mémoire de master ii - atddlgeo-ucad.org · 2 dédicace je dédie ce travail à : mon défunt...

71
1 DEPARTEMENT DE GEOGRAPHIE Mémoire de Master II Master II : Aménagement du Territoire, Décentralisation, Développement Local (ATDDL) Préparé par : Pierre Joseph DIATTA Sous la direction de : M. Amadou Diop ,Maitre de conférences ANNEE ACADEMIQUE 2012 - 2013 THEME : Gestion décentralisée des litiges fonciers au Sénégal : cas de la Communauté rural de Kafountine UNIVERSITE CHEIKH ANTA DIOP Dakar

Upload: phamque

Post on 14-Sep-2018

262 views

Category:

Documents


1 download

TRANSCRIPT

1

DEPARTEMENT DE GEOGRAPHIE

Mémoire de Master II

Master II : Aménagement du Territoire,

Décentralisation, Développement Local

(ATDDL)

Préparé par :

Pierre Joseph DIATTA

Sous la direction de :

M. Amadou Diop ,Maitre de conférences

ANNEE ACADEMIQUE 2012 - 2013

THEME : Gestion décentralisée des litiges fonciers au

Sénégal : cas de la Communauté rural de Kafountine

UNIVERSITE CHEIKH ANTA DIOP

Dakar

2

Dédicace

Je dédie ce travail à :

Mon défunt père Gérôme Malang DIATTA, ma référence

A ma maman chérie Célestine Mousso DIATTA

A ma tante Marie Thérèse DIATTA (Dadou)

A mes frères et sœurs de Katila

A Awa Madeleine DIATTA

A mes cousins et voisins au campus social de l’UCAD en première année : Fulbert

Souleymane DIATTA et Ibrahima Nicola DIATTA

A tous les membres de l’AMFOK (Amicale des Elèves et Etudiants du Fongny daibang et

Karone)

A tous les membres de L’ARH (Amicale des ressortissants de Hilol)

A tous les membres du RENAD (Réseau National des Acteurs du Développement

A mon ami et frère Mamour NDIAYE

A Mouhamed DIATTA

A tous les camarades avec qui j’ai partagé les salles de classe (primaire, secondaire)

A toutes ces personnes,

Nous dédions ce modeste travail qui boucle notre second cycle à l’université.

3

Remerciements

Au Pr. Amadou DIOP, merci d’avoir accepté de superviser ce travail. Vos compétences, votre

simplicité, vos qualités humaines, le travail que vous abattez pour donner aux étudiants une

formation de qualité et votre vision font de vous un universitaire de renommé, digne d’estime.

Trouvez ici l’assurance de notre reconnaissance et notre respectueuse admiration.

A tous les professeurs et professionnels qui ont intervenu au cours de ce Master. Nous vous en

sommes reconnaissants pour toutes les connaissances et les outils que vous nous avez donnés

et qui nous seront d’un apport considérable pour notre vie professionnelle et universitaire.

A mes frères Henry DIATTA et David Sakono Diatta sans qui je ne serais pas à ce niveau des

études. Votre soutien moral et financier depuis le décès de notre papa m’a permis de

poursuivre mes études. Merci !

A mes frères Philippe, Eric, Bruno,Oscar, Raphael, Daniel, Théophil et à mes sœur Nadine,

Nely, Anika, Rosine, Rose, Amy Agnès bref toute la famille Katila

A mes camarades, collègues de la promotion ATDDL 2013, votre sens du travail en équipe,

votre esprit d’échange et de partage a été d’un apport capital aussi bien pour ce TER que dans

la formation. Je vous remercie et vous assure que ça été un grand plaisir de partager avec vous

cette année universitaire qui restera gravé dans mes souvenir.

A toutes les personnes que j’ai rencontré dans mon champ de recherche : les chefs de villages,

les PCR (anciens et l’actuel), l’ASCOM, je salut votre ouverture, votre compréhension et

votre disponibilité.

4

Liste des sigles, acronymes et abréviations

ANCAR : Agence Nationale de Conseil Agricole et Rural

APAD : Association des Planteurs de l’Arrondissement de Kataba 1

ASCOM : Assistant Communautaire

CADL : Centre d’Appui au Développement Local

CCL : Code des Collectivités Locales

CERP : Centre d’Expansion rurale Polyvalent

CL : Collectivité Locale

CR : Communauté rurale

CRK : Communauté Rurale de Kafountine

ENEA : Ecole nationale d’Economie Appliquée

IDEP : Institut de Développement Economique et de Planification

IRD : Institut de Recherche et de Développement

MFDC : Mouvement des Forces Démocratiques de la Casamance

OCB : Organisation communautaire de Base

ONG : Organisation Non Gouvernementale

PLD : Plan Local de Développement

PLHA: Plan Local de L’hydraulique et de l’Assainissement

RGHP : Recensement Général de la Population et de l’Habitat

ROK : Réserve Ornithologique de Kalissaye

UCAD : Université Cheikh Anta Diop de Dakar

UGB : Université Gaston Berger de Saint Louis

UNICEF : Fond des Nations Unies pour l’Enfance

5

Sommaire

Dédicace………………………………………………………………………………..1

Remerciements………………………………………………………………………….2

Liste des sigles, acronymes et abréviations…………………………………………....3

Sommaire……………………………………………………………………………….4

Avant-propos……………………………………………………………………………5

Introduction………………………………………………………………………………6

Première partie : Cadre théorique, opératoire et méthodologique………………………10

Chapitre I : Cadre théorique……………………………………………………………..11

Chapitre II : Cadre opératoire……………………………………………………………18

Chapitre III : Cadre méthodologique……………………………………………………..23

Deuxième partie : Gestion décentralisée du foncier et des litiges fonciers dans la Communauté

rurale de Kafountine (CRK)………………………………………………………………32

Chapitre I : Les dynamiques de développement de la CRK………………………………33

Chapitre II : Décentralisation et gestion foncière au Sénégal ; cas d’application de la

CRK…………………………………………………………………………………………41

Chapitre III : Litiges fonciers dans la CRK : causes, manifestations et conséquences……56

Conclusion générale et perspectives………………………………………………………..62

Bibliographie…………………………………………………………………………………65

Tables des matières…………………………………………………………………………..68

6

Avant-propos

Pour boucler notre cycle de master, nous avons porté notre option sur le Master ATDDL

(Aménagement du Territoire, Décentralisation, Développement local), pour deux raisons

essentielles : acquérir les connaissances et les outils nécessaire à l’exerce des métiers du

développement et aussi pour bénéficier des apprentissages de l’analyse propre à la recherche.

On est ainsi amené à réaliser ce TER qui porte sur le thème : Gestion décentralisée des litiges

fonciers au Sénégal ; cas de la communauté rurale de Kafountine (CRK). Le travail ainsi

effectué a permis d’aborder les quatre temps de la recherche : construction d’un objet

d’étude ; élaboration d’une problématique et des hypothèses ; l’observation et la collecte des

données, le traitement et l’interprétation des résultats. Différents outils, techniques et

méthodes de collectes et de traitement de données ont aussi été utilisés pour la réalisation de

ce TER. Ce modeste travail est une contribution à la production scientifique dans la CR. Ainsi

nous avons pu déterminer les déterminants des litiges fonciers à savoir les dynamiques de

développement rural qui se traduisent évidemment sur le foncier, il s’agit de : l’accroissement

de la population, le développement de nouvelles activités agricoles, de la pêche et du

tourismes et aussi du dualisme droit moderne droit traditionnel et ensuite faire un état des

lieux de la gestion décentralisée du foncier, appréhender comment les litiges fonciers sont

gérés dans les différents échelons de la communauté rurale et les acteurs impliqués dans la

résolution des conflits et enfin aborder les conséquences des litiges fonciers dans la CRK. Ces

différentes questions abordées posent l’urgence de trouver une réponse à la problématique de

la gestion du foncier afin de pouvoir réduire considérablement les litiges et de voir également

comment mettre en place des mécanismes de gestion des litiges en prenant en compte les

manières locales de résolution des litiges.

7

Introduction

Les politiques de décentralisation sont apparues en Afrique et particulièrement en Afrique

francophone au lendemain des indépendances. Elles relèvent d’une nouvelle vision (la

décentralisation) de la gouvernance inscrite dans une logique de rupture avec le jacobinisme.

Elle se traduit par le transfert de pouvoir et de compétences à des collectivités territoriales.

Ainsi, les Etats fédéraux et les Etats unitaires décentralisés ont transféré à leurs collectivités

locales certaines compétences qui jusque là étaient dévolues à l’Etat. C’est dans cette

perspective que la gestion du foncier fut décentralisée au niveau des échelons territoriaux.

Le foncier est cependant caractérisé par une succession de droit. Avant la période coloniale, il

était régit par un droit coutumier distinct d’un pays à un autre et d’une communauté à un

autre. Pendant l’époque coloniale, les pouvoirs coloniaux ont tenté de substituer le droit

coutumier par un droit « de propriété privé » qui était paradoxal aux conceptions autochtones

bref aux réalités locales, et, qui visait essentiellement la satisfaction des intérêts du

colonisateur. Au lendemain des indépendances, les Etats africains ont engagés des réformes

foncières qui avaient pour but de prendre en compte la conception « négro africaine » du

foncier, mais force est de constater, qu’ils s’inscrivaient toujours dans la conception

bourgeoise, occidentale du foncier, dans la mesure ou l’Etat est considéré comme le

propriétaire de tout.

Les populations locales qui se sont opposées au droit moderne depuis donc les colons

continuent à s’opposer au droit « légitime », « positif » instauré par les Etats africains

indépendants. Et ce, malgré la gestion qui est maintenant confiée à des pouvoirs locaux élus

par les populations et devant rendre compte à celles-ci. La problématique de la législation

conjuguée avec les nombreux enjeux sur le foncier surtout rural : changement des systèmes

d’activités, accroissement de la population qui se traduisent par un besoin croissant de terre

ont accru considérablement l’insécurité foncière et engendré des litiges et des conflits.les

pouvoirs locaux que l’on a confié cette tâche de la gestion du foncier sont confrontés à un

maque de dispositif, de moyens matériels et technique. Dans ce contexte des initiatives

consistant à reconnaissance des droits coutumiers ont été expérimentées dans certains pays

d’Afrique francophone pour tenter d’apporter des solutions à la gestion du foncier gage des

litiges et conflits auxquels il est assujetti. IL s’agit entre autre du PFR (Plan Foncier Rural), ce

plan vise à identifier, recenser et cartographier le droit foncier « tel que reconnu ou exprimé

par les populations ». Après ce travail les droits recensés doivent faire l’objet d’une

8

reconnaissance juridique. Ce plan a été expérimenté en Cote d’Ivoire puis au Bénin, en

Guinée et au Burkina. Cet outil de clarification du jeu foncier passe pour la réduction de

l’insécurité foncière qui alimente les litiges fonciers qui gangrènent aujourd’hui le foncier en

Afrique.

L’inadaptation des réformes foncières aux réalités sociales des pays explique la situation de la

superposition des droits ou du dualisme droit «coutumier »- droit « moderne » et des

problèmes liés à la gestion qui caractérise le foncier de ces pays. Conscient donc de cette

situation et des mutations sociales, économiques qui ont pour toile de fond le foncier, les

gouvernements des pays africains et leurs partenaires se sont engagés dans de nouvelles

réformes afin d’apporter des solutions durables à la problématique du foncier.

Au Sénégal une Commission National de Réforme Foncière (CNRF) est mise en place depuis

décembre 2012. Le domaine national est au cœur de la réforme. La commission dirigée par

maitre Doudou Ndoye a pour mission de « procéder à la vérification de toutes les occupations

du domaine national ». La question de la gestion concrète et consensuelle de la réforme

foncière est aujourd’hui un impératif, eu égard aux nombreux enjeux qui impactent sur la vie

des populations. La loi 64-46 du 17 juin 1964 relative au domaine national instaurée quatre

(4) ans après l’indépendance du Sénégal a longtemps été agitée, mais elle s’est confrontée à

des difficultés d’application du fait de l’inachèvement de son opérationnalisation et du fait

qu’elle n’a jamais été acceptée par les populations. Cependant, même si elle avait pour

ambition de revenir de la conception bourgeoise au droit négro africain, elle a tout de même

retiré aux populations leur droit coutumier au profit d’un simple droit d’usage révocable en

cas de non mise en valeur de leurs terres.

Les trois (3) ordres collectivités locales : région ; commune et communauté rurale dont

disposent le Sénégal, vont hériter de cette compétence. Vue donc la complexité de la tâche et

le manque de moyens matériels, techniques et humains dont elles font objet, ces collectivités

peinent à assurer certaines de leurs missions. L’ancien maire de Rufisque maitre Mbaye

Jacques Diop disait à l’époque qu’on leur avait transféré des compétences à problème.

Dans un tel contexte caractérisé par une pluralité de normes le foncier se voit assujetti à de

multiples tensions et ce surtout dans les communautés rurales où pratiquement toutes les

activités reposent sur le foncier.

9

La CR de Kafountine fait parti des CR les plus confrontées aux problèmes de litiges fonciers.

Ceci est du à sa position géographique, mais aussi à sa vocation à la fois agricole, touristique

et de pêche. L’ensemble de ces différentes activités conjugué à l’accroissement de la

population justifie les tensions et conflits liés à l’accès à la terre. Cependant le foncier est

encore régit par le droit coutumier. Les populations qui n’avaient jamais accepté la loi sur le

domaine national considèrent la terre comme un bien qui leur a été légué par leurs ancêtres, la

terre des aïeux qui a un caractère et une valeur sacré. Leur rapport et leur attachement profond

à cet héritage ne pouvait être interrompu du jour au lendemain. La gestion traditionnelle de la

terre prévaut encore sur une bonne partie de la CR, elle est pourtant un noyau faible parce

qu’elle n’a pas une basse de données écrite donc durable, ce qui fait qu’elle est source de

litiges dans les zones ou les enjeux sur la terre sont importants. Dans de pareilles zones aussi

se développe de nouvelles pratiques telles que le marchandage des terres qui n’est ni

coutumier ni légal aux yeux de la loi sur le domaine national. C’est un mode de transaction

très courant aujourd’hui et qui entraine des litiges avec les ventes multiples du même terrain.

Le conseil rural qui a un pouvoir très limité se contente de délivrer des affectations de

parcelles à ceux là qui ont acquis leur terrain moyennant une somme d’argent et qui cherchent

à sécuriser leur parcelle. Le rôle du conseil rural est relative faible dans la mesure où le

foncier est gérer par les autochtones. La gestion des litiges fonciers relève en grande partie

des instances locales (coutumières), mais aussi du conseil rural et de la justice. Les

populations font recourt à l’instance qui légitime leurs droits fonciers. On note ainsi que les

litiges induits par la gestion traditionnelle c'est-à-dire un litige relevant des différents droits

traditionnelles ou qui oppose des individus qui fondent leurs droits sur le droit coutumier sont

résolus par une instance locale, les litiges dus aux nouvelles transactions ou le conseil rural a

été impliqué sont résolus au niveau de celui-ci et quand ils relèvent de droit ni fondé sur le

domaine national, ni fondé sur la législation coutumière, la justice devient le recourt. Ces

litiges fonciers engendrent aujourd’hui des conséquences sur la cohésion sociale, la solidarité

de proximité et sur la valorisation économique de certains espaces. Ils impactent de façon

générale sur le développement de la collectivité locale.

10

CARTE1 : localisation de Kafountine

11

Première partie :

Cadre théorique,

Opératoire et

Méthodologique

12

Chapitre I : cadre théorique

1. Problématique :

Le Sénégal s’est engagé depuis son indépendance dans une politique de décentralisation. A la

gestion naguère centralisée se substitue une gestion décentralisée. Ce processus consiste en un

double mouvement : d’une part redistribuer les compétences afin de régler les problèmes au

niveau où ils se posent concrètement, d’autre part impliquer les citoyens dans l’exercice

touchant à leur avenir.

Dans cette dynamique la politique de décentralisation est alliée à la politique foncière. Les

communautés rurales créées en 1972 suite à la réforme administrative territoriale introduite

par la loi 72-25 du 19 avril 1972 décident de l’affectation et de la désaffectation des terres

sous réserve de l’approbation de la décision par le préfet. Cette réforme représente le premier

acte de la décentralisation au Sénégal, elle traduit la volonté manifeste du pouvoir central de

faire participer les populations locales à la gestion des affaires de leur terroir.

Initié en 1996 par la loi n*96-07 du 22 mars 1996 le deuxième acte phare de la

décentralisation crée la région et transfère neuf (9) domaines de compétences aux

collectivités locales dont les domaines. Le décret 96 1130 du 27/12/1996 portant transfert de

compétences en matière de gestion et d’utilisation du domaine privé de l’Etat du domaine

public et du domaine national renforce les pouvoirs des conseils en matière de gestion du

domaine national.

En effet, le sol sénégalais est divisé en trois ensembles domaniaux (Joel Turbe Schawachtger,

2008) :

-le domaine national 95% du sol est régi par la loi du 17 juin 1964 (l’Etat n’est propriétaire

mais le détient pour le compte de tous)

- le domaine de l’Etat 3% du sol, est divisé en public et privé

-le domaine des particuliers 2% (il s’agit de la propriété privé soumise au régime de

l’immatriculation).

La loi n° 64-46 du 17 juin 1964 crée un vaste domaine national. Elle précise en son article 1

que : « constitue de plein droit le domaine national, toutes les terres non classées dans le

domaine public, non immatriculées et dont la propriété n’a pas été transcrite à la Conservation

13

des hypothèques à la date d’entrée en vigueur de la présente loi. Ne font pas non plus partie de

plein droit du domaine national, les terres qui, à cette même date, font l’objet d’une procédure

d’immatriculation au nom d’une personne autre que l’Etat ». Ce dernier est subdivisé en

quatre (4) zones : zones urbaines, zones des terroirs, zones pionnières et zones classées.

Cette loi régit l’essentiel du foncier sénégalais, mais elle cohabite avec le régime de la

propriété privé et de la propriété de l’Etat.

La communauté rurale est depuis 1972 impliquée dans la gestion du foncier, la réforme de

1996 viendra en suite renforcer ces pouvoirs en matière de gestion du domaine national. Ces

terres concernent essentiellement les zones des terroirs qui regroupent les terres de l’habitat

rural, les terres de culture, les terres de pâturage, les terres de parcours, les boisements

régulièrement utilisés, les terres en friche jugées nécessaires à son extension (article 2 du

décret n° 64-573 du 30 juillet 1964). Elles constituent 54% du domaine national et sont celle

qui nous intéresse particulièrement dans cette étude.

Les terres du domaine national sont inaliénables, elles n’appartiennent pas non plus à l’Etat

qui les détient pour l’intérêt de tous. A partir donc de ce moment, les paysans ne disposent

que d’un droit d’usage.

Le conseil rural a pour prérogative en matière foncière l’affection et la désaffectation ainsi

que le règlement des litiges fonciers.

Malgré la législation et la gestion décentralisée qui sont instaurée les litiges fonciers

continuent de subsister et se sont même accrus sur plusieurs parties du territoire national. Il se

pose la question quels sont les déterminants des conflits et comment est ce qu’ils sont gérés

dans ces différents endroits ? La nouvelle loi est sensée remplacer le mode de gestion

traditionnel. Et face à des populations restées attacher à des pratiques locales, la loi peine à

s’implanter. Sans au tant s’imposer la nouvelle législation foncière va fragiliser le droit

traditionnel. Le Roy soutient, à cet effet, que la substitution du modèle « archaïque » africain

par le modèle moderne capitaliste n’est ni achevé ni achevable à vie humaine ».

Le foncier sénégalais souffre du dualisme entre droit moderne et droit traditionnel. Dans le

monde rural, les communautés les plus conservatrices gardent leur mode de gestion

traditionnelle du foncier. La terre appropriée par le droit de feu, de la hache et du sabot est

transmise de génération en génération donc d’une façon lignagère. Chaque famille a sur

l’autorité du chef de famille des droits éminents sur son patrimoine foncier. Ce mode de

14

gestion traditionnelle est aujourd’hui à l’origine de nombreux conflits. Dans cette gestion les

terres appropriées par un lignage depuis des siècles restent les terres de la famille, même si

elles sont devenues des terres en friche. Le prêt qui dure plusieurs générations entraine aussi

des conflits. Et dans les zones ou la droit moderne est plus influent, la cohabitation entre les

deux droit se traduit par des abus qui induisent de nouvelles pratiques, telles que les

transactions financières, les locations de terrain. Abondant dans le même sens Marie Claude

Maurel estime que « le territoire a une mémoire et que toute nouvelle loi foncière en se

superposant aux lois antérieurs crée des difficultés juridiques parfois inattendues en favorisant

l’émergence de nouvelles catégories d’ayants droit»1. On assiste dès lors à une pluralité de

normes favorable à des situations de conflits.

Les conseils ruraux chargés de la gestion du foncier dans les communautés rurales sont pour

la plus part dépourvus de ressources (humaines et matérielles) leur permettant d’assurer la

tache.

Les évolutions récentes liées au changement des systèmes d’activités et l’accroissement de la

population entrainent une compétition sévère pour l’accès à la terre, et ce, surtout dans les

zones stratégiques (zones côtières, zones à proximité des grands aménagements, zones à forte

vocation agricole). Au Sénégal, en dehors des conflits fonciers qui opposent souvent les

agriculteurs et les éleveurs dans le bassin arachidier, et là, ils sont liés à un problème de

délimitation des parcours d’élevage, les conflits en matières foncières sont plus élevés sur la

petite cote, la grande cote, dans les zones à vocations agricole comme à Sangualkam et dans

la zone de la vallée du fleuve Sénégal où il y’a les grands aménagements. Dans le littoral sud

les zones de Kaps kring et de Kafountine sont les zones côtières les plus stratégiques et elles

sont aussi des zones de tensions et de conflits fonciers.

La compétition croissante pour l’accès à la terre conduit à des conflits. Les zones rurales

notamment les plus stratégiques sont des théâtres de conflits fonciers.

La CR de Kafountine en plus de sa position stratégique qui va favoriser le développement du

tourisme et de la pêche est aussi une zone à vocation agricole. Tous ces éléments conjugués

sont à l’origine des dynamiques de développement qui se traduisent notamment sur le foncier.

Le tourisme attire beaucoup d’acteurs, il contribue à l’accroissement de la population et à la

diversification de la société. Il nécessite aussi de l’espace pour la construction des structures

1 CHANTAL B., PAMARD, LUC C., (1995), dynamique des systèmes agraire : terre, terroir,

territoire les tensions foncières, OSTROM, novembre 1995 (page 12)

15

d’accueils et valorise des espaces avec le tourisme de découverte et l’écotourisme. Il

augmente la valeur du foncier et ouvre la porte à des pratiques telles que les transactions

financières.

La pêche est aussi une activité qui attire de nombreux travailleurs, certes saisonniers. Mais

bon nombre finissent par s’installer.

De l’agriculture vivrière les populations de la CR commencent à accorder plus d’importance

aux cultures horticoles : maraichages, arboriculture et la culture de l’anacardier. Ce sont de

nouvelles formes de culture qui demande de grandes espaces. Ce changement d’activité

agricole se traduit en même temps sur l’espace. L’assertion de Philippe L. Delville et Jean P.

Chauveau : « le foncier constitue, en effet, la toile de fond de la quasi-totalité des dynamiques

de développement rural. Il est bien souvent aussi à l’origine de conflits entre « ayant droit »

sur un même espace »2, vient le confirmer. Ces territoires sont dans un tel contexte ouverts

aux litiges.

La gestion des litiges dans la cohabitation entre le droit foncier et le droit traditionnel est

assurée par différentes instances : le conseil rural d’un coté et des instances locales de l’autre

coté. Les populations vont régler leur problème foncier en fonction de l’instance à laquelle

elles se fient.

L’objectif de cette étude va consister à analyser la gestion des litiges foncier, à étudier leurs

déterminants et leurs conséquences sur le périmètre de la CR. Il s’articule autour de trois

objectifs spécifiques :

1. Analyser les déterminants des litiges fonciers dans la CRK.

2. Déterminer les causes et manifestations des litiges fonciers et leurs conséquences.

Ces objectifs de recherche suscitent un ensemble de questions de recherches qui ont permis

d’alimenter et de structurer la problématique d’ensemble, mais aussi de présenter les axes qui

sont ensuite développés.

Quels sont les déterminants des litiges fonciers dans la CRK?

Comment est géré le foncier et les litiges fonciers dans la CRK?

2PHILLIPPE L. D., JEAN P. C., quelles pratiques foncières pour l’Afrique noire ? Réconcilier pratiques, légitimité et

légalité, édition KARTHALA, 345pages

16

Quel est le type de droit appliqué pour la gestion foncière ?

Quelles sont les conséquences engendrées par les litiges?

2. Justification de l’étude et délimitation de son champ

La dimension géographique de l’étude se révèle à travers l’importance de la thématique

foncière en milieu rural. Les profondes mutations socio-économiques auxquelles la CR est

assujetti ces dernières décennies entrainent une multiplication des tensions et conflits liés à

l’accès à la terre.

La pluralité des normes induite par la non adhésion des populations rurales à la loi sur le

foncier, le manque de ressources (compétences techniques, humaines, ressources

financières…) que rencontre le conseil, favorisent des modes locales de gestion des litiges

fonciers.

Cette étude est à la fois importante et complexe, elle analyse le fondement des litiges dans les

différents échelons de la CR : échelle village, échelle inter-village et l’échelle CR, les

conséquences socio- économiques.

Dans La CRK la gestion traditionnelle du foncier est aujourd’hui à l’origine de nombreux

litiges notamment dans les villages les plus conservateurs.

Intérêt de ce sujet est qu’il apporte des éléments qui permettent de comprendre les

déterminants des litiges fonciers.

Il permet aussi de voir les modes de gestion des conflits dans les différents échelons de la CR

à savoir dans un village et entre donc deux villages et de connaitre les acteurs associés à la

résolution des litiges.

Il permettra également de mesurer les conséquences des litiges sur le plan social et

économique.

La CRK est le parent pauvre en matière d’étude de recherche malgré qu’’elle soit ouverte à

d’immenses champs de recherche. Les interrogations suivantes que pose la problématique de

la gestion décentralisée des litiges fonciers dans la CR de Kafountine sont donc à savoir.

« En dépit du phénomène bien connu de la croissance de la population urbaine à l’échelle

mondiale, la question foncière en milieu rural conserve toute son actualité dans les société du

17

sud. Dans le contexte actuel, caractérisé par le pluralisme des règles et des institutions de

régulation foncière, par une marchandisation croissante de la terre, par une pression sans

précédent sur les ressources naturelles et par une transformation profonde des systèmes

d’activités»3, cette assertion donne un résumé de la justification de notre sujet.

En définitive, vue le climat de litiges qui règne dans la localité, comprendre les fondements

les mondes de gestions et les acteurs intervenants aidera à anticiper sur les conflits et à rendre

plus performant la gestion au niveau local.

La gestion décentralisée est optée par l’Etat du Sénégal depuis l’indépendance, impliquée

dans la gestion du foncier et des litiges fonciers depuis 1972, les communautés rurales

verront leurs pouvoirs renforcer avec la réforme de 1996. Nous allons dans ce travail avoir

une double approche : une approche spatiale et une approche temporelle. Le TER portera sur

une délimitation spatio-temporelle.

Approche spatiale :

Bien que nous travaillerons sur une échelle globale qui est celle de la CR, mais le traitement

de la question dans l’espace communale oblige de prendre donc en considération les autres

niveaux d’échelon que nous avons dans la CR.

La CR de Kafountine est composée de dix neuf (19) villages, les litiges fonciers sont notés au

niveau des villages et entre deux villages et il se trouve aussi que les réalités locales ne sont

pas les mêmes d’un village à un autre. Les acteurs donc peuvent changer selon l’échelle et les

enjeux fonciers ne sont pas aussi les mêmes.

La CR peut être aussi subdivisé en zone « traditionnelle », il s’agit donc des zones moins

ouvertes où toutes la population est autochtone. Dans de telles zones l’ancrage au droit

traditionnel, ne donne aucun accès au droit moderne. Et en zone ouverte, il s’agit de la partie

de la CR où les dynamiques rurales se sont le plus manifestées. La conception traditionnelle

du foncier change et laisse place à de nouvelles pratiques.

La question sera aussi abordée en fonction du zonage de la localité.

Pour en fin vérifier le problème les hypothèses de recherche suivantes sont dégagées :

18

Hypothèse 1. Les dynamiques de développement et la question de la gestion foncière sont les

déterminants des litiges fonciers.

Hypothèse 2. Les litiges fonciers sont gérer par des instances locales

Hypothèse 3. Les litiges ont des conséquences sur la cohésion sociale et sur la valorisation de

certains espaces

Après ce cadre théorique, nous allons aborder le cadre opératoire qui nous permettra de mieux

cadrer la recherche en donnant plus de précision sur le sujet à travers la définition, l’analyse

des concepts opératoire et le modèle d’analyse.

19

Chapitre 2 : Cadre opératoire

Le cadre opératoire porte sur la définition et l’opérationnalisation des concepts clés de ce

TER. Tous les concepts clés du thème seront introduits.

1. Définition des concepts utilisés dans ce travail

Le concept est un élément fondamental à la recherche en sciences sociales. Le caractère

souvent ambigüe du concept du à la différence de perception en fonction notamment de la

discipline mais aussi de la question abordée exige un éclaircissement. La définition permet

non seulement au chercheur d’avoir une compréhension plus large de la question mais aussi

de mieux cerner le problème.

Plusieurs notions sont donc à expliquer et à articuler pour préciser la problématique :

1.1. Les litiges fonciers

Le foncier est défini comme étant « l’ensemble des manifestations et des conséquences de la

valeur marchande d’une étendue. En son sein la terre est transformée en terrain et en sol, bien

certes immeuble, mais reproductibles, amendables, extensibles et échangeables » (Lévy et

Dussault 2003).

Le foncier est ici défini comme un bien donc un capital, un sol approprié sur le quel toute les

transactions possibles sont permises.

Cette appréhension va à l’encontre de la conception de Robert doublier qui disait que « nul

homme, nul collectivité humaine n’a fabriqué la terre même à l’origine. Elle ne saurait passer

pour être le fruit d’aucun travail le fruit d’aucun travail humain. En fait, elle est une

divinité…Ainsi nul individu fut-il le plus grand roi du monde ne peut exercer ni acquérir sur

la terre un droit de propriété réel ».

Force est aussi de souligner que le foncier, est un élément central dans l’existence, des

individus, des collectivités. Pour leur survie les hommes sont obligés de travailler la terre. Le

besoin d’avoir de la terre surgit à partir de ce moment. Ainsi donc naitra l’appropriation de la

terre par des groupes sociaux. Dans le temps les sociétés s’accroissent et évolue, le besoin de

terre de même.

Le rapport homme- foncier fait qu’il est appréhendé de façon différente d’un disciple à

l’autre. Le droit une approche du foncier comme étant un bien approprié donc régi.

20

L’anthropologie va l’analyser sur l’angle de l’affective et le géographe sous d’un support de

production.

La définition de Volker Stramm semble assez exhaustive, selon lui « Le foncier est considéré

comme un « fait social total» constitué à la fois par la terre et les ressources naturelles qui y

sont directement attachées, et par l’ensemble des relations entre individus et groupes pour

l’appropriation et l’utilisation des ressources. Il apparait comme support et capital intervenant

dans la production avec une dimension religieuse, culturelle et affective. »

Elle permet de voir les relations entre « ayant droit » en fonction donc de la disponibilité de la

terre. Leur relation est évidement conflictuelle quand l’offre est supérieure à la demande, mais

surtout quand la gestion repose à la fois sur des normes modernes (la loi sur le domaine

national) et sur des pratiques locales.

Les litiges fonciers sont les conflits entre individus ou groupes sociaux pour le droit sur le

foncier. Le litige peut avoir plusieurs causes, fondements ou déterminant.

1.2. La gestion décentralisée

La gestion est définie dans le dictionnaire universel comme étant l’action d’administrer,

d’assurer la rentabilité. Elle est un processus qui met en œuvre des actions qui permettent de

prendre en charge une question de la manière la plus efficace possible.

La décentralisation vient du verbe décentraliser qui veut dire faire descendre. Pour descendre

il faut partir du haut vers le bas. Le pouvoir était centré à un niveau supérieur et la population

considérée comme de simples sujets. Ces systèmes de politique adoptés pendant des siècles

dans les pays occidentaux avaient fini de montrer leur limite.

Robert Scarprit dans son cris d’alerte disait que « je ne souhaite pas que l’Afrique commette

les mêmes erreurs qu’à commises mon pays depuis des siècles en adoptant le jacobinisme

c’est dire l’idée qu’on soude une nation à partir du centre. C’est une idée absolument inexacte

et à la limite dangereuse ».

La décentralisation consiste à une implication de la population dans gouvernance d’un Etat,

elle correspond à un transfère de pouvoirs d’un niveau central à un niveau local. Elle instaure

des pouvoirs locaux chargés de prendre en charge plusieurs domaines dans leurs localités

respectives. Au Sénégal les domaines de compétences qui étaient au paravent entre les mains

du pouvoir central ont été transférés aux collectivités locales dont notamment les domaines.

21

La CR se charge dès lors de la gestion du domaine national et plus spécifiquement de la zone

des terroirs. Il s’agit d’une gestion décentralisée qui implique les populations à la gestion de

leurs affaires.

1.3. La communauté rurale

Le terme est composé de deux vocables : les vocables communauté et rurale. Nous allons les

aborder séparément d’abord.

Le vocable communauté est selon Pierre Georges un groupement de territoire, ou de

personnes reposant sur des identités ou des similitudes d’intérêts et se superposant à des

unités plus petites correspondant à des territoires ou à des groupes définis administrativement

ou socialement structurés.

Le vocable rural renvoie à la campagne, un milieu essentiellement attaché à des activités de la

campagne.

Il définira également la communauté rurale comme étant un groupement social cohérent

exploitant en commun ou individuellement un espace agricole déterminé, lié par l’histoire et

la tradition, souvent par l’appartenance linguistique, religieux ou culturelle, acceptant des

règles de vie commune.

Collectivités territoriales administratives les communautés rurales sont instituées au Sénégal

en 1972 par la loi 72-45 du 17 juin 1972. Elles ont été instaurées de façon progressive sur

l’ensemble du territoire nationale. La CR est administrée par un conseil rural composé d’élis

locaux qui sont élis aux chiffrages universels directs. Le président du conseil rural, personne

morale de droit administrative est élu au chiffrage indirect par ses pères. La CR regroupe un

ensemble de village appartenant au même terroir unit par une solidarité résultant du voisinage

et possédant des intérêts communs. A la tête de chaque village, on a un chef de village.

2. définition opérationnelle

Il s’agira d’opérationnaliser les concepts-clés de nos hypothèses, c'est-à-dire d’isoler les

concepts définis des indicateurs pertinents pour notre étude, afin de donner des pistes et

repères qui guideront le travail de recherche (tableau 1).

Tableau 1 : Opérationnalisation des concepts

22

concepts indicateurs

Gestion décentralisée Dualisme droit moderne- droit traditionnel

Instances de gestion des litiges

Déterminants des litiges fonciers

Pratiques locales

Dynamique de

développement

Développement du

tourisme

Développement de

la pêche

Développent de

l’horticulture

Accroissement de

la population

Conséquences des litiges fonciers Cohésion sociale

Economique (non valorisation de espace

litiges)

2.1. Modèle d’analyse

Figure 1 : Modèle d’analyse conceptuelle

Déterminants des litiges

fonciers

Les dynamiques de

développement

La gestion foncière Litiges

fonciers

Conséquence

des litiges

fonciers

Gestion des litiges

23

Le modèle est généré par un travail logique, des hypothèses, des concepts et des indicateurs. Il

donne une conduite logique et facilite l’interprétation du phénomène étudié. Il s’agit d’un

schéma qui met en relief notre procédure d’analyse. Il commence par analyser les

déterminants des litiges fonciers, ensuite la gestion foncière et des litiges fonciers et enfin les

conséquences engendrées par les litiges fonciers.

24

Chapitre 3 : Cadre méthodologique

La recherche scientifique se fonde sur une méthodologie. Autrement dit, il y’a pas de science

sans méthode et pas de méthode sans science. Un projet scientifique ne peut se faire sans une

méthode particulière qui met en lumière les réalités du terrain. La démarche en science sociale

porte sur l’observation et sur la théorie. Une recherche s’effectue en plusieurs étapes et

nécessite un découpage du travail dans le temps.

Nous présenterons dans un premier temps la procédure de recherche documentaire, ensuite

nous aborderons les techniques de recueil des données sur le terrain et enfin nous évoquerons

les difficultés confrontées dans ce travail.

1. méthode et technique de collecte des données

Les données géographiques proviennent de plusieurs sources et sont produites sur des

supports différents : on dit qu’elles sont multi sources. La méthode d’acquisition des données

est également très diverses. Elles peuvent être classées en fonction des sources. Celles

obtenues de la recherche bibliographique qui sont qualifiées de « seconde main » et celles

obtenues des enquêtes de terrain qui sont des données brutes recueillies sur le terrain.

Diverses méthodes sont possibles et elles varient en fonction de l’étude et des moyens dont on

dispose. Dans le cadre de ce TER. Nous avons recouru à la recherche documentaire et aux

enquêtes de terrain

1.1. La recherche documentaire

La recherche documentaire a été orientée sur notre thème de recherche et plus spécifiquement

sur notre objet de recherche. Ainsi, elle part du général au particulier. Nous avons consulté

des documents de nature divers dans différents lieux de documentation (tableau 2)

Tableau 2 :

Nature des documents et des thèmes exploités Lieux de documentation

25

La méthode des classeurs, qui consiste en une prise de note classé en fonction des différentes

partis de notre travail, que nous avons adoptées au cours de l’activité de documentation nous

permet de faire l’état de la question sous forme de revu documentaire.

1.1.2. La revue documentaire

Le foncier est un champ d’étude de plusieurs disciples à savoir : l’économie, le droit, la

sociologie, l’anthropologie et la géographie. En plus des sciences, les organismes, institutions

internationales et les Etats accordent aussi une importance à la question foncière. La

production scientifique qui s’y rapportant est très vaste. La décentralisation est une forme de

politique qui se doit être perfectionnée d’où l’intérêt qui lui est accordé et qui motive les

nombreuses recherches. Cependant la production scientifique sur de la gestion décentralisée

des litiges fonciers reste précaire et inexistante en tout cas à notre connaissance sur la CR de

Document

généraux et

spécifiques

- Sur les droits fonciers

- sur les réformes foncières

- sur les pratiques foncières

- sur les dynamiques foncières

- sur la sécurisation foncière

- sur l’appropriation de la terre

- la décentralisation de la gestion

foncière

- sur le foncier et la

décentralisation

- la décentralisation au Sénégal

- sur les conflits fonciers

- la gestion coutumière des

conflits

- sur les dynamiques socio

spatiaux

- sur l’occupation des sols

Centre de documentation IDEP

Centre de documentation IRD

Bibliothèque centrale UCAD

Bibliothèque centrale UGB

Bibliothèque centrale ENEA

Internet

CR de Kafountine

Services techniques de Ziguinchor :

(ANCAR,

26

Kafountine. Cette synthèse bibliographique présente des approches sur la problématique du

foncier et sur la gestion décentralisée de celle-ci.

1.1. 3. Apport des quelques productions

Productions à vocation de publication

Gérer le foncier rural en Afrique de l’ouest : dynamique foncière et interventions

publiques.

Cet ouvrage fait une analyse de la gestion du foncier en Afrique de l’ouest partant de la

gestion locale ou traditionnelle à la gestion moderne. Il montre le dualisme qui prévaut

actuellement entre législations foncières nationales et règles foncières locales dites

« coutumières ». Et préconise la nécessité de l’un et l’autre de converger vers un cadre

commun.

Il est souligné que depuis la conquête coloniale l’Afrique rurale connait une situation de

pluralité juridique : aux systèmes fonciers locaux, s’est superposée une législation nationale

imposée par le colonisateur, fondée sur des principes différents et orientée vers les intérêts du

colonisateur. Les gouvernements des indépendances n’ont pas radicalement changé la

législation foncière, sauf pour en accentuer les tendances centralisatrices au nom du rôle de

l’Etat dans le développement économique, avec l’appui des institutions internationales. Avec

comme arguments en faveur d’une telle responsabilité de l’Etat dans la possession et

l’affectation des terres :

-pour promouvoir un développement économique, il fallait faire de la terre un moyen de

production, et de la libérer de son enchâssement dans les rapports sociaux et les valeurs

« traditionnelles », pour le rendre accessibles aux acteurs économiques efficaces ;

-l’Etat devait pouvoir mobiliser la terre aisément pour des projets de développement, des

infrastructures, l’extension urbaine ;

-l’Etat devait protéger les populations locales des effets d’une spéculation foncière, d’où un

contrôle des transactions par des instances administratives.

Cette intervention de l’Etat sur le foncier est depuis un certain temps contestée, tant par les

institutions internationales, que par les ONG ou les chercheurs dénonçant l’impact de

l’intervention publique pour les paysans pauvres ou pasteurs. Loin d’empêcher la spéculation,

27

les interventions de l’Etat ont, en effet, souvent généré une forte insécurité et suscité un rush

pour s’approprier les terres.

Quelles pratiques foncières pour l’Afrique noire ? Réconcilier pratique, légitimité et

l’égalité (Philipe. L.D, Jean. P.C)

Il a été question dans cet ouvrage de traiter des entrées analytiques : comment la question du

foncier est elle posée ? Quels sont les débats actuels ? Et des entrées opérationnelles :

comment intervenir sur le foncier et orienter le comportement des acteurs, dans une optique

d’éthique et d’efficacité économique ?

La cohabitation de fait de deux systèmes juridique (l’un coutumier et l’autre relevant du droit

positif) est présentée comme le premier élément de l’insécurité foncière. Les normes locales

sont fragilisées par l’intervention de l’Etat et les évolutions récentes.

Développement local et communauté rurale : approches et instruments pour une

dynamique de concertation

Grigori et Mouloud apportent des analyses sur le droit moderne et sur l’importance du droit

traditionnel, ils ont aussi donné des éléments d’éclaircissement sur la décentralisation. Ils

montrent que le principe selon lequel l’insécurité de la propriété des terres constitue l’un des

principaux obstacles à l’investissement est discutable car dans une majorité des c as il existe

des droits d’usages qui sont bien protégés au sein des communautés. Il est montré aussi la

flexibilité du droit coutumier qui permet des compromis entre propriétaire et non propriétaire

contrairement au droit privé. Ils affirment que l’exigence d’un droit moderne susceptible de

sécuriser la propriété concerne surtout les zones où le marché de la terre crée une insécurité.

Pour l’accès inégal à la terre, ils estiment que dans de très nombreuses sociétés, en effet, il

existe des mécanismes de solidarité qui contribuent à mieux répartir les ressources entre les

différents usagers. Dans les pays du sahel, par exemple, une majorité de famille à accès à la

terre sans en avoir la propriété. Dans cette partie de leur ouvrage, ils défendent le droit

coutumier et montre que c’est un droit qui a des aspects positives qui ne doivent pas être

négligés. Pour la décentralisation, les deux formes que constituent la déconcentration et la

décentralisation sont aussi analyser.

Dynamique des systèmes agraires : terre, terroir, territoire les tensions foncières

28

Dans cette ouvrage, une contribution de Paul Pélissier intitulé transition foncière en Afrique

noire des terroirs au temps des finages dégage trois principes lié au contrôle traditionnel du

foncier et les conséquences qui en ressortes.

Le premier principe est celui du défrichement qui fonde le contrôle foncier, et, l’exploitation

du sol et sa mise en valeur justifie la pérennité de la tenure.

Le second principe est que tout membre de la communauté (clanique, villageoise, lignagère) à

accès à l’utilisation du sol en fonction de sa capacité de travail et de ses besoins, de sorte le

concept de paysans sans terre est totalement étranger à la culture africaine.

Le troisième principe est que les vivants ne sont que les usufruitiers d’un bien qui ne leur

appartient pas.

Il estime que de ces deux principes ; insertion dans un lignage et usufruitier d’un bien découle

deux conséquences habituelles :

En premier lieu la terre est couramment soumise à plusieurs types de droits, par exemple ceux

du « maitre de terre » administrateur de fond, descendant des premiers « maitre de feu » et

ceux du « maitre de hache » d’détenteur d’un droit d’usufruit imprescriptible ( et à ce titre ce

comportant en « propriétaire ») et enfin le droit de culture sous forme de prêt temporaire qui

annonce lui-même deux formes d’affectation du sol : la location et la mise en gage.

La seconde conséquence habituelle des principes fondateurs du statut du sol est qu’au sein

d’un même terroir, la terre peut être soumise à différents droits dessinant parfois une sorte de

zonage auquel participe chaque exploitant.

Il est aussi décrit dans cet exposé le contrôle foncier dans les sociétés lignagères et dans les

sociétés villageoises, leur adaptabilité à certaines dynamiques mais aussi les conséquences ou

limites de ces pratiques africaines en matière foncière.

1.1.4. Position du problème scientifique

Le foncier comme nous l’avons souligné est le champ d’étude de plusieurs disciplines. Les

auteurs en fonction de leur discipline et de la question qu’ils abordent ont essayé d’apporter

des éléments de réponse sur la question. Ainsi, nous allons voir la relation qui existe entre les

travaux que nous avons consulté et ce que nous comptons aborder.

29

Sur l’ensemble, on constate que les ouvrages spécifiques à vocation de publication sont prêts

de la problématique que nous abordons dans notre TER, mais ils n’ont pas pris en compte

toute l’étendue de la question. Dans cette littérature, les études sont souvent sectorielles.

La littérature s’emble le plus proche de notre thématique, des thèmes faisant l’état des lieux

de la décentralisation et de la gestion du foncier et même des litiges fonciers sont abordés. La

question de la gestion des litiges dans le contexte actuel de la gestion décentralisé des litiges

reste peu prise en compte.

Ce TER constitue le premier travail de ce genre dans notre zone d’étude, ainsi il s’inscrit dans

le cadre général de la gestion décentralisée des litiges fonciers. une attention particulière est

accordée aux déterminants des litiges que sont les dynamiques de développement et la gestion

du foncier ( dualisme doit moderne-droit coutumier), à la gestion des litiges, aux causes et

manifestations et aux conséquences des litiges.

Les informations et données recueillies suite à cette première étape sont complétées par les

travaux de terrain.

1.2. Les enquêtes de terrain :

Cette deuxième partie de la quête de l’information géographique a été menée sur notre zone

d’étude. Elle nous a permis d’obtenir les données dites de « première main » qui sont

impératives dans les travaux de recherche en science sociale. Ce sont des données brutes

directement collectées auprès des populations pour être analysées. Une visite exploratoire, des

enquêtes quantitatives par questionnaire et des enquêtes qualitatives guide d’entretien ont été

réalisées. La méthode quantitative complète la méthode qualitative à travers des entretiens et

les visites exploratoire.

1.2.1. La visite exploratoire

La visite exploratoire correspond à la première phase de terrain. Il s’est agit d’un séjour d’une

semaine sur la localité. Cette visite nous a permis de parcourir le terroir, de constater la

pression sur le foncier et d’aborder la question avec quelques uns.

1.2.2. L’enquête proprement dite

Il s’agit de recueillir des informations quantitatives auprès des populations. C’est la méthode

de la démarche quantitative. Elle est constituée d’un questionnaire qui sera administré à un

30

nombre d’individu bien défini. Les informations pertinentes collectées portent

essentiellement les déterminants des litiges fonciers, la gestion du foncier et des litiges

fonciers et sur les conséquences des litiges brefs sur nos hypothèses de recherche. Ce paquet

d’information tiré du questionnaire a alimenté la discussion dans ce TER.

- Choix des unités d’enquête et L’échantillonnage

Pour recueillir les informations nécessaires à l’élaboration de ce TER nous avons choisi de

faire une enquête auprès des ménages de la CRK. L’échantillonnage va constituer à définir un

sous ensemble des ménages (population) considéré comme un véritable modèle réduit des

ménages. Sur les 2737 ménages que compte la CR nous avons tiré un échantillon de 1/10 et

on s’est retrouvé avec un échantillon de 274 ménages. Cet échantillon est réparti d’abord entre

les différentes zones de la CRK et ensuite entre les villages. En se basant sur la répartition de

la population de la CRK nous avons réparti l’échantillon comme suit entre les deux parties

principales qui composent la CR : 70% pour la partie continentale soit 191 ménages et les

30% pour les iles soit 83 ménages. Le tableau 3 donne la distribution de l’échantillon dans les

villages de ces deux zones.

Tableau 3 : distribution de l’échantillon dans les villages

Partie continentale : villages Nombre de ménages enquêtés % par rapport à l’échantillon

Kafountine 75 27%

Albadar 19 16%

Abéné 44 07%

Diannah 46 17%

Colomba 07 03%

Zone des îles

Îles Karone : villages

Hilol 09 03%

Kouba 07 03%

Coumbaloulou 02 01%

Mantate 01 0,0%

Kassel 03 01%

Îles Biliss : villages

Kailo 03 01%

31

Boune 04 01%

Boko 01 0,0%

Saloulou 06 02%

Petit Kassa : villages

Bakassouck 02 01%

Haer 04 01%

Hitou 06 02%

Niomoune 29 11%

Diogué 07 03%

1.2.3. Le guide d’entretien

Le guide d’entretien n’est pas un questionnaire au sens strict du terme. C’est une discussion,

orientée sur l’objet de recherche, avec les personnes ressources ciblées : les chefs de village,

le PCR, le président de la commission domanial, l’ASCOM, le chef de centre du CADL.

Le guide d’entretien a abordé les aspects suivants :

- La gestion décentralisée du foncier

- Les déterminants des litiges fonciers

- Causes et manifestations des litiges fonciers et les conséquences des litiges

- La gestion des litiges fonciers, acteurs et instances

Les données réunies avec ces outils de collecte de données ont été traitées.

1.2.4. Le traitement des données

Il est effectué grâce aux logiciels suivants :

Sphinx pour le saisi et le traitement du questionnaire ;

Word pour le traitement des textes et la réalisation de tableaux ;

Excel pour les calculs statistiques et la construction de figures et

Arcview pour l’élaboration des cartes.

2. Difficultés rencontrées et limites de la recherche

32

La difficulté majeure à laquelle on a été confronté est consécutive à l’éloignement de notre

zone d’étude. Ce biais spatial ne nous as pas facilité la tache, il a considérablement perturbé

notre calendrier de visite de terrain et de collecte des données.

La seconde difficulté est relative à l’extrême pauvreté d’informations concernant

généralement la gestion foncière dans la CRK et principalement les litiges fonciers. Au fait, la

plus part des documents que nous avons eu à consulter traiter de la problématique du foncier à

l’échelle des pays du sud, de la sous région et national. C’est seul dans les documents de

planification que la question des litiges et de la gestion du foncier est mentionnée, juste une

façon de souligner le problème.

Entre autres limites, nous soulignons le non traitement d’images satellites pour cartographier

l’occupation des sols.

33

Deuxième partie :

Gestion décentralisée

des litiges fonciers

dans la Communauté

Rurale de

Kafountine (CRK)

34

Chapitre I : Les dynamiques de développement de la CR de Kafountine

La CR de Kafountine est située sur le littoral Sud du Sénégal, plus précisément en basse

Casamance dans la région de Ziguinchor, département de Bignona, arrondissement de Kataba

1. Elle est limitée au Nord par la CR de Kataba 1, au Sud par le fleuve Casamance, à l’Est par

le marigot de Diouloulou et à l’Ouest par l’océan Atlantique. Elle regroupe dix neuf (19)

villages sur une superficie totale de 908 km2 et est répartie en deux terroirs distincts : la partie

des îles (14 villages) couvrent une superficie de 832 km2, elle est subdivisée en trois zones : le

Karone, le Biliss et le Petit Kassa et la partie continentale (5 villages) avec 76 km2.

Sa position géostratégique favorise les mutations économiques et sociales qui impactent

fortement sur le foncier et justifient les litiges dont il est sujet.

I. Le changement dans le système d’activité agricole

L’agriculture vivrière principale culture sera affaiblie par la période tri-décennale (70-90) de

sécheresse qu’à connu le Sénégal. La faiblesse des rendements jointe à la montée de la salinité

au niveau des terres rizicultivables ont considérablement affaiblies la riziculture et de façon

générale les cultures vivrières. Ces faits conjugués au développement de l’économie

monétaire vont attirer les populations vers des cultures de rente : l’arboriculture, la culture de

l’anacardier et le maraichage.

1. L’arboriculture

L’arboriculture telle qu’elle est connue aujourd’hui est une activité récente dans la CR. Il

n’existait pas auparavant, des plantations destinées à la commercialisation. Cette activité a

pris de l’ampleur dans les années 80, elle a été introduite par des migrants mandings et

diolas fogny qui sont venus s’installer définitivement dans la CR. C’est par la suite que les

autochtones qui ont les moyens et des terres arables suffisantes se sont lancés dans cette

activité. Aujourd’hui on constate que beaucoup d’urbains, d’émigrés, originaires ou non de

la localité commencent à investir dans la plantation. C’est une activité qui nécessite une

importante superficie. Ce qui fait des terres autre fois destinées à la culture de l’arachide, du

mil ou du maïs sont aujourd’hui transformées en plantation. Des terres qui, pendant

longtemps sont restées en friche, sont recolonisées par leurs anciens propriétaires.

L’arboriculture dans la CR est plus pratiquée dans la partie continentale. Cette zone de 76

km² dispose plus de terres favorable à plantation. Dans cette partie de la CR à part le village

35

de Kafountine et d’Abéné, la plupart des familles ont une plantation de mangue ou

d’agrume.

Au niveau des îles, l’arboriculture n’est pas aussi développée, les terres de plateau

favorables à ces cultures ne sont pas importantes, voire inexistantes dans certains villages

des îles. C’est seulement dans la partie appelée Karone où nous avons une étendue de terre

qui regroupe quatre (4) villages : Hillol, Mantate, Couba et Coumbaloulou que cette activité

est pratiquée, mais c’est un nombre restreins de familles qui dispose d’une plantation. Les

autres ne jugent pas l’activité rentable du fait de l’enclavement de la localité.

2. La culture de l’anacardier

Elle est aussi une activité assez récente dans l’ensemble de la région. Connu comme une

culture des manjacks de la Guinée voisine, elle prendra des proportions importantes ces

dernières années, en raison des revenus intéressants qu’elle génère. Les noies d’acajous sont

vendus à un prix qui peut atteindre 700f CFA le kg et le jus fermenté est aussi vendu. Dans

la partie continentale certains s’investissent dans cette culture. Au niveau des îles c’est

encore dans le Karone que cette activité est pratiquée par les habitants, un nombre important

des familles dispose de terre ou elles ont planté des anacardiers.

3. Les cultures maraichères

Le maraichage ancienne activité certes, mais limité à des besoins de consommation

familiale. Aujourd’hui, il est tourné vers la commercialisation et attire un nombre

conséquent de la population active. C’est une activité pratiquée pendant la saison sèche et

elle mobilise surtout les femmes, elle contribue dans les revenus des familles. Elle est

favorisée par l’existence du marché permanent avec souk de Kafountine qui ne cesse de se

développer avec l’accroissement de la population et le développement des établissements

d’accueil touristique. On note de plus en plus de gens qui investissent dans le jardinage

aussi bien dans la partie continentale de la CR que dans les îles. Au niveau des îles Biliss à

partir de l’hôtel karone jusqu’au niveau du village de Saloulou, la bande de terre qui sépare

le marigot à l’océan atlantique est très favorable au maraichage, il y est pratiqué de façon un

peu timide faute d’intrants et d’appui aux populations qui s’y activent, les cultures illicites

restent privilégiées. Dans la zone Karone les groupements des femmes de hillol et de kouba

avaient en 1990 bénéficié de jardin communautaire avec l’appui de l’UNICEF. Cependant

même si les projets n’ont pas réussi faute de suivi, le maraichage reste une activité parallèle

36

aux cultures illicites. Dans le Petit Kassa les femmes de Bakassouck ont un jardin

communautaire qui contribue actuellement à l’amélioration des revenus des ménages.

L’ampleur de ces nouvelles activités agricoles va entrainer de forts enjeux mettant en relief

les litiges fonciers. A ces activités s’ajoute la pêche qui de plus en plus mobilise de multiples

acteurs.

II. Le développement de la pêche

La CR de Kafountine est une zone côtière, elle bénéficie de 30 km de large qui part

d’Abéné à Saloulou. En plus de son ouverture sur l’océan atlantique la CR est maillée par un

labyrinthe de marigots. La quasi-totalité des villages des îles sont séparés les uns des autres

par un cours d’eau. Cette situation favorable fait que la pêche de type artisanal est pratiquée

aussi bien dans les bonlong qu’en haute mer. La pêche fait partie des activités les plus

prospères de l’économie de la CR et, elle est l’une des principales sources de revenus

directs ou indirects des populations

1. La pêche dans les bolongs.

Cette activité est pratiquée dans les bolongs par les populations autochtones. Ces derniers

sont peu équipées et maitrisent moins les techniques de pêche en haute mer, d’ailleurs la

pêche n’a jamais était l’activité principale de ces populations, elle fut plutôt une activité

secondaire destinée à des besoins de consommation familiale.

2. La pêche en haute mer

Elle est favorisée par la position côtière de la CR. Cette activité pratiquée en haute mer est

l’apanage des pêcheurs lébous et « Guet Ndariens ». Ils sont plus équipés et maitrisent

mieux les techniques de pêche en haute mer. Le dynamisme de la filière dans la CR a

favorisé le développement d’activités connexes telles que le mareyage et la transformation

des produits halieutiques. La pêche en haute mer et ses activités annexes attirent de

nombreux migrants du Sénégal et de la sous région dans la CRK.

2.1. Impact de la pêche dans l’évolution démographique dans la CRK

2.2. les migrants lébous et « Guet Ndariens »

Les pêcheurs lébous et « Guet Ndariens » viennent pratiquement du Nord du Sénégal et plus

précisément de Saint Louis, de la petite cote et des iles du Saloum. Ils sont des saisonniers

37

c'est-à-dire qu’ils viennent pour une période bien déterminée et à la fin de la campagne ils

retournaient chez eux. Force est de constater qu’un nombre assez conséquent d’entre eux a

fini par s’installer définitivement. Ces derniers ont obtenu des terrains et ont fini par

s’installer avec leur famille. Il faut préciser aussi que la partie continentale de la CRK est la

zone d’accueil.

Les autres migrants sont attirés par les activités annexes de la pêche et, ils viennent des autres

localités de la région de Ziguinchor, des autres régions du Sénégal et aussi de la sous région.

2.3.les migrants de la sous région

La CR accueil aussi des migrants de la sous région qui s’activent principalement dans les

activités de transformation de poisson et de mareyage. Ils constituent également une main

d’œuvre pour le transport des mises à terre des pirogues au quai. Le poisson transformé est

revendus dans la sous région et à l’intérieur du pays. La Guinée Conakry est le pays de la sous

région qui a le plus de ressortissants dans la CR. Appelés communément « soussou », ces

derniers sont fortement représentés et assez organisés avec leur association.

Cette migration entrainée par la pêche et ses activités annexes va beaucoup contribuer à

l’accroissement de la population et à l’étalement des villages de Kafountine et d’Abéné qui

sont les principaux villages d’accueil. Elle augmente le besoin de terre donc la valeur et

développement des transactions financières dans les villages que nous avons cités ci-dessus.

III. Le développement du tourisme

1. Processus évolutif du tourisme

En 1980 sous la présidence d’Abdou Diouf l’Etat du Sénégal a pris l’initiative de développer

le tourisme communautaire. C’est ainsi que des campements villageois furent installer dans

les zones ciblées. Dans la CR de Kafountine le campement le Filao fut implanté à cette date

dans ce cadre. Il est le premier établissement touristique installé dans la CR. La réussite de ce

programme dans la CR va encourager les opérateurs touristiques. Par la suite les

établissements touristiques se sont multipliés dans la localité, des campements et des hôtels

sont installés progressivement dans la CR et principalement sur le littoral entre le Village de

Abéné et celui de Kafountine. Avec ses deux hôtels : le Kalissaye et l’hôtel Karone et ses

nombreux campements, la capacité réceptif est estimée à 354 lits pour un échantillon de 15

réceptifs (Boubacar Ba, 2002).

38

2. Contribution à la croissance de la population et impacts sur le foncier

L’activité touristique dans la CRK va attirer des gens venus des autres localités du pays et de

la sous région (artistes, sculpteurs, antiquaires etc.). Elle va aussi contribuer à l’urbanisation

de la CR.

Le tourisme communautaire qui y est développé étant un tourisme intégré qui rapproche les

populations aux touristes a permis à certains d’entre eux qui ont éprouvé une affection de la

localité d’acquérir des parcelles de terres et d’y construire une maison de vacance ou même

d’investir dans le tourisme en construisant un réceptif. Sur toute la partie continentale de la

CR nous avons des maisons, des campements appartenant à des touristes. Le long du littoral

allant d’Abéné jusque qu’après le village de Kafountine en partant vers le village de Boune

gisent des constructions (maisons, campements et hôtels) appartenant pour la plupart à des

touristes de nationalités différentes.

Des touristes et d’autres personnes du pays ou de la sous régions ont obtenu des parcelles

destinées à l’habit ou à une autre finalité dans le cadre de l’activité touristique sur la partie

continentale de la CR et jusque dans la bande de terre qui sépare le marigot à l’océan et qui

fait face aux villages de Kailo et de Boune.

Le tourisme va contribuer à augmenter la valeur des terres dans cette partie de la CR.

Beaucoup de terres qui sont restées inexploitées pendant plusieurs années pour plusieurs

raisons (baisse des rendements et du prix de l’arachide par exemple, le développement de

l’économie monétaire etc.), ces terres qui étaient à un moment presque abandonnées vont

avoir à nouveau de la valeur. Elles sont donc réappropriées par leur propriétaire coutumier et

soient vendues avec la demande de plus en plus croissante soit exploitées à des fins agricoles.

Le tourisme va également contribuer à la valorisation de certain espace avec le tourisme de

découverte et le développement de l’écotourisme. C’est le cas de la réserve ornithologique de

Kalissaye créée en 1978 sur décret présidentiel, elle sera fermée pour des raisons liées à la

crise en Casamance en 1993 pour être ouverte en 2000. L’intérêt entrainé par le tourisme va

provoquer des revendications sur l’appartenance d’un ilot appelé l’île des oiseaux qui se

trouve dans la réserve entre les villages riverains que sont le village de Saloulou et le village

de Bakassouck. La réserve est plus proche de Saloulou que de Bakassouk, les différents droits

traditionnels que les uns et les autres ont eu sur ces espaces sont aujourd’hui à l’origine du

39

litige. Dans la zone du Karone le lieu de reproduction des oiseaux qui s’y trouve et appelé

réserve de Kassel est aujourd’hui timidement revendiquer par le village de Hillol parce que

selon eux la réserve ou le lieu de reproduction se trouve dans des terres leur appartenant et

que c’est parce qu’elle est plus proche de Kassel que les gens l’ont appelée réserve de Kassel.

Les enjeux provoqués sur ces terres par le développement de l’écotourisme vont susciter les

revendications faites sur ces espaces.

IV. Les dynamiques démographiques de la CR

La CRK va connaitre des dynamiques démographiques qui auront des impacts sur le plan

spatial.

1. Croissance de la population

La population de la CR est chiffrée en 1988 par le Recensement Général de la Population et

de l’Habitat (RGPH) à 12505 habitants. Le RGPH de 2003 estime la population à 18280

personnes. La population en 2010 est estimée à 19 682 habitants par le PLHA (Plan Local

d’Hydraulique et d’Assainissement) et selon les projections elle devrait atteindre 20 418

personnes en 2015.

Les chiffres fournis par les différents recensements ont montré une évolution exponentielle

de la population depuis 1988. Cet accroissement de la population est du aussi bien à la

croissance naturelle mais aussi et surtout à l’immigration sur la CR. Le tourisme, la pêche et

leurs activités annexes attirent de plus en plus du monde dans la partie continentale de la CR.

Elle s’est traduite sur le plan spatial par l’étalement des villages de la terre ferme :

Kafountine, Dianah, Albadar, Abéné. Le village de Colomba qui se trouve un peu plus à

l’intérieur est moins affecté.

Le village de Kafountine par exemple qui avait à l’origine trois quartiers : Doumassou,

Mangline et Batara est aujourd’hui constitué d’une dizaine de quartier. Dianah Kabare qui

n’est pas un sous quartier de Diannah mais un village entier va naitre entre Dianah et

Kafountine. Ce qui fait que si on prend la route entre Kafountine et Dianah, Abéné et entre

Kafountine et Dianah, Albadar, on a du mal à voir les limites entre les villages.

Contrairement à la partie continentale, l’accroissement de la population au niveau des îles

revient essentiellement à l’accroissement naturel, mais il y’a aussi le retour au bercail de

40

certains retraités et de quelques aventuriers. Hormis, les facteurs énumérés au dessus, les îles

restent composées par une population homogène, celle des familles originaires.

1.2 la composition de la population

Les diolas, les peulhs, les mandingues, les manjacques, mancagnes… composent la

population de la CR. Les diolas karone majoritaire représente 87%, les mandingues

constituent les 10% et les autres font les 3%.

L’hétérogénéité de la population de la CR ne se traduit pas sur le plan spatial, au niveau des

îles la population est homogène, elle est composée de Karone pour la plupart des villages.

Dans le petit Kassa même si les populations ne sont des diolas Karone, elles restent

homogène, composées de la sous composante diola appelé diola Kassa.

C’est donc dans la partie continentale appelé aussi « terre ferme » de la CR que nous avons

une hétérogénéité de la population. L’ouverture de cette partie de la CR par rapport aux autres

territoires et les différentes activités expliquent son attractivité. Elle explique également la

forte concurrence pour l’accès à la terre aussi bien pour l’habitat que pour le maraichage ou

l’arboriculture et les activités touristiques.

2.3.La répartition spatiale de la population

La population de la CR est inégalement répartie dans l’ensemble du périmètre de la CR. Selon

PLD de 2009, la population est répartie comme suit dans les deux parties de la CR : 70% dans

la partie continentale, soit une densité de 148,30 hbts/km² et 30% dans les iles, soit une

densité de 5,7 hbts/km².

la zone des îles 30%

la zone

continentale 70%

la zone des iles

la zone continentale

41

Diagramme circulaire de la répartition de la population de la CR

L’afflux massif des migrants qui ont fini par s’installer définitivement dans cette partie de la

localité en raison du développement de la pêche, du tourisme et des autres activités agricoles

justifie ces disparités.

En somme on va constater que les dynamiques de développement que nous venons d’analyser

ont comme toile de fond le foncier surtout dans la partie continentale de la CRK. Elles vont

par ailleurs accroitre les enjeux sur le foncier et par conséquent susciter une course pour

l’accès à la terre qui va expliquer les litiges qui en résultent. A la suite de ces dynamiques

nous allons analyser la décentralisation et la gestion foncière dans la CRK pour voir

l’influence qu’à la gestion foncière en place dans les litiges.

42

Chapitre 2 : Décentralisation et gestion foncière au Sénégal ; cas

d’application de la CR de Kafountine

I. La décentralisation

La décentralisation est un processus consistant pour l’Etat à transférer au profit des

collectivités locales certaines compétences et les ressources correspondantes. Elle revêt un

caractère politique et administratif, financier et technique. Au plan politique, elle aboutit à la

mise en place d’organes locaux, exécutifs et délibérants. Au plan administratif, elle est source

d’autonomie de gestion des affaires administratives au niveau local. Au plan financier, la

décentralisation engendre l’autonomie de gestion, et si nécessaire le développement d’une

fiscalité locale. C’est donc un transfert de pouvoir source de démultiplication par la création

de nouvelles personnes morales. La décentralisation comme toute démarche ou politique

repose sur un certain nombre de principes :

Le respect de l’unité nationale

Ce principe traduit l’intérêt d’affirmer le caractère unitaire de l’Etat et d’empêcher qu’une

collectivité ne soit tentée de remettre en cause l’unité nationale par des velléités

indépendantistes ou sécessionnistes.

L’égale dignité des CL

Les collectivités locales sont indépendantes les unes des autres, l’article 13 du CCL le

stipule « aucune collectivité locale ne peut établir ou exercer de tutelle sur une autre.

La libre administration des CL

Il trouve son fondement juridique dans la constitution du Sénégal qui dispose en son article

102 que « les collectivités locales constituent le cadre institutionnel de la participation des

citoyens à la gestion des affaires publiques. Elles s’administrent librement par des assemblés

élues. Leur organisation, leur composition et leur fonctionnement est déterminé par la loi.».

Le transfert de compétences et le partage du pouvoir entre l’Etat et les trois (3) ordres

de CL

Il exprime le partage des responsabilités dans l’exercice des compétences. Le transfert de

pouvoir d’une instance supérieure à une instance locale inférieure est gage de la

43

décentralisation. Il se traduit par une démultiplication avec la création de CL qui sont des

personnes morales dotées d’organes exécutifs et délibérants.

La compensation du transfert de compétences par le fonds de dotation et le transfert de

fiscalité

Le CCL dans son exposé des motifs (P.200) stipule que « la loi prévoit, pour aider les CL à

exercer les compétences qui leur sont dévolues, un transfert concomitant, en leur faveur, des

moyens et ressources ainsi que la mise à leur disposition de services extérieurs de

l’administration ».

La disponibilité des ressources est à la fois une condition et une composante essentielle de

l’autonomie financière des CL. A travers le levier de la fiscalité l’Etat accompagne le

processus de décentralisation.

On ne peut parler d’autonomie sans la disponibilité des ressources financières qui permettent

à la collectivité de prendre en charge les problèmes des populations.

Le contrôle à postériori ou contrôle de l’égalité

Le contrôle à postériori ou de l’égalité est désormais la règle de gouvernance, elle est

introduite par la loi portant transfère de compétence aux CL. L’alinéa 3 de l’article premier de

cette loi précise que « l’Etat exerce les missions de souveraineté, le contrôle de légalité des

collectivités locales dans les conditions fixées par la loi…. ». Les missions publiques sont

dorénavant réparties, avec ce dispositif les représentants de l’Etat (gouverneur pour la région,

préfet pour la commune et le sous-préfet pour la CR) ont des missions spécifiques limitées par

des textes et les autorités décentralisées (élus locaux) ont aussi les leurs.

La participation citoyenne

L’implication des populations dans la gestion des affaires publiques locales, la proximité des

instances de décision d’avec la population sont impératives à la démocratie souhaitée dans la

nouvelle vision de la gouvernance des territoires.

En effet, l’histoire de la décentralisation au Sénégal s’est constituée de façon progressive.

I. Le processus évolutif de la décentralisation au Sénégal

44

Ayant connu une première ébauche de décentralisation pendant la période coloniale, le

Sénégal va s’inscrire dès son accession à la souveraineté internationale dans un processus de

décentralisation. Le code des collectivités locales (CCL) précise bien dans son exposé des

motifs (p.6) que « le Sénégal depuis son accession à la souveraineté internationale, a opté

pour une politique de décentralisation progressive et prudente, mais désormais irréversible. ».

1. la décentralisation avant les indépendances au Sénégal

Elle a été initiée au Sénégal à la fin du XIXème

siècle. L’administration de la colonie fortement

caractérisée par une centralisation rigoureuse associée à une forte déconcentration sera

secouée dans la moitié des années 1950 par les mouvements d’émancipation et par la loi

cadre.

Dans la colonie du Sénégal on assiste à la création des communes de Gorée et de Saint-Louis

le 10 août 1972. La loi de 1855 définie leur statut et leurs limites étaient fixées par le décret

du 10 mars 1873. Ensuite Rufisque et Dakar devinrent respectivement en 1880 et en 1887.

Il y’avait au Sénégal ces quatre communes de plein exercice qui avaient le statut des

communes françaises. Il faut cependant souligner que la volonté du législateur français était

loin de faire bénéficier la population autochtone des vertus de l’institution mais plutôt de

permettre à la population française qui y résidait, d’exercer leurs droits civiques et politiques.

Les citoyens des quatre communes bénéficiaient ainsi d’un statut privilégié par rapport aux

autres populations du Sénégal.

Quelques années après la création des quatre communes, le gouvernement français manifesta

sa volonté de faire avancer la décentralisation. Il fut reconnu au gouverneur de l’AOF

(Afrique Occidentale Française) le pouvoir de créer des communes mixtes de façon

progressive et prudente les conduisant à passer du statut de commission municipale nommée,

à celui de commission municipale élue, au suffrage universel.

Parallèlement aux communes de plein exercice, des collectivités furent crées sous

l’appellation de communes mixtes. Comme prévue l’institution est rendu plus démocratique

suite au décret pris le 04 décembre 1920 ; les membres de la commission municipale

pouvaient désormais être soit nommés, si la commune mixte était classée au 1er

degré ; soit

élus au suffrage restreint, si la commune mixte était classée au 2e degré ; soit élus au suffrage

universel, si la commune mixte était classée au 3e degré.

45

En 1904 furent crées les communes mixtes de Thiès, Tivaoune et Louga. C’est au tour de

Ziguinchor et de Meckhé d’être érigé en commune mixte de même statut respectivement en

1907 et en 1911. Vers 1917 cette communalisation va se propager dans le Baol et le Sine-

Saloum. Ainsi, Fatick, Kaolack, Foundiougne et Diourbel devinrent communes mixtes en

1918. Kébémer et Khombole en 1925, Mbour et Gossas en 1926.

Dans les années 50 l’arrêté du 1er

décembre 1952 institué six (6) nouvelles communes

mixtes : Kolda, Guinguinéo, Mbacké, Tambacounda, Podor et Matam. Bignona fut crée en

1957

Il est nécessaire de préciser que le mouvement communal du Sénégal garde la marque d’une

volonté du pouvoir colonial de généraliser la culture arachidière sur l’ensemble du territoire

de la colonie.

La décentralisation bien qu’elle ait connu ses débuts pendant la période coloniale restât une

politique qui cherche principalement à satisfaire les intérêts du pays colonisateur et de ses

citoyens installés dans certaines villes de la colonie.

2. la décentralisation de l’indépendance (1960) à nos jours

Le Sénégal, face à son destin en 1960, décide de s’engager dans une démarche de

décentralisation. L’architecture territoriale et administrative est modifiée progressive avec les

différentes réformes introduites au cours des années.

La réforme du 13 janvier 1960 remplace les cercles, les subdivisions et les cantons par les

régions. Les lois n°60-23 et 60-24 du 1er

février 1960 porteront la totalité des communes

existantes au statut de commune de plein exercice qui tendait vers la forme la plus

démocratique de l’institution. C’est en effet, à partir de 1972 que la politique de

décentralisation au Sénégal va prendre une autre dynamique marquée par de grandes

réformes.

La première grande réforme dite acte I de la décentralisation va intervenir en 1972.

L’innovation majeure introduite par la loi n° 72-25 du 13 mai 1972 résidera dans la création

de collectivités locales en milieu rural. Cette loi crée les communautés rurales de façon

progressive dans toutes les régions du Sénégal. Il est d’abord advenu la phase

d’expérimentation qui est effectuée dans la région de Thiès avant d’être généralisé au niveau

46

des autres régions. La spécificité de cette nouvelle catégorie de collectivité est clairement

définie par l’article premier de la loi de 1972 qui dispose que les communautés rurales sont

des personnes morales et « constituées par un certain nombre de villages appartenant au

même territoire, unis par une solidarité résultant du voisinage, possédant des intérêts

communs et capable de trouver des ressources nécessaires à leur développement. ». Les

attributions du président du conseil rural sont renforcées par les réformes de 1983 et de 1990.

La deuxième grande réforme de la décentralisation au Sénégal interviendra en 1996, elle est

appelé l’acte II de la décentralisation. Cette réforme va mettre en place un troisième ordre de

collectivité locale en l’occurrence la région. Mais l’innovation majeure de cette réforme réside

dans le transfert de compétences aux trois ordres de collectivités locales : région, commune,

communauté rurale dont dispose le Sénégal. Dans le second titre de l’exposé des motifs de la

loi n° 96-07 du 22 mars 1996, elles sont présentées sont forme de liste d’une première étape

de transferts pour les secteurs suivant :

1.- Domaines ;

2.- Environnement et gestion des ressources naturelles ;

3.- Santé, population et actions sociales ;

4.- Jeunesse, sport et loisirs

5.- Culture,

6.- Education ;

7.- Planification

8.- Aménagement du territoire ;

9.- Urbanisme et habitat.

Elle a permis au Sénégal de franchir un pas décisif. L’adoption de la loi 96-04 a aboutit à la

mise en place du Code des Collectivités Locales (CCL). Le contrôle de la pratique des

collectivités locales est désormais inversé, le contrôle à postériori devient la règne de

gouvernance et l’approbation à priori l’exception.

47

Le Sénégal a misé depuis le départ sur une politique de décentralisation progressive et

prudente tenant à chaque fois compte des insuffisances et contraintes de la mise en œuvre de

l’acte précédent de son application.

II. les insuffisances et contraintes de mise en œuvre de la décentralisation

La décentralisation, comme il est précisé dans ses principes que nous avons énumérés un peu

plus en haut, se fonde sur un transfert de compétences et le partage de pouvoir entre l’Etat et

les collectivités locales, la disponibilité des ressources financières, l’adhésion des populations

etc. les insuffisances et contraintes de mise œuvre sont en grande partie donc relatives à des

problèmes

1. les insuffisances et contraintes de mise en œuvre liées aux compétences

transférées

Avant les réformes de 1996, outre les questions d’administration générale, de maintien de

l’ordre, l’hygiène et la santé publique, la voirie, les transferts urbains, la cultures, le sport, les

loisirs et l’éducation et l’organisation d’un certain nombre de prestations économiques et

sociales comme les bourses d’aide aux plus démunis, le logement, les compétences des

communautés rurales au même titre que celles des communes étaient définies par une clause

générale de compétences ( ) qui résultait de la formule selon laquelle « le conseil municipal

(ou rural) règle par ses délibération les affaires de la commune (ou de la CR) ». Les

compétences n’étaient pas clairement définies, elles étaient confinées dans le terme ambigu

des affaires locales qui étaient assimilées à tout ce qui est ressenti comme besoins collectifs

justifiant une intervention de la collectivité.

A ce stade la répartition des compétences entre l’Etat et les communautés rurales constituait le

principal obstacle de la décentralisation, en ce sens que la clause générale ne favorisait pas

l’initiative privé, la seule référence à cette clause ne permettait pas de hiérarchiser les

compétences entre les collectivités.

C’est l’acte II de la décentralisation (1996) qui va contribuer à apporter des solutions à ce

problème de l’hiérarchisation des rôles et des compétences des collectivités locales, avec la

création de la région, et le transfert de compétences de façon spécifique à la communauté

rurale et aux autres collectivités. Ces compétences naguère dévolues à l’Etat sont depuis

décentralisées au niveau des échelons de gouvernance territoriale instaurés au fil du temps

dans l’ensemble du territoire nationale. Force est de constater que la seule définie assez claire

48

des compétences ne suffit pas pour atteindre le but en matière en mise en œuvre d’une

politique de décentralisation. La preuve Les collectivités peinent toujours à assurer

convenablement les missions qui leur sont assignées. La gestion du foncier transférée aux

collectivités locales en est un parfait exemple.

2. Les contraintes et insuffisances de la mise en œuvre de la gestion décentralisée du

foncier

La gestion du foncier et principalement du domaine national est transmise à la CR

(collectivité locale) que nous avons opté d’étudier depuis les années 1972. Il était à cette

époque inscrit dans la clause générale des compétences, la réforme de 1996 viendra le définir

plus clairement. La plus part des communautés rurales ne parviennent pas à apporter les

réponses attendus dans la gestion du foncier. Elles sont confrontées à des difficultés d’ordre

diverses ; la première difficulté réside dans la loi régissant le foncier en milieu rural « loi sur

le domaine national ». Elle fait des paysans de simples usufruitiers. Ancrés à une gestion

traditionnelle du foncier, ces populations rejettent la forme nouvelle de gestion proposée par

l’Etat. La deuxième difficulté rencontrée par les CR relève de l’insuffisance des moyens et

outils dont elles disposent pour assurer la gestion du foncier.

Ces insuffisances vont susciter l’idée du lancement de l’acte III de la décentralisation, cette

année, par le président de la République du Sénégal Monsieur Macky Sall. Nous allons voir le

cas de la collectivité locale de Kafountine et donner en illustration la problématique de la

gestion décentralisée du foncier dans cette CR.

III. Décentralisation et gestion foncière dans la CRK

La CRK est érigée en collectivité locale décentralisée en 1980 pendant la phase de

généralisation de la réforme de 1972, portant création des communautés rurales au Sénégal.

La gestion du foncier relève donc de son domaine de compétence depuis sa création, elle sera

plus spécifiée avec la réforme de 1996. La CR est administré par un conseil rural, d’autres

services et organismes interviennent aussi pour appuyer la collectivité dans l’exercice de ces

compétences.

1. Le conseil rural

Organe délibérant de la collectivité locale, le conseil rural est composé d’hommes et de

femmes élus au suffrage universel direct pour un mandat de cinq (5) ans. Conformément à

49

l’article 203 du CLL, le conseil dans les quinze jours qui suivent la date de proclamation des

résultats élit en son sein un bureau composé du président du conseil rural et de deux vices

présidents appuyés par un assistant communautaire (ASCOM).

Le président du conseil rural est l’organe exécutif de la CR, il est chargé de l’exécution des

délibérations du conseil rural. Les décisions du président et les délibérations du conseil rural

sont transmises au représentant de l’Etat (sous-préfet) pour approbation.

Le nombre d’élus locaux varie en fonction de la taille démographique de la collectivité. La

CRK a ainsi un conseil composé de 32 membres. Il est aussi composé de six (6) commissions

dont la commission domaniale.

On note cependant des disparités relatives au genre et à la zone dans la composition du

conseil. L’essentiel des membres du conseil son des hommes, les femmes sont donc très

faiblement représentées et la majeure partie des conseillers habitent les villages de la terre

ferme.

1.2.les services déconcentrés

Pour mieux conduire le processus de décentralisation vers les résultats escomptés, l’Etat a mis

sur pied un certain nombre d’institutions.

1.2.1. La DER

Parmi ces dernières figure la D.E.R, dont l’objectif principal est de promouvoir le

développement rural. Créée en décembre 1997. La DER a sous son autorité la division des

Centres d’Expansion Rurale Polyvalents (CERP) mis en place en 1960. Depuis lors, cet outil

de gestion au niveau local garde dans le fond l’esprit du développement rural. C’est à partir de

1972 que les CADL, jadis CERP, sont appelés à jouer un rôle décisif dans leurs missions. Ils

deviennent alors des cellules techniques d’appui et de conseil. Premiers partenaires des

communautés rurales, ils sont chargés entre autres :

- d’encadrer les conseils ruraux dans l’élaboration et l’exécution des actions de

développement local en collaboration avec les autres partenaires de la communauté ;

- d’aider à mettre en exécution les directives relatives aux actions ;

- d’aider à exploiter les ressources du terroir ;

50

- de participer aux renforcements de capacité des élus locaux et des organisations

communautaires de base (OCB) pour une meilleure prise en charge des compétences

transférées et des actions de développement.

1.2.2. La sous-préfecture

Le Sous-Préfet, représentant de l’Etat, veille à la sauvegarde des intérêts nationaux, au

respect des lois. Depuis janvier 1997, la plupart des contrôles a priori de l’administration

centrale ont été convertis en contrôles de légalité a posteriori, à l’exception de certains actes

comme le budget qui doit être soumis à l’approbation préalable du représentant de l’Etat. Il

encadre et appuie les élus locaux pour une meilleure appropriation des compétences

transférées.

1.3.Les organismes d’appui au développement

En dehors de l’Etat plusieurs partenaires interviennent pour aider les collectivités locales dans

l’exercice de leur compétence et pour contribuer de façon générale dans l’amélioration des

conditions de vie des populations. Ainsi la CRK enregistre des partenaires divers intervenants

dans différents domaines

Tableau 1 : partenaires au développement et leurs domaines d’intervention

Partenaires Domaines d’Intervention

Enda-Acas Santé, Hydraulique

CAJACK France hydraulique

SBC Hollande

Construction, Equipements et Appui à

l’Education Sanitaire

Fondation Baobab Hollande Santé

Association des Ressortissants de Kafountine

en Allemagne

Santé

Fondation Allemande Santé

Planète école Education

Kafo-Saze Education, Formation Professionnelle

Voiliers Sans Frontière Education

Enseignants Sans Frontières Education

Loz Africa Education

APAD : Association des Planteurs de Horticulture, Apiculture, Commercialisation des

51

l’Arrondissement de Kataba1 produits horticoles

ANCAR Agriculture, Elevage

PNDL Planification et appui financier

SOURCE : PLD 2009

II. La gestion décentralisée du foncier dans la CRK

Le premier titre de l’exposé des motifs (p.118) de la loi n°96-07 du 22 mars 1996 portant

transfert de compétences aux collectivités locales, précise que le domaine national et le

domaine public, propriété indivisible de la nation tout entière, restent sous la responsabilité de

l’Etat qui peut en transférer la gestion aux collectivités locales. L’article 17 de la loi dispose

que les compétences transférées à la communauté rurale en matière domaniale concernent la

gestion et l’utilisation du domaine privé de l’Etat, du domaine public et du domaine national

et le premier article de préciser que la communauté rural règle, par délibération, les affaires

dont elle a compétence. Le foncier qui peut être inclus dans la clause de compétences

générales attribuées aux collectivités locales bien avant la réforme de 1996 est dorénavant

devenu une compétence transférée.

1. Les prérogatives de la CR en matière domaniale

Les alinéas 1, 2,3 de l’article 195 du code des collectivités locales précisent que Le conseil

rural a pour attributions de délibérer en toute matière pour laquelle compétence lui est donnée

par la loi sur :

1-les modalités d’exercice de tout droit d’usage pouvant s’exercer à l’intérieur du territoire de

la communauté rural, sous réserve des exceptions prévues par la loi,

2- le plan général d’occupation des sols, les projets d’aménagement, de lotissement,

d’équipement des périmètres affectés à l’habitation, ainsi que l’autorisation d’installation

d’habitations ou de campement ;

3- l’affectation et la désaffectation des terres du domaine national.

2. Contraintes de la gestion décentralisée du foncier dans la CKR

Les terres du domaine national dont nous étudions ici la gestion en milieu rural concernent, en

effet, les terres appelées « zones de terroir » qui correspondent aux terres d’habitation en zone

rurale, l’espace exploité pour l’agriculture et l’élevage dont la gestion est confiée à la CR. Des

52

contraintes relatives à l’acceptation de la loi n° 64-46 du 17 juin 1964 qui régit le foncier, aux

manques moyens humains et techniques se posent en tout effet.

2.1.Les contraintes relatives à la législation foncière

La CR de Kafountine située en basse Casamance principalement en milieu Diola est

composée d’une population qui a un attachement profond vis-à-vis de la terre, du foncier. La

terre en plus d’être un support de production, revêt une valeur sacré pour ces populations,

raison pour laquelle elles n’ont jamais compris ni accepté la loi sur le domaine national encore

moins la gestion affectée par l’Etat à un conseil rural. Ce dernier est discrédité au même titre

que l’Etat concernant essentiellement la gestion foncière.

Il s’y ajoute que l’érection de Kafountine en CR en 1980 va coïncider avec les débuts de la

crise casamançaise ou le problème du foncier est souligné comme faisant parti des principales

causes. Les années 90 seront marquées par la vaste campagne de sensibilisation des

populations de la CR par MFDC (Mouvement des Forces démocratiques de la Casamance)

pour leur adhésion à la cause indépendantiste. Le MFDC va également interdire le

recouvrement de la taxe rurale.

Dans un tel contexte la question du foncier s’avère très sensible et complexe dans la CRK. Le

droit coutumier va continuer donc à s’exercer dans la localité, et surtout dans la zone des iles

où nous avons encore une population essentiellement autochtones encore très attachées aux

valeurs traditionnelles. Le foncier hérité des ancêtres qui l’ont acquis par le droit de friche est

gérer par le chef de famille selon les règles coutumières. Tout membre de la famille à accès à

l’utilisation du sol en fonction de sa capacité de travail et de ses besoins (Paul Pélissier,

1995). Dans ce mode de gestion la terre est soumise à plusieurs types de droits par exemple :

« ceux « maitre de terre » gestionnaire et administration de fonds, descendant des premiers

maitre ; ceux du « maitre de hache » c'est-à-dire l’exploitant détenteur d’un droit d’usufruitier

imprescriptible » qui vont entrainer des conflits et litiges avec les évolutions qui commencent

à faire effet sur le jeu foncier. Si dans la partie de la CRK que nous venons d’évoquer la

gestion traditionnelle qui y est adoptée reste la source des litiges, dans la partie continentale le

foncier bien qu’il soit régit par le droit « traditionnel » est aujourd’hui affecté par une

évolution des normes sociales qui va se traduire par une pluralité des normes juridiques. Les

changements qui se sont opérés aussi bien sur le plan social que sur plan économique ;

accroissement de la population du en grande partie aux fortes migrations dans cette zones et la

convoitise dont la terre fait objet avec les dynamiques de développement seront à l’origine des

53

litiges fonciers. Il se développe ainsi des transactions monétaires sur la terre. Ces évolutions

soulignées, combinées au développement de l’économie monétaire poussent les ruraux à

échanger leurs terres pour résoudre des problèmes financiers.

Le conseil rural jusque là écarté de la gestion du foncier se fait une piste d’entrer en jeu par la

régularisation des ventes de terres par le biais de procès verbaux de désaffectation et de

réaffectation de terrain. En réalité ce sont des acteurs sensibilisés qui pour la plus part sont des

étrangers à la communauté rural : touristes et migrants venus de la sous région et d’autres

localités du pays, qui cherchent à consolider leurs droits foncier après avoir acquis des terres

auprès des propriétaires coutumiers.

2.2.Les contraintes relatives aux manques de moyens humains et techniques

La gestion du foncier est confrontée a un manque de moyens matériels et humains gage d’une

mise en œuvre d’une telle politique. Sur le plan humain le conseil rural ne dispose pas d’un

personnel technique suffisant en quantité pour la mise en œuvre de la politique de la gestion

décentralisée du foncier. Au niveau du conseil les conseillers ruraux ont pour la plus part un

niveau d’instruction relativement moyen, seul l’ASCOM a un niveau et une formation de

niveau BAC plus. Les membres de la commission domaniale n’ont pas la parfaite maitrise des

textes et lois sur le domaine national. D’ailleurs il est noté un dysfonctionnement de la

commission car la plus part des membres de cette commissions ne connaissent pas leur rôle.

Le Centre d’appui au Développement Local (CADL), qui la première cellule technique et de

conseil mis à la disposition de la CRK dont le siège se trouve dans l’arrondissement de

Kataba1 a un personnel très réduit, composé de trois agents : le chef de centre, un agent

technique des eaux et forets qui est le chef de brigade, un agent technique de l’élevage. Force

est de constater que ce sont des fonctionnaires de l’Etat qui ont déjà d’autres tâches relatives à

leur fonction

Sur le plan matériel la CRK à l’instar des autres communautés rurales ne dispose pas d’outils

lui permettant de gérer le foncier d’une manière plus rationnel qui puisse susciter l’adhésion

des populations. Il n’existe pas de cadastre comme prévue par la loi. Les textes aussi

renferment des imprécisions qui ne facilitent pas la tâche à l’administration locale. La notion

de mise en valeur qui fonde l’affectation n’est définie dans aucun texte comme il est prévu par

la loi.

54

Les réponses apportées par l’étude de la décentralisation et de la gestion foncière dans la CRK

montrent très clairement les limites au plan humain et technique fournies par le dispositif mis

en place pour la gestion décentralisée du foncier. En plus donc des insuffisances ou des

manquements retenus, la loi sur le domaine national supposée régir le foncier rural reste

rejetée par les populations. Nous allons voir dans ce contexte comment sont gérés les litiges

fonciers ?

III. La gestion décentralisée des litiges fonciers

Dans le contexte actuel caractérisé dans la CRK par une gestion coutumière du foncier et par

l’émergence de nouvelles pratiques telles que la marchandisation des terres la gestion des

litiges fonciers est en grande partie effectuée par des instances locales traditionnelles, mais les

populations vont aussi recours au conseil rural qui est impliquée dans des cas d’affectation et

de réaffectation des terres et notamment à la justice.

1. Les instances locales traditionnelles

L’organisation, la gestion n’est pas une chose nouvelle à ces communautés. La coutume a

défini des modes de gestion sur lesquels se fondent les populations villageoises pour gérer

leur foncier. Pour les cas de conflits qui opposent les membres d’une même famille lors de la

séparation des terres, les acteurs interpelés sont les patriarches (ensemble des notables y

compris le chef de village) qui réunissent les deux antagonistes et les montrent comment se

fait la répartition des terres selon la tradition. Les différentes terres : de plateaux, les rizières

sont divisée en autant de partie et c’est l’ainé qui choisit le premier sa partie pour chaque

terre. Les acteurs sont principalement les notables de la concession et les deux frères

concernés et on invite également un notable cousin de la famille c'est-à-dire dont la mère

vient de la famille. Ces types de conflit ont toujours trouvé une résolution et se posent souvent

dans des familles ou les frères ne s’entendent pas. Quand le conflit oppose deux familles de

même village, ce cas de litige est le plus souvent dû au fait que la terre soit soumise à

plusieurs types de droit. Il arrive souvent dans un village que le « maitre de terre », laisse à un

autre exploitant un droit d’usufruitier et ce droit peut durer de génération en génération et il se

pose un litige lorsque les descendants du premier exploitant veulent reprendre les terres. Dans

ce cas de figure les acteurs son principalement les notables de tout le village, les concernés

directs. Ils s’attellent en premier lieu à voir celui qui déteint le droit de maitre si ils

parviennent à trouver ce dernier par des témoignages fiables le conflit est vite soldé, le

problème se posent souvent au cas où il n’y a pas de témoin fiable. Ce cas de figure a toujours

55

trouvé des résolutions au niveau de ces instances villageoises de gestion des litiges. Excepté le

conflit de Boune qui a opposé des familles du même village, ce sont les cas qui ont opposé

des villages distincts qui n’ont pas eu de témoins capables de clarifier les choses parce ces

derniers sont considérés comme parti. On peut citer en guise d’exemple le cas du conflit

Bakassouck et Saloulou pour ce cas un comité de gestion qui va réunir des membres des

différents villages des iles. C’est ce comité qui se charge de régler le différent qui oppose les

deux villages. L’autre cas entre deux villages s’est le litige qui a opposé les villages de Kouba

et de Hilol la résolution de ce conflit va faire intervenir les notables des deux villages et les

notables des villages Tendouck et de Mlompe qui sont les cousins à plaisanterie des Karones.

De cette qualité, ces cousins à plaisanterie s’investissent dans la médiation pour une harmonie

et une cohésion sociale entre ces villages. On note un recourt à d’autres instances comme le

conseil rural et la justice dans la gestion des litiges quand le problème n’est pas dû au droit

traditionnel.

2. Le conseil rural et la justice dans la gestion des litiges fonciers

Le conseil rural que nous comme nous l’avons souligné en dessus dans la gestion du foncier

ne gère pas en réalité le foncier dans la CRK se sont les populations elles mêmes qui gèrent le

foncier selon le droit coutumier et avec les ventes de terres qui s’opère dans la localité, les

acheteurs avertis pour sécuriser leur terre et probablement acquérir un titre de propriété passe

par le conseil rural pour obtenir une affectation ou réaffectation. Ces derniers font recours au

conseil rural pour régler un litige sur le terrain qui leur a été affecté. C’est des cas très rare

parce que le conseil rural fait les vérifications nécessaires : consultation du chef de village et

des nobles avant de délibérer sur le terrain. La vente des terres est presque cautionnée et

organisée par le conseil rural en collaboration avec les notables et les chefs de village de la

partie continentale de la CR.

C’est surtout dans la partie continentale de la CRK que l’on note des cas de litiges qui ont fini

entre les mains de la justice. Dans cette partie les acteurs n’appartiennent pas à la même

sphère sociale et les enjeux fonciers sont plus importants. La terre qui est devenu pour

beaucoup d’acteurs un fond de commerce est assujettie à des abus divers : vente remise en

cause, vente multiple etc.

On comprend à la suite de l’analyse de la gestion des litiges dans la CRK, que les instances

auxquelles vont recourir les populations sont multiples et les acteurs et organisations

impliqués varient en fonction de l’instance de gestion. Mais force est de constater que les

56

instances locales « traditionnelles » sont les plus recourues du fait de la dominance du droit

coutumier dans la gestion foncière de la CRK. Cependant il n’en demeure pas moins qu’il

existe d’autres instances telles le conseil rural et la justice.

57

Chapitre 3 : conflits fonciers dans la CRK : causes, manifestations et

conséquences

Les conflits fonciers sont devenus de plus en plus récurrents dans la CRK. Jusqu’à une

période très récente, ces problèmes fonciers étaient très peu connus voire même inexistants

dans la localité. C’est à partir des années 80 que vont commencer à s’opérer dans la CRK des

mutations socio-économiques qui vont se traduire sur le foncier au fil des années. Il s’agit

notamment de la croissance de la population et des dynamiques de développement rural : le

développement du tourisme et de la pêche attirent un nombre important de migrants qui vont

gonfler la population de la CRK et contribuer à bouleverser les normes sociales d’antan et le

changement des systèmes d’activité. Tous ces changements intervenus ont donné plus de

valeur au foncier et entrainé une course à l’accès à la terre. Face à ces évolutions, la gestion

« coutumière » du foncier qui prédomine dans la CRK subit les influences du droit moderne et

entraine divers abus sur le foncier. Ainsi, se développent les litiges sur le foncier de la CRK.

I. Causes et manifestation des litiges fonciers dans la CRK

Les enjeux croissants et multiples justifient la convoitise et la course pour l’accès à la terre

notée dans la localité. La législation coutumière en place et les nouvelles pratiques

embrassées par les acteurs sont les principales causes des litiges.

1. Les causes et manifestation des litiges induites par le droit coutumier

Les causes des litiges fonciers qui résultent de la gestion coutumière dans la CRK sont le plus

notées dans la partie des îles. Comme nous avons eu à le préciser, cette zone est toujours

habitée par des familles autochtones. Elles ont hérité les terres de leurs ancêtres qui les

avaient acquises par le droit de hache, de friche que P. Pélissier considère comme le principe

le plus universellement reconnu, qui fonde le contrôle foncier. Dans chaque famille le

patriarche est le « chef de terre », chargé de la gestion. Il est constaté des litiges fonciers inter

villages (c'est-à-dire entre village) et intra village (au sein d’un village) qui découle des types

de droit auxquels la terre est soumise.

1.1.Les litiges fonciers intra village occasionnés par le doit coutumier

On les note au sein d’une même famille ou conception et entre deux familles distinctes.

Dans les familles ou concessions les litiges bien qu’ils existent n’ont pas une grande ampleur.

C’est souvent des divergences dans la répartition des terres entre ayant droit. Avec l’évolution

58

démographique, il s’opère au sein des familles ou concessions des séparations appelé en

langue Karone « Pikeutinol kississou » qui peut être traduit comme la séparation de cuisine.

Les familles qui partageaient le même repas vont le faire séparément. A cet effet, il est

effectué un réajustement foncier c'est-à-dire une division des terres qui étaient exploitées

ensemble par la famille ou concession. Ainsi les différentes terres de cultures sont

redistribuées donc partagée entre les deux nouvelles familles car pour l’habitat des problèmes

ne se posent pas à ce niveau. La division des terres de cultures pose problème le plus souvent

quand il y’a un antécédent entre les deux protagonistes.

Les litiges qui opposent deux familles distinctes du même village sont très rares dans les

villages de cette partie de la CRK. D’autant que chaque famille connait les terres qui lui

appartiennent. Les droits d’usufruitier dont dispose certains sur les terres d’une autre famille

même si ces derniers continuent de les exploiter ne remontent pas de génération en génération

au point de pouvoir porter des litiges. Les seuls litiges entre familles d’un même village

alarmantes ont été soulignés dans le village de Boune. Ce village dispose de la bande de terre

qui sépare l’océan atlantique au bolong qui part dans les îles Biliss. Elle part de derrière

l’hotel Karone à Kafountine jusqu’à l’embouchure de Saloulou. Boune situé dans une petite

île ne disposant de terre s’est approprié ces terres par le droit de friche. Toutes les familles qui

composent le village disposent de terres sur cette étendue. Ces terres héritées de leurs ancêtres

ont des parties qui sont au cours des années devenues des terres en friche. L’enjeu du foncier

sur cette partie, due au développement du maraichage ou des activités agricole hors saison des

pluies et du tourisme vont redonner un intérêt et une valeur importante au foncier sur cette

bande. L’exploitation grandissante des terres va donc entrainer des litiges entre des familles.

Le type de droit peut être avancé comme étant à l’origine des conflits car si certains

bénéficient d’un « droit de hache » qui est témoigné parce qu’ils exploitent les terres depuis

plusieurs années les autres posent un « « droit de maitre » parce qu’ils prétendent être

descendants des premiers maitre de terre, donc du premier occupant. Les conflits fonciers

notés ici ont été mal soldés entre les familles. Car elles ont fini par faire recours à des

pratiques mystiques pour régler leur compte.

1.2.Les litiges fonciers inter village entrainés par le droit coutumier

Il s’agit des litiges fonciers qui opposent deux villages de la CRK, ils sont aussi plus

remarqués dans les îles où le droit ou la législation coutumière régit encore le foncier. Dans la

partie des iles Karone, c’est au niveau des terres de culture que les litiges sont notés. Il est

59

arrivé que des familles d’un village qui ont bénéficié d’un droit d’exploitation sur les terres

« appartenant » à des familles d’un autre village soient sommées de ne pas les exploitées

après un différents ayant opposé les deux villages. Ces types de litiges ont opposé souvent le

village de Hilol et de Kouba qui sont les deux plus grands villages de cette partie. Concernant

les litiges qui opposent ces deux villages, dans la plus part des cas, le conflit ne découle pas

réellement du type de droit dans la mesure où le droit de premier occupant prime sur les autres

droits selon la coutume et que les villages connaissent les détenteurs de ces droits et comment

les autres ont pu en bénéficier d’un droit d’usufruitier sur les mêmes terres. C’est en effet, la

façon de récupérer les terres qui pose problème, parce que ce n’est pas dans une intention de

les exploiter mais plutôt pour le règlement d’un différent. Il est arrivé que des familles se

voient leurs cultures détruites. On peut rattacher ces types de litiges au cas du village de

Boune et de Saloulou qui ont eu, pour une raison ou pour une, à interdire aux autres villages

d’exploiter des terres qui leurs appartiennent.

Les litiges dus au droit coutumier sont survenus lorsque le détenteur du droit de maitre ou de

premier occupant n’est réellement pas connu. Ils sont notés sur des terres qui ont été soumise

à plusieurs droit et qui ont porté des confusions sur les droits dont disposaient chacun des

partie c'est-à-dire qu’on ne parvient plus à connaitre le détenteur du droit de maitre. Ce type

de conflit a opposé les villages de Saloulou et de Bakassouck qui se disputent l’île des oiseaux

qui se situe dans la réserve ornithologique de Kalissaye.

2. Les litiges fonciers entrainés par les nouvelles pratiques

Il s’agit des transactions monétaires sur la terre. La marchandisation des terres est un

phénomène nouveau dans la CRK, devenu très fréquent voire même courant, bien qu’elle ne

soit pas reconnu ni par le droit moderne et ni par le droit coutumier comme pratique légitime.

Force est de souligner que ce type de pratique ne font objet que dans la partie continentale de

la CRK, par contre dans la partie des îles la terre garde son caractère sacré et maintien une

gestion coutumière. Les villages de la zone continentale de la CRK ne sont pas des villages

traditionnels au sens profond du terme, parce que les familles fondatrices de ces villages sont

originaires soit des iles (Karone, Biliss) soit du fognie. Cette partie constitue la zone ouverte

de la CRK ou le tourisme et la pêche vont attirer des acteurs d’origines diverses. Le

développement de ces activités va entrainer le recul des activités traditionnelles et donner au

foncier un enjeu économique fort. Ces enjeux économiques forts du foncier sont aussi dus à

la position stratégique de la CRK et justifient la présence d’acteurs divers ceux voulant se

60

constituer un patrimoine foncier ou faire des rentes d’anticipation, et ceux ayant besoin d’un

toit pour s’installer définitivement. Les ruraux confrontée à des problèmes financiers changent

leur perception traditionnelle du foncier et en vont un fond de commerce. On va assister dans

ces villages à un partage du patrimoine foncier entre les membres de la famille. Ce partage

concerne souvent les terres de plateaux qui ne jouent plus leur rôle de terres de cultures hautes

sous pluie, mais qui se voit transformer en terre d’habitation (maison, réceptif touristique,

maison de campagne etc.) ou en terre d’horticulture, de maraichage. La terre est ainsi vendu

par les ruraux pour résoudre un besoin monétaire d’urgence ; cas de baptême par exemple. Il

faut aussi noter la forte présence d’opérateur immobilier qui ont acquis des parcelles auprès

des populations ou ils vont construire des villas qu’ils vont revendre à des dizaines de

millions, il, suffit de taper sur le net pour s’en apercevoir. La vente des terres est donc dans

cette zone le principal motif des litiges ou conflits fonciers. Il arrive que la vente d’une partie

du patrimoine lignager par un ayant droit et le plus souvent le patriarche soit remise en cause

par les autres membres de la famille. Il est arrivé aussi des cas de vente multiples d’une même

parcelle, dans ce cas c’est le propriétaire qui pour des besoins financiers profite de la nos

exploitation d’une parcelle déjà vendue ou de l’absence du premier acquérant pour le revende

à un autre.

II. Conséquences des litiges fonciers

Les litiges fonciers enregistrés dans la CRK ne sont pas sans incidence sur le plan social et sur

le plan économique.

1. Les conséquences sociales des litiges fonciers dans la CRK

Les litiges fonciers qui ont opposé des villages ou des familles de villages différents ont le

plus eu d’incidence sur le plan social. Ces types de litiges sont notés dans les villages des îles

et ils ont opposé des villages voisins. Les relations sociales entre donc les villages concernés

ont été détériorées pendant la période du litige. La cohésion sociale et la solidarité de

voisinage souhaitées pour réussir à impulser le développement se sont vues rompu par ces

litiges fonciers. Ces villages liés par l’histoire et la tradition (appartenance linguistique,

religieux et culturelle), se voient éloigner mutuellement les uns des autres. La relation de

confiance, de solidarité, de partage se transforme en une « guerre froide » entre village. Pour

le cas des villages de Hilol et de Kouba, pour le conflit récent de 2011 les choses ont failli

dégénérer, il a fallu de peu pour que cela tourne en un affrontement physique qui pouvait

perturber la stabilité de la zone et entraver les actions de développement entreprises dans la

61

localité tout entière. Ces litiges vont cultiver une mésentente entre donc ces deux villages des

îles qui ont la chance de se trouver sur une même étendu terrestre, ils sont les uns des rares

villages des îles ou on n’a pas besoin d’une pirogue pour se déplacer. Ils sont presque

condamnés à entreprendre le développement ensemble car dans l’avenir avec l’accroissement

de la population la distance de 2 à 3 km qui sépare les villages se verra considérablement

réduite, le développement ne sera plus pensé de façon séparée. Dans la zone du Biliss les cas

de litiges qui ont opposé le village de Boune à ces voisins ont eu à perturber la solidarité et la

cohésion sociale. Par exemple quand Boune à interdit aux autres villages de travailler dans ces

terres, son voisin de Kailo qui le ravitaille en vin de palme pour les rituels et les cérémonies

traditionnelles, a interdit à ces récolteurs de vin de vendre aux habitants de Boune.

Les litiges intra village, au sein du même village sont les litiges qui opposent les membres

d’une même famille ou de la même concession et les membres de deux familles distinctes.

Dans les villages les iles de la CRK, ils sont constatés mais ne sont pas assez important car ils

ont pu trouver des résolutions et c’est souvent des litiges au sein d’une même famille qui sont

le plus soulevés. C’est seulement à Boune qu’un problème opposant des familles distinctes du

même village et ayant un impact social est soulevé et il s’explique par l’enjeu fort qu’a le

foncier.

Dans les villages de la partie continentale les litiges ont souvent apposé les autochtones aux

particuliers qui sont venu acquérir une parcelle pour une raison ou pour une autre. Ces

derniers ont souvent été victime d’une double vente, ou d’une remise en cause de la vente par

les autres membres de la famille. Dans ces cas les gens font souvent recours à la justice pour

résoudre leur différent et à des pratiques mystiques ce qui fait que le dialogue et la discussion

qui sont des principes fondamentaux dans la vie en communauté sont de plus en lus écartés.

1.2. Les conséquences économiques des litiges fonciers dans la CRK

Nous somme ici dans une société traditionnelle où les gens concernant le foncier font recours

à des pratiques obscures, mystiques pour résoudre, régler un contentieux foncier. Ainsi des

parcelles, des terrains vont rester inexploités pour des raisons mystiques. Dans les villages de

la terre ferme, par exemple, on nous a signifié des parcelles qui sont depuis des années à leur

état d’antan, parce qu’aucun des belligérants n’ose y effectuer des travaux mêmes si pour

certains cas quelqu’un a bénéficié du verdict de la justice. Au niveau des iles nous pouvons

noter le cas qui a opposé deux familles à Boune, il a conduit à la non exploitation des terres

objets du litige. Nous avons aussi le cas de Kalissaye qui opposait Bakassouck à Saloulou, des

62

tentatives de résolution à l’amiable sont menées par le comité de gestion de la réserve. Ce

conflit à valu par des résolutions mystiques la disparition de l’ilots de reproduction pendant

des années entravant ainsi son exploitation à des fins écologiques mais aussi économiques

avec l’écotourisme, le tourisme de découverte qui commence à prendre effets à coté du

tourisme balnéaire.

63

Conclusion générale et perspectives

Tout au long de cette étude nous avons posé les dynamiques de développement et la gestion

foncière comme étant les déterminants des litiges fonciers, de même, on s’est attelé à faire

l’analyse de la gestion décentralisée du foncier et des litiges fonciers ainsi que les

conséquences engendrées par ces litiges.

Nous sommes partis du cadre général de la gestion foncière en Afrique surtout francophone et

du Sénégal pour ensuite abordé de façon spécifique la gestion décentralisé du foncier dans la

CRK. Le caractère exponentiel de l’évolution des litiges fonciers dans la CRK ces dernières

décennies va susciter l’idée de voir les déterminants et d’analyser la gestion foncière confiée à

la CRK depuis sa création.

La position géostratégique de la CRK conjuguée aux dynamiques de développement qui s’y

observent, les problèmes de gestion foncière ainsi que l’accroissement de la population

mettent en évidence les convoitises sur le foncier, ce qui par conséquent entraine les litiges

fonciers notés.

Nous avons donc essayé d’apporter des réponses partant de la problématique, aux questions

que nous nous posions : quels sont les déterminants des litiges fonciers dans la CRK ?

Comment sont gérés le foncier et les litiges fonciers ? Quel est le type de droit qui régit le

foncier? Quelles sont les conséquences des litiges ?

Cette vision systématique de l’analyse de la gestion décentralisée du foncier et des litiges

fonciers dans la CRK pose des hypothèses de recherche :

La première hypothèse que suscite ces questions de recherche est que « les dynamiques de

développement et la gestion foncière sont les déterminants des litiges fonciers »

Les dynamiques de développement notés concernent le changement des systèmes d’activité

avec les proportions que prennent l’arboriculture, le maraichage, la culture de l’anacardier.

Pour ce premier élément les résultats des enquêtes l’ont confirmé dans la partie continentale

de la CRK et dans la zone des îles seul le maraichage le confirme, pour l’arboriculture et la

culture de l’anacardier le manque de terres favorables à ces activités et l’enclavement de la

zone font qu’elles ne peuvent constituer des déterminants aux litiges fonciers.

64

Il s’agit aussi du développement du tourisme, de la pêche, et de l’évolution démographique.

Là également les données collectées l’ont confirmé dans la partie continentale de la CRK.

Cette zone abrite le quai de pêche, les infrastructures touristiques. Ces deux activités ont très

fortement contribué à l’accroissement de la population dans cette partie de la CRK. Il s’opère

ainsi une recomposition socio- spatial qui va déterminer les litiges fonciers.

La gestion décentralisée du foncier est aujourd’hui confronté au dualisme droit moderne-droit

traditionnel. Cet état des lieux est dû aux insuffisances et manquement du dispositif mise en

place pour la gestion du foncier, aux manquements remarquables qu’ils y’a dans les textes sur

la décentralisation et sur la loi sur le domaine national à ces fait j’ajoute le rejet du droit

moderne par les populations. Ce qui donne un foncier géré par le droit coutumier et ouvert

aussi à d’autres pratiques : marchandisation des terres, abus divers. Les analyses résultant des

données ainsi obtenues de la gestion foncière confirment le rôle déterminant qu’elle a sur les

litiges fonciers. Le droit traditionnel renferme plusieurs types de droit qui aujourd’hui portent

à confusion et entrainent les litiges fonciers dans la partie des îles où la gestion coutumière

régit le foncier. Dans la partie continentale la terre devenu un fond de commerce est assujetti à

des ventes multiples, ventes remises en cause qui évidemment débouche sur des conflits vie

l’enjeu du foncier.

En effet, cela vient conforter notre seconde hypothèse qui est de dire que « les litiges

fonciers sont gérés par des instances locales »

Cette seconde hypothèse est confirmé par les enquêtes surtout dans la partie des îles,

composée de population homogène qui ont la même sphère sociale, ces populations accordent

une grande importance aux valeurs traditionnelles, elles gardent une gestion traditionnelle du

foncier, ainsi les litiges sont aussi gérer par des acteurs locaux donc des instances locales

selon maintenant l’échelle du litige ; si c’est un conflit au sein d’une famille ; l’instance va

réunir des acteurs d’une même famille plus des médiateurs qui sont des cousins de la famille,

si le litige oppose deux familles du même villages, l’instance regroupe tous les notables du

village et enfin si il oppose deux villages ; l’instance réunit tous les notables des deux villages

plus des médiateurs qui sont souvent les cousins à plaisanterie. On note également le recours

au conseil rural et à la justice sur tout dans la partie continentale de la CR où le foncier à

perdu sa valeur sacré pour devenir une valeur marchande. Le conseil fait office de résolution

du litige dans les cas ou il est intervenu avec l’affectation ou la désaffectation. Les recours à

65

la justice sont observés dans les cas ou aucun des droits moderne (attribution par le conseil

rural) et traditionnel n’a fondé les droits revendiqués.

Notre troisième et dernière hypothèse va consister à étudier les conséquences des litiges,

elle est formulée comme suit « les litiges fonciers ont des conséquences sur la cohésion

sociale et sur la valorisation de certains espaces.», elle est soulevé dans l’esprit d’analyser

les impacts négatifs et leurs effets. Cette hypothèse donc est confirmée par les enquêtes sur

l’ensemble de la CRK. Les litiges qui ont opposé des villages et des familles ont contribué à

détériorer les liens familiaux, les relations de solidarité, de confiance et de partage. La paix

sociale s’est vu ainsi menacer. Ce qui constitue un frein au développement. Beaucoup de

villages au niveau des îles ont vu leurs liens sociaux brisés par ces litiges fonciers. Il est aussi

noté des espaces qui ne sont pas mis en valeur depuis qu’ils sont disputés ce qui impact

négativement sur le développement économique.

En somme cette étude sur la gestion décentralisée des litiges fonciers au Sénégal : cas de la

CRK, nous a permis d’appréhender la question de la gestion décentralisée du foncier, ainsi les

limites de la décentralisation et de la gestion foncière sont appréhendées, les réalités sur la

gestion du foncier et des litiges fonciers ainsi que les conséquences sont ressorties.

Les mutations économiques, sociales et spatiale ne sont pas accompagnées d’une législation

adaptée, du dispositif de gestion et de la communication impérative dans une gouvernance

démocratique. Cette situation soulève de multiples thèmes de réflexion allant dans le sens de

parfaire la gestion décentralisée, par exemple comment concilier le droit traditionnel à de

nouvelles lois plus adaptées aux réalités locales ? Comment hiérarchiser les rôles entre les

différents acteurs de la décentralisation (Etat et ses services, administration locale,

organisations et la population) bref comment réussir une bonne gouvernance foncière?

La décentralisation étant une politique qui consiste à impulser le développement à partir du

bas, nous souhaitons étudier si l’opportunité se présente le thème suivant : Le développement

local de la CRK : potentialités, faiblesses ; quelles organisations des acteurs et quels actions

pour impulser un développement durable.

66

Bibliographie

Actes du collogue du 14 oct 2005. Production foncière : Responsabilité des élus et des

aménageurs, ADEF, 154 pages

Alain. K. (2008), des communautés locales Problématique. In Meral. Ph, Castellanet. Ch et

Lapeyere. R. (dir), la gestion concertée des ressources naturelles. L’épreuve du temps, Gret-

KARTHALA, pp 277-280

Alain. R (2005), le « Droit d’agir » une proposition pour la « bonne gouvernance foncière »,

cahier d’orthographe du droit, pp. 59-72

Alain. R (2002), Foncier et décentralisation. Réconcilier la légalité et la légitimité des

pouvoirs domaniaux et fonciers. Cahier d’orthographe du droit, PP. 15-43

Cathérine Farvacque, Vitkovic, Patrick MC (1993) Politique foncière des villes en

développement, ADEF, 155 pages

CHANTAL B., PAMARD, LUC C., (1995), dynamique des systèmes agraire : terre, terroir,

territoire les tensions foncières, OSTROM, 472pages

CLOTILDE BUHOT, Yann Gérard, FAbin Brulay et Claire Ghoblet (2009), Tensions

foncières sur le littoral, Presse universitaire de Rennes, 172 pages

Colin, J.Ph ; Pierre Yves, Le Meur et Eric Léonard. Les politiques d’enregistrement des droits

fonciers : du cadre légal aux pratiques locales, KARTHALA, 532pages

Déthié. S. ND, Assize. T. (2009), Gouvernance locale et gestion décentralisée des ressources

naturelles, Dakar, CSE, 318pages

ERIC. I. (2009), Décentralisation et limites foncières au Mali ; le cas du cercle de kita, iied,

dossier n°151

ETIENNE R., ALAIN K., ALAIN B. (1996), la sécurisation foncière en Afrique pour une

gestion viable des ressources renouvelables, KARTHALA, 388pages

GRiGORI LAZAREV, Mouloud arad (2002), Développement local et Communautés

rurales ; Approches et instruments pour une dynamique de concertation. KARTHALA,

366pages

67

Jacques. F. (2006), foncier et décentralisation ; l’expérience du Sénégal. Quatrième atelier

national des commissions foncières, Niamey 21-23 juin, pages 1-11

Joelle. T. SC. (2008), Le foncier au Sénégal : Accès à la terre, accès à l’eau, égalité des sexes,

ntiposift.com , pp. 1-14

Klaux D. (2005), une politique foncière pour la croissance et la lutte contre la pauvreté,

Rapport d’Etude de la BM, 244pages

Lavingne. Th, Ouédraogo. H,Toulmin. C et Le Meur. P.Y. (2002), Pour une sécurisation

foncière des producteurs ruraux, Paris, GRET, 172pages

PHILLIPPE L. D., JEAN P. C. (1998), quelles pratiques foncières pour l’Afrique noire ?

Réconcilier pratiques, légitimité et légalité, édition KARTHALA, 345pages

Philippe Lavigne Delville, Camille Toulmin et Samba traoré (2000) Gérer le foncier en

Afrique dynamique foncière et intervention publiques, KARTHALA, 357pages

UA- CEA- BAD, (2010) Ateliers consultatifs régionaux sur les politiques foncières en Afrique

principales conclusions et recommandations, CONSORTIUM, 50pages

VOLKER S. (1998), structures et pratiques foncières en Afrique de l’ouest, L’HARMATAN,

214pages

68

Tables des matières

Dédicace………………………………………………………………………………..1

Remerciements………………………………………………………………………….2

Liste des sigles, acronymes et abréviations…………………………………………....3

Sommaire……………………………………………………………………………….4

Avant-propos……………………………………………………………………………5

Introduction………………………………………………………………………………6

Première partie : Cadre théorique, opératoire et méthodologique………………………10

Chapitre I : Cadre théorique……………………………………………………………..11

1. Problématique…………………………………………………………………….11

2. Justification de l’étude et délimitation de son champ……………………………15

Chapitre II : Cadre opératoire……………………………………………………………18

1. Définition des concepts utilisés dans ce travail………………………………….18

1.1. Les litiges fonciers……………………………………………………………….18

1.2. La gestion décentralisée………………………………………………………….19

1.3. La communauté rurale……………………………………………………………

2. Définition opérationnelle…………………………………………………………20

2.1. Modèle d’analyse………………………………………………………………..21

Chapitre III : Cadre méthodologique……………………………………………………..23

1. Méthode et technique de collecte des données…………………………………..23

1.1. La recherche documentaire………………………………………………………23

69

1.1.2. La revue documentaire…………………………………………………………24

1.1.3. Apport de quelques productions……………………………………………….25

1.1.4. Position du problème scientifique……………………………………………...27

1.2. Enquêtes de terrain………………………………………………………………..28

1.2.1. La visite exploratoire……………………………………………………………28

1.2.2. L’enquête proprement dite……………………………………………………..28

1.2.3. Le guide d’entretien………………………………………………………………30

Deuxième partie : Gestion décentralisée du foncier et des litiges fonciers dans la Communauté

rurale de Kafountine (CRK)………………………………………………………………32

Chapitre I : Les dynamiques de développement de la CRK………………………………33

I. Le changement des systèmes d’activités agricoles…………………………….33

1. L’arboriculture……………………………………………………………………..33

2. La culture de l’anacardier…………………………………………………………..34

3. Les cultures maraichères…………………………………………………………...34

II. Le développement de la pêche………………………………………………….35

1. La pêche dans les bolongs…………………………………………………………..35

2. La pêche en haute mer………………………………………………………………35

2.1. Les migrants lébous et « Guet Ndariens »…………………………………………35

2.2. Les migrants de la sous région……………………………………………………..36

III. Le développement du tourisme………………………………………………….36

1. Processus évolutif du tourisme……………………………………………………..36

2. Contribution du tourisme à la croissance de la population et impacts sur le foncier de

la CRK………………………………………………………………………………36

IV. Les dynamiques démographiques de la CRK…………………………………..38

1. Croissance de la population………………………………………………………….38

1.2. Composition de la population……………………………………………………….38

1.3. La répartition spatiale de la population……………………………………………...39

Chapitre II : Décentralisation et gestion foncière au Sénégal ; cas d’application de la

CRK…………………………………………………………………………………………41

70

1. La décentralisation………………………………………………………………….41

1.1. Le processus évolutif de la décentralisation au Sénégal………………………………42

1.1.2. La décentralisation avant les indépendances au Sénégal…………………………….43

1.1.3. La décentralisation de l’indépendance (1960) à nos jours……………………………44

1.2. Les insuffisances et contraintes de la mise en œuvre………………………………….46

1.2.1. Les insuffisances et contraintes liées aux compétences transférées………………….46

1.2.2. Les contraintes et insuffisances de mise en œuvres de la gestion décentralisée du

foncier………………………………………………………………………………………47

2. Décentralisation et gestion foncière dans la CRK……………………………………….47

2.1. Le conseil rural………………………………………………………………………….47

2.2. Les services déconcentrés……………………………………………………………….48

2.2.1. La DER………………………………………………………………………………..48

2.2.2. Le sous-préfet………………………………………………………………………….49

2.3. Les organisations d’appui au développement……………………………………………49

3. La gestion décentralisée du foncier………………………………………………………50

3.1. Les prérogatives de la CR en matière domaniale……………………………………….50

3.2. Les contraintes à la gestion décentralisée du foncier dans la CRK…………………….50

3.2.1. Contraintes relatives à la législation foncière……………………………………..51

3.2.2. Contraintes relatives au manque de moyens humains et techniques………………….52

4. L a gestion des litiges fonciers…………………………………………………………….53

4.1. Les instances locales traditionnelles……………………………………………………53

4.2. Le conseil rural et la justice

Chapitre III : Litiges fonciers dans la CRK : causes, manifestations et conséquences……56

I. Causes et manifestations des litiges fonciers dans la CRK……………………..56

71

1. Causes et manifestations des litiges fonciers induits par le droit coutumier………56

1.1. Les litiges fonciers intra village entrainés par le droit coutumier………………….56

1.2. Les litiges fonciers inter village entrainés par le droit coutumier…………………...57

2. Les litiges fonciers entrainés par les nouvelles pratiques……………………………58

Conclusion générale et perspectives………………………………………………………..62

Bibliographie…………………………………………………………………………………65

Tables des matières…………………………………………………………………………..68