les echos - 11 12 2020

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VENDREDI 11 ET SAMEDI 12 DÉCEMBRE 2020 ISSN0153.4831 113 e ANNÉE NUMÉRO 23346 42 PAGES Antilles-Réunion 4,10 €. Belgique 6,50 €. Espagne 4,40 €. Grande-Bretagne 6£60. Grèce 4,20 €. Italie 4,40 € Luxembourg 6,70 €. Maroc 35 DH. Suisse 11 FS. Tunisie 5,50 TND. Zone CFA 3100 CFA. People first. Solutions follow. * *C’est avec l’Humain que se révèlent les solutions. Les nouveaux défis de Safran Les Echos WEEK-END Climat Cinq ans après, un sommet pour remettre l’Accord de Paris sur les rails. // PP. 8-9 Castex durcit le déconfinement Facebook menacé de démantèlement Réformer l’Etat, une urgence absolue La chronique de Jacques Attali Les piètres performances des élèves français dans les der- niers classements mondiaux, notamment en mathématiques et sciences, devraient sonner l’alerte et nous inciter à revoir profondément le fonctionne- ment de l’école et les méthodes d’enseignement, écrit Jacques Attali. Il en va de même pour la santé ou la police, qui ont aussi montré leurs lacunes. Que l’Etat se réforme avant de réfor- mer les autres ! // PAGE 12 Le Premier ministre lors de sa conférence de presse de jeudi. Photo Thomas Samson/AFP COVID Alors que l’épidémie de coronavirus ne reflue plus en France, voire montre des signes inquiétants de possible reprise, le gouvernement a décidé, jeudi, de mettre un sérieux coup de frein au déconfinement qui doit com- mencer mardi prochain. Les cinémas, les théâtres, les musées et autres lieux qui devaient rou- vrir à cette date resteront portes closes au moins jusqu’au 7 jan- vier, a annoncé le Premier minis- tre, Jean Castex. Et le couvre-feu en vigueur dès mardi débutera à partir de 20 heures et non 21 heu- res, avec très peu de dérogations possibles. Il sera en vigueur en outre pour le 31 décembre, mais pas la veille de Noël. // PAGES 2-3 C’est la plus grosse offensive des autorités américaines dans le secteur de la tech depuis leur poursuite de Microsoft en 1998. GAFA Double attaque. Mercredi, La Federal Trade Commission (FTC) et une coalition de 46 Etats américains ont annoncé déposer deux plaintes contre Facebook pour abus de position dominante et monopole illégal, ouvrant la voie à deux procès qui pourraient s’étirer sur plusieurs années. Le gendarme de la concurrence américain et les procureurs géné- raux demandent aux juges d’étu- dier un remède sévère : forcer le réseau social à se séparer de ses filiales Instagram et WhatsApp, deux acquisitions devenues le moteur de la croissance du groupe. L’ampleur de la menace est inédite pour le réseau social né en 2004. // PAGE 27 ET L’ÉDITORIAL DE JEAN-MARC VITTORI PAGE 15 La BCE ajoute 500 milliards d’euros à son programme d’urgence POLITIQUE MONÉTAIRE Pour sa dernière réunion de l’année, la Ban- que centrale européenne a tenu ses promesses, face à la dégradation des perspectives économiques. Elle a revu à la baisse, de 5 à 3,9 %, ses prévisions de croissance pour 2021. La BCE a porté l’enveloppe de son programme d’urgence (PEPP) à 1.850 milliards d’euros, et l’a pro- longé jusqu’en mars 2022. Le temps que l’Europe bénéficie d’une immunité collective face au Covid, et que l’économie retrouve sa mar- che normale. La banque centrale a également étendu ses finance- ments à taux négatifs destinés aux banques qui continuent à soutenir l’économie. // PAGE 33 Tesla bouleverse la hiérarchie automobile mondiale AUTOMOBILE En quelques mois, le classement boursier des cons- tructeurs automobiles a été totale- ment chamboulé. Tesla, devenu numéro un en juillet, vaut désor- mais près de 600 milliards de dol- lars, autant que la plupart des cons- tructeurs traditionnels réunis. Dans le Top 20 figurent aussi des jeunes pousses chinoises qui n’exis- taient pas il y a cinq ans. Le marché de la voiture électrique a com- mencé à faire ses preuves cette année : pour les nouveaux venus, cela se traduira par de la croissance nette, alors que les constructeurs « old school » devront aussi gérer le poids du passé. // PAGE 25 ET « CRIBLE » PAGE 44 Le plan de Bruxelles pour des batteries vertes et recyclables MATIÈRES PREMIÈRES Alors que le marché des voitures électriques est en plein essor, la Commission européenne a prévu d’imposer des règles au secteur des batteries à partir de 2027. Des critères envi- ronnementaux s’appliqueront sur l’ensemble de la chaîne de vie des batteries, de l’extraction des matiè- res premières au recyclage, en pas- sant par la production. Les batte- ries ne respectant pas ces normes seront « interdites » sur le marché unique, a prévenu Thierry Breton. De son côté, la Chine, premier fabricant de batteries, a déposé une centaine de propositions de normes pour structurer le marché d’ici à trois ans. // PAGE 36 SUR L’ÉCLAIRAGE ÉCO À 7H15 DANS LE 7H-9H DE MATTHIEU BELLIARD RETROUVEZ NICOLAS BARRÉ Le quartiers des Chartrons, sur les bords de Garonne, à Bordeaux. Photo Sébastien Ortola/RÉA Immobilier : pourquoi les prix grimpent malgré la crise l Les prix en nette hausse dans toutes les grandes villes françaises sur un an. l Rennes, Nantes, Lyon en tête du palmarès avec une inflation du mètre carré de plus de 10 %. l Malgré le confinement, le nombre de transactions reste proche du record de 2019. // PAGE 18 SPÉCIAL CRÉDIT Emprunter après 50 ans Les Echos PATRIMOINE Justin Sullivan/AFP

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Page 1: Les Echos - 11 12 2020

VENDREDI 11 ET SAMEDI 12 DÉCEMBRE 2020

ISSN0153.4831 113eANNÉENUMÉRO 23346 42 PAGES

Antilles-Réunion 4,10 €. Belgique 6,50 €.Espagne 4,40 €. Grande-Bretagne 6£60.Grèce 4,20 €. Italie 4,40 € Luxembourg 6,70 €.Maroc 35 DH. Suisse 11 FS. Tunisie 5,50 TND.Zone CFA 3100 CFA.

People first.Solutions follow.**C’est avec l’Humain que se révèlent les solutions.

Les nouveaux défis de Safran

Les EchosWEEK-END

Climat Cinq ans après, un sommet pour remettre l’Accord de Paris sur les rails. // PP. 8-9

Castex durcit le déconfinement

Facebook menacé de démantèlement

Réformer l’Etat, une urgence absolue

La chronique deJacques Attali

Les piètres performances des élèves français dans les der-niers classements mondiaux, notamment en mathématiques et sciences, devraient sonner l’alerte et nous inciter à revoir profondément le fonctionne-ment de l’école et les méthodes d’enseignement, écrit Jacques Attali. Il en va de même pour la santé ou la police, qui ont aussi montré leurs lacunes. Que l’Etat se réforme avant de réfor-mer les autres ! // PAGE 12

Le Premier ministrelors de sa conférence de

presse de jeudi.Photo Thomas Samson/AFP

COVID Alors que l’épidémie de coronavirus ne reflue plus en France, voire montre des signes inquiétants de possible reprise, legouvernement a décidé, jeudi, de mettre un sérieux coup de frein au déconfinement qui doit com-mencer mardi prochain. Les cinémas, les théâtres, les musées et autres lieux qui devaient rou-vrir à cette date resteront portes closes au moins jusqu’au 7 jan-vier, a annoncé le Premier minis-tre, Jean Castex. Et le couvre-feu en vigueur dès mardi débutera à partir de 20 heures et non 21 heu-res, avec très peu de dérogations possibles. Il sera en vigueur en outre pour le 31 décembre, mais pas la veille de Noël. // PAGES 2-3

C’est la plus grosse offensive des autorités américaines dans le secteur de la tech depuis leur poursuite de Microsoft en 1998.

GAFA Double attaque. Mercredi, La Federal Trade Commission (FTC) et une coalition de 46 Etats américains ont annoncé déposer deux plaintes contre Facebook pour abus de position dominanteet monopole illégal, ouvrant la voie à deux procès qui pourraients’étirer sur plusieurs années. Le gendarme de la concurrence américain et les procureurs géné-

raux demandent aux juges d’étu-dier un remède sévère : forcer le réseau social à se séparer de ses filiales Instagram et WhatsApp, deux acquisitions devenues le moteur de la croissance du groupe. L’ampleur de la menace est inédite pour le réseau social néen 2004. // PAGE 27 ETL’ÉDITORIAL DE JEAN-MARCVITTORI PAGE 15

La BCE ajoute 500 milliards d’euros à son programme d’urgencePOLITIQUE MONÉTAIRE Pour sa dernière réunion de l’année, la Ban-que centrale européenne a tenu sespromesses, face à la dégradation des perspectives économiques. Ellea revu à la baisse, de 5 à 3,9 %, ses prévisions de croissance pour 2021.La BCE a porté l’enveloppe de son programme d’urgence (PEPP) à 1.850 milliards d’euros, et l’a pro-longé jusqu’en mars 2022. Le tempsque l’Europe bénéficie d’une immunité collective face au Covid, et que l’économie retrouve sa mar-che normale. La banque centrale a également étendu ses finance-ments à taux négatifs destinés aux banques qui continuent à soutenir l’économie. // PAGE 33

Tesla bouleverse la hiérarchie automobile mondialeAUTOMOBILE En quelques mois, le classement boursier des cons-tructeurs automobiles a été totale-ment chamboulé. Tesla, devenu numéro un en juillet, vaut désor-mais près de 600 milliards de dol-lars, autant que la plupart des cons-tructeurs traditionnels réunis. Dans le Top 20 figurent aussi des jeunes pousses chinoises qui n’exis-taient pas il y a cinq ans. Le marchéde la voiture électrique a com-mencé à faire ses preuves cette année : pour les nouveaux venus, cela se traduira par de la croissancenette, alors que les constructeurs « old school » devront aussi gérer lepoids du passé. // PAGE 25ET « CRIBLE » PAGE 44

Le plan de Bruxelles pour des batteries vertes et recyclablesMATIÈRES PREMIÈRES Alors que le marché des voitures électriques est en plein essor, la Commission européenne a prévu d’imposer desrègles au secteur des batteries à partir de 2027. Des critères envi-ronnementaux s’appliqueront sur l’ensemble de la chaîne de vie des batteries, de l’extraction des matiè-res premières au recyclage, en pas-sant par la production. Les batte-ries ne respectant pas ces normes seront « interdites » sur le marché unique, a prévenu Thierry Breton. De son côté, la Chine, premier fabricant de batteries, a déposé une centaine de propositions de normes pour structurer le marchéd’ici à trois ans. // PAGE 36

SUR

L’ÉCLAIRAGE ÉCO À 7H15DANS LE 7H-9H DE MATTHIEU BELLIARD

RETROUVEZ NICOLAS BARRÉ

Le quartiers des Chartrons, sur les bords de Garonne, à Bordeaux. Photo Sébastien Ortola/RÉA

Immobilier : pourquoi les prix grimpent malgré la crisel Les prix en nette hausse dans toutes les grandes villes françaises sur un an.l Rennes, Nantes, Lyon en tête du palmarès avec une inflation du mètre carré de plus de 10 %.l Malgré le confinement, le nombre de transactionsreste proche du record de 2019. // PAGE 18

SPÉCIAL CRÉDITEmprunter après 50 ans

Les EchosPATRIMOINE

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Vaccins : deux grains de sable et le temps long

LE FAIT DU JOUR POLITIQUECécileCornudet

D eux noms, deux grainsde sable viennent coupsur coup gripper la

mécanique – déjà bien malade – de la confiance envers les vaccins. Jérôme Salomon, ciblé par le Sénat pour avoir voulu atténuer un rapport interne préconisant l’achat de 1 milliard de masques en 2019. Le directeur général de la Santé, figure s’il en est de l’Etat, qui tente d’effacer ses erreurs, soit exactement ce que reprochent les Français aux élites gouvernantes : l’effet est ravageur. Si elles ont menti sur les masques, comment les croire sur les vaccins ? Eric Caumes, ensuite, infectiologue de renom qui répand ses doutes sur les deux premiers vaccins et s’alarme du nombre d’effets indésirables du Pfizer-BioNTech (« Le Parisien »), voilà qui contribue à semer la suspicion au moment où les Français tentent de se faire une religion. Suspicion alimentée, le calendrier est cruel, par le Royaume-Uni, qui déconseille le même vaccin aux personnes allergiques. La campagne officielle de communication vient à peine de commencer en France qu’elle est déjà percutée. Dans les sondages, les sceptiques grimpent encore : 52 % disent

qu’ils ne se feront pas vacciner.Dans la course folle aux vaccins et aux interrogations, l’exécutif choisit une stratégie contre-intuitive, celle du temps long et… du doute elle aussi. « Nous ne savons pas tout », répètent les membres de l’exécutif (Emmanuel Macron en tête) et Alain Fischer, chargé de la stratégie vaccinale. « Que 50 % de la population exprime des doutes, c’est légitime », a-t-il encore indiqué jeudi devant le Sénat. Pour être crédible au moment où il donnera son feu vert, après les autorisations de l’Agence européenne des médicaments (avant le 29 décembre pour Pfizer), l’exécutif joue aujourd’hui l’humilité et la transparence. Au risque de donner le sentiment de n’être pas très sûr de lui et d’alimenter à son tour la méfiance. Mais a-t-il d’autre choix ? Que dirait-on s’il était affirmatif quand tant de données manquent encore ? Au temps de l’ultraréactivité, le politique prend son temps. Il laisse prospérer les soupçons aujourd’hui en espérant qu’il sera ce faisant plus audible demain. Que sa prudence et sa discrétion (aucune personnalité ne se précipite pour se faire vacciner) seront gages de sérieux. Le ras-le-bol face au Covid, la publication des études, les succès espère-t-on de la vaccination britannique, la force de conviction des généralistes feront le reste et convertiront peu à peu les Français au vaccin. C’est le pari. C’est un [email protected]

Dire ses propres doutes pour reconquérir la confiance. C’est le choix contre-intuitif fait par l’exécutif sur les vaccins alors que prospèrent les interrogations chez les Français et les professionnels.

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Le grand déballage public sur la ges-tion des masques avant et pendant la crise sanitaire n’est pas terminé. Les sénateurs de la commission d’enquête sur le Covid ont publié leur rapport jeudi. Ils y apportent denouvelles pièces à conviction qui accablent l’administration. En parti-culier, le directeur général de la Santé, Jérôme Salomon.

Les sénateurs ont eu accès à deséchanges de courriels. Ils montrent que pendant plus d’un mois, en jan-vier et février 2019, celui-ci a fait pression sur le directeur de Santé publique France, François Bour-

dillon, afin qu’il fasse modifier un rapport commandé à un expert, comme l’a révélé « Le Monde ». Ce rapport contrariait le choix politi-que consistant à laisser se vider les stocks d’Etat de masques, pour les remplacer par des stocks tournants bien plus limités, et déléguer la ges-tion des masques aux collectivités ou aux hôpitaux.

Raisons budgétairesA l’origine, ce rapport mettait en avant les faibles capacités d’appro-visionnement de la France, pour recommander de reconstituer un stock de précaution de 1 milliard demasques, soit 20 millions de boîtes.Mais lors de sa publication, en mai 2019, la mention de ce stock a

disparu. A la place, il n’y a plus qu’une estimation du « besoin » : « En cas de pandémie, le besoin en masques est d’une boîte de 50 mas-ques par foyer, à raison de 20 mil-lions de boîtes en cas d’atteinte de 30 % de la population. L’importance du stock est à considérer en fonction des capacités d’approvisionnement garanties par les fabricants », se contente d’écrire l’expert.

Après avoir exposé ses réticenceset traîné des pieds, François Bour-dillon écrit à Jérôme Salomon : « Voici donc en retour l’avis dans lequel j’ai retiré […] toute allusion à un stock chiffré notamment pour les masques. » Dans un précédent courriel, Jérôme Salomon avait justifié sa demande ainsi : « Je sou-haite éviter de nous mettre en situa-tion de prendre des décisions précipi-tées, qui pourraient nous mettre en difficulté collectivement, y compris sur le plan budgétaire. » Ces emails ont été transmis à la commission d’enquête du Sénat par Jérôme Salomon « lui-même », a indiqué Olivier Véran jeudi en fin de jour-née. La Direction générale de la santé devait donner des explica-tions jeudi dans un communiqué, a ajouté le ministre.

En octobre 2018, le directeurgénéral de la Santé avait ordonné à Santé publique France de com-

mander 50 millions de masques seulement (la commande, rehaus-sée de 50 millions d’unités, mettra neuf mois à être passée), tout en commençant à détruire les stocks non conformes ou périmés, soit 613 millions d’unités.

« L’absence de masques chirurgi-caux pendant la crise vient de cette décision de 2018 », et non pas de la nouvelle doctrine de 2011, a pointé lasénatrice LR, Catherine Deroche, corapportrice de la commission d’enquête. Le 15 juin, a-t-elle rappelé,l ’Etat a p éniblement acquis 4 milliards de masques pour 2,8 milliards d’euros, qui ont mis des semaines à arriver et ont coûté trente fois plus cher dans cer-tains cas.

Si elle n’est pas tendre avecJérôme Salomon, la commission d’enquête dédouane en revanche la ministre de la Santé de l’époque, Agnès Buzyn, qui affirme ne pas avoir connu l’état des stocks jusqu’àcette année.

« Le directeur général de la Santétient à préciser qu’il a lui-même fourni l’ensemble des échanges de mails aux membres de la commissiond’enquête du Sénat », s’est justifiée l’administration du ministère de la Santé dans un communiqué jeudi soir, soulignant ainsi sa « volonté totale de transparence ». — S. G.

La commission d’enquête du Sénat accable SalomonLes sénateurs ont rendu jeudi leur rapport sur la gestion de la crise du Covid.

seront autorisés, même sans motif professionnel (le télétravail à 100 % reste cependant la norme quand c’estpossible) et il sera donc possible de serendre à l’autre bout du pays pour célébrer le 24 décembre en famille. Ce soir-là, d’ailleurs, le couvre-feu sera levé. « Noël occupe une place à part dans nos vies et nos traditions », aargumenté le chef du gouverne-ment. Pas de dérogation en revanchepour le Nouvel An, qui « concentre tous les risques d’un rebond ».

Olivier Véran a appelé les Fran-çais à ne pas aller se faire dépister systématiquement avant de retrou-ver leur famille à Noël, pour ne pas engorger les laboratoires, et pour

éviter un relâchement des compor-tements, parce que les tests antigé-niques détectent mal les cas positifsen période d’incubation.

Gérald Darmanin a brandi lamenace d’amendes à 135 euros pourles Français qui violeraient le cou-vre-feu sans bonne raison et promisde pourchasser les centres com-merciaux qui ne respecteraient pas le protocole sanitaire ou les partici-pants à des « fêtes sauvages ». Les forces de l’ordre « assureront les con-trôles avec tact et mesure, mais il n’y aura pas d’indulgence », a-t-il pro-mis. Plus de 2,9 millions de contrô-les ont déjà été réalisés, avec plus de285.000 verbalisations à la clé. n

l Le Premier ministre a confirmé jeudi le déconfinement à partir de mardi prochain, mais face à une épidémiequi ne recule plus, il a renoncé à rouvrir les cinémas, les théâtres, et autres gymnases à cette date. l Le couvre-feu sera instauré dès 20 heures ; il sera levé la veille de Noël mais pas le 31 décembre.

Une fin d’année sous couvre-feu, sans spectacle et sans rassemblement

Franche-Comté qui vient de repren-dre les évacuations sanitaires cette semaine. Le nombre de malades en réanimation vient de passer sous le seuil de 3.000, « mais nous pouvons craindre que le mouvement ralen-tisse, voire s’inverse » d’ici une à deuxsemaines, a prévenu Olivier Véran, d’autant plus que « l’hiver va s’instal-ler » et que « les vacances vont aug-menter les contacts sociaux ».

« Nous ne sommes pas arrivés aubout de cette deuxième vague », en a conclu Jean Castex. Il ne suffira pas de veiller au respect de protocoles sanitaires dans les l ieux qui accueillent du public pour faire refluer le virus, a expliqué le Premier

ministre, il faudra aussi « éviter les flux, les rassemblements et les concen-trations de population » – d’où ce dur-cissement de la stratégie de déconfi-n e m e n t . C o n c r è t e m e n t , l e s établissements recevant du public, ycompris les zoos, les salles de jeu, lesmusées, les conservatoires de musi-que ou les gymnases, demeureront fermés trois semaines de plus que prévu, jusqu’au 7 janvier, avec une clause de revoyure à l’approche de cette date. La réouverture des res-taurants et des bars reste, elle, tou-jours programmée le 20 janvier, si lasituation sanitaire le permet. La jauge des lieux de culte ne sera pas non plus accrue. Deux sièges doi-vent être laissés vides entre chaque groupe, et une rangée sur deux seu-lement peut être occupée.

A partir du 15 décembre, onpourra néanmoins sortir de chez soi sans attestation de 6 heures à 20 heures. Tous les déplacements

A partir du 15 décembre, on pourra de nouveau sortir de chez soi sans attestation de 6 heures à 20 heures.

RETROUVEZ DOMINIQUE SEUXDANS « L’ÉDITO ECO »À 7H45DU LUNDI AU VENDREDI

SUR

Solveig Godeluck @Solwii

Coup de blues pour le monde du spectacle et pour bon nombre de Français. Il n’y aura pas de cinéma, de théâtre ou de concerts pour la sai-son des fêtes, contrairement à ce quiavait été envisagé initialement par legouvernement. Il n’y aura d’ailleurs pas du tout de fêtes, avec un couvre-feu avancé à 20 heures au lieu de 21 heures, et levé uniquement pour la veille de Noël. Ni spectacles ni réveillon pour le 31 décembre : la règle sera de « rester chez soi le plus possible », a insisté le Premier minis-tre, Jean Castex, jeudi, lors de la con-férence de presse hebdomadaire du gouvernement sur l’épidémie.

Ces annonces ont douché lesespoirs de nombreux Français, même si les « fuites » de ces derniersjours dans la presse avaient un peu préparé les esprits à ces décisions difficiles. Pour apporter les mauvai-ses nouvelles, le chef du gouverne-ment était accompagné du ministre de la Santé, Olivier Véran, chargé d’indiquer que l’épidémie, non con-tente de se stabiliser, croît à nou-veau, et du ministre de l’Intérieur, Gérald Darmanin, venu manier le bâton face aux Français tentés par latransgression des règles sanitaires.

« Facteur climatique »Ce soudain durcissement s’explique par un nombre de contaminations quotidiennes qui « a arrêté de baisserdepuis une semaine », a expliqué Oli-vier Véran, citant les près de 14.000 cas de jeudi, contre 12.000 casle jeudi précédent. Il a mis en avant un « relâchement collectif », notam-ment depuis la réouverture des petits commerces le 28 novembre, et« un facteur climatique », froid et humidité, qui expliquerait d’ailleurs le « gradient » entre une Bretagne peu touchée et une Bourgogne-

COVID-19

FRANCE Vendredi 11 et samedi 12 décembre 2020 Les Echos

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Les Echos Vendredi 11 et samedi 12 décembre 2020 FRANCE // 03

lisé 350.000 places de septembre à décembre 2019 ! » explique-t-il. Dès que la rumeur a circulé d’un possiblereport de la date d’ouverture au-delà du 15 décembre, les réservations ont stoppé net. « Et les tickets non vendus sont perdus, il n’y a pas de rattrapage »,rappelle Jean-Marc Dumontet.

Dans le groupe Fimalac Entertain-ment, on avait déjà arbitré entre les théâtres où les spectacles à l’affiche permettaient de relever le rideau en limitant la casse (Bouffes Parisiens, La Madeleine, Théâtre de Paris) et ceux où l’ardoise aurait été trop lourde (La Porte Saint-Martin). Res-ter fermé est plutôt un soulagement.

Car chaque faux départ entamedavantage le moral des exploitants, de leurs équipes, des artistes et génère des dépenses en pure perte. Ainsi le Théâtre Antoine, Bobino, leThéâtre de l’Œ uvre, le Lucernaire, Le Palais-Royal, le Théâtre Michel, le Cirque Bouglione, avaient réen-clenché les processus de répétition,montage, billetterie, communica-tion… Il va falloir maintenant rem-bourser ou replacer les spectateurs sur des représentations ultérieures.

Si, du côté des salles de concerts degrande jauge, on a déjà fait une croixsur toute activité en 2020 et au pre-mier trimestre 2021, les cinémas, eux, étaient globalement détermi-nés à rouvrir. « Nous le voulions à la fois pour des raisons culturelles, socia-les, et économiques en cette période devacances scolaires et de fêtes, alors quedécembre représente 10 % de notre activité », assure Marc-Olivier Seb-bag, délégué général de la Fédéra-tion nationale des cinémas français.

Enfin du côté des musées, qui laplupart appartiennent à l’Etat ou aux collectivités locales, tout commedu côté des salles de spectacle sub-ventionnées, on prend son mal en patience et on mise sur le digital en attendant pour entretenir le lien avec le public. n

Martine Robert @martiRD

« Parce que personne ne veut revivre un troisième confinement, les ciné-mas, théâtres, salles de spectacle, cir-ques, musées, devront rester fermés pour éviter la concentration de flux, lebrassage des publics. Et, le 7 janvier, nous réexaminerons la situation », a annoncé ce jeudi soir le Premier ministre, Jean Castex. Ces lieux cul-turels auraient dû rouvrir mardi prochain. Mais la situation sanitairene le permet pas, a-t-il expliqué.

Cette décision divise les profes-sionnels du secteur privé de la cul-ture. Ainsi au sein du Syndicat natio-nal du théâtre privé, la position officielle plaidait pour la réouver-ture, mais les avis divergeaient entreles patrons de petites jauges, aux coûts de plateaux plus faibles, pro-grammant par exemple des one-man-show d’humour, et ceux des plus grandes salles, s’estimant dans l’incapacité d’amortir les frais. Et ce, même si décembre représente envi-ron 20 % du chiffre d’affaires annuel.

Tickets non vendus, perdusLa succession de stop-and-go et les incertitudes ont fini par avoir raison des plus déterminés, tel Jean-Marie Dumontet, qui exploite cinq salles à Paris et une sixième à Saint-Malo (Ille-et-Vilaine). « Le problème est que l’on ne vend plus aucun billet. Car nousavons besoin d’un délai de commercia-lisation, nous ne rouvrons pas commeun magasin de jouets ! Pour vous don-ner une idée, nous avions commercia-

La décision de maintenir les lieux culturels fermés au moins jusqu’au 7 janvier déçoit certains profession-nels, mais est comprise par d’autres, lassés des faux départs, dévastateurs pour leur public et leurs équipes.

Les lieux de culture coupés dans leur élan

Cette rallonge d’une dizaine de mil-liards supplémentaires n’est pas en soi une surprise. Le projet de loi de finances pour 2021 – dévoilé en sep-tembre dernier quand le gouverne-ment jurait, la main sur le cœur, qu’il ferait tout pour qu’il n’y ait pas de deuxième vague épidémique – comportait ainsi… zéro euro pour les mesures d’urgence supplémen-taires. Un scénario logique, dans la mesure où l’on tablait alors sur une forte reprise, mais que Bercy s’était engagé à revoir.

Fléchage vers les filières les plus touchées« Avec une dizaine de milliards d’euros, cela nous permettrait d’abon-der en crédits nécessaires le fonds de solidarité, le dispositif de chômage partiel, mais aussi la nouvelle aide pour les jeunes annoncée par Emma-nuel Macron » , a détaillé aux « Echos » Laurent Saint-Martin.

Dans le détail, le gouvernement amusclé en novembre le fonds de soli-darité pour les secteurs les plus en difficulté – ceux fermés administra-tivement comme les restaurants, les bars, la culture, mais aussi ceux quasi à l’arrêt comme le tourisme, l’événementiel. Jeudi soir, le Premierministre Jean Castex a indiqué que lefonds pourra aussi bénéficier« aux prestataires et exploitants agricoles travaillant avec le secteur de l’hôtelle-rie et de la restauration, ou aux sous-traitants du monde de l’événementiel, notamment sportif et culturel ».

Désormais, quelle que soit leurtaille, les entreprises de ces filières peuvent toucher une aide men-suelle allant jusqu’à 20 % de leur chiffre d’affaires mensuel équiva-lent de 2019. Bercy a déjà indiqué que le dispositif coûtait plus de

Emmanuel Macron avait indiqué la semaine dernière, lors de son entre-tien au média Brut, qu’il envisageait « sans doute une nouvelle aide excep-tionnelle » pour les jeunes en préca-rité en janvier ainsi qu’une « amélio-ration du système de bourses ». Le chef de l’Etat avait fait référence à l’aide de 150 euros déjà versée deux fois cette année aux jeunes bénéfi-ciant des aides au logement ainsi qu’aux étudiants boursiers.

Cette facture rallongée va alour-dir un peu plus le déficit pour l’an prochain. Il y a quelques jours, Oli-vier Dussopt, le ministre délégué aux Comptes publics, avait expliquéque la nouvelle prévision dégradée de croissance pour l’an prochain poussait automatiquement le défi-cit au niveau de 7,8 % du PIB (contre–6,7 % espérés en septembre). La dizaine de milliards supplémen-taire va pousser la jauge au-dessus de 8 %. Les nouvelles prévisions doi-vent être dévoilées ce vendredi. n

Bercy va remettre 10 milliards sur la table pour les aides aux entreprises en 2021

Renaud Honoré @r_honore

Officiellement, le gouvernement commence à poser les jalons de la findu « quoi qu’il en coûte » d’Emma-nuel Macron. Mais du point de vue des finances publiques, la différencen’est pas encore flagrante. Ainsi l’exécutif va proposer de rajouter entre 9 et 10 milliards d’euros sup-plémentaires au projet de loi de finances pour 2021, qui revient la semaine prochaine en discussion à l’Assemblée, afin d’aider les entre-prises en difficulté et les précaires.

C’est le rapporteur général duBudget à l’Assemblée qui a tiré le pre-mier pour appeler à renforcer les mesures économiques d’urgence. Il faut rajouter « une dizaine de mil-liards d’euros », a plaidé jeudi matin sur RTL Laurent Saint-Martin. « Je demande que le gouvernement fasse bien attention à ce que les premières semaines de l’année 2021 soient bien couvertes par ces mêmes mesures d’urgence », a insisté le député LREM.

De fait, l’exécutif travaille bien,selon nos informations, à rajouter entre 9 et 10 milliards d’euros. Le chiffrage pourra varier, si jamais le gouvernement ne dépense pas tousles crédits prévus pour 2020 pour ces mêmes mesures d’urgence. Début novembre, Bercy avait fait voter une enveloppe large de 20 milliards d’euros supplémentai-res pour faire face aux conséquen-ces du deuxième confinement.

L’exécutif va muscler la semaine prochaine le budget pour 2021 qui ne comportait pas jusqu’à présent de crédits pour les mesures d’urgence supplémentaires.

C’est dans la rencontre entre les femmes, les hommeset la technologie que se trouvent solutions et innovations.

People first. Solutions follow.*

*C’estavec

l’Hum

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révèlent

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bearingpoint.com

Pour le député LREM, Laurent Saint-Martin, les 10 milliards d’euros constituent « une enveloppe assez large pour traiter les effets de la deuxième vague ». Photo Anne-Christine Poujoulat/AFP

3,5 milliards par mois. En revanche,les entreprises des autres secteurs cesseront de toucher l’aide men-suelle de 1.500 euros à partir du 1er janvier prochain.

Concernant le dispositif de chô-mage partiel, la ministre du Travail, Elisabeth Borne, a indiqué mercredisoir que les entreprises « fermées totalement ou partiellement » conti-nueront d’être remboursées à 100 % de l’indemnisation versée à leurs salariés couverts par ce dispositif « aussi longtemps que les fermetu-res » dureront. Cela devait normale-ment s’arrêter à la fin de cette année,mais la ministre dit souhaiter qu’on aille « jusqu’à fin février ». Enfin,

Cette facture rallongée va alourdir le déficit, qui serait à 7,8 % du PIB en 2021.

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04 // FRANCE Vendredi 11 et samedi 12 décembre 2020 Les Echos

sement net de la fraude au chô-mage partiel durant le deuxième confinement ».

Autre risque associé à la criseet surveillé de près : la prise de contrôle par des réseaux mafieux d’entreprises en diffi-culté. Le phénomène semble à ce stade limité. « Certains com-merces ou sociétés peuvent être moins regardants sur l’origine des fonds injectés, mais il ne faut pas fantasmer sur la pénétrationdu crime organisé dans l’Hexa-gone », souligne la cellule de Bercy. Ce problème pourrait toutefois se matérialiser lors-que la vague de faillites se déclenchera. Tracfin compte sur l’extrême vigilance des administrateurs judiciaires et commissaires aux comptes.

Suivi des cryptoactifsL’un des grands enjeux d’avenir pour les équipes qui traquent les circuits financiers à risque porte sur la numérisation des services de paiement, et en par-ticulier des cryptoactifs (bit-coins, etc.), qui peuvent consti-tuer « un vecteur de blanchimentde capitaux ». Le travail de B e r c y a d é j à c o n t r i b u é à démanteler un réseau de finan-cement terroriste fin septem-bre : 29 personnes ont été inter-pellées et « l’analyse du réseau a confirmé le rôle central des deux collecteurs de cryptoactifs identi-fiés par Tracfin, suspectés d’être affiliés à Al Qaida ».

Autre succès, plusieursrecommandations de la cellule viennent d’être reprises dans une ordonnance qui durcit les obligations des plateformes d’échanges d’actifs numéri-ques, en matière de tenue de compte anonyme et de prise d’identité dès le premier euro.

Tracfin, dont les pouvoirstendent à s’accroître, devrait aussi être concerné par la loi contre le séparatisme. Son droitd’opposition devrait être élargi dans ce cadre. — I. Co.

A chaque crise, ses fraudes. Tracfin est bien placé pour le savoir. La cellule de Bercy char-gée de lutter contre les circuits financiers clandestins, le blan-chiment d’argent et le finance-ment du terrorisme a connu une année 2020 hors normes.

Le Covid-19 a fait naître unemultitude d’escroqueries aux masques et au matériel sani-taire, mais ce sont surtout les fraudes massives au chômage partiel qui ont frappé. C’est l’un des constats tirés du dernier rapport d’analyse des tendan-ces et des risques de Tracfin.

La fraude au chômage partiela pu être identifiée grâce aux alertes des banques dès le débutde la crise sanitaire. Il a donc étédécidé avec le ministère du Tra-vail d’allonger le délai de valida-tion des dossiers de 48 heures à15 jours et d’effectuer des con-trôles a priori. Résultat : à la fin septembre, plus de 90 dossiers ont été transmis par Tracfin à l’autorité judiciaire, pour un total de plus de 22 millions d’euros. « Dans ce contexte, près d’une trentaine de droits d’oppo-sition [dispositif de blocage de certaines opérations bancaires,NDLR] ont été mis en œuvre entre juin et septembre, pour un montant cumulé de 2,2 millions d’euros », indique le rapport.

En quatre mois, le recoursaux droits d’opposition a donc été trois fois plus élevé que sur l’ensemble de 2019 ! Sur le mon-tant total de la fraude de 225 mil-lions d’euros, plus de la moitié a pu être bloquée et récupérée. Tracfin se félicite de « l’infléchis-

FINANCES

Fraude au chômage partiel, vigilance envers les réseaux mafieux : la cellule anti-blanchiment de Bercy a dû s’adapter.

Fraude : comment Tracfin navigue dans la crise

des élus du personnel aux questionsde santé et de sécurité au travail pour les PME. « On a pris le temps de la réflexion », expliquait son négociateur, Eric Chevée, jeudi, précisant avoir en définitive rendu un avis « favorable » sur le texte.

« Le paritarisme a fonctionné avecune qualité et une maturité du dialo-gue social très forte », s’est félicitée Diane Deperrois, du Medef, cheffe de file de la délégation patronale. « La dernière séance de négociation a permis pas mal d’avancées », a insisté de son côté la négociatrice de la CFDT, Catherine Pinchaut.

Modifications législatives et réglementairesLes partenaires sociaux ont respectél’échéance de la fin d’année, qui leur avait été donnée par le gouverne-ment, mais aussi les parlementaires de la majorité qui travaillent sur uneproposition de loi sur la santé au tra-vail. C’est d’autant plus important que la balle est désormais dans leur camp puisque, contrairement à l’accord sur le télétravail « ni prescriptif ni normatif », celui sur la santé au travail implique des modifi-cations législatives et réglementai-res. Patronat et syndicats n’ont pas oublié les relations difficiles avec le gouvernement d’Edouard Philippe qui avait repris la main sur la forma-tion et l’assurance-chômage.

La ministre du Travail, ElisabethBorne, et le secrétaire d’Etat chargé

notamment un focus sur l’articu-lation avec la politique de santé publique.

« Modernisation » des services de santé au travailPour Laurent Pietraszewski, « c’est tout à l’honneur des partenaires sociaux que d’avoir su définir un cadre, comportant un important volet de prévention, qui renforcera le service rendu aux salariés et aux entreprises par les services de santé au travail et qui permettra notam-ment d’anticiper l’usure au travail ». L’accord comporte en effet un premier volet qui prévoit notam-ment la création d’un « passeport prévention », ainsi qu’un focus sur la prévention de la désinsertion professionnelle. S’y ajoutent un volet qualité de la vie au travail ainsi qu’une « modernisation » des services de santé au travail interentreprises avec notamment l’ouverture à la médecine de ville à laquelle tenaient tout particuliè-rement les artisans et professions libérales de l’U2P.

Ceux-ci pourront suppléer lespersonnels de santé au travail « pour les visites médicales pério-diques et de reprise du travail ». Une « offre socle soumise à un processus de certification » est par ailleurs définie pour les services de santé au travail qui devront développer une « interface informatique » avec les employeurs et les salariés. n

Il le sera d’autant plus que le résul-tat définitif risque d’être supérieur, car un certain nombre de contrats sont encore en cours d’enregistre-ment. « Cela correspond aux tendan-ces qui nous remontent des CFA et desbranches professionnelles », précise-t-on au ministère du Travail.

La raison principale d’un tel suc-cès tient à la très généreuse prime àl’embauche des apprentis décidée cet été (5.000 euros pour un mineur, 8.000 pour un majeur) qui a sauvé la rentrée. Quand bien même ces montants ont créé un effet d’aubaine, les employeurs ont été au rendez-vous malgré la crise. « On ne s’attendait pas à un tel chif-fre », reconnaît la présidente de la Fédération nationale des associa-tions régionales de directeurs de CFA, Roselyne Hubert.

Problème de financementCette aide, paradoxalement, aurait pu tempérer les efforts des CFA pour démarcher les entreprises, ce qui n’a visiblement pas été le cas, renforçant ainsi la dynamique. En les laissant complètement libres de

développer leurs sections d’appren-tissage sans avoir à attendre le bon vouloir des régions, la réforme de 2018 les a aussi incités à se dépasser,malgré un surcroît de charge admi-nistrative unanimement pointé du doigt parmi les intéressés. La déci-sion de laisser les CFA ouverts durant le deuxième confinement a joué également.

Pour exceptionnelle qu’elle soit,la hausse du nombre de contrats d’apprentissage attendue cette année provient aussi de la pour-suite de la bascule des contrats de professionnalisation, l’autre voie dela formation par alternance. Un transfert d’embauches classiques en CDI ou CDD, voire de stages, n’est

pas exclu non plus. « L’enjeu main-tenant est d’assurer la continuité des parcours et d’éviter les décrochages ou les ruptures de contrat », estime Roselyne Hubert, compte tenu de lafragilité financière de certains jeu-nes ou de certaines entrepri-ses. L’autre enjeu, global celui-là, sera d’assurer que France compé-tences, l’organisme national qui répartit les cotisations formation des entreprises, dispose d’assez de ressources pour financer un tel afflux de formations.

L’un des leviers, qui consiste àbaisser les niveaux de prises en charge des diplômes, n’intervien-dra qu’à la rentrée de 2022. Côté recettes, il est exclu de ponctionner davantage les employeurs. Il est donc probable que l’Etat soit amenéà remettre la main à la poche d’autant que le projet de loi de finan-ces pour 2021 oblige France compé-tences à équilibrer ses comptes à terme. « Plusieurs leviers peuvent être mobilisés dans le cadre d’une concertation avec les partenaires sociaux et les régions », toujours selon le ministère du Travail. n

Le nombre d’apprentis a battu un nouveau record cette année

Alain Ruello @AlainRuello

Le chiffre n’est encore que provi-soire, mais la conclusion, elle, ne fait pas de doute : avec 420.000 con-trats signés depuis le 1er janvier dansle secteur privé, contre 353.000 l’année dernière, le millésime 2020 de l’apprentissage s’annonce meilleur que celui de 2019, qui avaitdéjà atteint un sommet. Personne ily a quelques mois encore n’aurait parié sur une telle hausse de 19 %, soit 67.000 jeunes de plus. « Record pulvérisé », s’est réjouie la ministre du Travail, Elisabeth Borne.

EMPLOI

La prime à l’embauche des jeunes et les effets de la réforme de 2018 se sont traduits par une hausse inattendue de 19 % des contrats d’apprentissage cette année.

des Retraites et de la Santé au travail,Laurent Pietraszewski, se sont voulus rassurants. Voyant dans l’accord un signe de « la vitalité du paritarisme qui est au cœur des politiques de santé au travail », ils ont précisé dans un communiqué que « le gouvernement veillera, lors de la transcription de cet accord dans le droit du travail, au respect de son contenu et de son équilibre ».

Les députées LREM CharlotteParmentier-Lecocq et Carole Grandjean, à la manœuvre sur la proposition de loi sur la santé au travail, ont aussi immédiatement réagi. Elles ont précisé dans un communiqué qu’elles « respecte-ron[t] » ses conditions et « reste-ron[t] vigilantes à en intégrer, de manière fidèle, toutes les dimen-sions ». Mais tout en réaffirmant leur volonté de « l’enrichir de [leurs] propres travaux ». Avec

L’accord comporte un premier volet qui prévoit la création d’un « passeport prévention », ainsi qu’un focus sur la prévention de la désinsertion professionnelle.

Leïla de Comarmond @leiladeco

Après le télétravail, la santé au travail. Au bout de six mois de négo-ciation, une treizième réunion a permis de lever dans la nuit de mer-credi à jeudi les derniers obstacles à un accord entre les partenaires sociaux. Côté syndical, le texte final a reçu un avis favorable de la CFDT, de FO et de la CFE-CGC. Seule la CGTl’a rejeté. La CFTC prendra sa déci-sion la semaine prochaine.

Chose peu fréquente, du côtédu patronat, l’accord n’a pas fait d’emblée le plein. Le Medef et l’U2P ont annoncé qu’ils signeraient l’accord, la CGPME s’est dite « préoc-cupée » par le coût de la formation

TRAVAIL

La CFDT, FO et la CFE-CGC ont trouvé un accord avec le patronat sur la moder-nisation des services de santé au travail.

Un nouvel exemple de la bonne tenue du dialogue social en cette période de crise, après le récent compromis sur le télétravail.

Syndicats et patronat parviennent à un accord sur la santé au travail

Les visites médicales et de reprise du travail pourront être effectuées par l’un des médecins de ville inscrits sur la liste des « médecins praticiens correspondants ». Photo iStock

420.000CONTRATS SIGNÉSdepuis le 1er janvierdans le secteur privé,contre 353.000 l’année dernière. Le millésime 2020 de l’apprentissage s’annonce meilleur que celui de 2019.

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Derrière leurs chefs, MichelBarnier côté européen et David Frost côté britannique, les deux équipes de négociateurs se sont remises au travail dès jeudi, pour tenter de rapprocher ces positions diamétralement opposées : d’un côté, l’Union européenne refuse de brader l’accès à son marché, en demandant à Londres de ne prati-quer aucun dumping social ou envi-ronnemental pour pouvoir en bénéficier ; de l’autre, le Royaume-Uni veut, au nom de sa souverainetéretrouvée, avoir les coudées fran-ches pour décider de ses lois et des aides d’Etat qu’il souhaite distribuer.

830 milliards d’euros d’échanges en jeuLe problème, c’est qu’à ce stade aucune piste pour surmonter ces divergences ne semble se dessiner. Les derniers jours ont surtout per-mis à Boris Johnson de tenter de parler directement à Emmanuel Macron ou à Angela Merkel pour tenter de jouer sur leurs désac-cords, et à l’UE de lui imposer, au contraire, comme seul interlocu-teur la Commission et d’afficher haut et fort son unité. Mais aucune avancée significative n’a pu être constatée. Un « no deal » serait pourtant désastreux : à défautd’un accord commercial, ce sontles règles de l’OMC qui viendraient s’appliquer. En jeu, pas moinsde 830 milliards d’euros d’échangescommerciaux annuels, aujour-d’hui libres de tout quota ou tarif douanier et qui risquent d’en sup-porter au 1er janvier.

A Bruxelles, où la question duBrexit a délibérément été laissée de côté lors d’un sommet entre chefs d’Etat et de gouvernement, la Com-mission européenne a fini par se résoudre, jeudi, à présenter ses mesures de « contingence » en cas de Brexit sans accord. La publica-

tion était réclamée depuis des semaines par de nombreux Etats membres, mais Bruxelles prenait tout son temps, afin de ne pas envoyer un signal trop négatif en pleine négociation avec Londres.

Du mal à s’entendre, même sur la gestion d’un « no deal »Mais, même sur la manière de faireface à un éventuel « no deal », Lon-dres et Bruxelles ont bien du mal à s’entendre. Outre le secteur aérien et les transports routiers, où la Commission propose de maintenir la connectivité pendant six mois à condition que le Royaume-Uni optelui aussi pour le statu quo, Bruxellespropose sur la pêche un cadre vala-ble jusqu’à la fin 2021, consistant à

l La présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, et le Premier ministre britannique,Boris Johnson, se sont donné jusqu’à dimanche pour décider de l’avenir des pourparlers sur l’après-Brexit.l Leurs différends restent profonds, et aucune piste pour les surmonter ne semble à ce stade se dessiner.

Brexit : le week-end de la dernière chance

Alexandre Counis @alexandrecounis

—Correspondant à LondresGabriel Grésillon

ggresillon@—Bureau de Bruxelles

Ils se sont donné jusqu’à dimanche pour aplanir leurs divergences. Mais est-ce encore possible ? La présidente de la Commission euro-péenne, Ursula von der Leyen, et le Premier ministre britannique, Boris Johnson, ont pris rendez-vous pour la fin du week-end afin d’arrêter une décision sur l’avenir des pourparlers en cours à propos des futures relations entre l’UE et leRoyaume-Uni. Mais le dîner qui les a réunis, mercredi soir à Bruxelles, est loin de laisser penser que les deux camps peuvent d’ici là arra-cher un accord.

Le dîner a beau avoir été « vivantet intéressant », comme l’a dit à son issue Ursula von der Leyen, ou don-ner lieu à une discussion « franche »,comme l’a estimé Boris Johnson, force est de constater qu’il n’a per-mis aucune percée. Et trois heures d’entretien ont surtout servi à constater, une fois de plus, combienles positions des deux camps res-tent, sur la pêche mais surtout sur les conditions d’une concurrence équitable et sur les futurs modes derésolution des conflits, « très éloi-gnées ».

Le dîner qui lesa réunis, mercredi soir à Bruxelles,est loin de laisser penser que les deux camps peuventd’ici là arracherun accord.

maintenir un accès « réciproque desnavires de l’UE et du Royaume-Uni aux eaux de l’autre partie ». Pas sûr que Londres accepte une telle solu-tion, sachant que les Européens qui

vont pêcher dans les eaux britanni-ques sont beaucoup plus nom-breux que leurs homologues bri-tanniques s’aventurant dans les eaux européennes. Un porte-parole

de Downing Street s’est ainsi mon-tré particulièrement réservé, jeudi. Il a rappelé que le Royaume-Uni comptait « reprendre le contrôle » deses eaux au 1er janvier. n

Le Premier ministre britannique, Boris Johnson, et la présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen.

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AFP

Si les négociations en vue d’un accord commercial finissaient par achopper, l’Union européenne cherche d’ores et déjà à pallier deuxurgences : maintenir une certaine fluidité dans les déplacements entre les îles Britanniques et le Vieux Continent après le 31 décem-bre 2020 et trouver un statut tem-poraire pour la pêche dans les eauxanglaises.

La Commission a déjà une cer-taine pratique dans cet exercice puisqu’elle avait déjà préparé des plans de contingence en cas de divorce sans accord à l’été 2019. Jeudi, la présidente de la Commis-sion européenne, Ursula von der Leyen, a proposé plusieurs règle-ments aux vingt-sept pays mem-bres. La priorité est donnée aux transports en assurant des liaisons aériennes et en assurant la plus grande fluidité possible aux trans-ports routiers pendant six mois, alors que contrôles douaniers et phytosanitaires vont être rétablis. Les licences d’exploitation ont d’ores et déjà été prolongées de neuf mois pour les entreprises fer-roviaires, afin de maintenir la cir-culation des Eurostar, et de deux mois pour Eurotunnel.

En ce qui concerne la pêche, laCommission essaie de sauver les meubles pour une année supplé-mentaire. Elle recommande un « règlement visant à créer le cadre juri-dique approprié jusqu’au 31 décembre2021, ou jusqu’à la conclusion d’un accord de pêche avec le Royaume-Uni – selon la date la plus rapprochée – pour un accès réciproque continu des navires de l’UE et du Royaume-Uni aux eaux de l’autre partie après le 31 décembre 2020 ». Huit pays sont particulièrement concernés, qui se partagent 45 % des ressources halieutiques britanniques depuis des décennies (France, Allemagne, Espagne, Belgique, Pays-Bas, Irlande, Danemark et Suède).

Le transport des marchandises vaégalement se compliquer. Grâce au marché unique et à l’union doua-nière, il suffisait d’un bon de trans-port pour un véhicule et d’un bon delivraison pour le client quand un exportateur livrait au Royaume-Uni. A l’avenir, il faudra procéder à des dédouanements des deux côtés

de la frontière. Chaque marchandisesera certifiée, devra avoir un certifi-cat sanitaire si c’est une denrée péris-sable et des taxes douanières seront appliquées. Inévitablement, les délais vont s’allonger et les échangesse renchérir.

Lourdes conséquencesLondres a dévoilé en mai dernier son futur dispositif douanier qui s’appliquera en cas de non-accord commercial. Le gouvernement de Boris Johnson a prévu de supprimerles droits de douane sur 60 % des échanges qui entreront au Royau-me-Uni (contre 47 % aujourd’hui). Mais il en a maintenu certains, voireles a augmentés, sur les industries qu’il veut protéger. En particulier l’automobile et l’agroalimentaire pour sécuriser ses exploitants agri-coles, éleveurs et pêcheurs.

Moins évident, l’échec des négo-ciations pèserait sur les relations de sécurité entre le Royaume-Uni et l’Union européenne. Notamment enmatière de coopération policière et judiciaire, car il retrouve un statut d’Etat tiers. Cela veut dire qu’il n’y aura plus d’accès aux fichiers euro-péens ni aux agences européennes (Europol et Eurojust), ni de projets opérationnels alors que la menace terroriste est toujours bien présente.Enfin, dans le domaine de la défense,le Royaume-uni était avec la France l’une des deux seules puissances nucléaires de l’UE. Son départ sera fortement lourd de conséquences. — V. R. et service Monde

L’ Union européenne accélère les préparatifs en cas d’échecL’Union européenne prépare quelques garde-fous au cas où un accord commercial avec le Royaume-Uni s’avérerait impossible. De nombreux secteurs vont être impactés

Le gouvernement de Boris Johnson a prévu de supprimer les droits de douane sur 60 % des échanges qui entreront au Royaume-Uni contre 47 % aujourd’hui.

MONDE Les Echos Vendredi 11 et samedi 12 décembre 2020

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LeGrand rendez-vous

ChristianEstrosi

©Syspeo/SIPA

Maire deNicePrésident de laMétropoleNice Côte d’Azur

Dimanchede10hà11hsurEurope1

Michaël Darmon, Cécile Cornudet et Damien Fleurot reçoivent

Europe : feu vert pour le plan de relance l Les Vingt-Sept sont parvenus à s’entendre, jeudi soir, au sujet de l’avenir de leurs finances.l Le veto hongrois et polonais au sujet du mécanisme sur l’Etat de droit est levé.

mière évaluation de chaque demande puis les ministres l’entéri-neront à la majorité qualifiée.

La Commission de son côté doitencore attendre le feu vert des Par-lements nationaux pour emprun-ter les fonds nécessaires sur les marchés financiers. Elle le fera cer-tainement par étapes, à mesure de ses besoins de décaissement.

• QUAND INTERVIENDRONT LES PREMIERS VERSEMENTS ?La plus grosse part des montants enjeu (70 %) doit être attribuée en 2021et 2022, le solde (30 %) pouvant êtreversé jusqu'en 2023. Une règle restetoutefois applicable à tous : les montants reçus ne devront pas excéder 6,8 % du revenu national brut de chaque Etat membre. C’est l’Italie (65 milliards d’euros) et l’Espagne (59 milliards) qui rece-vront la plus grande part de l’aide européenne. Viennent ensuite la France avec 40 milliards et la Polo-gne avec 23 milliards.

La France s’attend à ce qu’unepremière tranche de 10 % du mon-tant total soit distribuée en mars ouavril 2021. Le reste sera conditionné

au respect des objectifs définis dansles plans nationaux.

• QUAND ET COMMENT SERONT REMBOURSÉES LES AIDES ?Tout l’intérêt de l’emprunt collectif qui sera opéré par le biais de la Commission européenne, c’est qu’ilpourra être remboursé via le bud-get européen. Pour éviter que le poids de la contribution de chaque Etat membre augmente et avec lui, les impôts pesant sur les contribua-bles, les Etats membres se sont engagés à créer de nouvelles res-sources propres pour rembourser l’emprunt. L’accord du 10 novembredernier entre le Parlement euro-péen et le Conseil prévoit la mise enplace de nouvelles ressources et l e u r c a l e n d r i e r d e m i s e e n œuvre. Une taxe plastique doit entrer en vigueur au 1er janvier 2021.Elle devrait être suivie de la taxe car-bone aux frontières et de la taxe Gafa et de la taxe sur le système d’échange des quotas d’émission (ETS). Le remboursement du capi-tal de l’emprunt doit s’étaler sur 30 ans, jusqu'en 2058. n

marché pour reconstruire l’écono-mie européenne après le passage de l’épidémie de Covid-19. Le plan de relance, baptisé « Next Genera-tion EU » pour montrer qu’il est censé préparer le terrain aux géné-rations à venir, doit contribuer à préparer l’économie européenne aux défis du XXIe siècle. A quoi ser-viront ces fonds, qui les rembour-sera et quand ?

• QUE CONTIENT LE PLAN DE RELANCE EUROPÉEN ?Sa pièce maîtresse est la « Facilité de relance et de résilience » (FRR), qui représente l’essentiel du dispo-sitif puisqu’elle est dotée de 672 milliards sur les 750 milliards d’euros disponibles. Il s’agit de sub-ventions à hauteur de 312 milliardsd’euros et de prêts pour 360 mil-liards que les pays seront libres de contracter ou non, en fonction de leurs besoins. Conçus pour être utilisés rapidement, ces fonds iront irriguer directement les éco-nomies des Etats membres via les collectivités locales, les banques d’investissement ou les agences gouvernementales.

Le reste de l’enveloppe, 78 mil-liards d’euros, viendra abonder le budget européen 2021-2027 via desprogrammes européens jugés eux aussi utiles pour accompagner les investissements d’avenir. Une enveloppe de 47,5 mill iards d’euros est dédiée à React-EU, une initiative de soutien à la reprise, 10 milliards iront au Fonds de tran-sition juste, qui doit accompagner les pays en retard sur le front de la transition climatique, 5 milliards s’ajouteront au programme Hori-zon Europe, dédié à la recherche età l’innovation…

• QUELLES CONDITIONS SONT LIÉES AU VERSEMENT DES AIDES ?L’argent du plan de relance ne doit pas servir à financer les hausses desalaires des personnels de santé oule chômage partiel. Les pays du nord de l’Europe, méfiants envers l’usage qui pourrait être fait de l’argent commun, y ont veillé, et il yaura des conditions à respecter pour obtenir le déblocage des fonds. 37 % des dépenses engagées devront être dédiées à la transition

énergétique et 20 % à la digitalisa-tion de l’économie.

La Commission a aussi demandéque les gouvernements tiennent compte des « recommandations » qui leur sont adressées lors du Semestre européen, sorte de guide pratique sur les réformes structurel-les à mener. L’Europe de l’après-Co-vid-19 devra être plus verte, plus numérique et mieux adaptée aux défis actuels et à venir. Une ultime condition est prévue pour la pre-mière fois et s’appliquera aussi bien au plan de relance qu’au budget plu-riannuel : les Etats devront s’assurer que l’argent européen est dépensé dans le respect de l’Etat de droit.

• QUELLES SONT LES PROCHAINES ÉTAPES DU CALENDRIER ?Les gouvernements préparent depuis plusieurs semaines leurs pro-pres plans de relance détaillant l’usage qu’ils comptent faire des fonds européens sur la période 2021-2023. Les envois officiels sont atten-dus entre le 1er janvier 2021 et le 30 avril. La Commission disposera alors de deux mois pour une pre-

Le dispositif de soutien européen en cinq questions

Catherine Chatignoux @chatignoux

Le plan de relance européen, adopté dans son ultime mouture jeudi par les dirigeants européens, a été âprement négocié, d’abord auprintemps au sein du couple fran-co-allemand, puis avec les pays « frugaux » du nord de l’Europe. L’ampleur de la pandémie et les dégâts réalisés sur l’économie ont fini par emporter le consensus. La Commission européenne a été autorisée en juillet à emprunter surles marchés pour le compte des Etats membres 750 milliards d’euros. Une première, justifiée parla nécessité de prévoir des fonds suffisamment importants et bon

Le super- plan de relance européen de 750 milliards d’euros qui a été adopté jeudi par le Conseil européen est une première à la fois par son ampleur et par les modalités de son adoption, via un endettement commun des Vingt-Sept.

Gabriel Grésillon @GGresillon

—Bureau de Bruxelles

Le veto est levé. Après des semainesde blocage par la Pologne et la Hon-grie, un compromis a enfin été trouvé, jeudi soir au sujet du méca-nisme qui doit conditionner, à l’ave-nir, l’accès aux fonds européens au respect de l’Etat de droit. Varsovie etBudapest, après avoir mis leur veto au dispositif en y voyant une menace pour leur souveraineté, ontfinalement accepté une solution élaborée notamment par la prési-dence allemande de l’UE.

Viktor Orbán, le Premier minis-tre hongrois, avait lui-même estimé, en arrivant à Bruxelles, que les Vingt-Sept étaient « à deux doigtsde parvenir à un consensus ». La machine à communiquer hon-groise, par la bouche du chef de cabinet de Viktor Orbán, Gergely Gulyas, s’était chargée de présenter cette percée comme une « victoire »de son pays.

Fermeté des pays « frugaux »La prudence est restée de mise jus-qu’au bout, car les pays dits « fru-gaux », emmenés par les Pays-Bas, préféraient garder leur posture de fermeté sur un sujet qu’ils considè-rent comme capital. A son arrivée àBruxelles, le Premier ministre néer-landais , Mark Rutte , s ’é ta i t dit « neutre » au sujet du compromissur la table. Celui-ci consiste à ne pas modifier le mécanisme sur l’Etat de droit, mais à l’accompa-

EUROPE gner d’une déclaration qui en clari-fie la portée et le fonctionnement. La possibilité de solliciter l’avis de laCour de justice de l’Union euro-péenne au sujet de ce mécanisme y est notamment gravée dans le mar-bre, offrant un sursis procédural d’un à deux ans aux deux pays récalcitrants.

Forts de cette victoire, les Euro-péens n’entendaient pas se laisser happer par l’autre dossier qui les accapare depuis des semaines. Le Brexit ? « Il n’est pas à l’ordre du jour », avertissait sèchement un haut diplomate quelques heures avant le début de la rencontre. Ursula von der Leyen, la présidente de la Commission, a toutefois informé les dirigeants européens dela situation, au lendemain de son dîner avec Boris Johnson, le Premierministre britannique. Une situation de blocage, mais que les Vingt-Sept ne veulent surtout pas tenter de résoudre directement avec Londres,préférant faire bloc derrière leur négociateur, Michel Barnier, et der-rière Ursula von der Leyen elle-même. L’objectif étant, jusqu’au bout, de préserver leur unité.

Les dirigeants européens avaiententamé leur réunion, en tout début d’après-midi, par une conversation

Le compromis offre un peu de temps à Varsovie et Budapest, mais ne change rien au fonctionnement du dispositif.

au sujet de la pandémie. Après une phase consacrée à procéder à des achats groupés de vaccins, ils sesont engagés à aborder les vaccina-tions dans un maximum de coordi-nation. Ce qui impliquera un paral-lélisme dans les calendriers, mais aussi dans les ordres de vaccinationpar types de population. Ils enten-dent également lutter contre la défiance entourant ces vaccins. « Il est important de diffuser une infor-mation claire et factuelle sur les vac-cins et de lutter contre la désinforma-

tion », résument-ils dans leur communiqué.

Outre un débat qui s’annonçaitcomplexe sur les objectifs de réduc-tion des gaz à effet de serre à l’hori-zon 2030, les dirigeants européens devaient enfin avoir une discussion,en fin de soirée, au sujet de la Tur-quie. Un sujet sur lequel s’affichent des sensibilités très différentes. Cer-tes, comme le résume une source diplomatique, « il y a un consensus pour constater qu’Ankara a suivi une trajectoire opposée à l’apaise-

ment que nous souhaitions au cours des derniers mois ».

Besoin de WashingtonMais ce constat partagé ne suffit pas à mettre tout le monde d’accord quant aux actions à mettre en œuvre. A la suite des agissements militaires du pays et à ses activités deforage dans les eaux grecques et chy-priotes, les dirigeants devaient demander la constitution d’une liste de personnes à sanctionner. Mais l’idée de sanctions économiques,

elle, divise. « La Turquie est dans une situation économique suffisamment précaire pour ne pas en rajouter », plaidait une source diplomatique européenne estimant essentiel de continuer à présenter à Ankara un agenda positif. Tout en avouant que les Européens, en dépit de leurs ambitions géostratégiques affichées,continuent de compter sur le grand frère américain sur ce dossier : « Le changement de locataire à la Maison-Blanche pourrait peut-être exercer surelle une pression bienvenue. » n

Angela Merkel, Charles Michel, président du Conseil européen, et Xavier Bettel, le Premier ministre luxembourgeois, jeudi à Bruxelles.

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Les Echos Vendredi 11 et samedi 12 décembre 2020 MONDE // 07

effet en ce moment le dossier du laboratoire pour son candidat-vaccin à base d’ARN, développé avec la biotech allemande BioN-Tech. L’EMA devrait rendre le 29 décembre au plus tard sa déci-sion sur une autorisation condi-tionnelle du traitement, déjà approuvé au Royaume-Uni, à Bahreïn et au Canada.

Des hackers russeset nord-coréensLes sites de Pfizer et de BioNTech n’ont eux pas été attaqués dans le cadre de cet incident. A leur connaissance, « aucun partici-pant aux études cliniques du vac-cin n’a pu être identifié » grâce auxdonnées dérobées.

L’Agence européenne desmédicaments n’est pas la pre-mière organisation de santé cibléepar des hackers. Depuis le début de la pandémie, les attaques con-tre les laboratoires et autres cen-tres de santé ont explosé. Micro-soft avait même tiré la sonnette d’alarme à ce sujet, à la mi-novem-bre : pas moins de sept entreprisesde santé situées en France, aux Etats-Unis, au Canada, en Inde et en Corée du Sud ont été victimes de tentatives de piratage. La majo-rité de ces attaques ont cependantété neutralisées.

Plusieurs pirates sont identi-fiés : le russe Fancy Bear, notam-ment responsable du piratage aux Etats-Unis du Comité natio-nal démocrate lors de l’élection présidentielle de 2016, ainsi que Zinc et Cerium, qui viennent de Corée du Nord. n

Enrique Moreira @EnriqueMoreira

L’enjeu du vaccin contre le Covid-19 est tel que même les pirates informatiques s’en mêlent. L’Agence européenne desmédicaments (EMA, en anglais), qui évalue en ce moment plu-sieurs dossiers de candidats-vac-cins, a été la cible d’une cyberatta-que, a-t-elle annoncé mercredi.

Auditionnée jeudi par la com-mission de l’Environnement, de la Santé publique et de la Sécuritéalimentaire du Parlement euro-péen, la toute nouvelle directrice de l’agence, Emer Cooke, a pré-cisé : « En réalité, nous en avons connu plusieurs lors des deux der-nières semaines. » L’EMA a ouvertimmédiatement une enquête et collabore avec la police. « Cela ne ralentira en rien le calendrier déjà annoncé pour l’évaluation des demandes d’autorisation d’utilisa-tion conditionnelle. Nous restons totalement opérationnels », a insisté la directrice.

Le géant pharmaceutiqueaméricain Pfizer a précisé dans lafoulée que « certains documents liés à sa soumission réglemen-taire » avaient été piratés . L’agence européenne évalue en

L’Agence européenne des médicaments (AEM), qui délibère actuellement sur la délivrance d’autori-sations à plusieurs vaccins contre le Covid-19, s’est dit mercredi la cible d’une cyberattaque.

Vaccins Covid-19 :l’Agence européenne des médicaments piratée

accord sur le chiffre de 55 % était déjà entendu depuis des semaines, les modalités concrètes de cet enga-gement ont, elles, été bien discu-tées. Certains pays de l’Est, Pologne en tête, ont âprement négocié leur feu vert. Encore très dépendante aucharbon, la Pologne refuse depuis le début tout objectif national en appui de l’objectif collectif. Varsovieredoute les conséquences écono-miques d’une transformation expresse de son mix énergétique qui lui serait imposée.

Pour éviter son veto, les Etatsmembres devaient ainsi s’en tenir à un objectif « collectif » qui sera le résultat d’un « effort qui prendra en compte l’équité et la solidarité, en ne laissant personne derrière », selon lesprojets de conclusion qui ont fuité

quente du « fonds pour la transition juste », de 17,5 milliards d’euros, prévu pour aider les pays les plus en retard à accélérer leur transition vers des énergies moins polluantes.

Les institutions européennes ontacté, mercredi, que les fonds struc-turels ne financeraient plus de pro-duction d’énergie fossile après 2025. Mais les pays les plus dépen-dants au charbon ont obtenu en échange de bénéficier d’ici là à pleindes aides liées au gaz, pour lancer leur transition.

Les fonds du plan de relanceeuropéen ont aussi vocation à ali-menter l’effort important qui sera nécessaire : 37 % au moins des sub-ventions versées devront être con-sacrées à des mesures de verdisse-ment de l’économie. n

Accord en vue des Vingt-Sept sur le renforcement des objectifs climatiques 2030

Derek Perrotte @DerekPerrotte

—Bureau de Bruxelles

Les Européens continuent d’avan-cer à marche forcée vers leur grandobjectif de neutralité climatique en 2050. Jeudi soir, en sommet euro-péen à Bruxelles, les chefs d’Etat et de gouvernement des Vingt-Sept devaient adopter le renforcement des objectifs de réduction des gaz à effet de serre d’ici à 2030.

La barre, jusqu’ici fixée à uneréduction de 40 % par rapport aux niveaux de 1990, va être portée à « au moins 55 % », comme l’avait proposé la Commission euro-péenne en septembre. Le Parle-ment européen avait préconisé de viser 60 % mais il n’a ici qu’un rôle consultatif.

Unanimité requiseUn tel changement de braquet s’impose pour espérer avoir encore une chance de tenir les objectifs de l’Accord de Paris, qui commémo-rera samedi ses cinq ans. Les émis-sions de gaz à effet de serre ont atteint l’an dernier dans le monde unniveau sans précédent et, au rythmeactuel, les objectifs fixés par la COP21ne pourront être atteints, a alerté mercredi un rapport du PNUE (Nations unies).

Il était toutefois difficile d’allerau-delà pour des Vingt-Sept soumisici à la règle de l’unanimité. Si un

Les Etats de l’Union européenne devaient valider, jeudi soir, un objectif de 55 % de réduction des gaz à effet de serre d’ici à 2030.

RÉAGIRFACE À UNE CRISE

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avant le sommet. « Il y a un certain nombre de réassurances, de garanties,de mesures de soutien à donner aux uns et aux autres pour que chacun soità l’aise avec l’objectif », confiait jeudi

après-midi une source européenne. Varsovie veut ainsi l’assurance taciteque la Commission saura lui réser-ver le moment venu une part consé-

Les institutions européennes ont acté mercredi que les fonds structurels ne financeraient plus de production d’énergie fossile après 2025.

La Pologne, très dépendante du charbon, veut des garanties sur les aides dont elle bénéficiera.

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lement leur intention, ou non, de rattraper le retard de leur pays, et d’indiquer dans quelles proportions.Les organisateurs comptent bien, également, voir beaucoup de pays s’engager à atteindre la neutralité carbone et dire à quelle échéance.

La référence à ce principe dansles politiques climatiques nationa-les commence à peine à se répan-dre. L’Europe, la Chine, le Japon ou encore la Corée du Sud viennent de décider d’en faire le fil rouge de leurs actions. C’est le signe que l’Accord de Paris, qui a édicté cette règle, est bien vivant malgré les coups subis ces dernières années. Principalement, celui que lui a porté l’annonce, en 2017, du retrait des Etats-Unis.

Revoir les planètes s’alignerLe « zéro émission nette », l’autre terme pour qualifier le concept de neutralité carbone, est devenu plus familier depuis cinq ans aux entre-prises et aux collectivités. A la diffé-rence des Etats, la mobilisation de

la société civile n’a fait qu’aller croissant depuis 2015. Les villes et les régions sont aux premières loges lorsque les conséquences du réchauffement, comme les dramati-ques « méga incendies » qui rava-gent périodiquement l’Australie et la Californie, se font sentir. Investis-seurs, banques, assurances et com-pagnies industrielles ne rechignent pas à adhérer aux méthodologies qu’a inspirées l’Accord de Paris pourse décarboner.

A qui veut s’en saisir, la luttecontre le réchauffement climatique offre de formidables opportunités de développement. D’autant que la pression de l’opinion et donc des consommateurs n’a fait qu’aller crescendo depuis cinq ans, surtout chez les jeunes nombreux à dénon-cer l’inertie des Etats. A eux de faire en sorte que se reforme l’alignementdes planètes scientifiques, sociétaleset politiques dont Laurent Fabius, le président de la COP21, a estimé avoir bénéficié pour arracher l’Accord de Paris. n

Cinq ans après, un nouveau sommet pour remettre sur les rails l’Accord de Paris sur le climatl Inscrit dans le texte historique adopté en 2015, l’objectif de contenir le réchauffement à 2 degrés Celsius ne cesse de gagner en incertitude.l Le « Sommet de l’ambition pour le climat », qui se tient ce samedi, se présente comme celui de la dernière chance pour tenir ce cap. De nouveaux engagements des Etats sont attendus.

premier, et pour l’instant le seul, quiait gravé dans la loi le « zéro nette émission ». Le gouvernement bri-tannique, très ambitieux, vient par ailleurs d’annoncer qu’il visait une baisse de ses gaz à effet de serre (GES) de 68 % d’ici à 2030 par rap-port à leur niveau de 1990.

Les petits pays, les plus volontairesLes pays de l’Union européenne se préparent à lui emboîter le pas et à légiférer sur une réduction de ces GES d’au moins 55 % à la même échéance. Le Canada, lui aussi, a annoncé un objectif de neutralité carbone (pour 2050), après la Chine (pour 2060), le Japon et la Corée du Sud (pour 2050). Les Etats-Unis, avec l’élection de Joe Biden, sont con-sidérés comme faisant partie de ce groupe des 127 Etats qui sont respon-sables de près des deux tiers des rejets de CO2.

Mais les efforts que tous prévoientde faire ne sont pas à la hauteur des enjeux. Le CAT juge insuffisantes et incompatibles avec un réchauffe-ment de 2 °C les contributions natio-nales – les NDCs (Nationally Deter-

chercher les bons élèves et aussi de celui des pays les moins avancés (PMA). La Jamaïque a doublé son ambition par rapport à son NDC de 2015. La Colombie va accélérer la baisse programmée de ses émis-sions pour lui faire atteindre 51 % en 2030 (par rapport à 1990).

A l’opposé, la Russie et le Brésilsont au fond de la classe. La politiquemenée par Moscou « n’est pas du toutalignée sur les objectifs de long terme de 2 °C », juge Alexandra Deprez. Le pays n’a pas prévu de réduire sa pro-duction de gaz et de pétrole. Ce qui vaut à sa politique climatique d’être qualifiée d’« extrêmement insuffi-sante » par le CAT.

Son appréciation sur celle menéepar Brasilia est à peine moins sévère,avec la reprise à tout va de la défores-tation. Le gouvernement a bien annoncé qu’il réviserait sa contribu-tion en vue de diminuer de 43 % ses émissions en 2030. Mais il a condi-tionné cet engagement au verse-ment d’une aide de 10 milliards de dollars par la communauté interna-tionale en paiement des services écosystémiques rendus par le mas-sif amazonien. — J. C.

Qui sont les bons et mauvais élèves

Les Etats sont encore loin de mani-fester avec la même ferveur leur volonté d’éviter à la planète un réchauffement de plus de 2 °C d’ici à la fin du siècle. Mais il y a du progrès,et même beaucoup. Une majorité d’entre eux – très précisément 127 Etats sur les 197 reconnus par lesNations unies – affichent désormais leur intention d’atteindre la neutra-lité carbone, selon le comptage que vient de publier le centre de réflexion et d’analyse Climate ActionTracker (CAT).

C’est une vraie avancée. Sauf querelativement peu de ces pays ont pris officiellement de nouveaux engagements ou les ont relevés pour atteindre cet objectif. Tant et sibien qu’à ce stade aucun Etat ne peut faire figure d’élève modèle. Unseul Etat, le Royaume-Uni, est le

L’objectif de la neutralité carbone fait son chemin, mais pas partout. Et les engagements annoncés par la plupart des 127 pays qui signalent vouloir l’atteindre dans les toutes prochaines décennies ne suffiront pas.

Joël Cossardeaux @JolCossardeaux

On sera très loin, samedi, de l’eupho-rie générale telle que l’ont connue etpartagée les milliers de participantsà la COP21. L’Accord de Paris sur le climat, conclu il y aura exactement cinq ans, ne donne plus autant enviede pavoiser. D’abord parce que totalement virtuel, Covid-19 et res-pect des distanciations obligent, le « Sommet de l’ambition pour le climat », organisé ce même jour à l’invitation de la Grande-Bretagne, de la France, de l’Italie, du Chili et des Nations unies, se prête peu aux effusions. Mais surtout parce que l’accord historique conclu en 2015 par 196 Etats éveille aujourd’hui bien des craintes. Le principal objectif qu’il fixe, celui de limiter à 2 °C, au pire du pire, le réchauffe-ment de la planète d’ici à la fin du siè-cle, s’annonce de plus en plus diffi-cile à tenir.

Il suffit pour s’en rendre comptede se plonger dans l’avalanche de rapports qui précède ce sommet, comme c’est le cas à la veille de cha-que COP, les conférences mondiales pour le climat, dont la 26e édition, à Glasgow, a été reportée à décem-bre 2021. Le Programme des Nationsunies pour l ’environnement (PNUE), dans sa dernière livraison, redoute une poussée du mercure de 3,2 degrés. Et alors qu’il faudrait les réduire de 7,6 % par an, les émis-sions de gaz effet de serre (GES) continuent d’augmenter à un rythme affolant. Le volume des rejets de CO2, qui en sont les pre-miers responsables, a crû de 2,6 % en 2019 contre 1,4 % en moyenne paran depuis 2010.

L’angle mort du Covid-19Une tendance très fâcheuse qu’il est peu probable de voir brisée en 2020,même si « l’effet Covid » va indiquer le contraire. D’après les estimations que publie ce vendredi le Global Car-bon Project (GCP), un programme de recherche international, les émis-sions devraient en effet baisser cette année de 7 % au niveau mondial. Une chute qui n’impressionne guèreses chercheurs. « Ce n’est pas beau-coup compte tenu de l’arrêt majeur des activités lié au premier confine-

ENVIRONNEMENT

« On voit le mur se rapprocher »Propos recueillis parMuryel Jacque

@MuryelJacque

Quel bilan dressez-vous cinq ans après l’Accord de Paris ?Nous devrions avoir atteint le pic des émissions mondiales de gaz à effet de serre cette année. Or, je pense que nous allons rater cet objectif. Pour rester dans la limite fixée dans l’Accord, en dessous de 2 °C, et laisser ouverte la porte à un réchauffement plus limité à 1,5 °C, ilfaut que le monde les divise par deux d’ici à 2030. Il y a une ving-taine d’années, quand la science était moins avancée et les émis-sions moins élevées, l’objectif était de les diviser par deux en 2050… On voit le mur se rapprocher. En partie parce que les grands pays émergents ont nettement aug-menté leurs émissions, et que le stock de carbone a continué à aug-menter dans l’atmosphère. La dis-cussion d’aujourd’hui est de savoir comment on arrive à la neutralité carbone d’ici à trente ans. Avec le retard accumulé, les objectifs sont bien plus exigeants car le rythme de réduction nécessaire est plus rapide. Depuis cinquante ans, pourtant, les scientifiques alertent et des gouvernements ont perçu le danger à partir des années 1970, notamment lors de la conférence de Stockholm. Mais cela fait cin-quante ans qu’on traîne.

Le contexte politique a également été très négatif…Nous avons connu, c’est vrai, des hauts et des bas ces cinq dernières années. La sortie des Etats-Unis de l’Accord a clairement eu un effet degel de la diplomatie climatique. Des pays comme le Brésil ont caressé l’idée de sortir. En Austra-lie, le gouvernement s’est posi-tionné contre la politique climati-que. On a vu des pays comme le Mexique abandonner les réformesqui devaient les amener vers une trajectoire meilleure. Sans oublier que la Chine ne s’est pas sentie obli-gée de modifier sa politique d’investissements extérieurs large-ment consacrés aux énergies fossi-les dans les pays de la route de la soie. Cela n’a pas fragilisé l’Accord de Paris en soi, car aucun pays n’a suivi les Etats-Unis, mais, on l’a vu dans tous les sommets, le climat devait entrer par la petite porte, le mot « changement climatique » était interdit de séjour.

Quels sont les espoirs ?Malgré ces difficultés politiques majeures, tout cela est en train de se retourner. Depuis cinq ans, beaucoup d’acteurs non gouverne-mentaux – villes, régions, entrepri-ses – ont pris l’Accord de Paris comme référence pour leurs stra-

tégies. Les investisseurs ont pris conscience des risques les concer-nant si les banques ou les fonds de pension investissaient trop dans des secteurs intensifs en énergies fossiles ou dans des entreprises quin’avaient pas opéré le tournant nécessaire. Ce mouvement était sous le radar, il s’est accéléré avec les discussions sur le besoin de transformation radicale. A Davos comme dans les analyses de l’Agence internationale de l’éner-gie, l’idée que cette économie zéro carbone est le futur s’est imposée petit à petit.

C’était l’un des paris de l’Accord en 2015…Oui, et ce mouvement s’est accélérécette année grâce à trois facteurs. D’abord, l’Union européenne a confirmé son engagement d’aller vers des émissions net zéro en 2050avec le Green Deal comme pro-gramme général de transforma-tion de son économie. Ensuite, la Chine s’est donné un objectif de neutralité carbone en 2060. Enfin, les élections américaines ont vu, pour la première fois, le climat comme une des quatre priorités d’un candidat. Tout cela change le momentum politique. Et cette fois, les évolutions du secteur économi-que rejoignent ces décisions politi-ques de très haut niveau qui man-quaient. De ce point de vue, je suis désormais plus optimiste.

Comment cela se traduit-il pour le climat ?Ce sont des bonnes nouvelles. Avant l’Accord de Paris, nous étions sur une trajectoire entre 4 et7 °C de réchauffement climatique. Après l’Accord, et les premiers plans climat présentés fin 2015, nous nous dirigions vers environ 3 °C. Là, les engagements engran-gés pour l’instant nous remettent presque sur une trajectoire de 2 °C. Ce n’est pas assez, mais nous som-mes repartis dans une dynamique bien plus positive.

Quel sera l’impact de la crise engendrée par le Covid-19 ?C’est difficile à dire. Nombre de pays s’engagent toutefois vers une

LAURENCE TUBIANA

Directrice générale de la Fondation européenne sur le climat, et ancienne ambassadrice de la France chargée des négociations sur le changement climatique lors de la COP21

relance plus verte. L’UE va peser lourd car les financements de ses plans de relance vont être plus ou moins fortement conditionnés. Il faut attendre ce que les Etats-Unis feront, mais des engagements importants ont été pris par Joe Biden, ainsi que par le Japon, la Corée du Sud, la Colombie. Mais il faut que les finances publiques sui-vent, que les investissements aillent dans la bonne direction, et que les banques de développementstoppent les financements aux énergies fossiles, comme l’a fait la BEI. En fin de compte, l’Accord de Paris est devenu la référence pour le secteur économique privé comme public, c’est la référence pour les gouvernements et les insti-tutions financières. Il sert de juge de paix par rapport à ce qu’il faut faire pour le climat. Il y a un avant etun après-Paris.

L’Europe peut-elle rester un leader en matière de climat ?Même si les démocrates gagnent les deux sièges en lice au Sénat en janvier, les Etats-Unis ne pourront pas faire autant, aussi vite que l’Europe. Une coopération améri-cano-européenne serait très bien-venue. Mais il ne faudrait pas se faire trop d’illusion, par exemple, sur la généralisation d’une taxe car-bone, il y a un appétit modéré outre-Atlantique. Le plan de Joe Biden est d’aller vers les outils dontil dispose, dont un changement desrégulations en matière de soutien aux renouvelables ou le renforce-ment de l’électrification des trans-ports. Il y aurait quelque chose d’intéressant à faire sur l’harmoni-sation de ces régulations euro-péennes et américaines. Ce mouve-ment vers une économie sobre en carbone est un grand champ de coopération. On n’imposera rien à la Chine. En revanche, la menace de la taxe carbone aux frontières a son importance. Une discussion entre la Chine, les Etats-Unis et l’Europe va donc s’engager pour savoir si les efforts des uns et des autres sont suffisants. L’Europe doit jouer à la fois le rôle de leader etde broker. n

« Depuis cinq ans, beaucoup d’acteurs non gouvernementaux – villes, régions, entreprises – ont pris l’Accord de Paris comme référence pour leurs stratégies. »

Michel De Grandi @MdeGrandi

« Le compte à rebours est enclenché et notre survie est en jeu», assure Mohamed Nasheed, ancien prési-dent des Maldives et ambassadeur du Climate Vulnerable Forum, unestructure qui représente un mil-liard de personnes dans 48 pays particulièrement exposés aux dérèglements climatiques.« Nos pays, en particulier les petits Etats insulaires, seront condamnés à l’extinction, même avec une hausse des températures limitée à + 2 °C, ajoute-t-il. Plus de 1,5 °C nous condamne à mort. »

Pour dire l’urgence, les diri-geants du Pacifique ont décidé de

se réunir ce vendredi, de façon vir-tuelle, à la veille du sommet coor-ganisé par les Nations unies, le Royaume-Uni et la France. Ras-semblés au sein du Forum des insulaires du Pacifique (FIP), ils entendent exiger l’adoption d’une politique internationale de lutte contre le changement climatique.

« Assistance climat »Certains de ces insulaires se ran-gent aux côtés des pays les moins avancés (PMA) situés majoritaire-ment en Asie et en Afrique et qui, aujourd’hui, craignent d’être les laissés pour compte de la lutte contre le dérèglement climatique. Confrontés à un avenir sombre, marqué par des sécheresses de plus en plus dures, des cyclones chaque fois plus violents, des méga-incendies ou des pluies dilu-viennes qui ravagent leurs cultu-res, ces pays pauvres ne cessent de rappeler les riches à leur promessefaite en 2009 à la conférence de Copenhague de porter à 100 mil-liards de dollars par an dès 2020

leur « assistance climat » pour les aider à faire face aux conséquencesdu changement climatique. Non seulement il manque encore 21,1 milliards de dollars, mais les efforts ont tendance à ralentir. Après + 22 % en 2017, ils n’ont pro-gressé que de 11 % l’année suivante.

« Des efforts ont été faits, mais ilsne sont pas à la hauteur des besoins et l’horloge climatique tourne », explique Alexandre Magnan, cher-cheur à l’Institut du développe-ment durable et des relations inter-n a t i o n a l e s ( I d d r i ) . C e q u e déplorent les pays les moins avan-cés, déjà particulièrement touchés par la pandémie de Covid-19 qui a gommé des décennies de création de richesse, c’est le « manque d’action massive » au moment où l’urgence climatique ne fait que s’intensifier. Or, ces PMA se trou-vent aux avant-postes des change-ments : « La zone intertropicale est très active au niveau des phénomè-nes climatiques. C’est là que se mani-festent en premier les effets du dérè-glement », explique le chercheur. n

Les pays les plus pauvres réclament une action massiveLes pays les moins avancés, confrontés à des phénomènes climatiques de plus en plus violents, rappellent les Etats riches à leurs promesses : 100 milliards de dollars par an.

ment », indique l’un eux. Illustration par l’absurde de l’énormité de l’écart à combler pour arriver aux 2 degrés,« il faudrait, au point où nous en som-mes aujourd’hui, un Covid tous les deux ans », indique un expert.

A plus forte raison, les Etats, quis’emploient à éteindre la pandémie, vont donc devoir relever beaucoup plus les manches qu’ils ne l’ont jamais fait. Alors que l’Accord de Paris les invite à revoir leur « niveau d’ambition » dans ce domaine tous les cinq ans, trop peu l’ont encore fait, notamment du côté des pays quisont les plus émetteurs, comme la Chine. Le « Sommet de l’ambition pour le climat » va donner l’occasionaux quelque 80 chefs d’Etat et de gouvernement d’annoncer formel-

La pression de l’opinion n’a fait qu’aller crescendo depuis cinq ans.

Nations unies sur le changement climatique. Le retour serait effec-tif un mois plus tard, et les Etats-Unis, qui représentent près de 15 %des émissions mondiales, auront à soumettre un nouvel engage-ment à l’horizon 2030. Avant le mandat Trump, Washington s’était engagé à réduire les émis-sions de gaz à effet de serre de 26 à28 % à l’horizon 2025, par rapportau niveau de 2005.

Chute du charbonLes émissions totales de gaz à effetde serre avaient baissé de 10,2 % en2018 par rapport à 2005 aux Etats-Unis, selon l ’ inventaire de l’Agence américaine de protec-tion de l’environnement (EPA). Avec la pandémie, qui a cloué au sol les avions et réduit les consom-mations, les émissions de CO2 liées à l’énergie devraient baisser de 11 % cette année, selon les prévi-sions de l’Agence américaine d’information sur l’énergie (EIA).

Chassé par le gaz, moins cherpour produire de l’électricité, le charbon, combustible le plus pol-luant, connaît une chute structu-relle. Avec le rebond de l’activité prévu l’an prochain, les émissions deCO2 liées au secteur de l’énergie seraient inférieures d’environ 15 % par rapport à 2005, selon l’EIA.

Pour « réengager » les Etats-Unis,Joe Biden a déjà multiplié les sym-boles : l’ancien secrétaire d’Etat JohnKerry, qui avait signé l’Accord de Paris avec sa petite-fille sur les genoux, sera le premier représen-tant présidentiel sur le climat et il sera membre du Conseil de sécurité nationale.

Fin novembre, il a rappelé lanécessité de la coopération. « Lors dela réunion mondiale de Glasgow, dansun an, toutes les nations devront fairepreuve d’ambition ensemble, sinon nous échouerons tous ensemble », a-t-il jugé. Un coordinateur de la politique climatique doit aussi être nommé en décembre.

Durant les cent premiers jours deson mandat, Joe Biden a promis de convo quer un sommet p our « convaincre les plus grands émet-teurs de prendre des engagements supplémentaires » sur leurs objec-tifs. Et d’adopter l’amendement de Kigali au protocole de Montréal, pour donner « un nouvel élan » à la lutte contre les hydrofluorocarbu-res, un gaz à effet de serre puissant.

Zéro émission en 2050Le président élu a affiché dans son programme l’ambition d’arriver à une économie « zéro émission » à l’horizon 2050 et évoqué une forme de taxe carbone sur les biens à forte intensité de carbone « provenant de pays qui ne respectent pas leurs obli-gations climatiques et environne-mentales ». Il entend aussi mettre la pression sur la Chine et notamment son financement des pays des « nou-velles routes de la soie ».

Les feux de forêt à répétition enCalifornie et les ouragans semblent

avoir convaincu une partie de la population que l’Etat doit en faire davantage contre le dérèglement cli-matique, selon une étude de Pew Research. Mais le programme « vert » démocrate à 2.000 milliards de dollars risque toutefois de se retrouver rapidement bloqué par unCongrès peu coopératif si le Sénat conserve la majorité républicaine.

Parmi ses grands chantiers, JoeBiden veut réduire l’empreinte car-bone des bâtiments existants de moitié d’ici à 2035, développer les digesteurs de méthane dans l’agri-culture, densifier l’habitat urbain, développer le rail. Le démocrate veut aussi créer une nouvelle agence, Arpa-C, qui identifierait des projets réalisables à des coûts com-pétitifs dans le stockage d’énergie, les petits réacteurs nucléaires ou l’air conditionné sans impact sur le climat. Il entend pour cela s’appuyersur le réseau des quatre cents mairesqui avaient défié Donald Trump sur la sortie de l’Accord de Paris. n

Joe Biden promet un retour ambitieux des Etats-Unis

Véronique Le Billon @VLeBillon

—Bureau de New York

Donald Trump en est sorti, Joe Biden a promis d’y revenir « au pre-mier jour » de la nouvelle adminis-tration, et pour agir. Le président élu, qui entrera en fonction le 20 janvier prochain, a fait du retour des Etats-Unis dans l’Accord de Paris pour le climat l’undes marqueurs de la campagne.

Pour réintégrer l’Accord, dontles Etats-Unis sont officiellement sortis le 4 novembre (un an après lanotification du retrait par Donald Trump), Washington va devoir en informer la Convention-cadre des

Après le retrait ordonné par Donald Trump, le président élu américain s’est engagé à revenir dans l’Accord de Paris « au premier jour » de la nouvelle administration.

veau souffle à l’Accord de Paris, recevant les félicitations de la communauté internationale et infligeant un camouflet au clima-tosceptique Donald Trump. L’engagement chinois, s’il était tenu, mettrait l’objectif de limiter le réchauffement climatique pla-nétaire à 1,5 °C à la portée du monde.

L’effet d’annonce digéré, lemonde attend désormais de savoir comment le géant asiati-que, dont l’addiction au charbon est forte, va mettre en musique cette nouvelle ambition. « Si la Chine se contente le 12 décembre de répéter ce qui a été dit à l’ONU en septembre, cela soulèvera beau-coup de questions sur la crédibilité de son objectif de long terme », pré-vient Li Shuo, responsable du cli-mat à Greenpeace China.

Atteindre la neutralité carboneen 2060 implique une transfor-mation complète de la deuxième économie mondiale, qui ne peut souffrir le moindre retard. Or

« l’objectif de court terme est vraimenttrop modeste et ne traduit pas une forte ambition pour les années à venir », poursuit Li Shuo.

Engagements tenusXi Jinping s’est engagé, devant les Nations unies, à ce que la Chine par-vienne à un pic de ses émissions de CO2 « avant » 2030, et non plus « autour » de 2030 comme promis à Paris. Cette petite avancée a été jugéetrop modeste par les experts envi-ronnementaux, certains scientifi-ques anticipant le pic au plus tôt en 2025, d’autres estimant même qu’il est déjà atteint.

A l’occasion de la COP21, la Chines’était également engagée à réduire les émissions de CO2 par unité de PIBde 60 % à 65 % d’ici à 2030 et à aug-menter la part des énergies non fos-siles à 20 % de la consommation d’énergie. « La Chine est en bonne voiepour atteindre ces trois objectifs, voireles dépasser », constate Li Shuo. De fait, la Chine est en avance sur son plan de route : avec une réduction de

croissance industrielle à tout prix. Une première partie de la feuille de route doit être dévoilée dans le 14e plan quinquennal couvrant la période 2021-2025.

Le charbon représentait encore,l’an dernier, 57,7 % du bilan énergéti-que chinois. Et la Chine est soupçon-née de vouloir donner un coup d’accélérateur à la production de charbon pour relancer son écono-mie. Selon un rapport publié cet été, le pays a augmenté de 21 % ses pro-jets de centrales au charbon au pre-mier semestre. La Chine investit par ailleurs dans de nombreuses centra-les à charbon à l’étranger.

Réagissant à l’engagement de XiJinping pour 2060, le Centre de recherche sur l’énergie et l’air pur (CREA), basé à Helsinki, a appelé Pékin à tirer un trait sur toutes les nouvelles centrales au charbon pla-nifiées à partir de 2020 et à doubler lacroissance de l’éolien et du solaire lors des dix prochaines années. La longue marche vers la neutralité carbone ne fait que commencer. n

Le nouveau souffle donné par les objectifs climatiques chinois

Frédéric Schaeffer fr_schaeffer

—Correspondant à Pékin

Cinq après l’adoption de l’Accord de Paris, la Chine va-t-elle à nou-veau surprendre en relevant ses objectifs climatiques de court terme pour les harmoniser avec ceux de long terme ? Son prési-dent, Xi Jinping, avait créé la sur-prise, le 22 septembre à l’Assem-blée générale des Nations unies enannonçant un objectif de neutra-lité carbone à horizon 2060.

La Chine, premier émetteur degaz à effet de serre au monde (28 % des émissions globales), redonnait là un immense nou-

Xi Jinping a créé la sur-prise avec une ambition de neutralité carbone à horizon 2060. Mais la Chine doit maintenant accorder ses objectifs climatiques de court et long terme.

l’intensité de carbone de 48 % fin 2019, la Chine a dépassé son objectif de 2020 (40 % à 45 %) qu’elle s’était fixé à Copenhague en 2009.

L’échec de ce sommet avait en par-tie été imputé à la Chine, ayant refusétout objectif contraignant et s’étant opposée à toute mesure de vérifica-tion de l’application de l’accord. De « bad boy » du climat en 2009, la Chine s’est muée en leader prudent lors de la conférence de Paris. L’engagement de Xi Jinping pour 2060 est une nouvelle étape, mais demande à être confirmé par des mesures concrètes et radicales dans un pays qui a longtemps privilégié la

De « bad boy » du climat en 2009, la Chine s’est muée en leader prudent lors de la Conférence de Paris.

mined Contributions) dans le jargononusien – annoncées en 2015 par les pays d’Europe, mais aussi par les Etats-Unis et le Canada. La Chine n’est pas au niveau non plus. « Pour l’être, il faudrait déjà qu’elle com-mence par ne plus ouvrir de centrales au charbon », commente un expert.

A ce jour, 129 pays ont fait connaî-tre leur intention de revoir leur NDCs. « Le problème est que l’on ne sait pas quand ils le feront d’ici à la COP26, fin 2021 », explique Alexan-dra Deprez, chercheuse à l’Institut du développement durable et des relations internationales (Iddri). Surce total, seuls 16 Etats ont effective-ment réévalué leur contribution, dont le Chili, le Surinam, la Norvège,Andorre ou encore la Mongolie. C’est plutôt de ce côté-là qu’il faut

55 %LA RÉDUCTIONdes gaz à effet de serre, par rapport à leur niveau de 1990, que l’Union européenne espère atteindre d’ici à 2030.

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08 // MONDE Vendredi 11 et samedi 12 décembre 2020 Les Echos Les Echos Vendredi 11 et samedi 12 décembre 2020 MONDE // 09

lement leur intention, ou non, de rattraper le retard de leur pays, et d’indiquer dans quelles proportions.Les organisateurs comptent bien, également, voir beaucoup de pays s’engager à atteindre la neutralité carbone et dire à quelle échéance.

La référence à ce principe dansles politiques climatiques nationa-les commence à peine à se répan-dre. L’Europe, la Chine, le Japon ou encore la Corée du Sud viennent de décider d’en faire le fil rouge de leurs actions. C’est le signe que l’Accord de Paris, qui a édicté cette règle, est bien vivant malgré les coups subis ces dernières années. Principalement, celui que lui a porté l’annonce, en 2017, du retrait des Etats-Unis.

Revoir les planètes s’alignerLe « zéro émission nette », l’autre terme pour qualifier le concept de neutralité carbone, est devenu plus familier depuis cinq ans aux entre-prises et aux collectivités. A la diffé-rence des Etats, la mobilisation de

la société civile n’a fait qu’aller croissant depuis 2015. Les villes et les régions sont aux premières loges lorsque les conséquences du réchauffement, comme les dramati-ques « méga incendies » qui rava-gent périodiquement l’Australie et la Californie, se font sentir. Investis-seurs, banques, assurances et com-pagnies industrielles ne rechignent pas à adhérer aux méthodologies qu’a inspirées l’Accord de Paris pourse décarboner.

A qui veut s’en saisir, la luttecontre le réchauffement climatique offre de formidables opportunités de développement. D’autant que la pression de l’opinion et donc des consommateurs n’a fait qu’aller crescendo depuis cinq ans, surtout chez les jeunes nombreux à dénon-cer l’inertie des Etats. A eux de faire en sorte que se reforme l’alignementdes planètes scientifiques, sociétaleset politiques dont Laurent Fabius, le président de la COP21, a estimé avoir bénéficié pour arracher l’Accord de Paris. n

Cinq ans après, un nouveau sommet pour remettre sur les rails l’Accord de Paris sur le climatl Inscrit dans le texte historique adopté en 2015, l’objectif de contenir le réchauffement à 2 degrés Celsius ne cesse de gagner en incertitude.l Le « Sommet de l’ambition pour le climat », qui se tient ce samedi, se présente comme celui de la dernière chance pour tenir ce cap. De nouveaux engagements des Etats sont attendus.

premier, et pour l’instant le seul, quiait gravé dans la loi le « zéro nette émission ». Le gouvernement bri-tannique, très ambitieux, vient par ailleurs d’annoncer qu’il visait une baisse de ses gaz à effet de serre (GES) de 68 % d’ici à 2030 par rap-port à leur niveau de 1990.

Les petits pays, les plus volontairesLes pays de l’Union européenne se préparent à lui emboîter le pas et à légiférer sur une réduction de ces GES d’au moins 55 % à la même échéance. Le Canada, lui aussi, a annoncé un objectif de neutralité carbone (pour 2050), après la Chine (pour 2060), le Japon et la Corée du Sud (pour 2050). Les Etats-Unis, avec l’élection de Joe Biden, sont con-sidérés comme faisant partie de ce groupe des 127 Etats qui sont respon-sables de près des deux tiers des rejets de CO2.

Mais les efforts que tous prévoientde faire ne sont pas à la hauteur des enjeux. Le CAT juge insuffisantes et incompatibles avec un réchauffe-ment de 2 °C les contributions natio-nales – les NDCs (Nationally Deter-

chercher les bons élèves et aussi de celui des pays les moins avancés (PMA). La Jamaïque a doublé son ambition par rapport à son NDC de 2015. La Colombie va accélérer la baisse programmée de ses émis-sions pour lui faire atteindre 51 % en 2030 (par rapport à 1990).

A l’opposé, la Russie et le Brésilsont au fond de la classe. La politiquemenée par Moscou « n’est pas du toutalignée sur les objectifs de long terme de 2 °C », juge Alexandra Deprez. Le pays n’a pas prévu de réduire sa pro-duction de gaz et de pétrole. Ce qui vaut à sa politique climatique d’être qualifiée d’« extrêmement insuffi-sante » par le CAT.

Son appréciation sur celle menéepar Brasilia est à peine moins sévère,avec la reprise à tout va de la défores-tation. Le gouvernement a bien annoncé qu’il réviserait sa contribu-tion en vue de diminuer de 43 % ses émissions en 2030. Mais il a condi-tionné cet engagement au verse-ment d’une aide de 10 milliards de dollars par la communauté interna-tionale en paiement des services écosystémiques rendus par le mas-sif amazonien. — J. C.

Qui sont les bons et mauvais élèves

Les Etats sont encore loin de mani-fester avec la même ferveur leur volonté d’éviter à la planète un réchauffement de plus de 2 °C d’ici à la fin du siècle. Mais il y a du progrès,et même beaucoup. Une majorité d’entre eux – très précisément 127 Etats sur les 197 reconnus par lesNations unies – affichent désormais leur intention d’atteindre la neutra-lité carbone, selon le comptage que vient de publier le centre de réflexion et d’analyse Climate ActionTracker (CAT).

C’est une vraie avancée. Sauf querelativement peu de ces pays ont pris officiellement de nouveaux engagements ou les ont relevés pour atteindre cet objectif. Tant et sibien qu’à ce stade aucun Etat ne peut faire figure d’élève modèle. Unseul Etat, le Royaume-Uni, est le

L’objectif de la neutralité carbone fait son chemin, mais pas partout. Et les engagements annoncés par la plupart des 127 pays qui signalent vouloir l’atteindre dans les toutes prochaines décennies ne suffiront pas.

Joël Cossardeaux @JolCossardeaux

On sera très loin, samedi, de l’eupho-rie générale telle que l’ont connue etpartagée les milliers de participantsà la COP21. L’Accord de Paris sur le climat, conclu il y aura exactement cinq ans, ne donne plus autant enviede pavoiser. D’abord parce que totalement virtuel, Covid-19 et res-pect des distanciations obligent, le « Sommet de l’ambition pour le climat », organisé ce même jour à l’invitation de la Grande-Bretagne, de la France, de l’Italie, du Chili et des Nations unies, se prête peu aux effusions. Mais surtout parce que l’accord historique conclu en 2015 par 196 Etats éveille aujourd’hui bien des craintes. Le principal objectif qu’il fixe, celui de limiter à 2 °C, au pire du pire, le réchauffe-ment de la planète d’ici à la fin du siè-cle, s’annonce de plus en plus diffi-cile à tenir.

Il suffit pour s’en rendre comptede se plonger dans l’avalanche de rapports qui précède ce sommet, comme c’est le cas à la veille de cha-que COP, les conférences mondiales pour le climat, dont la 26e édition, à Glasgow, a été reportée à décem-bre 2021. Le Programme des Nationsunies pour l ’environnement (PNUE), dans sa dernière livraison, redoute une poussée du mercure de 3,2 degrés. Et alors qu’il faudrait les réduire de 7,6 % par an, les émis-sions de gaz effet de serre (GES) continuent d’augmenter à un rythme affolant. Le volume des rejets de CO2, qui en sont les pre-miers responsables, a crû de 2,6 % en 2019 contre 1,4 % en moyenne paran depuis 2010.

L’angle mort du Covid-19Une tendance très fâcheuse qu’il est peu probable de voir brisée en 2020,même si « l’effet Covid » va indiquer le contraire. D’après les estimations que publie ce vendredi le Global Car-bon Project (GCP), un programme de recherche international, les émis-sions devraient en effet baisser cette année de 7 % au niveau mondial. Une chute qui n’impressionne guèreses chercheurs. « Ce n’est pas beau-coup compte tenu de l’arrêt majeur des activités lié au premier confine-

ENVIRONNEMENT

« On voit le mur se rapprocher »Propos recueillis parMuryel Jacque

@MuryelJacque

Quel bilan dressez-vous cinq ans après l’Accord de Paris ?Nous devrions avoir atteint le pic des émissions mondiales de gaz à effet de serre cette année. Or, je pense que nous allons rater cet objectif. Pour rester dans la limite fixée dans l’Accord, en dessous de 2 °C, et laisser ouverte la porte à un réchauffement plus limité à 1,5 °C, ilfaut que le monde les divise par deux d’ici à 2030. Il y a une ving-taine d’années, quand la science était moins avancée et les émis-sions moins élevées, l’objectif était de les diviser par deux en 2050… On voit le mur se rapprocher. En partie parce que les grands pays émergents ont nettement aug-menté leurs émissions, et que le stock de carbone a continué à aug-menter dans l’atmosphère. La dis-cussion d’aujourd’hui est de savoir comment on arrive à la neutralité carbone d’ici à trente ans. Avec le retard accumulé, les objectifs sont bien plus exigeants car le rythme de réduction nécessaire est plus rapide. Depuis cinquante ans, pourtant, les scientifiques alertent et des gouvernements ont perçu le danger à partir des années 1970, notamment lors de la conférence de Stockholm. Mais cela fait cin-quante ans qu’on traîne.

Le contexte politique a également été très négatif…Nous avons connu, c’est vrai, des hauts et des bas ces cinq dernières années. La sortie des Etats-Unis de l’Accord a clairement eu un effet degel de la diplomatie climatique. Des pays comme le Brésil ont caressé l’idée de sortir. En Austra-lie, le gouvernement s’est posi-tionné contre la politique climati-que. On a vu des pays comme le Mexique abandonner les réformesqui devaient les amener vers une trajectoire meilleure. Sans oublier que la Chine ne s’est pas sentie obli-gée de modifier sa politique d’investissements extérieurs large-ment consacrés aux énergies fossi-les dans les pays de la route de la soie. Cela n’a pas fragilisé l’Accord de Paris en soi, car aucun pays n’a suivi les Etats-Unis, mais, on l’a vu dans tous les sommets, le climat devait entrer par la petite porte, le mot « changement climatique » était interdit de séjour.

Quels sont les espoirs ?Malgré ces difficultés politiques majeures, tout cela est en train de se retourner. Depuis cinq ans, beaucoup d’acteurs non gouverne-mentaux – villes, régions, entrepri-ses – ont pris l’Accord de Paris comme référence pour leurs stra-

tégies. Les investisseurs ont pris conscience des risques les concer-nant si les banques ou les fonds de pension investissaient trop dans des secteurs intensifs en énergies fossiles ou dans des entreprises quin’avaient pas opéré le tournant nécessaire. Ce mouvement était sous le radar, il s’est accéléré avec les discussions sur le besoin de transformation radicale. A Davos comme dans les analyses de l’Agence internationale de l’éner-gie, l’idée que cette économie zéro carbone est le futur s’est imposée petit à petit.

C’était l’un des paris de l’Accord en 2015…Oui, et ce mouvement s’est accélérécette année grâce à trois facteurs. D’abord, l’Union européenne a confirmé son engagement d’aller vers des émissions net zéro en 2050avec le Green Deal comme pro-gramme général de transforma-tion de son économie. Ensuite, la Chine s’est donné un objectif de neutralité carbone en 2060. Enfin, les élections américaines ont vu, pour la première fois, le climat comme une des quatre priorités d’un candidat. Tout cela change le momentum politique. Et cette fois, les évolutions du secteur économi-que rejoignent ces décisions politi-ques de très haut niveau qui man-quaient. De ce point de vue, je suis désormais plus optimiste.

Comment cela se traduit-il pour le climat ?Ce sont des bonnes nouvelles. Avant l’Accord de Paris, nous étions sur une trajectoire entre 4 et7 °C de réchauffement climatique. Après l’Accord, et les premiers plans climat présentés fin 2015, nous nous dirigions vers environ 3 °C. Là, les engagements engran-gés pour l’instant nous remettent presque sur une trajectoire de 2 °C. Ce n’est pas assez, mais nous som-mes repartis dans une dynamique bien plus positive.

Quel sera l’impact de la crise engendrée par le Covid-19 ?C’est difficile à dire. Nombre de pays s’engagent toutefois vers une

LAURENCE TUBIANA

Directrice générale de la Fondation européenne sur le climat, et ancienne ambassadrice de la France chargée des négociations sur le changement climatique lors de la COP21

relance plus verte. L’UE va peser lourd car les financements de ses plans de relance vont être plus ou moins fortement conditionnés. Il faut attendre ce que les Etats-Unis feront, mais des engagements importants ont été pris par Joe Biden, ainsi que par le Japon, la Corée du Sud, la Colombie. Mais il faut que les finances publiques sui-vent, que les investissements aillent dans la bonne direction, et que les banques de développementstoppent les financements aux énergies fossiles, comme l’a fait la BEI. En fin de compte, l’Accord de Paris est devenu la référence pour le secteur économique privé comme public, c’est la référence pour les gouvernements et les insti-tutions financières. Il sert de juge de paix par rapport à ce qu’il faut faire pour le climat. Il y a un avant etun après-Paris.

L’Europe peut-elle rester un leader en matière de climat ?Même si les démocrates gagnent les deux sièges en lice au Sénat en janvier, les Etats-Unis ne pourront pas faire autant, aussi vite que l’Europe. Une coopération améri-cano-européenne serait très bien-venue. Mais il ne faudrait pas se faire trop d’illusion, par exemple, sur la généralisation d’une taxe car-bone, il y a un appétit modéré outre-Atlantique. Le plan de Joe Biden est d’aller vers les outils dontil dispose, dont un changement desrégulations en matière de soutien aux renouvelables ou le renforce-ment de l’électrification des trans-ports. Il y aurait quelque chose d’intéressant à faire sur l’harmoni-sation de ces régulations euro-péennes et américaines. Ce mouve-ment vers une économie sobre en carbone est un grand champ de coopération. On n’imposera rien à la Chine. En revanche, la menace de la taxe carbone aux frontières a son importance. Une discussion entre la Chine, les Etats-Unis et l’Europe va donc s’engager pour savoir si les efforts des uns et des autres sont suffisants. L’Europe doit jouer à la fois le rôle de leader etde broker. n

« Depuis cinq ans, beaucoup d’acteurs non gouvernementaux – villes, régions, entreprises – ont pris l’Accord de Paris comme référence pour leurs stratégies. »

Michel De Grandi @MdeGrandi

« Le compte à rebours est enclenché et notre survie est en jeu», assure Mohamed Nasheed, ancien prési-dent des Maldives et ambassadeur du Climate Vulnerable Forum, unestructure qui représente un mil-liard de personnes dans 48 pays particulièrement exposés aux dérèglements climatiques.« Nos pays, en particulier les petits Etats insulaires, seront condamnés à l’extinction, même avec une hausse des températures limitée à + 2 °C, ajoute-t-il. Plus de 1,5 °C nous condamne à mort. »

Pour dire l’urgence, les diri-geants du Pacifique ont décidé de

se réunir ce vendredi, de façon vir-tuelle, à la veille du sommet coor-ganisé par les Nations unies, le Royaume-Uni et la France. Ras-semblés au sein du Forum des insulaires du Pacifique (FIP), ils entendent exiger l’adoption d’une politique internationale de lutte contre le changement climatique.

« Assistance climat »Certains de ces insulaires se ran-gent aux côtés des pays les moins avancés (PMA) situés majoritaire-ment en Asie et en Afrique et qui, aujourd’hui, craignent d’être les laissés pour compte de la lutte contre le dérèglement climatique. Confrontés à un avenir sombre, marqué par des sécheresses de plus en plus dures, des cyclones chaque fois plus violents, des méga-incendies ou des pluies dilu-viennes qui ravagent leurs cultu-res, ces pays pauvres ne cessent de rappeler les riches à leur promessefaite en 2009 à la conférence de Copenhague de porter à 100 mil-liards de dollars par an dès 2020

leur « assistance climat » pour les aider à faire face aux conséquencesdu changement climatique. Non seulement il manque encore 21,1 milliards de dollars, mais les efforts ont tendance à ralentir. Après + 22 % en 2017, ils n’ont pro-gressé que de 11 % l’année suivante.

« Des efforts ont été faits, mais ilsne sont pas à la hauteur des besoins et l’horloge climatique tourne », explique Alexandre Magnan, cher-cheur à l’Institut du développe-ment durable et des relations inter-n a t i o n a l e s ( I d d r i ) . C e q u e déplorent les pays les moins avan-cés, déjà particulièrement touchés par la pandémie de Covid-19 qui a gommé des décennies de création de richesse, c’est le « manque d’action massive » au moment où l’urgence climatique ne fait que s’intensifier. Or, ces PMA se trou-vent aux avant-postes des change-ments : « La zone intertropicale est très active au niveau des phénomè-nes climatiques. C’est là que se mani-festent en premier les effets du dérè-glement », explique le chercheur. n

Les pays les plus pauvres réclament une action massiveLes pays les moins avancés, confrontés à des phénomènes climatiques de plus en plus violents, rappellent les Etats riches à leurs promesses : 100 milliards de dollars par an.

ment », indique l’un eux. Illustration par l’absurde de l’énormité de l’écart à combler pour arriver aux 2 degrés,« il faudrait, au point où nous en som-mes aujourd’hui, un Covid tous les deux ans », indique un expert.

A plus forte raison, les Etats, quis’emploient à éteindre la pandémie, vont donc devoir relever beaucoup plus les manches qu’ils ne l’ont jamais fait. Alors que l’Accord de Paris les invite à revoir leur « niveau d’ambition » dans ce domaine tous les cinq ans, trop peu l’ont encore fait, notamment du côté des pays quisont les plus émetteurs, comme la Chine. Le « Sommet de l’ambition pour le climat » va donner l’occasionaux quelque 80 chefs d’Etat et de gouvernement d’annoncer formel-

La pression de l’opinion n’a fait qu’aller crescendo depuis cinq ans.

Nations unies sur le changement climatique. Le retour serait effec-tif un mois plus tard, et les Etats-Unis, qui représentent près de 15 %des émissions mondiales, auront à soumettre un nouvel engage-ment à l’horizon 2030. Avant le mandat Trump, Washington s’était engagé à réduire les émis-sions de gaz à effet de serre de 26 à28 % à l’horizon 2025, par rapportau niveau de 2005.

Chute du charbonLes émissions totales de gaz à effetde serre avaient baissé de 10,2 % en2018 par rapport à 2005 aux Etats-Unis, selon l ’ inventaire de l’Agence américaine de protec-tion de l’environnement (EPA). Avec la pandémie, qui a cloué au sol les avions et réduit les consom-mations, les émissions de CO2 liées à l’énergie devraient baisser de 11 % cette année, selon les prévi-sions de l’Agence américaine d’information sur l’énergie (EIA).

Chassé par le gaz, moins cherpour produire de l’électricité, le charbon, combustible le plus pol-luant, connaît une chute structu-relle. Avec le rebond de l’activité prévu l’an prochain, les émissions deCO2 liées au secteur de l’énergie seraient inférieures d’environ 15 % par rapport à 2005, selon l’EIA.

Pour « réengager » les Etats-Unis,Joe Biden a déjà multiplié les sym-boles : l’ancien secrétaire d’Etat JohnKerry, qui avait signé l’Accord de Paris avec sa petite-fille sur les genoux, sera le premier représen-tant présidentiel sur le climat et il sera membre du Conseil de sécurité nationale.

Fin novembre, il a rappelé lanécessité de la coopération. « Lors dela réunion mondiale de Glasgow, dansun an, toutes les nations devront fairepreuve d’ambition ensemble, sinon nous échouerons tous ensemble », a-t-il jugé. Un coordinateur de la politique climatique doit aussi être nommé en décembre.

Durant les cent premiers jours deson mandat, Joe Biden a promis de convo quer un sommet p our « convaincre les plus grands émet-teurs de prendre des engagements supplémentaires » sur leurs objec-tifs. Et d’adopter l’amendement de Kigali au protocole de Montréal, pour donner « un nouvel élan » à la lutte contre les hydrofluorocarbu-res, un gaz à effet de serre puissant.

Zéro émission en 2050Le président élu a affiché dans son programme l’ambition d’arriver à une économie « zéro émission » à l’horizon 2050 et évoqué une forme de taxe carbone sur les biens à forte intensité de carbone « provenant de pays qui ne respectent pas leurs obli-gations climatiques et environne-mentales ». Il entend aussi mettre la pression sur la Chine et notamment son financement des pays des « nou-velles routes de la soie ».

Les feux de forêt à répétition enCalifornie et les ouragans semblent

avoir convaincu une partie de la population que l’Etat doit en faire davantage contre le dérèglement cli-matique, selon une étude de Pew Research. Mais le programme « vert » démocrate à 2.000 milliards de dollars risque toutefois de se retrouver rapidement bloqué par unCongrès peu coopératif si le Sénat conserve la majorité républicaine.

Parmi ses grands chantiers, JoeBiden veut réduire l’empreinte car-bone des bâtiments existants de moitié d’ici à 2035, développer les digesteurs de méthane dans l’agri-culture, densifier l’habitat urbain, développer le rail. Le démocrate veut aussi créer une nouvelle agence, Arpa-C, qui identifierait des projets réalisables à des coûts com-pétitifs dans le stockage d’énergie, les petits réacteurs nucléaires ou l’air conditionné sans impact sur le climat. Il entend pour cela s’appuyersur le réseau des quatre cents mairesqui avaient défié Donald Trump sur la sortie de l’Accord de Paris. n

Joe Biden promet un retour ambitieux des Etats-Unis

Véronique Le Billon @VLeBillon

—Bureau de New York

Donald Trump en est sorti, Joe Biden a promis d’y revenir « au pre-mier jour » de la nouvelle adminis-tration, et pour agir. Le président élu, qui entrera en fonction le 20 janvier prochain, a fait du retour des Etats-Unis dans l’Accord de Paris pour le climat l’undes marqueurs de la campagne.

Pour réintégrer l’Accord, dontles Etats-Unis sont officiellement sortis le 4 novembre (un an après lanotification du retrait par Donald Trump), Washington va devoir en informer la Convention-cadre des

Après le retrait ordonné par Donald Trump, le président élu américain s’est engagé à revenir dans l’Accord de Paris « au premier jour » de la nouvelle administration.

veau souffle à l’Accord de Paris, recevant les félicitations de la communauté internationale et infligeant un camouflet au clima-tosceptique Donald Trump. L’engagement chinois, s’il était tenu, mettrait l’objectif de limiter le réchauffement climatique pla-nétaire à 1,5 °C à la portée du monde.

L’effet d’annonce digéré, lemonde attend désormais de savoir comment le géant asiati-que, dont l’addiction au charbon est forte, va mettre en musique cette nouvelle ambition. « Si la Chine se contente le 12 décembre de répéter ce qui a été dit à l’ONU en septembre, cela soulèvera beau-coup de questions sur la crédibilité de son objectif de long terme », pré-vient Li Shuo, responsable du cli-mat à Greenpeace China.

Atteindre la neutralité carboneen 2060 implique une transfor-mation complète de la deuxième économie mondiale, qui ne peut souffrir le moindre retard. Or

« l’objectif de court terme est vraimenttrop modeste et ne traduit pas une forte ambition pour les années à venir », poursuit Li Shuo.

Engagements tenusXi Jinping s’est engagé, devant les Nations unies, à ce que la Chine par-vienne à un pic de ses émissions de CO2 « avant » 2030, et non plus « autour » de 2030 comme promis à Paris. Cette petite avancée a été jugéetrop modeste par les experts envi-ronnementaux, certains scientifi-ques anticipant le pic au plus tôt en 2025, d’autres estimant même qu’il est déjà atteint.

A l’occasion de la COP21, la Chines’était également engagée à réduire les émissions de CO2 par unité de PIBde 60 % à 65 % d’ici à 2030 et à aug-menter la part des énergies non fos-siles à 20 % de la consommation d’énergie. « La Chine est en bonne voiepour atteindre ces trois objectifs, voireles dépasser », constate Li Shuo. De fait, la Chine est en avance sur son plan de route : avec une réduction de

croissance industrielle à tout prix. Une première partie de la feuille de route doit être dévoilée dans le 14e plan quinquennal couvrant la période 2021-2025.

Le charbon représentait encore,l’an dernier, 57,7 % du bilan énergéti-que chinois. Et la Chine est soupçon-née de vouloir donner un coup d’accélérateur à la production de charbon pour relancer son écono-mie. Selon un rapport publié cet été, le pays a augmenté de 21 % ses pro-jets de centrales au charbon au pre-mier semestre. La Chine investit par ailleurs dans de nombreuses centra-les à charbon à l’étranger.

Réagissant à l’engagement de XiJinping pour 2060, le Centre de recherche sur l’énergie et l’air pur (CREA), basé à Helsinki, a appelé Pékin à tirer un trait sur toutes les nouvelles centrales au charbon pla-nifiées à partir de 2020 et à doubler lacroissance de l’éolien et du solaire lors des dix prochaines années. La longue marche vers la neutralité carbone ne fait que commencer. n

Le nouveau souffle donné par les objectifs climatiques chinois

Frédéric Schaeffer fr_schaeffer

—Correspondant à Pékin

Cinq après l’adoption de l’Accord de Paris, la Chine va-t-elle à nou-veau surprendre en relevant ses objectifs climatiques de court terme pour les harmoniser avec ceux de long terme ? Son prési-dent, Xi Jinping, avait créé la sur-prise, le 22 septembre à l’Assem-blée générale des Nations unies enannonçant un objectif de neutra-lité carbone à horizon 2060.

La Chine, premier émetteur degaz à effet de serre au monde (28 % des émissions globales), redonnait là un immense nou-

Xi Jinping a créé la sur-prise avec une ambition de neutralité carbone à horizon 2060. Mais la Chine doit maintenant accorder ses objectifs climatiques de court et long terme.

l’intensité de carbone de 48 % fin 2019, la Chine a dépassé son objectif de 2020 (40 % à 45 %) qu’elle s’était fixé à Copenhague en 2009.

L’échec de ce sommet avait en par-tie été imputé à la Chine, ayant refusétout objectif contraignant et s’étant opposée à toute mesure de vérifica-tion de l’application de l’accord. De « bad boy » du climat en 2009, la Chine s’est muée en leader prudent lors de la conférence de Paris. L’engagement de Xi Jinping pour 2060 est une nouvelle étape, mais demande à être confirmé par des mesures concrètes et radicales dans un pays qui a longtemps privilégié la

De « bad boy » du climat en 2009, la Chine s’est muée en leader prudent lors de la Conférence de Paris.

mined Contributions) dans le jargononusien – annoncées en 2015 par les pays d’Europe, mais aussi par les Etats-Unis et le Canada. La Chine n’est pas au niveau non plus. « Pour l’être, il faudrait déjà qu’elle com-mence par ne plus ouvrir de centrales au charbon », commente un expert.

A ce jour, 129 pays ont fait connaî-tre leur intention de revoir leur NDCs. « Le problème est que l’on ne sait pas quand ils le feront d’ici à la COP26, fin 2021 », explique Alexan-dra Deprez, chercheuse à l’Institut du développement durable et des relations internationales (Iddri). Surce total, seuls 16 Etats ont effective-ment réévalué leur contribution, dont le Chili, le Surinam, la Norvège,Andorre ou encore la Mongolie. C’est plutôt de ce côté-là qu’il faut

55 %LA RÉDUCTIONdes gaz à effet de serre, par rapport à leur niveau de 1990, que l’Union européenne espère atteindre d’ici à 2030.

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LE COMMENTAIRE

de Jean-Philippe Delsol

D ans le classement QS WorldUniversity Rankings, seulesdeux universités publiques

françaises sont présentes dans le Top 200, contre douze universités en Allemagne, 26 au Royaume-Uni et 45 aux Etats-Unis. La France est au onzième rang mondial aux côtésde pays beaucoup plus petits, comme la Suède. Et 30 % seulementdes étudiants décrochent leur licence en trois ans, 56 % y échouenten première année (2018).

Malgré ces chiffres alarmants, lamoindre réforme universitaire se heurte à la fronde du monde ensei-gnant, qui, aujourd’hui, gronde contre un amendement à la loi de programmation de la recherche permettant de déroger, provisoire-ment, à la qualification exclusive par le Conseil national des universi-tés (CNU) des candidats aux fonc-

tions de maître de conférences et deprofesseur. Ceux-ci critiquent un vote emporté à la sauvette, mais plus encore, ils craignent une frag-mentation de l’université française et une baisse de qualité, s’inquiètentde possibles dérives dans les recru-tements… Ils redoutent surtout la concurrence et une perte éven-tuelle de leur statut corporatif.

La bonne idée de cet amende-ment honni est de permettre aux universités de recruter des profils différents, de les faire sortir de leur entre-soi et d’améliorer la qualité etla diversité des échanges universi-taires, de favoriser ainsi leur vitalité.Il est vrai que le risque de recrute-ments locaux de complaisance existera à défaut de compétition entre elles. Cette ouverture du recrutement en dehors du CNU n’a de sens que si elle est une réforme

nombreuses sont ceux ayant les meilleures universités et le taux de diplômés le plus élevé : Corée du Sud, Canada, Japon, Australie, Royaume-Uni, Etats-Unis, Pays-Bas… Les universités n’y excluent pas les plus modestes parce qu’ellesdéveloppent des bourses, des jobs étudiants et des partenariats avec des entreprises, des prêts étu-diants… A titre d’exemple, 38 % des étudiants du MIT ne règlent aucun frais de scolarité.

La recherche y gagnerait aussi,car la liberté des chercheurs est le gage de leur créativité et de leur fécondité, au lieu de soumettre toute la recherche publique fran-çaise aux fourches Caudines d’une unique Agence nationale de la recherche, l’ANR. Dans le classe-ment QS précité, les critères de qua-lités académiques, incluant la

recherche, sont les plus importantset les huit premiers pays du classe-ment sont ceux dont le secteur privéuniversitaire est le plus important.

L’expérience vécue dans lesfacultés libres existantes démontre que des établissements privés peu-vent utilement contribuer à la for-mation des étudiants et que la pos-sibilité de créer de nouvelles universités libres, ou l’autorisation donnée aux établissements publics qui le souhaiteraient d’opter pour un statut d’université libre, pourraitredonner au système universitaire français la force et le rayonnement qu’il mérite. Osons aller au bout de nos réformes.

Jean-Philippe Delsol est avocat, président de l’Institut de recherches économiques et fiscales (Iref).

de prémices vers la possibilité pourchaque université publique ou pri-vée d’acquérir son autonomie, de délivrer ses propres diplômes dans le respect des normes européennes.

Certes, les universités devien-draient alors payantes. Avant de s’en alarmer, il faut constater, comme l’observe une étude de l’Ins-titut de recherches économiques et fiscales (Iref), que les pays où les universités privées sont les plus

La France est au11e rang mondial.

Et 30 % seulement des étudiants décrochent leur licence en trois ans,

Comment faire des universités françaises les meilleures du monde ?

Pourquoi le Covid-19 ne sauvera pas l’Accord de Paris

Muryel Jacque @muryel-jacques

Dans la lutte contre le dérèglement climatique, la pandémie de Covid-19a permis un test grandeur nature qu’on aurait préféré inenvisageable. En mars, près de la moitié de l’huma-nité s’est cloîtrée, et l’activité écono-mique s’est vu infliger un coup d’arrêt abrupt, inédit en temps de paix. Résultat, les émissions de gaz àeffet de serre (GES), et de CO2 en par-ticulier, ont immédiatement chuté. Au pic du confinement planétaire, les scientifiques ont enregistré une baisse de 17 % en moyenne. L’impacts’est révélé déjà beaucoup moins netlors du reconfinement, moins strict et plus décalé autour du globe. Sur-tout, entre les deux, les émissions ont vite repris un bon rythme, qu’elles soient liées à la génération d’électricité (au charbon, au gaz, avant tout), aux transports, à l’indus-trie, aux bâtiments (résidentiels et commerciaux) ou à l’agriculture, les grands secteurs émetteurs.

Avec un choc incroyable, d’uneviolence rare économiquement et socialement, les émissions mondia-les ne devraient diminuer que de 5 %environ cette année, d’après les don-nées quotidiennes en temps quasi réel de Carbon Monitor. La doulou-reuse preuve par l’exemple que la solution n’est pas là, dans un arrêt forcé de nos économies, dans l’équi-valent d’un Covid-19 par an pendant des décennies, puisque le Giec estime que, pour limiter la hausse detempérature à 1,5 °C (par rapport à l’ère préindustrielle), les émissions anthropiques devraient baisser d’environ 45 % entre 2010 et 2030, devenant égales à zéro vers 2050.

Pis, cela n’a rien changé auxconcentrations de CO2, qui conti-nuent à augmenter. Le dioxyde de carbone, gaz stable, à longue durée de vie, demeure pendant des sièclesdans l’atmosphère, et encore plus longtemps dans l’océan, a rappelé ce mois-ci l’organisation météoro-

logique mondiale. Rien n’avait bougé depuis dix mille ans, jusqu’à l’industrialisation. Aujourd’hui, il y a quatre fois plus de CO2 dans l’atmosphère que dans les années 1960 et dix fois plus qu’au début desémissions humaines. La dernière fois que la Terre a connu une teneuren CO2 comparable, c’était il y a entre trois et cinq millions d’années.Et encore les puits de carbone natu-rels que sont la végétation et les océans arrivent-ils à absorber la moitié des émissions.

En clair, s’agissant des concentra-tions qui résultent des émissions passées et actuelles, accumulées et entraînant le réchauffement clima-tique, la situation est irréversible. « Le nettoyage d’excès de CO2 par la Terre ne se fera pas à l’échelle humaine, explique Philippe Ciais, directeur de recherche au Labora-toire des sciences du climat et de l’environnement. Au bout de mille ans, il en restera encore 20 %. » La cli-matologue Corinne Le Quéré le confirme : « On ne reviendra jamais aux niveaux préindustriels. »

Ce que nous pouvons faire, enrevanche, c’est « stabiliser le cli-mat », si nous parvenons à la neu-tralité carbone d’ici à 2050 dans le cadre de l’Accord de Paris. Tant quenous ne l’aurons pas atteinte, nous continuerons à réchauffer l’atmos-phère. Cela passe par la décarbona-tion de l’économie mondiale, donc de l’énergie produite mais aussi uti-lisée dans les transports, les indus-tries, les bâtiments, etc., énergie quireste aujourd’hui très dépendante des hydrocarbures. Près des trois quarts des émissions de GES pro-viennent des besoins en énergie.

L’an dernier, les émissions duG20, les 20 économies les plus avan-cées, ont reculé de 0,1 %. Une pre-mière en l’absence de choc externe,mais on est encore loin du compte. Pour l’heure, les efforts à faire demeurent gigantesques. « Nous sommes face à un problème que nousavons créé et qui sera incomparable-

ment plus durable que le Covid », pré-vient le climatologue Hervé Le Treut. En l’état actuel des déclara-tions faites par les pays qui ont signél’Accord de Paris, les pronostics donnent un réchauffement à +3 °C. Toutefois, outre l’Union euro-péenne qui entend se montrer net-tement plus ambitieuse, les annon-ces récentes des deux plus grands émetteurs donnent de l’espoir, avec la Chine qui vise la neutralité car-bone en 2060 et le retour annoncé

des Etats-Unis dans l’Accord.Surtout, l’argent public ne man-

que pas en ce moment. Un article paru en octobre dans la revue « Science » montre l’impact poten-tiel que les plans de relance actuels pourraient avoir pour basculer versun système énergétique bas car-bone. Bien qu’une telle transforma-tion nécessite un large éventail de mesures politiques pour se concré-tiser, précisent ses auteurs, si seule-ment une fraction des plus de

12.000 milliards de dollars que les gouvernements du monde entier comptent mettre sur la table pour enrayer la crise liée au Covid-19 étaient consacrés à la décarbona-tion au cours des cinq prochaines années, ce serait suffisant pour remettre le monde sur des rails compatibles avec l’Accord de Paris. A condition que ces investisse-ments soient accompagnés d’un désinvestissement important des énergies fossiles. n

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L’ANALYSE DE LA RÉDACTION Bien que la planète ait vécu deux confine-ments successifs en 2020, avec des économies à l’arrêt ou sévèrement ralenties, la baisse des émis-sions de gaz à effet de serre a été mo-deste et, surtout, la concentration de CO2 dans l’atmosphère n’a jamais été aussi importante. Explications.

DLes points à retenir

•Même après un choc économique et social inouï, les émissions mondiales de gaz à effet de serre ne devraient diminuer que de 5 % cette année.•En termes de réchauffement climatique, la situation est irréversible.•Reste la possibilité de stabiliser la situation en visant la neutralité carbone d’ici à 2050.•D’autant que l’argent public ne manque pas et que les plans de relance incluent un système énergétique bas carbone.•Aux différents Etats maintenant à se re-mettre sur les rails des Accords de Paris.

10 // Vendredi 11 et samedi 12 décembre 2020 Les Echos

idées&débats

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Les Echos Vendredi 11 et samedi 12 décembre 2020 IDEES & DEBATS // 11

opinionsL’intolérable retour de la famine dans le monde

sans comparaison. Dans beaucoup de pays en développement, une majorité des familles (deux tiers au Nigeria ou auGabon) devront sauter un repas, selon la Banque mondiale. La raison, outre lachute de revenu, est le prix des denrées devenu très élevé par la mauvaise qua-lité, ou les cassures, des chaînes d’approvisionnement : un simple plat de riz ou de haricots atteint 185 % du revenu moyen quotidien au Soudan du Sud, calcule le PAM, qui ajoute qu’à ce prix-là un même plat coûterait 400 dol-lars aux Etats-Unis. L’année 2021, pré-vient David Beasley, verra des millions d’enfants supplémentaires ne pas aller à l’école y recevoir ce qui était souvent leur seul repas. L’exode rural pour cause de famine va se multiplier, mais les banlieues des métropoles sont déjà déstabilisées par le chômage de masse et privées de nourriture par la paralysiedes marchés.

Les pays en développement ne peu-vent comme au nord accroître les dis-tributions alimentaires parce qu’ils affrontent une double crise financière. Ils sont privés des envois d’argent des émigrés et les emprunts supplémentai-res à faible taux comme au nord leur sont interdits. Le G20 mobilisé pour effacer les dettes des pays les plus pau-vres, comme le proposent la France et d’autres, n’a accordé qu’un délai de paiement de quelques mois. L’écono-miste Esther Duflo, prix Nobel elle aussi, parle de cet aveuglement égoïste des pays développés comme d’une « honte ». La crise, le nationalisme, le populisme, le rapetissement des esprits politiques conduisent à se désintéresser de ce qu’on appelait naguère le tiers-monde. Les causes qui mobilisaient alors, comme la faim après la guerre du Biafra à la fin des années 1960, n’apparaissent dans plus aucun programme politique, y com-pris dans ceux de gauche et d’extrême gauche.

Eric Le Boucher est éditorialiste aux « Echos ».

dernières décennies étaient d’ailleurs notables, l’objectif onusien de suppri-mer la faim dans dix ans était à portée de main. La famine tue encore mais l’humanité dispose des moyens de l’éra-diquer.

Depuis 2014, le retour des conflits ainversé la courbe. Soixante millions de personnes supplémentaires souffrent de la faim, notamment dans quatre régions, le Soudan du Sud, le sud-est duNigeria, le Yémen, le Burkina Faso. La crise économique entraînée par le Covid aura des conséquences plus générales et encore plus désastreuses. Si les pays en développement sont

médicalement moins touchés, sans doute parce que le virus aime les tempé-ratures basses, leurs économies le sont tout autant ou plus. La Banque mon-diale a calculé que 60 % des foyers dans68 pays du Sud verront leurs salaires baisser cette année. On a vu aux Etats-Unis des longues files de voitures venir chercher les bons alimentaires, les 5 milliards débloqués par le gouverne-ment sont d’ailleurs épuisés. On voit en France exploser le nombre de repas dis-tribués par les Restos du cœur. La faim est partout. Mais, dans des proportions

Le G20 mobilisé pour effacer les dettes des pays les plus pauvres n’a accordé qu’un délai de paiement de quelques mois.

La crise, le nationalisme, le populisme, le rapetissement des esprits politiques conduisent à se désintéresser de ce qu’on appelait naguère le tiers-monde.

Parmi les objectifs du millénaire de l’ONU, celui d’éliminer la faim en 2030 semblait le plus facile à atteindre. Mais, depuis 2014, le retour des conflits a inversé la courbe. Et en raison de la pandémie 135 millions de personnes supplémentaires seront touchées par la famine.

DANS LA PRESSEÉTRANGÈRE

• « Je ne m’attendais pas à ce que le gouverne-ment nous tue. » Ashenafi Hailu, un ressor-tissant du Tigré, une province éthiopienne attaquée au nom de l’unité de l’Ethiopie parl’armée régulière et des milices progouver-nementales, a survécu par miracle à une pendaison.

Il raconte son incroyable histoire au« New York Times », qui a recueilli d’autres témoignages de réfugiés. Ashenafi s’est réveillé après sa pendaison à côté d’un char-nier comprenant même des enfants.

Comme des douzaines d’autres, il a fuison pays pour se réfugier dans un camp au Soudan, à Hamdayet. Près de 500.000 Ethiopiens ont ainsi fui, dans ce qui a été décrit par les Nations unies comme « le pireexode » d’Ethiopie depuis plus de vingt ans.

Risque d’extension du conflitLeurs récits, souligne le quotidien new-yor-kais, apportent un démenti aux affirma-tions répétées d’Abiy Ahmed, selon lequel aucun civil n’a été tué.

Les Tigréens interrogés par le « Times »affirment au contraire être pris entre les

bombardements sans distinction de l’armée régulière et une campagne de meurtres, de viols et de pillages des milices liées au gouvernement d’Addis-Abeba. Plu-sieurs ont affirmé au journal qu’ils avaient vu des douzaines de corps le long des routesempruntées pour fuir.

Le risque d’une extension du conflit auxpays voisins, au Soudan et à l’Erythrée, est en plus immense alors qu’il est en train de dégénérer dans une guérilla qui menace dedéstabiliser l’Ethiopie et toute la Corne de l’Afrique.

En tout cas, nombre de Tigréens accu-sent les dirigeants politiques, et particuliè-rement Abiy Ahmed, qui a reçu le prix Nobel de la paix en 2019 pour son action visant à mettre fin au conflit en Erythrée, d’être les responsables de ce conflit.

On peut se demander si le comité duNobel retirera son prix au Premier ministre.— J. H.-R.

Ethiopie : quand la mort rôde

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C ertains se mobilisent pour leclimat à la fin du siècle, d’autresse désespèrent de ne pouvoir

boucler leur fin de mois. Les médias despays riches parlent d’eux en continu. Dans les pays pauvres, des millions d’êtres humains se couchent sans avoirmangé à la fin de la journée dans un silence médiatique et politique presquetotal. La Terre compte encore 690 mil-lions de mal-nourris (8,9 % de la popu-lation mondiale) dont 140 millions d’affamés et dont 7 millions meurent encore par an.

Le Programme alimentaire mondial(PAM) a reçu, jeudi 10 décembre, le prixNobel de la paix 2020, à distance à cause du Covid. Son directeur exécutif, David Beasley, a alerté : la pandémie double les besoins alors qu’elle bloque le transport des aides, en conséquence 135 millions de personnes supplémen-taires seront touchées par la famine. Elle pourrait l’an prochain atteindre « des proportions bibliques ». Il a besoinde 5 milliards de dollars pour boucler son budget 2020 et de 15 milliards l’an prochain, il tend la main aux Etats et aux milliardaires mécènes.

Parmi les objectifs du millénaire del’ONU – vaincre la pauvreté, permettre à tous les enfants d’aller à l’école, don-ner l’accès à tous à une eau propre… –, celui d’éliminer la faim en 2030 sem-blait le plus facile à atteindre. D’abord en permettant à toute famille de s’auto-alimenter ou, à défaut, de recevoir des aides. Il y a de la nourriture en excès, des moyens de transport, des organisa-tions généreuses publiques et privées, et les sommes d’argent à mobiliser sonttrouvables, quelques dizaines milliardsde dollars. Les progrès enregistrés ces

LA CHRONIQUEd’ Eric Le Boucher

SERVICE ABONNEMENTS LES ECHOS 4, rue de Mouchy 60438 Noailles Cedex. Tél. : 01 70 37 61 36 du lundi au vendredi de 9h à 18h. IMPRESSION L’Imprimerie (Tremblay-en-France), Midi Libre (Montpellier). TIRAGE DU 10 DÉCEMBRE 2020 : 53.353 exemplaires. Origine du papier : France. Taux de fibres recyclées : 56%.Ce journal est imprimé sur du papier porteur de l’Ecolabel européen sous le numéro FI/37/002. Eutrophisation : P

tot0.01kg/tonne de papier Membre de membre ACPM OJD CPPAP : 0421 c 83015. Toute reproduction, même partielle, est interdite sans l’autorisation expresse de l’éditeur (loi du 11 mars 1957)

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LA REVUEDU JOUR

Europe et chocs sino-américains

LE DOSSIER L’Institut français des relations internationales (Ifri) a fêté ses quarante ans l’an dernier. A cette occasion s’est tenue, sous le haut patronage du président de la République, une conférence exceptionnelle à la Sorbonne. Des intervenants prestigieux, de différents milieux (Bruno Le Maire, Jean-Paul Agon, Christine Ockrent), ont traité des perspectives d’un continent européen, dont les desseins et destins sont façonnés par de nouvelles réalités. Les prochaines décennies seront dominées par la volonté de la Chine de devenir la première puissance mondiale, tandis que les Etats-Unis feront tout pour conserver ce rang. D’où des mutations et tensions sur le projet européen lui-même, de nouvelles alliances géopolitiques, de nouvelles menaces. Celles-ci relèvent de la cybersphère, mais aussi de nouveaux protectionnismes.

LA PUBLICATION Créée en 1936, « Politique étrangère » est publiée depuis 1979 par l’Ifri. Cette livraison spéciale du trimestriel, bilingue (en français et en anglais, sans chinois), a la hauteur de vue que l’on retrouve, en fait, dans tous les numéros habituels. — Julien Damon

L’Avenir de l’Europe face à la compétition sino-américaine« Politique étrangère », numéro spécial, 2020.

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12 // IDEES & DEBATS Vendredi 11 et samedi 12 décembre 2020 Les Echos

opinions

LE POINTDE VUE

de Guillaume Bazot

Annuler la dette ? Ne jouons pas aux apprentis sorciers

D epuis quelques mois et le creu-sement des déficits faisant suiteà la crise du Covid, il est fré-

quent d’entendre parler des risques associés à l’accumulation des dettes publiques. Parmi les recommanda-tions, celle de l’annulation de la dette détenue à la Banque centrale semble avoir attiré l’attention. Pour autant, cette solution apparaît problématique pour au moins deux raisons.

Premièrement, les chances que celaadvienne sont – au regard des institu-tions européennes et des traités – prati-quement nulles. Il faut reconnaître que la question possède un véritable attrait, notamment parce qu’elle interroge l’importance des contraintes budgétai-res. Cependant, il est illusoire de croire que l’on peut annuler à froid la dette des Etats membres détenue à la Banque cen-trale européenne (BCE) sans que cela nuise dramatiquement aux relations européennes. Deuxièmement, jusqu’où ce processus d’annulation peut-il aller ? Soit il est infini, et l’on aurait trouvé ici une martingale – il suffit de stimuler l’économie en accroissant sans fin la dépense publique tout en laissant la ban-que centrale accumuler les pertes –, soit il est fini, et l’on aimerait en connaître leslimites. De fait, il est aisé de présager quela vraisemblance d’un coût économique d’ampleur est d’autant plus grande que la dette effacée est importante. Néan-moins, il serait utile de connaître la loi deprobabilité sous-jacente, ce qui permet-trait de comparer les gains et les pertes potentiels qui découlent d’un tel événe-

particulier les engagements vis-à-vis desétablissements de crédit. En temps nor-mal, en cas de retrait, la banque centralerevend ses titres pour rembourser le pro-priétaire des fonds. Ceci n’est désormais plus possible puisque les titres en ques-tion n’existent plus. La banque centrale fait alors « tourner la planche à billets » pour répondre à ses engagements.

Ceci peut être relativement indolore,notamment si la majorité des banques garde confiance en la valeur de l’euro et conserve ses dépôts à la banque centrale.Néanmoins, comment prévoir leur réaction ? De fait, les institutions finan-cières peuvent anticiper une chute de la valeur de la monnaie et chercher à se débarrasser de leur portefeuille libellé en euros. Les banques retirent leurs dépôts et la prophétie devient autoréali-satrice. A petite échelle, l’inflation obte-nue, si elle demeure limitée, peut avoir des effets macroéconomiques bénéfi-ques en réduisant les dettes – aux dépenstoutefois des petits épargnants, dont les patrimoines sont souvent monétaires (dépôts à vue ou à terme). En revanche, siles retraits deviennent importants, le danger est grand de générer une fuite massive de capitaux et d’être à l’origine d’une crise monétaire, bancaire et éco-nomique d’ampleur. Ainsi, au regard du haut niveau d’incertitude qui entoure lesconséquences d’une telle politique, il est sans doute préférable de ne pas jouer aux apprentis sorciers.

Guillaume Bazot est maître de conférences à l’université Paris-VIII.

ment. Dès lors, quels sont concrètement les risques ? Pour répondre à cette ques-tion, il faut se plonger dans le bilan des banques centrales. A l’actif, la BCE accu-mule principalement des crédits et des titres (81 % de son bilan), notamment desdettes publiques. Au passif, il y a entre autres les pièces et billets en circulation (21 %), les dépôts des banques commer-ciales (50 %) et le capital de la banque centrale (8 %). Le capital peut faire tam-pon contre des pertes éventuelles à hau-teur de 8 % du bilan (soit 108 milliards d’euros), ce qui est insuffisant pour épon-ger les dettes publiques. Il est vrai qu’une

banque centrale ne peut faire faillite. L’idée est alors de laisser le capital de la BCE devenir négatif pour permettre aux Etats de s’endetter encore plus. Le pro-blème est ici double. D’une part les pertesde la BCE échoient à ses actionnaires, soit au final principalement aux Etats membres. Bien que ces derniers n’aient pas à en assumer la charge, la banque centrale ne leur reversera plus le moin-dre revenu d’exploitation. D’autre part, une partie importante du passif de la BCE continue de poser problème, en

Le niveau d’incertitude entourant les conséquences d’une telle politique doit dissuader d’en prendre le risque.

LE POINTDE VUE

de Bertrand Piccard

Accord de Paris sur le climat : une saine frustration

A u milieu du tour du monde deSolar Impulse, j’ai participé àces dix jours de discussions

dont le monde attendait tant. J’ai vu comment chaque détail sémantique, chaque virgule fut âprement négocié. Comment les rapports de force se jouaient autour d’un accord surprenantentre Barack Obama et Xi Jinping pour devenir les leaders climatiques. Et l’explosion de joie finale lorsque les 195 chefs d’Etat et de gouvernement se sont engagés à contenir l’augmentationde la température atmosphérique « bien en dessous de 2 °C, si possible 1,5 ».

Cinq ans après cet immense éland’espoir, le constat est sans appel : le pro-blème climatique a augmenté de manière exponentielle, alors que nos efforts ont crû de façon linéaire, creusanttoujours plus le fossé entre ce que nous devrions faire et ce que nous faisons réel-lement. Alors que reste-t-il de la COP21 ?Avant tout, beaucoup de frustration. Mais loin d’être inutile, cette frustration est en réalité une avancée. C’est elle qui apermis de faire bouger les lignes. Seule-ment, pas comme on pouvait s’y atten-dre. A Paris, les Etats étaient en avance sur le monde économique, et les entre-prises résistaient. Aujourd’hui, on observe précisément l’inverse. Consta-tant que rien n’avance – si ce n’est les émissions de CO2 et les grèves des jeu-nes –, des acteurs locaux et privés s’emparent du problème. Certaines régions, comme l’Ecosse, annoncent vouloir atteindre la neutralité carbone

autofinancés par les économies réali-sées. Il existe des centaines de solutions dans tous les domaines de l’industrie, de l’énergie, de la mobilité, de l’agriculture etdes bâtiments qui permettent à la fois deprotéger l’environnement et de générer de la création de richesse et d’emplois. Pour ce faire, les décideurs doivent en prendre conscience et adopter des nor-mes environnementales beaucoup plus ambitieuses afin de tirer ces nouvelles technologies vers le marché.

Le problème est précisément là : notrecadre juridique est basé sur des techno-logies anciennes et inefficientes, permet-tant aux pollueurs d’affirmer que ce qu’ils font est légal. Il existe des réglemen-tations en matière de santé, d’hygiène, d’éducation, de justice… mais chacun peut encore rejeter autant de CO2 qu’il le souhaite dans l’atmosphère, pêcher autant de poissons qu’il veut et épuiser les cycles de reproduction, ou encore brûler du pétrole à volonté. L’imprévisi-bilité des législations et le risque de dis-torsion de concurrence empêchent l’industrie d’investir spontanément dansune production plus propre. Une situa-tion ubuesque tant au niveau environne-mental qu’économique. Pour aller de l’avant, il faut aligner la pression popu-laire qui fait peur, les solutions qui rassu-rent et un cadre légal ambitieux. Puisse la frustration de l’échec nous y pousser.

Bertrand Piccard est psychiatre, explorateur, président de la Fondation Solar Impulse.

dix ans avant tout le monde, des entre-prises forment des coalitions vertes, dans le textile, le transport maritime, l’industrie, la finance. Des Etats améri-cains s’opposent à Trump et décident de suivre unilatéralement l’Accord de Paris. Des villes prennent les mesures qu’elles peuvent à leur échelle pour sortirde la paralysie. Oui, la frustration a réveillé le monde, cinq ans et quelques gigatonnes de CO2 plus tard.

Cette réaction bienvenue du mondecapitaliste doit prendre de vitesse celle des mouvements écologistes pour éviter la radicalisation que l’on sent poindre. Il est fort probable qu’en ne prenant pas encompte le bien-être des populations et deleur milieu de vie, le système actuel ris-que fortement d’être balayé par une lamede fond « verte » et populaire. Autre chose a changé depuis cinq ans : la spec-taculaire rentabilité des technologies propres et des énergies renouvelables. Sur la moitié du globe, l’électricité photo-voltaïque coûte maintenant moins cher que celle produite par énergie fossile ou nucléaire, et les investissements dans l’efficience des ressources peuvent être

A Paris, les Etats étaient en avance sur le monde économique, et les entreprises résistaient. Aujourd’hui, on observe précisément l’inverse.

Avant de réformer les autres, l’Etat devrait se réformer lui-même

LA CHRONIQUE

Par Jacques Attali

A vant de se lancer imprudemmentdans bien des réformes, l’Etatdevrait faire fonctionner ses servi-

ces de base : la santé, la police et l’éducation. Il en est très loin. La pandémie nous rappelleles énormes lacunes de notre système de santé ; et la gestion plus que problématique des enjeux de sécurité nous rappelle les insuffisances de notre système policier. Et dans ces deux cas, il ne s’agit pas seulement de moyens financiers, mais surtout de com-pétences, de méthodes, de matériels, de motivation, de respect. En matière d’éduca-tion, c’est plus flagrant encore, parce que, là, on dispose de comparaisons internationalesqui en apportent des preuves objectives. Despreuves consternantes.

Selon la plus récente étude Pisa de l’OCDE,qui « teste l’aptitude des élèves à appliquer les connaissances acquises à l’école aux situationsde la vie réelle », la France est classée au 23e rang sur les 79 pays participants en com-préhension de l’écrit, en mathématiques et en sciences. L’Allemagne est 19e, les Etats-Unis 12e, la Suède 10e, la Corée 8e. Singapour est en tête ; la France est aussi un des pays quiréussit le moins à réduire l’impact du milieusocio-économique sur les résultats scolai-res : « Le niveau à l’écrit des 10 % d’élèves des familles les plus riches équivaut à une avance de trois années scolaires environ par rapport aux 10 % d’élèves les plus pauvres. »

Cela devrait suffire à sonner le tocsin. Maisil y a pire : selon une étude dite « TIMSS », effectuée par un organisme scientifique américain reconnu, l’International Associa-tion for the Evaluation of Educational Achie-vement, et qui vient d’être rendue publique, les élèves français de CM1 étaient, en 2019, enavant-dernière position mondiale en mathé-matiques et en sciences (ne devançant que leChili) ! Et cela n’est suivi d’aucun rattrapage entre le CM1 et la quatrième, où la France se classe là encore parmi les derniers. De plus, seulement 2 % des élèves français ont un « niveau avancé » (contre 11 % en moyenne dans l’OCDE et plus de 50 % à Singapour, à Taïwan et en Corée du Sud).

Les jeunes Français ont désormais un trèsmauvais niveau en sciences. C’est un épou-vantable désastre. Cela devrait faire les grands titres. Il semble que le déclin ait com-mencé il y a vingt-cinq ans. On aurait dû s’en

rendre compte. Lancer immédiatement un grand débat national. Agir massivement.

Mais non. Il n’en a rien été. Comme si toutle monde, du gouvernement aux parents, enpassant par les syndicats enseignants, avait intérêt à cacher le problème, à le glisser len-tement sous le tapis. Pour ne fâcher per-sonne. Nous vivons la conspiration du silence de la médiocrité. Et il n’y a pas de pirepoison que la médiocrité. Si on ne fait rien, sion ne déclenche pas au plus vite une mobili-sation générale, c’est un tsunami qui nous menace : celui du déclin, qui viendra inévita-blement quand il sera impossible de former des techniciens, des chercheurs, des ingé-nieurs, des médecins avec cette génération. Et quand les familles les plus aisées auront compris que l’enseignement qu’on donne à leurs enfants en France est un désastre, qu’aucune école privée ne suffit à le compen-ser et émigreront pour ne pas le subir.

Veut-on cela ? Non, évidemment. Seule-ment voilà, pour le changer, il ne suffira pasd’augmenter notre dépense d’éducation, qui est dans la moyenne de l’OCDE, et mêmetrès supérieure à celle de pays bien mieux classés que nous. Il nous faudra bien plus, des choses plus subtiles et plus difficiles à obtenir : des professeurs mieux formés, capables de transmettre une passion des mathématiques, de la physique et de toutesles autres sciences ; des professeurs en situation d’être plus exigeants avec les élè-ves, sans risquer d’être agressés par des parents ; des élevés motivés pour les étudesaustères, continues qu’exigent les mathé-matiques ; des élèves à qui on aura su faire ressentir la joie extrême de résoudre un problème difficile, de trouver la démonstra-tion la plus simple possible d’un théorème complexe, d’entrer dans le monde fascinantdes nombres imaginaires, de naviguer dansune géométrie à trois puis quatre, puis n dimensions, et bien plus ; pour, plus tard, s’émerveiller devant la capacité de ces outilsà décrire la nature, à lui donner un sens, même provisoire, et à faire faire à l’huma-nité ses plus merveilleux progrès, humbles ou immenses.

Je ne vois pas venir le commencement dudébut d’un tel programme ; même pas le commencement d’un débat sur sa néces-sité. Il est vrai qu’on est occupé à des débats beaucoup plus sérieux. Par exemple sur la loi dite de « sécurité globale » : comment passer de 23 à 25 sans passer par 24… n

Nous vivons la conspiration du silence de la médiocrité. Et il n’y a pas de pire poison que la médiocrité.

L'ACTUALITÉ DES THINK TANKS

L’IDÉE Néologisme désignant de nouvelles pratiques et habitudes alimentaires, le « flexitarisme » mêle donc flexibilité et végétarisme. Dans la lignée de la consommation responsable, il s’agit, avec cette tendance, à la fois de manger bien et de ne se priver de rien. Le concept, lit-on dans une note du think tank Agridées intitulée : « Flexitarisme : une opportunité pour la chaîne alimentaire ? », est dit « agglutinant ». Issu d’un collectif alliant experts et industriels, le document livre un travail très fouillé sur la question et ausculte les préférences (pour moins de consommation individuelle de viande) et les perspectives (pour une transition raisonnable de toute la chaîne alimentaire, impliquant végétaux et animaux).

L’INTÉRÊT Think tank dynamique spécialisé dans le large domaine agricole, agroalimentaire et agro-industriel, Agridées traite des réalités, des difficultés et des opportunités d’un ensemble d’activités essentielles. Mettant ici de côté tous les intégrismes qui peuvent frapper ce type de dossier, l’analyse est claire et alertement rédigée. Avec des propositions sur un meilleur étiquetage européen des produits carnés, sur le plaisir de manger ou encore le soutien aux filières des plantes. Des idées qui se lisent avec curiosité et appétit.— Julien Damon

www.agridees.com

Demain, tous flexitariens ?

Toutes les équipes travaillentdésormais à distance

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Les Echos Vendredi 11 et samedi 12 décembre 2020 IDEES & DEBATS // 13

focus

La lourde rançon de la révolution numérique

P ar temps de confinement, onl’aurait presque oubliée. Il y acombien de temps que nous ne

l’avons éprouvée, cette douce sensation d’avoir quitté sa laisse ? D’errer sans repère, sans navigateur de poche, sans réseau, sans fléchage… Sans les vibra-tions sournoises de ce petit rectangle froid plaqué contre notre poitrine ou surnotre cuisse ? Quelle cime faut-il désor-mais gravir, dans quelle forêt profonde faut-il s’enfoncer pour jouir de ce senti-ment ineffable de déconnexion ultime ?Dans son essai provocateur sur « L’Ere de l’individu tyran », l’écrivain et philo-sophe Eric Sadin dresse un portrait sidé-rant de ce nouvel « être ultra-connecté, replié sur sa subjectivité et ses intérêts ». Un électrochoc. Tant ses observations sur le délabrement de notre monde commun et le mythe de la « suffisance de soi » sonnent juste.

Isolement collectif« En 2007, l’avènement du smartphone intensifia cette impression de jouir d’une forme d’allégement de son existence et d’une indépendance sans cesse accrue. » Treize ans après, l’auteur s’attache sur-tout à disséquer l’impact de ces nouvel-les technologies numériques sur notre psychologie individuelle et collective. Etson constat est plutôt effarant. Car aprèsdeux décennies de pratiques assidues, l’histoire récente des systèmes numéri-ques révèle un effet inverse : l’ivresse desréseaux semble avoir clairement encou-ragé l’avènement des « particularismes autoritaires » et l’émergence d’une forme d’ingouvernabilité permanente. On peut partager – ou pas – l’alarmismedes conclusions d’Eric Sadin sur cette montée des comportements d’incivilité,la sensation d’un isolement collectif et ce qu’il appelle « l’effondrement de notre monde commun ». Mais force est de constater l’incroyable finesse et l’impactde ses analyses, au cœur de l’ouvrage,

sur les « technologies de l’embrasement des esprits » que représentent, à ses yeux, des réseaux tels que Facebook, Twitter ou Instagram…

Homme-sandwichTrès vite, l’humanité tout entière s’est laissé griser par l’apparition quasi simultanée de l’Internet et du téléphoneportable à la fin des années quatre-vingt-dix. Assez vite aussi, on s’est aperçu des conséquences alarmantes des phéno-mènes d’addiction chez les ados, mais aussi sur les adultes et les enfants. Mais, pour Eric Sadin, un phénomène sour-nois, souvent occulté, est « la sensation toujours plus répandue d’une centralité de soi ». Au point que « Time Maga-zine », en 2006, élit « You » comme per-sonnalité de l’année. Mieux : l’ivresse du« libéralisme de soi » va encore culminer avec Twitter, cette « machine à enivrer » qui attise l’impression d’une primauté de soi et acte le postulat du « triomphe dela parole sur l’action ». « En ce sens, Twit-ter participe de cet air du temps – tout en ycontribuant au premier chef – où les êtrescherchent à s’affirmer, non pas tant en vuede patiemment défendre un point de vue, de tenter de convaincre des interlocuteurs,que d’imposer leur perception des cho-ses. » Quant à Instagram (créé en 2010), l’auteur y voit l’ultime plateforme dédiéeà l’affichage de soi. Une prouesse en ter-mes de « continuelle monétisation de sa personne » visant à transformer l’insta-grameur en homme-sandwich d’un genre nouveau.

Eric Sadin n’est ni le premier ni le der-nier à vouloir démonter les effets mas-sifs et nocifs de la révolution numériquedes vingt dernières années et de l’appari-

tion du smartphone sur la société. Déjà, l’économiste italo-américaine Mariana Mazzucato, spécialiste de l’économie del’innovation, citée en exemple par le pape François dans son dernier livre sur« Un temps pour changer » (Flamma-rion, 2020), a mis en garde contre l’illu-sion de l’innovation pour l’innovation en rappelant que les douze technologiesclés de l’iPhone ont toutes été inventées par des agences gouvernementales, américaines pour la plupart. L’origina-lité de l’essai d’Eric Sadin est de se con-centrer sur l’impact social et psychologi-que de ces nouveaux outils. Pour lui, l’histoire récente des systèmes numéri-ques semble montrer qu’ils ont profon-dément – et insidieusement – modifié nos mentalités en changeant notre rap-port au réel et en contribuant à une « représentation boursouflée de soi ».

Un pamphlet contre l’angélisme technoParadoxalement, malgré ses accents faussement déclinistes, cet essai icono-claste, largement à contre-courant, a uneffet stimulant. Car il a le mérite de démonter patiemment certains méca-nismes pervers, comme le passage du « free speech » au « hate speech », le glis-sement vers la « culture de l’humilia-tion »… Malgré son style foisonnant, parfois déroutant, il agit comme un révélateur. D’abord, car l’on sent bien que l’auteur n’est pas dans une posture passéiste. Auteur de plusieurs essais surle « Web précognitif », l’intelligence arti-ficielle et la « critique de la raison numé-rique », Eric Sadin est loin d’être réfrac-taire aux technologies numériques. Il enest même un fin connaisseur. Et c’est ce qui fait toute la force de ce pamphlet argumenté contre l’angélisme techno ambiant, habilement rédigé à l’impar-fait narratif.

En faisant le lien entre ces technolo-gies d’embrasement des esprits et le déli-tement du lien social, l’auteur voit dans cet effet de « déni implicite d’autrui » unedes explications majeures de cette atmosphère régnante de « fureur de touscontre tous ». Décapant… n

L’humanité tout entière s’est laissé griser par l’apparition quasi simultanée de l’Internet et du téléphone portable à la fin des années 1990. Photo iStock

Eric Sadin n’est ni le premier ni le dernier à disséquer les ravages de l’addiction aux réseaux sociaux. Mais son analyse décapante de l’impact d’un certain usage des « outils numériques » sur le délitement du lien social sonne comme un électrochoc.

ESSAIL’Ere de l’individu tyran - La find’un monde communEric Sadin, 352 pages, Grasset, 20,90 euros.

ESSAIOsons l’autoritépar Thibault de Montbrial, Editions de l’Observatoire, 304 pages, 19 euros.

LIVRES

Par Pierre de Gasquet

est à l’origine de la formation des sociétés. Lespremiers regroupements humains sont la conséquence du choix de certaines tribus de fusionner avec d’autres. La motivation pre-mière de ces unions était la réponse à cette seule interrogation : serons-nous plus en sécurité avec ou sans eux ? La liberté n’était pas le préalable à cette décision, mais une con-séquence de celle-ci. »

LE SYNDROME MALIK OUSSEKINE « Le traumatisme profond de la mort de Malik Oussekine [étudiant battu par deux policiers,le 6 décembre 1986, et mort de ses blessures, NDLR] va constituer le point de départ d’une nouvelle doctrine de maintien de l’ordre […]. Les spécialistes de la sécurité publique l’ont baptisée “doctrine Malik Oussekine”. Son principe cardinal est simple : éviter au maxi-mum tout contact direct entre forces de l’ordre et manifestants. Contenir la violence plutôt que la réprimer pour éviter à tout prixun nouveau drame. » n

Messagerie instanta-née et visioconféren-ces ont envahi nosvies et ont entraînéquelques dommagescollatéraux : baissede l’attention, reculdes relations socia-les… Francis Brochetdémontre la néces-

sité de poser un moment nos prothèses à écran tactile servant prétendument à com-muniquer pour sortir de notre bulle. Il démonte brillamment les arguments de ceux qui continuent obstinément à confon-dre progrès et progression.— Guillaume de Calignon

Eloge de la conversation au temps du smartphoneFrancis Brochet, éditions Kiwi, 192 pages, 18 euros.

ces » des unes et desautres afin de répon-dre à une situationdonnée. Mettre enp l a c e u n r é s e a usocial interne, tenirdes réunions effica-ces, éviter le burn-outdes équipes, mieuxles impliquer dans

un projet, entretenir l’intelligence émotion-nelle des salariés, et bien d’autres cas encore. On trouvera dans cet ouvrage bien des exemples et d’expérimentations mis au service d’une gouvernance moderne. Enri-chissant et rafraîchissant. — Daniel Fortin

L’Entreprise nouvelle générationLuc Bretones, Philippe Pinault et Olivier Trannoy. Editions Eyrolles. 419 pages. 28 euros.

En pleine polémique sur l’article 24 de la loidite « de sécurité globale », et plus générale-ment sur les violences policières, la lecture de l’ouvrage de Thierry de Montbrial est éclairante. Ce n’est pas vraiment l’archétypede l’avocat s’indignant des dérives sécuritai-res de l’arsenal législatif. Au contraire, Thierry de Montbrial est un peu l’anti-Fran-çois Sureau, pour le comparer à un de ses confrères. Il n’empêche, son point de vue mérite d’être écouté, ou plutôt lu, notam-ment son analyse sur les difficultés du maintien de l’ordre en France et sa thèse, selon laquelle l’Etat aurait renoncé pendanttrop longtemps à faire respecter l’ordre public. Extraits.

RENONCEMENT Thierry de Montbrial fut l’avocat des deux gendarmes frappés à coups de poing par Christophe Dettinger enjanvier 2019. Il raconte le procès. « Je revois ce gendarme de 22 ans, pas très costaud, la coupe en brosse, issu de la classe moyenne, le prototype du citoyen lambda, en somme, regarder dans les yeux le prévenu de quinze ans son aîné, au profil très proche. Hormis leur différence d’âge, la ressemblance, y com-pris physique, était saisissante. La même France, placée des deux côtés d’un même miroir, se faisait face. Comment l’une a-t-elle pu développer une telle haine de l’autre ? »

LIBERTÉ ET SÉCURITÉ « L’histoire de l’humanité nous enseigne qu’avant la quête de liberté, c’est la recherche de la sécurité qui

• C e l i v r e e s t u n appel à retrouver l’autre. Car Francis Brochet, journaliste, ne croit pas du tout que Jean-Paul Sartre,pour qui « l’enfer, c’[était] les autres », ait eu raison. Au con-traire, « l’homme est un animal social », comme le pensait Aris-tote. L’auteur nous fait sentir ce besoin de communication et même de conversation – puisque deux objets peuvent désormais communiquer entre eux – essentiel à l’humain, et mis à mal aujourd’hui par les outils numériques.

Livres en bref

Connexion partout, communication nulle part

• Voici une mine d’informations à des-tination de ceux qui s’interrogent sur la m e i l l e u r e f a ç o n d ’o rg a n i s e r l e u r entreprise à l ’ère numérique. En croi-sant les témoignages de quelque 250 diri-geants, les auteurs ont rédigé un véritable vade-mecum du management moderne, à mille lieues des théories fumeuses qui empoisonnent généralement ce genre d’exercice. On y trouve au contraire des recettes très concrètes sur les « best practi-

Manager autrement

BONNES FEUILLES

Par Marie Bellan

L’avocat Thierry de Montbrial s’interroge sur la capacité des forces de l’ordre à assurer la sécurité intérieure en France.

Avons-nous renoncé à l’ordre public ?

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Propos recueillis parNicolas Barré, Julie Chauveau et Enrique Moreira

F ondée en 2000, Gavi est une organisa-tion mondiale visant à élargir la cou-verture vaccinale. Ses partenaires his-

toriques sont la Fondation Bill & Melinda Gates, l’OMS, l’Unicef et la Banque mondiale.Elle dirige le dispositif Covax, lancé en jan-vier 2020 par les Nations unies. Son directeurexécutif, le Dr Seth Berkley, revient sur les enjeux de la campagne mondiale de vaccination.

Quel est le rôle de Gavi dans la lutte contre la pandémie de Covid-19 ?Depuis vingt ans, nous travaillons avec nos partenaires historiques [la fondation Bill & Melinda Gates, l’OMS, l’Unicef et la Banque mondiale, auxquels sont venues s’ajouter de nombreuses entreprises privées, NDLR] pour un élargissement maximal de la cou-verture vaccinale mondiale.

Lorsque le Covid-19 a fait son apparitionfin 2019, nous avons tout de suite compris que nous serions impliqués dans l’approvi-sionnement en vaccins des pays en dévelop-pement. Il est par ailleurs devenu très vite évident que nous allions nous retrouver dansla même situation qu’en 2009 [lors de la crisede la grippe H1N1, NDLR] avec tous les stocksde vaccins achetés par un petit nombre de pays riches. Pour éviter cela, nous avons mis sur pied un nouveau dispositif, appelé « Covax ».

De quoi s’agit-il ?Covax est le pilier vaccin de l’Accélérateur d’accès aux outils Covid-19, mis en place dès le début de la crise par les Nations unies. Je tiens à souligner que le président français, Emmanuel Macron, a joué un rôle impor-tant dans son émergence. Covax est un dis-positif à deux branches. La première sou-tient l’accès aux futurs vaccins pour 92 pays, choisis uniquement sur leur statut économi-

que en se basant sur le classement de la Ban-que mondiale. Elle réunit des pays à faibles etmoyens revenus. La deuxième branche regroupe des Etats pouvant s’autofinancer, incluant des pays aux revenus moyens, ainsique les pays les plus riches. A ce jour, 189 pays travaillent sur un mécanisme de partage des vaccins au sein de Covax.

Comment avez-vous procédé jusqu’à présent ?Nous avons commencé en tentant d’évaluer le nombre de doses auxquelles nous pour-rions avoir accès, tout en sachant qu’en 2021 la demande mondiale excéderait les capaci-tés de production. Nous sommes arrivés au nombre de 2 milliards de doses pour l’an pro-chain. Nous les avons réparties à raison de 950 millions de doses pour chacune des deux branches du dispositif. Les 100 millionsrestants serviront de réservoir humanitaire.

Y a-t-il des pays qui n’ont pas intégré Covax ?Les deux grands absents majeurs du disposi-tif sont les Etats-Unis et la Chine. Cuba non plus ne nous a pas rejoints. Certains de ces pays ont fait le choix de ne pas intégrer la structure, mais d’autres n’ont tout simple-ment pas pu à cause de mesures légales les empêchant de se joindre à nous. C’est parti-culièrement vrai pour plusieurs pays d’Amé-rique latine. Nous ne voulons évidemment exclure aucun pays. Ils sont donc tous invitésà nous rejoindre.

Quelles ont été les difficultés pour mettre sur pied ce dispositif ?Il y en a eu plusieurs. D’abord, de nombreux accords bilatéraux avaient déjà été signés, malgré nos efforts pour mettre en place des mécanismes multilatéraux. Cela a accru la pression sur les disponibilités des futures doses. Nous restons toutefois confiants quant à notre capacité à atteindre l’objectif de2 milliards de vaccins en 2021. Un autre défi aété de définir une stratégie commune à autant de pays. A un moment où, en plus,

Certains laboratoires divisent leur prix en trois tiers : un prix pour les pays les plus pau-vres, un autre pour les pays à revenus moyens et un troisième pour les plus riches. Enfin, concernant les coûts de livraison, nous envisageons de partager une partie desfrais avec les différents pays du dispositif.

Un prix « sans but lucratif » signifie-t-il que c’est gratuit ?Aucun vaccin n’est gratuit, nulle part dans le monde. Mais, pour les 92 pays les plus pau-vres, Gavi se propose de subventionner l’achat des doses, s’ils ne peuvent pas payer. Que ce soit à cause de la crise économique ouparce qu’ils ne peuvent pas mobiliser les fonds nécessaires assez rapidement.

Combien de personnes entendez-vous vacciner ?Nous estimons qu’au moins 20 % de la popu-lation mondiale devra être vaccinée. Pour arriver à ce chiffre, nous avons regardé quelle partie serait considérée comme la plus à risque et celle qu’il faut absolument vacciner pour avoir un véritable contrôle surla pandémie. Selon une étude réalisée par Northeastern, on peut réduire le nombre de morts liés au Covid-19 de 60 % si les 2 mil-liards de doses de vaccin sont réparties équi-tablement entre les pays. Ce taux chute à 30 % si on distribue l’intégralité des doses aux seuls 50 plus riches. Cela prouve que l’accès mondial au vaccin est un point critique.

Comment est financée cette campagne vaccinale mondiale ?Nous avons demandé pas moins de 2 mil-liards de dollars à nos partenaires et aux gou-vernements impliqués, uniquement pour lancer le dispositif en 2020. Nous avons à ce jour légèrement dépassé ce montant. Nous cherchons maintenant des fonds pour finan-cer la campagne mondiale de vaccination en2021. Pour cela, 5 milliards de dollars supplé-mentaires sont nécessaires afin d’acheter lesdoses de vaccin souhaitables.

Quelles leçons le monde peut-il retenir de cette année 2020 ?Il est fort probable que, étant donné l’aug-mentation de la population, l’urbanisation massive, le changement climatique, le réchauffement de l’atmosphère…, nous allons connaître de plus en plus d’épidémies de ce genre à l’avenir. Le Covid-19 nous a montré à quel point le monde entier est vul-nérable. Cela prouve la nécessité d’avoir des systèmes de santé résilients.

Par ailleurs, la science a été incroyable-ment réactive. Il faut normalement de sept à dix ans pour développer un vaccin, or, en seulement 303 jours, on a vu les premiers résultats d’efficacité d’un vaccin. Mais cela aurait aussi pu aller encore plus vite. S’il y avait, par exemple, un système internationalpour labelliser et autoriser ces candidats vac-cins. L’OMS se penche actuellement sur ces questions.

Que pensez-vous du phénomène des « antivax » ?Je sais qu’en France il y a un fort niveau de défiance vis-à-vis des vaccins, même si para-doxalement les Français ont toujours conti-nué à se vacciner. Au-delà des « antivax », il ya un phénomène mondial d’« antiscience » en général et d’« antigouvernement ». Tout cela est venu se mêler aux traditionnelles défiances vis-à-vis des vaccins. C’est un vrai problème.

Que peut-on faire face à ce phénomène ?Les réponses sont multiples : donner la parole à des personnes en qui les popula-tions ont confiance, avoir des leaders qui s’engagent pour rassurer les communau-tés... Mais il sera également nécessaire d’êtretout à fait transparent sur les résultats scien-tifiques des essais cliniques, montrer que les données sont là, accessibles. Enfin, nous ne devons pas perdre de vue la nécessité de lut-ter contre la désinformation.

Devrait-on rendre le vaccin obligatoire ?C’est aux pays de déterminer leur stratégie devaccination, et ce n’est pas notre rôle de leur dire comment faire. Cela étant, face à un cer-tain niveau de défiance, je pense qu’il serait plus judicieux de commencer par une cam-pagne basée sur le volontariat.

Avons-nous trouvé le bon équilibre entre la lutte contre le Covid-19 et la poursuite des autres soins ?La balance a parfois un peu trop penché du côté de la gestion de la crise. Par exemple, lorsque nous avons atteint le premier pic de la pandémie, en mars, les consignes généra-les étaient de poursuivre les campagnes de vaccination de routine pour les autres mala-dies encore bien présentes. Or, si les pays ontglobalement continué, ils ont parfois retiré des soignants chargés de ces tâches pour les mettre sur la gestion des cas de Covid-19, ralentissant l’administration des autres vac-cins aux populations.

Quel est votre scénario pour 2021 ? Je pense que l’hiver sera très dur, la plupart des pays n’ayant pas réussi à mettre fin à la chaîne de transmission du virus. Une grandepartie de la population commence à en avoirun peu assez du confinement. Il va pourtant falloir être encore un peu patient. Avec un peu de chance, l’arrivée des premiers vaccinsen cette fin d’année devrait permettre de changer la dynamique de la pandémie. n

Son actualité

Depuis janvier 2020, Gavi est en charge du dispositif Covax. Celui-ci est le pillier vaccin de l’Accélérateur d’accès aux outils de lutte contre le Covid-19, mis en place dès le début de la pandémie par les Nations unies. L’objectif de ce dispo-sitif est d’assurer un accès équitable au traitement pour tous les pays du monde, les plus riches comme ceux en dévelop-pement. Le Dr Seth Berkley et son équipe négocient pour cela des contrats avec tous les laboratoires. Il estime avoir besoin de 2 milliards de doses de vaccin.

Son parcours

Médecin et épidémiologiste spécialisé dans les maladies infectieuses, le doc-teur Seth Berkley a rejoint Gavi, l’Alliance du vaccin, en tant que directeur exécutif en août 2011. Avant cela, ce diplômé de médecine des universités Brown et de Harvard a créé en 1996 l’Initiative inter-nationale pour un vaccin contre le sida (Iavi), le premier partenariat public-privé axé sur le développement de produits vaccinaux. Il a également travaillé au Centre des maladies infectieuses des Centres pour le contrôle et la prévention des maladies (CDC) des Etats-Unis.

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DR SETH BERKLEYDirecteur exécutif de Gavi, l’Alliance du vaccin

« La plupart des pays n’ont pas réussi à briser la chaîne de transmission du virus »

toutes les frontières se refermaient ! Enfin, une des choses qui a pris le plus de temps a été de convaincre les membres d’acheter les doses, ou de les réserver, avant même que lesvaccins soient approuvés.

Comment allez-vous livrer ces vaccins ?Le conseil d’administration de Gavi a donné son accord pour utiliser certaines ressourcesdéjà en possession de l’Alliance afin de répondre à cette problématique. Il a ainsi mis150 millions de dollars de côté avec pour seule condition de commencer en priorité par la livraison des pays les plus pauvres. Cetargent doit servir à deux choses : apporter une assistance technique mais aussi s’assu-rer que la chaîne du froid est bien en place. Les vaccins nouveaux comme celui de Pfizerou de Moderna nécessitent d’être conservés à –70 et –20 °C.

Comment négociez-vous avec les laboratoires pharmaceutiques ?Il faut préciser que Covax est cogéré par Gaviet la Coalition pour les innovations en matière de préparation aux épidémies (Cepi). Son rôle est axé sur la recherche et ledéveloppement. C’est très important car, dèsjanvier 2020, au tout début de l’épidémie, la Cepi a financé des candidats vaccins. Nous possédons donc déjà un portefeuille de dif-férents traitements. Mais nous achetons aussi des vaccins à n’importe quel labora-toire apportant une amélioration à notre arsenal.

Les compagnies pharmaceutiques peu-vent fixer un prix dit « sans but lucratif », fixepour tous les pays. Plusieurs ont choisi cette option pour toute la période de la pandémie.

« Nous estimons qu’au moins 20 % de la population mondiale devra être vaccinée. »

14 // Vendredi 11 et samedi 12 décembre 2020 Les Echos

le grand entretien

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Une entreprise puissante est précieuse. Elle a les moyens d’innover, d’investir, de créer richesses et emplois. Une entreprise trop puissante est dangereuse. En étouffant la concurrence, elle bloque un ressort essentiel de l’économie, constitue des rentes injustes et inefficaces, peut menacer la démocratie. Les autorités américaines estiment que Facebook a franchi la ligne rouge. La Federal Trade Commission (Autorité de la concurrence) et la quasi-totalité des Etats américains accusent le géant des réseaux sociaux de pratiques contraires au libre jeu de la concurrence. Ils veulent obtenir la cession de ses filiales Instagram et WhatsApp, qui renforcent son emprise sur ses utilisateurs. Il est vrai qu’il y a ici un problème majeur. Comme les autres géants numériques, Facebook s’est appuyé sur la valeur de ses actions et les marges dégagées par son activité d’origine pour acheter toute une série de jeunes pousses qui risquaient de lui faire de l’ombre si jamais elles venaient à grandir. Résultat de ces achats prédateurs : la concurrence s’étiole aux

Etats-Unis, comme l’ont montréde nombreux travauxacadémiques – et un livre publiél’an dernier par ThomasPhilippon, un économistefrançais travaillant à New York.Voilà pourquoi les autoritésdemandent la séparation desdifférentes activités deFacebook, que le groupe s’estbien sûr ingénié à intégrer demanière inextricable commel’avait fait auparavant Microsoft.

Le problème est cependantplus profond. Car la puissanced’un Google ou d’un Facebookvient de son réseau. La cessionde filiales n’est qu’un premierpas vers la remise en cause d’unpouvoir excessif. Il faudra allerplus loin. Certains rêvent audémantèlement, comme celuiqui avait éclaté le pétrolierStandard Oil en 34 morceaux il y a plus d’un siècle, ou celui qui avait divisé AmericanTelephone and Telegraph enhuit entités, en 1982.

Mais ce n’est pas la solution. Contrairement au pétrole ou aux télécoms, un réseau numérique est une activité à rendement croissant. Plus nous nous servons du moteur de recherche Google, mieux il travaille. Son éclatement en dix mini-Google entraînerait une baisse inutile d’efficacité. Il va donc falloir inventer un nouvel outil contre les monopoles numériques. Il passera vraisemblablement par l’accès à leurs données. A première vue, cette piste semble impossible. Mais après tout, la directive européenne DSP2 a imposé aux banques l’accès des fintechs à leurs données. Comme l’expliquait l’historien Fernand Braudel, le capitalisme aspire au monopole mais son efficacité passe par l’action des pouvoirs publics pour l’empêcher d’y parvenir. Le capitalisme numérique n’échappe pas à cette règle.

(Lire nos informationsPage 27

L’ÉDITORIAL DES « ÉCHOS »

Premier pas contre les néomonopoles

L’offensive des autorités américaines contre Facebook vise à contraindre le géant américain à céder des activités.

Par Jean-Marc Vittori

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RETOUR SUR LA TERRE FERME Kevin Escoffier a posé le pied à terre à La Réunion, dix jours après son naufrage. Le marin, dont le bateau s’était brisé en deux le30 novembre, est arrivé jeudi matin sur l’île, après avoir été sauvé par un autre concurrent, Jean Le Cam, puis avoir été récupéré par la frégate « Nivôse » il y a quatrejours. Le skipper, qui garde le sourire, vêtu d’une tenue de la Marine nationale, a expliqué qu’il était « partagé entre la déception d’avoir dû abandonner le Vendée Globe »et le fait d’avoir vécu « une belle histoire humaine avec Jean Le Cam [...] et une belle histoire humaine avec les marins sur le “Nivôse” ». Photo Richard Bouhet/AFP

DERNIÈRE HEURE

Liban : le Premier ministre inculpé

'CATASTROPHE – Quatremois après le drame, le jugelibanais chargé de l’enquête

sur l’explosion dévastatrice au port de Beyrouth a inculpé, jeudi, le Premier ministre démissionnaire Hassan Diab et trois ex-ministres pour négligence. L’enquête a confirmé qu’ils avaient reçu « plu-sieurs rapports écrits les mettant en garde contre tout atermoiement pourse débarrasser du nitrate d’ammo-nium », a précisé une source judi-ciaire. Les autorités libanaises auraient arrêté vingt-cinq person-nes, notamment des responsables du port et des douanes.

Le Maroc renoue avec Israël

'DIPLOMATIE – Le Maroca confirmé jeudi qu’il allait « reprendre des relations

diplomatiques » avec Israël « dans les meilleurs délais », et qualifié de « prise de position histo-rique » la décision de Washington de reconnaître la souveraineté marocaine sur le territoire disputé du Sahara occidental. Le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahou a salué jeudi soir un accord de normalisation « histori-que » avec le Maroc et évoqué la mise en place sous peu de « vols directs ». Le Hamas dénonce un « péché politique » .

LFI lance un nouveau réseau social pour soutenir Mélenchon

'POLITIQUE – La Franceinsoumise a lancé un nou-veau « réseau social

d’action » pour la campagne de Jean-Luc Mélenchon en vue de la présidentielle de 2022, baptisé « Action populaire » et « ouvert à toutes les personnes ayant apporté leur soutien » à sa candidature. Le leader LFI avait conditionné sa candidature à une « investiture populaire » de 150.000 personnes. De l’aveu du parti, la création de ce réseau est aussi une manière de compenser la difficulté à faire campagne en temps de Covid.

En soutien aux Ouïghours, Griezman rompt avec Huawei

'FOOTBALL – Le footballeurfrançais Antoine Griez-mann a annoncé jeudi

mettre « un terme immédiat à [son] partenariat » avec Huawei, invo-quant des « forts soupçons » sur la participation du géant des télé-coms chinois à la surveillance de la minorité musulmane ouïghoure par les autorités chinoises. L’atta-quant de Barcelone et des Bleus, qui avait un contrat avec la mar-que depuis 2017, appelle Huawei à « engager au plus vite des actions concrètes pour condamner cette répression de masse ».

«La terrasse» par Antonio Giovanni pour «Les Echos»

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Vendredi 11 et samedi 12 décembre 2020www.lesechos.fr

AVIS FINANCIERCegedim, 25

Vincent Collen @VincentCollen

Un cap symbolique est franchi. Jeudi, le baril de brent a coté plus de 50 dollars, pourla première fois depuis le début du mois de mars, au début de la pandémie. Il était en hausse de près de 4 % en fin d’après-midi, porté par l’espoir d’une diffusion prochainedes vaccins contre le Covid-19 dans un nom-bre croissant de pays. Le baril de WTI amé-ricain était également au plus haut depuis lafin de l’hiver, à plus de 47 dollars.

« Les traders saluent le début des campa-gnes de vaccination d’ici quelques jours aux Etats-Unis et au Canada, écrit Bjornar Ton-haugen, du cabinet Rystad Energy. C’est bien plus rapide que ce qu’on attendait il y a seulement quelques semaines. » Le brent est aussi porté par la perspective d’un nouveauplan d’aide aux ménages et aux entreprises aux Etats-Unis.

Autre stimulus, l’accord signé entrel’Opep et la Russie la semaine dernière. Faceà une consommation qui tarde à repartir, les 23 pays exportateurs ont décidé d’aug-menter leur production dans une propor-tion nettement moins importante que prévu début 2021.

Retour à la normale en IndeLa demande est soutenue en Chine et en Inde, respectivement premier et troisième importateur mondial de brut. Le raffineur Indian Oil estime que la consommation de produits pétroliers est pratiquement reve-nue à la normale en Inde. Au Brésil, la con-sommation de carburants a même dépasséson niveau d’avant la pandémie. Enfin, les cours du brut sont tirés par la faiblesse du dollar, qui rend l’or noir moins cher pour lesgrands pays consommateurs.

L’optimisme des marchés est d’autantplus remarquable que les dernières statisti-

ques sur la demande de pétrole sont loin d’être rassurantes. Aux Etats-Unis, les stocks de brut sont repartis à la hausse, inversant une tendance à la baisse depuis lemois de juillet. Ils ont augmenté de plus de 15 millions de barils en une semaine, un volume qualifié d’« énorme » par les analys-tes de HSBC. Les stocks américains se situent désormais 11 % au-dessus de leur n i ve a u m o ye n d e s c i n q d e r n i è r e s

années. Pénalisée par les mesures de confi-nement, la consommation d’essence faiblit outre-Atlantique.

Des stocks à écoulerLe cours du brent reste encore loin des 70 dollars frôlés en début d’année. Il reste tiraillé entre les bonnes nouvelles sur les vaccins et les mauvaises sur le regain des contaminations en Europe et aux Etats-

JCAC 405.549,65 points0,051 % n

DOW JONES30.010,66 points-0,1934 % J

EURO/DOLLAR1,2118 $0,2897 % J

ONCE D’OR1.844,35 $0,1412 % J

PÉTROLE (BRENT)50,8 $3,7158 %

DEVISES EUR/GBP 0,9116 EUR/JPY 126,384 EUR/CHF 1,0758 GBP/USD 1,3291 USD/JPY 104,304 USD/CHF 0,8878 TAUX EONIA -0,474 LIFFE EURIBOR 3 MOIS -0,545 OAT 10 ANS -0,4324 T-BONDS 10 ANS 0,9389

ÉNERGIE

Amazon 27Apple 27Arriva 22AT&T 28Avions Mauboussin 32BYD 25Canal+ 28CIC 34Crédit Agricole 30Crédit Mutuel 34Crunchyroll 28

Eurorail 22Facebook 27Flixtrain 22Fnaim, 18Foncia 18Fondation Groupe Primonial 25Froilabo 31Funimation Global Group 28Geely 25Google 27

Gorgias 30Hermès 24Instagram 27Laforêt 18McLaren 22Mediapro 28Nodalview 18Renfe 22Saic 25Shang Xia 24SNCF 22

Société Générale 34Sony 28Thello 22Toyota 25Transdev 22WarnerMedia 28WhatsApp 27Whympr 30

= LES ENTREPRISES CITÉES

l’essentiel

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FP

L’ouverture des lignes TGV à la concurrence tourne au fiascoA partir de ce week-end, les concurrents étrangers de la SNCF peuvent légalement inaugurer des lignes TGV domes-tiques en France, mais aucune compagnie ne viendra contes-ter le monopole de l’entreprisepublique. // P. 22

L’appli Whympr à la conquête des passionnés de montagneL’interdiction d’utiliser les remon-tées mécaniques favorise l’essor des autres disciplines, tels l’escalade ou le ski de randonnée. Basée à Chamonix, Whympr veut s’imposer comme un outil de référence à la montagne. // P. 30

Covid-19 : les logisticiens du froid dans les starting-blocks pour transporter les vaccinsLe convoyage de millions de doses de

vaccins est une opportunité pourla chaîne du froid française.

Les acteurs logistiques atten-dent le cahier des chargesde l’Etat. // P. 31

Bruxelles veut imposerdes batteries

électriques « propres »Des critères environnementaux

seront fixés à partir de juillet 2027sur l’ensemble de la chaîne de vie des bat-teries. Les batteries ne respectant pas cesnormes seront « interdites » sur le marchéunique, a prévenu Thierry Breton. // P. 36

Enrique Moreira @EnriqueMoreira

C’est une journée importante pour Pfizer et BioNTech. Tandis qu’un comité d’experts américains indépendants a commencé, jeudi, à examiner les donnéesdu vaccin contre le Covid-19, les résultats de l’essai clinique de phase III de ce mêmetraitement viennent d’être publiés dans le « New England Journal of Medecine », une revue fonctionnant sur le système dit « de relecture par les pairs » et la plus cotée aux Etats-Unis. Mieux encore, deux responsables de la publication y voient un « triomphe » du vaccin, écrivent-ils dans un éditorial.

Efficacité et sécurité confirméesDes propos de bon augure quant à l’avisque rendra le comité d’experts améri-cains. Les conclusions de ce dernierdoivent permettre à l’agence de santéaméricaine (FDA) de rendre sa déci-sion sur la demande d’autorisation

CORONAVIRUS

Le pétrole repasse la barre symbolique des 50 dollars le baril

Unis, relèvent les analystes de la banque MUFG. La poursuite de la hausse des prix « demandera de la patience, étant donné l’importance des stocks qui mettront du tempsà être écoulés sur le marché », préviennent-ils.

La demande planétaire est encore bieninférieure à la normale. Elle s’établirait actuellement à 92 millions de barils par jour, estime MUFG, soit encore 7,5 % de moins qu’à la même époque l’an dernier. n

En fin d’après-midi jeudi, le baril de brent s’échangeait à 50,80 dollars, en hausse de près de 4 %.

Sharon Wajsbrot @Sharonwaj

Comme un air de déjà-vu. Face aux diffi-cultés d’Areva SA, l’ancien holding du champion du nucléaire devenu sa structure de défaisance, chargée d’achever la construction du réacteur EPR vendu au finlandais TVO, l’Etat doit à nouveau jouer les pompiers. Selon nos informations, le gouverne-ment a validé le principe du rachat d’une partie des titres qu’Areva SA détient au capital d’Orano pour lui évi-ter d’entrer en cessation de paiements dès le printemps prochain.

« L’Etat est d’accord sur le principesous réserve qu’un nouvel accord soittrouvé avec les Finlandais », expliqueune source proche d’Areva. Dansles détails, l’Etat pourrait racheterjusqu’à 16 % des titres qu’Areva SAdétient au capital d’Orano pourune valorisation comprise entre600 et 800 millions d’euros. « Lesdiscussions sur la valorisation deces titres, comme les discussionsavec les Finlandais, sont toujoursen cours », précise cette source.

Pour Areva SA, il y avait urgence.Empêtré dans son chantier finlandais,que beaucoup considèrent désormais comme un fiasco industriel, le groupe risque, comme l’a révélé « Le Canard enchaîné », la cessation de paiements dès le mois d’avril prochain. En cause :le nouveau report de mise en service de ce réacteur annoncé au printemps dernier à cause de l’impact du Covid-19et, surtout, de nouveaux problèmes techniques. Ce énième aléa a fait à nou-veau exploser la facture de ce chantierqui a plus de dix ans de retard. L’accordconclu en 2018 entre Areva et son client, l’électricien TVO, prévoyait d’importantes pénalités en cas de nou-veaux retards. Outre le versement de 450 millions d’euros d’Areva à TVO, il fixait à 20 millions d’euros les pénali-tés par mois (dans la limite de 400 mil-lions d’euros) si le réacteur n’était pas mis en service à partir du 1er janvier 2020. « Le calendrier de cet accord est obsolète, comme ses clauses de sanc-tions, il faut le renégocier », indique unesource chez Areva.

Grâce à ce transfert de titres, ArevaSA espère pouvoir couvrir les coûts de l’achèvement de son chantier finlandais, prévu désormais pour février 2022. Pour l’Etat, principal actionnaire d’Areva SA, il n’y avait pas vraiment d’autres solutions. L’entrée enBourse d’Orano, explorée ces derniers mois, aurait pu permettre à Areva SA de se renflouer, car ce dernier détient 40 % du capital du spécialiste du retrai-tement du combustible nucléaire. Toutefois l’opération est loin d’être évidente. Par ailleurs, une recapita-lisation directe d’Areva SA par les pou-voirs publics aurait été incompatible avec le droit européen. n

Nucléaire :l’Etat porteà nouveau secours à ArevaÉNERGIE

Pour l’Etat, principal actionnaire d’Areva SA, il n’y avait pas vraiment d’autres solutions.

d’utilisation d’urgence déposée parPfizer et BioNTech.

Les résultats publiés par la revue scien-tifique confirment l’efficacité du vaccin. Les participants vaccinés avaient 95 % de risque en moins de contracter le Covid-19.Surtout, l’efficacité était similaire quels que soient l’âge, le sexe, l’origine ethnique,le poids ou la présence de pathologies. A la mi-novembre, les deux laboratoires avaient annoncé les mêmes résultats dans un communiqué de presse. La com-munauté scientifique avait alors appelé à la prudence en l’absence des données complètes. Cette fois, tout y est. Et même si les responsables de la revue reconnais-sent des « problèmes mineurs » dans les données, ils estiment que « les résultats del’essai sont suffisamment impressionnantspour rester valables ».

Reste toutefois des questions en sus-pens auxquelles seul le temps pourra répondre : combien de temps le vaccin sera efficace ? Des problèmes de sécurité apparaîtront-ils au cours d’une campagneà grande échelle ? Ou encore, l’inconnue sur la capacité du vaccin à prévenir les for-mes asymptomatiques de la maladie. n

Les résultats du vaccin de Pfizer-BioNTech publiés dans une revue scientifique

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AFP

Page 18: Les Echos - 11 12 2020

« Le marché de l’immobilier de luxe se porte étonnamment bien ! » Tel est le constat dressé par Alexander Kraft, directeur général de Sothe-by’s International Realty pour la France et Monaco. « Lors du pre-mier déconfinement au printemps, ily a eu une véritable vague d’activité. L’été est resté très actif un peu par-tout en France. Nous avons même rattrapé les deux mois d’inactivité et en septembre, nous étions en train dedépasser les résultats de 2019 », se félicite-t-il.

En novembre, le second confine-ment a ralenti le mouvement. Maisil n’a pas eu le même impact que le premier, car les signatures chez le notaire ont toutes pu être mainte-nues et le réseau avait eu le temps de se roder à l’organisation de visi-tes à distance. « Depuis la reprise desvisites physiques [le 28 novembre, NDLR], nous avons vu déferler une nouvelle vague. Nous avons plein de transactions dans les tuyaux et je crois que la fin 2020 sera la fin d’année la pus active que nous ayonsconnue depuis vingt ans », poursuit Alexander Kraft. Il prévoit même de dépasser en 2020 les performan-

ces secondaires à la campagne ou en bord de mer.

Le segment du très haut degamme – les biens à un tarif supé-rieur à 20 millions d’euros – sur lequel les clients étrangers surtoutnon européens sont traditionnel-lement plus nombreux, connaît, lui, quelques difficultés. « La clien-tèle moyen-orientale est toujours présente. Nous voyons aussi quel-ques Africains. Mais il n’y a plus d’Asiatiques, et surtout les Améri-cains, qui sont les clients principauxpour l’ultraluxe, ont disparu », indi-que Charles-Marie Jottras.

« Les Américains sont absents.Mais nous avons quand mêmequelques acheteurs français – sou-vent des entrepreneurs de la tech –des Chinois de Hong Kong, desQataris, des Mexicains, des Suisses.Nous avons même eu des Japonaisqui nous ont acheté trois apparte-ments sur simple visite virtuellepour un investissement locatif »,raconte Sébastien Kuperfis. Iladmet cependant que le nombrede mandats pour ce type de biensa diminué, certains vendeursayant préféré reporter leur projet.

Sur le segment intermédiaire– les transactions de 5 à 20 mil-lions – les Français ont pris le relaisdes étrangers. « Notamment pour les biens situés sur la côte d’Azur ou àla montagne – Courchevel, Méri-bel… – pour lesquels justement ils nesont plus en concurrence avec les

Une excellente année pour le haut de gammeLe secteur du luxe devrait enregistrer une très bonne année 2020, en dépit de la crise sanitaire. Les Français ont pris le relais des étrangers, sauf sur le segment de l’ultraluxe.

permettre de réaliser une pre-mière sélection de biens. « Elles sont particulièrement utiles en amont pour nos clients pressés et qui ont une vision très précise de cequ’ils désirent. Elles servent aussi p o u r l e s re v i s i t e s » , s o u l i -gne Yann Jéhanno.

Meilleur taux de conversionLors du récent congrès de la fédération des agents immobi-liers Fnaim, Thomas Lepelaars, dirigeant de Nodalview, entre-prise proposant des solutions devisites virtuelles, expliquait que ces dernières « permettent de pré-qualifier un projet, et d’augmenter la qualité et le taux de conversion des visites physiques. Les proprié-taires sont aussi moins ennuyés et, avec moins de passages, il y a moinsde risque que le logement soit mal rangé, ce qui permet aux profession-nels de présenter le bien sous son meilleur jour ».

Pour les agents immobiliers,c’est également un gain de temps pour prospecter. Sauf à préférer à la simple visite virtuelle – avec un a s s e m b l a g e d e p h o t o s à 360 degrés – ou à la vidéo une « visiovisite ». Dans ce dernier cas,l’agent immobilier est sur place etguide le visiteur à distance via un système de visioconférence. « Le client peut lui demander d’ouvrir une fenêtre pour se rendre compte du bruit dans la rue ou un placard pour en observer la profondeur. C’est encore plus intéressant », estime le président de Laforêt. Pour lui, visites virtuelles et visio-visites vont désormais « s’insérer dans le parcours client ». D’ailleurs,même la clientèle de l’immobilier de luxe s’y est mise. Les futurs locataires et les acheteurs passe-ront, selon leurs besoins, du réel au virtuel. Hormis quelques récal-citrants qui continuent à ne jurer que par la visite physique. — E. Di.

Les visites virtuelles d’apparte-ments et de maisons ne sont plus anecdotiques. La crise sanitaire etles deux confinements, durant lesquels les visites physiques ont été momentanément à l’arrêt, leuront donné un coup d’accélérateur.Une transformation de la façon detravailler des agents immobiliers est même à l’œuvre – alors que cette pratique en laissait jusqu’à présent certains sceptiques. « Nos agences sont désormais, peu ou prou, toutes équipées pour faire de la visite virtuelle. Et de 50 % à 60 % disposent d’équipements très poin-tus », estime Yann Jéhanno, prési-dent de Laforêt.

Locations bouclées à distance« Toutes nos annonces en ligne auront leur visite en 3D dès le cou-rant de l’année prochaine », indiquede son côté celui de Foncia, Phi-lippe Salle. Le dirigeant se félicite d’être déjà parvenu à boucler à dis-tance un certain nombre de loca-tions cette année, en particulier pour de petites surfaces. « Désor-mais, une partie du marché va pou-voir se faire sans visite physique. Il yaura bien un avant et un après crisedu Covid-19 », affirme-t-il.

Pour une acquisition immobi-lière, la visite sur place reste encore incontournable. « Il s’agit quand même d’un acte de vie. Et l’acheteur a besoin de sentir les lieux », poursuit Philippe Salle. Mais les visites virtuelles peuvent

La visite virtuelle et la visite en visioconférence viennent bousculer les habitudes de travail des agents immobiliers. Elles permettent une présélec-tion des biens, même si, au moins dans le cas d’un achat, la visite physique reste incontournable.

Avec les confinements, les visites virtuelles ont pris leur envol

res des notaires du Grand Paris, le marché commence peut-être aussi à se réguler » après l’euphorie de 2019.

Côté prix, la hausse sur un an, à lafin septembre, atteint 6,5 % pour lesappartements et 4,2 % pour les mai-sons. S’agissant des appartements, les projections pour le quatrième trimestre laissent présager d’une poursuite de la hausse, plus pro-noncée en province (+7,1 %) qu’en région parisienne (+6,1 %). La hausse du prix des maisons attein-drait 5,8 % en Ile-de-France, et 6,1 %en régions.

Prix en hausse dans toutes les grandes villesLes prix ont augmenté dans toutes les grandes villes de France. Avec des hausses spectaculaires à Rennes(+14,4 % sur un an), Nantes (+13,2 %)ou Lyon (+10,6 %). A Paris, la hausse s’est établie à 7,6 %. L’évolution plus modérée à Bordeaux (+2,2 %) inter-vient après plusieurs années de forteaugmentation. Résultat : le pouvoir d’achat immobilier des Français est partout en baisse.

Le premier confinement n’a pasprovoqué d’« exode urbain », note Frédéric Violeau. Mais il admet que certaines régions, en particulier proches de l’Ile-de-France, ont profité de la recherche de verdure et d’espace de certains citadins. C’est le cas de la Norman-die, du Centre-Val de Loire et de la Bourgogne-Franche-Comté. La baisse des locaux parmi les acqué-reurs de maisons y a atteint 3 pointspour la première et deux pour les deux autres. Les départements de l’Yonne (+9 points), de l’Eure et de l’Orne (+6 points chacun) se sont avérés particulièrement prisés.

Finalement, si le marché du loge-ment ancien se porte bien, c’est qu’ilreste « un marché d’utilisateurs, que la volonté des Français d’accéder à lapropriété est toujours forte, que l’attrait de la pierre demeure et que le

crédit immobilier reste peu cher », a conclu Frédéric Violeau, même s’il a constaté que les conditions d’accès au crédit s’étaient durcies ces derniers mois. « Le relatif main-tien des volumes sur les avant-contrats augure d’un premier tri-mestre 2021 relativement solide », a-t-il ajouté.

Mais, a-t-il prévenu, « le marchéde l’immobilier ne pourra rester éter-nellement décorrélé d’une crise éco-nomique qui deviendrait endémi-que ». Autrement dit, la résistance constatée aujourd’hui ne durera peut-être pas indéfiniment… n

l Le marché du résidentiel ancien n’a baissé que de 5 % sur un an à la fin septembre 2020, selon les notaires.l Les prix sont en hausse de 6,5 % pour les appartements, et de 4,2 % pour les maisons.

Immobilier : le marché du logement résiste pour l’instant à la crise

Elsa Dicharry @dicharry_e

La crise sanitaire n’aura affecté que faiblement le marché de l’immobi-lier résidentiel ancien en France en 2020. Selon les chiffres des notairespubliés jeudi, le nombre de transac-tions n’a baissé que de 5 % sur un anà la fin septembre, à 990.000. Sachant que 2019 avait été une année exceptionnelle.

« On ne peut que constater la rési-lience remarquable du marché », a commenté Frédéric Violeau, prési-dent de l’Institut notarial de droit immobilier (Indi). Après un démar-rage de l’année en fanfare, le pre-mier confinement a marqué un coup d’arrêt brutal à l’activité. Mais, juste après, de la mi-mai à la mi-août, l’effet de rattrapage a été spec-taculaire. Puis l’activité a repris son rythme de croisière. Y compris lors du confinement de novembre, moins strict que le premier, au coursduquel les offices notariés ont pu rester ouverts, et les déménage-ments été autorisés. La signature des actes à distance a aussi été pérennisée.

Début de régulation après l’euphorie de 2019Les notaires notent néanmoins que la baisse du nombre de transactionssur un an s’est accentuée au fil des mois : elle était de 0,7 % à la fin juin, de 3,7 % à la fin juillet, de 4,6 % à la finaoût et donc de 5 % à la fin septem-bre. Selon les projections établies sur la base des avant-contrats signés, à la fin décembre, la réduc-tion devrait atteindre 8 % sur un an.« La décélération constatée ne peut être imputée exclusivement à la crise sanitaire, tempère cependant Elo-die Frémont, membre de la com-mission des statistiques immobiliè-

IMMOBILIER

« La volonté des Français d’accéder à la propriété est toujours forte, l’attrait de la pierre demeure et le crédit immobilier reste peu cher. »FRÉDÉRIC VIOLEAUPrésident de l’Institut notarial de droit immobilier

acheteurs étrangers qui ont tendanceà surenchérir », assure Alexander Kraft. « Nous avons programmé de nombreuses visites en janvier pour des clients étrangers », note en outrele patron de Junot. D’une manière générale, le premier trimestre 2021 s’annonce encore très dynamique pour l’immobilier de prestige. D’autant qu’en cette période d’incertitudes, la pierre est une valeur refuge pour les clients fortu-nés. — E. Di.

« Les Américains sont absents. Mais nous avons quand même quelques acheteurs français – souvent des entrepreneurs de la tech – des Chinois de Hong Kong, des Qataris, des Mexicains, des Suisses... »SÉBASTIEN KUPERFISDirecteur général de Junot Immobilier

ces de 2019. Sébastien Kuperfis, le directeur général de Junot Immo-bilier, spécialiste des biens haut de gamme basé à Paris et Neuilly-sur-Seine, table, de son côté, sur un nombre de transactions en 2020 identique à celui de 2019. Mais « avec un chiffre d’affaires en haussede 20 % du fait de l’augmentation desprix et du panier moyen ». Il note unrééquilibrage du marché parisien, avec moins d’acheteurs qu’aupara-vant, mais davantage de vendeurs. « Nous n’avions jamais eu autant de biens à vendre », assure-t-il.

Le président de Daniel Féau,Charles-Marie Jottras, est moins dithyrambique. Il anticipe une baisse de 13 % ou 14 % du nombre detransactions sur l’année du fait de lacrise sanitaire. En dépit d’un mois de décembre qui « s’annonce fort ». Les ventes à Paris ont été un peu plus difficiles dans son réseau. « Notre agence d’Aix-en-Provence a très bien marché cette année, note-t-il en revanche. Nous avons vendu beaucoup de propriétés de 2 à 3 mil-lions d’euros en Provence à des Pari-siens. » Dans l’ensemble, les profes-sionnels du secteur constatent un net engouement pour les résiden-

Le premier trimestre 2021 s’annonce encoretrès dynamique.

ENTREPRISES Vendredi 11 et samedi 12 décembre 2020 Les Echos

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20 // ENTREPRISES Vendredi 11 et samedi 12 décembre 2020 Les Echos

fabrication de whisky, les Français en sont les plus gros consomma-teurs au monde.

Nombreux sont d’ailleurs ceuxs’étant lancés dans l’aventure. Ainsi, on ne recense pas moins de 85 dis-tilleries à ce jour dans l’Hexagone. Une myriade de petites entreprises familiales, éparpillées sur l’ensem-ble du territoire, plutôt haut de gamme. Toutes jouent la carte de l’identité régionale. La pionnière et la plus grosse, Warenghem (Armo-rik), est née en 1983, à Lannion en Bretagne. Elle emploie 13 salariés et produit 250.000 bouteilles, essen-tiellement pour le marché domesti-que où il s’en consomme au total quelque 200 millions chaque année,selon le président de la Fédération française du whisky, Philippe Jugé. Trois régions comptent chacune une bonne dizaine de distilleries, la Bretagne, l’Alsace et l’Occitanie.

Servi en exclusivité à la table de l’Elysée« Les spiritueux sont une industrie demarques dans laquelle il est difficile de se lancer à l’international avec des petits moyens », constate ce respon-sable. La production française n’en est pas moins riche d’une extrême diversité. « Chaque whisky est très différent des autres », dit Philippe Jugé. Les Bienheureux ont voulu y apporter leur touche personnelle enlançant le premier triple malt trico-lore, fruit d’un assemblage prove-nant de trois distilleries différentes : l’une en Alsace, une autre dans le Nord – dont Les Bienheureux ont racheté le stock – et la troisième prèsde Cognac. A la différence des autresqui insistent sur leur origine locale, ce whisky se veut d’abord français. Une signature qui devrait susciter l’intérêt à l’étranger, où Les Bienheu-reux entendent se faire connaître. « Les whiskies français commencent à être connus en dehors des frontiè-res », assure Philippe Jugé.

La gamme de triple malt Belle-voye s’est ouvert les portes de l’Ely-sée, où elle a le privilège de l’exclusi-

vité. Tout comme sur les vols La Première et classe Affaires d’Air France. Le chiffre d’affaires des Bienheureux a doublé en deux ans à10 millions d’euros. L’entreprise bordelaise, qui s’appuie sur le savoir-faire des grands crus du Bor-delais en matière d’élevage et d’assemblage, lance un coffret de trois whiskies vieillis en fût de chêne, en barrique de calvados ou en barrique de vieille prune. Et pourcontinuer de surprendre, Les Bien-heureux vont d’ici à quelques jours commercialiser un mélange déton-nant de rhum (70 %) et de cognac (30 %). Sous la marque Thoreau, dunom du philosophe américain connu pour une forme d’excentri-cité et de désobéissance. n

Bellevoye, symbole du dynamisme des whiskies françaisl Les Bienheureux ont créé les premiers whiskies français « triple malt » sous la marque Bellevoye.l En deux ans, l’entreprise bordelaise s’est hissée au premier rang de ce marché en termes de chiffre d’affaires, raflant neuf médailles d’or lors des concours internationaux.

du pays replient leurs budgets mar-keting. La bouteille de Hibiki 17 ans d’âge se brade alors à 9.200 yens (73 euros) à Tokyo.

Flambée des prixA la fin 2020, quelques chanceux peuvent encore espérer trouver la même bouteille à 60.000 yens (475 euros) dans la capitale nip-pone. La plupart des bars spéciali-sés sont, eux, en rupture de stock depuis que le groupe Suntory, sub-mergé par la demande, a suspendu la vente de son alcool vedette pour propulser des mélanges plus jeu-nes. En une décennie, le whisky japonais a orchestré une entrée fra-cassante sur la scène mondiale. « C’est une conjonction de facteurs », explique Liam McNulty, un expert basé à Tokyo, animateur de la plate-forme Nomunication. « Il y a eu les récompenses remportées, à la fin des années 2000, par plusieurs whiskys japonais dans des concours interna-tionaux mais aussi l’influence de JimMurray », détaille le spécialiste. Dans l’édition 2015 de sa « Whisky Bible », le critique anglais donne à un single malt de Yamazaki vieilli en fût de cerisier le titre de « meilleur whisky de l’année ».

Cette « victoire » fait flamber leprix de la bouteille et convainc les aficionados en Europe et aux Etats-Unis de goûter enfin aux produc-tions nippones, qu’ils avaient jus-

de production, plusieurs petites entreprises se sont lancées récem-ment sur le marché en profitant d’un cadre réglementaire très laxiste. Rien ne définissant claire-ment l’appellation « whisky japo-nais », ces sociétés importent en masse des whiskies bon marché duCanada ou des mélasses qu’elles remettent en bouteille dans l’archi-pel avant de les écouler à l’étranger sous la prestigieuse étiquette « Japanese Whisky ».

Plus fort que le sakéUne pratique que dénoncent de plus en plus d’acteurs japonais. A latête de ce mouvement de résistance,M a m o r u Ts u c h i ya , l ’u n d e s meilleurs historiens du whisky japonais, vient de proposer au gou-vernement de mettre en place des règles plus strictes qui obligeraient les fabricants à distiller au Japon ouà vieillir leurs produits localement.

« Cela pourrait éventuellementinterpeller les autorités qui ont sur-tout été intéressées jusqu’ici par les impôts payés par les producteurs », suggère l’animateur de Nomunica-tion. Il remarque que la valeur des exportations de whisky japonais va dépasser pour la première fois, sur 2020, la valeur des ventes de saké à l’étranger. Une performancequi pourrait convaincre Tokyo d’enfin protéger l’intégrité du whisky japonais. n

Le whisky japonais débordé par son succès

Yann Rousseau @yannsan

—Correspondant à Tokyo

Bill Murray n’y est pour rien. Lors-qu’il interprète, en 2003, dans « Lostin Translation », un acteur améri-cain désenchanté, invité à Tokyo à jouer dans une publicité pour le whisky Suntory, les producteurs de single malt japonais sont au plus mal. Ils n’exportent presque pas, et leurs ventes dans le pays ne cessentde reculer. Les plus jeunes généra-tions préférant les alcools blancs, les vins occidentaux et les canettes de chuhai (du shochu mélangé à del’eau pétillante) bon marché.

Selon les autorités fiscales, lepays ne boit plus, au début des années 2000, que 150.000 litres de whisky par an, très loin du pic de consommation de 408.000 litres enregistré en 1983. Des distilleries ferment, et les grands producteurs

Longtemps moquées en Occident, les productions japonaises connaissent un succès spectaculaire depuis une dizaine d’années.Les grandes distilleries, comme Suntory et Nikka, ne parviennent pas à répondre à la demandeet de petites sociétés en profitent pour écouler de « faux » whiskies japonais.

Marie-Josée Cougard @CougardMarie

« Le whisky, c’est de la bière distillée ». La formule risque d’en choquer plus d’un, et elle en dit longsur l’esprit qui règne chez Les Bien-heureux, dont les cofondateurs, Alexandre Sirech et Jean Moueix, marient un discours volontiers provocateur avec la liturgie des grands crus. L’entreprise bordelaises’est lancée dans la production du whisky français en 2018, sous la marque Bellevoye, après avoir testé 150 whiskies dans le monde et fait travailler son département de recherche et développement pendant deux ans.

Depuis, Les Bienheureux, quifont aussi le rhum El Pasador de Oro, un gin français bio et des vins iconoclastes, ont raflé l’or dans les plus grands concours à Paris, Bruxelles, Londres, Madrid, San F r a n c i s c o … r e m p o r t a n t 40 médailles, dont neuf pour les whiskies. Un record mondial dans le secteur.

Les atouts français« On a longtemps laissé les Ecossais dire que c’était la pureté de l’eau qui faisait la qualité du whisky », dit, nonsans ironie, Alexandre Sirech. « Mais ce qui compte, c’est la maîtrisedu brassin », affirme-t-il. En clair, le contenu de la cuve dans laquelle onbrasse. Une conviction qui a con-duit les deux associés à détenir, depuis un an, à la fois brasserie et distillerie afin de mener à bien l’éla-boration du whisky Bellevoye. Car la France, à la différence de l’Ecosse,dispose de la matière première en abondance, comme plus gros pro-ducteur de malt dans le monde. Ellebénéficie aussi d’une industrie de latonnellerie prospère. Et s’il fallait un argument de plus pour encoura-ger les candidats à se lancer dans la

SPIRITUEUX

David Barroux @DavidBarroux

Le hasard est parfois cruel, mais ilpeut aussi bien faire les choses. Lorsque, au lendemain de la crise économique et financière de 2008, Eric Cordelle se retrouve au chômage, il n’a qu’une ambition : se relancer « en fabriquant quelqueque chose ». L’ingénieur était ban-quier, il veut devenir entrepreneuret créer. Est-ce parce que, enfant, la chimie et les alambics le pas-sionnaient ? Est-ce parce qu’il a vécu dans un Japon qui a prouvé que les Ecossais et les Irlandais n’avaient pas le monopole du whisky ? Ou est-ce juste parce queson épouse, Anne-Hélène, lui en asoufflé l’idée ?

C’est sans doute un peu tous cesingrédients réunis qui vont faire que, finalement, il y a presque unedizaine d’années, les Cordelle se lancent un défi fou : eux qui, à partun grand-père bouilleur de cru, n’ont aucun lien avec le monde de l’alcool décident de produire un whisky made in France.

Le pari n’est cependant pastotalement insensé. « Le whisky est le spiritueux le plus consommé en France. On en achète plus de 210 millions de bouteilles par an. Il y a donc un véritable marché, et on peut produire toute l’année », expli-que Eric Cordelle, qui, pour réus-sir son aventure entrepreneu-riale, ne se précipite pas. « La clé, c’était de commencer par trouver une bonne source d’eau, et on vou-lait aussi un beau lieu qui puisse être ouvert au public. On a donc misle temps avant de trouver une ancienne ferme sur les contreforts du Vercors, à Saint-Jean-en-Royans », se souvient-il. Et pour sedifférencier sur un marché bien occupé, les Cordelle vont faire plu-

Ancien banquier,Eric Cordelle et son épouse se sont installés dans le Vercors pour lancer un whisky bio haut de gamme, distillé à basse température.

Le Vercors défie l’Ecosse

qu’alors moquées. Initié à la boissonen 1853 par le commodore Mat-thew Perry, venu d’Amérique pour forcer l’archipel, alors isolé, à ouvrirdes relations diplomatiques et com-merciales avec l’Occident, le Japon a allumé ses premières distilleries en 1923, suivant des techniques écossaises.

Une poignée de grands acteurscomme Suntory et Nikka y produit des alcools de qualité mais essen-tiellement destinés aux « sala-rymen » cherchant une boisson bon marché, à partager avec des collègues à la sortie du bureau. « Cessociétés ont donc été surprises par la soudaine envolée de la demande à l ’ international , souffle Liam McNulty. Comme il faut entre cinq etdix ans de vieillissement en fût pour un whisky premium, elles n’ont aujourd’hui pas assez de réserves et doivent maintenant investir massi-vement dans de nouvelles distilleries pour se mettre à niveau. » Alléchées par cette nouvelle aura et ce déficit

La date

1923Cette année-là, le Japon allume ses premières distilleries, suivant des techniques écossaises.

« On a longtemps laissé les Ecossais dire que c’était la pureté de l’eau qui faisait la qualité du whisky. Mais ce qui compte, c’est la maîtrise du brassin. »ALEXANDRE SIRECHCofondateur des Bienheureux

sieurs choix stratégiques. D’abordcelui d’être 100 % bio, ce qui reste encore très rare sur le marché du whisky, et ensuite de pratiquer une distillation à basse tempéra-ture. « Comme dans la cuisine, les cuissons lentes permettent de libé-rer des arômes, de donner de la ron-deur », détaille l’ingénieur, qui va dessiner lui-même son alambic.

« Ce métier, c’est l’école de lapatience », remarque celui qui, après des années de préparation etd’investissement, a commencé à produire il n’y a que quatre ans. Etcomme, pour avoir le droit à l’appellation « whisky » en France,il faut laisser vieillir en fût au moins trois ans, c’est seulement depuis cette année que le whisky Séquoia, produit par la Distillerie du Vercors, est véritablement commercialisé. « Jusque-là on ven-dait des ’’pure malt’’, ce qui a permisde commencer à nous faire connaî-tre auprès des cavistes », explique

l’entrepreneur. Pour sa promo-tion, il peut aussi s’appuyer sur desaficionados qui savent repérer les nouveautés et ont noté ce nouvel acteur tout auréolé de deux médailles d’or au prestigieux con-cours mondial de spiritueux de Bruxelles. La production reste pour l’instant relativement faible (autour de 10.000 bouteilles). « On pourrait faire cinq à dix fois plus, mais mieux vaut monter en puis-sance progressivement », estime Eric Cordelle. D’autant que l’acti-vité consomme beaucoup de cash,car il faut produire et stocker pen-dant des années avant de vendre. L’avantage étant que ce qui n’est pas vendu aujourd’hui aura sans doute plus de valeur dans quel-ques années. n

En France, pour avoir le droit à l’appellation « whisky » , il faut laisser vieillir en fût au moins trois ans.

La France, à la différence de l’Ecosse, dispose de la matière première en abondance, en tant que plus gros producteur de malt dans le monde. Elle bénéficie aussi d’une industrie de la tonnellerie prospère. Photo Bellevoye

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Certains lientleur destin à une

fondation à AmsterdamNous lions le nôtre àl’Accord de Paris

Le 12 décembre 2015, 195 pays prenaientdes engagements sans précédent contre lamenace des changements climatiques en

adoptant l’Accord de Paris.Cinq ans après, Veolia crée un championmondial pour développer les solutionsles plus innovantes au service de la

transformation écologique.Et c’estànouveauenFrancequeça sepasse.

Pour en savoir plus : global-champion.veolia.com

#TogetherForOurPlanet #ParisAgreement

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22 // ENTREPRISES Vendredi 11 et samedi 12 décembre 2020 Les Echos

company »), ces véhicules un peu particuliers qui sont des coquilles vides sans activité opérationnelle et dont l’objet est de réaliser une ou plusieurs acquisitions.

McLaren a en tout cas pris langueavec au moins une d’entre elles, basées aux Etats-Unis, a indiqué au « Financial Times » Mike Flewitt, le patron de la branche automobile duconstructeur, qui représente 80 % de son activité. Afin de lever dans lesmois qui viennent 300 à 500 mil-lions de livres en actions, il dit aussi considérer, « sans vouloir exclure personne », de possibles investisse-ments venant « de particuliers, de groupes familiaux, de fonds souve-rains et de fonds de private equity ».

Des ventes en baisse de 60 %Le groupe a souffert de la crise sani-taire. Il a annoncé en mai la suppres-sion de 1.200 postes, soit un quart deses effectifs, et levé en juillet 150 mil-lions de livres de dette supplémen-taire auprès de la Banque nationale du Bahreïn, alors qu’il risquait

d’arriver à court de trésorerie. Ses ventes ont reculé de plus de 60 % surles neuf premiers mois de l’année, à 389,2 millions de livres, et ses pertesavant impôt se sont creusées, à 312,9 millions, contre 68,2 millions sur la même période de l’an dernier.

Parmi les autres scénarios àl’étude pour réduire une dette qui atteignait à la fin du troisième tri-mestre 661 millions de livres, le groupe cherche à vendre son siège de Woking, au sud-ouest de Lon-dres, tout en continuant à le louer. Ilpourrait aussi imposer une cure d’amaigrissement à sa division McLaren Applied, qui vend sa tech-nologie à des tiers, ou bien céder unepart minoritaire dans son équipe decourse automobile.

McLaren, qui ne dispose d’aucunpartenariat avec un plus grand constructeur, ne peut compter que sur lui-même pour investir en R&D.Il vient notamment d’investir près de 400 millions de livres dans le futur moteur hybride qui doit rem-placer, d’ici à dix ans, ses actuels moteurs essence. n

Alexandre Counis @alexandrecounis

— Correspondant à Londres

Toutes les options sont désormais ouvertes chez McLaren. Durement éprouvé par les dégâts collatéraux de la pandémie de Covid-19, le constructeur britannique de voitu-res de sport cherche à lever 500 mil-lions de livres en capital afin de se refinancer. Parmi les pistes sur la table figure notamment celle d’une introduction en Bourse, qui passe-rait d’abord par la fusion avec une SPAC (« special purpose acquisition

AUTOMOBILE

Le constructeur de voitures de sport examine de possibles investissements venant de particuliers, de groupes familiaux, de fonds souverains et de fonds de private equity.

McLaren cherche à lever 500 millions de livres

échanges avec tout opérateur inté-ressé sans attendre la réalisation des formalités administratives », dit-on au sein de la société.

Cependant, cette activité sur leslignes dites « en open access » reste jalonnée de nombreuses barrières à l’entrée, qui demandent une notifi-cation formelle dix-huit mois avant

de lancer les premiers trains. « Si un opérateur décide de venir avec du matériel qui ne respecte pas nos règlesde sécurité ou de lecture de la signali-sation, ça ne peut pas marcher », dit-on à l’Autorité de régulation des transports (ex-Arafer), qui reçoit lesnotifications formelles. En outre, la SNCF avait bien bétonné son pré carré, en segmentant sa tarification entre trains classiques InOui et low cost Ouigo. Surtout, la crise sani-taire n’a rien arrangé aux yeux des candidats, le trafic affaires du TGV ayant largement disparu, même surles axes réputés les plus rentables.

Thello et Renfe toujours sur les rangsCependant, la messe n’est pas dite. Le week-end des 12 et 13 décembre n’est pas une date butoir, « mais seulement l’ouverture d’une possible fenêtre », selon plusieurs sources. Defait, si Flixtrain a retiré son dossier àce stade, Thello et Renfe sont loin d’avoir définitivement abandonné, selon nos informations. Le premier, filiale de Trenitalia, voulait au départlancer dès juin 2020 ses TGV « Frec-ciarossa » sur la ligne Paris-Lyon-Milan, avec possibilité de vendre desbillets sur Paris-Lyon uniquement. Actuellement, il semble toujours

Feu vert à la recapitalisation de la SNCFLa SNCF va pouvoir être recapitalisée à hauteur de 4,05 milliards d’euros, selon un arrêté publié au « Journal officiel » jeudi qui autorise l’Etat à souscrire à l’opération, conformément au plan de relance annoncé en septembre dernier. Ces 4 milliards sont destinés au réseau, avec en particulier 2,3 milliards permettant de poursuivre les travaux prévus. Le gouvernement avait indiqué que le groupe public allait bénéficier de 4,7 milliards d’euros dans le cadre de son plan de relance, dont 4,05 milliards de recapitalisation, le reste allant notamment aux petites lignes, au fret et aux trains de nuit. « L’Etat conserve l’intégralité du capital social de la société nationale SNCF », est-il précisé dans l’arrêté.

ENTENDEZ-VOUSL’ÉCO?DU LUNDIAU VENDREDIDE 14H00À 15H00

Tiphainede Rocquigny

L’espritd’ouver-ture.

L’émis-sion àforttauxd’inté-rêt.

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> Avec Elsa Conesa,

journaliste aux Echos,

le vendredi

Le train rapide tricolore attend toujours ses potentiels challengers. Photo Patrick Lévêque/Sipa

Denis Fainsilber [email protected]

L’ouverture des lignes SNCF domes-tiques à la concurrence, c’est un peu la version ferroviaire du roman « Le Désert des Tartares » : l’ennemi est aux portes de la citadelle et il faut se préparer au combat mais, en défini-tive, celui-ci ne se montre jamais. Telest, pour l’instant, le résultat de l’arri-vée programmée de concurrents étrangers sur les lignes de TGV.

Si le schéma imaginé dès 2013par la Commission de Bruxelles puisvalidé, au terme d’infinis débats, par le Parlement européen fin 2016 s’était déroulé comme prévu, les rivaux de la compagnie nationale auraient lancé leurs premiers trains à grande vitesse sur des lignesfrançaises dès le samedi 12 décem-bre, date d’entrée en vigueur de

FERROVIAIRE

A partir de ce week-end, les concurrents étran-gers de la SNCF peuvent légalement inaugurer des lignes TGV domes-tiques en France, mais aucune compagnie ne viendra contester le monopole de l’entreprise publique.

A plus long terme, cependant, les jeux ne sont pas encore faits.

L’ouverture des lignes TGV à la concurrence tourne au fiasco

l’« horaire de service 2021 ». Mais au départ des gares parisiennes, les TGV de la SNCF resteront désespé-rément seuls sur les écrans d’affi-chage. Car les opérateurs étrangers ayant regardé le dossier, l’italien Thello, l’allemand Flixtrain et l’espa-gnol Renfe, ont, pour l’instant, capi-tulé. Même pour la voie royale Paris-Lyon-Marseille. Quarante ans après son lancement sur Paris-Lyon, le train rapide tricolore attend donc toujours ses potentiels challengers, et la France reste en retard par rap-port à des pays comme l’Allemagne, l’Italie, l’Autriche, la Suède et même l’Espagne, qui va s’y mettre à son tour au printemps prochain.

Une défaillance fâcheuse pour leprocessus soutenu par les pouvoirs publics, qui voulaient faire de ce volet – à l’instar de la concurrence dans l’aérien domestique, beaucoupplus ancienne – un marqueur de la réforme ferroviaire adoptée en 2018. Aux yeux de la Commission européenne, cette réforme visait à « renforcer la compétitivité du sec-teur et faciliter la libre circulation des voyageurs ».

SNCF Réseau a sollicité des candidatsAfin de bien jouer le jeu et respecterle nouveau cadre juridique, la filiale SNCF Réseau (ex-RFF), intéressée par les potentielles recettes de péages versés par de nouveaux entrants, a prospecté le marché dès 2017 pour « vendre » aux concur-rents de sa maison mère les atouts du réseau ferroviaire tricolore. Un virage assumé. « Nous entamons des

intéressé par ce même schéma, mais pour juin 2021 au plus tôt, à rai-son de trois fréquences quotidien-nes. Quant à l’ibérique Renfe, il se montre encore candidat au marché français, à l’heure où la SNCF vient lui disputer, à la mi-mars 2021, ses propres clients domestiques.

Ce vrai-faux départ dans la miseen concurrence des services non c o nve n t i o n n é s c o n s t i t u e l e deuxième échec simultané, après celui des lignes TET (trains d’équili-bre du territoire), soit les actuels

Intercités. L’Etat, qui subventionne chaque année les axes Nantes-Bor-deaux et Nantes-Lyon, va déclarer infructueux l’appel d’offres pour ces deux lignes, alors que trois can-didats (Transdev, l’allemand Arriva et le belge Eurorail) étaient prêts à succéder à la SNCF, pour un début d’exploitation qui était projeté fin 2022. Un renoncement d’autant plus fâcheux qu’en théorie, 8 autres lignes Intercités devaient suivre le même chemin concurrentiel, après la rénovation de leurs voies. n

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24 // ENTREPRISES Vendredi 11 et samedi 12 décembre 2020 Les Echos

473 millions. Le groupe, qui ne communique plus par pays depuis des années, ne précise pas la situation de sa filiale fran-çaise, chroniquement défici-taire et sujette à une nouvelle restructuration (307 postes supprimés, hors réseau d’agen-ces pour partie cédées).

TUI France, plus connu parses clubs Marmara et Lookéa etses circuits Nouvelles Frontiè-res , est intégré dans une « région » Europe de l’Ouest dont la perte opérationnelle a été multipliée par quinze, avoi-sinant 441 millions d’euros, pour un total de revenus divisé par plus de 2, à 1,3 milliard.

En dépit de ces résultats cala-miteux, la direction reste confiante. D’une manière géné-rale, elle estime que « 2021 sera une année de transition pour le tourisme et que 2022 devrait voirun retour à des niveaux d’avant coronavirus ». En outre, estime son patron, Fritz Joussen, le modèle économique intégré de TUI, qui possède ses tour-opé-rateurs, ses agences de voyages,ses avions, ses hôtels et ses paquebots, le tout sous une marque unique, rend possible une reprise rapide.

RenflouementCe modèle intégré a toutefois été quelque peu malmené par les conséquences du Covid-19, d’où le lancement par TUI d’un vaste programme de réduction de 30 % de ses coûts, visant aussi à accélérer sa révolution numérique, afin de rendre ce même modèle « plus flexible ». Ce programme prévoit la sup-pression de 8.000 postes dans lemonde, un objectif en bonne partie atteint.

En parallèle, le bateau TUI aété renfloué par trois fois depuisle début de la crise sanitaire, l’Etat allemand étant partie pre-nante de chacun des plans de soutien. Annoncé le 2 décembredernier et d’un montant de 1,8 milliard, le troisième vise à sécuriser la situation financière du groupe courant 2021 avec l’hypothèse d’une pandémie persistante. TUI avait déjà béné-ficié de l’injection de 3 milliards d’euros au printemps et en septembre. n

Christophe Palierse @cpalierse

Frappé de plein fouet par la crise sanitaire, le numéro un mondial du tourisme TUI a misun genou au sol, mais il assure pouvoir repartir de l’avant. Tel est le message adressé jeudi parle groupe allemand à l’occasionde la publication des résultats de son exercice 2019-2020 (clos au 30 septembre), marqué par un déficit astronomique.

TUI accuse en effet une pertenette part du groupe de 3,1 mil-liards d’euros, à comparer à un profit de 416,4 millions sur 2018-2019, pour un chiffre d’affaires en baisse de 58 %, frô-lant les 8 milliards. Ce déficit s’explique largement part une perte opérationnelle de 3 mil-liards – à comparer à un résul-tat positif approchant 894 mil-lions un an auparavant –, conséquence directe de la chutede son activité.

EffondrementLa crise a frappé tous les métiers – hôtellerie, croisière, excursions-visites, transport aérien – et toutes les grandes zones géographiques du géant allemand. A titre d’exemple, TUI paie cher sa récente expan-sion dans la croisière, une acti-vité jugée stratégique et jus-qu’alors très rentable. Elle a généré cette fois une perte d’exploitation de 322,8 millions,contre un gain de 366 millions sur 2018-2019, et ses revenus ont fondu de moitié, à environ

TOURISME

Le groupe allemand, numéro un mondial du tourisme, a perdu plus de 3 milliards d’euros au cours de son exercice 2019-2020.

Il estime pouvoir rebondir rapide-ment grâce à son modèle intégré, pourtant malmené par la crise.

TUI table sur un retour à la normale en 2022

à suivre

L’Utac-Ceram rachète son concurrent Millbrook pour 130 millions d’eurosAUTOMOBILE L’organisme français d’homologation de véhicu-les Utac-Ceram va racheter une participation majoritaire dansson concurrent britannique, Millbrook, pour 118 millions delivres (130 millions d’euros). L’ancien propriétaire, Spectris,conservera 13,5 % du nouveau groupe et y réinvestira 25 mil-lions de livres. Le but de l’opération est de « créer un groupe lea-der dans le domaine des essais techniques, de l’homologationautomobile et des nouvelles technologies ». L’Utac emploie580 personnes dans le monde, et Millbrook 700. Le groupe seradirigé par Laurent Benoit, actuel président de l’Utac-Ceram.L’opération devrait lui permettre de doubler son chiffre d’affai-res (83 millions d’euros en 2019).

Le Bâtiment craint la hausse de la TVA pour certains travaux de rénovation BTP Un amendement au projet de loi de finances 2021, voté lasemaine dernière au Sénat avec le soutien du gouvernement,pourrait porter la TVA de 5,5 % à 10 % sur certains travaux derénovation énergétique, alerte la Fédération française du bâti-ment (FFB). Cela concerne notamment les remplacements deportes d’entrée, de volets isolants, et de fenêtres (sauf remplace-ment d’au moins 50 % des fenêtres du logement et en substitu-tion à du simple vitrage). De surcroît, pour tous les travaux derénovation énergétique, la TVA à 5,5 % nécessiterait que l’arti-sans ait le label « reconnu garant de l’environnement » (RGE).Or « il n’existe aujourd’hui que 65.000 entreprises qualifiées RGEsur les 320.000 entreprises de bâtiment », souligne la FFB. Letexte revient lundi à l’Assemblée nationale. Si les députés main-tiennent la mesure, elle s’appliquerait en juillet 2021.

Dominique [email protected]

Après les bolides Ferrari, l’artisanatde luxe chinois. Les Agnelli ont en effet décidé de renforcer leur empreinte dans le luxe en Asie. La célèbre famille italienne, via son holding Exor, s’offre Shang Xia , la marque chinoise d’Hermès. Exor vainvestir quelque 80 millions d’euros, « via une augmentation de capital réservée qui lui permettra de devenir l’actionnaire majoritaire », indiquent les entreprises. Hermès restera au capital, ainsi que sa cofondatrice Jiang Qiong Er.

« Avec Hermès, nous sommesimpatients d’accompagner Jiang Qiong Er dans la construction d’une grande entreprise […] auprès d’une clientèle progressant dans le monde entier », a déclaré le PDG d’Exor, John Elkann. Nous sommes ravis de pouvoir partager avec Shang Xia notre expérience de développement de marques de luxe mondiales. »

Shang Xia a été lancée en 2010 parHermès, sur la base d’un concept original : remettre en valeur les savoir-faire chinois au service de créations contemporaines. La mar-que travaille avec une soixantaine d’ateliers en Chine, au Vietnam, au

Népal et en Mongolie. Son offre va del’art de vivre (services à thé…) au mobilier, en passant par la mode et les accessoires (bijoux, sacs), avec des prix de 100 à 300 euros pour les petits cadeaux, qui peuvent monter jusqu’à 10.000, voire 100.000 euros. L’an dernier, son chiffre d’affaires a atteint plus de 20 millions d’euros (+60 %), mais la marque n’est pas rentable.

Cap sur l’internationalLa notoriété de Shang Xia est encore faible. Elle est aujourd’hui vendue essentiellement en Chine, via sept magasins, à Shanghai, Pékin, Chengdu, Hangzhou ou Shenzhen. A l’international, elle a une seule boutique à Paris, ouverte il y a sept ans. En 2021, la marque veut franchir les frontières pour mettre d’abord le cap sur le reste del’Asie, Singapour et Taiwan. Avant un horizon plus lointain, le reste du monde.

Cette nouvelle étape dans sondéveloppement demande de lourds investissements, alors que Shang Xia n’a pas atteint la rentabilité. Ce qui explique sans doute qu’Hermès ait décidé de s’adosser à un parte-naire puissant dans un contexte de crise sanitaire. Exor gère un porte-feuille dont la valeur est estimée à 27 milliards de dollars. « Avec Exor, nous partageons une longue culture familiale et entrepreneuriale sur laquelle nous pourrons bâtir les nou-veaux succès de Shang Xia », a souli-gné le gérant d’Hermès, Axel Dumas.

Des fondations solidesLa dirigeante de la marque chinoise(qui a mené le projet avec Patrick Thomas, ancien dirigeant d’Her-mès), estime que, dix ans après sa création, Shang Xia a bâti des fon-dations solides, en termes d’appro-visionnement notamment. Tra-vailler avec des artisans souvent isolés a été un défi à relever.

Désormais, la société veut accélé-rer malgré un contexte incertain pour le marché du luxe. Le secteur devrait chuter de 20 % en 2020, selondifférentes études. Mais pas en Chine, qui va rester son moteur. Ce nouveau duo constitué d’Exor et d’Hermès « va permettre à Shang Xiade poursuivre ses rêves et ses ambi-tions avec plus de puissance que jamais », souligne Jiang Qiong Er. L’opération devrait être bouclée à la fin de l’année. n

LUXE

La famille Agnelli, propriétaire de Fiat et de Ferrari, va prendre la majorité de la marque lancéeil y a dix ans parle groupe de luxe.

Le français resteau capital avecla cofondatrice de la griffe chinoise.

Hermès cède les commandes du chinois Shang Xia aux Agnelli

Shang Xia a ouvert une seule boutique hors de Chine, à Paris, en 2013. Photo Miguel Medina/AFP

Shang Xia été lancée en 2010 par Hermès, sur la base d’un concept original : remettre en valeur les savoir-faire chinois au service de créations contemporaines.

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mobileCegedimIR

Anne Feitz @afeitz

Personne n’aurait voulu y croire il y a deux ou trois ans : le classement des constructeurs automobiles en fonction de leur capitalisation boursière est tout bonnement ren-versant. Sur la première marche dupodium, et de très loin, se trouve Tesla, avec une valorisation de 570 milliards de dollars – il n’occupepourtant cette place que depuis le début juillet.

C’est trois fois plus que le numérodeux, Toyota (199 milliards), et six fois plus que le troisième, le géant Volkswagen (91 milliards). Ces deuxconstructeurs « old school » se dis-putent pourtant (avec l’alliance Renault-Nissan-Mitsubishi) le rangde leader mondial pour le nombre de véhicules vendus (plus de 10 mil-lions chacun).

Mais ce qui surprend également,c’est la présence dans le Top 20 de six groupes chinois parfaitement inconnus, ou presque, il y a quel-ques années : BYD, Saic, Xpeng, Li Auto, Geely. Trois d’entre eux sont de jeunes pousses de l’électrique (NIO, Xpeng et Li Auto) tout juste sorties du berceau. Elles n’exis-taient pas il y a cinq ans et se propul-sent aujourd’hui dans le sillage de lafirme d’Elon Musk. Chacune vaut déjà largement plus de 25 milliards de dollars, davantage que PSA (23 milliards) ou Renault (13 mil-liards). « Je suis sidéré, c’est tout bon-

AUTOMOBILE

Le classement bour-sier des constructeurs automobiles est renversant : non seulement Tesla vaut désormais autant que la plupart des constructeurs traditionnels réunis…

… mais on y trouve aussi plusieurs jeunes pousses chinoises qui n’existaient pas il y a cinq ans.

Automobile : l’électrique bouscule la donne en Bourse

des ventes de voitures électriques observée cette année.

Même si, avec 500.000 bolides àbatterie prévus en 2020, Tesla est encore très loin des 10 millions ven-dus par Toyota ou VW, il reste, et de loin, numéro un mondial pour les ventes de voitures électriques. Quant aux nouveaux venus, ils sur-fent tout simplement sur la vague. « Beaucoup d’investisseurs se disent “j’ai raté Tesla, je ne veux pas rater les suivants” », souligne un analyste.

La plus « ancienne » de ces jeunespousses, NIO, a vendu moins de 40.000 voitures sur les onze pre-miers mois de l’année. « La société nedoit sa survie qu’à l’injection de 1 mil-liard de dollars de la ville chinoise de Hefei, en avril dernier et elle vaut aujourd’hui 60 milliards de dollars ! »soupire le même professionnel. Li Auto et Xpeng ont fait leur entrée surle Nasdaq cet été seulement. Le scan-dale Nikola, cette start-up spéciali-sée dans les camions électriques qui avait survendu ses performances, n’a pas vraiment servi de leçon.

Pour Xavier Mosquet, associé spé-cialiste de l’automobile du BCG, le succès boursier de Tesla s’explique toutefois parfaitement. « Ils réussis-sent dans l’électrique, un marché qui adésormais fait ses preuves et qui pro-gresse de 25 % ou 30 % par an. Un niveau de croissance plutôt rare en ce moment », relève-t-il.

D’autant qu’après cinq trimestresconsécutifs de bénéfices, Tesla sem-ble avoir enfin prouvé sa capacité à produire en plus grandes séries. « Retraitée des profits liés aux crédits CO2 et de la rémunération d’Elon Musk, la marge de la division automo-bile a atteint 9 % au dernier trimestre,ce qui place Tesla parmi les construc-teurs les plus rentables au monde », souligne Philippe Houchois, ana-lyste chez Jefferies.

Un accès quasi gratuitau capitalSurtout, contrairement aux masto-dontes du secteur, les nouveaux champions de l’électrique partent de zéro. « Pour eux, le boom de l’élec-trique se traduit par de la croissance nette, alors que pour les construc-teurs traditionnels, il s’agit d’un jeu àsomme nulle : ils perdent dans le thermique ce qu’ils gagnent dans l’électrique », analyse Philippe Hou-chois. Non seulement ils doivent investir des milliards dans les nou-velles technologies, mais ils doiventparallèlement restructurer leurs anciennes activités. « Ils ne peuvent pas rester les bras croisés, sinon ils seront écrasés », souffle l’analyste.

Et ce, d’autant qu’avec de tellesvalorisations boursières, les nou-veaux acteurs ont un accès quasi gratuit au capital. « Tesla vient d’annoncer une augmentation de capital de 5 milliards de dollars, fai-sant à peine frémir le cours, poursuitPhilippe Houchois. Et ce sera pareil pour les autres. De quoi financer de lourds programmes de R&D, se doterde réseaux de distribution du jour aulendemain, etc. Ce décalage est ingé-rable pour les constructeurs tradi-tionnels. »

Certains ont d’ailleurs bien iden-tifié la menace. Le patron du groupeVW, Herbert Diess, a clairement désigné Tesla ces derniers jours comme la cible à rattraper, et celui de PSA, Carlos Tavares, le considèredésormais comme un concurrent « très sévère ».

(Lire « Crible »Page 44

Désormais, Tesla pèse autant que Toyota, Volkswagen, Daimler, BMW, General Motors, Ford, Fiat Chrylser, PSA et Renault réunis !

Léa Delpont— Correspondante à Lyon

Etait-ce prémonitoire ? En 2019,la fondation de la Financière de l’Echiquier, se préparant à deve-nir la Fondation Groupe Primo-nial, après le rachat de la sociétéde gestion d’actifs par le leader indépendant de la gestion de patrimoine, ouvrait son champ d’action jusqu’ici centré sur l’éducation et l’insertion sociale et professionnelle, à la santé. Son premier geste, après son lancement auprès de la Fonda-tion de France en juin 2020, a été d’offrir un robot désinfec-tant à l’Institut Mutualiste Montsouris.

La Financière avait innové en2006 en créant la première fon-dation française abritée par unesociété de gestion d’actifs, avec un mode d’abondement au

pourcentage des frais de dos-siers. « Plus il y a de clients, plus ily a de financements pour la fon-dation », résume la déléguée générale, Cécile Jouenne-Lanne. Le nouveau périmètre du groupe Primonial – 48 mil-liards d’euros d’actifs gérés ou conseillés et des métiers diver-sifiés – devrait donc lui permet-tre d’augmenter ses ressources dans les prochaines années.

CrowdfundingAvec son budget actuel de 1,3 million d’euros, la Fondationa mis l’accent en 2020 et 2021 sur des actions « permettant de répondre à l’augmentation des inégalités et des difficultés issues de la crise, dans un contexte social inédit fragilisant les plus vulnérables ». Depuis l’origine, elle s’adresse à des populations en grande exclusion, sans-abri, primo-arrivants, femmes iso-lées, anciens détenus…

Dès mars, Cécile Jouenne-Lanne s’est tournée vers les associations gravitant autour de la Fondation pour une prise de température à chaud. « C’est la première fois que nous réagis-sions ainsi, sur un sujet d’actua-lité, car il était impensable de res-ter les bras croisés » . Une

première opération de finance-ment participatif a permis d’attribuer 150.000 euros à une vingtaine d’associations pour répondre à des besoins urgents,comme l’équipement informa-tique d’élèves confinés dans les quartiers sensibles lyonnais.

La Cravate SolidaireEn novembre, le comité de gou-vernance a décidé de donner suite à ces actions pour « soute-nir des projets nés dans la crise, qui ont mûri et qui se sont struc-turés », explique la déléguée générale. Le Comité de sélectiona ainsi octroyé ses subventions àSport dans la Ville, qui suivait des jeunes vulnérables à Lyon bien avant le Covid-19. L’associa-tion, qui misait sur l’accompa-gnement par les valeurs du sport, a fait évoluer son offre en créant un programme de sou-tien scolaire axé sur le passage en 6e, sur des cours à domicile etdes stages mixtes sport-ensei-gnement pour les collégiens, enfin sur du soutien à distance pour les lycéens en préparation du baccalauréat.

La fondation financera aussiLa Cravate Solidaire, dans sa mission d’insertion profession-nelle, via du prêt de vêtements et l’organisation de sessions de

coaching. Confrontée à une recrudescence des besoins, et à l’augmentation de ses partenai-res prescripteurs, elle doit agrandir ses espaces de stoc-kage et de formation, ouvrir de nouveaux ateliers et recruter des coachs pour les animer.

Sa troisième action concerneMake.org. Le projet « Abri d’urgence » vise l’accroissementdu nombre de places d’héberge-ment pour les femmes victimes de violences domestiques, grâceà la mobilisation de chambres d’hôtel invendues. La phase pilote a démarré en novem-bre pour mettre à l’abri une cen-taine de femmes, avant un déploiement national.

La Fondation Groupe Primo-nial a enfin lancé un appel à pro-jets pour agir sur la souffrance psychologique et la santé men-tale éprouvée par la crise. Elle a reçu 90 dossiers, qui seront départagés avant la fin du mois.

Structure distributrice, maisaussi opératrice, elle gère la Maison des jeunes talents, foyergratuit pour boursiers de pro-vince, inscrits dans des classes préparatoires à Paris, avec une cinquantaine de places dans la capitale, assorties d’un accom-pagnement pédagogique. n

A Lyon, l’association Sport dans la ville aide les collégiens et lycéens vulnérables en cette période de crise sanitaire.

SOCIAL

Anciennement fondation de la Financière de l’Echiquier, la nouvelle structure a infléchi son action tout au long de la crise sanitaire, pour gérer l’urgence, et maintenant la reconstruction.

Fondation Primonial veut répondre en urgence à la crise

L’annonce de son entrée dans l’indice S&P 500, à compter du 14 décembre, lui a donné une nou-velle impulsion depuis la mi-no-vembre. Désormais, le trublion de l’automobile pèse autant que Toyota, Volkswagen, Daimler, BMW, General Motors, Ford, Fiat Chrylser, PSA et Renault réunis !

Les analystes n’en finissent pas dedébattre sur ce niveau de valorisa-tion. Ceux de JP Morgan estiment qu’au vu des fondamentaux, le titre ne vaut pas plus de… 90 dollars. Ceux de Goldman Sachs tablent à l’inverse sur un cours de 780 dol-lars, compte tenu de l’accélération

nement effrayant !, commente un analyste financier, spécialiste du secteur. Soit il s’agit simplement d’une bulle qui va se dégonfler, soit ceclassement signifie que les marchés anticipent la mort à dix ans des constructeurs traditionnels. »

Numéro un mondialde l’électriqueL’ascension stratosphérique de Tesla a déjà été largement com-mentée. Le cours de Bourse du fabricant californien de voitures électriques a été multiplié par 7 (+622 %), à plus de 600 dollars, d e p u i s l e d é b u t d e l ’a n n é e .

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ment, nous garantissons que ce qui est illégal hors ligne est illégal en ligne », a salué Ylva Johansson, la commissaire européenne aux Affai-res intérieures. Clément Beaune, le secrétaire d’Etat français aux Affai-res européennes, a salué « une avan-cée majeure, portée par la France ». Le texte final doit encore être for-mellement adopté par les institu-tions, avant une entrée en vigueur espérée fin 2021 ou début 2022.

SurveillanceA défaut d’agir à temps ou de faire preuve d’assez de transparence sur les mesures mises en place, les plate-formes s’exposeront à des amendes dont pourra directement décider l’Etat membre demandant le retrait d’un « contenu terroriste ». Bruxel-les ne va pas jusqu’à imposer aux plateformes et aux réseaux sociaux une obligation de surveillance générale des contenus postés ou le recours à des outils automatisés,

deux pentes jugées trop glissantes etcomplexes. Mais elle attend qu’ils développent largement les moyens humains de surveillance et les systè-mes permettant aux autorités, parti-culiers, associations... de leur signa-ler des « contenus terroristes ».

Cette volonté de mettre au pas lesgéants de l’Internet se traduira aussi par des nouvelles contraintes en direction de messageries instan-tanées comme WhatsApp et Tele-gram. Mercredi, dans le cadre de la présentation de son nouveau plan d’action contre le terrorisme, la Commission a annoncé travailler à des solutions techniques devant permettre aux enquêteurs d’accé-der aux communications ainsi échangées par des suspects, aujourd’hui cryptées et inexploita-bles. C’est un autre pas réclamé par des Etats que l’Europe n’avait jus-qu’ici pas voulu franchir. Point cen-tral des discussions, et crucial pour l’efficacité du règlement, des ordres

transfrontaliers de retrait des contenus pourront être effectués : chaque Etat pourra ainsi en émettreenvers une plateforme établie dans un autre Etat de l’UE. « C’était indis-pensable. On ne pouvait exiger un retrait en une heure et laisser un pouvoir de blocage ou de ralentisse-ment à des autorités nationales. La vitesse est clé », explique l’euro-député Geoffroy Didier (PPE/LR). « La propagande terroriste a joué un rôle clé dans les récents attentats en Europe. La différence entre une vidéoqui est en ligne une heure, trois heu-res ou 24 heures, ce sont des millionsde vues », a insisté l’un des négocia-teurs du texte, l’eurodéputé Javier Zarzalejos (PPE). Le futur règle-ment harmonise la définition d’un « contenu terroriste » et prévoit desgarde-fous pour les contenus à but journalistique, artistique ou liés à larecherche. Un mécanisme doit per-mettre de réclamer la republicationdes contenus enlevés par erreur. n

Haine en ligne : l’Europe impose le retrait en 1 heure

Derek Perrotte @DerekPerrotte

— Bureau de Bruxelles

L’Europe a franchi jeudi un pas important dans la lutte contre le ter-rorisme et dans la régulation des plateformes numériques. Le Parle-ment européen et le Conseil sont parvenus à un accord final sur un règlement leur imposant de retirer dans un délai d’une heure maximaleles contenus « à caractère terroriste »qui leur seront signalés. Le projet a été lancé en 2018 par la Commissioneuropéenne. De nombreux Etats, la France en tête, en faisaient une prio-rité. « Stopper la propagande terro-riste est central dans notre travail contre la radicalisation. Avec ce règle-

Les institutions européen-nes sont parvenues à un accord sur cette mesure portée par la France depuis deux ans.

L’initiative est la plus grosse offensive des autorités américaines dans le secteur de la tech depuis leur poursuite de Microsoft en 1998.

jusqu’ici : forcer Facebook à céder ses filiales Instagram et WhatsApp. Les deux plaintes évoquent aussi la possibilité d’encadrer davantage les acquisitions futures, les 46 Etats réclamant que leur feu vert soit obtenu pour tout rachat d’une start-up valorisée 10 millions de dol-lars ou plus, une compétence rele-vant uniquement de l’autorité de la concurrence jusqu’ici. La FTC réclame enfin d’interdire à l’entre-prise d’imposer des conditions anti-compétitives aux développeurs de logiciels. Facebook a réagi vigoureu-sement mercredi, qualifiant ces poursuites d’« histoire révision-niste ». « Le fait le plus important dans cette affaire, que la FTC ne men-tionne pas dans sa plainte de 53 pages,c’est qu’elle a laissé la voie libre à ces acquisitions il y a des années », a déclaré Jennifer Newstead, la direc-trice juridique du groupe.

En 2012, la FTC avait conduit uneenquête sur le rachat d’Instagram et avait voté à l’unanimité pour le valider. La Commission euro-péenne a aussi examiné l’acquisi-tion de WhatsApp en 2014 et « n’a pas trouvé de risque d’atteinte à la concurrence », a mis en avant Face-

book. « Instagram et WhatsApp sontdevenus les produits incroyables qu’ils sont aujourd’hui car Facebook a investi des milliards de dollars et des années d’innovation et d’exper-tise », a ajouté Jennifer Newstead.

Google également poursuiviLa double plainte participe d’une salve d’enquêtes sur les pratiques anticoncurrentielles des géants technologiques de la côte ouest. En octobre, le département de la Jus-tice et les procureurs généraux de 11 Etats ont déposé une plainte con-tre Google pour abus de position dominante dans la recherche en ligne. La FTC enquête également sur Amazon, et le ministère de la Justice sur Apple. A la mi-octobre, leCongrès a de son côté présenté un rapport proposant de limiter radi-calement le pouvoir des Gafa, en évoquant aussi un démantèlement, l’interdiction de donner la préfé-rence à leurs propres produits et une présomption de refus pour les futurs rachats de start-up.

(Lire l’éditorialde Jean-Marc VittoriPage 15

Les autorités américaines réclament le démantèlement de Facebook l La Federal Trade Commission et une coalition de 46 Etats américains accusent le réseau social d’avoir étouffé la compétition en rachetant Instagram et WhatsApp.l Ils demandent aux cours fédérales d’envisager une revente de ces applications mais aussi d’encadrer davantage de futures acquisitions.

« Facebook s’est engagé dans unestratégie systématique visant à élimi-ner ce qui menace son monopole. […] Cette attitude nuit à la compéti-tion, laisse les consommateurs avec peu de choix dans le domaine des réseaux sociaux personnels et prive les annonceurs des bénéfices de la concurrence », dénonce le gendarmede la concurrence américain. La FTC reproche à Facebook d’avoir « étouffé les menaces » pesant sur son monopole établi depuis 2011, en rachetant l’application de partage dephotos Instagram en 2012 et la mes-sagerie mobile WhatsApp en 2014.

L’autorité évoque aussi les « con-ditions anticoncurrentielles » impo-sées aux développeurs tiers se bran-chant sur sa plateforme jusqu’à l’an dernier. « Facebook a rendu ses inter-faces de programmation accessibles aux applications tierces, à condition seulement qu’elles s’abstiennent de développer des fonctionnalités concurrentes et de se connecter avec ou de promouvoir d’autres réseaux sociaux », dénonce la FTC. Elle évo-que les mesures prises par Facebookcontre Vine, une application de par-tage de courtes vidéos rachetée par son rival Twitter, en 2013, et contre Path et Circle, deux réseaux sociauxconcurrents disparus depuis.

La coalition d’Etats se concentresur les mêmes griefs. « Des milliardsont été jetés à des sociétés pour les convaincre de vendre », a dénoncé Letitia James, la procureure de NewYork menant la coalition, souli-gnant qu’Instagram ne « dégageait pas un centime de revenu » quand Facebook l’a racheté pour 1 milliard de dollars. Elle a aussi accusé la plateforme « de tuer la dernière bouf-fée d’oxygène des entreprises refusantd’être rachetées ». « Nous ne laisse-rons aucune société penser qu’elle est “too big to fail” », a-t-elle conclu.

Les autorités ont surtout surprisen demandant un remède que même l’Union européenne, connue pour ses amendes élevées contre lesGafa, n’évoque qu’avec des pincettes

Anaïs Moutot @AnaisMoutot

— Correspondante à San Francisco

Double attaque. Mercredi, la Fede-ral Trade Commission (FTC) et une coalition de 46 Etats Américains ontannoncé déposer deux plaintes dis-tinctes contre Facebook pour abus de position dominante et monopoleillégal, ouvrant la voie à deux procèsqui pourraient s’étirer sur plusieurs années. Le gendarme de la concur-rence américain et les procureurs généraux demandent aux juges d’étudier un remède sévère : forcer le réseau social à se séparer de ses filiales Instagram et WhatsApp, deux acquisitions devenues le moteur de la croissance du groupe de Mark Zuckerberg.

L’ampleur de la menace est iné-dite pour le réseau social né en 2004,qui n’avait jamais été poursuivi par les autorités américaines pour pra-tiques anticoncurrentielles et dont le plus gros revers se résumait jus-qu’ici à une amende de 5 milliards de dollars infligée par la FTC pour violation de la vie privée, soit moins de 10 % de son chiffre d’affaires.

Virage à 180 degrésAvec une plainte similaire contre Google déposée mi-octobre, cette initiative représente la plus grosse offensive des autorités américaines dans le secteur technologique depuis leur poursuite de Microsoft en 1998. Elle montre un virage à 180 degrés de la FTC, qui s’était con-tentée jusqu’ici d’accords volontai-res avec les Gafa et avait décliné une poursuite antitrust contre Google en 2013. Elle indique aussi un con-sensus de plus en plus bipartite sur le sujet, les plaignants comprenant des Etats démocrates comme répu-blicains, même si la plainte de FTC n’a recueilli les votes que d’un com-missaire républicain sur trois.

GAFA

Florian Dèbes @FL_Debes

Record battu ! Après avoir sanc-tionné Google par une amende de50 millions d’euros pour des man-quements à la protection des don-nées personnelles des utilisateurs d’Android, la Commission natio-nale de l’informatique et des liber-tés (CNIL) double la mise dans un autre dossier, celui du consente-ment des internautes au ciblage publicitaire en ligne via des fichiers de type cookies.

Le gendarme français de laprotection de la vie privée vient d’infliger une amende de 100 mil-lions d’euros à Google pour avoir déposé des cookies publicitaires sur les ordinateurs d’utilisateurs àpartir du site Google.fr sans consentement préalable des internautes et sans les avoir informés de façon satisfaisante. Il s’agit de la première amende à neuf chiffres infligée à un géant dunumérique dans ce type d’affaires.

Publicités ciblées Pour le même motif, le site d’e-commerce Amazon a, lui, été sanctionné d’une amende de 35 millions. Les cookies sont de petits fichiers permettant notam-ment de suivre l’historique de navigation en vue d’adresser aux internautes des publicités ciblées .« Quand vous arrivez sur ces sites, vous n’avez encore cliqué nulle partni pu lire un quelconque message d’information, mais vous avez déjà reçu une volée de cookies à finalité publicitaire », regrette Mathias Moulin, le directeur de la protec-tion des droits et des sanctions à laCNIL. La formation restreinte du régulateur a jugé ces manque-ments d’autant plus graves que 47 millions de Français utilisent le

La CNIL sanctionne Google et Amazon

moteur de recherche de Google etqu’ils ont ouvert 300 millions de comptes sur Amazon.

Amazon assure mettre réguliè-rement à jour ses pratiques pour se conformer pleinement à la loi. « Nous sommes en désaccord avec la CNIL », clame un porte-parole. Déjà condamné en 2014 pour des pratiques similaires, Google défend le bilan de ses actions récentes en la matière, notam-ment la décision d’interdire bien-tôt certains cookies sur son navi-gateur Chrome. « La décision rendue par la CNIL en matière d’“ePrivacy” fait l’impasse sur ces efforts et ne prend pas en compte le fait que les règles et les orientations réglementaires françaises sont incertaines et en constante évolu-tion », indique Google.

A la CNIL, on réfute toute incer-titude réglementaire. Les récentesmises à jour de ses recommanda-tions sur les cookies ne reviennentpas sur la notion d’information préalable sur laquelle portent les reproches du jour. Les manque-ments constatés relèvent de la directive européenne « privacy » de 2002 (transcrite dans la loi française « informatique et liber-tés ») et non du règlement euro-péen sur la protection des don-nées personnelles (RGPD) entré en application en 2018.

A ce titre – et au grand dam deGoogle –, le régulateur français n’est pas tenu de faire remonter le dossier auprès de la « CNIL irlan-daise », que l’entreprise améri-caine a choisie comme autorité compétente pour juger de ses pra-tiques de protection des données personnelles en Europe. Cette question de la création d’un méca-nisme dit de « guichet unique » estjustement l’un des points chauds dans les débats sur la révision à venir de la directive ePrivacy. n

Le régulateur de la protection des données personnelles reproche aux géants du numérique d’avoir suivi l’historique de navigation des internautes sans leur consentement.

La CNIL réfute toute incertitude réglementaire.

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HIGH-TECH & MEDIASLes Echos Vendredi 11 et samedi 12 décembre 2020

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28 // HIGH-TECH & MEDIAS Vendredi 11 et samedi 12 décembre 2020 Les Echos

cela alourdirait sa « facture foot-ball » d’au moins 250 millions en plus de ce qu’il paie actuellement.Le groupe redeviendrait, certes, incontournable dans le foot mais risquerait de creuser ses pertes en France, sans pour autant avoir l’assurance de gagner de nombreux abonnés. Bénéficier de la même baisse des droits que Mediapro pourrait obtenir pourrait donc aussi bien faire ses affaires.

Pour l’instant, la LFP reste detoutes les façons l’otage de Media-pro. Ce dernier, qui n’a guère séduit plus de 500.000 abonnés avec sa chaîne Téléfoot et qui pourrait per-dre jusqu’à 800 millions d’euros cette année, est en effet en mesure defaire traîner le dossier. Plus qu’une baisse des droits, certains estiment

que le groupe espagnol cherche en fait surtout à obtenir un abandon detoutes les poursuites judiciaires aux-quelles il est exposé, en échange d’unrenoncement à son contrat qui per-mettrait à la LFP de négocier avec Canal. Les abonnés lésés, les FAI quiont signé des contrats, SFR Altice qui a partagé ses droits pour les Cou-pes d’Europe risquent en effet d’atta-quer Mediapro. Pour la Ligue, en casde départ de Mediapro, il y a aussi l’enjeu de récupérer au moins les 320 millions d’impayés pour les échéances d’octobre et de décembre.

Différents scénariosCanal+, déjà en contentieux avec le groupe de Jaume Roures au sujet dela distribution de Téléfoot, refuse, lui, de discuter officiellement tant

que la LFP n’aura pas purgé la situa-tion avec Mediapro.

Juridiquement, soit le concilia-teur du tribunal de Nanterre, Marc Sénéchal, est en mesure de décider un plan de continuation viable avec un prix révisé et une garantie ban-caire réelle, cette fois. Soit il décide d’un plan de cession par lequel Mediapro se retire de l’Hexagone. Selon « L’Equipe », il aurait con-seillé au conseil d’administration dela LFP d’accepter les conditions de Mediapro pour un retrait, la date officielle de la fin de la conciliation étant prévue pour le 18 décembre.

Cependant, le conciliateur peutaussi déclarer que sa mission a échoué et qu’il n’a pas trouvé de terrain d’accord. Dans ce cas, la LFP pourrait demander par injonc-

David Barroux @DavidBarroux

Nicolas Madelaine @NLMadelaine

avec Marina Alcaraz @marina_alcaraz

L’avenir du football français est l’enjeu d’une énorme partie de pokermenteur. Autour de la table : Media-pro, qui a acquis les droits audiovi-suels pour environ 830 millions d’euros de l’essentiel des matchs desLigues 1 et 2 ; Canal+, qui a repris à BeIN, pour 330 millions, deux bellesaffiches par journée de champion-nat ; la Ligue de football profession-nel (LFP), avec ses clubs affiliés qui cherchent à se faire payer ; et, enfin, le tribunal de commerce, qui tente de mettre tout le monde d’accord depuis que Mediapro ne paie plus cequ’il doit au foot français.

Jeudi, un conseil d’administra-tion et une assemblée générale de laLFP ont été l’occasion pour Vincent Labrune, son nouveau président, defaire un point. L’heure est grave. Mediapro, s’il a réglé sa première traite, a été incapable depuis de ver-ser les quelque 320 millions qu’il devait. La Ligue a du coup été obli-gée de s’endetter. Et même si elle avait réussi à contracter un deuxième emprunt (en plus du PGE) pour gagner du temps, l’incer-titude ne peut plus durer.

600 à 700 millions pour le championnatLe foot français a deux options. Soit il trouve un terrain d’entente avec Mediapro en consentant le rabais que ce dernier demanderait (autour de 20 %) sur le montant des droits, soit il parvient à rompre son contratavec Mediapro, récupère ses droits et cherche à conclure un contrat avec Canal+. Mais dans ce cas, la LFPdevra accepter de toucher beaucoupmoins que le 1,2 milliard d’euros du dernier appel d’offres et sans doute àpeine autant qu’il y a quatre ans. A cesujet, « L’Equipe » évoque environ 600 millions d’euros par an pour le championnat, plus 100 millions en fonction de l’évolution du porte-feuille d’abonnés aux chaînes distri-buées par Canal, une part de rému-nération variable inédite.

Pour Canal+, qui clame qu’il n’apas perdu d’abonnés cette année,

SPORT

dre des participations dans une société en rapport avec son objet. LaLigue a également clarifié les rôles de président et de directeur général – l’option du PDG est même envisa-gée. L’ensemble va être soumis au vote de l’assemblée fédérale de la Fédération française de football, prévue en mars 2021, puis devra obtenir l’aval du ministère des Sports. La société commerciale pourrait gérer les droits commer-ciaux, en premier lieu les droits de retransmission à la télévision. D’aucuns poussent même l’idée d’une entrée au tour de table d’un fonds d’investissement, scénario mis en œuvre depuis peu en Italie.

Rien n’est cependant acté en cesens, sachant qu’un tel schéma est loin de faire l’unanimité. Selon une étude du cabinet conseil spécialisé Sport Value auprès de 20 dirigeants de « haut niveau » du foot pro, cette solution est loin de figurer parmi les principales envisagées alors que le ballon rond traverse une crise inouïe.

Alors que 95 % des dirigeantsinterrogés estiment que le football professionnel doit parler d’une seulevoix auprès des pouvoirs publics, tirant la leçon de la cacophonie du printemps dernier à propos de l’arrêt du championnat, seulement 21 % de ces mêmes dirigeants préco-nisent l’appel à des investisseurs, à l’instar de la Série A. De même, 58 %d’entre eux plaident d’abord pour unassouplissement des règles de la DNCG, le contrôleur financier des clubs, pour les deux prochaines sai-sons, afin de tenir compte d’un envi-ronnement dégradé.

Transformation des modes de diffusionL’étude de Sport Value montre aussi que l’unanimité est loin d’être faite autour d’une éventuelle réduc-tion du nombre de clubs de L1 que d’aucuns suggèrent afin de renfor-cer les grands clubs dans les compé-titions européennes. 17 % des diri-geants interrogés souhaitent une « refonte du format et du modèle des

Christophe Palierse @cpalierse

avec Anne Drif @Anndrif

En attendant le règlement de l’épi-neux dossier de ses droits télévi-suels, la Ligue de football profes-sionnel (LFP), prise de court par le défaut de paiement de son nouveau diffuseur espagnol Mediapro, en plus de la crise sanitaire, ouvre la voie à une nouvelle donne institu-tionnelle et économique.

Son assemblée générale, qui s’esttenue jeudi, a adopté diverses modi-fications de ses statuts, donnant notamment la possibilité de créer une filiale commerciale ou de pren-

L’assemblée générale de la Ligue de football professionnel a adopté la possibilité de créer une filiale commerciale ou de prendre des participa-tions dans une société en rapport avec son objet.

Le football français à la merci d’unegrande bataille de poker menteur

tion le paiement de ses traites et précipiter la cessation de paiement et la mise sous administration judiciaire de Mediapro. Mais ses problèmes financiers ne seraient pas réglés pour autant et le dossier pourrait traîner, aggravant la situa-tion pour les clubs.

La LFP peut aussi activer uneclause de dénonciation du contrat Mediapro, même si elle s’expose à un procès où serait évalué l’impact de la crise sanitaire sur la valeur desdroits. Heureusement que Vincent Labrune a la confiance des prési-dents de clubs en tant qu’ancien patron de l’OM et, apparemment, aussi de bonnes relations avec Canal+ pour réparer les relations tendues entre le foot et la chaîne… Sa tâche est immense. n

l Mediapro serait prêt à se retirer du championnat français, contre l’abandon de toutes poursuites.l Canal+ aurait une proposition pour reprendre les droits qui les ramènerait à leur niveau de 2016.l La conciliation doit se terminer le 18 décembre, mais ce ne sera pas forcément la fin de cette saga.

d’un rééquilibrage du modèle éco-nomique des clubs qui supportent une masse salariale importante grâce aux droits de retransmission àla télévision et aux transferts. Alors que l’accord conclu en 2018 entre Mediapro et la LFP pour la période 2020-2024 devait être celui d’une nouvelle phase d’expansion, cette même période pourrait être réces-sive. Les recettes attendues des droits télévisés sont susceptibles d’être révisées nettement à la baisse après la sortie de Mediapro.

Or, la Ligue s’est lourdementendettée. Après avoir souscrit un prêt garanti par l’Etat (PGE) de 224,5 millions, après l’arrêt brutal de la saison 2019-2020 et un diffé-rend avec Canal+ sur le paiement deses dernières échéances, elle a dû contracter un prêt de 120 millions auprès de JP Morgan afin de faire face, cette fois-ci, à l’échéance d’octobre non couverte de Media-pro (172,3 millions). En outre, le groupe espagnol n’a pas honoré celle de décembre… n

La Ligue espère rebondir en modifiant ses statuts

Le 4 décembre, Nîmes recevait l’Olympique de Marseille pour le compte de la 13e journée de Ligue 1. Le football français est fragilisé par l’échec de Mediapro avec sa chaîne Téléfoot. Photo Sylvain Thomas/AFP

Sony s’offre Crunchyroll pour1 milliard d’euros

STREAMING

Le groupe japonais reprend la société californienne aujourd’hui détenue par WarnerMedia, une filiale d’AT&T.

Yann Rousseau @yannsan

— Correspondant à Tokyo

Continuant d’investir dans son offre de vidéo et de musique à la demande pour casser sa dépen-dance à la vente de produits ou de composants électroniques, Sony va racheter, pour 1 milliardd’euros, la plateforme Crunchy-roll, spécialisée dans la diffusionde dessins animés japonais. Techniquement, c’est la société Funimation Global Group – unecoentreprise associant Sony Pic-tures Entertainment et la filiale Aniplex de Sony Music Enter-tainment – qui va reprendre, dans une transaction réglée en numéraire, la société califor-nienne aujourd’hui détenue par WarnerMedia, propriété de l’opérateur télécoms AT&T. Si legéant américain inscrit cette vente dans son grand pro-gramme de cession d’actifs jugés« non stratégiques », Sony veut, lui, renforcer son empreinte sur le marché mondial de l’« anime », qui ne cesse de croî-tre hors des frontières du Japon.

« Nous avons une compréhen-sion profonde de cette forme d’artmondiale et nous sommes bien placés pour fournir un contenu exceptionnel aux publics du monde entier », s’est réjoui Tony Vinciquerra, le PDG de Sony Pictures Entertainment. Selon l’Association de l’anima-tion japonaise, la vente de conte-nus à l’étranger génère désor-mais presque autant que le chiffre d’affaires réalisé dans l’Archipel. Au total, le marché du dessin animé japonais a atteint, à l’échelle planétaire, 21 milliards de dollars en 2018, soit le double du début des années 2000. Une poussée d’abord portée par les platefor-mes de VoD telles que Netflix, Funimation ou Crunchyroll.

Fondé en 2006 à San Fran-cisco, Crunchyroll en a été l’un des pionniers et a accumulé un catalogue de 1.000 titres. Con-centrée d’abord sur les Etats-Unis, la société a ensuite déve-loppé son offre en Europe avec notamment la prise de contrôle,l’an dernier, du distributeur franco-allemand d’anime VIZ Media Europe. Le groupe reven-dique ainsi aujourd’hui 3 mil-lions d’abonnés payants et un fichier de 90 millions d’utilisa-teurs réguliers présents dans plus de 200 pays. Sous l’impul-sion de son PDG, Kenichiro Yoshida, Sony mise massive-ment sur le développement de cette économie de l’abonne-ment, que ce soit dans la vidéo, la musique ou le jeu vidéo avec ses solutions pour les utilisa-teurs des consoles PlayStation. Le groupe japonais espère ainsi compenser, sur le long terme, lavolatilité de ses activités indus-trielles de production de cap-teurs d’images, de casques audio ou de smartphones, plus soumis aux cycles de la conjonc-ture économique mondiale. n

Sony veut renforcer son empreinte sur le marché mondial de l’« anime ».

compétitions ». En revanche, ils sont72 % à militer pour une « trans-formation des modes de diffusion des contenus » du football pro-fessionnel – service Internet (OTT), streaming… – et 50 % à jugernécessaire une « meilleure gestion et valorisation des infrastructures » du ballon rond.

Sport Value, qui a par ailleursinterrogé des experts étrangers, propose à ce titre aux acteurs du foot français de « créer un joint-ven-ture avec un spécialiste de la produc-tion d’image et de la réalisation pour maîtriser les contenus plutôt qu’une société commerciale pour commer-cialiser les droits »… Enfin, la crise dufootball relance aussi la question

La crise du football relance la question d’un rééquilibrage du modèle économique des clubs.

Page 29: Les Echos - 11 12 2020

Les Echos Vendredi 11 et samedi 12 décembre 2020 // 29

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APPEL D’OFFRES

Date limite de dépôt des offres : 21/12/2020

Région : Ile-de-FranceC.A.: 2.260 K€ au 31/12/2019 (12 mois)Activité : transport public routier de marchandises

agroalimentaires, véhicules < à 3,5 tonnesEffectif : 28 salariésModalités :Cession organisée en application des articles L.642-1 et suivants du

Code de CommerceL’accès aux informations sera réalisé par dataroom électronique après

un premier contact auprès de l’étude : [email protected] identifiants de connexion seront communiqués après remise de

l’engagement de confidentialité et des pièces mentionnées, téléchargeablessur le site : www.ajilink.fr

Retrouvez l’ensemble des appels d’offre sur www.ajilink.fr

SELARL AJILINK LABISCABOOTERJérôme CABOOTERAdministrateur Judiciaire Associé18, rue de l’abreuvoir77100 MEAUXwww.ajilink.fr

RECHERCHE DE PARTENAIRE OU DE REPRENEURENTREPRISE EN LIQUIDATION JUDICIAIRE

«SARL COLIS SERVICES».

APPEL D’OFFRES

Date limite de dépôt des offres : 08/01/2021 à 12h00

Région : Ile-de-FranceC.A.: 6.157 K€ au 31/12/2019 (12 mois)Activité : BTP (pose de cloisons, doublages, plafonds...).Effectif : 25 salariésModalités :Cession organisée en application des articles L.642-1 et suivants du

Code de CommerceL’accès aux informations sera réalisé par dataroom électronique après

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RECHERCHE DE PARTENAIRE OU DE REPRENEURENTREPRISE EN REDRESSEMENT JUDICIAIRE

SAS I.D.S.

APPEL D’OFFRES

Date limite de dépôt des offres : Lundi 21 décembre 2020 à 17h00

Région : Marseille (15ème)Activité : Entreprise de Transport spécialisée

dans le transport d’enrobésCA: 657 069€ au 30/09/2020 (9 mois)

1 175 375€ au 31/12/2019 (12 mois)Effectif : 16 salariésModalités :Cession organisée en application des articles L.642-1

et suivants du Code de Commerce.L’accès aux informations sera réalisé par dataroom électronique

après remise de l’engagement de confidentialité et des piècesmentionnées, téléchargeables sur le site : www.ajilink.fr.

Frédéric AVAZERIAdministrateur Judiciaire AssociéSCP AJILINK AVAZERI-BONETTO23/29 rue Haxo13001 MARSEILLE

RECHERCHE DE PARTENAIRE OU DE REPRENEUR

APPEL D’OFFRES

Date limite de dépôt des offres : lundi 28 décembre 2020 à 12h00

Région : Ile-de-France (siège), Rhône-AlpesC.A.: 1.134 K€ (au 31/12/2019 – 12 mois)Activité : Transport public (véhicules > 3,5 tonnes)

de marchandisesEffectif : 11 salariésModalités :Cession organisée en application des articles L.642-1 et suivants du

Code de CommerceL’accès aux informations sera réalisé par dataroom électronique après

un premier contact auprès de l’étude : [email protected] identifiants de connexion seront communiqués après remise de

l’engagement de confidentialité et des pièces mentionnées, téléchargeablessur le site : www.ajilink.fr

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RECHERCHE DE PARTENAIRE OU DE REPRENEURENTREPRISE EN REDRESSEMENT JUDICIAIRE

"ENTREPRISE DE TRANSPORT DE MARCHANDISES"

I- Mot d’accueil :- Olivier BUISINE, Président de l’IFPPC

II- Ouverture :- Alain GRISET, Ministre chargé des Petites et

Moyennes Entreprises (sous réserve)Christophe BASSE, Président du Conseil Nationaldes Administrateurs et Mandataires judiciaires

III- Promouvoir les outils de restructurationen temps de crise – La peur du tribunalet la méconnaissance des procédures, freinsau sauvetage de l’entreprise- Georges RICHELME, Président de la Conférence

Générale des Juges Consulaires- Sophie JONVAL, Présidente du Conseil National des

Greffiers des Tribunaux de Commerce- Lucile JOUVE, Mandataire judiciaire- Aurélia PERDEREAU, Administrateur judiciaire- Philippe DUBOIS, Avocat

IV- L’après-crise – Que restera-t-il des ordonnancesCovid ? Projets d’ordonnances droit des sûretéset transposition directive- Jean-François DE MONTGOLFIER, Directeur des

Affaires Civiles et du Sceau- Julien THÉRON, Professeur des Universités- Reinhard DAMMANN, Avocat

V- Crise sanitaire et risques de blanchiment decapitaux- Maryvonne LE BRIGNONEN, Directrice de TRACFIN- Stephen ALMASEANU, Vice-Procureur de la

République, parquet de Paris- Soazig LEDAN-CABARROQUE, Déléguée du

CNAJMJ aux obligations LAB-FT- Béatrice AMIZET, Mandataire judiciaire- François MERCIER, Administrateur judiciaire

VI- L’invitée :Laurence PARISOT (sous réserve) : Regard sur la crise

1) Revue de la jurisprudence 2020- Jean-Pierre REMERY, Conseiller doyen de la

chambre commerciale de la Cour de cassation- Laurence-Caroline HENRY, Avocate générale

à la Cour de cassation- Marine SIMONNOT, Avocate

2) Mise en place d’un PSE en cas de défaillanced’entreprise- Sonia MOUROZ, Responsable de centre de gestion

AGS- Bruno DAVID, Mandataire judiciaire- Sébastien VIGREUX, Administrateur judiciaire- Hubert DE FRÉMONT, Avocat

3) Régime des contrats en cours et bauxcommerciaux- Fabien KENDERIAN, Maître de conférences HDR

en droit privé- François-Charles DESPRAT, Mandataire judiciaire- Justine PELENC, Administrateur judiciaire- Ghislaine BETTON, Avocate

4) Revendications, restitutions et droits derétention- Augustin AYNÈS, Professeur des Universités- Sophie TCHERNIAVSKY, Mandataire judiciaire- Vincent ROUSSEAU, Administrateur judiciaire- Jacques TORIEL, Avocat

Enregistrement vidéo du colloque envoyé aux participantsAttestation de participation délivrée à l’issue de la journée

Inscriptions sur www.ifppc.fr

FAIRE FACE À LA CRISE

PLÉNIÈRE DU MATIN: 9h-12h30 ATELIERS DE L’APRÈS-MIDI AU CHOIX: 14h-17h

Présentés par François LEGRAND, Mandataire judicaireet Olivier BUISINE, Administrateur judiciaire, Président de l’IFPPC

COLLOQUE EN LIGNE

Lundi 25 janvier 2021 - De 9h à 17h

16e Entretiens

Sauvegardede la

RECHERCHE DE REPRENEURS DANS LE CADRE D’UN REDRESSEMENT JUDICIAIREDénomination sociale : GROUPE ADIONA

Activité : accompagnement des jeunes à la mobilité internationale et à l’orientationLocalisation : Venelles (13) – Effectif : 5 salariés et 3 apprentis

C.A. HT : Ante-Covid 965 K € (sur 12 mois)Post-Covid 285 K € (sur 12 mois - estimation)

Actifs: 15 sites Internet dont www.monsalonetudiant.com;35 noms de domaine et 2 marques déposées.

Date limite de remise des offres auprès de la SELARL de SAINT-RAPT & BERTHOLET :31 décembre 2020 à 17h00

L’accès au dossier de présentation se fera par dataroom. Les identifiants de connexionseront communiqués après transmission d’un engagement de confidentialité disponible

sur le site : aj-specialises.fr/societe

Contact : Monsieur Lou BILLOUD70 rue de la Tramontane – 13090 Aix en ProvenceTél. : +33 (0) 442 66 56 60Courriel : [email protected]

RECHERCHE DE REPRENEURS DANS LE CADRE D’UN REDRESSEMENT JUDICIAIREDénomination sociale : SAS GEO SENTINEL

Activité : conception de logiciel et objet connecté dans le secteur de la santé et la sécurité despersonnes fragiles, analyse des alertes de santé de géolocalisation et des appels SOS.

Développement et vente de montres ou de trackers permettant : de mesurer la tension artérielle,la saturation en oxygène et le rythme cardiaque ; de géolocaliser les porteurs de l’outil ; de passer

des appels de détresse sur un numéro pré enregistré.Localisation : Aix-Marseille

C.A. HT 2019 : (exercice 2019, sur 12 mois) : 128 K€ – Projections 2020-2021 : 461 K€Nombre de salariés : 5 personnes – Immobilisations au 31.12.2019 : 643 K€

Date limite de remise des offres auprès de la SELARL de SAINT-RAPT & BERTHOLET :22 janvier 2021

L’accès au dossier de présentation se fera par dataroom. Les identifiants de connexion seront communiquésaprès transmission d’un engagement de confidentialité disponible sur le site : aj-specialises.fr/societe

Contact : Monsieur Antoine MANENTSainte Victoire, angle ouest –70 rue de la Tramontane13090 Aix en Provence – Tél. : +33 (0) 442 66 56 60Fax: +33 (0) 442 65 20 96 – : [email protected]

Société : MAKEEN ENERGY TECHNOLOGY CENTER (ex-SIRAGA)Activité : Conception, fabrication et montage de machines et ensemble

pour l’emplissage, l’entretien et la distribution de bouteilles GPLSiège social : Buzançais (36500)

Effectif actuel : 78 salariés – CA au 31.12.2019 (15 mois) : 16 475 282 €Date ultime de dépôt des offres: 15 janvier 2021 à 12h00

Les tiers sont invités à remettre leur proposition (conforme à l’article L.642-2 du codede commerce) en 6 exemplaires à l’Administrateur Judiciaire, Me Guy PIERRAT.

L’accès à une data room électronique sera autorisé après régularisation d’un engagementde confidentialité et une présentation succinte du candidat à la reprise.

Les candidats intéressés sont invités à se manifester par télécopie ou e-mail auprès de:Me Guy PIERRAT, Administrateur Judiciaire – 24 rue Chanzy – 28000 Chartres

E-mail : : [email protected]

APPEL D’OFFRES DE REPRISE DANS LE CADRED’UNE PROCÉDURE DE REDRESSEMENT JUDICIAIRE

APPEL D’OFFREReprise d’actifs de la SAS MARANATHA :

Actions & comptes courantsArticle L642-19 C.COM

100 % du capital del’EURL « LE RELAISD’AUBAGNE » (hôtel)

RCS Marseillen°453 271 280

C/C créditeur détenu parSAS MARANATHAau passif de SARL

LE RELAIS D’AUBAGNE(1.7 M€)

550 actions détenues par la SASMARANATHA sur les 986.448 actions

composant le capital de laSCS FINOTEL VALORISATION 6

(restaurant)

Informations et conditions sur :www.louis-lageat.fr / [email protected]

DLDO : 23.12.2020 à 12h00en l’étude du mandataire judiciaire en charge de la liquidation judiciaire de la SAS MARANATHA.

Entre les mains de Me Christophe BASSE171, avenue Charles de Gaulle – CS 20019 – 92521 Neuilly sur seine CEDEX

Contact : [email protected]

A VENDREChangeur France International SA (ex Banque Travelex)

8 FONDS DE COMMERCE DE BUREAU DE CHANGEET LES DAB PARTOUT EN FRANCE :

(Conformément aux articles L. 642-19 et suivants du code de commerce)

- 52 CHAMPS ELYSEES : 52 av. des Champs Elysées 75008 Paris- 125 CHAMPS ELYSEES :125 av. des Champs Elysées 75008 Paris- OPERA : 8 Place de l’Opéra 75009 Paris- SAINT MICHEL : 4, boulevard Saint Michel 75006 Paris- RAMBUTEAU : 42, rue de Rambuteau 75003 Paris- RIVOLI : 194, Rue de Rivoli 75001 Paris- CANNES : 8 Rue d’Antibes 06400 Cannes- LILLE : 69, rue Faidherbe 59800 Lille

Date limite dépôt des offres : LUNDI 18 JANVIER 2021 A 11H00

APPEL D’OFFRESRECHERCHE DE CANDIDATS

EN VUE D’UNE CESSION D’ENTREPRISE(L.642-2 et suivants du Code de commerce)

SOCIETE DE LOCATIONS DE MOBILIERPOUR LES SALONS, CONGRES ET EVENEMENTIEL

Jugement d’ouverture : 23 novembre 2020Activité : Organisation de foires, salons professionnels et congrès

Siège social : GONESSE (95)Effectif total : 59 salariés

Carnet de commandes : NéantClientèle : Organisateurs de salons, Décorateurs de stand haut

de gamme, Agences évènementielles, Parcs d’expositionC.A. : Au 31/12/2018 : 12,6 M€

Au 31/12/2019 : 13,7 M€EBITDA : Au 31/12/2018 : 1,8 M€

Au 31/12/2019 : 2,7 M€Date limite de dépôt des offres: 11 janvier 2021 à 17h00

SELARL AJRS – Me Philippe [email protected]

L’accès aux informations sera possible après demande écrite précisant l’identité du candidatrepreneur et justifiant de sa capacité commerciale et financière à intervenir dans cette affaire.

TOUT CANDIDAT DOIT SE MANIFESTER PAR ÉCRIT AUPRÈS DE:

Entreprise spécialisée dans la productionde pâte à papier, localisée à Tarascon (13150)

En redressement judiciaire306 salariés

Chiffre d’affaires 2019 (12 mois) : 117,5 M€Résultat d’exploitation 2019 (12 mois) : -28,7 M€

RECHERCHE DE CANDIDATSREPRENEURS EN PLAN DE CESSION

Pour accéder aux dossiers de présentation, les candidats intéressés sont invités à contacter par écrit :Me Joanna Rousselet – Administrateur judiciaire – 38 avenue Hoche – 75008 Paris

[email protected] / [email protected] Jean Baron – Administrateur judiciaire – 10 rue d’Alsace Lorraine – 31000 Toulouse

[email protected] / [email protected] date limite de remise des offres est fixée au 4 janvier 2021 à 12H00.

Société exerçant des activités d’injection sous pression,d’usinage et d’assemblage de pièces en aluminium à destination

de grands constructeurs automobiles internationaux.

En redressement judiciaire :294 salariés

C.A. au 31/12/2019 : 36,3 M€ / Résultat d’exploitation au 31/12/2019 : -3 M€Exploitation de deux usines dans le Jura (39)

Pour accéder au dossier de présentation, les candidats intéresséssont invités à contacter par écrit :

Me Frédéric Abitbol et Me Joanna Rousselet – Administrateurs judiciaires38, avenue Hoche – 75008 Paris – [email protected] et [email protected]

La date limite de remise des offres est fixée au 18 janvier 2021 à midi.

RECHERCHE D’INVESTISSEURS ET/OU DECANDIDATS REPRENEURS EN PLAN DE CESSION

Administrateurs Judiciaires Associés Selarl BCM - Me Jean-Baptiste ALBERTINI

• Activité : Post-production complète (programmes TV 75% /fiction 25%)• Localisation : Studios / Bureaux situés à Boulogne-Billancourt (92)• Effectifs : 22 salariés• C.A. HT : 3,5 M€ au 31 décembre 2019 / 3,8 M€ en 2018 / 3,9 M€ en 2017• C.A. HT estimé en 2020 : 2 M€

Les offres tendant au maintien de tout ou partie de l’activité de l’entreprisedevront être soumises au plus tard le : 15 janvier 2021 à 12h00.

SOCIETE DE POST PRODUCTION EN REDRESSEMENT JUDICIAIRERECHERCHE PARTENAIRE OU CESSIONNAIRE

Un dossier de présentation ou data room virtuelle sera mis en place. L’accès à cette data room peut être obtenu surdemande écrite motivée justifiant d’une capacité financière, industrielle ou commerciale adaptée, et après signatured’un engagement de confidentialité à l’adresse suivante : [email protected]

RECHERCHE DE PARTENAIRES / CANDIDATS A LA REPRISEOFFRE DE REPRISE EN « PRÉPACK CESSION »

Activité : Plateforme Saas permettant, la création, le stockage et ladiffusion de contenus interactifs auprès des médias

C.A. au 31/12/2019 : 850 K€Effectifs : 7 salariésLocalisation : Paris 2ème

La date limite de dépôt des offres est fixée au : 8 janvier 2021 à 17h00.

Cet appel d’offres s’inscrit dans le cadre d’une procédure amiable pour laquelle lecaractère confidentiel sera préservé (article L. 611-15 du Code de commerce). Aussi,le candidat devra signer un engagement de confidentialité manuscrit avant tout accès àla Dataroom. Enfin, l’offre déposée devra respecter les dispositions de l’article L.642-2 du Code de commerce.

Franck MICHEL - Alain MIROITE - Charles GORINS - Nicolas DESHAYES - Christophe BIDAN - Serge PREVILLE - Lesly MIROITE -Nicolas GRICOURT - Céline MASCHI - Hervé COUSTANS - Maxime LEBRETON

Blois-Bobigny-Cayenne-Chartres-Colmar-Créteil-Evreux-Fort de France-Gosier-Laval-Le Mans-Marseille-Melun-Mulhouse-Nantes-Nevers-Orléans-Paris Flandrin-Paris La Fayette-Poitiers-la Réunion-Rennes-Rouen-Saint Martin-Tours-Versailles

Me Lesly MIROITE48 rue La Fayette2e étage75009 PARISRéf. dossier : 23794

CONTACT :Guillaume COGENTél : 01.48.24.34.35Fax : [email protected]

RECHERCHE DE PARTENAIRES / REPRENEURSDANS LE CADRE D’UN REDRESSEMENT JUDICIAIRE

DATE LIMITE DE RÉCEPTION DES PROPOSITIONS : LUNDI 18 JANVIER 2021 À 12H00

Activité de l’entreprise : Transport routier de marchandisesLocalisation : DROME (26)Effectif actuel : 18 salariésCA HT du dernier Exercice : 1.085 K€ (au 30.06.2020 – 12 mois)Valeur nette comptable des immobilisations du dernier exercice connu : 12 K€ (au 30.06.2020 – 12 mois)Locaux d’activité : Bail commercial

Locaux et terrain de 1.000 m²Loyer annuel H.T de 15.600 €

Merci de contacter : AJ PARTENAIRESMaîtres Didier LAPIERRE et Ludivine SAPIN

Mme Michèle VARLOUD – 18 rue Jacquemart, 26100 ROMANSTél : 04 75 02 86 03

Courriel : [email protected]

Siège social : Région Nouvelle-AquitaineActivité :• Agence : Agence Web spécialisée dans le e-commerce avec une équipe d’environ 25 personnes.Son coeur de métier historique est l’activité d’Agence : la conception, la maintenance et l’hébergementde sites marchands (plateformes de e-commerce). La société élabore, conçoit et pilote des sitesBtoC et BtoB sécurisés et sur mesure pour ses clients, majoritairement des PME et ETI.• Logiciel : un nouveau logiciel à usage des fonctions commerciales des entreprisesNombre de salariés : Entre 20 et 30 – Clientèle : B to BEléments comptables : Exercice du 01/01/2019 au 31/12/2019 : CA : 2 037 790 €

Exercice du 01/01/2018 au 31/12/2018 : CA : 1 564 343 €L’accès aux informations (data-room électronique et/ou dossier de présentation) sera possible aprèsdemande écrite précisant l’identité du Candidat-repreneur et justifiant de sa capacité commerciale etfinancière à intervenir sur cette affaire et après la régularisation d’un engagement de confidentialité.

Date limite de dépôt des offres: le 22 janvier 2021 à 12h00 dernier délai en l’étude de:SELARL AJ UP - Cédric LAMAIRE, Administrateur Judiciaire 13 rue de la Boule d’Or – 79000 Niort

Collaborateur en charge Mr Samuel FAURE – Tél : 02 40 20 11 18 / [email protected]

SOCIETE D’EDITION DE LOGICIELS ET DE CREATION DE SITES WEBRECHERCHE UN PARTENAIRE FINANCIER OU UN REPRENEUR

RECHERCHE DE PARTENAIRES / CANDIDATSA LA REPRISE EN REDRESSEMENT JUDICIAIRE

Activité : Auto/moto-école (permis B, BEA, AM, moto…) etformation professionnelle (permis PL, CACES...)700 stagiaires permis B et Moto et 1 000 stagiaires enformation pro en 2020

C.A. estimé au 31/12/2020 (12 mois) : 1,6 M € - Effectif : 24Localisation : Vienne (86)Actifs à céder : fonds de commerce, véhicules en propre et en crédit-bail,

droit au bail, …Date du Redressement Judiciaire : 3 décembre 2020La date limite de dépôt des offres est fixée au : 12 janvier 2021 à 12h00Une data room électronique hébergée sur notre site www.ajadataroom.fr seraaccessible après acceptation d’un engagement de confidentialité.

Réf. à rappeler : 23816

Me Serge PREVILLE10 rue des Grandes Ecoles86000 POITIERS

CONTACT :Mathieu DEREAUTél. : 05.49.62.02.45Fax : [email protected]

Franck MICHEL - Alain MIROITE - Charles GORINS - Nicolas DESHAYES - Christophe BIDAN - Serge PREVILLE - Lesly MIROITE -Nicolas GRICOURT - Céline MASCHI - Hervé COUSTANS - Maxime LEBRETON

Blois-Bobigny-Cayenne-Chartres-Colmar-Créteil-Evreux-Fort de France-Gosier-Laval-Le Mans-Marseille-Melun-Mulhouse-Nantes-Nevers-Orléans-Paris Flandrin-Paris La Fayette-Poitiers-la Réunion-Rennes-Rouen-Saint Martin-Tours-Versailles

Me Bernard HOUPLAIN46 Promenade jean Rostand93000 BOBIGNY

Page 30: Les Echos - 11 12 2020

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ARGENTGRATUITENCORELONGTEMPS

ques, comme l’escalade, la start-up basée à Chamonix élargit petit à petit son champ d’action. « 75 % du marché de la montagne est drainé par la randonnée et notre objectif est de conquérir cette communauté, car la base de l’information est la même que pour les autres disciplines », détaille Tim MacLean. Déjà 35 % des posts de ses utilisateurs concer-nent cette pratique familiale grandpublic.

Ambitions mondialesL’ambition de l’équipe cofondée parXavier Bougouin ne s’arrête pas à laFrance. « Nous voulons devenir l’application de référence mondiale pour la montagne », assume Tim MacLean, qui a notamment tra-vaillé dix ans au marketing chez Apple. Si 90 % de ses utilisateurs sont français, 4 % sont suisses, et 3 %situés aux Etats-Unis. Disponible en anglais comme en français, l’appli permet aussi d’avoir accès

aux itinéraires dans sa langue. Whympr n’est pas seule sur son marché. L’américain AllTrails a levé un total de 78 millions de dol-lars depuis sa création en 2010, et l’allemand Fatmap a déjà un pied en France. Leur positionnement respectif n’est pourtant pas aussi large que Whympr, dont le cofon-dateur estime qu’une place est encore à prendre : « Ils ont tous une approche spécifique, via GPS ou les cartes 3D, mais personne n’a encore réussi à rassembler les communau-tés avec l’ensemble des infos clés pourpratiquer toutes les disciplines de montagne. »

Avant-poste au lac TahoeLe chemin pour y parvenir est étroit, mais il existe. C’est pourquoi l’équipe de la jeune pousse, qui vient d’entrer au Village by CA de Grenoble va certainement cher-cher à lever une série A dès l’an pro-chain, notamment pour accélérer

Guillaume Bregeras @gbregeras

Pas de télésiège ? Qu’à cela ne tienne ! La montagne regorge de ressources et d’activités pour occu-per ses amoureux et tous ceux qui imaginaient dévaler les pistes cet hiver. Pour les aiguiller, plusieurs start-up proposent des applica-tions, en règle générale spécialiséesdans une pratique bien précise. Ce n’est pas le cas de Whympr, qui afait le pari inverse, rassembler les différentes pratiques (excursion, escalade, ski de randonnée…) au sein d’une même plateforme en lui donnant une forte dimension communautaire.

A l’approche du premier breakhivernal, son cofondateur Tim MacLean se tient prêt : « Au tout début du confinement, nous avons senti un impact négatif, car plus per-sonne ne postait d’images. Mais cet été, les Français avaient envie d’acti-vité “outdoor”, et nous l’avons cons-taté sur notre activité. »

Augmenter la part des abonnés payantsCette période si particulière qu’est 2020 lui a permis d’atteindre les 100.000 téléchargements, dont 65.000 créations de compte (10.000 actifs et 700 qui paient l’abonnement mensuel pour accé-der à plus de services). « Avec 1 % descomptes créés transformés en abon-nés payants, nous sommes un peu au-dessous de la norme du marché, analyse l’entrepreneur. Notre objec-tif est de monter à 3 %. » L’utilisateurlambda accède à 60.000 itinéraires et à des outils de communication. Mais, pour accéder à un mode horsligne, au tracker GPS ou aux alertesmétéo, il faut s’acquitter d’un abon-nement, qui augmente progressive-ment au rythme des services inclus,comme les cartes IGN ou le descrip-tif précis d’itinéraires, textes et pho-tos à l’appui.

Entrée sur le segment montagnepar les disciplines les plus techni-

SPORT

mande, demande de rembour-sement ou d’échange, etc.). « Lesdix questions les plus fréquentes représentent 60 % du volume total du service client », insiste Romain Lapeyre. Les commer-çants qui ont souscrit à un abonnement au logiciel peu-vent ainsi se concentrer sur la résolution des problèmes les plus complexes, en échangeant,par exemple, directement au téléphone avec les clients.

L a j e u n e p o u s s e , q u iemprunte son nom à un célèbredialogue de Platon, se présente ainsi comme « un canal de loyauté » qui veut aider les e-commerçants à fidéliser leursclients et, in fine, doper leur chiffre d’affaires. Le pari est gagnant. Alors que la crise sani-taire a poussé de nombreuses enseignes à prendre le virage del’e-commerce pour compenser la fermeture brutale de leurs magasins, Gorgias affirme avoirconnu une croissance de 300 % cette année. Une performance qui n’est pas passée inaperçue chez les investisseurs.

Six hubs régionauxRésultat : la jeune pousse a annoncé, jeudi, avoir levé 25 millions de dollars lors d’un tour de table en Serie B auprès de Sapphire Ventures, Alven, Amplify, CRV et SaaStr. La société avait déjà levé 14 mil-lions de dollars en novem-bre 2019.

L’application de Gorgias estutilisée par plus de 4.500 bouti-ques en ligne, parmi lesquel-les Steve Madden, Electrolux ouSergio Tacchini. La jeune pousse profite de son intégra-tion sur les grandes platefor-mes de l’e-commerce telles que Shopify, Magento ou BigCom-merce. La société veut profiter de ses nouveaux financements pour améliorer les performan-ces de son logiciel et doubler le nombre de ses salariés, répartisdans six grands hubs régionaux(Paris, San Francisco, Charlotte,Toronto, Belgrade et Sydney). L’e-commerce se fiche bien des frontières. n

Adrien Lelièvre @Lelievre_Adrien

Faute d’activité économique, c e r t a i n s p a t r o n s o n t é t écontraints de placer des sala-riés au chômage partiel cette année, voire d’organiser de dou-loureux plans de licencie-ments. Ce fut tout le contraire pour Romain Lapeyre et Alex Plugaru.

Alors que la pandémie duCovid-19 déferlait sur le monde, les cofondateurs de Gorgias, une start-up spécialisée dans le service-client pour les e-com-merçants, ont passé une partie non négligeable de leur temps àsigner des contrats de travail. « On a embauché 80 personnes depuis mars », explique RomainLapeyre. La société en comptait30 au début de l’année.

Fondé à Paris en 2015, Gor-gias avait à l’origine mis au pointun outil pour écrire des e-mails plus rapidement via des tem-plates et des raccourcis. Au fil deleurs échanges avec d’autres entrepreneurs, les patrons de lajeune pousse constatent toute-fois que le service client est sou-vent l’un des points faibles des marchands en ligne. De quoi lesconvaincre de s’attaquer direc-tement à ce problème.

« Un canal de loyauté » « Gorgias est en quelque sorte unegrosse boîte mail qui permet d’aider les e-commerçants à gérer leur service-client à un seul endroit, où vont atterrir toutes les requêtes, qu’elles viennent pare-mail ou Facebook », résume Romain Lapeyre. Grâce aux outils de l’IA, la pépite fournit des réponses toutes faites aux questions les plus simples (suivi ou annulation d’une com-

E-COMMERCE

La pépite aide les boutiques en ligne à mieux gérer leur service client grâce à une application payante qui centra-lise les requêtes.

Elle a connu une croissance rapide cette année avec la crise sanitaire.

Service client pour les e-commerçants : Gorgias lève 25 millions de dollars

4.500BOUTIQUES EN LIGNEutilisent l’appli Gorgias.

Incubateurs, accélérateurs, struc-tures d’accompagnement… tous souffrent, depuis mars dernier, et ledébut de la crise du Covid-19. Pour-tant, l’un de ses plus anciens repré-sentants, Le Village by CA, poursuitson activité en démontrant une forme de résistance. Son antenne parisienne a même enregistré 58 millions d’euros de fonds levés par ses jeunes pousses depuis le début de l’année. Un montant qui monte à 520 millions depuis ses débuts en 2014, et tutoie même le milliard d’euros cumulés (914 pré-cisément) si l’on élargit l’observa-tion à ses 36 antennes.

« 90 % des start-up que nousaccompagnons sont encore vivantes,

défend Fabrice Marsella, directeur général du Village by CA. Cela s’explique notamment parce que nous les embarquons à un stade de maturité où elles ont déjà fait leurs preuves de concept. Et malgré le con-finement, un plus grand nombre d’entre elles que ce que je pouvais imaginer arrivent à passer la crise relativement facilement. »

Une autre explication vient dumodèle de cette société d’accompa-gnement, filiale du Groupe Crédit Agricole. Le Village by CA met en relation start-up et grands groupes pour aller plus loin que les simples POC, qui ont longtemps permis de boucler les budgets de ce type de structures. « Nos offres ont changé

de nature au fur et à mesure de la maturité des corporates, détaille Fabrice Marsella. L’acculturation est terminée, et nous sommes dans une phase où le retour sur investisse-ment est exigé. Nous participons d’ailleurs à l’élaboration d’outils con-crets pour mieux encadrer la relationentre start-up et grands groupes, avecd’autres acteurs de l’innovation. »

Des ambitions plus fortesPour soutenir ses pépites pendant l’éclatement de la crise sanitaire, LeVillage by CA a dématérialisé son accompagnement. Il était d’abord question d’obtenir des aides de l’Etat, puis de trouver des manières de continuer l’activité malgré le contexte, ou de lever des fonds à distance. Depuis la fin du premier confinement, l’espace parisien, situé dans le huppé 8e arrondisse-ment, accueille à nouveau les entre-preneurs et leurs équipes qui le souhaitent.

Une approche que l’on retrouveaussi dans les « villages » en région,notamment à Grenoble que la

pépite Whympr vient de rejoindre pour un accompagnement de deux ans. « Le secteur de la montagne, à qui s’adresse cette start-up, nous touche particulièrement, explique Brice Lemoine, directeur de cette antenne. Ils veulent devenir la réfé-rence mondiale d’ici à 2025 et nous allons les aider à s’internationaliser, notamment aux Etats-Unis, grâce à notre réseau. »

Cette ambition traduit celle descentaines d’autres jeunes pousses qui rejoignent cet accélérateur. Et sitoutes, loin de là, n’auront pas cette trajectoire, elles pourront au moinsse frotter de près à la relation si essentielle avec le monde des gran-des entreprises. — G. B.

4À NOTERLe Village by CA propose également un programme d’accompagnement aux entreprises pour notamment immerger leurs collaborateurs dans le quotidien des start-up.

Le Village by CA face aux mutations de l’accompagnementLa filiale du Crédit Agricole opère depuis 2014 des structures d’accélération des start-up et de formation des grands groupes. Malgré la crise sanitaire, les jeunes pousses de l’antenne parisienne ont levé un total de 58 millions d’euros.

L’utilisateur lambda de Whympr peut accéder à 60.000 itinéraires et à des outils de communication.

sa présence outre-Atlantique. Elle ya déjà envoyé un développeur basé au lac Tahoe, un temple de l’« outdoor » situé dans le Nevada, pour nouer des partenariats straté-giques en vue de proposer des servi-ces comme les alertes avalanches. En parallèle, elle commence à ima-giner d’autres pistes de revenus, conclue Tim MacLead : « J’aimeraispouvoir un jour prévenir notre utili-sateur que la corde achetée il y a dix ans est usée, donc dangereuse, et qu’ilest donc temps d’en changer. Mais nous sommes une start-up, et il faut prioriser nos actions. »

4À NOTERWhympr avait réalisé une première levée de fonds de 430.000 euros via des business angels et la plateforme de financement participatif Sowefund.

l L’interdiction d’utiliser les remontées mécaniques favorise l’essor des autres disciplines, tels l’escalade ou le ski de randonnée. l Basée à Chamonix, cette jeune pousse tente de s’imposer comme un outil de référence pour tous les amoureux de la montagne.

L’appli Whympr à la conquête des passionnés de montagne

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Pour soutenir ses pépites pendant la crise sanitaire, Le Village by CA a dématérialisé son accompagnement.

START-UP Vendredi 11 et samedi 12 décembre 2020 Les Echos

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Bénédicte Weiss—Correspondante à Strasbourg

A Strasbourg, Rhenus Logistics Alsace s’équipe pour faire face au défi du stockage de vaccins contre leCovid-19. L’entreprise va démarrer la construction dans quelques semaines d’un nouvel entrepôt sous température dirigée, d’une surface de 8.500 mètres carrés – unprojet décidé pendant la crise sani-taire et visant à renforcer les surfa-ces de stockage existantes. Conçu pour du froid positif (15 °C – 25 °C) et

négatif (jusqu’à –20 °C), l’entrepôt pourra s’adapter à d’autres besoins grâce à l’ajout d’équipements com-plémentaires – pour descendre à des températures plus basses, par exemple. « Cette coquille permettra aussi d’être flexible par rapport aux exigences demandées par [certains] produits pharmaceutiques que nous conservons, comme les produits oph-talmiques et progestatifs », explique Laurent Schuster, PDG de Rhenus Logistics France.

Fioles ou lotsLe logisticien, filiale du géant alle-mand éponyme, et qui emploie 1.500 salariés en France toutes bran-ches confondues, maîtrise le froid à destination du secteur pharmaceu-tique depuis plus de trente ans maintenant. Il dispose en Alsace de 50.000 mètres carrés de surface de

stockage en la matière. Les produitspharmaceutiques y séjournent deux mois en moyenne. Les surgéla-teurs, achetés à des fabricants euro-péens et asiatiques, peuvent attein-dre la température de –196 °C. Bien plus basse, donc, que les –80 °C nécessaires à la conservation du vaccin de Pfizer-BioNTech contre le Covid-19. « Des contacts ont été pris avec certains distributeurs à ce

sujet », relate Laurent Schuster, qui toutefois précise que des échanges sont aussi en cours pour la presta-tion de services liés tels que l’étique-tage, la préparation de commandes à façon, ou l’emballage selon un pro-tocole spécifique (définissant par exemple la quantité de neige carbo-nique allouée).

Certaines inconnues subsistent,notamment en matière de capaci-tés de stockage. « Tout dépendra du mode de conditionnement du vaccin,par fioles ou par lots », estime le directeur général. Avant le début dela pandémie, en janvier 2020, la construction d’un autre entrepôt, entièrement consacré aux tempé-ratures positives, avait déjà été annoncée. Celui-là a été livré, d e p u i s . D ’ u n e s u r f a c e d e 12.600 mètres carrés, il n’est pas encore entièrement occupé. n

Le logisticien Rhenus adapte ses entrepôts aux conditions de stockage exigéesLe logisticien strasbour-geois, qui dispose déjà de 50.000 mètres carrés de stockage froid, va cons-truire un nouvel entrepôt, destiné en partie aux doses de vaccin anti-Covid.

Impossible d’évaluer le montant des marchés, les entreprises du froid sont en attente du schéma final de distribution décidé par l’Etat. Photo Pfizer/Handout via REUTERS

ques) sans limite de temps, pour les besoins de la recherche. « A –20 degrés, ils ne se conservent quesix mois à un an », explique le diri-geant. « Un appareil de 1.000 litres,une armoire d’un mètre sur deux, permet de ranger 72.000 éprouvet-tes. » Pour les vaccins, cela dépen-dra du conditionnement…

Son entreprise, mais aussid’autres concurrents étrangers, a été consultée par le ministère de la Santé, par des logisticiens, par des industriels et même les doua-nes en vue de la conservation du fragile produit Pfizer-BioNTech. La Grèce lui a déjà passé une com-mande via un maillon de la chaîne logistique. Christophe Roux s’impatiente de participer àl’effort français.

CouveusesFroilabo, né Couprie à Lyon en 1918, fabriquait à l’origine des cou-veuses pour bébés. La PME, qui produit toujours des étuves, a investi deux millions d’euros en 2018 pour tripler la surface de sonusine roumaine, où sont produi-tes les grandes séries. Meyzieu, avec son bureau d’études, fabri-que les modèles spécifiques. Froi-labo investit de nouveau quelquescentaines de milliers d’euros sup-plémentaires dans la productivitéafin de tripler sa cadence dans lesprochains mois, en vue du pic de forte demande.

Le marché de ces congélateurs,à plus de 10.000 euros pièce, était déjà dynamique grâce « à de nom-breuses universités, centres de recherche ou laboratoires pharma-ceutiques qui constituent leur bio-banque à coup de 10 ou 30 appa-reils », dit le directeur général. « On les vide rarement : on accu-mule au fil des ans, comme un datacenter ». D’où les besoins inces-sants de nouveaux matériels. n

Léa Delpont—Correspondante à Lyon

Coup de chaud sur les supercon-gélateurs. Ils étaient connus desseuls laboratoires et de quel-ques industriels. Ces congéla-teurs à –80 °C, sont désormaisfamiliers du grand public à lafaveur de l’arrivée imminente duvaccin Pfizer-BioNTech enFrance. Sur un marché françaisestimé à 3.000 appareils par an,il ne reste qu’un seul fabricanttricolore, Froilabo, à Meyzieuprès de Lyon.

L’entreprise centenaire quicompte 75 salariés et réalise 8 millions d’euros de chiffre d’affaires, dans le giron du groupeaméricain Techcomp, spécialiste des équipements scientifiques de laboratoire, n’a pas attendu le vac-cin anti-Covid pour connaître un sursaut d’activité, elle a bondi de 20 % durant les deux vagues épi-démiques. Depuis le printemps, elle a livré « une centaine d’appa-reils aux hôpitaux de Paris et quel-ques dizaines à ceux de Lyon », explique le directeur général Christophe Roux, pour conserverles échantillons de biopsies préle-vés sur les malades.

Pas de limite de tempsCes supercongélateurs, dotés de deux compresseurs, sont cou-ramment utilisés dans le milieu hospitalier et pharmaceutique pour stocker des prélèvements biologiques (sang, tissus organi-

Le dernier fabricant français de congélateurs à –80 °C stocke déjà les prélèvements effectués sur les malades du Covid-19. Afin d’être prêt pour les vaccins, il investit sur son site de production.

Froilabo triple sa production de supercongélateurs

tout employant 50.000 salariés et exploitant 100.000 camions frigori-fiques. Soit un véhicule frigorifique pour 450 habitants, au lieu d’un pour 12.000 habitants en Chine. « Nous maîtrisons les contraintes de température, la traçabilité et la sécu-rité avec un système d’alarme redon-dant, appuie le dirigeant de GandonTransports. Notre personnel reçoit des formations spécifiques, et nous sommes audités avant de travailler pour les laboratoires. »

Si le nombre de doses, exprimé enmillions, est impressionnant, AlexisDegouy, délégué général de l’Union des entreprises de transport et de logistique de France (Union TLF), relativise : « On reste sur un tonnage limité et sur une logistique maîtrisa-ble. » Les projections font état de 10.000 tonnes de vaccins à convoyer,« soit entre 150 et 300 semi-remor-ques mobilisés, pour une opération échelonnée sur plusieurs semaines, voire plusieurs mois ». « Ce n’est pas

le marché du siècle, confirme Jean-Eudes Tesson. Six millions de doses de vaccins, c’est environ 1.000 palet-tes. Soit l’équivalent de ce qui sort cha-que jour d’une usine de brioches… »

Le secteur se prépare à un trans-port spécifique : le vaccin ne sera

pas mélangé à d’autres produits dans les remorques. « Il y a des con-traintes mécaniques liées au très grand froid », précise Jean-Eudes Tesson. Les caissons contenant de la carboglace à – 70 °C devront être placés dans des enceintes à – 25 °C, pour réduire l’écart de température,sinon ils seront difficiles à refermer.

La filière sera impliquée de bouten bout. « Aucune entreprise ne pourra prendre un vaccin n’importe où pour l’amener n’importe où. Il y aura plusieurs intervenants », souli-gne Jean-Eudes Tesson. D’où l’enjeude la traçabilité et du suivi de tempé-rature, créneau sur lequel se préci-pitent plusieurs start-up. « Si un vac-cin subit des ruptures de la chaîne du froid, il sera dégradé. Ses effets secon-daires peuvent même être accentués. Avoir des supercongélateurs, c’est bien beau, mais le suivi de tempéra-ture est central », explique Adrien Content, à la tête de Koovea, start-upspécialisée dans le traçage. n

l Le convoyage de millions de doses de vaccins contre le Covid-19 est une opportunité pour la chaîne du froid française.l Les acteurs logistiques attendent le cahier des charges de l’Etat pour démarrer au premier semestre 2021. L’opération est sensible, mais les professionnels évoquent « un tonnage limité et maîtrisable » de 10.000 tonnes de vaccins.

Covid : les logisticiens du froid dans les starting-blocks pour transporter les vaccins

Hubert Vialatte—Correspondant à Montpellier

Avec le convoyage de dizaines de millions de doses de vaccins, la filièrelogistique va bénéficier d’un coup deprojecteur inédit. Si quelques don-nées techniques sont connues – le vaccin de Pfizer-BioNTech devra être conservé à – 80 °C –, les transpor-teurs restent encore dans l’attente des modalités de la part de l’Etat. Quels vaccins prendront le lea-dership commercial ? Où les ache-miner ? Selon les dernières informa-tions, le gouvernement compte créercinq plateformes nationales équi-pées de supercongélateurs. Les colis isothermes seront ensuite transpor-tés en flux tendu par des grossistes répartiteurs vers les pharmacies.

Les agences régionales de santé(ARS) sont en train de recenser les effectifs à vacciner dans chaque département. « La filière est dans l’expectative. Nous n’avons pas encore beaucoup de données. De fait, il est difficile d’évaluer le montant dumarché. Tout dépendra du schéma final de distribution », explique le transporteur mayennais Joël Gan-don, qui emploie 280 salariés, avec une flotte de 160 semi-remorques etun chiffre d’affaires de 28 millions d’euros. Il est l’un des trois spécialis-tes français du transport de vaccins,avec Star Service et Eurotrans-pharma.

« La logistique n’est pas la mêmepour livrer un hôpital, un centre logistique départemental ou un médecin de campagne. Il manque uncahier des charges. On ne peut rien mettre en place tant qu’on ne sait pasprécisément où livrer, dans quelles quantités et à quelle température », enchaîne Jean-Eudes Tesson, prési-dent de La Chaîne logistique du froid, qui regroupe trois organisa-tions professionnelles du secteur (UNTF, USNEF et Transfrigoroute France). « C’est souvent comme ça : l’Etat met du temps à se décider, et il nous faudra être très réactifs », souf-fle un professionnel.

Une journée d’usine de briochesLa chaîne logistique du froid trico-lore compte des géants du secteur (Stef Logistique Santé, STG, Alloga…), mais surtout beaucoup detrès petites entreprises régionales, le

SANTÉ

« Notre personnel reçoit des formations spécifiques, et nous sommes audités avant de travailler pour les laboratoires. »JOËL GANDONDirigeant de Gandon Transport

8.500MÈTRES CARRÉS La surface d’un nouvel entrepôt sous température dirigée, dont la construction commencera dans quelques semaines.

PME & REGIONSLes Echos Vendredi 11 et samedi 12 décembre 2020

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32 // PME & REGIONS Vendredi 11 et samedi 12 décembre 2020 Les Echos

innovateurs

LE PROJET AVIONS MAUBOUSSIN

Alérion M1H : un avion écologique et superagile

roue de lave-vaisselle, engre-nage, adaptateur, etc. –, souvent introuvable sur le marché. A ce jour, la start-up, créée en février 2000 à Aix-en-Provence, a enregistré 400 de ces fichiers de fabrication sur son site, issus surtout de la contribution volon-taire de spécialistes de la modéli-sation. « Ces éclaireurs agissent par conviction pour lutter contre l’obsolescence programmée. Nous appuyons leur combat », milite Pierre-Jacques Lyon.

Prix moyen de 14 eurosPour se développer, Marklix compte sur l’amendement CD1308, adopté le 26 novembre. Il oblige le fabricant d’un bien dequelque nature qu’il soit « à met-tre à disposition des vendeurs ouréparateurs les plans de fabrica-tion par imprimante 3D des piè-ces détachées nécessaires à son fonctionnement ». La start-up estime qu’au moins 10 % des piè-ces d’un appareil de la vie cou-rante sont reproductibles. Les volumes sont énormes : une simple gamme d’aspirateurs high-tech compte plus de 10.000 pièces d’assemblage. « Nous pouvons digitaliser ces stocks physiques et les produire à la demande », défend Pierre-Jac-ques Lyon. Le coût du service varie de 8 à 80 euros selon la complexité de la pièce. Marklix se rémunère en prélevant une commission et prévoit jusqu’à 100.000 ventes l’an prochain, au prix moyen de 14 euros l’unité. n

Des pièces détachées en impression 3D

(UTBM) et la plateforme de recherche sur la pile à combusti-ble FCLAB, le constructeur vise un premier vol en 2022 pour la version hybride électrique et, en 2024, en version hydrogène.

Géométrie variableMais l ’ innovation la plus brillante de ce petit avion léger aux ailes effilées, comme celles des premiers Mauboussin, est ailleurs. Elle réside dans la com-binaison de possibilités de décollage et d’atterrissage courts– avec des performances se rap-prochant des trajectoires d’héli-coptères – et de vitesses de croi-sière élevées. « La clé, c’est une voilure à géométrie variable, une hypersustentation, explique David Gallezot. On arrive à voler doucement ou vite en rentrant ou en déployant les volets arrière, dont les formes ont été bien calcu-lées. » Avec le décollage et l’atter-rissage sur moins de 200 mètres,l’ingénieur vise un maillage du territoire qui pourrait s’appuyer sur les 1.200 points d’atterris-sage, en France, capables d’offrirune piste de 300 mètres de long sur 20 de large. Le biplace, qui volera à une vitesse de 250 km/h,permettra de valider ces princi-pes, mais un prototype d’avion régional à six places à hydro-gène, l’Alcyon M3C, est déjà prêt à décoller. Il atteindra 370 km/h en vitesse de croisière, affichera une autonomie de 1.500 km et pourrait être commercialisé en 2026. L’entreprise, qui a investi 1 million d’euros, est en cours de levée de fonds. n

Date de création : 2020Président et cofondateur : Pierre-Jacques LyonEffectif : 2 personnesSecteur : Services

Paul Molga— Correspondant à Marseille

Moins de 20 % des pannes d’appareils du quotidien trou-vent une solution de réparation en France. C’est la preuve que le potentiel de ce marché n’est pas encore bien couvert. Le prési-dent-fondateur de Marklix, Pier-re-Jacques Lyon, l’a compris. Avec son associé, Thomas Boul-lier, il a mis au point une plate-forme d’intermédiation qui per-met à tous de commander en ligne la pièce détachée qui lui manque pour réparer un appa-reil électroménager ou un meu-ble. Son secret : un réseau indus-triel d’imprimantes 3D associé àune bibliothèque de fichiers de pièces . Sur le site de l’entreprise,un particulier peut obtenir un ersatz de la pièce plastique défectueuse – sabot de rasoir,

Mar

klix

LE SERVICE MARKLIX

Emmanuel Guimard— Correspondant à Nantes

Bouhyer poursuit la transforma-tion de ce vieux métier qu’est la fon-derie de fonte, servant à fabriquer les contrepoids des engins de tra-vaux publics ou de manutention. Lasociété vise en particulier le « zéro déchet » à cinq ans, « à l’exception des matières premières pouvant être réutilisées par d’autres entreprises »,précise Alain Mimouni, le PDG. La fonderie, qui emploie plus de 320 salariés à Ancenis (Loire-Atlan-tique) et dans sa filiale ardennaise Béroudiaux (réunies dans le groupe Cast), consacrera à cet objectif une partie de son pro-gramme d’investissement de 5,5 millions d’euros, soutenu par le plan de relance.

Déjà, le sable constituant lesmoules de fonderie, compacté par le biais de résine et d’additifs, est recyclé à 98 % par un système de tri,de purification et de lavage. Le volume restant, plus abîmé, s’avé-rait impossible à recycler. Avec la société Inerta, Bouhyer expéri-mente un procédé consistant à mélanger cette matière avec de la terre afin de créer un substrat de culture. Les racines des plantes poussant sur cette matière contri-buent à dépolluer le sable, et la bio-masse produite devient une source énergétique. D’autres matières res-tent à recycler tels les peintures ou les mastics, qui finissaient en

« Nous achetons 70.000 tonnes de matières premières de seconde main par an à partir desquelles nous fabriquons des pièces recyclables éternellement. »ALAIN MIMOUNIPDG de Bouhyer

déchetterie spécialisée. Car Bou-hyer se voit globalement comme une société de recyclage. « Nous achetons 70.000 tonnes de matières premières de seconde main par an, devieille fonte et de l’acier, à partir des-quelles nous fabriquons des pièces recyclables éternellement », estime Alain Mimouni. Là encore, le défi est de traiter les vieux moteurs ou les blocs freins destinés à être fon-dus mais en traitant auparavant les impuretés souillant cette matière.

Robot collaboratifPar ailleurs, pour remplacer les additifs servant au mélange de métaux, l’entreprise emploie désormais de la matière venant des piles et batteries usagées. En bout de course, Bouhyer en retire une matière résiduelle riche en zinc susceptible d’intéresser

d’autres industriels. L’entreprise investira aussi dans la mise en place de robots permettant le pilo-tage à distance des coulées rou-geoyantes. L’entreprise étudie notamment un cobot (robot colla-boratif) permettant de faciliter le geste sur 80 % de l’ébarbage des éléments bruts de fonderie, un tra-vail très éprouvant.

Le groupe exporte près de 90 %de sa production, notamment en Allemagne où il fournit la quasi-to-talité des constructeurs de gros matériel de travaux publics. « Nous

sommes presque une société alle-mande en Franc », note le PDG. En France, l’industriel fournit notam-ment Manitou, Haulotte et Meca-lac. En croissance continue depuis quatre ans, Bouhyer et sa filiale ardennaise totalisaient 50 millions d’euros de chiffre d’affaires l’an der-nier. « Pour 2020, avant le Covid, nous avions un carnet de comman-des à la hausse de 20,7 % »,men-tionne Alain Mimouni.

Finalement, l’impact de la situa-tion sanitaire entamera 18 % de l’activité de l’entreprise. Mais pour l’industriel, la sortie de la crise seraaccompagnée, dans de nombreux pays, de grands travaux de relance,et donc d’un besoin de matériel de travaux publics. « Nous voulons être prêts à répondre à cette forte croissance d’activité », soutient le dirigeant. n

PAYS DE LA LOIRE

Le fabricant de contre-poids en fonte basé en Loire-Atlantique veut réduire ses rejets de matière et atténuer la pénibilité du travail via la robotique.

La fonderie Bouhyer investitdans le « zéro déchet »

Le sable constituant les moules de fonderie, compacté par le biais de résine et d’additifs, est recyclé à 98 % par un système de tri, de purification et de lavage. Photo Bouyher

Léa Delpont— Correspondante à Lyon

La maison de vente De Baecque & Associés met aux enchères, samedi 12 décembre, à Lyon, 350 bijoux Joïa, tournant une page de l’histoire locale trois ans après la fermeture de cet atelier de joaillerie. Estimées entre 100 et 10.000 euros, ces pièces d’or serties de diamants etde pierres précieuses passeront sous

Enchères : comment De Baecque & Associés ont tiré parti du confinement

le marteau lors d’une vacation qui varetrouver un peu de public – 40 per-sonnes à huis clos, mais retransmiseen direct, comme toutes celles prati-quées depuis le mois de mars. Ren-trée en 2019 dans le Top 20 français, avec un volume de ventes de 17 mil-lions d’euros frais compris (+ 39 %), la société lyonnaise, présente à Pariset à Marseille, a connu un grand suc-cès durant le premier confinement, selon son fondateur Etienne De Baecque. Elle était l’une des premiè-res maisons de vente d’art à repren-dre ses activités sur Interencheres etDrouot Live – 14 ventes en avril-mai. « L’offre était réduite et les clients très disponibles. On a vendu 3.000 petits objets à des acheteurs dont la moitié étaient nouveaux. »

De Baecque a pu basculer rapide-ment en numérique grâce à ses sal-les des ventes bien physiques de Lyon et Marseille, transformées en salles virtuelles. Ces deux ancien-nes usines en centre-ville de 1.000 m2 et 1.200 m2 sont des lieux d’exposition et de stockage dont ne

disposent pas les concurrents de la capitale, qui entreposent dans des garde-meubles et pratiquent les enchères dans les hôtels de vente comme Drouot. « Notre métier a de grandes contraintes logistiques. C’était un atout d’avoir nos stocks sous la main pour déballer sans délai, et photographier les objets », explique le commissaire-priseur dequarante-trois ans, actionnaire de Drouot depuis 2014.

Six commissaires-priseursDevant la motivation des acheteursà distance, il n’a pas hésité à mainte-nir les ventes cataloguées du second semestre, et notamment la collection Creuzevault, clou de la saison avec un Max Ernst parti à 1 million d’euros le 20 novembre. « Mais au deuxième confinement, la plupart des maisons s’étaient organi-sées pour travailler », dit-il.

L’entreprise, qui compte six com-missaires-priseurs et 22 collabora-teurs, devrait pratiquement égaler sa performance de l’année dernière.

Créé en 2008, De Baecque connaît une forte croissance depuis l’acqui-sition de l’étude Enchères Rive Gau-che en 2014, spécialiste des arts pre-miers . L’achat d ’une charge lyonnaise en 2018 lui a aussi permisd’étoffer ses spécialités avec les ins-truments de musique et les miné-raux. Mais la maison a fait un coup,il y a un an, en reprenant le fonds decommerce Leclere à Marseille, en liquidation judiciaire. Etienne De Baecque espère « développer des synergies très fortes sur l’axe Paris-Lyon-Marseille et rationaliser la logistique entre les trois sites, en fai-sant de grosses économies de temps etde frais de transport ». n

AUVERGNE-RHÔNE-ALPES

La maison de vente lyonnaise a occupé le terrain des enchères en live au printemps, et a vendu un Max Ernst le 20 novembre, confirmant ainsi son entrée récente dans le Top 20 français.

Date de création : 2011Président : David GallezotEffectif : 7 personnesSecteur : Mobilité

Monique Clémens— Correspondante à Besançon

Un avion économiquement rai-sonnable et écologiquement responsable : c’est le pari pas si fou de David Gallezot, polytech-nicien passé par Supaéro, collec-tionneur d’aéronefs anciens et pilote d’avions légers. « Il s’agit deredonner de l’attractivité à des ter-ritoires grâce à l’aviation durable et responsable », explique l’arti-san de la renaissance d’Avions Mauboussin, un constructeur aéronautique des années trente qui, déjà, visait l’efficacité éner-gétique. Portée par cette marqueprestigieuse, la société avait inté-gré une motorisation hybride électrique dès les premiers des-sins du biplace Alérion M1H, en 2016, mais proposera vite une turbine alimentée à l’hydro-gène. Implanté depuis 2017 à Belfort, où il a noué des partena-riats avec l’université de techno-logie de Belfort-Montbéliard

17MILLIONS D’EUROSLe volume de ventes, frais compris, réalisé par la maison De Baecque & Associés en 2019.

90 %La part de sa production que le groupe exporte.

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Page 33: Les Echos - 11 12 2020

« Une fois que les taux d’intérêt sonten territoire négatif et que l’effet de surprise est dissipé, la poursuite de leur baisse a généralement peu d’impact sur la monnaie, constate Dominic Bunning, responsable de la recherche européenne sur les changes chez HSBC. Après l’intro-duction de cette mesure dans leurs pays, le Japon, la Suisse et la Suède virent même leur monnaie progres-ser dans les trois mois qui suivi-rent. » En juin 2014, la BCE fut la première grande banque centrale à faire passer son taux en territoirenégatif à –0,1 %. Mais sur les cinq baisses de taux en territoire néga-tif, seules les deux premières, en 2014, ont pu faire reculer la mon-naie européenne.

Euro fort, dollar faibleLes marchés estiment que la BCE n’est pas en mesure d’inverser la tendance à la hausse de l’euro face au dollar mais au mieux de ralentirsa progression. Sa remontée face au billet vert est d’autant plus facile que la première monnaie mondialeest en proie au doute. Depuis l’élec-tion présidentielle du 3 novembre,

monnaie européenne, l’ère de l’eurofaible, quand il enregistra son plus bas historique (0,84 dollar).

CompétitivitéLa baisse de l’euro depuis un mois par rapport aux devises émergen-tes permet à son taux de change global (par rapport aux devises de ses partenaires commerciaux) de limiter sa hausse. « Il est seulement0,5 % plus élevé que les prévisions dela BCE pour 2021. Elle peut ainsi davantage tolérer la hausse de l’euroface au dollar tant que les monnaiesémergentes poursuivent leur remontée », estime Andreas Steno Larsen responsable de la stratégie sur les taux et devises chez Nordea.Cette année, l’euro progresse seu-lement de 1,3 % par rapport à la devise chinoise, à 7,91 renminbis. Cette appréciation modeste permettra aux exportateurs euro-péens de profiter davantage de la reprise économique en Chine (leurdeuxième marché à l’export) qu’aux Etats-Unis, où le bond de près de 8 % de l’euro contre le dollar handicape bien plus leur compétitivité. n

Une impuissance face à la vigueur de l’euro

Nessim Aït-Kacimi @NessimAitKacimi

« Nous sommes prêts à ajuster tous nos instruments à la vue de l’évolu-tion du taux de change. Nous n’avons pas fermé la porte à une baisse des taux », a déclaré Chris-tine Lagarde lors de la conférence de presse de la Banque centrale européenne (BCE). « Nous suivons les développements du taux de change avec beaucoup de soin. » Desavertissements sans effet sur l’euro. Il a progressé de 0,4 %, à 1,2130, et atteint au plus haut 1,2160dollar. Il a gagné 1 % par rapport à lalivre, et 0,5 % contre le yen.

La BCE a opté pour le statu quosur les taux. Une nouvelle baisse aurait eu peu d’impact sur l’euro.

Les mesures annoncées par la Banque centrale européenne n’ont pas fait baisser l’euro, qui a gagné 0,4 %, à 1,2130 dollar jeudi. Les marchés estiment que la BCE n’est pas en mesure d’inverser la progression de sa monnaie.

Bastien Bouchaud @BastienBouchaud

Toujours plus. La Banque du Japon (BoJ) continue d’accumuler des actions à un rythme effréné. Elle en détient désormais pour plus de

BANQUE CENTRALE

Au plus fort de la crise, la BoJ a amplifié ses achats d’actions, via des ETF, et détient désormais plus de 6 % des actions japonaises

45.000 milliards de yens, soit envi-ron 355 milliards d’euros, l’équiva-lent de plus de 6 % du marché japo-nais, selon l’institut de recherche local NLI. La banque centrale dépasse ainsi le fonds de pension public japonais, le GPIF, l’un des plusgrands au monde, au palmarès des principaux actionnaires du marché.

Et elle n’a pas terminé ses emplet-tes. Pionnière des politiques hétéro-doxes, ses achats d’actions font par-tie de sa panoplie d’outils depuis dix ans. Aujourd’hui encore, elle estla seule banque centrale à interve-nir directement sur les marchés actions. En mars, face à la brusque chute des cours, elle a décidé de

doubler son enveloppe annuelle consacrée à ces acquisitions, à 12.000 milliards de yens au maxi-mum. Ses achats ont été particuliè-rement importants en avril, lorsqueles marchés étaient au plus bas.

Un pactole théoriqueMais elle reste active en dépit du rebond des cours ces dernières semaines. Jeudi, elle a encore achetépour 1,2 milliard de yens d’ETF, por-tant le total cette année à près de 7.000 milliards, un record histori-que. Pour le moment, la BoJ est gagnante. La hausse historique du Nikkei en novembre, désormais à son plus haut niveau depuis 1991, a

permis à la banque centrale d’accu-muler environ 10.000 milliards de yens de gains sous-jacents. Des pro-fits théoriques, la banque centrale n’ayant aucune intention de céder ses titres.

Son pactole est donc voué à conti-nuer de grossir. D’autant que les actions japonaises ont de bonnes chances de continuer à grimper. Les entreprises japonaises ont accumulé du cash ces dernières années et sont de plus en plus promptes à le reverser à leurs actionnaires. Avec un rebond de plus de 40 % des bénéfices attendu l’année prochaine, le marché japonais attire de plus en plus

d’investisseurs internationaux. Ils sont repassés à l’achat depuis octo-bre, avec une accélération des flux en novembre.

« Le Japon apparaît comme unnouveau havre de sécurité, axé sur la reprise de la croissance, avec un mar-ché actions sous-évalué, peu endetté et encore peu détenu par les inves-tisseurs internationaux », s’enthou-siasment les analystes de Société Générale, qui ont fait des actions japonaises l’un de leurs grands parispour 2021. Ils s’attendent à ce que le Nikkei grimpe à 29.500 points d’ici àla fin de l’année prochaine, soit une hausse de plus de 10 % par rapport àson niveau actuel. n

La Banque du Japon devient le premier actionnaire des entreprises de l’archipel

longée. Déjà étendu à la f inavril 2021, il se poursuivra aumoins jusqu’en mars 2022. D’ici là,e s p è r e C h r i s t i n e L a g a r d e ,l’Europe aura atteint le seuild’immunité collective grâce auxvaccins, et l’économie aura reprisune marche à peu près normale.La BCE agira tant que les effets dela pandémie se feront sentir,notamment pour garantir auxEtats des coûts de financementfaibles, ce qui leur permettrad’emprunter pour mettre en placedes plans de relance budgétaireindispensables.

Cette extension du programmepourrait toutefois poser des pro-blèmes techniques à la BCE. « LePEPP est toujours lié par la limite dedétention globale qu’elle s’est fixée,en dessous de 50 % pour toute dettesouveraine éligible, souligne GillesMoëc, chef économiste d’AXA IM.Celle-ci est difficile à quantifier,mais au-delà de 600 milliardsd’euros de complément pour lePEPP, la BCE en serait très proche. »Des craintes balayées par Chris-tine Lagarde : « Nous avons dit àplusieurs reprises que les limitesque nous nous sommes imposées nedoivent pas être un obstacle à l’exé-cution de notre politique moné-taire », a-t-elle affirmé, soulignanten outre que d’importants mon-tants de dette devraient être levéssur les marchés l’an prochain.

Soutien aux banquesComme Christine Lagarde l’avait également laissé entendre, la Ban-que centrale a modifié son pro-gramme de financement de long terme à taux négatifs pour les ban-ques, les TLTRO. Ils permettent auxétablissements qui maintiennent leurs prêts à l’économie réelle (entreprises et ménages) de se financer auprès de la BCE à –1 %. Autrement dit de gagner de l’argenten empruntant. Cette mesure de soutien à la consommation et à l’investissement a été prolongée jusqu’à la fin juin 2022. Trois nou-velles opérations auront lieu au second semestre 2021. Le pourcen-tage de leur stock de dette donnant droit à un prêt à taux préférentiel a,lui aussi, été légèrement revu à la hausse.

Ces annonces, qui étaient atten-dues, ont un peu déçu les marchés. les taux des principaux emprunts d’Etat européens ont fini en légère hausse jeudi. « Pour l’instant, la BCEa choisi de laisser les gros bazookas aux gouvernements et se concentre sur une véritable ingénierie de ban-que centrale », conclue Carsten Brzeski, chez ING. n

l Pour sa dernière réunion de politique monétaire de l’année, la Banque centrale européenne a relevé l’enveloppede son programme d’achats d’actifs lié à la pandémie (PEPP), à 1.850 milliards d’euros, et l’a étendu jusqu’en mars 2022.l Elle a également prolongé ses prêts aux banques à taux négatifs et augmenté le montant éligible.

La BCE renforce son soutien à l’économie

Guillaume Benoit @gb_eco

La Banque centrale européenne a tenu parole. Elle a renforcé ses prin-cipales mesures de soutien, dans un contexte économique difficile pour la zone euro, entre deuxième vague de pandémie et craintes sur les conséquences d’un Brexit sans accord. « Les données que nous rece-vons et les prévisions de nos équipes suggèrent que l’impact à court termede la pandémie sur l’économie sera plus prononcé et que l’inflation res-tera faible plus longtemps que ce quenous avions anticipé », a confirmé Christine Lagarde, la présidente de la BCE.

La Banque centrale table désor-mais sur une croissance de 3,9 % en2021 (contre 5 % estimés en septem-bre), suivie d’une accélération l’année suivante (4,2 %, contre 3,2 %initialement). L’inflation pour sa part ne devrait pas dépasser 0,2 % en 2020 et atteindrait progressive-ment 1,4 % en 2023. La BCE a annoncé qu’elle continuerait à sur-veiller de près l’évolution du taux dechange de l’euro et ses effets sur la hausse des prix.

La BCE n’a pas touché à ses tauxdirecteurs, qui restent à leurs niveaux historiquement bas : le taux de la facilité de dépôt demeurefixé à –0,5 % pour le taux de dépôt, à0 % pour le taux de refinancement, et à 0,25 % pour celui de la facilité deprêt marginal. En revanche, elle a significativement recalibré ses outils non conventionnels, comme l’avait promis sa présidente lors de la réunion d’octobre.

RallongeA commencer par le programmed’achats d’urgence pandémie(PEPP). Son enveloppe va croîtrede 500 milliards, pour atteindre1.850 milliards d’euros. ChristineLagarde avait clairement indiquéque ce mécanisme exceptionnel– adopté le 18 mars dernier pourramener le calme sur le marché dela dette souveraine européenne –serait l’un des instruments privi-légiés de la Banque centrale. Parti-culièrement souple, il permet à laBCE de s’affranchir de certaineslimites, notamment en termes demontants investis par pays. Laprésidente a toutefois précisé quecette rallonge « ne serait pasobligatoirement utilisée dans sonintégralité » . Plus importantencore, la durée du PEPP a été pro-

POLITIQUEMONÉTAIRE

« Le Japon apparaît comme un nouveau havre de sécurité, [...] avec un marché actions sous-évalué,peu endetté et encore peu détenu par les investisseurs internationaux. »LES ANALYSTES DE LA SOCIÉTÉ GÉNÉRALE

la devise américaine a perdu 3 %. Les marchés estiment qu’avec un Congrès divisé qui bloquera des mesures de l’administration Biden, la Réserve fédérale (Fed) sera en première ligne pour faire repartir lacroissance et l’emploi.

Un nouvel assouplissement de lapolitique monétaire de la Fed pour-rait faire baisser le dollar par rap-port à l’euro, qui s’établira durable-ment dans sa zone naturelle d’évolution entre 1,20 et 1,30 dollar. Ces dix-sept dernières années, l’euros’est inscrit au moins une fois dans cette zone en cours d’année sauf en 2016 et 2019, quand il s’est établi sous 1,20 dollar. Ce fut aussi le cas dans les quatre premières années (1999-2004) après la naissance de la

Un nouvel assouplissement monétaire de la Fed pourrait fairebaisser le dollarpar rapport à l’euro.

FINANCE & MARCHESLes Echos Vendredi 11 et samedi 12 décembre 2020

Page 34: Les Echos - 11 12 2020

34 // FINANCE & MARCHES Vendredi 11 et samedi 12 décembre 2020 Les Echos

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BANQUE

Edouard Lederer @EdouardLederer

Crédit Mutuel Alliance Fédérale (CMAF) resserre les rangs. La prin-cipale composante du groupe Cré-dit Mutuel a tiré les conséquences de la crise sanitaire, de l’accéléra-tion des usages digitaux, et cela, alors qu’un nouvel adhérent de poids, le Crédit Mutuel Nord Europe (CMNE), devrait le rejoin-dre dans un peu plus d’un an.

Dans ce contexte, le groupe ban-caire a présenté, jeudi, une version actualisée de son plan stratégique 2019-2023, présenté en 2019. « Face à l’accélération de transitions irré-versibles, nous faisons le choix de réviser notre plan stratégique », explique Daniel Baal, le directeur général de CMAF, dans un entretienaux « Echos ». Sur le plan financier, son objectif est à présent de retrou-ver le niveau record… de 2019 et donc d’effacer la crise « au plus tarden 2023 ». La banque ambitionne à cet horizon l’atteinte d’un résultat net supérieur à 3 milliards d’euros, là où le plan original ciblait les 4 milliards d’euros, et un produit net bancaire (PNB) de 14,6 mil-liards, comme l’an dernier.

Pousser les feux en matière commerciale« Cette année, nous enregistrerons un recul de notre PNB, de l’ordre de 5 %, et de notre résultat net, compte tenu de la crise », relève Daniel Baal.En outre « 2020 sera bien sûr mar-quée par une augmentation très fortedu coût du risque, essentiellement non avéré. Nous sommes volontaire-ment très prudents dans nos hypo-thèses financières pour les années suivantes, compte tenu de l’incerti-tude sanitaire et économique. »

Au total, le groupe pousse lesfeux en matière commerciale et multiplie les mesures d’efficacité. Des points de vente pourraient notamment être regroupés, et cer-taines fonctions support entre réseaux ou fédérations vont être mutualisées. L’horizon 2023, l’échéance du plan stratégique, serad’autant plus charnière, que, sauf coup de théâtre, l’Alliance fédérale devrait à cette date compter un membre de plus, la fédération nor-

l Le Crédit Mutuel Alliance Fédérale, principale composante du groupe Crédit Mutuel, revoit à la baisse ses objectifs financiers à l’horizon 2023. l Le groupe resserre les rangs avant l’arrivée d’un nouvel adhérent de poids.

Le Crédit Mutuel Alliance Fédéralecorrige ses objectifs avant d’absorberle Crédit Mutuel du Nord

environ 4.000 agences, réparties équitablement entre le réseau Cré-dit Mutuel et celui du CIC.

« Nous avons bien deux réseaux »« Nous croyons aux réseaux de proxi-mité et nous croyons que ces réseaux ont toujours du sens. Cela ne veut pasdire que l’on ne fera jamais d’optimi-sation de notre réseau. Si, dans une ville, trois agences sont à moins d’un quart d’heure à pied, nous réfléchi-rons à les regrouper pour gagner en efficacité », estime Daniel Baal, pourqui rassembler les équipes « permeten plus d’avoir davantage de compé-tences au même endroit ».

Point essentiel, « nous ne regrou-perons jamais une caisse de Crédit Mutuel et une agence CIC », précise bien Daniel Baal. « Crédit Mutuel et CIC sont deux réseaux distincts avec deux marques fortes. Crédit Mutuel et CIC sont parmi les plus belles mar-ques françaises. Nous avons bien deux réseaux et deux marques que nous voulons cultiver. »

Cette approche se distingue apriori des orientations prises très récemment par Société Générale. Les fermetures d’agences annon-cées par la banque de la Défense seferont sur fond de fusion entre les deux réseaux du groupe en France,Société Générale et Crédit du Nord.

Or, même si la décision n’a pas étéprise, certains craignent pour la pérennité de l’enseigne Crédit du Nord ou de ses marques régionales bien implantées. De quoi aiguiser l’appétit des mutualistes. « On n’a pas l’intention de laisser le terrain libre. Quand certains ont pour projet de réduire de 10 à 20 % leur nombre d’agences, on a toujours la même réflexion : c’est une opportunité de développement pour nous », pour-suit le dirigeant. Alors qu’en moyenne, le nombre d’agences ban-caires a chuté de 17,5 % dans la zoneeuro entre 2015 et 2019, seuls 4,6 % des points de vente ont fermé en France sur la période, portant le parc (à fin 2019) à 36.000 agences. — E. Le.

Le groupe veut préserver son réseau d’agences

Atterrissage en douceur. Alors que le groupe Société Générale a décidéde fermer 600 agences en France àhorizon 2023, les groupes mutua-listes se montrent nettement moinsconservateurs. « Nous refusons la tentation du grand plan de fermeturedes agences. Nous optimisons nos réseaux, surtout en ville, mais la baisse se limite à 1 ou 2 % », indique aux « Echos » Daniel Baal, le direc-teur général de Crédit Mutuel Alliance Fédérale, à l’occasion de la présentation, jeudi, d’un plan stra-tégique amendé pour le groupe mutualiste. Il compte actuellement

Crédit Mutuel Alliance Fédérale ajustera ses réseaux à l’horizon 2023 mais confirme s’appuyer sur ses deux enseignes,à savoir Crédit Mutuelet CIC. Le groupe estime que les 600 fermetures d’agences annoncéespar Société Générale pourraient lui profiter.

« Nous croyons aux réseaux de proximité. Cela ne veut pas dire que l’on ne fera jamais d’optimisation. Si dans une ville, trois agences sont à moins d’un quart d’heure à pied, nous réfléchirons à regrouper. »DANIEL BAALDirecteur général de Crédit Mutuel Alliance Fédérale

diste du Crédit Mutuel Nord Europe(CMNE), basée à Lille. « Effective-ment, Crédit Mutuel Nord Europe travaille actuellement à une adhé-sion à Crédit Mutuel Alliance Fédé-rale. Ce choix sera soumis à l’appro-bation de ses caisses locales, qui s’exprimeront en janvier prochain », confirme le dirigeant.

Se regrouper permet de mettreen commun des moyens sur tous les sujets réglementaires ou liés à lagestion de bilan, au refinancement, au contrôle des risques. Un atout pour le futur nouveau membre de l’alliance et pour ses membres exis-

tants. « Pour Crédit Mutuel Alliance Fédérale et CMNE, ce serait un ren-forcement mutuel. En partageant nos moyens et nos expertises, nous pourrions accroître notre efficacité opérationnelle et accélérer notre développement commun. »

L’enjeu est clé pour le groupe. Lafédération basée à Lille représente un PNB de l’ordre de 800 millions d’euros et serait la deuxième, loin derrière le Crédit Mutuel Centre EstEurope, basé à Strasbourg. Dans le monde mutualiste, une telle inté-gration nécessite une certaine agi-lité politique.

« En cas d’adhésion, les adminis-trateurs du CMNE trouveront bien évidemment une place au sein des structures faîtières que sont la Caissefédérale de Crédit Mutuel et la Ban-que fédérative du Crédit Mutuel, comme toutes les fédérations adhé-rentes », indique Daniel Baal. « Cela fait trois ou quatre ans que nous

échangeons régulièrement avec les dirigeants du CMNE. Ils ont ainsi pu étudier notre plan stratégique 2019, et ils n’ont pas de différence fonda-mentale avec notre approche. »

Avec l’arrivée de CMNE, la compo-sition du conseil va mécaniquementdevoir évoluer, en tenant compte du poids économique de chacun. Selon nos informations, CMNE aurait été rassuré sur ce point. Quant aux adhérents actuels, ils devront aussi s’y retrouver. « Si CMNE arrivait dans le groupe, j’applaudirais des deux mains », souligne une source au sein d’une fédération.

« Chez nous, chaque fédération estreprésentée par au moins un admi-nistrateur et un censeur. Nous avonsde nombreuses autres instances, notamment notre chambre syndi-cale et interfédérale, dans lesquelles toutes les fédérations ont naturelle-ment voix au chapitre », répond Daniel Baal. n

Basé à Strasbourg, Crédit Mutuel Alliance Fédérale regroupe actuellement treize fédérations de Crédit Mutuel. Photo Frederic Maigrot/RÉA

Dans le monde mutualiste, une telle intégration nécessite une certaine agilité politique.

Page 35: Les Echos - 11 12 2020

Les Echos Vendredi 11 et samedi 12 décembre 2020 FINANCE & MARCHES // 35

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prise de renforcer son capital sansdevoir ouvrir son capital à un actionnaire externe, et de conti-nuer à emprunter.

Une garantie allant jusqu’à 35 % des encoursPour attirer les investisseurs (com-pagnies d’assurances, gestionnai-res d’actifs…) qui vont prêter cet argent aux entreprises via ces pro-duits qui seront distribués par les banques, le gouvernement a cassé sa tirelire en apportant une garan-tie allant jusqu’à 35 % des encours. Ilest prêt ainsi à prendre à sa charge des pertes de 7 milliards sur l’enve-loppe de prêts de 20 milliards actuellement prévue.

Mais, malgré cet effort, les inves-tisseurs traînent des pieds, crai-

gnant de financer des entreprises fragiles. « La nature même de l’inves-tissement porte à une certaine pru-dence, reconnaît Daniel Baal, direc-teur général de Crédit Mutuel Alliance Fédérale. Quand on investitdes fonds d’assurance-vie, on a une obligation de ne pas perdre de capital.Or, sur des quasi-fonds propres, il existe un risque spécifique. On se positionnera quand on connaîtra vraiment le dispositif, le moment venu. »

Dans l’état actuel des discussions,le taux que paieront les PME pour-rait se situer entre 3 et 5 %, auquel s’ajouterait la rémunération de la garantie de l’Etat. Compte tenu du risque et, malgré la garantie, les investisseurs veulent une rémuné-ration plus élevée. Pour convaincre

les récalcitrants, la CPME, qui a rédigé une tribune dans « Les Echos » pour appuyer sa proposi-tion, souhaite ajouter « une contri-bution complémentaire de solida-rité » représentant de 1,5 à 2 % de plus et payée par toutes les entrepri-ses. Soit un taux global de 7 à 8 %, conforme au prix moyen d’une obli-gation convertible.

En contrepartie, les PME veu-lent s’assurer que toutes aurontdroit au dispositif, à commencer

par les centaines de milliersd’entre elles qui ont reçu un prêtgaranti par l’Etat (PGE) pour pas-ser la crise. « Si nous ne voulonspas exclure les entreprises de proxi-mité, le ticket minimum devraitêtre fixé aux alentours de 250.000ou 300.000 euros », estime Ger-main Simoneau. Avec un ticketminimum en millions comme ilen est question, le dispositif nebénéficierait qu’à des grosses PMEou des ETI qui ont déjà accès à des

sources de financement comme ladette privée. « Le risque, c’est queles petites entreprises regardentpasser les trains et que l’Etat aitmobilisé 7 milliards d’euros pouraider des entreprises qui n’en ontpas besoin, insiste le chef d’entre-prise. Il ne faut pas manquer lacible ! » Le dispositif, qui devraaussi être validé par la Commis-sion européenne, doit être opéra-tionnel au premier trimestre2021. n

Thibaut Madelin @ThibautMadelin

et Edouard Lederer avec R. G.

Face au manque d’appétit des inves-tisseurs pour les prêts participatifs, ces instruments censés renforcer les bilans des PME et leur permettrede rebondir à la sortie de la pandé-mie, les petites entreprises propo-sent de les payer plus cher. Alors que certains craignent un enlise-ment de ce projet phare du plan de relance de Bercy, cette proposition pourrait relancer les discussions entre banques, investisseurs et pou-voirs publics.

« En contribuant à hauteur de35 % par sa garantie, l’Etat nous oblige et peut-être nous invite, nous entrepreneurs, à faire notre part en nous appropriant ce dispositif, expli-que Germain Simoneau, président de la commission financement à la Confédération générale des petites et moyennes entreprises (CPME). D’ailleurs, nous pourrions proposer de le faire évoluer pour y ajouter une notion de solidarité interentreprises et donner plus de puissance et d’effet au dispositif. »

Les prêts participatifs sont descréances de long terme. Rem-boursés en dernier, ils ne sont pas assimilés à de la dette d’un point devue de l’analyse financière mais à des quasi-fonds propres. I ls offrent ainsi la possibilité à l’entre-

CRÉDIT

Face au manque d’appétit des investis-seurs, la CPME propose d’augmenter de 1,5 à 2 % le rende-ment de ces prêts s’apparentant à des fonds propres.

Prêts participatifs : les PME proposent de payer plus pour convaincre les investisseurs

Pour s’assurer que les prêts participatifs pourront aider les PME, l’Etat est prêt à prendre à sa charge des pertes de 7 milliards sur l’enveloppe de prêts de 20 milliards actuellement prévue. Photo iStock

Tourisme : Bpifrance complète son arsenalLa banque publique a officialisé jeudi le lancement du fonds FAST. Doté de 80 millions d’euros (financé par Bpifrance, la Caisse des Dépôts et des régions), il va permettre d’investir des tickets compris 50.000 et 400.000 euros afin de renforcer le capital d’environ 300 entreprises du secteur du tourisme et favoriser leur rebond. Le dispositif ressemble à celui des prêts participatifs conçu par l’Etat, avec les banques et les investisseurs. Les instruments utilisés seront des obligations convertibles, avec un taux de 7 %.

de plus de 680 millions d’euros en 2019, une croissance annuelle de plus de 30 % sur dix ans, elle a surfé sur l’essor de l’économie numérique et la transition éner-gétique. Entré en Bourse en 2005 avec une capitalisation de 4,5 mil-lions d’euros, le groupe était valo-risé 1,5 milliard d’euros en juillet dernier quand il a été transféré sur le marché réglementé d’Euro-next Paris, avant d’intégrer en sep-tembre le SBF 120.

Ce rapport anonyme a été envoyépar e-mail et via Twitter à des ana-lystes financiers, des gérants, puis à la société mardi soir. Il accuse Solutions 30 d’avoir des liens avec des personnes ayant fait l’objet de condamnations pénales liées au blanchiment d’argent, et d’avoir réalisé lui-même des transactions liées à ce crime. Les comptes com-porteraient également des erreurs, et la rentabilité et le cash-flow ne correspondraient pas à la nature des activités de la société.

Démenti catégoriqueLe groupe, qui a son siège social au Luxembourg, a démenti catégori-quement toutes les affirmations du rapport. Entre 2013 et 2016, il a bientravaillé avec un employé du cabi-net d’expertise comptable, la fidu-ciaire du Kiem, dont un des gérants,Angelo Zito, aurait été cité dans desaffaires judiciaires entre 1998 et 2000, en lien avec la mafia. Mais ce dernier a été relaxé en 2000. Solutions 30 cite aussi le registre des experts-comptables assermen-tés du Luxembourg, dans lequel Angelo Zito apparaît en bonne et

due forme. Sur les transactions apparentées à du blanchiment d’argent, Solutions 30 a indiqué que, pour établir de nouvelles enti-tés juridiques, il lui arrive d’acquérirpar souci d’efficacité des « coquillesvides », ce qu’il considère comme une pratique de marché.

Action en justiceSur les marchés, on s’étonne.Quand les vendeurs à découvertsortent des rapports négatifs surun titre, i ls ne le font pas demanière anonyme. En général, ilsassument. Quoi qu’il en soit, lesa n a l y s t e s f i n a n c i e r s s o n tconvaincus que ces accusationssont infondées. Les analystesd’Oddo BHF ont jugé les réponsesapportées par Solutions 30 « pro-bantes ». Ils « remettent en ques-tion le sérieux de l’analyse menéepar l’auteur du rapport au vu deserreurs qu’il commet ». Solutions30 a d’ores et déjà alerté l’Autoritédes marchés financiers et lancéune action en justice, notammentcontre une personne qui diffusedes informations fausses et trom-peuses à l’égard de ses dirigeants.

Cette affaire soulève des ques-tions. Si ce rapport est faux, ses accusations risquent d’apporter de l’eau au moulin des politiques ou des acteurs de la place de Paris qui militent depuis des années pourune réglementation plus stricte vis-à-vis des vendeurs à découvert, qui sont dans le collimateur des auto-rités depuis que Muddy Waters s’est attaqué à Casino. S’il dit la vérité, les dommages seront impor-tants pour la place de Paris. n

Laurence Boisseau @boisseaul

En deux jours, Solutions 30 a perduprès de 26 % de sa valeur en Bourse.En cause, un rapport anonyme accusant la société, qui installe la fibre optique et des compteurs électriques chez des particuliers, d’avoir des liens avec la mafia ita-lienne, et de publier des comptes erronés. En mai 2019, déjà, l’action avait dévissé quand Muddy Waters,le célèbre activiste américain, avait déclaré, sans explication, vendre à découvert 0,5 % du capital. Depuis quelques semaines, sur les mar-chés, des rumeurs circulaient. Et ces derniers jours, environ 13 % du capital ont été vendus à découvert, notamment par un hegde fund, Gladstone Capital Management.

Solutions 30 est l’une des valeursfavorites des fonds petites et moyennes valeurs. Créée en 2003 par son PDG Gianbeppi Fortis, la société a connu un développement rapide. Avec un chiffre d’affaires

BOURSE

L’action de la SSII a perdu plus de 25 % en deux jours, après la publication d’un rapport anonyme qui accuse la société d’installation de fibre optique et de comp-teurs électriques de liens avec la mafia italienne.

Solutions 30, cible d’accusations anonymes, saisit la justice

Page 36: Les Echos - 11 12 2020

36 // FINANCE & MARCHES Vendredi 11 et samedi 12 décembre 2020 Les Echos

Bruxelles veut imposer des batteries électriques « propres »

Derek Perrotte @DerekPerrotte

—Bureau de Bruxelles

« Un avenir vraiment durable doit être alimenté par des batteries pro-pres. » En une phrase, le commis-saire européen à l’Energie, Maros Sefcovic, a résumé l’enjeu de la révi-sion du règlement de 2006 sur les batteries, dévoilée jeudi par Bruxel-les. A l’aune de l’objectif européen deneutralité climatique d’ici à 2050 et sur fond d’électrification à marche forcée de l’automobile, la Commis-

un vrai défi tant Bruxelles prévient que l’essor des batteries au lithium entraînera « une très forte hausse desquantités de déchets ». Aujourd’hui, seulement 10 % du lithium contenu dans les batteries est recyclé, alors que le nombre de batteries au lithium prêtes au recyclage sera multiplié par 700 d’ici à 2040, souli-gnent les études de la Commission.

La proposition de règlementinsiste sur l’importance de valoriserdurablement le cobalt, le lithium, le nickel et le plomb. Ces mesures viennent compléter le plan présentéen septembre pour développer en Europe des chaînes d’extraction et de traitement des terres rares, un marché clé pour l’énergie propre, aujourd’hui dominé par la Chine.

En promettant aux Européensque leurs véhicules bénéficieront « des batteries les plus vertes, les plus performantes et les plus sûres », le Vieux Continent veut rebattre les cartes et retrouver une autonomie stratégique sur un marché de la bat-terie électrique dominé pour l’heurepar la Chine et la Corée du Sud. « Lesbatteries ne respectant pas totalementles normes que nous fixerons seront interdites au sein du marché unique »,a souligné Thierry Breton.

L’enjeu est énorme : Bruxellesestime que la demande mondiale de batteries va être multipliée par 14d’ici à 2030. L’ONG Transport & Environnement, pas toujours ten-dre avec la Commission, a cette foislargement salué un projet « à même

sion européenne entend ainsi lan-cer une véritable révolution indus-trielle dans un secteur en plein essor. Pour la première fois, des cri-tères environnementaux seront imposés sur l’ensemble de la chaînede vie des batteries, de l’extraction des matières premières au recy-clage, en passant par la production.

Pour limiter l’empreinte carbonede leur production, les fabricants devraient d’abord, selon le projet derèglement qui devra être validé par les Etats membres et le Parlement européen, la mesurer et la déclarer à compter de juillet 2024.

« Aujourd’hui, on ne la connaîtpas vraiment. Il faut le temps de col-lecter des données dans ce secteur

tout juste naissant en Europe », explique un expert de la Commis-sion. Un système de « passeport numérique » devra notamment per-mettre un suivi fin de l’origine et du traitement des matériaux utilisés, « une première » saluée par Thierry Breton. En janvier 2026, des labels de classe de performance seront introduits, comme il en existe par exemple pour les réfrigérateurs.

Sur la base des données alorsrecueillies, des seuils maximaux d’empreinte carbone seraient fixés, à chaque niveau de la chaîne, à par-tir de juillet 2027. Des critères de performance et de sécurité seront aussi définis. Bruxelles se défend d’opter pour un calendrier trop lent

face à l’urgence climatique, un bémol pointé par certains. « C’est unrythme en réalité très ambitieux pource qui sera un pas de géant. Personne au monde n’a fixé des objectifs aussi rapides e t é le vés que ceux de l’Europe », a affirmé Maros Sefcovic.

La liste des critères écologiques àrespecter portera en particulier sur la durabilité des matières premiè-res utilisées, le recours à des maté-riaux recyclés et la propreté de l’énergie déployée pour la fabrica-tion. Le volet recyclage du plan entrerait en vigueur dès 2025. L’objectif de collecte séparée des batteries portables passerait alors à 65 % (puis à 70 % en 2030), contre 45 % dans les textes actuels. Ce sera

l Des critères environnementaux seront fixés à partir de juillet 2027sur l’ensemble de la chaîne de vie des batteries.l Les batteries ne respectant pas ces normes seront « interdites » sur le marché unique, a prévenu Thierry Breton.

MATIÈRES PREMIÈRES

Selon Bruxelles, la demande mondiale de batteries va êtremultipliée par 14 d’ici à 2030. Photo Clément Mahoudeau/AFP

demande est en train de basculer du carbonate de lithium à l’hydroxyde delithium, où la pureté est en enjeu plusimportant », précise encore David Krupka, chef de projet à l’Afnor.

La diplomatie des normesL’organisme français a d’ailleurs appelé les acteurs hexagonaux à rejoindre le tour de table, pour évi-ter que les standards ne soient uni-quement dictés par la Chine. Qua-torze pays ont déjà répondu favorablement.

« Les acteurs français ont montréun vif intérêt pour définir la pureté del’hydroxyde et la méthode qui per-mettra d’y parvenir. Ils s’intéressent aussi aux garanties de qualité au moment de la livraison, ainsi qu’à la bonne cohérence au niveau des per-formances », détaille David Krupka.Les normes sont également un enjeu majeur pour la valorisation des batteries usagées. « La recycla-bil ité requiert des normes en amont », avertit Olivier Peyrat.

La Chine prend très au sérieux laquestion des standards, essentiels au commerce international. Elle est donc très active au sein de l’ISO.Au début des années 2000, Pékin participait à quelques tours de table, plutôt en qualité d’observa-teur, mais aujourd’hui, elle multi-plie les participations et contribu-tions. « C’est un feu roulant », explique Olivier Peyrat. n

Etienne Goetz @etiennegoetz

L’essor des voitures électriques change la donne sur le marché du lithium. La demande explose et sur-tout, les industriels exigent une qualité irréprochable. Pourtant, il existe actuellement très peu de nor-mes internationales fixant les stan-dards de ce produit. C’est la raison pour laquelle la Chine, premier fabricant de batteries, a déposé unecentaine de propositions auprès de l’Organisation internationale de normalisation (ISO), dans le but de structurer le marché d’ici à trois ans. Les futures normes porteront aussi bien sur l’extraction, la con-centration, la séparation, que sur latransformation du lithium.

« Les Chinois ont manifestementrencontré des difficultés d’approvi-sionnement il y a quelques années. Ilssouhaitent probablement disposer denormes internationales pour sécuri-ser leurs achats en termes de qualité de lithium », explique Olivier Peyrat,directeur général de l’Afnor, l’orga-nisme français des normes. « Sur cemarché, on est passé des téléphones aux voitures électriques, ce qui a relevé le niveau d’exigence. La

Pékin a mis sur la table une centaine de propositions visant à structurer le marché du lithium.

La Chine pousse ses pions dans la bataille des normes

de faire de l’Europe un leader mon-dial de cette technologie stratégi-que ». Les Verts du Parlement euro-péen ont eux aussi bien accueilli le texte. La Commission a mis sur pied en 2017 l’Alliance européenne des batteries. Elle donne des outils juridiques pour rassembler entre Etats membres les industries de l’automobile, des matières premiè-res et de la chimie afin de concevoirdes chaînes de valeur 100 % euro-péennes. Les premières « gigafac-tories » européennes, lancées par lecouple franco-allemand, devraient entrer en activité en 2021 ou 2022.

D’autres projets sont en cours definalisation, et Maros Sefcovic se dit« persuadé que, d’ici à 2025, l’Union européenne sera en mesure de pro-duire suffisamment de cellules de batteries pour répondre aux besoins de l’industrie automobile euro-péenne ». Mercredi, la Commission a annoncé son ambition d’avoir au moins 30 millions de voitures « zéro émission » sur les routes con-tinentales d’ici à 2030. n

Le Vieux Continent veut retrouverune autonomie stratégique dans un marché aujourd’hui dominé par la Chine et la Corée du Sud.

Page 37: Les Echos - 11 12 2020

Les Echos Vendredi 11 et samedi 12 décembre 2020 FINANCE & MARCHES // 37

CAC 40

VALEURS MNÉMO / INFO / OUV CLOT % VEIL % AN BPAOST VOL. + HAUT % MOIS + HAUT AN PERISIN / DEVISE / DATE DÉTACH. / DIV NB TITRES + BAS % 52 S. + BAS AN RDT

AIR LIQUIDE (AI) R A 135,35 136 + 0,85 + 7,77 930954 137,35 - 3,65 144,45 FR0000120073 11/05/20 2,7 473.593.425 135,2 + 11,25 94,86 1,99AIRBUS GROUP (AIR) R A 93,77 93,72 + 0,14 - 28,17 3,4 1687673 94,48 + 6,6 139,4 27,60NL0000235190 15/04/19 1,4 784.149.270 92,77 - 24,55 48,12 1,76ALSTOM (ALO) R A 45,3 45,68 + 1,58 + 16,66 1156281 46,3 +10,46 46,956 FR0010220475 15/07/19 5,5 226.926.854 45,27 + 19,66 27,567 ARCELORMITTAL (MT) R A 17,5 17,446 + 0,52 + 11,53 6289451 17,662 +29,81 17,854 LU1598757687 16/05/19 0,15 1.102.809.772 17,24 + 10,24 5,98 ATOS SE (ATO) R A 74,9 73,8 - 1,23 - 0,7 393375 75 +13,71 82,46 FR0000051732 03/05/19 1,7 109.993.166 73,24 - 3,15 43,26 AXA (CS) R A 19,85 20,005 + 0,51 - 20,33 7052448 20,055 +10,72 25,615 FR0000120628 07/07/20 0,73 2.424.373.785 19,688 - 18,78 11,844 3,65BNP PARIBAS (BNP) R A 44,665 43,46 - 2,44 - 17,74 4836934 44,78 + 2,99 54,22 FR0000131104 29/05/19 3,02 1.249.798.561 43,065 - 13,55 24,505 BOUYGUES (EN) R A 34,72 34,17 - 1,41 - 9,79 837187 34,92 + 2,55 41,32 FR0000120503 09/09/20 1,7 380.702.792 33,84 - 8,9 22,27 4,98CAP-GEMINI (CAP) R A 118,15 116,85 - 1,1 + 7,3 445362 118,15 + 1,79 121,65 FR0000125338 03/06/20 1,35 165.784.837 115,8 + 10,18 51,78 1,16CARREFOUR (CA) R A 13,94 13,9 - 0,04 - 7,02 3088036 13,96 - 1,28 16,915 FR0000120172 08/06/20 0,23 817.623.840 13,745 - 7,33 12,095 1,66CREDIT AGRICOLE (ACA) R A 10,515 10,365 - 0,91 - 19,81 7929060 10,54 +17,15 13,8 FR0000045072 24/05/19 0,69 2.884.688.712 10,24 - 17,87 5,7 DANONE (BN) R A 52,22 52,38 + 0,93 - 29,12 1937871 53,14 - 3,11 75,16 FR0000120644 14/07/20 2,1 686.629.600 52,12 - 28,93 46,03 4,01DASSAULT SYSTEMES (DSY) R A 153,65 153,5 - 0,42 + 4,74 257491 154,4 + 2,71 164,15 FR0000130650 28/05/20 0,7 264.919.418 151,05 + 7,57 105 0,46ENGIE (ENGI) R A 12,585 12,395 - 1,43 - 13,92 1,21 5364766 12,625 + 3,51 16,795 10,28FR0010208488 21/05/19 0,8 2.435.285.011 12,37 - 14,01 8,626 ESSILORLUXOTTICA (EI) R A 128,9 128,5 - 0,47 - 5,38 533677 129,2 + 7,08 145 FR0000121667 21/05/19 2,04 438.611.346 127,6 - 7,59 86,76 HERMES INTL (RMS) R A 832,8 828 - 0,27 + 24,29 58160 836,4 - 0,6 865 FR0000052292 28/04/20 3,05 105.569.412 825,2 + 24,1 516 0,37KERING (KER) R A 576,1 573,3 - 0,17 - 2,03 226501 578,8 - 6,17 628,2 FR0000121485 23/06/20 4,5 126.279.322 571,5 + 4,92 348,55 0,79L.V.M.H. (MC) R A 498,45 501 + 0,6 + 20,96 465929 502,4 + 5,7 502,4 FR0000121014 01/12/20 2 504.757.339 494,85 + 26,26 278,7 0,4LEGRAND (LR) R A 70,72 71,1 + 0,91 - 2,12 625820 71,22 - 1,2 77,94 FR0010307819 01/06/20 1,34 267.447.746 70,38 - 2,36 45,91 1,89L'ORÉAL (OR) R A 304,3 301,7 - 0,1 + 14,28 472362 306 - 4,34 321,4 FR0000120321 03/07/20 3,85 559.856.576 301,7 + 18,08 196 1,28

MICHELIN (ML) R A 106,5 105,55 - 0,57 - 3,25 419800 106,9 + 1,78 112,8 FR0000121261 01/07/20 2 178.339.302 104,75 - 2,85 68 1,9ORANGE (ORA) R A 10,22 10,325 + 0,98 - 21,3 7423727 10,4 + 2,89 13,545 FR0000133308 07/12/20 0,4 2.660.056.599 10,215 - 22,57 8,632 3,87PERNOD-RICARD (RI) R A 157,9 158,8 + 0,86 - 0,38 521752 159,55 - 0,81 171,1 FR0000120693 09/12/20 1,48 261.876.560 157,15 - 2,28 112,25 0,93PEUGEOT (UG) R A 21,27 21,11 + 0,19 - 0,89 4712683 21,48 +14,76 22,01 FR0000121501 02/05/19 0,78 894.828.213 20,8 + 0,86 8,878 PUBLICIS GROUPE (PUB) R A 40,16 40,06 - 0,25 - 0,74 1237704 40,3 + 9,36 43,7 FR0000130577 07/09/20 1,15 247.748.484 39,75 + 1,14 20,94 2,87RENAULT (RNO) R A 36,515 36,355 - 0,44 - 13,81 2207529 36,88 +30,7 43,365 FR0000131906 18/06/19 3,55 295.722.284 35,47 - 11,89 12,77 SAFRAN (SAF) R A 120,4 118,45 - 1,29 - 13,95 843230 120,6 - 0,25 152,3 FR0000073272 27/05/19 1,82 427.235.939 117,35 - 19,06 51,1 SAINT-GOBAIN (SGO) R A 39,4 39,07 - 0,56 + 7,04 1341564 39,45 + 0,44 40,8 FR0000125007 10/06/19 1,33 532.683.713 38,9 + 3,72 16,408 SANOFI (SAN) R A 81,81 81,79 + 0,33 - 8,74 2264763 82,59 - 3,42 95,82 FR0000120578 04/05/20 3,15 1.258.964.700 81,36 - 5,62 67,65 3,85SCHNEIDER ELECTRIC (SU) R A 115 114,7 + 0,18 + 25,36 1036938 115,35 - 3,65 121,8 FR0000121972 05/05/20 2,55 567.068.555 114,1 + 28,19 61,72 2,22SOCIÉTÉ GÉNÉRALE (GLE) R A 17,67 17,098 - 3,25 - 44,87 7510229 17,79 + 5,53 32,23 FR0000130809 27/05/19 2,2 853.371.494 16,956 - 41,36 10,774 STMICROELETRONICS (STM) R A 29,44 29,46 - 1,67 + 22,9 0,23 5409912 29,81 + 2,86 34,68 129,64NL0000226223 21/09/20 0,04 911.204.420 28,82 + 25,9 13,73 0,14TELEPERFORMANCE (RCF) R A 270,1 270,7 + 0,45 + 24,52 138070 274,7 + 0,45 297,3 FR0000051807 02/07/20 2,4 58.730.600 269,4 + 27,21 150,3 0,89THALES (HO) R A 77,98 77,1 - 1,23 - 16,67 372230 78,5 + 4,96 99,96 FR0000121329 01/12/20 0,4 213.364.420 76,42 - 12,21 52,5 0,52TOTAL (FP) R A 36,985 37,665 + 2,09 - 23,45 7127189 37,99 +13,95 50,93 FR0000120271 25/09/20 0,66 2.653.124.025 36,79 - 20,95 21,12 1,75UNIBAIL-R/WFD (URW) R A 61,06 61,3 + 0,39 - 56,42 921063 62,14 +18,52 142,05 FR0013326246 24/03/20 5,4 138.472.385 60,62 - 56,74 29,08 VEOLIA ENV. (VIE) R A 20,12 19,625 - 2,07 - 17,23 1771241 20,19 + 4,06 29,09 FR0000124141 12/05/20 0,5 567.266.539 19,605 - 15,23 15,675 2,55VINCI (DG) R A 85,82 85,76 + 0,3 - 13,37 951890 86,8 - 2,61 107,35 FR0000125486 23/06/20 1,25 613.519.218 85,32 - 13 54,76 1,46VIVENDI (VIV) R A 25,75 25,4 - 1,93 - 1,63 3344681 25,85 - 0,31 26,65 FR0000127771 21/04/20 0,6 1.185.938.395 25,31 + 2,42 16,6 2,36WORLDLINE (WLN) G A 73,26 73,82 + 0,82 + 16,9 749999 74,08 + 0,35 82,66 FR0011981968 279.122.471 73,04 + 28,16 36,36

A.S.T. GROUPE (ASP) g C 4,42 4,36 + 21,45 14793 4,45 +19,45 4,45 FR0000076887 19/06/19 0,25 12.903.011 4,34 + 38,41 1,82 AB SCIENCE (AB) g B 10,6 10,7 + 1,71 + 98,88 165124 10,94 +12,16 13,78 FR0010557264 45.145.024 10,5 +108,17 4,81 ABC ARBITRAGE (ABCA) g B 7,3 7,26 - 1,76 + 8,36 28455 7,36 - 1,89 7,58 FR0004040608 08/12/20 0,1 58.512.053 7,25 + 9,67 5,05 1,38ABIVAX (ABVX) g B 22,7 22,4 + 2,75 - 0,67 22197 23,45 +18,9 25 FR0012333284 13.851.239 22,25 + 49,73 10,4 ACCOR (AC) LR A 31,27 30,55 - 1,77 - 26,83 865323 31,27 + 7,12 42,24 FR0000120404 10/05/19 1,05 261.288.260 30,08 - 21,14 20,15 ACTIA GROUP (ATI) g C 2,815 2,79 - 0,89 - 35,27 29177 2,815 +17,23 4,625 FR0000076655 21/09/20 0,15 20.099.941 2,71 - 31,62 1,74 5,38ADOCIA (ADOC) g B 8,15 7,96 - 1,97 - 19,6 27350 8,15 + 9,19 16,18 FR0011184241 6.977.854 7,47 - 5,13 5,6 AÉROPORTS DE PARIS (ADP) G A 106,9 105 - 0,94 - 40,37 74471 107,2 - 7,16 179,2 FR0010340141 06/12/19 0,7 98.960.602 104,2 - 40,27 70,7 AIR FRANCE-KLM (AF) LR A 5,2 5,092 - 2,08 - 48,69 4224125 5,27 +26,2 10,27 FR0000031122 14/07/08 0,58 428.634.035 4,985 - 49,98 2,614 AKKA TECHNOLOGIES (AKA) Gg B 26,45 25,65 - 1,72 - 56,92 59862 26,45 +17,66 62,273 FR0004180537 28/06/19 0,49 20.291.990 25,25 - 51,27 14,54 2,73AKWEL (AKW) g B 21,4 21,25 - 0,47 + 5,2 7851 21,4 +22,83 22,5 FR0000053027 08/06/20 0,2 26.741.040 20,7 + 4,68 8,8 0,92ALBIOMA (ABIO) Gg B 42,85 41,85 - 2,22 + 60,96 50214 42,85 - 3,46 47,6 FR0000060402 11/06/20 0,35 31.641.910 41,15 + 66,4 22,85 0,84ALD (ALD) G A 11,34 11,4 - 17,63 93702 11,48 14,2 FR0013258662 29/05/20 0,63 404.103.640 11,24 - 17,15 6,29 5,53ALPES (CIE DES ) (CDA) g B 19,26 19,02 - 1,45 - 36,28 17108 19,26 +10,2 30,95 FR0000053324 10/03/20 0,7 24.510.101 18,8 - 37,23 13,16 3,68ALTAREA (ALTA) A 132,8 133,6 + 2,45 - 34,02 6810 133,6 + 0,6 210 FR0000033219 06/07/20 4,5 17.275.839 130 - 33,07 103,2 ALTEN (ATE) G A 89,95 88,25 - 1,89 - 21,56 33403 90 - 0,06 119 FR0000071946 20/06/19 1 34.205.863 87,1 - 16,59 54,5 AMUNDI (AMUN) G A 66,8 67,6 + 1,58 - 3,29 EX-DS 15/03/17 207256 68,05 + 1,43 78,55 FR0004125920 24/05/19 2,9 202.585.953 66,65 - 1,67 43,82 ARCHOS (JXR) g C 0,047 0,043 - 14,49 - 60,28 50633885 0,049 +37,1 0,115 FR0000182479 167.279.961 0,042 - 38,32 0,025 ARGAN (ARG) A 78 77,4 - 0,51 - 0,26 2780 78 - 2,52 93 FR0010481960 26/03/20 1,9 22.309.227 77,4 + 7,8 54 ARKEMA (AKE) LR A 95,98 95,3 - 0,42 + 0,63 195461 97,56 + 4,31 99,52 FR0010313833 25/05/20 2,2 76.736.476 95,3 - 0,71 42,5 2,31ARTMARKET.COM (PRC) g C 7,4 7,22 - 3,99 - 24,08 23355 7,54 + 7,44 10,1 FR0000074783 6.651.515 7,2 - 19,06 5,01 ASSYSTEM (ASY) B 25,8 26,1 + 0,39 - 19,2 OPA 24/11/17 8595 26,8 +17,57 34,65 FR0000074148 08/07/20 1 15.668.216 25,5 - 15,26 16,58 3,83ATARI (ATA) g C 0,376 0,374 + 13,47 1072778 0,385 - 3,48 0,494 FR0010478248 269.809.814 0,368 + 20,65 0,17 AUBAY (AUB) g C 35,7 33,9 - 5,04 + 1,35 10522 35,7 + 8,83 36,3 FR0000063737 06/11/20 0,33 13.208.296 33,45 15,32 0,97AXWAY SOFTWARE (AXW) g B 24,6 24,8 + 1,22 +100 3353 24,8 + 7,36 24,9 FR0011040500 02/07/19 0,4 21.316.266 24,2 +111,97 10,55 BAINS MER MONACO (BAIN) B 63,6 63,6 + 1,27 + 10,8 850 63,6 + 4,95 67,6 MC0000031187 26/09/14 0,01 24.516.661 61,6 + 15,64 44 BÉNÉTEAU (BEN) g B 9,26 9,12 - 1,19 - 15,79 46235 9,3 + 9,81 10,9 FR0000035164 12/02/20 0,23 82.789.840 8,95 - 12,56 4,9 2,52BIC (BB) G A 50,8 49,46 - 2,54 - 20,23 114410 51,2 + 2,91 66,05 FR0000120966 01/06/20 2,45 45.532.240 48,02 - 20,55 38,5 4,95BIGBEN INT. (BIG) g C 19,48 19,16 - 1,14 + 19,45 45618 19,6 +29,28 19,8 FR0000074072 24/07/19 0,2 19.969.658 19,06 + 27,73 8,1 BIOMÉRIEUX (BIM) G A 115,1 117,9 + 0,86 + 48,58 135953 119,5 + 3,42 144,8 FR0013280286 14/07/20 0,19 118.361.220 113,8 + 42,74 75 0,16BOIRON (BOI) g A 37,6 37,2 - 0,27 + 2,2 8142 38,65 - 4,62 44,8 FR0000061129 02/06/20 1,05 17.545.408 36,9 + 9,73 26,75 2,82BOLLORÉ (BOL) G A 3,368 3,334 - 0,66 - 14,29 1088256 3,376 - 2,23 3,996 FR0000039299 02/09/20 0,02 2.946.208.874 3,322 - 13,18 2,01 0,6BONDUELLE (BON) g B 20,15 19,78 - 0,7 - 15,11 26815 20,2 - 0,1 23,9 FR0000063935 06/01/20 0,5 32.538.340 19,68 - 17,24 16,58 2,53BUREAU VERITAS (BVI) LR A 22,99 22,71 - 0,09 - 2,36 987937 22,99 + 6,92 26,01 FR0006174348 20/05/19 0,56 452.204.032 22,35 - 2,82 15,165 BURELLE SA (BUR) A 780 782 - 4,4 20 782 +36,24 842 FR0000061137 03/06/20 15 1.757.623 780 + 1,56 407 1,92CARMILA (CARM) g C 12 11,9 - 0,17 - 40,5 67217 12 +22,81 20 FR0010828137 03/07/20 1 142.357.425 11,74 - 34,69 6,54 CASINO (CO) G A 25,39 25,31 - 0,04 - 39,3 221187 25,8 + 4,33 42,85 FR0000125585 09/05/19 1,56 108.426.230 25,07 - 45,36 19,045 6,16CATANA GROUP (CATG) g C 2,82 2,73 - 0,73 - 36,95 135563 2,82 +17,17 4,49 FR0010193052 30.514.178 2,655 - 24,48 1,7

CGG (CGG) G A 0,856 0,883 + 2,63 - 69,51 12463595 0,895 +30,02 3,121 FR0013181864 711.324.929 0,845 - 65,66 0,443 CHARGEURS (CRI) g C 17,92 17,58 - 1,79 + 1,74 82347 17,96 + 2,93 24,1 FR0000130692 16/09/20 0,28 24.211.232 17,58 + 7,85 7,9 1,59CHRISTIAN DIOR (CDI) A 443,4 443,2 - 2,98 EX D OP 08/06/17 7358 447,6 + 3,26 479,8 FR0000130403 01/12/20 2 180.507.516 439,2 252,4 0,45CNP ASSURANCES (CNP) G A 13,34 13,18 - 1,13 - 25,66 728680 13,43 + 9,83 18,17 FR0000120222 26/04/19 0,89 686.618.477 12,95 - 26,37 5,3 COFACE (COFA) G A 8,54 8,55 - 0,47 - 22,06 207544 8,59 - 1,95 12,51 FR0010667147 22/05/19 0,79 152.031.949 8,41 - 18,57 4,448 COLAS (RE) A 119,5 122,5 + 3,81 - 13 4508 124,5 +12,39 143 FR0000121634 08/09/20 6,4 32.654.499 119,5 - 13 90 5,22COVIVIO (COV) G A 76,4 74,7 - 1,84 - 26,19 147537 76,45 + 8,18 112,2 FR0000064578 27/04/20 4,8 94.544.232 73,9 - 28,03 38,84 COVIVIO HOTELS (COVH) A 17,7 17,95 - 6,02 - 37,02 16697 18,4 +23,79 30 FR0000060303 13/05/20 1,55 132.547.616 17 - 38,1 11,6 DASSAULT AV. (AM) G A 919,5 900 - 0,06 - 23,08 3973 919,5 + 1,24 1192 FR0000121725 22/05/19 21,2 8.348.703 894,5 - 20,84 624 DBV TECHNOLOGIES (DBV) G B 4,58 4,552 - 1,34 - 76,81 949320 4,61 + 8,38 25,44 FR0010417345 54.927.187 4,314 - 67,78 2,352 DERICHEBOURG (DBG) g B 4,696 4,61 - 1,12 + 26,3 566721 4,72 +59,63 4,74 FR0000053381 07/02/20 0,11 159.397.489 4,526 + 30,23 2,07 2,39DEVOTEAM (DVT) g C 98 97,9 + 3,6 3132 98 + 0,1 99,1 FR0000073793 03/07/19 1 8.332.407 97,9 + 9,14 47,25 EDENRED (EDEN) LR A 46,48 46,07 - 0,65 - 0,07 602575 46,48 - 1,98 51,56 FR0010908533 13/05/20 0,7 246.583.351 45,19 + 4,92 29,74 1,52EDF (EDF) LR A 12,795 12,5 - 2,27 + 25,91 EX-DS 7/03/17 3342280 12,83 +13,84 13,61 FR0010242511 26/11/19 0,15 3.099.923.579 12,395 + 33,38 5,978 EIFFAGE (FGR) LR A 81,5 81,2 - 0,1 - 20,39 273905 82,28 - 2,29 111,75 FR0000130452 21/05/19 2,4 98.000.000 80,84 - 18,67 44,65 EKINOPS (EKI) g C 6,55 6,66 + 2,62 + 0,76 84593 6,66 +11,37 7 FR0011466069 25.448.179 6,46 + 31,88 3,67 ELIOR (ELIOR) G A 5,785 5,63 - 2,43 - 57,02 869697 5,785 + 4,26 13,83 FR0011950732 07/04/20 0,29 174.147.823 5,52 - 55,39 3,062 5,15ELIS (ELIS) G A 13,71 13,26 - 3,28 - 28,32 287760 13,76 + 1,22 19 FR0012435121 27/05/19 0,37 221.807.226 13,16 - 26,25 5,375 EOS IMAGING (EOSI) g C 1,8 1,786 - 1,65 - 19,37 398259 1,854 +27,21 2,9 FR0011191766 26.569.946 1,732 - 18,45 1,18 ERAMET (ERA) G A 40,5 40,08 - 1,04 - 12,57 86112 40,52 +35,04 47,18 FR0000131757 29/05/19 0,6 26.636.003 38,9 - 0,64 18,665 ERYTECH PHARMA (ERYP) g B 7,86 7,42 - 5,6 + 10,75 174934 7,97 +22,24 11,46 FR0011471135 19.088.731 7,35 + 75,83 2,8 ESI GROUP (ESI) g C 42,4 41,8 - 1,42 + 28,62 1411 42,4 + 3,98 43,6 FR0004110310 6.028.192 41,6 + 46,67 24,6 EURAZEO (RF) G A 54,7 54,7 + 0,37 - 10,33 160493 55,5 + 9,4 67,05 FR0000121121 08/05/19 1,25 79.000.522 53,8 - 10,98 35,6 EUROFINS SCIENT. (ERF) LR A 63,79 65,29 + 2,5 + 32,11 450834 65,85 - 6,06 75,4 FR0014000MR3 03/07/19 2,45 190.742.750 63,2 + 32,11 39,3 4,41EUROPCAR GROUPE (EUCAR) g B 0,895 0,868 - 0,8 - 79,97 2810126 0,895 +11,42 4,688 FR0012789949 21/05/19 0,26 163.884.278 0,834 - 77,9 0,492 EUTELSAT COM. (ETL) G A 9,544 9,396 - 1,45 - 35,16 390222 9,55 - 1,61 14,825 FR0010221234 20/11/20 0,89 230.544.995 9,386 - 36,28 7,984 9,47EXEL INDUSTRIES (EXE) B 48,5 47,6 - 1,86 + 2,15 739 49 +19,9 49,1 FR0004527638 13/02/19 1,14 6.787.900 47,6 + 12,53 31 FAURECIA (EO) LR A 41 40,5 - 1,15 - 15,68 245304 41,32 + 7,88 49,49 FR0000121147 31/05/19 1,25 138.035.801 40,05 - 14,56 20,58 FDJ (FDJ) G A 35,8 35,77 - 0,17 + 50,14 208623 35,92 + 7,16 36,09 FR0013451333 26/06/20 0,45 191.000.000 35,42 + 51,89 18,3 1,26FFP (FFP) g A 93,2 93,5 + 1,63 - 10,1 10218 94,2 +12,79 105,6 FR0000064784 22/05/20 2,15 24.922.589 92,6 - 7,24 42,15 2,3FIGEAC AERO (FGA) g B 4,29 4,29 - 0,23 - 53,87 74772 4,51 +22,57 9,69 FR0011665280 31.839.473 4,205 - 60,71 2,415 FIN. ODET (ODET) A 746 746 + 0,54 - 4,6 257 748 + 3,61 810 FR0000062234 04/06/20 1 6.585.990 742 - 5,33 497 0,13FNAC DARTY (FNAC) G A 48,7 48,82 + 0,45 - 7,54 73440 48,98 +16,91 53,85 FR0011476928 26.608.571 47,64 - 5,48 16,29 FONCIÈRE LYONNAISE (FLY) A 65 63,4 - 3,06 - 14,09 1044 66,8 +10,07 83,4 FR0000033409 21/04/20 2,65 46.528.974 63,4 - 11,94 51 GECI INTERNATIONAL (GECP) g C 0,017 0,017 - 3,51 - 49,7 8085233 0,017 -26,01 0,07 FR0000079634 01/10/01 0,1 315.583.099 0,016 - 47,28 0,016 GECINA (GFC) LR A 128,3 127,2 - 0,39 - 20,3 126304 128,8 - 0,63 183,6 FR0010040865 01/07/20 2,5 76.463.771 126,1 - 20,2 88,5 GENFIT (GNFT) G B 4,646 4,48 - 2,01 - 74,62 380119 4,658 +26,98 20,96 FR0004163111 38.858.617 4,47 - 69,19 3,022 GENSIGHT (SIGHT) g C 7,01 6,63 - 0,45 +166,8 328364 7,01 +63,7 7,8 FR0013183985 39.693.012 6,51 +281,47 1,36

GETLINK (GET) LR A 13,77 13,52 - 2,17 - 12,83 728825 13,85 - 6,24 17,04 FR0010533075 23/05/19 0,36 550.000.000 13,44 - 11,63 8,615 GL EVENTS (GLO) g B 11,02 10,3 - 6,53 - 57,17 122847 11,08 + 8,31 24,45 FR0000066672 01/07/19 0,65 29.982.787 10,22 - 55,02 6,4 GROUPE CRIT (CEN) g B 64,2 65 + 0,31 - 11,68 1057 65,4 +11,11 74,4 FR0000036675 26/06/19 1 11.250.000 63,2 - 11,56 36,15 1,54GROUPE GORGÉ (GOE) g B 13,46 13,22 - 1,78 - 22,42 6232 13,48 + 3,77 19 FR0000062671 01/07/20 0,32 13.502.843 13,22 - 15,8 8,59 2,42GTT (GTT) G A 80,1 80,35 + 0,88 - 5,91 53937 80,55 - 4,12 102,7 FR0011726835 03/11/20 2,5 37.078.357 79,1 - 3,83 48,76 3,11GUERBET (GBT) g B 31,75 31,75 - 23,12 1605 32 - 0,47 44,1 FR0000032526 30/06/20 0,7 12.600.874 31,65 - 39,98 24,05 2,21HAULOTTE GROUP (PIG) g B 5,78 5,93 + 3,67 + 11,89 136931 5,93 +34,31 5,93 FR0000066755 15/07/20 0,22 31.371.274 5,73 + 17,89 3,27 3,71HEXAOM (HEXA) g B 37,1 38,2 + 2,69 + 3,8 4330 38,2 +19,75 39,8 FR0004159473 11/06/19 1,5 6.937.593 37,1 + 14,03 21,7 HIGH CO (HCO) g C 4,93 4,88 - 0,41 - 19,74 1252 4,93 +10,91 6,32 FR0000054231 24/05/19 0,16 22.421.332 4,88 - 18,12 2,95 ICADE (ICAD) G A 65,55 65 - 0,15 - 33,02 109327 66,1 + 1,33 106 FR0000035081 06/07/20 1,6 74.535.741 64,2 - 31,14 41,88 ID LOGISTIC (IDL) g A 202,5 202,5 - 0,49 + 12,25 449 203,5 + 1,76 220 FR0010929125 5.649.427 202,5 + 6,58 115 IMERYS (NK) G A 37 36,78 - 0,16 - 2,39 87192 37 +14,15 43,54 FR0000120859 15/05/20 1,72 85.015.055 36,22 + 2,97 20,68 4,68INNATE PHARMA (IPH) g B 4,38 4,34 - 1,36 - 27,18 406191 4,402 +23,65 7,48 FR0010331421 78.980.640 4,226 - 23,19 2,9 INTERPARFUMS (ITP) g A 43 43,4 + 0,93 + 29,03 21165 43,75 + 2,36 44,65 FR0004024222 02/05/19 0,71 51.988.409 42,95 + 30,97 23,682 IPSEN (IPN) G A 68,5 69,3 + 1,17 - 12,28 212787 69,6 -17,4 95,9 FR0010259150 03/06/20 1 83.814.526 67,25 - 12,39 34,2 1,44IPSOS (IPS) G A 28,3 28,55 - 1,38 32204 28,6 +13,29 32,1 FR0000073298 01/07/20 0,45 44.436.235 28,15 + 1,06 15,82 1,58JACQUET METAL SERVICE (JCQ) g B 13,36 14,32 + 7,19 - 7,13 67565 14,4 +20,74 15,86 FR0000033904 01/07/20 0,2 23.461.313 13,36 + 0,7 7,6 1,4JCDECAUX (DEC) G A 20,04 19,82 - 0,9 - 27,87 161743 20,04 + 5,2 27,74 FR0000077919 21/05/19 0,58 212.902.810 19,61 - 24,06 12,26 KAUFMAN & BROAD (KOF) g B 36,6 35,85 - 2,05 - 3,11 16440 36,75 - 0,69 41,86 FR0004007813 08/06/20 1,75 22.088.023 35,65 - 3,94 19,4 4,88KLEPIERRE (LI) LR A 19,1 18,885 - 0,58 - 44,21 862094 19,275 + 6,54 34,66 FR0000121964 07/07/20 1,1 299.939.198 18,565 - 43,12 10,05 KORIAN (KORI) G A 29,5 28,78 - 1,98 - 26,31 120470 29,7 - 4,07 42,54 FR0010386334 11/06/19 0,6 105.038.158 28,78 - 24,03 23,441 LAGARDÈRE (MMB) G A 20,94 20,4 - 2,95 + 4,99 90499 21,16 + 4,88 28,48 FR0000130213 14/05/19 1,3 131.133.286 20,32 + 3,4 8,14 LDC (LOUP) A 99,4 98,4 - 1,6 - 5,84 3002 100 - 2,57 110,5 FR0013204336 25/08/20 1,2 17.134.471 98,4 - 8,04 74,2 1,22LNA SANTÉ (LNA) g B 47,8 47,3 - 1,36 - 4,54 5700 48,4 - 3,07 53 FR0004170017 08/07/20 0,45 9.705.937 47,3 - 2,87 31,75 0,95LECTRA (LSS) g B 24,15 24,2 - 0,41 + 8,28 15422 24,35 +24,74 24,85 FR0000065484 06/05/20 0,4 32.347.211 24 + 9,01 12,2 1,65LINEDATA SVICES (LIN) g B 28,1 28,3 + 1,43 + 5,99 14279 28,3 +10,55 30,9 FR0004156297 06/07/20 0,95 6.625.726 27,9 + 10,12 18 3,36LISI (FII) g A 21 20,65 - 1,67 - 31,28 21856 21 - 1,67 32,7 FR0000050353 30/04/19 0,44 54.114.317 20,5 - 34,24 12,5 LUMIBIRD (LBIRD) g C 12,74 12,68 - 0,47 - 16,03 16403 12,84 + 7,82 15,499 FR0000038242 22.466.882 12,36 + 2,1 5,365 M6-MÉTROPOLE TV (MMT) G A 13,74 14,04 + 1,74 - 16,33 163857 14,16 +25,13 17,07 FR0000053225 15/05/19 1 126.414.248 13,66 - 10,74 8,55 MAISONS DU MONDE (MDM) G B 15,67 15,32 - 2,42 + 18,12 88949 15,67 +23,05 15,83 FR0013153541 02/07/19 0,47 45.241.894 15,2 + 25,88 5,35 MANITOU (MTU) g B 21,9 22,05 + 0,23 + 2,8 5470 22,2 + 3,76 22,3 FR0000038606 17/06/19 0,78 39.668.399 21,9 + 14,84 11,36 MARIE BRIZARD W & S (MBWS) g C 1,434 1,414 - 1,4 - 11,74 9522 1,434 + 3,67 1,7 FR0000060873 27/09/07 0,5 44.698.844 1,414 - 25,66 0,651 MAUNA KEA (MKEA) g C 1,408 1,374 - 3,24 + 0,59 123211 1,422 +17,84 2 FR0010609263 30.558.480 1,374 + 41,94 0,566 MERCIALYS (MERY) G A 6,975 7,01 + 0,79 - 43,15 525455 7,06 +24,18 12,64 FR0010241638 27/04/20 0,48 92.049.169 6,915 - 42,78 3,89 MERSEN (MRN) g B 25 25,15 + 1 - 26,35 25524 25,25 + 4,79 35,3 FR0000039620 03/07/19 0,95 20.858.964 24,7 - 25,48 12,38 METABOLIC EXPLORER (METEX) g C 2,5 2,35 - 6,38 + 52,6 202894 2,51 +38,24 2,72 FR0004177046 27.813.800 2,35 + 45,06 0,921 NANOBIOTIX (NANO) g B 12,52 12,46 - 1,11 + 50,48 194335 12,58 +50,12 14,82 FR0011341205 13/05/19 26.037.122 12 + 68,38 3,54 NATIXIS (KN) G A 2,706 2,639 - 2,15 - 33,32 8953721 2,721 + 9,55 4,411 FR0000120685 31/05/19 0,78 3.155.951.502 2,608 - 30,26 1,471 NEOEN (NEOEN) G A 48,45 48,2 - 0,1 + 55,99 120214 48,9 + 4,78 52,9 FR0011675362 85.490.712 47,3 + 90,51 25,3 NEXANS (NEX) G A 55,15 55,45 + 1 + 27,5 65744 55,85 +19,04 57,35 FR0000044448 17/05/19 0,3 44.105.941 54,3 + 36,21 21,55 NEXITY (NXI) G A 33,52 32,62 - 2,04 - 27,15 85417 33,52 +11,71 46,2 FR0010112524 25/05/20 2 56.129.724 32,62 - 27,28 22,04 6,13NICOX (COX) g B 4,345 4,25 - 1,73 - 2,41 302652 4,345 + 7,05 6,27 FR0013018124 33.491.370 4,22 + 8,83 2,53 NRJ GROUP (NRG) B 5,8 5,8 + 1,05 - 13,43 2894 5,82 + 3,57 6,88 FR0000121691 03/06/19 0,17 78.107.621 5,72 - 3,65 4,5 ONXEO (ONXEO) g B 0,767 0,755 + 0,53 + 36,04 63459 0,767 +10,06 0,979 FR0010095596 78.317.810 0,75 + 44,64 0,3 ORPÉA (ORP) LR A 106,4 105,95 + 0,09 - 7,31 118005 107,55 - 2,84 129 FR0000184798 12/07/19 1,2 64.615.837 105,6 - 5,99 69,1 PHARMAGEST INT. (PHA) g B 99,9 97,9 - 1,41 + 61,55 6469 100 +15,45 100,8 FR0012882389 01/07/20 0,9 15.174.125 97,6 + 61,55 41,25 0,92PIERRE & VACANCES (VAC) g B 14,65 14 - 2,78 - 30,69 22774 14,65 + 7,69 33,9 FR0000073041 19/03/12 0,7 9.893.463 13,85 - 26,55 9,08 PLASTIC OMNIUM (POM) G A 28,62 28,32 - 0,63 + 13,73 139206 28,76 +21,23 31,48 FR0000124570 29/04/20 0,49 148.566.107 28,16 + 15,69 12,01 1,73PLASTIVALOIRE (PVL) g B 6 6,06 + 1,34 - 12,43 DIV 8 02/05/17 22211 6,07 +48,71 7,48 FR0013252186 18/04/19 0,2 22.125.600 5,95 - 19,74 2,79 PROLOGUE (PROL) g C 0,349 0,347 + 1,46 125672 0,349 +47,66 0,41 FR0010380626 46.585.630 0,321 - 5,45 0,15 QUADIENT (QDT) g B 16,57 16,42 - 1,32 - 23,91 93292 16,74 +35,7 24,3 FR0000120560 07/09/20 0,35 34.562.912 16,17 - 24,05 9,615 2,13RALLYE (RAL) A 6,19 6,26 - 0,48 - 38,14 93321 6,47 +33,62 10,3 FR0000060618 20/05/19 1 52.373.235 6,18 - 27,21 3,105 RAMSAY GDS (GDS) A 17,8 18 - 0,55 + 7,14 566 18 + 2,86 21,8 FR0000044471 02/12/14 1,4 110.389.690 17,6 + 7,14 15,2 RECYLEX SA (RX) g C /130520 - 45,57 3,66 FR0000120388 04/07/90 0,61 25.886.482 - 46,2 1,3 RÉMY COINTREAU (RCO) G A 144,4 146,6 + 1,17 + 33,88 72398 148,2 - 3,43 162,8 FR0000130395 28/07/20 1 50.503.106 144,4 + 27,59 79,2 0,68REXEL (RXL) G A 12,13 11,805 - 2,64 - 0,34 882812 12,19 + 9,61 13,415 FR0010451203 02/07/20 0,48 304.425.106 11,785 + 1,03 4,921 ROBERTET (RBT) G B 851 855 - 0,23 - 7,37 340 862 - 6,46 1068 FR0000039091 02/07/20 5 2.172.551 851 - 0,12 662 0,59ROTHSCHILD & CO (ROTH) G A 27 26,45 - 2,04 + 3,32 17051 27,05 - 0,19 27,6 FR0000031684 20/05/19 0,79 77.617.512 26,3 + 6,65 14,62 RUBIS (RUI) G A 37,98 37,9 - 0,21 - 30,78 DIV 2 28/07/17 387972 38,14 +10,17 57,45 FR0013269123 17/06/20 1,75 103.560.783 37,2 - 25,98 27,34 4,62SARTORIUS STED. BIO. (DIM) G A 292,2 294,6 + 1,03 + 99,46 DIV 6 10/05/16 57886 295,8 - 1,67 367 FR0013154002 29/06/20 0,34 92.180.190 290,8 +104,3 133,9 0,12SAVENCIA (BH) B 59,4 59,4 - 3,26 1074 59,6 +11,65 64,8 FR0000120107 13/05/19 1 14.032.930 59 + 0,68 45,1

SCOR (SCR) LR A 27,58 27,4 - 0,51 - 26,78 501251 27,84 - 5,52 39,12 FR0010411983 30/04/19 1,75 186.677.576 26,96 - 27,86 15,88

SEB (SK) G A 145,4 143,3 - 1,24 + 8,23 35827 145,9 + 1,06 155 FR0000121709 22/05/20 1,43 50.307.064 142,7 + 5,99 86,35 1

SES-IMAGOTAG (SESL) Gg B 27,5 29 + 6,42 - 8,52 48353 31,3 +12,4 37,5 FR0010282822 25/06/12 0,5 15.758.108 27,5 - 0,51 19,5

SHOWROOMPRIVÉ (SRP) g C 1,768 1,714 - 2,06 +159,25 577094 1,768 +18,21 1,888 FR0013006558 117.461.769 1,656 +114,06 0,243

SOITEC (SOI) G A 150 150,8 - 0,46 + 60,94 EX-DS 13/05/16 REGR.1P20 73740 151,1 +17,08 154,7 FR0013227113 33.278.901 147,8 + 59,92 48,86

SOLOCAL GROUP (PAJ) B 3 2,925 - 2,4 - 89,74 477253 3,003 +18,42 30,115 FR00140006O9 129.505.837 2,881 - 88,88 1,73

SOLUTIONS 30 (ALS30) A 16,5 14,7 - 8,92 + 47,59 5808543 17,3 - 7,31 19,94 FR0013379484 107.127.984 12,72 + 49,47 5,3

SOMFY (SO) A 129,2 128,4 - 0,77 + 46,74 4607 129,4 + 1,1 145 FR0013199916 30/06/20 1,25 37.000.000 126,2 + 49,13 63,6 0,97

SOPRA STERIA GP (SOP) G A 126,7 124,9 - 1,58 - 12,96 41721 126,7 + 9,27 162 FR0000050809 02/07/19 1,85 20.547.701 123,1 - 8,36 78,15

SMCP (SMCP) g B 5,3 4,982 - 6,35 - 47,28 339905 5,32 +15,86 10,08 FR0013214145 74.117.760 4,982 - 33,66 2,945

SPIE (SPIE) G A 17,05 16,49 - 3 - 9,2 315590 17,06 - 2,89 19,58 FR0012757854 24/09/19 0,17 157.698.124 16,47 - 9,64 7,805

SQLI (SQI) g C 18,9 19,1 - 0,78 - 22,04 805 19,35 - 3,29 24,5 FR0011289040 21/07/17 0,88 4.613.975 18,75 + 12,88 13,42

STEF (STF) g B 71,3 71,8 + 0,7 - 10,7 1214 71,8 - 0,83 85,1 FR0000064271 17/11/20 1,5 13.000.000 70,4 - 11,79 57,2 4,18

SUEZ (SEV) LR A 15,825 15,82 - 0,53 + 17,32 1232438 15,895 - 1,65 16,36 FR0010613471 18/05/20 0,45 628.362.579 15,795 + 19,67 8,046 2,85

SWORD GROUP (SWP) g B 30,85 30,75 - 0,81 - 9,82 7598 31 - 5,53 37,15 FR0004180578 10/09/20 2,04 9.544.965 30,4 - 8,62 20,45 7,81

SYNERGIE (SDG) g B 30 30 + 2,74 5992 30 + 3,63 31,4 FR0000032658 19/06/19 0,8 24.362.000 28,85 - 0,5 13

TARKETT (TKTT) G B 15 15,11 + 0,73 + 4,93 46598 15,3 +33,01 16,56 FR0004188670 12/06/19 0,6 65.550.281 14,89 + 12,34 7,53

TECHNICOLOR (TCH) B 1,932 1,903 - 0,89 - 85,22 1422560 2,1 +30,25 13,735 FR0013505062 218.324.139 1,902 - 85,59 1,1

TELEPERFORMANCE (RCF) R A 270,1 270,7 + 0,45 + 24,52 138070 274,7 + 0,45 297,3 FR0000051807 02/07/20 2,4 58.730.600 269,4 + 27,21 150,3 0,89

TF1 (TFI) G A 6,96 6,835 - 2,22 - 7,64 311459 6,985 +15,16 7,805 FR0000054900 29/04/19 0,4 210.392.991 6,755 - 10,6 4,062 5,85

TFF GROUP (TFF) B 27,1 26,9 - 0,37 - 26,7 866 27,1 +10,7 38,2 FR0013295789 06/11/20 0,35 21.680.000 26,8 - 28,27 22 1,3

THERMADOR GROUPE (THEP) B 65 65,6 - 0,61 + 23,77 1705 66,2 + 7,19 66,8 FR0013333432 09/04/20 1,8 9.200.849 65 + 20,59 35,7 2,74

TIKEHAU CAPITAL (TKO) g A 23,8 23,7 - 0,84 + 7,73 EX D S 03/07/17 21319 24 + 6,28 26,4 FR0013230612 22/05/20 0,5 137.114.864 23,6 + 1,72 15,45 2,11

TRANSGÈNE (TNG) g B 1,728 1,664 - 2,8 + 7,35 122157 1,728 + 5,18 2,08 FR0005175080 83.841.334 1,654 - 10,54 0,81

TRIGANO (TRI) G A 138 136,2 - 1,59 + 44,74 20552 139,6 +23,59 140,5 FR0005691656 14/01/20 2 19.336.269 134,8 + 48,45 41,76 1,47

UBISOFT ENTERTAINMENT (UBI) LR A 78,38 78,34 - 0,1 + 27,22 356893 78,96 + 6,41 85,14 FR0000054470 123.458.887 77,58 + 37,78 51,16

VALEO (FR) LR A 31,67 31,44 - 0,76 + 0,1 558096 31,91 + 1,42 34,05 FR0013176526 29/06/20 0,2 241.717.403 30,93 - 4,76 10,51 0,64

VALLOUREC REG (VK) G A 28,355 29,03 + 1,86 - 74,19 214507 29,455 +82,62 114,68 FR0013506730 11.449.694 27,87 - 70,76 11,186

VALNEVA (VLA) g B 6,72 6,83 + 1,19 +165,76 387167 6,87 +36,6 7,35 FR0004056851 90.954.937 6,56 +171,03 1,784

VERALLIA (VRLA) g A 27,6 27,55 + 0,18 - 8,96 36690 27,6 + 5,56 36,01 FR0013447729 15/06/20 0,85 123.272.819 27,3 - 8,26 19,26 3,09

VERIMATRIX (VMX) g B 2,86 2,855 - 0,18 + 44,19 243535 2,885 + 8,14 3,245 FR0010291245 84.927.567 2,8 + 50,26 1,138

VICAT (VCT) g A 35 34,75 - 0,71 - 13,88 25696 35,25 + 7,59 41,65 FR0000031775 20/04/20 1,5 44.900.000 34,75 - 12,03 22,5 4,32

VILMORIN & CIE (RIN) g A 48,7 49,25 + 0,82 + 2,07 4848 49,9 + 2,07 52,4 FR0000052516 11/12/19 1,35 22.917.292 48,7 - 1,5 34,25 2,74

VIRBAC (VIRP) G A 220 223 + 1,83 - 5,71 4140 224,5 + 4,45 244,5 FR0000031577 26/06/15 1,9 8.458.000 220 - 3,67 132,2

WAVESTONE (WAVE) g B 29,55 29,75 + 0,34 + 14,42 5712 29,95 +16,67 29,95 FR0013357621 19/09/19 0,23 20.196.492 29,5 + 18,53 15,5

WENDEL (MF) G A 97,8 98,25 + 0,26 - 17,09 81652 98,75 + 7,2 127,5 FR0000121204 07/07/20 2,8 44.719.119 97 - 19,47 54,8 2,85

WORLDLINE (WLN) G A 73,26 73,82 + 0,82 + 16,9 749999 74,08 + 0,35 82,66 FR0011981968 279.122.471 73,04 + 28,16 36,36

XPO LOGISTICS (XPO) A 278 278 - 1,42 + 6,92 9 278 + 9,45 296 FR0000052870 20/06/19 0,6 9.836.241 278 + 7,75 214

AUTRES VALEURS DE LA ZONE EUROEURONEXT (ENX) G A 86,3 87,05 + 0,87 + 19,82 237922 88,45 - 0,34 109,7 NL0006294274 20/05/20 1,35 70.000.000 86 + 25,43 52,9 1,83

NOKIA (NOKIA) R A 3,447 3,438 - 0,46 + 3,95 0,3 247492 3,462 +10,71 4,352 11,61FI0009000681 29/07/19 0,02 5.653.886.159 3,36 + 9,96 2,083 1,46

SES (SESG) LR 7,87 7,884 + 0,13 - 36,93 823560 7,914 - 1,35 14,165 LU0088087324 21/04/20 0,34 376.915.302 7,776 - 33,04 4,87 5,07

X-FAB SILICON (XFAB) g A 4,65 4,58 - 3,38 + 9,83 106785 4,735 +23,45 6,08 BE0974310428 130.781.669 4,53 + 14,64 1,868

VALEURS ZONE INTERNATIONALEGENERAL ELECTRIC (GNE) 9,368 9,413 + 0,53 - 4,42 1,29 8595 9,45 +23,24 12,1 US3696041033 USD 25/09/20 0,01 8.759.873.000 9,1 - 5 5,02

HSBC (HSB) 4,426 4,417 - 1,01 - 37,04 52,19 141010 4,484 + 5,47 7,121 GB0005405286 USD 27/02/20 0,21 20.368.242.460 4,34 - 33,52 3,081

LAFARGEHOLCIM LTD (LHN) A 43,8 43,4 - 1,27 - 11,34 4 48606 44,1 + 1,17 49,79 CH0012214059 CHF 15/05/20 2 615.929.059 42,9 - 8,13 26,89

SCHLUMBERGER (SLB) A 19,05 19,55 + 2,63 - 45,54 3,45 69463 19,7 +26,95 36,9 AN8068571086 USD 01/12/20 0,13 1.385.122.304 18,35 - 41,99 11,05

SRD Suite VALEURS FRANÇAISES SRD Suite VALEURS FRANÇAISES

A : Indicateur acompte, solde ou total du dividende. BPA : Bénfice par action. PER : Price Earning Ratio. Les plus hauts et plus bas ajustés sont sur l’année civile. Les valeurs classées par ordre alphabétique sont regroupées en trois classes de capitalisation signalées par les lettres A pour les capitalisations supérieures à 1 milliard d’euros, B pour les capitalisations comprises entre 1 milliard d’euros et 150 millions d’euros et C pour les capitalisations inférieures à 150 millions d’euros. L : Valeurs de l’indice CACNext20. R : Valeurs de l’indice CACLarge60. G : Valeurs de l’indice CACMid60. g : Valeurs de l’indice CACSmall. Les bénéfices par action : source FacSet JCF Estimates.

VALEURS MNÉMO / INFO / OUV CLOT % VEIL % AN BPAOST VOL. + HAUT % MOIS + HAUT AN PERISIN / DEVISE / DATE DÉTACH. / DIV NB TITRES + BAS % 52 S. + BAS AN RDT

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euronext SÉANCE DU 10 - 12 - 2020CAC 40 : 5549,65 (0,05 %) NEXT 20 : 11949,1 (-0,20 %)

CAC LARGE 60 : 6143,68 (0,03 %)CAC ALL-TRADABLE : 4303,4 (-0,03 %)

DATE DE PROROGATION : 28 DÉCEMBRE

SRD VALEURS FRANÇAISES

VALEURS MNÉMO / INFO / OUV CLOT % VEIL % AN BPAOST VOL. + HAUT % MOIS + HAUT AN PERISIN / DATE DÉTACH. COUPON / DIV NB TITRES + BAS % 52 S. + BAS AN RDT

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Page 38: Les Echos - 11 12 2020

38 // FINANCE & MARCHES Vendredi 11 et samedi 12 décembre 2020 Les Echos

ÉTABLISSEMENT PUBLIC

LNEGrégoire Olivierest nommé à la présidence du conseil d’administration du Laboratoire national de métrologie et d’essais, par décret du président de la République du 9 décembre.

Grégoire Olivier, 59 ans, ancienélève de l’Ecole polytechnique,titulaire d’un MBA de l’univer-sité de Chicago, est ingénieur del ’Ecole des mines de Paris .Actuellement, il est secrétairegénéral du groupe PSA tout enassurant la direct ion de larégion Chine et Asean. En 2007,il est entré dans le groupe PSAen tant que membre du direc-

NRJMarie-Noëlle Le Moalest nommée directrice de la stratégie marketing et de l’innovation de NRJ Global, la régie publicitaire des médias du groupe NRJ.

Marie-Noëlle Le Moal, 43 ans, diplômée de l’ESC Le Havre et de l’ESCP Europe, a débuté chez IP

Håkan Akesson, de retour en France

Comme une histoire d’amour… Håkan Akesson, le nou-vel ambassadeur de Suède à Paris, connaît bien la France. Depuis très longtemps, il y vient régulièrement en vacances. Et, à deux reprises, il y a séjourné plusieursmois d’affilée.

La première fois, c’était en 1983. Il a alors 22 ans, estétudiant à l’université d’Uppsala, la plus ancienne fac deSuède. Il y suit un cursus mêlant gestion, marketing international et langues étrangères. Par goût du voyageet surtout pour s’immerger dans le français, il prend une année de césure en France. Il choisit Montpellier, pour ses températures et son ensoleillement bien supé-rieurs à ceux de la campagne de Lund, où, avec sa mèreinfirmière, son père agriculteur et sa petite sœur, il a vécu son enfance et son adolescence. Sous le charme decette ville du Midi, Håkan Akesson y passe des mois for-midables dans une ambiance « dynamique et pleine d’énergie ». Il prolonge par un stage chez Saab à Paris. Mais le temps est venu de repartir. Il quitte l’Hexagone àla fin de l’été 1984, nostalgique. Et avec une envie qui tou-jours demeurera : y revenir un jour pour y travailler.

Jeune, il s’intéresse à « tout ce qui se passe en dehors dela Suède », il aime aller voir ailleurs comment ça fonc-tionne. « Ce qui est vraiment beau dans les voyages, c’est qu’on rencontre des personnes de cultures différentes, mais qu’on se rend compte que nous sommes tous les mêmes, nous avons les mêmes rêves, les mêmes senti-ments, les mêmes préoccupations », explique-t-il, tout sourire.

« Et puis, confie-t-il, comme beaucoup de diplomates,je voulais faire de notre monde un monde meilleur. » La diplomatie, une idée qui remonte à loin chez cet hommequi fêtera ses 60 ans l’an prochain. Lycéen déjà, il se dit que, plus tard, il travaillerait bien pour l’ONU ou l’orga-nisation suédoise de coopération internationale. Etu-diant, il fait un stage au ministère des Affaires étrangè-res. Premier pas d’une carrière où alternent les postes àStockholm et les postes en ambassade. De ses fonctionsà l’étranger – Singapour (1998-2002), Addis-Abeba (2002-2005, son premier poste en tant qu’ambassa-

deur), Istanbul (2010-2013) –, il garde de nombreux sou-venirs. Notamment « le dynamisme, l’énergie et les ambi-tions » des pays d’Asie de l’Est et du Sud-Est. Ou encore, dans un tout autre registre, le conflit du Darfour. « J’étaisparmi les premiers diplomates qui sont allés en hélicop-tère évaluer la situation sur place, dit-il. J’ai vu de près le fait qu’un tiers des villages, dans de très vastes zones, avaient été entièrement brûlés par les milices. Ça a été uneexpérience horrible. »

Diplomatie féministeAvant de retrouver Paris, Håkan Akesson était directeurgénéral des affaires administratives au ministère des Affaires étrangères. Parmi ses sujets quotidiens : l’éga-lité femmes-hommes. En cinq ans, le taux de femmes ambassadeurs est passé de 43 % à 48 %. « Aujourd’hui, la Suède est le premier pays au monde en ce qui concerne les ambassadrices, rappelle-t-il. Et au niveau des direc-teurs au ministère, les femmes représentent 52 %. » Un motif de fierté pour lui. Et une préoccupation quoti-dienne, au-delà même de la stratégie de « diplomatie féministe » – initiée dès 2014 par Margot Wällstrom, alors ministre des Affaires étrangères suédoise. « On se rend compte qu’il y a des aspects égalité femmes-hommesdans tous les domaines, souligne-t-il. Partout, il faut lut-ter pour ces droits. C’est ce que nous faisons en Suède, c’estce que vous faites en France aussi. »

La France, aujourd’hui différente de celle de 1991-1992, alors qu’il était à l’ENA. A l’époque, la Suède, qui préparait son adhésion à la Communauté économique européenne, cherchait des fonctionnaires parlant fran-çais. En attendant de pouvoir arpenter à nouveau Paris,qu’il aime tant, Håkan Akesson se délecte de bouquins de Pierre Lemaitre. Ou de Jean-Christophe Rufin… qu’ilavait eu comme prof à l’ENA. n

carnettoire, directeur des program-mes et de la stratégie automo-bile. Il avait pris la direction desservices de mobilité en 2016.

Interactive. Dès 2002, elle a officiédans le Groupe Figaro, assurant notamment la direction marke-ting et études de Media.figaro. En2018, elle a rejoint Mondadori MediaConnect (devenu Reworld MediaConnect) comme direc-trice marketing, études et com-munication.

PORTRAIT

par Marianne Bliman @Marianne_Bliman

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ENTREPRISES

UNION INVESTMENT REAL ESTATEMaxie Laubeest promue secrétaire générale d’Union Investment Real Estate France.

Maxie Laube, 39 ans, diplôméede Montpellier Business Schoolet de l’University of AppliedSciences de Stralsund (en Alle-magne), est titulaire d’un execu-tive master « expert confor-mité » de l’université Paris-D a u p h i n e . E n 2 0 0 5 , e l l e aintégré la filiale française dugroupe comme chargée de mis-sion. En 2014, elle était devenueresponsable des opérations.

EDFJulien Villeretest nommé directeur de l’innovation groupe.

Julien Villeret, 45 ans, diplôméen marketing et politiques decommunication du Celsa, est cer-tifié auprès de l’Insead en mana-gement stratégique de l’innova-tion. Après des débuts au sein del’agence i&e, il est devenu, dès2007, directeur de l’information,puis de la communication deSFR. C’est en 2014 qu’il est entréchez EDF pour y être directeur dela communication.

MALAKOFF HUMANISOlivier Ruthardtest désormais directeur général adjoint, directeur des ressources humaines du groupe.

Olivier Ruthardt, 52 ans, titu-laire d’un DEA en droit et d’unMBA en ressources humaines deParis-Dauphine, devint notam-ment directeur des ressourceshumaines de Groupama en 2003et directeur général adjoint desrichesses humaines de la Maifen 2009. Il était directeur géné-ral adjoint chargé des ressourceshumaines et des relations socia-les de la Matmut depuis 2017.

,Envoyez vos nominations à[email protected]

+Ils sont nésun 11 décembre

•Martin Ajdari, directeur adjoint de l’Opéra national de Paris, 52 ans.•Paul Allibert, directeur général de l’Institut de l’entreprise, 37 ans.•Gérard Atlan, bijoutier, 81 ans.•Jean-Claude Boulet, publicitaire, ex-PDG de l’agence BDDP, 79 ans.•Patrick Braouezec, ex-député-maire de Saint-Denis, 70 ans.•Philippe Carillon, CEO de LexisNexis Emea, 51 ans.•Anne Caron, présidente de la Maison Caron, 48 ans.•Didier Desert, ex-associé chez EY, propriétaire de l’Ambassade d’Auvergne à Paris, 57 ans.•Thierry Jadot, ex-président de Dentsu Aegis Network, 57 ans.•John Kerry, ancien secrétaire d’Etat américain, 77 ans.•Enrico Macias, chanteur, 82 ans.•Eddie Misrahi, président d’Apax Partners, 66 ans.•Ludovic Morlot, chef d’orchestre, 47 ans.•Bérénice Ravache, directrice de Fip, 39 ans.•Cécile Réinaud, fondatrice de Séraphine, 47 ans.•Macky Sall, président du Sénégal, 59 ans.•Jean-Louis Trintignant, artiste dramatique, 90 ans.

CHANGES COURS AU COMPTANT VAR. VAR. COURS VEILLE ANNÉE1 EURO EN DEVISE BCE EN % EN %10-12-2020

TAUX MARCHÉS MONÉTAIRES ET EURODEVISES MARCHÉS MONÉTAIRES JOUR 1 MOIS 3 MOIS 6 MOIS 1 AN10-12-2020

ECARTS DE TAUX AVEC L’ALLEMAGNE 6 MOIS 2 ANS 5 ANS 7 ANS 10 ANS10-12-2020

ALLEMAGNE 100,36 -0,77 -0,82 -0,77 -0,63

PORTUGAL 0 5,64 0,24 0,32 0,43

FRANCE -0,08 0,05 0,12 0,12 0,20

ESPAGNE -0,07 0,19 0,30 0,38 0,55

ITALIE -0,12 0,29 -0,06 0,97 1,08

DOLLAR US 1,2118 0,29 7,99LIVRE STERLING 0,9116 0,81 7,68FRANC SUISSE 1,0758 0,11 -0,89COURONNE DANOISE 7,4442 0,00 -0,39COURONNE NORV. 10,6342 -0,32 7,66KUNA CROATE 7,5457 -0,02 1,35COURONNE SUEDOISE 10,2411 -0,16 -2,43DOLLAR CANADIEN 1,5422 -0,46 5,85YEN JAPONAIS 126,384 0,31 3,63DOLLAR AUSTRALIEN 1,6116 -0,84 0,77ROUBLE RUSSE 88,6237 -0,40 27,59ROUPIE INDIENNE 89,361 0,32 11,69DOLLAR NEO-ZELANDAIS 1,7125 -0,49 2,63COURONNE TCHEQUE 26,3105 0,08 3,54FORINT HONGROIS 354,065 -0,75 6,93ZLOTY POLONAIS 4,4268 -0,17 3,71LEV BULGARE 1,9577 0,16 0,07DOLLAR HONG-KONG 9,3927 0,29 7,51WON SUD COREEN 1319,1201 0,42 1,80PESO MEXICAIN 24,2128 0,73 13,98REAL 6,1428 -1,66 36,28DOLLAR SINGAPOUR 1,6201 0,26 7,34RAND SUD-AFRICAIN 18,2304 0,82 16,04LIVRE TURQUE 9,5706 1,24 43,38RENMIBI YUAN 7,9296 0,32 1,55RUPIAH 17091,7348 0,27 9,72PESO PHILIPPIN 58,3313 -0,03 2,68RINGGIT MALAIS 4,9208 0,22 7,15BATH THALANDAIS 36,4329 0,24 9,31

ZONE EURO -0,43/-0,73 -0,56/-0,86 -0,41/-0,71 -0,37/-0,67 -0,37/-0,67

SICAV/FCP

FR0013341781 2CRSI g C 4,355 4,36 4,265 4,345 + 2,24 29337

FR0014000T90 2MX ORGANIC B 10,5 10,694 10,45 10,45 - 0,95 252700

FR0013185857 ABEO g C 9,4 10,15 9,14 9,3 + 3,56 61275

FR0012616852 ABIONYX PHARMA g B 0,93 0,93 0,874 0,877 - 5,6 322782

FR0000064602 ACANTHE DEV. C 0,431 0,431 0,431 0,431 3985

FR0000062978 ADL PARTNER g C 14,3 14,55 14,25 14,55 + 1,04 2362

FR0012821890 ADUX g C 1,5 1,535 1,475 1,535 + 2,33 4079

FR0004152874 ADVENIS g C 2,08 2,1 2,08 2,08 - 0,95 13394

FR0013296746 ADVICENNE g C 10,1 10,85 9,9 10,3 + 3,83 57771

FR0013421286 ALPHA MOS C 1,52 1,55 1,42 1,49 - 1,97 4139

FR0000053837 ALTAMIR B 20,06 20,06 19,98 20 3685

FR0012789667 AMPLITUDE g C 2,15 2,16 2,15 2,15 310994

FR0011992700 ATEME g C 16,5 17,1 16,46 17 + 3,03 25834

FR0000061780 AUGROS CP. C 5,1 5,1 5,1 5,1 + 6,25 915

FR0000039232 AUREA g C 6 6,02 5,7 5,7 - 6,86 5199

FR0013183589 AURES TECHNO g C 23 23,7 23 23,5 + 1,73 2778

FR0013529815 AVENIR TELECOM C 0,617 0,617 0,6 0,6 - 0,5 258930

FR0013258399 BALYO g C 1,418 1,456 1,33 1,36 - 2,86 686952

FR0000062788 BARBARA BUI C 4,76 4,76 4,76 4,76 + 33,71 1550

FR0000035370 BASTIDE CONF.MED. g C 48 48,35 47,9 48,25 + 0,52 3464

FR0011814938 BOOSTHEAT C 3,72 3,72 3,25 3,32 - 11,47 219348

FR0000074254 BOURSE DIRECT C 2,78 2,78 2,68 2,72 - 2,16 7875

FR0010151589 CAFOM C 6,65 6,8 6,45 6,5 - 7,14 5032

FR0012969095 CAPELLI g C 31,4 31,4 30,5 30,7 - 1,6 1228

FR0000072894 CAST g C 4,04 4,08 3,91 4,02 + 1,26 11101

FR0010193979 CBO TERRITORIA C 3,6 3,64 3,6 3,64 + 0,55 8236

FR0000053506 CEGEDIM B 28 28,3 27,5 28 + 1,45 12342

FR0010309096 CEGEREAL B 32,2 33 31 32,4 + 0,62 1692

FR0000054322 CIBOX INTERACTIVE g C 0,213 0,213 0,2 0,207 - 2,36 714429

FR0013426004 CLARANOVA g B 7,14 7,2 6,95 7,11 - 0,7 253113

FR0000053399 CNIM GROUP C 14,7 15,1 14,35 14,85 - 1,66 2338

FR0004031763 COHERIS g C 1,985 1,985 1,95 1,95 + 0,26 887

FR0010483768 CRCAM BRIE PIC. CC B 22,125 22,125 21,67 21,71 - 2,47 33758

FR0010461053 CRCAM LANGUED CCI B 62,89 62,89 61,3 61,32 - 2,64 830

FR0000185514 CRCAM NORD FR. B 21,8 21,8 20,9 20,9 - 4,13 5094

FR0000044364 CRCAM NORM. SEINE B 111,4 111,7 111 111,4 1054

FR0000045528 CRCAM PARIS IDF B 75 75 72,5 73,99 - 1,11 1789

FR0007317813 CS GROUP g C 4,08 4,12 4,05 4,12 + 0,98 982

FR0013283108 DELTA PLUS g B 64 64 63 63 - 0,63 846

FR0000073793 DEVOTEAM g C 98 98 97,9 97,9 3132

FR0012202497 DIAGNOSTIC MEDICALg C 1,72 1,72 1,68 1,7 - 1,16 6891

FR0010099515 ECA g B 22,2 22,6 22 22,5 + 1,35 7972

FR0000072373 EGIDE g C 1,01 1,08 0,99 1,04 + 5,26 152778

FR0000031023 ELECT.STRASBOURG B 119 119,5 118,5 119,5 + 1,27 919

FR0012650166 ENGIE EPS g C 11,9 12,6 11,9 12,2 + 1,67 14737

FR0000120669 ESSO g B 12,65 12,75 12,2 12,7 + 3,25 5464

FR0000054678 EURO RESSOURCES C 3,14 3,14 3,04 3,13 + 2,62 5642

FR0000075343 EUROMEDIS GROUPE C 12,6 12,8 12,4 12,5 - 0,79 5055

FR0010490920 EUROPACORP g C 0,836 0,836 0,816 0,83 - 0,72 28895

FR0000035784 EVERGREEN C 1,15 1,15 1,15 1,15 + 4,55 1200

FR0011271600 FERMENTALG g C 1,486 1,498 1,41 1,418 - 4,83 451245

FR0004076891 FLO (GROUPE) g B 0,165 0,165 0,16 0,162 + 1,25 16801

FR0011277391 FONC. PARIS NORD g C 0,025 0,025 0,024 0,024 201615

FR0013030152 FRANCAISE ENERGIE g C 17,55 17,6 17,35 17,35 - 1,42 1483

FR0010501692 GENERIX g C 6,82 6,84 6,6 6,7 + 0,3 12022

FR0013399474 GENKYOTEX g C 3,03 3,05 2,98 3,01 - 0,33 45116

FR0011799907 GENOMIC VISION g C 0,834 0,84 0,785 0,803 - 3,37 1946914

FR0000061459 GERARD PERRIER B 66,4 67,4 66 67,2 + 1,51 1467

FR0004050300 GROUPE OPEN g C 14,96 14,96 14,92 14,92 - 0,53 1276

FR0012612646 GROUPE PARTOUCHE B 21,5 21,5 20,8 20,9 - 1,42 1842

FR0004155000 GROUPE SFPI g C 1,825 1,96 1,825 1,945 + 6,58 143040

FR0000066722 GUILLEMOT g C 8,48 8,68 8,48 8,62 + 3,11 38237

FR0000038531 HF COMPANY C 5,06 5,06 4,99 5,02 + 0,4 1760

FR0012821916 HIPAY GROUP g C 14,15 14,2 12,75 13,45 - 5,28 31713

FR0000065278 HOPSCOTCH GROUPE g C 7,52 7,92 7,52 7,7 + 2,67 6288

FR0000051393 IDI B 41,2 41,6 40,8 41,3 + 0,24 1160

FR0000071797 INFOTEL g C 40,2 40,5 39,9 40,1 - 0,25 8296

FR0000064297 INNELEC MULTIMEDIAg C 5,26 5,4 5,26 5,4 + 2,66 4164

FR0013233012 INVENTIVA g B 10,34 10,38 10,12 10,2 - 1,35 96386

FR0012872141 JACQUES BOGART g C 10,3 10,3 9,94 10 + 0,2 6032

FR0004029411 KEYRUS g C 3,05 3,05 2,92 2,92 - 4,26 13728

FR0000066607 LACROIX g C 28,8 29,7 28,8 29,7 + 2,06 1807

FR0000032278 LATECOERE g C 2,2 2,53 2,19 2,27 + 6,82 274233

FR0006864484 LAURENT-PERRIER B 78,6 78,6 77,2 77,2 - 1,78 1192

FR0013233475 LYSOGENE g C 2,17 2,17 2,1 2,1 - 3,67 22675

FR0000032302 MANUTAN INTER. B 71,2 72,2 70 72,2 + 1,4 1866

FR0000051070 MAUREL ET PROM g B 1,72 1,808 1,71 1,794 + 4,91 379225

FR0011742329 MCPHY ENERGY g C 31,5 31,6 30,45 31,5 - 1,1 188628

ACTIONSEURONEXT HORS SRD FRANÇAISES

ISIN VALEUR OUV +HT +BS CLÔT ÉCART VOL

ACTIONSEURONEXT HORS SRD Suite FRANÇAISES

ISIN VALEUR OUV +HT +BS CLÔT ÉCART VOL

FR0004065605 MEDINCELL C 9,88 10,2 9,28 9,56 - 4,4 75555

FR0010298620 MEMSCAP g C 1,02 1,035 1,01 1,03 - 1,91 13929

FR0000077570 MICROPOLE g C 1,13 1,145 1,105 1,13 - 0,88 58630

FR0013482791 NACON SAS B 7,95 8,24 7,91 8,2 + 5,13 144393

FR0013018041 NAVYA g B 3,825 4,155 3,535 4,08 + 5,43 1837932

FR0004154060 NETGEM g C 1 1,18 0,998 1,18 + 19,92 817960

FR0004050250 NEURONES B 24,5 24,5 24 24,4 + 0,83 3154

FR0000052680 OENEO g B 10,9 11,32 10,8 11,1 + 1,84 26667

FR0010428771 OL GROUPE g C 2,21 2,21 2,18 2,21 + 0,46 3001

FR0000075392 ORAPI g C 7,34 7,34 7,12 7,2 - 0,55 6921

FR0010609206 OREGE C 1,16 1,34 1,16 1,25 + 7,76 231924

FR0012127173 OSE IMMUNO g C 7,24 7,44 7,2 7,44 + 2,76 95728

FR0004038263 PARROT B 4,51 4,64 4,51 4,6 + 2 10394

FR0000038465 PASSAT g C 6,2 6,2 6 6,2 3157

FR0011027135 PATRIMOINE ET COMM B 14,75 14,75 14,75 14,75 1132

FR0000053514 PCAS B 9,8 10,2 9,75 9,75 + 2,09 2027

FR0012432516 POXEL g C 6,7 6,73 6,58 6,6 - 1,64 68360

FR0004052561 PROACTIS C 0,156 0,168 0,154 0,167 - 5,11 12753

FR0012613610 PRODWAYS GROUP g C 2,28 2,33 2,21 2,32 + 1,75 82921

FR0013344173 ROCHE BOBOIS SA B 18,6 19 18,6 19 + 2,7 2312

FR0000054199 S.T. DUPONT C 0,077 0,079 0,076 0,078 - 0,51 22313

FR0000060071 SAMSE B 158 160 156 160 + 1,91 988

FR0000039109 SECHE ENVIRONNEM. g B 40,3 40,45 38,6 39,3 - 2,48 4963

FR0011950682 SERGEFERRARI GP g C 6,1 6,16 6,02 6,12 + 0,66 6860

FR0000074122 SII g C 24,2 24,3 21,8 23,2 - 6,07 21415

FR0004016699 SMTPC g B 16,7 16,7 16,3 16,3 - 0,91 1774

FR0000065864 SOGECLAIR g C 19,8 20,4 19,8 20,2 + 2,02 1979

FR00140006O9 SOLOCAL GROUP B 3 3,003 2,881 2,925 - 2,4 477253

FR0010526814 SUPERSONICS g C 1,32 1,32 1,26 1,3 + 3,18 1570

FR0000060949 TIVOLY C 16,9 17,1 16,2 16,8 3407

FR0000033003 TOUAX g C 8,64 8,66 8 8,32 - 3,7 29618

FR0000036816 TOUR EIFFEL g B 30,7 30,9 30,4 30,5 - 0,33 1452

FR0000034548 UNION FIN.FRANCE g B 19,2 19,3 19 19,25 + 1,32 3517

FR0000074197 UNION TECH.INFOR. g C 0,595 0,595 0,57 0,57 - 4,2 11742

FR0004186856 VETOQUINOL B 83,4 84,2 82 83,4 + 0,48 2700

FR0000050049 VIEL ET CIE C 5,56 5,7 5,48 5,6 + 0,36 9020

FR0004183960 VOLUNTIS g C 4,505 4,6 4,34 4,36 - 3,11 50528

FR0000062796 VRANKEN - POMMERY B 15,2 15,2 15 15 - 1,32 2724

FR0004034072 XILAM ANIMATION g C 47,55 48,2 46,4 47 - 1,57 3939

ISIN VALEUR OUV +HT +BS CLÔT ÉCART VOL

ACTIONSEURONEXT HORS SRD Suite FRANÇAISES

CERTIFICAT/FONDS INVESTIR 10INVESTIR 10 GRANDES VALEURS I10GS - FR0011630474 124,27 0,00

INVESTIR PEA PALATINE FR0013284114 100,59 -0,01

Valeur unitaire hors frais : valeur de la part ou de l’action hors droits d’entrée ou de sortie éventuels. Les SICAV éligibles au PEA sont signalées par un astérisque *. Le pictogramme P indique la cotation d’un FCP. Classification des OPCVM : actions françaises (AF), actions de la zone EURO (AE), actions internationales (AI), monétaires EURO (ME), monétaires à vocation internationale (MI), obligations et autres titres de créances libellés en EURO (OE), obligations et autres titres de créances internationaux (OI), sicav luxembour-geoises (LX), diversifiés (DI), garantis ou assortis d’une protection (GP). ** : en euros ou dans la devise indiquée dans la colonne «DÉSIGNATION DES VALEURS».

Banque Cantonalede Genève (France) SATél. 04 72 07 31 50bcgef.fr/fonds

CLA

SSIF

ICAT

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CLA

SSIF

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Mirabaud Asset ManagementTél. +41 058 200 60 [email protected]

LU0704154292 RAM (L) SF EM MKT EQ 207,76 09/12

LU0375629556 RAM (L) SF EUROPEAN EQ 460,53 09/12

LU0705072691 RAM (L) SF GB EQ SUST ALP 101,87 09/12

LU1048876350 RAM (L) SF GB STB INCOME EQ 129,26 09/12

VAL. UNIT DATE DERNIER DÉSIGNATION HORS FRAIS DE LA DIVIDENDE NETCODE ISIN DES VALEURS EN EUROS** VALOR. EN EUROS** MONT. DATE

VAL. UNIT DATE DERNIER DÉSIGNATION HORS FRAIS DE LA DIVIDENDE NETCODE ISIN DES VALEURS EN EUROS** VALOR. EN EUROS** MONT. DATE

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VAL. UNIT DATE DERNIER DÉSIGNATION HORS FRAIS DE LA DIVIDENDE NETCODE ISIN DES VALEURS EN EUROS** VALOR. EN EUROS** MONT. DATEC

LASS

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LU2004923152 SWISS ALL CAPS (EUR) 117,74 09/12 LU1626130063 SWISS SMALL & MID CAPS (CHF) 119,6 09/12 LU1626130816 SILK ROAD ZONE STOCKS (USD) 106,3 09/12 LU0851564038 BALANCED (EUR) 128,97 08/12 LU0851564384 DYNAMIC (EUR) 151,02 09/12 LU1626130220 HIGH DIV. EUROPE STOCKS (EUR) 95,21 09/12 LU0851564541 WORLD EQUITY (EUR) 175,26 08/12

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LU0935723782 RAM (L) TF II ASIA BD TOT RET 156,16 09/12

SYNCHRONY (LU)

Page 39: Les Echos - 11 12 2020

Les Echos Vendredi 11 et samedi 12 décembre 2020 PATRIMOINE // 39

Anne-Sophie Vion @AnnesophieVION

C ent milliards d’euros. C’est le mon-tant que devrait atteindre à la fin del’année l’épargne « forcée », thésau-

risée par les ménages français en temps de Covid-19. « Ils auront épargné sur leur compte bancaire depuis mars l’équivalent duplan de relance du gouvernement français », ironise Mathieu Plane, économiste à l’OFCE, qui s’exprimait le 25 novembre au « 28 minutes » d’Arte. Tout l’enjeu pour les pouvoirs publics consiste à dégonfler ce basde laine jugé improductif pour le mobiliser vers les secteurs économiques qui en ont le plus besoin. Dans sa boîte à outils, l’Etat s’estd o t é d ’u n n o u ve a u l a b e l , b a p t i s é « Relance », annoncé lors de la présentationdu plan de relance le 3 septembre. Ses modalités ont été précisées le 19 octobre. Cequ’il faut savoir.

1 A quoi sert le label Relance ?L’objectif du gouvernement, qui

sous-tend l’ensemble de son plan de relance, est de renforcer la situation finan-cière des entreprises durement touchées par la crise sanitaire et de restaurer leur capacité d’investissement. Dans ce con-texte, les fonds qui obtiennent le label Relance s’engagent à investir une part signi-ficative de leurs actifs en fonds propres ou quasi-fonds propres dans les entreprises principalement françaises, en particulier des petites et moyennes entreprises (PME) et des entreprises de taille intermédiaire (ETI), tous secteurs confondus.

Pour s’assurer du succès du dispositif,Matignon a mis au point le label en partena-riat avec des associations et fédérations du secteur financier, d’entreprises et d’épar-gnants. Face à l’urgence, il a aussi imposé uncalendrier de déploiement strict. Il faut queles fonds estampillés Relance collectent de l’argent tant auprès des investisseurs parti-culiers qu’institutionnels en 2020, 2021 et/ou 2022. Ceux dont la phase de levée des

capitaux a débuté avant la labellisation sansêtre pour autant terminée sont également éligibles au label. L’objectif, selon Bruno Le Maire, ministre de l’Economie, des Finan-ces et de la Relance, est de mobiliser 20 mil-liards d’euros en deux ans au service de la relance.

2 Quels types de produits peuvent l’obtenir ?

Depuis le 19 octobre et jusqu’au 31 décembre2020, des fonds d’investissement présen-tant des profils de risques variés peuvent postuler. Dans le détail, il s’agit de fonds investis dans des valeurs cotées françaises ou européennes, comme les organismes deplacement collectif en valeurs mobilières (OPCVM), sicav ou FCP, ainsi que de fonds d’épargne salariale. Le non-coté est égale-

ment concerné puisque la famille des fondsde capital-investissement – FCPR, FCPI, FIPet FPCI – y est éligible.

S’y ajoutent des véhicules qui concernentpour l’essentiel les investisseurs profession-nels (fonds de fonds alternatifs, fonds pro-fessionnels spécialisés...).

Certains fonds estampillés Relance sontréservés à une clientèle avisée. La plupart pourront être souscrits dans des supports d’épargne grand public, comme les enve-loppes fiscalement avantageuses de l’assu-rance-vie, du PEA et du PEA-PME, ou encore de l’épargne salariale et retraite. La liste des fonds labellisés est diffusée sur le site Internet du ministère de l’Economie, des Finances et de la Relance, et régulière-ment actualisée. Au 9 décembre, 100 fonds ont déjà obtenu le label

3 A quels critères les fonds label-lisés doivent-ils répondre ?

Pour être labellisés, les fonds doivent inves-tir au moins 30 % de leur actif dans des entreprises dont le siège social est implantéen France, dont au moins 10 % spécifique-ment dédiés aux TPE, PME ou ETI, cotées ou non cotées. Ils devront s’efforcer de parti-ciper à au moins cinq opérations d’augmen-tation de capital ou d’introduction en Bourse par an. Les fonds intègrent aussi des critères ESG (environnementaux, sociaux et de gouvernance). Et s’engagent à ne pas financer le secteur du charbon. Le label est accordé pour une durée de qua-tre ans. Le respect des critères est contrôlé par la Direction générale du Trésor et tout manquement grave donnera lieu à un retrait.

ÉPARGNE Mis en place par le gouvernement, le label Relance doit inciter les Français à investir une partie de leur abondante épargne dans des PME tricolores au travers des fonds estampillés. Quels sont ses atouts ? Faut-il souscrire ?

4 Est-ce redondant avec les autres labels existants ?

Le label Relance est cumulable avec les labels d’investissement durable existants comme le label ISR ou le label Greenfin. Selon Bercy, « ces labels ne poursuivant pas les mêmes objectifs, ils ne sont pas en concur-rence mais se complètent ». La labellisation Relance d’un fonds déjà estampillé ISR, Greenfin ou Finansol est même facilitée.

5 Quelle valeur ajoutée pour l’épargnant ?

Les premiers fonds labellisés Relance, préexistaient au label. Ils ont pu l’obtenir carils répondaient déjà à ses exigences. Autre-ment dit, ce n’est pas le label Relance qui les rend plus performants ou plus vertueux. Quel en est alors l’intérêt pour les épar-gnants ? « Ce label leur explique clairement à quoi va servir leur argent, estime Christophe Bavière, senior managing partner du groupeEurazeo, c’est-à-dire à financer des entrepri-ses innovantes françaises, à dynamiser le tissuéconomique et à créer des emplois sur le terri-toire. Il répond ainsi à leur exigence de plus enplus importante de donner du sens à leurs pla-cements ». De même, appuie Xavier Antho-nioz, président de 123 IM, « les investisseurs se perdent parmi les milliers de produits exis-tants qui visent à financer l’économie réelle. Celabel, qui consacre les PME françaises ISR, a lavertu de leur indiquer qui, selon le gouverne-ment, joue le plus le jeu ».

Autre spécificité, le label Relance donneaccès au dispositif de garantie en fonds pro-pres de bpifrance (jusqu’à 1 milliard d’eurosd’investissements garantis). Ce qui signifie que les entreprises en portefeuille bénéfi-cient de l’appui de l’Etat et que les souscrip-teurs sont partiellement protégés d’une perte en capital. Sauf que, reconnaissent des professionnels, « le mécanisme est flou ». Il devrait être précisé par le gouverne-ment début 20201. En l’état, la garantie ne concerne que les fonds de non-coté et à l’exclusion de ceux qui ouvrent droit à un avantage fiscal à l’entrée (FCPI et FIP). n

Placement : les fonds labellisés Relance en cinq questions

a fondu entre les deux confinements. L’Indice de tension immobilière (ITI) de Meilleurs Agents affiche des niveaux particulièrement bas, exception faite de Strasbourg et Lille. Ainsi, à Montpellier, Lyon et Paris, on ne compte plus que 6 %

d’acheteurs de plus que de vendeurs. Même constat à Bordeaux (3 %), Nice (4 %), Marseille (7 %) ou encore Toulouse et Nantes (8 %). L’an dernier, à la même période, la capitale en comptait 26 %, Rennes 29 % et Montpellier 23 % .

Moins d’acheteursSelon la plateforme immo-bilière Meilleurs Agents, le réservoir d’acheteurs poten-tiels qui avait contribué au redémarrage rapide du marché à l’aube de l’été

INDICES DES PRIX IMMOBILIERS (IPI)

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ImpôtsComment réajuster le mon-tant de vos prélèvements ? A compter du 1er janvier pro-chain, vos revenus seront imposés en fonction du taux calculé sur vos revenus de 2019. Il ne correspondra pas toujours à votre situation ac-tuelle. Par ailleurs, des mises à jour sont peut-être néces-saires sur les crédits d’im-pôts auxquels vous avez droit et éventuellement sur le montant de votre taxe d’habitation.

Les SCPI solides face au Covid-19Au début de la pandémie, les experts les plus optimistes estimaient que le rendement des SCPI se maintiendrait à tout juste 4 % en 2020. Il s’établit à 4,12 % au 30 sep-tembre, selon la plateforme MeilleureSCPI. com, contre 4,40 % à la même période en 2019.

PATRIMOINE

Page 40: Les Echos - 11 12 2020

40 // PATRIMOINE Vendredi 11 et samedi 12 décembre 2020 Les Echos

rance en cours de sa résidence actuellevers la nouvelle. Puis, il a complété la différence en cash », raconte un ges-tionnaire de patrimoine.

Une autre personne de 57 ansayant eu le même problème de santé, survenu quatre ans avant d’emprunter, est parvenue avec satisfaction à décrocher une assu-rance. Cette garantie lui a coûté deux fois plus cher que celle tarifée àune personne du même âge en bonne santé. « Pour ceux qui sont (bientôt) à la retraite et souhaitent alléger la note de cette couverture, il convient de demander à ne pas être assuré contre le risque d’incapacité temporaire ou totale de travail, soit d’être couvert a minima sur le décès »,conseille Cécile Roquelaure.— Laurence Boccara

plexes. Il arrive alors que le coût de cette protection s’envole pour atteindre voire dépasser le taux du crédit. « Pour les seniors avec des pathologies et compte tenu du bas niveau, il arrive fréquemment que le TAEG excède le taux d’usure. Cette situation rend souvent impossible tout accès à un crédit immobilier », reconnaît Philipe Taboret, direc-teur général délégué de Cafpi.

1 TRANSFÉRER SON CRÉDITReste qu’il est possible de trouver dessolutions au cas par cas. « Un client ayant la soixantaine qui s’est fait opé-rer à cœur ouvert entre la signature du compromis de vente et celle de l’acte authentique chez le notaire s’est fait recaler chez les assureurs spéciali-sés. Compte tenu de sa surface patri-moniale, il a quand même pu acheter sa nouvelle résidence principale en négociant avec sa banque. Elle a accepté de transférer le crédit et l’assu-

contrairement à un contrat indivi-duel », explique Arnaud Guilleux.

1 DES ASSUREURS SPÉCIALISÉSA noter qu’à partir de la cinquan-taine, le seul critère « fumeur » creuse l’écart entre les tarifs (voir tableau). Outre ce paramètre, les compagnies d’assurances devien-nent plus vigilantes sur l’état de santé. Si, à la lecture du premier questionnaire médical simplifié, quelques réponses mentionnent une maladie (actuelle ou passée), d’autres problèmes (dos, surpoids, hypertension), « l’assureur passera un niveau supérieur et demandera systématiquement des examens médicaux plus poussés. Et c’est là queles surprimes interviennent », indi-que Astrid Cousin, porte-parole de Magnolia.fr, courtier en assurances.

Si les banques n’assurent pas cescas, plusieurs compagnies se sont spécialisées dans ces dossiers com-

50 ans. Bien que progressifs, les sautsimportants observés dans les barè-mes interviennent autour de 45 ans et passé 60 ans », indique Arnaud Guilleux, président de Monem-prunt.com. « Le poids de l’assurancepour une personne (non fumeuse) avec un crédit sur vingt ans au taux de 1,5 % représente respectivement 36 % et près de 50 % du coût total du prêt pour une personne de 50 et 60 ans contre 18 % à 40 ans », préciseAgnès Bruhat, directrice générale de MetLife.

Si la souscription d’une assu-rance extérieure à la banque est réputée offrir de coquettes écono-mies pour les jeunes emprunteurs, cette démarche s’avère bien moins évidente pour les plus de 50 ans. « Beaucoup de délégations ne sont pas compétitives pour les seniors. Souscrire l’assurance de l’établisse-ment prêteur permet de bénéficier detarifs pas trop chers car une assu-rance groupe mutualise les risques

tes à faire des efforts de taux ou à réaliser des montages sophistiqués.« Cette clientèle plaît car elle a un his-torique en matière de rembourse-ment de crédits, dispose de place-ments et perçoit à cette période de la vie professionnelle des revenus sou-vent à leur plus haut niveau. Au-delàde 50 ans, certains ménages n’ont parfois plus d’enfants à charge et arrivent à la fin de leurs gros cré-dits », indique Ludovic Huzieux, cofondateur d’Artemis Courtage.

1 GARDER L’ASSURANCE GROUPELe virage le plus délicat à négocier consiste à contenir le coût de l’assu-rance-emprunteur, voire tout sim-plement à décrocher cette garantie notamment en cas de pépin de santé. Pour mémoire, le prix de cette couverture augmente avec l’âge. « En moyenne, pour une per-sonne en bonne santé, la prime d’assurance double entre 25 et

Crédit : emprunter après 50 ans

ritoire négatif depuis le début 2020 dans le contexte de crise sanitaire. Les fonds tricolores perdent 4,77 % dans la période.

Le baromètredes fonds

d’équipements médicaux et de produits électroniques pour le télétravail. Dans ce contexte, les Bourses locales s’envolent. M

orni

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7/12

/202

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FONDS ACTIONS FRANCEEn dépit de la remontée bour-sière exceptionnelle du CAC 40 en novembre, de plus de 20 %, le marché parisien reste en ter-

–4,77 %FONDS ACTIONS CHINEL’économie chinoise surfe sur la pandémie. Les exportations chinoises ont bondi en novem-bre, notamment en matière

+24,76 %IMMOBILIER

S’endetter après 50 ans est d’autant plus facile que sa capacité financière est importante et que son apport personnel est musclé. Deux sujets restent sensibles : la durée du prêt et le coût de l’assurance-emprunteur. Des solutions existent.

chances de décrocher un crédit immobilier », explique cette der-nière. Ces solutions financières sontproposées par une poignée d’éta-blissements spécialisés (Sygma Banque, Creatis, CFCAL, Créditlift Courtage…), souvent des filiales de grands groupes bancaires.

Toutefois, comme ces enseignesn’ont pas pignon sur rue, le plus rapide pour faire jouer la concur-rence consiste à passer par un cour-tier en crédit qui propose le regrou-pement de crédits. Cet intermédiairese rémunère selon la complexité du dossier entre 4 à 8 % du montant du crédit racheté, plus parfois des frais de dossier. Il faudra aussi intégrer aux dépenses liées à cette opération le paiement des indemnités de rem-boursement anticipé du crédit immobilier. Malgré ces frais, le jeu peut en valoir la chandelle.— L. B.

vaux ou d’autres dépenses. Récem-ment, ce réaménagement de dettes a servi à une personne fraîchementdivorcée – avec 8.000 euros de reve-nus mensuels – à dégager des liqui-dités pour racheter la soulte de son ex-épouse (devenir le seul proprié-taire de la résidence principale), régler la prestation compensatoire et aussi les frais d’avocats et de notaire, tout en continuant à régler son crédit immobilier en cours. « Ce genre de montage complexe aurait été difficile avec une banque classique », commente Maël Bernier.

• INVESTISSEMENT LOCATIFEnfin, ce genre d’opération « peut aussi être utile à une personne prépa-rant un projet immobilier. En faisantpasser un ratio d’endettement bien au-dessous de la barre fatidique des 33 %, cela permet d’avoir toutes ses

prévoir une dette un peu plus élevée afin de repartir du bon pied avec un peu de trésorerie d’avance », indique Maël Bernier, porte-parole de Meilleurtaux. Cette opération se révèle payante pour tous ceux dont le taux d’endettement global excède35 % avec des durées de fin de cré-dits encore lointaines.

• RETRAITE OU DIVORCEContrairement à une fausse idée, cette stratégie ne concerne pas que les petits revenus ou les personnes en situation de surendettement. « Cette démarche a tout son sens pour des nouveaux (futurs) retraités accusant une baisse sensible de leurs revenus et devant encore rembourserplusieurs crédits », explique San-drine Allonier, porte-parole de Vousfinancer.com.

Cela peut aussi aider à dégagerdes liquidités pour financer des tra-

dette et met en place un crédit uni-que avec une mensualité unique sur une durée de remboursement souvent plus longue et un nouveau taux.

• COÛT VARIABLECe coût varie selon les situations. Si la personne est propriétaire d’un bien immobilier mis en garantie et que le regroupement intègre du crédit immobilier plus d’autres petits prêts, les taux proposés par Meilleurtaux.com varient entre 1,5 et 2,30 % sur des périodes allant de 8à 25 ans. En revanche, si le deman-deur est locataire et sans bien immobilier à mettre en garantie, cecoût est compris entre 3,70 et 4,30 % et limité à 12 ans.

Presque toujours, le nouveléchéancier proposé devient plus supportable pour ses finances (voir tableau). « Il est même possible de

Les échéances de prêts en tout genre continuent de tomber alors que vos revenus ont tendance à se contracter ? Pour ceux dont le niveau d’endettement devient trop lourd à porter, le regroupement de crédits peut être une solution inté-ressante. Pour mémoire, cette opé-ration consiste à faire racheter par un établissement financier tous ses crédits en cours (immobilier, con-sommation, automobile, revolving,prêt personnel, travaux). Ce dernieragrège alors le tout en une seule

Faire baisser son endette-ment en vue du passage à la retraite ou d’un achat immobilier, c’est possible. Le regroupement de crédits offre plus d’aisance finan-cière avec à la clé un allon-gement de la durée du crédit.

Mode d’emploi pour réduire son endettement

L es confinements ont pu fairemûrir des projets immobi-liers. Bientôt libres de circu-

ler à leur convenance, certains s’apprêtent à changer de lieu de vie, àse faire plaisir en s’offrant une rési-dence secondaire ou encore à inves-tir dans un bien locatif. Si acquisi-tion immobilière rime presque toujours avec un crédit, négocier cette étape à plus de 50 ans offre un peu moins de marge de manœuvre qu’à 25 ou 30 ans. Certains points peuvent bloquer comme la durée ducrédit et l’assurance-emprunteur.

Pour les plus de 50 ans, il devientdifficile d’envisager un prêt sur vingt-cinq ans. Bien sûr, rien n’empêche de réduire cette durée. « Quel que soit le projet à financer, mieux vaudra toujours profiter de l’effet de levier du crédit surtout en

cette période de taux bas. Néan-moins, il faudra prendre soin de fairecoïncider la fin du remboursement du prêt avec l’arrêt de la vie active », conseille Olivier Grenon-Andrieu, président du groupe Equance. Si ce scénario n’est financièrement pas tenable, « il convient d’apprécier l’échéancier en tenant compte de la baisse de revenu qui survient au moment du passage à la retraite », prévient Cécile Roquelaure, char-gée des études chez Empruntis.

1 MUSCLER L’APPORT PERSONNELPour éviter d’être entravé par cet événement incontournable tout en s’endettant, deux solutions sont possibles, voire combinables. D’abord, il faudra penser à muscler son apport personnel. Autrement dit, autofinancer l’opération au-delà des 10 % minimum requis pourles droits de mutation (couram-ment appelés frais de notaire). « Plus on apporte de cash au momentde l’achat, plus le montant à emprun-ter diminue. Les mensualités devien-nent donc plus supportables sur une durée de quinze ans ou moins », explique Sandrine Allonier, porte-parole de Vousfinancer.com. « Il faudra donc trouver le juste équilibreentre l’apport de liquidités et le mon-tant du crédit acceptable pour ses finances », ajoute-t-elle.

1 SOUSCRIRE UN PRÊT À PALIERAutre piste à explorer : demander àla banque si elle pratique le prêt dit « à paliers », dont le rembourse-ment s’organise en deux temps. La première phase consiste à payer desmensualités majorées tant que l’emprunteur travaille et dispose der e v e n u s r é g u l i e r s . D a n s l a deuxième phase, au moment de la retraite, ces échéances deviennent plus douces pour tenir compte de ressources plus faibles.

En règle générale, les banquesapprécient de prêter aux plus de 50 ans car ils sont considérés comme un vivier de bons dossiers. Certaines n’hésitent pas à leur dérouler le tapis rouge et sont prê-

A partir de la cinquantaine, les compagnies d’assurances deviennent plus vigilantes sur l’état de santé.

Comment faire sans s’assurer ?Vous avez (ou avez eu) une maladie grave et aucune compagnie n’accepte de vous assurer ? Deux scéna-rios sont encore possibles. D’abord, « rien n’empêche de nantir des titres de société, un contrat d’assu-rance-vie ou un plan d’épargne en actions bien garni. Ce montage dépend des établissements prê-teurs, tous ne l’acceptent pas. Le montant mis en garantie sera minoré par la banque », indique Ludo-vic Huzieux, d’Artemis Courtage. Le second scénario consiste à garan-tir le prêt avec une hypo-thèque portant sur un autre bien immobilier, entièrement payé. Et si ce montant ne suffit pas, on procède à une double hypothèque en mettant en garantie un second bien. En cas de décès de l’emprunteur, c’est la succession qui devra de l’argent à la banque. « Attention ces frais varient sensiblement d’une enseigne à l’autre », précise un gestionnaire de patrimoine.

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Les Echos Vendredi 11 et samedi 12 décembre 2020 PATRIMOINE // 41

D ans mon souvenir, Teto estl’archétype des collection-neurs d’aujourd’hui. […] Ce

qui l’intéressait et le stimulait, c’étaitles talents émergents, ceux qui étaient en phase d’observation et donc sous-estimés. Grâce à son enga-gement inlassable, il a pu acheter leurs œuvres dans des conditions trèsavantageuses et occuper ainsi une place unique à une époque où le mar-ché de l’art était dominé par les vieuxmaîtres et les peintres impression-nistes. » Simon de Pury, la star inter-nationale des commissaires-priseurs, préface un livre, paru récemment chez Flammarion, consacré aux extraordinaires col-lections, en partie disparues, du Suédois Theodor dit « Teto » Ahrenberg (1912-1989), qui avait faitfortune dans le négoce de matières premières.

Selon son fils Staffan, il va dans unpremier temps collectionner des œuvres déjà reconnues de Picasso, Chagall et même une centaine de Matisse. Cependant en 1961, à la suitede démêlés avec l’administration de son pays, la majorité de ses œuvres est saisie et vendue aux enchères. Teto Ahrenberg s’installe alors en Suisse, dans une maison entre Lau-sanne et Vevey. Là, il reçoit de jeunesartistes et achète abondamment de l’art contemporain tout en élevant ses enfants. L’un d’eux va tomber dans le creuset de l’art puisqu’il s’agitde Staffan Ahrenberg, propriétaire de la galerie et maison d’édition Cahiers d’Art, à Paris.

1 VENTE EN LIGNEJusqu’au 18 décembre, ce dernier vend une sélection de pièces chez Sotheby’s, exclusivement sur Inter-net, qui comprennent, comme il l’explique « des séries incomplètes et des éditions ». On ne verra donc pas les Christo, Mark Tobey ou TadeuszKantor qui constituaient le socle de sa collection.

La vente estimée à 300.000 euroscomprend 74 lots. Un chapitre du livre publié chez Flammarion est entièrement consacré à l’une des galeristes préférées du collection-neur, la mythique Iris Clert, décou-vreuse notamment d’Yves Klein. « Il a collectionné les œuvres de nom-breux artistes d’avant-garde qui ont exposé dans sa petite mais influente

galerie parisienne entre 1956 et 1971, parmi lesquels on comptait Arman, Lucio Fontana, Robert Rauschen-berg… », peut-on lire dans l’ouvrage.

Staffan Ahrenberg se souvientd’Iris Clert comme d’une « très fortepersonnalité, exubérante, toujours en représentation mais qui savait déceler les grands artistes » . Aujourd’hui, elle fait partie de l’his-toire de l’art contemporain fran-çais. Ainsi, en 1961, elle demande à son écurie de 41 artistes, à l’occa-sion de l’inauguration de sa galerie sur le Faubourg Saint-Honoré, de produire, chacun, un portrait d’elle. L’exposition s’intitule : « Les 41 présentent ».

« J’ai été frappé par l’idée du toutou rien, racontera plus tard Teto. J’ai dit à Iris que j’achèterais l’exposi-tion à la condition d’avoir absolu-ment toutes les œuvres. » Pour emporter l’affaire, il négocie le fait qu’une salle entière soit consacrée àcette exposition dans son musée, qui doit être dessiné par Le Corbu-sier, mais qui ne verra jamais le jour.Il reste aujourd’hui 20 pièces de cette série en possession de Staffan Ahrenberg, qui sont dispersées le 18 décembre.

No m b r e d e s i g n a t u r e s d el’ensemble sont désormais oubliées,comme Jean-François Chabaud (1936-2001), qui représente en pein-ture, pour l’occasion, un joli buste, très intime, rebaptisé « Iris nue », estimé à 800 euros. Jean-Jacques Lebel (né en 1936), artiste du mouve-ment Fluxus qui était l’objet d’une exposition au Centre Pompidou en 2018 et dont l’œuvre fait partie des collections permanentes du musée d’Arts de Nantes, a lui aussi fait un portrait de l’exubérante galeriste sous forme d’une peinture-collage, estimé à 6.000 euros.

1 AGGLOMÉRATION D’OBJETS DU QUOTIDIENParmi les palpitantes fréquenta-tions de Teto Ahrenberg, il y avait l’artiste conceptuel Daniel Spoerri (né en 1930). Mais avant de devenir un plasticien connu pour ses « tableaux-pièges », dans lesquels ilagglomère littéralement des objets du quotidien, il est d’abord un poète, danseur et metteur en scène de théâtre. En 1959, il crée une mai-son d’édition d’œuvres d’art appelée« MAT » pour Multiplication d’Art Transformable.

« A l’époque on éditait des bronzesou des estampes mais rarement des objets », selon l’expert de Sotheby’s Guillaume Mallecot. En fait, MAT reprend le principe de la fameuse « Boîte-en-valise », de Marcel Duchamp, qui édite dès 1936 un musée portatif de ses œuvres. Le générique des éditions de MAT, tirées à 100 exemplaires, est presti-gieux. Man Ray propose en 1965 un« Objet indestructible », un métro-nome sur lequel est collée une image d’œil, estimé à 15.000 euros. Niki de Saint Phalle imagine en 1964un « Tableau non tiré », une pein-ture monochrome avant que la carabine ne se soit exprimée sur la

planche peinte, comme elle avait coutume de le faire (estimation : 10.000 euros) et Arman tranche un escarpin de dame en deux en 1965, qu’il fixe dans du Plexiglas (estima-tion : 3.000 euros).

L’artiste français, qui était allévivre à New York, faisait partie des intimes de Teto Ahrenberg. Son filsraconte d’ailleurs qu’il avait été envoyé chez lui à ses quinze ans, pour apprendre l’anglais, en vain. « Chez lui à New York, on ne parlait que le français. » La vente contient de nombreuses œuvres d’Arman comme une « Vénus aux dollars », une édition à 20 exemplaires de 1970. Il s’agit d’un mannequin en polyester transparent incrusté de véritables billets de banque, image s’il en est du système capita-liste. Par la suite, Arman, lui-mêmevictime du système a beaucoup produit au point d’affaiblir son mar-ché.

Quant à la tenue d’une tellevente en période de crise sanitaire, l’expert de Sotheby’s se montre opti-miste : « Les prix sont sensiblement similaires à ceux d’avant la période Covid. Simplement le volume des œuvres mises en vente, lui, est inférieur. »— Judith Benhamou

www.sothebys.com « Une vie avec Matisse, Picasso, Le Corbusier, Christo… Teto Ahrenberget ses collections », Flammarion,372 pages, 60 euros.

en bref

En 1965, Arman tranche en deux un escarpin de dame qu’il fixe dans du Plexiglas. Estimation : 3.000 euros. Photo Sotheby’s

Jeff

Pach

oud/

AFP

La mythique Iris Clert était l’une des galeristes préférées du collectionneur, Teto Ahrenberg.

Découvreuse notamment d’Yves Klein, elle fait aujourd’hui partie de l’histoire de l’art contemporain français.

SUCCÈS POUR LA COLLECTION BALTHUS Un ensemble exceptionnel d’œuvres du peintre figuratif français Balthus a totalisé 2,5 millions d’euros le 8 décem-bre chez Artcurial. Il provient de la collection Frédérique Tison, muse et modèle de l’artiste. A

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VENTE DES HOSPICES DE BEAUNE CE DIMANCHEReportée en raison du Covid, la 160e édition de la vente aux enchères caritative de vins, aura lieu le 13 décembre. Accessible en ligne (Christie’s),seuls des acheteurs profes-sionnels seront présents.

MARCHÉ DE L'ART

D’Arman à Man Ray : la collection Teto à des prix attractifs Un livre et une vente aux enchères célèbrent la mémoire d’un collectionneur d’origine suédoise qui a possédé plus de 100 Matisse, mais savait aussi repérer les jeunes prometteurs. Beaucoup d’estimations très basses pour des éditions d’artistes devenus célèbres.

«Les prix sontsensiblement

similaires à ceux d’avant la période Covid. Simplement le volume des œuvres mises en vente, lui, est inférieur. »GUILLAUME MALLECOTExpert de Sotheby’s

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42 // Vendredi 11 et samedi 12 décembre 2020 Les Echos

Camille Prigent

U n million d’espèces anima-les et végétales menacées,des ressources naturelles

surexploitées, des sols appauvris… le rapport publié en mai 2019 par l’IPBES, l’équivalent du GIEC pour la biodiversité, dresse un bilan sévère. Et il rappelle que les entre-prises sont des acteurs clés dans la protection des écosystèmes : 55 % du PIB mondial dépend d’une biodi-versité productive, selon une étude du réassureur Swiss Re publiée en septembre 2020.

« Il y a une prise de conscience desentreprises, avec une maturité très diverse selon les secteurs », souligne Nathalie Devulder, directrice déve-loppement durable de RTE et prési-dente de la commission biodiver-sité de l’association Entreprises pour l’environnement. Pourquoi cette hétérogénéité ? Parce que les enjeux liés à la biodiversité sont variés, complexes et difficiles à mesurer. « C’est aussi culturel : l’entreprise est dans la mesure et l’optimisation, alors que le vivant est changeant et hétérogène. » Malgré ces difficultés, les entreprises sont de plus en plus nombreuses à agir afin de limiter leur impact sur le vivant.

1 RESPECTER LA LOI EN MATIÈRE DE PROTECTION DE LA NATURELe respect de la réglementation est le premier moteur de la protection du vivant, depuis de nombreuses années déjà. Ainsi, la loi relative à laprotection de la nature impose aux entreprises la réalisation d’une étude d’impact pour les travaux d’aménagement du territoire depuis 1976. « La prise en compte de la biodiversité fait partie intégrante

kilomètres de haies et 12.000 arbres ont été plantés sur plus de 11.000 hectares. Agir localement, c’est éga-lement le choix de Maisons du Monde à travers une politique de réduction de l’impact de ses maga-sins. Dès 2021, le groupe va systéma-tiser une contribution biodiversité, indexée à l’impact des ouvertures demagasin, pour financer des actions de préservation de la biodiversité locale. « Cela deviendra financière-ment plus intéressant d’ouvrir dans un lieu qui contribue moins à l’artifi-cialisation des sols, comme un cen-tre-ville », détaille Rémi-Pierre Lap-prend, chef de projet RSE chez Maisons du Monde. Le groupe a aussi travaillé sur ses achats, 70 % deson approvisionnement en bois étant certifié FSC ou PEFC.

1 CERTIFIER POUR RASSU-RER LES CONSOMMATEURSLe point commun de ces initiatives,c’est la collaboration entre les entre-prises et d’autres acteurs, dont les collectivités locales et les ONG. Le Marine Stewardship Council (MSC), ONG internationale de certi-fication des acteurs de la pêche durable, travaille avec des pêche-ries, des distributeurs comme Car-refour et Picard, mais aussi des enseignes de restauration comme McDonald’s ou Sushi Daily, qui vient d’annoncer la labellisation de tous ses produits à base de thon et de surimi. « La certification crée un cercle vertueux qui permet d’inciter toute la filière à améliorer ses prati-ques », souligne Edouard Le Bart, directeur Europe, Afrique, Moyen-Orient et Asie du Sud du MSC.

En bout de chaîne, le consomma-teur est « très en demande et se dit prêt à se tourner vers une marque quis’engage pour une meilleure préser-vation de l’environnement ». n

de notre modèle économique. Elle représente environ 15 % du budget dedéveloppement de chaque projet, hors dépenses d’investissement », détaille Vianney de Lavernée, res-ponsable stratégie-RSE-innovation chez Engie France Renouvelables. Parmi les solutions mises en place par le groupe pour limiter son impact figurent la construction de passes à poissons pour qu’ils puis-sent remonter les rivières malgré une installation hydraulique ou desdispositifs d’effarouchement pour éviter les collisions de certaines espèces d’oiseau avec les éoliennes.

Chez l’exploitant de carrièresCemex, les sites peuvent même devenir de vraies terres d’accueil pour la biodiversité. Ils sont parti-culièrement prisés des hirondelles de rivage, une espèce protégée qui niche dans des parois de sable meu-ble. En un week-end, une centaine de nids peut apparaître sur un frontde taille et stopper l’exploitation. « Nous travaillons avec la Ligue pourla protection des oiseaux afin d’anti-ciper l’arrivée de ces hirondelles et defavoriser leur installation sur un endroit du site qui ne nous gêne pas »,explique Johanna Moreau, respon-

sable biodiversité chez Cemex France. Le groupe a par ailleurs développé des solutions pour ses 216 sites de production de béton prêt à l’emploi, comme la mise en place de passages à faune en bas desclôtures.

1 ANTICIPER L’IMPACT DE SES ACTIVITÉSL’industrie agroalimentaire fait aussi partie des secteurs les plus impliqués. Consciente que son cadre réglementaire va devenir pluscontraignant, avec la loi sur l’écono-mie circulaire qui va bannir les

emballages en plastique à usage unique d’ici à 2040, la marque Vitteltravaille à l’intégration de matières recyclées dans ses packagings, maisaussi à la préservation des sols autour des sources d’eau, dans les Vosges. En 1992, elle a lancé le pro-gramme Agrivair en collaboration avec 17 collectivités locales, 37 exploitations agricoles et l’Institut national de la recherche agronomi-que. « En préservant les sols, on pré-serve à la fois la biodiversité et la nappe phréatique », explique Fran-çoise Bresson, directrice RSE de Nestlé Waters France. Au total, 240

La loi relative à la protection de la nature impose aux entreprises la réalisation d’une étude d’impact pour les travaux d’aménagement du territoire depuis 1976. Cemex

LES QUATRE DANGERS MAJEURS QUI PÈSENT SUR LA BIODIVERSITÉ

1. L’ARTIFICIALISATION DES SOLSConséquence de l’étalement de l’urbanisation et des infrastructures humaines, l’artificialisation des sols a un impact direct sur la perte de biodiversité. Ce sol remplaçant l’habitat naturel d’espèces animales et végétales, il peut conduire à la dégradation, voire la disparition, de la faune et de la flore. En France, le plan biodiversité comprend un objectif « zéro artificialisation nette », dont l’horizon n’a pas encore été fixé.

2. L’EXPLOITATION DES ESPACES NATURELSL’agriculture, la pêche et l’exploitation forestière non durables ont un effet dévastateur sur labiodiversité. Selon l’Ipbes, plus de 75 % des types de cultures vivrières dépendent de la pollinisation par les animaux ; un tiers des stocks de poissons sont exploités à un niveau biologiquement non durable ; et la moitié des forêts a disparu depuis les années 1990, hors industrie du bois ou agricole.

3. LE CHANGEMENT CLIMATIQUE ET LA POLLUTIONLa moitié des mammifères terrestres et un quart des oiseaux menacés pourraient déjà avoir été affectés par le changement climatique. La pollution chimique des sols et, par ruissellement, des eaux douces et des océans, ainsi que la pollution plasti-que, multipliée par dix depuis 1980, sont également une cause majeure de la perte de biodiversité. En France, la loi antigaspillage prévoit d’atteindre le « zéro plastique jetable » d’ici à 2040.

4. LES ESPÈCES EXOTIQUES ENVAHISSANTESL’expansion d’espèces exotiques envahissantes peuvent engendrer des impacts écologiques néga-tifs mais aussi être à l’origine de coûts économiques importants. En France, l’Union internationale pour la conservation de la nature a édité un guide avec les groupes EDF, Engie, Eqiom et GSM pour aider les entreprises à gérer cette problématique qui concerne plus d’une centaine d’espèces en métropole et près de 400 outre-mer.

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ENJEUX Se conformer à une réglementation exigeante, contrôler sa chaîne d’approvisionnement ou participer à la préservation des ressources naturelles… les entreprises sont de plus en plus soucieuses de leur impact sur la biodiversité.

Biodiversité : des entreprises s’engagent dans la protection du vivant

ECONOMIE DURABLE

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Les Echos Vendredi 11 et samedi 12 décembre 2020 SPÉCIAL ÉCONOMIE DURABLE // 43

« L’érosion de la biodiversité est un risque majeur pour les entreprises »

Propos recueillis parCamille Prigent

C ’est une pionnière du con-seil aux entreprises sur labiodiversité. Véronique

Dham a créé son premier cabinet de conseil en 2005.

Les enjeux de biodiversité concernent-ils tous les secteurs d’activité ?Toutes les activités dépendent de la nature ou exercent des pressions sur elle. Certaines industries sont plus particulièrement concernées, car elles ont des impacts impor-tants, comme les industries extrac-tives ou la construction. D’autres secteurs sont très dépendants des ressources naturelles, comme l’agriculture, l’industrie agroali-mentaire, la pharmacie ou la cos-métique, qui peuvent être mena-c é e s p a r l a d i s p a r i t i o n d e s ressources ou la limitation de leur exploitation. Enfin, certains sec-teurs sont exposés sur l’ensemble de leur chaîne de valeur, comme l’agroalimentaire, avec des impacts sur l’amont agricole, la production, le packaging et la fin de vie du pro-duit.

Vous conseillez les entreprises sur la biodiversité depuis 2005. Quelles évolutions avez-vous pu observer ?A l’époque, le sujet était inexistant. En l’espace de quinze ans, la prise de

Ces données sont ensuite modéli-sées pour donner un score unique. L’outil est-il parfait ? Non. La Caisse des Dépôts en a conscience et tra-vaille dans un processus d’amélio-ration continue. Mais il faut saluer ce genre d’initiative parce qu’un sys-t è m e d e q u a n t i f i c a t i o n e s t aujourd’hui nécessaire pour pous-ser les entreprises à agir. Cela leur

conscience a évolué dans le bon sens, mais les entreprises sont nombreuses à ne pas encore avoir saisi en quoi elles étaient concer-nées. Installer des ruches au siège ouplanter des arbres à l’autre bout du monde, ce sont desactions positives mais qui sont très déconnectées des impacts réels. Il ya deux ans, un mouvement impor-tant s’est mis en marche dans le sillage de la plénière de l’IPBES à Paris, l’équivalent du GIEC pour la biodiversité. Cet événement a per-mis de mettre des chiffres sur l’enjeu de la préservation de la bio-diversité, mais a aussi mis le doigt sur les causes de son érosion, parmilesquelles la pollution, le réchauffe-ment climatique ou encore le chan-gement d’affectation des sols… des phénomènes tous liés à l’activité économique.

La finance responsable peut-elle jouer un rôle dans cette prise en compte par les entreprises ?Les investisseurs ont compris que l’érosion de la biodiversité était un risque majeur pour les entreprises et donc pour la rentabilité de leurs actifs. Ils veulent avoir la possibilité d’évaluer la durabilité des entrepri-ses sous le prisme de la biodiversité,faisant entrer ce sujet dans le giron de la direction financière. Les entre-

prises doivent montrer que leur modèle économique n’est pas

menacé par l’éro-sion de la biodiver-sité. Si elles n’ensont pas capables,elles vont, à terme,être exclues desp o r t e f e u i l l e s ,

comme c’est le cas aujourd’hui avecles industries extractives ou l’arme-ment.

De quels outils les entreprises disposent-elles pour mesurer leur impact sur le vivant ?La difficulté à mesurer explique en grande partie pourquoi les entre-prises ont mis du temps à traiter le sujet de la biodiversité. C’est un enjeu global, mais les réponses sontlocales. Les scientifiques estimaientqu’on ne pouvait pas résumer la bio-diversité en un indicateur, tandis que les entreprises et les investis-seurs en réclamaient un pour pou-voir traiter le sujet sérieusement.

Cette année, la Caisse des Dépôtsa lancé le Global Biodiversity Score,un indicateur unique qui propose d’évaluer l’empreinte d’une entre-prise. Il fait se rencontrer des don-nées financières, comme le chiffre d’affaires de la société, ses achats, mais aussi d’autres données relati-ves à la pollution générée par ses activités, ses émissions de gaz à effetde serre ou le nombre de mètres carrés qu’elle artificialise chaque année.

VÉRONIQUE DHAM Fondatrice de Biodiv’Corp

ENTRETIEN La fondatrice de Biodiv’Corp, Véronique Dham, a l’ambition de sensibiliser les entreprises à l’enjeu du vivant, de former leurs salariés et d’influencer leurs plans d’action pour limiter les impacts.

permet de piloter le sujet de la biodi-versité comme elles le font avec leurs émissions de carbone par exemple, ou la trajectoire 2 °C.

Vous travaillez beaucoup à sensibiliser les dirigeants, mais aussi les équipes opéra-tionnelles des entreprises. En quoi est-ce indispensable ?

Véronique Dham : « Tout sujet important doit être porté par les plus hautes instances de l’entreprise, car c’est la direction qui donne la vision sur des sujets éthiques. » DR

Tout sujet important doit être portépar les plus hautes instances de l’entreprise, car c’est la direction quidonne la vision sur des sujets éthi-ques comme la biodiversité ou le climat. Mais il faut que cela des-cende sur le terrain, sinon c’est un engagement qui n’est jamais trans-formé en action. Cela doit passer par une sensibilisation à tous les niveaux, et par une formation tech-nique pour certains métiers, par exemple les métiers du bâtiment, les équipes achats ou de sourcing des matières premières. n

«L’IPBES à Paris -

l’équivalent du GIEC pour la biodiversité - a permis de mettre des chiffres sur l’enjeu de la préservation de la biodiversité, mais a aussi mis le doigt sur les causes de son érosion. »

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44 // Vendredi 11 et samedi 12 décembre 2020 Les Echos

Le temps ne favorise ni EssilorLuxottica ni GrandVision dans une renégociation.

« Il n’est pour voir que l’œil du maître. » Quoi qu’en dise La Fontaine, les actionnaires d’EssilorLuxottica peuvent aujourd’hui se trouver très dépendants du premier d’entre eux, Leonardo Del Vecchio, trop roué pour ne pas faire durer le suspense sur sa vision. Le temps s’est suspendu au-dessus de l’acquisition du propriétaire de GrandOptical, de l’éventuelle réinstauration d’un dividende après son annulation en avril, et du choix, deux ans après la naissance du nouvel ensemble, d’un directeur général, ces deux dernières décisions ayant été promises avant la fin de l’année. Les rumeurs persistantes sur la renégociation d’une emplette jugée chère avant même la crise, à 7,2 milliards d’euros, n’ont rien d’étonnant après que LVMH a montré la voie des soldes avec Tiffany. Mais l’horizon redonné par l’arrivée des vaccins a modifié le rythme de l’horloge. La famille Van der Vorm, qui contrôle GrandVision, la maison mère, et dont beaucoup d’actifs dépendent du pétrole, peut être tentée de jouer la montre alors qu’EssilorLuxottica devra à nouveau se concentrer sur sa gouvernance. Il ne semble certes pas impossible à certains courtiers que la nomination d’un nouveau patron puisse être repoussée après la prochaine assemblée générale, lorsque prendra fin l’équilibre des pouvoirs prévalant jusqu’ici entre les parties française et italienne. En attendant, pandémie oblige, les boursiers avancent, la buée sur les lunettes…

La buée sur les lunettes

Une lente et progressive décéléra-tion interrompue par un freinage brutal : ce qu’a vécu le marché automobile mondial en quelques années n’augure pas d’un redémarrage en trombe après la crise sanitaire. La reprise sera « irrégulière », souligne Matthias Heck, responsable crédit chez Moody’s, pour qui retrouver les 95 millions de véhicules vendus, soit le pic des années 2017-2018, « prendra jusqu’au milieu de la décennie ». Le rebond des ventes (+7,7 % attendus par l’agence de notation) devrait être plus visible en Europe de l’Ouest (+12,2 %), tirée par le Royaume-Uni, l’Italie et l’Espagne, qu’aux Etats-Unis (5,2 %) et qu’en Chine (+4 %). Mais les cash-flows libres des constructeurs resteront sous pression, notamment à cause du poids des investissements, souligne l’agence de notation qui maintient à « stable » la perspective du secteur.

La reprise du marché automobile mondial va s’étirer en longueur. Croyants, mais pas dupesAirbnb et DoorDash n’ont pas raté leur fenêtre d’entrée en Bourse.

Les épargnants américains prennent-ils encore la peine de passer des ordres avec limite de prix ? Certains vieux routiers des entrées en Bourse se posent la question au vu de l’envolée des marques grand public DoorDash et Airbnb. La plateforme de location immobilière a réussi l’exploit marketing de monter dans le train du « monde d’après » où se trouvait naturellement le livreur de repas. Les valorisations donnent le vertige et celle de DoorDash (11,8 fois les ventes selon Fox Advisors) provoque déjà des prises de bénéfice. Les « venture capitalists » pourraient gémir de laisser autant d’argent « sur la table » lors du placement initial (IPO), sauf que les valorisations supérieures aux dernières levées de fonds d’avant la pandémie n’allaient pas de soi, étant donné les refinancements dans l’intervalle. La dizaine de milliards de plus-value de SoftBank effacent un peu plus l’échec de WeWork, la licorne maudite de Masayoshi Son. Loin de se perdre dans ces arcanes techniques, la Bourse américaine montre surtout sa quête inlassable de croissance et sa croyance à long terme à l’innovation, quitte à prendre de gros risques, dont les prospectus regorgent. Les investisseurs ne sont pas dupes. Les vaccins alimentent leur confiance et les prix des actifs longs montent quand les taux sont bas. Le vétéciste Uber introduit en mai 2019, juste avant que la Fed ne redevienne accommodante, en avait d’ailleurs fait les frais.

// Budget de l’Etat et PSR 2021 : 448,8 milliards d’euros (prévisions PLF 2021) // PIB 2020 : 2.223 milliards d’euros// Plafond Sécurité sociale : 3.428 euros/mois à partir du 01-01-2020 // SMIC horaire : 10,15 euros à partir du 01-01-2020 // Capitalisation boursière de Paris : 1.764,98 milliards d’euros (au 30-11-2020)// Indice des prix (base 100 en 2015) : 104,51 en novembre 2020 // Taux de chômage (BIT) : 9 % au 3e trimestre 2020 // Dette publique : 2.638,3 milliards d’euros au 2e trimestre 2020

= Les chiffres de l’économie

Transmission poussivecrible

EN VUE

David B. Robbins

M ark Zuckerberg a beau avoirquelque deux milliards d’amis,ceux-ci ne suffiront peut-être

pas à le protéger de ses ennemis. Ceux-là sont beaucoup moins nombreux mais, hélas pour lui, ils sont aussi bien plus puissants. Le gendarme de la concurrence américain (FTC : Federal Trade Commis-sion) s’est ligué avec les procureurs géné-raux de 46 Etats. Ils demandent à la justicede forcer le réseau social à se séparer de WhatsApp et Instagram, ses deux filiales devenues ses pépites. Revoilà la justice américaine revenue au temps du démantè-lement d’ATT avec la naissance en 1984 des Baby Bells et, plus loin encore en, 1911, ladispersion de la Standard Oil. Mark Zuc-kerberg a pris la place de John D Rockefel-ler et c’est David B. Robbins, directeur de la Federal Trade Commission, qui tient le glaive antitrust. Il accuse Facebook d’avoir étouffé la compétition en rachetantces deux start-up devenues des géantes : « Facebook s’est engagé dans une stratégie

systématique visant à éliminer ce qui menace son monopole. » Facebook hurle au « révisionnisme ». Instagram est l’appli-cation de photos où l’on expose sa vie en rose, celle de Mark risque de s’assombrir. Voici David B. Robbins, directeur opéra-tionnel, son président Joseph Simons, et toute son organisation, sûrs d’être occupéspendant des années, peut-être même plus longtemps que les poursuites qui acca-blent Nicolas Sarkozy. Robbins connaît bien les agences de régulation. Diplômé en droit et en informatique, il a commencépar passer quinze ans dans le privé commeavocat et comme manager dans le secteur de la technologie, avant de rejoindre le ser-vice public. Il a fait des allers-retours entre la FTC qu’il dirige depuis 2013 et la Com-mission fédérale des communications. La communication c’est avec Facebook et les Gafam qu’il va falloir la rétablir.

(Lire nos informationsPages 15 et 27

La Bourse de Paris à l’équilibre

• La Bourse de Paris n’a quasiment pas bougé jeudi, les investisseurs accueillant sans enthousiasme les annonces de la Banque centrale européenne. L’indice CAC 40 a pris 0,05 %, à 5.549,65 points. Il avait perdu 0,25 % la veille. Si à Londres le FTSE 100 a gagné 0,54 %, à Franc-fort le DAX a cédé 0,33 %. La BCE a pourtant pris les mesures qui étaientattendues, mais l’absence de sur-prise a déçu les marchés. D’autant que l’institut monétaire s’est montrétrès prudent sur le rythme de la reprise en Europe. Les incertitudes autour du Brexit ont aussi pesé sur le moral. Londres et Bruxelles se sont donné une dernière chance d’aboutir d’ici à dimanche.

Du côté des valeurs, Total a prisla tête du CAC 40. Porté par la hausse des cours du brut (le baril debrent a dépassé les 50 dollars pour la première fois depuis mars), le groupe pétrolier s’est adjugé 2,09 %.A l s t o m (+ 1,58 %) et O r a n g e(+ 0,98 %) complètent le podium. Peugeot, qui a vu les actionnaires familiaux accroître leur participa-tion de 2 % mercredi, a gagné 0,19 %.

Le secteur bancaire n’a pasprofité de l’annonce d’une exten-sion des financements à taux néga-tifs de la banque centrale. Lanterne rouge du CAC 40, Société Géné-rale a perdu 3,25 %. BNP Paribasa reculé de 2,44 % et Crédit Agri-cole SA de 0,91 %.

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JOAILLERIEBijoux et BD:le bon accord

ALIMENTATIONLe saumon en voiede réhabilitation

SANTÉParkinson,

l’oubliée du Covid

LES NOUVEAUX DÉFIS DE SAFRANEn janvier, le motoriste des Airbus change de patron, en pleinesturbulences sanitaires. Un joyau industriel français confiantdans sa capacité à surmonter la crise qui frappe l’aérien.

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A LA POURSUITE DU RÊVE

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Disponible sur samsung.comDAS Galaxy Z Fold2 tête : 0,859 W/kg, tronc : 1,453 W/kg, membres : 2,89 W/kg. DAS Galaxy Z Flip 5G tête : 0,799 W/kg, tronc : 1,451 W/kg, membres : 1,79 W/kg. Imagesd’écrans simulées. Visuels non contractuels. L’utilisation d’un kit mains libres est recommandée. Réseau 5G bientôt disponible en France. Google Duoest unemarque déposée de Google LLC. Samsung Electronics France - CS2003 - 1 rue Fructidor - 93484 Saint-Ouen Cedex. RCS Bobigny 334 367 497. SAS aucapital de 27 000 000 €.

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LES ECHOS WEEK-END – 9

SOMMAIRE 11 DÉCEMBRE 2020

12 ESPRIT WEEK-END

22 LE DIMANCHE IDÉAL DE…la romancière anglaise Sophie Kinsella.

BUSINESS STORY

25 EN COUVERTURE :COMMENT SAFRAN RÉSISTE AU MAL DE L’AIRLe 1er janvier, Philippe Petitcolin céderales manettes à Olivier Andries, après avoirpiloté le fleuron aéronautique au traversd’une crise aussi violente qu’inattendue.Les défis à relever restent de taille.

34 PHILIPPE CORROT, UNE RÉUSSITEQUI N’A RIEN DU MIRACLECe pionnier duWeb autodidacte a donnéle jour à la dixième licorne française, Mirakl.

40 UN DIRECTEUR TRÈS ROCK À LA SANTÉLes clefs de la célèbre prison sont auxmainsdu décoiffant Bruno Clément-Petremann. 64 QUAND LA MUSIQUE REJOUE SES SUCCÈS

Morceaux inédits, pépites retrouvéeset albums cultes font le sel des rééditions.

STYLE

67 DES CAILLOUX ET DES BULLESObjets de vols rocambolesques, trésorscachés, pierres magiques... les bijouxbrillent dans la bande dessinée commeautant de joyaux scénaristiques.

75 BON CRU DE BORDEAUXLa montre Code 11.59 d’Audemars Piguet.

76 MODE LA TRÈS INFLUENTE REI KAWAKUBOLa créatrice de Comme des Garçonss’apprête à ouvrir à Paris un espace dédiéau travail de jeunes designers.

78 DE CATHERINE DE MÉDICIS À COCO CHANELDans un château de Chenonceau désert,le défilé des Métiers d’art de Chanel s’estmué en expérience purement numérique.

79 TOP MOUMOUTEVeste en cachemire Loro Piana.

80 (PETIT) COMITÉ DES FÊTESIdées cadeaux de dernière minute.

84 GOÛT

86 RELÈVE ASSURÉELa Corolla, douzième générationet 100% hybride.

87 ENCEINTE ZENUn boîtier connecté qui met de l’huile(essentielle) dans la musique.

…ETMOI

89 PARKINSON, CETTE GRANDE OUBLIÉELe confinement a durement affecté lesmalades de cette pathologie trop souventméconnue. Mais la recherche progresse…

94 DÉLICES D’INITIÉS

Olivier Andries, bientôt dansle siège du pilote chez Safran.

POUR ALLER PLUS LOINSUR LESECHOS.FR/WEEKEND● Notre podcast sur les défis qui attendent Safranà la veille de son changement de patron.

● Musique : le best-of des coffrets à offrir pour Noël.● Une sélection des plus grands filmsqui parlent de la planète.

● Les meilleurs jeux vidéo pour petits et grands.

46 LE SAUMON REMONTE LE COURANTLe poisson, roi des tables de fêtes, tented’en finir avec l’industrialisation à outrance.

52 EMER COOKE, GENDARME EUROPÉENDES VACCINS SOUS PRESSIONRudes débuts pour la nouvelle patronnede l’Agence européenne des médicaments.

54 WIZZ AIR AU SEPTIÈME CIELComment la compagnie low cost d’originehongroise nargue les majors de l’aérien.

CULTURE

57 LE CINÉMA PASSE AU VERTEntre prise de conscience écologique etbouleversements induits par la pandémie,l’industrie du septième art vit un tournant.

96 BIEN-ÊTREAlimentation: plaisir, goût et santé aumenu.

98 CLAP DE FINLa chronique de Marc Dugain.

MANUELBRAUNPOURLESECHOSWEEK-END

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BFOTO/GETTY/ISTOCK

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STRATION:CAROLEBARRAUDPOURLESECHOSWEEK-END

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LES ECHOS WEEK-END – 11

La belle aventure industrielle de Safran repose sur unesomme de paradoxes. Le plus important tient à ce qui futpendant des décennies la source de son éclat : le moteurCFM56, le plus vendu aumonde dans sa catégorie, qui aéquipé plusieurs générations aussi bien de Boeing qued’Airbus. La prouesse avait été rendue possible, dans lesannées 1970, par la création d’une société en joint-ventureentre Snecma, un groupe public, et General Electric,à l’époque prototype de la firme privée américaine àsuccès. À cette naissance paradoxale, s’ajoute le fait qu’àla manœuvre dans cette collaboration franco-américaine,exceptionnelle à tous points de vue, se trouvait un grandpatron gaulliste, René Ravaud, devenu une légende dansl’aéronautique. Sous la présidence de Georges Pompidou,soutien déterminé du projet, Jacques Chaban-Delmaset Valéry Giscard d’Estaing y avaient chacun apportéleur pierre, confiant à Simon Nora, l’un des plus brillantstechnocrates de la période, l’instruction du dossier.De l’autre côté de l’Atlantique, la négociation remontajusqu’à Richard Nixon et se heurta pendant longtempsà l’opposition résolue du Pentagone. Malgré tant de féesétatiques penchées sur son berceau, l’entreprise a puau fil des ans s’extirper de la sphère publique (avec unepart de l’Etat au capital réduite à 11%), et constituedésormais un fleuron de la haute technologie française.Ses performances spectaculaires en Bourse au coursde la décennie passée en témoignent. Et pourtant ce poidslourd de notre industrie garde fortement ancrés les traitsde notre culture nationale, avec des syndicats puissantset remuants, ainsi qu’une histoire managériale complexe,à la fois plutôt endogène et sujette à de fréquentes luttesde pouvoir. Mais le plus étonnant de tous ces paradoxes,c’est que ce trésor stratégique pour la France semblesi peu reconnu comme tel par les Français.Henri Gibier

TRÉSOR CACHÉ

ÉDITO 11 DÉCEMBRE 2020

ILLU

STRATIONKIM

ROSELIER

ENCOUVERTURE:M

ANUELBRAUNPOURLESECHOSWEEK-END

Directeur de la publication,président de la SAS Les Echos :Pierre LouetteDirecteur des rédactions : Nicolas Barré

RÉDACTION

Directeur : Henri Gibier (7249)Directeur de création :Fabien Laborde (7273)Assistante : Maria Lopez-Pissarra (7325)Rédacteurs en chef :Laura Berny (7166),Karl De Meyer (7219)Mariana Reali (7335)Rédacteur en chef adjoint :Claude Vincent (7361)Chef d’édition :Anne-Sophie Pellerin (7322)Directrice artistique :Cécile Texeraud (7354)Directrice artistique adjointe :Alice Lagarde (7276)Chef de service photo :Jany Bianco-Mula (7170)Conseiller éditorial : Daniel Fortin (7240)Conseillère éditoriale et directrice mode :Béline DolatRédaction : Philippe Chevilley (7192)(chef de service), Florence Bauchard(7162), Isabelle Lesniak (7290), StefanoLupieri (7295) (chefs de rubrique),Pierre de Gasquet (7215) (grand reporter)Editrice Web : Cécilia Delporte (7218)Edition : Véronique Broutard (7183),Emmanuelle Chabert (7187),Annette Lacour (7275)Maquette : Christine Liber (7291)Service photo : Clémentine Neupont(7317), Constance Paindavoine (7320)Infographies : service infographiedes «Echos »Documentation : Anne Flateau (7239)Ont collaboré à ce numéro :Jérôme Berger, Jessica Berthereau,Philippe Bertrand, Philippe Besson, LeïlaBeyler, Ludovic Bischoff, AudeBlanchard-Dignac (maquette), SarahBraeck, Frank Declerck, SabineDelanglade, Marc Dugain, Astrid Faguer,Romin Favre, Cédric Fréour, EmmanuelGrasland, Laurent Guez, VéroniqueLe Bris, Gabrielle de Montmorin, Aliced’Orgeval, Jean-Francis Pécresse,Raphaël Sachetat, Philippe Venturini.

Pour obtenir votre correspondant,composez le 01 87 39 suivi des quatrechiffres entre parenthèses.Les adresses e-mail se construisent ainsi :initiale du pré[email protected]

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Les Echos Le Parisien MédiasTél. : 01 87397800Présidente : Corinne MrejenDirecteur général :Philippe Pignol (8311)Directrice adjointe du pôle Lifestyle :Sophie Chartier (7501)Directeur du pôle Réseaux, Internationalet Régions : Nicolas Grivon (7526)Pour obtenir votre correspondant,composez le 01 87 39 suivides quatre chiffres entre parenthèses.

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Origine du papier : Finlande.Taux de fibres recyclées : 0%. Le papierde ce magazine est issu de forêts géréesdurablement. P

tot0.009kg/tonne

Les Echos Week-End est une publicationhebdomadaire du Groupe Les Echos.ISSN 2430-7599. CPPAP 0421 C 83015.Dépôt légal : décembre 2020

Un catalogue Google de 36 p et 88 g estassemblé à ce numéro sur l’ensemble desabonnés.

Principal associé : Ufipar (LVMH)Président-directeur général :Pierre LouetteDirectrice générale Pôle Les Échos :Bérénice LajouanieDirecteur délégué : Bernard Villeneuve

En janvier, OlivierAndries arrive auxcommandes de Safran,le motoriste des Airbus,dans un contexte aussiviolent qu’inattendu.

LES ECHOS WEEK-END – 25

BUSINESS STORY11 DÉCEMBRE 2020

COMMENTSAFRAN RÉSISTEAU MAL DE L'AIRPar Emmanuel GraslandPhotographe: Manuel Braun

Dans l’usine Safrande Villaroche(Seine-et-Marne),où sont fabriquésles moteurs Leap.

Andries

BUSINESS STORY / CULTURE / STYLE / ... ET MOI

N°240.SUPPLÉMENTAUN°23346DUQUOTIDIEN«LES

ÉCHOS»DES

11ET

12DÉCEM

BRE2020.NEPEUTÊTREVENDUSÉPARÉM

ENT.5,50

CodeEtudeACPM

JOAILLERIEBijoux et BD:le bon accord

ALIMENTATIONLe saumon en voiede réhabilitation

SANTÉParkinson,

l’oubliée du Covid

LES NOUVEAUX DÉFIS DE SAFRANEn janvier, le motoriste des Airbus change de patron, en pleinesturbulences sanitaires. Un joyau industriel français confiantdans sa capacité à surmonter la crise qui frappe l’aérien.

CodeEtudeACPM

LES ECHOS WEEK-END – 57

CULTURE11 DÉCEMBRE 2020

LE CINÉMAPASSE AU VERT

Tournaged’effets spéciaux

sur fond vert.

Par Véronique Le Bris

EVERETTCOLLECTION/ABACA

LES ECHOS WEEK-END – 67

11 DÉCEMBRE 2020

STYLE

Bianca Castafiore,le célèbre

personnage créépar Hergé en 1938.

DES CAILLOUXET DES BULLESAu-delà de leurs formesgraphiques, les bijouxoffrent de parfaits scenariiaux auteurs de BD. Entrevols rocambolesques,trésors cachés et pouvoirdes pierres, ils brillentdans le neuvième art.

Par Gabrielle de Montmorin

HERGÉ/MOULINSART–2020

Castafiore,le célèbre

personnage crééenen 1938.1938.

LES ECHOS WEEK-END – 89

11 DÉCEMBRE 2020

ETMOI…

PARKINSON,CETTE GRANDE

OUBLIÉEJessica Berthereau

Illustration: Cristina Spanò

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12 – LES ECHOS WEEK-END

ESPRITWEEK-END11 DÉCEMBRE 2020

L'AGENDA TÉLÉ

« ALEX VIZOREK EST UNE DERNIÈRE FOISUNEŒUVRE D’ART ! »L’art d’en rireLe talent d’Alex Vizorek est de réussir à nousfaire rire tout en distillant une foultituded’anecdotes que l’on n’hésitera pas à ressortir à latable du réveillon! L’humoriste belge décortiqueles grands courants de l’art contemporain maisaussi du cinéma pour pointer du doigt des détailsabsurdes ou incongrus sur des œuvres et desartistes que l’on croyait connaître. Pour ladernière de son spectacle, il est entouré d’invitésqui font pétiller la culture avec un humour belgeauquel on devrait consacrer unmusée!Vendredi 11 décembre à 22 h 30 sur France 5.

DISTRICT ZCourses de zombiesGrosse attente pour District Z, le nouveau jeude TF1 dont on parle depuis des années etqui sera enfin diffusé à l’antenne ce week-end.Création 100% française produite par Arthur, cejeu, fusion entre Koh-Lanta (pour l’action), unescape game (pour les énigmes à résoudre) etun film d’horreur (pour la mise en scène à basede zombies coursant des vedettes), est présentépar Denis Brogniart. Objectif : concurrencer la

référence du genre qu’est Fort Boyard surFrance 2. En cette année de confinement, voirdes gens tenter de s’évader d’une zone closehorrifique devrait parler au plus grand nombre !Vendredi 11 décembre à 21 h 05 sur TF1.

« LE VOL DU BOLI »L’Afrique au ChâteletSuper spectacle «crossover», Le Vol du Boliévoque l’histoire de l’Afrique et de ses rapportsavec l’Europe du XIIe siècle à ce jour. Unecréation de 90 minutes signée de la pop star

Damon Albarn (Blur, Gorillaz…) et du cinéastemauritanien Abderrahmane Sissako, avec dansle principal rôle féminin l’immense chanteuseFatoumata Diawara. Cette comédie musicalesingulière, qui marie pop et world music,fable, histoire et politique, a été enregistréeau Châtelet juste avant le confinement. Elleest diffusée en prime time sur la télé publiquedans le cadre de la saison Africa 2020.Vendredi 11 décembre à 20 h 50 sur France 5.

« COMMENT LE CHIEN A CONQUIS LE MONDE »Ode canineEn plus d’être fidèle, le chien a toujours étéle plus utile des compagnons. Ce documentairede Jean-Baptiste Erreca nous apprend commentl’homme a domestiqué les premiers loupsil y a 15000 ans pour créer plus de 400 racesde chiens, une diversité unique au sein d’unemême espèce. Et comment le chien lui a étéprécieux pour chasser et se protéger. Bref,l’opposé de son félin de coloc, vous savez,cette indolente boule de poils qui ronronnetoute la journée près du radiateur !Samedi 12 décembre à 22 h 25 sur Arte.

L’humoriste belgeAlex Vizorek donne

sur France 5la dernière d’un

spectacle quia connu le succèssur scène pendantprès de dix ans.

Damon Albarn et Abderrahmane Sissakosignent une comédie musicale singulière.

Au débutétaitle loup…

« LES GALETTES DE PONT-AVEN »L’origine du monde selon MarielleÀ quoi reconnaît-on un film culte? Sans douteà un acteur inspiré qui n’a pas peur de se mettreen danger, comme Jean-Pierre Marielle devantla caméra de Joël Séria. Dans Les Galettesde Pont-Aven, il incarne un représentanten parapluies dans la France de la fin des TrenteGlorieuses qui tente d’échapper à sa morne vieen s’adonnant à la peinture et en tombantd’extase devant le corps des femmes quimontent dans sa petite chambre d’hôtel deprovince. Sublime Marielle montrant ses fêlureset déclamant maladroitement ses sentiments.Dimanche 13 décembre à 21 h 05 sur C8.Ludovic Bischoff L

ACOMPAGNIEDESINDES

ONEPLANET

HELENEPAMBRUN

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14 – LES ECHOS WEEK-END

ESPRIT WEEK-END

L'AGENDA SPECTACLES

« LA PLUS PRÉCIEUSE DES MARCHANDISES »AU ROND-POINTLe conte de GrumbergLe théâtre reprend ses droits au Rond-Pointavec un spectacle triste, beau et drôle commeun conte de fées. La Plus Précieuse desmarchandises, c’est cette petite fille de la tribudes «sans-cœur» jetée d’un train en 1942 etrecueillie par un Pauvre Bûcheron et unePauvre Bûcheronne… Jean-Claude Grumberg(auteur) et Charles Tordjman (metteur en scène)se retrouvent pour cette fable chargée d’histoire.Paris, théâtre du Rond-Point, 15 décembreau 3 janvier. Tél. : 01 44 95 98 21.

TCHEKHOV ET FEYDEAU À L’ATELIERAntistressLes deux spectacles phares de l’automne sontà l’affiche du théâtre de l’Atelier, en alternancepour tenir compte du couvre-feu. Crise de

nerfs. Trois farces de Tchekhov, dans une miseen scène grinçante de Peter Stein, donne à voirun JacquesWeber colossal. On purge bébéde Feydeau, revu et interprété en chansonspar l’irrésistible Émeline Bayart, offre unegrande bouffée de délire comique antistress.Paris, théâtre de l’Atelier, du 18 décembreau 31 janvier et du 19 décembre au 3 janvier.Tél. : 01 46 06 49 24.

« UNE HISTOIRE D’AMOUR » À LA SCALA PARISMichalik revientLa Scala Paris rouvre ses portes avec son «tube»de 2020:Une histoire d’amour, le mélo moderned’Alexis Michalik (le 19 décembre). Drôle,émouvant, le dernier prodige de l’artiste surdouéest interprété par une troupe virtuose. Aumenudu théâtre du boulevard de Strasbourg, d’autresreprises: L’Art du rire de Jos Houben (le 20),Embrase-moi de Kaori Ito (le 22), Perte (le 23).Et un concert en ouverture, le 18: Anne Queffélecdans les trois dernières sonates de Beethoven.Paris, La Scala, réouverture le 18 décembre.Tél. : 01 40 03 44 30.

« LA SEPTIÈME VIE DE PATTI SMITH »AU THÉÂTRE 14Patti FerdaneLe Théâtre 14 présente La Septième Vie de PattiSmith, un spectacle performance de BenoîtBradel, tiré du roman de Claudine Galéa.Marie-Sophie Ferdane incarne à merveille cettejeune Marseillaise galvanisée par la découverte

La Plus Précieusedes marchandises,un conte fantastiqueglacé d’humour deJean-Claude Grumberg.

Jacques Weber dans Crise de nerfs. Bartabas et Tsar, cheval «couleur d’abîme».

de la star dans les années 1970. Un passeportpour le rock et l’émancipation. Patti Ferdane joueet danse entourée de deuxmusiciens électriques,déclame du Rimbaud, magnifie les odes de lapoétesse new-yorkaise. Gloria… in excelsis deo !Paris, Théâtre 14, du 15 au 19 décembre.Tél. : 01 45 45 49 77.

« BOULE À NEIGE » À LA VILLETTELet it snow!Avec son mini-décor et ses flocons scintillants,la boule à neige est peut-être le plus petit théâtredu monde. Homme de théâtre singulier,Mohamed El Khatib propose avec l’historienPatrick Boucheron de nous raconter les histoireset les rêves engloutis dans ces univers liquides.Entourés d’une collection de ces précieux objetskitsch, ils vont jouer les conteurs-anatomistesau milieu du public installé sur un gradincirculaire, dans la Grande Halle de la Villette.Paris, La Villette, du 15 au 29 décembre, dans lecadre du Festival d’automne. Tél. : 01 53 45 17 17.

BARTABAS EN DUO À AUBERVILLIERSLes deux tsarsBartabas va pouvoir reprendre ses Entretienssilencieux avec son grand cheval «couleurd’abîme» dénommé Tsar. Les aficionados dusublime écuyer communieront pendant un peuplus d’une heure avec l’homme et l’animal,dans l’enceinte du théâtre équestre Zingarod’Aubervilliers. Un duo intime, pudique,subtilement acrobatique, porté par le dispositifsonore imaginé par Manuel Poletti et l’Ircam.Aubervilliers, théâtre Zingaro, du 16 décembreau 3 janvier, dans le cadre du Festival d’automne.Tél. : 01 53 45 17 17. Philippe ChevilleyAgenda sous réserve d’une prolongation du confinement.

ANTOINEDESAINTPHALLE

FRANCKFOKERMAN64CRUEDEMONTREUIL78000VERSAILLES0685138450

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THE

Le plaisir de conduire

Consommations en cycle mixte de la Nouvelle BMW Série 2 Gran Coupé selon motorisations : 4,6 à 7,5 l/100 km.Émissions de CO2 : 120 à 172 g/km en cycle mixte selon la norme WLTP.BMW France, S.A. au capital de 2 805 000 € - 722 000 965 RCS Versailles - 5 rue des Hérons, 78180 Montigny-le-Bretonneux.

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16 – LES ECHOS WEEK-END

ESPRIT WEEK-END

L’AGENDA DES EXPOSITIONS

GIORGIO MORANDI À GRENOBLEBeauté immobileLe Musée de Grenoble expose un ensembled’eaux-fortes et d’aquarelles de GiorgioMorandi, l’un des grands peintres de l’Italiedu XXe siècle, maître de la nature morte,connu pour son quotidien monacal,confiné qu’il fut tout au long de sa viedans son atelier de Bologne. Un hymneà l’immobilité et à ses vertus. Dèsle déconfinement et jusqu’au 14 mars,www.museedegrenoble.fr

PHOTO DAYS À PARISLa photo reprend la poseL’édition mort-née du mois de la photose rattrape dès ce week-end grâce auparcours de Photo Days : expos,signatures, conférences dans plus de40 galeries et institutions parisiennes.À voir dès dimanche, chez Jean-KentaGauthier, dans le VIe arrondissement,les photos de Raphaël Dallaporta qui

a capturé chaque jour durant une année l’imagedu soleil au sol, révélant au bout sa courbeen huit. Et dès le déconfinement, le retourde la splendide expo «Man Ray et la mode»au musée du Luxembourg. Jusqu’au 6 février.www.photodays.paris

BRIGA, UNE VILLE OUBLIÉE À ROUENQuand la Normandie était romaineEnfouis sous la forêt pendant plus d’unmillénaire, les vestiges de la ville antiquede Briga, non loin d’Eu, révèlent leurssecrets, au fil des fouilles. En témoigne«Briga, renaissance d’une ville oubliée»à partir du 26 décembre au musée desAntiquités de Rouen. La découverterécente, à partir de 2006, d’une véritableagglomération sur 65 hectares, est iciexposée pour la première fois.Jusqu’au 8 mars.museedesantiquites.fr

Le peintre GiorgioMorandi, dans sonatelier à Bologne(Italie), en 1953.

Sans titre,sculpture en bois

de Mihai Olos (1988),à voir au Mucem.

FOLKLORE À MARSEILLEL’envers du clichéLe folklore est-il rétrograde? Bien au contraire,comme le montre cette nouvelle exposition duMucem. Une sélection de 360œuvres et objetsqui invite à réfléchir sur le lien entre avant-gardeet folklore. Le propos s’appuie notamment surde grands noms tels Kandinsky, Brancusi, SophieTaeuber-Arp, tous inspirés à unmomentde leur vie par ce «savoir du peuple».Dès le déconfinement et jusqu’au 22 février.www.mucem.org

NOËL AU LOUVRELe musée tous ensembleLe Louvre revient en force avec un beauprogramme de visites et d’activités pourles enfants pendant les vacances. En accès libre(visite guidée de 20 minutes sur une dizainede thématiques, récit d’un conte, découverteavec un plasticien des secrets de fabricationde Rubens) ou bien sur réservation. Ainsi,chaque jour à 15h00, est proposée une visitedes galeries sur le thème des animaux, de la viequotidienne ou des héros. Sans oublier l’expoincontournable du moment, pour toutela famille également : «Le Corps et l’Âme,de Donatello à Michel-Ange, sculpture italiennede la Renaissance».www.louvre.frAlice d’OrgevalAgenda sous réserve d’une prolongation du confinement. H

ERBERTLIST/MAGNUMPHOTOS

NICUILFO

VEANU/COURTESYOLO

SESTATEANDPLANBCLU

J,BERLIN

ÉTIENNEMANTE/DRAC-NORMANDIE

Statuette de Mercure, débutdu Ier siècle avant notre ère,découverte sur le site de Briga.

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18 – LES ECHOS WEEK-END

ESPRIT WEEK-END

L'AGENDA POLARS D'AILLEURS

« LIRE LES MORTS », DE JACOB ROSSCœurs caraïbesL’action se déroule à Camaho, caillou fictifde l’archipel caribéen, mais il n’est pas difficilede reconnaître en filigrane la Grenade où estné l’auteur, désormais installé en Angleterre.Hanté par le meurtre de sa mère lors d’émeutesqui ont secoué l’île plusieurs années auparavant,Michael Digson accepte l’offre d’emploi ducommissaire de San Andrews contre la garantiede pouvoir enquêter sur son affaire personnelle.Il poursuit en parallèle une investigationà haut risque sur de multiples disparitions dansla région. Premier roman du poète traduit enfrançais, ce tome inaugural d’un quartet envoûtepar son atmosphère lancinante et passionnepar la réalité qu’il décrit, notamment l’influencedes sectes et les tensions raciales.Traduit de l’anglais (Grenade)par Fabrice Pointeau, Sonatine, 360 p., 21 €.

« LA PROIE », DE DEON MEYERLe crime du Rovos ExpressOn connaissait le crime de l’Orient-Expressd’Agatha Christie, on va désormais compteravec le meurtre du Rovos de Deon Meyer.Pour sa septième aventure, le duo de chocBenny Griessel-Vaughn Cupido enquête sur uncrime perpétré dans le train « le plus luxueuxdu monde» qui relie Pretoria au Cap, en Afrique

du Sud, pour le bonheur des touristes fortunés.Le corps d’un ancien membre des servicesde police, reconverti en garde du corps de luxe,a été balancé par la fenêtre d’un wagon.Malgré les pressions en haut lieu, les Hawksne lâcheront pas cette sale affaire qui impliquedes tueurs russes, les services secretssud-africains, l’ex-président milliardaireet ses protégés indiens.Traduit de l’afrikaans par Georges Lory,Gallimard, 568 p., 18 €.

« LE PLONGEUR », DE MINOS EFSTATHIADISLe Péloponnèse en eaux troublesLe héros, détective privé émigré à Hambourg,se fait tantôt appeler Chris Papas, tantôtChristos Papadimitrakopolos en fonction deses interlocuteurs, des oreilles qui l’écoutentet des bouches qu’il veut délier. Pas faciled’assumer ses origines quand on a un pèregrec et une mère allemande, surtout dansun Péloponnèse traumatisé à la fois parles horreurs de la Seconde Guerre mondialeet la cure d’austérité actuelle imposée par uneUnion européenne insensible aux difficultésde ses États-membres. L’enquête de Christosest à la fois une quête identitaire et une plongéedans le douloureux passé d’un pays très loinde la carte postale estivale.Traduit du grec par Lucile Arnoux-Farnoux,Actes Sud, 208 p., 21 €.

Des tropiquesau cerclepolaire,cinq sombresaffaires fortdépaysantes.

Le Norvégien Heine Bakkeid.

« L’AMANT DE JANIS JOPLIN »,D’ELMER MENDOZAL’argot des narcosDans le Triangle d’or de la marijuana, le Sinaloa,David, jeune homme trop naïf, est capablede tuer un lièvre d’un lancer de pierre mais pasde repérer les filles interdites, chasse gardée destrafiquants. Une bagarre qui tournemal lors d’unbal de village le force à s’exiler à Los Angeles,où il est déniaisé par une «Janis Joplin» dontil tombe éperdument amoureux. Dès lors, toutesa vie sera consacrée à retrouver la rockeuseplutôt qu’à se méfier des redoutables baronsde la drogue. Une tragicomédie rocambolesquecolorée par l’argot des narcotrafiquants.Traduit de l’espagnol (Mexique)par François Gaudry, Métailié, 240 p., 19,80 €.

« TU ME MANQUERAS DEMAIN »,DE HEINE BAKKEIDPsychose polairePremier roman traduit en français d’uncompatriote quadragénaire de Jo Nesbø, cepremier tome de la trilogie «Thorkild Aske»met en scène un ex-flic à la dérive, pointantau chômage à sa sortie de prison. Accroaux médocs, constipé chronique, rongépar la culpabilité d’avoir écrasé une femme,le malheureux se voit confier par son psyune affaire susceptible de le remettre en selle :retrouver, dans une île de l’extrême nord dela Norvège, au-delà du cercle polaire, un fils àpapa apparemment disparu en mer. Un thrillertorturé, dépaysant à souhait, aux étonnantesdigressions fantastiques.Traduit du norvégien par Céline Romand-Monnier,Les Arènes, 464 p., 20,90 €. Isabelle Lesniak

GETTYIMAGES/ISTOCK

HARRIETMOLSEN

DR

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20 – LES ECHOS WEEK-END

ESPRIT WEEK-END

AGENDA COFFRETS MUSIQUE CLASSIQUE

SAMSON FRANÇOIS COMPLETE RECORDINGSLe chic souverainDisparu à 46 ans, usé par une vie de bohème,Samson François (1924-70) était l’archétypede l’artiste romantique: imprévisible, tourmenté,l’esprit vagabond, mais la mise impeccable.Sa fausse désinvolture le porte naturellementvers des formes courtes que Chopin, Debussyet Ravel ont marquées de leur empreinte.Samson François s’y glisse avec une dextéritégourmande et un chic souverain.Aux enregistrements de studio, ce coffretajoute deux récitals et un documentaire réalisépar son fils. Le piano en liberté. Erato (54 CD+1 DVD)

MICHAEL TILSON THOMAS CONDUCTS IVESAmérique insoliteCharles Ives (1874-1954) étonne par la singularitéde sa musique, mélange de romantismeet de modernité tumultueuse où se superposentdes mélodies empruntées à la mémoirecollective et des rythmes complexes.Sa Symphonie n° 4 emporte dans un réjouissantdéluge sonore alors que The UnansweredQuestion fascine par son climat énigmatique.

Michael Tilson Thomas est le meilleur guidepour ce fascinant voyage vers une Amériqueinsolite. Sony Classical (4 CD)

WILHELM KEMPFF EDITIONL’Allemand lumineuxAllemand, Wilhelm Kempff (1895-1991) l’étaitpar le répertoire qu’il défendait le plus souvent,

Le pianiste Samson François,photographié en juillet 1961.

de Bach à Brahms en passant par Beethoven,Schubert et Schumann. Mais il ne figeait passon clavier dans un sérieux, un poids à laquellecédaient certains de ses compatriotes. Sonpiano était au contraire lumière, couleur,souplesse. Les doigts sur les touches et la têtedans les étoiles, Wilhelm Kempff reste un destrès grands poètes du piano du XXe siècle.Deutsche Grammophon (80 CD)

ZEFIRO, THE MOZART COLLECTIONBons vents d’hiverDe la rue où elle ordonnait le pas des militaireslamusique pour vents a pris du galon en s’invitantchez les aristocrates. Aussi est-ce pour desensembles de hautbois, clarinettes, bassons etcors queMozart composa quelques chefs-d’œuvreà redécouvrir. Si les mouvements rapidessourient, les épisodes lents distillent mélancolieet de tendresse. L’ensemble Zefiro, qui joue surinstruments anciens, fait souffler sur ces pagesun air frais, délicat et parfumé. Arcana (6 CD).

BEETHOVEN, THE COMPLETE SONATAS FORVIOLIN/VIOLONCELLO & PIANOÉlévation d’âmeIsabelle Faust et Jean-Guihen Queyrasse réunissent autour du piano d’AlexanderMelnikov dans les dix sonates pour violonet les cinq pour violoncelle. Ardent, mais aussimalicieux et contemplatif, leur Beethovenà hauteur d’homme ne manque pourtantpas d’élévation d’âme. Et la prise de son,exemplaire de naturel, facilite les échanges.Harmonia Mundi (6 CD).Philippe Venturini

LES 18 ET

21 DÉCEMBRE

CLAUDEPOIRIER/ROGER-VIOLLET

DR

RADIO

CLASSIQUE

RADIO CLASSIQUE FÊTE NOËLDanse hongroise ou Ave Maria?Danse du sabre ou Il était unefois dans l’Ouest? Pour Noël, Radio Classique offre l’ensembledans ses deux concerts, l’un à la Philharmonie de Paris, l’autreà l’Auditorium de Bordeaux. Le premier mobilise l’Orchestresymphonique de la Garde républicaine, le chœur de l’Arméefrançaise et la Maîtrise des Hauts-de-Seine conduits parFrançois Boulanger avec Emmanuel Ceysson, harpe soloduMetropoltan Opera de New York. Le second réunitl’Orchestre national Bordeaux Aquitaine, son chef PaulDaniel, le violoniste Matthieu Arama et la jeune et la soprano Cyrielle Ndjiki Nya. Elgar,Offenbach, Chabrier, Gershwin, Falla partageront la scène avec des traditionnels decirconstance. Retransmis en direct le 18 décembre à 18h30 (Paris) et le 21 décembre à 19h00(Bordeaux). Ces concerts seront ensuite disponibles en streaming sur radioclassique.fr

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Un hommage aux tout premiers aviateurs et explorateursqui ont partagé leur histoire avec Longines.

PERPÉTUER L’ESPRIT PIONNIER.

En 1935,Howard Hughes fut l’avia-teur le plus rapide du monde enétablissant son record de vitesse à566 km/h. Cependant, ce qui rendl’histoire de Hughes si particulière-ment impressionnante est qu’ilavait conçu lui-même l’avion qu’ilpilotait. Hughes n’était pas un piloteordinaire qui battait des records—il était également ingénieur aéro-nautique, homme d’affaires etproducteur de films hollywoodiensà succès. Son esprit combatif etson courage face au danger le pous-sèrent à aller au-delà de ses limites.À peine quelques années plustard, Hughes fit le tour du monde.

Son périple lui prit seulement3 jours, 19 heures et 14 minutes…Et bien sûr, il fut l’homme le plusrapide à accomplir cet exploit.Hughes se fia toujours à sonchronomètre de navigation célesteLongines pour déterminer laposition exacte de son appareilen pleine nuit, dans l’obscuritétotale et au-dessus des nombreuxet vastes océans qu’il survola.C’est à sa façon d’aborder lachute que se distingue un espritpionnier. Essayer, échouer, sebattre et triompher avec élégance.C’est ce dont on se souvientlorsque tout le reste a été oublié.

La collection Longines Spirita été conçue dans cet esprit.Un mélange d’élégance, de traditionet de savoir-faire rassemblantles mêmes caractéristiques quecelles mises au point pour assisterles tout premiers aviateurs :une précision à toute épreuve,une couronne caractéristiquedes montres pilotes, des chiffrestrès lisibles et des aiguillesluminescentes.Un puissant hommage à l’espritpionnier qui se perpétue.

Howard Hughesest considéré commel’un des pionniers del’aviation civile pouravoir réalisé le tourdu monde en un tempsrecord. Pour s’orienter,il fit confiance auxchronomètres denavigation et auxchronographes déve-loppés par Longines.

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22 – LES ECHOS WEEK-END

ESPRIT WEEK-END

Comment occupez-vous vos dimanchesdéconfinés?On n’a pas encore le droit de tout faire partouten Angleterre mais, depuis deux semaines,les règles sont assouplies. On peut sortir, voirdumonde, faire ses courses de Noël. C’estmerveilleux, cette période, l’odeur du paind’épices, les vitrines illuminées, etc. Bien sûr, uneoption serait d’acheter sur Internet par prudencesanitaire, mais ce serait dommage de se priverd’une expérience pas seulement fonctionnellemais tellement émotionnelle.

Vous êtes dans l’esprit de Noël?Il faut absolument trouver unmoyen de lerecréer…Mais je garde à l’esprit que, lorsqu’ona une grande famille comme la mienne, il faudrafaire des choix compliqués aux réveillons.Comme Becky, mon accro du shopping, nousavons un groupeWhatsApp avec mes sœursqui nous sert à organiser les fêtes!

Votre endroit préféré un dimanche normal?Mon lit ! Je peux y boire 20 tasses de thé avantdem’en extirper. Les plus jeunes de mes cinq

enfants m’y rejoignent pour lézarder, regarderdes épisodes de séries en retard, j’y lis lesjournaux. Ensuite, promenade dominicaleavant le déjeuner. J’ai été élevée dans le cultede cette marche rituelle et, comme on est dansle Dorset, le choix de promenades est vaste…

Un film du dimanche?C’est souvent les enfants qui choisissent maisil n’est pas évident de contenter tout le mondealors qu’il y a quinze ans d’écart entre eux. Devieux spectacles familiaux comme Chitty ChittyBang Bang, qui raconte enmusique les aventuresfarfelues d’un savant, de ses deux enfants etd’une conductrice à bord d’une voiture volante,ou unMarvel avec des superhéros. Dans unautre genre, nous avons vu ou revu récemmentThe Grand Budapest Hotel deWes Anderson, LaLa Land de Damien Chazelle et Emma, basée surle livre de Jane Austen. Je ne pose qu’une seulecondition: rien de déprimant. La vie l’est déjàassez pour qu’on n’en rajoute pas le dimanche!

Pareil en littérature?J’ai voulu écrire un jour un polar, mais monéditeur m’a renvoyé le manuscrit enme disantqu’on n’y croyait pas, les personnages n’étaientpas assez torturés! Comme lectrice, j’aimebeaucoup les thrillers s’ils ne sont pas tropsombres. Ma lecture dominicale idéale reste unAgata Christie ou un PGWodehouse, j’ai d’autantplus de plaisir à les relire que je ne retiens jamaisqui est coupable. Dans un registre pluscontemporain, j’aime bien les intrigues d’espionsrusses de Tom Bradby, comme Secret Service, etcertaines histoires d’amour comme 28 Summersd’Elin Hilderbrand. Elle décrit si bien leNantucket que je me suis mis en tête d’y aller…

Vos dimanches sont-ils sportifs?Depuis toute petite, je joue au tennis, mes cinqenfants aussi. J’ai longtemps vécu àWimbledon,après l’école, j’allais faire la queue dans l’espoirque des spectateurs y revendent leur billet.Adulte, j’ai eu la chance d’y voir Roger Federer.Même si vous êtes fan et que vous l’avez vu jouerà la télé des dizaines de fois, rien ne peut vouspréparer à tant d’élégance sur un court.

Avec qui passeriez-vous votre dimanche?Lizzy Bennett, l’héroïne d’Orgueil et Préjugésde Jane Austen. On comploterait à proposdeM. Darcy!Propos recueillis par Isabelle Lesniak

«L’Accro du shopping fête Noël », traduitde l’anglais par Daphné Bernard. Belfond,448 pages, 20 euros.

Pour sa neuvième aventure, son «Accro du shopping» accepte lamission d’organiser le réveillon familial. Comme elle, l’auteureanglaise consacre son dimanche déconfiné aux courses de Noël.

SOPHIE KINSELLA

LE DIMANCHE IDÉAL DE…

MARIANNEROSENSTIEHL/OPALEVIALEEMAGE

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PERPÉTUER L’ESPRIT PIONNIER.

THE PIONEERSPIRIT LIVES ON.

Pourquoi cette montre ? Elle est équipée d’un balancier-spiral en silicium, offrant une résistanceaccrue aux champs magnétiques et aux chocs du quotidien. Sa précision et sa fiabilité en font unchronomètre certifié COSC. À quel point faisons-nous confiance aux nouveaux modèles de notre

collection Longines Spirit ? Nous les livrons avec une garantie complète de cinq ans.

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Nous lançons la 5G, forts de la qualité de notre 4G.Reconnu réseau mobile N°1 en zones rurales en 2018 et 2019 toutes technologies

confondues, nous sommes aujourd’hui fiers de lancer notre 5G!

Nos 2000 experts réseau travaillent au déploiement (1) de la 5G Bouygues Telecom

et à la densification de notre réseau 4G pour couvrir en très haut débit mobile

l’ensemble du territoire, tout en préparant solidement l’avenir.

99%

N°1en zones rurales

2018-2019en 2G, 3G et 4G(2)

de la populationcouverte en

bouyguestelecom.fr

(1) Ouverture du réseau 5G prévue courant décembre 2020. Déploiement progressif en zones urbaines. Téléphones compatibles 5G et cartesde couverture sur bouyguestelecom.fr

(2) Enquêtes ARCEP sur la Qualité des Réseauxmobiles en 2018 et 2019 – N° 1 dans les communes demoins de 10 000 habitants.

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LES ECHOS WEEK-END – 25

BUSINESS STORY11 DÉCEMBRE 2020

COMMENTSAFRAN RÉSISTEAU MAL DE L'AIRPar Emmanuel GraslandPhotographe: Manuel Braun

Dans l’usine Safrande Villaroche(Seine-et-Marne),où sont fabriquésles moteurs Leap.

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26 – LES ECHOS WEEK-END

BUSINESS STORY

omer est uninspecteur pointilleux. Il tourne autour dumoteur et prend des photos afin de comparer250 points à la maquette numérique. Un travailrépétitif. Les techniciens du centre de livraisonclient de l’usine Safran de Villaroche, enSeine-et-Marne, ont baptisé ainsi ce «cobot»(néologisme désignant les robots conçus pourcoopérer avec les humains) en référence àHomer Simpson. Dans la série d’animation, c’estlui qui appuie sur le bouton de démarrage de lacentrale nucléaire de Springfield. Un choixemblématique de la moyenne d’âge des salariésdu site de Safran.Doté d’une caméra 3D et d’un bras de

«cobot», Homer a nécessité dix-huit mois dedéveloppement. Mais il est loin d’être unespécificité dans l’usine de fabrication desmoteurs Leap, conçus par Safran et l’américainGeneral Electric (GE), des petits bijoux quicoûtent autour de 14 millions de dollars l’unité…Utilisation de la réalité augmentée pour lemontage, bras zéro gravité pour manipuler despièces lourdes, manutention aérienne desmoteurs gérée par écran tactile… Les troislignes d’assemblage des moteurs Leap, quiéquipent les Airbus A320 Neo et les Boeing 737Max, font la part belle à l’industrie du futur. Lesnéophytes en visite sont surpris par le faibleniveau de bruit de l’usine. La crise a rendul’endroit encore plus silencieux : 25% deseffectifs sont en activité partielle et une des troislignes d’assemblage est à l’arrêt.Le 1er janvier prochain, Philippe Petitcolin

cédera les manettes du groupe à Olivier Andries,après avoir piloté Safran, fleuron français del’aéronautique, au travers d’une crise aussiviolente qu’inattendue. «Jusqu’au 15 mars, nousn’avons pas senti la crise. Les activités de servicesavaient un peu baissé en Chine. Mais tout le mondepensait que cela allait passer très vite», racontePhilippe Petitcolin, le directeur général.Le 28 février, lors de la présentation des

résultats annuels, Safran prévoit encore unehausse de sa rentabilité en 2020, 45000

Le groupe aéronautique, après des années de forte croissance,a réussi à encaisser le choc de la pandémie en taillant très vitedans ses coûts. En janvier, Philippe Petitcolin passe toutefoisle manche du groupe à Olivier Andries, avec de sérieux défisà relever: évolution du modèle d’affaires, gestion de fournisseursfragilisés et nécessaire réduction des émissions de CO2 des moteurs.Une revue de détail avec le patron sortant et son successeur.

MANUELBRAUNPOURLESECHOSWEEK-END

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LES ECHOS WEEK-END – 27

SAFRAN

recrutements d’ici à 2024 et un dividende de1 milliard d’euros. Tout bascule deux semainesplus tard. L’industriel enregistre des baissesd’activité à deux chiffres. « Rapidement, on s’estrendu compte que c’était parti pour durer », ditPhilippe Petitcolin. « Le 10 avril, j’ai instaurédeux comités de direction par semaine, alors quenormalement j’en fais un par mois. » Le dirigeantadopte un pilotage très fin. « Je demandaisle plan d’action pour les trois prochains jours.J’avais deux thèmes de questions : l’aspectsanitaire et le business. »Au siège, une petite dizaine de personnes

continue de venir. Chacun apporte de quoimanger le midi. Au fil des jours et de la fatiguequi s’accumule, la tenue se fait plus décontractée,les hommes sont moins bien rasés. La cellulede crise se réunit deux fois par jour. L’objectif estde réduire très rapidement le point mort dugroupe, en taillant dans les coûts partout où

1905 Fondation de laSociété des moteursGnome, à Gennevilliers,par les frères Seguin.1945 La Société desMoteurs Gnome &Rhône est nationaliséeet devient Snecma(Société nationaled’étude et deconstruction demoteurs d’aviation).

À gauche: PhilippePetitcolin,directeur généralde Safran jusqu’àla fin du mois.

Ci-dessus: montagedu moteur Leap,conçu avec GeneralElectric, un bijouqui coûte dans les14 millions dedollars.

1969 Premier vol duConcorde (photo) ,dont le moteur estdéveloppé par Snecmaet Rolls-Royce.1974 Accord decoopération avecGeneral Electric pour laréalisation du CFM56.1982 Premiervol commercialdu moteur CFM56.

2000 Turbomecaet Labinal rejoignentle groupe Snecma.2005 Fusion entreSnecma et Sagem.2011 Entréede Safran au CAC 40.2016 Lancementde la productiondes moteurs Leap.2018 Rachatde Zodiac.

UNE HISTOIREPLUS QUECENTENAIRE

KEYSTONE-FRANCE/GAMMA-RAPHO

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28 – LES ECHOS WEEK-END

BUSINESS STORY

c’est possible. «Nous avons supprimé les étapesd’approbation. Dans ces moments-là, il faut allervite. On essaye de prendre la meilleure décisionpossible, mais on n’est jamais totalement sûrde soi parce qu’on n’a pas le temps de réfléchir.Le soir, on repart en se demandant si cela serasuffisant ou pas», confie Philippe Petitcolin.Sur le premier semestre, Safran réduit

ses achats de matières premières de 30%,ses dépenses de sous-traitance de 40%,ses investissements de 74%, et ses budgets deR&D de 31%. L’industriel ferme quatre usines etsupprime 15000 postes à l’étranger, en comptantles intérimaires. Le dividende de 1 milliard estannulé finmars. «Le management a su fairepreuve d’une réactivité remarquable pour mettrel’entreprise hors de danger», estime RobertPeugeot, administrateur du groupe etreprésentant de la FFP au sein du conseil.

JUSQU’À 40%D’INACTIVITÉ« On a battu la mesure pour que les chosesavancent rapidement. En France, on a dit très viteaux partenaires sociaux : “Après le chômagepartiel, soit on trouve un accord, soit on vaprocéder à des licenciements” », raconte PhilippePetitcolin. Safran emploie plus de 45000salariés en France. C’est le cœur du réacteuravec 66 usines et 14 sites de maintenance.On évoque le chiffre de 12000 emplois endanger. Des négociations s’engagent très vite :début juillet, Safran est la première entreprisefrançaise à recourir au dispositif de chômagepartiel de longue durée.Le groupe signe cet accord, baptisé

«Accord de transformation d’activité »,avec la CFE-CGC, la CFDT, FO et même la CGT.Safran s’engage à ne pas licencier en Francependant dix-huit mois, à modérer les salairesdes cadres dirigeants, à limiter les dividendeset à augmenter de 1% la masse salarialeen 2021, en privilégiant les moins de 30 anset les bas salaires.En échange, les syndicats acceptent

l’annulation des négociations salariales 2021, unplafonnement de l’intéressement et un gel desdispositifs d’épargne salariale et de cotisationsde retraite employeurs. Surtout, les salariéspeuvent avoir jusqu’à 40% de temps d’inactivitésur six mois glissants. L’État finance les salairesà hauteur de 84% du salaire net perdu, ce qui

permet de préserver de 92 à 96% du revenu netselon les syndicats, pour les rémunérationsinférieures ou égales à 4,5 Smic. L’accord inclutenfin des mesures d’incitation aux départsen retraite avec un objectif de 3000 départset le recrutement de 350 à 450 apprentiset de 300 jeunes diplômés par an.Cette réduction drastique des coûts va

permettre au groupe de dégager une margeopérationnelle de 10% en 2020, malgré unchiffre d’affaires attendu en recul de 35%, à

16 milliards d’euros. « Safran aura un cash-flowpositif au second semestre. Le groupe a démontrésa résilience grâce à son mix produits, sonexposition au secteur de la défense et à unportefeuille clients diversifié », expose GuillaumeHue, directeur associé au cabinet Archery. Encomparaison, le concurrent Rolls-Royce espèreun retour à une situation de trésorerie positive…au second semestre 2021.Les effectifs de Safran sont désormais de

81000 salariés contre 95400 fin 2019. Cette criseporte un coup d’arrêt à un cycle de croissanceextraordinaire, le dernier effondrement dumarché datant de 1992-94. « Beaucoup desalariés ont moins de cinq ans d’ancienneté. Ilsn’avaient connu que des belles années. La notionde bas de cycle n’avait pas vraiment de réalitépour eux », remarque Anne-Claude Vitali,déléguée centrale syndicale CFDT chez Safran.« Chez Safran, il y a eu un degré de stupéfactionplus fort que chez Airbus, qui avait déjà pris desplombs avec l’A400M », rapporte un fournisseur.Qui plus est, le groupe, détenu à 11,2% par

l’État et dont 43% des salariés sont actionnaires,a connu un parcours boursier exceptionneldepuis quinze ans. Son cours a bondi de 430%

Avec 33600exemplaires, le CFM56a été la gamme demoteur la plus venduede l’histoire del’aéronautique. Conçupar GE et Snecma auxtermes d’une alliancescellée en 1974, il a

pourtant longtemps étésur la sellette, fauted’acheteur. «J’entendsles vautours volerautour du bâtiment»,disait alors RenéRavaud, le patron de laSnecma (René Ravaux,une vie pour l’industrie,

de Félix Torres). Maisen mars 1979, le dernierespoir, United Airlines,se concrétise. Lacompagnie remotoriseune trentaine de DC8avec le CFM56, suiviepar Delta. Le premiervol commercial est

réalisé par Delta enavril 1982. Et sonsuccès grandissant,avec l’A320 et le Boeing737, fera des deuxchallengers des années1970 des motoristesleaders qui détrônerontPratt & Whitney.

LE CFM56, L’ADN DU SUCCÈSMANUELBRAUNPOURLESECHOSWEEK-END

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LES ECHOS WEEK-END – 29

SAFRAN

entre le 11 mai 2005, jour de la fusion entreSagem, spécialiste des télécommunications etdes matériels de défense, et Snecma, le championfrançais des moteurs qui a codéveloppé lapropulsion du Concorde, et le 25mars 2020.«Dans les années 2008-09, le marché necomprenait pas l’entreprise. Les investisseursn’avaient pas confiance, à cause de la confusioncréée par la fusion avec Sagem. Mais cela a changéquand ils ont saisi le potentiel de visites d’ateliersque nous avions devant nous, du fait de la jeunessede notre flotte de moteurs et qu’ils ont prisconscience de nos positions, notamment dansles trains d’atterrissage et les freins carbone»,explique Ross McInness, le présidentdu conseil d’administration, à l’époque directeurfinancier de Safran.À l’origine, la réussite de ce joyau industriel

s’est bâtie sur les profits tirés de la vente et lamaintenance des CFM56, la gamme de moteursla plus vendue de l’histoire de l’aéronautique.GE réalise la partie haute pression des moteurset Safran la partie basse pression. Leur joint-venture à 50-50, CFM International, est l’undes rares exemples de partenariats industrielsfranco-américains qui aient réussi dans

la durée, même s’il y a souvent eu chez Safran« la crainte de ne plus savoir construireun moteur civil tout seul et chez GE le soupçonque les Français sont de “super ingénieurs”mais qu’ils peuvent se tromper sur l’aspectbusiness », note un fournisseur. Le succès del’alliance s’est amplifié avec le Leap.Lorsqu’elle est lancée en 2008, cette nouvelle

génération de moteurs n’a pas d’applicationavion. Son modèle d’affaires est fondé sur sept àhuit ans de production. Ce sera beaucoup plus.Séduit par sa plus faible consommation de

carburant, le chinois Comac choisit le moteurpour son C919 en 2009. Airbus hésite, lui, àremotoriser son avion moyen courrier A320, unnouvel avion étant censé arriver vers 2025, mais

À gauche: OlivierAndries, qui prendrales manettes dugroupe le 1er janvierprochain.

Ci-dessus:la manutentionaérienne desmoteurs est géréepar écran tactile.

finit par sauter le pas en 2010. Le Leap devientune option de l’A320 Neo avec le moteur dePratt &Whitney. Et les choses s’enchaînent.Face au succès de l’A320 Neo, Boeing lance uneversion remotorisée du 737 l’année suivante,exclusivement équipée en Leap. « Quandon a présenté le Leap, on nous a dit que c’étaitun produit de fin de vie des A320 et des 737et que cela allait durer cinq ou six ans, maisles commandes sont arrivées par millierset aujourd’hui on ne parle pas de nouvel avionavant 2035 », relate Philippe Petitcolin.

LE DÉFI DEVIENT INDUSTRIELAprès ces succès commerciaux, le défi devientindustriel. Il faut réaliser une montée encadence jamais vue. « Pour réussir, nous avonsdécidé d’avoir recours à une double source, auminimum, pour chaque pièce du moteur. La miseau point des gammes de production a ensuite ététrès stricte pour être sûr de produire efficacementdes pièces conformes. Nous avons aussi été trèsvigilants sur la détection avancée des difficultéschez les fournisseurs et nous avons bâti uneéquipe de “forces spéciales”, qui étaient dépêchéeschez eux en cas de souci. Et puis, on a investi

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BUSINESS STORY SAFRAN

près de 1 milliard d’euros pour augmenter noscapacités de production et installer de nouvelleslignes de production entièrement digitalisées »,détaille Olivier Andries, alors en charge de lafiliale Safran Aircraft Engines. Lancée en 2016,la production atteint 1736 moteurs par an en2019. Un niveau réalisé en 2017 par le CFM56au bout de quasiment quarante ans.Aujourd’hui, la culture du groupe est à la fois

le fruit d’une construction àmarche forcéedepuis dix ans et d’une histoire riche et complexequi fait la fierté des équipes. Dans les années1970, la Snecma est un fabricant de moteursmilitaires qui travaille avec Dassault et chercheà se diversifier dans le civil. Ses usines sont dessites sur lesquels «le soleil de la grève ne se couchejamais», selon un DRH de l’époque (1). Lorsqueles socialistes arrivent au pouvoir en 1981,la direction bataille pour éviter une allianceimposée avec Rolls-Royce, jugé plus européenque GE. Entre 1987 et 1996, quatre patrons sesuccèdent, dont Louis Gallois. «Dans les années1990, le dialogue social chez Snecma était fondésur un bras de fer systématique où rien ne pouvaitêtre obtenu sans débrayage. Les syndicats étaientdans un jeu à trois bandes avec la direction del’entreprise et l’État actionnaire. En 2004,

Snecma croyaient l’inverse », se souvient PatrickPotacsek, délégué CFE-CGC chez Safran AircraftEngines et ex-Sagem. Au final, les Snecma ontimposé leurs hommes et leurs méthodes, mêmesi un manager Snecma avait parfois du mal àrentrer dans la boutique Sagem qu’il dirigeait.En 2018, le rachat du fabricant de sièges et de

cabines d’avions Zodiac n’a pas posé ce genre deproblème car il n’y avait pas d’ambiguïté sur quiétait le chef. L’entreprise était un archipel dePME sans réelle intégration. En termesd’avantages, les Zodiac ont fait un bond.« Socialement, on avait vingt ans de retard »,indique Éric Durand, délégué CFE-CGC chezSafran Seats.La construction de l’identité de groupe a été

très progressive. Au départ, les Snecma,Hispano-Suiza, Messier-Bugatti, Labinal etautres Turbomeca ont conservé leur nom,adossé au logo groupe Safran. Mais aussi leurjournal interne, leur chalet au Bourget ou leurpropre recrutement. En 2009-10, les choses sontrationalisées, le logo évolue. Le groupe passedevant, avant de s’imposer totalement en 2016.La disparition des marques historiques irritealors certains salariés mais le succès de Safranen Bourse et les recrutements massifs de la

De haut en baset de gaucheà droite: trainsd’atterrissage;drones (ici lePatroller,présenté au Salondu Bourget en2017) ; intérieursd’avion (icimodèle de cabinepour A320).

l’ouverture du capital a changé la donne», déclareMarc Aubry, administrateur salarié CFDT.

LE CHOC CULTUREL DE LA FUSIONEn 2005, la fusion Snecma-Sagem provoque ungrand choc culturel. La Snecma, qui a aggloméréautour d’elle des acteurs comme Turbomeca,Labinal ou Hurel-Dubois, vise en fusionnant avecSagem à amortir d’éventuelles crises dansl’aéronautique. Perçue comme l’alliance de lacarpe et du lapin, ce mariage dégénère en guerredes chefs avec un président du conseil et unprésident du directoire qui ne se parlent plus etun DRH qui fait office d’agent de liaison. L’Étatsera contraint de changer les dirigeants.Les salariés ne se comprennent pas

forcément mieux. Plus opportunistes, les Sagemont une mentalité de voltigeurs tandis que ceuxde Snecma travaillent sur des programmes delong terme, avec des processus industriels trèsrigoureux. Persuadés d’être le centre du monde,ces derniers ont vécu avec un actionnairebienveillant, l’État, qui demandait peu dedividendes alors que Sagem a été ébranlée parl’explosion de la bulle Internet et a des salariésactionnaires. « Les Sagem pensaient que leurentreprise avait racheté Snecma tandis que les

La propulsion :fabricationde moteurs d’avionset d’hélicoptères ;participation de 50%dans ArianeGroup.

Les équipementsaéronautiques :fabrication d’unegamme allant desfreins carbone auxtrains d’atterrissage,en passant parle câblage électrique,les toboggansd’évacuation,les gilets et radeauxde sauvetage.

L’électronique et ladéfense : fabricationde systèmes denavigation, de

LES GRANDS MÉTIERSDU GROUPE

surveillance et deguidage, de drones,d’équipementsoptroniques portables,de calculateurs demoteurs d’avions et desystèmes optiquespour le spatial etl’astronomie.

Les intérieursd’avions : fabricationde cabines, de sièges,de toilettes et desystèmes dedivertissements.

CYRILABAD/CAPAPICTURES/SAFRAN

ADRIENDASTE/SAFRAN

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BUSINESS STORY SAFRAN

Plus d’infos sur lesechos.fr/weekend

dernière décennie ont facilité la chose.Aujourd’hui encore, le groupe reste uneorganisation complexe avec dix-huit dirigeantsau «comex» et une palette de produits allantdes moteurs d’avions et d’hélicoptères auxmiroirs de télescopes, en passant par lessystèmes de navigation et de positionnement,les périscopes de sous-marins, les drones,les jumelles multifonctions, les trainsd’atterrissages ou les systèmes dedivertissements en avion. « Le groupe est assezdécentralisé sur le plan opérationnel et les gensse parlent peu d’une business unit à l’autre.C’est assez cloisonné », estime un prestataire.

Le management est franco-français. Sur lesdix-huit membres du comex, seuls trois sontétrangers. Pendant un temps, le groupeprésentait même des données françaises aucomité de groupe européen. La fabrication demoteurs occulte souvent le reste des activités,ce qui a par exemple poussé SafranElectronics & Defense à lancer des hackathonsdans les écoles d’ingénieurs, afin d’êtrebien identifié comme un électronicien par lesétudiants, à l’instar de Thales.Cet éclectisme aux airs de conglomérat sera

l’un des défis d’Olivier Andries lorsqu’ils’installera aux manettes en janvier. Installé au

siège depuis septembre, le dirigeant a visité unevingtaine de sites français dans cette optique,notamment dans les branches équipements etintérieurs d’avions qu’il n’a pas dirigées. Tout lemonde sait que Philippe Petitcolin et OlivierAndries ne s’entendent pas, ce qui limite le« tuilage». Mais l’ancienneté du nouveau patrondans le groupe permet d’atténuer les dégâts quecette mésentente pourrait créer.À court terme, Olivier Andries devra relever

le défi de la préservation des compétences etsurtout de la chaîne d’approvisionnement, alorsque certains fournisseurs sont très dépendantsde Safran et que les compagnies aérienness’attendent à une reprise par paliers. Le retourau niveau de 2019 pour les vols domestiques estattendu pour fin 2022-début 2023. Pour les volsrégionaux un an plus tard et pour les vols longscourriers encore un an après.

LE DÉFI DES ÉMISSIONSEn termes de business, il faudra aussi s’adapterà la montée en puissance des contrats demaintenance dits «à l’heure de vol». Depuis leCFM56, Safran et GE ont adopté un modèle detype Nespresso : une vente en première monte àprix quasi coûtant et une rémunération fondéesur les passages en ateliers et les piècesdétachées. Avec le Leap, le service sera de plusen plus facturé à l’heure de vol. Ce qui imposeune grande maîtrise de la durée de vie despièces pour ne pas se rater et une solidecompétitivité des ateliers. « Aujourd’hui, environ70% des moteurs Leap qui ont été commandés ontdes contrats à l’heure de vol », relève OlivierAndries. Dans le même temps, le retour ou pasdes voyages d’affaires aura un impact sensiblesur la rentabilité de la branche intérieursd’avions, très touchée par la crise.Le grand défi technologique sera enfin celui

de la réduction des émissions de carbone (–50%visés par la filière en 2050). Une approchemenéevia des moteurs aux architectures de rupture,l’utilisation de biocarburants, de carburantssynthétiques, ou bien un avion à hydrogène, pourlequel Airbus a présenté une feuille de routeen septembre avec un horizon à 2035.Les ingénieurs de Safran ne débordent pasd’enthousiasme pour l’hydrogène. Mais si cettetechnologie se concrétisait un jour, elle seraitpour les motoristes un choc similaire à celuide l’électrique dans l’automobile.En attendant, Homer a fini son inspection du

moteur Leap. Le turboréacteur va partir pourles bancs d’essais, avant d’être livré au client.Auparavant, l’intérieur a été contrôlé parendoscopie et une équipe d’opérateurs a faitune série de contrôles visuels pour éliminerdes défauts de type microrayures. Un moteurreprésente jusqu’à un tiers du prix catalogued’un appareil. Pour de tels montants,on bichonne les clients.(1) In René Ravaud, une vie pour l’industrie,de Félix Torres, Editions First.

Homer, le «cobot» chargé de l’inspection de chaque turboréacteur, prend des photosde contrôle de 250 points du moteur pour les comparer à une maquette numérique. M

ANUELBRAUNPOURLESECHOSWEEK-END

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BUSINESS STORY

PHILIPPE CORROTUNE RÉUSSITE QUI N’A RIEN DU MIRACLELe fondateur de la dixième licorne française, Mirakl, est tombédans l’informatique dès l’enfance. Autodidacte, il a multipliéles créations d’entreprises, proposant aujourd’hui une solutioninnovante de commerce électronique qui a séduit jusqu’à Carrefour.

Par Philippe BertrandPhotographe: Iorgis Matyassy pour Les Échos Week-End

Philippe Corrot,cofondateur

et PDG de Mirakl,photographié à Paris

le 24 novembredernier.

e Lycée Pasteur, à Neuilly, n’a pas été que levivier d’une bande de comiques ayant fait lesbeaux jours du cinéma français. Le terrain dejeux du faux château Louis XII de la banlieuehuppée de Paris a aussi été arpenté par l’un desrares champions français du numérique. Vingtans après que Gérard Jugnot, Thierry Lhermitteet Christian Clavier ont découvert le septièmeart au ciné-club, Philippe Corrot, le fondateurde Mirakl, la nouvelle licorne française quipermet aux e-commerçants de créer leurpropre place de marché en y associant d’autresvendeurs, scellait son amitié avec MichaelZiegler le long du boulevard d’Inkermann.« Il était prudent, presque sauvage », témoignele second. Philippe Corrot franchit la premièremarche de sa carrière d’entrepreneur en sériedans les escaliers qui mènent à la cave du pèrede son ami. Il y crée Keyrus, pionnière desagences Web. L’histoire rapprochait ces famillesd’Ashkénazes qui avaient fui les persécutionsd’Europe de l’Est. Les Korowsky sont devenusCorrot aux abords des étangs du bois deBoulogne. Le collégien un peu sauvage cachaitun tempérament. « Une fois passée la méfiancedu premier abord, il se révèle », décrypteAlexandre Viros, le patron d’Adecco quePhilippe Corrot rencontrera plus tard, à la Fnac.« Affirmé, très curieux et passionné », complèteMichael Ziegler.Le lycée sera pourtant sa seule école. Malgré

une mention au bac, un mois de droit résumeses études supérieures. « Mon parcours scolairea été chaotique. Mes parents ne s’occupaient pasde moi », se justifie l’intéressé. Le campus deNanterre forgera quand même son destin.À côté de la faculté d’État, éternel foyer de lacontestation, pousse « la fac Pasqua», privée,neuve, bourrée de PC, de Mac et reliée àInternet. « Je passais mes journées dans les sallesinformatiques, se souvient Philippe Corrot, alorsque je m’étais inscrit en commerce et gestion,parce que c’était moins cher. »Le fondateur de Mirakl fréquente les beaux

quartiers mais n’a pas les poches profondes.Son père Daniel lui a donné le goût de

l’informatique et l’esprit d’entreprise, aucuneaisance. À Neuilly, Philippe campe dans le salonde sa tante. La marque «Daniel Corot» a orné lefronton de belles boutiques de prêt-à-portermasculin à Parly 2, Rosny 2 et Créteil Soleil,les centres commerciaux à l’américaine dupromoteur Robert de Balkany. « Mon père étaitl’un des pionniers de la fast fashion, avec descollections qu’il renouvelait souvent. » Unemésentente entre associés noie la visioncommerciale de Daniel en désastre financier.« Il ne s’en est jamais remis », regrette son fils.

« L’ORDINATEUR, C’EST MON DOUDOU »Les parents divorcent. La mère, anciennevendeuse, retourne dans sa famille. Le pèretente quelques coups qui ne réussiront pas.Philippe le rejoint à Paris dans de beauxappartements où l’électricité est coupée et leshuissiers frappent à la porte. Mais Daniel donneà Philippe le goût de la technologie. Le fils n’apas tout perdu. Il s’intéresse dès l’âge de 4 ansà l’informatique, apprend le codage, dirigeune tortue sur ses premiers écrans Apple IIet Commodore 64. « Il a été l’un des premiersabonnés à Internet », raconte son ami du LycéePasteur. « L’ordinateur, c’est mon doudou »,admet aujourd’hui Philippe Corrot.

«Je passais aussi beaucoup de temps à lire»,ajoute-t-il. De l’économie à la philosophie, enpassant par l’histoire des religions, l’éclectismeguide ses intérêts mais ne dévie pas vers lasuperficialité. «Il est très cultivé», s’accordentses proches. «J’ai avec lui des conversationsprofondes», confie Alexandre Viros, agrégé dephilosophie. «Ensemble, nous aimons sonderl’âme humaine», s’épanche Adrien Nussenbaum,son deuxième compagnon de route, au téléphonedepuis le bureau américain deMirakl, àCambridge, Massachusetts. «Mes amies lesurnomment Google», s’amuse sa femmeAnne-Laure. Philippe Corrot a deux autrescordes à son arc culturel : le dessin et la photo.Il collectionne aujourd’hui Murakami et KeithHaring. «Il a le sens de l’esthétique et cela nousa aidés chez Keyrus», expliqueMichael Ziegler.

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LES ECHOS WEEK-END – 35

PHILIPPE CORROT

L’agence fondée en 1997, après que les deuxgarçons ont imaginé un genre d’iTunes ou éditéles films de Luc Besson en CD-Rom (Michael afait une école de cinéma!), concevait des sitesInternet. Le style léché de la maison convaincKookaï, Van Cleef & Arpels, Cartier,Mauboussin, Chopard et la place Vendôme.« Keyrus, c’était ça ou le McDo », résume celuique la « fac Pasqua» a vite poussé dehors.Philippe Corrot aime « les beaux sites ». Keyrus– la muse de la création – perce rapidement« parce que les SSII n’avaient pas la culture del’image ». Les marques de luxe accourent.Son premier client sera SOS Cintres, pour7000 francs [environ 1060 euros, NDLR].Le succès devra aussi beaucoup à l’agenceFrance Télécom de Neuilly qui lui ouvrirala porte du groupe public.

QUATORZE BANQUES AVANT D’OBTENIR UN PRÊTEn 1997, le Web restait une terra incognita.« J’ai visité quatorze banques avant que le CICdes Batignolles [dans le XVIIe arrondissement deParis, NDLR] n’accepte de m’accorder un prêt de20 000 francs [3000 euros, NDLR]», enrageencore Philippe Corrot. « Nos premiers prospectsdisaient qu’Internet, c’était pour les pédophiles etles nazis », se rappelle Michael Ziegler. « Il étaittrès beau mais je ne comprenais pas très bien cequ’il faisait », reconnaît Anne-Laure Navarra,la jeune fille du XVIe qui deviendra sa femmeet la mère de ses deux enfants. L’avocate enfusion-acquisition chez EY comprendra viteet créera Wondercity.com, un cityguide pourparents qui comptera 400000 abonnés avantsa revente au propriétaire du groupe Fleurus.Deux ans plus tard, le suédois Mind appelle

les fondateurs de Keyrus, que la Chambre decommerce de Stockholm a identifiée commel’une des meilleures agences Web, et leurpropose un rachat. L’affaire ne se fait pas maisla bulle Internet monte. « Nous nous disions quecela ne durerait pas », explique Philippe Corrot.Éric Cohen, le fondateur de la SSII Progiware,frappe à son tour à la porte. Il veut donnerl’image de la modernité à son entreprise,

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BUSINESS STORY PHILIPPE CORROT

C’est en septembredernier que Mirakl estdevenu la dixièmelicorne française enlevant 300 millions dedollars. L’opérationsouscrite pourl’essentiel par le fondsPermira, qui a pris 20%du capital du

CONSOLIDER OU SE FAIRE CONSOLIDER

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qu’il introduit en Bourse. Philippe Corrot cède.Il se lance aussitôt, en 2001, dans une autreaffaire : Maÿrev, spécialiste des bijoux fantaisie,sur le modèle du britannique Accessorize. Soncompère Michael Ziegler suit, d’autant plus quesa famille possède le spécialiste des accessoiresde mode Rand. « J’avais signé une clause denon-concurrence avec Progiware », s’excusepresque Philippe Corrot. Les deux hommesposent leur enseigne au fronton d’anciennesboutiques de téléphonie et parrainent la «StarAcademy». Quatre ans plus tard, ils revendentà Rand. « Ça m’a gonflé », schématise PhilippeCorrot. Retour à l’informatique.

« LE BON MODÈLE EST CELUI D’AMAZON »Michael Ziegler ne prend pas ombrage du dédainde son copain pour la mode et accompagne lemouvement que rejoint un ami d’ami, AdrienNussenbaum, un HEC qui a raté à New Yorkle lancement d’unemessagerie instantanée(«C’était trop tôt.»). L’autodidacte et le diplômépassé chez Deloitte sont comme chien et chat.«Je me suis employé à les rapprocher», indiqueMichael Ziegler. Un déjeuner à Drouot, où ilsachètent pour l’anniversaire deMichael untableau de Ben opportunément nommé Jecherche à plaire, brisera la glace. Les troismousquetaires duWeb lancent la plate-formed’e-commerce de Natalys.Philippe Corrot découvre la puissance de la

vente en ligne et pense tout de suite que « le bonmodèle est celui d’Amazon », qui réalise la moitiéde son activité sur sa marketplace. SplitGamessera en septembre 2005 la place de marché desjeux vidéo et suivra une autre tendance de laconsommation : l’occasion. La jeune poussefacilite l’échange de jeux entre gamers. Bientôt,200000 membres rejoignent la communautériche d’un catalogue de 15000 produits. « JeffBezos l’avait prédit : plus il y a d’offre, plus il y ade clients », commente Philippe Corrot.L’entrepreneur se mue en startuppeur et lève

2 millions d’euros puis, avec ses associés, croiseXavier Flamand. Le directeur général defnac.com propose de les intégrer et de créer laplace de marché de ce qui est alors encore unefiliale de PPR. SplitGames a 3 ans. « Cela a étécompliqué », concède Philippe Corrot, avec un

certain sens de l’euphémisme. La culture de lavieille dame est forte, les magasins crient à laconcurrence. « Ils ont eu le droit de prendre desdétours et de se comporter comme des corsaires »,raconte Alexandre Viros, qui chapeaute alorsl’activité musicale de l’enseigne. « Philippe est unvrai commerçant. Il respecte ce qui n’est pas lui.Il comprend que d’autres modèles existent. »L’enfant sauvage se glisse dans le moule.Le succès fait taire les réticences. Fabien

Sfez, le directeur général de l’époque, rehaussela prime de sortie attachée au rachat deSplitGames. Plus tard, Alexandre Bompardsuit. « Philippe est un pionnier : il avait déjà, àl’époque où je l’ai connu à la Fnac, la vision trèsclaire que les places de marché allaienttransformer l’économie », affirme celui qui estdevenu PDG de Carrefour, un groupe qui utilisela solution Mirakl. « Philippe a toujours eu uneâme d’entrepreneur, développant une vision qui

allie la technologie et le business. Il est arrivé àla Fnac avec cet esprit start-up, qu’il a su intégreraux fonctionnements de l’entreprise », confirmeEnrique Martinez, l’actuel patron de FnacDarty. « Amazon n’était pas perçu par touscomme une menace», se remémore PhilippeCorrot, qui a sorti les statistiques du nombrede colis expédiés par le géant de Seattle commepreuve du danger. Trois ans d’accompagnementplus tard, Philippe et Adrien partagent unnouveau déjeuner décisif. Ce jour de la Saint-Valentin, ils se font le cadeau d’une nouvelleaventure. Ce sera Mirakl. Pourquoirecommencer après avoir créé et vendu troissociétés? « Philippe n’est pas un hommed’argent. C’est un bâtisseur », répond MichaelZiegler. « Il veut avoir les moyens de protégerses enfants, mais il a envie de créer des boîtes »,ajoute Adrien Nussenbaum.Philippe Corrot réécrit son logiciel avec une

autre technologie que celle de la Fnac. Il devientlibre de prôner à toutes les marques l’ouverturede leur site à des marchands concurrents.« Mirakl aide les entreprises à se projeter enrespectant leur passé et n’est qu’au début de sonhistoire », prédit Alexandre Viros. Le leadermondial de la place de marché, commeil se présente, entend être la solution pourtous ceux qui préfèrent lutter contre le géantAmazon sur son propre terrain plutôtque d’attendre le jour improbable où l’Étattrouvera la martingale pour éloigner la menace.Cela fait un vaste potentiel.

spécialiste des placesde marché, a hissé lavaleur de l’entreprisebien au-delà du milliardde dollars. Depuisle début de l’année,l’encore jeune poussea remporté 25 clientset lancé 18 nouvellesmarketplaces,

enregistrant unehausse de 111% de sonvolume d’affaires. Ellecompte désormais 300clients, dont FnacDarty, Conforama, lesGaleries Lafayette…« Il n’y a pas deconcurrents qui fassentla même chose que

nous», affirmeAdrien Nussenbaum,qui résume ainsil’argumentaire fait auxmarques : «Soit vousserez consolidés, soitvous consolidez votresecteur en créantune place demarché dédiée. »

Les récompensess’entassentdans les locauxde la licornefrançaise,spécialiste desplaces de marché.

AdrienNussenbaum,

le compèrede Philippe Corrotchez Mirakl.

ANLEFEVRE

IORGISMATYASSYPOURLESECHOSWEEK-END

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COMMUNIQUÉ

Le temps est l’essence de Moët & Chandon depuis sa création. C’est lui quipermet aux œnologues de façonner les cuvées d’exception de la Maison, enrespectant chaque étape de leur élaboration avec la plus grande patience.Depuis 1743, Moët & Chandon a su épouser les époques avec style pourdemeurer une marque reconnue dans le monde. Déguster une cuvée Moët &Chandon c’est avant tout prendre la mesure du temps pour mieux saisir toutson potentiel. —

Le temps s’apprécie au gré de la nature…

Pour faire de grands champagnes, il faut savoirlaisser le temps au temps. Au commencement ily a le cycle de la végétation qui vibre au diapasonavec le rythme des saisons. Moët & Chandon està l’écoute de la nature qui lui offre sa générosité,et contraint la main de l’homme à composeravec la rudesse des éléments. Pour élaborer lescuvées de la Maison, il faut respecter chacunedes étapes du cycle de la vigne, et s’adapter avecréactivité aux nombreux aléas climatiques. Lavigne nécessite une vigilance de chaque instant,il faut la cajoler, la guider, la respecter pour luipermettre de s’épanouir et conduire les raisins àleur pleine maturité, celle qui offrira le plus beaupotentiel aromatique. C’est alors que le tempss’accélère, la récolte des baies s’opère à la mainavec le maximum de délicatesse pour extraire lesplus beaux jus qui entreront dans l’assemblagedes cuvées Moët & Chandon.

Le temps s’affirme en cave pour révéler lesplus belles promesses…

Le temps s’égrène dans les caves séculairesde la Maison d’Epernay. Une fois pressésdélicatement, les jus des raisins commencentalors leur étape de fermentation. Ces vinsintégreront les assemblages qui confèrent auxcuvées Moët & Chandon toute leur identité. Cetart de l’assemblage requière la minutie et la

patience des œnologues guidés par le Chef deCave Benoit Gouez, véritable garant d’un styleunique transmis au fil des décennies via sesprédécesseurs. C’est aussi le Chef de Cave quisait se projeter dans le temps pour sélectionnerles années qui pourront être millésimées. Letemps marque enfin son empreinte lors de lamaturation lente des cuvées, cette étape quiva de 24 mois à 7 ans et pendant laquelle lesvins vieillissent en cave, pour leur permettre delivrer leurs secrets et révéler leur plein potentielaromatique. C’est ainsi que le goût de MoëtImpérial, cuvée emblématique de la Maison, setransmet de génération en génération depuisplus de 150 ans et que les cuvées millésiméessont le reflet de la complexité et de la richessedes années qui les composent.

Le temps prend tout son sens aumoment dela dégustation…

L’art de la dégustation s’apprécie au temps dela découverte. Tout commence par le choix duflacon, le temps nécessaire pour le conduireà sa température de service idéale, et le choixdes mets qui sauront lui donner la plus bellerésonance. Un savoir-faire qui fait éloge de lapatience, dans laquelle la dégustation révèleson moment clef, celui qui permet de découvrirla générosité de la nature sublimée par la mainde l’homme.e

MOËT & CHANDONLA MESURE DU TEMPS

L ’A B U S D ’A L C O O L E S T D A N G E R E U X P O U R L A S A N T É . À C O N S OMM E R AV E C M O D É R AT I O N .

STEP

HAN

EO

LIV

IER

AR

TEPH

OTO

Page 82: Les Echos - 11 12 2020

Corruption, assassinat,manipulation, complot...

un diptyque au cœur du pouvoirpour XIII !

au rayonbande dessinée

Toujours amnésique, Jason Mac Lane, alias XIII,

a infiltré une organisation qui s’apprête

à prendre le pouvoir aux États-Unis.

Alors qu’il a pour mission de réaliser un tir contre le Pape,

XIII va être confronté à un choix crucial :

se souvenir... ou trahir !

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Page 83: Les Echos - 11 12 2020

XIII, alias Jason Mac Lane, est devenu un nouvel administrateur de la Fondation Mayflower. Pour prouver sa légitimité, il se voit invitéà réaliser un test de tir de très longue distance... Comment conserver sa crédibilité auprès de la Fondation sans devenir un assassin ?

À suivre dans le tome 27,Mémoirerechargée

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40 – LES ECHOS WEEK-END

BUSINESS STORY

UN DIRECTEURTRÈS ROCK À LA SANTÉBruno Clément-Petremann, le patronde la mythique prison parisienne, cultiveavec délice les contradictions. Hommede gauche et conseiller de deux ministresde droite. Passionné de punk rock etreprésentant de l’ordre public. Nordisted’adoption et amoureux de l’Algérie.Supporter de l’Olympique de Marseilleet fan du Racing Club de Lens. L’histoired’un iconoclaste.

Par Anne Vidalie — Photographe: Julien Pebrel

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LES ECHOS WEEK-END – 41

UN DIRECTEUR TRÈS ROCK À LA SANTÉ

u’ont en commun le poète GuillaumeApollinaire, la résistante Marie-Claude Vaillant-Couturier et le premier président de laRépublique algérienne Ahmed Ben Bella?Réponse : les geôles de la Santé, où tous, enleur temps, ont été embastillés. Leurs portraits,dessinés au pochoir par l’artiste ChristianGuémy, alias C215, ornent désormais les mursde la prison parisienne qui a rouvert ses portesen janvier 2019, après quatre longues annéesde fermeture et 180 millions d’euros de travaux.Depuis juin 2019, c’est Bruno Clément-

Petremann, 58 ans, qui détient les clés dela mythique maison d’arrêt, campée derrièreses hauts murs de meulière à la lisière desXIIIe et XIVe arrondissements. Celle que, élèvede l’École nationale de l’administrationpénitentiaire, il s’imaginait diriger, un jour.Celle où il a effectué son premier stage,à une époque où les hommes étaient encoreregroupés par origine ethnique – les Européensdans le bloc A, les Africains au B, lesMaghrébins au C et les Asiatiques au D.Monsieur le Directeur fait volontiers

les honneurs des lieux. Il montre les cellulesplus spacieuses (9 mètres carrés pour un seuloccupant, 11 pour deux lits superposés),avec fenêtre plus grande (n’en déplaise auxriverains), douche et même téléphone fixe pourappeler les proches. Le vaste gymnase flambantneuf où prisonniers et surveillants ont disputéun tournoi de foot endiablé la semaine

précédente. Le centre scolaire, cadre d’uneexposition de reproductions d’œuvres du muséedu Louvre dont les détenus ont été promus«co-commissaires». Bruno Clément-Petremannraconte aussi l’enregistrement de deuxémissions littéraires pour la radio RCF, l’étédernier, avec l’écrivaine Delphine de Viganet le journaliste François Busnel. En attendantune conférence consacrée à l’histoire du rapet, peut-être, un festival rock avec des groupesparisiens.

LA FAUTE À BADINTERIci, les conditions carcérales sont à desannées-lumière de celles, encore en vigueurdans quelques établissements, qui ont valuà la France une cinglante condamnation parla Cour européenne des droits de l’hommeen janvier dernier. Ici, on peut travailler et fairedu sport, se cultiver et se former. Et le directeurs’en félicite, lui qui emprunte volontiers à ValéryGiscard d’Estaing sa définition de la prison :« la privation de liberté et rien d’autre ». Pourtant,l’étudiant en droit de Paris-Tolbiac, fils uniqueélevé en Seine-et-Marne par un père ouvrieret une mère au foyer, ne se rêvait pas engarde-chiourme.Il se voyait plutôt journaliste, le jeune Bruno

Clément (Petremann est le nom de sa secondeépouse, Céline, ex-responsable presse duParquet national financier et nouvelle chargéede la communication de la cour d’appel

Bruno Clément-Petremann,directeur de laprison de la Santé.Ci-dessus: un couloiret une cellulede la maison d’arrêtrénovée.

À L’ORIGINE,UNE VRAIE MAISONDE SANTÉ

20 août 1867Inauguration dela prison de laSanté, dessinée parl’architecte ÉmileVaudremer. Elle s’élèvesur le site de la maisonde santé édifiéeau XIIIe siècleà la demandede Margueritede Provence, veuvede Louis IX, pouraccueillir les pestiférés.

1899Installationde la guillotine.

1965Projet de destructionde la maison d’arrêt.À sa place seraitconstruit un immeublepyramidal de50 étages pourle ministère del’Éducation nationale.L’idée est abandonnéeaprès l’électionprésidentielle de 1974.

28 novembre 1972Exécution de RogerBontems et ClaudeBuffet, condamnésà mort à la suited’une sanglante prised’otages. Ils sontles derniers guillotinésde la Santé.

8 mai 1978Évasion du braqueurJacques Mesrine,dit « l’ennemi publicnuméro 1 ».

21 juillet 2014Fermeture de laprison pour destravaux de rénovation.

2019La Santé rouvre enjanvier. En juin, BrunoClément-Petremannen devient directeur.

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de Douai). Ce fan de punk rock n’avait-il paspublié en 1983 une interview fictive du groupebritannique The Clash, ses idoles, dansle magazine Rock & Folk? Mais il échoueau concours du Centre de formation desjournalistes. Commissaire de police, alors?Reçu à l’écrit, il se plante à l’oral. La faute à…Robert Badinter. « Comme il venait d’entrerau gouvernement, il avait lâché son cours de droitpénal, raconte Bruno Clément-Petremann.Ce qui m’avait dissuadé de choisir cette matière. »Impardonnable pour un futur policier. Il sespécialise en sciences criminelles, optioncriminologie. La rencontre de deux hommes,l’un magistrat, l’autre pasteur, bouleverseses projets d’avenir. Le premier, Jean Favard,spécialiste des questions carcérales et conseillerdu garde des Sceaux Badinter, enseigne letraitement pénitentiaire à Tolbiac. Le second,Ernest Ungerer, ancien officier et déporté,est aumônier général des prisons. L’étudianten droit a trouvé sa voie : il sera directeur deprison. En 1987, il réussit le concours et, l’annéesuivante, découvre la maison d’arrêt de la Santé.Avant de le ramener à ses premières amours

vingt-deux ans plus tard, sa carrière lui feradécouvrir la France et les multiples facettesde son métier. Chaque étape de ce parcoursinitiatique l’a « passionné », affirme-t-il. Sonpremier poste, au quartier Saint-Paul de Lyon,le confronte à la surpopulation carcérale– « un taux d’occupation de 350%, pas une nuitsans matelas sur le sol » –, aux tentativesd’évasion – « six en deux ans » – et à lasusceptibilité des surveillants. « Je me sentaiscomme un interne dans un service d’urgence,se souvient-il. J’arrivais le matin sans savoirce qui allait se passer dans la journée. » Unedécennie avant la loi pénitentiaire de 2009,il organise déjà des réunions de consultationavec les détenus.

BIENVENUE CHEZ LES CH’TISNommé à la prison de Moulins-Yzeure (Allier),il y dirige la maison centrale, réservéeaux longues peines, qui héberge alors unecinquantaine de condamnés à perpétuité.Il côtoie de « gros profils », comme le braqueurMichel Vaujour ou Georges Ibrahim Abdallah,le chef de la Fraction armée révolutionnairelibanaise en France. Si l’expérience est fascinantepour l’ancien étudiant en criminologie, c’estune drôle de gageure pour le jeune directeur.« On doit utiliser toutes les ressources à notredisposition pour les aider à tenir le coupen traçant un chemin possible vers l’avenir »,explique-t-il. Il poursuit ce travail d’orfèvreau Centre national d’observation de Fresnes

histoire d’amour entre le fils d’ouvrier et leshabitants au cœur gros comme ça d’une régionmise à genoux par la fermeture des mineset la désindustrialisation. Entre le supporterde l’Olympique de Marseille et le Racing Clubde Lens dont l’écharpe sang et or, dansson bureau de la Santé, surplombe la photoofficielle du président de la République. À Loosaussi, il innove. S’investit dans la préventiondes suicides. Expérimente la surveillancesous bracelet électronique. « Nordisted’adoption », comme il se définit, il souhaiterester dans la région, pas trop loin de la maisonqu’il vient d’acheter sur la côte d’Opale. Mais,deux postes plus tard, il doit se résoudre à faireses bagages : direction Agen et l’École nationalede l’administration pénitentiaire où il seconvertit aux joies de la formation, lui qui« aime la transmission ».

ROMANCIER INSPIRÉ PAR LES CLASHSon emploi du temps lui laisse un peu de tempspour prendre la plume. Enfin. Après la mortde Joe Strummer, l’âme des Clash, en 2002,une idée de roman a germé. En résumé:un jeune militant français de l’ultragauche,en cavale dans le Londres rock des années 1970,se place dans le sillage de Strummer, avantd’écoper de vingt ans de prison qu’il purge dansplusieurs établissements français. Son livre,Strummerville (La Tengo Éditions), sera publiéen 2012. La preuve que l’on peut vénérer leschanteurs de I Fought the Law («J’ai combattula loi»), Police on my Back («La police à mestrousses») ouWhite Riot («Émeute blanche»),tout en incarnant l’ordre républicain. « Il y aun côté ado qui persiste en lui, observe sonéditeur, Alexandre Chabert. Bruno a gardé sesidéaux de jeunesse. » Et quelques signes discretsd’anticonformisme – boutons de manchetteDark Vador, cheveux légèrement ébourifféset pattes un peu longues sur les joues.Un jour d’août 2009, il est sur les marches

du Reichstag, le siège du Parlement allemandà Berlin, lorsque son portable sonne. Lanouvelle garde des Sceaux, Michèle Alliot-Marie, cherche un conseiller prison pourson cabinet ministériel, lui apprend le patronde l’administration pénitentiaire. Un spécialiste,pas un magistrat. Est-ce que le postel’intéresserait? Bruno Clément, un tempssyndiqué à la CFDT, hésite un peu, puis appelleson communiste de père. « Il m’a dit “fonce,c’est génial”. » C’est le procureur général prèsla Cour de cassation François Molins, alorsdirecteur de cabinet de la ministre, qui a souffléson nom. « J’ai été séduit par son intelligence,sa créativité et son ouverture d’esprit, J

ULIENPEBREL/M.Y.O.P.POURLESECHOSWWEK-END

Le bureau du directeur de la Santé se parede touches personnelles, tels ces hommagesà Albert Camus et au Racing Club de Lens.

(Val-de-Marne), une unité alors dédiée àl’élaboration des projets d’exécution de peine,puis prend la direction de l’hôpital de la prison.En 1999, Bruno Clément vit son Bienvenue

chez les Ch’tis personnel. Comme le directeurde La Poste joué par KadMerad, il est muté dansle «Grand Nord», à la tête de la prison de Loos-lez-Lille aux cellules bondées (1000 hommespour 350 places) et aux conditions de détention« pourries », dit-il. C’est le début d’une longue

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Bruno Clément-Petremann à la tête del’état-major de sécurité de l’administrationpénitentiaire. Pas vraiment sa tasse de thé,a priori. « Ce qui m’intéresse davantage,reconnaît-il, c’est comment remettre dans le droitchemin des personnes qui se sont égarées surdes voies de traverse. »Mais avec les attentatsterroristes de 2015, de nouvelles urgencesémergent : la prise en charge de la radicalisationderrière les barreaux et la collecte durenseignement. Une fois de plus, il « s’éclate ».

L’ALGÉRIE SUR LES PAS DE CAMUSUn déplacement professionnel en Algériescelle sa nouvelle affectation. Alger voudraitl’aide de Paris pour améliorer son systèmecarcéral, Bruno Clément-Petremann pourraitpeut-être s’en charger? Cet adorateur d’AlbertCamus se laisse convaincre. La tentationest trop forte de mettre ses pas dans ceuxde l’écrivain, d’Alger à Oran. Seule ombre autableau, l’éloignement de sa tribu recomposée– six filles et un garçon, entre 12 et 30 ans.« Je pourrais parler des heures de ce pays,de la cordialité de ses habitants qui me rappellele Nord, de l’ambiance électrique des stadesde foot », s’enthousiasme-t-il.Sa mission achevée, il patiente quelques

mois avant de décrocher son Graal en juin 2019 :la prestigieuse direction de la Santé. Seize moisplus tard, les syndicats de gardiens, pas toujourstendres avec les chefs, lui tressent des lauriers.Erwan Saoudi, délégué FO Pénitentiaire pourla région Île-de-France, le trouve carrément« cool ». « Il est franc, direct, à l’écoute, et il saittrancher », salue-t-il. Aurélien Pruvot, premiersurveillant à la Santé et encarté à l’Ufap-Unsa,le juge « humain, avenant, accessible pour sonpersonnel. Il détonne dans une administrationde passe-murailles. »Bruno Clément-Petremann le sait, il fait

des envieux avec son établissement rénové dusol au plafond (un peu moins avec son salairemensuel net de 4800 euros après trente-troisans de carrière). Pourtant, tout n’est pas rose,loin de là. 80% des quelque 470 surveillantssont des stagiaires fraîchement diplômés.Et le nombre de gradés destinés à encadrerces débutants reste notoirement insuffisant.« C’est notre principale difficulté », regrette-t-il.L’autre s’appelle surpopulation carcérale, cemal français. Le 17 mars, au début du premierconfinement dicté par l’épidémie de Covid,la Santé comptait 850 détenus, pour 708 places.Les sorties anticipées et la mise en sommeildes tribunaux ont vidé les cellules, ramenantle nombre de pensionnaires à 595 deux moisplus tard. Puis le naturel est revenu au galop :ils sont aujourd’hui 825. « Le tout-carcéral n’estpas la solution, il existe d’autres peines plus utileset moins coûteuses comme la surveillanceélectronique ou les travaux d’intérêt général »,martèle le directeur. Mais autant prêcher dansle désert algérien…

Le Conseilconstitutionnela tranché le 2 octobre.La France a quelquemois pour adopterune loi permettantaux personnes placéesen détention provisoired’exiger des conditionsd’incarcérationrespectueusesde leur dignité. Visées :les cellules insalubreset la surpopulationendémique des188 prisons du pays.Au fil des ans,le nombre d’hommeset de femmes derrièreles barreaux n’acessé de battre des

records. En marsdernier, ils étaient72500 pour61000 places.Le Covid a réussilà où la politiquea échoué : les mesuresde libération anticipéeprises sur fond de crisesanitaire, ainsi quela chute de l’activitépénale pendantle confinement, ontfait fondre la populationcarcérale à 58600détenus. Mais depuisl’été, elle repartà la hausse :elle atteignait62260 personnesdébut novembre.

UNE SURPOPULATION CHRONIQUEconfie-t-il. Par ses convictions, aussi. Commelui, je suis convaincu qu’il faut faire une placeplus large à la réinsertion des détenus. »L’expérience entamée auprès de Michèle

Alliot-Marie se poursuit avec son successeurMichel Mercier. Trois années « grisantes »marquées par l’adoption de la loi pénitentiairede 2009, plutôt favorable aux condamnés,et le lancement d’un plan de lutte contreles suicides. « La politique pénitentiaire n’est nide droite, ni de gauche, plaide Bruno Clément-Petremann. Robert Badinter l’a humanisée,mais c’est Jacques Chirac qui a créé le Contrôleurdes lieux de privation de liberté. » Ses camaradesdu cabinet se souviennent d’un type sympaet enjoué, d’une bonne humeur inébranlableet d’un calme olympien. « Capable de lâcherde bonnes blagues jusque sur les bancs del’Assemblée nationale, derrière le ministre »,ajoute un magistrat. Un autre loue « son profondrespect pour chaque maillon de la chaîne pénale,policiers, gendarmes, juges, gardiens, personnelsadministratifs, mais aussi détenus ».L’élection de François Hollande en mai 2012

referme cette parenthèse ministérielle. Voilà

Fan des Clash,Bruno Clément-Petremann a affichédans son bureaude directeurd’établissementpénitentiaireun poster duchanteur deI Fought the Law.

JULIENPEBREL/M.Y.O.P.POURLESECHOSWWEK-END

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BUSINESS STORY

LE SAUMONREMONTELE COURANTAlors que le saumon fumés’annonce en force sur lestables des réveillons français,la filière poursuit son travailpour réduire son impactenvironnemental. Et redorerson image après les excèsd’une industrialisationpoussée à outrance dans lesannées 1980 et 1990. À la pointede ce travail de reconquêteœuvre le leader mondial,le norvégien Mowi. Dansune de ses usines, une séancede fumage sans enfumage.

Par Florence BauchardPhotographe: Didier Olivré

ntre la limitation à deuxclients à la fois à l’intérieur de la boutiqueet un personnel trois fois plus nombreux à cetteépoque de l’année, cela va être un véritablecasse-tête », anticipe à l’approche des fêtesBarbara Karoglan, dans la jolie boutiquede 15 m2 aux murs bleu sombre qu’elle a ouverteen 1986 avec son mari rue Monge, dans leVe arrondissement, l’une des plus anciennesenseignes spécialisées de la capitale. «UnSaumon à Paris» est aussi, accessoirement,

une des adresses préférées de Vernon Subutex,le personnage de Virginie Despentes. « Mêmeavec le foodtruck à l’extérieur pour récupérerles commandes, il faut compter d’habitude unebonne heure d’attente, d’autant que c’est unevente qui demande beaucoup de conseils », ajoutecette grande femme aux yeux clairs. Tout estfonction du goût de chacun – et de son exigence.Norvégien, danois, bio d’Irlande ou d’Écosse,français, plus ou moins gras ou iodé, l’éventaildes provenances et des qualités du saumon

est très vaste. Les prix peuvent aller du simpleau triple, la palme revenant au saumon sauvagede l’Adour fumé à l’aulne par Barthouil, unemaison familiale quasi centenaire. À 319 eurosle kilo, « c’est l’équivalent du caviar du saumon » !

EMBELLIE AU RAYON POISSONNERIE« Le saumon fumé reste un aliment plaisirpour lesquels les Français ont montré un regaind’intérêt depuis le premier confinement »,note Margot Lévis, du cabinet d’études IRI.

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LE SAUMON REMONTE LE COURANT

Dans l’usine du géantnorvégien Mowià Lampaul-Guimiliau(Finistère),le 28 septembre 2020.

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En cette fin 2020, ce poisson apprécié pour sesbienfaits nutritionnels (vitamine D, oméga-3)et la variété des préparations possibles (vapeur,poêlé, cuisson longue, etc.) sera peut-être encoreplus recherché qu’à l’accoutumée. Car, mêmes’il s’est considérablement démocratisé depuiscinquante ans, le saumon fumé garde uneconnotation festive qui sera bienvenue pourégayer un réveillon terni par la crise sanitaire.À la fin octobre 2020, le segment le mieux

valorisé du rayon poissonnerie affiche desventes en hausse de 4% en valeur sur un an,selon l’IRI – il a certainement bénéficié du faitque les particuliers ont eu plus de temps pourcuisiner, et moins de possibilités de prendre desrepas hors de leur domicile. Après une longuepériode de déclin qui a vu une chute des ventesde saumon, fumé comme frais, de 30% au totalsur six ans, l’embellie sera-t-elle durable?Margot Lévis le pense, ne serait-ce qu’en raisonde la pérennisation du télétravail, mais aussi

grâce aux efforts de montée en gamme dela grande distribution, de concert avec lesindustriels comme le champion dumondedu saumon, Mowi.Fournisseur historique de plusieurs

marques distributeur, le géant norvégien,né du regroupement de trois entités en 2006,est jusqu’ici inconnu du grand public dansl’Hexagone, même s’il y possède de longue datedes sites de transformation dans les Hauts-de-France et en Bretagne. Le groupe espère biengagner en visibilité en lançant cette année unegamme plus qualitative sous sa propre marque :Mowi Pure en grande distribution et MowiSupreme à destination des restaurateurs.

REDORER UNE IMAGE ÉCORNÉESon objectif : redonner des lettres de noblesseà la filière saumon, qui a essuyé beaucoupde critiques envers ses méthodes et leurs dégâtssur l’environnement, en « tirant le marchévers le haut », explique depuis le siège de BergenOle-Eirik Lerøy, président du conseild’administration, issu d’une famille de pêcheursqui court sur quatre générations.En mettant ainsi en avant la marque Mowi,

dérivée du patronyme de son fondateur ThorMowinckel, un des pionniers les plus passionnésde la salmoniculture norvégienne dans les

années 1960, l’entreprise cherche aussi à redorerson image dans une industrie aujourd’huibanalisée et standardisée. « La rançon d’uneinondation du marché par le développement tousazimuts de l’élevage en Norvège, le principal paysproducteur et exportateur de saumon Atlantiquedepuis les années 1980 », explique FabriceTeletchea, maître de conférences à l’universitéde Lorraine, spécialisé dans les systèmesde production aquacoles.La pandémie a quelque peu bousculé le

planning des animations en magasin prévuespour l’introduction de cette offre Mowi enFrance, le marché européen le plus friand desaumon fumé avec une consommation annuelled’environ un demi-kilo par personne. « Maisnous avons préféré maintenir ce projet car,à un moment ou un autre, le Covid va disparaître»,explique Fabrice Barreau, patron de la zoneEurope de l’Ouest depuis sept ans. Unepersévérance accueillie avec soulagement parle site de Landivisiau, reconverti dans lesproduits fumés après avoir frôlé la délocalisationà la suite d’un incendie ravageur en juillet 2018.En attendant l’achèvement, au printemps,

du chantier de reconstruction mené tambourbattant avec le soutien de la région et des élus,la production a déménagé temporairementà Lampaul-Guimiliau, dans les anciens

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BUSINESS STORY

Dopée par la demande mondialede protéines animales, la productionde saumon d’élevage a décollé depuisquarante ans, passant de 12000 tonnesen 1980 à 2,4 millions de tonnes en 2018,selon la FAO. La Norvège avec ses28000 kilomètres de côtes baignées

d’eau froide reste aujourd’hui de loin lepremier pays producteur (1,2 million detonnes), devant le Chili (614 179 tonnes)– le saumon de l’hémisphère Nord y aété acclimaté à partir de 1978 après despremiers essais infructueux au débutdu XXe siècle –, le Royaume-Uni (189707),

le Canada (120553) ou encore les îlesFéroé (86800). La Chine s’est aussipositionnée sur le marché endéveloppant des unités de productionà terre, car les capacités mondialesexistantes peinent à répondre à l’appétitdes nouvelles classes moyennes.

locaux des abattoirs GAD, en contrebas de l’undes plus beaux enclos paroissiaux du Finistère.En cette fin d’automne brumeuse, la productionde saumon fumé Mowi bat déjà son plein. « Unà trois jours s’écoulent entre la réception des filetsde Boulogne-sur-Mer, où ils ont été débarrassésde leur gras et de leur chair brune, jusqu’à leuremballage dans des présentoirs en kraft, selonun cahier des charges strict en matière de couleur,texture et goût », explique Nathalie Mercier,en charge de la recherche pour Mowi France.Une opératrice en blouse blanche, charlotte

sur la tête et masque anti-Covid sur le visage,

PRODUCTIONEN FORTE HAUSSE

saisit délicatement avec des gants bleuélectrique de grands filets de saumon à la chairorange vif de 50 cm livrés quotidiennementet les place bien à plat sur la ligne de salage,après avoir dûment vérifié l’absence de toutetâche, défaut ou trou susceptible de provoquerdes déchirures lors du tranchage. En quelquesminutes, les saumons sont recouvertsautomatiquement d’une fine pellicule blanchede sel de mer au grain variable, selon le poids,l’origine du poisson et la recette choisie. Ilsconservent cette saumure quelques heuressur des claies métalliques avant d’être douchés

Chez Mowi, à Lampaul-Guimiliau. Les filetsde saumon arrivantquotidiennementde Boulogne-sur-Mersont pesés, saléset mis à matureravant le fumage.

DIDIEROLIVRÉPOURLESECHOSWEEK-END

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LE SAUMON REMONTE LE COURANT

puis laissés à maturer de nouveau pour quele sel pénètre bien la chair, avant un fumageà la sciure de hêtre dans une enceinte ferméependant cinq heures trente.Après avoir refroidi pendant une

douzaine d’heures, les filets sont découpésmécaniquement en fines tranches, selonla technique dite de tranchage frais, plusrespectueuse des qualités organoleptiquesque le tranchage par températurenégative. Savamment pliées pour êtredétachables une à une sans difficulté, lestranches sont ensuite emballées quatre parquatre sur une plaque de carton doré sousatmosphère modifiée, plutôt que sous-videcomme pour les marques distributeur.

« PRODUIRE PLUS EN IMPACTANT MOINS »Cette attention redoublée à chaque étape dela transformation, pour produire un saumonfumé plus qualitatif, s’applique égalementen amont de la chaîne, dès la pisciculture.Mowi a ainsi travaillé à la sélection d’unesouche plus robuste de salmo salar – le nomlatin du saumon de l’Atlantique – et amélioréles conditions d’élevage, avec une alimentationplus riche que dans le reste de l’industrie.Mowi n’avait, il est vrai, guère d’autre choix.

Comme dans l’élevage intensif du poulet ou du

sur les autres espèces de poissons pour nourrirun animal carnassier, affaiblissement de lagénétique des espèces sauvages par hybridationavec des saumons d’élevage échappés des cages.De quoi obérer les perspectives de la filière,ne serait-ce qu’en termes d’acceptabilité sociale,voire d’attractivité en tant qu’employeur.

Fabrice Barreau résume ainsi le défi :« trouver des solutions pour produire

plus en impactant moins ». D’ici 2030,le groupe prévoit de réduire de 35% sesémissions de carbone. Avec un budget derecherche-développement de 46 millions

d’euros pour un chiffre d’affaires (record) de4,1 milliards en 2019, le géant norvégien disposede ressources d’innovation sans équivalent dansla profession. Il emprunte à des secteurs commel’exploration pétrolière ou même les Gafam desméthodes pour prévenir la pollution des fondsmarins, l’occurrence de maladies, l’évasionde saumons, et pour veiller au bien-être animal.Pour Eirik Moe, du cabinet de conseil EY,

Mowi est une « véritable locomotive de sonindustrie, certainement l’une des sociétés les plusactives ces dernières années », poussée il est vraipar une réglementation de plus en plus sévèreen Norvège, sa principale base d’exploitationet le premier producteur mondial. « Les progrèsdans le secteur sont réels », explique Joël

porc, l’industrialisation de la salmoniculturea créé de graves problèmes sanitaires etenvironnementaux, dénoncés régulièrementpar les ONG: accumulation des déjectionsdes animaux et des restes de leur nourrituresur les fonds marins, abus de pesticideset d’antibiotiques contre le développementde maladies parasitaires, prélèvement croissant

3,4MILLIONSDETONNES

de saumon (en équivalentpoids éviscéré) ont été

consommées dans le mondeen 2019, dont près de 70%de saumon de l’Atlantique.

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BUSINESS STORY

du saumon sur la pêche d’autres poissonscomme les anchois, son régime nutritifa été partiellement végétalisé avec du soja.Des essais sont menés avec des insectes, desalgues et même des coproduits de l’exploitationforestière. Pour mieux maîtriser ce maillonde la chaîne primordial à la fois pour la qualitédu produit fini et en termes de coûts, Mowia fini par l’intégrer, comme toutes les autresétapes de la salmoniculture, depuis l’écloseriejusqu’au produit vendu au détail.

DÉMARCHE DE LABELLISATIONAutant d’efforts consacrés par la certificationAquaculture Stewardship Council (ASC) de prèsde 60% des fermes du groupe, essentiellementsituées en Norvège. Un label qui fait référenceaujourd’hui. Développée à l’initiative duWWFen 2003, la réflexion sur un encadrementplus strict de l’aquaculture a débouché sept ansplus tard sur la création de l’ASC aux Pays-Bas.Mowi fait partie des industriels du saumonqui se sont mobilisés à partir de 2013 pouraccompagner le mouvement au sein dela Global Sustainable Seafood Initiative.

JOHN FREDRIKSEN, LE MILLIARDAIRE DU SAUMON

Après découpe, les tranches de saumon sont emballées sur du carton doré, qui ne manque pas de souligner le côté festif de cet aliment plaisir.

d’élevages rassemblant des dizaines de milliersd’individus au même endroit. Chez Mowi,des poissons nettoyeurs (des vieilles) sontintroduits dans les cages pour dévorer les pouxavant qu’ils ne s’attaquent aux branchies dessaumons, les condamnant à une mort certaine.Et des systèmes d’éclairage y sont égalementinstallés pour éloigner les parasites.Pour réduire la pression de l’alimentation

Mowi doit beaucoup à JohnFredriksen. Discret, cemilliardaire d’origine modeste– son père était soudeur – n’estpas loin d’être considéré comme« le plus grand entrepreneur del’histoire de la Norvège ». Aprèsavoir fait fortune dans le pétrole,le négoce et l’immobilier, « cet

autodidacte a eu le couraged’investir 1 milliard d’euros dansla restructuration d’un secteuren difficulté au début desannées 2000», raconte Ole-EirikLerøy, président du conseild’administration de Mowi.Devenu premier actionnairedu géant de la pisciculture avec

15% du capital, devant le fondssouverain norvégien (10%),ce septuagénaire s’est classéà nouveau cette année en têtedes plus grosses fortunes dupays, selon le magazine Kapital,avec un patrimoine estiméà 104 milliards de couronnes,soit 9,75 milliards d’euros.

Aubin, spécialiste de l’analyse environnementaledes systèmes d’élevage de l’Inrae (Institutnational de recherche pour l’agriculture,l’alimentation et l’environnement).La vaccination des alevins s’est ainsi

largement substituée aux antibiotiques et desméthodes alternatives aux pesticides se sontdéveloppées pour lutter contre le fléau du poude mer, parasite naturel qui prolifère au sein

DIDIEROLIVRÉPOURLESECHOSWEEK-END

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LE SAUMON REMONTE LE COURANT

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« Notre objectif est de certifier toutesnos fermes ASC d’ici à 2025, sachant que l’auditest renouvelé chaque année, et qu’en casde déviation conséquente par rapport auxréférentiels, on perd la certification », expliqueCatarina Martins, qui a rejoint depuis avril 2019l’équipe de direction au poste nouvellementcréé de directrice du développement durable.« Une démarche bien en phase avec les attentesdu consommateur, en particulier en France,où le tonnage de saumons ASC toutes marquesconfondues proposé en grande distribution adoublé entre 2018 et 2019 », souligne CamilleCivel, responsable du développement de ce labelen France et en Belgique.

AMÉLIORATION INÉGALE SELON LES PAYS« La profession règle les problèmes au fur et àmesure en faisant évoluer progressivement lespratiques et les technologies », confirme FabriceTeletchea. Si les méthodes se sont assainies enNorvège pour préserver la deuxième ressourceéconomique du pays après les hydrocarbures,c’est toutefois loin d’être la norme partout.Au Chili, où la production a doublé en dix anspour répondre à la demande russe, américaine,japonaise et chinoise, Liesbeth van der Meer,directrice de l’antenne locale de l’association

de protection des océans Oceana, déplore« le refus de 20% des industriels implantés dansle pays de transmettre des informations surles traitements chimiques et antibiotiques.Si l’indice antibiotique par poisson a décru,le secteur en emploie encore des volumesimpressionnants en raison d’une productionde saumons en forte croissance dans un paysà la législation plus permissive qu’ailleurset où la prise de conscience du public est bien plusfaible qu’en Europe. » En 2018, le Chili employait550 fois plus d’antibiotiques par tonne de

saumon que la Norvège, selon cette spécialiste,vétérinaire de formation.La direction de Mowi estime que « les poux

de mer sont et resteront la principale limitationà la croissance de notre industrie ». Pour ÉlodieMartinie-Cousty, pilote du réseau océans, merset littoraux de France Nature Environnement,la nutrition de ce poisson situé en boutde chaîne alimentaire, qui du coup accumuledes polluants comme les PCB, constitueun autre sujet de préoccupation persistant.De même que l’hybridation des saumonssauvages avec des «évadés». Pas sûr que lesméga-élevages pilotes implantés à terre oules fermes offshore – inspirées des plateformespétrolières – financés aujourd’hui par lecapital-risque répondent à ces problématiques.Au-delà des risques techniques, ces installationsmêmes ne sont pas sans poser des risquesd’image, observe de son côté Benoît Videl-Giraud, du cabinet de conseil Via Aqua.« Ne serait-il pas plus sage de consommer moinsde saumon ? », suggère Élodie Martinie-Cousty.Voilà une question à laquelle on pourrarépondre au moment des bonnes résolutionsdu Nouvel An.

EN 2018, LE CHILIEMPLOYAIT 550 FOISPLUS D’ANTIBIOTIQUESPAR TONNE DE SAUMONQUE LA NORVÈGE, SELONL’ASSOCIATION OCEANA.

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Page 96: Les Echos - 11 12 2020

52 – LES ECHOS WEEK-END

BUSINESS STORY

EMER COOKE, GENDARMEEUROPÉEN DESVACCINS SOUS PRESSIONLa directrice générale de l’Agenceeuropéenne des médicaments continuede vouloir respecter toutes lesprocédures de validation des vaccinsanti-Covid, même après le feu vertexpress des Britanniques au produitPfizer. C’est la confiance des citoyensqui est en jeu.

Par Karl De Meyer

ous, les régulateurs, nous sentons une immenseresponsabilité à ce moment de la crise sanitaire,nous cherchons à protéger nos populations surla base d’une évaluation scientifique de l’efficacité,la sécurité et la qualité des vaccins », nousdéclarait très prudemment le 1er décembre EmerCooke, la toute nouvelle directrice généralede l’Agence européenne des médicaments(EMA en anglais), en charge de l’approbationdes vaccins contre le Covid. Au téléphonedepuis Amsterdam, l’Irlandaise expliquaitqu’une réunion prévue le 29 décembre pourrait,« si tout se déroule bien », conduire à uneautorisation du produit codéveloppé par Pfizeret BioNTech. Elle insistait sur la nécessitéde respecter chaque étape de la procédure.Sur la question de savoir si l’autoritéaméricaine, la Food and Drug Administration,pourrait donner son feu vert un peu plus tôt,elle apparaissait plutôt détendue : « La FDAest légèrement en avance sur nous, parce qu’ilsont une approche différente reposant surune autorisation temporaire d’urgence. »Elle s’attachait à souligner au passagela qualité de la coopération transatlantique.Le lendemain, 2 décembre, coup de tonnerre

dans le ciel pharmaceutique : le régulateurbritannique avalise le procédé Pfizer ;le gouvernement de Boris Johnson annoncele début des vaccinations quelques jours plus

L’Irlandaise Emer Cooke,arrivée à la tête de l’EMAle 23 novembre, a suivile dossier Covid au seinde l’OMS depuis le débutde la pandémie.

SWENPFÃRTNER/ZUMAPRESS/REA

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LES ECHOS WEEK-END – 53

EMER COOKE

tard. Alors que Londres peine depuis des moisà finaliser les modalités du Brexit, de nombreuxresponsables politiques britanniques laissententendre à mots plus ou moins couverts quele Royaume-Uni bénéficie déjà de son retraitde l’Union européenne sous la forme d’unexamen plus rapide, sous-entendu moinsbureaucratique, des remèdes à la pandémie.Alors que le même jour se tient un conseil des

ministres de la Santé de l’UE, en téléconférence,Emer Cooke se contente de « prendre note » dela décision britannique. Le ministre allemandde la Santé, qui dirige les débats car l’Allemagneassure jusqu’à la fin de l’année la présidencetournante de l’Union, ne lui facilite pas la tâche.Jens Spahn met en garde contre une possibleperception par les citoyens que l’Europe seraità la traîne. « Nous devons agir aussi vite quepossible », déclare l’ambitieux quadragénaire,qui a songé un moment postuler à la successiond’Angela Merkel.Énorme pression sur Emer Cooke, donc,

qui a toutefois de nombreux atouts danssa manche pour y résister. D’abord un CVen béton. Après des études de pharmacieau prestigieux Trinity College de Dublin,elle travaille dans l’industrie du médicamentpendant trois ans avant de rejoindre lerégulateur irlandais, puis l’Associationeuropéenne des groupes pharmaceutiques

que grâce à eux nous avons de faibles incidencesde la polio, de la variole et même de la rougeole. »Selon l’eurodéputée française Véronique

Trillet-Lenoir (Renew Europe, centristes),« une manière de lutter contre les antivaccinsserait de faire la transparence sur les contratsd’achat par la Commission européenne desvaccins de six groupes pharmaceutiques. Une foisles négociations terminées, il faudrait rendrepublics la structuration des prix, les sites deproduction, les clauses de responsabilité juridiqueet les conditions de la propriété industrielle. »Où l’on réalise au passage que c’est l’exécutifcommunautaire, et plus précisément sadirectrice générale santé, l’Italienne SandraGallina, qui a passé commande pour les 27. C’estune première. « On peut imaginer faire de mêmepour d’autres médicaments afin d’obtenir demeilleurs prix », estime Véronique Trillet-Lenoir,cancérologue. Malheureusement, unecommande mutualisée de remdesivir à Gileads’est révélée peu judicieuse, le médicamentanti-Covid étant maintenant déconseillé par desétudes de l’OMS.

VERS UNE EUROPE DE LA SANTÉMalgré tout, de cette crise sanitaire majeurepourrait émerger une Europe de la santé, alorsque les États-membres conservaient jusque-làjalousement cette compétence au niveaunational. « Le budget européen alloué à la santéva passer de 450 millions d’euros dans la période2014-2020 à 5 milliards d’euros dans la période2021-2027. Il y a eu une vraie prise de consciencesur la nécessité d’une plus grande intégration,estime Nathalie Colin-Oesterlé, les États-membresn’étaient pas préparés. » La Commissioneuropéenne vient de proposer d’étendre lespouvoirs de l’EMA, notamment pour gérer lesstocks, remédier aux pénuries de médicamentset de matériel. Emer Cooke s’en est réjouie: «C’estla reconnaissance des nouvelles responsabilitésque nous avons assumées depuis le début de lacrise. C’est le résultat des leçons apprises au coursdes dix derniers mois. » À vrai dire, la directricede l’EMA n’en est pas encore à penser à sesmissions post-Covid, mais plutôt à organiser ledéploiement des vaccins. « Nous avons développéun système de surveillance mensuel pour traquerd’éventuels effets secondaires, et nous lanceronsen parallèle des études indépendantes.»On n’a pasosé lui souhaiter de bonnes fêtes.

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à Bruxelles. En 1998, elle entre à la Commissioneuropéenne, et intègre en 2002 l’Agenceeuropéenne des médicaments, alors basée àLondres – suite au Brexit, l’EMA s’est délocaliséeen 2019 à Amsterdam et a emménagé cetteannée dans le quartier d’affaires du Zuidas,qu’on peut comparer à La Défense.

UN FORUM EN LIGNE CE VENDREDIDevenue responsable des affaires internationalesde l’Agence, Emer Cooke passe en 2016à l’Organisation mondiale de la santé (OMS),à Genève, où elle étoffe son réseau de contactsmondial. Elle est nommée en juillet dernierà la tête de l’EMA, et prend ses fonctionsle 23 novembre. Débuts en fanfare, donc, maisavec une connaissance parfaite du dossierCovid : « Depuis le début de la pandémie,je lui ai consacré 80% de mon temps à l’OMS. »L’Irlandaise, qui travaille en ce moment plusde douze heures par jour et le week-end, peutaussi compter sur le soutien de nombreuxeurodéputés, notamment à la CommissionENVI (Environnement, santé publique, sécuritéalimentaire). Le soir de l’annonce britannique,la Française Nathalie Colin-Oesterlé (PPE,conservateur) nous déclarait ainsi partéléphone : « Il ne faut surtout pas confondrevitesse et précipitation, il ne faut pas donnerde feu vert si l’on n’est pas sûr. Cela ne sert à riende hâter l’autorisation si personne ne veut sefaire vacciner ensuite, par défiance. » Depuisplusieurs semaines, l’élue locale de Metz entendles inquiétudes de ses administrés : « Les genspensent qu’on va trop vite, qu’on fait passerl’intérêt des laboratoires avant la santé descitoyens, alors que l’Europe défend les standardsles plus élevés au monde. »Emer Cooke a bien conscience de l’enjeu,

notamment pour la France, pays de LouisPasteur où paradoxalement les mouvements«antivax» sont particulièrement virulentset pullulent sur les réseaux sociaux. C’estpourquoi elle a décidé d’organiser, ce vendredi11 décembre, un forum en ligne où lesEuropéens pourront exposer leurs craintes etposer des questions aux scientifiques de l’EMA.« Il est très important que les réactions descitoyens soient basées sur des informations,pas sur des mythes ou des rumeurs », confiela directrice générale de l’Agence, créée en 1995,aujourd’hui forte de quelque 900 personnes.« Les gens ont oublié que les vaccins ont changéle monde et infléchi les courbes de mortalité,

« IL EST TRÈS IMPORTANTQUE LES RÉACTIONS DESCITOYENS SOIENT BASÉESSUR DES INFORMATIONS,PAS SUR DES RUMEURS. »

DR

Un centre de vaccinationen cours d’installationdans un gymnase en Allemagne,à Eschwege (Hesse),le 1er décembre 2020.

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54 – LES ECHOS WEEK-END

BUSINESS STORY WIZZ AIR

WIZZ AIR AUSEPTIÈME CIEL

ne compagnie aérienne qui, enpleine pandémie, ouvre de nouvelles liaisonsentre Cluj-Napoca (Roumanie) et Karlsruheou entre Bergen et Trondheim, qui installeune base aéroportuaire à Gatwick et bientôtune autre à Abu Dhabi? C’est possible.Pas une semaine ne passe sans une nouvelleinitiative de la remuante Wizz Air. En six mois,la compagnie low cost paneuropéenne d’originehongroise a réalloué 20% de ses capacitéspour mettre en place pas moins de260 nouvelles liaisons et 13 nouvelles bases,tout en prenant livraison, comme prévu, de7 nouveaux Airbus A321 neo – les avionsmonocouloir les plus compétitifs du marché.Dans une industrie sapée par l’effondrement

du tourisme et des voyages d’affaires, la Bourseapplaudit l’activisme de cet opérateur mineurqui fait la nique aux grandes compagnies : àLondres où l’entreprise est cotée, l’action s’est

envolée (c’est le cas de le dire) à 4884 pence(+87% par rapport à la mi-mai). Avec plus de4,18 milliards de livres (4,60 milliards d’euros)de capitalisation au 7 décembre, la société crééeen septembre 2003 pèse deux fois plus qu’AirFrance-KLM (2,28 milliards d’euros).

« En économie, tout bas de cycle estgénéralement suivi par une phase de croissance,l’occasion pour nous d’améliorer notrecompétitivité », rappelle lors d’un entretienen visioconférence le PDG et cofondateurde Wizz Air, József Varadi. Économistede formation, l’ancien directeur généralde la compagnie nationale hongroise Malévn’a pas été surpris par le retournement deconjoncture. En revanche, cet entrepreneur,qui a rejoint le secteur aérien après dix anspassés chez Procter & Gamble, n’avait « pasanticipé qu’il serait provoqué par un virus ! »Inédit, ce choc aurait plutôt tendance à

Dans un secteur ravagé parla pandémie, la compagnielow cost d’origine hongroise

nargue les majors.Capitalisant sur des coûtsultracompétitifs et lajeunesse de sa clientèle.

Par Florence Bauchard

Un Airbus 321aux couleurs

de la compagniehongroiseWizz Air.

AKOSSTILLER/BLO

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Page 99: Les Echos - 11 12 2020

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Page 100: Les Echos - 11 12 2020

56 – LES ECHOS WEEK-END

BUSINESS STORY WIZZ AIR

stimuler le sportif accompli, joggeur quasimentquotidien, skieur l’hiver et golfeur l’été, mariéà une championne olympique de kayak.Encore trop jeune en 2008 pour profiter

de la redistribution des cartes consécutiveà la crise des subprimes, Wizz Air a depuis bienprospéré avec l’appui d’un premier actionnaireexpérimenté, le fonds américain Indigo Partners,notamment grâce au trafic dit «ethnique»des migrants économiques de Pologne,Hongrie, et autres pays d’Europe centrale,vers le Royaume-Uni, l’Allemagne, la Franceou les Pays-Bas. C’est dans un deuxième tempsque le transporteur a capté des touristes et uneclientèle d’affaires. Le pavillon à bandeau fuchsiaet bleu aisément reconnaissable est devenu lepremier opérateur d’Europe centrale et orientaledevant Ryanair, battant à son propre jeu le ténoreuropéen du low cost – pourtant deux fois plusgros que lui – avec des coûts par siège disponible(hors fioul) très faibles (2,70 euros). Le fruitd’une politique tarifaire agressive, d’unedistribution en direct, et de coûts du personnelallégés, sans parler de l’externalisation à 100%des services demaintenance.

80 MILLIONS DE PASSAGERS D’ICI À 2025Si dès avril dernier Wizz Air a réduit de 20%son effectif – plutôt jeune et peu syndiqué –,« promettant de les réembaucher dès quela situation le permettra », selon la secrétairegénérale Marion Geoffroy, la compagniemaintient son objectif de doubler d’ici à 2025son trafic passagers, avec 80 millions depassagers sur six ans, tout en continuantà étoffer sa flotte. Entamée depuis quelques

années, elle veut accélèrer la diversificationde son offre en étendant son réseau versl’Oural et le sud-est et la densifier en Europeoccidentale. Tout est prêt pour l’ouvertured’une base à Abu Dhabi le 15 janvier,en coopération avec le très puissant fondssouverain ADIA. Dans l’Union européenne,la priorité est à la densification du maillage,sur des liaisons intérieures moins touchéespar la crise sanitaire. En France, oùWizz Airest déjà présente sur plusieurs aéroportsrégionaux (Beauvais, Grenoble, Bordeaux…),« la compagnie pourrait égalementêtre tentée par des transversales libérées parla concurrence », estime Guillaume Hue,directeur associé du cabinet de conseil ArcheryStrategy Consulting.La compagnie ultra-low cost a les moyens

de ses ambitions, après plusieurs annéesde croissance à deux chiffres. Au termede son dernier exercice clos au 30 mars 2020,elle affichait encore 300 millions d’euros

de bénéfice net pour 2,7 milliards de chiffred’affaires. « Nous avons suffisammentde liquidités pour tenir deux ans sans faire volerun avion et nous disposons de l’une des basesde coûts les plus compétitives en Europe »,lance József Varadi dans un anglais à peineteinté d’une pointe d’accent sur les «r».Avec une flotte d’Airbus récente – quatre anset demi contre huit ans en moyenne pourRyanair ou EasyJet –, Wizz Air est prêteà capitaliser sur toute esquisse de reprise,comme elle l’a prouvé l’été passé. Sa clientèlehistorique relativement jeune (36 ans enmoyenne), et donc moins inquiète face au virus,a répondu présent dès la levée des restrictions.

« Les prochains mois vont être très difficiles »,reconnaît toutefois le PDG, qui se projette déjàà l’été prochain sans faire de pronosticsur les résultats annuels. « La saison estivaledevrait marquer un tournant, avec une visibilitéaccrue sur des vaccins espérons-le efficaces »,spécule le dirigeant depuis le siège genevoisde l’entreprise, à la veille de s’installertemporairement à Londres pour gérerla transition du Brexit. En attendant,« quotidienne et opportuniste, la gestion dépenddes mesures imposées par les gouvernementset la profitabilité attendue », explique MarionGeoffroy. Les clients ne semblent pas avoirperdu le goût de voyager, pourvu que l’étausanitaire se desserre. « Il suffit de voir l’explosiondes réservations constatée en octobre lorsde la suppression des restrictions entreles Canaries et l’Angleterre avant que leconfinement décrété par Boris Johnson n’y metteun terme », souligne le directeur commercialGeorge Michalopoulos.En attendant une relance du transport

aérien et une meilleure coordination desprotocoles sanitaires, les négociations vont bontrain pour abaisser encore les coûts d’opérationdans des aéroports européens aux abois :près de 200 d’entre eux seraient au bordde la faillite. « Certes, Wizz Air prend despositions, mais sans doute moins agressivementqu’annoncé au départ, et certainement pasde manière rentable pour le moment »,tempère Guillaume Hue. Il faudra peut-êtrese dépêcher d’aller à Cluj-Napocaj viaKarlsruhe, au cas où la ligne ferme…

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DANS L’UNION EUROPÉENNE,LA PRIORITÉ EST À LA DENSIFICATIONDU MAILLAGE, SUR DES LIAISONSINTÉRIEURES MOINS TOUCHÉESPAR LA CRISE SANITAIRE.

József Varadi, PDG et cofondateur de Wizz Air, photographiéau Global Aviation Festival, à Londres en septembre 2016. C

HRISRATCLIFFE/BLO

OMBERG

Page 101: Les Echos - 11 12 2020

LES ECHOS WEEK-END – 57

CULTURE11 DÉCEMBRE 2020

LE CINÉMAPASSE AU VERT

Tournaged’effets spéciaux

sur fond vert.

Par Véronique Le Bris

EVERETTCOLLECTION/ABACA

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58 – LES ECHOS WEEK-END

CULTURE

410000 allers retours Paris-New York en avion.Produire du cinéma pollue, à un point telqu’Hollywood était considéré en 2006 commele deuxième pollueur de Californie après lesecteur du pétrole. Ces données sont anciennes,rares, voire pas très fiables. « Il n’y a pas d’étudeprécise chiffrée du secteur, pas de visionscientifique », découvre avec surprise ClémenceLacharme. Consultante senior de Carbone 4,elle fait partie du quatuor d’experts que leCentre national du cinéma et de l’image animée(CNC) a missionné depuis septembre 2020 pouranalyser le sujet et mettre en place, à terme, unepolitique cohérente. « Quantifier sera peut-êtreune de nos recommandations… Mais l’absencede chiffres n’empêche pas d’agir », déclare MarieCarrega, adjointe au secrétaire général del’Onerc (Observatoire national sur les effets duréchauffement climatique intégré au ministèrede la Transition écologique), mandatée elleaussi par le CNC. Au regard de leurs premièresobservations sur le terrain et des discussionsavec des professionnels, le secteur est en retard,avec des pratiques surprenantes, notamment entermes de gestion des déchets. « Mais on ne peutpas dire que rien n’a encore été fait. Et certainesinitiatives sont fortes », poursuit Marie Carrega.Pour l’instant – et c’est en cela que la volonté

du CNC de structurer sa politique quis’imposera aux acteurs du milieu estpertinente –, les expériences sont sporadiques

Pour l’industriecinématographiquecela aurait dû êtrel’année de la prisede conscienceécologique. Les effetsde la pandémie ontredéfini les contoursd’une mutationinéluctable. Vers unmieux? Encore troptôt pour le dire.

es Arcs Film Festival de 2019 avaient annoncé lacouleur. Désormais, le cinéma sera vert. Chaqueédition de ce rendez-vous d’altitude vivra aurythme de son Green Lab qui réunit expertset partages d’expériences menées dans toutel’Europe. Cette initiative, l’une des premièresd’un grand festival généraliste en France, devaitamorcer un mouvement de fond et de réflexionpour réduire l’empreinte écologique du secteur,sur le modèle de l’action qu’il avait menée enfaveur de la parité avec son Lab des Femmes.Le Festival de Cannes, en mai suivant, devaiten être le point d’orgue.Le Covid 19 est passé par là, annulant au

passage tous les grands rendez-vous habituels,mettant le secteur à genoux jusqu’à en redéfinirles priorités. Mais justement, en tant que causeet conséquence d’un bouleversement écologiqueprofond, cette pandémie contribue-t-elle àpropulser le nécessaire verdissement ducinéma? La réflexion est lancée, des initiativeshier pionnières trouvent de plus en plus leurraison d’être et se multiplient. Reste toutefois àconvaincre la grande majorité d’un secteur quin’aime pas trop changer ses habitudes mais qui,bientôt, n’aura plus le choix.En 2011, il avait été établi que l’industrie

audiovisuelle (c’est-à-dire la productiontélévisuelle, publicitaire et cinéma) françaiselibérait 1,1 million de tonnes de CO2 chaqueannée dans l’atmosphère, soit l’équivalent de 20

20B-REELFILMS.ALLRIGHTSRESERVED

Page 103: Les Echos - 11 12 2020

LES ECHOS WEEK-END – 59

LE CINÉMA PASSE AU VERT

Sur un tournage, les décors constituentle second poste gourmand en émission carboneet représentent, à eux seuls, 20% du total.Le collectif Eco-déco dont Valérie Valero, cheffedéco de Fin de matinée d’Hiroshi Nishitaniou de Shakira de Noémie Merlant, est l’unedes fondateurs, s’est depuis près de deux ansvivement mobilisé pour négocier un tournantécologique. « C’est la première fois que notremétier décide de réfléchir à ses habitudes de

par Ecoprod ou certaines régions commel’Ile-de-France. Au cours de 2020, les prioritésont évolué. « Certes, les tournages ont reprisavec même une certaine frénésie depuisle déconfinement. Avec deux attitudes encore plustranchées : les plus vertueux le restent, les autres– la grande majorité, pas encore sensibiliséeau sujet – se comportent plus mal qu’avant »,constate Mathieu Delahousse, président etcofondateur de Secoya.

et dépendent beaucoup de l’engagementpersonnel de ceux qui les prennent. Et celamalgré Ecoprod, un collectif incitatif créé pardes acteurs du secteur (l’Ademe, Audiens,France Télévisons, Tf1 ou Film Paris Région)qui sensibilise aux bonnes pratiques, existedéjà depuis dix ans. Notons au passage quel’audiovisuel (films, séries ou festivals TV) est,à ce jour, plus impliqué que ne le sont lapublicité et le cinéma.

UN GROS TRAVAIL DE SENSIBILISATIONLa première étape cruciale est celle du tournage,dont l’économie est tendue et contrainte.Le premier poste coûteux en bilan carbone estcelui de la régie avec notamment le transport,l’hébergement et la nourriture où le gaspillageest souvent la règle. Créée par deux régisseurs,la société Secoya, propose toute une gammede services qui va de l’audit à la mise en placed’un écomanager chargé de sensibiliser leséquipes et de faire respecter les protocoles,des règles de gestion de déchets ou de tablesde régie vertueuses, renforcées de règlessanitaires depuis la Covid (fruits ou alimentsen vrac, fontaine à eau et gobelet nominatif,machine à café en grain etc.).Avant la pandémie, le surcoût d’un tournage

écologique était estimé à 2% du budget totalmais pouvait se compenser par les écobonus(en moyenne de 15000 euros) distribués

Dans leurdocumentaireDemain (2015),Cyril Dion et

Mélanie Laurentprésentent

des citoyens quichangent les choses

au quotidien.

À gauche, I am Greta,le documentairede Nathan Grossmansur et avec GretaThunberg (au centre),est présenté dansla section Déplacerles montagnes duFestival des Arcs2020.

Ci-contre :007 Spectre (2015),le film de SamMendes, unesuperproductionavec grands moyenset gros effets pastrès écocompatibles…

EONPRODUCTIONS/COLL.CHRISTOPHEL

DR

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60 – LES ECHOS WEEK-END

CULTURE LE CINÉMA PASSE AU VERT

travail. L’initiative vient du terrain », souligne-t-elle. En cela, elle est originale. Une charte depratiques durables a été élaborée, enrichie defiches qui recommandent la réutilisation desfeuilles de décor amovibles, la location, l’achatd’occasion et la revente des éléments décoratifs,la limitation des quantités de matériaux et dessolvants, l’utilisation de peintures ou collesécoresponsables, la réduction et le tri desdéchets… voire une consommation réduitede l’eau pour le lavage des pinceaux.Durant le Production Forum de janvier 2020,

le collectif Eco-déco avait réalisé un décor de80 m2 écoresponsable afin de montrer, in vivo,les résultats et les avancées de leurs recherches.Depuis, un questionnaire a été envoyé à près de2000 professionnels. Il servira à créer un siteInternet qui cartographiera, répertoriera etpartagera toutes les bonnes adresses dematériaux, de ressourcerie. L’initiative estfinancée par l’Ademe, agence de transitionécologique mais fonctionne grâce àl‘implication bénévole des techniciens décoles plus motivés.Parmi ces bonnes adresses, figureront sans

doute celles des Provence Studios, situés àMartigues, où ces pratiques vertueuses sontle lot quotidien. Les 26000 m2 qui lescomposent sont écoconçus, Le toit est recouvertde panneaux solaires et dotés de fenêtres pourtourner en lumière naturelle. Les bâtimentssont chauffés et refroidis par thalassothermie et éclairés par leds. Et tout ce qui estrécupérable – de l’eau de pluie aux décors – l’est.Ces studios d’abord construits pour séduireles productions américaines ont déjà accueilliquelques films français : les scènes de cascadede Taxi 5, le tournage sur fond vert de GastonLagaffe ou encore Bronx, le dernier OlivierMarchal diffusé sur Netflix.Mais l’impact écologique du cinéma dépasse

largement les tournages. Une fois un filmterminé, il voyage souvent de festival en festival

avant sa sortie en salle. Par leur attractivité,ces manifestations constituent un autre grospoint noir du bilan carbone du secteur.Là encore, les transports, l’hébergementet les déchets créés par les festivaliersnécessitent que de bonnes pratiques soientmises en place. Benedikt Erlingsson,le réalisateur islandais deWoman at war, avaitdemandé à chacun des festivals qui l’avaientinvité à défendre son film de compenserson bilan carbone en plantant des arbres.Le Green Lab des Arcs Film Festival,

dont la deuxième édition commence (en ligne)le 12 décembre 2020 a aussi cette ambitionvertueuse. La démarche est d’autant pluspertinente que le bilan carbone du festival,surtout en termes de transports est lourd :il faut acheminer les festivaliers venus de toutel’Europe à 1950 mètres d’altitude ! Là encore,le partage d’expérience a été privilégié à traversune plate-forme à construire, l’idée étantà court terme de créer une Charte Greencommune à tous les festivals européenscomparables (La Rochelle, Riga, Rotterdamou Sarajevo…), mais s’adaptant aux contraintesde chacun. À Sarajevo par exemple, c’est le trides déchets qui pose problème.

UN PRIX ASSOCIÉ À UNE ASSOCIATIONTous s’engagent aussi à compenser leur bilancarbone. Aux Arcs, il est évalué à environ2000 euros par édition. Cette somme, doubléepar le partenaire TV5 Monde, est reverséeà une association choisie par le lauréat du prixCinéma et engagement environnemental. En2019, Édouard Bergeon (Au nom de la terre),l’a destinée à une association qui lutte contrele suicide des paysans. Cette année, c’est NathanGrossman auteur du documentaire I am Greta,qui l’attribuera. D’autres événementssont prévus dont une section «Déplacerles montagnes» qui mélange engagementcitoyen et écologie, coréalisée avec la

Le réseau Utopia,qui gère des cinémasplutôt dans le sudde la France, a décidéde lancer un projetd’un petit complexede quatre salles et300 places. C’estPont-Sainte-Marie,commune limitrophede Troyes (Aube), quil’accueillera dans unécoquartier. Conçupour aller bien au-delàdes normes actuelles, lebâtiment sera à énergiepositive, avec pompeà chaleur, panneauxphotovoltaïques etsystème de géothermie.Son ossature sera enbois, son toit en pailleet sa consommationen eau minimale grâceaux toilettes sèches.«Notre projet estlégitime et cohérentavec la programmation

engagée d’Utopia»,déclare Anne Faucon,sa future directrice,même si les institutionsou la mairie de Troyesleur ont mis des bâtonsdans les roues.Pour s’imposer, il a falluconvaincre le fondseuropéen dedéveloppementrégional (Feder),ouvrir une campagnede souscription Ululeet s’assurer un soutienmédiatique et depersonnalités engagéestels Robert Guédiguianou Charlotte Silvera.Les travaux devraientdébuter en 2021.Ce cinéma écologiquepionnier et exemplairecomprendra égalementune salle d’éducationà l’image et desensibilisationà l’écologie.

UTOPIA, UNE SALLE MODÈLE

Woman at war (2017),de BenediktErlingsson oul’histoire d’Halla,célibatairesans histoirequi cacheune activisteenvironnementaletrès engagée.

SLO

TMACHINE/JOUR2FETE

DR

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62 – LES ECHOS WEEK-END

CULTURE LE CINÉMA PASSE AU VERT

jeune militante Camille Étienne, porte-paroledu mouvement #onestpret. « Certes, on brûledu CO2, même quand le festival se déroule enligne, reconnaît volontiers Guillaume Calop,le délégué général,mais en organisant cesrencontres, en diffusant ces expériences, ces filmset ces idées, nous contribuons à sensibiliseret à propager les comportements vertueux. »Si le cinéma a un rôle capital à jouer pour

la sensibilisation et la représentation, c’est sansdoute à travers les films qu’il est le plus à mêmede diffuser des messages. Il l’a d’ailleursbeaucoup fait au tournant des années 2000.RappelonsMicrocosmos : le peuple de l’herbeproduit par Jacques Perrin,Home de YannArthus-Bertrand, La Marche de l’empereur deLuc Jacquet, oscar du meilleur documentaireou encore Demain de Cyril Dion et MélanieLaurent, pour ne citer que les principauxsuccès. Ces films qui ont incontestablementcontribué à sensibiliser le grand public à labeauté de la planète et à la nécessairesauvegarde de sa biodiversité, ont-ils étéproduits et réalisés de manière vertueuse?« Pas vraiment, avoue Luc Jacquet,même si onfait attention. Mais on tourne longtemps, dansdes endroits difficiles d’accès… J’ai essayé demettre en place un protocole du type Secoya de laconception du projet jusqu’au banc de montage,mais cela coûte très cher. »Plus que jamais, l’argent devient le nerf de la

guerre. « Financer des films sur l’environnementest devenu un enfer. C’est désormais un sujet tropgrave pour être de l’entertainment. D’autant qu’ilest difficile de toucher ceux qui ne sont pas

l’urgence médiatique au second plan tout enmalmenant la parole scientifique. Et deconclure : « Désormais, on navigue à vue. »Pour les expertes mandatées par le CNC, 2020

pourrait pourtant être le moment opportunpour adopter demeilleures habitudes de travailet permettre au secteur d’entamer vraimentsa transition écologique. On attend doncavec impatience leurs recommandationset la politique mise en place, qui ne serontdévoilées qu’au prochain Festival de Cannes.

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Alors productrice pour la société Haut et Court,fort engagée dans une démarche quotidienneécologique depuis cinq ans, Julie Billy racontecomment le tournage à l’été 2019 de Gagarine, quis’inscrit dans le cadre de la démolition de la cité, aété le plus responsable possible. «Nous tournionsà Ivry-sur-Seine où les équipes, quand ellesn’étaient pas recrutées sur place, se rendaient àvélo ou en métro. Nous n’avons eu que deuxvoitures à disposition pour les comédiens. La décoa privilégié la réutilisation et la récup en limitantles déchets. Et nous avons au maximum tenté detravailler avec les habitants du quartier : pour lesfigurants, les équipes techniques et la cantine,confiée à une association locale qui n’a servi quedes repas végétariens. » Le budget de ce premierfilm (2,8 millions d’euros) ne permettait pas demettre en place une stratégie complète avec

L’EXEMPLE DU TOURNAGE DE « GAGARINE »

tous a créé une dynamique positive, une ambianceinclusive et chaleureuse qui a eu beaucoup debienfait dans le management d’équipe. Nous avonsconstaté que ces efforts écologiques retombentsurtout sur la régie qu’il faut donc renforcer d’unou deux stagiaires. Dans le même temps, nousavons économisé sur les repas dont le coût estpassé de 25 à 20 euros par tête. Tourner écoloest donc rentable mais nécessite une journéede travail en amont avec les chefs de postepour revoir l’organisation générale. »La pandémie a ensuite contraint à une stratégiemarketing totalement virtuelle (sans déplacementsdes équipes, ni support papier). Ce qui n’a pasempêché Gagarine, labellisé Cannes 2020, d’êtrevendu à 40 pays (dont Singapour, Taïwan etles États-Unis) avant sa sortie France prévuele 6 janvier 2021.

convaincus, de leur faire comprendre que cesenjeux-là sont vitaux et de bon sens », expliqueencore le réalisateur, dont les cinq prochainsprojets sont financés avec l’aide de la FondationPrince-Albert-II-de-Monaco et pensés dans unelogique de mini-studio avec des déclinaisonssous la forme d’expositions immersives, d’undocumentaire, d’un support pédagogique, etc.« Je ne pars plus pour un tournage mais enexpédition d’où je ramène des images », déclare-il.C’est devenu encore plus compliqué cette année,avec la pandémie qui accroît les coûts desvoyages et a paradoxalement fait passer

L’équipe de Secoya aideles sociétés de

production dans unedémarche écologique.

écomanager ou bilan carbone. «Nous avons doncfait appel à Secoya pour la gestion des déchets, latable régie sans plastique, ni capsule de café et lamise en place d’une signalétique de sensibilisation.Enfin, en postproduction, nous avons réutilisé lesmêmes disques durs et limiter les sauvegardes. »Quels bénéfices ont été tirés? «L’engagement de

HAUTETCOURS

DR

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Le podcast d’actualité des Echosqui transforme l’informationen de passionnantes histoires

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64 – LES ECHOS WEEK-END

CULTURE

Nostalgie, quandtu nous tiens. Sous le sapin cette année,les cadeaux pourraient avoir le doux parfumdu passé. D’AmyWinehouse à Serge Gainsbourgen passant par McCartney, l’heure est auxrééditions, ces albums à succès enrichis deraretés, de démos et de captations live. Unemadeleine de Proust pour tous collectionneurs etunemanière habile pour les maisons de disquesde continuer à faire vivre les catalogues de leursartistes. Finis les années 1990 et l’âge d’or du CD,durant lesquels les majors rééditaient à tour debras les albums stars de l’époque du vinyle. «Onest désormais sur la même culture que le livre: lebel objet prend d’autant plus d’importance à l’èrede la dématérialisation. Et si le travail autour duson est toujours très important, la partie éditoriales’est davantage étoffée», explique Georges deSousa, directeur du label Panthéon et directeurcommercial physique chez Universal Music.Ainsi, les albums de Piaf se nichent-ils

désormais dans une luxueuse mallette,l’album «Young Americans» de Bowiese décline sur un éclatant vinyle doré.Sans parler de l’intégrale de Dylan, avecpour écrin une boîte en forme d’harmonica.Une façon de prendre à rebours l’écouteactuelle de la musique en ligne. Et de seplonger dans l’histoire d’une œuvre.Au risque parfois de tomber dans le

superflu : la réédition de «The Wall » des PinkFloyd joue ainsi des photos inédites, mais aussides écharpes, des sous-verres et des billes enl’honneur du groupe. « C’est un stratagème demercenaire. Une façon pour les artistes et leursmaisons de disques d’inciter les fans les pluspassionnés à acheter des albums qu’ils ontdéjà », nuance le critique musical SimonReynolds.

À LA RECHERCHE DES PÉPITESAu-delà de leur packaging soigné ou insolite,qu’apportent musicalement ces nouveauxcoffrets? « Beaucoup de disques réédités sont loind’être des chefs-d’œuvre, mais sont présentéscomme des trésors perdus », ironise SimonReynolds. « On a parfois l’impression d’écouterles fonds de tiroir, tel le prochain album “Afterthe Gold Rush” de Neil Young, avec deux bonusdu même morceau », ajoute le journaliste et

QUAND LA MUSIQUEREJOUE SES SUCCÈS

Entre disques hommages et anniversaires, nouveaux albumsenrichis d’une poignée d’inédits, le monde de la musique revisite

ses classiques à grand renfort de rééditions.

Par Cécilia Delporte

KIRTONROSS/EYEVINE/ABACA

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LES ECHOS WEEK-END – 65

LES RÉÉDITIONS D’ALBUMS

documentariste rock Christophe Conte.Fort heureusement, on y trouve bien souventdes «pépites». Car tels des chercheurs d’or,les équipes des labels s’immergent dans la viedes artistes, à la recherche de vieilles bandesoubliées, de morceaux inédits, de versionsalternatives ou d’enregistrements live encorejamais dévoilés au public. Un véritable travaild’investigation, à la rencontre des photographesde l’époque, d’auteurs spécialisés, de fan-clubs,pour dénicher ces fameuses raretés. Surtoutdans les années 1960 à 1980, «l’industrie musicalereproduisant à l’infini ces témoignages d’uneépoque idéalisée», analyse Christophe Conte.Ces coffrets onéreux – avoisinant souvent

la centaine d’euros –, les grandes maisons dedisques en dévoilent dix à quinze par an. Leurélaboration nécessite plus d’un an de travail.« C’est très différent de la commercialisationtraditionnelle d’un disque, où l’artiste fait sapromotion, confie Thierry Jacquet, directeurgénéral du Back Catalogue chez Warner MusicFrance. Pour Édith Piaf par exemple, l’intégrales’est vendue à 10 000 exemplaires à traversle monde. Mais nous sommes généralementsatisfaits lorsque nous vendons 1 000 à 5 000exemplaires de ces coffrets, car ils s’adressentà une cible très spécifique. On est souvent surdes éditions limitées et numérotées, il fautcalculer très précisément le nombre d’albumsà fabriquer. »

UN TRAVAIL MÉTICULEUX SUR LE SONNombreuses sont aussi les rééditions « mettanten lumière une période plus méconnue del’histoire de la musique », s’enthousiasmeSimon Reynolds. Il cite la compilation«Kankyō Ongaku» qui « fait découvrir aux paysoccidentaux une musique encore peu disponibleen dehors du Japon ». Autre réussite, cette fois-ciplus médiatisée : le dernier collector de Prince,«Sign O’The Times», riche de deux concertset pas moins de 45 morceaux inéditset remastérisés (voir encadré p. 66). Laremastérisation, ce processus très spécifiquepermettant d’apporter aux sons du passéde la brillance, de la rondeur, de la profondeuret de supprimer les possibles nuisances.C’est ainsi que le catalogue des Beatles, dont

les bandes analogiques ont été converties en

années 1960. Au même titre que lesenregistrements d’Elvis Presley aujourd’huine s’écoutent plus comme à l’époque, surun 78 tours à Memphis », décryptele musicologue Guillaume Gilles.Une façon de dépoussiérer les morceaux

grâce aux nouvelles technologies, d’étendreles droits de l’éditeur sur le catalogueet de vendre des albums. Quitte à provoquerl’agacement des puristes, à l’image du mixagede «Sgt. Pepper’s » en 2017. « Certains fans y ontvu une trahison de l’esprit original du disque »,se souvient Christophe Conte. Parfois, c’estaussi une manière de « réparer» l’histoire,comme en témoigne l’opus «Let It Be… Naked»en 2003, remanié afin qu’il sonne tel queMcCartney l’aurait voulu : un album rock brut,dénué des chœurs et cordes ajoutés à son insupar le producteur Phil Spector. « C’est un actede respect de l’œuvre de l’artiste, clarifieGeorges de Sousa. Il faut le faire si cela a dusens. Il y a des artistes qu’il ne faut surtout pastoucher, car la patine fait partie de l’histoirede l’album. Je pense à Buena Vista Social Clubet au son cubain notamment. »

studios, un livede 2007 et des remixinédits.À droite: Prince,en 1987, l’annéede la sortie de sonalbum «Sign O’TheTimes», rééditéaujourd’huien coffret deluxe.

À gauche:Amy Winehouse,en novembre 2006.Les titres de lachanteuse anglaise,décédée en 2011, fontl’objet d’un coffreten édition limitée:«The Collection»,comprenant 3 albums

10000EXEMPLAIRES VENDUSdans le monde pour le coffret

intégral d’Édith Piaf.Sa conception

a obtenu un Grammy Award.

numérique, a été soigneusement retravaillé en2009 pour un résultat flamboyant. Car loin dedénaturer l’œuvre d’origine, la remastérisationfait partie de l’évolution naturelle d’un album:« Le disque évolue, la technologie aussi et ceserait une erreur de considérer que l’on écouteles Beatles comme nous le faisions dans lesJ

EFF

KATZ/THEPRINCEESTATE

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CULTURE LES RÉÉDITIONS D’ALBUMS

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Drôle de paradoxe, c’est bel et bien le retouren grâce du vinyle qui a donné un secondsouffle au marché des rééditions, parfoismême s’agissant d’albums très contemporains.« C’est un procédé purement commercial, puisquele disque original n’appartient pas au vinyle.Musicalement, cela déforme l’œuvre qui n’a pasbesoin d’être retravaillée. C’est devenu unargument marketing un peu factice », estimeGuillaume Gilles. À l’instar du groupe Coldplayqui célèbre cet hiver les 20 ans de son albumculte «Parachute» avec une remastérisationdu CD… en vinyle.Dans les pas de leurs aînés, les jeunes talents

ont repéré le filon. Fin 2019, trois des plus grosalbums de l’année – signés Angèle,Aya Nakamura et Lomepal – faisaient peauneuve avec des versions enrichies d’inédits.L’album «Sainte-Victoire» de Clara Luciani s’estquant à lui offert deux rééditions, chacune richede bonus différents. Elles séduisent d’autantplus ces artistes qu’elles leur permettentd’être à nouveau présents dans les classementsde streaming, nerf de la guerre désormais.« C’est une façon de continuer à exister, expliqueGeorges de Sousa. On est sur un marché d’offre.Si vous voulez faire parler de vous, il fautsouvent sortir une version deluxe, avecun nouveau packaging, un nouveau contenu. »Les rééditions, une petite entreprisequi ne connaît pas la crise.

DES COFFRETS AU TOP

«Goats Head SoupCoffret SuperDeluxe»Album mésestimédes Rolling Stones,dans lequel figurele mégatube Angie,« Goats Head Soup »retrouve de sasuperbe dansun coffret de quatreCD revisitantentièrement le disque.Une versionremastérisée, enrichied’un « live » à Bruxellesde 1973, de démos etde trois inédits, dontle fougueux Scarlet.

«Future NostalgiaDeluxe Boxset» et«Bonus Edition 2 CD»Révélation de l’année,Dua Lipa revisite avecpanache son albumdisco-pop «FutureNostalgia ». Lesdéclinaisons sontnombreuses, de laversion agrémentéede 17 remix – dontl’un avec Madonna –à un coffret deluxeaccompagnénotamment dephotographies.Mention spéciale à laréédition française, oùfigure un duo inéditavec Angèle.

«Sign O’ The TimesCoffret SuperDeluxe»Chef-d’œuvrede Prince, «Sign O’ TheTimes » vient d’êtreréédité trente-trois ansaprès sa sortiedans une versionremastériséeet agrémentée defaces B et remixd’époque. La versionla plus luxueusepropose trois CDd’inédits et deux live :les concerts d’Utrechtle 20 juin 1987 etde Paisley Parkle 31 décembrede la même année.

«Grand Prix EditionDeluxe»Succès de l’année 2020,Benjamin Biolaypropose son «GrandPrix» en versionenrichie de cinqnouveaux morceaux,dont un duo avecJuliette Armanet.La réédition dédicacéepar l’artiste contientégalement un beaulivret de 80 pages,riche en photoset anecdotes autourde l’œuvre, ainsiqu’une affiche collectorà choisir.

«Gimme Some Truth.The Ultimate Mixes»À l’occasion du 80e

anniversaire de lanaissance de JohnLennon, Yoko Onodévoile cettesplendide compilation,remixant depuisAbbey Road lesmeilleurs morceaux del’artiste. Avec son filsSean à la production,l’album – proposéen multiplesformats – comprend36 morceaux, dont lestitres posthumes issusde «Milk and Honey »,ainsi qu’un livretde 124 pages.

«Serge Gainsbourg :Back to Mono»Les fans deGainsbourg peuventréécouter d’une autreoreille ses albumsenregistrés entre 1958et 1968. S’il étaitdevenu impossiblede trouver leschansons de l’artistetelles qu’elles étaientparues à l’origine– en mono –, chacundes morceaux a étéretravaillé depuisAbbey Road dans sonformat d’origine.Le tout proposé dansun superbe coffretvinyle 180 grammes.

Benjamin Biolay, photographiéà Paris en juin. Son dernier album«Grand Prix» sort en versionenrichie.

MATHIEUZAZZOPOURLESECHOSWEEK-END

DR

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11 DÉCEMBRE 2020

STYLE

Bianca Castafiore,le célèbre

personnage créépar Hergé en 1938.

DES CAILLOUXET DES BULLESAu-delà de leurs formesgraphiques, les bijouxoffrent de parfaits scenariiaux auteurs de BD. Entrevols rocambolesques,trésors cachés et pouvoirdes pierres, ils brillentdans le neuvième art.

Par Gabrielle de Montmorin

HERGÉ/MOULINSART–2020

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STYLE

entdix mille euros. C’est l’estimation basse pourun crayonné de la page 54 de l’album Les Bijouxde la Castafiore qui sera mis aux enchèresle 14 janvier prochain par la maison de ventesArtcurial. Le précieux document de travail– équivalent à un scénario précédant la pageencrée –, devrait vite trouver preneur. PourSaveria de Valence, spécialiste du départementbandes dessinées de l’entreprise, « personnene sait vraiment expliquer pourquoi les gensaiment tant cette histoire de bijoux. C’est le seulalbum qui se passe entièrement à Moulinsart,peut-être est-ce l’une des raisons. »Apparue pour la première fois en 1938 dans

Le Petit Vingtième, la diva toute bijoutée revientneuf ans plus tard dans Le Sceptre d’Ottokar,poussant des trilles difficilement contenus parles vitres Secure de sa Cadillac. Il faut attendre1963 pour que ses bijoux deviennent les hérosd’un album entier. N’en déplaise à SéraphinLampion, ravi à l’idée d’assurer «une petitefortune en bimbeloterie», la prima donna nepossède pas tant de pièces de valeur, hormissa fameuse émeraude offerte par le maharadjahde Gopal. Cela n’empêche pas la légende des’écrire au son de cris perçants, «Ciel !… MesBijoux!», ponctués par «Hi-i-… Mon collier!»

Crayonné dela page 54 des Bijouxde la Castafiored’Hergé. Certainesdes cases ont étéutilisées pourla version finale,mais les trois

derniers strips sontinédits. En ventechez Artcurial, cetteplanche est estiméeentre 110000et 130000 euros.

HERGÉ/MOULINSART–2020/ARTCURIAL

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BIJOUX ET BANDE DESSINÉE

lorsque se casse le modèle fantaisie signé TristanBior. À défaut de réelle intrigue, l’humour del’albummarque le neuvième art, qui ne cessede lui rendre hommage. C’est le cas de la bandedessinée Les Bijoux de la Kardashian, parue il ya deux ans sur une idée de François Vignolle,journaliste spécialiste des sujets policiers etjudiciaires, avec la complicité du grand reporterJulien Dumond, et Grégory Mardon au dessin.« J’ai découvert cette icône des réseaux sociaux,qui vend sa propre personne et sa famille parle biais d’une émission de téléréalité. Laconfrontation entre ces deux mondes donnait unehistoire très télégénique. D’un côté, des anciensvoyous aux noms d’un autre temps, dignes desfilms de Melville ou d’Audiard. De l’autre, la

lancer une nouvelle série mettant en scène uneagence de détectives privés dans les années 1950,rien de tel qu’une affaire rocambolesque qui adéfrayé la chronique. Cerise sur le gâteau, lepersonnage principal, Yvonne Labrousse, laditeBégum, épouse de l’Aga Khan, était une femmeravissante, ancienne Miss France, dotée d’uneélégance et d’un charme digne d’une Grâce Kellydans ses meilleurs rôles. C’est tout de même plusglamour qu’une enquête sur un cocu, fût-ilmagnifique. J’ai choisi ce fait divers pour leburlesque de sa conclusion : les malfaiteursrestituant le butin dans une vulgaire boîte debiscuits en fer-blanc. Ce contraste entre l’immensevaleur des bijoux et le dérisoire écrin m’a semblépathétique et jubilatoire ! »

INVRAISEMBLABLE FAIT DIVERSLorsque la Bégum s’écrie dès la première page« Ciel ! Mes bijoux ! », le lecteur se régale. Toutcomme l’amateur de ligne claire, dans laquelles’intègrent harmonieusement les bijoux à peinestylisés. Chez Dupuis, l’éditrice Elsa Sztulcmana vite été séduite par le projet. « L’alliance de sesdialogues à la Simenon, de cet invraisemblablefait divers et des planches immersives d’OlivierSchwartz était irrésistible. Dès les premièrespages, j’ai été catapultée dans les années 1950,

De gauche à droiteet de bas en haut:la réplique cultede la Castafiore,maintes foisreprise; une casedes Bijouxde la Kardashian ;un extrait de AtomAgency, les bijouxde la Bégum.

fashion week de Paris avec tout ce qui compteen matière de mode et de grands joailliers », serappelle François Vignolle. « Ce n’est pas unehistoire sur Kim Kardashian, mais sur le regardque l’on porte à ces icônes qui brassent du ventavec génie, sans forcément avoir un énormetalent. » Lorsqu’il s’agit de donner un titre àl’album, le salut à Hergé s’impose. « Je fais partied’une génération biberonnée à Tintin. Enfants,nous avions les yeux écarquillés devant ce jeunereporter. L’occasion était trop belle pour ne pasfaire un petit clin d’œil. »Publié lui aussi en 2018, Atom Agency,

les bijoux de la Bégum s’inspire d’un célèbrehold-up survenu en 1949, sur la route deCannes. Son scénariste, Yann, détaille : « Pour

GLENAT

DUPUIS

HERGÉ/MOULINSART–2020

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STYLE BIJOUX ET BANDE DESSINÉE

comme on plonge dans un film d’Audiard.Parfaitement ficelé, le scénario proposait unarrière-plan passionnant et très peu exploré enBD : la diaspora arménienne.»Élément scénaristique imparable, le vol de

bijoux est déjà le thème choisi par le duo RenéGoscinny et Albert Uderzo en 1954, lorsqueLa Libre Belgique leur commande un personnageproche de celui de Tintin. Cela sera Luc Junior,dont la première aventure, Junior et les bijouxvolésmet en scène un jeune reporter aidépar son chien Alphonse et son ami photographeLaplaque. La bande dessinée belge excelle dansl’art de résoudre le mystère d’une disparitionde bijoux, des enquêtes de Gil Jourdan à L’Affairedu collier de Blake et Mortimer, une aventurehaletante autour du collier deMarie-Antoinetterestauré par le joaillier Duranton-Claret pour lecompte d’un riche collectionneur.Lorsqu’il s’agit d’imaginer un nouvel épisode

des Schtroumpfs après la mort de Peyo, en 1993,son fils Thierry Culliford retient à son tour l’idéedu vol avec Le Schtroumpfeur de bijoux. «Àchaque case, à chaque phylactère, nous nousinterrogions: mon père aurait-il fait comme celaou autrement? Et puis, très vite, nous avons décidéde faire comme nous le sentions. Par chance,l’album a été très bien reçu, les gens ont trouvéque nous avions respecté l’esprit des personnages.Quand j’étais plus jeune, ce qui me marquait leplus était le côté miniature des Schtroumpfs.D’ailleurs, mon père emmenait ses collaborateursdans la forêt et les obligeait à se mettre à platventre pour être à hauteur de Schtroumpfs! C’est lethème de cette histoire où le Schtroumpf est utilisépar des malfaiteurs pour s’introduire chez les genset leur voler leurs bijoux. Tout comme l’argentintroduit dans l’album précédent, les bijouxn’intéressent pas les Schtroumpfs car, dans leurunivers, cela ne représente rien.»À l’inverse des petits hommes bleus, les

bijoux ont été toute la vie de Patrice Ordas,disparu l’hiver dernier. Directeur de la Haute

École de joaillerie de Paris durant près de trenteans, auteur de sagas historiques, il devientscénariste de bande dessinée. En 2015, sort lepremier tome des Naufragés du métropolitain,écrit à la demande d’Hervé Richez, directeuréditorial de Bamboo Édition. Soit l’histoirede l’atelier Verne, place Vendôme, auquelRaspoutine commande cinq croix sertiespour les enfants du tsar Nicolas II en 1910,l’année de la crue centennale.

SONNER JUSTE« Le bijou en matière scénaristique représenteun enjeu concret et, en attirant la convoitise,il devient un élément déclencheur intéressant.L’idée de ce projet sur le monde de la joaillerieexigeait que cela sonne juste. L’expérience dePatrice l’a permis. Il était aussi très versé dansl’histoire des Romanov. » La précision du dessinde Nathalie Berr répond à celle des dialoguesracontant la technicité des métiers joailliers. Ausujet d’une émeraude, le maître d’atelier évoquele risque « d’une faiblesse du poignet pour égriserun béryl à la ceinture » ou félicite le travail

TROIS VOLS MIS EN DESSIN

Le collier de la reineSerti de 650 diamantstotalisant 2840 carats,le collier réalisépar les joailliersde la couronneBoehmer & Bassengeest au cœur d’uneescroquerie orchestréeen 1784 par Jeannede Valois-Saint-Rémy,pseudo-comtessede La Motte. La reineMarie-Antoinettesera éclaboussée parle scandale.

Les bijouxde Kim KardashianVenue assister auxdéfilés parisiens,la vedette américainede téléréalité estbraquée dans la suitede son hôtel dansla nuit du 2 octobre2016. Parmi les24 pièces dérobées,une bague sertied’un diamant tailleémeraude de 18,88carats, flirtant avec

les 4 millions d’euros,plusieurs colliersdu joaillier new-yorkaisJacob & Co, et deuxmanchettes Cartierserties de diamants,pour un préjudiceestimé à 8 millionsd’euros.

Les bijouxde la BégumRaflés en deux minutessur la route, à 3 km deCannes, en août 1949,les 50 bijoux de lafemme de l’Aga Khan(ci-contre) déchaînentla presse. On parled’un préjudice de200 millions de francs,soit 6 millions d’euros.Ils seront « restitués»,sur le trottoir deslocaux de la brigadede Marseille. Une partiea été dessertieen 199 brillantset 14 carats de pierresprécieuses, faisantbaisser l’estimation à160 millions de francs.

Ci-contre:Le Schtroumpfeurde bijoux, premieralbum réalisé aprèsle décès de Peyo.En bas: l’ancienneMiss France YvetteLabrousse devenuela Bégum (épousede l’Aga Khan),ici en juin 1957.

PEYO/LELO

MBARD2021

AGIP/BRIDGEMANIMAGES/LEEMAGE

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de la polisseuse grâce auquel « la lumièretourne sans accrocher. Toutes les arêtes sontvives. » « À mon sens, la fiction n’est bonneque lorsqu’elle est nourrie de sincéritéet d’authenticité », ajoute l’éditeur.Un mantra que peuvent revendiquer

Pierre Christin et Annie Goetzinger pour leurenquêtrice Édith Hardy qui, dans le septièmetome de ses aventures, Les diamants fondentau soleil, se retrouve face à des gemmes voléesà une famille juive durant la guerre.Paru en 2012, l’album s’inscrit dans uneproduction bédéphile contemporaine animéepar l’univers des diamantaires. Le scénaristeYann a ainsi imaginé «Les Éternels», une sériehaute en rebondissements entre Israël etAnvers. Les longueurs suggestives des tenuesdes héroïnes, dessinées et mises en couleur parFélix et Dominique Meynet, rivalisent avec

la pierre traverse le XXe siècle en faisant serencontrer la petite et la grande histoire. «L’idéeest un voyage dans le temps et dans l’espace où lehéros est un bijou qui passe de main en main,résume son auteur, Fred Bernard. J’ai lu deshistoires de diamants et de chercheurs de pierres.J’adore cet univers. J’imagine la vie des pierreset des bijoux. J’aime l’idée qu’ils puissent êtretransmis, qu’ils soient retaillés et remontés,mais aussi qu’ils portent des noms. Ce sont despersonnages en soi.»De New York à Tokyo, deGreta Garbo à Yannick Noah, le diamant suit sadestinée, par deux fois offert spontanément, engeste désintéressé. «Je trouvais beau d’imaginercela. La plupart du temps, les pauvres bijoux sontenfermés dans des coffres. J’aime aussi que lediamant passe des bas-fonds aux grandes soirées.»

CLIN D’ŒIL À LA CASTAFIOREL’année 1961 marque l’apparition d’une pievoleuse qui n’est pas sans rappeler un autrecélèbre passereau amateur de carats. « C’estévidemment un clin d’œil à la Castafiore.Je ne pouvais pas faire autrement. » Au fil des69 pages, l’agilité intellectuelle inhérente à labande dessinée s’allie à la poésie du dessin deJacques de Loustal pour lequel le projet tombaità pic. « J’étais à la recherche d’une histoire plusvariée, avec moins d’unité de temps et de lieu.J’avais envie de dessiner de grandes images avecun texte légendé en dessous. Ce type de découpagem’a permis de travailler en couleur directe,c’est-à-dire une esquisse au crayon, puisle dessin au net à la plume, ensuite la couleur,à l’aquarelle. Je reprends un tout petit peu à lapierre noire, pour mettre de légers accents. Pourla pierre, j’ai regardé pas mal de documentationsur la taille des diamants. Je ne suis pasconnaisseur, à l’exception du Koh-i Noor qui, enplus d’être un diamant légendaire, est le nom

l’humour du scénario, symbolisé par l’agence«De Boers», suggérant la De Beers, puissantconglomérat diamantaire sud-africain. Au fildes six tomes, le lecteur peut apprendrel’origine des diamants noirs ou admirer unerareté de la nature, deux macles en tête-bêcheformant une étoile de David.Composée à huit mains – Agnès et Jean-

Claude Bartoll au scénario, Bernard Köllé audessin, Patricia Krahen ou Jocelyne Charranceà la couleur –, la série «Diamants» se concentrequant à elle sur le monde des mines avec laWorld Mining Co, qu’un héritier doit perpétuerau prix d’aventures politico-économiquesimpliquant FBI et consorts.Totalement atypique, l’album Bijou, paru

à l’automne dernier, a pour héros un diamantbaptisé «Bellaciao». Extraite par un orpailleurdépité ayant tenté sa chance en Afrique du Sud,

En haut:Les Naufragés dumétropolitain,

l’histoired’un atelier

de joaillerie, dontles dialogues

retracentles techniques bien

connues de sonauteur, Patrice

Ordas. Ci-contre:Les Éternels,Le Diamant

d’Abraham, une sérieà rebondissementssur l’univers des

diamantaires.

DARGAUD2005

GRANDANGLE

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QUELQUES CHIFFRES

9 langues : c’est lenombre de traductionsde L’Affaire du collier,d’Edgar P. Jacobs,paru en 1967. Le titrefait toujours partie destrois best-sellers des26 albums d’enquêtesde Blake et Mortimer.

400000 exemplaires :le total des ventesdu Schtroumpfeurde bijoux, depuissa parution en 1994.

470000 exemplaires :le tirage de la série«Bouncer », traduiteen 17 langues depuisla parution du premiertome en 2001.

10 millionsd’exemplaires :le total des ventes desBijoux de la Castafiore,paru en 1963, toutestraductionsconfondues, y comprisle wallon de Liège,d’Ottignies ou deNivelles, ou encorel’alsacien, le picard,le bourguignon…

d’une marque tchèque de crayons noirs de grandequalité que j’utilise régulièrement. »Dans un registre diamétralement opposé, la

série «Bouncer» nous transporte dans un FarWest livré à la fureur des hommes prêts à toutpour mettre la main sur le plus gros diamant del’Ouest, «L’œil de Caïn», ou, dans le tome 10, surun trésor maudit dans le désert de Sonora. Plusau sud, la chaîne des Llanganates, cesmontagnes de l’Équateur réputées inaccessibles,offrent un cadre spectaculaire à L’Or du bout dumonde. Attendu en février prochain, l’album a

pour héroïne une jeune fille de cuisineirlandaise qui part à la recherche du trésord’Atahualpa, le dernier empereur inca.« L’auteur a bénéficié de l’expertise de PhilippeEsnos, un chasseur de trésor qui a passé vingt ansà traquer le trésor d’Atahualpa. Personne nesaura jamais s’il l’a trouvé puisque,malheureusement, il vient de mourir. Il a livrétoutes les péripéties de sa recherche à JérômeFélix qui les a transposées dans une fictionse passant à la fin du XIXe siècle », détailleson éditeur Hervé Richez.

Du trésor au talisman, la frontièreest souvent mince. Ce que confirme ElsaSztulcman. « Dans la série de science-fiction“Valérian et Laureline”, l’héroïne, qui raffoledes bijoux (diadèmes, boucles d’oreillesexubérantes, bracelets manchettes, anneauxde cheville), possède même une “pierre vivanted’Arphale”, qui se fixe à la peau pour embellirsa propriétaire ! Le bijou peut aussi être porteurde pouvoirs divins ou de malédiction. C’estun thème récurrent de la série d’aventureet de mythologie viking “Thorgal”, avec la pierrede sang volée par la redoutable Kriss de Valnor,la bague Ouroboros qui fait voyager dansle passé, ou la ceinture d’or qui donne sonimmortalité à la Gardienne des clés. Aaricia,la compagne de Thorgal, naît en serrant uneperle en forme de larme dans chaque poing,qu’elle portera en pendentif et dont elle utiliseral’éclat pour redonner la vue à Vigrid, un jeunedieu aveugle. » De saint Marc à Van Hamme,il n’y a que quelques planches.

DR

CASTERMAN

Dans l’album Bijou de Fred Bernard, le personnage principal est le diamant Bellaciao.

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LES ECHOS WEEK-END – 75

STYLE HORLOGERIE

FONCTIONS En plus de leurdispositif dédié à la mesurede temps plus ou moins courts,les chronographes sont parfoisdotés de fonctions particulières.L’une de ces subtilités mécaniquesles plus connues est appelée« flyback » en anglais ou « retouren vol » en français. Conçue en 1936pour les aviateurs, elle permet, enune seule manipulation, la remiseà zéro d’un chronométrage encours et le lancement simultané

d’un nouveau. Créée un siècle plustôt, la fonction dite « rattrapante »a quant à elle été inventéepour lire les temps intermédiairesgrâce à une deuxième aiguillecentrale des secondes que l’onpeut stopper et relancer àla demande. Dissimulée sousla première aiguille, celle-ciapparaît seulement quandon l’arrête et rattrape la coursede l’autre instantanémentpour se resynchroniser avec elle.

20000CHFLe 8 novembre àGenève, la venteAntiquorum comptaitun chronographeHeuer en or rose (1950).Cet instrument àcalendrier complet etphases de Lune, estimé5000 – 7000 CHF,est parti très au-dessusà 20000 CHF(18703 euros).

5292DOLLARSChez Sotheby’sNew York, le27 novembre dernier,un beau chronographeBvlgari en or jaune etacier de 2010, cadrannoir et mouvementautomatique, a étéadjugé à 5292 dollars(4441 euros) dans safourchette d’estimation(4000-6000 dollars).

819000DOLLARSHKÀ Hong Kong le29 novembre, Phillipsproposait unchronographe PatekPhilippe Nautilus enacier à fonction flyback(2008). Le lot a dépasséson estimation haute(620000 dollars HK)avec une adjudicationà 819000 dollars HK(88306 euros).

DESIGNUn an après sa naissance, la collection Code 11.59d’Audemars Piguet s’enrichit d’une dizaine deréférences. Boîte ronde à lunette ultrafine,cornes ajourées et carrure octogonale:l’architecture identitaire, élégante et originale,est ici associée à des cadrans laqués aux couleursinédites, intenses et profondes. Chacun d’eux estprotégé par le verre saphir doublement incurvéspécifique aux Code 11.59, qui est creusé dessuset dessous pour créer un fascinant effet visuel.

PARTICULARITÉD’un diamètre de 41 mm, ce chronographeest façonnée en or gris et s’ouvre sur un cadranbordeaux fumé dont les nuances s’assombrissentvers le pourtour. Ce dégradé chromatiqueest accentué par une finition satinée soleil quipermet à l’ensemble de jouer avec les refletsde la lumière à chaquemouvement de poignet.

MOUVEMENTLamanufacture du Brassus a équipé le boîtierd’un fond saphir, pour observer la beauté d’unmouvement automatique à fonction flyback dotéd’unemasse oscillante squelettée en or 22 carats.

CARACTÉRISTIQUESÉtanchéité : 30 m.Échelle tachymétrique sur le rehaut.Bracelet en alligator.

COMBIENPrix sur demande.Frank DeclerckPhotographe : Romin Favre

BON CRU DEBORDEAUX

LE MOT LA COTE

CADRANS

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L’ANALYSE

76 – LES ECHOS WEEK-END

STYLE

Un projet ambitieux. Si les conditions sanitairesle permettent, la créatrice japonaise ReiKawakubo et son époux Adrian Joffe, à la têtedu label Comme des Garçons, ainsi que de leurmultimarque Dover Street Market, plébiscitésà travers le monde, devraient inaugurer uneantenne parisienne dédiée à la jeune création.Baptisée Dover Street Trading Market,cette dernière sera attenante à la boutiqueComme des Garçons de la rue du Faubourg-Saint-Honoré, à Paris, et mettra en lumièresept jeunes talents, sélectionnés par le duo.On y trouvera les créations cool et fonctionnellesdu label américain masculin ERL, les pièceschics et radicales de la marque new-yorkaiseVaquera, la créativité débridée du collectifde Singapour, Youths in Balaclava, ou bienencore les propositions glamours et joyeusesdu français Victor Weinsanto.Inaugurée il y a tout juste un an, l’entité

Dover Street Market Paris est un incubateurde talents aux fonds totalement privés,qui propose à ces jeunes pousses unaccompagnement global visant à développerleur production, leur stratégie commerciale,leurs relations avec la presse ou encoreen mettant à disposition un espace showroom,pendant la fashion week parisienne.

UN DUO PUISSANT ET DISCRETSoutenir la jeune création n’est pas nouveaupour ce couple aussi puissant que discret. C’esten 2004 qu’ils inaugurent à Londres leur conceptstore Dover Street Market, qui présente à la foisdes pièces de leur propre marque et cellesde jeunes stylistes émergents à qui ils donnentle coup de pouce décisif – le français Jacquemusdès 2013, GraceWales Bonner en 2016…Leurs créations y côtoient des marques de luxeétablies comme Celine, Balenciaga, Prada…Au fil des années, le principe s’exporte à

travers le monde et différentes antennes ouvrentau Japon, à New York, Los Angeles, Pékin ouSingapour. L’idée? Chaque créateur est invitéà imaginer la scénographie de son espace.Une visibilité unique: être vendu chez DoverStreet Market devient un label : «C’est une grandeopportunité et une forme de reconnaissance.Adrian Joffe est quelqu’un de très disponible, jesais que je peux l’appeler à tout moment lorsque

LA TRÈS INFLUENTE REI KAWAKUBOMéconnue du grand public, la créatrice japonaise du label Comme des Garçons influence

et promeut la création depuis plus de quarante ans. Et s’apprête à ouvrir, avec son épouxAdrian Joffe, un espace dédié au travail de jeunes designers à Paris.

Rei Kawakubophotographiée parPaolo Roversi quicollabore depuisplus de trente ansavec Comme desGarçons.

Par Maud Gabrielson

Comme des Garçons, à Tokyo, après des étudesde philosophie. Suivant la vague de créateursjaponais venus s’installer à Paris dansles années 1960 et 1970 – Kenzo Takada, YohjiYamamoto, Issey Miyake –, elle défile dansla capitale française dès 1981, et surprendavec son esthétique nouvelle, articuléeautour du noir, des volumes atypiques etde la célébration du corps. «Rei Kawakuboest un maître à penser pour toutes les générationsde créateurs, Martin Margiela en tête. C’est

j’ai besoin d’un conseil stratégique, et la modede Rei Kawakubo a une grande influence surmon travail. Ce sont de parfaits mentors»,explique ThebeMagugu, le créateur sud-africainde 26 ans, lauréat du Prix LVMH 2019, dontles créations féminines et modernes sontprésentées dans les boutiques Dover StreetMarket, mais également sur leur site Internet.À 78 ans, Rei Kawakubo continue d’exercer

son influence sur la jeune génération dedesigners. C’est en 1969 qu’elle fonde la marque P

AOLO

ROVERSI/COMMEDESGARÇONS

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Plus d’infos sur lesechos.fr/weekend

LES ECHOS WEEK-END – 77

MODE

ERL, Victor Weinsanto,Vaquera… Quelques-unsdes labels qui serontvendus au concept storeparisien de DoverStreet Market.

le genre de designer que l’on classe du côtédes auteurs. Elle a très tôt eu la volontéde déconstruire le vêtement pour redéfinirla notion de beauté, de formes, de volumes.Elle travaille comme le ferait une artisteet imagine une mode intemporelle qui en ce sensne répond pas à la logique de la mode.La sienne est radicale et avant-gardiste à tousles niveaux », analyse Leyla Neri, anthropologuede la mode et professeur à l’antenne parisiennede la Parsons School of Design.

UNE STRATÉGIE TRÈS EFFICACESi Rei Kawakubo se concentre sur sa visionde la mode et fuit toutes les interviewset apparitions publiques, elle n’en garde pasmoins un œil sur sa précieuse entreprise :« Elle a une vraie vision commerciale, elle esttrès calée en marketing », insiste Leyla Neri.Son époux, Adrian Joffe, est à la tête del’entreprise et en supervise l’expansion.Ce Sud-Africain de 67 ans, ancien traducteurinterprète en japonais et tibétain, rencontrela créatrice au début des années 1990, à Tokyo.Mariés en 1993, ils ont ensemble fait deComme des Garçons et de Dover Street Marketdes références dans la profession. « Il y a eud’autres tandems forts dans la mode, YvesSaint Laurent et Pierre Bergé, Valentinoet Giancarlo Giammetti… mais la différenceavec eux c’est qu’ils ont toujours été ouverts àl’esprit du collectif », poursuit l’anthropologue.

Le collectif. C’est ainsi que la créatricefonctionne. Rei Kawakubo a toujours prissous son aile une ribambelle de jeunesdesigners prometteurs, les formant, puisinvestissant dans leurs propres marquesou leur ligne dédiée. En 1993, le créateurJunya Watanabe inaugurera ainsi la siennebaptisée Junya Watanabe Comme des Garçons.La créatrice Chitose Abe, a la tête de Sacai,a elle aussi été formée à l’école Rei Kawakubo.En 2012, c’est au tour de Kei Ninomiya,qui après avoir exercé de nombreuses annéescomme designer textile pour Comme desGarçons, se voit offrir son propre label baptiséNoir. Au fil des années, l’entreprise a multipliéles lignes. Et la liste est longue : Commedes Garçons Homme Plus, Comme des GarçonsHomme Plus Evergreen, Comme des GarçonsHomme Deux, Comme des Garçons Shirt,Comme des Garçons Tricots, Commedes Garçons Parfums, Comme des GarçonsBlack, Comme des Garçons Wallet…La plus identifiable étant sans conteste Commedes Garçons Play, avec ses pièces basiquesflanquées du cœur rouge aux yeux rieursplébiscitée par les ados des beaux quartiers.

«Rei Kawakubo est la reine des collaborations»,commente Leyla Neri. Converse, Nike, Adidas,Vans, Supreme ou même Louis Vuitton,en 2008. La marque a également cédé auxsirènes de la fast fashion en signant une lignepour le géant suédois H&M, la même année.

Cet hiver, Salomon, l’équipementier sportifspécialisé dans les sports au grand air, se prêteà l’exercice sur deux paires de chaussures.« C’est l’opportunité pour nous d’atteindreun public différent du nôtre, plus jeune, plusen phase avec la mode. Ce genre de collaborationnous permet de briser un peu les frontières entrela mode urbaine et les performances sportives »,explique Éric Pansier, directeur de la marquebasée en Haute-Savoie. Avec un chiffred’affaires supérieur à 3 millions d’euros en 2019(en augmentation de 10% par rapport à l’annéeprécédente), le modèle Comme des Garçonsne semble pas près de s’essouffler. Et continuede fasciner et d’inspirer le monde de la mode :en 2017, le prestigieux MetropolitanMuseum of Art de New York a consacré unegrande rétrospective au travail de la créatrice.Le dernier créateur à y avoir eu droitde son vivant s’appelait Yves Saint Laurent.

ELIRUSSELLINNETZ

MAXWELLAURELIENJAMES

DR

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L’INSPIRATION

78 – LES ECHOS WEEK-END

STYLE

DE CATHERINE DE MÉDICIS À COCO CHANELLe 3 décembre, Chanel dévoilait sa collection des Métiers d’art. Un défilé hommageaux savoir-faire de ses artisans et manufactures habituellement présenté dans un lieuhistorique. Cette année, ce fut au château de Chenonceau, sans public… ou presque.

Une collectioninspirée par leslieux, avec unepalette noir et blanccomme le sol dela grande galerie.Ci-dessus: Médicis,Chanel, même parentéde monogramme.

Par Béline Dolat

es cinq arches du château deChenonceau se reflètent dans les eaux du Cherà la nuit tombée. Après Cinecitta à Rome,ou encore les salles égyptiennes du METà New York, la maison Chanel et sa directriceartistique Virginie Viard ont choisi ce sitesolennel pour inspiration et décor du défilédes Métiers d’art 2020-21. Musique.Les silhouettes apparaissent dans la grandegalerie de l’édifice baptisé «châteaudes Dames» qui fut, entre autres, le lieude résidence de Catherine de Médicis. Aucunjournaliste, aucune cliente, aucun «amide la maison» n’assiste physiquement au défilé.Pas un chat… si ce n’est la comédienneKristen Stewart, spectatrice privilégiée,filmée comme un personnage de fiction.Cette année, la collection des Métiers d’art

est une expérience numérique. Le film estd’une qualité irréprochable, le livre de photosde Juergen Teller accompagnant l’invitationvirtuelle portant un QR Code est déjà uncollector, mais sans l’émotion et la dramaturgied’un défilé live, quels sont les enjeux d’un telévénement pour Chanel? « À chaque défilé,on apprend à composer avec l’exceptionnelde la crise sanitaire, explique Bruno Pavlovsky,président des activités mode et de Chanel SAS.Pour la collection de prêt-à-porter présentée enoctobre à Paris, nous avions peu d’invités, maisnos influenceurs étaient connectés et réagissaientsur les réseaux sociaux comme s’ils étaientau Grand Palais. Notre propos, c’est le rêve pourtous, et les outils digitaux nous aident à rendreaccessible ces moments rares. Pour le défilé desMétiers d’art, l’enjeu est différent car la collectionest plus confidentielle. Ce sont des vêtementsexceptionnels, considérées comme des pièces decollection par nos clientes. Le défilé a été diffusésur nos médias et, en parallèle, nous avons ouvertune plate-forme qui leur était destinée – ainsiqu’aux amis de la maison – leur donnant accèsà un contenu exclusif. Ici, l’objectif n’est pas defaire de l’audience, il est d’avoir un impact juste. »

Effet miroir, un double C, monogrammede Catherine deMédicis gravé dans la pierredu château, rappelle celui de Coco Chanel.Virginie Viard joue l’écho entre ces deux femmespuissantes avec une collection à la sobriétéaffichée, inspirée par l’architecture des lieux. Unepalette noir et blanc comme le sol de la grandegalerie, le losange, motif Renaissance, rythmegraphiquement robes et accessoires. Broderiessignées Lesage et Montex, effets de plumes parLemarié, plissés Lognon, parures Goossens… lacollection est une démonstration de la virtuositéde ces artisans qui travaillent pour tout le secteurdu luxe et que la crise n’a pas épargnés.

«Depuis mars, beaucoup de collections ont étéannulées, sinon minimisées, et un certain nombredes clients des métiers d’art rencontre desdifficultés. Comme tous les fournisseurs dela mode, ils sont les premiers du secteur à êtrefragilisés. Le dernier semestre de 2020 n’a pas étébon et le premier semestre de 2021 sera lui aussidifficile, précise Bruno Pavlovsky. Chez Chanel,nous les soutenons, notamment en maintenantnos commandes. C’est pour cela que nous avonsété les premiers à proposer une collection Croisièreau printemps. Parce que dans ce contexte,

il s’agissait aussi de continuer à les fairetravailler.» Comme tous les grands nomsdu luxe et depuis près d’un anmaintenant, la maison Chanel faitle grand écart. Susciter le rêveet l’envie par la créativité, et faireface à des impératifs économiquesinédits. Tout un art. J

UERGENTELLER

DR

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L’ANALYSE DE SABINE DELANGLADE

LES ECHOS WEEK-END – 79

MODE

Depuis 1924 et sa création à Trivero dansle nord de l’Italie par Pietro Loro Piana,la marque cultive sa différence, sur fondde transparence et de luxe discret. Ici pas plusde défilé que de designer vedette, l’attentionde la maison est portée sur le produit,entre savoir-faire artisanal, matières uniques(«baby cachemire» du nord de la Chineet de Mongolie, vigogne des Andes, lainemérinos extrafine d’Australie et de Nouvelle-Zélande), technologie de pointe et fabrication100% transalpine. C’est dans cet espritque la maison a lancé pour l’hiver la collection

TOP MOUMOUTE«Cashfur», interprétation innovanteet responsable de la fourrure, conjuguantexcellence des fibres et mode de productionrespectueux des animaux et de l’environnement.À l’instar de cette veste à capuche réversiblezippée «Jackson», marron clair et crème,confectionnée en cachemire et soie. Un peude douceur dans la rudesse de l’hiver.

COMBIEN ? Veste réversible Jackson encachemire, Loro Piana, 4900 euros.Texte : Astrid FaguerPhotographe : Sarah Braeck

De Michel de Montaigne, on se souvientdes propos sur l’amitié, les passions,le pouvoir. Moins de sa virulencecontre les dangers des corsets pourles femmes: «Pour faire un corpsbien espagnolé (fin comme celuid’une espagnole), quelle géhenne nesouffrent-elles, guindées et cenglées,jusques à la chair vive? Ouy, quelquesfois à en mourir», (Essais, 1580).Cinq siècles plus tard, la grandeaffaire c’est encore le «no bra»(#FreeTheNipple). Ce ne sont pasles féministes qui jettent leurs«soutifs» par-dessus les moulinsde l’oppression masculine commecertaines les avaient symboliquementbrûlés dans les années 1970.Mais les (petits) seins ont prisle goût du confort pendant le premierconfinement et l’ont gardé: 18%des moins de 25 ans n’en portent plusjamais, contre 4% six mois plus tôt.Le corps des femmes, fesses, ventreet poitrine, fut durant des sièclessoutenu d’un seul tenant parun corset. Il fallut attendre HerminieCadolle, ouvrière corsetière, amiede Louise Michel, pour, en 1889,fendre son corset sous la poitrine.Le «corselet-gorge»était inventé maissera peu porté. En 1913,Mary Jacob l’amélioreen nouant deuxmouchoirs avec uneépingle à nourrice.En 1931, Warner BrosCorset Companyl’industrialise enclassifiant de A à Dles quatre tailles debonnet. En 1992, le Wonderbra fait unmalheur historique. Le soutien-gorgea permis aux femmes de mieuxbouger, mieux respirer. Il lesopprime aujourd’hui. Allez savoir!

Après avoir libéré les mouvementsdes femmes, le soutien-gorgeles opprime. Le confinement

est passé par là.

L’OBJET

ILLU

STRATIONKIM

ROSELIERPOURLESECHOSWEEK-END

ILLU

STRATIONBABETHLAFONPOURLESECHOSWEEK-END

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NŒUDS & PAPILLOTTES Bracelet en plexiglas, GIORGIO ARMANI, 1 250 €. Champagne Blanc de Blancs dans son étui seconde peau, 100% papier et 100% recyclable, RUINART, 73 €.Décoration de sapin Nœud, HEMA, 3,25 €. Escarpins I Love Vivier en veau velours, ROGER VIVIER, 550 €. Porte-monnaie en cuir, fermoir cuir et onyx, édition limitée, AMBUSH × BVLGARI,490 €. Verre à Martini, Vega, en cristal, BACCARAT, 300 € le coffret duo. Bracelet en argent antique et émail, BOTTEGA VENETA, 850 €. Montre Khaki Field Mechanical, HAMILTON,570 €. Papillotes praliné-chocolat avec blagues à l’intérieur, À LA MÈRE DE FAMILLE, 27,50 € la boîte de 250 g. Rouge Allure, Les Chaînes d’or de Chanel, édition limitée, CHANEL, 41 €.

(PETIT) COMITÉDES FÊTES

Des cadeaux de dernière minuteet une bonne dose de cotillons

pour une fin d’annéesans morosité.

Photographe: Olivia FremineauRéalisation: Noémie Barréassistée de Marion Renoux

STYLE

Page 125: Les Echos - 11 12 2020

CRACKERS & VITAMINES Vide-poche Templo sculpté à la main, en résine, OCTAEVO, 29,50 €. Bouteille de champagne du Coffret Exc3ptions, écoconçu, contenant trois cuvées,Brut Rosé, Brut sous Bois, Blanc de Blancs, BILLECART- SALMON, 230 €. Cracker de Noël Jo Malone London chez SEPHORA, 35 €. Assiette en céramique décor orange, JOHN DERIAN ×ASTIER DE VILLATTE, 84 €. Théière en porcelaine, 0,55 l, DAMMANN FRÈRES, 50 €. Œufs de brochet au yuzu, 100 g, PETROSSIAN, 17 €. Ceinture en cuir, BURBERRY, 650 €.Parfum d’intérieur Fleur d’oranger, DIPTYQUE, 50 €. Solaires en métal doré et verres miroir, BOTTEGA VENETA EYEWEAR. Mule plate en cuir, LOUIS VUITTON, 595 €.

CADEAUX DE DERNIÈRE MINUTE

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ROSACES & CONFETTIS Paquet de cantucci, biscuits aux amandes, ANTONIO MATTEI chez EATALY, 8,30 €. Boîte d’allumettes, KERZON, 9 €. Collier chaîne en Monile, BRUNELLOCUCINELLI, 1 200 €. Bougie marbrée Gordes, CASA LOPEZ, 38 €. Étui à AirPods en cuir, LORO PIANA, 380 €. Boîte Stratus en carton-pierre, matériau qui recycle les chutes de papierde l’Atelier d’Offard, spécialisé en papiers peints imprimés à la planche, ATELIER D’OFFARD × STUDIO OF XXI. Éclairs, bouchées de chocolats, trois parfums, VINCENT GUERLAIS,18 € la boîte de 10. Sculpture murale Hirondelle bleu saphir, LALIQUE, 640 €. Montre Sigan, en matériaux biosourcés, SWATCH, 65 €. Pochette en cuir et métal, CHANEL, 1 400 €.

Page 127: Les Echos - 11 12 2020

BULLES & FRUITS DÉGUISÉS Boule de Noël en verre décoré, DIOR MAISON, 450 € le set de 4. Bandana Paisley en coton, LEVI’S, 15 €. Caviar Platine®, 50 g, ASTARA, 92,50 €. VanityDior Travel brodé d’un motif résille, DIOR, 1 700 €. Sac Le Pliage Nano, en cuir, LONGCHAMP, 220 €. Babies en serpent d’eau, CELINE PAR HEDI SLIMANE, 820 €. Panettone aux amandesde Sicile, 1 kg, DOLCE & GABBANA e FIASCONARO, 37 €. Cuiller en inox doré, ABSOLUMENT MAISON au BHVMARAIS et aux GALERIES LAFAYETTE, 129,90 € la ménagère de 24 pièces.Champagne Blanc de Blancs et coffret en fibres naturelles, entièrement recyclable, conçu et fabriqué en France, orné des anémones emblématiques de la Maison, PERRIER-JOUËT, 64 €.

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84 – LES ECHOS WEEK-END

STYLE

LE REPAIREDRINKS & CO, COCKTAIL DÉTONANT

Parmi les nombreuxétablissements que nous avons pu testerà domicile depuis le premier confinement,le Bistrot Flaubert est l’une de nos meilleuressurprises. Cette adresse parisienne, l’unedes pionnières de la bistronomie, fut crééeà la fin des années 1980 par Michel Rostang,à côté de laMaison Rostang, sa table deuxétoiles. L’une et l’autre ont été reprises il y aun an par Stéphane Manigold, déjà à la têtedes excellents Substance et Contraste.Cet entrepreneur de la gourmandise a réuniles chefs de ses quatre affaires pour mettreau point un menu commun, à emporter oulivré chez vous. À 39 euros, la formule tapedans le mille. Pour deux raisons : c’estvraiment bon et c’est facile à réchauffer et àservir. Commençons par le goût : un veloutébutternut-châtaigne, suave et réconfortant,un saumon gravlax bien condimenté debetteraves et d’aneth ; un épatant filet decanette (juste) cuit au barbecue, une jolieblanquette ou un agneau rosé aux légumesde saison ; un riz au lait au beurre salé,un tiramisu, un crumble aux pommes francdu collier. Rien à dire, sinon bravo.L’autre atout de ce menu très bien ficelé,donc, c’est de simplifier la vie du client : lesplats sont livrés dans de sobres emballagesen carton, plus présentables sur votre table,et plus écolos, que les barquettes enplastique. Pour les plats chauds, un petittour au micro-ondes et, hop, c’est prêt ! Lescuissons, calculées au millimètre, tiennentcompte de ce coup de chaud ultime. Enfin,vous pouvez ajouter à votre commandeune bouteille sélectionnée par AnthonyPedrosa, le directeur de Substance, quivous sera facturée presque à prix coûtant.Bistrot Flaubert : click and collectou livraison à Paris et petite couronnesur rostang.bonkdo.com. Tél. : 0142670581.Menu à 39 €. À la carte, comptez environ 50 €.

BISTROT FLAUBERT,EN PLEIN DANS LE MILLE

PARIS À la fois boutique, bar et restaurant,Drinks & Co est un concept store d’un nouveaugenre qui vient d’ouvrir ses portes débutdécembre sous l’hôtelHilton, près de la gareSaint-Lazare. Impossible de rater ses largesbaies vitrées donnant sur le parvis et ceinturant500 m2 d’espaces lumineux décorés façonjungle urbaine. Aux beaux jours, la longueterrasse accompagnant les lieux attirera encoreplus les regards.En attendant la réouverture des bars et lieuxde restauration, il est possible d’y découvrirplus de 1000 spiritueux en provenance dumonde entier, alignés le long des murs, ainsiqu’une petite sélection de vins et champagnes.Une boutique au concept original puisqueles clients peuvent goûter l’intégralité desalcools proposés à la vente. L’occasion de selaisser tenter par des breuvages peu connus,souvent artisanaux, introuvables ailleurs.Comme Séquoia, un whisky bio distillé dansle Vercors, Ryoma, un étonnant rhum japonaisvieilli en fût de chêne, ou Amázzoni, un ginbrésilien composé d’espèces botaniques localesétonnantes (fleurs de nénuphars géants, grainesde cacao…). On teste et, si on aime, on passeen caisse. Une offre singulière, à l’imagede ce nouveau lieu qui se veut vivant du matin

Illustrations: Amélie Falière

LES PETITS PLATSDANS LES GRANDS

PAR LAURENT GUEZ

Bonne adresse de quartierCorrect, sans plus

Très belle table

Cuisine, décor : tout y estAttention : table d’exception

au soir en passant par des afterworksmusicaux très attendus dès que les restrictionsliées à la crise sanitaire seront levées.On pourra alors se restaurer de quelques plats«comfort food» (ribs marinés au whiskeyJameson Original, vacherin au mascarponearomatisé au gin Beefeater…). Mais aussidéguster des cocktails préparés par la jeuneéquipe de bartenders. Là encore, l’idée est derendre le bar accessible à tous avec des cocktailsà prix abordables (entre 10 et 13 euros).Et bonne nouvelle : les spécialités proposéesau bar se déclinent avec ou sans alcool. Desrecettes miroirs : mêmes verres, mêmes saveursgrâce aux nouveaux «spirit free», des élixirsélaborés avec la même exigence que lesspiritueux classiques mais «désalcoolisés».Envie de prolonger le plaisir en réalisant cescocktails chez vous? Alors, offrez-vous unemini master class ! Tout au long de la journée,sans réservation, seul ou à plusieurs, on vousapprendra en trente minutes à manier le shakeravant de déguster votre création.Ludovic Bischoff

C’EST OÙ : 106 bis, rue Saint-Lazare,75008 Paris.Tél. : 01 70932770.

Chez Drinks & Co, à mi-chemin entre la boutique de spiritueux et le bar à cocktails. VINCENTMACHER

ALEXISANICE

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LES ECHOS WEEK-END – 85

GOÛT

01 LES PLUS LUMINEUSESGanache de chocolat noir à labergamote, praliné au jasmin,ganache au pain d’épices…De 9 à 72 pièces, les coffretsde chocolats aux saveurslimpides signés Jacques Genintémoignent d’une justesseaffriolante (à partir de 12 €).www.jacquesgenin.fr

02 LES PLUS TEXTURÉESLe fondant d’un gianduja auxnoisettes, la volupté d’uneganache de chocolat noir à lacrème d’Isigny, le croquant d’unecoque de nougatine fourréede praliné… Chez Bernachon,les assortiments des nouvellesboîtes Paraty (à partir de 21 €)

attestent du talent de la maisonlyonnaise à travailler le chocolattout en textures.www.bernachon.com

03 LES PLUS FINGER FOODDes fines barres chocolatées,comme des mikados, à différentspralinés (à partir de 14 €) :lait et pécan, noir croquant,lait et noix de coco… Tel estl’un des jolis tours du MOFchocolatier Nicolas Cloiseaupour La Maison du Chocolat.www.lamaisonduchocolat.com

04 LES PLUS BARRÉESFidèle à lui-même, le «bean-to-bar » Plaq se distingueà nouveau. Pour les fêtes,

la manufacture de la rue du Nil,à Paris, propose des coffretsépurés, réunissant non pas desbonbons mais quelques-unesde ses plaques noires et au lait(à partir de 53 €).www.plaqchocolat.com

05 LES PLUS SURPRENANTSLe MOF chocolatier PatrickRoger signe un nouvelassortiment de ses fameusesdemi-sphères. Des coques dechocolat colorisées, renfermantun caramel coulant en quatreparfums : abricot, bière blonde,pêche-réglisse et surtout beurresalé (58 €). Déroutant.www.patrickroger.comJérôme Berger

TOP 5 LES MEILLEURES BOÎTES DE CHOCOLATS

LA RÉDACTION DES « ÉCHOS » S’EST FAIT LIVRER

LA CHRONIQUE VINDE JEAN-FRANCIS PÉCRESSE

Elle est, à sa manière, l’ultime survivanted’une civilisation. De celles dont l’on perdla trace à force d’en effacer le nom. Datéde l’an 2009, ce flacon que l’on saisitd’une main tremblante porte, en mentiond’origine géographique, l’étendard des«coteaux flaviens». L’indication protégéea cessé de l’être cette même année, faute decombattants. Ne restait plus à la défendreque Franck et Nadine Renouard, en leurdomaine de Scamandre, précisément situé,sur cette marche orientale du plateau desCostières, en cette extrémité où, au sièclepremier de notre ère, les Romains del’empire des Flavius poussèrent la culturede la vigne. Au-delà, à quelques pas versl’ouest, c’étaient les terroirs gaulois. Ici, lesfrontières de l’histoire recouvrent celles dela géographie. Mais, comme souvent, il s’esttrouvé une administration pour les séparer.Au surplomb de la Petite Camargue, lavingtaine d’hectares de vignes de Scamandreest affectée aux Costières de Nîmesmais, sin’était cette langue des taureaux qui vousattachent à jamais à cette terre, avec ses solsde galets roulés teintés de 50 nuancesd’argiles rouges, le domaine est plutôt typérhodanien, ascendant Châteauneuf.Il y a vingt ans seulement, il n’existait pas.En place des carignan, syrah et grenache,des marsanne et roussanne, et aussi deschardonnay et petit manseng, n’y poussaitque de la luzerne. Rien ne destinait FranckRenouard, ponte parisien de l’implantologiedentaire, à jeter là les bases d’une aventureviticole. Rien d’autre qu’un serment de finde soirée, passé avec son ami de Camargue,le peintre Pierre-Marie Brisson. «J’étaisamateur de vins, mais de vins finis…», dit-ildrôlement, étonné encore, lui l’hommede science, de cette folie cartésienne.Les débuts furent épiques. Une poignéed’hectares sans maison ni cuvier, unepremière récolte vinifiée dans des cuvesextérieures. « On dormait dans la voiturepour les surveiller. » Renouard a tracé saroute, impérial, s’écartant de l’esprit desCostières pour élaborer, à l’image du 2013,éblouissant de fraîcheur, des vins profondset tendus, doués de cette impressionnantecapacité de garde qu’ont les grandessignatures rhodaniennes.Scamandre rouge 2013, Costières de Nîmes. 22 €la bouteille. www.comptoir-mediterraneen.com

À PARIS, KGB, FUSION ASIATIQUEKGB c’est Kitchen Galerie Bis, la petite sœur de ZeKitchen Galerie, l’étoilé de William Ledeuil. L’espritest le même, ambiance galerie d’art moderne. Lejeune chef Martin Maumet y propose une bellecuisine contemporaine où transpire une influenceasiatique toute en sauces, herbes, bouillons,légumes et agrumes. Le tataki de bœuf est marinéau piment, sésame noir et noisette-satay, lasavoureuse poitrine de porc confite et caramélisées’accompagne d’un riz thaï vénéré au yuzu kosho(au piment) et de choux grillés. L’étonnant houmousde lentilles vertes du Puy est relevé d’agrumeset le mascarpone aux pommes confites profitede la subtile note du miso blanc. Claude Vincent

À PARIS, MAMÉ KITCHEN, CURE DÉTOXLe plein de végétal, pas mal de céréales et un peude protéines animales. Au menu chez MaméKitchen, une cuisine flexitarienne où, selon unconcept en vogue outre-Atlantique, les protéinessont traitées en «condimeat » (façon condiment).Les plats offrent beaucoup de liberté : une baseà choisir entre polenta, quinoa ou boulgour, paréede brocolis, patates douces, kale ou chou rouge– avec tofu ou œuf bio, effiloché de poulet Label

C'EST COMBIEN : de 7 à 13 €.POUR COMMANDER : 25, rue des Grands Augustins,75006 Paris. En click & collect ou en livraisonsur kgb.shop-and-go.fr

C’EST COMBIEN : plats environ 14 €, desserts 4,50 €.POUR COMMANDER : 40, rue de Ponthieu,75008 Paris. En click & collect sur mame-kitchen.com ou via Deliveroo.

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rouge, haloumi (fromage chypriote) ou saumongrillé. Les sauces sont équilibrées. Idéal pourrester raisonnable avant les fêtes – sans se priverde dessert : un succulent brownie sans glutenaux graines de sarrasin toastées. Neïla Beyler

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86 – LES ECHOS WEEK-END

STYLE AUTO

NOTRE PRÉFÉRÉETOYOTA COROLLA 180h COLLECTIONPuissance : 180 ch.De 0 à 100 km/h : 7,9 s.Longueur : 4,37 m.Rejets de CO

2: 86 g/km.

Consommation : 3,7 l/100 km.Prix : 33450 €.

ABORDABLEAvec des tarifs débutant sous les30000 euros (pour la 122 ch) et nedépassant les 35000 euros avec le pleind’options, la nouvelle Corolla hybrideest d’autant plus intéressante que, pourtrouver aussi bien à consommationcomparable, hormis des modèles diesel(qui battent de l’aile) ou des électriques(moins polyvalents à ce tarif), il n’existepas d’alternative. Sans évoquer sesloyers bon marché.

RELÈVE ASSURÉESans payer de mine, la Corollaest la voiture la plus vendueau monde. 100% hybride, sadouzième génération devraitsuivre la voie tracée.

Par Cédric Fréour

PLUTÔT CONFORTABLEDouceur et silence de fonctionnement,appétit d’oiseau, construction etassemblage fait pour durer, siègesenveloppants (surtout ceux de la version180 ch faisant penser à une Porsche),déco contemporaine, cuir de qualité,finitions rassurantes… La Corolla respirele travail achevé. À deux détails près :le fameux «effet mobylette» de latransmission CVT n’est pas totalementgommé et le coffre n’est pas immense.Mais la Corolla existe aussi en break.

VÉLOCESous le capot, maîtrise ancestrale oblige(la première Toyota hybride remonte àvingt-quatre ans !), la Corolla n’offre nonplus un, mais deux mariages essence-électricité. L’un «traditionnel» de 122 chet un autre inédit de… 180 ch. Lequelaccélère avec célérité (100 km/h en 7,9 s)sans, évidemment, trop consommer(moins de 4 l/100 km en ville !). Touten restant d’une grande quiétude…Qui dit mieux? Pas grand monde!

FIABLEPresque 50 millions d’exemplaires enbientôt cinquante-cinq ans de carrière :cela en fait des Corolla ! Une success-story qui repose sur une fiabilitédevenue légendaire (année après année,Toyota figure dans le tiercé de tête desenquêtes menées sur la «satisfactionclient») et à laquelle la douzièmegénération apporte enfin un coup decrayon. Silhouette élancée, regardacéré… Jamais Corolla n’aura été autantdans le coup.

DR

SEBASTIENMAUROY

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LES ECHOS WEEK-END – 87

STYLE HIGH-TECH

Un peu de douceur pour les fêtes.Avec son diffuseur Lilywood, Aromasounddévoile sa toute nouvelle enceinte «zen»,cadeau idéal pour lutter contre la morositéambiante. Son utilisation, d’une grandesimplicité, se révèle très intuitive,notamment grâce à l’application maison.Quelques minutes à peine suffisent pourla mise en route : le temps de brancherl’enceinte, de verser un peu d’eau dansle réceptacle et d’appairer le tout avecvotre smartphone, et voilà Lilywood prêteà ravir les sens : la vue, tout d’abord, avecsa silhouette en imitation bois qui changedes plastiques noirs habituels sur ce marché.L’enceinte délivre également un sonde relativement bonne facture : 15 wattsqui suffiront à accompagner un réveilen douceur. À fort volume, en revanche,les graves s’étouffent et on constateun manque de précision dans les aigus.Autre petit bémol, l’application n’intègrepas les plateformes externes (Spotify etDeezer), mais seulement les morceauxprésents dans le terminal. Il est cependanttout à fait possible de passer directementpar le Bluetooth pour y jouer ses playlistshabituelles.Le diffuseur de brume froide – qui peutfaire office de simple humidificateurd’appoint – se pilote à l’aide du smartphone.On peut ainsi faire varier son intensitéet choisir d’activer ou non les huilesessentielles. Lors de leur diffusion, un légerclapotement apporte un petit supplémentd’âme à cette ambiance zen. Bonus nonnégligeable, l’enceinte intègre une sourcelumineuse dont le spectre des couleurs,quasi infini, se choisit au doigt sur l’écrandu téléphone. Pas forcément avant-gardiste– d’autres produits proposent ces mêmesfonctionnalités, parfois avec plus deflexibilité ou de puissance, notammentpour le son –, mais l’ensemble reste sobre,joli et d’une simplicité remarquable.Et ce, pour un prix tout doux.

COMBIEN? À partir de 69,90 euros.

HUILES DIVERSESL’enceinte est fournie avec un flaconde Synergie Zen bio de 10 ml (pourla relaxation), mais le magasin maisonregorge de trouvailles olfactives, commele Tonus pour commencer la journéeavec une touche vivifiante. De 6 à 10 €les flacons de 10 ml.

GRANDE AUTONOMIESi cette version est filaire, son autonomietient dans la capacité de son réservoir,350 ml, qui offre plusieurs heuresde brumisation douce et de diffusiond’huiles essentielles.

VERSION NOMADEAromasound propose moult versionsde diffuseurs. Parmi elles, Symphoney,qui a le grand mérite d’être sans fil,rechargeable par prise USB avechuit heures d’autonomie pourdes fonctionnalités quasi identiquesà celles de Lilywood.

EFFET BIEN-ÊTREL’odorat est le seul sens en lien directavec notre cerveau. Il active notresystème limbique, zone du cerveaujouant un rôle très important dans nosémotions. Les huiles essentielles – àmanier avec précaution – influencentdonc directement notre bien-être.

PROGRAMMATION POSSIBLEQue ce soit pour une alarme ou pourpréparer des atmosphères en amont,il est possible de programmer la miseen route de l’enceinte à distance,en lumière, son ou sensation olfactive.

ENCEINTE ZENAromasound présente Lilywood,son enceinte connectée multifonctiondotée d’un diffuseur d’huilesessentielles. À glisser sous le sapin.

Par Raphaël Sachetat

DR

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L�énergie est notre avenir, économisons-la !

Chloé est Directrice Régionale Paris.Chloé relève les nouveaux dés des villes de demain : accélérer la mobilité électrique, intégrer les énergiesrenouvelables� Avec Chloé, Enedis développe un réseau électrique innovant et connecté. C’est ça, le servicepublic de la transition écologique dans les territoires.

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©Brice

Portolano

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LES ECHOS WEEK-END – 89

11 DÉCEMBRE 2020

ETMOI…

PARKINSON,CETTE GRANDE

OUBLIÉEJessica Berthereau

Illustration: Cristina Spanò

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90 – LES ECHOS WEEK-END

ET MOI…

Alors que lapathologie,qui ne touche pasque les personnesâgées, explosedans lemonde,la recherchetrès activelaisse entrevoirquelques espoirsthérapeutiques.

« Il est indéniable que le premier confinementa eu un impact négatif sur ma santé, assureStéphane Billerey, diagnostiqué Parkinsondepuis quatre ans. J’ai perdu un peu de mobilitédu côté droit et je me mets à trembler, ce qui nem’arrivait pas avant. C’est l’évolution normalede la maladie, mais j’ai l’impression que ça l’aun peu accélérée. » En cause : une moindreactivité physique, l’impossibilité d’aller voircertains professionnels de santé, un contextesanitaire anxiogène particulièrement délétère…« C’est une maladie très étrange qui fait que l’onest très sensible au stress. Du coup, on absorbevraiment le stress ambiant, ce qui impactel’évolution de la maladie. » À 56 ans, StéphaneBillerey est toujours actif mais, comme biend’autres, a dû se mettre à travailler à distance,or « avec le télétravail, je fais automatiquementmoins d’exercice physique et il me manque lesinteractions avec les collègues, à la fois sur le planrelationnel et sur le plan cognitif ».

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LES ECHOS WEEK-END – 91

PARKINSON, LA GRANDE OUBLIÉE

Beaucoup de personnes vivant avec lamaladie de Parkinson partagent le constat faitpar Stéphane : 60% de celles interrogées parl’association France Parkinson une semaineavant la fin du premier confinementrapportaient une aggravation des symptômesmoteurs de la maladie, 73% une augmentationdes troubles de l’anxiété et 80% unaccroissement des douleurs et des troublesdu sommeil. Plus de 60% ont fait part d’uneréduction importante de l’activité physiquequotidienne et 85% ont signalé un arrêt desséances avec leur kinésithérapeute. « Lespatients ont déjà tendance à être enfermés dansleur maladie alors le confinement, c’est la doublepeine », résume Didier Robiliard, présidentde France Parkinson, lui-même atteint.

«Assez dramatique sur le moment, le premierconfinement pourrait aussi avoir des effets de longterme, s’inquiète Marie Fuzzati, directricescientifique chez France Parkinson. Par exemple,l’effet bénéfique de l’activité physique disparaîtprogressivement dès que les patients arrêtent d’enfaire et il leur est ensuite difficile de remonter lapente.»Heureusement, quelques aménagementsont été apportés pour le second confinement,comme l’autorisation des visites en Ehpad pourbriser l’isolement, ou la possibilité d’aller voirtous les professionnels de santé. Stéphane peutcette fois-ci se rendre chez son kiné une fois parsemaine. «Revivre cette situation est tout de mêmedifficile psychologiquement. Il faut se blinder.J’imagine que des personnes moins accompagnéesdoivent rencontrer des problématiquespsychologiques assez fortes.»Ce sentiment d’oubli vécu pendant le premier

confinement fait étrangement écho à uneperception plus large de méconnaissance de la

maladie de Parkinson. « C’est une maladie quisouffre d’ignorance, certainement parce qu’elle estattribuée au grand âge, alors qu’elle touche aussides personnes en activité professionnelle et qu’elleest souvent réduite aux tremblements, alorsqu’elle est source de bien d’autres complications »,regrette Didier Robiliard. Diagnostiqué à45 ans, il a été contraint de s’arrêter de travaillerau bout de cinq ans à cause de « raideurs, delenteurs et d’une fatigue extrême ». Après uneintervention chirurgicale (neurostimulation),il a retrouvé certaines facultés physiques et a ok,merci. choisi de s’engager auprès de FranceParkinson, dont l’un des objectifs est de « fairesortir la maladie de l’ombre ».Si Parkinson touche moins de personnes que

la maladie d’Alzheimer – à laquelle elle est, àtort, souvent assimilée ou confondue – c’est lamaladie neurodégénérative dont le nombre decas a le plus augmenté entre 1990 et 2015. Il aplus que doublé, passant de 2,6 à 6,3 millionsde patients dans le monde. Et pourrait doublerde nouveau d’ici 2040, à 12,9 millions, alertentquatre grands scientifiques spécialistes dela maladie dans un ouvrage paru aux États-Unisau printemps (1). « C’est la maladie du cerveauqui connaît la croissance la plus rapide aumonde, martèle Ray Dorsey, l’un des auteurs,professeur de neurologie à l’université deRochester. Le risque au cours de notre viede développer la maladie de Parkinson est sixà sept fois plus élevé que celui de mourir d’unaccident de voiture. Presque tout le monde seraaffecté, directement ou indirectement. »En France, on recensait environ 160000

patients parkinsoniens fin 2015 et uneprogression de 25000 nouveaux cas par an,dont 17% âgés de moins de 65 ans (2). Une étude

publiée en 2018 prévoit une augmentation dunombre de patients d’environ 65% entre 2010et 2030 (3). « Le premier facteur de risque estl’âge, le sexe en étant un autre puisque cettemaladie est environ 1,5 fois plus fréquentechez l’homme que chez la femme. Le nombrede cas va augmenter fortement en raison duvieillissement de la population mais ausside l’allongement de l’espérance de vie, puisqueles patients parkinsoniens vivront alors pluslongtemps avec la maladie », analyse leneurologue et épidémiologiste Alexis Elbaz,directeur de recherche à l’Inserm.

DÉCRITE DÈS 1817 PAR JAMES PARKINSONLoin de se résumer aux tremblements (30%n’en auront jamais), cette pathologie, décritepour la première fois en 1817 par le médecinbritannique James Parkinson, peut être définiecomme une « maladie de l’automaticité, expliqueDavid Devos, professeur à l’université de Lilleet neurologue au CHU de Lille. Elle affecte lamotricité automatique mais aussi l’intelligenceautomatique et les émotions automatiques, parexemple lorsqu’on éclate de rire devant un film. »Le mécanisme de la maladie est bien connu:une mort régulée (c’est-à-dire enclenchée parla cellule) de certains neurones du cerveau,notamment – mais pas seulement – desneurones dopaminergiques. Elle se caractérisepar la formation d’agrégats de protéinesalpha-synucléines et une surcharge en fer.Quant aux causes, elles sont multiples et

pour beaucoup encore mal définies. « Il n’y apas une seule cause car c’est une maladiemultifactorielle. De façon très schématique,il y a pour chaque individu une cinquantainede facteurs génétiques possibles, une

UNE MALADIE AUX CAUSESMULTIFACTORIELLESET, POUR BEAUCOUP,ENCORE MAL DÉFINIES.

L’association France Parkinson,créée il y a plus de trente ans,oeuvre notamment pour financerla recherche grâce aux donset pour soutenir les malades et leursproches. www.franceparkinson.frAprès la mauvaise expérience dupremier confinement, l’association

France Parkinson a monté uneopération appelée «Tous en lien »en mobilisant tout son réseaude bénévoles pour maintenir le lienavec les patients par téléphone,visio ou via des visites.Ligne Info Écoute renforcée. Tél. :0145209896 www. dopamine. care

Une série télévisée éducative,développée aux Pays-Bas, paysayant l’une des meilleures approchesde soins et de suivi des patientsparkinsoniens, a été déclinée enanglais depuis 2017. Deux saisonssont disponibles sur ParkinsonTV.https://parkinsontv.org

Le site ClinicalTrials dressela liste des essais cliniquesqui recrutent à travers le monde.Ceux qui se déroulent surle territoire françaissont accessibles sur:https://clinicaltrials.gov/https ://parkinson. network/fr

OÙ S’INFORMER ?

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92 – LES ECHOS WEEK-END

ET MOI…

cinquantaine de facteurs environnementauxpossibles et 50 fois 50 interactions possibles entreces facteurs, indique David Devos. C’est pourcela qu’il n’y a pas UNE maladie de Parkinsonmais DES maladies de Parkinson. » Comme ledétaille Marie Fuzzati, « si l’on regroupe dixpersonnes vivant avec Parkinson, elles seront trèsdifférentes en termes d’âge, de symptômes, deprogression de la maladie, de réponse auxmédicaments, d’effets secondaires destraitements… »

« La définition de la maladie de Parkinsonreste un vrai problème scientifique, résumeOlivier Rascol, neurologue au CHU de Toulouse.En l’absence de biomarqueurs visibles du vivantdu patient, le diagnostic s’effectue toujours surun faisceau d’arguments cliniques et il y a 10%des cas dans lesquels on se trompe. » Pour RayDorsey, la façon de diagnostiquer cette maladieest tout simplement « archaïque ». « Quant auprincipal traitement, la L-Dopa, il est vieux decinquante ans. Cinquante ans ! Nous avons faitplus de percées thérapeutiques au siècle dernierqu’au siècle actuel », regrette-t-il. La L-Dopa,un précurseur de la dopamine, est « l’une desrévolutions de la neuro-pharmacologie moderne,rappelle Olivier Rascol.Même s’il est loin d’êtreparfait, notamment car il n’agit pas sur lesanomalies non-dopaminergiques du cerveau,c’est le médicament le plus puissant en termesde réponse et d’efficacité. » Ce qui explique qu’ilreste encore le «gold standard» (le meilleurdu moment) après tant d’années.De nombreux médicaments

complémentaires existent et il y a aujourd’huitout un éventail de traitements permettant auxneurologues d’affiner au mieux selon chaquepatient. Mais tous ces traitements « restent

le manque de financements empêche derépondre au besoin massif de recherche dansce domaine. « Il y a de très importants facteursenvironnementaux contribuant à la maladiede Parkinson, dont des pesticides et des solvantsque nous utilisons toujours, la pollution de l’airet les métaux lourds », s’indigne quant à luiRay Dorsey. Avec ses coauteurs, il présenteun plan d’action en 25 points, dont lesdeux premiers sont de bannir le paraquatet le trichloroéthylène. Ce qui est déjà le casdans l’Union européenne, depuis respectivement2007 et 2016, mais pas aux États-Unis ni dansde nombreux autres pays.Avec «Ending Parkinson’s disease», Ray

Dorsey ambitionne de provoquer une prisede conscience publique et politique à l’imagede celle qui a eu lieu pour le sida, qui « est

symptomatiques, c’est-à-dire qu’ils améliorentles symptômes mais n’ont pas d’impact surl’évolution de la maladie », précise David Devos.Il n’existe donc pas encore de traitementneuroprotecteur visant à ralentir ou à guérirla maladie. Pourquoi? « Pour une raison trèssimple qu’il ne faut pas oublier : on ne voit pasce qu’on fait, poursuit-il. L’une des clés est depouvoir suivre les biomarqueurs pour bienvisualiser la mort des neurones et voir l’impactd’un traitement au niveau du cerveau. Une foisqu’on aura ces outils, qui sont en cours dedéveloppement, on pourra tester de façonbeaucoup plus pertinente des moléculeset des combinaisons de molécules. »

LE REPOSITIONNEMENT DE MÉDICAMENTSLa bonne nouvelle, c’est que la recherche surla maladie de Parkinson est très dynamique avecplus de 160 nouvelles molécules actuellementtestées dans le monde, principalementdans cette optique de neuroprotection, souligneDavid Devos. «Il y a beaucoup d’avancéesscientifiques mais pas encore d’innovationthérapeutique majeure. On espère que ce serale cas dans les prochains mois ou années.»Le chercheur vient de terminer une grandeétude européenne afin d’évaluer l’efficacitéd’un traitement à base de défériprone pourlutter contre l’accumulation de fer dansles zones du cerveau qui dégénèrent (4).Si les résultats, attendus pour avril 2021,sont positifs, il pourrait s’agir d’une premièrestratégie de neuroprotection. À l’imagede cet essai, «de nombreuses recherches actuellesportent sur le repositionnement de médicamentsdéjà sur le marché, ce qui comporte de grandsavantages en termes de rapidité de miseà disposition pour les patients si les effets sontprouvés», souligne Marie Fuzzati.Là où le bât blesse, c’est en termes de

prévention, notamment en ce qui concerneles facteurs environnementaux. « La maladiede Parkinson est probablement en grande partiecausée par le développement industriel maisc’est vraiment là où il y a le moins d’actions »,déplore Marie Fuzzati. Par exemple, «l’expositionaux pesticides comme facteur de risqueest maintenant assez bien établie, au point qu’enFrance la maladie de Parkinson est reconnuedepuis 2012 comme maladie professionnellechez les agriculteurs, sous certaines conditions»,indique Alexis Elbaz. Qu’en est-il chez lapopulation générale? Le chercheur a mené uneétude montrant une incidence de la maladie deParkinson un peu plus élevée dans les cantonsles plus ruraux et notamment les plus viticoles.«Mais c’est une étude écologique pour laquelle onne peut pas établir de lien au niveau individuel.»En somme, c’est démontré au niveau

épidémiologique chez l’homme et lesexpériences sur les animaux exposés àdes pesticides montrent clairement unecausalité. « Les modèles animaux conduisenttout de même à une forte probabilité de causalitéchez l’homme », souligne David Devos, pour qui

De nombreusespersonnes connuesont été ou sontaffectées par lamaladie de Parkinson,à l'instar du papeJean-Paul II, du boxeurMohamed Ali oude la présentatricemétéo CatherineLaborde, qui atémoigné dansson livre Trembler(Plon, 2018).L'acteur américainMichael J. Fox,rendu célèbre par sonrôle dans la trilogieRetour vers le futur,a été diagnostiqué àseulement 29 ans.

Il le révèle au grandpublic à la fin desannées 1990 et se ditchoqué, lors d'untémoignage devantle Congrès américain,par les « si maigres »financements attribuésà la recherchesur cette maladie.En 2000, il crée safondation, qui a depuisconsacré plus de900 millions de dollarsà la recherche sur lamaladie de Parkinson,ce qui en fait le plusgrand bailleur de fondsà but non lucratifpour cette pathologie.www.michaeljfox.org

DE JEAN-PAUL II À MICHAEL FOX

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LES ECHOS WEEK-END – 93

PARKINSON, LA GRANDE OUBLIÉE

maintenant la maladie bénéficiant du plus defonds fédéraux pour la recherche aux États-Unis ». En France, un réseau regroupedepuis 2012 les 25 centres experts Parkinson.« Grâce au soutien financier du programmed’investissements d’avenir, le réseau Ns-Park a euun effet levier en nous permettant de doublerle nombre d’études auxquelles nous participons, desuivre de plus grandes cohortes de patients, d’êtreplus compétitifs pour gagner des financementset attirer les industriels. Mais ceci reste insuffisantparce que les sommes affectées sont demeuréesmodestes», pointe Olivier Rascol, qui coordonnele réseau. Inquiet de l’avenir incertain du planmaladies neurodégénératives 2014-19, il estimeégalement que c’est une question politique:«La recherche sur le cancer est performante enFrance en grande partie parce qu’il y a eu un choix Plus d’infos sur www.lesechos.fr/we

politique de santé publique d’y investir beaucoupd’argent depuis de nombreuses années. Il n’y a paseu un effort de la même ampleur pour lesmaladies neurodégénératives.» Pas encore.

(1) « Ending Parkinson’s disease », Ray Dorsey,Todd Sherer, Michael S. Okun, Bastiaan R. Bloem.PublicAffairs, 2020.(2) Santé publique France, Bulletinépidémiologique hebdomadaire du 10 avril 2018.(3) « Projections of prevalence, lifetime risk, andlife expectancy of Parkinson’s disease (2010-30) inFrance », Mathilde Wanneveich, Frédéric Moisan,Hélène Jacqmin-Gadda, Alexis Elbaz, Pierre Joly.Movement Disorders, 2018, vol. 33, n° 9.(4) http://www.fairpark2.eu/

« DE NOMBREUX FACTEURSENVIRONNEMENTAUX

CONTRIBUENT À LA MALADIE :PESTICIDES, SOLVANTS,POLLUTION DE L’AIR,MÉTAUX LOURDS… »

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94 – LES ECHOS WEEK-END

ET MOI…

DÉPAYSEMENT EN MODE RENAISSANCE

Avec sa vue dégagée en surplomb de la valléede Gaillac, cette demeure historiqueRenaissance du XVe siècle assureun dépaysement total. Elle se niche au cœurde la cité médiévale de Cordes-sur-Ciel (Tarn),à une heure de Toulouse. Culminantà 320 mètres d’altitude, ce village perchéqui fêtera ses 800 ans en 2022 est réputé êtreune des premières bastides du pays cathare.Deux fois restaurée dans les règles de l’artpar les compagnons du Devoir, la demeure offrele charme de l’ancien avec du travertinet des tomettes au sol, des lambris et des pierres

apparentes, des colombages sur les murs,des plafonds à la française, des vitraux et unmajestueux escalier à vis en pierre. Érigée surtrois niveaux et près de 600m2 au total, elles’organise autour d’une cour intérieure avec descoursives. L’habitation totalise 12 pièces, dont10 suites auxquelles il faut ajouter une terrassede 37m2 orientée plein sud et un jardinsuspendu attenant de 400m2. Il est mêmepossible d’acquérir un terrain contigu dotéd’une tour médiévale, afin d’y installerune piscine. Commercialisée par Émile Garcin,la propriété est affichée à 1219000 euros.

IMMOBILIER : LE POTENTIEL DU RETAIL

En matière d’immobilier, la défiancedes investisseurs envers le secteur du commercea démarré avec l’épidémie de Covid-19. Il fautdire que cette activité a été perturbée pourcause de fermeture pendant plusieurs semainesde certains magasins. Cette mauvaise passeétant pour l’instant dans le rétroviseur,les «retail park», ces zones commerciales à cielouvert implantées dans les zones périurbaines(surnommées «boîtes à chaussures»),pourraient mieux tirer leur épingle du jeu.La raison? « Leurs loyers sont modérés. En pleinair, ces lieux sont faciles d’accès et offrent degrandes surfaces, utiles pour accueillir les clientsen période de pandémie. Autant d’argumentsqui plaisent aux enseignes désormais en quêted’économies. Côté investisseurs, les rendementspeuvent parfois monter à 6%, contre 3,3% pourdu commerce de centre-ville. Une performancepossible à condition d’être sélectif dans le choixdes actifs », affirme Laurent Delautre, directeurdes investissements Commerces et cofondateurde Mata Capital, une société de gestionspécialisée dans les fonds immobiliers.Convaincue par ce modèle, cette sociétécommercialise à destination des professionnelsun fonds 100% dédié aux commercesde périphérie. Toutefois, elle distille cettestratégie d’investissement dans un autre fonds«maison» plus diversifié, accessible auxparticuliers, à hauteur de 100000 euros.

DÉLICES D'INITIÉSSix idées pour rêver, faire fructifier son argent. Ou dépenser futé.

Par Laurence Boccara

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DR

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LES ECHOS WEEK-END – 95

MON ARGENT

PLACEMENTS : LA STRATÉGIE OBLIGATAIRE

Et si une pincée de stratégie obligataire mettaitun peu de sel dans vos placements? C’estdu moins la conviction de la société de gestionJupiter Asset Management. En dépit d’uncontexte de taux d’intérêt durablement bas,cette firme britannique assure pouvoir dénicherpartout dans le monde des opportunitéssur le marché obligataire, afin de préparerun appétissant cocktail pour les investisseurs.Elle affiche ainsi un penchant assumé pour lesobligations à haut rendement, notamment pourdes entreprises notées BB et celles situées dansles secteurs les plus défensifs. « Avec une bonnesélection de crédit, les investisseurs peuventobtenir des rendements allant de 3% à deuxchiffres », affirme la société de gestion. Du côtédes émissions d’États, elle indique queles obligations chinoises à dix ans rapportentenviron 3% et que celles de la Russie à cinq ansoffrent un rendement supérieur à 5%. « Dansle contexte actuel de faible inflation, lesperspectives sont favorables pour les obligationsd’État et le crédit aux entreprises », indique-t-elle.

LE CROWDFUNDING VERSION « ROYALTIES »

En France, le financement en royalties estla facette la moins connue du crowdfunding,contrairement à l’investissement en capitalet à la souscription d’un prêt obligataire, bienplus répandus. Cette façon d’investir dansune entreprise consiste à récupérer sa mise(ou plus), en recevant chaque trimestre

LES TRÉSORS DE PIERRE BERGÉ

LE BOOM DES MONTRES AUX ENCHÈRES

En l’espace de quelques années, les ventesaux enchères demontres de luxe se sontmultipliées, avec des cotes atteignant pourcertaines plusieurs millions de dollars. Faceà l’attrait pour cet objet beau et utile, troismaisons de ventes (Christie’s, Sotheby’s, Phillips)organisent régulièrement des vacations partoutdans le monde, représentant environ350millions de dollars de ventes par an, indiquele premier rapport du Credit Suisse sur les objetsde collection. La période du confinement n’a passtoppé cet engouement, bien au contraire.Objet d’art et de technique, une montre s’achètefacilement en ligne à condition de biens’informer sur son pedigree. Le rapport du CreditSuisse considère ce marché comme stable,avec «des perspectives qui devraient rester bonneset solides», indique Jules Boudrand, directeurchez Deloitte Suisse, un expert cité par la banquehelvète. Cette même publication fait un focussur deuxmarchés de niche également en pleineforme: les instruments de musiquede collection et les sacs à main de luxe.

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un pourcentage de son chiffre d’affaires pendantune durée déterminée (souvent cinq ans).Spécialisée dans ce créneau du financementparticipatif, la fintech nantaiseWe Do Gooda levé en ligne près de 5millions d’euroset financé 107 sociétés. Cette plate-forme proposeaux investisseurs d’injecter de l’argent dansdes entreprises en démarrage, ayant des projetsavec un impact social et environnemental.Non garantis, les rendements affichés sont plutôtalléchants: comptez entre trois et cinq foisla mise de départ. C’est la contrepartied’un niveau de risque élevé pour des jeunessociétés en phase de démarrage. D’ailleurs,le taux de défaut annoncé par la plate-formeavoisine 10%.

Voilà une source de cadeaux de Noël pouramateurs de livres anciens. Le 16 décembre à14 heures aura lieu sur le site Drouot digital (etpeut-être en présentiel), la vente de 310 ouvragesayant appartenu à Pierre Bergé (1930-2017),homme d’affaires et mécène, réputé être uncollectionneur et un bibliophile averti. Organiséepar la maison qui porte toujours son nom, cettedispersion sera la cinquième du genre. La ventede la totalité de sa bibliothèque, qui comptaitplus de 1600 ouvrages, a démarré en 2015 de sonvivant et a été fractionnée en six vacations. Cetteannée, la thématique choisie porte sur les livresanciens et quelques manuscrits, allant du XVIe auXIXe siècle. Le lot vedette est une édition originalede 1685 des œuvres complètes de Shakespeare,en un volume, estimée entre 40000 et60000 euros. Il s’agit d’une quatrième éditiond’un tirage in-folio avec un portrait gravé del’auteur. Autre pièce notable: un exemplairedatant de 1663 de l’édition originale de L’Écoledes femmes deMolière, avec sa reliure d’origineet son étui de maroquin rouge. Cette pièce estestimée entre 15000 et 20000 euros.

Nouvelle ventede la bibliothèquede Pierre Bergé(ci-dessus), avec cesœuvres complètesde Shakespeare,estimées entre40000 et 60000 euros.S

TEPHANEBRIOLANT

STÉPHANEBRIOLANT

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96 – LES ECHOS WEEK-END

ET MOI… BIEN-ÊTRE

Pour 58% des Français, le plaisir restela préoccupationmajeure de leurs repas et, pour62% d’entre eux, cette quête est d’abord associéeau goût. Ce sont là deux traits qui ressortentd’une étude très fouillée des comportementsalimentaires de nos concitoyens, réalisée parla Fondation Nestlé France et Ipsos (1). Mais«la notion de plaisir évolue avec son époque»,remarque Youmna Ovazza, chez Ipsos. Pour latrès grandemajorité des sondés (90%), le plaisirne consiste pas, comme on pourrait le penser, àmanger des «aliments interdits» ou sucrés, graset salés en réaction à une doxa du bien-manger…Pour 70% des Français, manger sain et bon grâceà une alimentation variée est primordial et 42%essaient de le faire plus souvent. Cuisiner maisonavec des ingrédients frais en est la principaleexpression, une évolution renforcée parles confinements. Les nouvelles préconisationssanté poussent les Français à lire plus souvent

les étiquettes (47%) et à utiliser des applisd’information comme Yuka, à être plus attentifsaux valeurs nutritionnelles (39%), à réduirele sucre (41%), souligne l’enquête… Emportersa «gamelle» au bureau (36% des Français) estaussi tendance. Si c’est là unmoyen demaîtriserl’équilibre nutritionnel du repas, cela rested’abord un choix économique. Près d’un Françaissur deux (47%) considère en effet quemangeréquilibré coûte trop cher. «Les grands principessont intégrés mais l’équilibre réel reste une notionsubjective», conclut Youmna Ovazza.

(1) Les thèmes ont été dégagés de l’analyse de415000 posts sur les réseaux sociaux (juillet 2018-août 2019), puis une communauté en ligne de95 familles a été suivie pendant deux semaines.Le tout complété par deux études quantitativesen ligne auprès de 1000 personnes représentativesde 18 à 65 ans (décembre 2019 et juillet 2020).

ALIMENTATION : PLAISIR, GOÛT ET SANTÉ AU MENU

Amateurs de légumes, impossible de passer à côtéde deux ouvrages qui leur rendent hommage.Légumes de Ferrandi (Flammarion), a mobilisétoutes les équipes de cette école réputée, pourproduire une véritable somme qui ne laisse rien dansl’ombre des techniques de base (ustensiles,préparation et nettoyage, découpes et cuisson)avant d’entrer en cuisine avec 80 recettes.Impossible également d’ignorer le Légumesde Régis Marcon (Éditions de La Martinière). Lesgastronomes connaissent bien le chef trois étoilesde Saint-Bonnet-le-Froid, en Haute-Loire. Après leschampignons, les céréales et les herbes, il s’attaquecette fois aux légumes mis en fiches (originegéographique, histoire, saveurs, utilisation…) avantd’être cuisinés. Au final, deux incontournables quifont la part belle à plus de 350 tiges, bulbes, racines,feuilles, fleurs, cucurbitacées et autres tubercules.

Thérapie manuelle issue de la médecinetraditionnelle chinoise, l’acupressionest une pratique millénaire qui stimuledes zones et des points précis du corpshumain, afin de soulager les douleurs,de calmer les tensions, de rééquilibrerl’organisme en – schématiquement – faisantmieux circuler l’énergie et le sanget en libérant les hormones du «bonheur».Pas toujours facile, cependant, d’avoirun praticien à proximité. La société nantaiseNeo Factory a conçu pour cela un petit tapisspécial, Climsom Zen. Avec ses 6930 pointesau total, on pourrait craindre de devoirjouer le fakir sur son tapis à clous !Mais finalement pas vraiment. L’exercice,s’il est inconfortable au début n’est en riendouloureux à l’usage. Et l’idée n’est pas,ici, de soigner (l’acupression a des contre-indications) mais plutôt de procurerun moment de détente, de lâcher-priseet de bien-être quotidien.

Manger des mangues gommerait les rides profondes.Mais pas n’importe quelle quantité, n’importe quellevariété et sur n’importe quelle peau ! L’expérience aété conduite sur des femmes ménopausées à la peauclaire (Nutrients, novembre 2020). Certaines d’entreelles ont ajouté à leur alimentation l’équivalent d’unedemi-mangue quatre fois par semaine pendantquatre mois, tandis que d’autres en avalaient troisfois plus. Si les rides des femmes du premier groupeont régressé de 20% environ, celles du secondgroupe se sont creusées ! La variété des manguestestées – des Ataulfo – pourrait expliquer ces effetsantagonistes : elles sont très riches en caroténoïdesaux effets anti-âge (production de collagène), maisaussi très dosées en sucre (15 g pour 100 g) qui, lui,détruit ce collagène ! De la mesure en toute chose…

LES LÉGUMES EN COUPE RÉGLÉE

ACUPRESSION : DO IT YOURSELF

LA MANGUE, ANTIRIDES NATUREL ?

Par Claude Vincent – Illustrations: Carole Barraud

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98 – LES ECHOS WEEK-END

CLAP DE FIN

MARC DUGAINNOUVEAU MONDE

Valéry Giscard d’Estaing s’en est allé. Du Coviddit-on. On a beaucoup dit qu’il avait réformé, àraison, car les réformes qu’il a insufflées ont étéplus nombreuses et consistantes que celles deson successeur François Mitterrand qui voulaitincarner un grand changement. Lamajorité etle droit de vote à 18 ans, le remboursementde la pilule, l’avortement, le divorce avecconsentement mutuel, il démarre son septennatau pas de charge avant de se fracasser surune conjoncture terrible qui marque la fin destrente glorieuses, la fin de l’énergie bonmarché,le retour du chômage et de l’inflation. Il fait aussientrer la France dans l’économie libéraleassumée, elle qui louvoie dans un systèmehybride d’économie mixte. Il est finalement battuà gauche par un homme, plus à droite que lui,qui ne fait pas ses erreurs de communication carGiscard a revêtu son unique septennat d’unepesanteur monarchique qui confine au ridiculedans la mise en scène d’une proximité avec lepeuple dont il est fondamentalement incapable.Giscard croyait aumarché, bien plus que ses

deux prédécesseurs et à son efficience. C’est aussile cas de Gaspard Koenig, un jeune professeur,chercheur, chroniqueur aux Échos, enquêteurqui nous a délivré il y a quelques semaines un

livre remarquable sur La fin de l’individu. Je mesouviens que lors de la sortie de L’Homme nu,sur la dictature du numérique que j’avais écritavec Christophe Labbé, il nous avait traitésgentiment de technophobes, ce qui n’était pastotalement vrai mais je lui en veux d’autantmoins que le livre qu’il publie aux Éditions del’Observatoire est un livre essentiel pour ceux quiveulent réfléchir à la société que nous préparel’intelligence artificielle. Il évacue assezrapidement deux tabous que sont la destructionphysique de l’homme à terme par les robots etle chômage demasse qu’ils engendreraient.

Cependant, il est indiscutable que lanumérisation accélérée de la société pendantle Covid nous amontré qu’un tremblement deterre s’annonce, avec un risque d’obsolescencerapide de nombreuses tâches pour lesquelleson croyait l’homme indispensable, commel’enseignement en particulier, dont on peut fairele pari qu’il disparaîtra inexorablement à termeau profit d’unmonitoring robotisé.Gaspard Koenig déroule son livre comme

un grand reportage dans la sphère de l’IA,de la Silicon Valley à Pékin en passant parTel Aviv, pour conclure que l’Europe a déjà perdupied dans cette compétition qui dégage unmodèle parfaitement adapté au régime chinois,mélange de capitalisme brutal et de totalitarismepolitique. Exquise fusion du communisme etdu capitalisme pour une société sans les étatsd’âme des promoteurs européens du libre arbitreet sans les faux états d’âme des Américains.La sincérité critique que dégage ce livre trèsdocumenté m’a convaincu que le danger étaitmoins dans l’intelligence artificielle que dans lerétrécissement de la pensée subjective humaineindividuelle submergée par une rationalitédéterminée par des algorithmes supposésnous représenter dans notre globalité.

UN TREMBLEMENT DE TERRES’ANNONCE, AVEC UN RISQUED’OBSOLESCENCE RAPIDE

DE TÂCHES POURLESQUELLES ON CROYAITL’HOMME INDISPENSABLE.

LE TRAIT

ILLU

STRATIONPORTRAIT:KIM

ROSELIER

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