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244 PROCÈS-VERBAUX DES SÉANCES ANNEXE TOPOGRAPHIE ANCIENNE DE LA BANLIEUE DIJONNAISE (RÉGION SUD) (par M. le chanoine M. Chaume, membre résidant) « Les matériaux mis en oeuvre sont extraits, pour la plupart, des Visites de finages et des Reconnaissances de bornes conservées aux Archives municipales de Dijon, série K. Mais nous devons également beaucoup aux anciens actes notariés et aux fonds ecclésiastiques des Archives départementales : tout récemment M. E. Nolin, chef de bureau aux Archives, nous a signalé l'existence d'anciens plans relatifs à l'établissement du canal de Bourgogne, grâce auxquels nous avons pu préciser certaines données qui, jusqu'alors, nous échappaient complètement. » La région étudiée est l'une de celles qui ont été le plus complète- ment bouleversées depuis deux siècles, et c'est là ce qui fait que la restitution de la topographie ancienne soit particulièrement délicate. Il suffit, pour s'en faire une idée, de rappeler ces événements consi- dérables que furent l'établissement de la route de Beaune (1728 et suiv.), le tracé des lignes de chemin de ter à destination de Lyon (18-12- 1845), de Saint-Amour (1878-1882) et d'Is-sur-Tillc (1869-1872),- l'organisation des voies de triage et du dépôt des machines (1882 et siiiv.), enfin l'installation des subsistances militaires et de l'arsenal (1877-1880). » Trois points importants permettent cependant de raccorder les témoignages et de tenter une restitution de l'état primitif de cette partie de la banlieue. Ces trois points sont, à l'extrême nord, le Pont aux Chèvres, aujourd'hui absorbé dans la place du Premier-Mai ; à l'ouest, la Croix du Juise (ou du Jugement), dite plus tard, par alté- ration, croix de Guise, et qui se trouvait le long du grand chemin de Dijon à Marsannay, aujourd'hui rue de Chenôve, à l'endroit où cette rue est coupée par la rue des Peyvet ; à l'est, le Gué de l'Ouche, dont l'emplacement précis demeure incertain, mais qui devait avoisiner le Moulin Bernard, à l'endroit où les deux bras de l'Ouche sont le. plus rapprochés, entre la Verrerie et le Battoir (aujourd'hui fabrique de moutarde). Un quatrième point, non moins notable, mais dont l'emplacement se trouve en dehors des limites du territoire actuel de Dijon, est constitué par la ferme de la Noue. » Ces repères dûment établis, voici comment on peut se représenter, pour les xiv c et xv° siècles, la topographie de cette région : » 1° Du pont aux Chèvres, à la Croix du Juise, le grand chemin venant de Dijon. Ce chemin se trouvait à l'ouest de l'avenue Jean-

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244 PROCÈS-VERBAUX DES SÉANCES

ANNEXE

TOPOGRAPHIE ANCIENNEDE LA BANLIEUE DIJONNAISE

(RÉGION SUD)

(par M. le chanoine M. Chaume, membre résidant)

« Les matériaux mis en œuvre sont extraits, pour la plupart, desVisites de finages et des Reconnaissances de bornes conservées auxArchives municipales de Dijon, série K. Mais nous devons égalementbeaucoup aux anciens actes notariés et aux fonds ecclésiastiquesdes Archives départementales : tout récemment M. E. Nolin, chef debureau aux Archives, nous a signalé l'existence d'anciens plans relatifsà l'établissement du canal de Bourgogne, grâce auxquels nous avonspu préciser certaines données qui, jusqu'alors, nous échappaientcomplètement.

» La région étudiée est l'une de celles qui ont été le plus complète-ment bouleversées depuis deux siècles, et c'est là ce qui fait que larestitution de la topographie ancienne soit particulièrement délicate.Il suffit, pour s'en faire une idée, de rappeler ces événements consi-dérables que furent l'établissement de la route de Beaune (1728 etsuiv.), le tracé des lignes de chemin de ter à destination de Lyon (18-12-1845), de Saint-Amour (1878-1882) et d'Is-sur-Tillc (1869-1872),-l'organisation des voies de triage et du dépôt des machines (1882 etsiiiv.), enfin l'installation des subsistances militaires et de l'arsenal(1877-1880).

» Trois points importants permettent cependant de raccorder lestémoignages et de tenter une restitution de l'état primitif de cettepartie de la banlieue. Ces trois points sont, à l'extrême nord, le Pontaux Chèvres, aujourd'hui absorbé dans la place du Premier-Mai ; àl'ouest, la Croix du Juise (ou du Jugement), dite plus tard, par alté-ration, croix de Guise, et qui se trouvait le long du grand chemin deDijon à Marsannay, aujourd'hui rue de Chenôve, à l'endroit où cetterue est coupée par la rue des Peyvet ; à l'est, le Gué de l'Ouche, dontl'emplacement précis demeure incertain, mais qui devait avoisinerle Moulin Bernard, à l'endroit où les deux bras de l'Ouche sont le.plus rapprochés, entre la Verrerie et le Battoir (aujourd'hui fabriquede moutarde). Un quatrième point, non moins notable, mais dontl'emplacement se trouve en dehors des limites du territoire actuelde Dijon, est constitué par la ferme de la Noue.

» Ces repères dûment établis, voici comment on peut se représenter,pour les xivc et xv° siècles, la topographie de cette région :

» 1° Du pont aux Chèvres, à la Croix du Juise, le grand cheminvenant de Dijon. Ce chemin se trouvait à l'ouest de l'avenue Jean-

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PROCÈS-VERBAUX DES SÉANCES 245

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Plan schématique de la banlieue de Dijonau XVe siècle >

(Région comprise entre ïrémolois et l'Ouche) [%'• ̂ ••<1 -̂'-̂ N,

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PROCÈS-VERBAUX DES SÉANCES 217

Jaurès et rejoignait, à la hauteur de la rue de la Corvée, la rue deChenôve, avec laquelle il se confondait ensuite ;

» 2° Au sud de la Croix du Juise, en prolongement du précédent,le grand chemin de Marcenay, qui frôlait Trémolois sur la droite :aujourd'hui la rue de Chenôve ;

» 3° Partant encore de la Croix du Juise, et se dirigeant droit ausud, le grand chemin de la Justice, qui atteignait sur le territoire deChenôve, un pevi à l'est de la grande route actuelle, les fourches pati-bulaires de Dijon, autrement dit la Justice ;

» 4° Coupant le grand chemin de Marcenay et le grand chemin dela Justice, le chemin de Champloup, dit encore Rouelle de Billetorte,qui unissait presque en droite ligne la chapelle Saint-Jacques deTrémolois et la ferme de la Noue ;

» 5° Au Carron de Champloup, et formant un angle droit avec lechemin précédent, une rouelle tirant à la rivière d'Ouche. Cette rouelleparaît s'identifier au chemin qui unissait Chenôve au gué de l'Ouche,en sorte que le carron de Champloup peut être situé aux ateliers dePerrigny, non loin de l'endroit où se rejoignent les deux lignes deLyon et de Saint-Amour ;

» 6° A peu près à mi-chemin de Trémolois et du carron de Champ-loup, et perpendiculaire au chemin de Champloup, la rouelle de Mal-maison, dont le nom fut longtemps conservé par un climat du cadastre.Cette rouelle, nous dit l'enquête de 1445, commençait au grand cheminde Billetourte, au devers la Justice, et tirait contre la rouelle Mirepie,ce qui lui donne une direction sud-nord, avec l'intersection du canalet de la ligne de chemin de fer comme point approximatif d'abou-tissement ;

» 7° Partant de la Croix du Juise, la rouelle de Creusot, qui aboutissaitdevers l'Ouche, aux champs de la Colombière. Cette rouelle correspond,pour toute la première partie de son tracé, au moderne chemin desCreusots ; par delà les voies de triage et le dépôt des machines duP.-L.-M., elle se terminait non loin de la limite du finage actuel deDijon, à l'endroit où l'Ouche se rapproche le plus du canal. Il y avaitlà un carrefour important où se croisaient le chemin de Chenôve auMoulin Bernard (ci-dessus n° 5) et le chemin de Dijon à la Noue(ci-après, n° 11). A noter que la portion de la rouelle de Creusotcomprise entre la Croix du Juise et l'endroit où cette rouelle faisaitun destour porte, dans l'enquête de 1455, le nom de rouelle de la Croixdu Juise ;

» 8° S'embranchant au détour dont il vient d'être question, et sedirigeant droit vers le sud, la rouelle au Sac, dite encore rouelle perdue.Il s'agit vraisemblablement d'un cul-de-sac se terminant en plein champ.

» 9° Commençant à la rouelle de la Croix du Juise dans sa portionla plus proche de la route de Beaune actuelle, et se dirigeant surChenôve, la rouelle de l'Espinotte. Son tracé se retrouve, semble-t-il,

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248 PROCÈS-VERBAUX DES SÉANCES

dans la limite sud du climat Es Pcnottes, tel qu'il est figuré au cadastre ;» 10° La rouelle du Pyot, partant encore de la Croix du Juise et se

dirigeant vers l'est. Il s'agit encore, suivant toute apparence, d'uncul-de-sac ;

» 11° La rouelle du Grand Pasquier, autrement dit chemin de Dijonà la Noue, dont le tracé s'identifie très exactement au lit actuel ducanal de Bourgogne, depuis la limite du finage de Dijon jusqu'à 300ou 350 mètres du pont de chemin de fer, où il s'infléchit vers l'ouestpour tomber perpendiculairement sur la rouelle de Malemaison (ci-dessus, n° 6). Quelque part, à proximité de cette rouelle, se trouvaitla fontaine au Bouot, si l'on tient compte de ce fait, que dans les actesdu xive siècle le lieu dit au Grand Pasquey est encore appelé a lafonlaîgne au Bouot, et que, tout près du Grand Pâquier, sur les bordsde l'Ouche, se trouvait le pâquier des Fontenis (clos Mallard du cadastre),on peut admettre avec vraisemblance que cette fontaine se trouvaitnon loin du canal, entre la passerelle et le pont du chemin de fer ;

» 12° La rouelle du Petit Pasquier continuait dans la direction deDijon la rouelle du Grand Pasquier, et l'on peut soupçonner qu'ellefranchissait l'Ouche à quelque distance à l'est du déversoir actuel.On ne voit pas clairement si la rouelle du Clos au Roussot, deversla rivière d'Ouche, s'identifie à la partie septentrionale de la rouelledu Petit Pasquier, ou si elle s'embranche sur celle-ci ;

» 13° La rouelle Mirepie paraît avoir été le prolongement de larouelle de la Malemaison (n° 6), au delà du carrefour où se rencon-traient avec elles les rouelles du Grand et du Petit Pasquier. On saitqu'elle se dirigeait devers Dijon, mais on n'a pas su déterminer jusqu'àprésent le point où elle aboutissait à l'Ouche ; peut-être faut-il cher-cher à proximité du Moulin Saint-Etienne. Ce qui est sûr, c'est quela rouelle Mirepie n'existait plus à l'époque moderne.

» Nous remarquerons encore que le cours ancien de l'Ouche, danscette partie du territoire, ne correspond pas exactement au coursactuel. L'examen des plans du canal montre, en particulier, que surles deux points où l'Ouche est actuellement le plus proche du cheminde halage, au quai Gauthey, et près des Rotondes (à la limite dufinage) la rivière avançait ses boucles bien au delà de ce chemin.

» Nous terminerons en formulant quelques hypothèses sur l'originedes lieux-dits signalés dans cette communication. Le clos au Roussottient peut-être son nom de la famille dijonnaise des Roussot (xii° s.),apparentée aux le Riche, possesseurs primitifs du moulin Bernard.— L'Espinotte doit faire allusion à une épine remarquable. — LaMalemaison est sans doute en relation avec la Justice, soit qu'ils'agisse de la demeure du bourreau, soit — plus simplement — qu'ily ait là une désignation populaire du gibet communal. — Enfin,suivant M. P. Lebel, Billetorte ne serait pas autre chose qu'un troncd'arbre tordu ».