maladie de parkinson et psychotropes -...

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1 Maladie de Parkinson et psychotropes JM Michel, CPA Hôpitaux Civils de Colmar - Prévalence en France: 150.000 - Augmentation constante de l’incidence et de la prévalence après 60 ans - Impact des comorbidités - Troubles psychiques: baisse de la qualité de vie Serre Maladie de Parkinson et psychotropes JM. MICHEL Centre pour Personnes Âgées, Hôpitaux Civils de Colmar En France, on estime la prévalence de la maladie de Parkinson à 150000 patients, l’âge moyen de début se situant au début de la soixantaine avec des extrêmes allant de 17 à 90 ans. L’incidence de la MP augmente constamment au-delà de 60 ans. On peut donc s ‘attendre à une augmentation sensible de la prévalence lié au vieillissement attendu de la population Chez les patients âgés, la question des co-morbidités se pose ainsi que leur responsabilité sur l’évolution de la maladie. Les troubles psychiques, qu’ils soient liés aux fluctuations motrices ou non, sont à l’origine d’une importante dégradation de la qualité de la vie.

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Maladie de Parkinson et psychotropes

JM Michel, CPA Hôpitaux Civils de Colmar

- Prévalence en France:150.000- Augmentation constante del’incidence et de la prévalenceaprès 60 ans- Impact des comorbidités- Troubles psychiques: baisse de la qualité de vie

Serre

Maladie de Parkinson et psychotropesJM. MICHELCentre pour Personnes Âgées, Hôpitaux Civils de Colmar

En France, on estime la prévalence de la maladie de Parkinson à 150000patients, l’âge moyen de début se situant au début de la soixantaine avec desextrêmes allant de 17 à 90 ans. L’incidence de la MP augmente constammentau-delà de 60 ans. On peut donc s ‘attendre à une augmentation sensible de laprévalence lié au vieillissement attendu de la populationChez les patients âgés, la question des co-morbidités se pose ainsi que leurresponsabilité sur l’évolution de la maladie. Les troubles psychiques, qu’ilssoient liés aux fluctuations motrices ou non, sont à l’origine d’une importantedégradation de la qualité de la vie.

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Physiopathologie

- Voies dopaminergiques nigrostriatales et méso-cortico-limbiques affectées- Lésions de voies non dopaminergiques: noradrénergiques, sérotoninergiques,cholinergiques, métenképhalinergiques…

La physiopathologie est complexe comme en témoigne ces 2 schémas.La maladie de Parkinson fait partie d’une famille de pathologiesneurodégénératives caractérisées par l’accumulation de la protéine α-synucléineau niveau des terminaisons présynaptiques des neurones. Les voiesdopaminergiques efférentes nigro-striées sont affectées, mais aussi les voiesafférentes au Locus Niger (sérotoninergiques, noradrénergiques,métenképhalinergiques, glycinergiques, histaminiques H1, muscariniques …).Les premiers signes cliniques apparaissent lorsque les concentrationsdopaminergiques sont réduites de 60 à 80% laissant suggérer une phasepréclinique de dégénérescence neuronale d’une quinzaine d’années. La maladiede Parkinson affecte la motricité et certaines fonctions végétatives, mais c’estaussi une maladie cognitive et psychique.

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Les syndromes parkinsoniensprovoqués par les psychotropes

Les neuroleptiques

Fréquence du syndrome parkinsonien:- Chlorpromazine: > 10%- Halopéridol: 30%

Mécanismes:- Blocage des récepteurs dopaminergiques (D2 +++)- Action sur neurotransmetteurs autres, canaux ioniques, facteurs

intracellulaires de transcription…- Altération progressive des systèmes dopaminergiques avec

l’avancée en âge

Dans un premier temps, nous allons nous intéresser aux syndromesparkinsoniens provoqués par les psychotropes.Dès l’utilisation des premiers neuroleptiques, notamment lachlorpromazine, nous savons que toute molécule altérant lefonctionnement des systèmes dopaminergiques centraux peut induire unsyndrome parkinsonien. La fréquence était supérieure à 10% avec lesphénothiazines aliphatiques (chlorpromazine) et supérieure à 30% avecl’halopéridol.Les mécanismes en cause impliquent non seulement le blocage desrécepteurs dopaminergiques, mais concernent aussi les récepteurs àd’autres neurotransmetteurs, les canaux ioniques, les facteurs detranscription intracellulaires, l’expression génétique…L’avancée en âge s’accompagne d’une diminution progressive dessystèmes dopaminergiques.

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Effets dose-dépendantsSeuil d’apparition du syndrome parkinsonien:80% des récepteurs dopaminergiques D2 occupés

Fréquence d’apparition varie en fonction de facteurs:- Neuroleptiques: 15 à 60% selon molécule, posologie et galénique- Traitements associés- Âge, sexe, susceptibilité génétique, MP préclinique, DCL…

Pourcentage d’occupation des récepteurs dopaminergiques D2BENTUÉ-FERRER D., ALLAIN H. In "Les syndromes parkinsoniens secondaires" 2006 Ed Masson

Les neuroleptiques sont des médicaments antagonistes des récepteursdopaminergiques D2. Les effets indésirables sont dose-dépendants etliés au pourcentage d’occupation des récepteurs D2, le seuild’apparition étant de 80%. Ce sont surtout les neuroleptiques depremière génération qui sont concernés : phénothiazines,butyrophénones car elles se lient aux récepteurs D2 avec une forteaffinité.La fréquence d’apparition d’un syndrome parkinsonien auxneuroleptiques varie de 15 à 60 % selon la molécule et la posologie,les formes retard étant le plus souvent incriminées. L’âge, le sexe(ratio féminin/masculin 2/1), une susceptibilité génétique, une maladiede Parkinson préclinique, un état démentiel telle une maladie aveccorps de Lewy et certains traitements associés augmentent ce risque.

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Potentiel d’induction d’un syndrome parkinsonien des neuroleptiquesBENTUÉ-FERRER D., ALLAIN H. In "Les syndromes parkinsoniens secondaires" 2006 Ed Masson

Actions des NL 2e G

- Réc D2: affinité plus faible et dissociation rapide

- Action préférentielle sur un autre sous-type de récepteur dopaminergique

- Action significative et simultanée sur d’autres types de récepteurs

Les neuroleptiques qualifiés d’atypiques ou de 2e génération sontsusceptibles d’induire moins d’effets indésirables de type parkinsonienpar le biais de plusieurs mécanismes:- une action préférentielle sur un autre sous type de récepteurdopaminergique (sous récepteur D4 et clozapine par exemple)- une action antagoniste simultanée de récepteurs appartenant à dessystèmes de neurotransmission autres que dopaminergique, tels lesrécepteurs muscariniques. La fixation conjointe d’un neuroleptique surles récepteurs dopaminergiques D2 et sur des récepteurssérotoninergiques autolimiterait le blocage dopaminergique.- une affinité plus faible pour les récepteurs dopaminergiques D2 et unedissociation plus rapide de ces mêmes récepteurs.

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La fréquence moindre des syndromes parkinsonienssecondaires aux neuroleptiques "atypiques" est discutée

Métaanalyses:

LEUCHT S. (Lancet 2003)- 31 études contrôlées comparant NL "classiques" vs NL "atypiques"- 2320 patients- Dose de chlorpromazine < 600 mg/j : pas de risque plus élevé de syndrome

extrapyramidal qu'avec les neuroleptiques "atypiques"- Seule la clozapine a montré une supériorité en terme d'efficacité et de

tolérance neurologique (effets indésirables hématopoïétiques non pris encompte)

GEDDES J. (BMJ 2000)- 52 essais randomisés (12649 patients)- NL "atypiques": moins d'effets extrapyramidaux mais absence de preuve

d'une meilleure efficacité

Il convient d’être prudent, cette moindre fréquence d’effets indésirables desneuroleptiques atypiques étant discutée comme en témoigne une méta-analysepubliée en 2003 dans le Lancet par Leucht. Des études contrôlées, comparantneuroleptiques classiques versus neuroleptiques atypiques (soit 31 étudesregroupant 2320 patients), montraient en effet qu'une dose quotidienne inférieure à600 mg de chlorpromazine n’entraînerait pas plus de syndrome extrapyramidal queles molécules de la nouvelle génération. Seule la clozapine a montré une supérioritéen terme d’efficacité et de tolérance neurologique, mais les effets hématopoïétiquesn’ont pas été pris en compte.Une deuxième méta-analyse a été menée par Geddes et publiée dans la revueBritish Medical Journal. Elle a regroupé 52 essais randomisés (12649 patients) etmontre à l’inverse une diminution de la fréquence des effets extrapyramidaux avecles neuroleptiques atypiques, mais celle-ci n’est pas quantifiée, de sorte que lapertinence clinique de ce travail est discutable.S’il y a moins d’effets extrapyramidaux avec les neuroleptiques de la nouvellegénération, nous devons cependant tenir compte qu’ils ont aussi d’autres effetssecondaires potentiels : diabète, abaissement du seuil épileptogène, chutes,hyperprolactinémie, agranulocytose, dyslipidémie, prise de poids, allongement duQT, AVC

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La prescription des antipsychotiqueschez les parkinsoniens âgés

Marras C & al; Antipsychotic use in older Adults with Parkinson's disease. Movement Disorder.2007, 22, 3: 319-323

Une étude canadienne (C. Marras) a estimé l’incidence dessymptômes psychotiques nécessitant un traitement chez lesparkinsoniens âgés de plus de 65 ans sous traitement dopaminergiquesur une période de 5 ans. Elle a tenté de déterminer le type detraitement psychotrope utilisé en se basant sur des données desservices de soins de l’Ontario.Sur 10347 patients, 499 ont bénéficié d’un traitement antipsychotiquedans l’année qui a suivi le démarrage du traitement dopaminergique.Les neuroleptiques classiques restent encore largement employés avectoutefois une tendance à la diminution au fil des années. L’auteurconclut que la prescription de ces molécules sont surtout le fait demédecins traitants et qu’un switch est réalisé après un avis spécialisé,surtout par les psychiatres. Cette tendance s’atténue d’année en année.

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Neuroleptiques cachésCertains antiémétiques, hypnotiques, antihistaminiques,

traitements fonctionnels de la ménopause…

AntidépresseursIRS: incidence 2 cas / 1000 patients traités

Interactions médicamenteusesMécanisme variable:- synergie des effets- Élévation du taux circulant d'une ou des 2 molécules- Inhibition d'un cytochrome- ….

Très insidieux sont les neuroleptiques cachés tels les médicaments quibloquent les récepteurs dopaminergiques D2 mais ne franchissent pas oufaiblement la barrière hémato-encéphalique. Il s’agit des anti-émétiques (Primpéran surtout), de traitement des troubles fonctionnels de laménopause, d’hypnotiques (Noctran et Mépronizine)), d’anti-histaminiques de la famille des phénothiazines, d’anxiolytiques(Vésadol)Si des mouvements anormaux sont décrits avec les antidépresseurs dela classe des IRS, les cas de syndrome parkinsonien sont plus rares(incidence 2 cas /1000 patients traités) et s’expliquent par uneaugmentation des concentrations synaptiques de sérotonine quidéprimerait les systèmes dopaminergiques).- Les interactions médicamenteuses: la co-morbidité implique une co-prescription qui favorise l’apparition d’un syndrome parkinsonien. Lemécanisme est variable : synergie des effets, élévation des tauxcirculants d’une ou des 2 molécules, inhibition d’un cytochrome.Plusieurs associations ont été évoquées : neuroleptique et inhibiteur del ‘acétylcholinestérase, carbamazépine et acide valproïque par exemple.

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Clinique:- Syndrome akinéto-hypertonique- Symptomatologie bilatérale et symétrique- Mouvements anormaux associés- Apparition le plus souvent dans les 3 premiers mois- Survenue tardive (> 1 an) dans 25% des cas- Peu ou pas de sensibilité à la lévodopa- Régression de la symptomatologie dans des délais longs.

Si persistance: maladie de Parkinson débutante démasquée?

Quelle attitude à adopter?- Identifier la molécule responsable et si possible la supprimer- Remplacement par une molécule moins inductrice de syndrome

parkinsonien: avis du neurologue et du psychiatre- Chaque prescription doit être réfléchie- Proscrire la prescription d'un correcteur- Lévodopa? Amantadine? Avis neurologique +++

Sur le plan clinique, le syndrome akinéto - hypertonique prédomine et la topographie des symptômes esten général bilatérale et symétrique. D’autres mouvements anormaux peuvent apparaître : dystonie,dyskinésie, akathisie, tics, choréique… Si ces effets apparaissent classiquement dans les 3 premiers mois,ils surviennent au delà d’un an dans 25 % des cas. Le syndrome parkinsonien iatrogène n’est pas sensible àla Lévodopa et l’on peut espérer une régression de la symptomatologie à l’arrêt de la molécule incriminéemais dans des délais longs (80 jours en moyenne). La scintigraphie au DAT-Scan met en évidence unefixation normale du radiotraceur au niveau des terminaisons dopaminergiques présynaptiques (intégrité dela voie dopaminergique nigro-striée), contrairement à la maladie de Parkinson mais cet examen n’est pasdisponible partout et reste d’un coût prohibitif (800 à 1000 €). Si la symptomatologie persiste, nous pouvonsnous poser la question d’une maladie de Parkinson débutante démasquée par la prescription ou la possibilitéd’un effet toxique du traitement sur le système dopaminergique.Quelle attitude à adopter en cas de syndrome parkinsonien induit par les psychotropes?- Identifier la molécule responsable et si possible la supprimer ou du moins diminuer la dose.- Chaque prescription doit être réfléchie en terme de bénéfice - risque, de posologie, de durée detraitement… On peut parfois tenter les inhibiteurs de l’acétylcholinestérase dans la démenceparkinsonienne.- Un changement de neuroleptique en faveur d’une molécule moins inductrice d’un syndrome parkinsonienest à considérer. Nous ne devons pas hésiter à demander un avis auprès de nos confrères psychiatres etneurologues quant à la stratégie thérapeutique à adopter.- La prescription d’un correcteur est à proscrire car la preuve de leur efficacité reste à démontrer et lasurvenue d’effets secondaire est fréquente chez les personnes âgées (état confusionnel, hallucinations, étatsdélirants…)- L’introduction de Lévodopa ou d’amantadine, dont la mention légale « syndrome parkinsonien induit parles neuroleptiques » est dans le Vidal, est à discuter au cas par cas après une réflexion conjointe avec lesneurologues.

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Troubles psychiques: interaction entre des facteurs neuropathologiques,thérapeutiques et de personnalité.

POLLAK P. Rev Neurol 2002

- Personnalité- Contexte social et familial- Réactions secondaires liées aux effets thérapeutiques

Effets des médicaments(pharmacocinétique,pharmacodynamique)Effets des autres traitements(chirurgical, physiothérapie,psychothérapie…)

Lésions neuropathologiques- Dopaminergiques- Non dopaminergiques(noradrénergiques,sérotoninergiques,cholinergiques…)

Les traitements psychotropes des troubles psychiatriques de laMaladie de ParkinsonLa maladie de Parkinson est une maladie neuropsychiatrique.Les nombreux troubles psychiques sont la résultante d’unecombinatoire complexe entre la personnalité prémorbide dumalade, la variété des lésions cérébrales associées à la maladie deParkinson, les traitements antiparkinsoniens et les réactionspsychologiques indirectes aux effets de ces traitements. C’est laraison pour laquelle la gestion thérapeutique des troublespsychiques est complexe, d’autant que les symptômes peuventfluctuer en parallèle avec les fluctuations motrices et être plusinvalidant que les troubles moteurs.

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Maladie de Parkinson: une maladie neuropsychiatrique

60 à 98 %Troubles du sommeil

> 60 %États confusionnels (iatrogénie +++)

6 %Autres pulsions et compulsions8 %Addiction aux jeux et au traitement dopaminergique

1,2 à 14 %Comportements stéréotypés17 à 40 %Apathie25 à 40 %Hallucinations (visuelles + auditives)

30 à 35 %Anxiété (périodes "off"+++)20 à 40 %Dépression

Fréquences(à relativiser)Troubles psychiques et du comportement

Les troubles psychiques les plus fréquents sont les états dépressifs quipeuvent être précoces (jusqu’à 40% des patients parkinsoniens seloncertains travaux, chiffre à mettre au conditionnel car il n’est pas certainqu’il traduise la réalité) .Suivent l’anxiété, pouvant parfois prendre l’allure d’attaque de paniqueet accompagner les fluctuations motrices (périodes off), les étatsconfusionnels très souvent d’origine iatrogène, les hallucinations souventvisuelles (plus rarement auditives ou tactiles).Les traitements médicamenteux (antiparkinsoniens, psychotropesantalgiques…) ont souvent un rôle aggravant et parfois déclenchant toutcomme les pathologies associées.Les idées délirantes peuvent être aussi à thèmes de persécution et depréjudice.Les autres troubles sont représentés par l’apathie, les troubles du contrôledes impulsions (punding ou comportements stéréotypés, addiction auxjeux ou aux traitements dopaminergiques, pulsions libidineuses, attitudescompulsives…).

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Troubles du sommeil

Enfin les troubles du sommeil sont très fréquents et gênants aprèsplusieurs années d’évolution et au stade des fluctuations. Lesétiologies sont multiples et la nature très variable : fragmentation dusommeil, insomnie d’endormissement, apnées du sommeil,hallucinations nocturnes, somnolence diurne, troubles ducomportement du sommeil paradoxal. La prise en charge, qu’elle soitmédicamenteuse ou non, dépendra, de fait, du ou des mécanismesimpliqués.

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Dysfonctionnement du cortex préfrontalet des ganglions de la base

Les boucles cortico-striato-thalamo-corticales

Alexander GAnnu Rev NeuroSci1986

Circuits moteurs associatifs limbiques

SNr: substantianigra pars reticulata

Gpi: pallidum int

Les données de la littérature mettent en avant le rôle central d’un systèmecomplexe associant le cortex préfrontal et les ganglions de la base dans lagenèse et le contrôle comportemental.Les ganglions de la base ne sont pas de simples relais sur le chemin del’information issue du cortex et ont un rôle majeur d’intégration desdifférentes unités de représentation ou d’informations corticales pour lesrecoder en fonction du contexte et d’un objectif donné. Ceci expliquequ’au cours de la maladie de Parkinson, la dénervation dopaminergique etles traitements administrés provoquent des troubles du comportement enrapport avec un dysfonctionnement de ces structures.

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Prise en charge des troubles psychiqueset du comportement

Approche multidisciplinaire:- gériatre, psychiatre, neurologue, médecin traitant- autres professionnels de santé- patient et entourage

Prévention +++

Troubles avérés: facteurs de susceptibilité sous-jacents ?

De ce fait, la prise en charge des troubles psychiques et ducomportement chez le malade parkinsonien âgé est difficile etnécessite généralement une approche multidisciplinaire associantgériatre, neurologue, psychiatre, médecin traitant, mais aussi lesautres professionnels de santé et les travailleurs sociaux. De plus lesinformations fournies par l’entourage constituent une aide précieusedans la réflexion et les prises de décision. Le premier destraitements des troubles comportementaux est la prévention.En cas de troubles avérés, il convient d’identifier et de prendre encharge un éventuel facteur de susceptibilité sous-jacent (iatrogénie,état dépressif, co-morbidité….).

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Que peut-on prescrire ?États dépressifs- Inhibiteurs de la monoamine oxydase A et B ?- Inhibiteurs de la recapture de la sérotonine +++

États anxieux- Traitement optimal des troubles moteurs et des fluctuations- Benzodiazépines à durée de vie courte, IRS

États psychotiques, troubles du comportement- Prise en charge des problèmes médicaux contingents, suppression

des traitements non indispensables, ajustement thérapeutique de lamaladie de Parkinson…

- Si insuffisant: traitement neuroleptique avec la plus grande prudence Clozapine +++

- Inhibiteurs de l'acétylcholinestérase dans la démence associée à lamaladie de Parkinson

Que peut-on prescrire ?En théorie, les inhibiteurs de la monoamine oxydase représentent un traitement pharmacologiqueintéressant des états dépressifs, compte tenu de leur effet d’inhibition du catabolisme descatécholamines, en particulier de la dopamine.La ségéline (IMAO B) a été proposée en premièreintention même si son efficacité reste toujours discutée. La moclobémide (IMAO A) a une actionanti-dépressive, mais son relatif mauvais rapport bénéfice/risque n’a pas conduit à une utilisationrégulière. Les IRS sont actuellement considérés comme le traitement de choix, même s’ilsaggravent le syndrome parkinsonien dans de rares cas. Ils ne devront pas être associés à la ségéline(Déprényl, Otrasel) en raison d’un risque, même s’il n’est pas fréquent, de syndromesérotoninergique, responsable de troubles comportementaux (confusion, agitation, état maniaque),moteurs (tremblements, myoclonies) et généraux (fièvre, sueurs, diarrhées, nausées). Lamiansérine peut être une alternative intéressante.La prise en charge des de l’anxiété repose avant tout sur le traitement optimal des troubles moteurset des fluctuations. Le traitement pharmacologique repose sur des benzodiazépines à durée de viecourte (Alprazolam, Lorazépam, Oxazépam) ou à des antidépresseurs de la classe des IRS.Si les troubles du comportement persistent et les états psychotiques restent invalidants malgré unestratégie de prise en charge bien conduite (prise en charge de tout problème médical contingent,suppression des traitements non indispensables, ajustement des traitements antiparkinsoniens), onsera amené à prescrire un traitement antipsychotique. Le seul neuroleptique qui a montré unintérêt significatif par son efficacité et un bon rapport bénéfice risque est la clozapine, même si laprescription et la surveillance sont contraignantes du fait d’un risque d’agranulocytose (1% despatients). Cette molécule dispose d’une AMM dans cette indication.

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POLLAK P & alClozapine in drug induced psychosis in Parkinson'sdisease: a randomised, placebo controlled study withopen follow upJ Neurol Neurosurg Psychiatry. 2004

Amélioration des troublesdans le temps (jours)

Âge moyen des 2groupes: 72 ans

Période 1: screeningPériode 2: adaptationposologies (4 sem.)Période 3: 12 sem.Période 4: 3 mois

Plusieurs études randomisées, dont celle publiée par POLLAK en 2004, ontclairement montré l’efficacité sur le long terme de la molécule sansaggravation du syndrome parkinsonien à des posologies quotidiennesinférieures à 50 mg. L'arrêt du traitement s’accompagnent parfois d’unereprise de la symptomatologie, notamment hallucinatoire. La moléculeaméliorerait le tremblement, la qualité du sommeil et parfois les dyskinésies.Une action favorable des inhibiteurs de l’acétylcholinestérase a été suggéréepar des études ouvertes et par l’essai contrôlé de la rivastigmine sur leshallucinations. Si nous sommes confrontés à un état démentiel associé, il estsouhaitable de tenter cette molécule avant de démarrer un traitementantipsychotique, d’autant qu’elle a l’AMM dans les « démences associées àla maladie de Parkinson »L’apathie, qui survient en cas de carence dopaminergique relative, estinitialement sensible à la majoration des traitements dopaminergiques. Dansla situation où elle relève de lésions non dopaminergiques avec undysfonctionnement d’un ou plusieurs circuits reliant le cortex préfrontal auxganglions de la base, les traitements médicaux ont un impact limité. Destraitements inhibiteurs de l’acétylcholinestérase peuvent être discutés, maissurtout, il ne faut pas méconnaître un état dépressif.

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Les troubles cognitifs

Éléments communs: corps de Lewy, déplétion cholinergique

Éléments distinctifs:Démence associée à la MP: symptômes moteurs au 1er planDémence avec corps de Lewy: symptômes démentiels au 1er plan

- Syndrome parkinsonien:moins caractéristique, retrouvé chez 80%des patients, moins dopa-sensible- Troubles cognitifs précoces avec un déclinplus rapide, pouvant précéder les troublesmoteurs. Fluctuations de l’état cognitif +++- Troubles visuo-spatiaux +++- Hallucinations +++- Intolérance aux neuroleptiques +++

- Histoire typique de maladie de Parkinson. synd. extrapyramidal asymétrique…. bonne réponse à la lévodopa- Survenue de la démence après plusieursannées d’évolution (> 2 ans)- Troubles visuo-spatiaux +- Hallucinations ++- Intolérance aux neuroleptiques ++

Maladie avec corps de LewyMaladie de Parkinson avecdémence

Nous nous attardons pas sur les troubles cognitifs non démentiels,souvent présents dès le début de la maladie, qui résultent surtout dedifficultés de contrôle des ressources attentionnelles et affectentparticulièrement les fonctions exécutives.L’évolution vers un état démentiel est fréquente (20 à 40 % dans lesenquêtes transversales). Les études longitudinales de cohorte sontinquiétantes puisque l’on estime qu’à 8 ans de suivi, 78 % desparkinsoniens en seront affectés. Le tableau clinique de la démenceparkinsonienne est très proche de celui de la maladie avec corps deLewy. Leur distinction repose sur la chronologie de survenue destroubles cognitifs par rapport aux troubles moteurs, critère assezarbitraire sachant que les parentés cliniques, neuropsychologiques,neurochimiques et neuropathologiques entre les deux pathologiessont telles que l’on a tendance à évoquer un continuum.

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Bénéfices de la Rivastigmine dans "la démence associéeà la maladie de Parkinson"

Étude internationale et multicentrique (EXPRESS)68 centres 541 patients N Engl J Med. 2004 351:2509-2518, 2547-2549

Source Dr Sellal 2005

Rivastigmine vs placebo

À 6 mois:

- baisse significative des troubles du comportement (NPI-10)

- diminution des hallucinations

- absence d'aggravation des signes parkinsoniens

Dans les deux situations, les systèmes cholinergiques sont encoreplus altérés que dans la maladie d’Alzheimer, raison pour laquellel’utilisation des inhibiteurs de l’acétylcholinestérase est justifiée.Vu la sensibilité très importante aux neuroleptiques, il convientd’être encore plus prudent dans leur utilisation. Seule la clozapineest à envisager pour corriger les troubles hallucinatoires et délirantsquand la réponse aux inhibiteurs de l’acétylcholinestérase estinsuffisante.

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Conclusions

Les troubles psychiques et cognitifs sont fréquents

Retentissement sur la qualité de vie et l'évolution de lamaladie

Approche multidisciplinaire,sans oublier les aidants

Prévention +++

Si nécessité d'un traitement pharmacologique:- neuroleptiques: clozapine +++- antidépresseurs de première intention: IRS- état démentiel: inhibiteurs de l'acétylcholinestérase

Conclusions :Les troubles psychiques et cognitifs sont fréquents dans la maladie de Parkinson dusujet âgé.Ils compliquent la prise en charge des malades, ont un grand retentissementsur leur qualité de vie ainsi que celle de leur entourage et grèvent le pronostic de lamaladie. Le traitement de ces troubles est difficile et nécessite une approchemultidisciplinaire. Le premier des traitements des troubles comportementaux est « laprévention ». En effet, il convient d’identifier et de prendre en charge un éventuelfacteur de susceptibilité sous-jacent (iatrogénie, co-morbidité….).Parmi les psychotropes, les neuroleptiques sont les plus délicats à manipuler du fait deleur forte affinité pour les récepteurs dopaminergiques. La clozapine, à une posologierelativement faible, est le seul neuroleptique à avoir une efficacité antipsychotiquesans aggravation du syndrome parkinsonien, avec toutefois l’inconvénient d’uneprescription très encadrée, voire contraignante.Les inhibiteurs de la recapture de la sérotonine sont les antidépresseurs à utiliser enpremière intention.Dans les états démentiels associés à la maladie de Parkinson, les inhibiteurs del’acétylcholinestérase sont à tenter en première intention dans la prise en charge decertains troubles psychotiques.Chaque prescription de psychotropes doit être réfléchie, ciblée, pesée en terme debénéfice - risque, de posologie, de durée de traitement… Elle n’est pas une finalité ensoi et doit toujours s’inscrire dans un projet de soins au sens large du terme.

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