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    Regar

    dssu

    rlad

    roite

    18 fvrier 2014 - n 34

    Lettre ditepar la cellule Veille et Ripostedu Parti socialiste

    to

    NOTE DE VEILLE ET RIPOSTE SUR LA SITUATION DE LA DROITE ET DE L !EXTRME-DROITE 1

    Agir face au populisme

    Les dernires tudes dopinion sur linfluence du Front national montrent que 34 %des franais lui accordent leurs prfrences, et quaux lections europennes, il at-teindrait 20 %, soit le double des rsultats de celles de 2009, mais que, pour les pro-chaines lections municipales, il connat un tassement certain et dpasse rarementles 10 %. Les analyses ne manquent pas pour rendre compte de cette situation : criseconomique, malaise identitaire, complexit des politiques gouvernementales, en-serres par les obligations europennes et internationales, dsignation de boucsmissaires, le plus souvent, les musulmans, avec, en mme temps, des relents dan-tismitisme

    Les crispations de la socit franaise sexpliquent par l. Ce qui est cependant frap-pant, cest la diffrence entre les ralits nationales et locales. Dans les communes,les politiques ont des rsultats visibles, les enjeux sont comprhensibles, les lus sontplus proches et, le plus souvent, les municipalits adoptent des dmarches pragma-tiques qui tentent de prendre en compte les attentes et les intrts des diffrentes par-ties de la population. La crise nationale tient, elle, beaucoup au sentiment partaglargement que les gouvernants, la fois parce quils ne le veulent ni ne le peuvent,sont trop loin des ralits concrtes et vivent par trop en cercles ferms - impressionqui est, videmment, renforce par lcart qui existe plus encore avec les instanceseuropennes, le Parlement malheureusement y compris. La critique des lites et du systme trouve l ses racines, responsables de toute sorte, politiques et syndicaux,

    mdiatiques, privant le peuple de sa souverainet.

    Il faut en tirer quelques leons dans le moment o nous sommes. Il est vrai que gou-verner est difficile et complexe. Mais, cest justement pour cela quil faut tre prsentauprs des franais, avec des politiques les plus concrtes possibles et avec le soucidexpliquer les donnes et les choix qui sont faits et pourquoi ils le sont. On ne dirajamais assez que le manque de visibilit est une cause majeure de la crise de la re-prsentation. La proposition faite actuellement dun pacte de responsabilit pourles entreprises revt une grande importance. Une majorit de franais souhaite quilrussisse pour des rsultats conomiques attendus, mais aussi parce quil peutcontribuer changer les formes de laction politique, en amenant les diffrents int-

    rts qui structurent lconomie franaise travailler dans un mme sens.

    Alain BERGOUNIOUX

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    LEurope, angle mort de la pensede lUMPLEurope reste incontestablement un angle mortde la rflexion et de la pense de lUMP. Cestmme un sujet que lon tente, dans cette forma-tion, desquiver jusquau dernier moment, sem-ble-t-il. Comme en tmoigne la dernireconvention de lUMP, en janvier, pourtant en partieconsacre linvestiture de ses ttes de listes dansla perspective de llection europenne du 25 maiprochain, mais qui a soigneusement vit dabor-der la question sur le fond.

    La rorientation de la construc-tion europenne impulse parFranois Hollande, ds le moisde mai 2012, a t dcisive et

    salutaire. Elle contraste lvi-dence et sur lessentiel, avec la

    politique accepte par Nicolas

    Sarkozy.Il est vrai que le bilan de la droite et de Nicolas Sar-kozy, dans ce domaine, na rien denthousiasmant.Il ne peut en aucun cas constituer une rfrence.Le pacte de stabilit impuls par la diplomatie al-lemande, ds 2011, na pas t rellement contestpar lquipe au pouvoir, et les critres de crois-sance et demploi ont t totalement ngligs parla diplomatie de Nicolas Sarkozy. La crise finan-cire et montaire europenne na pas t rgle

    au cours de cette priode, qui a, en revanche, tmarque par une absence de vision et de projetdynamique pour lEurope. Cest ce moment queles choix daustrit budgtaire sans aucunecontrepartie conomique et sociale, y compris entermes de rgulation financire et bancaire, ontt poss, et finalement subis, par notre pays. LEu-rope et la France les paient encore aujourdhui,avec une croissance faible, une vritable dsin-dustrialisation et un risque dflationniste dsor-mais identifi. Avec un endettement public et privconsidrable, beaucoup dinjustices sociales et

    donc beaucoup de frustrations populaires, y com-pris vis--vis de lEurope.

    La droite dans lembarras. La rorientation dela construction europenne impulse par Fran-ois Hollande, ds le mois de mai 2012, a t claire.Elle contraste lvidence et sur lessentiel, avec lapolitique accepte par Nicolas Sarkozy. Elle per-met de redonner sens au choix de lEurope, cest--dire de lavenir dans la paix. Do la difficult delUMP le reconnatre, et donc, aborder la ques-tion europenne, au-del dinvestitures dailleurslaborieusement actes et sans relief.

    La gauche, sous lautorit du chef de ltat, est, eneffet, parvenue amender le pacte de stabilit, travers ladoption dun pacte de croissance, de lor-dre de 120 milliards deuros. Elle a galement ob-tenu ladoption du principe, terme, dunetaxation des transactions financires internatio-nales, la mise en place dun plan emploi jeunes, sous limpulsion du couple franco allemand.Elle a plaid, avec succs, pour linstauration delUnion bancaire, pour mieux rguler la finance, et,surtout, mieux prvenir les crises bancaires et sp-culatives, comme celle rencontre, en 2008.Le sauvetage et la rorientation de la PAC, au b-nfice des exploitations agricoles les plus mo-destes, ont t assurs. La rvision de la directivesur les travailleurs dtachs a t arrache,avec la volont de casser les tendances au dum-ping social, actuellement luvre, et de respon-sabiliser les entreprises donneuses dordre.La politique financire et montaire, conduite parla BCE, sest considrablement assouplie depuisdix-huit mois, travers une prise de conscienceopportune des risques de dflation lchelle ducontinent, et surtout de la zone euro, le rachat par-tiel des dettes souveraines des pays les plus expo-ss, et une rduction progressive des taux dintrtrels. L encore, le plaidoyer de Franois Hollandea t dterminant pour voluer et inflchir le coursde la politique europenne.

    Il convient de poursuivre cette action de rorien-tation, afin de conforter le modle social et poli-tique de lEurope, face aux drives populistes etaux tentations nationalistes, qui minent le sens deson ambition. Il est clair quune majorit de

    gauche au Parlement europen, avec, la cl, ladsignation dun nouveau prsident de la Com-

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    mission aiderait puissamment cette transfor-mation progressive et progressiste.Face cette cohrence, la rcente convention delUMP, consacre la fois la stratgie cono-mique et la dsignation des ttes de listes r-

    gionales pour les lections europennes, a rvlson embarras sur le sujet. LUMP a ainsi t ca-pable de dvelopper des propositions cono-miques et financires, sans chercher la moindrecorrespondance avec une ambition ou un projeteuropen. Elle a investi des candidates et candi-dats sans donner la raison sociale, ni le sens decet acte. Il est vrai qualler au-del, cest savanceren terrain min pour lUMP. Cette famille poli-tique est divise sur la question depuis 35 ans etle fameux appel de Cochin du 6 dcembre1978, 6 mois avant la premire lection euro-

    penne au suffrage universel direct. Cette frac-ture ne sest jamais dmentie depuis, quilsagisse du principe de lentre de lEspagne et duPortugal dans la Communaut europenne, aucur des annes 80, ou des dbats suscits parladoption, par voie de referendum, du Trait deMaastricht, en 1992, avec le refus argument dePhilippe Seguin, au nom du courant gaulliste.LUMP est mal laise sur la question des insti-tutions europennes, du rle du Parlement deStrasbourg. Elle peine dfendre le bilan de Ni-colas Sarkozy. On peut le comprendre. Elle

    cherche ses mots pour critiquer laction de r-orientation engage depuis vingt-et-un mois parla gauche. Elle hsite sans cesse entre logique in-tergouvernementale et renforcement dun fd-ralisme assum, alors que des dcisionsconomiques et fiscales urgentes simposentpour conjurer dumping social et fiscal.

    Le boulet du bilan du PPE. En outre, le bilan duPPE et de la commission dirige par un conser-vateur au plan social et un libral au plan co-nomique, est le sien. Il se caractrise par uneaustrit renforce, en particulier, au dtrimentdes pays du sud de lEurope, la monte des ph-nomnes de repli nationaliste, laggravation duchmage, et des ingalits sociales, labsence deprojet politique capable dentrainer, de mobiliserles peuples dEurope. Il se manifeste, aussi,par la course permanente la dflation com-ptitive , au risque de transformer lambition eu-ropenne, celle des fondateurs, en Munichsocial et en une guerre de tranche cono-mique lourde de menaces.

    Dans ces conditions, lUMP tergiverse, hsite assumer, sans avoir la capacit de renier. Tirail-le entre ses tropismes souverainistes tradition-nels et les lans fdralistes de quelques-uns,entre son souci de complaire au discours de rejet

    aveugle de lEurope formul par le Front nationalet sa proccupation de demeurer crdible et dene pas se couper de la branche centriste, lUMPgagne du temps.

    LUMP pressent que sesrecettes conomiques aggrave-raient le risque dflationnisteet apparaitraient de plusen plus dcales, au regardmme du diagnostic pos

    par la BCE ou le FMI.

    Un projet conomique et socital, sans rap-port avec les dfis europens. Son projet, ul-tralibral pour le pays, au plan conomique, etautoritaire, sur le plan socital, lloigne de toutelucidit sur la construction europenne et le rlede la France dans cette dification. LUMP pres-sent que ses recettes conomiques aggrave-

    raient le risque dflationniste et apparaitraientde plus en plus dcales, au regard mme dudiagnostic pos par la BCE ou le FMI. Elle voitbien que ses approches xnophobes et de d-fiance vis--vis de lautre, de ltranger lui interdi-raient tout discours srieux sur louverture unmodle europen, confiant en lui-mme et por-teur de paix. Elle sent bien que la thmatique des frontires lcarte de toute politique cr-dible au cur de lEurope. En outre, la tentationde repli nationaliste contredit directement les r-flexes conomiques libraux , et le discours

    sur le dclin de la France nest pas le meilleur ta-lisman pour la construction de lEurope.La France a besoin dun dbat europen srieux,rassembleur, novateur. Il est craindre quelUMP le refuse, faute dides claires et coh-rentes. Faute, aussi, de volont de se dmarquerdes facilits dun dbat politicien sur la lgitimitdun pouvoir qui a t investi par le suffrage uni-versel, il y a moins de deux ans et qui dispose detrois ans encore pour gouverner et changer ladonne. Qui possde aussi un bilan et un projet.

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    DCRYPTAGE & DBATS

    Ladhsion au FN est forte dans des zoneso la privatisation de lespace rsulte dunchoix pleinement assum

    Jacques Lvy est gographe et urba-niste, professeur lcole polytechnique fdrale de

    Lausanne, directeur du Laboratoire Chros. Il est, parailleurs, codirecteur de la revue EspacesTemps.net.

    Existe-t-il une gographie cohrente du vote, lchelle du territoire franais ?Il existe bien, en effet, des logiques spatiales quitendent se renforcer. Le choix de localisation delhabitat est, de ce point de vue, plus important

    que par le pass. Tant et si bien que les diffrencesgographiques psent davantage, aujourdhui,dans les votes, que les catgories socio-profes-sionnelles. Il y a toujours eu une spatialit duvote, qui na cess de se renforcer au fil du temps.La gographie franaise a longtemps repos surdes rgions homognes, autour des villes et descampagnes correspondant des identits et destraditions. Les choses ont chang. Au point onous tendons peu peu vers un systme o laplace quon occupe dans un ensemble urbain de-

    vient dterminante. Dans les cartes habituelles, siles diffrences rgionales se maintiennent en ap-

    parence, cest parce quon donne beaucoup de sur-face des territoires dpeupls. En recourant loutil du cartogramme et en accordant, sur lacarte, la mme place tous les lecteurs, on saper-oit que ces phnomnes rgionaux se sont consi-

    drablement attnus. Il existe ainsi bien une rgionalit du Front national. On vote davantagepour ce parti dans le Sud-Est que dans lOuest. Celanempche nullement, cependant, leffet de gra-dient durbanit. Ce qui signifie, en clair, que, quelque soit le territoire incluant, dans une mmesphre, ville, banlieue et zone priurbaine, le scoredu Front national est toujours plus fort quand onsloigne du centre. Le constat vaut pour toutes lesaires urbaines, quelle que soit leur taille. De cepoint de vue, le FN est une exception. Ce qui vaut

    pour ce parti nest pas applicable aux autres mou-vements politiques.

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    Dans Le mystre franais, Emmanuel Todd etHerv Le Bras constatent une adhsion au can-didat socialiste dans les zones traditionnelle-ment acquises au catholicisme. Ceci vaut, en

    particulier, pour lOuest. Comment expliquez-vous ce phnomne ?La notion de catholique zombi , propre Emma-nuel Todd, ne me semble pas pertinente. Daprs lui,certaines permanences sont immuables. Et ce,mme lorsque les indicateurs tendent dmontrerle contraire ! Ainsi, les familles dites complexes sont-elles pour lui un indicateur majeur de diffren-tiation. Ce qui tait sans doute juste il y a un sicleou deux, ne lest toutefois plus, aujourdhui. Todd esttrs rticent lide que la socit dans laquellenous vivons pourrait changer, en profondeur. Il atendance opposer le fondamental , confindans limmobilit, et la surface , sujette au chan-gement, au mme titre quun Fernand Braudel quiestimait quil y avait une histoire immobile pour leslments essentiels de la vie sociale.Jappartiens une autre famille de pense, qui es-time que lhistoricit vaut pour lensemble de la so-cit, mme si elle se manifeste, selon les domaines, des rythmes diffrents. Le fait que notre payscompte, aujourdhui, moins de catholiques quau-trefois, tend ainsi dmontrer quun changement

    profond de socit sest opr, mme si les post-ca-tholiques bretons sont diffrents de leurs homo-logues parisiens. Comme dans dautres rgionsdomines par un pouvoir imprial, o lapparte-nance un espace tatique et gopolitique taitcontrainte, la Bretagne sest soude autour delglise, rige en outil didentit rgionale. Le faitque lidentit bretonne sexprime aujourdhui autre-ment que par la religion, a correspondu un chan-gement dans la nature de ce sentimentdappartenance. Elle nen demeure pas moins trs

    puissante. Laffaire des bonnets rouges la dail-leurs parfaitement dmontr. On a vu des al-liances de classe entre patrons et ouvriers, ce quinest pas courant ailleurs en France. En Bretagne, onpeut mme tablir une relation entre les revendica-tions daujourdhui et les rvoltes antifiscales delAncien Rgime.Dans lensemble, les identits rgionales dautrefoisse sont profondment modifies, notamment souslinfluence de lurbanisation. Lidentit des grandesvilles est ainsi trs proche, dune agglomration

    lautre, sans pour autant sapparenter aux modlesqui ont prcd. La mondialisation contribue les

    faire se rinventer et ne cre pas des identits de r-sistance, comme on lentend dire parfois, mais desidentits multiscalaires : tre de ce lieu et tre dansle Monde sont deux manires complmentaires de

    dfinir les identits mtropolitaines.

    Est-il possible de localiser et de rationaliserlabstention ?Labstention est marque socialement par le peudintrt que les exclus accordent au scrutin. Encombinant le vote par catgorie socio-profession-nelle et labstention, on voit bien, dautre part, qu'envaleur absolue, les ouvriers ont opt moins massi-vement pour Franois Hollande que les cadres, enmai 2012. Les premiers sont, en effet, beaucoupmoins nombreux stre dplacs dans les urnesque les seconds.

    La carte des votes blancs et nuls est corrle avec les gra-dients de lurbanit. Si les raisonsde labstention sont multiples etdiffuses, elles nen manifestent pasmoins une dsinclusion vis--

    vis du systme politique, tandisque le vote frontiste, au mme titreque le vote blanc et nul, se traduitclairement par une participation

    protestataire.

    Quelles sont les raisons de labstention et duvote blanc et nul ?La carte des votes blancs et nuls est corrle

    avec les gradients de lurbanit. Si les raisons delabstention sont multiples et diffuses, elles nen ma-nifestent pas moins une dsinclusion vis--visdu systme politique, tandis que le vote frontiste, aumme titre que le vote blanc et nul, se traduit clai-rement par une participation protestataire.

    Pourquoi le foss se creuse-t-il entre les tissusurbain et priurbain ?Je reste prudent, sur ce point. Le foss existe, certes,dans le cas du Front national, dont on voit bien quil

    est exclu des centres-villes. Parfois mme du priur-bain et au-del, ds lors quil se situe la priphrie

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    de grandes villes. Il faut distinguer, ce sujet,lhypo-urbain, compos daires multi-polarisespeu loignes des villes, o les pratiques ur-baines sont moins intenses, ou linfra-urbain, en-

    core plus lcart, du priurbain, qui est unecomposante des aires urbaines et o se concen-trent les mnages souvent actifs, et qui ont choisicet habitat et les modes de vie qui lui correspon-dent.Bien que disjointes morphologiquement et mar-ques par une discontinuit du bti, ces zonessont relies, fonctionnellement, par la mobilit,aux grandes villes. Les actifs qui le composenttravaillent en milieu urbain. Cest dans ces zones-l, mais aussi dans linfra-urbain, qui reprsentequelque 2 millions dhabitants, que le Front na-tional a connu sa plus forte progression. Or, il ya eu un dplacement important du vote dex-trme droite vers la priphrie, au cours des der-nires annes. Si lon considre que llectionprsidentielle de 2012 traduit une volution du-rable, on voit bien quil sest pass quelquechose.

    position conomique compa-rable, deux ouvriers vivant en

    centre-ville et dans le priurbainvont souvent effectuer des choixlectoraux diffrents, mais plus

    gnralement des choix de viediffrents. Ainsi il ny a pas eudmeutes dans les centres-villes, en 2005, alors mme quela pauvret, la prsence de

    jeunes issus de limmigration yest pourtant trs prsente.

    Le priurbain est-il un lieu de pauvret et delocalisation subie ?Il faut lever un malentendu. Deux dynamiquesdistinctes se font jour. Lune relve du prix delimmobilier qui loigne, tout naturellement, lescatgories moyennes des centres historiques. Cephnomne est dailleurs trs largement pari-

    sien, puisque ce cot y est suprieur de deux trois fois suprieur celui des autres grandes

    villes, pour des revenus quivalents. Lle-de-France est confronte une migration de Parisintra muros vers les communes de la petite cou-ronne. Avec, pour consquence, une extension

    de la zone centrale qui devrait tre conforte parlamlioration de loffre des transports publics.Lautre phnomne tient la priurbanisation etlaccomplissement dun rve : devenir propri-taire, plutt que locataire, possder une maisonavec jardin, plutt quun appartement et circuleren voiture, plutt quen transports publics. Il sersume par une privatisation de lespace. Lescouches sociales les moins favorises se trou-vent conduites opter pour des localisationsloignes qui leur permettent daccder un fon-cier moins cher et de rester plus ou moins solva-bles. Cest pour elles un sacrifice financierimportant, qui prouve bien quil sagit dun choix forte signification, se situant dans un rapportfort avec limage quelles se font dune vie rus-sie.Sensuit un vritable chass-crois entre les d-tenteurs de capital culturel levs qui se trouventnaturellement attirs par les villes-centres, et lescatgories populaires, faiblement dotes, quitendent sen loigner, en partie par contrainte,en partie par choix. La vision selon laquelle les

    riches chasseraient les pauvres ne rend pascompltement compte du problme, dans lamesure o la qute priurbaine peut rsulterdune dcision positive de la part des intresss.LEurope vit ce phnomne avec plusieurs di-zaines dannes de dcalage aves les Etats-Unis. position conomique comparable, deux ou-vriers vivant en centre-ville et dans le priurbainvont souvent effectuer des choix lectoraux diff-rents, mais plus gnralement des choix de viediffrents. Ainsi il ny a pas eu dmeutes dans les

    centres-villes, en 2005, alors mme que la pau-vret, la prsence de jeunes issus de limmigra-tion y est pourtant trs prsente.

    Nombreux sont ceux, parmi les catgoriespopulaires que vous dcrivez, qui ressententun sentiment de solitude et dabandon,quils rpercutent ensuite dans les urnes, enoptant pour des solutions extrmes.Oui. Notons dabord que dans le priurbain, dela majorit des grandes villes de France, il y a des

    personnes trs aises. En analysant la carte desrevenus, jai identifi un anneau des seigneurs

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    qui se situe aux confins du territoire priur-bain, relativement proche de la ville et djcampagnard : le meilleur des deux mondes, vupar ses habitants. Sensuit une logique de

    club qui touche, plus particulirement, les ca-tgories les plus aises, qui se donnent lesmoyens de slectionner leur voisinage. Le Frontnational fait parfois de bons scores dans ceszones, mais ce nest pas systmatique.Si au contraire, on sloigne vers les limites desaires urbaines, le point dquilibre entre dsirset ralit vcue devient problmatique. La par-tie infrieure de la classe moyenne et la frangesuprieure des catgories infrieures, du faitdes limites de leur solvabilit et des cons-quences gographiques que cela leur impose,et, compte tenu des sacrifices consentis, sontconomiquement fragilises, tandis que leurvie quotidienne peut ne pas correspondre leur rve.

    Pourquoi le vote frontiste est-il surrepr-sent en milieu priurbain ?Le vote frontiste se situe aux antipodes de lidede bien public (et de biens publics). Il traduit unmanque vident de confiance dans la socit,rige comme un jeu somme ngative. Ce

    rejet et llimination maximale de toute exposi-tion laltrit dans lespace public, sont coh-rents, cause et consquence la fois, avec lanotion de socit de mfiance . Il nest guresurprenant, sur ce point, que le soutien auFront National soit particulirement fort dansdes zones o la privatisation de lespace rsultedun choix initial, renforc par les pratiquesquotidiennes, pleinement assum.

    lheure de la mtropolisation, ne

    convient-il pas de redfinir une proximitsocitale pertinente, lchelle locale ?Oui, mme sil convient de temprer quelquepeu la notion de local . Cet chelon est le pluspetit niveau o tout peut faire socit. O lem-

    ploi, le logement, lconomie, les rapports so-ciaux forment un systme, part entire. Avecdes tailles variables. Lle-de-France est ainsiune socit locale, au mme titre que Romo-

    rantin. Ce qui nempche nullement la coexis-tence parallle despaces de solidaritinfra-locale.

    Le vote frontiste traduit unmanque vident de confiancedans la socit, rige commeun jeu somme ngative. Cerejet et llimination maximale

    de toute exposition laltritdans lespace public, sont coh-rents, cause et consquence la fois, avec la notion de so-cit de mfiance .

    Prenons le cas des arrondissements des troisgrandes villes franaises (Paris, Lyon, Mar-seille). Le systme fonctionne plutt bien,

    mme si les lus ny ont pas de pouvoirs ten-dus. Ils sont, en revanche, en capacit dagir surle vivre ensemble , dans une logique deproximit qui sied parfaitement lcheloncommunal. Cest ce niveau, ou dans le cadredes conseils de quartiers - l ou la dmocratieparticipative est prsente -, quil est possibledimpulser un nouveau rapport au politique.En multipliant les chelons territoriaux puis-sants et fragments lintrieur dune aire ur-baine, on sexpose recrer des espaces desgrgations.

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    Mensonges, censures, restrictions tous azi-muts Cest peu dire que les municipalits ad-ministres par le FN, dans les annes 1990, ont

    subi des attaques frontales. Au mpris des ins-titutions et au prix dune vritable mise sous tu-telle des principes de libert, dgalit et de

    fraternit. Aux manettes dans quatre villes du

    Sud-Est (Orange, Marignane, Toulon, Vitrolles),il a laiss derrire lui des villes endettes

    jusqu'au cou et dmontr son incapacit construire un projet social et culturel digne dece nom.

    Un urbanisme surdvelopp, une populationnombreuse, peu diplme et compose, no-tamment, darrivants de la dernire heure

    Il est utile de rappeler ce qua t leur bilan.

    Le glissement de lopinion sertde tremplin au FN. Tant et sibien quau soir du 18 juin 1995,

    Jean-Marie Le Chevallier, fidlelieutenant de Jean-Marie Le Pen,hrite des rnes de lexcutif

    local, succdant une droiteaux pratiques clientlistesprouves.

    Singularit toulonnaise. Toulon, les litesont longtemps concentr lessentiel de leurs ef-forts sur lactivit militaire. Ici, le localisme alongtemps constitu un rempart contre leschangements. Synonyme denvahissement, lamodernit a servi les desseins de lextrme-

    droite qui est parvenue fdrer le sentimentdimpuissance des laisss-pour-compte ,

    convaincus des mfaits du progrs. En 1995, leFN emporte les suffrages, au prix dun vritableconcours de circonstance qui rsulte de limpr-paration de la gauche et de ltat de dliques-cence dune droite proche des extrmes. Ducoup, le passage de tmoin sopre en douceur.Au nom dun discours rcurrent. Et dun prin-

    cipe immuable qui puise son inspiration dansla rhtorique de lAlgrie franaise, du racismeet de la lutte acharne contre la gauche et la la-cit.Le glissement de lopinion sert de tremplin auFront national. Tant et si bien quau soir du 18juin 1995, Jean-Marie Le Chevallier, fidle lieute-nant de Jean-Marie Le Pen, hrite des rnes delexcutif local, succdant une droite aux pra-tiques clientlistes prouves. deux pas de l,deux autres villes ont galement cd lin-

    fluence du FN : Marignane et Orange.Au fil des semaines, la nouvelle quipe sur-prend lopinion. Les deux premiers mois n-cessaires son installation se sont drouls

    sans incidence particulire, linverse des bi-bliothques dOrange ou des cantines scolairesde Marignane , prcise Luc Landri, auteurdun important mmoire sur limplantation duFN dans la rgion. la diffrence de ses condis-ciples frontistes, le maire ne prend aucune me-sure marquante. Au point de contraindre le chefsuprme, Jean-Marie Le Pen, le sermonnerlors dun Bureau national du mouvement, le30 octobre 1995. Ce qui ne lempchera nulle-ment, cependant, de mettre en place une ges-tion de bon pre de famille , aux seules finsde satisfaire ses affids et quelques rallis dedernire minute, habitus aux largesses somp-tuaires de ses prdcesseurs. Paradoxalement,lexprience frontiste rveille les consciences r-publicaines et militantes, touffes par unedroite clientliste qui a rgn sans partage surla ville trente annes durant. Lunion de la

    gauche sen trouve renforce. Des liens senouent avec les associations et les syndicats.

    Le bilan de la gestion municipale

    du Front national

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    Liens dautant plus forts que la majorit munici-pale se complait dans des rapports ambigus avecla mafia locale.

    Restrictions drastiques. Derrire son ct bonenfant, le premier dile se rvle tre un tribun re-doutable, convaincu du bien-fond de la rigueur.Avec, pour consquence immdiate, la limitationdes cots de fonctionnement et dinvestisse-ments. Au diable, les promesses ! Sous couvert derductions budgtaires drastiques, les subven-tions accordes aux associations diminuentcomme peau de chagrin. Et justifient des contri-butions slectives, au nom de considrations po-litiques partisanes. Pour le plus grand profit

    dorganismes qui se voient attribuer des aidessubstantielles, comme le Cercle national des com-battants ou Fraternit franaise, qui comptentparmi les satellites du FN. La municipalit apportegalement son soutien lassociation 35 ansaprs, charge dorganiser une manifestationcommmorant le retour des rapatris dAlgrie.Ct culture, le Centre national de Chateauvallondevient rapidement le principal lot de rsistance.Attaqu de toutes parts, il ne doit son salut qulopinitret de la ministre socialiste, Catherine

    Trautmann, et du prsident du Conseil rgional dePACA, Michel Vauzelle, qui sefforcent de compen-ser labsence de financement municipal. Cette in-tervention est dautant plus utile que linstitutionexerce une activit culturelle dans les quartierssensibles.Au sein de lexcutif rgional, les lus frontistesprennent systmatiquement position contre leFonds rgional daide contemporaine (FRAC) et lespectacle vivant. Ils sopposent galement touteforme de coopration culturelle avec le bassinmditerranen. Une logique de rupture qui ne faitque sajouter au veto aux subventions allouesaux scnes rgionales. La remarque vaut gale-ment pour la politique de la ville, voue aux g-monies, au prtexte quelle favoriserait la

    dviance sociale , linterventionnisme cono-mique, la formation ou le soutien aux entrepriseset au tissu associatif Au FN, nous pensons quelargent le mieux utilis est celui qui reste dans la

    proche du contribuable , rsume alors un lu.Au sein mme de la cit varoise, les personnes endifficult, majoritairement issues de limmigra-

    tion, ptissent des effets dune politique minima-liste. Derrire lillusion dune gestion financire

    rigoureuse, transparaissent, cependant, des d-penses excessives. Tant et si bien que laccroisse-ment des dficits en investissements retarde ledveloppement de la cit. Sans parler dune poli-

    tique localiste qui trouve rapidement ses limitesdans une ville en manque de perspectives.

    Au fil des mois, la situation sedgrade et le dficit se creuse.Les lus frontistes reviennent

    peu peu sur leurs engage-ments. Ds 1996, la taxe dhabita-tion connat une augmentation

    sensible et la taxe profession-nelle est porte au maximumdu taux autoris. Le temps,

    pour Jean-Marie Le Chevallier,dannoncer une hausse des im-

    pts de 5,5 %, aussitt estime 7,2 % par le socialiste Christian

    GouxAu fil des mois, la situation se dgrade et le dficitse creuse. Les lus frontistes reviennent peu peusur leurs engagements. Ds 1996, la taxe dhabi-tation connat une augmentation sensible et lataxe professionnelle est porte au maximumdu taux autoris. Le temps, pour Jean-MarieLe Chevallier, dannoncer une hausse des imptsde 5,5 %, aussitt estime 7,2 % par le socialisteChristian Goux. La lgre dcrue amorce, les an-

    nes suivantes, ne constitue gure quun subter-fuge.Le dsastre gagne rapidement le terrain cono-mique. Ce qui a le don dagacer dans une munici-palit aux ressources limites, dont lactivit sersume, pour lessentiel, la prsence de la Direc-tion des chantiers navals (DCN). De surcrot, lex-cutif municipal sempresse de liquider lepatrimoine communal, via la vente de nom-breuses proprits qui relvent de son autorit.Au nom du sacro-saint principe de rigueur, au-cune initiative nest affiche. Les investissementsse limitent au strict minimum. Du coup, les

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    marges de manuvres seffritent. Cest le tempsdes affaires, avec la disparition troublante dudirecteur de cabinet du maire et la rsurgencedun clientlisme notoire qui cotera cher au

    FN lors des lections suivantes. Epoque peuglorieuse qui se soldera par la mise en examendu premier magistrat et certains de ses ad-joints, mettant bas le fameux slogan Mainspropres, ttes hautes ! Les querelles intestinesachveront de perturber la majorit munici-pale. Avec, pour consquence inluctable, desrevers lectoraux, au profit de candidats degauche ports par la victoire des lections lgis-latives de juin 1997.

    Une ville surendette. Voil ceque dcouvriront les lus socia-listes, aprs six annes de ges-tion frontiste Vitrolles, par lecouple Mgret. Au point quelquipe pilote par le maire

    (PS), Guy Bono, ne bnficierapas de fonds suffisants pour

    honorer les salaires des fonc-tionnaires. Dure ralit qui se

    soldera par une situation finan-cire calamiteuse !

    Situation calamiteuse Vitrolles. Une villesurendette. Voil ce que dcouvriront les lussocialistes, aprs six annes de gestion frontiste Vitrolles, en 2003, par le couple Mgret. Aupoint que lquipe pilote par le maire (PS), GuyBono, ne bnficiera pas de fonds suffisantspour honorer les salaires des fonctionnaires.Dure ralit qui se soldera par une situation fi-nancire calamiteuse ! De surcrot, plus de 1600 fiches de paie seront attribues desagents non rsidents, dans le cadre de contratsqui ne correspondent pas ce que le service pu-blic est en droit dattendre de pareils recrute-ments.Pis ! Lexcutif socialiste doit faire face la d-gradation du patrimoine communal, de la voi-

    rie et des coles, touches par de nombreusesinfiltrations deau. Sans parler de labandon de

    la politique de la petite enfance, ainsi que desquipements sportifs et culturels qui ne rpon-dent plus aux normes et qui ont pourtant fait larputation de Vitrolles. Le tout, sur fond de

    fracture humaine et lapparition de zones denon droit o les lois de la Rpublique ne sontplus de miseRapidement, les politiques menes par le cou-ple Mgret et leurs acolytes mnent la dgra-dation progressive des lieux publics et unrsultat financier catastrophique. Situationcomparable, bien des gards, celle de Tou-lon. Au point que les socialistes mettront pro-fit la campagne pour publier un ouvrage surces annes noires, nhsitant pas pointer ltatde dcrpitude des lieux publics. Photos lap-pui. Ce livre se rvlera trs utile lusage. His-toire, surtout, de dnoncer la cration duneprime la naissance de 5 000 francs, attribue

    aux enfants franais ns de parents euro-pens qui vaudra aux Mgret une condamna-tion. Preuve que les principes institutionnelspeuvent servir de rempart contre ces appren-tis fascistes qui cdent trop souvent leurspenchants extrmistes.Dans les quartiers, ces pratiques donnent lieu une vritable politique dapartheid, au profit

    des seuls europens, presss de quitter leszones taux dimmigration lev, avec lappuide la mairie. Lieux dinsalubrit o les servicespublics et la police nentraient plus depuis long-temps. Bel exemple de discrimination !Durant cette priode, la culture et le tissu asso-ciatif deviennent les piliers incontournables dela rsistance. Au point que leurs animateurssont dans le viseur de la municipalit. Les M-gret sen prennent ainsi des symboles, en por-tant bas lexpression culturelle locale.

    Sensuivent la fermeture du cinma, la mise enveilleuse du thtre et la cration dun comitde lecture rig par lexcutif en instance decensure, au sein mme de la bibliothque mu-nicipale. Le tout, au profit dune prtendue cul-ture folklorique, cense servir des intrtsnationalistes.Aussitt lus, Guy Bono (PS) et ses troupes por-teront leffort sur lassainissement de la situa-tion financire. Au fil du temps, ils parviennent rduire lendettement et stabiliser les

    comptes municipaux. Cette politique ira de pairavec la rorganisation des services publics et le

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    recrutement dune trentaine de cadres de catgo-rie A. Seul moyen de tourner la page et de mettreun terme plusieurs annes dimprities.Forts du soutien du Conseil gnral des Bouches-

    du-Rhne, ils procderont la restauration dupatrimoine communal. Paralllement, ils met-tront laccent sur le rtablissement du lien social,en partenariat avec le tissu associatif, et labore-ront un plan de rsorption de la prcarit. Enfin,ils creront une Maison de lemploi et multiplie-ront les contacts avec des organismes dinsertion.Indispensable, aprs six annes de coupes som-bres !

    Orange amre ! Corruption, clientlisme, at-

    teinte aux services publics et au milieu associatif,absence complte de visibilit politique, dgrada-tion des quipements Avec Jacques Bompardaux commandes, la situation ne cesse de se d-grader, Orange. Exemple, parmi dautres, lex-pulsion, lappel du maire frontiste, de laconseillre de gauche, Anne-Marie Hautant, parles forces de police, au dtour dun dbat dorien-tation budgtaire. Le tout, sur fond dinsultes etdinvectives, ladresse des lus de lopposition.Une habitude dont le maire ne se dpartita ja-

    mais totalement. linstar des autres lus frontistes, Bompard faitde lassainissement des finances une priorit. Etquelle priorit ! Sa politique se solde par une v-ritable calamit : baisse des investissements etdu prix de leau, au motif que la municipalit n'as-sure plus l'entretien de la tuyauterie et les inves-tissements ncessaires. En octobre 2011, laChambre rgionale des comptes pointe des irr-gularits, en mettant laccent, en revanche, surdes dpenses caractre familial du coupleBompard. En cause, des factures de restaurant,des nuits dhtel, des soins de vinothrapie,hammam et bain thermal , des notes de par-fums de luxe, des cigares et cigarettes, des coti-

    sations d'assurances personnelles , desachats de billets de train, d'instruments de mu-

    sique, de literie, l'achat d'un tlphone Nokia ef-fectu au nom de jeune fille de l'pouse du maire. Sans parler de l'utilisation de deux vhiculesde fonction . En terre frontiste, lincomptence fi-nancire bat son plein.Bompard sest content de grer le goudron ,

    disait de lui le prsident de lassociation Faireface, en 1996 : quelques chausses refaites, des

    sens interdits supprims, des places de parkinggratuites . En 2010, il tait mis en examen pour prise illgale dintrt dans une affaire devente de terrain. Un an plus tard, la Chambre r-

    gionale des comptes de PACA pointait, son tour,des irrgularits dans sa gestion municipale. Cequi nempche nullement lintress de dfendrebec et ongles sa gestion, prs de vingt ans aprsson lection.

    En 1995,Marignane soffre un an-cien employ de banque, Daniel

    Simonpieri, "lepniste light", aux

    dires de ses adversaires. Cet en-fant du pays reprend soncompte le vieux systme client-liste de la droite qui contrlait laville depuis prs dun demi-sicleet lui avait octroy un sige auconseil municipal.

    Marignane : npotisme et clientlisme tous

    azimuts ! Marignane est une cit pavillonnairede 32 000 mes, compose, en large partie, de fa-milles douvriers raptris noires et de la vieille im-migration maghrbine. En 1995, la citmditerranenne soffre un ancien employ debanque, Daniel Simonpieri, lepniste light , auxdires de ses adversaires. Cet enfant du pays re-prend son compte le vieux systme clientlistede la droite qui contrlait la ville depuis prs dundemi-sicle et lui avait octroy un sige au conseilmunicipal. Comme dans les autres municipalits

    frontistes, le maire affiche quatre priorits : prf-rence nationale, scurit, baisse des impts etrestauration culturelle. Tout est bon pour fabri-quer et entretenir discriminations et tensions. Cequi vaut, en particulier, la majorit frontiste, desupprimer, dans les cantines scolaires, les repasde substitution pour les enfants musulmans.Ct scurit, les brigades de nuit, armes, sanscagoules, et affubles de casquette, rangers ettreillis noirs recrutent dans les milieux prochesde l'extrme-droite. Formes par des gros bras

    maison, elles entretiennent la peur, provoquentles jeunes et multiplient les contrles au facis,

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    comme Vitrolles et Orange. Manire dafficherla vitrine de l'ordre nouveau au petit peuple, enqute de tranquillit.

    En moins de temps quil ne

    faut, les impts locaux aug-mentent, tandis que le centre-ville, promis la rnovation,comme Vitrolles, Orange etToulon, ne cesse de se dgrader.Le rapport de la Chambre rgio-nale des comptes est particuli-rement accablant de ce point devue : aucune restructurationdes services , diminution del'autofinancement , aug-mentation importante du poidsde la dette , qui atteint prs de

    44 millions d'euros, trop forteaugmentation des charges cou-

    rantes par rapport aux recettesde fonctionnement .

    En moins de temps quil ne faut, les impts lo-caux augmentent, contrairement aux pro-messes, tandis que le centre-ville, promis larnovation, comme Vitrolles, Orange et Tou-lon, ne cesse de se dgrader. Le rapport de la

    Chambre rgionale des comptes est particuli-rement accablant de ce point de vue :aucune restructuration des services , dimi-nution de l'autofinancement , augmentationimportante du poids de la dette , qui atteint

    prs de 44 millions d'euros, trop forte aug-mentation des charges courantes par rapportaux recettes de fonctionnement . Les chargesde fonctionnement courant ne cessent de pro-gresser, pour atteindre prs de 9 %, tandis queles dpenses nettes de personnel explosent :64 % des charges de fonctionnement, en 2003 !La CRC fustige galement des avantages ennature concernant les voitures de fonction -33 vhicules acquis entre 1998 et 2001 -, l'at-tribution d'avantages dans des conditions irr-

    gulires , notamment des logements defonction attribus titre gratuit .Le tout vaut Daniel Simonpieri dessuyer unepeine dun an de prison avec sursis, en 2011, etcinq annes dinligibilit, pour harclementmoral, lencontre dun employ municipal,dorigine marocaine. Il plonge galement pourfavoritisme, fausses factures et emploi fictif. Unconseiller municipal de lopposition va jusqupublier une liste d'emplois familiaux sur la-quelle figurent les noms de dix-sept personnesayant bnfici d'embauches et qui se trouvent

    directement lies des lus ou la famille dumaire. En 1998, le tribunal administratif se voit son tour contraint d'intervenir dans une af-faire de subvention prfrentielle et d'attribu-tion d'un local l'association Fraternitfranaise. Ce npotisme a ses limites. Adhrentdu MNR, puis de lUMP, Simonpieri passe latrappe et perd sa mairie en 2008. Comme par-tout ailleurs Le mois prochain, il faudra sensouvenir.

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    loccasion dune rencontre organise, le5 fvrier dernier, par la Fondation Jean-Jaurs,il tait question de linfluence des mdias et dessondages sur la perception du FN. Il sagissaitaussi de savoir si la mdiatisation tranquille

    du FN faisait ou ferait son ventuel succslectoral. Nous livrons ici quelques enseigne-ments de cette rencontre.

    Nicolas Lebourg a demble pos les bases dudbat, en se livrant une prsentation de

    ltat du FN . Le parti dextrme droite reven-dique, ce jour, prs de 74 000 adhrents, unniveau trs lev, avec plusieurs volutionsmarquantes. Le FN retrouve un tat, un fonc-tionnement et une structuration, avec MarineLe Pen, proche de celle davant la scission m-grtiste : unit, fonde sur le compromis na-tionaliste , un fort rajeunissement, pour seprojeter vers lavenir, et une forte fminisation,

    pour des raisons financires. Histoire de ne pastre pnalis par les lois sur la parit hommes-femmes.Sa normalisation offre des perspectives ses adhrents. Aujourdhui, le militant peutchercher faire carrire sur le plan politique.Ainsi, de gros moyens ont t dploys dansle domaine de la formation, autour de 5 objec-tifs :

    aller au contact de la population :porte--porte, tractage

    fournir des lments de langage auxadhrents sur lconomie et expliquer la sortiede leuro ;

    former juridiquement les futurs luspour les rendre oprationnels et en faire une al-ternative face aux diles en place. Les villes la-boratoires ne sont plus dactualit ;

    former les cadres du parti pour tenir

    les militants, viter les drapages mdiatiques etmatriser lexpression publique.

    Depuis 1999, les relations internes se basent,toutefois, sur lallgeance au clan Le Pen .Ce qui ne manque naturellement pas de crerdes tensions au sein de la direction, au regard duparcours de ses dirigeants qui sopposent rgu-lirement sur les fondamentaux . Des tenta-tives ont t menes pour vincer les groupes lesplus radicaux pour rendre le parti plus respec-table . Avec, la cl, un recentrage de la doctrinesur de nouveaux thmes, afin de promouvoir le

    national-populisme . Cette dmarche se carac-trise par plusieurs orientations politiques, rsu-mes dans le marinisme :

    rejet de lislam et du nolibralisme ; valorisation des thmatiques sociales

    et de ltat-providence.

    Pour se normaliser, le FN

    sefforce de changer de para-digme, en sinscrivant dans unedynamique politique moderne.En se dmarquant de ses mar-queurs anciens que sont la

    Seconde Guerre Mondiale,la Guerre dAlgrie, au plan

    politique, et le poujadisme,

    au plan conomique.En rsum, le FN est un parti identitaire , ausens classique du terme, qui semploie pro-mouvoir lgalitarisme , ce qui est plus nou-veau. Pour se normaliser, il sefforce de changerde paradigme, en sinscrivant dans une dyna-mique politique moderne. En se dmarquantde ses marqueurs anciens que sont la SecondeGuerre Mondiale, la Guerre dAlgrie, au planpolitique, et le poujadisme, au plan cono-

    mique. En interne, cette stratgie se traduit par

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    Le Front national, les mdiaset des sondages

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    une perte dinfluence de la Nouvelle droite et desmouvances catholiques. On comprend mieuxainsi les nouvelles rfrences Jean Jaurs etmme Pierre Mendes-France lui, pourtant,train dans la boue par Jean-Marie Le Pen !

    Enfin, le FN sinscrit dans une dynamique delobby. Sil peine constituer des listes en prvi-sion des lections municipales, son ambitionnen demeure pas moins de marquer les es-prits, en exerant une relle influence sur lopi-nion. Il se veut ainsi le dfenseur des servicespublics et des relegus. Ainsi, il met tout sonpoids pour peser sur le dbat, en poussant lesautres partis intgrer les problmatiques quilprtend dcliner dans son programme : c est ceque lon appelle la lepnisation des esprits .Les atermoiements, hsitations dune certainepartie de la droite dite classique, en sont lapreuve. Au point que le FN peut envisager s-rieusement des alliances avec la droite tradi-tionnelle , en largissant considrablementson spectre lectoral et en ciblant prioritaire-ment les villes de 9 000 100 000 habitants.

    La sociologie des lecteursdu FN est fort dissemblable

    de celles des autres partis. Ony remarque un fort potentielchez les couches dites popu-laires. Elle croit chez les 25-45ans, ceux qui travaillent, maisqui subissent la duret de la si-tuation du march de lemploi.

    Jrme Fourquet, directeur du Dpartement

    Opinion et Stratgies dEntreprise de lIfop, ana-lyse, dans son propos, la structuration du voteFN et les difficults que les sondeurs prouventpour mesurer sa vritable cote de popularit. Ily a ncessit de redresser les sondages pro-pres au FN, comme pour tout autre parti, ceciprs que les rponses faites sont sujettes in-terprtations. Si les lecteurs frontistes ne se d-voilaient pas auparavant, il y a dsormaismoins de rticences affirmer ses choix, mmesi tout cela reste fragile. Avant 2010, on obser-

    vait une proportion trs importante de sous-dclarations . Les temps ont chang, et il nest

    dsormais plus tabou de se revendiquer du FN.Autre question soumise au dbat : la porositentre lectorat UMP et vote FN. Concrtement,le glissement des intentions de votes en faveurdu FN est caractristique de toutes les forma-

    tions politiques : de lUMP, au MoDem, jusqullectorat de Jean-Luc Mlenchon. Aprs avoirconfort la dfiance envers les structures delEtat, son administration, les lus, les lites,lambition du parti de Marine Le Pen est de sap-proprier toutes les arcanes du pouvoir.

    Pour lheure il est difficile dapprcier, au plusprs, le niveau du FN. Il est, cependant, lev. Ilconvient, toutefois, de relativiser cette prmi-nence dans les sondages, au regard de lestima-tion de la participation. Ce qui est sr, cest quily a une dynamique croissante par rapport lapprciation des autres partis plus clas-siques . Ceci se traduit dans les sondages parun fort transfert de voix FN vers les listes dedroites, ds lors que celles-ci paraissent pro-mises la victoire, en clair un vote utile sondtriment.

    La sociologie des lecteurs du FN est fort dis-semblable de celles des autres partis. On y re-marque un fort potentiel chez les couches dites

    populaires. Elle croit chez les 25-45 ans, ceux quitravaillent, mais qui subissent la duret de la si-tuation du march de lemploi. Les sniors sontdornavant trs minoritaires. Le fait structurantde cet lectorat est la monte en puissance desfemmes qui viennent maintenant presque ga-ler la proportion masculine. Pour mmoire,llectorat fminin reprsentait 1/3 de llectoratdu FN, en 2002, contre 50 %, douze ans plustard.

    Sur la question de la connivence subjective ouimplicite entre les mdias et le FN, et limpactdes sondages favorables au FN, il faut bien gar-der lesprit que les premiers sont clients dessondeurs, avec lambition de vendre. Il existedonc bien une relation commerciale entre m-dias et sondeurs , qui focalise lattention deslecteurs et spectateurs, et donc la consomma-tion de mdias.

    Jol Gombin, doctorant en sciences politiques,

    apporte quelques claircissements sur la socio-logie et la structure de llectorat du FN. Il affirme

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    dentre que beaucoup de strotypes et pr-supposs sont invalids par lensemble desdonnes scientifiques. La caricature, cest letransfert massif des lecteurs du PC vers le FN.Aucune donne, aucune tude ne peut tayer

    cette thse. Alors, pourquoi une telle mprise ?La faute au PCF qui sest toujours prsentcomme le parti des ouvriers. Ce qui, sociologi-quement, est une contre-vrit. Il y a toujourseu, et en proportion non ngligeable, un lecto-rat ouvrier de droite. C est la dimension symbo-lique de notre perception des choses qui estmise en jeu ici. Sappropriant ainsi une catgo-rie particulire de llectorat, il en stigmatisedautres.

    Jol Gombin met une critique sur les m-thodes de sondages qui, malheureusement, neprennent pas en compte tous les critres utilespour avoir une lecture objective des sondages.Pour exemple, il faudrait, aujourdhui, prendreen compte la nature des diplmes. Nous nepossdons pas les outils statistiques et les cor-rectifs adquats cette fin, prcise le chercheur.Enfin, il est toujours possible dinterprter unsondage, selon lobjet du message. Il existe tou-jours un dfaut de recul et danalyses sur cetlectorat.

    Analyser le FN, cest tudier la France et lUE, r-sumeJean-Yves Camus. Cest aussi tudier larecomposition des droites : autrefois, elles se

    composaient de deux familles - conservateurset libraux. Aujourdhui, elles sont de troistypes. Les deux premires sur lesquelles vien-nent se greffer les nationaux-populistes .Il est encore difficile de mesurer les mouve-

    ments idologiques entre ces trois mouvances,dans la mesure o subsiste une notion affectivedans le choix des lecteurs. Il nous faut, malgrtout, conduire un dbat dpassionn sur lesujet, car le phnomne nest pas marginal.Au contraire, il se structure.

    Il ny a pas de lien entre ch-mage et vote FN. Ce que lon ob-

    serve, malgr tout, cest que

    linactivit favorise labstention,ce qui, mcaniquement, favo-rise la monte en puissance duFN, dont llectorat reste mobi-lis.

    Il ny a pas de lien entre chmage et vote FN.Ce que lon observe, malgr tout, cest quelinactivit favorise labstention, ce qui, mcani-

    quement, favorise la monte en puissance duFN, dont llectorat reste mobilis. Il est toutaussi illusoire de dire que ceux qui ont choisi,jusquici, labstention voteront majoritairementFN lavenir.

    1 NOTE DE VEILLE ET RIPOSTE SUR LA SITUATION DE LA DROITE ET DE L !EXTRME-DROITE 15

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    16 NOTE DE VEILLE ET RIPOSTE SUR LA SITUATION DE LA DROITE ET DE L!EXTRME-DROITE

    Sans commentaire(Avril 1935)