edition du lundi 8 novembre 2010

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LES ANNONCES DE LA SEINE RENTRÉE SOLENNELLE Cours et tribunaux de Monaco Le nouveau statut de la magistrature en principauté par Florestan Bellinzona ......................................................................2 Contrat judiciaire par Robert Cordas ................................................................................7 Croire en la justice par Jacques Raybaud ...........................................................................9 CHRONIQUE Femmes / hommes : la violence conjugale et la nouvelle loi du 9 juillet 2010 par Myriam Lasry .............................................................................12 ANNONCES LEGALES ...................................................16 AVIS DENQUÊTE..............................................................22 J OURNAL OFFICIEL D’ANNONCES LÉGALES - I NFORMATIONS GÉNÉRALES, J UDICIAIRES ET TECHNIQUES bi-hebdomadaire habilité pour les départements de Paris, Yvelines, Hauts-de-Seine, Seine-Saint-Denis et Val de Marne 12, rue Notre-Dame des Victoires - 75002 PARIS - Téléphone : 01 42 60 36 35 - Télécopie : 01 47 03 92 15 Internet : www.annoncesdelaseine.fr - E-mail : [email protected] FONDATEUR EN 1919 : RENÉ TANCRÈDE - DIRECTEUR : JEAN-RENÉ TANCRÈDE Lundi 8 novembre 2010 - Numéro 55 - 1,15 Euro - 91 e année L a cérémonie de rentrée judiciaire des Cours et Tribunaux de la Principauté de Monaco, qui s’est tenue le 1 er octobre 2010, a débuté par la tradition- nelle Messe du Saint-Esprit, concélébrée par l’en- semble du clergé diocésain et Monseigneur Giuliano. Robert Cordas, Premier Président de la Cour d’appel a ensuite présidé l’audience solennelle qui s’est tenue en pré- sence de hautes personnalités monégasques : Michel Roger, Ministre d'Etat, ancien juge au Tribunal Suprême, Hubert Charles, Président du Tribunal Suprême et Jacques Boisson, Secrétaire d’Etat qui représentait S.A.S le Prince Souverain Albert II de Monaco . Les autorités judiciaires française et italienne assistaient éga- lement à cette cérémonie parmi lesquelles André Ride, Inspecteur Général des Services Judiciaires français, Catherine Trochain et Jean-Marie Huet, respectivement Premier Président et Procureur Général de la Cour d’Appel d’Aix-en-Provence ainsi que les Premier Président et Procureur Général de la Cour d’Appel de Gênes. C’est le thème du « nouveau statut de la magistrature en Principauté » qui a été choisi par Florestan Bellinzona, Juge au Tribunal de Première Instance de Monaco, pour le dis- cours d’usage. Adopté à l’unanimité le 16 novembre 2009 après sept années de négociations et de consultations, ce nouveau statut en dotant la justice monégasque d’un Haut Conseil de la Magistrature « répond aux objectifs que le légis- lateur s’était fixé, une modernisation afin de répondre aux besoins de tout état de droit : assurer la compétence, l’impar- tialité, l’intégrité et l’indépendance des magistrats ». Après un rappel de l’histoire de la magistrature monégasque, Florestan Bellinzona a livré à son auditoire une étude comparée approfondie de ce nouvel organe, installé le 26 avril dernier en présence de S.A.S. le Prince Souverain, avec ses équivalents européens. Le Premier Président Robert Cordas a ensuite rendu compte de l’activité civile qui a été soutenue au cours de l’année judi- ciaire écoulée. Il a insisté sur la nécessité pour la justice monégasque de se conformer au droit européen et tout par- ticulièrement au principe du délai raisonnable, rappelant qu’il s’applique tant en matière civile que pénale. Il a ainsi plaidé pour la mise en place d’un « traitement des procédures qui soit différencié en fonction de la nature de l’affaire et de sa complexité réelle (et non pas supposée) afin que les parties dis- posent du temps raisonnablement nécessaire pour faire valoir leurs prétentions avant que le juge ne rende sa décision le tout dans le cadre d’un véritable « contrat judiciaire ». « Ceux qui servent la Justice avec conscience (…), ceux qui en sont les détracteurs de métier ou de circonstance doivent savoir que même lorsqu’ils disent qu’ils ne croient plus à rien, les hommes continuent à « croire en la Justice ». Cette phrase empruntée au Premier Président Pierre Drai a constitué le fil directeur du discours prononcé par le Procureur Général de Monaco, Jacques Raybaud. Lui aussi a souhaité mettre l’ac- cent sur les principes édictés par la Convention européenne des droits de l’homme car « ceux qui s’éloignent de ces fonda- mentaux sapent en réalité la légitimité d’une institution qui participe pleinement au maintien de l’Etat de droit ». Jean-René Tancrède JRT SERVICES Domiciliations commerciales 01 42 60 36 35 [email protected] 12, rue Notre-Dame des Victoires - 75002 PARIS Photo © Jean-René Tancrède - Téléphone : 01.42.60.36.35 Cours et tribunaux de Monaco Rentrée solennelle - 1 er octobre 2010

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LES ANNONCES DE LA SEINE

RENTRÉE SOLENNELLECours et tribunaux de MonacoLe nouveau statut de la magistrature en principautépar Florestan Bellinzona ......................................................................2Contrat judiciairepar Robert Cordas ................................................................................7Croire en la justicepar Jacques Raybaud ...........................................................................9CHRONIQUEFemmes / hommes : la violence conjugaleet la nouvelle loi du 9 juillet 2010par Myriam Lasry .............................................................................12ANNONCES LEGALES ...................................................16AVIS D’ENQUÊTE..............................................................22

JOURNAL OFFICIEL D’ANNONCES LÉGALES - INFORMATIONS GÉNÉRALES, JUDICIAIRES ET TECHNIQUESbi-hebdomadaire habilité pour les départements de Paris, Yvelines, Hauts-de-Seine, Seine-Saint-Denis et Val de Marne

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FONDATEUR EN 1919 : RENÉ TANCRÈDE - DIRECTEUR : JEAN-RENÉ TANCRÈDE

Lundi 8 novembre 2010 - Numéro 55 - 1,15 Euro - 91e année

La cérémonie de rentrée judiciaire des Cours etTribunaux de la Principauté de Monaco, qui s’esttenue le 1er octobre 2010, a débuté par la tradition-nelle Messe du Saint-Esprit, concélébrée par l’en-

semble du clergé diocésain et Monseigneur Giuliano.Robert Cordas, Premier Président de la Cour d’appel aensuite présidé l’audience solennelle qui s’est tenue en pré-sence de hautes personnalités monégasques : Michel Roger,Ministre d'Etat, ancien juge au Tribunal Suprême, HubertCharles, Président du Tribunal Suprême et Jacques Boisson,Secrétaire d’Etat qui représentait S.A.S le Prince SouverainAlbert II de Monaco .Les autorités judiciaires française et italienne assistaient éga-lement à cette cérémonie parmi lesquelles André Ride,Inspecteur Général des Services Judiciaires français,Catherine Trochain et Jean-Marie Huet, respectivementPremier Président et Procureur Général de la Cour d’Appeld’Aix-en-Provence ainsi que les Premier Président etProcureur Général de la Cour d’Appel de Gênes.C’est le thème du « nouveau statut de la magistrature enPrincipauté » qui a été choisi par Florestan Bellinzona, Jugeau Tribunal de Première Instance de Monaco, pour le dis-cours d’usage. Adopté à l’unanimité le 16 novembre 2009après sept années de négociations et de consultations, cenouveau statut en dotant la justice monégasque d’un HautConseil de la Magistrature « répond aux objectifs que le légis-lateur s’était fixé, une modernisation afin de répondre auxbesoins de tout état de droit : assurer la compétence, l’impar-tialité, l’intégrité et l’indépendance des magistrats ».

Après un rappel de l’histoire de la magistrature monégasque,Florestan Bellinzona a livré à son auditoire une étude comparéeapprofondie de ce nouvel organe, installé le 26 avril dernieren présence de S.A.S. le Prince Souverain, avec ses équivalentseuropéens.Le Premier Président Robert Cordas a ensuite rendu comptede l’activité civile qui a été soutenue au cours de l’année judi-ciaire écoulée. Il a insisté sur la nécessité pour la justicemonégasque de se conformer au droit européen et tout par-ticulièrement au principe du délai raisonnable, rappelantqu’il s’applique tant en matière civile que pénale. Il a ainsiplaidé pour la mise en place d’un « traitement des procéduresqui soit différencié en fonction de la nature de l’affaire et de sacomplexité réelle (et non pas supposée) afin que les parties dis-posent du temps raisonnablement nécessaire pour faire valoirleurs prétentions avant que le juge ne rende sa décision le toutdans le cadre d’un véritable « contrat judiciaire ».« Ceux qui servent la Justice avec conscience (…), ceux qui ensont les détracteurs de métier ou de circonstance doivent savoirque même lorsqu’ils disent qu’ils ne croient plus à rien, leshommes continuent à « croire en la Justice ». Cette phraseempruntée au Premier Président Pierre Drai a constitué le fildirecteur du discours prononcé par le Procureur Général deMonaco, Jacques Raybaud. Lui aussi a souhaité mettre l’ac-cent sur les principes édictés par la Convention européennedes droits de l’homme car « ceux qui s’éloignent de ces fonda-mentaux sapent en réalité la légitimité d’une institution quiparticipe pleinement au maintien de l’Etat de droit ».

Jean-René Tancrède

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Cours et tribunaux de

MonacoRentrée solennelle - 1er octobre 2010

Le nouveau statutde la magistratureen Principautépar Florestan Bellinzona

C’est avec grande fierté que j’ai acceptéce qui constitue selon l’expressionconsacrée, le plus redoutablehonneur qui puisse être fait à un

magistrat de l’ordre judiciaire monégasque.Redoutable, car outre la difficulté de s’exprimerdevant cette assemblée prestigieuse, persistecelle d’arriver à être le plus complet possible,dans un délai raisonnable mais avant tout cellede décider du thème à aborder.Ce dernier point a, pour ma part, été le plusaisé à réaliser tant l’actualité a orienté le choixde ce thème, celui du nouveau statut de lamagistrature monégasque.Le statut de la magistrature a deux buts, fixer lesdroits et devoirs des magistrats, mais surtoutassurer l’indépendance des membres de la justice.Si l’indépendance d’un magistrat est avant toutun état d’esprit, il reste toujours importantd’instaurer des garanties contre les pressionsdirectes ou indirectes qui pourraient peser surlui, car cela est nécessaire pour que lesjusticiables puissent avoir confiance dans lajustice de leur Etat.Dans un Etat démocratique, l’indépendance dela Justice est avant tout au service du justiciablequi doit être assuré d’être jugé par des magistratsimpartiaux, à l’abri de toute pression.Avant d’aborder le statut actuel, il m’a sembléopportun d’effectuer un rappel de l’histoire dela magistrature monégasque.Le statut des magistrats à Monaco a connu denombreuses évolutions avant que nous neparvenions à la loi n°1.364 du 16 novembre2009.Ainsi, le premier personnage dont les fonctionsse rapprochaient de celles des magistrats apparudans l’histoire de Monaco, fut le Podestat quiprit en charge les affaires civiles et donna lessolutions aux différents litiges, libérant ainsi leCastelan de cette charge.Par la suite, le Podestat devint compétent pourles affaires criminelles, en 1447, tandis que les

affaires civiles se virent confiées à un « jugeordinaire », lequel faisait cependant partie duTribunal du Podestat.A la fin du 15ème siècle apparut ce qui se révèleracomme l’ancêtre du Ministère public en lapersonne du Procureur fiscal, celui-cipoursuivant devant le Podestat les crimes et lesatteintes aux droits du seigneur.La justice émanait toujours du seigneur, ce quidonnait aux justiciables d’alors la possibilité d’enappeler à lui pour les sentences rendues par lePodestat.Dans le courant des 16ème et 17ème siècles apparutle Bayle général, qui deviendra ensuite l’Auditeurgénéral et qui bénéficiera de la plénitude despouvoirs judiciaires, tant en matière civile etcriminelle que concernant les intérêts duseigneur.C’est en 1678, près d’un siècle avant la France,que les lois et coutumes de la Principauté, en cecompris les règles régissant l’ordre judiciaire,furent codifiées.Durant la Révolution française puis sousl’Empire, Monaco devint un territoire françaiset se vit donc appliquer les lois françaisesconcernant l’ordre judiciaire et ainsi furent créésle juge de paix, les tribunaux civils etcorrectionnels ainsi que le Tribunal criminel.Peu de temps après que la Principauté n’aitrecouvré sa souveraineté et sa législation, suiteau traité de Paris de 1815, les Princes Honoré IVet Honoré V instituèrent des tribunaux propresà la Principauté, dont les fondements reposaientsur le Code Napoléon.Dès le 22 mars 1815, le Prince, dans sonordonnance sur l’organisation judiciaire,conférait aux juges l’inamovibilité, premierbastion de l’indépendance des magistrats.Dans les ordonnances des 14 avril 1857 et10 juin 1859, cette inamovibilité était rappeléeet un principe encore plus important étaitconsacré textuellement, celui de l’indépendanceabsolue des juges.Par ordonnance en date du 2 juin 1898, lePrince, qui connaissait des affaires en dernierrecours, s’adjoignit un Conseil de révisioncomposé de juristes, lequel, en 1930, devien-dra la Cour de révision, telle que nous laconnaissons actuellement.C’est en 1909 que fut instauré le droit d’appel etque fut donc créée la cour d’appel, et en 1911

2 Les Annonces de la Seine - lundi 8 novembre 2010 - numéro 55

Rentrée solennelleLES ANNONCES DE LA SEINE

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Directeur de la publication et de la rédaction :Jean-René Tancrède

Comité de rédaction :Jacques Barthélémy, Avocat à la CourThierry Bernard, Avocat à la Cour, Cabinet BernardsFrançois-Henri Briard, Avocat au Conseil d’EtatAntoine Bullier, Professeur à l’Université Paris I Panthéon SorbonneMarie-Jeanne Campana, Professeur agrégé des Universités de droitAndré Damien, Membre de l’InstitutPhilippe Delebecque, Professeur de droit à l’Université Paris I Panthéon SorbonneDominique de La Garanderie, Avocate à la Cour, ancien Bâtonnier de ParisBrigitte Gizardin, Substitut général à la Cour d’appelRégis de Gouttes, Premier avocat général honoraire à la Cour de cassationSerge Guinchard, Professeur de Droit à l’Université Paris II Panthéon-AssasFrançoise Kamara, Conseiller à la première chambre de la Cour de cassationMaurice-Antoine Lafortune, Avocat général honoraire à la Cour de cassation Bernard Lagarde, Avocat à la Cour, Maître de conférence à H.E.C. - EntrepreneursJean Lamarque, Professeur de droit à l’Université Paris II Panthéon-AssasNoëlle Lenoir, Avocate à la Cour, ancienne MinistrePhilippe Malaurie, Professeur émérite à l’Université Paris II Panthéon-AssasPierre Masquart, Avocat à la CourJean-François Pestureau, Expert-Comptable, Commissaire aux comptesSophie Pillard, MagistrateGérard Pluyette, Conseiller doyen à la première chambre civile de la Cour de cassationJacqueline Socquet-Clerc Lafont, Avocate à la Cour, Présidente d’honneur de l’UNAPLYves Repiquet, Avocat à la Cour, ancien Bâtonnier de ParisRené Ricol, Ancien Président de l’IFACFrancis Teitgen, Avocat à la Cour, ancien Bâtonnier de ParisCarol Xueref, Directrice des affaires juridiques, Groupe Essilor International

Publicité :Légale et judiciaire : Didier ChotardCommerciale : Frédéric Bonaventura

Commission paritaire : n° 0713 I 83461I.S.S.N. : 0994-3587Tirage : 13 032 exemplairesPériodicité : bi-hebdomadaireImpression : M.I.P.3, rue de l’Atlas - 75019 PARIS

Copyright 2010Les manuscrits non insérés ne sont pas rendus. Sauf dans les cas où elle est autoriséeexpressément par la loi et les conventions internationales, toute reproduction, totale oupartielle du présent numéro est interdite et constituerait une contrefaçon sanctionnéepar les articles 425 et suivants du Code Pénal.

Le journal “Les Annonces de la Seine” a été désigné comme publicateur officiel pourla période du 1er janvier au 31 décembre 2010, par arrêtés de Messieurs les Préfets :de Paris, du 29 décembre 2009 ; des Yvelines, du 16 décembre 2009 ; des Hauts-de-Seine, du 23 décembre 2009 ; de la Seine-Saint-Denis, du 22 décembre 2009 ; duVal-de-Marne, du 18 décembre 2009 ; de toutes annonces judiciaires et légales prescritespar le Code Civil, les Codes de Procédure Civile et de Procédure Pénale et de Commerceet les Lois spéciales pour la publicité et la validité des actes de procédure ou des contratset des décisions de justice pour les départements de Paris, des Yvelines, de la Seine-Saint-Denis, du Val-de-Marne ; et des Hauts-de-Seine.N.B. : L’administration décline toute responsabilité quant à la teneur des annonces légales.

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35 € avec suppléments culturels95 € avec suppléments judiciaires et culturels

COMPOSITION DES ANNONCES LÉGALES

NORMES TYPOGRAPHIQUES

Surfaces consacrées aux titres, sous-titres, filets, paragraphes, alinéas

Titres : chacune des lignes constituant le titre principal de l’annonce sera composée en capitales (oumajuscules grasses) ; elle sera l’équivalent de deux lignes de corps 6 points Didot, soit arrondi à 4,5 mm.Les blancs d’interlignes séparant les lignes de titres n’excéderont pas l’équivalent d’une ligne de corps6 points Didot, soit 2,256 mm.Sous-titres : chacune des lignes constituant le sous-titre de l’annonce sera composée en bas-de-casse(minuscules grasses) ; elle sera l’équivalent d’une ligne de corps 9 points Didot soit arrondi à 3,40 mm. Lesblancs d’interlignes séparant les différentes lignes du sous-titre seront équivalents à 4 points soit 1,50 mm.Filets : chaque annonce est séparée de la précédente et de la suivante par un filet 1/4 gras. L’espace blanccompris entre le filet et le début de l’annonce sera l’équivalent d’une ligne de corps 6 points Didot soit2,256 mm. Le même principe régira le blanc situé entre la dernière ligne de l’annonce et le filet séparatif.L’ensemble du sous-titre est séparé du titre et du corps de l’annonce par des filets maigres centrés. Leblanc placé avant et après le filet sera égal à une ligne de corps 6 points Didot, soit 2,256 mm.Paragraphes et Alinéas : le blanc séparatif nécessaire afin de marquer le début d’un paragraphe où d’unalinéa sera l’équivalent d’une ligne de corps 6 points Didot, soit 2,256 mm. Ces définitions typographiquesont été calculées pour une composition effectuée en corps 6 points Didot. Dans l’éventualité où l’éditeurretiendrait un corps supérieur, il conviendrait de respecter le rapport entre les blancs et le corps choisi.

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qu’il fut donné au Tribunal suprême la missionde veiller au respect de la Constitution.Dès la Constitution du 18 décembre 1917, lePrince prononçait la séparation des pouvoirs,afin de renforcer l’indépendance des magistrats.Par ordonnance du 9 mars 1918 était instituéela fonction de directeur des Services judiciaires.Cette indépendance se voyait à nouveaurenforcée par la Constitution du 17 décembre1962 qui, en son article 68, rappelle que si laJustice appartient au Prince, celui-ci en délèguele plein exercice aux cours et tribunaux, et qu’ilgarantit l’indépendance des juges.La loi du 15 juillet 1965 portant organisationjudiciaire est venue préciser le mode defonctionnement des cours et tribunaux et lestatut des magistrats.Dès 2001, il est apparu nécessaire de moderniserles textes régissant la magistrature monégasqueet c’est ainsi qu’une commission a été créée,présidée par Yves Jouhaud alors Premierprésident de la Cour de révision.Les travaux ont donc immédiatementcommencé et c’est à la fin de l’année 2002 quela commission a pu rendre son projet.

Il faut souligner que ces travaux ont été effectuésavant que la Principauté n’adhère au Conseil del’Europe et que cette décision de modifier lestatut des magistrats ne relève donc pas d’unevolonté de standardiser notre législation vis-à-vis des législations européennes, mais bien d’unedémarche spontanée de modernisation.Le but premier du texte était de donner plus degaranties d’indépendance aux magistrats ainsique des garde-fous supplémentaires et surtoutde recouvrir « la totalité des droits, devoirs etgaranties qui doivent être consentis aux Jugesdans un état de droit moderne » pour citer feuMonsieur le ministre d’Etat Jean-Paul Proust.Cependant, un équilibre devait être trouvé entreles garanties d’indépendance des membres ducorps judiciaire et les pouvoirs régaliens duSouverain, car il n’était évidemment pasquestion de remettre en cause le principe de laJustice déléguée.C’est la recherche de ce délicat équilibre qui apoussé le Conseil national et le Gouvernementà de longues discussions, voire négociations,durant près de sept années.Durant cette période, les magistrats moné-gasques ont été consultés à plusieurs reprisespar le Conseil national afin de donner leur avissur certains points.

A l’issue de cette longue phase législative, la loiportant statut de la magistrature a été votée àl’unanimité le 16 novembre 2009.Par ordonnance souveraine nº 2.572 du 13 jan-vier 2010, les modalités d’élection des membresdu Haut conseil de la magistrature ont été fixéeset par ordonnance souveraine nº 2.706 du 7 avril2010, les règles de fonctionnement interne duHaut conseil ont été précisées, complétant ainsil’arsenal législatif nécessaire à la mise en placedu nouveau statut de la magistrature.Il ne s’agit évidemment pas de se livrer à unelecture de chacune des dispositions de lanouvelle loi, mais d’en envisager les réformesles plus importantes.Le nouveau statut a introduit quelques nou-veautés, et surtout le Haut conseil de la magis-trature sur lequel nous nous attarderons plusparticulièrement, et qu’il est intéressant decomparer avec ses équivalents dans les diffé-rents pays européens.

I. Les réformes

Le nouveau statut de la magistrature rappelleen premier lieu qu’il est évidemment applicableaux magistrats monégasques, mais aussi auxmagistrats détachés, dans la limite de saconformité avec le statut national de ceux-ci.Il fixe ensuite les droits et les devoirs desmagistrats et précise nombre de points,notamment en ce qui concerne la possibilitéd’exercer une autre activité, même en cas demise en disponibilité.

Les fonctions judiciaires ayant connu dans lesdernières décennies un essor plus que notable,il est apparu que la sélection des futursmagistrats par le directeur des Servicesjudiciaires n’est plus désormais adaptée face aunombre de candidats potentiels. C’est ainsi qu’ila été décidé d’instaurer un concours d’entréedans la magistrature monégasque, pour lesnationaux, première étape à franchir avant depouvoir suivre les enseignements de l’Ecolenationale de la magistrature française.D’ailleurs, il est à noter que Monsieur ledirecteur des Services judiciaires a, anticipantsur l’instauration d’un tel concours, suggéré auxcandidats potentiels à la carrière de magistratde préparer l’examen d’avocat, afin de pouvoirfaire un choix éclairé.Le concours sera ainsi ouvert par arrêté dudirecteur des Services judiciaires. Ledit arrêtédevra rappeler les conditions suivantes : être denationalité monégasque, être âgé de 23 ans aumoins, ne pas être privé de ses droits civiquesou politiques, être de bonne moralité et êtreapte physiquement à l’exercice de la fonction,dans les conditions prévues pour lesfonctionnaires de l’Etat.L’arrêté devra en outre mentionner le nombrede postes mis au concours ainsi que le nombre,le programme, l’objet et les conditions dechacune des épreuves, écrites ou orales, ainsique les coefficients de notation et la notemoyenne minimale à obtenir.Le jury de ce concours sera composé duPremier président de la Cour de révision oud’un membre de cette cour qu’il aura délégué àcet effet, le Premier président de la Cour d’appel

“Le nouveau statut aintroduit quelques nouveautés,et surtout le Haut conseil de lamagistrature sur lequel nousnous attarderons plusparticulièrement, et qu’il estintéressant de comparer avecses équivalents dans lesdifférents payseuropéens.”Florestan Bellinzona

Rentrée solennelle

REPÈRES

Les Fondementsde la Justice monégasque

La Constitution du 17 décembre1962 comporte un titre X, intitulé

« la Justice », qui détermine lesprincipes sur lesquels se fondel’organisation judiciaire.Les dispositions du titre X de laConstitution consacrent notammentle principe de la justice déléguée envertu duquel le pouvoir judiciaireappartient au Prince qui en délèguele plein exercice aux cours ettribunaux(1). Ceux-ci rendent lajustice en Son nom (art. 88). Cettedélégation est conforme à un autreprincipe de base de tout Etat dedroit, celui de la séparation desfonctions administrative, législativeet judiciaire, également consacrépar la Constitution (art. 6).Du fait de l’application combinée deces dispositions constitutionnelles,l’institution judiciaire est totalementindépendante du pouvoir exécutif,pour ce qui est des procédures etdécisions juridictionnelles bien sûr,mais aussi de l’administration de lajustice.Pour cette raison, le gouvernementprincier ne comporte aucunConseiller pour la justice.L’administration judiciaire est, aucontraire, assurée par undépartement indépendant, laDirection des services judiciaires.A sa tête, le Directeur des services

judiciaires détient, en son champ decompétence, des pouvoirscomparables, dans leur nature etleur étendue, à ceux dévolus, pourl’administration générale du pays,au ministre d’Etat. A l’instar decelui-ci, il est responsable de samission devant le Prince seul.De même, le principe del’indépendance des juges estgaranti par la Constitution (art. 88).Cette disposition concerne plusparticulièrement les magistratsexerçant les fonctions du siège, àsavoir ceux appelés, par leursdécisions - collégiales ouindividuelles - à trancher les litigesqui leur sont soumis par les partiesdans les conditions déterminées parla loi.En application de ce principe, lesjuges du siège bénéficient del’inamovibilité en vertu de laquelleils ne peuvent être révoqués,suspendus ni déplacés dans desconditions identiques à cellesappliquées aux fonctionnaires(2).Toujours aux fins de garantirl’indépendance de la justice, laConstitution énonce quel’organisation, la compétence et lefonctionnement des tribunaux, ainsique le statut des juges sont fixéspar la loi (art. 88). Ils ne peuventdonc émaner du pouvoir

réglementaire, sauf en applicationde la loi, ce qui constitue unegarantie importante(3).

Notes : 1 - En matière judiciaire, les seulesprérogatives appartenant au Prince, àl’instar de souverains et chefs d’Etatd’autres pays, sont de nature régalienne,en l’occurrence la grâce et l’amnistie(art. 15 de la Constitution).2 - L’inamovibilité ne s’applique ni auxmagistrats du parquet général, quiappartiennent à un corps hiérarchisé à latête duquel se trouve le procureur général,ni aux juges suppléants. Les fonctions dejuge suppléant sont les premières exercéesdans la hiérarchie judiciaire monégasque.Normalement placés près le tribunal depremière instance, les juges suppléantspeuvent, par ordonnance du premierprésident de la cour d’appel, être affectésau parquet général.3 - Il n’existe pas à Monaco de dispositifde répartition du domaine de la loi et durèglement comparable, par exemple, ausystème instauré par la Constitutionfrançaise de 1958. La Constitutionmonégasque affecte toutefois certainesmatières à la compétence législative et telest donc le cas de l’organisation, de lacompétence et du fonctionnement destribunaux, ainsi que du statut des juges.

Source : www.monaco.gouv.mc

ou son délégué, le procureur général ou sondélégué, le président du tribunal ou son déléguéainsi que trois personnes désignées, à raison deleur compétence, par le directeur des Servicesjudiciaires dont un professeur agrégé desfacultés de droit françaises.Seuls les candidats monégasques ayant satisfaitaux épreuves du concours requis pour accéderaux fonctions de magistrat dans un paysmembre de l’Union européenne et ayant exercéces fonctions durant au moins cinq annéesseront dispensés de passer ces épreuves pourêtre nommés en qualité de magistratréférendaire, après avis du Haut conseil de lamagistrature.La promulgation de ce nouveau statut de lamagistrature a vu s’éteindre le juge suppléant etl’a vu remplacé par le magistrat référendaire.Si l’intitulé change, la fonction n’est pasfondamentalement modifiée pour autant. Ainsi,le magistrat référendaire restera amovible, afinà la fois de lui permettre de terminer saformation directement auprès des différentesjuridictions monégasques et d’évaluer sesqualités en tant que magistrat. Le magistratréférendaire ne sera nommé définitivementqu’après avis conforme du Haut conseil de lamagistrature.Le magistrat référendaire restera dans cettefonction durant deux années, officialisant ainsila pratique antérieure qui faisait que les derniersjuges suppléants le restaient durant unemoyenne de deux années avant d’être nommésjuges titulaires.Une des grandes nouveautés réside égalementdans les méthodes d’avancement qui se fontdésormais à l’ancienneté de manière automa-tique.Ainsi, une nouvelle garantie est offerte puisqu’iln’existe pas de moyen d’entraver, le cas échéant,la carrière d’un magistrat. Cependant, le texteprévoit que les personnes méritantes pourront,sur proposition du directeur des Servicesjudiciaires ou du chef de juridiction concerné,et après avis du Haut conseil de la magistrature,bénéficier d’une réduction de la périoded’ancienneté requise pour changer de grade.Il s’agit là d’un garde-fou qui reprend par ailleursles durées d’ancienneté communémentpratiquées auparavant.Les durées d’ancienneté fixées pour accéder augrade supérieur sont de huit années entre letroisième et le deuxième grade et de dix annéesentre le deuxième grade et le premier grade.Dans le cas où un avancement anticipé seraitproposé, la durée d’ancienneté ne pourraitcependant être inférieure à quatre ans.Les nominations aux grades supérieurs nepeuvent intervenir que par ordonnancesouveraine, rendue après avis du Haut conseilde la magistrature.Le nouveau statut offre désormais la possibilitéaux magistrats de faire défendre les intérêts deleur profession par l’action syndicale.Cela peut de prime abord paraître surprenantquand on sait que le nombre total de magistratsqui pourraient être défendus par un syndicatest de 24, mais cela s’inscrit dans un souci demodernisation qui permettra de faire valoir laposition du corps et non d’un seul individu.A ce titre, il est à noter que des statuts ont étédéposés afin de créer effectivement un syndicatde magistrats.Le nouveau statut s’inscrit globalement dans

une idée de modernisation et cela peut seressentir jusque dans la formule de serment queles magistrats doivent prononcer, et ainsi, siauparavant, il était juré fidélité au Prince etobéissance aux lois de la Principauté, il seradésormais juré de respecter les institutions dela Principauté et de veiller à la juste applicationde la loi. La pierre angulaire de toute la réforme résidedans l’instauration du Haut conseil de lamagistrature.Il a d’ailleurs été installé solennellement le26 avril 2010, en présence de Son AltesseSérénissime le Prince Albert II.Ce nouvel organe est au cœur dufonctionnement du nouveau statut de lamagistrature. Il a plusieurs fonctions, mais vanotamment donner son avis sur lesnominations et l’avancement des magistrats etstatuera en matière disciplinaire.Il est composé de sept membres : le directeurdes Services judiciaires qui en est le président,le Premier président de la Cour de révision quien est le vice-président, ainsi que des membresdésignés : un par le Conseil de la couronne, unpar le Conseil national, un par le Tribunalsuprême hors de leur sein et enfin deuxmagistrats élus par le corps judiciaire ; seuls lesmembres de la Cour de révision ne pouvantêtre candidats à ces élections.Suite aux élections qui se sont tenues le 16 mars2010, la composition du Haut conseil a été fixéepar l’ordonnance souveraine n°2.711 du 19 avril2010.Il est donc constitué, outre Messieurs ledirecteur des Services judiciaires et le Premierprésident de la Cour de révision, des membrestitulaires suivants :- Me Paul-Louis Aureglia, notaire honoraire,désigné par le Conseil de la couronne ; - Mlle Coralie Ambroise-Casterot, professeuragrégé des facultés de droit, désignée par leConseil national ; - M. Jean-Pierre Machelon, professeur agrégédes facultés de droit, désigné par le Tribunalsuprême ; - M. Gérard Dubes, premier substitut duprocureur général, élu par le second collège ducorps judiciaire ; - M. Sébastien Biancheri, juge au Tribunal depremière instance, élu par le premier collège ducorps judiciaire.Et des membres suppléants suivants :- M. Roger Beauvois, vice-président de la Courde révision, désigné par ladite cour poursuppléer le vice-président de droit ;- M. Olivier Echappe, président de chambre àla Cour d’appel de Versailles, désigné par leConseil de la couronne ;- M. Pierre Julien, professeur agrégé des facultésde droit, désigné par le Conseil national ; - M. Patrick Gérard, recteur de l’Académie,chancelier des Universités de Paris, désigné parle Tribunal suprême ; - M. Robert Cordas, Premier président de laCour d’appel, élu par le second collège du corpsjudiciaire ;- M. Cyril Bousseron, juge au Tribunal depremière instance, élu par le premier collège ducorps judiciaire.Afin de respecter l’ordre des pouvoirs et leprincipe de la justice déléguée, le Haut conseilrendra des avis destinés à éclairer le Prince dansses décisions puisque les nominations des

magistrats et les nominations à des grades plusélevés sont et restent une prérogative duSouverain.Dans le cas où l’avis du Haut conseil diffèreraitde celui du directeur des Services judiciaires, lePrince tranchera seul, muni des deux avis.La seule exception à cette règle concerne latitularisation définitive d’un magistratréférendaire pour laquelle un avis conforme duHaut conseil est nécessaire. Cela signifie que ladécision de nommer un juge monégasque doitêtre prise à la fois par le Haut conseil et le Prince.Le Haut conseil dispose également d’unemission générale puisqu’il peut être consultépour toute question portant sur l’organisationou le fonctionnement de la justice.Si le Haut conseil est constitué de 7 membres,il est cependant une situation où seuls six de sesmembres se réuniront et se verront complétéspar le Premier président de la Cour d’appel ouson vice-président, c’est celle des poursuitesdisciplinaires.Cette exception a trait au fait qu’il échet audirecteur des Services judiciaires de saisir leHaut conseil des poursuites disciplinaires àl’encontre d’un magistrat et d’établir un mémoireau soutien de ses demandes.Si de telles situations devaient se présenter, undébat contradictoire est prévu, le magistratconcerné se voyant communiquer le dossier depoursuites ainsi que le mémoire du directeur desServices judiciaires ; il pourra y répliquer par écritet le cas échéant se faire assister par un avocat-défenseur ou un avocat, monégasque ou étranger.En outre, l’audition de témoins sera possible, à lademande des parties ou même d’office.Dans ce cas, les décisions du Haut conseilseront motivées et signées par les membresayant pris part à la délibération. Les décisionsqui emporteraient des sanctions telles quel’abaissement d’échelon, la rétrogradation, l’ex-clusion, la mise à la retraite d’office ou la révo-cation seront rendues exécutoires par ordon-nance souveraine.Il est cependant prévu un cas de suspension quipeut être prise en urgence par le directeur desServices judiciaires après avis du Premierprésident de la cour d’appel et du procureurgénéral.Le Haut conseil revêt donc une importancetoute particulière dans ce nouveau statut de lamagistrature. Il est intéressant de le compareravec ses équivalents dans les autres pays.

II. Le Haut Conseilface à ses équivalents

L’indépendance des juges est une des conditionsde la liberté politique des citoyens ou sujets d’unpays et, au fil des années, l’instauration d’unConseil de la magistrature ou de la justice s’estimposée dans la plupart des pays, notammenteuropéens.Ainsi, l’Italie a instauré un tel organe en 1947,le Portugal en 1976, l’Espagne en 1978 et laBelgique en 1998. De même, les pays de l’Europecentrale et de l’Est se sont dotés pour une grandepartie d’un tel Conseil lorsqu’ils ont retrouvé lechemin de la démocratie et ont consacré leprincipe de la séparation des pouvoirs et del’indépendance des magistrats.

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Même les pays anglo-saxons et d’Europe duNord, qui présentent des particularitéspolitiques et historiques par rapport à nossystèmes de droit romain, ont adopté desstructures qui se rapprochent des conseils quel’on peut trouver dans les différents payseuropéens et participent d’ailleurs au Réseaudes conseils de la justice créé à Rome en 2004.Le meilleur, et le plus proche des exemplesreste celui de la France qui, par la loi du 30août 1883 constitua la Cour de cassation enConseil supérieur de la magistrature. Le pro-fesseur Jean-Gicquel devait d’ailleurs, lors deson discours donné à l’occasion du cinquan-tième anniversaire du Conseil supérieur de lamagistrature, dire de cette loi que c’était « untexte fondateur de la justice républicaine en cequ’il crée, conformément au principe de laséparation des pouvoirs, une institution-écranou d’interposition destinée à préserver l’indé-pendance des juges. ».C’est par la Constitution du 28 septembre 1958en son article 64 que le Conseil supérieur de lamagistrature français tel que nous leconnaissons aujourd’hui a été instauré.Le Haut conseil de la magistrature monégasquedispose, ainsi que nous l’avons évoqué, de3 membres magistrats dont deux élus par leurspairs, et de quatre membres non-magistrats. Sil’on compare cette composition à celle des autresconseils supérieurs en Europe, c’est uneexception, car dans la grande majorité des pays,les conseils supérieurs sont composés d’unemajorité de membres du corps judiciaire.Même au Portugal où les textes prévoient queles magistrats sont en minorité, les deuxmembres nommés par le Président de laRépublique sont habituellement des magistrats,ce qui leur confère au sein de ce conseil lamajorité.Cependant, il convient évidemment de rappelerque la problématique monégasque n’est pas la

même que dans la plupart des autres pays neserait-ce qu’au vu du nombre de magistrats enposte en Principauté, qui rendrait difficile unereprésentation majoritaire au sein du Hautconseil.La règle de l’élection est aussi majoritairementusitée pour le choix des magistrats devantcomposer les conseils, même si plusieurs paystels que le Danemark, les Pays-Bas et la Suèdeont préféré une nomination par le gouverne-ment.En ce qui concerne les membres non magistrats,le Haut conseil a repris un mode de sélectiontrès proche de celui de la France, du Danemark,des Pays-Bas et de la Suède. D’autres pays ontfait le choix d’élections pour les membres nonmagistrats, par le Parlement, tels que la Belgique,la Bulgarie, la Hongrie, l’Italie, le Portugal, laRoumanie et l’Espagne.La présence de membres de droits, tels ledirecteur des Services judiciaires et le Premierprésident de la Cour de révision, n’est pas unerègle en la matière.Cependant, lorsqu’elle est prévue, elle bénéficiegénéralement aux premiers présidents etprocureurs généraux des cours supérieures,comme en France, en Italie, en Bulgarie et enRoumanie, ainsi qu’aux représentants dupouvoir exécutif tels que le chef de l’Etat en Italieet le ministre de la Justice en Hongrie, Irlande,Pologne et Roumanie.La Bulgarie et l’Italie sont les deux pays qui,hormis désormais la Principauté de Monaco,confient statutairement la présidence duConseil supérieur à un représentant du pouvoirexécutif, chef de l’Etat ou ministre de la Justice.D’autres pays tels la Hongrie et le Portugal enont confié la présidence au Président de la Courde cassation et depuis la dernière réformeintervenue en France, le Conseil supérieur dela magistrature est présidé, par le Premierprésident ou le procureur général de la Cour de

cassation, selon qu’il se réunit en formation siègeou ministère public. Dans plusieurs autres payseuropéens, le président du conseil est élu par leconseil lui-même en son sein.La durée du mandat des membres du Hautconseil est à Monaco de quatre années, ce quiest dans la moyenne des durées de mandat pourles autres pays. Seuls deux pays, l’Espagne et laRoumanie, ont prévu un non-renouvellementdes mandats, considérant que cela constitueune garantie supplémentaire d’indépendance.Pour les autres pays, dont la Principauté deMonaco, le renouvellement du mandat estpossible, soit immédiatement, soit après unedurée préfixe.Dans une majorité de pays, les conseils ne sontcompétents que pour les juges, s’agissant de leurnomination et déroulement de carrière.Cependant, nombre de conseils disposent decette compétence tant pour les magistrats dusiège que du parquet.Les pouvoirs attribués aux différents conseilsen matière de nomination sont très variablesd’un pays à l’autre. Ainsi, certains Etats commel’Espagne, le Portugal et l’Italie ont instauré unsystème dans lequel le conseil prend seul ouquasiment seul la décision des nominations,affectations et promotions.Certains partagent ce pouvoir avec d’autresorganes comme les chefs de juridiction, le chefde l’Etat ou le ministre de la Justice.En France, le Conseil supérieur de lamagistrature propose au Président de laRépublique les nominations des magistrats dusiège de la Cour de cassation, des premiersprésidents des cours d’appel et des présidentsdes tribunaux de grande instance et donne unavis sur les propositions de nomination faitespar le ministre de la Justice, étant précisé quece dernier doit suivre ledit avis. Le Conseildonne en outre un simple avis consultatif surles nominations au sein du ministère public.

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Le système le plus proche du nôtre semble êtrecelui de la Belgique où le Conseil propose lesnominations, mutations et promotions au Roiqui reste libre de les refuser. Ce mode defonctionnement est celui qui convient le mieuxà un système de Justice déléguée, afin derespecter à la fois le principe d’indépendancedes magistrats et les pouvoirs du Souverain.Il est à noter que, quel que soit le cas de figure,les systèmes d’avancement à l’ancienneté,comme ils viennent d’être instaurés enPrincipauté de Monaco, limitent nécessaire-ment le pouvoir des conseils supérieurs,même lorsque leur avis est requis.En ce qui concerne la discipline des magistrats,seuls cinq pays européens ont confié cettemission à un Conseil de la magistrature ou dela Justice : La France, la Bulgarie, l’Italie, lePortugal et la Roumanie.Les Pays-Bas et la Pologne ont confié cettemission aux juridictions de droit commun, leDanemark, la Hongrie et la Suède ont pour leurpart créé des juridictions spécifiques et les autrespays ont organisé des systèmes mixtes oùplusieurs organes se partagent les questions dediscipline.La plupart des organes disciplinaires sontcomposés de magistrats et de non-magistrats.D’un pays à l’autre, la nature administrative oujudiciaire de la procédure est très variable.En outre, seuls les Pays-Bas semblent ne pasavoir prévu de recours contre les décisions enmatière disciplinaire.En Principauté de Monaco, si la possibilité d’unrecours n’est pas expressément prévue, le droitcommun tend à considérer qu’il restera toujourspossible de saisir le Tribunal suprême enapplication de l’article 90 B 1 de la Constitution.Le Haut conseil de la magistrature monégasquene dispose pas, à l’inverse de nombreux conseilsd’autres pays, de pouvoirs en ce qui concernetant la formation initiale que la formationcontinue des magistrats. Il n’intervient pas nonplus dans le concours de recrutement.En cela, le Haut conseil se rapproche du Conseilsupérieur de la magistrature français qui nedispose pas non plus de pouvoirs de cet ordreet n’a pas autorité sur l’Ecole nationale de lamagistrature, chargée des formations initiale etcontinue.Il convient de rappeler que les magistrats del’ordre judiciaire monégasque sont formésinitialement par l’Ecole nationale de lamagistrature française et qu’ils peuventparticiper aux formations continues qu’ellepropose, ceci expliquant que le Haut conseiln’ait pas de fonctions spécifiques en cettematière puisqu’en tout état de cause, il n’existepas de système de formation des magistrats entant que tel au sein de la Principauté.La plupart des conseils sont expressément dotésdu pouvoir de donner des avis sur des projetslégislatifs concernant la justice au sens large : lestatut des magistrats, le fonctionnement de lajustice et des tribunaux ou l’organisation judiciaire.Certains conseils ont même, comme enBelgique, en Espagne ou en Bulgarie, l’obligationde rédiger un rapport sur le fonctionnement dusystème judiciaire. D’autres, à l’instar de l’Italie,ont la faculté de rédiger un rapport accompagnéde propositions.Si le Haut conseil de la magistrature moné-gasque ne s’est pas vu confier de tels attributspar la loi n° 1.364 du 16 novembre 2009, celle-

ci prévoit en son article 21 que le Haut conseilpeut être consulté par le Prince sur toute ques-tion portant sur l’organisation ou sur le fonc-tionnement de la justice. Il sera donc amené àdonner des avis dans des domaines très variés.Ceci a d’ailleurs d’ores et déjà été mis en placedans le cadre de réflexions sur la formationcontinue des magistrats.Pour parfaire ces avis, nombre de pays ontdonné à leurs conseils des pouvoirsd’investigation voire d’enquête et d’audit.Ainsi, en Roumanie, le Conseil supérieurcomprend un département d’inspectionjudiciaire. De même au Portugal et en Espagne,le conseil a la faculté d’organiser des inspectionsafin de proposer des mesures pour remédieraux déficiences qui seraient constatées.Il faut cependant noter que nombre de cesconseils, même s’ils n’en ont pas l’obligation,rédigent pour la plupart des rapports sur lefonctionnement, tant du conseil lui-mêmeque sur le système judiciaire et font à cetteoccasion des remarques et suggestions quantaux améliorations qui pourraient être appor-tées.Ces organes ont tous la possibilité de se fairecommuniquer les statistiques de fonctionne-ment des juridictions et possèdent des pou-voirs d’inspection plus ou moins étendus.La problématique monégasque est différentesur ce point, car la dimension de l’ordrejudiciaire de la Principauté fait qu’il n’est pasapparu nécessaire de prévoir des pouvoirsspécifiques d’enquête ou d’audit, et ce d’autantplus que le directeur des Services judiciaires adéjà la possibilité de solliciter des juridictionsou du Parquet des rapports et statistiques.En outre, les membres élus du Haut conseilétant des magistrats en exercice dans lesjuridictions monégasques, ils en connaissent,par essence, les problématiques et le mode defonctionnement.Certains pays ont souhaité, afin de marquerd’une manière particulièrement forte laséparation des pouvoirs, doter le systèmejudiciaire d’un mode de fonctionnementautonome et donc d’un budget radicalementséparé de l’exécutif et dans ces cas, le Conseilsupérieur peut, par exemple aux Pays-Bas, auDanemark, en Suède ou en Irlande, être chargéde la répartition du budget entre les différentscours et tribunaux, lesquels sont d’ailleurs enconséquence dotés de systèmes administratifspropres et doivent rendre compte de la gestiondu budget auprès du Conseil.Ce mode de fonctionnement serait bienévidemment incompatible avec notre systèmede justice déléguée puisqu’il marquerait uneséparation absolue de la Justice et de l’exécutifet donc de la personne du Souverain.D’ailleurs, ce système est minoritaire puisqueseuls les pays d’Europe du Nord l’ont adopté,pour des raisons historiques ayant entrainé unecertaine défiance vis-à-vis de l’influence que lepouvoir politique pourrait avoir sur le pouvoirjudiciaire.En ce qui concerne leur mode de fonctionne-ment, certains pays, et notamment l’Italie,l’Espagne et la Belgique ont doté leur Conseilsupérieur d’une infrastructure administrativetrès importante avec du personnel permanenten quantité et un fonctionnement en commis-sions. D’autres, comme l’Italie et l’Espagne sesont même vus dotés de services de docu-

mentation et d’un département des relationsinternationales. D’ailleurs, dans ces pays, lesmembres magistrats des conseils sont déchar-gés de toute activité juridictionnelle.Cela n’est cependant pas une tendancemajoritaire et ainsi nombreux autres pays, dontla France, n’ont pas doté leur Conseil supérieurde tels atouts et se voient mettre leurs moyensà disposition par le pouvoir exécutif.La Principauté a suivi ce dernier modèle qui, làencore, est le plus adapté à sa situation. En effet,si le rôle du Haut conseil est primordial dans lenouveau statut de la magistrature monégasque,il ne serait cependant pas envisageable dedécharger ses membres de toute autre fonctionni de prévoir un fonctionnement en commis-sions, avec du personnel à temps plein.

III. Conclusion

Ce nouveau statut a donc réussi à être modernetout en respectant les institutions de laPrincipauté de Monaco et ses particularismesqui font qu’un modèle ne peut être entièrementrepris d’un autre pays.Le système est-il perfectible ? L’avenir le dira,nous n’avons pas encore de recul sur sonapplication.Aurait-on pu aller plus loin comme certainsl’auraient souhaité ? Peut-être.Cependant, l’équilibre semble avoir été trouvéet de l’avis de beaucoup, il aurait été difficiled’aller encore au-delà de ce qui a été fait sansremettre en cause le principe de la justicedéléguée et les pouvoirs du Prince.Le nouveau statut répond aux objectifs que lelégislateur s’était fixé, une modernisation afinde répondre aux besoins de tout état de droit :assurer la compétence, l’impartialité, l’intégritéet l’indépendance des magistrats.Cela n’a pas pour seul but de protéger le juge,mais légitime sa fonction à l’égard du justiciableet sert à lui inspirer la confiance en la Justice.Cette réforme était nécessaire pour asseoirencore davantage ces garanties qui sontindispensables puisque les magistrats exercentau nom du Souverain une prérogativerégalienne de l’Etat.Mais cette délégation est présente dans tous lesEtats de droits, quelle que soit leur essenceconstitutionnelle puisque même dans les Etatsoù il ne persiste pas de système de justicedéléguée en tant que telle, les décisions sontrendues au nom du peuple souverain qui confiedonc les pouvoirs judiciaires aux magistrats.Ce nouveau statut offre aux magistrats desgaranties telles qu’ils pourront continuerd’exercer leur profession le plus sereinementpossible et être à l’abri de tout arbitraire, carc’est à cette condition qu’ils pourront protégerles justiciables, leur garantir une justice indé-pendante et peut-être finir de restaurer laconfiance qu’ils peuvent avoir en elle.Je souhaiterais, avant d’en terminer avec cetteintervention que j’espère avoir rendue intéres-sante, remercier Monsieur le directeur desServices judiciaires, Monsieur le Premier pré-sident de la cour d’appel et Madame le prési-dent du Tribunal de première instance dem’avoir confié la prestigieuse et délicate mis-sion d’assurer le discours de l’audience solen-nelle de rentrée ».

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Contrat judiciairepar Robert Cordas

(…)

Il m’appartient maintenant de rendrecompte, le plus brièvement possible, del’activité civile des juridictions, Monsieurle procureur général devant évoquer dans

un instant l’activité pénale.Au cours de l’année judiciaire qui vient des’achever, l’activité des juridictions a été toujoursaussi soutenue.Je dois citer quelques chiffres même s’ils nepeuvent traduire par leur aridité la très grandecomplexité des contentieux qui sont soumis ànos juridictions.- le Tribunal du travail a traité 61 procédurestandis que le Bureau de conciliation, saisi de121 requêtes, a pu procéder à 4 conciliations soitune activité comparable à celle de l’année passée.Je tiens à rendre hommage aux juges duTribunal de première instance qui ont bienvoulu assurer la présidence de cette juridictionce qui s’est ajouté à leur charge de travailhabituelle. Ils ont ainsi contribué à éviter que lenombre d’affaires en attente de jugement quis’élève à 288 n’atteigne de plus grandesproportions.- La Justice de paix a également connu une forteactivité. Si le nombre de jugements rendus enmatière civile est à peu près constant, le nombrede jugements de simple police a connu unehausse de 87%, celui des injonctions de payer de21,40% et celui des ordonnances de 36,40%.Là encore le mérite en revient aux magistratsdu Tribunal de première instance qui ont prisde leur temps pour assurer la tenue de cesaudiences en palliant l’empêchement dumagistrat titulaire.Je dois également rendre hommage au greffieret à la secrétaire du juge de paix qui ont sus’organiser en conséquence.- Le Tribunal de première instance a rendu4 392 décisions toutes matières confondues,dont 1 016 jugements.Le nombre d’affaires nouvelles (725) commecelui des procédures en attente de décisions(1 143) reste à peu près constant.137 ordonnances de référé ont été rendues.Le juge tutélaire qui a en charge plus de 700procédures a rendu 346 décisions.

Ces excellents résultats sont dus au travailtoujours aussi minutieux et réfléchi desmagistrats du tribunal qui a vu les départs trèsregrettés de Monsieur Robin, juge, et deMonsieur Nédelec, premier juge d’instruction,après plusieurs années passées au service del’institution judiciaire monégasque.Le Tribunal de première instance a accueillien début d’année deux nouveaux magistrats :Mme Casini-Bachelet et Mme Hoarau qui ontdéjà donné la pleine mesure de leurs qualitésprofessionnelles et humaines.Plus récemment il y a quelques jours ontégalement été installés au Tribunal de premièreinstance : Mme Fleurichamp précédemmentvice-président au Tribunal de grande instancede Grasse et Monsieur Kuentz, vice-présidentchargé de l’instruction au Tribunal de Saint-Pierre de la Réunion.Nous leur renouvelons nos compliments et nosvœux de succès dans leurs nouvelles fonctions.Le sous-effectif dont a souffert le tribunal setrouve donc maintenant résorbé.La Cour de révision a rendu en matière civile39 arrêts pour 30 l’année précédente. Aucune

des décisions civiles qui lui ont été déférées n’aété censurée. La Cour de révision a vu le départ de deux deses conseillers, Monsieur José Chevreau etMonsieur Jerry Sainte-Rose mais qui vientd’accueillir trois nouveaux magistrats : MonsieurJean-Pierre Gridel, Monsieur Guy Joly etMonsieur Jean-François Renucci auxquels nousrenouvelons nos compliments.Le Tribunal suprême a rendu 16 décisionscomme l’année passée.La Cour d’appel a enregistré en matière civile115 affaires nouvelles (pour 158 l’annéeprécédente) et a rendu 173 arrêts (dont 157 aufond) pour 142 l’année précédente (dont 134au fond).La diminution sensible des procéduresnouvelles et l’augmentation du nombre d’affairestraitées ont contribué à une réduction dunombre d’affaires en cours de 204 à 170.La chambre du conseil a rendu 32 arrêts enmatière civile.Ces très bons résultats sont le fruit d’un travailsans relâche. Il m’est donc particulièrementagréable de rendre publiquement hommage aux

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REPÈRES

Le droit monégasque

Le droit monégasque est, dansson ensemble, largement inspiré

du droit français. Ceci s’explique parl’étroitesse et l’ancienneté desrelations privilégiées unissant lesdeux pays.Ainsi de 1793 à 1816, les codesfrançais promulgués sous le PremierEmpire furent appliqués à Monaco.Pour pallier dans certaines matièresl’inadaptation de la législationfrançaise aux particularités de laPrincipauté, des codesspécifiquement monégasquesfurent ultérieurement promulgués,tels le code de commerce le5 novembre 1866, le code pénal le19 décembre 1874 et le code civil le21 décembre 1880. Par la suite, lePrince Albert Ier décida de confier aubaron de Rolland, magistratfrançais, la rédaction de deuxnouveaux codes, le Code deprocédure civile et le Code de

procédure pénale, lesquels furentrespectivement promulgués en1896et en 1904.Ces cinq codes représentèrentjusqu’au début des années 1960l’essentiel du droit positifmonégasque et ne connurent quede minimes modifications .Mais le 26 mai 1954, le PrinceSouverain ordonna la création d’uneCommission de mise à jour descodes chargée précisément deproposer les révisions nécessairesde la législation monégasque àl’effet de l’adapter aux besoinsnouveaux des justiciables et auxstandards contemporains. Cetorganisme présidé, dès sa création,par le Directeur des servicesjudiciaires, président du conseild’Etat, fut composée à l’origine, dequatre conseillers à la cour derévision. Ses travaux aboutirent à lapromulgation, en 1963, d’un

nouveau Code de procédure pénale,puis, en1967, d’un Code pénal. Sacomposition est aujourd’huicomplétée par des professeurs dedroit, des magistrats d’autresjuridictions monégasques, unmembre du barreau et deuxreprésentants du Conseil national(+ 1 membre du Gouvernement).A ce jour, en dépit de l’inspirationfrançaise, de nombreusesparticularités du droit monégasquesont tout à fait notables, dans desdomaines très divers : le droit de lafamille, de la nationalité, dessociétés, les procédures collectivesde règlement du passif, le droitpénal, la procédure pénale, le droitadministratif, etc …Une revue de droit monégasquepubliée depuis l’an 2000, facilitedésormais sa connaissance.

Source : www.monaco.gouv.mc

“Ce que les textes de notredroit processuel interne neprévoient pas encoreexpressément, doit être pris enconsidération et appliqué enpratique pour que notreprocédure soit en conformitéavec ce principe de droiteuropéen qui s’impose.”Robert Cordas

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magistrats qui sont à mes côtés, au greffier enchef et agents du greffe pour leur investissementet leur dévouement sans faille.Je précise à cet égard que le Greffe a reçu etdélivré 7 138 actes au cours de l’année.Monsieur le Bâtonnier, je veux aussi remercierles membres de votre Barreau pour leurcollaboration dans la mise en état desprocédures et la qualité de leur contribution àl’élaboration des décisions que nous rendons. Ilest de coutume de dire que les bonnesconclusions font les bons jugements ou les bonsarrêts et que les bons avocats font les bons juges.Pourtant, il nous reste une marge de progressionet le traitement des contentieux devant la Courme semble encore très perfectible.

D’une part parmi les 170 affaires en attentecertaines datent de plusieurs années et ont faitl’objet d’échanges de conclusions multiples etvolumineuses sans que ces développementsn’apportent une réelle valeur ajoutée au débat(l’une d’entre elles a déjà donné lieu à 1 810 pagesde conclusions…).Pour celles-là, il conviendra que soit rapidementparachevée leur mise en état par le dépôt devéritables conclusions récapitulatives que laCour sera amenée à exiger des parties, au besoinpar arrêt avant dire droit.Nous devons en effet franchir une étape : cellequi consiste à passer d’une mise en étatpurement mécanique à une mise en état active,je dirai même proactive, constructive et rapide.D’autres procédures méritent un traitementaccéléré en raison de leur nature : en matière dedroit de la famille ou d’accident, du travail parexemple.Je suis bien conscient en tenant ces propos qu’ilssont susceptibles de heurter les esprits quiconsidèrent que selon notre procédure civilemonégasque le procès serait la chose des parties,et que le juge n’a donc pas à s’immiscer dans sapréparation ou son déroulement.Mais ce principe est en contradiction fonda-mentale avec celui issu des normes euro-péennes et plus précisément celui de laConvention européenne des droits del’homme selon lequel tout justiciable a droit àce que sa cause soit instruite et jugée dans un« délai raisonnable ».Cette règle que les plaideurs ne manquent pas,légitimement, de nous rappeler en matièrepénale, s’impose aussi en matière civile, ce quel’on pourrait avoir tendance à perdre de vue. Elle s’impose aux parties et au juge.Si le juge a le devoir de la respecter lui-mêmeen rendant ses délibérés à bref délai, il a aussi le

devoir de la faire respecter par les plaideurs enévitant les comportements dilatoires…Ce « devoir » vient d’être récemment inscritdans le recueil de déontologie établi par leConseil supérieur de la magistrature françaisau nombre des obligations qui pèsent sur lemagistrat au titre de son devoir de loyauté àl’égard du justiciable.Il a de même été consacré dans la résolution del’assemblée générale du Réseau européen desConseils de justice du 9 juin 2010 relative à ladéontologie des juges qui stipule que « danschaque procédure le juge veille à fixer des délaisraisonnables aux parties et à lui-même ».C’est pourquoi il me paraît nécessaire de tenterde concilier ces deux conceptions en imaginantun traitement des procédures qui soitdifférencié en fonction de la nature de l’affaireet de sa complexité réelle (et non pas supposée)afin que les parties disposent du tempsraisonnablement nécessaire pour faire valoirleurs prétentions avant que le juge ne rende sadécision le tout dans le cadre d’un véritable« contrat judiciaire ».Ce que les textes de notre droit processuelinterne ne prévoient pas encore expressément,doit être pris en considération et appliqué enpratique pour que notre procédure soit enconformité avec ce principe de droit européenqui s’impose.C’est dans cette voie que je souhaite engagerrésolument l’action de la Cour d’appel cetteannée pour ce qui concerne le traitement descontentieux civils.Je me réjouis de constater que le Tribunal depremière instance vient d’exprimer le souhaitde s’engager également dans la même démarcheet ne peux que l’encourager vivement àpersévérer avec détermination.(…)

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Croire en la justicepar Jacques Raybaud

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En ce début d’année judiciaire que noussouhaitons heureuse pour cette belle ins-titution, malgré les difficultés internes ouexternes, que nous ne méconnaissons

pas, il nous faut être convaincus pour reprendrecette belle expression d’un ancien premier prési-dent de la Cour de cassation, Monsieur Aydalot,« qu’il n’est pas de sentiment qui soit ancré plussolidement au tréfonds de la conscience deshommes que celui de la justice ».Et dans un discours de rentrée, l’un de sessuccesseurs, Monsieur Pierre Drai, parachevait cepropos en ajoutant : « Ceux qui servent la Justice avecconscience - c’est-à-dire hors les cris et les clameurs,mais aussi hors les chuchotements pernicieux etdestructeurs - ceux qui en sont les détracteurs de métierou de circonstance doivent savoir que même lorsqu’ilsdisent qu’ils ne croient plus à rien, les hommescontinuent à “croire en la Justice” ».

Croire en la Justice

C’est en premier lieu être convaincu que celle-ci remplit correctement une grande partie deses missions.Le faisons-nous ? Pour le petit domaine qui estle mien, à savoir l’activité pénale, je crois pouvoirrépondre par l’affirmative.

La situation de la délinquanceet la réponse du Parquet

Il convient tout d’abord de rappeler notammentà l’adresse de nos invités que même si les chiffresapparaissent quelque peu flatteurs par rapport

à d’autres ressorts, ceux-ci ne peuvent êtreanalysés en faisant abstraction du nombre denationaux et résidents monégasques ainsi quede la complexité incontestable de bon nombred’affaires.Le nombre de plaintes qui a été enregistré en2009-2010 est à peu près identique à celui de2008-2009 : 2 794 contre 2 859, soit unediminution de 2,5%.Les grandes tendances sont globalement à labaisse.Si l’on essaye d’affiner à travers quelquesinfractions :

Les stupéfiantsLégère diminution de l’ordre de 3%, étant préciséqu’il s’agit dans la plupart des cas de faits dedétention, les faits de trafic relevés au cours del’année judiciaire n’ayant été que de 4.Les conduites en état alcoolique : connaissentune baisse plus marquée de l’ordre de 7% mêmesi malheureusement celles-ci peuvent conduireà des situations tragiques, comme nous l’avonsconnu dernièrement.

Les vols : situation plus contrastéeEn effet, si l’on se doit de constater une légèreaugmentation des vols simples sur l’ensemblede l’année judiciaire de l’ordre de 7%, enrevanche une tendance inverse doit être relevéeconcernant les vols avec effraction commis dansles maisons d’habitation puisque nousenregistrons une baisse de l’ordre de 50% avecune chute significative au cours de l’été écoulé.

Délinquance économique et financièreQui représente environ le tiers des procéduresenregistrées.Sur cette masse, de quelques 786 procès-verbaux, il convient de relever que certainesinfractions ne trouvent que très rarement deréponse pénale. Je veux parler de l’usage

frauduleux de cartes bancaires dont le chiffreest en augmentation de 32%.L’on sait bien qu’il est difficile d’enrayer ce phéno-mène puisque nous assistons tout au contraire àune croissance soutenue des transactions parcartes bancaires à l’échelle internationale.S’agissant du blanchiment, on se doit de releverune baisse des signalements enregistrés en 2010de l’ordre de 40%. Même constat en ce domaine s’agissant descommissions rogatoires internationales quinous sont adressées par l’étranger avec unetendance à la baisse de 28% (31). Bien évidemment, le suivi de ces dossiers estassuré de façon rigoureuse puisque pourprendre le chiffre de l’année 2009, l’année 2010n’étant pas arrivée à son terme, je peux vousindiquer que sur 21 procédures (signalements) :- 6 ont fait l’objet d’une mesure de classement

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“Comme S.A.S. le PrinceSouverain le rappelait dansson intervention lors del’installation du Haut Conseil :« Je vois votre Conseil commeun véritable partenaireinstitutionnel, soucieux commeJe le suis de garantir auxjusticiables une justiceindépendante et impartiale,rendue par des magistratsirréprochables (…)»”Jacques Raybaud

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sans suite, faute d’éléments pour les raisons quiseront développées dans un instant ;- 5 ont donné lieu à une ouverture d’informationavec les investigations nécessaires toujoursmenées par le magistrat instructeur ; - 9 ayant donné lieu à enquête préliminaire.Malheureusement, je ne peux que soulignerles difficultés de faire aboutir certains de cesdossiers du fait de l’insuffisance des renseigne-ments initialement communiqués et des diffi-cultés rencontrées en pratique par les servicesspécialisés de la Sûreté pour obtenir les élé-ments nécessaires permettant de caractériserl’infraction originelle.Constatant ces difficultés, mon parquet a,depuis un an, essayé de les contourner ens’adressant directement aux autorités judiciairesétrangères concernées.Hélas, là encore, cette démarche proactive n’estpas systématiquement couronnée de succès.Je ne puis en conséquence qu’appeler trèssincèrement de mes vœux que la coopérationavec certains Etats immédiatement voisins ou pasconnaisse une évolution plus favorable, Monacode son côté mettant un point d’honneur àrépondre de façon systématique et rapide à toutedemande d’entraide venant de l’étranger, avec undélai moyen de réponse de l’ordre de 2 mois.

Commentaires sur ces chiffres :Le premier commentaire, comme je l’ai rappelétout à l’heure, c’est que ces chiffres sontglobalement satisfaisants. (…)Ces résultats convenables sont dus égalementà la réponse apportée à la délinquance par monparquet et les juridictions pénales dans leuraction régulatrice tant répressive que préventive.Le sens de l’action du Ministère public et desdécisions des juridictions pénales a bienévidemment pour seul objectif de tendre versune justice répressive, rapide, efficace et adaptée.Mais nous reviendrons sur ce point dansquelques instants.

Il m’appartient, à présent, d’examiner l’activitépénale des différentes juridictions :Les magistrats instructeurs ont été saisis cetteannée à 48 reprises, ce qui représente unediminution de quelque 49% par rapport à 2009. Parallèlement, 94 règlements ont été établis,avec une durée de traitement tout à fait correctede 45 jours.Le Parquet civil a suivi 622 procédures,55 dossiers de naturalisation ayant été traités.

Le Parquet général a par ailleurs été rendudestinataire de 83 commissions rogatoiresinternationales, soit une diminution de 11% avecun délai de traitement moyen de deux mois. 32 commissions rogatoires internationalesont été délivrées par Monaco dont 15 enmatière de blanchiment.Le Tribunal correctionnel a prononcé888 jugements, soit une augmentation depresque 10%, tandis que la Cour d’appel, de soncôté, a rendu 60 décisions en chambre duconseil et 50 décisions correctionnelles, ce quireprésente un taux d’appel de 15%.Cette même Cour a eu à connaître de 4 dossiersd’extradition sur les 7 demandes formulées. Acelles-ci s’ajoutent 10 demandes d’extraditionformulées par Monaco dont 3 demandesd’extension, soit le double de 2009. La Cour de révision a été saisie en 2010, de82 pourvois dont 42 en matière pénale et a rendu101 arrêts dont 62 en matière pénale, soit uneaugmentation de plus de 40% dont 3 cassations.12 dossiers nouveaux ont été enregistrés auTribunal suprême dont une demande de sursisà exécution qui a été suivie d’effet. Cette hautejuridiction a rendu 16 décisions. Afin d’éviterque le Tribunal suprême ne prenne des mesuresavant-dire-droit, je crois utile ici d’insister sur lanécessité pour les parties de déposer desdossiers complets.Enfin, la maison d’arrêt a procédé à 101 écrous.Ajoutons, et cela est important, que la duréemoyenne de détention provisoire s’agissant desmineurs a été de 36 jours et que celle des majeursa été de 61 jours, soit une diminution de 36%. (…)

Croire en la Justice c’est en deuxième lieu,savoir que l’institution judiciaire ne reste pas àl’écart de l’évolution de notre monde d’au-jourd’hui et sait parfaitement s’adapter en semodernisant… en modernisant ses structures eten modernisant ses modes de fonctionnement.

La modernisationdes structures d’abord

Nous avons écouté avec beaucoup d’intérêtl’intervention de notre collègue Bellinzona quia bien voulu nous entretenir, avec brio, de cetteréforme importante du statut de la magistratureet qui a opportunément enrichi son exposéd’éléments de droit comparé.Ne nous y trompons pas : il s’agit d’une réformeau cœur de nos préoccupations qui a pu voir le

jour à l’issue de réflexions approfondies et quiconstitue, je pense, un bon point d’équilibre.Ce texte devrait être suivi d’une refonte de la loisur l’organisation judiciaire.Instituant notamment un Haut conseil de lamagistrature, il apparaît innovant en ce qu’il créeune structure habilitée à partager avec le PrinceSouverain un certain nombre de prérogativeset à assurer l’effectivité de l’indépendance desmagistrats.Certes, ce principe fondamental est déjàinscrit dans notre Constitution mais satraduction est affinée sur certains points,notamment l’avancement et les procéduresdisciplinaires.Comme S.A.S. le Prince Souverain le rappelaitdans Son intervention lors de l’installation duHaut Conseil : « Je vois votre Conseil comme unvéritable partenaire institutionnel, soucieuxcomme Je le suis de garantir aux justiciables unejustice indépendante et impartiale, rendue pardes magistrats irréprochables, conscients desresponsabilités redoutables qui sont les leurs ettoujours attentifs aux enjeux, privés et publics,qui cernent les litiges qu’il leur appartientd’arbitrer ». Il appartiendra très probablement à terme à ceHaut conseil de définir dans ses avis les contoursd’une déontologie qui sera aussi utile à l’usagerde justice qu’au juge lui-même. La qualité de la justice que rend ce dernierdépend en effet non seulement du respect desrègles de procédure mais aussi d’une certaineéthique.Cela veut dire trois choses à mon sens :- conscience professionnelle qui l’incite à unevigilance quant à l’examen de ses dossiers et auxconséquences de ses décisions,- conscience qui le pousse à parfaire saformation,- conscience que son activité n’est pasindividuelle mais qu’elle est collective et qu’elles’inscrit dans le fonctionnement d’unejuridiction.L’on voit bien en conclusion qu’en regard desmissions qui sont les siennes et des objectifs àatteindre, ce Conseil répond bien à uneconception moderne de la justice et qu’il estappelé à bref délai à prendre au sein desinstitutions monégasques une place nonnégligeable.

L’indispensable modernisationdes modes de fonctionnement

Celle-ci est une préoccupation constante en cequi nous concerne et même si elle revêtquelquefois un caractère très concret, elle n’enest pas moins importante.Il en est ainsi de l’outil informatique qui permetde mieux suivre l’activité pénale et de rendremieux compte des différentes formes de ladélinquance avec une typologie plus fine desdifférentes infractions qui passe notammentpar la création d’un panel étoffé de critères derecherches. (…)La modernisation de nos modes defonctionnement ne peut être dissociée, ensecond lieu, de la nécessaire adaptation de nosréponses aux différentes formes de ladélinquance.Je me souviens ici que lors d’une rentréesolennelle, j’avais eu l’occasion de faire état d’uneaugmentation des procédures constatées en

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matière de vols par effraction dans des maisonsd’habitation, alors que cette année, tout aucontraire, ces vols sont en forte diminution,comme nous l’avons vu.Par contre, depuis quelques mois, et bien que latendance ne soit pas aussi négative sur l’année,mon attention est appelée sur une augmentationdu nombre des infractions commises par desmineurs, avec deux pics, si je puis dire, en maiet en juillet (respectivement 17 et 11 procéduresqui ont trait essentiellement à des faits de volset de consommation de stupéfiants).Je me dois de reconnaître que ce constat desderniers mois est intervenu en dépit d’uneréactivité accrue de ce parquet et d’un suivirigoureux de ces procédures par le collègue encharge de ces dossiers, lequel a procédé àquelque 15 admonestations.De quoi s’agit-il ?Il s’agit de rappels à l’ordre effectués en directionde primo-délinquants, en présence des parentset un procès-verbal est signé par l’intéressé quis’engage à ne plus recommencer.L’intérêt de cette procédure réside justementdans cette sorte de « contrat moral » entrel’institution judiciaire et le mineur qui est par

ailleurs prévenu que les poursuites pourrontêtre reprises en cas de récidive.Pour l’instant, nous avons le plaisir de constaterque tel n’a pas été le cas.Poussant plus loin nos interrogations, nousavons tenu également à développer nos effortsplus en amont en approfondissant nos relationsavec nos partenaires institutionnels dans cedomaine. Une première réunion s’est tenue enjuin 2010 avec les services de l’Educationnationale en présence de Monsieur Péri, sondirecteur et avec ceux de la Direction de l’actionsanitaire et sociale pour voir comment nouspouvions améliorer notre action commune enmatière de signalements de mineurs en danger.Cette réunion s’est doublée dernièrement d’unerencontre avec Monsieur le juge tutélaire, car ilest bien certain que s’il est un domaine oùl’action isolée de tel ou tel n’a que peu de sens,c’est bien celui-là.Ces deux réunions permettront, je n’en doutepas, d’améliorer notre action commune en cedomaine, notamment au niveau du suivi desmesures adoptées et les résultats escomptés n’enseraient que meilleurs si ces efforts étaientaccompagnés d’un léger accroissement deseffectifs, notamment d’éducateurs.

Je tiens ici tout particulièrement à remercier lesdifférents départements ministériels concernéspour l’engagement qu’ils ont ainsi démontré surce sujet, que je considère comme central.L’implication et la bonne connaissance de cesproblèmes comme en ont les interlocuteursrencontrés sont les garants de l’efficacité de lajustice dans un domaine où l’être en devenirqu’est tout mineur exige, au plus haut degré, desqualités professionnelles et humaines, telles quesens des responsabilités et écoute des uns et desautres.Il est inutile de dire que je pense hautementsouhaitable de continuer notre travail encommun afin d’essayer d’apporter une meilleureréponse à ces problèmes touchant unepopulation de jeunes en difficultés. Il nous fautnécessairement les protéger et les aider.

Enfin, croire en la justice, c’est être persuadéque les membres qui la composent ont toujoursla même énergie et le souci constant de bienfaire.Je reprendrai ici le propos de clôture d’uncolloque sur la magistrature tenu à l’époque parMonsieur Drai qui paraphrasant La Bryère disait

« Vous ne vous contenterez pas de faire votremétier, mais vous aurez à cœur de faire votredevoir : rendre justice à ceux qui, en confiance,s’adressent à vous, le faire dans un délairaisonnable et supportable, par des décisionsimmédiatement compréhensibles, le tout dans unclimat qui exclut soupçons et prévention. Soyezces “praticiens de l’Ideal” seulement préoccupésde la confiance et du respect qui vous sont dus.En tout, soyez crédibles et responsables ».Crédibilité, en premier lieu, pour le parquet,va de pair avec effectivité qui inspire chacunedes actions de celui-ci.L’effectivité, c’est avant tout apporter uneréponse systématique à tout acte de délinquancecomme la loi nous le demande.A cet égard, la certitude et la rapidité de lasanction sont des armes essentielles pour lutterefficacement contre la commission d’infractionset contre la récidive car une justice trop lenteest aussi une justice sans mémoire.Sur ce plan-là, à Monaco, nous ne pouvons quenous féliciter, tout au moins pour l’instant,puisque nous avons des délais d’audiencementsur citation directe de l’ordre de 4 mois et quenous parvenons à fixer à une dizaine de joursnos convocations à comparaître.

Réponse rapide, mais non réponse unique.Un tel choix appartient bien au seul parquet quidoit retenir la meilleure réponse à un acte dedélinquance et être en permanence enrecherche d’adéquation au terrain, tant il est vraiqu’une « bonne » action publique est celle quirépond concrètement au problème constaté.Cela passe par conséquent par une utilisationaussi fine que possible des différents outils ànotre disposition et absence de comparutionimmédiate ne signifie pas bien sûr absence deréponse pénale.Je dirais même qu’il s’agit là de l’orientationmajoritairement retenue puisque l’on constatequ’en 2009 il y eu quelque 738 citations directes,ce qui représente environ 80% des poursuitesengagées.Orientation qui devrait être reconduite en 2011.En second lieu, responsabilité va de pair pource parquet avec l’obligation qu’il se fait de menerune action de qualité :- qualité tout d’abord des procédures qu’il estappelé à conduire, condition essentielle à undébat judiciaire juste et clair,- qualité dans la recherche difficile à trouverquelquefois entre efficacité de la procédure etprotection des libertés,- et enfin qualité dans l’obligation de privilégier entoutes circonstances la réponse judiciaire humainec’est-à-dire adaptée à chaque cas individuel.Cette mission est d’autant moins aisée à remplirqu’elle concerne l’application tant du droit pénal,du droit civil que du droit commercial et socialet même administratif puisque ce parquetintervient comme « rapporteur public » devantle Tribunal suprême. C’est aussi une autre facette de cette notion deresponsabilité qui nous contraint au respectd’un certain nombre de règles, de principes,sous peine de dévoyer, voire de nier l’essencemême de notre fonction qui fonde notre qualitéde magistrat.Requérant une exacte et équitable applicationde la loi, gardien des libertés mais aussi garantde l’ordre public, le parquetier devra veiller àexercer ses fonctions en recherchant l’objectivitéla plus grande et c’est ce devoir d’impartialitéqui constitue le fondement même de cet étatde magistrat qui a été posé récemment par laCour européenne des droits de l’homme.Je ne saurais prolonger plus avant mon proposmais il m’a paru important de rappeler cesquelques principes car ceux qui s’éloignent deces fondamentaux sapent en réalité la légitimitéd’une institution qui participe pleinement aumaintien de l’Etat de droit.

Parce que, comme lui, fils de la Méditerranée,- mais rassurez-vous, ma comparaison s’arrê-tera là - j’emprunterai ma conclusion à AlbertCamus qui, hostile à toute idéologie et prô-nant systématiquement mesure et tolérance,achevait ce magnifique livre « L’homme révolté» par ce propos :« Au sommet de la plus haute tension va jaillirl’élan d’une droite flèche, du trait le plus dur et leplus libre ».Cet espoir, devait, je suppose, être partagé parcet autre citoyen de la Méditerranée, MonsieurDrai quand il déclarait comme je le rappelaistout à l’heure :« que même quand il ne croit plus à rien,l’Homme croit encore à la Justice ». (…)

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Chronique

« Rien ne se produit sans un mouvement initial »(Albert Einstein).

Il faut parfois du temps, de la patience etbeaucoup de souffrance pour que les ténèbresde l’esprit, l’aveuglement instinctif, et lesradicalités sourdes ou barbares de la violence

laissent place aux lumières calmes et puissantesde la raison, à la civilité paisible, et au bel équilibredes forces de vie entre les êtres.Une loi juste et forte a le pouvoir d’accélérer ceprocessus, d’éduquer et relever les consciences.Ainsi les dispositions adoptées le 9 juillet 2010 dansle cadre de la loi n°2010-769 du 9 juillet 2010« relative aux violences faites spécifiquement auxfemmes, aux violences au sein des couples et auxincidences de ces dernières sur les enfants » s’inscritde plain-pied dans la société de progrès qui est lanôtre, dans la belle aventure de l’égalité ou tout aumoins de l’équilibre entre hommes et femmes.Dans notre paysage de lois spéciales, a été instauréeune protection renforcée des victimes de violencesconjugales en ménageant une notion extensive ducouple : divorcé, pacsé ou de fait, y compris de cequ’il en reste après sa rupture.Le juge aux affaires familiales voit ses prérogativesélargies puisqu’il peut adopter des mesures civileset pénales, prendre une ordonnance protectionprescrivant des mesures en urgence dans le cadrede l’article 515-11 du Code civil « s’il estime au vudes éléments produits devant lui etcontradictoirement débattus qu’il existe des raisonssérieuses de considérer comme vraisemblable lacommission des faits de violence allégués et le dangerauquel la victime est exposée ».Les nouvelles dispositions garantissent plusefficacement l’éloignement du conjoint violent ouun relogement assorti de la confidentialité, desdispositions d’accueil pour les enfants, unaccompagnement par des personnes qualifiées.La protection vise tout autant les violencesphysiques que psychologiques. Le harcèlementmoral est désormais reconnu en matière conjugale.La nouvelle loi qui agit par capillarité dans de trèsnombreuses dispositions de notre droit civil et

pénal concerne également l’éducation, l’habitation,le travail, tout autant que le séjour des étrangerset le droit d’asile.Ainsi peu importe la nationalité de la victime etson statut, certaines réserves traditionnelles dudroit des étrangers ont disparu au profit d’uneprotection accrue dès lors qu’elle demeure sur leterritoire français.Le législateur a tenu compte des pratiques etcoutumes étrangères que les femmes peuvent subiren France et partout dans le monde : ainsi ledispositif vise à les protéger contre les mariagesforcés et assouplit les démarches d’obtention d’untitre de séjour en cas de violences.Notre approche ne se veut ni didactique niexhaustive - le lecteur averti pourra se reporter autexte - mais analytique en ce qui concerne tant lesujet qu’elle traite (I) que le rôle précieux de l’avocatdans cet édifice (II).

I. Hommes-femmes :l’égalité des textes ?

L’égalité est un sujet de fond et de forme qui n’enfinit pas de tourmenter nos sociétés modernes.Il s’agit d’une notion plus complexe qu’il n’y parait,une équation faussement simple à deux termes maisà plusieurs inconnues, dont la logique est fuyanteet l’évidence trompeuse.Privilégier l’égalité, parfois de manière expéditiveet idéologiquement consensuelle, aboutit à dessituations paradoxales de déséquilibre parce queles parties ne sont pas comparables, ayant desidentités, des besoins et des spécificités biendistincts.C’est la raison pour laquelle il nous semble qu’avantde s’enfermer dans des concepts qui risquent dedevenir totalitaires parce que nul ne les a biencompris, il parait plus judicieux de raisonner entermes d’équilibre.Il en va ainsi de la place de l’homme et de lafemme : pour les faire vivre en sécurité entre euxmalgré leurs antagonismes obscurs et intemporels,il convient de favoriser un équilibre et de protégerpar priorité la partie affectée du plus faiblecoefficient force/autonomie.La nouvelle loi privilégie ostensiblement laprotection des femmes ce qui pourrait être considérécomme un traitement de faveur mais chacun sait etressent que les violences perpétrées contre ellesdepuis toujours, sont spécifiques tant en raison deleur sexe, vulnérable au sens réel et charnel du terme,que de leur faiblesse morphologique, de leurcondition culturelle et économique partout dans lemonde y compris en France.Chacun garde à l’esprit les drames de la passion,Marie Trintignant victime d’un trop plein d’amourou de folie, de la jalousie ou de l’emprise aveugles,de l’égarement des corps et des esprits.

Existe aussi la violence brute, dépourvue d’amour,seul exutoire d’une haine incontrôlée contre lesfemmes, tout simplement.Le temps était venu d’octroyer à ces victimesfaciles, une part de justice en plus.Organiser le sauvetage, dresser des remparts,faciliter la fuite.Pour la mieux protéger, il fallait donc désignerexpressément la femme en tant que telle, dans letitre et dans le texte, la nommer enfin, cette victimeoriginelle de la culture et de la nature, ce boucémissaire de l’impuissance phallique qui renvoiel’homme aux terreurs archaïques de l’altérité, del’incomplétude et de la castration(1).Lui consacrer le droit à être faible et pointer lecurseur là où cela fait mal depuis tant d’années,depuis la nuit des temps.

A - Le curseur sémantique -L’inégalité textuelle au service d’un

équilibre du socle symbolique

La question des violences dans le couple et surtoutcelles qui s’exercent contre les femmes conduit àquitter l’angélisme de la notion d’égalité sousprétexte que certains acquis et de nombreux droitsont vu le jour depuis une soixantaine d’années.Président encore à l’indigence de certains rapportsde couple, des facteurs sociologiques etéconomiques ; aussi, et surtout, des déséquilibresintrinsèques et profonds, des situations de faiblessepsychique ou encore de peurs trop souvent liéesà des conditionnements ancestraux dont l’hommele plus moderne et tout autant la femme, ont dumal à s’extraire(2).Penser le contraire serait faire œuvre de déni. Orle diable est dans le déni.Les avocats, travaillent pour renverser ce diable,l’extraire des réalités cachées, des apparences lisseset des détresses muettes.La nouvelle loi prend intelligemment en compteces aspects en alliant ce qui fait le socle de touteconstruction humaine : la dimension symboliquedu langage (a) et la consécration de l’incontestablevulnérabilité des femmes (b).

a) Les violences « faites spécifiquement auxfemmes » : les mots pour le direMonsieur François Fillon, a consacré les violencesfaites aux femmes « grande cause nationale » pourl’année 2010.Un rapport d’information préalable intitulé« Violences faites aux femmes : mettre enfin unterme à l’inacceptable » a permis aux parlemen-taires une prise en compte de la réalité notam-ment d’un point de vue sociologique et statis-tique(3).La loi n°2010-769 du 9 juillet 2010 prévoit unchamp d’application plus large puisqu’elle étendses dispositions au couple.

Femmes / hommes : la violence conjugaleet la nouvelle loi du 9 juillet 2010par Myriam Lasry*

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Chronique

La question des violences faites spécifiquementaux femmes apparait néanmoins prioritaire.Cette prise de conscience est une des bannièresdu monde moderne, le bastion avancé du respecthumain au même titre que le développement desconditions de salubrité sanitaire ou celles duprogrès social.L’ensemble de droits qu’une société accorde auxfemmes constitue une jauge très fiable pour établirson niveau de civilisation ou de barbarie.Il est aisé de constater que les peuples et les nationsqui bafouent les Droits de l’homme tiennentencore moins compte de ceux de la femme,l’emprisonnent chaque jour dans les catacombesd’une morale asphyxiante, la cagoulent de linceulsnoirs signant leur vertu et leur misère, quand il nes’agit pas de mutilations nécessaires au bon plaisirou au bon ordre de la société.Ici nous vivons du bon côté du monde : un mondecivilisé qui ne demande qu’à penser, évoluer,s’illuminer de justice, n’en déplaise à bon nombred’intellectuels occidentaux cyniques et défaitistes.C’est donc au trébuchet de l’esprit du temps qu’ilfallait soupeser les équilibres en présence etaccepter d’instaurer un régime spécial pour desvictimes spécifiques : il fallait désormais pointer lesgenres, dire avec les mots « femmes », « violence »que le plus souvent des deux, la victime désignéeau sacrifice est une femme et pas un homme.Comment le faire autrement ? L’être humain estfait de son langage lequel s’insinue dans le tissagedes consciences et se fonde dans la trame duverbe(4) (5).On gagne certains combats en nommant demanière juste et sans artifice.La guerre des mots est une guerre de basseintensité, sensible, infiltrante, irradiante et trèsefficace car elle s’inscrit durablement dans lesgénérations et les schémas tournés vers l’avenir.Les mots fécondent les idées, sculptent la penséetandis que celle-ci voyage dans l’air du temps,chasse et balaie les vieux schémas d’un mondeancien.Jamais le pouvoir du signifiant(6) n’aura été aussiindiscutable qu’aujourd’hui.Internet est le royaume absolu des mots-clés.Ceux-ci, soigneusement choisis, créent,consacrent, hissent au premier plan, érigent, etvalident mieux qu’à toute autre époquel’introduction biblique : « au début était le verbe »(Genèse, Chapitre I Berechit).Femme, loi, violence …un clic pour changer dedestin.

b) Le corps et sa loi : l’incontestable vulnérabilitédes femmesLa nouvelle loi prévoit un arsenal de protectiontrès complet qui confère au juge aux affairesfamiliales des prérogatives étendues, puisque sanssubordonner ses mesures au dépôt de plaintepénale de la victime, il peut, en urgence, imposerl’éviction du conjoint violent dès lors « qu’il existedes raisons sérieuses de considérer commevraisemblable la commission des faits de violenceallégués et le danger auquel la victime estexposée ».L’on ne peut renvoyer dos à dos les victimes detous sexes, de toute corpulence et de toutescultures, il existe des violences qui touchentparticulièrement les femmes.Parce dans le monde et y compris en France etdans certains cas, avec l’importation de coutumespeu amènes, ce sont bien elles qui subissent descrimes d’honneur, des expéditions punitives

mutilantes, des viols perpétrés par un partenaireactuel ou passé, un mariage forcé.Notamment l’article 33 de la nouvelle loi réprimeles situations de violences commises en vue decontraindre une personne à contracter un mariageou en raison de son refus de se soumettre à mariageet applique la loi pénale française, même lorsqueces faits sont commis à l’étranger à l’encontre d’unepersonne résidant habituellement sur le territoirefrançais.La protection des étrangers (entendre : étrangères)est prévue par la délivrance d’une carte de séjoury compris aux personnes en situation irrégulière(CESEDA, article L.316-3 et L.316) ce qui constitueune véritable loi de sauvetage.Désormais, la présomption de consentement àl’acte sexuel s’efface dans le cadre du mariage (Codepénal, article 222-22).Les femmes vivent encore et toujours dans unmonde plus dangereux pour elles qu’il ne l’est pourles hommes. Cela ne se vérifie pas que dansl’obscurité sordide des rues mal famées.Le décor domestique est le théâtre des drames oùle plus fort l’emporte sur la plus faible sans aucunedifficulté : la victime est sous la main, dans le salonou dans la chambre à coucher. Elle s’est habituéepetit à petit à l’inacceptable, ouvrant chaque jourle champ des compromissions.Parce que la différence de force musculaire entreles deux sexes peut atteindre jusqu’à 50%, en raisonde la sécrétion de testostérone(7).Parce que du point de vue économique, ellesdemeurent plus fragiles et plus dépendantes :souvent moins qualifiées en raison de la maternité,du travail à temps partiel et des conditionnementssociologiques persistants, elles perçoivent 27% desalaire en moins que les hommes(8).Lors d’une conférence-débat organisée parAmnesty international en date du 16 juin 2010,Madame Elisabeth Badinter a estimé que le ratiode 10% de femmes victimes de violences au seinde leur couple serait surévalué en raison del’inadéquation de certains paramètres statistiques.Pour autant, une femme décède tous les deux jourset demi victime de son compagnon ou ex-compagnon. (Voir le rapport d’informationpréalable à la loi, dressé en juillet 2009, intitulé« Violences faites aux femmes : mettre enfin unterme à l’inacceptable »).Les violences conjugales expliqueraient 20% deshomicides commis en France : 157 femmes sontmortes sous les coups de leur conjoint en 2008.

c) Une œuvre à long terme : l’éducation desconsciencesLe respect des organismes faibles n’est pas unedisposition naturelle au monde vivant.Pourtant il a été vérifié que les mutations et lespaliers d’évolution destinés à favoriser uneadaptation à l’écosystème sont facilités parl’organisation d’une forme de solidarité entre lesorganismes biologiques d’une même espèce.Une société évoluée favorise l’aide aux démunis.Si les femmes apparaissent moins armées face àune prédation sociale ou sexuelle, la loi a un effetde catalyse sur les mentalités.Le développement du droit social, l’abolition de lapeine de mort, la protection de l’enfance, les droitsde l’homme en ont été des illustrations marquéesdu vingtième siècle.Les nouvelles dispositions n’ont pas pour simplevocation de protéger ou sanctionner : la préventionse fera par une éducation et un regard quelque peudifférent sur les femmes.

« La journée de la femme » du 8 mars était unepremière étape.L’article 24 de la loi instaure une journée du25 novembre consacrée nationalement à lasensibilisation aux violences qui leur sont faites.Autre exemple qui démontre que nulle protectionne pourra se mettre en place sans l’appui du langageet l’exacte dénomination des choses.De même l’article 27 introduit une modificationde la loi du 30 septembre 1986 en ce qu’elleremplace le terme « association familiale » par« association de défense des droits des femmes ».L’article 28 de la loi modifiant la loi du 21 juin 2004relative à la confiance dans l’économie numériqueen faisant remplacer après le mot « violences » sontinsérés les mots « notamment l’incitation auxviolences faites aux femmes ».L’article 29 prévoit qu’un rapport sera remis par legouvernement sur la création d’un Observatoirenational des violences faites aux femmes et il seraprésenté au parlement avant le 31 décembre 2010.

B - La fin des tabous : Le cœur- et le corps - des hommes

La loi du 9 juillet 2010 concerne la violence « ausein des couples » car les hommes peuvent subirune maltraitance physique ou psychologique réelle,quotidienne, souvent invisible ou si peu visibleparce que la société ferme les yeux - au fond querisquent-ils ? Nul ne craint le pire.Prévoir une protection générale au sein du couplemême si la victime n’est pas une femme, ne constituepas un artifice du législateur.Le triptyque protection - prévention - répression- fondant respectivement les chapitres I, II et IIIde la loi - ne s’appliquera pas nécessairement de lamême manière mais la nécessité de prendre enconsidération la partie réputée forte ne relève nid’une vue de l’esprit ni d’une démagogie dérisoire.Il s’agit d’accompagner une réalité mal connue.Les statistiques le démontrent.

a) les faitsSelon le magazine La Croix (La Croix, 22 août2010), 27 hommes sont décédés en 2008 des suitesde la maltraitance physique perpétrées par leurcompagne, soit un décès tous les 13 jours.Même si la proportion hommes-femmes victimesest de 1 à 5,8 (27 hommes contre 157 femmes), lenouveau dispositif se justifie pleinement.Les enquêtes menées en 2008 par l’Observatoirenational de la délinquance démontrent que110 000 hommes seraient victimes chaque annéede violences physiques ou psychologiques de lapart de leur partenaire femme et que cephénomène aurait tendance à s’accroître avec l’âge(Le Figaro, 26 août 2010).Ces statistiques mêlent les violences physiques etpsychologiques. Si l’on isole les seules maltraitancespsychologiques les chiffres se rapprochent : selonFrance Soir, dans une enquête sur le sujet, 8 à 10%d’hommes seraient victimes de violencesconjugalesUne étude québécoise pointe les mêmesstatistiques et indique que 8% des femmes ont subides violences conjugales contre… 7% des hommes.Ainsi les hommes auraient moins besoin d’êtreprotégés d’une forme d’atteinte spécifique à leuridentité sexuelle ou culturelle qu’en en leur simplequalité de partenaire d’une femme déséquilibrée,dure, ou en manque de repères.La violence au féminin existe. C’est aussi uneviolence folle, tyrannique, souvent fondée sur une

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victimisation paranoïaque dont le conjoint situéà la mauvaise place, paie le tribut avec une formede résignation qui ne laisse pas d’étonner.Quelle dette illimitée serait-il en charge de régler ?Que dire de l’impérium des femmes sur leur foyer,de cette nostalgie pour une toute puissancenaguère exercée sur les petits, maintenue sansdésemparer, à l’âge de la maturité sur le conjoint.Toujours enivrées de leur pouvoir fétiche de vieet de mort du temps où elles menaient leur familletambour battant, elles entretiennent en l’autrel’illusion de sa totale dépendance.Que dire de la dictature domestique qui infantiliseou même réifie ce conjoint débonnaire, lequel, pardétestation du conflit ou crainte de déplaire - oucrainte tout court - alimente le système pervers desa soumission à l’idole indéboulonnable, la femme,la mère, sacrée ou déifiée par les archétypesuniversels(9).Que dire de tous petits garçons, ces êtres perduset murés dans de grand corps d’homme, sommésd’accepter comme une évidence un certainsadisme quotidien parce qu’ils n’en ont pas terminéavec un attachement insécure, un holding distant,une cruauté plus lointaine, celle qui empruntaitjadis les alibis naturels de ces mains maternantesdisposant sans limite ni contre-pouvoir de lapuissance absolue d’intrusion, de sanctions.L’acceptation jour après jour de la maltraitance faitreculer les défenses et les limites psychiques.L’inacceptable surgit par un chemin aux contoursindéfinis en en temps réel et qui ne se distinguequ’a posteriori lorsqu’on l’a quitté pour de bon.Hommes meurtris bafoués humiliés ; victimesconsentantes dont on ne sait quelle histoireancienne avec cette femme omnipotente qui leurfut donnée pour mère… ou tout simplementfroide, distante, étrangère à cet enfant et à elle-même.La grande détresse humaine aussi déchirantequ’invisible est de devoir accepter n’importe quellesituation d’iniquité pour échapper à l’angoisse duvide et de la solitude. Tout sauf l’indifférence… Ycompris la maltraitance.

b) Tu seras un homme mon filsN’a-t-on pas toujours inculqué aux petits garçonsla vertu de retenir les larmes ? Ne sont-ils encoreconditionnés pour être plus durs au mal que lesfilles, plus résistant aux coups dans la cour derécréation, moins passifs, moins sensibles ?

La Croix du 7 mai 2003 :« Quand on interroge les parents sur la façon dontils élèvent les filles et les garçons, ils disent souvent« on ne fait pas de différence », mais les stéréotypesde sexe sont encore très vivaces.La force des stéréotypes éducatifs a été mise enévidence par des tests effectués aux Etats-Unis.Quand on présente un bébé, habillé de façonindifférenciée, à un groupe d’adultes comme étantun garçon, il est qualifié de « grand, fort, etc. »Le même bébé, présenté comme étant une fille, seraaffublé de qualificatifs opposés : « petite, jolie, fine,douce ».Quand on leur présente une vidéo d’un bébé quipleure et qu’on leur demande pourquoi, la plupartrépondent « parce qu’il est en colère » si on leur ditqu’il s’agit d’un garçon.Mais si on leur dit qu’il s’agit d’une fille, ils répondent« parce qu’elle a peur ».Il est difficile d’échapper à « ce phénomèned’étiquetage » comme l’appelle la psychologueaméricaine Zella Luria.

« Chez les filles, on valorise le relationnel, les tempsd’échange, les sourires, les jeux verbaux - lesvocalisations pour les bébés.Avec les garçons, on s’investit davantage dans lesactivités physiques, les jeux brutaux et on acceptemieux qu’ils soient turbulents ».1 - Parents de filles, parents de garçons : les élève-t-on de la mêmefaçon ? Edition Milan.2 - Filles et garçons, êtes-vous si différents ? Edition de La MartinièreJeunesse.

c) De la dictature culturelle à la double infamieLes hommes battus ne sont que 5% à pouvoirtémoigner - contre 8% - en ce qui concerne lesfemmes.Une femme qui porte plainte pour violencesbénéficie d’une crédibilité forte et son actionn’engendre pas ipso facto de déficit narcissique tandisqu’un homme malmené perd sa dignité sociale, nejouit pas nécessairement d’une plus- valuecompassionnelle : il encourt même un scepticismenarquois de l’officier de police qui le recevra.Ainsi le voilà nié dans son statut de victime, ce quiconstitue un préjudice peu acceptable.Les hommes maltraités subissent donc une doubleinfamie : silence et humiliation.Les lieux de parole réservés aux femmesn’accueillent pas les hommes et ceux-ci ne peuventque se tourner vers l’association « SOS hommesbattus » qui fonctionne à guichet unique.La violence subie est au départ psychologique :harcèlement, humiliations et isolement.La brutalité physique apparait plusieurs annéesaprès.Une femme qui frappe son compagnon nonviolent peut parier sur le fait qu’il ne ripostera paspar crainte de sa propre force ou des représaillesjudiciaires.En règle générale, les femmes ne font pas l’objetd’une garde à vue et sont rarement condamnéesdans les cas peu probable d’une comparutioncorrectionnelle.En tant que femme, en tant qu’avocat, suis-je moinssensible à la souffrance des hommes au prétextequ’ils ont été incontestablement par le passé, lessavants organisateurs de l’oppression des femmes ?La réponse est non.Car je préfère un monde où chacun sauve la face,son sexe, son corps.Un monde sans humiliation. Un monde juste oùles êtres vivent en paix dans l’intimité de leurhistoire parfois douloureuse et de leursconditionnements à affronter.Un monde où les hommes préservent cette dignitédont ils ont tant besoin pour asseoir leur virilité,et osons le dire, le sens encore vivace du devoir desécurité et de protection envers leur famille.Ces schémas n’ont pas disparu parce qu’ils relèventfondamentalement de l’espèce et de l’identité :notre culture latine ne les a pas encore abrogés.En tant qu’avocat, je veux être et je suis, au-delà dutemps, des mœurs et des tabous, un lieu, un espaceoù s’expriment la honte, l’indicible, l’innommable,la parole maudite.Un monde plus juste sait que la force ou la faiblessene sont pas nécessairement où l’on pense lestrouver, que la vérité n’est pas dans les apparences.Elle ne se prouve pas plus dans les armes que dansla complainte ou les larmes.Avocats nous possédons cette richesse de savoircontempler notre prochain de l’autre côté dumiroir et le suivre avec compassion vers cesterritoires perdus où nul n’oserait s’aventurer.

d) Le statut de demandeur : perversions et autresmarchés de dupesLe texte, dans un souci de simplification peuopportun à notre sens, semble poser que « la partiedemanderesse » est, ipso facto, la victime.Ne s’agit-il pas d’un avantage judiciaire accordé àla partie la plus diligente ?Aux termes de l’article 515-11 de la nouvelle loi lejuge peut se fonder sur des estimations, un ressenti,une vraisemblance…Il prend des mesures « s’il estime au vu des élémentsproduits devant lui et contradictoirement débattusqu’il existe des raisons sérieuses de considérercomme vraisemblable la commission des faits deviolence allégués et le danger auquel la victime estexposée ».Ne peut-on pas imaginer qu’une femme puisseêtre plus systématiquement demanderesse àl’action ? Cela fait-il d’elle la vraie victime ?Avec le crédit qui est le sien auprès des autori-tés, elle n’aura aucun mal à fabriquer du vrai-semblable, prétendre qu’elle a été agressée enpremier alors même, que par des violencesinitiales elle aurait suscité une riposte - mêmeatténuée, mais qui ferait de l’homme undéfendeur - un conjoint à abattre, avec toutesles conséquences graves que la loi fait pesersur lui : mesure d’éloignement, de privation del’habitat, de perte de l’autorité parentale, ainsique toutes les mesures coercitives dont on nepeut se féliciter que si elles sont appliquéesavec justesse et justice.

II. Avocats : Les piliersd’un monde meilleur

A - Corps présents

a) L’avocat : Un savoir-faire spécifique etincontournableNous sommes présents avec nos codes, notrecorps, nos cœurs.Avant même les premières fissures ou quand letoit s’effondre et le sol se dérobe.Les situations humaines sont faites d’émotions etde déchirements, de relations complexes etmeurtries, de soif de justice, de besoinséconomiques immédiats.Notre mission, au-delà de la défense, est dereconstruire un monde cohérent, panser les plaiessociales, soigner, accompagner, faire en sorte queles êtres en déshérence ré-habitent un jour leurscorps, leurs esprits, leurs maisons.Cette loi de protection nous place au carrefour detrès nombreuses branches du droit où toutes noscompétences spécifiques se déploient : civil, pénal,droit du travail, droit des baux, droit de séjour oud’asile.Notre intervention ne saurait être seulementcontingente, aléatoire et tributaire de petits besoinsponctuels car le droit s’est éminemmentcomplexifié. Les justiciables, notamment lorsqu’ilssont en situation de crise ou de faiblesse ont grandbesoin d’une aide qualifiée, éthique, morale,réglementée.Notre habileté professionnelle est davantagerequise lorsque la charge de la preuve est difficileà rapporter notamment en cas de violences psy-chologiques : seuls les avocats, par leur pratiquedu contentieux et l’expérience ingrate desembûches judiciaires, disposent d’outils intellectuels

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spécifiques : faculté d’anticipation et de stratégie.Nous avons fait le choix dès l’origine, dès notreprestation de serment - et même avant pour lesplus enthousiastes - d’aider notre prochain, de luiprêter assistance.Cette vocation n’est ni vaine ni artificielle.Elle nous contraint au contraire à faire des choixdignes et parfois difficiles d’écoute et de don de soi.Il sera très opportun et très bien accueilli decommuniquer sur ces valeurs et notre savoir-faireprécieux, nous présenter à visage humain etdécouvert. Les justiciables ne demandent qu’ànous faire confiance, obtenir des garanties decompétence, de dévouement et de probité.Une bonne communication nous montrera dansnotre réalité : accessibles et en mesure de réglerles difficultés les plus anodines ou les plus graves,sans que nous devenions des produits de grandeconsommation, ce qui perdrait les justiciables etdévoierait nos principes essentiels.

TVDroit dont le lancement est intervenu le15 octobre 2010 et dont madame Marie-AiméePeyron a fait connaitre les premières images lorsde l’Assemblée générale extraordinaire du Conseilnational des barreaux contribuera sans doute àfaire connaître au grand public mais aussi auxautres professionnels que nous croisons, le rôlesingulier, éminemment spécifique et humain quenous tenons.

b) L’interprofessionnalité comme activateur decompétencesDans les crises de familles, les situations peuventassez rapidement devenir graves et urgentes surtoutlorsqu’il y a violence physique ou psychique grave.Les questions relatives aux enfants, aux subsides,au logement doivent être abordées avec sérieuxdans un souci de clarification et de viabilitéfinancière à court ou très long terme.Or le droit ne peut faire sans le chiffre etréciproquement.Le débat sur l’interprofessionnalité met en exerguela nécessité de ne pas écarteler, parcelliser, disloquerles savoirs, la force ne pouvant venir que de l’unitéet du regroupement.Qu’il s’agisse de conseil ou de contentieux, la plus-value de nos interventions est mise en relief et enlumière lorsque nous travaillons avec d’autresprofessionnels, chacun accomplissant sa part deprodige dans un esprit de proximité indispensableau service d’une bonne justice.Si les acteurs du chiffre et du droit décident de serapprocher et de se tenir chaud, ils tiendront égalementchaud à ceux qui ont recours à leur savoir-faire : chacungagnera en crédibilité par cette compétence liée et lejusticiable bénéficiera d’une sécurité accrue.Les querelles entre professions règlementéesdoivent se dissiper car les compétences de chacunfont plus que s’additionner : les qualificationsconjuguées du chiffre et du droit agissent avec lavitalité d’une fonction exponentielle dans le sensd’un service de qualité.Ainsi les professions non réglementées serontperçues comme ce qu’elles sont réellement, c'est-à-dire non fiables et génératrices de dérive.Dans le souci scrupuleux de notre déontologie,nous pourrions, en respectant toutes lesprécautions éthiques qui s’imposent, envisagerpour l’avenir, une interprofessionnalité adaptéeaux autres besoins des justiciables, et pourquoipas, en y associant d’autres professionnels de l’aideet de la sollicitude : psychiatres, pédopsychiatres,psychologues, assistants sociaux, médiateurs.

Nous serions d’ailleurs en bonne place pour enconstituer les figures de proue, coordonner cesactions concertées et pluridisciplinaires.Sans être capitalistique cette interprofessionnalitépermettrait la mise en place d’une aidepolyvalente autour des personnes en difficulté,au sein de sanctuaires précieux qui pourraientêtre désignés par une nomenclature porteuse demots apaisants et réconfortants : maisons « dejustice et de soins », maisons d’« assistance et deréconfort des familles »…

B - Lecture d’avenir :Un M.A.R.C. de qualité pour une

solution au long terme

Dans certains cas où la violence est physique,réitérée et même assumée sans remords parl’auteur des faits, les mesures radicalesd’éloignement et la sanction pénale nousapparaissent incontournables.Il se peut que le dialogue n’ait tout simplement passa place, que l’agresseur dont la constructionpsychique est perverse soit dénué de touteempathie, et nie purement et simplementl’existence de sa victime.D’ailleurs le législateur a voulu privilégier un espritde respect, l’article 41-1-5° du Code de procédurepénale (article 30 de la loi ) prévoyant que lamédiation pénale n’est possible qu’à la demande ouavec l’accord de la victime.Dans les cas moins graves et il en existe denombreux, où les voies de fait sont inexistantes,où la violence est psychologique, le dialoguerompu, la médiation nous apparaît une mesurefructueuse car elle peut aider chacun dans cetterelation dysfonctionnelle et torturée.L’amour se mue en haine, la haine se transformeen procédures.La consécration légale de la violence morale et duharcèlement va sans doute favoriser l’inflation desdemandes judiciaires - qui devront être décryptéescomme autant de demandes d’aide au couple.Pour se maintenir dans la relation, ou pour ensortir, le plus dignement possible.Une mesure de médiation constituera peut-être laseule et unique opportunité dans la vie de ce couple,d’aborder réellement, et avec une émotion juste, lesquestions qui l’ont affecté en profondeur, deconvoquer les rancunes anciennes, d’ écouterautrement certaines plaintes et d’entendredifféremment la sensibilité de l’autre.L’attachement ne disparait pas de manière sisimple, sans laisser de traces.Car même sans sexualité, sans cohabitation, la pageprétendument tournée, l’amour meurtri ou déçuhante les esprits et continue d’habiter les poitrines.Si le couple constitue, en fin de vie ou bien aprèssa rupture, un champs de mines, il dessineégalement le territoire des possibles et permet, s’ilbénéficie d’une aide digne de ce nom, d’instaurerdes relations créatrices et des solutions nouvelles- parfois insoupçonnées - dans l’intérêt biencompris de chacun et notamment celui des enfantsqui sont les siens. Il parait souhaitable de ne pasdélaisser cette opportunité.De fait, nous sommes en tant qu’avocats placés auxpremières loges de la médiation, de l’arbitrage, dela conciliation. De droit, nous devons occuper cetteplace naturelle dans la résolution des litiges.Les conflits ne signifient pas nécessairement laguerre mais souvent deux conceptions différentesde la paix qui s’opposent…

III. Conclusion

La loi du 9 juillet 2010 instaure, à notre sens, unvéritable équilibre, antichambre de l’égalité quantaux traitements de la violence, qu’elle soit physiqueou psychologique subie par les femmes mais aussipar les hommes.Si les femmes ont obtenu une consécration tantsur le fond que de nature sémantique de la violencequi leur est faite depuis toujours, les hommesmaltraités en couple ont désormais la possibilitéde briser la loi du silence : la justice ne commence-t-elle pas lorsque les tabous se brisent et la parolese libère ?Avocats, nous sommes parties prenantes desmutations profondes de la société telle que vouluepar le législateur, des évolutions qui, lorsqu’ellessignent le progrès, nous confèrent la tâche nobled’accompagner les personnes dans les aspectsmultiples de leur vie. Juridique, leur parcours estaussi psychologique, économique, et touche à lasanté du corps.A notre sens, l’interprofessionnalité, à conditionde la soumette à une éthique scrupuleuse, nouspermet de valoriser nos compétences et d’affirmerleurs forces et singularités dans une perspectivede grande efficacité pour les justiciables.Il serait utile de favoriser les mesures de médiation,puisque notamment la violence psychologique a étéreconnue digne d’être prise en compte par la loi. Lesenfants n’en sont d’ailleurs pas les dernières victimes.Le médiateur invite chacun à exprimer sasouffrance et ses déceptions, favorise l’émergenced’une parole singulière qui n’a peut-être pas puexister auparavant, ce qui permet auxprotagonistes de tracer par eux-mêmes, les grandeslignes de force d’un accord viable et prometteurdans l’intérêt de chacun, y compris de leurs enfants.Le temps des conflits, de la rage de la guerre estparfois nécessaire et même incontournable.Il y a une certaine élégance à en sortir.

« Nous ne voyons pas le monde avec nos yeux, nousle voyons avec nos concepts » (Albert Jacquard,Petite philosophie à l'usage des non-philosophes).

« Nous sommes tissés de l'étoffe dont sont faits nosrêves » (William Shakespeare).

Références bibliographiques :1 - Sigmund Freud, Essais de psychanalyse. Traduction française, 1920par le Dr S. Jankélévitch. Nouvelles conférences sur la psychanalyse(Conférences dispensées de 1915 à 1917).2 - Pierre Bourdieu, « La domination masculine », Editions du Seuil,1998.3 - « Violences faites aux femmes : mettre enfin un terme àl’inacceptable », rapport commandé par la députée madame DanielleBousquet, rapporteur : monsieur Guy Geoffroy, député.4 - Françoise Dolto, « Tout est langage », Editions Gallimard, Paris, 1994.5 - Louis Ferdinand Saussure, « Théorie de linguistique générale ». Voiraussi « Le cours de linguistique générale de Saussure : Le rôle de lalangue vis-à-vis de la pensée », Sandrine Tognotti, Université de Genève,1997.6 - Sur le pouvoir du signifiant : Jacques Lacan, Jacques Lacan, « Ecrits »,Editions du Seuil, deux volumes, Paris, 1966, réed. 1999 (ISBN2020380544) voir « Le Séminaire », Editions du Seuil, Paris, 2001 (ISBN2020486474.7 - « Sportmédecine.com : « les différences hommes-femmes ».8 - « Les inégalités de salaires hommes-femmes : du temps de travailaux discriminations », 6 janvier 2009 (Lara Muller, Premièresinformations, premières synthèses, n°44-5, 31 octobre 2008).9 - Carl Gustav Jung, « Psychologie et religion », Buchet-Chastel, 1958.

* Myriam Lasry est avocat à la Cour, ancien secrétaire de la Conférence,diplômé de l’Ecole supérieure de commerce Reims, anciennementchargée de cours à l’Université, membre de l’Association « AlpesMaritimes Médiation ; elle se présente aux prochaines élections, auConseil de l’Ordre des Avocats du Barreau de Paris ».

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