regards sur la droite_n° 19.pdf

Upload: parti-socialiste

Post on 14-Apr-2018

221 views

Category:

Documents


0 download

TRANSCRIPT

  • 7/30/2019 Regards sur la Droite_n 19.pdf

    1/13

    Regar

    dssu

    rlad

    roite

    15 mai 2013 - n 19

    Lettre ditepar la cellule Veille et Ripostedu Parti socialiste

    dito

    NOTE DE VEILLE ET RIPOSTE SUR LA SITUATION DE LA DROITE ET DE L EXTRME-DROITE 1

    Demandez le programme

    On ne prte pas assez attention aux propositions qugrnent, de temps autre, les diri-geants de lUMP. Il est vrai quils donnent aujourdhui la priorit, non pas la critique -cest le rle dune opposition - mais une volont de dstabilisation du gouvernement.Cela tient, certes, aux divisions internes de lUMP, o rgne la surenchre, pour capter lesoutien des militants. La polmique mene contre la justice (150 dputs UMP soutien-nent Henri Guaino qui est poursuivi pour un dlit de diffamation !) montre aussi un cer-tain affolement face aux affaires qui cernent lancien Prsident et son homme deconfiance, Claude Guant. Mais il y a, et peut-tre surtout, la poursuite dune politique,celle mise en uvre par Nicolas Sarkozy, dans les derniers temps de son quinquennat,de radicalisation volontaire des oppositions dans la socit franaise pour crer des pas-serelles lectorales avec le Front national.

    Tout cela est spectaculaire et fait souvent oublier ce que propose lUMP. Or, il nest question- et il suffit de parcourirLe Figaro pour le constater - que de dnoncer lassistanat , em-portant au passage le RSA mis en place pourtant par cette mme droite, du rtablisse-ment dune fiscalit favorable aux catgories sociales les plus riches, de porter lge de laretraite 65 ans, voire 67 ans, daller vers plus de flexibilit sur le march du travail, malgrlaccord sign entre les partenaires sociaux, dune remise en cause des services publics,etc Et tout cela, au nom dune comptitivit de lconomie perdue (perdue dailleurs parqui ? Le dcrochage des dix dernires annes, sous les gouvernements de droite, a t re-doutable ! ).

    Les socialistes nont jamais ni les problmes. La priorit a t donne au redressementdu pays ds la campagne lectorale du printemps dernier. Mais nous ne pensons pas

    quune politique de comptitivit passe par labaissement de tous les acquis sociaux. Lespays qui russissent le plus en Europe ont maintenu lessentiel de ltat social. Ils ne consi-drent pas que des hausses de salaires soient contradictoires avec ladaptation des en-treprises pour faire voluer leurs productions. La cohsion sociale et le dialoguepermanent, sont, en fait, des facteurs essentiels de la comptitivit dun pays - comme lesouligne le rcent rapport de Louis Gallois. C est ce que veut faire le Prsident et son gou-vernement, dans une situation difficile : construire des quilibres positifs dans notre so-cit. Nous navons pas la mme conception que lUMP des politiques mener. Noussavons que, dans une priode de crise, il faut construire des compromis entre les intrtsen prsence quil convient de rassembler pour runir toutes les forces du pays. Nous nepensons pas pour autant que le modle libral - qui a montr ses dfaillances, et quellesdfaillances en 2008 ! - soit une solution. Or, lUMP na rien dautre proposer. Demandons

    donc leur programme

    Alain BERGOUNIOUX

  • 7/30/2019 Regards sur la Droite_n 19.pdf

    2/13

    LUMP : du dni dmocratique auchemin escarp des primaires

    Le double chec de lUMP du 6 mai et du 17 juin2012, vient de loin. Il intervient au terme dunelongue srie de dconvenues lectorales, loc-casion des scrutins municipaux de 2008, rgio-naux de 2010, cantonaux et snatoriaux de2011. Il traduit lincomprhension dune poli-tique et dune mthode progressivement reje-tes par le pays.

    La dfaite du candidat de lUMP llection pr-sidentielle se mesure par un cart suprieur un million de voix ; cest un cart importantpour le prsident sortant. Linsuccs de lUMPaux lections lgislatives parat encore plusconsidrable, avec la perte de plus de centsiges et un affaissement dans de nombreuxdpartements dominante urbaine. Ainsi, unefaon de gouverner a t sanctionne.

    LUMP refuse dengagerlinventaire des raisonsde son chec. Elle restedans le dni du verdict du

    suffrage universel. Elle tendmme intenter un procsen illgitimit, comme si la

    gauche tait revenue aupouvoir par effraction .

    Fuite en avant. Des pistes de sortie de crise sof-frent cette formation de droite, mais celle-ci nesemble manifestement pas prte les saisir ni les explorer, car elle na pas vraiment admis leverdict du 6 mai 2012.LUMP, toutes sensibilits confondues, refusedengager linventaire des raisons de son chec.Elle reste dans le dni du verdict du suffrage

    universel. Elle tend mme intenter un procsen illgitimit, comme si la gauche tait revenue

    au pouvoir par effraction pour reprendrelune de ses formules favorites.Elle dveloppe, simultanment, une forme defuite en avant sur des thmes conomiquesultralibraux, comme sil ne stait rien pass auprintemps 2012. Elle demande ainsi aux sala-ris de travailler 39 heures par semaine, payes35, oubliant au passage le sens du slogan Tra-

    vailler plus pour gagner plus , pour lui substi-tuer celui de Travailler plus pour gagnermoins .Elle prconise, lintention des citoyens, derduire les dpenses publiques de 130 milliardsen cinq ans, au risque dcorner certains ser-vices publics, de diminuer le volume des com-mandes publiques et, avec elles, lactivitconomique.Elle ritre, ladresse des mnages et desconsommateurs, une augmentation brutale et

    immdiate dau moins trois points du taux deTVA, soit 33 milliards deuros de ponctions sup-plmentaires sur la consommation.Elle recommande doctement, la marche forcevers la retraite 65 ans, alors que les rformesFillon de 2003 et 2010 ont conduit linjusticesociale et limpasse financire - prs de 20 mil-liards de dficit des rgimes de retraite, chance 2020.

    Opacit et drive. cette fuite en avant qui setraduirait coup sr si elle venait tre appli-que, par une austrit svre vite insoutenable,sajoute une absence rcurrente de clart sur lesystme dalliance pour reconqurir, puis exer-cer le pouvoir. LUMP reste plus que jamais dansle non-dit et limplicite de la campagne lecto-rale prsidentielle perdue. La stratgie dite delasschement du terreau de lextrme-droite, travers non seulement des drapages verbaux,mais surtout des affirmations identitaires , luvre depuis le discours de Grenoble du30 juillet 2010, demeure plus que jamais dac-

    tualit.Cette stratgie se dveloppe la faveur de dis-

    NOTE DE VEILLE ET RIPOSTE SUR LA SITUATION DE LA DROITE ET DE L EXTRME-DROITE 2

  • 7/30/2019 Regards sur la Droite_n 19.pdf

    3/13

    cours de plus en plus discriminants , de sol-licitations de rflexes identitaires , dambi-guts savamment distilles, linstar du

    ni-ni proclam par la direction de lUMP lorsdu second tour de llection lgislative du

    17 juin 2012 : un tournant au regard de la ver-sion chiraquienne pour lextrme-droite et sesprjugs.Cette tendance sexprime aussi par des rappro-chements avec certains mouvements ultras,lors de manifestations souvent violentescontre le mariage pour tous , propositionpourtant ratifie par les Franais, en mai et juin2012.Cette drive loigne lUMP des principes rpu-blicains fondamentaux et la dportent vers des

    rflexes factieux et des connivences troublesdont Henri Guaino devient lun des instiga-teurs les plus coutumiers. Lopposition entre

    pays lgal et pays rel devient la rfrencermanente des dclarations de lex-plume deNicolas Sarkozy.

    Porosit. Laxe du discours de lUMP reposedsormais sur lide que la matrise de lin-fluence lectorale du FN dpendrait finalementde ladoption dlibre de lessentiel de sesthmes, lexception notable de la question dela sortie de leuro. Ce calcul sest pourtant avrfaut pour remporter un scrutin lectoral ma-

    jeur. Il nest pas sr non plus, quil lui permettede rsister lattraction idologique du FN, sur-tout depuis que ce dernier enfourche rsolu-ment un discours conomique et social,dinspiration anti-librale, contrairement laculture poujadiste vhicule depuis plusieursdcennies par Jean-Marie Le Pen.Par ailleurs, lUMP ne propose aucune solutioncrdible pour sortir et dpasser la crise quelle

    a elle-mme largement contribu gnrer auterme de dix annes de gestion qui se sont tra-duites par le doublement de la dette, la pertede 750 000 emplois industriels, et un dficitextrieur annuel gal 3,5 points de PIB.Les dclarations des dirigeants de lUMP ren-forcent une opposition la fois strile et syst-matique aux choix noncs par lexcutif, quilsagisse des questions sociales, socitales, co-nomiques ou ducatives. lexception du ju-gement port lintervention militaire au Mali,

    lessentiel se rsume une critique ultralib-rale et dinspiration drgulatrice, comme si la

    crise financire de lautomne 2008 navait ja-mais eu lieu. Comme si lchec lectoral duprintemps 2012 ntait quun accident, uncontretemps fcheux, une parenthse ou-blier. Comme si, surtout, le dni lavait dfiniti-

    vement emport sur lappel au constat etlapptence une analyse rationnelle.Sur un plan plus organisationnel, le congrsde novembre 2012, catastrophique sur le ter-rain politique et mdiatique, a montr lten-due des faiblesses dune formation politique,construite au lendemain du scrutin prsiden-tiel de 2002, et conquise presque par surprisepar Nicolas Sarkozy au beau milieu du quin-quennat de Jacques Chirac, profitant des d-boires judiciaires dAlain Jupp, le meilleur

    dentre nous .Cet pisode du congrs de novembre derniera confirm linaptitude rcurrente de lUMP lexercice de la dmocratie interne, son incapa-cit collective matriser les dbats, lesconfrontations dides et dambitions.Les clats de Jean-Franois Cop propos du

    pain au chocolat ou du racisme anti-blanc , la stigmatisation des chmeurs et desplus dmunis dans un grand nombre de mo-tions, ont rvl sans prcaution, la frocit desenjeux de pouvoir en mme temps que lam-pleur de la perte de repres dune organisation,dune famille politique qui pendant des dcen-nies, stait rfre exclusivement, jusque dansses intituls successifs, au double principe dela Rpublique et du Rassemblement.

    Labsence de leadershipreprsente un fait incontes-table et durable. Cette don-

    ne heurte gravement laculture traditionnelle de ce

    parti, fonde sur ladhsionet le respect souvent incon-ditionnel du chef .

    Absence de leadership. La scission parlemen-taire, conjoncturelle, linitiative de Franois

    Fillon, pourfendant les tricheries et mensongesdu Secrtaire gnral sortant, la tlvision et

    NOTE DE VEILLE ET RIPOSTE SUR LA SITUATION DE LA DROITE ET DE L EXTRME-DROITE 3

  • 7/30/2019 Regards sur la Droite_n 19.pdf

    4/13

    devant les grands mdias nationaux et interna-tionaux, en dit long sur lacuit des haines, et ledegr des malentendus.Labsence de leadership reprsente un fait in-contestable et durable. Cette donne heurte gra-

    vement la culture traditionnelle de ce parti,fonde sur ladhsion et le respect souvent in-conditionnel du chef .Ce congrs, et les palinodies qui lont accompa-gnes et suivies, marquent une capacit surpre-nante conjuguer, impuissance manifeste,dchanement des haines personnelles, imma-turit collective, sur fond de tricheries avreset de coups de bluff mal ajusts.De surcrot, lUMP vit sur des schmas poli-tiques, trs dcals au regard des attentes de la

    socit franaise, de ses aspirations une pro-fonde rnovation dmocratique.

    Tout indique aujourdhui,que lUMP peine incarnerune alternative crdible,

    se rfugiant dans une oppo-sition, la fois malveillante,

    et sans repres, autres quedes surenchres sans issuepour elle, avec lextrme-droite.

    La droite franaise, comme elle la crment ex-prim pendant la campagne prsidentielle, etplus encore au cours de lentre-deux tours ,refuse la mthode de la ngociation, la lgiti-

    mit des corps intermdiaires, des syndicats,du tissu associatif, dune dmocratie plus par-ticipative.Elle affiche, quotidiennement, sa dfiance vis--vis du Parlement. Des dputs UMP nhsitentpas, en plein dbat parlementaire, vocifrercontre le mariage pour tous aux cts des te-nants dun anti parlementarisme traditionnel etviscral. Nous ne sommes plus trs loin, avecHenri Guaino ou Christian Jacob, du tous pour-ris qui a toujours aliment, sous toutes les la-

    titudes, et toutes les poques, la tentation durecours aux menes factieuses et liberticides.

    Elle exprime aussi un rejet troublant de touteaspiration pourtant bien relle, dans notrepays, lgalit des droits et des chances. telleenseigne, quelle se permet de justifier implici-tement le comportement dexils fiscaux, qui

    prfrent manifestement leurs intrts privsau redressement des comptes publics, leurconfort personnel, la justice fiscale. Cette atti-tude parat dautant plus inlgante, que la ges-tion des dix annes coules a t marque parune succession de renoncements, confinant auclientlisme fiscal, conduisant un endette-ment public de lordre de 1 800 milliards.

    Manque de crdibilit. La direction de lUMPritre, autant que de besoin, sa dfiance ins-

    tinctive vis--vis de lautorit judiciaire. Ses d-clarations menaantes lencontre des jugesdinstruction, loccasion de laffaire Betten-court ou de lAffaire Guant, inquitent. Sa frilo-sit, lgard de lide mme de transparenceou de moralisation de la vie politique et cono-mique, consacre une conception dcale, voirertrograde de laction publique, certains res-ponsables, comme Henri Guaino, envisageantmme dabandonner leur mandat parlemen-taire, pour ne pas avoir fournir dinforma-tions, sur ce qui relve dabord de la viepublique, lorsque lon prtend solliciter les suf-frages et la confiance de ses concitoyens.Tout indique aujourdhui, que lUMP peine in-carner une alternative crdible, se rfugiantdans une opposition, la fois malveillante, etsans repres, autres que des surenchres sansissue pour elle, avec lextrme-droite. Dautantquelle continue de prendre ses distances avecdes principes aussi mancipateurs, que la s-paration des pouvoirs et des autorits, ltat dedroit, la transparence de la vie publique comme

    contrepartie de sa lgitimit et de sa noblesse.La formation dominante de la droite subit lesconsquences durables des contradictions deses principaux responsables, et des inimitispersonnelles qui en rsultent.Lopposition entre Franois Fillon et Jean-Fran-ois Cop est celle de deux clans irrconcilia-bles, mlant choc dambitions individuelles,contradictions de formes, et raisons de fond.Lincompatibilit entre Nicolas Sarkozy, candi-dat dfait llection prsidentielle, et Franois

    Fillon, ex collaborateur du premier, dsor-mais dli de toute prsence, de toute prve-

    4 NOTE DE VEILLE ET RIPOSTE SUR LA SITUATION DE LA DROITE ET DE LEXTRME-DROITE

  • 7/30/2019 Regards sur la Droite_n 19.pdf

    5/13

    nance, apparat comme un fait majeur de la vie po-litique droite. Cette double confrontation - dau-cuns voqueraient cette double mprise - risquentde dterminer les conditions du dbat droite, dici la prochaine grande chance, lorganisation de

    primaires - ouvertes ou semi-ouvertes - parlUMP dans la perspective des prochaines lectionsprsidentielles. Cette consultation pourrait avoirlieu, courant 2016 ; une volution statutaire estdores et dj engage, cet effet.

    Ncessaire clarification. Cette dmarche ne serapas aise pour un parti politique, plus habitu suivre ou accompagner llan dun chef incon-test, Jacques Chirac, pendant plus de 25 ans,Nicolas Sarkozy, plus rcemment.

    Il lui faudra dabord, remiser tous les argumentspolmiques adresss au Parti socialiste, tout aulong de lanne 2011, quand celui-ci sest claire-ment engag dans une innovation dmocratique.Il sagira, pour lui, ensuite, daffronter, sans biaiser,le dbat sur les alliances. En clair, le Front nationalreprsente-t-il, aux yeux de lUMP, un simple obsta-cle la victoire de la droite, ou bien une formationpolitique extrieure larc rpublicain, ce quifonde le vivre ensemble de la socit franaise ?Il conviendra galement, droite, de prciser laplace de Nicolas Sarkozy, et donc celle de son bilan, la veille de la double chance suprme que re-prsentent les lections prsidentielles et lgisla-tives de 2017. A loccasion de ces primaires ,lancien Chef de lEtat apparaitra-t-il, comme uncandidat naturel, ou comme un concurrent poten-tiel, parmi dautres, comme la nettement affirmson ancien Premier ministre ?La mthode de consultation, et les conditions dex-pression et de respect du vote peuvent, par ail-leurs, susciter de vrais problmes, et de profondsmalentendus, au sein dune formation, organise

    de manire centralise et verticale, avec des habi-tudes de fonctionnement et dinvestitures plusproches de la nomination, que de llection dansun cadre pluraliste, ouvert, transparent.

    Florilge. LUMP devra aussi, cette occasion, et au-del du dpassement denjeux de pouvoir autre-ment plus dcisifs que lors de son congrscacophonique de novembre 2012, prciser sonprogramme, et notamment les mesures quellecompterait prendre, en cas de succs en 2017, pour

    revenir ventuellement sur des rformes posespar la gauche. Le florilge des dclarations formu-

    les sur de nombreux thmes depuis onze mois,permet de mieux cerner lampleur de la tche. Lescontradictions internes, apparues propos de sonattitude, en cas dventuel retour au pouvoir, quantau mariage pour tous , au bouclier fiscal ,

    la rduction du temps de travail ou la trans-parence et la moralisation de la vie publique ris-quent de savrer difficiles trancher. Dautant quelensemble sera dnonc sous la pressionconstante et virulente dune extrme-droite,convaincue de son ascendant idologique sur uneformation politique, qui a aboli bien des tabous etabaiss beaucoup de digues, depuis les deux der-nires annes du quinquennat de Nicolas Sarkozy.

    Depuis un an, faute derepres et de leader, fautede mmoire aussi, celle delorigine mme de son cou-rant de pense, de Charlesde Gaulle Philippe Seguin,dAndr Malraux, RobertBoulin, lUMP nincarne plusquun parti, priv de gouver-nement et refusant den tirerles consquences.

    LUMP a t le parti du gouvernement pendant dixans, disposant de lElyse, de Matignon, et de lamajorit absolue lAssemble nationale. Depuisun an, faute de repres et de leader, faute de m-moire aussi, celle de lorigine mme de son courant

    de pense, de Charles de Gaulle Philippe Seguin,dAndr Malraux, Robert Boulin, elle nincarneplus quun parti, priv de gouvernement et refu-sant den tirer les consquences. Alors quelle pour-rait sinscrire dans lalternative, elle reste fige,crispe, dans la nostalgie de son pass immdiat.

    NOTE DE VEILLE ET RIPOSTE SUR LA SITUATION DE LA DROITE ET DE L EXTRME-DROITE 5

  • 7/30/2019 Regards sur la Droite_n 19.pdf

    6/13

    DCRYPTAGE & DBATS

    La droite doit cesser une bonne foispour toute de jouer avec le feu !

    Caroline Fourest est est essayisteet rdactrice en chef de la revue ProChoix. Militantefministe, elle est galement engage sur les thmesde lgalit, de la lacit et des droits de lhomme. Sondernier livre, Quand la gauche a du courage, a tpubli, en 2012, au ditions Grasset et Fasquelle.

    6 NOTE DE VEILLE ET RIPOSTE SUR LA SITUATION DE LA DROITE ET DE LEXTRME-DROITE

    Que vous inspirent les vnements survenus dansle cadre des manifestations et actions coup depoing des anti-mariages pour tous ?Cette mobilisation ne pouvait que librer de vieuxdmons, dans la mesure o lobjectif tait de lgi-timer le maintien des discriminations. Sans comp-ter quelle a t organise par lAssociationfamiliale catholique (AFC) qui sest rige, dans le

    pass, contre le PACS, en lien avec lAlliance Vita,une association de lobbying anti-avortement, pi-lote par Christine Boutin et Tugdual Derville. Leclimat est cependant plus tendu, aujourdhui, quepar le pass, mme si je suis convaincue que lho-mophobie a profondment recul dans le pays,au-del des vnements qui sont survenus cesdernires semaines. Ces dbordements et ces vio-lences nen rvlent pas moins une pousse in-quitante de lextrme-droite, en France.

    Comment expliquez-vous la radicalisation dumouvement ?

    Si CIVITAS et la Manif pour tous sont partis en or-dres disperss, leurs services dordre respectifsnen taient pas moins composs de gros brasportant tous les attirails du GUD. Et LaurenceTcheng, qui est considre comme la porte-parolela plus prsentable de la Manif pour tous, anou des contacts avec CIVITAS, jugeant mmeque les deux organisations se livraient des

    causes communes. Elle a dailleurs compar leshomosexuels des enfants.Quant Frigide Barjot, elle ne vient pas, contraire-ment ce qui a t dit, de lunivers des night-clubs,mais de lultra-droite. Elle a mme t marie Ba-sile de Kock, par lAbb de Nantes, fondateur de laContre-rforme catholique, et sur lequel il y auraitbeaucoup dire en terme de moralit, dans sesrapports avec les enfants. Rappelons, pour m-moire, que les deux poux ont frquent les soi-res organises par la famille Le Pen, lhtel

    Montretout de Saint-Cloud, dans les annes 1990.Et, que depuis lors, les liens ont perdur. La pr-

  • 7/30/2019 Regards sur la Droite_n 19.pdf

    7/13

    sence de Gilbert Collard la manifestation du21 avril ntait cet gard pas fortuite. Et, il senest fallu de peu pour que Jean-Franois Cop se

    joigne au cortge.

    Cette bataille ne se joue-t-elle pas sur le terraindes valeurs ?Oui. La ralit, c est que la droite na toujours pasde leader et quelle na pas fix de cap idologiquedepuis la prsidentielle. Laquelle a dailleurs tun sommet en terme de radicalit. La ligne Buisson est toujours sur la table. Or, elle mne une droite maurrassienne, dans la plus puretradition de lextrme-droite.Quon ne se mprenne pas. Cette idologie a tou-

    jours prise au sein de lUMP et de son courant leplus radical, La Droite forte, dont le porte-parole,Guillaume Peltier, a t le leader, en 1998, des Jeu-nesses Action chrtient, un groupe dintgristesanti-avortement, oppos au PACS. Il est ensuitepass par lIchtus, lInstitut de la cit catholique,qui prche le rtablissement de la thocratiechrtienne, avant de militer au Front national etde rejoindre Philippe de Villiers. Ajoutons quil nesest dcouvert lac que face lIslam, et quil offi-cie, aujourdhui, au sein de lUMP, o il affirmehaut et fort que la droite abrogera la loi sur le ma-riage pour tous, ds quelle reviendra au pouvoir.

    Ce qui est videmment une posture et une pro-messe laquelle personne ne croit, mais qui nenest pas moins rvlatrice des changements inter-venus depuis 1998 au sein de cette famille poli-tique. Il y a donc bien eu une drive du bloc dedroite, au point que Marine Le Pen a pu paratreplus moderne que lUMP, sur ce dbat. Ce qui estinquitant.

    En novembre et en mars, vous avez t prisepour cible par des groupuscules identifis lul-tra-droite. Avec le recul, comment analysez-vousces vnements ?Le 18 novembre, les Jeunesses nationalistes etCIVITAS occupaient le terrain, en criant des pro-pos homophobes. Nantes, il sagissait davan-tage dune course poursuite, caractre politique.

    Jai t prise pour cible pour deux raisons. Dunepart, parce que je travaille sur ces groupes depuisdix-sept ans, quils me connaissent parfaitementet que je suis devenue leur bte noire. Ce que jeconsidre comme un compliment. Il est dailleurs

    des hommes dont il est glorieux dtre ha,comme le disait Diderot. Or, il se trouve que mes

    dernires enqutes ont beaucoup drang leBloc identitaire, les Jeunesses nationalistes et lesgroupes situs droite du FN, ainsi que des mili-tants frontistes qui ne sont pas pour rien danscertaines oprations dintimidation, comme

    Nantes. leurs yeux, japparais galement sous les traitsdune intellectuelle fministe, qui plus est, les-bienne. Ce qui semble avoir jou dans les insultesqui ont t profres mon encontre, lorsque jait passe tabac. Et ce, alors mme que je ra-lisais un reportage sur les Femens, pour lecompte de France 2, et que je mettais une touchefinale un film consacr aux Jeunesses nationa-listes. Ces agresseurs taient directement issusde ce groupuscule, ainsi que du FN 93. Lun deuxa dailleurs continu me menacer au commis-sariat.

    Ceux qui voient dans lesmanifestations davril desdbordements sporadiqueset homophobes se trompent.Nous sommes devant une

    drive idologique beaucoupplus srieuse quil ny parat.Et, la porosit idologiquervle par ce dbat entreces extrmes-droites, en

    pleine recrudescence et unepartie de la droite qui a

    perdu lessentiel des valeursde la Rpublique, est vrai-ment proccupante.

    Qui sont au juste les Jeunesses nationalistes ?Elles se limitent quelques centaines de mili-tants qui se reconnaissent dans le nofascisme,en lien avec la droite franaise. Cette organisationest une manation de luvre franaise cre par

    Pierre Sidos, dans la plus pure tradition du rejetdes ides de Mai 1968. Elle se rfre au Marchal

    NOTE DE VEILLE ET RIPOSTE SUR LA SITUATION DE LA DROITE ET DE L EXTRME-DROITE 7

  • 7/30/2019 Regards sur la Droite_n 19.pdf

    8/13

    Ptain et Edouard Drumond, thoricien de lan-tismitisme et auteur de La France juive. Elle estprside, aujourdhui, par Yvan Benedetti, excludu FN pour ses propos antismites, et dont llec-

    tion sest faite un 6 fvrier, en hommage aux v-nements survenus en 1934. Alexandre Gabriac,son jeune acolyte, a lui aussi t mis la porte duFN, aprs la publication dune photo le montrantse livrer au salut nazi devant un drapeau portantlemblme du Svatsika. Depuis, il a pris la tte des

    Jeunesses nationalistes.Ntant plus encart au Front national, les deuxcompres ont radicalis leurs discours. Ils fai-saient parti du comit daccueil qui mattendait la gare Montparnasse. Ils taient accompagns,pour loccasion, didentitaires, issus de la mmesouche idologique, le nationalisme rvolution-naire. Ils se sont fait connatre pour leurs actionsspectaculaires contre les Quick Hallal ou lesprires de rue. Ils sont certes plus intelligents etmoins caricaturaux que les Jeunesses nationa-listes, mais nen sont pas moins porteurs dune vi-sion raciste et blanche de la socit franaise.Avec, leur tte, Fabrice Robert, skinhead dansses jeunes annes, ou Philippe Vardon, chef de filede Nissa Rebela, mouvement identitaire niois, ettrs prsent dans les manifestations davril.

    Une partie de la droite sestfaite piger. Ce qui doit incitercertains voquer un droitdinventaire pour sextraire dela pente dangereuse sur la-quelle ils se sont engags lors

    de la campagne prsiden-tielle. Si ce nest pas le cas etque la ligne forte incarne

    par Patrick Buisson, Guil-laume Peltier, Geoffroy Didieret dautres lments radicauxcontinue occuper le terrain,

    au sein de lUMP, la drive

    peut aller trs loin. Au seulprofit de Marine Le Pen,qui gagnera sur tous lestableaux.

    Nantes, jai t interpelle par des militantsde la Manif pour tous et du FN, commencer parle responsable des rseaux sociaux de MarineLe Pen, Gauthier Boucher, qui a dlivr de nom-breuses consignes sur twitter et film la vido du comit daccueil . Fiammetta Venner et moi-mme avions dailleurs fait mention de son dpla-cement en Iran, dans louvrage Marine Le Pen

    (Grasset et Fasquelle, 2011). Il tait accompagn,pour loccasion, de son pre, lun des chefs du na-tionalisme rvolutionnaire pro-russe et pro-ira-nien, qui incarne lun des mouvementsextrmistes les plus virulents et les plus radicauxau monde. Ce qui ne lempche nullement dtreSecrtaire dpartemental adjoint du FN.

    Au-del de ces vnements, nassiste-t-on pas une remise en cause de notre modle rpublicainpar une frange radicale de la droite ?Cest bien le fond du problme. Ceux qui voientdans les manifestations davril des dbordementssporadiques et homophobes se trompent. Noussommes devant une drive idologique beaucoupplus srieuse quil ny parat. Et, la porosit idolo-gique rvle par ce dbat entre ces extrmes-droites, en pleine recrudescence et une partie de ladroite qui a perdu lessentiel des valeurs de la R-publique, est vraiment proccupante.Une partie de la droite sest faite piger. Ce qui doitinciter certains voquer un droit dinventairepour sextraire de la pente dangereuse sur laquelleils se sont engags lors de la campagne prsiden-tielle. Si ce nest pas le cas et que la ligne forte in-carne par Patrick Buisson, Guillaume Peltier,Geoffroy Didier et dautres lments radicauxcontinue occuper le terrain, au sein de lUMP,la drive peut aller trs loin. Au seul profit de Ma-rine Le Pen, qui gagnera sur tous les tableaux.Les affaires de corruption lui ont dailleurs valudapparatre comme une oie blanche, alors quelhomme qui a ouvert les comptes de JrmeCahuzac, en Suisse, Philippe Pninque, est lun de

    ses proches conseillers. Les prochaines munici-pales seront terribles.

    8 NOTE DE VEILLE ET RIPOSTE SUR LA SITUATION DE LA DROITE ET DE LEXTRME-DROITE

  • 7/30/2019 Regards sur la Droite_n 19.pdf

    9/13

    Y a-t-il, dans ce mouvement de radicalisation, unevolont, en particulier de sa branche catholique, deprendre une revanche sur le principe fondamentalde sparation des glises et de ltat ?Oui. Fondamentalement, on dcouvre que la lacitnest pas menace par le seul intgrisme musul-man, mais par tous les intgrismes. Pour lheure, ladroite parat trs affte pour combattre lint-grisme musulman. Elle est, en revanche, totalementaveugle lorsquelle elle doit faire face un mouve-ment profond de rejet de la scularisation, port pardes catholiques intgristes. Ce qui est dramatique,ds lors que lon tient cette valeur cardinale questla lacit. Or, les catholiques intgristes sont beau-coup plus nombreux que les musulmans, dansnotre pays. Ils sont peut-tre moins virulents dansleurs modes dactions, mais nen sont pas moins ca-pables de relles violences, dans un contexte globalmarqu par les particularismes religieux, les ten-sions identitaires et la crise conomique.Ceci est proccupant et la droite doit cesser unebonne fois pour toute de jouer avec le feu ! charge,pour nous, de faire de la lacit une valeur consen-suelle et une protection du vivre ensemble , entant ferme vis--vis de ceux qui lui portent atteinteet en dfendant les principes de libert, dgalit etde fraternit.

    Lappel de Frigide Barjot prsenter des candidats Manif pour tous aux municipales naugure-t-ilpas dune rpartition des rles entre FN et UMP ?Ces manifestations ressemblent beaucoup auxgrandes coalitions chrtiennes qui font du lobbyingsur la droite dure et la radicalisent, aux Etats-Unis.Une alliance se dessine peu peu entre une coali-tion chrtienne et une partie de lUMP, qui sidentifieau parti Rpublicain. Cest le modle que ChristineBoutin a en tte, avec un rel savoir-faire et des

    moyens dploys par les rseaux catholiques, quine sont pas totalement ngligeables. lheure o ladroite a perdu son corset rpublicain, ce lobbyingpeut combler un vide.Si Frigide Barjot et ses allis staient conduitscomme un vritable organe de lobbying, en dcer-nant les bons et mauvais points aux maires, ils au-raient t perus diffremment quun concurrentdirect de la droite. Ils ont commis une erreur tac-tique colossale, dautant que, sur un total de 36 700maires, 17 000 avaient sign la ptition anti-PACS,

    en 1998. Des lus de toutes petites communes, sanstiquette et profondment conservateurs. De tout

    cela, dcoule une logique. Soit, nous nous dirigeonsvers une socit lamricaine o les lobbying -mouvements gays, catholiques intgristes -, de-vront faire pression pour que les mariages se pas-

    sent correctement, soit on applique la rgle demanire implacable qui sapplique tous les lus,sans y droger. Au risque daboutir des bras de fertrs douloureux pour le tissu rpublicain.

    Il existe bien, dans notrepaysage politique, une droiterpublicaine qui souffre,aujourdhui. Et force est de

    constater quelle est contraintede se taire, tant quune person-nalit digne de ce nomnmerge pas. Le jour o elle

    sera nouveau en capacitde sexprimer, des gens fiersdeux-mmes rapparatront.

    Croyez-vous dans la capacit de lUMP se recons-truire , au-del de toute tentation dalliance avec leFront national ? Ce mouvement possde-t-il les per-sonnes ressources pour viter de tomber dans cepige et retrouver ainsi une vraie lgitimit rpubli-caine ?Tout dpendra de llection pour dsigner le candi-dat la tte de lUMP. Il existe bien, effectivement,dans notre paysage politique, une droite rpubli-caine qui souffre, aujourdhui. Ctait dailleurs dj

    le cas sous le quinquennat de Nicolas Sarkozy etforce est de constater quelle est contrainte de setaire, tant quune personnalit digne de ce nomnmerge pas. Le jour o elle sera nouveau en ca-pacit de sexprimer, des gens fiers deux-mmes r-apparatront. Ds lors que cette frange de la droitese fera entendre et quelle gagnera les lections in-ternes, les groupuscules situs droite du FN et lacoalition chrtienne, qui a trouv des gries dansle cadre de la Manif pour tous, mais qui aura du mal se reformer sur dautres thmes de socit, rede-

    viendront ce quils taient avant cette squence po-litique : des groupes marginaux.

    NOTE DE VEILLE ET RIPOSTE SUR LA SITUATION DE LA DROITE ET DE L EXTRME-DROITE 9

  • 7/30/2019 Regards sur la Droite_n 19.pdf

    10/13

    Entre primaires et chicaneries

    Et maintenant ? Aprs la croisade anti-mariagepour tous et quelques jours seulement avant lim-mense happening anti-Hollande du 26 mai, lUMPaffiche ses divisions. Et montre, sil en tait besoin,son incapacit fixer un cap clair. Entre un Jean-Franois Cop, autoproclam prsident, qui in-carne une ligne dure et autoritaire, sur fond de droitisation et de ralliement aux thses fron-tistes, et un Franois Fillon, qui ne cesse dalerter

    les siens sur labsence de ligne politique, les mili-tants peinent sy retrouver. Tant et si bien quedambitieux quadras, tels Xavier Bertrand, LaurentWauquiez, Bruno Le Maire ou Nathalie-Kos-ciusko-Morizet se mettent en avant.

    Derrire la question des sta-tuts, les choix de la directiondu principal parti dopposi-

    tion impacteront son fonc-tionnement et son avenir.LUMP est-il gntiquement,comme le prtend Benoist

    Apparu, un parti gaulliste,bonapartiste, dont la voca-tion premire est de conduire

    un chef llyse, ou leproduit dune droite dcom-plexe , dont Cop et les te-nants de la Droite forte,anime par Guillaume Peltieret Geoffroy Didier, revendi-quent, aujourdhui, le leader-

    ship ?

    Difficile quation. Primaire ou culture du chef ?Derrire la question des statuts, les choix de la di-rection du principal parti dopposition impacte-ront son fonctionnement et son avenir. LUMPest-il gntiquement, comme le prtend BenoistApparu, un parti gaulliste, bonapartiste, dont lavocation premire est de conduire un chef llyse, ou le produit dune droite dcomplexe, dont Cop et les tenants de la Droite forte, ani-

    me par Guillaume Peltier et Geoffroy Didier,revendiquent, aujourdhui, le leadership ? en croire les rsultats des lections internes delautomne dernier, cest bien cette ligne dure etractionnaire que les militants souhaitent majo-ritairement voir exprimer, en prvision des pro-chaines chances lectorales.Reste un obstacle, et non des moindres. lUMP,la figure du chef est le rsultat dune vidence,comme ce fut le cas pour Jacques Chirac, et, plusrcemment, Nicolas Sarkozy. Tant et si bien que

    les lections internes ne font traditionnellementque ratifier ce principe. Cest bien l la difficult.Qui, de Cop, de Fillon ou dun troisime larronsorti du chapeau, peut se prvaloir dune autoritsuffisante pour imposer son magistre la ttedu parti ? Cette question ne manquera pas de ta-rauder les esprits, jusquen 2016 et lorganisationde primaires pour dsigner le futur candidat laprsidentielle.Faute dautorit naturelle, le fantme de Sarkozyhantera les esprits et la question dun hypoth-

    tique retour fera les choux gras de la presse. Len-jeu bien compris de notre scrutin interne tait belet bien llection prsidentielle de 2017 et non ladirection de notre formation politique, analyse ledput UMP Benot Aappru. De ce point de vue,lacceptation du principe de la primaire pour d-

    signer un candidat la prsidentielle est en totalecontradiction avec ce quest, dans notre histoire etdans notre culture, llection du prsident de notre

    formation politique prdterminant celle ou celuiqui sera notre candidat. Il est contradictoire et

    source de difficults sans fin de prvoir des mo-dalits particulires pour slectionner notre can-didat llection prsidentielle alors mme que

    10 NOTE DE VEILLE ET RIPOSTE SUR LA SITUATION DE LA DROITE ET DE LEXTRME-DROITE

  • 7/30/2019 Regards sur la Droite_n 19.pdf

    11/13

    par essence le prsident de lUMP est notre can-didat naturel (1).

    Clivage idologique. Derrire ce choix statutaire,lUMP va donc devoir trancher une contradiction,au risque dentretenir les rivalits, sur fond decomptition permanente entre copistes et fillo-nistes. Ce, dautant plus que le projet initial de ceparti de faire vivre et prosprer une droite degouvernement a du plomb dans laile. Au-deldu jeu de dupes auquel se livrent ses dirigeants,transparat clairement un clivage entre la ligneBuisson , la fois nationaliste et scuritaire, etune droite plus librale et europenne. La cas-

    sure du parti, et le dpart de son aile modre

    pour dautres rivages, comme ceux de lUDI, lar-gement construite dans cette perspective, signi-fierait un retour un jeu trois avec le FNcomme la droite la connu dans les annes 1980-1990, observe le politologue, Laurent Bouvet (2).

    Seules des primaires pour la dsignation duncandidat lUMP et lUDI permettraient alors deconjurer le risque de voir le FN accder au secondtour de la prsidentielle. Au fond, la question est de savoir quelle stratgielectorale accompagnera, dans les prochainsmois, la ligne idologique qui sest dessine, loccasion du congrs du 18 novembre dernier.Faut-il, ou non, suivre la voie emprunte par Sar-kozy et Buisson, en radicalisant un discours me-nant, quon le veuille ou non, des accordspolitiques avec le FN au printemps prochain, oucompter sur un rapprochement avec lUDI poursuivre un autre chemin ? Nul doute que les lec-tions municipales et europennes de 2014 appor-teront leur lot de rponse. Chacun saura alors qui profite le crime et si cette stratgie de droi-tisation que tente, sa manire, de perptuer

    Cop - et, dans une moindre mesure, Fillon -, fa-vorise lUMP ou le FN, dont llectorat privilgiera, nen pas douter, loriginal la copie.

    Guerre de succession. Cette interrogation rendplus cruciale encore la question de la succession.puis par la guerre idologique que se livrentles hritiers du sarkozysme, les ambitions per-sonnelles et labsence dune stratgie dallianceferme, lUMP va devoir trancher.Lorganisation dune nouvelle lection pour la

    prsidence, en septembre, est, de ce point de vue,clairement remise en cause. Ce, dautant plus que

    les partisans de lannulation du vote, sont dsor-mais majoritaires, au motif que le parti nauraitrien gagner un duel fratricide. Xavier Bertrandpropose ainsi de trancher la question de lorgani-

    sation ou non dune nouvelle lection, par le biaisdun vote sur la toile. Seuls les fillonistes font dela rsistance, en dpit de la volont de leur chefde file de se mnager, en prvision de la prsiden-tielle de 2017. Laurent Wauquiez, qui se dit prt le suppler en cas de renoncement, en appelle lorganisation dune lection transparente pour faire contrepoids au scrutin de novembre,entach dirrgularits. Prudent, Cop fait minede rester en retrait. Fin mai, lorsque les adhrentsvoteront par Internet les statuts du parti, il prvoit

    de glisser une question sur llection de septem-bre (3). Tant et si bien que lannulation ne sera pasde son fait, mais des militants

    Une primaire ouverte sera bien organise, en 2016,pour dsigner le reprsen-tant de lUMP la prsiden-tielle. Au terme dun accordentre Cop et Fillon, le candi-dat de lopposition llection

    suprme sera lu par len-semble des sympathisantsde droite, et non par les seulsmilitants. Un pav dans la

    marre de Cop qui voit ainsises chances diminuer.

    La confusion est donc son comble. Le 22 avril, setenait une runion cense dfinir les conditions demise en uvre de la primaire pour la prsiden-tielle. La commission de rvision des statuts -la CRS, a ne sinvente pas ! -, ne de laccord signen dcembre entre Cop et Fillon, nest pas parve-nue sentendre. Pis, elle a but sur la compositiondu bureau politique et de la haute autorit charge

    de veiller au bon droulement des primaires !En clair, Cop semploie verrouiller lappareil !

    NOTE DE VEILLE ET RIPOSTE SUR LA SITUATION DE LA DROITE ET DE L EXTRME-DROITE 11

  • 7/30/2019 Regards sur la Droite_n 19.pdf

    12/13

    Petite rvolution. Changement de cap, le 24 !En conclusion dun long change, la commissionactait enfin la dcision, sous la pressionddouard Balladur, dAlain Jupp et de Fran-ois Fillon. Une primaire ouverte sera bien or-ganise, en 2016, pour dsigner le reprsentantde lUMP la prsidentielle. Au terme dun accordentre Cop et Fillon, le candidat de lopposition llection suprme sera lu par lensemble dessympathisants de droite, et non par les seuls mi-litants. Un pav dans la marre de Cop qui voitainsi ses chances diminuer. Et, pour cause ! Po-pulaire au sein de lappareil, il lest beaucoupmoins lchelle nationale. Et, il le sait. Quand Sarkozy, qui se rvait jusqualors en recourt, il sevoit potentiellement contraint de sabmer dansun duel fratricide contre son ex-Premier ministre,

    mme sil lui suffit, pour lheure, de quelquesmots pour saturer lespace mdiatique. Le mythedu sauveur a du plomb dans laile

    Au nom dune logiqueprtendument constructive et de l intrt suprieur du pays, Cop et Fillon font

    donc mine de sentendre.Lexemple laiss par les so-cialistes, en 2011, les pousse,il est vrai, se lancer. LUMP

    se rve ainsi en parti dmo-crate, au risque de butter ttou tard sur la culture du chef,

    propre son mode de fonc-tionnement interne.

    Les membres de la commission ont prvu deremettre le couvert la mi-mai, afin de soumettre rfrendum le maintien dune nouvelle lection la tte du parti, en septembre. Et denterrer ainsiune procdure dont plus personne ne veut.Histoire, surtout, ne pas jeter de lhuile sur le feu, lheure o se dessineront les listes pour les mu-

    nicipales.Au nom dune logique prtendument construc-

    tive et de l intrt suprieur du pays, Cop etFillon font donc mine de sentendre. Lexemplelaiss par les socialistes, en 2011, les pousse, il estvrai, se lancer. LUMP se rve ainsi en parti d-mocrate, au risque de butter tt ou tard sur la cul-ture du chef, propre son mode defonctionnement interne. Dautant que cet exerciceprilleux autorise toutes les ambitions, privantainsi la droite dun leadership pendant trois ans,avant de se rassembler derrire le mieux plac.Le vieux mythe gaulliste qui veut quun leader nese dcrte pas dans les urnes, lUMP, a duplomb dans laile. Il faudra bien sy faire. Y com-pris parmi les sarkozystes qui nont pas mnagleur peine, au cours des dernires semaines,pour inscrire dans les statuts lannulation de laprimaire, ds lors que lex-Prsident dcide de se

    prsenter. La campagne change donc de nature.Cest dsormais sur le terrain de lopinion que ledbat va se nouer pour rassembler ce qui estpars, autour du peuple de droite . Avec quelledirection ? Ceci est une autre histoire.

    Notes :(1) Benot Apparu, Primaire ou culture du chef,lUMP doit choisir, Libration, 9 avril 2013.

    (2) Laurent Bouvet, UMP : une lection et aprs ?,Le Figaro, 21 novembre 2012.(3) Alexandre Lemari, UMP : lorganisation du

    futur scrutin interne fait lobjet de vifs dbats ,2 avril 2013.

    12 NOTE DE VEILLE ET RIPOSTE SUR LA SITUATION DE LA DROITE ET DE LEXTRME-DROITE

  • 7/30/2019 Regards sur la Droite_n 19.pdf

    13/13

    NOTE DE VEILLE ET RIPOSTE SUR LA SITUATION DE LA DROITE ET DE L EXTRME-DROITE 13

    Wauquiez, hraut de lUMP !

    Des mois que Laurent Wauquiez sapplique fus-

    tiger lassistanat et dnoncer le matraquagefiscal qui font suite la victoire de Franois Hol-lande la prsidentielle de 2012. Se gardant biende tirer les leons de la dfaite et dassumer lebilan dsastreux de la droite au pouvoir - 1 millionde chmeurs supplmentaires, un pays en rces-sion avec - 0,2 % de croissance au premier semes-tre 2012, 400 milliards de dettes supplmentaires,dont les trois-quarts sont imputables la gestiondu gouvernement Fillon, dsindustrialisation dela France, hausse de la pauvret, pnurie de loge-

    ments-, lancien ministre se plait donner desleons lactuelle majorit gouvernementale quia hrit dune France meurtrie par cinq annes desarkozysme. Attisant les peurs, jouant sur la haineet la dfiance, Wauquiez et ceux qui se rclamentdune droite rsolument dcomplexe ontpourtant mis mal notre modle rpublicain.

    Dvoiement. Mais, aujourdhui, les dignitaires delUMP, plus prompts sinvectiver les uns les au-tres, porter le fer contre le programme de mora-lisation de la vie publique ou mler leurs voix celles des anti-mariage pour tous, excits par desextrmistes de tout poil gagneraient sans doute se livrer un bilan critique de leur politique, avantde porter haut ltendard dune France aux ac-cents conservateurs que les lecteurs ont rejetmassivement lors des lections de 2012.

    Quimporte, au fond. 38 ans, Laurent Wauquiezentend sapproprier le volet social de la droite. Unprincipe teint de libralisme et rsolument par-tisan - lutte contre lassistanat, dfiscalisation des

    heures supplmentaires, fin des 35 heures -, quifait peu de cas de lintrt des franais et du pays.Sous couvert de dfendre les classes moyennes,lancien ministre sacharne sur les plus dfavori-ss. Ceux-l mme qui ont subi, dix annes du-rant, les effets de la politique mene par ceuxl-mme qui la dnoncent. Ce bb du sarko-zysme reste cependant fidle son matre et nytrouve rien y redire, avec son florilge dexpres-sions de communiquant.

    Apprenti-sorcier. Le dput-maire du Puy-en-Velay, joue aussi les apprentis-sorciers sur la

    question du mariage pour tous, en marquant son

    opposition au vote solennel de la reprsentationnationale. Aprs avoir rclam de haute voix unrfrendum, dont lorganisation est contraire lesprit de la Constitution, et affirm quil dfendaitlalternative dunion civile , il sest bien gard decondamner les violences perptres par des mou-vements radicaux, lors des manifestations pilo-tes par Frigide Barjot et ses troupes. Pis, il sestdvoy dans un exercice de manipulation, en pr-tendant que la police se serait livre des dbor-dements, en sen prenant ouvertement des

    enfants !

    Sa croisade anti-assistanat relve galement dufantasme. Ce faisant, il sen prend des mesuresprises par le gouvernement dont il fut pourtantmembre part entire. Yves Jego, ancien membrede lUMP, na dailleurs pas manqu de saisir laballe au bond en prenant ses distances avec lludu Puy-en-Velay, jugeant toute tentative de rap-prochement de son parti avec le FN dangereuse :

    Ce n'est pas Marine Le Pen qui disait a, ou Jean-Marie Le Pen ? C'est consternant de s'attaquer auRSA, une mesure que nous avons vote et qui per-met des millions de Franais de survivre dansun temps de crise. (...) M. Wauquiez caricature cettedisposition pour des raisons populistes. . Et din-sister : Il y a une forme de gangrne, de lepni-

    sation des esprits, qui est en train de gagner unepartie de l'UMP qui est tout fait intolrable (LeParisien, 12 mai 2011).

    Son dernier fait darme a trait la transparenceprne par le Prsident de la Rpublique. Il sem-

    ploie ainsi dvoiler son patrimoine, non pas tantpour soutenir cette opration main propre ,que pour gner ceux qui lui font face au sein deson propre camp : Cop, NKM, et Le Maire, sesconcurrents quadras de lUMP. Mais, ne nous ytrompons pas. Cette bataille entre modernes et anciens , nest quune gesticulation pour per-mettre lintress de se prparer la succession la direction de lUMP, et assouvir ainsi une am-bition dvorante.