rapport d'activité 2016 du conseil constitutionnel · aux autres juridictions, aux...

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c CONSEIL CONSTITUTIONNEL RAPPORT D’ACTIVITÉ 2016 c

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CONSEILCONSTITUTIONNEL

—RAPPORT

D’ACTIVITÉ2016

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CC_Couv_Mise en page 1 21/09/2016 12:50 Page3

CONSEIL CONSTITUTIONNEL

Conseil constitutionnel 2, rue de Montpensier 75001 Paris

www.conseil-constitutionnel.fr

CC_Couv_Mise en page 1 21/09/2016 12:50 Page4

CONSEILCONSTITUTIONNEL

—RAPPORT

D’ACTIVITÉ2016

sommaire

4 AVANT-PROPOS—

Par Laurent Fabius, président du Conseil constitutionnel

Les membres

Qu’est-ce quele Conseilconstitutionnel ?

Lesdécisions2015-2016

Action internationaleet événements

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4 AVANT-PROPOS—

e Conseil constitutionnel est à lafois célèbre et méconnu. Communément désignécomme un collège de « Sages », cité à l’occasion deses décisions les plus marquantes, son rôle et sonactivité ne sont en réalité guère connus, reconnais-sons-le, de beaucoup de nos conci-toyens. Dans une démocratiemoderne, cette situation n’est passatisfaisante. Les pouvoirs impor-tants confiés au Conseil constitu-tionnel – au premier rang desquelscelui, considérable, d’annuler la loivotée par le Parlement – impliquent non seulementque le Conseil agisse avec justesse, sagesse et célérité,mais aussi qu’il fasse mieux connaître son action.Les citoyens souhaitent aujourd’hui être bien infor-més sur les institutions qui influent sur leur vie, et ilsont raison.

C’est pourquoi j’ai souhaité, dès ma prise de fonc-tions en mars 2016, que le travail d’information etde pédagogie concernant le Conseil soit renforcé.Jusqu’ici, le Conseil constitutionnel ne disposaitpas d’un rapport annuel. C’est désormais chosefaite : tous les 4 octobre, jour anniversaire de laConstitution de la Ve République, nous rendronspublic un bilan retraçant les temps forts de notreactivité au cours de l’année écoulée.

Le rapport 2016, disponible en accès libre sur notresite internet, présente d’une manière synthétiqueet pédagogique nos principales décisionsd’août 2015 à août 2016. Parmi les 125 décisionsdiverses rendues au cours de cette période, nousavons retenu celles qui nous ont semblé les plussignificatives par leur portée jurisprudentielle etpar leur importance dans le débat politique, éco-nomique et social. Cette sélection illustre la grandediversité des thèmes traités par le Conseil consti-tutionnel – depuis l’équilibre entre la sécurité etles libertés dans le cadre de la lutte contre le terro-risme jusqu’à des questions concernant l’économie,la fiscalité, la justice, les prisons ou encore le droitde l’environnement, du travail et de la santé. Au-delà de cette présentation de nos principales déci-sions de l’année, il nous a paru utile que le rapport2016 comporte, parce qu’il est le premier du genre,un éclairage sur ce qu’est le Conseil constitutionnel.C’est l’objet du début du rapport, qui présente leparcours des membres actuels du Conseil, puisexpose les grandes lignes de son évolution histo-rique depuis 1958 – notamment sa « juridiction-nalisation » de plus en plus affirmée – ainsi queses compétences. Cette partie permettra à celles et

ceux qui sont les moins familiersde notre juridiction de mieux com-prendre son histoire, ses missionset son rôle.

Notre activité n’étant pas exclusi-vement juridictionnelle, nous avons

voulu donner aussi un aperçu des autres facettesdu Conseil. D’où une présentation de notre actioninternationale, qui sera renforcée dans les annéesqui viennent afin d’approfondir l’indispensabledialogue des juges, notamment au plan européenet dans l’espace francophone. D’où aussi une évo-cation des événements variés que nous accueillonsau fil de l’année dans nos locaux du Palais-Royal –je pense par exemple au salon du livre juridique,au concours « Georges Vedel » de plaidoiries rela-tives à des questions prioritaires de constitution-nalité (QPC) ou encore au prix de thèse du Conseilconstitutionnel. Le rapport mentionne enfinquelques jalons de notre activité en 2017 – annéeélectorale, ce qui aura une forte incidence sur nostravaux puisque le Conseil est chargé d’assurer le

LLAURENT FABIUSprésident du Conseil

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bon déroulement de l’élection du Président de laRépublique et est juge des élections présidentielles,législatives et sénatoriales.

Un dernier mot. Le Conseil constitutionnel est uneinstitution modeste par sa taille – il compte moinsde soixante-dix personnes –, mais grande par ses responsabilités comme par ses pouvoirs. Aumoment où l’on parle de désarroi démocratique,je considère que notre pays a besoin d’institutionsfortes et incontestées, d’institutions-repères verslesquelles nos concitoyens puissent se tourner eten lesquelles ils puissent avoir pleine confiance. LeConseil constitutionnel peut et doit être une insti-tution-repère. Ce statut conduit notamment la juri-diction que je préside à être pleinement ouvertesur l’extérieur, aussi bien en France qu’à l’étranger,et à s’adresser à tous – non seulement, bien sûr,aux autres juridictions, aux professeurs, aux étu-diants, aux journalistes, mais aussi aux citoyensdans leur ensemble. Une obligation de réserve nousincombe, mais la réserve n’est pas l’effacement. Enraison de sa place éminente dans notre République,le Conseil constitutionnel doit mieux faire connaîtreson rôle et son activité : c’est une exigence démo-cratique. L’objectif de ce rapport annuel est d’ycontribuer.

« Les citoyenssouhaitent aujourd’hui être

bien informés sur lesinstitutions qui influent

sur leur vie, etils ont raison. »

Lesmembres

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En vertu de l’article 56 de laConstitution, le Conseilconstitutionnel comprendneuf membres, dont lemandat dure neuf ans etn’est pas renouvelable, ce quiconstitue une garantied’indépendance. Lesmembres sont nommés parles plus hautes autorités del’État : trois le sont par lePrésident de la République,trois par le président del’Assemblée nationale, troispar le président du Sénat. LeConseil est renouvelé partiers tous les trois ans. Letexte constitutionnel prévoitaussi que les anciensPrésidents de la Républiquefont de droit partie à vie duConseil constitutionnel.

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MODE DE DÉSIGNATION—

Trois membres sont nom-més par décision du Pré-sident de la République,lequel désigne aussi le pré-

sident du Conseil. Trois membressont nommés par le président de l'As-semblée nationale et trois autres parle président du Sénat.

Peuvent faire l'objet d'une nominationau Conseil constitutionnel tous lescitoyens jouissant de leurs droitsciviques et politiques. En pratique, ilest fait appel à des personnalités dontla compétence est reconnue, notam-ment en matière juridique et politique,dont la nomination doit être approuvéepar le Parlement.

Depuis la loi constitutionnelle du 23juillet 2008, la procédure prévue audernier alinéa de l'article 13 de laConstitution est applicable à ces nomi-

nations. Ainsi, les nominations effec-tuées par le Président de la Républiquesont soumises à l'avis de la commissionpermanente compétente de chaqueassemblée. Les nominations effectuéespar le président de chaque assembléesont soumises au seul avis de la com-mission permanente compétente del'assemblée concernée.

En cas de décès ou de démission, l'au-torité de nomination désigne un nou-veau conseiller pour la durée du man-dat restant à courir. Toutefois, unepersonne nommée en remplacementd'un conseiller décédé ou démission-naire dont le mandat devait expireravant trois ans, peut être nommée ànouveau pour neuf ans.

En outre, sont membres de droit àvie du Conseil constitutionnel lesanciens Présidents de la République.

Parmi les anciensPrésidents de laRépublique, seul ValéryGiscard d'Estaing siègeactuellement au Conseilconstitutionnel. Jacques Chirac et NicolasSarkozy ont décidé decesser de participer auxtravaux du Conseil depuisrespectivement mars 2011et janvier 2013.

Valéry GISCARDD’ESTAING Président de la Républiquede 1974 à 1981. Il estmembre de l’Académiefrançaise depuis 2003.

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Membres de droit

—Né en 1946 à Paris, Laurent Fabius est ancien élève de l’École normale supérieure de la rued’Ulm, agrégé de lettres modernes et ancien élève de l’ENA (promotion « François Rabelais »).

Laurent Fabius a débuté sa carrière par l’exercice de fonctions juridictionnelles au Conseild’État. Élu député de Seine-Maritime en 1978 – et réélu à chaque élection jusqu’en 2012 –, ilassume des responsabilités gouvernementales au début du premier septennat de François Mit-terrand, d’abord comme ministre délégué chargé du Budget de 1981 à 1983, puis commeministre de l’Industrie et de la Recherche de 1983 à 1984. Il est ensuite nommé Premier ministre,à 37 ans, fonction qu’il a occupée de 1984 à 1986.

À deux reprises, Laurent Fabius a présidé l’Assemblée nationale : de 1988 à 1992, puis de 1997à 2000. Il a été ministre de l’Économie, des Finances et de l’Industrie de 2000 à 2002, et ministredes Affaires étrangères et du Développement international de 2012 à 2016. En 2015, il a présidéla Conférence de Paris pour le climat, la COP 21, qui a abouti au premier accord universel delutte contre le changement climatique.

Laurent Fabius a également exercé de nombreuses responsabilités au plan local, notammentcomme maire de Grand-Quevilly et comme président de la Communauté d’agglomération deRouen.

Nommé président du Conseilconstitutionnel le 19 février2016 par le Président de laRépublique.

A prêté serment le 8 mars 2016 devant lePrésident de la République.

LAURENT FABIUSPrésident

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LES MEMBRES—

Diplômée de l'Institut d'études politiques de Paris, Claire BazyMalaurie est titulaire d’une maîtrise en droit et d’une licence derusse. Elle est ancienne élève de l’ENA.

Elle a débuté sa carrière au ministère des Finances, à la directiondes relations économiques extérieures (DREE) puis a intégré laCour des comptes à la sortie de l’ENA. Claire Bazy Malaurie aété directeur à la Délégation à l’aménagement du territoire et àl’action régionale (DATAR), directeur des affaires financières auministère de l’Équipement, directeur des hôpitaux au ministèredes Affaires sociales. Plusieurs missions lui ont en outre étéconfiées dans le domaine de la gestion publique et de l’enseigne-ment supérieur. Elle a été rapporteur adjoint au Conseil consti-tutionnel. Claire Bazy Malaurie a été nommée présidente dechambre à la Cour des comptes en 2006.

Nommée le 31 août 2010 etrenommée le 12 février 2013 parle président de l'Assembléenationale. A prêté serment le 7 septembre2010 et le 14 mars 2013 devantle Président de la République.

CLAIREBAZY MALAURIE

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Après un diplôme d'études approfondies de droit public et enhistoire du droit, Nicole Belloubet soutient une thèse d’État endroit public suivie d’une agrégation. Elle débute sa carrière d’en-seignante à l’université Paris 1, puis à Évry-Val d’Essonne. De1997 à 2002, Nicole Belloubet est nommée rectrice d’académieet chancelière de l’université, d’abord à Limoges, puis à Toulouse.Elle enseigne à nouveau par la suite à l’université d’Évry, puis àl’Institut d’études politiques de Toulouse. Nicole Belloubet a également été chargée de différents rapports pour les ministresde l’Éducation nationale, sur l’avenir du lycée et des filières géné-rales au baccalauréat, les violences sexuelles à l’école et sur laréussite éducative.

Nicole Belloubet est élue en tant que première adjointe à la mairiede Toulouse chargée de la culture de 2008 à 2010 puis premièrevice-présidente de la région Midi-Pyrénées en charge de l’éduca-tion, de l'enseignement supérieur et de la recherche de 2010 à2013.

Nommée le 12 février 2013 parle président du Sénat.A prêté serment le 14 mars 2013devant le Président de laRépublique.

NICOLEBELLOUBET

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Michel Charasse est diplômé de l’Institut d’études politiques deParis. Plusieurs fois élu du Puy-de-Dôme depuis 1977 – maire dePuy-Guillaume, conseiller régional et général, sénateur –, il aoccupé différents postes de fonctionnaire au sein du ministèrede l’Économie et des Finances et de ses opérateurs, au début desa carrière.

Conseiller auprès du secrétaire général de la présidence de laRépublique, puis conseiller auprès du Président de la République(1981-1995), Michel Charasse a exercé les fonctions de ministreen charge du Budget, d’abord comme ministre délégué auprèsdes ministres de l’Économie, puis comme ministre de plein exer-cice. Il a également été vice-président et trésorier de l’Associationdes maires de France, membre fondateur et vice-président del’Institut François Mitterrand. Michel Charasse a par ailleurssiégé au conseil d’administration de l’Agence française de déve-loppement et au Haut Conseil de la coopération internationale.De 2001 à 2004, il fut questeur du Sénat et de 2004 à 2008 jugesuppléant à la Haute Cour de justice.

Nommé le 25 février 2010 parle Président de la République.A prêté serment le 12 mars 2010devant le Président de laRépublique.

MICHELCHARASSE

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Jean-Jacques Hyest est diplômé d'études supérieures de droitpublic. Administrateur territorial, il débute sa carrière commedirecteur des services du département de Seine-et-Marne, puiscomme directeur de la protection civile de Seine-et-Marne. Éluen 1982 conseiller général de Seine-et-Marne (vice-président puisprésident en 2004), maire de la Madeleine-sur-Loing de 1983 à2015, député de 1986 à 1995 (3e circonscription de Seine-et-Marne) puis sénateur de Seine-et-Marne. Jean-Jacques Hyest aégalement été juge titulaire à la Haute Cour de justice et à laCour de justice de la République.

Il a présidé la commission des lois constitutionnelles, de la légis-lation, du suffrage universel, du règlement et de l'administrationgénérale du Sénat de 2004 à 2011.

Nommé le 1er octobre 2015 parle président du Sénat.A prêté serment devant lePrésident de la République le 12 octobre 2015.

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LES MEMBRES—

Lionel Jospin est diplômé de l’Institut d’études politiques de Pariset ancien élève de l'ENA. Il débute sa carrière au ministère desAffaires étrangères. Il devient ensuite professeur d’économie etdirecteur de département à l’Institut universitaire de technologiede l’université Paris XI à Sceaux.

Élu conseiller de Paris de 1977 à 1986, Lionel Jospin est éludéputé de Paris de 1981 à 1986. Il est ensuite élu député deHaute-Garonne. Lionel Jospin est également premier secrétairedu Parti socialiste de 1981 à 1988.

Lionel Jospin est ministre de l’Éducation nationale de 1988à 1992. Il est Premier ministre de 1997 à 2002. En 2012,Lionel Jospin préside la commission de rénovation et dedéontologie de la vie publique.

Nommé le 18 décembre 2014par le président de l'Assembléenationale.A prêté serment le 6 janvier2015 devant le Président de laRépublique.

LIONELJOSPIN

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Diplômée de l'Institut d'études politiques de Paris et d’étudessupérieures de droit public, Corinne Luquiens a mené toute sacarrière professionnelle dans les services de l’Assemblée nationale.Administratrice puis conseillère, elle devient ensuite directrice,tout d’abord du service des relations internationales à partir de2002, puis directrice de la séance à partir de 2004.

Elle est nommée directrice générale des services législatifs en2009. En 2010, Corinne Luquiens est nommée secrétaire généralede l'Assemblée nationale et de la présidence.

—Nommée le 18 février 2016 parle président de l'Assembléenationale.A prêté serment le 8 mars 2016devant le Président de laRépublique.

CORINNELUQUIENS

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Titulaire du CAPA et d’un diplôme d'études supérieures de droitprivé, Nicole Maestracci a débuté sa carrière comme avocateavant d’entrer en 1977 à l’École nationale de la magistrature.

Elle a exercé différentes fonctions de magistrat du siège en pre-mière instance et en appel avant d’être nommée présidente dutribunal de grande instance de Melun (2003-2010) puis premièreprésidente de la cour d’appel de Rouen (2010-2013). Elle aoccupé plusieurs postes de responsabilité au ministère de laJustice et au ministère de l’Équipement (1984-1992). Elle a étéprésidente de la mission interministérielle de lutte contre lesdrogues et la toxicomanie (1998-2002). Parallèlement, elle a pré-sidé la Fédération nationale des associations d'accueil et de réin-sertion sociale (FNARS) de 2004 à 2012. Elle a également présidéou participé à plusieurs instances dans le champ des politiquespénales et pénitentiaires, de la santé, de l’insertion sociale, del’exclusion et de la jeunesse.

Nommée le 12 février 2013 parle Président de la République. A prêté serment le 14 mars 2013devant le Président de laRépublique.

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Titulaire d’une licence en droit et diplômé de l'École des hautesétudes commerciales (HEC), Michel Pinault est également ancienélève de l'ENA. Il débute sa carrière au Conseil d’État, avant deprendre des responsabilités au sein d’un grand groupe françaisd’assurances pendant une quinzaine d’années.

De 2008 à 2012, il préside la section de l’administration auConseil d’État. À partir de 2011, Michel Pinault est égalementmembre de la commission des sanctions de l’Autorité des marchésfinanciers, commission qu’il préside à compter de 2014.

—Nommé le 19 février 2016 parle président du Sénat.A prêté serment le 8 mars 2016devant le Président de laRépublique.

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Qu’est-ce quele Conseilconstitutionnel ?

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Conçu par les rédacteurs de la Constitution de 1958comme un simple organerégulateur des pouvoirspublics, le Conseilconstitutionnel s’estprogressivement transforméen une véritable Courconstitutionnelle, chargée de contrôler la conformitédes lois non seulement autexte de la Constitution mais aux principes contenusdans le « bloc deconstitutionnalité » :Déclaration des droits del’homme et du citoyen de1789, Préambule de laConstitution de 1946, Chartede l’environnement de 2004.La réforme de la QPC,introduite dans laConstitution en 2008 etentrée en vigueur en 2010, a accéléré ce mouvement de« juridictionnalisation ».

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- 1 -UN STATUT POUR ASSURER

L’INDÉPENDANCE

La Constitution prévoit depuis 1958 une incom-patibilité entre les fonctions de membres du Conseilconstitutionnel et celles de ministre ou de parle-mentaire (national ou européen). Ce régime estcomplété par les lois de 1995 (interdiction de toutmandat électoral) et surtout de 2013 : pour tirerles conséquences de l’entrée en vigueur de la ques-tion prioritaire de constitutionnalité (QPC), l’in-compatibilité s’étend à toute fonction publique outoute autre activité professionnelle, en particulierla profession d’avocat.

Le mandat de membre dure neuf ans et n’est pasrenouvelable afin d’assurer l’indépendance des mem-bres. Toutefois, un membre nommé en remplacementd’un membre démissionnaire ou décédé pour moinsde trois ans peut être renommé pour un nouveaumandat complet.

Enfin, les membres du Conseil constitutionnel sont soumis à une stricte obligation de réserve. Ilsn’entrent en fonction qu’après avoir prêté sermentdevant le Président de la République de notammentexercer leur fonction « en toute impartialité » et « de garder le secret des délibérations et des votes ».

- 2 -UNE COLLÉGIALITÉ ESSENTIELLE

Le Conseil constitutionnel est une institution collé-giale : ses décisions ne sont rendues qu’en formationplénière. Les membres se réunissent sur convocationdu président du Conseil constitutionnel chaque foisque nécessaire : il n’existe pas de session du Conseilconstitutionnel. Il faut qu’au moins sept membressoient présents pour rendre une décision. Mais ce quo-rum peut être abaissé en cas de force majeure. Le pré-sident confie l’instruction à un membre rapporteurqui propose une solution au collège. En cas de partagedes voix, le président a voix prépondérante.

Une fois la décision rendue, il n’existe pas de possibilitéd’exprimer publiquement une différence d’appréciationpar rapport au raisonnement ou au sens d’une décision.Contrairement à d’autres Cours, les opinions « dissi-dentes » ou « séparées » n’existent pas.

- 3 -DES DÉCISIONS QUI S’IMPOSENT

À TOUTES LES AUTORITÉS

Dès 1958, la Constitution précise dans son article 62 :« Les décisions du Conseil constitutionnel ne sont sus-ceptibles d’aucun recours. Elles s’imposent aux pou-voirs publics et à toutes les autorités administratives etjuridictionnelles » ; ceci afin de garantir le rôle de régu-lateur des pouvoirs publics, en particulier de gardiende la répartition des compétences entre le Parlementet le Gouvernement. Le Conseil précisera assez viteque l’autorité qui s’attache à ses décisions ne concernepas seulement le sens de la décision mais également leraisonnement et la motivation qui « en sont le soutiennécessaire et en constituent le fondement même » (décision 62-18 L du 16 janvier 1962).

En matière de contrôle de constitutionnalité deslois, le Conseil constitutionnel va développer unetechnique lui permettant de dépasser l’alternativeentre validation et censure d’une disposition légis-lative : la réserve d’interprétation. Cette méthodeutilisée dès 1959 consiste à déclarer qu’une dispo-sition législative est conforme à la Constitutionsous réserve d’être interprétée dans le sens que leConseil lui donne.

Le Conseil constitutionnelrend ses décisions dans desdélais très brefs :  trois moisen QPC, un mois en contrôlea priori, et même huit joursquand le gouvernementdéclare l’urgence.

STATUT ET FONCTIONNEMENT — 17

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DATES CLÉS—

À ses débuts, le Conseil constitutionnel est avant tout l’arbitre de la répartitiondes pouvoirs des acteurs constitutionnels, au premier rang desquels leParlement et le Gouvernement. Puis son rôle en matière de contrôle deconstitutionnalité des lois va considérablement se développer pour devenircelui de gardien du respect par le législateur des droits fondamentaux en troisétapes fondatrices : jurisprudentielle (décision du Conseil de 1971) etinstitutionnelles (révisions constitutionnelles de 1974 et 2008).

Préambule de la Constitutiondu 27 octobre 1946 (extrait) : « Au lendemain de la victoireremportée par les peuples libressur les régimes qui ont tentéd'asservir et de dégrader lapersonne humaine, le peuplefrançais proclame à nouveauque tout être humain, sansdistinction de race, de religion ni de croyance, possède desdroits inaliénables et sacrés.

Il réaffirme solennellement lesdroits et libertés de l'homme et du citoyen consacrés par laDéclaration des droits de 1789 et les principes fondamentauxreconnus par les lois de laRépublique (…). »

Préambule de la Constitutiondu 4 octobre 1958 (extrait) : « Le peuple français proclamesolennellement son attachement

aux Droits de l'homme et auxprincipes de la souveraineténationale tels qu'ils ont étédéfinis par la Déclaration de 1789, confirmée et complétéepar le Préambule de laConstitution de 1946, ainsi qu’auxdroits et devoirs définis dans la Charte de l’environnement de 2004 (…). »

Une innovationinstitutionnellemajeure. Présentant leprojet de Constitution devantle Conseil d’État le 27 août1958, le garde des sceaux Michel Debréindique que « la création du Conseilconstitutionnel manifeste la volonté desubordonner la loi, c'est-à-dire la volontédu Parlement, à la règle supérieure édictéepar la Constitution.» Le projet constitutionnel met en place ce que l’on appelle alors le « parlementarisme rationalisé » enorganisant la répartition des compétencesentre le pouvoir législatif (le Parlement) et le pouvoir exécutif (le Gouvernement).Selon les mots du garde des sceaux, leConseil constitutionnel, « institutionparticulière », sera « une arme » contre la « déviation du régime parlementaire »dénoncée comme la faiblesse desprécédents régimes.Le 28 septembre 1958, le peuple françaisapprouve massivement par référendum lanouvelle Constitution qui est promulguéele 4 octobre.

Une garantie pour nos droitset libertés fondamentaux.Le Conseil constitutionnel donne unenouvelle dimension à son contrôle enconsidérant que les lois doivent êtreconformes non seulement aux articlesde la Constitution mais également àson Préambule. Or ce court texte renvoie à laDéclaration des droits de l’homme et ducitoyen de 1789 et au Préambule de laConstitution de la IVe République de1946. Le Conseil leur confère ainsi uneportée juridique. Il contrôlera désormais

les lois au regard de ces textescomportant les « droits etlibertés de l’homme et ducitoyen consacrés par lesprincipes fondamentauxreconnus par les lois de la

République » et un certainnombre de « principes politiques,

économiques et sociaux » qualifiés de « particulièrement nécessaires à notretemps. » cf ci-dessous.

4octobre

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Un outil pourl’oppositionparlementaire. Larévision constitutionnelle du 29 octobre 1974 ouvre à 60députés ou 60 sénateurs le droit desaisir le Conseil constitutionnel jusqu’alors réservéaux Président de la République, Premier ministre etprésidents des assemblées parlementaires. Cetteréforme permet ainsi à l’opposition parlementairede déférer une loi au Conseil constitutionnel. Lenombre de saisines, donc de décisions du Conseil,va croître pour atteindre une moyenne de vingt paran alors que ce nombre n’atteignait pas même cinqauparavant. En 1992, cette réforme est étendue aucontrôle de la constitutionnalité des engagementsinternationaux que la France souhaite ratifier.Cependant, le contrôle reste incomplet. Toutes leslois ne sont pas déférées au Conseil constitutionnelcar la saisine demeure un acte politique dans leprolongement du débat parlementaire. Par ailleurs,des dispositions législatives de lois plus anciennespouvant porter atteinte aux droits et libertés descitoyens n’ont jamais été contrôlées par le Conseilconstitutionnel.

30 ans et des nouvellesambitions. L’année 1989 est celled’un double anniversaire : les trenteans du Conseil constitutionnel et lebicentenaire de la Révolution.

Saisissant cette double occasionsymbolique, Robert Badinter, alors

président du Conseil constitutionnel, lancepubliquement une idée novatrice : permettre àtout citoyen de contester, dans le cadre d’unprocès, la constitutionnalité d’une loi dont leConseil n’a pas été saisi. Mais le projet seheurte à deux reprises à l’opposition du Sénaten 1990 et 1993.

Un élargissement de la saisine aux citoyens. Laréforme de 2008 instaurant la question prioritaire de constitutionnalité(QPC) entre en vigueur le 1er mars 2010. Le Conseil n’est plus seulementsaisi par des autorités politiques d’une loi non encore promulguée, mais pardes citoyens auxquels cette loi est appliquée et qui soulèvent une QPC lors d’unprocès. C’est une nouvelle étape de la juridictionnalisation du Conseil constitutionnel : si la procéduredemeure principalement écrite, le caractère contradictoire se renforce en incluant notamment l’oralitéà travers une audience publique ; le Conseil constitutionnel se dote d’un règlement de procédurespécifique qui organise par exemple le déport et la récusation de membres du Conseil.

1959 : le décret du 13 novembreprévoit qu’un compte rendu destravaux est établi par le Secrétairegénéral. La loi du 15 juillet 2008ouvre ces archives à la consultationaprès un délai de 25 ans.

1983 : le Conseil fait paraître auJournal officiel le texte des saisinespuis des observations duGouvernement (1995), en plus desdécisions publiées depuis l’origine.

1997 : ouverture d'un des premierssites internet institutionnels.Chaque décision est publiée le jourmême de son prononcéaccompagnée d’un dossier(communiqué de presse ...). Lors de l’introduction de la QPC,les vidéos des audiences sontpubliées sur le site : www.conseil-constitutionnel.fr

2016 : le mode de rédaction desdécisions est modifié poursimplifier la lecture et approfondirla motivation. Le Conseil rendaccessibles sur son site les comptesrendus des délibérations de plus de25 ans.

La transparence,exigencedémocratique

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COMPÉTENCES—

Depuis sa création en 1958,le Conseil constitutionnelcontrôle la conformité à laConstitution des lois votéespar le Parlement avant leurpromulgation par lePrésident de la République.Ces décisions sont intituléesDC pour « décision deconformité ». Le contrôleest dit « a priori »puisqu’intervenant avantl’entrée en vigueur de la loi.

- 1 -LES MODALITÉS DU CONTRÔLE

Le Conseil constitutionnel ne peut exercer soncontrôle que lorsqu’il est saisi. La plupart des sai-sines sont le fait de l’opposition parlementaire. LePrésident de la République n’a saisi qu’une seulefois le Conseil constitutionnel d’une loi ordinaire(décision n° 2015-713 DC du 23 juillet 2015, loirelative au renseignement). Les citoyens et autresautorités privées ou publiques ne peuvent saisir leConseil constitutionnel ni intervenir devant lui.

La saisine est introduite par une lettre adresséeau Conseil constitutionnel. Dans la pratique, lalettre est accompagnée d’un mémoire exposantdivers arguments visant à démontrer l’inconsti-tutionnalité de tout ou partie de la loi déférée.Cependant, le Conseil constitutionnel est saisi dela loi dans sa totalité même si la saisine ne porteque sur une partie du texte. Il n’est donc pas limité

Contrôle a priori : les décisions DC

20

par les griefs des saisissants et reste libre de sou-lever d’office la question de la constitutionnalitéd’autres dispositions.

Le Conseil constitutionnel dispose d’un délai d’unmois pour rendre sa décision. Ce délai peut êtreramené à huit jours à la demande du Gouvernements’il y a urgence. Ce délai suspend le délai de promul-gation de la loi qui reprend dès la notification de ladécision au Président de la République.

Le Conseil constitutionnel s’assure que la loi res-pecte la Constitution, entendue au sens large du « bloc de constitutionnalité ». En particulier, leConseil constitutionnel y intègre la Déclarationdes droits de l’homme et du citoyen de 1789, lePréambule de la Constitution de la IVe Républiquede 1946 et la Charte de l’environnement de 2004.

- 2 -LES DOMAINESDE CONTRÔLE

Le contrôle du Conseil constitutionnel porte essen-tiellement sur deux grands domaines :

- Le respect de la procédure parlementaire, commele respect du droit d’amendement ou le respect de lacompétence des pouvoirs publics. Par exemple, leConseil censurera le renvoi au décret si la Constitu-tion donne compétence à la loi donc au Parlementpour intervenir ; il considère que le législateur n’estpas allé au bout de sa compétence (cas d’« incompé-tence négative »). La première décision sanctionnantune incompétence négative portait sur des disposi-tions de procédure pénale qui confiaient au présidentdu tribunal de grande instance un pouvoir discré-tionnaire pour décider si les délits seraient jugés parune formation collégiale du tribunal ou par un jugeunique (décision n° 75-56 DC du 23 juillet 1975).

La saisine estobligatoire pour : > Les lois organiques(transmises par lePremier ministre).> Les règlements desassembléesparlementaires(transmis par leprésident del’Assemblée nationaleet le président duSénat).> Les propositions delois qu’un cinquièmedes membres duParlement, soutenu parun dixième desélecteurs inscrits surles listes électorales,se proposent desoumettre auréférendum.

La saisine estfacultative pour : > Les lois ordinaires.> Les engagementsinternationaux avantleur ratification.

Dans le cas ducontrôle facultatif, les autorités desaisine sont : > Le Président de laRépublique.> Le Premier ministre.> Le président del’Assemblée nationale.> Le président duSénat.> 60 députés. > 60 sénateurs.

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- Le respect des principes constitutionnels tels que :• la liberté d’association (décision n° 71-44 DC

du 16 juillet 1971, loi relative au contrat d’association) ;

• le principe d’égalité devant la loi (décision n° 75-51 DC du 27 décembre 1973, loi definances pour 1974) ;

• la liberté individuelle (décision n° 76-75 DC du12 janvier 1977 dite « fouille des véhicules ») ;

• la liberté de conscience (décision n° 77-87 DCdu 23 novembre 1977 dite « liberté d’enseigne-ment ») ;

• le droit de grève (décision n° 79-105 DC du 25 juillet 1979 dite « grève à la radio et à latélévision ») ;

• le droit de propriété (décision n° 81-132 DCdu 16 janvier 1982, loi de nationalisation) ;

• l’inviolabilité du domicile (décision n° 83-164du 29 décembre 1983 dite « perquisitions fis-cales ») ;

• le droit de mener une vie familiale normale (déci-sion n° 93-325 DC du 13 août 1993, loi relativeà la maîtrise de l’immigration) ;

• le respect de la vie privée (décision n° 94-352DC du 18 janvier 1995, loi d’orientation et deprogrammation relative à la sécurité) ;

• la sauvegarde de la dignité de la personnehumaine (décision n°94-343/344 dite « lois debioéthique ») ;

• l’accessibilité et l’intelligibilité de la loi (décisionn° 99-421 DC du 16 décembre 1999) ;

• la présomption d’innocence (décision n° 2001-455 DC du 12 janvier 2002, loi de modernisa-tion sociale) ;

• la spécificité de la justice pénale des mineurs(décision n° 2002-461 DC du 29 août 2002,loi d’orientation et de programmation pour lajustice).

- 3 -EFFETS DE LA DÉCISION

La décision du Conseil constitutionnel peut :

- Constater que la disposition est conforme à laConstitution : le Président de la République peutdonc promulguer l’ensemble de la loi, la faisantentrer en vigueur.- Constater qu’une ou plusieurs dispositions mécon-naissent la Constitution : la loi promulguée par lePrésident de la République ne pourra alors pascontenir les dispositions, considérées comme cen-surées ; elles n’apparaissent pas au Journal officiel. - Émettre une « réserve d’interprétation » sur uneou plusieurs dispositions : plutôt que de censurer,le Conseil énonce la façon dont la loi devra êtreinterprétée et appliquée. - Censurer la totalité de la loi.

Le Conseil constitutionnel explique les raisons quil’ont conduit à valider ou censurer la loi. Cettemotivation des décisions ainsi que leur publicationau Journal officiel est une exigence de l’ordonnanceorganique sur le Conseil constitutionnel.

Les décisions du Conseil constitutionnel ne peuventêtre remises en cause, de quelque manière que cesoit. Elles s’imposent à tous, y compris au Gouver-nement, au Parlement et aux juridictions.

Si le Gouvernement et le Parlement souhaitent,malgré la censure prononcée par le Conseil consti-tutionnel, faire adopter la loi, deux voies s’ouvrentà eux. Ils peuvent :- Soit voter une nouvelle loi : celle-ci devra toutefoistenir compte des explications et observations for-mulées par le Conseil constitutionnel pour éviterqu’elle soit à nouveau censurée.- Soit procéder à une révision de la Constitution.

COMPÉTENCES—22

1233contrôles de

constitutionnalitéeffectués depuis 1958

dont

506décisions QPC

de 2010à 2016

en chiffres

727contrôles

a priori(1) de1958

à 2016

23

3223décisions rendues

en matière d'élections depuis 1958

2824sur les élections

législatives

177sur les

électionssénatoriales

157sur les électionsprésidentielles

38sur les

référendums27

sur les autreséléctions

(1) Les contrôles a priori concernent les lois ordinaires, les lois organiques, le règlement des assemblées, les traités…

Au 1er octobre 2016

COMPÉTENCES—

La réforme constitutionnelledu 23 juillet 2008, entrée envigueur le 1er mars 2010,instaure la questionprioritaire deconstitutionnalité (QPC).La QPC est le droit reconnuà toute personne qui estpartie à un procès desoutenir qu'une dispositionlégislative est contraire auxdroits et libertés que laConstitution garantit. Cecontrôle est dit « aposteriori » puisque leConseil constitutionnelexamine une loi déjà entréeen vigueur.

- 1 -UNE SAISINE SOUS CONDITION

La QPC peut être posée à tout moment lors d’uneinstance devant une juridiction de l’ordre admi-nistratif (relevant du Conseil d’État) ou judiciaire(relevant de la Cour de cassation). La question peutainsi être posée en première instance, en appel, ouen cassation. Il est alors sursis à statuer (sauf dansles cas de privation de liberté).

Elle n’est pas directement posée au Conseil consti-tutionnel mais doit faire l’objet d’un double filtreavant d’être renvoyée au Conseil constitutionnel. C’est la juridiction saisie qui procède sans délai àun premier examen de trois conditions : - La disposition législative critiquée doit être appli-cable au litige. À noter que le Conseil considèrequ’il est saisi de la disposition telle qu’elle est inter-prétée de façon constante par la jurisprudence.Cette interprétation s’incorpore à la disposition.- Elle ne doit pas avoir déjà été déclarée conformeà la Constitution par le Conseil constitutionnel. LeConseil constitutionnel doit avoir spécialementexaminé la disposition dans sa décision de confor-mité. Les juges doivent cependant prendre encompte les éventuels changements de circonstances. - La question doit présenter un caractère sérieux.

Si ces trois conditions sont réunies, la question esttransmise au Conseil d’État ou à la Cour de cassa-tion, qui, dans un délai de trois mois, procèdent àun nouvel examen et décident de saisir ou non leConseil constitutionnel. Le Conseil constitutionneldoit juger la question prioritaire de constitution-nalité dans un délai de trois mois.

La première phase de la procédure est écrite : unéchange contradictoire est organisé entre les partieset le Secrétariat général du Gouvernement chargéde défendre la constitutionnalité de la loi. Les par-ties peuvent produire des observations sans l’aided’un avocat. Une audience publique est ensuiteorganisée à laquelle seuls des avocats peuvent pren-dre la parole.

Contrôle a posteriori : les QPC

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Le Conseil constitutionnel examine si la dispositionlégislative est conforme aux droits et libertés quela Constitution garantit. Cela comprend le « blocde constitutionnalité » (dont notamment la Décla-ration des droits de l’homme et du citoyen de 1789,le Préambule de la Constitution du 27 octobre1946 et la Charte de l’environnement de 2004)mais cela exclut les règles de procédure d’adoptiondes lois que le Conseil contrôle en contrôle a priori.

- 2 -UNE DÉCISION SANS APPEL

La décision du Conseil constitutionnel est sans appelpossible. Elle peut : - Soit juger la disposition législative conforme à laConstitution : cette disposition conserve sa placedans l'ordre juridique interne. La juridiction doitl'appliquer, en prenant en compte les éventuellesréserves d'interprétation formulées par le Conseilconstitutionnel. - Soit juger la disposition législative contraire à laConstitution : cette disposition est abrogée, elle dis-paraît de l'ordre juridique. La déclaration d'incons-titutionnalité ne bénéficie donc pas seulement à lapartie qui a présenté la QPC, mais s’étend aux autresinstances en cours.

Cependant, l’article 62 de la Constitution permet auConseil constitutionnel de différer dans le tempscette censure en donnant au Parlement le tempsnécessaire pour modifier la loi. Dans l’intervalle, leConseil explique alors comment il convient d’appli-quer la disposition.

La QPC, plus encore que le contrôle a priori, touchetoutes les branches du droit puisqu’elle est à dispo-sition de tout justiciable.

Depuis 2010, le Conseil constitutionnel a censuréprès d’un quart des dispositions qui lui étaient soumises. Il a ainsi abrogé, car contraires aux droitset libertés :

• le régime de garde à vue qui ne garantissait pasles droits de la défense, en particulier l’assistanceeffective d’un avocat ;

• le régime de la retenue douanière pour les mêmesraisons (2010-32 QPC) ;

• le régime de l’hospitalisation sans consentementqui méconnaissait le droit au juge.

Mais il a aussi jugé constitutionnels : • l'incrimination du négationnisme

(2015-512 QPC) ;• la liberté de mettre fin aux liens du mariage

(2016-557 QPC) ;• la spécificité du droit d’Alsace-Moselle

(2011-557 QPC) ;• l’obligation de vaccination (2015-458 QPC).

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COMPÉTENCES—

Le contrôle de la conformitédes lois à la Constitutionreprésente désormaisl’essentiel de l’activité duConseil constitutionnel. Il n’atoutefois rien perdu de sesautres compétences quelégislateur et constituant onteu plutôt tendance à élargir.

alors les fonctions de Président de la République. Ce futle cas en 1969 lors de la démission de Charles de Gaulleet en 1974 lors du décès de Georges Pompidou.

Le référendumComme pour l’élection présidentielle, le Conseil suitl’intégralité des opérations du référendum. Il veille àleur régularité et juge les réclamations. Enfin, il assurele décompte des voix et proclame les résultats.

Dans le cadre du référendum d’initiative partagée(article 11 de la Constitution), il vérifie la validitédes soutiens des électeurs (un dixième des inscritssur les listes électorales) nécessaires pour soumettreau référendum la proposition de loi présentée parau moins un cinquième des membres du Parlement.Introduite par la révision constitutionnelle de 2008et la loi organique de 2013, cette procédure n’ajamais encore été utilisée.

Contentieux électoral parlementaireL’article 59 de la Constitution fait du Conseil consti-tutionnel le juge électoral des élections parlementaires,rôle que les assemblées s’étaient autrefois réservé.

Le Conseil peut être saisi par tout électeur ou candidatde la circonscription dans laquelle le député ou le séna-teur dont l’élection est contestée a été élu. La requêteest écrite et doit exposer les raisons pour lesquellesl’annulation de l’élection est demandée. Elle doit par-venir dans les dix jours qui suivent l’élection.

Le Conseil peut prononcer l’annulation de l’électionou inverser un résultat. Il peut également prononcerun à trois ans d’inéligibilité.

L’introduction de la législation sur le financementdes campagnes électorales a conduit à une forte aug-mentation du nombre de décisions de contentieuxélectoral. En plus des griefs financiers que peuventsoulever les requérants contre un élu, le Conseil estsaisi de tout rejet de compte de campagne par laCommission nationale des comptes de campagne etde financement politiques.

- 1 -LE CONSEIL CONSTITUTIONNELET LES ÉLECTIONS NATIONALES

L’élection présidentielleLe Conseil constitutionnel contrôle toutes les opérationsconcernant l’élection du Président de la République :

• il est consulté sur tous les actes préparatoires(décrets, circulaires…) ;

• il établit la liste des candidats après avoir vérifié lavalidité des 500 parrainages d’élus nécessaires pourse présenter à l’élection ; le Conseil doit statuer sansdélai s’il est saisi d’une contestation sur cette listepar toute personne ayant été parrainée ;

• il juge les réclamations ou les irrégularités qu’ilpeut constater lui-même ou par l’intermédiairede ses délégués dans les bureaux de vote, ou encores’il est saisi par un électeur ou un candidat ;

• il assure le décompte des voix et proclame lesrésultats ;

• enfin, il peut être saisi d’un recours de candidat dontle compte de campagne n’a pas été approuvé par laCommission nationale des comptes de campagne.

Par ailleurs, sur saisine du gouvernement, il constatesoit un empêchement temporaire, soit un empêchementdéfinitif du chef de l’État. Le président du Sénat assure

Les autres compétences

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Statut des parlementairesLe Conseil peut également constater l’inéligibilitéd’un parlementaire qui n’aurait pas déposé de situa-tion patrimoniale auprès de la Haute autorité pourla transparence de la vie publique. Celle-ci saisit lebureau de l’assemblée concernée, qui saisit le Conseil.

Une inéligibilité peut survenir en cours de mandat.Le Conseil constitutionnel constate, à la demandede l’assemblée concernée ou du garde des sceaux, ladéchéance d’un parlementaire devenu inéligible.

Enfin, le Conseil constitutionnel constate, à lademande de l’assemblée concernée, du garde dessceaux ou du parlementaire lui-même s’il n’y a pasd’incompatibilité entre le mandat de député ou desénateur et les autres fonctions de cet élu.

- 2 -LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL

RÉGULATEUR DES POUVOIRS PUBLICS

La répartition des compétences entre la loi et le règlementLe Conseil constitutionnel est saisi par le Premierministre lorsque ce dernier veut modifier par décretune disposition législative intervenue dans le domaineréglementaire (donc de la compétence du gouverne-ment). Ces décisions, notées L, dites de « délégalisa-tion » ou « déclassement » contrôlent ainsi que laloi (donc le Parlement) n’a pas débordé de sondomaine de compétence délimité par l’article 34 dela Constitution. Près des deux tiers des 263 décisionsL ont été rendus avant 1990 (au 1er septembre 2016).

Cet arbitrage peut aussi avoir lieu au cours de la dis-cussion parlementaire : l’article 41 de la Constitutionpermet au gouvernement d’opposer une irrecevabilitéà une proposition de loi ou un amendement qui neserait pas du domaine de la loi. En cas de désaccordentre le Gouvernement et le président de l'assembléeintéressée, le Conseil constitutionnel, à la demande del'un ou de l'autre, statue dans le délai de huit jours.

De la même manière, le Conseil constitutionnel peutêtre saisi en vertu de l’article 39 de la Constitutionpour contrôler la conformité de la présentation d’unprojet de loi aux dispositions organiques précisantla procédure parlementaire.

Ces décisions sont répertoriées sous les lettres « FNR » (fin de non-recevoir). Le Conseil a rendu

onze décisions FNR (dont la dernière en 1979) pourl’article 41 et une pour l’article 39 en 2014.

La répartition des compétences entre l’Étatet certaines collectivités d’outre-merEn application de l'article 74 de la Constitution, appli-cable aux collectivités d'outre-mer dotées de l'autonomie,le Conseil constitutionnel peut constater qu'une loi pro-mulguée est intervenue dans le domaine de compétencede la Polynésie française, de Saint-Barthélemy ou deSaint-Martin et permettre ainsi à ces dernières de lamodifier ou de l'abroger. Il peut être saisi par le présidentde l'exécutif ou de l'assemblée de la collectivité, le Premierministre, le président de l'Assemblée nationale ou le pré-sident du Sénat. Il statue dans un délai de trois mois.

Les 11 décisions LOM (loi d'outre-mer) rendues parle Conseil constitutionnel concernaient toutes la Poly-nésie française.

Le Conseil constitutionnel peut être saisi, avant leurpromulgation, des « lois du pays » adoptées par leCongrès de la Nouvelle-Calédonie. Il vérifie leur confor-mité au « bloc de constitutionnalité » comme il le faitpour les décisions DC, mais également leur conformitéaux orientations définies par l’Accord de Nouméa etaux dispositions organiques prises pour leur applica-tion. Il veille donc aussi à la répartition des compétencesentre l’État et la Nouvelle-Calédonie.

Le Conseil constitutionnel a rendu 6 décisions LP(loi du pays) entre 1999 et 2016.

Les pouvoirs exceptionnels du Présidentde la RépubliqueLe Conseil constitutionnel doit être consulté par lePrésident de la République lors de la mise en appli-cation de l'article 16 de la Constitution, et sur lesmesures prises en application de cet article.

Après trente jours d'exercice des pouvoirs exception-nels, le Conseil constitutionnel peut être saisi par leprésident de l'Assemblée nationale, le président duSénat, soixante députés ou soixante sénateurs, pourexaminer si les conditions ayant nécessité la mise enapplication de l'article 16 demeurent réunies. Au termede soixante jours d'exercice des pouvoirs exceptionnelset à tout moment au-delà de cette durée, il procède deplein droit à cet examen.

L’article 16 n’a été mis en application qu’une seulefois en 1961.

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Lesdécisions2015-2016

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Le champ des questions quetraite chaque année leConseil constitutionnel esttrès vaste : il recouvre laquasi-totalité des politiquespubliques et des sujets depréoccupation des Français –lutte contre le terrorisme etétat d’urgence, croissanceéconomique, fiscalité,environnement, droit dutravail, santé, justice… Les 25 décisions présentées dansles pages qui suiventdonnent un aperçu de cettediversité. Qu’il s’agisse deQPC (contrôle de la loi dit a posteriori) ou de DC(contrôle a priori, avantpromulgation de la loi), cesdécisions ont marqué lapériode d’août 2015 à août2016.

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LES DÉCISIONS 2015-2016—

RenseignementLoi relative au renseignement (décision n°2015-713 DCdu 23 juillet 2015)

Saisi, pour la première fois, par le Présidentde la République, le Conseil constitutionnels’est prononcé sur le nouveau régimelégislatif qui encadre les techniques derecueil de renseignements.

Le Conseil a toutefois censuré les dispo-sitions relatives aux mesures de surveil-lance internationale. Le législateurn’avait sur ce point prévu aucun dispo-sitif encadrant les conditions d’exploi-tation, la conservation ou la destructiondes renseignements collectés.

Cette censure a obligé le législateur àreprendre un nouveau texte pour enca-drer davantage ces mesures. Il s’agit dela loi du 30 novembre 2015 relative auxmesures de surveillance des communi-cations électroniques internationales. L

e texte a pour l’essentiel étéjugé conforme à la Constitu-tion par le Conseil constitution-nel. Ce dernier s’est assuré que

le législateur était parvenu à un justeéquilibre entre, d’un côté, la préventiondes atteintes à l’ordre public et, de l’autrela garantie de plusieurs droits constitu-tionnellement garantis. Il a vérifié queles garanties apportées par le législateurpréservent en particulier le droit au respect de la vie privée, l’inviolabilité du domicile ou le secret des correspon-dances.

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CroissanceLoi pour la croissance, l’activité et l’égalité des chances économiques(décision n°2015-715 DC du 5 août 2015)

Le Conseil s’est également prononcé danscette décision sur un dispositif d’encadre-ment des indemnités que peut accorder lejuge au salarié licencié sans cause réelle etsérieuse. Le Conseil constitutionnel a jugéque le législateur pouvait, dans un soucide sécurité juridique, plafonner ces indem-nités sous réserve de retenir des critèresprésentant un lien avec le préjudice subipar le salarié. Or si le critère de l'anciennetédans l'entreprise est adéquat, tel n'est pasle cas du critère des effectifs de l'entreprisequi est sans lien avec le préjudice. LeConseil constitutionnel a donc censuré letexte pour méconnaissance du principed’égalité devant la loi.

Cette décision se fonde, à plu-sieurs reprises, sur la libertéd’entreprendre qui était invo-quée par les députés et séna-

teurs requérants. Sur la période récente,le Conseil constitutionnel s’est montrévigilant sur les libertés économiques.

La censure par la décision « loi Macron »du pouvoir d’ « injonction structurelle »qui était confié à l’autorité de la concur-rence dans le commerce de détail en estune illustration. Ce pouvoir aurait permisà l’autorité de la concurrence d’obligerdes entreprises à modifier, compléter ourésilier des accords ou actes, ou de céderdes actifs alors même qu’aucun abusn’était constaté. Le Conseil constitutionnela censuré les dispositions en cause sur leterrain de la liberté d’entreprendre et dudroit de propriété.

La loi pour la croissance, l’activité et l’égalité des chances économiques,dite loi « Macron », comportait 308 articles et touchait à de très nombreuxdomaines de la vie économique.

Le Conseil constitutionnels’est prononcé surdifférents aspects de cetexte par l’une des pluslongues décisions de sonhistoire. Elle comporte 169paragraphes et censure24 dispositions de la loi.

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Portde commercedu Havre.

LES DÉCISIONS 2015-2016—

Grand ParisLoi portant sur la nouvelle organisation territoriale de la République(décision n°2015-717 DC du 6 août 2015)

La contestation devant le Conseil constitutionnel de cette loi portait sur lepoint très précis des modalités de répartition des sièges de conseiller de lamétropole du Grand Paris attribués à la commune de Paris et du moded’élection des conseillers métropolitains.

représentation proportionnelle suivant larègle de la plus forte moyenne combinéeà un minimum d'un siège par arrondisse-ment, les dispositions contestées condui-saient à ce que, dans plusieurs arrondis-sements, le rapport du nombre desconseillers métropolitains à la populationde l'arrondissement s'écarte de la moyenneconstatée à Paris dans une mesure mani-festement disproportionnée.

Les dispositions contestées ont donc étécensurées pour méconnaissance du prin-cipe d’égalité devant le suffrage. L

a jurisprudence du Conseil consti-tutionnel relative au principed'égalité devant le suffrageimplique une répartition des sièges

selon une règle de proportionnalité à lapopulation. Ce principe n'est cependant pasabsolu et il peut y être dérogé afin de tenircompte d'impératifs d'intérêt général. Cettedérogation n'est toutefois admise que dansune mesure limitée. Selon sa jurisprudence,le Conseil constitutionnel peut ainsi tolérerune fourchette de plus ou moins 20 %d’écart à la moyenne. Le Conseil a faitapplication de cette jurisprudence à proposdes dispositions dont il était saisi.

Il a jugé que compte tenu du nombre desièges à répartir et de la population res-pective de chaque arrondissement, enappliquant une règle de répartition à la

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EnvironnementLoi relative à la transition énergétique pour la croissance verte(décision n°2015-718 DC du 13 août 2015)

La loi relative à la transition énergétiquepour la croissance verte a plafonné lacapacité totale autorisée de productiond’électricité d’origine nucléaire. Ce plafonnement peut conduire lasociété titulaire d’autorisationsd’exploiter des installations nucléaires àdevoir renoncer à certaines d’entre elles.

protégé par les articles 2 et 17 de la Décla-ration des droits de l’homme et du citoyende 1789.

Le Conseil constitutionnel a en revancherelevé que les dispositions de la loi ne s’op-posaient pas à ce que les titulaires d'auto-risations de création d'installationsnucléaires déjà délivrées au jour de l'entréeen vigueur de la loi, privés de la possibilitéde demander une autorisation d'exploiterune installation pour laquelle ils disposentd'une telle autorisation de création oucontraints de demander l'abrogation d'uneautorisation d'exploiter afin de respecterle plafonnement, puissent prétendre à uneindemnisation du préjudice subi.

Après l’intervention de cette décision duConseil constitutionnel, l’État et la sociététitulaire d’autorisations d’exploiter desinstallations nucléaires ont entamé desdiscussions pour définir des principesd’indemnisation.

Le Conseil constitutionnel ajugé que ces autorisationsaccordées par l’autorité admi-nistrative ne peuvent être assi-

milées à des biens sur lesquels s’applique-rait un droit de propriété. Il a enconséquence écarté l’argumentation fon-dée sur l’atteinte au droit de propriété

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Éoliennes au large des côtes de Boulogne-sur-Mer.

LES DÉCISIONS 2015-2016—

Bisphénol ASuspension des opérations relatives aux conditionnements contenantdu bisphénol A (décision n°2015-480 du 17 septembre 2015Association Plastics Europe)

La suspension de la fabrication, del’importation, de l’exportation et de lamise sur le marché de toutconditionnement à vocation alimentairecontenant du bisphénol A porte-t-elleatteinte à la liberté d’entreprendre ?C’est à cette question que devaitrépondre le Conseil constitutionnel.

Il a jugé que la suspension de l'im-portation et de la mise sur le marchénational des produits contenant dubisphénol A visés par la loi porte à la

liberté d'entreprendre une atteinte quin'est pas manifestement disproportionnéeau regard de l'objectif de protection de lasanté qu'il a poursuivi.

Le Conseil constitutionnel a, en revanche,relevé que la commercialisation des pro-duits en cause est autorisée dans de nom-breux pays et qu'ainsi la suspension de la

fabrication et de l'exportation de ces pro-duits sur le territoire de la République ouà partir de ce territoire est sans effet surla commercialisation de ces produits dansles pays étrangers. Le Conseil constitu-tionnel en a déduit que la suspension dela fabrication et de l'exportation de cesproduits en France ou depuis la Franceapporte à la liberté d'entreprendre des res-trictions qui ne sont pas en lien avec l'ob-jectif poursuivi.

Le Conseil constitutionnel a donc cen-suré uniquement la suspension de lafabrication et de l'exportation des pro-duits comportant du bisphénol A et des-tinés à entrer en contact direct avec desdenrées alimentaires.

« Le Conseil a donccensuré uniquementla suspension de lafabrication et del'exportation desproduits comportantdu bisphénol A. »

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Taxis et VTCIncrimination pénale de la mise en relation de clients avec desconducteurs non professionnels (décision n°2015-484 QPCdu 22 septembre 2015 Société Uber France SAS)

La loi réprime de deux ansd'emprisonnement et de 300 000 €d'amende le fait d'organiser un systèmede mise en relation de clients avec despersonnes qui, sans pouvoir légalements'y livrer en application du code destransports, faute d'être, par exemple,taxis ou VTC (Voiture de transport avecchauffeur), effectuent pourtant desprestations de transport routier depersonnes à titre onéreux.

La société requérante contestaitces dispositions sur le terraindu principe de légalité des délitset des peines. Selon elle, la loi

était d’une portée trop large et conduisaità la répression de tout système de « covoi-turage », où est seulement demandée uneindemnisation pour couvrir les frais d’in-demnisation et d’utilisation du véhicule.

Le Conseil a rejeté l’argumentation de lasociété. Il a en particulier jugé que les dis-positions contestées n'ont ni pour objetni pour effet d'interdire les systèmes demise en relation des personnes souhaitantpratiquer le covoiturage tel qu'il est définipar le code des transports.

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Incompatibilité de l’exercice de l’activité de conducteur de taxi aveccelle de conducteur de VTC (décision n°2015-516 QPC du 15 janvier2016 M. Robert M.)

La loi avait prévu que l'activité de conducteur de taxi est incompatible avec l'exercicede l'activité de conducteur de VTC. Le législateur avait entendu lutter contre lafraude à l'activité de taxi, notamment dans le secteur du transport de malades, etassurer la pleine exploitation des autorisations de stationnement délivrées aux taxis.

cules motorisés à deux ou trois roues oucelle de conducteur d'ambulance.

En outre, cette incompatibilité ne s'ap-plique pas au titulaire d'une autorisationde stationnement qui n'exerce pas lui-même l'activité de conducteur de taxi.

Le Conseil constitutionnel en a déduitqu'en instituant l'incompatibilité prévuepar les dispositions contestées, le législa-teur a porté à la liberté d'entreprendreune atteinte qui n'est justifiée ni par lesobjectifs qu'il s'est assignés ni par aucunautre motif d'intérêt général.

Or, d'une part, l'activité deconducteur de taxi et celle deVTC sont exercées au moyende véhicules comportant des

signes distinctifs. Par ailleurs, seuls lesvéhicules sanitaires légers et les taxis peu-vent être conventionnés avec les régimesobligatoires d'assurance maladie pourassurer le transport des malades.

D'autre part, l'incompatibilité, qui neconcerne que les activités de conducteurde taxi et de VTC, ne fait pas obstacle àun cumul entre l'activité de conducteurde taxi et l'activité de conducteur de véhi-

LES DÉCISIONS 2015-2016—

État d’urgenceAssignation à résidence dans le cadre de l’état d’urgence(décision n°2015-527 QPC du 22 décembre 2015 M. Cédric D.)

La loi du 3 avril 1955 relative à l’étatd’urgence prévoit que le ministre del’Intérieur peut prononcer desassignations à résidence et fixe le régimejuridique qui leur est applicable. Ces mesures peuvent notamments’accompagner d’une astreinte àdemeurer dans le lieu d'habitationpendant une plage horaire déterminée,dans la limite de douze heures parvingt-quatre heures.

Le Conseil constitutionnel a égalementjugé que ces mesures ne portent pas uneatteinte disproportionnée à la liberté d’al-ler et de venir pour trois raisons.

D’une part, l’assignation ne peut être pro-noncée qu’en cas de péril imminent résultantd’atteintes graves à l’ordre public et seulementà l’égard d’une personne à l’égard de laquelleil existe des raisons sérieuses de penser queson comportement constitue une menacepour la sécurité et l'ordre publics.

D’autre part, tant la mesure d'assignationà résidence que sa durée, ses conditionsd'application et les obligations complémen-taires dont elle peut être assortie doiventêtre justifiées et proportionnées aux raisonsayant motivé la mesure dans les circons-tances particulières ayant conduit à la décla-ration de l'état d'urgence. Le juge adminis-tratif est chargé de s'assurer que cette mesureest adaptée, nécessaire et proportionnée àla finalité qu'elle poursuit.

Enfin, la mesure d'assignation à résidenceprise en application de cette loi cesse auplus tard en même temps que prend finl'état d'urgence.

Le Conseil constitutionnel a jugéque la plage horaire maximalede cette astreinte, fixée à douzeheures par jour, ne saurait être

allongée sans que l'assignation à rési-dence soit alors regardée comme unemesure privative de liberté, dès lors sou-mise aux exigences de l'article 66 de laConstitution.

FiscalitéLoi de finances pour 2016 (décision n°2015-725 DC du 29 décembre 2015)

recours à cette prime en dispensant les tra-vailleurs qui y sont éligibles d'engager lesdémarches pour percevoir cette prime.

Le Conseil constitutionnel a censuré cetarticle comme contraire au principe d'égalitéau motif qu'il excluait du bénéfice de lamesure les travailleurs modestes non sala-riés, sans que cette différence de traitementsoit en rapport avec l'objet de la loi.

L’une des dispositions de la loi definances pour 2016 prévoyait leversement d'une fraction de laprime d'activité sous la forme

d'une réduction dégressive de Contributionsociale généralisée (CSG). Son objectif était,pour augmenter le pouvoir d'achat desfoyers les plus modestes, d'instituer unemodalité particulière de décaissement de laprime d'activité et d'accroître le taux de

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en chiffres 37

Les délais de jugement(1)

(moyenne du nombrede jours)

17jours

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18jours

en2015

Pourun contrôlea priori

79jours

en201677

joursen

2015

Pour uneQPC

(1) Sur la période 1975 à 2009, avant l’apparition des QPC, le délai de jugement était en moyenne de 17 jours.

LES DÉCISIONS 2015-2016—

Crimes contre l’humanitéDélit de contestation de l’existence de certains crimes contrel’humanité (décision n°2015-512 QPC du 8 janvier 2016 M. Vincent R.)

Est réprimée pénalement la contestationde l'existence d'un ou plusieurs crimescontre l'humanité, tels qu'ils sont définispar l'article 6 du statut du tribunalmilitaire international annexé à l'accordde Londres du 8 août 1945, dès lors qu'ilsont été commis soit par les membresd'une organisation déclarée criminelle enapplication de l'article 9 dudit statut, soitpar une personne reconnue coupable detels crimes par une juridiction françaiseou internationale. Les dispositions quiprévoient cette répression pénale sontissues de la loi dite « Gayssot ».

Le Conseil constitutionnel a jugéque ces dispositions ne mécon-naissent ni la liberté d’expressionni la liberté d’opinion.

Il a ainsi jugé que les propos contestantl'existence de faits commis durant laSeconde Guerre mondiale qualifiés decrimes contre l'humanité et sanctionnéscomme tels par une juridiction françaiseou internationale constituent en eux-mêmes une incitation au racisme et à l'an-tisémitisme. Par suite, les dispositionscontestées ont pour objet de réprimer unabus de l'exercice de la liberté d'expressionet de communication qui porte atteinte àl'ordre public et aux droits des tiers. LeConseil constitutionnel a relevé que lesdispositions contestées visent à luttercontre certaines manifestations particu-lièrement graves d'antisémitisme et dehaine raciale. Il a également relevé queseule la négation, implicite ou explicite,ou la minoration outrancière de ces crimesest prohibée et que les dispositions contes-

« Le Conseil constitutionnel a jugéque ces dispositions ne méconnaissentni la liberté d’expression ni la libertéd’opinion. »

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mondiale, en partie sur le territoire national,a par elle-même une portée raciste et anti-sémite. Ainsi, en réprimant pénalement laseule contestation des crimes contre l'hu-manité commis soit par les membres d'uneorganisation déclarée criminelle en applica-tion de l'article 9 du statut du tribunal mili-taire international de Nuremberg, soit parune personne reconnue coupable de telscrimes par une juridiction française ou inter-nationale, le législateur a traité différemmentdes agissements de nature différente. LeConseil constitutionnel a jugé que cette dif-férence de traitement est en rapport avecl'objet de la loi qui a institué l'incriminationcontestée et qui visait à réprimer tout acteraciste, antisémite ou xénophobe.

tées n'ont ni pour objet ni pour effet d'in-terdire les débats historiques. Le Conseilconstitutionnel en a déduit qu'ainsi, l'at-teinte à l'exercice de la liberté d'expressionqui en résulte est nécessaire, adaptée etproportionnée à l'objectif poursuivi parle législateur.

S’agissant de l’égalité devant la loi pénale,le Conseil constitutionnel a relevé que, d'unepart, la négation de faits qualifiés de crimecontre l'humanité par une décision d'unejuridiction française ou internationale recon-nue par la France se différencie de la négationde faits qualifiés de crime contre l'humanitépar une juridiction autre ou par la loi. D'au-tre part, la négation des crimes contre l'hu-manité commis durant la Seconde Guerre

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Mur pour laPaix, érigé enmars 2000 devant l'Écolemilitaire, surle Champ-de-Mars, à Paris.

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Droit des détenusActivités professionnelles des détenus (décision n°2015-485 QPCdu 25 septembre 2015 M. Johny M.)

La participation des personnes détenues aux activités professionnellesorganisées dans les établissements pénitentiaires donne lieu àl'établissement d'un acte d'engagement par l'administration pénitentiaire.Cet acte, signé par le chef d'établissement et la personne détenue, énonceles droits et obligations professionnels de celle-ci ainsi que ses conditionsde travail et sa rémunération.

acte d'engagement la participation des déte-nus aux activités professionnelles organiséesdans les établissements pénitentiaires et enrenvoyant à cet acte d'engagement le soind'énoncer les droits et obligations profes-sionnels du détenu, dans des conditions quirespectent les dispositions de l'article 22 dela loi du 24 novembre 2009 et sous lecontrôle du juge administratif, les disposi-tions contestées ne portent atteinte à aucunprincipe constitutionnel.

Le Conseil constitutionnel a jugéce cadre légal du travail en prisonconforme à la Constitution. Il aen particulier relevé que les dis-

positions de l'article 22 de la loi du 24novembre 2009, celles de l'article 717-3 ducode de procédure pénale et les dispositionscontestées énoncent différentes règles etgaranties relatives aux conditions de travaildes personnes détenues. Le Conseil consti-tutionnel a jugé qu'en subordonnant à un

Formation aucentre dedétention pourmineurs de laprison deFleury-Mérogis.

SantéLoi de modernisation de notre système de santé (décision n° 2015-727DC du 21 janvier 2016)

La loi de modernisation du système de santé affichait comme priorité laprévention des risques, le droit des patients et la proximité des soins.

plus discutés de la loi, ne constituait pasune privation de propriété pour les indus-triels du tabac, dès lors notamment quela marque du produit continuera à figurersur le paquet. En outre, l’exigence consti-tutionnelle de protection de la santépublique permettait de justifier lesatteintes au droit de propriété et à laliberté d’entreprendre liées à l’obligationdu « paquet neutre ».

Le Conseil constitutionnel était égalementsaisi d’autres dispositions de la loi, notam-ment : l’immunité pénale pour les per-sonnes fréquentant les « salles de consom-mation de drogues à moindre risque », lasuppression du délai de réflexion d’unesemaine entre la demande d’interruptionvolontaire de grossesse et sa confirmationécrite, la recherche sur les gamètes etembryons, ou encore le renforcement dela transparence des liens d’intérêt entreles laboratoires pharmaceutiques et lesautres acteurs du monde de la santé. Cesdispositions ont été déclarées conformesà la Constitution.

Le Conseil a en revanche jugé inconstitu-tionnelles les dispositions qui rendaientobligatoire à compter du 1er janvier 2017le dispositif du « tiers payant » pour lesorganismes d’assurance maladie complé-mentaire, au motif que le législateurn’avait pas suffisamment encadré ce dis-positif et avait ainsi méconnu l’étenduede sa propre compétence – ce que l’onappelle l’« incompétence négative ».

Trois mesures concernant letabagisme étaient contestéesdevant le Conseil constitu-tionnel : celles – transposant

une directive européenne – relatives àl’interdiction des arômes et des additifsdans les produits du tabac, celles relativesà l’interdiction de la publicité dans lesbureaux de tabac sous forme d’affi-chettes – lesquelles constituaient la der-nière dérogation à l’interdiction généralede la publicité en faveur du tabac poséepar la loi Evin –, et celles relatives au « paquet neutre ».

Ces dispositions ont toutes été déclaréesconformes à la Constitution. En particu-lier, le Conseil constitutionnel a jugé quele « paquet neutre », l’un des points les

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Organisations professionnellesMouvement des entreprises de France et autres [Critère del'audience des organisations professionnelles d'employeurs pourl'appréciation de la représentativité] (décision n° 2015-519 QPCdu 3 février 2016)

Le code du travail prévoit, depuis une loi du 5 mars 2014, que lareprésentativité des organisations professionnelles d’employeurs estdéterminée notamment en fonction de leur « audience ». Ce critèred’audience se mesure par le nombre des entreprises adhérentes àl’organisation patronale – à la différence de ce qui est prévu pour lessyndicats, dont l’audience est mesurée par le résultat aux électionsprofessionnelles.

D’autre part, le Conseil a relevé que laliberté d’adhérer au syndicat de son choix,prévue par le Préambule de la Constitutionde 1946, n’imposait pas que toutes lesorganisations professionnelles d’em-ployeurs soient reconnues comme étantreprésentatives indépendamment de leuraudience. En fixant le seuil minimum d’au-dience permettant l’accès à la représenta-tivité à 8 % de l’ensemble des entreprisesadhérant à des organisations profession-nelles d’employeurs, le législateur a vouluéviter la dispersion de la représentativitépatronale et n’a pas fait obstacle au plu-ralisme.

Les requérants invoquaient également uneautre disposition du Préambule de 1946 :celle du huitième alinéa, qui consacre undroit des travailleurs, par l’intermédiairede leurs délégués, à la participation et à ladétermination collective de leurs condi-tions de travail. Le Conseil a toutefois jugéque cette disposition ne conférait aucundroit équivalent au bénéfice desemployeurs, lesquels fixent les conditionsde travail des salariés.

Le MEDEF et les autres requérantsà l’origine de la QPC transmiseau Conseil constitutionnel consi-déraient que d’autres éléments

devaient être pris en compte pour apprécierla représentativité, tels que le nombre desalariés ou le chiffre d’affaires des entreprisesadhérentes.

Le Conseil constitution-nel a toutefois jugé queles dispositions en causedu code du travail neméconnaissaient aucunprincipe constitutionnel.

Alors que les requérantsestimaient que ces dispo-sitions portaient atteinteà la liberté syndicale, leConseil a jugé qu’en pré-voyant que l’audience desorganisations profession-nelles d’employeurs semesure en fonction dunombre des entreprisesadhérentes, le législateura voulu assurer un égal

accès de ces organisations à la représenta-tivité – quel que soit le nombre de salariésemployés par les entreprises adhérentes ouleur chiffre d’affaires.

« Le Conseil atoutefois jugé que lesdispositions en causedu codedu travail neméconnaissaient aucun principeconstitutionnel. »

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État d'urgenceLigue des droits de l'homme [Police des réunions et des lieux publicsdans le cadre de l'état d'urgence] (décision n° 2016-535 QPCdu 19 février 2016)

Immédiatement après les attentatsterroristes ayant frappé Paris et Saint-Denis le 13 novembre 2015, l’étatd’urgence, prévu par la loi du 3 avril 1955,a été déclaré par décret en Conseil desministres. Dans ce contexte, la Ligue desdroits de l’homme a soulevé une QPCà l’encontre des dispositions de la loide 1955 permettant à l’autoritéadministrative, lorsque l’état d’urgencea été déclaré, d’ordonner la fermetureprovisoire des salles de spectacle, desdébits de boisson et des lieux de réunionde toute nature ainsi que d’interdireles réunions de nature à provoquer ouà entretenir le désordre.

L’argumentation de l’associationrequérante portait principale-ment sur l’atteinte portée parces dispositions au « droit

d’expression collective des idées et desopinions » – terme employé pour la pre-mière fois par le Conseil dans une décisionde 1995, et auquel se rattache la libertéde réunion.

Il appartenait donc au Conseil, selon unejurisprudence bien établie, de s’assurerque le législateur avait assuré la concilia-tion entre, d’une part, la prévention desatteintes à l’ordre public et, d’autre part,le respect des droits et libertés reconnus àtous ceux qui résident sur le territoire dela République.

En l’espèce, le Conseil a jugé conformes àla Constitution les dispositions contestéesde la loi de 1955 relative à l’état d’urgence.Il a estimé qu’elles opéraient une conci-liation qui n’était pas manifestement dés-équilibrée entre le « droit d’expressioncollective des idées et des opinions » etl’objectif de valeur constitutionnelle desauvegarde de l’ordre public.

Pour cela, il s’est fondé sur les différentesgaranties ou conditions encadrant le pro-noncé de ces mesures de fermeture pro-visoire ou d’interdiction de réunion.D’une part, ces mesures ne peuvent inter-venir que dans le cadre de l’état d’ur-gence, c’est-à-dire en cas de péril immi-nent ou de calamité publique. D’autrepart, le recours à ces mesures par l’au-torité administrative est strictement enca-dré et s’effectue sous le contrôle du jugeadministratif : elles doivent être néces-saires, justifiées et proportionnées auxnécessités de la préservation de l’ordrepublic. Enfin, ces mesures sont bornéesdans le temps : elles cessent au plus tardlorsque prend fin l’état d’urgence.

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Rassemblement de soutien suite aux attentats contreCharlie Hebdo, place de la République à Paris.

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PerquisitionsLigue des droits de l'homme [Perquisitions et saisies administrativesdans le cadre de l'état d'urgence] (décision n° 2016-536 QPCdu 19 février 2016)

Le Conseil constitutionnel a été saisi enjanvier 2016 d’une autre QPC portant surla loi du 3 avril 1955 (voir décisionprécédente). Étaient contestées lesdispositions permettant à l’autoritéadministrative, lorsque l’état d’urgenceest déclaré, d’ordonner des perquisitionset de copier des données informatiquesdans le cadre de ces perquisitions.

Conseil a relevé que leur mise en œuvreétait conditionnée à un ensemble de strictesgaranties et conditions – notamment la pré-sence d’un officier de police judiciaire, l’obli-gation de présence de l’occupant ou de sonreprésentant ou de deux témoins, l’établis-sement d’un compte-rendu communiquésans délai au procureur de la République,le contrôle du juge administratif. Le Conseila admis que des perquisitions puissent êtreordonnées la nuit, mais a précisé qu’ellesdevaient alors être justifiées par l’urgenceou l’impossibilité de les effectuer le jour.

Concernant la possibilité de copier des don-nées informatiques dans le cadre de ces per-quisitions, le Conseil constitutionnel a enrevanche censuré les dispositions en cause.Il a jugé que le législateur n’avait pas prévude garanties légales propres à assurer uneconciliation équilibrée entre l’objectif devaleur constitutionnelle de sauvegarde del’ordre public et le droit au respect de la vieprivée. Le Conseil a en effet relevé que detelles copies de données informatiquesétaient assimilables à une saisie ; or ni cettesaisie, ni l’exploitation des données ainsicollectées n’étaient, aux termes de la loi,autorisées par un juge, y compris lorsquel’occupant du lieu perquisitionné ou le pro-priétaire des données s’y oppose et alorsmême qu’aucune infraction n’est constatée.Au demeurant, le Conseil a relevé que lesdispositions en cause rendaient possible lacopie de données dépourvues de tout lienavec la personne dont le comportementconstitue une menace pour la sécurité etl’ordre public ayant fréquenté le lieu où aété ordonnée la perquisition.

À la suite de cette censure, le législateur amodifié les dispositions en cause, dans lecadre de la loi du 21 juillet 2016 proro-geant l’état d’urgence pour une durée desix mois.

Concernant les perquisitionsadministratives, le Conseilconstitutionnel a jugé les dispo-sitions en cause conformes à la

Constitution – tout en rappelant qu’elless’inscrivaient dans le cadre très spécifiqued’un « régime de pouvoirs exceptionnelsdont les effets doivent être limités dans letemps et l’espace ». Si de telles mesures por-tent atteinte à l’inviolabilité du domicile,protégé au titre du respect de la vie privéepar l’article 2 de la Déclaration de 1789, le

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LES DÉCISIONS 2015-2016—

Collectivités territorialesCommune d'Éguilles et autre [Répartition des sièges de conseillerscommunautaires entre les communes membres de la métropole d'Aix-Marseille-Provence] (décision n° 2015-521/528 QPC du 19 février2016)

Les métropoles sont des Établissementspublics de coopération intercommunale(EPCI) à fiscalité propre caractérisés par un fort degré d’intégration. Enparticulier, les métropoles se voientobligatoirement transférer certaines des compétences départementales – et non exclusivement des compétencescommunales, comme c’est le cas pour les autres EPCI.

membres, des sièges de conseiller com-munautaire au sein de l’organe délibé-rant de la métropole. Ce système attribuedes sièges supplémentaires, répartis à lareprésentation proportionnelle, à cer-taines communes les plus peuplées de lamétropole.

Les communes requérantes – Éguilles etPertuis – reprochaient notamment à cesdispositions de méconnaître le principed’égalité devant le suffrage, au motif quela règle dérogatoire d’attribution desièges supplémentaires aboutirait à favo-riser la représentation des électeurs descommunes bénéficiaires de cette règle.Le Conseil a toutefois écarté cette argu-mentation, et déclaré les dispositionscontestées conformes à la Constitution.Le Conseil a notamment relevé que lelégislateur avait voulu réduire les écartsde représentation entre les communesles plus peuplées et les autres communesde cette métropole, lesquels résultent desécarts démographiques particulièrementprononcés entre les communes membresde cette métropole et de l’attributionautomatique d’un siège à un nombreimportant de communes peu peuplées.Le Conseil a jugé que les dispositionscontestées, qui ont pour effet d’améliorerla représentativité des membres de l’organe délibérant de la métropole Aix-Marseille-Provence, ne méconnais-saient pas le principe d’égalité devant lesuffrage.

La loi du 27 janvier 2014 demodernisation de l’actionpublique territoriale et d’affir-mation des métropoles a créé

la métropole d’Aix-Marseille-Provenceet a prévu, dans le Code général des col-lectivités territoriales (CGCT), un sys-tème spécifique à cette métropole pourla répartition, entre les 92 communes

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Droit du travailM. Michel O. [Absence d'indemnité compensatrice de congé payé encas de rupture du contrat de travail provoquée par la faute lourde dusalarié] (décision n° 2015-523 QPC du 2 mars 2016)

Le Conseil constitutionnel a été saisi d’une QPC concernant les dispositionsdu code du travail privant le salarié licencié pour faute lourde de l’indemnitécompensatrice de congé payé.

C’est pourquoi le Conseil a censuré lesdispositions du code du travail qui res-treignaient l’attribution de l’indemnitécompensatrice de congé payé aux seulssalariés dont la rupture du contrat de tra-vail n’avait pas été provoquée par unefaute lourde. Cette déclaration d’incons-titutionnalité a pris effet immédiatementà compter de la publication de la décision,et a pu être invoquée dans toutes les ins-tances introduites à cette date et non jugéesdéfinitivement.

Le Conseil a relevé que cetterègle ne s’appliquait paslorsque l’employeur était tenupar le code du travail d’adhérer

à une caisse de congés. Par conséquent, lelégislateur a traité différemment les salariéslicenciés pour faute lourde, selon que leuremployeur est ou non affilié à une caissede congés.

Le Conseil a jugé que cette différence detraitement était sans rapport tant avecl’objet de la législation relative aux caissesde congés qu’avec celui de la législationrelative à la privation de l’indemnité com-pensatrice de congé payé.

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Élection présidentielleLoi organique de modernisation des règles applicables à l'électionprésidentielle (décision n° 2016-729 DC du 21 avril 2016)

La loi organique de modernisation des règles applicables à l’électionprésidentielle visait notamment à réformer le dispositif des « parrainages »et les règles d’accès des candidats aux médias audiovisuels.

Le Conseil constitutionnel a par ailleursjugé conformes à la Constitution les dis-positions imposant désormais la publica-tion des noms élus des « parrains » au furet à mesure de leur réception, au moinsdeux fois par semaine. Il en est de mêmes’agissant de la règle nouvelle imposantde rendre publics les noms de tous les « parrains ». Une plus grande transparencesera ainsi assurée.

Le Conseil a également jugés conformesà la Constitution les dispositions qui pré-voient désormais l’application, en matièreaudiovisuelle, du « principe d’équité », aulieu du principe d’égalité, pendant lapériode allant de la publication de la listedes candidats jusqu’à la veille de la cam-pagne « officielle ». Le Conseil a jugéconforme à la Constitution la conciliationopérée entre l’exercice de la liberté de com-munication et le principe de pluralismedes courants d’idées et d’opinion. La déci-sion relève que la loi organique a voulufavoriser, dans l’intérêt des citoyens, laclarté du débat électoral, tout en accordantaux opérateurs audiovisuels une libertéaccrue dans le traitement de l’informationen période électorale. La différence de trai-tement entre les candidats qui peut enrésulter est justifiée par le motif d’intérêtgénéral de clarté du débat électoral et esten rapport direct avec l’objet de la loi. Cesdispositions ne sont donc pas contrairesau principe d’égalité devant le suffrage.

Le Conseil a jugé conformes à laConstitution les nouvelles règlesconcernant les modalités de « pré-sentation » – selon le terme juri-

dique utilisé par les textes – des candidatsà l’élection présidentielle. Les présentations,plus communément appelées « parrai-nages », devront désormais être adresséesau Conseil constitutionnel exclusivementpar voie postale. La décision précise toute-fois, dans une réserve d’interprétation, quecette exigence ne s’oppose pas à ce que leConseil puisse, le cas échéant, prendre encompte des circonstances de force majeureayant gravement affecté les conditions d’ex-pédition et d’acheminement des parrainagesdans les jours précédant l’expiration dudélai de présentation des candidats.

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Droits des détenusSection française de l'observatoire international des prisons [Permisde visite et autorisation de téléphoner durant la détention provisoire](décision n° 2016-543 QPC du 24 mai 2016)

Selon ces dispositions, contestéespar la Section française de l’ob-servatoire international des pri-sons, aucune voie de recours

n’était prévue à l’encontre d’une décisionrefusant un permis de visiteà une personne placée endétention provisoire, lorsquela demande émanait d’unepersonne n’étant pas mem-bre de la famille. Aucunrecours n’était possible nonplus lorsque le permis devisite était sollicité en l’ab-sence d’instruction ou aprèssa clôture. Ces dispositionsne prévoyaient pas davan-tage de voie de recours àl’encontre des décisions refu-

sant l’autorisation de téléphoner à unepersonne placée en détention provisoire.

Le Conseil a jugé que l’impossibilité decontester ces décisions de refus mécon-naissait le droit à un recours juridictionneleffectif.

En outre, le Conseil constitutionnel a jugéque le droit à un recours juridictionneleffectif était également méconnu par l’ab-sence de tout délai déterminé imparti aujuge d’instruction pour statuer sur unedemande de permis de visite d’un membrede la famille de la personne placée endétention provisoire.

La déclaration d’inconstitutionnalité a étéreportée jusqu’à l’entrée en vigueur denouvelles dispositions législatives, et auplus tard jusqu’au 31 décembre 2016.

Le Conseil constitutionnel a statué enmai 2016 sur les droits des détenus, àl’occasion d’une QPC dirigée contre desdispositions issues de la loi pénitentiairedu 24 novembre 2009 et du code deprocédure pénale.

« La déclaration d’inconstitutionnalité aété reportée jusqu’à l’entrée en vigueur denouvelles dispositions législatives, et auplus tard jusqu’au 31 décembre 2016. »

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Un détenu téléphone à sa famille au centre pénitentiairede Bourg-en-Bresse.

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Fraude fiscaleM. Jérôme C. [Pénalités fiscales pour insuffisance de déclarationet sanctions pénales pour fraude fiscale] (décision n° 2016-546 QPCdu 24 juin 2016)

M. Alec W. et autre [Pénalités fiscales pour insuffisancede déclaration et sanctions pénales pour fraude fiscale] (Décision n° 2016-545 QPC du 24 juin 2016)

Peut-il y avoir, pour des mêmes faits,cumul de pénalités fiscales pourinsuffisance de déclaration, d’une part, etde sanctions pénales pour fraude fiscale,d’autre part ? C’est à cette question quele Conseil constitutionnel a répondu àl’occasion de deux QPC transmises par laCour de cassation – deux affairesdistinctes, mais qui posaient desquestions identiques.

de lutte contre la fraude fiscale justifientl’engagement de procédures complémen-taires dans les cas de fraude les plus graves.

Le Conseil a néanmoins formulé uneréserve en jugeant que le principe de néces-sité des délits et des peines impose que lessanctions pénales « ne s’appliquent qu’auxcas les plus graves de dissimulation frau-duleuse de sommes soumises à l’impôt ».Il a précisé que cette gravité peut résulterdu montant de la fraude, de la nature desagissements de la personne ou des circons-tances de leur intervention.

Le Conseil a par ailleurs rappelé que lemontant global des sanctions éventuelle-ment prononcées ne peut dépasser le mon-tant le plus élevé de l’une des sanctionsencourues.

Le Conseil constitutionnel ad’abord jugé que les sanctionsprévues – fiscales d’un côté,pénales de l’autre – étaient, prises

isolément, conformes à la Constitution. Cessanctions sont proportionnées aux incrimi-nations qu’elles répriment. Le Conseil acependant jugé qu’une sanction pénale pourfraude fiscale ne peut être appliquée à uncontribuable qui, pour un motif de fond, aété définitivement jugé non redevable del’impôt.

Concernant la question centrale, le Conseila déclaré le cumul de sanctions conformeà la Constitution. Il a jugé que les dispo-sitions contestées permettaient d’assurerensemble la protection des intérêts finan-ciers de l’État ainsi que l’égalité devantl’impôt, en poursuivant des finalités com-munes, à la fois dissuasive et répressive.Le recouvrement de l’impôt et l’objectif

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LES DÉCISIONS 2015-2016—

La loi du 6 août 2015 pour la croissance,l’activité et l’égalité des chanceséconomiques a notamment eu pour objetd’élargir les possibilités d’ouverture descommerces le dimanche. Elle a modifié lecode du travail afin de permettre auxmaires de supprimer, dans la limite dedouze fois par an – contre cinq fois dansl’état antérieur du droit –, le reposhebdomadaire dominical des salariés descommerces de détail.

le repos hebdomadaire dominical. Dansla capitale, cette compétence pour fixerles « dimanches du maire » revenait aupréfet de la région Île-de-France, préfet deParis.

C’est cette spécificité que contestait, parle biais d’une QPC, la Ville de Paris. Ellefaisait notamment valoir que les disposi-tions en cause du code du travail portaientatteinte au principe d’égalité entre collec-tivités territoriales.Le Conseil constitutionnel a fait droit àcette argumentation, en jugeant que lesdispositions contestées introduisaientune rupture injustifiée du principe d’éga-lité entre collectivités territoriales. Il aconsidéré qu’au regard de l’objet des dis-positions contestées, aucune différencede situation, ni aucun motif d’intérêtgénéral ne justifiait qu’à Paris ce pouvoirne soit pas confié au maire, comme dans l’ensemble des autres communes.

Le Conseil a donc déclaré les dispositionscontestées contraires à la Constitution.

Toutefois, à Paris, un dispositifparticulier avait été prévu : lecode du travail précisait que,contrairement aux maires des

autres communes de France, le maire deParis n’avait pas le pouvoir de supprimer

Travail dominicalVille de Paris [Dérogations temporaires au repos dominical dessalariés des commerces de détail à Paris] (décision n° 2016-547 QPCdu 24 juin 2016)

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Quartierde l'Opéradans le 9e arrondissementde Paris.

Le Conseil constitutionnel a été saisid’une QPC concernant les dispositions dulivre des procédures fiscales qui, tellesqu’interprétées de manière constante parla Cour de cassation, subordonnent lamise en mouvement de l’action publiquepour la répression de certainesinfractions fiscales au dépôt d’une plaintepréalable par l’administration.

Le requérant estimait qu’il enrésulte une méconnaissance duprincipe de séparation des pou-voirs et du principe d’indépen-

dance de l’autorité judiciaire.

Le Conseil constitutionnel a jugé qu’ildécoule du principe de l’indépendance del’autorité judiciaire, à laquelle appartien-nent les magistrats du parquet, un principeselon lequel le ministère public exercelibrement, en recherchant la protectiondes intérêts de la société, l’action publiquedevant les juridictions pénales.Au cas particulier, le Conseil a toutefoisjugé que les dispositions contestées, tellesqu’interprétées par la Cour de cassation,ne portent pas une atteinte disproportion-née à ce principe.

Le Conseil s’est fondé sur trois motifs.D’une part, une fois la plainte déposéepar l’administration, le procureur de laRépublique dispose de la faculté de déciderlibrement de l’opportunité d’engager despoursuites. D’autre part, les infractionspour lesquelles une plainte de l’adminis-tration préalable aux poursuites est exigéeconcernent des actes qui portent atteinteaux intérêts de l’État et causent un préju-dice principalement au Trésor public :ainsi, dans l’hypothèse où l’administration,qui est à même d’apprécier la gravité desatteintes portées à ces intérêts collectifsprotégés par la loi fiscale, ne dépose pasde plainte, l’absence de mise en mouve-ment de l’action publique qui en résultene constitue pas un trouble substantiel àl’ordre public. Enfin, la compétence pourdéposer la plainte préalable obligatoirerelève de l’administration, qui l’exercedans le respect d’une politique pénaledéterminée par le Gouvernement et dansle respect du principe d’égalité.

Le Conseil constitutionnel a donc déclaréconformes à la Constitution les disposi-tions contestées.

Infractions fiscalesM. Karim B. [Subordination de la mise en mouvement de l'actionpublique en matière d'infractions fiscales à une plainte del'administration (décision n° 2016-555 QPC du 22 juillet 2016)

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Ministère de l'Économie et des Finances à Paris Bercy.

LES DÉCISIONS 2015-2016—

Le Conseil constitutionnel a déclaréconformes à la Constitution la plupartdes dispositions de cette loi organique, àl’exception notamment des dispositionsrelatives aux nouvelles règles deréintégration des magistrats après undétachement, et de celles relatives auxmagistrats soumis à l’obligation de dépôtd’une déclaration de situationpatrimoniale.

Sur ce dernier point, le Conseil a jugéqu’au regard des exigences de pro-bité et d’intégrité qui pèsent sur lesmagistrats exerçant des fonctions

juridictionnelles et de l’indépendance quileur est garantie dans cet exercice, le légis-lateur a méconnu le principe d’égalité enlimitant l’obligation de déclaration de patri-moine à certains magistrats seulement. LeConseil a déclaré conforme à la Constitu-tion l’obligation de déclaration d’intérêtsfaite à l’ensemble des magistrats.

Par ailleurs, deux dispositions de la loiorganique concernaient le Conseil consti-tutionnel : l’une imposait le dépôt dedéclarations d’intérêts et de déclarationsde patrimoine à ses membres ; l’autreréformait les conditions de dépôt d’uneQPC en matière correctionnelle et contra-ventionnelle. Ces deux dispositions ontété censurées comme des « cavaliers »législatifs : elles ne relevaient pas de la loiorganique prévue pour les magistrats parl'article 64 de la Constitution mais de celleprévue spécifiquement pour le Conseilconstitutionnel par l'article 63.

Le Conseil a jugé conformes à la Consti-tution l’ensemble des autres dispositions,en particulier les règles suivantes : les pro-cureurs généraux ne seront plus nommésen Conseil des ministres ; les magistratsexerçant les fonctions de juge des libertéset de la détention seront nommés pardécret du Président de la République ; uncollège de déontologie distinct du Conseilsupérieur de la magistrature rendra desavis sur toute question déontologique indi-viduelle et examinera les déclarations d’in-térêts des magistrats qui lui sont soumises ;le principe de la liberté syndicale desmagistrats est consacré.

MagistratureLoi organique relative aux garanties statutaires, aux obligationsdéontologiques et au recrutement des magistrats ainsi qu’au Conseilsupérieur de la magistrature (décision n° 2016-732 DCdu 28 juillet 2016)

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École nationale de la Magistrature de Bordeaux.

La loi relative au travail, à lamodernisation du dialogue social et à lasécurisation des parcours professionnels,dite « loi travail », comprenait 123 articles. Les recours des sénateurset des députés se limitaient à contesterla procédure d’adoption de la loi et deuxde ses articles.

Sur la procédure d’adoption, leConseil constitutionnel a jugéqu’une seule délibération duConseil des ministres suffit pour

engager, lors des lectures successives d’unmême texte, la responsabilité du Gouver-nement qui en a délibéré. Les conditionsposées pour l’application de l’article 49,alinéa 3, de la Constitution ont donc étérespectées.

Sur le fond, le Conseil s’est prononcé surles deux articles dont il était saisi.Le premier prévoyait un droit à indemni-sation pour une organisation syndicalelorsqu’une collectivité territoriale lui retiredes locaux mis à sa disposition pendantplus de cinq ans, sans proposer de locauxde substitution. Le Conseil a jugé que l’in-demnité prévue ne pouvait excéder le pré-judice lié à la fin de la mise à dispositiondes locaux. Il a en outre censuré la portéerétroactive de ces dispositions, qui per-mettait qu’elles s’appliquent aux conven-tions de mise à disposition en cours.

Le second article dont le Conseil était saisiprévoyait la mise en place d’une instancede dialogue social, commune à l’ensembledu réseau, dans les réseaux de « franchi-sés » d’au moins 300 salariés en France.Il a été jugé que le législateur pouvait pré-voir cette instance, dotée seulement d’un

pouvoir de proposition. Le Conseil a tou-tefois formulé des réserves d’interprétationet prononcé une censure partielle sur cepoint (censure de la mise à la charge exclu-sive des franchiseurs des dépenses de fonc-tionnement de l’instance de dialoguesocial).

Quelques autres dispositions ont été cen-surées car adoptées selon une procédurecontraire à la Constitution (« cavaliers »ou « entonnoirs »). En revanche, le Conseilconstitutionnel ne s’est pas prononcé d’of-fice, bien qu’il en ait la faculté, sur laconformité à la Constitution des autresdispositions de la loi dont il n’était passaisi. Elles pourront, le cas échéant, fairel’objet de QPC.

Droit du travailLoi relative au travail, à la modernisation du dialogue social et à lasécurisation des parcours professionnel (décision n° 2016-736 DC du 4 août 2016)

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LES DÉCISIONS 2015-2016—

La « loi biodiversité » comprenait 174 articles. Le Conseil constitutionnelne s’est prononcé que sur les seuls quatre articles dont il était saisi par lessénateurs et députés. Il a jugé ces quatre articles, pour l’essentiel, conformesà la Constitution.

l’exemption de certaines règles pour lescessions d’espèces végétales appartenantau domaine public, réalisées à titre gratuitau profit d’utilisateurs qui n’entendentpas en faire une exploitation commerciale.

Quelques autres dispositions ont été cen-surées car adoptées selon une procédurecontraire à la Constitution (« cavaliers »ou « entonnoirs »). En revanche, le Conseilconstitutionnel ne s’est pas prononcé d’of-fice, bien qu’il en ait la faculté, sur laconformité à la Constitution des autresdispositions de la loi dont il n’était passaisi. Elles pourront, le cas échéant, fairel’objet de QPC.

Le Conseil a jugé conformes à laConstitution : le principe de « non-régression », de valeurlégislative, qui oblige à une amé-

lioration constante de la protection del’environnement compte tenu des connais-sances scientifiques du moment ; la miseen place d’une redevance sur l’exploitationde gisements en mer situés sur le plateaucontinental ou dans la zone économique exclusive ; l’interdiction des produits phy-topharmaceutiques contenant des subs-tances actives de la famille des « néoni-cotinoïdes », compte tenu des risquesqu’elles sont susceptibles d’emporter surl’environnement et la santé publique ;

BiodiversitéLoi pour la reconquête de la biodiversité, de la natureet des paysages (décision n° 2016-737 DC du 4 août 2016 )

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Rivière du Jura.

Actioninternationaleet événements

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Le cœur de la mission duConseil constitutionnel estde rendre la justice. Mais sonactivité ne se limite pas à cetaspect juridictionnel. Sur leplan international, le Conseildéveloppe de nombreuxéchanges avec lesjuridictions étrangères,notamment au sein del’Union européenne et del’espace francophone : le « dialogue des juges » estune nécessité dans le monded’aujourd’hui. Par ailleurs, leConseil est soucieuxd’ouverture sur l’extérieur,en organisant chaque annéede nombreux événementsqui permettent d’accueillirétudiants, universitaires,professionnels du droit, etau-delà. Le Conseilconstitutionnel est uneinstitution ouverte, aux plansnational et international.

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L’ACTION INTERNATIONALE—

L’action internationale du Conseilconstitutionnel est conduite par leprésident et les membres duConseil constitutionnel. Le Conseil constitutionnel a denombreux échanges avec les coursconstitutionnelles étrangères dansun cadre bilatéral ou multilatéral. Ces échanges contribuent aunécessaire dialogue des juges.

Dans un cadre bilatéral, le président et les membresdu Conseil constitutionnel reçoivent régulièrementleurs homologues étrangers et se déplacent au sein descours étrangères. Ces rencontres permettent aux jugesconstitutionnels de tisser des liens plus étroits, de réflé-chir en commun à leurs jurisprudences et d’inscrireleurs décisions dans un contexte international enconstante mutation.

De nombreuses autres personnalités étrangères (repré-sentants de hautes juridictions, parlementaires, per-sonnalités d’avenir, professionnels du droit…) sontégalement accueillies au Conseil constitutionnel. Ceséchanges sont organisés en lien avec le ministère desAffaires étrangères et du Développement international,le service des affaires européennes et internationalesdu ministère de la Justice, le Conseil d’État…

Dans un cadre multilatéral, le Conseil constitutionnelest membre de nombreuses instances internationalestelles que la Commission européenne pour la démo-cratie par le droit (dite « Commission de Venise »), laConférence des cours constitutionnelles européennes,la Conférence mondiale sur la justice constitutionnelle.

Le Conseil constitutionnel entretient aussi deséchanges réguliers avec les juridictions européennes(Cour européenne des droits de l’homme e et Courde justice de l’Union européenne).

Il alimente tout au long de l’année la base de donnéesde jurisprudence constitutionnelle CODICES du Conseilde l’Europe en résumant ses décisions et en les indexant,permettant ainsi une recherche par mots clés en françaiset en anglais, accessible dans le monde entier.

Le Conseil constitutionnel héberge par ailleurs lesecrétariat général de l’Association des cours consti-tutionnelles ayant en partage l’usage du français(ACCPUF) dont il est membre de droit. Créée en1997 à son initiative afin de renforcer les liens entreles membres de l’espace francophone, l’ACCPUF rrassemble aujourd’hui 48 cours constitutionnelleset institutions équivalentes d’Afrique, d’Europe,d’Amérique et d’Asie.

Toutes ces actions permettent au Conseil constitu-tionnel d’être internationalement connu et de s’en-richir constamment de l’expérience de ses homo-logues. Ces échanges sont plus que jamais nécessairesà l’approfondissement de l’État de droit et à la pro-tection des droits de l’homme.

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Le président Laurent Fabius s’est rendu àStrasbourg le 3 juin 2016, à l’invitation duprésident de la Cour européenne desdroits de l’homme (CEDH), Guido Raimondi.

Dans les semaines qui ont suivi sa nomination à latête du Conseil constitutionnel, le président LaurentFabius a été invité par ses homologues italien, PaoloGrossi, britannique, Lord Neuberger of Abbostbury,allemand, Andreas Vosskuhle, pour des entretiensbilatéraux. Guido Raimondi, président de la Coureuropéenne des droits de l’Homme (CEDH), et KoenLenaerts,  président de la Cour de justice de l'Unioneuropéenne (CJUE), se sont également entretenusavec le président Fabius. Parallèlement, il a reçu au Conseil constitutionnel Jean Spreutels, pré-sident de la Cour constitutionnelle de Belgique, Gil-bert Kolly, président du Tribunal fédéral suisse etprésident de l'ACCPUF, Beverley McLachlin, jugeen chef du Canada.

Les membres du Conseil constitutionnel entretiennentdes contacts privilégiés avec leurs homologues de laCommission de Venise et de l’Association des coursconstitutionnelles ayant en partage l’usage du français(ACCPUF). En outre, des juges ou parlementairesétrangers sont reçus régulièrement au Conseil consti-tutionnel comme  récemment Maria Macarena Gel-man, députée uruguayenne, ou Lee Jinsung, juge dela Cour constitutionnelle de Corée du Sud.

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« Toutes ces actionspermettent au Conseil des’enrichir constamment del’expérience de seshomologues. Ces échangessont nécessaires àl’approfondissement de l’Étatde droit et à la protectiondes droits de l’homme. »

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Nicole Belloubet, membre du Conseil con-stitutionnel, au Bureau de l’ACCPUF, Cour constitutionnelle de Belgique, Bruxelles, les 4 et 5 février 2016.

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LES GRANDS ÉVÉNEMENTS DE L’ANNÉE —

Colloques, salons, concours…Chaque année, plusieursmanifestations sont l’occasion pourle Conseil constitutionnel d’ouvrirses portes et d’accueillirnotamment  les professionnels dudroit, les universitaires et lesétudiants. Ces échangescontribuent au rayonnement duConseil constitutionnel.

- 1 -HOMMAGE À ROBERT BADINTER

Le 27 juin 2016, le président Laurent Fabius aaccueilli au Conseil constitutionnel la cérémonie deremise de l’ouvrage L’exigence de justice édité parDalloz en l'honneur de Robert Badinter. e

- 2 -LE CONCOURS VEDEL

Le concours Vedel, parrainé par le Conseil constitu-tionnel, est organisé chaque année par les éditions Lex-tenso. Il est destiné à récompenser les deux meilleuresplaidoiries, l'une en défense, l'autre en demande, surune question prioritaire de constitutionnalité.

La 6e édition du concours Vedel, ouvert aux étu-diants de Master II, s’est tenue le 19 mai dernierau Conseil constitutionnel. À cette occasion, le prixde la meilleure plaidoirie de la question prioritairede constitutionnalité a été attribué à l'équipe del'université Paris 1 Panthéon-Sorbonne pour lesdemandeurs et à l'équipe de l'université de Mont-pellier pour les défendeurs.

- 3 -LES JOURNÉES DES RÉSEAUX

DE L’ORGANISATION INTERNATIONALEDE LA FRANCOPHONIE (OIF)

Les 31 mai et 1er juin 2016, le Conseil constitutionnela accueilli les Journées institutionnelles des réseauxde la Francophonie organisées par l'OIF. Aujourd’hui,seize réseaux institutionnels travaillent au service dela promotion de la paix, de l’état de droit et desdroits de l’homme.

En présence notamment de Michaëlle Jean, Secrétairegénérale de la Francophonie, et de nombreuses personnalités, le président Laurent Fabius a ouvertles travaux.

Les évolutions et thèmes majeurs enregistrés dans l'es-pace francophone ont été abordés par des grandstémoins comme Fatimata Bazeye, ancienne présidentede la Cour constitutionnelle du Niger, François Cré-peau, rapporteur spécial des Nations Unies sur lesdroits de l'homme des migrants, Cheikh Tidiane Gadio,ancien ministre des Affaires étrangères du Sénégal, pré-sident de l’Institute for PanAfrican Strategies, le GénéralSiaka Sangaré, délégué général aux élections du Mali,président du RECEF.

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- 4 -LE PRIX DE THÈSE 2016

Le prix de thèse du Conseil constitutionnel permetà celui-ci de soutenir les travaux universitaires relatifsà la justice constitutionnelle par l'attribution d'unesubvention à la publication de thèses.

Depuis 1997, un jury, composé de membres duConseil constitutionnel et d'universitaires, se réunitchaque année sous la présidence du président duConseil constitutionnel.

Le vingtième jury a attribué le prix de thèse du Conseilconstitutionnel 2016 à la thèse de Sylvie Salles inti-tulée « Le conséquentialisme dans la jurisprudencedu Conseil constitutionnel ».

- 5 -LE PRIX CARCASSONNE

Pour la troisième année consécutive, le Club desjuristes, en partenariat avec le journal Le Monde etla revue Pouvoirs rendent hommage à Guy Carcas-sonne, constitutionnaliste reconnu, avec le prix GuyCarcassonne.

Celui-ci est destiné à récompenser un auteur de moinsde 40 ans d'un article sur une question juridique liéeà l'actualité française ou étrangère. Il doit aider àfaire comprendre au plus grand nombre les enjeuxjuridiques, politiques, sociaux posés par une questionconstitutionnelle.

Les deux lauréats, Cédric Martins et Jérémy Kalfon,élèves avocats à Paris ont reçu le prix au Conseilconstitutionnel le 26 mai 2016, remis par le président Laurent Fabius et Olivier Duhamel.

- 6 -LE SALON DU LIVRE JURIDIQUE

Le 10 octobre 2015 s’est tenu le salon du livre juridique,organisé conjointement par le Conseil constitutionnelet le Club des juristes (think tank juridique). Le salondu livre juridique rassemble chaque année après larentrée universitaire, les éditeurs juridiques, les auteurs,les étudiants, et les professionnels du droit. r

De nombreux auteurs sont présents tout au long dela journée pour présenter leurs ouvrages, rencontrerle public et dédicacer leurs livres.

Lors de cette journée, le Prix du livre juridique et lePrix de la pratique juridique y sont décernés. Ilsrécompensent un ouvrage juridique et un ouvrage àdestination des praticiens du droit, parus au coursdes douze derniers mois.

La dernière édition a primé pour le Prix du livre juri-dique 2015 l’ouvrage Droit du commerce internationalet des investissements étrangers, de Mathias Audit, Syl-vain Bollée et Pierre Callé. Le Prix du livre de la Pratiquejuridique, a été décerné ex aequo à deux ouvrages : LeGuide du Comité d’hygiène, de sécurité et des condi-tions de travail (CHSTC), de Pierre-Yves Verkindt,Laurence Pécaut-Rivolier et Grégoire Loiseau, paruaux éditions Dalloz ; et Informatique et libertés – Laprotection des données à caractère personnel en droitfrançais et européen, d’Anne Debet, Jean Massot etNathalie Metallinos, paru aux éditions Lextenso.

Les étudiants en droit peuvent quant à eux participerau tirage au sort de « pack-livres étudiant » et remporterune sélection de livres pour l'année universitaire, enfonction de chaque niveau d'études (du L1 au doctorat).

La dernière édition a réuni plus de 2 000 personnes ;la prochaine est prévue pour le 8 octobre 2016.

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2017 : ANNÉE D’ÉLECTIONS—

En 2017, pour la première foisdepuis 1958, se tiendront la mêmeannée l’élection présidentielle, les élections législatives et des élections sénatoriales. Le Conseil constitutionnel est chargé du contrôle des élections nationales. L’élection présidentielle de 2017sera la onzième sous la Ve République. Les deux tours de scrutin sont prévus les 23 avrilet 7 mai 2017.

- 1 -AVANT L’ÉLECTION

Le Conseil constitutionnel est consulté sur l’ensembledes actes et textes préparatoires à l’élection prési-dentielle. Il arrête le formulaire de parrainage. Il s’as-sure avec le ministère de l’Intérieur du recensementnational des votes. Il désigne ses délégués (près de 1 500 magistrats) pour contrôler les bureaux de vote.

- 2 -PENDANT L’ÉLECTION

Lors du scrutin, au premier comme au second tour, lesdélégués du Conseil constitutionnel contrôlent le fonc-tionnement des 65 000 bureaux de vote situés sur leterritoire national et à l’étranger. Les difficultés ou irré-gularités sont inscrites dans les procès-verbaux qu’ilsétablissent et transmettent au Conseil constitutionnel.

Le Conseil constitutionnel recense les votes et déclareles résultats du premier tour. À l’issue du second tour,il proclame le candidat élu.

- 3 -APRÈS L’ÉLECTION

Le Conseil constitutionnel examine les contestationsqui portent sur la régularité de l’élection présidentielleet celles qui sont relatives aux comptes de campagne.

S'agissant des élections législatives et sénatoriales,le Conseil constitutionnel est en charge de leurcontentieux.

Les élections législatives se tiendront les 11 et 18 juin 2017. Les élections sénatoriales sont prévuesle 24 septembre 2017.

LesparrainagesLe Conseilconstitutionnelreçoit les « parrainages » des personneshabilitées àprésenter descandidats àl’élection

présidentielle. Plusde 40 000 éluspeuvent« parrainer » uncandidat. Un élu nepeut parrainerqu’un seulcandidat. 500parrainages sontnécessaires pourêtre candidat, sousréserve qu’ils

proviennent d’aumoins trentedépartements oucollectivitésd’outre-mer et qu’iln’y en ait pas plusde 50 pour unmêmedépartement ou collectivitéd’outre-mer. La période d’envoi

des parrainages auConseilconstitutionneldure troissemaines. En 2017,pour la premièrefois, le Conseilconstitutionnelrendra publiquependant cettepériode, deux foispar semaine, la

liste des élus quiauront valablement« parrainé » uncandidat. Le Conseilconstitutionnelvérifie la validitédes parrainages. Ilétablit la liste descandidats àl’électionprésidentielle.

Article 58 de la Constitution :« Le Conseil constitutionnelveille à la régularité del’élection du Présidentde la République. Il examineles réclamations et proclameles résultats du scrutin ».

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Septembre 2016 - Document édité par le Conseil constitutionnel - 2, rue de Montpensier 75 001 Paris Directeur de publication : Laurent Fabius - Coordination éditoriale : Anne de BlicConception et réalisation : Agence Cito - Impression : La Rochelaise Crédits photos : Benoit Teillet (couverture, p.2, p.3, p.5, p.9, p.10, p.11, p.12, p.13, p.16, p.20, p.21, p.23, p.24, p.25, p.37, p.45, p.50) ;Didier Plowy (p.3, p.8, p.62) ; Istock (p.31, p.32, p.33, p.34, p.41, p.43, p.44, p.46, p.47, p.52, p.54, p.56) ; Shutterstock (p. 30) ;Kiev.Victor / Shutterstock.com (p. 39) ; AFP / Éric Feferberg (p. 40) ; AFP / Jean-Sébastien Evrard (p. 48) ; AFP / Jean-Philippe

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