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USAGES ET APPROPRIATIONS D’UN ESPACE PUBLIC A MARSEILLE : LE CAS DE LA PORTE D’AIX Côme Blanchin Séminaire S9 AVT : Constitution, recomposition et densification du territoire urbain en Méditerranée Axe 1 – Modes de constitutions de l’espace public urbain : les pratiques et les formes Enseignant encadrant : Sandrine Hilderal-Jurad ENSA-M Janvier 2016

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Usages et appropriations d'un espace public à Marseille : le cas de la Porte d'Aix

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USAGES ET APPROPRIATIONS D’UN ESPACE PUBLIC A MARSEILLE :

LE CAS DE LA PORTE D’AIX

Côme Blanchin Séminaire S9 AVT : Constitution, recomposition et densification du territoire urbain en

Méditerranée

Axe 1 – Modes de constitutions de l’espace public urbain : les pratiques et les formes

Enseignant encadrant : Sandrine Hilderal-Jurad ENSA-M Janvier 2016

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Je souhaite remercier Sandrine Hilderal-Jurad pour ses conseils avisés tout au long de la rédaction, Julie Lalande, Thierry Ciccione, Jean-Michel Savignat, Nicolas Mattei, Bernard Misrachi

et les habitants de la Porte d’Aix pour m’avoir accordé de leur temps, Alex, Paul, Antonin et Célia pour leur soutien

et Jean-Yves et Claire pour leur relecture.

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AVANT-PROPOS Marseille est une ville de contrastes, de couleurs et de richesses. C’est ma ville depuis cinq ans, et je ne m’en lasse pas. J’y découvre chaque jour de nouvelles choses, de nouveaux endroits et de nouvelles personnes. C’est pourquoi je voulais absolument réaliser mon mémoire de cinquième année sur un espace public de Marseille. Lequel ? Là était toute la question. Puis m’est apparu la Porte d’Aix comme une évidence. Depuis que je suis arrivé à Marseille, ce quartier m’a toujours intrigué. Porte de la ville hier comme aujourd’hui, situé dans l’hyper centre-ville et proche de tout mais finalement relégué en second plan par nombre de marseillais. Je me suis donc plongé dans ce quartier, j’ai essayé de comprendre ce qui pouvait être mystérieux à mes yeux, j’ai questionné, et j’ai rencontré des personnes qui m’ont beaucoup appris sur cette partie de Marseille et sur les gens qui l’habitent. Écrire ce mémoire m’aura permis de découvrir encore un petit peu plus Marseille, ses quartiers et ses habitants.

Espace public – Pratiques – Projet urbain – Transformation – Cristallisation

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TABLE DES MATIERES

AVANT-PROPOS ................................................................................................................ 7

INTRODUCTION .............................................................................................................. 13

I. UN ESPACE PUBLIC TRANSFORME AU FIL DU TEMPS .................................. 21

1. De la Porte Royale à la Porte d’Aix ....................................................................... 21

2. Le territoire de la voiture ....................................................................................... 23

3. Réappropriation de l’espace public par les habitants ............................................. 25

II. L’ESPACE PUBLIC DE LA PORTE D’AIX AUJOURD’HUI, QUELLES PRATIQUES ? .................................................................................................................... 31

1. La Porte d’Aix, un territoire composé de fragments d’histoire ............................. 31

2. De multiples pratiques qui composent l’espace public .......................................... 36

3. Un effet cristallisant des travaux actuels ............................................................... 44

III. UNE DUALITE ENTRE MUTATIONS ET PRATIQUES DES HABITANTS ... 47

1. Une dualité à révéler .............................................................................................. 47

2. Le regard des acteurs sur les pratiques dans l’espace public ................................. 49

CONCLUSION ................................................................................................................... 55

BIBLIOGRAPHIE ............................................................................................................. 59

TABLE DES ILLUSTRATIONS ...................................................................................... 61

ANNEXES ........................................................................................................................... 63

1. Entretiens avec des habitants de la Porte d’Aix ..................................................... 63

2. Entretiens avec divers acteurs du projet actuel ...................................................... 65

3. Documents de concours du projet de Stoa pour le réaménagement de l’espace public de la Porte d’Aix .............................................................................................................. 67

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INTRODUCTION Selon Thierry Paquot (2009), les espaces publics sont ceux qui peuvent être accaparés par des personnes privées ou partagés collectivement. Ajoutons que pour Alice Beja (2012), « les espaces publics […] ont vocation à être habités par tout un chacun, par ce « public » mouvant, composé de consommateurs et d’usagers, mais aussi de flâneurs, d’errants, de foules plus ou moins soumises aux itinéraires balisés par l’autorité ». Quels qu’en soient leurs dimensions, les espaces publics permettent aux habitants de s’arrêter, se croiser, se rencontrer, discuter ou simplement jouir d’une respiration dans la densité urbaine. À Marseille, à la croisée de trois arrondissements, un espace public revêt toutes les fonctions énumérées par Alice Beja ; c’est celui de la Porte d’Aix. Point de départ de l’axe majeur de Marseille (Arc de triomphe de la Porte d’Aix – Obélisque de Mazargues), cet espace a connu maints projets urbains qui l’ont fait, refait et défait au fil des siècles. Porte historique de Marseille pour aller vers Aix-en-Provence, ce fut longtemps la limite (remparts) de la ville de ses faubourgs. Puis, au fil du temps, la ville est passée au-delà et les faubourgs sont devenus des quartiers marseillais. Au XXème siècle, l’autoroute nord vient terminer sa route sur la place de la Porte d’Aix et énormément détériorer l’espace. En effet, l’arrivée de l’autoroute en 1969 va marquer cet espace public : la place ne va devenir qu’un vaste rond-point dirigeant les automobilistes vers les différents quartiers de la ville. Les usages des habitants vont alors énormément changer. Au fil des années et des projets, la Porte d’Aix se trouve sans arrêt en mutation (Centre directionnel, Euroméditerranée, etc.) Les usagers en sont les premiers concernés. Nous pouvons donc nous poser la question suivante : Quels sont les effets des projets urbains sur les pratiques des usagers de l’espace public de la Porte d’Aix ?

Fig. 1 : L'axe historique de Marseille en 2011 (photo Camille Moirenc)

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Pour cela, nous utilisons une méthode hypothético-déductive. Ainsi, dans le déroulé du mémoire, nous posons trois hypothèses majeures :

- l’arrivée de l’autoroute en 1969 détériore l’espace public de la Porte d’Aix ; - l’arrivée d’Euroméditerranée modifie les pratiques des usagers. Avec le recul de

l’autoroute en 2010, les usagers de la Porte d'Aix retrouvent un espace public. - les travaux actuels (de 2015) cristallisent une situation : l’espace public change de

forme, mais les usagers et leurs pratiques restent les mêmes.

De plus, afin de poser les cadres du sujet, nous avons défini certains mots-clés. Dans ce mémoire, nous utiliserons des projets urbains comme repères temporels. Selon Avitabile (2005), le projet urbain est « une démarche d’initiative publique qui a pour objet de définir un cadre et une stratégie d’action en vue d’induire des dynamiques urbaines (ou un processus de mutation urbaine) en prenant en compte les logiques des agents et les jeux d’acteurs et en articulant les différents registres d’action aux différentes échelles inférant sur ses conditions de concrétisation ». Nous pouvons aussi le définir comme un projet qui redéfinit les espaces urbains et qui peut en changer les pratiques. Ainsi, comme ils sont vecteurs de changements d’espaces, d’usages et/ou de pratiques, les projets urbains semblent être de très bons marqueurs de temps. Les mots usages et pratiques sont souvent employés de manière similaire, il faut cependant noter une certaine différence. Nous parlons d’usage lorsque nous mettons l’accent sur l’objet, car c’est lui qui offre des fonctions et des services qui permettent des usages. Et nous parlons de pratique lorsque nous mettons l’accent sur l’homme. Dans ce mémoire, nous emploierons donc le terme de « pratique » et non pas celui d’ « usage » car il nous semble important d’insister sur les habitants de la Porte d’Aix et de leur appropriation de l’espace public. Nous utiliserons aussi le terme d’usager, bien qu’il se rapporte au mot usage, car, selon le dictionnaire Larousse, c’est « une personne qui a recours à un service public ou qui emprunte le domaine public », par conséquent l’espace public. Les pratiques que nous observons sont majoritairement de deux types : en mouvement ou statiques. Les pratiques dites de mouvement sont celles qui sont contenues par des flux réguliers. Cela peut être un passage régulier d’usagers à pied à un endroit comme devant une bouche de métro par exemple. Cela peut-être aussi les flux de voitures ou de bus dans les rues avec une interaction piétonne si quelqu’un monte ou descend du véhicule. Les pratiques dites statiques sont les plus fréquentes à la Porte d’Aix. Celles-ci sont caractérisées par une appropriation stationnaire d’un espace par une personne. Par exemple, dans le délaissé autoroutier, la majorité des pratiques sont dites stationnaires, telles qu’une sieste, la lecture d’un journal ou une discussion entre plusieurs personnes, etc. Enfin, nous avons défini ce qu’est pour nous un « effet cristallisant ». C’est un processus qui contribue à figer un fait social ou une réalité urbaine à un moment t. C’est un maintien, une forme de résistance aux changements. Définir ces mots-clés est partie prenante de ma première phase de travail qui est plus théorique. Celle-ci comprend aussi la lecture d’ouvrages afin de cadrer le sujet du mémoire. Un grand travail sur l’historique du quartier et de l’espace public de la Porte d’Aix est aussi réalisé. Celui-ci me permet de définir trois grandes dates qui serviront de marqueur pour le mémoire : l’arrivée de l’autoroute en 1969, son recul en 2010 et le démarrage des travaux d’aménagement de l’espace public en 2015.

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Un travail de cartographie et de photo aérienne historique sur la Porte d’Aix nous permet d’analyser les formes urbaines en présence au fil de l’évolution de l’espace public. En associant ce travail à l’analyse de photos anciennes et d’entretiens, nous pouvons déterminer les pratiques de l’espace public aux différentes périodes. La seconde partie de ma tâche est un travail d’observation empirique à la Porte d’Aix. Aller sur le site plusieurs fois, à différents jours de la semaine et à différentes heures de la journée est nécessaire pour analyser les différentes pratiques des usagers de l’espace public. Rappelons que la période d’observation fut en automne et en hiver et de ce fait, les températures sont plus basses que le reste de l’année et les journées se raccourcissent. Pendant la période d’observation, l’espace public étudié est en chantier. L’espace n’est donc pas totalement figé car les zones de travaux peuvent évoluer à tout moment. Ainsi, la cartographie que nous réalisons pour 2015 est une photographie de l’espace à un moment t. La pratique de la Porte d’Aix nous permet d’observer les usages de l’espace public par les habitants et de les photographier afin d’avoir un matériau avec lequel travailler. À partir de là, nous pouvons analyser ces pratiques et les cartographier pour en avoir une vision spatiale. En allant sur le site, nous pouvons aussi réaliser des entretiens avec les usagers de l’espace public. Ces entretiens nous permettent de prendre conscience des usages antérieurs aux travaux actuels. Certaines fois, lorsque la personne habite dans le quartier depuis plusieurs décennies, nous pouvons discuter des différentes temporalités, ce qui étoffe le travail historique. Enfin, nous faisons des entretiens avec ceux qui « réalisent » la Porte d’Aix aujourd’hui. Différents acteurs qui touchent ou ont touché, par le projet d’Euroméditerranée, l’espace public de la Porte d’Aix. J’ai eu un entretien téléphonique avec Nicolas Mattei (directeur de la ZAC Saint Charles / Porte d’Aix), rencontré Jean-Michel Savignat (architecte-urbaniste coordinateur de la ZAC Saint Charles / Porte d’Aix), et Julie Lalande et Thierry Ciccione (agence Stoa mandataires du projet d’aménagement des espaces publics de la porte d’Aix). De ce fait, dans une première partie, nous parlerons de l’évolution de l’espace public et de ses pratiques au fil du temps. Dans une deuxième partie, nous analyserons les différentes pratiques que l’on peut trouver aujourd’hui dans l’espace public de la Porte d’Aix. Et enfin, nous tenterons de comprendre s’il existe une dualité entre les pratiques des habitants et les mutations de l’espace public.

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Fig. 2 : Plan de situation de la place de la Porte d'Aix en 2014 (Google Earth)

Fig. 3 : La place de Porte d'Aix (cartographie personnelle)

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I. UN ESPACE PUBLIC TRANSFORME AU FIL DU TEMPS La Porte d’Aix avec son espace public a eu, au cours de l’histoire de Marseille, des rôles capitaux à des époques diverses. Nous allons essayer de comprendre comment, depuis le XIIème siècle jusqu’à XXIème, s’est formé cet espace et de quelle manière les transformations qu’il a subit tout au long de l’histoire ont impactées les pratiques des usagers.

1. De la Porte Royale à la Porte d’Aix

Fig. 4 : Cartes de la place de la Porte d'Aix - 1650 - 1720 - 1785 - 1810 (Thierry Durousseau)

Jusqu’au XVIIème siècle, le site actuel de la Porte d’Aix est hors les murs. Dans le rempart médiéval, la Porte d’Aix est alors celle permettant d’accéder au chemin menant vers Aix en Provence. Le long de cette voie, actuelle rue Bon Pasteur, se constitue un premier faubourg. En 1660, sur ordre de Louis XIV, le rempart médiéval est détruit. Une nouvelle enceinte est construite autour de la ville agrandie et un axe majeur se développe sur un axe nord-sud formé par les actuelles rue d’Aix, cours Belsunce et rue de Rome. À chaque extrémité de cet axe royal se trouve deux nouvelles portes. Au nord, la porte Royale et au sud la porte de Rome. La population continua cependant d’appeler Porte d’Aix cette porte Royale. À l’intérieur de la nouvelle fortification se crée une place de forme rectangulaire qui vient clore au nord l’axe royal. Et au milieu de cette place se trouve toujours l’aqueduc qui apportait les eaux de l’Huveaune jusqu’en ville. À la fin du XVIIIème siècle, la voie menant à Aix est déplacée à l’est du faubourg afin d’être dans la continuité, même hors les murs, de l’axe royal. Face à la place rectangulaire à l’intérieur des remparts se forme alors une place en exèdre à l’extérieur de la ville. Cette place amorce la nouvelle route vers Aix, actuelle avenue Camille Pelletan, et termine la forme de la place actuelle de la Porte d’Aix. Coupée en deux par le rempart, la partie extérieure de la place est la plus grande, l’aqueduc réduisant l’espace coté ville. Déjà à cette époque-là, de multiples projets d’embellissement de la place royale apparaissent : quatre projets d’arc de triomphe en l’honneur de Louis XVI et un projet d’entrée monumentale sur l’aqueduc. Mais tous restent vains.

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En 1823, les projets d’arc de triomphe furent repris par le Marquis de Montgrand, et celui en l’honneur du duc d’Angoulême, et de l’expédition qu’il avait conduite en Espagne pour rétablir Ferdinand VII, fut voté. Ainsi, lorsque le 17ème régiment de l’armée française fit son entrée dans Marseille en rentrant d’Espagne, on avait dressé, hors la porte d’Aix un arc de triomphe provisoire. Puis, après la destruction des remparts et de l’aqueduc, dont il reste un vestige près de l’hôtel de région, commencèrent les travaux de l’arc de triomphe définitif. En 1828, le gros œuvre est terminé, et en 1839, après la réalisation de la sculpture, eut lieu l’inauguration de l’arc de triomphe en grande pompe. L’aménagement de la place autour de l’arc de triomphe est confié à l’architecte Rivaud. Celui-ci va alors remettre en valeur le monument en travaillant la pente. Un parvis circulaire de 60cm de haut est créé, les chaussées sont élargies et deux fontaines sont prévues mais ne verront jamais le jour. La place de la Porte d’Aix se trouve alors dans l’état dans lequel elle restera jusqu’au milieu du XXème siècle.

Fig. 5 : Extrait d'une carte de Marseille en 1914 avec lignes de tramways (fonds AGAM)

Jusque dans les années 50, la place de la Porte d’Aix ne connait pas de grands changements. La géométrie de la place reste la même. Seul le tramway fait son apparition sur la place. En 1914, deux lignes de tramway passent par le site. Dans les années cinquante, des projets vont modifier formellement la place. Plusieurs bâtiments verront le jour à l’est de la Porte d’Aix, coté gare saint Charles : bureaux de la SNCF, cité administrative d’Air France et l’hôtel de l’Arbois. À ces îlots administratifs, viennent s’ajouter des groupes HLM comme celui de Mattei (1953). Ce dernier vient souligner l’axe d’une infrastructure dont les travaux débuteront dans les années soixante. Cette infrastructure viendra couper en deux un quartier, et défigurer la place de la Porte d’Aix. Cette infrastructure, c’est l’autoroute A7.

« Avant l’autoroute, à la place du jardin, il y avait des baraquements, des chevaux, des vaches, etc. L’axe majeur, c’était Camille Pelletan / rue d’Aix. »

EXTRAIT D’ENTRETIENS PORTE D’AIX – CF. ANNEXES Il est assez difficile de savoir quels étaient les pratiques des usagers pendant cette période-là, mais savoir comment s’est construit au fil du temps la géométrie de l’espace est important. Avant l’arrivée de l’autoroute donc, la place de la Porte d’Aix avait une forme urbaine bien dessinée, exèdre au nord et demi-rectangle au sud. Des bâtiments venaient fermer l’espace sur les côtés est et ouest.

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2. Le territoire de la voiture

Fig. 6 : Place de la Porte d'Aix en 1973 (IGN) Fig. 7 : Destruction de la rive nord de la place de la Porte d'Aix en 1971 (fonds AGAM)

Ainsi, à la fin des années 1960, le quartier fut le lieu d’un nouveau bouleversement urbain : l’arrivée de l’autoroute Nord jusqu’au cœur de Marseille. Les travaux de la percée autoroutière furent dantesques, coupant littéralement en deux les quartiers traversés. La place de la Porte d’Aix est détruite sur sa rive nord afin de laisser arriver l’autoroute jusqu’en son centre. L’arc de triomphe jusqu’alors monumental perd son échelle. Il devient un objet décoratif d’un énorme rond-point qui clôt l’autoroute et qui redirige le flux massif des automobilistes vers les différents quartiers de Marseille. L’enchevêtrement de voies à grande circulation sur la place laisse alors peu de place au piéton. L’axe majeur du quartier devient alors cette grande infrastructure mise en service en 1972, et la géométrie historique de la place laisse place à un espace éventré sur sa partie nord. Nous faisons donc l’hypothèse que l’arrivée de l’autoroute détériore l’espace public de la Porte d’Aix.

Fig. 8 : Arrivée monumentale de l'autoroute dans les années 1970 (fonds AGAM)

Entre 1975 et le début des années 1990, un nouveau projet urbain apparait : le centre directionnel. Ce projet a pour but de redynamiser la rive nord du Vieux Port, de la Canebière à

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la Porte d’Aix. Dans le cadre du projet, la rive sud-ouest de la place de la Porte d’Aix va complètement changer. Les îlots du quartier sainte Barbe sont démolis car insalubres, et de nouveaux bâtiments sont construits avec en particulier l’hôtel de région. La forme du nouveau bâtiment conserve la géométrie du demi-rectangle au sud de la place.

2.1 Forme urbaine en présence

Fig. 9 : Vue aérienne en 1999 (IGN) Fig. 10 : Vue aérienne en 1999 (fonds AGAM)

Ainsi, dans la deuxième partie du XXème siècle, les différents projets urbains auront complétement changé la place de la Porte d’Aix. L’axe majeur n’est plus l’axe historique, l’arc de triomphe n’est plus monumental, mais est sur un rond-point, il n’y a plus de façade fermant l’espace sur la partie nord nord-est et au sud et l’îlot sainte Barbe n’est plus le même. En termes de forme urbaine, la place de la Porte d’Aix est complètement métamorphosée. Géométriquement ordonnée pendant plusieurs siècles, la place ne devient qu’un grand délaissé autoroutier avec l’arrivée de l’infrastructure. En effet, l’espace qui clôt l’autoroute est un grand rond-point qui prend la majeure partie de la place. Au nord, l’exèdre qui était historiquement hors les murs, il n’en reste plus qu’une moitié. À l’ouest, un îlot fut démoli pour laisser place à un parking. Et au sud, le demi rectangle est toujours existant malgré la démolition de l’ancien îlot. Le nouveau bâtiment a gardé cette forme urbaine qui termine la rue d’Aix.

2.2 Pratiques de l’espace public Avec l’arrivée de la voiture et son omniprésence à partir de 1972, les pratiques de l’espace public de la Porte d’Aix changent. « Quand l’autoroute arrivait jusqu’à la Porte d’Aix, il y avait des voitures, des camions et des bus partout. Ils s’arrêtaient tous là. » (Extrait d’entretiens Porte d’Aix – cf. annexes). En effet, le principal changement de pratique est dû à l’arrivée de l’autoroute. Point clé dans l’entrée à Marseille, la Porte d’Aix ne devient alors qu’un gigantesque parking. De multiples espaces destinés théoriquement aux piétons sont envahis par la voiture : la majorité des bas-côtés des routes, le triangle du Bois et l’îlot à l’ouest servent de parkings pour tous les automobilistes, camions et bus qui entrent dans la ville.

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Fig. 11 : Espace autour de l'arc de triomphe en 2005 (photo Jean-Michel Savignat)

Avec l’arrivée de l’autoroute, un espace arboré va aussi faire son apparition : le délaissé autoroutier. Ce rond-point aménagé autour de l’arc de triomphe va être approprié par les habitants du quartier. Au milieu du vacarme des allées et venues automobiles, les habitants vont s’installer dans un espace qui manquait au quartier : un parc. Ce délaissé, nullement aménagé comme un parc, tiendra ce rôle aux yeux des habitants. Pique-niques en famille, siestes, jeux d’enfants improvisés, parties de pétanques ou simplement espace de déambulation. La plupart des usages qui en sont fait tiennent réellement de ceux d’un parc. Dans la même période, une pratique importante de l’espace fut celle du marché informel qui se tenait à la Porte d’Aix. Connu de tous les marseillais, on trouvait essentiellement, sur ce marché, des objets dit « tombés du camion » ou trouvés dans les poubelles. Il permettait, selon les dire d’un habitant du quartier, de faire vivre de nombreuses familles. Ainsi, l’espace public de la Porte d’Aix, pendant la deuxième moitié du XXème siècle, fut donc essentiellement pratiqué de deux manières : un usage de parking dans les espaces vides et des pratiques de parc dans le délaissé autoroutier arboré.

« Quand il y avait l’autoroute, c’était un rond-point. Ça ne donnait pas une belle image. L’espace public n’était pas trop pratiqué, à part l’espace vert au milieu. Avec le recul de l’autoroute, ça a été un changement radical : vraiment moins de voitures. Il y a eu une hausse de la fréquentation de la place. »

EXTRAIT D’ENTRETIENS PORTE D’AIX – CF. ANNEXES Comme nous le dit cet habitant, l’arrivée de l’autoroute eu un impact très fort sur la qualité de l’espace public ainsi que sur sa fréquentation. Il faudra attendre le début des années 2010 pour voir l’autoroute reculer, dans le cadre du projet Euroméditerranée, jusqu’à l’avenue du Général Leclerc. Ce qui libèrera l’espace public de la Porte d’Aix du flux incessant d’automobilistes arrivant à Marseille.

3. Réappropriation de l’espace public par les habitants À partir des années 2010, le projet Euroméditerranée vient modifier l’espace public de la Porte d’Aix. En effet, dans le cadre du projet de la ZAC Saint Charles / Porte d’Aix, le recul de la fin de l’autoroute est programmé et réalisé. L’infrastructure s’arrête donc à l’avenue du Général Leclerc et non plus sur la place de la Porte d’Aix.

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Cette modification aura un impact majeur sur les pratiques des usagers de la Porte d’Aix. L’autoroute n’arrivant plus sur la place, le flux automobile est nettement réduit, et certains espaces n’étant plus utilisés comme lieux de parkings sont regagnés par les habitants. Nous émettons donc l’hypothèse que la mise en place du projet d’Euroméditerranée a modifié les pratiques des usagers. Et qu’avec le recul de l’autoroute au début des années 2010, les habitants de la Porte d’Aix retrouvent réellement un espace public.

3.1 Forme urbaine en présence Le recul de l’autoroute n’a pas énormément fait évoluer la forme urbaine de la place de la Porte d’Aix. Son incidence a eu plus d’effet sur les pratiques de l’espace public. En effet, seul l’espace utilisé antérieurement par l’autoroute s’est transformé en zone de chantier inaccessible au public. Cette zone de travaux empiète aussi un petit peu sur l’ancien délaissé autoroutier utilisé comme parc.

Fig. 12 : Vue aérienne de la place de la Porte d'Aix en 2014 (Google Maps)

3.2 Pratiques de l’espace public Si la forme urbaine de la Porte d’Aix ne fut pas très impactée par le recul de l’autoroute, les pratiques de l’espace public le furent énormément. En effet, l’arrêt d’une arrivée incessante d’automobilistes à la Porte d’Aix permit aux habitants de retrouver un quartier plus calme et plus accueillant au piéton. Comme nous le racontait un habitant, la fréquentation de l’espace public de la Porte d’Aix a connu une réelle hausse avec la très forte baisse de trafic automobile.

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Fig. 13 : Appropriation du délaissé autoroutier en 2014 (photo Stoa) Fig. 14 : Appropriation du délaissé autoroutier en 2012 (photo Stoa)

Premier espace à profiter du recul de l’autoroute : le désormais ex-délaissé autoroutier. En effet, la fermeture de l’ancienne portion d’autoroute aux voitures et aux usagers pour cause de travaux sécurise d’autant plus l’espace vert. Le délaissé autoroutier n’est donc plus un rond-point et de ce fait, les usagers s’approprient encore plus leur « parc ». Les pratiques rencontrées dans cet espace vert sont souvent calmes. Pique-niques, siestes, lecture, etc. Les gens viennent profiter du soleil et de la tranquillité que peut procurer un espace vert arboré.

Fig. 15 : Le triangle du Bois en 2012 (photo Stoa)

Un autre espace qui a profité de la réduction du flux automobile est le triangle formé par la rue Bernard du Bois et le boulevard Charles Nédelec. Nous l’appellerons le triangle du Bois. Comme nous ont fait remarquer des habitants de la Porte d’Aix ainsi que des photos aériennes, celui était assailli de voitures et de camion lorsque que l’autoroute arrivait jusque-là. Coté Nédelec, il servait même de point d’arrêt pour de nombreux bus. Depuis le recul de l’infrastructure, la majorité des zones vides – comme ce triangle – qui servaient de lieux de parking, parfois sauvage, sont rendues aux usagers. De fait, le triangle a connu, à partir de 2009, un aménagement afin de créer des espaces d’accueil pour les tables des cafés et restaurants en rez-de-chaussée rue du Bois. Trois terrasses sont donc créées, permettant une appropriation de cet espace-là.

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Fig. 16 : Espace ouest du rectangle de la rue d'Aix en 2013 (photo Stoa)

« Avant les travaux actuels, il y avait une placette goudronnée devant les arcades. Les gens passaient mais ne s’arrêtaient pas. »

EXTRAIT D’ENTRETIENS PORTE D’AIX – CF. ANNEXES Ainsi, dans le demi-rectangle dessiné par les îlots à l’extrémité nord de la rue d’Aix, et malgré la présence de commerces ou de lieux de restauration, les deux grands espaces entourant la route ne sont principalement que des lieux de passages.

Fig. 17 : Espace devant la sortie de métro en 2012 (photo Stoa) Fig. 18 : Espace public devant la demi-exèdre en 2014 (photo Stoa)

À côté de la sortie du métro Jules Guesde, derrière le parking toujours existant, les habitants de la Porte d’Aix ont essentiellement une pratique statique. En effet, de nombreux bars sont quotidiennement remplis. Et l’animation créée autour de ces bars génère une zone où de nombreuses personnes s’arrêtent au soleil pour discuter, lire le journal ou simplement profiter de la chaleur du soleil. Ainsi, le recul de l’autoroute jusqu’à l’avenue du Général Leclerc a permis à l’espace public de la Porte d’Aix de retrouver ses usagers. Le flux massif de voiture rendait la place dangereuse et peu agréable à cause du vacarme incessant généré. À partir de 2010, donc, la place redevient accueillante à la population du quartier. Cependant, dès 2015, la place va entrer à nouveau dans une période de mutation. De nouveaux travaux s’engagent : c’est le réaménagement des espaces publics de la Porte d’Aix par Stoa pour Euroméditerranée. Ces travaux vont fermer de nombreux espaces aux publics et donc l’espace public accessible sera généré par les différentes barrières. Nous allons donc, dans une deuxième partie, étudier plus précisément quelles sont les pratiques des usagers lors de cette nouvelle période de mutation.

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II. L’ESPACE PUBLIC DE LA PORTE D’AIX AUJOURD’HUI, QUELLES PRATIQUES ?

Après avoir analysé les différentes formes urbaines de l’espace public de la Porte d’Aix au fil des siècles, et des pratiques qui en découlaient, nous allons dans deuxième temps étudier les pratiques actuelles. Pour cela, nous avons réalisé un travail de terrain à la fin de l’année 2015. Durant cette période, le territoire était en travaux. En effet, le projet d’aménagement des espaces publics de la Porte d’Aix mené par Euroméditerranée était en cours de réalisation. Nous pouvons donc nous interroger sur l’effet de ces travaux sur les usagers.

1. La Porte d’Aix, un territoire composé de fragments d’histoire Comme nous l’avons vu au cours de la première partie, l’espace public de la Porte d’Aix a évolué au fil du temps. Et de ce fait, l’espace résultant aujourd’hui est un territoire composé de fragments d’histoire.

Fig. 19 : Les différents fragments qui composent la Porte d'Aix (cartographie personnelle)

Sur la carte ci-dessus, nous avons répertorié les différents fragments qui composent ce territoire. En pointillé rouge, le tracé de l’ancien aqueduc tel qu’il fut représenté à la fin du XVIIème siècle. Celui-ci marquait, à l’est, la limite de l’ancienne ville. En vert, nous avons la ville du XIXème siècle ainsi que son axe majeur et l’arc de triomphe. En jaune, l’ancien tracé de l’autoroute qui venait se terminer sur la place de la Porte d’Aix. En rose, l’opération ZAC Sainte Barbe et enfin en rouge, les trois nouveaux bâtiments réalisés dans le cadre d’Euroméditerranée début XXIème siècle. Aujourd’hui, l’espace de la Porte d’Aix est fait de l’héritage de tous ces différents projets qui ont façonné ce quartier. Chacun ayant apporté avec lui une nouvelle configuration de la place entière ou seulement d’une partie. Par exemple, une des modifications que l’on peut considérer comme majeure fut l’arrivée de l’autoroute. Avec elle, le délaissé autoroutier fait son apparition. Et subsistant jusqu’à aujourd’hui, il est un des espaces perçu le plus positivement dans le quartier, faisant office de parc pour ses usagers.

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Fig. 20 : L'espace public pendant les travaux (cartographie personnelle)

Sur la période d’observation des pratiques des habitants de l’espace public de la Porte d’Aix, le site était en travaux. Ci-dessus, la carte représente les différents espaces fermés au public pour la réalisation de ce chantier avec l’espace public en résultant. Les pratiques des habitants se limitaient donc à de plus petits espaces pendant l’observation. Afin de mieux comprendre les pratiques des habitants pendant les travaux, nous allons décomposer l’espace public en cinq espaces plus petits qui sont appropriés de différentes manières par les usagers : le délaissé autoroutier, le triangle du Bois, l’espace proche du métro et la demi-exèdre, le carrefour entre le boulevard des dames et la rue sainte Barbe, et le rectangle de la rue d’Aix avec ses arcades.

Fig. 21 : Les différentes zones de l'espace public (cartographie personnelle)

Espace autour du métro et de la demi-exèdre Le délaissé autoroutier Le triangle du Bois Le carrefour entre le boulevard des Dames et la rue sainte Barbe Le rectangle de la rue d’Aix et ses arcades

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Le rectangle de la rue d’Aix et ses arcades

Fig. 22 : Panorama du rectangle vu depuis la rue d'Aix en 2015 (photo personnelle)

Cet espace est formé, des deux côtés de la rue, par les retraits des bâtiments. Ces retraits permettent de créer deux placettes, dont l’une (à l’ouest) se prolonge par des arcades sous le bâtiment. Le bâtiment à l’ouest date de 1989 et du projet de la ZAC sainte Barbe. Il a cependant repris la même forme que l’ancien îlot créant ce rectangle à l’extrémité de la rue d’Aix. C’est cet espace qui monumentalise l’arc de triomphe avec le dénivelé qui place l’arc sur un piédestal naturel quand on vient du sud. Pendant l’observation, cette placette était en travaux, la première dalle de pavés du projet de Stoa réalisée étant localisée à cet endroit. De ce fait, l’espace accessible au public est très réduit. Concrètement, à l’ouest, il se limite aux arcades et à quelques mètres devant elles. À l’est, un parvis est laissé libre aux différents commerces situés en rez-de-chaussée.

Le carrefour entre le boulevard des Dames et la rue sainte Barbe

Fig. 23 : Carrefour entre le bd des Dames et la rue sainte Barbe en 2015 (photo personnelle)

Ce carrefour est certainement l’espace qui est le moins touché par les travaux actuels. Son espace public est principalement constitué de trottoirs, et il contient aussi un parvis devant l’hôtel de Région.

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Espace devant le métro et demi-exèdre

Fig. 24 : Espace public devant la bouche de métro en 2015 (photo personnelle)

Autour de la bouche de métro et devant la demi-exèdre se forme un espace longiligne qui longe les façades des bâtiments. Avant les travaux, un parking venait compléter cet espace, mais depuis le début du chantier, la zone du parking est fermée par des grillages, et l’espace est réduit à cette épaisseur entre les façades des immeubles et les grilles des travaux. En rez-de-chaussée de la demi-exèdre se trouvent des commerces tels que le Dio’z, magasin de prêt-à-porter de sport ou le bar du Soleil. L’espace devant les magasins fait donc office de parvis pour ceux-ci. Autour du métro, les pieds de façades étaient autrefois occupés par des commerces. Ils ont fermés à cause d’une position peu stratégique, coincés derrière la sortie du métro, encore plus évidente avec l’ajout des grilles du chantier.

Fig. 25 : Espace public devant la demi-exèdre en 2015 (photo personnelle)

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Le délaissé autoroutier

Fig. 26 : Panorama du délaissé autoroutier en 2015 (photo personnelle)

Au centre de la place de la Porte d’Aix, contenant l’arc de triomphe, se trouve le délaissé autoroutier. Cet espace arboré d’environ 0,6 ha, résultant du rond-point créé pour l’autoroute, est considéré par les habitants comme un parc de par les pratiques qu’il permet. Autour de l’arc de triomphe, un espace en dur est censé le mettre en valeur. Et la majeure partie du délaissé est végétalisé. Le « parc » n’a pas de façades proche, ce qui fait de lui un espace très ensoleillé, avec pour seules ombres celles des arbres.

Le triangle du Bois

Fig. 27 : Espace public du triangle du Bois en 2015 (photo personnelle)

Cette petite placette de forme triangulaire est formée par la rue Bernard du Bois et le boulevard Charles Nédelec. Elle est orienté est-ouest, et est bordée d’immeubles au sud. Ces immeubles ont quasiment tous en rez-de-chaussée un commerce. De fait, les restaurants, snacks et autres salons de thé profitent de l’espace public du triangle pour installer leurs tables dehors. Pendant les travaux, la majeure partie du triangle était inaccessible au public. Ne restait alors aux commerces qu’une bande de quelques mètres pour sortir leurs tables. De l’autre côté du triangle, une autre bande libre au public et protégée de la route servait pour le flux piéton le long du boulevard Charles Nédelec.

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Ces différentes petites zones qui composent l’espace public de la Porte d’ Aix sont cinq petits espaces où différentes pratiques peuvent avoir lieu. Pendant l’observation, il nous a semblé évident de devoir analyser l’espace public comme un ensemble, mais aussi d’étudier individuellement les cinq zones afin de mieux comprendre les différentes pratiques des usagers. Car ces différents espaces sont complémentaires, et c’est les interactions qui existent entre eux qui font les pratiques de la place de la Porte d’Aix. Tous offrent des pratiques différentes et l’ensemble crée un espace public accueillant où de nombreuses pratiques sont possibles. Nous allons justement analyser les différentes pratiques qu’ont les habitants de la Porte d’Aix dans l’espace public aujourd’hui, en dépit des travaux.

2. De multiples pratiques qui composent l’espace public Les pratiques dans un espace public sont généralement de deux types : les pratiques stationnaires et les pratiques en mouvement. Ici, les pratiques en mouvement chez les piétons et les automobilistes sont dues au fait que la place est un carrefour entre plusieurs quartiers. Ci-dessous, la carte représente les flux piétons passant sur notre site. Ceux-ci sont majoritairement dans un axe nord-sud entre la rue d’Aix / cours Belsunce et l’avenue Camille Pelletan / rue du Bon Pasteur. Ces deux zones sont deux pôles majeurs d’activités, plus particulièrement au niveau commercial. À ceci est ajouté le positionnement de la bouche de métro « Jules Guesde », proche de la rue du Bon Pasteur, qui brasse également de très nombreuses personnes. Nous pouvons nous rendre compte que l’axe majeur historique, même s’il ne l’est plus aujourd’hui, est quand même l’axe le plus emprunté par les habitants. Lorsqu’il avait une grande importance dans la ville, différentes entités attractives se sont installées le long de celui-ci, et aujourd’hui ces entités attirent toujours les habitants. De ce fait, l’ancien axe majeur de la ville est aujourd’hui l’axe majeur piétonnier du quartier.

Fig. 28 : Les flux piétons (cartographie personnelle)

Comme nous l’avons vu dans la partie précédente, l’espace public de la Porte d’Aix est composé de plusieurs petites zones dans lesquelles les habitants ont différentes pratiques. Nous allons donc détailler les pratiques que l’on peut observer dans chaque zone.

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Le rectangle de la rue d’Aix et ses arcades

Fig. 29 : Passage dans les arcades en 2015 (photo personnelle) Fig. 30 : Passage dans les arcades en 2015 (photo personnelle)

Pendant les travaux, cet espace était donc essentiellement constitué par les arcades le long du bâtiment à l’ouest. Celles-ci sont sur le passage entre la fin de la rue d’Aix et le reste du quartier. Elles permettent de distribuer la partie ouest (boulevard des Dames) et nord (avenue Camille Pelletan) de la place.

« Cet espace (les arcades) est juste un passage. Trop proche des voitures, la rue est très passante. Les gens ne s’arrêtent pas. »

EXTRAIT D’ENTRETIENS PORTE D’AIX – CF. ANNEXES C’est en effet un espace très passant. Mais comme le souligne l’extrait d’entretien ci-dessus, très peu de personnes s’y arrêtent. A part la Poste et le magasin Dynasty, il n’y pas de lieux qui incitent à s’arrêter. Lors de l’observation, avec les travaux, le seul passage pour aller vers l’arc de triomphe était au bout des arcades, ce qui fait converger de nombreuses personnes vers le même point. A l’est de la rue d’Aix, nous retrouvons le même type de pratiques. Une épaisseur de quelques mètres devant les façades constitue l’espace accessible au public. Par rapport à l’ouest de l’espace, une présence plus accrue de commerces fait s’arrêter des usagers afin de boire un café, de discuter ou pour regarder les étals des magasins. Cependant, la majorité des gens ne fait que passer.

Fig. 31 : Partie est du rectangle de la rue d'Aix en 2015 (photo personnelle)

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Durant l’observation, donc, les usagers de la Porte d’Aix dans ce rectangle de la rue d’Aix, sont réduits à des petits espaces le long des façades. Peu de pratiques sont possibles si ce n’est de traverser ces espaces pour aller d’un point A à un point B.

Le carrefour entre le boulevard des Dames et la rue sainte Barbe

Fig. 32 : Traversée du carrefour en 2015 (photo personnelle) Fig. 33 : Traversée du carrefour en 2015 (photo personnelle)

Cet espace, bien qu’il soit public, ne propose pas d’autres pratiques en tant que piéton de traverser le boulevard des Dames, la rue sainte Barbe ou la rue de la Joliette. C’est le carrefour automobile le plus important qui vient se confondre avec celui au pied de l’arc de triomphe. Nous avons remarqué qu’au niveau des feux rouges, sur ce carrefour, plus que sur tout autre du quartier, un certain nombre de personnes se faisait déposer ou monter en voiture. Cette pratique évoque le point de repère dans la ville que peut être cette place avec son arc de triomphe. Cela nous rappelle aussi, quelques années en arrière, lorsque certains bus partaient aussi de la Porte d’Aix.

Espace devant le métro et demi-exèdre

Fig. 34 : Pratiques dans l'espace devant le métro trois jours différents - de gauche à droite : 11/11, 28/11 et 2/12 (photos personnelles)

Dans cet espace proche de la bouche de métro, il existe plusieurs pratiques majeures. Étant proche du métro, le lieu est fréquenté par les usagers du transport en commun qui sortent de cette station et qui se dirigent vers divers endroits du quartier. Ceux-là ne font que passer, et en fait, comme la bouche est orienté vers la rue de la Joliette, beaucoup ne traversent même pas cet espace. Une autre pratique que l’on retrouve beaucoup dans cette zone est celle de la vente à la sauvette. Cette pratique, décriée par beaucoup, permet à de nombreuses familles de vivre, selon des habitants du quartier. En plus de la vente à la sauvette de cigarettes, de shit ou de toutes autres choses, un marché informel se tient aussi derrière la bouche de métro. Régulièrement, quelques personnes improvisent des stands de marché à même le sol et vendent divers objets. Le nombre de stands a clairement diminué depuis les travaux actuels. Car l’espace où ils s’installaient est réduit avec l’inaccessibilité de l’ancien parking, aujourd’hui en chantier. Ce

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marché crée un véritable point d’intérêt pour cette zone, et de nombreuses personnes viennent jusque-là simplement pour le marché.

« Autour du métro, il y a un marché, parfois sauvage. » « Le marché (informel) autour de la sortie de métro « Jules Guesde » n’existe quasiment plus, seul 3 ou 4 stands subsistent. Moi, je vends deux-trois bricoles (à la sauvette), les jeunes ils vendent des cigarettes, du shit. »

EXTRAIT D’ENTRETIENS PORTE D’AIX – CF. ANNEXES Cet espace est aussi un lieu où certaines personnes, la plupart du temps âgés, s’arrêtent seules ou en groupes pour se reposer, lire le journal ou discuter. Cet espace étant orienté plein sud, il est souvent ensoleillé. Ce qui lui confère des qualités pour des pratiques statiques telles que la discussion, le repos, la lecture (de journaux), l’attente, etc.

Fig. 35 : Pratiques statiques devant le métro en 2015 (photo personnelle)

Au niveau de la demi-exèdre, plusieurs commerces sont en rez-de-chaussée des immeubles, ce qui donne à l’espace public des pratiques induites par ceux-ci. Ainsi, comme l’indique la photo ci-dessous, l’espace public est occupé par des terrasses avec tables et chaises et pour l’exposition des produits vendus par le magasin de prêt-à-porter de sport.

Fig. 36 : L’espace public devant la demi-exèdre en 2015 (photo personnelle)

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« Les pratiques n’ont pas changé. Les vendeurs de cigarettes et de shit sont toujours là, ils sont encore mieux cachés avec les grillages du chantier. »

EXTRAIT D’ENTRETIENS PORTE D’AIX – CF. ANNEXES Ainsi, comme nous l’indique un commerçant, la vente à la sauvette, s’opérant aussi dans cet espace, est d’autant mieux cachée par les bâches accrochées aux grillages délimitant la zone de travaux. Les vendeurs n’ont donc plus à se cacher eux-mêmes puisqu’ils sont dans un espace déjà à l’abri des regards. De ce fait, il y a une recrudescence de ces pratiques, ce qui déplait aux commerçants avoisinants.

Fig. 37 : Vendeurs à la sauvette dans la masse en 2015 (photo personnelle)

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Le délaissé autoroutier

« L’été, les gens viennent jouer aux boules autour de l’arc de triomphe, et profiter de l’ombre des arbres dans le parc. »

J-M. SAVIGNAT – EXTRAIT D’ENTRETIENS PORTE D’AIX – CF. ANNEXES

Fig. 38 : Différentes appropriations du délaissé autoroutier en 2015 (photos personnelles)

Fig. 39 : Différentes appropriations du délaissé autoroutier en 2015 (photos personnelles)

Le délaissé autoroutier tient une place très importante dans l’espace public de la Porte d’Aix. C’est le plus grand espace libre et accessible au public du quartier. Pour les habitants, cet espace revêt le costume de parc, et ils lui donnent toujours ce nom là ou celui de jardin. Cependant, cet espace n’est pas aménagé comme tel et ne s’apparente à un parc que par les pratiques que l’on peut observer en son sein. La grande majorité du temps, cet espace vert est occupé par une population cherchant un endroit calme. On y vient seul, entre amis ou avec ses enfants pour profiter de l’herbe et de l’ombre des arbres en été ou du soleil en automne/hiver. En journée, c’est une population âgée que l’on retrouve qui se fait rejoindre dès la sortie de l’école par les enfants accompagnés de leurs parents. Les enfants profitent d’un grand espace un petit peu éloigné des routes pour jouer en toute tranquillité.

« Dans le jardin, c’est les familles, les enfants. Il est très souvent plein de gens. Après l’école et dans l’après-midi, quand c’est au soleil l’hiver. »

« Il y a pas mal de gens qui font des pique-niques (dans le parc). »

EXTRAIT D’ENTRETIENS PORTE D’AIX – CF. ANNEXES

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Fig. 40 : Le même groupe de femmes au même endroit différents jours en 2015 - de gauche à droite 28/11, 2/12 et 15/12 (photos personnelles)

Pendant le temps de notre observation, nous avons pu voir plusieurs jours en fin d’après-midi un groupe de dames venir s’assoir au soleil en haut de la butte que forme cet espace vert. En discutant avec elles, elles nous racontaient qu’elles aimaient venir là discuter entre elles tout en profitant du soleil. L’espace plus proche de l’arc de triomphe possède un revêtement en stabilisé, et de ce fait n’est que peu utilisé comme le reste du délaissé autoroutier. Selon les usagers du parc, il est un point noir du quartier. En effet, le monument qu’était l’arc de triomphe autrefois est devenu les plus grandes toilettes de Marseille. Ce qui génère de fortes odeurs qui repoussent les gens à s’approprier cet espace.

« Le parc, avant les travaux, il était très beau, il y avait plein de beaux arbres ! Beaucoup de gens y allaient. Maintenant, il est sale. Il y a des poubelles partout. Les gens pissent et chient (sic) sans respect, sur l’arc de triomphe même ! Y’a plus de cons que de bons aujourd’hui. En été, il y a tellement de gens qu’il n’y a plus de place. Mais les cons reviennent et salissent tout. »

EXTRAIT ENTRETIENS PORTE D’AIX – CF. ANNEXES C’est malgré tout un lieu de passage très fréquenté aux heures de pointes. Ce qui fait que cet espace est propice à la vente, et, de fait, nous avons remarqué qu’un vendeur à la sauvette installait régulièrement son étal à proximité de l’arc de triomphe.

Fig. 41 : Vendeur à la sauvette sur un lieu de passage important en 2015 (photo personnelle)

Fig. 42 : Vendeur à la sauvette en 2015 - de gauche à droite 28/11, 2/12 et 15/12 (photos personnelles)

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Le triangle du Bois

Fig. 43 : Personnes en terrasses dans l'espace public du triangle du Bois en 2015 (photo personnelle)

Cet espace triangulaire, résultant du croisement de deux rues, n’offre, pendant les travaux, que très peu d’appropriations possibles. En effet, lors du chantier, seul un espace longiligne le long des façades est accessible et utilisé par les commerces. Cet espace est aussi celui où passent les personnes remontant ou descendant la rue Bernard du Bois. Ainsi sur quasiment toute la longueur, au pied des immeubles, se trouvent de nombreux cafés-restaurants, snacks et autres salons de thés. Ceux-ci, habitués à avoir de plus grands espaces extérieurs avant les travaux, ne peuvent plus poser que quelques tables devant leurs devantures. Les pratiques de cet espace sont donc principalement liées aux snacks et restaurants présents en façade. Comme nous confirme les architectes de l’agence Stoa, « les pieds de façade ont une importance dans l’espace public. Les usages dépendent […] des rez-de-chaussée. » (2015, cf. annexes). En effet, on retrouve, ici, essentiellement des personnes occupant l’espace public en venant boire ou manger quelque chose en terrasse. L’effervescence que procure un chantier n’est cependant pas que négative. En l’occurrence, certaines personnes s’installent en terrasse afin de pouvoir observer les ouvriers travailler. La plupart des clients sont des habitués, ce qui leur permet, de plus, de suivre l’évolution des travaux semaines après semaines.

Fig. 44 : Personne observant le chantier en 2015 (photo personnelle) Fig. 45 : L'espace public du triangle du Bois en 2015 (photo personnelle)

Les pratiques de l’espace public du triangle du Bois sont donc conditionnées par les rez-de-chaussée des immeubles en façade. Avec la demi-exèdre, ce sont les deux espaces à être dans ce cas-là. Sur la carte ci-dessous, nous avons répertorié les différentes pratiques que l’on trouve dans l’espace public, avec les rez-de-chaussée des bâtiments si les pratiques leur sont dues.

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Fig. 46 : Les différentes pratiques de la Porte d’Aix (cartographie personnelle)

La carte ci-dessus résume les différentes pratiques présentes dans l’espace public de la Porte d’Aix pendant notre observation. Nous pouvons remarquer qu’il existe une concentration de pratiques différentes autour de la bouche de métro et de la demi-exèdre. Dans le délaissé autoroutier, qui est le deuxième espace le plus pratiqué, nous trouvons différentes pratiques mais qui relèvent toutes de celles d’un parc. L’espace public restant avec les travaux dans le triangle du Bois est occupé par les terrasses des cafés/restaurants se trouvant en façade. Enfin, le rectangle de la rue d’Aix et le carrefour entre le boulevard des Dames et la rue sainte Barbe sont surtout des lieux de passages. Nous pouvons donc nous demander, si toutes ces pratiques, observées aujourd’hui, sont dues à la nouvelle forme de l’espace public créée par les travaux ou si ce sont des pratiques équivalentes aux anciennes qui persistent face à ce nouvel espace qui leur est donné. Nous optons pour la seconde option, et nous allons voir dans la partie suivante que ces travaux mettent en place un processus que nous essayerons de définir.

3. Un effet cristallisant des travaux actuels Comme nous venons de le voir, avec les travaux actuels, les pratiques de l’espace public de la Porte d’Aix n’ont pas vraiment changées. Si l’on compare les pratiques de 2014 avec celles que l’on peut observer aujourd’hui, rien ne sera bien différent. Ainsi, les travaux de l’aménagement des espaces publics de la Porte d’Aix, malgré le changement qu’ils amènent, ne modifient pas réellement les pratiques d’hier. Nous allons donc essayer de mieux comprendre quel est ce processus en marche dans l’espace public de la Porte d’Aix. Pour cela, nous avons posé l’hypothèse suivante : les travaux cristallisent une situation. L’espace public change de forme, mais les usagers et leurs pratiques restent les mêmes. En dépit de la mutation amorcée par le chantier occupant une grande partie de l’espace public de la Porte d’Aix, les habitants n’ont quasiment pas changé leurs habitudes en ce qui concerne leurs pratiques de l’espace public. En effet, nous pouvons nous rendre compte, grâce aux entretiens réalisés avec les habitants et les acteurs du projet actuel, que la majorité des

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pratiques persistent malgré l’apparition des travaux. Nous allons prendre deux exemples qui confirment cet effet que nous pourrions qualifier de résistance des pratiques envers les mutations entreprises. Vers la bouche de métro « Jules Guesde », avant les travaux, se tenait un marché informel d’une dizaine de stands. En plus de ce marché, des personnes vendaient à la sauvette des cigarettes et de la drogue. Malgré un espace réduit à cause des travaux, ce marché existe toujours, même si le nombre de stands est réduit : « seul 3 ou 4 stands subsistent. » (Extrait d’entretiens Porte d’Aix – cf. annexes). « Les pratiques n’ont pas changées. Les vendeurs de cigarettes et de shit sont toujours là, ils sont encore mieux cachés avec les grillages du chantier. » En ce qui concerne la vente à la sauvette, comme le confirme ce commerçant, nous ne remarquons pas de changements. Toujours situés entre la fin de la rue du Bon Pasteur et la demi-exèdre, les vendeurs continuent d’exercer leur commerce et l’apparition des travaux leur permet d’être d’autant mieux cachés derrière les grillages. Le triangle du Bois est lui aussi un bon exemple de la cristallisation qu’opèrent les travaux sur les pratiques de l’espace public par ses usagers. En effet, en dépit des travaux qui réduisent considérablement l’espace utilisable par les terrasses des cafés/restaurants, ces derniers ont toujours des clients, et se sont appropriés ce petit espace en y installant tout de même chaises et tables. Collés aux grilles qui protègent le chantier, les clients boivent un café, discutent, profitent. Ils gardent les même pratiques qu’avant, et le chantier leur permet même d’avoir une animation constante qu’ils peuvent observer si bon leur semble. Cet effet qui est apparu avec la mise en place des travaux, est ce que nous nommerons un « effet cristallisant ». Nous pouvons le définir de la sorte : c’est un processus qui contribue à figer un fait social ou une réalité urbaine à un moment t. En effet, en dépit des changements spatiaux, les pratiques des usagers de la Porte d’Aix restent les mêmes. On peut apparenter cela à une forme de résistance des pratiques des usagers par rapport aux mutations engagées.

Fig. 47 : Personnes en terrasses devant un café du triangle du Bois en 2015 (photo personnelle)

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III. UNE DUALITE ENTRE MUTATIONS ET PRATIQUES DES HABITANTS

Nous avons donc vu lors de la partie précédente que les pratiques actuelles perdurent, pour la majorité, depuis longtemps. Les travaux ont cristallisé ces manières de s’approprier l’espace qu’ont les habitants de la Porte d’Aix depuis le retrait de l’autoroute en 2010, dernière grande mutation de l’espace public. Au regard de cette persistance des pratiques, nous sommes en mesure de nous demander si celle-ci n’existe pas depuis plus longtemps. Si, finalement, lors des différentes mutations de l’espace public au fil du temps, ce ne sont pas les mêmes types de pratiques qui durent. Pour cela, nous allons comparer les pratiques des différentes zones qui composent l’espace public après plusieurs mutations et ensuite, nous allons analyser le point de vue des différents acteurs du projet actuel sur les pratiques des usagers de la Porte d’Aix.

1. Une dualité à révéler L’espace public de la Porte d’Aix a subi de nombreuses mutations au fil du temps : transformations dues à l’agrandissement de la ville avant le XXème siècle, arrivée de l’autoroute dans les années 1970 puis recul de celle-ci en 2010 et enfin réaménagement de l’espace public en 2015. Ces mutations ont sans cesse modifié l’espace public que les habitants peuvent s’approprier. Cependant, nous avons pu nous apercevoir, tout au long du travail de ce mémoire, que les pratiques liées à ces changements n’ont pas été modifiées autant que l’a été l’espace public. Nous allons donc comparer les pratiques historiques avec celles existantes aujourd’hui. Dans le rectangle de la rue d’Aix, les pratiques sont donc essentiellement en mouvement puisque cet espace est un lieu de passage. Autrefois, bien que les placettes devant les arcades existaient déjà, peu de gens s’y arrêtaient. Les commerces présents n’ont jamais vraiment créé d’espace animé sur leurs parvis et comme l’ancien axe majeur de la ville a toujours été un simple lieu de passage, cette pratique se retrouve aujourd’hui encore dans l’extrémité nord de celui-ci, le rectangle débouchant sur la Porte d’Aix. Le carrefour entre le boulevard des Dames et la rue sainte Barbe nous permet de parler des flux routiers se trouvant en général à la Porte d’Aix. En effet, le flux massif de véhicules a toujours existé sur la place de la Porte d’Aix. Et bien avant que l’autoroute n’arrive sur le site, celui-ci a toujours été contraint par ces pratiques de déplacements. Déjà au XIXème siècle, des projets d’aménagements voulaient améliorer l’espace public en détournant les voies de « charrois ». Cette pratique de l’espace par de nombreux véhicules est semblable depuis des siècles, elle a augmenté avec l’arrivée de l’autoroute, et restera toujours importante car la Porte d’Aix est à proximité de l’entrée en ville par l’autoroute, par la gare ferroviaire et maritime. L’espace devant le métro et la demi-exèdre est aussi un espace où certaines pratiques ont persistées. Les pratiques actuelles de vente, à la sauvette aujourd’hui, ne datent pas d’hier. En effet, au XVIIème siècle, lorsque la rue du Bon Pasteur était encore le chemin d’Aix, un faubourg s’était créé le long de celui-ci. De fait, déjà à cette époque, profitant d’un passage régulier, des commerces s’étaient créés. Cette présence commerciale a perdurée jusqu’à aujourd’hui dans la rue du Bon Pasteur. Ainsi, ces pratiques de ventes, à la sauvette ou sous forme de marché, sont restées ancrées dans le lieu. Dans cet espace, les pratiques dépendent

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donc en partie de celles que l’on trouve dans la rue y débouchant. De plus, avec l’arrivée de la station de métro au XXème siècle, ce lieu de passage a été renforcé. Que cet espace soit aussi un lieu d’arrêt afin de profiter du soleil, de lire son journal ou de discuter entre amis est lié au fait qu’il soit aussi un espace de vente. L’animation générée par celui-ci a pour effet de créer un brouhaha qui permet de se sentir dans un groupe, comme nous le racontait une personne qui, justement, profitait du soleil peu avant midi vers la bouche de métro. Le délaissé autoroutier est certainement l’exemple le plus évident en ce qui concerne la persistance de pratiques. Depuis son apparition, avec celle de l’autoroute, cet espace vert et arboré qui, à l’origine, était un simple rond-point, est devenu le parc dont le quartier avait grandement besoin. Avec lui, c’est aussi un espace de calme, agréable à pratiquer qui est arrivé. Et de fait, depuis qu’il est dans le quartier de la Porte d’Aix, le délaissé autoroutier a toujours été pratiqué. À la manière d’un parc, les usagers viennent s’allonger, discuter, se reposer, jouer, pique-niquer, dormir, lire, s’assoir, etc. Ces pratiques ne sont pas seulement celles d’aujourd’hui, mais bien celles que nous pouvons retrouver dans ce « parc » depuis qu’il existe. Il faut tout de même noter que depuis que l’autoroute a reculé jusqu’à l’avenue du général Leclerc, ce qui a entrainé une certaine sécurisation de la zone, la fréquentation par les habitants du parc est devenue plus importante.

Fig. 48 : Pratique du délaissé en 2005 (photo J-M Savignat) Fig. 49 : Pratique du délaissé en 2015 (photo personnelle)

Le triangle du Bois est caractérisé depuis quelques années par des terrasses de restaurants et cafés, mais ces pratiques ne sont pas issues d’une quelconque persistance. En effet, avant qu’un espace ne soit réservé aux terrasses, le triangle était un parking et un lieu d’arrêt pour bus. Bien que tous les espaces ne soient pas lieu de persistance de pratiques au fil du temps, nous pouvons tout de même considérer que cette dualité entre pratiques et mutations de l’espace public existe. Quelques fois, c’est la rue derrière l’espace qui joue le rôle de mémoire, d’autres fois c’est la position de la Porte d’Aix qui induit la pérennité de certaines pratiques. Cette résistance au changement, nullement négative, fait partie de l’« ADN » des habitants de cette place qui ne tiennent pas compte des mutations urbaines pour pratiquer leur espace. Malgré les différents changements de l’espace public, les pratiques restent les mêmes. Selon les différents acteurs du projet actuel que nous avons pu interroger, cela s’explique par la population habitant le quartier. Nous allons donc étudier, dans la partie suivante, le regard que portent les acteurs du projet actuel sur les pratiques des usagers de la Porte d’Aix.

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2. Le regard des acteurs sur les pratiques dans l’espace public Lors de la phase d’obtention d’informations diverses et variées sur le sujet du mémoire, nous avons pu réaliser des entretiens avec différents acteurs du projet se concrétisant actuellement à la Porte d’Aix. En effet, nous avons pu rencontrer Jean-Michel Savignat, architecte urbaniste coordinateur de la ZAC Saint Charles / Porte d’Aix, Julie Lalande et Thierry Ciccione, architectes urbanistes de Stoa qui s’occupent de l’aménagement des espaces publics de la Porte d’Aix. Nous avons aussi réussi à avoir un entretien téléphonique avec Nicolas Mattei, qui est le directeur de la ZAC Saint Charles/Porte d’Aix pour Euroméditerranée. Ces entretiens nous ont permis d’avoir un regard sur la manière avec laquelle ils ont étudiés la place de la Porte d’Aix et plus particulièrement les pratiques qui la composent. Les différents acteurs nous ont donc donné leur regard sur l’espace public du site, et en règle générale, ainsi que sur les pratiques des usagers de la Porte d’Aix. À travers leur expérience et leur savoir sur la question, ils nous permettent de mieux comprendre pourquoi la majorité des pratiques ont persistées au cours du temps.

« L’espace public se doit d’être accueillant aux différents usages, mais on ne décrète pas des usages. Pour que l’espace soit lieu de pratiques, on travaille sur la qualité, les dimensions spatiales, etc. «

J-M. SAVIGNAT – EXTRAIT D’ENTRETIENS PORTE D’AIX – CF. ANNEXES

« Le vide, c’est le lieu du possible. » STOA – EXTRAIT D’ENTRETIENS PORTE D’AIX – CF. ANNEXES En ce qui concerne l’espace public, Julie Lalande, Thierry Ciccione et Jean-Michel Savignat partagent un même point de vue. En effet, pour eux, l’espace public ne doit pas forcément induire de pratiques en particulier, mais doit laisser un champ des possibles le plus large possible. Ce champ des possibles est, aujourd’hui, assez large à la Porte d’Aix. C’est pourquoi on peut retrouver des pratiques différentes les unes des autres. Prenons l’exemple du délaissé autoroutier. Comme Jean-Michel Savignat nous le précise, « on avait un rond-point au départ avec de l’herbe qui est devenu un espace vert de fait par les usages des habitants. » (2015, cf. annexes) Il n’est effectivement pas aménagé (aucun banc, siège, etc.) et ne relève d’un parc que par les arbres et l’herbe qui le compose. Ainsi, et parce que ça en est un, le délaissé autoroutier laisse le plus de liberté en terme de pratiques. Comme il n’est pas aménagé, aucune pratique n’est induite, et de fait les habitants peuvent se l’approprier comme ils le souhaitent.

Fig. 50 : Le délaissé autoroutier et son champ des possibles en 2015 (photo personnelle)

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« La difficulté de la Porte d’Aix, c’est que c’est un espace symbole de la ville et une place de quartier à la fois. »

J-M. SAVIGNAT – EXTRAIT D’ENTRETIENS PORTE D’AIX – CF. ANNEXES De plus, comme nous le fait remarquer Jean-Michel Savignat, la Porte d’Aix peut être caractérisée de deux manières : symbole de la ville en tant que porte d’entrée et place accueillante à la population qui habite le quartier. Ces deux caractéristiques induisent deux types d’espaces différents et de fait, deux types de pratiques possibles. Cette dualité est présente quasiment depuis l’apparition d’un réel espace public dans ce quartier de Marseille. En effet, depuis toujours porte d’entrée de la ville, la Porte d’Aix a une portée symbolique étant le premier espace vu et pratiqué par de nombreuses personnes arrivant sur Marseille. Cette double caractérisation de l’espace a aussi permis à sa manière de faire persister certaines pratiques. En effet, même si une des caractéristiques domine à un moment t, l’autre ne cessera pas d’être là. De ce fait, en second plan, des pratiques continuent à exister et peuvent être de nouveau plus apparentes lors d’une autre période de l’histoire. Par exemple, lorsque l’autoroute arrivait encore sur la place, cette monumentalité, ajouté celle de la vue de Notre Dame de la Garde, était bien réelle. Tous les automobilistes arrivant sur Marseille se retrouvaient face à l’arc de triomphe avant de se diriger vers les autres quartiers. Celui-ci avait le rôle pour lequel il était destiné, c’est-à-dire une porte d’entrée majestueuse. Cependant, toujours lors la même période, pendant qu’un des rôles définis par J-M Savignat était rempli, le second, celui de place de quartier, était placé en arrière-plan. En effet, comme nous avons pu le voir dans la première partie du mémoire, l’espace public fut très largement réduit par l’arrivée de l’autoroute et l’espace qui restait était fortement impacté par le flux massif d’automobilistes.

« Les pratiques sont plus liées à la population qu’à l’espace public. » « Les pratiques changeront avec le changement de la population. »

STOA – EXTRAIT D’ENTRETIENS PORTE D’AIX – CF. ANNEXES Enfin, ces affirmations des architectes de l’agence Stoa sur le lien entre la population et les pratiques dans l’espace public sont une réponse à la question des persistances des pratiques de la Porte d’Aix au fil de l’histoire. En effet, la population habitante du quartier est depuis longtemps la même, majoritairement issue de l’immigration d’Afrique du nord. Celle-ci a pris l’habitude de certaines pratiques dans l’espace public de la Porte d’Aix et ces pratiques persistent par le maintien de cette population au cours des décennies. Ainsi, cette persistance des pratiques est due à la présence d’une même population. Avec le projet d’Euroméditerranée, un renouvellement de la population est certainement à prévoir car un pôle étudiant et des immeubles de logements sont projetés aux alentours de la Porte d’Aix. Cette future population majoritairement étudiante viendrait peu à peu s’immiscer dans la population habitante actuelle et de ce fait, certaines pratiques d’aujourd’hui pourrait changer ou disparaitre et de nouvelles, dues à la nouvelle population pourraient apparaitre. Ces entretiens avec les acteurs du projet récent de réaménagement de l’espace public de la Porte d’Aix nous permettent de venir confirmer cette persistance de pratiques dans cet espace public. Ils nous permettent aussi de donner d’autres explications sur ce phénomène grâce à leurs connaissances sur le sujet.

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Fig. 51 : Perspective sur le parc pour le concours du projet de réaménagement des espaces publics (Stoa)

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CONCLUSION Nous avons donc vu, tout au long de ce mémoire, que les pratiques des usagers de l’espace public de la Porte d’Aix ont pu évoluer au fil du temps. Cependant, et ce malgré les nombreux projets urbains qui sont venus modifier la forme de l’espace public, la majorité d’entre elles ont persistées. Nous aurions pu penser qu’un changement de forme urbaine aurait modifié aussi les pratiques présentes, mais dans ce lieu singulier qu’est la place de la Porte d’Aix, l’appropriation faite par les habitants de cet espace est resté la même. Ainsi, en réponse à la problématique posée en introduction, nous pouvons affirmer, grâce à ce mémoire et au travail réalisé au préalable, que les projets urbains n’ont pas un effet considérable sur les pratiques des usagers de la Porte d’Aix. Comme une forme de résistance au changement, les habitants ont continués à pratiquer l’espace public comme ils avaient l’habitude de le faire. Lors de la dernière mutation en 2015, un « effet cristallisant » est apparu avec les travaux. Celui-ci a figé les pratiques de l’espace public présentes avant la mutation. Et nous a permis de se poser la question d’une persistance de pratiques plus anciennes au travers des projets urbains effectués depuis le XXème siècle. L’ambition de ce mémoire, d’analyser les différentes pratiques dans l’espace public de la Porte d’Aix au fil du temps afin de mieux comprendre celles actuelles, a en certains points été revue à la baisse. En effet, l’analyse des pratiques présentes avant notre période d’observation fut, pour certaines tranches d’histoire, difficile à réaliser. Le manque de documents faisant état des pratiques avant le XXème siècle nous a forcés à davantage étudier la forme de l’espace public au travers de cartes historiques, et d’en déduire, dans la mesure du possible, les pratiques qui en étaient induites. Cependant, si le temps imparti pour le travail du mémoire avait été plus long, peut-être nous aurions pu plus nous plonger dans certaines archives et étudier plus justement les anciennes pratiques. Le projet actuel, conçu par Stoa, de réaménagement des espaces publics de la Porte d’Aix est une nouvelle mutation de cette place. Lors de l’entretien réalisé avec les architecte-urbaniste en charge du projet, Julie Lalande et Thierry Ciccione, nous avons discuté quelque peu de leur projet. Ainsi, comme nous le montre les documents du concours (cf. annexes), ils ont conçu un nouvel espace public qui leur semblait cohérent avec les habitants du quartier et leurs pratiques actuelles. Ce qui prédomine dans le projet, c’est la volonté de créer des espaces de qualité qui laissent la possibilité de tous les types de pratiques. De grandes places plantées et un vrai parc qui s’apparentent à de grands vides de qualité. De fait, comme régulièrement à la Porte d’Aix, l’espace public va être modifié. Et comme pour les projets urbains précédents, nous pouvons nous demander si celui-ci va apporter des changements dans les pratiques des habitants du quartier ? Est-ce que les futurs espaces vont permettre d’accueillir les pratiques qui ont persisté jusqu’à aujourd’hui ou vont-ils au contraire en faire disparaitre certaines, ou induire et permettre de nouvelles pratiques ?

« On n’est pas obligé de remplir l’espace public. Il faut laisser des possibles. L’espace public ce sont des grands vides remplis par le public. »

STOA – EXTRAIT D’ENTRETIENS PORTE D’AIX – CF. ANNEXES

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- RONCAYOLO Marcel, Lectures de villes – Formes et temps, Marseille : Éditions

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- TIRONE Lucien, Un nouveau centre pour Marseille, In: Méditerranée, deuxième série, tome

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WEBOGRAPHIE :

- FAURÉ Christian, Distinguer les usages des pratiques [en ligne]. Disponible sur :

http://www.christian-faure.net/2008/11/18/distinguer-les-usages-des-pratiques/ [23/12/15]

OUVRAGES NON PUBLIÉS :

- AGAM (Agence d’urbanisme de l’agglomération Marseillaise), Un demi-siècle d’histoire

urbaine, Les grandes étapes de l’évolution du secteur Saint-Charles-Porte d’Aix au XXe siècle,

Marseille, 2012, 16 p.

- FIAMMANTE Céline, Une action urbaine au cœur des travaux de la Porte d'Aix, TPFE

ENSA-Marseille, 2006

- LALANDE Julie, De l’Avant Projet à la remise en gestion, la maitrise d’œuvre d’espace

public, mémoire professionnel ENSA-Marseille, 2013, 27 p.

- SAVIGNAT Jean-Michel, Programme et directives d’aménagement de la place Jules

Guesde / Porte d’Aix, pour Euroméditerranée, Marseille, 2011, 113 p.

- STOA, Note méthodologique concours, pour le projet de réaménagement de la Porte d’Aix à

Marseille, 2011, 20 p.

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TABLE DES ILLUSTRATIONS FIG. 1 : L'AXE HISTORIQUE DE MARSEILLE EN 2011 (PHOTO CAMILLE MOIRENC) ................................................. 13 FIG. 2 : PLAN DE SITUATION DE LA PLACE DE LA PORTE D'AIX EN 2014 (GOOGLE EARTH) .................................... 17 FIG. 3 : LA PLACE DE PORTE D'AIX (CARTOGRAPHIE PERSONNELLE)...................................................................... 17 FIG. 4 : CARTES DE LA PLACE DE LA PORTE D'AIX - 1650 - 1720 - 1785 - 1810 (THIERRY DUROUSSEAU) .............. 21 FIG. 5 : EXTRAIT D'UNE CARTE DE MARSEILLE EN 1914 AVEC LIGNES DE TRAMWAYS (FONDS AGAM) ................ 22 FIG. 6 : PLACE DE LA PORTE D'AIX EN 1973 (IGN) ............................................................................. 24 FIG. 7 : DESTRUCTION DE LA RIVE NORD DE LA PLACE DE LA PORTE D'AIX EN 1971 (FONDS AGAM) ................... 23 FIG. 8 : ARRIVEE MONUMENTALE DE L'AUTOROUTE DANS LES ANNEES 1970 (FONDS AGAM) .............................. 23 FIG. 9 : VUE AERIENNE EN 1999 (IGN) FIG. 10 : VUE AERIENNE EN 1999 (FONDS AGAM) ................... 24 FIG. 11 : ESPACE AUTOUR DE L'ARC DE TRIOMPHE EN 2005 (PHOTO JEAN-MICHEL SAVIGNAT) ............................. 25 FIG. 12 : VUE AERIENNE DE LA PLACE DE LA PORTE D'AIX EN 2014 (GOOGLE MAPS) ........................................... 26 FIG. 13 : APPROPRIATION DU DELAISSE AUTOROUTIER EN 2014 (PHOTO STOA) ..................................................... 28 FIG. 14 : APPROPRIATION DU DELAISSE AUTOROUTIER EN 2012 (PHOTO STOA) ..................................................... 27 FIG. 15 : LE TRIANGLE DU BOIS EN 2012 (PHOTO STOA) ........................................................................................ 27 FIG. 16 : ESPACE OUEST DU RECTANGLE DE LA RUE D'AIX EN 2013 (PHOTO STOA)................................................ 28 FIG. 17 : ESPACE DEVANT LA SORTIE DE METRO EN 2012 (PHOTO STOA) ............................................................... 29 FIG. 18 : ESPACE PUBLIC DEVANT LA DEMI-EXEDRE EN 2014 (PHOTO STOA) ......................................................... 28 FIG. 19 : LES DIFFERENTS FRAGMENTS QUI COMPOSENT LA PORTE D'AIX (CARTOGRAPHIE PERSONNELLE) ........... 31 FIG. 20 : L'ESPACE PUBLIC PENDANT LES TRAVAUX (CARTOGRAPHIE PERSONNELLE) ............................................ 32 FIG. 21 : LES DIFFERENTES ZONES DE L'ESPACE PUBLIC (CARTOGRAPHIE PERSONNELLE) ...................................... 32 FIG. 22 : PANORAMA DU RECTANGLE VU DEPUIS LA RUE D'AIX EN 2015 (PHOTO PERSONNELLE) .......................... 33 FIG. 23 : CARREFOUR ENTRE LE BD DES DAMES ET LA RUE SAINTE BARBE EN 2015 (PHOTO PERSONNELLE) ......... 33 FIG. 24 : ESPACE PUBLIC DEVANT LA BOUCHE DE METRO EN 2015 (PHOTO PERSONNELLE) .................................... 34 FIG. 25 : ESPACE PUBLIC DEVANT LA DEMI-EXEDRE EN 2015 (PHOTO PERSONNELLE) ............................................ 34 FIG. 26 : PANORAMA DU DELAISSE AUTOROUTIER EN 2015 (PHOTO PERSONNELLE) .............................................. 35 FIG. 27 : ESPACE PUBLIC DU TRIANGLE DU BOIS EN 2015 (PHOTO PERSONNELLE) ................................................. 35 FIG. 28 : LES FLUX PIETONS (CARTOGRAPHIE PERSONNELLE) ................................................................................ 36 FIG. 29 : PASSAGE DANS LES ARCADES EN 2015 (PHOTO PERSONNELLE) ........................................................... 38 FIG. 30 : PASSAGE DANS LES ARCADES EN 2015 (PHOTO PERSONNELLE) ........................................................... 37 FIG. 31 : PARTIE EST DU RECTANGLE DE LA RUE D'AIX EN 2015 (PHOTO PERSONNELLE) ....................................... 37 FIG. 32 : TRAVERSEE DU CARREFOUR EN 2015 (PHOTO PERSONNELLE) ............................................................. 39 FIG. 33 : TRAVERSEE DU CARREFOUR EN 2015 (PHOTO PERSONNELLE) ............................................................. 38 FIG. 34 : PRATIQUES DANS L'ESPACE DEVANT LE METRO TROIS JOURS DIFFERENTS - DE GAUCHE A DROITE : 11/11,

28/11 ET 2/12 (PHOTOS PERSONNELLES) .................................................................................................. 38 FIG. 35 : PRATIQUES STATIQUES DEVANT LE METRO EN 2015 (PHOTO PERSONNELLE) ........................................... 39 FIG. 36 : L’ESPACE PUBLIC DEVANT LA DEMI-EXEDRE EN 2015 (PHOTO PERSONNELLE) ........................................ 39 FIG. 37 : VENDEURS A LA SAUVETTE DANS LA MASSE EN 2015 (PHOTO PERSONNELLE) ......................................... 40 FIG. 38 : DIFFERENTES APPROPRIATIONS DU DELAISSE AUTOROUTIER EN 2015 (PHOTOS PERSONNELLES) ............. 41 FIG. 39 : DIFFERENTES APPROPRIATIONS DU DELAISSE AUTOROUTIER EN 2015 (PHOTOS PERSONNELLES) ............. 41 FIG. 40 : LE MEME GROUPE DE FEMMES AU MEME ENDROIT DIFFERENTS JOURS EN 2015 - DE GAUCHE A DROITE

28/11, 2/12 ET 15/12 (PHOTOS PERSONNELLES) ....................................................................................... 42 FIG. 41 : VENDEUR A LA SAUVETTE SUR UN LIEU DE PASSAGE IMPORTANT EN 2015 (PHOTO PERSONNELLE) ......... 42 FIG. 42 : VENDEUR A LA SAUVETTE EN 2015 - DE GAUCHE A DROITE 28/11, 2/12 ET 15/12

(PHOTOS PERSONNELLES) ......................................................................................................................... 42 FIG. 43 : PERSONNES EN TERRASSES DANS L'ESPACE PUBLIC DU TRIANGLE DU BOIS EN 2015

(PHOTO PERSONNELLE) ............................................................................................................................ 43 FIG. 44 : PERSONNE OBSERVANT LE CHANTIER EN 2015 (PHOTO PERSONNELLE) ................................................... 44 FIG. 45 : L'ESPACE PUBLIC DU TRIANGLE DU BOIS EN 2015 (PHOTO PERSONNELLE) ............................................... 43 FIG. 46 : LES DIFFERENTES PRATIQUES DE LA PORTE D’AIX (CARTOGRAPHIE PERSONNELLE) ............................... 44 FIG. 47 : PERSONNES EN TERRASSES DEVANT UN CAFE DU TRIANGLE DU BOIS EN 2015 (PHOTO PERSONNELLE) ... 45 FIG. 48 : PRATIQUE DU DELAISSE EN 2005 (PHOTO J-M SAVIGNAT) .................................................................. 49 FIG. 49 : PRATIQUE DU DELAISSE EN 2015 (PHOTO PERSONNELLE) .................................................................. 48 FIG. 50 : LE DELAISSE AUTOROUTIER ET SON CHAMP DES POSSIBLES EN 2015 (PHOTO PERSONNELLE) .................. 49 FIG. 51 : PERSPECTIVE SUR LE PARC POUR LE CONCOURS DU PROJET DE REAMENAGEMENT DES ESPACES PUBLICS

(STOA) ..................................................................................................................................................... 54

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ANNEXES

1. Entretiens avec des habitants de la Porte d’Aix

• Lundi 30 novembre 2015 – peu avant midi Homme, environ 60/70 ans - Le parc, avant les travaux, il était très beau, il y avait plein de beaux arbres ! Beaucoup de gens y allaient. Maintenant, il est sale. Il y a des poubelles partout. Les gens pissent et chient sans respect, sur l’arc de triomphe même ! Y’a plus de cons que de bons aujourd’hui. En été, il y a tellement de gens qu’il n’y a plus de place. Mais les cons reviennent et salissent tout. - Quand les travaux seront finis, ce sera joli, arrangé. Mais s’ils ne mettent pas de gardien, c’est foutu. Homme, environ 40/50 ans – habitant depuis 25 ans - Quand il y avait l’autoroute, c’était un rond-point. Ça ne donnait pas une belle image. L’espace public n’était pas trop pratiqué, à part l’espace vert au milieu. Avec le recul de l’autoroute, ça a été un changement radical : vraiment moins de voitures. Il y a eu une hausse de la fréquentation de la place. - Ça commence à changer. - On voit un changement de population, c’est clair. Les gens ne sont plus ceux qui étaient là avant. Homme, environ 70 ans – habitant depuis 55 ans - Avant il y avait une place, ils ont tout cassé. Ils ont fait un jardin. Ils vont tout démolir, ils vont nous déplacer. Devant le métro, on avait le marché (informel), maintenant, quasiment plus (depuis les travaux actuels). - Avant l’autoroute, à la place du jardin, il y avait des baraquements, des chevaux, des vaches, etc. L’axe majeur, c’était Avenue Camille Pelletan / rue d’Aix. Homme, environ 40 ans - La place faisait vivre beaucoup de familles avec la vente à la sauvette, la vente des chiffons venant des poubelles, beaucoup de roumains. Maintenant, avec les travaux, tout cela a disparu. Le marché (informel) autour de la sortie de métro « Jules Guesde » n’existe quasiment plus, seul 3 ou 4 stands subsistent. Moi, je vends deux-trois bricoles (à la sauvette), les jeunes ils vendent des cigarettes, du shit. Mais maintenant, on se fait emmerder par tout le monde, les flics et les voyous. - Marseille, c’est la chasse aux gens pauvres.

• Mercredi 2 décembre 2015 – aux alentours de 14h Homme, environ 50 ans – travaillant dans le quartier depuis 4 ans - Cet espace (les arcades) est juste un passage. Trop proche des voitures, la rue est très passante. Les gens ne s’arrêtent pas.

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- Dans le jardin, c’est les familles, les enfants. Il est très souvent plein de gens. Après l’école et dans l’après-midi, quand c’est au soleil l’hiver. - Autour du métro, il y a un marché, parfois sauvage. Homme, environ 20 ans – employé du magasin Dio’z - Avant, c’était un rond-point. - Le parc était plus grand avant les travaux. Il y a pas mal de gens qui font des pique-niques. Homme, environ 40 ans – patron du magasin Dio’z - Les pratiques n’ont pas changé. Les vendeurs de cigarettes et de shit sont toujours là, ils sont encore mieux cachés avec les grillages du chantier. - Les usages n’ont pas encore changé, mais peut-être qu’ils le seront dans le futur. Homme, environ 40 ans – travaillant au magasin Dynasty - Avant les travaux actuels, il y avait une placette goudronnée devant les arcades. Les gens passaient mais ne s’arrêtaient pas. - Quand l’autoroute arrivait jusqu’à la Porte d’Aix, il y avait des voitures, des camions et des bus partout. Ils s’arrêtaient tous là (triangle du Bois).

• Lundi 21 décembre 2015 – 14h – par téléphone Bernard MISRACHI – artiste (groupe dunes) – habitant du quartier depuis 1982 - On a acheté des locaux en 82, d’autres artistes nous ont rejoint jusqu’en 87. Les prix étaient très bas à ce moment-là. Depuis que l’on y habite, il y a toujours des travaux. Dans le quartier, début années 80 c’était déjà la fin d’un quartier. Tous les commerçants partaient, le boucher marseillais du coin, l’épicier, etc. Comme le quartier était vide, toute la population qui habitait dans les îlots sainte Barbe s’est déplacé chez nous au moment des démolitions. - L’espace public (de la Porte d’Aix), c’est un espace de liberté. Sans problème d’usages, ils sont tous permis. Pétanque, pique-nique, etc. - Le plus marquant, c’est l’intolérance des collectivités face aux pratiques. L’image de l’arrivée de la ville à Marseille, c’est des familles sur l’herbe avec les enfants qui jouent, et ça ne leur plait pas. Pourtant, c’est une appropriation belle et douce de l’espace public. - Là où il y avait le parking, c’était un marché de légumes, puis un marché aux puces informel. - Ça devient des zones de conflits car les collectivités laissent pourrir les lieux. - On pourrait qualifier les pratiques de l’espace public de la porte d’Aix de volées. Le souhait des collectivités, c’est qu’il y ait moins d’usages, donc c’est des pratiques de résistances. On ne nous donne pas de liberté, on la prend. - Réhabilitation = changer les paysages et les populations. - La population qui habite l’espace public, c’est celle que l’on qualifie d’illégitime pour l’habiter.

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2. Entretiens avec divers acteurs du projet actuel Nicolas MATTEI – Lundi 7 décembre 2015 – par téléphone Il est le directeur de la ZAC Saint Charles/Porte d’Aix pour Euroméditerranée. - Le quartier a toujours fait l’objet de renouvellements urbains. De la destruction des remparts au projet actuel en passant par la cité administrative (DDE, SNCF, Telecom) dans les années 50 ou par l’aménagement de parkings pour bus. - Le projet retenu est celui qui remet le plus l’axe historique au centre. - Le constat des Ateliers de Découverte Urbaine fut que les habitants des limites de quartiers environnants ne se considéraient pas comme habitants du quartier de la Porte d’Aix mais de celui qui jouxte (Belsunce, Sainte Barbe, etc.). Donc la volonté principale est de reconstruire un quartier de vie. Ainsi, en 1998, on a projeté de recréer des habitations, de l’espace de vie et le recul de l’autoroute A7 jusqu’à l’avenue du Général Leclerc. - Après une grosse concertation, le programme est établi : parc fermé la nuit et gardienné ; espace public autour de la Porte d’Aix. - La reconquête du quartier n’est pas un but. Par contre, la gentrification se fera naturellement sur le long terme. Le projet de l’école d’architecture à la Porte d’Aix amènera des étudiants. Et ceux-là feront hausser les prix des commerces et services alentour de par leur nombre et leur demande. Jean-Michel SAVIGNAT – Mercredi 9 décembre 2015 – à son agence Il est l’architecte urbaniste coordinateur de la ZAC Saint Charles – Porte d’Aix. Il a pour mission l’assistance à la maitrise d’ouvrage et la coordination urbanistique du projet. Il a rédigé le programme et les directives d’aménagement de la ZAC. - L’espace public se doit d’être accueillant aux différents usages, mais on ne décrète pas des usages. Pour que l’espace soit lieu de pratiques, on travaille sur la qualité, les dimensions spatiales, etc. - On avait un rond au départ avec de l’herbe qui est devenu un espace vert de fait par les usages des habitants. On va le compenser par un vrai parc. - Le paysage qu’amène avec elle la voiture a complètement déstructuré l’espace. C’est une césure entre l’hyper centre-ville et ses anciens faubourgs (ancienne limite de l’enceinte du XVIIème). Volonté d’élargir le centre-ville en y réintégrant le quartier de la Porte d’Aix. - La Porte d’Aix retrouvera de l’espace public seulement si l’autoroute n’arrive plus en son centre. - Espace public autour de l’arc de triomphe minéral et vrai parc à côté. Il faut réintégrer la Porte d’Aix dans l’ordinaire des espaces publics de Marseille. - L’été, les gens viennent jouer aux boules autour de l’arc de triomphe, et profiter de l’ombre des arbres dans le parc. - Les différents acteurs de la ville se sont toujours désintéressés de ce secteur parce qu’il est sale, etc. - Contradiction entre le marché sauvage et informel autour du métro, décriés par beaucoup et l’implantation de bâtiments importants comme l’hôtel de région. Volonté de faire disparaitre ce marché par la création du parking.

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- Axes du projet : 1. Faire reculer l’autoroute, 2. Créer un véritable espace public, 3. Construire autour : recréer un quartier avec de la mixité fonctionnelle et sociale, recoudre les espaces. - La difficulté de la Porte d’Aix, c’est que c’est un espace symbole de la ville et une place de quartier à la fois. Thierry CICCIONE et Julie LALANDE – Lundi 21 décembre 2015 – à leur agence Ce sont les architectes urbanistes de Stoa qui s’occupent de l’aménagement des espaces publics de la Porte d’Aix. - L’espace vert du rond-point = un délaissé autoroutier avec des pratiques de parc. - Herbe = parc. Vide = parking - Les pratiques sont plus liées à la population qu’à l’espace public. - Les collectivités veulent que l’aménagement favorise les pratiques légales et permet d’éviter les informelles/illégales. Le stationnement est également interdit. - L’espace sud (fin rue d’Aix) sera le parvis de l’arc de triomphe. Jouer avec la pente. La pente au service de la Porte d’Aix : mise en scène du monument. - On n’est pas obligé de remplir l’espace public. Il faut laisser des possibles sur l’espace public. L’espace public ce sont de grands vides remplis par le public. - Les pratiques changeront avec le changement de la population. - Les pieds de façade ont une importance dans l’espace public. Les usages ne dépendent pas de l’aménagement, mais des rez-de-chaussée et de la population. - Il faut donner à la voiture sa juste place : le minimum. Remettre les transports en commun au cœur. La plupart des échanges de flux (bus/métro/voiture) se fait au carrefour. - C’est un quartier qui n’a jamais été terminé. - Le vide, c’est le lieu du possible.

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3. Documents de concours du projet de Stoa pour le réaménagement de l’espace public de la Porte d’Aix

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