edition du jeudi 18 decembre 2014

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LES ANNONCES DE LA SEINE J OURNAL OFFICIEL DʼANNONCES LÉGALES - I NFORMATIONS GÉNÉRALES, J UDICIAIRES ET TECHNIQUES bi-hebdomadaire habilité pour les départements de Paris, Yvelines, Hauts-de-Seine, Seine-Saint-Denis et Val de Marne 12, rue Notre-Dame des Victoires - 75002 PARIS - Téléphone : 01 42 60 36 35 - Télécopie : 01 47 03 92 15 Internet : www.annoncesdelaseine.fr - E-mail : [email protected] FONDATEUR EN 1919 : RENÉ TANCRÈDE - DIRECTEUR : JEAN-RENÉ TANCRÈDE P oint d’orgue des grands rendez-vous annuels du monde judiciaire, la Rentrée du Barreau de Paris a revêtu, pour l’édition 2014, un lustre particulier car, durant près de trois jours, se sont succédés d’importants événements à la Mutualité : une conférence Berryer avec pour invité d’honneur Arnaud Montebourg qui a fait salle comble le mercredi 10 décembre puis le jeudi différentes conférences/ débats dans le cadre de « l’université d’hiver du Barreau de Paris » et enfin le vendredi pas moins de deux ministres sont venus expliquer aux avocats le projet de loi « croissance » adopté en Conseil des Ministres le 10 décembre 2014. Emmanuel Macron, le matin, a plaidé avec brio et sans notes, il a convaincu les avocats de l’aider à « retrouver collectivement l’esprit de conquête » car pour lui « ne pas changer les lois, c’est s’interdire de faire autrement » et par voie de conséquence « condamner la France à ne plus être le centre de l’univers sous l’effet de la mondialisation dans quelques années » ; il a été applaudi par une foule de participants, tous debout. Entre dialogue et concertation, il a abordé les sujets qui inquiètent les avocats notamment l’ouverture du capital des structures d’exercice, la loi relative à la consommation, la création d’un défenseur syndical aux audiences de conciliation devant les Conseils de Prud’Hommes. La Ministre de la Justice était à la tribune l’après-midi même pour, à son tour, s’exprimer sur le projet de loi relatif à la réforme des professions réglementées qu’elle défendra également devant les parlementaires. Pour Christiane Taubira, le Barreau de Paris porte haut les couleurs de l’accès au droit égal pour tous afin que chacun soit un sujet de droit ; elle a conclu sa brillante intervention en déclarant que « la responsabilité de l’État ne se confondait pas avec celle de la profession d’avocat » et qu’elle veillerait personnellement, lors des débats à l’Assemblée nationale, à ce que les intérêts des justiciables, et ceux qui les défendent, soient respectés. Face aux plus hautes autorités françaises et étrangères, et avant que les lauréats du concours d’éloquence oratoire aient discouru : le 1 er  Paul Fortin sur « L’éloge d’Olivier Metzner » et le second Emmanuel Pire sur « Les procès de Mandela », Laurent Martinet Vice-Bâtonnier, puis Pierre-Olivier Sur Bâtonnier, se sont succédés à la tribune pour livrer quelques messages forts à leurs confrères afin de les rassurer sur les dossiers d’actualité qui les préoccupent tels que le secret professionnel, l’avocat en entreprise, le nouveau Palais de Justice, la postulation, le monopole de la plaidoirie pour les avocats de souche... Puisque demain le besoin de droit dans le monde sera immense, les avocats veulent naturellement « prendre leurs parts » dans les débats afin « d’œuvrer pour aplanir les malentendus, favoriser le dialogue et reconstruire l’harmonie de leur profession ». Face aux responsables politiques, ils ont donc, en fin de semaine dernière, manifesté leur volonté de participer à « l’organisation des grandes libertés ». Jean-René Tancrède Jeudi 18 décembre 2014 - Numéro 50 - 1,15 Euro - 95 e année Barreau de Paris Séance solennelle de rentrée, 12 décembre 2014 Photo © Jean-René Tancrède - Téléphone : 01.42.60.36.35 Emmanuel Pire, Pierre-Olivier Sur, Paul Fortin et Laurent Martinet AUDIENCE SOLENNELLE DU BARREAU DE PARIS - Le devoir d’audace des Avocats de France par Pierre-Olivier Sur .... 2 - Le Barreau de Paris présent et engagé par Laurent Martinet ....... 5 - Éloge d’Olivier Metzner par Paul Fortin .......................................... 7 - Les procès de Mandela par Emmanuel Pire ................................ 10 VEILLE LÉGISLATIVE l Conseil des Ministres Projet de loi « croissance et activité » 17 mesures pour impacter l’économie française ....................... 13 l Conseil National des Barreaux ................................................ 14 l Confédération Nationale des Avocats .................................... 14 TRIBUNE l Projet de loi « croissance » - Suite et fin par Frédéric Douchez............................................... 15 Dispositions relatives au notariat, ou comment casser un outil qui fonctionne et pourquoi ne pas suivre l’avis du Conseil d’État ? par Pierre Cellard ................................... 15 ELECTIONS l Barreau des Hauts-de-Seine 25/26 novembre 2014 ................. 18 PALMARÈS l Prix Jean Zay de la laïcité remis à Christiane Taubira ........... 19 ANNONCES LÉGALES ................................................. 19 DÉCORATION l Dominique de La Garanderie Commandeur de la Légion d’honneur .............................................. 27 VIE DU DROIT l 30 èmes Journées de Paris des Huissiers de Justice Les Huissiers de Justice, acteurs du sursaut démocratique et républicain par Patrick Sannino ................................................... 29

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  • LES ANNONCES DE LA SEINE

    JOURNAL OFFICIEL DANNONCES LGALES - INFORMATIONS GNRALES, JUDICIAIRES ET TECHNIQUESbi-hebdomadaire habilit pour les dpartements de Paris, Yvelines, Hauts-de-Seine, Seine-Saint-Denis et Val de Marne

    12, rue Notre-Dame des Victoires - 75002 PARIS - Tlphone : 01 42 60 36 35 - Tlcopie : 01 47 03 92 15Internet : www.annoncesdelaseine.fr - E-mail : [email protected]

    FONDATEUR EN 1919 : REN TANCRDE - DIRECTEUR : JEAN-REN TANCRDE

    Point dorgue des grands rendez-vous annuels du monde judiciaire, la Rentre du Barreau de Paris a revtu, pour ldition 2014, un lustre particulier car, durant prs de trois jours, se sont succds dimportants vnements la Mutualit: une confrence Berryer avec pour invit dhonneur ArnaudMontebourg qui a fait salle comble le mercredi 10dcembre puis le jeudi diffrentes confrences/dbats dans le cadre de luniversit dhiver du Barreau de Paris et enfin le vendredi pas moins de deux ministres sont venus expliquer aux avocats le projet de loi croissance adopt en Conseil des Ministres le 10dcembre2014. EmmanuelMacron, le matin, a plaid avec brio et sans notes, il a convaincu les avocats de laider retrouver collectivement lesprit de conqute car pour lui ne pas changer les lois, cest sinterdire de faire autrement et par voie de consquence condamner la France ne plus tre le centre de lunivers sous leff et de la mondialisation dans quelques annes; il a t applaudi par une foule de participants, tous debout. Entre dialogue et concertation, il a abord les sujets qui inquitent les avocats notamment louverture du capital des structures dexercice, la loi relative la consommation, la cration dun dfenseur syndical aux audiences de conciliation devant les Conseils de PrudHommes.La Ministre de la Justice tait la tribune laprs-midi mme pour, son tour, sexprimer sur le projet de loi relatif la rforme des professions rglementes quelle dfendra galement devant les parlementaires.

    Pour Christiane Taubira, le Barreau de Paris porte haut les couleurs de laccs au droit gal pour tous afi n que chacun soit un sujet de droit ; elle a conclu sa brillante intervention en dclarant que la responsabilit de ltat ne se confondait pas avec celle de la profession davocat et quelle veillerait personnellement, lors des dbats lAssemble nationale, ce que les intrts des justiciables, et ceux qui les dfendent, soient respects.Face aux plus hautes autorits franaises et trangres, et avant que les laurats du concours dloquence oratoire aient discouru: le 1erPaul Fortin sur Lloge dOlivier Metzner et le second Emmanuel Pire sur Les procs de Mandela, Laurent Martinet Vice-Btonnier, puis Pierre-Olivier Sur Btonnier, se sont succds la tribune pour livrer quelques messages forts leurs confrres afi n de les rassurer sur les dossiers dactualit qui les proccupent tels que le secret professionnel, lavocat en entreprise, le nouveau Palais de Justice, la postulation, le monopole de la plaidoirie pour les avocats de souche...Puisque demain le besoin de droit dans le monde sera immense, les avocats veulent naturellement prendre leurs parts dans les dbats afi n duvrer pour aplanir les malentendus, favoriser le dialogue et reconstruire lharmonie de leur profession. Face aux responsables politiques, ils ont donc, en fi n de semaine dernire, manifest leur volont de participer lorganisation des grandes liberts. Jean-Ren Tancrde

    Jeudi 18 dcembre 2014 - Numro 50 - 1,15 Euro - 95e anne

    Barreau de ParisSance solennelle de rentre, 12 dcembre 2014

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    Emmanuel Pire, Pierre-Olivier Sur, Paul Fortin et Laurent Martinet

    AUDIENCE SOLENNELLE DU BARREAU DE PARIS- Le devoir daudace des Avocats de France par Pierre-Olivier Sur .... 2- Le Barreau de Paris prsent et engag par Laurent Martinet ....... 5- loge dOlivier Metzner par Paul Fortin .......................................... 7- Les procs de Mandela par Emmanuel Pire ................................10

    VEILLE LGISLATIVElConseil des Ministres Projet de loi croissance et activit 17 mesures pour impacter lconomie franaise .......................13lConseil National des Barreaux ................................................14lConfdration Nationale des Avocats ....................................14

    TRIBUNE lProjet de loi croissance - Suite et n par Frdric Douchez ...............................................15 Dispositions relatives au notariat, ou comment casser un outil qui fonctionne et pourquoi ne pas suivre lavis du Conseil dtat ? par Pierre Cellard ...................................15

    ELECTIONSlBarreau des Hauts-de-Seine 25/26 novembre 2014 .................18

    PALMARSlPrix Jean Zay de la lacit remis Christiane Taubira ...........19

    ANNONCES LGALES .................................................19DCORATIONlDominique de La Garanderie Commandeur de la Lgion dhonneur .............................................. 27

    VIE DU DROITl30mes Journes de Paris des Huissiers de JusticeLes Huissiers de Justice, acteurs du sursaut dmocratique et rpublicain par Patrick Sannino ................................................... 29

  • 2 Les Annonces de la Seine - Jeudi 18 dcembre 2014 - numro 50

    Audience solennelle

    Le devoir daudace des Avocats de Francepar Pierre-Olivier Sur

    Dans ce haut lieu des meetings fi vreux, lissue dune semaine cruciale o les avocats sont descendus dans la rue, nous voici donc Laurent Martinet et moi, avec le Conseil de lOrdre et la Confrence, face vous, Madame la Ministre.lMais il ny aura pas de ets de manches, car pour la premire fois lors dune Rentre, nous avons choisi de ne pas porter la robe, parce que nous ne sommes ni dans un Palais de Justice, ni dans un thtre. Nous sommes dans une salle politique, runis pour rflchir et construire la politique du BarreaudeParis. Seuls les secrtaires de la Confrence portent cet aprs-midi les attributs ncessaires des discours quils prononceront tout lheurel la Mutualit aujourdhui, il ny aura pas non plus de poing lev car dsormais cest vous, Madame la Ministre, qui reprsentez non plus la sdition mais lordre tabli. Et si nous nous battons toujours en tant quavocats, pour la conqute de nouvelles liberts, ce nest jamais dans la culture du grand soir. Car nous croyons moins la dmagogie ou la facilit des manifestations htroclites, qu la concertation et la discussion pour faire avancer les lois et les ordonnances... lOrdre des avocats du Barreau de Paris la prouv au cours de ces dernires semaines.Mais que cest long et compliqu: de malentendu en malentendu, darbitrage en arbitrage, de blocage en dblocage... nous ne recherchons rien dautre que lunit de la profession, en vue dune spirale vertueuse et dun avenir meilleur pour tous les avocats.lAinsi, dans cette salle maintenant, ny aura-t-il pas de faux semblants. Nous reconnaissons votre talent, nous rvrons certains grands textes que vous avez fait voter, qui resteront dans lHistoire; et, oserai-je le dire, vous nous avez sduits, Laurent Martinet et moi. Mais chacun le sait: il ny a pas damour, il ny a que des preuves damour.Cest pourquoi lobjet de ce discours de Rentre consiste vous proposer une synthse des ambitions, des inquitudes et des projets du Barreau, en esprant vous convaincre, pour que vous agissiez nos cts.

    I - PRSENTATION DU BARREAU DE PARIS Pour y parvenir permettez-moi de vous rappeler dabord qui nous sommes, puis quel est notre environnement, enfin quels sont nos rves. Et nos peurs.Notre premire Universit dhiver a dgag quelques lignes de force que voici. Nous sommes 26 500avocats. Lun des Barreaux les plus jeunes de France, dont le Conseil de lOrdre est le refl et exact de toutes les formes dexercice, un Barreau parfaitement galitaire dans sa rpartition hommes/femmes, y compris dans ses instances reprsentatives ainsi que la montr le rsultat des dernires lections (Laurent Martinet vient de vous le dire). Nous voulons briser tous les plafonds de verre. Vous le savez, nous sommes post-fministes! Nous avons fait de lgalit une obligation de rsultat.Comme vous, nous nous inscrivons dans les perspectives de la Justice du 21mesicle, avec deux crations pour les prochains mois:lUne plate-forme sur internet pour des actions collectives, afi n daider leur mise en uvre par tous les confrres (et pas seulement par les Cabinets structurs), avec un contrle de dontologie au

    service de tous les justiciables Il sagit dattaquer sur leur segment certains braconniers du droit et donnons acte au projet de loi Macron, quil restitue aux avocats une place dans les actions de groupe via la CARPA, alors que nous en avions t exclus par la loi Hamon. Nous constatons avec satisfaction, sur ce point, que nous avons su nous faire entendre!lDans un autre ordre dides, conformes avec vos projets, nous installons lEFB une cole Internationale des modes alternatifs de rglement des litiges.Soyons concrets: notre Barreau produit plus des deux tiers du chiffre daffaires de la profession, principalement en prestations juridiques, mais aussi au judiciaire. Et si laide juridictionnelle ne reprsente Paris que 5% de lenveloppe nationale, nous nous sommes appliqus revoir et corriger son fonctionnement pour que... la dfense des plus dfavoriss, souvent assure dans lurgence, qui est la plus difficile et la plus exigeante devienne une spcialit part entire: les urgentistes du droit pnal. Je salue en particulier aujourdhui le Barreau pnal et la Confrence pour leur norme travail. La socit tout entire en a besoin.lParalllement nous encourageons les initiatives Pro bono via la structure Barreau de Paris solidarit dont le label attire dsormais les meilleurs Cabinets. Mais notre Barreau, qui est la locomotive de la profession, souff re aussi.Dune faon gnrale, si la fiert dtre avocat demeure (91% de nos confrres se disent fiers dtre avocat) la promesse dun panouissement professionnel pour les gnrations futures pose problme, cause de la diffi cult de la collaboration et de lassociation. Tel est lun des messages qui se dgage de lenqute que nous avons commande pour notre Universit dHiver.Plus que les autres Barreaux, nous sommes trs directement exposs la crise car dans les grandes villes il ny a pas damortisseurs et nous sommes soumis une cadence infernale qui laisse sur le bord de la route les plus fragiles dentre nous ou ceux qui, comme disait Roland Barthes, sont indiffrents devenir modernes. Nous avons dcid cette anne de ne pas appeler la cotisation professionnelle dun quart des confrres parisiens, soit prs de 7000avocats, dont les revenus sont les moins levs.

    II - LE NOUVEAU PALAIS DE JUSTICE DE PARIS Cest donc ce Barreau trs divers, qui a pour vaisseau amiral notre Palais de Justice sur lle de la Cit, qui va partir pour les Batignolles... Car nous allons dmnager dans une tour.

    Pierre-Olivier Sur

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    LES ANNONCES DE LA SEINESige social :

    12, rue Notre-Dame des Victoires 75002 PARISR.C.S. PARIS B 339 349 888

    Tlphone : 01 42 60 36 35 - Tlcopie : 01 47 03 92 15Internet : www.annoncesdelaseine.fr

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    Etablissements secondaires :l 4, rue de la Masse, 78910 BEHOUSTTlphone : 01 34 87 33 15l 1, place Paul-Verlaine, 92100 BOULOGNETlphone : 01 42 60 84 40l 7, place du 11 novembre 1918, 93000 BOBIGNYTlphone : 01 42 60 84 41l 1, place Charlemagne, 94290 VILLENEUVE-LE-ROITlphone : 01 45 97 42 05

    Directeur de la publication et de la rdaction :Jean-Ren Tancrde

    Comit de rdaction :

    Thierry Bernard, Avocat la Cour, Cabinet BernardsFranois-Henri Briard, Avocat au Conseil dEtatAgns Bricard, Prsidente de la Fdration des Femmes AdministrateursAntoine Bullier, Professeur lUniversit Paris I Panthon SorbonneMarie-Jeanne Campana, Professeur agrg des Universits de droitAndr Damien, Membre de lInstitutPhilippe Delebecque, Professeur de droit lUniversit Paris I Panthon SorbonneBertrand Favreau, Prsident de lInstitut des Droits de lHomme des Avocats Europens, ancien Btonnier de BordeauxDominique de La Garanderie, Avocate la Cour, ancien Btonnier de ParisBrigitte Gizardin, Magistrat honoraireRgis de Gouttes, Premier avocat gnral honoraire la Cour de cassation Serge Guinchard, Professeur de Droit lUniversit Paris II Panthon-AssasGrard Haas, Avocat la Cour, Prsident de GesicaFranoise Kamara, Conseiller la premire Chambre de la Cour de cassationMaurice-Antoine Lafortune, Avocat gnral honoraire la Cour de cassation Bernard Lagarde, Avocat la Cour, Matre de confrence H.E.C. - EntrepreneursJean Lamarque, Professeur de droit lUniversit Paris II Panthon-AssasChristian Lefebvre, Prsident Honoraire de la Chambre des Notaires de ParisDominique Lencou, Prsident dHonneur du Conseil National des Compagnies dExperts de JusticeNolle Lenoir, Avocate la Cour, ancienne MinistrePhilippe Malaurie, Professeur mrite lUniversit Paris II Panthon-AssasJean-Franois Pestureau, Expert-Comptable, Commissaire aux comptesGrard Pluyette, Conseiller doyen la premire Chambre civile de la Cour de cassationJacqueline Socquet-Clerc Lafont, Avocate la Cour, Prsidente dhonneur de lUNAPLYves Repiquet, Avocat la Cour, ancien Btonnier de ParisRen Ricol, Ancien Prsident de lIFACFrancis Teitgen, Avocat la Cour, ancien Btonnier de ParisCarol Xueref, Directrice des affaires juridiques, Groupe Essilor International

    Publicit :Lgale et judiciaire : Didier ChotardCommerciale : Frdric Bonaventura

    Commission paritaire : n 0718 I 83461I.S.S.N. : 0994-3587Tirage : 14 444 exemplairesPriodicit : bi-hebdomadaireImpression : M.I.P.3, rue de lAtlas - 75019 PARIS

    Copyright 2014Les manuscrits non insrs ne sont pas rendus. Sauf dans les cas o elle est autorise expressment par la loi et les conventions internationales, toute reproduction,totale ou partielle du prsent numro est interdite et constituerait unecontrefaon sanctionne par les articles 425 et suivants du Code Pnal.

    Le journal Les Annonces de la Seine a t dsign comme publicateur of ciel pour la priode du 1er janvier au 31 dcembre 2014, par arrts de Messieurs les Prfets : de Paris, du 24 dcembre 2013 ; des Yvelines, du 19 dcembre 2013 ; des Hauts-de-Seine, du 18 dcembre 2013 ; de la Seine-Saint-Denis, du 26 dcembre 2013 ; du Val-de-Marne, du 30 dcembre 2013 ; de toutes annonces judiciaires et lgales prescrites par le Code Civil, les Codes de Procdure Civile et de Procdure Pnale et de Commerce et les Lois spciales pour la publicit et la validit des actes de procdure ou des contrats et des dcisions de Justice pour les dpartements de Paris, des Yvelines, de la Seine-Saint-Denis, du Val-de-Marne ; et des Hauts-de-Seine.N.B. : Ladministration dcline toute responsabilit quant la teneur des annonces lgales.

    - Tarifs hors taxes des publicits la ligneA) Lgales :Paris : 5,49 Seine-Saint-Denis : 5,49 Yvelines : 5,24 Hauts-de-Seine : 5,49 Val-de-Marne : 5,49 B) Avis divers : 9,76 C) Avis nanciers : 10,86 D) Avis relatifs aux personnes : Paris : 3,83 Hauts-de-Seine : 3,83 Seine-Saint Denis : 3,83 Yvelines : 5,24 Val-de-Marne : 3,83 - Vente au numro : 1,15 - Abonnement annuel : 15 simple35 avec supplments culturels95 avec supplments judiciaires et culturels

    COMPOSITION DES ANNONCES LGALESNORMES TYPOGRAPHIQUES

    Surfaces consacres aux titres, sous-titres, lets, paragraphes, alinas

    Titres : chacune des lignes constituant le titre principal de lannonce sera compose en capitales (ou majuscules grasses) ; elle sera lquivalent de deux lignes de corps 6 points Didot, soit arrondi 4,5 mm. Les blancs dinterlignes sparant les lignes de titres nexcderont pas lquivalent dune ligne de corps 6 points Didot, soit 2,256 mm.Sous-titres : chacune des lignes constituant le sous-titre de lannonce sera compose en bas-de-casse (minuscules grasses) ; elle sera lquivalent dune ligne de corps 9 points Didot soit arrondi 3,40 mm. Les blancs dinterlignes sparant les diffrentes lignes du sous-titre seront quivalents 4 points soit 1,50 mm.Filets : chaque annonce est spare de la prcdente et de la suivante par un let 1/4 gras. Lespace blanc compris entre le let et le dbut de lannonce sera lquivalent dune ligne de corps 6 points Didot soit 2,256 mm. Le mme principe rgira le blanc situ entre la dernire ligne de lannonce et le let sparatif. Lensemble du sous-titre est spar du titre et du corps de lannonce par des lets maigres centrs. Le blanc plac avant et aprs le let sera gal une ligne de corps 6 points Didot, soit 2,256 mm.Paragraphes et Alinas : le blanc sparatif ncessaire a n de marquer le dbut dun paragraphe o dun alina sera lquivalent dune ligne de corps 6 points Didot, soit 2,256 mm. Ces d nitions typographiques ont t calcules pour une composition effectue en corps 6 points Didot. Dans lventualit o lditeur retiendrait un corps suprieur, il conviendrait de respecter le rapport entre les blancs et le corps choisi.

    2013

    P R E S S EPAYANTEDiffusion Certi e

  • Les Annonces de la Seine - Jeudi 18 dcembre 2014 - numro 50 3

    Audience solennelle

    Nous nous sommes opposs ce projet. Il nous apparaissait dispendieux et inutile. En effet nous pensions que les mtres carrs manquant, rclams par les Magistrats et les Greffiers, pourraient tre trouvs sur lle de la Cit ( lHtel Dieu) et, dans nos murs aussi, par compensation avec lespace libr du fait de la dmatrialisation. Il est un fait, que les avocats viennent de moins en moins au palais. lheure du tout numrique, il ny a pratiquement plus daudiences de procdure et il ny a plus besoin de kilomtres darmoires pour les dossiers et leurs copies.Renzo Piano a dessin notre futur palais pour quil soit lun des plus beaux et des plus grands du monde. Alors il convient, maintenant que toutes les voies de recours sont puises, dy adhrer pleinement...Dans le Grand Paris, la tour du palais, ct de laquelle nous allons btir une Maison des avocats, sera le point de fuite dune nouvelle perspective. La perspective Nord-Sud, qui commence aux Batignolles, dont lArc de Triomphe est le centre et la Tour Eiffel la pointe Sud... de mme quil y a laxe Est-Ouest, qui va du Louvre la Dfense, connu dans le monde entier.Voil pour la grandeur de lurbanisme de la Justice.Ensuite larchitecture.Ce nouveau palais ne ressemblera plus aux temples antiques qui taient le modle architectural de nos lieux de Justice, o lon accdait par de majestueux escaliers pour se soumettre, le souffle coup, au jugement expiatoire. Au contraire, chacun y sera partenaire dune Justice participative ce qui suppose daplanir les escaliers par une dalle immense, o lespace intrieur ne sera rien dautre que le prolongement de lespace extrieur. Ce nest donc plus la Justice aux yeux bands mais le symbole de la transparence avec un simple pan de verre franchir... moins quil faille sen affranchir. Dommage que larchitecte nait pas aussi, aplani lestrade du Parquet et dommage que la grande salle amnageable pour les procs de masse, que nous avions demande, nait pas t prvue! Madame la Ministre nous voici donc dans notre futur palais.

    III - LAVENIR Mais je voudrais maintenant vous faire part de nos rves et de nos peurs. Le dernier thme de notre Universit dHiver tait, I have a dream.Notre gnration davocats a recueilli travers une tradition orale, dont la Confrence est gardienne, quelques bribes de la fabuleuse Histoire du

    Barreau: lavocat hros des procs rvolutionnaires, puis celui quon a appel lavocat roi des 3meet 4meRpublique. Et Daumier, avec la plaque de cuivre en bas de limmeuble et la salle des pas perdus au bout du palais, pour plusieurs audiences par jour que plaidaient tous les confrres... ctait avant la fusion avec les Conseils juridiques et avant lapparition du traitement de texte... je revois les fines pelures de papier de toutes les couleurs, sur lesquelles les vieux avocats que nous avons ctoys en entrant au Barreau, se sont uss les yeux.Aujourdhui, tournant le dos Daumier, nous avons fait la synthse : nous sommes la gnration Badinter qui a russi louverture de lexercice professionnel, avec toujours, larmure de la dontologie et larme de la parole. Une parole globale les mots prononcs, les mots crits, les mots numriss, les mots ports dans toutes les langues.Demain, le besoin de droit dans le monde sera immense. Nous serons prsents en Afrique lorsquil y aura 2milliards dhabitants, en Asie parce que cest aussi une zone de droit civil, en Amrique du Sud pour les mmes raisons de culture commune. Telle est la perspective que nous avons voulu donner notre politique internationale cette anne, via nos campus, en amenant dans ces zones dinfluence le plus possible de confrres et dlves de lEFB.Alors, puisque vous aimez les vers Madame la Ministre, allons ensemble avec Rimbaud, conqurir, la nuit verte aux neiges blouies...lau Liban, o nous plaidons contre la peine de mort, arrachant les premires opinions dissidentes abolitionnistes de la part de certains hauts Magistrats;l Bamako, dans une salle comble, avec la guerre aux frontires et la menace dbola, pour participer la reconstruction du pays par le droit;l au Nord et Sud Kivu, o nous irons nous constituer partie civile aux cts de nos confrres de Bukavu et de Goma, pour dnoncer les viols de masse en tant quarme de guerre;lau Brsil, o nous proposons aux 850 000 avocats du pays de rejoindre notre Grande Bibliothque du Droit numrique, consacre au droit continental et couple au puissant moteur de Wikipdia;l Phnom Penh, au lendemain dune grve gnrale o Sam Rainsy a failli renverser le vieux dictateur Hun Sen;len Turquie, aux cts de nos confrres poursuivis et emprisonns;let Jrusalem, bientt, pour porter un message de paix...

    Jinsiste sur la prsence dsormais permanente de notre Barreau devant les cours pnales internationales. Petit petit, sous notre influence, le droit anglo-amricain qui est trop cher et trop long se mtisse de droit continental qui garantit mieux la scurit juridique et la rapidit des procdures. Alors le temps de la Justice est aussi offert aux victimes, qui deviennent de vritables parties au procs et non plus de simples tmoins. Notre gnration y travaille. Elle croit au droit international. Elle y participe comme vhicule de progrs pour lHistoire.Ce nest pas pour rien que Michel Debr, le pre de la Constitution, disait dans les annes60: demain (donc aujourdhui) Londres sera la premire place pour la finance et Paris la premire pour le droit.Mes prdcesseurs ont bien compris le message. Alors notre Barreau a largement accueilli les Cabinets internationaux (qui emploient dsormais un quart des avocats parisiens) et nous sommes devenus en retour cest le paradoxe vertueux de cette transformation du Barreau les ambassadeurs de la place de Paris qui est aujourdhui lun des hauts lieux du droit et de larbitrage dans le monde.Mais jentends les sceptiques qui comme dans le Bateau ivre disent: je regrette lEurope aux anciens parapets!Les anciens parapets Madame la Ministre, ce sont les peurs. Les peurs du changement, les portes fermes et les replis frileux. Cest aujourdhui la crainte de lavocat prsent en entreprise, comme certains ont pu redouter la disparition des avous ou la fusion avec les Conseils juridiques.La peur. Cest un mal terrible de la socit qui sagrge sans doute aux difficults de notre profession. Aujourdhui cest aussi un mal politique. Pour tout le monde, cest un risque dimmobilisme. Nous avons un devoir daudace.lQuand dans les annes 50, les premiers avocats ont accept de sortir de leurs Cabinets pour rencontrer leurs clients en entreprise, cela avait choqu comme au Salon des indpendants de 1884, lorsque les premiers impressionnistes ont sorti leurs chevalets pour aller peindre en pleine lumire...Quand en 1971, nous avons fusionn avec les avous de premire instance, certains pensaient que nous allions perdre notre me et ils ont organis un norme soulvement de la profession. Mais qui le regrette aujourdhui?Quand les Btonniers Philippe Lafarge et HenriAder ont soutenu la fusion avec les Conseils

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    Audience solennelle

    juridiques, contre un candidat au btonnat hostile la rforme, qui avait crit un livre rest clbre La grande peur de 1992, beaucoup pensaient que ctait une folie de donner le titre davocat des juristes apparemment moins diplms, apparemment dpourvus de dontologie et tellement nombreux que si on les autorisaient plaider, les avocats de souche allaient tout perdre...Non seulement ils nont rien perdu, mais grce cette fusion, une nouvelle profession est apparue, entranant les avocats dans une spirale de croissance qui a profit tous. Nul ne songerait aujourdhui revenir en arrire Jai le devoir de vous rappeler qu lpoque lopposition au projet de rforme avait t considrable dans toute la France beaucoup plus considrable encore que lopposition actuelle aux avocats en entreprise. Cette opposition farouche sexprimait travers la Confrence des Btonniers, la CNA qui tait trs puissante et le Syndicat des Avocats de France (SAF) qui ne ltait pas moins.Vous me voyez venir Je vous propose de raisonner par un effet de calque: avocats/Conseils juridiques; avocats/juristes dentreprises.Tant pour les Conseils juridiques que pour les juristes dentreprise, lopration ne fonctionne que sil y a un tronc commun: une fois la priode transitoire rvolue, cest pour tous les avocats un mme diplme, une mme dontologie avec un mme secret, une mme assurance RCP avec les mmes cotisations. Mais les avocats salaris en entreprise ne plaideront pas. En effet, comment le pourraient-ils puisquils sont soumis lautorit dune hirarchie et qu dfaut dindpendance et de distance, la plaidoirie est dontologiquement impossible. Ils ne plaideront donc ni pour lentreprise, ni pour ses dirigeants, ni pour quiconque. Cest ce que nous avons soutenu au cours du travail de concertation pralable. Cest ce qui est aujourdhui crit dans le texte qui sera port par le Gouvernement au Parlement. Et nous serons inflexibles sur cette exigence.Cela prservera le monopole de plaidoirie pour les avocats de souche. Et dans les sphres contentieuses qui se situent hors de ce monopole, tels que les juridictions sociales, consulaires ou les rfrs, il ny a aucune raison pour que le directeur juridique actuellement habilit y plaider, mais qui ny plaide pas, y plaide demain. En effet, pas plus demain quaujourdhui, il ne souhaitera se placer en risque vis--vis de son entreprise au regard de lala judiciaire. Il prfra dlguer ce risque ceux qui par nature et par obligation conservent en toutes circonstances distance et indpendance: les avocats libraux.En tout tat de cause, il faut le rpter, lexpos des motifs du projet de loi Macron 3 prvoit expressment et dune faon gnrale je cite entre guillemets: lavocat salari en entreprise ne plaidera pas. Le Ministre est venu le confirmer ce matin. A ce stade et sous rserve des travaux parlementaires venir, nous avons donc t pleinement entendus.Alors demain, comme hier avec la loi du 31dcembre1990, il faudra que notre profession soit plus ouverte, mieux harmonise avec celle de nos partenaires trangers qui ont quasiment tous adopt (17 en Europe), le statut davocat salari en entreprise. Cela doit entraner partout un coefficient multiplicateur de dveloppement au bnfice de tous les avocats. Il faut que les dossiers rentrent, que le tlphone sonne, que les affaires marchent... cest ce retour mcanique, que nous attendons. Le mme que celui dont toute la profession a profit avec louverture aux Conseils juridiques!

    Pourquoi? Parce que lavocat prsent en entreprise, y imprimera sa marque pour son Barreau, de mme que lexpert-comptable commissaire aux comptes concurrence aujourdhui lavocat car il est, lui dj, install dans lentreprise.Oui, cest toute la profession, Paris et la province, les anciens et les modernes, les petites, les moyennes et les grandes structures qui profiteront de cette mesure. Nous sommes pour lunit par la croissance.Nous aimerions tellement Madame la Ministre que vous vouliez bien le comprendre et que devant le Parlement vous nous donniez des garanties pour nous permettre de convaincre nos confrres rticents. Ne tombons pas dans le pige des Cassandre qui voudraient nous faire croire que le projet concernerait 200 000juristes dentreprise, quand ils sont seulement 16 000, comme le montre une tude de lINSEE, et pas tous susceptibles, loin sen faut, de rejoindre notre profession. Comme avec les Conseils juridiques en 1990, il sagirait dintgrer un quart de leffectif de la profession sur une priode de cinq ans. Cest donc parfaitement possible!Alors avanons vers la grande profession du droit, en continuant notre politique de fusion dans le cadre dune rglementation forte. Car sinon, les juristes dentreprise risquent dobtenir un statut part et de constituer une profession concurrente, tandis que tout autour de notre primtre volueraient des professionnels drglements dans la jungle dinternet...Voil ce que soutient lOrdre de Paris, depuis le btonnat de Bernard du Granrut; et qui a toujours t confirm, y compris pendant les mandats de Jean-Marie Burguburu et Christian Charrire-Bournazel.En effet, depuis 30 ans, chaque fois quil est consult le Conseil de lOrdre vote pour lavocat salari en entreprise, condition quil nait pas le droit de plaider. Faut-il rappeler que, mme au CNB, il y avait eu un exact partage des voix sur cette question en 2010 ce qui montre, que les vrais raisons de lhostilit aujourdhui, quon voit dans la rue, sont peut-tre ailleursAinsi concernant lavocat salari en entreprise et rien que cette question, il y a une alternative:lou bien, nous agrandissons notre primtre en imposant notre rglementation, avec la coexistence de petites, moyennes et grosses structures davocats, en entreprise et au-del;lou bien, ce sont les autres qui se dvelopperont et drglementeront tout. Alors lavocat, avec son Histoire, son titre, sa dontologie, son exercice judiciaire et juridique, risquerait de disparatre!Cest ce titre aussi que dans les derniers tats du texte Macron nous sommes satisfaits davoir obtenu que le dfenseur syndical ne partage pas la reprsentation obligatoire avec les avocats devant la Cour en matire sociale. Cest crit dans le projet de loi et le Ministre nous la confirm ce matin.

    IV - LE SECRET PROFESSIONNEL Jaborde maintenant le dernier thme de mon propos, dnominateur commun de tous les avocats et point fondamental dans la dfense des liberts publiques: le secret professionnel.Rassemblons-nous, avec vous Madame la Ministre, si vous le voulez bien, pour le dfendre.Pour dfendre le secret, clef de vote du lien social, qui nest pas le privilge des avocats et qui nest pas non plus le sanctuaire des dlinquants, mais le secret en tant que rgle sacre de la vie prive et des affaires...

    Le secret, refuge ncessaire de la vrit, du libre arbitre et de la responsabilit de chacun pour laccs au droit...Le secret qui, dans les priodes les plus sombres de lHistoire tait extorqu par la torture et qui, dsormais, ne rsiste pas aux nouvelles technologies...Or, cest prcisment dans les eaux profondes du secret que certains Magistrats jettent leurs filets drivants. Et ils attendent. Pour eux, la nouvelle exigence de transparence est une fin qui justifie les moyens. Alors ils ont bonne conscience, car ils savent quils finiront bien par trouver quelque chose... Quelque chose, mais quoi ? Quelque chose quils ne cherchaient pas prcisment. Cest la rgle odieuse de la prsomption de culpabilit indtermine, comme si par nature nous tions tous coupables.coutez aux portes Mesdames et Messieurs les juges, pendant des jours et des nuits, des semaines et des mois. Comme avec la calomnie pour Beaumarchais, il en restera toujours quelque chose! Rien ni personne ne vous chappera. Mais lquilibre social se sera effondr.Quel paradoxe et quelle tristesse, que devant 1200 avocats du monde entier rassembls Florence, le Prsident de lUnion Internationale des Avocats (UIA) Stephen Dreyfuss ait appel dfendre cette anne, au mme titre que les avocats de Chine ou de Core, dIran ou de Turquie, les avocats du Barreau de Paris la merci dcoutes tlphoniques et de perquisitions.De mme, la Confrence Internationale des Barreaux de Culture Commune (CIB), qui sest runie Dakar dans le souvenir de son fondateur le Btonnier Mario Stasi, a-t-elle vot une motion de soutien, ce qui mmeut mais me rend trs mal laise, venant de confrres africains qui exercent parfois notre mtier au risque de leur vie.Le Prsident de la Rpublique nous a reus, puis vous aussi Madame la Ministre, ainsi que votre Cabinet, pour nous promettre une loi sur le secret... Mais nous serions, mavez-vous dit, en attente dun vhicule lgislatif?Non, dites-nous aujourdhui, que ce nest pas une question de calendrier, quen matire de liberts publiques on ne temporise pas, que lexploitation des fadettes du Premier Prsident de la Cour de cassation et des miennes, aura au moins conduit un grand texte sur le secret en 2015. Car si ces derniers temps les avocats ont t beaucoup couts... il sagirait maintenant quils soient entendus!Cest la perspective que le Prsident du Tribunal de Grande Instance de Paris, Monsieur Jean-MichelHayat, a propos par son ordonnance du 9 octobre dernier restituant un Btonnier, les tlphones portables quun Juge dinstruction venait de saisir. Voil une grande jurisprudence, qui a rappel les fondamentaux du secret confi par un client son avocat et confi par un avocat son Btonnier.Le Prsident Jean-Michel Hayat a prononc ici mme un magnifique discours hier, dans le cadre de notre Universit dhiver et il ma autoris le citer:Quelle que soit la nature de laffaire, un Btonnier parce quil est Btonnier ne peut voir soumis linvestigation, le cur de son activit de Btonnier, activit en lien quotidien avec lensemble de ses confrres, dans une forme de pche la preuve vers laquelle il ne faut pas driver.Et le Prsident de poursuivre:Au nom de la transparence dont il faudra bien admettre qu ltendre inconsidrablement tous

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    Audience solennelle

    les champs daction et dlaboration de la dcision, on basculerait vite dans une forme de totalitarisme de la vie en socit.Ainsi le texte de loi est-il simple concevoir maintenant. Il pourrait sarticuler en trois grands principes intgrer dans le Code de procdure pnale.lPremier grand principe:Toute interception et exploitation tlphonique, lectronique, numrique, ne peut tre ordonne qu lencontre dune personne souponne davoir particip au crime ou au dlit objet de la saisine.Voil pour en finir avec les filets drivants ! lDeuxime grand principe:Le Juge de la dtention (JLD) et, lorsquil sagit dun

    auxiliaire de Justice, le Prsident du TGI, sont seuls comptents pour en dcider par ordonnance spcialement motive, aprs quils en ont contrl la ncessit et la proportionnalit, en se fondant sur des considrations objectives.Voil pour instaurer un contrle a priori, comme cela se fait aux tats-Unis, dans les juridictions pnales internationales et dans tous les grands Etats de droit.lTroisime grand principe:Aucune interception entre une personne lgalement surveille et un avocat, ne peut tre enregistre, retranscrite, exploite.Voil pour que cessent les coutes incidentes!

    Madame la Ministre, veuillez mexcuser de ne plus vous proposer un discours, mais dj de vous suggrer une loi Ce serait une grande loi, parce quelle serait porte par vous.Elle complterait celles que vous avez dj fait voter par le Parlement. En dfendant le secret, tout le secret (y compris le secret des dlibrs), vous apporteriez votre pierre ldifi cation des liberts.Y aurait-il plus beau projet pour un Ministre de la Justice?Y aurait-il plus belle raison dunir tous les Magistrats et tous les avocats de France? Y aurait-il plus belle transition pour vous donner la parole?

    Le Barreau de Paris prsent et engagpar Laurent Martinet

    Laction des hommes au jour le jour a vocation sinscrire dans le temps et elle ne le fait que lorsquelle sert et illustre des valeurs elles-mmes prennes.Celles douverture, de proximit, de transparence et de comptitivit constituent, pour le Btonnier Pierre-Olivier Sur et moi-mme, les ides rgulatrices qui guident nos pas depuis notre prise de fonction. Nous considrons que notre Barreau doit tre ouvert sur le monde, quil doit concevoir et mettre en place un exercice rnov de notre profession, quil doit aussi accompagner lvolution de notre socit, sans jamais subir pour autant ce que le changement pourrait vhiculer dindsirable voire dinacceptable.Notre Ordre et en premier lieu, nous-mmes, les Btonniers, nous nous devons dtre lcoute de chacune et de chacun dentre vous, soucieux dapporter rponse aux proccupations de notre Barreau, nos difficults et nos incertitudes, sans jamais faillir au plus grand respect de lintrt gnral. Cette mission, nous entendons lexercer dans une transparence totale, sous le regard de tous, sans fuir notre devoir de vous rendre des comptes. Telle est lintention du propos que je vous tiens aujourdhui.Certaines missions que notre Barreau a accomplies ont fait le tour du monde, je veux parler l de labolition de la peine de mort, de la promotion des droits de la dfense et, aujourdhui, de notre droit de tradition civiliste sur les 5continents.Mais il est aussi de notre responsabilit de nous proccuper du quotidien et den voir la noblesse.Il y a des dieux mme dans la cuisine disait Hraclite et peut-tre le savez-vous, cest en se rclamant de cette phrase quAristote fonda la biologie et Freud la psychanalyse.Plus modestement, il est de notre responsabilit dasseoir galement la comptitivit du Barreau de Paris, alors que le monopole du droit pourrait ressembler une peau de chagrin et que nos concitoyens, pourtant de plus en plus demandeurs dinformations juridiques, nont pas toujours la facult de rmunrer son juste prix le prestataire comptent qui les leur fournit.Mais jamais, jamais, je ne dsesprerai.Certes un vent de cynisme souffl e, qui souvent suscite un regard narquois lencontre de ceux qui accordent foi aux propos encourageants, fortiori optimistes, quon leur tient.Cest ainsi que sinstallent la mfi ance et la dfi ance.Bientt, la suspicion entoure celui qui parle pour redonner confi ance.

    Ce doute est encore nourri par la crise que nous devons affronter et par les rformes qui concernent notre profession devenue ds lors virtuellement indfinie.Je sais que les dclarations dintention vous ont lasss et vous avez raison.Les mots et les promesses, je le sais galement, sont souvent insuffi sants entretenir lespoir.Je vais donc essayer limpossible, vous convaincre que derrire les mots: se dessine une action; se dresse une vigilance; se construit un projet.Voyons ensemble, voulez-vous, ce qui a t fait en un an, car ce nest pas rien! - et ce qui reste encore accomplir.

    I - FORMATION Vous savez comme elle me tient cur et comme je suis convaincu quelle est notre avenir.Son excellence, car cest ce que nous avons laudace de viser, est de nature : asseoir la comptitivit des gnrations futures, leur assurer un avenir solide, inviter des collaborateurs de qualit rejoindre nos Cabinets, et essaimer nos valeurs hors de France.Lcole de Formation du Barreau a souvent t considre comme inutile et, parfois, trop coteuse aux yeux des avocats en exercice qui y voyaient un outil inadapt.Pour un peu, elle serait apparue comme un terrain de faiblesse et dinsuffi sance. Il tait ds lors de notre devoir de rhabiliter lenseignement dispens lEFB. Nous en avons fait un chantier prioritaire.Pour commencer, nous avons recueilli les souhaits, les suggestions, les critiques au sein mme de notre Barreau.Un groupe indpendant de jeunes confrres, runis dans un cercle de travail dnomm La Caravane,

    est all, de Cabinets en Cabinets, recueillir les observations de tous et notamment des lves.Cette consultation a permis la restitution dun livre blanc qui prend en considration des thmatiques... telles que lventualit dun numerus clausus, leur vision de lavenir; ou encore les contours de notre profession de demain.Une rforme de cette importance ne pouvait nos yeux tre envisage dans le secret dun Cabinet, fut-ce celui des Btonniers.Il fallait que les personnes concernes expriment leurs craintes et leurs dsirs.Cest dans cet esprit qua t mis en place un Comit Scientifique dont la mission a consist rendre la formation plus pragmatique, plus pratique, vritablement ancre dans les ralits de la vie juridique, conomique et socitale, propre sinsrer dans les complexits, les arcanes du monde de lentreprise.Jai plaisir remercier les membres de ce Comit dont je rappellerai quils sont issus dunivers professionnels varis.Ils sont avocats, ils sont professeurs duniversit, ils sont Magistrats, ils sont Chefs dentreprises. Ils ont tous mis en commun leurs expertises et leurs expriences complmentaires.Il sagissait pour nous de dfi nir un enseignement sans redondance avec celui que prodigue lUniversit, - synthtisant ce que la profession davocat suppose de science, de rfl exion, dimagination, mais aussi de connaissance du monde, des hommes et de leurs besoins; et jajouterai, de moralit.Le but assign tait de parvenir une formation dexcellence.Et nous avons ainsi russi, sous lgide de Jean-Louis Scaringella, faire de lEFB une cole dapplication pratique du droit rpondant aussi bien aux attentes de la profession; quaux besoins des clients, quils soient consommateurs de droit ou justiciables.Il fallait aussi que lEFB, comme dautres grands tablissements publics ou universitaires, soit ouverte sur le monde, et quelle prpare les avocats percevoir linternational comme un champ daction naturel.Pari et dfi , permettez-moi de le dire, russis!Le programme mis en place comporte des enseignements obligatoires et dautres, laisss au choix et la vocation de chacun.Les trois piliers directeurs en sont la dontologie, la vision europenne, laction internationale. Cet enseignement rnov se veut au cur de la ralit.Cest pourquoi, il englobe lactivit pnale comme celle du Conseil juridique, les nouveaux mtiers de lavocat, comme les modes alternatifs du rglement des confl its et le droit collaboratif.

    Laurent Martinet

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    Une part de lenseignement est aussi consacre la conduite dun Cabinet. Cest essentiel car un Cabinet, cest une entreprise.Dautant que si la pratique judiciaire nous est familire, si la dfense est notre nature premire, il tait important que lEFB permette de cultiver la relation entre lavocat et lentreprise.Ainsi, nos jeunes confrres accdent-ils la pratique du mtier davocat, comme la technicit juridique quil leur faudra mettre en uvre quotidiennement, et laccompagnement de lentreprise cliente doit galement tre dans sa mission naturelle comme lest son action dans le prtoire.LEFB est dsormais proche de lentreprise et je men flicite.Nous avons aussi nou des relations privilgies et harmonieuses avec les Magistrats, afin que lactivit judiciaire, dialectique et conflictuelle par nature, soit pourtant aussi sereine que possible; et que le rle de lavocat y soit plus que jamais reconnu.Jean-ClaudeMagendie dveloppe lcole une activit intense et prcieuse, incarnant par sa prsence et celle dautres Magistrats, auprs de notre Barreau, la tradition multisculaire de la notion de famille juridique, une notion laquelle je tiens beaucoup.Nous avons aussi mis en place des formations communes, conjointes avec les Magistrats et en collaboration avec lENM.Je ne saurais vous dire quel point la mise en place de ces accords me semblait imprieuse.Je veux saluer l le Directeur de lENM, XavierRonsin, et dire publiquement quel point il tait fondamental mes yeux dinstaller de tels partenariats car je reste profondment attach une relation Avocats / Magistrats empreinte de respect, de considration et dthique.

    II - LOUVERTURE LINTERNATIONAL Nous avions pris lengagement de proposer chaque anne 500 stages rmunrs ltranger. Cet engagement est devenu ralit.Par ailleurs, nous avons pass des accords de partenariat et de rciprocit avec des Grandes coles et Universits sur lensemble de la surface du globe, en Australie comme au Brsil, au Canada comme en Chine, aux tats-Unis comme en Inde ou au Tchad, ou, plus prs de nous, au Royaume-Uni.La plupart de ces accords sont dj en cours dexcution, dautres en phase de finalisation.Dans tous les cas, nous avons mis en place des modes de financement et daccompagnement de nos plus jeunes Confrres, quil sagisse de prts ou de bourses.LEFB doit tre aussi lcole de la Rpublique, capable dassurer lgalit des chances, quelle que soit lorigine sociale ou professionnelle de nos lves.Jy suis personnellement et viscralement attach. Jen suis le garant.Il y a aussi Campus International qui rencontre un vritable succs et concrtise les changes entre avocats, entrepreneurs et pouvoirs publics.Nous sommes ainsi dj alls au Cambodge, au Mali, au Brsil et nous allons continuer sur ce chemin.

    III - LE NUMERUS CLAUSUS En effet, le champ de nos activits sest largi et ne cesse de prendre de lampleur. Louverture linternational constitue un vritable atout.A cette aune, ce ne sont ni les besoins de droit, ni les clients, qui font dfaut.Il faut aussi, que le Barreau et avec lui ltat, se donnent les moyens dassumer la demande de droit des plus dmunis, et aussi des classes moyennes.Jai pris bras le corps cette mission de rforme de

    lenseignement pralable en assumant concrtement la Prsidence de lEFB quexerce pour la premire fois un Vice-Btonnier et jen suis particulirement reconnaissant au Btonnier Pierre-Olivier Sur.Je commence voir se dessiner lcole, et jen suis heureux, une satisfaction de lenseignement reu, une confiance en lavenir.Et pour paraphraser Aim Csaire, un nouvel optimisme se lve lhorizon.Ne disait-il pas dans Moi laminaire, une nouvelle bont ne cesse de crotre lhorizon.

    IV - LA GOUVERNANCE Quon se rassure, je ne parle que de celle du Barreau de Paris. Il fallait quelle volue quelque peu.Cest ainsi que nous avons modifi la date dlection des Dauphins, reporte au mois de juin qui prcde lentre en fonction du nouveau Btonnier.Si cette rduction de la dure du Dauphinat 6 mois a t ici ou l discute, elle nous parat de nature permettre aux nouveaux Btonnier et Vice-Btonnier de se prparer utilement leur mission, et dentrer, ds le premier jour de leur mandat, dans lefficacit et dans la ralisation de leur programme.Nous avons aussi, appuys par le Conseil de lOrdre qui en a vot le principe, dcid la suppression de llection de confirmation qui navait plus grand sens.A ce sujet, jaimerais mettre deux vux.lLe premier: que la dure du Btonnat soit porte 3 ans.En effet, sur de nombreuses thmatiques, nous avanons, et quel dommage, au pas de course, pour ne pas dire marche force.Cet allongement du mandat permettrait ou, je lespre, permettra de toute vidence dinscrire dans la dure les orientations les plus profondes auxquelles nous aspirons.lLe second vu: que le tandem Btonnier / Vice-Btonnier - dont nous exprimentons chaque jour, Pierre-Olivier et moi, le bonheur et lefficacit - soit dsormais inscrit dans nos murs.Quelle plus belle harmonie que la complmentarit! Quel plus grand respect que lchange!A deux, on est plus forts.Notre gnration travaille en quipe.Les portes de lOrdre ne se referment pas sur nous.Nous veillons tre en phase avec lintrieur et lextrieur de notre Barreau.Cest aussi pour nous le meilleur moyen de ne pas lcher prise avec nos Cabinets de demeurer toujours avocats, en phase avec notre mtier et nos quipes.Bref, quand une solution a tous les avantages et aucun inconvnient, pourquoi faudrait-il sen priver?Le secret dun bon tandem.Il faut que ceux qui travaillent ainsi cte cte le fassent dans lharmonie, dans ce respect mutuel et cette amiti qui lient profondment ceux qui servent le mme dessein.De ce point de vue, je rassure les esprits chagrins, le Btonnier Pierre-Olivier Sur et moi servons ensemble dans la srnit, la vrit et la fraternit.l Nous avons souhait procder une autre modification, en limitant le nombre de mandats au Conseil de lOrdre de nos anciens Btonniers, et pourtant nous serons un jour des anciens Btonniers.Mais quelle que soit la haute estime dans laquelle on les tient et lhommage quon leur doit, il faut que leur autorit soit mtisse et, comme le Barreau lui-mme est jeune, que les membres plus rcents du Conseil puissent accomplir leur mandat sans trop ployer sous le poids du pass.Nanmoins, je ne rpterai jamais assez combien lactivit des anciens Btonniers lOrdre est

    prcieuse, combien leurs conseils, dans les cas difficiles, je lai expriment, sont ncessaires et irremplaables.lJe me rjouis aussi que notre Conseil de lOrdre volue au fil des lections vers une parit que lon trouve rarement dans dautres institutions.Javais pris lengagement devant vous, Madamela GardedesSceaux, la veille de la Journe de la Femme, lorsque vous nous avez fait lhonneur de venir au Palais le 7 mars dernier, de veiller scrupuleusement ce que le collge ordinal soit pour la premire fois compos dune liste paritaire davocates et davocats.Nous avons tenu parole. Nous lavons fait.Dj trois femmes ont assur la lourde charge de secrtaire du Conseil de lOrdre au cours des cinq dernires annes, jai aussi le plaisir de vous dire que lors des toutes dernires lections au Conseil de lOrdre - il y a un mois -, sur les quatorze Siges renouveler, huit femmes ont t lues.De mme, au Conseil National des Barreaux, dans le cadre dune liste paritaire, 7femmes et 9hommes ont t lus.Nous y sommes presque. Ce ntait jamais arriv. Cest une grande victoire.lJai galement port devant le Conseil de lOrdre, puis devant le Conseil National des Barreaux, le cong paternit.Le Conseil de lOrdre de Paris la vot.Cest encore une victoire dont nous sommes fiers, Madame la GardedesSceaux. Je continuerai le combat.2015 approche.lLe Conseil de lOrdre continuera sa mission dans le mme souci de transparence qui nous anime, avec un nouvel outil, une commission de contrle des missions et des cots.Cette commission a pour secrtaire un membre du Conseil en exercice et pour responsable un conseiller matre la Cour des Comptes.Nous devions cette transparence nos Confrres.Nous en avions pris lengagement lors de notre campagne.lDe la mme faon, qui aurait pu croire il y a quelques annes que nous souhaiterions un jour la transparence au point quune runion du Conseil de lOrdre soit retransmise en direct!L aussi, nous lavons fait lors du dernier Campus cet t lEFB et chaque fois que nous le pourrons, nous continuerons dans cette voie de lassociation de tous la dcision qui les concerne.Nous considrons que si nous portons traditionnellement les intrts du justiciable et de la profession davocat auprs des responsables politiques, nous avons aussi un rle jouer dans les dcisions diverses qui concernent la forme de notre socit, la manire dont la Justice est rendue et lorganisation des grandes liberts.Vous laurez tous compris, cest le sens de notre prsence la Maison de la Mutualit. Nous voulons tmoigner dun Barreau prsent et engag.Cette volont de donner ou, peut-tre, de redonner lavocat toute sa place au cur de la cit et de la dmocratie nous a guids vers la cration dun dpartement des affaires publiques.Il a pour tche dassister lOrdre et les Btonniers dans les actions entreprises dans cette sphre de la cration lgislative.Il a aussi le devoir dinformer les avocats sur les positions prises en leur nom par leurs lus. 2015 approche, disais-je.Il y a aussi des sujets qui fchent et il est gnralement convenu de ne pas en parler. Mais cela nest pas dans mes habitudes.

    Audience solennelle

  • Les Annonces de la Seine - Jeudi 18 dcembre 2014 - numro 50 7

    Depuis le dbut de lanne, je Sige au Conseil National des Barreaux par dlgation du Btonnier de Paris, Vice-Prsident de droit.Chacun sait que ce lieu dchanges et de dbats est parfois celui de la discorde entre les positions de notre Barreau et celles de nos confrres exerant en rgions.Ainsi, les avocats de toutes les rgions de France voient la disparition de la postulation comme un manque gagner alors que nous y sommes favorables, comme nous sommes favorables lavocat en entreprise alors que nos confrres

    des autres Barreaux franais ont sur ce sujet des positions bien diffrentes.Cest vous Madame la GardedesSceaux qui, dans dautres circonstances, parliez de la politique comme du courage de sinterroger sur la vie dans la cit, sur les espaces que nous crons pour nous entendre, pour nous comprendre, pour nous disputer et pour nous rassembler.Malgr les divergences dont je viens de parler et qui sont naturelles dans un corps habitu la rfl exion et au dbat, je crois aussi la possibilit de se rassembler, et pour reprendre encore vos

    mots Madame la Ministre, et je veux y prendre ma part!Pour que ltat nait pas dcider dun destin commun de notre profession que nous nous serions montrs incapables de dfinir nous-mmes, je serai heureux, vous laurez compris, davoir t de ceux qui ont uvr pour aplanir les malentendus, favoriser le dialogue et reconstruire lharmonie de notre profession.Cest aussi cette conviction qui prsidera ma dmarche tout au long de ce mandat en 2015. Vive le Barreau de Paris. Vive les avocats et la dfense!

    Audience solennelle

    loge dOlivier Metzner par Paul Fortin

    LAUTOPSIE DUN SUICID

    Chaque jour, au crpuscule, le temps sarrte. Sur lle de Bodic, la pnombre fige les arbres. En face, Vannes se transforme, grise et immobile. Enfi n, lobscurit avale le bruit des fl ots.Ce soir-l, un homme trouble cette mcanique immuable. Derrire ses lunettes, il a attendu que le refl et de la lune remplace celui du soleil pour prendre la mer. Il manuvre au large.Ses gestes sont dcids, mais approximatifs. Dans son sang, un mlange dArmagnac et de mdicaments moussent ses sens, sans temprer sa rsolution.Le moteur peine coup, il enjambe lembarcation, dcid en fi nir.Une vague se brise contre lesquif, les embruns glaciaux le frappent. Un frisson le parcourt. Tremp, peut-tre, subrepticement hsite-t-il mme renoncer. Il contemple le miroitement roulant des toiles fi xes. Une dernire fois, il laisse ses penses divaguer.Et puis implacable, conscient de ses turpitudes, refusant ses tergiversations, il saute la mer.Leau pntre dans les voies respiratoires et provoque une apne rfl exe. Le cur ny tait plus, et cest maintenant le corps qui se drobe. Par spasme, lpiglotte se ferme jusqu empcher toute respiration. Sa tte est encore hors de leau, mais lair marin cesse dj dirriguer sa vie, jusqu lanoxie.a y est, les tnbres lont emport. Plus rien ne bouge, lhistoire sest arrte.A laube, un corps dhomme gt, chou sur la plage. Cette dpouille, cest celle du propritaire de lle.Cette dpouille, cest celle dOlivier Metzner.Madame le Garde des Sceaux, Mesdames et Messieurs les Btonniers, Mesdames et Messieurs les Hauts Magistrats, mes chers Confrres, Mesdames et Messieurs,Pour une journe, avec vous, je serai mdecin-lgiste. Lautopsie dun suicid.Je ferai parler la mort de cet homme pour en raconter la vie. Je ferai parler le corps de cet homme pour en exhumer lesprit.Devant nous, Olivier Metzner, 63 ans. Les lividits cadavriques sont stabilises, la rigidit musculaire est complte, lquilibre thermal est atteint.Voil, cest un dcs par noyade sans traces dintervention dun tiers, le 17mars2013. Fin de lhistoire. Rideau? Non.Il nous faut en dire plus. Dchiff rons la chair pour apercevoir lme.Alors, dabord, examinons ensemble ses deux yeux

    bleus. Le cristallin est gonfl et sclros.Pas de doute, ce sont les yeux fatigus mais clairvoyants, cerns mais veills dun avocat, de lavocat qui a us sa vue sur les dossiers, jusqu percer le secret des procdures.Ce corps, devant nous, cest celui dun avocat.Maintenant, cest le tour de son visage. La peau est lgrement couperose. La dentition, des molaires aux incisives, est marque par les Bordeaux, et le tabac des Cohiba.Voil donc, un avocat qui a connu le succs et la fortune, sans rechigner sur les plaisirs raffi ns de la vie.Ce corps, devant nous, cest celui dun avocat qui a russi, et dun homme qui a vcu.Enfi n, regardons ce corps mis nu. Il ne nous dit pas grand-chose. Cest un corps fait dabsences. Nulle cicatrice qui plastronnerait sur le torse pour rvler le combat dune vie, nulle tare si singulire quelle aurait pu dicter une existence entire, nulle corne sur ses paumes pour laisser imaginer un destin paysan.Mais, surtout, le long de ses doigts, une nouvelle absence, plus signifi cative encore: nulle alliance qui voquerait quelquun dautre pour raconter autre chose que la solitude.Ce corps, devant nous, cest celui dun avocat qui a russi seul, et dun homme qui a vcu seul.Alors oui! Je viens faire lloge dOlivier Metzner, ce gnial prcurseur qui aura t avocat, tellement avocat quil sest oubli lui-mme.Cette pope professionnelle, cette tragdie humaine, cette histoire de notre poque, je vous la propose en trois actes et un pilogue.

    ACTE I LA PREMIRE NULLIT Dans notre premier acte, Olivier Metzner na pas 30ans, mais le regard amus et la chevelure dense.La silhouette est svelte. Aujourdhui elle est masque par une robe noire. Il est entr dans la

    salle et il sest discrtement mis dans un coin.Le prtoire qui lentoure est hors du temps. Il respire le pass.Lustres et fresques au plafond. Allgories de la Justice et maximes latines sur les murs.En un sicle, rien na chang. Le Code sappelle toujours Napolon, et cest sur le mme Parquet que les grands Anciens de la Rpublique des Avocats ont forg lloquence judiciaire.La plus belle des gloires serait dgaler leur art.Quon ne compte pas sur le dcor pour crire lhistoire.Alors, comme un colier, Olivier Metzner a sorti de son cartable de quoi crire.Il demeure courb, prostr sur quelques feuilles. Il les serre comme une carte au trsor, et entend peine ce qui se dclame.Autour de lui, les avocats virevoltent. Leur ballet bat son plein. On se frle, on se salue, on signore. On plaide, on interroge.Chacun connat son rle, et le rcite avec lassurance des habitus.On schange le bon mot de la veille. Une fulgurance du confrre a suffi obtenir lacquittement. Dautres mditent pour prparer leur plaidoirie venir. Ils le savent bien, eux, tout se joue laudience.Derrire, Olivier Metzner patiente, silencieux, sur un banc choisi au hasard.Venu de Normandie dune famille dagriculteurs, il nest pas un hritier du Barreau, ni un jeune prodige dont les diplmes pourraient remplacer lascendance.Songez plutt, un baccalaurat obtenu pniblement 21 ans. Des annes de fac Caen, passes prodiguer des cours de voile, et obtenues aux rattrapages grce aux cours dun camarade. A lpoque, la licence suffi t pour passer le certifi cat daptitude. Alors, pour Metzner, a sera licence, CAPA, rien dautre!Arriv Paris, celui qui aime naviguer seul, na pas prvu dtre le fi dle second dun capitaine au long cours.Alors, il sera seul matre bord! Metzner pose sa plaque 26ans et se forme lui-mme. Sans moule pour faire de lui la dclinaison dun autre, il dessine sa propre pure.Sans mentor, sans prt--plaider, Olivier Metzner travaille. Beaucoup. Seul. Et quand il doute, humblement, il se tourne vers les textes. Il lit, et relit. Il vrifi e, et revrifi e. Surtout, il fait ce que peu faisait alors, de la procdure pnale.Aff aire n3. MM. Azoulay, Langlois, et Briat.Olivier Metzner sapproche, et remet ses quelques pages aux Magistrats. Que fait-il?Ne sait-il pas que les procs se gagnent par le verbe? Ne sait-il pas que la procdure est orale?Ne sait-il pas que lon devient tnor en multipliant les arias?Exorde, proposition, narration, rfutation, et proraison: voil les ingrdients dune relaxe. Que peut vouloir cet excentrique?

    Paul Fortin

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    Rien dsotrique dans cet trange mange. Ni tnor, ni danseur-toile, ce Matre-l est simplement compositeur.Depuis quelques annes dj, le style saffute. Mais, cest hier que tout a pris forme, que la partition sest crite. La veille, Olivier Metzner est parti prcipitamment consulter la procdure, excit comme un orpailleur qui on annonce un nouveau filon. Pourquoi cette frnsie? Un tmoin qui se rtracte? Un disparu qui rapparat? Un coup de tonnerre? Non, un simple procs-verbal horodat un jour trop tard.Matre Metzner, vous avez la parole.Il rsume sa trouvaille dun filet de voix, et convie laudience ce dlai expir qui fausse tout.Curieux, non?Le propos ne fera pas les gorges chaudes du Palais, sa voix avale certains mots, mais tout est dune clart absolue.Ce Juge habitu ce quon lui fasse la cour, habitu manier la svrit et la clmence son gr, habitu tre tout puissant pour dcider entre le chtiment et le pardon trsaille.Il a perdu son-libre arbitre, et doit concder la libert.Nullit du titre de dtention. Nullit. Nullit. Ce mot qui veut dire la mdiocrit partout ailleurs. Dans nos prtoires, il rsonne comme une victoire du droit.Dominos chutant en cascade, chteau de cartes qui seffondre, choisissez votre mtaphore. Le rsultat est le mme: en pointant la fissure juridique qui fragilise les fondations dune enqute, cest lensemble de ldifice ou, tout le moins, une aile entire et quelques crous qui disparaissent.A lincertitude des curs quil faut conqurir, lloquence, mlodieuse ou irritante selon les gots, Olivier Metzner prfre la froide constance du droit et des procs-verbaux.Plutt que la jubilation du bon mot, il a choisi les cotes qui seffacent.Oui, Olivier Metzner sait que rugissements et implorations se perdent dans le vide sans matire pour se propager.Les mots couchs sur du papier peuvent tre plus implacables que les balbutiements dun tmoin qui craque.Une fois la bataille judiciaire remporte, lexcentrique est devenu prcurseur.Gagnez sur les faits, et votre client vous remerciera en rappelant quil navait effectivement rien se reprocher.Gagnez sur de la procdure, et vous serez un avocat vnr. a y est, sa carrire est lance.

    Binoclard pointilleux, technicien vtillard, bredouilleur prcis, gratte-papier virtuose. En toute confraternit, on lui concde des qualits, parce quon y accole ses dfauts.Mais pour lheure, cette technicit rbarbative et ce vice de procdure austre, ils ont pris le prvenu par la main pour le guider vers la libert.

    ACTE II LE COUP DAVANCE Notre deuxime acte se droule trente ans plus tard. Le cadre a radicalement chang et rsume lui seul trois dcennies judiciaires.Ce jour davril 2011, nous sommes devant le 100rue de lUniversit. Pntrez dans lhtel particulier, laissez sur la gauche lescalier la franaise. Vous voil arrivs. Cest le bureau dOlivier Metzner. Il est absent.Nattendez pas larrive dun quelconque personnage, le dcor restera inhabit pour la journe.Lil glisse dabord sur une moquette cobalt pour sarrter sur deux imposants miroirs se refltant linfini. Les moulures et dorures ont le cachet de lhistoire. Le mobilier contemporain sefforce dtre de bon got. Un univers bleu et bois aux tons trop prcieusement doss.Sur le porte-manteau, les costumes de chez Arnys et les cravates Dior ctoient dsormais la robe noire.Le luxe dgouline le long des murs et tmoigne du succs indniable de lavocat.Dabord, comme les cheveux blancs, lassurance est venue avec les annes. Au Palais, le jeune homme qui sasseyait au fond se permet maintenant de fumer le cigare devant la Chambre de linstruction. De loin, on reconnat maintenant sa silhouette et sa carapace.La conscience de son talent confine mme parfois au contentement.Les Juges lcoutent, lattendent mme: comme lors du procs Crdit Lyonnais o laudience est interrompue le temps que Metzner, qui plaidait ailleurs, ne se montre pour claircir un point de droit.Surtout, le pnal des affaires est pass par l.Les rgles sont les mmes, mais les pions ont t remplacs par des socits-crans. Les fous sont des intermdiaires obscurs. Les cavaliers sont des rtrocommissions. Lchiquier a cess dtre un hexagone. Il est devenu sphrique et comporte 24fuseaux horaires.Mais ce sont toujours des hommes qui dplacent les pices. Et ce jeu l, le roi du gambit, le Grand Matre, cest Metzner.Le cabotage solitaire autour de lIle de la Cit est derrire lui, cest maintenant avec un quipage aguerri quil navigue jusqu la rue des Italiens.

    Dans ce nouvel univers, Olivier Metzner a russi faire de son Cabinet un des centres de gravit. Cest ici que lon anticipe toujours plus en amont, cest ici quon remonte le temps. Ce qui se passe au prtoire sest jou dans le Cabinet du Juge dinstruction, et a t prvu, ici mme, autour de ce bureau, lavance.Regardez le justement, cet imposant bureau, qui ne dvoile rien, o tout est en ordre jusqu tre impersonnel. Sans la plaque en bas, est-on rellement chez Metzner?Pas de photo glorieuse dune remise de lgion dhonneur.Pas de relique dun succs pass ngligemment pose sur une tagre pour impressionner le visiteur.Pas de photo de famille.Pas dobjet insolite, dont la nostalgie serait la seule lgitimit. Rien ne dpasse, en apparence, tout est en ordre.Tout, vraiment tout?Non, sur un meuble une paisse enveloppe de papier, bien visible, prend la poussire et dtonne dans lordonnancement des choses, tel un menhir dans un champ ou une acanthe sur une colonne dorique.Une erreur, un oubli? Non, bien au contraire, ce paquet contient les fameux enregistrements du majordome dune milliardaire. Tout Paris bruisse de savoir ce quon dit en secret dans les salons neuillens des Bettencourt. Demain, aprs-demain, dans une semaine, peu importe, la police viendra.La Justice veut savoir. Alors, elle saura. Metzner, le stratge, la devin, alors il a tout prpar lavance.Aujourdhui, notre hte nest pas l. Mais soyons sr quil sourit, amus et certain davoir, encore une fois, un coup davance.

    ACTE III LA DERNIRE LARME Notre troisime acte na pas de lieu, pas de date.En apparence, il se droule au 3me tage du numro 27 de lavenue Panenkalis Vilnius, dans le bureau anonyme dun Procureur dun Palais de Justice fatigu davoir abrit le KGB pendant loccupation. Les clats de rire nont pas fait la rputation des lieux.Vu de lextrieur, en ce jour de lautomne 2003, inhabituellement froid, laction qui nous intresse ne dure quune fraction de seconde. Pas plus.Vu de lextrieur, cinq personnages sont sur scne: un interprte, un Procureur, Olivier Metzner, sa collaboratrice, et Bertrand Cantat.Ce dernier, effondr, raconte sa fatale et tragique dispute avec Marie Trintignant, ses motions, ses remords infinis, sa conscience de ses actes.

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    Des interrogatoires, Olivier Metzner en a lu, entendu des milliers. Sans jamais trembler. Mais cette fois, a nest pas un interrogatoire comme les autres, le trouble est si fort quil finit par gagner lavocat jusqu tre irrpressible.Dans la peau dOlivier Metzner, les murs ont vol en clat, le fugace se fait infini, et les visages dfilent.Cest un de ces instants o le temps sarrte pour convier une vie entire dans la mme seconde et dans la mme pice.coutons ses penses.coutons, cette tempte sous un crne.Jai su les grer les Crozemarie, les Le Floch, les stupeux, tous ceux habitus tenir la drage haute. Mais, lui juste l, ce grand gaillard de chanteur avec toute son humanit, ce fardeau quil porte jamais, il me secoue, il me tue.Je ne vais pas pleurer, quand mme.a fait 25 ans que je suis avocat. Je me suis toujours pargn a.Limpudeur, cest pour les confrres qui parlent deux-mmes pour mieux parler des autres.Mais Metzner ne peut plus chapper cette confession qui continue. Irradi par la sincrit, lavocat est dfinitivement atteint. Les images, les rencontres dune vie entire, de sa propre vie, reviennent son esprit. Il divague, veut se ressaisir.Extraordinaire, il est cens tre un roc, un bouclier humain, et il vacille. Il faut tenir.Un jour, peut-tre, il lchera tout a, le Cabinet, les dossiers. Il achtera une le pour flner, Il reprendra la mer. Mais pas maintenant.Il na pas le droit lerreur, Il na pas le droit la faiblesse, il est attendu, il a une rputation assumer.Pour qui va-t-on le prendre sil se met pleurnicher? Et Cantat qui continue:Je veux demander pardon Marie, du plus profond de mon cur, car cest l que se trouvait Marie.Lorsquune histoire personnelle devient un rcit universel, le moment touche au sublime. Cest lheure de cder pour Metzner, qui se tourne vers sa collaboratrice.Cline, avez-vous un mouchoir?Une larme a perl, elle scoule peine. Metzner pleure.Lhomme clotr dans lavocat vient de resurgir la surface. Metzner contre Metzner.Le foss intrieur entre lhomme et lavocat a toujours t l. Les deux sont discrets. Mais, alors quon serait tent dimaginer lavocat mticuleux dorigine protestante en ascte, il y a aussi un picurien en lui.

    Dans les annes 80, il y a le Metzner diurne, travailleur assidu, mais aussi ce Metzner nocturne, ftard et buveur au Palace. Metzner, le rflchi pour dfendre sans relche, et lirraisonn pour dpenser sans compter.Mais depuis quelques annes, lavocat prend le dessus. La clientle de PDG sest accompagne dun choix assum: le travail dabord. Dsormais, on verra surtout lavocat. Le cercle des proches a mu, il ne comprend plus que des juristes. Lhomme ne disparat pas pour autant, mais il ne se montre plus que par clipse, quelques intimes.Pourquoi un tel hiatus entre lhomme et lavocat? Sil a jamais t libre, ce choix du travail, est-il devenu un engrenage?Les rponses ces questions ne seront jamais connues. Elles ne lont probablement jamais t.Mais, retenons de ces instants lituaniens, que la rserve, la discrtion de lhomme ne traduisent pas labsence dmotions.Que lassurance de lavocat ne veut pas dire son insensibilit.Retenons quil y avait indubitablement quelque chose de contenu chez lui. Non pas un secret consciemment dissimul tout prix, mais plutt une indicible tension enfouie, ressort de son existence, et pourtant inconnue de lui-mme.Une corde intrieure, invisible et latente, avec laquelle Cantat est entre en rsonance aujourdhui.Sous la robe, nous avons eu la chance dapercevoir lhomme quelques instants, mais lavocat a vite repris le dessus.Metzner quitte le Procureur et murmure: Jai pleur pour vingt ans.

    PILOGUE QUE RESTE-T-IL DOLIVIER METZNER? Quant notre pilogue, il se droule ici, maintenant. Et, il sadresse toi.Toi, lambitieux.Lambitieux qui rve de gloire et dimmortalit.Toi qui vois dans la lumire une occasion de briller.Toi qui vois dans les mdias lantichambre de la postrit.Songe un instant Olivier Metzner. Que reste-t-il de cette existence mene sans infidlit notre robe?Pas le moindre crit, si ce nest ceux contingents et ennuyeux du praticien, et quon appelle conclusions.Pas de causes pouses pour lui promettre de figurer dans les livres dhistoire et transformer quelques procs mdiatiques en tmoins dune poque.Pas de devise ternelle, de voix de bronze qui rsonnerait encore au Palais de Justice pour guider les pas des gnrations futures.

    Pas de saillie imprissable pour devenir un avocat que lon cite en ville. Pas mme une tombe fleurir.Le corps se perd dans leau, le nom dans la mmoire.Toi, lambitieux, qui cherches la distinction et la russite,Songe encore un instant ce que signifie ce suicide lapoge, au sommet dune carrire, et sans perspective dau-del.Lexcitation des plaisirs ne peut pas toujours repousser la lassitude et les exigences incessantes de la rputation.La griserie des succs ne peut indfiniment faire taire cette crypte mlancolique, indicible et pourtant criante.Quand vient la crainte quun jour la rvrence des confrres cesse dtre celle que lon doit aux plus talentueux pour devenir celle que lon rend aux ans en hommage leur gloire passe,Larmure devient prison. La solitude se fait poison. Que vaut la fortune sans la libert?Comment dfendre jusquau dernier jour sans redouter le dclin?Les grands avocats meurent trop tt ou trop tard. Promesses inaccomplies ou combat de trop: cruel dilemme.Olivier Metzner a planifi sa sortie, chancelant seul face lui-mme, mais certain dviter ce procs de trop, certain de ne pas cder cette mort de thtre, cette mort qui ne lui allait pas, celle o lavocat rend son dernier souffle en plaidant.Alors, que restera-t-il de cette vie une fois que les larmes auront sch?Il subsistera cette voie quil a emprunte, celle dune dfense pnale moderne, o lon se mfie du doux bruit de la langue, o sans confondre le verbe avec la vrit, on prfre la procdure et les faits.Sans quil le revendique, sans quil le thorise, sans mme quil le sache, Olivier Metzner a forg peu peu une mthode.Sr de ses forces, mais surtout conscient de ses faiblesses, lavocat, praticien sans chapelle, a su arpenter les chemins nouveaux que lpoque offrait tous.La chronique judiciaire est passe des instantans daudience aux instructions feuilletonnantes. Une page nouvelle devait scrire. Metzner sen est charg.Contre lexpert avec la technique, contre lenqute avec la procdure, contre les certitudes avec la subtilit, il se bat, infatigable.Metzner, prcurseur. Metzner, stratge.Metzner, solitaire.Dune innovation baroque, il a fait un classique. Son legs est dj notre patrimoine.Son hritage a la force des vidences.

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    Les procs de Mandelapar Emmanuel Pire

    Nous sommes le 12 juin 1964.Comme chaque jour depuis plusieurs mois, la foule a envahi les rues. Mes frres sont l, tout autour, je les entends. Ils chantent, ils crient, ils pleurent.Bientt, ils entreront dans cette salle, au-dessus de moi, leur pitinement rsonnera et la clameur grossira quand je monterai les marches.Je monterai le premier, comme chaque jour.Je me tournerai vers eux, qui mattendent le visage tendu. Je leur sourirai, je lverai le pouce, le poing.Ils rpondront mon geste en entonnant dune seule voix lun de ces chants de libert qui vous donnent la chair de poule.Aujourdhui comme chaque jour, mais aujourdhui, pour la dernire fois.Tout lheure, le Juge deWet entrera, habill de sa robe rouge, dans un silence de mort.Tout lheure, le Juge de Wet, qui hier ma dclar coupable de toutes les charges, annoncera la peine quil a retenue.Le Procureur PercyYutar, de sa voix de fausset que je ne supporte plus, a requis la peine de mort.Je me suis prpar cette ventualit.Jai rdig une dclaration que jentends lire depuis le box des accuss. Ce sera mon testament, les dernires paroles de Mandela au monde.Je ne retire rien de ce que jai dit par le pass.Le sang de nombreux patriotes a t vers parce quils demandaient tre traits conformment aux standards civiliss.Notre arme ne cesse de crotre.Si je dois mourir, je tiens ce que tous sachent que je vais la rencontre de mon destin, comme un homme.Jai 46 ans. Cest mon cinquime procs.Pour la deuxime fois, jencoure la peine capitale.Jusqu prsent, je nai pas eu me plaindre de la Justice de mon pays parole davocat.Cest une ralit, Nelson Mandela, jug 5 reprises par les tribunaux du rgime de lapartheid, a bnfi ci presque systmatiquement de procdures conformes aux standards internationaux.Ce quon appelle, en jargon europen, des procs quitables.Le seul vritable dysfonctionnement judiciaire que NelsonMandela ait subi a eu lieu a loccasion de son tout premire procs.Il tait entr, avec deux amis indiens, dans un tramway rserv aux indiens.Linfraction tait incontestable mais le Juge qui en fut saisit craignit les relations familiales de lenseignant qui avait t choisi pour assurer la dfense du jeune Mandela, tudiant en droit Johannesburg.Le prvenu fut relax sans motif lgal.Mandela comprit ce jour l que la Justice ntait pas tout fait aveugle, et quil ntait pas tout fait malchanceux.Compte-tenu de mes activits politiques, jai videmment t poursuivi plusieurs reprises et je nai pas systmatiquement bnfi ci dune relaxe.Un militant qui se respecte doit tout de mme tre perscut par les autorits quil combat ; personne ne refuse une condamnation en bonne et due forme.Javais fait lobjet dune procdure fin 1952, accus davoir viol la loi sur linterdiction du communisme, avec 21 coprvenus.

    Je nai jamais cach mes sympathies pour les communistes, qui sont les seuls blancs qui nous considrent comme des tres humains part entire, et les seuls tats trangers qui soutiennent sans ambigut notre lutte mais je suis trop chrtien pour devenir marxiste.Je ne crois pas que lANC risque dtre rcupre par les communistes qui laident. Un peu de rouge dans beaucoup de noir, a fait toujours du noir, nest-ce pas?Ce procs tait une occasion idale pour transformer laudience en tribune militante et exposer le dtail de nos revendications et de nos actions, qui tombaient sans aucun doute sous le coup de linterdiction de ce qui sappelait alors le communisme dfi ni par la loiNotre ennemi ne fut pas le Procureur, ni le Juge qui ne me condamna fi nalement qu une peine lgre assortie dun sursis, mais le Prsident Gnral de lANC, le Docteur Moroka.Il tait dun des 21prvenus mais avait une peur bleue de perdre sa clientle.Plutt que dorganiser une dfense commune avec les autres, il dcida de prendre son propre avocat et de rpondre au Tribunal avec complaisance:Docteur Moroka,Certains des prvenus prsents dans cette salle sont-ils communistes?lOui. Lui, lui, et encore lui...Docteur Moroka,Pensez-vous quil devrait y avoir une galit entre Noirs et Blancs en Afrique du Sud?lCela nexistera jamais, votre honneur.Les manifestants qui staient rassembls par milliers demeuraient stupfaits. Limage de lANC sen trouva dvaste.Pour ma part, adoub par cette condamnation offi cielle, je devins Vice-Prsident de lANC et mon Cabinet ne dsemplit pas.Peut-tre parce que je devenais avocat aguerri, mon troisime procs, 4 ans plus tard, est un rgal pour les juristes frus de procdure.Javais t arrt et inculp, avec prs de 150 responsables de lANC et dautres organisations de lutte contre lapartheid, aprs ladoption par un congrs extraordinaire de la charte de la libert, un texte qui revendiquait lgalit des droits civiques et une plus grande Justice sociale, par la nationalisation de certains secteurs et une nouvelle rpartition des terres.Nous tions en 1956, javais 38 ans.Le Parquet nous poursuivit sous la qualifi cation de Haute Trahison, qui nous faisait encourir la peine capitale.

    Un premier Tribunal devrait examiner les charges avant de dcider de nous renvoyer devant une Haute Cour, spcialement constitue, pour nous juger.Nous avons engag une bataille juridique minutieuse, discutant pied pied chaque lment dincrimination et chaque lment de preuve.La phase prliminaire dexamen des charges fut longue et laborieuse.Le Parquet, trop charger son acte daccusation, perdit beaucoup en efficacit. Il prsenta 12000documents senss nous incriminer, dont la dclaration universelle des droitsdelHomme et des retranscriptions de discours tenus en anglais lors de nos meetings, ralises par des policiers qui ne comprenaient pas cette langue..Les 150 accuss venaient chaque jour, librement, au Tribunal.Nous ne venions pas les mains vides, videmment. Est-ce que vous vous imagiez, venir chaque jour au Tribunal, pendant un an, pour couter vos avocats croiser le fer avec le Procureur?Dans le box, nous sortions des journaux, certains jouaient aux mots-croiss, au scrabble, aux checs.Il ny eut pas de dtention provisoire inutile, ni mme dinterdiction de poursuivre nos activits politiques.Cette phase prliminaire dura pendant toute lanne 1957.Une centaine daccuss fut fi nalement renvoye devant la Haute Cour, pour y tre juge.Trois Juges furent dsigns pour statuer sur notre sort lun deux nous tait, de notorit publique, trs hostile.Nous le rcusmes, ainsi que lun de ses collgues, au nom de limpartialit; il accepta de se dporter.Le Juge qui fut nomm pour le remplacer tait un homme modr. Limpartialit de la juridiction tait incontestable.Cette premire bataille gagne, nos avocats attaqurent lacte daccusation lui-mme, et obtinrent de la Cour quelle considre que la violence organise tait ncessairement un lment constitutif de la Haute Trahison.Cette interprtation de la loi pnale nous tait trs favorable puisque la charge de la preuve qui repose sur laccusation sen trouvait considrablement alourdie.Je ntais pas pour autant tir daff aire, parce que si lANC tait toujours reste offi ciellement non-violente, cela faisait des annes que je militais, en son sein, pour une approche plus... dynamique.Je me suis toujours oppos aux tenants du Mahatma Gandhi qui soutenaient la non-violence comme un principe absolu.Pour moi, la non-violence nest quune tactique qui nous tait impose par le rapport de force trs dfavorable dans lequel nous tions, tactique qui devrait tt ou tard tre abandonne.Il y a eu par exemple ce dimanche soir, pendant lhiver 1953: je pris la parole Place de la Libert Johannesburg;Le temps de la rsistance passive est termin.La non-violence est une stratgie vaine, qui ne renversera jamais une minorit blanche prte maintenir son pouvoir nimporte quel prix.La violence est la seule arme qui dtruira lapartheid et nous devons tre prts, dans un avenir proche, lemployer.Voici nos ennemis, voici nos armes, attaquons les!Dsignant les policiers blancs qui assuraient le maintien de lordre, je rptais:Regardez, les voici, nos ennemis! Le bain de sang na pas eu lieu mais pas grce moi.

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  • Les Annonces de la Seine - Jeudi 18 dcembre 2014 - numro 50 11

    Audience solennelle

    Au cours de discussions internes lANC, je ne manquais pas une occasion de prparer les esprits abandonner la non-violence:Les opprims et les oppresseurs sont en confl it violent. Le jour du rglement entre les forces de la libert et celles de la raction nest plus trs loign. Lorsque ce jour arrivera, la vrit et la Justice prvaudront.Les opprims nont jamais ressenti autant damertume. La gravit de la situation dans laquelle se trouve le peuple le contraint mme rsister jusqu la mort la politique ignoble des gangsters qui dirigent ce pays.La nouvelle orientation du dbat judiciaire, autour de la question des violences, ne mtait donc pas ncessairement favorable.Une nouvelle inculpation fut rdige, qui ne visait plus que 30dentre nous. Le vritable procs pouvait commencer.2 ans et demi staient couls depuis notre premire comparution. Nous ntions pas au bout de nos peines.Laccusation prsenta 2000 documents, appela 210tmoins. Le Procureur mourut.Puis, le procs fut interrompu en avril 1960. Ltat durgence venait dtre dcrt et en quelques jours, 2000 personnes furent arrtes, dont jtais videmment, ainsi que dautres accuss et tmoins.Les Juges proposrent de poursuivre le procs en notre absence, mais nos avocats sy opposrent et leur choix fut respect.Puis, lorsque nous revnmes en salle daudience, sous escorte cette fois, nous navions plus aucune possibilit de prparer effi cacement notre dfense avec nos conseils, ne pouvant les rencontrer sur nos lieux de dtention.Nos avocats se retirrent en signe de protestation contre latteinte aux droits de la dfense, et nous mmes en place une stratgie denlisement qui nous permettrait dattendre la fi n de ltat durgence.Chacun de nous 30, assurant sa propre dfense, appellerait successivement en qualit de tmoin chacun de ses coprvenus.Aprs que nous ayons interrog ce tmoin,

    les 28 autres coprvenus procderaient un contre-interrogatoire.Sans mme compter les interventions du Procureur, le nombre dinterrogatoires et de contre- interrogatoire dpassait 25 000. Au rythme raisonnable de 4 par jour, nous pouvions tenir plus 25 ans.Fort heureusement, ltat durgence ne dura que 5mois et le procs pu reprendre son cours.Il fallut encore 8mois la dfense pour dmontrer combien lANC tait une organisation pacifi que.Les juges, excds, interrompirent les plaidoiries fi nales avant leur terme.Aprs 4 ans de procdure, ctait la premire entorse aux droits de la dfense quils se permettaient.En mars 1961, la Haute Cour rendit son dlibr dans une atmosphre survolte, les journalistes du monde entiers se pressant entre les manifestants et les militants.Oui, lANC a travaill pour remplacer le Gouvernement par une forme dtat radicalement et fondamentalement diff rente.Oui, lANC a utilis des moyens illgaux pour manifester.Oui, certains responsables de lANC ont fait des discours dans lesquels ils dfendaient la violence.Mais, daprs toutes les preuves prsentes devant elle, il est impossible cette Cour darriver la conclusion que lANC a acquis ou adopt une politique destine renverser ltat par la violence.En consquence, les accuss sont dclars non coupables, et acquitts.Nelson Mandela, pour la deuxime fois, bnfi ciait dune relaxe.Alors que la Haute Cour venait de reconnatre offi ciellement que lANC tait une organisation non-violente, Mandela ne faisais pas mystre de ses intentions, dclarant des journalistes;Si la raction du Gouvernement consiste craser par la force notre lutte non-violente, nous aurons reconsidrer notre tactique. A mon avis, nous achevons un chapitre sur cette question de la politique de non-violence.Et, en eff et, il obtint rapidement de la direction de lANC lautorisation de crer une organisation

    militaire clandestine, MK, le fer de lance de la nation. Le programme daction de MK, soutenu par le savoir-faire de communistes forms Cuba et en Chine, sorganiserait en quatre tapes: le sabotage, la gurilla, le terrorisme et la rvolution ouverte.Dans un premier temps, le mouvement sest concentr sur le sabotage, contre des infrastructures et des btiments Gouvernementaux, tout en prparant la deuxime tape, la gurilla.Albert Luthuli, Prsident de lANC, venait de recevoir le Prix Nobel de la paix lorsque Mandela rvla lexistence de sa petite arme, par lexplosion simultane de plusieurs bombes Johannesburg, Port Elizabeth et Durban.Des milliers de tracts furent distribus et les attentats se succdrent dans tout le pays, semaines aprs semaines.Mandela entreprit une tourne internationale pour convaincre les Chefs dtat africains de soutenir la lutte arme en Afrique du Sud, en finanant le mouvement, en fournissant des armes, et en accueillant des camps dentranement sur leur sol.En Ethiopie, en Tanzanie, en Tunisie, au Sierra Leone, au Libria, en Guine, laccueil fut trs chaleureux. Il revint en Afrique du Sud, aprs avoir personnellement suivi une formation paramilitaire: apprentissage des armes, marche force, techniques de camoufl age, etc...A son retour, vous ne lauriez pas reconnu. Il faut vous fi gurer Mandela dguis en Fidel Castro de lpoque. NelsonMandela barbu, en treillis, un pistolet charg en poche et une cartouchire cache sous la ceinture.Dans ses bagages, avec des valises de billets, des livraisons darmes et des promesses daccueil des volontaires dans des camps dentranement sur tout le continent.Les militants commencrent quitter clandestinement le pays, par groupe de 10 ou 20, pour rejoindre Dar-es-Salam et, de l, se rendre en Ethiopie.Les autorits devaient ragir. NelsonMandela ntait pas rentr depuis 5jours quand la police, bloquant son vhicule sur une route escarpe, entre une falaise et un ravin lempchant de fuir, procda son arrestation.Les charges me furent notifi es, comme toujours, dans les 24 heures de linterpellation, par un Magistrat. Il sagissait cette fois dincitation la grve et du dpart du pays sans document de voyage.Ces qualifications suffisaient me faire encourir, pour ce quatrime procs, 10 ans demprisonnement.Le public ne connaissait pas les plans secrets de MK, les soutiens dont nous bnficiions, ni le matriel de fabrication darmes que nous achetions.Aux yeux du monde, il sagirait dun procs politique et je deviendrais prisonnier dopinion.Un Comit pour ma libration se cra. Le slogan librez Mandela couvrit les murs de Johannesburg.Je fi s le choix, spectaculaire, de lethnicit.Jabandonnais mon lgant costume-cravate occidental pour mhabiller dun habit traditionnel, en peau de lopard.Alors que les Juges qui mavaient relax deux reprises taient blancs, alors que les policiers blancs qui mavaient arrt navaient jamais commis le moindre abus contre ma personne, je

    Remise de la mdaille du Barreau de Paris Unit Kocasakal par Romain Giraud 8me Secrtaire de la Confrence du Stage

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    Audience solennelle

    plaidais cette fois que je ne pouvais bnfi cier dun procs honnte en tant quaccus noir devant un appareil judiciaire blanc.Le Procureur appela plus de 100tmoins pour tablir que javais appel la grve et que javais quitt le pays sans passeport, deux faits de notorit publique, que je nav