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Prise en charge des hépatites B et C en hémodialyse Dr Christophe BAUDEAU Unité de Néphrologie Hôpital Américain de Paris 63 Bd Victor Hugo 92200 Neuilly sur Seine [email protected] Centre d ’Hémodialyse Privé de Monaco 32 Quai Jean Charles Rey MC 98000 Monaco Cedex _________________________ Club des Jeunes Néphrologues Porticcio 29.03.03

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Prise en charge des hépatites Bet C en hémodialyse

Dr Christophe BAUDEAU

Unité de Néphrologie

Hôpital Américain de Paris

63 Bd Victor Hugo

92200 Neuilly sur Seine

[email protected]

Centre d ’Hémodialyse Privé de Monaco

32 Quai Jean Charles Rey

MC 98000 Monaco Cedex

_________________________

Club des Jeunes Néphrologues

Porticcio

29.03.03

I prefer to sleep with twenty year oldboyfriends…they don’t know what theyare doing, but they do it all night long…

Madonna, 1996

Jeune néphrologue ?

Ils font probablement toute la journée de la pharmacologie, de l’immunologie, de la biologie moléculaire

Réanimation, glomérulonéphrites, transplantation

Ils connaissent très bien les glomérulonéphrites, les maladies génétiques rares et la

transplantation

Mais savent-ils comment marche un générateur de dialyse ?

comment on parle à une infirmière ?

qu’un malade dialysé est dépressif une fois sur deux

Et surtout comment on se lave les mains !

Hépatites B et C : principalescaractéristiques

VHCFlaviviridae

(ARN)

VHBHepadnaviridae

(ADN)

Transmission ParentéraleSexuelle

CommensaleMaterno-fœtale : 6%

ParentéraleSexuelle

Selles, salive, spermeCommensale

Materno-fœtale : 90%

Réplication constante variable

Vaccination non oui

Immunoglobulines ? oui

Diagnostic ELISA, RIBA, PCR ELISA, PCR

Histoirenaturelle

ChronicitéCirrhose, cancer

Maladies auto-immunes

Delta, portage sain, cirrhose,cancer

Maladies auto-immunes

Traitement INF PegRibavirine

INF, lamivudine, adéfovir

Plan

Pour chaque virus

Histoire

Epidémiologie

Virologie

Diagnostic

Evolution

Traitement

Pour les deux

Transmission

Mesures préventives

Hépatite B etnéphrologie 1833 : Epidémie d’ictère après vaccination anti-

variolique (Lurman, 1855)

1920 : seringues contaminées chez les diabétiques etles “vénériens”

1938 : Notion de serum hepatitis (Beeson, 1944)

1965 : Antigène Australia (Blumberg,1965)

1970 : Epidémies dans les centres de dialyse

1975 : Interféron de leucocytes humains

1981 : Vaccin

1990 : Interféron recombinant

1998 : Lamivudine

2002 : Adefovir

Hépatite B : immunologie desglomérulonéphrites

1971 : GEM

1974 : Maladie sérique

1975 : PAN

1977 : Cryoglobulinémiemixte “essentielle”

IgG

Hépatite B : épidémiologie

350 millions de patients

200 000 nouveaux cas par an auxUSA

Zones d’endémie

Groupes à risque

Hépatite B : virologie

Structure du virus

Dane et al., 1970 : 42 nm

Antigène de surface HBs enveloppe 7 nm protéines, lipides

Antigène HBc core ou nucléocapside 28nm

ADN viral, polymérase, transcripase réverse(Courroucé,1976, Bréchot, 1981) , protéine kinase...

Antigène Hbe produit en même temps que la réplication virale par les

hépatocytes

Hépatite B : virologie 2

Réplication virale inconstante

Très résistant

temps

froid

chaleur

Tropisme tissulaire

Foie

Pancréas, glandes salivaires, glandes séminales

Réservoirs de virus

Primates

Hépatite B : diagnostic

HBs : Ag et Ac

HBc : Ag et Ac (IgM et IgG)

HBe : Ag et Ac

ADN viral

Immunité post-infectieuse et post-vaccinale

Faux négatifs (Dueymes JM et al, 1990)

Profil évolutif

Réplication

Hépatite B : évolution

Guérison

Hépatite chronique active

Hépatite chronique persistante

Cirrhose

Adénocarcinome

Manifestations extra-hépatiques

Surinfections par le virus delta

Hépatite B : vaccination

Vaccins dérivés du plasma : HEVAC° Inactivation peptique à pH 2,8

Formol au 1/4000e

Risque d’encéphalite spongiforme ?

Guillain Barré ?

Vaccins recombinants : GenHEVAC°, ENGERIX°,HBVAXproDNA°…

aucun risque en France et aux USA

Chez les dialysés double dose, sous cutané, quatre injections

demi-dose pédiatrique intradermique (5 injections intradermiques à 15 joursd’intervalle) si non réponse

Sujet âgé ?

Hépatite B : traitementscuratifs “historiques” REPOS

CORTICOÏDES

Adénine arabinoside : VIDARABINE (Pollard,1978)

INTERFERON

HLI

rINF 2

PegINF

BITHERAPIE INF + ARA

Hépatite B : lamivudine(Epivir°) anti-VIH

comprimés à 150 et 300 mg

solution buvable à 10 mg/ml

élimination rénale

entre 50 et 300 mg/J

interactions avec autres anti-VIH et Bactrim°

Efficace sur la réplication et l ’histologie

Effets secondaires

Echappements de mutants (32% à un an, 66% àquatre ans)

Hépatite B : adéfovirdipivoxil (Hepsera°) Pro-drogue orale de l’adefovir (analogue du

monophosphate d’adénosine)

Métabolite intracellulaire : diphosphate d’adefovir,inhibe l’ADN polymérase

Phase 2 : doses de 30 et 60 mg/J : inhibition de laréplication, baisse de l’ADN de 4 log copies/ml en 12semaines

Action sur les souches résistantes à la lamivudine

Néphrotoxicité ++

Hépatite B : adéfovirdipivoxil (Hepsera°) Marcellin et al. New England Journal of Medicine,

2003, 348 : 808-816 : 27 février 2003...

515 patients (France, Etats Unis, TaiwanSingapour, Australie…)

10 mg d’Hepsera/J pendant 48 semaines

diminution de l’ADN viral, de l’ALAT, du score deKnodell

augmentation de la séroconversion anti-HBs

pas de mutation dans l’ADN polymérase

Autorisation Transitoire d’Utilisation en France renseignements : [email protected]

Immunoglobulineshumaines anti-HBs(Ivhebex°) perfusions de 5000 UI/100 ml

prévention de la récidive après transplantationhépatique

AES

10 000 UI IV x 1 à 6 jours, IV

Interactions avec vaccins vivants

Interférences avec tests immunologiques

frissons-hyperthermie

chocs anaphylactiques

Hépatite C :Epidémiologie Prévalence

3% de la population mondiale

3 à 15% des dialysés en Europe, 60% au Vietnam

Gradient Nord-Sud

Incidence

5000 nouveaux cas par an en France

70% chez des toxicomanes

Normalement, en dialyse, l ’incidence devrait êtreNULLE

Hépatite C : virologie

Non-A non B

1989

ARN, difficile à cultiver

partie structurale constante, partie génétique variable

nombreuses mutations spontanées

Six génotypes (France : 1a, 1b, 2a, 2b, 2c, 3a, 4a)

Réponse différente au traitement

Répartition géographique variable

Intérêt : différence entre HCV nosocomial etcommunautaire

Hépatite C : Diagnostic

Dépistage : transaminase 1x/mois

ELISA troisième génération

sensibilité de 70 à 90%

spécificité de 94 à 99%

Faux positifs : hypergamma, cryo, auto-anticorps

Faux négatifs : début (50 à 65 jours),immunodéprimés, dialysés

Antigènes de structure

Hépatite C : Diagnostic 2

Confirmation par RIBA (Radio-immunoblot Assay)

RIBA HCV-SIA° : génotype

Identification des antigènes viraux

E1E2

NS1

NS2NS2

NS2 NS5b

NS3NS2

C

Hépatite C : diagnostic 3

RT-PCR (Reverse transcriptase-polymerase chainreaction) AMPLICOR°

Rapide (< 6 heures)

Sensible (seuil < 100 copies par ml de sang)

Génotype

Positive en 8 jours

Indications :

Nouveau malade

AES

Transplantation

Hépatite C : diagnostic 4

Quantification de l’ARN viral : DNA AMPLICORMONITOR°

Sondes de capture et d’extension

Quantification directe

Sensibilité de 1000 à 5000 copies/ml

Toujours centrifuger immédiatementles prélèvements de biologie moléculaire,

et les conserver à -80°C, avec un contrôle interne de RNAses

Hépatite C : Evolution

Variable

Guérison spontanée : 15%

Hépatite chronique minime : 15%

Elévation permanente des transaminases : 50%

Cirrhose 20% après 20 ans

contamination après 40 ans

alcool

sexe masculin

déficit immunitaire

5% de cancérisation par an

Interféron (Roferon°)

3 M UI SC, trois fois par semaine après dialyse

Augmente la réponse immunitaire

ESI mineurs : syndrome grippal, digestifs,thrombopénie, neutropénie, dysthyroïdie

ESI graves : cardiopathie, ESI neuropsychiques

Dépression, délire, agitation, épilepsie, suicides, homicides

• Contradiction dans la littérature• Effet placebo ou nocebo du médecin• Prévenir les patients et le personnel• Faire participer le malade (stylos)• Y croire soi même...

Interféron pégylé(Pégasis°) Insertion de PEG à l’INF 2a

Plus longue demi-vie

Efficace par voie IV

Moins d’effets secondaires

Meilleure qualité de vie : travail, réinsertion, moins dedépression...

Ribavirine (Rébétol°) Gélules à 200 mg

Inhibe la réplication virale

Patients naïfs ou en rechute

entre 4 et 6 gélules/J

Génotype 1 : 12 mois, les autres 6 mois ou plus selonfacteurs de risque

ESI : locaux, généraux, hématologiques, gastro-intestinaux, musculo-squelettiques, psychiatriques,cutanées, respiratoires

Adapter à la fonction rénale et hépatique

Hépatite C : Bithérapie

Avantages des deux médicaments

Moindres doses et moindres ESI

RLT globale (Manns, NEJM, 2002) : Pegasis 0.5µg/kg, + Ribavirine : 47%, virémie ?

Génotype 1 : 34%

Génotypes 2 et 3 : 80%

Immunoglobulines : pas d’effet

Intérêt d’un traitement d’entretien ? (Gane, 2002)

Risque pour le transplant rénal ?

RLT possible après transplantation ? (Casanova, AJGastrol, 2001)

Ne pas attendre que le malade soit inscrit pour lediagnostiquer et le traiter +++

Transmission virale (1)

PARENTERALE

TRANSFUSION

TOXICOMANIE

NOSOCOMIALE

TATOUAGE, PIERCING, SCARIFICATIONS

PROFESSIONNELLE

SEXUELLE

“FAMILIALE”

MATERNO-FŒTALE

DIALYSE +++, surtout avant 1989, TRANSPLANTATION

INCONNUE

Transmission“horizontale” MANUPORTEE +++

Par le personnel et les malades

pas de gants

pas de changements de gants

présence de sang à la sortie de la salle

tensiomètres, flacons d’héparine, échanges destylos, EPO multidose, Dextros…

Echange de vaisselle (VHB)

Transmission“verticale” GENERATEURS

capteurs de PV

capteurs de PA

Interstices

Corps de pompe

Transmission (4)

PIQURE, PROJECTION

BRANCHEMENT/DEBRANCHEMENT

introduction, retrait de l’aiguille

manipulations de l’aiguille

prélèvements sanguins

introduction de matériel souillé dans le conteneur

compression

injection d’antibiotiques, d’EPO

dextros, gaz du sang

retrait du circuit : sang et dialysat

Transmission (5)

PENDANT LA SEANCE

changement de lignes, de pièges, de dialyseur

introduction de matériel souillé dans le conteneur

repiquage

ENTRE LES SEANCES

Lavage des mains du malade et du personnel

Relaxation du personnel

Désinfection de surface générateur

table

fauteuils

changement de linge, linge jetable

matériel jetable

Surfanios°, Hexanios°, ou autres virucides.

Transmission (6)

Gants, masque, lunettes

Seringues adaptées

Aiguilles adaptées

Vacutainers, flacons Bactec plus

Conteneurs adaptés

longueur

rigidité

solidité

imperméabilité

proximité

Pansements hémostatiques

Responsabilité dunéphrologue : bases morales

la base morale de la responsabilité du néphrologue estcontenue dans la première phrase du sermentd’Hippocrate : “Par Hygie et Panacée, je promets et jejure devant Apollon médecin...”

Il a donc promis à ses malades de les protéger(hygiène), et de les soigner (médicaments)...

Responsabilité du néphrologue :bases légales(2)

Circulaire DH/SI2-DGS/VS3 du 01.09.98, relative à lacollecte des objets tranchants souillés

Circulaire de 1999 concernant les capteurs depression veineuse en dialyse

Circulaire de 2001 concernant le taux acceptable dechloramines dans le liquide de dialyse

Loi de 1999 sur l’accréditation des établissements desanté

Loi du 4 mars 2002 sur les droits des malades

Décrets du 23.09.02 sur les modalités del’hémodialyse chronique.

Responsabilité du néphrologue :bases légales (1)

Circulaire DGS/DH/DRT N° 23 du 3 août 1989, portantsur les précautions générales d’hygiène

Loi N° 91-73 du 18.01.71 portant sur la vaccinationcontre l’hépatite B obligatoire des professionnels desanté

Décret 94-352 du 04.05.94, relatif à la protection dupersonnel vis à vis des risques biologiques

Note d’information DGS/DH/DRT du 28.10.96 relativeaux accidents d’exposition au sang (AES)

Circulaire DGS-DH du 28.04.98 relative à la préventionde la transmission d’agents infectieux véhiculés par lesang et d’autres liquides biologiques lors de soinsdans les établissements de santé.

Responsabilité du néphrologue :en pratique...

Repérer et isoler les malades contagieux

Traitement curatif, avec leur consentement

Traitement préventif, après information

Protéger le personnel, et veiller à son éducation,notamment en cas d’AES

Relai de l’information auprès des patients

Vérifier la vaccination des malades et du personnel

Se tenir informé...

Veiller à la protection des assistants

Déclaration obligatoire

Relations avec la médecine du travail

Protection des autres agents de soins : ambulanciers,techniciens de laboratoire.

Dépistage

Malades résidents, autochtones

Malades de passage : intérêt d’une sérothèque.

Traçabilité : générateurs, dialyseurs, lignes, AS, IDE,Médecin

La feuille de dialyse est à la fois l’ordonnance d’unmédecin, et la un document qui apporte la preuve quel’IDE a fait son travail, et que le matériel estconvenablement entretenu et désinfecté. Elle porte lasignature du médecin, et les initiales des auxiliaires quiont pris la responsabilité de la séance et de lamatériovigilance.

Intérêt du dossier informatisé

Précautions“universelles” Patient

préparation

isolement

branchement

surveillance

prélèvement

alimentation

injections

débranchement

nettoyage : lavabos automatiques, affichage des procédures...

Générateurs

préparation

nettoyage

Déchets

évacuation

Litchenko MB et al, Dyalog, 2000 1 : 2-5,

Diminution de lapromiscuité Vestiaires

Ambulances

Poste de dialyse : 10 à 12 m² (circulaire d’applicationdes décrets du 23.09.02 en attente…)

Personnel soignant et auxiliaire de soins

Education du personnel

Parler de tous les problèmes

Réunions d’information

Externalisation de la formation

Valorisation de la formation

interne

externe

Education des patients

La visite

Les associations

Le journal interne

Les prospectus dans la salle d’attente

La bibliothèque du centre de dialyse

Ségrégation ?

Les groupes à risque :

immigrants

patients institutionnalisés

toxicomanes

homosexuels masculins

prisoniers

partenaires sexuels de sujets infectés

patients infectés par le VIH

séparation de groupes ?

La question ne se pose qu’en phase contagieuse del’hépatite B

Combien ça coûte ?

Beaucoup de temps au médecin

Beaucoup d’argent à l’établissement de santé

Mais cet investissement vaut la peine car ces maladiessont très graves pour le malade, et très coûteuses à lacollectivité

Et ma charge de travail ?

L’époque de la dialyse “ facile, pas chère, et qui peutrapporter gros” est révolue

Gros ennuis, si on ne fait pas ce qu’il faut

Facile, et peu d’ennui, si on est bien organisé

Si le néphrologue ne prend pas ses responsabilités,l’”ADMINISTRATION” le fait à sa place…

REMERCIEMENTSà celles et ceux qui m’ont enseigné l’hygiène, et qui m’aident tous les jours endialyse, sans oublier mes maîtres en virologie et en immunologie, ennéphrologie et en réanimation médicale…seuls les plus intransigeants sont citésici, car la prévention et le traitement des hépatites B et C ne peut se concevoirque dans la précision et la rigueur.

Surveillant(e)s de dialyse : Florence DEGANO

Hélène PIERREFRANCOIS

Chantal POTIER

Christiane COPPOLA

Christine SAINT-ETIENNE

Erik HAEMELS

Psychologue

Rosie CONIGLIO

Médecin hygiéniste

Dr Simone FELTZ

Réanimation

Pr Jean Daniel TEMPE

Hépatologue Dr Hervé ZYLBERBERG

Biologistes Dr Robert REYNAUD

Dr Thierry CONNOIS

Dr Jean Marc COSTA

Immunologiste

Pr Philippe BARDOS

Infectiologues Pr Bernard GRENIER

Pr Robert VARGUES

Pr Serge KERNBAUM

Néphrologues Pr Jean Philippe MERY

Dr Hahfedh FESSI