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BA SE Biotechnol. Agron. Soc. Environ. 2012 16(1), 49-58 Typologie des systèmes de stockage et de conservation du maïs dans l’est et le sud du Sénégal Momar Talla Gueye (1) , Dogo Seck (2) , Jean-Paul Wathelet (3) , Georges Lognay (4) (1) Institut de Technologie Alimentaire. BP 2765. SN-Hann-Dakar (Sénégal). E-mail : [email protected] (2) Centre Régional de Recherche en Écotoxicologie et Sécurité Environnementale (CERES/Locustox). BP. SN - Dakar (Sénégal). (3) Univ. Liège - Gembloux Agro-Bio Tech. Unité de Chimie générale et organique. Passage des Déportés, 2. B-5030 Gembloux (Belgique). (4) Univ. Liège - Gembloux Agro-Bio Tech. Unité de Chimie analytique. Passage des Déportés, 2. B-5030 Gembloux (Belgique). Reçu le 15 novembre 2010, accepté le 23 juin 2011. Une enquête a été réalisée au Sénégal oriental dans les départements de Tambacounda, Bakel, Kédougou et en Casamance continentale dans les départements de Kolda, Sédhiou et Vélingara auprès de 330 utilisateurs de maïs dans 185 villages. Il en est ressorti six principaux types et deux modes de stockage. Des différences sont relevées en rapport avec les ethnies qui n’adoptent pas les mêmes modes de stockage. L’impact des types et modes de stockage sur le niveau des pertes, la perception qu’ont les producteurs sur les principaux déterminants du stockage, les spécificités inhérentes aux ethnies, aux localités ainsi que les pesticides et produits naturels utilisés dans les traitements post-récolte sont passés en revue. Mots-clés. Maïs, diagnostic rural participatif, stockage des aliments, perte après récolte, population rurale, groupe ethnique, Sénégal. Typology of maize storage and conservation systems in the East and the South of Senegal. A survey was conducted in Senegal in the Eastern departments of Tambacounda, Bakel and Kedougou and in Casamance mainland in the departments of Kolda, Sedhiou and Velingara encompassing 330 maize users in 185 villages. Six major types and two modes of storage were found. Differences are presented in relation to ethnic groups who do not adopt the same methods of storage. The impact of types and storage methods are reviewed with regard to loss levels, perception of the producers on the main storage determinants, specificities inherent to ethnic groups, localities as well as pesticides and natural products used in post-harvest treatment. Keywords. Maize, participatory rural appraisal, food storage, postharvest losses, rural population, ethnic groups, Senegal. 1. INTRODUCTION Le maïs est une denrée de base pour beaucoup de pays africains. En Afrique occidentale, le maïs est aujourd’hui classé filière agricole majeure et bénéficie de ce fait d’un important soutien politique. Sa valeur ajoutée est estimée à plus de 2 milliards d’euros, profite principalement aux populations rurales et assure plus de 10 millions d’emplois permanents (Baris, 2009). Au Sénégal, bien que la consommation de céréales soit le régime de base des populations, il est à noter que le riz a longtemps et continue d’occuper une place de choix au niveau des habitudes alimentaires. Toutefois, à la suite de la crise économique de ces dernières années, les populations, notamment urbaines, se tournent davantage vers les produits locaux dont le maïs. Cette céréale, quoique secondaire en termes d’importance de la production, est quand même bien ancrée dans certaines localités du pays. Sa culture est aujourd’hui sujette à la quantité de pluies que reçoivent les différentes zones agroécologiques. Il en résulte que la culture du maïs est confinée principalement dans les régions de Fatick, Kaolack, Kolda, Tambacounda et Ziguinchor. Elle se pratique aussi en zones plus sèches, en l’occurrence la Vallée du fleuve Sénégal, essentiellement lors des décrues. La production de maïs a évolué en dents de scie avec une croissance relativement constante de 1960 à 1990 et une légère baisse entre 1991 et 2000 (Ndiaye et al., 2005). Toutefois, en 2003, le maïs fut choisi comme « speculation test » dans un vaste programme gouvernemental dont l’objet est à court terme la réalisation de la sécurité alimentaire du pays. C’est ainsi que la production atteint un niveau jamais égalé,

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BASE Biotechnol. Agron. Soc. Environ.201216(1),49-58

Typologiedessystèmesdestockageetdeconservationdumaïsdansl’estetlesudduSénégalMomarTallaGueye(1),DogoSeck(2),Jean-PaulWathelet(3),GeorgesLognay(4)(1)InstitutdeTechnologieAlimentaire.BP2765.SN-Hann-Dakar(Sénégal).E-mail:[email protected](2)CentreRégionaldeRechercheenÉcotoxicologieetSécuritéEnvironnementale(CERES/Locustox).BP.SN-Dakar(Sénégal).(3)Univ.Liège-GemblouxAgro-BioTech.UnitédeChimiegénéraleetorganique.PassagedesDéportés,2.B-5030Gembloux(Belgique).(4)Univ.Liège-GemblouxAgro-BioTech.UnitédeChimieanalytique.PassagedesDéportés,2.B-5030Gembloux(Belgique).

Reçule15novembre2010,acceptéle23juin2011.

UneenquêteaétéréaliséeauSénégalorientaldanslesdépartementsdeTambacounda,Bakel,KédougouetenCasamancecontinentaledanslesdépartementsdeKolda,SédhiouetVélingaraauprèsde330utilisateursdemaïsdans185villages.Ilenestressortisixprincipauxtypesetdeuxmodesdestockage.Desdifférencessontrelevéesenrapportaveclesethniesquin’adoptentpaslesmêmesmodesdestockage.L’impactdestypesetmodesdestockagesurleniveaudespertes,laperceptionqu’ontlesproducteurssurlesprincipauxdéterminantsdustockage,lesspécificitésinhérentesauxethnies,auxlocalitésainsiquelespesticidesetproduitsnaturelsutilisésdanslestraitementspost-récoltesontpassésenrevue.Mots-clés.Maïs,diagnosticruralparticipatif,stockagedesaliments,perteaprèsrécolte,populationrurale,groupeethnique,Sénégal.

Typology of maize storage and conservation systems in the East and the South of Senegal.AsurveywasconductedinSenegalintheEasterndepartmentsofTambacounda,BakelandKedougouandinCasamancemainlandinthedepartmentsofKolda,SedhiouandVelingaraencompassing330maizeusersin185villages.Sixmajortypesandtwomodesofstoragewerefound.Differencesarepresentedinrelationtoethnicgroupswhodonotadoptthesamemethodsofstorage.Theimpactoftypesandstoragemethodsarereviewedwithregardtolosslevels,perceptionoftheproducersonthemainstoragedeterminants,specificitiesinherenttoethnicgroups,localitiesaswellaspesticidesandnaturalproductsusedinpost-harvesttreatment.Keywords.Maize,participatoryruralappraisal,foodstorage,postharvestlosses,ruralpopulation,ethnicgroups,Senegal.

1. INTRODUCTION

Le maïs est une denrée de base pour beaucoup depays africains. En Afrique occidentale, le maïs estaujourd’huiclasséfilièreagricolemajeureetbénéficiedecefaitd’unimportantsoutienpolitique.Savaleurajoutéeestestiméeàplusde2milliardsd’euros,profiteprincipalementauxpopulationsruralesetassureplusde 10millions d’emplois permanents (Baris, 2009).Au Sénégal, bien que la consommation de céréalessoit le régimedebasedespopulations, il est à noterque le riz a longtemps et continue d’occuper uneplacede choix auniveaudes habitudes alimentaires.Toutefois, à la suite de la crise économique de cesdernièresannées,lespopulations,notammenturbaines,se tournent davantage vers les produits locaux dontlemaïs.Cette céréale, quoique secondaire en termes

d’importancede laproduction,estquandmêmebienancréedanscertaineslocalitésdupays.Sacultureestaujourd’huisujetteàlaquantitédepluiesquereçoiventlesdifférenteszonesagroécologiques.Ilenrésultequela culture du maïs est confinée principalement dansles régionsdeFatick,Kaolack,Kolda,Tambacoundaet Ziguinchor. Elle se pratique aussi en zones plussèches, en l’occurrence laVallée du fleuve Sénégal,essentiellementlorsdesdécrues.

La production demaïs a évolué en dents de scieavecunecroissancerelativementconstantede1960à1990etunelégèrebaisseentre1991et2000(Ndiayeet al., 2005). Toutefois, en 2003, le maïs fut choisicomme«speculation test»dansunvasteprogrammegouvernemental dont l’objet est à court terme laréalisation de la sécurité alimentaire du pays. C’estainsiquelaproductionatteintunniveaujamaiségalé,

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soit près de 510236t, d’après les ServicesAgricolesetlesServicesdelaPrévisionetdesStatistiques(Falletal.,2004).Commecorollaire,ilyaeunaturellementdesproblèmesdestockageetdetransformation.Cettesituationaaussi faitque lemaïs, jusqu’iciculturedesubsistanceplutôt restreinte dans certaines parties duterritoirenationaldu faitdesdéficitspluviométriquesdeszonesnordetcentre,tendàdevenir,àl’imagedel’arachideetducoton,uneculturederente.Ilseposealorsnaturellementdesproblèmes liésà l’adéquationet à l’efficacité des systèmes de conservation et detransformation.

Le but de ce travail est de caractériser le savoirtraditionnelenmatièredestockageetdeconservationdes stocks de maïs. La prévention des pertes parl’utilisation de pesticides de synthèse ou de plantesinsecticidesestlargementabordée.

2. MATÉRIEL ET MÉTHODES

2.1. Conduite des enquêtes

Deux diagnostics participatifs ont été conduitsrespectivement dans les régions de Kolda au niveaudesdépartementsdeKolda,VélingaraetSédhiouetdeTambacoundadanslesdépartementsdeTambacounda,Bakel etKédougou; ces régions ont été choisies surbase de leur représentativité dans la culture dumaïsdu Sénégal. C’est principalement le dispositif deterrain de l’AgenceNationale deConseilAgricole etRural (ANCAR) qui s’est chargé de l’administrationdu questionnaire. Dans les poches non couvertes, ledispositifdelaSociétédeDéveloppementetdesFibresTextiles(SODEFITEX)aétémisàcontribution.

Afindelevertouteéquivoquesurlacompréhensiondes points abordés, le questionnaire est présenté àchaque «administrateur». En outre, au moins deuxciblessontauditionnéesenleurprésence.Unetrentainedeparamètresontétédéfinisdansl’ensemble.

DanslarégiondeKolda,cesont18communautésrurales qui ont reçu la visite de l’ANCARcontre 15pourTambacounda,comptenontenudesagentsdelaSODEFITEX.Cependant,ilestàsignalerquelaprioritéaétédonnéeàl’importancedelaproductionmaïsicolede chaque zone. D’autre part, l’administration desquestionnaires tient compte des différentes ethniesprésentesdansleslocalitésciblesenvued’enressortird’éventuellespratiquesspécifiques.Touslesutilisateursdu maïs regroupés sous le terme «producteur»sont concernés par les questionnaires: producteurs,ménagères,meuniers,boulangers traditionnels,unitésde transformation, etc. En somme, 25questionnairesontétéremisparcommunautéruraleetuneffectiftotalde330dontles220,soit66,7%,sontlocalisésàKolda,contre33,3%àTambacounda,aétéauditionné.Dans

l’ensemble,sixdépartements,Kolda(26,1%),Sédhiou(22,4%),Vélingara(18,2%),Tambacounda(14,8%),Kédougou (16,1%),Bakel (2,4%), soit 185villages,ontétévisités(Figure 1).

2.2. Exploitation des données

Les résultats des enquêtes ont été analysés sur leplanstatistique.Dece fait, les réponsesde toutes lesquestions ont été traitées sur Excel puis codifiées.Le logiciel SPSS 15.0 nous a permis par la suite defairedes tableauxdefréquence,descomparaisonsdemoyennes avec le test de Student-Newman-Keuls àuneprobabilité de 5%,mais également des tableauxdynamiquescroisésentreparamètres.

3. RÉSULTATS

3.1. Représentativité des différentes ethnies diagnostiquées

Seizeethniesontétérecensées,dontlareprésentativitédanslequestionnairedépenddeleurimportancedansles deux régions. C’est l’ethnie Peul (comportantplusieurs sous-groupes) avec 49% qui s’est révéléedominante autant à Kolda qu’à Tambacounda;viennent ensuite les Socé (10,9%) et les Malinké(8,2%).CesontlesBédicketlesBassariquisontlesmoins représentés avec respectivement 0,6 et 0,3%.Lesautresethniesserépartissentcommesuit :Diola(5,8%),Balante(4,8%),Diakhanké(3,9%),Kalonkéet Sarakholé (3,3%), Mandjack (2,1%), Mankagne(1,8%), Kognadji, Dialonké et Wolof (1,5%) etBambara(1,2%).

3.2. Types de stockage rencontrés dans la zone

Six principaux types de stockage ont été recenséschez 73% des producteurs (Tableau 1). Certainsproducteurs étalent d’abord les épis demaïs sur desclaiespuis les stockentdansdes sacs après égrenage(claie+sac,soit8,1%).L’enquêtearévélél’existenced’autres types de stockage assezmarginaux. Il s’agitdelaconservationdesépisdemaïsdansdesenclosdebambou(2,7%),desépisoudesgrainsdemaïsdansleschambresàhabitation(2,1%)etau-dessusdestoitsdesmaisons(2,7%).Ilaétéaussirecensél’utilisationdepaniers,debidons,declaiesinstalléesau-dessusd’unfoyer,decuisineetdecases.Lesfigures 2à5montrentquelquessystèmestypiquesdestockagedeceszones.

3.3. Modes de stockage pratiqués

Deuxmodesde stockageont été rencontrés: en épiset en grains. Leur fréquence est quasiment lamême

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Figure 1. Zoned’enquêtessurlatypologiedessystèmesdestockageetdeconservationdumaïsauSénégaldanslesrégionsdeKoldaetdeTambacounda.BounkilingreprésenteledépartementdeSédhiou—Survey area on the typology of maize storage and protection systems in Senegal in the Kolda and Tambacounda regions. Bounkiling represents Sedhiou department.

Tableau 1.PrincipauxtypesdestockagedanslesrégionsdeKoldaetdeTambacounda—Main storage types in the Kolda and Tambacounda regions.

Sac Claie Grenier Claie + sac Fût Magasin AutresFréquence 68 64 50 27 20 13 -Taux(%) 20,5 19,3 15,1 8,1 6 3,9 19,6

Figure 2.Épisdemaïs sèchésdansdu fourrage—Dried maize cobs in fodder.

Figure 3.Tasdemaïsenspathesendébutderécolte—Pile of spathed maize at early harvest.

Zone d’intervention

0 50 km

Goudiry

GabouBala

Dianké

Missirah

Vélingara

KoldaBounkiling

Tambacounda

Koussanar

Fatick

Kaolack

Saraya

Kédougou

Parc National de Niokolo Koba

Bakel

N

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avec environ 40% d’adoption. Par contre, 17% desproducteurs pratiquent à la fois les deux modes destockage. La durée du stockage est de 6mois enmoyenne,comptenontenudumodeadopté.

3.4. Perception de certains aspects liés au stockage du maïs

Le tableau 2 résume la perception qu’ont lesproducteurs vis-à-vis de quelques points relatifs austockagedumaïs.Ainsi,30%parmieuxnesaventpasquelesattaquesconstatéessurlemaïsenstockdébutentpendantleséchagedesépisauchamp.Laprésencedemoisissuresdanslesstocksdemaïsestévoquéedans56%descas.Lesdeuxtypesdestockageenépisetengrainsmontrentunedifférencedesensibilitécertaineàl’égarddesinsectespour83%desproducteurs.Quatre-vingt-deux pour cent des réponses obtenues révèlentl’existencedepertespondéralesàlasuitedesattaques

d’insectes.Parmieux,37%disentavoiraumoinsunefoisvuleurstockdemaïscomplètementanéantiparlesinsectes.Comme corollaire de leur infestation, 82%desproducteursfontuneévaluationqualitativedumaïsinfestéencoursdestockage.Toutefois,moinsde50%d’entreeuxsontconscientsdesnuisancesassociéesàlaproliférationdesinsectesinféodésauxstocksdemaïs.

Pour ce qui est des systèmes de stockage utilisésactuellement, plus de la moitié des producteurs lesjugent efficaces et capables de contenir les quantitésrécoltées. Vingt-huit pour cent de ceux-ci ont déjàessayé des systèmes et méthodes autres que ceuxdont ils disposent habituellement, 56% les jugentsatisfaisants. Cette même proportion de producteursest encline à expérimenter d’autres systèmes oumoyensdestockageauvude leurefficacitéet/oudeleurconvenanceparrapportàleursstocks.Leurchoixporteexclusivementsurlesmagasins,letraitementdesstocks,lessilosmétalliques,lesgreniersetlesclaies.

Figure 4.Épisdemaïsdansunemottedesorgho—Maize cobs in a Sorghum turf.

Figure 5. Épis suspendus au-dessus d’un foyer — Cobs hanging above a fire.

Tableau 2. Appréciationdefacteursdépendantdustockageetdutraitementdumaïs—Appreciation of some factors affecting maize storage and treatment (n=330).

Taux (%) Taux(%)Oui Non Oui Non

Attaqueauchamp 69,3 30,7 Pratiquedetraitements 41,4 58,6Moisissuresenstock 56,4 41,1 Traitementslocaux 42,0 58,0Sensibilitéépis/grains 83,4 15,6 Traitementmatière 72,2 27,8Appréciationqualitative 81,6 18,4 Traitementparvégétaux 44,8 55,2Connaissancedesnuisances 46,1 43,7 Garantieétanchéité 39,9 60,7Essaisd’autresméthodes 27,6 2,4 Formationreçue 9,7 90,3Efficacitéd’autressystèmes 56,1 37,4 Pertespondérales 81,7 18,3Existencedesystèmesàexpérimenter 56,7 43,3 Anéantissementdustock 37,0 63,0

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3.5. Traitement des stocks

Laprotectiondesstocksdemaïspardespesticidesouàl’aidedeplantesindigènesestunepratiqueobservéechez 41% des producteurs. C’est la denrée qui esttraitéedans72%descascontre42%pourleslocauxde stockage. Près de 45% des producteurs ayantrecoursautraitementutilisentdesvégétauxàlaplacede pesticides. Cependant, seuls moins de 10% desmaïsiculteurs ont reçuune formation leur permettantd’appliquer des traitements. On constate aussi que40%seulementdeceuxquipratiquent lafumigationaffirment prendre suffisamment de précautions pourassurerl’étanchéitédulocaldetraitement.

Parmiceuxquiseserventdesproduitschimiques,un seul connaissait lamatière active de la substancequ’il utilise. En outre, malgré le fait qu’ils traitentles stocks, 60% des producteurs ignorent si lesproduits sont autorisés pour le traitementdes stocks,etdumaïsenparticulier;36%se fondent sur l’avisdes commerçants pour le choix des produits. Surle pourquoi des traitements, les réponses sont trèsdisparates.Trente-septpourcentdisentlesappliquersurlessemences,27%pourlaluttecontrelesinsecteset27%prétendentlefaireparhabitude.Unpourcentagefaible,soit5%,fontleurchoixsuravisdesagentsdel’agriculture.

Les pesticides utilisés dans la conservation du maïs. Nature des pesticides.Autotal,20%desproducteursutilisentdespesticideset6%d’entreeuxdisentavoirrecours à des poudres sans en connaitre leur nom;2,4%mettentdesfongicideset1%delaK-Othrine.D’autresproduitsavecuneutilisationpluslimitéesontcités: raticides, thioral, atrafor, furadan, endosulfan,etc.Ilaétéégalementmentionnél’emploideliquides,sansaucuneprécisionquipermetted’identifiernoms,matières actives et doses des substances mises encause.

Doses.Ilaéténotéunegrandedisparitésurlesquantitésdepesticidesimpliquéesdanslaconservationdumaïs.Enfait,pourlespoudresàpoudrer,lesdoseslesplusfréquemmentpratiquéessont100à125g.100kg-1degrains (5,7%); 200g.100kg-1 (1,8%). En somme,3,3% des agriculteurs affirment ne pas doser ouméconnaissent la dose ou en appliquent de manièreimprécise. Pour ce qui est de la fumigation plusrarementpratiquée(1,8%),onrelèveentreautreslesdosesde3comprimésdephostoxinpour5touencore2compriméspar100kg.

Les produits naturels recensés dans le traitement des stocks de maïs. Nature.Lesproducteursdemaïsontrecoursàplusieursproduitsetmatièrespourlaprotectiondeleursstocks.

Dixplantesetduseldecuisineontétérecensésdansl’ensemble. Le neem (Azadirachta indica A.Juss.)est la plus utilisée (51,6%). Nous avons ensuiterespectivement Hyptis spicigera Lam. (13,54%),le traitement composite associant à la fois plusieursproduits, par exemple neem-Khaya senegalensis(Desr.)A.Juss. (12,5%). Les autres traitements citéssontAcaciasp.,Caciasp.,Citrus sinensis (L.)Osbeck,Khaya senegalensis(3,1%),Ziziphus mauritianaLam.etLippia chevalieriMoldenke(1,6%).Lesel(4,7%)estlaseulematièreidentifiéeendehorsdesvégétauxdanslaprotectiondesstocksdemaïs.

Doses et rémanence. Les quantités mises en jeun’ont pu être déterminées pour cause de trop grandevariation dans les données ne permettant pas uneévaluationstatistique.L’essentieldesproducteurssituelarémanencedespartiesdesplantesetautresproduitsappliquéssurlemaïsà6mois.Lestempsd’efficacitélespluscitéssont2(18%),3(27%)et6mois(23%).Néanmoins, certains affirment avoir une protectionassuréejusqu’à12(9%)voire24mois(1,3%).

3.6. Évaluation des pertes

Au niveau départemental.Letableau 3montrequelespertessontplusfaiblesàKoldaetsignificativementplus élevées à Kédougou. À Bakel, la faiblesse deseffectifs(2,4%)n’autorisepasunecomparaisonaveclesautreslocalités.Globalement,laduréedestockagevariepeuetsesitueautourde6mois.Lacorrélationtrès significative P=0,001 entre les modes destockage et les départements (χ2=52,381; ddl=30)révèle des pratiques de stockage spécifiques auxlocalités.Ilyaunetrèsfortetendanceàconserverlemaïs en épis à Kolda et à Vélingara.A contrario, àTambacoundaetKédougou,c’estlestockageengrainsqui domine au niveau des producteurs. Par ailleurs,danstouslesdépartements,lemaïsenépisestparlasuiteégrené.

Au niveau des ethnies. Les taux de pertes dumaïsstocké fluctuent selon les ethnies. C’est avec lesMankagnequ’onobserve lesniveaux lesplusfaiblesavec à peine 2%, contrairement aux Bambara etDialonké,soit27à30%.Danslaplupartdesethnies,lesrenseignementsobtenussituentlespertesentre15et 23%. Par contre, les durées de stockage les pluslongues s’observent avec lesKognadji puis viennentrespectivement les Sarakholé, Kalonké, Mandjack,Mankagne et les Dialonké. Chez toutes ces ethnies,le maïs est conservé au moins 6mois au cours del’année. L’épuisement des stocks intervient plus tôtchezlesDiolapuisrespectivementchezlesMalinké,DiakhankéetBalante,quelsquesoient lemodeet letypedestockagepratiqués(Tableau 4).

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Les pertes en rapport avec les modes de stockage.Lecroisemententrelesfacteursmodesdestockageetpertes montre une probabilité P=0,09 (χ2=9,351;ddl=2). Les pertes sont donc indépendantes desmodesdestockage.Ellessontsensiblementégalessurépis(20%)etsurgrainsdemaïs(17,6%).Toutefois,lestockagedesépissuivid’unégrenagedumaïs(épis-

grains)donnedestauxdepertessignificativementplusélevés,soit27%.

Croisement modes de stockage * ethnie.Larelationentre les modes de stockage pratiqués et les ethniesest hautement significative, P=0,000 (χ2=68,916;ddl=30).Lesethniesn’adoptentdoncpaslesmêmes

Tableau 4.Durée,modesdestockageetpertesselonlesethniesdanslesrégionsdeKoldaetdeTambacounda—Duration, storage types and losses according to ethnic groups in the Kolda and Tambacounda regions.

Durée de stockage (mois) Modes de stockage Pertes (%)

Épis Grains Épis-grainsEffectif % Effectif % Effectif %

Balante 5,7 1 6,2 13 81,2 2 12,5 25,0Bambara 6,0 1 25,0 2 50,0 1 25,0 30,0Bassari - 1 100,0Bédick 6,0 2 100,0Diakhanké 5,6 2 15,4 10 76,9 1 7,7 14,2Dialonké 6,0 3 60,0 2 40,0 - - 27,4Diola 5,4 12 63,1 2 10,5 5 26,3 22,6Kalonké 6,0 6 54,5 2 18,2 3 27,3 16,1Kognadji 6,2 5 100,0 - - - - 17,6Malinké 5,5 5 18,5 17 63,0 5 18,5 19,8Mandjack 6,0 3 42,8 3 42,8 1 14,3 22,9Mankagne 6,0 - - 6 100,0 1,9Peul 6,0 66 40,7 62 38,3 34 21,0 22,5Sarakholé 6,2 4 36,4 4 36,4 3 27,3 8,0Socé 5,8 23 63,9 7 19,4 6 16,7 18,3Wolof 5,8 2 40,0 1 20,0 2 40,0 7,5

Tableau 3. Durée,modesdestockageetpertesauniveaudesdifférentsdépartements—Duration, mode of storage and losses in different departments (n=330).

Taux d’échantillonnage(%)

Durée de stockage(mois)

Modes de stockage Pertes(%)

Épis Grains Épis-grainsEffectif % Effectif % Effectif %

Kolda 26,1 6,1b 54 62,8 19 22,6 13 15,1 15,7a

Sédhiou 22,4 5,6a 28 37,8 32 43,2 14 18,9 20,7ab

Vélingara 18,2 6,0ab 30 50,0 15 25,0 15 25,0 27,0ab

Tambacounda 14,8 5,7a 11 22,4 32 65,3 06 12,2 14,6a

Kédougou 16,1 5,9ab 12 22,6 30 56,6 11 20,7 29,9b

Bakel 2,4 - - 4 50,0 4 50,0 -Lesvaleurssuiviesdelamêmelettredansunecolonnenesontpassignificativementdifférentes(P<0,05)—Values followed by the same letter in a column are not significantly different (P < 0.05).

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modes de stockage. Chez les Socé, Diola, Kalonké,Dialonké etKognadji, le stockage se fait en prioritéen épis, tandis que chez les Malinké, Diakhanké etMankagne, c’est principalement sous forme égrenéeque le maïs est conservé. Les Sarakholé, Mandjacket dans unemoindremesure les Peuls pratiquent demanièreégalelesdeuxmodes.LesBassarietBédickontaussimontréunenettepréférence,maisleureffectifest faible pour permettre une conclusion pertinente(Tableau 4).

Croisement modes de stockage * types de stockage.Lacorrélationentremodeet typede stockage révèleuneétroiterelation,P=0,000(χ2=258,202;ddl=24).Parmilestypesdestockagelesplusrépandus,ilressortquelesépisdemaïssegardentprincipalementsurlesclaies(86%)etgreniers(64%)etlesgrainsconservésdans des sacs et magasins. Dans les enclos et lescuisines, le mode de stockage est exclusivement enépis;c’estlecasdansunemoindremesuredestoits.Hormislessacsetlesmagasins,lestockageengrainss’observe dans les fûts (95%) et paniers. Le maïsenfumédansdesclaiespassedel’étatépisàl’étatgrainàprèsde40%(Tableau 5).

4. DISCUSSION

Cediagnostic couvrant six départements producteursdemaïsapermisdemettreenévidencelespratiquesliées au stockage du maïs et de situer le niveau de

technicitédesproducteursquantà laconservationdeleurrécolte.

Les deux principaux modes de stockage en épiset en grains sont pratiqués à égale importance.Chezcertains, les épis sont égrenés dès allègement destravauxchampêtresversjanvier-février,puislesgrainsmis en sacs. D’ailleurs, la plupart des producteurspensent que «l’épi offre une certaine protection auxgrains contre les attaques d’insectes, d’où une plusgrandesensibilitédumaïségrené».Unparamètrenonprisencompteetquipourraitavoirsonimportanceestlaprésencedesspathes,encesensqu’ellesconstituentune barrière physique quand elles recouvrententièrement les grains. Les types de stockage, plusnombreux, sont pour la plupart rudimentaires. Ladisponibilité des matériaux locaux et des moyensfinanciers semblent guider les producteurs dans leurchoixdutypedestockage,notammentlaconstructiondemagasins en dur.Les claies, sacs et greniers sontutilisésàplusde60%.Dans lapratiquedestockageàproprementparler,leconstatestquelesprincipesdebasetelsqu’entreautresunebonnesiccitédesgrains,le dépôt sur fardage et l’aération du local ne sontsouvent pas respectés. Ce qui est plus préoccupant,c’estlestockaged’épisencorehumidesquiengendredesattaquesanormalementélevéesdenuisiblesautoutdébutdustockage,lesmoisissuresenparticulier.Leurprésenceestbienévidemmentliéeauxrisquesdevoirlesstockscontaminéspardesmycotoxines.

Les taux de pertes au cours du stockage nousmontrent qu’autant les épis que le maïs égrené sont

Tableau 5.RelationsentretypesetmodesdestockagedanslesrégionsdeKoldaetdeTambacounda—Relations between storage mode and types in the Kolda and Tambacounda regions.Types de stockage Modes de stockage Total

Épis Grains Épis-grainsClaies 55(85,9%) 6(9,4%) 3(4,7%) 64Sacs 4(5,9%) 56(82,3%) 8(11,8%) 68Grenier* 32(64%) 16(32%) 2(4%) 50Fût 1(5%) 19(95%) 20Magasin 4(30,8%) 8(61,5%) 1(7,7%) 13Enclos 9(100%) - 9Chambre 3(42,8%) 3(42,8%) 1(14,3%) 7Toit 8(88,9%) - 1(11,1%) 9Panier 2(100%) 2Claiesenfumées 3(37,5%) 2(25%) 3(37,5%) 8Cuisine 2(100%) - 2Case 1(25%) 3(75%) 4Total 122 115 19 256

*:typesdestockageoùsontappliquéeslesplantesdansletraitement—types of storage where the plants are used for the treatment.

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sujets aux attaques des insectes et des moisissures.Toutefois,cesontplutôt lesattaquesdes insectesquisontperçuesauniveauduproducteurcommepertesencesensqu’ellesréduisentsubséquemmentlepoidsdeladenréeencasdeforteinfestation.Lestauxévaluéspeuvent devenir énormes en six mois seulement,estimésàprèsde18%aveclemaïségrené,20%aveclaconservationenépisetprèsde27%danslecasd’unstockageenépissuivid’unégrenage;iln’endemeurepasmoinsquebonnombredeproducteursaffirmentavoir au moins une fois un stock complètementanéantiparlesinsectes.AuBurundi,laDirectiondelaDéfensedesCulturesestimait lespertesduesàlaprésencedesinsectesà2,4%en6moisdestockage,cequiestbieninférieurauxrésultatsdecetteétude.Pourtant, les producteurs ne disposaient pas demoyensde stockageplus sophistiqués (DirectiondelaDéfensedesCultures,1991).

Les niveaux de pertes entre ethnies révèlentdes différences. Comme cause, on peut penserà la performance des structures de stockagede chaque ethnie, et singulièrement le type dematériau disponible dans leurs localités respectives.L’échantillonnagedisproportionnéentreethniespeutentrainerdesdisparitésliéesàlafaiblessedecertainseffectifs par rapport à d’autres. La répartition desethniesauniveaudesdépartementss’estreflétéesurlesniveauxdepertesdesethniesdanslesdifférenteslocalités. C’est ainsi que les pertes plus élevéesobservées chez les Dialonké et Bédick se sontrépercutéesdansledépartementdeKédougouoùilssont plus nombreux. L’instruction des producteurs,paramètre non pris en compte, devrait contribuer àunemeilleurecompréhensiondesmesuresadéquatesà prendre pour la protection des stocks, surtout audébutdustockage.Ceproblèmeestpluspréoccupantavecles18%deproducteursquiignorenttotalementl’existencedespertesenpoids.Tran(1990)aidentifiéenCôted’Ivoirelesprincipauxinsectesquipondentsur maïs dès le champ en cas de prolongementdu séchage. Ce sont entre autres Sitophilus sp.,Cathartus quadricollis (Guérin-Méneville, 1844) etCarpophilus dimidiatus (Fabricius,1792).Philogèneetal.(1989)puisVowoteretal.(2004)citentquantàeuxSitophilus sp. etProstephanus truncatus (Horn,1878) ;lepremierprolifèresurtoutsurmaïségrenéetlesecondaffectionnedavantagelesépis.Cesauteursprécisentenoutrequelesnouvellesvariétésdemaïsmises au point avant tout pour leur fort rendementsontparticulièrementsensiblesàcetyped’insectes.Ilestdonctrèsintéressantdetesterlarésistancedenosvariétésàcesravageurs.

Les moisissures, bien qu’occasionnant desdiminutions de poids plus faibles que les insectes,sont aussi des facteurs d’altération qualitative àconsidérer. Des études mycologiques menées au

Bénin ont montré une prévalence de plus de 70%d’attaqueparprincipalementdesFusariumsp.etdesAspergillus sp. (Fandohan et al., 2005). Sur le plansanitaire,lespropriétéscancérigènesdesmycotoxinesproduites par ces espèces ne sont plus à démontrer.Les producteurs font généralement une évaluationqualitative (notamment le gout), mais la plupartd’entreeuxméconnaissent lesnuisancesassociéesàcesattaques.Lesappréciationsfaitesselimitentàdesvomissements,mauxdeventreetdiarrhées.

Les capacités de stockage des systèmesactuellement utilisés, jugés dans 50% des casefficaces et aptes à contenir les récoltes par lesproducteurs, servent pour toutes les céréales. C’estd’ailleurs un point critique dans leur système deconservation car elle permet une infestation croiséeentrecéréales.Lejugementduniveaudesatisfactiondes systèmes de stockage dépend naturellement dela production de chaque paysan. En effet, les petitsproducteursontmoinsdemalàconteniretconserverleursstocksenutilisantdepetitsconteneurstelsquelesfûtsmétalliques,paniers,bidons,etc.

Dans la gestion des ravageurs, les producteursqui traitent se servent de pesticides et de plantesinsecticides.Cependant,cettepratiquesembleplutôtlocalisée dans le département de Kédougou. Selonces derniers, on estime la rémanence des essencesutilisées en moyenne à 6mois, mais il est cité descasoùellecouvretoute laduréedelasaisonsèche,surtout avec H. spicigera. Le paradoxe est que lesproducteurs ne systématisent pas le traitement desstocksdemaïsparcetteplantedontl’efficacitésemblereconnue dans presque toute la zone de Kédougou.Par ailleurs, les paysans ne font pas une évaluationdes parties des plantes les plus actives contre lesravageurs,mêmeavecleneemoùcesontlesfeuillesquisontutiliséessousformedepoudreoudebouillie.Cesontpourtantlesgrainesquicontiennentletauxleplusélevédematièreactive.Leséchageàl’ombreestaussinécessairedanscecaspouréviterladestructiondes substances actives du neem (azadirachtine) parune exposition prolongée à la lumière (COLEACP,2011).Ainsi, des pertes dépassant parfois 20% en6mois de stockage sont déplorées. Ces dernièresannées, l’intérêt accordé auxbiopesticides végétauxaentrainéladécouvertescientifiquedebeaucoupdeplantesaromatiquesdontH. spicigeraetL. chevalieri.L’applicationd’huilesessentiellesdeH. spicigerasurSitophilus zeamais (Motschulsky, 1855) donne desmortalitésde66à70%parcontactet96à99,2%parfumigation(Noudjou-Wandji,2007);Habiba(2007)rapporte une mortalité de 96% par exposition auxvapeurs d’huiles essentielles de Xylopia aethiopica (Dunal) A.Rich. Il est ressorti de ces études quel’origine géographique tient un rôle central dans lacomposition biochimique et par conséquent, dans

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l’efficacité des huiles essentielles. Pour beaucoupde plantes, les volatiles libérés tels les composésterpéniquessontresponsablesdelatoxicitéenverslesinsectes(Tchoumbougnangetal.,2005;Mevyetal.,2007).

Troppeudeproducteursquiutilisentlespesticidessonthabilitésàlefaire.Parmanquedeformation,ilya ignorancedelanaturedesproduitsappliqués,d’oùlamultitudededosesévoquéespourunmêmeproduit.Les traitements souvent àbasedepoudres àpoudrers’effectuentàmainsnuesetsansprotectionrespiratoire,nonobstant les risques d’intoxication. La couleur dusachet contenant leproduit est leprincipal critèrededistinction.Toutcecimontreledangerqu’encourentlesproducteursfaceauxpesticides;dangerliéàlanaturedupesticideenquestion indépendammentde ladoseutilisée. Selon l’Organisation Mondiale de la Santé,chaqueannée,lespesticidescausentaccidentellementquelque 20000décès et près de 750000personnessouffrent de leurs effets chroniques spécifiques ounon, principalementdans les pays endéveloppement(AfricaStockpilesProgramme,2003).

Lafumigationestplusrarementeffectuéemaisceuxqui la pratiquent, outre les doses requises, semblentméconnaitrecomplètementl’impactdumoded’actionet lepouvoirpénétrantdecespesticides.Enfait,desproducteurs fumigent avec des sacs en propylènetissé ou mettent des comprimés entre des sacs. Defaçonplusnaturelle,lesépissubissentuneexpositionà la chaleur et à la fumée des foyers improprementappelée fumigation. Cette pratique semble donnerde bons résultats. Cependant, il existe des risquesréels d’accumulation d’hydrocarbures aliphatiquespolycycliques (HAP) résultant d’une combustionincomplète, ces composés sont cancérigènes. Uneévaluationdeleurprésences’avèreutile.

5. CONCLUSION

Ce diagnostic est intéressant à plusieurs égards. Lesmodesettypesdestockage,lemanquedeformation,lesmauvaisesconditionsd’entreposageainsiquecertainespratiques coutumières spécifiques aux ethnies sontparmilesconditionsquifavorisentladéperditiondesrécoltesdemaïs.Lespertesàceniveaupeuventêtreélevéesautantsurépisquesurgrains.LadécouvertedeP. truncatusdansleszonesdeKédougouetdeKolda(Guèye et al., 2008) impose plus d’attention pourcirconscriresaprogression.Lesinsectesresponsablesdes dégâts sont donc à identifier avec une attentionparticulière. Le traitement des stocks est apparucomme le problème le plus épineux à résoudre, euégard à la nocivité desproduitsmis en cause, à leurméconnaissance et aussi au non-respect des bonnespratiquesdetraitement.Comptetenudecettesituation,

l’utilisationde toutmoyennaturelde luttecontre lesnuisibles est à encourager dans la perspective delimiterl’épandagedepesticidessynthétiques.Danscecadre, la présence de plantes telles queH. spicigeraetL. chevalieri dans les zones est et sud du pays etBoscia senegalensis (Pers.) Lam. bien répartie dansle Nord plaident pour une étude systématique del’efficacité des traitements en conditions contrôlées(testsdelaboratoire)quiserontsuivisdetestsenmilieupaysan sur les principaux insectes déprédateurs descéréales (S. zeamais, Tribolium castaneum (Herbst,1797), P. truncatus) et des légumineuses (Caryedonserratus (Olivier,1790)etCallosobruchus maculatus (Fabricius, 1775)). Cependant, tout ceci devrait sefairedanslerespectdecritèresdedurabilitépourunegestion raisonnée de la biomasse en plantes dotéesd’effetsinsecticides.

Remerciements

Lesauteurs remercientvivement leFondsdesRecherchesAgricoles et Agroalimentaires (FNRAA) pour avoirsupporté financièrement ce travail. Nous sommes aussitrès reconnaissants à l’égard des Conseillers agricoles etrurauxdel’ANCARpouravoirremislesquestionnairesauxpaysans.

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