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«Les Parisiens sous l'Occupation»: l'exposition polémique (depuis le 20 mars 2008 à la Bibliothèque de l’Hôtel de Ville de Paris) Pourquoi? Que reproche-t-on à ces photographies? Faut-il s’en offusquer? En quoi cette exposition pose-t-elle problème?

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Page 1: «Les Parisiens sous l'Occupation»: l'exposition polémique (depuis le 20 mars 2008 à la Bibliothèque de lHôtel de Ville de Paris) Pourquoi? Que reproche-t-on

«Les Parisiens sous l'Occupation»: l'exposition polémique

(depuis le 20 mars 2008 à la Bibliothèque de l’Hôtel de Ville de Paris)

Pourquoi?

Que reproche-t-on à ces photographies?

Faut-il s’en offusquer?

En quoi cette exposition pose-t-elle problème?

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Une exposition intitulée «Les Parisiens sous l’Occupation» se tient depuis le 20 mars à la Bibliothèque de l’Hôtel de Ville de Paris. Problème, les 270 clichés réalisés par le photographe André Zucca suscitent une énorme polémique,

allant jusqu’à la demande par l’adjoint au maire à la Culture, Christophe Girard, de la suspension de l’exposition. (Rue de Belleville. Paris, 1944)

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Un photographe collabo Le photographe André Zucca travaillait entre 1940 et 1944 pour «Signal», un

magazine nazi créé à l’initiative de Goebbels et distribué dans les pays occupés pour vanter la puissance de la Wehrmacht. Les clichés exposés seraient juste une

vision propagandiste de Paris sous l’Occupation et non le reflet d’une période

douloureuse de l’Histoire. (Place de la Concorde)

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Un Paris coloré et ensoleillé On remarque sur tous les clichés exposés, une ville baignée de soleil. Beaucoup y ont vu un artifice de propagande, destiné à accentuer le côté «ville où il fait bon vivre» malgré la

présence de l’occupant allemand. L’utilisation de la couleur, rarissime dans les témoignages de l’époque, accentue cette apparente quiétude.(Esplanade du Palais de

Chaillot)

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Un quotidien empreint de légèretéLes 270 photographies exposées montrent un Paris léger, peuplé de Parisiens insouciants, souriants, en train de se baigner dans la Seine ou de faire la queue pour aller au cinéma. La

quasi-totalité de ces clichés aurait tout aussi bien pu être prise avant ou après la guerre. Rien ou

presque n’évoque une ville occupée par l’armée allemande. (Cinéma «Lux Bastille» et gare de la Bastille. «Haut le vent», film de J. de Baroncelli. )

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Une vision tronquéeL’exposition s’intitule «Les Parisiens sous l’Occupation», ce qui laisse à

penser que ces clichés sont le reflet de la vie quotidienne de tous les Parisiens de cette période. Hormis quelques photos, Zucca ne montre ni les files d’attentes devant les magasins d’alimentation, ni la Résistance

ou les rafles de juifs. (Dans le Marais, rue des Rosiers)

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Une démarche personnelleZucca collaborait à un magazine de propagande mais ses clichés relèvent plus d’une démarche personnelle. Jamais publiées, ces photographies en couleurs sont le reflet d’un Paris, certes insouciant, mais bien réel. Oui,

malgré la situation, certains Parisiens continuaient de mener une vie normale, empreinte de loisirs. (En suivant la mode. Jardin du Luxembourg.

Paris, mai 1942)

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Un impératif techniqueSur les clichés de Zucca, il fait toujours beau, ce qui rajoute à l’atmosphère

légère qui s’en dégage. La raison en est le film utilisé par Zucca. S’essayant à la photographie couleur, rarissime à l’époque, Zucca utilise de l’Agfacolor, un film à très faible sensibilité (16 ASA) qui nécessitait une extrême luminosité pour réussir les prises de vues. (Pont de la Tournelle. Habitant de Noisy-le-

Sec sinistré à la suite du bombardement du 19 avril 1944)

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La vision de ZuccaLe malaise suscité provient en premier lieu de la maladresse de l’intitulé. Uniquement composée de clichés réalisés par Zucca, l’exposition aurait dû s’appeler «Paris sous

l’Occupation vue par le photographe André Zucca». Consciente du malentendu, la mairie de Paris vient de décider de changer le nom en «Des Parisiens sous l’Occupation». Ou

comment colmater les failles d’une exposition mal pensée. (Les Halles. Paris, juillet 1942)

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Le manque de perspectiveAccompagnés de légendes minimalistes, les clichés sont livrés à l’oeil du visiteur et, bien souvent à son

manque de connaissance de cette période de l’histoire. Pourquoi ne pas avoir choisi de contextualiser ces clichés au lieu de livrer les légendes laconiques d’un photographe propagandiste? Ici, la photo est intitulée

«La rue de Rivoli sous la croix gammée, vers le Louvre.»Comme l’explique l’historien Marc Ferro au « Journal du Dimanche », il aurait été intéressant d’expliquer qu’on peut y voir l’hôtel Meurice, un des

nombreux palaces où les Allemands avaient installé leur commandement. D’où les nombreux drapeaux nazis. Et c’est bien la pénurie d’essence et le fait que l’armée allemande ait réquisitionné la plupart des

véhicules qui expliquent la rue déserte.

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Cette mise en perspective sera mise en place  dans les jours qui viennent à la demande du maire de Paris. Bertrand Delanoë a également demandé qu’un avertissement soit distribué au début de l’exposition. Ce court texte, également accroché au début du

parcours, met en garde le visiteur sur le regard porté par Zucca sur Paris et ses habitants, qui «ne montre rien, ou si peu, de la réalité de l’Occupation et de ses aspects dramatiques.» Enfin, des conférences portant sur cette période de l'histoire se tiendront en marge de l'exposition. (Signalisation allemande au marché aux puces de St-Ouen)

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La campagne d’affichage promotionnel a été suspendue, mais l’exposition «Des Parisiens sous l’Occupation», qui a déjà attiré plus de 10.000 visiteurs, est visible jusqu’au 1er juillet

2008 à la Bibliothèque de la Ville de Paris, 22 rue Malher, 75004 Paris. (Relève de la garde. Paris, 1941)