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Siège social et bureaux : 111, Faubourg Saint Honoré, 75008 Paris. Tel. : 01 42 89 10 89. Fax : 01 42 89 10 69 Société Anonyme au capital de 56 200 Euros. RCS : Paris B 399 991 041. SIRET : 399 991 041 00035. APE : 731Z Analyse probabiliste de la séismologie Analyse critique des formules déterministes Document adressé au Commissariat à l'Energie Atomique Direction de l'Energie Nucléaire Par la Société de Calcul Mathématique S. A. en application du contrat no 4000288990/P5B61, 26 mai 2007 rédaction Charline Carlier et Olga Zeydina Août 2007 Société de Calcul Mathématique, S. A. Algorithmes et Optimisation

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Siège social et bureaux : 111, Faubourg Saint Honoré, 75008 Paris. Tel. : 01 42 89 10 89. Fax : 01 42 89 10 69

Société Anonyme au capital de 56 200 Euros. RCS : Paris B 399 991 041. SIRET : 399 991 041 00035. APE : 731Z

Analyse probabiliste de la séismologie

Analyse critique des formules déterministes

Document adressé au

Commissariat à l'Energie Atomique

Direction de l'Energie Nucléaire

Par la

Société de Calcul Mathématique S. A.

en application du contrat no 4000288990/P5B61, 26 mai 2007

rédaction Charline Carlier et Olga Zeydina

Août 2007

Société de Calcul Mathématique, S. A. Algorithmes et Optimisation

Analyse Probabiliste de la séismologie. SCM SA - CEA/DEN, Rapport 2, août 2007. 2

Résumé opérationnel Nous présentons dans ce rapport une critique de la méthode actuellement utilisée pour l’estimation probabiliste de l’aléa sismique.

L’objectif final de la méthode est de donner la probabilité de dépassement d’une accéléra-tion donnée dans une certaine zone ou site (appelée "zone cible"). Pour obtenir ce résul-tat, trois étapes sont nécessaires :

1. Définition de la zone source

La France est divisée en zones selon le comportement géodynamique de chacune d’elles. Le taux de sismicité dans chaque zone est différent, mais les séismes sont supposés ré-partis de façon homogène dans chacune. Ceci est en réalité assez critiquable.

2. Détermination de la probabilité d’occurrence d’un séisme de ma-

gnitude m dans chaque zone source

On part de l'hypothèse, non justifiée et non réalisée, d'un processus de Poisson. Après quoi on réalise un ajustement déterministe, pour obtenir la loi de Gutenberg & Richter,

qui requiert deux paramètres a et b , respectivement l’ordonnée à l’origine et la pente

de la courbe de récurrence (logarithme du nombre de séismes cumulés en fonction de la magnitude). Cette approche n'est pas saine : d'une part le choix d'un processus de Poisson est factice ; d'autre part l'ajustement est arbitraire : suivant l'intervalle choisi, suivant la forme choi-

sie pour la courbe, on obtient des résultats radicalement différents. Nous recommandons une approche intégralement probabiliste, sans hypothèse factice : On travaille sur l'historique complet, et on ne fait pas d'hypothèse "Poisson" ;

On construit des lois de probabilité, du début jusqu'à la fin, sans réaliser aucun ajuste-ment.

3. Détermination de la probabilité de dépassement d’une accélération

donnée pour chaque magnitude (dans une zone cible à partir d'une

zone source)

Elle est obtenue actuellement à partir de la relation d’atténuation calculée de façon tota-lement déterministe. Une loi a été définie à partir de l’étude de 14 séismes en France. Il

n’existe pas de réelle relation entre l’accélération et la distance, car la propagation de l’accélération dans le sol va dépendre de sa composition. Pour une même distance, nous avons donc différentes valeurs de l’accélération. Il n’est pas sain de vouloir ajuster une loi sur des données trop dispersées.

Ici encore, nous préconisons l’utilisation d’une méthode probabiliste qui donnera la pro-babilité d’obtenir une accélération donnée dans la zone cible pour un certain intervalle de distance à partir de la zone source.

Analyse Probabiliste de la séismologie. SCM SA - CEA/DEN, Rapport 2, août 2007. 3

4. Conclusion : l'approche que nous proposons

L’objectif est de connaître la probabilité qu’un séisme, de magnitude donnée ou supé-rieure à une valeur donnée, né dans la zone source engendre une accélération donnée dans la zone cible (zone où l’on enregistre l’effet du séisme ; une centrale nucléaire par exemple).

Notre approche se déroulera en trois étapes principales :

− Le calcul de la probabilité d’occurrence d’un séisme d’une magnitude donnée (ou

supérieure à une valeur donnée) dans la zone source ;

− Calcul de la relation d’atténuation de l’accélération en fonction de la distance pour

différentes valeurs de magnitude (relation de distance entre la zone source et la zone ci-ble) ;

− Calcul final de la probabilité de dépasser une accélération donnée dans la zone ci-

ble. Ces trois étapes seront intégralement probabilistes, et sans hypothèses factices : elles

doivent s'appuyer uniquement sur des données.

Analyse Probabiliste de la séismologie. SCM SA - CEA/DEN, Rapport 2, août 2007. 4

Table des matières

Introduction ......................................................................................................................... 6 I Définition de la terminologie de base........................................................................... 7 1 La magnitude ........................................................................................................... 7 2 L’intensité................................................................................................................12

II Critique des formules déterministes ...........................................................................15 1. Naissance d’un séisme dans une zone source.........................................................15 2.1 Zonage sismotectonique en France .................................................................15 2.2 Calcul de la probabilité d’occurrence d’un séisme de magnitude m dans une zone source...................................................................................................................16

2. Détermination de la relation d’atténuation entre la zone source et la zone cible .25 3. Formule générale pour l’estimation probabiliste de l’aléa sismique......................31

Références bibliographiques...............................................................................................33

Analyse Probabiliste de la séismologie. SCM SA - CEA/DEN, Rapport 2, août 2007. 5

Tables des figures

Figure 1 : Carte d’aléa sismique.......................................................................................... 6 Figure 2 : Comparaison entre observation et prédiction pour le modèle GTAFPS [4]....... 7 Figure 3 : Exemple de sismogramme pour le séisme à Tourville la Rivière le 5/09/2000

à1h54.................................................................................................................................... 8 Figure 4 : Méthode de localisation de l’épicentre d’un séisme à partir de 3 stations......... 9 Figure 5 : Distribution des magnitudes dans le catalogue instrumental LDG.................11 Figure 6 : Répartition des séismes du catalogue instrumental [3]....................................12 Figure 7 : Répartition des séismes du catalogue historique ..............................................13 Figure 8 : Différence entre la magnitude calculée par Scotti et celle calculée par Levret pour des intensités comprises entre 1 et 5 .........................................................................14 Figure 9 : Zones sismotectoniques en France métropolitaine............................................15 Figure 11 : Hétérogénéité d’une zone 8 ..............................................................................16 Figure 12 : Nombre de séismes et nombre de séismes cumulés pour les magnitudes 2.5 à

6.3........................................................................................................................................19 Figure 13 : Nombre de séismes cumulés en fonction de la magnitude..............................20 Figure 14 : Probabilité d’occurrence d’un séisme dans la zone source en fonction de la magnitude locale .................................................................................................................21 Figure 15 : Comparaison de l’approche de Poisson avec notre approche ..........................21 Figure 16 : Nombre de séismes et nombre de séismes cumulés pour des magnitude 1.2 à 4.1........................................................................................................................................22 Figure 17 : Logarithme du nombre de séismes cumulés en fonction de la magnitude .....23 Figure 18 : Fonction de répartition de la magnitude locale...............................................24 Figure 19 : Comparaison de l’approche de Poisson, avec l'approche probabiliste.............24 Figure 20 : PGA en fonction de la distance hypocentrale pour une magnitude locale de 3.............................................................................................................................................26 Figure 21 : PGA mesurée (en bleue) et calculée (en rouge) en fonction de la distance hypocentrale........................................................................................................................27 Figure 22 : PGA mesurée (en bleue) et calculée (en rouge) en fonction de la distance

hypocentrale pour des valeurs inférieures à 0.03 m/s² ......................................................27 Figure 23 : ajustement PGA mesurée/distance hypocentrale par différentes méthodes ..28 Figure 24 : Accélérations enregistrées dans la zone cible pour 10 séismes de magnitude 3.............................................................................................................................................29 Figure 25 : Densité de probabilité de l’accélération...........................................................30 Figure 26 : Comparaison des deux lois probabilistes.........................................................31

Analyse Probabiliste de la séismologie. SCM SA - CEA/DEN, Rapport 2, août 2007. 6

Introduction

Le CEA souhaite améliorer les modèles probabilistes de séismologie utilisés actuelle-ment, car ceux-ci ne donnent pas des résultats totalement satisfaisants.

Il existe deux modèles principaux : le modèle du Ministère de l’Environnement et du Dé-veloppement Durable (MEDD) et celui du GTAFPS. Ces modèles permettent, à partir de données historiques et instrumentales, de définir pour chaque point du territoire la pro-babilité d’obtenir une accélération des mouvements du sol supérieure à un certain seuil. Ces résultats sont présentés sous forme d’une carte d’aléa sismique telle que dans la fi-gure 1 ci-dessous.

Figure 1 : Carte d’aléa sismique

Des sites d’EDF et du RAP (Réseau Accélérométrique Permanent) mesurent en perma-nence l’accélération des mouvements du sol. La prédiction des modèles cités précédem-ment montre des divergences avec les observations (voir tableau de la figure 2).

Analyse Probabiliste de la séismologie. SCM SA - CEA/DEN, Rapport 2, août 2007. 7

Figure 2 : Comparaison entre observation et prédiction pour le modèle GTAFPS [4]

Pour obtenir la carte de la figure 1, il y a trois principales étapes :

1. Définir des zones sources homogènes en terme de séismes. 2. Déterminer, pour chaque zone source, la courbe de récurrence à partir de l’historique des séismes dans chacune d’elles. Cette courbe donne le taux annuel

d’occurrence de chaque magnitude. 3. Déterminer la relation d’atténuation de l’accélération en fonction de la distance et

la probabilité de dépasser un certain seuil d’accélération, *A , donné, dans la zone cible.

En combinant ces différentes étapes, on calcule finalement la probabilité annuelle de dé-

passement d’une accélération *A dans la zone cible.

I Définition de la terminologie de base

1 La magnitude

La magnitude est utilisée pour décrire l’énergie libérée par le séisme. C’est une valeur

intrinsèque au séisme, qui n'est pas liée au lieu d’observation. Elle est calculée à partir des enregistrements faits par les sismographes (« sismo »= séisme et « graphe » = écrit). Un sismogramme est l’enregistrement des données d’un séisme dans la zone cible. Il donne l’amplitude (en cm) ou l’accélération des mouvements du sol au moment d’un

séisme. Une station doit disposer de 3 sismographes pour mesurer les mouvements du sol selon la composante horizontale (un sismogramme orienté N-S et un autre orienté E-

Analyse Probabiliste de la séismologie. SCM SA - CEA/DEN, Rapport 2, août 2007. 8

W) et la composante verticale. C’est cette dernière composante qui permet par la suite de

calculer les magnitudes. Un sismogramme se présente de la manière suivante :

Figure 3 : Exemple de sismogramme pour le séisme à Tourville la Rivière le 5/09/2000 à1h54

Sur la figure ci-dessus, la première flèche représente l’arrivée de l’onde P (Primaire) et la

deuxième l’arrivée de l’onde S (Surface). Les ondes P et S sont appelées "ondes de Vo-lume" car elles se propagent dans les trois directions. La vitesse de propagation de ces ondes est fonction de la nature du milieu ; elle augmente avec la distance et avec la den-sité du milieu. La vitesse des ondes P est comprise entre 5.5 et 12 km/s et celle des ondes S est comprise entre 3.5 et 6.5 km/s. A la surface, la vitesse des ondes est la valeur mi-

nimale soit 3.5 km/s pour les ondes P et 5.5 km pour les ondes S. A partir de ces enregistrements, il est possible de calculer la distance entre la station et le séisme.

On connaît le temps d’arrivée de l’onde P 0PP

t tV

∆= +

et celui de l’onde S

0SS

t tV

∆= +

; on en déduit donc la distance à l’épicentre (point de surface géographi-

que le plus proche du foyer ou hypocentre où a débuté le séisme) , ∆ .

1 1S P

S P

t tV V

− = ∆× −

D’où :

( ) S PS P

P S

V Vt t

V V

×∆ = − ×

Où :

− ∆ est la distance de la station à l’épicentre, appelée par la suite distance épicen-trale ;

Hypocentre du séisme

Distance épicentrale

Distance hypocentrale

Profondeur

Station

Analyse Probabiliste de la séismologie. SCM SA - CEA/DEN, Rapport 2, août 2007. 9

− PV et SV sont respectivement les vitesses de propagation des ondes P et S dans le

sol. Ces vitesses sont supposées connues ;

− Pt et St sont respectivement les temps d’arrivés des ondes P et S.

A partir d’au moins trois stations on peut déterminer la localisation géographique de l’épicentre.

Figure 4 : Méthode de localisation de l’épicentre d’un séisme à partir de 3 stations

Sur la figure 4 ci-dessus, le point d’intersection des trois cercles (point rouge) représente la localisation de l’épicentre du séisme. Remarque

Si l’on souhaite connaître la profondeur ou l’hypocentre du séisme, il faudrait alors tracer

des sphères et non plus des cercles.

A partir d’un sismogramme, plusieurs types de magnitudes sont calculés :

� La magnitude locale, lM (ou magnitude de Richter)

Elle est calculée pour les séismes proches (quelques centaines de kilomètres) des stations de mesure, à partir de l’amplitude maximale des ondes de volume. La formule est la sui-vante :

0( ) ( ) ( )lM Log A Log A cLog= − + ∆

Où :

− A est l’amplitude maximale mesurée sur le sismogramme (en mm) ;

2∆

1∆

3∆

Analyse Probabiliste de la séismologie. SCM SA - CEA/DEN, Rapport 2, août 2007. 10

− 0A représente l’amplitude de référence pour une magnitude de 0 à 100 km (en

cm). On a 0log( ) 2.48A = ;

− ∆ est la distance épicentrale (distance en kilomètres entre la station de mesure et

l’épicentre du séisme) ;

− c est une valeur de calibration qui dépend de chaque appareil de mesure.

La magnitude locale n’a pas de limite inférieure ou supérieure. Elle peut être négative si

l’appareil de mesure est très sensible. Pour le moment la magnitude maximale enregis-trée est de 9.

� La magnitude de durée dM

Comme pour la magnitude locale, elle est utilisée pour les séismes proches, mais elle est

définie à partir de la durée du signal et non plus à partir de l’amplitude maximale.

0.87 2 log( ) 0.0035dM t= − + × + ×∆ Où :

− t est la durée du signal (en s) ;

− ∆ est la distance épicentrale (en km).

� La magnitude de surface, sM :

Contrairement aux deux précédentes magnitudes, elle est utilisée pour les séismes loin-

tains, appelés téléséismes, pour des profondeurs inférieures à 80 km. Elle se calcule, comme son nom l’indique, à partir des ondes de surface.

log( )s

AM log a c

T

= + + × ∆

Où :

− A est l’amplitude du mouvement du sol, en µm ;

− T est la période de l’onde, en s ;

− ∆ est la distance épicentrale, en km ;

− a et c sont des constantes de calibration.

� La magnitude de volume, b

M

Elle est définie également pour les téléséismes, plus particulièrement les séismes pro-fonds. Elle est calculée à partir de l’amplitude de l’onde P, première onde à être enregis-

trée sur le sismogramme. La formule pour calculer cette magnitude est la même que celle utilisée pour calculer la magnitude de surface.

Analyse Probabiliste de la séismologie. SCM SA - CEA/DEN, Rapport 2, août 2007. 11

� La magnitude de d’énergie, w

M

Elle est liée à la physique du séisme et est définie uniquement pour les gros séismes.

log 61.5

w

S DM

µ × × = −

Où :

− µ est la rigidité du milieu ;

− D est le déplacement moyen de la faille ;

− S est la surface de la faille.

La magnitude est calculée depuis la mise en place du réseau de sismogrammes, c'est-à-

dire depuis 1962. Ces données sont enregistrées dans le catalogue du LDG (Laboratoire de Détection Géophysique du CEA). Les séismes en France sont de faible magnitude ; très peu dépassent la magnitude 5. C’est donc la magnitude locale qui est la plus couramment utilisée pour définir l’énergie

dégagée par un séisme. La figure ci-dessous présente la distribution des magnitudes dans le catalogue instru-mental LDG.

0

200

400

600

800

1000

1200

1400

1600

2.6

2.8

3.0

3.2

3.4

3.6

3.8

4.0

4.2

4.4

4.6

4.8

5.0

5.2

5.4

5.6

5.8

Magnitude

Nombre d'enregistrements

Figure 5 : Distribution des magnitudes dans le catalogue instrumental LDG

D’après le graphique de la figure ci-dessus, le nombre d’enregistrements dans le catalo-

gue LDG s’élève à plus de 11 0000. Plus de 80 % des magnitudes reconstituées (à partir des enregistrements des sismographes) sont comprises dans l’intervalle [2.6, 3.3].

Analyse Probabiliste de la séismologie. SCM SA - CEA/DEN, Rapport 2, août 2007. 12

La figure ci-dessous présente la répartition des séismes du catalogue instrumental.

Figure 6 : Répartition des séismes du catalogue instrumental [3]

2 L’intensité

L’intensité, contrairement à la magnitude, dépend du lieu d’observation. Elle varie donc en fonction de l’éloignement par rapport à l’épicentre. Elle est définie par rapport aux effets produits par le séisme, qu'ils soient seulement observés ou ressentis par l'homme

(réveil, chute d'objets, fissures ...), ou qu'ils aient causé des dégâts plus ou moins impor-tants aux constructions. L’intensité résulte souvent d'une simple estimation, à défaut d'une mesure. Les person-nes ayant ressenti un tremblement de terre peuvent remplir un questionnaire qui per-

mettra aux experts de déduire son intensité. Les données d’intensité existent depuis environ 1000 ans. Plus de 6000 séismes ont été ressentis durant cette période en France métropolitaine ou proches frontières. Ces don-nées sont disponibles sur le site de Sis France (http://www.sis-france.com).

La figure ci-dessous présente la répartition des séismes du catalogue historique.

Analyse Probabiliste de la séismologie. SCM SA - CEA/DEN, Rapport 2, août 2007. 13

Figure 7 : Répartition des séismes du catalogue historique

La première difficulté liée à l’intensité est que l’information obtenue diffère selon l’épo-que à laquelle elle a été définie. Les matériaux utilisés dans les bâtiments aujourd’hui sont complètement différents de ceux utilisés il y a deux siècles ; les effets produits par les séismes ne sont donc pas les mêmes.

La deuxième difficulté est que nous disposons de deux jeux de données : l’un contient des données de magnitude mesurées par des instruments de 1962 à aujourd’hui et un autre contient des données d’intensité datant de plusieurs siècle à 2004. Pour les utiliser dans une même méthode, il faut les homogénéiser.

Des corrélations existent entre les données de séismes enregistrées dans le catalogue Sis France et ceux du catalogue LDG. Selon la méthode de corrélation utilisée, les résultats divergent. Deux méthodes existent actuellement, avec des données différentes. Dans un cas, 73 séismes sont utilisés : c’est la corrélation de Levret (1994) ; dans le

deuxième cas, seuls 10 des meilleurs 73 séismes sont utilisés : c’est la méthode de Scotti (2001). Les relations obtenues sont différentes :

− Corrélation Scotti [2] :

100.64 1.86 log 0.45M I= × + × ∆ −

− Corrélation de Levret [2] :

100.44 1.48 log 0.48M I R= × + × +

Analyse Probabiliste de la séismologie. SCM SA - CEA/DEN, Rapport 2, août 2007. 14

Voyons avec un exemple le résultat obtenu avec les deux équations. La figure ci-dessous

présente le cas d’un séisme d’intensité égale à 5 ressenti à 10 km de l’épicentre pour un séisme à une profondeur de 1 km.

On trouve facilement la distance hypocentrale comme étant égale à :

2 2 2 210 1 10 kmR z= ∆ + = + ≃

Donc avec l’équation de Scotti on obtient : 4.61M = . Avec l’équation de Levret, on ob-

tient : 4.16M = . Ces deux valeurs sont significativement différentes.

Pour une profondeur z donnée, la différence entre les deux corrélations sera d’autant plus grande que l’intensité et la distance épicentrale sont grandes.

0.000

0.100

0.200

0.300

0.400

0.500

0.600

0.700

0.800

0.900

1.000

5

15

25

35

45

55

65

75

85

95

105

115

125

135

145

155

165

175

185

195

Distance épicentrale (en km)

M(Levret) - M(Scotti)

I = 1 I = 2 I = 3 I = 4 I = 5

Figure 8 : Différence entre la magnitude calculée par Scotti et celle calculée par Levret pour des

intensités comprises entre 1 et 5

Actuellement, les données d’intensité sont transformées en magnitude, puis une sélec-tion de séismes est faite sur le nombre total de séismes des deux catalogues. Les séismes avec une faible magnitude sont beaucoup moins nombreux dans le catalogue historique que dans le catalogue instrumental. Cela ne signifie pas que dans le passé il y a eu moins de séismes de faible magnitude mais seulement que la détection de ces magnitu-

des est plus difficile.

I = 5

R

= 1 kmz

10 km∆ =

Analyse Probabiliste de la séismologie. SCM SA - CEA/DEN, Rapport 2, août 2007. 15

Donc actuellement les magnitudes en dessous de 4 sont écartées des calculs. D’après la

figure 5, cela signifie que la plus grande majorité des séismes ne sont pas pris en compte dans la méthode. Il est donc difficile de corréler les données d’intensité avec les données de magnitude et l’utilisation d’une méthode de corrélation entraîne le rejet d’un très grand nombre de

données. Nous recommandons l’utilisation unique du catalogue instrumental. Il est pré-férable d’utiliser peu de données dont la source est fiable que beaucoup de données qui peuvent entraîner des biais dans le résultat.

II Critique des formules déterministes

Nous allons considérer successivement les trois étapes : naissance du séisme en zone source, propagation de l'onde entre la zone source et la zone cible, observation en zone cible.

1. Naissance d’un séisme dans une zone source

2.1 Zonage sismotectonique en France

La France est divisé en zones. Elles sont choisies selon leur dynamique tectonique et l’activité sismique. La figure ci-dessous présente un exemple de découpage de la France en 28 zones [3].

Figure 9 : Zones sismotectoniques en France métropolitaine

Dans chacune de ces zones, nous disposons d’informations sur des séismes de différentes magnitudes, dérivées du catalogue instrumental et historique.

Analyse Probabiliste de la séismologie. SCM SA - CEA/DEN, Rapport 2, août 2007. 16

Ces zones ainsi créées sont supposées avoir un taux de sismicité homogène. Les séismes

doivent donc être également répartis dans chacune de ces zones. Remarque

L’hypothèse d’homogénéité n’est pas respectée dans toutes les zones. Intéressons-nous à

la zone 8 qui englobe tout le Bassin Parisien. Le nombre de séismes dans toute cette zone est faible. La probabilité d’occurrence d’un séisme est donc faible globalement. Le problème est que dans cette zone (et dans d’autres aussi), la répartition des séismes n'est pas réellement homogène : la plupart des séismes de cette zone ont été enregistrés

dans la partie Est. Si l’on découpe cette zone en deux dans le sens Nord-Sud, on obtient une probabilité d’occurrence d’un séisme (toutes magnitudes confondues) plus élevée dans la partie Est que dans la partie Ouest. La figure ci-dessous représente un exemple d’hétérogénéité d’une zone.

Figure 10 : Hétérogénéité de la zone 8

Dans la figure ci-dessus, la partie Est de la zone a un taux de sismicité plus élevé que la partie Ouest. Cette zone n’a donc pas un taux de sismicité homogène.

2.2 Calcul de la probabilité d’occurrence d’un séisme de magnitude m dans

une zone source

La probabilité d’occurrence d’un séisme de magnitude m est calculée dans chacune des

zones sources. Les zones étant supposées homogènes en terme de séismes, la probabilité sera donc homogène dans toute la zone.

Chaque zone source est définie par un paramètre de sismicité β . Il est calculé de ma-

nière totalement déterministe à partir du catalogue de données de séismes de la chaque

zone source.

Prenons une zone source que l’on nomme arbitrairement zone source A . Dans cette zone

source ont été enregistrés A

N séismes de différentes magnitudes. A partir du nombre de

séismes enregistrés pour chaque magnitude, on trace une courbe appelée "courbe de ré-

currence" : logarithme du nombre de séismes cumulés en fonction de la magnitude.

Analyse Probabiliste de la séismologie. SCM SA - CEA/DEN, Rapport 2, août 2007. 17

La courbe ainsi obtenue est supposée suivre la loi de Gutenber & Richter dont l’équation

est la suivante :

logN a bM= +

Où :

− N est le nombre cumulé de séismes de magnitude supérieure à M

− M est la magnitude ;

− a est le logarithme du nombre de séismes de magnitude 0 ;

− b est la pente de la droite, en valeur absolue (appelée «b-value»).

Le paramètre de sismicité β est égal à ln10b × .

La probabilité d’occurrence d’un séisme compris dans l’intervalle de magnitude [ [1 2,m m

est alors donnée par la formule suivante :

( )

( )

min 1 2

max min1 2( )

1

M m m

M M

e e eP m m m

e

β β β

β

− −

− −

−≤ < =

− (1)

Où :

− minM est la magnitude minimale ;

− maxM est la magnitude maximale ;

− 1m et 2m sont respectivement la magnitude inférieure et supérieure de l’intervalle

de magnitude pour laquelle on souhaite calculer la probabilité d’occurrence ;

− β est un coefficient, calculé à partir de la courbe de récurrence.

La probabilité d’occurrence ainsi obtenue est une probabilité sur l’ensemble de la période de temps durant laquelle les séismes ont été enregistrés.

On peut également calculer le nombre annuel de séismes de magnitude supérieure ou

égale à M , Mλ . Il est calculé de la manière suivante :

m

m eα βλ −

= (2)

Où:

− α est égal à ln10a× ;

− β est égal à ln10b× .

Analyse Probabiliste de la séismologie. SCM SA - CEA/DEN, Rapport 2, août 2007. 18

Remarque méthodologique

Les équations (1) et (2) sont approximatives. Elles résultent de l’hypothèse selon laquelle le processus est poissonnien ; c'est-à-dire que la probabilité d’occurrence d’un séisme suit toujours la même loi, et est indépendante de l'apparition des séismes précédents (voir notre rapport 1, et la description en termes de "bons et mauvais jours").

Or un séisme est le résultat de la relaxation sur un segment de faille des contraintes ac-cumulés au cours du temps. Donc, si un séisme se déclenche, il y a relâchement des contraintes. La probabilité d’avoir un séisme l’année suivante est donc plus faible qu’avant l’apparition du séisme. L’utilisation d’un processus de Poisson n’est donc pas

justifiée pour ce phénomène. Il est difficile d’ajuster une loi, qu’elle soit de Poisson ou autre sur un tel phénomène. La probabilité d’occurrence et le taux annuel d’un séisme d’une magnitude donnée dans une zone source doivent être calculés uniquement sur la base de l’historique des séismes

dans cette zone source sans utiliser de lois déterministes ou de lois probabilistes empiri-ques. Ce sont les données qui doivent définir la loi et non pas le contraire.

Nous montrons l’utilisation de la loi de Gutenberg & Richter à partir de deux exemples. Exemple 1 : Séismes en Italie durant la période 06/05/1976 – 28/11/2002. [5]

Pour cet exemple, nous disposons pour chaque séisme de la valeur de la magnitude lo-cale. Des séismes de magnitude comprise entre 2.5 et 6.3 ont été enregistrés. Nous dispo-sons au total de 183 valeurs de magnitude.

Nous calculons le nombre de séismes de 0.1. Puis nous calculons le nombre de séismes cumulés. Le tableau ci-dessous présente les résultats.

Analyse Probabiliste de la séismologie. SCM SA - CEA/DEN, Rapport 2, août 2007. 19

MlNombre de

séismes

Nombre de séismes

cumulés

2.5 13 183

2.6 24 170

2.7 14 146

2.8 19 132

2.9 10 113

3 19 103

3.1 13 84

3.2 7 71

3.3 4 64

3.4 7 60

3.5 7 53

3.6 3 46

3.7 2 43

3.8 6 41

3.9 2 35

4 1 33

4.1 3 32

4.2 5 29

4.3 5 24

4.4 1 19

4.5 5 18

4.6 2 13

4.7 1 11

4.8 0 10

4.9 0 10

5 1 10

5.1 0 9

5.2 0 9

5.3 2 9

5.4 1 7

5.5 0 6

5.6 1 6

5.7 2 5

5.8 0 3

5.9 0 3

6 0 3

6.1 1 3

6.2 1 2

6.3 1 1

Figure 11 : Nombre de séismes et nombre de séismes cumulés pour les magnitudes 2.5 à 6.3

Nous calculons enfin le logarithme du nombre de séismes cumulés. Nous obtenons le graphique de la figure ci-dessous.

Analyse Probabiliste de la séismologie. SCM SA - CEA/DEN, Rapport 2, août 2007. 20

0

0.5

1

1.5

2

2.5

2.5

2.7

2.9

3.1

3.3

3.5

3.7

3.9

4.1

4.3

4.5

4.7

4.9

5.1

5.3

5.5

5.7

5.9

6.1

6.3

Magnitudes

Logarithme du nombre cumulé de

séismes

Figure 12 : Nombre de séismes cumulés en fonction de la magnitude

Dans cet exemple, la droite de régression s’ajuste bien aux données, sauf pour les fortes

magnitudes ( 6l

M ≥ ).

La courbe de récurrence de Gutenberg & Richter donne les informations suivantes :

− La pente : 0.517b = ;

− Le logarithme du nombre de séismes cumulés pour 0l

M = (i.e. l’ordonnée à

l’origine) 2.32a = ;

− La magnitude minimum du jeu de données : min 2.5M = ;

− La magnitude maximum du jeu de données : max 6.3M = .

− Le taux annuel de séisme de magnitude minm M≥ (équation (3)) : min

0.22m Mλ > = .

A partir de l’équation (1) on trace la probabilité d’occurrence d’un séisme en fonction de la magnitude.

Analyse Probabiliste de la séismologie. SCM SA - CEA/DEN, Rapport 2, août 2007. 21

0

0.02

0.04

0.06

0.08

0.1

0.12

2.5 - 2.6

2.7 - 2.8

2.9 - 3

3.1 - 3.2

3.3 - 3.4

3.5 - 3.6

3.7 - 3.8

3.9 - 4

4.1 - 4.2

4.3 - 4.4

4.5 - 4.6

4.7 - 4.8

4.9 - 5

5.1 - 5.2

5.3 - 5.4

5.5 - 5.6

5.7 - 5.8

5.9 - 6

6.1 - 6.2

6.3 - 6.4

Magnitude locale

Probabilité

Figure 13 : Probabilité d’occurrence d’un séisme dans la zone source en fonction de la magnitude

locale

La probabilité d’occurrence diminue de manière exponentielle avec la magnitude. La figure ci-dessous compare les probabilités d’occurrence obtenues avec un processus de Poisson, avec notre approche probabiliste qui consiste à créer la loi à partir des données.

0

0.02

0.04

0.06

0.08

0.1

0.12

0.14

2.5 - 2.6

2.7 - 2.8

2.9 - 3

3.1 - 3.2

3.3 - 3.4

3.5 - 3.6

3.7 - 3.8

3.9 - 4

4.1 - 4.2

4.3 - 4.4

4.5 - 4.6

4.7 - 4.8

4.9 - 5

5.1 - 5.2

5.3 - 5.4

5.5 - 5.6

5.7 - 5.8

5.9 - 6

6.1 - 6.2

6.3 - 6.4

Magnitude locale

Probabilité

Approche processus de poisson Approche probabiliste sans loi connue

Figure 14 : Comparaison de l’approche de Poisson avec notre approche

Notre approche suit la même tendance qu’avec la loi de Poisson, c'est-à-dire une diminu-tion exponentielle des probabilité d’occurrence.

Analyse Probabiliste de la séismologie. SCM SA - CEA/DEN, Rapport 2, août 2007. 22

Mais les résultats sont moins artificiels que ceux définis avec l'approche poissonnienne..

Ils reflètent réellement la réalité. Même si les faibles magnitudes dans les deux appro-ches sont plus probables que les fortes magnitudes, il n’y a aucune raison pour que

l’intervalle de magnitude [ [2.5,2.6 soit plus représenté que l’intervalle [ [2.6,2.7 .

Les données montrent en effet que, dans cette zone source, on a une plus grande probabi-

lité qu’un séisme soit d’une magnitude comprise dans le deuxième intervalle ( 0.13p = )

que dans le premier ( 0.07p = ).

Exemple 2 : Séismes en France (Savoie et haute Savoie) entre le 07/01/2000 et le

07/08/2007 [Données site CEA]

Comme pour l’exemple précédent, nous disposons de la magnitude de chacun des séismes d’une zone source (Savoie et Haute Savoie) ; au total 301 valeurs de magnitudes entre 1.2 et 4.1.

Le tableau ci-dessous présente le nombre de séismes et le nombre de séismes cumulés pour des magnitudes comprises entre 4.4 et 5.8 (avec un pas de magnitude de 0.1).

Ml Nombre de séismesNombre cumulé

de séismes

1.2 1 301

1.3 3 300

1.4 10 297

1.5 10 287

1.6 16 277

1.7 11 261

1.8 20 250

1.9 32 230

2 36 198

2.1 24 162

2.2 25 138

2.3 22 113

2.4 21 91

2.5 12 70

2.6 9 58

2.7 16 49

2.8 6 33

2.9 7 27

3 8 20

3.1 2 12

3.2 3 10

3.3 3 7

3.4 1 4

3.5 0 3

3.6 1 3

3.7 0 2

3.8 0 2

3.9 0 2

4 1 2

4.1 1 1

Figure 15 : Nombre de séismes et nombre de séismes cumulés pour des magnitude 1.2 à 4.1

Analyse Probabiliste de la séismologie. SCM SA - CEA/DEN, Rapport 2, août 2007. 23

Nous calculons ensuite le logarithme du nombre de séismes cumulés et nous traçons le

graphique en fonction de la magnitude. Nous obtenons le graphique de la figure ci-dessous.

0

0.5

1

1.5

2

2.5

3

3.5

1.2

1.4

1.6

1.8 2

2.2

2.4

2.6

2.8 3

3.2

3.4

3.6

3.8 4

Magnitudes

Logarithme du nombre cumulé de

séismes

Figure 16 : Logarithme du nombre de séismes cumulés en fonction de la magnitude

Dans cet exemple, la droite de régression s’ajuste bien aux données, sauf pour les faibles

valeurs de magnitude. La courbe de récurrence de Gutenberg & Richter donne les informations suivantes :

− La pente : 0.948b = ;

− Le logarithme du nombre de séismes cumulés pour 0l

M = : 2.98a = ;

− La magnitude minimum du jeu de données : min 1.2M = ;

− La magnitude maximum du jeu de données : max 4.1M = .

− Le taux annuel de séisme de magnitude minm M≥ : min

2.31m Mλ > = .

A partir de l’équation (1) on trace la probabilité d’occurrence d’un séisme en fonction de la magnitude (intervalle de magnitude de 0.5).

Analyse Probabiliste de la séismologie. SCM SA - CEA/DEN, Rapport 2, août 2007. 24

0

0.1

0.2

0.3

0.4

0.5

0.6

0.7

1 - 1.5

1.5 - 2

2 - 2.5

2.5 - 3

3 - 3.5

3.5 - 4

4 - 4.5

Magnitude

Probabilité

Figure 17 : Fonction de répartition de la magnitude locale

La figure ci-dessous compare les probabilités d’occurrences obtenues avec un processus de Poisson avec notre approche probabiliste.

0

0.1

0.2

0.3

0.4

0.5

0.6

0.7

1 - 1.5

1.5 - 2

2 - 2.5

2.5 - 3

3 - 3.5

3.5 - 4

4 - 4.5

Magnitude

Probabilité

Approche processus de poisson Approche probabiliste sans loi connue

Figure 18 : Comparaison de l’approche de Poisson, avec l'approche probabiliste

Alors que dans le premier exemple les deux approches présentaient la même tendance ;

dans cet exemple les résultats sont totalement différents.

Analyse Probabiliste de la séismologie. SCM SA - CEA/DEN, Rapport 2, août 2007. 25

2. Détermination de la relation d’atténuation entre la zone source et

la zone cible

Ce qui nous importe est de calculer la valeur maximale de la composante horizontale de l’accélération, « Peak Ground Acceleration » (PGA) en anglais. Elle est calculée par le

module vectoriel des deux composantes horizontales de l’accélérogramme ( )x t et ( )y t :

( )max ( )² ( )²PGA x t y t= + (3)

Une loi de corrélation entre la magnitude et la PGA a été établie à partir de 14 séismes localisés dans les Alpes, les Pyrénées et le Massif Central. La relation qui en est déduite

a été définie par Smit (1998) :

10 10log 3.93 0.78 1.5 logL

PGA M R= − + × − × (4)

Avec un écart type :10log 0.55PGAσ = .

Où :

− LM est la magnitude locale du séisme ;

− R est la distance hypocentrale (en km).

Exemple de construction graphique

Nous nous intéressons dans cet exemple à 45 séismes de magnitude locale ( LM ) égale à

3, recensés en France ou dans les régions frontalières à la France. Les informations sur ces séismes ont été trouvées sur le site du RAP (Réseau Accélérométrique Permanent). Nous disposons des informations suivantes pour chaque séisme :

− date et heure d’occurrence ;

− coordonnées géographiques (longitude et latitude) de la zone cible (station de me-

sure accélérométrique) ;

− profondeur du séisme, en km ;

− amplitude maximale de l’accélération enregistrée dans la zone cible pour chacune

des composantes (horizontale et verticale) ;

− la distance épicentrale (distance entre la zone source et la zone cible), en km.

A partir de ces informations nous déduisons :

− la distance hypocentrale de chaque zone cible à partir de la profondeur du séisme

et de la distance épicentrale ;

Analyse Probabiliste de la séismologie. SCM SA - CEA/DEN, Rapport 2, août 2007. 26

− la PGA maximale à partir des valeurs des deux composantes horizontales maxima-

les.

Nous regroupons l’ensemble des informations obtenues par chacune des zones cibles pour chacun des séismes. Nous obtenons ainsi 218 valeurs de PGA pour un séisme de magnitude locale égale à 3.

La figure ci-dessous représente les valeurs d’accélération en m/s² en fonction de la dis-tance hypocentrale.

0.000

0.020

0.040

0.060

0.080

0.100

0.120

0.140

0.160

0.180

0.200

0 25 50 75 100 125 150 175 200 225 250

Distance hypocentrale (en km)

PGA (m/s²)

Figure 19 : PGA en fonction de la distance hypocentrale pour une magnitude locale de 3

La PGA est très élevée à proximité du séisme et diminue fortement en s’éloignant de l’épicentre. On a donc une atténuation de l’accélération de la zone source à la zone cible. Sur ce graphique nous ajoutons la loi de corrélation de Smit définie dans l’équation (2).

Analyse Probabiliste de la séismologie. SCM SA - CEA/DEN, Rapport 2, août 2007. 27

0.000

0.020

0.040

0.060

0.080

0.100

0.120

0.140

0.160

0.180

0.200

0 25 50 75 100 125 150 175 200 225 250

Distance hypocentrale (en km)

PGA (m/s²)

PGA mesurée PGA calculée

Figure 20 : PGA mesurée (en bleue) et calculée (en rouge) en fonction de la distance hypocentrale

La relation définie par Smit ne prédit pas d’aussi grandes valeurs que celles mesurées par les stations. Au maximum, c'est-à-dire à une distance hypocentrale de 1 km, l’équa-tion (2) donne une PGA égale à 0.0257 m²/s. Le maximum enregistré par une station sur cette figure est une PGA égale à 0.181 m²/s pour une distance hypocentrale de 12 km.

Si nous zoomons maintenant sur les valeurs de PGA inférieures à 0.030 m/s², nous obte-nons le graphique de la figure ci-dessous. Les courbes en vert et en orange représentent respectivement l’intervalle de confiance supérieur et inférieur pour un niveau de con-fiance de 95 %.

0.000

0.005

0.010

0.015

0.020

0.025

0.030

0 25 50 75 100 125 150 175 200 225 250

Distance hypocentrale (en km)

PGA (m/s²)

Figure 21 : PGA mesurée (en bleue) et calculée (en rouge) en fonction de la distance hypocentrale

pour des valeurs inférieures à 0.03 m/s²

Analyse Probabiliste de la séismologie. SCM SA - CEA/DEN, Rapport 2, août 2007. 28

Sur le graphique ci-dessus, les valeurs calculées par l’équation (2) sous-estiment large-

ment la PGA vraie. Nous écrivons l’équation de la courbe de la meilleure approximation par un logarithme (en rouge sur la figure ci-dessous), par une puissance (en orange sur la figure ci-dessous) et par un exponentielle (en vert sur la figure ci-dessous).

-0.005

0.000

0.005

0.010

0.015

0.020

0.025

0.030

0 25 50 75 100 125 150 175 200 225 250

Distance hypocentrale (en km)

PGA (m/s²)

PGA mesurée Logarithmique (PGA mesurée)Puissance (PGA mesurée) Exponentiel (PGA mesurée)

Figure 22 : ajustement PGA mesurée/distance hypocentrale par différentes méthodes

Parmi les trois tests d’ajustement, celui de la puissance se rapproche le plus des valeurs mesurées, mais encore une fois les valeurs proches du séisme sont sous-estimées. Il n’existe pas de relation déterministe simple entre l’intensité ou l’accélération en fonc-tion de la distance. Les données sont trop dispersées pour que l’on ajuste une quelconque

loi, qu’elle soit logarithmique ou exponentielle. La cause principale de cette dispersion est la géologie, qui varie énormément d’un en-droit à un autre. Il est possible de trouver une accélération plus forte à 50 km qu’à 10 km de l’hypocentre. Certains sols ont la propriété d’atténuer les ondes, alors que d’autres

vont les amplifier, comme le sable par exemple. Pour une distance donnée, on aura donc une multitude d’accélérations possibles. Par exemple, sur la figure 8, pour une distance de 27 km, on enregistre des accélérations comprises entre 0.00041 m/s² et 0.014 m/s². La relation d’atténuation est censée suivre une loi logarithmique, la probabilité d’avoir

une certaine accélération à une distance r de la zone source est alors supposée suivre une loi log- normale.

La probabilité d’avoir une accélération A supérieure à une accélération seuil *A , sa-

chant que la magnitude du séisme est m et que la zone cible se situe à une distance r de la zone source, est définie par l’équation log – normale suivante.

( )ln

ln * ln*\ , 1

A

A AP A A m r φ

σ

−> = − (5)

Analyse Probabiliste de la séismologie. SCM SA - CEA/DEN, Rapport 2, août 2007. 29

Où :

− *A est l’accélération seuil enregistrée dans la zone cible (en m/s²) ;

− lnA est la moyenne des logarithmes des accélérations enregistrées dans la zone cible ;

− m est la magnitude du séisme dans la zone source ;

− r est la distance entre la zone cible et la zone source.

Prenons un exemple pour mieux comprendre comment cette loi s'applique.

50 kmr =

Zone cible

Zone source

3m =

Nous avons une zone cible qui enregistre les accélérations et une zone source, à une dis-

tance 50r km= de la zone cible, où le ou les séismes vont « naître ».

10 séismes de magnitude 3 ont eu lieu dans la zone source. 10 accélérations ont été enre-gistrées dans la zone cible, suite aux 10 séismes de la zone source. L’accélération maxi-

male enregistrée est max 0.15 / ²A m s= et l’accélération minimale est max 0.01 / ²A m s= .

Le tableau ci-dessous présente les accélérations enregistrées dans la zone cible suite aux 10 séismes de magnitude 3.

Séismes PGA (m/s²)

1 0.02

2 0.01

3 0.1

4 0.12

5 0.15

6 0.03

7 0.04

8 0.1

9 0.09

10 0.13

Figure 23 : Accélérations enregistrées dans la zone cible pour 10 séismes de magnitude 3

Analyse Probabiliste de la séismologie. SCM SA - CEA/DEN, Rapport 2, août 2007. 30

La figure ci-dessous présente la densité de probabilité définie par l’équation (5) à partir

des données de la figure 24.

0

0.2

0.4

0.6

0.8

1

0.01

0.02

0.04

0.05

0.07

0.08

0.1

0.11

0.13

0.14

0.16

0.17

0.19

0.2

0.22

0.23

0.25

0.26

0.28

0.29

0.31

0.32

0.34

0.35

0.37

0.38

0.4

PGA (m/s²)

Probabilité

Figure 24 : Densité de probabilité de l’accélération

Le seuil d’accélération est fixé à 0.1 m/s². La probabilité que la zone cible, située à une

distance épicentrale de 50 km de la zone source, soit soumise à une accélération supé-rieure ou égale à cette accélération seuil sachant un séisme de magnitude 3 est égale à 0.28. Remarque

On considère ici que la loi qui régit l’apparition d’une accélération est bien définie. Ce choix n’est pas justifié en réalité. L’atténuation de l‘accélération dans le sol est un phé-nomène qui n’est pas réellement connu. Elle dépend d’un très grand nombre de paramè-tres tels que le type de roche, la profondeur du séisme, etc.…Il n’est donc pas correct de

supposer que la probabilité d’une accélération suit une loi connue alors que le phéno-mène ne l’est pas. Il vaut mieux, comme nous l'avons vu au paragraphe précédent, tra-vailler sur les données réelles et non sur une loi paramétrique factice. La figure ci-dessous présente la comparaison entre les résultats avec une loi log - nor-

male et notre approche qui utilise uniquement les données d’observations pour créer la loi de probabilité.

Analyse Probabiliste de la séismologie. SCM SA - CEA/DEN, Rapport 2, août 2007. 31

0

0.2

0.4

0.6

0.8

1

0.01

0.03

0.05

0.07

0.09

0.11

0.13

0.15

0.17

0.19

0.21

0.23

0.25

0.27

0.29

0.31

0.33

0.35

0.37

0.39

PGA (m/s²)

Probabilité

Loi log - normale Loi définie à partir de l'historique

Figure 25 : Comparaison des deux lois probabilistes

Avec une approche probabiliste qui repose uniquement sur les données on obtient une

probabilité de dépassement du seuil de d’accélération égale à 0.5.

3. Formule générale pour l’estimation probabiliste de l’aléa sismique

L’objectif de l’étude probabiliste est de connaître la probabilité qu’une accélération seuil donnée soit dépassée dans la zone cible, quelle que soit la magnitude du séisme de la zone source. Pour cela nous disposons de :

− La probabilité d’occurrence qu’un séisme de magnitude m se produise dans chaque

zone source sur une période de temps donnée ;

− La probabilité d’occurrence annuelle d’une séisme de magnitude minm M≥ ;

− La probabilité d’occurrence qu’une accélération en zone cible dépasse une accéléra-

tion seuil quelle que soit la distance entre la zone cible et la zone source pour chaque magnitude. Pour une zone source donnée la probabilité de dépassement est définie par l’équation

suivante :

( ) ( )( )max

min

minmin,* \ *\ ,

M

source cible

m M rsource m M

P A A P m m M P A A m r dmdrλ=

≥ > ≥ × >= × ∫ ∫

Où :

− min,source m Mλ > est le taux annuel de séismes de magnitude supérieure ou égal à la

magnitude minimale choisie minM dans la zone source ;

Analyse Probabiliste de la séismologie. SCM SA - CEA/DEN, Rapport 2, août 2007. 32

− min\SourceP m m M ≥ est la probabilité d’occurrence d’un séisme de magnitude

m dans la zone source;

− ( )*\ ,cibleP A A m r> est la probabilité (d’occurrence) qu’un séisme de magnitude

m engendre une accélération supérieure à l’accélération *A pour un couple dans la zone

cible. La multiplication des deux termes dans l’intégrale donne la probabilité d’occurrence

qu’un séisme de magnitude m dans la zone source engendre une accélération *A A>

dans la zone cible sur la période de temps considérée (exemple : historique de séismes sur une période de 30 ans). On intègre ensuite selon la distance et la magnitude pour avoir un résultat pour toute les magnitudes et toute les distances.

Pour obtenir le taux annuel de dépassement (ou la probabilité annuel de dépassement) d’une accélération dans la zone cible, il suffit de multiplier la somme par le taux annuel

de dépassement de la magnitude minm M= .

Pour obtenir la probabilité toutes zones sources confondues, on somme sur toutes les zo-

nes sources.

( ) ( )( )min

max

min

min1,

* \ *\ ,MN

source ciblei rm M

source m MP A A P m m M P A A m r dmdrλ

= =≥

> ≥ × >= ×∑ ∫ ∫

Où N est le nombre de zones sources.

Conclusion générale sur les lois utilisées

1. Loi probabiliste

L’utilisation d’une loi de Poisson ou log – normale ou de toute autre loi empirique n’est pas justifiée dans le cas de l’étude d’un phénomène sismique. Les processus d’apparition et de propagation des séismes dans le sol ne sont pas suffisamment connus, il n’y a donc

aucune raison de considérer que les données suivent telle ou telle loi. Il faut utiliser l’his-torique dont on dispose sur les séismes afin de déterminer les probabilités dans la zone source et la zone cible. C’est à partir de cet historique que nous créerons les lois de pro-babilité.

2. Utilisation de lois déterministes

Dans les approches décrites plus haut, relatives à la littérature consultée, on constate un mélange entre approche probabiliste et approche déterministe. On commence par une loi probabiliste (Poisson, ou log-normale), mais ensuite on fait intervenir une loi détermi-niste, obtenue par ajustement (calcul de coefficients).

Ce mélange n'est pas sain : il faut en réalité utiliser des lois probabilistes, du début à la fin.

Analyse Probabiliste de la séismologie. SCM SA - CEA/DEN, Rapport 2, août 2007. 33

Références bibliographiques

[1] Marin, Sylvie – Avouac, Jean- Philippe – Nicolas, Marc – Schlupp, Antoine: A probabilistic Approcah to Seismic Hazard in Metropolitan France. Bulletin of the Seis-

mological Society of America, vol.94, n°6, p. 2137 – 2163, Décembre 2004. [2] Beauval, Céline: analyse des incertitudes dans une estimation probabiliste de l’aléa sismique, exemple de la France. Thèse de doctorat de l’Université Joseph Fourier - Grenoble I, 2003.

[3] Martin, Ch. – Secanell, R. : Révision du Zonage Sismique de la France – Etude Probabiliste – Fichier de Sismicité, 2002. [4] Martin, Ch. – Secanell, R. : Développement d’un modèle probabiliste d’aléa sismi-

que calés sur le retour d’expérience, Phase 2 : Calculs et cartographie suivant l’arbre lo-gique défini par le groupe « zonage », mars 2006 [5] Bragato et Slejko : Empirical Ground-Motion Attenuation Relations for the Eastern Alps in the Magnitude Range 2.5–6.3, Bulletin of the Seismological Society of America,

Vol. 95, No. 1, pp. 252–276, February 2005,