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LA NATURE. LE PAYS. LES HOlVlMES

Conception et réalisation :Philippe Oberlé

Editeur: S.A.E.P. - Route de Turckheim- Ingersheim 68.000 Colmar (France)

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Déjà parus dans la même collection africaine aux Editions S.A.E.P. :

- Reflets de la Côte d'Ivoire: la Nature, le Pays, les Hommes

- Côte d'Ivoire, Images du passé (1888-1980), par Ph. Oberlé

- Masques vivants de Côte d'Ivoire, par A. Gnonsoa, A. Kouakou, G. Koré, Ph. Oberlé

- Fleurs d'Mrique Noire, de la Côte d'Ivoire au Gabon, du Sénégal à l'Ouganda, par L. Aké Assi

- Kenya, Terre africaine, par Mario Introia.

Photo de couverture: la garde présidentielle, à Dakar. (cl. Michel Renaudeau/Hoa-Qui).

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AUTEURS:

Philippe BONNEFONDMichel BOULARDJean et Michèle COPANSChristian COULONMariétou Diongue DIOPJacques GAILLARDJean-Marc GASTELLUYoussouph Mbargane GUISSEPhilippe OBERLEMarie-Christine et Gérard SALEMAbdou SYLLA

PHOTOGRAPHES:

Alain-Marc OBERLE : nO 2 - 23 - 27 - 28 - 30 - 31 - 32 - 33 - 34 - 35 - 36 - 37 - 39 - 50 - 52 - 54 ­55 - 56 - 57 - 61 - 63 - 65 - 66 - 68 - 70 - 71 - 72 - 74 - 75 - 77 - 79 - 80 - 84.

Michel RENAUDEAU (Hoa-Qui) : nO 1 - 5 - 6 - 8 - 9 -11 - 16 -17 -18 - 20 - 21 - 24 - 25 - 26 ­38 - 40 - 41 - 42 - 45 - 47 - 53 - 59 - 64 - 67 - 69 - 76 - 78 - 82.

J.-L. BLANCHET (Pitch) : nO 12 - 58 - 60 - 62 - 81.Michel BOULARD: n° 14.G. BOUTIN (Hoa-Qui) : n° 29.Ph. CASSARD (Hoa-Qui) : nO 48 - 73.Bob CHEMIN (Fitch) : n° 3.C. DEJOUX (Fitch) : n° 43 - 44.Alassane DIOP: nO 83.A. GUILLEMONT (Pitch) : nO 4 - 7.HEUCLIN (Fitch) : nO 13.Michel HUET (Hoa-Qui) : n° 46 - 49 - 51.Patrick LEGER (Hoa-Qui) : nO 22.RAFI (Hoa-Qui) : nO 19.G. VIENNE / F. BEL (Pitch) : n° 10.

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INTRODUCTION

Pourquoi un nouveau livre de présentation du Sénégal? La raison enest simple. Les guides touristiques et les albums photographiques privilé­gient à l'excès les sujets "touristiques". A l'opposé, les ouvrages scientifiquestraitent de sujets spécifiques, étroits, et souvent de manière rébarbativepour les non spécialistes.

Entre ces deux catégories d'ouvrages, un fossé existe que nous souhai­tons combler. Notre objectif, peut-être ambitieux, vise à présenter le Sénégal,tout le Sénégal, en une cinquantaine de notices, courtes mais très densesen informations, à l'intention du grand public cultivé et des esprits curieux.

Les auteurs qui ont accepté de participer au projet ont tous vécu ou vi­vent encore au Sénégal : leurs textes reflètent une connaissance en profon­deur du pays décrit.

L'illustration n'a pas été négligée: 84 photographies ont été sélectionnéesparmi plusieurs centaines disponibles. Nous avons voulu montrer desimages caractéristiques du Sénégal, images parlantes par elles-mêmes,

• tout en mettant en valeur la diversité du pays. Diversité dans les paysa­ges : de la savane à la forêt,. les activités économiques : du ramassage arti­sanal du sel à l'excavatrice géante des phosphates de Taïba ,. l'habitat:des cases traditionnelles au prototype de M. Pedroza,. l'hôtellerie: du dis­cret hôtel de Nema Kadior au prestigieux Teranga , etc.

En espérant que cette formule nouvelle connaisse le succès, il nous resteà vous souhaiter une agréable découverte de ce pays aussi passionnantqu'attachant: le SENEGAL.

Philippe Oberlé.

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LA NATURE

LA TERRE ET LES SAISONS

Le Sénégal a une superficie de 196700 km2, soitun peu plus du tiers de celle de la France. Le paysse situe entre le 12e et le 17e parallèle de latitudenord, soit à mi-distance du Tropique du Cancer etde l'Equateur. Dakar se trouve sensiblement à lamême latitude que Khartoum ou que la Martinique.Le pays mesure 700 km dans sa plus grande di­mension.

Le Sénégal jouit d'un climat très particulier, dû àsa situation tampon entre l'océan Atlantique et lesimmensités chaudes et sèches du Sahel.

De novembre à mai, la saison sèche se caracté­rise sur la façade maritime par un alizé rafraîchis­sant et humide venant du large, tandis que l'inté­rieur du pays est soumis à l'harmattan, vent sec enprovenance du Sahara, frais la nuit mais trèschaud le jour, et souvent chargé de sable.

La période dite de "l'hivernage", ou saison despluies, de juin à octobre, est en réalité fort contras­tée. Les pluies peuvent commencer dans le sud-estdès le mois d'avril, mais il ne pleut à Dakar que versjuillet/août. A l'époque coloniale, on disait que lapremière grande averse tombait toujours à Dakarsur le défilé du 14 juillet!

Les pluies sont plus abondantes dans le sud dupays, en Casamance, que vers le nord, qui devientmalheureusement très sahélien. La moyenne an­nuelle des pluies est de 1 500 mm à Ziguinchor(avec 90 journées pluvieuses), 600 mm à Dakar(40 jours), 400 mm à Saint-Louis (30 jours).

Les températures sont plus élevées dans l'inté­rieur du pays que sur la côte: moyenne annuelle de25° à Dakar mais 28° à Linguère ou Tambacounda.A Dakar, le maximum journalier dépasse rarement30° tandis qu'à Podor ou Matam il atteint souvent40° en avril/mai, à la fin de la saison sèche. Danstout le pays, les mois les plus doux sont ceux de dé­cembre et janvier.

Le Sénégal est peu montagneux. Les humoristesprétendent volontiers que la plus haute montagneest le "tas d'arachide" dans le port de Dakar. En réa­lité, si tout l'ouest du pays est plat (moins de 50 md'altitude à l'exception du plateau de Thiès qui at­teint 130 m !), le sud-est présente par contre unagréable relief, notamment autour de Kédougou,avec le point culminant du pays: 581 m. Ce sont làles premiers contreforts du Fouta-Djalon, dont lesommet (l 515 m) se situe en Guinée.

n faut signaler enfin un relief bien connu de tousles touristes: les buttes des Mamelles, qui culminentà 105 m d'altitude, tout près de Dakar. Ce sont lesrestes d'un ancien volcan de l'ère quaternaire.Toute l'extrémité de la presqu'île du Cap Vert et l'îlede Gorée se caractérisent par un relief rocheux etdéchiqueté, d'origine volcanique, qui contraste avecle reste du littoral sénégalais, plat et sableux.

FLEUVES ET RIVIERES

Le fleuve Sénégal se forme à Bafoulabé, au Mali,par la réunion des rivières Bafing et Bakoye, dontles sources sont en Guinée. A la jonction de troispays: Sénégal, Mauritanie, et Mali, le fleuve reçoitencore la Falémé, et marque ensuite la frontièreentre le Sénégal et la Mauritanie jusque près de sonembouchure, non loin de Saint-Louis.

Le fleuve apporte la vie en une région qui seraitsans lui tristement aride et désolée. Sans allerjusqu'à la comparer à la vallée du Nil, la vallée dufleuve Sénégal est tout de même d'apparence mira­culeuse et les pluies de la lointaine Guinée assurentla survie de très nombreux agriculteurs. Comme lescrues du Nil, les crues du Sénégal sont attendueschaque année avec anxiété. Entre juillet et octobre,

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la crue recouvre des terres qui, gorgées d'eau, sontmises en culture (sorgho surtout) en novembre,après la décrue.

Entre Podor et Saint-Louis, le fleuve assure l'irri­gation de plusieurs grands périmètres de rizicul­ture, et près de Richard Toll, il a permis de planter8 000 hectares de canne à sucre.

A Bakel, le débit moyen annuel est d'environ800 m3/seconde, mais le débit atteint ou dépasse5 000 m3/seconde pendant la crue. Le fleuve est sai­sonnièrement navigable de Saint-Louis à Podor,mais la route a tué la majeure partie du transportfluvial. La construction de barrages régularisant lefleuve permettra peut-être de relancer l'activité dutransport fluvial.

La Gambie constitue le second fleuve de la ré­gion, mais la majeure partie de son cours se dérouleen République de Gambie et non au Sénégal. LaGambie descend du Fouta-Djalon, en Guinée, ettraverse le Sénégal oriental (et notamment le ParcNational du Niokolo-Koba) sur environ 300 km,avant de pénétrer en République de Gambie.

La Casamance serait plus une grande rivièrequ'un fleuve. Sa longueur est d'environ 300 kmcontre 1 700 pour le Sénégal (depuis la source de laBafing). Dans son cours inférieur, bordé d'une vé­gétation de Mangrove, remontent des eaux salines.En périodes de basses eaux, la salinité remontejusqu'à Sédhiou (plus de 170 km),

Le Saloum est plutôt connu par son estuaire: larivière elle-même, née dans la région du Ferlo, estintermittente et même navigable à partir de Kao­lack, ville qui possède un port fluvial encore actif.

Le Ferlo, enfin, qui apparaît en pointillé sur cer­taines cartes, n'est plus qu'une rivière fantôme.Pourtant, il y a quelques siècles ou millénaires, elleétait encore un bel affiuent du Sénégal. Il n'en sub­siste plus que la dépression du lac de Guiers qui seremplit par le fleuve Sénégal lors des crues. Unbarrage y conserve alors l'eau, qui alimente parpipe-line la ville de Dakar.

LE COUVERT VEGETAL

Sur les cartes des zones végétales de l'Afrique(qui correspondent en gros aux zones climatiques),

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le Sénégal appartient à deux grandes zones. Lamoitié nord du pays se rattache à la zone sahé­lienne (qui englobe aussi le sud de la Mauritanie, leMali, le Niger, le Tchad), tandis que le sud se rat­tache à la zone soudanienne (qui couvre la Guinée,la Haute-Volta, la moitié nord de la Côte d'Ivoire, leTogo, le Bénin, etc.).

Dans la zone sahélienne, les paysages de steppesont austères et secs, avec des arbres épineux ra­bougris et clairsemés, un tapis herbacé maigre etdiscontinu. L'arbre typique est l'acacia, dont les di­verses variétés confèrent au paysage son cachet siparticulier: Acacia senegal ou verek (qui produit lagomme arabique, autrefois objet d'un commerceimportant), Acacia albida ou kad, Acacia seyal ousourour, Acacia raddiana ou sing.

Le kad mérite une mention spéciale. Ses feuillesdonnent un excellent fourrage pour le bétail, et sesfruits sortent au printemps, en pleine saison sèche,bien à propos. C'est pourquoi paysans et éleveurs lerespectent et ne le coupent pas.

Outre les acacias, il faut citer le baobab (Adanso­nia digitata, ainsi nommé en l'honneur du grandnaturaliste français Michel Adanson, qui publia une"Histoire naturelle du Sénégal" en 1757), le jujubier(Zizyphus mauritiana) aux fruits comestibles, lesoump (Balanites aegyptiaca) qui donne des fruitsà pulpe sucrée avec une amande huileuse parfoisutilisée pour la fabrication artisanale de savon.

Les steppes sont parcourues par des troupeauxde bétail qui broutent immédiatement les jeunespousses et les herbes tendres, interdisant tout déve­loppement du couvert végétal.

La zone soudanienne est le domaine de la sa­vane, qui diftère de la steppe par un tapis herbacébeaucoup plus dense et continu. La savane peutêtre herbeuse (pratiquement pas d'arbres), ou ar­bustive (peuplée d'arbustes), ou arborée (arbrespeu abondants), ou boisée (arbres abondants).Lorsque les arbres forment un couvert presquecontinu, ce n'est plus la savane, mais la forêt claire.

Les arbres typiques de la savane sont le caïlcé­drat ou acajou du Sénégal (Khaya senegalensis), lenéré (Parkia biglobosa) dont les fleurs forment debelles sphères rouges, le kapokier (Bombax biono­pozense) aux grandes fleurs rouges et aux goussesrenfermant le duveteux kapok, l'anacardier (Ana­cardium occidentale) qui donne la pomme cajou la­quelle porte la noix de cajou, le manguier (Mangife­ra indica), le palmier à huile (Elaeis guineensis), letamarinier (Tamarindus indica), le karité (Butyros-

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permum parkii) dont les fruits servent à faire le"beurre de karité", le fromager (Ceiba pentendra)aux somptueux contreforts, et le palmier rônier(Borassus aethiopium), précieux pour son "choupalmiste", ses fruits à pulpe sucrée et surtout sasève qui, fermentée, donne le "vin de palme". Unseul arbre peut fournir en un mois jusqu'à 300 litresde sève, mais ensuite il meurt.

La savane souffre régulièrement du fléau des"feux de brousse". Ces feux présentent l'avantagede favoriser la repousse rapide d'une herbe tendreappréciée des troupeaux, mais de nombreux arbresen souffrent et en périssent.

Trois régions méritent une mention particulière,concernant le couvert végétal. Les régions côtièresd'abord: il faut signaler le remarquable progrèsdes plantations de filaos et d'eucalyptus qui ont no­tamment permis de fixer 18 km de dunes littoralesdans la presqu'île du Cap Vert.

Les estuaires du Saloum et de la Casamance en­suite, caractérisés par une végétation touffue depalétuviers (Rhizophora racemosa) aux innom­brables racines mi-aquatiques et mi-aériennes en­chevêtrées, constituant la "mangrove".

La région de la Basse-Casamance enfin, avec lesseules forêts denses humides du Sénégal, de typesubguinéen, avec arbres à feuilles caduques, no­tamment de beaux irokos (Chlorophora regia) etmampatans (Parinari excelsa). De larges parties decette belle forêt naturelle ont malheureusement étédétruites et remplacées par des alignements de pal­miers à huile.

LE BAOBAB, ARBRESYMBOLE

S'il est un arbre symbole du Sénégal, c'est bien lebaobab. Il est omniprésent dans les paysages, l'ima­gerie et l'imaginaire du pays...

Son nom scientifique, Adansonia digitata, évo­que la mémoire du grand botaniste français MichelAdanson, qui publia une remarquable "Histoire na­turelle du Sénégal" en 1757.

Roi des arbres et arbre royal, son tronc énorme(il peut atteindre 8 mètres de diamètre D, sesbranches difformes et tourmentées, son diadème

de feuillage gigantesque, rendent le baobab recon­naissable de très loin !

Chacun connaît ses fruits, les longs "pains desinge", dont les graines sont noyées dans une pulpefarineuse comestible, et son écorce grisâtre, épaisse,qui évoque la peau d'un pachyderme! Cette écorcefibreuse est détachée du tronc, à la base, en lanières,par les villageois qui l'utilisent pour confectionnerdes cordages. Le tronc "cicatrise" ensuite et prendun aspect boursouflé, côtelé. Les feuilles sont utili­sées, fraîches ou pilées, comme aliment.

Ce que l'on connaît généralement moins, ce sontles splendides fleurs du baobab, car elles sont éphé­mères. Au début de la saison des pluies, elles s'ou­vrent, une nuit, blanches coupes ouvertes, immacu­lées, d'apparence cireuse, et périssent dès lelendemain soir.

Le baobab recèle d'autres secrets. Certaines lé­gendes disent qu'il n'existe que de vieux baobabs etpas de jeunes! En fait, la très jeune plante res­semble plutôt... à l'arachide! Les jeunes rameauxsont souples et verts comme ceux des plantes her­bacées. Ce n'est que plus tard que les tiges et les ra­cines durcissent pour prendre une structure li­gneuse. Autre signe trompeur: le jeune baobabconserve ses feuilles même en saison sèche, alorsque les "adultes" les perdent...

Puis l'adulte devient vieillard: le vieux baobabpeut dépasser allègrement les 1 000 ans et surpas­ser en longévité le célèbre Mathusalem! Le secretde cette longévité: peut-être la nature spongieusede ses tissus qui lui permet d'emmagasiner uneénorme quantité d'eau et de traverser ainsi sereine­ment les plus éprouvantes saisons sèches. Un jour,pourtant, ses tissus internes meurent, le tronc de­vient creux, l'arbre finit par mourir. Il peut aussiêtre renversé lors d'une forte tempête, offrant alorsle spectacle étrange d'une sorte de caverne béante,sombre et mystérieuse.

En certains lieux, comme à Fadiouth, le baobabenveloppe de son mystère de vieux cimetières.Chez les Sérères, sa caverne centrale abrite lesrestes de défunts griots. La tradition veut que cestroubadours, à la fois appréciés, craints, méprisés,ne soient pas mis en terre.

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PLAIDOYER POUR LESPARCS NATIONAUX

Un excellent livre écrit sur le Sénégal, par Ar­mand Lunel, en 1966, présente une véritable ra­dioscopie du pays. On y trouve tout: l'histoire, lespopulations, la capitale, la brousse, "l'air du temps",mais pas un mot sur le patrimoine naturel, faune etflore, alors que le Parc National du Niokolo Kobaexiste depuis 1952.

Quatorze ans plus tard, le non moins bon "Séné­gal", par Christian Saglio, dans la collection "PetitePlanète", évoque le sujet mais sur un ton de raillerieet de mépris: "Pour peupler les parcs, on a importédes gazelles du Maroc, des girafes du Niger etmême des lions... de France (...). La redoutable par­comanie gagne les îles du Saloum après avoir gan­grené le delta du fleuve Sénégal l"

Décidément certains Français se font une spé­cialité de la courte vue et de l'ignorance! Quid'autre que les Français de l'époque coloniale ontquasi exterminé, par une chasse aveugle, la grandefaune de l'Afrique de l'Ouest, tandis que les Anglaisérigeaient patiemment parcs et réserves en Mriquede l'Est, léguant aux jeunes états indépendants une"rente" fructueuse puisque le tourisme constitue àprésent la seconde ressource en devises du Kenya,après le café?

Où se trouve la parcomanie lorsque l'on recenseen tout au Sénégal huit parcs ou réserves, dont cer­tains doivent être recherchés sur la carte à l'aided'une loupe, tandis que le Kenya s'enorgueillit au­jourd'hui de protéger quarante parcs ou réserves?

Heureusement, pendant que certains s'achar­naient à détruire ou à dénigrer, d'autres se met­taient au travail et, patiemment, telles des fourmislaborieuses, à petits pas, tentaient de sauver ce quipouvait encore l'être. Au premier rang d'entre eux,André-Roger Dupuy qui a voué une bonne partiede sa vie à la cause de la protection de la nature auSénégal, solidement appuyé par les plus hautesautorités du pays.

La protection intégrale de certaines zones de­vient une impérieuse nécessité dans tous les pays.Les motifs se situent à trois niveaux différents maiscomplémentaires: pour la science, pour l'économie,pour l'homme.

Pour la science, chaque espèce animale ou végé­tale existant à la surface du globe mérite d'êtreconservée. Chaque disparition définitive est un ap-

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pauvrissement du patrimoine mondial. Nous avonsle devoir de transmettre intact aux générations fu­tures ce que nous ont légué les générations passées.Bien des découvertes peuvent encore découler del'étude des plantes et des animaux. Sauver une zonetypique de chaque "biotope naturel" d'un pays doitconstituer un objectif prioritaire. Le Sénégal l'acompris en protégeant des zones fort diverses: sa­vane et forêt soudano-sahélienne, forêt humide,mangrove, îles rocheuses, cordon littoral, delta dufleuve.

Pour l'économie, les parcs créent des emplois di­rects et indirects par le biais du tourisme: hôtelle­rie, transports, vente d'objets souvenirs, etc. Maisles parcs sont aussi des stations de recherche envue de l'élevage des animaux sauvages (antilopes)pour la boucherie. Le jour n'est pas loin où cet éle­vage d'un nouveau type apportera une contribu­tion non négligeable. L'étude des plantes, quant àelle, peut déboucher sur la production de médica­ments.

Pour l'homme, enfin, les parcs apportent ce quisera le plus précieux au xxr siècle: des havres derepos et de calme, des lieux de communion avec lanature, qui permettront à l'homme futur de s'éva­der et de ne pas craquer complètement, dans sonunivers quotidien de bitume, de béton et d'acier.

Ultime bienfait des parcs boisés, leur contribu­tion à la sauvegarde et à la régulation du climat,leur rôle dans la lutte contre la désertification. Sansla protection officielle, les dernières forêts auraientdéjà disparu, dans la fumée bleutée du charbon debois...

LE NIOKOLO KOBA

Le Parc National du Niokolo Koba a été officiel­lement créé en 1954, avec une superficie de260 000 hectares. Grâce à des extensions succes­sives, il couvre à présent 813 000 hectares.

Le paysage de savane boisée offre des variationssuffisantes pour ne pas entraîner la monotonie. Sa­vanes herbeuses avec arbustes épineux, gorges etméandres des rivières Gambie et Niokolo Koba, ga­leries forestières où même les éléphants deviennentinvisibles, bosquets isolés où peuvent se cacher les

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lions, mares fréquentées par les ongulés, galeries debambous: le visiteur succombera vite au charmed'une nature sauvage et typiquement africaine.

Pendant la saison des pluies, la plupart des pistesdeviennent impraticables. La bonne saison pour vi­siter le parc s'étend de fin octobre à fin juin. Unhôtel confortable attend les visiteurs à Simenti, descampements plus rustiques existent à NiokoloKoba et à Badi. De plus, divers sites sont aménagéspour le camping.

Quels sont les animaux présents dans ce parc?Les Eléphants et les Lions sont les plus prestigieux,mais aussi les plus difficiles à observer. De mêmepour les Panthères, animaux nocturnes. On verraplus facilement des Buffles, petits Buffles forestiersau pelage rougeâtre, et grands Buffles de savane.Ils se rendent aux points d'eau matin et soir et pas­sent souvent les heures chaudes de l'après-midi àl'abri des sous-bois.

Parmi les Antilopes, les plus courantes sont leCobe de Buffon, très abondant et facile à voir dansles prairies dégagées, le Cobe onctueux, grandeAntilope aux longues cornes, le Guib harnaché,petit animal, l'Hippotrague, ou Antilope-cheval, degrande taille comme l'indique son surnom, l'Oure­bi, le Grand Bubale, à la tête curieusement allongée,le Céphalophe à flancs roux, petite Antilope de40 cm de haut qui fréquente les sous-bois. Plus rare,l'Eland de Derby, à la robe fauve pâle rayée deblanc, et aux cornes magnifiques.

Les petits carnivores tels que le Caracal, le Chatganté, la Civette, trapue avec une queue anneléecourte, la Genette, très fine avec une longue queueannelée, la Mangouste, le Serval, de mœurs noc­turnes, peuvent se rencontrer au détour d'une piste,au coucher ou au lever du soleil. Le Lycaon, sortede chien sauvage qui chasse en bande, peut se voirde jour.

Les Singes abondent: Cercopithèques, Patas etCynocéphales ou Babouins, mais les Chimpanzéssont peu nombreux et se cachent dans la forêt.Leurs lointains cousins, les petits Galagos, sont noc­turnes. On peut voir leurs yeux rouges briller dansles arbres lorsque la lueur des phares les éblouit,même en dehors du Parc National.

Il faut encore mentionner l'Aulacode, gros ron­geur, l'Ecureuil fouisseur (improprement nomméRat palmiste), l'Ecureuil de Gambie (queue anne­lée), le Lièvre, l'Oryctérope (strictement nocturne, ilcreuse de gros terriers et ne se nourrit que de ter­mites), le Phacochère, le Crocodile et l'Hippopo-

tame présents dans les rivières, le Varan du Nil, desSerpents (Naja, Python, Vipères et Couleuvres), etune grande diversité d'oiseaux: Aigles (martial ethuppé), Aigrettes et Pique-Bœufs blancs, Calaos (àbec rouge, à bec noir, et le Grand Calao d'Abyssinie,de la taille d'un dindon, qui marche plus qu'il nevole), Canards, Cigognes, Francolins, Gangas,Grues couronnées, Guêpiers, Hérons, Ibis, Jabirus,Martins pêcheurs, Oies de Gambie, Pigeons, Pin­tades, Pluviers, Sarcelles, Tisserins, Vanneaux,Vautours...

Même sans rencontrer les rois de la brousse, Elé­phants et Lions, une visite au Niokolo Koba seratoujours fructueuse et constituera une excellenteinitiation à la faune et aux paysages sauvages del'Afrique de l'Ouest.

LA BASSE CASAMANCE

Le Parc National de Basse Casamance, quicouvre 5 000 hectares, a été créé en 1970 dans lebut de préserver une parcelle de la flore et de lafaune typiques de la zone climatique guinéenne hu­mide. Il constitue donc un complément, ou plutôtun pendant, naturel au Parc National du NiokoloKoba, typique de la zone soudanienne de savanesboisées.

Son intérêt essentiel réside dans la belle forêt deSantiaba-Madjak, mais il comporte aussi des zonesde savane et de mangrove. Le parc se visite en voi­ture, en pirogue et aussi à pied, ce qui est rare etdonc appréciable dans un Parc National et mérited'être signalé. Plus de 40 km de chemins ont été tra­cés. Ils permettent de découvrir la forêt dans touteson intimité, avec ses bruits, ses bruissements, sesmurmures, ses odeurs, sans être dérangé par leronflement d'un moteur qui gâche une bonne partdu plaisir de la visite dans les Parcs Nationaux clas­siques où "il est interdit de sortir de son véhicule".

En forêt, on pourra observer (notamment en res­tant patiemment à l'affût dans des miradors judi­cieusement disposés) : Potamochères (sorte de san­gliers au pelage roux), Guibs harnachés, Cobes deBuffon, la rare antilope des marais Sitatunga,Buffies, Ecureuils volants ou Anomalures qui bon­dissent d'arbre en arbre, singes Colobes et Mones,

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dont les ébats s'arrêtent lorsque paraît l'Aigle cou­ronné. La Panthère, nocturne, est difficile à voir,mais on pourra entrevoir un Serval.

Les Reptiles sont discrets, le plus souvent invi­sibles, mais existent: Python royal, Vipères,Mamba vert, Mamba noir, Couleuvres, Caméléoninoffensif. Et bien entendu divers Amphibiens, Gre­nouilles, Crapauds, ainsi que de nombreux Pa­pillons et autres Insectes. Parmi les oiseaux, citonsles Calaos, Bulbuls, Souï-mangas, le superbe Toura­co vert.

Dans la partie "aquatique" du Parc, le visiteurrencontrera les habitants typiques de la mangrove:Crabe-violoniste, poisson Périophtalme, des oi­seaux: Hérons, Aigrettes, Ombrettes, Guêpiers,Martins-pêcheurs, Vautours pêcheurs. Peut-êtreaussi des Crocodiles, des Hippopotames ou le trèsrare Lamantin, mammifère aquatique.

L'accès au parc est facilité par la présence del'aéroport de Cap Skirring à moins de 20 km. Lameilleure saison pour la visite se situe entre dé­cembre et avril (il vaut mieux éviter la saison despluies, entre mai et octobre). Il existe à l'entrée duparc un campement touristique avec des bunga­lows et une belle "case à impluvium" typique de larégion.

LA PROTECTION DESOISEAUX

Les quatre autres Parcs Nationaux du Sénégalsont surtout voués à la protection des Oiseaux.

PARC NATIONAL DES ILES DE LAMADELEINE

Ces îles dont la plus grande se nomme l'Ile auxserpents, sont situées à 3 km de la côte, au sud deDakar et sont inhabitées en raison du manqued'eau douce. D'origine volcanique, ces îles ba­saltiques sont le vestige d'un ancien volcan. Ro­cheuses et inhospitalières, elles abritent toutefoisune centaine d'espèces végétales, dont de curieuxbaobabs nains qui ne dépassent pas, sauf exception,

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2 mètres de hauteur. Les îles ont été érigées en ParcNational en 1976.

De nombreux oiseaux y nichaient autrefois, maisle pillage des nids a entraîné leur exode. Avec unebonne protection, on peut espérer leur retour, sur­tout celui des Sternes. Quelques nids de Phaétonséthérés subsistent dans les rochers. Cet oiseau, sur­nommé "paille-en-queue" possède de longues plu­mes pointues à sa queue. Outre les oiseaux, ce parcprotège la faune marine: Mérous, Murènes, Barra­cudas, Marlins, Cigales de mer.

PARC NATIONAL DE LA LANGUE DEBARBARIE

Ce parc de 2000 hectares créé en 1976 protègeune langue de sable d'environ 30 km de long, prèsde l'embouchure du fleuve Sénégal, au sud deSaint-Louis. De nombreux oiseaux fréquentent ceslieux depuis longtemps. La création du parc lesprotège et facilite la multiplication des espèces pré­sentes.

On y observe surtout des Goélands railleurs, trèsgrégaires (plus de 2 000 couples), Sternes hansel(quelques centaines), Mouettes à tête grise, Sternescaspiennes, Sternes royales, Pélicans blancs et gris,Flamants roses. A l'automne et au printemps, lalangue s'anime du passage de milliers d'oiseauxmigrateurs qui font escale dans ce sanctuaire.

Le parc est aussi un lieu de reproduction pour lesTortues marines (Tortue caret, Tortue verte, Tor­tue à écailles, Tortue luth), espèces mondialementmenacées en raison de la chasse dont elles fontl'objet.

La meilleure période pour visiter ce parc s'étendde mars à août.

PARC NATIONAL DU DELTA DUSALOUM

Créé en 1976, le parc couvre 73 000 hectaresdont les 4/5 en mer. Le delta du Saloum compte desmilliers d'îles et îlots couverts d'une épaisse végéta­tion de mangrove. Univers aquatique coupé dumonde, ce delta a par chance échappé à la présencehumaine et offre un biotope naturel encore à peuprès intact.

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1. Coucher de soleil SUI' une sauane à baobabs.

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2. Une savane en voie de "sahélisation" près de Linguère.

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4. Forêt en Casamance.

3. Cimetière chrétien et baobabs à Fadiouth. Les tombes sont couvertes de débris de coquillages.

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5. Bord de mer au nord de Da/wr. On remarquera la vaste plantation de{daos destinée à stabiliser les du.nes, et le petit lac de Malika.

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6. Vue aérienne de l'île de Gorée. A gauche, le fort;à droite, le port et l'ancienne prison, devenue Musée.

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7, La riuière Nio/wlo Koba, dans le Parc National du même nom,Un hôtel domine la riuière,

9, Le "Bou El Mogdad", ('(;li>hre pour ses croisières touristiques,d'abord sur le fleuue Sénégal, puis sur le Saloum,

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JO 11.

10. Ull petit galago du Séné.gal, petit lémurien demœurs nocturnes.

11. Une lionne au Niokolo Koba.

12. Cobe de Buffon au Ni~kolo Koba.

13. Un gros scorpion noir, Pandinus imperator,mangeant une petite proie.

14. Une étonnante "araignée-crabe",Gasteracantha curvispina.

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15. Gravure du XIX e siècle: "Saint·Louis côté du couchant".

16. A l'est de Kaolacll, des sites protohistoriques, avec des mégalithes,témoignent de L'ancienneté de l'occupation humaine.

17. Statue du général Faidherbe à Saint·Louis.

18. A L'entrée de la Foire Internationale de Dallar, statue équestre d'unhéros du Sénégal du XIX' siècle: Nani Banna, plus connu sous le nomde Lat Dior, par le célèbre sculpteur Cheillh Diop, de Diourbel.

1.9. Pagne imprimé parla SOTIBA, à l'effigie de L.S. Senghor.

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1.9.

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20. Au premier plan, le père de l'Indépendance.Léopold Sedar Senghor.

Au second plan, Abdou Diouf, second Présidentde la République sénégalaise.

21. Le Président et lVIadameAbdoll Diouf flout à droite)en 19 '.

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Toutes les espèces de palétuviers africaines sontprésentes dans la mangrove du delta. Les eaux sontpoissonneuses et les vasières abritent des myriadesde Crabes-violonistes, Huîtres et Périophtalmes, cu­rieux petits poissons qui passent de longs momentshors de l'eau, sur la vase et se déplacent à terre enutilisant leurs nageoires pectorales comme des"pattes".

Des colonies d'oiseaux, attirées par l'abondancede la nourriture aquatique, vivent dans la man­grove, surtout des Aigrettes à gorge blanche, Hé­rons, Sternes royales, Flamants roses, Pélicans gris,J abiIus du Sénégal.

On peut aussi observer dans ce parc des Dau­phins, des Tortues vertes, le rare Lamantin, desCrocodiles. La forêt sèche de Fathala abrite quel­ques Antilopes (Guib harnaché et Céphalophe deGrimm), des Hyènes, Chacals, Phacochères, Singes(pata, Callitriche, Colobe). Mis à part la forêt de Fa­thala, le reste du parc ne se visite qu'en pirogue.Plusieurs campements et gîtes assurent l'héberge­ment.

PARC NATIONAL DES OISEAUX DUDJOUDJ

Créé en 1971, ce parc protège maintenant16 000 hectares du delta du fleuve Sénégal, aunord de Saint-Louis. Depuis sa création, les colo­nies d'oiseaux ont prospéré très rapidement, demême que la fréquentation des oiseaux migrateurs.Avec plusieurs millions d'oiseaux qui vivent là oufréquentent régulièrement les lieux, le Parc Natio­nal des Oiseaux du Djoudj est devenu l'un des toutpremiers sanctuaires d'oiseaux du monde entier,un haut-lieu que tout ornithologiste profession­nel ou amateur se doit de visiter une fois dans savie.

Pour les migrateurs qui fuient les rigueurs del'hiver en Europe, la désertification croissante duSahara et du Sahel a allongé la distance à couvrir.Le delta du Sénégal est devenu le refuge indispen­sable après un survol de 2 000 km de désert. Laliste complète des oiseaux du Djoudj déborderaitdu cadre de ce chapitre: on y a dénombré plus de180 espèces différentes! Nous ne citerons que lesprincipaux oiseaux: Sternes, Goélands, Mouettes,Petits Gravelots, Chevaliers Guignette, Canards,Sarcelles, Oies de Gambie, Pélicans blancs et gris,

petits et grands Cormorans, Aigrettes, Tantales,Spatules, Hérons, Anhingas, Aigles pêcheurs, Cir­caètes Jean le Blanc.

Attirés par cette avifaune, des prédateurs telsque les Chats gantés, Chacals, Civettes, Man­goustes fréquentent le parc. Et les Phacochères sontnombreux à s'ébrouer dans les vasières...

Une visite au Djoudj à l'époque des grandes mi­grations, lorsque des nuages de centaines demilliers d'oiseaux obscurcissent le ciel, est une expé­rience extraordinaire qu'il faut avoir vécue. Lameilleure période s'étend de novembre à avril.Pour bien observer les oiseaux, il faut être présenttôt le matin et tard le soir. Un campement touristi­que permet l'hébergement sur place.

LE PETIT MONDE DESARTHROPODES

Le Sénégal, côté faune, est surtout connu et ap­précié pour ses grands Mammifères et ses nom­breux Oiseaux. Mais il se trouve habité aussi parune toute autre catégorie d'animaux, celle des Ar­thropodes, autrement dit les Insectes, les Arach­nides, et les Mille-pattes. Tous ont en commun,avec les Crustacés, leurs cousins des mers, d'avoirle squelette à l'extérieur, formant une carapacecomposée de pièces articulées entre elles de ma­nière à permettre le mouvement, un peu à la façondes armures moyenâgeuses, en beaucoup plusléger, toutes proportions gardées, et surtout plus ef­ficace.

Bien moins remarquée, parce que de taille petiteou très petite, voire minuscule, la faune des Arthro­podes est cependant omniprésente au Sénégal, etplutôt pléthorique, mais... mal vue, dans tous lessens de l'expression. Souvent en effet, elle n'est ap­préhendée qu'au travers des exploits de ses mau­vais sujets: Cafards et Criquets, Puces et Poux,Mouches et Moustiques, que contrebalancent toutde même un peu les Papillons, joyaux ailés admirésde tous.

Pourtant cette petite faune est prête à séduire:elle demande à être connue et fait des efforts en cesens. C'est elle qui, la première, accueille le voya­geur aux chants de ses Cigales ou de ses Grillons.

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C'est elle aussi que représentent les majestueusesLibellules, virtuoses des airs, les jolies Coccinelles,bêtes-à-Bon-Dieu, la précieuse Abeille mellifère etpollinisatrice, ou encore les élégants Longicornesaux antennes démesurées. Et s'il faut accomplir descentaines de kilomètres pour approcher les GrandsMammifères, les Arthropodes peuvent être rencon­trés, les portes des villes à peine franchies.

En fait, il s'agit d'un autre monde, ou mieux ditsans doute, d'un univers parallèle au nôtre. De cetunivers, le Sénégal possède des richesses im­menses, notamment dans la zone forestière et dansses belles savanes arborées.

Sait-on qu'un seul arbre peut abriter près d'unmillier de ces Arthropodes? Lesquels présententsouvent entre eux des différences beaucoup plusimportantes que n'en montrent un éléphant et unesouris; cela non seulement quant à la forme, maisaussi pour ce qui concerne les modes de vie. Voyez:

- Les belles Cétoines vertes, ponctuées d'or, dé­vorant à pleines mandibules fleurs et fruits sau­vages, avant d'aller pondre dans des vieux troncsriches en terreau, où se développeront leurs larves.

- Les Cercopes à la robe marbrée, ou les Cigalesen tenue d'écorce, qui tirent leur subsistance de lasève puisée dans le bois grâce à un appareil buccaltransformé en une sorte de seringue aspirante; lesfemelles introduiront leurs œufs dans les tiges et lesrameaux à l'aide de pièces génitales conforméescomme des tarières.

- Les Mantes dites prieuses, tapies à l'affût, pro­digieusement camouflées et n'en surprenant quemieux leurs proies.

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- L'utile Araignée Gastéracanthe, étrange ogres­se rouge et noire tissant des filets quasi invisibles,capturant ainsi de nombreux petits Insectes dontelle fait son ordinaire.

- La Mygale, impressionnante sur ses huit pattesvelues, peu avenante et cependant mère attentive:elle transporte, partout où elle va, sa nombreuseprogéniture dans un couffin de soie confectionnépar elle-même.

- Le Scorpion Imperator, énigmatique rescapédes temps anciens les plus reculés, armé d'énormespinces et d'une queue terminée par un dard veni­meux ; c'est pourtant "un tendre" qui, avant de s'ap­parier, fait danser sa compagne tout en la gratifiant"d'amoureuses" piqûres prénuptiales...

- Etonnez-vous encore du singulier Uropyge toutrécemment trouvé en Basse Casamance: cousindes deux précédents, il est muni à l'arrière d'unesorte de sarbacane capable de lancer, si on l'impor­tune, un liquide acide à plus de 15 cm !

- Et encore ce grand Iule, cylindre multiannelé etmyriapodé, marcheur acharné, prodige d'éton­nants synchronismes entre ses quelque six centspattes; celles-ci, avancées par vagues successives,jamais ne s'emmêlent, même lorsque la tête, loin de­vant, est accaparée par la recherche de nourriture.

Quels curieux personnages, quels êtres étranges,quelles mœurs fantastiques. L'Afrique et le Sénégalen particulier recèlent ainsi quantité de petits ani­maux extraordinaires de formes et de comporte­ments. TI faut aller les voir.

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LE PAYS

LEPEUPLESENEGAUUS

Les témoignages d'une présence humaine au Sé­négal remontent au paléolithique. Au néolithique,de nouveaux habitants viennent se fondre aux pre­miers. A l'ouest du pays, des puits et des tumulus,datant du premier millénaire avant le Christ, accré­ditent l'existence d'une population dont on parledans les légendes. Plus au centre, des menhirs etdes cercles de pierres dressées témoignent de laprésence d'autres établissements humains.

La complexité du peuplement s'explique par denombreuses migrations, qui jalonnent l'histoire dupays. Au nord de la Gambie, en zone de savanes, sedéploient d'importantes sociétés, sur de vastes ter­ritoires. Les Wolof, les plus nombreux, auraient ac­cordé, par le passé, une grande importance auxfonctions de commandement. Ils se divisaient enplusieurs groupes: nobles, paysans libres, gens decaste et captifs. Les Serer auraient davantage misl'accent sur les techniques agraires, associant agri­culture et pastoralisme. On y retrouvait les mêmesdivisions que chez les Wolof. Cette opposition sché­matique s'efface souvent devant les situations lo­cales, où les ressemblances l'emportent sur les dif­férences, en raison des contingences imposées parle milieu physique. Les Toucouleur, établis le longdu fleuve Sénégal, forment une société complexeavec des divisions internes qui correspondent à desspécialisations religieuses, guerrières ou économi­ques. Les pêcheurs lébou occupent la presqu'île duCap Vert tandis que les pasteurs peul et maure no­madisent aux confins des autres sociétés. Le sud dela Gambie, davantage forestier, est habité par dessociétés plus réduites, résistantes aux influences ex­térieures : Diola, Baïnouk, Balant, Bassari, Bedik,Badiaranké, Mandjak, Mankagn, Pepel. On trouveles Malinké dans le sud et à l'est du pays, où vi­vent aussi les Soninké, Diakhanké, Dialonké etBambara.

Dans chacune de ces zones, une société domineles autres par la langue, les habitudes alimentaires,les comportements qui lui sont empruntés: c'est lecas des Wolof au Nord, des Malinké dans le Sud.

Les langues de ces sociétés se rattachent à deuxgroupes: atlantique et mandé. Beaucoup d'habi­tants parlent deux ou trois langues locales. Le fran­çais est devenu la langue de l'administration.

Des migrations à l'époque contemporaine ac­croissent le brassage social. Depuis l'indépendance,la législation de l'Etat sénégalais vise à créer uneunité nationale. La loi sur le Domaine National de1964 a cherché à diminuer les particularismes dansle régime juridique des terres. La loi de décentrali­sation de 1972 a implanté une organisation sem­blable pour l'administration de tous les villages("communautés rurales"). Le Code de la Famille, lamême année, a essayé de simplifier les modalitésdu mariage, de la filiation, de l'héritage, tout en pré­servant les us et coutumes. L'influence des modes(coiffures, vêtements), la généralisation d'un metscomme le riz au poisson sont aussi les signes decette unification. Le retour de migrants ayant vécuen France joue dans le même sens.

L'EPOQUE PRECOLONIALE

La reconstitution du passé du Sénégal est pos­sible grâce à la combinaison de trois sources: lesmonuments (buttes de coquillages, tumulus, méga­lithes) ; les récits oraux, en particulier ceux desgriots des anciennes familles souveraines; les écritsdes voyageurs arabes, des navigateurs portugais etdes explorateurs du XVIIIe siècle.

Du IXe au XIIIe siècle, les pays composant l'ac­tuel Sénégal relevaient successivement des empires

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du Ghana et du Mali, mais leur éloignement géo­graphique amoindrissait sans doute leur dépen­dance politique. Des produits circulaient au sein decet ensemble. Les pagnes de coton servaient demonnaie dès le XIe siècle; l'or était extrait duGalam et du Bambouk ; les îles du Saloum fournis­saient du sel, échangé contre du mil. L'islamisationdu Sénégal commença très tôt: elle débuta dans leTekrour, sur les rives du fleuve Sénégal, au XIesiècle. A la fin de cette période, et pour la moitiénord du pays, le pouvoir politique était détenu pardes "maîtres de la terre" (lamanes), chefs de com­munautés regroupant parents et alliés, descendantsd'un fondateur qui avait défriché son territoire parle feu.

La création de l'empire du Dyolof, dans la pre­mière moitié du XIVe siècle, marque l'apparitiond'un pouvoir monarchique indépendant. La fonda-.tion du royaume du Sine, toujours au XIVe siècle, ala même signification.

En 1544, Dinis Diaz découvre la presqu'île duCap Vert. Lors de ces premiers contacts, les Portu­gais ne manifestent aucune supériorité: ils décri­vent un pays vert et riant, des habitants sains.L'écart entre l'Afrique et l'Europe ne s'est creuséque par la suite, avec le développement du com­merce atlantique, qui venait de faire irruption dansla vie du pays. Une période de troubles et de réor­ganisation, marquée par de nouvelles migrations,suivit. Le pouvoir économique échut assez vite àune catégorie de marchands métis (les Tanga­maos) qui s'interposèrent entre les souverains séné­gambiens et les négociants étrangers. Les chevaux,fournis par les Portugais, étaient très recherchés,en échange d'esclaves et d'or.

A la fin du xve siècle, des Peul, sous la directionde Koli Tenguéla, traversent l'Afrique de l'Ouest ets'établissent dans la vallée du fleuve Sénégal, fon­dant le Fouta Toro. En 1549, l'empire du Dyolofs'effondre sous les coups de certains de ses vas­saux, les royaumes du Kayor et du Baol. Le nord dela Gambie se partage en quelques monarchies(Dyolof, Walo, Kayor, Baol, Sine, Saloum), contrô­lant des territoires étendus. La représentation poli­tique s'y exerce selon une double hiérarchie: des­cendante, avec des agents du pouvoir centraljusque dans les villages; ascendante, avec des délé­gués des principaux rangs et ordres jusqu'auprèsdu souverain. Le sud de la Gambie est formé decommunautés plus réduites, moins centralisées etmoins hiérarchisées, avec parfois un roi-prêtre à

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leur tête. Cette esquisse ne rend pas compte detoutes les nuances régionales, où s'affirment tantôtune forte autonomie, tantôt une dépendance trèsmarquée.

A la fin du XVIe siècle, les Portugais s'effacèrentdevant les commerçants hollandais, anglais et, fi­nalement, français. Ces derniers obtinrent unmonopole du commerce: ce furent les "compa­gnies à charte", justifiées par la doctrine du "mer­cantilisme colonial".

La traite des esclaves se développa au XVIIe etsurtout au XVIIIe siècle, permettant des profitsinouïs. Les populations se rebellèrent contre l'escla­vage, et la "guerre des marabouts", de 1673 à 1675,en est le témoignage.

Les effets de la traite se firent sentir sur très longterme: ponction de la tranche d'âge la plus active,croissance de l'absolutisme des souverains, désor­ganisation des activités économiques, ce qui suscitades famines au XVIIIe siècle.

LAPERIODECOLON~E

Du XVIIe au début du XIXe siècle, la côte du Sé­négal constitue un terrain de prédilection pour la ri­valité franco-britannique. Les premiers comptoirsfrançais au Sénégal datent du XVIIe siècle: 1659pour l'île de N'Dar (futur Saint-Louis) et 1677 pourl'île de Gorée. Les Anglais prennent ensuite Saint­Louis en 1758... et les Français reprennent la villeen 1779 ! Gorée devient anglaise en 1800 et Saint­Louis le redevient en 1809. Ce n'est qu'en 1815 queces établissements redeviennent français, pour lerester pendant 145 ans jusqu'à l'Indépendance de1960.

Au départ des Anglais, en 1816, les Françaisétaient implantés à Saint-Louis, Gorée et dans lescomptoirs de la Petite Côte. L'esclavage était abolipar un décret de 1848, ce qui amena la ruine des fa­milles de négociants et le développement du com­merce d'autres produits (gomme, morphil). Maisl'arachide paraissait le plus prometteur, avec descours très avantageux.

L'organisation interne du Sénégal, en royaumeset chefferies, semble avoir été relativement stablejusqu'au milieu du XIXe siècle. La vie locale n'en

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était pas moins riche d'une multitude d'événe­ments. L'arrivée de Faidherbe en 1854 marque ledébut de la conquête militaire du pays. Son but étaitd'assurer les meilleures conditions pour la produc­tion de l'arachide. Des chefs religieux et politiqueslui résistèrent: El Hadj Omar et Ahmadou Tall,Mamadou Lamine Drame, Maba, Lat Dior, AlbouriNdiaye. Dans quelques zones, ce sont des villageoisqui affrontèrent les conquérants (Diola, Serer Can­guin). En 1857, les Français s'installèrent sur lapresqu'île du Cap Vert, à l'emplacement qui allaitdevenir Dakar.

L'entreprise de colonisation, arrêtée un tempspar la guerre de 1870, reprit avec Brière de l'Isle.C'est l'époque de la disparition définitive d'une ca­tégorie de marchands sénégalais, vivant du com­merce de la gomme, éliminés par les maisons decommerce bordelaises: Maurel et Prom, Buhan etTeissère, Delmas et Laporte.

A la fin du XIXe siècle, le Sénégal était partagéen "pays d'administration directe", autour de Saint­Louis et Dakar-Gorée, et en "pays de protectorat",où étaient maintenus les descendants des anciennesfamilles régnantes. En 1916, les natifs des "com­munes de plein exercice" (Saint-Louis, Gorée, Ru­fisque, Dakar) obtinrent la citoyenneté française.Dans les centres urbains, naquit un débat politiqueet Blaise Diagne est élu comme député du Sénégalen 1914, puis Galandou Diouf.

La répression du commerce des captifs est effec­tive à partir de 1901 et les activités économiques seconcentrent définitivement autour de l'arachide. Laligne de chemin de fer de Dakar à Saint-Louis estinaugurée en 1885 et le tronçon de Thiès à Diourbelen 1908. Ces investissements, ainsi que la créationd'un réseau routier, nécessaires pour le transportdu produit, sont financés par le budget du territoiredu Sénégal, grâce à un impôt de capitation. La pro­duction de l'arachide connut alors une très fortecroissance, en raison de l'abondance des terres(1910-1929). Elle se ralentit après la crise de 1929­30, qui avait provoqué la faillite des banques de lacolonie.

Les populations de l'AOF participèrent à la dé­fense de la métropole pendant la première et la se­conde guerre mondiale. Les députés Lamine Gueyeet Léopold Sédar Senghor jouèrent un rôle impor­tant dans les deux Assemblées Constituantesd'après-guerre. A partir de 1946, des partis politi­ques apparurent sur la scène sénégalaise: SFIO,Bloc Démocratique Sénégalais, RDA, MPS, UDS, ...

L'innovation de Léopold Sédar Senghor fut de por­ter le débat politique dans les campagnes. Il en ré­colta les fruits: lui-même et Mamadou Dia furentélus députés en 1951 sur la liste BDS, et réélus en1956. De façon parallèle, s'organisait une vie syndi­cale, avec des revendications anti-colonialistes etdes actions d'envergure (grèves de 1953).

La seconde guerre mondiale fit reprendreconscience du sous-équipement des colonies. Unprogramme fut lancé pour y remédier (FIDES).Mais les investissements restaient en majorité pu­blics, et l'économie du pays était grevée par unehypertrophie du commerce par rapport aux activi­tés industrielles, limitées aux huileries.

A la veille de l'indépendance, le Sénégal était di­rigé par un Gouverneur, sous les ordres d'un Gou­verneur Général de l'AOF, installé à Dakar. Lepays était divisé en "cercles", avec, à leur tête, descommandants de cercle, fonctionnaires français, etsubdivisés en "cantons", avec des chefs de cantond'origine sénégalaise. La loi-cadre de 1958 accordal'autonomie au Sénégal, associé en 1959 au Soudandans la Fédération du Mali. Il s'en retira en 1960 etacquit son indépendance.

LEOPOLD SEDARSENGHOR, PERE DEL'INDEPENDANCE

Après la seconde guerre mondiale, la vie politi­que connut une impulsion nouvelle avec l'instaura­tion progressive du suffrage universel et de nou­velles institutions représentatives. Cette époque quiaboutit à l'indépendance fut marquée par la per­sonnalité de L.-S. Senghor.

Celui-ci, né à Joal en 1906, en pays sérère, futéduqué par les missions catholiques et devintle premier agrégé africain. D'abord très actifdans les mouvements des étudiants puis les cer­cles intellectuels noirs de Paris, L.-S. Senghor selança dans la vie politique en 1945 sous la houlettede Lamine Gueye, patron de la SFIO (Parti socia­liste français) au Sénégal. Tous deux furent élus dé­putés à l'Assemblée nationale française en 1945 et1946.

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Cependant, L.-S. Senghor prit rapidement sonautonomie. Alors que L. Gueye représentait surtoutles anciens "citoyens français" des quatre com­munes (Gorée, Dakar, Rufisque, Saint-Louis), etjouait plutôt la carte de l'assimilation, L.-S. Senghorétait enraciné dans les milieux paysans de l'inté­rieur du pays et mettait en avant l'héritage nègre(d'où la philosophie de la négritude).

En 1947, L.-S. Senghor fonde une revue indépen­dante, "La condition humaine", dans laquelle il sedémarque nettement de L. Gueye. En 1948, il crée,avec l'aide de Mamadou Dia et de toute une nou­velle génération de jeunes intellectuels, un parti, leBloc démocratique sénégalais (BDS), indépendantdes mouvements politiques français. Ce nouveauparti mena une campagne active en direction dumonde rural et s'attacha à rechercher le soutien desmarabouts. En dépit de sa religion, L.-S. Senghorparvint à se concilier avec ces chefs religieux mu­sulmans, qui, en tant que producteurs d'arachide,étaient sensibles à sa défense des intérêts paysans.En 1951, il remporta les deux sièges du Sénégal àl'Assemblée nationale française. L'année suivante,aux élections pour le renouvellement de l'Assem­blée territoriale, il enleva quarante des cinquantesièges à pourvoir. En 1956, le BDS s'agrégeait dif­férents petits partis et changeait d'appellation, de­venant le "Bloc populaire sénégalais". Finalement,en 1958, la SFIO et le BPS décidaient de s'unir dansune nouvelle formation: l'Union progressiste séné­galaise (UPS).

Après l'avènement du général De Gaulle au pou­voir en France, le projet de référendum sur la créa­tion d'une communauté franco-africaine divisal'UPS. L'aile la plus radicale du parti s'opposa àcette initiative, réclamant l'indépendance immé­diate et totale. Cependant, la majorité de cette for­mation, L.-S. Senghor en tête, non sans tergiversa­tions, décida d'appuyer l'initiative gaulliste. Cettediscussion se traduisit par le départ de l'UPS despartisans du "non" qui se rassemblèrent au sein duParti du regroupement africain (PRA). Finalement,les "oui" l'emportèrent, avec 97,2% des suffragesexprimés. Il apparaît que dans cette affaire, les ma­rabouts pesèrent de tout leur poids pour éviter unerupture avec la France.

Quelques mois plus tard était créée la Fédérationdu Mali, qui regroupait le Sénégal et le Soudan.Cette unité fédérale correspondait à l'idée de L.-S.Senghor de constituer un ensemble ouest-africainfrancophone. La Fédération du Mali accède à l'in-

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dépendance, avec l'accord de la France, le 20 juin1960. Mais deux mois plus tard, l'aventure fédéraleétait terminée. L'incompatibilité idéologique desgouvernements soudanais et sénégalais expliqueen grande partie cet échec. A l'approche des élec­tions présidentielles, le conflit éclate, et le gouverne­ment sénégalais, accusant les Soudanais de vouloirs'emparer du pouvoir, se retire unilatéralement del'union et proclame son indépendance. En sep­tembre 1960, L.-S. Senghor est élu Président de laRépublique du Sénégal et Mamadou Dia était ap­pelé aux fonctions de Premier ministre. Cas raris­sime en Afrique, L.-S. Senghor se retira volontaire­ment de la vie politique en 1980.

ABDOU DIOUF ET LADEMOCRATIESENEGALAISE

Abdou Diouf est devenu Président de la Républi­que le 1er janvier 1981, succédant à L.-S. Senghor. Ila été réélu en février 1983 avec 84% des suffragesexprimés, contre 15% à son adversaire, AbdoulayeWade, leader du Parti démocratique sénégalais. En1988, il a obtenu 73,2% des suffrages contre lemême adversaire politique principal qui passaitcette fois le cap des 25%. Abdou Diouf exerce aussiles fonctions de secrétaire général du Parti socia­liste.

A. Diouf est très différent des hommes politiquestraditionnels du Sénégal. Il s'est imposé davantagecomme un homme de dossiers et un grand commisde l'Etat que comme un patron politique dont l'in­fluence repose sur des liens clientélistes avec les no­tables locaux. Il est très représentatif de la nouvelleclasse politique sénégalaise, plus technocrate dansses orientations que les "vieux barons" du régime.Ancien élève de l'Ecole de la France d'Outre-Mer,sa carrière est marquée par un long parcours dansles instances étatiques: gouverneur du Sine­Saloum, directeur du cabinet du ministre des Af­faires étrangères, secrétaire général de la prési­dence de la République, Premier ministre. Parcontre, ce n'est pas sans mal qu'il a trouvé sa placedans le Parti socialiste.

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Dès son accession au pouvoir, il s'est attaché àdonner un élan nouveau à la politique de démocra­tisation du régime entreprise par L.-S. Senghor.Quatre mois après son arrivée au sommet de l'Etat,il levait la limitation du nombre des partis politi­ques voulue par son prédécesseur, dans le butd'instaurer une vie politique plus totalement démo­cratique.

Le résultat est qu'actuellement le Sénégal necompte pas moins de dix-sept partis d'oppositionlégalement reconnus. Parmi eux, les plus puissantsdemeurent le Parti démocratique sénégalais (PDS),créé en 1974, le Rassemblement national démo­cratique (RND), constitué en 1978 par le célèbrechercheur Cheikh Anta Diop, la Ligue démocrati­que-Mouvement pour le parti du travail (LD­MPT), reconnue en 1981 et le Parti africain de l'in­dépendance (PAl) vieux mouvement marxiste sé­négalais. Les deux premiers de ces partis d'opposi­tion se réclament d'un socialisme nationaliste, plusou moins anti-impérialiste ; les autres appartien­nent à la mouvance marxiste. En 1988 le scrutintraduit un déclin relatif du PS (71 ,5% et 103 sièges)et une poussée du PDS (24,7% et 11 sièges).

Cependant, aucun de ces partis n'est parvenu àmettre sérieusement le Parti socialiste en difficulté.Lors des élections législatives de 1978, le Parti so­cialiste obtint 81,7% de suffrages exprimés (82sièges), contre 17,8% au PDS (18 sièges) et 0,4%(aucun siège) au PAL Cinq années plus tard (1983),huit formations se présentèrent devant les élec­teurs. Une fois de plus, le Parti socialiste avec79,94% des suffrages exprimés (111 sièges) venaitlargement en tête de la compétition. Le PDS, avec13,97% des suffrages exprimés n'obtenait que8 sièges et le RND (2,71 %) un seul.

Il faut aussi observer que les partis d'oppositionconnaissent en leur sein des décisions qui portenttort à leur crédibilité politique. Le PDS est coupé endeux, à la suite de la résignation du numéro deuxdu parti, Fara N'Diaye (1986) ; et l'unité du RND aété ébranlée par la disparition de son leader histori­que, Cheikh Anta Diop. Dans ces conditions, les ap­pels répétés à l'union des mouvements d'oppositionsemblent tout à fait problématiques.

L'ouverture démocratique s'est également tra­duite par un renouveau de la vie syndicale. A côtéd'un syndicat proche du Parti socialiste (Confédé­ration nationale des travailleurs du Sénégal,CNTS), le PDS aida à la création d'un nouveausyndicat, l'Union des Travailleurs libres du Sénégal

(UTLS) ; une autre organisation, le Syndicat uni­que et démocratique des enseignants du Sénégal(SUDES), s'appliqua à structurer les revendica­tions des personnels de l'Education nationale. Maislà encore, des rivalités de personnes et de clientèles,jointes au malaise provoqué par les difficultés éco­nomiques actuelles, sont des facteurs de division dumouvement syndical.

La même diversification est sensible au niveaude l'information. A côté des organes plus ou moinsofficiels et progouvernementaux (la radio-télé­vision, et le quotidien "Le Soleil") on a assisté aucours de ces dernières années à une proliférationde journaux d'opinion, à l'existence certes souventéphémère.

D'autre part, la politique d'ouverture d'AbdouDiouf a aussi consisté à renouveler le Parti socia­liste, d'une part en cherchant à en démocratiser lesinstances, d'autre part, en s'efforçant de promou­voir en son sein une nouvelle élite dirigeante, plusdynamique que les cadres de l'époque de L.-S. Sen­ghor. Mais sur ce point la résistance des "vieux bar­rons" n'a pas permis les changements escomptés;et il n'est pas sûr que le président A. Diouf ait lamaîtrise totale de son parti.

En dehors de ces obstacles internes, la politiquede A. Diouf s'est heurtée à des difficultés de naturediverse. D'abord, de sérieux problèmes économi­ques ont poussé le gouvernement sénégalais à s'en­gager, sous le contrôle du Fonds monétaire interna­tional, dans une politique de rigueur peu populaire.Ensuite, le développement en Casamance d'unmouvement ethnique (notamment chez les Diola)représente un danger potentiel à une unité natio­nale que l'on croyait bien établie. Enfin, l'apparition,depuis une dizaine d'années, d'un islamisme mili­tant, constitue un défi à l'Etat laïc.

Ces différentes contraintes qui pèsent sur le ré­gime du Président Diouf expliquent la crise qui aéclaté à la suite des dernières élections présiden­tielles et législatives du 28 février 1988. En effet,l'annonce des résultats provoqua des émeutes derue à Dakar. Les leaders de l'opposition furent in­culpés d'atteinte à la sûreté de l'Etat. Le verdict plu­tôt clément de la Cour parut pouvoir décrisper l'at­mosphère. Cependant, le dialogue avec l'oppositionproposé par le chef de l'Etat tourna court.

Le Président Diouf semble avoir été très affaiblipar cette épreuve qui marque la fragilité et les li­mites de la démocratie sénégalaise.

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L'ETAT ET LESINSTITUTIONS

Le Sénégal accéda à la souveraineté internatio­nale en septembre 1960. Quelques jours aupara­vant, l'Assemblée nationale avait adopté la Consti­tution de la République indépendante. Ce textes'inspire dans l'esprit et dans la forme de la Consti­tution française de 1958, avec quelques aménage­ments. Il indique que les partis politiques concou­rent librement à l'expression du suffrage universelà condition qu'ils respectent "les principes de la sou­veraineté nationale et de la démocratie". Pour cequi est de l'organisation des pouvoirs, la Constitu­tion prévoit, ce qui est tout à fait original sur lecontinent africain, un exécutif bicéphale : un Prési­dent de la République élu pour sept ans par un col­lège électoral restreint, composé de députés et dereprésentants des Conseils municipaux et régio­naux, qui est le gardien de la Constitution, assurepar son arbitrage la continuité de la République etle fonctionnement régulier des institutions, ainsiqu'un Président du Conseil, chef du gouvernement,qui détermine et dirige la politique nationale. Lepouvoir législatif est, lui, confié à une Chambre uni­que, l'Assemblée nationale, élue pour cinq ans ausuffrage universel direct. La Constitution reconnaîtl'indépendance du pouvoir judiciaire et instaureune Cour suprême qui veille au respect des institu­tions et fait également fonction de juridiction admi­nistrative supérieure. Enfin, le texte constitutionnelinterdit toute propagande à caractère régionaliste.

Après la crise politique qui opposa en 1962, lePrésident de la République, L.-S. Senghor au Prési­dent du Conseil, M. Dia, une nouvelle Constitutionest soumise au référendum populaire. Elle tend àremplacer le régime parlementaire par un régimede type présidentiel. Le Président de la Républiquedevient l'unique organe exécutif. Il est désormaisélu pour quatre ans au suffrage universel, et estdoté de pouvoirs étendus, lui permettant dans cer­taines circonstances exceptionnelles de gouvernersans Parlement pour une durée limitée. Il a aussi lapossibilité de recourir au référendum pour faireadopter un projet de loi. Le mode d'élection des dé­putés est également modifié: désormais, le Sénégalest transformé en une circonscription unique, et unparti n'est autorisé à se présenter que s'il déposeune liste complète de candidats.

Depuis 1963, une série de réformes constitution­nelles sont venues modifier certaines dispositions

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du texte. En 1967, une révision constitutionnellevient accroître les pouvoirs du Président de laRépublique. Désormais élu pour cinq ans, celui-cipeut dissoudre l'Assemblée nationale. Peu confor­me à la tradition du régime présidentiel basé surla séparation des pouvoirs, cette révision orientele Sénégal sur la voie du présidentialisme. Ce­pendant en 1970, une nouvelle réforme réintro­duit la fonction de Premier ministre et renforceles attributions de l'Assemblée nationale, qui peutdésormais user de l'arme que constitue la mo­tion de censure. Ces modifications peuvent êtreanalysées comme une réponse à la crise poli­tique qui agita le Sénégal en 1968 et 1969. Ladéconcentration des pouvoirs était à l'ordre dujour.

En 1976, une importante modification est appor­tée à l'article 3 de la Constitution relative aux partispolitiques. L'ancien texte permettait un nombre illi­mité de partis, mais était en contradiction absolueavec le régime de fait, qui était celui d'un parti uni­que. Dans le but d'établir ce qu'il appelait une "dé­mocratie contrôlée", le Président Senghor fit adop­ter un projet limitant à trois le nombre des partisreconnus; ceux-ci devant obligatoirement se réfé­rer à trois courants de pensée déterminés par la loi:1) la démocratie libérale, 2) la démocratie socia­liste, 3) le communisme ou le marxisme-léninisme.Une année plus tard, dans le même souci de favori­ser le pluralisme politique, le scrutin majoritaire futremplacé par la représentation proportionnelle.Ces différentes réformes donnèrent une impulsioncertaine à la vie politique sénégalaise et constituè­rent une innovation politique importante en Afri­que noire.

Après le retrait de 1.-S. Senghor de ses fonc­tions présidentielles et l'avènement d'Abdou Dioufà la tête de l'Etat, le 1 er janvier 1981, d'autres dis­positions viennent compléter la structure insti­tutionnelle du régime. Une nouvelle loi sur lespartis politiques fut adoptée en mai 1981. Ellemettait fin à la limitation du nombre des partispolitiques. L'année suivante, l'Assemblée voteun nouveau code électoral. Celui-ci organise lesélections législatives selon un mode de scrutinmixte, inspiré du modèle ouest-allemand: unemoitié des députés étant élus au scrutin de listemajoritaire à l'échelon départemental, et l'autremoitié au scrutin proportionnel à l'échelon natio­nal. Enfin, en 1985, une nouvelle révision consti­tutionnelle supprime à nouveau le poste de Premierministre.

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22. Vue au "fish-eye" du centre moderne de Dakar.Au premier plan, la Place de l'Indépendance, ancienne Place Protêt. Le bâtiment bas, avec des colonnes, au centre, estle Ministère des Affaires étrangères.Tout au fond, la tour de la B.C.E.A.O. (Banque Centrale des Etats de l'Afrique de l'Ouest), auec l'île de Gorée en ar­rière-plan.A l'extrême droite du cliché, l'hôtel Teranga.Au fond à gauche, le port.

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23. Le palais présidentiel, à Dakar, qui fut jusqu'à l'Indépendance, la Résidence du Gouverneur Général de l'AfriqueOccidentale Française.

24. La garde présidentielle, lors de la fête de l'Indépendance, à Dakar.

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25. Dakar: au premier plan, vue partielle du port puis le vieux quartier autour du marché Kermel(bâtiment rond), et la tour de la B.C.E.A.O.

26. Marchande de fleurs au marchéKermel. 27. Animation au. coin d'une rue à Dakar.

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28. Le phare des Mamelle;;, li Dalwr.

30. La "maison des esclaves" à Gorée.

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2,9. L'hôtel de ville de Dakar.

31. Couleurs du soir à Gorée.

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32. Le charme ocred" Gorée.

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33. Le petit port de Gorée. Le bâtiment de droite abrite l'Université des Mutants fondée par L.-S. Senghor.

34. Saint-Louis.' un soir, au bord du fleuve ...

35. Les anciens comptoirs de Saint-Louis.

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36. Animation des rues centrales de Saint-Louis.

37. Le pont Faidherbe à Saint-Louis.

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38. Un vieux bâtiment de Podor.

39. Elégantes à Ziguinchor.

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Au niveau local, une réforme de 1972 organisedes "Commmunautés rurales", regroupant plu­sieurs villages, en tant qu'unités administratives debase en milieu rural. Au-dessus, existent les dépar­tements et les régions placés respectivement sousl'autorité d'un préfet et d'un gouverneur.

DAKAR, PORTE OCEANE

En janvier 1857, le Commandant français deGorée acquit un petit terrain de 50 m sur 45, sur leplateau de la presqu'île du Cap Vert, face à l'île deGorée. Un petit établissement militaire y étaitfondé, et le drapeau français hissé le 25 mai. Ainsinaquit Dakar. Au début, la croissance de la ville futlente; elle ne comptait que 19 000 habitants en1904, et40 000 en 1926, mais déjà 102 000 en 1942.

En 1957, c'était une grande agglomération de300 000 âmes qui célébrait son centenaire. Et au­jourd'hui, la capitale du Sénégal a franchi, avec sabanlieue, le cap du million d'habitants.

Cosmopolite, ouverte sur l'océan, porte d'accèsau Sénégal pour près de 300 000 touristes par an,Dakar, brillante et scintillante, ne cesse d'attirer despopulations venant de la brousse, et espérant trou­ver dans la capitale des conditions de vie plus fa­ciles.

Diplomates, hauts fonctionnaires, coopérantsétrangers côtoient à Dakar les classes moyennes etle petit peuple, les artisans, les marchands, le micro­cosme des "petits métiers" et de la débrouillardise,des Sénégalais surtout, bien sûr, mais aussi desMaures ou des Maliens venus tenter fortune.

En Afrique de l'Ouest, Dakar occupe une placebien à part: c'est la métropole de l'esprit et ducœur, comme Abidjan est celle de l'argent et des af­faires. Abidjan, ville-champignon, ne regarde quel'avenir: on rase les témoignages du passé, lesvieilles bâtisses, pour construire les tours et cathé­drales du xxre siècle. La ville ne possède même pasde musée digne de ce nom. Dakar, tout aucontraire, ne renie pas le passé, préserve avec nos­talgie de vieux bâtiments, conserve des noms derues datant de l'époque coloniale, et les mêmesvieux arbres ombragent des avenues qui ne sontpas élargies au bulldozer tous les la ou 20 ans. Le

Sénégal a produit des générations d'intellectuels, descientifiques, de fms lettrés. A Dakar, aux terrassesdes cafés, on aime discuter longuement de politiquenationale ou mondiale, des événements locaux, ousimplement disserter à perte de vue sur les chosesde la vie.

On dit parfois que le Sénégalais est xénophobe,mais il est avant tout fier et jaloux de son identitépropre. Les Français se plaisent généralementbeaucoup à Dakar: malgré quelques petits accro­chages mineurs dans la vie quotidienne, les Fran­çais retrouvent chez les Sénégalais beaucoup deleurs traits de caractère propres, notamment legoût de la discussion, de la critique et de la satire!Et lorsque les étrangers doivent quitter Dakar, auterme de leur contrat, les regrets et la nostalgie leurrestent longtemps au cœur, car Dakar est une citéattachante.

Dakar, ville multiple, présente des sites, centresd'intérêt, quartiers, nombreux et variés. Il y a touteune terminologie à connaître: quand on vous parlede "Gueule tapée", ne vous enfuyez pas. Sachezqu'au "Cap des Biches" il n'y a pas de biches, et queles "Mamelles" n'ont rien à voir avec la "Made­leine" !

Les Dakarois manient ces termes à plaisir, d'unair entendu, devant les nouveaux arrivés quelquepeu désorientés. Voici donc en quarante quatre clésun décodage de ce langage secret!

ALMADIES - La Pointe des Almadies constituel'extrémité ouest de la presqu'île du Cap Vert, etaussi l'extrémité ouest du continent africain. C'estune agréable "promenade du dimanche" pour lesDakarois. Le nom provient du portugais Almadia(pirogue). Des récifs à fleur d'eau prolongent laPointe, constituant la "Chaussée des Almadies", si­gnalée aux navires par un phare.

ARCHIVES CULTURELLES - Au 77 avenuePeytavin, une exposition ouverte au public pré­sente les richesses de l'ethnographie sénégalaise.

B.C.E.A.O. - Banque Centrale des Etats del'Afrique de l'Ouest (commune aux divers paysde l'Afrique de l'Ouest utilisant le franc CFA). Lesiège de la banque constitue le fleuron de l'architec­ture moderne dakaroise. Ses lignes évoquent lapuissance et les racines aériennes du fromager,arbre typique de la Casamance, d'où est originaire

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le jeune et brillant Pierre Goudiiaby Atepa, archi­tecte qui conçut ce bâtiment à l'âge de 28 ans.

BEL AIR - La Pointe de Bel Air ferme la partiesud de l'anse de Hann, à l'est de Dakar. On y trouveun cimetière et l'hydrobase (voir "hydrobase").

BERNARD - L'Anse Bernard se situe au sud-estde Dakar. Une route de corniche la longe, et ellecomporte deux petites plages: la "plage des en­fants" près de l'hôtel Lagon, et celle "de l'Anse Ber­nard". L'Anse Bernard se termine au sud par laPointe Bernard. Le Capitaine Bernard est resté cé­lèbre pour avoir repris Gorée aux Anglais en 1693.

BUILDING - On appelle "building administra­tif' ou "building" tout court, l'immense bâtiment re­groupant divers ministères, situé un peu plus hautque la Présidence, sur l'avenue Roume. De son toiten terrasse, on domine tout Dakar.

CAMBERENE - Village de pêcheurs au nord deDakar. On y pratique aussi des cultures maraέchères.

CAP DES BICHES - Plage, avec accès par laroute de Rufisque.

CAP MANUEL - Pointe sud de la presqu'île duCap Vert. Ce nom évoque le souvenir de Ma­nuel III, roi du Portugal au XVIe siècle. Un phare si­gnale cette pointe aux navires. Le Cap Manuel,constitué de laves, est un vestige de l'activité volca­nique de la fin du tertiaire.

CATHEDRALE - La "Cathédrale du souvenirafricain", boulevard de la République, fut inaugu­rée en 1929 et dédiée à tous ceux qui étaient "mortspour l'Afrique". Elle possède deux clochers et undôme d'allure byzantine.

CERF-VOLANT - Quartier de Dakar ainsi dé­nommé en raison de sa forme en "cerf-volant".

CORNICHES - La route de la corniche est, oupetite corniche, longe l'Anse Bernard, au sud-est deDakar, entre le port et le Cap Manuel. La route de lacorniche ouest, ou grande corniche, longe l'ouest dela presqu'île, de l'Anse des Madeleines au quartierMermoz, en passant par Soumbedioune et Fann.

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COUR DES MAURES - Au 69 de l'avenueBlaise Diagne s'ouvre une "enclave" maure aucœur de Dakar; c'est là que les bijoutiers mauresproduisent leurs splendides bijoux d'or et d'argent.

DANIEL SORANO - Le théâtre national Da­niel Sorano (du nom d'un grand comédien sénéga­lais), avenue de la République, est une institution dela vie culturelle et mondaine dakaroise.

DIEUPEUL - Quartier d'habitation (SICAP)entre l'avenue de la Liberté et le boulevard du Pré­sident Bourguiba.

FANN - Quartier résidentiel sur la cornicheouest, plage et centre hospitalier du même nom.

GARE - Le premier chemin de fer du Sénégalfut le Dakar - Saint-Louis, construit entre 1882 et1885. La petite gare des débuts fut remplacée en1914 par le bâtiment actuel, bel exemple de "l'archi­tecture ferroviaire coloniale" du début du siècle.

GOREE - L'île de Gorée, en face de Dakar, faitl'objet d'une notice séparée.

GUEULE TAPEE - Un boulevard et un quar­tier portent ce nom étrange qui désigne une variétéde gros lézard.

HANN - Ce nom désigne une plage, avec unclub de voile, un village de pêcheurs et un parc zoo­logique et forestier de 53 hectares, les accès se fai­sant par la route de Rufisque.

HYDROBASE - L'hydrobase, sur la Pointe deBel Air, recevait les hydravions dans la période del'entre-deux-guerres. Dès 1925, la compagnie Laté­coère reliait régulièrement avec un service postalToulouse et Marseille à Dakar.

I.F.A.N.. Important centre de recherches afri­caines, l'ancien Institut Français d'Afrique Noire estdevenu à l'Indépendance Institut Fondamentald'Afrique Noire.

LF.A.N. (MUSEE) - L'I.F.A.N. a la charge dumusée situé place Tascher, qui présente une bellecollection de masques provenant de toute l'Afriquede l'Ouest, de bijoux, d'instruments de musique, etc.

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INDEPENDANCE (PLACE) - Grande placecentrale de Dakar, l'ancienne et célèbre place Pro­têt, du nom de celui qui fut gouverneur du Sénégalde 1850 à 1854.

KERMEL - Le marché Kermel, au Plateau, trèscoloré, est le plus ancien de Dakar, avec un bâti­ment de belle "architecture métallique début desiècle". Célèbre par ses marchandes de fleurs et delégumes et par les innombrables petites boutiquesenvironnantes. Le quartier entourant le marchéKermel regroupait autrefois toutes les grandesmaisons de commerce.

LIBERTE - Quartier d'habitation (SICAP), au­tour de l'avenue de la Liberté.

MADELEINE - Les îles de la Madeleine (sou­vent appelées îles aux Serpents, du nom de la plusgrande d'entre elles), sont situées à l'ouest du CapManuel et forment un Parc National depuis 1976(voir notice séparée).

MAMELLES - Les deux collines "des Ma­melles", sur la route des Almadies, seuls vestigesd'un volcan du quaternaire, constituent, avec leurcentaine de mètres de hauteur, les plus hauts som­mets de la presqu'île du Cap Vert! On en a profitépour bâtir en haut de la plus haute des deux unphare très puissant d'aide à la navigation. Du hautde la colline, l'on jouit d'une vue admirable sur lamer et le Cap Vert.

MEDINA - Le quartier populaire de la Médina,avec ses rues en damier, fut créé vers 1914. Il estdevenu un très grand quartier d'habitation coincéentre le Plateau et les lotissements SICAP. C'estaussi la "cité de la débrouille" avec d'innombrables"petits métiers", artisans, boutiquiers.

MERMOZ - Quartier situé près de la cornicheouest. Une stèle évoque la mémoire de Mermoz, quiréalisa la première traversée aérienne de l'Atlanti­que sud en 1930, au départ de Saint-Louis.

MOSQUEES - La Grande Mosquée, œuvre del'architecte français Gustave Collet, avenue El HadjMalik Sy, fut inaugurée en 1964 par le roi Moham­med V du Maroc. De nombreux artisans marocainsont travaillé à sa décoration. Le minaret mesure67 m de haut.

La Petite Mosquée de la rue Carnot (angle rueBlanchot) fut bâtie vers 1880. C'est l'un des plus an­ciens bâtiments de Dakar.

MUSEE DYNAMIQUE - A Soumbedioune, cemusée bâti en 1966 pour le premier Festival Mon­dial des Arts Nègres, présente des expositions tem­poraires et de la chorégraphie.

MUSEE I.F.A.N.· voir I.F.A.N.

N'GOR - Un village de pêcheurs lébou, uneplage, une île et un hôtel portent ce nom. Ils sont si­tués au nord de la presqu'île du Cap Vert. Il y a unevingtaine d'années, avant la construction des nom­breux hôtels pour touristes à et autour de Dakar,l'hôtel de N'GOR était le "must" unique et irrempla­çable. La plage de N'GOR est bien protégée des"rouleaux" du large par l'île du même nom. Sur l'île,nombreuses paillottes et résidences de week-end.

OUAKAM - Ancien village lébou devenu unebanlieue nord-ouest de Dakar. Avant la mise enservice des pistes de l'aéroport de Yoff, c'est àOuakam que les avions atterrissaient. Il reste uneancienne piste, qui commence près de la "stèleMermoz".

PLATEAU - Le "Plateau" est le centre de la ville,véritable centre nerveux de la capitale et du pays,avec les principaux commerces et les administra­tions centrales.

POINT E - Pourquoi E ? En réalité, cette grandeplace située au nord-est de Fann présente une belleforme d'O!

PORT - Le port de Dakar est véritablement lepoumon du pays. Il comporte 40 postes à quai. Lesexportations sont d'environ 2 500 000 tonnes paran, dont les deux tiers pour les phosphates et les im­portations d'environ 1 000 000 tonnes par an.

PRESIDENCE - Le bel et sobre palais blanc duPrésident de la République, qui domine la mer, ave­nue Roume, fut édifié en 1907 pour le Gouverneur,Dakar étant devenue capitale de l'Afrique Occiden­tale Française. Le palais s'ornait à l'époque d'unclocheton central "très 1900". Diverses transforma­tions ont modifié et modernisé le bâtiment depuislors.

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QUART DE BRIE - Quartier d'habitation situéà côté du point E, et qui doit son pittoresque nom àsa forme... en portion de fromage!

SANDAGA - Grand marché du centre deDakar, dont l'architecture s'inspire des grandesmosquées soudanaises. On trouve tout au marchéSandaga!

SERPENTS (Ile) - voir MADELEINE.

SOUMBEDIOUNE - La baie de Soumbediounecomprend une plage, une flotille de pirogues de pê­cheurs, un marché aux poissons et un village arti­sanal. Ce village, créé en 1961, présente toutes lesvariétés des productions artisanales sénégalaises.

TILENE - Le marché de Tilène, très populaire,se trouve dans le quartier de la Médina, sur l'ave­nue Blaise Diagne.

WILLIAM PONTY - L'ancienne avenueWilliam Ponty, rebaptisée avenue Georges Pompi­dou, reste l'artère vitale de la capitale, avec ses ma­gasins et ses restaurants. William Ponty fut Gou­verneur Général de l'A.O.F. de 1908 à 1914. Avantde porter son nom, elle s'appelait "boulevard natio-

al"n .

YOFF - Une plage, un village de pêcheurs lébouet l'aéroport international de Dakar se partagent lenom de Yoff, et se situent dans la partie nord de lapresqu'île du Cap Vert.

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GOREE, L'ILE ASSO'UPIE

Les quelques minutes de chaloupe nécessairespour rejoindre Gorée aident-elles le voyageur à ou­blier la grande métropole dakaroise ? Toujours est­il que le nouveau venu sera d'emblée frappé par lapersonnalité de l'île, sentant immédiatement un lieuchargé d'histoire.

De fait, vu d'Afrique, Gorée retrace toute l'his­toire de l'Europe depuis 1444, date à laquelle la ca­ravelle du Portugais Denis Diaz, découvre les côtesdu Cap Vert. Le site si particulier de l'île, un crois­sant basaltique infertile sans grande ressource eneau, ne présentait guère d'intérêt pour les habitantsde la côte. Il n'en était pas de même pour lesgrandes puissances européennes de l'époque, quitrouvaient là un point aussi stratégique qu'accessi­ble. Gorée, bonne rade, ne tient-elle pas son nom duhollandais Goede Reede ?

Gorée aura à subir tous les affrontements desGrands. Vivant jusqu'au dernier quart du XVIIIesiècle tantôt à l'heure portugaise, tantôt à l'heurehollandaise, l'île sera française en 1677 avec l'ami­ral D'Estrée... non sans devenir au cours du XVIIIesiècle quatre fois anglaise!

Outre ses multiples fonctions politiques et com­merciales, l'île devait devenir une plaque tournantedu trafic des esclaves, plus de 600 000 selon cer­tains historiens. Tous ces facteurs conjugués assu­reront son développement: de 50 habitants à la findu XVIIe siècle, la population passera à près de6 000 en 1846. Le port de Gorée aura vu accosterjusqu'à 1 200 bateaux en 1850.

Ainsi est-on tenté de dire que la petite ville a péride son succès. Les problèmes sanitaires, d'alimenta­tion en eau et d'approvisionnement d'une popula­tion sans cesse croissante, de sécurité des bateauxmais aussi la volonté des autorités françaises desoustraire le Cap Vert à la convoitise des puis­sances "étrangères", ont accéléré l'installation fran­çaise sur la côte dakaroise.

Dès lors, l'île perdra une à une toutes ses fonc­tions administratives et commerciales, sa popula­tion diminuera régulièrement.

On trouve ici et là les traces de cette prestigieusehistoire: les portes entrouvertes des maisons desSignare, ces femmes métisses qui régnèrent sur l'îleau temps de sa splendeur, laissent parfois voir desuperbes jardins intérieurs. Les anciens forts, lesmaisons à balustrades, les couleurs des crépis,

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l'étroitesse des maisons, sont autant de blasons decette histoire mouvementée. Autant de vestiges quiconfèrent un charme si particulier à ce lieu.

Gorée n'est pas pour autant une ville morte, denombreux Goréens travaillant à Dakar continuentde vivre dans une île dont les plages ne manquentpas d'attirer les baigneurs du dimanche. Les nom­breux enfants et les petits commerces animent lesrues.

Marne Coumba Castel, puissance tutélaire deGorée, veille à la quiétude de chacun.

LES VILLES DEL'INTERIEUR

En dehors de l'agglomération dakaroise quicompte un million d'habitants, le Sénégal comptecinq grandes villes: Kaolack (136 000 habitants),Thiès (113 000), Saint-Louis (88 000), Ziguinchor(70 000), Diourbel (54 000) ; quatre villes moyen­nes : Mbour (38 000), Louga (35 000), Tambacoun­da (26 000), Mbacké (26 000), puis 17 petites villesde 8 000 à 20 000 habitants, dans l'ordre décrois­sant: Tivaouane et Kolda, Touba et Joal, Bignona,Kaffrine et Guinguineo, Fatick, Dagana, Bambey,Mekhé, Matam, Dédhiou, Velingara, Kedougou,Linguère, Nioro du Rip.

Les villes les plus nombreuses se situent dans lequadrilatère Dakar - Saint-Louis - Mbacké - Kao­lack. La densité de la population varie dans cette ré­gion de 20 à 100 habitants par km2

, avec l'exceptionde la presqu'île du Cap Vert, où la densité dépasse1 000. C'est dans cette région également qu'un cer­tain dynamisme urbain se poursuit: la populationde ces villes continue d'augmenter à un rythmesoutenu.

Deux autres zones du pays ont une densité de 20à 50 : le long du fleuve et en Casamance. Partoutailleurs, c'est-à-dire surtout dans la moitié est dupays, la densité se situe entre la et 20 habitants aukm2

, voire moins de la. Le long du fleuve, les villesne s'accroissent que lentement. Anciens comptoirsde l'époque coloniale, Dagana, Podor, Matam etBakel n'ont pas su trouver un nouveau souille. Et lasahélisation de ces régions n'améliorera pas leur si­tuation.

A quoi ressemblent les "villes de l'intérieur" ? Iln'existe pas de "portrait-robot" pour ces villes, cha­cune possède un cachet et une spécificité propres,découlant de l'héritage historique, de l'activité éco­nomique de la région, des caractères propres de seshabitants, et du climat qui impose le décor naturel.Matam, calme ville au bord du fleuve, en lisière duSahel, n'a pas grand chose de commun avec labourdonnante Kaolack, centre vital d'une régionarachidière. Linguère, perdue au milieu des im­mensités du Ferlo, est l'antithèse de Bignona, coin­cée entre la verdure de ses riches vergers et la luxu­riance de la grande forêt tropicale. Touba ne vitque dans l'attente du grand pèlerinage annuel du"Magal", alors que Tambacounda vit dans l'attentedes touristes se dirigeant vers le Niokolo Koba.

Entre toutes, deux villes sénégalaises présententun charme et un caractère exceptionnels, avecquelques traits communs, certes, notamment lestyle suranné d'anciennes bâtisses coloniales, maisavec surtout des différences qui rendent la visite dechacune d'elles si attrayante: Saint-Louis, porte duNord, fille du fleuve, et Ziguinchor, porte du Sud,fille de la forêt.

SAINT·LOUIS, FILLE DUFLEUVE

Peu de villes africaines évoquent tant de souve­nirs dans le cœur des Français: c'est que "Saint­Louis du Sénégal" a vécu deux cent quatre-vingt­dix-neuf ans de mariage d'amour avec la Francejusqu'à l'Indépendance de 1960.

C'est en 1659 que Louis Collier, de la "Compa­gnie Normande", bâtit sur l'île de N'Dar une habita­tion et un entrepôt fortifié qu'il baptisa Fort Saint­Louis, en hommage au roi Louis XIII. Au XVIIIesiècle, ce "comptoir" spécialisé dans l'exportation dela gomme arabique se transforma en une véritablecité, peuplée d'Européens, d'Mricains et... bientôt denombreux métis, ce qui était dans l'ordre natureldes choses!

En 1786, Saint-Louis compte 7 000 habitants.Une ordonnance de 1840 décide que le commande­ment de la petite colonie sera confié à un Gouver­neur. En 1848, le statut de captif et la traite des

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esclaves sont abolis, la commune de Saint-Louis estcréée, en même temps que celle de Gorée. En 1854,Napoléon III nomme Faidherbe, Gouverneur duSénégal. Pendant dix ans, il allait marquer la colo­nie de son empreinte énergique. Une ligne télégra­phique relia Saint-Louis à Gorée, un pont fut jetéentre l'île de Saint-Louis et la "langue de Barbarie",puis un pont de bateaux entre l'île et Sor, vers l'inté­rieur des terres.

Urbaniste avant l'heure, Faidherbe façonna laville, l'entourant d'un boulevard, construisant le pa­lais du Gouverneur, l'hôpital, la caserne, l'imprime­rie... L'année 1885 voit l'inauguration du chemin defer de Saint-Louis à Dakar. En 1895, c'est l'apogéede l'histoire de Saint-Louis: toutes les colonies del'Afrique Occidentale Française sont groupées sousl'autorité d'un Gouverneur Général résidant àSaint-Louis. Et en 1897, pour la première fois dansl'histoire, un ministre français visite l'Afrique:André Lebon se rend à Saint-Louis où il inaugure lepont Faidherbe, long de 507 mètres. Le pont actueln'est pas le pont d'origine, celui-ci a été renouvelépresque entièrement en 1931.

Le XXe siècle commence hélas pour Saint-Louispar une déchéance: en 1902 le siège du Gouverne­ment Général de l'A.O.F. est transféré à Dakar.Saint-Louis reste toutefois capitale du Sénégaljusqu'en 1957 et continue de croître, plus modeste­ment et plus calmement que sa rivale, Dakar. Vers1950, elle compte 40 000 habitants, et plus dudouble actuellement. Saint-Louis a su préserver soncachet historique et son charme spécifique. La villemoderne s'est développée du côté de Sor, tandisque la ville ancienne, sur l'île, a conservé ses vieillesrues, ses maisons aux balcons de bois, ses cours, sesvieux quais.

De nombreux vestiges historiques subsistent, no­tamment l'actuelle Gouvernance, place Faidherbe,à l'emplacement du vieux fort du XVIIIe siècle, dontles murs apparaissent encore sur la façade est, et lacathédrale, construite en 1827 sur l'emplacementd'une précédente chapelle. En longeant le quaiHenri Jay, on verra la maison des Frères de Ploër­mel qui créèrent la première école française enAfrique, puis une très ancienne "maison à contre­forts" et, juste avant le musée, l'ancien hôpitalfondé en 1840, maintenant établissement d'ensei­gnement. De la pointe sud de l'île on peut aperce­voir, sur la Langue de Barbarie, l'hydrobase d'oùs'envola Mermoz en 1930 pour la première traver­sée postale de l'Atlantique Sud. En remontant le

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long du fleuve, côté sud-ouest, on verra une vieillemaison fortifiée à arcades.

Les noms des rues de Saint-Louis fleurent lepassé: rue Adanson, rue Brière de l'Isle, rue deFrance, rue de Boufflers, rue Mage, rue Schœlcher,rue Carnot, ou rue Pierre Loti, en souvenir de l'écri­vain qui vécut là quelques mois en 1873/74, et dontles amours saint-Iouisiennes avec une belle "mulâ­tresse blonde" transparaissent dans le "Roman d'unSpahi".

Vers le nord-est de l'île, s'élève la "Grande Mos­quée", construite de 1825 à 1847. Par le pont Serva­tius, on accède à la Langue de Barbarie, mince cor­don littoral, avec le village de pêcheurs de GuetN'Dar, le cimetière marin où des filets de pêche re­couvrent les tombes, puis l'ancien Lazaret, et enfinl'hydrobase.

ZIGUINCHOR, FILLE DE LAFORET

Ziguinchor, capitale régionale de la Casamance,de près de 100 000 habitants, n'était, il y a un siècle,qu'un petit village d'à peine 1 000 habitants, com­posés de quelques Portugais et sûrtout de Baînoun,premiers occupants connus de la région. Relaisentre la Gambie et le Rio Cacheu pour le trafic desesclaves, Ziguinchor ne se développe qu'à la fin duXIXe siècle: cédée par le Portugal aux Français en1888, elle devient le centre commercial de la Casa­mance avec l'installation des comptoirs des princi­pales maisons de commerce. Son site portuaire lafait choisir comme lieu de traite du caoutchouc puisde l'arachide, de préférence à Carabane et à Séd­hiou dont l'accès est rendu difficile, pour le premierpar les bancs de sable et pour le second par le faibletirant d'eau. En 1908, elle déclasse définitivementces deux villes en acquérant les principales fonc­tions administratives, devenant le lieu de résidencede l'administrateur du cercle de la Basse-Casa­mance.

Dès cette époque, se distinguent un quartier eu­ropéen au plan en damier, le long du fleuve, dont ilreste encore quelques belles maisons ombragéesde flamboyants, et un quartier africain qui ne cessede s'étendre vers le sud: les quartiers Boucotte,

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Santhiaba, Thilène, Colobane et Kandé compren­nent des parcelles de rizières et gardent maintsaspects villageois; les cochons vaquent entre lesmaisons en banco, au toit de chaume ou de tôle on­dulée, des animistes et catholiques baînoun, diola,balante, pepel... Les musulmans, en nombre crois­sant, sont davantage originaires de la Moyenne etde la Haute Casamance (Mandingue, Peul, Sara­kholé ... ) mais aussi du "Nord" (Wolof, Toucouleur,Walo-Walo, Nyominka).

Cette diversité ethnique, religieuse et linguisti­que - aux diverses langues de la Casamance et desrégions du Nord, s'ajoute le créole, héritage de lacolonisation portugaise - résulte des importantesmigrations, favorisées depuis les années cinquantepar le désenclavement de la Casamance: le pontEmile Badiane qui permet de franchir la Casa­mance au niveau de Ziguinchor et la route trans­gambienne en sont des exemples. Ville étape versDakar pour l'exode rural, ses industries ne peuventguère retenir la population croissante de jeunes;ces derniers, en quête d'un salaire, sont découragésdepuis une quinzaine d'années par la sécheresse quisévit même dans cette région, "paradis vert" du Sé­négal. A part les industries de transformation del'arachide et de la crevette - à l'essor spectaculairedes années soixante, fait suite, à l'heure actuelle, uneffondrement de la pêcherie, contre-coup de la sé­cheresse et de la surexploitation -, l'attraction de Zi­guinchor repose sur les activités primaires (pêche,agriculture) et surtout tertiaires (administration,commerce, tourisme).

Ezéguichor "je me suis assis et j'ai pleuré" ne cor­respond plus à cette éthymologie du temps de latraite des esclaves; cette ville affirme sa personna­lité méridionale par sa gaieté même, à laquelle levin de palme n'est peut-être pas étranger.

TOURISME: INVITATIONAU VOYAGE

Pays d'Afrique Noire le plus proche de l'Europe,infrastructures d'accueil en perpétuelle améliora­tion, lieux chargés d'histoire (Gorée et Saint-Louis),prestige d'un Président francophile, savanes etfaune évoquant les contes africains de notre en­fance, sept cents kilomètres de plages, hospitalitéd'une population francophone: le Sénégal détenaitbien des atouts pour attirer massivement les tou­ristes, et en particulier les Français, et le pays a sujouer ces atouts.

L'hôtellerie a connu un boom extraordinaire de­puis le début des années 70, passant de 3 300 lits en1973 à 10 100 lits en 1985. Le nombre de touristesétait de 278000 en 1985, dont près de la moitiéétaient français. Ces touristes ont généré un apporten devises de 30,7 milliards de francs CFA, plaçantle tourisme au troisième rang des ressources dupays, après l'arachide et la pêche, et avant les phos­phates.

Les efforts actuels tentent d'attirer de nouvellesclientèles, et des bureaux de promotion du tourismesénégalais ont été ouverts aux Etats-Unis et dansplusieurs pays d'Europe. La principale motivationdes touristes reste la plage: lorsque l'hiver sévit enEurope, le climat du Sénégal est le plus agréable del'année. Heureuse coïncidence qui remplit les nom­breux hôtels de Dakar, de la "petite côte" au sud deDakar, et de la Casamance. On dénombre environune vingtaine d'hôtels quatre étoiles et autant detrois étoiles.

Mais pour découvrir le pays profond, il fauts'éloigner des plages et goûter le charme des "cam­pements" et "gîtes d'étape". Les "campements" lesplus connus sont ceux du lac Retba, du Parc des Oi­seaux du Djoudj, des îles du Saloum (Niodior etDionewar), de Linguère au centre du pays, de Badidans le Parc du Niokolo Koba, de Salemata, enpays Bassari, aux confins est du pays.

Les "gîtes d'étape" sont surtout nombreux en Ca­samance (une dizaine), où le Secrétariat d'Etat auTourisme a développé une idée originale qui fait àprésent école ailleurs en Afrique : créer des récep­tifs hôteliers de petite dimension, intégrés à unvillage, tant sur le plan architectural qu'écono­mique. La construction respecte le style local. A Af­finiam et Enampore, les gîtes reproduisent lagrande case traditionnelle de Casamance, avec im-

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pluvium, à Baïla le gîte reproduit la demeure cos­sue d'un notable, et à Oussouye la maison à étagede la région de Mlomp. Le personnel du gîte pro­vient en principe du village et des plats locaux sontcuisinés pour les touristes.

Que visiter au Sénégal, outre Dakar, Saint-Louis,Gorée, les plages, la végétation luxuriante de la Ca­samance et les Parcs Nationaux? Bien d'autres ré­gions ou sites présentent des attraits: Joal, villagenatal de l'ancien Président L.-S. Senghor, Fadiouth,avec ses célèbres greniers sur pilotis, le delta du Sa­loum, avec son labyrinthe d'îles et de bras de mer,que l'on peut visiter à bord du bateau "Bou El Mog­dad", la grande mosquée de Touba, les sculpteurssur bronze et autres artisans de Diourbel, Cayar etses pêcheurs, le fleuve Sénégal de son embouchureau Parc des Oiseaux du Djoudj puis jusqu'à Podor,Matam, Bakel, anciens comptoirs coloniaux où les"vapeurs" faisaient escale et qui semblent figés àja­mais, hors du temps... , les immensités sahéliennesdu Ferlo, les montagnes du Sud-Est, autour deKoudougou, premiers contreforts du Fouta-Djalon,et bien d'autres lieux encore.

AGRICULTURE:DE L'ARACHIDEAUX CULTURESVIVRIERES

L'agriculture tient une place importante au Sé­négal dans la mesure où 70% de la population ac­tive travaille dans ce secteur, et ceci malgré l'exoderural, saisonnier ou permanent, vers les villes, enparticulier Dakar, et malgré le bas niveau de viedes paysans et sa dégradation. Certaines régions,telles que le Siné-Saloum, connaissent même defortes densités de population. Cependant, le secteurprimaire ne représente depuis 1981, selon les an­nées, que 21 à 26% de la production intérieurebrute: dans celui-ci la part des cultures a varié, trèsirrégulièrement, entre 43 et 58%. On constate desfluctuations de l'activité agricole sur fond de pla­fonnement et même de dégradation. Avec enmoyenne ces dernières années 2,3 millions d'hec­tares, la surface cultivée ne progresse pas mais

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varie seulement entre 2,1 et 2,5 ; ainsi il n'y a que12% de la surface totale du pays qui sont cultivés.

L'essentiel de la production agricole provient descultures pluviales qui sont réalisées au cours de l'hi­vernage (saison des pluies de juillet à octobre). Cer­taines cultures sont réalisées en décrue durant lacontresaison froide (de novembre à février) ; ils'agit en particulier du sorgho dans la vallée dufleuve Sénégal. Il existe également des culturesinondées comme par exemple le riz aquatique oules rizières de nappe en Casamance. Enfin la cul­ture irriguée et les aménagements hydroagricolessont surtout développés dans la vallée du fleuve Sé­négal ; dans ce cas, on peut théoriquement cultivertoute l'année: les cultures pratiquées sont le riz, lemaïs, la tomate et la canne à sucre (cette dernièrepar la Compagnie Sucrière Sénégalaise, C.S.S., àRichard-ToU) ; l'aménagement général de la valléedu Sénégal, qui concerne plusieurs pays, est confiéà l'Organisation pour la Mise en Valeur du fleuveSénégal (O.M.V.S.) ; celle-ci a été à l'origine de laconstruction des barrages de Diama (près de Saint­Louis) et de Manantali (au Mali) ; le premier est ter­miné, le second en voie d'achèvement; malgré cesgros investissements, les périmètres irrigués sontencore peu développés et ils sont à l'origine demoins de 10% de la production vivrière sénéga­laise ; le but poursuivi par la mise en place de cesaménagements est de sécuriser la production agri­cole.

La première grande catégorie de cultures estcelle de rente; elle concerne en moyenne 1,1 mil­lion d'hectares, soit 48% de la superficie cultivée. Ils'agit surtout de l'arachide. Cette plante a été im­portée au XVIe siècle du Brésil par les Portugais; laspécialisation du Sénégal dans l'arachide a com­mencé à la fin du XIXe siècle, après l'ère dite de lagomme arabique; avec l'arachide est apparuel'économie de traite. Traditionnellement cette cul­ture est réalisée dans la zone dite du "bassin arachi­dier", c'est-à-dire dans le centre-ouest du pays(régions de Kaolack, Fatick, Diourbel et Thiès) ;toutefois, l'ère de culture s'est progressivementétendue vers l'est ("terres neuves"), le sud (Casa­mance) et le sud-est (Sénégal Oriental) ; le mouri­disme (confrérie musulmane datant de la fin duXIXe siècle) ajoué un rôle important dans cette dif­fusion de la culture arachidière. Les principalesconséquences de cette prédominance de l'économiearachidière sont: la distribution de revenus moné­taires importants aux paysans (entre 1981 et 1986

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ceux-ci ont varié selon les années entre 13 et54,8 mds FCFA avec une moyenne qui se situe à33 mds ; environ 90% des revenus monétaires desruraux proviennent de l'arachide), une industriali­sation du pays à travers les huileries et des exporta­tions d'huile et de tourteaux; ces dernières ontsouffert toutefois de l'arrêt des surprix français en1967/68 et de la concurrence des oléagineux euro­péens et américains (surtout le soja), ce qui entraînedes baisses des cours. Bien que le Sénégal soit lepremier producteur d'arachide d'Afrique franco­phone, on constate un déclin de cette culture;la production arachidière connaît une baisse ten­dancielle et de grandes irrégularités (entre 1 et0,5 millions de t. coque ces dernières années avecune moyenne de 730 000 t) ; la commercialisationofficielle apparaît encore comme plus perturbée eten baisse (entre 236 000 et 913 000 t avec enmoyenne 500 000 t, soit 68% de la production, de35 à 91 % selon les années entre 81 et 86), comptetenu en particulier du développement de la tritu­ration artisanale et des exportations frauduleu­ses. Cette situation a pour conséquence la sous­utilisation des huileries, dont la capacité de900 000 t n'a jamais été totalement utilisée ces der­nières années (la trituration a même été inférieureà 200 000 t en 84/85), la réduction des exportationsofficielles de 59 mds FCFA les meilleures années(29% du total des exportations, soit au premierrang de celles-ci) à 9 mds les moins bonnes (8%,quatrième rang) (moyenne 81/85 : 40 mds FCFA,20%, deuxième rang) et un déficit important de lafilière arachidière que l'Etat doit combler. Si unemonoproduction au niveau des cultures indus­trielles présente des risques, son effondrement esttout aussi dangereux. Son évolution dépend pourpartie de l'arbitrage réalisé par les paysans entre laculture de l'arachide et celle du mil en fonction duprix de chacun de ces produits, des conditions danslesquelles la collecte est réalisée (celles-ci ont beau­coup évolué ces dernières années), des efforts faitsen matière de recherche (ceux-ci ont été importantsdans le passé) et de vulgarisation (par la Sociétépour le Développement et la Vulgarisation Agri­cole, la SODEVA).

On peut citer comme autre culture de rente lecoton. Sa production est également assez variable(entre 24 000 et 47 000 t sur la période 81/86, lamoyenne étant de 36 000 t) ; elle est réalisée dans lesud-est du Sénégal <Sénégal Oriental et Haute Ca­samance, régions de Kaolack, Tambacounda et

Kolda) là où les pluies sont suffisantes; sa vulgari­sation est confiée à la Société pour le Développe­ment des Fibres Textiles (SODEFITEX). Les expor­tations de coton ont varié ces dernières annéesentre 2 et 8 mds FCFA (moyenne 5,8), soit 2 à 4%(moyenne 3) du total des exportations; elles ontsouffert de la très forte chute des cours mondiauxen 85/86.

Les cultures vivrières constituent une secondecatégorie de cultures; elles concernent en moyen­ne 1,2 millions d'hectares, soit 52% de la superficiecultivée. Il s'agit surtout de céréales: mil, sorgho,maïs et riz. Les principales zones de productionsont la vallée du fleuve Sénégal (riz en irrigué,... ), leCentre Ouest (mil,... ) et la Casamance (riz, maïs, ... ).La production est irrégulière, elle varie selon l'im­portance et la répartition des pluies; ces dernièresannées (81/86) le mil et le sorgho ont varié entre352 000 et 950 000 t (moyenne 625 000), le maïsentre 61 000 et 147 000 t (moyenne 96 000) et leriz paddy entre 95 000 et 147 000 t (moyenne121 000) ; globalement, compte tenu de l'accroisse­ment de la population, la production céréalière partête diminue. Le déficit céréalier est chronique etcroissant; en moyenne sur la période 80/86, la

'. production céréalière nationale n'a satisfait que55% de la demande; de 1951 à 1986, le déficit vi­vrier par habitant a doublé. Pour combler ce dé­ficit, le Sénégal d'une part fait appel à l'aide ali­mentaire internationale, qui peut être très impor­tante en cas de sécheresse, d'autre part réalise desimportations commerciales permanentes élevéessurtout de riz et de blé; ainsi, en 1985, il a été im­porté 432 000 t de céréales dont 336 000 de riz(26 mds FCFA, 7% du total des importations) et89 000 de blé (7,5 mds, 2%) ; le riz est un problèmecrucial bien que le Sénégal bénéficie actuellementen ce qui le concerne d'un cours mondial très bas;en 1985, 15% des importations sénégalaises concer­naient des produits alimentaires (55,8 mds). Le riz(essentiellement importé) est devenu l'aliment leplus important, surtout en ville mais aussi à la cam­pagne; il y a eu un changement complet dans leshabitudes alimentaires qui s'est réalisé au profitdu riz et du pain (blé) ; actuellement la consomma­tion de riz par habitant et par an est de l'ordre de68 kg alors qu'elle n'est, par exemple que de 3 kgen France; un des principaux problèmes du Séné­gal est qu'il produit surtout du mil et du sorgho etqu'il consomme (au niveau de la demande solva­ble) du riz.

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L'agriculture sénégalaise est, pour l'essentiel,celle d'un pays sahélien. La sécheresse qui sévit,avec quelques rémissions, depuis plus de quatorzeans a causé des dégâts considérables; les aléas cli­matiques concernent à la fois les pluies (quantités etrépartitions) et les crues; il en résulte des produc­tions très irrégulières aussi bien en agriculture plu­viale que de décrue; la dégradation du milieu estmanifeste, que ce soit au niveau de la désertifica­tion ou de la progression de l'eau salée ou des terressalées. Quand les pluies reviennent et permettentd'envisager une bonne récolte, alors des prédateurs(acridiens) attaquent les cultures, ce qui peut avoirde graves conséquences si des traitements massifsne sont pas très rapidement mis en place. La prati­que désastreuse des feux de brousse voit quant àelle ses effets négatifs amplifiés par la sécheresse.Les cultures sont pratiquées d'une manière exten­sive, les rendements sont faibles et le niveau techni­que peu élevé. On constate un appauvrissementdes sols dû entre autres à une chute très importantede la consommation d'engrais et à une réductiondes jachères; cette dernière est le résultat de l'aug­mentation de la pression démographique et du dé­veloppement de la culture attelée. Au Sénégal, on aaffaire pour l'essentiel à une agriculture dualiste;en effet d'un côté il existe une très forte autocon­sommation céréalière et de l'autre une importantecommercialisation arachidière.

L'ancienne politique agricole sénégalaise s'est ré­vélée coûteuse et peu efficace, aussi une NouvellePolitique Agricole (N.PA) a-t-elle été définie en1984; sa mise en œuvre véritable reste encore pourune bonne part à réaliser. Elle repose sur la volontéd'augmenter le niveau de vie du monde rural;pour obtenir ce résultat, elle entend promouvoir lacroissance de la production et de la productivité enfavorisant en particulier l'initiative individuelle;ceci doit être obtenu par le désengagement de l'Etat(spécialement des Sociétés Régionales de Dévelop­pement Rural, S.R.D.R.) et la libéralisation de l'éco­nomie. Concrètement, il s'agit de développer lescultures aussi bien pluviales qu'irriguées et de lesdiversifier (niébé, maraîchage, ... ). Les moyens àmettre en œuvre relèvent à la fois de l'intensifica­tion, telle l'augmentation de la consommation d'en­grais, et de l'extensification, tel l'accroissement dessuperficies cultivées par exemple par le développe­ment de la culture attelée. En tout état de cause, ilconvient de limiter les charges récurrentes; celan'empêche pas qu'il est indispensable de remettre

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sur pied un véritable crédit à travers la mise enplace progressive de la Caisse Nationale de CréditAgricole du Sénégal (C.N.CAS.). La N.P.A. miseégalement sur la réforme du mouvement coopéra­tif et des circuits de commercialisation ainsi que surune politique des prix; cette dernière repose sur lavérité des prix afin d'équilibrer les comptes de cha­que filière; ceci implique en particulier de reconsi­dérer le rôle que doit jouer la Caisse de Péréquationet de Stabilisation des Prix (C.P.S.P.l.

La N.P.A. a été complétée en 1986 par le PlanCéréalier. Les céréales sont désormais considé­rées comme le secteur prioritaire de l'agriculture.Le but poursuivi est que le Sénégal se nourrisse,l'objectif clairement formulé étant l'autosuffi­sance alimentaire, au moins à long terme; la di­minution progressive de la dépendance alimen­taire implique en corollaire l'augmentation de lapart de la production nationale dans la consom­mation alimentaire, ce qui semble impliquer uneprotection douanière. L'équilibre alimentaire re­cherché l'est autant en qualité qu'en quantité. Ilconvient de réorienter la production et la consom­mation vers le mil, le sorgho et le maïs réalisés enculture pluviale.

Pour mettre en œuvre ce vaste programme, uneffort de recherche se révèle indispensable. Il devraporter tout spécialement sur la mise au point d'es­pèces robustes à cycle court et besoins en eau ré­duits.

ELEVAGE: LA TRADITIONDES PASTEURS PEITL

, Au Sénégal, comme dans les autres pays sahé­liens, l'élevage tient une place très importante. En1985, on estimait les bovins à 2,2 millions de têtes,les moutons et les chèvres au total à 3 millions, lesporcins (en secteur non musulman) à 150 000, leschevaux et les ânes à 200 000 chacun et les volaillesà 9 millions; il conviendrait d'ajouter également à .cette liste les dromadaires. En moyenne, sur la pé­riode 1980/1986, l'élevage a représenté 31% de lavaleur ajoutée parle secteur primaire; d'une annéesur l'autre cette proportion varie fortement entre24 et 37%. '

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Il existe au Sénégal deux types d'élevage. Le pre­mier est l'élevage pastoral extensif, avec la pratiquede la transhumance, dans la zone sahélienne; il estle fait des Peul et concerne les zébus, les ovins et lescaprins; les animaux sont dans le Ferlo en saisondes pluies et dans sa périphérie en zone sèche;cependant compte tenu de la sécheresse, on cons­tate un repli des troupeaux vers le sud; la multipli­cation des forages et la sédentarisation ont pourconséquence la surcharge pastorale; la Société deDéveloppement de l'Elevage dans la zone Sylvo­Pastorale (SODESP) est chargée de l'améliorationde l'élevage dans cette région. Le second type estl'élevage sédentaire plus au sud; il concerne les bo­vins (taurins) n'dama trypanorésistants, les mou­tons, les chèvres, les chevaux, les porcs et les vo­lailles; il est le fait en particulier des Serer, desMandingue et des Diola.

En 1970, on estimait la production de viande etd'abats par habitant et par an à 20 kg; en 1980, onétait tombé à 12,7 kg; en 1982, on avait la valeurvoisine de 12,8 kg, soit une production totale de78 800 tonnes ce qui correspond à 83 calories ou à6 g de protéines par tête et par jour; on constateune nouvelle chute en 1983 avec 9 kg seulementsoit un total de 55 800 tonnes se répartissant en61 % pour les bovins, 18% pour les ovins et caprins,14% pour la volaille et 7% pour les porcins etéquins; le but actuellement poursuivi par le gou­vernement sénégalais est de retrouver le niveau de1970 et de s'y maintenir en développant la produc­tion bovine et l'embouche. En 1983, la productionde lait était estimée à 123,5 millions de litres, soit19,9 litres par habitant et par an, alors que laconsommation s'élevait à 269,5 millions de litres(43,5 litres par habitant et par an) ; cette dernièren'était donc couverte qu'à concurrence de 46% parla production nationale qu'il convient par consé­quent d'augmenter. On peut également citer la pro­duction de cuir et de peaux (en partie exportés)ainsi que celle d'œufs et de miel.

D'une manière générale, l'élevage est extensif; lebétail a à la fois une faible fécondité et une fortemortalité; il est peu productif. Il s'agit le plus sou­vent d'un élevage ostentatoire, avec une commer­cialisation faible et une orientation plus vers le laitque vers la viande. Le commerce des cuirs et despeaux a cependant une certaine importance. L'ali­mentation du bétail pose des problèmes surtout ensaison sèche et compte tenu de la réduction de l'es­pace pastoral, par exemple dans la vallée du fleuve

Sénégal à cause de la progression des aménage­ments hydroagricoles. La sécheresse a eu pourconséquence une diminution du cheptel, surtout dugros bétail; le troupeau bovin n'a pas encore re­trouvé son niveau de 1971, avant le début de la sé­cheresse. Celle-ci a provoqué également surpâtu­rage et déforestation dans certaines zones.

Le commerce interafricain du bétail sur pied esttrès développé. De ce point de vue, le Sénégal estimportateur net. Il bénéficie en particulier d'impor­tantes importations d'animaux de Mauritanie quisont destinés à combler le déficit sénégalais enviande.

Le développement de l'élevage implique-t-illasédentarisation de l'ensemble des troupeaux? Lesavis sur ce point sont partagés compte tenu desconséquences multiples et opposées d'une telle poli­tique. L'association culture-élevage est recherchéeà travers le développement de la culture attelée etde la fumure animale. La commercialisation desproduits animaux est favorisée par la créationd'abattoirs et par la mise en place de la Sociétéd'Exploitation des Ressources Animales du Sénégal(SERAS) et de coopératives d'éleveurs.

PECHE: DES PIROGUIERSALAPECHEINDUSTRIELLE

Ces dernières années, la pêche a connu une ra­pide expansion. Le Sénégal a 700 km de côte et unlarge platea~ continental; il dispose d'abondantesressources, le milieu marin étant très poissonneux;le risque est grand dans ces conditions d'y prati­quer une "exploitation minière" alors qu'il convientau contraire de ne pas piller cette richesse halieuti­que naturelle. Le danger est bien réel, des pro­blèmes récents sont apparus: le poisson devientmoins abondant et les rendements diminuent. Enmoyenne, sur la période 1980/1986, la contributionde la pêche à la formation de la valeur ajoutée dusecteur primaire a été de 12%, avec les variationsirrégulières d'une année sur l'autre entre 10 et14% ; cette valeur ajoutée de la pêche augmentegénéralement d'une année sur l'autre en FCFA

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courants passant ainsi de 12,7 mds en 1980 à29,1 mds en 1986. Les mises à terre en 1984 se sontélevées à 217 000 t ; les prises en mer sont un peuplus élevées, tout le poisson n'étant pas débarqué;une partie de celui-ci est directement exportée verscertains pays étrangers. Entre 1981 et 1984 lesquantités totales mises à terre ont peu varié. On es­timait en 1982 la production par tête à 39 kg, ce quisitue de ce point de vue, le Sénégal au treizièmerang mondial.

Il existe différents types de pêches. En ce quiconcerne le domaine maritime, il convient toutd'abord de souligner l'importance de la pêche arti­sanale. En 1984, les deux tiers des mises à terre pro­venaient de celle-ci (environ 145000 t). En valeur,la part de la production artisanale est beaucoupplus faible (35% en 1983) compte tenu de lamoindre valeur des espèces pêchées; en 1983 la va­leur moyenne du kilogramme pêché (91 FCFA)était 2,5 fois moins chère dans le secteur artisanalque dans le secteur industriel. Les revenus de lapêche artisanale sont réguliers (contrairement auxrevenus agricoles) et croissants. La valeur ajoutéedégagée est élevée. On estimait en 1983 à 40 500 lenombre de pêcheurs concernés par ce type depêche; il convient d'y ajouter environ 150 000 em­plois indirects pour connaître l'ensemble des per­sonnes (7% de la population active) bénéficiant desrevenus en provenane de ce secteur. L'armementartisanal comportait en 1985 8 700 pirogues dont63% étaient motorisées. La pêche artisanale est pra­tiquée tout le long des côtes sénégalaises mais à despériodes différentes: sur la Grande Côte au coursde la saison sèche, de janvier à avril à Kayar, etd'avril à juillet à Saint-Louis; sur la Petite Côte pen­dant la saison des pluies, d'août à novembre àMbour et Joal ; il y a également des pêcheurs àDakar et en Casamance (on pêche toute l'année àZiguinchor). On trouve des pêcheurs en particulierchez les Saint-Louisiens et dans les ethnies lébou,serer et niominka. Le déplacement du poisson en­traîne celui des hommes et de leurs pirogues; lesmigrations des pêcheurs et de leurs familles sontimportantes, surtout celles des Guet-ndariens(Saint-Louis) vers Kayar et Mbour. A l'origine onavait affaire à des paysans-pêcheurs mais peu àpeu la pêche l'a emporté sur l'agriculture, comptetenu du fait qu'elle est plus avantageuse que la cul­ture de l'arachide; aussi a-t-on désormais affaire àdes pêcheurs-paysans, la répartition des activitésdans les familles s'étant modifiée et leur niveau de

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vie étant plus élevé. L'évolution des techniques decapture a eu pour conséquence l'augmentation dela production par pirogue; peu à peu les embarca­tions sont pourvues d'un moteur et les filetsmaillants encerclants ainsi que les sennes tour­nantes (filets actifs) remplacent les lignes de fond,les filets dormants et les sennes de plage. La forteproduction artisanale est destinée essentiellementau marché intérieur, à travers l'autoconsommationet la commercialisation; elle permet également derégulariser l'approvisionnement des usines. En1981 la production artisanale était absorbée à 70%par la consommation locale en frais, à 22% par latransformation traditionnelle (poisson séché etfumé) destinée également à la consommation lo­cale et à 8% par la transformation industrielle dontles produits sont exportés. La commercialisation dupoisson destiné au marché intérieur est réalisée parl'intermédiaire des mareyeurs et est surtout orien­tée vers l'approvisionnement de l'agglomérationdakaroise. Compte tenu de son importance, lapêche artisanale est un secteur prioritaire; son dé­veloppement est réalisé en particulier à travers lescoopératives.

Dans le domaine maritime le second type depêche est la pêche industrielle. En 1984 un tiers desmises à la terre provenait de celle-ci (environ72 000 t). En valeur la part de la production indus­trielle est beaucoup plus forte (65% en 1983)compte tenu de la valeur élevée des espèces pê­chées ; en 1983 la valeur moyenne du kilogrammepêché (223 FCFA) y était 2,5 fois plus élevée quedans le secteur artisanal. La pêche industrielle créerelativement peu de valeur ajoutée; il y a un fortcontenu en importations (dont le coût va croissant)dans les dépenses liées à cette activité, le contrôlede l'étranger y est important; la pêche industrielleattire peu de capitaux alors que le renouvellementde l'armement se révèle actuellement indispen­sable; les prix à l'exportation, débouché des pro­duits de cette pêche, sont fixés sur les marchésétrangers; il s'agit donc d'un secteur extravertidont la valorisation est réalisée hors du Sénégal. Onestimait en 1983 à 2100 le nombre de pêcheursconcernés par ce type de pêche; il convient d'yajouter environ 10 000 emplois indirects. L'arme­ment industriel sénégalais comprenait en 1983165 unités, dont 144 d'opérationnelles; au total,cette année-là, 257 bateaux ont participé à la cam­pagne de pêche, 65% de la production sont assuréspar l'armement sénégalais. La pêche industrielle a

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sa base uniquement dans la région du Cap-Vert. Onpeut distinguer: la pêche à la sardinelle dont le pro­duit est destiné aux industries d'exportation et aumarché local en frais, la pêche chalutière (cre­vettes, soles,...) destinée uniquement aux industriesd'exportations et la pêche thonière également desti­née aux industries d'exportation. Entre 1960 et1983, la production de la pêche industrielle a connuune croissance annuelle moyenne de 30,8% qui cor­respond à une progression de la pêche sardinière etchalutière et à une stagnation de la pêche thonièredont la part par conséquent régresse. Actuellement,l'ensemble de la pêche industrielle stagne ou mêmerégresse; cela est dû à la fois au vieillissement del'armement, aux difficultés d'accès au crédit et àdes problèmes de gestion. Pour favoriser la bonneconservation du poisson, des entrepôts frigorifi­ques ont été construits. Les produits de la pêcheindustrielle, essentiellement exportés, passentauparavant par des unités de transformation in­dustrielles ; on dénombrait en 1983 42 unités decongélation, 3 conserveries de poisson (thon, cre­vettes, ... ) et 2 unités de fabrication de farine de pois­son (dont une à Djifer). On peut enfin noter l'échecde la pêche cordière qui avait été conçue commeune étape entre la pêche artisanale et la pêche in­dustrielle.

En dehors de la pêche maritime il existe égale­ment au Sénégal une pêche continentale en rivière;cependant, celle-ci diminue (par exemple dans lavallée du fleuve Sénégal) en particulier à cause dela sécheresse, de la diminution des crues qui s'en estsuivie et de la mise en place de cultures irriguées, cequi supprime certaines zones de ponte, donc de re­production du poisson. On estimait en 1970 ce typede production à 10000 t dont 80% autoconsom­mées. Il y aurait dans ce secteur 10 000 pêcheurs et4 000 pirogues.

De nouveaux types de production du poissondevraient être développés à l'avenir. D'une partl'aquaculture qui existe déjà sous forme d'essais enCasamance (crevettes). D'autre part, la pisciculturequ'on envisage d'implanter dans la vallée du fleuveSénégal.

La consommation de poisson est importante auSénégal. En 1980 on l'estimait à 22 kg par habitantet par an en moyenne. Cette consommation a ten­dance, ces dernières années, à diminuer. Il sembleque si l'on inclut la totalité des produits de la mer(y compris les crustacés, les mollusques, ... ) on ob­tient une quantité consommée supérieure à celle

indiquée ci-dessus. Le poisson est indispensable àl'équilibre alimentaire des Sénégalais; il constitueune couverture protidique importante; en effet, ilprocure 57% des protéines d'origine animale con­sommées au Sénégal. En 1983,63% de la produc­tion de la pêche maritime sénégalaise ont été con­sommés dans le pays; il s'agit d'une très grandepartie de la pêche artisanale et d'une petite fractionde la pêche industrielle. En plus de cette part de laproduction maritime, il convient également deprendre en compte la totalité des produits de lapêche continentale.

Les exportations des produits de la pêche mari­time constituent pour le Sénégal une source trèsimportante de devises. Elles représentent 37%(1983) de la production totale, le reste étant, nousl'avons vu, consommé sur place: elles proviennentessentiellement de la pêche industrielle et dans unefaible mesure de la pêche artisanale. Avant d'êtreexportés, les produits de la mer sont soit congelés,soit mis en conserve dans des usines. De 1981 à1985 ces exportations sont passées de 25,5 à55,2 mds FCFA ; leur part dans l'ensemble des ex­portations est passée de 16% en 1982 à 23% en 1985(moyenne 81/85 : 20%) ; sur la période 81/85 ellesse situent au troisième rang des exportations séné­galaises, très proches de l'arachide qui est au deu­xième rang; selon les années elles sont entre le pre­mier et le troisième rang; elles ont bénéficié cesdernières années d'une augmentation des coursmondiaux du poisson. Les produits chers (cre­vettes, langoustes, soles, rougets, conserves dethon) sont exportés vers les pays industriels, enparticulier la France ; les espèces meilleur marché(sardinelles, chinchards) sont exportées vers l'Mri­que du Nord et la Côte d'Ivoire. Ces exportationssont réalisées le plus souvent par voie maritime,toutefois, on constate une augmentation des expor­tations effectuées par voie aérienne pour les es­pèces à haute valeur marchande.

Le Sénégal se procure également des devises parles accords de pêche internationaux (par exempleavec la Communauté Economique Européenne). Ilaccorde, moyennant redevances, des droits depêche à des pays étrangers dans sa zone économi­que exclusive. Cela a pour conséquence, dans cer­tains cas, le développement d'une pêche irrégulièrepar les bateaux-usines étrangers.

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LA CUEILLETTE DESHUITRES

Les huîtres de palétuviers constituent une ri­chesse méconnue du Sénégal; élevées dans lesparcs ostréicoles de Joal et Fadiouth et venduesaux hôtels de Dakar, elles font l'objet d'unecueillette active en Basse-Casamance, circuit origi­nal détenu par les femmes diola.

Entre janvier et juin, les bolons - chenaux demarée bordés de mangrove - sont parcourus par denombreuses petites pirogues conduites à la rame,par une ou deux femmes des villages environnants,en quête des huîtres. Parties tôt le matin, cesfemmes diola gagnent les sites les plus propices, làoù les racines des palétuviers chargées d'huîtressont découvertes à marée basse. Elles descendentdans le poto-poto, sol boueux, ne craignant pas dese couper les pieds ou les mains avec les coquillesd'huîtres ou de s'enfoncer dans la vase; elles déta­chent les coquilles une à une directement de l'arbreou après en avoir coupé la racine. Elles ne rentrentque le soir, avec la marée montante, quand leurs pi­rogues sont remplies. Les huîtres sont alors déchar­gées au débarcadère du village et attendent le len­demain pour être transformées au "chantier".

Le chantier est le lieu de décortiquage deshuîtres; les huîtres, ouvertes sur le feu ou dansl'eau bouillante, sont mises à sécher 2-3 jours, puisles femmes les entreposent sur un van au-dessusdu foyer familial. Les huîtres sont consomméespour accompagner le niankatang - riz blanc sim­plement bouilli des Diola -, réservées parfois pourdes cérémonies familiales ou collectives, ou encorevendues en ville.

On retrouve ainsi à Dakar le long des rues lesplus passantes ces mêmes femmes venues vendreavant la saison des pluies, les divers produits deleur village (huîtres, huile de palme, citrons,...).

Au total, les huîtres non seulement leur appor­tent un complément de protéines à leur nourriturequotidienne, mais aussi une source de numérairequi leur permettra de satisfaire leurs désirs (tissus,quolifichets,... ) et, de plus en plus, les besoins fami­liaux croissants avec la sécheresse.

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MINES ET INDUSTRIES

Le secteur secondaire est composé des industriesextractives, des huileries, des "autres industries", del'énergie ainsi que des bâtiments et des travaux pu­blics (B.T.P.). Sur la période 1980/1986 la part dusecondaire dans la production intérieure brute a étéen moyenne de 31 % avec des variations selon lesannées entre 29 et 33%.

Le Sénégal est un pays pauvre en ressources mi­nières. Les phosphates sont, dans ce domaine, saprincipale production; les mines sont situées àTaïba et à Thiès; il s'agit de phosphates de chaux etd'alumine, ce second type étant unique au monde.Sur la période 1981/1985 la production a été enmoyenne de 1 847 000 t avec des variations dusimple au double selon les années entre 1181 000 tet 2 212 000 t. Jusqu'en 1983, l'essentiel de cetteproduction était exporté mais depuis 1984 une partimportante est vendue localement aux IndustriesChimiques du Sénégal (I.C.S.). Au cours de la pé­riode 81185, les exportations se sont élevées enmoyenne à 1 311 000 t avec les variations entre1 206 000 et 1 419 000 t ; c'est donc en moyenne71 % de la production qui ont été exportés (de 58 à100% selon les années). En valeur, ces exportationssont passées de 16,6 mds FCFA en 1981 à 26,6 en1985 ; elles représentent en moyenne 11% des ex­portations totales (de 9 à 14% selon les années) ;elles se situent au quatrième rang, par ordre d'im­portance, dans l'ensemble des exportations sénéga­laises. La baisse des cours mondiaux du phosphatea été préjudiciable au Sénégal; elle est due à la sta­gnation de la demande mondiale qui est liée elle­même à la diminution de la consommation mon­diale d'engrais.

Le Sénégal produit également du sel marin àKaolack; en 1985 la production a été de 150 000 t .l'essentiel est exporté vers les pays de l'Afrique d~l'Ouest; la valeur de ces exportations est passée de2,3 mds FCFA en 1981 à 5,9 en 1985; les exporta­tions de sel représentent 2% du total des exporta­tions sénégalaises. Il existe aussi au Sénégal descarrières; on extrait en particulier du marbre et del'attapulgite.

On peut également indiquer la présence de cer­tains gis~ments qui ne sont pas encore exploités:du fer (Société des Mines de Fer du Sénégal Orien­tal, MIFERSO), du phosphate dans la région deMatam, de l'or à Sabodala, de la tourbe dans les

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Niayes et du pétrole au large de la Casamance(Dome-Flore).

L'industrie sénégalaise est très fortement con­centrée financièrement et géographiquement dansla région du Cap-Vert; on y trouve plus de 70% desentreprises. Il existe par ailleurs quatre centres in­dustriels secondaires: Ziguinchor, Kaolack, Thièset le delta du fleuve Sénégal.

Au total on a recensé 341 entreprises indus­trielles dont 148 (43%) appartiennent à l'Etat. Glo­balement l'industrie sénégalaise est importante:13% seulement des exportations ne passent pas parune usine; cependant cette industrie ne progressepas ou très peu; l'indice de la production indus­trielle, base 100 en 1976 n'était qu'à 107,6 en 1985 et11 7,6 si on exclut les huileries. Les principalesusines sont antérieures à l'indépendance; Îe Séné­gal vit sur son acquis; non seulement l'industrie sedéveloppe peu, mais il y a même actuellement unrisque sérieux de désindustrialisation malgré le ca­ractère prioritaire de ce secteur. Depuis très long­temps, il existe des intérêts français nombreux et di­versifiés dans l'industrie sénégalaise. L'industriemoderne reste dominée par un nombre limité degrandes entreprises qui ont un poids prépondérantet qui sont tournées vers l'exportation, les autresunités constituant des industries de substitutionaux importations. Il y a des industries de biens deconsommation, de biens intermédiaires et de trans­formation des matières premières locales et impor­tées ; la faible progression industrielle ne favorisepas la diversification. Il existe des liens très fortsentre l'industrie et l'agriculture au niveau de la de­mande rurale et de la fourniture de produits par lesecteur agricole. Compte tenu de l'importance del'agriculture, les résultats de l'industrie dépendentde ceux de ce secteur à travers en particulier le ni­veau de la demande solvable des ménages ruraux.A noter également que l'industrie en elle-même esttrès peu intégrée et qu'elle a un taux moyen de va­leur ajoutée faible. Signalons enfin l'existence, pa­rallèlement à l'industrie moderne, d'un secteur arti­sanal (traditionnel ou non), informel, non structuréimportant. C'est plus dans ce secteur que dans l'in­dustrie qu'on peut espérer trouver une solution aumoins partielle, au problème du chômage; l'indus­trie n'emploie que 40 000 personnes et les effectifsdu secteur manufacturier ne représentent que 1%de la population active et 113 des effectifs des sec­teurs secondaire et tertiaire.

L'industrie sénégalaise connaît de nombreusesdifficultés pour se maintenir et se développer. L'ap­provisionnement des usines en matières premièreslocales pose des problèmes de quantité, de régulari­té et de qualité; la production erratique d'arachideen est un bon exemple. Les entreprises qui appar­tiennent à l'Etat traînent de lourds déficits et l'Etatlui-même a des dettes importantes à l'égard de l'in­dustrie. On constate l'échec de la politique desgrandes entreprises que ce soit par exemple lesI.C.S. (importation de soufre, exportation d'acidephosphorique) ou Dakar-Marine (réparation na­vale) qui enregistrent toutes les deux de lourdespertes. Il s'agit d'une industrie dépendante del'étranger au niveau des biens d'équipement, de latechnologie, des capitaux, des devises, de certainesmatières premières et des débouchés; de ce pointde vue l'industrie a souffert de la politique de ré­duction des importations mises en place pour limi­ter le déficit extérieur; cela a eu des conséquencesnéfastes en ce qui concerne le niveau d'équipementet la disponibilité en pièces de rechange. L'indus­trie sénégalaise manque de compétitivité aussi bienpour se protéger des importations que pour expor­ter; des barrières protectionnistes trop élevéesn'ont pas favorisé l'apparition d'efforts de moder­nisation mais à l'opposé il y a aussi des risques évi­dents à vouloir faire sauter ces barrières trop rapi­dement comme le préconisent certains organismesde financement. Il convient de souligner l'étroitessedu marché intérieur sénégalais (population peunombreuse et au faible pouvoir d'achat) et la fai­blesse de la demande du fait de la crise économiquequi sévit aussi bien au niveau national qu'inter­national; il existe des capacités industrielles inutili­sées mais rien n'est prévu pour relancer la de­mande intérieure. Enfin, la production pour l'ex­portation rencontre également de nombreusesdifficultés si on en juge par exemple par le dévelop­pement très lent de la zone franche industrielle deDakar qui a cette vocation; une des raisons de cedemi-échec est le coût élevé des facteurs de produc­tion au Sénégal.

La plus grande partie des industries sénégalaisess'organise autour de la transformation des ma­tières premières locales ou importées. On trouvetout d'abord le groupe des industries agro­alimentaires qui représente à lui seul 40 à 45% duchiffre d'affaires de l'industrie. Parmi celui-ci, enpremier l'industrie des corps gras c'est-à-dire es­sentiellement les huileries qui extraient de l'ara-

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chide les huiles et les tourteaux; ces usines souf­frent des fortes variations de la production arachi­dière et de la baisse tendantielle de celle-ci qui apour conséquence la sous-utilisation de la capacitéde traitement existante donc la hausse des coûts deproduction compte tenu des frais fixes; dans cesconditions se pose la question de savoir s'il convientou non de fermer une des quatre huileries actuelle­ment existantes. Comme autres industries alimen­taires on trouve une sucrerie (canne à sucre), desrizeries, des usines de fabrication de concentré detomate, des brasseries, des minoteries (blé importé),des conserveries et des unités de congélation pourle poisson. Dans l'agro-industrie non alimentairec'est le textile (coton) qui domine; cette industrieest la seconde en importance en Afrique Noire fran­cophone. Par ailleurs il existe une industrie chimi­que assez développée du fait en particulier de l'exis­tence des I.C.S., industrie lourde qui utilise unepartie du phosphate extrait du Sénégal; celle-ci, quia démarré mi-1984, a exporté dès 1985 pour24,6 milliards FCFA d'acide phosphorique, soit10% de la valeur totale des exportations ce qui lasitue au cinquième rang. L'industrie du raffinageest également importante; la Société Africaine deRaffinage (S.A.R.) a une capacité de production(qui n'est pas totalement utilisée) de 1,3 million detonnes; elle travaille aussi bien pour le marché inté­rieur que pour la réexportation de produits raffinésvers les pays voisins; avec en moyenne (81185)presque 100 milliards FCFA par an le pétrole est lapremière importation du Sénégal et représente28% du total des importations; la réexportation deproduits valorisés est passée de 38 mds en 1981 à47 en 1985, c'est la première exportation sénéga­laise avec 22% du total (entre 35 et 55%), la valeurajoutée du raffinage étant importante. Parmi les in­dustries sénégalaises on peut en dernier lieu signa­ler l'existence de l'industrie mécanique.

Compte tenu de la situation de l'industrie séné­galaise, un certain nombre de propositions sontfaites en matière de politique à mettre en œuvre.Un retour à l'initiative privée est souhaité à traversla libéralisation de l'économie et la promotion del'investissement privé (réforme du code des inves­tissements) et des petites et moyennes industries<P.M.I.). Il est nécessaire d'assainir la gestion,d'améliorer la productivité et la compétitivité (aug­menter les investissements productifs), de sauve­garder le patrimoine industriel, de renouveler lesinvestissements en les modernisant et d'affecter les

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restructurations nécessaires. Il convient, en ayantdes politiques par filière de valoriser au maximumtoutes les ressources naturelles. Sur le marchéintérieur l'ouverture à la concurrence étrangères'avère indispensable; elle implique nécessaire­ment l'amélioration de la qualité des produits etl'adaptation à la demande. Pour le marché exté­rieur, il est nécessaire d'une part de fournir desaides à l'exportation, d'autre part d'accorder uneprime à la valeur ajoutée pour aller vers des pro­ductions à plus forte valeur ajoutée. Globalement, ilfaut favoriser l'intégration des entreprises encréant un tissu industriel homogène. Géographi­quement, la décentralisation industrielle est né­cessaire ; la politique des zones industrielles dansles villes de l'intérieur devrait être favorisée. Auniveau national la sénégalisation des cadres etdu capital doit être recherchée ainsi que l'améliora­tion de la situation de l'emploi. Enfin, ce sont lesrésultats durables à long terme qu'il faut privilé­gier dans toute politique de développement miseen œuvre.

La Nouvelle Politique Industrielle (N.P.l.) séné­galaise de 1986 vise à l'ouverture vers les marchésinternationaux (exporter), à l'ouverture du marchénational (importer), à la valorisation maximum dela main-d'œuvre nationale et à accorder la prioritéaux activités de haute valeur ajoutée. Les moyensque l'on entend utiliser pour obtenir ces résultatssont l'élimination des entraves réglementaires,l'amélioration des structures de financement del'industrie, la promotion de l'investissement et de larecherche et l'uniformisation des taxations.

EQUIPEMENT,TRANSPORT ET ENERGIE

En 1985 les transports représentaient 19% dusecteur tertiaire en valeur ajoutée. Ceux-ci sont par­ticulièrement sensibles aux résultats de l'agricul­ture ; l'utilisation maximum des voies de communi­cation correspond aux mois de janvier à mars,c'est-à-dire à la période de commercialisation del'arachide. Plus on s'éloigne de Dakar, plus la densi­té de ces voies de communication est faible.

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Trois visages de l'hôtellerie auSénégal. De haut en bas:

- L'hôtel TERANGA, à Dakar,d'aspect futuriste.

- L'hôtel de la SOMONE :paillaltes et eau d'azur.

- L'hôtel NEMA KADIOR, noyédans la verdure, à Ziguinchor.

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Plantation d'arachide. A droite, une coupp montre des graines d'arachide qui se développent sous la surface du sol.

45. Une "montagne" d'arachide, dans le port de Dakar.

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46. La récolte, acrobatique, des noix de coco.

48. Labourage attelé dans la région du Baol.

47. Récolte du coton.

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4.9. Traversée d'une rivière au moyen d'un bac.

51. Transport du coton vers un centre de ramassage.

50. Transports en brousse...

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52. Un taxi-brousse prêt au départ.

53. Liurellr.s de journaux, à Dakar.

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Pirogues de pêcheursà Soumbedioune(Dakar).

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57. Bergers peul avec leur troupeau.

58. Transaction au marché aux moutons de Dakar.

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59. Excavatrice géante aux mines de phosphates de Taïba.

60. Ramassage artisanal du sel au lac Retba.

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Il n'existe au Sénégal qu'un seul grand port mo­derne dont la position est privilégiée, celui deDakar: il possède une rade profonde et sûre et il estfacile d'accès. Il s'agit à la fois d'un port de com­merce et de pêche; il comprend en particulier unterminal conteneur, un môle de pêche et des ate­liers de réparation navale (le plus important estDakar-Marine). Son trafic n'augmente guère; il sesitue en moyenne annuelle entre 4,5 et 5 millions detonnes (1985 : 5,2) et représente les 4/5e du com­merce extérieur sénégalais; par l'intermédiaire duchemin de fer, il permet la desserte du Mali qui estenclavé. Les ports secondaires du Sénégal sont peuimportants; il conviendrait de les revitaliser. Pourfavoriser le développement du transport maritime(et fluvial) il faudrait mettre en place un armementnational privé.

Le principal aéroport sénégalais est celui deDakar-Yoff; il comprend trois pistes. Son traficest en augmentation; en 1984 on a dénombré800 000 passagers et 20 000 t de fret. En dehors deDakar il existe 16 aéroports publics secondaires et25 aérodromes privés. Le Sénégal est membre de lacompagnie Air Afrique. Il a par ailleurs sa proprecompagnie aérienne, Air Sénégal, qui assure desvols intérieurs et régionaux.

La Régie des Chemins de Fer du Sénégal(R.C.F.S.) gère un réseau dont la construction a dé­buté à la fin du XIXe siècle. C'est le long de la voieferrée que la culture de l'arachide s'est progressive­ment développée. Aujourd'hui encore le rôle princi­pal du train est le transport de l'arachide et desphosphates. La régression actuelle et la désaffec­tion vis-à-vis du rail sont dues, au moins en partie, àla modernisation du réseau routier. Malgré la dié­sélisation, le chemin de fer est vétuste et sa mau­vaise qualité explique les accidents. La voie Louga­Linguère a été abandonnée faute de rentabilité. SiDakar-Thiès est en double voie, le reste du réseauest en simple voie. L'ensemble est à voie étroite. Le"Dakar-Niger", dont une partie appartient au Mali,a une longueur de 1 286 km ; il va jusqu'à Kouliko­ro au-delà de Bamako, au bord du fleuve Niger surlequel en période de hautes eaux le transport fluvialest possible; cette voie est indispensable au désen­clavement du Mali. Elle permet le transport des im­portations et des exportations en bénéficiant duport de Dakar; toutefois, compte tenu du mauvaisétat du réseau ferré, une partie importante du com­merce extérieur malien se fait par voie routière enparticulier à travers la Côte d'Ivoire et en utilisantle port d'Abidjan. Il existe également une voie

Dakar-Saint-Louis d'une longueur de 263 km. Lesinfrastructures (ateliers de réparations... ) de laR.C.F.S. sont situées à Thiès, ville à partir de la­quelle une voie part vers Saint-Louis et l'autre versTambacounda et Bamako.

Le Sénégal dispose d'un bon réseau routier d'en­viron 15000 km dont 24% de routes bitumées,c'est-à-dire 1,9 km/100 km2 ce qui est excellentpour un pays africain. La région du Cap-Vert estcelle qui est la mieux desservie. 65% du trafic na­tional de marchandises passent par la route. Leparc automobile sénégalais est relativement im­portant.

Certains fleuves sont navigables sur une partiede leur cours, au moins pendant la période deshautes eaux; il s'agit du fleuve Sénégal, du Saloum,de la Casamance et du fleuve Gambie. On constateun effacement progressif du transport fluvial lourdau profit là encore du J:éseau routier.

Les transports urbains sont surtout développés àDakar et dans la région du Cap-Vert. Ils sont assu­rés par les autobus de la SOTRAC, entreprise publi­que, et par les "cars rapides" et les taxis du secteurprivé.

Le Sénégal est un pays pauvre en énergie: celle­ci, très largement importée, lui coûte très cher. Ilconvient par conséquent de tout mettre en œuvrepour réduire sa dépendance énergétique à l'égardde l'étranger.

Nous l'avons vu précédemment, le Sénégal im­porte et consomme beaucoup de pétrole aussi bienen quantité qu'en valeur. Il dispose cependant d'unpeu de gaz dans son sous-sol et l'exploite. L'énergieélectrique est fournie par six centrales thermiquesdont une à gaz et les autres à pétrole. La productionet la distribution de cette électricité sont assuréespar la Société Nationale d'Electricité (SENELEC).Une part très importante est consommée par lepôle de développement que constitue la presqu'îledu Cap-Vert. Il est possible que dans l'avenir le bar­rage de Manantali (Mali) comporte une centrale etqu'une partie de l'énergie hydro-électrique ainsiproduite soit utilisée par le Sénégal.

Le bois de chauffe constitue un sérieux problèmecompte tenu des conséquences de son utilisation.L'énergie tirée du bois est très importante puis­qu'on l'estime à environ 60% du total de l'énergiesous toutes ses formes, consommée au Sénégal. Lebois est utilisé sous forme soit de bois de feu, soit decharbon de bois. Cela engendre un phénomène dedéforestation qui apparaît actuellement commeirréversible.

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Les énergies solaire et éolienne sont actuelle­ment peu utilisées, aussi existe-t-il encore dans cedomaine des possibilités de développement. Demême les gisements de tourbe et de lignite, encoreinexploités, pourront peut-être à l'avenir permettrela production d'énergie.

EDUCATION:UNE PRIORITE

L'enseignement constitue une part importantedu budget sénégalais. En 1983, le budget de l'Edu­cation Nationale s'élevait à 27 milliards de FrancsCFA et celui de l'Enseignement Supérieur à 8 mil­liards. Les écoles privées quant à elles, représentent10% de la population scolaire. Les effectifs des en­seignants sénégalais sont insuffisants mais la coo­pération fournie par la France et par d'autres paysapporte un complément humain et financier sub­stantiel. La langue de l'enseignement est le françaismais sa connaissance est limitée, surtout dans lescampagnes; le taux d'alphabétisation est au totalde 33% (1981) mais pour les adultes il n'est que de10%. Il existe des disparités régionales fortes: lascolarisation est beaucoup plus importante dans larégion du Cap-Vert que dans le reste du pays.

L'éducation préscolaire concernait en 1982 unecentaine d'écoles maternelles regroupant 280 clas­ses et 8 600 enfants. Ici, l'essentiel est entre lesmains du secteur privé qui scolarise 72% de l'effec­tif total. Ce type d'enseignement est surtout concen­tré dans la région du Cap-Vert.

L'enseignement élémentaire (primaire) concer­nait en 1982 1 800 écoles soit 8 600 classes et453 000 élèves, dont 10,6% dans le privé. Les effec­tifs ont ici été multipliés par 3,5 depuis l'indépen­dance. Le taux de scolarisation dans le primaire estau niveau national de 45% mais dans la région duCap-Vert il atteint 75%.

De la 6e à la terminale, l'enseignement est dis­pensé dans 190 établissements regroupant 2300classes.

L'enseignement moyen (l er cycle du secondaire)dure quatre ans. Il concernait en 198280 000 élèvesdont 30% dans le secteur privé. Depuis 1961 le tauxde croissance annuel moyen dans ce type d'ensei­gnement a été de 10,5%.

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L'enseignement secondaire (2 e cycle) dure troisans. En 1982 il concernait 21 000 élèves dont 22%dans le technique. Le taux de croissance annuelmoyen depuis 1961 a été ici de 14,2%. Le lycéeFaidherbe de Saint-Louis qui date de 1919 a été lepremier établissement secondaire d'Afrique Noirefrancophone.

La formation professionnelle conventionnelle,qui dure selon les cas deux ou trois ans, était dis­pensée en 1982 à 11 700 élèves.

L'enseignement supérieur est composé de l'uni­versité (quatre facultés), de grandes écoles (na­tionales ou inter-états: école vétérinaire, école debibliothécaires, polytechnique à Thiès, l'Institut Na­tional de Développement Rural (LN.D.R.) à Thiès,l'Ecole Nationale Supérieure Universitaire de Tech­nologie (E.N.S,U.T.),...), d'instituts ainsi que d'autresorganismes. En 1982, il y avait 11 000 étudiants; letaux de croissance annuel moyen de cette popula­tion étudiante a été de 12,4% depuis 1961. L'univer­sité de Dakar a une vocation régionale, 24% desétudiants ne sont pas sénégalais. Elle a un rôle à lafois d'enseignement et de recherche: 70% des en­seignants sont africains; créée en 1957, il s'agit dela plus ancienne université d'Mrique Noire franco­phone. La seule tentative de décentralisation uni­versitaire s'est soldée par un échec: l'universitéGaston Berger près de Saint-Louis, partiellementconstruite, n'ajamais ouvert ses portes.

Il existe 15 structures de formation des ensei­gnants : l'Ecole Normale Supérieure (KN.S.), quiest rattachée à l'université, et 14 autres écoles deneuf types différents. L'ensemble de ces écolesconcernait en 1981 3 000 élèves ou étudiants.

Nous l'avons vu, il existe un déséquilibre géogra­phique important dans le secteur de l'enseignementau Sénégal; par ailleurs cet enseignement est ina­dapté : les pertes du système scolaire sont impor­tantes (par exemple le taux de succès au baccalau­réat est juste un peu supérieur à 50%) et l'absencede débouchés (inadéquation avec les besoins del'économie) a pour conséquence le chômage des"intellectuels", Dans ces conditions le gouverne­ment sénégalais entend développer les enseigne­ments primaire, technique, professionnel et scienti­fique. "L'école nouvelle" veut être populaire, na­tionale et démocratique; l'introduction dans cetteécole des langues nationales, du travail productif etde l'enseignement religieux est prônée; enfin la sé­négalisation des enseignants apparaît comme in­dispensable.

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RECHERCHESCIENTIFIQUE

Dès les années 1950, Dakar fait figure de capi­tale intellectuelle du fait de la présence de diversinstituts de recherche intéressant l'ensemble del'A.O.F. dont le fameux Institut Français d'AfriqueNoire (IFAN, créé en 1936) qui deviendra l'InstitutFondamental d'Afrique Noire après l'indépen­dance. Sa création sera précédée par celles duCentre de Recherches Agronomiques de Bambeyen 1921 et de l'Institut Pasteur en 1924. L'Institutdes Hautes Etudes, embryon qui donnera nais­sance à l'Université de Dakar en 1957, fut créé en1950. L'ORSTOM intervient depuis 1949 au Séné­gal, année de création du premier laboratoire depédologie.

Depuis son accession à l'indépendance, le Séné­gal a progressivement mis en place des structureschargées d'élaborer et de mettre en œuvre la politi­que du gouvernement en matière de recherchescientifique et technique. Ainsi, dès 1960, un bureaude coordination de la recherche scientifique et tech­nique était constitué au niveau de la Présidence duConseil et les premiers boursiers envoyés en forma­tion en France. Depuis 1986, c'est la Division desAffaires Scientifiques et Techniques au sein du Mi­nistère du Plan qui est chargée de la coordinationdes recherches au Sénégal. La recherche agrono­mique a été entièrement sénégalisée par la créationde l'Institut Sénégalais de Recherches Agricoles(ISRA, créé en 1974) au sein duquel se sont intégrésles chercheurs appartenant aux différents institutsde recherche agronomique français dépendant duCIRAD. Ses domaines de compétence couvrent lesproductions végétales, animales, forestières, halieu­tiques et océanographiques ainsi que les systèmesde production. L'ORSTOM qui participe aux re­cherches océanographiques de l'ISRA mène égale­ment des recherches dans des domaines aussi va­riés que l'hydrologie, la géologie, la pédologie, lamicrobiologie, la nématologie, la géophysique, l'or­nithologie et les sciences humaines.

On peut estimer qu'il y a actuellement environ800 chercheurs et enseignants/chercheurs au Séné­gal dont la moitié sont actifs dans les domaines desrecherches agricoles et agro-industrielles. L'Uni­versité représente environ la moitié de ce potentielet l'ISRA environ un quart. Le nombre total dechercheurs a doublé depuis le début des années

1970 et s'est progressivement sénégalisé. Cepen­dant, le nombre de chercheurs ou d'enseignants/chercheurs étrangers est encore très important etpeut être évalué à environ 300. Une grande majori­té de ces expatriés sont de nationalité française etoccupent des fonctions importantes au sein de lacommunauté scientifique sénégalaise. Le finance­ment des recherches est également caractérisé parune dépendance importante de l'étranger puis­qu'environ 2/3 du budget de la recherche provientde sources extérieures. La France à elle seule as­sure la moitié du financement de l'aide extérieure etcouvre ainsi un tiers du budget de recherche séné­galais.

''LA SANTE POUR TOUS"

Les Sénégalais sont victimes d'un certainnombre de graves maladies qui sévissent à l'étatendémique: paludisme, lèpre, choléra, onchocer­cose (ou cécité des rivières; dans les bassins de laFalémé et de la Gambie), trachôme, parasitoses(plus virulentes en saison des pluies), leishmaniose,trypanosomiase, bilharziose, amibiase, tuberculose,rougeole (chez les enfants et souvent mortelle), po­liomyélite, méningite et maladies diverses relevantles problèmes d'hygiène urbaine.

Pour lutter contre ces différents fléaux il existeune certaine couverture sanitaire du territoire'mais elle est insuffisante et déséquilibrée; elleprivilégie la région du Cap-Vert et elle se dégradequand on va d'ouest en est. En 1980 on dénom­brait 13 hôpitaux principaux et secondaires (4 300lits d'hôpitaux, soit un lit pour 1 310 habitants)dont 5 (38%) à Dakar, 36 centres de santé(3 000 lits, 1 litll 900 habitants), 500 postes de san­té (dispensaires...) et 284 maternités (3100 lits, 1 lit!1 820 habitants). Il existe également d'autres in­frastructures telles que les centres de protectionmaternelle et infantile cP.M.I.) au nombre de 77, lessecteurs des grandes endémies, les léproseries (11)et les unités de soins de santé primaires (S.S.P.). Lepersonnel médical était composé en 1980 de 418médecins (un pour 13800 habitants) dont 1/4 dansle secteur privé et 70% dans la région du Cap-Vert,145 pharmaciens (53% dans le privé, 79% dans le

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Cap-Vert), 78 dentistes (dont 42% dans le privé),400 sages-femmes (63% dans le Cap-Vert) et 4 300infirmiers (un pour 1 300 habitants). Il existe sixécoles de formation destinées aux infirmiers et in­firmières. Le budget de la santé était en 1982 de8,3 milliards de FCFA dont plus de la moitié des­tinée à la seule région du Cap-Vert; le secteur de lasanté est le sixième poste de dépense de l'Etat.

Pour lutter efficacement sur le front de la santé,il est nécessaire d'améliorer la qualification et l'effi­cacité du personnel et des services dans ce secteur.Il convient également de limiter l'accroissementdes effectifs et des besoins de financement (fonc­tionnement et investissement) des unités hospita­lières. L'objectif de "la santé pour tous" conduit àmettre l'accent sur la médecine préventive (politi­que de prévention par les vaccinations par exem­ple) et sur l'éducation; un tel programme nécessitele développement des soins de santé primaires.

Il faut enfin souligner que, parallèlement à lamédecine moderne, la médecine traditionnelle tientune place encore importante surtout dans le monderural.

L'INFORMATION: UNEHEUREUSE PLURALITE

C'est au Sénégal qu'est née, au milieu du XIXe

siècle, la presse francophone d'Afrique Noire. Entreles deux guerres mondiales, 7 à 8 journaux étaientpubliés, plus ou moins régulièrement, à Dakar.

En 1933 naquit le célèbre "Paris-Dakar" qui de­vint "Dakar-Matin" après l'Indépendance, puis "LeSoleil" en 1970. Seul quotidien national, "Le Soleil"tire à plus de 40 000 exemplaires. Les opinions qu'ilémet sont très proches de celles du pouvoir enplace (parti Socialiste Sénégalais). Le journal estédité par la S.S.P.P. (Société Sénégalaise de Presseet de Publication) dans laquelle l'Etat sénégalais estactionnaire majoritaire.

La presse est libre au Sénégal, mais tous les jour­naux ne disposent pas des mêmes moyens finan­ciers. En 1974 le P.D.S. lançait son journal "Le Dé­mocrate". Il existe un hebdomadaire catholique:"Afrique Nouvelle". "Le Politicien" est un journal sa­tirique du même genre que "Le Canard enchaîné"

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français. En 1987 naissait un second journal satiri­que: "Le Cafard libéré" dont le titre humoristiquepastiche le célèbre hebdomadaire français. Il existeégalement de nombreux journaux d'oppositiondont la parution est plus ou moins régulière.

L'Agence de Presse Sénégalaise (A.P.S.) a été lapremière des agences nationales de presse d'Afri­que francophone. Signalons aussi la présence per­manente à Dakar de la presse et des agences étran­gères, le Sénégal étant très ouvert sur l'extérieur.Rappelons enfin que Dakar abrite le siège de la"PANA", Agence panafricaine d'information, dontla mission essentielle est la diffusion d'informationsrelatives à l'Afrique, vues par des Africains.

La radio et la télévision sont confiées à l'Officede Radiodiffusion Télévision Sénégalais (O.R.T.S.)qui a été créé en 1973. La formation des journalistesafricains est assurée à Dakar par le Centre d'Etu­des Supérieures des Techniques de l'Information(C.E.S.T.U. Enfin, l'édition est également présenteau Sénégal avec en particulier l'imprimerie natio­nale et les Nouvelles Editions Africaines (N.E.A.).

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LES HOMMES

DONNEESDEMOGRAPHIQUES

Le dernier grand recensement national date de1976. Les données ne sont donc pas toutes fraîches,mais les grandes tendances démographiques de­meurent valables. La population du pays était alorsde 5 115 000 habitants, mais en raison d'une fortecroissance, on l'estimait à 5 660 000 en 1980 et au­tour de 7 000 000 en 1988. On est loin du milliond'habitants, estimation au début du siècle...

La population est très inégalement répartie,puisque 41 % d'entre elle se trouvent dans les troisrégions de l'Ouest, qui sont les plus petites en super­ficie : celles du Cap Vert, de Thiès et de Diourbel. LeCap Vert à lui seul contient 20% de la population dupays, alors qu'il ne représente que moins de 3% dela superficie du pays. La densité y est cent fois plusforte que dans la région du Ferlo ! Tout l'est dupays est fort peu peuplé.

La population est jeune, comme dans la plupartdes pays du tiers-monde: la moitié des Sénégalais amoins de 20 ans. La forte natalité, 46 enfants parannée pour 1 000 habitants, compense largementla mortalité de 20 pour mille, qui recule devant lesprogrès de la santé publique, et assure un accroisse­ment annuel de 2,6'k. A ce rythme, la populationdouble tous les 27 ans! Une immigration en prove­nance des pays voisins, Mali et Guinée surtout, aégalement contribué à l'augmentation de popula­tion, tandis que l'émigration vers l'Europe reste enfait limitée à un petit nombre d'individus.

L'IDENTITE CULTURELLESENEGALAISE

Il est indéniable que l'histoire a produit, au moinsau nord de la Gambie, un type social et cultureld'humanité très reconnaissable et que l'on peut ha­bituellement repérer, y compris dans les autres so­ciétés de l'Mrique de l'Ouest. Le Sénégalais est à lafois un type et un style culturel à cause de l'impor­tance des mécanismes publics d'apparence sociale(les attitudes corporelles, langagières, éventuelle­ment vestimentaires) et de la communauté des ex­périences historiques (commerce, royautés à la dif­férenciation sociale marquée, islam). Mais cetteidentité sénégalaise n'est pas une synthèse qui an­nulerait la diversité réelle des écologies et des socié­tés (les Wolof, les Serer, les Toucouleur, etc.), deslangues (malgré la wolofisation accélérée) et lesdifférences si décisives actuellement entre les villeset les campagnes: l'homme de la "brousse" est sou­vent aux antipodes du "Titi" dakarois. Les tradi­tions, résultat du style de la colonisation française,d'une bourgeoisie métisse saint-Iouisienne ou d'uneélite intellectualopolitique au recrutement plus na­tional n'ont pas encore touché le paysan ou l'éle­veur. C'est dire qu'au sein de cette identité sénéga­laise, il existe des oppositions, des variations - pasforcément ethniques - des évolutions et qu'il ne fautpas idéaliser des comportements souvent destinésexplicitement aux relations avec les étrangers,qu'ils soient africains ou occidentaux. Mais cescomportements sont l'objet d'une telle fierté, d'unetelle ostentation, d'un tel jeu, qu'ils ne peuvent êtreignorés.

S'il fallait établir l'inventaire de cette identité, ilfaudrait marquer d'emblée le rôle du contact, del'échange, de l'adaptation, de l'adoption. Carl'islam, caractéristique centrale de cette identité,n'est après tout qu'un emprunt même s'il est plus

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que millénaire et même s'il a pris des formes spéci­fiquement locales (le choix du modèle confrérique ;l'invention de la confrérie mouride).

L'islam sénégalais est loin d'être monolithique: ila sa géographie, son ethnographie, et la concur­rence est souvent vive entre confréries. Mais de­puis 1915 il a dans l'ensemble servi loyalement lepouvoir colonial puis l'état indépendant. Il est plu­tôt œcuménique et tolérant; le président L.-S. Sen­ghor lui a dû ses succès anticoloniaux et sa stabilitéprésidentielle et pourtant c'est un catholique prati­quant et un francophile à toute épreuve.

Cette expérience de l'acculturation, cette propen­sion au voyage (et réciproquement à l'hospitalitévis-à-vis des étrangers) a envahi toutes les activitéspossibles; du commerce à la politique (les Sénéga­lais citoyens français des quatre communes), le Sé­négalais a pris l'habitude de fréquenter d'autres so­ciétés, d'autres civilisations.

Cela dit, les sociétés sénégalaises furent (et sontencore, même sous une forme atténuée) des socié­tés à ordre (hiérarchie socio-politique des nobles,des paysans et des esclaves) et à castes (divisionssocio-professionnelles des milieux artisanaux sur­tout). Les traditions politiques et morales de l'hon­neur sont très poussées et les chanteurs - poètes ­hagiographes - les griots - popularisent toujours, àla fois la dignité et le respect, la tradition conformeet l'initiative individuelle. La lutte sénégalaise estaussi un autre signe de cette identité - conflictuelle ­sénégalaise.

L'homme sénégalais n'existerait évidemmentpas sans la femme sénégalaise. Le paraître de l'élé­gance, tout comme la vie familiale étendue sont deson domaine. Affirmation culturelle et adaptationsociale vont de pair et manifestent une réussite peucommune en Afrique, malgré la pauvreté de plusen plus voyante qui s'installe.

LA FEMME SENEGALAISE

La vie familiale, l'enchaînement des générations,l'organisation de la communauté domestique don­nent aux femmes sénégalaises, comme dans lesautres pays africains, un rôle prépondérant malgréla place seconde qu'elles semblent occuper dans les

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traditions et les habitudes culturelles. L'existence desociétés matrilinéaires ou à accentuation matrili­néaire (comme les Serer) ne doit pas conduire àpenser que les femmes y ont plus d'importance oude liberté: elles servent de référence parentale maisce sont les hommes qui décident. D'ailleurs l'islami­sation ancienne de certaines sociétés sénégam­biennes a contribué à consolider le domaine réservédes femmes. Ce qu'on appelle l'occidentalisation estambigu et ne concerne pas également toutes les ca­tégories sociales: le plus frappant serait la fémini­sation non pas de la politique (il existait bien des"ministres" féminins avant que l'on importe - deFrance - le secrétariat d'Etat à la condition fémi­nine) mais de certains métiers modernes. C'est en­core très limité par rapport à d'autres pays afri­cains.

Il ne faut donc pas se laisser troubler par l'appa­rente autonomie féminine (les marchandes, lesmaîtresses de la concession familiale) et par l'élé­gance naturelle des jeunes femmes, notamment ur­baines. Car la femme reste la force sous-jacente del'économie villageoise et de l'économie domestique(les enfants et la nourriture) et ce, sous le regarddes autorités religieuses, villageoises et familiales.Les économies paysannes sont très diverses dans ledétail et la situation familiale d'une concession peutdonner plus ou moins d'importance au travail agri­cole féminin: en région arachidière (Wolof etSerer) les femmes participent à la préparation dessemences (le décorticage des arachides), à la cul­ture des champs et aux opérations d'après la ré­colte (battage, vannage) sur les champs des aînés(anciens, époux, frères aînés) de la concession maiselles peuvent aussi s'occuper de leurs champs per­sonnels.

Evidemment la femme est l'objet par excellencedes alliances matrimoniales. Le mode de résidenceest plutôt virilocal (chez le mari), ce qui fait que lesfemmes quittent souvent leur village d'origine. Lapolygamie est très répandue: elle peut être tempo­relle (plusieurs femmes successivement) et/ou géo­graphique. En ville cette dernière possibilité estassez fréquente vu les problèmes aigus du loge­ment. Le travail domestique est certainement l'oc­cupation la plus prenante mais c'est une activité quipeut laisser coexister un travail productif (décorti­cage d'arachide, teinture de tissus), un travail do­mestique stricto sensu (chercher le bois, l'eau, l'en­tretien de la maison, le repas), l'éducation et lasurveillance des enfants, et des relations de voisi-

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nage (activités et discussions collectives), de paren­té et d'hospitalité (l'accueil des "étrangers" commeon dit en franco-sénégalais), Ainsi que le dit AdrianAdams à propos des femmes Soninké du fleuve Sé­négal : "Certes ce ne sont pas les femmes qui dres­sent les murs et remplissent les greniers. Mais unemaison sans femmes, jarres vides et foyers éteints,ne tiendrait pas deux jours." Le travail domestiqueest de fait le foyer d'une société et même d'une civi­lisation.

C'est donc là que naissent bien des enfants, quese décident des mariages, des voyages. Les enfantssemblent toujours laissés à eux-mêmes mais ils sontl'objet d'une surveillance et d'une éducation collec­tives : mères, tantes, grands-mères, parentes plusou moins lointaines servent de repères dès le plusjeune âge. D'ailleurs l'éducation enfantine se passesouvent loin de chez soi: dans la concession d'unparent dans un autre village ou plus souvent en­core en ville.

LA JEUNESSE

Comme dans tous les autres pays africains, lajeunesse occupe une place démographique et so­ciale très importante. Depuis longtemps déjà la jeu­nesse vit les conséquences d'une école inadaptée aumonde rural comme à l'insertion urbaine et profes­sionnelle. Certes l'assiduité scolaire est un pro­blème : qu'elle soit faible comme dans des zonestrès musulmanes (où les responsables familiauxsentent qu'ils risquent d'y perdre leur autorité) ouau contraire excessive comme dans certaines zoneschrétiennes et évidemment urbaines. L'école estdonc un moyen de mobilité, géographique d'abord,et sociale ensuite, quoique l'avenir soit de plus enplus bouché.

Il ne faut pas oublier la dimension de l'émigra­tion internationale (vers la France essentiellement)qui prolonge et parfois même suscite l'émigrationvers la ville. Le film Baho (l'autre rive) illustre bienl'errance de la partie la plus entreprenante de lajeunesse. Mais ici ce sont souvent les cadres de lacaste artisanale ou de la confrérie religieuse qui ser­vent de points de repères et de causes incitatives.L'envoi de jeunes comme apprentis chez un parent

forgeron, mécanicien ou menuisier, le recrutementde jeunes taolibe (fidèles) par un marabout pouraller à l'école coranique, travailler les champs oumendier "professionnellement", démontrent s'il enétait besoin, que le mouvement des jeunes n'est pasentièrement spontané et que ceux-ci sont bien sou­vent les simples instruments de la volonté desadultes. Leur liberté est trompeuse et précaire.Néanmoins il existe de nombreux clubs de jeunesde quartiers ou de villages qui se consacrent ausport (football), à la musique. Dans la même dyna­mique, on notera les associations musulmanesconfrériques {dahira} dont le nombre et les fonc­tions se multiplient, notamment en ville.

L'entrée dans la vie active, installée, est donc trèsprogressive car ces "apprentissages" peuvent durerune dizaine d'années. Il s'agit là toutefois descouches populaires aux revenus incertains ou limi­tés. Les jeunes des catégories plus aisées, petitscommerçants et fonctionnaires, notabilités di­verses, peuvent suivre une scolarité plus normalequi leur permet de terminer le primaire ou d'at­teindre l'équivalent du B.E.P.C. Les écoles privées,professionnelles ou non, fleurissent depuis unebonne dizaine d'années: les marchands d'illusionsvivent aussi de cette jeunesse très petite-bour­geoise. Ensuite il y a évidemment le baccalauréat,l'université et si possible les études à l'étranger (enFrance notamment). Il y a là une jeunesse dorée quifait parfois parler d'elle. Modes de la coiffure, del'habillement, goûts musicaux, constituent les élé­ments culturels d'une jeunesse très occidentaliséemais qui se réafricanise à cause des succès de cettemode en Europe ou aux U.S.A.

La jeunesse sénégalaise est aussi une jeunessetrès politisée. Il existe toute une série d'associations,d'institutions qui cherchent depuis l'Indépendanceà l'organiser, voire à l'encadrer: Maisons deJeunes, Eclaireurs, Mouvements de jeunesse despartis. De façon plus diffuse, la jeunesse lycéenneet estudiantine a souvent contesté le système sco­laire et même le système politique institutionnel.1966, 1968, 1969, 1973 jusqu'à 1987 sont des datesbien connues de ces mobilisations finalement assezéphémères. Mais la politisation "gauchiste" a cédéle pas récemment à une islamisation plus soutenueet bruyante. Ce dernier mouvement exprime l'in­quiétude culturelle de cette jeunesse éduquée quicherche un langage plus "nationaliste" ou "afri­cain".

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LA VIE RURALE

Malgré l'importance grandissante de la popula­tion urbaine dans l'ensemble de la population séné­galaise et des migrations rurales consécutives à lamodernisation de l'économie, à la pression démo­graphique et à la crise sahélienne de la sécheresseet de la désertification, la campagne (et donc l'agri­culture) reste le fondement des sociétés séné­galaises. La plupart des quartiers populaires ur­bains restent organisés selon le principe de laconcession (ensemble de pièces entourant unecour) : la convivialité et la sociabilité sénégalaisessont marquées par la famille étendue, l'accueil desétrangers (travailleurs agricoles saisonniers, mar­chands, hommes religieux), la spécialisation artisa­nale (pièces de la concession servant de boutiqueou d'atelier) et un espace commun de réception, decuisine et de repas.

La vie rurale dans sa diversité écologique et eth­nique se définit par l'organisation domestique d'unensemble familial, par le travail agricole et de plusen plus par le poids des contraintes extérieures dela recherche de revenus complémentaires, des in­fluences "modernes" (école, santé, partis politiques)et des affiliations religieuses.

Le travail des champs (le cas des éleveurs peulde moins en moins nombreux, qui se sédentarisentou qu'on sédentarise de force, qui se prolétarisentaprès la perte des troupeaux consécutive auxsécheresses, n'est pas si différent), c'est-à-dire lerythme des précipitations et la capacité démogra­phique de la force de travail disponible, est bien en­tendu au cœur de cette vie rurale.

L'entretien des habitations de la concession mo­bilise les énergies féminines et même enfantines etadolescentes. La collecte du bois, de l'eau, le mé­nage, les courses au marché ou à la boutique, lapréparation des repas, la cuisine, la lessive, la sur­veillance des enfantR en bas âge scandent la jour­née du lever au coucher du soleil. Certes la cons­truction ou la réparation des cases, du mobilier, desoutils aratoires est le fait des hommes en périodecreuse.

Mais le travail des champs peut parfois concer­ner tous les âges et les deux sexes, qui peuvent tra­vailler ensemble ou séparément selon l'opérationagricole à assurer, ou la destination du champ (lesfemmes cultivent leur champ que leurs maris secontentent de débroussailler). Ces activités agri-

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coles de toutes les manières n'occupent au maxi­mum que six mois de l'année dans le cas du mil oude l'arachide. Le long du fleuve Sénégal tout celadépend évidemment de l'importance de la crue.Mais si les besoins de la concession et des champsdéterminent l'ordinaire quotidien, le monde villa­geois et l'univers extérieur ont aussi leurs contrain­tes. A l'heure du transistor toutes les familles séné­galaises peuvent suivre la vie nationale et interna­tionale. La vie familiale garde ses prérogativesavec ses temps morts de la sieste et les temps actifsdes événements familiaux (naissances, mariages,décès). La visite de parents, les voyages pour parti­ciper ailleurs à de tels événements familiaux fontpartie de l'emploi du temps. En un sens l'imprévuest toujours prévisible, accepté et assuré. Dans lemême ordre d'esprit, fêtes religieuses (musulma­nes, catholiques ou animistes), visites de respon­sables administratifs ou politiques (les "tournées")élargissent constamment le cercle des fréquenta­tions. L'étranger peut être également un marchandambulant (vêtements ou tissus) ou un représentantde son marabout (dans le cas des musulmans).

Bien entendu les hommes et les jeunes gens cir­culent plus dans le village et à l'extérieur. Si la vieféminine se cantonne autour de la concession ouparfois au petit marché local, les hommes ont leurslieux de réunions: les vieux sur la place ou à proxi­mité de la concession du chef de village ou de lamosquée. Les puits sont par contre un lieu de ren­contre avec les habitants de hameaux périphéri­ques ou avec les éleveurs de passage qui viennentabreuver leur troupeau.

Si une route bitumée passe à proximité, les arrêtsdes cars rapides et autres taxis-brousse constituentaussi des lieux de rassemblement, de circulationdes nouvelles.

Bref l'intensité de la vie de la concession n'exclutnullement l'importance des relations plus collec­tives et publiques. Même si les ruraux savent rare­ment définir avec précision les espaces cultivés ouhabités qui les entourent, ils en connaissent le conte­nu social. En un sens on n'est jamais perdu puis­qu'on a toujours un parent ou une autorité reli­gieuse ou sociale quelque part. C'est cette proximitésymbolique qui fait encore de la campagne la pré­férence de bien des citadins d'un certain âge. Pourles plus jeunes, ce symbolisme a été plutôt perçucomme une contrainte dont ils ont cherché à se libé­rer.

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L'HABITAT RURAL

Le Sénégal connaît des écologies et des paysagesvariés ainsi que des populations aux traditionspropres. Evidemment tout cela connaît une traduc­tion au niveau de l'habitat, tant pour la dispositiongénérale des lieux résidentiels que pour les maté­riaux utilisés aux fins de la construction ou del'aménagement villageois, que pour la structuremême de l'habitat. La proximité d'axes de circula­tion, de bourgs ou de villes, l'importance de reve­nus monétaires sont des facteurs secondaires quiont leur importance. Du galle toucouleur (fleuveSénégal) au fank diola (Casamance) en passant parle Keur wolof ou le mbind serer, l'habitat voit sesparticularités disparaître petit à petit. Une des rai­sons se trouve dans l'emploi de plus en plus fré­quent des matériaux de construction modernes. Ala tige de mil ou à la boue séchée, le paysan préfèrede plus en plus la tôle ondulée (y compris pour lesparois des habitations), le parpaing ou le ciment. Lastratification sociale et économique se marqueaussi dans la taille ou le style des résidences et deleurs aménagements.

Chez les Serer la notion de village est floue car ils'agit d'un habitat dispersé. Le voisinage ou ken­tand peut regrouper plusieurs hameaux: il sertd'unité d'organisation cérémonielle, d'unité de re­crutement pour les entraides des travaux agricolesou de gardiennage des troupeaux. La structure ré­sidentielle de base ou concession est le mbind quicomporte en moyenne de quinze à vingt personnes.Mais il existe des maisons isolées dans la brousse(pint akob). C'est le mbind entouré d'une clôture entiges de mil qui regroupe les unités sociales les plusimportantes, le n'gak (cuisine). Il y en a environdeux par mbind : c'est l'unité de production et deconsommation (ceux qui "mangent du même gre­nier"). L'habitat serer dispersé est typique car ilrapproche les lieux d'habitation des champs tout ensuscitant un intense réseau de chemins.

En pays wolof, fortement islamisé, l'habitat estbeaucoup plus concentré. L'importance des zonesdéfrichées par les migrants, notamment mourides,du début du siècle, rend les villages beaucoup plusvisibles dans le paysage. L'unité résidentielle, le"carré", keur, peut contenir plusieurs familles oucuisines mais leur interdépendance est très forte.Aux formes rondes ou courbes des limites desmbinds serer s'opposent les formes plus parallélé-

pipédiques du keur wolof (bien que dans le Kayortraditionnel ce soit peut-être moins visible). Le prin­cipe organisationnel est celui d'une grande placerectangulaire, mpentye, autour de laquelle se dispo­sent les keur. Les voies de circulation se coupent àangle droit. Sur le mpentye donnent habituellementla mosquée et le keur du marabout souvent chef devillage.

Dans la région du fleuve Sénégal il existe desvillages de paysans toucouleur et de pêcheurs prèsdu fleuve. Plus loin à l'intérieur on trouve les cam­pements peul. La concession toucouleur, galle, secompose le plus souvent de deux ménages, fooyre.Par contre chez les Soninké, aux confins du Mali, dela Mauritanie et du Sénégal le kore, unité de pro­duction et de consommation est aussi une unité derésidence. Aux huttes rondes en tiges de mil succè­dent des maisons "en dur" aux formes parallélépi­pédiques. Chez les Peul, nomades, on trouve deshuttes aux armatures et parois en branchages, re­couvertes de tiges de mil éventuellement. Ceshuttes, de hauteur d'homme, sont démontables.Elles peuvent être plus ou moins grandes, rondes,ovales ou allongées. A proximité on peut trouver uncoral en branchages d'épineux où l'on garde le petitbétail.

A l'autre bout du pays chez les Diola de Casa­mance, ce n'est plus le désert qui entoure et menaceles villages, ce sont la forêt, les cours d'eau et lesprécipitations. La concession, fank, comprend unefamille étendue de plusieurs ménages de parentspatrilinéaires. Ces familles constituent habituelle­ment un quartier, le village étant constitué de deuxquartiers exogamiques (les mariages se réglant àl'extérieur du quartier). Chaque quartier, kolole,possède sa place et son bois sacré où se situe l'autel,bukin, prééminent du quartier.

A M'lomp on trouvait encore récemment descases à un étage (les solives sont en fromager). AEnampore on trouve des cases à impluvium: ils'agit d'un grand bâtiment rond à double toit dontl'un en forme d'entonnoir permet à la pluie de rem­plir un réservoir. Plusieurs ménages peuvent êtreréunis dans ces cases. Une galerie-séjour donne surle bassin.

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LA VIE QUOTIDIENNE ADAKAR

Le Sénégal, pays profondément rural, a vu sedévelopper en quelques décennies des villes im­menses. Comment ces néo-citadins s'adaptent-ils àce nouveau cadre de vie, cohabitent-ils avec leursnouveaux voisins? Comment trouvent-ils lesmoyens de survivre dans des villes pleines de mi­rages où trouver un emploi, un logement, est uncasse-tête?

C'est là le lot quotidien de milliers de Dakarois etde Pikinois et on ne saurait résumer en quelqueslignes l'extraordinaire diversité des réponses ap­portées par chaque groupe à ces problèmes.

Les conditions d'urbanisation font que la viequotidienne est un subtil mélange de traditions etde modernité: les règles de solidarité familiale, li­gnagère sont certes ébranlées en ville et l'on assisteà une redéfinition des devoirs de chacun. Mais, àdes degrés divers, les traditions de solidarité degroupe (familial, villageois ou ethnique) marquentla vie quotidienne de chacun. On ne saurait refuserun toit ou un repas à un jeune parent venu debrousse. Le visiteur de quelques jours, venu se soi­gner ou régler un problème administratif, peut vitese transformer en enfant de la famille. Des famillesélargies se recomposent ainsi, tissant à travers laville des réseaux d'entraide qui aideront la per­sonne dans le besoin à trouver un petit travail, unlogement, une bourse scolaire ou la somme d'ar­gent qui permettra de régler le problème urgent dumoment. C'est par ces solidarités que s'effectuentles redistributions de biens entre les plus riches etles plus pauvres (et bien souvent encore entre cita­dins et paysans), par ces réseaux que s'effectue lecontrôle social.

N'est-ce pas là un des secrets de la paix relativeque connaît l'immense capitale? .

Il ne faudrait pas croire cependant que ces pro­fondes mutations altèrent complètement les racinesafricaines. Les rites magico-religieux, les marabou­tages, la médecine traditionnelle sont omniprésentsdans les villes si éloignées de la quiétude desvillages.

L'originalité de la capitale sénégalaise tient éga­lement à deux facteurs essentiels: la wolofisation etl'islam.

Phénomène rare en Mrique de l'Ouest, une lan­gue, le wolof, s'impose à tous comme la langue vé-

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hiculaire jusque dans les administrations (alorsmême que le français reste la langue officielle). Elleest la langue de jeux des enfants, de marchandageau marché, d'échange dans les transports en com­mun ; elle assure la communication entre les diffé­rents groupes linguistiques de la ville.

L'omniprésence de l'islam enfin ne manquerapas de frapper le nouveau venu. Somptueuses oumisérables, les mosquées sont partout dans la ville,qui vit de plus en plus au rythme des appels à laprière, des fêtes religieuses. Cette adhésion mas­sive, de groupes parfois très différents, à l'islam,fait des lieux de culte, des associations religieuses,des soirées de chants pieux, des points de rencontresociale très importants qui permettent à chacun desituer son voisin, de s'intégrer dans son nouveaumilieu. Il n'est point de conflits dans un quartier quine soit, d'une façon ou d'une autre, soumis àl'imam, point de réunions publiques qui ne soientprécédées et closes de bénédictions. Dieu ne pro­tège-t-il pas tous les siens?

LES PETITS METIERS

Le mal développement et la crise économiquemais également l'exode rural consécutif à la séche­resse et à la désertification, ont généré, depuis bien­tôt une décennie, une série de petits métiers dansles secteurs informels où les travailleurs sans quali­fication professionnelle et sans ressources, se dé­mènent quotidiennement, selon le "système D",pour gagner leur vie. Ces petits métiers, désormaisfamiliers, font partie des paysages urbains et sont sinombreux qu'il est pratiquement impossible de lesrépertorier tous, aucune étude systématique et sta­tistique n'ayant été réalisée sur eux. Ce sont parexemple, les gardiens de nuit et les gardiens de voi­ture de jour, les laveurs de voitures et les cireurs dechaussures, les petits porteurs de paniers dans lesmarchés etles récupérateurs d'objets jetés dans lespoubelles, les vendeurs de médicaments et les mar­chands de parfums, les vendeurs ambulants decafé et les tangana (vendeurs de café au lait lematin à des points fixes), les vendeurs d'eau fraîcheet les vendeurs de glace, les guides et les cocxeurs(apprentis et rabatteurs de clients dans les cars ra-

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pides de transport urbain), les vendeurs ambulantsde billets de la loterie nationale, etc.

En raison de la recrudescence des vols, parfois àmains armées, les particuliers ne disposant pas degarage à domicile font garder leurs véhicules pardes individus ou des groupes de veilleurs et les ré­tribuent mensuellement selon un tarif convenu àl'avance. Maintenant, non seulement des maisonsmais également des quartiers entiers sont gardéspar des veilleurs. Le gardiennage a pris une telleenvergure depuis quelques années que ce secteurs'organise de mieux en mieux par la créationd'agences et de sociétés de sécurité.

Au bas des immeubles des différents services etadministrations, dans les places publiques et danscertaines rues des centres-villes, il y a souvent desflopées de jeunes laveurs de véhicules qui louentleurs services soit au mois, soit à la tâche.

C'est du pays du Baal, chez les Murid, que nousvient ce nouveau métier de vendeur ambulant decafé, si fréquent dans nos marchés, à certainesheures. C'est également du Baal (Diourbel) et duSine-Saloum (Kaolack et Fatick), régions trèschaudes que nous viennent les métiers de vendeursd'eau fraîche et de vendeurs de glace (sous formede caramel), qui sillonnent les rues pendant la cani­cule.

Les difficultés économiques et les crises ont éga­lement généré la contrebande, la fraude et diverstrafics. C'est pourquoi, de nombreux produits deconsommation courante sont régulièrement ven­dus dans les rues par des marchands ambulants:produits pharmaceutiques, parfums, cosmétiques,etc., sans que les dangers et les risques graves queprovoquent ces produits inquiètent vendeurs etacheteurs.

Tous ces petits métiers prolifèrent et prospèrentallègrement à l'ombre des institutions et des activi­tés légalement autorisées. Ce sont donc des activi­tés tolérées, mais qui traduisent la réalité et la per­sistance d'une situation de crise économique quin'épargne plus aucun secteur et aucune catégoriesociale.

MARCHES ET MARCHANDS

La Sénégambie (au sens historique elle débordelégèrement le territoire de la confédération ac­tuelle), et plus largement l'Afrique de l'Ouest, estune région aux très anciennes traditions commer­ciales. Commerce transafricain et transaharien,traite atlantique internationale des esclaves, mou­vements de biens précieux ou de consommation ali­mentaire selon les axes fluviaux: les hommes et lesbiens s'échangent depuis plus d'un millénaire. Desgroupes spécialisés ou privilégiés organisèrentce commerce et en profitèrent. L'époque de laconquête coloniale proprement dite transforme en­core plus les conditions commerciales puisque laproduction agricole s'organise explicitement pourla vente et l'exportation (l'arachide par exemple) etque de nouveaux commerçants, français et liba­nais, prennent le contrôle de ce qu'on appelle latraite coloniale. L'indépendance voit cette traites'étioler progressivement: l'initiative économiquesénégalaise s'investit avec succès dans l'import­export, dans la redistribution à petite échelle (quar­tiers, villages). La tradition internationale va semaintenir et des réseaux commerçants s'établissenten France, en Europe et même aux D.S.A. Aux arti­sans -travailleurs du bois et des métaux précieuxécoulant eux-mêmes leurs marchandises- succè­dent de simples commerçants qui vendent des ob­jets pseudo-artisanaux en plastique fabriqués àHong-Kong! C'est la confrérie musulmane desMourides qui a réorganisé et développé ce com­merce très rentable.

Cette tradition et expérience internationalemultiforme s'appuie sur des pratiques marchan­des beaucoup plus modestes et indissociables dela vie quotidienne sénégalaise. N'importe quellepaysanne ou "ménagère" (la mère de familleprofessionnelle) peut vendre quelques légumes,condiments ou plats préparés sur le pas de saporte. Ces vendeuses peuvent aussi se réunir àplusieurs à proximité d'un endroit passant oud'une entreprise. Surveillant les enfants en basâge, elles exportent à l'extérieur de leur conces­sion la vie sociale de leur famille et de leur voisi­nage.

Dans les villages, des marchés périodiques (heb­domadaires ou bi-hebdomadaires) se tiennent surles places centrales: marchandes "amateurs" etcommerçants professionnels se côtoient sans trop

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de problèmes dans la mesure où leurs produits sontde natures très différentes.

Un commerce artisanal spécialisé ou de répara­tion, plutôt masculin, peut s'organiser selon cemême modèle.

On pourrait distinguer ensuite les commerçantsprofessionnels :

- itinérants: marchands de tissus ou de vête­ments (mais d'origine parfois dioula de Côted'Ivoire),

- sédentaires: installés (avec patente, taxe com­merciale... ou non) dans des marchés construitsspécialement à cet effet ou dans des échoppes indi­viduelles.

A la campagne, la petite boutique du village debrousse souvent tenue par un Nar (Sénégalais ouMauritanien d'origine maure) propose les produits"modernes" de base: allumettes, huile, savon, laitcondensé, nescafé, piles, etc. et quelques produitsalimentaires, riz, sucre, sel, condiments, etc. En villeces échoppes parsèment les quartiers. Dans lesbourgs, villes secondaires et à Dakar se superpo­sent des marchés importants où sont regroupéstoutes sortes de commerces, y compris alimen­taires. M'Backé, Saint-Louis, Kaolack notammentpossèdent des marchés qui sont presque de véri­tables souks où cohabitent artisans, revendeurs, etmarchands de produits plus ou moins périssables.Dakar connaît plusieurs grands marchés, Kermel(dans l'ancien quartier "colonial" à la clientèle sou­vent expatriée), Sandoga au cœur de la ville,proche des quartiers du commerce de gros oùs'opèrent aujourd'hui tous les trafics. Et puis dansles quartiers, des marchés plus ou moins bien tenusadaptés à la clientèle locale, Tilène, Gueule Tappée,HLM, le fort, et bien sûr ceux de Pikine, Guédia­waye ou Thiaroye-Gare (proche des maraîchers). ASoumbédioune s'est installé un marché aux pois­sons à l'heure de rentrée des pêcheurs. Les abat­toirs servent de rendez-vous aux éleveurs, auxmarchands du bétail sur pied et aux bouchers.

Le Sénégalais en un sens ne manque jamais derien: le commerce est comme une seconde natureet le paysage urbain se confond facilement avecdes lieux de vente et de marchandage.

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POULET CITRON

Gourmet ou pas, l'étranger ne pourra oublier lacuisine sénégalaise. Il lui restera toujours ce par­fum d'arachides grillées et d'oignons, ce moelleuxdu riz brisé bien juteux de sa sauce. Que ce soit de­vant la case-cuisine du village, dans la cour de Pi­kine ou dans celle des SICAP de Dakar, la cuisinec'est avant tout un lieu féminin avec ses lois de ran­gement, ses couleurs vives des bassines en émail.C'est là que les femmes pilent le mil, nettoient le riz,préparent les légumes qui accompagneront lesplats; c'est là que se mijotent dans l'huile de palmeou l'huile d'arachide les sauces à base de poissonfumé, séché ou frais, de volaille et de viande. Lesménagères le plus souvent utilisent de petits foursdits malgaches (à charbon de bois).

La présence de légumes (carottes, citrouilles, au­bergines, patates douces, choux, courgettes, gom­bos, manioc) n'est pas quotidienne et la base durepas familial reste souvent simple riz au poissonou à la viande.

Selon les régions, le couscous de mil et les bri­sures de riz constituent les céréales essentielles. Al'origine ces brisures de riz représentaient l'alimen­tation "offerte" par le système colonial. Aujourd'huileur pouvoir d'absorption des excellentes saucesfait oublier leur histoire. L'imagination culinaire sé­négalaise ne s'arrête pas aux mets élaborés. La rue,la plage ou la brousse offrent au visiteur toute unevariété de petits mets salés, pimentés, sucrés. Il nepourra résister au plaisir de goûter sur le débarca­dère de Gorée à ces petits beignets de poisson légè­rement pimentés ou de croquer le long des plagesces plaques de nougat à l'arachide caramélisées.Par temps de forte chaleur, la calebasse bienfraîche de lait caillé au sucre et à la noix de mus­cade sera sûrement le meilleur des rafraîchisse­ments.

Il n'est pas rare que l'on vous offre du jus de bis­sap, du jus de tamarin ou de gingembre "on therocks". On ne saurait parler boisson au Sénégalsans penser aux infusions de kinkiliba, de citron­nelle mais il en est une que chaque Sénégalais aimeà déguster après les repas et elle fait l'objet d'unevéritable cérémonie appelée "attaya" d'originemauritanienne. C'est avec les variétés de thé vertde Chine ou avec le gun powder (thé fort, sousforme de petites boulettes de feuilles de thé) que lerite se continue: chaque dégustateur consomme

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trois tasses de thé au goût distinct; la première estpeu sucrée, la deuxième l'est plus et elle contientquelques feuilles de menthe fraîche, la troisième estencore plus sucrée et contient aussi de la menthefraîche. Imaginons que ce thé suive cette bonne re­cette de yassa ou poulet au citron:

Préparation: 1 h. 15 mn. (+ 2 heures à l'avancepour la marinade) et cuisson.

Pour 8 personnes:2 poulets1 zeste de citron vert1 verre de jus de citron vert1 kg d'oignons1 verre d'huile d'arachide3 brins de thym2 feuilles de laurier4 tasses à thé de riz1 piment frais (facultatif)Sel, poivre.

1. Découpez le poulet (7 morceaux par poulet). Ypiquer quelques zestes de citron vert.

2. Faire macérer les morceaux dans le jus de ci­tron vert pendant 2 heures.

3. Egoutter les morceaux, réserver la marinade;faire griller les morceaux sur le charbon de bois: ilsdoivent cuire sans fumer. Emincer les oignons.

4. Dans l'huile d'arachide faire dorer légèrementles oignons. Saler, poivrer, ajouter le thym, le lau­rier, le reste du zeste et la marinade.

5. Au premier frémissement, déposer la grilladesur les oignons. Laisser mijoter à couvert pendant15 minutes sur feu très doux.

Le yassa se sert accompagné de riz blanc "son­nant" et de confit de piment pour ceux qui aimentles plats relevés.

Ce plat peut se faire avec de la viande (moutonou autre) ou du poisson.

JEUX ET SPORTS

Les jeux traditionnels sont variés au Sénégal.Il y a les jeux verbaux qui commencent dès la

plus tendre enfance (berceuses chantées par lamère par ex.) et continuent jusqu'à l'adolescence

avec les proverbes, devinettes, contes, etc. Ils per­mettent de familiariser l'enfant et le jeune sénéga­lais avec le milieu environnant: les plantes, les ani­maux, le corps humain...

Ils sont un moyen d'éducation par excellence etd'assimilation des valeurs culturelles tradition­nelles.

Il y a les jeux d'initiation ou de reproduction dumodèle social: le métier, la fonction maternelleavec les jeux de poupée, les jeux de construction etles jeux rituels.

Les jeux d'acrobatie: fia tape (saute-mouton),tang-tanguino (attelages -formés de cavaliers et dechevaux- faisant la course), les jeux de découverte:yaa kabati - kabati yaa, Takk bët (colin-maillard),les jeux d'adresse et surtout les jeux d'affronte­ment: lambi golo, xalaa-mandirbajjo et de pour­suite: njoos, dor daqe (frapper et fuir), langa buri,ont toujours occupé une grande place dans les loi­sirs des enfants sénégalais.

La pratique de ces jeux, par leur diversité, contri­buait largement au développement des qualitésphysiques mais aussi intellectuelles et morales del'enfant.

Le kuppe était organisé par les jeunes filles pen­dant l'hivernage et servait de rite d'appel à la pluie.Ce jeu est devenu très rare. Pourtant il présente ungrand intérêt car il est à la fois jeu de poursuite,d'affrontement et d'adresse.

Chez les adultes, les jeux d'adresse ou combinai­son comme le wuri, le yoote, variante du jeu dedames, sont encore pratiqués sous l'arbre à palabredans les villages et au coin des rues des quartierspopulaires en ville.

D'autres jeux plus athlétiques comme les coursesde pirogues sont souvent organisés et sont l'occa­sion de grands rassemblements très colorés. Maisde tous les jeux et sports traditionnels se distinguele lamb ou lutte traditionnelle. Il concentre les mo­ments forts de la tradition sportive et culturelle sé­négalaise. Le lamb se déroule dans une ambianceexceptionnelle: cadence endiablée des tam-tams,grande toilette des femmes, gaieté des couleurs...C'est le délire du public à l'entrée toujours spectacu­laire des lutteurs, portant sur le corps des gris-griset des amulettes de toutes sortes. Ils font alors leurbakk : poèmes rythmés déclamés par chaque lut­teur à sa propre gloire.

Lorsque le combat commence, les femmes pren­nent le relais en entonnant des chants pleins d'hé­roïsme pour enflammer les lutteurs...

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La tension du spectacle culmine sur une explo­sion indescriptible lorsqu'un des lutteurs, trompépar la ruse ou la prouesse technique de l'adversaire,est terrassé...

Ces jeux et sports traditionnels, dont certains dis­paraissent de la vie quotidienne, doivent être au­jourd'hui revalorisés. Un effort est fait par les auto­rités sénégalaises pour créer les conditions de leurexploitation pédagogique.

Le sport moderne occupe aussi une place privilé­giée. Il bénéficie de structures d'encadrement et deformation officielles. Le football est le sport le pluspratiqué et mobilise les jeunes. La période desgrandes vacances est l'occasion pour eux d'organi­ser des navetanes, compétitions entre les différentsquartiers de la ville.

Le basket-ball est très développé et l'équipe na­tionale, les Lionnes du Sénégal a eu à remporterplusieurs titres africains. Dans d'autres disciplinescomme le judo et le karaté, le jeu de dames, le ten­nis, l'athlétisme, le Sénégal est en bonne positionsur le plan africain.

Le sport moderne sénégalais connaît cependantdes problèmes réels dont le plus gros est certaine-,ment celui de l'exode.

LALUTTESENEGAUUSE

S'il est une activité sportive ancrée au plus pro­fond de la vie sénégalaise, c'est bien, sous toutes sesformes, la lutte.

Aux quatre coins du pays, on pratique une formeou l'autre de cet art, à chaque grand événement dela vie, de l'année. C'est ainsi que des tournois delutte opposent les villages casamançais au momentdes fêtes de circoncision, les villages serer au mo­ment des récoltes. Dans la vallée du fleuve Sénégal,on pratique notamment la lutte'acrobatique, multi­pliant sauts périlleux et pirouettes. Dans tous lescas, il s'agit de terrasser son adversaire en le proje­tant au sol.

Mais la lutte est bien plus qu'un sport, elle ex­prime toute la vie quotidienne, en dévoile parfoisles fondements. Les conflits, jalousies, rivalitésentre villages, entre familles trouveront un exutoiretemporaire dans ces combats pacifiques. Là encore,

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ce serait se méprendre de ne voir dans le choc desathlètes que la loi de la force ou de l'agilité. La re­nommée d'un lutteur tient autant à son palmarèsqu'à sa bravoure, son audace, son sens de l'honneur(et de l'humour), ses qualités de danseur. Chaqueséance de lutte est précédée de bah, démonstrationau cours de laquelle les concurrents accompagnésde leurs suivants saluent en dansant et haranguentla foule de leurs supporters tandis que les griotteschantent, sur le rythme des tam-tams, les méritesdes lutteurs.

Les spectateurs, en fins connaisseurs, se fontjuges de la force psychologique et de la puissancemagique qui permettront à leur favori de neutrali­ser les fétichages de son adversaire. Pour le com­bat, le lutteur se munit de nombreux xondioms(gris-gris), qui doivent à la fois le protéger et portermal à son adversaire.

Les séances de lutte n'ont pas disparu avec l'ur­banisation; elles se sont modifiées, adaptées auxnouveaux modes de vie et consacrent, à de nom­breux points de vue, ce qu'est cette nouvelle vie ur­baine.

Le premier changement est l'autorisation de la"frappe" (la boxe) qui introduit un élément drama­tique nouveau: les Kü ne sont pas rares. Le secondest la monétarisation des combats, la bourse d'ungrand champion peut être de plusieurs millions defrancs C.F.A. !

Plus fondamentalement, des écuries de luttevont se constituer en ville sur la base d'affinités eth­niques, régionales ou de quartiers. Chaque séancede lutte sera ainsi l'occasion d'affrontements mé­diatisés entre des communautés qui n'ont pas tou­jours la possibilité dans la vie quotidienne de s'affir­mer en tant que telles.

Tout ce qui se passe avant et autour du matchest alors aussi intéressant que le match lui-même.

L'ART ANCIEN

Le Sénégal, comme la plupart des pays africains,est une mosaïque d'ethnies dont les activités et lesproductions artistiques varient d'un terroir à unautre, selon les possibilités matérielles locales et enfonction des fonds métaphysiques et religieux qui

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les inspirent. Il y a donc, au Sénégal comme ailleursen Afrique, une diversité des expressions artisti­ques, telle qu'il n'y a aucune commune mesureentre les manifestations artistiques des Wolof et lescréations des Diola.

Cependant les ethnies majoritaires toucouleuret wolof du nord et du centre du pays, ayant étéislamisées très tôt (lxe-XIe siècle), leurs sens etconscience esthétiques se seraient investis très peudans les arts plastiques, peinture et sculpture no­tamment, l'islam interdisant la figuration dans lapratique artistique. Même si ces ethnies ont prati­qué ces types d'art avant l'islamisation, la nature dumatériau utilisé habituellement -le bois-, sa duréede conservation très courte, justifient l'inexistence,au XXe siècle, de survivances de leurs productionsplastiques.

Cette forte islamisation du pays expliquerait,selon l'ethno-esthétique, que les populations séné­galaises aient surtout excellé dans l'artisanat (dubois), dans l'ornementique (parure, vêture, tresses,tatouages, etc.), dans les arts de la parole (poésie,chants, musique, etc.), et donc dans les arts ducorps. Leur créativité artistique ne se projetteraitpas vers l'extérieur, en des objets concrets, séparéset indépendants de l'homme. Au contraire, toutesleurs créations artistiques serviraient à "décorer, àexalter ou à célébrer l'homme lui-même, commepour lui ajouter un surcroît de dignité et de beauté".

Aussi, peut-on comprendre la variété et l'abon­dance des thèmes et mélodies de la musique tradi­tionnelle et moderne, l'originalité et la douceur de lamusique religieuse des différentes sectes (tijaan,murid, khadriya et laayène), la richesse et la diver­sité de la parure (colliers, chaînes, pendentifs, bra­celets, bagues, anneaux et boucles d'oreilles, en or eten argent généralement). Si la célèbre "élégancedes belles Dakaroises", qui procède aussi de la vê­ture, a toujours frappé les observateurs, c'est parceque les populations sénégalaises ont toujours atta­ché une importance particulière à leur paraître. Au­jourd'hui encore, la vêture, très variée dans ses mo­dèles comme dans ses coupes et dans la diversitédes tissus, occupe une place centrale dans l'esthéti­que des Sénégalais, de la femme sénégalaise parti­culièrement. Cette parure et cette vêture sont exhi­bées avec fierté lors des khew, manifestationssociales (mariages, baptêmes, réceptions, séancesde tam-tams et de lutte, etc.) que les femmes affec­tionnent particulièrement de fréquenter. Ces khewsont régulièrement organisés à travers tous les

quartiers alors que les séances de lutte, si chères àcertaines driyanke, toujours attachées à la tradition,sont de nos jours organisées dans des arènes à l'oc­casion des week-ends. C'est au cours de ces séancesque se manifestent sous les aspects les plus diverset les plus colorés le folklore, la musique et la dansesénégalais.

Cependant certaines ethnies, peu et tardivementislamisées, présentent des particularités plastiquesremarquables:

- Les Serer, habitant le centre et le centre-ouestdu pays (régions de Diourbel, de Kaolack, de Faticket de Thiès), paysans attachés à leur sol et à leurstraditions ancestrales, continuent de pratiquerdes cultes agraires, adressent des offrandes auxautels des morts (pangols), en utilisant différentsinstruments rituels, taillés généralement dans lebois.

- Les Diola habitent la région sud du Sénégal, àl'embouchure du fleuve Casamance, région forte­ment boisée et parsemée de mangroves. Robustespaysans riziculteurs, réfractaires aux influences ex­térieures, les Diola ont bâti une civilisation maté­rielle reposant sur le bois, l'argile et le riz. Leursvastes habitations qui sont de véritables œuvresd'art architectural, sont construites en banco et enbois (poutres, charpentes des toits, portes sculptées,etc.). Leurs instruments domestiques et leurs outilsagricoles et de pêche, leurs accessoires rituels (sta­tues, masques, vases, bâtons, etc.) sont tous confec­tionnés en bois. Les cérémonies d'initiation (circon­cision et excision notamment) qu'ils organisentpériodiquement (tous les vingt ou vingt cinq ans)sont l'occasion de grandioses manifestations cultu­relles et artistiques où leur talent artistique s'ex­prime avec éclat dans la confection de la vêture, dela parure et des accessoires des initiés et de leursaccompagnateurs.

Il existe enfin des minorités ethniques (Manjac,Mancagne, Balante en Casamance, Bassari et Co­niadji au Sénégal Oriental) dont le dynamisme cul­turel et artistique est incontestable.

Si le Sénégal reste pauvre en objets-témoins deson passé précolonial, ses musées détiennent desobjets d'art représentant toutes les ethnies des paysde l'Afrique anciennement colonisés par la France;les collections du musée ethnographique de l'IFAN­CAD de Dakar par exemple, constituées pendant lapériode coloniale par les ethnologues français,constituent encore un microcosme artistique del'Afrique noire (poids à peser l'or ashanti ou collec-

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tion des masques d'or baoulé; statues dogon et fi­gurines bamileke, masque nalu et bronzes royauxfon, masque baluba et bracelets en cuivre guere,tambour royal senufo et statue protectrice ibo duculte des ancêtres, sceptres royaux toma et tiwarabambara, etc.).

D'autre part, dans les galeries d'art du centreville, dans les échoppes des antiquaires sénégalais,installés pour la plupart à Dakar, les amateurs d'artafricain peuvent trouver des objets d'art ancien detoutes les régions d'Afrique: statuettes en bois, enbronze, en cuivre et en laiton, etc.

Par ailleurs, dans les villages artisanaux, créésdans toutes les capitales régionales du pays par lessoins de l'Etat, sont installés des artisans, sculpteurssur bois notamment, appelés laobé ou mabo et quiproduisent en grande quantité des statuettes enbois, zoomorphes ou anthropomorphes, imitationsde modèles anciens ou créations nouvelles, consti­tuant ce qu'il est convenu d'appeler "art d'aéroport"et qu'ils exportent en Europe et aux Amériques.

Enfin, une longue tradition de travail du bronzeselon la technique de la fonte a subsisté dans le Baol(Diourbel). Le plus célèbre représentant de cettetradition, Cheikh Makhone DIOP, mort en 1982, apu produire des spécimens de bronze grandeur na­ture, appartenant désormais au patrimoine natio­nal et dont certains sont exposés au site de la Foirede Dakar et à la gouvernance de Thiès (TègneTanor Gogne, la Baigneuse, le Boxeur, LéopoldSENGHOR et le Baobab, Lat Dior Goné LatyrDIOP sur son cheval Malau, etc.). Cette traditionest aujourd'hui perpétuée par les enfants de CheikhMakhone DIOP.

Il faut enfin remarquer que des recherches ar­chéologiques et préhistoriques effectuées dans plu­sieurs régions du pays au cours des dernières an­nées (1973-1976) par les chercheurs de l'IFAN­CAD ont permis de découvrir divers objets dont lecaractère esthétique est indéniable: c'est le cas no­tamment du "pectoral de Rao" (dans la région deSaint-Louis), magnifique bijou en or offert en 1941à l'IFAN-CAD par M.J. JOIRE, professeur auLycée Faidherbe de Saint-Louis; ce sont égalementdifférents objets de parure, des céramiques et desarmes, tous conservés au Département de Préhis­toire, et dont les plus anciens seraient antérieurs àl'ère chrétienne.

Il y a là une direction de recherche qui permet­trait, sans nul doute, de remettre en question lespoints de vue ethno-esthétiques selon lesquels les

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populations sénégalaises n'auraient pas pratiquéles arts plastiques.

RICHESSES DEL'ARTISANAT

Bien que secteur informel, mal structuré et trèspeu connu dans toutes ses dimensions et son im­pact sur l'économie nationale, l'artisanat est un en­semble d'activités très anciennes au Sénégal. Selonla direction de l'artisanat du ministère de l'industrieet de l'artisanat, aucune étude globale de la situa­tion de l'artisanat sur l'ensemble du territoire natio­nal n'a encore été réalisée; cependant, une pre­mière étude, effectuée entre 1973 et 1975 dansles sept capitales régionales de l'époque, aurait ré­vélé l'existence de 150 000 entreprises artisanales ­l'entreprise artisanale comprend cinq salariés aumoins, travailleurs familiaux et apprentis non com­pris- ; une seconde étude, réalisée en 1986 dans ledépartement de Sédhiou, dans l'actuelle région deKolda, a permis de répertorier 2 000 entreprises ar­tisanales.

Les actions significatives de promotion de l'arti­sanat entreprises par l'Etat au début de l'indépen­dance ont revêtu les formes suivantes:

- Création d'une direction de l'artisanat au seindu ministère de l'industrie et de l'artisanat, afin dedéfinir et d'appliquer la politique de l'Etat en ma­tière d'artisanat;

- Création de structures d'encadrement, d'étudeset de recherche de financement du secteur de l'arti­sanat : société sénégalaise de promotion de l'artisa­nat (SOSEPRA), société nationale d'étude et de pro­motion industrielle (SONEPI) ;

- Création dans toutes les capitales régionales devillages d'artisanat et dont le plus célèbre est levillage artisanal de Soumboudioune à Dakar : cesvillages ont pour fonction de constituer un cadre detravail où sont regroupés différents corps de mé­tiers d'artisanat; ce qui devrait permettre leurmeilleur encadrement; ces villages ont égalementpour vocation d'être un lieu de rencontres etd'échanges touristiques. Aussi, le village de Soum­boudioune est-il régulièrement visité par les tou­ristes et les hôtes de marque.

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63.

PORTRAITS

&2. 64.

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65. Campement peul dans la région de Linguère.

66. Case dans la région de Linguère.

68. Grande case à lmpluvium, construction traditionnelle deCasamance.

67. Case bassari, dans le Sénégal oriental.

6.9. Prototype d'habitat moderne, de l'architecte Pedroza.

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70. Belle demeure à étage et à colonnades à M'Lomp, en Casamance.

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71. Retour du puits.

73. Femmes diola préparant un repas de fête en Casamance.

72. Un marché à Ziguinchor.

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74. Lutte sénégalaise.

76. Course de pirogues à Saint-Louis.

75. Colporteurs: de tout un peu.

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77. Echoppe d'un tailleur, rue Valmy, à Dakar. 78. Teinture sur tissu: décor apposé au tampon.

80. Un "peintre sous verre" au travail dans son atelier.

79. Bijoutier de la "Cour des Maures" à Dakar.

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81. Joueur de Balafon.

82. Grand tambour à fente diola.

83. Un féticheur présente ses remèdes et talismans.

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84. Entrée de lagrande mosquée

de Touba.

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Cependant, avec la nouvelle politique de désen­gagement de l'Etat, les structures d'encadrementde l'artisanat (SOSEPRA et SONEPI) ont été des­saisies de leurs attributions relatives à ce secteur,au profit des chambres des métiers (créées récem­ment), dont les services techniques devraient assu­rer, à partir du 1er septembre 1986, l'auto-organisa­tion des artisans, par leur responsabilisation pro­gressive.

La direction de l'artisanat du ministère de l'in­dustrie et de l'artisanat distingue trois types d'arti­sanat:

- L'artisanat d'art: bijouterie, sculpture (sur bois,sur ivoire et sur bronze), maroquinerie, tissage, tri­cotage, tressage, vannerie, broderie, teinturerie, po­terie, peinture d'art, reliure, menuiserie d'art, hautecouture, etc.,

- L'artisanat de production: menuiserie-ébé­nisterie, menuiserie de bâtiment, charpenterie mé­tallique, maçonnerie, moulage, cordonnerie, cou­ture, serrurerie, imprimerie, corderie, forgeage, ta­pisserie, etc.,

- L'artisanat de service: mécanique, électricité,soudure, plomberie, carrelage, tôlerie, carrosserie,tannage, coiffure, photographie, chaudronnerie,horlogerie, boulangerie, charbonnage, boucherie,etc.

Outre les caractères précédemment énumérés,l'artisanat sénégalais demeure dans son ensembleun secteur traditionnel, c'est-à-dire non organisérationnellement, peu modernisé et dont les équipe­ments et les outils sont archaïques; et les artisansne disposent généralement pas de capitaux à inves­tir pour l'acquisition des équipements et ne peuventpas bénéficier de financements auprès des institu­tions bancaires. Le secteur comprend surtout desentreprises familiales dans lesquelles les travail­leurs, très nombreux -enfants, parents et apprentis­sont initiés sur le tas, par les anciens, conformé­ment à la tradition du système des castes; car au­jourd'hui encore, tous les artisans sénégalais appar­tiennent aux castes: forgeron et bijoutier appelésteugue, cordonnier ou oudé, tisserand ou rab-kat,sculpteur sur bois ou laobé (mabo), etc.

Ces différents caractères se retrouvent dans lesquelques exemples suivants:

POTERIELa poterie appartient aux plus anciennes activi­

tés humaines. Au Sénégal, les fouilles effectuéespar les équipes de chercheurs de l'IFAN-Cheikh

A. DIOP en 1973 mentionnent l'existence de cetteactivité vers 3 000 avant Jésus-Christ. Des poteriesrituelles ont en effet été découvertes dans différentssites: Tiékéne, Kodiam, Sine-Ngayène, Wassu,Saré-Diouldé, etc.

Au Sénégal, le travail de la poterie est générale­ment réservé aux femmes, de condition particu­lière, parallèle et complémentaire à celle du forge­ron. Les potières se regroupent le plus souvent enguildes, véritables manufactures familiales. Plu­sieurs foyers existent ainsi à travers le pays et lespotières utilisent toujours les mêmes instruments etles mêmes techniques archaïques et traditionnels.

Les produits de la poterie sont d'usage profaneet utilitaire et sont parfois décorés : canaris, gar­goulettes, pots sphériques, jarres, unde, marmites,etc. Certaines de ces pièces sont d'un effet décoratifexceptionnel. A côté de cette poterie profane et utili­taire, il existe chez certaines ethnies une poterie ri­tuelle figurative: têtes et bustes modelés, vases fu­néraires, etc. Les productions utilitaires sont géné­ralement vendues sur les marchés des grandesvilles et exposées parfois le long des grands axesroutiers.

FORGERIE ET BIJOUTERIELe forgeron est considéré par l'ethnologie

comme le personnage le plus énigmatique de l'Afri­que traditionnelle et une figure centrale des civilisa­tions africaines: c'est lui qui fabrique l'outillage né­cessaire à toutes les activités de la communauté(outillage agricole: haches, herminettes, couteaux,houes, coupe-coupes, "konko", etc. ; armement: fu­sils, lances, poignards, glaives, pointes de flèches,etc.). C'est de lui que dépendrait également la viereligieuse et culturelle: il sculpte les images des an­cêtres, des génies et des forces et dirige les cérémo­nies rituelles et l'initiation. TI assume enfin des fonc­tions sociales et politiques (médiateur, maître decérémonies, conseiller). Dans nos villages actuels,le forgeron continue encore à assumer la plupartde ces fonctions. Le bijoutier ne se distingue du for­geron que par quelques traits: il travaille sur desmétaux précieux (or, argent) et façonne plus géné­ralement des objets de parure de petites dimen­sions : boucles d'oreilles, bracelets, bagues, penden­tifs, colliers, etc., dans un but purement esthétique.Et le développement actuel de la bijouterie sénéga­laise (prolifération des ateliers et magasins de bi­jouterie dans les villages d'artisanat mais aussi àtravers les quartiers de nos villes) est sans doute liéau goût de la femme sénégalaise pour la parure:

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elle consacre volontiers des fortunes à sa parure età celle de sa descendance.

CORDONNERIELa cordonnerie sénégalaise, notamment celle

des centres urbains, a longtemps été tributaire de lacordonnerie maghrébine, non seulement dans lesmodèles (babouches) mais également dans l'appro­visionnement en peaux tannées: les cordonnierssénégalais préféraient en effet les peaux tannéesimportées du Maroc et de la Tunisie pour deuxqualités essentielles: elles sont plus aisées à tra­vailler et elles sont plus résistantes. Cependant, de­puis quelques tabaski (fète du mouton en pays mu­sulman), nos cordonniers produisent une gammevariée de modèles qu'ils créent eux-mêmes et danslesquels les teintes vives remplacent le plus souventles teintes tendres. Et ils utilisent de plus en plus fré­quemment des peaux locales de moutons et dechèvres alors que les peaux tannées importées duMaghreb, de coût très élevé, sont toujours réser­vées pour la confection des babouches d'une cer­taine bourgeoisie.

Le dynamisme nouveau de ce secteur de l'artisa­nat se mesure désormais à l'abondance des pro­duits (babouches, sandales, escarpins, amulettes,ceintures, sacs, portefeuilles, bracelets, gaines decouteaux, fourreaux de sabres, selles de chevauxetc.), à la multiplicité des ateliers à travers les quar­tiers et à la modicité des prix proposés: la cordon­nerie sénégalaise fait de plus en plus une forteconcurrence aux grandes maisons de chaussures(Bata par exemple) sur le marché sénégalais.Comme les tisserands ou les sculpteurs laobé, lescordonniers se regroupent le plus souvent enguildes, avec dans chaque atelier une organisationet une hiérarchie spécifiques. Cependant leurs ou­tils de travail restent toujours traditionnels.

TISSAGEMalgré l'apparition et le développement des in­

dustries textiles (SOTIBA-SIMPAFRIC, ICOTAF,etc.), le tissage et la teinture sont toujours pratiquésdans nos régions. Mais si, dans la société tradition­nelle, le tissage fournissait des étoffes pour la con­fection de tous les vêtements, de nos jours il produitplus essentiellement des étoffes utilisées pour la fa­brication des pagnes et des grands-boubous. C'estsurtout dans les centres urbains que des femmescommerçantes s'occupent à la fois de la productionet de la commercialisation des étoffes qu'elles écou-

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lent sur tous les marchés sous forme de pagnes enles plaçant auprès d'amies et de parentes (vente aucomptant ou à crédit). Pour la production de cesétoffes, elles louent les services de tisserands man­jac (ethnie de la Casamance spécialisée dans le tis­sage) et leur fournissent les matières premières.Ceux-ci façonnent à l'aide de fils industriels d'im­portation de différentes couleurs, des pièces de bellefacture, accompagnées de figures et d'images.

Dans les zones rurales, bien qu'ayant fortementrégressé, le tissage est toujours perpétué par des fa­milles que la tradition attache à ce métier. Aussi, lecoton cultivé par les paysans des régions de Casa­mance et du Sénégal Oriental est-il désormais des­tiné à la société pour le développement des fibrestextiles (SODEFITEX), chargée de leur encadre­ment et de la commercialisation des fibres.

La teinture, toujours pratiquée par les femmestoucouleur et sarakolé, utilise encore les mêmestechniques traditionnelles (impression de dessins àl'aide de petits tampons de bois ou de pierre, tech­nique des ligatures savamment dosées au coursde trempées successives, etc.). Mais en mêmetemps que l'indigo, elles utilisent également desproduits teinturiers modernes, pour teindre pagneset grands-boubous en tissus industriels.

SCULPTURELes productions de la sculpture rituelle au Séné­

gal sont peu nombreuses. Et de nos jours, les laobésculpteurs sur bois, se sont particulièrement spécia­lisés dans la production d'objets utilitaires (mor­tiers, pilons, tam-tams, pirogues, bancs, sièges etfauteuils, cuvettes et assiettes, fourchettes etlouches, etc.) et d'objets non utilitaires (statuettes etmasques). Ces différents produits sont vendus àtravers tout le pays et parfois exportés.

Généralement installés dans les villages d'artisa­nat ou dans des ateliers familiaux, les laobé s'orga­nisent traditionnellement en guildes, produisent encommun, alors que le chef de la corporation estchargé de l'approvisionnement en matièresd'œuvre et de la commercialisation de leur produc­tion ; parfois, il confie aux jeunes apprentis la tâchede commercialisation de ces productions dans leshôtels et les marchés, dans les aéroports et lesplaces publiques ou alors il les envoie à l'étranger;c'est ainsi que l'on rencontre désormais dans lesgrandes villes européennes et américaines dejeunes laobé marchands de statuettes et d'objetsd'art africain.

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PEINTURE ET ''FIXES''

La peinture sous verre est l'un des arts popu­laires les plus vivants du Sénégal. Communémentappelés fixés et en wolof "suwer", les peintures sousverre très colorées et pleines d'expressivité sont ex­posées à la vente au grand marché de Sandaga, àl'avenue Blaise Diagne, au cœur de la médina deDakar. Sur les différents tableaux les artistes pro­fessionnels tels Gora MBENGUE, Alexis NGOM,Babacar LO et bien d'autres, avec des couleurschaudes et éblouissantes, racontent l'histoire du Sé­négal, les péripéties de la vie quotidienne, lesmythes et légendes traditionnels.

La peinture sous verre est d'origine peu connue.Elle se serait diffusée en Méditerranée à partir deByzance. Au Moyen-Orient et particulièrement enIran, elle s'est enrichie de la thématique chiite: évo­cation du prophète, des scènes de bataille du Coran.Au XVIIIe siècle, elle a été florissante au Maghreb,en Tunisie en particulier. La peinture sous verre sé­négalaise est donc héritière de multiples influencesmaritimes et sahariennes. Elle apparaît au XIXe

siècle à la faveur de l'existence de maisons de com­merce qui rendent possible l'importation de maté­riaux nécessaires (encre, verre, peinture), celle delibrairies libanaises et syriennes diffusant les livresarabes, des images et objets de culte. Les premiersateliers se sont créés donc dans les centres urbainscomme Dakar, Thiès, Saint-Louis, Kaolack et semultiplient ensuite. La technique utilisée est ainsidécrite dans le magnifique ouvrage de M. RENAU­DEAU et M. STROBEL consacré à la peinture sousverre au Sénégal: "Le procédé technique estsimple, il consiste à peindre sur une plaque de verredont les dimensions moyennes sont de quarante àsoixante centimètres. La face non peinte, lisse,laisse le support et ce qui révèle l'image. La facepeinte, elle, est protégée par une feuille de papier oude carton."

Les thèmes sont nombreux et permettent d'ex­primer l'imagerie populaire par la magie de latransparence, des reflets, du jeu des couleurs. Il y ales portraits d'une fraîcheur naïve, tout un réper­toire religieux et traditionnel où l'on retrouvepeintes les croyances, légendes et miracles desmythes anciens, mais aussi celles attribuées auxgrands marabouts confrériques comme AmadouBAMBA, El Hadj Malick SY, Limamou LAYE. Cetart confrérique à travers ces figures de marabouts

et leurs péripéties durant la période coloniale s'estparticulièrement développé comme forme de résis-tance et d'affirmation culturelle. .

Il y a également en images des histoires de la viequotidienne tels le voleur conduit au commissariat,le départ de l'épouse, des scènes de lutte qui sontpar la particularité des costumes, des bijoux, descoiffures, les repères d'une époque.

Le style des figurations à la fois suggestives etnarratives rappelle celui du griot. L'absence desrègles de perspective et des proportions donne auximages peintes une dimension de merveilleux quise rattache bien en effet à la tradition orale du Sé­négal. C'est sans doute pourquoi ces tableaux tapis­sent les murs de nombreuses maisons de quartierspopulaires au Sénégal.

La peinture comme art plastique est récenteau Sénégal. Il n'existe pas de survivance plastiquedes croyances ou des souvenirs historiques pour­tant encore vivaces dans la tradition orale. L'islamtrès ancien au Sénégal a sûrement contribué àcette situation. Il était en effet pour l'abolition dessystèmes de représentation traditionnels. Mais de­puis l'indépendance du Sénégal en 1960, sous l'im­pulsion du Président SENGHOR, l'Institut des Artsest créé. De nombreux jeunes peintres apprennentles différentes techniques, se frottent aux différentsstyles et communiquent avec les autres peintres dumonde. Le résultat de tout cela est une explosiond'une création plastique moderne qui participe àl'élaboration de la nouvelle identité sénégalaise. Denombreuses expositions de cette peinture sénéga­laise contemporaine ont été organisées dans plu­sieurs pays à travers le monde. Au Sénégal est pa­rallèlement créé le Musée Dynamique qui a déjàaccueilli de nombreuses expositions des peintres sé­négalais et étrangers dont celle de PICASSO. Lesmanufactures de tapisseries de Thiès ont permisaux artistes déjà affirmés de demander auxmeilleurs artisans de travailler avec eux hors des li­mites traditionnelles de la techniques même pouraccéder à une dimension communicative plus po­pulaire.

Les activités liées aux enseignes peintes sont ap­parues et se développent rapidement depuis quel­ques années. Mais ce secteur demeure lui aussi in­formel, c'est-à-dire peu connu et mal organisé. Lesenseignes sont généralement réalisées par des ar­tistes, peintres et dessinateurs, ou plutôt par des ar­tistes "déchus" ou reconvertis, parce que leur art neles faisait pas vivre, alors que les enseignes ne sont

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produites que sur commande, donc avec la certi­tude d'une rétribution de l'effort. Les commandessont le fait des artisans des petits métiers (tailleurs,coiffeurs, dibiteurs ou vendeurs de viande grillée,cordonniers, petits commerçants, tangana, etc.).Les enseignes sont le plus souvent des plaques mé­talliques ou de bois, peintes ou dessinées, avec desimages figurant l'activité principale du métier del'artisan (par exemple, le tailleur ferait représentersur son enseigne, qu'il affichera sur sa porte, untailleur en train de coudre sur sa machine, quelquesmodèles parmi ceux qu'il confectionne et quelquesmots explicatifs).

L'enseigne est donc de nos jours une réclame pu­blicitaire qui annonce et fait valoir une activité etun métier en puisant dans les images et les thèmesde l'imagerie populaire: elle constitue ainsi une ex­pression populaire de la créativité d'une certainecatégorie de nos artistes et un moyen de promotionet de diffusion de cet art populaire et naïf du Séné­gal.

LITTERATIJRE, THEATRE,CINEMA

La littérature sénégalaise d'expression françaiseest la plus riche de l'Afrique francophone. Les dé­buts du roman remontent aux années 1920 : Lestrois volontés de Malic, d'Amadou Mapaté Diagne(1920) ; Le réprouvé, roman d'une Sénégalaise, deMassyla Diop (1925) et surtout Force bonté de Ba­kary Diallo (1926).

Mais c'est Ousmane Socé avec Karim (1935) etMirages de Paris (1937) qui lance la tradition roma­nesque sénégalaise. La civilisation occidentale et lasociété française restent très présentes dans toutecette tradition qui décrit la difficulté d'être Africaindans un monde qui change.

C'est à la même époque de l'entre-deux-guerresd'ailleurs que L.-S. Senghor élabore avec A. Césaireet L.-G. Daumas la théorie ou l'idéologie de la négri­tude. L.-S. Senghor va surtout privilégier la poésieavec notamment Chants d'ombre (1945), Hostiesnoires (1948) et Ethiopiques (1956). C'est l'après­guerre qui voit l'éclosion de la première véritablegénération d'écrivains. Le conflit de l'ancien et du

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moderne domine chez Abdoulaye Sadji avec Nini,mulâtresse du Sénégal (1947) et surtout Maimonna(1952). C'est à cette époque qu'Ousmane Sembènecommence à écrire avec Le docker Noir (1956), 0Pays, mon beau peuple (1957). Son plus fameuxroman est Les bouts de bois de Dieu (1960) consa­cré à la grève du Dakar-Niger de 1947-48. Le pointd'orgue de cette première génération de roman­ciers est sans aucun doute le seul et unique romande Cheikh Amidou Kane, L'aventure ambiguë(1961).

Toutefois Sembène Ousmane (ancien militantsyndicaliste) reste l'écrivain le plus typique avec sapeinture des conflits sociaux - notamment Le man­dat (1966) etXala (1973) : il transposera plusieursde ses œuvres au cinéma.

Depuis une dizaine d'années, une nouvelle géné­ration d'écrivains de romans ou de nouvelles, beau­coup plus enracinée dans la culture sénégalaise, oc­cupe très brillamment le devant de la scène.

Des femmes comme Aminata Sow Fall- Lagrève des Battus (1979); L'appel des arènes(1982) - ou Mariama Ba, Une si longue lettre(1979); Un chant écarlate (1982) ou MariamaMbengue Ndoye donnent certainement le ton.Parmi la quinzaine d'autres écrivains confirmés ci­tons Papa Pathé Diop, La poubelle (1984) ; CheikhC. Sow, Cycle de sécheresse (1983). A l'imitation deL.-S. Senghor, la poésie connaît un grand succès(une cinquantaine de recueils). Mais bien plus répu­tés sont d'une part les recueils de contes, inspiréspour une bonne part de la tradition, et de l'autre, lespièces de théâtre. Birago Diop est un conteur horspair: Les contes d'Amadou Koumba (1947), Lesnouveaux contes d'Amadou Koumba (1958), Lescontes d'Awa (1977). L'existence du Théâtre DanielSorano et d'une troupe nationale ont permis d'afri­caniser des auteurs occidentaux (Molière, Racine,Shakespeare) et de monter des pièces inspirées parl'histoire épique sénégalaise: Cheikh Aliou N'Daoavec L'exil d'Alboury (1967) et Les fils de l'Almany(1973) en est un bon exemple.

Le passage du roman au théâtre ou au cinémaest donc assez courant. Le cinéma sénégalais mé­rite une mention particulière parce qu'il est le plusancien et le plus riche de l'Afrique francophone etmême de l'Afrique Noire tout entière. Le premierfilm sénégalais (et africain) est Afrique sur Seine(1957) de Paulin Vieyra. Ce cinéma comprend aumoins une quarantaine de courts et moyens mé­trages et une trentaine de longs métrages. Le véri­table inventeur du cinéma sénégalais est Sembène

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Ousmane. Trois courts métrages et six longs mé­trages scandent ses vingt-cinq ans de réalisateur.On évoquera le premier Boran Sarret (Le bon­homme charette, 1962) ; le réquisitoire contre lesemployeurs blancs, La Noire de... (1966 - le pre­mier long métrage africain) et les fameux Mandabi(1968 - premier film en wolof), Xala (1975) etCeddo (1977) qui traitent du Sénégal présent oupassé. Son dernier film, Samory Touré (1987) évo­que le grand héros africain anticolonialiste.

Mais Sembène est loin d'être seul aujourd'hui.Mahama Traoré dit Johnson évoque la jeune fille,Diankha-bi (1969), la femme, Diegue-bi (1970) etl'exploitation des enfants par des marabouts mal­honnêtes, Njangaan (1975). Djibril Diop parcourtDakar, Contras City (1969) et Badou Boy (1969). Lebracelet de bronze de Tidiane Aw (1973), film degangsters est un grand succès. Nous retiendronssurtout une femme, Safi Faye, Lettre paysanne(1975), Faa' Jal (1979), Moi ta mère (1980) et Aba-.bacar Samb avec Et la neige n'était plus (1965),Kodou (1981) et ce film qui est peut-être le chef­d'œuvre actuel du cinéma sénégalais, Jam ou l'his­toire d'un peuple (1981).

MUSIQUES

La musique au Sénégal comme dans biend'autres pays d'Mrique de l'Ouest, est un mélangede plus en plus complexe. Il y a d'abord les musi­ques traditionnelles au répertoire immense, plus oumoins bien conservées par la mémoire des profes­sionnels (griots) et des populations elles-mêmes.Ces musiques aux fonctions aussi bien quotidienneset profanes (les berceuses, les chants de fêtes,d'amour, du travail, etc.) que culturelles et morales(les chants historiques, épiques et laudateurs) sontencore bien vivantes et connaissent des adapta­tions sophistiquées pour des spectacles publics oudes émissions de radio. Elles servent aussi d'ar­rière-fond thématique et mélodique à toute une mu­sique moderne qui a intégré à la fois les rythmesétrangers (noirs américains, latino-américains) etl'instrumentation occidentale (la guitare électriquepar exemple).

Musiciens, chanteuses et chanteurs sont griotsd'origine. Cette caste maintient la transmission pro-

fessionnelle des savoirs et techniques musicaux. Ilexiste des traditions ethniques mais ce sont lesmandingues (ou malinké) les plus réputés; on lestrouve aussi au Mali, en Gambie et en Guinée: Sou­dioulou Cissoko, "Joli" Nyama Saso (de Gambie)sont parmi les plus connus. Certains ont moderniséleur répertoire comme Lamine Konte et sont trèsconnus à l'étranger. Le gouvernement sénégalais amême créé l'Ensemble Instrumental Traditionnelavec une section lyrique (il existe aussi le Ballet Na­tional de plus en plus destiné au public occidental).Il existe aussi des griottes, uniquement chanteuses,comme les célèbres Aissa M'Baye ou Khan M'BayeMadiaga.

Les instruments les plus courants sont les instru­ments à corde et les percussions. Parmi les instru­ments à corde, citons :

- La kora (luth-harpe) à vingt-et-une cordes surun chevalet monté sur une grosse calebasse coupéeen deux et recouverte d'une peau de vache. Il y aplusieurs manières de l'accorder.

- Le khalam, luth à cinq cordes. C'est l'instru­ment par excellence de l'épopée.

- Le riti enfin à une corde que fait vibrer unpetit archet, instrument d'origine peule. La cor­de est faite de crins de cheval et la caisse enbois de fromager est recouverte d'une peau delézard.

Les percussions sont aussi très variées: on dis­tingue les tambours à fente (konkon diola), lestambours sur pied à membrane: bugun diola,djoudjoung serer ; mbalack wolof, ndeund wolofqui accompagne la lutte, le sawzouba mandingue.Il existe enfin des tambours portatifs comme lesabar mandingue et le tama wolof. N'oublions pasle balafon (xylophone mandingue), l'instrumentroyal par excellence.

L'apparition de la musique sénégalaise modernes'est faite plus ou moins en deux temps. Une pre­mière période voit à la fois l'instrumentalisation oc­cidentale de musiques traditionnelles et le dévelop­pement de grands orchestres à fonction purementdistractive (bals et boîtes de nuit) : citons le StarBand et le Sahel de Dakar, le Diarama de Saint­Louis. Vers la fin des années 1970 une nouvelle gé­nération monte ses orchestres. Plus indépendante,plus cultivée musicalement (à l'échelle internatio­nale), elle cherche à concilier à la fois une expé­rience culturelle extra-sénégalaise, une certaine fi­délité aux traditions et une véritable profession­nalisation (répétitions, droits d'auteur, etc.).

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Les fonnations et les chanteurs les plus connus àl'heure actuelle sont Youssou N'Dour et le SuperEtoile de Dakar (douze disques), le Super Diamono(une dizaine de disques). Mais de nombreusesautres fonnations font aussi la réputation de cettenouvelle musique sénégalaise: Xalaam (très mo­derne dans son inspiration), Baaba Maal et leDaande Lénol, Ismael Lo (plus traditionnel). Unemention spéciale doit être faite au groupe ToureKunda fonné et connu en France mais qui a connuen 1984 des retrouvailles épiques avec le Sénégal.

La plupart des chanteurs fondateurs de ces or­chestres ont des voix remarquables tout en étantdes arrangeurs dynamiques et inventifs. Le succèsinternational de certains d'entre eux (YoussouN'Dour s'est produit avec J. Higelin à Bercy en1985) a suscité une espèce de rivalité ethnique:aujourd'hui les Toucouleur ou Peul "modernisent"leurs musiques et se lancent sur les traces de pré­curseurs wolof, serer ou soninké. Tous ces musi­ciens sont très populaires.

FETES POPULAIRES

Au Sénégal les fêtes sont l'occasion de marquerdes événements importants dans tous les domainesde la vie.

A part les tetes religieuses où l'accent est surtoutmis sur la piété et le recueillement, toutes les autresfêtes sont surtout caractérisées par la gaieté desrythmes (musiques, danses) et la densité des cou­leurs (costumes multicolores, masques, etc.).

Pour ce qui est des fêtes religieuses musulmanes,Tabaski (fête du mouton, en commémoration dusacrifice rituel d'Abraham), la Karité (fin du jeûneobservé tout le mois de ramadan), Gamou et "Tam­xarit", ou des fêtes bien connues de la religion chré­tienne, c'est toujours dans la ferveur qu'elles sontcélébrées par les communautés de fidèles et sonttoujours l'occasion d'oublier les querelles et demettre l'accent sur l'unité.

Chaque année également, il y a de grands re­groupements au niveau de chaque confrérie reli­gieuse musulmane pour commémorer des datesimportantes liées à la vie du fondateur et à l'histoirede la confrérie. Il en est ainsi pour les Niassènes

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(adeptes de Baye Niasse), les Layènes (Seydina Li­mamoulaye), les Mourides (Cheikh AhmadouBamba), les Tidianes (Cheikh Tidiane Sy). Ainsi,par exemple, chaque année à l'occasion du Grand­Magal, Touba, la sainte capitale du mouridisme estle point de convergence de centaines de milliers defidèles qui vont y célébrer le départ en exil auGabon (1895-1903) de Cheikh Ahmadou Bamba.Le Magal correspond chaque année au 18 du moislunaire musulman de Safar. La foule immensedrainée chaque année, la passion des fidèles, leskhassaïdes (chants religieux mourides)... c'est toutsimplement impressionnant!

A part les fêtes religieuses, les fêtes tradition­nelles les plus populaires sont le plus souvent liéesaux activités agricoles ou à certains événementsliés au cycle de la vie.

Ainsi, dans toutes les régions et chez presquetoutes les ethnies, la préparation de l'hivernage oc­casionne toujours des fêtes: fêtes pour apaiser lesesprits, solliciter un bon hivernage (Ex. chez lesSerer, le miss qui se déroule entre mars et avril, tou­jours avant le débroussaillement, est l'occasion defaire des libations, organiser là des danses, des fes­tivités).

Chez les Wolof, le Bawnaan est une manifesta­tion collective pour implorer la pluie quand elletarde à tomber (déguisements, tatouages, masques,chants et danses au rythme des tam-tams).

Après les durs travaux champêtres, et surtout aumoment des récoltes, des grandes tetes sont organi­sées, avec séances de lutte où participent les cham­pions des différents villages (Mbapatt).

Des étapes considérées comme importantesdans la vie, sont également des occasions de tete. Ilen est ainsi pour la circoncision, et l'initiation desjeunes filles ou des jeunes garçons dans les bois sa­crés. Chez certaines ethnies ces fêtes se raréfient(Ex. le Kassak wolof pour les circoncis), alors quechez d'autres (Mandingue, Diola), ces fêtes subsis­tent malgré les assauts du modernisme.

La Casamance est aujourd'hui la région du Sé­négal où la tradition de la fête s'est le plus conser­vée. A toute période de l'année (avant les pluies,pendant l'hivernage, au moment des récoltes), aucours des cérémonies d'initiation, des fêtes sont or­ganisées avec sorties de masques, chants, danses(Ex. Kumpo, Kankouran, etc.). Ces fêtes sont tou­jours l'occasion de renforcer les liens, d'assurer labonne entente, d'entretenir la solidarité entre lesmembres d'une société.

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Sur le plan politique, la !ete la plus importante auniveau national demeure la !ete du 4 avril, célébra­tion anniversaire de l'accession à l'Indépendance,événement national auquel on confère toute la so­lennité requise, consacré !ete de l'armée et de la jeu­nesse.

Il y a aussi la fête de la confédération Séné­Gambie célébrée le 1 er février.

Des tentatives sont faites de plus en plus dans lesens du recouvrement de l'identité culturelle: créa­tion de nouvelles !etes commémoratives de hérosnationaux et de hauts faits (journée du parrain!etée le 27 avril par tous les établissements scolairesqui portent le nom d'illustres fils du pays, cente­naire de la mort de Lat-Dior, héros national).

Un recensement de toutes les fêtes tradition­nelles est en cours. Puisse-t-il être soutenu par unevéritable conscience collective active qui permetteà travers la !ete, de donner un sens au passé, de larevivre mais aussi de l'enrichir.

LA TRADITION: UNCIMENT NECESSAIRE

Les croyances et pratiques traditionnelles sontd'une grande vivacité dans la société sénégalaiseactuelle malgré le modernisme. Il est fort remar­quable que les comportements individuels et collec­tifs quotidiens sont souvent imprégnés de l'espritde la tradition. Cela est certainement dû à la diver­sité des groupes ethniques qui conservent leur iden­tité ethno-culturelle, à la persistance de structuressociales qui se réfèrent bien plus à la parenté tradi­tionnelle, aux lignages, aux solidarités villageoisesanciennes qu'aux mutations et changements en­gendrés par les phénomènes pourtant importantsde l'économie monétaire, de l'urbanisation et del'école occidentale. Cette persistance de la traditiondans la société sénégalaise concerne autant la cam­pagne que la ville.

Dans ces cultures traditionnelles vivaces se dé­tache très nettement un personnage dont le rôleest encore d'une grande actualité. C'est le griot,homme de caste, détenteur de la tradition et maîtrede la parole. Anciennement lié à la cour des princeset rois des royaumes précoloniaux, le griot est en­core aujourd'hui l'artiste, le danseur des scènes de

théâtre, des !etes familiales de quartier, des films dela télévision; il est aussi très souvent le porte-paroledes discours dans les cérémonies et manifestationsofficielles au Sénégal. Mais il n'y a pas que le griot,il y a aussi le marabout. Dans le passé où dominaitentièrement la religion traditionnelle avec son sys­tème hiérarchisé de divinités et ses rites multiples,ce dernier était craint et respecté et les présages, lesgris-gris et les prières étaient considérés par les fa­milles royales ou les prétendants au trône commed'une grande efficacité. Et bien avant le maraboutmusulman, maître du Coran dans les écoles desvillages, existait donc le marabout fétichiste quiétait le compagnon d'armes précieux de tout princeou roi qui voulait acquérir l'invincibilité à la guerreet un règne long et plein de félicité. Au Sénégal au­jourd'hui le recours à ces marabouts fétichistes quisont parfois aussi des guérisseurs traditionnels, estune donnée manifeste de la vie quotidienne. Ce sonteux qui doivent, par des prescriptions et des incan­tations multiples, résoudre des problèmes de santéet de protection, de réussite individuelle et de pro­motion sociale. Le Centre Hospitalier Psychiatriquede Fann à Dakar a si bien compris l'impact descroyances et des religions traditionnelles dans levécu individuel et collectif qu'il s'est assuré de lacollaboration étroite de ces guérisseurs tradition­nels qui assurent leur traitement thérapeutique parune cérémonie rituelle appelée Ndëp.

D'une manière générale au Sénégal, la traditionest là lorsque se posent des problèmes graves; pourconjurer la sécheresse sont organisées chaqueannée des cérémonies de Baw-naan, rite tradition­nel riche et complexe d'appel à la pluie.

Dans les centres urbains comme Dakar, on ob­serve que des communautés originaires du mêmevillage ou appartenant à la même ethnie tels lesJ ola de Casamance, les Socé, les Poular après lesheures de travail ou les jours de !ete commémorentpar des chants, des danses, des costumes multicolo­res, leurs traditions et leur histoire ancestrale com­me pour lancer un défi au modernisme de la ville.

La tradition est bien vivante dans les relationssociales et les relations interpersonnelles fortementrégies par les valeurs anciennes d'hospitalité, de so­ciabilité, d'entraide, etc.

D'une manière très frappante aussi la traditionest portée au Sénégal dans toute sa permanence etsa beauté par la diriyanké, femme sénégalaise typi­que, célèbre par son esthétique traditionnelle: bou­bou et parures traditionnelles, mouchoir de tête,geste majestueux, élégance pure.

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LE CHRISTIANISME

Un écueil doit être évité quand on se penche surl'histoire du christianisme au Sénégal: ce seraitde lier religion et colonisation. Les finalités, leshommes, les centres où étaient prises les décisions(Paris, Rome) n'étaient pas les mêmes. Cependant,il reste que le clergé a été en grande partie d'origineétrangère, et souvent perçu comme tel, quelles quesoient les positions et inclinations de chacun. Deplus, les gouverneurs et commandants de cercleont su jouer des rivalités entre religions, selon lescirconstances et leurs options philosophiques.

Au XVIe siècle, les comptoirs du Sénégal étaientdesservis par des prêtres venant des îles du CapVert. Au XVIIe siècle, le pays est partagé en deuxzones: au nord, quelques religieux pour les comp­toirs des "compagnies à chartes" ; le sud est pris encharge par des franciscains. A la fin du XVIIIesiècle, Saint-Louis devient Préfecture Apostolique.Au début du xrxesiècle, des congrégations s'instal­lent au Sénégal: les sœurs de Saint-Joseph deCluny en 1819, les frères de Ploërmel en 1840. En1845, est fondée la Mission Catholique de Dakar.

Le fait décisif est la création de l'établissement deNgazobil, sur la Petite Côte, par MonseigneurKobès, en 1850. Douze ans plus tard, il comprenaitun séminaire, un orphelinat et une école-orphelinat,où étaient formés des artisans. De là, des missionscatholiques essaimèrent à l'intérieur du pays: lamission de Thiès fut créée en 1886, des jalons fu­rent posés dans les pays serer et diola entre lesdeux guerres mondiales.

A Saint-Louis des coutumes s'étaient grefféessur la religion chrétienne. Noël était la "fête dufanal" : les habitants se rendaient à la messe de mi­nuit accompagnés de porteurs de lanternes. Ceslanternes s'embellirent et devinrent des maquettesreprésentant un voilier, un bâtiment, etc. En 1938,cette coutume était tombée en désuétude et avaitcédé le pas à un carnaval.

Le catholicisme s'est implanté en ville et dansdes sociétés paysannes très attachées à leurs cultesagraires, où l'islam avait, à l'époque, peu d'emprise(Serer, Diola). Même dans ces sociétés, les catholi­ques restent une minorité. Les protestants, encoremoins nombreux, se trouvent dans les villes et dansle sud du pays.

De nos jours, le Sénégal est divisé en cinq dio­cèses et une Préfecture Apostolique. Un séminaire

est établi à Sébikotane. Les chrétiens forment envi­ron 5% de la population. L'adhésion au christia­nisme est assez souvent liée à une volonté indivi­duelle d'insertion dans le monde moderne, dans lemilieu urbain, elle demande un effort d'alphabéti­sation.

Des recherches originales sont entreprises. Dansle domaine de la théologie, les œuvres du R.P. Gra­vrand témoignent de la quête d'une symboliquecommune aux cultes agraires des sociétés sénéga­laises, en particulier des Serer, et aux religionschrétiennes: croyance en un Etre suprême, en desesprits intermédiaires, à une âme incorporée, àun passage dans l'au-delà, ce qui jette des passe­relles entre les deux voies. La Fraternité Saint­Dominique, à Dakar, a depuis longtemps entaméun dialogue avec des représentants de l'islam. Al'abbaye bénédictine de Keur Moussa, les officessont chantés en làngue wolof, avec accompagne­ment de kora.

Des religieuses, en ville et en milieu rural, four­nissent des soins de santé primaire, donnent descours d'alphabétisation, s'occupent du sevrage desnourrissons.

Les sociétés sénégalaises font preuve de tolé­rance à l'égard des religions: les femmes peuventêtre chrétiennes tout en participant aux cultesagraires; au sein d'une famille, les appartenancesreligieuses sont multiples. Mais cette tolérance n'apas débouché sur un syncrétisme et la naissance de"sectes" comme en d'autres pays d'Mrique. L'im­portance relative du catholicisme y est sans doutepour beaucoup.

L'ISLAM

La religion musulmane a pénétré au sud du Sa­hara, et notamment au Sénégal, depuis de nom­breux siècles. Dès le XIe siècle, sa présence est affir­mée dans le royaume de Tekrur, dans l'actuel Futa­Toro (nord du pays). Mais pendant longtemps,l'islam fut surtout la religion des princes, pour les­quels il constituait, avec son armature législative etbureaucratique, un instrument de gouvernement. TIfaudra attendre le XVIIIe et le xrxe siècle pour que

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l'on assiste au Sénégal à des conversions et mobili­sations de masse en faveur de l'islam. Celles-ci fu­rent le plus souvent liées au développement decontestation de l'ordre établi et de résistance à la co­lonisation. Ainsi, au Futa-Toro, à la fin du XVIIIesiècle, une révolution de "pieux musulmans" mit finau régime jugé oppresseur des Peul denyanke.Quelques dizaines d'années plus tard, dans lamême région, un autre mouvement politico-reli­gieux émergea autour de El Hadj Omar Tall qui,pour échapper à la colonisation française, organisaune véritable migration de ses compatriotes vers leMali actuel où il jeta les bases d'un des derniersgrands royaumes africains.

En pays wolof, au cours de la même période, l'in­fluence populaire de l'islam crut de façon spectacu­laire. Ce furent en effet autour des marabouts quetendaient à se regrouper tous ceux qui voulaientéchapper aux méfaits des aristocraties dirigeantespuis du colonisateur. L'islam, avec ses maraboutscharismatiques et ses confréries, devint une struc­ture marquant l'initiative et l'autonomie des socié­tés africaines devant le pouvoir étranger. Le succèsde Cheikh Amadu Bamba (1853-1927), véritablehéros national sénégalais et fondateur de la puis­sante confrérie des Mourides est significatif decette situation; à tel point que l'administration fran­çaise l'exila à deux reprises, cherchant par là, sansy réussir, à stopper l'extension du mouvement.

Aujourd'hui, l'islam représente la religion d'envi­ron 85% des Sénégalais qui se répartissent entreplusieurs confréries soufies.

La Qadiriyya est l'ancêtre de ces confréries. Elleparvint au Sénégal à partir de Tombuctu et de laMauritanie. Mais son influence est sur le déclindepuis fort longtemps. A l'heure actuelle, les fidè­les sénégalais de la Qadiriyya sont partagés entreplusieurs centres ayant à leur tête des dynastiesmaraboutiques distinctes. N'Diassane (près de Ti­vaouane) fait figure de capitale sénégalaise de cetteconfrérie, mais de nombreux adeptes de la Qadi­riyya font aussi allégeance aux marabouts de Nim­jatt en Mauritanie.

Le dépérissement de la Qadiriyya a profité à laTijaniyya et à la Muridiyya. La première de cesconfréries, née dans le Sud algérien à la fin duXVIIIe siècle, fut d'abord introduite au Futa-Toro,grâce notamment à l'action de EI,Hadj Omar. Plustard, elle se développa sous la houlette de mara­bouts comme El Hadj Malik Sy. La Tijaniyya sem­ble être la confrérie la plus importante du pays de

par le nombre de ses adeptes; mais elle est diviséeen plusieurs branches (celle de la famille Sy de Ti­vaouane, celle des Niasse de Kaolack, celle des des­cendants de El Hadj Omar, notamment).

La confrérie mouride de son côté, est la plus ré­cente et la plus unie des confréries du Sénégal. C'estaussi la seule qui soit authentiquement nationale.Elle a connu un développement considérable de­puis la colonisation et ne cesse de faire des adeptes.Signalons aussi l'existence dans la presqu'île duCap Vert d'une petite confrérie locale, la confrérielayenne, fondée à la fin du siècle dernier.

La structure de ces confréries repose sur les lienspersonnels entre le marabout (serigne) et sesadeptes (talibés). Ceux-ci doivent faire acte d'obéis­sance et d'allégeance envers leur chef religieux qui,en contrepartie, s'engage à protéger et à aider sesdisciples, ainsi qu'à les instruire. Cette organisationa donné naissance à des communautés fortementintégrées et fort dynamiques dans le domaine éco­nomique. Ce sont en effet ces communautés mara­boutiques qui ont été le fer de lance de la culture del'arachide. Plus récemment, ces réseaux confréri­ques ont aussi fonctionné en milieu urbain commedes entreprises commerciales, permettant l'éclosiond'une véritable classe d'hommes d'affaires, princi­palement, mais pas uniquement, chez les Mourides.

On comprend aussi, dans ces conditions, que lesconfréries jouent un rôle politique déterminant. Legouvernement doit compter avec leur poids socialet économique, d'autant que le renouveau del'islam, au Sénégal comme ailleurs, leur donne unevigueur nouvelle. Cependant pour l'instant, les ma­rabouts dans leur immense majorité, ne s'érigentpas en leaders de la contestation. Leurs intérêtssont trop liés à ceux de l'Etat pour qu'ils se lancentdans une opération de croisade. Mais ils profitentde l'engouement que rencontre l'islam dans dessecteurs de plus en plus larges de la population (ycompris dans la jeunesse) pour renégocier en destermes plus avantageux leurs relations avec l'Etat.Par contre, d'autres courants islamiques nouveauxont une démarche plus radicale, critiquant la laïcitéet s'en prenant à l'héritage occidental. Il demeuretoutefois que ce militantisme islamique, qui s'ex­prime notamment dans des revues comme Djamraou Wal Fadjiri, est pour l'instant marginal.

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TABLE DES MATIERES

Pages

Carte du Sénégal

Introduction

I-LANATURE

La terre et les saisonsFleuves et rivièresLe couvert végétalLe baobab, arbre symbolePlaidoyer pour les Parcs NationauxLe Niokolo KobaLa Basse CasamanceLa protection des oiseauxLe petit monde des arthropodes

II -LE PAYS

Philippe Oberlé

Philippe OberléPhilippe OberléPhilippe OberléPhilippe OberléPhilippe OberléPhilippe OberléPhilippe OberléPhilippe OberléMichel Boulard

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7

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Le peuple sénégalaisL'époque précolonialeLa période colonialeLéopold Sedar Senghor, père de l'indépendanceAbdou Diouf et la démocratie sénégalaiseL'Etat et les institutionsDakar, porte océaneGûrée, l'île assoupieLes villes de l'intérieurSaint-Louis, fille du fleuveZiguinchor, fille de la forêtTourisme: invitation au voyageAgriculture: de l'arachide aux cultures vivrièresElevage: la tradition des pasteurs peulPêche: des piroguiers à la pêche industrielleLa cueillette des huîtresMines et industriesEquipement, transport et énergieEducation: une prioritéRecherche scientifique"La santé pour tous"L'information: une heureuse pluralité

Jean-Marc Gastellu 25Jean-Marc Gastellu 25Jean-Marc Gastellu 26Christian Coulon 27Christ.ian Coulon 28Christian Coulon 30Philippe Oberlé 39Gérard Salem 42Philippe Oberlé 43Philippe Oberlé 43Marie-Christine Cormier Salem 44Philippe Oberlé 45Philippe Bonnefond 46Philippe Bonnefond 48Philippe Bonnefond 49Marie-Christine Cormier Salem 52Philippe Bonnefond 52Philippe Bonnefond 54Philippe Bonnefond 64Jacques Gaillard 65Philippe Bonnefond 65Philippe Bonnefond 66

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III - LES HOMMES

Données démographiquesL'identité culturelle sénégalaiseLa femme sénégalaiseLa jeunesseLa vie ruraleL'habitat ruralLa vie quotidienne à DakarLes petits métiersMarchés et marchandsPoulet citronJeux et sportsLa lutte sénégalaiseL'art ancienRichesses de l'artisanatPeinture et "fixés"

Littérature, théâtre, cinémaMusiquesFêtes populairesLa tradition: un ciment nécessaireLe christianismeL'islam

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Philippe Oberlé 67Jean Copans 67Jean Copans 68Jean Copans 69Jean Copans 70Jean Copans 71Gérard Salem 72Abdou Sylla 72Jean Copans 73Michèle Copans 74Mariétou Diongue Diop 75Gérard Salem 76Abdou Sylla 76Abdou Sylla 78Youssouph Mbargane Guissé 89(enseignes peintes Abdou Sylla)Jean Copans 90Jean Copans 91Mariétou Diongue Diop 92Youssouph Mbargane Guissé 93Jean-Marc Gastellu 94Christian Coulon 94

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Achevé d'imprimer sur les presses dela S.A.E.P. Ingersheim 68000 Colmar - France

le 22 août 1989Dépôt légal: 3e trimestre 1989

n° 1649ISBN 2-7372-567

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