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SÉANCE DU 4 JUIN 19-11 187 antiquité on a vu ce portique à cette place dans le cimetière 1 , Nous en sommes donc réduits aux hypothèses. Quoi qu'il en soit, je crois qu'il n'était pas inutile de rapprocher ces trois curieux calvaires de Genay, Courcelles-lès-Semur et Asnières. Ils oiïrent tous trois la même particularité étrange d'avoir leurs croix élevées sur des arcades ou des baies. Un lien de similitude doit certainement exister dès lors entre eux et la même raison a dli présider à leur édification. Dans l'état actuel de nos connaissances, nous ne pouvons que former des suppositions sur l'origine et la destination de ces trois monuments, que je crois, chacun en son genre, absolu- ment uniques en Côte-d'Or et peut-être en France. *** LE DOMAINE COMMUNAL DE DIJON AU DÉBUT DU XIX e SIECLE LA RÉGION DE CHAMPMAILLOT (par M. R. Gauchat, associé) La rente de Champinaillot ou de Chamaillot selon l'orthographe Utilisée au xviii 0 siècle était une exploitation agricole plus importante qu'on ne se l'imagine aujourd'hui. D'après un plan, daté du 28 juillet 1728, dressé par André FleUry, arpenteur-géomètre du roi, à la requête de dame Jeanne Gaillard Rébettes et de messire Garron, seigneur de Chatenay, ce domaine comptait près de 210 journaux de terres, soit environ 72 hectares. Limité au nord par la rente de la Motte Saint-Médard et le chemin de Mont- musard, il atteignait le cours de Suzon, s'étendait même au delà jusqu'aux chemins couverts des remparts, c'est-à-dire jusqu'au boulevard Carnot actuel. Au midi, le domaine touchait aux Petites Roches, comprenait le clos actuel de l'Argentière et se terminait vers l'est à l'emplacement du stand du Bocage. Ce territoire était traversé de l'ouest à l'est par plusieurs chemins. D'abord le chemin de la Molle qui devenait plus loin le chemin de Cromois. En 1728, ce chemin, qui partait jadis de la Porte Chanoine (fermée en 1513 et murée en 1557), se raccordait à la route qui ceinturait les remparts, à l'extrémité actuelle de la rue Jean-Baptiste-Baudin ; il reprenait sa direction naturelle à la hauteur de la rue Paul-Cabet et franchissait le Suzon sur un petit pont qui fut reconstruit et élargi en 1747. 11 reprit son tracé primitif et toute son importance lors de la réouverture, en 1747, de la porte dite alors Porte Bourbon. Venait ensuite le chemin inscrit au plan Fleury sous le nom de chemin des Remparts à Chamaillot. C'était un raccourci, sans doute assez fréquenté, qui s'identifie avec la petite rue Voltaire actuelle et (igure plus à l'est, au cadastre, comme sentier. 11 franchissait le Suzon sur une « planchotte ». Le troisième chemin, celui de Mirande, prenait naissance également sur la route de ceinture. La porte Neuve, fermée en 1513, ne fut ouverte que vers 1850, et c'est alors seulement qu'il se raccorda à la rue Chancelier-de-1'Hôpital actuelle. Il franchissait le Suzon sur le pont Gaulpin qui était déjà fort ancien, puisque l'on trouve trace aux Archives municipales 2 d'une réparation effectuée en 1512. Au midi, un quatrième chemin longeait les terres de Champmaillot. Il fran- chissait le Suzon à gué et empruntait une partie du chemin de l'Argentière tel qu'il figure au cadastre ; mais, avant d'arriver à la ligne actuelle du chemin de fer, il obliquait vers le sud-est, passait au nord des Petites Roches, remontait 1. La manie de certains visiteurs de graver leur nom sur les monuments n'est pas récente. Sur l'arcade d'Asnicres, j'ai pu lire l'inscription suivante : MICHEL PAUFFAHD. 1770. 2. .1 123.

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SÉANCE DU 4 JUIN 19-11 187

antiquité on a vu ce portique à cette place dans le cimetière 1, Nous en sommesdonc réduits aux hypothèses.

Quoi qu'il en soit, je crois qu'il n'était pas inutile de rapprocher ces troiscurieux calvaires de Genay, Courcelles-lès-Semur et Asnières. Ils oiïrent toustrois la même particularité étrange d'avoir leurs croix élevées sur des arcadesou des baies. Un lien de similitude doit certainement exister dès lors entre euxet la même raison a dli présider à leur édification. Dans l'état actuel de nosconnaissances, nous ne pouvons que former des suppositions sur l'origine etla destination de ces trois monuments, que je crois, chacun en son genre, absolu-ment uniques en Côte-d'Or et peut-être en France.

* * *

LE DOMAINE COMMUNAL DE DIJONAU DÉBUT DU XIXe SIECLE

LA RÉGION DE CHAMPMAILLOT

(par M. R. Gauchat, associé)

La rente de Champinaillot ou de Chamaillot selon l'orthographe Utiliséeau xviii0 siècle était une exploitation agricole plus importante qu'on ne sel'imagine aujourd'hui. D'après un plan, daté du 28 juillet 1728, dressé par AndréFleUry, arpenteur-géomètre du roi, à la requête de dame Jeanne GaillardRébettes et de messire Garron, seigneur de Chatenay, ce domaine comptaitprès de 210 journaux de terres, soit environ 72 hectares.

Limité au nord par la rente de la Motte Saint-Médard et le chemin de Mont-musard, il atteignait le cours de Suzon, s'étendait même au delà jusqu'auxchemins couverts des remparts, c'est-à-dire jusqu'au boulevard Carnot actuel.Au midi, le domaine touchait aux Petites Roches, comprenait le clos actuelde l'Argentière et se terminait vers l'est à l'emplacement du stand du Bocage.

Ce territoire était traversé de l'ouest à l'est par plusieurs chemins. D'abordle chemin de la Molle qui devenait plus loin le chemin de Cromois. En 1728, cechemin, qui partait jadis de la Porte Chanoine (fermée en 1513 et murée en 1557),se raccordait à la route qui ceinturait les remparts, à l'extrémité actuelle dela rue Jean-Baptiste-Baudin ; il reprenait sa direction naturelle à la hauteurde la rue Paul-Cabet et franchissait le Suzon sur un petit pont qui fut reconstruitet élargi en 1747. 11 reprit son tracé primitif et toute son importance lors dela réouverture, en 1747, de la porte dite alors Porte Bourbon.

Venait ensuite le chemin inscrit au plan Fleury sous le nom de chemin desRemparts à Chamaillot. C'était un raccourci, sans doute assez fréquenté, quis'identifie avec la petite rue Voltaire actuelle et (igure plus à l'est, au cadastre,comme sentier. 11 franchissait le Suzon sur une « planchotte ».

Le troisième chemin, celui de Mirande, prenait naissance également sur laroute de ceinture. La porte Neuve, fermée en 1513, ne fut ouverte que vers1850, et c'est alors seulement qu'il se raccorda à la rue Chancelier-de-1'Hôpitalactuelle. Il franchissait le Suzon sur le pont Gaulpin qui était déjà fort ancien,puisque l'on trouve trace aux Archives municipales 2 d'une réparation effectuéeen 1512.

Au midi, un quatrième chemin longeait les terres de Champmaillot. Il fran-chissait le Suzon à gué et empruntait une partie du chemin de l'Argentièretel qu'il figure au cadastre ; mais, avant d'arriver à la ligne actuelle du cheminde fer, il obliquait vers le sud-est, passait au nord des Petites Roches, remontait

1. La manie de certains visiteurs de graver leur nom sur les monumentsn'est pas récente. Sur l'arcade d'Asnicres, j'ai pu lire l'inscription suivante :MICHEL PAUFFAHD. 1770.

2. .1 123.

188 SÉANCE DIT 4 JUIN 1941

au nord (rue Cliarles-Royer actuelle), puis tournait vers l'est (chemin des Plan-chettes, après quoi, il se dirigeait sur Miramle. 11 porte au plan Fleury le nomde chemin de Clievigny par les Petites Roches. La portion allant de l'ancienneraffinerie au Creux d'Enfer n'existait pas encore.

Ce plan Fleury s'accorde assez bien avec le cadastre ; il met au point la topo-graphie de cette région sommairement indiquée au plan Touvin de Rochefort.Toutefois pour l'étude des communaux de Dijon, il est négatif. La ville possé-dait, en elïet, englobés dans les terres de Champmaillot, deux points d'eau :le Creux d'Enfer et la Fontaine des Suisses. Le plan Fleury, tout en les indiquant,n'en délimite pas les abords. Il est probable que ce plan, levé à titre privé,n'avait pas à être trop précis sur ce î-ujet, car les dégagements naturels de cessources étaient l'objet d'usurpations continuelles de la part des propriétairesvoisins, dont celui de Champmaillot.

Le Creux d'Enfer

Vers le milieu du xvme siècle, la plate-forme du Creux d'Enfer couvraitprès d'un hectare, dont le bassin occupait encore le cinquième. Ses limites nordet sud étaient constituées par les chemins ; celle de l'est était naturelle : c'étaitla butte au pied de laquelle était la source ; celle de l'ouest, conventionnelle,semble dater de 1755-1760.

Le 16 juin 1769, la ville accensa une portion de 18 ares 40 centiares au sieurJean-Baptiste Viennois, professeur de langue française. C'est là l'origine de lapropriétée située au sud de la promenade (elle s'agrandit en 1906 d'une nouvelleacquisition sur la ville à l'ouest).

En 1823, le bassin fut curé et la source captée dans un petit monument derocaille, que l'on voyait encore avant que le bassin ne soit comblé définitivementen 1920. Le Creux d'Enfer appartient toujours au domaine communal, mais lesmaisons qui montent à l'assaut des pentes ne permettent plus d'admirer l'agréa-ble panorama de Dijon au coucher du soleil qui enchantait tant le professeurViennois au temps de Louis XV.

La fontaine des Suisses et le Moulin à vent

L'emplacement de cette source dont les eaux avaient été canalisées dansdes conduits de bois jusqu'à la place Saint-Michel en 1534 (délibération de laChambre de ville du 21 août), fut « arpenté » pour la première fois en 1559, àl'occasion des réparations à faire à la fontaine (délib. de la Ch. de ville du 24octobre 1559).

La source captée était close, ainsi que le montre une délibération du 26 sep-tembre 1586 : les clefs, en effet, furent alors prêtées aux frères Mallard, maladesde la peste en leur rente de la Motte.

En 1591, les eaux n'arrivaient plus jusqu'à Dijon. C'est en 1619 seulementque s'achevèrent les travaux qui les ramenèrent place Saint-Michel.

En 1624, Philibert Berbis, conseiller au Parlement, « ayant volonté de bâtirsa maison en Champmaillot » s'aperçut que l'eau de la fontaine lui serait fortutile et adressa une requête à la ville afin d'obtenir le droit de prendre de l'eau.Dans sa séance du 7 juin, la Chambre de ville lui accorda la cinquième par-tie de l'eau qui s'écoulait. Puis, par une nouvelle délibération du 28 novembre1645, elle accorda au conseiller Berbis, la propriété perpétuelle de la source.Mais, en ce monde, ce qu'on veut définitif n'est bien souvent que provisoire :dès le 13 avril 1649, une commission était nommée pour vérifier les entreprisesdu conseiller Berbis sur la fontaine. Pourtant, pendant un siècle, la ville n'osarevenir sur sa généreuse concession et laissa les choses en état. Le 18 avril 1753,le sieur Jacques Coindé, procureur à la Chambre des comptes, qui possédaitalors Champmaillot, vendit au sieur Laureau une partie du domaine, y comprisles bâtiments et la source.

Alertée aussitôt, la Chambre de ville prolita de l'occasion. Dès le 28 avril,elle nomma une commission à l'elïet de constater les usurpations commises surles terrains de la ville près de Champmaillot. Dans sa séance du 20 juin 1753,

SÉANCE nt; '1 JUIN 1941 189

elle ordonna la restitution du terrain usurpé et de la source : elle accorda, commejadis, la cinquième partie de l'eau au propriétaire de Champmaillot.

Aussi, lorsque Laureau revendit son domaine aux dames Jacobines, l'actede vente du 30 juillet 1700 spécifie « ...à l'exception d'une pièce de terre enfriche où est la fontaine de Champmaillot, mentionnée dans la vente du 18 avril1753, laquelle pièce de terre et fontaine se sont postérieurement à la dite ventetrouvées appartenir à la ville de Dijon qui s'en est emparée comme lui appar-tenant... ».

Le domaine fut revendu le 1er octobre 1791 par les créanciers des dames Jaco-bines à Henry Maulbon d'Arbaumont. Il est spécifié dans cet acte que le canaltraversant le verger reçoit les eaux de la fontaine, qui s'écoulent dans le réservoirsitué dans le jardin (il s'agit de la mare figurée au plan cadastral).

La disposition des lieux telle qu'elle apparaît au cadastre date de 1812, etrésulte des travaux entrepris pour régulariser le débit de la source. La fontaineen contrebas était limitée au nord par le mur de Champmaillot, au midi parune haie vive ; le canal d'écoulement était bordé d'arbres. Elle fut encore réparéeen 1847. On y accédait par le bas au moyen d'un sentier de pied qui prenaitroute de Mirande près de l'entrée de Champmaillot. Ce sentier disparut et futcédé par acte du 18 juin 1859 à l'orphelinat des demoiselles Pérard pour êtreincorporé au clos situé au sud (délil). du Cons. munie, des 24 février et 10 mai1859).

Signalons en passant qu'à cette époque Champmaillot abritait l'hospice deNazareth fondé par des religieuses pour y recueillir les enfants assistés.

Les terrains situés à l'est, sur lesquels s'élève aujourd'hui le quartier de laFontaine des Suisses, furent lotis par la Société Foncière vers 1885 et le quartierse peuplant, la fontaine devint un dépôt de détritus ; tant et si bien que la villecéda gratuitement la source et ses abords aux Hospices civils de Dijon quil'incorporèrent à l'enclos de l'asile des vieillards (délib. du Cons. munie, du5 octobre 1909).

Au sud-est de la fontaine et au sommet de la butte qui la surplombait, s'éle-vait, avant la Révolution, un moulin à vent qui appartenait à la ville. Un bailà cens du 18 mars 1788 consenti au sieur Pothier, meunier de Chêvre-Morte,est ainsi libellé « ...un terrain vague et inculte sur lequel est élevé un moulinà vent qui tombe en ruine, appartenant à la ville dans son territoire lieu-dit enCreux d'Enfer, ...à charge par ledit Pothier de mettre et entretenir le dit moulinen bon état et propre en tous temps à faire de grains bonne farine ».

En 1797, le citoyen Pothier, s'autorisant de la législation nouvelle revenditmoyennant 10.000 livres, par acte du 29 vendémiaire an IV, à Jean Patron,vigneron, le moulin à vent, son emplacement (380 m2) et la pièce de terredescendant au couchant, bornée au nord par le ruisseau de la Fontaine et aumidi par le journal déjà cédé par le vendeur à Laurent Clémencet le 28 prairialan1 IV. Ces deux pièces de terre s'identifient à la parcelle cadastrale n° 15 (sec-tion K) qui après avoir appartenu vers 1815 à un sieur Cagnet devint ensuitele clos des demoiselles Pérard dont j'ai déjà parlé plus haut.

Naturellement, au cours des recherches ordonnées par la municipalité concer- ,nant les communaux usurpés, l'affaire eut un rebondissement. Patron fut menacéde poursuites. Mais dans l'après-midi du 29 mai 1807, un violent orage renversacomplètement le vieux moulin et ses grandes ailes disparurent de l'horizondijonnais, couchées sur un tas de décombres (rapport du voyer Duleu du 30 mai1807). Alors la ville désira en terminer rapidement et une transaction intervintle 16 octobre 1807. Le sieur Patron versa une indemnité de 54 francs et la villeabandonna ses droits.

Les Petites Roches

Dans cette même région de Champmaillot et à la lisière sud de ce domainela ville possédait une autre « communal » : les Petites Roches. Il s'agissait àl'époque de deux excavations au fond desquelles dormaient deux petites mares,et qui étaient séparées par la chaussée du chemin venant du faubourg Saint-Pierre et montant au Creux d'Enfer.

190 SÉANCK DU 4 JUIN 1941

II existe aux Archives municipales 1 un plan des Petites Roches, levé parBoiteux, en vertu d'une délibération du Conseil du 15 pluviôse et d'un arrêtédu 30 floréal an II.

Une partie du « communal » y est indiqué comme incorporée dans l'enclosdu citoyen Champy. Cet enclos provenait des terres de Champmaillot. —Nous avons dit plus haut que ce domaine avait été démembré par la procureurCoindé. A part la Rente proprement dite, vendue au sieur I.aureau, il s'étaitdessaisi de la pièce des Grands Thculey au profit de Claude Forey. Cette pièce,dont le bornage du 22 novembre 1784 accuse 15 journaux trois quarts, estidentifiable à la parcelle cadastrale n° 3 (section K). Kl le fut inscrite au cadastreau nom d'un sieur Marchand.

Poursuivant son morcellement, Coindé avait encore vendu à Varenne deBéost, le 12 février 1756, la pièce de terre appelée l'Argentière. Cette pièce,le 16 septembre 1768, passa aux mains de M. de Castella, qui la renvendit le3 février à M. Champy. — A l'époque du cadastre, elle était propriété de M. Mou-genet de Renoncourt.

Le chemin de l'Argentière, créé sans doute pour desservir la nouvelle pro-priété* s'embranchait sur l'ancien chemin dit de Chevigny, avant la ligneactuelle du chemin de fer ; il forma, pour atteindre le Creux d'Enfer, un raccourciqui prit bientôt de l'importance. C'est pourquoi l'un des propriétaires de l'Ar-gentière, constatant l'abandon de l'ancien chemin en profita pour anticiperet arrondir son domaine aux dépens du « communal », ainsi que l'indique leplan Boiteux. L'usurpation étant couverte par la prescription, aucune protes-tation ne s'éleva.

Toute la partie du communal cadastrée depuis à la section M et la portioncorrespondante aux parcelles 15, 16 et 17 de la section L furent vendues le 29septembre 1792 (4 journaux) à François Meigné, serrurier à Dijon. Trois ansplus tard, le citoyen Meigné, devenu directeur du magasin des canons à Paris,revendit son terrain au citoyen Claude Gauthier. Au cadastre, ce terrain figuraau nom d'un sieur Regneau. La mare était alors comblée.

Le surplus, environ 2.000 mètres carrés, qui avait été relâché à la communeen vertu d'une condamnation prononcée le 28 mars 1772, contre les défricheurs,était cultivé en vigne à bail par le sieur Daujon (bail du 13 sept. 1803). Cettevigne fut vendue aux enchères le 25 mai 1810 pour une surface de 34 ares 28« y compris la mare et les inégalités de terrain ». Il est permis de supposer queMeigné n'ayant pas pris possession de tout son terrain, les parcelles 15 et 17(section L) furent revendues une seconde fois, ce qui ne peut surprendre beau-coup, étant donné l'ignorance de la ville à l'égard de ses biens ruraux. Un puits,visible encore ces dernières années, avait remplacé la deuxième mare comblée.

Notons en passant que le 28 août 1787 M. Champy ayant vendu à l'Étatl'emplacement où s'est installé depuis la Raffinerie, le vieux chemin de Chevignydevenu simple sentier, fut rejeté directement sur les allées de la Retraite.L'État revendit la Raffinerie, alors magasin à poudre à M. Pitrot le 14 novembre1833. Le sentier de pied qui traversait les Petites Roches et aboutissait auchemin des Péjoces existe encore dans sa partie orientale.

Les communaux dont il vient d'être question faisaient partie du patrimoinede la commune depuis son affranchissement. Il me reste à parler de deux autrespropriétés communales qui, elles, furent acquises sur des domaines particuliers.

La Paginer de la Molle

En 1748, le président Fyot de la Marche désirant compléter les aménagementsdu parc de Montmusard offrit à la ville en échange du pâquier de la Lochère(où il possédait déjà lui-même 3 journaux) un pâquier de 14 journaux, constituépour la plus grande portion du domaine de Champmaillot, par lui acquise le

1. Série N1, fonds mod.

SÉANCE DU 4 JUIN 1941 191

6 août 1748, et pour le reste (la partie occidentale) de la rente de la Motte Saint-Médard, englobée à une date antérieure dans son propre domaine. Cet échangefut accepté par la chambre du Conseil le 21 août 1748 et enregistré le 20 avril1749.

Ce pâquier, où l'écoulement des eaux de la source située à l'est, en borduredu chemin de Cromois, formait une mare, fut conservé par la ville pendant30 ans ; puis elle en céda une partie (12 journaux et 28 perches) par bail à censdu 12 juin 1778 à Guyton de Morveau, avocat général et à Jacques Champy,commissaire des poudres et salpêtres qui y établirent une nitrière artificielle.— Le reste du pâquier (50 ares environ), formant une langue de terre le longdu chemin de Cromois, lui loué par la ville à différentes reprises. Une pointefut incorporée dans l'enclos des Petites Sœurs des Pauvres et le reste formeaujourd'hui un large trottoir planté d'arbres en bordure du boulevard deStrasbourg.

Les Allées de la Retraite

Les Allées de la Retraite étaient considérées comme promenade de la villeau même titre que le cours du Parc ; elles figurent sur tous les inventaires despropriétés privées de la ville datant de la lin du XVIIIC siècle. Leur classement,sous le nom de boulevard Voltaire, dans la voirie urbaine ne date que de 1885(dél. du Cons. munie, du 21 juillet).

En 1750, le domaine de Montmusard faisait l'admiration de tous les Dijon-nais. Le président Fyot de la Marche, alors au comble des honneurs, venaitpourtant d'essuyer une défaite dans ses tractations avec la ville au sujet del'érection de Montmusard en fief. Ce n'est pas sans inquiétude ni dommaged'ailleurs que les municipalités d'alors tenaient tête à un personnage aussipuissant. A cette époque où le désir de créer des « esplanades » hantait les collec-tivités aussi bien que les princes, l'intendant de la province, Joly de Fleury,pourrait bien être l'inspirateur des magistrats municipaux qui prirent l'initiativede créer cette promenade. Ce faisant, la ville trouva sans doute dans ce prolon-gement des allées de Montmusard une occasion d'atténuer le ressentiment deM. de la Marche et de lui témoigner son dévouement.

Il existait alors une large avenue qui allait de la route de Gray (avenueMaréchal-Lyautey actuelle) au chemin de Cromois. Sur cette allée, qui cô-toyait le Suzon, venaient se brancher d'autres allées secondaires qui menaientà Montmusard (voir plan de Dijon par Mikel, 1759). C'était cette avenue qu'ils'agissait de prolonger jusqu'à la route d'Auxonne, face à la maison de retraitedes Pères Jésuites. Les terrains nécessaires à son établissement furent acquissur Î7 propriétaires et payés 2.1)10 livres 5 sols et 6 deniers. La superiieie acquiseétait de 11 journaux deux tiers et 26 perches (4 h. 02 a. 45 cent.). Le procès-verbal d'arpentage est daté du 7 mars 1754, celui d'estimation du 6 mai. Cesdeux pièces furent approuvées par la Chambre de ville le 15 mai 1754 1 .

Parmi les parcelles coupées par les allées, l'une d'entre elles, comprise entrele petit chemin des remparts et le chemin de Mirande, fut acquise sur Laureau(de Champmaillot). Une autre appartenait au sieur Coindé, entre le chemin deMirande et celui dit de Chevigny. 11 est à remarquer d'ailleurs que les troiscinquièmes, de. l'avenue sont situés dans l'ancien territoire du domaine deChampmaillot. Le report des superficies acquises et des confins indiqués dansle procès-verbal d'arpentage, permet de reconstituer partiellement le tracéd'une ancienne desserte aujourd'hui disparue. Ce chemin figure sur la cartejointe à cette étude.

On peut imaginer facilement l'aspect des allées. Elles comprenaient quatrerangées d'arbres ; les fossés latéraux avaient six pieds d'ouverture et quatrede profondeur (marché passé le 12 avril 1755) ; au milieu, la levée ou chausséeavait dix-huit pieds et demi de largeur (marché passé le 5 janvier 1756).

Montmusard, dont la splendeur allait s'éteindre, fut acquis en 1772 par

1. Arch. munie, K 127.

192 SEA.NCT; DU 2 JUILLET 1941

Jacques Dumay qui manifesta aussitôt l'intention de mettre toutes les terres enculture. Les Dijonnais considéraient alors les allées de Montimisard comme unepromenade publique au même titre que les allées de la Retraite ; d'ailleurs leprésident de la Marche leur en avait permis l'accès perpétuel lors de la cessiondu pàquier de la Lochôre.

Prévenue aussitôt, la chambre du Conseil se réunit le 20 novembre 17715et : « ...observant que le sieur Demay, acquéreur de iVIontmusard, se disposeà faire arracher les arbres de la promenade que M. de la Marche laissait aupublic et à mettre en culture le terrain emplanté, ce qui rendrait inutile la dé-pense que la ville a faite en continuant cette promenade jusqu'à la maison dela Retraite, s'oppose à cette destruction et le fait signifier à l'intéressé ».

M. Demay répliqua en Invoquant de prétendus droits sur les allées de laRetraite (délib. de la Ch. du Conseil des 16 et 20 avril 1771). Enfin la villevoulant éviter un procès, une transaction amiable intervint le 1(1 juillet 1775.Elle abandonnait ses droits sur les allées secondaires et toutes dépendancesextérieures de Montmusard ; elle versait en outre 1.150 livres. Mais Demaylaissait à la ville l'entière jouissance de la grande avenue. Celle-ci, en pleinevégétation, semblait donc sauvée. Ce ne fut pas pour longtemps. La Révolutionsurvint et, le 21 septembre 1793, la partie située entre l'Étoile (place du30-Octobre actuelle) et la route de Gray, créée par le président de la Marche,était vendue au citoyen Gaudriot, maître de poste. La superlicie était de sixjournaux un tiers. Au cadastre, elle ne ligure déjà plus et se trouve incorporéedans la parcelle 92, section G. Seule une allée secondaire demeure visible,simple chemin de desserte, sur le plan cadastral. A noter que ces parcelles92 et 93 n'en formaient jadis qu'une seule (dite pièce Bernardon) et avait étéacquise par voie d'échange sur le domaine de ChampmaiIJot par le « PrésidentBosjan » (plan Fleury).

Les allées de la Retraite devenues cours Ignace furent pourtant et heureuse-ment conservées (au cadastre elles figurent comme promenade pour 4 hect.37 a., section Q, 224 bis et 267). Sans doute la plantation disparut peu à peu ;sans doute aussi, on y ouvrit des sablières. Mais à la fin du Second Empire,la plantation fut refaite moyennant une dépense de 1.115 fr. 30 (délib. duCons. munie, des 24 sept. 1866 et 19 août 1867) ; les fossés lurent comblés avecles pierres provenant de la démolition des remparts (délib. du Cons. munie,du 8 juin 1867). Malgré tout, et en dépit de leurs 72 années d'existence, les arbresont bien mauvaise mine. 11 est vrai que l'on peut espérer que la sollicitudemunicipale, qui dota, il y a trois ans, le boulevard Voltaire d'un éclairagemoderne, lui accordera bientôt une nouvelle et verte parure pour décorer lanudité de son ample perspective.

Séance du 2 juillet 1941

PRÉSIDENCE DE M. LE CHANOINE M. CHAUME, président

Sont élus membre non résidant (honoris causa) : M. Jules Vendryes,membre de l'Institut, doyen de la Sorbonne, et associé : M. GustaveQuennet, à Dijon, vice-président de la Société de tir « Les chevaliersdijonnais » et vice-président du Comité des sports de la ville de Dijon.

Est approuvé le vœu émis par l'Académie des Sciences, Arts etBelles-Lettres de Dijon le 18 juin dernier touchant l'inscription surl'inventaire supplémentaire des monuments historiques des façadeset des toitures des maisons Vernier, 2, place des Ducs-de-Bourgogne,et Maillard, 5 et 7, place Ernest-Renan, à Dijon.

LE DOMAINE COMMUNALDE DIJON

AU DÉBUT DU m * SIECLE

LA REGION DECHAMPMAILLOT

/ . il LA RETRAITE

R Gauchat del.