cette semaine n°88

Upload: nofullname9870

Post on 05-Apr-2018

236 views

Category:

Documents


0 download

TRANSCRIPT

  • 7/31/2019 Cette Semaine N88

    1/44

    CETTE SEMAINETreizime anne Apriodique mars 2006 n88 Prix libre ou abonnement

    Quelque chose frappe et frappe encore,impatiemment, notre porte. Il faudra bien ouvrirun jour...

    Beaucoup se terrent. Pas seulement les lchesnon, les gens trop ns, les gens trop calmes aussi.Ils ne veulent plus sen mler. Mais on les y mle ;ils sont sans cesse ramens dans le courant ; lesillres ne servent rien. Mme la langue chouelamentablement, cette langue reprise du vieuxmonde, avec ses vieilles eurs, ses balourdes images,ses ornements dun autre ge. Rien ne correspondplus, les mots anciens retombent parce quils nesaccrochent rien dans le nouveau. Ce sont des

    hauteurs que natteignent aucune plaisanterie,aucun trait desprit, aucun prcepte de sagesse.

    Lge bourgeois sen va. Ce qui vient, personnene le sait. Beaucoup le pressentent obscurment

    et on se moque deux. Les masses le pressententobscurment, sont incapables de sexprimeret sont (encore) jugules. Ce que lon voit seconfronter mollement, des deux cts montrer les

    dents, puis se jeter aveuglment sur ladversaire la n des ns, cest lAncien et le Nouveau, cestlirrconciliable opposition de ce qui tait et de cequi sera.

    Un raz de mare dferle sur la terre. Il nest pasuniquement de nature conomique, il ne sagit passeulement de bouffer, de boire et de gagner dessous. Il ne sagit pas seulement de savoir commenton va distribuer les biens conomiques de la terre,

    qui doit travailler et qui doit exploiter. Non, autrechose est en jeu : tout.

    Kurt Tucholsky,dans la Weltbhne du 11 mars 1920

    CRPUSCULE

  • 7/31/2019 Cette Semaine N88

    2/44

    2Cette Semaine / mars 2006

    Rvoltes doctobre/ novembre Chronologie 3 Pour quun mlange dtonne... 3 Dans une rvolte,on est avec les rvolts ou avec le pouvoir ! 6 Le voile se dchire 7 Paris brle... 8 Alors, quest-ce quon attend ? 9 Lessence de la rvolte 10 Feu volont ! 10

    Biomtrie Les mauvais lves de la biomtrie 11 Sans hsitation aucune 12

    Occupation dun chantier de prison pour mineurs 13

    Nuclaire Du bton pour les guignols 13

    Procs contre Vive les mutins ! 14

    Squats Ne nous laissons pas chasser 16 La gauche senamme : la mairie liquidesquat et solidarit coups de trique 18 Lille, Marseille, Montreuil 19

    Italie A ceux qui ne sont pas rests au chaudpendant la tempte 20 Tirer sur la Croix Rouge ? 24 A propos du vol larrachde la amme olympique 25 Procs en cours 26 Bas les pattes du Val Susa 28 Brves du dsordre 24

    Espagne Une journe Madridet quelques considrations intempestives 30 Guantanamo est au coin de la rue et dans les ttes 32

    Sommaire

    Nouvelles de Barcelone 33 Brves du dsordre 30

    Argentine-Uruguay/Chili Plate-forme du Rio de la Plata 34 Brves du dsordre 35

    Grce Libert pour Kalaitzidis, Karasariniset Aspiotis ! 39 La loi anti-terroriste n187dans toutes ses consquences 38 Brves du dsordre 36

    Allemagne Sur le procs des 4 de Aachen 40

    Tout est eux, rien nest nous ! 43 Tiens, tes radi ! 43

    Lanarchie et ses hros 44

    CETTE SEMAINE

    BP 275 54005 Nancy cedex francehttp://cettesemaine.free.fr/[email protected]

    Abonnement : 12.50 euros / an(15.50 euros hors de france)

    bien entendu, les personnes quisouhaitent recevoir le journal nont

    pas forcment se poser la question delabonnement, une demande suft

  • 7/31/2019 Cette Semaine N88

    3/44

    3 Cette Semaine / mars 2006

    jeudi 27 octobre 2005

    Nuit dmeutes Clichy-sous-bois, aprs la mort de deuxgamins courss par la police,un centre commercial estattaqu, une cole, la poste et lamairie de Clichy-sous-bois sontcaillasses.

    vendredi 28 octobre 2005

    Tir balles relles contre un carde CRS Clichy-sous-bois.

    dimanche 30 octobre 2005

    Le garage de la police municipalede Montfermeil est incendi.

    lundi 31 octobre 2005

    Vers 21 heures, un cocktailMolotov est lanc en direction

    du PC des forces de scurit, Clichy-sous-bois. Affrontements Aulnay-sous-Bois, Bondy,Tremblay-en-France, Neuilly-sur-Marne, Chelles, Sevran-Beaudottes, Argenteuil, Sarcel-les.

    mercredi 2 novembre 2005

    Jet de cocktail molotov sur unegrande surface dameublement

    Bondy, qui part en ammes.Des CRS essuient des tirs balles relles la Courneuve.A Aulnay-sous-bois, quartierdu Gallion, un poste de police

    de jour est saccag. Toujoursdans ce quartier, la voituredune quipe de France 2est retourne et brle. Unconcessionnaire Renaultest incendi, ainsi que deuxclasses dune cole primaire.Au Blanc-Mesnil un gymnase estincendi, une maison publiqueet un lyce sont dgrads. Deuxmolotovs sont lancs contrele commissariat dAntony. Lecentre commercial Bobigny 2est vandalis, une voiture estincendie devant la prfecture.Une banque est incendie Sevran. A Saint-Denis, les

    forces de lordre essuient uncoup de feu. A la Courneuve,un local dEurocopter est lacible de cocktails molotov. APau, un bureau de poste estendommag.

    jeudi 3 novembre 2005

    Un entrept de moquette, de15 000 m2 est incendi Aulnay-sous-bois dans la zone deGaronord. Le palais de justicede Bobigny est la cible denginsincendiaires. Au Bourget, unentrept est incendi. Des CRSsont la cible de tirs au pistolet grenaille Neuilly-sur-marne.

    A Stains, un salle de classedcole primaire est incendi, lavoiture du maire PCF subit unetentative dincendie pendantquil discute avec un groupe

    Pour quun mlange dtonne...

    Cela fait maintenant plus de 15 jours que des meutessecouent de nombreuses villes en France. Il ne sagit paspour nous de prendre la parole la place de quiconque ni mme

    de penser quil serait bon que quelques uns des acteurs de cesattaques la prennent ou quapparaissent des reprsentants. Si nousvoulons nous pencher sur les attaques qui ont t menes, cestjuste pour noncer comment ces faits nous parlent.

    Si lon regarde les cibles incendies, que ce soit des btiments delEtat, des coles, des commissariats, ou encore des entreprisessemi-tatiques (comme la Poste ou EDF), des bus, des tramway,des mtros et autres transports publics ou des entreprises prives,cest vritablement une guerre ouverte qui est mene. Au del dechaque cible particulire il sagit dattaques massives. Et mmesi lventail est large et sans cesse renouvel, il sagit dattaquescibles. En effet, cest de dvastation quil sagit, avec la puissance

    qui est luvre et qui sen dgage, avec ce que cela comporte dejoyeusement spectaculaire. Un commissariat qui brle, cest le lieude travail des ics qui est dtruit, avec tout ce que cela contient demenaces mises excution, de dsorganisation et de dmoralisationiniges aux policiers (ils doivent en plus essuyer laffront dene pas avoir s protger leur base). Cette trane de poudre,aprs avoir amb de manire exponentielle, ne pouvait sansdoute pas crotre ternellement, mais la contagion a frappdautres territoires, comme si le relais circulait,mme si certains tentent de coller unelecture concurrentielle sur cettepropagation. Mme si son avenirest inconnu. Les transports, lesbus, mtros et tramways sont leslieux mouvants dun contrlequotidien (par la monte lavant,les contrleurs, les camras, et lesinjonctions omniprsentes auxpassagers). Ils participent du

    quadrillage du territoire. En rapport avec le travail, ils sont undversoir proltaires, ils sont un moment du chemin qui mneau chagrin. Quant aux coles, il y aurait trop dire pour que nous

    en parlions srieusement, mais lomniprsence et la multiplicitdes formes de contrle mise en place dans ces tablissements,les rapports sociaux imposs par ces lieux sufsent appeler laamme. Ces incendies, ces affrontements, pleins de vitalit et depuissance nous rjouissent. Nous ne voulons srement pas, commeon a pu le voir ces derniers jours (alors que tout le monde enterrebien vite ces meutes et destructions), expliquer le pourquoi etle comment, essayer de recycler des merdes conceptuelles tellesque les jeunes veulent plus de justice alors que des tribunauxreoivent des cocktails molotovs. Chacun essaye de refourguer sesvieux morts et ses saloperies thoriques que ce soit pour dnoncerla justice coloniale ou pour en appeler la justice sociale ou la justice en banlieue . Et chacun de ressortir des fumisteries

    sur le racisme et le dit no-colonialisme . Nous devons supportertoute la vieille rhtorique post-maosante. Nous devons couterles tmoignages de syndicalistes rvolutionnaires qui parlent duchemin de croix quest pour eux lengagement politique et qui

    refusent (quel courage !) ce quils considrent commedes conneries star acadmique de voituresbrles. Nous devons patienter devant ces

    tentatives, pas forcment volontaires,denserrer ce qui se passe dans des

    concepts inoprants, faibles etsouvent dgueulasses. A ceuxqui rclament plus de justicenous voudrions rappeler quela justice est la machine produire de la punition, ducontrle des comportements.Cest lantichambre de la prison,le commandement des matonset des ics, des murs froids et

    Rvoltes de novembre

    CHRONOLOGIEPARCELLAIRE

    DELARVOLTE

  • 7/31/2019 Cette Semaine N88

    4/44

    4Cette Semaine / mars 2006

    de jeunes, au quartier de CLosSt Lazare. A Saint-Ouen unentrept est incendi et unmagasin de sport pill. La mairiede Noisy-le-sec est la cible de

    molotovs. Lentrept de bus deTrappes est incendi, dtruisant27 bus. A Mantes-la-jolie cestla Poste et la Scurit Socialequi sont pris pour cible. AVilliers-le-bel un supermarchest pill, alors quun poste dela police municipale est attaqu La-Queue-en-brie et un centreculturel Villetaneuse.

    vendredi 4 novembre 2005

    Plusieurs vhicules sont

    incendis sur le parking ducentre commercial Bobigny 2,vhicules appartenant desfonctionnaires du tribunaltout proche. Vol du matrielinformatique dans un tribunal

    dinstance en Seine-St-Denis, cetribunal est ensuite incendi.Une cole maternelle etprimaire est partiellementdtruite Brtigny-sur-Orge,

    un espace culturel attenant aucollge Jean-Monet Torcy,deux classes dune maternelle Achres. Dbut dincendieau groupe scolaire Bonaparte Evry. Un molotov est lanccontre le commissariat de placedes Ftes Paris-19e.

    samedi 5 novembre 2005

    Six vhicules EDF incendisdans un dpt Roubaix.Une salle pour les jeunes est

    incendie dans lagglomrationde Bordeaux, Bgles cestune voiture municipale et uneautre salle pour les jeunesqui ambe. A Aubervilliers,un entrept de textile prend

    feu, une crche est incendie la Courneuve, Montreuilcest un Leader Price et unconcessionnaire automobile.Un bureau de Poste est incendi

    VIlletaneuse. La vitrine et laporte dentre de la permanenceUMP Fontenay-sous-boissont brises. Un McDonald estdfonc par une voiture-blier Corbeil-Essonnes. A Nantes,dbut dincendie dans unemaison de quartier. Incendiedun Monoprix Grigny et duncentre socio-culturel Rosny-sous-bois. A Evreux, un centrecommercial, un bureau de posteet deux coles sont vandalissou incendis. Deux coles sont

    incendies Grigny, ainsi quuneusine de recyclage de papier.A Orlans et Montargis desmolotovs sont envoys contredes magasins. A Guenange,

    un dpt de bus est incendi,ainsi qu Monceau-les-mines.A Pau tentative dincendie deslocaux de lANPE, Laval unlocal daide sociale du conseil

    gnral est incendi. Toulouse,quartier du Mirail, une cole, uncollge et quelques commercessont endommags, tout commeune concession automobileRenault. A Rouen une voitureblier est lance contre uncommissariat. Jet de molotovscontre la permanence UMP dePierre Lellouche dans le 9mearrondissement, Paris.

    dimanche 6 novembre 2005

    Une mairie annexe dOrlanset une voiture de police sont lacible de jet de pierre, en pleinjour. Destruction du gymnaseArmand Desmet Clichy-sous-

    des barreaux. Cest le lieu de traitement de ce quont ramen lespetites mains policires, le lieu des aveux et du dpt, le cirquedo lon repart enchan et encag. Cest comparatre entrav,devoir sexpliquer et se justier sur sa vie. Cest limpuissance desproches, le lieu des petites misres quotidiennes et des ngociationssordides, le lieu des parties civiles et des rquisitoires.

    Concernant la fuite des jeunes Clichy, tous ceux qui refusentle contrle, un dsir de libert chevill au corps, ne peuvent quecomprendre ce geste, comme le rexe vital de se soustraire lapnible et contraignante suspension de temps quest un contrlede police. Cest peut-tre parce quils nont pas t tus pardes ics (mais par le fait mme de vouloir leur chapper) queles pacicateurs qui jouent les durs, les habituels vendeurs depunition et de ressentiment victimaire comme les grand frres duMIB, nont pas essay de faire leur beurre sur cette affaire. Peuttre que justement les deux morts ne correspondaient pas assezau statut de victimes, puisque dans ce qui a provoqu leur dcsintervient un geste de vitalit. Il apparat dlirant que ces faitset ceux qui sen sont suivi, lembrasement de nombreuses villes,ne soient pas aussi compris comme le refus de la police dans son

    existence mme, dans sa matrialit, et dans lune de ses pratiquesles plus minimales : le contrle didentit.

    Prenant des formes multiples, deux types de discours sont trsprsents : vouloir ramener lordre et condamner ce qui se passe.Chacun y va de sa petite recette miracle pour, vainement,touffer ce climat insurrectionnel, soit par une oppositionfrontale, soit dans un jeu de nuances. Mettre plus deCRS dans les cits ou rtablir la police de proximit,supprimer les allocations familiales, expulserceux qui ne sont pas franais, rtablirun service civil ou encorerenforcer la prsence des

    mdiateurs, donner des fondsaux associations de quartier,multiplier le nombre detravailleurs sociaux... Chacundun peu consquent sait quele maintien de lordre ne se fait

    pas dans une opposition entre prvention et rpression, mais parlusage de ces deux types de contrle pour former une tenaille, parla mise en uvre complmentaire de ces deux forces dimpositionde lordre et de la paix. Il ne suft pas doccuper les gens avectoutes sortes dactivits (ou avec un travail ds lge de 14 ans), ilne suft pas que les ics connaissent les jeunes grce la prsenceamicale de leurs patrouilles ou des activits communes (tournoisde foot, dcouvertes VTT, initiation citoyenne la scuritroutire...), pour que tout le monde se tienne tranquille, pour quechacun intriorise la contrainte et se fasse ic de soi mme et deses colres, par la peur et la raison. Avec un enttement notable,tout le monde sest oppos ces vnements, le gouvernementet son parti videmment, le PS bien sr, les imams locaux puislUOIF travers une fatwa... Les appels au calme sont venus detoutes parts : associations proches des jeunes, partis de gauche,lus locaux, ducateurs... Rien ny fait, le nombre daffrontementset dincendies na cess de crotre. En revanche, dans les mdias(vecteur principal de colportation des faits dont on parle), il a falluattendre trs longtemps, et encore de manire trs poussive etfaible, pour que se dise une hostilit de la part des gens, victimes,tmoins, badauds et autres interviews. Pour exemple mme la

    femme de lhomme qui est mort en dfendant ses poubelles na puque prsenter de lui un portrait peu amne, o, sur fond de photoavec son berger allemand, elle dit la camra : Il voulait quetout soit propre, je lui disait tu es fou, arrte tu va te faire tuer ...

    Dans ce ots de discours inutiles, lextrme gaucheet certains ultra gauchistes amnent leur aque

    de saloperie ce ruisseau dtouffement.Chacun y va de son petit cours de

    morale, de sa petite dnonciation,de son petit conseil avis, quandce nest pas de son prche surce qui est politique et ce qui ne

    lest pas, de ce que tout a veuxdire en gauchistement correct,de ce quil faut excuser, justierfaiblement... Et chacun de fairele tri clair dans le rel pournous livrer son point de vue

    Rvoltes de novembre

  • 7/31/2019 Cette Semaine N88

    5/44

    5 Cette Semaine / mars 2006

    sur ce qui est bon et ce qui nest lest pas, ce quil est correct debrler et ce qui respecter. Bref, dun point de vue compltementextrieur, chacun condamne sa manire le rel ou le nie (on a pulire que cette explosion ntait pas violente, ou alors dune violenceinsignifante, minuscule, ridicule par rapport aux mchantesviolences du capitalisme). Dans la cacophonie des manifestationsfort tardives se sont ctoys ceux qui comprennent sans excusermais sont contre ltat durgence, ceux qui justient sanscomprendre sauf pour les voitures brles, ceux qui dnoncent enexcusant mais sont contre Sarkozy. La question pourrait tre derchir sur des cibles que lon se donnerait, mais dcidment pasdimproviser (comme au moment des meutes de Gnes en 2001)son petit catchisme pour dire ce quil fallait dtruire et ce quilfallait conserver, et dmettre jugement sur jugement sur ceux quisattaquent ce qui nous entoure. On aura entendu jusqu plussoif les rengaines du type mais pourquoi ne brlent-ils pas pluttle 16 me arrondissement ou Neuilly (mme dans la bouchedEric Raoult), variantes sur le thme les barricades oui mais niici ni maintenant, ailleurs, avant ou aprs . Il faut apparemmentrappeler quil ny a pas de copyright sur le cocktail molotov et quechacun pourrait mettre Neuilly feu et sang si cela lui chante. Ils

    brlent les voitures de leurs voisins ? Mais, dans les cits commeailleurs, ce nest pas Disney Land, tout le monde nest pas copain,et que ce soit avec le concierge, le voisin-citoyen ou le vigilelocal il peut exister un peu dinimiti. Il faut comprendre aussique brler une voiture dans ce genre de guerre ouverte, ce nestpas forcment vouloir emmerder son propritaire et sa rentabilitpotentielle. Cest une guerre de territoire qui se joue. Une guerrequi dispute aux ics, lEtat et ses agents, aux rapports sociauximpos le capitalisme, du territoire dans des affrontements.Contrairement une niaiserie passe en boucle, il ny a rien desuicidaire (est-ce pour les circonstances attnuantes ?) dans toutcela. Il ny a rien de suicidaire mettre le feu, tirer ou jeter desboules de ptanque sur les ics. Il ny a rien dautodestructeur

    arracher par la force, la pacication et au contrle, des zones ole droit et la justice cessent enn de sexercer.

    Cest inattendu et il nest jamais trop tard.

    bois. Une journaliste de lachane KBS TV (Core du Sud)est agresse Aubervilliers. UnMacDo est dtruit la voitureblier Corbeilles-Essonne.

    Incendie dun Monoprix Gagny,de la mdiathque Noisy-le-secet dun centre socio-culturel Rosny. Incendie et destructiondun poste de police Evreux,ainsi quune mairie annexe.Tentative dincendie de lANPEdans le quartier de lOusse desbois Pau. Une cole maternelleest incendie Saint-Etienne. APerpignan, une voiture blier estenvoye contre la faade duncommissariat de jour, dans lequartier du Moulin Vent. Un

    incendie ravage le studio deproduction TV dAsnires-surSeine, o se trouvait une partiedes dcors dune srie de TF1.

    lundi 7 novembre 2005

    Gymnase incendi Villepinte.Deux coles incendies Lilleet prs de Valenciennes. Une

    bibliothque carbonise Bthancourt, une boulangerieet un supermarch Nantes.Une concession Renault et unToyota incendis, Brest etMetz. Vhicule blier contreun poste de police Rouen,tentative dincendie dun autre Clermont-Ferrand, jet de cocktailmolotov Beaucaire..

    mardi 8 novembre 2005

    A Arras, deux grandessurfaces sont incendies. Deux

    journalistes russes molests. Unlocal de Nice-Matin endommag Grasse. Tentative de pillagedun supermarch Marseille.

    mercredi 9 novembre 2005

    Une cole maternelle estdtruite Belfort. Incendie duntransformateur EDF Vallauris.

    jeudi 10 novembre 2005

    Une cantine scolaire subit lesort des ammes VilleneuvedAsq. Un poste de police, deuxcoles, un collge et une mairiesont la cible dincendiaires.Des vhicules de police ont tincendis dans lenceinte dupalais de justice, Bordeaux. 11policiers blesss Lyon.

    vendredi 11 novembre 2005

    A Pau, quartier de lOusse-des-bois un restaurant estdvalis puis incendi. Incendiedun transformateur EDF Angoulme, et un distributeur

    automatique de billet totalementdtruit. Coupure dlectricit Gonesse.

    samedi 12 novembre 2005

    Un magasin de hi- est incendidans la zone commerciale deToulouse-Blagnac, Rambouilletce sont des magasins demeubles, et une garderie Savigny-le-Temple. Six molotovssont jets dans la cour duncommissariat Maison-Alfort,incendie dune cole Rennes,un transformateur neutralis Amiens. Des coles incendies Carpentras et Aix-en-provence.Tentative dincendie dunestation-service dans le 19earrondissement de Paris. Dans lecentre ville de Lyon des jeunessaffrontent avec la police placeBelcourt.

    Entrept Aulnay, 4 novembre

    Cette guerre nous rjouit, nous parle. Son existence nous appelle agencer un rapport avec la puissance diffuse qui sest constitueet densie. Parce que nous en avons un besoin imprieux. Parceque nous ne voulons pas tre des rvolutionnaires de papier.

    Parce que tous ces feux nous rchauffent le cur et raniment desperspectives. Parce quil faut de loxygne et de lhtrogne biendoss pour quun mlange dtonne.

    Il nous appartient dsormais de ne pas nous satisfaire de grer- toujours aussi inefcacement - la rpression, ni de rabattre lapuissance qui est luvre et lenthousiasme que sa vitalit aprovoqu chez nous sur des pratiques qui, du moins ces dernierstemps, ont prouv leur strilit, comme des rassemblementsou des manifs, sans parler des marches des banlieues et de lapolitisation ou autre initiatives du mme acabit. Peut tre faut-ilpartir dailleurs et se donner les moyens dinventer des formesdinterventions la hauteur de la situation.

    Fils de la rpublique ? - Alors nique ta mre !

    Rvoltes de novembre

  • 7/31/2019 Cette Semaine N88

    6/44

    6Cette Semaine / mars 2006

    dimanche 13 novembre 2005

    Une voiture enamme est lancedans la cour dune maternelledans le quartier de la Reynerie

    Toulouse. A Carpentras, unematernelle est endommage.Une grande surface est incendie Blagnac. Incendie dune cole Halluin, et dune salle de sport Faches-Thumesnil. Montbliard,incendie dun btimentregroupant des associations.Cinq policiers blesss parlexplosion dune bouteille de gazdans lincendie dune poubelle Grenoble.

    lundi 14 novembre 2005

    Bourges, incendie dun localassociatif. Des bouteillesdacides sont jetes sur la mairiede Pont lvque, un collge estincendi Grenoble et un local

    dducation la sant Chalons-en-champagne. Un vhicule estprojet contre un local de policedsaffect Romans-sur-Isre.Garages incendis Saint-Fonset Vitry-le-Franois. Enginsincendiaires lancs contre latrsorerie principale de Bobigny,

    Dans une rvolte,on est avec les rvolts ou avec le pouvoir !

    DANS UNE SOCIT qui ne propose que lasoumission un prof, un patron, un ic,

    un contrleur, un maton, un juge, lEtat... on atoujours raison de se rvolter.

    On a raison de se rvolter contre les assassinatscommis par la police : Bouna Traore et ZyedBenna (15 et 17 ans) morts dans un transforma-teur le 27-10-05 Clichy-sous-Bois, en fuyantles ics qui ont choisi de ne pas les secourir. Ilssajoutent la longue liste macabre des centai-nes de jeunes tus par les forces de lordre.

    On a raison de se rvolter contre le racisme,institutionnel ou pas, contre les contrles

    didentit, contre le harclement de la policeet de la justice, les raes et les dportations desans-papiers, les expulsions de squatteurs sousprtexte de scurit .

    Nous noublions pas ric Blaise condamn quatre mois dont deux ferme pour avoir tir surdes canettes avec un pistolet billes, retrouvmort au matin du 13-11-05 Fleury-Mrogis.La direction parle de suicide : dans une crisede delirium, il se serait cogn la tte contreles murs de sa cellule . dme crbral diralautopsie. La famille se bat pour connatre lavrit. Il avait 28 ans...

    Nous noublions pas la vengeance policire etjudiciaire contre les meutiers ou prtendustels, les 5 000 gardes vue, les 850 condam-nations des peines de prison ferme dont 120mineurs.

    Nous noublions pas Reda (21 ans) qui a eula main arrache par une grenade Toulouse,le 7 novembre 2005. Sa mre dclare : La

    grenade il la prise pour lloigner, parce quelletait tombe prs dun groupe denfants. Tous sesdoigts sont rests sur place. Pour les secours, nile Samu, ni les pompiers, personne sest dplac,cest des jeunes qui lont emmen. Les CRS rigo-laient. (Radio Canal-Sud 12.11.05)

    Ni Jrmy (20 ans), condamn 4 ans ferme Arras pour participation lincendie qui a d-truit deux magasins dameublement, ni Hussein(23 ans), condamn 1 an ferme Bobigny,accus davoir prt un bidon dessence des

    copains, ni ces centaines dautres condamns des peines de 3 9 mois ferme pour unepoubelle incendie, ni les deux de Toulousecondamns 3 mois ferme pour avoir montrleur cul aux CRS !

    On a raison de se rvolter contre un pouvoiret des politiciens qui, tout en leur interdisantle RMI et en organisant la prcarit avec lecontrat premire embauche (CPE), nouvelleversion du CIP, reprochent aux jeunes de tra-quer, et contre des patrons qui dlocalisentleurs botes sueur tout en se plaignant que lajeunesse naime pas le travail surexploit (qui

    en voudrait ?).

    Parce que la guerre contre les pauvres et lemouvement social samplie, parce que ltatcherche prvenir et diviser tout mouve-ment de rsistance en jetant les individus les

    uns contre les autres, que les gouvernementssuccessifs empilent les nouvelles lois rpres-sives : antiterroristes, de prvention de ladlinquance , contre limmigration. Parcequil va mettre encore plus de keufs partout(cole, trains,...) et quil construit de nouvellesprisons pour les jeunes.

    Parce que nous voulons sortir du pige ratsde ce systme qui rend la vie toujours plusinvivable et dtruit une une toutes les ga-ranties quavait gagnes le mouvement ouvrierpar ses luttes...

    Nous manifestons notre solidarit aux jeunes

    poursuivis suite aux meutes, et dont les procscontinuent.

    Prochain rendez-vous : 13 fvrier 2006 13hau tribunal de Bobigny (M Bobigny-Picasso)pour le procs de trois frres accuss de rbel-lion agents.

    Nous nous runissons chaque semaine, sansorganisations ni partis, pour changer desinformations, prparer des actions, et briserlisolement qui nous dmobilise.

    Runions ouvertes chaque jeudi 19 h, laBourse du travail de Montreuil, 24 rue de Paris,mtro Croix de Chavaux, ligne 9.

    [email protected]

    un transformateur EDF Clichy-sous-bois, une crche Cambrai, lofce de tourismede Fontenay-sous-bois et undpt dautobus Saint-Etienne(18 en sont endommags).

    mardi 15 novembre 2005

    A Pointe--Pitre des coups defeu sont tirs sur la police oun barrage avait t rig, dans

    le quartier du Carnage.Avertissement:Nous avons dlibrment choisidans cette petite tentative dechronologie de laisser de ctles statistiques tant rabchesdes tas de ferraille crams, ou lespiphnomnes comme lincendiedun bus avec des passagersdedans.Comme ces faits sont tirs desjournaux et des agences depresse, elles sont lires avec lesprcautions usuelles. Nous avonsessay de recouper les dates dans

    la mesure du possible. Enn, nousnavons recens notre avis iciqu peine 10 % des attaques.Coupures de journaux de toute lafrance bienvenues !

    Rvoltes de novembre

  • 7/31/2019 Cette Semaine N88

    7/44

    7 Cette Semaine / mars 2006

    D a n sson dsir

    irrpressibledgalit, de

    reconnaissanceet de libert, cette

    jeunesse, lima-ge des lycens, a fait

    preuve dune vitalitque ce monde vieilli et

    fatigu r e f o ul e partoutailleurs. Lvnement dcon-

    certe ainsi nombre didologuesen fa isant cla ter le discours

    ordinaire dun spectacle o barba-

    res, dlinquants, et autres violeursen runion doivent tenir le mme rledpouvantails que celui du terrorisme dans le

    jeu politique mondial.

    Les banlieues ne sont pas cette contre sise aux confins dunlimes imaginaire o les hordes modernes guetteraient patiem-

    ment leffondrement de lEmpire, elles sont de notre monde, ellesen concentrent les contradictions essentielles. Depuis la chute du

    Parti Communiste et de sa gestion municipale, elles sont au cur dunproblme politique majeur que les diffrents pouvoirs traitent par la

    manipulation, labandon au chaos, et la surveillance policire. Du

    torpillage de la Marche pour lgalit par les socialistes avec la crationde SOS Racisme, de laide apporte par Pasqua limplantation dun islamis-

    me pri de tenir la place du stalinien absent, limportation de la mthode am-ricaine de destruction des zones de pauvret par la drogue et les gangs, tout vise

    maintenir dans lombre, le silence et la mort, une population dont on ne sait plusque faire. Ltat durgence, puis avec fbrilit dans le vieil arsenal juridique colonial,

    vient ici servir les formes nouvelles de domination qui, depuis trente ans, travaillent ne laisser cette mme population dautres choix que la prison ou la misre du ghetto

    subie dans lhumiliation.La barbarie est du ct de ceux qui se sont rsigns tout.

    Le jeu des apparences se dissipe,lordre rgne mais ne gouverne pas.

    www.laguerredelaliberte.orgLe 4 dcembre 2005

    Pour la seconde fois cette anne, la jeunesse vient de laisser clater sa rvolte contrela socit. Hier collges et lyces taient occups, aujourdhui les banlieues serebellent. En exprimant spontanment sa colre sur tout le territoire, la jeunessedes banlieues est sortie de lombre.

    Bannis, surveills, has, ces jeunes ont fait de leur existence mme une

    question politique. Ceci ne leur est pas pardonn. Dans une guerre declasse qui ne dit plus son nom, lordre rpublicain avise dsormais quele simple fait de vouloir vivre en dehors de la misre impose doittre tenu pour un dlit de droit commun. Except quelques penseursdpressifs de la raction, qui ose pourtant contester le dsastreglobal des banlieues? Cela doit nanmoins rester la pture ordi-naire des sociologues et experts en tout genre, sans que rienne soit engag pour les besoins de la colre. La rvolte deces jeunes constitue un scandale aux yeux de ceux pourqui seule la violence produite par le traitement moder-ne de la vieille question sociale est en dfinitiveacceptable.

    Un soulvement priv de perspectives poli-tiques aura peut-tre tort dans la forme, ilaura toujours raison dans le fond.

    Crainte passe, la raction droulecomme laccoutume son catalo-gue dexplications ahurissantesapprouves par la pol ice :les maffieux, les barbus, la

    polygamie, le rap, le racisme

    anti-blanc... Dautres seplaindront que lon naitpas vu se raliser ici,lart ou la philoso-

    phie; autant cher-cher une jacque-rie qui auraittranch latte dunroi.

    LE

    VOI

    L E

    S

    ED

    C

    HI R

    E

    Revue de Salut Public

    Rvoltes de novembre

  • 7/31/2019 Cette Semaine N88

    8/44

    8Cette Semaine / mars 2006

    ... et avec elle les banlieues des villes de Franceet dEurope.

    Les couvre-feux et la police aligne en tenueanti-meute ny peuvent rien, les appels au cal-me et la raison qui arrivent de tous les recoins

    de la politique et des institutions sociales nypeuvent rien, tout comme les promesses dunchangement, dune amlioration progressive oudun engagement contre ltat de dlabrement.

    Les pyromanes, les vandales, les barbares,les insurgs, les rvolts, quimporte le nomquon veut leur donner, nont plus doreilles.Enferms dans des ghettos de bton depuis desdizaines dannes par la socit du progrset du bien-tre, ils ne veulent dsormais pluscouter ni parler.

    Ils ont vu seffriter chaque jour toute certitudedune vie digne, dune possibilit de survie d-cente. Tout est sacri au nom dun progrs et

    dun bien-tre qui leur a t et leur est refus ;tous les jours, ils ont d se confronter une po-lice qui a tu leurs amis et leurs frres ; chaquejour ils doivent se dbrouiller dans les alvolesque la vieille socit industrielle avait destines leurs pres hier main duvre bas cotet aujourdhui surplus conner, ignorer, liminer.

    Non, les personnes qui sont en train de brlerles villes de ce vieux continent putr ne sontpas des aliens comme on voudrait nous le fairecroire : ce ne sont pas des trangers venus deloin comme le racontent quelques journalistescrtins, ni non plus des jeunes enrls par

    lidologie islamiste, cette idologie en voguesi rassurante.Ces nouveaux barbares sont nos enfants, quiont grandi et ont t bercs au sein de cette so-cit, de ce monde.On les avait tout simplement oublis : onoublie souvent les pauvres lorsquon na plusbesoin de les pressurer, de les faire crever dansles usines ou de les envoyer se faire massacrerici ou ailleurs. On les oublie... jusqu ce quilsreviennent frapper la porte.

    A prsent, les patrons et les hommes politiqueshurlent au scandale, parlent du problme desbanlieues, discutent le ventre gras des crve

    la faim, de la racaille quils ont jets lapriphrie de leurs villes. Et ils voudraient bienils en ont mme la prtention que ces pau-vres frappent gentiment la porte, un seul lafois et sans trop dranger. Ils voudraient quonleur demande excusez-moi, puis-je ? avantdentrer.

    A linverse, cest le dsespoir qui hurle, ce sontla rage et la vengeance qui incendient les es-prits, ce sont les annes dabus et de privationsqui dfoncent les portes des clapiers des riches,sans demander personne je peux ?.

    Aucune revendication, aucune parole, aucuneidologie manuvrer et alimenter, aucunCasarini ou Agnoletto avec lesquels dialoguer.Seulement le feu, la destruction de ce systmeinfme, de ses symboles, de ses marchandises,de ses infrastructures. Ils brlent les voitures etles centres commerciaux, les commissariats etles coles, les banques et les siges des partis,les coles maternelles et les transports publics.Et avec tout cela commencent brler les va-leurs obscnes de cette Terre et sa morale, lescertitudes des riches et les illusions des gueux,les privilges de quelques uns et lesclavage debeaucoup.Les politiciens dguiss en rvolutionnaires

    deviennent mesquins, les petits gnomes rougesqui remplissent les manifs et les rassemble-ments de la moiti du monde font pitre gure,les sociologues de gauche et les intellectuelsdun autre monde est possible se montrentmisrables : les barricades romantiques rigesau nom du grand idal sont absentes, il nesagit pas non plus de laube de la Rvolutionqui portera les purs desprit et de cur vers leNouveau Monde, ce nest pas la grve gnraleprlude du changement, ce nest pas la lenteconstruction du dialogue qui amnera la prisede conscience. Il ny a rien de tout ce dont ces

    professionnels du social se remplissent la bou-che. Pourtant, ce qui est en train dincendier les

    villes dEurope, cest laffrontement de classe.Ce nest pas celui des livres et des dbats, maisla ralit.

    Dans cet affrontement, comme dans touteguerre, il ny a rien de pur : lorsque les op-prims sinsurgent, ils accomplissent des actessublimes et dautres ignobles, des gestes pas-sionns et dautres honteux, chacun peut sortirle meilleur de soi tout comme le pire.Mais ceci est une vidence partir du momento les masses insurges, quoiquen disentcertains, nexistent pas. Il nexiste que des indi-vidus, capables de tout le bien comme de toutle mal possible ; capables de crer une socit

    meilleure, diffrente, aussi bien que dempirerplus encore celle qui existe dj.

    Ce qui devrait vritablement compter prsentest que dans la rvolte gnralise se brise unmcanisme, celui de la quotidiennet sur lequelest fonde toute lhorreur sociale, toute la vio-

    lence de lEtat, toutes les possibilits dexploi-tation et de dvastation. Et ce nest justementquen brisant la normalit que nous pouvonsentrevoir de nouvelles possibilits pour unmonde vraiment diffrent, que nous pouvonsapprendre de nouvelles manires dtre ensem-

    ble et de lutter, construire les bases des rvoltesfutures, recommencer rver une existencediffrente.Regarder de faon moraliste ce qui est en trainde se passer dans les banlieues du continent,en cherchant avec une loupe les nuisances decertains insurgs, nest utile qu ceux quiveulent conserver le monde tel quil est, pourrester agripps leurs privilges et certitudes,et certainement pas ceux qui ont intrt et lavolont de tout renverser.On nous dit que les insurgs ne parlent pas,et pourtant leur rvolte sest rpandue commeune tche dhuile en quelques heures, parcou-rant des milliers de kilomtres. On nous dit queles insurgs nentendent et ne comprennentrien, et pourtant ils sont en train de mettre enchec la police de villes entires nuit aprs nuit.Alors, comment est-ce possible ? Commentfont-ils ?

    Cest simple, le langage du feu a t cette fois-ci plus clair que mille paroles, et a t comprispar beaucoup de personnes. A prsent, cest nous de dcider daccueillir le message, decomprendre lincommensurable sagesse que cemouvement de rbellion porte inconsciemmenten lui : dans ce monde de la marchandise, bassur la violence et lautorit, il ny a plus rien changer, rien rformer, rien amliorer. En

    un mot : il ny a plus rien sauver.

    Gherardino

    [Article crit dItalie pendant les meutes et tirde Aresis, journal apriodique de Florence, n1,novembre/dcembre 2005, p.3]

    Paris brle...

    Renault Aulnay, le 12 novembreMcDonalds Corbeil, le 6 novembre

    Eglise Romans/Isre, le 16 novembre

    Ecole maternelle Lille, le 6 novembre

    Rvoltes de novembre

  • 7/31/2019 Cette Semaine N88

    9/44

    9 Cette Semaine / mars 2006

    Tract qui a circul sur Marseille dbut novembre

    Rvoltes de novembre

  • 7/31/2019 Cette Semaine N88

    10/44

    10Cette Semaine / mars 2006

    Feu volont !

    Lessence de la rvolteLe patronat et lEtat ne peuvent et neveulent plus payer. Nantes le 18.11.05

    Personne ne pense lide quils peuventdisparatre.Les enfants des cits, ces palestiniens du

    spectacle triomphant, savent, eux, quilsnont rien perdre ni rien esprer dumonde tel quil devient.Avant-propos la rdition de 95 Dela misre en milieu tudiant.

    Qui donc a pris la dfense des insurgsdans les banlieues, dans les termesquils mritent ? Nous allons le faire.

    La misre qui svit dans les banlieuesavec son chmage, sa rpressionpolicire constante, ses conditions devies plus que prcaires, le racisme, ont

    runi les conditions dune confrontationsans prcdent avec lEtat. Les ammesravageant les ghettos symbolisentlattaque tous azimuts contre celui-ci, quil soit rpressif ou prtentionsociale dencadrement. Les attaquescontre les coles, la police, les servicessociaux sont des actes cibls et nonaveugles. Elles sont le rvlateur duneprise de conscience qui na que faire dejugements htifs sociologisants. Ces jeunes sont une partie du proltariatsans avenir qui ne peut tre dupe face la fausse perspective dintgration-

    (mais dans quoi?). Car comment croireque les insurgs ont encore la moindrecomplaisance vis--vis de servicesdits sociaux dont la seule prrogativeest de rguler la misre .sociale ? Onpeut certes gloser sur le manque decrdits allous par lEtat et dire queses acteurs sont en sous-effectifs maisil importe avant tout de dire que sesmdiateurs, ces assos, ces grandsfrres sont avant tout des gardiens dela sociale. Ils sont aux jeunes ce questla bureaucratie syndicale aux ouvriers,un mcanisme dintgration au systmedexploitation. A ceux qui soffusquentde lincendie dune cole, faut-il leurrappeler que celle-ci nest quunecroyance linstar de la religion ou de lapolitique ? II est troublant de constaterque linstitution scolaire ne soit pasmise dans le mme sac que toutesles formes de rpressions sabattantsur les insurgs des banlieues.Que le bobard de lintgration parlducation (nationale) ne fonctionneplus et nisse dans les ammes est unenouvelle rjouissante. Ces jeunes

    rvolts se sont souvenus que leursbancs dcole taient en bois et quilsferaient un fameux brasier, rien deplus logique, lgalit des chances tantvante par notre rpublique tant un

    leurre. Par ailleurs, on stonne queles voitures brlent, mais on devraitse rjouir de ces gestes salutaires ! IIont sauv de la mort des centaines depersonnes promises chaque jours auaccidents de la route et qui plus est de longues journes dennuis dans desboulots de merde. Quant ces derniersla rplique des politiques unanimes netrompe pas : rpression par le travailds quatorze ans, et si a ne suftpas enfermement. De ces promesses,une fois nest pas coutume, une seulesera tenue, la seconde videmment,vu que de travail, il ny en a point. Ces jeunes rvolts ont voulu illuminerla grisaille qui forme leurs quotidiens,ils en paieront le prix.

    A ce constat sajoute celui moinsenjou des ractions suscites dansdes milieux qui auraient du tre mmede saisir lessence de cette rvolte. Eneffet, les rodomontades formules parcertaines personnes se mouvant dansles cercles gauchistes ou libertairessont afigeantes de par leur pauvretet leur courte vue. Ce qui est contre-productif , ce nest pas de cramer sonquartier pourri, cest de ny voir que desactes manquant de sens historique ,de conditions objectives et autresblablas de marxistes de confort, bref

    de ne considrer ces vnements quepar le bout de la lorgnette mdiatiqueou dune grille danalyses obsoltes.Il parait compltement drisoire desattarder sur des piphnomnes telsque lattaque dun bus transportantdes individu-es, ceux-ci tant bienvidemment monts en pingle par lesjournalistes matraqueurs. A qui fairecroire que la rvolution franaise ou lacommune de Paris, toutes proportionsgardes, furent exemptes dactesfcheux ? A dautres peut-tre...

    Et si il doit se dvelopper desorganisations ou des stratgiesdactions directes, a sera avant toutpar eux-mmes. Rangez vos syndicatsaussi rvolutionnaires soient-ils, vosassociations, vos militants et autressamaritains de la cause sociale.

    Cest en tant que dclasss etchmeurs que nous exprimons ici hautet fort notre solidarit avec la racailleinsurge.

    Vaut mieux une bonne guerre civilequune paix pourrie ! ! !

    SECTION COSAQUES JABOTS DE BOIS

    [Texte qui a circul sur Nantesvers mi-novembre 2005]

    Les enseignants de la CNT [Vignoles] ne prnent pasbien sr les incendies de voitures ni de btiments publics,mais ils ne prnent pas non plus la rsignation.

    CNT Vignoles, 6 novembre

    Cette ambe de violence est strile. Brler les voituresde ses propres parents ou voisins, brler des autobus qui

    desservent les quartiers populaires, saccager des colesmaternelles tmoigne de la part de ceux qui le font duneabsence de conscience sociale et de solidarit. (...) Lestravailleurs nont pas se rjouir de la forme que prendcette explosion, et pas seulement parce quils sont lespremiers en souffrir.

    Arlette Laguiller,dito des bulletins dentreprise de LO, 7 novembre

    Monsieur le Prsident, je souscris vos propos dertablir lordre. La socit franaise est en drive. LaRpublique est menace. On voit poindre des germesde guerre civile. Il ny a pas hsiter : rtablir lordre estune priorit. Tous les responsables politiques, de gauchecomme de droite doivent parler dune mme voix.Lheure est au rassemblement rpublicain pour radiquer

    la gangrne, la barbarie, la sauvagerie.Andr Gurin,

    dput-maire PC de Vnissieux, 7 novembre

    Ils [les meutiers] sen prennent leur environnementimmdiat, dans une attaque parfois autodestructrice. Lesattaques dcoles, si elles vont encore plus aggraver lesconditions de vie des habitants des quartiers, en disentlong sur la perception dune institution, qui voque plus certains jeunes de quartier la reproduction sociale, et uneantichambre du chmage, que des outils dmancipation

    Coordination des groupes anarchistes(liaison Seine St Denis), 9 novembre

    Oui il y a des raisons de se rvolter, mais brler des voi-

    tures (appartenant des personnes parfois aussi pauvres),frapper au hasard ne fait que du tort. (...) La Fdrationanarchiste tient tmoigner son soutien aux habitantsdes quartiers victimes de la violence sociale de certainsmeutiers comme celle de la police.

    Fdration anarchiste, 10 novembre

    Parce que les jeunes nont plus de perspectives, il neleur reste plus que lautodestruction. Comme dans unelogique suicidaire, ils sen prennent dabord ce qui lesentoure : personnes, institutions (coles, etc.), objetsmatriels (voitures, etc.)

    No Pasaran, 11 novembre

    Les violences sont auto-destructrices. Elles nuisentessentiellement ceux dont elles dnoncent lexclusion.

    Faire cesser les violences, qui psent sur des populationsqui aspirent lgitimement au calme, est videmmentncessaire

    Communiqu commun ATTAC, FA, CGT,GISTI, Les Verts, LO, MJS, PCF, etc., 13 novembre

    Rvoltes de novembre

  • 7/31/2019 Cette Semaine N88

    11/44

    11 Cette Semaine / mars 2006

    Jeudi 17 novembre, une vingtaine de

    personnes sest introduite dans le

    lyce de la Valle de Chevreuse (91).

    Certains ont distribu des tracts,

    dautres ont improvis une saynte qui

    fut interrompue par le bris de deux

    machines visant contrler lentre des

    lycens dans le rfectoire.

    Depuis septembre 2005, ce lyce avait

    mis en place les outils biomtriques qui

    reconnaissent les contours de la main des

    lves, pralablement enregistrs dans

    des bases de donnes informatiques.

    Lusage de la biomtrie dans les cantines

    scolaires, dont lefcacit est par ailleurs

    conteste, a pour objectif dhabituer les

    enfants ces technologies carcrales

    an quils se soumettent sans rsistance

    aux contrles dans les aroports, les

    bibliothques et les gares, dont la mise

    en place est imminente.

    Le 17 novembre, les perturbateurs du

    repas de midi voulaient dnoncer cette

    ducation la biomtrie qui sert

    lgitimer une prsence de plus en plus

    quotidienne doutils de contrle en tous

    genres, eurons de leffort de guerre

    de la Science lencontre de la liberthumaine.

    Tout sest pass dans une ambiance

    bon enfant jusquau moment o les

    participants laction, affubls de

    masques de clowns, quittaient le

    rfectoire en marchant. Certains, pris

    au hasard, ont alors t violemment

    molests par un surveillant, puis par des

    lves et dautres membres du personnel,

    furieux que daussi belles machines aient

    t mises hors dusage. Le dpart des

    clowns a t entrav coups de pied et

    de poing.

    Trois dentre eux ont t nalement

    remis la gendarmerie. A lissue de

    24 heures de garde vue et deux

    perquisitions, aprs avoir refus la

    comparution immdiate, ils sont sortis

    libres du Tribunal de Grande Instance

    dEvry.

    Le procs, initialement prvu le 16

    dcembre, sest tenu le 20 janvier

    2006. Ils ont t condamns trois

    mois avec sursis, 9 086 euros pour le

    remboursement des bornes et 500 euros

    damende pour lintrusion dans le lyce.Tous trois ont fait appel.

    LES MAUVAIS LVESDE LA BIOMTRIE

    Lycennes, lycens,

    Ne sentons-nous pas autour de nous ltau qui seresserre, le bocal qui rtrcit ? Ne voyons-nouspas venir ce moment o lon saura dans tous lesdtails ce que nous faisons, o nous sommes, ceque nous consommons ?

    Il y a quelque chose de a avec le systme debiomtrie install dans la cantine du lyce. Pas uncontrle fort, daccord. Juste lun de ces trucs quinous apprennent toujours tre identis, tris,spars. Qui nous conditionnent, nous habituent ressembler aux moutons et aux veaux dansnos assiettes, pucs pour que les administrations

    sachent parfaitement do ils viennent, quand ilsnaissent, quand ils meurent.

    Le meilleur moyen de contrler les humains,cest pour linstant de les mettre lcole et autravail, avec en poche une carte bleue et untlphone mobile. Imaginez quun jour prochain,on nous mette une puce sous la peau, objectifavou de ceux qui nous invitent sinscrire la biomtrie : il deviendra alors compltementimpossible de nous rvolter contre le pouvoir delEtat et des entreprises.

    Il ne sagit pas de science-ction, mais de ce quiarrive petit petit ici et maintenant sous le voiledu high tech branch et du jeu. Du temps de nosgrands-parents, la science et la technologie devaient

    p e r m e t t r eden nir avecla misre et lesingalits. Aujourdhui,le progrs cher auxanciennes gnrationssent plein nez la prisonet la mort. Dans ce nouveau millnaire, noussommes nombreux et nombreuses savoir quele dlire scientique et technologique est le

    premier obstacle la justice sociale et la liberthumaine.

    Il est encore temps : demandons-nous si unmonde sans camra de surveillance, sansordinateur et sans portable, ne serait pas plusvivable. Demandons-nous ce que la biomtrie etses puces peuvent nous apporter. Et ne laissonspas remettre en marche ces foutues machines trier entre ceux qui ont les moyens et ceux quonenvoie manger dehors (... Et nhsitons pas ensaboter dautres !).

    Des complices

    [Tract distribu le 17 novembre 2005 avant ladestruction des bornes biomtriques]

    Biomtrie

    Actronix, distribution desystmes biomtriques29, rue Charles Dupont 92270Bois Colombes 01 47 82 21 95 www.actronix.fr Biomtrie Capital Contrle,distribution et installation

    de matriel de scurit agreSAGEM, disposant dun rseaudinstallateur sur lensemble dela France, habilit EDF et SecretDfense12, rue Jules Ferry ImmeubleHenry Spaak 93651 Rosnysous Bois 08 26 10 26 20 ISTEC-Europe, intgrateurdes solutions du Coren ISTEC,Nitgen, Sony Bionics. EADS Telecom, intgredans ses solutions de scuritpublique des moyens deconsultations de base de

    donnes biomtriques. INDEX Technologie,dveloppe et commercialisedes serrures et des solutionsqui permettent de contrlerde manire autonome, portes,

    gches lectriques par lareconnaissance de lempreintedigitale.Zone industrielle 8, rue delindustrie 68360 Soultz 0389 74 35 39 Sagem, quipe le FBI, Interpol,

    le Kosovo, le Liban, les EmiratsArabes Unis, les Philippines,lAfrique du Sud, la Malaisie,la Namibie, le Nigeria, laMauritanie, la Cte dIvoire,ainsi que les systmes degestion des prestations socialeset permis de conduire aux Etats-Unis. Thales Security Systems,expert en identicationbiomtrique pour entrepriseset gouvernements, a fourni deux pays africains, le Kenyaet la Namibie, des systmes

    complets pour la gestion detitres. Travaille sur les sites desAroports de Paris. TimeCard, solutions depointage biomtriques.20, rue du Bel Air CE1534

    Lisses 91015 Evry cedex 0160 86 60 86 www.timecard.fr Vigivision, vidosurveillance,intgre les solutions de Zalix.81, rue de Paris 92100Boulogne 01 41 10 07 90 www.vigivision.com

    Xelios, un acteur franaisdenvergure internationale,diteur dveloppeur detechnologies dempreintesdigitales. Zalix Biomtrie, un spcialistefranais, dveloppeur etintgrateur aux comptencestendues.57-61, avenue de la libert 94269 Fresnes 01 46 15 9999 www.zalix.fr Zefyr Technologies,une entreprise franaisespcialise dans ltude, la

    conception, la fabrication et lacommercialisation de solutionsbiomtriques.70 avenue Bernadotte ZoneIndustrielle des Soeurs 17300Rochefort/Mer 05 46 878 454

    Quelques profteurs en passant...

  • 7/31/2019 Cette Semaine N88

    12/44

    12Cette Semaine / mars 2006 Biomtrie

  • 7/31/2019 Cette Semaine N88

    13/44

    13 Cette Semaine / mars 2006

    Des prisons pour mineurEs auxpolitiques de tolrance zro.Legouvernement prvoit la constructionde 7 Etablissements Pnitentiairespour MineurEs de 13 18 ans dicin 2006. Ils fourniront 420 nouvellesplaces dincarcration qui sajouterontaux 850 existantes dans les quartierspour mineurEs des prisons. Les

    projets actuels dEPM sont situsdans les priphries de Valenciennes,Meaux, Lyon, Mantes-la-Jolie, Toulouseet Marseille. Quelques autres mesuresillustrent ce renforcement scuritairegnralis : une augmentation des incarcrations:+ 45% entre 1990 et 2002 pour lesmineurEs et 1320 nouvelles placespour les majeurEs. la cration des Centres de Placement Immdiat (CPI), des CentresEducatifs Renforcs (CES) et ensuitedes Centres Educatifs Ferms (CEF).

    Ces centres montrent une volutionde plus en plus disciplinaire, auxdpens de politiques ducatives(sachant que lducatif peut galementrimer avec normalisation et mise aupas des individuEs). la soumission des services sociaux une mission de icage des individuEs,avec par exemple, lobligation desducateurs/trices la dlation et latransmission des dossiers la police. des pressions sur lentourage familialavec les suspensions des allocations eten instaurant la responsabilit pnale

    des parents de dlinquantEs. le dveloppement des nouvellestechnologies pour crer des outilsde contrle : vidosurveillance(notamment dans les tablissements

    scolaires), biomtrie, braceletslectroniques, chage ADN, etc. Letout pour un contrle permanent. la cration de nouveaux dlits, parexemple la pnalisation dactes duquotidien comme le regroupementdans les halls dimmeubles ou la fraudedes transports en commun, jusqu lamise en place de couvre-feux.

    une prsence policire plus forteet plus agressive avec notammentles Brigades Anti Criminalit (BAC)harnaches de nouvelles armes high-tech, les contrles aux facis, lesharclements constants, les bavureset accidents meurtriers couvertset cachs.

    Il se pose la question de ladviance et de sa gestion. Ltattient pour responsable les individuEsquil considre comme fautifs etles punit. Or, ce sont les conditions

    sociales, affectives, conomiques quiconstruisent une personne, et ce sontces conditions qui sont questionner.Comment peut-on envisager dergler des problmes en enfermant,brisant et torturant des individuEs?Il sagit dune logique circulaire quine fait que perptuer et accrotre laviolence. La prison instaure la punitionen systme, elle existe pour faire peuret prserver lordre tabli. Elle est unsupplice qui, malgr tous les discoursde rnovation et de rformes,reste essentiellement dgradant et

    humiliant. [email protected]

    [Extrait du tract Pourquoi occuper lechantier dune prison ?]

    Maintenant on pourrait presque enseigner aux enfants dans les colescomment la plante va mourir, non pas comme une probabilit mais

    comme lhistoire du futur. On leur dirait quon a dcouvert des feux, des

    brasiers, des fusions, que lhomme avait allum et quil tait incapable

    darrter. Que ctait comme a, quil y avait des sortes dincendie quonne pouvait plus arrter du tout. Le capitalisme a fait son choix : plutt a

    que de perdre son rgne. Entretien avec Marguerite Duras, Le Matin, 4 juin 1986

    Le prix Nobel de la paix a t attribu au prsident de lAIEA,association cre au lendemain de la Seconde Guerre mondialepour promouvoir et grer le nuclaire civil et militaire. Ellesillustre depuis Tchernobyl par son ngationnisme zl et lagestion de la prolifration des arsenaux nuclaires des tats.Voil la paix que nous offrent les gouvernements et institu-tions internationales, des morts par millions, des dchets pourdes milliers dannes. Ainsi, le prsident de lAIEA, Hans Blixdclarait en 1986 : Lindustrie atomique peut supporter descatastrophes comme Tchernobyl, tous les ans. Le parti nucla-riste mobilise toutes ses forces dans lambition de relancer leprogramme nuclaire. Avec SAGE1, le milieu nuclariste tudieici, pour nous, les conclusions de son tude sur ladaptation des

    populations un environnement dvast par la catastrophe deTchernobyl. Cette dvastation fait dsormais partie du prsent.Le risque que cette organisation sociale nous fait courir tousest le risque ncessaire pour assurer sa prennit. Une socitreposant sur la production de masse dnergie est une socitmortifre. Avec ITER2, les nuclaristes veulent poursuivre leuride autiste et dangereuse de puissance innie.

    Mais le nuclaire ne peut plus tre prsent comme une nergiematrise ainsi que le faisait la propagande jusquau milieu desannes 80. Aujourdhui, chacun va devoir shabituer la pers-pective de vivre irradi en samusant. Cest pourquoi il va falloirfaire avec des joujoux et des guignols comme M. Nuclon. Cettenouvelle propagande reprend fond la bonne vieille mthode

    du pouvoir de linfantilisation : pour viter que puisse exister laralit des problmes en jeu, sont mises en place des prsenta-tions infantiles du genre : La ssion nuclaire est ton amie .

    En attendant quun mouvement social exprime et soutiennela ncessit darrter immdiatement le nuclaire, nous traite-rons ces propagandistes scientistes comme ils le mritent. Lediscours a chang, mais nous ne nous laisserons pas manipuler !Nous navons pas peur, nous sommes en colre !

    Paris le 15 octobre 2005Comit de Lutte Anti-Nuclaire

    1. Stratgie pour une culture de protection radiologique pratique enEurope en cas de contamination radioactive suite un accident nu-

    claire. Soulignons que laropage dexperts et contre-experts a tcopieusement asperg de purin et dufs pourris lors de sa runion deconclusion Paris.2 .International Thermonuclear Experimental reactor. Projet de recher-che dun racteur fusion.

    Du bton

    pour les guignolsSamedi 15 Octobre la Fte de la Science, dans les jardins du Snat auLuxembourg Paris, le stand de lIRSN (Institut de Radioprotection etde Sret Nuclaire) a t assailli par un Comit de Lutte Antinuclaire(CLAN) sur le coup de 15h30. Il sagissait de dnoncer en actes linfmie

    de cette mascarade o lon prtend expliquer aux enfants, dans la joie etla bonne humeur, que ce qui empoisonne est bon. Un court texte intituldu bton pour les guignols a accompagn un dluge dufs pourriset dinsultes essuy par les ers pdagogues bahis du risque radioactif.Notons aussi qu cette occasion, Nuclon, mascotte virtuelleinteractive cense prsenter le travail de lInstitut, nous a quitt.

    Biomtrie / Nuclaire

    Occupationdun chantierde prison

    pour mineursDans la nuit du dimanche au lundi 20 fvrier, nous avons occup lechantier de construction du futur Etablissement Pnitentiaire pour Mi-neurs (EPM) dOrvault. Cette occupation comportait la fois un campde base au sol et plusieurs cabanes dans les arbres. Mardi matin, laube, les occupant-e-s au sol ont t expulss manu militari par les for-ces de lordre, et le camp brl une fois vid. Les personnes occupantesdes arbres sont, elles, toujours en place.

    Un action doccupation dune grue [dun chantier Bouygues] en soutienaux individuEs dans les arbres luttant contre le projet pour mineurssest tenu ce matin, mardi 22 fvrier. A 8h45, lensemble des personnesen soutien en bas des grues ont t embarqu trs rapidement par lesforces de lordre avec les violences coutumires. Elles ont t relchesaprs vrication de leur identit et une fouille en bonne et due forme.A 10h30, les 5 personnes qui occupaient la grue depuis ce matin ont temmenes au poste aprs avoir t descendues par le GIPN. Elles ontt mises en garde--vue pour opposition par voie de fait, lexcutionde travaux publics... Pendant ce temps-l, loccupation des arbres duchantier de lEPM Orvault tient toujours.

  • 7/31/2019 Cette Semaine N88

    14/44

    14Cette Semaine / mars 2006

    Gwenola est accuse davoir :

    1. port des allgations ou imputations de faits portant atteinte lhonneur et la considrationde lAdministration pnitentiaire, administration publique, en tenant les propos suivants : contreces tabassages effectus par les Eris (ces quipes de matons cagouls et instaurs par Perben, en dbutdanne), contre ces quartiers disolement o lon meurt silencieusement (mais srement) , lesquelstendent imputer aux quipes de lAdministration pnitentiaire de commettre des actes deviolences caractriss et de laisser mourir les dtenus ;

    2. provoqu la commission de dgradations volontaires dangereuses pour les personnes () : situ aimes le feu, la violence et les meutes, si tu sais apprcier le bruit et lodeur dune prison qui brleAlors viens soutenir ton quipe prfre : les clairvauxs hooligans club. Le 9 mars, cest la rencontre ausommet. Ce jour-l, oublie d aller travailler et amne toi avec tes potes et ton matos. Vive le chaos !, quivoquent un appel commettre des incendies en proposant des lecteurs de soutenir un club dontle but est d amener le chaos en incendiant les tablissements pnitentiaires .

    3. commis le dlit dapologie du crime datteinte volontaire la vie (en lespce un homicidevolontaire) en publiant sur le site susnomm le texte suivant : alors tu tes retranch dans le miradoret tu en as fait quelque chose d extraordinaire, dont daucuns rvaient : une place avance de la subversion,du renversement du strict (et triste) agencement qui met d un ct les bons et de l autre les mchants .Le mirador est devenu danger pour la prison. Tu as tir, les coups de feu ont tu une employe de lacentrale.

    4. commis le dlit d injure publique en prsentant les surveillants de prison comme des porcs eten reproduisant une afche reprsentant un cochon en uniforme .

    5. commis le dlit de diffamation publique envers une administration publique en ce que cespropos ( Vous avez cr les Eris pour faire la sale besogne en semant la violence au fond des QI, vousleur avez donn carte blanche pour les lynchages Leurs mthodes la limite du viol ont pour butdexercer une pression psychique de peur sur le reste de la population pnale) tendent accrditer lideque les surveillants de prison, qualis de matons usent de brimades gratuites lendroit desdtenus, pouvant aller jusquau meurtre, ces lments pouvant dailleurs constituer des infractionspnales .

    6. directement provoqu les lecteurs (cette provocation nayant pas t suivie deffet) commettredes dlits de destructions, dgradations et dtriorations volontaires dangereuses pour lespersonnes, en les invitant commettre des incendies et des dgradations volontaires dans les

    maisons centrales, an de parvenir leur destruction et en proposant aux dtenus de se rvolter etdamener le chaos en incendiant ces tablissements pnitentiaires (texte GYPA : Si aucune mesurenest prise pour l amlioration de nos conditions, consigne est donne de saboter, brler, dtruire toutes lescentrales de scurit Cest beau une prison qui brle, cest mieux que des dtenus genou en cellule) .

    Ces accusations portent sur la diffusion de textes dont elle nest pas lauteur :

    1 : la diffusion dune afche voquant les tabassages des eris (quipes de surveillants cagouls,institus par Perben en janvier 2003 pour les oprations de maintien de lordre en dtention) etcritiquant les quartiers disolement ( o lon meurt doucement, mais srement).

    2 et 4 : la diffusion de deux afches de soutien avec les inculps de la mutinerie de Clairvaux du 15avril 2003 et appelant un rassemblement de solidarit lors de leur procs, Troyes (Aube).

    3 : la diffusion dun texte sign une admiratrice .

    5 et 6 : la diffusion dun texte crit, en juin 2003, par un groupe de dtenus (Il ny a pasdarrangement) du quartier disolement de la maison darrt de Bois dArcy, suite plusieurstabassages dans ce quartier.

    Procs contre Vive les mutins !

    Aprs plusieurs reports, Gwenola, une camarade que la police accuse dtrelanimatrice du site Vive les mutins !et dtre ce titre responsable de son con-tenu, devait passer en procs le 31 aot 2004, 15 mars puis 6 dcembre 2005. La

    nouvelle date, sans doute la dernire, est le 4 avril 2006 devant la 17e chambredu TGI de Paris. En forme minimale de solidarit, nous reproduisons ci-contreles diffrents corps du dlit.

    Vive les mutins !

  • 7/31/2019 Cette Semaine N88

    15/44

    15 Cette Semaine / mars 2006

    Lettre ouverte Frdric Bettinecci,ex-maton la maison centrale de Moulins-Yzeure

    Cher Frdric,

    Mercredi dernier, en me rveillant cest si agrables les rves veills jai appris quedans ton mirador, tu avais choisi de renoncer tes folies. La folie denfermer dautreshommes. Parce que ctait comme a, parce quil le fallait, parce que tu ntais responsablede rien, de toutes faons... La folie de ces longues heures te languir dune ombre suspecte,

    dune agitation qui enn suggrerait que ton heure de gloire approchait, et de cet hommeque tu aurais nalement dans ta lunette avec cet exquis moi : je vais lavoir . La folie demater, mater en tre dgot de ces corps, de leurs disgrces et de leurs odeurs La foliede traquer la violence dun regard qui en dit long , la tendresse de gestes dplacs auparloir, lironie dun sourire tellement au-del de tes contingences de maton

    Et puis tout le reste En transformant chaque jour ces hommes en objet, en les voyantsans les regarder, en croyant pouvoir les dtenir , sous prtexte de ton travail, tu temtamorphosais doucement en monstre. Tu navais plus qu te dbattre dans cette foliecollective. Tu as eu raison de mettre n cette folie furieuse.Alors tu tes retranch dans le mirador, et tu en as fait quelque chose dextraordinaire,dont daucuns rvaient : une place avance de la subversion, du renversement du strict (ettriste) agencement qui met dun ct les bons et de lautre les mchants . Le miradorest devenu danger pour la prison. Tu as tir, les coups de feu ont tu une employe de laCentrale.

    Toute la journe, jcoutais les ashs dinfos qui te disaient toujours l-haut, dans tonmirador, en discussion avec la psychologue de la Centrale. Oui, tu avais dj bascul duct de ceux quil faut semployer rappeler lordre . Jimaginais ce quelle pouvait biente dgoter comme arguments pour te convaincre dabdiquer sans violence. Des argumentscapables de te convaincre, toi le maton, en poste dans cette centrale, dans ce caveau donous parviennent parfois les cris touffs des condamns de longues peines. Pardonne-moi, mais a ma fait marrer de limaginer te disant : Ne vous inquitez pas, meurtre avec

    prmditation, ce nest plus que perpet heureusement pour vous, y a plus la peine de mortet puis, sur perpet, vous pouvez sortir au bout de 18 ans et 18 ans, a se fait sur une jambe,compar ceux qui purgent des 30 ans. Et puis les prisons se sont vachement humanises Avecvos relations, vous pourrez aller dans une prison avec des parloirs sexuels Alors, vraiment, faut

    pas voir votre avenir tout en noir !

    Alors, maintenant, tu te retrouves de lautre ct. Du ct de ceux que, mme en ne faisantpas plus mal ton boulot quun autre, tu surveillais, contrlais, emmerdais. Du ct de ceuxdont tu violais lintimit. Du ct de ceux que, mme en ntant tout aussi humain quunautre, tu mprisais : ils nauraient jamais pous ta lle, et si tu leur amenais un truc endouce, ctait toujours intress. Tu penses que ta vie a bascul. Moi, je ne pense pas quil yait un bon et un mauvais ct, que les voleurs ou les salauds soient que du ct des matons.Comme pour tout taulard, je vais te souhaiter de ne pas tre du par tes proches. Jesprequils te soutiendront sans te juger, quils se souviendront de lami, de lamant, du collgue,du voisin, sans te ramener perptuellement ton acte et ses victimes. Jespre quils teconserveront leur amiti, leur amour ou leur tendresse. Jespre quils ne marchanderont pasleur malaise, leur conit entre leurs sympathies et la rprobation sociale, en se fourvoyantdans la piti.Jespre pour toi que tu tomberas sur de bons matons. Je ne plaisante pas. Tu es mieux placque moi pour connatre la dure loi de toutes les corporations qui grent lordre : malheur

    celui qui dchoit ! Mais, tu sais bien, les bons matons nexistent pas, ou alors ils se retrouvent,un jour, dans un mirador tu connais la suite !Tu risques de passer de longues annes en prison, qui sajouteront toutes les annes de tavie que tu as gch en acceptant dtre maton, et o tu t es donc dtourn des mille plaisirsordinaires, incompatibles avec les hauts murs . Jimagine ta rancur aujourdhui, lorsquetu penses aux moments passs regarder des trous du cul et toutes ces eurs que tu asoubli de voir.

    Jai peur pour toi que tu ne comprennes pas, au long de ces annes, ce quest le sens de lapeine . Parce que tu serais bien le premier le comprendre Et pourtant, cest pendanttoutes ces annes dun boulot la con, ce qui ta permis de durer : combien de fois tu asaccept de collaborer aux basses uvres de la pnitentiaire parce que tu te disais, nalement,quil fallait bien quils payent , ces ordures !

    Merci, cher Frdric, pour cette belle journe. On est un paquet avoir rv dtre ta place.Merci pour ta libert. On se sent plus libre lorsque existent ce que tes anciens collgues,les syndicats et lAdministration (persuads, dans une stupide unanimit, de dfendre les bons travailleurs ) appellent dj une brebis galeuse .

    Sincrement,Une admiratrice

    Cela va faire environ un an que le Ministre adcid la fermeture des portes de cellule encentrale. Petite tolrance qui nous tait accordhistoire davoir un semblant de vie sociale entredtenus, une vidence lorsquon sait que pour

    beaucoup les peines sont tellement fortes quil vautmieux se recrer un peu de libert dans un univers olon en est priv. bref tout ceci a pris n et suite cettedcision notre vital sest rduit 8m !

    Quon ne stonne pas des consquences qui en ontdcoul ces derniers mois et qui en dcoulerontprochainement dans les centrales.

    En effet, nous le GYPA [Groupe ya pas darrangement]adressons un avertissement PERBEN et ses sbiresqui rgnent dune poigne de fer sur le ministre de lajustice et qui ont dcid de tout miser sur la rpressionde la population pnale.

    Vous avez cr les E.R.I.S. sorte dunit dlite delA.P. pour faire la sale besogne en semant la violenceau fond des Q.I. contre des dtenus isols, vous leuravez donn carte blanche pour les lynchages.

    Le port de la cagoule de sinistre mmoire a fait sonapparition en tout lgalit. Des listes de dtenus ontt tablies pour cibler leur action et semer la terreur.Leurs mthodes, la limite du viol (coups, mise nu,cartage de fesse, palpation des parties intimesetc...), ont pour but dexercer une pression psychiquede peur sur le reste de la population pnale.

    Lexemple de dtenus choisis par le ministre que lonpasse tabac au su et au vu de tous, sert dissuader

    les co-dtenus et rassurer lopinion publique avidede scuritaire.

    Nous, le GYPA, avons dcid de rentrer en rsistancepour rpondre ces violences et lagression denos liberts fondamentales, par des actions visant rtablir nos dignits dhommes. Nous sommesprt aller jusquau bout nayant plus rien perdre.Votre politique de loppression ne laisse pas dautrechoix aux longues peines que de se soumettre ou dese rvolter !

    Les vnements et les mouvements qui se sontpasss en Centrale ces derniers mois illustrent bienle malaise de ceux qui ont dcid de ne pas se laisserenterrer vivant dans ces tombes que sont devenu vosprisons.

    Si aucune mesure nest prise pour lamlioration denos conditions, si les portes de nos avenirs restentcloses, consigne est donn de saboter, brler, dtruire,toutes les centrales de scurit.

    Ceci an quune prise de conscience se fasse auniveau national et que lon dnonce cette politiquede labsurde, de lanantissement quest celle du toutrpressif.

    Cette politique strile est voue lchec et mnerala socit toute entire droit dans le mur. Ne loubliezpas un jour nous sortirons !!!

    Cest beau une prison qui brle, cest mieux que desdtenus genoux en cellule...

    Le GYPA,juin 2003

    Du QIde Bois-dArcy

    Vive les mutins !

  • 7/31/2019 Cette Semaine N88

    16/44

    16Cette Semaine / mars 2006 Squats

  • 7/31/2019 Cette Semaine N88

    17/44

  • 7/31/2019 Cette Semaine N88

    18/44

  • 7/31/2019 Cette Semaine N88

    19/44

    19 Cette Semaine / mars 2006

    Marseille :Expulsion du squat de la Rose

    Squats

    NOUSOCCUPONS depuis deux ans la bastide Notre-Dame dela Consolation.Quand nous sommes arrivs, la maison tait vide depuis 10ans et mise dans un tat de dlabrement avanc. Nous avonstravaill et travaillons encore pour la rendre habitable...

    Vendredi 9 dcembre, nous dcouvrons avec stupeur unpermis de construire pos dans lenceinte de la maison.Ds le lendemain, des ouvriers dposent des sacs gravats,soi-disant pour un chantier de dmolition cens commencerle lundi suivant, comme sil sagissait de raser un btimentvide...

    Le terrain, un des 30.000 biens immobiliers du patrimoinepriv de la ville de Marseille laisss vides pour spculer,a t promis la vente pour 800.000 euros lassociation Entraide Protestante qui projette dy construire 27 lo-gements sociaux pour public en difcult .

    Quant au petit dtail quil y a des gens qui vivent l, tout le

    monde feint de lignorer. Pas vu, pas pris.

    Interrog,Entraide protestante prtend ne pas tre of-ciellement au courant de notre existence. Bizarre, puisquecest bienEntraide protestante qui a demand au cours duconseil municipal du 3 octobre 2005 la mise dispositionanticipe aprs vacuation des squatteurs .

    Et lexpulsion dune vingtaine de personnes ? Lassociationdit que cela ne la concerne pas, laissant ce dtail lacharge de la mairie, la pro du dlogement. Cot mairie :mpris, silence radio, coups de force. Cest comme sictait dj fait, et laffaire dj conclue...

    La mairie aime bien vendre la peau de lours avant de

    lavoir tu.Quil sagisse de la RTM, de la SNCM, du racket des horo-dateurs, des habitants de la classe populaire chasssdu centre-ville ou de ceux qui autour de ltang deBerre refusent de respirer les ordures que leurenvoie Gaudin, la mairie nen a rien a foutre.Alors des squatteurs...

    quoi, qui sintresse-t-elle alors ???

    Au fric et ceux qui en ont dans une ville o rien ne doitplus tre gratuit.Aux bnces de la maa immobilire avec laquelle ellespcule main dans la main. lurbanisation force et la liquidation des espaces qui

    chappent son contrle parce que leurs habitants syorganisent par eux-mmes.

    Comme dhabitude, ce nest quune fois que la maison estoccupe par des gens qui refusent leur systme capitalisteque ses propritaires se souvient de son existence relle.Et pas seulement sur le papier : ils veulent alors la vendre,la vider.

    Comme dhabitude, ils jouent la carte de lhumanitaire enprtendant construire des logements caractre social,alors quils ne font que grer la misre engendre par leursystme.

    Et comme dhabitude, ils se font un devoir dexpulser en

    t comme en hiver ceux qui se donnent les moyens desorganiser autrement.

    Lautonomie, pas la charit !

    Dtecteur infrarouge de mal-logs,on narrte pas le progrs...

    Des squatters parisiens nous ont rcemment signal linstallation dune nouvelleforme de porte anti-squat avec une sorte de micro camra directement sur la porte.Ce nouveau systme anti-squat (anti-vandales comme dit Sitex) est dcrit par sonconcepteur : dtecteurs de vibration, douverture, de mouvement infrarouge,dclenchement dune sirne haute puissance, envoi dun message vers le PC T-

    lsurveillance, envoi dun message SMS renseign vers un tlphone mobile entemps rel du proprio, lalarme Oasis First est autonome (sur un trpied en acier placer dans le local protger) ou incorpore la porte Sity, autoprotection larrachage, autonomie dun an pour la batterie (avec signal de remplacement despiles).

    Les proprios ne se refusent dcidment rien, on saura bien le leur rendre.

    Le 10 juin 2005 sont expulss duncoup trois squats ouverts depuis desannes dans le quartier de Wazem-mes : le Trimar (119 bd Montebello),le 121bis (rue Lafargue) et le Tri-cart : Le squat est pour nous, outrelimpratif de se loger, une possibilit

    de sortir de ce schma pourri destinaux proltaires : un travail pourri etun logement insalubre. Le logementest un bien vital qui ne doit pas semonnayer. Nous prenons ce coupdclat policier comme une volontde porter un coup fatal aux squats.Nouvelle tentative qui malheureu-sement ne portera pas ses fruits.Spculateurs, huissiers, ics, on vousemmerde !

    Le 7 dcembre 2005, les deuxderniers squats dactivit se font ex-

    pulser dans la foule. Cette mthodedevient une sale habitude Lille. LeLabo (65 rue Jenner) navait pasdavis dexpulsion. Quant White

    Wood (7 rue de Laventie), occupdepuis le 15 novembre 2004, il avaitreu le 20 octobre 2005 le comman-dement de quitter les lieux de la So-cit Civile Immobilire Satellite.

    Le 30 dcembre 2005, la BigBoss - e (82bis rue Jeanne dArc) sefait expulser sous la neige. Le pro-prio et ses molosses ny russissantpas seuls, ils ont d se faire aider dela poulaille : Depuis de long moisle btiment tait vide, car vide ilrapportait plus que habit de richesbotes qui spculent sur nos habitats,nos vies. Nous tions cinq. Dcids prendre nos vies en main. Noussquattions ce qui est devenu durant11 jours la big boss-e.

    Outre les squats dhabitation quitiennent toujours ou ont t rou-

    verts, le Maquis, un foyer dactivitsautogr, a ouvert le 20 janvier 2006au 6 rue de Colmar, mtro Porte desPostes.

    Lille, Aubry squat killer

    Mardi11 octobre 2005, huitfamilles ivoiriennesdu passage du Ga-zomtre Montreuilse font expulser de

    limmeuble o ellevivaient depuis cinqans aprs avoir rglpendant deux ans unloyer de la main la

    main un marchandde sommeil. Un jeuneivoirien sans titrede sjour est arrt.Les familles la rueoccupent alors avec

    des voisins et amis

    le Centre socialLouns Matoub. Lecabinet du maire,

    Brard lexpulseurcommuniste

    muscl des Romsqui a aussi faitdmolir le foyer

    africain NouvelleFrance, propose

    trois nuits dhteldisperses en Ile deFrance. Le refus en-trane linterventiondes CRS qui frappentdans le tas (plusieurs

    blesss) et coursenten ratonnant unemanifestation spon-tane rue de Paris.

    Les habitants du Ga-zomtre improvisentalors un campementplace de la Rpubli-que, qui prend desallure de fte avecdes centaines de

    personnes solidairesqui y passent.

    Le 14 octobre, lesfamilles acceptent delever le camp contre35 nuits dhtelpayes.

    A prsent, les cliba-taires sont la rueet les familles dansun htel minableque certaines payenten partie. La luttecontinue pour unrelogement et une

    rgularisation sanscas par cas, avec no-tamment un concertde solidarit prvu le5 mars.

    Montreuil : la lutte du Gazomtre

    [Tract rcupr dans une rue de Marseille]

  • 7/31/2019 Cette Semaine N88

    20/44

    20Cette Semaine / mars 2006

    Sur le procs contre les anarchistes de Lecce et la lutte contre les centres de rtention

    Le 19 janvier dbutera Lecce le procs contre treize anarchistes accuss outreune srie dactions contre certaines multinationales qui senrichissent sur la guerre et legnocide des populations du Sud du crime davoir men pendant des annes une lutteconstante et dtermine contre le lager pour immigrs de San Foca. Deux dentre euxsont en prison depuis le 12 mai dernier, deux autres sont assigns en rsidence surveille,une quinzaine se trouve en libert surveille. La base du procs est encore une fois lar-ticle 270bis sur l association subversive but terroriste, avec lequel ont t incarcrsces dernires annes des dizaines de rvolutionnaires, de rebelles ou de simples militantsde gauche, sans le moindre dbut de preuve. Pour tre accus d association subversive,il suft dsormais dun simple tag sur un mur.

    Mais ce nest pas tellement cela que nous tenons dire. Nous savons que les lois delEtat sont des toiles daraigne pour le riche et des chanes dacier pour le pauvre, toutcomme nous navons jamais cherch le sens de ce qui est juste parmi les articles du codepnal. Ce qui nous intresse de souligner est ce qui rend ces anarchistes dangereux et cequil y a duniversel dans leur lutte.

    Il y a eu de grandes discussions ces derniers mois sur les Centri di PermanenzaTemporanea (CPT, centres de rtention). Aprs que certains reportages de journalistesaient rendu compte des conditions inhumaines dans lesquelles survivent les femmes etles hommes interns dans ces structures, les diverses forces politiques se sont disputes

    propos des responsabilits dune telle gestion. Mais la question nest pas comment ilssont grs, mais plutt leur nature mme. Introduits en Italie en 1998 par le gouvernementde centre-gauche avec la loi Turco-Napolitano (vote galement par les Verts et Rifonda-zione Comunista), les CPT sont sous tous leurs aspects des lagers. Exactement comme lescamps de concentration fascistes et nazis (et avant eux les camps coloniaux, Cuba ou enAfrique du Sud), il sagit de lieux dans lesquels on est enferm sans navoir commis aucundlit et retenu complte disposition de la police. Qu lintrieur les conditions soientdsespres, la bouffe pourrie et les mauvais traitements constants en est une consquen-ce terrible, mais pas le centre du problme. Il suft de peu pour sen rendre compte.

    Ce qui pour un italien nest quun simple dlit administratif (ne pas avoir de pa-piers), est devenu pour un tranger un dlit passible dinternement. Comme nous lap-prend lhistoire il suft de penser aux lois racistes de tous les Etats entre la premire etla deuxime guerre mondiale, avant de crer de tels camps de concentration, il faut au

    pralable imposer lquation tranger=dlinquant. Cest en ce sens quon doit lire la l-gislation de droite comme de gauche sur limmigration en Italie (mais nous pourrionsdire en Europe et partout). Si les mmes critres qui prsident lobtention du permisde sjour pour les immigrs taient appliqus aux soi-disant citoyens, nous serions desmillions tre enferms ou vivre en clandestins. En effet, combien dItaliens peuventdmontrer quils ont un travail en rgle ? Combien vivent plus de trois dans un appar-tement de 60 mtres carrs ? Sachant que les contrats dintrim ne sont pas valables pourobtenir le permis de sjour, combien dentre nous seraient des rguliers ? Dnir toutceci comme un racisme dEtat nest pas de lemphase rhtorique, mais bien un constatrigoureux.

    Aujourdhui, les CPT (mais plus gnralement toutes les formes de rtention adminis-trative : des centres didentication aux zones dattente dans lesquelles sont gards lesrfugis ou les demandeurs dasile) sont la matrialisation de ce racisme. Et cest juste-

    ment parce que le l barbel est le symbole des lagers et de loppression totalitaire depuissoixante ans que la cohrence involontaire du pouvoir a entour ces nouveaux camps dels barbels. Tout comme ce nest pas un hasard si la rtention administrative, depuis tou-

    jours un dispositif typique de la domination coloniale, se diffuse aujourdhui partout dansle monde (des ghettos palestiniens Guantanamo, des geles secrtes anglaises o sont

    A CEUX QUI NE SONT PAS RESTS AU CHAUDPENDANT LA TEMPTE

    Italie

  • 7/31/2019 Cette Semaine N88

    21/44

    21 Cette Semaine / mars 2006

    enferms les immigrs suspects de terrorisme aux CPT italiens).En mme temps quon bombarde et quon massacre au nom desdroits de lhomme, des millions dindsirables sont brutalementprivs de tout droit, dtenus dans des camps gards par la policeet cons aux soins de quelque organisation humanitaire.

    Si les CPT sont des lagers comme le disent dsormais beau-coup de gens, il est tout fait logique de chercher les dtruireet daider les hommes et les femmes qui y sont enferms svader.Et il est tout fait logique de frapper les collaborateurs qui lesconstruisent et les grent. Cest ce que pensaient les anarchistes

    de Lecce. Ils ont alors dnonc publiquement, dans lindiffrencegnrale, la responsabilit des grants du CPT de San Foca cest--dire la curie de Lecce, travers la Fondation Regina Pacis etles conditions infmes auxquelles taient soumis les dtenus ; ilsont recueilli des tmoignages, des donnes, et se sont organiss.Ils sont devenus une pine dans le pied de la curie et du pouvoirlocal. En t 2004 dj, un des leurs fut arrt pour avoir essay defavoriser la fuite de quelques immigrs au cours de la rvolte quia clat lintrieur du centre Regina Pacis. Ils se sont rendusdans les ftes de village, pour donner les noms et prnoms desagents responsables des tabassages dans le CPT, des mdecins quiles couvraient, du directeur qui frappait, squestrait et contraignaitcertains musulmans manger de la viande de porc. Tout ce, sans

    jamais perdre lobjectif de vue : fermer pour toujours ces lagers, etnon pas les rendre plus humains. Pendant que ce droulait toutcela, quelques actions anonymes touchaient les banques qui nan-aient le CPT, mais aussi les proprits de la curie et du directeurde la fondation Regina Pacis, don Cesare Lodeserto. Et ces anar-chistes taient prts les dfendre publiquement. Les autorits depouvaient plus cacher le problme. Quont-elles fait alors ? Ellesont dabord incarcr Lodeserto sous laccusation de squestrationde personne, dtournement de biens publics, violence prive etdiffusion de fausses nouvelles tendancieuses (le prlat senvoyaitdes messages de menace quil attribuait ensuite la malavita al-banaise). Puis elles ont fait fermer le CPT de San Foca. Lodesertoplac en rsidence surveille, puis remis en libert, elles ont donc

    incarcr les anarchistes an de sen dbarasser pour des annes.Les gens qui comptent ont dfendu le prtre de faon tonitruante.En dfense des anarchistes, il ny a eu au mieux que dhonntesprjugs. Justice est faite...

    Mais quelque chose ne tourne pas rond. Le chteau de cartede laccusation contre les rebelles est maladroit et branlant, et,surtout, les luttes contre les CPT prennent de la vigueur dans toutelItalie. En avril, les reclus du lager de via Corelli Milan montentsur les toits, ils se taillent les veines et hurlent la plus universelle desrevendications : la libert. Suivis par les immigrs enferms dans leCPT de corso Brunelleschi Turin, la rvolte stend Bologne,Rome, Crotone. Des dizaines dentre eux russissent svader,tandis que le soutien pratique la lutte commence sorganiser

    lextrieur. En mme temps que des manifestations et des initia-tives qui dnoncent les responsabilits de ceux qui senrichissentsur les dportations des immigrs (dAlitalia la Croix Rouge, descompagnies de transport aux entreprises prives impliques dansla gestion des lagers), les petites actions de sabotage ne manquentpas. Et lors de cette convergence spontane qui constitue le secretde toutes les luttes, les crimes imputs aux anarchistes de Lecce sediffusent.

    Cest ce mouvement encore faible mais croissant qui apos publiquement le problme des CPT, envoyant patre les poli-ticiens de gauche, dans leur tentative pathtique dattribuer au seulgouvernement de droite la responsabilit des lagers.

    Que tout cela foute le bordel est dmontr par les dclarationsdu ministre de lIntrieur Pisanu sur les anarchistes qui incitent la rvolte les immigrs (comme si les conditions inhumaines danslesquelles ils vivent ntaient pas en soi une incitation permanente)et sur la ncessit des CPT pour affronter le terrorisme (il est

    Juin-aot 2002. Les premiersrassemblements commencentdevant Regina Pacis.31-08-02, Melendugno. Quelquesmanifestants interrompent leconseil municipal au son decornes de brume pour protester

    contre le maire qui avait interditune manifestation et uneexposition contre Regina Pacis San Foca.03-11-02, Monteroni.Manifestation devant lglise oMonseigneur Ruppi (gestionnairede la fondation Regina Pacis) doitachever sa visite pastorale. Uneexposition sur limmigration estdploye, des banderoles sontsorties et des tracts distribus.Lvque renonce se montrersur la place et fuit par derrire.12-11-02, Lecce. En soire,quelques trouble-fte serassemblent devant la prfecture,et avec des sifets, des claironset un mgaphone font savoirleur mpris aux 11 ministresde lIntrieur qui tiendront lelendemain un sommet sur lecontrle de limmigration. Lesrues sont bloques par coupset des tracts distribus.13-11-02, Lecce. Au cours de lamanifestation du Social Forum

    contre le sommet des ministres,certains manifestants mitraillentavec des fruits pourris et desoeufs les policiers, journalistes etle service dordre du Lecce SocialForum (dont le porte-parole avaitcondamn les manifestationscontre Monseigneur Ruppi).20-11-02, Casarano. Au coursdune confrence dAlleanzaNazionale sur la loi Bossi-Fini,une quinzaine de personnesdploient une banderole contreles expulsions. A la confrence,

    participaient le sous-secrtaire lIntrieur et don Lodeserto.10-05-03, Lecce. Peu avant ledpart de la course cycliste GirodItalia, des tags comme libertpour les immigrs et Ruppiassassin apparaissent sur lesmurs et lasphalte.11-06-03, Lecce. Des mainsinconnues endommagent avecune ambe le portail latral dela cathdrale, des tags sont laissssur le mur contre le Cpt et sesgestionnaires.

    12-10-03, San Foca. Devant leCpt, une dizaine de personnesmanifestent leur solidaritaux reclus ; de lintrieur,les immigrs rpondent en

    LA LUTTE CONTRE LECENTRE DE RTENTION

    REGINA PACIS

    SQUESTRSEN ATTENTE DE JUGEMENT

    Le 12 mai 2005 se dclenchelopration Nottetempo : per-quisitions dans toute lItalie , cinqanarchistes de Lecce incarcrs,13 autres inculps et laisss enlibert. Tous sont accuss d as-sociation subversive nalit desubversion de lordre dmocrati-

    que (art. 270bis du code pnal).Les jours suivants se droulentdes initiatives de solidarit spon-tanes.Le 21 mai, une manifestation avecbeaucoup de monde parcourt lesrues du centre-ville en solidaritavec les incarcrs et contre lesCpt. Le lendemain a lieu un ras-semblement devant la prison deLecce o sont dtenus trois desincarcrs. Les deux autres sontassigns en rsidence surveille.Alors que les demandes de remiseen libert sont repousses, deuxdes trois sont transfrs Mel etSalerne.Le 6 aot, un des incarcrsobtient lassignation rsidence,et