les echos - 03 12 2020

40
JEUDI 3 DÉCEMBRE 2020 ISSN0153.4831 113 e ANNÉE NUMÉRO 23340 40PAGES Antilles Réunion 4,10 €. Belgique 3,60 €. Espagne 4,40 €. Grande-Bretagne 3£80. Grèce 4,20 €. Italie 4,40 €. Luxembourg 3,80 €. Maroc 35 DH. Suisse 5,90 FS. Tunisie 5,50 TND. Zone CFA 3100 CFA. DOMINIQUE SEUX DANS « L’ÉDITO ÉCO » À 7H45 DU LUNDI AU VENDREDI SUR Transports La SNCF se dirige vers une perte abyssale de 5 milliards // P. 23 Enquête Masques anti-Covid : comment la France a remonté la pente face aux Chinois // P. 14 Loïc Venance/AFP La résistance des patrons de PME face à la crise En s’offrant Slack, Salesforce veut défier Microsoft Le futur radieux des monnaies numériques L’analyse de Jean-Marc Vittori Le projet Libra de Facebook et le Covid, qui a démultitplié le nombre de paiements sans contact, ont convaincu les ban- ques centrales que le lance- ment de monnaies numériques n’étaient plus une option, écrit Jean-Marc Vittori. En franchis- sant ce pas décisif, elles vont aussi devoir faire des choix qui changeront à jamais monnaie et finance. // PAGE 10 Le rebond de la consommation en décembre limitera la chute de l’activité CONJONCTURE Au quatrième tri- mestre, l’économie française tour- nera encore à 8 % en dessous de son niveau d’il y a un an. Mais avec le déconfinement, la consomma- tion devrait rebondir nettement au mois de décembre, prévoit l’Insee. Ce qui permettra de limiter quel- que peu la crise. Cette année, le PIB devrait plonger de 9 %, un peu moins que ce que craignait le gou- vernement. La prochaine campa- gne de vaccination fait espérer une sortie de crise l’an prochain. Cel- le-ci reste largement liée à un retour de la confiance chez les ménages et les entreprises. Ce qui nécessitera encore un soutien public en 2021. // PAGE 6 Covid-19 : comment les vaccins seront acheminés vers les patients ÉPIDÉMIE Une organisation au cordeau va devoir se mettre en place pour vacciner les publics prioritaires dans les Ehpad, en jan- vier et février. Les premiers vaccins disponibles devront être conservés par grand froid. Deux circuits de distribution sont prévus : une cen- taine d’hôpitaux répartis dans cha- que département et cinq platefor- mes nationales vont être équipés de super-congélateurs. « Les Fran- çais attendent d’être convaincus par la qualité du processus engagé », déclare l’ex-ministre de la Santé Marisol Touraine, « pas très inquiète » sur la volonté des Fran- çais de se faire vacciner si l’opéra- tion est bien menée. // PAGE 2 A plus de 1,20 dollar, l’euro fort pénalise les exportateurs européens CHANGES Proche de 1,21 dollar, l’euro connaît un regain de vigueur, qui complique la politique de la Banque centrale européenne. Il a gagné 7,5 % cette année malgré la crise sanitaire et économique. Favorisée par le retour de la confiance sur les marchés bour- siers européens, la hausse de la monnaie unique accroît le risque de déflation et pèse sur la compéti- tivité des exportateurs européens. Sans des décisions fortes de soutien à l’économie, comme une baisse significative des taux d’intérêt lors de la réunion du 10 décembre, l’euro fort risque de s’installer dura- blement dans le paysage monétaire européen. // PAGE 31 BAROMÈTRE En dépit d’une chute d’activité sans précédent au printemps, les dirigeants de PME-ETI ont gardé le moral et leurs réflexes d’entrepreneurs, au cours des derniers mois, selon une enquête de bpifrance, qui a interrogé plus de 1.700 entreprises. Ils sont 69 % à n’avoir jamais songé abandon- ner depuis le mois de mars et, pour 83 % d’entre eux, la crise sanitaire est une incitation à accélérer le développement d’innovations. La Banque publique d’investissement, opérateur du PGE pour l’Etat, voit également un signe fort d’optimisme dans les 40 % qui ne prévoient pas de difficulté financière d’ici à juin 2021. // PAGE 28 Salesforce a confirmé le rachat de Slack à l’occasion de la publication de ses résultats trimestriels. Photo G. Jones/Bloomberg LOGICIELS Salesforce, le numéro un des logiciels de relation client, réalise la plus grosse acquisition de son histoire en mettant 27,7 milliards de dollars sur la table pour acheter la messagerie professionnelle collaborative Slack, l’une des success-stories de la Silicon Valley ces dernières années. L’opération doit permet- tre à Salesforce de rivaliser davan- tage avec Microsoft, dont l’outil Teams a rattrapé Slack. Elle consacre l’ascension de Sales- force qui s’est imposé à coups de rachats audacieux et rivalise avec Oracle, mais surtout désormais avec Microsoft, Amazon et Google. // PAGE 24, L’ÉDITORIAL DE DAVID BARROUX PAGE 15 ET « CRIBLE » PAGE 40 L’ultimatum du gouvernement aux assureurs l Bruno Le Maire menace les assureurs d’une taxe faute d’un geste pour les hôteliers et restaurateurs d’ici à lundi. l Certains d’entre eux ont déjà gelé leurs tarifs, mais Bercy attend d’autres efforts. l L’Etat veut inciter les compagnies à renforcer les fonds propres des entreprises. Une brasserie parisienne, juste avant le reconfinement. Photo Gonzalo Fuentes/Reuters // PAGES 30 iStock

Upload: others

Post on 11-Sep-2021

0 views

Category:

Documents


0 download

TRANSCRIPT

Page 1: Les Echos - 03 12 2020

JEUDI 3 DÉCEMBRE 2020

ISSN0153.4831 113e ANNÉENUMÉRO 23340 40PAGES

Antilles Réunion 4,10 €. Belgique 3,60 €.Espagne 4,40 €. Grande-Bretagne 3£80.Grèce 4,20 €. Italie 4,40 €. Luxembourg3,80 €. Maroc 35 DH. Suisse 5,90 FS. Tunisie5,50 TND. Zone CFA 3100 CFA.

DOMINIQUE SEUXDANS « L’ÉDITO ÉCO »À 7H45DU LUNDI AU VENDREDI

SUR

Transports La SNCF se dirige vers une perte abyssale de 5 milliards // P. 23

Enquête Masques anti-Covid : comment la France a remonté la pente face aux Chinois // P. 14

Loïc

Ven

ance

/AFP

La résistance des patrons de PME face à la crise

En s’offrant Slack, Salesforce veut défier Microsoft

Le futurradieux des monnaies numériques

L’analyse deJean-Marc Vittori

Le projet Libra de Facebook et le Covid, qui a démultitplié le nombre de paiements sans contact, ont convaincu les ban-ques centrales que le lance-ment de monnaies numériques n’étaient plus une option, écrit Jean-Marc Vittori. En franchis-sant ce pas décisif, elles vont aussi devoir faire des choix qui changeront à jamais monnaie et finance. // PAGE 10

Le rebond de la consommation en décembre limitera la chute de l’activitéCONJONCTURE Au quatrième tri-mestre, l’économie française tour-nera encore à 8 % en dessous de son niveau d’il y a un an. Mais avecle déconfinement, la consomma-tion devrait rebondir nettement aumois de décembre, prévoit l’Insee. Ce qui permettra de limiter quel-que peu la crise. Cette année, le PIBdevrait plonger de 9 %, un peu moins que ce que craignait le gou-vernement. La prochaine campa-gne de vaccination fait espérer unesortie de crise l’an prochain. Cel-le-ci reste largement liée à un retour de la confiance chez les ménages et les entreprises. Ce qui nécessitera encore un soutien public en 2021. // PAGE 6

Covid-19 : comment les vaccins seront acheminés vers les patientsÉPIDÉMIE Une organisation au cordeau va devoir se mettre en place pour vacciner les publics prioritaires dans les Ehpad, en jan-vier et février. Les premiers vaccinsdisponibles devront être conservéspar grand froid. Deux circuits de distribution sont prévus : une cen-taine d’hôpitaux répartis dans cha-que département et cinq platefor-mes nationales vont être équipés de super-congélateurs. « Les Fran-çais attendent d’être convaincus parla qualité du processus engagé », déclare l’ex-ministre de la Santé Marisol Touraine, « pas très inquiète » sur la volonté des Fran-çais de se faire vacciner si l’opéra-tion est bien menée. // PAGE 2

A plus de 1,20 dollar, l’euro fort pénalise les exportateurs européensCHANGES Proche de 1,21 dollar, l’euro connaît un regain de vigueur,qui complique la politique de la Banque centrale européenne. Il a gagné 7,5 % cette année malgré la crise sanitaire et économique. Favorisée par le retour de la confiance sur les marchés bour-siers européens, la hausse de la monnaie unique accroît le risque de déflation et pèse sur la compéti-tivité des exportateurs européens. Sans des décisions fortes de soutienà l’économie, comme une baisse significative des taux d’intérêt lors de la réunion du 10 décembre, l’euro fort risque de s’installer dura-blement dans le paysage monétaireeuropéen. // PAGE 31

BAROMÈTRE En dépit d’une chute d’activité sans précédent au printemps, les dirigeants de PME-ETI ont gardé le moral et leurs réflexes d’entrepreneurs, au cours des derniers mois, selon une enquête de bpifrance,q u i a i n t e r r o g é p l u s d e 1.700 entreprises. Ils sont 69 % àn’avoir jamais songé abandon-ner depuis le mois de mars et, pour 83 % d’entre eux, la crise sanitaire est une incitation à accélérer le développement d’innovations. La Banque publique d’investissement, opérateur du PGE pour l’Etat, voit également un signe fort d’optimisme dans les 40 % qui ne prévoient pas de difficulté financière d’ici à juin 2021. // PAGE 28

Salesforce a confirmé le rachat de Slack à l’occasion de la publication de ses résultats trimestriels. Photo G. Jones/Bloomberg

LOGICIELS Salesforce, le numéroun des logiciels de relation client, réalise la plus grosse acquisition de son histoire en mettant 27,7 milliards de dollars sur la table pour acheter la messagerie professionnelle collaborative Slack, l’une des success-stories dela Silicon Valley ces dernières années. L’opération doit permet-tre à Salesforce de rivaliser davan-

tage avec Microsoft, dont l’outil Teams a rattrapé Slack. Elle consacre l’ascension de Sales-force qui s’est imposé à coups de rachats audacieux et rivalise avecOracle, mais surtout désormais avec Microsoft, Amazon et Google. // PAGE 24,L’ÉDITORIAL DE DAVIDBARROUX PAGE 15ET « CRIBLE » PAGE 40

L’ultimatum du gouvernement

aux assureurs

l Bruno Le Maire menace les assureurs d’une taxe faute d’un geste pour les hôteliers et restaurateurs d’ici à lundi.l Certains d’entre eux ont déjà gelé leurs tarifs, mais Bercy attend d’autres efforts. l L’Etat veut inciter les compagnies à renforcer les fonds propres des entreprises.

Une

bra

sser

ie p

aris

ienn

e, ju

ste a

vant

le r

econ

finem

ent.

Phot

o G

onza

lo F

uent

es/R

eute

rs

// PAGES 30

iSto

ck

Page 2: Les Echos - 03 12 2020

Tests de masse à Lille, Saint-Etienne et au HavreUne campagne de tests Covid massive va être expé-rimentée dans trois grandes villes françaises, comme le recommandait le Conseil scientifique. Il s’agira de Lille, Saint-Etienne et Le Havre, a révélé BFMTV mercredi, d’après les propos tenus par Emmanuel Macron mercredi lors d’un déjeu-ner avec des sénateurs. «On va essayer sur une aire urbaine de tester massive-ment, pour mieux connaître cette maladie, quels sont les quartiers, les populations, les lieux de vie les plus concernés», avait exposé le Premier ministre, Jean Castex, mercredi matin sur BFMTV/RMC. L’opération sera menée avant les fêtes, « sur la base du volontariat ».

Comment les vaccins anti-Covid seront acheminés jusqu’aux premiers patients

endroit. A la sortie du congélateur, ilne faudra pas traîner, car le vaccin survit 16 jours dans son colis et 5 jours au réfrigérateur. Les 10 % d’Ehpad disposant de leur propre pharmacie seront livrés directe-ment. Pour les autres établisse-ments, comme à l’accoutumée, les grossistes travailleront avec les offi-cines de ville. Il faudra s’assurer de la présence du médecin à l’Ehpad puis organiser des vaccinations en série pour ne pas gâcher les doses, chaque flacon ouvert devant être consommé dans la journée. n

l Cinq plateformes régionales et 100 établissements hospitaliers vont être équipés de supercongélateurs.l Une planification au cordeau sera nécessaire pour éviter de perdre les précieuses doses à conserver par grand froid.

France. Elle a d’abord décidé d’équi-per 100 centres hospitaliers publics, un dans chaque département, pour desservir depuis cette base les éta-blissements destinataires des doses.

90 petits ou moyenscongélateursMais cette démarche a montré ses limites. D’une part, les hôpitaux ne comprennent pas pourquoi ils devraient faire office de plateforme de stockage départementale. La logistique implique des contrain-tes : il faut sécuriser les locaux, lais-

ser un accès facile aux livreurs, et pouvoir envoyer un technicien jouret nuit en cas d’avarie.

D’autre part, la tâche n’est pasaisée, comme l’a montré l’expé-rience de la distribution de mas-ques via les hôpitaux en mars. Dansle rapport de la mission d’enquête de l’Assemblée nationale sur le Covid, le président de la Fédération hospitalière de France (FHF), Fré-déric Valletoux, évoque ce fiasco : « Nous ne savions jamais quand, combien réceptionner et à qui don-ner ces masques. Selon une note

confidentielle du ministère de la Santé envoyée en novembre aux agences régionales de santé, 90 hôpitaux vont être dotés de petits ou moyens congélateurs à – 80 °C entre le 10 décembre et le 10 janvier.

Selon nos informations, le gou-vernement compte également mettre sur pied cinq plateformes nationales équipées de gros super-congélateurs, pour stocker des cen-taines de milliers de doses du vaccinPfizer/BioNTech. Elles arriveront dans des colis réfrigérés avec de la

glace sèche, pouvant contenir entreune et cinq boîtes de 195 flacons. Dans chaque boîte, il y a de quoi procéder à 975 injections sous forme de flacons de 5 doses.

A partir de ces plateformes, lescolis isothermes seront acheminés en flux tendu par les grossistes-ré-partiteurs, qui ont l’habitude de livrer deux fois par jour les pharma-cies. Les agences régionales de santé ont commencé à recenser les effectifs à vacciner dans chaque département, afin d’envoyer préci-sément les bonnes quantités au bon

Les doses du vaccin Pfizer/BioNTech sont stockées à – 80 °C. Ici, dans une usine Pfizer à Puurs, en Belgique. Photo Pfizer/Handout via Reuters

« L’exécutif fait face à un cocktail potentiellement détonant »Propos recueillis parPierre-Alain Furbury

@paFurbury

L’exécutif a-t-il raison de s’orienter vers une vaccination « progressive » ?D’abord, l’arrivée prochaine de plu-sieurs vaccins est une excellente nouvelle. La mobilisation des cher-cheurs comme des Etats a été spec-taculaire. Et pour la première fois, l’Union européenne a négocié col-lectivement, ce qui est une grande avancée. Pour autant, des incon-nues sur les propriétés des vaccins demeurent et les doses vont arriver progressivement. La vaccination vadonc s’étaler sur des mois : ce n’est pas un choix ; c’est une contrainte. Le gouvernement aura à relever un triple défi : convaincre les Français de se faire vacciner ; expliquer à unepartie de ceux qui sont partants qu’ils vont devoir attendre ; et faire accepter pendant plusieurs mois encore, alors qu’on vaccinera, des restrictions dans la vie sociale. Ce cocktail est potentiellement déto-nant. Il suppose que le gouverne-ment ait une stratégie claire, une logistique impeccable et qu’il s’engage dans un discours de con-viction plutôt que de coercition. Le gouvernement n’a pas le droit à l’erreur tant les enjeux sont décisifs.

Que feriez-vous, concrètement, si vous étiez toujours ministre ?A chacun ses responsabilités. C’est le gouvernement qui dispose des

informations nécessaires et sait donc ce qui peut se faire. Quels que soient ses choix, il faut qu’il les annonce vite, de façon précise, opérationnelle. On ne peut pas renouer avec des queues à n’en plus finir comme pour les tests. L’essentiel, dans une telle crise, c’estla confiance et c’est ce qui a le plus manqué. Imaginer qu’on pouvait tout faire bien du premier coup est illusoire et chacun peut compren-dre qu’on tâtonne face à une crise inédite et un virus inconnu. Mais cequi passe mal, ce sont les injonc-tions parfois contradictoires, assé-nées plutôt qu’expliquées. Lorsque des règles ne sont pas comprises, elles ne sont pas acceptées. De ce point de vue, la création d’un collec-tif citoyen, bien que tardive, va dansle bon sens.

Vous ne craignez pas que ce soit un gadget ?La démocratie n’est jamais un gadget. La démocratie sanitaire a été la grande absente de cette crise, sans aucune justification. La concertation avec les associations de patients ou d’usagers, l’échange avec les citoyens ont manqué. Il est crucial que les Français intériori-sent de nouveaux comportements, puissent interroger et faire des pro-positions. Voyez, après un temps d’incertitude, le port du masque n’est plus un enjeu.

Emmanuel Macron a-t-il raison d’exclure une vaccination obligatoire ?

comme cela avait été fait en 2016 pour préparer la vaccination obligatoire de 11 vaccins. Le « mon-sieur (ou la madame) Vaccins » annoncé(e) aura un rôle décisif.

Dans l’attente du vaccin, comment éviter une troisième vague ?Le vaccin arrive mais nous ne som-mes pas sortis, c’est vrai, de la période de tension. Seuls le respect des gestes barrières, une limitation des activités sociales, l’attention de chaque instant portée aux plus fragi-les peut nous permettre de franchir sereinement cette étape transitoire.

L’exécutif a-t-il trouvé le bon équilibre entre crise sanitaire et exigences économiques ?Le premier déconfinement a été, del’aveu même du Premier ministre, trop rapide. Il a créé le sentiment qu’un retour immédiat à la vie d’avant était possible. Les principesqui ont fondé la sortie du deuxièmeconfinement me paraissent, en revanche, plus équilibrés. Per-sonne ne peut se satisfaire d’une économie à l’arrêt. Le déconfine-ment progressif était un bon choix et, selon moi, la seule option pour concilier impératifs sanitaires et préoccupations économiques. La difficulté, c’est la tonalité de sa miseen œuvre. L’affaire des églises, des commerces dits « non essentiels » ou des stations de ski montre que le gouvernement a du mal à croire au sens des responsabilités des citoyens.

Vous semblez tout de même moins dure que les oppositions…La situation est suffisamment dif-ficile pour ne pas faire la leçon au gouvernement. Le temps du bilan viendra nécessairement. Je ne sais si quelqu’un peut penser qu’il aurait à coup sûr fait mieux. Mais je n’en suis pas moins critique sur le man-que d’anticipation à la fin de l’été, l’absence de messages de précautionnets. Il y a eu un échec de la stratégie« tester, tracer, isoler ». Si certaines insuffisances et défaillances étaient compréhensibles dans la première phase, elles ne l’étaient plus alors.

Des tests massifs sont annoncés dans trois métropoles. Ne serait-il pas plus pertinent de tester tous les Français avant Noël ?Pour Noël, se tester avant de voir des proches fragiles est une bonne chose. Au-delà, le plus important c’est de mettre en place une coor-dination efficace entre les tests, le traçage et l’isolement.

Qu’inspire la course aux vac-cins dans le monde à la prési-dente d’Unitaid que vous êtes ?La course aux vaccins est positive, et la découverte d’un vaccin si rapi-dement une réussite inédite. Mais n’oublions pas que la lutte contre la Covid-19 se joue au niveau mondial :si nous voulons que l’épidémie soit jugulée chez nous, nous devons nous assurer qu’elle le sera partout. Pour cela, nous devons faire des vac-cins des biens publics mondiaux. La

solidarité internationale n’est pas seulement une exigence éthique, elle est dans notre intérêt sanitaire etéconomique. Cela suppose de tra-vailler – ce que fait Unitaid – à l’acces-sibilité et à l’efficacité non seulementdes vaccins, mais aussi des tests et des traitements partout dans le monde. Il y a eu une mobilisation internationale importante pour que la réponse à l’épidémie n’oublie pas les pays les plus pauvres et la Francey a joué un rôle moteur. Elle est toutefois insuffisante sur le plan financier. Il faut mettre les bouchéesdoubles : il manque 4 milliards tout de suite, près de 24 milliards en 2021.Ce n’est pas insurmontable pour despays riches qui mettent, chacun, descentaines de milliards dans leurs plans de relance. n

Oui. Dans un contexte d’interroga-tion voire de franche défiance, il fautparier sur la conviction, la pédago-gie et la responsabilisation. Rien ne serait pire qu’une vaccination obli-gatoire qui ne serait pas respectée.

Vous avez vous-même rendu des vaccins obligatoires…Je ne suis pas très inquiète sur la volonté des Français de se faire vac-ciner dans la durée, dès lors que les vaccins seront accessibles, mieux connus, et que le processus de vac-cination fonctionnera bien. Les pre-mières semaines de la campagne de vaccination seront donc déter-minantes. Les Français attendent d’être convaincus par la qualité du processus engagé. L’organisation dela campagne doit être à la hauteur.

Comment expliquez-vous de telles réticences, en France, face aux vaccins ?Cela traduit pour beaucoup une remise en cause de la parole offi-cielle. La crise de la grippe H1N1 a euun impact catastrophique sur la vaccination. Mais il y a aussi une défiance nouvelle à l’égard de la parole scientifique et la cacophoniedes derniers mois n’a pas aidé. Il estdonc important de pouvoir tra-vailler en lien direct avec l’opinion,

MARISOL TOURAINE Ancienne ministre de la Santé et présidente d’Unitaid

« La démocratie sanitaire a été la grande absente de cette crise, sans aucune justification. »

Ham

ilton

/REA

ÉPIDÉMIESolveig Godeluck

@Solwii

Une planification au cordeau. Il va falloir des organisations bien hui-lées pour gérer en janvier et février la vaccination contre le Covid des publics prioritaires, à savoir un petit million de pensionnaires de maisons de retraite, d’unités de soins longue durée, voire de rési-dences autonomie et de personnelsvulnérables travaillant auprès d’eux. Le Premier ministre, Jean Castex, s’apprête à dévoiler ce jeudi la méthode choisie par le gouverne-ment pour lancer cette campagne vaccinale exceptionnelle.

La principale difficulté de cettepremière phase de la vaccination est liée à une faible disponibilité desvaccins. Les doses seront d’abord etuniquement livrées par le tandem Pfizer-BioNTech, et devront être conservées à – 80 °C. Or ni les hôpi-taux, ni les Ehpad, ni les grossistes-répartiteurs ne sont équipés en supercongélateurs ou bien de façonanecdotique.

La « task force » vaccins du gou-vernement a donc lancé des achats de congélateurs via Santé publique

Les plateformes équipées de gros supercongélateurs devraient pouvoir stocker des centaines de milliers de doses du vaccin Pfizer/BioNTech.

FRANCE Jeudi 3 décembre 2020 Les Echos

Page 3: Les Echos - 03 12 2020

L�énergie est notre avenir, économisons-la !

JE DÉPANNEÀDISTANCEPOURQUERIENNES�ARRÊTE.SURTOUTPAS LAVIECOURANTE.

Émilie est Agent de Conduite Réseau à Ormes (45).Émilie pilote en temps réel le réseau électrique pour en garantir la fiabilité. Avec Émilie, Enedis sécurisel�exploitation d�un réseau électrique toujours plus agile et connecté. C�est ça, le service public de latransition écologique dans les territoires.

Retrouvez-nous sur www.enedis.fr

©Brice

Portolano

Page 4: Les Echos - 03 12 2020

04 // FRANCE Jeudi 3 décembre 2020 Les Echos

LE FAIT DU JOUR POLITIQUECécileCornudet

V ouloir s’adresserà la jeunesse estun incontournable

présidentiel, souvent une arlésienne. Comment reprendre leurs codes sans les singer, comment se faire comprendre quand la défiance grandit ? Emmanuel Macron s’y attelle chez Brut, Jean Castex travaille à un discours à la jeunesse, dans un climat très particulier. La jeunesse de 2020 ne ressemble pas aux précédentes. Peut-êtremoins remuante, c’est un paradoxe (sans doute dû en partie à la faiblesse du syndicalisme étudiant), mais lointaine, presque séparatiste.« On peut parler de rupture culturelle entre une bonne partie des jeunes et le reste du pays », relève la spécialiste de l’opinion Chloé Morin. Elle part de leur regard sur la police. Seuls 34 % des moins de 35 ans disent avoir « confiance » en elle, contre 49 % des plus âgés (chiffres Ifop). Si l’exécutif reproche à l’extrême gauche d’être active dans la dénonciation des « violences policières », la perméabilité des jeunes à ces sujets, comme à ceux des libertés publiques, l’inquiète autrement. Il faut s’expliquer.Le fossé n’a cessé d’apparaître au fil des mois. Avant le Covid déjà, deux sociologues publient une enquête, avec un titre qui inspirera Emmanuel Macron : « Avoir 20 ans en 2020 » (1). Sur le genre et le féminisme, sur l’écologie, « la coupure est

Les 20 ans de 2020 : en voie séparatiste ?

inédite ». « Née avec Internet dans la main, vivant sur les réseaux sociaux, mue par des valeurs d’égalité sociale, cette génération “désenchaînée” avance non pas contre celle de ses parents, mais hors d’elle », décrivent-elles.L’assassinat de Samuel Paty rappelle une autre divergence. Puisque la liberté est pour eux une valeur cardinale, ils devraient voir dans la publication des caricatures l’expression de la liberté de la presse : pas du tout, c’est porter atteinte à l’identité, juge une large frange des moins de 30 ans. « On n’offense pas », le respect de l’autre, voilà les valeurs premières. Les trois quarts pensent qu’il « faut respecter les religions pour ne pas offenser les croyants », dit l’Ifop pour « Marianne ». Une majorité (57 %) juge la laïcité instrumentalisée contre les musulmans. Malentendu total. Si l’on ajoute à cela les conséquences économiques et psychologiques des deux confinements, la coupe finit de se remplir. Autre rapport au monde, à l’avenir, à l’information, ressentiment vis-à-vis des aînés pour la dette écologique, incompréhension sur le vivre-ensemble à la française, et maintenant impression d’avoir été sacrifiés pour la santé des plus âgés. Avant d’espérer des gains électoraux, il y a tout simplement à réarrimer les plus jeunes au paquebot national. Et si l’apostrophe « OK boomer ! » n’était pas une moquerie, mais une alerte ? « Bye bye, boomer »…[email protected]

(1) Claudine Attias-Donfut, Martine Segalen. Odile Jacob.

Chaque génération arrive à vingt ans avec le sentiment de ne pas comprendre celle d’au-dessus (et réciproquement), mais le fossé semble cette fois plus profond encore.

D’ici à 2030, 108.000 seniors de plus devraient vivre en EhpadDÉPENDANCE Les Ehpad, où vivent plus de 610.000 personnesâgées en perte d’autonomie, pourraient compter 108.000 rési-dents de plus d’ici à 2030 du fait du vieillissement de la popula-tion, selon des projections de la Drees, le service statistique desministères sociaux, publiées mercredi. Si les pratiques actuellesd’entrée en institution pour les personnes âgées en perte d’auto-nomie se poursuivaient, il faudrait alors doubler le rythmed’ouverture de places observé depuis 2012 entre 2019 et 2030,est-il estimé. « Le besoin d’ouverture de places en Ehpad et en rési-dence autonomie serait massif » dans la prochaine décennie,souligne la Drees.

en bref

Des

sins

Kim

Ros

elie

r pou

r « L

es E

chos

»Li

onel

m B

onav

entu

re/A

FP

« manque d’interministériel, de déconcentration et de décentralisa-tion » durant la crise, les « messages contradictoires sur les masques, les défaillances sur la politique des tests ». Et Damien Abad a insisté surles « grands oubliés » qu’ont été les Ehpad et les malades hors Covid avec les déprogrammations.

29 préconisationsUn rapport « partial et partiel » a fustigé le député LREM Julien Borowczyk, président de la com-mission d’enquête, avec selon lui « des conclusions préétablies […] à charge pour les soignants », autour dit-il, du « tri » des patients âgés. « A95 %, il n’y a pas eu de tri des patientsâgés. Les médecins ont fait une éva-luation bénéfice risque, le rapport ne le reflète pas et a fait le tri des audi-tions », déplore-t-il. Damien Abad a souligné lors de la première vague épidémique une chute « brutale et anormale au pic de la crise début avril du nombre de personnes âgées

de plus de 75 ans admises en réani-mation » et le lourd tribut des Ehpad dans les décès de la premièrevague.

Parmi les recommandations, lacréation d’un ministre délégué, placé auprès du Premier ministre, chargé de l’anticipation des crises. De même, il est proposé de redéfinirla liste des produits et équipementsdevant figurer dans les stocks stra-tégiques, de consolider les capaci-tés de productions françaises de cesstocks et de garantir une produc-tion au moins égale à 50 % des besoins en temps de crise sur le ter-ritoire national.

Une réflexion sur le rôle de Santépublique France ou encore la sup-pression des agences régionales de santé (ARS) au profit d’agences départementales de santé sous l’autorité des préfets de départe-ment sont avancées. Ainsi, entre autres, qu’une refonte du système des Ehpad afin qu’ils soient, notam-ment plus médicalisés. n

Macron s’adresse directement aux jeunes

Grégoire Poussielgue @Poussielgue

Une interview à un site devenu, quatre ans seulement après sa créa-tion, incontournable dans le mondedes médias sur Internet et une réfé-rence pour les jeunes : en s’expri-mant en direct sur Brut ce jeudi, Emmanuel Macron innove dans sa communication. Il fait surtout le constat que pour toucher les moinsde trente ans, les médias tradition-nels ne suffisent plus. « Les moins de25 ans n’utilisent plus les médias tra-ditionnels pour s’informer. A la fin octobre, l’allocution d’Emmanuel

Macron pour annoncer le reconfine-ment a été regardée par près de 80 % des plus de 65 ans mais par seule-ment la moitié des 18-24 ans », pointeBruno Jeanbart, le directeur géné-ral adjoint d’OpinionWay.

D’où la nécessité d’aller sur leurterrain. « Il est amusant de constaterque des présidents comme Chirac ou Mitterrand faisaient venir des jeunessur les plateaux de télévision quand ils voulaient les cibler. Maintenant, cesont les présidents qui se déplacent »,souligne Frédéric Dabi, directeur général adjoint de l’Ifop.

« Avoir 20 ans en 2020 »Pour Emmanuel Macron, il y a en tout cas urgence à s’adresser aux moins de 30 ans, à l’heure où la France s’apprête à sortir de son second confinement de l’année. « C’est dur d’avoir 20 ans en 2020. Donc je ne donnerai jamais de leçon ànos jeunes. Ce sont ceux qui, honnête-ment, vivent un sacrifice terrible », a-t-il reconnu le 14 octobre dernier. Entre le chômage, la précarité, les cours suspendus pour les étu-diants, sans oublier la fermeture des bars et restaurants, les jeunes paient un lourd tribut, alors qu’ils sont plutôt épargnés par la maladie.Par leurs comportements, ils ont aussi été accusés d’avoir favorisé

l’émergence de la deuxième vague.Le gouvernement a lancé l’été

dernier son plan « un jeune, une solution », mais ce ne sera pas suffi-sant. Emmanuel Macron va certes rappeler ce qui a été fait depuis le début du quinquennat pour la jeu-nesse. Plusieurs organisations de jeunesse ont cependant demandé l’extension du RSA, et le message a été relayé par le Conseil économi-que, social et environnemental (Cese), qui a demandé mercredi un accès aux minima sociaux pour les 18-25 ans, quel qu’en soit le méca-nisme. « Il suffit d’une étincelle pour qu’une mobilisation de la jeunesse prenne. Or, dans ce contexte de crise économique et sociale, cette étincelle peut être les violences policières », alerte Jean-Daniel Lévy, directeur délégué de Harris Interactive France.

A la crise est, de fait, venu s’ajou-ter le retour en force de la question des violences policières alors que les moins de 30 ans sont plus sensi-bles que la moyenne au sujet. Brut est le média qui emploie Rémy Bui-sine, journaliste molesté par la police lors de l’évacuation du camp de migrants de la place de la Répu-blique la semaine dernière. Le tabassage de Michel Zecler, produc-teur de rap, a aussi eu un écho parti-

culier. Selon un sondage réalisé parl’Ifop au mois de juin dernier, 30 % des Français estiment que le racisme d’Etat « correspond à une réalité ». Mais ce pourcentage monte à 46 % chez les moins de 35 ans et même à 47 % chez les 18-24 ans.

A la veille de la présentation duprojet de loi contre le séparatisme, lessignaux envoyés par les moins de 30 ans sur la laïcité sont aussi jugés inquiétants. Selon un sondage Ifop diffusé la semaine dernière par l’heb-domadaire « Marianne », 33 % des jeunes ne trouvent pas justifié de publier des caricatures se moquant des religions. L’Elysée précise que l’interview a été calée après le dis-cours des Mureaux (Yvelines), qui présentait la loi séparatisme, mais avant le tabassage de Michel Zecler. n

SOCIÉTÉ

Le chef de l’Etat doit accorder ce jeudi une interview au média Brut pour mieux atteindre les jeunes.

Premiers affectés par la crise issue du Covid-19, ils sont aussi très concernés par la question des violences policières.

Entre le chômage, la précarité, les cours suspendus pour les étudiants…, les jeunes paient un lourd tribut, alors qu’ils sontplutôt épargnés par la maladie.

Isabelle Ficek @IsabelleFicek

Le rapport doit être officiellement rendu public dans cinq jours, le temps pour les députés et les grou-pes parlementaires qui le souhai-tent, d’y ajouter une contribution, mais il a déjà viré à la bataille politi-que. Elle oppose la majorité et Les Républicains qui ont demandé en avril dernier par la voix de leur pré-sident de groupe à l’Assemblée nationale, Damien Abad, la créa-tion d’une commission d’enquête sur la gestion de l’épidémie de Covid-19.

Cette dernière a fini ses travaux,après avoir mené plus de 50 audi-tions, durant quelque 130 heures, parmi lesquelles celles de l’ex-Pre-mier ministre, Edouard Philippe, l’ex-ministre de la Santé, Agnès Buzyn, ou encore son successeur Olivier Véran, et pour finir celle du chef du gouvernement, Jean Cas-tex. Son rapport a été adopté mer-credi matin. Les oppositions l’ont approuvé quand les députés LREM et Modem se sont abstenus sur ce document, qui revient sur des épi-sodes délicats pour le gouverne-ment, comme les masques, les testsou encore la gestion de la crise dansles Ehpad.

Une gestion « chaotique »Il pointe une France « mal armée », une « sous-estimation du risque », un « manque d’anticipation », un « pilotage défaillant de la crise », ont détaillé ce mercredi lors d’une con-férence de presse Damien Abad et le député LR des Alpes-Maritimes Eric Ciotti qui ont voulu en donner les grandes lignes. Ce dernier a sou-

SANTÉ

Une « sous-estimation du risque » et un « manque d’anticipa-tion » ont été mis en avant par le rapport de la commission d’enquête du Palais-Bourbon sur la gestion de l’épidémie.

Il doit être rendu public la semaine prochaine.

Covid-19 : un « pilotage défaillant de la crise » pointé à l’Assemblée

Le rapport de la commission d’enquête du Palais-Bourbon sur la gestion de l’épidémie de Covid-19 revient sur des épisodes délicats pour le gouvernement, comme les masques, les tests ou encore la gestion de la crise dans les Ehpad. Photo Stéphane Mahé/Reuters

ligné une gestion « chaotique » de lacrise, qui a révélé des « failles struc-turelles ».

Le rapport relève pêle-mêle « unebaisse des stocks stratégiques », des « problèmes fournisseurs », le

« A 95 %, il n’y a pas eu de tri des patients âgés. Les médecins ont fait une évaluation bénéfice risque, le rapport ne le reflète paset a fait le tri des auditions. »JULIEN BOROWCZYKDéputé LREM et présidentde la commission d’enquête

RetrouvezNicolasBarréà7h15pour«L’éclairageéco»dans le 7h-9hdeMatthieuBelliard

Page 5: Les Echos - 03 12 2020

Les Echos Jeudi 3 décembre 2020 FRANCE // 05

méthode fondé sur « le dialogue, l’écoute, la recherche du compro-mis ». Pas question, donc, de sortir un dispositif clés en main qui ne fait pas consensus. « On s’interdit d’avoir d’entrée de jeu trop d’idées arrêtées, ce rapport est une brique utile, mais pas exclusive », explique-t-on dans l’entourage de la ministredu Travail, Elisabeth Borne.

Il « va désormais être transmis auxpartenaires sociaux et sera un des élé-ments qui permettra de nourrir la concertation dans le cadre de l’agendasocial », précise Matignon dans un communiqué diffusé mercredi en début d’après-midi, qui précise que « Jean-Yves Frouin le présentera à l’ouverture de cette concertation », d’ici fin décembre.

« Formes particulières d’emploi »Le ministère du Travail va lancer deux chantiers en parallèle. Le pre-mier, qui concerne la construction d’un socle de droits sociaux, va être engagé d’ici « une à deux semaines ». Il constitue le troisième volet de la réflexion engagée sur « les formes particulières d’emploi » avec les salariés de deuxième ligne et le travail détaché. Il pourrait éventuel-lement se traduire par des mesures qui seraient inscrites l’année pro-chaine dans le projet de loi de finan-cement de la Sécurité sociale.

Le ministère a « quatre mois uti-les » pour boucler le second chan-tier sur lequel il va aussi lancer une

teur, « niveau le plus pertinent […] sur lequel tout le monde s’accorde, s’agissant à tout le moins des organi-sations ayant vocation à représenterles travailleurs », là où les platefor-mes auraient souhaité un dialogue à leur seul niveau. Concernant la désignation des représentants des salariés en charge de ce dialogue, Jean-Yves Frouin préconise un « système d’élection » et non d’adhé-sion. Mais avec un scrutin par pla-teforme, pas au niveau national pour éviter un taux d’abstention record comme pour les salariés de très petites entreprises.

Négociation collectiveSi le rapport évoque une éventuelleexpérimentation du passage par des contrats collectifs de droit civil,ce qui ne manquera pas de faire polémique, il propose l’instaura-tion d’une véritable négociation collective qui constitue « la forme la plus adaptée pour permettre un dialogue constructif et équilibré », et dont l’un des enjeux sera la défi-nition du champ. n

Leïla de Comarmond @leiladeco

« Tout le monde était d’accord là-dessus. Personne ne voulait d’un tiers statut entre salariat et travail indépendant, ni les plateformes, ni les travailleurs, ni les experts… » résume un représentant de l’exécu-tif. L’enterrement de cette « fausse bonne idée » par le rapport remis mercredi matin par l’ancien magis-trat Jean-Yves Frouin au Premier ministre, Jean Castex, sur la régula-tion des plateformes numériques de travail arrive à point nommé pour l’exécutif qui souhaitait aban-donner cette piste, évoquée par la Cour de cassation et le gouverne-ment précédent.

Il en va autrement pour la pro-position alternative formulée par Jean-Yves Frouin d’un « tiers sécu-risateur » qui salarierait les tra-vailleurs de plateforme. En arri-vant à Matignon, Jean Castex a revendiqué un changement de

EMPLOI

L’ancien magistrat Jean-Yves Frouin a remis mercredi matin au gouverne-ment un rapport pour « réguler les plateformes numéri-ques de travail ».

Travailleurs des plateformes : l’exécutif lance une large concertation

concours-sesame.net

prepa

La plateforme officielle d’entraînementpour vous accompagner vers la réussite.

prepa-sesame.net

Cette plateforme offre la possibilité de se familiariser et de s’entraînerdès maintenant et sereinement aux épreuves du concours avec desoutils officiels et spécifiquement conçus par Concours SESAME pourses candidats.

concertation : il s’agit de celui de la représentation des travailleurs de plateforme et, au-delà, des modali-tés d’un dialogue social spécifique. Le gouvernement a été autorisé par la loi d’orientation des mobili-tés à légiférer par ordonnance au plus tard en avril sur le sujet. C’est ce qui a été à l’origine de la mission confiée à Jean-Yves Frouin dont l’objet a été ensuite élargi.

Dans son rapport, l’ancien prési-dent de la chambre sociale de la Cour de cassation plaide pour éta-blir un dialogue au niveau du sec-

La concertation va être lancée d’ici à fin décembre sur deux grands chantiers : le dialogue social dans le secteur et la construction d’un socle de droits sociaux.

qu’il faudrait être à 50 % comme écrit dans la loi de 2015 sur la transi-tion énergétique pour la croissance verte (LTECV). Mais ce type de retard est beaucoup moins le fait des opérateurs de l’Etat, comme l’AP-HP ou Enedis, que de ses admi-nistrations centrales.

Leurs dirigeants pourraientméditer sur leur démarche, notam-ment sur celle de La Poste. Les bâti-ments gérés par Poste Immo, sa filiale immobilière, sont approvi-sionnés à 100 % en énergie renouve-lable. Sa flotte totalise 37.000 véhi-cules électriques. Ses émissions de CO2 sont compensées par l’achat de crédit-carbone et les émissions que génèrent toutes ses activités sont strictement mesurées.

Une politique d’achats très rigoureuse« Il faut introduire des critères de développement durable dans toutes les fonctions internes des administra-tions où c’est possible », estime Gué-ric Jacquet, coauteur de l’étude EY. Les administrations et les satellites de l’Etat sont invités à réfléchir sur l’écoconception de leurs services numériques. Ils pourraient notam-ment ne plus s’approvisionner qu’enélectricité verte pour faire tourner et refroidir leurs data centers.

Cela passe par une politiqued’achats très rigoureuse, mais payante à de multiples égards. Les plus de 80 milliards d’euros de commandes de fournitures passées chaque année par l’Etat constituent un puissant soutien à l’activité. « Il faut que les grandes administrations s’engagent par contrat avec les filières qui sont sous leur tutelle », poursuit Guéric Jacquet.

Parmi les outils préconisés pourpermettre aux managers publics d’accélérer la transition énergétique,l’étude met en avant l’instauration d’un « dialogue annuel sur la questionenvironnementale ». L’idée est d’ins-tituer ce type d’échanges dans les comités de direction, mais égale-ment au niveau des instances repré-sentatives du personnel. Enjeu : fairede la TEE un objet de négociation au même titre que le social. n

Joël Cossardeaux @JolCossardeaux

Les cordonniers sont souvent les plus mal chaussés, dit le proverbe. L’Etat peut en témoigner puisqu’il ne s’applique pas à lui-même, ou très peu, les prescriptions qu’il édicteet enjoint les entreprises de les sui-vre en matière de transition écolo-gique. « L’Etat n’a pas encore entre-pris de véritable verdissement de ses dépenses de fonctionnement en interne », déplore une étude publiée ce jeudi par le cabinet international EY. La plupart des ministères inves-tissent moins de 3 % de leur budget dans la transition énergétique et éco-logique (TEE), et seuls cinq ministè-res ont réalisé un bilan carbone de leurs administrations, pointent notamment ses auteurs qui propo-sent une série de leviers pour accé-lérer le processus.

Autre anomalie, « il n’y a que 6 %des dépenses publiques qui vont à la TEE, alors qu’on est capable d’atteindre les 30 % dans un plan de relance », pointe Alexis Gazzo, un des deux coauteurs de cette étude. « Ce qui fonctionne pour les dépenses nouvelles, ne marche pas pour les autres. On n’arrive pas à s’attaquer à la partie dure », explique-t-il. Cet expert entend par là la politique d’achats, la mobilité propre, la gestion de l’énergie et des bâtiments,ou encore la sobriété numérique dont se soucie depuis longtemps le secteur privé.

Un exemple concret ? Les voitu-res et fourgons à faibles émissions (hybrides et électriques) acquis par l’Etat pour renouveler une flotte de près de 65.000 véhicules n’ont repré-senté que 22 % de ses achats alors

ENVIRONNEMENT

Les administrations centrales tardent beaucoup à verdir leur fonctionnement, constate une étude du cabinet international EY publiée ce jeudi.

Le retard criant de l’Etat sur la transition écologiquepar rapport au secteur privé

Les modalités de représentation collective des travailleurs des plateformes sont un important enjeu. Photo iStock

Page 6: Les Echos - 03 12 2020

06 // FRANCE Jeudi 3 décembre 2020 Les Echos

Guillaume de Calignon @gcalignon

Il y a une lumière au bout du tunnel.Elle est encore loin et brille faible-ment mais l’Insee l’aperçoit. Le moisde décembre devrait logiquement marquer une reprise de l’activité économique à court terme et la

SOCIAL

Le déconfinement progressif devrait inciterles Français à consom-mer plus ce mois-ci.

Dans une note publiée mercredi, l’Insee table sur une chute du PIB de 9 % sur l’ensemble de l’année, soit un recul moins important que celui anticipé par le gouvernement.

Laurent Thévenin @laurentthevenin

Des résultats jugés « déce-vants ». Dans un rapport sur l’attractivité des quartiers prio-ritaires de la politique de la ville (QPV) publié mercredi, la Cour des comptes dresse un constat sans appel sur l’impact des poli-tiques publiques qui leur sont consacrés. « En dépit des moyensfinanciers et humains déployés, cette attractivité a peu progressé en dix ans », notent les magis-trats financiers, sur la base d’une enquête nationale et de l’observation, en lien avecquatre chambres régionalesdes comptes, de l’évolutionde la situation de 8 QPV dans quatre régions sur la période 2008-2018.

C’est le cas en matière delogement – l’une des trois dimensions prises en compte dans le rapport, avec l’éduca-tion et l’activité économique. L’attractivité résidentielle « reste faible ». « Dans les quar-tiers qui ont bénéficié du pro-gramme national de rénovation urbaine, le cadre et les conditionsde vie de leurs habitants se sont améliorés, parfois très sensible-ment comme aux Minguettes [à Vénissieux, dans la banlieue lyonnaise, NDLR], sans toute-fois que l’image extérieure des quartiers ne se transforme, tant celle-ci demeure ternie par les problèmes de sécurité », souli-gnent les auteurs du rapport.

Il y a chaque année plus depersonnes qui quittent ces quar-tiers que de nouveaux habitantsqui s’y installent. Un mouve-ment qui se double d’une ten-dance préoccupante : les nou-veaux venus présentent des « situations sociales, économi-ques et familiales plus précaires »que les partants. Au final, « l’objectif […] d’une plus grande mixité sociale et fonctionnelle desquartiers […] n’est pas atteint », note le rapport.

Les résultats des élèves scola-risés dans ces quartiers sont inférieurs à la moyenne de leur académie, « malgré une amélio-ration depuis dix ans », souligne-

COLLECTIVITÉS LOCALES

L’attractivité des quartiers prioritaires de la politique de la ville a peu progressé sur la période 2008-2018, relève la Cour des comptes dans un rapport.

Les quartiers populaires ont subi un « recul économique et commercial » en dix ans

t-il également. La Cour des comptes pointe par ailleurs le « recul économique et commer-cial » subi par ces quartiers sur la période 2008-2018. « La pré-sence et l’implantation d’activités économiques au sein des QPV, déjà peu diversifiées, se sont sensi-blement réduites au cours des dernières années », écrit-elle. Selon elle, ces quartiers sont « peu aidés par les dispositifs de développement économique qui s’y révèlent inefficaces ». Autre signe de dévitalisation observé, les services de proximité « se délocalisent en périphérie » de ces quartiers.

Pour la Cour des comptes, lasituation appelle une « réformesubstantielle de la politique de laville », à laquelle l’Etat consacrechaque année environ 10 mil-liards d’euros - auxquels s’ajou-tent les financements de la rénovation urbaine et les dépenses, « difficilement mesu-rables», des collectivités loca-les. Selon elle, celle-ci « relève encore trop d’une vision natio-nale prescriptive ».

D’où sa recommandation de« rendre plus effective la décentra-lisation de la politique de la ville en permettant une différencia-tion accrue autour de projets de quartiers » qui seraient inclus dans chaque contrat de ville. Leur mise en œuvre et leur éva-luation devraient être confiées à« à la collectivité signataire locale-ment la plus pertinente ». Il est également préconisé de « préci-ser le sens et la portée des objectifsde mixité sociale et fonctionnelle des quartiers » et de les « arrimerà une stratégie pluriannuelle explicite en matière d’évolution du parc social, d’attribution des logements et d’affectation des locaux d’activité ».

Selon les magistrats, il s’agitaussi de « mieux articuler le renouvellement urbain avec l’accompagnement social, édu-catif, économique des habi-tants ». Autre nécessité mise enavant par la Cour des comptes :une articulation plus étroite des actions financées par les crédits de la politique de la villeavec les politiques publiques générales. n

Selon les magistrats, il s’agit de « mieux articuler le renouvellement urbain avec l’accompagnement social, éducatif, et économique des habitants ».

PME et ETI ont contribué à 44 % des exportations en 2019CONJONCTURE Il n’y a pas que les grands groupes qui expor-tent : les PME et ETI ont compté pour 44 % du montant desexportations françaises de marchandises en 2019, selon le pre-mier bilan de Business France publié mercredi. Alors qu’ellesreprésentent 99 % du nombre total des exportateurs français(129.200), PME et ETI ont contribué à hauteur de 221 milliardsd’euros aux 508 milliards de biens exportés l’an passé.

en bref

SMIC : « Vraisemblablement pas de coup de pouce » au 1er janvier, dit CastexSOCIAL Le salaire minimum ne sera « vraisemblablement » pasrevalorisé cette année au-delà de ce que recommande le grouped’experts sur le SMIC, soit « entre 1 % et 1,2 % », a indiqué mer-credi le Premier ministre, Jean Castex, sur RMC et BFMTV. Lerapport des experts remis mardi à la ministre du Travail, Elisa-beth Borne, préconise de s’en tenir à la revalorisation automati-que du salaire minimum, estimée à environ 1 %.

perspective d’un vaccin efficace avant l’été fait naître des espoirs à moyen terme, estime l’Institut dans une note publiée mercredi.

« L’allégement des restrictionsdevrait entraîner un rebond assez important de la consommation des ménages en décembre, un peu commece qui s’était passé à la mi-mai », pré-voit Julien Pouget, le chef du dépar-tement de la conjoncture à l’Insee. Plus précisément, avec la réouver-ture des commerces dits « non essentiels », la consommation des ménages rebondirait en décembre et se situerait 6 % sous son niveau d’avant-crise. Elle était inférieure de 14 % environ en novembre à ce qu’elle était il y a un an.

Tout se passe comme si, au moinspour les dépenses des ménages, le confinement fonctionnait comme un interrupteur. Quand le gouverne-ment appuie sur le bouton, elles se ferment. Une nouvelle pression sur l’interrupteur et tout repart. Cela ne vaut pas pour les entreprises, car certaines sortiront affaiblies et endettées de ce « stop and go ».

« Les cicatrices de ce deuxièmeconfinement sur les entreprises seront très différentes selon les sec-teurs d’activité », remarque Julien Pouget. Mais « les soutiens publics massifs au tissu productif et aux ménages fonctionnent, comme on l’a vu au printemps dernier, lors du déconfinement. Ils ont permis à l’éco-nomie de vite retrouver un niveau d’activité relativement proche de celui d’avant la crise », explique l’expert del’Insee. Le PIB du troisième trimes-tre, qui a bénéficié d’effets de rattra-page après le confinement du prin-temps, n’était inférieur que de 4 % à son niveau de l’année précédente.

« L’économie chinoise est repartie »Il existe aussi une autre différence importante avec le printemps der-nier. « Le contexte international est moins sombre qu’au deuxième tri-mestre. L’économie chinoise est repartie et les contraintes d’approvi-sionnement qui pesaient sur l’offre auprintemps dernier sont moindres cet automne », souligne Julien Pouget.

Sur l’ensemble de l’année 2020, lePIB français devrait moins chuter que ce que prévoit le gouvernement.L’activité devrait tout de même recu-ler d’environ 9 % par rapport à 2019, selon l’Insee. Au quatrième trimes-tre, la richesse produite resterait inférieure de 8 % environ à celle des trois derniers mois de l’année précé-dente. Une grande partie du rebond de l’an prochain se jouera sur le retour de la confiance des ménages et des entreprises.

Pour l’instant, celle-ci n’est pas aurendez-vous. Les chefs d’entreprise sont déprimés, tout comme les Fran-çais. En novembre, le moral des ménages se situait à un niveau simi-laire à celui de décembre 2018, au cœur de la crise des « gilets jaunes ».Et comme les mesures de restric-tions sont en partie prolongées jus-qu’en janvier, pour les bars et les res-taurants, il pourrait rester faible encore quelques mois.

Pour les économistes d’Euler Her-mes, le moral devrait toutefois petit àpetit revenir au printemps 2021, avecle lancement de la campagne de vac-cination à grande échelle et le main-tien d’un soutien budgétaire public. Selon eux, « un retour de la confiancedes ménages français à son niveau d’avant-crise d’ici la fin de l’année pro-chaine générerait une croissance addi-tionnelle de la consommation des ménages de 10 milliards d’euros en 2021, soit un tiers de la croissance totale de la consommation des Fran-çais l’an prochain ».

Et 20 milliards d’euros d’excèsd’épargne pourraient être dépen-sés, ce qui générerait 1 point de croissance en plus sur l’année. Avectout de même une crainte : toute hausse du chômage et toute multi-plication des plans sociaux dans le pays se traduira mécaniquement par un retour de craintes, et donc d’épargne de précaution. Le sou-tien public aux entreprises en diffi-culté va donc devoir durer encore quelques trimestres pour éviter qu’une mécanique dépressive mor-tifère ne se mette en place. n

La consommation devrait bien repartir en décembre

« Les cicatrices de ce deuxième confinement sur les entreprises seront très différentes selon les secteurs d’activité. »JULIEN POUGETChef du département de la conjoncture de l’Insee

LE REDÉPLOIEMENTINDUSTRIEL,UN INSTRUMENT DEMAÎTRISE DE NOTREEMPREINTE CARBONE

Information et inscription :

bit.ly/confuniden

16DEC

2020

14H00

16H30MER

CRED

I

UN ÉVÉNEMENT 100% DIGITAL

Avec la participationexceptionnelle de :

BarbaraPOMPILIMinistre dela Transitionécologique

AgnèsPANNIER-RUNACHERMinistre déléguée,en charge de l’Industrie

Organisé parEn partenariat avec

Page 7: Les Echos - 03 12 2020

Etats membres, elle obtient de négo-cier au nom des Vingt-Sept des pré-commandes de vaccins. Elle a aujourd’hui signé six contrats et s’estassurée de disposer de plus de 1,2 milliard de doses qui seront dis-tribuées aux Etats membres au pro-rata de leur population.

Par touches successives, la nou-velle Commission a posé les jalons d’une Europe de la santé. « On peut critiquer son manque de réactivité ini-tiale à la pandémie, mais elle a quandmême fait preuve d’une grande soli-dité et elle a fait faire un saut institu-tionnel et décisionnel indéniable à l’Europe durant cette période » reconnaît la socialiste française Syl-vie Guillaume. L’eurodéputée fait allusion au plan de relance de 750 milliards d’euros qu’Ursula von der Leyen propose le 27 mai pour permettre à l’ensemble des pays européens de repartir sur des bases saines après la récession historique qui s’annonce pour 2020.

La cuisse de JupiterLe projet, qui doit permettre de ne passacrifier la conversion verte et la tran-sition numérique à la crise sanitaire, est inédit : pour la première fois, les Européens vont émettre une dette commune. Paris et Berlin ont joué lesmeneurs et grillé la priorité à la Com-mission en s’accordant au préalable sur les principales lignes de ce plan, donnant l’impression qu’Ursula von der Leyen n’avait plus qu’à l’entériner et le « vendre » aux autres partenai-res européens.

L’épisode a surtout alimenté le pro-cès en allégeance de la présidente de la Commission au couple franco-alle-mand. « Il ne faut pas oublier qu’Ursula von der Leyen est née de la cuisse de Jupiter », rappelle avec humour Yves Bertoncini, vice-prési-dent du Mouvement européen. C’est Emmanuel Macron qui, rejetant le candidat du Parlement, Manfred Weber, l’a proposée au Conseil. Elle a démarré son mandat avec une légiti-mité réduite, soutenue par une faible majorité d’eurodéputés. « On verra par la suite si elle parvient à se détacherde ses mentors pour prendre la place centrale entre les gouvernements et le Parlement, qui est théoriquement la sienne. Le départ d’Angela Merkel

devrait l’aider à s’émanciper », pour-suit Yves Bertoncini.

Ce reproche d’un « déficit d’incar-nation et d’équilibre institutionnel » est partagé par Sylvie Guillaume : « Elle ne tient pas assez compte de l’avis du Parlement européen. » Cela s’est manifesté à l’occasion du budgeteuropéen, qu’elle n’a pas assez défendu devant les coups de serpes des pays du nord de l’Europe et dans son projet de pacte migratoire qui « penche résolument du côté des Etats les plus minimalistes sur l’accueil des migrants et la solidarité ».

On dit l’ancienne ministre de laDéfense allemande bunkérisée dans ses bureaux du Berlaymont. Le fait est qu’elle y vit en quasi-permanence et qu’on la voit peu, ou pas, sur le ter-rain : « C’est une grande travailleuse, elle est presque ascétique », notent ses collaborateurs qui la voient plutôt comme « la vestale de l’Europe », qui maintiendrait constamment allu-mée la flamme de l’Union.

La deuxième année de son man-dat ne s’annonce pas plus facile. Elle sera jugée sur sa capacité à mettre en place le Pacte vert, à débourser les milliards d’euros du

plan de relance (toujours bloqué), àgérer des relations tendues avec la Pologne et la Hongrie, sans parler du retour à une certaine discipline budgétaire. Et à très court terme,

sur le Brexit. Les relations avec le Parlement pourraient aussi se ten-dre. « La sortie de crise sera son épreuve de vérité », pronostique Yves Bertoncini. n

l Plongée dans le chaos de la pandémie quelques mois après son arrivée à la tête de la Commission, Ursula von der Leyen a peu à peu repris le contrôle des événements. l Elle a introduit une nouvelle dose de fédéralisme en Europe.

Une première année sous le sceau du Covid pour Ursula von der Leyen

Catherine Chatignoux @chatignoux

Son prédécesseur, Jean-Claude Juncker, pensait avoir enduré le pire durant son mandat, en essuyant troiscrises successives, la débâcle finan-cière en 2008, la crise de la dette, à partir de 2009, et celle des migrants en 2015. L’histoire a décidé de frapperencore plus fort pour Ursula von der Leyen, cueillie trois mois après sa prise de fonction par une pandémie complètement imprévisible et plus dévastatrice qu’imaginé.

Débordée, les premières semai-nes, autant que les gouvernements, celle qui apparaît comme une novicedans le grand bain européen va s’atta-cher à recoller les morceaux d’une Europe désunie et à rendre la Com-mission utile dans un domaine large-ment réservé aux Etats membres. Elle tente d’abord de ramener à la rai-son des Etats au bord de la crise de nerfs qui ferment les uns après les autres sans la moindre concertation leurs frontières devant l’arrivée du virus. Face à un risque de paralysie del’Europe, Bruxelles obtient des gou-vernements qu’ils dégagent des voies

de passage pour les marchandises et les travailleurs frontaliers bloqués. Le commissaire français Thierry Breton convainc aussi Paris et Berlin de lever leur interdiction d’exporta-tion de matériel médical, unanime-ment interprétée comme un manque de solidarité européenne.

Ursula von der Leyen met enplace une réserve stratégique pour aider les pays confrontés à des pénu-ries de matériel médical, soutient financièrement les laboratoires de recherche, propose ensuite d’avoir sa propre autorité sanitaire, sur le m o d è l e d e l a B a r d a a m é r i -caine. Alors que se profile une com-pétition contre-productive entre

EUROPE

La nouvelle présidentes’est s’attachée à recoller les morceaux d’une Europe désunie.

Alexandre Counis @alexandrecounis

—Correspondant à Londres

• LA PÊCHELe sujet, très chargé politique-ment, est explosif. D’un côté de la Manche, le Royaume-Uni fait de lareprise en main de ses eaux le sym-bole de sa souveraineté retrouvée. De l’autre, une poignée d’Etats membres (France, Espagne, Belgi-que, Pays-Bas, Danemark, Irlande)soulignent l’importance du dos-sier pour leurs pêcheurs, et font, sans doute plus que les autres, montre d’inflexibilité.

Les Européens visaient audépart le statu quo dans l’accès auxeaux du Royaume-Uni, particuliè-rement poissonneuses, là où les Britanniques ne voulaient plus

leur proposer que de simples quo-tas négociés chaque année. Ils en conviennent désormais, la situa-tion ne pourra pas rester inchan-gée. Signe que les choses peuvent bouger, le négociateur de l’UE, Michel Barnier, a proposé la semaine dernière que l’Union reverse au Royaume-Uni 15 à 18 % de la valeur des prises effectuées par les pêcheurs européens dans les eaux britanniques. Un niveau jugé très insuffisant côté anglais.

• LA CONCURRENCEAides d’Etat, environnement, droit du travail ou transparence fiscale : les Européens cherchent un méca-nisme pour garantir à l’avenir les conditions d’une concurrence équitable. De leur côté, les Britanni-ques soulignent que s’ils ont quitté l’UE, ce n’est pas pour continuer d’en suivre toutes les règles. D’autant qu’ils n’auront plus voix auchapitre pour les élaborer.

Les engagements que Londresenvisage restaient encore, ces der-niers jours, très éloignés des atten-

tes des Européens. L’UE réclame une « clause d’évolution » pour améliorer les normes au fil du temps, tout en vérifiant que les règles du jeu restent équitables. Parmi les dernières pistes évo-quées, chaque partie pourrait sug-gérer des mises à niveau, qui devraient ensuite être avalisées d’un commun accord.

Sur les aides d’Etat, Bruxellesréfléchit même à un mécanisme de consultation, où chaque camp informerait l’autre de ses projets de subvention. En cas de diver-gence sur certaines normes, l’UE souhaite pouvoir recourir à des contre-mesures unilatérales et immédiates, par exemple en réta-blissant des droits de douane. Reste à convaincre Londres.

• LA GOUVERNANCELa gouvernance de l’accord futur est encore loin de faire consensus. Londres refuse notamment qu’un mécanisme de résolution de diffé-rends puisse s’appliquer à la pêche.De son côté, Bruxelles souhaite un

Brexit : les trois points de blocage qui restent à réglerAlors que les prochains jours s’annoncent détermi-nants, trois points de friction bloquent encore la conclusion d’un accord.

accord de gouvernance global, pour que d’éventuelles violations de l’accord dans un domaine (par exemple la pêche) puissent don-ner lieu à des compensations dansun autre (par exemple l’énergie).

Les deux parties négocient unmécanisme où un tribunal d’arbi-trage aurait la main en cas de vio-lation de l’accord. Mais Londres neveut pas entendre parler de la Cour de justice de l’Union euro-péenne (CJCE), qu’elle voit commejuge et partie. Pas question de sur-croît pour elle de quitter l’UE… tout en restant d’une manière ou d’une autre sous l’autorité des juges de Luxembourg. Bruxelles estime au contraire qu’ils ont légi-timement un rôle à jouer, en parti-culier sur toutes les questions liéesau droit européen.

L’Europe pourrait sur ce pointdevoir lâcher du lest. Parmi les pis-tes à l’étude ces derniers jours, la Commission étudierait la possibi-lité d’éviter dans le futur accord toute référence à la CJCE, ou au « droit communautaire ». n

Face à la crise sanitaire, Ursula von der Leyen a réussi à poser les jalons d’une Europe de la santé.

Oliv

ier H

osle

t/Poo

l/Reu

ters

MONDE Les Echos Jeudi 3 décembre 2020

Page 8: Les Echos - 03 12 2020

08 // MONDE Jeudi 3 décembre 2020 Les Echos

Sept des huit pays les plus pro-ducteurs de ressources fossiles (60 % du total mondial) ont revu leurs projets d’investissement juste avant que n’éclate la pandé-mie. Tous leurs plans et program-mes mettaient en évidence que l’écart allait fortement s’accroître entre la production attendue et celle à ne pas dépasser, indique le rapport. Sur la période 2020-2030,le Mexique prévoit ainsi d’aug-menter de 50 % le pétrole qu’il extrait, le Brésil et les Emirats ara-bes unis de 70 % chacun et l’Argen-tine de 130 % !

Résultat, si tous les projets dansles cartons se réalisaient, les émis-sions mondiales de CO2 dues à la consommation de combustibles fossiles s’approcheraient de la zone des 40 millions de gigatonnesen 2030. On est très loin de la barrede 20 millions de tonnes sous

les experts du PNUE. Force leur est de constater que tel n’est pas le cas, pour l’instant. Les pays ont bien davantage mis le paquet pour sou-tenir les activités dépendantes des ressources fossiles.

A ce titre, les économies les pluspuissantes de la planète sont loin d’être en reste. En novembre der-nier, les Etats du G20 ont mobilisé 233 milliards de dollars en leur faveur contre 146 milliards pour celles qui préservent le climat et l’environnement, indique le PNUE.Aux Etats-Unis, sur les 100 mil-liards de dollars d’aides publiques identifiés par le rapport, environ les deux tiers ont été accordés aux secteurs dépendants du charbon, du pétrole et du gaz, le reste reve-nant aux énergies et aux activités vertes. Les proportions sont totale-ment inverses en Chine, en Allema-gne et en France. n

Le recours accru aux énergies fossiles pèse sur les objectifs de l’Accord de Parisl Alors qu’elle devrait diminuer de 6 % par an sur la prochaine décennie pour tenir l’objectif de 1,5 degré de réchauffement, la production d’énergies fossiles risque au contraire de croître de 2 %, alerte un rapport des Nations unies.l Il se base sur les prévisions annoncées par les producteurs eux-mêmes.

Joël Cossardeaux @JolCossardeaux

Ce n’est plus un fossé à combler, mais un gouffre qui menace de s’ouvrir. L’écart entre les efforts à fournir par les 183 Etats qui ont rati-fié l’Accord de Paris sur le climat pour ne pas dépasser 1,5 degré de réchauffement à la fin du siècle et cequ’il en est en réalité se creuse dan-gereusement.

Alors qu’il faut faire décroître laproduction d’énergies fossiles de 6 % par an entre 2020 et 2030 pour espérer atteindre cet objectif, cel-le-ci va continuer d’augmenter ces prochaines années, selon un rap-port publié mercredi par le Pro-gramme des Nations unies sur l’environnement (PNUE).

Les pays producteurs ont dansleurs cartons de quoi extraire du sol2 % de ces ressources en plus en moyenne chaque année, s’inquiè-tent les auteurs de l’édition 2020 du« Production Gap Report », un document réalisé avec l’appui de trois instituts. Une telle croissance reviendrait à partir de 2030 à dou-bler les volumes par rapport à ceuxqu’il faudrait atteindre pour être compatible avec le niveau mini-mum de réchauffement fixé en décembre 2015 à Paris.

La parenthèse du CovidCes chiffres ont de quoi désarçonnerquand on connaît l’engagement d’arriver à la neutralité carbone pris par les grandes économies du monde dont le Japon, la Corée du Sud et surtout la Chine, premier paysémetteur de CO2 et de gaz à effets de serre. En fait, pour l’instant, les seulsefforts significatifs réalisés relèvent des mesures de confinement impo-sées aux Etats pour enrayer la pan-démie de Covid-19. Ces décisions devraient entraîner une baisse de la production de matières fossiles de 7 % en 2020, selon les estimations provisoires des experts du PNUE. Mais il s’agit d’une simple paren-thèse, appelée à se refermer aussi vite qu’elle s’est ouverte.

CLIMAT

confirmer la fermeture d’ici à un ande onze centrales à charbon repré-sentant 4,8 gigawatts, moyennant 317 millions d’euros d’indemnisa-tions des opérateurs.

La sortie du charbon devrait s’accélérer…La sursouscription de l’appel d’offres dans le cadre de ces ferme-tures et la présence inattendue parmi les sites sélectionnés de cen-trales très récentes, comme celles de Vattenfall à Moorburg et de RWEen Rhénanie-du-Nord-Westphalie, respectivement mises en service en 2015 et 2014, laisse à penser que

le maintien de centrales à charbon, si modernes soient-elles, n’est plus économiquement intéressant pour les énergéticiens. « La hausse pro-grammée du prix du CO2 et les niveaux très bas du prix du gaz devraient accélérer le calendrier de sortie du charbon en Allemagne », anticipe Philippe Litz, expert du secteur chez Agora Energiewende.

Le gouvernement a en parallèleajusté son cadre juridique pour accroître son parc d’éoliennes en mertandis que la chute des coûts de pro-duction de l’électricité photovoltaï-que dope les projets de fermes solai-res outre-Rhin. L’exécutif berlinois confirme ainsi son objectif de 65 % d’énergies renouvelables dans sa pro-duction d’électricité en 2030 contre 40 % en 2020. « Mais le gouvernementpart de l’hypothèse que les besoins en électricité resteront stables, ce qui est irréaliste », réagit Michael Schäfer, spécialiste des politiques énergéti-ques chez Agora Energiewende.

…mais les émissions de CO2 vont croître à court termeLes associations de défense de l’environnement estiment de fait que le gouvernement ne se donne pas les moyens de ses ambitions. « Les mesures prises ne suffiront pas

à atteindre les objectifs fixés. Et si l’UE relève ses propres objectifs de réduction de gaz à effet de serre, l’Allemagne ne devra plus réduire de 55 % mais de 65 % au moins ses pro-pres émissions de CO2 d’ici à 2030 », prévient Michael Schäfer.

A court terme, ces émissions ris-quent même de remonter car la sor-tie du charbon, couplée à la ferme-ture des six dernières centrales nucléaires allemandes d’ici à deux ans, va mettre le réseau électrique sous haute tension. D’ici à 2025, ce sont 20 gigawatts qui seront pro-duits en moins. L’Allemagne a des réserves puisqu’elle exporte en moyenne 8 % de sa production d’électricité, mais il s’agit d’énergies renouvelables non disponibles en permanence.

Selon les scénarios du grouped’experts BloombergNEF, Berlin devra donc compenser cette dispa-rition à court terme par du gaz, dontla production augmenterait de 74 % (!) d’ici à 2023, mais aussi par du charbon dans ses centrales res-tantes. Au total, les analystes tablent sur une hausse de 15 % des émissions de CO2 dans les deux pro-chaines années en Allemagne, en attendant que les énergies renouve-lables puissent prendre le relais. n

Les ambitions contrariées de Berlin sur le climat

Ninon Renaud @NinonRenaud

—Correspondante à Berlin

Un an après l’adoption du paquet cli-mat destiné à paver le chemin d’uneneutralité carbone de l’Allemagne en 2050, le gouvernement d’Angela Merkel a tiré un premier bilan posi-tif du chemin déjà parcouru. Malgréles mises en garde du patronat, l’exé-cutif berlinois a par ailleurs « très bien accueilli » la volonté de Bruxel-les de réduire d’ici à 2030 de 55 % et non plus de 40 % par rapport à 1990les émissions de gaz à effet de serre en Europe, a précisé mercredi sa porte-parole Ulrike Demmer.

Au cours des douze derniersmois, l’Allemagne estime avoir joué les bons élèves en bouclant plu-sieurs lois importantes, qu’il s’agissede relever progressivement le prix des émissions de CO2 ou d’encadrer sa sortie du charbon d’ici à 2038. Mardi, le ministre de l’Economie, Peter Altmaier, a d’ailleurs pu

Malgré ses efforts de verdissement, le choix de sortir simultanément du nucléaire et du charbon complique la tâche du gouvernement allemand.

onéreuse de carburants de syn-thèse. Le mix énergétique devrait être réadapté pour que la consom-mation de pétrole, gaz et charbon ait baissé de plus de 90 % en 2050.

Se placer à l’échelle européennereste crucial. « Une solution collec-tive est moins chère que l’addition de solutions nationales, prévient Sébastien Léger. Le Nord possède des sites à même de stocker le CO2, etle Sud des zones ensoleillées propi-ces à la production d’électricité et d’hydrogène par énergie solaire. »

Les efforts demandés sont énor-mes, surtout quand il s’agira d’éli-miner les dernières émissions. Pour autant, McKinsey a établi qu’une grande partie de ces réduc-tions viendrait de technologies matures, 25 % de technologies en phase pilote et 15 % en phase de R&D. En outre, les 15 principales élimineraient 70 % des émissions, et les quatre premières (technolo-gies éoliennes, terrestres et solairesdans l’énergie, passage au véhicule électrique à batterie, installation depompes à chaleur dans les bâti-ments) représenteraient un tiers de la décarbonation.

11 millions d’emploisPour y arriver, il faudrait investir près de 1.000 milliards d’euros paran, selon le cabinet : 800 milliards de dépenses d’investissement (déjà là aujourd’hui) devraient être redirigées des technologies à forte intensité de carbone vers cel-les à faible intensité, et 180 mil-liards supplémentaires devraient être mis sur la table, une somme compensée par des économies surles dépenses de fonctionnement.

Surtout, McKinsey assure quela transition entraînera la créationde près de 5 millions d’emplois net.De gros efforts de formation et d’aides devront être faits, dit le cabinet, car des secteurs seront bousculés plus que d’autres. Der-rière ce chiffre net se cache 11 mil-lions de créations mais 6 millions d’emplois perdus. n

Muryel Jacque @MuryelJacque

L’UE ambitionne d’être « neutre en carbone » d’ici à trente ans. Lesémissions nettes de gaz à effet de serre de son économie seraient alors égales à zéro. Pour l’heure, la Commission européenne n’a pas précisé le degré de contribu-tion de chaque secteur d’activité ni de chaque Etat à cette décarbo-nation. Alors comment y parve-nir concrètement, et à quel prix ?

Dans une étude, le cabinet deconseil McKinsey assure qu’il existe une voie rentable, tout en restant acceptable par la société, pour atteindre les objectifs du Pacte vert. Il a passé en revue des centaines de leviers qui permet-traient de réduire les émissions dans les secteurs les plus émet-teurs : électricité, bâtiment, indus-trie, transports et agriculture.

La décarbonation augmenterale coût des activités dans certains des secteurs, mais la différence serait compensée par les écono-mies dans d’autres. « Lorsqu’on faitla somme entre les leviers déjà ren-tables et ceux qui ne le sont pas, nous arrivons à un équilibre de coûtsupplémentaire », résume Sébas-tien Léger, responsable du pôle développement durable de McKinsey France.

Une stratégie à l’échelle européenneC’est dans l’industrie, dont cer-tains processus seront chers, comme le captage de carbone, quele coût serait le plus important ; il serait légèrement positif dans le bâtiment mais négatif dans les transports, où l’essor de la voiture électrique viendrait contrebalan-cer, par exemple, la fabrication

Il existe une voie rentable pour que l’UE décarbone son économie, selon une étude publiée jeudipar le cabinet McKinsey.

L’Europe peut atteindre la neutralité carboneen 2050 à un coût net nul

laquelle ces rejets doivent se situerà la même date pour être raccord avec l’objectif de 1,5 degré de réchauffement.

« La crise du Covid pourrait êtrel’occasion pour les gouvernements demettre en œuvre une reprise verte de l’économie basée sur une transition vers les énergies propres », observent

Aux Etats-Unis, sur 100 milliards de dollars d’aides publiques, environ les deux tiers ont été accordés aux secteurs dépendants du charbon, du pétrole et du gaz.

« Le gouvernementpart de l’hypothèse que les besoins en électricité resteront stables, ce qui est irréaliste. »MICHAEL SCHÄFERSpécialiste des politiques énergétiques chez Agora Energiewende

Page 9: Les Echos - 03 12 2020

Les Echos Jeudi 3 décembre 2020 MONDE // 09

jamais connu la prison, a éclaté en sanglots à l’énoncé de sa condam-nation. Les trois jeunes activistes avaient plaidé coupables à l’ouver-ture du procès, le 23 novembre, puisplacés en détention provisoire.

Visage juvénile, frange tombantsur des lunettes aux montures noi-res, Joshua Wong s’était rendu célè-bre lors du mouvement des Para-pluies de 2014, alors qu’il n’avait que17 ans. L’année dernière, quelques jours après sa sortie de prison, il avait pris la parole devant le quar-tier général de la police de Hong Kong, où des milliers de personnes s’étaient rassemblées. Il avait alors critiqué « la tyrannie » des autoritéspro-Pékin tandis que des manifes-tations monstres secouaient l’ex-colonie britannique.

Joshua Wong, Agnes Chow etIvan Lam étaient tous trois mem-bres du parti Demosisto, autodis-sous quelques heures après l’entréeen vigueur de la loi sur la sécurité nationale imposée par Pékin le 1er juillet dernier.

La tentation de l’exilDepuis, Pékin étend son emprise surle territoire et mène une répression croissante des voix dissidentes. Véri-table épée de Damoclès instillant unclimat de peur sur la ville, cette loi a dissuadé les Hongkongais d’expri-mer leur opposition, tandis que tousles rassemblements publics ont été interdits au nom de la lutte contre leCovid-19 et que les élections législati-ves de septembre ont été repousséesd’au moins un an. Craignant d’avoir affaire à la justice de Pékin, certains

Frédéric Schaeffer fr_schaeffer

—Correspondant à Pékin

C’est l’un des visages les plus connusde la mobilisation prodémocratie à Hong Kong. Joshua Wong, 24 ans, aété condamné mercredi à treize mois et demi de prison pour avoir organisé et incité à un rassemble-ment non autorisé devant le siège de la police le 21 juin 2019.

A ses côtés, deux autres jeunesmilitants de premier plan, Agnes Chow, qui fête ses 24 ans ce jeudi 3 décembre, et Ivan Lam, 26 ans, ontégalement été condamnés, respec-tivement, à dix mois et sept mois derrière les barreaux. « Les jours à venir seront difficiles, mais nous tien-drons bon », a crié Joshua Wong alors qu’il était conduit à l’extérieur de la salle. Agnes Chow, qui n’a

CHINE

Le jeune militant prodémocratie Joshua Wong et deux autres activistes ont été condamnés à des peines de prison pour leur implication dans un rassemblement non autorisé en juin 2019.

A Hong Kong, Pékin se débarrasseméthodiquement des voix dissidentes.

A Hong Kong, la purge des voix dissidentes

Ivan Lam (au centre) et Joshua Wong (à gauche) lors de leur transfert vers le tribunal, mercredi, où ils se sont vus infliger respectivement sept mois et treize mois et demi de prison. Photo Tyrone Siu/Reuters

estime Jean-Pierre Cabestan, pro-fesseur à l’Université baptiste de Hong Kong et chercheur associé à Asia Centre.

Tous les regards se portentdésormais sur le système judiciaire de Hong Kong, dont l’indépendancepourrait être la prochaine cible du Parti communiste chinois. La loi sur la sécurité nationale a ouvert la brèche, autorisant la conduite de certains procès en Chine continen-tale et autorisant Carrie Lam à nommer directement des juges pour les affaires liées à la sécurité

nationale. Les craintes que Pékin aille plus loin se sont accrues, alors que des journaux hongkongais pro-Pékin et des proches du pouvoir en place appellent ouvertement à une réforme du système judiciaire.

Les entreprises internationalesimplantées à Hong Kong suivent cela avec la plus grande attention, la« Common Law » étant l’un des piliers de la place financière. « Nousvoyons bien que Pékin resserre son emprise sur Hong Kong, la politique est devenue un sujet tabou dans les dîners en ville », indique un investis-

seur à Hong Kong. « Pékin cherche méthodiquement à neutraliser tou-tes les forces d’opposition qui pour-raient, à ses yeux, transformer HongKong en base de subversion propre àdéstabiliser le régime, poursuit Jean-Pierre Cabestan. Mais les idéeslibérales de la plupart de Hongkon-gais ont peu de chance de laisser place à l’idéologie de Xi Jinping, et la société hongkongaise restera une source de contestation – voire de contre-pouvoir –, avec laquelle le Parti communiste va devoir compter. » n

Videz-vous la tête avecun magazine qui la remplitun magazine qui la remplit

Videz-vous la tête avec un magazine qui la remplit

Vendredi

avec

Les Echos

activistes s’exilent, comme Nathan Low, compagnon de route des trois emprisonnés, aujourd’hui à Lon-dres ; ou tentent de le faire, comme les douze jeunes arrêtés par les gar-de-côtes chinois alors qu’ils fuyaient vers Taïwan.

Menant une véritable chasse auxsorcières, les autorités ont égale-ment arrêté des journalistes indé-pendants, limogés des enseignants et ont disqualifié quatre députés prodémocratie, entraînant la démission en bloc du camp anti-Pé-kin. C’est donc dans un Parlement où ne siégeaient presque unique-ment que des députés favorables à Pékin que la cheffe de l’exécutif, Car-rie Lam, a promis de continuer à renforcer les liens avec la Chine continentale à l’occasion de son discours politique annuel le 25 novembre dernier.

« Les affaires de Hong Kong sontdésormais quasi ouvertement gérées par le bureau de liaison du gouverne-ment central présent sur place »,

Tous les regards se portent désormais sur le système judiciaire de Hong Kong, dont l’indépendance pourrait être la prochaine cible du Parti communiste chinois.

d’emplois sans précédent et la réduc-tion du temps de travail pourraient conduire à une perte de masse sala-riale totale estimée à 6,5 % en moyenne (avant prise en compte desmesures de subventions salariales) pour l’ensemble des salariés.

S’il est un constat alarmant pourl’OIT, c’est bien l’observation que les personnes faiblement rémunérées et les femmes sont celles qui souf-frent le plus de la crise pandémique. Dans certains pays européens, le rapport révèle que, sans les aides salariales, la moitié des travailleurs les moins bien rémunérés auraient perdu environ 17,3 % de leur salaire. De même, sans ces subventions sala-riales, les femmes auraient perdu 8,1 % de leur salaire au deuxième tri-mestre 2020, contre un recul de 5,4 % pour les hommes.

« Questions gênantes »« L’accroissement des inégalités entraîné par la crise du Covid-19 menace de laisser derrière lui de la pauvreté ainsi qu’une instabilité sociale et économique, ce qui serait désastreux, avertit le directeur géné-ral de l’OIT, Guy Ryder. Si nous vou-lons vraiment reconstruire un avenir meilleur, nous devons aussi nous emparer de questions gênantes comme, par exemple, le fait de savoir pourquoi des métiers ayant une valeur sociale élevée, à l’image de ceuxdes soignants et des enseignants, sont très souvent mal payés. »

Pour l’OIT, l’adoption d’un salaireminimum pourrait jouer un rôle important pour bâtir une relance économique durable et équitable. Il existe un salaire minimum, sous une forme ou sous une autre, dans 90 % des Etats membres de l’OIT. Mais, avant même le début de la crise, 15 % des salariés à travers le monde étaient payés à un niveau inférieur au salaire horaire mini-mum, soit parce que la législation n’était pas appliquée, soit parce qu’elles en étaient exclues. n

Richard Hiault @RHIAULT

Le coronavirus n’affecte pas seule-ment le goût et l’odorat mais égale-ment le pouvoir d’achat des salariés.Dans son rapport biennal, publié mercredi, l’Organisation internatio-nale du travail (OIT) constate que « les salaires mensuels ont baissé ou ont progressé de manière plus lente aupremier semestre 2020, en raison de lapandémie de Covid-19, dans deux tiersdes pays pour lesquels on dispose de chiffres officiels ». A brève échéance, la crise devrait même exercer une pression à la baisse sur les niveaux de rémunération.

Les chiffres sont parfois trom-peurs. Pour un tiers des pays analy-sés par l’OIT, les salaires moyens ontsemblé augmenter. En réalité, pré-cise l’organisation, cette hausse résulte du fait qu’un nombre impor-tant de salariés faiblement rémuné-rés ont perdu leur emploi. En n’apparaissant plus dans les statisti-ques, la moyenne des salaires est faussée.

Ainsi, dans les économies despays riches du G20 (60 % des salariésdu monde), en moyenne, les salairesmoyens réels ont augmenté de 2,6 %à la fin du deuxième trimestre de 2020, justement en raison de ces

SOCIAL

La pandémie de Covid-19 provoque, en sus de la hausse du chômage, une compression des salaires que ne compensent pas les dispositifs d’aides des Etats aux salariés, constate l’Organisation internationaledu travail.

La crise sanitaire tire les salaires vers le bas

changements sans précédent dans la composition de l’emploi.

L’OIT observe ce même phéno-mène aux Etats-Unis, au Brésil, au Canada, en France et en Italie. « En France et en Italie, pendant la crise duCovid-19 en raison des difficultés à entreprendre une recherche active d’emploi, un nombre sans précédent de salariés ont perdu leur emploi », poussant les salaires moyens à la hausse. La réalité est donc faussée.

D’une manière générale, la crisese fait sentir principalement par des baisses de salaires plutôt que par dessuppressions massives d’emplois. Bon nombre de pays ont d’ailleurs adopté des mesures radicales pour préserver le marché du travail.

Certains, comme la Nouvelle-Zélande, ont conçu des subventions salariales sous forme de somme for-faitaire ; ailleurs, par exemple au Danemark, en Allemagne et en Suisse, les subventions salariales couvraient un pourcentage du salaire jusqu’à un plafond spécifié. En France, le recours au chômage partiel a été massif au printemps, permettant de sauvegarder l’emploi et d’assurer 84 % de la rémunérationnette du salarié (100 % au SMIC).

Malgré ces aides, pour la seuleUnion européenne, les pertes

Pour un tiers des pays analysés par l’OIT, les salaires moyens ont semblé augmenter.

En réalité, cette hausse résulte du fait qu’un nombre important de salariés faiblement rémunérés ont perdu leur emploi.

Page 10: Les Echos - 03 12 2020

LE COMMENTAIRE

de François Bourguignon

Faut-il adopter le revenu universel ?L es conséquences désastreu-

ses pour la pauvreté et la pré-carité de la pandémie ont

montré que les filets de protection sociale des économies développées fonctionnaient mal en temps de crise aiguë. Dans plusieurs pays, la crise actuelle semble ainsi avoir ravivé l’idée d’un revenu minimum universel versé à chaque citoyen indépendamment de son niveau de revenu et de son activité. En France, la création d’un revenu universel, dit« socle citoyen », vient d’ailleurs d’être inscrite au programme des débats parlementaires de 2021.

Si le revenu universel n’est pas uneidée nouvelle, il est souvent mal com-pris. Certains le considèrent comme une utopie d’un coût exorbitant et desurcroît injuste car profitant aussi aux riches, tandis que d’autres en font une panacée. Les uns comme les autres ne voient pas que les systè-mes redistributifs en place dans

nombre d’économies avancées pos-sèdent de facto une dimension de revenu universel et que la question est surtout de savoir comment cette dimension peut être renforcée.

Il n’est pas exact que la créationd’un revenu universel exige une hausse monumentale de la fiscalité et soit un cadeau fait aux riches, dès lors que, justement, on le combine avec l’imposition du revenu au sein d’un « impôt négatif » tel que pro-posé il y a longtemps par Milton Friedman. Il s’agit alors d’un « revenu de base » versé à tout adultedans la population joint à un impôt proportionnel sur le revenu à partir du premier euro reçu. Si les deux opérations sont effectuées par la même administration, ce système équivaut à un barème particulier d’imposition du revenu. L’impôt dû est négatif et prend la forme d’un transfert égal au revenu de base en l’absence de tout revenu d’activité.

sations sociales. Dès lors, on peut se demander si l’introduction d’un revenu universel dans le système redistributif français ne reviendrait pas à amalgamer et rebaptiser les prestations actuelles de soutien au revenu. La réflexion en cours sur un« revenu universel d’activité » fusionnant le RSA, la prime d’acti-vité et certaines autres prestations va d’ailleurs dans cette direction.

L’avantage majeur de l’universa-lité est de combler les trous du filet de protection sociale en éliminant les critères d’éligibilité et la lourdeuradministrative de l’octroi de presta-tions d’appui au revenu. Les gains entermes de simplicité par rapport au maquis actuel sont potentiellement considérables.

Dans le cas de la France, on nepeut cependant ignorer que l’adop-tion du revenu universel et de l’impôt négatif remettrait en cause certains principes de base du sys-

tème redistributif. C’est le cas de la dimension familiale, puisque l’uni-versalité requerrait de traiter indé-pendamment les adultes d’une même famille. C’est aussi le cas de l’aspect plus strictement social de prestations comme le RSA, dont l’objectif est non seulement de four-nir un revenu de base mais aussi de faciliter l’insertion des bénéficiaires dans l’emploi.

La comparaison entre un systèmeredistributif basé sur le revenu uni-versel et la redistribution telle qu’elleopère aujourd’hui est délicate. Son énorme complexité et ses limites dans des crises telles que celle que nous traversons constituent cepen-dant un argument solide en faveur d’une organisation plus simple, plusclaire et surtout plus efficace.

François Bourguignon est professeur à l’Ecole d’économie de Paris.

Le transfert diminue lorsque le revenu augmente et joue alors le même rôle que les prestations socia-les d’appui au revenu dans plusieurspays développés. L’impôt devient positif au-dessus d’un certain seuil, et sa progressivité est assurée par unjeu de surtaxes pour des revenus plus élevés.

A l’évidence, un tel système estproche de l’ensemble constitué en France, d’un côté, par le RSA et la prime d’activité et, de l’autre, par la fiscalité du revenu et certaines coti-

L’avantage majeur de l’universalité est de combler les trous du filet de protection sociale en éliminant les lourdeurs administratives.

Jean-Marc Vittori @jmvittori

Avez-vous des sibidissies ? Ou des aimènes baissées ? C’est la mon-naie à la mode. Vous ne pourrez pas la ranger dans votre porte-monnaie, mais dans votre mobile. Elle circule déjà aux Bahamas depuis le mois d’octobre. Est testéeen Chine, à Shenzhen et bientôt à Pékin. Pourrait être lancée en Suède, terre d’innovation moné-taire s’il en fut – pays du premier billet de banque, en 1661, puis de la première banque centrale sept ansplus tard.

Sibidissie, c’est l’acronymeanglais CBDC, pour « central bank digital currency ». En français, celadonne aimène baissée ou MNBC, « monnaie numérique de banque centrale » – même si la Banque de France s’égare dans l’anglicisme MDBC, « monnaie digitale ».

Il y a deux ans, la perspective debanques centrales plongeant dans la devise numérique aurait semblésaugrenue. Les banquiers cen-traux sont par nature conserva-teurs. La monnaie est de la con-fiance cristallisée au fil du temps. Pas question d’aller trop vite. Sauf que le numérique, lui, galope.

Deux événements ont convaincules banques centrales d’accélérer. D’abord le projet Libra, annoncé enfanfare par le géant américain des réseaux sociaux Facebook mi-2019. Ce n’était certes pas la pre-mière fois qu’une monnaie numé-rique était lancée. Dans la panique engendrée par la faillite de la ban-que Lehman Brothers, un mysté-rieux Satoshi Nakamoto avait lancé dix ans plus tôt le « bitcoin » (« pièce en unité numérique »). Unemonnaie existant seulement dans un registre partagé entre ses utili-sateurs. Sa grande volatilité en fait toutefois un actif financier plus qu’un outil de paiement.

En 2014, une autre expérience aété tentée avec le Tether, monnaie numérique valant un dollar (« sta-blecoin », dans le langage des experts). Ce lien stable repose tou-tefois sur une garantie fragile et desréserves opaques. Aujourd’hui, la valeur des différents stablecoins

existants serait de l’ordre de 15 mil-liards de dollars. Pas de quoi fouet-ter un banquier central.

Mais avec Libra, il en va autre-ment. Facebook compte près de 3 milliards d’utilisateurs dans le monde. Et des grands acteurs du paiement, comme Visa ou PayPal, se sont associés au projet (avant dese retirer). L’effervescence a gagné le petit monde des banques centra-les et des régulateurs financiers, qui a accéléré les réflexions enta-mées les années précédentes.

L’autre événement est le Covid.Chaque fois que c’était possible, lesconsommateurs ont utilisé le paie-ment sans contact pour échapper au virus, soupçonné de courir sur les pièces et les billets. Les banquesont relevé les plafonds de paiementsur les cartes bancaires. Dans les pays comme la Suède, où même lestroncs des églises étaient déjà numérisés, l’argent physique dis-paraît.

Or pièces et billets sont le seullien visible entre la banque cen-trale et la population. Dans la zoneeuro, les billets sont signés par la présidente de la Banque centrale européenne. Et constituent un outil de réserve plus sûr qu’un compte ouvert dans une banque, qui peut faire faillite. Ce lien s’estompant, il devient urgent d’en créer un autre.

Les banquiers centraux n’ontpas le choix. Ils vont devoir plongerdans le bain numérique. Ce saut ouvre un formidable champ. Il devient possible d’inventer une monnaie programmable (automa-tiquement versée si des conditions sont remplies), fondante (dont la valeur diminue au fil du temps), ciblée (destinée par exemple à l’achat de produits alimentaires)… Ce choix du numérique va aussi requérir une foule d’autres choix. Deux d’entre eux seront essentiels.

D’abord, le lien entre les usagersde la monnaie et la banque cen-trale. Un billet est une créance directe sur la banque centrale. Pour qu’une MNBC soit aussi directe, il faudrait que chacun d’entre nous ait un compte à la ban-que centrale. Avec deux inconvé-nients : la banque centrale n’est pas

outillée pour ça et les banques y perdraient une large partie des dépôts nécessaires à leur activité. Ilfaudra donc inventer une architec-ture hybride, avec des intermédiai-res (banques, fintechs, autres acteurs du paiement) et une garan-tie absolue par la banque centrale.

Ensuite, le taux d’intérêt. Il n’estpas possible de prélever un taux d’intérêt sur un billet, mais cela le devient sur une monnaie numéri-que. Si la banque centrale décide

que sa MNBC ne porte pas intérêt, elle devra renoncer aux taux néga-tifs (en cas de taux négatifs, chacunconvertira ses comptes en CBDC, manœuvre plus simple et plus sûreque celle qui consiste à tout conver-tir en billets). Rappelons que la BCEpratique un taux négatif depuis plus de six ans… Si la banque cen-trale décide que sa MNBC porte intérêt, c’est alors la monnaie elle-même qui deviendra le levier de la politique monétaire et non les

comptes. Toute la finance en seraittransformée.

La monnaie est toujours unequestion de souveraineté. L’effigie de César figurait déjà sur les piècesromaines. Le passage aux mon-naies numériques rebat les cartes. Aucune tête ne sera visible sur les sibidissies ! Dans les formes que prendra la monnaie numérique debanque centrale se jouera le renou-vellement de la souveraineté de l’Etat – ou sa dilution. n

L’ANALYSE DE LA RÉDACTION Les banques centralesvont devoir lancer des monnaies numé-riques, car les billets disparaissent et la concurrence menace. Ce faisant, elles vont aussi devoir faire des choix qui change-ront à jamais monnaie et finance.

DLes points à retenir

•Les banquiers centraux ne peuvent plus ignorer la vitesse à laquelle les monnaies numériques circulent.•La crise du Covid a, par ailleurs, accéléré l’utilisation du paiement sans contact.•Ce choix du numérique ouvre un champ de possibles très large comme d’inventer une monnaie programmable, fondante, ciblée…•Mais il nécessitera une architecture hybride, entre les usagers de la monnaie et la banque centrale, et une garantie absolue par cette dernière.•La banque centrale aura aussi à décider si sa monnaie numérique porte intérêt ou non : un choix crucial.

Boll

pour

« L

es E

chos

»

La marche forcée vers les monnaies numériques

10 // Jeudi 3 décembre 2020 Les Echos

idées&débats

Page 11: Les Echos - 03 12 2020

Les Echos Jeudi 3 décembre 2020 IDEES & DEBATS // 11

opinions

totalement gelés, la plus grande source d’incertitude a peut-être disparu. La volatilité fondamentale des taux de change diminuait en réalité bien avant la pandémie, d’autant que les banques centrales les unes après les autres ont contourné la limite du zéro. Depuis lors,le Covid-19 a gelé les taux d’intérêt à un niveau extrêmement bas.

Mais la stagnation actuelle ne durerapas éternellement. La deuxième vague du virus frappe actuellement l’Europe plus durement que les Etats-Unis, mais cette tendance pourrait s’inverser à l’approche de l’hiver, en particulier si l’interrègne postélectoral américain paralyse à la fois la politique sanitaire etla politique macroéconomique. Bien que les Etats-Unis disposent encore d’une énorme capacité à apporter une aide d’urgence indispensable aux tra-vailleurs et aux petites entreprises durement touchés, la croissance de la dette publique et privée américaine surles marchés mondiaux laisse entrevoir des fragilités à plus long terme.

Autrement dit, il existe une incohé-rence fondamentale sur le long terme entre la croissance continue de la dette des Etats-Unis sur les marchés mon-diaux et la baisse continue de leur pro-duction dans l’économie mondiale. Un problème analogue a conduit à l’effon-drement du système d’après-guerre de Bretton Woods de taux de change fixes,une décennie après que l’économiste deYale Robert Triffin l’eut identifié au début des années 1960. Par ailleurs, le Fonds monétaire international s’attend à ce que la croissance de l’économie chi-noise soit de 10 % entre le début de cetteannée et la fin de l’année prochaine.

A court et moyen terme, le dollarpourrait monter, surtout si de nouvellesvagues de Covid-19 affolent les marchésfinanciers et déclenchent une fuite versla sécurité. Outre l’incertitude sur les taux de change, il est très probable que le billet vert soit toujours roi en 2030. Cependant, un traumatisme économi-que tel que celui que nous vivons actuel-lement constitue souvent un tournant douloureux.

Kenneth Rogoff est professeur d’économie et de politique publique à l’université de Harvard et ancien économiste en chef du FMI.

Aux Etats-Unis, les discussions sur les mesures de relance budgétaire se déroulent un jour pour se terminer le lendemain. Et bien que l’on connaisse maintenant le résultat de l’élection pré-sidentielle américaine, d’autres grandesbatailles politiques se profilent à l’hori-zon. Cependant, jusqu’à présent, les mesures prises en matière de taux de change ont été relativement limitées.

Personne ne sait avec certitude pour-quoi les taux de change restent relative-ment stables. Parmi les explications possibles, on peut citer la généreuse mise à disposition par la Fed de lignes de swap en dollars et l’aide financière massive des pouvoirs publics dans le monde entier. Mais la raison la plus plausible tient à la paralysie de la politi-

que monétaire classique. Les taux d’intérêt directeurs de toutes les gran-des banques centrales se situent à la limite inférieure effective (autour de zéro) ou à proximité de celle-ci, et les principaux prévisionnistes estiment qu’ils y resteront pendant de nombreu-ses années, même dans un scénario de croissance optimiste. Sans cette limite inférieure proche de zéro, la plupart desbanques centrales fixeraient mainte-nant des taux d’intérêt bien inférieurs àzéro, de l’ordre de –3 % à –4 %. On peut donc penser que, même si l’économie s’améliore, il pourrait s’écouler beau-coup de temps avant que les responsa-bles politiques ne décident de faire « décoller » les taux d’intérêt dans une zone franchement positive.

Les taux d’intérêt ne sont pas le seulparamètre susceptible d’influer sur les taux de change ; d’autres facteurs, tels que les déséquilibres commerciaux, jouent aussi un rôle important. Les ban-ques centrales sont engagées dans diverses activités quasi budgétaires tel-les que le relâchement monétaire, maiscomme les taux d’intérêt paraissent

A court et moyen terme, le dollar pourrait monter, surtout si de nouvelles vagues de Covid-19 affolent les marchés financiers.

Le roi dollar conservera-t-il longtemps sa couronne?La relative stabilité du dollar en cette période de crise exceptionnelle interroge bien des économistes. Si elle s’explique en partie par la géné-reuse politique menée par la Fed, sur le long terme, la croissance continue de la dette américaine couplée au recul des Etats-Unis dans la production mondiale pourrait néanmoins entamer la confiance dans le billet vert.

DANS LA PRESSEÉTRANGÈRE

tensions en mer de Chine orientale. Même si Tokyo prend toujours en compte que la Chine est une menace réelle. Ce qui oblige àmaintenir une étroite ligne entre Washing-ton et Pékin.Pour le moment, l’Australie a tout fait pour s’écarter de cette idée même siles raisons de la colère contre Pékin ne man-quent pas, estime le « SCMP ». L’un des conseils des experts, souligne le journal, estd’utiliser un langage le plus diplomatique possible avec Pékin et de déterminer des projets communs.L’autre idée qui circule est d’inviter la Chine à rejoindre l’accord de partenariat transpacifique, qui lie onze paysdu Pacifique. Ce n’est pas gagné.

En attendant, les ministres des Affairesétrangères d’Australie, du Japon et de la Corée du Sud devaient participer mercredi à une visioconférence avec l’Otan.— J. H.-R.

Chine-Australie : la diplomatie plutôt que la « guerre »

Ker

em U

zel/B

loom

berg

C onstatant l’attraction exercéepar des actifs alternatifs tels quel’or et le bitcoin pendant dans la

pandémie, certains économistes répu-tés prédisent une forte baisse du dollar. Cette baisse n’a pas eu lieu, mais elle peut encore survenir. Etrangement, malgré une gestion incohérente de la pandémie par les Etats-Unis, des dépen-ses massives de soutien face à la catas-trophe économique et le relâchement monétaire (qui a franchi de nombreu-ses lignes rouges, selon le président de la Réserve fédérale, Jerome Powell), le taux de change du dollar ne varie pas beaucoup. Même l’élection présiden-tielle et tout le brouhaha qui l’a entouréene jouent guère. Les traders et les jour-nalistes en font peut-être des tonnes autour des variations au jour le jour du taux de change du billet vert, mais pourceux d’entre nous qui étudient ces varia-tions à long terme, ils font beaucoup debruit pour rien.

Certes, l’euro s’est apprécié d’environ6 % par rapport au dollar depuis le débutde l’année, mais ce n’est rien en compa-raison des secousses brutales qui ont eulieu après la crise financière de 2008, lorsque le taux de change du dollar a fluctué entre 0,63 et 0,93 par rapport à l’euro, et entre 90 et 123 par rapport au yen. La réaction modérée des taux de change face à la pandémie est l’une des grandes énigmes macroéconomiques du moment. Les économistes savent depuis des décennies qu’il est extrême-ment difficile d’expliquer les fluctua-tions monétaires. Néanmoins, dans un contexte d’incertitude macroéconomi-que mondiale qui dépasse ce que la plu-part d’entre nous ont jamais connu, on s’attend à ce que les taux de change con-naissent des variations spectaculaires. Mais alors même qu’une deuxième vague de Covid-19 frappe l’Europe, l’euro n’a baissé que de quelques pour cent – une goutte d’eau dans la mer en termes de volatilité du prix des actifs.

LA CHRONIQUEde Kenneth Rogoff

LE LIVREDU JOUR

Apprendre des erreurs d’autruiLE PROPOS L’échec reste un sujet tabou, plus en France qu’aux Etats-Unis où l’écosystème (investisseurs inclus) accorde généralement volontiers sa confiance à un entrepreneur ayant déjà subi des revers et « appris de ses erreurs ». Cet ouvrage propose, à travers l’analyse didactique de 16 histoires de sociétés ayant mal appréhendé la révolution numérique, d’aider dirigeants, managers et consultants à repérer en amont des erreurs et à les corriger avant qu’elles produisent leurs effets.

L’INTÉRÊT L’éventail des sociétés retenues est vaste : d’entreprises françaises bien connues (La Redoute, La Poste, Viadeo, Dailymotion, etc.) aux géants mondiaux (Uber, Gillette ou encore Boeing et son 737 MAX). Cette variété donne parfois un sentiment de fourre-tout mais permet de couvrir beaucoup de types d’erreurs (stratégiques, humaines, technologiques, liées à un marketing inadapté). Des petits dysfonctionnements aux gros accidents industriels… Journaliste business pendant vingt ans (entre

autres à la rédaction en chef du « Figaro »), Vincent Giolito se livre à un honnête mea-culpa : s’il s’intéresse de près à l’échec, c’est parce qu’il l’a lui-même subi avec sa start-up, Plusnews.fr, lancée en 2007. Ce site d’info « voulait développer un traitement de l’actualité “différent” », en profondeur, mais son modèle économique n’a pas résisté à la crise des subprimes. — Isabelle Lesniak

Les 16 plus belles erreurs de la transformation numériquepar Vincent Giolito, éditions Eyrolles/Fabernovel, collection GAFAnomics, 224 pages, 20 euros.

SERVICE ABONNEMENTS LES ECHOS 4, rue de Mouchy 60438 Noailles Cedex. Tél. : 01 70 37 61 36 du lundi au vendredi de 9h à 18h. IMPRESSION L’Imprimerie (Tremblay-en-France), Midi Libre (Montpellier). TIRAGE DU 2 DÉCEMBRE 2020 : 53.345 exemplaires. Origine du papier : France. Taux de fibres recyclées : 56%.Ce journal est imprimé sur du papier porteur de l’Ecolabel européen sous le numéro FI/37/002. Eutrophisation : P

tot0.01kg/tonne de papier Membre de membre ACPM OJD CPPAP : 0421 c 83015. Toute reproduction, même partielle, est interdite sans l’autorisation expresse de l’éditeur (loi du 11 mars 1957)

Elsa Conesa (Finance et Marchés)Daniel Fortin (Magazine, Opinionset Innovation)Muriel Jasor (Leadership et Management)Arnaud Le Gal (Les Echos Entrepreneurset opérations spéciales)Etienne Lefebvre (France et international)Clémence Lemaistre (Information digitale)Lucie Robequain (France, Internationalet Enquête)Marie-Christine Sonkin (Patrimoine)

DIRECTEUR DE CRÉATIONFabien LabordeDIRECTRICE ARTISTIQUE Marion MoulinEDITORIALISTESCécile CornudetJacques Hubert-RodierEric Le BoucherJean-Francis PécresseJean-Marc VittoriSabine DelangladeLaurent Flallo, Sylvie Ramadier (Le Crible)

LES ECHOS WEEK-ENDDIRECTEUR DE LA RÉDACTIONHenri GibierRÉDACTEURS EN CHEF Laura Berny,Karl De Meyer et Mariana RealiDIRECTRICE ARTISTIQUE Cécile Texeraud

SÉRIE LIMITÉERÉDACTRICE EN CHEF Frédérique DedetDIRECTRICE ARTISTIQUEClarice Fensterseifer

PUBLICITÉLes Echos Le Parisien MédiasTél. : 01 87 39 78 00.PRÉSIDENTE Corinne MrejenDIRECTEUR GÉNÉRALPhilippe PignolDIRECTRICE PUBLICITÉ FINANCIÈRECéline VandrommeDIRECTRICE PUBLICITÉ COMMERCIALEEmmanuelle Denis

Les Echos est une publication duPRINCIPAL ASSOCIÉ UFIPAR (LVMH)PRÉSIDENT-DIRECTEUR GÉNÉRAL Pierre LouetteDIRECTRICE GÉNÉRALE PÔLE LES ECHOS Bérénice LajouanieDIRECTEUR DÉLÉGUÉ Bernard VilleneuveDIRECTEUR DE LA PUBLICATION& PRÉSIDENT DE LA SAS LES ECHOS Pierre LouetteEdité par Les Echos, SAS au capital de 794.240 euros RCS 582 071 43710, boulevard de Grenelle, CS10817, 75738 Paris Cedex 15Tél. : 01 87 39 70 00. www.lessechos.fr

DIRECTEUR DES RÉDACTIONSNicolas BarréDIRECTEUR DES DÉVELOPPEMENTSÉDITORIAUX DU PÔLE LES ECHOSHenri GibierDIRECTEURS DÉLÉGUÉSDE LA RÉDACTIONDominique Seux et François VidalRÉDACTEURS EN CHEFDavid Barroux (Entreprises)Julie Chauveau (Entreprises)

ÉDITRICEMarie Van de Voorde-LeclerqÉDITRICE ADJOINTEClémence CalliesDIRECTEUR DE LA DIFFUSIONET DU MARKETING CLIENTSEtienne PorteauxDIRECTEUR STRATÉGIEET COMMUNICATIONFabrice Février

Ce numéro comporte un 3e cahier de 8 pages « Les Echos Sociétés »

Publiez vos contributions sur le Cercle des Echos :

lecercle.lesechos.fr

• Depuis avril, la tension entre la Chine et l’Australie s’est exacerbée. Pékin n’a pas apprécié le souhait de Canberra d’ouvrir une enquête internationale sur l’origine de la pandémie de Covid-19. Et le ton ne cesse de monter. La semaine dernière, la Chine a imposé des droits de douane prohibitifs surles importations de vin australien. L’Austra-lie a réagi avec colère à la publication d’un photomontage d’un diplomate chinois posté sur Twitter montrant un soi-disant soldat australien tenant un couteau sur la gorge d’un enfant en Afghanistan.

Le « South China Morning Post » s’inter-roge sur la meilleure façon de mettre un terme « diplomatiquement » à ce différend.Le point de départ, écrit le quotidien, serait de s’inspirer du modèle du Japon, de la Corée du Sud et des pays de l’Association des nations de l’Asie du Sud-Est (Asean). Laréussite du Japon tient à son idée de ne jamais perdre de vue que la Chine est un important partenaire commercial et d’évi-ter les critiques directes ou d’accroître les D

essi

n M

aily

s Gla

ize p

our «

Les

Ech

os »

Page 12: Les Echos - 03 12 2020

12 // IDEES & DEBATS Jeudi 3 décembre 2020 Les Echos

art&cultureAbonnez-vous pour recevoir votre journal à partir de 7h30 :

abonnement.lesechos.fr

Mark Tobey, un abstrait dans le Marais

L’art abstrait de Mark Tobey décliné en 40 œuvres à la Galerie Jeanne Bucher Jaeger. Photo © Galerie Jeanne Bucher-Jaeger Paris

Judith Benhamou @judithbenhamou

Les défenseurs de l’art con-t e m p o r a i n « m a d e i n France » aiment bien dire que l’histoire de l’art récenteest injuste et qu’il était préfé-rable d’être américain pour être valorisé en tant qu’artiste abstrait dans l’après-guerre. Ils soulignent qu’avant les « drippings » de Jackson Pollock (1912-1956), le Français André Masson (1896-1987) avait déjà expéri-menté les fameuses coulures. Mais il existe une injustice au sein même de la vaste écoleaméricaine : il valait mieux faire partie de l’écurie new-yorkaise des expressionnistes abstraits et être un homme pour être reconnu (voir l’article consacré à la femme de Pollock, Lee Krasner, dans « Les Echos » du 14 octobre 2020).

Le peintre abstrait américain MarkTobey (1890-1976) fait partie des victimes decet arbitraire de la postérité. Une galerie parisienne Jeanne Bucher Jaeger lui consa-cre, dans le Marais, une exposition en 40 œuvres, réalisée en collaboration avec les collectionneurs français Jean-Gabriel de Bueil et Stanislas Ract-Madoux. Certes, Tobey fut une star en son temps, mais on nel’a pas revu à Paris en grand depuis 1961, année d’une rétrospective au musée des Arts décoratifs. Il exposa au MoMA de NewYork dès 1929 et, en 1958, obtint le grand prix de la Biennale de Venise. Mais est-ce

parce qu’il était de Seattle,parce qu’il résida à la fin desa vie à Bâle, parce qu’il réa-lisait de petits formats, ouparce qu’il s’intéressait à laspiritualité asiatique, qu’il aété ensuite oublié ?

Quête spirituelleTobey est un original. En 1918, il se convertitau bahaïsme, une religion monothéiste d’origine perse. Dans les années 1920, il est initié à la calligraphie orientale et à la signi-fication spirituelle de la ligne. Il va les inté-grer à son travail. L’exposition chez Jeanne Bucher Jaeger s’ouvre sur les années 1940 avec « Animal Totem », une toile à mi-che-min entre la composition surréaliste et la représentation d’un objet amérindien.

Son abstraction va par la suite revêtir plu-sieurs formes. Il pratique une peinture de chevalet toute en matière, qu’on devine en quête de spiritualité. Il convient de l’obser-ver de loin pour apprécier le halo de lumièrequi s’en dégage et de près pour constater l’infinité des détails, comme celle d’une vue au microscope. C’est le cas dans « UnknownJourney », de 1966, une toile dans les tons marron prêtée pour l’occasion par le CentrePompidou. A la fin des années 1950, Tobey se prend aussi au jeu d’une calligraphie asia-tique qui semble mariée à la technique du dripping. Ne manquez pas cette remarqua-ble exposition intimiste, qui fait l’objet d’un excellent catalogue, paru chez Gallimard. n

EXPOSITIONMark Tobey. Tobey or Not To Be ?Galerie Jeanne Bucher Jaeger, Espace Marais.Jusqu’au 12 février.

Retour au paradisPhilippe Chevilley

@pchevilley

Une région idyllique, les Carpates, sublimée par Jules Verne et Bram Stoker.Une rivière majestueuse, le Prut, et ses rives enso-leillées où séjournent des familles juives venues de la ville. C’est dans ce coin de para-dis que le héros de « Mon père et ma mère »,Erwin, un garçon de dix ans, passe ses vacances, habitant, avec ses parents, une « isba » louée à un paysan. Il observe les touristes, fait de grandes promenades à che-val dans les montagnes, emmagasine ses souvenirs dans l’espoir de devenir un jour écrivain… Mais le paradis n’est jamais loin de l’enfer. On est en 1938, le spectre de la guerre hante à nouveau l’Europe. La haine, l’antisémitisme se propagent jusque dans les campagnes.

Le bonheur de ces beaux jours est enta-ché d’une peur sourde. Publié en 2013, ce roman autobiographique tardif d’Aharon Appelfeld (1932-2018) est en tout point mer-veilleux. Distillant un air léger enivrant, ponctué de souffle brûlant de mélancolie, iloffre un mélange troublant de plénitude et d’intranquillité. Au fil des pages les person-nages prennent de plus en plus de relief, telsdes hologrammes venus rejouer l’insou-ciance des derniers jours heureux. En tant qu’homme et écrivain, Appelfeld nous invite à cultiver notre part d’enfance, à

renouer avec l’émerveille-ment primal, source detoute création.

Conte de GrimmErwin s’émerveille des pay-sages bucoliques, des soirsd’été passés en communion

avec ses parents et des êtres étranges qui peuplent les plages du Prut : l’homme taci-turne à la jambe coupée, P. la jeune femme écorchée vive, Rosa Klein la diseuse de bonne aventure, Zeiger le médecin héroï-que, et Karl Koenig l’écrivain taiseux que le garçon prend pour modèle… Plus loin, il y ala cabane où s’est réfugiée la tante Yulia après une déception amoureuse. Le récit dela visite à la femme solitaire évoque un conte de Grimm.

Tout est subtil et délicat dans « Mon pèreet ma mère », magnifié par la traduction ultrasensible de Valérie Zenatti : le regard tendre que porte Erwin sur ses parents (la mère hypersociable et mystique, le père misanthrope et pusillanime), l’apprentis-sage de la cruauté (auprès des paysans sour-nois et d’un camarade de classe antisémite),les premiers émois (à la vision des jeunes filles qui s’ébattent dans la rivière).

Le déchaînement de la barbarie, qui seprofile à la fin du livre, ne parvient pas à entamer cet amour du monde, cette pulsionde vie et de littérature qui a permis à AharonAppelfeld de traverser l’enfer, sans jamais oublier le paradis. n

ROMAN ISRAÉLIENMon père et ma mèred’Aharon Appelfeldtraduit de l’hébreu par Valérie ZenattiEditions de l’Olivier, 304 pages, 22 euros.

LE POINTDE VUE

de David Lisnard

Le très haut débit pour en finir avec la fracture numérique

L e 2 octobre dernier, une « bombemétéorologique » dévastait troisvallées emblématiques des

Alpes-Maritimes : celle de la Tinée, cellede la Vésubie et celle de la Roya. Dans lesheures qui ont suivi, des milliers habi-tants se sont retrouvés sans logement, sans aide immédiate et isolés du reste du monde du fait des routes et des pontsdétruits et des moyens de communica-tion coupés. Or, une telle situation n’est pas une fatalité. Une solution par le très haut débit existe. Elle nécessite simple-ment que l’Etat sorte enfin du « tout fibre » et valide d’autres choix plus rapi-des et moins onéreux, en l’occurrence satellitaires.

A ce jour la France figure parmi lesplus mauvais élèves en Europe dans ce domaine. En effet, si 99,5 % de la popu-lation a accès à Internet, le très haut débit n’est accessible qu’à 70,3 % des logements français, et seuls 56,2 % ont accès à la fibre optique. En tout, 23.073 communes sur les 34.967 que compte notre pays bénéficient du très haut débit et 11.668 d’entre elles dispo-sent de la fibre optique.

Au regard des investissements qu’ilreste à réaliser, de l’incertitude des financements, du retard pris dans la production de prises FTTH (« fiber to the home ») et de la complexité à amé-nager certaines zones difficiles d’accès, les engagements du président de la République, promettant le très haut débit pour tous en 2022 et la couvertureintégrale du territoire en fibre optique pour 2025, ne seront pas respectés.

Trop de Français sont encore privésd’une connexion Internet de bonne qua-lité : près de 12 % n’ont même pas accès au haut débit, et il faudra attendre

Français et de rattraper enfin notre retard à l’international, la solution est de déployer une constellation satelli-taire en orbite basse, laquelle offrira despossibilités de connexion à Internet en très haut débit, égales partout en France et en Europe.

Voici déjà quatre ans, en octo-bre 2016, un rapport réalisé par Gene-viève Fioraso et remis au Premier ministre de l’époque, Manuel Valls, recommandait entre autres de renfor-cer l’investissement public dans les satellites de télécommunication. Rien n’a réellement avancé depuis.

Cette situation est d’autant moinsacceptable que nous possédons en France la technologie permettant de répondre à ces besoins en très haut débit, grâce à une industrie spatiale quia fait ses preuves depuis de nombreusesannées. Nous le savons bien, à Cannes, ville qui accueille la seule usine d’Europe d’assemblage intégral de satellites ainsi que le siège social de Thales Alenia Space, premier indus-triel français dans ce secteur.

Ne pas recourir à la solution satelli-taire pour réduire – enfin – la fracture numérique est une erreur stratégique aussi bien qu’une faute financière et économique, toutes deux commises par nos gouvernements successifs ces dernières années. Il ne tient qu’au prési-dent de la République de profiter du plan de relance économique européen,dont 20 % des fonds doivent être enga-gés en faveur de la transition numéri-que, pour mettre enfin sur orbite le trèshaut débit auquel ont droit tous les Français.

David Lisnard est maire LR de Cannes.

encore plusieurs années avant un hypo-thétique déploiement terrestre cou-vrant l’ensemble du pays.

La réduction de la fracture numéri-que et la suppression des zones blanchesdoivent être une priorité non seulement pour les situations d’urgence, mais aussiparce que le très haut débit permet le désenclavement des territoires ainsi queleur développement économique, une gestion plus efficiente de leur exploita-tion par les agriculteurs, la possibilité detélétravailler, de suivre des cours en

ligne, ou encore l’essor indispensable dela télémédecine. Il est d’ailleurs frappantde constater à quel point les « zones blanches numériques » et ce que l’on nomme les « déserts médicaux » corres-pondent – globalement – aux mêmes zones géographiques.

Il est enfin temps d’interroger leschoix effectués ces dernières années, lesquels ont privilégié le recours exclu-sif à la fibre optique – y compris dans leszones à faible densité d’habitants –, délaissant du même coup la couverturesatellitaire, ainsi que l’a très justement pointé du doigt Thierry Breton, com-missaire européen aux affaires inté-rieures, chargé des questions spatiales.

Afin de répondre au plus vite auxbesoins de connexion de l’ensemble des

L’Etat doit sortir du « tout fibre » et valider d’autres choix plus rapides et moins onéreux, en l’occurrence satellitaires.

LE POINTDE VUE

de Guillaume Baechler, Hervé Boco et Laurent Germain

De la vertu des mesures anti-OPA

L a fin justifie-t-elle tous lesmoyens ? Telle est la questionque soulèvent certains activistes

dans la bataille homérique entre les deux premiers leaders mondiaux des « services à l’environnement », Veolia etSuez. L’intention d’OPA (offre publique d’achat) de Veolia, qualifiée d’« hostile »par le conseil d’administration de Suez (communiqué de presse de Suez du 5 octobre 2020), a mis en lumière certai-nes pratiques de défense contre les OPAque peuvent envisager les principales entreprises françaises.

En l’occurrence, Suez a transféré àune fondation de droit néerlandais deux actions des filiales de sa branche eau et assainissement afin d’en empê-cher le transfert hors du groupe Suez sans l’accord de la fondation pendant une durée limitée à quatre ans. Cette mesure a provoqué la colère de certainsactionnaires minoritaires de Suez, comme le fonds activiste CIAM, qui a mis en demeure la direction de l’entre-prise d’accepter ce qui n’est à ce stade qu’une intention d’offre d’achat.

De son côté, l’Association de défensedes actionnaires minoritaires a menacédirectement les administrateurs d’engager leur responsabilité civile ou pénale s’ils n’abandonnaient pas cette arme anti-OPA, alors qu’elle n’empêchepas de lancer une offre. Or ces mesures ne peuvent en général être réduites à unmoyen de protéger l’équipe dirigeante car elles peuvent avoir un impact éco-

derniers n’hésitent plus alors à investir dans des projets innovants et de longue haleine. Enfin, une récente étude sur trente-six entreprises allemandes ayant pris des mesures anti-OPA (Drobetz et Momtaz, 2020) montre que ces mesuresde protection sensibilisent les managersaux opportunités d’investissement.

La littérature analysant directementla valeur de l’entreprise montre claire-ment que les mesures anti-OPA peu-vent accroître la valeur ex ante pour lesactionnaires en favorisant l’implicationdes équipes en place. Comme l’a montréune étude empirique sur 1.500 entre-prises américaines entre 1990 et 2002 (Straska et Waller, 2010), ces mesures améliorent la valeur des entreprises quiont des pouvoirs de négociation faibles ou qui ont un actionnariat très dilué. Plus marginalement, certains contre-exemples, comme l’étude de Bebchuk etal. (2009), suggèrent que l’absence d’adoption de ce type de mesures peut être un signal de bonne gouvernance.

Aussi, le débat sur les protectionsanti-OPA doit-il être mené, non pas uni-quement d’un point de vue juridique, mais aussi en constatant les avantages économiques qu’elles semblent appor-ter à l’entreprise, ses actionnaires, ses managers et ses parties prenantes.

Guillaume Baechler est professeur à l’université Paris-Saclay. Hervé Boco et Laurent Germain sont professeurs à TBS Business School.

nomique positif sur l’entreprise et ses actionnaires.

D’un point de vue académique, lesmesures anti-OPA sont étudiées dans lecadre de la théorie des incitations et desproblèmes principal-agent. Cette théo-rie se focalise sur les conflits d’intérêts entre les actionnaires et l’équipe mana-gériale de l’entreprise dont ces derniers sont les mandataires. Plus spécifique-ment, elle analyse aussi les conflits sous-jacents entre les petits porteurs, qui n’ont d’influence directe ni sur la composition ni sur la politique du conseil d’administration, et les action-naires référents.

De nombreux travaux scientifiquesont révélé que les protections anti-OPA peuvent avoir un impact positif sur la valeur de l’entreprise en améliorant la performance des managers, favorisant une relation de long terme entre les actionnaires et les équipes managéria-les. Ainsi, comme l’a montré une étude empirique sur près de 3.500 firmes amé-ricaines (Chemmanur et Tian, 2018), ces

De nombreux travaux scientifiques ont révélé que les protections anti-OPA améliorent la performance des managers.

Page 13: Les Echos - 03 12 2020

Les Echos Jeudi 3 décembre 2020 IDEES & DEBATS // 13

leadership&management

LA CHRONIQUEd’Erin Meyer

S’il est une chose que le Covid-19 nous aapprise, c’est que la plupart des entre-prises doivent faire preuve de beau-coup plus de créativité pour se réinven-ter. Selon Reed Hastings, cofondateur et co-PDG de Netflix, c’est grâce à sa cul-ture très peu orthodoxe que sa société fait figure d’exemple. Il l’a d’ailleurs conçue comme un modèle d’adaptabi-lité au changement, en réaction à l’échec de Pure Software, son entre-prise précédente. Et avec ce leitmotiv : « La liberté des salariés nourrit l’innova-tion. Les procédures opérationnelles tuent la flexibilité. »

Les congés chez Netflix : « Prenez-en »Chez Netflix, pas de règlements. La politique de congés se résume à « Pre-nez-en », et la politique de déplace-

ments professionnels se contente d’indiquer « Agissez dans le meilleur intérêt de Netflix ». Concernant les con-gés maternité, un simple « Prenez soin de votre bébé et de vous-même » fait l’affaire. Si vous avez besoin d’un nouvelordinateur, on laisse chacun juge de ce qui est bon pour l’entreprise. Le mana-gement par les objectifs, les indicateursde performance et les primes à la per-formance sont considérés comme des pratiques inutiles et à éviter.

Imaginez : vous êtes cadre moyendans le secteur du divertissement et vous voulez acheter un film à un prix très élevé. Vous avez étudié la question et vous pensez que ce sera un immensesuccès. Votre supérieur et le supérieur de votre supérieur ont clairement exprimé qu’ils ne pensent pas que ce film en vaille la peine. Si vous êtes sala-rié de Netflix, vous n’avez pas besoin del’approbation de la direction pour signer des contrats coûteux ou dépen-ser de grosses sommes d’argent. Tout lemonde connaît la devise de Netflix : « Ne cherchez pas à plaire à votre supé-

rieur, cherchez à faire ce qui est bon pourl’entreprise. » Si vous pensez que ce filmsera un succès pour Netflix, c’est vous qui décidez.

Un management selon le contexte, pas par contrôleDans la plupart des entreprises, le sys-tème de prise de décision est pyrami-dal. Chez Netflix, au contraire, ce sys-tème ressemble à un arbre. Le PDG est installé aux racines de l’arbre, il définit la direction que prend l’entreprise, fournit les principales orientations stratégiques et s’assure que les salariés disposent de toutes les informations dont ils ont besoin pour prendre des décisions importantes. Les cadres supérieurs forment le tronc et les gros-ses branches, ils clarifient la direction àprendre et le contexte dans leurs pro-pres départements. Mais les véritables décideurs sont les cadres de niveau inférieur, situés sur les branches supé-rieures de l’arbre. Ces « capitaines avi-sés » assimilent tout le contexte décrit par leurs collaborateurs, et le confron-

tent à leur propre jugement pour pren-dre de grandes décisions pour le bien del’entreprise.

Il existe un nombre croissant d’entre-prises dont l’objectif premier est l’inno-vation, la rapidité et la flexibilité opéra-tionnelle. Pour les dirigeants travaillantdans ces entreprises, où la culture de la réinvention est plus importante que la reproductibilité ou l’élimination des défauts, il faut envisager de renoncer aux règles et procédures, à l’origine d’une véritable gueule de bois de l’ère industrielle. Développez une culture dela liberté et de la responsabilité et per-mettez à vos salariés de travailler libre-ment.

Erin Meyer est américaine, professeure en management interculturel à l’Insead et co-auteure, avec Reed Hastings, de « No Rules Rules », publié par Penguin Random House.

Chronique traduite de l’anglais par Gwénaële Reboux, traductrice à l’Insead.

E nvironnement économiqueimprévisible, guerres commer-ciales, relocalisation des chaînes

d’approvisionnement (voir ci-contre) ; en interne, organisation matricielle doublée d’une montée en puissance du télétravail, santé mentale des salariés en berne… La pandémie de Covid-19 accentue la complexité des organisa-tions et, en contexte aussi difficile, les dirigeants éprouvent toutes les peines du monde à justifier leurs actions. Ils devraient s’inspirer des sportifs qui, avant de se lancer dans un marathon, soignent les détails de leur préparation.Quatre conseils pleins de bon sens aux dirigeants et managers soucieux de mieux affronter la complexité.

1. Ne vous isolez plus« On n’a jamais autant besoin de collectif,de méthode, de débat et de contradiction que pendant une crise », rappelle le pro-fesseur à HEC Olivier Sibony. Mais les dirigeants et managers de haut niveau se tiennent souvent à distance des réali-tés de l’organisation. Sans retours sur cequi se passe vraiment à l’intérieur de l’entreprise, ils courent le risque d’accen-tuer leur solitude non seulement physi-que mais aussi psychologique. Or « le dirigeant doit savoir s’accorder des temps d’écoute et d’échange avec les interlocu-teurs les plus qualifiés et divers, les plus représentatifs des parties prenantes con-cernées [jeunes salariés, seniors, clients, fournisseurs, actionnaires, tout comme nombre de représentants de la société : NDLR]. Il doit s’assurer de ne pas tomber dans un piège commun, celui des œillères nées des biais décisionnels personnels, professionnels et politiques », insiste la conférencière et coach de dirigeants Paule Boffa-Comby. Comprendre l’évo-lution des attentes de tous ceux qui inte-ragissent avec l’entreprise est primor-dial pour rendre l’organisation inclusiveet susciter l’engagement des équipes.

2. Impliquez les acteurs de terrain dans vos décisionsLes managers intermédiaires sont les plus susceptibles de fournir aux diri-geants des informations sur le vécu quo-tidien de l’entreprise. Bien qu’ils soient les plus proches du terrain, 21 % de ces responsables déclarent être rarement ou jamais consultés pour les décisions stratégiques et seulement 43 % (contre 62 % en février) se sentent habilités à prendre des décisions à impact sur les objectifs de l’entreprise, selon le rapport « À chacun sa voix » de Workplace fromFacebook. Or, intégrer ces experts dans la boucle décisionnelle pourrait placer lacomplexité sous un précieux éclairage.

3. Gagnez la confiance des équipes« Une entreprise managée par la con-fiance et par l’envie est infiniment plus per-formante qu’une entreprise classique », selon Pascal Demurger, le président de la

Maif. Sans confiance, pas de producti-vité, pas de motivation ni de collectif de travail, mais comment la gagner ? Cer-tainement pas en superposant les cou-ches de management, en allongeant les cycles de décision et en multipliant les règles ; il n’y aurait pas meilleure façon de doucher tout enthousiasme et d’étouf-fer toute prise d’initiative. Les dirigeants et managers vont devoir commencer parexaminer leur confiance en eux, puis accepter de se fier à la bonne foi, au sens des responsabilités et à la loyauté des salariés. S’ils savent aussi éviter toute dis-sonance entre leur image, leurs discourset leurs actes, le pari peut être gagné, avecà la clé le respect des collaborateurs et bien plus d’engagement collectif.

4. Vérifiez que ce que vous dites a été comprisCombien sont les dirigeants et top managers à se bloquer dans une posturequi ne favorise guère le dialogue, encore

L’ANALYSEdeMuriel Jasor

Complexité : 4 conseils tout simples pour mieux y faire face

Face aux défis nés de la crise sanitaire et économique, les dirigeants et top managers devraient s’ins-pirer des sportifs qui, avant de se lancer dans un marathon, soignent les détails de leur préparation.

La pandémie de Covid-19 accentue la complexité des organisations. Photo iStock

Netflix : la liberté des salariés au service de la légitimité

Diversité mise à mal

P reuve supplémentaire que la crise du Covid-19 exacerbe les inégalités, un rapport ducabinet McKinsey & Company radiographie

le ressenti de 3.800 salariés répartis entre 11 pays. Si la surcharge de travail, l’inquiétude professionnelle et la perte de lien social sont évoquées par plus de la moitié des répondants, certaines populations de salariés sont plus affectées que d’autres : les femmes sont 1,5 fois plus nombreuses que les hommes à faire part d’un problème de charge mentale ; les employés LGBTQ+ sont 1,3 fois plus nombreux à se dire concernés par la distension du sentiment d’appartenance à un collectif ; les représentants de minorités ethniques sont 1,5 fois plus préoccupés par le coup de frein porté à leur progression professionnelle, tout comme les parents (impactés par la fermeture des établissements scolaires lors du premier confinement). « Les facteurs sont à la fois macroéconomiques, microéconomiques et culturels », estime Sandra Sancier-Sultan, directrice associée senior de McKinsey France, coauteure de l’étude. Toutefois, 9 entreprises sur 10 assurent continuer à promouvoir la diversité, 2 sur 5 projettent d’augmenter les moyens alloués à ce sujet et 1 salarié sur 6 dit percevoir les efforts réalisés par son employeur (investissement dans la formation, politique de parentalité, montée en compétences de tous...). —Julie Le Bolzer

aRetrouvez l’intégralité de l’article sur lesechos.fr/idees-debats/leadership-management/

LA TENDANCE

oMATIÈRES À PENSER

Covid : 5 raisons de repenser votre stratégie d’approvisionnement

L es experts du cabinet de conseil Kyu ontmené des entretiens auprès d’une centainede professionnels des risques et de la supply

chain (ou chaîne d’approvisionnement). Revue des risques identifiés.1. Difficultés d’une planification adaptée. Le risque sanitaire, considéré comme faible en 2019, est devenu prioritaire. Notamment pour certaines enseignes du secteur de la grande distribution qui ont été confrontées, après le premier confinement, à des surstocks de collections d’hiver non écoulés. Il est, pour elles, plus que jamais nécessaire d’identifier, de localiser et de caractériser tous les maillons de la supply chain pour mieux orienter la stratégie et réagir efficacement en cas de défaillance.2. Des contraintes réglementaires qui ne cessent d’évoluer. L’adaptation aux protocoles sanitaires des clients et des fournisseurs allonge les délais d’intervention. En outre, les réglementations, très diverses d’un pays à l’autre, ainsi que la fermeture des frontières sont associées à des problématiques de gestion opérationnelle. Pour pouvoir s’approvisionner, les entreprises vont devoir adapter leur sourcing. 3. Fournisseurs fragilisés et dépendance problématique. La pandémie a notamment mis en exergue la dépendance des pays occidentaux vis-à-vis de la Chine. Le risque de faillites des fournisseurs les plus fragilisés par la crise fait peser une menace importante sur des supply chain globalisées et interdépendantes. Pour sécuriser les approvisionnements, il convient de relocaliser certaines productions et de diversifier les bassins d’approvisionnement. 4. Une politique de transport à revisiter. La crise sanitaire a aussi révélé la grande vulnérabilité de la logistique mondiale. Diversifier les solutions et les canaux, au-delà des routes maritimes et routières classiques va être nécessaire.5. Cybersécurité et technologies, de nouveaux enjeux. Considérablement digitalisée, la supply chain s’appuie sur de nombreux systèmes interconnectés entre tous les acteurs. Ces avancées technologiques laissent toutefois de nombreuses entreprises vulnérables à la défaillance de leurs systèmes d’information ou de ceux de leurs partenaires. —Léna Sanchez

aRetrouvez l’intégralité de l’article sur lesechos.fr/idees-debats/leadership-management/

Des

sin

Mai

lys G

laiz

e pou

r « L

es E

chos

»

moins la contradiction ? Ils pensent avoir largement expliqué les choses, mais elles ont été mal comprises, pas entendues ou vite oubliées, car trop déconnectées de la réalité de terrain. Onne le dira jamais assez : répéter, expli-quer le « pourquoi » sans relâche et véri-fier que tout a bien été compris est indis-pensable dès lors qu’il est question de partager et atteindre des objectifs com-muns. Une question de bon sens, résu-merait Olivier Rattez, manager et auteurdu savoureux ouvrage « Petites Leçons de management reçues des gens sim-ples » publié par les Editions Baudelaire.

@Mljr75112

Sans confiance, pas de productivité, pas de motivation ni de collectif de travail.

Page 14: Les Echos - 03 12 2020

Masques anti-Covid : comment la France a remonté la pente

Richard Hiault @RHIAULT

E mmanuel Macron l’avait promis auprintemps. « Je veux que d’ici à la fin del’année nous ayons obtenu […] cette

indépendance pleine et entière. » En mars der-nier, au paroxysme de la première crise pan-démique du Covid-19, la France est à nu. Imprévoyant, l’Etat n’a guère de stock de masques de protection. Masques chirurgi-caux, masques FFP2, masques en tissu, l’Hexagone manque quasiment de tout. A tous les niveaux – Etat, régions, collectivi-tés locales, hôpitaux, cliniques –, une course s’engage pour s’équiper. En recourant d’abord à l’importation massive. De Chine, évidemment. Par cargos entiers. Avec le ris-que de se faire subtiliser sa commande tant ce sprint infernal est général à l’échelle de toutes les nations frappées par la pandémie.

Cette course contre la montre se dérouleaussi sur le territoire français. Pour des rai-sons de sécurité intérieure. A grand renfort de discours et de polémiques au sein de la classe politique sur cette fragilité française, l’Etat met tout en œuvre avec le seul souci dene plus dépendre de l’étranger pour ses approvisionnements en masques de protec-tion. A Bercy, la Direction générale des entre-prises (DGE) s’active. De même, la Direction générale de la santé (DGS). « Dans notre mal-heur, la France a la chance de disposer de qua-tre producteurs dont la capacité se situait, en janvier, entre 3,5 et 4 millions de masques par semaine », indique-t-on au ministère de l’Industrie. Ce n’est pas pour rien que le chef de l’Etat a choisi justement de se rendre à Saint-Barthélemy-d’Anjou en cette fin de mars, sur l’un des sites du fabricant Kolmi-Hopen, premier fabricant européen de mas-ques chirurgicaux, aux côtés de Maco-pharma, Valmy et Paul Boyé.

Branle-bas de combat chez Kolmi-HopenChez Kolmi-Hopen, la crise commence bien avant que la première vague ne touche le ter-ritoire hexagonal. « Dès le 21 janvier, nous avons dû fournir la Chine en masques de pro-tection », se souvient Gérald Heuliez, son directeur général. « Début février, nos équipestournaient sept jours sur sept et vingt-quatre heures sur vingt-quatre avec quatre machines dédiées aux masques FFP2 et six aux masqueschirurgicaux. A l’époque, nous sentions bien que la réquisition des masques par l’Etat fran-çais allait arriver », ajoute-t-il (les masques deprotection respiratoire de type FFP2 et les masques anti-projections ont été réquisi-tionnés entre le 3 mars et le 31 mai). L’entre-prise décide d’investir dès février plus de 8 millions : « Nous avons ouvert un nouveau site de production de masques chirurgicaux et FFP2 à Angers. » Résultat : avant la crise, Kol-mi-Hopen produisait 350.000 masques médicaux et 40.000 masques FFP2 par jour. « Au début de l’année prochaine, nous serons capables de produire, sur nos deux sitesangevins, 3,5 millions de masques quotidien-nement », prédit Gérald Heuliez.

A Tourcoing, chez Macopharma, dont latransfusion sanguine est le cœur de l’activité,Yvan Malépart, directeur exécutif, se remé-more la relance d’une activité jusque-là en veille. « Début 2020, notre capacité de produc-tion de masques FFP2 était de zéro. Sans assu-rance de la part de l’Etat de pouvoir vendre nos masques, nous avons quand même pris la décision, début février, de rebrancher nos machines, que nous avions conservées. Nous avons pu commencer à livrer des pro-duits finis dès le mois d’avril, et notre capacité de production devrait atteindre les 125 mil-lions de masques pour l’année 2021 », avance-t-il. Là encore, plusieurs millions d’euros sont consacrés à l’aménagement d’un atelierpour accueillir matériel et personnel supplé-mentaire – Macopharma a recruté 150 per-sonnes – dédié à cette tâche.

L’effort national ne se concentre pas uni-quement sur ces quatre acteurs historiques. De nouveaux entrants apparaissent. En l’espace de sept mois, le nombre de fabri-cants en France passe de 4 à 21. Parmi ces nouveaux venus, la PME iséroise située à Saint-Didier-de-la-Tour, MDB Texinov, se décide, elle aussi, à participer à l’autonomie sanitaire. Des masques FFP2 en plus des masques à usage non sanitaire (UNS) sont privilégiés. Un défi. Fondé en 1972, MDB Texinov est avant tout un fabricant de texti-les techniques par tricotage à maille jetée. « La moitié de notre chiffre d’affaires est destinée au monde agricole. Nous fabriquons, par exemple, des protections anti-insectes, des filets pare-grêle ou encore du textile de renfor-cement des sols (repris depuis 2018 par le

PME s’équipe de deux machines et produit entre 2 et 10 millions de masques mensuelle-ment. « Nous travaillons sans assurance que l’Etat achètera nos masques. Dans un marché perturbé par l’intervention massive de l’Etat au printemps, notre action commerciale per-met d’augmenter notre production. Sur ce point, la préfecture et la région nous aident », indique Marie Tankéré.

Course au « meltblown »La PME commande également, avec le sou-tien de l’Etat, de la région et de bpifrance, uneligne de production de « meltblown », matière première actuellement achetée en Europe. Cette fameuse membrane non tis-sée à base de polypropylène fondu et soufflé (« melt » et « blown », en anglais) est l’un des composants essentiels des masques chirur-gicaux et FFP2. L’investissement de MDB Texinov permettra la création du seul site dans la moitié sud de la France avec 15 à 30 emplois à la clé. Même son de cloche du côté de Kolmi-Hopen où Gérald Heuliez con-cède que, en début d’année, « la France ne

produisant pas assez de meltblown, nous avons été dans l’obligation de nous approvi-sionner à hauteur de 30 % en dehors de France,mais toujours en Europe ».

Les services de l’Etat perçoivent très tôtcette faiblesse dans la chaîne d’approvision-nement. La pénurie menace et les prix, par-fois multipliés par quinze, s’envolent. Dès la mi-avril, la ministre déléguée en charge de l’Industrie, Agnès Pannier-Runacher, lance un appel à manifestation d’intérêt (AMI). Pour encourager les vocations industrielles sur ce matériau nécessitant des investisse-ments importants (de 4 à 8 millions d’euros),une subvention maximale de 30 % du mon-tant total est octroyée. Fin juin, une quaran-taine de projets voit le jour. Une dizaine, dontcelui de MDB Texinov, est retenue, mobili-sant 20 à 25 millions d’euros de subventions publiques pour 60 à 70 millions d’euros d’investissement total.

Les effets de cette mobilisation se fontrapidement sentir. Le ministère de l’Indus-trie assure que la production française est passée de 3,5 à 4 millions de masques hebdo-

spin-off Afitexinov). Dans les années 2000, nous nous sommes lancés sur le secteur médi-cal avec la fabrication de pansements et de tex-tiles implantables, puis de valves mitrales – en tests cliniques – et de dispositifs de photothéra-

pie. Du côté des masques, nous avions eu l’opportunité de répondre à un appel d’offres en 2009. Nous n’avions pas donné suite. Mais,cette année, il nous est apparu sensé de répon-dre à l’appel », témoigne Marie Tankéré, coordinatrice R & D chez MDB Texinov.

Cette décision sécurise l’emploi des70 salariés au regard de la baisse d’activité dans les autres secteurs. Les conséquences économiques du Covid-19 se font sentir. La

PANDÉMIE // Le chef de l’Etat promettait en mars que la France regagnerait son autonomie en matière de production de masques sanitaires. La forte mobilisa-tion des industriels, ces derniers mois, va permettre de remplir cet engagement avec une production hebdomadaire revendiquée de 100 millions de masques.

De nouveaux entrants apparaissent. En l’espace de sept mois, le nombre de fabricants en France passe de 4 à 21.

Emmanuel Macron à l’usine de masques Kolmi-Hopen de Saint-Barthélemy-d’Anjou, le 31 mars 2020. Photo Loic Venance/AFP

madaires en janvier à 62 millions fin septem-bre (49 millions de masques chirurgicaux et 13 millions de masques FFP2). « Fin sep-tembre, nous disposons enfin d’un stock de 1 milliard de masques. La France sera capable de produire 100 millions de masques par semaine d’ici à la fin de l’année. Ce chif-fre est suffisant pour répondre au pic de con-sommation enregistré au plus fort de la pre-mière vague », indique un porte-parole du ministère.

Côté commerce extérieur, la pressions’atténue. Les importations de masques par la France diminuent. Pointée à 34,3 millions d’euros en janvier, la valeur de ces achats externe atteint un pic de 1,78 milliard d’eurospour le seul mois de mai, indique les Doua-nes françaises. Ce montant redescend pro-gressivement pour s’élever à 443 millions d’euros en septembre dernier.

Pression chinoiseReste que le nombre exact de masques importés s’avère difficile à appréhender. Aucun chiffre précis n’est encore disponible.Ce que confirme Isabelle Méjean, écono-miste à l’Ecole polytechnique et lauréate cette année du « prix du meilleur jeune éco-nomiste ». « Nous faisons face à deux problè-mes : nous n’aurons pas accès à des données désagrégées sur la période actuelle avant au moins un an et il restera difficile d’identifier précisément les masques puisqu’ils sont mélangés avec d’autres produits de protection en tissu, des combinaisons, par exemple », avance-t-elle. « Quoi qu’il en soit, je doute que la France puisse être autosuffisante en matièrede production. L’idée sous-jacente est plutôt deréduire la dépendance à une seule source d’approvisionnement », ajoute-t-elle.

Du côté des professionnels français, cha-cun s’accorde pour observer que la France importe toujours des masques médicaux de protection. « Les masques que nous recevons encore sont ceux qui ont été commandés au printemps », concède le ministère. Il n’empê-che. Yvan Malépart constate un retour des masques chinois sur le marché français depuis l’été, « avec un respect parfois approxi-matif des normes européennes ». « Bon nom-bre de masques (médicaux ou de protection) dont les normes, américaines ou chinoises, ne sont pas suffisantes au regard de standards établis par l’Europe passent trop facilement la frontière », regrette aussi Gérald Heuliez.

« D’un côté, l’Etat dit vouloir protéger lemarché français, de l’autre, il nous met enconcurrence avec les produits chinois. Nous sommes en train d’arriver à une surcapacité deproduction du fait de l’arrivée de nouveaux acteurs, en particulier pour les masques chi-rurgicaux. C’est moins le cas, à ce stade, pour les masques FFP2 », analyse, pour sa part, Yvan Malépart.

Quel que soit l’industriel, l’incertitude del’avenir prévaut. Chez Kolmi-Hopen, Gérald Heuliez assure que son carnet de comman-des est rempli jusqu’en mars. « Au-delà, nousne savons pas », avoue-t-il. Même constat chez Macopharma. « Tout ce que nous demandons, c’est de la visibilité sur 2021 et la suite. Si l’Etat ne nous confirme pas des niveaux suffisants de commandes, nous serons forcés à terme de remettre en cause cetteactivité – alors que nous souhaitons la pérenni-ser, voire l’augmenter », déclare Yvan Malé-part. Mais si la pandémie disparaît, de nom-breux acteurs mettront la clé sous la porte.

Aujourd’hui, la France a bel et bien ren-forcé son autonomie sanitaire. Mais évoquerune relocalisation totale de la production desmasques relève de l’affabulation. La France n’a pas de vastes champs de coton et encore mois d’hévéas. Une partie des matières pre-mières proviendra toujours de l’étran-ger. « La France ne peut être indépendante surtoute la chaîne de production des masques », confirme Isabelle Méjean. « Il est moins gravede ne pas être autosuffisant sur des matières premières pour lesquelles les marchés sont très liquides que pour des biens finis pour les-quels il n’existe souvent pas beaucoup de pro-ducteurs alternatifs », tempère-t-elle.

Avec le chemin accompli, l’Hexagoneévite la pénurie de masques, à l’instar du printemps dernier, au moment où frappe une deuxième vague de Covid-19. Sur ce plan, une partie de la promesse présiden-tielle est tenue. n

Evoquer une relocalisation totale de la production des masques relève de l’affabulation.

14 // Jeudi 3 décembre 2020 Les Echos

enquête

Page 15: Les Echos - 03 12 2020

9

1010

11

11

15

15

15

18

19

19

9

11

1010

10

11

11

13

16

16

17

14

12

11

1011

11

11

10

11

11

18

19

VENDREDI

SAMEDI

DIMANCHE

VENDREDI SAMEDI DIMANCHE LUNDI

5/11

13/19

5/10

3/9

18/32

3/10

20/25

14/16

5/11

9/14

12/17

7/8

9/18

18/24

14/18

14/20

24/31

14/18

10/18

10/16

7/10

5/11

14/16

7/11

5/12

18/33

3/11

21/28

15/16

6/13

11/18

12/17

6/8

11/18

18/23

12/14

17/25

24/29

13/17

10/19

8/17

5/11

4/12

13/15

5/10

5/15

19/32

2/10

23/29

13/15

5/14

11/15

8/15

8/10

10/19

18/27

10/13

16/24

24/31

13/18

12/22

9/17

3/11

7/13

12/17

2/10

10/16

19/32

3/11

23/27

14/16

10/15

11/15

9/14

8/9

10/19

20/29

11/13

15/19

24/29

14/17

14/22

7/16

3/11

8/13

11/17

3/9

9/15

19/32

4/10

21/26

15/17

10/15

9/14

9/14

0/2

11/18

22/28

9/12

13/18

24/30

13/19

11/15

8/17

4/13

2/12

3/13

9/20 12/19

3/12

3/16

7/15

11/16

16/19 13/18

5/14

9/17

12/16

12/16

12/19 14/17

8/14

12/17

L’appétit vient en mangeant. Et celui de la tech américaine est visiblement sans limite. A l’heure où la révolution digitale bouleverse le quotidien des consommateurs comme celui des salariés, les géants de la Silicon Valley l’ont bien compris : le succès appartient à ceux qui innovent le plus rapidement et… qui grossissent le plus vite. Il faut être le meilleur et toucher le plus de monde possible.

Pour s’imposer quand la concurrence n’est qu’à un clic, il est devenu primordial de ne jamais se reposer sur ses lauriers. Dans notre univers numérique, les barrières à l’entrée se sont considérablement abaissées. Une start-up innovante peut faire naître de nouveaux usages qui seront adoptés mondialement en un temps record. A la faveur du confinement, Zoom s’est imposé comme un champion de la visioconférence et Slack a marqué des points dans le domaine des messageries collaboratives.

Pour les patrons de Google, Apple, Facebook, Amazon, Microsoft ou Salesforce, qui ont intégré la leçon de l’ex-boss d’Intel qui disait que « seuls les

paranoïaques survivent »,la facilité consiste néanmoinsde plus en plus non pasà innover en interne, maisà externaliser leur innovation.Dopés par des capitalisationsboursières record etdes profits gigantesques, tropsouvent ils ne cherchent plusà faire naître des idéesrévolutionnairesdans leurs labos de R&Dmais simplement à fairel’acquisition de produitsimaginés par d’autres. Googlea racheté Waze et YouTube ;Facebook, WhatsApp etInstagram ; Apple s’est offertShazam ; Microsoft,LinkedIn ; et, aujourd’hui,c’est au tour de Salesforcede mettre la main sur Slack.En agissant de la sorte, ces parrains de la Silicon

Valley aux poches très profondes n’enfreignent aucune loi. Ils rachètent souvent des entreprises de taille encore modeste dont ils contribuent à accélérer la croissance en les intégrant à leurs offres. Ils démocratisent ainsi de nouveaux usages en rassurant les utilisateurs. Et la concurrence entre eux reste extrêmement vive. Seul, Slack était menacé par la montée en puissance de l’offre Teams de Microsoft. Adossé à Salesforce, il sera plus fort. Le consommateur sera gagnant et le seul perdant sera peut-être un Zoom qui, sans le soutien d’un géant, risque de se retrouver bien vite bien seul, un peu comme un Snapchat ou Twitter qui, dans l’univers grand public, ont refusé de se vendre au plus offrant.

Les autorités de la concurrence – en particulier en Europe – devraient toutefois encadrer et surveiller plus sérieusement toutes ces opérations de croissance externe. Car, en fin de compte, elles contribuent surtout à renforcer un cartel digital qui pourrait un jour céder à la tentation de l’oligopole douillet.

(Lire nos informations Page 24et « Crible » Page 40

L’ÉDITORIAL DES « ÉCHOS »

Cartel 2.0

La Silicon Valley est devenue experte dans l’art d’externaliser sa R&D à coups d’acquisitions.

Par David Barroux

LA PHOTO DU JOUR

LA THAÏLANDE DE NOUVEAU SOUS TENSION La Cour constitutionnelle thaïlandaise a jugé mercredi que le Premier ministre Prayut Chan-o-cha n’était pas coupable de conflit d’intérêts et pouvait donc rester au pouvoir. Cette décision a immédiatement attisé les tensions, des milliers de manifestants prodémocratie descendant de nouveau dans la rue pour réclamer sa démission. Photo Lillian Suwanrumpha/AFP

DERNIÈRE HEURE

Trump se positionne pour… 2024

'ÉTATS-UNIS – Donald Trump a évoqué ouvertement, mardi soir,

la possibilité d’être de nouveau candidat à la présidence en 2024, ce qui impliquerait en creux qu’il reconnaîtrait avoir perdu la prési-dentielle. « Nous essayons de faire quatre ans de plus. Sinon, je vous reverrai dans quatre ans », a-t-il déclaré, lors d’une fête de Noël à la Maison-Blanche. « A ce stade, nous n’avons pas vu de fraude à une échelle susceptible de changer le résultat de l’élection », a lancé de son côté un de ses fidèles, le minis-tre de la Justice William P. Barr.

Tunisie : la police en renfort contre les manifestations

'MAGHREB – Le chef dugouvernement tunisien aappelé les forces de sécurité

à intervenir « immédiatement » pour repousser les manifestants qui bloquent les sites de produc-tion industrielle, après une série de mobilisations sociales à travers le pays. Alors que la Tunisie s’apprête à marquer le dixième anniversaire d’une révolution réclamant travail et liberté, qui a démarré dans une zone marginali-sée, les mobilisations se multi-plient dans des régions défavori-sées du sud et du centre du pays.

Le Goncourt des lycéens pour « Les Impatientes »

'CULTURE – L’écrivainecamerounaise Djaïli Amadou Amal, vedette

de la littérature dans son pays, a remporté mercredi le 33e Goncourt des lycéens pour « Les Impatientes », roman poignant sur la condition des femmes dans le sud-Sahel. S’inspirant de sa propre expérience, Djaïli Amadou Amal met en scène plusieurs femmes contraintes, comme elle, d’accepter les codes d’une société patriarcale oppressante. Le Gon-court des lycéens est l’un des prix les plus prescripteurs de ventes.

Le Collectif contre l’islamophobie en France dissous

'SÉCURITÉ – Comme annoncé après la décapita-tion de l’enseignant Samuel

Paty, le gouvernement a dissous, mercredi en Conseil des ministres, le Collectif contre l’islamophobie en France (CCIF), accusé de faire de la « propagande islamiste ». Le collectif avait décidé de prendre les devants en annonçant, vendredi, s’être « autodissous ». « Nous ne pouvons accepter une dissolution de façade et nous devons donc mettre un point final à cette action », a expliqué le porte-parole du gouvernement, Gabriel Attal.

« Alice » par Lisa Zordan pour « Les Echos »

Page 16: Les Echos - 03 12 2020
Page 17: Les Echos - 03 12 2020

Jeudi 3 décembre 2020www.lesechos.fr

AVIS FINANCIERManutan International 23

Alain Ruello et Christophe Palierse

Après le fonds de solidarité, les exonéra-tions, reports de charge, ou encore les prêtsgarantis par l’Etat, le gouvernement met sur la table une autre mesure de soutien aux entreprises les plus affectées par la crise. Au terme de nombreux échanges avec les fédérations professionnelles concernées, mais aussi d’arbitrages tendus entre ministères, compte tenu du coût potentiel de la mesure, l’Etat va prendre en charge une partie des congés payés acquis par les salariés durant les deux confine-ments, à savoir dix jours ouvrés. La minis-tre du Travail, Elisabeth Borne, et le minis-tre des PME, Alain Griset, l’ont annoncé mercredi soir lors d’une réunion avec les partenaires sociaux et les organisations professionnelles du secteur de l’hôtellerie-restauration.

Concrètement, la mesure – qui coûteraplusieurs centaines de millions d’euros – sera éligible à deux types d’entreprises. Toutd’abord, celles qui ont été fermées, à la suite d’une décision administrative, 140 jours cette année : restaurants, salles de sport ou de spectacle… A celles-ci s’ajoutent, en second lieu, les entreprises dont le chiffre d’affaires a baissé d’au moins 90 % sur les périodes d’urgence sanitaire. C’est le cas deshôtels, restés ouverts mais dont la clientèle s’est évaporée, ou qui ont décidé eux-mêmesde fermer.

« Un bon compromis »La prise en charge se fera via l’activité par-tielle. En clair, l’Etat et l’Unédic rembourse-ront à l’entreprise la totalité de ce qu’elle verse à son salarié, soit 70 % du brut (ou 84 %du net), et l’employeur complétera de sorte que le salarié, comme il se doit, touche l’inté-gralité de sa rémunération. « Les fédérations

professionnelles se sont engagées », assure-t-on dans l’entourage d’Elisabeth Borne.

Autre point important : les congés devrontêtre pris entre le 1er et le 20 janvier 2021, de façon à apurer une partie du stock de jours accumulés avant le retour de l’activité à la normale pour les entreprises ciblées. Ce qui suppose, dans le cas des congés acquis avantle 31 mai dernier, que l’employeur consulte son conseil social et économique (sans tar-der, car il a un délai de prévenance de 30 jours) ou obtienne l’accord du salarié dansle cas de congés pris par anticipation.

Sur la table lundi soir, ce compromis ademandé 48 heures supplémentaires pour

accoucher, devant le refus des fédérations professionnelles qui ont fini par accepter. « C’était cela ou rien », indique une source au fait des négociations. « C’est une aide ponc-tuelle, non reconductible, mais c’est un bon compromis », a réagi le président du groupe-ment patronal de l’hôtellerie-restauration GNI, Didier Chenet. Ce dernier se félicite en particulier de la prise en compte de l’hôtelle-rie qui n’est pas sujette à fermeture adminis-trative. « Il n’était pas pensable que la branchesoit coupée en deux. L’hôtellerie paie un lourd tribut à la crise », abonde le négociateur de l’Umih – la principale organisation patro-nale –, Thierry Grégoire, avant d’ajouter :

JCAC 405.583,01 points0,0245 % n

DOW JONES29.819,38 points-0,0152 % J

EURO/DOLLAR1,2091 $0,1574 % J

ONCE D’OR1.822,6 $0,6544 % J

PÉTROLE (BRENT)48,44 $2,5185 %

DEVISES EUR/GBP 0,9059 EUR/JPY 126,385 EUR/CHF 1,0837 GBP/USD 1,3347 USD/JPY 104,5205 USD/CHF 0,8961 TAUX EONIA -0,475 LIFFE EURIBOR 3 MOIS -0,526 OAT 10 ANS -0,3554 T-BONDS 10 ANS 0,8694

CORONAVIRUS

Airbus 40Amazon 18, 25Amundi Iberia 39BioNTech 22BlackRock 32Bosch 36, 38Casebook 29Circa 29Crédit Agricole SA 40Dassault Systèmes 40Facebook 25

Feedzai 39Google 25 JouéClub 18Just Search 27Klaxoon 27Kohl’s 23Lunii 18Macopharma 14Mécabois 18Microsoft 24, 27Naister 27

Novasep 29Orange 25Pfizer 22PicWicToys 18Pigment 27Renault 40Résilience 29Salesforce 24Sephora 23Slack 24SNCF 23

Société Générale 40Teleperformance 40TUI 20Unibail-Rodamco-Westfield 40Veniam 38Venture Orbital Systems 29Worldline 40

= LES ENTREPRISES CITÉES

l’essentiel

Biov

iva

Jouets : le made in France craint de payer la facture de la criseLes jouets fabriqués en France pèsent14 % du marché. Avec le reconfinement,les stocks des distributeurs sontpleins, notamment de produitschinois. Les PME tricolorescraignent de voir leurs com-mandes annulées, ou lesbesoins de réassort dimi-nuer. // P. 18-19

Le Brexit limitera le mercato des riches clubs anglais de footballLes clubs européens et notamment fran-çais pourraient avoir du mal à vendrecertains de leurs joueurs à la PremierLeague, l’élite du foot anglais. // P. 20

Lutte contre le piratage audiovisuel : dernière chance avant la présidentielle de 2022Un texte est prêt et porté par la députée

Aurore Bergé et la ministre de laCulture Roselyne Bachelot.

Reste à lui trouver une fenêtreparlementaire avant l’étéprochain. // P. 25

Le cash continue son(lent) déclin en Europe

Selon une étude de la BCE, lespaiements en espèce ont repré-

senté 73 % de l’ensemble des tran-sactions réalisées en 2019 dans la zoneeuro, contre 79 % en 2016. En France, lerecul du cash est plus marqué, passant de68 % en 2016 à 59 % en 2019. // P. 33

L’Etat va payer dix jours de congés dans les entreprises les plus touchées

« On avait demandé 15 jours, c’est 10. C’est mieux que rien, c’est satisfaisant ».

A contrario, ce compromis pourrait fairegrincer des dents du côté des syndicats de salariés. Comme le précise Didier Chenet, la prise en charge des congés payés vaut aussi bien pour des jours « en stock » que pour des « jours à venir », attribués à compter du 1er juin 2021. Une possibilité à laquelle FO, en particulier, s’oppose dans la mesure où elle s’effectuerait « au détriment des salariés », qui, dans les TPE, n’ont pas forcément la capacité de s’opposer à leur patron. « C’est honteux », déclare le secrétaire de la fédéra-tion FGTA du syndicat, Nabil Azzouz. n

Fermés 140 jours à la suite d’une décision administrative, les restaurants bénéficieront de la mesure. Photo Philippe Lopez/AFP

Dominique [email protected]

Un verre capable de ralentir la myopie des enfants. C’est le défi relevé par le japo-nais Hoya, qui figure parmi les leaders del’optique dans le monde. Le groupe lanceen France, avant le reste de l’Europe, ce verre d’une nouvelle génération, qui a demandé trois ans d’essais cliniques, en lien avec l’école polytechnique de Hong Kong. « Je ne parlerais pas d’innovation, mais de révolution, lance le directeur général de la filiale française, Jean-Mi-chel Lambert. Nous sommes à l’aube de créer une nouvelle catégorie de verres. C’estla plus grande avancée depuis l’invention des progressifs. » C’était il y a soixante ans.

A la différence des verres existants, ceverre baptisé « Hoya MiyoSmart Vision » permet, en plus de corriger leuracuité visuelle, de « traiter » les causes dela myopie chez les enfants. Il agit sur l’une de ses principales causes, l’allonge-ment de l’œil. « Les études ont montré qu’il freinait de 60 % la progression de la myopie des enfants, par rapport à un verreunifocal », précise le dirigeant. Un tour-nant en matière de santé, car entre 6 et 9 ans, près d’un enfant sur quatre por-teurs de lunettes est myope.

Le chiffre grimpe à 60 % à 18 ans. Il estdonc capital d’intervenir le plus tôt pos-sible, car « la progression est plus rapide avant l’âge de 10 ans », indique Hoya. Le « MiyoSmart » ne leur permettra pas un retour en arrière, mais il aidera à stabili-ser leur vue. « Ce ralentissement va avoir des conséquences majeures sur leur vie d’adulte, avec une réduction du risque de décollement de la rétine, de cataracte, macula ou autres », assure Jean-Michel Lambert.

Cette technologie a un prix. Pour unéquipement (montures et verres), il fau-dra compter entre 500 et 550 euros. Déjà,ce verre « actif » est en vente chez plus de6.000 opticiens en France. La fabricationest concentrée dans une seule usine dansle monde, en Thaïlande, près du centre de R&D du japonais.

Une pandémie silencieuseLa myopie est détectée dès le plus jeune âge, quand « l’enfant se rapproche trop dela télévision par exemple et lorsqu’il n’arrive plus à lire au tableau », souligne Hoya. En France, 2,5 millions d’enfants sont concernés. Un nombre qui ne cessede progresser. L’an dernier, lors du Salonmondial de l’optique, le Silmo, les profes-sionnels avaient évoqué une véritable pandémie silencieuse chez les plus jeu-nes, provoquée par l’usage immodéré des écrans. Selon le baromètre « Expert Santé Visuelle », les enfants passent en moyenne 2 h 45 par jour devant des tablettes. Le développement de la myo-pie est aussi lié à des raisons génétiques. En 2020, ce fléau toucherait près de 33 %de la population mondiale. « En vingt-cinq ans, nous allons passer à une per-sonne sur deux, contre une sur trois aujourd’hui, avec une forte vague en Asie », indique le dirigeant.

Avec cette innovation de rupture,Hoya espère gagner des parts de marchésur ses concurrents, dont certains seraient dans les starting-blocks. La filiale française vise un chiffre d’affaires stable en 2020, malgré la crise. Le mar-ché de l’optique dans l’Hexagone, qui s’est élevé à 6,6 milliards en 2019, devrait,lui, reculer de 10 % cette année, selon les professionnels. n

Hoya lance un verre qui ralentitla myopie des enfants

SANTÉ

déclencher une procédure de sauvegarde d’ici à six mois, ou encore 61 % licencie-raient au cours de cette même période.

On estime à 70.000 le nombre de sala-riés pour 6.500 établissements de sport et loisirs marchands, dont 3.500 salles de fitness. Les indépendants, qui pèsent 70 % des établissements, « sont les plus touchés par la crise », rappelle Philippe Herbette, lePDG de Fitness Park France, un poids lourd du secteur avec 250 salles. La ques-tion des loyers, qui représentent 40 % des charges, reste explosive. « Les lignes conti-nuent de bouger », note toutefois Philippe Diallo. Le ministre délégué chargé des PME, Alain Griset, a récemment évoqué d’autres mesures ou ajustements. La règle de calcul de la compensation à hauteur de 20 % du chiffre d’affaires changerait avec laprise en compte des meilleurs mois de 2019. Il serait aussi question d’avances remboursables avec un différé de paie-ment de trois ans, et un remboursement sur dix ans à un taux de 1 %.

Unanimes, les professionnels estimentqu’il faudra plus d’un an pour reconstituerleur clientèle respective. En attendant, l’organisation syndicale France Active-FNEAPL plaide pour la réouverture des salles le 4 janvier, janvier étant « une période d’activité primordiale ». Cette revendication devrait être affirmée lors d’une manifestation annoncée pour le 12 décembre à Paris. — C. P.

Les salles de sport frisent l’asphyxie

Les salles de sport ont grand besoin des mesures de soutien récemment annon-cées par le président Macron alors que leurfermeture est prolongée jusqu’au 20 jan-vier. Selon l’organisation interprofession-nelle Union Sport & Cycle, ces aides seraient insuffisantes. « Ces annonces ont eu un effet apaisant. Mais rien n’est réglé. Nous allons vers une grosse crise sociale, martèle son délégué général, Virgile Caillet. Près de 300 salles ont déposé le bilanau cours des derniers mois ». « La situation est intenable. La détresse s’ajoute à la catas-trophe économique », abonde le président de l’organisation patronale de la filière sport CoSMoS, Philippe Diallo.

70 % d’indépendantsSelon une enquête de CoSMoS, 46 % des répondants assurent avoir déjà perdu 30 % au moins de leur chiffre d’affaires annuel, 17 % d’entre eux ayant vu plus de lamoitié de leurs revenus disparaître. Pis, 41 % déclarent avoir trois mois, voire moins de trésorerie, un peu plus de 7 % dis-posant à peine de 30 jours de liquidités. Deson côté, Union Sport & Cycle évalue à 1,3 milliard d’euros les pertes de chiffre d’affaires cumulées du secteur, sur un totalde 3,2 milliards l’an dernier. La moitié des exploitants envisageaient en novembre de

SPORT

Page 18: Les Echos - 03 12 2020

Avec le second confinement, les stocks de jouets se sont accumulés dans toute la distribution et les fabricants français redoutent de garder leurs colis sur les bras.

réassort à la vitesse de l’éclair en 24 à48 heures. C’est une force du made inFrance ». Pour ses petits clients indépendants, Bioviva se dit prêt à accorder des délais de paiement. « La filière doit se serrer les coudes, sicela permet de sauver la saison », estime son patron.

De son côté , S entosphère(10 millions de chiffre d’affaires), connu pour ses kits d’expérimenta-tions scientifiques, a vu ses com-mandes plonger de 50 % en novem-bre par rapport à l’an dernier, aprèsun fort redémarrage en septembre. « En général, les enseignes font des prévisions sur Noël, au vu des ventes de la première semaine de novembre.Nous pouvons alors refabriquer jus-qu’au 24 décembre. Là, nous n’avonspas de visibilité », se désole Véroni-que Debroise, sa fondatrice.

sanitaire et moins de salariés, Sen-tosphère a vu sa capacité de pro-duction chuter de 40 % selon les produits.

« Notre espoir, c’est que les grandesmarques internationales aient livré d’autres pays, avec les stocks de l’Hexagone, relève Alain Ingberg. Cequi faciliterait un réapprovisionne-ment auprès de nos fabricants fran-çais. » Selon les professionnels, la grande distribution risque de ne pas refaire de commandes. Alors que Système U, Leclerc ou Auchan ont tous mis en avant la productiontricolore dans leurs catalogues cette année. Une opportunité pour La Grande Récré, King Jouet ou d’autres. « Si la grande distribution annule des commandes, car le jouet n’est pas son cœur de marché, les spé-cialistes et les pure players pourront

récupérer cette marchandise. Nous recevons encore des jouets entre Noëlet le jour de l’An », indique le porte-parole de JouéClub, Franck Mathais.

Chez PicWicToys, le jouet trico-lore représente déjà 12 % du chiffre d’affaires et près de 15 % de l’assorti-ment, avec près de 6.000 référencessur les 38.000 de l’enseigne. Une part relativement stable, « car il y a peu de développement d’acteurs fran-çais sur ce créneau », regrette toute-fois le patron, Romain Mulliez.

Boutique dédiéePendant cette crise, Amazon, sou-vent pointé du doigt, a donné un sérieux coup de pouce aux petites marques françaises. Le géant mon-dial leur a ouvert il y a plus d’un an une boutique dédiée, suivi par Cdis-

count. « De petites marques, avec un revenu entre 500.000 à 10 millions d’euros, ont du mal à entrer dans desmagasins, note Alain Ingberg. Cette vitrine les a sauvés pendant la pandé-mie. » Pour certaines, Amazon représente 30 % de leurs ventes.

Avec la réouverture, les enseignesattendent une forte affluence. Rien n’est encore perdu pour ce Noël pas comme les autres. La filière parie sur un rebond du marché dans la dernière ligne droite. Selon le cabi-net NPD, il avait rattrapé son retard en quelques mois après le premier confinement. « La magie de Noël va jouer. Comme les grands-parents ne pourront peut-être pas voir leurs petits enfants, ils compenseront peut-être en achetant plus de cadeaux ou plus gros », espère le porte-parole deJouéClub. n

l Les jouets fabriqués dans l’Hexagone pèsent 14 % du marché, contre 8 % il y a trois ans. l Avec le reconfinement, les stocks des distributeurs sont pleins, notamment de produits chinois livrés en septembre.l Les PME tricolores craignent de voir leurs commandes annulées, ou les besoins de réassort diminuer.

Jouets : le made in France craint de payer la facture de la crise

Dominique [email protected]

Les fabricants français de jouets redoutent de payer un lourd tribut àla crise sanitaire. Le made in France, avec Sophie la girafe, Smoby, ou Mécabois, représente 14 % du marché contre environ 8 % il y a trois ans. A fin août, selon NPD,ces marques affichaient un recul de8 %, contre –2 % pour le secteur. Une baisse liée à leur forte présencedans les magasins spécialisés.

Or, avec le second confinement,les stocks de poupées et de jeux de société se sont accumulés dans toute la distribution. Novembre et décembre représentent 50 % de ventes annuelles du secteur. Il reste donc quatre semaines pour écoulerce qui a déjà été commandé.

A ce stade, de 60 à 70 % de ce quiva remplir la hotte du père Noël a été livré. Les jouets made in China ont été réceptionnés en septembre. La cadence est différente pour ceuxfabriqués en France, dont les livrai-sons vont s’échelonner sur octobre, novembre, voire décembre. Mais les distributeurs vont devoir d’abord vider leurs réserves. « En France, ce sont les entreprises qui portent ces stocks. En général, dans les dernières semaines de décembre, la grande distribution et l’e-com-merce n’ont plus de produits et font des réassorts. Là, les colis risquent derester sur les bras de nos PME », s’inquiète le président de l’Associa-tion des créateurs-fabricants de jouets français, Alain Ingberg.

Commandes en suspensC’est le drame qu’a failli vivre Bio-viva (6 millions de chiffre d’affaires)une entreprise spécialisée dans les jeux éducatifs sur la nature. Un grand nom de la distribution a repoussé trois fois, à cause du Covid, une opération géante avec la PME, avec à la clé le risque de reprise de 1 million d’euros d’inven-dus par la société. « Par chance, grâce à la réouverture des commercessamedi, tout a été réactivé », se réjouit Jean-Thierry Winstel, son dirigeant. Et si le succès est au ren-dez-vous, « nous pouvons faire du

JEUX

« Fabriquer dans l’Hexagone, c’est un choix éthique »Propos recueillis parD. Ch.

C réé en 2014, Lunii a lancéMa Fabrique à Histoires,une conteuse audio interac-

tive qui permet d’écouter des histoi-res. Et d’en télécharger de nouvelles,proposées en cinq langues. Les enfants choisissent eux-mêmes le héros et le lieu du récit. Maëlle Chassard, cofondatrice de la start-up, explique comment elle a relocalisé sa production de Chine en France pour Noël.

Comment fait-on pour reloca-liser en France une fabrication 100 % chinoise ?Cela ne se fait pas du jour au len-demain. Nous avons lancé ce pro-jet à l’été 2018, et il a abouti enjuillet, cette année. C’est d’abordun choix éthique. Dès la créationde Lunii, en 2014, nous nousétions fait la promesse, les quatre

fondateurs, de fabriquer enFrance. A l’époque, nous avonsfrappé à la porte de bureaux d’étu-des et d’usines françaises, mais lesmontants étaient trop élevés pourde jeunes entrepreneurs sortis del’école, avec peu de moyens. Ducoup, nous avons travaillé avec unb u r e a u é t u d e s b a s é à H o n gKong et une usine familiale chi-noise. Il y a deux ans, nous noussommes dit qu’il était tempsd’impulser ce rapatriement. MaFabrique à Histoires se vendaitbien, avec une taille suffisante entermes de chiffre d’affaires et derentabilité.

Est-ce que ça a été compliqué au niveau industriel ?Avec un bureau d’études français, nous avons d’abord retravaillé le choix et le positionnement des composants sur la carte électroni-que de Ma Fabrique à Histoires. Ensuite, des sites en France, en

Europe mais aussi en Chine ont étédémarchés pour savoir lesquels étaient capables de répondre à notre cahier des charges. Car nous n’étions pas encore certains de trouver ces compétences hors d’Asie. Finalement, les étoiles se sont alignées. C’est le dossier de BMS Circuits (All Circuits), installé près de Bayonne, qui était le plus solide. Depuis juillet, la production a démarré. Notre objectif était d’être prêt pour Noël. La crise sani-taire a un peu compliqué les choses,car les frontières étaient fermées. Aujourd’hui, 80 % de la productionest faite en France. Le reste étant des composants que nous ne trou-vons ni en Europe ni en France. Nous restons en veille pour un jourarriver à 100 %.

Cette relocalisation a-t-elle pesé sur les marges de Lunii ?Pour être concurrentiel face à l’Asie, il a fallu automatiser la ligne de pro-duction chez notre partenaire indus-triel. Ce qui a nécessité 1 million d’euros d’investissement. Le gros challenge a été d’atteindre un coût defabrication qui permettait d’être éco-nomiquement viable. Nous avons dûrogner un peu sur les marges, sans toucher au prix public à 60 euros. Il est important de montrer l’exemple, de prouver qu’on peut faire du madein France sans que ce soit un luxe. Deplus, notre business model, qui, en plus du produit, repose sur la vente en ligne d’histoires à télécharger [15 % du chiffre d’affaires, NDLR], nous a aidés à trouver cet équilibre. Au total, ce retour a permis la créa-tion de seize emplois.

Est-ce que le made in France est bien perçu par vos clients ?Pour nous, ce n’est pas un argument

sociaux que certaines familles, qui hésitaient à acheter Ma Fabrique à Histoires parce qu’elle n’était pas fabriquée en France, étaient prêtes à sauter le pas. Mais c’est un petit pourcentage. Depuis le 1er octobre, tous nos produits en magasin sont made in France. Cetteannée, malgré le contexte sanitaire,nous visons entre 16 et 18 millions d’euros de chiffre d’affaires, pour 300.000 pièces produites, dont 250.0000 en France, contre 12 mil-lions d’euros de ventes en 2019.

Vous envisagez d’avoir un jour votre propre usine ?Non, ce n’est pas prévu. Notre volonté, c’est de fabriquer local. Nous avons ouvert une filiale à NewYork, il y a deux ans. Quand les ven-tes auront décollé aux Etats-Unis, nous envisageons d’ouvrir une ligne de fabrication dans l’usine de notre partenaire, All Circuits, au Mexique. n

MAËLLE CHASSARD, cofondatrice de Lunii

Aujourd’hui, 80 % de la production est faite en France. Le reste étant des composants que nous ne trouvons ni en Europe ni en France. Nous restons en veille pour un jour arriver à 100 %.

de vente. Cela correspond avant tout à nos valeurs. Avant ce rapa-triement, notre produit marchait très bien. Mais comme c’est une démarche responsable, elle est effectivement bien perçue. Nous avons observé sur les réseaux

Jeff

Pach

oud/

AFP

La société a toutefois déjà desbest-sellers, dont le Loto des Odeurs, très demandé par les ORL, durant cette pandémie, pour faire de la rééducation. « Grâce à notre flexibilité, nous allons pouvoir y

répondre, mais ce ne sera pas le cas pour toute notre offre », note la diri-geante. A la suite du premier confi-nement, avec un strict protocole

Pendant cette crise, Amazon, souvent pointé du doigt, a donné un sérieux coup de pouce aux petites marques françaises.

ENTREPRISES Jeudi 3 décembre 2020 Les Echos

Page 19: Les Echos - 03 12 2020

La consommation de produits hexagonaux dopée par la pandémie

Clotilde Briard @ClotildeBriard

Le made in France continue à gagner du terrain dans l’esprit des Français. 64 % d’entre eux estimentainsi avoir augmenté leur consom-mation de produits hexagonaux depuis le début de l’épidémie de Covid, selon la nouvelle étude d’Opi-nionWay pour l’agence Insign, con-firmant la tendance d’une premièreétude menée sur le thème après le premier déconfinement.

L’attrait du fabriqué en Francen’est pas le même selon les profils. Chez les cadres et professions intel-lectuelles, la part monte à 70 % quand les personnes ayant des reve-nus faibles ne sont que 50 % à le faire. Un effet crise avec la crainte dedébourser plus en période difficile. Parmi les marques représentatives du made in France citées en premierpar les consommateurs, on trouve Le Slip Français, Saint James, Armor Lux, Petit Bateau, Chanel mais aussi Renault et Michelin.

3 euros de plus pour un burgerCe sont d’abord les aliments et bois-sons qui sont privilégiés, devant les produits d’hygiène et de beauté. Mais les vêtements et chaussures commencent à rattraper leur retard. « Le patriotisme économiquemonte en puissance. Est-ce parce queles Français sentent que le chômage va davantage montrer son nez en 2021-2022 ? » s’interroge le direc-teur associé d’Insign, Eric Bonnet.

Les sommes que les consomma-teurs acceptent de débourser pour favoriser le made in France sont aussi significatives. Après avoir prisau printemps un tee-shirt comme

Deux consommateurs sur trois estiment avoir augmenté leurs emplettes made in France depuis le début de l’épidémie, selon une étude d’OpinionWay pour l’agence Insign. Et autant jugent important de privilégier, en ligne,les sites hexagonaux.

BLACK FRIDAY = vendredi fouClick & Collect = cliqué-retiré**What else = Quoi d’autre ?

**

NESPRESSO

FranceSASSIREN

382597821RCSPARIS27rueduColonelPierreAvia,75015Paris*offrevalableenFrancemétropolitainedu2au5décembre2020inclus,voirmodalitéscomplètessurwwwnespressocom

Du 2 au 5 décembre 2020 inclusPour contribuer au respect des règles sanitaires en vigueur,

commandez sur Nespresso.com ou au 0 800 55 52 53et privilégiez une livraison à votre domicile ou le Click & Collect

SURTOUSNOSCAFÉS*

BLACK FRIDAY

JUSQU’À -20%

avec tout d’abord l’élargissement des horaires d’ouverture (8 h 30 - 20 h 30 contre 9 heures - 19 h 30 habituellement). Mais il table aussi sur la fidélité de ses clients. « Selon les enquêtes, 67 % des consomma-teurs voulaient attendre la réouver-ture des magasins pour faire leurs achats de jouets pour Noël », souli-gne le dirigeant.

Période crucialeSamedi dernier, jour de grande réouverture des commerces « non essentiels », l’affluence s’est bien répartie sur la journée et des clientsavaient même pris rendez-vous, une solution parmi d’autres trouvéepar l’enseigne pour les faire revenir en toute sécurité. Noël est crucial pour l’enseigne, qui réalise 50 % de son chiffre d’affaires annuel sur les deux derniers mois de l’année – mais surtout 100 % de son résultat.

Sans ce reconfinement denovembre, la société tablait, dans ses prévisions de rentrée, sur un chiffre d’affaires de 264 millions d’euros en 2020. Un léger retrait parrapport à 2019 (276 millions) à cause de la fermeture de son maga-sin de la Défense, pour des travaux qui ont pris du retard en raison de lacrise sanitaire.

L’enseigne estime avoir réussi safusion avec les 43 ex- Toys ’R’ Us repris en juin 2019 par sa maison mère Luderix. Celle-ci est détenue à

Malgré le Covid, PicWicToys fermera moins de magasins que prévu

Nicole Buyse—Correspondante à Lille

Autant voir le verre du bon côté – celui qui est à moitié plein. Le confi-nement a fait de PicWicToys une enseigne totalement « multica-nale ». La chaîne nordiste de maga-sins de jouets, puériculture et loisirscréatifs a mis à profit la fermeture au printemps de ses 63 magasins pour accélérer sa digitalisation. « Nous avons fait en trois mois les développements informatiques que nous aurions faits en trois ans », sou-ligne Romain Mulliez, président et DG de PicWicToys.

Ce qui a permis à ses 63 magasinsde se muer en véritables entrepôts de click and collect» et de drive en temps de confinement. L’enseigne asauvé 50 % du chiffre d’affaires de novembre, contre 25 % seulement lors du premier confinement. Une progression vertigineuse quand la part du Web dans le chiffre d’affai-res ne représentait que 7 % en 2019.

PicWicToys espère arriver àcompenser le manque à gagner de novembre d’ici à la fin de l’année,

Le confinement de novem-bre menace le résultat annuel de l’enseigne de jouets et puériculture. Elle avait pourtant commercia-lement réussi sa fusion avec les ex-Toys ’R’ Us.

La chaîne nordiste de magasins de jouets, puériculture et loisirs créatifs a mis à profit la fermeture au printemps de ses 63 magasins pour accélérer sa digitalisation. Photo Romuald Meigneux/Sipa

unité de mesure pour lequel une somme moyenne de 7,60 euros est perçue comme acceptable – un montant confirmé cette fois-ci –, l’étude a ajouté une nouvelle unité de mesure : le burger.

Pour n’avoir que des ingrédientshexagonaux, deux personnes sur trois accepteraient de mettre davantage la main au porte-mon-naie, avec, en moyenne, 3,10 euros payés en plus par rapport aux 5 euros d’un burger dont l’origine dela composition serait inconnue. « Cette capacité à accepter un prix nettement plus élevé montre que l’onn’est pas dans l’effet de mode », estime le directeur associé.

Appellations flouesCôté enseignes, les personnes inter-rogées sont aussi deux sur trois à accorder de l’importance au fait de réaliser leurs emplettes sur des sitesfrançais comme Cdiscount, FNAC ou Rue du Commerce. Parmi les arguments avancés figure la possi-bilité d’avoir accès à un service après-vente localisé chez nous et, dans une moindre mesure, il s’agit de s’assurer que leurs données informatiques ne sont hébergées que sur le territoire. « C’est égale-ment le moyen dans l’esprit du publicde ne pas opposer le petit commerce et les “marketplaces” », complète Eric Bonnet. Cdiscount, qui se défi-nit d’ailleurs comme l’« e-com-merce made in France », consacre en outre un onglet de recherche auxproduits hexagonaux.

Il existe cependant des freins àune consommation plus locale : la dénomination. Les gens ont une idée assez floue des mentions comme Origine France Garantie oumade in France. Insign a testé l’appellation produit 100 % français.Pour une personne sur deux, elle désigne bien à la fois la conception et la fabrication dans l’Hexagone, avec des matières premières uni-quement bleu, blanc, rouge. Pour donner le poids de ce qui vient réel-lement de chez nous, Insign ima-gine même un système coloriel à apposer sur les produits, à l’image du Nutri-Score, en alimentaire. n

51 % par Romain Mulliez et sa famille et à 49 % par le fonds améri-cain Cyrus Capital Partners. L’intro-duction du rayon puériculture dansles ex-Picwic et du rayon loisirs créatifs chez les ex-Toys, ainsi que ledéploiement global du nouveau concept, a été profitable. « En octo-bre, tous nos magasins ont été en pro-gression », souligne Romain Mulliez.Du coup, l’enseigne a pris la décisionde ne fermer que 18 magasins au lieudes 23 annoncés dans le PSE décidé en juin dernier. Des fermetures pro-grammées en janvier prochain après la période des fêtes. n

67 %DES CONSOMMATEURSvoulaient attendre la réouverture des magasins pour faire leurs achats de jouets pour Noël.

Les Echos Jeudi 3 décembre 2020 ENTREPRISES // 19

Page 20: Les Echos - 03 12 2020

20 // ENTREPRISES Jeudi 3 décembre 2020 Les Echos

La nouvelle aide passera par uneaugmentation de capital de quel-que 500 millions d’euros qui devra être confirmée lors de l’assemblée des actionnaires en janvier. L’Etat met sur la table une participation convertible de 420 millions d’euros via son Fonds de stabilisation éco-nomique (FSE). La KfW, accorde une ligne de crédit supplémentaire de 200 millions d’euros. Cette fois surtout, l’actionnaire d’un quart du groupe, le milliardaire russe Alexeï Mordashov, met la main à la poche

Un pont d’ici à l’été 2021Cette enveloppe permettra à « l’entreprise de combler le fossé si la pandémie persiste en 2021 », com-mente TUI dans un communiqué. Le roi allemand des voyages à forfaitétait déjà sous l’eau lors des premiè-res restrictions du printemps. Les fêtes de Noël en comité restreint exi-gées par les autorités allemandes l’ont enfoncé. Devant les incertitu-des actuelles, les clients suspendent

maintenant leurs réservations pour Pâques. « TUI était une entreprise trèssaine avant la pandémie, assure le patron du groupe, Fritz Joussen. Le marché est intact, la demande est là. Mais nous n’avons pas été en mesure de générer un chiffre d’affaires signifi-catif depuis le mois de mars. »

Le dirigeant espère maintenantque la nouvelle enveloppe sera suf-fisante pour « préparer le groupe surle plan stratégique et structurel pour la période suivant la pandémie ». Une espérance qui n’est pas arrivée jusqu’aux marchés boursiers, où l’action du groupe tombait de 9,70 % en fin de journée.

Plus de voyages individuelsLa crise « va entraîner un change-ment de paradigme » dans le secteur,avait prévenu Friedrich Joussen, le directeur général du groupe, devantl’association de la presse étrangère en juin dernier. Il y aura moins d’exclusivités, des prix plus bas maisaussi des « voyages plus individuali-

sés » pour répondre aux nouvelles formes de demande, avait-il expli-qué. TUI doit globalement virer de bord, en réduisant son offre de croi-sière et de vols, déjà excédentaire faute de demande, et investir massivement dans ses plateformes numériques pour répondre à la concurrence des voyagistes en ligne,avait expliqué Friedrich Joussen.

En Allemagne, les critiques pleu-vent contre le sauvetage d’une entreprise dont le modèle est remisen question par les nouvelles for-mes d’organisation du tourisme. TUI ne relève pas d’une nécessité stratégique pour l’Allemagne, contrairement à Lufthansa, font valoir les économistes allemands. « L’Etat n’est pas omnipotent », tran-che notamment Michael Hütjer, directeur de l’institut d’économie de Cologne, dans le « Manager Magazin ». « Après la crise, nous devons abandonner l’idée qu’il puissecouvrir les risques pour tous les acteurs économiques », juge-t-il. n

nombre d’apparitions dans des matches internationaux en tantque jeune et comme profes-sionnel, la longueur de leurs apparitions en club (dans leur championnat national et dans les compétitions européennes), et le pedigree du club vendeur (le championnat dans lequel il évolue et son classement, mais aussi sa progression dans les compétitions européennes). Les joueurs qui atteindront le bon de nombre de points serontd’emblée autorisés à franchir laManche et ceux qui sont juste en dessous pourront être repê-chés par un comité. Autant de dispositions qui seront réexa-minées avant la fenêtre de transferts de l’été prochain.

La Fédération voulaitun régime plus strictL’objectif du foot anglais était à la fois de préserver, malgré le Brexit, la qualité des clubs de l’élite anglaise, comme le vou-lait la Premier League, mais aussi de faire plus de place, grâce au Brexit, aux joueurs et en particulier aux jeunes espoirs anglais, comme le sou-haitait la Fédération.

Le futur système est le résul-tat d’un compromis : alors que le seuil à atteindre pour les joueurs européens désirant rejoindre l’Angleterre semble avoir été fixé à 15 points, la Pre-mier League poussait, selon la BBC, en faveur d’un dispositif plus ouvert, avec un seuil de seulement 9 points, et la Fédé-ration pour un système plus f e r m é , f i x a n t l a b a r r e à 18 points. La Premier League a donc, sur ce front, lâché plus delest. Mais elle estime s’être rattrapée en assouplissant les critères en vertu desquels les points seront attribués.

Le nouveau régime renchéri-ra-t-il au passage le prix des joueurs anglais ? Aux yeux de laPremier League, l’essentiel est sauf : tous ses clubs pourront peu ou prou recruter les talentsqu’ils convoitent dans l’UE. Pour les clubs français, en revanche, il pourrait être difficile de vendre à l’avenir cer-tains joueurs. Il est ainsi proba-b l e q u’u n N ’G o l o K a n t é , aujourd’hui milieu de terrain de Chelsea, n’aurait jamais pu franchir la Manche pour rejoin-dre le club anglais de Leicester en venant de Caen s’il avait dû, en 2015, se soumettre à un tel mécanisme.

4À NOTERLes stades anglais ont rouvert leurs portes au public mercredi, sauf dans les zones d’Angleterre à risque très élevé où ils restent fermés. Ils peuvent accueillir jusqu’à 50 % de leur capacité, dans la limite de 4.000 spectateurs dans les zones à risque modéré, et de 2.000 dans les zones à risque élevé.

Alexandre Counis @alexandrecounis

— Correspondant à Londres

C’est peut-être la fin d’une véri-table manne pour le football français. A cause du Brexit, les clubs européens et notamment ceux de Ligue 1 auront désor-mais plus de contraintes à respecter pour céder leurs joueurs aux riches équipes anglaises de Premier League à compter du 1er janvier.

Après des mois de discus-sions et de tensions, la Premier League, l’English Football Lea-gue, qui représente les clubs de deuxième division, et la Foot-ball Association, autrement dit la Fédération, ont trouvé un ter-rain d’entente mardi sur le régime qui s’appliquera aux transferts de joueurs euro-péens vers l’Angleterre une fois le Brexit entré en vigueur. Et le moins que l’on puisse dire est que la porte qui leur était jus-que-là grande ouverte a été en partie fermée.

Limites d’âge et système de pointsSelon les nouvelles règles approuvées par le Home Office au niveau gouvernemental, les clubs de Premier League ou d’EFL ne pourront plus acheterde joueurs étrangers de moins de 18 ans. Ceux de Premier Lea-gue seront aussi limités sur les achats de joueurs de moins de 21 ans : ils ne pourront plus en recruter que trois par fenêtre detransferts à compter de celle de janvier, et jamais plus de six parsaison.

Au-delà des seules limitesd’âges, les clubs anglais ne seront plus totalement libres d’embaucher qui bon leur sem-ble. Pour bénéficier d’un per-mis de travail, les joueurs euro-péens qu’ils convoitent devront également atteindre un certain nombre de points dans le cadredu nouveau régime d’immigra-tion que Londres veut instaurerau 1er janvier, et qui s’applique déjà aux joueurs non euro-péens n’ayant pas le droit de tra-vailler au Royaume-Uni. Ces points seront attribués aux joueurs en fonction de plu-sieurs critères, comme leur

SPORT

Les clubs européens et notamment français pourraient avoir du malà vendre certainsde leurs joueursà la Premier League, l’élite du foot anglais.

Plus question de vendre des joueurs de moins de 18 ans, et le nombrede ceux de moinsde 21 ans sera plafonné.

Le Brexit limitera le mercato des riches clubs anglais de football

Découvrez notre marketplaceBtoB, Les Echos Solutions

annonces.lesechosleparisien.fr01 87 39 70 08

ple au Stade de France), cette approche résulte aussi de deux autres éléments clés, souligne Etienne Thobois : « La volonté des fédérations d’être plus engagées dans l’organisation des Jeux » ; et l’exis-tence d’« un écosystème fort en France ». « Nous avons une industrie plutôt mature avec de grands événe-ments comme Roland-Garros, le Tourde France, le marathon de Paris, et de grands organisateurs comme ASO, Lagardère, GL Events. Nous avons aussi des équipementiers champions à l’international, par exemple Doublet », rappelle Etienne Thobois.

Opportunité crucialeEn conséquence, les Jeux de 2024 sont une opportunité pour « mettre en valeur l’industrie française », d’autant que, constate le directeur général, « l’appétence autour des Jeux est là ». En filigrane se joue déjàle fameux « héritage des Jeux » dansla mesure où Paris 2024 seraient untremplin pour aller conquérir

d’autres marchés, comme l’ont fait les Anglais après les Jeux de Lon-dres de 2012. Dans l’immédiat, les entreprises françaises sont invitées à se positionner dans le cadre des appels du Cojo qui seront lancés en trois vagues : mars 2021 au momentdes JO de Tokyo, fin 2021 et enfin en2022 pour les stades de football. Parla suite, la mise en œuvre des diversaccords doit être finalisée, Paris 2024 gardant la main sur l’ensem-ble du dispositif avant, pendant et après les Jeux, en tant que supervi-seur coordinateur. Le Cojo doit aussi assurer en direct certains aspects des JO : protocole, présenta-tion des athlètes…

Paris 2024, qui vient de revisi-ter sa carte des sites pour optimi-ser ses dépenses, affine déjà saméthode avec le récent lance-ment de deux « pilotes » : le Golfnational de la Fédération fran-çaise de golf, implanté à Saint-Quentin-en-Yvelines, et le stadeolympique Yves-du-Manoir de

Colombes, qui appartient audépartement des Hauts-de-Seineet où se dérouleront les compéti-tions de hockey sur gazon. Untroisième pilote doit être lancé,sous peu, avec l’aréna de Paris LaDéfense de Nanterre, exploité parle groupe de l’homme d’affairesJacky Lorenzetti, par ailleurspropriétaire du club de rugbyRacing 92.

Processus ouvertParis 2024 promet enfin un proces-sus ouvert même si les éventuels candidats jouant à domicile, la Fédération française de tennis avec Roland-Garros ou encore Consor-tium Stade de France peuvent faire figure de favoris. « Certains ont un avantage, mais il faut quand même jouer le jeu », assure Etienne Tho-bois. « Le sujet, c’est comment réin-venter les jeux avec la maîtrise des coûts. Si externaliser coûte deux fois plus cher, cela ne sert à rien. Mais nous croyons en notre modèle». n

Christophe Palierse @cpalierse

Annoncés comme l’occasion de construire un « nouveau modèle » de JO, plus raisonnables en matière d’investissements et d’empreinte environnementale, plus efficients aussi, les Jeux Olympiques de 2024 devraient déjà faire date dans la ges-tion de la trentaine de sports qui y seront pratiqués.

Après une étude minutieuse, lecomité d’organisation (Cojo) Paris 2024 s’engage dans la mise en œuvre d’un modèle de Jeux exter-nalisés. Ou, pour reprendre la for-mule de son directeur général, Etienne Thobois, en « coconstruc-tion » avec des prestataires experts, l’objectif étant d’« optimiser » l’orga-nisation. L’enjeu est de taille dans lamesure où le montant global des marchés que doit passer Paris 2024s’élève à 2,5 milliards d’euros.

Consultations tous azimutsDans cette optique, Paris 2024 pré-sente jeudi sa démarche auprès de quelque 300 entreprises de la filière sport française. La réunion – en visioconférence – vise à susciter des manifestations d’intérêt. Le comité d’organisation doit y détailler sa méthode et son calendrier, son pro-cessus de consultations tous azi-muts arrivant à son terme en 2022.

« Par définition, un comité d’orga-nisation est un grand ensemblier, et il ya toujours eu de l’externalisation. Mais la grande différence avec Paris 2024, c’est le grand nombre de sites existants, 70 % des sites des compéti-tions, d’où l’idée d’avoir un modèle global », explique Etienne Thobois. « Il ne s’agit pas de faire des économiespour faire des bénéfices, ce n’est pas le but du Cojo. S’il y a économies à tel endroit, dans tel domaine, c’est pour mieux investir ailleurs », affirme le directeur général de Paris 2024.

Outre l’utilisation de sites exis-tants avec, le cas échéant, des tra-vaux de modernisation (par exem-

SPORT

Le comité d’organisa-tion veut faire un appel généraliséà des partenaires.

Paris 2024 présente jeudi sa démarche et son calendrier auprèsdes entreprises de la filière sport française.

Paris 2024 : vers des Jeux Olympiques externalisés

Troisième sauvetage pour TUI, le géant allemand du tourisme

Nathalie Steiwer— Correspondante à Berlin

L’Allemagne continue de porter à bout de bras ses champions natio-naux minés par la crise sanitaire. Après Lufthansa, Berlin s’est pen-ché sur TUI. Le géant du tourisme aannoncé mercredi un accord entre l’Etat, les banques et les investis-seurs sur un nouveau plan d’aide de1,8 milliard. Il s’ajoute aux 3 mil-liards déjà injectés au printemps et en septembre pour sauver le groupe aux 70.000 employés.

TOURISME

L’Etat, les banques et les investisseurs se sont entendus sur un nouveau paquet de 1,8 milliard d’euros pour sauver le géant allemand du tourisme.

Page 21: Les Echos - 03 12 2020

Nous lançons la 5G, forts de la qualité de notre 4G.Reconnu réseau mobile N°1 en zones rurales en 2018 et 2019 toutes technologiesconfondues, nous sommes aujourd’hui fiers de lancer notre 5G!Nos 2000 experts réseau travaillent au déploiement (1) de la 5G Bouygues Telecomet à la densification de notre réseau 4G pour couvrir en très haut débit mobilel’ensemble du territoire, tout en préparant solidement l’avenir.

(1) Ouverture du réseau 5G prévue courant décembre 2020. Déploiement progressif en zones urbaines. Téléphones compatibles 5G et cartesde couverture sur bouyguestelecom.fr

(2) Enquêtes ARCEP sur la Qualité des Réseauxmobiles en 2018 et 2019 – N° 1 dans les communes demoins de 10 000 habitants.

99%

N°1 en zones rurales2018-2019en 2G, 3G et 4G(2)

de la populationcouverte en

bouyguestelecom.fr

Page 22: Les Echos - 03 12 2020

22 // ENTREPRISES Jeudi 3 décembre 2020 Les Echos

uns après les autres : Rétromobile etWine Paris reculés à juin, le Salon de l’agriculture à mai et, dans une « version colloque » édulcorée, le Sima (machinisme agricole) à… 2022. Le chiffre d’affaires du géant mondial des Salons va passer de 440 millions d’euros l’an dernier à 85 millions cette année. Placé sous la protection du tribunal de com-merce, Comexposium a supprimé 135 postes sur 400 en France et solli-cité ses actionnaires (chambre de commerce de Paris - Ile-de-France et Crédit Agricole Assurances), qui ont remis au pot 75 millions.

Privés de Salons et de congrès, lesparcs des expositions sont, par effetdomino, à l’arrêt. « Nous avons perdu au 30 septembre 90 % de notrechiffre d’affaires 2020 et nous n’aurons pas de premier trimestre 2021. Des savoir-faire exceptionnels français risquent de disparaître. Dans un premier temps, les grands

gouvernement. Selon le président de l’Unimev et vice-président de GLevents, Olivier Roux, « la fermeture brutale imposée a conduit à une perte d’activité de plus de 80 %, et 55 % des dirigeants du secteur inter-rogés déclarent que le pronostic vital de leur entreprise est engagé à moins de six mois ».

Si l’Unimev salue le plan d’aidescomplémentaires annoncé, notam-ment l’octroi de 20 % du montant duchiffres d’affaires 2019, il réclame que ce dispositif soit élargi aux pres-tataires de l’événementiel, ces TPE-PME sans lesquelles rien ne serait possible.

70 % d’événements B to BAu-delà des aides, « il faut un calen-drier, sous peine de sacrifier le deuxième trimestre 2021. Nous con-tribuons à maintenir ou créer 40.000emplois sur les 455.000 ETP [équiva-lent temps plein, NDLR] événemen-tiels et touristiques, générons 40 mil-l i a rd s d ’ e u ro s d e re t o m b é e s économiques pour les territoires. Et 70 % de nos événements sont B to B, donc soutiennent beaucoup d’autres secteurs », rappelle Olivier Roux. « Les Salons sont souvent le premier maillon vers l’export pour les PME »,rappelle Renaud Hamaide.

L’Unimev prévient : « Notre filièreest une partie de l’âme de notre pays, un acteur majeur de l’animation de la vie locale et du rayonnement de la France. Pourtant de nombreuses sociétés événementielles ne seront plus présentes dans quelques semai-nes s i r ien n ’est fa i t de toute urgence. » n

me-Uni, pays le plus endeuillé d’Europe. Le feu vert britanni-que intervient après « des mois d’essais cliniques rigoureux et d’une analyse approfondie des données par des experts MHRA qui ont conclu que le vaccin répondait à ses normes strictes desécurité, de qualité et d’effica-cité », a indiqué un porte-parole du ministère de la Santé britan-nique. La directrice de l’agence, June Raine, a a jouté lorsd’une conférence de presse qu’« aucun aspect » n’avait été négligé.

Premières vaccinations fin décembre en FranceL’agence évalue également le vaccin développé par l’univer-sité d’Oxford et AstraZeneca (auxquels le gouvernement bri-tannique a commandé 100 mil-lions de doses), mais ce dernier doit encore lever les doutes qui entourent les résultats très pro-metteurs de son essai de phase III. Les résultats des essais cliniques à grande échelle du vaccin de Pfizer et BioNTech montrent, eux, une efficacité à 95 %. Le laboratoire et la biotech ont développé un vaccin à ARN messager, une technologie qui n’a encore jamais été commercialisée pour un usage sur les humains mais qui présente, sur le papier,p l u s i e u r s av a n t a g e s : l a réponse immunitaire déclen-chée est plus forte, et les effets secondaires moindres.

En France, où le façonnier demédicaments Delpharm va conditionner le vaccin sur son site de Saint-Rémy-sur-Avre, enEure-et-Loir, une première vague de vaccination est prévuepour environ 1,5 million de per-sonnes les plus sensibles « vrai-semblablement entre fin décem-bre et début janvier », a indiqué mardi Emmanuel Macron. Uneseconde vague devrait suivre, « quelque part entre avril et juin ». n

Basile Dekonink @Bdekonink

L’annonce était attendue depuis des mois. Près d’un an après l’apparition des premiers cas de Covid-19, le Royaume-Uni est devenu mercredi le toutpremier pays occidental à auto-riser un vaccin contre la mala-die, marquant une avancée majeure dans la lutte contre la pandémie. L’Agence britanni-que de réglementation des médicaments et des produits desanté (MHRA) a validé le dispo-sitif développé par Pfizer, en coopération avec la biotech allemande BioNTech.

Le patron du laboratoireaméricain, Albert Bourla, a salué un « moment historique » quand celui de BioNTech, Ugur Sahin, s’attend à ce que le déploiement du vaccin « réduisele nombre d’hospitalisations à haut risque ». Le gouvernement britannique, qui a commandé un total de 40 millions de doses pour 2020 et 2021, ne va pas per-dre une seconde : le vaccin sera disponible « dans tout le pays à partir de la semaine prochaine »,a-t-il déclaré.

Comme en France, la campa-gne de vaccination va d’abord cibler des publics prioritaires. Parmi eux figurent les résidentsdes maisons de retraite, le per-sonnel soignant, les personnes âgées et les personnes les plus vulnérables, a détaillé le minis-tre britannique de la Santé Matt Hancock. L’épidémie a tué près de 58.500 personnes au Royau-

CORONAVIRUS

Les premières doses seront disponibles « dans tout le pays à partir de la semaine prochaine », a indiqué le gouverne-ment britannique.

Première autorisation pour le vaccin de Pfizer et BioNTech au Royaume-Uni

Les pavillons de Paris Expo Porte de Versailles, à Paris. La capitale dispose de la plus grosse offrede parcs des expositions d’Europe. Photo Stéphane de Sakutin/AFP

à suivre

Martine Robert @martiRD

Foires, congrès, Salons… une filière d’excellence française avec des fleu-rons reconnus mondialement : Viparis en matière de parcs des expositions, Comexposium et GL events dans l’événementiel… Paris, capitale mondiale des congrès en 2 0 1 9 , ave c 2 3 7 é vé n e m e n t s accueillis, dispose aussi de la plus grosse offre de parcs des expositionsd’Europe. Pourtant, ce leadership pourrait être perdu si l’activité repart plus tardivement dans l’Hexagone qu’ailleurs. Ce jeudi, l’Unimev, qui fédère la profession, a larme le gouvernement en publiant une tribune dans la presse.

« Avec cette crise, les événementsvont plutôt se “continentaliser” que s’internationaliser. Alors si nous sommes les derniers à redémarrer enEurope, on se fera damer le pion par Francfort, Milan, Madrid ou Lon-dres. Si on pèche par excès de précau-tion, si on a le moindre retard à l’allu-mage en matière de relance ou d’accès au territoire, on perdra les Salons », met en garde le président d e C o m e x p o s i u m , R e n a u d Hamaide.

Or, pour l’instant, aucune activitéà l’horizon et aucune visibilité quant à la reprise. Comme il existe une inertie de trois mois au mini-mum pour organiser un Salon, l’organisateur reporte les siens les

ÉVÉNEMENTIEL

Sans calendrierde reprise, avec un premier trimestre 2021 déjà gâché, le secteur interpellele gouvernementdans une tribuneà paraître ce jeudi.

C’est une filièred’excellence française qui pourrait tomber de son piédestal.

Salons et congrès : Paris craint pour son leadership

Vers un retour du public dans les stades en décembreSPORT Le Premier ministre, Jean Castex, a indiqué mercredi surRMC/BFMTV que les spectateurs ne seraient pas de retour dansles stades « avant le 15 décembre », alors que le sport profession-nel se dispute à huis clos depuis près de deux mois et qu’Emma-nuel Macron avait évoqué janvier. La ministre des Sports,Roxana Maracineanu, avait récemment estimé « envisageable »cette date du 15 décembre, une demande des clubs qu’elle a « por-tée » auprès du Premier ministre.

Des fourgonnettes électriques PSA avant la fin 2021AUTOMOBILE Peugeot, Citroën et Opel proposeront avant la fin2021 l’ensemble de leurs fourgonnettes en version électrique, aannoncé mercredi PSA. Le groupe, qui trouvera sur sa routeRenault, s’est donné pour objectif de proposer une gamme totale-ment électrifiée en 2025. Les versions électriques seront assem-blées dans l’usine de Vigo (Espagne) et les moteurs et réducteursproduits à Trémery (Moselle) et Valenciennes (Nord).

DÉCOUVREZ TOUS LES DEALSEN EXCLUSIVTÉPRIVATE EQUITY

M&A LBO

boutique.capitalfinance.eu/decouverteAbonnez-vous à un tarif exceptionnel !

exposants internationaux vont se recentrer sur un seul événement dans le pays leur donnant le meilleuraccès au marché visé. Il y a un vrai ris-que de redistribution géographique àl’échelle européenne », s’inquiète aussi Pablo Nakhlé Cerruti, direc-teur général de Viparis (Paris Expo Porte de Versailles, Paris Nord Ville-pinte, Palais des Congrès de Paris…).

Lui a essayé de tailler dans lescoûts des divers contrats de sécu-rité, de sûreté, de propreté de l’entreprise. Mais le statut d’établis-sement recevant du public de ses sites impose des dépenses incom-pressibles, qui représentent 40 % des frais de maintenance des parcs,même désertés, sans parler des loyers. La filière s’estime « la grandeoubliée des négociations sur les aideset le déconfinement progressif ». Pre-mier à fermer le 5 mars, le secteur sera le dernier à rouvrir, rappelle l’Unimev dans sa tribune, et la pers-pective du 20 janvier reste haute-ment hypothétique, « conditionnée à des curseurs sanitaires et hospita-liers ainsi qu’à des normes instables et peu adaptées aux contraintes d’organisation des événements ». Ainsi la profession, habituée à gérerles flux, en est à son quatrième réfé-rentiel sanitaire négocié avec le

Premier à fermerle 5 mars, le secteur sera le dernierà rouvrir.

Page 23: Les Echos - 03 12 2020

Les Echos Jeudi 3 décembre 2020 ENTREPRISES // 23

investir dès l ’an prochain un volume d’investissements proche de celui fixé avant la crise (soit 2,8 à 2,9 milliards). Par ailleurs, 1,5 mil-liard d’euros de la recapitalisation serviront à tenir plusieurs engage-ments sur l’infrastructure (fin du glyphosate sur le ballast, consolida-tion des ponts enjambant les voies),et 14 petites lignes de TER ne serontpas transférées aux régions, mais

sanctuarisées chez SNCF Réseau, moyennant un chèque de 250 mil-lions de l’Etat.

En interne, le groupe a égalementlancé un plan d’économies de 1,8 milliard, en décalant par exem-ple des investissements dans cer-tains chantiers ferroviaires ou dans les systèmes d’information. Mais, face aux besoins financiers urgents,pendant « toute l’année 2020, nous

sommes allés sur les marchés finan-ciers lever de l’argent, a expliqué Jean-Pierre Farandou aux séna-t e u r s . Po u r re m b o u rs e r n o s emprunts, pour payer les salaires, pour payer nos fournisseurs… On voit la dette de la SNCF s’envoler ». Crise ou pas crise, l’entreprise doit refinancer sa dette de façon annuelle, en raison de rembourse-ment d’échéances, mais la crise a

bis, l’impact de la crise sanitaire était déjà évalué en interne à 5 mil-liards sur le chiffre d’affaires de l’entreprise et 4 milliards sur sa marge opérationnelle. Avec l’assou-plissement, à partir du 15 décem-bre, de l’interdiction de voyager entre régions, il restera donc à l’entreprise une petite fenêtre de deux semaines afin de redresser la courbe.

Recapitalisation de l’EtatLe plus préoccupant est que les 4,7 milliards attribués à l’entrepriseferroviaire par le gouvernement dans le cadre du plan de relance, qui s’ajoutent aux 25 milliards d’euros de reprise de dette en jan-vier dernier, semblent déjà très insuffisants pour redresser le tir. Lapremière enveloppe, qui n’a pas encore été consommée et le sera sur plusieurs années – inférieure à ce que Berlin a alloué à la DeutscheBahn –, porte sur 4,1 milliards d’augmentation de capital pour la maison mère. Plus 650 millions de crédits budgétaires pour des affec-tations précises en faveur du fret ferroviaire, des petites lignes régio-nales et de la relance des trains de nuit, selon une source interne.

La majeure partie de ce ballond’oxygène n’ira pas à l’exploitation des trains proprement dite, mais aux investissements dans la moder-nisation du réseau ferré. Notam-ment pour compenser 1,5 milliard d’euros de dividendes internes que les activités TGV ou fret sont dans l’incapacité de verser cette année à SNCF Réseau. Par ce truchement budgétaire, cette entité pourra

Denis [email protected]

Plus les semaines passent, et plus les conséquences de la crise sani-taire pèsent sur les comptes de la SNCF. L’entreprise publique pour-rait perdre près de 5 milliards d’euros cette année, a estimé son PDG Jean-Pierre Farandou. « Nous allons finir l’année en perte impor-tante », a-t-il indiqué mercredi devant la Commission de l’aména-gement du territoire du Sénat. « Je rappelle qu’au premier semestre […] nous étions en résultat net à – 2,5 milliards d’euros [précisément – 2,39 milliards, NDLR]. On ne sera pas loin de faire x 2 », a ajouté le patron de l’entreprise public. En clair, une perte proche de 5 mil-liards d’euros.

« Je n’aurais pas dit ça avant leconfinement numéro 2 », a précisé ledirigeant qui, encouragé par un redressement du trafic loisirs en juillet-août, espérait « un second semestre moins mauvais » que le premier. Néanmoins, à la fin de sep-tembre, donc avant le confinement

TRANSPORT

Malgré le plande relance qui luia attribué 4,7 milliards d’euros pour le moyen terme, l’entreprise publique voit ses pertes d’exploitation grimper de façon préoccupante.

Les pertes de la SNCF pourraient s’élever à 5 milliards d’euros cette année

Jean-Pierre Farandou, PDG de la SNCF. La très grande partie de la recapitalisation accordéepar l’Etat servira à tenir plusieurs engagements sur l’infrastructure. Photo Jean-François Monier/AFP

Dominique [email protected]

Sephora poursuit son expansion aux Etats-Unis. L’enseigne de parfu-merie du groupe LVMH (proprié-taire des « Echos ») vient de signer « un partenariat stratégique de long terme », avec le grand distributeur américain Kohl’s pour l’ouverture de boutiques dans ses magasins « life style ».

Les 200 premiers emplace-ments, baptisés « Sephora at Kohl’s », vont ouvrir à l’automne 2021, et 850 sont prévus pour 2023. Cette entente remplace un précé-dent accord, signé il y a une dizaine d’années avec les grands magasins J.C. Penney, qui arrivait à son terme.

Il concerne non seulement leréseau de points de vente mais aussile site d’e-commerce de l’enseigne, et proposera en matière de beauté « exclusivement une offre de produitsde prestige de Sephora », indique l’entreprise. Avec ce partenariat, Sephora, dont le chiffre d’affaire global est estimé à près de 10 mil-liards d’euros, va accroître sa force de frappe outre-Atlantique. « Avec une échelle et une portée plus large en

COSMÉTIQUE

L’accord prévoit l’ouverture de 200 boutiques « Sephora chez Kohl’s » à l'automne 2021, puis au moins 850 d’ici à 2023.

L’offre de l’enseigne tricolore, présente depuis vingt ans aux Etats-Unis, sera aussi sur le site du distribu-teur en exclusivité.

Groupe familial créé en 1966,Manutan est un des leaders européens du e-commerce BtoB, spécialisé dans la distribution aux entreprises etcollectivités. Sonoffredeproduits etde servicesdequalité est l’unedesplus largesd’Europe, et luipermetdecouvrir l’ensembledesbesoinsdeses clients et de les accompagner dans l’optimisation de leurs achats indirects. Avec 26 filiales implantées dans 17 pays d’Europe, leGroupecompte plus de 2 200 collaborateurs et réalise un chiffre d’affaires de 774millions d’euros en 2018/19.Manutan France a été labellisée BestWorkplaces 2020.Manutan International est une société cotée surEuronextParis – compartimentB - ISIN :FR0000032302-MAN

www.manutan.comProchain rendez-vous : publication du chiffre d’affaires du 1er trimestre 2020/2021 prévue le 19 janvier 2021 (après clôture dumarché)

Exercice 2019/2020 :Bonne résilience duGroupeManutan dans un contexte économique très perturbé par la crise sanitaire :

Un chiffre d’affaires en légère croissance et une rentabilité préservée

Retour de la croissance lors du 4ème trimestre (Juillet –Septembre 2020)L’activité duGroupe est en croissance de +0,8% sur l’ensemblede l’exercice 2019/2020 (-1,6% à périmètre, change et joursconstants). Après avoir connu un fort impact négatif lié à la criseduCovid-19 sur lesmois demars et avril, leGroupe renoue avecla croissance dès le mois demai, avec une progression du chiffred’affaires de +3,8% pour la période demai à septembre (+3,0%àpérimètre, change et jours constants).Une rentabilité opérationnelle courante supérieure à 7% duchiffre d’affairesLa rentabilité opérationnelle courante s’établit à 7,5%du chiffred’affaires (contre8,0%pour l’exerciceprécédent).Depuis ledébutde la crise, le groupeamis enœuvredesmesures spécifiquespouraccompagneraumieux ses clients et limiter l’impactde la crise surla performance, tout en préservant l’avenir :– Adaptation de l’offre produits et services au plus près desbesoins clients

– Maintien d’une activité commerciale etmarketing significativepour soutenir le développement

– Optimisationde la structuredecoûts (dépensesopérationnellesen retrait de 0,8%par rapport à l’exercice précédent)

– Poursuite du plan d’investissements moyen terme (Capacitéslogistiques et systèmes d’information).

La diminution du taux demarge commerciale (36,6% du chiffred’affaires contre 37,6% pour l’exercice précédent) s’expliquemajoritairement pardes coûtsponctuels etnonrécurrents liésauxachats de produits Covid-19 (masques, gels, blouses,…).Un résultat net qui s’établit à 4,8% du chiffre d’affairescontre 5,5% sur l’ensemble de l’exercice précédentLabaissede -12,0%s’expliqueprincipalementpar lacombinaisondes impacts suivants :– la baisse de -6,2%du résultat opérationnel courant;– laconstatationd’unedépréciationdugoodwill sur l’UGTSportset Loisirs (Casal) pour 3 millions d’euros, déjà présente au31 mars 2020 (à noter que le chiffre d’affaires de Casal nereprésente que 5%du chiffre d’affaires duGroupe);

– un résultat financier enbaisseen lienavec l’évolutionde la livresterling et du dollar américain.

DividendesAuregarddes résultats enregistrés et de la situationéconomique,il seraproposéà l’AssembléeGénéraled’approbationdescomptesde l’exercice clos au 30 septembre 2020 un montant global dedividendes de 11 millions d’euros. Le dividende distribués’établirait à 1,45 euro pour chacune des 7 613 291 actionscomposant le capital social, au nominal de 2 euros.

Une situation financière toujours solideLeGroupe garde une structure financière solide et un niveau detrésorerie qui lui permet de financer son activité et sesinvestissements dans le contexte actuel. LeGroupe dispose ainsid’une trésorerie de 90,2 millions d’euros et son endettementfinancier(incluant l’impact IFRS16desdettes locatives) représente11,9%du total du bilan au 30 septembre 2020.

Perspectives sur l’exercice 2020/2021La situation actuelle présente de fortes incertitudes et peu devisibilité avec une crise d’une ampleur et d’une forme inédites etde fortes incertitudes sur l’investissementdesentreprises sur2021.Dans ce contexte, le Groupe reste confiant sur sa capacité dedéveloppement àmoyen terme, fort de ses atouts fondamentauxconfortés dans cette période de crise :– Unmodèle digital avancé– Une forte proximité et un accompagnement de ses clients– Unpositionnement demarque adapté à la crise actuelle– Un engagement et un attachement des collaborateurs àManutan

– Une offre produit large et qualitative permettant de répondreaumieux aux besoins de nos clients

– Desmoyens logistiques importants– Une capacité à protéger sa rentabilité en période de crisecouplée à une situation financière solide et une stabilité del’actionnariat et dumanagement.

L’exercice 2020/2021 verra également la mise en œuvre du pland’investissements d’extension des capacités de stockage et lapoursuite du déploiement dumodèle digital qui représentent unenjeumajeur pour leGroupe.Le Groupe restera également attentif aux opportunités decroissance externe qui pourraient se présenter.

(en millions d’euros) 2019 /2020 2018/2019 Variation

Chiffre d’affaires 779,7 773,9 +0,8%

Résultat opérationnel courant 58,4 62,2 -6,2%

Résultat opérationnel 55,6 60,6 -8,4%

Résultat net 37,2 42,3 -12,0%

AVIS FINANCIERS

augmenté ce besoin de finance-ment, reconnaît une source interne.

C’est dans ce contexte tendu quele groupe doit procéder à certaines cessions « des filiales les moins stra-tégiques », selon une lettre de cadrage récemment signée par quatre ministres, lesquels ont déjà prévu le f léchage interne de 600 millions de ces recettes de poche. Jean-Pierre Farandou a ainsi confirmé que le groupe publicavait mis en vente le loueur de wagons Ermewa, qu’il estime à 2,5 milliards d’euros. Il réfléchit aussi sur la cession des 50 % qu’il détient dans le loueur de locomoti-ves Akiem, mais aucune décision n’a encore été prise, selon lui. Pas question, en revanche, de céder le logisticien Geodis ou la filiale de transport publics Keolis, considé-rés comme stratégiques. n

« Toute l’année 2020, nous sommes allés sur les marchés financiers lever de l’argent. Pour rembourser nos emprunts, pour payer les salaires, pour payer nos fournisseurs… » JEAN-PIERRE FARANDOUPDG de la SNCF

magasin et en ligne », fait valoir Jean-André Rougeot, président de Sephora Americas.

Séduire une jeune clientèleDe fait, Kolh’s enregistre, hors période de confinement, un trafic de18 millions de clients par semaine, dans plus de 1.150 magasins installésen périphérie des villes et qui atti-rent la classe moyenne. Présent depuis vingt ans en Amérique du Nord, Sephora compte de son côté 500 boutiques et une forte présenceen e-commerce. « Cette nouvelle col-laboration est un excellent exemple de deux entreprises […] qui tirent parti des atouts l’une de l’autre pour rendre la beauté plus accessible à des millions de clients à travers le pays », aindiqué Michelle Gass, PDG de Kohl. Ce partenariat peut séduire une jeune clientèle qui a tendance à délaisser les grands magasins et autres centres commerciaux ces dernières années.

L’offre de l’enseigne française,une centaine de marques, rempla-cera celle de Kohl’s, dans le secteur de la beauté. Elle y proposera aussi une gamme unique de maquillage. En ligne, « Sephora at Kohl » sera lancée à l'automne 2021. L’activité de Sephora n’a pas été épargnée par la pandémie de Covid-19. Le pôle « Distribution sélective » de LVMH avu ses ventes reculer de 31 % sur les neuf premiers mois de 2020. Après la fermeture de la quasi-totalité de ses boutiques dans le monde pen-dant près de deux mois, ses ventes sont reparties au 3e trimestre. n

à suivreNouveau métro de Toulouse : le recours de Siemens contre Alstom rejetéTRANSPORTS Le tribunal administratif a rejeté la requêtede Siemens contre son concur-rent Alstom, qui a remporté l’appel d’offres pour la troi-sième ligne du métro de Tou-louse. Le 24 novembre, Sie-mens Mobility avait introduit une requête en référé dans le cadre de la procédure d’attribu-tion du marché du système de la future ligne du métro de Tou-louse. Il comprend le matériel roulant, les équipements d’automatisme et de voie, l’ali-mentation et la maintenance.

Kering inaugure son nouveau centre opérationnel aux Etats-UnisLUXE Le groupe français de luxe Kering ouvre les portes deson nouveau centre opération-nel aux Etats-Unis, à Wayne (New Jersey), un peu plus à l ’o u e s t d e s o n a n c i e n n e implantation de Secaucus, qui était quasi en face de Manhat-tan. Ce complexe ultramo-derne, dont l’aménagement intérieur a été confié à l’agenced’architecture HLW, bénéficie du niveau or de la certification LEED (Leadership in Energy and Environmental Design). « Parmi les principales avancéesdu site de Wayne, un Tech Bar etun Retail Lab ont été conçus pour tester de nouvelles fonc-tionnalités pour les boutiques afin d’optimiser l’expérience digitale des clients », précise le groupe dans un communiqué.

Sephora va prendre des emplacements chez l’américain Kohl’s

10MILLIARDS D’EUROSL’estimation du chiffre d’affaires de Sephora.

Page 24: Les Echos - 03 12 2020

manière dont chacun travaille dans un monde entièrement numérique oùil est possible de travailler de n’importeoù », a indiqué le PDG et cofondateurde Salesforce dans un communiqué,en estimant que les deux firmes « étaient faites l’une pour l’autre ».

Salesforce compte incorporerSlack dans ses offres cloud pour en faire un « hub » rassemblant les différentes données, outils, et conversations de ses clients. La

firme espère continuer sa diversifi-cation et s’installer comme le rival deMicrosoft, dont les investissements dans le cloud lui ont permis de damer le pion au pionnier de la ventede logiciels dématérialisés via abon-nement. « Si Salesforce veut s’étendreau-delà de sa mine d’or des divisions ventes et marketing, c’est le moment et cela représente un coup de semoncemajeur contre Microsoft », estime Dan Ives, analyste chez Wedbush.

L’entreprise dirigée par SatyaNadella est en compétition avec sonlogiciel Dynamics et possède égale-ment Teams, un produit concurrentde Slack lancé en 2016. Marc Benioffavait tenté de construire une messa-gerie collaborative avec un outil interne, Chatter, en 2010, doublé du rachat de Quip en 2016, mais le pro-duit n’a pas eu le succès escompté.

Cette opération montre aussi ladifficulté pour les start-up de tracer

leur chemin en solo face à un mou-vement de consolidation croissant. Les géants du logiciel, qui attirent moins l’attention des régulateurs que les Gafa, multiplient les acqui-sitions, comme Adobe qui a récem-ment racheté Workfront. Plusieurs entreprises comme Box, Dropbox, Airtable ou DocuSign seraient ausside potentielles cibles.

Lancée en 2014, après un pivotloin de ses débuts dans les jeux

vidéo, la plateforme de collabora-tion entre équipes Slack était l’une des success-stories de la décennie dans la Silicon Valley. Son logiciel permettant de réduire l’usage des e-mails et d’intégrer tout un éco-système d’applications a été adopté par de nombreuses jeunes pousses, avant de conquérir les grandes entreprises dans tous les secteurs.

Compétition féroceL’entreprise, introduite en Bourse en 2019, compte 142.000 clients et prédit un chiffre d’affaires de 870 à 876 millions de dollars cette année, une hausse de 40 % en un an. Mais sa croissance était moins impor-tante qu’espéré par les investisseurs.La faute notamment à la compéti-tion de plus en plus féroce de Micro-soft, dont le logiciel Teams a dépasséles 115 millions d’utilisateurs quoti-diens fin octobre, une augmenta-tion de 53 % en six mois. Slack n’a pas communiqué de chiffre sur ce sujet depuis octobre 2019, quand ils étaient 12 millions.

En juillet, Stewart Butterfield,le PDG de Slack, avait déposé une plainte pour pratiques anticoncur-rentielles auprès de la Commission européenne. Il accusait Microsoft de profiter de sa position de force sur le segment professionnel pour imposer Teams en l’associant à sa suite bureautique Office 365. Le patron a finalement estimé que la meilleure manière de combattre était de s’associer à un autre géant : « L’opportunité que nous voyons ensemble est massive… C’est la combi-naison la plus stratégique de l’histoiredu logiciel », a-t-il déclaré mardi.

(Lire l’éditorial de David BarrouxPage 15 et « Crible » Page 40

l Le numéro un des logiciels de relation client réalise la plus grosse acquisition de son histoire.l Une opération qui doit lui permettre de rivaliser davantage avec Microsoft, dont l’outil Teams a rattrapé Slack.

Salesforce rachète Slack pour 27 milliards de dollars

Anaïs Moutot @AnaisMoutot

— Correspondante à San Francisco

La rumeur courait depuis la semaine dernière. A l’occasion de la publication de ses résultats trimes-triels mardi, Salesforce a confirmé racheter Slack, une opération qui valui permettre de rivaliser davantage avec son concurrent Microsoft, dontl’outil Teams a rattrapé Slack. Le numéro un des logiciels de relation client met 27,7 milliards de dollars sur la table, en cash et en actions. Unmontant plus de 50 % supérieur à la capitalisation de la messagerie professionnelle, lorsque l’informa-tion a fuité, et qui représente plus de trente fois son chiffre d’affaires. Il bat aussi la plus grosse opération du secteur jusqu’ici, le rachat de LinkedIn par Microsoft pour 26,2 milliards de dollars en 2016.

L’entreprise de San Francisco,dont les vingt et un ans d’histoire sont jalonnés de plus de 60 acquisi-tions, réalise sa plus grosse opéra-tion de croissance externe après l’achat de Tableau Software pour 15,7 milliards en 2019. S’il est validé par les autorités, le rachat sera clôturé au deuxième trimestre de l’année prochaine. Stewart Butter-field, le PDG et cofondateur de Slack,continuera de diriger la messagerie.

Ascension de SalesforceMarc Benioff, qui déclarait pourtanten août que « l’environnement M&A n’était pas bon » à cause de prix trop élevés, a voulu agir vite face à l’évolu-tion des entreprises accélérée par la pandémie. « Ensemble, Salesforce et Slack façonneront le futur du logiciel d’entreprise et transformeront la

LOGICIELS

Nicolas Richaud @NicoRichaud

« Le cafard d’Internet », « une chose démente à utiliser à l’intérieur d’une organisation »… C’est en s’attaquant frontalement à l’e-mail et en dis-tillant des « punchlines » de cet acabit lors d’interviews et de confé-rences que Stewart Butterfield par-vient à faire connaître le nom de sa start-up au mitan des années 2010 : Slack, une messagerie collaborativetrès intuitive destinée au marché professionnel qui croule sous des montagnes d’e-mails.

En 2011 , cet entrepreneurcanadien – cofondateur de Flickr revendu à Yahoo! six ans plus tôt – avait commercialisé le jeu vidéo massivement multijoueur Glitch. Un échec. Mais en retravaillant sur le système de communication inté-gré au sein du jeu, Stewart Butter-field et ses équipes créent Slack. Fluide, ergonomique, se voulant « cool » : le service se fait vite une bonne place chez les start-up de la

Silicon Valley. Dans le même temps,Slack enchaîne les levées de fonds ; entre 2014 et 2016, la start-up récolteplus de 500 millions de dollars. Stewart Butterfield se targue alors d’avoir reçu (et refusé) près de dix offres de rachat. A l’époque, Microsoft s’apprête à faire une pro-position de 8 milliards. Mais Bill Gates et Satya Nadella y mettent finalement leur veto. La guerre avec Slack sera frontale.

En attendant, Stewart Butterfields’attaque à l’internationalisation de son service freemium et étoffe ses fonctionnalités. En 2018, le nombre d’utilisateurs quotidien atteint 8 millions de personnes – un bond de près de 2.600 % en quatre ans. Leparc de clients payants et les reve-nus grimpent aussi et, après un totalde 11 levées de fonds, la décacorne prend la direction de Wall Street mi-2019. Une success-story sans ani-croche ? Pas exactement, car la con-currence a affûté ses armes, surtoutMicrosoft qui recalibre son offre et lance Teams, proposé au sein de sa suite bureautique Office 365.

Une opportunité historique ratée« Slack a toujours eu du mal à se déployer sur les grands comptes avec ses outils très ludiques, inspi-rés de son ADN jeu vidéo, note Guillaume Gombert, directeur des projets stratégiques chez Faber-novel. Tandis que Microsoft s’est appuyé sur Office 365 pour Teams.

Pour les entreprises déjà clientes, c’était juste une fonctionnalité à ajouter et donc une démarche moins lourde que de basculer dans un nouvel écosystème. »

Arrivent la crise sanitaire et l’avè-nement du télétravail. Une opportu-nité historique pour Slack… qui ne va pas la saisir, au contraire de Zoom. « Sur 2020, la croissance de Slack est linéaire, alors qu’elle aurait pu exploser. Microsoft a bien joué le coup en proposant Teams gratuite-ment plusieurs semaines pendant le confinement. Le fait qu’ils proposent de la visio et du tchat en même temps les a aussi beaucoup servis », souli-gne Guillaume Gombert.

Résultat, Slack évolue en dessousde son prix d’introduction en Bourse depuis plusieurs mois. Dans le même temps, le conflit s’envenime avec Microsoft. Au cœurde l’été, Slack attaque Microsoft à Bruxelles pour pratiques anticon-currentielles. La Commission euro-péenne examine la plainte et déci-dera d’ouvrir une enquête, ou non.

D’ici là, Slack sera sans doutepassé sous la houlette de Sales-force puisque le rachat devrait être clôturé au deuxième trimestre de 2021. « Il s’agit de la combinaison la plus stratégique dans l’histoire du software, s’est réjoui Stewart Butterfield, qui continuera à diriger la messagerie. J’ai hâte d’y être. » Le quadragénaire milliardaire aura tout loisir de poursuivre sa guérilla contre l’e-mail et Microsoft. n

Slack : la firme à 27 milliards qui est en guerre avec l’e-mail et MicrosoftAvant d’entrer en Bourse, mi-2019, la messagerie collaborative destinée au marché professionnel avait effectué 11 levées de fonds et était l’une des coqueluches des investisseurs. Rien ne semblait pouvoir freiner son ascension, puis la route de Slack a croisé celle de l’offre Teams de Microsoft.

Mais pour ce qui est du chiffred’affaires « cloud », c’est-à-dire de vente de solutions informatiques à distance, le jeu est plus serré. Salesforce est né avec ce nouveau modèle et a toujours vendu l’inté-gralité de ses logiciels par abonne-ment. Sur ce créneau porteur, il estdevant Google (9 milliards de dol-lars de revenus cloud) et plus très loin d’Oracle (27 milliards), d’Ama-zon Web Services (35 milliards) et de Microsoft (45 milliards).

Consécration boursièreCette réussite est liée à la précocitéde Salesforce. Dès la création en 1999, Marc Benioff – lui-même un ancien d’Oracle – a anticipé le suc-cès à venir des logiciels loués sur Internet au lieu d’être vendus sur CD-ROM. Les marges sont moin-dres, mais les avantages pour le client – rapidité du déploiement et des mises à jour notamment – vontprogressivement faire basculer l’industrie. Alors que les géants installés rechignent à rogner sur leurs profits en changeant de méthode de commercialisation, Salesforce engrange les clients.

Dès 2003, le Petit Poucet califor-nien est rentable. En 2008, il passe la barre du milliard de dollars de chiffre d’affaires, puis 5 milliards en 2014, 10 milliards en 2017, 20 milliards en 2020… En Bourse, le titre s’envole. Depuis 2015, son cours a été multiplié par quatre. Il surperforme sur la période l’indiceNasdaq des technologies. Cette réussite est consacrée à la fin de

L’irrésistible ascension de Salesforce

Sébastien Dumoulin @sebastiendmln

Haute de plus de 300 mètres, la Salesforce Tower domine depuis quelques années la ville de San Francisco. C’est le symbole parfait de la démesure de son patron, Marc Benioff, qui vient de racheterSlack 27 milliards de dollars, et de son insolent succès. En vingt et un ans, la start-up est devenue unedes plus grandes entreprises mon-diales du secteur du logiciel et l’unedes seules à pouvoir rivaliser avec les mastodontes historiques du secteur Oracle et Microsoft, mais aussi les tout-puissants Gafa, ses voisins de la Silicon Valley.

Sur son exercice clos fin jan-vier 2020, Salesforce a encaissé 17 milliards de dollars. Il devrait passer les 21 milliards cette année, affichant – comme chaque année depuis vingt ans – une croissance supérieure à 20 %. Il reste un écart significatif avec ses grands concur-rents : Oracle génère près de 40 milliards de dollars de revenus,Microsoft 143 milliards.

Le précurseur des logiciels cloud a depuis longtemps débordé de son terrain de jeu initial, l’administration des ventes. A coups de rachats audacieux, le Californien s’est installé dans la cour des grands et rivalise avec Oracle, mais surtout Amazon, Google et Microsoft.

Salesforce a confirmé le rachat de Slack à l’occasion de la publication de ses résultats trimestriels, mardi. Photo Michael Nagle/Bloomberg

l’été 2020 par l’entrée de Salesforcedans l’indice Dow Jones, dont il chasse le pétrolier ExxonMobil.

Le deuxième coup de génie deSalesforce est d’avoir identifié des relais de croissance à son activité initiale – la gestion des ventes – en signant de gros chèques : 2,5 milliards de dollars pour ExactTarget en 2013, 2,8 milliards pour Demandware en 2016, 6,5 milliards pour MuleSoft en 2018, 15,9 milliards pour Tableau Software en 2019, 27 milliards pour Slack aujourd’hui. Marc Benioff a certes échoué à mettre la main sur LinkedIn (absorbé par Microsoft) ou Twitter, mais il a su faire fructifier ses emplettes.

Aujourd’hui, le pilier initial desventes ne représente plus que 29 %du chiffre d’affaires, à égalité avec les logiciels de service clients et ceux de développement d’applica-tions – tandis que sa branche mar-keting et e-commerce compte déjàpour 16 % du total. Avec Slack, le groupe californien compte faire des outils collaboratifs un nou-veau pilier, et bousculer toujours plus ses grands rivaux. n

En vingt et un ans, Salesforce est devenu l’une des plus grandes entreprises mondiales du secteur du logiciel.

HIGH-TECH & MEDIAS Jeudi 3 décembre 2020 Les Echos

Page 25: Les Echos - 03 12 2020

Les Echos Jeudi 3 décembre 2020 HIGH-TECH & MEDIAS // 25

Nicolas Madelaine @NLMadelaine

et Marina Alcaraz @marina_alcaraz

Une loi pour renforcer la lutte con-tre le piratage audiovisuel verra-t-elle le jour avant la fin du mandat d’Emmanuel Macron ? L’industrie, qui n’a pourtant de cesse de dénon-cer un renforcement du phéno-mène à cause des confinements, dit ne plus trop y croire, échaudée qu’elle est après moult tentatives.

Et pourtant, la députée AuroreBergé se montre confiante sur la possibilité du vote au Parlement d’ici à l’été d’un texte qui existe déjà. Roselyne Bachelot, la ministre de la Culture, est également favorable à un texte en 2021. Une fois encore, surce sujet à haut risque électoral, tout dépendra de la volonté politique à l’Elysée.

Effectivement, le texte n’est autreque celui de la grande loi audiovi-suelle telle que rédigée après le tra-vail des commissions parlementai-res, juste avant que la crise sanitairene lui coupe son élan au printemps. Il serait allégé du projet de création d’un holding de l’audiovisuel public et se concentrerait d’abord sur la lutte contre le piratage, ensuite sur la création de l’Arcom via la fusion entre le Conseil supérieur de l’audio-visuel (CSA) et l’Hadopi, chargée jus-tement de la lutte contre le piratage.

ConsensusPour Aurore Bergé, « tout le monde est d’accord sur ce texte à part La France insoumise. Il y a accord entre l’Assemblée et le Sénat, et les réticen-ces des opérateurs télécoms ont été réglées », dit celle qui était rappor-teure de la loi sur l’audiovisuel et est

AUDIOVISUEL

Propos recueillis par Fabienne Schmitt

@FabienneSchmittet N. M.

Quel constat dressez-vous sur le piratage en France ?Entre 2016 et 2020, on a divisé par deux le nombre de téléchargementsglobaux illicites, qui se sont donc établis en janvier 2020 à 8 millions au total. Le chiffre reste très élevé. Jene vais pas vous faire de dessin : le confinement n’est pas favorable à ceux qui défendent la propriété litté-raire et artistique. Pendant le pre-mier confinement on était remonté à 10 millions, d’après les chiffres de l’Alpa, de Médiamétrie et du Centre national du cinéma (CNC).

Comment expliquer ce recul ?Il n’a qu’une cause : les décisions de justice pour demander aux moteursde recherche et fournisseurs d’accèsInternet de déréférencer et de blo-quer les sites illégaux. On était sur une bonne pente car jusqu’en 2016, le chiffre des téléchargements illici-tes ne faisait qu’augmenter… En jan-vier 2019, les courbes du télécharge-ment illicite et licite se sont croisées.Hélas, le téléchargement illicite a recommencé à augmenter.

A combien s’élève le manque à gagner pour les industries ?Il est toujours très difficile à évaluer. Dans le sport, quand vous avez une chaîne de télévision qui est surtout regardée pour ses événements spor-tifs, évidemment, c’est très grave pour elle. Quand Canal+ est né, on

parlait de 500.000 abonnés qui pira-taient les décodeurs, c’est considéra-ble ! Il y a quelques années, le coût dupiratage pour les professions qui fabriquent des contenus audiovi-suels était évalué à 50 milliards de dollars dans le monde sur cinq ans. En 2005, il y avait 5.000 magasins devidéo et il n’y en a plus aujourd’hui. Le chiffre d’affaires de la vidéo s’éle-vait à un peu plus de 2 milliards d’euros. Aujourd’hui, si vous addi-tionnez la vidéo physique, la vidéo locative… on n’atteint pas 500 mil-lions. Donc on a une perte de 1,5 mil-liard pour la filière cinéma et pour les recettes fiscales de TVA, cela fait 300 millions en moins.

Vous avez mis en cause Orange, le taxant de « complice » du piratage. Le pensez-vous toujours ?Le problème avec Orange, c’est que nous avons beaucoup de peine à leur faire appliquer le blocage des sous-domaines des sites Internet. Dans un premier temps, ils nous ontdit que les sous-domaines ne sont pas traités par les décisions de justice. Désormais, ils le sont et de façon explicite. Il y a un retard à l’allumage que nous regrettons ! Et aujourd’hui, la question n’est tou-jours pas résolue comme nous le souhaiterions. Autrefois, notre prin-cipal souci c’était Google. Depuis, on

a signé un accord, et aujourd’hui il applique les décisions de justice.

Vous avez dit que vous attaqueriez en justice Orange si le problème n’est pas résolu. Le ferez-vous ?J’ai dit que si cela n’était pas résolu àla fin de l’année, nous nous réser-vions d’autres moyens. Nous ne sommes pas à la fin de l’année. On ne peut pas admettre que le fournis-seur d’accès Internet dont l’Etat est le premier actionnaire n’applique pas intégralement les décisions de justice. Et on ne peut pas être sans arrêt en train de vérifier si elles sont bien appliquées.

La réforme potentielle du piratage telle qu’elle est rédi-gée à ce stade n’inclut pas de sanctions pour l’internaute. Vous convient-elle ?Si l’internaute de base ne sait pas qu’il y a un problème lorsqu’il télé-charge un programme de façon illi-cite – ce qui se traduit par une démarque d’un tiers de la valeur descontenus –, c’est qu’on n’a pas trouvéde solution satisfaisante. L’idée de latransaction pénale – c’est-à-dire pro-poser, sous la responsabilité de l’Hadopi, une pénalité, l’équivalent de la contravention pour le station-nement, pour éviter des poursuites judiciaires encombrant les tribu-naux – est la meilleure formule. Et effectivement, elle n’est pas dans le texte actuel. Avec les ordonnances dynamiques pour fermer les sites destreaming, la loi envisagée s’attaquesurtout au piratage du sport et

moins à celui du cinéma et des séries. Cela dit, le ministre de la Culture a changé, cela a son impor-tance, c’est le propre d’un nouveau ministre d’imprimer sa marque. Et nous savons que la députée Aurore Bergé se bat pour cette transaction pénale. Tant que cette bataille n’est pas gagnée, je me battrai. La France a inventé le droit d’auteur et nous nesommes plus les leaders dans ce domaine, c’est dommage.

La volonté politique est-elle là pour lutter contre le piratage ?Roselyne Bachelot, la ministre de la Culture, y est favorable. Mais il ne suffit pas de convaincre le ministre de la rue de Valois. J’étais optimiste ily a dix ans et, malheureusement, lesespoirs ne se sont pas concrétisés. Le seul homme politique vraiment motivé sur la transaction pénale était Nicolas Sarkozy, contre beau-coup de députés de son propre camp. François Hollande ne voulait

NICOLAS SEYDOUXPrésident de l’Alpa

Lutte contre le piratage : dernière chance avant la présidentiellel Un texte de loi est prêt et porté par Aurore Bergé et Roselyne Bachelot.l Reste à lui trouver une fenêtre parlementaire et, enfin, un soutien politique, désespèrent les chaînes de télévision.

La publicité numérique majoritaire aux Etats-Unis

Nicolas Richaud @NicoRichaud

La tendance est marquée depuis de longues années dé jà dans le monde de la publicité, mais c’est tout de même un nouveau cap sym-bolique qui est franchi. En 2020,les dépenses publicitaires se sont portées majoritaire-ment (51 %) sur le numérique aux Etats-Unis – tous médias confondus –, selon les estima-tions de GroupM (filiale du leader mondial de la publicité WPP). Une grande première.

Il y a trois ans, le numériquene représentait encore qu’un tiers des investissements publi-citaires outre-Atlantique. « La publicité numérique a été un remarquable point lumineux au cours d’une année sombre pour l’industrie de la publicité », fait valoir GroupM. Outre-Atlanti-que, le segment de la publicité numérique est dominé outra-geusement par Google et Face-book, ainsi que par Amazon qui est parvenu à s’imposer comme le troisième acteur du secteur ces dernières années. Cette année, ces trois géants de la tech vont s’arroger près de deux tiers du marché numéri-que de la publicité aux Etats-Unis, d’après eMarketer.

Plus globalement, le numéri-que a représenté 110 milliards de dollars des dépenses publici-taires en 2020, selon GroupM. Soit la plus faible croissance his-torique (+5,4 % sur un an) pour ce média. Mais la performance est pourtant bien notable, alors que le marché global chute, lui, de 8,8 % outre-Atlantique par rapport à 2019, à 214,6 milliards (un montant qui n’inclut pas les publicités politiques). Et que tous les autres médias, sans exception, reculent.

Avec la crise sanitaire et éco-nomique, de nombreux grou-pes ont taillé à la scie sauteuse dans leurs frais. Et dans ce type de contexte, les budgets mar-keting et publicitaires sont les premiers à être coupés. Deuxième média privilégié par les annonceurs derrière le numérique, la télévision recule de 12,3 % sur un an, à 56 mil-liards de dollars. La radio chute,elle, de 27,1 %, à 12 milliards. Même tendance pour la presse écrite quotidienne (–30,3 %), à 8,8 milliards, et magazine (–19,8 %), à 8,7 milliards. Le cinéma, lui, paie le plus lourd tribut (–81,6 %), à 149,4 millions.

L’an prochain, GroupM pro-nostique que la croissance des dépenses publicitaires va repar-tir à la hausse pour tous les principaux médias, hormis la presse écrite quotidienne et magazine qui seront de nou-veau en baisse. Le numérique va, lui, continuer sur sa lancée et réaccélérer de 18,1 % sur un an, à plus de 130 milliards aux Etats-Unis. Ce qui représen-terait alors 54,1 % du marché américain en 2021. n

PUBLICITÉ

En 2020, les dépen-ses publicitaires se sont portées majori-tairement (51 %) sur le numérique outre-Atlantique.

« Sans transaction pénale, on ne réglera pas le problème »pas en entendre parler, malgré l’intervention de Manuel Valls dans un second temps. En 2017 à Cannes,le président Emmanuel Macron laissait entendre que la contrepartiedu cadeau du pass Culture était le renforcement de la lutte contre le téléchargement illégal. La crise des « gilets jaunes » a eu raison de cette volonté. Franck Riester, qui a pré-cédé Roselyne Bachelot, était totale-ment favorable à la transaction pénale quand il était député, mais nel’a plus été une fois ministre…

Est-ce que c’est la crainte de perdre le vote des jeunes ?Il y a cette perception qu’il ne faut passe les mettre à dos. Mais cela fait douze ou treize ans que les pirates opèrent en masse, ils finissent par être moins jeunes ! Et ce ne sont pas les plus démunis. La présidentielle ne se gagnera ou se perdra pas sur lesujet du téléchargement illicite. On apris conscience que tout dans Inter-net n’est pas formidable et les res-ponsables politiques ont compris qu’il doit être réglementé, en parti-culier pour les industries qui ven-dent de la propriété intellectuelle, comme la presse. Si le gouverne-ment le voulait, la réponse est aujourd’hui dans les mains de l’Assemblée nationale et du Sénat. Le secteur de la création audiovi-suelle est très fragile, d’autant plus qu’il est frappé de plein fouet par la crise. Les gens ne se rendent pas compte qu’il risque de ne plus pou-voir investir comme auparavant. J’appelle les responsables politiquesà faire preuve de courage. n

aujourd’hui présidente déléguée du groupe LREM à l’Assemblée.

Pour le monde audiovisuel et desayants droit, il y a « urgence à faire voter une loi efficace », résume JulienTaieb, responsable juridique de la Ligue de football professionnel (LFP), qui préside l’APPS (Associa-tion pour la protection des pro-grammes sportifs). Si le sport fait partie des premiers secteurs affec-tés (avec un manque à gagner de l’ordre de 500 millions d’euros par an pour les chaînes sportives, selon la LFP), tout l’écosystème souf f re . S e lo n une étud e de l’Hadopi, le manque à gagner serait

de plus de 1 milliard d’euros en 2019 (dont au minimum 100 millions pour le sport), à comparer avec un chiffre d’affaires de 9,5 milliards d’euros. Le nombre de pirates, même s’il a eu tendance à baisser ces dernières années, reste élevé : 11,8 millions.

Liste noire de sites piratesPour l’Hadopi, le projet de loi appor-terait des « réponses efficaces » contre le piratage. Si Nicolas Sey-doux, le président de l’Alpa (Asso-ciation de lutte contre la piraterie audiovisuelle), déplore des ratés (voir ci-dessous), le texte a de quoi

satisfaire Canal+ et BeIN Sports. L’idée est de s’attaquer aux facilita-teurs du piratage plus qu’aux pirateset d’aider le juge avec une liste noire de sites pirates et de leurs sites miroirs, automatiquement sanc-tionnés sans qu’il ne soit nécessaire de redémarrer une procédure judi-ciaire. Le tout, donc, avec la coopé-ration des fournisseurs d’accès (FAI), grâce à l’intervention d’un tiers de confiance, qui serait l’Arcom, afin que ces FAI ne soient pas exposés à des poursuites judi-ciaires intempestives.

Pour Aurore Bergé, le texte pour-rait être adopté par le Parlement en

quelques jours. Reste à trouver le véhicule parlementaire dans un agenda très chargé, sachant qu’aprèsl’été 2021 la campagne présidentiellesera dans toutes les têtes. Selon la fenêtre disponible, le texte pourrait être présenté par des députés ou parle gouvernement. Mais toute la question est dans la volonté politi-que de ce dernier, et ce, même si l’on ne s’attaque plus aux internautes eux-mêmes. La lutte contre le pira-tage est perçue comme faisant per-dre des voix, en particulier celles de la jeunesse. En outre, les lois audiovi-suelles au sens large sont réputées être des boîtes de Pandore... n

La commission Culture de l’Assemblée nationale avait renforcé le texte de loi contre le piratage en mars. Photo Gonzalo Fuentes/Reuters

Aux Etats-Unis, le segment du numérique est dominé par Google, Facebook et Amazon.

« J’appelle les responsables politiques à faire preuve de courage. »

Mar

tin B

urea

u/A

FP

Page 26: Les Echos - 03 12 2020

26 // Jeudi 3 décembre 2020 Les Echos

Publication judiciaire : décision de l’Autorité de la concurrence n° 20-D-09 du 16 juillet 2020 relative à des pratiques mises en œuvredans le secteur des achats et ventes des pièces de porc et de produits de charcuterie

Aux termes de la présente décision, l’Autorité de la concurrence (ci-après« l’Autorité ») sanctionne plusieurs sociétés actives dans le secteur desachats et ventes des pièces de porcs et de produits de charcuterie pouravoir mis en œuvre trois pratiques anticoncurrentielles constituées, pour lapremière, par une entente entre concurrents sur le prix du jambon sansmouille (ci-après « JSM »), utilisé pour fabriquer des jambons cuits, et pourles deuxième et troisième, par des ententes entre concurrents sur le marchéde la commercialisation de produits de charcuterie crus, d’une part, cuits,d’autre part, sous marque de distributeurs (ci-après « MDD ») et premiersprix.

Ces pratiques ont notamment été révélées grâce à la procédure de clémence,qui permet aux entreprises ayant participé à une entente d’en dévoilerl’existence à l’Autorité et d’obtenir, sous certaines conditions, le bénéficed’une exonération totale ou partielle de sanction pécuniaire.

En effet, le groupe Campofrio a sollicité en octobre 2012 le bénéfice de laclémence dans le secteur de l’approvisionnement en JSM par les charcutiers-salaisonniers auprès des abatteurs et découpeurs (grief n° 1), d’une part,et dans le secteur des produits de charcuterie vendus par les charcutiers-salaisonniers sous MDD (griefs n° 2 et 3), d’autre part.

Les opérations de visite et saisie réalisées en France en mai 2013 ont permisde réunir de nombreuses preuves qui ont complété celles apportées par lepremier demandeur de clémence.

Par ailleurs, à la suite de ces opérations, le groupe Coop a égalementsollicité, en septembre 2013, la mise en œuvre du programme de clémencedans le secteur de la fourniture de produits de charcuterie crus vendus sousMDD (grief n° 2).

L’exploitation des milliers de pièces reçues et saisies par les servicesd’instruction, complétée par de nombreuses auditions ainsi que par uneexpertise en écritures visant à analyser la valeur probante d’une pièceversée par le primo-demandeur de clémence, a permis de sanctionner lestrois ententes suivantes :

Entente sur la variation du prix hebdomadaire du jambon sans mouille

Les groupes Campofrio, Fleury Michon, Financière Turenne Lafayette (ci-après « FTL ») et Les Mousquetaires se sont entendus, entre le 14 janvier2011 et le 26 avril 2013 pour défendre une position commune sur la variationdu prix hebdomadaire du jambon sans mouille dans leurs négociations avecles abatteurs (grief n° 1).

En effet, il ressort des éléments du dossier que les charcutiers-salaisonniersse contactaient via des appels téléphoniques bilatéraux avant le début desnégociations, généralement le vendredi matin, afin d’aboutir à une positioncommune de négociation.

Ce consensus, qui portait sur la variation de prix du JSM sur le marchéd’intérêt national de Rungis (ci-après « MIN ») et non le prix lui-même, leurpermettait de présenter un « front commun » face aux abatteurs, de manièreà mieux résister aux hausses de prix ou à obtenir des baisses de prix.

Cette entente a modifié le rapport de force entre charcutiers-salaisonnierset abatteurs, au bénéfice des premiers et au détriment des seconds. Elle apar ailleurs impacté la variation de la cotation du JSM sur le MIN, qui sert deréférence pour les transactions réalisées hors de ce marché. Elle présente,par conséquent, un caractère particulièrement grave, qui justifie le prononcéde sanctions d’un montant global de 21 428 000 euros, qui se répartissentcomme suit entre les entreprises concernées :

Entreprise Montant (en €)Charcuteries Cuisinées du Plélan 6 731 000Fleury Michon LS 8 030 000Salaisons Celtiques 6 667 000

Ententes sur les prix des produits de charcuterie crue et cuite

S’agissant des produits de charcuterie crue (grief n° 2), huit entreprises(appartenant aux groupes CA Animation, Campofrio, Coop, La Financièredu Haut Pays, FTL, Savencia, Sonical, ainsi que la société Salaisons duMâconnais) ont mis en œuvre entre le 8 avril 2010 et le 30 avril 2013 desaccords et pratiques concertées, via des réunions secrètes et des échangesbilatéraux, d’une part, pour faire passer des demandes de hausses de prix devente auprès des enseignes de la grande distribution et, d’autre part, pour seconcerter sur les offres en prix à proposer en réponse aux appels d’offres deces enseignes.

Eu égard à la gravité intrinsèque de cette pratique, l’Autorité inflige dessanctions d’un montant global de 10 150 000 euros qui se répartissentcomme suit :

Entreprise Montant (en €)Aoste SNC 892 000Bell France 1 125 000France Salaisons 350 000Les Monts de la Roche 116 000Maison de Savoie 689 000Établissements Rochebillard et Blein,au nom de Peguet Savoie

44 000

Établissements Rochebillard et Blein 286 000Salaisons du Mâconnais 1 000Salaisons Moroni 108 000Salaison Polette et Cie 3 367 000Saloir de Virieu 14 000Sapresti Traiteur 87 000Souchon d'Auvergne 2 257 000Val de Lyon 814 000

S’agissant des produits de charcuterie cuite (grief n° 3), sept entreprises(appartenant aux groupes Campofrio, Cooperl Arc Atlantique, FTL, LesMousquetaires, Nestlé et Roullier, ainsi que la société Aubret) ont mis en œuvredes accords et pratiques concertées, dans le cadre d’échanges bilatérauxentre le 2 juillet 2010 et le 7 juin 2012, pour se concerter sur les offres en prixà proposer, notamment en réponse aux appels d’offres des enseignes de lagrande distribution.

Cette pratique a diminué l’incertitude devant normalement peser sur chaqueopérateur.Elle a pu concourir, soit directement soit indirectement, à la fixationde prix supérieurs à ceux qui auraient résulté d’une situation normale deconcurrence.

Les sanctions infligées à ce titre, d’un montant total de 61 459 000 euros, sontles suivantes :

Entreprise Montant (en €)Aubret 750 000Brocéliande - ALH 25 763 000Cooperl Arc Atlantique 9 767 000Herta 96 000Salaisons Celtiques 7 338 000Salaisons du Guéméné 2 320 000S.C.O. 15 425 000

La sanction des manquements du premier demandeur de clémence

Pour la deuxième fois dans sa pratique décisionnelle après l’affaire desmessageries (décision n° 15-D-19 du 15 décembre 2015 relative à despratiques mises en œuvre dans les secteurs de la messagerie et de lamessagerie express), l’Autorité refuse d’accorder au premier demandeurde clémence le bénéfice de l’exonération totale de sanctions. Après avoirconstaté, en effet, que le groupe Campofrio avait omis d’informer les servicesd’instruction de la tenue d’une réunion anticoncurrentielle à laquelle il avaitparticipé en avril 2013, et, partant, manqué à son obligation de coopération,elle lui inflige une sanction de 1 million d’euros au titre du deuxième grief.

L’octroi de la « clémence Plus » au second demandeur de clémence

S’agissant du second demandeur de clémence, l’Autorité, également pourla deuxième fois dans sa pratique décisionnelle après l’affaire des produitsblancs (décision n° 18-D-24 du 5 décembre 2018 relative à des pratiquesmises en œuvre dans le secteur des produits électroménagers), faitapplication de la possibilité, dite « clémence Plus », prévue au paragraphe19 du communiqué de procédure du 2 mars 2009 relatif au programmede clémence français, d’accorder une exonération supplémentaire auxentreprises pouvant prétendre à une exonération partielle. Elle accordedonc, en l’espèce, au groupe Coop, second demandeur de clémence, uneexonération totale de sanctions pour la période des pratiques que seuls leséléments fournis par ce groupe ont permis de révéler.

En sus des sanctions pécuniaires infligées, l’Autorité enjoint aux entreprisessanctionnées de publier un résumé de la décision dans l’édition papier etdans l’édition en ligne des journaux Le Monde, Les Échos et de la RevuePorc Mag. Par ailleurs, les frais de l’expertise sont mis à la charge desentreprises concernées.

Certaines des entreprises sanctionnées ont formé un recours devant la courd’appel de Paris contre cette décision.

PUBLICATION JUDICIAIRE

Page 27: Les Echos - 03 12 2020

Guillaume Bregeras @gbregeras

De loin, le sujet peut paraître abs-cons. Pourtant, à y regarder de plus près, la planification est un thème universel à toutes les entreprises dont les outils n’ont pas forcément évolué avec les exigences actuelles, expérience utilisateur en tête. Si Anaplan fait figure de leader avec une capitalisation boursière pro-che des 10 milliards de dollars, un duo d’entrepreneurs estime qu’il estencore possible de faire irruption sur ce marché et de le remporter.

Romain Niccoli et EléonoreCrespo ont donc créé Pigment avec la ferme ambition de bâtir un géantdepuis la France, et viennent de boucler une série A qui monte le total des fonds levés à 25,9 millions de dollars depuis un an et son lance-ment. Le premier a cofondé et dirigé la tech de Criteo, et la secondea travaillé pour Google avant de rejoindre le fonds britannique

Index Ventures. Désormais, la jeune pousse compte sur des inves-tisseurs de premier rang avec Blos-som Capital, FirstMark Capital, mais aussi FRST et des business angels comme Olivier Pomet et Alexis Lê Quôc (Datadog), Florian Douetteau (Dataiku) ou Thibaud Elzière (eFounders).

C’est chez Index que les deuxcofondateurs se sont rencontrés et ont identifié le besoin d’un outil de planification afin de piloter le busi-ness des entreprises. « Les outils ne sont plus adaptés, tranche Eléonore Crespo. Trop souvent, les sociétés finissent par utiliser des tableurs classiques comme Excel pas du tout dynamiques. Pourtant, le sujet est clépour piloter son budget, ses ressour-ces humaines ou son équipe com-merciale, par exemple. » Un pilotagequi, à l’aune de la crise du Covid-19, exige une finesse et une souplesse plus importantes que jamais.

Gagner du temps et collaborerC’est là qu’intervient spécifique-ment le nouvel outil créé par Pigment. Sa capacité à intégrer des données de projection pour dessiner plusieurs scénarios, et les mettre instantanément en forme sans la nécessité de passer par une armée de consultants détonne dans le paysage du logiciel pour entreprise. « Il faut bien com-prendre comment se prépare un bud-get, par exemple, explique Romain Niccoli. Chacune des équipes concer-nées travaille dans son coin, puis arrive avec une hypothèse qu’il est très compliqué de faire évoluer ensuite par manque de temps et de collaboration en amont. Là, il est possible de jouer rapidement avec les données de prévision, de les ajuster en fonction de plusieurs possibilités, ce qui est d’autant plus essentiel dans la période d’in-certitudes que nous traversons. »

Une vingtaine d’employés, dontune vaste majorité d’ingénieurs, constituent actuellement l’équipe de la start-up qui veut installer des bureaux à l’étranger dès 2021. Elle compte actuellement six clients, dont une banque du CAC 40 et des scale-up du Next40, avec qui elle a éprouvé le produit. S’ouvre désor-mais le chemin de la croissance, ou,elle l’espère, de l’hypercroissance. Confirmant encore une fois la capa-cité de la French Tech à générer deschampions mondiaux dans le SaaS,un secteur inconnu du grand publicmais si essentiel à la bonne marchedes entreprises. n

GESTION

La start-up tricolore créée par l’ancien cofondateur de Criteo et une ex-investisseuse chez Index porte le total de ses fonds levés à 25,9 millions de dollars.

Son outil permet de planifier les finances de l’entreprise avec une approche de la donnée dynamique.

« Les outils ne sont plus adaptés. Trop souvent, les sociétés finissent par utiliser des tableurs classiques comme Excel, pas du tout dynamiques. Pourtant, le sujet est clé... »ÉLÉONORE CRESPOEx-Index Ventures

A date, une centaine de sociétés utilise déjà Teams augmenté des fonctionnalités de la jeune pousse.

C’est une période intense pour Naister. Cette jeune pousse créée en 2018 démarre la com-mercialisation de sa plateformed’automatisation de personna-lisation des contenus enrichis en même temps qu’elle acquiertl’agence Just Search. Le mon-tant de l’opération n’est pas divulgué, mais Raymond Boch, son gérant, prend 15,84 % des parts de Naister, tandis que ses 25 collaborateurs rejoignent la start-up parisienne.

« Dans le cadre des campa-gnes de marketing digital, certai-nes tâches sont encore manuel-les, comme la création d’une “landing page” », explique Ema-nuel Baudart, PDG et cofon-dateur de Naister. Nous avons décidé de racheter une agence et de faire pivoter son modèle. Ce qui nous permet d’accélérer la digitalisation de ses clients, mais aussi notre entrée sur le marché. » Dans le vaste terri-toire du ciblage publicitaire, le positionnement de Naister est très spécifique. Avec sa tech-nologie, la start-up automatise la personnalisation de l’offre d’un site en fonction des requê-tes envoyées sur Google par les consommateurs.

Des internautes insatisfaits des résultatsSelon Emanuel Baudart, un tiers des internautes ne seraienten effet pas satisfaits des pages sur lesquelles ils atterrissent après avoir mené une recher-che sur le moteur du géant amé-ricain. Naister exploite donc les contenus comme le texte, l’image ou la vidéo en structu-rant un message plus en phase grâce à un outil de machine learning. Après un bêta-test d’un an mené avec Disneyland Paris (28.000 mots-clés struc-turés), la pépite estime avoir suffisamment aboutit son produit pour démarrer sa commercialisation.

De son côté, Just Search, quicumule 5 millions d’euros de chiffre d’affaires pour 1 million de marge brute, compte déjà 45 clients (Airbus Défence and Space, SNCF Réseaux) qu’il con-seille en stratégie marketing. Une approche qui perdurera mais qui sera désormais enri-chie de la plateforme Naister.

Vers un nouveau financement dilutifPour le moment positionnée sur le référencement payant (SEA), la start-up ouvre aussi la voie vers d’autres niches comme les médias sociaux, avec une approche d’automati-sation basée sur sa technologie.Après une première levée de fonds de 1,5 million d’euros l’an passé, menée auprès de Habert Dassault Finance, du brésilien Lima Consulting et de business angels comme Catherine Barba, Naister se pose la question d’un nouveau financement dilutif, et ainsi doper ses chances de cons-truire un acteur de poids dans la martech tricolore.— G. B.

Naister s’offre l’agence Just Search

MARKETING

La start-up qui édite une solution d’auto-matisation de landing pages élargit sa palette avec cette opération.

L’acquisition inter-vient au moment de la commercialisa-tion de son produit.

Pigment, le nouveau challenger du logiciel de planification d’entreprise

son chemin avec un impact très concret pour les deux entités. Alorsqu’ils travaillent ensemble depuis 2018, Microsoft et la pépite rennaisepoussent un cran plus loin leur inté-gration. Désormais, c’est l’outil col-laboratif Teams qui bénéficie de certaines fonctionnalités dévelop-pées par Klaxoon.

« Dès 2019, nous avons mesuré unmeilleur degré de satisfaction chez nos clients utilisant les outils de Klaxoon, explique Carlo Puras-santa, vice-président de Microsoft France. Il est donc devenu importantpour nous de les intégrer dans notre parcours client Teams, notamment pour faciliter la créativité chez nos utilisateurs. » La pépite du Next 40 met au point des outils de collabo-ration dont l’utilisation a été dopée depuis le début du confinement

et l’explosion du télétravail. En s’associant encore davantage au géant américain, elle bénéficie d’unchemin tout tracé pour accélérer son internationalisation.

50 % de clients internationauxLes deux entreprises se sont mises d’accord pour prioriser ce déploie-ment au Royaume-Uni et en Alle-magne dans un premier temps, avant d’envisager de l’élargir en dehors de l’Europe. « La moitié de nos 5.000 clients sont déjà interna-tionaux, détaille Matthieu Beucher, PDG et cofondateur de Klaxoon. Mais leur croissance est trois fois supérieure à celle des entreprises françaises qui nous utilisent. » A date, une centaine de sociétés utili-sent déjà Teams augmenté des

fonctionnalités de la jeune pousse et l’objectif est de faire croître rapi-dement ce chiffre, tout en renfor-çant les synergies entre les deux produits. C’est l’équipe produit de Microsoft basée à Seattle qui avait rapidement repéré la start-up, alorsà ses débuts, et depuis, leurs servi-ces de R&D respectifs continuent de tisser des liens.

Avec ce partenariat, Klaxoonrejoint un programme d’accompa-gnement déjà étrenné avec succès

par des sociétés tricolores comme Talentsoft ou Cegid, et poursuit sa forte croissance. Interrogés depuis 2018 sur la signification d’un tel rap-prochement, les deux acteurs con-firment que cela ne présage pas un éventuel accord financier plus poussé. De son côté, Matthieu Beu-cher préfère louer la capacité de sonpartenaire à pousser des collabora-tions même sans être un client de ses produits.

Tandis que Carlo Purassanta nevoit pas d’opportunité à court ou moyen terme : « La discussion d’uneprise de participation ou d’une acqui-sition n’est pas planifiée. C’est l’évolu-tion du marché qui orientera un jourou pas ce débat. Pour le moment, il s’agit surtout d’aider à l’améliorationde la relation digitale au sein et entre les entreprises. » — G. B.

La collaboration entre les start-up et les grands groupes n’est pas tou-jours pavée que de bonnes inten-tions. Pourtant, la relation entre l’un des Gafam et Klaxoon poursuit

DIGITAL

L’outil collaboratif Teams intègredes fonctionnalités développées par la société rennaise.

Après la France, Microsoft va pousser son déploiement au Royaume-Uni et en Allemagne.

Klaxoon renforce son partenariat avec Microsoft pour s’internationaliser

Eléonore Crespo (ex-Google) et Romain Niccoli (cofondateur de Criteo) se sont rencontrés au sein du fonds Index Ventures. C’est là qu’ils ont identifié l’opportunité de créer Pigment, un logiciel de planification.

Pigm

ent

START-UP Les Echos Jeudi 3 décembre 2020

Page 28: Les Echos - 03 12 2020

Matthieu Quiret @MQuiret

La pandémie a poussé les entrepri-ses à donner un violent coup de freinà l’investissement, mais elles main-tiennent remarquablement leurs efforts dans la transition énergéti-que et numérique. L’étude annuelle de la Banque européenne d’investis-sement (BEI) qu’ont publié mardi « Les Echos » a interrogé les prati-ques de 13.500 sociétés de l’Union européenne. Elles confirment la baisse de 23,5 % des dépenses au deuxième trimestre 2020 par rap-

port au dernier trimestre 2019. L’an dernier, la part des entreprises euro-péennes ayant accru leurs investis-sements était 16 % supérieure à cel-les diminuant leur effort. Les prévisions pour 2020 sont très diffé-rentes puisque la part de celles bais-sant leurs investissements est 28 % plus élevée que celles les augmen-tant. L’écart est sensiblement plus marqué encore pour les entreprises françaises, à 34 %. Quant aux PME, elles sont plus enclines comme d’habitude à la prudence que les grands groupes. Plus de 40 % d’entreelles ralentissent leurs dépenses.

Au-delà de la réaction à courtterme à la crise, le co-auteur de l’étude Christoph Weiss et la chef-économiste de la BEI, Debora Revol-tella, pointent surtout le fait que les dirigeants gardent une stratégie de long terme. En effet, 47 % affirment investir dans des mesures d’effica-cité énergétique, alors qu’ils n’étaientque 40 % l’an dernier. Cette tendance

est encore plus forte en France, où 55 % déclarent doper ce type de dépenses, contre 31 % en 2019.

Audit énergétiqueLes entreprises françaises ont con-sacré cette année en moyenne 19 % de leur investissement à l’efficacité énergétique, contre 10 % l’an dernieret une moyenne européenne 2020 de 12 %. « Près de 60 % des entreprisesfrançaises interrogées ont réalisé un audit énergétique ces quatre dernièresannées, or c’est souvent le déclencheurd’investissements à venir », explique Christoph Weiss. Pour lui, c’est l’effetd’une politique nationale forte sur leclimat. Six entreprises sur dix recon-naissent que le changement climati-que a déjà un impact sur leurs mar-chés, 4 points de plus que la moyenne européenne. Si les PME nesemblent pas moins touchées, les grandes entreprises sont à 81 % prê-tes à investir face au risque climati-que, contre 59 % pour les plus peti-

tes. Une réserve qui s’explique notamment par les difficultés d’accès au financement, 67 % des PME évoquant cette raison, contre 52 % pour les autres.

La transition énergétique n’est pasla seule à faire l’objet d’arbitrages de crise. L’innovation, en particulier dans la numérisation, devient une priorité, une stratégie plus intuitive dans une époque du sans-contact roi. Un peu plus de la moitié des entreprises hexagonales disent avoir développé un nouveau produitou service numérique, en légère hausse sur un an. En revanche, les Français apparaissent en retard dans ce domaine, la moyenne euro-péenne dépassant les 60 %. Selon Christoph Weiss, les entreprises jugent que l’effet à long terme de la pandémie concernera moins les investissements et leurs marchés que l’emploi : un tiers des interro-gées s’attend à une réduction dura-ble des effectifs. n

Malgré la conjoncture, les entreprises françaises préservent leurs investissements vertsSi presque la moitié des sociétés françaises prévoient de réduire leur effort d’investissement en 2020, 55 % vont renforcer les projets d’efficacité énergétique. une proportion plus forte que la moyenne en Europe.

Léa Delpont— Correspondante à Lyon

« Pour la première fois de ma vie, j’aimanifesté », dit Loïc Renart, pro-priétaire de trois hôtels et d’un res-taurant à Lyon. Le président du groupe Globe et Cecil Développe-ment, 140 chambres et 5 millions d’euros de chiffre d’affaires, a défiléavec les restaurateurs et commer-çants trois lundis de suite, vêtu de noir, devant la préfecture du Rhône. « Durant le premier confi-nement, j’ai été un bon soldat. Mais,aujourd’hui, je suis révolté », expli-que le quadragénaire en colère, alors qu’Emmanuel Macron demande à la restauration de patienter jusqu’en 2021.

« Ce deuxième confinement estmarqué par une terrible iniquité », grogne l’hôtelier, sujet à des mou-vements d’humeur et d’irritabilitéqui ne lui ressemblent pas. Lui, l’aubergiste moderne toujours optimiste, au point de signer l’acquisition de son troisième éta-blissement le 1er octobre.« Psy-chologiquement, être classé non essentiel, c’est éprouvant », ajoute-t-il, frustré de ne pouvoir tra-vailler. Une pratique régulière de la méditation lui évite les problè-mes de sommeil de nombre de sesconfrères. Mais ce sportif modéré se surprend « à courir dix kilomè-

tres tous les matins depuis trente-deux jours. » Fin octobre, ce patronlongtemps engagé auprès du Cen-tre des jeunes dirigeants, actif au Lab bpifrance, a décidé de ne pas subir le deuxième confinement comme le premier.

Non soumis à une fermetureadministrative, il a voulu garder ses hôtels ouverts à tout prix, en l’occurrence 50.000 euros par mois pour tourner à vide… Les employés eux-mêmes préféraient venir travailler « pour être ensem-ble, plutôt que de rester chez eux, même avec un maintien de salaire à100 % », affirme Loïc Renart. Effet pervers : les lieux sans vie pesaientsur le moral des troupes. Il a fermédeux établissements sur trois, mais pas les réservations, les raresclients du Phénix et du Simplon étant automatiquement surclas-sés au 4-étoiles Globe&Cecil, avec room service.

10 % d’activité« On facture moins de 50.000 eurospar mois, à peine 10 % de notre chif-fre, mais on arrivera peut-être à ne pas perdre d’argent tout en ayant fait vivre notre communauté. » Les 45 employés, suivis par un cabineten risques psychosociaux, se par-tagent le chômage partiel et, à tourde rôle, le service, la veille, le ménage, ou ont trouvé des tâches utiles : changement du logiciel, petits travaux, livraisons de repas au Samu social pour le restaurant.

« On est prêt à rouvrir du jour aulendemain si l’activité reprend », espère l’hôtelier, peu optimiste cependant sur les congrès, dépla-cements professionnels et voyagesinternationaux. « Avec les aides, j’aide quoi tenir deux ans, mais je n’ai pas choisi d’être chef d’entreprise pour vivre sous perfusion. » n

Le propriétaire de trois hôtels à Lyon n’a pas voulu subir le deuxième confinement. Il a manifesté et gardé son principal établissement ouvert, malgré une activité quasi nulle. Pour maintenir à flot la communauté humaine de l’entreprise, à défaut de la comptabilité.

Loïc Renart, un hôtelier sur le pavé

présentation de l’industrie, secteur dans lequel la combativité et la rési-lience sont peut-être plus naturelles du fait de la longueur des cycles », convient Philippe Mutricy, qui fait toutefois valoir que 45 % des patrons de TPE et PME déclarent par ailleurs, dans un baromètre Bpifrance-Rexecode, ne pas avoir de difficultés de trésorerie insur-montables.

La vertu des comités de directionDans la tourmente, les chefs d’entreprise se sont d’abord appuyés sur leurs équipes, avant leur entourage personnel. Ils étaient, le mois dernier, 88 % à esti-mer ce soutien décisif pour l’avenir. Ce qui ressort plus généralement

est la vertu des échanges au sein desorganisations et autour de la table du comité de direction : les diri-geants entourés d’une équipe rap-prochée sont presque trois fois moins nombreux à éprouver un sentiment de solitude face à la criseque ceux qui en sont dépourvus, dequoi encourager les PME et les ETI àtravailler sur leur transformation managériale.

Mais la priorité des prochainessemaines, pour Bpifrance, opéra-teur du PGE pour l’Etat, consistera àcommuniquer largement sur un chiffre : 83 % des dirigeants interro-gés estiment que la crise va les inci-ter à accélérer le développement d’innovations. De quoi convertir ceux qui ont préféré geler leurs investissements ? n

l Une étude du think tank de la banque publique met en lumière la résistance des dirigeants de PME-ETI et leur volonté de continuer à saisir des opportunités. l Pour 83 % des interrogés, la conjoncture va les inciter à accélérer le développement d’innovations.

Pour Bpifrance, les chefs d’entreprise ont passé le plus dur de la crise

Valérie Landrieu @ValLandrieu

Les résultats de l’étude de Bpifrance« Résister et se relever : les diri-geants de PME-ETI à l’épreuve de lacrise » tranchent avec le paysage morose des enquêtes de conjonc-ture. Menée en juillet, auprès d’un échantillon aléatoire de 1.734 entreprises de 10 à 5.000 sala-riés, l’enquête a été réactualisée en novembre mais « le message qui en ressort demeure l’incroyable résis-tance de ces entrepreneurs », expli-que Philippe Mutricy, directeur des études de Bpifrance. Plus de 6 chefsd’entreprise sur 10 (67 %) interrogésentre le 1er et le 10 novembre dernierdéclaraient n’avoir jamais songé à abandonner la partie. Invités à noter leur forme physique et psy-chologique, ils s’accordent à peu de chose près une note moyenne cons-tante, aux alentours de 6 sur 10 en juillet et en novembre, et 69 % d’entre eux n’hésitent pas à se décla-rer « combatifs » quand 7 % se disent « abattus ».

« L’essentiel du choc est probable-ment derrière nous », estime, dans ces conditions, Philippe Mutricy. « Les chefs d’entreprise ont perdu en capital mental et entrepreneurial au printemps, lors du premier confine-ment, mais depuis ils résistent. Nous voyons des dirigeants présents, et quigardent leurs réflexes en dépit des dif-ficultés », confirme Elise Tissier, la directrice de Bpifrance Le Lab, le think tank de la banque publique, aux manettes pour cette étude.

Moins de 1 % des dirigeants parlent de dépôt de bilanQuand bien même la part de ceux qui craignent des difficultés finan-cières alarmantes sous six mois bondit de 7 % à 12 % entre juillet et novembre, Bpifrance veut voir un signe fort d’optimisme dans les 40 % qui n’en prévoient aucune à l’horizon juin 2021. Et dans les 47 %qui tablent sur des difficultés finan-cières modérées. Du reste, un autrechiffre frappe : moins de 1 % de ces dirigeants parlent de dépôt de bilan.Les autres enquêtes de conjonctureles évaluent plutôt à 4 % – haut de

ENTREPRISES

fourchette retenu par le gouverne-ment dans la loi de finances pour évaluer le risque de non-rembour-sement du prêt garanti par l’Etat

(PGE). Précision utile : l’étude ne s’est intéressée à aucune des 2 mil-lions de TPE françaises. Et, « nous avons chez les répondants une surre-

Les dirigeants entourés d’une équiperapprochée sont presque trois fois moins nombreux à éprouver un sentiment de solitude.

PME & REGIONS Jeudi 3 décembre 2020 Les Echos

Page 29: Les Echos - 03 12 2020

Les Echos Jeudi 3 décembre 2020 PME & REGIONS // 29

innovateurs

tion de principes actifs pour la pharmacie. « Nous poursuivrons le développement de ce site avec de nou-veaux investissements », assure d’ores et déjà Jean Bléhaut, prési-dent de la business unit « synthesis solutions » de Novasep.

Pour l’heure, le fabricant se doted’un nouvel atelier équipé de deux réacteurs de synthèse pour pro-duire des petits et des moyens volu-mes de principes actifs entrant dansla composition de thérapies ciblées.Un usage de plus en plus fréquent dans le secteur pharmaceutique quioblige le fabricant à façon à ajuster ses outils et l’organisation de ses productions. Le nouvel atelier de Novasep sera « extrêmement flexi-ble » pour pouvoir rapidement pas-ser d’une production à une autre et ainsi satisfaire les attentes des labo-

ratoires pharmaceutiques. Le pro-jet mobilise un investissement de 6,5 millions d’euros qui devrait être opérationnel en fin d’année pro-chaine. Doté de réacteurs montant rapidement en température, il per-mettra également à Novasep « de réduire les consommations d’énergie et d’optimiser les conditions de sécu-rité au travail des 260 salariés du siteisérois », fait valoir le producteur de principes actifs.

A la conquête de nouvelles parts de marchéComme toutes celles produites sur le site de Chasse-sur-Rhône, les molécules fabriquées dans le nou-vel atelier seront destinées à l’onco-logie, mais aussi à l’antibiothérapie ou aux affections de longue durée comme le diabète. Dans un premier

les géométries du moteur pour faire passer le nombre de pièces del’organe de combustion de plu-sieurs centaines à trois seule-ment. Et ainsi ramener son coût de fabricat ion à moins de 100.000 euros par unité », souli-gne Stanislas Maximin, l’un des trois cofondateurs de la start-up.Côté performances, le Navier, dont les tests s’étaleront jusqu’à fin 2022, pourra afficher une poussée de 1,6 tonne pour placeren orbite des « nanosatellites », de plus en plus répandus dans les télécommunications, la sur-veillance de phénomènes terres-tres ou la météo.

Mise en orbite en 2024La société ne compte pas s’arrê-ter là. La prochaine génération de moteur est déjà en prépara-tion et les 14 membres de son équipe, issus de l’Estaca, de Supaero ou de l’Ensma, tra-vaillent sur le lanceur. Nommé « Zéphyr », il devrait être capabled’envoyer des satellites en orbitebasse. « Notre ambition est de devenir le premier opérateur de lancement sur le marché des nanosatellites », détaille-t-il. Un premier vol suborbital est prévud’ici à trois ans et les premières mises en orbite dès 2024. D’ici là,l’entreprise prévoit d’investir 70 millions d’euros à Reims pour son développement et d’embaucher plus de 80 person-nes. Dans cet objectif, elle bou-cle premier financement, qui sera suivi par une série A de 3,5 millions d’euros, annoncée pour septembre prochain. n

LA TECHNOLOGIE VENTURE ORBITAL SYSTEMS

Date de création : 2019Président et cofondateur : Stanislas MaximinEffectif : 14 personnesSecteur : Spatial

Guillaume Roussange— Correspondant à Amiens

La miniaturisation impacte tousles secteurs à l’instar du spatial, en particulier les satellites. Or, cette réduction d’échelle se heurte à un problème de taille : laquestion des lanceurs, conçus pour envoyer en orbite des objetslourds, donc coûteux à convoyer.La solution à ce problème pour-rait venir d’une start-up fran-çaise : Venture Orbital Systems (VOS). Implantée à Reims, elle ambitionne de révolutionner l’industrie des lanceurs. Son arme ? L’impression métallique 3D grâce à laquelle la jeune entreprise a conçu un nouveau moteur allégé et « imprimable » en moins d’une semaine.

Baptisé « Navier », ce propul-seur, développé en interne et soutenu à hauteur de 50.000 euros par l’agence spatiale fran-çaise, sera produit par Lisi Aerospace. « Nous avons repensé

Vent

ure O

rbita

l Sys

tem

s

Un moteur de lanceur allégé et imprimé en 3D

bagageries connectées. Les utili-sateurs peuvent ainsi se délesterde leur casque ou autres saco-ches et poussette, mais aussi se renseigner sur les horaires de train ou l’agenda touristique de la ville. « Notre objectif est d’équi-per des sites touristiques, des bords de plage, des parvis de gare,partout où les gens ont potentiel-lement besoin de laisser des affai-res dans un lieu sécurisé », expli-que Tony Lara.

Levée de fonds en 2021Créé l’an dernier, Casebook s’est jusque-là concentré sur le déve-loppement de sa bagagerie con-nectée en collaboration avec desentreprises locales. « Nous som-mes partis d’une borne interac-tive fabriquée par la société drô-moise IPM France, et les casiers sont réalisés par Simef Industrie en Savoie », précise Tony Lara. La jeune entreprise souhaite mettre les bouchées doubles surla commercialisation et se rémunère sur la vente des casiers et leur maintenance, en revanche l’intégralité des recet-tes va au propriétaire de la baga-gerie. De prime abord, Case-book avait ciblé les exploitants de sites touristiques et les collec-tivités locales, qui restent ses priorités malgré la crise. Les quatre premières bagageries connectées ont été installées cet été dans l’Ain, l’Hérault et les Hautes-Pyrénées. Pour accélé-rer ses ventes, la start-up espèrelever 400.000 à 500.000 euros début 2021. n

La bagagerie connectée à une application mobile

Date de création : 2019DG : Tony LaraEffectif : 2 personnesSecteur : Services

Françoise Sigot — Correspondante à Lyon

C’est un fait, les cyclistes commeles motards ou les randonneurs,n’ont souvent guère de solutionspour s’alléger de leurs effets per-sonnels, le temps d’une course ou d’une visite touristique. Par-tant de ce constat, Franck Viola et Tony Lara, les fondateurs de Casebook, ont créé une bagage-rie connectée. A première vue, elle ressemble fort aux casiers de piscine ou de consigne, avec une dose d’intelligence en plus. Les casiers sont, en effet, équipésd’une borne munie d’un écran qui permet non seulement de gérer les locations, mais aussi d’accéder à des informations. Une application mobile couplée à la bagagerie physique permet, par ailleurs, de gérer à distance la réservation et de localiser ces

Case

book

Nicole Buyse— Correspondante à Lille

Derrière les murs de brique de l’ancien siège de cette usine de chaussettes, à Roubaix (Nord), s’activent une centaine de couturiè-res et couturiers. Certains assem-blent des masques, d’autres des bonnets, t-shirts ou tot bags. Cet ate-lier a été créé ex nihilo au moment

L’atelier de fabrication de masques Résilience pérennisé à Roubaix

du confinement, en même temps que sa maison mère, Résilience. « Ila totalisé jusqu’à 275 personnes, sou-ligne sa directrice, Stéphanie Cal-vino. De mai à la fin juillet, on fabri-quait 25.000 masques par jour. » Devenu entreprise d’insertion en septembre, l’établissement a péren-nisé 92 emplois : 30 CDI, 60 CDD d’insertion et 15 encadrants. Ils seront bientôt 110 pour faire face à une nouvelle commande de mas-ques (450.000 pour l’association Savoir faire ensemble).

Résilience a été financé grâce audon d’un peu moins de 1 million d’euros du fonds Afir de la famille Leclercq (fondatrice de Decathlon) et d’un prêt de 600.000 euros de la famille Sisley (groupe de cosméti-ques). Basée à Marcq-en-Baroeul (Nord), la structure a très vite acheté 220 machines à coudre, dont130 pour l’atelier de Roubaix, et

répartit le reste entre une soixan-taine d’autres entreprises d’inser-tion en France. Pierre Guérin, prési-dent de Résilience, précise que 20 millions de masques ont été fabriqués au total « alors qu’on en prévoyait 2 millions au départ ».

DiversificationCela a permis de créer 2.500 emploisde réinsertion entre mars et mai, dont un millier a été pérennisé depuis. Car chacun a réfléchi à la confection d’autres produits. L’ate-lier de Roubaix s’est mis à faire des

shorts pour Decathlon, puis des bonnets, toujours pour Decathlon, qui cherche à relocaliser certaines productions. Il fabrique aussi des tabliers pour Le Bon Coin ou encoredes sacs à linge pour un hôpital.

Et, à la rentrée, Résilience, quifonctionne comme une plateforme logistique, a lancé la fabrication de t-shirts, pourvus du label écores-ponsable Low Impact. « Le coton estproduit, filé et tissé en Grèce, ache-miné par voie ferroviaire en France »,souligne Christophe Lépine, cofon-dateur de Résilience. Découpés à Paris chez Intertex, les kits sont dis-patchés entre les ateliers d’inser-tion. Une agence de pub parisienne en a commandé 1 million pour ses goodies, la ville de Roubaix 50.000. L’atelier de Roubaix sera bientôt agrandi de 1.000 mètres carrés, doublant de surface pour monter son propre service de coupe. n

HAUTS-DE-FRANCE

La société née pendant le premier confine-ment pour fabriquer des masques confec-tionne aujourd’hui bonnets, t-shirts et tabliers dans son atelier roubaisien.

temps, cet outil industriel devrait permettre de satisfaire les com-mandes de clients existants, mais Novasep mise aussi sur ce nouvel équipement pour conquérir plus departs de marché.

« En trois ans, le site a doublé sonchiffre d’affaires », explique le prési-dent de la business unit « synthesis solutions » de Novasep, qui ne pré-cise pas son montant. Pour assurer cette croissance, Novasep a aug-menté les capacités de son unité pilote. Il a aussi mis en service, il y adeux ans, une unité de production àbasse température. Les réacteurs de synthèse en cours d’installation viendront compléter ce « panel de technologies » sur lequel mise le sous-traitant pour poursuivre le développement de son site de Chasse-sur-Rhône. n

nes de Cyrene par an, soit dix fois plus que la production actuelle-ment assurée par Circa en Tasma-nie, et générer 48 emplois. Le con-seil régional du Grand Est se félicite

déjà de l’arrivée de ce nouvel acteur,mais le calendrier du projet n’est pas encore connu. « La plateforme Chemesis propose des services mutualisés, dispose de toutes les

autorisations nécessaires et offre un vivier de gens qui connaissent bien lachimie. L’aide de Total et la proximitéimmédiate de l’Allemagne, où les innovations environnementales sonttrès bien accueillies, contribuent à son succès », souligne Eric Lecomte,directeur d’investissement pour le fonds SPI de bpifrance. L’organismefinance à Carling ses deux seuls projets du Grand Est, l’un et l’autre d’origine auvergnate.

Près de 100 millions d’euros d’investissementMetex Noovista finalise la construc-t i o n d ’ u n e u s i n e q u i p r o -duira 5.000 tonnes de propanediol (PDO), un solvant et conservateur qui intervient dans les cosmétiques,et 1.000 tonnes d’acide butyrique par an. Ce dernier est un ingrédientqui a des bénéfices pour la santé et la croissance des animaux. Le site représente un investissement de 48 millions d’euros pour une cin-quantaine d’emplois.

Le biochimiste Afyren confirmepour sa part un investissement de 60 millions d’euros pour créer une usine de molécules extraites de sous-produits de betterave. Le site de 60 salariés produira des compo-santes biosourcées utilisées dans l’alimentation humaine en tant queconservateurs ou aromates, dans lanutrition animale et dans les indus-tries cosmétique et chimique. Les deux entrepreneurs auvergnats trouveront en Allemagne des approvisionnements en matière première et un marché potentiel. n

Pascale Braun— Correspondante à Metz

Haut lieu historique de la pétrochi-mie, la plateforme de Carling en Moselle continue d’attirer les jeu-nes pousses de la chimie verte. L’association Chemesis, qui regroupe une dizaine d’entreprises employant 1.200 salariés au pied des installations de Total, compte deux nouveaux membres. Metex Noovista achève la construction d’une usine d’acide organique, et Afyren Neoxy posera au début décembre la première pierre d’un site de molécules biosourcées.

Une troisième implantation seprofile avec l’australien Circa Group, qui pourrait fabriquer à Carling un solvant extrait de molé-cules de bois : le Cyrene, qui pré-sente de multiples applications dans les fluides fonctionnels, dont l’encre pour textile et papier. Cofi-nancée à hauteur de 11,6 millions d’euros par l’Union européenne dans le cadre du projet ReSolute, l’usine devrait produire 1.000 ton-

GRAND EST

Après les auvergnats Metex Noovista et Afyren Neoxy, l’austra-lien Circa est pressenti sur la plateforme Chemesis. Il produit un solvant extrait de molécules de bois.

La plateforme de Carling attire les usines de la chimie verte

La plateforme regroupe une dizaine d’entreprises employant 1.200 salariés au pied des installations de Total. Photo DR

Novasep dope ses capacités de production de principes actifs

2.500EMPLOISde réinsertions ont été créés entre mars et mai.

L’INVENTION CASEBOOK

Françoise Sigot — Correspondante à Lyon

Sur ces quatre dernières années, Novasep aura consacré plus de 20 millions d’euros d’investisse-ment à son site de Chasse-sur-Rhône en Isère, la plus importante usine du groupe dédiée à la fabrica-

AUVERGNE-RHÔNE-ALPES

Le producteur de composants pour l’industrie pharmaceu-tique investit 6,5 mil-lions d’euros dans un nouvel atelier destiné aux petits volumes.

Page 30: Les Echos - 03 12 2020

Sollicités par l’Etat pour soutenir davantage les commerçants fragi-lisés par le Covid, les assureurs sont aussi appelés à contribuer au projet imaginé par les pouvoirs publics pour aider les entreprises françaises à repartir de l’avant, après la crise. Le dispositif, dont lespremières bases ont été présentéescet été mais dont les contours res-tent à préciser, vise à donner plus de marges de manœuvre financiè-res aux entreprises, grâce à des

prêts participatifs. Ces prêts de 7 à 8 ans, qui pourraient représenter jusqu’à 20 milliards d’euros, s’apparentent à des quasi-fonds propres et ont vocation à amélio-rer la solvabilité des entreprises enrenforçant leur capital. Celles-ci seraient ainsi plus à même d’inves-tir en période de relance.

Pour mettre en musique ce sys-tème, les pouvoirs publics , aujourd’hui dans l’attente du feu vert de Bruxelles, comptent notamment sur les assureurs, poids lourds de l’investissement. Les banques distribueraient ces instruments de quasi-fonds pro-pres, mais ceux-ci seraient finan-cés par des investisseurs attirés, enthéorie, tant par la rémunération –on parle d’un taux de 3 à 5 % – que par la garantie de l’Etat qui pour-rait aller jusqu’à 35 %.

Sur le papier, les assureurs, quise savent attendus par le gouver-

nement, reconnaissent que ces investissements pourraient offrir des perspectives intéressantes alors que les obligations d’Etat affichent des taux négatifs. Pour autant, à l’heure où l’endettement des entreprises a flambé et où la crise fait redouter des faillites, ils ne sont pas prêts à participer sanscondition.

Placer avec prudence« Il est clair qu’on va toujours regar-der les opportunités d’investisse-ment, mais cela doit se faire claire-ment dans notre standard, car à la fin on investit l’argent de nos clients,cela doit se faire dans le meilleur intérêt de nos clients », a souligné lepatron de l’assureur AXA, ThomasBuberl, lors d’une conférence mardi, rappelant que son groupe apar ailleurs promis 500 millions d’euros pour renforcer les fonds propres d’entreprises françaises.

« Nous parlons là de l’argent desassurés, a aussi prévenu Florence Lustman, présidente de la Fédéra-tion française de l’assurance, lors d’une audition devant les parle-m e n t a i r e s l a s e m a i n e d e r -nière. Notre responsabilité à leur égard nous impose donc de placer avec prudence ces montants. Certes,un peu de rendement est souhaita-ble, mais nous devons avant tout préserver leur épargne. »

Les assureurs attendent ausside savoir comment ces potentiels investissements seront considérés par la régulation du secteur : Solva-bilité 2. « Combien un investisse-ment de 100 euros dans ces prêts participatifs coûte-t-il en fonds pro-pres ? Quel sera le traitement comp-table de ces produits ? Il conviendra de le savoir lorsque le produit nous sera présenté de manière com-plète », a insisté Florence Lustman — S. P.

Le secteur reste prudent face aux prêts participatifs pour les entreprises fragiliséesConçus pour aider les entreprises à rebondir après la crise, les prêts participatifs sont présentés comme des investisse-ments attractifs pour les assureurs dans un environ-nement de taux bas. Mais ceux-ci rappellent qu’ils sont d’abord responsables de l’argent des assurés.

Thibaut Madelin @ThibautMadelin

l Menaçant le secteur d’une taxe, le ministre de l’Economie réclame « au moins » un gel des primes d’assurancespour les cafés, hôtels et restaurants contraints à la fermeture par la crise du Covid.l Une disposition qui a des chances d’être accueillie favorablement, dans la mesure où certains disent l’avoir déjà actée.

Hôtellerie-restauration : Le Maire pose un ultimatum aux assureurs

« C’est le geste minimal que je demande [aux assureurs], qu’ils gèlent les primes d’assurance », pour les hôtels, cafés et restaurants,a déclaré le ministre de l’Economie, Bruno Le Maire. Photo Ludovic Marin/AFP

Solenn Poullennec @SolennMorgan

Nouveau coup de pression sur les assureurs. Mardi soir, le ministre del’Economie, Bruno Le Maire, leur a demandé de s’engager « au moins » sur un gel des primes pour les cafés,hôtels et restaurants. Faute de quoi, l’exécutif pourrait laisser adopter par les parlementaires une taxe coû-tant 1,2 milliard d’euros au secteur. « C’est le geste minimal que je leur demande, qu’ils gèlent les primes d’assurance, et je pense qu’ils peuventfaire encore un peu mieux, a déclaré mardi soir le ministre Bruno Le Maire, interrogé sur la chaîne de télévision LCI, à l’issue d’une réu-nion avec les représentants du sec-teur. Ils ont jusqu’à lundi prochain pour le faire. »

Le secteur a déjà annoncé desmesures de soutien aux entreprises,notamment en dotant le fonds de solidarité de 400 millions d’euros enfaveur des entreprises et des indé-pendants, mais « ce n’est pas suffi-sant », selon le ministre.

Un prélèvement« très brutal »Ces déclarations interviennent après que le Sénat a adopté un amendement lors des débats sur le budget 2021 instaurant une « taxa-tion exceptionnelle de solidarité » de2 % assise sur les primes des contratsd’assurance-dommages. Ce prélève-ment estimé à 1,2 milliard est « très brutal pour les assureurs », a reconnuBruno Le Maire alors que l’exécutif apar ailleurs décidé de taxer les assu-reurs-santé à hauteur de 1,5 milliard.Ce constat n’a pas empêché le minis-tre de prévenir que, « si lundi pro-chain, il n’y a aucun geste qui est fait, [...] on adoptera cet amendement ».

« Il y a des marcheurs qui pour-raient être favorables à cette taxe. Il y ale sentiment dans tous les groupes politiques que les assureurs ne font pas le job. Il y a une pression de l’opi-nion publique », explique Valé-ria Faure -Muntian, députée (LREM). Le gouvernement s’est dit défavorable à la taxe, lors des débatsau Sénat, mais il peut être d’autant plus sensible aux signaux envoyés par les parlementaires de son bord que les discussions autour de la loi de « sécurité globale » ont tourné à l’affrontement avec la majorité.

« On voit bien qu’on est dans uneproblématique politique », constate

ASSURANCE

Face à la crise, l’Autorité bancaire européenne (EBA, en angais) réac-tive son régime exceptionnel sur lesmoratoires. Après l’avoir stoppée en septembre, jugeant alors la situation économique rassurante, le régulateur des banques euro-péennes a annoncé mercredi matinune reprise de l’application de ses lignes directrices sur les mora-toires jusqu’au 31 mars 2021.

Une mesure censée être excep-tionnelle, qui illustre la crainte des autorités face au risque de resserre-ment du crédit en Europe et de dété-rioration des bilans des banques. « Avec le déploiement continu de la pandémie Covid-19, il est essentiel queles banques continuent de fournir desprêts à l’économie réelle », a indiqué l’EBA dans un communiqué.

En temps normal, un prêt quin’est pas remboursé au bout de troismois est automatiquement consi-déré comme non performant. La banque doit alors passer une provi-sion dans ses comptes. Grâce à ces lignes directrices, les établisse-

ments bancaires peuvent accorder des moratoires supplémentaires sans que cela n’affecte leur bilan. « Avec les nouvelles mesures de confi-nement, il y a des phénomènes saison-niers à prendre en compte dans la dis-

tribution du crédit, explique aux « Echos » Isabelle Vaillant, direc-trice de la régulation à l’EBA. Cer-taines entreprises, grandes ou petites,ont peut-être besoin de cette liquidité à nouveau ou désormais, alors qu’elles avaient peut-être pu passer lecap dans la saison précédente. »

Un coup de pouce pour l’écono-mie mais aussi pour les banques. Selon l’EBA, les moratoires accor-dés aux entreprises et aux ménagesreposent sur un montant total de prêts de 871 milliards d’euros. Ce quicorrespond à environ 6 % de l’encours total des prêts bancaires dans la zone euro. Avec 255 mil-liards au 30 juin, la France est championne d’Europe.

Le nouveau régime dérogatoirepourrait repousser le moment fati-

dique où les banques se trouveront confrontées à une montagne de prêts non performants, auxquels elles ne pourront plus faire face. Unrisque déjà identifié par la Banque centrale européenne (BCE), qui invite les banques à mettre plus d’argent de côté pour se préparer aux impayés.

Deux garde-fousL’enjeu est donc d’éviter une forme de normalisation de cette mesure exceptionnelle sur les moratoires, introduite une première fois pour trois mois en mars, puis prolongée de juin à septembre. L’EBA veut limiter ce risque à l’aide de deux garde-fous. Premièrement, les moratoires ne pourront pas excé-der une durée de neuf mois au total.

Deuxièmement, le régulateurimpose aux banques un devoir d’alerte vis-à-vis de leur supervi-seur. « Les banques doivent mettre sur la table un plan de surveillance de leurs crédits en risque », insiste Isabelle Vaillant. Ces plans régu-liers doivent inclure des points par secteur d’activité (stations de ski, librairies…).

« La banque continue de menerson appréciation comptable de ces prêts et des provisions, même si elle lefait avec une plus grande liberté, défend la régulatrice. Par ailleurs, on lui demande ces plans de sur-veillance. » Pour elle, la question est « indépendante » de celle d’autori-ser à nouveau les banques à verser des dividendes, qui sera tranchée mi-décembre. n

BANQUE

Pour éviter un resser-rement du crédit, l’Autorité bancaire européenne (EBA) réactive son régime exceptionnel sur les moratoires.

Les banques pourront de nouveau accorder des différés de remboursement à leurs clients.

L’Autorité bancaire européenne réactive les moratoires

Un coup de pouce pour l’économiemais aussi pour les banques.

Thierry Martel, le patron de Grou-pama et par ailleurs représentant des assureurs mutualistes au sein dela Fédération française de l’assu-rance (FFA). « Ce n’est pas compliqué pour le secteur mutualiste de s’enga-ger dans des gels de primes, on pense tellement que c’est légitime qu’on l’a déjà fait », avance-t-il, affirmant que les assureurs vont plancher sur d’autres propositions.

Dans la majorité, Valéria Faure-Muntian évoque pour sa part l’idée d’élargir le gel aux contrats de santé et prévoyance des entreprises et à d’autres acteurs que les hôteliers et les restaurateurs, pour en faire béné-ficier le tourisme, les loisirs, les dis-cothèques, les activités sporti-ves, etc. Selon nos informations, la piste d’un geste en faveur des assurésautomobile a aussi été évoquée. Ceciserait bien vu des associations de consommateurs, qui ont réclamé des ristournes. Cette solution aurait cependant rencontré beaucoup d’opposition.

Depuis le début de la crise, lesassureurs sont dans le viseur des clients et des politiques. Ils ont été accusés de se défausser de leurs obli-gations de couverture des pertes desentreprises. On leur a aussi reprochéde profiter de la baisse des dépenses de santé et de celle des accidents d’automobiles pendant le confine-ment. Le sort des hôteliers et des res-taurateurs, touchés de plein fouet par les confinements, cristallise tou-tes les tensions.

Elles ont monté d’un cran depuisque les assureurs ont demandé à certains clients d’accepter des ave-nants précisant qu’ils ne seront pas couverts à l’avenir contre les consé-quences d’une pandémie. De leur côté, les assureurs considèrent que les critiques qui leur sont adressées sont souvent « injustes ». Ils disent avoir mis 2,1 milliards d’euros sur la table pour aider les entreprises, sousforme d’aides financières, d’annula-tions de loyers ou encore de remisesde primes. Ils reconnaissent avoir fait des « économies » sur l’automo-bile, mais évaluent malgré tout l’aug-mentation de la charge des sinistres liée à la crise à 2 milliards. n

Depuis le début dela crise, les assureurs sont dans le viseur des clientset des politiques.

FINANCE & MARCHES Jeudi 3 décembre 2020 Les Echos

Page 31: Les Echos - 03 12 2020

Les Echos Jeudi 3 décembre 2020 FINANCE & MARCHES // 31

L’euro face au dollar

Janv.

1,22

1,20

1,18

1,16

1,14

1,12

1,10

1,08

1,06Févr. Mars Avril Mai Juin Juil. Août Sept. Oct. Nov.

1,1213 1,2080*

« LES ÉCHOS » / SOURCE : BLOOMBERG / PHOTO : ISTOCK*EN SÉANCE

L’euroa augmenté

de 7,6 %depuis le début

de l’année.

Guillaume Benoit @gb_eco

La révélation a créé un certain malaise dans l’univers feutré des « ECB watchers », ces économistes spécialisés dans le suivi de la Ban-que centrale européenne. Philip Lane, l’économiste en chef de la BCE,a mené plusieurs entretiens indivi-duels avec des stratégistes de ban-ques et de grandes sociétés de ges-tion dans la foulée des conférences de politique monétaire. On compte parmi ces derniers BlackRock, UBS,AXA, Goldman Sachs, Citi, BNP Paribas, ou Pimco. Une pratique quia commencé le 12 mars dernier, selon le « Wall Street Journal », qui aépluché les agendas de Philip Lane publiés sur le site de la BCE.

Ce jour-là, une formule mala-droite de Christine Lagarde, sur le fait que la BCE n’était pas là pour réduire les écarts de taux entre les pays de la zone euro, avait immé-diatement fait bondir les taux ita-liens. La présidente de la BCE a rec-tifié le tir quelques minutes plus tard. De son côté, Philip Lane a décroché son téléphone pour une mise au point, appelant, un par un,une dizaine d’économistes. Il avait publié une note de blog explicative le lendemain. Il a ensuite renouvelérégulièrement l’exercice, au moins jusqu’en septembr,e selon les der-niers agendas publiés.

IncompréhensionJusqu’ici, l’institution s’était mon-trée extrêmement prudente et avaitmême revu ses pratiques en 2015 après la communication d’infor-mations sur l’évolution du pro-gramme d’achat d’actifs lors d’un dîner regroupant des hedge funds, sans publication simultanée sur le

site de la BCE. D’où l’incompréhen-sion chez certains acteurs, notam-ment ceux qui n’ont pas été invités às’entretenir avec Philip Lane, et qui aimeraient connaître la nature des discussions. « Je suis évidemment un peu jaloux parce qu’il ne m’a jamais appelé, a ainsi confié Antoine Bouvet, stratégiste taux chez ING à Bloomberg. Je ne sais pasquel était le contenu de ces appels mais il s’en est peut-être tenu au script des mises à jour de son blog après la réunion. »

« En toute transparence : c’est dans mon agenda »Selon plusieurs sources contactéespar « Les Echos », aucune informa-tion nouvelle n’a été communiquéeà cette occasion. Philip Lane lui-même s’est défendu mardi soir, lorsd’une intervention dans un forum organisé par Reuters. « Il s’agit d’une approche structurée et systé-matique dans le cadre de laquelle nous faisons tourner différents ECB watchers, a-t-il indiqué. En toute transparence : c’est dans mon agenda. » Il a précisé qu’il s’agissait essentiellement de vérifier com-ment les informations communi-quées avaient été reçues « pour voirs’il y a des questions, pour entendre les réactions des ECB watchers ». « C’est tout à fait conforme aux prin-cipes clés de l’interaction avec le mar-ché par rapport aux informations déjà publiées », a-t-il ajouté, souli-gnant par ailleurs que des mem-bres de l’équipe de la BCE avaient assisté à chacun des entretiens.

« Bien sûr, il est essentiel que la BCEreste en contact avec les marchés, et entretienne avec eux un dialogue régulier, explique un ancien habitué des couloirs de l’institution. Mais le format utilisé me paraît peu adapté. »Surtout, ces appels, qui ont lieu très peu de temps après la conférence depresse, pourraient donner l’impres-sion qu’ils réduisent l’importance decet événement, qui a toujours été considéré comme le principal canalde communication de la banque centrale. n

Imbroglio autour de la communication de la Banque centrale européennePhilip Lane, économiste en chef de la BCE, s’est entretenu individuellement avec des banques et des investisseurs à l’issue des conférences de politique monétaire.

Avant la réunion de la BCE lasemaine prochaine, les avis restent tranchés. Les hedge funds parient modestement sur la hausse de l’euro,alors que les spéculateurs indivi-duels anticipent la baisse de la deviseeuropéenne par rapport au dollar, selon l’analyse de la banque Citi. De leur côté, les particuliers clients des courtiers en ligne sont pessimistes sur l’euro depuis mai. Les hedge funds ont été neutres (printemps, été) puis positifs à partir de septem-

bre sur les perspectives d’évolution de la monnaie européenne.

L’année prochaine, le consensusdes économistes et stratèges établi par l’agence Bloomberg prévoit un euro entre 1,20 et 1,23 dollar. Gold-man Sachs anticipe une remontée de l’euro face au billet vert à 1,25 dol-lar dans 12 mois et 1,28 dollar en 2022. Société Générale prévoit que la devise européenne grimpera à 1,23 dollar l’été prochain et 1,27 dol-lar dans 12 mois. n

Nessim Aït-Kacimi @NessimAitKacimi

L’euro est repassé au-dessus du niveau de 1,20 dollar pour s’établirmercredi à 1,2080 dollar, soit un gainde 7,6 % depuis le début de l’année. Ila atteint 1,2110 dollar au plus haut de la séance de mercredi. Il a progressé de 6,6 % par rapport à la livre sterlinget de 3,2 % contre le yen. Il est stable face au franc suisse. Le regain de vigueur de la devise européenne contraste avec son passage à vide au début de la pandémie. A l’époque certains stratèges prédisaient mêmeque l’euro pourrait plonger et attein-dre la parité avec le dollar.

Sa hausse généralisée (+ 6,1 % deson taux de change en 2020) est malvenue pour la Banque centrale européenne (BCE) car elle aug-

mente le risque de déflation. Les exportateurs voient en effet leur compétitivité dégradée sur les mar-chés étrangers et notamment outre-Atlantique. « Si l’on excepte le premier trimestre de 2018, l’euro est àson plus haut niveau face au dollar depuis décembre 2014. C’était un mois avant que la BCE annonce son plan d’assouplissement quantitatif au début de 2015 », constate Robin Brooks, chef économiste à l’Institut de la finance internationale.

Il faudra plusque des déclarationsLa hausse de l’euro met au défi la BCE qui doit annoncer des mesuresde soutien lors de sa réunion du 10 décembre. Sans annonce forte, lamonnaie européenne pourrait s’installer au-delà de son seuil de tolérance de 1,20 dollar. Il faudra plus que des déclarations de la BCE et des interventions verbales pour

le faire reculer. A l’été et en septem-bre, elles avaient permis de gagner un peu de temps mais sans changerla psychologie du marché.

« La BCE ne peut pas faire grand-chose pour s’opposer à une hausse del’euro au-delà de 1,20 », estime George Saravelos, stratège à la Deutsche Bank. Cette progression est facilitée par un affaiblissement généralisé du dollar sur lequel la BCE n’a pas d’emprise. Le stratège anticipe un niveau de 1,22 à 1,23 dol-lar en fin d’année à moins que la Banque centrale ne baisse forte-ment son taux de dépôt en décem-bre. « Une baisse des taux en décem-bre pourrait ramener l’euro sous 1,17 dollar », estime Jordan Roches-ter, de la banque Nomura. A moyenterme, la dynamique des flux finan-ciers (investissements sur les actions européennes) devrait, entreautres facteurs, favoriser l’euro et l’amener vers 1,25 à 1,30 dollar.

l A 1,2080 dollar, l’euro gagne 7,6 % cette année.l La hausse de l’euro met au défi la BCE, qui doit annoncer des mesures de soutien lors de sa réunion du 10 décembre.

L’euro repasseau-dessusde 1,20 dollar,un défi pour la BCE

DEVISE

EUROPE MATIN7H - 9H

MATTHIEU BELLIARD

Du lundi au vendredi avec Sonia Mabrouk,Nicolas Canteloup et toute la rédaction.

Janet Yellen devrait respec-ter l’indépendance de la Réserve fédérale et ne pas militer pour des assouplissements monétaires, qui de toute façon, seraient, selon elle, d’un effet limité dans le con-texte actuel. A l’inverse, Donald Trump ne s’est pas privé de faire pression sur la Fed pour baisser lestaux d’intérêt et indirectement le billet vert, trop fort, selon lui.

Equilibre et apaisementC’est le Trésor qui a la charge de la politique de change des Etats-Unis. Il peut décider dans des circonstan-ces exceptionnelles que la Fed intervienne sur le marché pour vendre ou acheter des dollars. « Janet Yellen ne devrait pas décider d’interventions pour orienter la valeur du dollar dans un sens ou un autre, mais seulement pour restau-rer le calme après un mouvement très désordonné et volatil du marché,prédit Matthew Luzzetti, chef éco-nomiste chargé des Etats-Unis à la Deutsche Bank. Elle devrait s’abste-nir de faire baisser le dollar par ses déclarations et s’en tenir à sa préfé-rence pour un environnement de dol-lar fort et stable, dont le cours est du seul ressort des marchés ». En sur-

face en tout cas, la politique en matière de change devrait être plus équilibrée et apaisée que sous l’administration Trump, en guerre contre les pays accusés de mener des dévaluations compétitives au détriment des Etats-Unis.

Dans une conférence organiséeen février 2019 par la Brookings Institution, l’ancienne présidente de la Fed admettait que « la valeur des monnaies est un sujet de contro-verse dans les discussions commer-ciales ». Mais elle va prendre ses fonctions dans un contexte moins tendu grâce à la remontée de la devise chinoise, en hausse de 7,2 %sur les 12 derniers mois. « La nou-velle secrétaire au Trésor pourrait ne pas se contenter de répéter le dogme du dollar fort dans l’intérêt des Etats-Unis de ses prédécesseurs. Par le passé en tant que présidente de la Fed, elle avait d’ailleurs pointé les effets néfastes d’un dollar fort surla croissance américaine et le déficitcourant » estime Zach Pandl, coresponsable de la stratégie sur les changes, taux d’intérêt et émer-gents à la banque Goldman Sachs.

Les marchés anticipent unepoursuite de la baisse du billet verten 2021, mais modeste, autour de

Janet Yellen devra accompagner la baisse du billet vert sans provoquer de krach

Lorsque les médias américains ont annoncé la probable nomina-tion, désormais officielle, de Janet Yellen, ancienne présidente de la Réserve fédérale, comme secré-taire au Trésor, le dollar a cédé 0,3 %. « Elle juge que la politique monétaire ne peut à elle seule faire sortir l’économie américaine de la crise du Covid-19 », estime la ban-que Nomura. La politique budgé-taire doit à ses yeux prendre le relais (hausse des dépenses, assu-rance-chômage, soutiens aux sec-teurs sinistrés…). Or, le plan de soutien pour lutter contre la pan-démie va faire déraper le déficit budgétaire et les dépenses publi-ques, et donc peser sur le dollar. Passé les 100 jours de sa période degrâce, les marchés des changes sanctionneront plus durement le billet vert si ces mesures n’ont fait qu’augmenter la dette sans effet notable sur la croissance et l’emploi.

La future secrétaire au Trésor américain veut apporter un soutien rapide et fort à l’économie pour la sortir de la crise sanitaire et de la dépression.

« La BCE ne peut pas faire grand-chose pour s’opposer à une hausse de l’euro au-delà de 1,20. »GEORGE SARAVELOSStratège à la Deutsche Bank

2 %, selon le consensus des prévi-sions de Bloomberg. Il a déjà cédé 7,5 % depuis le début de l’année. Un des défis pour Janet Yellen serad’accompagner ce mouvement de baisse sans provoquer une crise deconfiance à l’égard du dollar qui menacerait le financement des déficits américains par les investis-seurs étrangers. — N. A.-K.

La Fed et le dollarDurant les quatre années de présidence de la Réserve fédérale (2014-2018) de Janet Yellen, le dollar a progressé de 13,7 %. Le billet vert avait grimpé à l’annonce de sa nomination. Le dollar a enregistré sous son leadership à la Fed sa deuxième meilleure perfor-mance depuis plus de trente ans. Il avait connu sa plus forte hausse sous le qua-trième mandat d’Alan Greenspan (1998-2002) quand il gagna 19 %. Il per-dit le quart de sa valeur les quatre années suivantes.

Page 32: Les Echos - 03 12 2020

32 // FINANCE & MARCHES Jeudi 3 décembre 2020 Les Echos

APPELÀ CANDIDATURESPOUR LE PRIX

ÉDITION 2020

Vous êtesétudiantes ou alternantes

dans le domainedes services énergétiques

Vous exercez depuisplus de trois ans un

métier technique en lien avecla transition énergétique

Vous êtesen dernière année

de CAP, BEP, Bac PRO,Bac +2/3, Bac +4/5

ALORS CE PRIX EST FAIT POUR VOUS !Pour candidater, rendez-vous sur le site

www.women.dalkia.fr et déposez votre dossierau plus tard le 31 décembre 2020.

EN PARTENARIAT AVEC :

Non seulement les marchésa c t i o n s o n t e n r e g i s t r é d e sh a u s s e s s p e c t a c u l a i r e s e nnovembre, mais en plus l’envi-ronnement de taux s’est amélioréaux Etats-Unis.

Contrairement aux empruntsd’Etat ou aux actions, le métal pré-cieux ne rapporte rien, ni coupon ni dividende. Toutefois, quand les

taux d’intérêt sont inférieurs à l’inflation, l’or permet de se proté-ger contre les taux réels négatifs. La chute des taux réels américainsà –1 % avait dopé les cours de l’or à l’été dernier. Ce n’est plus le cas actuellement.

L’optimisme sur les marchés setraduit aussi par une chute des paris à la hausse sur l’or. Selon les

données de la CFTC, un des princi-paux régulateurs financiers aux Etats-Unis, les positions longues des spéculateurs n’ont jamais été aussi faibles depuis dix-huit mois.

Sorties massivesdans les ETF orEnfin, l’euphorie des investisse-ments via les fonds indiciels (ETF)

adossés à l’or s’essouffle. SelonBloomberg, les ETF or ont plongéde 100 tonnes en novembre. Ils’agit de la première sortie men-suelle en un an et de la plus impor-tante en près de quatre années.« Les investisseurs ETF sont doncdevenus un facteur négatif pourl’or, après avoir soutenu les prixentre avril et août avec leursachats », explique Carsten Fritsch,de Commerzbank. Cette baisseva-t-elle se poursuivre ? Lesobservateurs sont sceptiques etestiment les fondamentauxencore positifs pour l ’or. Lademande en Asie montre dessignes de reprise, le dollar conti-nue de baisser, le stock mondialde dette à taux négatif a atteint unn o u v e a u r e c o r d , à p l u s d e17.000 milliards.

Une Fed toujoursaccommodante« Nous pensons aussi que les vaccins changent la donne à moyen terme, mais la réaction des investisseurs paraît précipitée », écrit-on chez UBS. La vaccination va encore pren-dre du temps, et, en outre, la transi-tion entre les administrations Trump et Biden ne se fera pas tout en douceur. Tous ces facteurs « aug-mentent les chances que la Fed conti-nue de renforcer son assouplisse-ment quantitatif et achète des obligations de longue durée », expli-quent les analystes d’UBS. In fine, les anticipations d’inflation pour-raient grimper, faire baisser les tauxréels et donc soutenir l’once. n

Etienne Goetz @etiennegoetz

La pandémie de Covid-19 avait donné un coup de fouet à l’envolée des cours de l’or l’été dernier. Le métal jaune avait même battu son précédent record historique, à 1.911dollars l’once, pour en installer un nouveau, au-dessus des 2.000 dol-lars. Certains analystes estimaient possible de le voir grimper jusqu’à 2.300 dollars. Depuis son pic au début août, l’or a toutefois perdu près de 15 %, pour évoluer autour des 1.800 dollars ces derniers jours.En novembre, il a perdu 5,4 %, enregistrant au passage son pire mois depuis novembre 2016.

Le retour de l’appétitpour le risqueAvec l’élection de Joe Biden etl’annonce de la découverte deplusieurs vaccins efficaces à plusde 90 %, le sentiment de marchés’est inversé. Alors que les inves-tisseurs cherchaient par tous lesmoyens à se protéger, ils retrou-vent de l’appétit pour le risque.

MATIÈRESPREMIÈRES

La perspectivede sortie de la crise sanitaire et de hausse des taux met les cours du métal précieuxsous pression.

Métaux : pourquoi l’or perd de son éclat après avoir enregistré un record historique

titre que les risques de crédit ou dechange. » En 2025, la proportiond’actifs gérés durablement chezles grands investisseurs aura dou-blé, passant de 18 % à 37 %, selonun sondage de BlackRock auprèsde 425 institutions, égalementpublié ce jeudi.

152 milliards de dollars d’encours durablesLes premiers effets de son offensivecommerciale se font déjà sentir. Surles neuf premiers mois de l’année, BlackRock a collecté 39 milliards dedollars sur ses stratégies durables. Avec l’effet de la variation des mar-chés, les encours de ces produits ont augmenté de 45 milliards à la fin septembre, à 152 milliards de dollars. Mais ils représentent à peine 2 % des actifs totaux de BlackRock. La proportion monte à 9 % en y ajoutant les 573 milliards de dollars logés dans des fonds d’exclusion, qui restent à l’écart de certaines valeurs comme les armes ou les énergies fossiles.

Dans les 152 milliards de dollarsde fonds durables, il faut distinguerla gestion active de la gestion pas-sive. Les fonds indiciels cotés (ETF) dits « ESG » pèsent pour un tiers desencours durables, soit 50 milliards. BlackRock balaie les interrogationssur l’engagement de ces produits, par définition suivistes. « Le MSCI adéjà beaucoup d’indices durables et nous avons travaillé avec les FTSE Russell et Markit pour qu’i ls adaptent certains de leurs indices », pointe Stéphane Lapiquonne. BlackRock revendique 141 ETF ESG,90 de plus qu’à la fin 2019 et se rap-proche de son objectif pluriannuel de 150 produits.

Outre l’élargissement de lagamme de fonds, « nous avons atteint notre objectif d’intégrer les c r i t è r e s E S G d a n s 1 0 0 % d e nos 5.600 stratégies de gestion active [soit 2.700 milliards de dollars d’encours, NDLR], contre 75 % à la

fin mai, indique Carole Crozat, responsable de la recherche théma-tique chez BlackRock. Il ne s’agit pasd’exclure des valeurs, mais de res-ponsabiliser nos gérants, qui doivent tenir compte, dans leurs choix de ges-tion, des dimensions ESG essentiellespour atteindre leur objectif de perfor-mance de long terme ».

Enfin, BlackRock a commencé àmuscler son rôle d’actionnaire. Minoritaire au capital, il a souvent une présence significative dans de nombreuses entreprises cotées. En 2021, le gestionnaire a l’intention devoter contre les directions généra-les, en l’absence de progrès sur le climat, dans 244 sociétés sur un panel de 440 entreprises qui sont àl’origine d’environ 60 % des émis-sions mondiales de carbone.

Pas de oui systématique aux résolutions climatMais, dans les assemblées généra-les tenues entre août 2019 et août 2020, le groupe s’est seule-ment prononcé en faveur de 11 % des résolutions climatiques dépo-sées par des actionnaires pour infléchir la politique des sociétés cotées, a regretté ce mardi l’ONG ShareAction. « Nous votons essen-tiellement contre la nomination d’administrateurs mais pas forcé-ment pour les résolutions climat, qui ne sont pas toujours pertinen-tes , rétorque Stéphane Lapi-quonne. Il est parfois plus efficace de ne pas s’exprimer par le biais desrésolutions mais en travaillant avecle management des entreprises. En matière de vote, nos motivations sont pragmatiques et non idéologi-ques. » Cette année, BlackRock a par exemple voté contre la résolu-tion climat présentée chez Total, et soutenue par La Banque PostaleAsset Management (AM) et le Cré-dit Mutuel AM. Il a en revanche soutenu celle destinée à infléchir la stratégie du groupe pétrolier américain ExxonMobil. n

Amélie Laurin @AmelieLaurin

Après les engagements, le bilan. BlackRock dévoile ce jeudi les premiers résultats de son virage vert, annoncé en janvier dernier parson PDG, Larry Fink, dans sa très attendue lettre annuelle aux inves-tisseurs. Scrutée de près en tant quepremier gestionnaire d’actifs mon-dial, avec 7.800 milliards de dollars d’actifs, la société américaine a entrepris de rénover sa gamme de produits pour prendre davantage en compte les critères ESG (envi-ronnementaux, sociaux et de gouvernance) et renforcer son rôle d’actionnaire.

« L’année 2020 a marqué l’accé-lération d’un processus entamédepuis plusieurs années, et nousavons rattrapé notre retard sur nospairs européens, déclare StéphaneLapiquonne, directeur de Blac-kRock France et coresponsablede l’Europe continentale. Nousmettons les bouchées doubles pourrépondre aux besoins de réalloca-tion des actifs des investisseurs, quiont pris conscience des risques cli-matiques et environnementaux, etde leur influence sur les perfor-mances des entreprises, au même

GESTION D’ACTIFS

Depuis ses promesses de janvier, le premier gestionnaire d’actifs mondial a augmentésa collecte et son catalogue de fondsaux critères environ-nementaux, sociauxet de gouvernance.

Mais ces derniers pèsent toujours moins de 2 % des encours.

BlackRock dévoile ses progrès en matière de finance durable

Les marchés actions ont enregistrédes hausses spectaculairesen novembre.

Page 33: Les Echos - 03 12 2020

Les Echos Jeudi 3 décembre 2020 FINANCE & MARCHES // 33

loin d’une disparition accélérée de la monnaie fiduciaire comme le clamentcertains. » Des acteurs organisent même la résistance de ce moyen de paiement. Le transporteur de fonds Brink’s, dont le dirigeant, Patrick Lagarde, se dit « rassuré » par les conclusions de l’étude de la BCE, a ainsi annoncé la semaine dernière avoir offert l’installation d’une cin-quantaine de distributeurs automa-tiques de billets (DAB) aux commu-nes qui n’en possèdent plus, ainsi qu’un an de gratuité d’exploitation.

Avec les fermetures d’agencesbancaires, des centaines de villages perdent en effet leur DAB. « Nous avons reçu un grand nombre de demandes de la part des maires de cescommunes, ajoute-t-il. Sans accès aux espèces, ce sont les commerçants qui sont impactés, notamment les commerçants nomades, mais égale-ment la ville. Les habitants sont souvent contraints de faire leurs cour-ses dans la commune voisine. » n

Gabriel Nedelec @GabrielNedelec

Ce n’est toujours pas la chute bru-tale que ses détracteurs lui souhai-tent, mais le déclin du cash est bel etbien là. C’est la conclusion d’une vaste étude de la Banque centrale européenne (BCE) sur l’usage des espèces au sein de la zone euro publiée mercredi, trois ans après lesderniers chiffres sur le sujet.

En moyenne, 73 % des transac-tions de la zone euro ont été réali-sées en espèces en 2019, contre 79 %trois ans plus tôt. Elles ne représen-tent en revanche plus que 48 % de lavaleur totale des échanges, contre 54 % précédemment. L’argent liquide reste donc loin devant les autres types de paiement, dont la carte, qui a représenté 24 % des transactions l’an passé et 41 % des montants. « Si l’on compare les tran-sactions en espèces et en cartes, en termes de nombre et de valeur, on peut en déduire que les paiements en espèces sont généralement plus fai-bles en valeur », souligne l’étude.

6 transactions sur 10Le déclin du cash est cependant plus ou moins prononcé d’un Etat membre à l’autre. En France, par exemple, où les espèces étaient déjàmoins utilisées qu’ailleurs du fait dela popularité de la carte bancaire, labaisse est plus marquée. Les Fran-çais ont utilisé la monnaie sonnanteet trébuchante pour régler 6 tran-sactions sur 10 en 2019, contre

PAIEMENT

Les paiements en espèces ont représenté 73 % de l’ensembledes transactions réalisées en 2019 dansla zone euro, contre 79 % en 2016, selonune étude de la BCE.

En France, le recul du cash est plus marqué, passant de 68 % à 59 % en trois ans.

Le cash continue son lent déclin en Europe

Répartition des moyens de paiement En %, en volume

Espèces Espèces

Autres(chèque,virement,paiementmobile,etc.)

Autres(chèque,virement,paiementmobile,etc.)

Cartes Cartes

France Zone euro

« LES ÉCHOS » / SOURCE : BCE

2016

2019

2016

2019

68 %

27 %

5

279 %

19 %

59 %

35 %

3

6

73 %

24 %

Tous les jours40 millions de personnes

nous écoutent.

La radio c’est + de 40 millions d’auditeurs quotidiensdepuis 10 ans, toutes classes d’âges et CSP confondues.

La Radio. Les voix qui nous lient.

Médiamétr ie - 126 000 Radio cumul sept N- ju in N+1 sur 10 dern ières sa isons, aud ience cumulée Tota l Rad io ,Lu-Ve, 5h00-24h00, 13 ans+. Co

ncep

tion

grap

hiqu

e:

en bref

Will Smith investit dans une néobanque pour adosBANQUE La start-up californienne Step a réussi à séduire de nom-breuses célébrités, dont le chanteur Justin Timberlake, l’acteurWill Smith (photo) via son fonds Dreamers VC, ou encore l’ancienquarterback Eli Manning, afin de boucler son dernier tour de tablede 50 millions de dollars (mené par Coatue Management). Lancée ily a deux mois, la néobanque, qui propose un compte et une cartebancaire pour adolescents, revendique déjà 500.000 clients auxEtats-Unis.

Niel, Pigasse et Zaouri ont déjà levé 250 millions d’euros pour leur SPACBOURSE Entre lundi matin et mardi soir, le véhicule nouvellementconstitué, 2MX Organic, a déjà collecté 250 millions d’euros.Cette SPAC, ou société spécifiquement dédiée à une ou plusieursacquisitions, a prévu d’investir dans des biens de consommationdurables. Elle pourrait lever jusqu’à 300 millions d’euros. Le livred’ordres sera clos lundi prochain. Les investisseurs prennent unticket minimum de 1 million d’euros.

AFP

7 trois ans plus tôt. En valeur, le cashne représente plus en 2019 qu’un quart du total des montants réglés, contre 28 % trois ans plus tôt.

En Europe, les plus gros utilisa-teurs d’espèce sont les Maltais (88 %des transactions), les Chypriotes et les Espagnols (83 %). A l’inverse, c’est en Finlande (35 %) et aux Pays-Bas (34 %) que le cash est le moins utilisé. La BCE relève cependant que les usages réels contrastent avec les préférences affichées par les Européens. Ainsi, seuls 27 % d’entre eux disent préférer payer enespèces, contre 49 % qui préfèrent, pour des questions de confort, payer par carte ou avec un autre moyen de règlement. En France, lesaficionados de l’argent liquide ne sont plus que 9 %, alors qu’ils étaient17 % il y a trois ans.

SoulagementDepuis plusieurs années, les espè-ces laissent progressivement la place à d’autres moyens de paie-ment, notamment digitaux. Outre la carte bancaire, elles subissent la concurrence du commerce en ligne, du paiement sans contact ou encore, dans une moindre mesure, du paiement mobile.

Mais, pour les acteurs de la filièrefiduciaire, qui attendaient impa-tiemment les chiffres de la BCE, les conclusions de l’étude sont plutôt unsoulagement. « Cette évolution était a t t e n d u e , c o m m e n t e M a r c Schwartz, le patron de la Monnaie de Paris, chargée de la frappe moné-taire en France. Mais ce que l’on cons-tate, c’est que les espèces restent le moyen de paiement le plus utilisé en Europe, et même en France. On est

« On est loind’une disparition accéléréede la monnaie fiduciairecomme le clament certains. »MARC SCHWARTZPatron de la Monnaie de Paris

Page 34: Les Echos - 03 12 2020

34 // FINANCE & MARCHES Jeudi 3 décembre 2020 Les Echos

CAC 40

VALEURS MNÉMO / INFO / OUV CLOT % VEIL % AN BPAOST VOL. + HAUT % MOIS + HAUT AN PERISIN / DEVISE / DATE DÉTACH. / DIV NB TITRES + BAS % 52 S. + BAS AN RDT

AIR LIQUIDE (AI) R A 136,5 135,35 - 0,88 + 7,25 683430 137,2 + 4,84 144,45 FR0000120073 11/05/20 2,7 473.593.425 135,35 + 13,17 94,86 2AIRBUS GROUP (AIR) R A 89,96 91,32 + 2,15 - 30,01 3,4 1943603 91,77 +44,75 139,4 26,90NL0000235190 15/04/19 1,4 784.149.270 89,7 - 29,63 48,12 1,81ALSTOM (ALO) R A 45,99 45,55 - 0,72 + 16,32 1046937 46,17 +29,27 46,956 FR0010220475 15/07/19 5,5 226.894.751 45,48 + 24,84 27,567 ARCELORMITTAL (MT) R A 16,084 16,358 + 0,54 + 4,58 8126844 16,444 +36,54 16,85 LU1598757687 16/05/19 0,15 1.102.809.772 15,93 + 7,05 5,98 ATOS SE (ATO) R A 75,8 74,28 - 1,9 - 0,05 522281 75,96 +26,33 82,46 FR0000051732 03/05/19 1,7 109.993.166 74,26 - 1,59 43,26 AXA (CS) R A 19,718 19,968 + 0,77 - 20,48 7548882 20,025 +39,09 25,615 FR0000120628 07/07/20 0,73 2.417.778.069 19,56 - 18,21 11,844 3,66BNP PARIBAS (BNP) R A 43,925 44,95 + 1,69 - 14,92 4994809 45,07 +44,42 54,22 FR0000131104 29/05/19 3,02 1.249.798.561 43,315 - 10,72 24,505 BOUYGUES (EN) R A 34,48 34,8 + 1,58 - 8,13 1196284 35,01 +20,08 41,32 FR0000120503 09/09/20 1,7 380.654.936 34,35 - 4,45 22,27 4,89CAP-GEMINI (CAP) R A 116,05 114,25 - 1,51 + 4,91 407839 116,55 +13,23 121,65 FR0000125338 03/06/20 1,35 169.449.699 113,25 + 9,49 51,78 1,18CARREFOUR (CA) R A 13,75 13,595 - 1,13 - 9,06 2803776 13,75 + 0,55 16,915 FR0000120172 08/06/20 0,23 817.623.840 13,49 - 8,02 12,095 1,69CREDIT AGRICOLE (ACA) R A 10,18 10,375 + 1,67 - 19,73 7725943 10,375 +48,6 13,8 FR0000045072 24/05/19 0,69 2.884.688.712 10,07 - 15,92 5,7 DANONE (BN) R A 52,82 52,2 - 1,17 - 29,36 1902857 52,86 + 9,21 75,16 FR0000120644 14/07/20 2,1 686.629.600 51,96 - 28,73 46,03 4,02DASSAULT SYSTEMES (DSY) R A 153,9 152,7 - 0,55 + 4,2 240729 155 + 4,98 164,15 FR0000130650 28/05/20 0,7 264.919.418 152,15 + 9,38 105 0,46ENGIE (ENGI) R A 12,635 12,8 + 2,32 - 11,11 1,21 8067807 12,8 +20,7 16,795 10,61FR0010208488 21/05/19 0,8 2.435.285.011 12,58 - 8,96 8,626 ESSILORLUXOTTICA (EI) R A 125,6 126,05 + 0,24 - 7,18 829600 127,7 +18,64 145 FR0000121667 21/05/19 2,04 438.611.346 125,15 - 7,59 86,76 HERMES INTL (RMS) R A 820,8 827,2 + 0,58 + 24,17 47286 832,2 + 3,22 865 FR0000052292 28/04/20 3,05 105.569.412 819,4 + 24,39 516 0,37KERING (KER) R A 607,9 605,1 - 0,46 + 3,4 115415 607,9 +14,82 628,2 FR0000121485 23/06/20 4,5 126.279.322 601,8 + 11,97 348,55 0,74L.V.M.H. (MC) R A 495 497,85 + 0,22 + 20,2 353373 497,95 +22,73 499,5 FR0000121014 01/12/20 2 504.757.339 494,25 + 25,55 278,7 0,4LEGRAND (LR) R A 70,5 69,88 - 1,22 - 3,8 446098 70,8 + 8,11 77,94 FR0010307819 01/06/20 1,34 267.447.746 69,68 - 2,02 45,91 1,92L'ORÉAL (OR) R A 306,6 306,4 + 0,03 + 16,06 374308 307,4 + 7,93 321,4 FR0000120321 03/07/20 3,85 559.856.576 304,4 + 21,73 196 1,26

MICHELIN (ML) R A 106,35 104,4 - 1,97 - 4,31 577995 106,9 +12,62 112,8 FR0000121261 01/07/20 2 178.339.302 103,8 - 2,7 68 1,92ORANGE (ORA) R A 10,635 10,735 + 1,04 - 18,18 7867415 10,74 +10,83 13,545 FR0000133308 02/06/20 0,2 2.660.056.599 10,53 - 25,35 8,632 1,86PERNOD-RICARD (RI) R A 161,6 159 - 1,64 - 0,25 615815 161,6 +13,57 171,1 FR0000120693 08/07/20 1,18 261.876.560 158,9 - 1,97 112,25 0,74PEUGEOT (UG) R A 20,03 19,98 - 0,79 - 6,2 2749176 20,03 +26,26 22,01 FR0000121501 02/05/19 0,78 894.828.213 19,685 - 7,2 8,878 PUBLICIS GROUPE (PUB) R A 38,97 39,32 - 0,08 - 2,58 1084532 39,34 +30,07 43,7 FR0000130577 07/09/20 1,15 247.748.484 38,26 + 0,38 20,94 2,93RENAULT (RNO) R A 33,95 34,73 + 1,45 - 17,66 1701689 34,895 +61,5 43,365 FR0000131906 18/06/19 3,55 295.722.284 33,84 - 19,63 12,77 SAFRAN (SAF) R A 122,3 123,75 + 0,77 - 10,1 849555 124,15 +35,19 152,3 FR0000073272 27/05/19 1,82 427.235.939 121,6 - 14,57 51,1 SAINT-GOBAIN (SGO) R A 39,85 39,25 - 2,07 + 7,53 1477098 39,89 +12,3 40,8 FR0000125007 10/06/19 1,33 535.683.713 39,01 + 6,83 16,408 SANOFI (SAN) R A 84 84,04 - 0,07 - 6,23 1876918 84,39 + 5,87 95,82 FR0000120578 04/05/20 3,15 1.258.964.700 83,53 + 1,84 67,65 3,75SCHNEIDER ELECTRIC (SU) R A 116,4 114,95 - 1,58 + 25,63 1125877 116,75 + 6,63 121,8 FR0000121972 05/05/20 2,55 567.068.555 114,6 + 32,89 61,72 2,22SOCIÉTÉ GÉNÉRALE (GLE) R A 17,54 17,914 + 2,1 - 42,24 5964541 17,962 +47,76 32,23 FR0000130809 27/05/19 2,2 853.371.494 17,39 - 36,97 10,774 STMICROELETRONICS (STM) R A 34,32 33,38 - 2,65 + 39,26 0,23 2811388 34,4 +25,16 34,4 146,88NL0000226223 21/09/20 0,04 911.204.420 33,04 + 53,12 13,73 0,13TELEPERFORMANCE (RCF) R A 275,2 271,9 - 1,81 + 25,07 241182 275,4 + 2,6 297,3 FR0000051807 02/07/20 2,4 58.730.600 266,8 + 28,98 150,3 0,88THALES (HO) R A 77,5 78,02 + 0,44 - 15,67 388645 78,14 +35,03 99,96 FR0000121329 01/12/20 0,4 213.364.420 77,18 - 9,89 52,5 0,51TOTAL (FP) R A 35,75 36,71 + 1,05 - 25,39 7736394 36,79 +35,51 50,93 FR0000120271 25/09/20 0,66 2.653.124.025 35,55 - 22,03 21,12 1,8UNIBAIL-R/WFD (URW) R A 62,6 63,4 + 1,08 - 54,92 813176 64,1 +85,16 142,05 FR0013326246 24/03/20 5,4 138.472.385 61,56 - 54,58 29,08 VEOLIA ENV. (VIE) R A 19,915 20,16 + 1,18 - 14,97 3403143 20,62 +21,45 29,09 FR0000124141 12/05/20 0,5 567.266.539 19,85 - 11,38 15,675 2,48VINCI (DG) R A 87,44 88,4 + 0,32 - 10,71 1078488 88,98 +25,6 107,35 FR0000125486 23/06/20 1,25 613.519.218 87,4 - 8,72 54,76 1,41VIVENDI (VIV) R A 25,18 25,2 + 0,08 - 2,4 2860200 25,33 + 0,04 26,65 FR0000127771 21/04/20 0,6 1.185.842.163 25,13 + 2,69 16,6 2,38WORLDLINE (WLN) G A 76,5 75,12 - 2,11 + 18,95 653585 77,4 +17,82 82,66 FR0011981968 279.122.471 74,9 + 31,33 36,36

A.S.T. GROUPE (ASP) g C 4,18 3,98 - 5,01 + 10,86 4037 4,18 + 5,57 4,3 FR0000076887 19/06/19 0,25 12.903.011 3,98 + 28,8 1,82 AB SCIENCE (AB) g B 10,38 10,4 + 0,58 + 93,31 149494 10,5 +12,31 13,78 FR0010557264 45.145.024 10 + 91,18 4,81 ABC ARBITRAGE (ABCA) g B 7,46 7,38 - 0,94 + 10,15 20312 7,46 + 1,1 7,58 FR0004040608 06/10/20 0,1 58.512.053 7,37 + 10,98 5,05 1,36ABIVAX (ABVX) g B 24 23,7 - 1,04 + 5,1 14610 24 +25,8 25 FR0012333284 13.851.239 23,2 +103,96 10,4 ACCOR (AC) LR A 29,66 30 + 1,42 - 28,14 983709 30,04 +34,11 42,24 FR0000120404 10/05/19 1,05 261.288.260 29,38 - 21,4 20,15 ACTIA GROUP (ATI) g C 2,72 2,7 - 0,37 - 37,35 27252 2,72 +42,71 4,625 FR0000076655 21/09/20 0,15 20.099.941 2,68 - 31,73 1,74 5,56ADOCIA (ADOC) g B 8 8,03 + 0,88 - 18,89 18731 8,15 +25,47 16,18 FR0011184241 6.977.854 7,92 - 6,95 5,6 AÉROPORTS DE PARIS (ADP) G A 106 105,8 + 0,1 - 39,92 99192 107,1 +22,45 179,2 FR0010340141 06/12/19 0,7 98.960.602 104,8 - 39,99 70,7 AIR FRANCE-KLM (AF) LR A 5,268 5,126 - 0,85 - 48,35 4657575 5,29 +73,76 10,27 FR0000031122 14/07/08 0,58 428.634.035 5,084 - 50,9 2,614 AKKA TECHNOLOGIES (AKA) Gg B 26,3 26,05 - 0,76 - 56,25 41141 26,45 +60,41 62,273 FR0004180537 28/06/19 0,49 20.291.990 25,45 - 47,99 14,54 2,69AKWEL (AKW) g B 20,65 20,3 - 0,25 + 0,5 12126 20,65 +30,13 20,8 FR0000053027 08/06/20 0,2 26.741.040 20,3 - 0,49 8,8 0,96ALBIOMA (ABIO) Gg B 43 41,95 - 2,78 + 61,35 36152 43,3 - 0,12 47,6 FR0000060402 11/06/20 0,35 31.641.910 41,95 + 86,03 22,85 0,83ALD (ALD) G A 11,1 11,16 + 0,9 - 19,36 95740 11,26 +13,65 14,2 FR0013258662 29/05/20 0,63 404.103.640 10,98 - 18,66 6,29 5,65ALPES (CIE DES ) (CDA) g B 19,7 20,05 + 2,19 - 32,83 16997 20,1 +44,45 30,95 FR0000053324 10/03/20 0,7 24.510.101 19,68 - 29,65 13,16 3,49ALTAREA (ALTA) A 138 138,4 - 31,65 4067 139,8 +22,48 210 FR0000033219 06/07/20 4,5 17.275.839 137 - 29,03 103,2 ALTEN (ATE) G A 90,65 89,25 - 1,22 - 20,67 35087 90,65 +28,05 119 FR0000071946 20/06/19 1 34.205.863 88,7 - 14,02 54,5 AMUNDI (AMUN) G A 67,05 67,3 + 0,52 - 3,72 EX-DS 15/03/17 127644 67,65 +17,25 78,55 FR0004125920 24/05/19 2,9 202.585.953 66,45 - 1,54 43,82 ARCHOS (JXR) g C 0,035 0,034 - 0,58 - 67,85 7697229 0,037 + 1,78 0,115 FR0000182479 167.279.961 0,033 - 60,46 0,025 ARGAN (ARG) A 80,4 79,2 - 1 + 2,06 1825 80,4 - 2,46 93 FR0010481960 26/03/20 1,9 22.309.227 79 + 7,03 54 ARKEMA (AKE) LR A 96,64 96,12 - 0,85 + 1,5 224902 97,12 +12,68 99,52 FR0010313833 25/05/20 2,2 76.736.476 95,12 + 2,28 42,5 2,29ARTMARKET.COM (PRC) g C 7,52 7,74 - 0,26 - 18,61 9380 7,78 +15,18 10,1 FR0000074783 6.651.515 7,48 - 12,74 5,01 ASSYSTEM (ASY) B 25 24,5 + 0,2 - 24,15 OPA 24/11/17 15007 25 +11,36 34,65 FR0000074148 08/07/20 1 15.668.216 24,4 - 21,1 16,58 4,08ATARI (ATA) g C 0,377 0,377 - 0,27 + 14,38 1762747 0,382 - 5,75 0,494 FR0010478248 269.809.814 0,367 + 23,45 0,17 AUBAY (AUB) g C 33,7 33 - 2,22 - 1,35 9548 33,7 +13,6 35 FR0000063737 06/11/20 0,33 13.208.296 33 - 2,51 15,32 1AXWAY SOFTWARE (AXW) g B 23,7 23,7 - 0,42 + 91,13 1393 23,7 +15,05 24,5 FR0011040500 02/07/19 0,4 21.316.266 23,4 +106,09 10,55 BAINS MER MONACO (BAIN) B 63,8 62 - 2,82 + 8,01 334 63,8 67,6 MC0000031187 26/09/14 0,01 24.516.661 62 + 15,24 44 BÉNÉTEAU (BEN) g B 8,88 8,86 - 0,23 - 18,19 103310 9,04 +14,54 10,9 FR0000035164 12/02/20 0,23 82.789.840 8,83 - 16,73 4,9 2,6BIC (BB) G A 51,1 49,76 - 2,53 - 19,74 91853 51,15 +20,37 66,05 FR0000120966 01/06/20 2,45 45.532.240 49,38 - 19,29 38,5 4,92BIGBEN INT. (BIG) g C 17,76 18,16 + 4,37 + 13,22 141836 18,48 +24,9 18,48 FR0000074072 24/07/19 0,2 19.969.658 17,7 + 20,26 8,1 BIOMÉRIEUX (BIM) G A 119,2 119 - 0,08 + 49,97 119560 120,8 - 6,89 144,8 FR0013280286 14/07/20 0,19 118.361.220 118 + 47,83 75 0,16BOIRON (BOI) g A 38,3 37,65 - 1,83 + 3,43 4240 38,3 - 1,57 44,8 FR0000061129 02/06/20 1,05 17.545.408 37,6 + 12,05 26,75 2,79BOLLORÉ (BOL) G A 3,27 3,242 - 0,86 - 16,66 1384377 3,27 + 2,01 3,996 FR0000039299 02/09/20 0,02 2.946.208.874 3,2 - 14,59 2,01 0,62BONDUELLE (BON) g B 19,8 19,8 - 15,02 22953 20 + 6,8 23,9 FR0000063935 06/01/20 0,5 32.538.340 19,68 - 16,81 16,58 2,53BUREAU VERITAS (BVI) LR A 21,66 21,85 + 1,02 - 6,06 650947 21,85 +14,19 26,01 FR0006174348 20/05/19 0,56 452.204.032 21,49 - 6,58 15,165 BURELLE SA (BUR) A 800 784 - 1,75 - 4,16 416 800 +53,73 842 FR0000061137 03/06/20 15 1.757.623 784 - 0,76 407 1,91CARMILA (CARM) g C 12,42 12,88 + 2,22 - 35,6 179922 13,1 +87,48 20 FR0010828137 03/07/20 1 142.357.425 12,42 - 28,36 6,54 CASINO (CO) G A 24,5 24,56 + 0,57 - 41,1 191324 24,64 +20,63 42,85 FR0000125585 09/05/19 1,56 108.426.230 24,14 - 38,14 19,045 6,35CATANA GROUP (CATG) g C 2,89 2,78 - 3,81 - 35,8 150822 2,89 +42,27 4,49 FR0010193052 30.514.178 2,72 - 7,49 1,7

CGG (CGG) G A 0,91 0,92 + 0,02 - 68,23 19665058 0,932 +82,14 3,121 FR0013181864 711.324.929 0,866 - 60,61 0,443 CHARGEURS (CRI) g C 17,78 17,54 - 1,24 + 1,5 58337 17,8 + 2,69 24,1 FR0000130692 16/09/20 0,28 24.211.232 17,42 + 14,19 7,9 1,6CHRISTIAN DIOR (CDI) A 430,2 432,8 + 0,51 - 5,25 EX D OP 08/06/17 3424 433 +17,23 479,8 FR0000130403 01/12/20 2 180.507.516 429 - 7,52 252,4 0,46CNP ASSURANCES (CNP) G A 13,76 13,72 - 0,58 - 22,62 530881 13,79 +38,94 18,17 FR0000120222 26/04/19 0,89 686.618.477 13,45 - 24,16 5,3 COFACE (COFA) G A 8,68 8,71 - 0,12 - 20,6 185593 8,79 +27,15 12,51 FR0010667147 22/05/19 0,79 152.031.949 8,47 - 12,81 4,448 COLAS (RE) A 113,5 114 + 0,89 - 19,03 452 114,5 + 8,57 143 FR0000121634 08/09/20 6,4 32.654.499 113 - 20,5 90 5,61COVIVIO (COV) G A 72,85 73,75 + 0,75 - 27,12 172999 74,9 +41,42 112,2 FR0000064578 27/04/20 4,8 94.488.052 72,55 - 26,21 38,84 COVIVIO HOTELS (COVH) A 16 16,1 - 0,31 - 43,51 1400 16,2 +36,44 30 FR0000060303 13/05/20 1,55 132.547.616 16 - 41,45 11,6 DASSAULT AV. (AM) G A 913 901 - 0,33 - 22,99 6391 925 +24,62 1192 FR0000121725 22/05/19 21,2 8.348.703 894 - 24,54 624 DBV TECHNOLOGIES (DBV) G B 4,128 4,118 - 0,34 - 79,02 978192 4,14 + 9,81 25,44 FR0010417345 54.927.187 3,91 - 69,79 2,352 DERICHEBOURG (DBG) g B 3,556 3,456 - 2,81 - 5,32 145005 3,556 +36,6 3,784 FR0000053381 07/02/20 0,11 159.397.489 3,414 + 8,34 2,07 3,18DEVOTEAM (DVT) g C 98,1 97,9 - 0,1 + 3,6 8408 98,9 + 0,2 99,1 FR0000073793 03/07/19 1 8.332.407 97,9 + 10,37 47,25 EDENRED (EDEN) LR A 48,2 47,78 - 1,02 + 3,64 459446 48,31 +18,62 51,56 FR0010908533 13/05/20 0,7 246.583.351 47,68 + 7,18 29,74 1,47EDF (EDF) LR A 12,835 12,885 + 0,35 + 29,78 EX-DS 7/03/17 2227799 12,97 +27,2 13,61 FR0010242511 26/11/19 0,15 3.099.923.579 12,745 + 37,45 5,978 EIFFAGE (FGR) LR A 83,28 83,36 - 0,19 - 18,27 255044 83,84 +29,76 111,75 FR0000130452 21/05/19 2,4 98.000.000 82,2 - 14,26 44,65 EKINOPS (EKI) g C 6,88 6,85 - 1,01 + 3,63 332288 6,88 +19,76 7 FR0011466069 25.422.170 6,36 + 38,1 3,67 ELIOR (ELIOR) G A 4,89 4,986 + 2,01 - 61,94 734193 5,005 +51,55 13,83 FR0011950732 07/04/20 0,29 174.147.823 4,8 - 56,42 3,062 5,82ELIS (ELIS) G A 13,96 13,81 - 0,72 - 25,35 439434 14,04 +39,21 19 FR0012435121 27/05/19 0,37 221.807.226 13,8 - 23,53 5,375 EOS IMAGING (EOSI) g C 1,64 1,61 - 1,83 - 27,31 151785 1,64 +23,47 2,9 FR0011191766 26.569.946 1,562 - 22,97 1,18 ERAMET (ERA) G A 37,87 38,39 + 1,03 - 16,25 61114 38,75 +58,77 47,18 FR0000131757 29/05/19 0,6 26.636.003 37,33 - 5,56 18,665 ERYTECH PHARMA (ERYP) g B 7,74 7,24 - 2,82 + 8,06 123616 7,8 +45,53 11,46 FR0011471135 19.081.988 7,2 + 70,35 2,8 ESI GROUP (ESI) g C 42,7 42,6 + 31,08 17 42,7 + 9,23 43,6 FR0004110310 6.028.192 42,6 + 47,4 24,6 EURAZEO (RF) G A 53,2 53,75 + 1,13 - 11,89 106241 53,75 +33,37 67,05 FR0000121121 08/05/19 1,25 79.000.522 53,1 - 12,17 35,6 EUROFINS SCIENT. (ERF) LR A 65,8 64,82 - 1,46 + 31,16 376723 66,32 - 6,33 75,4 FR0014000MR3 03/07/19 2,45 190.742.750 64,71 + 39,4 39,3 4,44EUROPCAR GROUPE (EUCAR) g B 0,949 0,912 - 1,99 - 78,97 5737550 0,959 +54,49 4,688 FR0012789949 21/05/19 0,26 163.884.278 0,88 - 78,04 0,492 EUTELSAT COM. (ETL) G A 9,304 9,348 + 0,56 - 35,49 665055 9,36 + 4,8 14,825 FR0010221234 20/11/20 0,89 230.544.995 9,16 - 36,43 7,984 9,52EXEL INDUSTRIES (EXE) B 43,9 44,1 + 0,69 - 5,36 2157 44,1 +13,37 47,8 FR0004527638 13/02/19 1,14 6.787.900 43,8 + 7,04 31 FAURECIA (EO) LR A 42,08 41,33 - 2,27 - 13,95 452104 42,1 +31,16 49,49 FR0000121147 31/05/19 1,25 138.035.801 40,71 - 12,62 20,58 FDJ (FDJ) G A 35,49 34,98 - 1,3 + 46,82 257794 35,57 + 6,78 36,09 FR0013451333 26/06/20 0,45 191.000.000 34,82 + 62,96 18,3 1,29FFP (FFP) g A 88,9 90 + 1,7 - 13,46 6230 90 +30,62 105,6 FR0000064784 22/05/20 2,15 24.922.589 88 - 13,79 42,15 2,39FIGEAC AERO (FGA) g B 4,32 4,3 - 0,23 - 53,76 31753 4,375 +66,67 9,69 FR0011665280 31.839.473 4,145 - 61,47 2,415 FIN. ODET (ODET) A 736 728 - 1,09 - 6,91 177 740 + 6,12 810 FR0000062234 04/06/20 1 6.585.990 728 - 10,34 497 0,14FNAC DARTY (FNAC) G A 46,9 47,6 + 1,54 - 9,85 74332 47,9 +31,64 53,85 FR0011476928 26.608.571 46,34 - 6,3 16,29 FONCIÈRE LYONNAISE (FLY) A 64 63,4 - 0,94 - 14,09 237 64 +15,27 83,4 FR0000033409 21/04/20 2,65 46.528.974 62,8 - 12,67 51 GECI INTERNATIONAL (GECP) g C 0,019 0,018 - 7,37 - 46,34 20077590 0,019 -22,12 0,07 FR0000079634 01/10/01 0,1 301.583.099 0,017 - 43,77 0,017 GECINA (GFC) LR A 129,4 128,3 - 0,93 - 19,61 114946 129,8 +16,74 183,6 FR0010040865 01/07/20 2,5 76.461.700 127,2 - 17,81 88,5 GENFIT (GNFT) G B 4,6 4,5 - 1,23 - 74,5 630258 4,6 +35,46 20,96 FR0004163111 38.858.617 4,35 - 67,65 3,022 GENSIGHT (SIGHT) g C 7,22 6,84 - 6,56 +175,25 1176873 7,42 +78,59 7,8 FR0013183985 39.693.012 6,62 +494,78 1,36

GETLINK (GET) LR A 14,24 14,28 - 0,07 - 7,93 897787 14,29 +20,4 17,04 FR0010533075 23/05/19 0,36 550.000.000 13,98 - 5,24 8,615 GL EVENTS (GLO) g B 10,6 10,34 - 2,45 - 57,01 135470 10,74 +45,22 24,45 FR0000066672 01/07/19 0,65 29.982.787 10 - 56,37 6,4 GROUPE CRIT (CEN) g B 61,1 61,3 + 0,49 - 16,71 868 61,3 +15,66 74,4 FR0000036675 26/06/19 1 11.250.000 59,8 - 9,85 36,15 1,63GROUPE GORGÉ (GOE) g B 13,5 13,42 - 0,59 - 21,24 15375 13,6 +11,28 19 FR0000062671 01/07/20 0,32 13.502.843 13,32 - 12,86 8,59 2,39GTT (GTT) G A 84,2 83,35 - 1,07 - 2,4 49021 84,5 102,7 FR0011726835 03/11/20 2,5 37.078.357 83,2 + 4,25 48,76 3GUERBET (GBT) g B 32,8 32,4 - 21,55 3071 32,8 +10,2 44,1 FR0000032526 30/06/20 0,7 12.600.874 32,1 - 37,33 24,05 2,16HAULOTTE GROUP (PIG) g B 5,26 5,35 + 1,71 + 0,94 52513 5,5 +35,79 5,78 FR0000066755 15/07/20 0,22 31.371.274 5,17 + 5,94 3,27 4,11HEXAOM (HEXA) g B 35,1 34,5 - 1,71 - 6,25 1048 35,1 +16,55 39,8 FR0004159473 11/06/19 1,5 6.937.593 34,5 + 2,99 21,7 HIGH CO (HCO) g C 4,96 4,91 - 1,01 - 19,24 3746 5 +13,13 6,32 FR0000054231 24/05/19 0,16 22.421.332 4,9 - 16,21 2,95 ICADE (ICAD) G A 65,6 63,55 - 2,98 - 34,52 189774 65,65 +42,81 106 FR0000035081 06/07/20 1,6 74.535.741 62,8 - 29,58 41,88 ID LOGISTIC (IDL) g A 198 197,8 - 0,7 + 9,65 2365 200 - 1,1 220 FR0010929125 5.649.427 197,8 + 4,11 115 IMERYS (NK) G A 35,62 35,5 - 0,39 - 5,79 70385 35,66 +31,09 43,54 FR0000120859 15/05/20 1,72 85.015.055 34,98 + 0,51 20,68 4,85INNATE PHARMA (IPH) g B 4,598 4,4 - 3,93 - 26,17 629765 4,598 +24,29 7,48 FR0010331421 78.980.640 4,356 - 21,85 2,9 INTERPARFUMS (ITP) g A 42,8 43,5 + 3,08 + 29,32 39690 43,85 + 9,71 44,65 FR0004024222 02/05/19 0,71 51.988.409 42,35 + 30,38 23,682 IPSEN (IPN) G A 77 71,9 - 6,62 - 8,99 466870 78,45 - 9,1 95,9 FR0010259150 03/06/20 1 83.814.526 70,55 - 28,46 34,2 1,39IPSOS (IPS) G A 27,5 27,4 - 1,26 - 5,35 42995 27,7 +27,74 32,1 FR0000073298 01/07/20 0,45 44.436.235 27,2 - 2,66 15,82 1,64JACQUET METAL SERVICE (JCQ) g B 12,68 12,5 - 1,58 - 18,94 17281 12,68 +27,16 15,86 FR0000033904 01/07/20 0,2 23.461.313 12,36 - 11,97 7,6 1,6JCDECAUX (DEC) G A 20,4 19,75 - 3,19 - 28,13 395836 20,44 +46,62 27,74 FR0000077919 21/05/19 0,58 212.902.810 19,46 - 23,69 12,26 KAUFMAN & BROAD (KOF) g B 36,2 36,55 - 1,22 25462 36,75 + 7,18 41,86 FR0004007813 08/06/20 1,75 22.088.023 35,7 + 2,21 19,4 4,79KLEPIERRE (LI) LR A 19,39 19,655 + 0,92 - 41,94 1646666 19,77 +77,79 34,66 FR0000121964 07/07/20 1,1 299.939.198 19,085 - 39,41 10,05 KORIAN (KORI) G A 28,5 28,48 + 0,07 - 27,08 150840 28,56 +12,39 42,54 FR0010386334 11/06/19 0,6 105.038.158 27,94 - 23,19 23,441 LAGARDÈRE (MMB) G A 20,32 20,06 - 1,09 + 3,24 96330 20,32 + 5,41 28,48 FR0000130213 14/05/19 1,3 131.133.286 19,62 + 1,01 8,14 LDC (LOUP) A 99,8 98,8 - 1 - 5,45 591 100 + 5,11 110,5 FR0013204336 25/08/20 1,2 17.134.471 98,8 - 9,36 74,2 1,22LNA SANTÉ (LNA) g B 48,6 47,55 - 1,96 - 4,04 9684 49,1 + 6,49 53 FR0004170017 08/07/20 0,45 9.705.937 47 - 2,96 31,75 0,95LECTRA (LSS) g B 23,1 23,75 + 2,37 + 6,26 69453 24,05 +27,01 24,85 FR0000065484 06/05/20 0,4 32.347.211 23,05 + 7,71 12,2 1,68LINEDATA SVICES (LIN) g B 26,3 26 - 0,76 - 2,62 2008 26,5 + 6,12 30,9 FR0004156297 06/07/20 0,95 6.625.726 25,7 + 0,39 18 3,65LISI (FII) g A 21,1 20,55 - 2,84 - 31,61 11800 21,1 +41,72 32,7 FR0000050353 30/04/19 0,44 54.114.317 20,45 - 33,71 12,5 LUMIBIRD (LBIRD) g C 12,12 12,8 + 8,84 - 15,24 51405 12,96 +31,15 15,499 FR0000038242 22.466.882 12,12 - 6,51 5,365 M6-MÉTROPOLE TV (MMT) G A 13,38 13,48 + 1,35 - 19,67 171455 13,52 +37,41 17,07 FR0000053225 15/05/19 1 126.414.248 13,26 - 13,7 8,55 MAISONS DU MONDE (MDM) G B 14,7 14,79 - 0,61 + 14,03 150701 15,23 +29,62 15,23 FR0013153541 02/07/19 0,47 45.241.894 14,67 + 16,09 5,35 MANITOU (MTU) g B 21,9 21,4 - 1,84 - 0,23 8671 22 +24,85 22,3 FR0000038606 17/06/19 0,78 39.668.399 21,35 + 12,39 11,36 MARIE BRIZARD W & S (MBWS) g C 1,468 1,458 + 0,83 - 8,99 3072 1,468 +13,37 1,7 FR0000060873 27/09/07 0,5 44.698.844 1,458 - 22,12 0,651 MAUNA KEA (MKEA) g C 1,374 1,346 - 1,9 - 1,46 127698 1,38 +23,71 2 FR0010609263 30.558.480 1,33 + 20,18 0,566 MEDIAWAN (MDW) g B /271020 + 10,15 12,2 FR0013247137 33.768.746 + 22,34 5,02 MERCIALYS (MERY) G A 6,915 7,025 + 1,44 - 43,03 578109 7,13 +66,47 12,64 FR0010241638 27/04/20 0,48 92.049.169 6,83 - 40,62 3,89 MERSEN (MRN) g B 25 24,4 - 2,4 - 28,55 17020 25 +12,44 35,3 FR0000039620 03/07/19 0,95 20.858.964 24,4 - 20,78 12,38 METABOLIC EXPLORER (METEX) g C 2,5 2,53 + 14,48 + 64,29 1535681 2,67 +65,36 2,67 FR0004177046 27.813.800 2,37 +121,54 0,921 NANOBIOTIX (NANO) g B 12,86 12,12 - 6,19 + 46,38 359873 12,86 +95,48 14,82 FR0011341205 13/05/19 26.037.122 11,58 + 62,03 3,54 NATIXIS (KN) G A 2,682 2,678 - 0,52 - 32,34 9407313 2,69 +30,51 4,411 FR0000120685 31/05/19 0,78 3.155.951.502 2,595 - 29,06 1,471 NEOEN (NEOEN) G A 49,7 48,45 - 2,71 + 56,8 185771 49,7 + 4,08 52,9 FR0011675362 85.490.712 47,8 + 89,63 25,3 NEXANS (NEX) G A 52,8 51,6 - 1,9 + 18,65 55589 52,8 +17,01 54,2 FR0000044448 17/05/19 0,3 44.105.941 51,1 + 44,7 21,55 NEXITY (NXI) G A 33,44 33,42 - 0,42 - 25,37 90545 33,6 +35,85 46,2 FR0010112524 25/05/20 2 56.129.724 32,86 - 25,77 22,04 5,98NICOX (COX) g B 5,13 4,79 - 6,99 + 9,99 801881 5,13 +36,27 6,27 FR0013018124 33.491.370 4,62 + 22,51 2,53 NRJ GROUP (NRG) B 5,84 5,72 - 1,04 - 14,63 11578 5,84 + 5,93 6,88 FR0000121691 03/06/19 0,17 78.107.621 5,72 - 4,35 4,5 ONXEO (ONXEO) g B 0,76 0,742 - 0,14 + 33,69 52954 0,76 +18,91 0,979 FR0010095596 78.317.810 0,735 + 40 0,3 ORPÉA (ORP) LR A 104,45 103,9 - 0,67 - 9,1 112733 105,35 +19,76 129 FR0000184798 12/07/19 1,2 64.615.837 103,8 - 7,23 69,1 PHARMAGEST INT. (PHA) g B 98,5 98,6 + 0,1 + 62,71 10004 98,6 +12,94 100,8 FR0012882389 01/07/20 0,9 15.174.125 98,2 + 67,4 41,25 0,91PIERRE & VACANCES (VAC) g B 15,15 14,9 - 1,33 - 26,24 12977 15,25 +60,91 33,9 FR0000073041 19/03/12 0,7 9.893.463 14,7 - 15,34 9,08 PLASTIC OMNIUM (POM) G A 29,14 28,54 - 2,13 + 14,62 281771 29,28 +44,87 31,48 FR0000124570 29/04/20 0,49 148.566.107 27,86 + 17,16 12,01 1,72PLASTIVALOIRE (PVL) g B 5,9 5,9 + 0,51 - 14,74 DIV 8 02/05/17 15252 5,91 +78,79 7,48 FR0013252186 18/04/19 0,2 22.125.600 5,81 - 14,74 2,79 PROLOGUE (PROL) g C 0,4 0,379 - 5,25 + 10,82 420204 0,41 +68,44 0,41 FR0010380626 46.585.630 0,377 + 7,67 0,15 QUADIENT (QDT) g B 16,6 16,41 - 0,55 - 23,96 135701 16,64 +40,86 24,3 FR0000120560 07/09/20 0,35 34.562.912 16 - 15,19 9,615 2,13RALLYE (RAL) A 5,15 5,22 + 2,15 - 48,42 164878 5,26 +63,64 10,3 FR0000060618 20/05/19 1 52.373.235 4,99 - 21,97 3,105 RAMSAY GDS (GDS) A 17,8 17,8 - 1,11 + 5,95 228 17,9 + 6,27 21,8 FR0000044471 02/12/14 1,4 110.389.690 17,75 + 7,23 15,2 RECYLEX SA (RX) g C /130520 - 45,57 3,66 FR0000120388 04/07/90 0,61 25.886.482 - 34,81 1,3 RÉMY COINTREAU (RCO) G A 145,8 143,8 - 1,1 + 31,32 71726 146,5 - 0,9 162,8 FR0000130395 28/07/20 1 50.503.106 143,7 + 26,7 79,2 0,7REXEL (RXL) G A 11,6 11,515 - 0,9 - 2,79 576621 11,6 +25,16 13,415 FR0010451203 02/07/20 0,48 304.425.106 11,32 + 3,55 4,921 ROBERTET (RBT) G B 899 900 - 2,49 200 902 - 3,74 1068 FR0000039091 02/07/20 5 2.172.551 895 - 10,89 662 0,56ROTHSCHILD & CO (ROTH) G A 26,75 26,7 + 0,95 + 4,3 15529 26,8 +17,62 27,6 FR0000031684 20/05/19 0,79 77.617.512 26,25 + 7,44 14,62 RUBIS (RUI) G A 36,6 36,78 + 0,49 - 32,82 DIV 2 28/07/17 263497 36,84 +27 57,45 FR0013269123 17/06/20 1,75 103.560.783 36,38 - 28,23 27,34 4,76SARTORIUS STED. BIO. (DIM) G A 292 294 + 0,34 + 99,05 DIV 6 10/05/16 63062 298,8 -10,15 367 FR0013154002 29/06/20 0,34 92.180.190 290,6 +108,96 133,9 0,12

SAVENCIA (BH) B 58 57,2 - 1,38 - 6,84 3165 58,8 +19,42 64,8 FR0000120107 13/05/19 1 14.032.930 57 - 3,7 45,1

SCOR (SCR) LR A 29,04 28,64 - 2,19 - 23,46 397331 29,08 +33,58 39,12 FR0010411983 30/04/19 1,75 186.677.576 28,3 - 25,28 15,88

SEB (SK) G A 149,4 146,9 - 1,67 + 10,95 53470 150,4 + 3,09 155 FR0000121709 22/05/20 1,43 50.307.064 146,9 + 3,96 86,35 0,97

SES-IMAGOTAG (SESL) Gg B 26,55 26,95 + 1,51 - 14,98 2801 27 + 8,02 37,5 FR0010282822 25/06/12 0,5 15.758.108 26,4 - 10,76 19,5

SHOWROOMPRIVÉ (SRP) g C 1,8 1,762 - 1,01 +166,51 796581 1,808 +48,07 1,888 FR0013006558 117.461.769 1,654 +119,78 0,243

SOITEC (SOI) G A 148,8 148 - 0,67 + 57,95 EX-DS 13/05/16 REGR.1P20 57266 149,7 +16,9 149,9 FR0013227113 33.278.901 147,4 + 60,78 48,86

SOLOCAL GROUP (PAJ) B 2,56 2,728 + 7,72 - 90,43 1299466 2,8 +35,05 30,115 FR00140006O9 129.505.837 2,494 - 90,29 1,73

SOLUTIONS 30 (ALS30) A 17,4 17,1 - 1,27 + 71,69 311243 17,7 +11,04 19,16 FR0013379484 107.127.984 17,07 + 86,58 5,3

SOMFY (SO) A 135 130,4 - 1,21 + 49,03 4389 135 + 9,95 145 FR0013199916 30/06/20 1,25 37.000.000 128,6 + 55,24 63,6 0,96

SOPRA STERIA GP (SOP) G A 129,2 128,1 - 0,78 - 10,73 29757 130 +25,47 162 FR0000050809 02/07/19 1,85 20.547.701 127,6 - 3,83 78,15

SMCP (SMCP) g B 5,65 5,27 - 5,98 - 44,23 606180 5,7 +51,09 10,08 FR0013214145 74.117.760 5,13 - 51,56 2,945

SPIE (SPIE) G A 17,18 17,09 - 0,64 - 5,89 177302 17,27 +21,38 19,58 FR0012757854 24/09/19 0,17 157.698.124 17 - 4,95 7,805

SQLI (SQI) g C 18,6 18,5 - 24,49 2813 18,65 + 4,82 24,5 FR0011289040 21/07/17 0,88 4.613.975 18,4 + 5,11 13,42

STEF (STF) g B 72,6 72,6 + 0,14 - 9,7 906 73,5 +14,15 85,1 FR0000064271 17/11/20 1,5 13.000.000 72,2 - 17,97 57,2 4,13

SUEZ (SEV) LR A 15,9 15,97 - 0,62 + 18,43 1768060 16,05 + 1,4 16,36 FR0010613471 18/05/20 0,45 628.362.579 15,825 + 22,47 8,046 2,82

SWORD GROUP (SWP) g B 31,8 32,05 + 1,1 - 6,01 2746 32,1 + 5,95 37,15 FR0004180578 10/09/20 2,04 9.544.965 31,5 - 4,61 20,45 7,49

SYNERGIE (SDG) g B 27,65 27,8 - 0,18 - 4,79 2270 28,05 + 7,34 31,4 FR0000032658 19/06/19 0,8 24.362.000 27,1 + 5,1 13

TARKETT (TKTT) G B 14,77 14,59 - 1,55 + 1,32 87156 14,94 +42,9 16,56 FR0004188670 12/06/19 0,6 65.550.281 14,5 + 7,44 7,53

TECHNICOLOR (TCH) B 1,695 1,7 - 86,8 303289 1,74 +34,92 13,735 FR0013505062 218.324.139 1,676 - 87,61 1,1

TELEPERFORMANCE (RCF) R A 275,2 271,9 - 1,81 + 25,07 241182 275,4 + 2,6 297,3 FR0000051807 02/07/20 2,4 58.730.600 266,8 + 28,98 150,3 0,88

TF1 (TFI) G A 6,715 6,64 - 1,26 - 10,27 227881 6,735 +27,33 7,805 FR0000054900 29/04/19 0,4 210.392.991 6,555 - 9,97 4,062 6,02

TFF GROUP (TFF) B 26,6 26,7 + 0,38 - 27,25 8732 26,9 +17,11 38,2 FR0013295789 06/11/20 0,35 21.680.000 26,4 - 29,74 22 1,31

THERMADOR GROUPE (THEP) B 64,6 64,6 + 0,31 + 21,89 1902 65 + 7,67 65 FR0013333432 09/04/20 1,8 9.200.849 64 + 20,52 35,7 2,79

TIKEHAU CAPITAL (TKO) g A 23,9 23,6 - 1,26 + 7,27 EX D S 03/07/17 16670 23,9 +24,21 26,4 FR0013230612 22/05/20 0,5 136.802.970 23,6 + 3,06 15,45 2,12

TRANSGÈNE (TNG) g B 1,748 1,726 - 0,92 + 11,35 64938 1,75 +19,03 2,08 FR0005175080 83.841.334 1,702 - 10,29 0,81

TRIGANO (TRI) G A 138,9 135,5 - 2,59 + 44 21269 139,1 +17,83 140,5 FR0005691656 14/01/20 2 19.336.269 135,3 + 41,96 41,76 1,48

UBISOFT ENTERTAINMENT (UBI) LR A 79,1 77,5 - 1,5 + 25,85 484253 79,4 + 3 85,14 FR0000054470 123.458.887 77,32 + 39,29 51,16

VALEO (FR) LR A 33,55 32,94 - 2,54 + 4,87 656198 33,55 +25,49 34,05 FR0013176526 29/06/20 0,2 241.717.403 32,43 - 6,37 10,51 0,61

VALLOUREC REG (VK) G A 28,985 28,34 - 1,87 - 74,8 228710 29,195 +121,51 114,68 FR0013506730 11.449.694 27,855 - 68,91 11,186

VALNEVA (VLA) g B 6,15 6,17 + 0,82 +140,08 412599 6,33 - 5,66 7,35 FR0004056851 90.954.937 5,97 +146,8 1,784

VERALLIA (VRLA) g A 27,9 27,4 - 1,44 - 9,45 72956 28,1 +14,17 36,01 FR0013447729 15/06/20 0,85 123.272.819 27,4 - 9,48 19,26 3,1

VERIMATRIX (VMX) g B 3,09 2,93 - 4,72 + 47,98 511891 3,09 +18,15 3,245 FR0010291245 84.927.567 2,86 + 55,36 1,138

VICAT (VCT) g A 34,8 35,1 + 0,43 - 13,01 25519 35,2 +29,28 41,65 FR0000031775 20/04/20 1,5 44.900.000 34,15 - 8,47 22,5 4,27

VILMORIN & CIE (RIN) g A 49,65 49,4 - 0,2 + 2,38 3583 49,95 +10,51 52,4 FR0000052516 11/12/19 1,35 22.917.292 48,9 - 1,79 34,25 2,73

VIRBAC (VIRP) G A 217 216,5 - 0,46 - 8,46 3347 218,5 + 4,09 244,5 FR0000031577 26/06/15 1,9 8.458.000 214,5 - 3,35 132,2

WAVESTONE (WAVE) g B 25 25,8 + 3,2 - 0,77 13247 26,7 +12,91 29 FR0013357621 19/09/19 0,23 20.196.492 24,95 + 13,66 15,5

WENDEL (MF) G A 94,5 94,2 - 0,37 - 20,51 50008 94,55 +23,78 127,5 FR0000121204 07/07/20 2,8 44.719.119 93,15 - 22,15 54,8 2,97

WORLDLINE (WLN) G A 76,5 75,12 - 2,11 + 18,95 653585 77,4 +17,82 82,66 FR0011981968 279.122.471 74,9 + 31,33 36,36

XPO LOGISTICS (XPO) A 284 284 + 1,43 + 9,23 5 284 +10,94 296 FR0000052870 20/06/19 0,6 9.836.241 284 + 7,58 214

AUTRES VALEURS DE LA ZONE EUROEURONEXT (ENX) G A 89,2 90,4 + 1,4 + 24,43 125548 90,95 + 1,06 109,7 NL0006294274 20/05/20 1,35 70.000.000 89,2 + 34,42 52,9 1,76

NOKIA (NOKIA) R A 3,331 3,283 - 1,6 - 0,74 0,3 352542 3,335 +16,52 4,352 11,09FI0009000681 29/07/19 0,02 5.653.886.159 3,247 + 4,41 2,083 1,52

SES (SESG) LR 7,656 7,808 + 0,83 - 37,54 1032450 7,808 + 9,85 14,165 LU0088087324 21/04/20 0,34 376.915.302 7,62 - 34,19 4,87 5,12

X-FAB SILICON (XFAB) g A 4,65 4,43 - 4,32 + 6,24 149299 4,66 +33,03 6,08 BE0974310428 130.781.669 4,43 + 10,61 1,868

VALEURS ZONE INTERNATIONALEGENERAL ELECTRIC (GNE) 8,361 8,582 - 0,75 - 12,86 1,29 21455 8,617 +33,57 12,1 US3696041033 USD 25/09/20 0,01 8.759.873.000 8,301 - 15,76 5,02

HSBC (HSB) 4,494 4,615 + 2,24 - 34,21 52,19 131889 4,638 +25,14 7,121 GB0005405286 USD 27/02/20 0,21 20.693.492.491 4,494 - 30,52 3,081

LAFARGEHOLCIM LTD (LHN) A 44,47 44,79 + 0,79 - 8,5 4 21105 44,79 +15,68 49,79 CH0012214059 CHF 15/05/20 2 615.929.059 44,35 - 3,66 26,89

SCHLUMBERGER (SLB) A 17,4 18,05 + 3,44 - 49,72 3,45 49138 18,15 +36,74 36,9 AN8068571086 USD 01/12/20 0,13 1.385.122.304 17,3 - 44,63 11,05

SRD Suite VALEURS FRANÇAISES SRD Suite VALEURS FRANÇAISES

A : Indicateur acompte, solde ou total du dividende. BPA : Bénfice par action. PER : Price Earning Ratio. Les plus hauts et plus bas ajustés sont sur l’année civile. Les valeurs classées par ordre alphabétique sont regroupées en trois classes de capitalisation signalées par les lettres A pour les capitalisations supérieures à 1 milliard d’euros, B pour les capitalisations comprises entre 1 milliard d’euros et 150 millions d’euros et C pour les capitalisations inférieures à 150 millions d’euros. L : Valeurs de l’indice CACNext20. R : Valeurs de l’indice CACLarge60. G : Valeurs de l’indice CACMid60. g : Valeurs de l’indice CACSmall. Les bénéfices par action : source FacSet JCF Estimates.

VALEURS MNÉMO / INFO / OUV CLOT % VEIL % AN BPAOST VOL. + HAUT % MOIS + HAUT AN PERISIN / DEVISE / DATE DÉTACH. / DIV NB TITRES + BAS % 52 S. + BAS AN RDT

VALEURS MNÉMO / INFO / OUV CLOT % VEIL % AN BPAOST VOL. + HAUT % MOIS + HAUT AN PERISIN / DEVISE / DATE DÉTACH. / DIV NB TITRES + BAS % 52 S. + BAS AN RDT

VALEURS MNÉMO / INFO / OUV CLOT % VEIL % AN BPAOST VOL. + HAUT % MOIS + HAUT AN PERISIN / DEVISE / DATE DÉTACH. / DIV NB TITRES + BAS % 52 S. + BAS AN RDT

euronext SÉANCE DU 02 - 12 - 2020CAC 40 : 5583,01 (0,02 %) NEXT 20 : 12054,82 (-0,42 %)

CAC LARGE 60 : 6182,2 (-0,02 %)CAC ALL-TRADABLE : 4327,45 (-0,06 %)

DATE DE PROROGATION : 28 DÉCEMBRE

SRD VALEURS FRANÇAISES

VALEURS MNÉMO / INFO / OUV CLOT % VEIL % AN BPAOST VOL. + HAUT % MOIS + HAUT AN PERISIN / DATE DÉTACH. COUPON / DIV NB TITRES + BAS % 52 S. + BAS AN RDT

VALEURS MNÉMO / INFO / OUV CLOT % VEIL % AN BPAOST VOL. + HAUT % MOIS + HAUT AN PERISIN / DATE DÉTACH. COUPON / DIV NB TITRES + BAS % 52 S. + BAS AN RDT

Page 35: Les Echos - 03 12 2020

Les Echos Jeudi 3 décembre 2020 FINANCE & MARCHES // 35

ARKADEAAlexandre Lepoutreest nommé directeurdu développementde ce promoteur immobilier, joint-venture entre Poste Immo et Icade.

Alexandre Lepoutre, 47 ans,diplômé de l’ESTP, a d’abord tra-vaillé pour Quillery et Dema-thieu-et-Bard. Après avoir colla-b o r é à l a v a l o r i s a t i o n d e sfonciers ferroviaires parisiens àla SNCF, il a passé dix ans chezIcade Promotion, devenantdirecteur de projets, puis direc-teur du développement de l’acti-vité partenariats publics etsanté en Ile-de-France. Pendantquatre ans, il a ensuite dirigé ledéveloppement et la maîtrised’ouvrage du bailleur social Toitet Joie (groupe La Poste).

ADPOlivier Mansardest nommé directeur commercial en France et en Suisse, membre du comité exécutif de l’éditeur de logiciels.

Olivier Mansard, 50 ans, est titu-laire d’un master de l’Iscid. Au cours de sa carrière, il a travaillé ausein de directions commerciales etgénérales, notamment chez SAP

Bernard Serin, droit au but

Ce matin-là, Bernard Serin recevait « à domicile » – en l’occurrence, à La Citadelle, ce quatre étoiles tombé cet étédans l’escarcelle de son holding luxembourgeois Ebenis. Bien avant cette acquisition, le président du FC Metz étaitchez lui en Moselle, où il a bâti sa carrière de capitaine d’industrie. Le président et propriétaire du groupe belge John Cockerill (6.000 salariés pour 1,2 milliard de chiffre d’affaires en 2019) est arrivé en 1952, à l’âge de deux ans, dans ce qui apparaissait alors comme le Texas français.

Fils d’un vigneron méridional devenu sidérurgiste puiscadre, le jeune Bernard a d’abord joué dans l’équipe de foot de Florange, tout en poursuivant ses études d’ingé-nieur. Embauché à Sacilor, dont il prend les rênes en 1993,il ne quittera la Lorraine qu’en 2002 pour redresser Cocke-rill Mechanical Industry (CMI), une filiale belge d’Arceloralors en grande difficulté. Depuis, il a hissé cet emblème de la construction mécanique au rang de groupe mondiald’ingénierie avant de lui restituer, en 2019, le nom de son fondateur. A Seraing, siège wallon de John Cockerill, Ber-nard Serin, également docteur honoris causa de l’univer-sité de Liège, a vu éclore un parc portant son nom. C’est surle site du groupe qu’il a lancé, cet été, le fonds Industrya, pour soutenir des projets dans la transition énergétique, l'industrie 4.0 et les matériaux.

Prouesses technologiques Les start-up industrielles étant souvent gourmandes en fonds, Industrya a provisionné 42 millions d'euros abon-dés par John Cockerill, à hauteur de 52 %. Le solde est injecté par des investisseurs publics belges. Ouvert aux porteurs de projets du Benelux, des Hauts-de-France, du Grand Est et d’Allemagne, Industriya apportera, outre unaccompagnement et un hébergement dans l'un des sept incubateurs européens du fonds, des financements allantde 300.000 euros à 2 millions.

Car Bernard Serin reste ingénieur. En verve, il évoqueles prouesses technologiques de son groupe, dont cette centrale thermo solaire inaugurée fin 2019 dans un désertde pierres chinois, où 4.500 miroirs autour d’une tour de 150 mètres font fondre du sel pour procurer de l’énergie

nuit et jour. A l’aéroport de fret de Liège, le groupe expéri-mente aussi, grâce à son joint-venture chinois CJH, un écosystème à l’hydrogène. « Nous travaillons le sujet depuis quatre ans et voilà que le plan hydrogène européen sedébloque et que les étoiles s’alignent », s’enthousiasme Ber-nard Serin.

A l’inverse, il n’apprécie guère qu’on évoque les repro-ches d’ONG quant aux contrats remportés par John Coc-kerill auprès de l’Arabie saoudite tant pour ses équipe-ments de tourelles de chars que pour la formation d’instructeurs militaires saoudiens au Cockerill Campus. « A chaque commande, nous nous en remettons à la déci-sion de gouvernements démocratiquement élus qui détien-nent des éléments politiques et éthiques dont nous ne dispo-sons pas ! Ce sont eux, et non les ONG, qui ont la main », assène l’homme d’affaires, également propriétaire d’un vignoble dans l’Hérault. « J’ai appris progressivement à gérer plusieurs sujets en même temps », explique posé-ment, le septuagénaire soigné, chevelure blanche et moustache impeccable, qui ne délaisse pas Metz pour autant. Il a injecté plus de 100 millions d’euros dans son écosystème économique et sportif. Parmi les buts de Ber-nard Serin, devenu président du FC Metz en 2009 : trans-former le stade Saint-Symphorien en un espace futuriste et multifonctionnel. Avec 9.000 mètres carrés dévolus aux séminaires, événements, centre d’affaires et co-wor-king jouxtant 30.000 gradins. Les VIP et congressistes conforteront l’activité traiteur, restauration et hôtellerie d’Ebenis. Quant aux footballeurs, ils étrennent, un terraind’entrainement indoor de 4.000 mètres carrés. Le FC Metz vient, en prime, de prolonger de dix ans son partena-riat avec l’académie Génération foot, à Dakar. Bernard Serin, qui a bâti des ponts entre le Sénégal, la Lorraine et laWallonie, rêve aujourd’hui d’aller voir, de l’autre côté de laTerre, le Pôle nord, dont il aimerait contribuer modeste-ment à contrer la fonte. Ingénieur, encore. n

UNION FINANCIÈRE DE FRANCEThomas Bontempsest nommé directeur de l’audit interne.

Thomas B ontemps, 43 ans,ancien élève de l’Ecole centralede Lyon, titulaire d’un master enrégulation financière et manage-ment des risques de l’IEP deParis, a exercé des fonctions degestion de projet et de manage-ment dans l’informatique, prin-cipalement en banque et assu-rance. En 2014, i l a intégrél’Autorité de contrôle prudentielet de résolution (ACPR) commesuperviseur bancaire. En 2017, ilavait été nommé inspecteursenior et chef de mission à l’AMF.

ROQUETTEPierre Courdurouxdeviendra directeur général le 14 décembre.

Pierre Courduroux, 55 ans,diplômé de l’EM Lyon, est titu-laire d’un executive MBA del’Université Washington à Saint-Louis, dans le Missouri (Etats-Unis). Depuis octobre dernier, ilest le directeur financier deRoquette. Auparavant, il avaitnotamment assuré la directionfinancière de Monsanto.

,Envoyez vos nominations à[email protected]

et Experian. Il a également occupéle poste de vice-président global sales au sein de Masternaut.

PORTRAIT

par Pascale Braun— Correspondante à Metz

Thom

as V

an A

ss

ENTREPRISES

LEO PHARMAKarine Duquesnedevient directrice générale en France.

Karine Duquesne, 49 ans, titu-laire d’un doctorat en pharma-cie, est diplômée en marketingstratégique et en administrationdes entreprises. Elle a officiévingt ans chez Janssen : elle anotamment assumé aux Etats-Unis des responsabilités au seinde l’organisation stratégiquemarketing et commercialemonde dans le domaine desmaladies neurodégénératives,dont Alzheimer et la sclérose enplaque. Dernièrement, elle étaitdirectrice générale d’ActelionPharmaceuticals en France.

+Ils sont nésun 3 décembre

•Angèle, chanteuse, 25 ans.•Raymond Bassoulet, senior partner et ex-CEO d’Egon Zehnder en France, 60 ans. •Daniel Bour, président d’Enerplan et de La Générale du Solaire, 65 ans. •Patrick Chamoiseau, écrivain, 67 ans. •Marie Drucker, journaliste, 46 ans. •Pierre-Henry Gagey, président de la maison Louis Jadot, 65 ans.•Pascal Grégoire, écrivain et publicitaire, 59 ans.•Jean-Luc Godard, cinéaste, 90 ans.•Daryl Hannah, actrice, 60 ans. •Edmond Hervé, ancien ministre de la Santé, 78 ans. •Diane Kurys, réalisatrice, 72 ans. •Christian Karembeu, footballeur, 50 ans.•Gaspard Koenig, essayiste, fondateur du think-tank GenerationLibre, 38 ans. •Jacques Mézard, membre du Conseil constitutionnel, plusieurs fois ministre, 73 ans. •Julianne Moore, actrice, 60 ans.•Matthieu Orphelin, député du Maine-et-Loire, ancien porte-parole de la Fondation Nicolas Hulot, 48 ans.•Ozzy Osbourne, chanteur, 72 ans.•Sébastien Soriano, président de l’Arcep, 45 ans.•David Villa, footballeur, 39 ans.•Katarina Witt, championne de patinage artistique, 55 ans.

carnet

CHANGES COURS AU COMPTANT VAR. VAR. COURS VEILLE ANNÉE1 EURO EN DEVISE BCE EN % EN %02-12-2020

TAUX MARCHÉS MONÉTAIRES ET EURODEVISES MARCHÉS MONÉTAIRES JOUR 1 MOIS 3 MOIS 6 MOIS 1 AN02-12-2020

ECARTS DE TAUX AVEC L’ALLEMAGNE 6 MOIS 2 ANS 5 ANS 7 ANS 10 ANS02-12-2020

ALLEMAGNE 100,30 -0,69 -0,74 -0,69 -0,56

PORTUGAL 0 5,57 0,21 0,30 0,42

FRANCE -0,03 0,03 0,12 0,12 0,20

ESPAGNE -0,06 0,17 0,25 0,39 0,57

ITALIE -0,05 0,26 0,01 0,97 1,10

DOLLAR US 1,2091 0,16 7,76LIVRE STERLING 0,9059 0,76 7,01FRANC SUISSE 1,0837 -0,23 -0,17COURONNE DANOISE 7,4442 0,00 -0,39COURONNE NORV. 10,667 0,36 7,99KUNA CROATE 7,5502 -0,06 1,41COURONNE SUEDOISE 10,2779 0,41 -2,08DOLLAR CANADIEN 1,5642 0,15 7,36YEN JAPONAIS 126,385 0,36 3,63DOLLAR AUSTRALIEN 1,6354 -0,11 2,26ROUBLE RUSSE 90,874 -0,95 30,83ROUPIE INDIENNE 89,154 0,52 11,43DOLLAR NEO-ZELANDAIS 1,7135 0,32 2,69COURONNE TCHEQUE 26,394 0,44 3,87FORINT HONGROIS 359,32 0,81 8,52ZLOTY POLONAIS 4,4859 0,82 5,10LEV BULGARE 1,9562 0,01 -0,01DOLLAR HONG-KONG 9,3736 0,17 7,30WON SUD COREEN 1333,27 -0,19 2,90PESO MEXICAIN 24,2447 0,26 14,13REAL 6,3337 0,77 40,52DOLLAR SINGAPOUR 1,6185 0,24 7,23RAND SUD-AFRICAIN 18,5405 0,75 18,01LIVRE TURQUE 9,5236 0,80 42,68RENMIBI YUAN 7,937 0,04 1,65RUPIAH 17079,2448 0,11 9,64PESO PHILIPPIN 58,0901 0,00 2,26RINGGIT MALAIS 4,93 0,02 7,35BATH THALANDAIS 36,5428 0,10 9,64

ZONE EURO -0,43/-0,73 -0,49/-0,79 -0,39/-0,69 -0,36/-0,66 -0,36/-0,66

SICAV/FCP

FR0013341781 2CRSI g C 4,42 4,42 4,21 4,295 - 1,49 76885

FR0013185857 ABEO g C 8,58 8,6 8,1 8,38 - 2,33 16503

FR0012616852 ABIONYX PHARMA g B 0,928 1 0,926 0,955 - 0,83 228386

FR0000064602 ACANTHE DEV. C 0,429 0,436 0,427 0,436 - 0,23 6336

FR0000076861 ACTEOS g C 1,53 1,565 1,525 1,565 + 2,29 2061

FR0000062978 ADL PARTNER g C 14,1 14,15 14 14,1 + 0,71 874

FR0012821890 ADUX g C 1,6 1,625 1,54 1,61 + 0,63 7289

FR0004152874 ADVENIS g C 2,08 2,1 2,08 2,1 22625

FR0013296746 ADVICENNE g C 8,1 8,16 7,9 8,1 + 0,5 14097

FR0013421286 ALPHA MOS C 1,51 1,51 1,4 1,5 - 1,32 4338

FR0000053837 ALTAMIR B 20 20,33 20 20,255 + 1,28 420

FR0012789667 AMPLITUDE g C 2,12 2,14 2,12 2,13 3260

FR0011992700 ATEME g C 16,56 16,9 16,56 16,8 + 1,21 12427

FR0000039232 AUREA g C 5,44 5,44 5,2 5,3 - 2,57 2644

FR0013183589 AURES TECHNO g C 18,8 20 18,75 20 + 6,38 3591

FR0013529815 AVENIR TELECOM C 0,76 0,836 0,66 0,668 + 11,3 2831778

FR0013258399 BALYO g C 1,36 1,438 1,326 1,37 + 1,48 369349

FR0000035370 BASTIDE CONF.MED. g C 47,3 47,6 47 47,3 + 0,64 2778

FR0011814938 BOOSTHEAT C 3,43 3,48 3,1 3,28 - 6,02 159874

FR0000074254 BOURSE DIRECT C 2,44 2,6 2,44 2,6 + 8,33 101221

FR0010151589 CAFOM C 6,35 7,45 6,25 6,95 + 12,1 46213

FR0012969095 CAPELLI g C 34,2 34,5 33,4 33,8 - 2,31 4027

FR0000072894 CAST g C 3,69 3,69 3,48 3,6 - 1,91 22349

FR0000064446 CATERING INTL SCESg B 10,4 10,5 10,3 10,3 - 0,96 2115

FR0010193979 CBO TERRITORIA C 3,58 3,6 3,57 3,58 + 0,28 32758

FR0000053506 CEGEDIM B 27,9 28 27,5 28 + 1,82 7658

FR0000054322 CIBOX INTERACTIVE g C 0,204 0,208 0,203 0,206 - 0,48 172762

FR0013426004 CLARANOVA g B 7,085 7,085 6,39 6,85 - 3,86 634621

FR0000053399 CNIM GROUP C 13,95 14,3 13,95 14,3 + 2,14 3508

FR0013335742 COGELEC g C 7,3 7,42 7,18 7,3 3153

FR0000185506 CRCAM ATL. VENDEE C 120 120,96 118 120,96 + 0,8 595

FR0010483768 CRCAM BRIE PIC. CC B 23,1 23,1 22,205 22,595 - 0,07 4709

FR0000045239 CRCAM LOIRE HAUTE C 80,97 80,97 76 78 - 3,69 384

FR0000185514 CRCAM NORD FR. B 21 21,3 20,91 21,3 + 0,64 5534

FR0000045528 CRCAM PARIS IDF B 72,35 73,07 72,35 73 - 0,68 793

FR0007317813 CS GROUP g C 3,64 3,64 3,61 3,61 - 0,82 1850

FR0013283108 DELTA PLUS g B 65,2 65,6 63,4 63,4 - 3,65 1394

FR0000073793 DEVOTEAM g C 98,1 98,9 97,9 97,9 - 0,1 8408

FR0012202497 DIAGNOSTIC MEDICALg C 1,675 1,675 1,655 1,655 - 1,19 3388

FR0010099515 ECA g B 22,3 22,4 22,1 22,2 - 0,45 1263

FR0000072373 EGIDE g C 0,918 0,98 0,916 0,958 + 4,36 180088

FR0012650166 ENGIE EPS g C 12,8 12,8 12,1 12,35 - 2,76 10586

FR0000120669 ESSO g B 12,3 12,45 12 12,3 + 0,82 4431

FR0000061475 EURASIA FONC. INV. C 0,278 0,278 0,278 0,278 + 18,8 400

FR0000054678 EURO RESSOURCES C 3,14 3,14 3,07 3,12 - 0,64 1570

FR0000075343 EUROMEDIS GROUPE C 12,4 12,6 12,2 12,4 6399

FR0010490920 EUROPACORP g C 0,818 0,83 0,801 0,822 + 0,12 83323

FR0000062341 F.I.E.B.M. C 4,56 4,56 4,56 4,56 - 14,77 500

FR0000038184 F.I.P.P. C 0,189 0,224 0,187 0,224 - 1,75 105608

FR0011271600 FERMENTALG g C 1,468 1,468 1,378 1,406 - 2,63 275508

FR0004076891 FLO (GROUPE) g B 0,148 0,15 0,148 0,15 99033

FR0011277391 FONC. PARIS NORD g C 0,025 0,026 0,024 0,025 - 3,92 260817

FR0013030152 FRANCAISE ENERGIE g C 17,6 17,7 17,4 17,7 + 0,28 27940

FR0010588079 FREY B 29,6 29,6 29 29 - 2,03 391

FR0010501692 GENERIX g C 6,62 6,84 6,58 6,84 + 2,7 8330

FR0013399474 GENKYOTEX g C 3,04 3,05 3,01 3,02 - 0,98 19630

FR0011799907 GENOMIC VISION g C 0,8 0,813 0,772 0,788 - 0,25 1278859

FR0000065971 GRAINES VOLTZ C 100 100 96 96 - 4 378

FR0004050300 GROUPE OPEN g C 14,92 14,98 14,92 14,92 1970

FR0004155000 GROUPE SFPI g C 1,63 1,635 1,62 1,63 8794

FR0000066722 GUILLEMOT g C 8,66 8,66 8,04 8,16 - 5,77 38471

FR0000038531 HF COMPANY C 4,88 4,98 4,87 4,87 3197

FR0012821916 HIPAY GROUP g C 14,2 14,35 12,8 12,95 - 6,16 37456

FR0000065278 HOPSCOTCH GROUPE g C 5,4 5,72 4,86 5,2 - 1,89 18455

FR0000051393 IDI B 41,6 41,6 40,5 41 - 0,49 567

FR0000071797 INFOTEL g C 40,2 40,3 39,8 39,8 - 1 1032

FR0000064297 INNELEC MULTIMEDIAg C 4,86 4,95 4,86 4,95 + 1,85 3810

FR0013233012 INVENTIVA g B 10,72 10,78 10,44 10,58 - 2,22 93373

FR0012872141 JACQUES BOGART g C 9,32 9,38 8,8 9,38 + 0,21 1823

FR0004029411 KEYRUS g C 2,55 3,1 2,55 3 + 19,52 305629

FR0000032278 LATECOERE g C 1,86 1,94 1,86 1,928 + 3,21 86151

FR0013233475 LYSOGENE g C 2,21 2,25 2,21 2,25 + 1,81 14681

FR0000060196 M.R.M. C 0,965 0,965 0,965 0,965 + 1,58 6620

FR0000032302 MANUTAN INTER. B 64,8 65 62,6 63,2 - 2,17 888

FR0000051070 MAUREL ET PROM g B 1,628 1,666 1,57 1,628 + 0,25 407951

FR0011742329 MCPHY ENERGY g C 34,8 35,55 32 33,6 - 3,45 272622

FR0004065605 MEDINCELL C 10,8 11,2 10,7 11,05 + 2,32 82943

FR0010298620 MEMSCAP g C 1,1 1,1 1 1,035 - 5,48 53026

ACTIONSEURONEXT HORS SRD FRANÇAISES

ISIN VALEUR OUV +HT +BS CLÔT ÉCART VOL

ACTIONSEURONEXT HORS SRD Suite FRANÇAISES

ISIN VALEUR OUV +HT +BS CLÔT ÉCART VOL

FR0000077570 MICROPOLE g C 1,095 1,1 1,08 1,095 + 0,46 36010

FR0013482791 NACON SAS B 7,65 7,7 7,51 7,6 + 0,26 100654

FR0013018041 NAVYA g B 4,28 4,575 4,05 4,525 + 5,85 817238

FR0004154060 NETGEM g C 1 1,005 0,984 0,998 - 0,7 20729

FR0004050250 NEURONES B 24,3 24,5 24 24,3 1256

FR0000052680 OENEO g B 10,7 10,7 10,4 10,4 - 2,07 16699

FR0010428771 OL GROUPE g C 2,2 2,2 2,18 2,2 + 1,38 3721

FR0000075392 ORAPI g C 7,5 7,94 7,48 7,82 + 4,83 47132

FR0010609206 OREGE C 0,89 0,92 0,886 0,892 + 0,68 47753

FR0012127173 OSE IMMUNO g C 7,36 7,4 7,22 7,36 + 0,55 38821

FR0013318813 PARAGON ID g C 28,4 28,9 28,3 28,4 638

FR0004038263 PARROT B 4,77 4,77 4,52 4,61 + 1,77 25673

FR0000038465 PASSAT g C 5,95 5,95 5,6 5,85 + 0,86 6566

FR0011027135 PATRIMOINE ET COMM B 14,9 15 14,85 14,85 - 0,34 850

FR0000053514 PCAS B 9,7 10,6 9,7 10,2 + 6,25 3909

FR0012432516 POXEL g C 6,75 6,82 6,52 6,6 - 2,37 89651

FR0004052561 PROACTIS C 0,134 0,18 0,129 0,168 + 22,63 261519

FR0012613610 PRODWAYS GROUP g C 1,89 1,91 1,86 1,91 + 1,06 18366

FR0013344173 ROCHE BOBOIS SA B 18,15 18,45 18,15 18,45 + 1,1 644

FR0000054199 S.T. DUPONT C 0,076 0,078 0,075 0,077 + 1,05 66198

FR0006239109 SCBSM g C 7,9 7,95 7,9 7,95 2695

FR0000039109 SECHE ENVIRONNEM. g B 39,4 40,4 38,2 39,1 - 1,26 6750

FR0011950682 SERGEFERRARI GP g C 6,14 6,26 6 6,26 + 1,95 10066

FR0000060790 SIGNAUX GIROD g C 11,4 11,95 11,4 11,95 + 4,83 604

FR0000074122 SII g C 22,8 22,9 22,7 22,7 + 0,44 2562

FR0004016699 SMTPC g B 16,7 16,7 16,5 16,7 1485

FR0000065864 SOGECLAIR g C 15,6 18,45 15,6 17,15 + 27,04 40354

FR00140006O9 SOLOCAL GROUP B 2,56 2,8 2,494 2,728 + 7,72 1299466

FR0000060949 TIVOLY C 16,4 16,4 15,6 15,8 - 3,66 2805

FR0000033003 TOUAX g C 9,22 9,3 9 9,14 + 0,44 28673

FR0000036816 TOUR EIFFEL g B 30,7 31,1 30,7 31,1 + 1,3 1114

FR0000034548 UNION FIN.FRANCE g B 19,35 19,5 19 19 - 3,06 1851

FR0000074197 UNION TECH.INFOR. g C 0,6 0,63 0,56 0,605 + 1,68 64913

FR0004186856 VETOQUINOL B 81 81,6 80 80 - 0,99 1627

FR0000066680 VIDELIO C 1,69 1,69 1,66 1,66 - 2,35 1001

FR0000050049 VIEL ET CIE C 5,66 5,68 5,3 5,6 - 1,06 15956

FR0004183960 VOLUNTIS g C 4,86 4,86 4,53 4,6 - 4,56 73406

FR0000062796 VRANKEN - POMMERY B 15,3 15,45 15,05 15,3 2306

FR0004034072 XILAM ANIMATION g C 45,05 45,9 45,05 45,6 + 1 4578

ISIN VALEUR OUV +HT +BS CLÔT ÉCART VOL

ACTIONSEURONEXT HORS SRD Suite FRANÇAISES

CERTIFICAT/FONDS INVESTIR 10INVESTIR 10 GRANDES VALEURS I10GS - FR0011630474 125,07 -0,59

INVESTIR PEA PALATINE FR0013284114 100,59 -0,93

Valeur unitaire hors frais : valeur de la part ou de l’action hors droits d’entrée ou de sortie éventuels. Les SICAV éligibles au PEA sont signalées par un astérisque *. Le pictogramme P indique la cotation d’un FCP. Classification des OPCVM : actions françaises (AF), actions de la zone EURO (AE), actions internationales (AI), monétaires EURO (ME), monétaires à vocation internationale (MI), obligations et autres titres de créances libellés en EURO (OE), obligations et autres titres de créances internationaux (OI), sicav luxembour-geoises (LX), diversifiés (DI), garantis ou assortis d’une protection (GP). ** : en euros ou dans la devise indiquée dans la colonne «DÉSIGNATION DES VALEURS».

Banque Cantonalede Genève (France) SATél. 04 72 07 31 50bcgef.fr/fonds

CLA

SSIF

ICAT

ION

CLA

SSIF

ICAT

ION

Mirabaud Asset ManagementTél. +41 058 200 60 [email protected]

LU0704154292 RAM (L) SF EM MKT EQ 203,87 01/12

LU0375629556 RAM (L) SF EUROPEAN EQ 459,99 01/12

LU0705072691 RAM (L) SF GB EQ SUST ALP 103,06 01/12

LU1048876350 RAM (L) SF GB STB INCOME EQ 128,77 01/12

VAL. UNIT DATE DERNIER DÉSIGNATION HORS FRAIS DE LA DIVIDENDE NETCODE ISIN DES VALEURS EN EUROS** VALOR. EN EUROS** MONT. DATE

VAL. UNIT DATE DERNIER DÉSIGNATION HORS FRAIS DE LA DIVIDENDE NETCODE ISIN DES VALEURS EN EUROS** VALOR. EN EUROS** MONT. DATE

VAL. UNIT DATE DERNIER DÉSIGNATION HORS FRAIS DE LA DIVIDENDE NETCODE ISIN DES VALEURS EN EUROS** VALOR. EN EUROS** MONT. DATE

VAL. UNIT DATE DERNIER DÉSIGNATION HORS FRAIS DE LA DIVIDENDE NETCODE ISIN DES VALEURS EN EUROS** VALOR. EN EUROS** MONT. DATEC

LASS

IFIC

ATIO

N

CLA

SSIF

ICAT

ION

LU2004923152 SWISS ALL CAPS (EUR) 117,22 01/12 LU1626130063 SWISS SMALL & MID CAPS (CHF) 119,71 01/12 LU1626130816 SILK ROAD ZONE STOCKS (USD) 107,55 01/12 LU0851564038 BALANCED (EUR) 128,38 01/12 LU0851564384 DYNAMIC (EUR) 149,53 01/12 LU1626130220 HIGH DIV. EUROPE STOCKS (EUR) 96,54 01/12 LU0851564541 WORLD EQUITY (EUR) 173,75 01/12

A la recherche d’une gestion active de conviction ?

Tous les details de nos solutions d’investissement

à disposition ici : www.mirabaud-am.com

LU0705071701 RAM (L) SF L/S EUROPEAN EQ 129,04 01/12

LU0375630729 RAM (L) SF US SUST EQ 347,41 01/12

LU0419186167 RAM (L) TF GB BD TOT RET 155,99 01/12

LU0935723782 RAM (L) TF II ASIA BD TOT RET 155,91 01/12

SYNCHRONY (LU)

Page 36: Les Echos - 03 12 2020

36 // Jeudi 3 décembre 2020 Les Echos

INNOVATION Avant que le Web Summit ne le fasse apparaître dans les radars des bastions technologiques, le Portugal avait déjà amorcé une stratégie d’investissement pour se rendre attractif sur le champ de l’innovation.

Comment le Portugal cultive son identité de « tech nation »Julie Le Bolzer

@JulieLeBolzer

T erre d’innovation », « para-dis de la tech », « eldoradopour les start-up »… les

périphrases désignant le Portugal ont changé de braquet, et celui que l’on appelait le « pays des œillets », en référence à la révolu-tion de 1974, se pare d’habits sans cesse plus technologiques. Point d’orgue de cette dynamique, le choix du Web Summit, grand-messe des geeks, de poser ses valises à Lisbonne a parachevé son image de nation numérique. Cette transformation constitue un atout de taille pour se positionner sur l’échiquier mondial et se rendreattractif. Ainsi le pays entend-il poursuivre sur sa lancée et conti-nuer à flécher les investissements en ce sens.

Une stratégie globale« La stratégie du Portugal est globale,avec des dispositifs allant de l’incita-tion fiscale jusqu’au Tech Visa, en passant par la réinvention de l’ensei-gnement supérieur et de l’écosystèmed’accompagnement à l’entrepreneu-riat », indique Laurent Marionnet, directeur général de la chambre de commerce et d’industrie luso-française (CCILF), club d’affaires et société de conseil dont le siège se situe à Lisbonne.

Aux quatre coins du pays, lespépinières, incubateurs, accéléra-teurs et autres hubs pour jeunes pousses fleurissent. Un foisonne-ment propice à l’innovation qui attire également les multinationa-les : Mercedes-Benz a implanté son pôle digital mondial dans la capitaleportugaise, Bosch a fait de son usined’Aveiro le centre névralgique de sa division thermotechnique… Et, dans tous les établissements d’enseignement supérieur, de Portoà Evora, de Coimbra à Cascais, les centres de recherche accélèrent la

fertilisation croisée entre jeunes talents, acteurs académiques et éco-nomiques. Cela dans des domaines aussi divers que la mobilité du futur,la fintech, la cybersécurité, le renou-veau du textile, l’agriculture de demain, le développement durable,l’économique social et solidaire, etc.

« Pour ce qui est de la rechercheet du développement, nous aidons

les universités et les entreprises via des programmes d’aides finan-cières, en ne faisant aucune distinc-tion entre les entreprises portugai-ses et étrangères », explique Luís Castro Henriques, président de l’Agence pour l’investissement et le commerce extérieur du Portugal (Aicep) , précisant q u ’ « e n v i r o n 2 0 0 m i l l i o n s

d’euros d’investissements ont été accordés en 2019 ».

Implantée au Portugal depuisprès de deux ans, la start-up fran-çaise TestWe a déjà commercialisé sa solution de dématérialisation des examens auprès d’établisse-ments portugais, telles la faculté de droit et l’école de commerce Católica, et observe « une réelle

appétence pour la digitalisation dans le secteur public ». « Contraire-ment à d’autres pays où l’impul-sion vient du terrain et pas de la tête, au Portugal, ce sont les direc-tions des universités qui poussent le recours à notre plateforme per-mettant de passer des épreuves à distance » , constate Rafaela Manes, responsable du dévelop-pement du marché lusophone chez TestWe.

Des points forts historiquesNéanmoins, entrer de plain-pied dans le IIIe millénaire ne détourne pas le Portugal de ses points forts historiques. La douceur de vivre, le climat délectable et les plages répu-tées, qui ont fait les belles heures del’industrie touristique et des pro-grammes immobiliers pour retrai-tés aisés, sont mis à profit dans la stratégie d’attractivité. En attestent les planches de surf trônant devant le nouveau campus de la Nova School of Business and Economics, à Carcavelos, qui dispose d’un accèsdirect à l’océan.

« Ces atouts sont indéniablementdifférenciants auprès de certains startuppeurs qui se targuent de suivre le soleil autour du monde », note Laurent Marionnet, insistant surtout sur les réformes qui ont été entamées à l’époque de la crise économique de 2008 et qui ont « assaini les bases ». Et l’expert de citer la stabilité sociale, le mou-vement de relocalisation, les expor-tations, qui se portent au mieux, le recul du chômage avant que n’éclate la pandémie…

« Certes, du fait du Covid-19, 2020est une année compliquée, mais nos différents facteurs de compétitivité restent les mêmes, et les projets inno-vants envisagés avant la crise, aussi bien dans l’industrie que dans la recherche et le développement, sont maintenus », assure Luís Castro Henriques. n

Aux quatre coins du pays, les pépinières, incubateurs, accélérateurs et hubs pour jeunes pousses fleurissent. Photo iStock

UNE STRATÉGIE DE COMPÉTITIVITÉ, TROIS GRANDS LEVIERS D’ACTION

ATTIRER LES INVESTISSEURS INTERNATIONAUXEn 2010, le Portugal fait partie des derniers pays touchés par la crise économique amorcée en 2008, et il réplique avec une vague de réformes. Dans le même temps, les politiques gouvernementales s’orientent vers l’attractivité du pays auprès des investisseurs étrangers. Ainsi, une démarche globale est-elle enclenchée, comprenant à la fois l’incitation fiscale, la création de l’Aicep (Agence pour l’investissement et le développement du commerce du Portugal), la simplification administrative, ou encore le renouveau desinfrastructures, des télécommunications et des capacités logistiques.

FAVORISER L’ÉMERGENCE DE CENTRES DE R&DPilier de la stratégie du Portugal pour accroître son attractivité, la création d’un écosystème propice à l’innovation a généré un foisonnement de centres de recherche et de développement. La plupart des universités du pays abritent donc les synergies entre jeunes talents, enseignants-chercheurs et entreprises, des projets souvent financés par l’AICEP, qui a investi 200 millions d’euros pour la seule année 2019. Et l’agence assure que, malgré la crise du Covid-19, les nouveaux partenariats ont été maintenus.

RENFORCER LE TISSU DE START-UPL’objectif de faire du Portugal un pays « start-up friendly » a conduit à l’éclosion d’incubateurs et de dispositifs d’accélération, notamment dans la sphère universitaire. En effet, la coopération entre les secteurs académique et privé ne sert pas la seule innovation des multinationales, mais aussi l’émergence de jeunes pousses promptes à s’internationaliser rapidement. Outre les fonds à l’intention des start-up, le Portugal semble aussi en passe d’éradiquer les lourdeurs administratives pour accélérer la création.

Phot

os iS

tock

Les centres de recherche du pays accélèrent la fertilisation croisée entre jeunes talents, acteurs académiques et économiques.

TERRITOIRES

Page 37: Les Echos - 03 12 2020

Les Echos Jeudi 3 décembre 2020 SPÉCIAL TERRITOIRES // 37

La Nova School of Business and Economics forme les talents en système ouvert avec les entreprises

CAS D’ÉCOLE

lieu à une réflexion plus vaste sur la transformation de l’établissement. L’internationalisation, déjà bien engagée, apparaît comme un vec-teur d’opportunités. « Nous avions perçu le mouvement global du chan-gement avec, du côté des étudiants, une appétence grandissante pour la mobilité et, concernant l’enseigne-ment et la recherche, la nécessité de collaborer avec d’autres écosystè-mes », explique Daniel Traça.

Bien que le Portugal fût frappé deplein fouet, en 2010, par la crise éco-nomique, le projet de campus n’a pas été abandonné. Au contraire, lesfinancements pleuvent : 50 millionsd’euros levés auprès d’entreprises etde particuliers, 16 millions auprès de la Banque européenne d'investis-sement… « Dans le contexte de dépression générale, cette initiative ambitieuse en faveur d’un avenir meilleur a suscité l’intérêt », se sou-vient Daniel Traça, ajoutant que la campagne de crowdfunding « a per-mis à Nova SBE de tisser des liens iné-dits avec les acteurs économiques ».

En effet, outre l’internationalisa-tion de ses masters, qui comptent 54 % d’étudiants étrangers (dont les candidatures ont bondi de 30 % en 2020), la stratégie de développe-ment repose sur d’autres piliers… D’une part, Nova SBE est engagée dans une démarche partenariale avec les entreprises pour faire évo-luer l’enseignement supérieur, la formation continue, la recherche, l’accès aux stages et à l’emploi.

Pour exemple , le françaisBNP Paribas, partenaire d’un pro-gramme de master, participe à l’enseignement et finance une bourse pour les étudiants ; l’alle-mand Adidas vient recruter sur place ; le canadien Westmont Hos-pitality Group y invente le tourisme et l’hôtellerie de demain ; la banque espagnole Caixa y développe des programmes en faveur de l’écono-mie sociale et solidaire…

InterdisciplinaritéD’autre part, l’école de commerce a fait de l’interdisciplinarité sa mar-que de fabrique. « Nos masters ne sont pas adaptés aux seuls titulaires de licences en économie et gestion. Ils accueillent aussi des diplômés en droit, chimie, architecture… car ils sont conçus pour intégrer la diver-sité », précise Daniel Traça, insistantégalement sur le positionnement numérique et durable de l’enseigne-ment. Résultat, Nova SBE ne cesse de gagner des places dans le classe-ment des masters en management du « Financial Times », et le taux d’employabilité de ses étudiants est de 100 % six mois après l’obtention du diplôme. « Cela valide notre modèle qui prépare les jeunes à évo-luer dans un environnement interna-tional et interdisciplinaire, et qui prône un business non centré sur la finance et le marketing, mais emprunt de responsabilité, de solida-rité et de coopération », conclut Daniel Traça. — J. L. B.

Ses baies vitrées cyclopéennes sym-bolisent l’ouverture sur tous les horizons. Ses 3.200 étudiants de 70 nationalités différentes sont la preuve de sa dimension internatio-nale. Et ses installations ultramo-dernes, dont un foisonnement d’espaces favorisant les interactionsformelles et informelles, témoi-gnent de sa vision avant-gardiste de l’enseignement supérieur.

Le nouveau campus de la NovaSchool of Business and Economics (Nova SBE), inauguré en 2018 à Carcavelos, sur la municipalité de Cascais, est l’une des illustrations du renouveau du Portugal. « Le site précédent, implanté à Lisbonne dans un ancien collège jésuite du XIXe siècle, incarnait une approche passéiste de la formation. Les nou-veaux bâtiments, eux, génèrent une ambiance de start-up et sont tournés vers l’avenir », résume le doyen, Daniel Traça.

En 2008, alors que cette univer-sité publique célèbre ses trente ans d’existence, le besoin d’espace et la nécessité de déménager donnent

Le nouveau campus de la Nova School of Business and Economics a été conçu pour servir d’écrin à la coo-pération entre étudiants, enseignants-chercheurs et entreprises du monde entier. Il figure ce que pour-rait être l’enseignement supérieur de demain.

Propos recueillis par Julie Le Bolzer

@JulieLeBolzer

Comment le Portugal en est-il venu à faire des talents l’un de ses principaux atouts auprès des investisseurs ?Nous récoltons aujourd’hui les fruits d’une stratégie amorcée dès les années 1980, alors que le Portugal venait de s’engager dans son processus de démocratisation et s’apprêtait à rejoindre l’Union européenne. A cette époque, nous avons fait le pari de l’éducation en investissant dans les systèmes scolaires et universitaires.

Preuve que cette démarche anécessité des efforts sur le long terme, ce n’est qu’au début des années 2010 que les résultats ont commencé à se faire sentir, lorsque celles et ceux qui étaient enfants aux prémices de cette politique sontarrivés sur le marché du travail. Ainsi l’Aicep [Agence pour l’inves-tissement et le commerce extérieur du Portugal, NDLR] a-t-elle com-mencé il y a près de cinq ans à communiquer sur le fait que le Portugal est un vivier de talents hautement qualifiés.

Quels sont les piliers de cette politique ?Le Portugal a conscience d’être un petit pays qui n’a d’autre choix que d’entretenir des liens avec le reste du

portugais ou d’étudiants venus de l’étranger – sont donc acculturés auterrain et au mode de fonctionne-ment des entreprises. Enfin, nous investissons dans des programmes d’enseignement et de recherche dans des secteurs de pointe, de manière à accélérer sur le champ de l’innovation, ce qui, là encore, constitue une source d’attractivité.

Quels sont les secteurs privilégiés par l’Aicep ?La politique de l’Aicep n’est pas pres-criptrice en termes de projets, nous sommes ouverts à tous les secteurs. Ainsi nous avons investi récem-ment dans le domaine des biotech-nologies. Cela dit, nous tendons à nous concentrer sur les activités où nous sommes particulièrement compétitifs, par exemple l’automo-bile, qui est en train de se réinventeret où nous soutenons des innova-tions très diverses, dans l’électrique,

dans les composants, dans les pro-cessus d’usinage, etc. Autres sec-teurs où l’Aicep est historiquement engagée, le numérique, l’électroni-que ou encore l’industrie papetière ont eux aussi donné lieu à la créa-tion de centres de recherche et de développement. Cela ne nous empêche néanmoins pas de conti-nuer à moderniser des secteurs tra-ditionnels dans lesquels le Portugal s’est historiquement illustré, tels l’agroalimentaire, le tourisme, le textile… Nous sommes dans une logique incrémentale.

Tout cela vise-t-il également à susciter l’attractivité auprès des talents étrangers ?Absolument. Ainsi, environ 14 % des étudiants de notre système universitaire sont-ils étrangers, un taux en constante progression. Celaest notamment dû au fait que la plu-part des universités du Portugal dis-pensent des formations en anglais et que notre écosystème de recher-che et de développement est en lienétroit avec les entreprises. Tous ces éléments font également du Portu-gal un territoire attractif pour les investisseurs en quête de talents ouverts, hautement qualifiés, dis-posant de compétences très recher-chées, et formés pour travailler avecdes organisations de tous horizons. Le Portugal et ses talents sont défi-nitivement ouverts au monde et à l’innovation. n

« Notre écosystème est destiné à favoriser les synergies entre les talents et les acteurs économiques »

ENTRETIEN Président de l’Agence pour l’investissement et le commerce extérieur du Portugal, Luís Castro Henriques détaille la straté-gie qui, il y a une trentaine d’années, a consisté à faire le pari de l’éducation, permettant au pays de devenir un réservoir de compétences.

Le campus de la Nova School of Business and Economics, inauguré en 2018 à Carcavelos.

«« Le Portugala conscience

d’être un petit pays qui n’a d’autre choixque d’entretenir des liens avec le reste du monde. »

monde. Ainsi les jeunes Portugais apprennent-ils au moins deux lan-gues étrangères, un point fort aux yeux des entreprises mondialisées, qui doivent évoluer dans un con-texte global. Surtout, cet esprit d’ouverture est culturel : voilà quatrecents ans que le Portugal s’affranchitdes frontières. Cela est encore plus vrai aujourd’hui avec le déploiementd’un écosystème complet, destiné à favoriser les synergies entre les talents et les acteurs économi-ques du monde entier, et qui va des infrastructures aux services de télé-communication, en passant par les centres de recherche et de dévelop-pement. Concernant la R&D, l’Aicepa mis en place des aides financières, couplées à des incitations fiscales, à l’intention des entreprises. Et nousfinançons jusqu’à 75 % des dépensesdes universités sur certains projets.

Quelles sont les autres compétences différenciantes des talents issus du système universitaire portugais ?Leurs qualifications techniques sont identiques à celles dont dispo-sent les autres pays européens les plus compétitifs, si ce n’est que notre écosystème de recherche et de développement se révèle très orienté vers les entreprises, sans distinction entre les organisations portugaises et les autres. En plus d’être ouverts sur le monde, nos talents – qu’il s’agisse de citoyens

Luís Castro Henriques l’affirme, « le Portugal et ses talents sont définitivement ouverts au monde et à l’innovation ».

Enge

nhar

ia P

ortu

gal

Wifr

e Mel

endr

ez

RÉAGIRFACE À UNE CRISE

AGIRPOUR PRÉPARER L’APRÈS

0,59€par jour

*

Reprenez un temps d’avance avec Les Echos.

• Le site et l’applien illimité

• Le journal numériqueen avant-première

• Les newslettersréservéesaux abonnés

abonnement.lesechos.fr

*danslecadred’unabonnementdigitalà18€parmoisaulieude36€parmois,soit50%deréduction

Page 38: Les Echos - 03 12 2020

38 // SPÉCIAL TERRITOIRES Jeudi 3 décembre 2020 Les Echos

autonome. « Les entreprises alle-mandes arrivent ici pour le prix de la main-d’œuvre. Elles restent et se déve-loppent rapidement pour la qualité de la matière grise et les infrastructu-res », indique Augustin Olivier, qui regrette a contrario « une certaine frilosité des entreprises françaises ».

A Lisbonne, le directeur généralde la chambre de commerce luso-française, Laurent Marionnet, un Français qui accompagne les entre-prises de l’Hexagone souhaitant réa-liser des affaires au Portugal, ne dit pas autre chose : « C’est la réalité. Lescentres de recherche français ne sont pas encore ici. » Et pourquoi, selon lui ? « Nous ne sommes pas un peuplede commerçants. Il faut nous pousserà l’international. C’est culturel. Or les atouts du Portugal sont indéniables. C’est un pays très en avance sur plein de choses… A mettre dans les radars de l’innovation », insiste celui qui s’y est installé il y a six ans.

100 % énergie renouvelableN’empêche, c’est bien à une entre-prise française, Renault, qu’on doit, avec le fournisseur d’éner-gie Empresa de Electricidade da Madeira, l’expérimentation menée à Porto Santo sur le stockage d’éner-gie à partir de véhicules électriques capables de réinjecter de l’électri-cité dans le réseau électrique. Cette petite île de l’archipel de Madère souhaite, en effet, devenir l’une des premières au monde à utiliser à 100 % des énergies renouvelables.

En conclusion, le Portugal figuredorénavant en très bonne place sur la carte du monde pour qui veut développer et tester les technologiesdu véhicule du futur. n

jusqu’à 50 % des dépenses engagées.Tous secteurs confondus, ce sont ainsi 200 millions d’euros qui ont été alloués par l’Aicep à des projets de R&D en 2019. Un record. Une manne dont a su largement profi-ter le secteur automobile, en pleine mutation, qui a quasi doublé ses exportations en dix ans, deve-nant « le plus grand exportateur de biens du pays », souligne Luís Castro Henriques.

Des universités de pointeUn écosystème portugais égale-ment très favorable à l’éclosion de pépites nationales : à l’image de la start-up Veniam, fondée par un chercheur de l’université de Porto, devenue en seulement quelques années la solution de référence pourconnecter les véhicules entre eux ouaux infrastructures (lire ci-dessous).

Reste que le secteur automobiles’est d’abord développé grâce aux initiatives privées, en lien avec les universités, souffle, depuis Porto, Augustin Olivier, de l’Inesc Tec – Institute for Systems and Com-puter Engineering, Technology and Science –, qui fédère les princi-pales universités du nord du pays, avec parmi ses missions celle de « favoriser le transfert des technolo-gies vers l’industrie ».

A Braga, les équipes de recherchede l’équipementier Bosch tra-vaillent ainsi depuis 2013, en étroite collaboration avec celles de l’univer-sité du Minho et l’Inesc Tec, au déve-loppement de la voiture connectée. A Porto, c’est le fabricant de pneu Continental qui a ouvert un centre technique pour développer ses pro-pres solutions pour la conduite

Etienne Thierry-Aymé @e_THA

V oitures connectées et auto-nomes, autoroutes intelli-gentes… Le Portugal est

aujourd’hui en pointe sur les technologies du véhicule du futur. L’Aicep, agence de développement économique du pays, ne manque d’ailleurs pas de le faire savoir.

Ciblant notamment les investis-seurs étrangers, elle a ainsi édité cette année un dossier détaillant les principaux atouts du pays dans la course au développement des moyens de locomotion de la pro-chaine génération : des infrastruc-tures logistiques au réseau de bor-nes de recharge pour les voitures électriques en passant par la 5G, sans oublier les talents. Un vivier né du choix stratégique fait par le pays de miser sur les talents pour renforcer son attractivité.

Des investissements pour les projets de R&DLe retour sur investissement est des plus tangibles, avec un niveau de qualification au plus haut niveau desstandards européens, notamment s’agissant de ses ingénieurs, qui représentent 21 % des étudiants for-més par les universités portugaises – l’un des plus forts taux en Europe.

De surcroît, le système univer-sitaire est très ouvert sur le monde de l’entreprise. De quoi séduire les industriels du monde entier… D’autant plus quand on y ajoute le coup de pouce financier dont ils peu-vent bénéficier pour leurs projets deR&D en partenariat avec les univer-sités. Un soutien qui peut s’élever

Véhicule du futur : l’art de faire converger l’énergie des innovateursMOBILITÉ En dix ans, le secteur automobile est devenu le premierexportateur du pays… Et demain ? Universités, industriels et puissance publique travaillent d’ores et déjà au développement des technologies dont auront besoin nos prochains véhicules.

de véhicule à véhicule en mouve-ment, maillage avec les infrastructu-res, interopérabilité avec les princi-paux systèmes de communication – V2X, wi-fi, GPS, 4G, 5G, LTE… Avecaussi, comme bénéfice attendu pourles villes, la possibilité de disposer d’informations leur permettant d’améliorer la qualité de services, comme réduire les embouteillages.

Depuis 2015, l’entreprise, quiemploie près de 60 personnes à travers le monde, a installé son siègeà Mountain View, en Californie. Elle dispose de bureaux commer-

ciaux à Détroit, Munich et Tokyo. Mais son centre d’ingénierie est demeuré à Porto. « Pour des raisons historiques mais aussi pour la qualité des ingénieurs sur place », insiste João Barros.

PartenariatsVeniam multiplie aussi les partena-riats, travaillant étroitement avec les principaux équipementiers mondiaux pour développer et inté-grer ses outils dans le véhicule de demain, comme avec le japonais Denso ou l’allemand Bosch, pré-

Le secteur automobile, en pleine mutation, a quasi doublé ses exportations en dix ans. Photo iStock

Veniam, une start-up à la pointe de l’Internet des objets en mouvement

sent au Portugal avec son centre de R&D de Braga, au nord du pays (lire ci-contre), avec qui la start-up a décroché au CES 2019 de Las Vegas un prix de l’innovation pour leurs travaux conjoints mariant plate-forme logicielle et unité d’inter-connexion universelle.

En quelques chiffres, Veniam,c’est aujourd’hui, 250 inventions et plus de 130 brevets délivrés, 504 To de données déjà déplacées et plus de 600 bus, taxis ou camions à ordures déjà équipés dans la seule agglomération de Porto. — E. T.-A.

La plateforme logicielle développée par Veniam pourrait permettre de fluidifier le trafic en ville.

Veniam, c’est l’histoire d’une succes story, celle d’une start-up cofondée en 2012 par un professeur de l’uni-versité de Porto, João Barros, spécia-liste des technologies de l’informa-tion et des télécommunications. Ou comment passer, après plusieurs levées de fonds, d’un projet universi-taire à celui de leader mondial de « l’Internet des objets en mouve-ment », explique son CEO. Parmi les nombreuses bonnes fées s’étant penchés sur son berceau se trouventOrange, Verizon et Cisco. Pour João Barros, la révolution à l’œuvre n’est « pas seulement celle du véhicule autonome, mais celle du véhicule con-necté ». Un marché potentiel énorme : selon PwC, rien qu’en Europe, aux Etats-Unis et en Chine, ils devraient être plus de 470 mil-lions à circuler à l’horizon de 2025.

Des data pour relever des défisVoitures, taxis, bus… La plateforme logicielle développée par Veniam permet de résoudre les principaux défis que pose le développement de ce type de véhicules : masse de don-nées collectées et traitées dans le cloud, communications sécurisées

Né à Porto il y a pratique-ment neuf ans, Veniam a bien grandi, devenant le leader mondial de l’Internet des objets en mouvement. Une brique incontournable pour la réussite du véhicule autonome et connecté.

A Braga, Bosch développe les technologies de la voiture autonome

INDUSTRIE

« C’est une preuve de plus du poten-tiel énorme du Portugal. Et c’est un vote de confiance pour le haut niveau de compétences de ses ingé-nieurs. ». C’est avec dithyrambe que Dirk Hoheisel, alors vice-président et directeur général des opérations commerciales, membre du board de Bosch, a inauguré, le 30 mai 2018, en présence de la chancelière alle-mande, Angela Merkel, et du Premier ministre portugais, António Costa, le nouveau centre de technologie et de développe-ment de Braga, au nord du pays. Avec, à la clé, l’embauche d’une centaine d’ingénieurs supplé-mentaires. Soit 200 ingénieurs entièrement occupés à la concep-tion et au développement du véhicule autonome, logés dans un nouveau bâtiment de 4.500 mètres carrés.

« Nous avons aussi à Bragaun centre de test de 3.500 m2, 1.500 pour le développement m u l t i m é d i a e t 1 .0 0 0 p o u r l’équipe logicielle », détaille Carlos Ribas, le directeur du site et représentant du géant alle-mand au Portugal. Avec, en tout, 400 ingénieurs à temps plein sur l’ensemble du site.

Une course à la démocratisationUn programme d’innovations largement soutenu par la puis-sance publique. « Jusqu’à 40 % », explique Carlos Ribas. Avec, parmi les prérequis, « que 80 % des recherches aboutissent sur

A deux pas de son site industriel de Braga, l’équipementier allemand a renforcé son centre de technologie et de développement. Objectif : mettre au point les capteurs et logiciels destinés à la conduite automatisée.

le marché dans les trois ans ». Un nouveau centre et une nou-velle brique dans la stratégie glo-bale de développement – électro-nique, hardware, software – de l’équipementier vers le véhicule 100 % autonome. Un signal fort, surtout, de la place qu’occupe désormais le Portugal dans la course à sa démocratisation.

Le centre est situé à moinsde 5 kilomètres du site principal de production, qui emploie près de 3.600 salariés et fournit chaque jour une variété de composants (solutions multi-médias, contrôle du châssis, cap-teurs de positionnement) aux principaux fournisseurs auto-mobiles de la planète. « En dehorsde l’Allemagne, c’est l’un de nos plus grands sites industriels », insiste Carlos Ribas.

Rapide retour en arrière. Toutcommence en 1990, avec l’ouver-ture de l’usine Blaupunkt, entiè-rement affectée à la produc-tion d’autoradios. Du fait de l’évolution du marché automo-bile , la marque est vendue en 2009. Une réorganisation s’opère. Le site de Braga devient Bosch Car Multimedia, consa-cré au développement et à la pro-duction de systèmes d’info-divertissement, d’instrumenta-tion et de capteurs de mesures de sécurité. — E. T.-A.

«« En dehorsde l’Allemag

ne, c’est l’un de nos plus grands sites industriels. »CARLOS RIBASDirecteur du site

200MILLIONS D’EUROS

Le montant alloué par l’Aicep à des projets de R&D en 2019, tous secteurs confondus.

Veni

am

Page 39: Les Echos - 03 12 2020

Les Echos Jeudi 3 décembre 2020 SPÉCIAL TERRITOIRES // 39

obstacles lorsqu’elles cherchent à lever des fonds, au premier rang desquels leur capacité à se dévelop-per à l’international (54 %) et la localisation du siège de la société (38 %), selon le rapport annuel de Portugal Fintech. Mais la situation évolue : les 30 plus importantes fin-techs au Portugal ont levé plus de 275 millions d’euros cette année, dont 30 % auprès d’investisseurs internationaux.

Le Web Summit n’est pas étran-ger à ces chiffres : à l’origine organiséen Irlande, cet événement se tient depuis 2015 chaque année à Lis-bonne. Il a contribué à faire connaî-tre les entreprises portugaises en Europe, mais aussi à attirer les investisseurs étrangers. « Le secteur des fintechs a réussi à travailler étroi-tement avec les pouvoirs publics », souligne Pedro Pinheiro, professeurà la Porto Business School.

Un « bac à sable réglementaire »En avril 2020, le gouvernement a annoncé la création d’une « regula-tory sandbox », « bac à sable régle-mentaire » en français, qui permet aux fintechs et aux assurtechs du pays d’échanger librement avec la Banque du Portugal, la Comissão doMercado de Valores Mobiliários, l’équivalent de l’Autorité des mar-chés financiers (AMF) française, et l’Autoridade de Supervisão de Seguros e Fundos de Pensões, équi-valent de notre Autorité de contrôle prudentiel et de résolution. « Histo-riquement, l’innovation financière auPortugal a toujours été forte, mais ellevenait surtout des grands groupes, explique Pedro Pinheiro. La sandboxdoit permettre de faciliter l’accès au marché pour les petits challengers. » Et contribuer à faire émerger de nouveaux champions européens. n

Un carrefour pour les fintechs « born global »

FINANCE Un vivier de talents internationalement reconnu, un accès au financement de plus en plus facile, mais aussi le soutien des autorités publiques et des régulateurs : les fintechs portugaises ont bien des atouts. Le principal : la taille réduite du marché intérieur, qui les pousse à la conquête de l’international.

« Les investisseurs sont de plus en plus sensibles aux critères extrafinanciers »

rêt grandissant pour les actifs réels et utilisent de plus en plus des instruments passifs comme éléments constitutifs de leurs stratégies d’allocation d’actifs.

Amundi a développé une politique globale d’investissement responsable. Comment cette thématique se développe-t-elle ici ?Qu’ils soient particuliers ou insti-tutionnels, nos clients portugais sont de plus en plus demandeurs de produits qui prennent en compte les critères environne-mentaux, sociaux et de gou-vernance, et la crise du Covid-19 semble avoir renforcé l’appétencedes investisseurs pour cette thé-matique. L’investissement res-ponsable représente aujourd’hui 345 millions d’euros d’encours sous gestion chez Amundi. D’ici à la fin 2021, tous nos fonds ouverts intégreront des critères extrafinanciers.

Propos recueillis par C. Pr.

Les fintechs connaissent une croissance solide au Portugal. Photo iStock

D’un point de vue d’investisseur, le Portugal est-il un marché dynamique ?La pandémie a interrompu une période de croissance solide, caractérisée par un désendette-ment des secteurs public et privé. Compte tenu de l’exposition du pays aux secteurs du tourisme et de l’hôtellerie, et du rôle des peti-tes et moyennes entreprises, qui sont au cœur du tissu économi-que local, nous prévoyons une contraction en 2020, suivie d’un rebond en 2021, largement impu-table aux effets de base.

Comme de nombreux Etatseuropéens, le Portugal a mené u n e i m p o r t a n t e p o l i t i q u e d’expansion budgétaire cette année pour lutter contre la contraction économique. Le pays pourrait revenir avant ses voisins à des niveaux de dette réduits, étant donné la discipline budgétaire qui y est menée depuis des années.

Quelles sont les spécificités du marché portugais ?Les investisseurs portugais sont très prudents. Les clients particuliers conservent une épar-gne importante sur leurs comp-tes de dépôt, malgré les taux actuels. Quant aux institution-nels, comme les fonds de pensionou les assureurs, ils ont un inté-

Amundi est présent au Portugal à travers Amundi Iberia, dirigé par Marta Marín. La structure basée à Madrid gère 20,4 milliards d’euros d’encours et emploie une équipe de 30 personnes. Avec une particularité de la clientèle locale : une grande prudence et une appétence de plus en plus marquée pour l’investissement durable.

« Le pays pourrait revenir avant ses voisins à des niveaux de dette réduits, grâce à sa discipline budgétaire menée depuis des années. »MARTA MARÍN Directrice générale d’Amundi Iberia

Gui

llerm

o Sa

nz/A

mun

di

environ 75 personnes à l’époque. Et commence un nouveau chapitre à Porto. « Le Portugal est l’un des pays fondateurs d’Euronext, en plus d’être un excellent gisement de talents. Malgré les crises, ce pays n’a jamais fait de compromis sur la formation de ses jeunes », détaille-t-il.

Porto est aujourd’hui l’un destrois centres technologiques du groupe, avec Paris et la Scandinavie.C’est depuis la deuxième ville por-

tugaise que sont gérés la cyber-sécurité du groupe, les services sur le cloud, les opérations IT ainsi qu’un certain nombre de dévelop-pements de softwares.

Accompagner la croissance du groupe« Nous avons été remarquablement accueillis par les autorités nationales et locales, qui ont un sincère intérêt pour l’industrie financière et la tech-

Le Portugal est aujourd’hui le pays dans lequel Euronext emploie le plus de personnes après la France. Photo Euronext

La Bourse portugaise est parmi les premières à avoir rejoint le groupe boursier paneuropéen. C’était en 2002. Le Portugal est aujourd’huile pays dans lequel Euronext emploie le plus de personnes, après la France. Un dynamisme notam-ment porté par l’ouverture en 2017 d’un centre technologique à Porto, qui emploie plus de 150 personnes.

Avant l’ouverture de ce centre, lesupport technologique d’Euronext était en partie basé à Belfast, en Irlande du Nord. Mais, en juin 2016, le Royaume-Uni vote en faveur de sasortie de l’Union européenne. « J’avais l’intuition qu’il était néces-saire de garder les fonctions centralesd’Euronext à l’intérieur de l’Union européenne », souligne Stéphane Boujnah, président du directoire et directeur général d’Euronext. Il prend alors la décision de transférerle centre de Belfast, qui employait

nologie », explique Stéphane Bouj-nah. L’inauguration du centre tech-nologique de Porto a été faite en présence du Premier ministre por-tugais, António Costa, en fonction depuis 2015. Un soutien au plus haut niveau justifié pour le direc-teur général d’Euronext par la forte présence du groupe au Portugal : « Ce n’est pas du tout de l’offshore, nous ne sommes pas un acteur étran-ger. La Bourse portugaise et Inter-Bolsa [un dépositaire central de titres, NDLR] font partie intégrante du groupe », insiste-t-il.

Le centre de Porto a vocation àcontinuer sa croissance. A forma-tion égale, le coût total après char-ges sociales des talents du pays est inférieur à celui de la France, mais aussi de l’Irlande, où était précé-demment implanté Euronext.

« Les équipes de Porto accompa-gnent la croissance du groupe. Elles vont notamment être sollicitées lors de la finalisation de l’acquisition de Borsa Italiana », rappelle Stéphane Boujnah. En trois ans d’existence, le centre technologique a doublé ses effectifs. L’empreinte portugaise du groupe paneuropéen va jusqu’au conseil de surveillance, dont l’un des membres depuis 2012, Manuel Ferreira da Silva, est originaire de Porto. — C. Pr.

Porto, avant-poste technologique d’EuronextLa deuxième ville du Portugal abrite l’un des centres technologiques d’Euronext. Les 150 salariés qui y travaillent gèrent notamment la cybersécurité du groupe paneuropéen. Une activité stratégique et en croissance : les effectifs y ont doublé en trois ans.

ment international, que ce soit à Lisbonne, avec Nova SBE ou l’uni-versité catholique, ou à Porto, avec la faculté d’économie et la Porto Business School.

Fort soutien publicLes start-up du pays ont aussi la par-ticularité d’être « born global ». Avecun marché intérieur de 10 millions d’habitants, le Portugal est trop petitpour satisfaire les besoins d’une start-up en forte croissance. Pour cette raison, la majorité des start-upportugaises visent l’international dès leur création, avec une préfé-rence pour les Etats-Unis et le Royaume-Uni, mais aussi l’Espa-gne, le Brésil et certains Etats afri-cains lusophones. « Il arrive même que le Portugal soit leur deuxième marché, comme pour Lovys, qui s’est d’abord développé en France », illus-tre Fernando Peres Ferreira, inves-tisseur en venture capital (VC) chez Portugal Ventures. Ce dernier a par-ticipé en 2019 à la levée de Lovys auxcôtés du fonds français MAIF Ave-nir et de l’américain Plug and Play, permettant à la start-up de se finan-cer à hauteur de 3,3 millions d’euros.

Les jeunes pousses portugaisescontinuent d’être confrontées à des

Camille Prigent @camille_prigent

L e britannique Revolut, l’alle-mand N26 et le français Lydiaont tous trois décidé de poser

leurs valises au Portugal. Les suc-cess-stories domestiques sont aussi nombreuses, et la crise du Covid-19 ne semble pas avoir altéré les pers-pectives du secteur des fintechs au Portugal : globalement, la crois-sance du secteur a été aussi forte cette année qu’en 2019, selon le rap-port annuel de Portugal Fintech.

Si les fintechs connaissent unecroissance solide au Portugal, c’est làencore d’abord grâce à la qualité de la formation des jeunes (lire page 37),aussi bien dans les métiers technolo-giques que financiers. « Les coûts de R&D et d’ingénierie au Portugal sont moins élevés que la moyenne, alors même que les travailleurs du monde de la tech sont très bien formés », con-firme Rui Miranda, coordinateur de TecBIS, une structure cofinancée par l’Union européenne qui com-prend un incubateur et un accéléra-teur pouvant accompagner les start-up pendant trois à six ans.

Côté finance, les universités por-tugaises bénéficient d’un rayonne-

La success-story Feedzai

Cette fierté nationale, fondée en 2009, a été incubée au sein de TecBIS avant d’accéder au marché américain. C’est là que le projet, une technologie de médecine prédictive, pivote vers la finance et devient un système de détection de fraudes. « Le time-to-market était beaucoup plus court que dans le secteur de la santé, et il était facile pour Feedzai de démontrer aux banques combien elles pouvaient gagner grâce à cette technologie », souligne Rui Miranda, coordi-nateur de TecBIS. La société est présente dans 190 pays, dont l’Hexagone. 95 % des cartes de paiement émises par des banques françaises sont protégées par Feedzai.

«« Les coûts de R&D

et d’ingénierie au Portugal sont moins élevés que la moyenne, alors même que les travailleurs du monde de la tech sont très bien formés. »RUÍ MIRANDACoordinateur de TecBIS

Page 40: Les Echos - 03 12 2020

40 // Jeudi 3 décembre 2020 Les Echos

AXA emprunte le chemin ingrat mais payant de la régularité.

Pas de grosse nouvelle, petite bonne nouvelle ! Le plan de moyen terme d’AXA, un alliage de continuité stratégique et d’objectifs chiffrés en ligne avec les attentes, a laissé son action de marbre, de quoi conserver le rebond plus fort que la moyenne depuis début novembre (+43 % contre +31 % pour Allianz et +23 % pour Zurich Insurance), sans effacer le retard pris depuis le début de 2020. Tout se passe comme si le rachat de XL avait désensibilisé le portefeuille de risques couverts aux caprices des cycles financiers, comme promis, mais sans bénéficier par ricochet à l’histoire boursière. Ce supplice de Tantale pour actionnaires fidèles risque de durer tant que les bénéfices de l’emplette américaine ne seront pas plus réguliers dans le temps. L’ac-cent mis sur la réduction de leur volatilité se comprend, et les efforts de pro-ductivité devraient conjurer les craintes pour la rentabilité. Ce progrès or-ganique est ingrat, mais il peut capitaliser sur le fait que la réassurance-dommages et les risques d’entreprises ne sont pas si mal aimés, comme le montre Reinsurer Conduit à la City. En plus du marché porteur, cette petite start-up se vante, il est vrai, de ne pas avoir d’héritage du passé à assumer, tout en faisant miroiter un rendement du dividende de 5 à 6 %. Comme un défi aux vieux Goliath de l’assurance, dont les faits et gestes sont surveillés par les régulateurs financiers et l’opinion publique.

Tantale et Goliath

Plus de la moitié des 149 entrepri-ses françaises évaluées par Stan-dard & Poor’s ont conservé une notation de crédit solide malgré un record historique de dégrada-tions (35) cette année, dont trois « anges déchus » passés de la ca-tégorie « investissement » à celle « spéculative » (Renault, Valeo, Accor). Mais Eric Tanguy, chargé de la coordination des notes en France, constate que leur pers-pective est négative pour 38 % d’entre elles, au lieu de 20 % à 25 % habituellement. Dans les sec-teurs, déjà fragiles avant la crise, de la distribution non alimentaire et de la restauration en Europe, les experts de S&P, Mickaël Vidal et Solène Van Eetvelde, craignent qu’à la problématique des liquidi-tés succède celle de la solvabilité à plus long terme. Rembourser la « dette Covid », quand c’estpossible, prendra au moinsjusqu’en 2023.

Le redressement du profil de crédit des entreprises sera long. « Dream team »Wall Street apprécie moyennementla boulimie de Salesforce pour rivaliser avec Microsoft.

A quel moment déjà la grenouille qui voulait ressembler au bœuf ex-plose-t-elle ? Sept à huit fois plus petit que Microsoft par les revenus et la capitalisation boursière, Salesforce met, avec l’acquisition de Slack, un point d’orgue à une stratégie de croissance externe qui lui a coûté près de 50 milliards de dollars en trois ans. La facture a certes été payée en partie avec son propre titre, qui a plus que doublé dans l’intervalle. Mais les 27,7 milliards de dollars, à 60 % en cash, consentis pour la mes-sagerie collaborative qui a promis de renvoyer le courriel aux oubliet-tes de l’histoire, à côté de la télécopie, ont fait tiquer Wall Street. La con-frontation engagée par le leader mondial des logiciels de relation client avec le père de Windows et d’Office devient de plus en plus frontale. La « dream team » qu’espère constituer le patron et cofondateur de Sales-force, Marc Benioff, pour réaliser son « rêve » de 50 milliards de dollars en chiffre d’affaires devra d’abord, pour ce faire, passer sur le corps de Teams, le logiciel conçu par Microsoft après avoir renoncé à mettre la main sur Slack. Le combat de David (142.000 utilisateurs payants chez Slack) contre Goliath (115 millions) nécessitera des moyens. La seule porte de sortie pour les actionnaires de Salesforce serait que l’autre pré-tendant qui, selon les experts d’UBS, tournait autour de la firme de San Francisco, déclare sa flamme.

// Budget de l’Etat et PSR 2021 : 448,8 milliards d’euros (prévisions PLF 2021) // PIB 2020 : 2.223 milliards d’euros// Plafond Sécurité sociale : 3.428 euros/mois à partir du 01-01-2020 // SMIC horaire : 10,15 euros à partir du 01-01-2020 // Capitalisation boursière de Paris : 1.764,98 milliards d’euros (au 30-11-2020)// Indice des prix (base 100 en 2015) : 104,51 en novembre 2020 // Taux de chômage (BIT) : 9 % au 3e trimestre 2020 // Dette publique : 2.638,3 milliards d’euros au 2e trimestre 2020

= Les chiffres de l’économie

Une seule idée en dettecrible

EN VUE

Joshua Wong

A près qu’on l’eut privée de sonposte d’ambassadrice despôles, Ségolène Royal déclarait

en janvier dernier que la France était plongée dans un « régime autoritaire » avec « un pouvoir qui n’écoute pas, qui n’en fait qu’à sa tête, qui assiste à la souf-france des citoyens sans réagir ». Texto. Hélas, ses âneries sont largement parta-gées. Plutôt que ces fameux pôles où ellen’avait jamais mis les pieds hormis pour« Paris Match », on lui conseille comme àtous les « insoumis » qui le sont surtout àl’honnêteté intellectuelle d’aller faire un tour du côté de Pékin. Quand Mélen-chon hurle « Dans quel pays du monde on fait un truc pareil ? » l’adorateur du Venezuela ne parle pas de la Chine maisde la « monarchie » macronienne. Ce qu’est vraiment un régime autoritaire Pékin pourtant le prouve plus que jamais. Il y a d’abord ces informations qui prouvent comment la réalité des casde Covid a été dissimulée. Quant à la

mise au pas de Hong Kong pourtant pro-mise à l’autonomie jusqu’en 2047, elle sepoursuit. Pour la troisième fois de sa jeune vie, Joshua Wong, « l’icône » de la « révolution des parapluies », va se retrouver en prison. A 24 ans, Joshua estdéjà un vieux militant. A 16 ans, il soule-vait, victorieusement, des dizaines de milliers d’élèves et de parents contre l’introduction d’un cours de patriotismechinois, un « lavage de cerveau ». Plus tard les « parapluies » réclameront un véritable suffrage universel pour choisirleurs dirigeants sans ingérence de Pékin. Pour Wong, les dirigeants chinoisne voient en ses compatriotes qu’« une bande de bébés pleurnichards occidentali-sés » à « maintenir dans un état d’adoles-cence perpétuelle sans jamais leur per-mettre d’atteindre la maturité politique ».C’est ça un régime autoritaire.

(Lire nos informationsPage 9

La Bourse de Paris à l’équilibre

• L’indice CAC 40 a terminé quasi-ment stable mercredi, en hausse de0,02 % à 5.583,01 points. La veille, il avait grimpé de 1,14 %. La Bourse deParis a évolué dans le rouge une bonne partie de la séance, les inquiétudes sur les conséquences économiques de la deuxième vagueprenant le dessus alors que les créa-tions d’emplois dans le secteur privé américain ont continué à ralentir en novembre d’après les données ADP.

Ailleurs en Europe, le DAX a cédé0,52 %, pénalisé par la hausse de l’euro. Le FTSE 100 a en revanche bondi de 1,23 %, porté par le feu vertdonné au vaccin de Pfizer et BioN-Tech.

La rotation sectorielle s’est pour-suivie au détriment des valeurs tech-nologiques. STMicroelectronics a perdu 2,65 % tandis que Worldline a cédé 2,11 %, les deux valeurs accu-sant les pires performances de l’indice. Teleperformance (–1,81 %) et Dassault Systèmes (–0,55 %) ont terminé en territoire négatif. A l’inverse, les sociétés qui ont le plus àgagner à un retour à la normale ont progressé. Airbus s’est adjugé 2,15 %, Renault a grimpé de 1,45 % etUnibail-Rodamco-Westfield a pris1,08 %. Le secteur bancaire a égale-ment bénéficié de cette tendance. Société Générale a gagné 2,1 %, devant BNP Paribas (+1,69 %) et Crédit Agricole SA (+1,67 %).