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- 0 - Comment stimuler le langage oral des enfants allophones par le conte et le jeu symbolique Spécialisation en diversité culturelle et français langue d’enseignement Travail de fin d’études rédigé par Kokkinou Georgia en vue de l’obtention du titre d’institutrice préscolaire. Année académique 2016-2017 Professeurs : Mmes Marichal et Croiselet

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Comment stimuler le langage oral des

enfants allophones par le conte et le jeu

symbolique

Spécialisation en diversité culturelle et français langue

d’enseignement

Travail de fin d’études rédigé par Kokkinou Georgia en vue de

l’obtention du titre d’institutrice préscolaire.

Année académique 2016-2017 Professeurs : Mmes Marichal et Croiselet

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REMERCIEMENTS

Je remercie Mmes Marichal et

Croiselet pour leurs explications et

conseils.

Je remercie Mme Deville pour

avoir toujours cru en moi, pour sa

bienveillance et son soutien

apporté tout au long de ma

formation…

Je souhaite remercier Mme

Nathalie Cuche, institutrice

préscolaire, pour toutes les bonnes

choses partagées, sa joie de vivre

et son humour qui m’ont donné des

ailes…

Pour finir je remercie, Estelle,

Naomi et Éléonore pour leur aide,

leur soutien et leurs ondes

positives.

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TABLE DES MATIÈRES

INTRODUCTION………………………………………………………………………...3

1. CHEMINEMENT PERSONNEL ET PROFESSIONNALISANT………………..4

2. CONTENU DE RECHERCHE……………………………………………………...8

A. Contexte de stage et choix de mes outils……………………………………………...8

B. Développement du langage chez l’enfant de 0 à 6 ans……………………………….10

Vocabulaire et syntaxe

C. Spécificités des enfants allophones…………………………………………………...12

« Conflit de loyauté »

« Deux types d’enfants allophones »

D. Méthodologie de l’acquisition du langage oral pour mes élèves allophones………...14

Difficultés langagières des enfants de ma classe de stage

Enrichir le vocabulaire et utiliser la phrase simple

Comment mémoriser ?

E. Outils utilisés dans ma classe de stage pour stimuler le langage oral chez les enfants

allophones…………………………………………………………………………….18

Le conte et activités de prolongement de celui-ci pour stimuler le langage

Le jeu symbolique pour stimuler le langage

Éléments complémentaires au jeu symbolique

CONCLUSION………………………………………………………………………………28

BIBLIOGRAPHIE…………………………………………………………………………..29

ANNEXES……………………………………………………………………………………30

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INTRODUCTION

Pour introduire ce travail de fin d’études, j’écris quelques mots sur la diversité

culturelle. Pourquoi est-ce que je choisis la diversité culturelle ?

Premièrement parce que je la représente. Je suis née en Grèce, le grec est ma langue

maternelle mais j’ai étudié et fait ma vie en Belgique. Je dirais que je suis un « mélange de

cultures » (grec, macédonien, turc et belge).

Deuxièmement, parce qu’actuellement la diversité culturelle devient la caractéristique

des systèmes éducatifs, comme le dit René Tarin : « Flux migratoires, démocratisation de la

société et de l’accès à l’éducation ont profondément modifié les caractéristiques de la

population scolaire et du métier d’enseignant. » (2006, p.15).

Le nombre d’enfants allophones augmente chaque jour. Il est nécessaire de les aider, il

me semble, à s’intégrer et s’épanouir au sein du système scolaire. À cette fin, lors de mon

stage optionnel, je cherche des outils qui peuvent les accompagner pour l’acquisition du

langage oral.

Le conte et les activités de prolongement de celui-ci, telles des « cartes-images du

conte » ou « jeu symbolique », sont les outils que les enfants de ma classe exploitent. Tout au

long de mon travail de fin d’études, j’essaye de déterminer s’ils sont des outils efficaces pour

l’apprentissage de la langue française.

Pour ce travail de fin d’études, je commence par mon cheminement personnel et

professionnalisant. Ensuite, j’étudie l’hypothèse de mes outils en consultant d’abord quelques

auteurs experts du langage. Ils me fournissent des éléments théoriques sur l’acquisition du

langage des enfants de 0 à 6 ans. Pour finir, je m’attarde sur la question des enfants

allophones.

Ces éléments théoriques sont mis en lien avec mes observations et ma pratique de

stage optionnel. L’ensemble va fournir, je l’espère, des éléments de réponse à ma question.

C’est ici que commence le « journal de bord » de mon voyage…

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Ière PARTIE : CHEMINEMENT PERSONNEL ET

PROFESSIONNALISANT

Avant de commencer ma formation d’institutrice maternelle, j’étais aussi attirée par

celle d’institutrice primaire.

Voici mon parcours…

Encore hésitante, je m’inscris en section d’institutrice primaire. Mais quelques mois

après l’inscription, je me demande si je suis à ma place en section primaire.

Il est trop tard pour changer de section et la section maternelle m’attire toujours autant.

Je me renseigne afin de savoir si après mon année en section primaire je peux passer en 2ème

année, section maternelle. Je suis ravie d’apprendre que cela est possible, à condition de

réussir ma 1ère année en primaire. Je m’applique sérieusement et je réussis mon BAC 1,

section primaire.

Pendant cette première année en primaire, j’apprends à combiner formation et analyse

de terrain. Je me construis une image de la profession plus conforme à la réalité. Pour donner

un exemple concret, lors de mon premier stage en 2ème primaire, je donne toutes les réponses

aux questions que les enfants me posent. Je commence ces études sur le tard, je suis plus

habituée à « l’apprentissage transmissif » et « l’apprentissage actif », quant à lui, est quelque

chose de nouveau pour moi.

Peu de temps après, je réalise l’importance des « essais-erreurs » pour les enfants (dont

ceux de ma classe de stage). Je réfléchis et j’analyse cette situation ; je prends conscience

qu’il s’agit de la meilleure façon pour chaque enfant de découvrir son apprentissage. C’est

l’enfant qui cherche une solution à un problème et c’est lui qui la trouve. Moi je suis là pour

l’accompagner : je le guide quand il me le demande.

En somme, je comprends combien la manipulation/exploration est primordiale à

l’école. Non seulement l’enfant recherche les solutions aux problèmes, mais il développe

aussi son autonomie, le respect de soi-même et des autres, l’acceptation de la différence, …

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Cette première année, je constate aussi que les cours d’art, de musique et d’éveil sont

mes préférés. Grâce à ces cours, je réalise que j’envisage l’apprentissage de mes futurs élèves

sur un mode très créatif. Cette créativité, je souhaite l’explorer en section maternelle.

Ensuite, j’entre à l’ENCBW, en 2ème année, section maternelle. Je me sens tout de

suite dans mon élément.

Ce qui me marque particulièrement, c’est mon premier stage en classe de maternelle

(Accueil/1ère M) : les premiers jours sont éprouvants car je me retrouve face à la différence de

pédagogie maternelle/primaire. Cependant, ma MDS m’aide beaucoup ; grâce à son aide, je

m’adapte rapidement. J’acquiers une première maturité professionnelle. Grâce à son

professionnalisme, sa rigueur, son encadrement et ses encouragements, je sens que je

progresse.

Lors de cette même année, j’apprends à travailler la séquence d’apprentissage. Celle-ci

organise l’apprentissage en trois temps (contagion, apprentissage et entraînement), que je

trouve logique et efficace. Il y a en effet une « phase » où les enfants cherchent la réponse à la

situation-problème de départ. Ensuite, grâce à cette exploration, il y a la phase où les enfants

apprennent quelque chose. Pour finir, il y a la phase où les enfants s’entrainent pour « ancrer »

leur apprentissage. Selon moi, grâce à la séquence, les enfants s’approprient la matière de

manière solide.

La séquence d’apprentissage m’aide également à réfléchir au sens que l’apprentissage

apporte aux enfants. Je veille à ce que mes préparations aient du sens pour mes élèves : que

l’apprentissage les concerne, cible des intérêts de leur âge. De plus, quand mes élèves

comprennent le sens de ce qu’ils apprennent, la séquence contribue à un climat positif dans

notre classe, ce qui est primordial à mes yeux, en plus du bien-être et de la sécurité affective

de mes élèves.

Toujours la même année, grâce à mes rapports de stage, je constate que mes points

forts sont mon sens de l’organisation, mon esprit analytique et quelques bonnes capacités

artistiques.

En ce qui concerne les cours qui m’apportent beaucoup à l’ENCBW, il s’agit des

cours de français de Mmes Élisabeth Marichal et Bénédicte Deville, de sciences de Mme

Hanane Benkadour et d’éducation artistique de Mmes Alexandra Leblanc et Laurence

Grosfils.

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Le cours de français est basé sur le conte. Les « ateliers didactiques » autour de celui-

ci, sont le moteur de mon présent travail.

Ensuite, après un travail de groupe sur l’environnement, je comprends combien il est

nécessaire de sensibiliser mes élèves, d’une façon ludique et créative, à la protection de

l’environnement naturel. De la sorte, je participe à la protection de l’environnement et je

travaille avec les enfants ma facette d’« acteur social1 ».

Me voici maintenant en BAC 3. Dès le début de cette année, j’apprends la nécessité

de la coopération. J’apprends que mon rôle d’« acteur social » va être sollicité.

En effet, je comprends que dans notre société, l’école ne fonctionne plus uniquement

comme lieu de « transmission de connaissances » car cela ne s’avère plus suffisant.

L’ouverture de l’école sur l’extérieur est de plus en plus nécessaire. Lors de mon travail

d’équipe sur les « inégalités scolaires et sociales », je suis convaincue qu’être enseignant

implique de réfléchir au rôle de l’école et sa place dans la société.

En somme, je réalise que l’école insère l’enfant dans un « tout ». Ce « tout », qui est

son environnement, lui permet d’envisager sa position dans celui-ci. Nous, enseignants,

agissons dans l’école mais également en dehors de celle-ci : réunions entre collègues et

parents, collaboration avec les centres PMS, écoles des devoirs, associations socio-culturelles

ou sportives, etc. Ces différentes tâches nécessitent des compétences spécifiques que je

travaille tout au long de mon BAC 3.

Lors de mes derniers stages, j’apprends à prendre ma place au sein de l’équipe

éducative et l’école. Je m’implique, je participe aux réunions et aux spectacles. J’entretiens, je

crois, une relation de confiance et de collaboration avec mes MDS. J’ai également, il me

semble, une bonne communication et relation de confiance avec les parents. Je me sens un

partenaire engagé. Cette gestion d’interactions fait de moi, je l’espère, une enseignante de

plus en plus « artisane ».

Durant mon stage optionnel, j’apprends aussi à être une institutrice d’un

public multiculturel. Je pense que lorsque je cherche de la documentation pour mes élèves

afin de les instruire, j’apprends à travailler ma facette de « maître instruit ».

1 « Facettes » : modèles de professionnalité de Paquay ; cfr annexes.

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Par mes analyses réflexives et ma prise de recul, je complète mon panel de facettes

avec celle de « praticien réflexif ». Il me semble que cette facette s’améliore lorsque, durant

mes stages, je cherche à « faire apprendre à mes élèves des savoirs (objectifs de

connaissance ; contenus disciplinaires) avec des savoir-faire et des savoir-être (attitudes,

confiance et autonomie).»2

En cette dernière année, ce qui me marque aussi est le cours et le stage de

psychomotricité relationnelle. Ce dernier m’apporte beaucoup car c’est pendant ce stage que

j’apprends à être plus dans « l’être » que dans le « faire ». C’est-à-dire que j’apprends à

développer mon sens de l’observation. Jusqu’ici, mes préparations étaient ma seule

préoccupation. Grâce à ce stage, l’observation prend toute son importance : j’observe les

enfants et je pars de ces observations pour construire la séance. Au lieu de dire ou faire à leur

place, je me fais discrète. Grâce à ce que je vois, je mets en place des activités psychomotrices

pour les aider à affronter leurs « angoisses ».

Je pense que ces deux derniers stages se déroulent dans la sérénité et la confiance. Je

ressens une grande évolution entre ma première année à l’ENCBW et aujourd’hui. Je me vois

comme une personne en voie de professionnalisation.

Ces deux stages me permettent de dire que je m’approche de la « phase de

maturation » selon Wheeler3 car en classe, je me sens de plus en plus à l’aise et naturelle. Je

me soucie plus de faire apprendre à chaque enfant en fonction de ses difficultés, son potentiel,

sa différence…que du regard des autres.

Même si je resterai en évolution continue tout au long de ma carrière, je me sens déjà

beaucoup plus apte à exercer le métier d’institutrice.

2Van Bogaert, A. « Psychologie des apprentissages » ENCBW, 2014-2015 et Herinne, L. « Psychologie des apprentissages », ENCBW, 2015-2016. 3 Wheeler (1992)

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IIème PARTIE : CONTENU DE RECHERCHE

A. Contexte de stage et choix de mes outils

Ma classe de stage est une classe de 2ème maternelle se situant à Schaerbeek (Bruxelles).

Le nombre d’enfants est de 24. La majorité est composée d’enfants bulgares ou turcs. En ce

qui concerne les autres enfants ; deux d’entre eux sont d’origine syrienne, trois d’origine

africaine, un d’origine maghrébine, une d’origine portugaise et le dernier d’origine belge.

Malgré le fait qu’on soit au mois de mai, la majorité des enfants ne s’expriment pas

beaucoup en français. Je constate que la plupart communiquent en turc entre eux. Cette

majorité parle sa langue maternelle à la maison et avec les amis. Le quartier de l’école compte

principalement des habitants et des magasins, cafés, boucherie, épicerie, boulangerie,

pharmacie, turcs. Les enfants habitent pour la plupart à proximité de l’école.

Dans la classe il y a 3-4 enfants qui s’expriment bien en français. Ces enfants parlent le

français à la maison. Ils expliquent beaucoup aux autres enfants, et à mes yeux ils occupent un

rôle de «tuteur».

Avec les enfants de sa classe, la titulaire utilise une grande expressivité, des mimes, des

images ou supports visuels. Pour tous les chants et la danse, elle accentue, exagère les gestes.

Elle verbalise aussi de façon répétitive des actions telles qu’apprendre à fermer sa veste seule,

ranger son cartable et la classe. Je constate également, que la titulaire de la classe mémorise et

dit quelques mots en bulgare et turc. Par exemple, elle dit : « Apporte-moi tsanta » ce qui veut

dire : « Apporte-moi ton cartable.»

J’observe que l’« oralité » utilisée par ma MDS est constante, expressive et répétitive. Je

pense que celle-ci incite ses élèves à parler et qu’elle aide aux règles de syntaxe et de

grammaire. Par exemple, un enfant de la classe veut des ciseaux et les montre avec le doigt

pointé sur l’armoire. Ma MDS lui demande ce que cela veut dire, ce à quoi l’enfant répond

doucement « ciseaux », alors ma MDS réplique qu’il doit dire « je veux les ciseaux ».

Autre situation : un enfant souhaite aller aux toilettes mais dit seulement « toilettes ! ». Ma

MDS lui répond en reformulant bien les mots : « je - peux - aller – aux - toilettes ? ». Ainsi,

quand un enfant souhaite se rendre aux toilettes, il sait qu’il doit dire cette phrase.

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Après ces observations et grâce à l’expressivité et le côté théâtral de ma MDS, l’idée de

« conte avec objets » m’apparaît. Je raconte le conte avec des objets tels que boule rouge,

boule brune, lunettes, chapeau…

Je crois que cela peut être un outil efficace pour stimuler le langage des enfants de notre

classe. Comme je ne reste que pour deux semaines de stage, je souhaite apporter un « côté

ludique » à l’apprentissage de la langue.

De plus, selon une de mes sources (« Enseigner la langue orale en maternelle », Philippe

Boisseau), la « théâtralisation » du texte oral améliore la « production orale » des enfants. Par

cette « théâtralisation » on « cultive cet oral ». « La production par l’adulte d’un texte de

l’oral…conduit naturellement au développement des formes adaptées à la construction de la

syntaxe orale de l’enfant lorsque celui-ci s’empare à son tour de l’histoire. » (2005, p. 141)

Ceci m’interpelle et me rassure quant au choix de mon outil pour stimuler le langage de

mes élèves. Je continue de réfléchir à toutes les « facettes » exploitables dans le conte,

susceptibles de provoquer la motivation de mes élèves à parler en français.

Selon le même auteur, « le meilleur album pour apprendre à parler est porteur d’un

scénario et d’illustrations qui suscitent l’intérêt des enfants ». (2005, p.144). Je décide donc

de raconter le conte du « Chaperon rouge ». Je reviens sur les raisons de ce choix de conte un

peu plus loin.

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B. Développement du langage chez l’enfant entre 0 et 6 ans

Dans mes cours de « français et didactique » à l’ENCBW, j’ai appris que le langage oral

sert à « communiquer ses besoins, sentiments et émotions ».

Mais comment se développe concrètement ce langage ? Afin de le comprendre je fais

quelques recherches.

Qui dit apprentissage de la langue dit apprentissage des mots et de la syntaxe. Il est

essentiel, je pense, de s’attarder un peu sur ces éléments et de comprendre leur rôle dans

l’acquisition d’une nouvelle langue.

« Le mot oral4 est un son ou un groupe de sons, constituant une unité porteuse de

signification à laquelle est liée, dans une langue donnée, une représentation d’être, d’un

objet, d’un concept, etc. » Pour l’expliquer autrement, les mots sont des sons qui désignent

quelque chose.

Et le « vocabulaire », alors ? C’est bien l’ensemble des mots d’une langue?

Dans le « petit Robert » je cherche la définition du mot « vocabulaire » et je trouve qu’il

s’agit de « l’ensemble de mots utilisés par une personne ou un groupe » (2006).

Pour l’expliquer en mes propres mots, je déduis que chaque langue a son propre

« vocabulaire ». Celui-ci crée le « dictionnaire » de la langue. Autrement dit, les mots de la

langue qui composent le « vocabulaire » forment le « code » de cette langue.

Et la syntaxe alors, à quoi sert-elle ?

Selon Madame Isabelle Goies, il s’agit de « l’ordre des mots dans la phrase ». La syntaxe

se met progressivement en place, vers 2-3 ans, quand l’enfant combine les mots (2013-14,

notes de cours « Français et didactique »).

« C’est à partir de 3-4 ans que l’enfant emploie des connecteurs (parce que, quand,

mais…), construit des phrases simples (Sujet, Verbe, Complément), utilise les pronoms (je, tu,

il, elle, nous, vous, ils) et les déterminants possessifs (mon, ton, son, sa, ses) » (2013-14, notes

de cours « Français et didactique »).

4 CNRTL, dictionnaire en ligne

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En résumé, l’enfant commence par dire des mots et ensuite il les « combine ». Pour les

combiner « correctement », c’est-à-dire pour former une phrase compréhensible, il utilise des

« règles ». La syntaxe c’est le « bon ordre des mots » qu’il enregistre de ses interlocuteurs.

Ces « règles », il les mémorise progressivement.

Je prends conscience que les élèves de ma classe de stage de 2ème maternelle (+-5ans) se

trouvent au même stade que des élèves francophones d’une classe d’accueil/1ère maternelle.

Pour enseigner une nouvelle langue à mes élèves allophones, il est indispensable, d’après moi,

que j’apprenne à développer leur vocabulaire et leur syntaxe.

Mais comment m’y prendre ?

Je consulte des sources supplémentaires axées, cette fois-ci, sur les enfants allophones.

Après ces éléments théoriques j’espère y voir plus clair…

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C. Quelques spécificités des enfants allophones

➢ « Conflit de loyauté »

Puisque je travaille avec des enfants allophones, il me semble important d’écrire quelques

mots sur le concept de « triple autorisation » (Mouraux, 2012, p.117).

C’est un mal-être des parents, communiqué à leur enfant. Ce mal-être empêche la relation

positive avec l’enseignant. Si l’enfant sent que les demandes de l’école sont contraires aux

valeurs familiales ou pèsent sur ses parents, un conflit se crée : « le conflit de loyauté ».

L’enfant délaisse l’école par « loyauté » vis-à-vis de ses parents. Selon Danielle Mouraux,

« la tâche la plus importante à mener avec les parents consiste à les amener à autoriser leurs

enfants à apprendre à l’école ». (2012, p.117)

Mon rôle d’enseignante est, je pense, de rester vigilante quant à cette situation qui pèse sur

l’enfant. Je veille à aider ses parents à l’« autoriser » à apprendre. Si les parents se sentent

compris et respectés, ils peuvent alors communiquer une image positive de l’école à leur

enfant.

Comment vont-ils se sentir compris ?

À ce propos, j’observe beaucoup ma MDS. Je constate une communication positive avec

les parents allophones de ses élèves. Elle s’intéresse beaucoup à leur culture, les questionne

sur celle-ci, semble intéressée par les échanges et toujours ouverte et bienveillante. Elle invite

les parents en classe, note et apprend des nouveaux mots de leur langue. Quand le parent ou

l’enfant semble soucieux elle écoute, cherche à comprendre plutôt qu’à juger.

Comme elle, j’estime que je dois m’adapter à mon public de parents. Je dois favoriser la

communication avec l’école. Si les parents se sentent en confiance mes élèves se sentent en

confiance aussi. C’est une « clé » pour l’acquisition et la stimulation de la langue.

Ma MDS laisse également les enfants de sa classe s’exprimer dans leur langue maternelle.

Il y a des moments, tels que la récréation ou certains ateliers, où il est permis de parler dans sa

langue maternelle. À ce propos, selon Suzanne Vanderschnick, la langue d’origine est « un

marqueur d’appartenance» : elle affirme que « si la langue maternelle de l’enfant allophone

est dévalorisée la seconde langue est vécue comme une oppression. En conséquence, se crée

un conflit entre les deux langues » (1990, p. 51).

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J’en conclus que pour faire apprendre la langue orale à mes élèves allophones il est

d’abord essentiel d’être ouverte d’esprit. L’apprentissage et le partage se font dans les deux

sens.

➢ Deux types d’élèves allophones :

Dans l’article « Le langage à l’école maternelle », j’apprends qu’il y a deux types

d’enfants allophones :

a) « Les enfants nés en pays francophone dont la langue maternelle n’est pas le

français ». Je comprends que pour eux, les « codes culturels et linguistiques » à la

maison sont différents de ceux du pays d’accueil (2006, 97-98) ;

b) « Les enfants qui arrivent en pays francophone en cours de scolarisation. » Dans ce

cas de figure, « il n’y a pas que la langue qui pose problème. Il y a le changement de

lieu, cadre, organisation, climat, rythme, alimentation… » Tout ceci provoquerait chez

les parents et leurs enfants une « perte de repères et un sentiment d’insécurité » (2006,

97-98).

Dans ma classe de stage je constate que la majorité des élèves font partie de la catégorie

b). Cependant, comme déjà mentionné, ma MDS accompagne beaucoup les enfants et les

parents.

De mon côté, je pense que le conte aide la stimulation du langage et l’échange des

cultures. En effet, je trouve qu’il amène un côté ludique de la langue. Cet aspect « plaisir »

suscite, toujours d’après-moi, cet échange culturel. À travers le conte nous apprenons des

éléments de la « culture française » et nous comparons avec l’autre culture. Nous apprenons

ce qui est semblable ou différent avec l’autre. Ces raisons me poussent à être encore plus en

accord avec mon choix d’outil.

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D. Méthodologie du développement du langage chez les enfants allophones

Les trois premiers jours de stage, je raconte le conte du « Petit Chaperon rouge. » Je

reviendrai plus en détail sur ce conte un peu plus loin. D’abord, je commence par décrire mes

observations de classe. En effet, celles-ci me permettent de cibler les « difficultés

langagières » de mes élèves et de réfléchir à comment y remédier.

Je garde en tête que pour l’ensemble du groupe-classe, mon objectif central est

d’enrichir leur vocabulaire et de leur faire formuler des phrases simples. La formulation des

phrases simples permet en même temps un travail sur la syntaxe.

Comment vais-je m’y prendre ?

Je commence par regarder la définition de « la phrase simple »5. « C’est une phrase qui

comporte une seule proposition. La proposition se compose d’un sujet et d’un groupe verbal.

Le groupe verbal a comme noyau un verbe ».

Philippe Boisseau donne quelques exemples de phrases simples qu’il appelle « la forme de

base » pour les enfants de 3 ans « en retard de construction du langage ». « Je monte sur la

montagne » est par exemple une phrase simple (Pronom et Groupe Verbal). Selon l’auteur,

« certains petits de 3 ans, en retard d’un an ou plus dans cette construction, y passent des

formes infra syntaxiques telles que le mot phrase ou la phrase à deux mots aux phrases

élémentaires de l’oral français, notamment la forme Pn GV (Pronom+ Groupe Verbal) qui en

est vraiment la forme de base. » (2005, p.10)

Je constate que mes élèves allophones de plus ou moins 5 ans se trouvent au même stade

oral qu’un enfant francophone de 2-3 ans qui développe son langage. J’entends certains de

mes élèves dire des « mots phrases ». En effet, c’est une première difficulté langagière que

j’observe dans ma classe de stage : « moi toilettes », « moi maison », « moi partir », « moi

manger ».

Mon objectif est donc de faire comprendre la nécessité du verbe à ce « mot phrase » pour

construire la « forme de base ». Et puisque selon Philippe Boisseau, c’est la syntaxe qui aide

« l’enrichissement du vocabulaire et l’amélioration de l’articulation » (2005, p.5-6) avec la

construction de la phrase, je travaille aussi celle-ci. C’est-à-dire que j’essaie de permettre à

l’enfant de construire une phrase en combinant « correctement » les mots.

5Grammaire en ligne « reverso » cfr bibliographie.

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Je reviens sur la phrase simple mais avant cela, je cible quelques autres « difficultés

langagières » de certains élèves de ma classe de stage.

En effet, une autre difficulté que je constate, est que quelques enfants allophones de ma

classe enlèvent certaines parties du mot et/ou ont des difficultés à prononcer certains mots. Un

enfant d’origine turque dit par exemple « louge » ou « oujee » au lieu de « rouge ». De ce fait,

la plupart du temps, je ne le comprends pas quand il s’exprime en français.

Je consulte le cours de « français et didactique » de Mme Isabelle Goies et j’apprends

que « l’enfant de 3-4 ans, fait des essais de sons et utilise deux stratégies afin de compenser

ses difficultés langagières : l’élision (enlever certaines parties du mot) et la substitution

(changer un son à l’intérieur d’un mot) » (2012-13, BAC 1, notes de cours). Je constate en

effet que cet élève recourt aux mêmes stratégies et je réfléchis à quoi mettre en place pour

remédier au problème.

Les jours suivant la narration du conte, je m’assois près de cet élève pour l’aider à

articuler le mot « rouge ». Le « Chaperon rouge » est une bonne occasion, je pense, pour

répéter des phrases avec le mot « rouge » et travailler le son « r ».

Concrètement, quelques jours après la narration du conte, je lui donne des vignettes6, en

petit format, du « Chaperon rouge ». Il les découpe et les colle dans l’ordre sur une bandelette.

Pendant que mon élève découpe les vignettes de l’histoire je lui demande de me les décrire.

Avant de coller chaque vignette, je l’aide à reformuler une phrase et je corrige sa

prononciation. Par exemple « le Chaperon rouge arrive chez grand-mère » : je montre la

gorge pour faire comprendre à mon élève que le « r » se place à ce niveau et non au niveau de

la langue comme le « l ».

En somme et pour récapituler, mes réflexions sont les suivantes : « Comment exploiter le

moment conte pour faire parler les enfants ? », « Comment enrichir leur vocabulaire et

travailler la syntaxe d’une façon ludique et motivante pour eux ? » « Comment remédier aux

« difficultés langagières » de certains élèves de ma classe tels que les problèmes d’articulation

et de prononciation qui nuisent à la compréhension ? »

6Cfr annexes

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Afin de compléter mon observation des « difficultés langagières », je pose également des

questions à ma MDS sur le comportement langagier de l’enfant. Je m’intéresse à son

comportement en classe et en dehors de celle-ci : « Comment s’exprime l’enfant en classe ou

à la maison ? Est-il timide, parle-t-il beaucoup ou non ? »

En me basant sur tout ce que j’apprends de mes sources, pour l’ensemble de ma classe, je

crée du matériel pour stimuler ou corriger le langage de mes élèves. En dehors des vignettes

de l’histoire, je photocopie par exemple des « cartes-images »7. L’enfant doit choisir trois

cartes et formuler une phrase simple. Par exemple « chaperon rouge » (image) rencontre « le

loup » (image) dans le « bois » (image). Il n’y a que les cartes « chaperon rouge », « loup »,

« bois ». On y ajoute oralement le verbe « rencontre ».

Pour ce travail de syntaxe et de prononciation, après chaque « narration du conte »8, je

suis les recommandations de Philippe Boisseau. Je m’occupe d’un enfant seul ou d’un petit

groupe restreint. C’est en effet une des stratégies conseillées par Boisseau : « …le succés et

l’efficacité d’une situation est plus souvent et plus aisement au rendez-vous quand elle se

développe dans un petit groupe, qui assure à chacun une plus grande densité de prises de

paroles et d’interactions positives avec l’adulte » (2005, p.22)

Je retrouve le même point de vue dans « Le langage à l’école maternelle » où je lis que les

« échanges » autour d’une histoire ou jeu nécessitent « une relation et un étayage plus

‘serrés’ que dans un groupe plus large. » (2011, p. 99-100)

Pour aider mes élèves à mémoriser des mots et/ou phrases je me documente également sur

les conditions favorables à la mémorisation9.

Je relève que les enfants « retiennent plus facilement ce qui fait sens et est utile… un mot

qu’ils en ont besoin pour un projet…». Mon choix de conte me semble avoir du sens pour eux

car les animaux, tel le loup féroce, intriguent beaucoup les enfants du préscolaire10. Ceci est

donc un point positif pour la mémorisation des nouveaux mots.

Je note aussi qu’à cet âge « l’affectif » ainsi que la « répétition » sont nécessaires pour

cette mémorisation ; « le rappel des récits, l’apprentissage des formules répétitives…dans un

contexte ludique, la répétition sont très efficaces pour la mémorisation ». Et à nouveau je

7Cfr annexes 8 Court rappel du conte tous les jours 9« Guide pour enseigner le vocabulaire à l’école maternelle », 2014, p.30-31. 10 Français et didactique « Savoir écouter le conte »

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pense que le conte est idéal pour travailler ces facettes. Je reviens sur ces aspects du conte

plus loin.

Et pour finir, afin que le nouveau mot soit « stocké durablement » il faut qu’il soit souvent

« réactivé ». Pour travailler ce point, lors de mon stage, je fais quotidiennement des retours

fréquents mais courts sur le conte. Pour cela, soit je rappelle le conte, soit certains enfants le

racontent. Chaque jour, mes élèves ont à leur disposition du matériel varié pour le raconter et

se le rappeler : marionnettes, déguisements, planches de l’histoire à remettre dans l’ordre.

C’est un « apprentissage distribué » (Cellier et al., 2014, p. 31).

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E. Outils utilisés lors de mon stage pour développer le langage chez les enfants

allophones

➢ Le conte pour stimuler le langage

À la lecture d’Isabelle Goies, j’apprends que « pour percevoir et produire le langage,

l’enfant doit pouvoir être exposé aux sons de la langue dans des interactions sociales

stimulantes et sécurisantes.» (« Français et didactique », 2013-14, notes de cours)

Je prends en compte ces conseils et je lance mon activité « conte » car je souhaite

répondre au problème suivant ; comment stimuler le langage des enfants de ma classe par le

conte?

En plus des raisons citées auparavant, en voici quelques autres pour justifier ce choix

d’outil : tout d’abord, en relisant mon cours de Français et didactique, dans la partie

concernant le « Savoir écouter le conte », je me rappelle que « le vocabulaire du conte est

précis et riche, ses phrases répétitives donnent un rythme et un mystère à l’oral. Sa syntaxe

est complexe et élaborée ». Autrement dit, cela rejoint l’importance de la répétition des mots

citée auparavant mais également le travail sur la syntaxe, primordial selon Philippe Boisseau.

Dans l’article « Le langage à l’école maternelle » j’apprends que l’enseignant aide la

« compréhension » de la langue « sans jamais se priver des moyens non verbaux (gestes,

images, etc), insister sur la prononciation…» (2011, p.98-99).

Je fais des liens avec ces éléments théoriques car pendant l’écoute du conte, les enfants de

ma classe semblent captivés par l’histoire. Ils sont concentrés et calmes. Je crois d’ailleurs

qu’ils cherchent le sens des mots qu’ils écoutent en s’aidant de mes déguisements et mimes.

Après l’écoute du conte, certains élèves me disent : « encore ! ». J’en entends

également d’autres réciter des phrases du conte. Tout au long de mon stage, je les entends

échanger des petites phrases comme « je vais te manger » ou des simples mots tels que :

« loup », « forêt », …

Quelques enfants cherchent à communiquer avec moi. Ils veulent par exemple me dire

des phrases qu’ils ont retenues : « Le loup mange le Chaperon rouge ? » ou « Le loup

méchant ? ». Dans des cas comme ceux-ci, je leur réponds : « Qu’est-ce que tu en penses ? »,

« Est-ce que le loup est méchant ? », « Oui je crois que le loup est méchant. »

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Ces observations me convainquent que les enfants de ma classe de stage ressentent la

nécessité de verbaliser. Je constate que le conte encourage le langage mais aussi le partage

entre pairs. Ceci est très positif et constitue un nouvel argument en faveur de mon objectif qui

concerne la stimulation du langage chez mes élèves.

Bien entendu, avant de continuer sur les arguments positifs de mon choix de conte, il est

nécessaire d’ajouter quelques mots sur la forme du récit. En effet, pour celle-ci, je me base sur

ce que j’apprends par ma MDS. Vu l’obstacle de la langue des enfants allophones, dans une

classe de 2ème maternelle, il faut, d’après ma MDS, utiliser un conte pour un niveau de 1ère

maternelle.

Selon Philippe Boisseau, le conte « oblige à improviser de perpétuels changements :

sauter telle phrase trop difficile, changer ces mots que les enfants ne comprendront pas,

etc. ». Autrement dit, pour que mes élèves écoutent, comprennent le conte et développent

ensuite l’oral, il est nécessaire de simplifier l’original. (2005, p.145)

Concrètement, je simplifie le récit11. Vu que mon objectif premier est de faire apprendre à

mes élèves des mots proches de leur quotidien, je supprime par exemple la phrase suivante :

« tire la chevillette et la bobinette cherra », qui est une phrase que j’estime trop lointaine du

vécu des enfants.

Tout comme ma MDS en classe, lors de ma narration, je mise beaucoup sur l’expressivité

verbale et non verbale. Je pense à ce que j’ai appris lors de mon cours de français « Savoir

écouter le conte » de Mmes Elisabeth Marichal et Bénédicte Deville : « le conte aide à

s’imprégner d’une langue oralisée par le biais de l’attitude corporelle, les gestes, mimiques,

intonation de la voix. L’enfant s’y réfère lorsqu’il parle à son tour.» (2014-15, p.10)

Je confirme l’hypothèse que le conte m’est d’une aide précieuse pour le travail de

formulation de phrases avec Philippe Boisseau : « ‘Les textes de l’oral’12 tels que nos

conteurs de l’oral en produisent,…contiennent beaucoup de formes Pn GV ou GN, Pn GV

caractéristiques de l’oral. » (2005, p. 140)

11Cfr annexes 12 Laurence Lentin citée par Philippe Boisseau

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De plus, avec le conte je veille à la « dimension sonore du langage » puisque « la

perception auditive et les capacités d’articulation de l’enfant allophone doivent s’adapter. »

(« Le langage à l’école maternelle », 2011, p. 99)

En clair, puisque les enfants allophones n’ont pas, dès la naissance, la « conscience

phonologique » du français, il est nécessaire que je veille à une bonne articulation et

formulation des mots. Mon activité conte m’offre des occasions d’articulation et de

formulation « soignées et exagérées ». Lors de la narration je ralentis le rythme de mes

phrases, j’exagère certains mots, je prononce très fort certains autres, …Tout ceci reste naturel

pendant la narration d’une histoire.

Par ce travail de « mise en scène théâtrale » j’espère aussi mettre les enfants en contact

avec la « musique » de la langue française. Comme exprimé par Mme Marichal lors de nos

ateliers, « chaque langue a sa propre musique ». Pour l’apprentissage d’une nouvelle langue,

je considère important que l’enfant perçoive cette « musique ». Celle-ci rend les mots plus

compréhensibles. (Ateliers optionnels, 2016-17)

J’ajoute un mot pour le choix du conte « Le petit chaperon rouge ». Les meilleures

histoires à conter sont celles qui sont « au centre de l’intérêt de l’enfant. Les animaux comme

le loup, carnivore, inquiétant, stimulent l’imagination ainsi que l’envie de protéger, d’aider

autrui. » (Boisseau, 2005, p. 73 ; Deville et Marichal, 2014-2015 p. 13).

Dans la classe de stage, je vois ce point de vue confirmé chaque jour par le constat que les

enfants semblent fascinés par ce loup. Par exemple, afin de vérifier s’ils comprennent le

conte, je leur demande, après l’écoute de celui-ci, de me faire un dessin de l’histoire. Je leur

demande de dessiner ce qu’ils veulent, concernant l’histoire. Quand je récolte les dessins des

enfants, je constate que le loup est dans tous les esprits !

En parallèle à mon objectif langage, je souhaite, comme déjà expliqué, que les enfants

prennent du plaisir avec le conte choisi et que cette motivation soit une aide supplémentaire

pour améliorer le langage oral. Avec le côté ludique du conte de par la mise en scène

notamment, j’espère créer un lien affectif et positif avec la langue française. Je souhaite qu’ils

gardent une image, des souvenirs agréables de la langue française.

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Pour récapituler, lors des premiers jours de stage, je raconte le conte tous les jours sans

exception. J’utilise un jour les objets tels que la boule rouge pour le Chaperon rouge, la boule

brune pour le loup, les lunettes pour la grand-mère, etc. Les jours suivants je varie ; j’utilise

des instruments (pour les sons), une marionnette, et des planches photocopiées du conte.

Ensuite, ce sont quelques enfants volontaires qui racontent le conte.

Je fais rejouer l’histoire par un groupe d’enfants avec les objets, des marionnettes ou

cartes à conter, car selon Philippe Boisseau « après une ou deux présentations de l’album on

associe très vite les enfants à la restitution de l’histoire puis, à travers des jeux…, on les

entraîne au récit oral autonome. » (2005, p.140-141)

Quand les enfants racontent le conte à leur tour, je précise certains éléments que je pense

difficiles pour eux. Par exemple, les enfants qui se déguisent en forêt portent des tissus verts

afin de représenter les arbres. Afin de m’assurer que tous les enfants comprennent ce

déguisement de forêt, j’ajoute des jouets représentant des arbres.

Pour les activités après le conte, comme décrit plus haut, je m’occupe parfois d’un seul

enfant avec des difficultés langagières précises. D’autres fois, je m’occupe d’un petit groupe.

Dans ce groupe je mélange des enfants qui ne s’expriment pas avec d’autres qui s’expriment

plus et je demande une collaboration entre eux. Je pose des questions à tous les enfants et je

reformule si nécessaire.

Je pose les mêmes questions tous les jours en veillant à ce que les questions et les

réponses restent des phrases simples et courtes. Ainsi, j’espère que les enfants les plus timides

et ceux qui ne s’expriment pas en français entendent à répétition la même réponse. Par cette

répétition, je vise la compréhension du message, et à ce qu’à un moment tous les enfants

répètent des phrases.

J’essaie de clarifier le plus possible les mots pour les enfants. Je demande par exemple ce

que veut dire « le loup court ». Dans ce cas, afin d’illustrer cette phrase, moi ou un enfant

mimons le loup qui court. Si nécessaire, je montre une image du loup qui court.

Je pose aussi des questions qui aident à comprendre pourquoi les personnages agissent

ainsi. Par exemple : « Pourquoi le loup veut-il manger le Petit chaperon rouge ? » ; « Le loup,

il veut manger le Petit chaperon rouge parce qu’il a très très faim… »

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Afin de poursuivre mon objectif de stimulation du langage oral, je veille aussi à « varier

les présentatifs des personnages de l’histoire dont ils sont pour la plupart à la

3èmepersonne » : « Voilà le loup », « voilà, voici, à côté de, c’est... ce, cette,… », « La grand-

mère, elle habite derrière le moulin », « La petite fille, elle porte un panier avec une galette et

un petit pot de beurre ; elle apporte une galette et un petit pot de beurre », « La petite fille, elle

s’en va dans la forêt »… Selon Philippe Boisseau « on doit les préférer aux déclaratives

simples caractéristiques de l’écrit : « La petite fille se rend dans la forêt. » (2005, p. 144)

En somme, je varie les activités autour du conte pour provoquer la formulation de la

phrase simple. Cette variation d’activités contribue, je crois, à ce que la stimulation du

langage oral se fasse par tous les enfants. J’espère aussi que certains vont aller plus loin que le

conte initial, par exemple qu’ils inventent une suite au conte.

À la fin du stage nous confectionnons un « roman-photo ». Je photographie les enfants

pendant qu’ils « jouent » le conte. Ils sont déguisés en Chaperon rouge, en loup, en grand-

mère ou en chasseur. On choisit les séquences les plus « parlantes » comme par exemple

lorsque le Chaperon rouge rencontre le loup, lorsque le loup se rend chez la grand-mère,

…Ces « séquences » incitent, d’après-moi, au langage, car les enfants sont impatients de les

décrire.

En somme, on exploite le récit initial de plusieurs manières et on garde des traces : dessins

et roman-photo.

➢ Le jeu symbolique pour stimuler le langage

Dans l’article « Le langage à l’école maternelle », je relève que « l’ancrage prioritaire

des apprentissages est dans le vécu, les jeux, les manipulations, les échanges en situation »

(2011, p.98). Sabine De Graeve rejoint ce point de vue. Elle affirme que l’enseignement en

maternelle s’appuie beaucoup sur l’aspect ludique. Je cite : « Toute classe maternelle devrait

permettre de vivre des expériences à des enfants qui bougent, créent et imaginent. » (1998,

p.29).

Dans mon cours et mon stage de psychomotricité relationnelle de cette année, j’apprends

que dans le jeu symbolique, l’enfant joue des rôles réels ou fictifs. Ainsi, le jeu m’intéresse

dans le sens où il amène une compréhension approfondie du conte. Cette compréhension

accompagne la stimulation du langage oral.

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Pour mon objectif langage, après la narration du conte, je mets donc en place un espace

« jeux symboliques ». Par ce biais, je souhaite que l’enfant imite les personnages du conte, ce

qu’il entend, qu’il crée les dialogues de celui-ci et exerce son vocabulaire.

En ce qui concerne le matériel, à nouveau, je m’inspire de mon stage de psychomotricité

relationnelle de cette année. En effet, pour laisser place à l’imagination et la créativité des

enfants il est essentiel de choisir des « accessoires neutres13 » pour les « jeux symboliques ».

Je choisis donc de prendre une grande caisse et d’y mettre des morceaux de tissus. J’ajoute

quelques objets tels qu’un bâton, un morceau de fourrure, un fusil factice, des lunettes, …

Je place mon « jeu symbolique » au coin rassemblement qui me semble approprié car il

s’agit d’un grand espace délimité par des bancs. Si je souhaite me déplacer pour aider ma

MDS je peux toujours veiller sur les jeux symboliques car les enfants restent accessibles à

notre regard.

Des colliers bleus sont portés par les enfants pour ce jeu. Les enfants « jouent » par quatre.

Les enfants l’identifient comme espace « jeu » quand je mets la caisse à tissus colorés. Quand

je ferme le jeu, cette caisse est rangée en haut de l’armoire.

Je demande également à mes élèves qu’ils apportent, de la maison, tout ce qu’ils

souhaitent rajouter pour rejouer l’histoire. De cette façon j’espère aussi créer un lien avec les

parents, lien que j’estime bénéfique pour l’apprentissage du langage. Les enfants semblent

motivés et enthousiastes de partager avec leurs parents ce qu’ils font en classe.

Je crée une composition des groupes aussi variée que possible. Je mélange les garçons

avec les filles mais aussi les enfants qui me semblent les plus extravertis avec des enfants plus

réservés. Ceci, afin de les inciter à jouer, apprendre et échanger avec chacun et à verbaliser en

français.

En bref, dans cet espace, les enfants ont à leur disposition des tissus et objets utiles à la

narration du conte, apportés par moi-même ou par eux. Les enfants choisissent les tissus et/ou

objets qu’ils souhaitent. Ils assemblent ces tissus et objets pour créer les personnages du

conte. Mon objectif est de les inciter à verbaliser ce qu’ils font.

13 Cela veut dire non de vêtements mais juste des morceaux de tissus

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Au départ je laisse les enfants jouer en autonomie. Je les observe et je prends des notes.

Dans un premier temps, je constate que les enfants manipulent beaucoup les tissus. Je

remarque que le bâton devient un fusil, que le morceau de fourrure se transforme en loup etc.

Certains font des essais devant le miroir comme s’ils exploraient quelque chose, d’autres

observent plutôt leurs camarades. D’autres encore répètent des dialogues du conte, parlent aux

autres enfants à propos de celui-ci.

Parfois un enfant se plaint de ne pas avoir un objet précis et, dans ce cas, je lui conseille

de rechercher dans la classe tout objet qui peut y ressembler.

Au fur et à mesure du temps, les enfants semblent familiarisés avec ce « coin ». Je

constate qu’ils formulent de plus en plus ce qu’ils souhaitent. Par exemple : « Je prends le

tissu rouge parce que je veux être le Chaperon rouge » ou « Je prends un rouleau comme fusil,

je tue le loup, je suis bien fort ! »

Les enfants rejouent le conte tous les jours. Parfois ils donnent des significations

différentes au même tissu. Par exemple, la fourrure qui sert de barbe un jour sert de queue du

loup le lendemain. Ils verbalisent de plus en plus leurs actions ou intentions face aux autres.

Parfois, ils miment les actions des personnages du conte. Par exemple, « Le loup court »

ou « Il court chez Grand-mère ».

À d’autres moments, ils miment les caractéristiques du personnage. Par exemple ils

miment le loup qui est féroce. Ils montrent leurs dents, sortent les griffes. Je profite toujours

de ces occasions pour les faire verbaliser.

Je réfléchis et je prends conscience que le fait de jouer uniquement ne suffit pas. C’est la

« description orale » de ce que les enfants font qui provoque la stimulation du langage. Leur

imagination, leurs actions, leur expression corporelle, leurs sensations et la verbalisation orale

de tout ceci provoque le langage.

En ce qui concerne le « groupe restreint » recommandé par Philippe Boisseau, il est déjà

dans cet espace. Je peux donc travailler immédiatement la stimulation du langage. C’est-à-

dire que les quatre enfants verbalisent sur le moment. Je les laisse jouer quelque temps et

ensuite j’interviens pour formuler des phrases.

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Cependant, il arrive que je leur demande aussi de verbaliser devant toute la classe. En

effet, je photographie les enfants et je montre les photos en collectif. Je demande à un enfant

volontaire d’expliquer à tout le groupe ce qu’il fait.

J’ajoute que le « jeu symbolique » est mon outil de langage mais aussi mon outil de climat

de classe serein et positif. Je remarque qu’à travers mon objectif d’acquisition du langage, je

« touche » à d’autres compétences. Le jeu devient, par exemple, un outil de partage et de

collaboration. Les enfants s’unissent, imaginent et jouent l’histoire. Cela leur demande une

« concertation » afin de se mettre d’accord sur « qui va jouer qui ». À ces moments j’évite de

m’immiscer ou de critiquer. Les enfants arrivent généralement à régler d’eux-mêmes les

conflits qui peuvent apparaitre.

Je constate également que mon jeu symbolique évolue avec le temps. Comme mes élèves

et moi-même ajoutons des tissus et objets, il y a inspiration et création de nouvelles situations.

De nouvelles histoires remplacent l’histoire initiale. Comme par exemple « Les deux

Chaperon rouge » que je décris plus loin.

Après mes constatations et réflexions personnelles, je décide de garder des « traces

visuelles » de tout ce que les enfants font. Des dessins, des photos et un roman-photo. Ainsi,

je souhaite donner l’occasion à tous mes élèves de verbaliser leurs actions. J’espère que les

enfants entendent les phrases à répétition. Par cette répétition ils devraient s’approprier le

vocabulaire, les phrases et la syntaxe.

➢ Pour compléter mes observations sur le « jeu symbolique » de ma classe

de stage.

J’insère un rappel du développement psychologique de l’enfant du préscolaire ci-dessous.

Selon Piaget, « entre 2 et 6 ans nous nous trouvons à la période préopératoire »14. Cette

période est celle du « grand égocentrisme ». Autrement dit, l’enfant ne voit les choses que de

son point de vue et croit que les autres pensent comme lui.

Toutefois, des études récentes « contredisent » l’avis de Piaget et affirment que l’enfant

« n’est pas aussi égocentrique » qu’on le dit. En effet, selon ces études, l’enfant s’adapte aux

sentiments d’autrui. Il est capable « d’imitation, interaction ou coopération. » (Druart,

Waelput, 2005, p.17)

14Cité dans Bee, H. & Boyd, D. (Herinne, L., Document non publié). 2015-2016, p.3.

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Pour rejoindre ce point de vue théorique, je constate que, pendant le jeu symbolique, il y a

des échanges coopératifs. Par exemple, au tout début de stage, il y a quelques disputes car

tous les garçons veulent se déguiser en loup et toutes les filles en Chaperon rouge. Au fil du

temps cela change : les enfants se concertent pour savoir qui se déguise en qui.

En somme, ce jeu les aide vraisemblablement à prendre conscience du fait que chacun

pense différemment. Ainsi, ils gèrent mieux les conflits et comprennent le respect des règles

de vie de la classe. Il y a de moins en moins, il me semble, d’enfants insatisfaits ou frustrés.

Tout ceci m’aide à me concentrer mieux sur l’objectif « langage oral ».

Pour conclure ce TFE, j’ajoute quelques mots sur deux éléments qui me semblent

complémentaires pour stimuler le langage oral : le langage non verbal et le miroir.

En effet, je constate que dans le jeu symbolique, le corps aide à se faire comprendre par

autrui. Dans un premier temps, il y a nécessité de recourir au langage non verbal pour jouer

avec les autres. En effet, mimer des personnages demande des gestes adéquats pour

communiquer, faire comprendre ce qu’on souhaite transmettre à autrui. Avec ces efforts non

verbaux que l’enfant exécute pour se faire comprendre, j’ai l’impression qu’il y a stimulation

du langage verbal. C’est-à-dire que l’enfant se rend compte quele non-verbal ne suffit pas. Il

doit ajouter des mots à ses mimes pour se faire comprendre. Il réalise que pour être

compréhensible il a besoin de deux langages.

En ce qui concerne le miroir, il est indispensable pour les jeux symboliques. Mais

j’observe aussi qu’il m’aide beaucoup pour la stimulation du langage oral. L’enfant se déguise

et se regarde dedans. Il regarde peut-être pour vérifier si ce qu’il imagine être comme

personnage est conforme à l’image que lui envoie le miroir ? Peut-être qu’il prend conscience,

quand il se regarde dedans, du résultat du déguisement ?

Parfois, les enfants se regardent dans le miroir et « améliorent » leur déguisement. Pour

stimuler leur langage je leur pose des questions : « Qu’est-ce que tu vois ?», « Comment te

trouves-tu ? », « Est-ce que t’es content de ton déguisement ? ».

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« Les deux Chaperon rouge » : histoire jouée par les enfants et observée vers la fin de

mon stage

Les enfants commencent par fouiller dans la caisse. Ils choisissent leur tissu et/ou

accessoire (tissu ou robe rouge, chapeau, morceau de fourrure, panier, rouleau en carton).

Cette fois, deux filles décident d’être toutes les deux le « Chaperon rouge ». Je m’assois

près d’elles et leur demande comment on peut faire pour qu’il y ait deux « Chaperon rouge »

dans notre histoire ; elles se regardent et rigolent. Quelques instants après, l’une des deux dit :

« sœurs ! » ; je réponds : « Ah vous êtes sœurs ? » ; elles ont l’air ravies.

Pendant ce temps les garçons du groupe viennent près de nous et écoutent ce qui se passe.

Immédiatement, ils cherchent dans la caisse. Ils se déguisent tous les deux en loup. Ensuite,

souriants, ils viennent près de nous. Je dis : « Alors, vous vous êtes déguisés en loup tous les

deux ? ». Ils me répondent que oui. Je demande à ce groupe s’ils sont d’accord de rejouer

l’histoire et de verbaliser leurs actions. Je leur dis : « Jouez cette nouvelle histoire pour moi,

mais il faut parler pour m’expliquer ce qui se passe sinon je ne comprends pas. »

Les jours suivants, les enfants semblent prendre goût à l’invention d’une nouvelle histoire

du « Chaperon rouge ». Le nouveau groupe crée une histoire avec deux « Chaperon rouge »

qui se rendent dans la forêt et rencontrent maman et papa loup. C’est toujours le « Chaperon

rouge » qui se rend dans la forêt, mais avec sa grande sœur, et elles rencontrent un loup et une

louve. Les enfants disent : « C’est monsieur/papa loup et madame/maman loup ». Pendant ces

scénettes, ma MDS et moi-même écoutons, posons quelques questions de précision et

reformulons.

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CONCLUSION

C’est ici que s’achève mon voyage…

Tout au long de ce travail de fin d’études, j’ai gardé en tête que mon objectif est de

stimuler le langage oral des enfants allophones. Comme les enfants de ma classe de stage ne

s’expriment pas régulièrement en français, j’ai cherché à provoquer une motivation de

langage. En sollicitant leur imagination, je pense avoir pu stimuler leur expression orale.

Au cours du stage qui me sert de base pour ce travail, j’ai vu que les enfants écoutent

volontiers le conte. Grâce à celui-ci, ils ont spontanément envie de parler en français. Dans un

premier temps, ils ont formulé avec mon aide des phrases simples. Ensuite, ils ont joué les

scènes du conte. Avec le matériel en lien avec ce conte, mis à leur disposition, ils se sont

approprié au mieux l’histoire.

Avec le jeu symbolique, je suis parvenue à les « mettre en action ». J’ai fait en sorte

qu’ils se déguisent et qu’ils échangent avec les autres. Il en est ressorti que par l’action et le

mouvement, ils mémorisent plus facilement du vocabulaire et des phrases simples.

Grâce à mes outils, j’ai l’impression que j’ai réussi à stimuler autrement leur langage

oral, et qu’en parallèle de mon objectif « expression orale » je leur ai apporté des moments de

détente et d’évasion qui leur ont permis de se construire une relation affective, une image

positive de la langue française.

J’espère également avoir été assez attentive aux différentes cultures de ma classe afin

d’éviter le « conflit de loyauté » entre le cadre familial de mes élèves et celui de l’école,

condition primordiale pour un apprentissage dans l’harmonie.

En fin de stage, une nouvelle question m’est apparue, concernant le langage non verbal

et le miroir. Est-ce que ces deux outils sont aussi efficaces que le conte et le jeu symbolique

pour la stimulation du langage oral ? Dans quelle mesure sont-ils complémentaires? C’est une

problématique que je laisse ouverte et que j’espère pouvoir approfondir prochainement lors

d’une pratique ultérieure « sur le terrain ».

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BIBLIOGRAPHIE

OUVRAGES

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France.

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Imprimé en Belgique.

Herinne, L. (2015-2016). Résumé : Les âges de la vie de Helen Bee et Denise Boyd, « UE

2030, Psychologie des apprentissages ». Document non publié, École normale catholique du

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Wheeler, A. (1992). Modèle d l’évolution professionnelle des enseignants. (Document donné

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ARTICLES

CNDP-CRDP (2011) Le langage à l’école maternelle dans Unité 3040 Didactique du

Français 3NPS : Unité 3040.

SYLLABUS ET NOTES DE COURS, ENCBW

Bar, S. (2016-2017) & Pollet, N. Inégalités sociales et scolaires 3NPS : notes de cours, École

normale catholique du Brabant wallon, Louvain-La-Neuve.

Cuvelier, F. (2015-2016) Technique de gestion du groupe 2NPS : notes de cours et syllabus,

École normale catholique du Brabant wallon, Louvain-La-Neuve.

David, J. (2014-2015). Psychologie du développement 2NPS : notes de cours, École normale

catholique du Brabant wallon, Louvain-la-Neuve.

De Cuyper, G. (2015-2016). Psychomotricité 2NPS : notes de cours et ateliers, École normale

catholique du Brabant wallon, Louvain-la-Neuve.

Deville, B. (2014-2015). Didactique du Français, savoir écouter le conte 2NPS : syllabus et

notes de cours, École normale catholique du Brabant wallon, Louvain-la-Neuve.

Herinne, L. (2015-2016). Psychologie des apprentissages 2NPS : notes de cours, École

normale catholique du Brabant wallon, Louvain-La-Neuve.

Goies, I. (2014-2015). Le développement du langage de 0 à 6 ans 1NPS : notes de cours,

École normale catholique du Brabant wallon, Louvain-La-Neuve.

Labalue, F. (2016-2017). Différenciation, 3NPS : notes de cours et portfolio, École normale

catholique du Brabant wallon, Louvain-La-Neuve

Marichal, E. (2014-2015). Didactique du Français, savoir écouter, le conte et divers ateliers

optionnels 2NPS/3NPS. École normale catholique du Brabant wallon, Louvain-La-Neuve

Pauwels, P. (2016-2017). Psychomotricité relationnelle 3NPS : notes de cours et ateliers,

École normale catholique du Brabant wallon, Louvain-la-Neuve.

Van Bogaert, A. (2014-2015). Psychologie des apprentissages 2NPS : notes de cours, École

normale catholique du Brabant wallon, Louvain-La-Neuve.

SOURCES INTERNET

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❖ Au pays des Contes : http://www.bonjourdumonde.com/blog/grece/11/fiches-

pedagogiques/au-pays-des-contes-fiche-pedagogique, consulté le 1er Mai 2017

❖ CNRLT : http://www.cnrtl.fr/definition/d%C3%A9guiser, consulté le 2 Mai 2017

❖ Larousse, encyclopédie en ligne :

http://www.larousse.fr/encyclopedie/divers/conte/36566, consulté le 20 Mars 2016

❖ Grammaire en ligne, « reverso » :

http://grammaire.reverso.net/1_2_les_composants_de_la_phrase.shtml, consulté le 3

juin 2017.

TRAVAUX

ENCBW-UE 3080 Inégalités sociales et scolaires : « projet salle des parents »15.

Alba Marta, Kokkinou Georgia, Lisart Justine, Manga Bijou, Mousel Liza

15 La réflexion de notre travail m’a aidée pour le point « conflit de loyauté de ce TFE ».

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ANNEXES

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« Le petit Chaperon rouge » (Corinne Marchois « Ludo et ses Amis » cfr bibliographie)

Texte « simplifié »

Il était une fois une bien jolie petite fille… Sa mère et sa grand-mère l’adorent. Elle porte toujours un petit chaperon rouge -offert par sa grand-mère – si bien qu’on l’appelle le petit Chaperon rouge.

Un jour sa mère lui dit :

Voix de maman : « tiens petit chaperon rouge. Voici une galette et un petit pot de beurre pour ta grand-mère. Vas vite lui apporter, elle est malade. Mais…quand tu es dans la Forêt ne parle à personne … »

Dans la Forêt le petit Chaperon rouge rencontre le loup.

Grosse voix : « bonjour petit Chaperon rouge » dit le loup. « Où vas-tu petit Chaperon rouge ?? »

Petite voix : « chez ma grand-mère.. »

Loup, grosse voix : « que portes-tu dans ton panier ? »

Petite voix : « de la galette et un pot de beurre, c’est pour grand-mère elle est malade… »

Loup, grosse voix : « où habite ta grand-mère petit chaperon rouge? »

Petit chaperon rouge : « dans la forêt là-bas après le moulin» dit le petit chaperon rouge.

Loup grosse voix : « ah très bien je te propose un jeu.. Je vais par ce chemin et toi par celui-ci et nous allons voir qui arrive le premier… ! »

Le loup cooooooourt court court jusqu’à la maison de la grand-mère et il y arrive le premier. Il frappe à la porte…toc toc toc

« Qui est là ? » Dit la grand-mère

« C’est moi le petit chaperon rouge » dit le loup avec une voix toute toute douce…

« Ah entre ma petite fille entre » dit la grand-mère.

Le loup entre et wraaam saute sur la grand-mère et la mange. Puis il se couche dans son lit met ses habits et attend le petit chaperon rouge…

Le petit Chaperon rouge, qui s’est attardé dans la forêt, a ramassé des fleurs et a regardé les papillons, arrive chez sa grand-mère. Toc toc toc..

« Qui est là ?» Dit le loup avec la voix de la grand-mère.

« C’est moi grand-mère ! Le petit Chaperon rouge. Je t’apporte de la galette et un petit pot de beurre. Ouvre-moi ! » Dit la petite fille.

« Entre ma petite fille ! Entre ! » Dit le loup avec la voix de la grand-mère…

« Bonjour grand-mère !.... ! »

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« Oh grand-mère que tu as des gros oreilles ! »

« C’est pour mieux t’entendre mon enfant » dit le loup toujours avec voix douce

« Oh grand-mère que tu as des gros yeux !! »

« C’est pour mieux te voir mon enfant » toujours le loup avec voix douce

« Oh grand-mère mais que tu as des grands bras ! »

« C’est pour mieux t’embrasser mon enfant » dit le loup toujours voix douce

« Oh grand-mère que tu as des grandes jambes !! »

« C’est pour mieux courir mon enfant » dit le loup : toujours voix douce

« Oh grand-mère mais que tu as des grandes dents !! »

« Mais c’est pour mieux te MAAAAAANGER» grosse grosse voix de loup !!

Le méchant loup mange le petit Chaperon rouge.

Un chasseur qui cherche le loup depuis longtemps passe par la maison de la grand-mère. Par la fenêtre il voit le loup dormir. Son ventre est énorme (geste de la main).

Il rentre vite dans la maison prend les ciseaux et coupe le ventre du loup. Il sort petit chaperon rouge et sa grand-mère.

« Ouf que j’ai eu peur ! » Dit le petit Chaperon rouge ; « il fait bien noir dans le ventre du méchant loup ! A partir de maintenant j’écouterai toujours les conseils de ma maman ! »

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