travailler ensemble número 3 - juillet 2010

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Edito Par Bruno Roelants Secrétaire Général de CICOPA et CECOP – CICOPA Europe Ce troisième numéro de Travailler Ensemble nous offre une mise à jour sur la façon dont les coopératives industrielles et de service, et d’au- tres entreprises de propriété des travailleurs, s'efforcent de créer, maintenir et redistribuer de la valeur dans leurs territoires avec des em- plois durables, y compris en temps de crise. Mais il nous fait aussi com- prendre une partie des problèmes et défis auxquels ces entreprises font face, et, de là, les besoins de lois et de politiques publiques visant à mieux les aider à réaliser leur mis- sion. Comme vous le constaterez dans les pages suivantes, les coopératives industrielles et de service ont bien été affectées par la crise dans le monde entier, mais la liquidation d’entreprises, les pertes d’emploi et l’endettement ont été substantielle- ment moins sévères que dans d’au- tres types d'entreprises actives dans les mêmes secteurs (p.3). Le groupe coopératif Mondragon, présent dans plusieurs industries, a souffert d’une baisse substantielle de ses ventes mais, en fin de compte, cela n’aura apparemment qu’un impact marginal Entre poussées déflationnistes et signes de reprise Les coopératives industrielles et de service au cœur de l'économie L’impact de la crise sur les coopératives : 2nde enquête auprès des membres de CICOPA (page 3) Travailler ensemble est une publication commune de CICOPA et de CECOP-CICOPA Europe Éditeur: Olivier Biron Éditeur adjoint: José Miguel Botello Graphisme: jcse © CICOPA 2010 SOMMAIRE Edito 1 Intercontinental 3 Amérique Latine 8 Europe 12 Amérique du Nord 24 Asie 26 Afrique 23 Juillet 2010 - Numéro 3 Le bulletin d’information mondial sur les coopératives et les entreprises détenues par leurs travailleurs dans le secteur de l’industrie, de l’artisanat et des services Organisation Internationale des Coopératives de Production Industrielle, Artisanale et de Services, organisation sectorielle de l’Alliance Coopérative Internationale Confédération Européenne des Coopératives de Production et de Travail Associé, des Coopératives Sociales et des Entreprises Sociales et Participatives Contact: Maison Européenne des Coopératives Avenue Milcamps 105 BE-1030 Bruxelles Tel: +(32) 2 543 10 33 Fax: +(32) 2 543 10 37 www.cicopa.coop www.cecop.coop [email protected] [email protected] L’Alliance Coopé- rative Internationa- le a une nouvelle présidente (page 3) Journée Internationale des Coopératives « L’entreprise coopérative autonomise les femmes » (page 6) Travailler ensemble (suite de l’article page 2)

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Publication commune de CICOPA et CECOP -CICOPA Europe

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Page 1: Travailler Ensemble Número 3 - Juillet 2010

Edito Par Bruno Roelants Secrétaire Général de CICOPA et CECOP – CICOPA Europe Ce troisième numéro de Travailler Ensemble nous offre une mise à jour sur la façon dont les coopératives industrielles et de service, et d’au-tres entreprises de propriété des travailleurs, s'efforcent de créer, maintenir et redistribuer de la valeur dans leurs territoires avec des em-plois durables, y compris en temps de crise. Mais il nous fait aussi com-prendre une partie des problèmes et défis auxquels ces entreprises font face, et, de là, les besoins de lois et de politiques publiques visant à mieux les aider à réaliser leur mis-sion.

Comme vous le constaterez dans les pages suivantes, les coopératives industrielles et de service ont bien été affectées par la crise dans le monde entier, mais la liquidation

d’entreprises, les pertes d’emploi et l’endettement ont été substantielle-ment moins sévères que dans d’au-tres types d'entreprises actives dans les mêmes secteurs (p.3). Le groupe coopératif Mondragon, présent dans plusieurs industries, a souffert d’une baisse substantielle de ses ventes mais, en fin de compte, cela n’aura apparemment qu’un impact marginal

Entre poussées déflationnistes et signes de reprise

Les coopératives industrielles et de service au cœur de l'économie

L’impact de la crise

sur les coopératives :

2nde enquête auprès

des membres de

CICOPA (page 3)

Travailler ensemble est une publication

commune de CICOPA et de CECOP-CICOPA Europe

Éditeur: Olivier Biron

Éditeur adjoint: José Miguel Botello

Graphisme: jcse

© CICOPA 2010

SOMMAIRE

Edito 1

Intercontinental 3

Amérique Latine 8

Europe 12

Amérique du Nord 24

Asie 26

Afrique 23

Juillet 2010 - Numéro 3

Le bulletin d’information mondial sur les coopératives et les entreprises détenues par leurs travailleurs dans le secteur de l’industrie, de l’artisanat et des services

Organisation Internationale des Coopératives de Production Industrielle, Artisanale et de

Services, organisation sectorielle de l’Alliance Coopérative Internationale

Confédération Européenne des Coopératives de Production et de Travail

Associé, des Coopératives Sociales et des Entreprises Sociales et Participatives

Contact: Maison Européenne des Coopératives

Avenue Milcamps 105 BE-1030 Bruxelles

Tel: +(32) 2 543 10 33 Fax: +(32) 2 543 10 37

www.cicopa.coop www.cecop.coop

[email protected] [email protected]

L’Alliance Coopé-

rative Internationa-

le a une nouvelle

présidente (page 3)

Journée Internationale des Coopératives

« L’entreprise coopérative autonomise

les femmes » (page 6)

Travailler ensemble

(suite de l’article page 2)

Page 2: Travailler Ensemble Número 3 - Juillet 2010

sur les pertes d’emplois nettes (p.18). Dans certains cas, il y a même eu création d’entreprises ou d’emplois (par exemple en Italie p.20, en Espagne p.15). Les coo-pératives de travail associé françaises se sont senties suffisamment sûres d’elles pour lancer une marque commune (p.13). Encore plus significative, peut être, est la nouvelle vague de transformation d'entreprises menacée de fermeture en coopératives économique-ment viables dans plusieurs pays (Argentine p.8, Espa-gne p.14-15; d’autres exemples seront introduits dans les prochains numéros). En plus de la soutenabilité éco-nomique et sociale, nos entreprises sont en train égale-ment de s’engager rapidement dans le champ de la sou-tenabilité environnementale (p.5).

Tout en se concentrant sur leurs propres réalités locales et nationales (ce qui est logique en ces temps difficiles), il est frappant d’observer que nos entreprises et leurs organisations représentatives ont rarement été si acti-ves internationalement. Le groupe Mondragon construit un rapport avec un des principaux syndicats d'Amérique du Nord en vue d’encourager les coopératives industriel-les dans cette région (p.7). Les mouvements coopératifs de travail associé du Québec et du Canada anglophone ont atteint un niveau sans précédent d'intégration, mal-gré une évolution en grande partie séparée jusqu’ici (p.24). Les dirigeants des organisations coopératives de travail associé de Pologne et de Slovaquie se sont ré-cemment rencontrés pour discuter de toute une série de questions clés (p.18); en fait, les représentants des coo-pératives de travail associé d'Europe Centrale se ren-contrent régulièrement, tout comme ceux d’Espagne, d'Italie et de France, ceux des pays du Mercosur en Amérique du Sud, et ceux des Etats Unis et du Canada (plus d’informations dans nos prochaines numéros).

Cependant, l'évolution de notre modèle d’entreprise fait face à plusieurs défis que la crise actuelle a tendance à rendre encore plus aigus (p.3). De nombreuses coopéra-tives industrielles, notamment, se trouvent en plein mi-lieu de chaînes de production globalisées. Alors que leur système interne (prise de décision démocratique au sein du personnel, réserves coopératives etc.) leur permet de mieux résister, il leur est plus difficile de s’attaquer aux changements structurels dans l'économie. Plus elles construisent des institutions communes de soutien (formation, financement, R&D, plates-formes de produc-tion etc) comme dans les groupes coopératifs, plus elles peuvent également jouer un rôle actif dans ces transfor-mations structurelles, même si elles sont pour une gran-de part tributaires de l’environnement général sur le plan économique et politique. De nombreuses coopérati-ves engagées dans les services, y compris dans ceux d'intérêt général, souffrent de paiements tardifs et de resserrement du crédit, qui pourraient devenir critiques s’ils devaient durer encore longtemps (p.20-21). La pro-lifération de fausses coopératives de travail associé s’est poursuivie au même rythme dans plusieurs pays (voir

Brésil p.10, Colombie p.8). Quelques organisations coo-pératives, comme en Ouganda, doivent d’abord assurer que la production et la distribution d'énergie soit dispo-nible dans les régions avant de penser à développer systématiquement des activités industrielles ou de ser-vices par le modèle coopératif (p.23).

Afin d’affronter ces défis et mieux accomplir leur mission de génération de valeur et de création d’emploi, nos entreprises ont un besoin urgent de meilleures lois et de meilleures politiques publiques. En Corée, le manque d'une loi coopérative générale et d’une loi pour les coo-pératives de travail associé a obligé ces dernières à se développer à travers une loi sur les “entreprises socia-les”, ayant ses forces et ses faiblesses (p.26). Au Brésil, des efforts importants ont été déployés ces trois derniè-res années pour approuver une loi sur les coopératives de travail associé afin d’encourager les vraies et bannir les fausses (p.10). Dans le champ des restructurations, des centaines de milliers de firmes changeront de main ces prochaines années au Canada (p.24, des chiffres semblables ont été rapportés dans l'Union européenne), mettant en jeu le développement local et l’emploi. Notre modèle d’entreprise est certainement une des réponses à cette question, mais il devrait être nettement mieux encouragé à travers des politiques publiques appro-priées.

Dans l'Union européenne, les coopératives et leur rôle dans la crise ont récemment bénéficié, à juste titre, de la reconnaissance du Commissaire au Marché Intérieur Barnier (p.12), du Commissaire à l'Emploi Andor (p.12), du premier ministre espagnol Zapatero (p.16) et du nouveau gouvernement britannique (p. 19). Un centre coopératif dans une région de Finlande comprenant de nombreuses coopératives de travail a reçu un prix euro-péen sur l’entrepreneuriat (p.13), et le groupe Mondra-gon en a reçu un sur le capital intellectuel et la création de richesse (p.18). Il convient d’espérer que ces signaux déboucheront sur des politiques publiques concrètes.

Last but not least, il est important que notre secteur coopératif soit de mieux en mieux inséré dans le systè-me de réseau et de représentation des coopératives tous secteurs confondus. À propos du changement ré-cent dans la leadership de l'Alliance Coopérative Inter-nationale, nous accueillons avec satisfaction l'élection de Dame Pauline Green comme nouvelle présidente de l’A-CI (p.3). Le fait qu'elle est la toute première femme dans cette position rend le thème de la journée coopé-rative internationale de cette année – les coopératives donnent du pouvoir aux femmes - particulièrement ap-proprié (p.6). Finalement, l’année Internationale de Coopératives approuvée par les Nations Unies - 2012 - (p.5) fournira certainement une occasion unique pour mieux expliquer et plaider en faveur de notre modèle d’entreprise. ◊

TRAVAILLER ENSEMBLE ‐ NUMÉRO 3 ‐ JUILLET 2010   2

Entre poussées déflationnistes et signes de reprise Les coopératives industrielles et de service au cœur de l'économie

Edito par Bruno Roelants, Secrétaire Général de CICOPA et CECOP – CICOPA Europe (suite de la page 1)

Page 3: Travailler Ensemble Número 3 - Juillet 2010

I N T E R C O N T I N E N T A L

ame Pauline Green a été élue Présidente de l’ACI pour une période de 4 ans lors de son assemblée

générale qui s’est tenue à Genève les 19 et 20 novembre 2009 et dont le thème était « La crise mondiale – l’oppor-tunité Coopérative ». Pauline Green a souligné l’importance d’augmenter de manière substantielle la visibilité de l’ACI et du mouvement coopératif dans son ensemble et en par-ticulier vis-à-vis des organisations internationales.

Née à Malte en 1948, Pauline Green est la première femme à accéder à la présidence de l'Alliance Coopérative Interna-tionale depuis sa création, il y a 114 ans. Véritable citoyen-ne multinationale, – sa famille s'est déplacée à travers tou-te l'Europe pendant sa jeunesse –elle s’est mariée et a eu deux enfants après avoir travaillé comme secrétaire puis comme policy officer à Londres. Son statut de mère à temps plein lui a permis d’étudier avant de travailler pour le mouvement syndical du Royaume-Uni comme lobbyiste à plein temps en matières d’affaires européennes - un tra-vail qui l'a poussée à se présenter en 1989 à l'élection au Parlement européen comme membre du parti coopératif.

Au cours des 10 années suivantes, elle fut le leader du groupe politique le plus important du Parlement européen. Entre 2000 et 2009, elle fut la directrice générale de Co-operatives UK, l’organisation intersectorielle des coopératives du Royaume-Uni. Elle contribue ainsi à rassembler les différents secteurs du mouvement, milite avec succès en faveur d’une nouvelle législation coopérative au Royaume-Uni et elle constitue un acteur clé du renouveau du développement coopératif.

Elle fut élue à la présidence de l’ACI-Europe en 2002 et entre 2006 et 2009, elle fut co-présidente de Cooperatives Eu-rope, le nouvel organe de l’ACI pour l’Europe. ◊

L’Alliance Coopérative Internationale a une nouvelle présidente

Par Olivier Biron, CICOPA / CECOP

TRAVAILLER ENSEMBLE ‐ NUMÉRO 3 ‐ JUILLET 2010  3

epuis octobre 2008, la crise financière mondiale a me-né à la banqueroute de nombreuses institutions finan-

cières aux Etats-Unis et en Europe, et menace actuellement le système financier mondial. Cherchant une réponse à ses préoccupations concernant la crise économique et les impor-tants défis qu’elle lance par rapport à l’emploi, à la durabili-té des entreprises et à la cohésion sociale, en 2009, CICOPA (directement et à travers son organisation régionale, CECOP-CICOPA Europe pour les affaires européennes) a initié un processus de consultation auprès de ses membres, afin d’a-voir une meilleure idée des effets de la crise sur les entre-prises affiliées.

Un an après la première consultation qui s’est déroulé en mars 2009, CICOPA a lancé une nouvelle consultation, avec pour objectif d’observer les changements et l’évolution de la situation, ainsi que d’évaluer la réaction des coopératives de

travail associé et sociales. La plupart des membres de CI-COPA ont participé à la consultation menée en 2010, à sa-voir, 27 membres présents dans 21 pays (Allemagne, Ar-gentine Brésil, Bulgarie, Canada, Chine, Colombie, Corée du Sud, Danemark, Espagne, Estonie, Etats-Unis, Finlande, France, Italie, Japon, Malte Pologne, République Tchèque, Roumanie, Slovaquie).

En Europe

D’une part, la majorité des États membres européens ont rapporté une baisse de la production et des ventes. Cepen-dant, ces derniers mois, un rétablissement lent et ténu de la production et des ventes a été observé dans les coopérati-ves espagnoles, maltaises et dans quelques coopératives italiennes. Le secteur secondaire (manufacture et construc-

L’impact de la crise sur les coopératives 2nde enquête auprès des membres de CICOPA

Par Manon Richert, CICOPA / CECOP

(suite page suivante)

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Page 4: Travailler Ensemble Número 3 - Juillet 2010

tion notamment) est le plus affecté par la crise. Dans le secteur des services, des tendances contrastées apparais-sent : les services relatifs aux entreprises (par ex. : immo-bilier, logistique, transports) sont parmi les plus affectés, tandis que les services sociaux sont relativement épargnés.

Une autre tendance générale est celle de la détérioration de l’environnement financier : en 2009, il est devenu de plus en plus difficile pour les entreprises affiliées à CECOP-CICOPA Europe de négocier des prêts bancaires, et de gra-ves problèmes de retards de paiement avec les autorités publiques nous ont été rapportés, notamment en Italie et en Espagne. A cet égard, des réformes législatives au niveau européen sont requises, afin d’accélérer les procédures de paiement, et des décisions légales doivent être prises par la Cour de Justice de l’Union Européenne.

Cependant, le niveau d’endettement dans les coopératives de travail associé et sociales est plus bas que dans d’autres types d’entreprises. Il est également intéressant de noter que des nouveaux instruments financiers et systèmes de crédit coopératifs sont en train d’être développés. En réalité, les coopératives de travail associé et sociales sont moins dépendantes de sources financières extérieures que les en-treprises conventionnelles, et ceci explique leur plus haut degré de soutenabilité.

En termes de destructions d’emplois et de fermetures d’en-treprises, une différence significative a été observe par rap-port à 2009. En effet, la majorité des membres font au-jourd’hui état de destructions d’emplois, alors que cela n’é-tait pas le cas en 2009. La tendance est la même concer-nant les cas de fermetures d’entreprises ou d’entreprises en liquidation. Toutefois, la majorité des cas rapportés de fer-metures d’entreprises ne sont pas uniquement liés à la crise économique actuelle, qui a plutôt agi comme un facteur aggravant. De plus, les destructions d’emploi et les ferme-tures d’entreprises ont été substantiellement moins nom-breuses que dans d’autres types d’entreprises dans les mê-mes secteurs.

En réalité, l'innovation coopérative et la flexibilité semblent être des facteurs qui permettent autant de prévenir que de surmonter les effets négatifs de la crise. Par exemple, afin de maintenir les emplois en temps de situation économique défavorable, certains de nos membres préfèrent baisser les salaires plutôt que de supprimer des postes de travail. D’a-près le membre allemand de CECOP-CICOPA Europe, cette flexibilité est la conséquence d’un degré supérieur de parti-cipation directe des travailleurs dans l’entreprise.

Néanmoins, si l’on considère qu’il est prévu que la situation se dégrade, ou, au mieux, stagne, nos membres prévoient d’adopter des mesures pour aider leurs entreprises affiliées à affronter la crise : formation et conseil ; renforcement de la coopération entre coopératives ; services financiers ; pro-motion du modèle de la coopérative de travail associé, etc. Dans ce contexte, des micro-mesures ne seraient pas suffi-santes, et les membres de CECOP-CICOPA Europe deman-dent également à leurs gouvernements nationaux de mettre en place simultanément des mesures pour une reprise effi-ciente : suppression des désavantages fiscaux ; accès facili-té au crédit ; possibilités de garanties supplémentaires ; taux d’intérêt plus favorables à l’investissement ; simplifica-tion des procédures de création d’entreprise.

Et le reste du monde

Pour les membres extra-européens, la situation économique générale semble être plutôt hétérogène. Tandis que nos membres en Asie et en Amérique du Nord considèrent que la situation s’est détériorée, en Amérique du Sud, deux membres affirment que, dans l’ensemble, la situation éco-nomique leur est plutôt favorable, ou du moins, meilleure qu’en 2009. Il est difficile de dégager une tendance généra-le concernant les secteurs les plus affectés, dans la mesure où la diversité est bien trop importante parmi les pays concernés.

Concernant les réductions d’emploi et les fermetures d’en-treprises, l'image générale est plutôt panachée. La majorité des membres (à l’exception du Canada et du Brésil) ne si-gnalent aucune destruction d’emplois ou fermeture directe-ment liées à la crise.

Simultanément, en Argentine, de nombreux entrepreneurs indépendants sont enclins à se constituer en coopérative pour mieux affronter la crise.

Concernant les conditions financières que doivent actuelle-ment affronter les coopératives de travail associé et les coo-pératives sociales, comme en Europe, tous les membres font état de difficultés dans la négociation de prêts bancai-res.

La situation est similaire pour les systèmes de soutien fi-nancier aux coopératives, dans la mesure où pour y avoir accès, il faut pouvoir satisfaire à des critères élevés, aux-quels les coopératives de travail et sociales ne peuvent pas toujours répondre (Argentine et Colombie).

Cependant, les perspectives d’avenir sont meilleures en-dehors d’Europe : en Argentine, au Brésil, au Japon, en Co-rée du Sud et en Chine, les coopératives affiliées espèrent une amélioration de la situation économique en 2010. Si les membres américains et canadiens n’en espèrent pas tant, ils ne redoutent du moins aucune détérioration.

Pourquoi nos entreprises sont-elles plus résilientes ?

Il existe des concepts clés pour expliquer la résilience relati-ve des coopératives à la crise en cours : en effet, ces entre-prises sont d’abord caractérisées par une relation de travail spécifique, dans laquelle les travailleurs-propriétaires sont souverains dans la prise de décision au sein de l’entreprise, et sont entièrement responsables des choix qu’ils font.

Les principes qui découlent de cela sont la solidarité, l’inno-vation et la flexibilité :

la solidarité entre les travailleurs et entre coopératives, par ex., à travers les instruments de financement mu-tualisés ;

l’innovation, à travers la modernisation, la formation et l’adaptation ;

la flexibilité combinée à la sécurité, dans la mesure où le changement est censé soutenir l’emploi durable. ◊

TRAVAILLER ENSEMBLE ‐ NUMÉRO 3 ‐ JUILLET 2010   4

Le rapport complet est disponible sur le site

de CECOP-CICOPA Europe http://www.cecop.coop/Les-entreprises-cooperatives-dans.html

Page 5: Travailler Ensemble Número 3 - Juillet 2010

TRAVAILLER ENSEMBLE ‐ NUMÉRO 3 ‐ JUILLET 2010  5

Le 18 novembre à Genève (Suisse), CICOPA a organisé en collaboration avec son organisation régionale, CECOP-CICOPA Europe, un séminaire sur le thème de l’environne-ment. Celui-ci a eu lieu dans l’après-midi, juste après l’As-semblée Générale de CICOPA qui a lieu tous les 2 ans. La discussion portait sur la manière dont les coopératives industrielles, sociales, de service et d’artisans contribuent au développement durable.

a gestion des déchets dans une des municipalités de Bue-nos Aires en Argentine, le recyclage d’équipement de ski en

France ou bien encore la construction durable et pauvre en car-bone au Canada étaient autant de bonnes pratiques présentées ainsi que 3 autres exemples du Japon, de France et d’Espagne qui ont montré le potentiel des coopératives en matière d’envi-ronnement et de développement durable.

Le séminaire était un premier pas qui survient à un moment crucial, juste avant la Conférence sur le Changement Cli-matique des Nations unies qui se tenait à Copenhague, au Danemark et dont l’objectif était de trouver un successeur au protocole de Kyoto qui prendra fin en 2012. Mais le travail que CICOPA a lancé ne se limite pas à Copenhague. Au contraire, cette initiative est perçue comme le départ d’un travail de plus longue haleine pour montrer comment notre secteur coopératif allie les préoccupations liées à l’environnement avec les préoccupations d’ordre économique et socia-le. ◊

Comment les coopératives participent à l’environnement et au développement durable ?

Par Olivier Biron, CICOPA / CECOP

La résolution que les Nations Unies (NU) viennent d’adopter est un véritable plaidoyer pour les coopératives. Cette nouvelle résolution sur le rôle des coopératives dans le développement social proclame 2012 comme l’année internationale des Coopératives. Les Etats Membres des NU ont approuvé la résolution (A/RES/64/136) ce 18 décembre à la 64ème session de l’Assem-blée Générale des Nations Unies.

La résolution des NU reconnait que le modèle entrepreneurial coopératif est un facteur de développement économique et social majeur qui favorise la participation des personnes dans le développement économique et social autant dans les pays développé qu’en voix de développement et qui contri-bue à l’éradication de la pauvreté. La résolution encourage également tous les gouvernements à créer un environnement plus propice au développement des coopératives par la promotion et la mise en place de meilleures législations, la recherche, l’échange de bonnes pratiques, l’assistance techni-que et le renforcement des capacités.

L’Année Internationale des Coopératives en 2012 va mobiliser le Mouvement coopératif au niveau mondial et l’Alliance Coopératives Internationale (ACI) par la mise en place d’une campagne qui comprendra une série d’é-vènements à travers le monde et des messages ciblés que toutes les coopératives seront à même d’utiliser afin de promouvoir ce modèle entrepreneurial.

Communiqué de presse des Nations Unies : http://www.un.org/News/Press/docs/2009/dev2784.doc.htm ◊

Les Nations Unies proclament 2012 Année Internationale des Coopératives !

Par Olivier Biron, CICOPA / CECOP

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Pour davantage d’information, voir : http://www.cicopa.coop/CECOP‐seminar‐Working‐together‐for.html  

Page 6: Travailler Ensemble Número 3 - Juillet 2010

TRAVAILLER ENSEMBLE ‐ NUMÉRO 3 ‐ JUILLET 2010  6

Le 3 juillet 2010 sera célébrée la 88ème Journée Internationale des Coopératives de l'Alliance Coo-pérative Internationale (ACI) et la 16ème Journée Internationale des Coopératives des Nations Unies. Cette année, l’ACI entend mettre l'accent sur l'égalité des genres, avec pour thème : « L’entreprise coopérative autonomise les fem-mes ». L'ACI invite les coopérateurs à reconnaitre la contribution fondamentale des femmes au dé-veloppement économique, social et culturel mon-dial, à renforcer l'engagement coopératif pour permettre la prise de contrôle des femmes dans ces entreprises et à prôner leur participation dans le mouvement coopératif.

ACI souligne que partout dans le monde, les fem-mes optent pour le modèle coopératif comme réponse à leurs besoins économiques et sociaux :

soit pour réaliser leurs aspirations à créer des entrepri-ses, accéder aux produits et aux services dont elles ont besoin, soit pour participer à des activités basées sur des valeurs et des principes éthiques et qui offrent des op-portunités de revenus.

Paloma Arroyo, directrice de la Confédération Espagnole des Coopératives de Travail Associé (COCETA), très concernée par ce sujet, souligne que « le choix de ce thème est particulièrement pertinent en cette période de crise alors que les femmes dans les différentes parties du monde représentent parfois le seul soutien économique à la famille. Et elles le font à travers des coopératives, et notamment des coopératives de travail associé ».

Les coopératives sont des entreprises détenues et gérées de manière démocratique guidées par les valeurs d’en-traide, de responsabilité, de démocratie, d’égalité, d’é-quité et de solidarité. Elles axent leurs activités sur la personne et permettent à leurs membres, par le biais de décisions prises démocratiquement, de déterminer com-ment réaliser leurs aspirations. Ce genre de corporation offre aux travailleuses associées des moyens organisa-tionnels efficaces pour améliorer leur niveau de vie en accédant à un travail décent, à des mécanismes d’épar-gne et de crédit, à des logements, à des services so-ciaux, de santé, d’éducation et de formation. Mais ces sociétés d’économie sociale offrent également aux fem-mes la possibilité de participer à l’activité économique et d’exercer leur influence. Cette participation est source d’autosuffisance et d’estime de soi. Les autres effets po-sitifs sont la promotion de l’égalité et la mutation des préjugés machistes instaurés dans les différentes socié-tés. Pour la directrice de COCETA, Paloma Arroyo, « la coopérative de travail associé a démontré qu’elle était, pour toutes ces raisons, le meilleur modèle entrepreneu-rial pour le développement personnel, familial et pour le travail des femmes ».

Dans les coopératives composées uniquement de fem-mes, celles-ci sont en mesure, en mettant en commun leurs capitaux, d’exercer des activités génératrices de

revenus et d’organiser leur travail d’une manière flexible. Tout cela leur a permis de gagner de la confiance en el-les, d’assumer des responsabilités professionnelles, de valoriser leurs compétences et d’améliorer leur niveau de vie à travers un revenu et en accédant à une vaste gam-me de services. Un exemple emblématique de ce phéno-mène est celui de SEWA qui est l’Association des Fem-mes indépendantes. Situé dans l’état indien du Gujerat, cette organisation donne la possibilité à des femmes pauvres qui travaillent à leur compte de gagner un salai-re à travers leur travail ou leur petite entreprise. SEWA rassemble une branche coopérative qui est composée principalement de coopératives de production, d’artisanat et de services. Les femmes peuvent devenir membre d’une coopérative dans des secteurs aussi diversifiés que la protection de l’eau, la fabrication de produits laitiers, l’artisanat, la reforestation, la culture du sel ou bien en-core la construction et l’engagement de celles-ci est adapté aux conditions locales. Ceci donne la possibilité aux femmes membres dans les communautés locales de créer leur propre entreprise, développer un pouvoir de négociation collectif et créer des sources alternatives d’emploi, et ainsi, d’assurer une sécurité de subsistance à leurs familles. SEWA a également une banque coopéra-tive et un plan d’assurance santé (pour plus d’informa-tions sur SEWA, lisez le numéro 1 de « Travailler Ensem-ble » d’avril 2009 et le site Internet de SEWA à l’adresse www.sewa.org).

Pour mieux comprendre l’importance des coopératives de travail associé dans l’autonomisation des femmes, Palo-ma Arroyo explique qu’en Espagne, environ 49 % des travailleur des coopératives sont des femmes. Elles ob-tiennent des niveaux de leadership auxquels elles n’au-raient pas accès dans les entreprises traditionnelles et elles suivent des formations en plus grand nombre que les hommes. Evoluant sans aucune discrimination en matière d’horaire ni de salaire, autant dans les coopérati-ves de femmes que dans les coopératives mixtes, elles font de l’égalité des genres une réalité. ◊

Journée Internationale des Coopératives : « L’entreprise coopérative autonomise les femmes » Par José Miguel Botello, CICOPA / CECOP

Le message de l’ACI sur la Journée Internationale des coopératives est disponible à l’adresse  : http://www.ica.coop/activities/idc/2010.html  

L’

Page 7: Travailler Ensemble Número 3 - Juillet 2010

TRAVAILLER ENSEMBLE ‐ NUMÉRO 3 ‐ JUILLET 2010  7

United Steelworkers, l’union des travailleurs sidérurgiques des Etats-Unis et du Canada, et Mondragón, la plus grande coopérative au monde, ont signé un accord de collaboration pour l’établissement de coopératives dans ce secteur en Amérique du Nord. En effet, la Uni-ted Steelworkers souhaite établir des coopératives qui adapteraient les principes de négo-ciation collective au modèle de travail associé de Mondragon.

Accord de collaboration entre Mondragon

et United Steelworkers Par Hazel Corcoran, Fédération Canadienne des Coopératives de Travail

Le président de l’USW, Leo W. Ge-rard a déclaré : « Nous voyons dans cet accord un premier pas histori-que vers une transformation des coopératives en un modèle d’entre-prise viable, capable de créer de l'emploi décent, de renforcer les capacités et responsabiliser les tra-vailleurs, et de soutenir les commu-nautés des Etats-Unis et du Canada. Trop souvent, nous avons vu Wall Street réduire les entreprises à des coquilles vides, en drainant leurs liquidités et leurs actifs, et vider les communautés de leur substance en dispersant les emplois et en éri-geant des barrières autour des usi-nes. Nous avons besoin d’un nou-veau modèle d’entreprise qui investi-rait dans les travailleurs et les com-munautés ».

Josu Ugarte, président de Mondragón International a ajouté : « Ce que nous annonçons aujourd'hui est très important - l'association de la plus grande coopérative de travailleurs industrielle au monde avec l'une des unions de travailleurs les plus progressistes et avant-gardistes, dans le but de travailler ensemble pour que cette combinaison de savoir-faire et de visions complémentaires puisse transformer les pratiques industrielles en Amérique du Nord ».

Soulignant les différences entre « plans d’actionnariat salarié » (ESOP) et « unions coopératives », Gerard a déclaré : « Nous avons beaucoup d’expériences avec les ESOP, mais avons remarqué qu'il ne se passe guère de temps avant que Wall Street mette les travailleurs de côté et reprenne le contrôle. Nous voyons le modèle coopératif de Mondragón, avec le principe d'appropriation «un travailleur, une voix», comme un moyen de re-donner des responsabilités aux travailleurs et faire en sorte que les entreprises rendent des comptes à Main Street [« la rue »], plutôt qu'à Wall Street ».

USW et Mondragón ont tous deux souligné les valeurs communes qui présideront à cette collaboration. Ugarte a commenté : « Nous nous sentons inspirés de faire ce premier pas basé sur des valeurs partagées avec USW, qui a démontré plutôt deux fois qu'une que le futur appartient a ceux qui relient leurs valeurs et leurs visions aux personnes, et qui place ces trois éléments au-dessus de tout ». D’autre part, Gerard a ajouté « Nous nous réjouissons de travailler avec Mondragón, car nous partageons des valeurs, comme le fait que le travail doit renforcer les capacités des travailleurs et soutenir les familles et leurs communautés ».

Dans les mois à venir, USW et Mondragón réfléchiront à des opportunités pour mettre en œuvre cette appro-che hybride d’union coopérative en partageant les valeurs communes mises en avant par USW et Mondragón et en opérant dans des segments industriels dans lesquels les deux organisations sont présentes. ◊

Le texte complet de cet accord est disponible sur l’adresse Internet : http://assets.usw.org/Releases/agree_usw_mondragon.pdf (en anglais)

L’intérieur d’une usine de Mondragón

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TRAVAILLER ENSEMBLE ‐ NUMÉRO 3 ‐ JUILLET 2010  8

endant plus de 60 ans, l’ancienne entreprise

Dinan SACIFIyA, a été le leader dans le secteur

de la fabrication de récipients en Argentine et en

Amérique Latine, avec une production de plus de 700

tonnes par mois dans ses 7 usines de plus de 400

salariés. Mais pendant la crise de 2001, cette entre-

prise s’est endettée à un niveau élevé, ce qui l’a obli-

gée à se déclarer en cessation de paiements. Elle a

ensuite été rachetée par la société chilienne Edelpa,

S.A., qui a lancé un processus de restructuration en-

trainant le licenciement de plus de 120 travailleurs, la

vente de quatre de ses sept usines et la réduction du

volume de production à 350 tonnes par mois. En mai

2008, l’entreprise a été transmise au groupe Hurling-

ton, S.A., qui a poursuivi la réduction de la produc-

tion : de 326 tonnes par mois en février 2009, elle

est passée à 85 tonnes en août 2009 pour aboutir à

une production égale à zéro en octobre 2009, et ce,

malgré la forte demande (1.400 tonnes/mois) : l’en-

treprise a donc été littéralement liquidée.

Après de longs mois de négociations ardues entre

l’entreprise et les travailleurs, ces derniers ont pu

obtenir gain de cause grâce à l’intervention du Minis-

tère du Travail argentin. Le 18 décembre 2009, un

accord intégral a ainsi été signé avec le Groupe Hur-

lington S.A., propriétaire de l’entreprise. Cet accord

inclut le paiement des salaires dus à tous les travail-

leur, un contrat de garantie pour trois ans entre l’en-

treprise et la coopérative qui permettra l’utilisation

des deux usines de production, des machines et de

l’équipement de production ; il comprend également

le transfert d’un ensemble de biens immobiliers et de

machines pour une valeur de plus de 12 millions de

pesos argentins en compensation de l’indemnisation

des travailleurs ainsi que la cession d’un ensemble de

matières premières.

Ce processus a bénéficié du soutien de l’Institut Na-

tional du Monde Associatif et de l’Economie Sociale

(INAES) et du Secrétariat au Commerce Intérieur ar-

gentin. Ces 2 organismes ont prodigué des conseils à

la nouvelle direction en matière de gestion et ont me-

né les négociations avec les institutions financières,

les fournisseurs et les principaux clients. Cette méca-

nique a permis de relancer la production et d’obtenir

les bons de commande nécessaires afin de garantir la

rentabilité et la réinsertion de la coopérative dans le

marché. D’autre part, la nouvelle entité, soutenue par

Red Gráfica Cooperativa, un groupe coopératif dont

elle fait partie depuis sa création, a organisé une sé-

rie de formations pour ses membres sur les particula-

rités et les caractéristiques de l’entreprise autogérée

sous forme coopérative. Cette initiative amorce ainsi

le passage de l’ancien modèle de gestion basé sur la

relation patron-salarié à un modèle basé sur la parti-

cipation, la responsabilité, la démocratie et le com-

promis, dans le cadre d’un projet partagé par tous les

membres et garantissant la qualité du service et la

satisfaction du client. ◊

A M É R I Q U E L A T I N E

Argentine

Des travailleurs sauvent leur entreprise Par José Orbaiceta, FECOOTRA

Les ex-travailleurs de l’usine de fabrication de récipients « Dinan SACIFIyA » ont re-pris leur entreprise et l’ont transformée en coopérative de travail pour la renommer « Envases Flexible Ltda. ». Celle-ci se trouvait dans une situation de crise depuis 2001 et elle avait été rachetée par différentes sociétés privés. L’inauguration a eu lieu le 17 mars 2010.

Inauguration de la cooperative / Red Gráfica

P

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TRAVAILLER ENSEMBLE ‐ NUMÉRO 3 ‐ JUILLET 2010  9

elon la Confédération des Coopératives de Colombie

(Confecoop), le mouvement coo-pératif colombien est né au dé-but du XXe siècle, quand le gé-néral Rafael Uribe intègre l’idée coopérative dans la pensée so-cialiste, démocratique et huma-niste. En 1916, le Ministre de l’Agriculture et du Commerce, Benjamín Herrera, présente, de-vant le Congrès de la Républi-que, le premier projet coopératif. Cependant, ce n’est qu’en 1931 que le Congrès adopte la premiè-re loi sur les coopératives. Le mouvement coopératif prend alors son essor: en 1933, le pays compte 4 coopératives avec 1807 membres ; en 1962, il en existe 759 avec plus de 450 000 membres.

En 1959, la première association de coopératives dans le pays voit le jour, l’Union Coopérative Na-tionale de Crédit (UCONAL), et en 1960, l’Association Colombienne des Coopératives (ASCOOP), actuel membre de CICO-PA, est créée.

Au cours des dernières années, les chiffres indiquent que le secteur coopératif colombien se porte bien. En 2008, d’après Confecoop, le nombre total de coopérati-ves, tous secteurs confondus, atteignait 7’833, avec 4'473’514 associés, ce qui représente une augmenta-tion de 11% du nombre d’associés par rapport à l’an-née 2007. De plus, on estime qu’entre 2001 et 2007, la croissance totale du nombre de coopératives a été de 323% (données d’ASCOOP). En ce qui concerne les coopératives de travail associé, les données ne sont pas négligeables non plus : ces entreprises sont au nombre de 3903 comptabilisant 537’959 associés. Quant à la répartition selon le sexe, les hommes repré-sentent environ 60% des associés, et les femmes, 40%.

Cependant, si l’on regarde au-delà des seules statisti-ques, on s’aperçoit que la réalité est loin d’être aussi rose que l’on pourrait le penser. « En réalité, ce nom-bre élevé de coopératives traduit une explosion du nombre de coopératives de travail associé qui n’appar-

tiennent pas au secteur de l’économie sociale et solidai-re. Il s’agit en fait d’entreprises qui se sont converties en coopératives pour ne pas avoir à payer les charges exigées par l’Etat », confie Carlos Paz, gérant de la coopérative Pollos Vencedor et président du Comité des Coopératives de Travail d’ASCOOP. On estime que seu-les 1000 coopératives de travail associé sur les 4000 annoncées dans les chiffres officiels seraient de « vraies » coopératives : les 3000 restantes sont en fait de « fausses » coopératives, à savoir des instruments servant à exploiter une main-d’œuvre bon marché, dont les entrepreneurs, mais également l’Etat colom-bien, profitent, notamment dans le secteur de la santé.

Face à ces travers, le secteur coopératif s’est organisé et a obtenu en juillet 2008 qu’une loi qui définit les conditions à remplir pour pouvoir prétendre au statut de coopérative (loi 1233) soit adoptée. Cette nouvelle norme définit les conditions minimales à respecter, comme, par exemple, « l’impossibilité pour un travail-leur associé d’avoir un salaire inférieur au SMIC », ou « l’interdiction de répercuter le coût des impôts sur les travailleurs ».

Colombie

Les coopératives de travail associé sont en augmentation … les vraies, mais aussi les fausses Par José Miguel Botello, CICOPA / CECOP

Des travailleurs dans la coopérative avicole Pollos Vencedor

Actuellement, le secteur coopératif en Amérique Latine, et les coopératives de travail associé en particulier occupent une place de plus en plus importante et centrale dans l’économie de cette région du monde. Cependant, le secteur a ses particularités et doit surmonter des obsta-cles qui varient selon les pays. Focus sur un pays où la coopération de travail associé est pré-sente depuis le début du siècle : la Colombie.

(suite page suivante)

S

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Brésil

Un moment décisif pour le mouvement coopératif brésilien

Par José Miguel Botello, CICOPA / CECOP

D’autre part, Carlos Paz, gérant de coopérative, signale que l’adoption de cette nouvelle loi est aussi une «réponse du gouvernement colombien aux exigences posées par les Etats-Unis » pour l’intégration de la Co-lombie dans le Traité de libre-échange bilatéral. Les syndicats américains ont fait remarquer à juste titre que les prix exercés par ces « fausses » coopératives étaient trop peu élevés et que par conséquence, elles pratiquaient une concurrence déloyale. L’entrée en vi-gueur de ce traité est attendue pour 2012. Comme le souligne le gérant de Pollos Vencedor, ses possibles effets sur les coopératives de travail dépendront des

secteurs d’activité, ceux-ci étant vastes et divers. Pour Carlos Paz, « s’il peut y avoir des bénéfices pour les coopératives du secteur de la santé, il peut y avoir des effets négatifs sur celles du secteur avicole ».

Quant à la crise mondiale actuelle, la Colombie ne l’a pas ressentie aussi fortement que les pays européens ou d’Amérique du Nord : au cours de l’année 2009, la croissance du PIB a été positive (+1,3%), et pour cette raison, il s’agit plutôt d’une décélération de la croissan-ce. Pour leur part, les coopératives ont produit d’excel-lents résultats affirme Carlos Paz. ◊

ujourd’hui, il est difficile d’établir des chiffres fiables qui donnent une vue d’ensemble de la situation des coopératives au Brésil. C’est le cas en particulier

pour les coopératives de travail associé pour diverses raisons. La principale est sans doute le manque de don-nées actualisées et fiables : les derniers chiffres officiels à disposition datent de 2005, et proviennent de l’Organi-zação das Cooperativas Brasileiras (OCB), qui n’englobe pas toutes les coopératives du pays. De plus, le cas du Brésil présente la particularité de voir les coopératives de travail associé divisées en deux catégories distinctes : d’un coté les coopératives « de travail », et de l’autre, les coopératives « de production », les premières fournissant des services ou de la main-d’œuvre, les deuxièmes pro-duisant des biens et ayant la propriété ou le contrôle di-rect sur les moyens de production.

Les dernières statistiques disponibles indiquent qu’il exis-te au Brésil 7518 entreprises coopératives, comprenant 6'791’054 membres. Parmi celles-ci, 1994 sont des coo-pératives de travail associé qui ont 425’181 membres et 173 sont des coopératives de production qui ont 17’569 membres. Selon Geraldo Balod, président de la confédé-ration de coopératives COOTRABALHO, organisation membre de CICOPA, en dépit du fait qu’il n’existe pas de données fiables, il est certain que le nombre de coopéra-tives de travail a diminué de manière constante depuis 2005. Cela serait du à la lutte contre la fraude dans le secteur coopératif que le gouvernement fédéral est en train de mener. Cette lutte a des effets négatifs sur les coopératives car le gouvernement brésilien considère nombres d’entre elles comme frauduleuses, alors qu’en réalité, elles sont légales.

Comme on l’a donc souligné, un des graves problèmes

auxquels doivent faire face les coopératives de travail associé au Brésil est l’apparition de fausses coopératives appelées aussi “gatoperativas” (« chat-pératives »). D’a-près UNISOL, un autre membre brésilien de CICOPA, la prolifération de ce type d’entreprises, qui ne sont que des intermédiaires pour la fourniture de main-d’œuvre à bas prix, s’est produite dans les années 90, lorsque le travail a été « flexibilisé ». Ces coopératives frauduleuses repré-sentent une vaste proportion du nombre total des coopé-ratives de travail susmentionné, mais il n’existe malheu-reusement pas de données officielles.

Actuellement, le secteur coopératif brésilien est régulé par la loi 576/1 de 1971 : il s’agit d’une législation adop-tée par la dictature militaire. Pour COOTRABALHO, cette norme est obsolète. Elle régule le mouvement coopératif comme un ensemble homogène et elle omet ainsi les particularités des coopératives de travail associé. La confédération souligne également que cette loi ne traite que des aspects purement formels (constitution, statuts, etc.). Le secrétaire général d’UNISOL, Marcelo Rodrigues, évoque la nécessité d’adopter le nouveau projet de loi sur les coopératives de travail associé. Celui-ci permet-trait d’améliorer la situation de ces coopératives à plu-sieurs titres: elle permettrait la participation de person-nes juridiques dans les coopératives, réduirait le nombre minimum d’associés (qui varie aujourd’hui entre 7 à 20), interdirait la seule fourniture de main-d’œuvre par une coopérative, tendrait vers une professionnalisation de la gestion en rendant le conseil d’administration obligatoire, soutiendrait la durabilité financière à travers la création des Certificats de Crédit Coopératif, et adopterait la liber-té de représentation dans certaines circonstances, com-me par exemple, la liberté de créer des entités nationa-

Les débuts du mouvement coopératif au Brésil remontent à très loin : un embryon de mouvement

est apparu à la fin de la colonisation portugaise, quand le Movimento Cooperativista Brasileiro fut

crée à la fin du XIXe siècle, avec le soutien des fonctionnaires, des militaires, des professions libé-

rales et des ouvriers. Ce mouvement s’étend d’abord aux zones urbaines. Ainsi, la première coopé-

rative connue est établie dans la ville d’Ouro Preto en 1889, sous le nom de Sociedade Econômica

dos Funcionários Públicos de Ouro Preto. Ensuite, ce type d’entreprises se répand dans les autres

villes brésiliennes.

A

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TRAVAILLER ENSEMBLE ‐ NUMÉRO 3 ‐ JUILLET 2010 11

les. L’espoir aujourd’hui est que cette nouvelle loi sur les coopératives de travail associé soit adoptée sous peu : le projet de loi 131/2008 est déjà passé devant la chambre des députés, puis par le Sénat avec quelques amende-ments, et doit maintenant être soumis de nouveau au vote des députés en raison des amendements du sénat. Il devra ensuite être ratifié par le président.

Par ailleurs, des élections législatives, régionales et prési-dentielles auront lieu en automne 2010. L’actuel prési-dent, Luiz Inácio Lula da Silva ne s’y représentera pas. La nouvelle loi sur les coopératives sera-t-elle adoptée et ratifiée avant les élections ? Les sentiments des uns et des autres sont mitigés. Le président de COOTRABALHO, Geraldo Balod, affirme que la tâche ne sera pas aisée, puisqu’à l’heure actuelle, les politiciens se concentrent entièrement sur la campagne électorale. Marcelo Rodri-gues, directeur d’UNISOL, fait remarquer pour sa part qu’un consensus existe dans les chambres législatives fédérales. Il pense donc que le projet sera finalement adopté mais peut-être pas avant la fin 2010.

D’autre part, comme cela a déjà été mentionné, la loi en vigueur sépare les coopératives de travail associé en deux types de coopératives : les coopératives « de tra-vail » et « de production ». Dans la nouvelle loi, cette division ne sera pas maintenue de la même façon : il y aura d’un côté les coopératives de travail « de produc-tion », qui « à travers le travail collectif produisent des biens tangibles » ; et de l’autre, les coopératives de tra-vail « de services ».

Concernant la situation du mouvement coopératif face à la crise, UNISOL souligne que les entreprises ont été af-fectées entre la fin 2008 et le premier semestre 2009. Depuis lors, un processus de reprise s’est enclenché grâ-

ce notamment aux mesures gouvernementales. Selon COOTRABALHO, les coopératives, à l’instar des entrepri-ses « classiques », ont subi les effets de la crise, à l’ex-ception des coopératives de travail à caractère social. Pour UNISOL, la bonne résistance du secteur est due à son haut degré de flexibilité qui lui permet de « redistribuer » les coûts internes en diminuant par exemple le salaire des membres afin de préserver l’em-ploi et de maintenir l’activité économique pendant les périodes de crise. Il est également important de signaler que les fonds de réserve des coopératives représentent un soutien financier et économique important pour ces entreprises. Pour autant, la crise ne s’est pas accompa-gnée d’une augmentation des récupérations d’entreprises par leurs travailleurs sous forme de coopératives. Ces démarches étaient monnaie courante dans les années 1990, mais l’augmentation des conversions d’entreprises en coopératives depuis 2008 n’est pas très important si l’on en croit UNISOL.

En outre, le Brésil, comme le Paraguay, l’Argentine et l’Uruguay, appartient au système d’intégration régional MERCOSUR, mais il reste encore du chemin à parcou-rir en termes de coopération du mouvement coopératif: ceci vaut pour toute l’Amérique Latine, nous confie COO-TRABALHO. Pour sa part, UNISOL nous révèle que l’Union Européenne cofinance actuellement un projet de coopé-ration technique soutenant la création d’un Réseau du Sud qui vise à l’échange d’expériences sur la coopération de travail associé entre les pays du MERCOSUR, et le développement de contacts réguliers avec les initiatives mises en œuvre au Pérou, en Bolivie, au Venezuela et en Colombie. ◊

Coopérative de travail associé brésilienne dans le secteur de la métallurgie

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TRAVAILLER ENSEMBLE ‐ NUMÉRO 3 ‐ JUILLET 2010  12

e groupe PPE du Parlement Européen (Groupe du Parti Populaire Européen) a organisé le 14 Avril un

forum d’échange sur la “Nouvelle Politique pour l’Emploi” en collaboration avec le Commissaire Européen pour l’Em-ploi et les Affaires sociales, László Andor, les membres du Parlement Européen, les syndicats, Business Europe et les différentes parties prenantes.

CECOP a profité de cette occasion pour souligner que la durabilité des emplois devrait être intégrée dans les politi-ques européennes de l’emploi et ne devrait pas être consi-dérée seulement sous l’angle de l’emploi ou des politiques sociales, mais également sous l’angle du développement économique à long terme de l’entreprise : en effet, le dé-veloppement économique d’une entreprise sans aucune continuité des emplois est difficile à atteindre. Les mesures en faveur du maintien d’emplois et des compétences au sein des entreprises devraient avoir une place centrale dans les politiques de l’emploi.

Au sein du réseau européen CECOP, des centaines d’entre-prises menacés de disparaitre ont été sauvés durant ces dernières années au travers la reprise par les travailleurs et se sont développés sous forme coopérative. CECOP a également rappelé le Parlement Européen et la Commis-sion Européenne que les coopératives ont prouvé une meilleure résistance face à la crise comparé à d’autres en-treprises de taille identique, actives dans les mêmes sec-

teurs et situés dans les mêmes régions, comme cela a été démontré à travers les enquêtes menées parmi les mem-bres de CECOP en 2009 et en 2010.

Le Commissaire Européen à l’Emploi László Andor a recon-nu lors de la réunion que les coopératives se sont mon-trées innovantes en temps de crise et que certaines leçons pourraient être tirées de leur expérience. Il a également souligné que les banques coopératives avaient prouvés une stabilité supérieure face aux banques conventionnel-les. ◊

est ce 13 janvier 2010 que Michel Barnier, le nou-veau commissaire français désigné au Marché in-

térieur et Services a été auditionné par la Commission du « Marché intérieur et de la protection des consom-mateurs » et la Commission des « affaires économiques et monétaires » du Parlement européen.

Lors de son audition, Michel Barnier a déclaré que l’une de ses priorités sera de mettre le citoyen, les hommes et les femmes, au cœur du marché européen, et à cet égard, il a déclaré vouloir se penché sur le modèle des coopératives ou des mutuelles.

Il a également souligné la possibilité d’un « social busi-ness act » pour mieux accompagner les entreprises qui, tout en faisant un profit, luttent contre l’exclusion. ◊

Union Européenne

László Andor, Commissaire Européen à l’Emploi: « Les coopératives se sont montrées innovantes en temps de crise »

Par Diana Dovgan, CICOPA / CECOP

L

Le nouveau commissaire au Marché intérieur veut se pencher sur le modèle coopératif

Par Olivier Biron, CICOPA / CECOP

C’

László Andor, commissaire européen à l'emploi,

aux affaires sociales et à l'inclusion

Michel Barnier, Comissaire Marché intérieur et Services de l’UE

E U R O P A

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epuis 2006 la DG Entreprises et industrie de la Commission européenne organise les European

Enterprise Awards pour identifier et récompenser l'ex-cellence parmi les autorités publiques dans la promo-tion de l'esprit d'entreprise et de la petite entreprise au niveau national, régional et local. Une liste de 12 candi-dats dans 5 catégories sélectionnés parmi plus de 330 projets nationaux a été élaborée pour les European En-terprise Awards 2010.

Un projet coopératif fait partie de cette sélection dans la catégorie “Entrepreneuriat responsable et d’intégra-tion sociale” qui reconnaît des actions régionales ou locales promouvant la responsabilité sociétale et des procédures de gestion durable.

Le Centre coopératif de la région de Tampere est actif depuis 1998 et a promu l'esprit d'entreprise coopératif par la consultance, l'enseignement et la dissémination de l'information. Toute personne qui envisage de fonder

une coopérative peut obtenir des conseils pratiques et un appui moral dès les toutes premières étapes du pro-cessus d'établissement. On offre aux nouvelles coopé-ratives toute l’expertise en tenant compte des indivi-dualités qui les constitueront.

Le Centre coopératif a multiplié par 300 le nombre des coopératives dans la région de Tampere au cours de ces 5 dernières années. Les coopératives fondées avec l'aide de Centre coopératif totalisent plus de 700 mem-bres. La signification sociale des coopératives est régio-nalement importante parce qu’elles créent des nou-veaux emplois et parce que les entrepreneurs déjà ac-tifs consolident leurs positions par la coopération. Les nouvelles coopératives apportent à leurs membres une protection tant financière que sociale et provoquent autour d’elles un effet multiplicateur positif. ◊

e mouvement coopératif de travail associé fran-çais dans son ensemble affirme son ambition de

développement dans tous les métiers et lance une nou-velle marque unique, claire et fédératrice. C’est lors du salon des Entrepreneurs, ce 1er février, que la CGScop (Confédération Générale des coopératives de produc-tion) a révélé la nouvelle marque et son identité visuel-le : celle-ci qui adopte le nom « Les Scop » reprend un nouveau logo et un slogan qui désigneront l’ensemble des entreprises ayant opté pour ce statut.

L’acronyme Scop, anciennement « Sociétés Coopérati-ves de Production », devient à présent « Sociétés Coo-pératives et Participatives ». Enfin, un slogan – « La démocratie nous réussit » - rappelle la gouvernance même des coopératives fondée sur la démocratie d’en-treprise. Il souligne autant la santé financière de ces entreprises que l’épanouissement de ceux qui y travail-lent.

Un nouveau site web est consacré à cette marque qui sert de base à un label qui rassemblera les coopérati-ves adhérentes à la CGScop et qui puisse s’inscrire dans leur communication.

La presse française s’est d’ailleurs faite écho de cette

nouvelle marque. Ainsi, le quoti-dien français « Le Monde » et le site internet du magazine « L’En-treprise » mette le modèle coo-pératif à l’honneur.

Dans son édition du 1er février, « Le Monde » souligne les résul-tats économiques supérieurs des coopératives en France par rap-port aux entreprises classiques mais aussi leur capacité à mieux résister à la crise.

Sur son site web, le magazine « L’entreprise » rappelle le mode de gouvernance participatif et démocratique des coopératives. L’article entend également souligner comment la reprise d’une entreprises par ses travail-leurs sous forme coopérative peut être une alternative à la fermeture d’une entreprise sans héritiers ou en crise.

Visitez le site internet consacré à cette nouvelle marque à l’adresse www.les-scop.coop! Vous pouvez également visiter le site de la Confédération générale des Scops à l’adresse www.scop.coop. ◊

Finlande

Promouvoir les coopératives en tant que modèle entrepreneurial moderne et flexible

Par Olivier Biron, CICOPA / CECOP

D

France

La CGScop dévoile sa nouvelle marque

Par Olivier Biron, CICOPA / CECOP

L

Pour plus d'information: http://www.osuustoimintakeskus.net

TRAVAILLER ENSEMBLE ‐ NUMÉRO 3 ‐ JUILLET 2010 13

Page 14: Travailler Ensemble Número 3 - Juillet 2010

TRAVAILLER ENSEMBLE ‐ NUMÉRO 3 ‐ JUILLET 2010  14

Quatorze travailleurs ont évité la faillite du plus grand atelier de construction mécanique de Saba-dell (Catalogne), en le transformant en coopérative. La reconversion est un exemple en termes d’appui institutionnel, mais surtout, un modèle de détermi-nation et de ténacité dont a fait preuve ce groupe de mécaniciens, afin de conserver leurs emplois en pleine situation de crise.

Quand Paco Delgado a su que l’atelier de construc-tion mécanique où il travaillait allait fermer ses por-tes, il a non seulement décidé de maintenir son em-ploi, mais également de sauver l’entreprise aux cô-tés de ses collègues. Un visionnaire? « Pas du tout. Je ne suis qu’un mécanicien. Ma seule ambition était de ne pas me retrouver sans emploi », confie l’actuel président de la coopérative. L’idée d’une entreprise détenue par tous les travailleurs est ve-

nue d’un des collègues qui connaissait la formule coopérative. Les candidats repreneurs se sont im-médiatement renseignés sur les procédures de transformation et de création à suivre. Cinq mois plus tard, Mec 2010 est née. Sur les 33 ex-travailleurs, 14 sont devenus propriétaires de la coopérative nouvellement créée. Pour cela, ils ont utilisé la totalité de leurs allocations de chômage1 afin d’acquérir l’outil de travail et de s’installer dans un nouvel entrepôt de 1000m². Les anciens travail-leurs, devenus aujourd’hui co-entrepreneurs, espè-rent tourner à plein rendement avant la fin de l’an-née. ____ 1 En Espagne, il est possible de percevoir la totalité des allocations de chômage en une seule fois plutôt que de les percevoir sur une base mensuelle.

Espagne

Les coopératives, une solution à la crise économique

Par Mariana Vilnitzky, COCETA

L’économie mondiale traverse actuellement une période de tourment : les fermetures d’entreprises et les licenciements collectifs sont presque devenus monnaie courante et le chômage, en particulier en Espagne, a augmenté de manière importante. Qu’à cela ne tienne, des travailleurs, contraints par les circonstances, ont décidé d’entreprendre et de racheter les sociétés qui les employaient ou d’en créer de nouvelles, notamment dans le secteur de l’économie sociale et principalement des coopératives de travail associé. Voici quelques exemples de ces reconversions spontanées et réussies !

Un travailleur de Mec 2010 / COCETA

QUATORZE MÉCANICIENS PRENNENT EN MAIN

LES RÊNES DE LEURS VIES

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TRAVAILLER ENSEMBLE ‐ NUMÉRO 3 ‐ JUILLET 2010 15

Quand la multinationale Koxka décide de pré-senter un plan de licenciement collectif visant à renvoyer 10% du personnel, Josu Tariñe Alórriz, Juanjo Garro Roldán et Juan Antonio Rodríguez, qui partagent la même passion pour la bière, décident de créer leur propre marque.

Les trois hommes ont depuis longtemps éla-boré leur propre système de brassage : « Nous avions remarqué que notre bière plai-sait beaucoup et certaines personnes ont commencé à nous encourager à nous y consa-crer à temps plein, mais nous avions des em-plois stables à l’usine et sauter le pas nous aurait couté beaucoup », précise Josu Taniñe.

Après le choc de leur licenciement, les 3 amis prennent la balle au rebond et font appel à la Chambre de Commerce pour connaitre la marche à suivre afin de créer leur propre en-treprise. On leur conseille alors de s’adresser à l’organisation pour l’économie sociale « Anael », car c’est un secteur qui semble mieux convenir à leur projet. Dès lors que les trois hommes prennent connaissance de l’op-tion coopérative, ils réalisent que c’est exacte-ment ce qu’il leur faut. « Nous avons bénéficié d’un accompagnement dans nos démarches » explique Tariñe. Aujourd’hui, les travailleurs sont égaux lorsqu’il s’agit d’assumer des responsabilités ou de pren-dre des décisions. « C’est tout le contraire de ce à quoi on nous avait habitués dans le passé », concluent les nouveaux entrepreneurs.

NAPARBIER: DU LICENCIEMENT COLLECTIF À LA

FABRICATION DE BIÈRE SOUS LA FORME COOPÉRATIVE

Membres de la coopérative Naparbier/ COCETA

es coopératives de travail associé ont montré qu’elles étaient beaucoup plus performantes en période de

crise dans le maintien d’emplois que d’autres formes en-trepreneuriales. Alors que le chômage continue d’augmen-ter en Espagne, il se maintient dans les coopératives et il augmente même dans certains secteurs comme celui des services d’éducation et des services aux personnes. La plupart du temps, les coopératives de travail ne procèdent pas à des licenciements en période de crise ; certaines font des ajustements de salaire, redistribuent le travail diffé-remment et mettent en place des systèmes innovateurs pour ne licencier personne. Selon les données de COCETA, pendant le premier semestre 2009, le nombre de coopéra-tives de travail créées dépassaient de plus de 10 unités les chiffres de l’année précédente. Tendance qui, pour certai-nes communautés autonomes comme celle de Murcia, se confirme où en 2009, 190 coopératives de travail associé y

ont été créées. De plus, alors que partout en Espagne, 24% des entreprises ont fermé leurs portes, ce nombre n’était que de 6% dabs les coopératives de travail associé.

Revendications du secteur

L’Assemblée de Coceta était l’occasion pour appeler à des mesures et des actions tant au niveau central qu’au niveau des communautés autonomes. Coceta demande que l’on permette aux coopératives d’avoir un accès plus facile aux financements; de pouvoir générer des bénéfices et de ren-dre possible les nouveaux investissements et la circulation commerciale régulière. Les coopératives de travail associé exigent également des changements dans la législation en matière fiscale, et en particulier, pour que les charges qu’elles doivent supporter à cause de la dotation des fonds obligatoires, à caractère impartageable, s’adaptent à d’au-tres figures similaires, comme les PME et les micro-PME. ◊

L’emploi augmente dans les coopératives de travail associé

Par Mariana Vilnitzky, COCETA

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Pour la première fois dans l’histoire du mouvement coopératif espagnol, un chef de gouver-nement se réunit avec les coopératives ainsi qu’avec l’économie sociale dans son ensemble. C’est ce qu’a fait José Luis Rodríguez Zapatero à Madrid, au mois de février dernier. Cette rencontre marque un pas très important pour la reconnaissance de l’économie sociale en général, et du coopérativisme en particulier.

u cours du séminaire « Economie sociale : entreprises compétitives et soutena-

bles engagées pour l’emploi» organisé par la Confédération Espagnole des Entreprises de l’Économie Sociale (Cepes) à la fin février à Ma-drid, le chef du gouvernement, José Luis Rodrí-guez Zapatero, a affirmé que les coopératives étaient un « modèle novateur et remarquable de l’économie sociale, de large portée et qu’il constitue également une approche pleine de possibilités ».

José Luis Zapatero a également déclaré que les besoins du secteur seraient pris en compte dans le projet de loi sur l’économie soutenable, qui sera débattu au Congrès des députés, ainsi que dans la loi sur l’économie sociale, qui de-vrait être présentée avant l’été.

« Nous voulons qu’elle soit une loi pionnière pour l’économie sociale au niveau européen, et je voudrais souligner quatre éléments qui la concernent », a expliqué José Luis Zapatero. « Elle définira un cadre légal pour l’économie sociale, sur la base de ses caractéristiques tout en acceptant sa diversité ; cette loi reconnaîtra l’importante contribution du secteur au développement socio-économique, à la création de postes de travail et à l’emploi durable, qui caractérise l’économie sociale, et établira les compromis et mesures pour que les pouvoirs publics l’encouragent ; troisièmement, elle définira les canaux de dialogue entre les organisa-tions représentatives de l’économie sociale et les administrations publiques ; et quatrièmement, elle ira vers la réduction des obstacles bureaucratiques et administratifs qui rendent difficile le développement de l’activité de ces entreprises ».

La Présidence espagnole et l’économie sociale en Europe

Pour le chef du gouvernement, « l’économie sociale a été très importante dans la phase d’expansion économi-que et sera très importante pour surmonter la crise. Ses entreprises englobent l’esprit d’entreprise, le risque, l’imagination, mais aussi la responsabilité et le compromis. Ici réside sa force.

Dans son discours, le chef du gouvernement a souligné son engagement pour la promotion de l’économie so-ciale en Europe : « nous allons profiter de notre Présidence pour promouvoir et mettre en valeur l’économie sociale », a-t-il affirmé, avant d’ajouter : « nous avons une occasion excellente pour cela : la Conférence Euro-péenne de l’économie sociale, qui sera célébrée en mai, à Tolède. Nous voulons qu’elle soit une grande ren-contre entre les représentants de l’économie sociale et du tiers secteur, les représentants des gouvernements européens, latino-américains et des Communautés Autonomes, des membres du Conseil pour le Développe-ment de l’économie sociale, des experts et les acteurs sociaux. L’économie sociale représente en Europe 10% des entreprises et 6% de l’emploi total ; deux millions d’entreprises et presque 20 millions de travailleurs. Lors de la rencontre à Tolède, il faudra mettre en évidence la capacité de l’économie sociale à contribuer au déve-loppement d’un modèle de croissance soutenable, plus sain et plus productif dans l’ensemble de l’Union Euro-péenne ».

La conférence Européenne de Tolède sur l’économie sociale a eu lieu les 6 et 7 mai dernier sous la Présidence espagnole de l’Union Européenne. Les conclusions de la conférence mettent en lumières le fait que les entre-prises d’économie sociale sont des acteurs du marché qui contribuent à la construction européenne dans un monde globalisé. A ce titre, on y souligne la nécessité de créer, à partir de l’Union européenne et des États membres, des mesures générant un cadre favorable au développement des entreprises d’économie sociale dans leurs multiples expressions, et notamment pour les coopératives. ◊

Zapatero: «Les coopératives constituent un modèle novateur et plein de possibilités de l’économie sociale»

Por Mariana Vilnitzky, COCETA

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José Luis Rodríguez Zapatero, Presidente del Gobierno de España / CEPES

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n 1986, la première loi visant à réguler les « Sociedades

Anónimas Laborales » a été adop-tée. A cette époque, elles étaient des sociétés anonymes dont 51% des actions étaient détenues par les travailleurs, qui devenaient de fait des associés.

Ce modèle spécifiquement espa-gnol a permis de résoudre les cri-ses entrepreneuriales de cette époque alors que les problèmes économiques obligeaient beaucoup d’entreprises à fermer leurs por-tes, surtout dans les secteurs in-dustriels et de production. Ces en-treprises ont joué un rôle de re-dressement du tissu entrepreneu-rial et de l’emploi.

Cependant, dans la période qui suivit, le secteur organisé autour de la Confederación Empresarial de Sociedades Laborales (Confesal) s’est rendu compte de la nécessité de reformuler la loi afin de rendre ce modèle entrepre-neurial plus dynamique et plus flexible. L’idée étant qu’il devait non seulement permettre la repri-se d’entreprises et le maintien des emplois mais qu’il devait aussi at-tirer de nouvelles formes entrepre-neuriales. Ainsi, en 1997, la loi sur les « Sociedades Laborales » fut promulguée avec le soutien du secteur, et dont la principale inno-vation fut la création de ce qui est connu en tant « sociedad limitada laboral». Il s’agit de sociétés cons-tituées au minimum de trois mem-bres, où aucun ne peut détenir plus de 33% du capital social, et dont le capital doit être d’au moins 3.000 euros au moment de la constitution.

Ce type de sociétés a connu un succès rapide. A l’exception des deux dernières années de crise, les chiffres démontrent la capacité de ces entreprises à créer de l’emploi

et de la richesse. Entre 1996 et 2006, 14.957 entreprises et 77. 383 postes de travail ont été créés. Cela correspond à une augmentation du nombre d’entreprises de 282% et du volume de l’emploi de 146%.

En 2009, le secteur des SAL en Espagne repré-sente 17.000 entreprises et 100.000 travailleurs ; son volume d’affaires s’é-lève à 16 milliards d’eu-ros au cours de la derniè-re année fiscale. Cepen-dant, il faut noter que le secteur a subi un recul lent et modéré dans la création d’emplois depuis 2002, au moment même où l’emploi augmentait dans l’éco-nomie traditionnelle. Confesal ex-plique que cette situation est due aux carences de la loi sur les « Sociedades Laborales », et no-tamment, au manque d’éléments qui incitent les travailleurs à deve-nir membres. D’autre part, une proportion importante de la force de travail a adopté le statut d’in-dépendant, poussée par les politi-ques de développement en faveur de cette forme entrepreneuriale ainsi que par la promulgation d’u-ne législation sur le statut d’indé-pendant.

Une réforme de la loi pour les Sociedades Laborales

Cette situation, combinée à la crise économique, a poussé Confesal à exiger auprès du gouvernement l’adoption d’une loi qui libérerait les SAL des contraintes dans les-quelles elles ont été enfermées et qui rendrait à ce modèle d’entre-

prise le dynamisme sur lequel il a pu se reposer au cours de la der-nière décennie.

Le but est de stimuler l’accès des travailleurs à la propriété et la gestion de la société, en assurant la durabilité des emplois et le ren-forcement du tissu entrepreneu-rial. A cet égard, des incitations fiscales pour les travailleurs se-raient nécessaires pour que ceux-ci s’intègrent à l’entreprise en tant que membres; de même, des exemptions fiscales pour les entre-prises qui intègrent ces nouveaux associés seraient souhaitables.

Ainsi, le Gouvernement, à travers la Direction Générale de l’Écono-mie Sociale, du Travail Autonome et de la Responsabilité Sociale des Entreprises du Ministère du Tra-vail, a lancé le processus visant à promouvoir ce projet de réforme de la loi actuellement en vigueur.◊

Les «sociedades laborales», un forme entrepreneuriale créatrice d’emploi

Par José Luis Núñez, Confesal

La “Sociedad Laboral” Telecsal

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Pour plus d’informations : http://www.confesal.es

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Mondragon excelle en matière de gestion des connaissances

Par Olivier Biron, CICOPA / CECOP

e prix MAKE (Most Admired Knowledge Enterpri-ses) est un programme de recherche qui identifie

les organisations qui surpassent leurs pairs en matière de capital intellectuel et de création de richesses. MON-DRAGON a été reconnue comme l’une des 10 meilleures entreprises en matière de Gestion de la Connaissance à l’occasion de la 9ème édition du rapport MAKE.

Le rapport a été rédigé par Teleos, une firme indépen-dante engagée dans la recherche en matière de gestion de la connaissances et de capital intellectuel et par Know Network, une communauté de sociétés basée sur le web consacrée à l’évaluation et au partage des meil-leures pratiques de gestion des connaissances visant à optimiser la performance.

Le groupe Mondragon a été fondé en 1956 et est consi-déré comme l’un des exemples les plus prospères d’en-treprise détenue par ses travailleurs dans le monde. Le groupe MONDRAGON est divisé en 4 ères principales : la Finance, l’Industrie, le Détail et la Connaissance et il est aujourd’hui le groupe basque le plus important et le 7ème groupe d’Espagne.

Au niveau européen, c’est la deuxième fois que Mon-dragon remporte le prix MAKE. ◊

Performances de la Corporation Mondragon en 2009: les ventes ont baisse, l’emploi a également souffert mais moins que les ven-tes En 2009, le groupe Mondragon a été fortement affecté par la crise économique, en particulier dans plusieurs de ses produits industriels clé, comme les pièces pour l’industrie automobile, et dans la distribution. Ses ventes totales étaient de 14 780 billion Euro, soit 12% de moins qu’en 2008. Les emplois totaux ont été en moyenne de 85 000, une diminution de 8,3% par rapport à 2009, et une des plus importantes dans l’histoire du groupe. Cependant, il convient de souligner que la diminution des emplois a été inférieure à celle des ventes, ce qui est du en partie à des di-minutions volontaires de salaire et le replacement temporaire de centaine de travailleurs d’une coo-pérative à l’autre. De plus, un tiers de cette dimi-nution d’emplois a été récupérée en fin d’année, et pratiquement toutes les pertes nettes d’em-plois ont pris la forme de retraites anticipées.

es dirigeants de NAUWC (National Auditing Union of Worker Cooperatives) et de CPS (Coop Pro-duct Slovakia) se sont rencontrés le 25 mars 2010 dans les locaux de Pokrok, coopérative de tra-

vail associé établie à Zilina - Slovaquie, et ont discuté du développement d’une coopération mutuelle entre les coopératives de travail associé polonaises et slovaques, de la participation des coopératives polonaises de travail associé à l’exposition COOPEXPO et de l'expérience polonaise dans le domaine des coopératives sociales.

Ils ont également évalué l'impact de la crise sur les coopératives dans les deux pays. Ils ont noté que, tandis qu'en Slovaquie les coopératives de production ont connu une baisse des ventes et du chiffre d'affaires, une réduction des travailleurs et des membres ainsi qu’une situation critique dans les coopé-ratives de production occupant des personnes handicapées, en Pologne, la situation s’est améliorée. Les coopératives en Pologne ont adopté des mesures pour empêcher des licenciements économiques collec-tifs.

L'exposition Coopexpo, un autre des thèmes qui a été abordé, se tient en Slovaquie chaque année au mois d’août (cette année entre le 19 et le 22 aout) avec Agrokomplex, la plus grande foire agricole. La foire sera l'occasion pour l'organisation polonaise de tenir un séminaire sur les coopératives sociales, considérant qu’elle a acquis une expérience significative dans ce domaine.

Les possibilités de commerce et de coopération transfrontalière entre la Pologne et la Slovaquie, dans le domaine des produits, du tourisme et des séjours d’échange notamment, ont aussi été abordées. ◊

Pologne - Slovaquie

Un pas en avant dans la coopération

Par Helena Capova, Coop Product Slovakia

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élection générale au Royaume-Uni a eu lieu le 6 mai de cette année. Au cours de la bataille électo-

rale, les trois partis majoritaires (conservateurs, tra-vaillistes, et libéraux-démocrates) ont publié des mani-festes qui mettent tous les coopératives en évidence.

Les coopératives de travailleurs en particulier ont été mises sous les projecteurs dans la course électorale quand David Cameron, leader du parti conservateur, a dévoilé un plan permettant aux salariés du secteur pu-blic de former des coopératives, de manière à ce que, par exemple, « les infirmières puissent diriger leurs cliniques », ou « les professeurs, leurs écoles » (The Economist, 18/02/10).

Co-operatives UK, le collectif qui chapeaute les coopé-ratives au Royaume-Uni et membre de CECOP, a im-médiatement réagi à ce plan en « accueillant favorable-ment le soutien des conservateurs au mouvement coo-pératif », tout en prévenant que « le diable se cache dans les détails » : le plan ne doit pas « être imposé d’en-haut aux salariés du secteur public » (Third Sector Online, 16/02/10).

Michael Stevenson, président du parti coopératif (étroitement aligné sur le parti travailliste) a rétorqué que « les Tories ne sont pas le parti de la mutualité/coopération » (Guardian, 15/04/10).

Le parti travailliste a annoncé dans la foulée qu’il sou-

tiendrait et encouragerait le mouvement coopératif à la prochaine élection générale au Royaume-Uni.

Co-operatives UK a accueilli chaleureusement la recon-naissance des trois partis du rôle que les coopératives peuvent jouer en construisant une société meilleure. Pour plus de détails sur la réponse de Co-operatives UK faite aux partis durant la campagne, cf. : http://www.cooperatives-uk.coop/live/dynamic/News2IndexSmall.asp.

En mai, le Cabinet Office du Royaume-Uni a publié le programme de la nouvelle coalition pour le gouverne-ment qui a réaffirmé l’engagement des deux partis vis-à-vis des coopératives.

« Nous donnerons aux salariés du secteur public un nouveau droit à constituer des coopératives de travail associé et offrirons de reprendre les services qu’ils fournissent. Ceci permettra à des millions de salariés du secteur public de devenir leur propre patron et les aidera à fournir des services de meilleure quali-té » (http://www.cabinetoffice.gov.uk/media/409088/pfg_coalition.pdf, p.26).

Co-operatives UK cherche maintenant à construire des liens avec d’autres organisations européennes de coo-pératives, avec une expérience dans le développement de services d’intérêt général ou en matière de coopéra-tives sociales. ◊

lors que les différents partis politique annonçaient lors de la campagne qu’ils soutiendraient et en-

courageraient le mouvement coopératif lors des pro-chaines élections générales, un article sur le site inter-net du Guardian explique comment l’histoire des coopé-ratives a influencé le progrès social en Grande Breta-gne. Cette histoire y est décrite comme « l’émergence d’une force sans précédent pour le progrès social à tra-vers le travail associé, mais aussi le prolongement par lequel les entreprises capitalistes en Grande Bretagne se sont senties défiées par ce mouvement ».

« Si les travaillistes tiennent parole et soutiennent le mouvement coopératif » affirme l’auteur « le progrès social qui en découlerait pourrait être significatif ».

Deux exemples de coopératives illustrent cet article dont la Coopérative Leed Co-op et la coopérative SUMA.

Lisez l’article sur www.guardian.co.uk/commentisfree/2010/feb/09/importance-of-cooperatives.

Pour plus d’informations sur SUMA : www.suma.coop. ◊

Grande Bretagne

Les coopératives de travail associé au Royaume-Uni : un enjeu électoral ?

Par John Atterton, Co-operatives UK

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Un article consacré à l’importance des coopératives sur le site du Guardian

Par Olivier Biron, CICOPA / CECOP

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ette solution est temporaire, mais elle est inhérente à la logique mutualiste. Ainsi, 7 coopératives sur 10

ont réussi à maintenir durablement l’emploi, tandis que 10% des coopératives engageaient de nouveaux travail-leurs. Ces chiffres proviennent de l’étude sur la conjonc-ture économique portant sur quatre derniers mois de l’année 2009 menée par Elabora, le centre d’études de Confcooperative.

Son secrétaire général, Vicenzo Mannino, commente ain-si ces résultats : « En matière de trésorerie, les coopéra-tives ne se trouvent pas dans une situation particulière-ment bonne: les coopératives souffrent des retards de paiement dans le secteur des coopératives de travail as-socié, sociales, de pêche, agroalimentaires et de distribu-tion. En ce qui concerne les coopératives de travail asso-cié et les coopératives sociales, l’administration publique est toujours à l’origine de ces retards de paiement. En revanche, les coopératives agroalimentaires et les coopé-ratives de pêche de petite taille, sont tributaires des grossistes avec qui elles travaillent. Ce profond senti-ment d’incertitude vis-à-vis des paiements et des liquidi-tés influence fortement les investissements et la crois-sance des coopératives : les coopératives sociales, par exemple, qui sont les plus efficaces en ce qui concerne la croissance de l’emploi, ont décidé de reporter l’intégra-tion de nouveau personnel initialement prévue ».

Vincenzo Mannino poursuit en soulignant « qu’au-delà des retards de paiement, notamment de la part des ad-ministrations publiques, les coopératives dénoncent les facteurs suivants qui continuent à entraver leur dévelop-pement : le «dumping» en matière de contrats, les ap-pels d’offre et de services qui sont remportées par des offres extrêmement basses, dans des secteurs déjà ca-ractérisés par leurs faibles marges opérationnelles ; la concurrence déloyale et les stratégie dites de « prix pré-dateurs »; la rigidité du marché du travail et le manque de travailleurs qualifiés ; les difficultés d’accès au crédit ; les charges fiscales ; les coûts de la bureaucratie ; la faible dotation en infrastructures du pays. Finalement, il y a aussi l’impact élevé des coûts énergétiques ».

« En termes de compétitivité, la stratégie de présence sur les marchés étrangers est payante : les coopératives qui ont déjà une activité à l’étranger ont enregistré une importante augmentation de leurs revenus par rapport à celles qui ne se consacrent qu’au marché italien. La bais-se de la consommation, les pratiques de dumping et de prix prédateurs, ont obligé quelques coopératives à ré-duire les prix de leurs produits ».

Le crédit pose problème

Au Sud de l’Italie, seulement 12,5% des coopératives ont fait la demande de nouveaux prêts dans les quatre der-niers mois de 2009, alors que la moyenne nationale est de 34%. Au Nord, il y a actuellement une augmentation des demandes de crédit qui se voient rejetées. Dans le centre du pays, les demandes concernant des crédits de faible montant sont accordées la plupart du temps, mê-me si elles restent inférieures aux montants demandés. Au niveau national, 11% des coopératives ont signalé que leurs demandes de crédit avaient été refusées.

Concernant les taux d’intérêt relatifs aux crédits qui n’ont pas encore été accordés, 20% des coopératives ont re-marqué une évolution à la hausse tandis que 50% d’en-tre elles n’ont observé aucun changement. Seuls 30% des coopératives ont constaté une diminution du taux d’intérêt.

Concernant les garanties exigées, 25% des coopératives ont du fournir des garanties personnelles supplémentai-res: la tendance au resserrement des conditions de fi-nancement se poursuit. ◊

Italie

Les coopératives italiennes réagissent face à la crise

Par Giancarmine Vicinanza, Confcooperative

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La reprise a lieu, mais elle est encore faible. Bien que la confiance revienne, les prévisions

à court terme restent incertaines. Les coopératives connaissent les affres de la crise écono-

mique mais elles continuent à y répondent avec beaucoup de courage du point de vue de

l’emploi: elles ont baissé les prix afin d’encourager les ventes et de maintenir les niveaux

de production, sacrifiant une part de leurs profits afin de sauver l’emploi.

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es entreprises coopératives affiliées à Legacoop Servizi sont généralement à haute intensité de travail et elles

enregistrent également une augmentation importante de l’em-ploi. De plus, les choix et les processus de modernisation et de diversification de ces dernières années a fait de ce secteur un terrain très important en matière d’offre de services de qualité et il occupe ainsi une position d’excellence au niveau national en termes de chiffre d’affaires et de maturité entrepreneuriale. Les coopératives de services en Italie sont aujourd’hui une composante essentielle du processus de tertiarisation de l’ad-ministration publique, de l’industrie et de la distribution à grande échelle. Elles font parties des principaux acteurs qui sont en mesure de proposer des services d’excellence de façon autonome, directement aux clients et aux usagers. Pour cela, elles répondent aux besoins, tant traditionnels qu’innovants, du monde de la production et de la société. Les coopératives de travail associé dans le secteur des services, y compris les consortia, représentent un facteur décisif d’innovation dans les politiques économiques en Italie. L’expérience des de ces en-treprises provient de leur capacité à mettre le travail au centre de leur approche, à valoriser les compétences professionnelles afin de rendre les services plus efficaces et répondre de façon adéquate aux besoins. Au cours des dernières années, les coopératives de services affiliées à Legacoop Servizi ont opéré ainsi pour garantir un avenir stable pour les nouvelles générations de membres leur offrant la possibilité de travailler dans des entrepri-ses structurées et dans le cadre de rapports de travail stables. Pour garantir une croissance durable aux coopéra-tives de services, il est nécessaire de mettre en œuvre des politiques nationales mais aussi européennes qui vi-sent à légaliser et à réguler les marchés. L’encadrement juridique des marchés publics en particulier est un fac-teur de développement fondamental pour les entreprises compétentes et saines. C’est pour cela qu’il est néces-saire de garantir la transparence dans les appels d’offre selon des critères d’assignation qui prennent en compte le projet dans son ensemble (le critère de l’offre la plus économiquement avantageuse), et pas seulement le prix (en excluant donc le prix le plus bas). Il est également nécessaire d’examiner attentivement les éventuelles ano-malies contenues dans l’offre et de prévoir un contrôle efficace des services fournis.

Dans le contexte actuel de resserrements des crédits et de crise économique, les sérieux retards de paiement en matière de marchés publics, qui est un problème qui ne touche pas que l’Italie bien qu’aucun autre état ne connaisse une situation aussi grave, représentent un réel handicape pour le développement des entreprises coo-pératives car ils créent des obstacles aux politiques de développement et d’innovation.

Les coopératives peuvent se développer en valorisant savoir et compétences : pour cela, il faut promouvoir la création de nouvelles coopératives entre les professions et dans des secteurs innovateurs et favoriser les procé-dés qui poussent les coopératives à combiner leurs efforts. A cet égard, les compétences développées au cours des dernières années au sein de Legacoop Servizi peuvent représenter un incubateur important pour une nouvel-le coopération. ◊

Zoom sur les coopératives dans le secteur des services en Italie: Etat des lieux des entreprises affiliées à Legacoop Servizi

Par Daniele Conti, Legacoop Servizi

Legacoop Servizi est la fédération représentative des coopératives de services affiliées à la Legacoop

(Lega Nazionale delle Cooperative e mutue – La Ligue Nationale des Coopératives et des Mutuelles),

qui une des plus anciennes organisations italiennes et qui rassemble quelques 15000 coopératives

dans toutes les régions d’Italie et dans tous les secteurs de production. Les coopératives de services

affiliées à Legacoop Servizi sont aujourd’hui au nombre de 2500. En 2009, elles ont généré un volume

total d’affaires de près de 8 milliards d’euros et impliquent plus de 350 000 membres et travailleurs.

Elles offrent également une vaste gamme de services et prestations : du transport et de la transfor-

mation agroalimentaire à la restauration, des services de nettoyage et de désinfection à la surveillan-

ce privée, du transport de personnes à la fourniture de services et de biens culturels.

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eize ans après sa naissance, elle représente une expérience réus-

sie dans le cadre des politiques volon-taristes mises en œuvre pour pro-mouvoir l’emploi en Italie et notam-ment à travers la loi dite « Marcora » qui soutient la transformation en coo-pérative d’entreprises en crise. La coopérative avait pour but de péren-niser l’emploi et la production dans l’un des secteurs d’activité les plus significatifs de la région du Mugello tout en tenant compte de l’échec de la gestion précédente. Actuellement, l’entreprise emploie 39 travailleurs, dont 34 sont des travailleurs mem-bres. La coopérative continue à opé-rer dans le secteur des emballages. Aujourd’hui son activité est divisée en produits d’emballage primaire (emballage des aliments) et en pro-duits d’emballage secondaire (sacs de courses) et sa production est destinée à la grande distribution.

IPT fait partie des entreprises les plus importantes de son secteur en Italie. De 2002 à nos jours, la valeur de la production a progressivement augmenté. Les résultats en 2009 mettent en relief une augmentation de la valeur de la production qui dépasse les 12 millions d’euros. Le volume actuel de la production avoisine les 4.000 tonnes par an. L’évolution de la production des sacs à commission est remarquable : au cours des dernières années, elle s’est consolidée et développée, la production d’emballages primaires représentant près de 20% du total de la production.

IPT est dans un processus de modernisation afin de mieux faire face à la concurrence internationale qui se fait toujours plus féroce. Elle a par exemple créé un label pour les produits à faible impact sur l’environnement et qui sont biodégradables. C’est ainsi qu’en mai 2009, quelques grandes structures coopératives et non coopératives ont décidé de remplacer le traditionnel sac en plastique par des sacs produits à partir de sources renouvelables, comme le Mater-Bi qui est un type de « bioplastique » de source agricole renouvelable fabriqué à base d’amidon de maïs. Produit en Italie, il est entièrement biodégradable en conformité avec les normes européennes.

Au-delà de l’incertitude normative qui existe encore en Italie et du report à 2011 d’interdire la commercialisation des sacs en plastique traditionnels dû aux dépenses que cela impliquerait, on remarque aujourd’hui un intérêt grandissant pour les produits issus de l’agriculture biologique : les entreprises sont en train de s’équiper afin d’y apporter rapidement une réponse adéquate. En ce sens, l’objectif d’IPT est de renforcer ce segment de la produc-tion et de développer la recherche pour diversifier et élargir la production, notamment en matière de condition-nement alimentaire. La coopérative est notamment en train de développer une série de produits innovants qui auront un impact significatif sur l’environnement et la réduction de l’utilisation de sacs plastiques traditionnels. ◊

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L’Industria Plastica Toscana : une coopérative qui réussit !

Par Adriana Assini, ANCPL

L’Industria Plastica Toscana (IPT) est une coopérative italienne ayant son siège à

Scarperia (Florence). Celle-ci est née en juillet 1994 à l’initiative de quelques ex-

employés de l’Industria Plastica Italiana qui l’ont repris cette société privée sous la

forme coopérative suite à sa mise en demeure.

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Emballages biodégradables / Coop Firenze

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Un des facteurs contribuant à la perpétuation de la pauvreté dans un pays comme l'Ouganda est le manque d'énergie et plus particulièrement du courant triphasé indispensable à l'industrie. En fait, l'industrie est un important facteur qui peut aider à soulager la pauvreté. Sans énergie, il est très dif-ficile pour la population d'exploiter les ressources locales et de créer de nouvelles opportunités. La corrélation entre le manque d'énergie et le faible niveau de développement dans le pays est très im-portante.

n Ouganda, seul 10 % environ de la population sont connec-tés au réseau d'électricité national mais c'est principalement

dans les zones urbaines et les coûts d’accès à l'électricité sont les plus élevés après la Suède. En Ouganda, la capacité théorique est de 409MW mais la production réelle n’atteint que 140-200MW. Cette faible production est due en partie aux variations climatiques qui provoquent de très faibles niveaux d'eau dans les fleuves et dans les lacs pendant la saison sèche ce qui diminue à son tour la capacité de production. C’est la raison de la croissance très rapide du marché de la bioénergie.

La phase suivante de modernisation des coopératives en Ouganda

Avec la phase, aujourd’hui terminée, de redécouverte des coopéra-tives qu’elle a menée dans le pays, l’UCA (Uganda Cooperative Alliance) s'engage dans une deuxième phase qui inclut l’établissement de nouveaux types de coopératives moder-nes en tant que stratégie de renforcement du mouvement coopératif tout entier. Historiquement, l'Ouganda était connue en grande partie pour ses coopératives agricoles mais cela change. L’UCA travaille actuellement sur un pro-gramme pour aider ses membres à établir des systèmes de bioénergie qui moderniseront non seulement les coopé-ratives agricoles dans les zones rurales, mais soutiendront aussi beaucoup d'institutions rurales telles que le stocka-ge, la transformation, le pompage d’eau potable, l'éclairage domestique et des villes rurales, les activités commer-ciales et autres, utilisant une énergie renouvelable produite à faible coût par les coopératives elles-mêmes.

En partenariat avec des investisseurs étrangers, un fonds pour l'énergie renouvelable doit être créé qui sera financé en partie par ceux-ci et en partie par des coopératives ougandaises. On s'attend à ce que 100 millions de dollars US environ puissent être levés. Sur une période de 10 ans, 11 coopératives énergétiques semblables à celles qui ont vu le jour aux USA depuis 1942 seront créées dans tout le pays et produiront 2194 MW, six fois ce que le pays peut actuellement produire avec la totalité de son infrastructure hydroélectrique. Ces nouvelles coopératives ainsi fon-dées seront en copropriété entre les investisseurs étrangers et les coopératives des différents secteurs.

Ce modèle innovateur de financement permettra de surmonter les difficultés de reproduction et de développement des systèmes bioénergétiques pour les communautés rurales, systèmes qui ont été testés par certains donateurs et mais qui n’ont pu être mis en œuvre en raison des dépenses importantes qui y étaient associées. Avec ce modèle, ceux que l’on appelle "les pauvres" pourront apporter leur contribution au capital du fonds. Le Fonds pour l’énergie renouvelable que l’UCA projette est spécifiquement conçu pour des pays en voie de développement.

Le contrat prévoit que, après quelque temps, les investissements étrangers diminueront progressivement en paral-lèle à l’augmentation de la participation des coopératives au capital : les coopératives impliquées dans ce projet devraient finalement en posséder 100 %, en utilisant les revenus générés par l'électricité pour racheter les parts des investisseurs étrangers. Bien qu'un risque relatif existe réellement, tout sera fait par l’UCA pour s’assurer que les principes coopératifs seront respectés et notamment le principe « d’un homme - une voix » puisque la puissance du vote ne dépendra pas de l’importance de la participation au capital. C'est donc une approche très intéressante et innovatrice qui trouve sa cause dans le besoin des membres coopératifs et de la population ougandaise de disposer de l’électricité pour échapper à la pauvreté.

Des études techniques et économiques sont actuellement en cours dans les trois régions de l'Ouganda où le projet sera piloté. Bien plus, une fois mis en œuvre, le projet devrait transformer complètement la vie de la population des communautés rurales et booster le mouvement coopératif. En effet, il devrait notamment avoir un impact sur la création de nombreuses coopératives actives dans les secteurs de la santé et de l’artisanat. Il représente aussi une réponse appropriée des coopératives Ougandaises aux variations climatiques. ◊

Ouganda

Les coopératives collaborent avec le secteur privé pour améliorer l'accès de la population à l'électricité

Par Leonard Msemakweli, Uganda Cooperative Alliance

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A F R I C A

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Canada

Entretien à Alain Bridault, président de la Fédération Canadienne de Coopératives de Travail

Vous avez récemment été élu président de la Fédé-ration Canadienne des Coopératives de travail. Pouvez-vous nous expliquer dans quel contexte ?

Il me paraissait essentiel de renforcer les coopératives de travail du Québec en les associant avec la Fédération canadienne des coopératives de travail. C’est pourquoi, en 2007, j’ai d’abord convaincu le Réseau de la Coopéra-tion de Travail du Québec, dont ma coopérative est membre, de devenir membre régulier de cette fédéra-tion. En étant délégué de ce réseau à la FCCT, j’ai eu ainsi un accès direct à son conseil d’administration. J’ai ensuite obtenu que la fédération des Coopératives Fores-tières du Québec en devienne également membre. Je pense par ailleurs que, si le CA de la FCCT m’a élu si ra-pidement vice-président, en 2008, puis président en 2009, c’est pour montrer une marque de reconnaissance envers les coopératives de travail du Québec puisqu’ elles constituent le nombre le plus important de coopératives de travail sur l’ensemble des provinces du Canada avec près de 300 coopératives.

Quelles différences existent au niveau législatif en-tre le Québec et le reste du Canada ?

Contrairement au reste du Canada, l’impartageabilité des réserves est inscrite dans la législation au Québec et c’est très important ! C’est évidemment un gage de dura-bilité essentiel pour les coopératives de travail et l’absen-ce d’impartageabilité des réserves met constamment en difficulté la capacité de développement d’un réseau de coopératives de travail à long terme. C’est un des chan-tiers sur lequel je compte bien me pencher en tant que président de la Fédération canadienne.

Est-ce que vous pensez que les coopératives de tra-vail peuvent représenter une alternative face à la crise qui a ébranlé l’économie mondiale ?

Bien entendu, et pas seulement les coopératives de tra-vail mais tous les secteurs coopératifs. Au Québec, l’exemple du Mouvement des caisses populaires Desjar-dins est parlant. C’est le plus important réseau bancaire du Québec avec plus de 4 millions de membres sur une population de 7 millions. Si le Québec a été comparative-ment peu touché par cette crise, cela tient notamment à la force de son réseau bancaire.

Par ailleurs, un des chantiers importants que je veux également mettre en place concerne la transmission d’entreprises. Au Canada, on estime que 200.000 entre-prises vont changer de main au cours des dix prochaines années. Par exemple, pour le Québec, cela représente des villages entiers qui risquent d’être complètement déstructurés car de nombreuses entreprises qui em-ploient parfois jusqu’à 100 personnes n’auront pas de repreneur. On va voir les possibilités de reprise d’entre-prises se multiplier avec parfois le risque qu’une entrepri-

se soit rachetée pour ensuite qu’on la laisse mourir afin d’éliminer la concurrence. Dans ce contexte, l’alternative coopérative se prépare et elle va permettre de sauver des villages. À cet égard, Orion, la coopérative dont je suis un des fondateurs, travaille sur cette question et elle a publié différents guides de sensibilisation à ce sujet et, en 2011, la Fédération Canadienne des Coopératives de Travail va organiser une grande conférence internationale sur la transmission d’entreprise à des coopératives de travail afin de bien mettre en valeur l’expertise acquise et le sérieux de l’alternative coopérative à cette question de la transmission.

Quelle est votre vision de la coopération de travail aujourd’hui ?

Je suis d’abord issu du mouvement de l’autogestion des années soixante-dix. C’est ce qui m’a amené vers les coopératives de travail, vers ce que l’économiste français Claude Vienney qualifiait d’autogestion concrète. Pour moi, la coopération du travail ne fut qu’un phénomène marginal du mouvement coopératif durant ce que j’appel-le le siècle d’hégémonie du mode de production indus-trielle, jusqu’au tournant des années 1980. Ce sont les différentes formules de coopératives de consommation qui avaient alors le plus de potentiel de développement. Mais avec l’avènement de la société dite post industrielle ou de la Société du savoir selon la formule de Peter Drüc-ker, c’est à partir de maintenant que la formule de la

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coopérative de travail va pouvoir donner la pleine mesure de son potentiel. En effet, le succès des entreprises de la nouvelle économie se fonde maintenant sur les compé-tences de leurs ressources humaines. Les entreprises d’aujourd’hui et encore plus de demain devront être des entreprises intelligentes offrant des produits et services à forte intelligence ajoutée. Les pratiques de management changent. La gestion des ressources humaines est main-tenant plus importante que le reste puisque la compétiti-vité des entreprises dépend de leurs capacités à mobili-ser l’intelligence de leurs employés. Cela signifie dévelop-per leur sentiment d’appartenance, implanter des métho-des de gestion participative, laisser une grande place à leurs capacités d’innovation, et de plus en plus les faire participer aux résultats de l’entreprise. Or, tout cela cor-respond au paradigme même d’une coopérative de travail qui est la seule forme d’entreprise qui, par nature ,est intelligente, qui a ce potentiel d’entreprise intelligente de

manière innée, qui a ce potentiel de mobilisation de l’in-telligence de ses ressources humaines par sa raison d’ê-tre et sa façon d’être.

C’est pourquoi, j’estime que les conditions objectives d’un vaste et nouveau déploiement des coopératives de travail sont maintenant réunies. Il existe notamment un potentiel énorme de création de nouvelles coopératives, surtout parmi les jeunes diplômés et dans le domaine des nouvelles technologies, où il y a beaucoup plus d’intelli-gence ajoutée. Cependant, les conditions subjectives, culturelles ne sont pas encore réunies, notamment chez nous en Amérique du Nord. En effet, au Canada, nous sommes très près du centre névralgique du capitalisme avec les Etats-Unis à notre porte, du centre de produc-tion de l’idéologie capitaliste. Nous aurons beaucoup à faire pour que se concrétise ce potentiel.

Propos recueillis par Olivier Biron, CICOPA / CECOP

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ichael Moore, le réalisateur américain célèbre pour ses documentaires qui montrent une réalité diffé-

rente de celle des médias conventionnels, adresse dans son dernier film, Capitalism, a love story, une critique au système de libre-échange qui domine aux Etats-Unis, en exposant ce qui le rend coupable de la plupart des maux arrivés avec l’actuelle crise économique mon-diale. Une des solutions proposées par Moore dans ce documentaire est la création d’entreprises coopératives. Il mentionne en particulier l’entreprise Isthmus Eginee-ring & Manufacturing Co-op (Wisconsin), une coopérati-ve qui génère 50 millions de dollars par an ; et le cas des anciens travailleurs de Republic Windows & Doors, qui, après avoir eu obtenu de l’entreprise et de la Bank of America qu’on leur paie ce qu’on leur devait, ont en-visagé de continuer à travailler dans la fabrication de fenêtres et portes en créant leur propre coopérative de travail associé.

Entre autres conséquences graves de cette crise capita-liste, Michael Moore parle des nombreuses expulsions que les banques américaines effectuent chaque jour aux Etats-Unis, où des familles qui auparavant avaient tout ce dont une personne de la classe moyenne pou-vait rêver, vivent aujourd’hui dans la rue à cause des licenciements massifs mis en œuvre par les grandes entreprises capitalistes afin de maximiser leurs bénéfi-ces.

Dans son documentaire, Moore explique aussi les rai-sons de l’existence de ce système libéral sauvage aux Etats-Unis : selon le réalisateur, depuis l’arrivée de Ro-nald Reagan à la Présidence, en 1981, dans le contexte de la crise pétrolière, Wall Street a commencé à pren-dre le pouvoir au sein de la classe politique nord-

américaine, en faisant en sorte que soient approuvées des mesures favorables au capital, au détriment de la classe ouvrière. Ce phénomène s’est poursuivi pendant les présidences de Georges Bush Senior, Bill Clinton et Georges Bush Junior.

Pour plus d’informations sur le film, l’adresse du site officiel : http://www.michaelmoore.com/books-films/capitalism-love-story (en anglais). ◊

États-Unis

« Le capitalisme, un histoire d'amour » ... ou pas

Par José Miguel Botello, CICOPA / CECOP

M

Michael Moore

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Si vous avez des questions, des suggestions, des critiques concernant « Travailler ensemble », n’hésitez pas à nous écrire à l’adresse [email protected]

ien que le mouvement coréen des coopé-ratives de travail associé soit né au début des années 1990, il connut de nombreux

problèmes tels que l’absence d’une législation appropriée et d'un programme d’aide. C’est la raison pour laquelle, depuis le milieu des an-nées 1990, la première génération des coopéra-tives de travail associé s'est engagée dans “le programme d’aide à l’autosuffisance (SSP)” qui entendait promouvoir “les coopératives de tra-vail associé comme petites entreprises pouvant fournir des emplois aux personnes défavori-sées. Ces petites entreprises étaient très faibles cependant, particulièrement en termes d'auto-nomie. La plupart d'entre-elles étaient pratique-ment gérées par des agences d’aide subven-tionnées par le gouvernement. Pour maintenir les principes coopératifs, la Fédération des coo-pératives de travail associé de Corée (KFWC) fut organisée en 2002.

KFWC était composée de quelques coopératives pionnières de travail associé et des coopérati-ves de travail associé nouvellement organisées sous le SSP. La promulgation en 2007 de la loi sur la promotion de l’entreprise sociale changea la situation. Cette loi créait un nouveau label : "l'entreprise sociale", non seulement pour les petites entreprises existant sous le SSP, mais aussi pour les différentes initiatives civiles. Pour organiser ces nouvelles initiatives cooperative minded, en 2007, KFWC changea son nom en “Association coréenne des Entreprises d’Économie Sociale (KASEE).

Un des membres importants de KASEE, Working Together Corp. (WT Co) est un groupe composé de 9 petites entreprises de type coopératives de travailleurs associé sous le SSP, disséminées dans la province de Kyungki (province des environs de Séoul) et actives dans le secteur du nettoyage. WT Co fut lancée en 2003 avec l’aide financière de la fondation Over-coming-unemployment et développa ensuite des activités non seulement économiques comme le nettoyage, l’entretien des écoles, des hôpitaux, des bâtiments publics, la vente en gros d'articles d’entretien, mais aussi des activités sociales comme des programmes de formation et des services d'hygiène pour les familles pauvres. En 2008, WT Co avait 10 branches locales et employait 180 travailleurs. Son chiffre d'affaires était de 3 millions de dollars US.

En 2009, WT Co eut l’opportunité de se développer. Woongjin Group, un des plus grands groupes de Corée du Sud a dé-cidé de céder gratuitement à WT Co sa division “nettoyage domestique”. Woongjin Homecare, la branche “nettoyage do-mestique” du groupe Woongjin avait commencé ses activités en 2007, mais en raison de sa faible rentabilité, le groupe Woongjin décida de s’en défaire. Dans la recherche de l'acheteur approprié, le Woongjin Groupe remarqua que les entre-prises sociales pourraient ajouter plus de valeur au secteur du nettoyage et décida de la céder à une entreprise sociale spécialisée dans le secteur du nettoyage. La partie cédée comprenait 8 branches locales et 70 ouvriers. D'abord, WT Co hésita à l'accepter parce que de trop grande taille. Cependant, dans la considération du maintien de l’emploi des travail-leurs de Woonjin Homecare et pour des raisons d’économies d’échelle WT Co accepta cette opportunité.

Avec cette nouvelle indépendance, WT Co reçut la marque, les travailleurs, les actifs ainsi que les contrats existants. Après cette transformation, tous les travailleurs de “Ins’ care” (le nouveau nom de Woongjin Homecare) qui avaient été engagés dans le cadre de contrats à durée déterminée furent réengagés comme travailleurs permanents et leur salaire de base fut augmenté. Hyunsu Lee, chercheur à l’Institut Hope Factory a estimé que "la transformation d’entreprises en entreprises sociales pourrait être un nouveau type de contribution sociale des sociétés" et a ajouté "qu’il serait nécessaire de soutenir les entreprises sociales pour leur permettre d'utiliser le système et le savoir-faire des grandes entreprises." Cet exemple de transformation a été présenté par Joongang, un quotidien majeur en Corée du Sud (le 28 janvier 2010).

Jusqu'à présent, les systèmes de gouvernance coopératifs ne s'appliquent pas à cette nouvelle division. Un des objectifs importants de WT Co, a dit Chuljong LEE, président de WT Co et de KASEE, est la coopérativatisation de celle-ci au cours de la restructuration de WT Co dans les prochaines années. ◊

Corée du Sud

Transformation d’entreprises traditionnelles en entreprises sociales, un nouveau type de contribution sociale pour les sociétés?

Par Changhwan Lee, KASEE

Travailler ensemble est une publication commune de CICOPA et CECOP-CICOPA Europe éditée en français, anglais et espagnol - © CICOPA 2010

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Inauguration d’In’s Care en présence du président de KAASE Chuljong Lee (à droite)