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Institut de Formation en Soins Infirmiers INFIRMIER Promotion : 2012/2015 Date de remise : 22/05/2015 Session : 1 UE 3.4 Initiation à la démarche de recherche UE 5.6 Analyse de la qualité et traitement des données scientifiques et professionnelles La place de la tendresse dans les soins : Une question d’intelligence émotionnelle Référent UE : Josette LECLERCQ Référent du suivi pédagogique : Josette LECLERCQ Julie DENAX

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Institut de Formation en Soins Infirmiers

INFIRMIER

Promotion : 2012/2015

Date de remise : 22/05/2015

Session : 1

UE 3.4

Initiation à la démarche de recherche

UE 5.6

Analyse de la qualité et traitement des données

scientifiques et professionnelles

La place de la tendresse dans les

soins : Une question d’intelligence

émotionnelle

Référent UE : Josette LECLERCQ

Référent du suivi pédagogique : Josette LECLERCQ

Julie DENAX

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Julie Denax - Institut de Formation en Soins Infirmiers du CH de Carcassonne -2015

« J’atteste que ce travail est personnel, cite systématiquement les sources

utilisées entre les guillemets et ne comporte pas de plagiat »

Julie DENAX

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Julie Denax - Institut de Formation en Soins Infirmiers du CH de Carcassonne -2015

S o m m a i r e

Introduction.........................................................................................................p1

1 La tendresse dans les soins : des limites pour le soignant ?........................p3

1.1 Situation d’appel……………………………………………………………….p3

1.2 Constats………………………………………………………………………...p4

1.2.1 Le toucher et la tendresse………………………………………………..p4

1.2.2 Le développement de l’enfant et les troubles associés……………...p6

1.2.3 Posture professionnelle et compétences………………………………p8

1.2.4 La distance professionnelle……………………………………………...p9

1.2.5 Les émotions et les affects………………………………………………p10

1.3 Question de départ……………………………………………………………p12

1.4 Enquête exploratoire………………………………………………………….p12

1.4.1 Objet de recherche………………………………………………………..p12

1.4.2 Règles de déontologie et d’éthique…………………………………….p13

1.4.3 Mon échantillonnage……………………………………………………...p13

1.4.4 Déroulement de l’entretien…………………………………………….....p13

1.4.5 Mon guide d’entretien……………………………………………………..p13

1.4.6 Analyse de mes entretiens…………………………………………........p14

2 Le travail en équipe et l’expérience : Dans l’acquisition d’une intelligence

émotionnelle……………………………………………………………………..p21

2.1 Question centrale……………………………………………………………....p21

2.2 Développement du cadre conceptuel……………………………………….p22

2.2.1 Le travail en équipe………………………………………………………..p22

2.2.2 L’expérience…………………………………………………………………p24

2.2.3 La gestion des émotions…………………………………………………..p25

2.2.4 Le soignant…………………………………………………………………..p27

2.3 Synthèse du cadre conceptuel………………………………………………..p28

2.4 Question de recherche………………………………………………………….p28

3 L’intelligence émotionnelle : Un pas vers l’humanisation des soins……..p28

3.1 Question de recherche…………………………………………………….......p29

3.2 Présentation et explication de l’objet de recherche envisagé……………p29

Conclusion…………………………………………………………………………….p31

Bibliographie

Annexe 1 : guide d’entretien

Annexe 2 : Entretien IDE 1

Annexe 3 : Entretien IDE2

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<prénom nom de l’étudiant> - Institut de Formation en Soins Infirmiers du CH de Carcassonne -<année>

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Julie Denax - Institut de Formation en Soins Infirmiers du CH de Carcassonne -2015

L i s t e d e s s i g l e s u t i l i s é s

IDE : Infirmier diplômé d’Etat

DSM: Diagnostic and Statistical Manual of Mental Disorders

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Julie Denax- Institut de Formation en Soins Infirmiers du CH de Carcassonne -2015 1

Introduction

La formation en soins infirmiers valorise l’acquisition de compétences par le biais de la

pratique d’une part mais aussi par les connaissances théoriques, d’autre part. De plus, il

est demandé aux étudiants infirmiers, d’adopter une posture réflexive à travers des

analyses de situation vécues en stage afin d’en faire une autocritique et d’améliorer leurs

pratiques.

Cette recherche s’inscrit aussi dans l’approfondissement d’un questionnement

professionnel et elle est l’accomplissement d’un travail de réflexion acquis tout au long

des études. Elle s’appuie sur une situation que j’ai vécue en stage et qui m’a amené à

réfléchir sur la place de la tendresse dans les soins en pédopsychiatrie. Ce sujet s’inscrit

dans les relations interpersonnelles entre le patient et le soignant. Cet aspect relationnel

du soin est intégré dans les unités d’enseignement du référentiel de formation dans le

sens où le soin relationnel est une compétence à part entière de l’infirmière.

Tout au long de ces trois années de formation, j’ai pu observer les postures des

infirmières auprès des patients qui restent parfois plus centrer sur la technicité du soin,

l’efficacité, le rendement …etc. au détriment de l’aspect relationnel et psychologique.

Ainsi, lorsqu’il a fallu choisir une situation, je voulais que celle-ci traite de la relation

soignant/soigné. Mon stage en pédopsychiatrie m’a permis de me questionner sur la

place de la tendresse dans les soins relationnels du fait de l’observation des postures des

infirmières. En effet, celles-ci adaptent leur positionnement professionnel en fonction des

besoins des enfants et des activités réalisées. La compréhension de ce phénomène est

important pour moi car je souhaiterai, dans mon futur métier, travailler auprès d’enfants

ayant des troubles psychiatriques.

Mon travail sera organisé de la manière suivante : La description de ma situation d’appel

qui m’a conduit à m’interroger sur des constats tels que l’adaptation de la posture de

l’infirmière en pédopsychiatrie, le rôle de la tendresse dans le développement

psychoaffectif de l’enfant, le rôle du soignant en pédopsychiatrie et la gestion des

émotions. La réflexion menée sur ces thèmes m’ont permis de dégager une

problématique en lien avec les limites ou les risques à l’utilisation de la tendresse dans les

soins. Pour étayer mon questionnement, j’ai interviewé deux infirmières en

pédopsychiatrie qui m’ont apporté d’autres éléments à prendre en compte dans la gestion

des émotions qui sont le travail en équipe et l’expérience.

Ainsi, dans un deuxième temps, je me suis attardée sur ces concepts et sur l’intelligence

émotionnelle dont fait preuve les infirmières interrogées. Ce concept me parait alors

essentiel dans la prise en soin d’un patient car, selon Margot Phaneuf, son « absence

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stériliserait nos relations de toute attention à l’autre et de tout mouvement vers la

compréhension. ». Par conséquent, l’intelligence émotionnelle permet d’humaniser les

soins et m’amène à me questionner sur l’influence de ce concept sur l’humanisation des

soins. En effet, en raison du contexte émotionnel de notre métier, il me semble primordial

de comprendre cette théorie et d’en tirer le meilleur parti. J’ai donc, dans la dernière étape

de mon travail, poser une question de recherche et construit une ébauche

méthodologique en lien avec l’intérêt que je porte à ce sujet, l’intérêt pour la profession et

l’objet de ma recherche.

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1 LA TENDRESSE DANS LES SOINS : DES LIMITES POUR LE

SOIGNANT ?

1.1 Situation d’appel

J'effectue mon stage de semestre 4 en pédopsychiatrie à l'hôpital de jour.

On accueille de 9h00 à 16h00, des enfants de 3 à 12 ans qui ont des troubles

psychiatriques comme par exemple des troubles du spectre autistique, des troubles

de déficit de l'attention avec ou sans hyperactivité, des troubles de l'attachement.

Cette situation se déroule la première semaine de mon stage. Je ne connais donc pas

tous les enfants ainsi que la raison de leur hospitalisation. Pendant 3 jours j'ai

beaucoup observé les infirmières sur la manière d'appréhender les enfants et sur leur

posture lors d'activités thérapeutiques. J'ai pu observer deux attitudes: celle très

cadrante lors d'activités et celle plus détendue lors des temps informels comme les

temps en récréation.

Le quatrième jour, je me retrouve dans la cour après manger pour surveiller les

enfants. L'un d'entre eux, Benjamin 9 ans, s'approche de moi et me dit : « tu es belle

julie ». Je le remercie en souriant. Puis il m'encercle de ses bras, pose sa tête sur ma

poitrine et me fait un « câlin ». Je me sens alors très mal à l'aise, je reste figée ne

sachant pas comment réagir. Lui retourner son câlin en l'enlaçant aussi ou le

repousser. Je décide de prendre cette dernière option car mon premier réflexe est de

rester professionnel car pour moi, il est nécessaire d'élaborer une distance

thérapeutique avec les patients. J'en discute alors avec une infirmière qui me répond

qu'avec cet enfant, il faut lui rappeler que nous sommes des professionnels et ne pas

hésiter à mettre une distance physique avec lui car il a tendance à envahir l'espace

des autres.

En effet, après avoir regardé son dossier de soins, je découvre que cet enfant est

placé dans une famille d'accueil depuis qu'il est nourrisson et qu'il souffre d'un

syndrome abandonnique et de troubles de l'attachement. De ce fait, il ne gère pas les

distances sociales et demande une attention constante de la part des soignants.

Un autre jour, plus tard dans le stage, nous nous promenons dans un parc et une

infirmière commence à jouer avec les enfants, dont Benjamin, en les attrapant, les

serrant dans ses bras et en les couchants au sol. Toute l'équipe, y compris moi-

même, nous prêtons au jeu. Les enfants essayent de nous attraper en nous enlaçant,

nous étreignent afin qu'on ne puisse plus bouger. Les enfants courent dans tous les

sens, rient, on peut voir sur leur visage qu'ils s'amusent vraiment et qu’ils prennent du

plaisir. Après ce temps de jeu, je me questionne et demande à l'infirmière son avis sur

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ce comportement, qui est pour moi, un comportement entre adulte et enfant et non

entre professionnel de santé et patient.

Elle me répond que pour elle, il est important de leur offrir des moments de répit afin

qu'ils oublient la raison de leur présence avec nous, de leur montrer qu'on n'est pas

que des soignants mais aussi des adultes bienveillants. Tout cela pour favoriser la

relation avec ces enfants.

Interpellée par ces deux facettes tout au long du stage, j'en discute avec l'équipe

soignante. Les infirmières me répondent, que pour elles, il est important d'avoir deux

positionnements professionnels: celle du professionnel cadrant, posant des limites et

celle plus détendue, qui se permet de jouer avec eux, d'être dans le contact physique,

l'affection et la tendresse.

1.2 Constats

1.2.1 Le toucher et la tendresse

Je remarque, dans ces exemples de situations, que le toucher est omniprésent aussi bien

pendant le temps de jeu que lorsque Benjamin me fait un câlin.

Il me paraît donc intéressant de développer ce thème et d'essayer de comprendre son

rôle dans le soin avec des enfants.

Selon David Le Breton, professeur en psychologie, « le toucher est une forme primordiale

de contact qui enracine le monde ». En effet, ce sens est « un langage universel » pour

Evelyne Malaquin-Pavan, Cadre supérieur Infirmier, qui peut « transmettre une

intentionnalité, contenir et sécuriser la personne ». Donc le toucher est une forme de

langage non verbal qui permet de transmettre un message. Mais a-t-il d'autres fonctions ?

Pour David Le breton, « le sens tactile remplit une fonction anthropologique de contenant,

de restauration de soi en situation de souffrance ou de manque à être ». Il parle alors de

toucher relationnel et rajoute que celui-ci est une communication affective et qu'il peut

faire office « d'un rappel d'un contact maternel visant à envelopper ». En effet, il rajoute

que « le toucher est une forme de maternage, de retour aux sources colmatant un instant

la souffrance et pourvoyant un effet de remise au monde. »

Sachant que les enfants suivis en hôpital de jour souffrent pour la plupart de troubles

d'attachement ou de troubles affectifs, il me semble donc juste d'utiliser le toucher comme

médiation thérapeutique.

De plus, pour Evelyne Malaquin-Pavan, le toucher, « contact de proximité affective » sert

à rassurer et rappelle à l'individu qu'il n'est pas seul dans sa souffrance. En effet, selon

Carine Blanchon, infirmière clinicienne, « le toucher relationnel est avant tout une

rencontre avec l'autre » et permet d' « offrir à la personne un geste qui la réconforte dans

son identité psychique et corporelle ».

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Donc les infirmières par l'utilisation de ce toucher, cherchent à apaiser et à rétablir un

manque affectif mais aussi cherchent à établir une relation avec l'enfant.

Le Breton conclut en disant que « la communication tactile, par l'étreinte et le contact

physique, s'efforce souvent de conjurer l'impossibilité de dire ». Ainsi, je me demande si

Benjamin, par ce câlin, cherche à me dire quelque chose qu'il ne peut pas faire avec des

mots ? Attend-il de ma part une réponse affective, un geste tendre envers lui ?

Une étude sur le toucher affectif et l'estime de soi des personnes âgées confirme le fait

que le toucher permet de dire des choses lorsque les mots ne suffisent pas. Les auteurs

disent que « étant le premier moyen de communication, le toucher comme langage non

verbal est particulièrement important pour les bénéficiaires confus dans les situations ou

les mots échouent complètement ».

Le public accueilli dans ce service étant des enfants ayant pour la plupart, un retard de

développement et notamment des troubles de langage, il me semble évident d’utiliser le

toucher pour établir une communication et une relation avec eux. De plus, cela leur

montre notre intérêt à leur égard par le fait que « le soignant traduit son engagement et sa

disponibilité envers un autre qui réclame son attention » selon Le Breton.

Après ces recherches sur le toucher, je me demande si, d’après la dimension affective

que celui-ci suppose, (toucher « relationnel », toucher « affectif ») peut-il être considérer

comme une forme de tendresse ? En effet, l’étreinte d’un câlin, le contact tactile lors d’un

jeu amène à réfléchir sur cette notion de tendresse et d’affectivité dans les soins.

La tendresse se définie selon le dictionnaire Le Larousse comme un : « Sentiment tendre

d'amitié, d'affection, d'amour qui se manifeste par des paroles, des gestes doux et des

attentions délicates.». Dans cette définition, on comprend bien qu’il n’est pas que question

de toucher physique mais qu’elle englobe aussi bien des intentions, des sentiments qui

n’impliquent pas forcement de contact physique. Le site internet du centre national de

ressources textuelles et lexicales donne comme définition : « Sentiment d'affection,

d'amitié, de générosité qui porte à considérer autrui avec bienveillance, à le traiter avec

beaucoup de sollicitude. »

Jacques Salomé, psychosociologue, précise dans un éditorial que : « La tendresse n’est

pas un sentiment ou de l’amour finissant ou un peu tiède comme le pensent beaucoup.

C’est une qualité active de la relation, qui se traduit par une attention, une densité du

regard ou de l’écoute, une générosité offerte de sa présence à l’autre, avec l’envie de lui

donner le meilleur de soi, de lui donner du bon et de rencontrer aussi le meilleur de lui. »

On retrouve dans ces définitions les notions de bienveillance envers l’autre, de don de soi

et de générosité.

De plus, d’après l’étude sur le toucher affectif, « d’autres éléments tels que l’intonation de

la voix, la posture, l’affect, l’intention aussi bien que le contact tactile doivent être pris en

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compte dans la signification que le bénéficiaire accorde au toucher. » On retrouve ici, les

notions d’affect et d’intention que l’on a dans la définition de la tendresse. David Le Breton

enrichit cette réflexion en disant que le toucher « est parfois proche de la tendresse mais

il n’englobe aucun contenu érotique ».

Donc, il me semble juste de dire que le toucher est une forme de tendresse surtout

lorsque celui-ci est qualifié d’ « affectif ». Je m’interroge alors sur son rôle dans le

développement psychoaffectif de l’enfant.

1.2.2 Le développement de l’enfant et les troubles associés

Il me semble intéressant de comprendre le comportement de Benjamin en ce qui

concerne sa demande d'affection envers les soignants. En effet, pourquoi cet enfant

sollicite constamment les soignants et pourquoi a-t-il besoin de démonstrations affectives

envers lui ? En quoi la tendresse joue-t-elle un rôle dans le développement psychoaffectif

de l'enfant ?

En s'appuyant sur l’anthropologie et la psychologie, Abraham Maslow, psychologue,

formula une hiérarchie des besoins, composé de cinq étapes de la croissance humaine.

Selon sa pyramide des besoins de l’enfant, il existe 5 besoins primaires : des besoins

physiologiques comme boire, se nourrir, dormir, être propre....Ces besoins sont la base

de la pyramide. Puis il y a le besoin de sécurité physique et psychique ainsi que le besoin

de stabilité. En effet, l'enfant a besoin de règles, de limites, de frustrations pour se sentir

en sécurité. Mais il a aussi besoin de stabilité comme des horaires fixes, des réponses

cohérentes, des routines régulières pour son développement. Le troisième besoin est le

besoin d'appartenance, de reconnaissance et d'affection. En effet, il a besoin de se sentir

aimé par des gestes de tendresses et des démonstrations d'affection. Il a aussi besoin

d'attention de la part de la figure maternelle et de se sentir apprécié pour ses qualités. Le

quatrième besoin est le besoin d'estime de soi par le fait de se sentir respecté et

accompagné. Et enfin, le besoin de réalisation de soi en apprenant en jouant, en étant

motivé et en communiquant avec ses pairs.

Donc un enfant a besoin de se sentir aimer, reconnu, réconforter, sécurisé par la figure

maternelle pour qu'il puisse se développer normalement.

Dans le cas de Benjamin, le fait d'avoir été placé en famille d'accueil très tôt dans son

enfance ne lui a pas permis de satisfaire tous ses besoins, ce qui a provoqué des troubles

de l’attachement et un syndrome abandonnique. Mais qu'est-ce que l'attachement ? Quel

est son importance dans le développement de l'enfant ?

L'attachement est défini par Bowlby, psychiatre et psychanalyste anglais, comme « un

équilibre entre les comportements d’attachement envers les figures parentales et les

comportements d’exploration du milieu.». Le DSM-IV définit les troubles réactionnels de

l'attachement comme " un mode de relation sociale gravement perturbé et inapproprié au

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Julie Denax - Institut de Formation en Soins Infirmiers du CH de Carcassonne -2015 7

stade de développement, présent dans la plupart des situations, qui a débuté avant l'âge

de 5 ans". Les enfants peuvent présenter le type inhibé qui est décrit comme " une

incapacité persistante, dans la plupart des situations, à engager des interactions sociales

ou à y répondre d'une manière appropriée à son développement" ou le type désinhibé qui

se caractérise par "l'échec ou l'incapacité d'avoir des relations sociales discriminées (par

exemple familiarité excessive avec des étrangers, manque de sélectivité dans le choix

des figures d'attachement)"

Plusieurs approches en psychologie cherchent depuis longtemps à comprendre

l'importance des premières relations affectives sur le développement socio-affectif. À cet

effet, Bowlby caractérise ce lien précoce par l'attachement et affirme qu'il repose sur des

fondements biologiques. En fait c'est l'attachement qui a, en réalité, la fonction de fournir

une base sécurisante à l'enfant. Cette façon de concevoir le lien unissant la mère et son

nourrisson a changé considérablement le sens et la perception du rôle de la première

relation affectueuse. Bowlby affirme que le besoin d’attachement du bébé à sa mère est

un besoin inné de contact social. Ce besoin est un besoin primaire au même titre que les

autres c'est-à-dire que la relation d’attachement qu’un enfant entretient avec son parent

est aussi indispensable à son développement que le fait de s’alimenter par exemple. Ce

besoin est primaire dans la mesure où il ne découle d'aucun autre, et qu’il est quasi

nécessaire à la survie.

Donc Benjamin cherche sa figure d'attachement mais de manière inappropriée car il n'a

pas de relations sociales discriminées. En effet, il a fait preuve de familiarité excessive

envers moi alors qu’il ne me connaît pas. C'est pour cette raison que les soignants lui

rappellent que nous sommes des professionnels et qu'ils m'ont conseillé de mettre une

distance sociale car il a tendance à envahir l'espace des autres. De plus, son besoin

d'affection et d'attention sont liés à son sentiment d'insécurité permanent. Donc il est

judicieux de mettre en place des limites et des règles afin qu'il se retrouve dans un

environnement sécurisant mais aussi d’être, à certains moments, dans la tendresse afin

de lui montrer notre intérêt à son égard.

En conclusion, un enfant a besoin de tendresse et de relation affective pour favoriser le

lien d'attachement et se sentir en sécurité, qui je le rappelle, est un des besoins vitaux et

essentiels de l'enfant. L’auteur Alain Delourme le confirme en disant que ce « mouvement

non passionnel de l’amour » fournit un ciment affectif indispensable au lien social.

Caractérisé par sa stabilité, sa douceur et sa délicatesse, la tendresse jouerait 3 fonctions

essentielles :

- l’unification des dimensions physiques, psychiques et affectives, qui se rapporte

au besoin d'identité

- la sécurisation du sujet, notamment vis-à-vis de sa peur d’abandon et d’isolement,

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- la confirmation (réciproque) du sentiment d’exister, qui se rapporte au besoin

d'appartenance

Je comprends donc mieux le comportement des soignants qui ont deux postures :

apporter des limites et être dans le cadrage d'une part, et être dans une relation affective,

le contact physique, le toucher, d'autre part.

1.2.3 Posture professionnelle et compétences

Cependant, en tant que soignant, ce contact physique et cet élan de tendresse m'ont

déstabilisé. Je suis surprise et gênée par cette étreinte avec cet enfant. Effectivement, je

constate que ma représentation d'une bonne posture professionnelle équivaut forcement

avec la mise place d'une distance physique avec cet enfant. De plus, je pensais que les

temps d'amusement, les gestes tendres pourraient nous discréditer aux yeux des enfants.

C'est pourquoi, je ne me suis pas permise un échange affectif avec lui et que je l’ai

repoussé. En revanche, poussée par l'équipe soignante, je me suis autorisée, dans la

deuxième situation, à partager des moments affectifs avec les enfants. Ainsi, je

m'interroge sur l'impact de ma représentation de la compétence professionnelle sur ma

relation avec Benjamin. Qu’est-ce que la compétence ? Quel est le rôle de l’infirmier dans

la relation ? La tendresse peut-elle impacter sur nos compétences ?

Selon le ministère des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes, l'infirmier «

réalise des soins destinés à maintenir ou restaurer la santé de la personne malade ». Il «

doit être en mesure de créer une relation de confiance avec le patient et son entourage. Il

peut être en contact avec des personnes agitées, des personnes angoissées, choquées, il

doit pouvoir créer un lien, une communication avec chacun d’entre eux, qu’il prend en

charge de façon globale et individualisée ». L'article R4311-2 du code de la santé

publique rajoute que « Les soins infirmiers, préventifs, curatifs ou palliatifs, intègrent

qualité technique et qualité des relations avec le malade. Ils sont réalisés en tenant

compte de l'évolution des sciences et des techniques » Donc, il est important pour être

professionnel et compétent, d'établir un lien, une relation de qualité avec le patient. Pour

cela, l’infirmier devra acquérir des compétences relationnelles nécessaires à la mise en

place de la relation.

Selon G. LE BOTERF, expert en management et développement : « La compétence d’un

professionnel se reconnaît à sa capacité à gérer efficacement un ensemble de situations

professionnelles. Pour cela, il devra savoir combiner et mobiliser plusieurs compétences

ou ressources. » L'infirmier doit donc acquérir, pour être compétent, un savoir, un savoir-

agir qui est un savoir-faire en situation, un savoir-être et un savoir-combiner. L'auteur

donne un exemple pour l’infirmier. Il dit : « Pour dispenser des soins curatifs, un infirmier

combinera certaines connaissances techniques et scientifiques [...] avec des

connaissances contextuelles sur le malades […], des savoir-faire méthodologiques […] et

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Julie Denax - Institut de Formation en Soins Infirmiers du CH de Carcassonne -2015 9

des techniques […], tout en mettant en œuvre des qualités d'écoute ». Quelqu'un de

compétent doit donc pouvoir mobiliser ses compétences mais aussi les combiner et les

organiser dans une situation de travail particulière.

En ce qui concerne les enfants, nous avons vu qu'il est nécessaire d'être dans l'affection

ou la tendresse afin qu'ils se développent normalement. Donc les échanges tendres

qu'ont les soignants envers les enfants sont à visés thérapeutiques et favorisent la

relation soignant-soigné. En effet, selon un article de la revue soins psychiatrie sur le sujet

des bisous en pédopsychiatrie, Franck Rosala, infirmier, dit qu’il est nécessaire de

contenir un enfant souffrant de troubles psychique. Il donne d’ailleurs des exemples de

thérapies comme la piscine pour l’effet englobant de l’eau et la musique pour la

contenance sonore. Pour cela, le soignant, en maintenant un enfant dans ses bras,

cherchera à le rassurer, lui expliquera qu’il le contient pour le soulager afin que l’enfant

puisse « récupérer ». Donner une enveloppe à l’enfant peut donc être considéré comme

un soin à visé thérapeutiques. Les infirmières doivent donc être dans la proximité, ce qui

explique la mise en place d'une distance intime dans certaines situations de soins. En

effet, les soins relationnels étant prédominants en pédopsychiatrie, les infirmières

adoptent une posture bienveillante, empathique, congruente...etc. et affective afin de

créer un lien et pouvoir construire une relation de confiance de qualité avec les enfants.

Le témoignage de Monique Trost, infirmière, dans la nouvelle revue de psychosociologie

confirme le fait qu’il est nécessaire d’être dans la tendresse en disant que « dans la

clinique quotidienne, je remarque que la tendresse fait partie du soin. Je vois son impact

sur la construction de la personnalité d’enfants suivis très jeunes, de façon régulière. ».

Ainsi, ma représentation d'un bon positionnement professionnel, c'est à dire à la mise en

place d'une distance physique stricte avec les enfants, n’est pas toujours avéré.

Effectivement, en pédopsychiatrie, il est nécessaire d’être dans la proximité et de faire

preuve de tendresse pour avoir une relation de qualité avec un enfant et prendre en

charge leurs troubles psychiatriques.

1.2.4 La distance professionnelle

Pour résumer, on a pu voir que les soignants adoptent deux postures afin de créer un

environnement sécurisé pour l'enfant et pour satisfaire ses besoins. Cela afin qu'il puisse

se développer psychologiquement et affectivement. La variation de leur posture est donc

à visée thérapeutique. Je m'interroge donc sur les limites des professionnels à utiliser la

dimension affective du soin relationnel. Quels sont les risques pour eux à utiliser la

tendresse lors d'activités thérapeutiques ? Comment se protègent-ils émotionnellement ?

Lors d'activités dans un environnement fermé, j'ai constaté que les infirmières posent des

règles, expliquent les consignes et les objectifs de l'activité. Elles sont dans une posture

d’éducatrice et de cadrage. Elles ne sont pas dans la démonstration d'affection ou la

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tendresse comme lors d’activités plus ludiques mais bien dans l'accompagnement dans

leur besoin de connaissance, d’apprendre. Elles adaptent donc leur distance

professionnelle en fonction des activités et des enfants. Or, selon Maurice Liégeois,

psychologue clinicien, la distance professionnelle permet de protéger psychologiquement

les soignants et de mieux gérer leurs émotions. En effet, « trouver et gérer la ''bonne''

distance thérapeutique est une sécurité psychologique » aussi bien pour le soignant que

le soigné. Donc en instaurant une distance plus importante et adaptée aux exercices

thérapeutiques, les infirmières essaient de se protéger émotionnellement. Par ailleurs, il

est important de rappeler que selon Pascal Prayez, la distance s’intègre dans les objectifs

définis de la rencontre et dans le contexte institutionnel. Les infirmières savent donc, en

fonction des objectifs de prise en charge et des besoins de l'enfant, à quel moment être

plus ou moins proches de lui. De plus, selon le même article professionnel de la revue

soins psychiatries, « chaque acte soignant pratiqué […] doit être parlé et réfléchi avant et

après la séance. La répétition de ces actes et la critique qui en est faite apportent aux

soignants une expérience primordiale. » Ainsi, on retrouve ce que l’auteur appelle la

phronésis, c’est-à-dire la connaissance pratique qui n’est pas seulement basée sur le

savoir théorique mais sur la capacité d’agir du soignant de la bonne manière, au bon

moment et pour les bonnes raisons.. Pour cela, il y a le kairos, « c’est l’aptitude qu’a le

soignant à saisir l’occasion opportune, à reconnaître le moment où il peut agir de telle ou

telle façon et ce qu’il peut se permettre. ». Puis il y a la bonne manière, en évitant l’excès

et le défaut et enfin, les bonnes raisons qui « sont celles qui amènent l’enfant vers plus

d’interactions avec les autres, plus de socialisation et moins d’angoisses ». Les infirmières

du service savent donc, avec l’expérience, choisir leur posture en fonction de la situation.

Par conséquent, la distance, mise en place en fonction des situations, fait donc partie de

la prise en soins de l'enfant, des objectifs que l'équipe soignante s'est fixée et permet de

se protéger émotionnellement.

1.2.5 Les émotions et les affects

Cependant, je m’interroge sur la place des affects dans les soins relationnels. En effet, j’ai

pu ressentir du plaisir lorsque les infirmières et moi-même jouons avec les enfants. Les

rires, les visages souriants des enfants et des soignants pendant le temps de jeu et au

contraire, ma gène lorsque Benjamin m’étreint, prouvent que des émotions émergent. Je

me demande alors si la tendresse et l’affectivité envers les enfants sont motivées par nos

émotions de la situation vécue. Nos affects peuvent-ils motiver notre posture de soignant

envers des enfants ? En quoi la prise en considération de nos émotions peut favoriser ou

non la relation avec des enfants ?

On a vu que la tendresse est un sentiment tendre, d’amitié, d’affection qui se manifeste

par des gestes, des paroles, des intentions, des regards. Elle est aussi une attention

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bienveillante envers l’autre, une générosité et un don de soi. Mais encore selon Nathalie

Clément-Hryniewiez, psychologue clinicienne, « elle est une invitation à être qui se

heurte, le plus souvent au discours raisonné de l’intellect qui voudrait que l’on écoute

parfois davantage sa raisons que ses sentiments. » Donc la tendresse intervient à la suite

d’émotions éprouvées par la personne. En effet, selon florence Michon, « les émotions

servent de moteur à nos comportement et […] elles sont essentielles à la vie. ». On

comprend alors que nos émotions comme la joie entrainent un comportement, une

réaction de la part de celui qui éprouve une émotion.

Une émotion se définit, selon Géraldine Langlois par «une réaction psychologique à une

situation donnée, qui touche des zones lointaines et profondes comme des zones plus

superficielles du moi intime et du moi professionnel ». Les sourires, les rires, le plaisir et la

gêne sont des émotions vécues à un moment donné, ce qui les différencient des

sentiments qui sont exprimés pendant une période plus longue. S’il est facile de

comprendre que le plaisir et les rires expriment la joie, qu’en est-il de la gêne que j’ai

éprouvée à la suite du compliment de Benjamin et de son « câlin »?

Selon Michelle Larivey, psychologue et auteur du livre La puissance des émotions, la

gêne « survient lorsque je repousse un sentiment de plaisir et que je tente d'y substituer

l'indifférence. ». Elle rajoute que « Elle résulte de deux forces contraires qui s'affrontent

en moi. Le plaisir qui apparaît naturellement au moment où il se passe un événement

agréable d'une part et l'effort pour empêcher ce plaisir de s'exprimer d'autre part. » Donc

le compliment de cet enfant à mon égard et le fait qu’il me montre de l’intérêt par ce

« câlin », m’ont inconsciemment donné du plaisir que je n’ai pas voulu extérioriser et qu’il

s’est exprimé en gêne. Il me semble donc nécessaire de laisser parler nos émotions afin

d’être congruent et authentique dans la relation.

Jacques Salomé, dans un éditorial, parle des émotions et dit que « Accepter d’entendre

nos émotions, de les respecter (et non de les maîtriser ou réprimer comme il était

conseillé autrefois dans certaines familles ou milieux) est un des moyens, des chemins

possible pour être en accord avec soi-même. »

En effet, dans la relation soignant/soigné, Florence Michon, cadre de santé, dit que « le

soignant, pour prendre soin de l’autre, doit accepter que ces émotions fassent partie

intégrante de sa personnalité et doit les légitimer. ». Elle continue en disant que l’infirmier

« fait alors preuve « d’intelligence émotionnelle » en reconnaissant lui-même ses propres

émotions et en les maîtrisant. ». Cependant, cette notion de maîtrise peut-elle être

compatible avec l’utilisation de la tendresse dans les soins ?

D’après Sylvie Consoli, psychanalyste, quelle que soit la gravité de la situation, « le

manque de tendresse chez un soignant ne lui permet pas d'avoir de l'empathie pour son

patient, c'est-à-dire la capacité à comprendre et à partager la souffrance de ce dernier

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tout en restant, bien sûr, et c'est fondamental, à sa place de soignant. Seules la tendresse

et l'empathie permettront au soignant, quel qu'il soit, d'accepter les découragements et les

révoltes de ses patients, ses désirs, ses doutes et ses craintes ». Donc la tendresse fait

partie intégrante de la relation mais elle requière aussi une maîtrise émotionnelle de la

part des soignants. On parle alors de la « place/rôle du soignant ».

1.3 Question de départ

Ce questionnement et cette recension des écrits m’ont amené à réfléchir sur le rôle de la

tendresse dans les soins en pédopsychiatrie. En effet, la tendresse est un besoin primaire

de l’enfant qui lui permet de se développer sur le plan psychique et affectif. Son utilisation

en pédopsychiatrie parait alors importante puisque les enfants accueillis ont, pour la

plupart, des troubles de l’attachement et des conflits familiaux. Cependant, la tendresse

c’est un don de soi, une générosité, c’est accepter que ses émotions fassent partie

intégrante de sa personnalité. On doit être en accord avec soi-même puisqu’elle est le

résultat d’une émotion éprouvée sur le moment. Elle suggère une proximité avec l’enfant,

une attitude bienveillante, de maternage de la part des soignants. Or, des auteurs telles

que Sylvie Consoli ou Florence Michon parlent de son utilisation avec une « intelligence

émotionnelle », c’est-à-dire en reconnaissant ses émotions et en les maîtrisant. Ces

auteurs parlent alors de la place du soignant dans la relation.

Ainsi, je m’interroge sur la compatibilité de l’utilisation de la tendresse dans les soins en

pédopsychiatrie avec la place et le rôle du soignant dans la prise en soin d’un enfant. En

effet, je me demande s’il existe des limites ou des risques pour les soignants à utiliser la

tendresse dans les soins et pose donc comme question de départ :

1.4 Enquête exploratoire

Afin de compléter ma réflexion sur ce thème et de confronter la recherche théorique avec

ce que pensent les professionnel de ce sujet, je vais mener une enquête exploratoire sur

le terrain auprès d’infirmiers.

1.4.1 Objet de recherche

Pour cela, il me semble plus pertinent de mener des entretiens semi-directifs, méthode

qualitative, car je suis à la recherche de sens et non dans l’explication d’un phénomène.

En effet, la tendresse dans les soins, le rôle d’un soignant auprès d’enfants atteints de

troubles psychiques, les affects et les émotions et les limites à l'utilisation de la tendresse

En quoi l’utilisation de la tendresse dans les soins peut-elle avoir des limites ou des risques

pour le soignant en pédopsychiatrie ?

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sont des sujets très subjectifs et je souhaite recueillir les sentiments, les ressentis, les

difficultés des infirmières interrogées sur ces thèmes.

1.4.2 Règles de déontologie et d’éthique

Avant l’entretien, j’ai demandé aux IDE interrogées si je pouvais enregistrer leurs propos

à l’aide de mon dictaphone afin d’analyser leurs réponses plus facilement.

Je leur ai précisé que l’entretien restera anonyme et qu’en aucun cas on ne pourra les

identifié.

Je leur ai également proposé de leur faire parvenir mon travail de fin d’année d’étude si

cela les intéresse.

1.4.3 Mon échantillonnage :

Mon sujet étant ciblé sur des enfants ayant des troubles psychiatriques, le choix de la

population se trouve limité. J’ai choisi d’interroger deux IDE travaillant dans un hôpital de

jour et d’âge diffèrent afin de comparer leurs réponses. La première IDE (IDE 1) à 31 ans

et est diplômée depuis novembre 2006. Elle a travaillé deux mois en intérim puis en

psychiatrie. Elle est en poste à l’hôpital de jour depuis décembre 2012.

La deuxième IDE (IDE 2) a 43 ans et est diplômée depuis 1994. Cela fait 21 ans qu’elle

travaille en psychiatrie dont 18 ans à l’hôpital de jour.

1.4.4 Déroulement de l’entretien

Ces entretiens seront semi-directifs, c’est-à-dire que je poserai une question ouverte,

inaugurale afin que les professionnelles puissent s’exprimer librement sur le sujet. Ma

présence permettra de recentrer la personne sur les thèmes qui m’intéressent si celle-ci

dévie du sujet. L’enregistrement des entretiens me permettra d’être totalement concentrée

sur les propos des infirmières et d’observer leurs gestuelles.

1.4.5 Mon guide d’entretien

Celui-ci sera le même pour les deux professionnelles interrogées. Il me servira de support

lors des entretiens et me permettra de relancer les personnes sur les thèmes qui

m’intéressent (Cf. Annexe 1).

Choix de la question inaugurale

« Pouvez-vous me parler de la place de la tendresse dans les soins en

pédopsychiatrie ? »

Cette question inaugurale reste très ouverte et permettra au professionnel de s’exprimer

librement sur le sujet afin qu’il aborde les thèmes que je souhaite. Elle permettra aussi

d’aborder des thèmes auxquels je n’avais pas pensé et donc enrichir ma réflexion.

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Thèmes attendus

Au vue de mes questionnements, de mes observations et de mes recherches théoriques,

je souhaiterais que les professionnels abordent plusieurs thèmes. Ceux-ci me semblent

importants pour comprendre le rôle de la tendresse en pédopsychiatrie mais aussi

l’impact qu’elle peut avoir sur les émotions, ses limites et le rôle de l’IDE dans ce service.

Ainsi, j’ai divisé mon guide d’entretien par thème :

La tendresse : Étant le sujet de ma question de départ, j’attends ici que les IDE me

définissent ce qu’est pour elles la tendresse et son rôle sur le développement de l’enfant.

Il est intéressant de comparer la littérature avec ce que pensent les professionnels du

terrain sur son utilité, comment elles l’abordent, si elles la considèrent comme un soin.

La place/le rôle du soignant : D’après ma recension des écrits, l’utilisation de la

tendresse peut avoir un impact sur la place du soignant. Il faut savoir rester professionnel

tout en faisant preuve de tendresse dans la relation avec l’enfant. Je pense qu’il sera

intéressant de connaître les avis des infirmières sur ce sujet car elles sont les premières

concernées. Je souhaiterai qu’elles abordent deux sous thèmes qui sont les compétences

relationnelles et la distance professionnelle. Le premier me permettra de connaître leur

rôle dans la relation avec l’enfant, quelle place elles occupent, quelles compétences

doivent-elles mettre en place et le second me permettra de confronter la littérature et de

comprendre comment elles gèrent cette notion de distance avec des enfants.

Les affects, les émotions : Ce thème me semble important à aborder car nous sommes

en présence d’enfants qui ont des vies parfois compliquées et je souhaiterai comprendre

comment elles arrivent à gérer leurs émotions et quelles places elles leur accordent dans

un moment tendre avec un enfant. Ma recension des écrits parlent « d’intelligence

émotionnelle » où il est question de maîtrise des émotions. Savoir ce qu’elles en pensent

et comment elles traitent ce sujet si subjectif me permettra de confronter la littérature avec

leurs propos.

Les limites ou les risques à l'utilisation de la tendresse : Ce dernier thème me

permettra de connaître les difficultés qu'elles peuvent rencontrer sur le terrain et de les

confronter avec ma recension des écrits.

1.4.6 Analyse de mes entretiens

Afin d’analyser mes deux entretiens, je l’ai ai retranscris entièrement et je me suis aidée

de la méthode BARDIN. Cette dernière m'a permis de classer par thèmes les propos des

deux IDE à l'aide d'un code couleur afin de comparer de manière la plus objective

possible et d'analyser leur contenu.

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La tendresse

Après ma question inaugurale, les deux IDE ont pris le temps de me répondre. En effet,

elles ont marqué un silence de 5 secondes avant de me dire que la tendresse est

présente en pédopsychiatrie parce que les patients accueillis étaient des enfants. L'IDE 1

dit : « Je pense que la tendresse est importante parce qu'on est avec des enfants ». Elle

rajoute aussi que « Dans chaque acte en fait, on fait de la tendresse parce que les

enfants demandent des câlins […]. » L'IDE 2 quant à elle, dit que : « La tout de suite, je

pense au fait que l'on s'occupe d'enfants […] dans la relation à l'enfant, il y a la dimension

de la tendresse naturellement. ». Donc, pour elles, l'utilisation de la tendresse serait

naturelle du fait que les patients soient des enfants. Mais comment parlent-elles de la

tendresse ?

L'IDE 1 parle surtout de câlin, de papouilles ou de chatouille. Elle dit : « Le câlin est un

soin en lui-même, donc c'est un acte de tendresse ». Durant plus de la moitié de

l'entretien, elle assimile la tendresse à un contact tactile et parle même de Holding. Elle

dit : « Souvent on voit chez ces enfants-là, comme si ils n'avaient pas été portés. Le

holding est très important. » Elle continue en disant : « C'était un acte de tendresse parce

que c'était un câlin sur moi et il était rassemblé, il était porté. ». Puis, elle finit par dire :

« […] mais il y a des gestes tout à fait tendre dans les ateliers. La tendresse c'est pas

juste un câlin ou une réassurance. Ça peut être juste une valorisation [...] la tendresse ça

va être juste dans un regard. ». Mais encore, elle poursuit son discours en

disant : « Même quand on gronde, il y a de la tendresse, quand on pose une limite, il y a

de la tendresse. ». Donc, on retrouve ici la notion du toucher par ce contact tactile qui

peut être soit un câlin, soit des « papouilles » mais aussi, cette intention ou attitude

bienveillante que décrit Jacques Salomé par un regard, une valorisation.

L'IDE 2 définit la tendresse comme : « [….] un mouvement naturel de la relation d'un

adulte envers un enfant. ». Elle continue en disant: « [….] c'est un mouvement de

bienveillance, d'attention, de douceur [....] Un mouvement affectif [....] Dans les paroles,

dans l'attitude, les gestes. C'est une attitude bienveillante et douce. ». Elle rajoute :

« C'est un sentiment aussi [….]. » ou encore « c'est un mouvement naturel et maternant,

c'est relativement inné [….]. » On retrouve par cet entretien, la définition de la tendresse

selon le Larousse qui parle de sentiment. Mais encore, je constate que cette IDE reprend

les termes de bienveillance, d'attitude, d'attention qui sont présents dans la définition de

Jacques Salomé. En revanche, elle ne fait pas une seule fois référence au toucher, au

contact tactile. Donc, elle compare la tendresse à une posture naturelle qui est selon elle,

innée.

En ce qui concerne son rôle, L'IDE 1 dit : Un enfant qui se blesse dans la cour a besoin

de câlin pour le réconforter. ». Elle justifie l'utilisation de la tendresse en pédopsychiatrie

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en expliquant que les enfants ont un gros retard de développement, qu'il y a des enfants

de 6 ans qui ont un âge mental de 1 an. Elle dit : « […] et un bébé de 1 an, on lui fait des

risettes, des papouilles, […] on reprend tous les stades du développement à partir de leur

âge pathologique. ». Elle intègre aussi le holding dans les actes de tendresse qui est

important pour elle car cela permet à l'enfant d’être rassemblé, d’être porté, de se sentir

en sécurité. On retrouve donc les besoins de sécurité et d'affection de l'enfant décrit par

Maslow.

Pour l'IDE 2, le rôle de la tendresse permet à l'enfant de prendre confiance en lui. Elle dit :

« […] l'enfant a besoin de ressentir cela pour être en confiance, pour prendre confiance

en lui et au monde extérieur. ». Elle explique que : « La tendresse et la bienveillance, elle

lui permet de prendre confiance et de faire des expériences de plus en plus élaborer, de

plus en plus complexe et donc de grandir. ». Elle continue en disant : « […] l'enfant, […]

doit retrouver cette attitude bienveillante pour être en confiance et pour reprendre son

développement et le poursuivre. » On retrouve ici encore, le besoin de sécurité de l'enfant

car, d’après le discours de l'IDE, la tendresse permet de donner un environnement

sécurisé à l'enfant afin qu'il puisse avoir confiance et donc explorer plus facilement le

monde extérieur. Elle explique aussi que : « surtout s'il a eu un attachement sécure,

surtout s'il a eu une relation sécurisante, il va être d'autant plus capable. » Donc, je

retrouve ici le rôle de la tendresse et de la relation affective qui est de favoriser le lien

d'attachement et le sentiment de sécurité, qui font partie des besoins essentiels de

l'enfant selon Bowly.

Pour résumé, les deux IDE interrogées s'accordent à dire que la place de la tendresse est

importante en pédopsychiatrie car elle permet à l'enfant d'avoir un sentiment de sécurité,

un attachement sécure. De plus, elles en parlent comme si l'utilisation de la tendresse en

pédopsychiatrie est quelque chose de naturelle, d'inné, du fait qu'elles travaillent avec des

enfants. Même si l'IDE 1 est plus axée sur le contact tactile, je retrouve dans les deux

entretiens, les notions d'attitude, d'attention et de bienveillance qui définissent la

tendresse.

Le rôle/la place du soignant

L'IDE 1 parle ici de distance professionnelle et dit : « Il y a beaucoup moins de distance

physique avec les enfants qu'avec les adultes en fait. ». Elle explique : « […] même si on

est infirmière et même si on met une blouse, on a un contact physique, un contact tactile

[...] ». Cependant, elle rajoute : « Il faut faire attention aussi je pense quand même, de

rester à sa place de soignant […] on n'est pas les parents, on peut pas remplacer les

parents. » Puis, elle parle des compétences relationnelles nécessaires à la relation. Elle

dit : « il faut une bonne écoute et une bonne observation comme ça tu ressens les

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besoins de l'enfant[...] et tu sais ce que tu peux lui apporter toi, en tant que soignant. ».

Elle continue en disant : « il faut une certaine émotivité, une sensibilité je pense, parce

qu'on travaille avec des humains. » puis, « de l'empathie et il faut être aussi autoritaire

parce que les enfants ont besoin de tester les limites, de savoir jusqu’où ils peuvent

aller. ». Elle argumente son discours en disant : « Sans règles et sans limites, ils sont

perdus. Ça les sécurisent énormément, ça leur montre le chemin. Oui, non, bien, mal, ils

ont tout le monde a organiser. Tu leur montre que tu es présent en posant des limites,

que tu ne l'abandonne pas. ». Dans ses paroles, on comprend que la distance physique

est moins importante avec les enfants du fait des contacts tactiles qu'elle peut avoir avec

eux. Néanmoins, elle est consciente qu'il faut rester à sa place du soignant et que son

rôle n'est pas de remplacer les parents. Puis, elle énumère des attitudes et des qualités

primordiales à la relation comme, l'écoute, l'observation, l'empathie, la sensibilité et

l'émotivité et rajoute l'autorité. Cette dernière compétence est essentielle pour elle car elle

permet, comme la tendresse, de donner un sentiment de sécurité mais aussi le sentiment

d'exister à l'enfant.

L'IDE 2, en s'exprimant sur son rôle, dit : « […] je vais pouvoir lui apporter les outils

appropriés à lui, amener une réponse individualisée, une réponse à ses besoin. » Elle

rajoute : […] je pense qu'il est très important de bien...placer la tendresse. C'est à dire

que ça doit servir l'enfant. Il faut être conscient de ce qu'on fait avec lui. ». Elle continue

en disant : « On parle de juste distance relationnelle. Donc la compétence relationnelle

requise, c'est […] la sagesse. C'est d'avoir conscience des choses, d'avoir conscience de

ce qu'on fait et d'avoir conscience des problèmes de l’enfant et donc de trouver, de même

qu'on essaie de trouver la bonne distance relationnelle, on va faire de même avec la

tendresse. »Elle dit aussi : « On est là en tant que soignant, on n'est pas là pour

remplacer le parent. Pour moi, ça, c'est la base de la relation thérapeutique. ». Donc,

comme pour l'IDE 1, il faut être conscient de ce qu'on fait pour rester à sa place de

soignant. Elle parle de juste distance relationnelle et non d'une distance physique comme

l'IDE 1. De plus, en comparant la compétence relationnelle a de la sagesse, on peut se

rapporter à la notion de phronésis, citée précédemment, qui est la capacité d'agir du

soignant de la bonne manière, au bon moment et pour les bonnes raisons. Elle rajoute

aussi des compétences similaires à celles de l'IDE 1 qui sont l'observation, l'attention et

l'écoute.

Pour conclure, les deux IDE ont chacune énuméré des qualités nécessaires à la relation

comme l’écoute, l'observation, l'attention, l'empathie. Elles donnent donc une importance

à la qualité de la relation avec l'enfant. De plus, toutes les deux soulignent le fait qu'il est

nécessaire d'être conscient de ce qu'on fait afin de rester à sa place de soignant. L'IDE 2

précise que la tendresse doit servir à l'enfant et parle alors de sagesse.

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Les affects, les émotions

L'IDE 1 précise : « Avec certains enfants, ça m'est difficile ces moments tendres. C'est

des enfants où j'ai un transfert peut être négatif envers eux, j'ai moins d'accroche. […] il y

en a avec qui on ressent quelque chose [...] et d'autres moins.». Elle rajoute : « Ces

moments calmes même si ils les demandent, moi, ça me met mal à l'aise, d'ailleurs, je les

refuse souvent. » Elle complète alors en disant : « Mais ils le trouvent avec d'autres

soignants parce qu'on est une équipe, je ne suis pas la seule. ». Néanmoins, elle continue

son discours en disant : « Mais au niveau de la place des émotions, ça me gêne pas du

tout de faire un câlin […] si ça leur apporte quelque chose au niveau du soin. ». Elle

argumente sa réflexion et affirme : « Je reste professionnelle, je ne me mets pas en

danger moi […] je sais que je suis au travail, je rapporte pas les soucis des enfants à la

maison. ». Elle conclue en disant : « Comment te l'expliquer, je sais pas, je pense que ça

vient avec l’expérience. »

On peut voir par ce discours que des émotions peuvent émerger lors de moment tendre

avec des enfants. L'IDE parle alors de transfert négatif qui peut être la raison de sa gêne

mais elle précise que ces enfants peuvent trouver de la tendresse avec d'autres membres

de l'équipe. On comprend alors qu'elle accepte les émotions, qu'elle les entend et en

prend conscience. Ce qui rejoint les propos de Jacques Salomé ou de Florence Michon

qui donnent une importance au fait qu'il est nécessaire d'admettre que ces émotions

fassent partie de sa personnalité. Cependant, dans les autres situations, elle accepte ces

câlins car elle considère qu'elle reste professionnelle et que cela peut être thérapeutique

pour l'enfant.

L'IDE 2 définit d'abord les émotions et dit : « […] les émotions, c'est quelque chose de

naturel, qu'on va ressentir, c'est pas quelque chose qui est intellectualiser. ». Elle rajoute :

« […] il faut les accueillir avec bienveillance, les conscientiser évidemment et c'est pareil,

évaluer si on va servir les besoins spécifiques de l'enfant ou si on va le gêner. ». Elle

argumente en disant : « […] c'est très important d'accueillir les émotions, les sentiments

mais c'est important de les repérer, d'en prendre conscience et de les situer dans la

relation thérapeutique. Est ce qu'elles vont servir le soin ou le desservir ? » Elle continue

sa réflexion en disant : « Quand on a un sentiment de gêne ou de malaise, c'est une

alerte et en général, ça conduit à une remise en question ou à une discussion avec une

collègue. » Elle donne l'exemple d'un enfant violenté qui mettra « en place un

fonctionnement qui induit la violence » qui « va susciter des émotions et il faut en prendre

conscience » et donc « il faut pouvoir lui proposer autre chose. ». Puis, elle dit : « […]

c'est l’expérience et le travail qui a été fait avec les médecins, les psycho, avec les

collègues, l’expérience va me permettre de m'ajuster aux besoins de l'enfant. », « Donc la

gestion des émotions, c'est ça, c'est s'ajuster. Il y a des choses, des émotions que je vais

laisser passer et d'autres pas. ». Elle conclue en disant : « La plupart du temps, j'ai les

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rennes mais des fois, ça m'échappe un peu. Surtout quand il s'agit de s’énerver quand ils

sont pénibles. »

Pour cette IDE, les émotions sont naturelles et font partie intégrante de la relation

thérapeutique, ce qui rejoint aussi les propos de Florence Michon ou de jacques Salomé

sur l'acceptation des émotions. Elle emploie le mot « accueillir » plusieurs fois dans son

discours, ce qui peut renvoyer aux propos de Jacques Salomé sur le respect des

émotions en acceptant de les entendre. Mais encore, conscientiser les émotions, les

repérer, les situer dans la relation, les ajuster aux besoins de l’enfant peuvent être

assimilé à cette intelligence émotionnelle dont parle Florence Michon.

Pour résumé, les deux IDE acceptent les émotions dans la relations et en prennent

conscience. En refusant parfois des moments tendres avec certains enfants ou en

reconnaissant que des situations peuvent parfois leur échapper, elles sont conscientes

que les émotions font partie de leur personnalité. En ce qui concerne cette notion de

maîtrise des émotions, l'IDE 2 parle d'ajustement. En effet, en fonction des besoins de

l'enfant, elle ne va pas donner la même chose. Certaines émotions peuvent servir l'enfant,

d'autres pas. Donc, elle maîtrise celles-ci afin qu'elles restent thérapeutiques pour l'enfant.

On parle alors d'intelligence émotionnelle selon Florence Michon.

De plus, elles s'accordent à dire que l’expérience et le travail en équipe leur permettent de

rester professionnelle et de gérer des situations qui peuvent être difficile. Effectivement,

l'IDE 1 s'appuie sur l'équipe lorsque celle-ci n'arrive pas à gérer la demande d'un enfant

qui souhaite un moment tendre. L'IDE 2, quant à elle, affirme que l’expérience et le travail

en équipe vont lui permettre de s'ajuster aux besoins de l'enfant, ce qui revient à dire

qu'ils vont lui permettre de reconnaître ses émotions et de les maîtriser dans le but de

rester thérapeutique.

L'expression des limites ou des risques à l'utilisation de la tendresse

L'IDE 1 raconte ici une expérience professionnelle concernant la gestion des émotions et

déclare : « […] je ne rapporte pas les soucis des enfants à la maison. Il m'est arrivé dans

mon ancien travail de le faire et j'ai fait un travail dessus et maintenant je sais où est ma

place. ». Elle rajoute : « Mais la frontière est très fragile, si tu n'es pas une personne avec

une structure assez solide, tu te fais envahir par les problèmes des enfants. ». Avant cela,

lorsqu'elle parle de distance et de la place du soignant, elle dit : « Donc au niveau de

l'attachement et des transferts que l'on peut faire, je pense qu'il faut toujours réfléchir sur

les actes qu'on fait et en reparler après en équipe. Pour savoir si des fois, on va pas trop

loin et réajuster. ». Elle argumente en disant : « Parce que des fois, comme c'est des

enfants, on pourrait dépasser la frontière et ne plus être dans le thérapeutique je

pense. ». Elle conclue sa pensée et dit : « L'importance de l'équipe, là, elle est

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Julie Denax - Institut de Formation en Soins Infirmiers du CH de Carcassonne -2015 20

primordiale. C'est de pouvoir échanger après et de communiquer avec son équipe qui te

permet de te sentir beaucoup mieux après et de rester professionnelle. »

On constate que la limite ou le risque pour cette IDE est de ne plus être dans le

thérapeutique et donc ne plus être à sa place de soignant. Les transferts ou l'attachement

peuvent alors limiter l'utilisation de la tendresse selon elle. Elle affirme alors que le travail

d'équipe est primordiale car il lui permet de rester professionnelle et d'exprimer son

ressenti face à une situation difficile.

L'ide 2 dit : « La limite c'est de ne pas aller au-delà dont l'enfant a besoin pour grandir. La

tendresse ça peut être étouffant s’il y en a trop. ». Elle continue en disant : « Il y a des

enfants qui peuvent nous attacher plus que d'autres, c'est la vie, c'est humain. Et donc ils

vont vraiment nous prendre par les sentiments. ». Elle argument et déclare : « […] ça peut

être source de souffrance peut être si on s'attache beaucoup a un enfant et qu'il lui arrive

des choses difficiles, on peut en souffrir. ». Elle conclue sa pensée en disant : « Mais

c'est pas spécifique à la tendresse, pour moi, c'est le risque du métier parce qu'on

travaille avec des enfants, parce qu'on est humain. ». Je rebondie alors sur ses dernières

paroles en reformulant ses pensées. Pour elle, il n'y a pas plus de risque à utiliser la

tendresse que de mettre en place une relation thérapeutique avec un enfant. En effet,

pour elle « la base c'est une relation saine, savoir pourquoi on est là ».Elle

rajoute : « C'est vrai que le cadre du travail, ça aide beaucoup ». Elle revient alors sur le

travail d'équipe et dit : « […] on est une équipe, ça c'est très important l'équipe, on est

plusieurs cerveaux à réfléchir sur un enfant. » Elle déclare alors que « chaque enfant est

soutenu par toute l'équipe, ça aide à bien caler les choses. ». Néanmoins, selon ses

propos, si on se retrouve seul dans une situation, il peut y avoir des dérives : « On peut

être moins dans le professionnel et plus dans le personnel. ». Elle argument en

disant : « Dans le personnel, les choses sont beaucoup moins réfléchies, on n'est plus

tellement dans les service.[...] il va y avoir la place à des émotions pas très bien contrôlé,

donc les dérives ça peut être de faire part à l'enfant d'émotions dont il n'a pas besoin, qui

ne sont pas thérapeutiques. ».

Pour cette IDE aussi la limite ou le risque à l'utilisation de la tendresse est de ne pas

rester à sa place de soignant donc de ne plus être dans le thérapeutique. Cependant, elle

n'attribue pas cette limite seulement à la tendresse mais à la relation thérapeutique à part

entière. Pour elle, si la relation est saine, « la tendresse s'ajuste comme il faut ». Elle

revient aussi sur l'importance du travail en équipe qui lui permet de rester professionnelle

ainsi que le cadre du travail.

Pour conclure ce thème, les deux IDE expriment comme limite ou risque la dérive du

soignant à ne plus être à sa place. Même si pour l'une cette dernière n'est pas spécifique

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à la tendresse mais à la relation à l'enfant à part entière, elles s'accordent à dire que

parfois, on peut ne plus être dans le thérapeutique. Elles reviennent alors sur l'importance

du travail en équipe qui leur permette de rester professionnelles.

Résumé des entretiens :

La tendresse est perçue par les IDE comme une attitude naturelle bienveillante. Pour

elles, il est normal d'être tendre avec un enfant et cela joue un rôle important sur son

développement. Prendre confiance au monde extérieur et en lui-même, en lui donnant un

environnement sécure et le sentiment d'exister, afin qu'il puisse grandir et poursuivre son

développement, sont le rôle qu’elles donnent à la tendresse. On peut alors se rapprocher

des besoins de l'enfant selon Maslow et à la théorie du lien d'attachement de Bowly qui

confirment l'importance des relations affectives et tendre pour le développement

psychoaffectif de l'enfant.

Selon les IDE, le soignant doit avoir alors des compétences relationnelles basées sur

l'écoute, l’observation, l'empathie, l'attention et l'autorité pour l'une d'elle. Cette dernière

permet aussi de donner un milieu sécurisé à l'enfant et l'aide à se construire. Cependant,

des émotions peuvent émerger face à une demande de tendresse d'un enfant envers un

soignant. Il faut alors en être conscient, les repérer, les accepter et les maîtriser. Un

transfert, un attachement trop important peut amener le soignant à ne plus remplir sa

fonction et ne plus être dans le thérapeutique. Elles parlent alors du travail en équipe qui

serait pour elles primordiale et nécessaire dans la gestion des émotions et dans la remise

en question. Ce thème a été abordé spontanément par les 2 IDE lors des sujets de la

gestion des émotions et des limites à l'utilisation de la tendresse. De même que

l’expérience qui, selon elles, permet aussi de mieux maîtriser ses émotions.

2 LE TRAVAIL EN EQUIPE ET L’EXPERIENCE : DANS

L’ACQUISITION D’UNE INTELLIGENCE EMOTIONNELLE

2.1 Question centrale

Cette première partie m'a permis de confronter mes pensées avec la réalité du terrain. J'ai

été surprise par le fait qu'elles n'expriment pas tellement de difficultés lorsqu'elles utilisent

la tendresse dans les soins. Ceci m'a permis de faire cheminer ma réflexion, notamment

sur les thèmes du travail en équipe et de l’expérience. Ces deux thèmes, auxquels je ne

n’avais pas pensé, semblent très important pour la pratique au quotidien et

particulièrement pour la gestion des émotions. Je poserai donc comme question centrale :

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Julie Denax - Institut de Formation en Soins Infirmiers du CH de Carcassonne -2015 22

2.2 Développement du cadre conceptuel

2.2.1 le travail en équipe

Afin de comprendre ce concept, je vais d'abord définir le concept « équipe ».

Le mot équipe est, selon le dictionnaire historique de la langue française, synonyme

d'équipage car il était employé par les marins. Il remonte au moyen âge et désigne plus

tard, un ensemble de bateaux reliés les uns aux autres, appelé esquif, tirés par des

hommes depuis la rive. Par la suite, le terme équipe désigne le groupe d'homme. Après

avoir disparu du langage usuel, il réapparaît en 1860 dans le domaine sportif. Enfin, au

20ème siècle, il est utilisé pour s'appliquer au monde du travail.

Selon le livre L'apprentissage coopératif. Théorie, méthodes, activités de Abrami : « Une

équipe peut être définie comme étant un groupe de personnes interagissant afin de se

donner ou d'accomplir une cible commune, laquelle implique une répartition des tâches et

la convergence des efforts des membres de l'équipe. ». Ainsi, une équipe doit avoir un but

commun où chacun se doit de faire des efforts afin d'y parvenir. Pour Pierre Cauvin,

auteur du livre La cohésion des équipes, l'équipe est « le lieu où se développe les

solidarités, où se renforce les actions de chacun par le jeu des échanges, où s'unifie

l'activité, où se créer un esprit commun ». Cette définition vient compléter celle de Abrami,

dans le sens où, il est important d'être solidaire entre les membres de l'équipe afin de

mener à bien l'objectif commun. Par cette mission commune, va alors se développer une

unification des membres de l'équipe pour l'atteindre.

Mais encore, selon Monique Formarier, auteur du livre Les concepts en sciences

infirmières, les attributs de ce concept sont d'avoir un but commun à atteindre grâce à une

action commune. Cette action doit être réalisée par chaque membre de l'équipe. Chacun

est une ressource pour l'autre et il peut y avoir des rôles différents, complémentaires sans

qu'il y ait prépondérance d'un rôle sur l'autre. L'équipe doit être basée sur des interactions

positives, une collaboration efficace. Enfin, il doit y avoir un chef d'équipe afin de garantir

son efficacité.

Je retrouve ici, les propos de l'IDE 2 qui dit qu'un enfant est soutenu par toute l'équipe.

L'enfant serait alors l'objectif commun et chaque membre apporterait leur expérience pour

prendre en charge de manière efficace celui-ci.

Cependant, selon Roger Mucchielli, auteur du livre Le travail en équipe. Clés pour une

meilleure efficacité collective, il ne suffit pas d'être autour d'une table pour être une

En quoi le travail en équipe et l'expérience peuvent participer à la gestion des émotions du soignant?

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équipe. Le sentiment d'appartenance est très important, selon lui, pour la cohésion du

groupe. Il dit : « L'appartenance (à l'équipe) de la part des membres, gage de participation

et de coopération, est le vécu singulier de ce qui est la cohésion au niveau groupal. »

Monique Formarier rajoute qu'il faut « accepter les valeurs, les codes sociaux, les rites,

tout ce qui permet de forger un « esprit d'équipe » ». Mucchielli précise : « L'identification

au groupe, c'est sentir le groupe comme le sien, les réalisations du groupe comme

siennes, ses succès et ses échecs comme siens. ». On retrouve ici les esprits de

solidarité et de confiance qui sont forgés grâce au sentiment d'appartenance des

membres de la même équipe. De plus, chaque compétence est une ressource pour

l'équipe et « se potentialisent et se renforcent mutuellement » pour Monique Formarier.

En ce qui concerne le travail en équipe, dans un article des Cahiers pédagogiques intitulé

Les compétences collectives et la gestion des savoirs, Beillerot dit : « la finalité du travail

en équipe est la compétence collective qui résulte de la conjugaison de compétences

individuelles […] qui sont plus que l'addition de chacun. ». On retrouve ici cette notion de

compétence individuelle mise à contribution du groupe afin de potentialiser l'efficacité du

travail d'équipe. De plus, selon Mucchielli, les conditions favorables au bon

fonctionnement du travail en équipe sont, entre autre, « l'entraide en cas de difficulté d'un

des membres », « la volonté de suppléance d'un membre défaillant » et « la

connaissance à priori des aptitudes, réactions, initiatives de tous les autres par chacun ».

Ces points sont repris par Bruno Fortin dans son livre La gestion du stress au travail en

déclarant que « La coopération et l'entraide sont indispensables. Les membres de

l'équipe sont interdépendants. » et que « La clarification des rôles et responsabilités de

chacun. Chacun sait ce qu'on attend de lui dans son rôle [...] ».

Le travail en équipe paraît donc important lorsque nous sommes des soignants. Car nous

avons tous un but commun qui est la prise en soin d'un patient. Le partage de chaque

compétence permet d’améliorer la qualité de la prise en charge mais aussi, permet aux

soignants de s'entraider dans des situations particulières et de se remettre en question.

Je reviens alors sur les propos des IDE interrogées car elles viennent confirmer ce

concept du travail en équipe. Elles sont conscientes des compétences de chacun et

peuvent s'appuyer dessus lorsqu'elles rencontrent des difficultés avec un enfant par le

partage, la discussion et l’entraide.

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2.2.2 L’expérience

Le « Petit Larousse » donne comme définition de l’expérience, « une connaissance

acquise par la pratique jointe à une réflexion ». En prenant l’exemple de notre formation,

la notion de pratique me semble importante car les stages ont une place prépondérante.

Ils nous permettent d’exécuter des gestes, des activités afin d’améliorer notre dextérité,

nos techniques de soins. Puis, il y a la notion de réflexion qui est, dans cette définition,

interdépendante avec la pratique. On peut alors se référer aux analyses de situation qui

permettent à l'étudiant de se questionner sur une situation de soin et de prendre du recul.

Pour Jean Vincens, professeur de Sciences économiques, il existe deux types

d'expériences : l’expérience-acquisition et l’expérience révélation.

La première est acquise par la pratique suivie d'une réflexion, ce qui l'amène à dire, que

l’expérience-acquisition ne se limite pas à des situations vécues et n'est pas acquise

spontanément. Encore faut-il que le sujet mène une réflexion sur la situation, c'est à dire

une mise à distance vis à vis de la tâche à effectuer et un retour sur soi. Cette réflexion lui

permettra de passer par une expérience particulière à une capacité d’expériences qui

enrichira sa pratique dans des situations nouvelles et diversifiées. L’expérience exige

donc un retour réflexif sur cette pratique, ce que Vincens nomme un « acquis

conscient. ».

Ce que dit cet auteur me semble intéressant et rejoint les propos des IDE interrogées. En

effet, « Évaluer, réfléchir les choses, penser les choses » (IDE 2) ou « je pense qu'il faut

toujours réfléchir sur les actes qu'on fait » (IDE 1) renvoient à la réflexion qu'elles peuvent

mener dans leur pratique au quotidien.

La deuxième expérience est le fait que chaque individu possède déjà en lui, des

compétences dont il n'a pas connaissance. Ainsi, toute situation de travail est une

découverte de soi-même, une révélation de soi. Selon Vincens, « L'individu n'acquière

pas des compétences nouvelles, il découvre qu'il en possède certaines qu'il ne

soupçonnait pas. ». Ainsi, il rajoute : « […] un individu peut découvrir des compétences,

naturelles ou acquises, au cours de son histoire professionnelle ». Ceci rejoint les dires de

l'IDE 1 lorsqu'elle déclare que certaines personnes sont naturellement beaucoup plus

maternantes et tendres et d'autres, plus cadrantes et directives. Ces personnalités

professionnelles ont développé des compétences naturellement présentes en elles grâce

à des situations de soins.

Par ailleurs, selon Blaug, dans son ouvrage « The Empirical status of Human Capital

Theory, a slightly jaundiced survey », la pratique peut être totalement informelle, c'est à

dire sans formation formelle, solitaire, c'est-à-dire que le sujet est capable de tirer parti lui-

même de ses expériences de travail ou éventuellement, accompagné par ses pairs grâce

à des situations de travail discutées et encadrées. On pourrait alors faire le lien avec le

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Julie Denax - Institut de Formation en Soins Infirmiers du CH de Carcassonne -2015 25

travail d'équipe où la communication et l'échange permettent aux IDE de réfléchir sur une

situation particulière et d'en tirer une expérience. L'IDE 1 dit : C'est de pouvoir échanger

après et communiquer avec son équipe qui te permet […] de rester professionnelle. », De

même pour l'IDE 2 « […] penser les choses, pas tout seul d'ailleurs, ça se fait en

équipe », « […] on est plusieurs cerveaux à réfléchir sur un enfant. ».

Ainsi, l’expérience professionnelle s'acquière grâce à la pratique suivie d'une réflexion du

sujet en prenant du recul sur la situation et sur soi-même. Cette réflexion permet

d'acquérir de nouvelles compétences ou de faire émerger des compétences naturelles. Le

sujet peut mener cette pratique seule ou à l'aide d'un autre travailleur.

Ce dernier point est, selon l'article « L’expérience professionnelle dans les modes de

gestion de la main d’œuvre » écrit par Mallet et Vernières, la dimension sociale de

l’expérience. Elle désigne l’acquisition des connaissances au sens large (savoir, savoir-

faire, savoir-être) relatives aux relations avec les autres travailleurs. Je reviens alors vers

l'importance du travail en équipe qui est primordiale dans notre métier car il permet

d'acquérir des connaissances partagées entre les membres de l'équipe, de prendre du

recul sur une situation ou sur nos pratiques, d'acquérir de l'expérience et donc d’améliorer

la prise en charge.

2.2.3 La gestion des émotions

D'après l'enquête exploratoire, l’expérience et le travail en équipe permettent aux IDE de

mieux gérer des situations ou leurs émotions.

Ainsi, il me semble important de revenir sur le concept « émotion » afin de comprendre

comment l’expérience et le travail en équipe peuvent jouer un rôle sur leur gestion.

Étymologiquement, le terme est issu du latin et est construit en deux parties. Le préfixe

« e » issu de « ex » qui désigne éloignement vers l’extérieur et le radical « motion » issu

de « movere » décrit par le mouvement. Donc une émotion, c'est littéralement un

mouvement vers l’extérieur. Si de nombreuses théories ont vu le jour au court du temps,

il est difficile aujourd'hui de trouver une définition claire et unanime de ce concept.

Je vais donc vous proposer une première définition écrit par N. Sillamy dans le

Dictionnaire de psychologie : « l’émotion est une réaction globale, intense de l’organisme

à une situation inattendue accompagnée d’un état affectif de tonalité pénible ou agréable

».La deuxième est tirée du dictionnaire de l'Académie : « Réaction affective brusque et

momentanée, agréable ou pénible, souvent accompagnée de manifestations physiques

ou de troubles physiologiques. ». Je remarque qu'il y a une similitude entre ces deux

définitions, qui est une manifestation affective ou physique générée par l'émotion.

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Julie Denax - Institut de Formation en Soins Infirmiers du CH de Carcassonne -2015 26

Ainsi, nos comportements, nos actes sont régis par les émotions du moment. D'ailleurs,

Margot Phaneuf affirme ce constat : « Nos émotions influent sur nos réactions, nos choix,

nos décisions, elles orientent tout notre agir. Elles sont à la fois source de joie ou de

souffrance et se manifestent, par exemple par la gaieté, la peur, l’anxiété, la surprise, la

méfiance, la colère, la tristesse voire la haine et le rejet, autant qu’elles peuvent

déclencher des sentiments d’empathie, de tendresse et d’amour ». Cependant, en tant

que soignant, on ne peut pas se permettre certains comportements qui pourraient se

révéler néfastes pour le patient ou pour soi-même. Il faut alors avoir, ce que l'auteur

appelle, « l'intelligence émotionnelle ». Celle-ci a été développé par Daniel Goleman dans

son livre « L’intelligence émotionnelle ». Elle nous permet de reconnaître nos propres

émotions, de les comprendre et de les accepter. Cette intelligence nous permet de les

utiliser à bon escient en fonction des situations et a nous y adapté. Elle nous permet aussi

de reconnaître les émotions des autres, ce qui est important dans les soins infirmiers. En

effet, pour Margot Phaneuf, « C’est l’intelligence émotionnelle qui permet d’humaniser les

soins » car elle « permet de nous connaitre, de nous remettre en question et de nous

améliorer, pour devenir des personnes plus accomplis et de meilleurs soignants. ».

Je peux aussi faire un lien avec Jacques Salomé ou Florence Michon cités plus haut en

ce qui concerne l'importance de l'acceptation et de la compréhension de nos émotions. Il

est question aussi de repère et d'adaptation, termes repris par les IDE interrogées. Si

l'une parle d'ajustement et l'autre de réajustement sur le thème des émotions, leur

capacité d'adaptation à l'enfant ou à la situation n'est pas à contester. Mais comment

développer, approfondir notre « intelligence émotionnelle »?

Pour Margot Phaneuf, celle-ci relèverait de plusieurs compétences qui sont la

compréhension, l'acceptation et la gestion des émotions ; l'évaluation de notre motivation

et notre automotivation ; la reconnaissance et la compréhension des émotions des autres

et la gestion harmonieuse de notre relation avec les autres. Goleman, lui, parle de prise

de conscience de soi, de gestion de soi, de prise de conscience sociale et de gestion des

relations interpersonnelles. L'intelligence émotionnelle n'est donc pas quelque chose

d'innée, même si certaines personnes seraient plus douées que d'autres, il s'agit bien

d'une acquisition de compétences. Or, L'expérience et le travail en équipe permettent,

grâce à la pratique, à la réflexion, à l'échange, à la communication et à l'entraide entre

collègue, d'acquérir des connaissances, de forger nos compétences ou de les renforcer.

Cela est de même alors pour l'intelligence émotionnelle qui demande au soignant de

travailler ces capacités émotionnelles et sociales.

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2.2.4 Le soignant

Ce développement de concepts tels que le travail en équipe, l’expérience et la gestion

des émotions m’amènent à m'interroger sur ce qu'est un soignant. En effet, pourquoi en

tant que soignant la gestion des émotions est-t-elle si importante ? En quoi notre travail

de soignant demande-il une intelligence émotionnelle ?

Un soignant, selon le Dictionnaire Le Larousse c'est une « personne qui donne des soins

à quelqu'un ». Selon l’article L4311-1 du Code de la santé publique :

"Est considérée comme exerçant la profession d'infirmière ou d'infirmier toute personne

qui donne habituellement des soins infirmiers sur prescription ou conseil médical, ou en

application du rôle propre qui lui est dévolu. L'infirmière ou l'infirmier participe à différentes

actions, notamment en matière de prévention, d'éducation de la santé et de formation ou

d'encadrement.."

Dans ces définitions, nous retrouvons le terme de soins, ce qui m’amène à définir ce mot.

Selon Virginia Henderson, les soins infirmiers : « consistent principalement à assister

l'individu, malade ou bien portant, dans l'accomplissement des actes qui contribuent au

maintien ou à la restauration de la santé (ou à une mort paisible) et qu'il accomplirait lui

même s'il avait assez de force, de volonté ou de savoir. ». De plus, selon Christophe

Debout, infirmier anesthésiste, doctorant, co-auteur du livre les concepts en sciences

infirmières de Monique Formarier, les soins infirmiers relèvent d'une attention et d'une

intention soignante spécifiques à l'égard de la personne. Il rajoute : « La conception et la

mise en œuvre des soins infirmiers sont conditionnées à l'engagement d'une relation

interpersonnelle et à l'utilisation d'un processus intellectuel (raisonnement clinique)

alimenté de connaissances scientifiques [...] ». D'après ces définitions du soin infirmiers,

je comprends que le soignant doit avoir un engagement auprès de la personne, une

attention et une intention envers elle ainsi qu'une réflexion afin de comprendre

l'expérience globale qu'elle vit et d' « identifier sa réponse humaine spécifique » selon

Christophe Debout. On retrouve ici, les compétences sociales et émotionnelles dont doit

faire preuve le soignant. En effet, les relations interpersonnelles, le processus intellectuel

et l'engagement du soignant font partie de son rôle car il doit amener une réponse

humaine individualisée et spécifiques aux besoins du patient.

Ainsi, le soignant, pour prodiguer des soins infirmiers, doit être engagé, impliqué dans la

relation, il doit avoir une « intention soignante ». Il me semble intéressant de s’arrêter sur

ce point. Si le soignant doit avoir un engagement, une intention envers la personne afin

d'amener une réponse humaine, c’est-à-dire adapté à ce que vit, ressent le patient, il doit

être en mesure de faire preuve d'intelligence émotionnelle. En effet, en repérant les

émotions du soigné pour comprendre ce qu'il vit mais aussi ses propres émotions, le

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Julie Denax - Institut de Formation en Soins Infirmiers du CH de Carcassonne -2015 28

soignant pourra, selon Margot Phaneuf, « orienter son jugement et son comportement et

d’en tirer le meilleur parti possible dans l’intérêt du malade. ».

2.3 Synthèse du cadre conceptuel

Je me rends bien compte, au vue de ces recherches, que le travail en équipe et

l’expérience permettent à l'infirmier d'acquérir une intelligence émotionnelle. Assurément,

le travail en équipe donne au soignant la possibilité de partager ses difficultés, de prendre

du recul, d'en discuter avec ses collègues et de trouver une aide sur laquelle s'appuyer

lorsque la situation est perçue comme insurmontable. Le partage des compétences

permet aussi de remettre en question nos pratiques et d’améliorer la qualité de la prise en

charge du soigné. Mais encore, l’expérience professionnelle, qui se traduit par une

pratique suivie d'une réflexion, permet à l'infirmier d'acquérir de nouvelles compétences

ou d’en faire émerger des naturelles. L'intelligence émotionnelle, étant une compétence

parmi tant d'autres, il me paraît justifier de dire que le travail en équipe et l’expérience

permettent au soignant d'acquérir ces capacités émotionnelles et sociales.

2.4 Question de recherche

Au vue de toutes mes recherches et de mes entretiens, je prends conscience de

l'importance du travail en équipe et de l’expérience dans notre métier d'infirmier. Ceux-ci

permettent au soignant de rester professionnelle et de mieux gérer des situations

difficiles. L' « intelligence émotionnelle » dont doit faire preuve l'infirmier permet à celui-ci

d'être engagé, impliqué dans la relation et de donner une réponse humaine adaptée à la

personne. En effet, elle exerce une influence marquée sur le comportement du soignant

et son évolution humaine car elle permet de mieux se connaître mais aussi de porter une

attention particulière sur les émotions, sur l’expérience que vit le patient.

Ainsi, je pose comme question de recherche : Dans quelle mesure, l'intelligence

émotionnelle de l'infirmier favorise-t-elle l'humanisation des soins ?

3 L’INTELLIGENCE EMOTIONNELLE : UN PAS VERS

L’HUMANISATION DES SOINS

Dans cette partie, je vais essayer de me positionner en tant qu’apprentie chercheuse et

non plus en tant qu'étudiante.

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Julie Denax - Institut de Formation en Soins Infirmiers du CH de Carcassonne -2015 29

3.1 Question de recherche :

3.2 Présentation et explicitation de l'objet de recherche envisagé

Au tout début de ma recherche, je me suis centrée sur la place de la tendresse dans les

soins en pédopsychiatrie en développant plusieurs thèmes tels que la tendresse, la

distance professionnelle, les affects et les émotions, le développement psychoaffectif de

l'enfant et la posture professionnelle. Mes entretiens m'ont permis d'approfondir mon

questionnement et de me rendre compte de l'importance du travail en équipe et de

l’expérience dans la gestion des émotions du soignant. Ainsi, j'ai voulu approfondir ces

thèmes qui paraissaient primordiales pour les infirmières interrogées.

Je me suis rendu compte alors que le travail en équipe et l’expérience apportent au

soignant les outils nécessaires pour l'acquisition d'une intelligence émotionnelle. Cette

dernière permet au soignant d'être engagé, impliqué dans la relation en limitant les

risques pour lui mais en rendant le soin plus humain.

Faire preuve d'intelligence émotionnelle de la part du soignant pourrait répondre aux

besoins actuels des patients et aux exigences des politiques qui souhaitent remettre le

patient au cœur du soin, où les notions de dignité et de respect sont évoquées mais aussi

qui pourraient réhumaniser le soin en rendant le patient sujet du soin et plus objet du soin.

En effet, lors de mes stages, j'ai pu observer des attitudes et des prises en charge qui ne

prenaient pas en compte les attentes du patient et l'aspect psychologique non parce qu'on

ne veut pas, mais parce que nos pratiques actuelles ne permettent pas de prendre en

considération toutes les dimensions du « prendre soin ». On est encore dans un système

de santé où la médecine dite « occidentale » prédomine. On répare, on soigne un organe

malade, cette vision mécaniste néglige souvent le psychisme du malade et donc ne

permet pas une prise en charge holistique du patient. L'intelligence émotionnelle et

l'humanisation des soins m'intéressent car je trouve qu'il est important de changer nos

pratiques afin de nous retrouver dans nos valeurs professionnelles car nous soignons des

êtres humains et que cela suggère de les traiter en tant que tel.

Connaître l'impact positif de l'intelligence émotionnelle sur les soins pourrait alors amener

les professionnels à se repositionner et à modifier leurs représentations de la place des

émotions et notamment, de la tendresse dans la relation. En effet, il est important

Dans quelle mesure, l'intelligence émotionnelle de l’infirmier favorise-t-elle l'humanisation

des soins ?

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Julie Denax - Institut de Formation en Soins Infirmiers du CH de Carcassonne -2015 30

aujourd'hui de reconsidérer la place des affects et des attitudes tendres, bienveillantes

dans le soin car, en tant qu'infirmier et dans un monde où la maladie chronique ne fera

qu'augmenter, on se doit d'accompagner les personnes et l'entourage dans la maladie, la

souffrance physique et morale, le handicap...etc.

En tant qu’apprentie chercheuse, je privilégierai une approche qualitative car je

rechercherai le ressenti des professionnels sur ce sujet. Je construirai alors une grille

d'entretien avec une question inaugurale et les thèmes que je souhaiterai aborder tels que

l'intelligence émotionnelle et l'humanisation des soins. Cette méthode de recherche me

paraît vraiment appropriée car il me semble difficile d'établir un questionnaire quantitatif

sur ce sujet car il reste assez subjectif. Bien entendu, j'expliquerai aux infirmières

interrogées que ces entretiens resteront anonymes dans le respect des règles éthiques et

déontologiques. Je m’appuierai, par la suite, sur des auteurs tels que Salovey, Mayer,

Daniel Goleman ou Margot Phaneuf qui ont développé et approfondi ce concept pour

essayer de comprendre en quoi, il pourrait rendre le soin plus humain. Evidemment, je

n’émettrai aucune hypothèse de recherche de manière hâtive et resterai dans une posture

réflexive afin d’ouvrir tous les champs des possibles.

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Julie Denax - Institut de Formation en Soins Infirmiers du CH de Carcassonne -2015 31

Conclusion

Ce travail m'a permis de me remettre en question sans cesse et d'approfondir mon

questionnement tout au long des étapes de la recherche.

En effet, dans un premier temps, mon étonnement concernant la posture des infirmières

en pédopsychiatrie m'a amené à réfléchir sur la place et le rôle de la tendresse, la gestion

des émotions, le rôle des soignants et la posture professionnelle. Les deux entretiens

m'ont permis de confronter ma recension des écrits avec les propos des professionnelles

du terrain et de comprendre en quoi, il est nécessaire d'avoir une intelligence

émotionnelle. En effet, elles confirment les dires des auteurs en faisant preuve de

réflexion sur leurs émotions, en les repérant, les analysant et en les situant dans la

relation. Ceci dans le but de rester professionnel car pour elles, le risque à l'utilisation de

la tendresse, c'est de ne plus être dans le thérapeutique, c’est-à-dire de perdre sa place

de soignant.

Ainsi, elles parlent du rôle de l’expérience et du travail en équipe qui permettent de se

remettre en question, de prendre du recul sur une situation, de s’ajuster aux besoins de

l’enfant et de rester à sa place de soignant.

Le développement de ces concepts m'a donné l'occasion de réfléchir sur le rôle du travail

en équipe et de l’expérience sur la gestion des émotions. En effet, ces deux aspects

amènent aux infirmières la possibilité d'acquérir des compétences ou d'approfondi celles-

ci en menant une réflexion sur leur pratique seules ou en équipe. En développant le

concept de la gestion des émotions, j'ai pu approfondir la notion d'intelligence

émotionnelle, qui nécessite des compétences relationnelles et sociales. Donc, qui peut

s’acquérir par le biais de l’expérience et du travail en équipe. L’intelligence émotionnelle

est caractérisée par la reconnaissance de ses propres émotions et par leur maîtrise mais

aussi par la reconnaissance des émotions des autres, ce qui permet à l'infirmier de

donner une réponse adaptée à ce que vit, ressent la personne.

Ainsi, ma question de recherche s’intéresse au lien que peut avoir l'intelligence

émotionnelle avec l'humanisation des soins.

Bien entendu, ce travail de recherche comporte des limites du fait du peu de temps que

j'ai eu pour le réaliser mais j'ai néanmoins essayé de respecter toute la rigueur

méthodologique que ce travail demandait. En réalisant seulement deux entretiens, j'ai pu

avoir un aperçu minime de ce que pensent les professionnelles du terrain de la place de

la tendresse dans les soins. En questionnant un plus grand nombre d’infirmières, je pense

que d'autres thèmes seraient apparus mais cette recherche s'inscrit dans un continuum et

reste toujours ouverte. J'aurai pu choisir de travailler sur la relation de confiance avec un

enfant, sur l'engagement ou l'implication du soignant dans la relation, sur la

phronésis....mais il me semble, qu'en tant que future professionnelle, l'intelligence

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Julie Denax - Institut de Formation en Soins Infirmiers du CH de Carcassonne -2015 32

émotionnelle est primordiale car elle nous permet de rester à notre place de soignant tout

en demeurant des êtres humains dotés d'émotions. L'acceptation et la prise de

conscience que nos émotions fassent partie de la relation et de notre personnalité nous

permettra d'être en accord avec nous-même, d'être à l'écoute de nos ressentis et de nos

émotions et donc d'éviter un épuisement professionnel. Ainsi, on pourrait se demander si

l'intelligence émotionnelle pourrait prévenir ou au minima, diminuer le burn-out des

infirmiers ?

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Julie Denax - Institut de Formation en Soins Infirmiers du CH de Carcassonne -2015 33

Bibliographie

Textes législatifs et règlementaires

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Julie Denax - Institut de Formation en Soins Infirmiers du CH de Carcassonne -2015 35

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Julie Denax - Institut de Formation en Soins Infirmiers du CH de Carcassonne -2015 I

Liste des annexes

ANNEXE 1 Guide entretien

ANNEXE 2 Entretien IDE 1

ANNEXE 3 Entretien IDE 2

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Julie Denax - Institut de Formation en Soins Infirmiers du CH de Carcassonne -2015 II

ANNEXE 1

Guide entretien

Avant l’entretien

Remerciement pour la participation de mon TFE

Explication du déroulement

Entretien semi-directif de 20 minutes enregistré, anonymisé et non diffusé

Aucun jugement de valeur simplement un état des lieux des pratiques, validité de

mon sujet

Possibilité d’avoir un exemplaire du TFE lorsqu’il sera terminé

Question inaugurale : « Pouvez-vous me parler de la place de la tendresse dans les

soins en pédopsychiatrie ? »

IDE interrogées

thèmes

Ce que j’attends Questions de relance

La tendresse Définition de la tendresse

Pour vous, c’est quoi la

tendresse ?

Son rôle sur le

développement de l’enfant

A-t-elle un rôle sur le

développement de l’enfant ?

La place/rôle du soignant

Les compétences

relationnelles mises en place

Pouvez-vous me parler des

compétences nécessaires à la

mise en place d’une relation

avec un enfant ?

La distance professionnelle Quelle est pour vous la

distance professionnelle a

adopté envers un enfant et

quelle est son rôle ?

Les affects, les émotions

La place des émotions dans la

tendresse

Quelle place a pour vous les

émotions lorsque vous faites

preuve de tendresse envers un

enfant ?

La gestion des émotions Comment gérez-vous vos

émotions ?

Expression ou perception

des risques ou limites à

l’utilisation de la

tendresse

L’expression de limites à

l’utilisation de la tendresse

Il y a-t-il pour vous, des

limites ou des risques à

l’utilisation de la tendresse ?

Pénibilité du travail

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Julie Denax - Institut de Formation en Soins Infirmiers du CH de Carcassonne -2015 III

ANNEXE 2 Entretien IDE 1

Moi : Peux-tu me parler de la place la tendresse dans les soins en pédopsychiatrie ?

Silence 5 secondes

IDE 1 : En pédopsy, je pense que la tendresse est importante parce qu’on est avec les

enfants, même avec les adultes aussi c’est important. Dans chaque acte en fait, on fait

de la tendresse parce que les enfants demandent des câlins, même si on est infirmière,

même si on est là pour faire des soins, le câlin est un soin en lui-même, donc c’est un

acte de tendresse. Un enfant qui se blesse dans la cour a besoin de câlin pour le

réconforter.

Apres certains enfants ont des niveaux de développement qui sont du tout petit, du bébé

du nourrisson et qui ont besoin de passer par des câlins, par les chatouilles, par les

papouilles comme le bébé donc la tendresse à une place je pense, très importante dans

le rôle de l’infirmière en pédopsychiatrie.

Moi : Peux-tu préciser le rôle de la tendresse sur le développement de l’enfant ?

IDE 1 : Ben… on a des enfants qui ont un âge réel complètement fausser par rapport à

l’âge mental en fait. Il y a des gros retards de développement, on peut avoir des enfants

de 5, 6ans mais qui sont de niveau de 1 an et un bébé de 1 an, on lui fait des risettes, des

papouilles, ils sont dans le mimétisme donc on reprend tous les stades du développement

à partir de leur âge pathologique.

On reprend toutes les phases qui ne sont pas forcément acquises chez eux .mais on le

travaille avec eux, on repasse par ça. On reprend tous les prérequis, par exemple, je

prends l’exemple de l’eau avec laquelle on travaille avec ces enfants, l’eau est

rassurante, l’eau contient et nous on les accompagne dans ça. Donc c’est dans les

postures dans l’eau et c’est que des actes assez tendres en eux même. Puis, heu….c’est

des enfants qui sont intolérants a la frustration, c’est souvent des enfants qui n’ont pas de

limites poser à la maison. Souvent on voit chez ces enfants-là, comme si ils n’avaient pas

été portés. Le holding c’est très important et c’est pour ça qu’ils ont des prises en charge

en psychomot parce qu’ils n’ont pas de position du dos, ils sont centrés sur la phase

orale, ils n’ont pas l’appréhension du vide. Le portait si il a été fait, il n’a pas été efficace

au niveau du tout petit en fait. Donc le holding est très important, le rassemblement…. Je

me souviens d’un enfant qui s’est mouillé lors d’une activité et il n’était pas content parce

qu’il été mouillé, il est grand, il a 9 ans mais il est venu sur moi parce qu’il avait envie de

le rassembler. C’était un acte de tendresse parce que c’était un câlin sur moi et il était

rassemblé, il était porté. Il avait son dos appuyé sur mon ventre et donc il avait une

sensation de porter.

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Julie Denax - Institut de Formation en Soins Infirmiers du CH de Carcassonne -2015 IV

Moi : Peux-tu me parler du rôle ou de la place du soignant dans la relation avec l’enfant ?

IDE 1 : Alors il y a beaucoup moins de distance physique avec les enfants qu’avec les

adultes en fait. Donc ça c’est le rôle et la fonction du soignant, même si on est infirmière

et même si on met une blouse, on a un contact physique, un contact tactile que ce soit

par un câlin, des caresses, des chatouilles, on peut même faire des massages Donc ce

sont des actes de tendresses dans un sens parce que c’est pas brutale. Si on est brutal

avec ces enfants-là, ils partent en courant surtout s’ils ont connu des violences physiques.

Donc euh… la place du soignant… Il faut faire attention aussi je pense quand même de

rester à sa place de soignant, la place en elle-même la définir je sais pas, mais on reste

quand même des soignants, on n’est pas les parents, on peut pas remplacer les parents.

Donc au niveau de l’attachement et des transferts que l’on peut faire, je pense qu’il faut

toujours réfléchir sur les actes qu’on fait et en reparler après en équipe. Pour savoir si des

fois on ne va pas trop loin et réajuster

C’est pour ça que d’en parler en équipe en réunion interdisciplinaire avec la psychologue

et tout ça, ça permet de… Par ce que des fois comme c’est des enfants on pourrait

dépasser la frontière et ne plus être dans le thérapeutique je pense.

Moi : Peux-tu me parler de la place des émotions et des affects lorsque tu es dans la

tendresse avec un enfant ?

IDE 1 : Avec certains enfants, ça m’est difficile c’est moment tendre en fait. C’est des

enfants où j’ai un transfert peut être négatif envers eux, j’ai moins d’accroche.

Automatiquement quand on rencontre des enfants, il y en a avec qui on ressent quelque

chose, ça passe beaucoup mieux et avec d’autres moins. Ces moments calmes même si

ils les demandent moi ça me mets mal à l’aise, d’ailleurs je les refuse souvent. Mais ils le

trouvent avec d’autres soignants parce qu’on est une équipe, je ne suis pas la seule. Mais

au niveau de la place des émotions, ça me gêne pas du tout de faire un câlin, ou un

geste tendre envers un enfant. C’est des enfants qui ont des vie la plupart du temps

compliquées, qui ont souvent pas de câlin a la maison, ça me gêne pas de faire un câlin

si ça leur apporte quelque chose au niveau du soin

Je reste professionnelle, je ne me mets pas en danger, moi j’ai ma vie professionnelle

mais j’ai ma vie familiale à coté, je sais que je suis au travail, je ne rapporte pas les soucis

des enfants à la maison. Il m’est arrivé dans mon ancien travail de le faire et j’ai fait un

travail dessus et maintenant je sais ou est ma place. Comment te l’expliqué je ne sais

pas, je pense que ça vient avec l’expérience.

Apres, je sais que je suis là en tant qu’infirmière que c’est pas mes enfants à moi, que

c’est diffèrent. Si je peux leur apporter quelque chose, c’est très bien et ça s’arrête la en

fait. Mais la frontière est très fragile, si tu n’es pas une personne avec une structure assez

solide tu te fais envahir par les problèmes des enfants.

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Julie Denax - Institut de Formation en Soins Infirmiers du CH de Carcassonne -2015 V

L’importance de l’équipe-là, elle est primordiale. C’est de pouvoir échanger après et de

communiquer avec son équipe qui te permet de te sentir beaucoup mieux après et de

rester professionnelle. L’équipe-là, elle t’apporte tout.

Moi : Peux-tu développer les compétences relationnelles nécessaires à la mise en place

d’une relation avec un enfant ?

IDE 1 : Il y a des personnalités beaucoup plus cadrantes et directives et des personnalités

beaucoup plus maternante on va dire. Je parle de personnalité professionnelle

Il y a des personnes que j’ai rencontré qui sont beaucoup plus maternantes, tendres qui

ont ça naturellement en elle. En fonction des enfants que tu as en face, on ne va pas

donner la même chose. Tout ce qui est à l’extérieur et hors des ateliers thérapeutiques,

on est beaucoup plus dans les gestes de tendresse, de découverte, c’est beaucoup plus

libre. Alors que dans les ateliers, il y a un cadre qui est posé, des règles très stricts et ça

mène et ça tient l’atelier, c’est important. Et donc là, on est beaucoup dans le genre

éducateur. Mais il y a des gestes tout à fait tendres dans des ateliers. La tendresse c’est

pas justement un câlin ou une réassurance. Ça peut être juste une valorisation au

moment d’une réalisation d’une activité ou d’un atelier et la tendresse ça va être juste

dans un regard. Même si c’est très cadré comme atelier le regard va le porter va l’aider,

même si c’est très cadré, la tendresse elle y reste quand même. C’est des enfants ils ont

besoin de ça pour grandir.

Apres il faut une bonne écoute et une bonne observation comme ça tu ressens les

besoins de l’enfant après l’avoir observé et tu sais ce que tu peux lui apporter toi, en tant

que soignant. Il faut une certaine émotivité, une sensibilité je pense parce qu’on travaille

avec des humains. De l’empathie et il faut être aussi autoritaire parce que les enfants ont

besoin de tester les limites, de savoir jusqu’où ils peuvent aller. Et si tu n’arrives pas à

poser une règle ou une limite pour eux, c’est le flou total. Sans règles et sans limites ils

sont perdus. Ça les sécurisent énormément, ça leur montre le chemin. Oui, non, bien,

mal, ils ont tout le monde a organisé. Tu leur montre que tu es présent en posant des

limites, que tu ne l’abandonne pas. Mais même si on gronde il y a de la tendresse, quand

on pose des limites il y a de la tendresse. C’est tout le temps. Mais même pour les

adultes, si tu dois refaire un pansement à une dame, si tu n’y mets pas de la tendresse

c’est pas un soin que tu fais. Rien qu’un regard ou une parole pendant que tu lui refais le

pansement, ça va lui faire du bien. La considérer en tant qu’être humain et pas en tant

que juste objet j’ai un pansement à refaire, si tu ne mets pas de la tendresse dans chaque

geste ou dans chaque soin que tu fais, je pense que tu peux changer de métier

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Julie Denax - Institut de Formation en Soins Infirmiers du CH de Carcassonne -2015 VI

ANNEXE 3 Entretien IDE 2

Moi : Peux-tu me parler de la place la tendresse dans les soins en pédopsychiatrie ?

Silence 5 secondes

IDE 2 : hum....Alors heu...la tout de suite je pense au fait que l'on s'occupe d'enfants,

donc heu… dans la relation à l’enfant il y a la dimension de la tendresse naturellement.

Silence 2 sec Et donc on s'occupe d'enfants qui ont des pathologies mais avant tout ce

sont des enfants. Donc moi quand tu dis ça, moi ça me fait penser tout de suite au fait

que ce sont des enfants et donc qu'il y a de la bienveillance naturelle du fait que nous

sommes des adultes qui ont en charge des enfants. Ensuite la particularité c'est que ces

enfants, voilà ils ont une pathologie et donc des troubles du comportement et donc ça

peut venir fausser heu… la relation. Une relation qui serait ordinaire. Là on est quand

même en pedopsy et donc bien rapidement on se rend compte qu'au niveau relationnel, il

n'y a rien qui est simple pour eux et donc de fait, assez rapidement il y a rien qui est

simple pour nous. Et donc, on est devant des tableaux assez complexes qu'on va essayer

de comprendre, que la théorie nous aide à aborder avec les différentes pathologies,

qu'est ce qui se rattache plutôt a l'autisme ? Plutôt aux troubles liés à la maltraitance ?

Voilà donc on va petit à petit prendre des repères dans ces pathologies et dans ces

biologies et réévaluer ou resituer la tendresse, tout ce qui attrait a la relation, à la

dimension affective. On va le réévaluer, le replacer à la lumière de tous ce qu'on aura

appris de la pathologie et après de l'histoire de l'enfant. On va le replacer, on va le

repenser. Ce qui est un mouvement naturel de la relation d'un adulte envers un enfant, on

va ensuite, au regard de la pathologie et du parcours de l'enfant et de son histoire, on va

un petit peu le repenser. Voila

Moi : Pour toi, c'est quoi la tendresse

IDE 2 : La tendresse pour moi c'est un mouvement de bienveillance, d'attention de

douceur, pour moi la tendresse c'est de la douceur. Un mouvement affectif, c'est un

mouvement qu'on va manifester, exprimer à l'enfant. Dans les paroles, dans l'attitude, les

gestes. C'est une attitude bienveillante et douce. Silence 5 secondes C’est un sentiment

aussi, on ressent... on a besoin de procurer quelque chose de tendre et d'enveloppant à

l'enfant.

Moi : Est-ce que tu pourrais préciser le rôle, comme tu dis, de ce mouvement de

bienveillance sur le développement de l'enfant ?

IDE 2 : Oui, alors c'est heu…. tout a fait, l'enfant a besoin, me semble-t-il, de ressentir

cela pour être en confiance, pour prendre confiance en lui, et au monde extérieur. C'est à

dire l'enfant tout petit, le monde extérieur c'est au début, heu…, au début ce sont les

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Julie Denax - Institut de Formation en Soins Infirmiers du CH de Carcassonne -2015 VII

personnes qui s'occupent de lui. Et petit à petit il va élargir les personnes qui s'occupent

de lui et puis l'environnement et puis il va aller de plus en plus loin. Surtout s'il a eu un

attachement secure, surtout s'il a eu une relation sécurisante, il va être d'autant plus

capable... La confiance va lui permettre d'aller de plus en plus loin dans l'exploration de

l'environnement. Donc, la tendresse et la bienveillance elle lui permet de prendre

confiance et de faire des expériences de plus en plus élaborer, de plus en plus complexe

et donc de grandir.

Moi : Pour toi, quelle est la place et le rôle du soignant dans la relation à l'enfant ?

IDE 2 : Je pense qu'elle est très très importante parce que l'enfant, dont on s'occupe à

l'hôpital de jour, doit retrouver auprès du soignant cette attitude bienveillante pour être en

confiance et pour reprendre son développement et le poursuivre. Je lui permets de

poursuivre son développement dans les meilleures conditions possibles. De toute façon,

mon rôle de soignant, c'est de lui permettre cela dans les meilleures conditions possibles.

De lui apporter les outils, ma place de soignante c'est ça. C'est lui apporter des outils.

Donc je dois avoir les connaissances des pathologies, je dois avoir les connaissances sur

ce qu'il existe comme soins en pedopsy, je dois avoir les connaissances du parcours de

l'enfant, de sa famille pour avoir une compréhension de ses difficultés et une vision des

objectifs, il faut un projet. Donc avec cette compréhension et avec ce projet qui sont mis

en place, je vais pouvoir lui apporter les outils appropriés à lui, amener une réponse

individualisée, une réponse à ses besoins. En fait il faut répondre aux besoins, l'enfant qui

a des difficultés va avoir des besoins spécifiques, je dois pouvoir être en mesure de

mettre en place des ateliers des activités pour répondre le plus possible aux besoins. Par

exemple justement un enfant qui va être entravé dans son développement parce que il a

eu des expériences qui ne lui ont pas permis d'avoir cette confiance, cet attachement

secure dont on parlait, il va falloir qu'il puisse expérimenter dans les jeux que l'on va faire

ensemble dans les activités et dans les sorties, il va falloir qui puisse expérimenter un

attachement secure.

Moi : Pour toi, quelles sont les compétences relationnelles nécessaires à la mise en place

d’une relation avec un enfant ?

Silence 5 secondes Je réfléchie..... Je pense qu'il est très important de bien ….placer la

tendresse. C'est à dire que ça doit servir à l'enfant. Il faut être conscient de ce qu'on fait

avec lui. C'est un sentiment universel mais on est dans un cadre particulier de soin, ça

doit être bien placer. On parle de juste distance relationnelle. Donc la compétence

relationnelle requise, c'est heu…. comment dire, c'est la sagesse. C'est d'avoir

conscience des choses, d'avoir conscience de ce qu'on fait et d'avoir conscience des

problèmes de l'enfant et donc de trouver, de même qu'on essaie de trouver la bonne

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Julie Denax - Institut de Formation en Soins Infirmiers du CH de Carcassonne -2015 VIII

distance relationnelle, on va faire de même avec la tendresse. Pour certains, il faut y aller

doucement parce que, par exemple, Benjamin il faut être prudent avec la tendresse. Il faut

lui en donner un peu mais pas trop, il en avait jamais assez, il en fallait toujours trop et

c'était pas l'aider que d'en donner de trop. Et en même temps il faut surtout pas le priver

non plus puisqu'il a besoin de réparer quelque chose à ce niveau-là, donc il s'agissait pas

non plus de l'abandonner. C'est là où la compétence c'est d'évaluer. Evaluer, réfléchir les

choses, penser les choses, pas tous seul d'ailleurs, ça se fait en équipe, c'est un travail

d'équipe avec la psycho. C'est bien doser les choses, après c'est aussi l'observation,

l'attention, l'écoute.

Moi : Quelle est pour toi, la place des émotions dans la tendresse ?

IDE 2 : Silence 10 secondes Elles sont …. Alors les émotions, c'est quelque chose qui est

naturel, qu'on va ressentir, c'est pas quelque chose qui est intellectualiser. Donc je pense

qu'il faut les accueillir avec bienveillance les conscientiser évidemment et c'est pareil,

évaluer si on va servir les besoins spécifiques de l'enfant ou si on va le gêner. On peut le

déranger peut être. Voilà, il va falloir évaluer ça. En général, on a des alertes qui se

mettent en place. Quand on a un sentiment de gêne ou de malaise, c'est une alerte et en

général, ça conduit à une remise en question ou à une discussion avec une collègue. Je

sais que, par exemple, une élève qui arrive, qui découvre tout, tout de suite vous avez les

questions justes parce qu'en fait vous avez ressenti quelque chose, vous vous dites là, je

ne sais pas si j'ai bien fait. En général c'est toujours juste et alors il faut garder ça, il faut

garder ce mouvement la... Quand on ressent une gêne ça veut toujours dire quelque

chose. Alors des fois ce n’est pas important mais des fois ça l'ai. C'est des veilleuses qui

s'allument. Et alors après on le retravaille avec la psycho, en équipe, avec les collègues et

on en fait quelque chose.

Moi : Quand tu dis les conscientiser est ce que tu peux développer ?

IDE 2 : Ben on est en psy, c'est très important d'accueillir les émotions les sentiments

mais c'est important de les repérer, d'en prendre conscience et de les situer dans la

relation thérapeutique. Est ce qu'elles vont servir le soin ou le desservir ? Est ce qu'elles

vont servir le patient ou est ce qu'elles vont le gêner ? Est-ce que je les utilise ou est-ce

que je les garde pour moi ? Je les travaille ailleurs ?

Il y a des choses qui m'appartiennent et qui peuvent gêner le patient. A ce moment-là

c'est à moi d'aller en faire autre chose ailleurs. Et il y a des choses au contraire, qui vont

être utiles même si elles m'appartiennent, dans la relation thérapeutique. Par notre savoir

être on va proposer aux enfants qui ont des pathologies, on va proposer d'autres moyen

de fonctionner et de reprendre leur développement. Par exemple, un enfant qui a connu la

violence, il va mettre en place un fonctionnement qui induit la violence. Donc notre

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mission de soignant c'est lui proposer d'autres portes de sortie. Donc évidemment qu'on

va être confronté à des émotions quand il va venir nous énerver parce qu'il ne connait pas

autre chose. Donc ça va susciter des émotions et il faut en prendre conscience, il faut

savoir que c'est parce qu'il a vécu ça et il faut pouvoir lui proposer autre chose.

Donc heu…. c'est l'expérience et le travail qui a été fait avec les médecins, avec les

psycho, avec les collègues, l'expérience va me permettre de m'ajuster aux besoins de

l'enfant. C’est à dire qu'avec l'expérience j’ai appris à repérer chez l'enfant certaines

choses et donc heu…. j'ai appris à m'ajuster. Donc la gestion des émotions c'est ça, c'est

s'ajuster. Il y a des choses, des émotions que je vais laisser passer et d'autres pas. La

plupart du temps j’ai les rennes mais des fois, ça m'échappe un peu. Surtout quand il

s'agit de s'énerver quand ils sont pénibles. La tendresse c'est pas trop compliqué, donner

de la tendresse a un enfant c'est un mouvement naturel et maternant, c'est relativement

inné on va dire.

Moi : Pour toi est ce qu’il y a des risques ou des limites à l'utilisation de la tendresse ?

IDE 2 : Oui on est là pour aider l'enfant, et pas pour le gêner. La limite c'est ne pas aller

au-delà dont l'enfant a besoin pour grandir. La tendresse ça peut être étouffant si il y a en

a trop. Parfois l'enfant, il met à distance ses parents à certains moments de son

développement pour pouvoir grandir lui. A certains moment, on doit se retirer un petit peu

voilà. On est toujours là mais on doit se mettre en retrait parce qu’il en a besoin. Il faut

s’ajuster à l’enfant. On est là en tant que soignant, on n’est pas là pour remplacer le

parent. Pour moi ça c’est la base de la relation thérapeutique, il faut que ça soit poser à la

base. Il faut que ça soit clair en fait. Apres le reste se cale bien. Il y a des enfants qui

peuvent nous attacher plus que d’autres, c’est la vie, c’est humain. Et donc ils vont

vraiment nous prendre par les sentiments. Donc ça peut être source de souffrance peut

être si on s’attache beaucoup à un enfant et qu’il lui arrive des choses difficiles, on peut

en souffrir. Mais ce n’est pas spécifique a la tendresse, pour moi, c’est le risque du métier

parce qu’on travaille avec des enfants, parce qu’on est humain.

Moi : Donc pour toi, il n’y a pas plus de risque à utiliser la tendresse que de mettre en

place une relation avec un enfant ?

IDE 2 : Oui, pour moi la base c’est une relation saine, savoir pourquoi on est là. C’est vrai

que le cadre du travail, ça aide beaucoup. On est ici pour une mission et on est une

équipe, ça c’est très important l’équipe, on est plusieurs cerveaux à réfléchir sur un

enfant. Une vision des choses, c’est pas ça, on est une équipe, il y a plusieurs visions et

c’est très important. Chaque enfant est soutenu par toute l’équipe, ça aide a bien caler les

choses. Et si les choses sont bien caler à la base, la tendresse elle s’ajuste comme il faut.

Evidemment si on se retrouve un peu trop seul dans une situation, il y a des dérives

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possibles. On peut être moins dans le professionnel et plus dans le personnel. Dans le

personnel les choses sont beaucoup moins réfléchies, on n’est plus tellement dans le

service. Dans une relation trop personnelle, il va y avoir plus la place à des émotions pas

très bien contrôlées, donc les dérives ça peut être de faire-part à l’enfant d’émotions dont

il n’a pas besoin, qui ne sont pas thérapeutiques. Par exemple, si tu t’attaches trop à un

enfant, il te déçoit et tu lui en veux parce qu’il te déçoit, enfin, ça, ça n’a rien à faire dans

le travail.

Moi : As-tu quelque chose d’autre à rajouter.

IDE 2 : Oui ! La tendresse dans notre métier, c’est la plus belle chose. La tendresse c’est

dans les deux sens. Tu ne peux pas la donner si elle n’est pas reçue.

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DENAX Julie MAI 2015

INFIRMIER

Promotion 2012-2015

ABSTRACT :

In pedopsychiatric wards, it is noteworthy that nurses have several different postures with young patients. It can be a containing posture during therapeutic activities or an affectionate behavior with the children during therapeutic game. This allowed me to realize that affectionate behavior has a important role in the psychoaffective development of children. However, nurses’ affectionate behavior can have limits or risks for nurses. To support my reflexion, themes such as management of emotions, professional distance, interpersonal skills have been studied. Moreover, I did two interviews which confirm the importance of affectionate behavior towards children. Furthermore, the study of interviews allowed other themes as teamwork, experience and emotional intelligence to emerge. So, the development of this concepts leads to the following question: How teamwork and experience can participate in caregivers’ management of emotions? This question allowed me to understand the role and the importance of teamwork and experience in management of emotion. Indeed, teamwork and experience contribute to skills acquisition such as emotional intelligence. Knowledge sharing, discussions between the team members, everyone’s experiences allowed to caregivers to step back in difficult situation and to reflect on their posture. So, they acquire other interpersonal skills like emotional intelligence that might make caring more human. This leads to the research question: How would the emotional intelligence promote humanization of care? This paper enabled me to understand the importance of emotional intelligence in relationship between caregivers and patients. Indeed, the consideration of our emotions and to other people allowed to be authentic but also, to prevent burn-out.

Mots clés : Management of emotions, Emotional intelligence, Teamwork, Experience,

Humanization of care

256 mots

L’institut de formation de Carcassonne n'entend donner aucune approbation ni improbation aux opinions émises dans

les travaux de fin d’études : ces opinions doivent être considérées comme propres à leurs auteurs.

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