nuits sonores, lyon, 16-20 mai...

24
NUITS SONORES, LYON, 16-20 MAI 2012 LE JOURNAL DE LA RED BULL MUSIC ACADEMY

Upload: lamkhanh

Post on 15-Mar-2018

227 views

Category:

Documents


8 download

TRANSCRIPT

NUITS SONORES, LYON, 16-20 MAI 2012

LE JOURNAL DE LA RED BULL MUSIC ACADEMY

RED BULL MUSIC ACADEMY

10 ANS, ÇA SE DANSE !

Par Patrick Thévenin

10 ans de Nuits Sonores. Il faudrait sans doute plus de 10 jours, sur le dancefloor ou ailleurs, pour raconter par le détail tout le bien que le festival lyonnais a fait aux musiques électroniques du monde entier. Et surtout françaises !

10 ans de Nuits Sonores, ce serait aussi raconter 10 ans de techno, une vieille histoire avec laquelle il est bon de se familiariser pour mieux se projeter dans le futur. Ça tombe bien : Nuits Sonores n’a eu de cesse de relier les anciens et les modernes, de faire se confronter les racines de l’électronique aux nouveaux défis imposés par les machines, de s’offrir et de s’ouvrir à tous, des néophytes aux trainspotters…

Histoire de prolonger cette philosophie, le festival fêtera son dixième anniversaire en continuant de faire ce qu’il sait le mieux : envahir la ville de Lyon, au propre comme au figuré, s’emparer de l’architecture urbaine pour mieux la confronter à la modernité de l’électronique, faire danser une ville entière de jour comme de nuit, rendre hommage aux pionniers tout en donnant leur chance aux jeunes talents, célébrer la culture du deejaying tout en accompagnant la révolution du live, s’ouvrir à tous les styles et audaces qui font que l’électro reste toujours la musique la plus excitante en 2012… Une philosophie très proche de celle de la Red Bull Music Academy !

Pour les 10 ans de Nuits Sonores, on célèbrera donc Jean-Michel Jarre, on ira se frotter aux coups de basse de Kode 9, on se souviendra pourquoi Chris & Cosey, dans les années 80, ont inventé la minimal wave, on plongera la tête la première dans la soul futuriste de Theo Parrish ou on s’abandonnera dans les paradis artificiels d’Ostgut Ton, le label-carte de visite hors frontière du fabuleux Berghain de Berlin. En bref : un voyage dans le temps, le temps d’un long week-end, mais qui pourrait durer l’éternité !

Red Bull France SASU, RCS Paris 502 914 658

Directrice de la publicationLAURENCE [email protected] Rédacteur en chefPATRICK THÉ[email protected]

Contributeur at largeGUILLAUME [email protected]

Direction artistiqueGAËL [email protected]

Secrétaire de rédactionFRANCK [email protected]

ContributeursCAROLINE ANDRIEUTIPHAINE BRESSINPIERRE-JEAN CHIARELLIANDRE GIESEMANNOLIVIER LAMMOLIVIER PERNOTJONNIE WILKESTHOMAS BLONDEAUDANIEL WANG

Ce magazine comporte pages 12 & 13 un hommage à la pochette d’« Oxygene » de Jean-Michel Jarre par le collectif de graphistes //DIY

Les opinions exprimées dans la présente édition sont celles de contri-buteurs compétents et respectés. Elles ne reflètent pas nécessairement celles de Red Bull.

Publication éditée par Red Bull France, à l’occasion du festival Nuits Sonores.Merci de ne pas jeter ce journal sur la voie publique. Ce journal est gratuit et ne peut être vendu.

RemerciementsAgoria, Vincent Carry, Virginie Freslon, Julien Gagnebien, Laurent Garnier, Clovis Goux, Louis Hallonet, Jean-Michel Jarre, Chloé Krempf, Jérémy Platini, Corinne Stenneler, Mat Galet. & don’t forget : love is the message !

WWW.NUITS-SONORES.COM

REDBULL.FR

REDBULL.FR/RBMA

REDBULLMUSICACADEMY.COM

RBMARADIO.COM

RED BULL MUSIC ACADEMY

WWW.REDBULLMUSICACADEMY.COM

RED BULLMUSIC ACADEMY STAGEDEMANDEZ LE PROGRAMME

NUIT 1 Mercredi 16 Mai

Ned (live) 21h30 - 22h30

Depuis quinze ans, ce farouche trio secoue la scène rock lyonnaise en mélangeant post-punk aux accents noise et rock’n’roll au groove tordu. Avec près d’un millier de concerts à leur actif, ces activistes de l’underground et du Do It Your-self ont côtoyé sur scène des légendes comme NoMeansNo, Don Caballero ou Bästard.

Bass Drum of Death (live) 22h45 - 23h45

Ce duo, à ne pas confondre avec le producteur anglais Drums of Death, vient du Mississippi. Il y forge un garage rock tei-gneux aux guitares tranchantes qui trouve son souffle dans la voix éraillée de John Barrett et sa dynamique live dans les ourlets rythmiques du batteur Colin Sneed. Une signature du redoutable label Fat Possum.

Chris & Cosey (live) 00h00 - 01h00

Voir article page 8.

Raisa K (live) 01h15 - 02h15

Participante de la Red Bull Music Academy 2011 à Madrid, Raisa Khan est une jeune Londonienne repérée dans le pro-jet Micachu & The Shapes où elle joue claviers, synthétiseurs et percussions, et sur scène aux côtés de Dels (du label Ninja Tune). Elle signe aussi sa propre musique, entre ambient ex-périmental et trip-hop névrotique.

Étienne Jaumet (DJ set) 02h30 - 04h30

Avec son duo Zombie Zombie, le musicien parisien explore des contrées électroniques et psychédéliques peuplées de mutants et d’êtres nyctalopes. En solo, il plonge dans la Night Music – du nom de son premier album mixé par Carl Craig, où les synthétiseurs s’enroulent en boucles hypnotiques et fréné-tiques. DJ set érudit attendu.

NUIT 3Vendredi 18 Mai

Kosme (DJ set) 21h00 - 23h00

À la tête du tout nouveau label Caramelo Records ou lors des fameuses soirées à l’Ambassade Club, Kosme défend une house tout en beats atmosphériques et une techno pleine de groove et de profondeur. Ce pilier des nuits lyonnaises est un DJ pas-sionné avec un sens aiguisé du dancefloor.

Space Dimension Controller (DJ set) 23h00 - 01h00

Inspiré par la techno futuriste de Détroit, l’Irlandais Jack Ha-mill, alias Space Dimension Controller, passé par l’Academy, imagine une musique entre house cosmique et techno analo-gique qu’il baptise Galactic Funk. Une fusion voyageuse dont le classicisme et l’évidence contribuent à la résurrection du mythique label R&S.

Theo Parrish (DJ set) 01h00 - 05h00

Enfant de Chicago, résidant aujourd’hui à Détroit, Theo Parrish produit ses premiers tracks depuis l’adolescence et se forge au fil du temps une aura de sage, d’érudit (il est aussi diplômé d’une école d’art). Il est surtout un puriste de la house deep et soulful, un artisan du groove qui offrira un set marathon, comme un voyage dans l’absolu.

NUIT 4Samedi 19 Mai

Mike Slott (DJ set) 21h30 - 23h00

Originaire d’Écosse, cet ancien élève de la Red Bull Music Aca-demy, installé à New York, signe un abstract hip-hop envoûtant, nourri d’influences jazz et classique, et d’envolées electronica. Comme sur son premier mini-album Lucky 9Teen, paru sur le label LuckyMe dont il est l’un des fondateurs, ou sur les remixes qu’il signe pour Flying Lotus ou Bonobo.

xxxy (DJ set) 23h00 - 00h30

Venu de Manchester, Rupert Taylor, alias xxxy, est un jeune activiste de la scène bass music londonienne. En trois ans, il a publié une dizaine de maxis et quelques remixes (The Count & Sinden, Ghostpoet) avec une obsession pour les sonorités garage et les broken beats. Il faisait partie de la promotion 2011 de la Red Bull Music Academy.

Clark (live) 23h00 - 00h30

Électron libre de la planète Warp, Chris Clark élabore une électro expérimentale, déchirée, transgressive, traversée d’un spleen mélancolique et d’une dimension mélodique unique. Dans la foulée de son sixième album, baptisé Iradelphic, le pro-ducteur anglais donnera un live irradiant et hypnotique. Intel-ligent Dance Music.

Kode 9 DJ set 02h00 - 03h30

Voir article page 17.

Jay Weed (DJ set) 03h30 - 05h00

Soutenu activement par Agoria, le jeune DJ et producteur lyonnais réalise des productions dubstep/grime qui brassent atmosphères lourdes et profondes, rythmiques breakées et évasions synthétiques. Des productions qui ont déjà séduit les labels anglais 502 Recordings (Oneman) et Grizzly (Sinden).

Étienne Jaumet, par Philippe Lebruman Theo Parrish, par Jos Kottmann XXXY

Par Olivier Pernot

RED BULL MUSIC ACADEMY

VINCENT CARRYTÊTE SONORE

Le directeur de Nuits Sonores est un pionnier de l’activisme techno. Dix ans après la première édition d’un projet fou fou fou, il analyse avec finesse et enthousiasme le chemin parcouru.

Entretien par Patrick Thévenin

Comment est né Nuits Sonores ?D’une idée commune à quelques personnes au moment de l’alternance politique à Lyon. Après plus d’un siècle de gou-vernance à droite et au centre, le socialiste Gérard Collomb est arrivé à la tête de la Mairie. Lyon a longtemps été emblé-matique de la répression techno, alors que c’est ici que sont nées des associations comme Technopol ou Polaris, se sont affirmés des talents comme The Hacker, Miss Kittin, Patrice Moore, Milosh, Oxia… Je suis journaliste, mais j’ai pas mal traîné dans la musique, j’ai monté une agence de booking, un magasin de disques, organisé des fêtes dans d’immenses lieux, je me suis occupé de clubs. En 1997, le dernier club dont je m’occupais, l’Opéra Mundi, a été victime d’une fer-meture par la préfecture. C’était une période noire pour la techno avec d’un côté une répression tous azimuts et de l’autre le développement des premières tentations ultra-com-merciales avec les raves estampillées M6 à Bercy. En 2002 : élections présidentielles et montée de Jean-Marie Le Pen. Je fais la promesse, si Le Pen est au second tour de rendre ma carte de journaliste. Dont acte. On est en juin, il fait beau, c’est la Fête de la musique, je me dis qu’il est temps d’écrire un projet de festival puisqu’on a enfin une municipalité de gauche. Je suis entouré de quelques amis, on rencontre trois filles qui ont fondé quelques années plus tôt Arty Farty, une des structures électro les plus élégantes de Lyon, Agoria est là aussi. Et dans ma cuisine, on invente les grands principes de Nuits Sonores : le circuit électronique, les apéros sonores, la carte blanche, la ville invitée, les grandes nuits. Tous les concepts sont là : une programmation ultra-exigeante sans concessions et un festival urbain.

Des influences ?On dit toujours qu’on est les enfants des Transmusicales de Rennes et de Sónar. Sónar pour l’exigence de la program mation et les Trans, avant le basculement vers le Parc des Expos, pour le modèle urbain.

Êtes-vous parvenus à ce que vous désiriez ?Oui, totalement. Peut-être pas la première année, qui est une sorte d’édition zéro, où tout le monde découvre le concept. Il faudra deux ou trois éditions pour que les différents acteurs s’approprient le festival et s’y pluggent, car Nuits Sonores est un festival dont le développement et l’épanouissement sont ultra-collaboratifs. Aujourd’hui, plus de cent structures y participent, au niveau local, national et européen. C’est une pépinière de pro-jets : des gens ont pu construire leur propre projet de vie profes-sionnel à travers le festival.

Comment se finance le festival aujourd’hui ?La part de financement de la ville de Lyon est passée au fil des années de 50% à 13%, car le festival s’est considérablement déve-loppé. Le soutien public est de 20%, 20 % viennent d’entreprises au sens large et les 60% restants des revenus propres comme la billetterie et les recettes annexes. C’est un festival très indépen-dant au niveau budgétaire, mais qui reste précaire. Exactement comme Sónar.

Vous pensez encore grandir ?On aurait pu continuer à agrandir le festival, mais on a décidé de fixer la jauge à 80 000 personnes, moitié sur les sites gratuits et moitié sur les payants. C’est la capacité maximum du festival et de

la ville. On ne veut pas être dépendant de têtes d’affiche comme les festivals blockbuster qui alignent Björk, Radiohead, Muse et Massive Attack sur une même édition. De plus, notre program-mation est fragmentée dans le temps et dans l’espace : tout est conçu pour que les scènes n’excèdent pas 4 000 personnes, alors que certains festivals tournent à 30 000 ! Ce format, on l’aime et c’est pour ça qu’on l’a appliqué à Nuits Sonores : un festival urbain, maîtrisé, sympa, où le public partage des choses simples sans la lourdeur de l’industrie festivalière derrière. C’est un pro-jet inventé pour Lyon, adapté à sa taille, à son architecture, à son urbanisme, ce n’est pas transposable à Paris ou dans une autre ville européenne.

L’artiste qui est venu à Nuits Sonores et dont tu es le plus fier ?Difficile à dire… Tony Wilson peut-être, car sans lui je n’aurais pas construit ma vie dans la musique. Il a fait le club dont je rê-vais, l’Hacienda, créé mon label préféré, Factory. Mes parents avaient tous les disques de Kraftwerk, mais c’est vraiment avec Madchester, au début des années 90, que je me suis pris une claque. À l’époque on pensait, comme aujourd’hui d’ailleurs, qu’on ne pourrait plus être surpris par la musique. C’était faux. C’était il y a plus de vingt ans et la rave nation a déboulé et a tout renversé sur son passage.

Un rêve ?J’adorerais avoir les Daft Punk, ça a failli arriver sur l’édition 2006, quand on a organisé une carte blanche à Paris, avec hom-mage au Palace, à F Com, mais ils jouaient en même temps aux Eurockéennes. Pour moi, c’est le groupe le plus important de la musique électronique française et peut-être mondiale.

Vincent Carry, par Richard Bellia

RED BULL MUSIC ACADEMY

WWW.REDBULLMUSICACADEMY.COM

JEAN MICHEL JARREIN SYNTHS WE TRUST« JE NE PRÉFÈRE PAS L’ANALOGIQUE AU NUMÉRIQUE, AU CONTRAIRE JE PENSE QUE LES DEUX PEUVENT TRÈS BIEN COHABITER ET MA MUSIQUE EN EST LA PREUVE. »

Illustration par Caroline Andrieu

RED BULL MUSIC ACADEMY

Aujourd’hui, le consensus sur Jean-Michel Jarre est total. L’idée ne viendrait à per-sonne d’oser basculer de son piédestal le pionnier de l’électronique française. Car Jarre est un génie qui, de ses premières collaborations avec Patrick Juvet ou Chris-tophe jusqu’à ses albums solo en forme d’épopées synthétiques, a changé la face de la musique. Un visionnaire dont l’héritage en mouvement perpétuel influence plus que jamais les Sébastien Tellier ou les Turzi aujourd’hui, pour ne citer qu’eux. Lyonnais d’origine, Jean-Michel Jarre est célébré pour les 10 ans de Nuits Sonores par Danger, Arandel et Acid Washed qui livreront leurs versions très personnelles d’« Oxygene », un des disques les plus révolutionnaires de Jean-Michel Jarre, écoulé à plus de 18 millions d’exemplaires à ce jour. Pour la Red Bull Music Academy, Jean-Michel Jarre a déballé devant nous dix de ses synthés préférés.

Interview par Patrick Thévenin

VCS 3 (1969)

Mon premier synthé, la réponse européenne au Moog améri-cain, la Mini face à la Cadillac… La technologie d’après-guerre a généré un son électronique européen très différent du son américain. Le VCS3 était un des premiers vrais synthés de re-cherche modulaire, une technique avec laquelle j’étais familier car elle était issue directement du matériel avec lequel j’avais travaillé au GRM (Groupe de Recherches Musicales) avec Pierre Schaeffer. J’ai composé beaucoup de morceaux avec, notam-ment pour « Oxygene » ou « Equinoxe », même si je m’en servais déjà avant avec Deserted Palace (un des premiers projets de Jarre, ndr) ou les musiques que j’ai réalisées pour l’Opéra de Paris. Je l’utilise toujours, sur scène, plus de quarante ans plus tard. C’est dingue de constater que cette technologie artisanale est finalement très solide. À mes débuts, ce fut mon principal outil avec un orgue Farfisa et deux Revox. Au même moment, Pink Floyd s’en est servi quand le groupe a commencé à introduire de l’électronique dans sa musique. Mais ils l’ont utilisé comme un élément secondaire dans un arrangement rock, alors que pour moi c’était l’outil principal de ma palette sonore.

ARP2600 (1971)

C’est un synthé américain qui est devenu rapidement le meil-leur synthé modulaire ou semi-modulaire du marché car, à la différence des Moogs qui n’avaient pas de sons préexistants, quand on allumait pour la première fois un ARP2600 on pou-vait commencer à jouer en bougeant les potentiomètres. Ça valait beaucoup moins cher qu’un Moog, mais c’était beaucoup plus gros avec un son d’une extrême richesse. Je l’ai beaucoup utilisé sur « Oxygene » ou « Equinoxe », mais aussi sur les albums de Christophe comme « Les Paradis Perdus » ou « Les Mots

Bleus ». Les ARP, ce sont un peu les Stradivarius ou les Steinway de la musique électronique. Ils ont été conçus par des artisans qu’on place aujourd’hui au même niveau que les luthiers qui ont mis au point les violons, les clavecins, le piano, bref tous les instruments acoustiques. Fait étrange : tous ces instruments électroniques de l’époque ont plus ou moins disparu au début des années 80 avec l’avènement du DX7. C’est-à-dire au moment où les Japonais se sont emparés du marché des synthés, avec une vision plus commerciale et agressive que celle qui prédomi-nait alors dans la lutherie électronique. Aujourd’hui, au même niveau qu’un piano ou qu’un saxo, les ARP restent des instru-ments classiques dont on jouera encore dans deux siècles ! La mode actuelle des vieux synthés, c’est la même chose que lorsqu’on met dans les mains d’un guitariste électrique une Les Paul 58 ou une Fender 52, alors qu’il n’a joué jusqu’à présent qu’avec des Ibanez ou des mauvaises copies japonaises. Toute la scène techno depuis les années 90 a grandi avec les plug-in et les émulations de ces instruments, qui sont des imitations numériques peu convaincantes des sons analogiques. Ce n’est pas que je préfère l’analogique au numérique, au contraire je pense que les deux peuvent très bien cohabiter et ma musique en est la preuve. Mais à un moment, il faut oser dire que ce n’est pas du tout la même chose. On ne peut pas comparer un ARP qui, à l’époque, valait quelque 30 000 francs, avec un plug-in à 50 euros, c’est une question de bon sens ! Après avoir vanté les vertus du tout virtuel, on se rend compte aujourd’hui qu’on est fait de chair et de sang et qu’on a absolument besoin d’un rapport sensuel et tactile avec les instruments.

ARP2500 (1969)

C’est le grand frère de l’ARP2600, conçu pour concurrencer le Moog modulaire. Pete Townshend des Who fut l’un des premiers musiciens à l’avoir utilisé en Europe. L’ARP2500 est une très grosse machine qu’on entend dans « Baba O’ Reilly » avec cette séquence qui a été déterminante dans le son des Who  : c’est de l’électronique et non un son de guitare  ! J’essaie d’approcher des gens qui ont un rapport aux synthé-tiseurs proche du mien, comme Pete Townshend ou Peter Gabriel qui a été l’un des premiers musiciens à posséder un Fairlight avec moi.

FAIRLIGHT CMI (1979)

Le Fairlight a été le premier instrument avec lequel j’ai tra-vaillé qui était en rapport direct avec la formation que j’avais reçue au GRM aux côtés de Pierre Schaeffer, soit la musique électro-acoustique, ce qu’on nommera plus tard le sampling. Avec le Fairlight, on pouvait enregistrer et échantillonner n’importe quel son. Un bruit naturel, urbain ou domestique, le jouer sur un clavier et en faire une percussion, un chœur, un son de cordes, un élément constitutif de la musique, des sons improbables dont on ne sait l’origine. C’est un instrument qui a un son très lo-fi avec beaucoup de charme et de chaleur, un grain qui fait penser aux compositions de Bernard Herrmann ou à l’esthétique qu’on retrouve dans les films des années 30 comme Metropolis. Il a beaucoup déterminé le son de Peter Gabriel, et son label Real World, et le mien aussi. Il a marqué ma discographie, à partir de « Champs Magnétiques » mais sur-tout avec « Zoolook » qui est entièrement réalisé au Fairlight. « Oxygene » et « Zoolook » sont deux disques très différents sur le plan sonore, car comme on le sait c’est l’outil qui définit le style et non pas l’inverse. Le Fairlight est un instrument qui, lors de sa mise sur le marché, m’a tout de suite paru extraor-dinaire parce qu’il me rapprochait de la manière dont j’avais abordé la musique électro-acoustique à mes débuts, c’est-à-dire avec deux magnétos, des ciseaux et du Scotch. Pour « Zoo-look », je me souviens avoir enregistré Markus Miller, qui est un des meilleurs, sinon le plus grand, bassiste au monde. En fait, j’ai samplé toutes ses parties avec sa complicité. Passé dans le Fairlight, ça ne sonne plus du tout pareil, la machine a twisté le tout. J’ai aussi samplé des chants esquimaux ou africains, en les considérant sous leur aspect sonore et non pas ethnique, car ce n’était pas le propos, pour les intégrer dans «Zoolook ». Peter Gabriel était plus préoccupé de faire découvrir des musiques différentes, en en découpant des parties et en les intégrant dans des morceaux à tonalité plus rock, pop ou élec-tro. Je pense que cette démarche commune à la même époque a déterminé et généré toute la philosophie du sampling qui, quelques années plus tard, va devenir la culture DJ. Ce qui peut faire rire aujourd’hui, c’est que le Fairlight fonctionnait avec des immenses disquettes qui avaient la taille d’un maga-zine et sur lesquelles tu pouvais mettre une vingtaine de sons qui duraient une seconde chacun. C’est archaïque par rapport à notre technologie (une clé USB standard doit pouvoir stoc-ker 10 000 disquettes de Fairlight), mais les limites de cette machine lui conféraient une poésie extraordinaire. Dans cinq ans, je pense qu’on va redécouvrir cet instrument.

RED BULL MUSIC ACADEMY

WWW.REDBULLMUSICACADEMY.COM

JD800 (1991)

La suite de la philosophie du DX7 et de la voie initiée par les synthés japonais qui vont faire plonger financièrement toute la lutherie américaine. Si je l’ai mis dans la liste, c’est parce que c’est un des premiers synthés polyphoniques japonais à se rapprocher des synthés analogiques, alors que je déteste le DX7 car il laissait penser que la musique électronique ne cherchait qu’à imiter des sons d’instruments acoustiques. Avec le JD800, tu peux modifier le son, comme tu le ferais sur un ARP ou un Moog, mais avec la texture sonore japo-naise, plus fine en quelque sorte. Je m’en suis beaucoup servi sur « Chronology » ou «Revolution ». Ce sont des albums qui ont moins marqué les esprits mais qui sont importants dans ma discographie car ils se situent à une période charnière, floue, où on a encore un pied dans l’analogique et un autre dans ce qui va devenir le numérique.

MEMORYMOOG (1982)

Le premier synthé analogique polyphonique. Jusque-là les synthés, les modulaires, le VCS3, l’ARP, étaient monopho-niques. Si tu voulais une polyphonie tu devais faire quatre sons différents que tu jouais en même temps. Une pratique qui s’est perdue aujourd’hui, ce qui est dommage car ça obligeait à composer de la même manière qu’on écrit pour un quatuor à cordes : violon, alto, violoncelle, contrebasse. Avec le Memory Moog, et d’autres synthés qui arrivent en même temps, d’un seul coup, on peut faire des accords et ça change tout. En bien comme en mal. On a alors cessé de composer de la musique électronique de manière classique, comme le faisait Wendy Carlos. Le Memory Moog, c’était 8  Moog réunis sous le même capot avec une différence de poids : on pouvait mettre en mémoire les sons qu’on créait. Avant, on était obligé, avec une feuille et un crayon, de noter toutes les opérations qu’on pratiquait sur le son, même si on n’arrivait jamais à recomposer le son d’origine à partir des notes prises. Désormais, tu pouvais retrouver le son dans l’état où tu l’avais laissé, même un an après sa composition.

RMI (1974)

C’est un instrument qui a été créé dans les années 70 et qui était révolutionnaire alors, car c’est le premier synthé numérique à l’époque du tout analogique, et dans le monde de l’électronique des années 70 le numérique n’avait pas du tout la côte. Le RMI fonctionne selon le principe de la synthèse additive alors que les synthés analogiques se basent sur la synthèse soustractive. La synthèse additive, pour schématiser, c’est comme les tirettes d’un orgue, c’est-à-dire que tu rajoutes des fréquences les unes aux autres et par couches de la même manière que sur un orgue tu peux ajouter 32 pieds, puis 16, puis 8, puis 4, qui sont en fait les octaves, ou les tiers d’octave ou les quintettes. C’est une technique qu’on retrouve beaucoup dans Deserted Palace ou sur le morceau « Oxygene 5 » où toute la séquence est faite au RMI. Ça donne un son très différent de ce que l’on entendait à l’époque, justement parce que le côté numérique ajoute une certaine froideur. C’est un peu ce que le film Tron a été pour le cinéma à l’époque.

EMINENT 310 (1970)

Ce synthé définit mon son, depuis « Les Mots Bleus » de Chris-tophe ou les chansons pour Patrick Juvet jusqu’à « Oxygene » où je l’ai énormément utilisé, et « Equinoxe ». Aujourd’hui encore, je m’en sers beaucoup. C’est, avec le VCS3, un des instruments fondateurs de ma musique. C’est un orgue développé par des Hollandais qui ont trouvé les premiers l’astuce pour faire des cordes à partir de sons électroniques. C’est le premier string ensemble dont est sorti le Solina qui est désormais plus connu que l’Eminent, même si l’Eminent c’est trois Solina ensemble avec un son nettement plus riche. On entend l’Eminent sur « Oxygene » et « Equinoxe », ce côté planant et phasé. Pour la pe-tite histoire, c’est du VCS3 et du Eminent passés dans une Smalltone, une pédale de phasing pour guitares, qui donne un son très opulent, qui rappelle un son de cordes, mais en bien plus électro.

OP-1 (2011)

Un tout petit nouveau, sorti il y a moins d’un an et inventé par des Suédois. C’est un synthé qui n’a l’air de rien, minuscule avec un look de petit Casio jouet, mais qui cache une machine très haut de gamme, fabriquée avec des instruments militaires. Il est 100 % numérique, mais définit quelque chose de tout à fait nouveau dans la portabilité. Il y a longtemps que je n’ai pas vu quelque chose d’aussi intéressant, flexible et créatif. Surtout, ses inventeurs ont réintroduit une notion qui manquait cruel-lement : l’humour. Il faut se souvenir que les Moogs, les ARP et tous les premiers synthés ont été créés par des fous furieux qui inventaient des instruments absolument pas raisonnables et financièrement hasardeux. Ils vendent leur OP-1 au compte-gouttes sur internet, et la notice d’explication est en japonais pour brouiller les pistes… Je les ai rencontrés après ma tournée en Suède, toute l’équipe est venue backstage et on a improvisé un bœuf. Si je l’ai choisi, c’est pour montrer que n’importe quel instrument de n’importe quelle époque peut avoir une valeur complètement intemporelle. Je suis sûr que des musiciens utili-seront encore l’OP1 dans 50 ans !

MELLOTRON (1963)

Un autre instrument mythique de la scène électro-acoustique, puisque que c’est un des premiers samplers, et ce bien avant le Fairlight. Ce qui est intéressant avec le Mellotron, c’est qu’il a été conçu à une époque, les années 60, où la philosophie du sampling n’était pas du tout à l’ordre du jour. C’est, une fois de plus, l’idée d’un illuminé qui se demandait comment jouer des chœurs de manière électronique. Le principe, c’est qu’on enregistre un chœur en studio sur une bande et ensuite on installe autant de petits magnétophones avec des bandes qui durent sept secondes qu’il y a de notes sur un clavier. Le Mello-tron, c’est une sorte de petit piano qui, lorsque tu appuies sur une note, met en contact la tête de lecture avec le magnéto, déclenche une bande qui va être lue par la tête de lecture pen-dant sept secondes. Cela te permet d’avoir toute une gamme de sons. Quand tu joues du Mellotron, tu as l’impression d’en-tendre les soundtracks des films muets des années 30, ce côté pleureur et distordu qui va définir le son de plein de morceaux des Beatles, des Moody Blues, du Procol Harum. En fait, la pop et le rock des années 60 vont utiliser cet instrument pour en faire des chœurs avec un côté rétro et vintage. C’est le son des années 40 adapté à la musique des années 60.

RED BULL MUSIC ACADEMY SESSION avec JEAN-MICHEL JARRE

LE MERCREDI 16 MAI à l’Hôtel de Ville de Lyon Inscription obligatoire sur www.redbull.fr/rbma

OXYGENE REVISITED

LE MERCREDI 16 MAIà l’Hôtel de Ville de Lyon

avec Danger, Acid Washed et Arandel sur invitation

RED BULL MUSIC ACADEMY

CHRIS & COSEYOHM SWEET OHM

Issu de la galaxie noire Throbbing Gristle, le duo adultérin Chris & Cosey marche sur les ruines de la musique industrielle et propose une alternative au nihilisme avec un son mélancolique à base d’antimatière.

Par Olivier Lamm

Formé dans l’environnement noir et hostile d’un des collectifs les plus radicaux de l’histoire de la pop, le duo Chris Carter & Cosey Fanni Tutti a dû braver bien des obstacles pour devenir cette entité musicale

et intime qui allait révolutionner la pop électronique. À com-mencer par Genesis P. Orridge, monstre sacré, premier mari de Cosey et chefaillon de Throbbing Gristle dont le ressentiment à l’égard du couple adultérin fut une source paradoxalement précieuse pour la courte carrière du collectif.

Entre Carter, le petit génie de l’électronique qui bricolait ses machines infernales en silence pendant que les trois autres se roulaient dans la boue et le sang, et Fanni Tutti, la femme fidèle de l’artiste torturé devenue playmate hardcore pour financer le foyer, il y avait pourtant plus qu’une passade adultère : quand Throbbing Gristle s’est dissous en juin 1981, Cosey était déjà enceinte de Chris. Trente ans et une reformation de TG plus tard, leur couple tient bon, et le duo a seulement changé son nom en Carter Tutti pour embrasser avec dignité, peut-être, le troisième âge de sa vie artistique.

Explication de cette longévité : la mission de TG et COUM Transmissions était de réduire la civilisation britan-nique en poussière, celle du duo Chris & Cosey était de la reconstruire après la bataille. Réinstallés dans un village du Norfolk depuis 1984 « pour échapper aux effets de la pauvreté et aux stalkers de Cosey », ils se sont immédiatement remis au travail et émancipés artistiquement pour devenir à leur tour (même si plus discrètement) majeurs. Leur proposition d’electronica sèche et rêveuse était tout aussi vénéneuse que celle de leurs camarades de la scène industrielle, mais beau-coup plus subtile et ambiguë.

À l’orée des années 80, le débat était vif, chez les rock critics, pour savoir si la musique synthétique devait embrasser pour de bon la pop ou se réserver au genre de pavés dans la mare que les TG avaient contribué malgré eux à rendre populaires. Chris & Cosey ont immédiatement fait le (bon) choix de ne pas choisir. Ce n’est donc pas un hasard si leurs cinq ou six premiers albums (« Heartbeat », « Trance », « Songs of Love and Lust », « Technø Primitiv », « Exotika »… tous récemment réédités) forment le Saint Graal de la jeunesse hipster qui achète toutes les rééditions du label Minimal Wave. Longtemps réservé aux gothiques désolés et aux fans d’indus au cœur en chou-fleur, le mélange splendidement fortuit de beats glauques et de fébrilité pop qui fait la singularité de ces disques dans le paysage de la new wave est enfin étudié et reconnu à sa juste valeur comme un miracle esthétique.

C’est que l’équilibre est précaire, et c’est ce qui le rend si précieux. Dans la musique de Chris & Cosey, il y a l’ennui de la campagne post-industrielle anglaise sous la pluie, la monotonie d’une électro-pop frigorifique à la limite parfois de la seconde zone sordide du tout venant 80’s ; mais il y a aussi l’inventivité foisonnante de Carter, pionnier injustement méconnu de la musique électronique anglaise, qui fut le pre-mier à posséder une boîte à rythmes TR-808 dans le Royaume (demandez donc à Carl Craig ce qu’il en pense). Il y a enfin, surtout, la voix toxique de Cosey, parfois amoureuse, souvent traîne-misère, toujours incertaine, qui mue les cauchemars en extase érotique et inversement.

Naïf et jusqu’au-boutiste à la fois, Chris & Cosey n’est pas un groupe d’électro-pop comme les autres parce qu’ils ont tout fait de travers pour oublier le passé. « Après Throbbing

Gristle, ni l’un ni l’autre nous ne souhaitions faire de la musique industrielle. Nous avons dû nous consumer pour en sortir. On s’est laissé aller, comme on sait si bien le faire. Les années 80 étaient une période très excitante pour faire de la musique électronique. Nous n’avions aucune formation musicale, donc le simple fait de vérifier si nous étions capables de composer des chansons était en soi un acte expérimental. »

Dernière explication de l’impression d’extase amoureuse que procurent jusqu’à ses moments de désespoir et de violence, le duo Carter et Fanni Tutti n’a jamais arrêté les expériences en solitaire et les collaborations, si bien que chacun de leurs disques a des airs de retrouvailles. Inséparables à la scène comme à la ville, ils ont fait de leur vie leur œuvre et leur œuvre ressemble à la vie, ou peut-être à cette magnifique double inversion perverse qui ouvre le bouleversant « Songs of Love and Lust » : « Driving blind to Hell knows where, it’s never like this when I’m not with you ».

Carter Tutti Void : « Transverse » (Mute Records)www.chrisandcosey.com

Retrouvez Cosey Fanni Tutti en interview sur www.rbmaradio.com

CHRIS & COSEY, nuit 1 - Scène 3Mercredi 16 mai 2012 / 00h00 - 01h00Anciennes Usines Brossette

RED BULL MUSIC ACADEMY

WWW.REDBULLMUSICACADEMY.COM

CHRIS & COSEY EN 10 MORCEAUX Par Jonnie Wilkes d’Optimo

Cowboys In Cuba TranceDe la dream machine music.

Walking Through Heaven Songs of Love and LustUne des plus parfaites et extatiques tranches d’électronique jamais enregistrée.

Do Or Die Techno PrimitivFrissons garantis.

Driving Blind Songs of Love and LustLa face A de l’album « Songs of Love and Lust » dont est tiré ce titre est probablement celle que je préfère dans toute l’histoire disco-graphique.

Dr. John (Sleeping Stephen) Exotika

Le rituel consistait à déshabiller et laver le corps.

Sweet Surprise Sweet Surprise

Sleazegasm.

Fantastique Muzik fantastique !

De la transe à l’état pur. Carl Craig aimait tellement ce morceau qu’il a accepté de le remixer gracieusement.

Voodoo Heartbeat

Tout est dans le titre : une programmation vaudou !

October Love Song October (Love Song) La pop portée à sa perfection.

Love Cuts Songs of Love and LustCoupant comme un couteau.

RED BULL MUSIC ACADEMY

OSTGUT TONLE SON DU BERGHAIN

« LE BERGHAIN INCARNE L’IDÉE QUE JE ME FAIS DE LA TECHNO : ANARCHISTE, UNDERGROUND, SANS COMPROMIS, UNIQUE, DINGUE, SEXY, REAL…  » MARCEL DETTMANN

Illustration par Caroline Andrieu

RED BULL MUSIC ACADEMY

WWW.REDBULLMUSICACADEMY.COM

Le Berghain, club berlinois qui héberge les résidences des artistes du label Ostgut Ton, a donné naissance à une esthétique composite. Un alliage séduisant de références à l’énergie sexuelle du Paradise Garage, au romantisme industriel du Bauhaus et au versant minima-liste de la techno de Détroit.

Par Pierre-Jean Chiarelli

L’ hydre Berghain-Ostgut prolonge la seule alchimie possible pour structurer une scène novatrice ancrée dans la tradition. Dans l’histoire de la house, les labels et les artistes pionniers se sont toujours développés

dans le voisinage d’un grand club. Les New-Yorkais, qui ne se trompent jamais en matière de dance music, ont été les premiers à rapprocher club et église. « Spiritualité du dancefloor », écrivait le journaliste Didier Lestrade dans le Libé pertinent des années 90. C’était de ça qu’il s’agissait pour ceux qui se rendaient au Paradise Garage à Manhattan, ou au Zanzibar à Newark. Sortir était alors une expérience proche de celle qu’on observe dans les églises baptistes, avec ces offices dominicaux électriques qui conduisent à la transe. Une téléportation cathartique qui durait douze heures avec, en compléments hédonistes, les drogues et le sexe. Ailleurs également, à Chicago, au Warehouse de Frankie Knuckles et au Music Box de Ron Hardy, ainsi qu’à Détroit, au Heaven de Ken Collier ou au Music Institute de Derrick May, l’effusion saturait l’espace. De quoi marquer à vie les clubbers en herbe et éveiller en eux des vocations créatrices.

La meilleure explication de ce lien fécond entre fréquentation des clubs et production musicale, c’est DJ Deep qui me l’a donnée. Il disait que si le swing de Frankie Feliciano était à ce point monstrueux, c’était parce que ce dernier enre-gistrait dans la foulée de soirées passées au Shelter. Encore imprégné de la puissance du club et secoué d’émotions, Feliciano était immédiatement « dedans » lorsque, de retour chez lui, il branchait sa MPC et ses claviers. Pour avoir passé une journée chez Kerri Chandler, je confirme en outre que ces artistes créent dans des conditions qui sont celles d’un club à l’heure de pointe : les caissons de basses à fond !

Ce qui rend passionnante la trajectoire des artistes Ostgut Ton, c’est qu’à leur tour ils sont devenus l’écho, l’ombre portée de « leur » club. On sait que les sets at home de Klock et Dettmann sont d’incroyables marathons (ils s’étalent parfois du samedi soir au lundi), ce qui a une incidence sur l’efficacité sidérante des morceaux. Ceux parus sur le label, qui est, rappelons-le, la propriété du Berghain, mais tout autant ceux sortis sur Klockworks et Marcel Dettmann Records. À partir du milieu des années 2000, les deux amis berlinois ont ressuscité, avec plus de talent que la concurrence, l’esthétique imparable du track. Vingt ans après les morceaux désossés réalisés à l’arrache par des ados noirs et latinos à Chicago, on se prenait en pleine poire des disques abstraits et agressifs composés sur ordinateur par des intellos trentenaires.

Acousticiens géniaux, princes de la volumétrie, surdoués du placement et de l’espace sonores, ces as du plug-in ont fait renaître la techno en s’attaquant respectueusement à ses racines. Ils ont notamment rendu ses lettres de noblesse à

la répétition et, partant, au minimalisme, qui avait sombré dans des formules creuses. « Glandula », le premier Klockworks, qui mêle répétition et tension, a presque valeur de manifeste. De l’art de « dramatiser » la musique en contenant, sous le joug des basses et du beat, le crescendo alarmant de phrases au bord de l’explosion. Car il faut l’avouer, la musique de Ben Klock et, à un degré moindre, celle de Dettmann et de Ryan Elliott, est sacrément dérangée. Fruit de l’instinct et de l’intellect, elle excite et tape sur le système en même temps. Face à ses yeux clairs, un jour d’hiver où je l’avais interviewé à New York, j’avais capté la singularité borderline du style de Klock. Peu loquace, timide mais hyper intense, le bonhomme au visage de man-nequin est une personnalité paradoxale dont les contrastes et la complexité trouvent à s’exprimer dans la musique. La sienne en tout cas. Mystique slash psychotique, l’Allemand ? Certes, mais capable de suavité, comme en témoigne son fantastique album « One » (2009), plus coloré que ses maxis et merveilleusement adapté à une écoute enveloppante, en voiture ou à pied à travers les rues.

Ben Klock insiste par ailleurs sur la dimension sexy et organique de sa musique. Celle-ci est au diapason de la permissivité chic qui se déploie dans les alcôves du Berghain. Si les stars de la constellation Ostgut restent fidèles aux principes originels (pas d’artifice, l’artiste s’efface derrière le pouvoir de la musique), il n’en reste pas moins que Berghain est aussi un phénomène pop qui attire les branchés de tous pays. Mais si célébrité et identification il y a, elles s’apparentent plutôt à ce que peut susciter, en cinéma, un David Lynch. Le rayonnement culturel de l’entité Berghain-Ostgut Ton reflète la complexité de l’époque, angoissante et incertaine — en particulier pour les jeunes. Dans un contexte de malaise généralisé, où un stress diffus et constant finit par faire douter de tout, le club redevient l’écrin idéal pour aller vers les autres, réapprendre à aimer. Véritable sas spatiotemporel de décompression, il est le théâtre d’abandons collectifs aux plaisirs troubles de l’immersion dans une atmosphère pénétrante, qui violente les inhibitions et libère le corps et l’âme à la fois.

Il y a peu, c’est d’une seule voix que Klock et Dettmann affirmaient que le Berghain était plus un temple qu’un club, un autre monde, exempt de stress et propice pour cette raison à toutes les euphories. En interview, Marcel Dettmann révèle sa bonne humeur. Moins ténébreux que Ben Klock, il se montre joueur avec les journalistes, n’hésitant pas à plaisanter avec eux, confiant sa joie de vivre un rêve éveillé depuis qu’il se produit dans le monde entier. Il est fier de son succès sans sonner faux et sans que cela, surtout, ne remette en cause son intégrité d’artiste 100% underground. L’autodérision pointe lorsqu’il dit passer plus de temps à préparer ses sets comme un maniaque qu’à les exécuter. Musicalement, il a suivi la

même évolution que Ben Klock, sortant des titres ravageurs sur son label avant de publier un premier album sur Ostgut plus recherché. Le sobrement intitulé « Marcel Dettmann » a pourtant déçu les fans, qui s’attendaient logiquement à un truc aussi marquant que One. C’est vrai que le disque ressemble trop à une suite sans accroc de morceaux. La déception vient sûrement du fait que les CD-mixés de Dettmann et ses podcasts avaient habitué les auditeurs à un niveau émotionnel très élevé.

« Conducted », notamment, un mix conçu l’an dernier pour Music Man, donne une idée de l’intensité démoniaque que le DJ peut imprimer dans ses sets en variant les styles et les époques. Dans ce disque, il n’hésite pas à briser la ligne en ressortant du grenier « Channel B » de Mono Junk, brutale déflagration hardware qui rappelle autant les débuts de la techno que les beats de DJ Premier. Dettmann mixe ce morceau avec le classique de Reel By Real, « Sundog », dont les saccades et le sample gangsta flirtaient dès le début des années 90 avec le hip-hop. Des frères de son de Klock et Dettmann — on pense à Sandwell District et Skudge — pratiquent dans leur coin ce mélange qui attise la fougue de leur musique et de leurs performances.

Enfin, il fallait un Américain à Berlin pour rappeler à la capitale allemande son héritage dub techno. L’arrivée du discret Ryan Elliott sur Ostgut et son recrutement comme résident au Berghain met de l’huile dans la machine infernale lancée par les Ben Klock, Marcel Dettmann, Roman Lindau et Martin Buttrich. Transfuge de Spectral Records et natif de Détroit, Elliott n’a pour l’instant sorti qu’un maxi sur Ostgut, un deux-titres intéressant. Situé au croisement de la techno et de la house, « Rocksteady » rapproche le Berghain et son annexe, le Panorama Bar, où officient Cassy, Steffi et Prosumer, des DJs plus soft. Peut-être le signe qu’Ostgut Ton va explorer plus avant les métissages potentiels qu’offrent les nombreux artistes d’origine turque de Berlin.

SOIRÉE OSTGUT TON avec Ryan Elliott, Ben Klock et Marcel Dettmann,

LE VENDREDI 18 MAI 2012 de 14h00 à 22h00à l’Hôtel-Dieu – Scène 2 : Cour d’honneur

Retrouvez le label Ostgut Ton en interview sur WWW.REDBULLMUSICACADEMYRADIO.COM

RED BULL MUSIC ACADEMY

LAURENT GARNIER VS AGORIALE CHOC DES TITANS

« À LA TROISIÈME ÉDITION DE NUITS SONORES, JE ME SUIS DIT QU’IL Y AVAIT ENFIN UN FESTIVAL EN FRANCE QUI AVAIT LA MÊME FORCE QUE LE SÓNAR DE BARCELONE, EN PLEINE VILLE, SUR PLUSIEURS JOURS, AUTOUR DE LA MUSIQUE URBAINE, OÙ LES ARTISTES FRANÇAIS SERAIENT FIERS DE JOUER. C’ÉTAIT INÉDIT ! » LAURENT GARNIER

Illustration par Caroline Andrieu

RED BULL MUSIC ACADEMY

WWW.REDBULLMUSICACADEMY.COM

Piliers de Nuits Sonores, le festival qu’ils aiment à la folie, les deux producteurs sont les représentants d’une techno à la française qui se nourrit de multiples influences. Une techno qui avance et fédère. Si Laurent Garnier parcourt aujourd’hui les clubs du monde entier avec son trio hybride, entre mix et live, LBS, Agoria, lui, est resté fidèle au deejaying pur. Malgré les dix ans qui les séparent, les deux amis sont unis par la même foi en la musique électronique et partagent souvent les mêmes visions.

Entretien par Olivier Pernot

Comment êtes-vous devenus les parrains du festival ?Agoria : Je me suis battu pour que ce festival existe. Je me rap-pelle qu’on avait entraîné le nouveau maire de Lyon, Gérard Collomb, pendant toute une nuit. Avec Vincent Carry (le direc-teur de Nuits Sonores, ndr), on l’emmenait dans les bars où il rencontrait des artistes locaux. Il a trouvé ça génial cette effer-vescence musicale dans sa ville. Il a décidé de nous soutenir alors qu’il aurait pu aider un festival de salsa ou une grande soirée avec David Guetta et Bob Sinclar… Je me souviens aussi quand nous avons rédigé le projet de Nuits Sonores chez Vin-cent, sur un coin de table. J’étais la caution artistique du festival et j’en suis devenu naturellement le parrain.Laurent Garnier : Ce qu’il faut savoir, c’est que Lyon a été l’une des pires villes en France pour la musique électronique. C’était hardcore de venir y jouer. Il y avait des descentes de police, les stups. J’ai des souvenirs désagréables de fin de soi-rée. J’ai fini au gnouf. Lyon, c’était violent et pendant long-temps, il ne s’y passait rien.

Laurent, quand es-tu venu pour la première fois à Nuits Sonores ?Laurent Garnier : À la troisième édition. Enfin, en France, il y avait un festival qui avait la même force que le Sónar de Bar-celone ! Un festival en pleine ville d’une taille importante, sur plusieurs jours, autour de la musique urbaine et où les artistes français seraient fiers d’aller jouer. C’était inédit en France.Agoria : On voulait que le festival ait cette dimension populaire et de proximité, avec de la musique dans les rues la journée, des soirées dans les bars, les petits clubs. Mais aussi des grands-messes dans des lieux inédits, des bâtiments du patrimoine lyon-nais. C’est rare d’avoir un festival qui propose tout cela à la fois.Laurent Garnier : J’ai adoré mon premier passage à Nuits So-nores. La dernière heure avec tout le monde sur scène. J’étais tellement parti… Je jouais des trucs complètement fous. Le public était hystérique. Je suis revenu dès l’année suivante et à chaque édition, avec un projet différent.

Quels ont été les autres meilleurs moments de tes sept participations ?Laurent Garnier : Il y a eu le ciné-mix à l’Institut Lumière sur un film de Jean Epstein, un moment très fort dans un endroit

incroyable. LBS en 2010 aussi, c’était une des trois premières dates du projet. J’ai flippé car l’idée de LBS était de jouer dans des petites salles. Et là, c’était immense. (rires) Mais dès le premier morceau du live, c’était complètement dingue. L’année der-nière, j’ai fait danser les gamins. Ça, c’est toujours génial ! Pour moi, Nuits Sonores c’est toujours de bons moments.

Quel souvenir gardez-vous de la nuit où vous avez joué ensemble en ping-pong ?Agoria : J’avais l’impression de jouer avec un alter ego. On ne se parlait pas. Nos disques se répondaient de façon tota-lement naturelle.Laurent Garnier : Parfois, on passait plusieurs disques chacun, on bifurquait sur de la drum’n’bass.Agoria : On ? C’était surtout toi qui nous emmerdais avec ta drum’n’bass ! (rires)Laurent Garnier : C’est ça, t’es sectaire ! Sans rire, ce mix avec Seb est un de mes vingt meilleurs sets de toute ma vie. On n’avait rien préparé et ce fut très fluide. On était comme deux gosses qui font une construction avec des legos et qui essaient d’aller de plus en plus haut. Et on est allé loin. C’était extrême-ment agréable. Un voyage incroyable…Agoria : Et le public nous suivait dans ce mix. Il nous portait. C’était un truc de taré !Laurent Garnier : C’était simple, sans compromis… et j’ai pu jouer de la drum’n’bass ! (rires)

Qu’est-ce que vous avez prévu cette année à Nuits Sonores ?Agoria : Rien. On laisse la place. C’est génial. Même s’il y a un DJ malade, il faudra trouver un autre remplaçant que moi.Laurent Garnier : Non, on ne joue pas. Je suis touriste cette année à Nuits Sonores… Mais une année, j’aimerais bien jouer sur les petites péniches. Une par nuit. Une soirée funk, une soi-rée reggae/drum’n’bass, une soirée rock, une soirée techno.Agoria : Il faudrait qu’on joue pour l’after aussi, de 6h du matin à midi. Ce serait beau.

Qu’est-ce que Nuits Sonores a apporté au pay-sage techno français ?Laurent Garnier : Une légitimité, un lieu qui représente la musique techno. Ce n’est pas le seul festival en France, il y a

le Name dans le Nord, Astropolis en Bretagne. Mais les Nuits Sonores ont posé une grosse brique pour construire la maison.Agoria : Nuits Sonores a apporté aussi un vrai message culturel. C’est rare d’avoir un festival qui n’a ni but mercantile ou politique, mais seulement culturel, en défendant une exigence artistique.

Est-ce que pour vous la France est un pays techno ?Laurent Garnier : Je ne crois pas que la France soit un pays fondamentalement techno, mais elle le devient de plus en plus. À une certaine époque, le mot même de techno était difficile à employer en France. Aujourd’hui, c’est moins compliqué.Agoria : Il y a en France des labels que je trouve extraordinaires comme Circus Company. Mais c’est difficile pour eux d’exister car les médias ne relaient pas leur actualité. Les artistes électro-niques français ont besoin d’être plus soutenus. À Lyon, il y a des mecs comme Jay Weed ou Opti qui font des trucs fantastiques.Laurent Garnier : La scène techno française est bien plus grande que ce que le quidam moyen connaît. Il y a plein de petits labels et des mecs en province qui font de la super bonne techno. Comme Madben, <Mars T>. Quand je les soutiens, je me fais critiquer sur ma page Facebook parce qu’ils sont français… En France, on ne se bat pas pour défendre ses produits régio-naux ! À part pour la bouffe ! (rires)

Qu’est-ce qu’il manque en France ? Des clubs ? Des médias ?Agoria : Il manque parfois des couilles ! Il en fallait pour créer Nuits Sonores à Lyon, alors que le milieu de l’électronique est très centré sur la scène parisienne. Et puis, on a laissé parfois passer des opportunités. La Techno Parade, par exemple, on voit ce que c’est devenu…Laurent Garnier : C’est vrai qu’en France, il y a peu de clubs et pas de culture club par rapport à l’Angleterre, l’Espagne ou l’Allemagne. Mais il y a des artistes, dans plein de villes. Seule-ment, souvent, ces producteurs français ne pensent qu’à per-cer à l’étranger. Il faudrait qu’ils commencent à faire plus de choses dans leur ville. Des soirées, des labels, des petits clubs. Puis faire grandir le truc. Aujourd’hui, cela veut dire quelque chose d’être Français et de faire de la musique électronique.

RED BULL MUSIC ACADEMY

Comment voyez-vous l’évolution du métier de DJ ?Laurent Garnier : C’est lui le jeune, il va te le dire !Agoria : Je deviens presque vieux déjà ! (rires) Je crois beau-coup à l’interaction avec le public. La question sera : comment parvenir à intégrer le public dans ce qu’on fait réellement sur scène ? Il pourrait avoir un rôle plus fort que seulement dan-ser et participer à l’effervescence de la nuit. Une nouvelle sorte de clubbing va être inventée. Mais on aura toujours ce besoin simple de la danse, cette envie de partager. Depuis quelques an-nées, ce qui m’embête dans le métier de DJ, c’est que le public regarde de plus en plus qui est sur scène. Le DJ passe son temps à lever les bras car avec les nouvelles machines, tout est réglé d’avance. La connexion par la seule musique a un peu disparu. C’est l’époque de la starification, de l’image à outrance, des DJs qui sont devenus des marques.Laurent Garnier : Je trouve surtout qu’il y a de plus en plus de DJs qui n’ont pas grand-chose à raconter. Alors que la base du métier de DJ, c’est de lire son dancefloor, de créer une relation avec lui pour l’emmener en voyage avec la musique, lui faire oublier ses emmerdes de tous les jours et lui donner des émo-tions. Aujourd’hui, il y a une course de vitesse. C’est à celui qui fera les plus belles vidéos, qui te flashera le plus dans ta gueule. On oublie la musique.

C’est triste comme constat…Laurent Garnier : Rends-toi compte : certains DJs mixent sans casque ! Comment font-ils ? J’en écoute beaucoup, et la plu-part m’ennuient. C’est trop lisse, trop propre et si eux-mêmes s’emmerdent à jouer des disques, où va-t-on ? J’ai envie de voir des gens qui vibrent. Le DJ doit faire quelque chose d’unique, d’inédit, capter le moment et aller loin. Ne jamais se répéter. Ne jamais raconter la même histoire.Agoria : Mixer, jouer des disques, cela doit rester simple, fluide. Dès qu’il y a une armada de technologie, cela se complique. Ça devient une autoroute.Laurent Garnier : Je trouve malheureusement que la technolo-gie ne rend pas les DJs plus créatifs.

Est-ce que c’est dur de vieillir dans ce métier ?Laurent Garnier : Quand je vois François Kevorkian qui a 58 ans, je trouve que tout va bien. Il envoie toujours la monnaie et joue avec autant de passion. Moi, j’ai 46 ans. Je suis plus âgé que les gens qui viennent m’écouter. Je n’en souffre pas. Si un jour mes potes me disent que je suis limite, j’arrête tout de suite.Agoria : La passion du DJ, ça se voit dans ses yeux. Laurent, il a toujours les même yeux d’enfant. Il est dedans. Tant que tu as ça, l’âge n’est pas un souci. Même si les DJs ont des horaires de tarés. À l’inverse des groupes de rock, ces feignasses qui ter-minent leurs concerts à 1h du mat. Samedi dernier à Londres, j’ai fini mon set à 8h30 du mat. Il y a une usure physique, c’est sûr.

Laurent Garnier : Je le sens aussi. Quand je me couche après les lives vers 7h du mat, je suis complètement rincé. Pour moi, physiquement, ça devient plus difficile.Agoria : Surtout qu’on nous propose toujours plus de dates.et même des week-ends avec quatre soirées. Il faut savoir dire non. Un week-end par mois, je suis off. Pour rester avec femme, voir mes potes. À 36 ans, j’ai besoin de me ressourcer.Laurent Garnier : Quand tu auras mon âge, tu te reposeras deux week-ends par mois ! (rires)

Laurent, que représente Agoria pour toi ?Laurent Garnier : Seb, c’est mon petit frère. C’est un des très rares DJs et musiciens avec qui je me sens en phase. Artistique-ment, mentalement. musicalement, je me vois tellement chez lui. Il a un esprit de famille. Ce qu’il a fait avec InFiné, c’est la suite de ce que j’ai essayé de faire avec F Communications. Tout est logique. On me demande souvent : « Qui va prendre ta relève ? » (rires) Mais c’est lui ma relève !

Agoria, que représente Garnier pour toi ?Agoria : Quand j’avais 18 ans, j’ai été éduqué par Laurent Gar-nier, F Communications, les soirées au Rex Club. C’était les belles heures, les premières de la techno. Laurent, c’est une légende, un pionnier, une idole et ce qu’il dit sur moi me touche énormé-ment. J’ai suivi l’aventure Fnac Dance, puis F Com. J’ai acheté les disques de Saint Germain, Lunatic Asylum, Juan Trip. J’étais à fond. Quand j’ai fait le maxi « La 11ème Marche », je voulais signer à tout prix sur F Com. À l’époque, on ne se connaissait pas. Quand il m’a appelé, j’avais déjà signé le morceau ailleurs. C’était un drame pour moi de ne pas être sur F Com.Laurent Garnier : J’aurais adoré signé « La 11ème Marche » ! Je l’ai beaucoup joué ce titre.Agoria : Plusieurs fois, au Japon ou en Amérique latine, les DJs des clubs locaux me disaient : Laurent est passé, il a joué ton disque et nous l’a donné. C’était cool de sa part de faire ça pour moi.

C’est le nouveau Laurent Garnier ?Laurent Garnier : Ah non, ce serait très chiant. Je suis un peu tête de con…Agoria : En plus, je ne joue pas beaucoup de drum’n’bass ! (rires)

LAURENT GARNIER VS AGORIALE CHOC DES TITANS (SUITE)

Retrouvez Laurent Garnier et Agoria en interview et en mix sur WWW.RBMARADIO.COM

RED BULL MUSIC ACADEMY

WWW.REDBULLMUSICACADEMY.COM

KODE 9

Musicien, DJ, chercheur, prof de philo et label-manager, l’Écossais Steve Goodman est l’un des personnages les plus occupés de la musique électronique contemporaine. Militant, irascible et droit dans ses bottes, c’est aussi l’un des plus attachants. Secoué par la jungle dans sa prime jeunesse à Édimbourg (il qualifie sa découverte du genre comme l’événement musical le plus important de sa vie), il mixe depuis 1990 et n’a jamais quitté le giron de ce fameux « continuum hardcore » qui fait la singu-larité de la dance music anglaise depuis le début des années 90.

Par Olivier Lamm

Kode 9 fait partie de ceux qui ont œuvré dans l’ombre pour l’émergence de la dernière incarnation majeure de la drum’n’bass, le dubstep : « C’était au début des années 2000… Il m’arrivait de mixer sur une

radio pirate de Brixton… J’organisais une soirée qui s’appelait déjà Hyperdub au Bug Bar, un petit club pas loin de chez moi. Je jouais du two-step, surtout les morceaux les plus dubby du genre. Parfois, Darren Cunningham, qui fait maintenant Actress, pas-sait et jouait de l’électro et de la Detroit techno. Le petit nom qu’on donnait à ces soirées entre nous, c’était Hyperdub 130, parce que toute la musique que l’on jouait tournait autour de 130 BPM. Je suis fasciné par la manière dont des cultures entières peuvent se réunir autour d’une pulsation précise à une cadence donnée. Et puis, en 2002 ou 2003, les gens d’Ammunition qui organisaient les soirées FWD>> à Soho m’ont proposé d’animer une émission sur Rinse FM. Je venais de sortir un maxi avec Benny de Horsepower Productions, à qui je donnais des coups de main de temps en temps pour leur site dubplate.net… »

Comme la plupart des pionniers, Goodman se tient pourtant volontiers à distance d’une variété musicale qu’il considère comme transitoire et dont il peine à cerner les contours. Il a bien sûr signé plusieurs morceaux séminaux du genre (dont « Sine of the Dub », relecture abyssale et impres-sionniste du « Sign o’ the Times » de Prince), déniché avec Burial son artiste le plus emblématique et dirige d’une main de fer Hyperdub, son label le plus identifié ; mais sa musique elle-même, en constante évolution, résiste indéfiniment aux carcans établis par ses camarades de la scène comme le crew

Digital Mystikz, Skream ou Benga. Refusant de choisir entre la voie commerciale des uns et le purisme monacal des autres, Kode 9 s’est frayé une troisième voie à mi-chemin du dancefloor et du précipice, un régime esthétique d’autant plus singulier qu’il a l’air complètement naturel (un de ses morceaux les plus emblématiques ne s’appelle-t-il pas « 9 Samurai » ?) « Au centre de tout, il y a la basse. Elle ma principale préoccupation, et elle apparaît dans tous mes champs d’expression. J’ai d’ailleurs remarqué que ma musique peut s’écouter de plusieurs manières, dans différents contextes, mais je n’ai toujours pas bien saisi son propos. Le seul mot que j’ai trouvé pour la décrire de manière satisfaisante vient du registre culinaire britannique : le bubble and squeak. C’est l’habitude qu’a la working class britannique d’accommoder les restes de la semaine avec le rôti du dimanche midi : un peu de patates, un peu de chou, un peu de viande qu’on mélange et qu’on frit en même temps. Ce n’est pas très bon pour la santé, mais c’est une manière de sublimer les petits restes qui nous compliquent la vie. »

De cette basse totémique dans son œuvre, Goodman a également tiré le livre Sonic Warfare, somme théorique sur l’usage des infrasons comme armes d’intimidation au sens large, et sur la manipulation des masses par la peur en général. Sans beaucoup d’effort, on reconnaît un fil rouge qui court depuis ses premiers morceaux jusqu’à « Black Sun », opérette d’anticipation dystopique où une catastrophe nucléaire inexpliquée agit de manière différente sur les diverses classes de la population qui se bourrent de drogues de synthèse pour bronzer sous le soleil noir ou partent en exil vers une nouvelle terre promise religieuse.

Passionné d’ésotérisme et de science-fiction (« Soleil Noir » est une nouvelle de J.G. Ballard dans laquelle la Terre a cessé de tourner sur elle-même), Goodman n’oublie jamais la dance music quand il passe des disques dans un club, mais voit les choses en grand lorsqu’il élabore son propre univers centrifuge. À bien des égards, « Black Sun » est le premier concept-album de l’histoire du dubstep. Mais derrière ce fameux « soleil noir » à l’histoire mouvementée (de la Société Théosophique à l’aile paranormale du parti nazi) se cache aussi un déboire tout personnel. « Quand Burial a été nominé pour le Mercury Prize en 2008, le tabloïd The Sun a lancé une campagne pour découvrir son identité et briser son vœu d’anonymat. Ça nous a tous touché et mis très en colère. J’ai enregistré le morceau éponyme peu après et dans ma tête, le terme « black sun » fait d’abord référence aux cendres laissées après la combustion de ce torchon dans ma cuisine : une petite tentative ritualiste de maudire le journaliste responsable de toute cette affaire. »

« JE SUIS FASCINÉ PAR LA MANIÈRE DONT DES CULTURES ENTIÈRES PEUVENT SE RÉUNIR AUTOUR D’UNE PULSATION PRÉCISE, À UNE CADENCE DONNÉE. LE NOM QU’ON DONNAIT À CES SOIRÉES, C’ÉTAIT HYPERDUB 130, PARCE QUE TOUTE LA MUSIQUE QUE L’ON JOUAIT TOURNAIT AUTOUR DE 130 BPM. »

KODE9

SAMEDI 19 MAI 201202H00 - 03H30ANCIENNES USINES BROSSETTE

Retrouvez Kode9 en interview et en mix sur WWW.REDBULLMUSICACADEMYRADIO.COM

RED BULL MUSIC ACADEMY

« JE M’ÉTONNE QUE LA PLUPART DES GENS IMPLI-QUÉS DANS LA MUSIQUE OU LE CIRCUIT NOCTURNE SEMBLENT SI PEU ATTACHÉS À LA SEULE CHOSE VRAIMENT IMPORTANTE DANS L’EXPÉRIENCE MUSI-CALE : L’ENVIRONNEMENT SONORE ! » DANIEL WANG

Robert-Johnson, Francfort, par Andre Giesemann

RED BULL MUSIC ACADEMY

WWW.REDBULLMUSICACADEMY.COM

LAST NIGHT A SOUND SYSTEM SAVED MY LIFE

Que serait un bon disque sans un bon sound-system ? Et d’abord, c’est quoi un bon sound-system ? Si certains clubs ont bâti leur légende, comme leur longévité, sur la qualité de leur son, la plupart ont toujours assuré le minimum syndical. Daniel Wang, musicien, DJ, producteur et fondateur du sémillant label Balihu, nous éclaire une bonne fois pour toutes. Les mauvais sound systems n’auront désormais plus d’excuse.

Par Daniel Wang, édité par Patrick Thévenin

J’ai joué et entendu des disques dans beaucoup d’endroits différents, tout autour du monde, au cours des six ou sept der-nières années, et j’ai remarqué à quel point la musique sonnait bien ou mal selon les lieux, où en général, le rendu sonore est loin d’être idéal. Je m’étonne que la plupart des gens impliqués dans la musique ou le circuit nocturne (en Europe, du moins) semblent si peu attachés à la seule chose vraiment importante dans l’expérience musicale : l’environnement sonore ! C’est

une liste sans fin d’entrepôts, de gares, de bunkers qu’on a transformés en clubs pour la bonne raison qu’ils sont spacieux et qu’ils « présentent bien », sans égard aucun pour la qualité acoustique des lieux. Par conséquent, j’espère que beaucoup gens liront cet article et feront quelque chose pour améliorer les espaces acoustiques dédiés aux prestations musicales.

Quels principes de base devrions-nous connaître afin d’améliorer nos espaces acoustiques ? Si vous ne voulez pas lire la totalité de l’article, alors apprenez juste les trois courts paragraphes suivants par cœur :

1. Les surfaces dures et plates (comme le ciment et les murs de brique) sont très mauvaises. Elles réfléchissent les ondes sonores tout autour de la pièce un peu comme une collision de boules de billard. Finalememt, vous avez un chaos sonore indescriptible. Ce qui est le cas de la plupart des clubs aujourd’hui, avec leurs espaces intérieurs bruts et non traités.

2. Les surfaces parallèles sont mauvaises elles aussi, ce qui veut dire que la façon dont la plupart des immeubles sont construits aujourd’hui s’apparente un peu à une salle de miroirs répétée à l’infini. En termes sonores, on entend de l’écho. Les plafonds courbes, paraboliques sont également très mauvais. Vous rappelez-vous quand, enfant, vous utilisiez une loupe pour enflammer une allumette par une belle journée ensoleillée ? Un plafond parabolique produit un effet analogue sur le son. Un coin du club semble vide, tandis que l’autre vous déchirera les tympans.

3. Les enceintes doivent être placées en accord avec la disposition acoustique du lieu. Souvent, on voit des gens régler les enceintes de telle sorte qu’elles aient l’air symétriques ou qu’elles s’in-sèrent harmonieusement dans les coins de la pièce. C’est une aberration absolue. Elles doivent rendre un bon son, et non bien présenter, comme des éléments de décor de la pièce. Les coins d’une pièce amplifient le son et accentuent souvent, sans aucune nécessité, les basses. Alors, éloignez les enceintes des recoins, de grâce !

Quels matériaux privilégier alors ?Les surfaces douces, isolées et irrégulières. Un club n’a pas besoin de ressembler à l’intérieur du vaisseau spatial de Barbarella (ni d’être recouvert de fourrure dorée en peluche !) pour avoir une bonne acoustique, mais c’est un idéal vers lequel il faut tendre. Des matériaux à faible densité avec un certain degré d’élasticité (en particulier, une piste de danse en bois) seront tou-jours meilleurs que du ciment, des briques ou, hérésie, des carreaux de céramique. Non seulement le bois est plus agréable pour l’oreille mais aussi pour les pieds. Si vous parvenez à danser dessus, un revêtement de type moquette est certainement le meilleur choix possible.

Et architecturalement parlant ?Les surfaces parallèles doivent être évitées, les surfaces plates, traitées. Soyons réalistes, deux murs parallèles sont excusables ; mais quatre murs parallèles non traités sont, en proportion, bien pires. Si vous ajoutez à cela un plafond bas, dur et plat et un dancefloor dur et plat lui aussi, alors vous avez tous les éléments d’un désastre sonore.

RED BULL MUSIC ACADEMY

LAST NIGHT A SOUND SYSTEM SAVED MY LIFE(SUITE)

Le sound system ne serait donc pas la clé ?La qualité du sound sytem dans un club n’est que l’un des nombreux facteurs optimisant l’écoute. Si l’on se procure un système coûteux et qu’on néglige l’acoustique, c’est comme si une femme dépensait 5 000 euros pour des chaussures Gucci et un sac Vuitton pour se comporter vulgairememt en public ensuite. Le prix de ce que vous possédez ne vous rend pas for-cément attirant. Si les propriétaires de clubs pouvaient consa-crer une petite portion de leur budget à investir dans du polys-tyrène, des pièces en bois, des résonateurs acoustiques, et un bon environnement acoustique intérieur en général, ils récu-péreraient leur mise plusieurs fois. Pour aller vite : un sound system de qualité moyenne dans un bon environnement peut donner de merveilleux résultats. À l’inverse, même le meilleur sound system du monde sonnera misérablement dans un envi-ronnement sonore de mauvaise qualité.

Pourquoi est-il si important de diffuser ainsi que d’absor-ber le son ? Tu n’ignores pas que la plupart des salles de concerts classiques, comme les églises médiévales, ont une forte réverbération acoustique naturelle, laquelle provient de l’architecture intérieure. N’est-ce pas en contradiction avec ce que tu dis à propos de la nécessité de réduire l’écho ?Certes ! Tu marques un point ! C’est ce qui faisait le charme, la beauté de la musique classique européenne ces 250 dernières années. On utilisait cette réverbération pour amplifier les chœurs et les symphonies, pour les rendre plus prenants. Es-tu jamais allé au Limelight à New York, qui fut un temps une vraie église ? Le son est atroce. La musique moderne enregis-trée et destinée aux radios et aux clubs est très différente de la musique classique exécutée en direct. Les basses et les per-cussions doivent être sèches et nettes, tandis que les vocaux et les autres éléments sont systématiquement enrichis avec une certaine quantité de réverbération lors de l’enregistrement. Je suis conscient qu’une grande partie de la techno contem-poraine sonne délibérément sèche par anticipation des mau-vais environnements acoustiques. Harmoniquement, cette musique s’en trouve alors appauvrie. Elle se voit contrainte d’ignorer des détails plus fins et se ferme à une créativité mu-sicale d’une gamme supérieure. Ne vaudrait-il pas mieux alors bénéficier de meilleurs espaces acoustiques, et tendre ainsi à produire une musique plus riche, plus « directe », plutôt que niveler son contenu harmonique ? C’est à ce point de croise-ment que les propriétaires de clubs, les DJs et les producteurs doivent reconnaître que leurs rôles sont intimement liés. De la techno sèche, minimale, « sous-produite », peut être une sorte de réponse à une mauvaise acoustique, mais ça ne rend pas la musique bonne en elle-même. La quantité de réverbération nécessaire est secondaire et impossible à ajuster. La plupart du temps, cela finit en cacophonie caverneuse de basses. Si le disque est bien produit, l’entendre dans des conditions idéales ne le fera que mieux sonner, techno ou pas. La mu-sique minimale est loin d’être une idée neuve : elle remonte à très loin, de la musique pour piano d’Éric Satie à la fin du XIXème siècle jusqu’à Miles Davis dans les années 50. Quelle que soit sa forme, elle devrait être un choix esthétique et non une excuse pour justifier la perpétuation des mauvais lieux d’écoute de la musique !

Concernant la création de son propre espace acoustique pour l’écoute domestique, qu’est-ce qu’un « plancher flot-tant » ?Je dois ici une infinie gratitude au DJ Richard Hardcastle (rien à voir avec Paul Hardcastle !) et à ses deux adorables

amis, Tom et Sue, qui vivent tous à Sheffield. Il m’est arrivé d’aller dans des studios avec de tels parquets à New York, il y a quelques années. Tom et Sue m’ont montré leur salle dédiée à l’écoute musicale dans leur propre maison. C’est vraiment là que j’ai vu cette théorie fonctionner ! Ils ont l’habitude de se rendre dans leur sous-sol le week-end, de fermer la porte isolante et de jouer à fond leurs disques pré-férés : de vieux morceaux de rave, des classiques de soul… pendant que leur jeune fils à l’étage dort tranquillement. Tout d’abord, faisons un distinguo très net. L’isolation acous-tique s’effectue à l’intérieur de l’espace d’écoute. Il faut un matériau pas trop dense avec une surface irrégulière pour réduire les réflexions. Si je recouvre les murs de ma chambre, ou même de la cabine de DJ, de matériaux comme de la mousse et de la moquette, j’obtiendrai certainement une meilleure acoustique, mais les voisins percevront toujours des vibrations en provenance des murs. Par contre, si vous voulez isoler le son de l’extérieur, vous avez impérativement besoin de matériaux denses (pensez à un abri anti-bombe en ciment). Un plancher flottant équivaut à poser une seconde couche par-dessus le sol déjà existant en le séparant avec du contre-plaqué, de la moquette ou un tapis. Vous pouvez effec-tuer cela avec vos murs et vos plafonds également. Le résultat ? Une pièce à l’intérieur d’une pièce. La pièce à l’intérieur est parfaitement isolée, et vous pouvez jouer de la musique aussi fort que vous voulez. Mais à proximité de la porte à double-couche, les gens se tenant derrière n’entendront pra-tiquement rien. C’est exactement le même principe qu’une bouteille thermos !

Et qu’en est-il de l’acoustique des gros clubs tels que le Pa-radise Garage ou le Sound Factory ?Un système puissant et une grande pièce ne sont pas incom-patibles avec une bonne acoustique. Ils devraient même aller de pair. En fait, une masse de corps humains constitue l’un des meilleurs matériaux absorbants ! Son coefficient d’ab-sorption est de 0.55, alors que la brique non vitrifiée a un coefficient de 0.03 — 1 étant le coefficient parfait d’absorp-tion. Très peu de matériaux dépassent le corps humain en absorption, à l’exception des larges bancs en bois dans une église, ou d’autres sortes de grands meubles asymétriques qu’on ne trouve pas sur une piste de danse.De toute façon, les corps humains peuvent recouvrir une piste de danse, mais ils ne peuvent pas recouvrir des murs. Par conséquent, il n’est pas acceptable d’entendre des DJs et des propriétaires de clubs dire : «Le son n’est pas terrible en ce moment, mais il sera très bien quand la piste va se rem-plir.» Cette piste de danse se remplirait plus tôt, et se viderait moins rapidement, si le son était correct dès le début de la soirée. Vous connaissez sans doute ce moment délicat où un dancefloor est soudain deserté à l’approche de la dernière heure, qui est pourtant souvent la meilleure partie du set d’un DJ ? La faute à l’acoustique ! Dans de tels clubs, quand la piste se vide, le son redevient alors rachitique. Si tant de gens ont envie de rentrer chez eux en même temps, c’est tout sauf un hasard !

Et les fameux ballons gonflés à l’hélium qui ont fait la répu-tation du Loft de David Mancuso ? David Mancuso m’a dit un jour que la tradition du Loft consis-tant à recouvrir le plafond de ballons était partiellement son secret pour avoir une meilleure acoustique. Je pense que c’est quelque chose qu’il faut tester, mais il est probable qu’un pla-fond avec de nombreuses surfaces rondes et caoutchouteuses

sonne mieux qu’un plafond dur et plat. La surface des ballons est fine et peut créer des variations harmoniques. Peut-être agissent-elle comme un récif coralien…

Il paraît que tu rêves d’ouvrir ton propre club à Berlin…À la différence de Sven Väth, je n’ai pas de fortune à claquer dans un palace techno égomaniaque comme le Cocoon Club. J’aimerais faire l’inverse de ces gros clubs : un espace intime, sur les bords de Berlin Mitte, rempli de rayons de bricoles que l’on ne trouve qu’à Berlin. Bien sûr, tout cela ne serait qu’un camouflage. En fait, les murs seraient couverts de polystyrène et de moquette, peints ou dissimulés, et les rayonnages empi-lés jusqu’en haut de vieux livres. Des disques serviraient à casser l’uniformité des surfaces afin d’améliorer l’acoustique. Dans la mesure où ce n’est qu’un rêve, j’en ferais quelque chose d’un peu japonais : le sol serait doucement moquetté, et les gens devraient enlever leurs chaussures pour entrer. Ce serait un endroit où l’on pourrait entendre toutes sortes de musiques. Peut-être alors qu’enfin on cesserait de penser que les Allemands écoutent de la mauvaise techno dans des entrepôts de type industriels, parce que j’en ai rencontré beaucoup qui aiment tout sauf ça.

Pour conclure, une pièce rembourrée et un sound system parfait sont les seules solutions pour une acoustique accep-table ?Pas nécessairement. En définitive, nous comprenons tous qu’un DJ doit composer avec l’endroit et l’équipement qui lui sont of-ferts. Et nous nous sommes tous certainement plus amusés dans un petit club moite avec un sound system moyen que dans une immense discothèque équipée d’un sound system parfait. Il faut clairement distinguer ces deux facteurs : la qualité du sound sys-tem ET la qualité de l’espace acoustique. Le bon son dans un club dépend des deux, mais ce sont deux choses bien distinctes. Nous nous sommes attachés à parler de l’espace acoustique, évoquons brièvement l’équipement.Parfois, de « mauvaises enceintes » peuvent avoir un rendu inté-ressant : une certaine quantité de distorsion et de surchauffe dus au sound system peut être agréable à l’oreille, comme lorsque les guitaristes de blues et de rock utilisaient leur amplis à lampes bon marché dans les années 1960 et 1970 pour créer des solos granuleux et secs. La distorsion est au cœur de la production de certains sons intéressants. N’importe quel ins-trument qui ne produirait que des ondes sinusoïdales pures, comme des sifflements, serait extrêmement ennuyeux, c’est pour cela que Leon Theremin et Bob Moog utilisaient différents circuits pour déformer les ondes sonores dans leurs synthé-tiseurs, obtenant une qualité plus bourdonnante, vibrante et chantante. Si vous avez un sound system au son sec, alors utili-sez-le comme bon vous semble. Un sound system de moyenne gamme, strident, avec de grosses basses bien sales peut vérita-blement faire danser les gens. Mais l’environnement acoustique déterminera toujours ce que la foule entendra, que la sortie de vos enceintes soit distordue ou nette. Jouer de la musique est une forme de communication profonde. Un bon son ne devrait jamais être trop fort, et vous ne devriez pas porter de bouchons d’oreilles pour apprécier la musique dans un club, ni avoir be-soin de crier pour vous faire entendre. C’est la responsabilité des ingénieurs du son autant que celle des DJs. Une fois encore, l’espace acoustique est primordial.

une version longue non traduite de ce texte a été publiée en 2007 sur le site ELECTRONICAMENTE.BLOGSPOT.FR

RED BULL MUSIC ACADEMY

WWW.REDBULLMUSICACADEMY.COMTape, Berlin, par Andre Giesemann

Retrouvez Daniel Wang en interview et en mix sur WWW.REDBULLMUSICACADEMYRADIO.COM

RED BULL MUSIC ACADEMY

CLARAMOTOTRANS-EUROPE EXPRESS

Son album « Polyamour », mélancolique et mélodique, sorti sur le label français InFiné, a inscrit la jeune Autrichienne, désormais basée à Berlin, dans la lignée d’un courant électro minimal et rêveur proche du son Kompakt. Passée par la Red Bull Music Academy de Melbourne, Clara Moto se raconte.

Interview par Patrick Thévenin

Comment t’es-tu lancée dans l’électronique ?À Graz, en Autriche, ma ville natale, j’ai emménagé avec trois amis qui étaient aussi DJs. À force de les écouter et de les regar-der, j’ai emprunté le même chemin.

Tu avais une formation musicale ?Je viens d’une famille plutôt mélomane, j’ai appris le piano très tôt, mais je n’ai pas longtemps persévéré dans ce domaine. Je me suis formée à l’électronique toute seule, en observant et en bricolant de mon côté.

Pourquoi l’électro et pas le rock ou la pop ?(rires) Je suis tombée dans l’électro à l’âge de 15 ans, et depuis je suis fan de cette musique. J’ai commencé en tant qu’auditrice, mais rapidement je me suis sentie limitée. Je voulais savoir comment c’était conçu et surtout si j’étais capable de faire la même chose.

Quelles sont tes influences ?Je ne m’en rends pas vraiment compte dans ma musique. Je sais seulement que j’ai vu sur scène deux artistes qui m’ont littéralement fascinée : Supercollider et Ricardo Villalobos.

Existe-t-il une scène électronique autrichienne en dehors de Kruder & Dorfmeister ?L’Autriche est un tout petit pays et sa scène électro minuscule. Tout le monde se connaît et tout est essentiellement concen-tré à Vienne. Kruder & Dorfmeister ont apporté beaucoup au développement de cette musique, ils ont donné une impul-

sion vitale même s’ils ont un peu placé Vienne comme le centre névralgique du downtempo et de la lounge music. Ce qui est faux !

Tu as participé à la Red Bull Music Academy de Melbourne en 2006, comment en as-tu entendu parler ?Par des amis, le concept m’a intrigué, du coup j’ai cherché sur in-ternet pour me faire ma propre idée et j’ai décidé de m’inscrire. Ce qui est une bonne chose : je ne savais pas à quoi m’attendre et ce fut une excellente surprise.

C’est difficile d’être choisie ?Le dossier à remplir est conséquent oui, mais je ne peux pas trop témoigner, ça a été plutôt facile pour moi. J’ai été acceptée du premier coup, alors que je connais quelques personnes qui se sont présentées plusieurs fois en vain. Je ne sais pas vraiment pourquoi ils m’ont choisi, je n’ai aucune idée des critères de sélection des participants.

Qu’y as-tu appris ?Principalement à être plus ouverte et curieuse des autres styles en rencontrant et travaillant avec des gens venus de styles musi-caux radicalement différents du mien. Ma formation a été plus humaine que technique.

Un des moments les plus excitants de cette Academy ?Quand Peter Hook, le bassiste de New Order, est venu parler avec nous une après-midi entière. Il a tout raconté, des débuts à leur manière d’utiliser les machines. J’étais très impressionnée.

Tu t’es fait des amis ?Oui bien sûr, Richard Eigner, par exemple, qui est Autrichien comme moi et qui a remixé un de mes titres, ainsi que Douglas Greed. J’ai réalisé aussi pas mal de remixes pour des partici-pants. En manière de networking, l’Academy est très efficace.

Tu dirais que c’est une étape importante dans ta carrière ?Oui, sans aucun doute ! Et puis, il faut rappeler que c’est en jouant pour le plateau RBMA du festival de Montreux en 2007 que j’ai rencontré Agoria qui m’a signé sur son label InFiné.

Tu joues aux Nuits Sonores cette année ?Non et pourtant j’y ai joué tous les ans de 2008 à 2011. J’y serai en touriste.

Un de tes morceaux colle-t-il à l’idée des Nuits Sonores ?Oui, « Deer and Fox ».

CLARA MOTO : « POLYAMOUR » (INFINÉ)

Retrouvez Clara Moto en mix sur WWW.REDBULLMUSICACADEMYRADIO.COM

Clara Moto, par Julien Mignot

RED BULL MUSIC ACADEMY

WWW.REDBULLMUSICACADEMY.COM

RED BULL MUSIC ACADEMY RADIO DEMAIN, C’EST MAINTENANT

Ligne éditoriale pointue, entretiens inédits et playlists exclusives, la Red Bull Music Academy Radio archive avec brio la musique de demain.

Par Thomas Blondeau

Au commencement était la Red Bull Music Academy, un workshop pas comme les autres où, chaque année, des dizaines de kids viennent échanger et travailler avec les pointures de la musique actuelle

(MF Doom, Moodymann, Tony Allen, Ewan Pearson, Theo Parrish…). En 2005, alors installée dans une ancienne librairie de Seattle pour sa 8ème édition, l’Academy s’inventait une annexe supersonique : la Red Bull Music Academy Radio, soit un studio exigu planqué sous l’escalier, équipé d’une poignée de micros, d’une paire de MK II et d’un encodeur numérique. Depuis ce laboratoire, tuteurs, intervenants et participants jetaient chaque soir sur le web mixes et productions azimutées. Questlove y mixait une soul millésimée importée de Philadelphie tandis que Spacek y révélait ses perles inédites, le tout secoué par les mix visionnaires de DJs brésiliens et de punks chinois invités pour l’occasion. Enthousiasmant, le projet pliait pourtant bagages au terme de la session, laissant derrière lui un acouphène insistant, une certaine idée de l’expérience musicale et des spectres culturels de demain. Mais c’était pour mieux renaître quelques mois plus tard, révisé, structuré et modernisé, et s’installer pour de bon sur les ondes internationales.

En 2012, la Red Bull Music Academy Radio est devenue l’une des plateformes audio les plus en pointe du web, une station numérique tentaculaire qui regroupe des centaines de live, DJ sets, émissions spécialisées et podcasts enregistrés aux quatre coins du globe. Entre les émissions phares qui, à l’instar de Panamérika, Feedback ou La Moutarde, capturent les cultures locales dans le monde entier, les mixes inédits mis en boîte par

les plus grands DJs et des heures d’interviews (Fireside Chat) avec une armée de pointures musicales (Talib Kweli, Laurent Garnier, Skream, Roots Manuva, Plaid…), la Red Bull Music Academy Radio invite sur ses ondes une diversité hallucinante de cultures musicales, archivant au passage les breaks les plus précieux. La preuve : les premiers mix de Flying Lotus ou de Hudson Mohawke, qui étaient alors des participants lambda de l’aca-démie, traînent encore dans les disques durs de la radio.

Désormais, la radio n’attend plus l’édition annuelle de l’Academy pour se mettre en branle. Son studio mobile se déplace dans le monde entier et s’immisce partout où se joue la musique de demain, tissant un réseau planétaire qui fait de ses gigantesques disques durs un puits de science musicale infini.

Présent dans des dizaines de clubs, capturant une foule de live et DJ sets via les Red Bull Music Academy Stages, des scènes spécialement installées dans les plus grands festivals (Nuits Sonores, Sónar, Noorderslag…), la RBMA Radio ne laisse rien au hasard : du plus en vue des DJs new-yorkais au plus obs-cur des rappeurs néo-zélandais, du ghetto-funk des favelas de Rio aux breakbeats drogués des faubourgs de L.A., rien n’échappe à ces micros 2.0 qui harponnent en direct le mégamix culturel de demain : un alliage explosif de numérique et d’analogique, de jazz expérimental, de punk numérisé et de pop exotique. Mis à jour quotidiennement, relayé par des dizaines de stations FM à travers la planète (dont Radio Grenouille en France), c’est un véri-table travail d’archiviste, méthodique et rigoureux, qui se joue sur ces ondes pas comme les autres. Tune in, turn on, drop out !

Parmi les dizaines d’émissions locales diffusées sur redbullmusicacademyradio.com, la France n’est pas en reste. Depuis l’Hexagone sont produits deux shows consacrés aux univers parallèles de la musique française. Depuis 2010, La Moutarde fait honneur aux musiques black en version extra-large, du hip-hop le plus pointu aux grooves marocains les plus improbables en passant par un afro-beat 2.0 tringlé d’électro. Le producteur parisien Jérôme Caron aka Blackjoy y reçoit des créateurs aussi divers que General Elektriks, Onra ou Akalé Wubé AIbrahim Maalouf. De leur côté, Patrick Thévenin, Guillaume Sorge et Clovis Goux explorent avec Crème Brulée les marges de la musique populaire française, ces avant-gardes qui vivent à l’ouest de la tendance mais ont pourtant fini par marquer en profondeur la musique populaire hexagonale : disco, électro, house, new wave, psyché… Une haute gastronomie musicale « à la française » !

Retrouvez La Moutarde, Crème Brûlée et des centaines d’autres heures de mix sur WWW.REDBULLMUSICACADEMYRADIO.COM

Gianfranco Tripodo / Red Bull Music Academy

RED BULL MUSIC ACADEMY

VERTICALEMENT2 Au début des années 70, rue Saint Anne à Paris,

Guy Cuevas y faisait danser Yves Saint-Laurent et Karl Lagerfled.

3 Au 54, Mick Jagger dansait souvent, sans chemise, sans pantalon.

4 Ce jeune prodige néo-lounge allemand a samplé Serge Daney sur son premier album.

6 Sous-genre disco repopularisé par Miss Kittin & The Hacker à la fin des années 90.

8 Initiales d’un label techno belge séminal à qui l’on doit notamment la popularisation d’Apex Twin.

9 Musique d’ascenseur sophistiquée made in Versailles.

11 Label indie américain à qui l’on doit notamment l’émergence de Crystal Castles, Salem ou Teen-girl Fantasy.

14 Sous-genre disco italien dont les héros se nom-ment Daniele Baldelli, Beppe Loda ou DJ Mozart.

16 Label dubstep influent.18 Au début des années 90, ce label hollandais a

établi un pont artistique entre Chicago, Détroit et l’Europe.

20 Ce membre de la Funk Mob est devenu l’un des producteurs français les plus recherchés à l’étran-ger.

22 Cet ex-chanteur du groupe émocore First To Last a réussi à vendre sa soupe dubstep au monde entier.

23 Attention à la descente.26 303, 808, 909.

27 Cet invité de Nuits Sonores 2012 a écrit l’une des plus belles chansons de Christophe.

28 Fondateur du label Perlon.30 On y passe entre deux crêpes complètes, aux

Transmusicales de Rennes.31 Ce morceau présent sur le premier album d’Aute-

chre a notamment été remixé par Seefeel.36 Cette bande de joyeux lurons a sorti un disque

intitulé « Musick to Play in the Dark ».37 Club punk ultime.39 Projet de la galaxie Smith’n’Hack.42 Ce groupe italien spécialisé dans la musique de

film a fortement influencé Justice sur « Phantom ».46 Encore un tube obscur d’Aphex Twin.47 Les Chemical Brothers s’y sont perdus en 1997. 48 Producteur techno allemand également connu

sous le pseudo d’Aldolf Noise.50 Vladislav Delay en version house.52 Groupe punk anglais emmené par Colin Newman.54 Ce DJ canadien, amateur de prothèses capillaires,

a fondé le label Turbo.55 Cette chanteuse tamoule a des collants fluo et un

avis sur tout.57 Le groupe des sœurs Scroggins est un des plus

samplés au monde.58 Mike Ink, Studio1, Wolfgang Voigt.

HORIZONTALEMENT1 Se place entre parenthèses, juste derrière Optimo.5 Ce musicien et cinéaste français maniaque est

branché rubber et oral sax.7 Ce label culte de Chicago oubliait souvent de

payer ses royalties aux pionniers de la house music : Marshall Jefferson, Adonis, Larry Heard…

10 Ils ont ambiancé les meilleurs dimanches soir d’Europe sur Jamaica Street à Glasgow.

12 Titre du premier album d’un jeune prodige de l’écurie Marble.

13 Ce DJ américain goûte régulièrement aux joies du crowd surfing en bateau gonflable.

15 Sébastien Tellier lui a tout piqué sur son dernier album.

16 Le week-end y dure en moyenne quatre jours, sans pause ni appareil photo.

17 Le futur du rap (en 2011 tout du moins).19 Cette chanteuse japonaise résidant à Londres par-

tage la vie de Maurice Fulton.21 À notre humble avis, un des meilleurs groupes

indie rock US en activité.24 Ce label house allemand sensible abrite notam-

ment John Roberts, Isolée et Efdemin.25 Collectif parisien noir et blanc connaissant Judith

Butler sur le bout de la langue.29 Sensation UK dubstep du moment. 32 Cette académie qui n’en est pas vraiment une

posera ses valises à New York en 2012.33 Il pourrait avoir sa statue à Baia degli Angeli.

34 Ce synthé créé en 1969 par Alan Robert Pearlman a été utilisé par des musiciens aussi divers que Klaus Schulze, David Bowie ou Joy Division. On lui doit aussi les sons de R2D2 dans Star Wars.

35 C’est sur ce label culte qu’est sorti l’hymne hard-core « We Have Arrived » de Mescalinium United.

37 C’est la maison de Richie Hawtin.38 Il figure sur le premier album de Plastikman.40 Ce producteur anglais booké aux Nuits Sonores a

marqué l’été 2011 avec « Pineapple Crush ».41 Label jazz allemand avec lequel Ricardo Villalo-

bos a collaboré.43 Son prénom, c’est Helmut et il adore la musique

bavaroise.44 Avec leur ami Dixon, ils ont œuvré pour la réhabi-

litation de la deep house.45 Encore un chef-d’œuvre signé Aphex Twin.49 Il a tout simplement inventé la musique minimaliste.51 Le petit fils de Berry Gordy n’a pas hérité du

talent de papy.53 Do.55 En 2004, il a « lâché la pression ».56 Espoir du label InFiné.59 Pseudo de Kevin Saunderson quand il signe « Rock

to the Beat » avec San Antonio en 1989.60 Cet ex de Sciences Po, disciple d’Andrew Weathe-

rall, est un adepte de la discipline et du désordre.61 Strike a pose.

JOUONS UN PEU... AVEC ROLAND BARTHES SIMPSON

1 2 3 4 5 6

7 8 9

10 11 12 13

14 15

16 17 18

19 20

21 22 23 24

25 26 27 28

29 30 31 32

33 34 35 36

37

38 39 40

41 42 43

44 45 46 47

48

49 50 51 52

53 54

55 56 57 58 59

60

61

Retrouvez les réponses sur : www.facebook.com/rolandbarthessimpson