le recours des tiers payeurs et l'impact du systeme d

114
1/114 Master 2 Droit des affaires Spécialité Assurance et banque LE RECOURS DES TIERS PAYEURS ET L'IMPACT DU SYSTEME D'INDEMNISATION DE SOLIDARITE NATIONALE DES VICTIMES D'ACCIDENTS MEDICAUX Margo REMILLY Directeur de mémoire : Céline BEGUIN Maitre de stage : Carole DAMIENS Date de soutenance : 5 septembre 2014

Upload: others

Post on 20-Jun-2022

1 views

Category:

Documents


0 download

TRANSCRIPT

Page 1: LE RECOURS DES TIERS PAYEURS ET L'IMPACT DU SYSTEME D

1/114

Master 2 Droit des affaires

Spécialité Assurance et banque

LE RECOURS DES TIERS PAYEURS ET

L'IMPACT DU SYSTEME

D'INDEMNISATION DE SOLIDARITE

NATIONALE DES VICTIMES

D'ACCIDENTS MEDICAUX

Margo REMILLY

Directeur de mémoire : Céline BEGUIN

Maitre de stage : Carole DAMIENS

Date de soutenance : 5 septembre 2014

Page 2: LE RECOURS DES TIERS PAYEURS ET L'IMPACT DU SYSTEME D

2/114

Page 3: LE RECOURS DES TIERS PAYEURS ET L'IMPACT DU SYSTEME D

3/114

TABLE DES MATIERES

-TABLE DES SIGLES LES PLUS COURAMMENT UTILISES....................................................……....5

INTRODUCTION …............................................................................................................... .......................6

I- Le recours des tiers payeurs influencé par l’intervention de l’ONIAM dans l’indemnisation des victimes d’accidents médicaux ………………………………...……..….......14

A/ Le recours subrogatoire des tiers-payeurs aligné sur celui de l'ONIAM .................................................14

1- Un recours subrogatoire fondé sur un régime de responsabilité pour faute………………….….............15

2- Le recours subrogatoire des tiers payeurs suivant les différents cas d'intervention de l'ONIAM au titre de la solidarité nationale …..............................................................................................................17

3- Un recours des tiers-payeurs contre l'ONIAM prohibé …......................................................................24

B/ L’existence d’un recours autonome des tiers-payeurs détaché de celui de l'ONIAM et de la victime..................................................................................................................................................25

1- Une action récursoire rendue possible en cas d’inapplication de la subrogation …...….......……......25

2- L'unique recours des tiers payeurs contre l'ONIAM : le cas de l’indemnisation des victimes contaminées par le Virus de l'Hépatite C (VHC)….............................................................................29

II - L'avenir incertain du recours des tiers-payeurs en cas d'indemnisation des victimes d'accidents médicaux par l'ONIAM ….............................................................................................. ......34

A/ L’indemnisation des victimes d’infection nosocomiale remaniée par la loi About du

30 décembre 2002 et par la jurisprudence ……………………………………….......................................34

1- L’indemnisation des victimes d'infection nosocomiale par l'ONIAM en fonction de la gravité du

dommage et non en fonction de la responsabilité.............................................................................. ...35

2- Une impossibilité de recours des tiers-payeurs contre l'établissement de soin en cas d'infection

nosocomiale grave, à l'inverse de l'ONIAM…………..........................................................................41

B/ L'émergence d'un transfert de la responsabilité médicale vers la solidarité nationale............................47

1- La réforme législative de 2002 en faveur des assureurs………………..………….……….................47

Page 4: LE RECOURS DES TIERS PAYEURS ET L'IMPACT DU SYSTEME D

4/114

2- La disparition de l’action récursoire pour les Tiers payeurs amorcée depuis avril 2014…................49

3- Vers un phénomène de déresponsabilisation des acteurs de santé …..............................................52

ANNEXES.…..........................................................................................................................................54

BIBLIOGRAPHIE..................................................................................................................................108

Page 5: LE RECOURS DES TIERS PAYEURS ET L'IMPACT DU SYSTEME D

5/114

TABLE DES SIGLES LES PLUS COURAMMENT UTILISES

ONIAM : Office National d'Indemnisation des Accidents Médicaux

CRCI : Commission Régionales de Conciliation et d'Indemnisation

CPAM : Caisse Primaire d'Assurance Maladie

IPP : Incapacité Partielle Permanente

VHC : Virus de l'Hépatite C

VIH : Virus de l'Immunodéficience Humaine

EFS : Etablissement Français du Sang

Page 6: LE RECOURS DES TIERS PAYEURS ET L'IMPACT DU SYSTEME D

6/114

Introduction

Avant l'intervention du législateur en 2002 relative aux droits des malades et à la qualité du

système de santé, la jurisprudence tant civile qu’administrative a tenté de créer des régimes de

responsabilité médicale favorables aux victimes de dommages survenus sans faute du

médecin.

Cependant, au départ, les victimes de la médecine ne pouvaient être indemnisées qu’en

apportant la preuve de la faute du médecin. Le médecin était tenu d’une obligation de moyens

et la mise en jeu de sa responsabilité dépendait de la preuve qu’il avait commis une faute1.

Très souvent, ces victimes n’étaient pas indemnisées car elles ne parvenaient pas à prouver

l’existence d’une faute du médecin.

La jurisprudence est intervenue pour s’emparer du problème, notamment la jurisprudence

administrative, qui a créé des cas de responsabilité sans faute. La Cour d’appel administrative

de Lyon, par un arrêt du 20 décembre 1990, consorts Gomez2, illustre cette avancée. Mais

malgré cela, la mise en œuvre de cette jurisprudence est difficile car elle restait cantonnée à

des situations très particulières nécessitant la réunion de trois conditions :

- La thérapeutique choisie devait être une thérapeutique nouvelle aux conséquences non

encore entièrement connues ;

- Le recours de cette thérapeutique ne devait pas s’imposer pour des raisons vitales ;

- L’utilisation de cette thérapeutique devait entrainer des complications exceptionnelles et

anormalement graves.

Dans ce cas, la responsabilité sans faute pouvait être admise.

Quelques années plus tard, le Conseil d’Etat a créé un régime de responsabilité sans faute du

médecin beaucoup moins strict pour le patient.

La jurisprudence Bianchi du 9 avril 1993 3 constitue une avancée majeure dans

l’indemnisation des victimes puisque le Conseil d’Etat a choisi d’autoriser l’indemnisation de

l’aléa thérapeutique 4 . Le régime de responsabilité peut alors s’appliquer tant à une

intervention à finalité thérapeutique qu’à une intervention à finalité non thérapeutique.

Par cette solution, et pour pallier la carence du législateur en la matière, la jurisprudence

administrative a tenté de trouver une solution pour indemniser les victimes d’un dommage

survenu sans faute du médecin ou de l’établissement de santé.

Toutefois, la Cour de cassation a refusé de consacrer une responsabilité sans faute des

1Arrêt Mercier, Cass, 20 mai 1936 (Annexe n°6) 2Arrêt consorts Gomez, Cour d’appel administrative de Lyon, 20 décembre 1990 (Annexe n°7) 3 Bianchi, 9 avril 1993 (Annexe n°8) 4Jurisprudence confirmée par un autre arrêt : CE, 3 novembre 1997

Page 7: LE RECOURS DES TIERS PAYEURS ET L'IMPACT DU SYSTEME D

7/114

professionnels de santé. Pourtant, elle a parfois accepté de créer des obligations accessoires de

sécurité de résultat mais dans des cas très limités, en posant un principe de présomption de

responsabilité5. Cette présomption existe en cas d'infection nosocomiale. Ce n’est pas un

régime de responsabilité sans faute mais un régime de présomption de responsabilité car pour

s’exonérer la clinique devra prouver qu’elle n’a commis aucune faute.

Cette jurisprudence a été entérinée par la loi du 4 mars 2002 dit « loi Kouchner ». Cette loi a

créé une véritable réforme du droit de la responsabilité médicale. Elle a posé des principes de

responsabilité médicale qui remettent en cause les jurisprudences administratives et civiles

élaborées en cette matière.

Cette loi de 2002 a créé l’article L1142-1 au sein du code de la santé publique et prévoit que

« hors le cas où leur responsabilité est encourue en raison d'un défaut d'un produit de santé,

les professionnels de santé mentionnés à la quatrième partie du présent code, ainsi que tout

établissement, service ou organisme dans lesquels sont réalisés des actes individuels de

prévention, de diagnostic ou de soins ne sont responsables des conséquences dommageables

d'actes de prévention, de diagnostic ou de soins qu'en cas de faute. Les établissements,

services et organismes susmentionnés sont responsables des dommages résultant d'infections

nosocomiales, sauf s'ils rapportent la preuve d'une cause étrangère». Le législateur de 2002

prévoit par cet article une responsabilité pour faute des établissements de santé, et exclue deux

cas de ce régime de responsabilité pour faute : le cas des infections nosocomiales et le défaut

d’un produit de santé où la responsabilité des établissements de santé fera l'objet d'une

présomption de responsabilité. La loi exclue ainsi l’application des jurisprudences Bianchi ou

Gomez.

Egalement, par cette loi de 2002 est créée l’ONIAM 6 , à savoir, l'Office National

d’Indemnisation des Accidents Médicaux, afin d’indemniser les victimes d’accidents

médicaux au titre de la solidarité nationale lorsque la responsabilité d’un acteur de santé ne

peut être engagée. Le principe général est celui de la réparation intégrale consistant à

indemniser tous les préjudices subis par la victime, afin de compenser au mieux les effets des

dommages subis.

Il est prévu que la solidarité intervienne en cas d’accident médical, d’affection iatrogène ou

d’infection nosocomiale par l’indemnisation effectuée par un fonds.

La loi de 2002 a souhaité que les victimes d’accidents médicaux aux conséquences

particulièrement anormales puissent obtenir une indemnisation de leur préjudice, même dans

les hypothèses ou aucune faute ne pouvait être retenue à l’égard des acteurs de santé. Seule la

5Cass, 21 mai 1996, Bonicci 6 Annexe n°4 : Le rôle de l’ONIAM

Page 8: LE RECOURS DES TIERS PAYEURS ET L'IMPACT DU SYSTEME D

8/114

solidarité a pu répondre à cette indemnisation.

Cette indemnisation par la solidarité nationale est soumise à des conditions restrictives :

- L’accident médical, l’affection iatrogène ou (l’infection nosocomiale)7 doit être directement

imputable à des actes de prévention, de diagnostic ou de soins

- L’évènement doit avoir pour le patient des conséquences anormales au regard de son état de

santé et de l’évolution prévisible de celui-ci.

- L’évènement doit présenter un caractère de gravité. Il faut une incapacité permanente

partielle (IPP) de plus de 24% selon le décret du 24 avril 2003.

Ces conditions restrictives d’indemnisation ne sont applicables que pour les accidents

médicaux non fautifs (appelés aléas thérapeutiques) résultants des dispositions de l’article

L1142-1 II du Code de la santé publique qui précise « lorsque la responsabilité d'un

professionnel, d'un établissement, service ou organisme mentionné au I ou d'un producteur de

produits n'est pas engagée, un accident médical, une affection iatrogène ou une infection

nosocomiale ouvre droit à la réparation des préjudices du patient, et, en cas de décès, de ses

ayants droit au titre de la solidarité nationale, lorsqu'ils sont directement imputables à des

actes de prévention, de diagnostic ou de soins et qu'ils ont eu pour le patient des conséquences

anormales au regard de son état de santé comme de l'évolution prévisible de celui-ci et

présentent un caractère de gravité, fixé par décret, apprécié au regard de la perte de capacités

fonctionnelles et des conséquences sur la vie privée et professionnelle mesurées en tenant

notamment compte du taux d'atteinte permanente à l'intégrité physique ou psychique, de la

durée de l'arrêt temporaire des activités professionnelles ou de celle du déficit fonctionnel

temporaire ».

Ainsi, lorsque l’assuré est victime d’un aléa thérapeutique, ayant entrainé des séquelles

inférieures à 24%, la victime n’obtiendra pas d’indemnisation. En effet, l’accident n’étant pas

la conséquence d’une faute d’un professionnel de santé ou d’un établissement de soins, il sera

impossible pour la victime de prétendre à une indemnisation.

En cas de reconnaissance d’un aléa thérapeutique, le recours de l’ONIAM est à envisager du

fait d’une absence de faute, mais cet aléa doit avoir pour conséquence un taux d'IPP supérieur

à 24%.

S’il est admis l’accident médical causé par une faute d'un tiers, celle-ci entraînera une

réparation par ce dernier et par son assureur, et non par l’ONIAM.

Concernant plus particulièrement la réparation des infections nosocomiales contractées dans

les établissements hospitaliers, celle-ci a évolué significativement, notamment par une

7Les victimes d'infection nosocomiale répondent à des conditions d'indemnisation particulières.

Page 9: LE RECOURS DES TIERS PAYEURS ET L'IMPACT DU SYSTEME D

9/114

deuxième loi du 30 décembre 20028 qui a intégré l'article L1142-1-1 au Code de la santé

publique. Après le 1er janvier 2003 (c'est à dire postérieurement à l'entrée en vigueur de la loi

About du 30 décembre 2002), la réparation en cas d'infection nosocomiale relève de la

solidarité nationale, dès lors que le taux d'incapacité permanente partielle est supérieur à 25%

ou que le patient est décédé selon l'article L1142-1-1 du code de la santé publique. De ce fait,

les victimes d’infection nosocomiale bénéficient d’une indemnisation répondant à des

conditions bien particulières au regard des conditions d’indemnisation des victimes d’aléa

thérapeutique.

9Les missions de l’ONIAM divergent entre fonds de garantie et indemnisation. En effet, d’une

part, l’ONIAM est un fonds de garantie qui a vocation à se substituer au responsable s’il

restait inconnu ou si la victime ne pouvait obtenir réparation de sa part. Leur intervention

n’étant que subsidiaire. D’autre part, les fonds d’indemnisation assurent directement

l’indemnisation des victimes, indépendamment de toute détermination de responsabilité,

comme c’est le cas pour les infections nosocomiales graves. Cependant, un point commun se

dégage concernant ces fonds : leur mise en place conduit à un déplacement de la charge de la

réparation vers la solidarité nationale. La solidarité nationale poursuit un but distinct de la

réparation, celui d’apporter l’assistance de toute la collectivité des citoyens à ceux qui en ont

besoin.

La loi du 4 mars 2002, complétée par la loi du 30 décembre 2002, consacre l'essor de la

solidarité nationale en ce qui concerne les accidents médicaux non fautifs, les affections

iatrogènes et les infections nosocomiales.

Avec cette loi de 2002, la réparation de ces dommages s'effectue dans un cadre inédit, selon

une procédure innovante et efficace de conciliation et de règlement amiable, qui repose sur

l'action des Commissions Régionales de Conciliation et d'Indemnisation (CRCI) et de l'Office

national d'indemnisation des accidents médicaux (ONIAM). La procédure est plus rapide que

dans le cadre des actions en responsabilité devant les juridictions. Elle est également fiable et

efficace10.

Ainsi, la victime d’un dommage médical dispose de deux voies pour obtenir une

indemnisation. Elle peut soit choisir la voie contentieuse et juridictionnelle ; elle demandera

alors l’indemnisation de son dommage à un juge ; ou elle peut, aussi, opter pour la voie

amiable depuis la loi de 2002, afin de conclure, avec le responsable, une transaction sur le

montant de l’indemnisation. 8Loi About du 30 décembre 2002 9 Annexe n°5 : Les missions de l’ONIAM 10La part des règlements amiables est d'environ 70%.

Page 10: LE RECOURS DES TIERS PAYEURS ET L'IMPACT DU SYSTEME D

10/114

Par cette voie amiable, la CRCI va être saisie. Cette commission a une double mission. Elle

permet, d'une part, de régler à l'amiable les différends nés des activités de prévention, de

diagnostic ou de soins entre les patients et les professionnels de santé et ce quelques soit leur

lieu d'exercice. D'autre part, elle a pour mission de rapprocher les parties en alignant leurs

points de vue. Grâce à ce système, une victime d'accident médical parvient dans la majorité

des cas à obtenir la réparation de son préjudice. 11La CRCI peut être saisie par toute personne s'estimant victime d'un dommage imputable à

une activité de prévention, de diagnostic ou de soins, ou, le cas échéant, par son représentant

légal ou ses ayants droits. La demande en vue de l'indemnisation est présentée à la

commission régionale ou interrégionale dans le ressort de laquelle a été effectué l'acte en

cause.

La saisine de la commission suspend les délais de prescription et de recours contentieux

jusqu'au terme de la procédure. La commission doit alors se prononcer sur la recevabilité de la

demande tant au regard de la date de réalisation de l'accident incriminé que du degré de

gravité du dommage.

En effet, la CRCI ne peut appréhender que les dommages médicaux les plus graves dont les

conséquences médico-légales franchissent les seuils de gravité prévus à l'article D1142-1 du

code de la santé publique. Cet article fixe un seuil de gravité à 24%. Il est également possible

de reconnaître le caractère de gravité par d'autre moyen, tel qu'un « accident médical, une

affection iatrogène ou une infection nosocomiale ayant entraîné, pendant une durée au moins

égale à six mois consécutifs ou à six mois non consécutifs sur une période de douze mois, un

arrêt temporaire des activités professionnelles ou des gênes temporaires constitutives d'un

déficit fonctionnel temporaire supérieur ou égal à un taux de 50% ».

De plus, la CRCI ne peut se prononcer que sur les actes postérieurs au 5 septembre 2001.

Si la commission estime que les dommages ne présentent pas le caractère de gravité prévu par

la loi, elle se déclare incompétente, et en informera les parties intéressées en précisant au

demandeur qu'il dispose de la faculté de saisir la commission en vue de la procédure de

conciliation, ou qu'ils pourront également saisir les juridictions compétentes.

Lorsqu'en revanche, la commission estime que les dommages subis présentent le caractère de

gravité prévu par la loi, on entre dans la phase de la procédure au cours de laquelle elle doit

émettre un avis sur les circonstances, les causes, la nature et l'étendue des dommages, ainsi

que sur le régime d'indemnisation applicable. La CRCI a 6 mois pour rendre son avis à

compter de la saisine.

11 Annexe n°3 : schéma procédure CRCI

Page 11: LE RECOURS DES TIERS PAYEURS ET L'IMPACT DU SYSTEME D

11/114

La Commission va émettre un avis de proposition soient aux assureurs de l'acteur de santé si

son assuré est fautif, soit à l'ONIAM dans le cas d'un aléa thérapeutique, ou d'une infection

nosocomiale grave (> à 25% ou décès).

Ces organismes ont alors 4 mois pour faire une offre d'indemnisation à la victime.

En cas de silence ou de refus de la part de l'assureur de faire une offre, ou lorsque le

responsable des dommages n'est pas assuré ou la couverture prévue au contrat d'assurance est

épuisée, l'ONIAM est substitué à l'assureur, d'après l'article L1142-15 du code de la santé

publique et dispose d'un recours subrogatoire contre l'assureur ou la personne non assurée,

tout ceci dans un but de protection des victimes. L'ONIAM doit faire une offre à la victime

qui si elle est acceptée vaut alors transaction.

Une fois l'offre faite par l'assureur ou par l'ONIAM, la victime dispose alors d'un choix. Elle

peut décider d'accepter l'offre. Dans cette hypothèse, l'acceptation de l'offre de l'ONIAM ou

de l'assureur vaut transaction et éteint en principe le contentieux. Son paiement doit intervenir

dans un délai d'un mois à compter de la réception par l'assureur ou par l'ONIAM de

l'acceptation de son offre provisionnelle ou définitive par la victime. Cependant, la victime

peut décider de ne pas accepter l'offre faite par l'ONIAM ou l'assureur. Dans ce cas, elle ou

ses ayants droits disposent alors d'un droit d'action en justice. L'action en indemnisation est

intentée devant la juridiction compétente selon la nature du fait générateur du dommage.

Toutefois, pour inciter les assureurs à faire une offre équitable, il est prévu que dans

l'hypothèse où le juge estime que l'offre faite par l'assureur est insuffisante, il condamne

l'assureur à verser à l'office une somme au plus égale à 15% de l'indemnité allouée, sans

préjudice des dommages et intérêts dû de ce fait à la victime.

Après que la victime ait été indemnisée, plusieurs recours subrogatoires peuvent être exercés

entre l'ONIAM, l'assureur et le responsable pour permettre à chacun de recouvrer ses droits.

La CRCI ne va pas toujours intervenir lorsqu'un assuré est victime d'un accident médical

grave. Dans le cadre de ces nouvelles missions, l'ONIAM va indemniser les victimes

directement, sans l'intermédiaire des CRCI. A l'exception de l'activité relative aux

contaminations transfusionnelles par le VHC qui ressort toujours de la couverture

assurantielle de l'Etablissement français du sang (EFS), les dommages susvisés sont sortis du

champ de couverture de l'assurance responsabilité civile médicale et hospitalière.

En effet, la loi du 9 août 2004 a confié à l’ONIAM de nouvelles missions en matière de

vaccinations obligatoires, de Virus de l’Immunodéficience Humaine (VIH) transfusionnel et

Page 12: LE RECOURS DES TIERS PAYEURS ET L'IMPACT DU SYSTEME D

12/114

de mesures sanitaires d’urgence. De plus, cette même loi de 2004 a transmis à l’ONIAM la

mission d’indemniser les victimes contaminées par le VIH suite à une transfusion ou à une

injection de médicaments dérivés du sang. La loi du 17 décembre 2008 confie à l’ONIAM la

mission de prendre en charge les victimes contaminées par le virus de l’hépatite C (VHC) à la

suite d’administration de produits sanguins ou d’injection de produits dérivés du sang. Enfin,

la loi du 29 juillet 2011 met en place un mécanisme spécifique pour faciliter la réparation des

préjudices éventuels liés à la prescription de benfluorex (Médiator).

Les différents domaines d’intervention de l’ONIAM sont autant de champs sur lesquels

n’intervient pas l’assurance en responsabilité civile médicale.

L’indemnisation des victimes d'accident médical coexiste avec d’autres sources

d’indemnisation, notamment celle des tiers payeurs. En plus de l’indemnisation de l’ONIAM

ou de l'assureur du tiers responsable, d’autres tiers payeurs vont participer au règlement de la

victime. Sont les tiers payeurs au sens de la loi les organismes de sécurité sociale, les

mutuelles, les employeurs publics ou privés de la victime et les sociétés d’assurances. Ici, les

tiers payeurs qui retiendront toute notre attention seront les caisses primaires d’assurance

maladie. Par définition, le tiers payeur est une personne qui effectue un paiement pour le

compte d’une autre, parce qu’il y est tenue en vertu d’une obligation légale, contractuelle ou

statutaire. Les caisses de sécurité sociale prennent en charge les frais médicaux de leurs

assurés ainsi que les conséquences de leur interruption temporaire de travail, et le cas échéant

de leur incapacité permanente, quelle que soit la cause à l’origine de ces frais.

Le paiement des Caisses contribue à réparer le préjudice corporel causé à une victime par un

tiers responsable. Le tiers payeur dispose donc d’une créance sur le tiers responsable, qui

s’impute sur le montant du préjudice « droit commun » subi par la victime. L’évolution des

régimes de responsabilité n’a pas amoindri le rôle de la sécurité sociale. La sécurité sociale

indemnise les assurés et leurs ayants droit en cas de maladie ou d’accident de toute nature.

Elle assume la prise en charge immédiate des conséquences d’un accident sans rechercher,

dans un premier temps, s’il existe ou non un tiers responsable. Cette pluralité de sources

d’indemnisation rend plus complexe les relations entre la victime, et les différents

intervenants de l’indemnisation.

Par ailleurs, la victime ne peut pas bénéficier d’un cumul d’indemnités pour un même

préjudice. De plus, le tiers responsable ne peut être déchargé d’une partie de sa dette en raison

de l’intervention d’autres payeurs. Le législateur a donc prévu la possibilité pour les

personnes intervenant dans l’indemnisation de la victime d’un accident accusé par un tiers

responsable de récupérer auprès de ce dernier les sommes servies à la victime en rapport avec

Page 13: LE RECOURS DES TIERS PAYEURS ET L'IMPACT DU SYSTEME D

13/114

l’accident.

Il n'est pas admissible que le médecin soit tenu pour responsable de toutes les conséquences

de ses actes professionnels en dehors de toute faute. Il n'est pas acceptable non plus qu'une

faute médicale aboutisse à abandonner une victime sans aucune reconnaissance et

compensation.

L’ONIAM intervenant à titre principal, va pouvoir exercer un recours contre le tiers

responsable en vertu de l’article L1142-17 du Code de la santé publique, qui précise : « si

l'office qui a transigé avec la victime estime que la responsabilité d'un professionnel,

établissement, service, organisme ou producteur de produits de santé mentionnés au premier

alinéa de l'article L. 1142-14 est engagée, il dispose d'une action subrogatoire contre celui-ci ».

Par ailleurs, la loi de 1985 a harmonisé les règles applicables à l’action récursoire contre les

tiers responsables. Selon l'article 29 de la loi de 1985, les tiers payeurs, et notamment la

Caisse primaire d'assurance maladie, règlent des soins et arrêts à la victime par avance. C'est

pourquoi, il est normal pour cet organisme d'exercer un recours contre le tiers responsable afin

de recouvrer leur créance.

Le recours des tiers payeurs est assez particulier notamment dans le domaine médical. En

effet, ce secteur, assez complexe, a évolué considérablement par sa jurisprudence et sa

législation, entrainant une évolution concernant un recouvrement possible des payeurs.

La responsabilité médicale se traduit par la nécessité cumulative d'une faute, d'un préjudice

causé au patient et du lien de causalité entre la faute et le préjudice. Le patient ou ses ayants

droits peuvent alors obtenir une indemnisation et la condamnation du professionnel de santé

ou de l'établissement de santé.

Les tiers-payeurs ayant participé à l'indemnisation des victimes, ont donc un droit au

recouvrement avec l’ONIAM de leur créance par le tiers responsable. Ainsi, lorsque les tiers-

payeurs indemnisent la victime d'un accident médical causé par la faute d'un tiers n'entrainant

par l'intervention de l'ONIAM, alors ils pourront exercer leur recours contre ce tiers

responsable.

Toutefois, lorsqu'intervient l’ONIAM en indemnisation au titre de la solidarité nationale, le

recours des tiers payeurs s'appréciera selon le cas d'intervention de l'Office. L’article 29 de la

loi du 5 juillet 1985, et l’article L376-1 du Code de la sécurité sociale leur ouvrent un droit à

recourir contre le tiers pour le remboursement de toutes les prestations à caractère

indemnitaire qu’elles ont servies aux victimes. Ce recours des tiers payeurs trouvent à

s’appliquer afin de remettre en cause la responsabilité de l’auteur du dommage, mais reste

assez complexe. Ce recours n’est parfois pas mis en œuvre dans la mesure où celui-ci va de

Page 14: LE RECOURS DES TIERS PAYEURS ET L'IMPACT DU SYSTEME D

14/114

pair avec le régime de responsabilité médicale. Ainsi, le tiers payeur va indemniser la victime

sans même pouvoir recouvrer sa créance. En effet, un régime de responsabilité sans faute dans

le domaine médical permettra un meilleur recouvrement pour les Caisses qu’un régime de

responsabilité pour faute.

Cependant, l’évolution du régime de responsabilité médicale, par la jurisprudence et par la loi,

a semble-t-il entrainé une limitation de cette faculté de recours pour les Caisses d'assurance

maladie. En effet, la loi Kouchner et About de 2002, ainsi que la jurisprudence récente tend à

limiter les droits des tiers-payeurs lorsqu'intervient l'ONIAM au titre de la solidarité nationale

en indemnisation des victimes d'accidents médicaux.

Il conviendra ainsi de s'interroger sur le recours des tiers payeurs et l'impact des systèmes

d'indemnisation de solidarité nationale des victimes d'accidents médicaux.

Les tiers payeurs, agissant au titre de la solidarité nationale, vont pouvoir exercer un recours

par le biais de différentes actions. Toutefois, notre problématique sera de savoir quelles sont

les facultés de recours des tiers payeurs et dans quelles mesures ce recours tendrait à se limiter

dans le cas d'une indemnisation des victimes d'accidents médicaux lorsqu'intervient l'ONIAM.

Par ailleurs, la question se poserait de savoir si cette limitation du recours pour les Caisses

aspirerait à se généraliser à tout le secteur du domaine médical lorsqu’intervient l'ONIAM en

indemnisation des victimes.

Dans quelles mesures peut-on prétendre que la solidarité nationale a vu son action en

indemnisation s'accroitre, délaissant la mise en œuvre de la responsabilité médicale ?

La solidarité nationale étant davantage acteur de l’indemnisation dans le secteur médical, va-t-

on vers une déresponsabilisation dans ce domaine ?

Afin d'expliciter sur la limitation du recours des tiers payeurs, il conviendra tout d’abord

d’examiner le recours des tiers payeurs influencé par l’intervention de l’ONIAM dans

l’indemnisation des victimes d’accidents médicaux (I), pour ensuite analyser l'avenir incertain

du recours des tiers payeurs dans le cadre de l'indemnisation de ces victimes (II).

I – Le recours des tiers payeurs influencé par l’intervention de l’ONIAM dans

l’indemnisation des victimes d’accidents médicaux

L'ONIAM va participer à l'indemnisation des victimes d'accidents médicaux graves et va

exercer par la suite une action subrogatoire en recouvrement de sa créance contre le tiers

responsable afin que celui-ci voit sa responsabilité engagée. Ainsi, on peut affirmer que le

recours subrogatoire des tiers payeurs va s'aligner sur celui de l'ONIAM qui agit au titre de la

solidarité nationale (A). Toutefois, il faut préciser que le recours des tiers payeurs s’exerce

Page 15: LE RECOURS DES TIERS PAYEURS ET L'IMPACT DU SYSTEME D

15/114

dans des cas particuliers de manière autonome et indépendant détaché de celui de l'ONIAM et

de la victime (B).

A/ Le recours subrogatoire des tiers-payeurs aligné sur celui de l'ONIAM

Afin de comprendre l'essentiel du sujet reposant sur la responsabilité médicale, il est

important de se pencher sur le recours dit « subrogatoire » des tiers payeurs fondé sur un

régime de responsabilité pour faute (1), pour ensuite analyser les différents cas d'intervention

de l'ONIAM laissant un droit de recours pour les tiers payeurs (2), pour enfin affirmer que

même si l'ONIAM intervient à l'indemnisation des victimes au titre de la solidarité nationale,

cela ne donne pas un droit de recours des tiers payeurs à l'encontre de l'Office (3).

1- Un recours subrogatoire fondé sur un régime de responsabilité pour faute

L’importance de l’évolution du régime de responsabilité médicale tient au fait qu’en fonction

de celui-ci (responsabilité pour faute ou sans faute), un recours plus ou moins accessible sera

possible tant à l’égard de l’ONIAM que pour les tiers payeurs.

En effet, si on se trouve dans un régime de responsabilité sans faute, la faute des acteurs de

santé n’aura pas besoin d’être prouvé par les payeurs afin d'arriver à recouvrer la créance des

payeurs. Au contraire, si on est dans un régime de responsabilité pour faute, la preuve d’une

faute sera exigée.

Or, il a été explicité préalablement que les lois de 2002 avaient prévu un régime de

responsabilité pour faute, effaçant toute possibilité de régime de responsabilité sans faute à

l'exception des cas de victimes d'infection nosocomiale ou des victimes de produits de santé.

Cette évolution jurisprudentielle est essentielle pour comprendre le recours de l’ONIAM et

des tiers payeurs. Ce passage au régime de responsabilité pour faute permet à l'ONIAM ainsi

qu'aux tiers-payeurs de pouvoir exercer un recours subrogatoire efficace contre le tiers

responsable en cas de faute de celui-ci. Ainsi, les payeurs devront prouver la faute de ce tiers

pour récupérer leur créance à leur tour. Ce recours dépend donc de cette responsabilité

médicale fondée sur la faute.

En outre, les payeurs ne pourront exercer leur recours que si un tiers responsable est identifié.

C’est pourquoi, les caisses primaires d’assurance maladie ainsi que l’ONIAM, lorsque

l’accident se définit comme un aléa thérapeutique supérieur à 24%, ne peuvent, malgré le

règlement de différents soins versés par l’organisme, récupérer leur créance, la faute n’étant

Page 16: LE RECOURS DES TIERS PAYEURS ET L'IMPACT DU SYSTEME D

16/114

pas admise. En effet, cette impossibilité de recours des tiers payeurs et également de

l’ONIAM est due au principe selon lequel, ceux-ci exercent une action subrogatoire pour

récupérer leur créance. En effet, il est précisé par l’article L1142-17 du Code de la santé

publique que « si l'office qui a transigé avec la victime estime que la responsabilité d'un

professionnel, établissement, service, organisme ou producteur de produits de santé

mentionnés au premier alinéa de l'article L. 1142-14 est engagée, il dispose d'une action

subrogatoire contre celui-ci ».

Par ailleurs, la Caisse de sécurité sociale dispose également d’une action subrogatoire12 afin

de recouvrir sa créance au même titre que l'ONIAM. Ainsi, dès lors que la victime peut

prétendre aux prestations à la suite d’un dommage, la caisse compétente est tenue de lui

verser en dehors de tout procès. Les articles L376-1 du Code de la sécurité sociale ouvrent

ensuite aux caisses de sécurité sociale la possibilité de poursuivre le remboursement par le

responsable d’un dommage corporel, des dépenses qu’elles ont exposées en faveur de la

victime, indépendamment de l’exercice par celle-ci ou par ses ayants droit d’un recours

indemnitaire au titre des préjudices qui sont demeurés à sa charge. Une fois que l’organisme a

effectué le versement à la victime, il est subrogé dans les droits de celle-ci c’est-à-dire de son

affilié. La Caisse primaire peut donc se retourner contre le responsable du dommage et son

assureur.

L’ONIAM et les tiers payeurs ont donc tous deux la possibilité d’un recours contre le tiers

responsable par le biais d’une action subrogatoire. Tous deux exercent leur action dans les

droits de la victime, c'est pourquoi, l'action contre le tiers responsable est possible.

Afin de mieux appréhender cette action subrogatoire, il convient de la définir : il s'agit de

l'action par laquelle un tiers solvens paie le créancier à la place du débiteur, et se substitue au

créancier dans le rapport d'obligation. Dans le cas du recours des tiers payeurs, le débiteur

désigne le tiers responsable. Le tiers payeur ayant versé une créance à la victime, il va ensuite

pouvoir exercer les droits et obligations de la victime. Il est possible de parler de subrogation

dite « personnelle ».

Le tiers payeurs a dû exécuter l’obligation de versement de prestation à la victime alors que le

tiers responsable était tenu de le faire. Ainsi, cette action dite, subrogatoire est parfaitement

justifiée. Cette subrogation détermine la limite de son recours. En effet, elle ne peut exercer

plus de droits que la victime n’en disposait13.

12En vertu de l'article L376-1 du Code de la sécurité sociale 13Situation similaire à l'ONIAM qui ne peut avoir plus de droit que la victime. L'Office dispose également d'une action subrogatoire agissant dans les mêmes droits que la victime en vertu de l'article L1142-17 du Code de la santé publique.

Page 17: LE RECOURS DES TIERS PAYEURS ET L'IMPACT DU SYSTEME D

17/114

En cas de partage de responsabilité, la victime ne peut obtenir du tiers responsable une

réparation qu’à hauteur de sa part de responsabilité dans l’accident. Cependant, la Cour de

cassation admet néanmoins dans le cas d’un partage de responsabilité, l’imputation de la

totalité des prestations versées par la sécurité sociale sur l’indemnité versée par le tiers

responsable en proportion de sa part de responsabilité14. La sanction est sévère car en raison

de sa faute, elle doit supporter une partie de son préjudice. En autorisant le recours de la

sécurité sociale pour la totalité de sa créance, la Cour de cassation vient encore diminuer

l’indemnisation dont bénéficiera la victime. Il y a ici une double peine par le fait que la

victime voit déjà son indemnisation réduite en raison de sa faute, puis le recours de la sécurité

sociale dans son remboursement en totalité.

Les tiers payeurs vont pouvoir exercer un recours plus ou moins efficace selon les différents

cas d’intervention de l’ONIAM. La plupart du temps, on peut apercevoir que la faculté de

recours des tiers-payeurs est similaire à celui de l'ONIAM.

2- Le recours subrogatoire des tiers payeurs selon les différents cas d'intervention de

l'ONIAM au titre de la solidarité nationale

Différentes situations peuvent se présenter et aboutiraient à des remboursements plus ou

moins possibles pour les caisses primaires d’assurance maladie.

La Commission de Conciliation et d’Indemnisation des accidents médicaux (CRCI) peut

rendre un avis mettant en cause un professionnel de santé. De ce fait, l’assureur du

professionnel de santé peut accepter d’indemniser la victime et de rembourser la créance de la

caisse, l'ONIAM dans ce cas ne va pas être amené à intervenir. Toutefois, si l’avis de la CRCI

met en cause un professionnel de santé et que l’assureur du professionnel refuse d’indemniser

la victime, l’ONIAM devra indemniser la victime. Cependant, la Caisse ne pouvant solliciter

le remboursement de sa créance auprès de l’ONIAM agissant au titre de la solidarité nationale,

elle devra donc initier une procédure contentieuse contre l’assureur du professionnel de santé

fautif. Elle pourra exercer un recours contre le tiers responsable au titre de l’article L376-1 du

Code de la sécurité sociale qui prévoit que « lorsque la lésion dont l'assuré social ou son ayant

droit est atteint, est imputable à un tiers, l'assuré ou ses ayants droit conservent contre l'auteur

de l'accident le droit de demander la réparation du préjudice causé, conformément aux règles

du droit commun, dans la mesure où ce préjudice n'est pas réparé par application du présent

livre. Les caisses de sécurité sociale sont tenues de servir à l'assuré ou à ses ayants droit les

prestations prévues par le présent livre, sauf recours de leur part contre l'auteur responsable de

14Cass, civ 2, 7 octobre 1992

Page 18: LE RECOURS DES TIERS PAYEURS ET L'IMPACT DU SYSTEME D

18/114

l'accident dans les conditions ci-après. Les recours subrogatoires des caisses contre les tiers

s'exercent poste par poste sur les seules indemnités qui réparent des préjudices qu'elles ont

pris en charge, à l'exclusion des préjudices à caractère personnel ».

Si l’avis de la CRCI fait apparaître que le dommage résulte d’un aléa thérapeutique, l’ONIAM

sera compétent pour indemniser la victime d’un préjudice supérieur à un seuil de gravité de

24%, mais la caisse ne peut demander le remboursement de sa créance à l’ONIAM (agissant

au titre de la solidarité nationale). Dans ce cas, l’assurance maladie joue son rôle d’assureur

solidaire et assume les pertes liées aux frais engagés dans la prise en charge de la victime.

En outre, l'ONIAM va intervenir lorsqu'une personne est victime d'une infection nosocomiale

grave15. L'indemnisation d'une victime d'une infection nosocomiale présente des spécificités

imposées par l'évolution jurisprudentielle et législative récente. Étant à l'origine fondée sur un

régime de responsabilité sans faute, le recours des tiers payeurs était systématiquement

possible. Toutefois, ce cas d'indemnisation a fait l'objet de changements assez importants

remettant en cause la possibilité pour les tiers payeurs de recourir contre le tiers responsable

pour les tiers payeurs16.

Par ailleurs, l’ONIAM a vu son champ d’intervention s’agrandir au bénéfice des victimes.

L’office intervient désormais de manière systématique lorsque survient :

- des dommages à la suite de vaccinations obligatoires,

- des conséquences d’une contamination par le VIH et le VHC,

- des conséquences non fautives de la recherche biomédicale

- des dommages à la suite de la mise en œuvre d’une mesure sanitaire d’urgence,

- des dommages à la suite d’une prescription de benfluorex.

Ainsi, dans ces nouveaux cas où intervient l’ONIAM systématiquement, (à l’exception des

conséquences non fautives de la recherche biomédicale), le recours des tiers payeurs sera

rendu possible à partir du moment où sera identifié un tiers responsable du dommage.

Lorsqu’intervient l’ONIAM au titre de la solidarité nationale, le recours de la Caisse primaire

d’assurance maladie reste basé sur le régime de la faute.

Aussi, dans le cadre d’une indemnisation des conséquences non fautives des recherches

biomédicales, la loi du 9 août 2004 a posé le principe, en son article L1142-3 du code de la

santé publique, suivant : « les personnes qui subissent des dommages dans le cadre de la

15Taux d'IPP > à 25% 16 Cf partie IIA

Page 19: LE RECOURS DES TIERS PAYEURS ET L'IMPACT DU SYSTEME D

19/114

recherche biomédicale peuvent faire valoir leurs droits en application auprès des commissions

régionales. Lorsque la responsabilité du promoteur n'est pas engagée, les victimes peuvent

être indemnisées par l'office, conformément aux dispositions du II de l'article L. 1142-1.

Toutefois l'indemnisation n'est pas dans ce cas subordonnée au caractère de gravité prévu par

ces dispositions. ». De ce fait, le seuil de gravité fixé à 24% ne sera pas à respecter pour que

l’ONIAM puisse indemniser la victime de son dommage.

Le recours de l’ONIAM et des tiers payeurs ne sera pas possible dans la mesure où il n’y a

pas de tiers responsable du dommage. En effet, l’indemnisation porte sur « des conséquences

non fautives des recherches biomédicales ». La notion retirée des victimes d’un aléa

thérapeutique est donc similaire dans ce cas.

La loi du 4 mars 2002, modifiée par la loi du 9 août 2004, a confié à l'ONIAM la mission

d'assurer la réparation intégrale des préjudices directement imputables à une vaccination

obligatoire. L'indemnisation des victimes de vaccinations obligatoire était antérieurement

assurée par le Ministère de la Santé. La procédure d'indemnisation des victimes de

vaccinations obligatoires est régie par les articles L. 3111-4 et L. 3111-9, et les articles R.

3111-27 à R. 3111-33 du code de la santé publique.

Est considérée comme obligatoire, la vaccination imposée par la législation française en

vigueur au moment de sa réalisation, et effectuée :

- soit dans le cadre de l'exercice d'une activité professionnelle, dans un établissement ou

organisme public ou privé de prévention de soins ou hébergeant des personnes âgées, et,

exposant à des risques de contamination ;

- soit dans le cadre d'un cursus scolaire préparant à l'exercice des professions médicales et

des autres professions de santé pour lequel une part des études a été effectuée dans un

établissement ou organisme public ou privé de prévention ou de soins.

- soit au titre des vaccinations infantiles imposées par la loi.

Les dommages imputables à des vaccinations ne revêtant pas de caractère obligatoire relèvent

de l'application du droit commun de la responsabilité des acteurs de santé, notamment du

régime de responsabilité des producteurs de produits de santé.

Selon la date de la vaccination (postérieure au 4 septembre 2001 * date d'entrée en vigueur de

la loi Kouchner) et la gravité du dommage (articles L.1142-8 du code de la santé publique), le

demandeur peut saisir les commissions régionales de conciliation et d'indemnisation des

accidents médicaux visées à l'article L.1142-5 du code de la santé publique.

Le demandeur peut saisir la juridiction compétente contre le producteur du vaccin, le médecin

prescripteur, le médecin vaccinateur et, le cas échéant, contre l'ONIAM.

Il est possible de saisir l'ONIAM et/ou la juridiction en informant le tribunal et l'office des

Page 20: LE RECOURS DES TIERS PAYEURS ET L'IMPACT DU SYSTEME D

20/114

démarches en cours.

Néanmoins, si une décision de justice définitive a été prononcée au titre des mêmes préjudices,

l'autorité de la chose jugée attachée à cette décision de justice n'est pas susceptible d'être

remise en cause par la décision de l'ONIAM.

Dans cette hypothèse, la loi du 9 août 2004 prévoit que l’ONIAM a la possibilité d’exercer un

recours à concurrence du montant des sommes versées à la victime contre le responsable du

dommage. Par son article L3111-9 du Code de la santé publique, il est constaté que «jusqu'à

concurrence de l'indemnité qu'il a payée, l'office est, s'il y a lieu, subrogé dans les droits et

actions de la victime contre les responsables du dommage ». Ainsi, il s’agirait d’une

responsabilité pour faute à effectuer dans un deuxième temps après avoir indemniser la

victime de ce dommage.

Les caisses primaires quant à elles, peuvent exercer un recours en se joignant à l’action de

l’ONIAM contre le responsable du dommage. Il s’agirait dans ce cas précis d’une action

subrogatoire dans la mesure où l’ONIAM lorsqu’il exerce son action effectue ce type d’action.

L’ONIAM indemnise également les conséquences d’une contamination par le Virus

d’Immunodéficience Humaine causée par une transfusion de produits sanguins ou une

injection de produits dérivés du sang selon l’article L3122-1 du code de la santé publique :

« Les victimes de préjudices résultant de la contamination par le virus d'immunodéficience

humaine causée par une transfusion de produits sanguins ou une injection de produits dérivés

du sang réalisée sur le territoire de la République française sont indemnisées dans les

conditions définies ci-après. Une clause de quittance pour solde valant renonciation à toute

instance et action contre un tiers au titre de sa contamination ne fait pas obstacle à la présente

procédure. La réparation intégrale des préjudices définis au premier alinéa est assurée par

l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des

infections nosocomiales mentionné à l'article L. 1142-22 ».

La procédure d'indemnisation des victimes des préjudices résultant de la contamination, par le

virus d'immunodéficience humaine, causée par une transfusion de produits sanguins ou une

injection de produits dérivés du sang, réalisée sur le territoire de la République française, est

régie par les articles L. 3122-1 à L. 3122-6 et R. 3122- 1 à R. 3122-23 du code de la santé

publique.

Les contaminations par le VIH sont de la compétence de l'ONIAM. En revanche, les autres

contaminations relèvent de la seule compétence de l'EFS. Les autres modes de contamination,

notamment par voie chirurgicale ou endoscopique, relèvent de l'application du droit commun

de la responsabilité des acteurs de santé. Selon la date de la contamination (postérieure au 4

septembre 2001) et la gravité du dommage (articles L.1142-8 du code de la santé publique), le

Page 21: LE RECOURS DES TIERS PAYEURS ET L'IMPACT DU SYSTEME D

21/114

demandeur peut saisir les commissions régionales de conciliation et d'indemnisation des

accidents médicaux visées à l'article L.1142-5 du code de la santé publique. En toute

hypothèse, le demandeur peut saisir la juridiction compétente contre le médecin et/ou

l'établissement de santé concernés et, le cas échéant, contre l'ONIAM.

Par ailleurs, il faut noter que la saisine de l’ONIAM est un préalable obligatoire avant tout

autre recours. Ainsi, l’article L3122-3 du Code de la santé publique prévoit que « la victime

ne dispose du droit d'action en justice contre l'office que si sa demande d'indemnisation a été

rejetée, si aucune offre ne lui a été présentée dans le délai mentionné à l'article L. 3122-5 ou si

elle n'a pas accepté l'offre qui lui a été faite. Cette action est intentée devant la cour d'appel de

Paris ».

Dans ce cas, le recours de l’ONIAM se fera à concurrence du montant des sommes versées à

la victime contre toute personne responsable du dommage ou contre toute personne tenue à un

titre quelconque d’assurer la réparation du dommage. L’article L3122-4 du Code de la santé

publique prévoit que : « l'office est subrogé, à due concurrence des sommes versées dans les

droits que possède la victime, contre la personne responsable du dommage ainsi que contre les

personnes tenues à un titre quelconque d'en assurer la réparation totale ou partielle dans la

limite du montant des prestations à la charge desdites personnes. Toutefois, l'office ne peut

engager d'action au titre de cette subrogation que lorsque le dommage est imputable à une

faute ». Ainsi, le recours de la Caisse est également réalisable, comme dans le cas précédant,

en se joignant à l’action de l’ONIAM contre le responsable du dommage.

La loi du 5 mars 2007 a confié à l'ONIAM la mission d'assurer la réparation intégrale des

préjudices directement imputables à une mesure sanitaire d'urgence. Ce dispositif est entré en

vigueur après la publication du décret n°2011-68 du 18 janvier 2011.

Le dispositif est néanmoins applicable à la première de ces mesures d'urgence qui concernait

la campagne de vaccination contre la grippe A(H1N1) décidée par arrêtés du Ministre chargé

de la santé des 4 novembre 2009 et 13 janvier 2010.

La procédure d'indemnisation des victimes de vaccinations est régie par les articles L. 3131-3

et L.3131-4, et les articles R. 3131-1 à R. 3131-3-5 du code de la santé publique.

Est considérée comme relevant de cette mesure d'urgence la vaccination effectuée :

Contre la grippe A (H1N1) ;

Dans le cadre de la campagne vaccinale mise en place par cet arrêté ministériel.

Ne relèvent pas de ce dispositif :

- Les dommages imputables à un vaccin contre la grippe saisonnière ou contre tout autre

virus ;

Page 22: LE RECOURS DES TIERS PAYEURS ET L'IMPACT DU SYSTEME D

22/114

- Les dommages imputables à un vaccin contre la grippe A(H1N1) réalisés en dehors de la

campagne vaccinale de l'hiver 2009-2010.

Vous pouvez saisir l'ONIAM et/ou la juridiction en informant le tribunal et l'office de vos

démarches en cours. Néanmoins, si une décision de justice définitive a été prononcée au titre

des mêmes préjudices, l'autorité de la chose jugée attachée à cette décision de justice n'est pas

susceptible d'être remise en cause par la décision de l'ONIAM.

Lorsque l’ONIAM indemnise les dommages survenus à la suite de la mise en œuvre d’une

mesure sanitaire d’urgence (notamment la vaccination contre la grippe H1N1), l’ONIAM va

pouvoir exercer son recours contre toute personne responsable du dommage ou son assureur à

concurrence du montant des sommes versées à la victime et ce même sans faute en vertu de

l’article L3131-4 du Code de la santé publique. Ainsi, on sera dans ce cas dans une

responsabilité sans faute. Cela signifie que l’ONIAM n’aura pas à prouver le caractère fautif

de l’accident pour exercer son recours contre le professionnel de santé ou l’établissement de

soins. Le recours de la caisse sera similaire à celui de l’ONIAM, elle pourra ainsi se joindre à

l’action de l’ONIAM contre le responsable du dommage.

La loi du 17 décembre 2008 a confié à l'ONIAM la mise en place d'un nouveau dispositif de

règlement amiable des contaminations transfusionnelles par le virus de l'hépatite C causées

par une transfusion de produits sanguins ou une injection de médicaments dérivés du sang.

Cette procédure est ouverte à toutes les victimes quelle que soit la date de la contamination.

Depuis le 1er juin 2010, l'ONIAM est seul compétent pour connaître des demandes relatives

aux contaminations par le virus de l'hépatite C causées par une transfusion de produits

sanguins ou une injection de médicaments dérivés du sang, dans le cadre de la procédure de

règlement amiable comme à l'occasion des contentieux en cours ou susceptibles d'être initiés

après cette date. Aucune demande d'indemnisation, amiable ou contentieuse, ne pourra être

dirigée contre l'Etablissement français du sang après le 1er juin 2010. Pour les demandes

initiées avant cette date, l'ONIAM se substitue à l'Etablissement français du sang dans les

contentieux en cours.

Dans le cadre de la procédure de règlement amiable, la saisine de l'ONIAM ne donne pas lieu

à la mise en cause de l'Etablissement français du sang ou d'un centre de transfusion sanguine.

Les demandeurs sont libres de saisir l'ONIAM soit par la voie d'une demande de règlement

amiable, soit par la voie d'une action contentieuse intentée contre l'ONIAM devant le tribunal

administratif territorialement compétent en fonction de leur lieu de domicile.

Le recours des payeurs sera plus complexe. L’ONIAM pourra exercer son action subrogatoire

envers le responsable du dommage, seulement si celui-ci a commis une faute selon l’article

L1221-14 du Code de la santé publique. Le recours de la CPAM est possible contre

Page 23: LE RECOURS DES TIERS PAYEURS ET L'IMPACT DU SYSTEME D

23/114

l’établissement de transfusion sanguine à la condition qu’il soit en mesure de démontrer

l’existence d’une faute. Une action subrogatoire est donc envisageable en cas de faute de

l’établissement de santé ou du professionnel de santé. Cependant, on verra par la suite que ce

recours de la Caisse présente des caractéristiques particulières.

Le dispositif d'indemnisation des victimes du benfluorex par l'ONIAM est en vigueur depuis

le 1er septembre 2011. Seuls les dommages imputables au benfluorex sont de la compétence

de l'ONIAM.

Les voies de droit commun restent accessibles pour les personnes imputant leur dommage à

une autre cause, notamment au traitement par une autre molécule. Cette voie de règlement du

litige est facultative. Il s'agit d'une procédure amiable, qui n'a donc aucun caractère

juridictionnel. Ce dispositif est une alternative aux tribunaux. La voie contentieuse peut

toujours être préférée.

La saisine préalable d'une juridiction ne fait pas obstacle à l'entrée dans le présent dispositif si

aucune décision à caractère définitif n'est intervenue.

Quelle que soit la voie de règlement du litige, contentieuse ou amiable, aux termes d'une

transaction avec le responsable du dommage ou aux termes d'une transaction organisée par le

biais d'un fonds d'indemnisation dédié, l'indemnisation perçue est réputée éteindre le litige.

C'est la personne qui aura été amenée à indemniser la victime qui dispose alors d'un recours

subrogatoire contre tous tiers éventuellement reconnus comme responsables ou

coresponsables du dommage. La loi du 29 juillet 2011 prévoit que le recours de l’Office sera

permis à concurrence du montant des sommes versées à la victime contre le responsable du

dommage. Une faute sera donc recherchée. La Caisse peut exercer son recours en se joignant

à l’action de l’ONIAM contre le responsable du dommage.

L’ONIAM va intervenir également dans le cas d’une contamination par l’hormone de

croissance extractive. Cependant, l'indemnisation des victimes de la maladie de Creutzfeldt-

Jakob relevant de tout autre mode de contamination relève du droit commun de la

responsabilité.

L'ONIAM n'intervient, aux côtés de l'Institut Pasteur le cas échéant, que dans le cadre des

procédures contentieuses.

La loi du 30 décembre 2002 complète l'article L. 1142-22 du code de la santé publique qui

définit les missions de l'ONIAM, « afin de lui transférer la prise en charge financière des

obligations de l'association France-Hypophyse résultant des contentieux civils relatifs à

l'indemnisation des victimes de Creutzfeldt-Jakob (MCJ) transmise par recours à l'hormone de

Page 24: LE RECOURS DES TIERS PAYEURS ET L'IMPACT DU SYSTEME D

24/114

croissance d'origine humaine ». Depuis cette date, l'ONIAM intervient, comme garant des

obligations de l'association France Hypophyse, pour les indemnisations susceptibles d'être

mise à la charge de cette dernière dans les contentieux civils et pénaux.

Dans ces différentes hypothèses, il est prévu que la créance des caisses soit déduite de

l’indemnisation qui sera versée à la victime par l’ONIAM.

Malgré une indemnisation effectuée par l'ONIAM à la victime, il n'est pas envisageable pour

les tiers payeurs d'exercer son recours subrogatoire à l'encontre de l'Office.

1- Un recours des tiers-payeurs contre l'ONIAM prohibé

Dans un avis du Conseil d'Etat du 22 janvier 201017, la question se posait de savoir si l’article

L3111-9 du Code de la santé publique, qui prévoit que l’indemnisation assurée par l’ONIAM

est due au titre de la solidarité nationale, fait obstacle à l’exercice, par les tiers payeurs d’un

recours subrogatoire. Selon le Conseil d’Etat, les recours des tiers payeurs, subrogés dans les

droits d’une victime d’un dommage qu’elles organisent, s’exercent à l’encontre des auteurs

responsables de l’accident survenu à la victime. La haute assemblée a, par ailleurs, estimé que

« la réparation qui incombe sous certaines conditions à l’ONIAM, en vertu des dispositions de

l’article L. 1142-1 du code de la santé publique, a pour objet d’assurer, au titre de la solidarité

nationale, la prise en charge des conséquences d’un accident médical, d’une affection ou

d’une infection qui ne peuvent être imputées à la faute d’un professionnel, d’un établissement

ou service de santé ou au défaut d’un produit de santé, sans que cet établissement public ait la

qualité d’auteur responsable des dommages. Il en résulte que les recours subrogatoires des

tiers-payeurs ayant versés des prestations à la victime d’un dommage corporel, organisés par

l’article L. 376-1 du code de la sécurité sociale, l’article 1er de l’ordonnance n° 59-76 du 7

janvier 1959 et l’article 29 de la loi n° 85-677 du 5 juillet 1985, ne peuvent être exercés contre

l’ONIAM lorsque celui-ci a pris en charge la réparation de ce dommage au titre de la

solidarité nationale ». C’est une solution qui me paraît s’imposer avec la force de l’évidence

dès lors que l’ONIAM a été créé par la loi du 4 mars 2002 pour désengorger les prétoires et

offrir une solution rapide, efficace et peu coûteuse au bénéfice des victimes, au titre de la

solidarité nationale.

Il convient ici de faire la distinction entre responsabilité et indemnisation au titre de la

solidarité. L’ONIAM ne peut être contraint à indemniser la victime au titre de sa

responsabilité mais va indemniser la victime au titre de la solidarité nationale. C’est pourquoi,

17Avis Coppola, CE, 22 janvier 2010 (Annexe n°9)

Page 25: LE RECOURS DES TIERS PAYEURS ET L'IMPACT DU SYSTEME D

25/114

le recours des tiers payeurs qui ne s’effectue que contre l’auteur du dommage ne peut se

réaliser à l’encontre de l’ONIAM. Il ressort clairement que ce n’est pas en tant que

responsable du dommage que l’ONIAM assure la réparation des préjudices, mais au titre de la

« solidarité nationale ». L’Office qui n’est pas le responsable du dommage, n’est donc pas non

plus le débiteur de la dette qui est en principe l’auteur du dommage.

Il en résulte que les Caisses de sécurité sociale et ONIAM obéissent à la même logique18 et,

au demeurant, au même ministère de tutelle. De ce fait, en cas de substitution de l’ONIAM,

les caisses ne disposent d’aucun recours contre ce fonds, mais ils conservent seulement, en

application des articles L376-1 du code de la sécurité sociale, une possibilité de recours contre

le tiers responsable.

Cependant, il existe un cas particulier faisant exception à ce principe de non recours contre

l’ONIAM, le cas de contamination par le Virus de l'Hépatite C par transfusion sanguine. En

effet, dans ce cas précis, la Caisse primaire peut exercer son recours non plus envers le tiers

responsable mais contre l’ONIAM. Ainsi, cette hypothèse démontre la nécessité pour les tiers

payeurs de recouvrir leur créance, en faisant de leur recours un droit indépendant et autonome

détaché du recours de l'ONIAM et de la victime.

B/ L’existence d’un recours autonome des tiers-payeurs détaché de celui de l'ONIAM et

de la victime

Le recours propre et autonome des tiers payeurs apparait dans des cas précis. D’une part, une

action récursoire est possible pour les tiers payeurs lorsque la subrogation est inenvisageable

(1).

De plus, il est fait état d'un cas particulier d'intervention de l'ONIAM : le cas d’une

contamination par le Virus de l'Hépatite C, où une action est rendue possible contre l'Office

par les tiers payeurs (2).

1- Une action récursoire rendue possible en cas d’inapplication de la subrogation

Il est envisagé un recours propre des tiers payeurs lorsqu’intervient l’ONIAM au titre de la

solidarité nationale. Cette action récursoire s'effectue sur le fondement de l'article L376-1 du

Code de la sécurité sociale. Cependant, il est à noter que cette action n’est pas prévue

explicitement.

En effet, notamment lorsque l’ONIAM intervient dans le cadre de ces nouvelles missions, tels

18L'ONIAM et les Caisses primaires d'assurance maladie agissent au titre de la solidarité nationale

Page 26: LE RECOURS DES TIERS PAYEURS ET L'IMPACT DU SYSTEME D

26/114

que : les dommages survenus en cas de vaccination obligatoire, en cas de mesure sanitaire

d’urgence, ou en cas de contamination par le VIH, VHC…, il est possible pour les tiers

payeurs d’exercer un recours propre, autonome appelé « action récursoire » afin de recouvrer

leur créance, sans prendre en compte les droits de la victime se rapportant à la subrogation.

Les tiers payeurs peuvent donc prétendre à une action récursoire contre le tiers responsable

qui est définit comme le recours d’une personne, qui a dû exécuter une obligation dont une

autre était tenue, contre le véritable débiteur de l’obligation.

L’ONIAM ne va pouvoir exercer cette action récursoire que dans le cadre d’une

indemnisation d'une victime d’infection nosocomiale. En effet, selon l’article L1142-21 du

Code de la santé publique, il est prévu que : « lorsqu'il résulte de la décision du juge que

l'office indemnise la victime ou ses ayants droit au titre de l'article L. 1142-1-1, celui-ci ne

peut exercer une action récursoire contre le professionnel, l'établissement de santé, le service

ou l'organisme concerné ou son assureur, sauf en cas de faute établie à l'origine du dommage,

notamment le manquement caractérisé aux obligations posées par la réglementation en

matière de lutte contre les infections nosocomiales ». De ce fait, il n'est pas fait mention

d'action récursoire de l'ONIAM dans les autres cas où il intervient, à la différence des tiers

payeurs.

On sait que l’ONIAM, institué par la loi du 4 mars 2002 dite loi Kouchner (dont les

dispositions ont été codifiées aux articles L1142-1 et suivant du Code de la santé publique)

dispose, lorsqu’il a dû indemniser une victime à la suite d’un avis émis par la commission

régionale de conciliation et d’indemnisation, d’une action subrogatoire à l’encontre de

l’établissement ou du médecin qui pourrait être jugé responsable du dommage.

L’article L1142-17 al 7 du Code de la santé publique indique en effet : « si l’office, qui a

transigé avec la victime, estime que la responsabilité d’un professionnel, établissement,

service, organisme, producteur de produits de santé mentionnés au premier alinéa de l’article

L1142-14 est engagée, il dispose d’une action subrogatoire contre celui-ci ».

Mais qu’en est-il lorsque la CRCI engage son action à l’encontre du professionnel de santé ou

de l’établissement, alors même que la victime a laissé passer les délais de recours contentieux

avant la saisine de la CRCI ? La réponse est claire. La saisine de la CRCI suspend bien les

délais de recours contentieux mais rien n’est prévu par les textes pour échapper aux

dispositions de droit commun en matière de recours indemnitaire.

Ainsi, si la victime qui a reçu une décision expresse de rejet n’a pas interrompu le délai de

recours contentieux de deux mois avant la saisine de la CRCI, alors l’intervention de celle-ci

n’a pas pour effet de rouvrir les délais. De ce fait, l’ONIAM n’a pas plus de droit que la

victime elle-même.

Page 27: LE RECOURS DES TIERS PAYEURS ET L'IMPACT DU SYSTEME D

27/114

Un avis du Conseil d’Etat du 17 septembre 2012 donne une position différente concernant le

recours des caisses primaires d’assurance maladie car il se fonde sur l’article L376-1 du Code

de la sécurité sociale qui ouvre aux caisses de sécurité sociale la possibilité de poursuivre le

remboursement par le responsable d’un dommage corporel des dépenses qu’elles ont exposées

en faveur de la victime, indépendamment de l’exercice par celle-ci ou par ses ayants droit

d’un recours indemnitaire au titre des préjudices qui sont demeurés à sa charge. Cette

disposition qualifie de subrogatoires les recours dont disposent les caisses primaires, or il est

prévu que si la victime n’a pas contesté la décision, par laquelle la collectivité publique à

laquelle le dommage est imputé a rejeté sa demande indemnitaire, alors cela n’a pas pour effet

de rendre irrecevables les conclusions des caisses tendant au remboursement par cette

collectivité des dépenses qu’elles ont engagées à la suite de l’accident. Cela étendrait ainsi son

action subrogatoire vers l'ouverture à une action récursoire. Le Conseil en 201219 s’est posé la

question de savoir si la forclusion de la victime frappe d’irrecevabilité l’action subrogatoire

engagée par une caisse de sécurité sociale sur le fondement de l’article L376-1 du Code de la

sécurité sociale.

En l’espèce, le tribunal administratif de Paris avait été saisi d’un recours subrogatoire de

l’ONIAM dirigé à l’encontre de l’Assistance publique – Hôpitaux de Paris pour le

recouvrement d’indemnités versées à la victime d’un dommage médical. Mais préalablement

à la saisine de la commission régionale d’indemnisation des accidents médicaux (CRCI), la

victime avait saisi l’Assistance publique – Hôpitaux de Paris d’une demande d’indemnisation

qui avait été rejetée. Or, cette décision de rejet n’avait pas été contestée dans le délai de

recours contentieux de deux mois selon l’article R421-1 et R421-3 du code de la justice

administrative, ce qui posait un certain nombre de difficultés notamment la problématique

dégagée précédemment.

Si l’ONIAM indemnise la victime en lieu et place de l’assureur, puis exerce le recours

subrogatoire prévu à l’article L1142-15 du code de la santé publique, le caractère définitif de

la décision rejetant la demande d’indemnité de la victime peut être opposé par l’établissement.

Mais, concernant la question de la recevabilité du recours subrogatoire des caisses exposé à

l’article L376-1 du Code de la sécurité sociale, le Conseil d’Etat a opté pour l’indépendance

de la recevabilité de leur action subrogatoire de l’exercice d’un recours indemnitaire par la

victime ne prenant pas en compte le caractère définitif de la décision préalable de rejet. Les

organismes sociaux ont le droit de poursuivre le remboursement, auprès du responsable d’un

dommage corporel, de prestations qu’elles ont versées à la victime. Cette action est totalement

indépendante de la mise en œuvre par la victime d’un recours destiné à obtenir

19 Avis CE, 17 septembre 2012 (Annexe n°10)

Page 28: LE RECOURS DES TIERS PAYEURS ET L'IMPACT DU SYSTEME D

28/114

l’indemnisation des préjudices demeurés à sa charge. Dans l’avis de 2012, la victime n’a pas,

dans le délai du recours contentieux critiqué la décision suivant laquelle l’Administration,

responsable du dommage, a opposé un refus à sa demande d’indemnité. Cette circonstance n’a

pas pour conséquence de rendre irrecevables les conclusions des organismes sociaux qui

souhaitent que l’Administration leur rembourse les dépenses de prestations exposées à la suite

de l’accident.

Toutefois, la position du Conseil d’Etat est satisfaisante dans la mesure où deux aspects sont à

distinguer. D’une part, se pose le problème de savoir comment l’Administration, son assureur

ou l’ONIAM vont indemniser la victime. Cette question relève du droit de la santé publique.

D’autre part, il conviendra de savoir quelle solution trouver au problème concernant la prise

en charge de cette victime par la caisse de sécurité sociale. La victime étant un assuré social,

la caisse compétente est tenue de lui verser des prestations à la suite d’un dommage en dehors

de tout procès. Dès lors que l’organisme a accompli ce versement, il est subrogé dans les

droits de la victime, c’est-à-dire son affilié. Il peut ainsi se retourner contre le responsable du

dommage et son assureur. Cette action est fondée sur le Code de la sécurité sociale par son

article L376-1. Si l’ONIAM souhaite exercer son recours contre le tiers responsable

également, son action doit être fondée sur le Code de la santé publique en vertu de l’article

L1142-17. Dans ce cas, il convient de distinguer rigoureusement deux branches du droit.

Ainsi, la décision définitive de rejet est rendue inopposable à l’égard des caisses de sécurité

sociale dans le cadre de leur recours tendant au remboursement des dépenses exposées en

faveur de la victime.

Le recours dit « subrogatoire » du tiers payeur n’est pas justifié dans la mesure où la victime

ne peut plus exercer de recours contre le tiers responsable, étant donné le dépassement du

délai de deux mois à dater de la notification du refus pour saisir le tribunal administratif. Le

tiers payeur ne peut donc pas exercer son action sur le fondement d’une action subrogatoire

(subrogé la victime ne lui donnant pas la possibilité d’exercer son recours), mais l’exercera

sur le fondement de son action récursoire.

L’avis de 2012 du Conseil d’Etat ne retient pas la qualification véritablement subrogatoire de

l’action en remboursement des caisses de sécurité sociale, mais revendique implicitement

l’existence d’une action récursoire.

L’analyse distingue la recevabilité de l’action subrogatoire de la caisse de l’exercice d’un

recours indemnitaire par la victime, que celle-ci n’est pas introduit un tel recours ou que,

l’ayant exercé, il ait été rejeté pour irrecevabilité, ou encore que la victime se soit désistée de

son action. D’après le rapporteur public, les préjudices pris en charge par la Caisse sont

présents depuis le commencement. C’est pourquoi, la décision de la victime de ne pas agir

Page 29: LE RECOURS DES TIERS PAYEURS ET L'IMPACT DU SYSTEME D

29/114

devant le juge ne doit pas avoir pour effet de rendre forclose l’action de la caisse.

Le Conseil d’Etat s’est conformé à une jurisprudence de la Cour de cassation en date du 24

janvier 2012 rendu par sa chambre criminelle qui prémunit les tiers payeurs contre la carence

de la victime ou d’un ayant droit en les autorisant à recourir de manière autonome contre le

responsable et son assureur.

L'arrêt rendu par le Conseil d'Etat du 10 octobre 2011 précise que le désistement de la victime

ou de ses ayants droits est sans incidence sur le droit au recours des tiers payeurs puisque les

dispositions de l'article L376-1 du Code de la sécurité sociale « ne font pas dépendre de

l'exercice d'un recours indemnitaire par la victime ou ses ayants droit la possibilité pour la

caisse de sécurité sociale, subrogée dans les droits de son assuré à hauteur des prestations

qu'elle lui a versées, d'en poursuivre le remboursement par le responsable de l'accident ». Il

rappelle ainsi que le droit au recours des tiers payeurs est un droit propre qui est distinct de

l'action en responsabilité intentée par la victime.

Cette action autonome des tiers-payeurs se justifie également dans un cas particulier, à savoir

l'indemnisation des victimes contaminées par le virus de l'hépatite C, où l'action des tiers

payeurs va être rendue possible à l'encontre de l'ONIAM alors même que ceux-ci indemnisent

les victimes au même titre.

2- L'unique recours des tiers payeurs contre l'ONIAM : le cas de l’indemnisation des

victimes contaminées par le Virus de l’Hépatite C (VHC)

Ce recours autonome et indépendant des tiers payeurs, ayant pour objectif essentiel le

recouvrement de leur créance, est revendiqué dans un cas particulier qui n’est autre que

l’indemnisation des conséquences d’une contamination par le VHC causée par une transfusion

de produits sanguin ou une injection de produits dérivés du sang.

En effet, il a été prévu par la loi Kouchner du 4 mars 2002 que l’ONIAM indemnise les

conséquences d’une contamination par le VHC, mais la qualification de l’ONIAM posera

question lorsqu’est entrée en vigueur la loi du 17 décembre 2008.

Il a été précisé, par un avis du Conseil d’Etat du 22 janvier 201020, que les tiers payeurs n’ont

pas la possibilité de recours contre l’Office lorsque l’ONIAM indemnise au titre de la

solidarité nationale les victimes.

En effet, l'avis Coppola de 2010 indique que « les recours subrogatoires des tiers payeurs

ayant versé des prestations à la victime d’un dommage corporel, organisés par l’article L376-

1 du Code de la sécurité sociale, l’article 1er de l’ordonnance du 7 janvier 1959 et l’article 29

20 Avis Coppola du CE, 22 janvier 2010 (Annexe n°9)

Page 30: LE RECOURS DES TIERS PAYEURS ET L'IMPACT DU SYSTEME D

30/114

de la loi du 5 juillet 1985, ne peuvent être exercés contre l’ONIAM lorsque celui-ci a pris en

charge la réparation de ce dommage au titre de la solidarité nationale ». La Haute assemblée

ne fait que confirmer cette idée : les tiers payeurs ne peuvent, en principe exercer de recours

subrogatoire contre l’ONIAM. Cela est vrai en ce qui concerne les recours formulés par les

caisses de sécurité sociale, mais aussi les assureurs, les mutuelles et plus largement les tiers

payeurs énumérés par l’article 29 de la loi du 5 juillet 1985. La solution devrait trouver à

s’appliquer lorsque c’est un autre fonds d’indemnisation qui est à l’origine du recours contre

l’ONIAM.

Le Conseil d’Etat pour rendre un avis le 18 mai 201121 sur la qualification de l’ONIAM s’est

basé sur deux aspects. Elles renvoient à l’opposition classique entre une logique de solidarité

nationale et une logique inhérente au droit de la responsabilité :

- Soit on prétend que l’ONIAM agit au titre de la solidarité nationale, et de ce fait, il ne sera

pas considéré comme l’auteur responsable. Cette affirmation est revendiquée dans l’avis du

Conseil d’Etat du 22 janvier 2010. Dans ce cas, il n’est pas possible d’admettre des actions

subrogatoires menées par les tiers payeurs envers l’ONIAM puisqu’il n’est pas auteur

responsable. Selon le Conseil d’Etat, il reste la possibilité pour les tiers payeurs d’agir contre

l’Etablissement Français Sanguins « en sa qualité de responsable du dommage », à charge

pour la Caisse primaire d’apporter la preuve d’une faute de cet établissement et « à condition

que celui-ci bénéficie de la couverture d’une assurance ».

- Soit, on considère que la cour administrative d’appel de Lyon a la bonne solution dans son

arrêt du 23 septembre 2010 en précisant que l’ONIAM, spécifiquement dans le domaine des

contaminations par l’hépatite C, n’agit pas au titre de la solidarité nationale et peut donc faire

l’objet d’un recours par un tiers payeur. Selon les juges de Lyon, l’ONIAM, lorsqu’il est

substitué à l’Etablissement Français du Sang (EFS) devient responsable du préjudice. La Cour

administrative d’appel de Lyon jugea à propos du contentieux portant sur l’hépatite C que

« lorsqu’il se trouve substituer à l’Etablissement français du sang dont seul, jusqu’alors la

responsabilité pouvait être recherchée par les victimes atteintes d’une hépatite C contractée

par voie traditionnelle, l’ONIAM ne se présente pas en qualité de payeur au titre de la

solidarité nationale ».

Les textes ne sont pas clairs car ils ont été modifiés à plusieurs reprises, et n’indiquent pas

expressément comme pour les vaccinations avec l’article L3111-9 du Code de la santé

publique, que l’ONIAM prend en charge la réparation des préjudices au titre de la solidarité

nationale. Or, on serait tenté de dire que l’ONIAM indemnise les préjudices d’une

21 Avis du CE, 18 mai 2011 (Annexe n°12)

Page 31: LE RECOURS DES TIERS PAYEURS ET L'IMPACT DU SYSTEME D

31/114

contamination au titre de la solidarité nationale et non en tant que personne morale. La

législation va dans ce sens en précisant dans l’article L1221-14 du Code de la santé publique

que les victimes de préjudices de la contamination par le virus de l’hépatite C sont

indemnisées par l’office mentionné à l’article L1142-22. Or, l’article 1142 mentionne que

l’ONIAM indemnise au titre de la solidarité nationale.

Le Conseil d’Etat, lorsqu’il va rendre son avis, va se baser sur le fondement exact de l’action

de l’ONIAM lorsqu’il indemnise les conséquences des contaminations par l’hépatite C.

L’ONIAM a pour finalité de faciliter l’indemnisation de certains préjudices hors des règles de

la responsabilité civile et administrative. L’un des atouts des fonds serait donc de séparer la

question de la responsabilité et celle de la réparation. Le fondement des actions de l’ONIAM

résiderait dans la solidarité nationale.

Ainsi, le Conseil d’Etat clarifie la situation, dans un avis du 18 mai 2011, concernant les

imprécisions législatives. Pour toutes les missions exercées par l’ONIAM, y compris celles au

sujet desquelles le législateur ne s’est pas référé explicitement à la solidarité nationale,

l’office agit au titre de la solidarité nationale.

De plus, le Conseil d’Etat rend un deuxième aspect essentiel de l’avis en précisant que le

législateur ayant décidé, à compter de l’entrée en vigueur de l’article 67 de la loi du 17

décembre 2008, soit repoussé effectivement le 1er juin 2010, que l’ONIAM se substitue à

l’EFS dans toutes les procédures en cours concernant les contaminations par l’hépatite C

n’ayant pas donné lieu à décision irrévocable, cette substitution prévaut « tant à l’égard des

victimes que des tiers payeurs ».

Le Conseil d’Etat par la clarté de sa décision s’aligne avec le législateur qui donne pour une

période bien définie le rôle d’auteur du dommage à l’ONIAM à l’égard de la Caisse de

sécurité sociale.

Cependant, l’ONIAM est doté d’une action subrogatoire permettant de souligner l’obligation

pour l’office de prendre, seulement de manière provisoire, la charge d’indemniser les victimes

voire leurs ayants droit. Le Conseil d’Etat dans son rapport de 2005 décrit une « déconnexion

entre l’auteur du dommage et le débiteur de l’indemnisation ». L’ONIAM serait en ce sens le

débiteur de l’indemnisation avec la possibilité d’exercer son action subrogatoire contre

l’auteur du dommage.

La question posée au Conseil d’Etat était de savoir si l’ONIAM peut lui-même être l’objet

d’actions subrogatoires initiées par les tiers payeurs. En effet, les préjudices provoqués par la

contamination par le virus de l’hépatite C donnent lieu à ce que les caisses primaires

d’assurance maladie interviennent au titre des frais exposés par les victimes. Or, l’article

L376-1 du Code de la sécurité sociale réserve aux caisses le droit d’agir contre l’auteur

Page 32: LE RECOURS DES TIERS PAYEURS ET L'IMPACT DU SYSTEME D

32/114

responsable de l’accident. Il conviendra donc de savoir si l’ONIAM peut être qualifié d’auteur

responsable vis-à-vis de la CPAM.

Les dispositions transitoires du IV de l’article 67 de la loi de 2008 qui prévoient que

l’ONIAM se substitue à l’EFS dans les procédures en cours tendant à l’indemnisation des

préjudices mentionnés à l’article L1221-14 du Code de la santé publique et n’ayant pas donné

lieu à une décision irrévocable, sont interprétées comme ouvrant aux tiers payeurs la

possibilité de se retourner contre l’ONIAM qui se substitue à l’EFS vis-à-vis de l’ensemble

des parties au litige. Cette solution tient à la garde de la stabilité des situations juridiques, les

droits des tiers payeurs comme des victimes doivent être préservés en ce qui concerne les

instances en cours. A compter du 1er juin 2010, l’ONIAM est substitué à l’EFS donc celui-ci

doit être déclaré hors de cause des instances en cours dès cette date. Les tiers payeurs doivent

en conséquence exercer leur recours subrogatoire contre l’ONIAM.

Il existe ainsi un paradoxe entre les qualités d’auteur responsable et d’acteur agissant au titre

de la solidarité nationale que peut avoir l’ONIAM lorsqu’il indemnise les victimes de

contamination par l’hépatite C. Le juge a donc dû interpréter les imperfections législatives

afin de ne pas aller à l’encontre des décisions parlementaires.

Après avoir énoncé que ce n’est pas en tant que responsable du dommage que l’ONIAM

assure la réparation des préjudices imputables à une contamination par le VHC mais bien au

titre de la « solidarité nationale », le Conseil d’Etat admet pourtant que les tiers payeurs

peuvent lui réclamer leurs débours par le biais d’une actions subrogatoire dans les procédures

en cours au 1er juin 2010. Il semblerait en conséquence que l’Office soit considéré, dans cette

hypothèse, comme l’auteur responsable des dommages résultant d’une contamination par le

VHC. Enoncer dans les procédures en cours, que l’ONIAM se substitue à l’EFS aussi bien à

l’égard de la victime que des tiers payeurs, et qu’il n’y a donc pas lieu de maintenir l’EFS

pour statuer sur le recours de ces derniers, revient donc à faire de l’Office, au moins envers les

tiers payeurs, le responsable de la contamination par le VHC. La substitution s’entend à titre

indemnitaire mais aussi en terme de responsabilité.

Par ailleurs, cette absence de reconnaissance juridictionnelle de responsabilité de l’EFS dans

les instances en cours permet-elle aux assureurs de l’EFS de se dédouaner de leur garantie ?

Etant donné que l’EFS est mis hors de cause des contentieux en cours, « aucune

condamnation ne peut être prononcée contre lui » au titre de la contamination par le virus de

l’hépatite C. La première chambre civile estime donc que la garantie de son assureur n’est

plus ouverte. L’assurance de responsabilité civile de l’EFS ne joue en effet que si ce dernier

est condamné à réparation. De ce fait, la condamnation de l’EFS étant impossible du fait de

Page 33: LE RECOURS DES TIERS PAYEURS ET L'IMPACT DU SYSTEME D

33/114

son remplacement par l’ONIAM dans les contentieux ouverts à la date d’entrée en vigueur de

la loi de 200822, ses assureurs se voient exempter de toute obligation.

De plus, concernant les rapports de l’ONIAM et des assureurs de l’EFS, aucun texte n’a prévu

que la substitution postérieure de l’ONIAM à l’EFS conduirait à la transmission des contrats

d’assurance de ce dernier. En jugeant que la substitution décidée par la loi de 2008 « n’opère

pas transfert à l’ONIAM des créances de l’EFS envers les assureurs de celui-ci », la Cour

empêche l’office de demander à être garanti de sa condamnation à la place de l’EFS par les

assureurs de ce dernier. L’EFS ne peut plus faire jouer son assurance de responsabilité car il

n’est condamné à aucune réparation. L’ONIAM qui est condamné en lieu et place de l’EFS ne

peut pas non plus appeler en garantie les assureurs de ce dernier car il n’est pas substitué à

l’EFS dans les droits découlant des contrats précédemment souscrits.

S’il n’est pas possible pour l’ONIAM de faire jouer la garantie des assureurs, la loi de 2008

ne mentionne nulle part que l’ONIAM doit endosser la responsabilité de l’EFS, dont la faute

demeure à l’origine de la contamination par le virus de l’hépatite C. La question est de savoir

si il est possible pour l’ONIAM de se retourner contre l’auteur du dommage, soit l’EFS ?

L’hypothèse semble envisageable, même si rien n’est indiqué dans l’avis du Conseil d’ Etat.

Ce recours possible de l’ONIAM permettrait d’engager la responsabilité du véritable auteur

du dommage, à l'inverse des tiers payeurs. Dans le but de faciliter le sort des tiers payeurs

engagés dans des actions à l’origine dirigées contre l’EFS puis reprise par l’ONIAM, cet avis

parvient à consacrer deux régimes distincts d’actions subrogatoires en matière de

contamination par le virus de l’hépatite C.

Concernant les procédures engagées après l’entrée en vigueur de la loi du 17 décembre 2008

(soit le 1er juin 2010), le Conseil d’Etat précise que les tiers payeurs peuvent exercer leur

recours subrogatoire contre l’EFS qui est juridiquement responsable du dommage mais dans

les mêmes conditions que l’ONIAM, étant donné que le fondement de l’indemnisation du

VHC réside dans la solidarité nationale. Une double condition est requise : la faute de

l’établissement de transfusion sanguine et la couverture d’une assurance. Cette double

condition qui n’est inscrit dans aucun texte a pour effet d’empêcher que les conditions de

subrogation soient plus souples pour les tiers payeurs qu’elles ne le sont pour l’ONIAM. Dans

ce dernier cas, l’ONIAM est substitué à l’EFS qu’à l’égard des victimes, et seulement au titre

de la solidarité nationale. L’ONIAM et les tiers payeurs sont en conséquence subrogés dans

les droits des victimes d’une contamination par le VHC à l’encontre de l’EFS, qui est lui –

même subrogé dans les droits de ces victimes à l’encontre des centres de transfusion sanguine.

Par cet avis, le Conseil d’Etat n’introduit donc qu’une exception temporaire et justifiée à

l’avis Coppola et a adopté une position équilibrée afin de pallier les imprécisions des textes.

22Soit le 1er juin 2010

Page 34: LE RECOURS DES TIERS PAYEURS ET L'IMPACT DU SYSTEME D

34/114

Or, cette imprécision parlementaire de substituer l’ONIAM à l’EFS et donc de rendre possible

le recours des tiers payeurs à l’encontre de l’ONIAM a permis de conserver, temporairement

qu’il soit, une certaine indépendance de leur recours. Ainsi, ce n’est que pour les contentieux

débutant après le 1er juin 2010 que les recours des tiers payeurs devront se faire sur le

fondement de la faute. Les tiers payeurs pourront exercer leur recours contre l’EFS si ils

apportent la preuve d’une faute de l’établissement de transfusion sanguine mais également si

l’établissement justifie d’une couverture d’assurance. De ce fait, le législateur a donc souhaité

garder un recours systématique des tiers payeurs (à l'encontre de l'ONIAM dans ce cas précis)

pour les procédures qui avaient débuté antérieurement à l’entrée en vigueur de la loi du 17

décembre 2008.

Les réformes de 2002 concernant l'indemnisation des victimes d'accidents médicaux ont

permis de figer la notion de responsabilité médicale. Toutefois, la création de ces nouveaux

articles par le législateur a sensiblement fragilisé le recours des tiers-payeurs en raison d'une

interprétation jurisprudentielle stricte.

II- L'avenir incertain du recours des tiers-payeurs en cas d'indemnisation des

victimes d'accidents médicaux par l'ONIAM.

Il existe un cas particulier qui marque une évolution jurisprudentielle allant en défaveur des

tiers payeurs : il s'agit de l'indemnisation des victimes d'une infection nosocomiale.

Antérieurement, ce recours des tiers payeurs était systématique, sans prise en compte d'une

responsabilité quelconque de l'établissement de soins et du professionnel de santé, comme

c’était le cas pour l'ONIAM. Or, la jurisprudence et le législateur ont remanié les conditions

d’indemnisation des victimes d’infection nosocomiale (A), allant même jusqu'à l’émergence

d’un transfert de la responsabilité médicale vers la solidarité nationale (B).

A/ L’indemnisation des victimes d’infection nosocomiale remaniée par la loi About du 30

décembre 2002 et par la jurisprudence récente

Afin de comprendre l'enjeu de la responsabilité d'un établissement de santé en cas d'infection

nosocomiale détectée, il convient tout d'abord, d'expliquer comment l’on a abouti à une

indemnisation des victimes d’infection nosocomiale en fonction de la gravité du dommage et

non en fonction de la responsabilité (1), pour ensuite analyser les différents recours possibles

dans le cas d’une indemnisation des victimes d’infection nosocomiale à la fois de l'ONIAM

mais également et surtout des tiers payeurs touchés par un revirement de jurisprudence de la

Page 35: LE RECOURS DES TIERS PAYEURS ET L'IMPACT DU SYSTEME D

35/114

Cour de cassation le 9 avril 2014 (2).

1- L'indemnisation des victimes d'infection nosocomiale par l'ONIAM en fonction de la

gravité du dommage et non en fonction de la responsabilité

Selon les données officielles issues du plan de lutte contre les infections nosocomiales pour

les années 2005-2008, environ quatre mille personnes meurent directement chaque année en

France d'infections nosocomiales contractées dans les hôpitaux. C’est pourquoi prévoir une

juste indemnisation des victimes a été la principale mission du législateur de 2002.

En effet, l'indemnisation des victimes d'infections nosocomiales a fait l'objet d'une évolution

jurisprudentielle importante qui a été consacrée par la loi du 4 mars 2002. Mais une loi

nouvelle de décembre 2002 23 a dû également apparaître pour fixer un nouveau régime

d'indemnisation des victimes d'infections nosocomiales. On peut constater que ces victimes

d'infection nosocomiale répondent à un régime de responsabilité différent de celui des

victimes d'accidents médicaux en général depuis toujours.

Tout d'abord, il est défini comme infections nosocomiales « les infections contractées dans un

établissement de soins, et qui étaient absente au moment de l'admission du patient ». Il s’agit

de « toutes maladies provoquées par des micro-organismes et contractées dans un

établissement de soin par un patient après son admission pour hospitalisation ou soin

ambulatoire » selon une circulaire de 1988. La victime doit démontrer le caractère nosocomial

de l'infection dont elle a fait l'objet. Il s'agit plus précisément des infections, contractées dans

un établissement de soins, et qui était absente au moment de l'admission du patient. Lorsque

l'état infectieux du patient à l'admission est inconnu, l'infection est classiquement considérée

comme nosocomiale si elle apparaît après un délai de 48 heures d'hospitalisation. Mais ces

infections peuvent être directement liées aux soins ou simplement survenir de l'hospitalisation

indépendamment de tout acte médical. D'autre part, l'infection nosocomiale est également

admise lorsque les symptômes apparaissent dans les 30 jours suivant l'intervention. Ce délai

est porté à un an pour les infections survenant en cas de mise en place de matériel prothétique

(prothèse articulaire, matériel métallique de fixation ou de suture).

On distingue plusieurs types d'infections nosocomiales qui relèvent de modes de transmission

différents :

– L’infection endogène qui est une infection développée par le patient du fait de son

hospitalisation mais dont il portait préalablement les germes.

– Les infections exogènes qui correspondent soit à des infections croisées, transmises d'un

23 Loi Kouchner du 30 décembre 2002

Page 36: LE RECOURS DES TIERS PAYEURS ET L'IMPACT DU SYSTEME D

36/114

malade à l'autre par les mains ou les instruments de travail du personnel médical ou

paramédical, soit à des infections provoquées par les germes portés par le personnel, soit

d'infections liées à la contamination de l'environnement hospitalier.

Auparavant, l'indemnisation était acceptée ou non selon les différentes infections, et selon les

deux ordres de juridiction. En effet, la Cour de cassation acceptait d'indemniser les victimes

d'infections nosocomiales qu'elles soient endogènes ou exogènes24 . La Cour de cassation

envisage donc que même si le patient est porteur d'un germe, celui-ci ne s'est révélé que par le

biais des actes de soins réalisés. Elle refusait donc la distinction entre les infections. Elle

considère comme nosocomiale toutes les infections contractées au cours d'une hospitalisation,

y compris celles causées par des germes dont le patient était porteur.

Cependant, le Conseil d'Etat refusait de retenir une faute dans l'organisation du

fonctionnement du service hospitalier lorsque le patient présentait une infection nosocomiale

endogène25.

La loi du 4 mars 2002 n'a pas permis de départager cette divergence de point de vue.

L'indemnisation d'une victime d'infection nosocomiale endogène dépendait donc de la nature

publique ou privé de l'établissement de soins dans lequel avait été hospitalisée la victime.

C'est par un arrêt du 10 octobre 2011 que le Conseil d'Etat a décidé de mettre fin à cette

discorde et à cette inégalité de traitement des victimes en fonction du lieu de leur

hospitalisation. Le Conseil a ainsi reconnu l'existence d'une présomption de faute pour les

établissements publics hospitalier en présence d'une infection nosocomiale qu'elle soit

endogène ou exogène.

La loi du 4 mars 2002 a permis la création d'un fonds d'indemnisation spécifique qui est

l'ONIAM. Cet Office indemnise les victimes d'accidents médicaux, les affections iatrogènes et

les infections nosocomiales au titre de la solidarité nationale. Cette loi a donc réglementé

l'indemnisation des victimes d'infections nosocomiales.

On trouve en effet une évolution de la jurisprudence assez redondante sur ce sujet. Ainsi, les

règles d'indemnisation ont été définies par la jurisprudence de la Cour de cassation et du

Conseil d'Etat. Le titre IV de la loi du 4 mars 2002 a institué un nouveau régime de

« réparation des conséquences des risques sanitaires » dont le dispositif a été codifié aux

articles L1142-1 et suivant du Code de la santé publique. L'article 101 de la loi avait prévu

son applicabilité aux « accidents médicaux, affections iatrogènes et infections nosocomiales

consécutifs à des activités de prévention, de diagnostic ou de soins réalisés au plus tôt six

mois avant la publication de la présente loi », le 5 septembre 2001, la loi ayant été publiée au

24 Civ 1, 4 avril 2008 25 CE, 27 septembre 2002

Page 37: LE RECOURS DES TIERS PAYEURS ET L'IMPACT DU SYSTEME D

37/114

Journal officiel le 5 mars 2002. Le Conseil d'Etat, qui connaissait des litiges relatifs à des

infections nosocomiales contractées dans les établissements publics de santé avant le 5

septembre 2001, continuait d'appliquer le régime de la présomption de faute dégagé dans

l'arrêt Cohen du 9 décembre 198826 selon lequel « l'introduction accidentelle dans l'organisme

du patient d'un germe microbien (…) révèle une faute dans l'organisation ou le

fonctionnement du service hospitalier à qui il incombe de fournir au personnel médical un

matériel et des produits stériles ». Un tel mécanisme était favorable aux victimes puisqu'il

aboutissait au renversement de la charge de la preuve. En effet, c'était au service hospitalier de

prouver qu'il n'avait pas commis de faute. Il incombait de prouver qu'il avait bien utilisé des

produits et du matériel stériles. Or, ces preuves étaient très difficiles à apporter.

Par trois arrêts de la Cour de cassation en date du 29 juin 199927, il a été précisé que « le

contrat d'hospitalisation de soins conclu entre un patient et un établissement de santé met à la

charge de ce dernier, en matière d'infection nosocomiale, une obligation de sécurité de résultat

dont il ne peut se libérer qu'en rapportant la preuve de la cause étrangère ». La première

chambre civile de la Cour de cassation avait consacré un régime de responsabilité de plein

droit en matière d'infection nosocomiale à la charge des établissements de santé et des

médecins libéraux, fondé sur une « obligation de sécurité de résultat » dont l'établissement ou

le médecin ne pouvait se libérer qu'en rapportant la preuve d'une cause étrangère.

La loi du 4 mars 2002 vise à unifier le régime de réparation des risques sanitaires résultant du

fonctionnement du système de santé. Elle pose le principe que « les professionnels de santé

(…) ainsi que tout établissement, service ou organisme dans lesquels sont réalisés des actes

individuels de prévention, de diagnostic ou de soins ne sont responsables des conséquences

dommageables d'actes de prévention, de diagnostic ou de soins qu'en cas de faute » à

l'exception des dommages résultant du défaut d'un produit de santé ou d'une infection

nosocomiale.

En effet, l'article L1142-1 alinéa 2 du Code de la santé publique dispose que « les

établissements, services et organismes susmentionnés sont responsables des dommages

résultant d'infections nosocomiales, sauf s'ils rapportent la preuve d'une cause étrangère ». Cet

alinéa vise à consacrer le régime de responsabilité de plein droit dégagé par la Cour de

cassation en 1999. Mais cette consécration reste partielle car désormais, cet alinéa ne vaut que

pour les établissements de soins, et non plus pour les professionnels de santé. La loi n'étend

pas ce régime aux praticiens dont la responsabilité en matière d'infections nosocomiales ne

pourra être engagée que sur le seul terrain de la responsabilité pour faute, preuve qui reste à la

charge de la victime. L'arrêt rendu par la Cour de cassation en date du 28 janvier 2010 a

26 CE, 9 décembre 1988 (Cohen) : Annexe n°14 27 Cass, civ 1, 29 juin 1999 : annexe n°15

Page 38: LE RECOURS DES TIERS PAYEURS ET L'IMPACT DU SYSTEME D

38/114

envisagé ce principe en cassant un arrêt de la Cour d'appel qui a condamné une clinique et un

médecin sur le fondement de la loi du 4 mars 2002 alors qu'aucune faute n'était prouvée à

l'égard de ce dernier.

Ainsi, à l'égard du médecin pour les infections nosocomiales, il y a deux situations évoluant

avec la jurisprudence. Si l'indemnisation concerne un acte médical antérieur au 5 septembre

2001, alors le régime d'indemnisation est celui de la présomption de faute, alors que si l'acte

médical est postérieur à cette date, le régime d'indemnisation est celui de la faute prouvée.

Toutefois, cette loi de mars 2002 a déclenché une crise majeure en raison de la proclamation

d'une obligation de sécurité de résultat envers les établissements de santé dans le monde de

l'assurance du risque médical. C'est pourquoi, a été établi la loi About du 30 décembre 2002

relative à la responsabilité médicale. Celle-ci a introduit un nouvel article L1142-1-1 du Code

de la santé publique qui prévoit que les dommages résultant d'infections nosocomiales

correspondant à un taux d'incapacité permanente supérieur à 25% ouvrent droit à réparation

au titre de la solidarité nationale. Ainsi, c'est le fond d'indemnisation, c'est à dire l'ONIAM qui

indemnisera ces victimes d'un dommage correspondant à un taux d'incapacité permanente

supérieur à 25%.

La loi du 30 décembre 2002 a permis de décharger les établissements de santé de la réparation

des dommages les plus graves consécutifs à des infections nosocomiales.

Cependant, cette loi ne donnait aucune indication quant à son entrée en vigueur, c'est pourquoi

elle est applicable pour les seules infections contractées à partir du 1er janvier 200328.

Ainsi, pour les infections nosocomiales contractées dans un établissement de santé entre le 5

septembre 2001 et le 31 décembre 2002, seul s'applique le régime de réparation défini à

l'article L1142-1 du Code de la santé publique qui prévoit que « seuls les établissements de

santé sont responsables de plein droit sauf s'ils rapportent la preuve d'une cause étrangère ».

La loi du 4 mars 2002 prévoit que lorsque la cause étrangère est établie, l'indemnisation de

l'infection nosocomiale est prise en charge par le biais de la solidarité nationale dans certaines

conditions. En effet, il est prévu que « lorsque la responsabilité de l'acteur de santé ne peut

être engagée, le malade ou en cas de décès ses ayants droits, peut obtenir la réparation des

préjudices liés à une infection nosocomiale au titre de la solidarité nationale par le biais de

l'Office Nationale d'indemnisation des accidents médicaux ». La date de l'acte inhérent à

l'infection doit être postérieure au 5 septembre 2001. Aussi d'autres conditions sont à

envisagées : tout d'abord, la victime doit être atteinte d'une infirmité conséquente puisqu'un

seuil de gravité d'incapacité permanente partielle est fixé à 24%. De plus, si ce seuil de gravité

n'est pas atteint, le caractère de gravité du dommage est également reconnu lorsque la durée

28 CE, 13 juillet 2007 : annexe n°16

Page 39: LE RECOURS DES TIERS PAYEURS ET L'IMPACT DU SYSTEME D

39/114

de l'incapacité temporaire de travail est au moins égale à 6 mois consécutif ou non sur une

période de 12 mois. Enfin, le caractère de gravité peut être satisfait à titre exceptionnel dans

deux hypothèses : d'une part lorsque la victime est déclarée définitivement inapte à exercer

l'activité professionnelle qu'elle exerçait avant l'accident, d'autre part, lorsque l'incident

occasionne des troubles particulièrement graves, y compris d'ordre économique, dans les

conditions d'existence de la personne.

Aussi, l'infection doit avoir des conséquences anormales au regard de l'état de santé initial du

patient. Cependant, la prise en charge par la solidarité nationale des infections nosocomiales

n'était pas fréquente dans la mesure où les hôpitaux ou établissements de santé privés avaient

des difficultés pour s'exonérer de leur responsabilité en démontrant l'existence d'une cause

étrangère.

Le recours des tiers – payeurs entre l'application des lois Kouchner et About s'effectuera sur le

fondement du régime de présomption de responsabilité. Ainsi, l'établissement de soins devra

de manière automatique procéder au recouvrement de la créance des tiers payeurs quel que

soit leur responsabilité si la cause étrangère n'est pas établie par l'établissement.

L'ONIAM, n'effectuant son action que lorsqu'une preuve étrangère est rapportée et lorsque le

taux d’IPP est supérieur à 24%, il ne pourra dans ce cas exercer de recours car il n’y a pas

d’identification du tiers responsable. Cependant, si l'ONIAM agit en indemnisation des

victimes lorsque l'assureur du tiers responsable refuse de payer, ou si ce dernier n'est pas

assuré, il se substituera au tiers responsable, et un recours lui sera alors possible.

La loi du 4 mars 2002 a abouti à étendre le champ des risques que doit garantir les assureurs

des établissements de santé en raison de l'affirmation de la responsabilité de plein droit dans le

cas de victimes d'infection nosocomiale. C'est pourquoi, sous la pression des assureurs, un

nouvel article a été inséré ensuite par la loi About du 30 décembre 2002 qui a permis aux

établissements de soins et donc à leur assureur de ne pas être contraint à indemniser les

victimes d'infection nosocomiale causant une incapacité permanente supérieure à 25%.

Si l’infection nosocomiale est à l’origine d’une IPP inférieure ou égale à 25%, le régime

d’indemnisation classique s’applique (article L 1142-1, II CSP). Par conséquent, la victime est

indemnisée soit par l’assureur de celui dont la responsabilité est établie, soit par l’ONIAM en

l’absence de responsabilité, si les conditions au titre de la solidarité nationale sont réunies

(conséquences anormales au regard de l’état de santé du patient et seuil de gravité IPP au plus

égal à 25 %, ou ITT 6 mois consécutifs ou non consécutifs sur une période de 12 mois, ou

inaptitude à l’exercice de la profession, ou troubles particulièrement graves, y compris

économique, dans les conditions d’existence).

Page 40: LE RECOURS DES TIERS PAYEURS ET L'IMPACT DU SYSTEME D

40/114

L’article L1142-1-1 du Code de la santé publique, adoptée par la loi About, dispose ainsi qu' :

« ouvrent droit à réparation au titre de la solidarité nationale :

1° Les dommages résultant d'infections nosocomiales dans les établissements, services ou

organismes mentionnés au premier alinéa du I de l'article L 1142-1 correspondant à un taux

d'atteinte permanente à l'intégrité physique ou psychique supérieur à 25 % déterminé par

référence au barème mentionné au II du même article, ainsi que les décès provoqués par ces

infections nosocomiales ;

2° Les dommages résultant de l'intervention, en cas de circonstances exceptionnelles, d'un

professionnel, d'un établissement, service ou organisme en dehors du champ de son activité de

prévention, de diagnostic ou de soins ».

L'ONIAM interviendra donc si le seuil de gravité du taux d'incapacité permanente atteint 25%

et plus, ou si les établissements de soins rapportent la preuve d'une cause étrangère et des

conditions au titre de la solidarité nationale réunies dans le cas d'un taux d'incapacité

permanente inférieur à 25%.

La définition de la cause étrangère a posé débat et a fait l'objet d'une définition inédite. En

effet, la délimitation de la cause étrangère n'est pas si simple à première vue étant donné que

celle-ci est une cause exonératoire de responsabilité, c'est pourquoi une définition claire

devait être rendue afin de faire face aux situations complexes. On dénombre trois catégories

de causes étrangères : la force majeure, le fait du tiers, ou le fait de la victime. La cause

étrangère présente les caractères de la force majeure lorsqu'elle réunit trois critères, soit

l'extériorité, l'imprévisibilité et l'irrésistibilité. En matière d'infection nosocomiale ; la preuve

de ces trois éléments est quasiment impossible à rapporter. C'est pourquoi, la Cour de

cassation n'a encore jamais retenu de cause étrangère de nature à exonérer le médecin ou

l'établissement de santé de sa responsabilité dans le cadre du régime de responsabilité de plein

droit.

Ce système consistant pour l'ONIAM à indemniser les victimes d'une infection nosocomiale

en se basant sur un critère de gravité (taux d'IPP > à 25%) est donc bien un système de

« guichet unique » qui est ici mise en œuvre, la responsabilité des établissements publics de

santé n'étant pas mise en cause pour les infections les plus importantes. Le législateur par ce

système a voulu que les victimes n'aient pas à rechercher la responsabilité des établissements

de santé lorsque le taux d'incapacité permanente partielle dépasse le seuil de 25% afin de

pouvoir bénéficier d'une indemnisation par la voie amiable en saisissant la CRCI.

Page 41: LE RECOURS DES TIERS PAYEURS ET L'IMPACT DU SYSTEME D

41/114

La haute juridiction rappelle bien que le régime indemnitaire prévu à l'article L1142-1-1 est

un régime distinct de celui prévu à l'article L1142-1. Ce qui conduit à affirmer qu'il n'est pas

possible d'assimiler ce régime d'indemnisation à un régime de responsabilité. Le Conseil

d'Etat avait ainsi affirmé dans son arrêt du 13 juillet 2007 que « l'article 1er de la loi du 30

décembre 2002 a créé un nouveau régime de prise en charge par la solidarité nationale des

dommages résultant des infections nosocomiales ». L'ONIAM ne peut donc se libérer de sa

charge indemnitaire en invoquant la faute commise par l'établissement de santé. L'existence

d'une faute commise par l'établissement est sans incidence sur l'obligation à la dette étant

donné que l'infection nosocomiale n'est pas indemnisée sur le fondement de la responsabilité

dans le cadre de l'article L1142-1-1 du Code de la santé publique.

Cependant, la loi du 30 décembre 2002 a permis à l'ONIAM d'exercer un recours contre

l'établissement responsable de victimes d’infection nosocomiale grave, afin de responsabiliser

la situation.

2- Une impossibilité de recours des tiers-payeurs contre l'établissement de soin en cas

d’infection nosocomiale grave, à l'inverse de l'ONIAM

Les tiers payeurs vont participer à l’indemnisation des victimes d’infection nosocomiale grave

ou légère. Un recours sera donc plus ou moins possible.

En effet, si la victime a fait l’objet d’une infection nosocomiale légère (soit un taux d’IPP < à

25%), le recours des tiers payeurs contre les tiers responsables sera possible si l’établissement

de soin en cause n’apporte pas la preuve d’une cause étrangère.

Si la victime d’une infection nosocomiale voit son taux d’IPP supérieur à 25%, l’ONIAM

devra intervenir et indemniser la victime qu’il y est faute ou non de l’établissement.

Toutefois, le législateur met à la disposition de l’Office la possibilité de se retourner contre

l'établissement concerné pour lui demander de l'indemniser de tout ou partie des sommes qui

sont à sa charge. Ce recours de l'Office peut être exercé également contre le professionnel, le

service, ou l'organisme concerné ou bien son assureur. La faute de l'établissement de santé

peut donc être invoquée par l'ONIAM dans le cadre d'une action récursoire ou d'un recours

subrogatoire. Cette solution semble logique dans la mesure où il ne peut pas être envisagé de

ne rendre responsable les établissements de soins que des infections nosocomiales les moins

graves. Le Code de la santé publique permet donc à l'ONIAM d'exercer deux types d'action à

l'encontre de l'assuré en cause : l'action subrogatoire, prévue à l'article L1142-17 qui suppose

que l'Office ait préalablement transigé et indemnisé la victime ; ou l'action récursoire de

l'article L1142-21 lorsque l'ONIAM est condamné à indemniser à l'issue d'une décision

Page 42: LE RECOURS DES TIERS PAYEURS ET L'IMPACT DU SYSTEME D

42/114

juridictionnelle ou dans le cadre d'une instance dirigée contre lui pour le cas où serait

prononcée une telle décision.

Ces deux actions sont néanmoins encadrées. Dans les deux hypothèses, l'ONIAM doit

apporter la preuve qu'une faute a été commise par l'établissement de santé à l'origine du

dommage, « notamment le manquement caractérisé aux obligations posées par la

réglementation en matière de lutte contre les infections nosocomiales ». Ce sera à l'ONIAM

de prouver ce manquement à cette obligation. C'est donc en faveur des établissements de

soins et de leur assureur que cet article L1142 – 17 du Code de la santé publique issu de la loi

du 30 décembre 2002 a été pris. En effet, il sera difficile pour l'Office de prouver cette

négligence et donc de pouvoir recouvrir leur créance. Face à de telles infections, seul

l'ONIAM est tenu d'indemniser les victimes, déduction faite des sommes versées par les

caisses d'assurance maladie.

La question se posait concernant un possible recours des tiers payeurs lorsqu'ils ont contribué

à indemniser la victime d’une infection nosocomiale grave de ses soins et arrêts. En effet, la

CPAM verse différentes prestations, notamment les indemnités forfaitaires au patient infecté.

Un jugement du Tribunal de Grande Instance du 6 décembre 2011 a reconnu les droits de la

CPAM au motif que cette dernière disposait d’un droit propre en vertu de l’article L376-1 du

Code de la sécurité sociale et qu’à ce titre, elle dispose d’un recours envers l’établissement

sans faute de l’infection nosocomiale. La victime, étant indemnisée au titre de la solidarité

nationale, ne dispose pas d’action contre l’établissement. Seule l’action récursoire permet à la

CPAM de recouvrer sa créance. L'action subrogatoire ne serait envisageable qu'à l'encontre de

l'ONIAM (car seul l'office est tenu d'indemniser les victimes). Ainsi, cette action est

impossible. Ce jugement a été confirmé par la Cour d’Appel d’Angers le 17 janvier 2013 au

motif que la CPAM aux termes de l’article L376-1 du Code de la sécurité sociale dispose d’un

recours de droit commun à l’encontre du responsable sans faute de l’infection nosocomiale.

La responsabilité sans faute des tiers payeurs est pour les deux premiers degrés de juridiction

maintenue, à l'inverse de l'ONIAM qui voit son recours plus limité.

La Cour d'appel avait fait droit au recours en remboursement des prestations versées au

patient exercé par la CPAM à l'encontre de l'établissement de soins au motif que cette dernière

bien que n'ayant pas plus de droits que l'ONIAM en la matière, bénéficie d'un régime

juridique différent de celui auquel est soumis l'office. Ainsi, est revendiqué par la Cour

d'appel le caractère autonome du recours de la Caisse. Ce régime juridique distinct lui

permettrait, conformément à l'article L376-1 du code de la sécurité sociale d'exercer un

recours de droit commun contre l'établissement public de santé qui est considéré comme

responsable sans faute de l'infection. Ainsi, pour les tiers payeurs, le régime ne serait plus un

Page 43: LE RECOURS DES TIERS PAYEURS ET L'IMPACT DU SYSTEME D

43/114

régime de responsabilité pour faute dans lequel la faute de l'établissement est recherchée pour

pouvoir exercer un recours, mais serait un régime de responsabilité sans faute où la CPAM va

pouvoir recouvrer sa créance sans rechercher une quelconque responsabilité de l'établissement

de santé.

Cependant, cette solution a été censurée par la Cour de cassation dans un arrêt rendu par sa

première chambre civile en date du 9 avril 201429.

Il convient de rappeler que l’indemnisation n’incombe pas depuis l’entrée en vigueur de la loi

du 30 décembre 2002 aux établissements de soins mais à l’ONIAM dès lors que ces

dommages résultant d’infections nosocomiales correspondent à un taux d’incapacité

permanente ou d’atteinte permanente ou d’atteinte permanente à l’intégrité physique ou

psychique supérieur à 25% ou au décès du patient. Face à de telles infections, seul l’ONIAM

est donc tenu d’indemniser les victimes, déduction faite des sommes versées par les caisses

d’assurance maladie. C’est l’ONIAM exclusivement qui indemnise la victime,

indépendamment de l’existence ou non d’une responsabilité civile. Toutefois, l’établissement

de soins dans lequel est apparu l’infection peut toutefois être appelé à indemniser l’ONIAM

de tout ou partie des sommes versées aux victimes en cas de faute de sa part, notamment en

cas de manquement aux obligations réglementaires applicables en matière de lutte contre les

infections nosocomiales. Hormis le cas de la preuve d’une faute, la victime de l’infection ou

ses ayants droits ne disposent d’aucun recours à l’encontre de l’établissement, et l’ONIAM

d’aucune action subrogatoire.

Aux termes de l’article L1142-17 du Code de la santé publique, l’ONIAM peut exercer un

recours subrogatoire contre l’établissement de soins que si une faute de ce dernier est établie

par l’Office lorsque les dommages sont indemnisés au titre de l’article L1142-1-1 (notamment

le manquement caractérisé aux obligations posées par la réglementation en matière de lutte

contre les infections nosocomiales). Egalement, aux termes de l’article L1142-21 du Code de

la santé publique, lorsque le dommage est indemnisé au titre de l’article L1142-1-1 de ce

même code, l’Office ne peut exercer une action récursoire contre l’établissement de santé que

si une faute est également prouvée par l’Office. Ainsi, l’ONIAM dispose d’une double action :

le recours subrogatoire et l’action récursoire.

L’ONIAM doit prouver l’existence d’une faute, d’un préjudice et le lien de causalité pour

pouvoir prétendre à un remboursement par l’établissement de soins de sa créance. En

l’absence de ces éléments, l’ONIAM ne pourra exercer un recours contre l’établissement de

soins.

29 Cass, civ 1, 9 avril 2014 : annexe n°17

Page 44: LE RECOURS DES TIERS PAYEURS ET L'IMPACT DU SYSTEME D

44/114

L’arrêt d’avril 2014 rend une solution peu favorable aux tiers payeurs. En effet, l’arrêt retient

que « la victime, lorsque l’article L1142-1-1 du Code de la santé publique est applicable,

n’étant titulaire d’aucune action à l’encontre de l’établissement de santé où l’infection a été

contractée, les caisses d’assurance maladie ne disposent d’aucune action subrogatoire à

l’encontre de cet établissement ». De plus, la Cour de cassation indique qu’ « aucun des textes

susvisés ne confère aux caisses d’action récursoire envers l’établissement de santé au titre des

sommes qu’elles ont versées à leur assuré ou pour son compte ».

Ainsi, par cet arrêt, la Cour de cassation n’admet pas la possible action des tiers payeurs que

ce soit subrogatoire ou récursoire. Cette prise en charge par l’ONIAM de l’indemnisation de

la victime au titre de la solidarité nationale à titre principal exclut de fait le recours des tiers

payeurs.

Pour justifier ce rejet de recours de la Caisse primaire d’assurance maladie, la Cour de

cassation relève, d’une part, que comme la victime n’a aucun recours contre l’établissement

de santé en cas d’infection nosocomiale grave, la CPAM par voie de conséquence, n’a aucune

action subrogatoire à l’encontre de cet établissement. Les caisses ne peuvent être subrogées

dans les droits de la victime. Dans ce cas, on considère que la victime n’a pas le droit de

diriger sa demande d’indemnisation à l’encontre de l’établissement de santé et de son assureur,

mais seul l’ONIAM est tenu d’indemniser les victimes. Or, un recours contre l’ONIAM n’est

pas possible pour la Caisse primaire selon l'avis Coppola de 201030 du Conseil d'Etat.

Cette situation pose question sur un recouvrement possible de la Caisse. En effet, on

s’aperçoit que cette solution créée un vide juridique pour les Caisses. En effet, si la victime

est indemnisée au titre de la solidarité nationale c’est en raison de son taux d’IPP atteignant

plus de 25% ou de son décès. On peut se demander ce qu’il en est de la responsabilité de

l’établissement de santé qui faute ou non ne sera pas poursuivi pour toute sa dette dans la

mesure où il ne recouvrira dorénavant plus la créance des tiers payeurs. Quel serait le recours

possible pour les Caisses ? Ces dernières ne pouvant pas être indemnisées par l’ONIAM,

comment peut-elle être indemnisée ?

Les textes ont prévu que la responsabilité de l’établissement de santé, dans lequel l’infection a

été contractée, ne peut être recherchée par l’ONIAM que si le dommage est imputable à une

faute de l’établissement par le biais d’une action récursoire.

Or, la Cour rappelle que les parlementaires n’ont pas prévu de recours récursoire de la CPAM

envers les établissements de soins en cas d’infection nosocomiales grave. Ainsi, aucun recours

n’est possible pour les tiers payeurs leur permettant de recouvrir leur créance.

30 Avis Coppola CE, 22 janvier 2010

Page 45: LE RECOURS DES TIERS PAYEURS ET L'IMPACT DU SYSTEME D

45/114

Cette solution n’est pas raisonnable et n’est pas appropriée dans la mesure où en cas de

responsabilités prouvées, les tiers responsables seront poursuivis par l’ONIAM mais pas par

la CPAM qui restera sans recouvrement.

En rendant cette solution, la Cour de cassation a fait une interprétation stricte de la loi en

précisant qu’en cas d’infection nosocomiale grave « seule l’ONIAM est tenu d’indemniser les

victimes, et que l’établissement de santé dans lequel l’infection a été contracté peut

uniquement en cas de faute, consistant notamment en un manquement à ses obligations

réglementaires en matière de lutte contre les infections nosocomiales, être appelé à indemnisé

l’ONIAM ». Ainsi, l’ONIAM bénéficierait d’une exclusivité d’indemnisation.

Si la Cour de cassation n’interpréterait pas les textes comme elle le fait, et si elle considérait

qu’en matière d’infection nosocomiale grave la CPAM pourrait avoir les mêmes droits que

l’ONIAM alors la CPAM aurait à prouver qu’il y a un manquement caractérisé à la

réglementation en matière de lutte contre les infections nosocomiales. Les moyens annexés à

la décision du 4 avril 2014 rendue par la Cour de cassation évoquant les moyens prétendus

d’une des parties soulèvent cette solution.

En effet, on pourrait considérer qu’en vertu de l’article L376-1 du Code de la sécurité sociale,

les tiers payeurs peuvent exercer leur recours subrogatoire contre l’établissement de santé en

sa qualité de responsable des dommages résultant d’infections nosocomiales. En effet, cet

article indique que «lorsque, sans entrer dans les cas régis par les dispositions législatives

applicables aux accidents du travail, la lésion dont l'assuré social ou son ayant droit est atteint

est imputable à un tiers, l'assuré ou ses ayants droit conserve contre l'auteur de l'accident le

droit de demander la réparation du préjudice causé, conformément aux règles du droit

commun, dans la mesure où ce préjudice n'est pas réparé par application du présent livre. Les

caisses de sécurité sociale sont tenues de servir à l'assuré ou à ses ayants droit les prestations

prévues par le présent livre, sauf recours de leur part contre l'auteur responsable de l'accident

dans les conditions ci-après. Les recours subrogatoires des caisses contre les tiers s'exercent

poste par poste sur les seules indemnités qui réparent des préjudices qu'elles ont pris en charge,

à l'exclusion des préjudices à caractère personnel. » C’est sur le fondement de cet article que

les juges de première instance ont prévu une possible action subrogatoire des tiers payeurs

lorsque le dommage est indemnisé au titre de l’article L1142-1-1 du Code de la santé publique.

De plus, « il se déduirait ainsi des dispositions combinées des articles L1142-17 et L1142-21

al 2 du code de la santé publique relatives au recours subrogatoire ouvert à l’ONIAM que

lorsque l’indemnisation de la victime d’une infection nosocomiale est assurée au titre de la

solidarité nationale, le législateur a entendu que la responsabilité de l’établissement de santé

dans lequel l’infection a été contractée ne puisse être recherchée par l’ONIAM et les tiers

Page 46: LE RECOURS DES TIERS PAYEURS ET L'IMPACT DU SYSTEME D

46/114

payeurs subrogés dans les droits de la victime que dans le cas où le dommage est imputable à

une faute de l’établissement de santé ».

Cette solution contraindrait alors seulement à la suppression de l’action récursoire et donc à la

disparition du recours propre et autonome des tiers payeurs qui se fondait sur l’article L376-1

du Code de la sécurité sociale. Cependant, la Cour déciderait de retenir la possibilité d’un

recours subrogatoire, la CPAM subrogeant les droits de la victime. Cette subrogation serait

possible en cas de faute prouvée de l’établissement de soins. De ce fait, les tiers payeurs

disposeraient d’une action subrogatoire au même titre que l’ONIAM.

Cette solution reviendrait à ne pas tenir compte de l’exclusivité implicite donnée à l’ONIAM

concernant l’indemnisation des victimes, et donc de rendre possible une indemnisation des

tiers responsables. En effet, l’action subrogatoire dans les droits des victimes ne

fonctionnerait pas si était revendiqué l’exclusivité de l’indemnisation des victimes par

l’ONIAM. L’action récursoire, du fait qu’elle n’est pas prévue par le législateur, au bénéfice

de la CPAM aurait disparu, retenant seulement la subrogation. Ainsi, cette disparition serait

dans le but de limiter au maximum les recours possibles des tiers payeurs contre le tiers

responsable, mais le maintien de l’action subrogatoire compenserait l’absence de l’action

récursoire. Les tiers payeurs ne pourraient exercer leur recours qu’en cas de faute de

l’établissement, c’est-à-dire dans les mêmes conditions que l’ONIAM.

Il conviendra d’attendre l’arrêt de la Cour d’appel de renvoi dans cette affaire, afin de savoir

si cette seconde position peut être adoptée au bénéfice des tiers payeurs. En effet, cette

dernière resterait une alternative plus acceptable pour les Caisses afin de leur donner une

possibilité de recouvrir leur créance au même titre que l’ONIAM. Toutefois, si la logique des

textes législatifs est suivie, alors la solution de la Cour de cassation se confirmera.

S’est également posée la question de savoir si cet arrêt faisait l’objet d’un revirement de

jurisprudence où s’il s’agissait simplement d’un cas d’espèce, dont une rectification aurait été

possible à l’avenir.

L’arrêt rendu par la première chambre civile de la Cour de cassation le 4 juin 201431 conforte

la position de la décision d'avril 2014 concernant la non reconnaissance de l'action récursoire

des tiers payeurs, en prévoyant « qu'aucun des textes susvisés ne confère aux tiers payeurs

d'action récursoire envers l'établissement de santé au titre des sommes qu'elles ont versées à

leur assuré ou pour son compte». Ainsi, cet arrêt confirme la décision du précédent arrêt en

rappelant que les tiers payeurs n'ont pas ce droit à l'action récursoire, ce qui revient à appuyer

la décision du 4 avril 2014 de la Cour de cassation.

31 Cass, civ 1, 4 juin 2014 : annexe n°18

Page 47: LE RECOURS DES TIERS PAYEURS ET L'IMPACT DU SYSTEME D

47/114

Cette absence de recours pour les tiers payeurs en matière d'infection nosocomiale grave

contre le responsable découlerait de la loi About du 30 décembre 2002 qui tendrait à instaurer

une indemnisation par l’ONIAM indépendamment d'une faute de l’établissement de soin et

donc confère un recours possible que par ce dernier si une faute est prouvée. Il mettrait donc

les tiers payeurs dans une situation de non recours engendrant une déresponsabilisation de

l’établissement de soins pour une partie de la créance.

B- L’émergence d’un transfert de la responsabilité médicale vers la solidarité nationale

Le régime de la responsabilité médicale a fait l’objet d’un mouvement législatif et

jurisprudentiel en faveur des assureurs, délaissant totalement les droits des tiers payeurs (1).

Les tiers payeurs disposaient antérieurement d'une action récursoire, cependant la possibilité

d'avoir recours à cette action semblerait avoir été supprimée par les juges (2). On peut penser

ainsi que le domaine médical tendrait vers une déresponsabilisation des acteurs de santé et

donc de leur assureur (3).

1- La réforme législative de 2002 en faveur des assureurs

Avant l’entrée en vigueur de la loi de 2002, la responsabilité médicale était fondée sur un

régime de responsabilité pour faute avec quelques cas admis par la jurisprudence

administrative qui répondaient d’une responsabilité sans faute. Ces derniers entrainaient une

indemnisation systématique des victimes par les acteurs de santé. Cela impliquait pour les

acteurs de santé de prouver leur non responsabilité dans l’accident.

Le régime de responsabilité pour faute n’était pas clairement admis laissant place à une

possibilité de responsabilité sans faute dans certains cas 32 en faveur des victimes et des

recours possibles des payeurs. Cependant la loi Kouchner du 4 mars 2002 a mis fin à

l’ambiguïté du régime applicable et a imposé un régime de responsabilité pour faute.

De ce fait, la loi de 2002 a consacré, de manière générale, le principe de la responsabilité

civile médicale fondée sur la faute par l’affirmation que les professionnels de santé et les

établissements de soins ne sont responsables « des conséquences dommageables d’actes de

prévention, de diagnostic ou de soins qu’en cas de faute ». On est donc passé à un régime de

responsabilité pour faute, hormis les cas où leur responsabilité est engagée en raison du défaut

de produit de santé, ou en cas d’infection nosocomiale.

En effet, s’agissant de l’indemnisation des infections nosocomiales, le régime

32 Cf introduction

Page 48: LE RECOURS DES TIERS PAYEURS ET L'IMPACT DU SYSTEME D

48/114

d’indemnisation était fondé sur une présomption de responsabilité. Ainsi, les acteurs de santé

devaient, eux-mêmes, prouver leur non responsabilité dans l’accident afin de ne pas engager

leur responsabilité.

Toutefois, la loi du 30 décembre 2002 a abrogé cette exception concernant son régime de

responsabilité applicable et a ainsi prévu que la responsabilité concernant les victimes

d'infections nosocomiales est basée sur un régime de responsabilité pour faute en vertu de

l'article L1142-1-1 du Code de la santé publique.

De surcroit, par cette implantation de la faute, la responsabilité des acteurs de santé sera

davantage plus difficile à engager dans la mesure où ce n’est pas aux établissements de soins

et professionnels de santé de prouver qu'ils n'ont pas commis de fautes mais ce sera à la

victime, à l'ONIAM, et à la CPAM de prouver cette faute pour pouvoir engager leur

responsabilité et ainsi exercer un recours contre les responsables.

La preuve à charge aux demandeurs est donc favorable aux acteurs de santé et donc à leur

assureur car leur responsabilité sera moins engagée. La charge de la preuve a été imposée de

cette manière par les lois de 2002 en raison d’une crise assurantielle apparue après l’adoption

de la loi Kouchner. Les difficultés d’assurance sont apparues en raison du développement

important du contentieux médical et d’une jurisprudence de plus en plus défavorable aux

professionnels de santé. Les assureurs ont menacé de déserter le marché de l’assurance de

responsabilité des professionnels et établissement de santé et ont soutenu que la loi Kouchner

avait alourdi le coût de responsabilité des professionnels et établissement de santé. Ce

dessaisissement des contrats d’assurance des assureurs aurait pour graves conséquences de

laisser des acteurs de santé sans assurances, ce qui entrainerait un arrêt obligatoire de leur

activité. On a assisté à une fronde des assureurs de responsabilité et à un désengagement de

leur part. Face aux difficultés assurancielles des praticiens et établissements de soins, un

aménagement du texte est revendiqué par les assureurs. Le gouvernement a laissé l’initiative

aux parlementaires, c’est donc par une proposition de loi que le renouveau de la loi du 4 mars

2002 est envisagé.

En effet, le 25 octobre 2002, le député Nicolas About déposait une proposition de loi «relative

à la responsabilité médicale». C’est ce texte qui a abouti à la loi du 30 décembre 2002. Les

motifs de la réforme concernaient le retrait de plusieurs compagnies d’assurance du marché de

la responsabilité civile médicale qui priverait de nombreux médecin libéraux, des cliniques

privées et certains hôpitaux publics de la possibilité de s’assurer. La situation était devenue

urgente.

Le 7 octobre 2002, le ministre de la santé, de la famille et des Personnes handicapées,

Monsieur Mattéi, a annoncé qu’une modification de la loi du 4 mars 2002 apparaissait

Page 49: LE RECOURS DES TIERS PAYEURS ET L'IMPACT DU SYSTEME D

49/114

nécessaire afin d’inciter les assureurs à revenir sur le marché de la responsabilité civile

médicale.

La proposition de loi déposée par le président Nicolas About visait à apporter des réponses à

cette crise. Elle a notamment préféré la notion de faute à celle de faute lourde, et elle a créé un

mécanisme d’information de l’ONIAM et du Parlement sur les infections nosocomiales.

La loi du 30 décembre 2002, loi About, a permis de faire couvrir les infections nosocomiales

les plus graves par la solidarité nationale. En effet, elle a introduit l’article L1142-1-1 du Code

de la santé publique qui a pour effet de faire supporter à la collectivité les dommages résultant

d’une infection nosocomiale en cas de décès de la victimes ou si le taux d’incapacité

permanente à son intégrité physique ou psychique est supérieur à 25% au regard d’un barème

fixé par décret.

Ainsi, les établissements de santé et leur assureur n’interviendront que lorsque l’infection

nosocomiale a causé un taux d’incapacité permanente partielle inférieure à 25%, et que les

établissements n'ont pas fait la preuve d'une cause étrangère.

L’action des tiers payeurs a été davantage limitée par cette évolution législative concernant le

régime de responsabilité médicale, prise en faveur des acteurs de santé et de leur assureur,

mais également par l'interprétation stricte de la loi par les juges tendant à la suppression de

leur action récursoire.

2- La disparition de l’action récursoire pour les Tiers payeurs amorcée depuis avril 2014 ?

Les tiers payeurs disposent d’une action subrogatoire en recouvrement de leur créance en

vertu de l’article L376-1 du Code de la sécurité sociale. Or, on pouvait considérer que l’action

subrogatoire admise pour la CPAM était une action récursoire déguisée dans la mesure où

l’article L376-1 du Code de la sécurité sociale n’a toujours fait référence qu’à un droit de

recours subrogatoire. En effet, bien que le terme subrogation était retenu par les dispositions

de l’article L. 376-1 du code de la sécurité sociale, l’action possible des caisses ne relevait pas

du véritable mécanisme de la subrogation. Ce dernier a ainsi pu considérer que cette action

n’était pas liée à l’éventuelle action engagée par la victime ou ses ayants droits. En effet, il

était admis que la Caisse primaire pouvait exercer un recours alors même que la victime avait

fait le choix de ne pas l’exercer. La subrogation n’était donc pas exercée totalement à ce titre.

Cette dernière action tenait donc plus a priori du régime de l’action récursoire, où le subrogé

exerçait un droit qui lui était propre.

Page 50: LE RECOURS DES TIERS PAYEURS ET L'IMPACT DU SYSTEME D

50/114

L'action par laquelle les caisses entendent obtenir le remboursement par le responsable d'un

dommage corporel des dépenses qu'elles avaient exposées en faveur de la victime était donc

parfois autonome et indépendante de celle de la victime ou de ses ayants droits.

Or, par cet arrêt de 2014, les juges ont voulu rectifier ce mécanisme en ne permettant plus aux

tiers payeurs d’exercer un recours systématique envers les tiers responsables alors même que

la subrogation n’était pas possible. De ce fait, l’arrêt du 9 avril 2014 indique que l’action

récursoire ne peut être un droit pour les tiers payeurs dans la mesure où cette action n’est pas

conférée par les textes législatifs.

Ces différents changements passant notamment par la suppression de l'action récursoire des

tiers payeurs sont la conséquence des évolutions législatives.

En effet, le législateur a voulu favoriser les assureurs par la création des lois Kouchner et

About de 2002 afin de permettre une assurance effective à chaque professionnel de santé.

Cependant, le législateur en admettant ces dispositions n’a pas pris en compte l’importance

des tiers payeurs et leur besoin d’un recours efficace. En effet, la loi n’étant pas claire sur un

éventuel recours possible ou non des tiers payeurs, les juges ont dû interpréter ce que le

législateur a voulu dire. Ainsi, la jurisprudence a fait une interprétation stricte de la loi au

détriment des tiers payeurs en précisant que l’article L376-1 du Code de la sécurité sociale ne

fait référence qu’à une action subrogatoire et non à une action récursoire, ce qui a entrainé la

suppression de cette action récursoire auparavant admise pour les tiers payeurs. Egalement,

cette stricte interprétation de la loi a été appliquée concernant l’article L1142-1-1 du Code de

la santé publique33 qui a insisté sur le caractère exclusif de l’indemnisation par l’ONIAM.

Cette exclusivité a contraint la victime d’une infection nosocomiale à avoir un droit de

recours seulement contre l’ONIAM et non contre les tiers responsables, les tiers payeurs n’ont

donc pu exercer leur recours subrogatoire dans les droits des victimes.

Cette interprétation est dans l’intérêt des assureurs et de l’ONIAM mais reste illégitime pour

les Caisses qui ne vont pas pouvoir bénéficier de la prise en charge de leur créance.

Cette solution jurisprudentielle d’avril 2014 paraît incohérente et injuste vis-à-vis des tiers

payeurs en ce que l’ONIAM serait favorisé dans son recours. Pour quelles raisons l’ONIAM

est-il davantage considéré que la CPAM ? L'Office peut exercer un recours subrogatoire et

récursoire contre les tiers responsables en vertu de l'article L1141-17 et L1141-21 du Code de

la santé publique, tout en apportant la preuve d’une faute de l’établissement de soin. En effet,

ce recours de l’ONIAM est fondé sur un régime de responsabilité pour faute. Cependant, pour

les tiers payeurs, l’action récursoire n’étant pas invoquée par les textes, seule l’action

33 Fait référence aux victimes d’infection nosocomiale

Page 51: LE RECOURS DES TIERS PAYEURS ET L'IMPACT DU SYSTEME D

51/114

subrogatoire en vertu de l’article L376-1 du Code de la sécurité sociale leur est conférée.

Toutefois, ils perdent toute possibilité de recours car leur droit à l’action subrogatoire ne peut

être mise en œuvre. Or, il serait logique d'avoir une possibilité de recours similaire à celui de

l'ONIAM dans la mesure où tous deux exercent leur indemnisation au titre de la solidarité

nationale. La responsabilité devrait donc être recherchée systématiquement afin que l’ONIAM

et la CPAM, exerçant leur action au même titre, puissent voir leur recours s’aligner34.

Ce qui est certain c’est que le législateur tend à ce que le régime du recours de la CPAM suive

celui de l’ONIAM (voir soit moins valorisé), car il parait difficile pour lui de penser qu’il

pourrait en être différemment pour la CPAM.

Cependant, concernant l’interprétation du législateur en défaveur des tiers payeurs, on peut

noter que cela n’a pas toujours été le cas. En effet, si on se penche sur l’indemnisation des

conséquences dues à une contamination par le VHC, on s’aperçoit que le Conseil d’Etat a

rendu une solution favorable aux tiers payeurs dans la mesure où le législateur avait commis

une erreur lorsqu’il a affirmé «substitué l’ONIAM à l’EFS », tant à l’égard des victimes que

des tiers payeurs. De ce fait, il a reconnu le rôle de responsable à l’ONIAM. C’est pourquoi,

le Conseil d’Etat a estimé qu’il était possible pour les tiers payeurs d’exercer un recours

contre l’ONIAM de manière très exceptionnelle. En conséquence, par cette interprétation, la

jurisprudence a rendu un avis assez favorable aux tiers payeurs, lui laissant la possibilité d’un

recours.

Auparavant, les juges faisait en sorte de ne pas laisser les tiers payeurs sans recours possible

au vue des prestations versées à la victime car ils n’ont pas à supporter la charge de la

responsabilité. Les juges réinterprétaient ainsi la loi de manière à ce que les tiers payeurs aient

un recours. Néanmoins, en avril 2014, les juges de la Cour de cassation n’ont pas admis ce

recours créant, de surcroit, un vide juridique.

Il est possible de se demander si le Conseil d’Etat serait plus favorable à la possibilité de

recours des tiers payeurs que la Cour de cassation. En effet, c’est le Conseil d’Etat qui avait

reconnu par son arrêt du 10 octobre 2011 un recours automatique possible des tiers payeurs à

l’encontre d’un établissement de santé sur le fondement de la responsabilité sans faute. Or,

l’arrêt de 2014 a été rendu par la Cour de cassation.

Nous pouvons constater que la Cour de cassation a toujours été plus exigeante que le Conseil

d’Etat en matière d’indemnisation des victimes d'accidents médicaux. En effet, ce dernier a

relevé, antérieurement à la loi de 2002, différents cas de responsabilité sans faute, laissant une

facilité de recours aux payeurs. Cependant la Cour de cassation a toujours eu des réticences à

34Cf moyen annexé à l'arrêt Cass, civ 1, 9 avril 2014

Page 52: LE RECOURS DES TIERS PAYEURS ET L'IMPACT DU SYSTEME D

52/114

admettre des cas de responsabilité sans faute.

C’est pourquoi, il conviendra d’attendre la réponse du Conseil d’Etat concernant ce type de

recours pour réaffirmer doublement cette impossibilité de recours pour les tiers payeurs

concernant l’indemnisation des victimes d’infection nosocomiales. Cependant, il faut noter la

confirmation de la Cour de cassation par un arrêt du 4 juin 2014 de sa position concernant

l’inexistence d’un recours récursoire des tiers payeurs.

Il était affirmé dans la loi du 4 mars 2002 que l’ONIAM était destiné à réparer les accidents

médicaux non fautifs, et qu’il était envisagé une présomption de responsabilité envers les

établissements de soins.

De ce fait, le législateur avait établi un règlement stricte du recours à l’ONIAM et donc à la

solidarité nationale, en ce qu’il n’intervenait que lorsqu’il y avait une absence de responsable.

Ce strict encadrement du recours à la solidarité nationale avait pour but d’éviter une dérive

dangereuse conduisant à abuser de l’intervention de l’ONIAM.

Par la modification de la loi, l’intervention de l’ONIAM dépend aujourd’hui de la gravité de

l’infection nosocomiale. Or, l’infection nosocomiale révèle généralement une faute des

professionnels de santé, ce qui amène à une déresponsabilisation de ceux-ci.

3- Vers un phénomène de déresponsabilisation des acteurs de santé

Cette loi de décembre 2002 a fixé un taux d’IPP de 25% pour permettre l’intervention de

l’ONIAM des victimes d’infection nosocomiale et donc a approuvé le désengagement des

assureurs. Les conséquences dommageables les plus rares mais aussi les plus graves, et ainsi

les plus coûteuses, ne sont donc plus prises en charge par l’assureur de responsabilité mais par

l’ONIAM au titre de la solidarité nationale. L’intervention de l’ONIAM lorsqu’il agit en cas

d’infection nosocomiale est une intervention principale, et non subsidiaire.

On est face à un paradoxe assez déconcertant dans la mesure où plus le dommage résultant

d’une infection contractée au cours d’une hospitalisation est grave, moins l’assureur de

responsabilité de la clinique est tenu de réparer le dommage.

Les fonds gérés par l’ONIAM servent donc non seulement à secourir les victimes d’accidents

médicaux qui ne disposent d’aucune action en responsabilité mais aussi à secourir l’assureur

de responsabilité qui perçoit pourtant des primes en contrepartie de la garantie due à son

assuré.

Afin de responsabiliser au minimum les intervenants, diverses dispositions sont prévues dans

Page 53: LE RECOURS DES TIERS PAYEURS ET L'IMPACT DU SYSTEME D

53/114

l’article 1er de la réforme. La loi a prévu un recours subrogatoire contre le responsable mais

celui-ci est subordonné à la « preuve d’une faute de l’assuré à l’origine du dommage,

notamment le manquement caractérisé aux obligations posées en matière de lutte contre les

infections nosocomiales » selon l’article L1142-17 al 7 du Code de la santé publique.

Ainsi, il a été vu auparavant que seule l’ONIAM a la possibilité d’exercer ce recours

subrogatoire, ou récursoire à l’encontre du tiers responsable. En effet, l’ONIAM va pouvoir

exercer un recours dans le cas d’indemnisation de victimes d’infection nosocomiale contre le

tiers responsable s’il prouve un manquement de l’établissement à son obligation. Or,

l’indemnisation par le tiers responsable portera sur l’indemnité versée à la victime déduction

faites des prestations versées par la Caisse d’assurance maladie.

La Cour de cassation par son arrêt du 9 avril 2014, a décidé que les tiers payeurs n’avaient pas

de droit de recours à l’encontre du tiers responsable dans le cadre d’une indemnisation des

victimes d’infection nosocomiale, et de son assureur. En effet, l’action subrogatoire n’était pas

envisageable dans la mesure où la victime ne peut exercer cette action contre l’ONIAM, et

l’action récursoire n’est pas possible du fait qu’elle n’a pas été envisagée par le législateur.

La carence de l’action récursoire des tiers payeurs afin de recouvrer leur créance pourrait être

étendue à des cas d’intervention de l’ONIAM autres que celui des victimes d’infection

nosocomiale grave, telles que l’indemnisation par l’ONIAM des dommages survenus à la

suite de vaccinations obligatoires, de contamination par le VIH ou le VHC ayant pour origine

une transfusion sanguine ou un produit dérivé du sang, de mesures sanitaires d’urgence, d’une

contamination par l’hormone de croissance extractive par la voie contentieuse, ou du

benfluorex.

En effet, il est à noter que lorsque l’ONIAM intervient dans le cadre de ces nouvelles

missions, il est saisi à titre principal, comme c’est le cas de l’indemnisation des victimes

d’infection nosocomiale. On pourrait donc se demander si l’action récursoire se verrait

disparaitre définitivement du fait de l’absence textuelle de ce recours concernant ces

nouveaux cas ? De plus, si cette notion est appliquée aux autres cas d’intervention de

l’ONIAM, l’Office intervenant à titre principal, les tiers payeurs se verrait-il interdire leur

recours subrogatoire au même titre que dans le cas d’une infection nosocomiale ? Ou cette

impossibilité de recours des tiers payeurs n’est-elle pas propre à l’indemnisation en cas

d’infection nosocomiale, permettant d’épargner les autres cas d’intervention de l’ONIAM ?

Page 54: LE RECOURS DES TIERS PAYEURS ET L'IMPACT DU SYSTEME D

54/114

Cette déresponsabilisation en matière d’infection nosocomiale, n’entrainerait-elle pas les

autres cas d’intervention de l’ONIAM dans le même sens ?

Ces questions resteront en suspend jusqu’à une nouvelle jurisprudence sur les autres cas où

intervient l’ONIAM répondant à cette situation.

En outre, la Caisse primaire d’assurance maladie ne pouvant pas recouvrer sa créance

lorsqu’est indemnisée une victime d’une infection nosocomiale, cette partie de créance qui

correspond aux prestations versées et à versées à la victime, ne sera pas remboursée par le

tiers responsable. Ainsi, les établissements de santé et leurs assureurs seront exonérés du

recouvrement de cette créance. Ce principe contribue alors à alimenter ce mouvement de

« déresponsabilisation de la matière médicale ».

Ce mémoire de fin d'étude a eu pour objectif d'expliciter les facultés de recours des tiers

payeurs dans le cadre d'une indemnisation des victimes d'accidents médicaux au titre de la

solidarité nationale et de savoir dans quelles mesures peut-on admettre une limitation récente

de l'action en recouvrement des tiers payeurs.

Malgré une réunion du 4 septembre 2013 imposant à la Caisse primaire de réorganiser leur

source de recouvrement vers les accidents médicaux graves, les juges et le législateur n'ont

pas été dans ce sens. La CPAM ne peut donc satisfaire à cet objectif régional rendu impossible

par les juges. En effet, la Cour de cassation dans un arrêt du 9 avril 2014 a interprété de

manière très stricte la loi en supprimant totalement l'action récursoire des tiers-payeurs

(auparavant fondée sur l'article L376-1 du Code de la sécurité sociale). N'ayant plus la

possibilité de ce recours, les tiers-payeurs restent sans recouvrement dans certains cas

d'accidents médicaux, notamment concernant les victimes d'infection nosocomiale entrainant

un vide juridique pour les Caisses primaires. Cette interprétation de la loi par les juges va

ainsi amené à se poser question sur le recouvrement des autres cas d'accidents médicaux

graves où auparavant un recours des tiers-payeurs était possible sur le fondement de la faute.

En raison d'une crise assurantielle évidente, le risque de cette limitation serait de voir,

progressivement, une responsabilité médicale disparaître en cas d'accident médical grave,

laissant à la solidarité nationale le soin de porter tout le poids d'une grave erreur médicale.

Page 55: LE RECOURS DES TIERS PAYEURS ET L'IMPACT DU SYSTEME D

55/114

ANNEXES

Page 56: LE RECOURS DES TIERS PAYEURS ET L'IMPACT DU SYSTEME D

56/114

Listes documents ANNEXES :

Document n°1 : L’évolution jurisprudentielle de la responsabilité médicale

Document n°2 : L'indemnisation et les recours possibles de l'ONIAM et des tiers-

payeurs dans le cadre d'un accident médical

Document n°3 : Schéma de la procédure CRCI

Document n°4 : Le rôle de l’ONIAM

Document n°5 : Tableau récapitulatif : les missions de l’ONIAM

Document n°6 : Cass, civ, 20 mai 1936 (arrêt Mercier)

Document n°7 : CA adm de Lyon, 20 décembre 1990 (Consorts Gomez)

Document n°8 : CE, 9 avril 1993 (Bianchi)

Document n°9 : Avis Coppola CE, 22 janvier 2010

Document n°10 : Avis CE, 17 septembre 2012

Document n°11 : Avis CE, 10 octobre 2011

Document n°12 : Avis CE, 18 mai 2011

Document n°13 : L’évolution de l’indemnisation des victimes d’infection nosocomiale

Document n°14 : CE, 9 décembre 1988 (Cohen)

Document n°15 : Cass, 29 juin 1999

Document n°16 : CE, 13 juillet 2007

Document n°17 : Cass, civ 1, 9 avril 2014

Document n°18 : Cass, civ1, 4 juin 2014

Page 57: LE RECOURS DES TIERS PAYEURS ET L'IMPACT DU SYSTEME D

57/114

Document n°1

L’évolution jurisprudentielle de la responsabilité médicale

Cour de cassation Conseil d’Etat

Avant la réforme de

2002 (lois

KOUCHNER et

ABOUT)

Régime de responsabilité pour

faute (médecin avait une

obligation de moyen) : Arrêt

Mercier de la Ccass, 1936

Cour d’appel administrative,

20/12/1990, Gomez : la

jurisprudence a créé des cas de

responsabilité sans faute.

La Cour de cassation a refusé de

consacrer une responsabilité sans

faute des professionnels de santé.

Cependant, elle a parfois accepté

de créer des obligations de

sécurité de résultat. Dans un arrêt

Bonicci, de 1936, elle a posé un

principe de présomption de

responsabilité dans les cas

d’infections nosocomiales.

Régime de responsabilité sans

faute du médecin

A admis un régime de

responsabilité sans faute de

l’aléa thérapeutique (CE,

Bianchi, 1993)

Avec la loi du 4 mars 2002

(Loi KOUCHNER) :

réforme du droit de la

responsabilité médicale

Création de l’article L1142-1 du Code de la santé publique :

responsabilité pour faute (à l’exception des cas d’infections

nosocomiales où une présomption de responsabilité est effectuée).

Concernant le cas d'infection nosocomiale : évolution de

l'indemnisation par la loi About du 30 décembre 2002 avec la

création de l'article L1142-1-1 du Code de la santé publique →

impose un régime de responsabilité pour faute.

Création de l’ONIAM (Office national d'indemnisation des

accidents médicaux) dans le but d’indemniser les victimes

d’accidents médicaux au titre de la solidarité nationale.

Source : inspiré site www.hcsp.fr

Page 58: LE RECOURS DES TIERS PAYEURS ET L'IMPACT DU SYSTEME D

58/114

Document n°2

L'indemnisation et les recours possibles de l'ONIAM et des tiers-payeurs dans le cadre d'un accident médical depuis les lois « Kouchner » et « About » de 2002

Faute du médecin, clinique, hôpital

Aléa thérapeutique Infection nosocomiale

Préjudices

Tout préjudice Séquelles > 24% arrêt d'activité > 6 mois

Séquelles < (ou égales) à 24%

Séquelles < (ou égales) à 25%

Séquelles > à 25% ou décès

Indemnisation

Indemnisation par l'assureur du médecin, clinique, centre hospitalier

Indemnisation par l'ONIAM

Pas d'indemnisation

Indemnisation par l'assureur de l'établissement de soin, sauf si prouve la cause étrangère. Si preuve cause étrangère + conditions de solidarité nationale réunies 35 : indemnisation par ONIAM

Indemnisation par l'ONIAM

Si refus par l'assureur d'indemniser, alors l'ONIAM interviendra.

Recours de l'ONIAM

Si intervient l'ONIAM : Recours subrogatoire de l'ONIAM contre l'assureur du médecin, clinique, centre hospitalier

Pas de recours car pas de tiers responsable

Pas de recours car l'ONIAM n'intervient pas

Pas de recours car pas de tiers responsable.

Recours subrogatoire ou récursoire de l'ONIAM en cas de faute d'un tiers responsable

Recours des tiers payeurs

Recours subrogatoire ou récursoire des tiers – payeurs contre l'assureur du tiers responsable.

Pas de recours car pas de tiers responsable

Pas de recours car pas de tiers responsable

Recours subrogatoire contre assureur de l'établissement de soin si n'apporte pas preuve cause étrangère.

Pas de recours possible des tiers-payeurs (depuis arrêt de la Cour de cassation du 9 avril 2014)

Source : inspiré du site médiam CPAM

35conséquences anormales au regard de l’état de santé du patient et seuil de gravité IPP au plus égal à 25 %, ou ITT 6 mois consécutifs ou non consécutifs sur une période de 12 mois, ou inaptitude à l’exercice de la profession, ou troubles particulièrement graves, y compris économique, dans les conditions d’existence

Page 59: LE RECOURS DES TIERS PAYEURS ET L'IMPACT DU SYSTEME D

59/114

Document n°3 Schéma de la procédure CRCI

Page 60: LE RECOURS DES TIERS PAYEURS ET L'IMPACT DU SYSTEME D

60/114

Document n°4

Le rôle de l'ONIAM

Page 61: LE RECOURS DES TIERS PAYEURS ET L'IMPACT DU SYSTEME D

61/114

Page 62: LE RECOURS DES TIERS PAYEURS ET L'IMPACT DU SYSTEME D

62/114

Document n°5

Tableau récapitulatif : Les missions de l’ONIAM

*Document obsolète concernant l’indemnisation des victimes d’infection nosocomiale où ce n’est plus un régime

d’indemnisation fondé sur la responsabilité mais un régime fondé sur la gravité (cf. annexe n°2). Le recours de l’ONIAM se

base sur un régime de responsabilité pour faute et celui des tiers payeurs est inexistant.

Page 63: LE RECOURS DES TIERS PAYEURS ET L'IMPACT DU SYSTEME D

63/114

Page 64: LE RECOURS DES TIERS PAYEURS ET L'IMPACT DU SYSTEME D

64/114

Page 65: LE RECOURS DES TIERS PAYEURS ET L'IMPACT DU SYSTEME D

65/114

Page 66: LE RECOURS DES TIERS PAYEURS ET L'IMPACT DU SYSTEME D

66/114

Page 67: LE RECOURS DES TIERS PAYEURS ET L'IMPACT DU SYSTEME D

67/114

Document n°6

Arrêt Mercier, Civ 20 mai 1936

LA COUR ;

Sur le moyen unique :

Attendu que la dame Mercier, atteinte d’une affection nasale, s’adressa au docteur Nicolas, radiologue, qui lui fit subir, en 1925, un traitement par les rayons X à la suite duquel se déclara chez la malade une radiodermite des muqueuses de la face ; que les époux Mercier, estimant que cette nouvelle affection était imputable à une faute de l’opérateur, intentèrent contre celui-ci, en 1929, soit plus de trois années après la fin du traitement, une demande en dommages-intérêts pour une somme de 200 000 francs ;

Attendu que le pourvoi reproche à l’arrêt attaqué, rendu par la cour d’appel d’Aix le 16 juillet 1931, d’avoir refusé d’appliquer la prescription triennale de l’art. 638 du code d’instruction criminelle à l’action civile intenté contre le docteur Nicolas par les époux Mercier, en considérant que cette action tenait son origine, non du délit de blessures par imprudence prétendument commis par le praticien, mais du contrat antérieurement conclu entre celui-ci et ses clients et qui imposait au médecin l’obligation de donner « des soins assidus, éclairés et prudents », alors que, d’après le pourvoi, ledit contrat ne saurait comporter une assurance contre tout accident involontairement causé, et que, dès lors, la responsabilité du médecin est fondée sur une faute délictuelle tombant sous l’application des art. 319 et 320 du code pénal et justifiant en conséquence l’application de la prescription triennale instituée par ces textes ;

Mais attendu qu’il se forme entre le médecin et son client un véritable contrat comportant, pour le praticien, l’engagement, sinon, bien évidemment, de guérir le malade, ce qui n’a d’ailleurs jamais été allégué, du moins de lui donner des soins, non pas quelconques, ainsi que parait l’énoncer le moyen du pourvoi, mais consciencieux, attentifs et, réserve faite de circonstances exceptionnelles, conformes aux données acquises de la science ; que la violation, même involontaire, de cette obligation contractuelle, est sanctionnée par une responsabilité de même nature, également contractuelle ; que l’action civile, qui réalise une telle responsabilité, ayant ainsi une source distincte du fait constitutif d’une infraction à la loi pénale et puisant son origine dans la convention préexistante, échappe à la prescription triennale de l’art. 638 du code d’instruction criminelle ;

Attendu que c’est donc à bon droit que la cour d’Aix a pu déclarer inapplicable en l’espèce ladite prescription pénale, et qu’en décidant comme elle l’a fait, loin de violer les textes visés au moyen, elle en a réalisé une juste et exacte application ;

D’où il suit que le moyen n’est pas fondé ; Par ces motifs, rejette.

Page 68: LE RECOURS DES TIERS PAYEURS ET L'IMPACT DU SYSTEME D

68/114

Document n°7

Cour d'Appel administrative de LYON, 20 décembre 1990 – Consorts Gomez Vu le code de la sécurité sociale ; Vu la requête enregistrée le 1er septembre 1989 au greffe de la cour, présentée pour M. et Mme Robert Gomez et M. Serge Gomez demeurant à la Croisette (01800) Meximieux par la SCP Bonnard, Delay, Deygas, Duplot, Guillaumond avocat ; M. et Mme Robert Gomez et M. Serge Gomez demandent à la cour : 1°) d'annuler le jugement en date du 28 juin 1989 par lequel le tribunal administratif de Lyon a rejeté leur demande tendant à ce que les Hospices Civils de Lyon soient condamnés à réparer le préjudice subi par M. Serge Gomez à la suite d'une intervention chirurgicale ; 2°) de condamner les Hospices Civils de Lyon à payer à M. Serge Gomez la somme de 4 293 285,78 francs, à M. et Mme Robert Gomez la somme de 100 000 francs avec intérêts à compter du 28 juin 1984 et capitalisation au 12 juin 1989 et à leur rembourser le montant des frais d'expertise avancés par eux ; Vu les autres pièces du dossier ; Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ; Vu la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ; Vu la décision n° 57 du bureau d'aide judiciaire de la cour en date du 2 avril 1990 ; Vu la décision n° 59 du bureau d'aide judiciaire de la cour en date du 2 avril 1990 ; Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ; Après avoir entendu au cours de l'audience du 17 décembre 1990 où siégeaient : - le rapport de Mme du Granrut, conseiller ; - les observations de Me J. Bonnard avocat de M. Serge Gomez, de M. et Mme Robert Gomez, et de Me Christian Gabolde, avocat des Hospices Civils de Lyon ; - et les conclusions de Mme Haelvoet, commissaire du gouvernement ; Considérant que M. Serge Gomez, alors âgé de 15 ans et demi, qui souffrait d'une cyphose avec des signes traduisant un aspect évolutif de la maladie de Scheuermann, a été hospitalisé à l'hôpital Edouard Herriot le 25 août 1983 pour y subir une intervention dite de Luqué ; qu'à la suite de cette intervention, M. Serge Gomez a présenté des troubles neurologiques graves qui en dépit des soins qui lui ont été prodigués, ont provoqué une paraplégie de la partie inférieure du corps ; que M. Serge Gomez et ses parents, M. et Mme Gomez, demandent réparation aux Hospices Civils de Lyon du préjudice subi du fait des conséquences dommageables de cette complication post-opératoire ; Considérant que l'utilisation d'une thérapeutique nouvelle crée, lorsque ses conséquences ne sont pas encore entièrement connues, un risque spécial pour les malades qui en sont l'objet ; que lorsque le recours à une telle thérapeutique ne s'impose pas pour des raisons vitales, les complications exceptionnelles et anormalement graves qui en sont la conséquence directe engagent, même en l'absence de faute, la responsabilité du service public hospitalier ; Considérant qu'en recourant à la méthode dite de Luqué, le chirurgien qui a pratiqué l'intervention sur la personne de Serge Gomez a mis en oeuvre une technique opératoire nouvelle dont il résulte de l'instruction que les conséquences n'étaient pas encore entièrement connues ; qu'en revanche, il ne résulte pas de l'instruction qu'en dépit de la gravité de l'affection dont souffrait M. Serge Gomez, ses jours aient été en danger ; que les conséquences de cette intervention ont été particulièrement graves et anormales et sont par suite de nature à engager la responsabilité des Hospices Civils de Lyon ; Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. Serge Gomez et M. et Mme Gomez sont fondés à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué le tribunal administratif de Lyon a rejeté leur demande ;

Page 69: LE RECOURS DES TIERS PAYEURS ET L'IMPACT DU SYSTEME D

69/114

Considérant qu'il sera fait une juste appréciation du préjudice subi par les parents de la victime résultant des troubles dans leurs conditions d'existence, en l'évaluant à 50 000 francs ; qu'il convient d'ajouter à cette somme les frais d'aménagement qu'ils ont supportés pour adapter leur logement au handicap de leur fils et dont le montant s'élève à 43 285,78 francs ; Sur les intérêts : Considérant que M. et Mme Gomez ont droit aux intérêts de la somme de 93 285,78 francs à compter du jour de la réception par les Hospices Civils de Lyon de leur demande, soit le 29 juin 1984 ; Considérant que la capitalisation des intérêts a été demandée le 12 juin 1989 ; qu'à cette date il était dû au moins une année d'intérêts ; que dès lors, conformément aux dispositions de l'article 1154 du code civil, il y a lieu de faire droit à cette demande ; Considérant que l'état actuel du dossier ne permet pas à la cour de disposer des éléments d'appréciation nécessaires pour fixer le préjudice subi par M. Serge Gomez ; que notamment la Caisse Primaire d'Assurance Maladie de l'Ain n'a pas produit le décompte des frais à sa charge et consécutifs à l'affection dont souffre la victime ; qu'il lui appartient en conséquence dans le délai de deux mois à dater de la notification du présent arrêt, de fournir, sans qu'il soit besoin d'ordonner l'expertise qu'elle sollicite, toutes précisions chiffrées sur le montant exact de ses débours ; Considérant par ailleurs que M. Serge Gomez bénéficie de l'allocation aux adultes handicapés qui doit s'imputer sur le montant de son indemnité ; qu'il devra en préciser le montant dans le même délai ; DECIDE : Article 1er : L'article 1er du jugement du tribunal administratif de Lyon du 28 juin 1989 est annulé. Article 2 : Les Hospices Civils de Lyon sont déclarés responsables des conséquences dommageables de l'opération subie par M. Serge Gomez le 25 août 1983. Article 3 : Les Hospices Civils de Lyon sont condamnés à payer à M. et Mme Robert Gomez une somme de 93 285,78 francs qui portera intérêt au taux légal à compter du 29 juin 1984 ; les intérêts échus le 12 juin 1989 seront capitalisés à cette date pour produire eux-mêmes intérêts. Article 4 : Il est ordonné un supplément d'instruction aux fins de permettre à la Caisse Primaire d'Assurance Maladie de l'Ain de produire dans le délai de deux mois toutes précisions sur le montant de ses débours et à M. Serge Gomez de fournir à la cour, dans le même délai, le montant de l'allocation aux adultes handicapés qu'il perçoit. Article 5 : Tous droits et conclusions des parties autres que ceux sur lesquels il est statué par le présent arrêt sont réservés ainsi que les frais d'expertise pour y être statué en fin d'instance.

Page 70: LE RECOURS DES TIERS PAYEURS ET L'IMPACT DU SYSTEME D

70/114

Document n°8

Arrêt CE, 9 avril 1993, Bianchi Conseil d’Etat statuant au contentieux N° 69336 Publié au recueil Lebon ASSEMBLEE M. Long, président M. Damien, rapporteur M. Daël, commissaire du gouvernement SCP Waquet, Farge, Hazan, Me Le Prado, Avocat, avocat(s) lecture du vendredi 9 avril 1993 REPUBLIQUE FRANCAISE AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS Vu la décision du 23 septembre 1988 par laquelle le Conseil d’Etat statuant au contentieux a, avant de statuer sur la requête de M. X..., ordonné une expertise à l’effet de déterminer les conditions dans lesquelles a été injecté le 3 octobre 1978, un produit de contraste au patient, préalablement à l’artériographie ; Vu les autres pièces du dossier ; Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d’appel ; Vu l’ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ; Après avoir entendu en audience publique : - le rapport de M. Damien, Conseiller d’Etat, - les observations de la S.C.P. Waquet, Farge, Hazan, avocat de M. Philippe X... et de Me Le Prado, avocat de l’assistance publique à Marseille, - les conclusions de M. Daël, Commissaire du gouvernement ;

Page 71: LE RECOURS DES TIERS PAYEURS ET L'IMPACT DU SYSTEME D

71/114

Sur la responsabilité : Considérant que, par décision du 23 septembre 1988, le Conseil d’Etat statuant au contentieux a rejeté les moyens tirés par M. X... de ce que l’artériographie vertébrale qu’il a subie le 3 octobre 1978 à l’hôpital de la Timone à Marseille n’avait pas été pratiquée par une équipe médicale qualifiée, de ce que le consentement du patient n’avait pas été recueilli et de ce que les soins post-opératoires qu’il a reçus étaient insuffisants ; que ces points ont été définitivement jugés et ne peuvent être remis en cause ; Considérant qu’il ressort du rapport établi à la suite de la nouvelle expertise ordonnée par la décision précitée du Conseil d’Etat sur les conditions dans lesquelles le produit de contraste nécessaire à l’artériographie a été injecté à M. X..., que ce produit n’a joué aucun rôle dans la survenance des troubles apparus après l’examen, qu’il n’existait aucun indice susceptible de faire soupçonner un risque de réaction ou d’hypersensibilité à l’iode et que, si le compte rendu de l’artériographie n’a pu être retrouvé, les constatations faites aussitôt après l’examen permettent de conclure que la dose totale d’iode injectée n’a pas été excessive par rapport aux normes couramment admises à l’époque ; que l’expert retient comme cause vraisemblable de l’accident une occlusion secondaire à l’artériographie, au niveau de l’artère vascularisant la moelle cervicale, provoquée par une petite bulle ou un petit caillot libérés au cours de l’exploration ou de l’évacuation du produit de contraste, constituant un risque inhérent à ce genre d’examen ; qu’il résulte de ces constatations et appréciations de l’expert, qui ne sont pas démenties par les autres pièces du dossier, qu’aucune faute ne peut être relevée dans l’exécution de l’artériographie subie par M. X... ; Considérant, toutefois, que lorsqu’un acte médical nécessaire au diagnostic ou au traitement du malade présente un risque dont l’existence est connue mais dont la réalisation est exceptionnelle et dont aucune raison ne permet de penser que le patient y soit particulièrement exposé, la responsabilité du service public hospitalier est engagée si l’exécution de cet acte est la cause directe de dommages sans rapport avec l’état initial du patient comme avec l’évolution prévisible de cet état, et présentant un caractère d’extrême gravité ; Considérant que le risque inhérent aux artériographies vertébrales et les conséquences de cet acte pratiqué sur M. X... répondent à ces conditions ; que, dès lors, M. X... est fondé à demander l’annulation du jugement attaqué, par lequel le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à la condamnation de l’assistance publique à Marseille ; Sur le préjudice : Considérant qu’il résulte de l’instruction et notamment des rapports d’expertise de première instance, qu’à la suite de l’artériographie qu’il a subie le 3 octobre 1978, M. X..., né le 22 juin 1936, est atteint d’une tétraplégie prédominante aux membres inférieurs, avec syndrome pyramidal et troubles sensitifs, se traduisant par une impotence motrice tant dans la marche qu’au niveau des membres supérieurs, avec accentuation des réflexes ostéo-tendineux ; qu’il souffre de douleurs importantes et résistant à la thérapeutique et de troubles sphinctériens ; qu’il a besoin de l’aide constante d’une tierce personne ; que, toutefois, dans l’évaluation du préjudice indemnisable, il convient de tenir compte de l’état du patient antérieurement à son hospitalisation ; que M. X... présentait, lors de son admission à l’hôpital, des vertiges avec nausées et douleurs cervico-occipitales, une paralysie faciale dont il conserve des séquelles ; que son état de santé l’avait obligé à cesser son travail depuis le début de l’année 1977 ; qu’il sera fait une juste appréciation du préjudice résultant de l’artériographie, en fixant l’indemnité due à M. X... à la somme de 1 500 000 F ; Sur les intérêts :

Page 72: LE RECOURS DES TIERS PAYEURS ET L'IMPACT DU SYSTEME D

72/114

Considérant que M. X... a droit aux intérêts de cette somme à compter du 1er octobre 1982, date de présentation de sa demande ; Considérant que la capitalisation des intérêts a été demandée les 7 juin 1985, 11 septembre 1987, 22 novembre 1991 et 23 novembre 1992 ; qu’à chacune de ces dates, il était dû au moins une année d’intérêts ; que, dès lors, conformément aux dispositions de l’article 1154 du code civil, il y a lieu de faire droit à ces demandes ; Sur les frais d’expertise : Considérant qu’il y a lieu, dans les circonstances de l’espèce, de mettre les frais d’expertise de première instance et d’appel à la charge de l’assistance publique à Marseille ; Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Marseille du 8 novembre 1984 est annulé. Article 2 : L’assistance publique à Marseille est condamnée à verser à M. X... la somme de 1 500 000 F. Cette somme portera intérêts au taux légal à compter du 1er octobre 1982. Les intérêts échus les 7 juin 1985, 11 septembre 1987, 22 novembre 1991 et 23 novembre 1992 seront capitalisés à ces dates pour produire eux-mêmes intérêts. Article 3 : Les frais d’expertise exposés en première instance et en appel sont mis à la charge de l’assistance publique à Marseille. Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté. Article 5 : La présente décision sera notifiée à M. X..., à l’assistance publique à Marseille et au ministre d’Etat, ministre des affaires sociales, de la santé et de la ville.

Page 73: LE RECOURS DES TIERS PAYEURS ET L'IMPACT DU SYSTEME D

73/114

Document n°9

Avis Coppola du Conseil d’Etat, 22 janvier 2010 Les recours subrogatoires des tiers-payeurs, ayant versé des prestations à la victime d’un dommage corporel, ne peuvent être exercés contre l’ONIAM lorsque cet office a pris en charge la réparation de ce dommage au titre de la solidarité nationale. Conseil d’État N° 332716 Publié au recueil Lebon 5ème et 4ème sous-sections réunies M. Arrighi de Casanova, président M. Xavier de Lesquen, rapporteur SCP ROGER, SEVAUX, avocat(s) lecture du vendredi 22 janvier 2010 REPUBLIQUE FRANCAISE AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS Vu l’arrêt du 8 octobre 2009, enregistré au secrétariat du contentieux du Conseil d’Etat le 14 octobre 2009, par lequel la cour administrative d’appel de Marseille, avant de statuer sur la requête de M. Jean-Yves A tendant à l’annulation du jugement du 25 mars 2009 par lequel le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande tendant, d’une part, à l’annulation de la décision du 23 avril 2008 par laquelle l’Office national des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales (l’ONIAM) a rejeté sa demande tendant à l’indemnisation des préjudices qui ont résulté de sa vaccination contre le virus de l’hépatite B, et d’autre part, à la condamnation solidaire de l’Etat et de l’ONIAM à l’indemniser des préjudices qui ont résulté de cette vaccination, a décidé, par application des dispositions de l’article L. 113-1 du code de justice administrative, de transmettre le dossier de cette requête au Conseil d’Etat, en soumettant à son examen les questions suivantes : 1°) L’article L. 3111-9 du code de la santé publique, dans sa rédaction issue de la loi du 9 août 2004, qui prévoit que l’indemnisation assurée par l’ONIAM est due au titre de la solidarité nationale, fait-il obstacle à l’exercice, par les tiers payeurs, d’un recours subrogatoire ‘

Page 74: LE RECOURS DES TIERS PAYEURS ET L'IMPACT DU SYSTEME D

74/114

2°) Dans l’affirmative, l’absence de mise en cause des tiers payeurs est-elle une cause d’irrégularité du jugement ‘ Vu les autres pièces du dossier ; Vu le code de la santé publique ; Vu le code de la sécurité sociale ; Vu l’ordonnance n° 59-76 du 7 janvier 1959 ; Vu la loi n° 85-677 du 5 juillet 1985 ; Vu le code de justice administrative, notamment son article L. 113-1 ; Après avoir entendu en séance publique : - le rapport de M. Xavier de Lesquen, Maître des Requêtes, - les observations de la SCP Roger, Sevaux, avocat de l’Office national d’indemnisation des accidents médicaux, des affectations iatrogènes et des infections nosocomiales, - les conclusions de Mme Catherine de Salins, rapporteur public ; La parole ayant été à nouveau donnée à la SCP Roger, Sevaux, avocat de l’Office national d’indemnisation des accidents médicaux, des affectations iatrogènes et des infections nosocomiales ; REND L’AVIS SUIVANT

Aux termes du premier aliéna de l’article L. 3111-9 du code de la santé publique : Sans préjudice des actions qui pourraient être exercées conformément au droit commun, la réparation intégrale des préjudices directement imputables à une vaccination obligatoire pratiquée dans les conditions mentionnées au présent chapitre, est assurée par l’Office national d’indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales institué à l’article L. 1142-22, au titre de la solidarité nationale . En vertu des dispositions de ce dernier article, l’Office national d’indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales (ONIAM) est un établissement public à caractère administratif de l’Etat, chargé de l’indemnisation, au titre de la solidarité nationale, des dommages occasionnés par la survenue d’un accident médical, d’une affection iatrogène ou d’une infection nosocomiale ainsi que des autres indemnisations qui lui incombent en

Page 75: LE RECOURS DES TIERS PAYEURS ET L'IMPACT DU SYSTEME D

75/114

vertu de la loi, dont la réparation des dommages directement imputables à une vaccination obligatoire en application de l’article L. 3111-9 précité. L’offre d’indemnisation que l’office adresse à la victime ou à ses ayants droit indique, en application du quatrième alinéa de l’article L. 3111-9 qui reprend, s’agissant de la réparation des dommages directement imputables à une vaccination obligatoire, les dispositions du deuxième alinéa de l’article L. 1142-17 du code de la santé publique applicables à l’office, l’évaluation retenue, pour chaque chef de préjudice ainsi que le montant des indemnités qui reviennent à la victime, ou à ses ayants droit, déduction faite des prestations énumérées à l’article 29 de la loi n° 85-677 du 5 juillet 1985 précitée, et plus généralement des indemnités de toute nature reçues ou à recevoir d’autres débiteurs du chef du même préjudice . Aux termes des deux premiers alinéas de l’article L. 376-1 du code de la sécurité sociale : Lorsque, sans entrer dans les cas régis par les dispositions législatives applicables aux accidents du travail, la lésion dont l’assuré social ou son ayant droit est atteint est imputable à un tiers, l’assuré ou ses ayants droit conserve contre l’auteur de l’accident le droit de demander la réparation du préjudice causé, conformément aux règles du droit commun, dans la mesure où ce préjudice n’est pas réparé par application du présent livre. / Les caisses de sécurité sociale sont tenues de servir à l’assuré ou à ses ayants droit les prestations prévues par le présent livre, sauf recours de leur part contre l’auteur responsable de l’accident dans les conditions ci-après . Aux termes, par ailleurs, du I de l’article 1er de l’ordonnance du 7 janvier 1959 relative aux actions en réparation civile de l’Etat et de certaines autres personnes publiques : I. - Lorsque le décès, l’infirmité ou la maladie d’un agent de l’Etat est imputable à un tiers, l’Etat dispose de plein droit contre ce tiers, par subrogation aux droits de la victime ou de ses ayants droit, d’une action en remboursement de toutes les prestations versées ou maintenues à la victime ou à ses ayants droit à la suite du décès, de l’infirmité ou de la maladie . En vertu de l’article 7 de la même ordonnance, ces dispositions sont applicables aux recours exercés par les collectivités locales, les établissements publics à caractère administratif et la caisse des dépôts et consignations agissant tant pour son propre compte, que comme gérante du fonds spécial de retraite des ouvriers des établissements industriels de l’Etat et comme gérante de la caisse nationale des retraites des agents des collectivités locales. Enfin, les dispositions de l’article 29 de la loi du 5 juillet 1985 tendant à l’amélioration de la situation des victimes d’accidents de la circulation et à l’accélération des procédures d’indemnisation, applicables en vertu de l’article 28 de la même loi aux relations entre le tiers payeur et la personne tenue à réparation d’un dommage résultant d’une atteinte à la personne, quelle que soit la nature de l’événement ayant occasionné ce dommage, énumèrent la liste des prestations versées à la victime ouvrant droit à un recours contre la personne tenue à réparation ou son assureur. I - Il résulte des dispositions du deuxième alinéa de l’article L. 376-1 du code de la sécurité sociale et du I de l’article 1er de l’ordonnance du 7 janvier 1959, ainsi que des articles 28 et 29 de la loi du 5 juillet 1985, que les recours des tiers payeurs, subrogés dans les droits d’une victime d’un dommage qu’elles organisent, s’exercent à l’encontre des auteurs responsables de l’accident survenu à la victime. La réparation qui incombe sous certaines conditions à l’ONIAM, en vertu des dispositions de l’article L. 1142-1 du code de la santé publique, a pour objet d’assurer, au titre de la solidarité nationale, la prise en charge des conséquences d’un accident médical, d’une affection ou d’une infection qui ne peuvent être imputées à la faute d’un professionnel, d’un établissement ou service de santé ou au défaut d’un produit de santé,

Page 76: LE RECOURS DES TIERS PAYEURS ET L'IMPACT DU SYSTEME D

76/114

sans que cet établissement public ait la qualité d’auteur responsable des dommages. Il en résulte que les recours subrogatoires des tiers payeurs ayant versé des prestations à la victime d’un dommage corporel, organisés par l’article L. 376-1 du code de la sécurité sociale, l’article 1er de l’ordonnance du 7 janvier 1959 et l’article 29 de la loi du 5 juillet 1985, ne peuvent être exercés contre l’ONIAM lorsque celui-ci a pris en charge la réparation de ce dommage au titre de la solidarité nationale. II - En application des dispositions du deuxième alinéa de l’article L. 1142-17 du code de la santé publique, le juge, saisi d’un litige relatif à l’indemnisation d’un dommage au titre de la solidarité nationale, s’il est conduit à évaluer le montant des indemnités qui reviennent à la victime ou à ses ayants droit, doit y procéder en déduisant du montant du préjudice total les prestations énumérées à l’article 29 de la loi du 5 juillet 1985, et plus généralement les indemnités de toute nature reçues ou à recevoir d’autres débiteurs du chef du même préjudice. Il lui appartient en conséquence de demander à la victime ou à ses ayants droit d’indiquer, si ces informations ne ressortent pas des pièces du dossier, sa qualité d’assuré social ou d’agent public ainsi que la nature et le montant des prestations qu’elle a, le cas échéant, perçues d’un ou plusieurs des tiers payeurs énumérés à l’article 29 de la loi du 5 juillet 1985. Il entre également dans l’office du juge, s’il l’estime utile pour le règlement du litige, de diligenter des mesures d’instruction auprès des tiers-payeurs. En revanche, il ne lui appartient pas d’appeler en la cause, par principe et sous peine d’irrégularité de sa décision, les tiers-payeurs dans un litige relatif à la réparation des préjudices par l’ONIAM au titre de la solidarité nationale. Le présent avis sera notifié à la cour administrative d’appel de Marseille, à M. Jean-Yves A, à la section locale interministérielle d’assurance maladie de l’Hérault, au service départemental d’incendie et de secours de l’Hérault, à l’Office national d’indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales et au ministre de la santé et des sports et à la caisse des dépôts et consignation. Il sera publié au Journal officiel de la République française.

Page 77: LE RECOURS DES TIERS PAYEURS ET L'IMPACT DU SYSTEME D

77/114

Document n°10 Avis du Conseil d'Etat du 17 septembre 2012 : Sur la question de savoir si la forclusion de la victime frappe d’irrecevabilité l’action subrogatoire engagée par une caisse de sécurité sociale sur le fondement de l’article L376-1 du Code de la sécurité sociale. AVIS Avis n° 360280 du 17 septembre 2012 NOR: CETX1234932S Version consolidée au 15 août 2014 Le Conseil d’Etat (section du contentieux, 5e et 4e sous-sections réunies), Sur le rapport de la 5e sous-section de la section du contentieux, Vu le jugement n° 1112149/6-1 du 15 juin 2012, enregistré au secrétariat du contentieux du Conseil d’Etat le 15 juin 2012, par lequel le tribunal administratif de Paris, avant de statuer sur la demande de l’Office national d’indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales (ONIAM), subrogé en application des articles L. 1142-15 et L. 1142-17 dans les droits de Mme Séverine Wagner, tendant à la condamnation de l’Assistance publique-hôpitaux de Paris (AP-HP) à lui verser différentes indemnités, a décidé, par application des dispositions de l’article L. 113-1 du code de justice administrative, de transmettre le dossier de cette demande au Conseil d’Etat, en soumettant à son examen les questions suivantes : 1° La circonstance que la victime d’un dommage médical indemnisé par l’ONIAM en application des dispositions de l’article L. 1142-15 ou de l’article L. 1142-17 du code de la santé publique n’ait pas contesté, dans le délai de recours contentieux, la décision de rejet opposée à sa demande indemnitaire préalable par l’établissement public de santé responsable du dommage rend-elle irrecevable, devant le juge administratif, le recours subrogatoire que les mêmes dispositions ouvrent à l’ONIAM contre ledit responsable ? 2° L’ONIAM, saisi d’une demande d’indemnisation d’un dommage médical sur le fondement des dispositions de l’article L. 1142-15 ou de l’article L. 1142-17 du code de la santé publique, est-il toujours tenu d’indemniser la victime, quand bien même celle-ci n’aurait pas contesté, dans le délai de recours contentieux, la décision de rejet opposée à sa demande indemnitaire préalable par l’établissement public de santé responsable du dommage ? 3° La circonstance que la victime d’un dommage n’ait pas contesté, dans le délai de recours contentieux, la décision de rejet opposée à sa demande indemnitaire préalable par la personne publique responsable du dommage rend-elle irrecevable la demande présentée par une caisse de sécurité sociale, dans le cadre de la subrogation prévue par les dispositions de l’article L. 376-1 du code de la sécurité sociale, tendant à ce que cette personne publique soit condamnée à lui rembourser les débours correspondant aux prestations qu’elle a servies dans l’intérêt de la victime ? Vu les observations, enregistrées le 22 août 2012, présentées pour l’ONIAM ;

Page 78: LE RECOURS DES TIERS PAYEURS ET L'IMPACT DU SYSTEME D

78/114

Vu les observations, enregistrées le 3 septembre 2012, présentées par l’Assistance publique-hôpitaux de Paris ; Vu les autres pièces du dossier ; Vu le code de la santé publique, modifié notamment par la loi n° 2002-303 du 4 mars 2002 ; Vu le code de la sécurité sociale ; Vu le code de justice administrative, notamment son article L. 113-1 ; Après avoir entendu en séance publique : ― le rapport de Mme Domitille Duval-Arnould, maître des requêtes en service extraordinaire ; ― les observations de la SCP Roger, Sevaux, avocat de l’Office national d’indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales ; ― les conclusions de Mme Fabienne Lambolez, rapporteur public ; ― la parole ayant été à nouveau donnée à la SCP Roger, Sevaux, avocat de l’Office national d’indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales, Rend l’avis suivant : I. ― Sur les deux premières questions posées par le tribunal administratif de Paris : 1. La loi du 4 mars 2002 relative aux droits des malades et à la qualité du système de santé a créé une procédure de règlement amiable des litiges relatifs aux accidents médicaux, aux affections iatrogènes et aux infections nosocomiales graves, confiée aux commissions régionales de conciliation et d’indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales (CRCI) et à l’Office national d’indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales (ONIAM), selon des modalités fixées aux articles L. 1142-5 et suivants du code de la santé publique. 2. La CRCI peut être saisie par toute personne s’estimant victime d’un dommage imputable à une activité de prévention, de diagnostic ou de soins, ou par les ayants droit d’une personne décédée à la suite d’un acte de prévention, de diagnostic ou de soins, et cette saisine « suspend les délais de prescription et de recours contentieux jusqu’au terme de la procédure » en vertu du dernier alinéa de l’article L. 1142-7 du même code. 3. Lorsque les dommages subis présentent un certain caractère de gravité, prévu au II de l’article L. 1142-1 et fixé à l’article D. 1142-1, la commission émet, en application du premier alinéa de l’article L. 1142-8, « un avis sur les circonstances, les causes, la nature et l’étendue des dommages ainsi que sur le régime d’indemnisation applicable ». Si la commission estime que le dommage engage la responsabilité d’un professionnel ou d’un établissement de santé, il résulte de l’article L. 1142-14 que l’assureur de la personne considérée comme responsable adresse à la victime, dans un délai de quatre mois, une offre d’indemnisation. Enfin l’article L. 1142-15 prévoit que, si l’assureur s’abstient de faire une offre ou si le responsable n’est pas assuré, l’ONIAM lui est substitué et que lorsqu’il a, à ce titre, versé une indemnité à la

Page 79: LE RECOURS DES TIERS PAYEURS ET L'IMPACT DU SYSTEME D

79/114

victime, l’office est subrogé dans les droits de celle-ci contre la personne responsable du dommage ou son assureur. 4. Dans le cas où le dommage est imputé à un établissement public de santé, ces dispositions législatives doivent être combinées avec les dispositions du code de justice administrative relatives à l’exercice des recours contentieux. 5. En vertu de l’article R. 421-1 et du 1° de l’article R. 421-3 de ce code, la personne qui a saisi une collectivité publique d’une demande d’indemnité et qui s’est vu notifier une décision expresse de rejet dispose d’un délai de deux mois à compter de cette notification pour rechercher la responsabilité de la collectivité devant le tribunal administratif. Conformément aux dispositions de l’article R. 421-5, ce délai n’est toutefois opposable qu’à la condition d’avoir été mentionné, ainsi que les voies de recours, dans la notification de la décision. 6. Si la CRCI est saisie, avant l’expiration du délai de deux mois à compter de la notification, par un établissement public de santé d’une décision rejetant une demande d’indemnisation, ce délai se trouve suspendu conformément aux dispositions du dernier alinéa de l’article L. 1142-7 du code de la santé publique. Eu égard à l’objectif poursuivi par le législateur en instituant une procédure de règlement amiable des litiges, la notification de la décision rejetant la demande d’indemnité doit indiquer non seulement que le tribunal administratif peut être saisi dans le délai de deux mois mais aussi que ce délai est suspendu en cas de saisine de la CRCI. La notification ne fait pas courir le délai si elle ne comporte pas cette double indication. 7. En revanche, en l’absence de toute disposition en ce sens, le délai de recours contentieux n’est pas rouvert par une saisine de la CRCI postérieure à son expiration. Dans le cas où une telle saisine déboucherait sur un avis selon lequel le dommage engage la responsabilité de l’établissement et où l’ONIAM indemniserait la victime en lieu et place de l’assureur de celui-ci, puis exercerait devant le tribunal administratif le recours subrogatoire prévu à l’article L. 1142-15 du code de la santé publique, le caractère définitif de la décision rejetant la demande d’indemnité de la victime pourrait être utilement opposé par l’établissement. En effet, en prévoyant cette subrogation, le législateur n’a pas dérogé au principe selon lequel le subrogé, qui ne saurait avoir plus de droits que le subrogeant, ne peut engager l’action que pour autant que la victime le pourrait encore. 8. Le législateur n’ayant pas entendu que la charge définitive de l’indemnisation incombe à l’ONIAM, en dehors des cas prévus aux II de l’article L. 1142-1 et à l’article L. 1142-1-1, où le dommage ouvre droit à réparation au titre de la solidarité nationale, l’office est fondé à refuser de verser l’indemnité en lieu et place de l’assureur de l’établissement lorsqu’une demande d’indemnité a été rejetée par une décision devenue définitive. 9. Il ne peut toutefois le faire qu’au vu de cette décision, des justificatifs de sa notification régulière et de l’absence de recours contentieux exercé dans le délai. Il appartient à l’établissement, s’il ne l’avait pas déjà fait devant la CRCI, de communiquer ces éléments à l’office à la suite de l’avis de la CRCI. Faute d’avoir procédé à cette communication avant que l’office n’ait fait une offre d’indemnité à la victime, l’établissement perd la possibilité d’opposer le caractère définitif de la décision pour faire échec à un recours subrogatoire. II. ― Sur la troisième question : 10. L’article L. 376-1 du code de la sécurité sociale ouvre aux caisses de sécurité sociale la possibilité de poursuivre le remboursement, par le responsable d’un dommage corporel, des dépenses qu’elles ont exposées en faveur de la victime, indépendamment de l’exercice par celle-ci ou par ses ayants droit d’un recours indemnitaire au titre des préjudices qui sont demeurés à sa charge.

Page 80: LE RECOURS DES TIERS PAYEURS ET L'IMPACT DU SYSTEME D

80/114

11. Bien que cette disposition qualifie de subrogatoires les recours dont disposent les caisses de sécurité sociale contre les tiers, la circonstance que la victime n’a pas, dans le délai du recours contentieux, contesté la décision par laquelle la collectivité publique à laquelle le dommage est imputé a rejeté sa demande indemnitaire n’a pas pour effet de rendre irrecevables les conclusions des caisses tendant au remboursement par cette collectivité des dépenses qu’elles ont engagées à la suite de l’accident. Le présent avis sera notifié à l’Office national d’indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales, à la Caisse d’assurance maladie des industries électriques et gazières, à l’Assistance publique-hôpitaux de Paris et à la ministre des affaires sociales et de la santé. Il sera publié au Journal officiel de la République française.

Page 81: LE RECOURS DES TIERS PAYEURS ET L'IMPACT DU SYSTEME D

81/114

Document n°11

Avis du Conseil d'Etat, 10 octobre 2011 : L'inaction de la victime ne rend pas forclose l'action des tiers payeurs

Conseil d’État N° 328500 ECLI:FR:CESSR:2011:328500.20111010 Publié au recueil Lebon 5ème et 4ème sous-sections réunies M. Philippe Martin, président Mme Domitille Duval-Arnould, rapporteur Mme Sophie-Justine Lieber, rapporteur public LE PRADO ; SCP DELVOLVE, DELVOLVE, avocat(s) lecture du lundi 10 octobre 2011 REPUBLIQUE FRANCAISE AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 2 juin et 2 septembre 2009 au secrétariat du contentieux du Conseil d’Etat, présentés pour le CENTRE HOSPITALIER UNIVERSITAIRE d’ANGERS, dont le siège est 4 rue Larrey à Angers (49033 Cedex 01) ; le CENTRE HOSPITALIER UNIVERSITAIRE D’ANGERS demande au Conseil d’Etat : 1°) d’annuler l’arrêt du 30 décembre 2008 par lequel la cour administrative d’appel de Nantes a, d’une part, annulé l’ordonnance du 5 février 2008 du président du tribunal administratif de Nantes donnant acte du désistement de la demande de Mme Mauricette et des consorts et, d’autre part, condamné le centre hospitalier à verser à la caisse une somme de 2 739,78 euros assortie des intérêts et une somme de 910 euros en application des dispositions de l’article L. 376-1 du code de la sécurité sociale ; 2°) réglant l’affaire au fond, de rejeter l’appel de la caisse primaire d’assurance maladie de la

Page 82: LE RECOURS DES TIERS PAYEURS ET L'IMPACT DU SYSTEME D

82/114

Sarthe ; Vu les autres pièces du dossier ; Vu le code de la santé publique ; Vu le code de la sécurité sociale ; Vu le code de justice administrative ; Après avoir entendu en séance publique : - le rapport de Mme Domitille Duval-Arnould, chargée des fonctions de Maître des Requêtes, - les observations de Me Le Prado, avocat du CENTRE HOSPITALIER UNIVERSITAIRE D’ANGERS et de la SCP Delvolvé, Delvolvé, avocat de la caisse primaire d’assurance maladie de la Sarthe, - les conclusions de Mme Sophie-Justine Lieber, rapporteur public ; La parole ayant été à nouveau donnée à Me Le Prado, avocat du CENTRE HOSPITALIER UNIVERSITAIRE D’ANGERS et à la SCP Delvolvé, Delvolvé, avocat de la caisse primaire d’assurance maladie de la Sarthe ; Considérant qu’il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que, le 26 septembre 2001, Vanessa , âgée de 19 ans et présentant un neurinome de l’acoustique gauche, a été opérée au CENTRE HOSPITALIER UNIVERSITAIRE (CHU) D’ANGERS ; que, dans la nuit du 3 au 4 octobre 2001, elle a été atteinte d’une méningite à pneumocoques dont elle est décédée le 6 octobre ; que, saisi le 8 mars 2004 par Mme Chevalier et les consorts d’un recours indemnitaire dirigé contre le CENTRE HOSPITALIER UNIVERSITAIRE D’ANGERS, le tribunal administratif de Nantes a appelé en la cause la caisse primaire d’assurance maladie (CPAM) de la Sarthe qui a demandé le remboursement de ses prestations par un mémoire enregistré le 18 mars 2004 ; qu’ayant été indemnisés par l’Office national d’indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales, les requérants se sont désistés de leur demande le 17 décembre 2007 ; que, par ordonnance du 5 février 2008, le président du tribunal administratif leur a donné acte de leur désistement sans examiner les conclusions de la caisse ; que le CENTRE HOSPITALIER UNIVERSITAIRE D’ANGERS se pourvoit en cassation contre l’arrêt du 30 décembre 2008 par lequel la cour administrative d’appel de Nantes, statuant sur l’appel de la caisse primaire d’assurance maladie de la Sarthe, a annulé l’ordonnance comme étant entachée d’irrégularité en l’absence d’appel en la cause de la caisse, puis, évoquant la demande de première instance, jugé que la maladie et le décès de Vanessa engageaient la responsabilité du centre hospitalier

Page 83: LE RECOURS DES TIERS PAYEURS ET L'IMPACT DU SYSTEME D

83/114

et fixé le montant des indemnités dues à la caisse ; Sans qu’il soit besoin d’examiner les autres moyens du pourvoi ; Considérant qu’en annulant l’ordonnance qui lui était déférée au motif que le tribunal administratif n’avait pas mis en cause la caisse primaire d’assurance maladie de la Sarthe, alors que cette caisse avait été mise en cause et avait d’ailleurs produit un mémoire, la cour administrative d’appel de Nantes a commis une erreur de fait qui justifie la cassation de son arrêt ; Considérant qu’il y a lieu, dans les circonstances de l’espèce, de régler l’affaire au fond par application des dispositions de l’article L. 821-2 du code de justice administrative ; Considérant qu’en donnant acte du désistement de Mme et des consorts et en mettant ainsi un terme au litige sans examiner, fût-ce pour les réserver, les conclusions présentées par la caisse primaire d’assurance maladie de la Sarthe dans son mémoire enregistré le 18 mars 2004 au greffe du tribunal, le président du tribunal administratif a entaché son ordonnance d’irrégularité ; que la caisse est par suite fondée à en demander l’annulation ; Considérant qu’il y a lieu d’évoquer et de statuer immédiatement sur les conclusions présentées par Mme et les consorts et par la caisse primaire d’assurance maladie de la Sarthe devant le tribunal administratif de Nantes ; Sur la requête de Mme et des consorts : Considérant que, par un acte enregistré le 17 décembre 2007 au greffe du tribunal administratif de Nantes, Mme et les consorts ont déclaré se désister ; que ce désistement est pur et simple ; que rien ne s’oppose à ce qu’il en soit donné acte ; Sur les conclusions de la caisse primaire d’assurance maladie de la Sarthe : Considérant qu’aux termes de l’article L. 376-1 du code de la sécurité sociale : “Lorsque, sans entrer dans les cas régis par les dispositions législatives applicables aux accidents du travail, la lésion dont l’assuré social ou son ayant droit est atteint est imputable à un tiers, l’assuré ou ses ayants droit conserve contre l’auteur de l’accident le droit de demander la réparation du préjudice causé conformément aux règles du droit commun, dans la mesure où ce préjudice n’est pas réparé par application du présent livre. / Les caisses de sécurité sociale sont tenues de servir à l’assuré ou à ses ayants droit les prestations prévues par le présent livre, sauf recours de leur part contre l’auteur responsable de l’accident (...) “ ; que ces dispositions ne font pas dépendre de l’exercice d’un recours indemnitaire par la victime ou ses ayants droit la possibilité pour la caisse de sécurité sociale, subrogée dans les droits de son assuré à hauteur des prestations qu’elle lui a versées, d’en poursuivre le remboursement par le responsable de l’accident ; que, par suite, le désistement de Mme et des consorts est sans incidence sur le sort des conclusions de la caisse primaire d’assurance maladie de la Sarthe ;

Page 84: LE RECOURS DES TIERS PAYEURS ET L'IMPACT DU SYSTEME D

84/114

Considérant qu’aux termes du I de l’article L. 1142-1 du code de la santé publique : “Hors le cas où leur responsabilité est encourue en raison d’un défaut d’un produit de santé, les professionnels de santé mentionnés à la quatrième partie du présent code, ainsi que tout établissement, service ou organisme dans lesquels sont réalisés des actes individuels de prévention, de diagnostic ou de soins ne sont responsables des conséquences dommageables d’actes de prévention, de diagnostic ou de soins qu’en cas de faute. / Les établissements, services et organismes susmentionnés sont responsables des dommages résultant d’infections nosocomiales, sauf s’ils rapportent la preuve d’une cause étrangère “ ; qu’en vertu de l’article 101 de la loi n° 2002-303 du 4 mars 2002, ces dispositions sont applicables aux infections nosocomiales consécutives à des soins réalisés à compter du 5 septembre 2001 ; Considérant qu’il résulte de l’instruction et, notamment, du rapport d’expertise, qu’à la suite de l’intervention pratiquée le 26 septembre 2001 au CENTRE HOSPITALIER UNIVERSITAIRE D’ANGERS, consistant dans une exérèse du neurinome de l’acoustique gauche en translabyrinthique, Mlle Vanessa , dont l’évolution post-opératoire immédiate avait été satisfaisante, a éprouvé, dans la nuit du 3 au 4 octobre, des céphalées violentes, des myalgies diffuses, des dorsalgies et des rachialgies ; que la ponction lombaire alors pratiquée a révélé une méningite à pneumocoques dont elle est décédée le 6 octobre ; Considérant que si le CENTRE HOSPITALIER UNIVERSITAIRE D’ANGERS soutient que Mlle était porteuse saine du pneumocoque lors de son admission à l’hôpital, cette circonstance, à la supposer établie, n’est pas de nature à faire regarder l’infection comme ne présentant pas un caractère nosocomial, dès lors qu’il ressort de l’expertise que c’est à l’occasion de l’intervention chirurgicale que le germe a pénétré dans les méninges et est devenu pathogène ; que les dispositions précitées du I de l’article L. 1142-1 du code de la santé publique font peser sur l’établissement de santé la responsabilité des infections nosocomiales, qu’elles soient exogènes ou endogènes, à moins que la preuve d’une cause étrangère ne soit apportée ; Considérant qu’il résulte de l’expertise que l’infection des méninges a été provoquée par l’intervention et constitue un risque connu des interventions de la nature de celle pratiquée en l’espèce ; que si l’expert a relevé qu’il était très difficile de la prévenir, il ne ressort pas de l’instruction qu’elle présente le caractère d’imprévisibilité et d’irrésistibilité qui permettrait de regarder comme apportée la preuve d’une cause étrangère ; Considérant qu’il résulte de ce qui précède qu’il y a lieu de condamner le CENTRE HOSPITALIER UNIVERSITAIRE D’ANGERS à verser à la caisse primaire d’assurance maladie de la Sarthe, subrogée dans les droits de l’assurée, une somme de 2 739,78 euros représentant le montant des prestations fournies au titre de l’assurance maladie ; que la caisse a en outre droit à l’indemnité forfaitaire prévue par les dispositions du neuvième alinéa de l’article L. 376-1 du code de la sécurité sociale, pour le montant de 980 euros auquel elle est fixée, à la date de la présente décision, par l’arrêté du 10 novembre 2010 ; Sur les intérêts et la capitalisation des intérêts : Considérant que la caisse primaire d’assurance maladie de la Sarthe a droit aux intérêts de la somme de 2 739,78 euros à compter du 18 mars 2004, date d’enregistrement de sa demande au greffe du tribunal administratif de Nantes ; qu’elle a demandé pour la première fois la

Page 85: LE RECOURS DES TIERS PAYEURS ET L'IMPACT DU SYSTEME D

85/114

capitalisation des intérêts le 29 avril 2008 ; qu’à cette date, les intérêts étaient dus pour au moins une année entière sur la somme de 2 739,78 euros ; qu’il y a lieu, dès lors, de faire droit à la demande de capitalisation tant à cette date qu’à chaque échéance annuelle ultérieure ; Sur l’application des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative : Considérant qu’il y a lieu, dans les circonstances de l’espèce, de mettre à la charge du CENTRE HOSPITALIER UNIVERSITAIRE D’ANGERS la somme de 3 000 euros au titre des frais exposés par la caisse primaire d’assurance maladie de la Sarthe et non compris dans les dépens ; D E C I D E : -------------- Article 1er : L’arrêt du 30 décembre 2008 de la cour administrative d’appel de Nantes est annulé. Article 2 : L’ordonnance du 5 février 2008 du président du tribunal administratif de Nantes est annulée. Article 3 : Il est donné acte du désistement de Mme et des consorts. Article 4 : Le CENTRE HOSPITALIER UNIVERSITAIRE d’ANGERS versera à la caisse primaire d’assurance maladie de la Sarthe une somme de 2 739,78 euros portant intérêts à compter du 18 mars 2004, les intérêts échus à la date du 29 avril 2008 puis à chaque échéance annuelle à compter de cette date étant capitalisés à chacune de ces dates pour produire eux-mêmes intérêts, et une somme de 980 euros en application des dispositions du neuvième alinéa de l’article L. 376-1 du code de la sécurité sociale. Article 5 : Le CENTRE HOSPITALIER UNIVERSITAIRE D’ANGERS versera à la caisse primaire d’assurance maladie de la Sarthe la somme de 3 000 euros au titre des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative. Article 6 : La présente décision sera notifiée à la caisse primaire d’assurance maladie de la Sarthe, au CENTRE HOSPITALIER UNIVERSITAIRE D’ANGERS, à Mme Mauricette , à Mlle Anita et à MM. Didier et Stéphane . Copie en sera adressée pour information au ministre du travail, de l’emploi et de la santé.

Page 86: LE RECOURS DES TIERS PAYEURS ET L'IMPACT DU SYSTEME D

86/114

Document n°12 Avis du Conseil d'Etat, 18 mai 2011 : Le recours des tiers payeurs en cas d'indemnisation d'une victime contaminée par le virus de l'hépatite C AVIS Avis n° 343823 du 18 mai 2011 NOR: CETX1114182S Version consolidée au 16 août 2014

Le Conseil d’Etat (section du contentieux, 5e et 4e sous-sections réunies), Sur le rapport de la 5e sous-section de la section du contentieux, Vu l’arrêt du 11 octobre 2010, enregistré au secrétariat du contentieux du Conseil d’Etat le 15 octobre 2010, par lequel la cour administrative d’appel de Paris, avant de statuer sur la requête de l’Etablissement français du sang tendant, d’une part, à l’annulation du jugement du 22 avril 2008 du tribunal administratif de Paris en tant qu’il l’a condamné à indemniser le préjudice économique subi par M. Oulabbi qui serait consécutif à sa contamination par le virus de l’hépatite C et à rembourser à la caisse primaire d’assurance maladie du Puy-de-Dôme la moitié du coût de la pension d’invalidité servie à l’intéressé à partir de 2004 et le capital représentatif de celle-ci et, d’autre part, à ce que soit limitée à 7,6 % sa contribution à la pension servie à M. Oulabbi, a décidé, par application des dispositions de l’article L. 113-1 du code de justice administrative, de transmettre le dossier de cette requête au Conseil d’Etat, en soumettant à son examen les questions suivantes : 1° Les dispositions de l’article 67 de la loi du 17 décembre 2008 et leurs décrets d’application du 11 mars 2010 qui, à compter du 1er juin 2010, confient à l’Office national d’indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales (ONIAM) aux lieu et place de l’Etablissement français du sang (EFS) l’indemnisation des victimes de préjudices résultant de la contamination par le virus de l’hépatite C causée par une transfusion de produits sanguins ou une injection de médicaments dérivés du sang, sans indiquer expressément que cette substitution s’opère au nom de la solidarité nationale, font-elles obstacle à l’exercice, par les tiers payeurs, d’un recours subrogatoire à l’encontre dudit office ? 2° Dans l’affirmative, y-a-t-il lieu de maintenir en cause d’appel l’EFS pour statuer ce que de droit sur le recours subrogatoire des tiers payeurs ? Vu les autres pièces du dossier ; Vu la note en délibéré, enregistrée le 18 février 2011, présentée pour l’Office national d’indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales ; Vu la note en délibéré, enregistrée le 23 février 2011, présenté pour l’Etablissement français du sang ; Vu le code de la santé publique ;

Page 87: LE RECOURS DES TIERS PAYEURS ET L'IMPACT DU SYSTEME D

87/114

Vu le code de la sécurité sociale ; Vu le code de justice administrative, notamment son article L. 113-1 ; Vu l’ordonnance n° 59-76 du 7 janvier 1959 ; Vu la loi n° 85-677 du 5 juillet 1959 ; Vu la loi n° 2002-303 du 4 mars 2002 ; Vu la loi n° 2008-1330 du 17 décembre 2008 ; Vu le décret n° 2010-251 du 11 mars 2010 ; Vu le décret n° 2010-252 du 11 mars 2010 ; Après avoir entendu en séance publique : ― le rapport de M. Frédéric Desportes, chargé des fonctions de maître des requêtes ; ― les observations de la SCP Piwnica, Molinié, avocat de l’Etablissement français du sang et de la SCP Roger, Sevaux, avocat de l’Office national de l’indemnisation des accidents médicaux, des affections ioatrogènes et des infections nosocomiales ; ― les conclusions de Mme Sophie-Justine Lieber, rapporteur public ; La parole ayant été à nouveau donnée à la SCP Piwnica, Molinié, avocat de l’Etablissement français du sang, et à la SCP Roger, Sevaux, avocat de l’Office national de l’indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales, Rend l’avis suivant : I. ― L’article L. 1142-22 du code de la santé publique relatif à l’Office national d’indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales (ONIAM) énonce, en son premier alinéa, que cet établissement public à caractère administratif de l’Etat est chargé de l’indemnisation, « au titre de la solidarité nationale », de certains dommages, définis par la loi, causés par un accident médical, une affection iatrogène ou une infection nosocomiale. En son deuxième alinéa, le même article dispose, dans sa rédaction issue des dispositions de l’article 67 de la loi du 17 décembre 2008, que l’ONIAM est également chargé, conformément à l’article L. 1221-14 du code de la santé publique issu des mêmes dispositions, de l’indemnisation, antérieurement assurée par l’Etablissement français du sang (EFS), des victimes de préjudices résultant de la contamination par le virus de l’hépatite C (VHC) causée par une transfusion de produits sanguins ou une injection de médicaments dérivés du sang. L’article L. 1221-14 organise la procédure d’indemnisation amiable de ces victimes par l’ONIAM selon des règles inspirées pour l’essentiel de celles prévues par les articles L. 3122-1 et suivants pour l’indemnisation des victimes d’une contamination transfusionnelle par le virus d’immunodéficience humaine. En vertu du troisième alinéa de l’article L. 1221-14, qui renvoie aux dispositions du deuxième alinéa de l’article L. 1142-17 du code de la santé publique applicables à l’indemnisation, au titre de la solidarité nationale, des dommages résultant d’un accident médical, d’une affection iatrogène ou d’une infection nosocomiale, l’office adresse à la victime ou à ses ayants droit une offre d’indemnisation indiquant

Page 88: LE RECOURS DES TIERS PAYEURS ET L'IMPACT DU SYSTEME D

88/114

l’évaluation retenue, pour chaque chef de préjudice « ainsi que le montant des indemnités qui reviennent à la victime, ou à ses ayants droit, déduction faite des prestations énumérées à l’article 29 de la loi n° 85-677 du 5 juillet 1985 précitée, et plus généralement des indemnités de toute nature reçues ou à recevoir d’autres débiteurs du chef du même préjudice ». L’article L. 1221-14 comporte par ailleurs, en son deuxième alinéa, des dispositions relatives à la preuve de l’origine de la contamination, aux termes desquelles « l’office recherche les circonstances de la contamination, notamment dans les conditions prévues à l’article 102 de la loi n° 2002-303 du 4 mars 2002 relative aux droits des malades et à la qualité du système de santé ». Cet article dispose que, en cas de contestation relative à l’imputabilité d’une contamination par le VHC, il incombe au demandeur d’apporter « des éléments qui permettent de présumer que cette contamination a pour origine une transfusion de produits sanguins labiles ou une injection de médicaments dérivés du sang » et à la partie défenderesse, au vu de ces éléments, « de prouver que cette transfusion ou cette injection n’est pas à l’origine de la contamination », le doute profitant au demandeur. En application des dispositions combinées des articles L. 1221-14, alinéa 7, et L. 3122-4, l’ONIAM peut exercer un recours subrogatoire contre l’établissement de transfusion sanguine « responsable du dommage », à condition, d’une part, que le dommage soit imputable à une faute de celui-ci et que, d’autre part, sauf dans le cas où la contamination trouve son origine dans une violation ou un manquement mentionnés à l’article L. 1223-5, l’établissement soit couvert par une assurance. Aux termes, enfin, des dispositions transitoires, figurant au IV de l’article 67 de la loi du 17 décembre 2008 : « L’ONIAM se substitue à l’EFS dans les contentieux en cours au titre des préjudices mentionnés à l’article L. 1221-14 du code de la santé publique n’ayant pas donné lieu à une décision irrévocable ». L’ensemble des dispositions issues de l’article 67 de la loi du 17 décembre 2008 est entré en vigueur le 1er juin 2010. II. ― Pour sa part, le deuxième alinéa de l’article L. 376-1 du code de la sécurité sociale, qui trouve application lorsque, sans entrer dans les cas régis par les dispositions législatives applicables aux accidents du travail, la lésion dont l’assuré social ou son ayant droit est atteint est imputable à un tiers dispose que : « Les caisses de sécurité sociale sont tenues de servir à l’assuré ou à ses ayants droit les prestations prévues par le présent livre, sauf recours de leur part contre l’auteur responsable de l’accident (...) ». Des dispositions semblables figurent au I de l’article 1er de l’ordonnance du 7 janvier 1959 relative aux actions en réparation civile de l’Etat et de certaines autres personnes publiques. Enfin, les dispositions de l’article 29 de la loi du 5 juillet 1985 tendant à l’amélioration de la situation des victimes d’accidents de la circulation et à l’accélération des procédures d’indemnisation, applicables en vertu de l’article 28 de la même loi aux relations entre le tiers payeur et la personne tenue à réparation d’un dommage résultant d’une atteinte à la personne, quelle que soit la nature de l’événement ayant occasionné ce dommage, énumèrent la liste des prestations versées à la victime ouvrant droit à un recours contre la personne tenue à réparation ou son assureur. III. ― Il résulte des dispositions du deuxième alinéa de l’article L. 376-1 du code de la sécurité sociale et du I de l’article 1er de l’ordonnance du 7 janvier 1959, ainsi que des articles 28 et 29 de la loi du 5 juillet 1985, que les recours des tiers payeurs, subrogés dans les droits d’une victime d’un dommage qu’ils indemnisent, s’exercent à l’encontre des auteurs responsables de l’accident. En confiant à l’ONIAM, établissement public à caractère administratif de l’Etat placé sous la tutelle du ministre chargé de la santé, la mission d’indemniser, selon une procédure amiable exclusive de toute recherche de responsabilité, les dommages subis par les victimes de

Page 89: LE RECOURS DES TIERS PAYEURS ET L'IMPACT DU SYSTEME D

89/114

contamination transfusionnelle par le VHC dans la mesure où ces dommages ne sont pas couverts par les prestations versées par les tiers payeurs et sans préjudice de l’exercice par l’office d’un recours subrogatoire contre « la personne responsable », le législateur a institué aux articles L. 1142-22 et L. 1221-14 du code de la santé publique un dispositif assurant l’indemnisation des victimes concernées au titre de la solidarité nationale. Il s’ensuit que, dans l’exercice de la mission qui lui est confiée par ces articles, l’ONIAM est tenu d’indemniser à ce titre et non en qualité d’auteur responsable. Ni la circonstance que le législateur n’ait pas expressément indiqué que l’ONIAM intervenait en ce cas au titre de la solidarité nationale ni le fait qu’il ait maintenu les règles de preuve prévues par l’article 102 de la loi du 4 mars 2002 ne sauraient remettre en cause la nature de l’intervention de l’ONIAM telle qu’elle résulte de l’économie générale du dispositif applicable, au demeurant semblable à celui prévu par la loi pour l’accomplissement par l’ONIAM d’autres missions d’indemnisation assurées expressément au titre de la solidarité nationale. Il résulte de ce qui précède que les tiers payeurs ayant versé des prestations à la victime d’un dommage entrant dans les prévisions de l’article L. 1221-14 ne peuvent exercer contre l’ONIAM le recours subrogatoire prévu par les articles L. 376-1 du code de la sécurité sociale, 1er de l’ordonnance du 7 janvier 1959 et 29 de la loi du 5 juillet 1985. IV. ― En application de ces articles, les tiers payeurs peuvent en revanche exercer leur recours subrogatoire contre l’EFS en sa qualité de responsable du dommage. A cet égard, il se déduit des dispositions combinées des articles L. 1221-14, alinéa 7, et L. 3122-4 du code de la santé publique, relatives au recours subrogatoire ouvert à l’ONIAM, que, lorsque l’indemnisation de la victime d’une contamination transfusionnelle par le VHC est assurée au titre de la solidarité nationale, le législateur a entendu que la responsabilité de l’EFS ne puisse être recherchée par l’ONIAM et les tiers payeurs subrogés dans les droits de la victime que dans les cas où, conformément aux dispositions des articles précités, le dommage est imputable à une faute de l’établissement de transfusion sanguine et à condition, en principe, que celui-ci bénéficie de la couverture d’une assurance. V. ― Toutefois, il résulte des dispositions du IV de l’article 67 de la loi du 17 décembre 2008 selon lesquelles l’ONIAM se substitue à l’EFS dans les procédures tendant à l’indemnisation des préjudices mentionnés à l’article L. 1221-14, en cours à la date d’entrée en vigueur de cet article et n’ayant pas donné lieu à une décision irrévocable, que le législateur a entendu, dans ces procédures, substituer l’ONIAM à l’EFS tant à l’égard des victimes que des tiers payeurs. Il s’ensuit qu’il n’y a pas lieu de maintenir en cause l’EFS dans les procédures concernées pour qu’il soit statué sur le recours de ces derniers. Le présent avis sera notifié à la cour administrative d’appel de Paris, à M. Mohamed Oulabbi, à Mme Aïcha Oulabbi, à l’Etablissement français du sang, à l’Office national d’indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales et à la caisse primaire d’assurance maladie du Puy-de-Dôme. Copie en sera adressée pour information au ministre du travail, de l’emploi et de la santé. Il sera publié au Journal officiel de la République française.

Page 90: LE RECOURS DES TIERS PAYEURS ET L'IMPACT DU SYSTEME D

90/114

Document n°13 L’évolution de l’indemnisation des victimes d’infection nosocomiale

Indemnisation des infections nosocomiales

Contractées avant

l’entrée en vigueur de la loi Kouchner (soit avant le 5 septembre

2001)

Contractées entre le 5 septembre 2001 et le 1er janvier 2003 (entre loi Kouchner et loi About) Article L1142-1 al 2 du

CSP

Contractées après l’entrée en vigueur de la loi About (soit le 1er janvier 2003)

Article L1142-1-1 du CSP

Préjudices Tout préjudice Tout préjudice Séquelles > à 24%

Séquelles < (ou égales) à 25%

Séquelles > à 25% ou décès

Indemnisation Présomption de responsabilité

des établissements

de soin et professionnels

de santé. Peuvent se libérer en

rapportant la preuve d’une

cause étrangère.

Responsabilité de plein droit

des établissements

de soins si n’apporte pas la

preuve d’une cause étrangère

Si cause étrangère + taux d’IPP >

à 24%

ONIAM va indemniser la

victime

Indemnisation par assureur de l’établissement

de soin si ne prouve pas

cause étrangère

Si preuve cause étrangère + conditions de solidarité nationale réunies 36 : indemnisation par ONIAM

Indemnisation par l’ONIAM

Recours de l’ONIAM

N’intervient pas Possible recours subrogatoire si l’ONIAM se substitue à

l’assureur en cas de refus de

celui-ci d’indemniser la

victime

NON Pas de recours possible car pas

de tiers responsable

quand l'ONIAM intervient

Recours subrogatoire

ou action récursoire de

l’ONIAM possible si

prouve faute

Recours des Tiers payeurs

Possible recours subrogatoire ou

récursoire si l’établissement

de soin ou professionnel de

santé ne rapporte pas la preuve d’une

cause étrangère.

Possible recours subrogatoire ou

récursoire si l’établissement

de soin n’apporte pas la

preuve d’une cause étrangère

NON Possible recours subrogatoire si

tiers responsable n’apporte pas la

preuve d’une cause étrangère

Pas de recours selon arrêt Civ 1, 9 avril 2014

36conséquences anormales au regard de l’état de santé du patient et seuil de gravité IPP au plus égal à 25 %, ou ITT 6 mois consécutifs ou non consécutifs sur une période de 12 mois, ou inaptitude à l’exercice de la profession, ou troubles particulièrement graves, y compris économique, dans les conditions d’existence

Page 91: LE RECOURS DES TIERS PAYEURS ET L'IMPACT DU SYSTEME D

91/114

Document n°14 Arrêt Cohen, CE, 9 décembre 1988 : La présomption de responsabilité en cas d'infection nosocomiale

Conseil d’Etat statuant au contentieux N° 65087 Publié au recueil Lebon 5 / 3 SSR Mme Bauchet, président M. Challan-Belval, rapporteur M. Stirn, commissaire du gouvernement lecture du vendredi 9 décembre 1988 REPUBLIQUE FRANCAISE AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 7 janvier 1985 et le 11 avril 1985 au secrétariat du Contentieux du Conseil d’Etat, présentés pour M. Henri X..., demeurant ... D 3 à Paris (75013), et tendant à ce que le Conseil d’Etat : 1°) annule le jugement du 7 novembre 1984 par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à ce que l’administration générale de l’assistance publique à Paris soit condamnée à lui verser diverses indemnités en réparation du préjudice qu’il a subi lors d’une intervention et de soins subis à l’hôpital de la Pitié en Août 1976 ; 2°) condamne l’administration générale de l’assistance publique à Paris à lui verser la somme de 1 599 580,71 F et une rente capitalisée d’un montant de 1 642 500 F au titre de la tierce-personne, avec intérêts de droit et capitalisation ; Vu les autres pièces du dossier ; Vu le code des tribunaux administratifs ; Vu l’ordonnance du 31 juillet 1945 et le décret du 30 septembre 1953 ;

Page 92: LE RECOURS DES TIERS PAYEURS ET L'IMPACT DU SYSTEME D

92/114

Vu la loi du 30 décembre 1977 ; Après avoir entendu : - le rapport de M. Challan-Belval, Maître des requêtes, - les observations de la S.C.P. Masse-Dessen, Georges, avocat de M. X... et de Me Foussard, avocat de l’administration générale de l’assistance publique à Paris et de la S.C.P. Desaché, Gatineau, avocat de la caisse primaire d’assurance maladie de Paris, - les conclusions de M. Stirn, Commissaire du gouvernement ; Sur le principe de la responsabilité : Considérant qu’il résulte de l’instruction et notamment du rapport d’expertise, que l’infection méningée compliquée d’une lésion de la moelle dorsale dont M. X... a été victime a eu pour cause l’introduction accidentelle dans l’organisme du patient d’un germe microbien lors de la sacco-radiculographie qu’il a subie le 18 août 1976 au groupe hospitalier de la Pitié-Salpétrière à Paris ou de l’intervention chirurgicale de cure de la hernie discale confirmée par cet examen qu’il a subie le 19 août 1976 dans le même établissement, alors qu’il résulte des constatations des experts qu’aucune faute lourde médicale, notamment en matière d’asepsie, ne peut être reprochée aux praticiens qui ont exécuté cet examen et cette intervention ; que le fait qu’une telle infection ait pu néanmoins se produire, révèle une faute dans l’organisation ou le fonctionnement du service hospitalier à qui il incombe de fournir au personnel médical un matériel et des produits stériles ; que, dès lors, M. X... est fondé à demander à l’administration générale de l’assistance publique à Paris, réparation du préjudice qu’il a subi du fait de cette faute et à soutenir que c’est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande d’indemnisation de ce préjudice ; Sur l’évaluation du préjudice : Considérant qu’il résulte de l’instruction que M. X... qui a subi des douleurs importantes, reste atteint d’une paralysie des membres inférieurs, de l’abdomen et de la partie basse du tronc, entraînant une incapacité permanente partielle de 80 % et, outre un préjudice esthétique important, des troubles de toute nature dans les conditions d’existence ; qu’il sera fait une juste appréciation de ces chefs de préjudice en l’évaluant à la somme de 500 000 F ; Considérant que M. X... a droit au remboursement des pertes de revenus qu’il justifie avoir subies durant la période d’incapacité temporaire totale et dont le montant, déduction faite des indemnités journalières qui lui ont été accordées, s’élève à 205 640,77 F ; Considérant que l’état de M. X... impose l’assistance d’une tierce personne au titre de laquelle il doit lui être attribué une somme de 400 000 F ; Considérant qu’à ces divers chefs de préjudice, il y a lieu d’ajouter une somme de 469 794,07 F exposés par la caisse primaire d’assurance maladie de Paris à titre de frais médicaux, pharmaceutiques et d’hospitalisation ainsi que les indemnités journalières servies à M. X... durant la période d’incapacité temporaire totale ; qu’ainsi le préjudice total dont la réparation incombe à l’administration générale de l’assistance publique à Paris s’élève à 1 575 434,84 F ; Sur les droits de la caisse primaire d’assurance maladie de Paris :

Page 93: LE RECOURS DES TIERS PAYEURS ET L'IMPACT DU SYSTEME D

93/114

Considérant que la caisse primaire d’assurance maladie de Paris justifie de débours s’élevant à 469 794,07 F à titre d’indemnités journalières et de frais médicaux, pharmaceutiques et d’hospitalisation ; que ces dépenses ne peuvent, en vertu de l’article 397 du code de la sécurité sociale applicable à la présente espèce en vertu de l’article 3 de la loi du 27 décembre 1973, s’imputer que sur la part de la condamnation de l’administration générale de l’assistance publique à Paris assurant la réparation de l’atteinte à l’intégrité physique de la victime, c’est-à-dire aux indemnités allouées en compensation des pertes de salaires subies, en remboursement des frais médicaux, pharmaceutiques et d’hospitalisation payés tant par la caisse primaire d’assurance maladie que par la victime, et, enfin, de la fraction de l’indemnité allouée en réparation de troubles dans les conditions d’existence qui couvre les troubles physiologiques subis par la victime ; que, dans les circonstances de l’affaire, cet élément d’indemnisation doit être évalué à 875 434,84 F ; qu’ainsi la créance de la caisse primaire d’assurance maladie de Paris, inférieure à cette somme, peut être intégralement recouvrée ; Sur les droits de M. X... : Considérant que M. X... a droit à la différence entre le montant total du préjudice causé par la faute du service hospitalier et le montant de la créance de la caisse primaire d’assurance maladie, soit la somme de 1 105 640,80 F ; Sur les intérêts : Considérant qu’à défaut de demande préalable d’indemnité, M. Henri X... a droit aux intérêts des sommes que l’administration générale de l’assistance publique à Paris est condamnée à lui verser à compter du 23 janvier 1981, date de l’enregistrement de sa demande devant le tribunal administratif de Paris ; que la caisse primaire d’assurance maladie à Paris a droit aux intérêts à compter du 16 mars 1982 date d’enregistrement de ses conclusions ; Sur la capitalisation des intérêts : Considérant que la capitalisation des intérêts a été demandée par M. X... les 7 janvier 1985, 8 janvier 1986, 26 mai 1987 et 4 juillet 1988 ; qu’à chacune de ces dates il était dû au moins une année d’intérêts ; que, dès lors, conformément aux dispositions de l’article 1154 du code civil, il y a lieu de faire droit à ces demandes ; Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Paris du 7 novembre 1984 est annulé. Article 2 : L’administration générale de l’assistance publique à Paris est condamnée à verser la somme de 1 105 640,80 F à M. X... avec intérêts au taux légal à compter du 23 janvier 1981. Les intérêts échus les 7 janvier 1985, 8 janvier 1986, 26 mai 1987 et 4 juillet 1988 seront capitalisés à ces dates pour produire eux-mêmes intérêts. Article 3 : L’administration générale de l’assistance publique à Paris est condamnée à verser la somme de 469 794 ,07 F à la caisse primaire d’assurance maladie de Paris avec intérêts au taux légal à compter du 16 mars 1982. Article 4 : Le surplus des conclusions de la demande de M. X... est rejeté. Article 5 : La présente décision sera notifiée à M. X..., à l’administration générale de l’assistance publique à Paris, à la caisse primaire d’assurance maladie de Paris et au ministre de la solidarité, de la santé et de la protection sociale.

Page 94: LE RECOURS DES TIERS PAYEURS ET L'IMPACT DU SYSTEME D

94/114

Résumé : 60-02-01-01-01-01 Il résulte de l’instruction et notamment du rapport d’expertise, que l’infection méningée compliquée d’une lésion de la moelle dorsale dont M. C. a été victime a eu pour cause l’introduction accidentelle dans l’organisme du patient d’un germe microbien lors de la sacco-radiculographie qu’il a subie le 18 août 1976 au groupe hospitalier de la Pitié-Salpétrière à Paris ou de l’intervention chirurgicale de cure de la hernie discale confirmée par cet examen qu’il a subie le 19 août 1976 dans le même établissement, alors qu’il résulte des constatations des experts qu’aucune faute lourde médicale, notamment en matière d’asepsie, ne peut être reprochée aux praticiens qui ont exécuté cet examen et cette intervention. Le fait qu’une telle infection ait pu néanmoins se produire, révèle une faute dans l’organisation ou le fonctionnement du service hospitalier à qui il incombe de fournir au personnel médical un matériel et des produits stériles.

Page 95: LE RECOURS DES TIERS PAYEURS ET L'IMPACT DU SYSTEME D

95/114

Document n°15

Arrêts de la Cour de cassation du 29 juin 1999 : passage à une responsabilité de plein droit des victimes d’infection nosocomiale

Cour de cassation Chambre civile 1 Audience publique du 29 juin 1999 N° de pourvoi: 97-14254 Publié au bulletin Cassation partielle. Président : M. Lemontey, président Rapporteur : M. Sargos., conseiller apporteur Avocat général : Mme Petit., avocat général Avocats : la SCP Gatineau, la SCP Coutard et Mayer, la SCP Peignot et Garreau, M. Vuitton., avocat(s) REPUBLIQUE FRANCAISE AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS Attendu que M. Y..., qui souffrait d’une arthrose tricompartimentale du genou gauche, a été opéré le 29 janvier 1988 dans un établissement de santé, la Clinique Ambroise-Paré, par le docteur X..., qui lui a posé une prothèse totale de ce genou ; qu’après cette intervention, M. Y... a souffert d’une infection nosocomiale due à des staphylocoques dorés dont l’éradication a nécessité plusieurs interventions chirurgicales et des changements de prothèse, la consolidation n’intervenant que le 31 décembre 1990 et M. Y... étant atteint d’une IPP lui interdisant la poursuite de son activité professionnelle ; qu’il a engagé une action tant contre l’établissement de santé que contre M. X..., mais que l’arrêt attaqué, estimant que ces derniers n’avaient commis aucune faute à l’occasion de l’apparition de l’infection nosocomiale, les a mis hors de cause de ce chef ; que la cour d’appel a toutefois retenu que M. X... n’avait pas informé son patient du risque d’infection nosocomiale inhérent à la pose de la prothèse et évalué le préjudice en résultant pour M. Y... à la somme de 70 000 francs ; Sur le moyen unique du pourvoi incident de M. X... : (sans intérêt) ; Mais sur le moyen unique, pris en ses deux premières branches du pourvoi principal de la caisse primaire d’assurance maladie de la Seine-Saint-Denis :

Page 96: LE RECOURS DES TIERS PAYEURS ET L'IMPACT DU SYSTEME D

96/114

Vu les articles 1147 du Code civil et L. 376-1 du Code de la sécurité sociale ; Attendu que pour rejeter le recours de la caisse primaire d’assurance maladie de la Seine-Saint-Denis tendant au remboursement des prestations qu’elle avait servies à M. Y..., l’arrêt attaqué a énoncé qu’elle ne pouvait exciper utilement de la faute d’information retenue à l’encontre du docteur X... pour prétendre à quelque indemnisation que ce soit, dès lors que cette faute est étrangère à l’affection elle-même ayant entraîné les débours de cette Caisse et qu’en outre, le préjudice qui en a résulté pour M. Y..., de nature morale, lui est personnel ; Attendu, cependant, que dans le cas où la faute du médecin a fait perdre au patient la chance d’échapper à une atteinte à son intégrité physique, le dommage qui en résulte pour lui est fonction de la gravité de son état réel et de toutes les conséquence en découlant ; que sa réparation ne se limite pas au préjudice moral mais correspond à une fraction des différents chefs de préjudice qu’il a subis, de sorte qu’au titre des prestations qu’ils ont versées en relation directe avec le fait dommageable, les tiers payeurs peuvent exercer leur recours sur la somme allouée à la victime en réparation de la perte de chance d’éviter une atteinte à son intégrité physique, à l’exclusion de la part d’indemnité de caractère personnel ; D’où il suit qu’en statuant comme elle a fait, la cour d’appel a violé les textes susvisés ; Et sur la troisième branche du même moyen : Vu l’article 1147 du Code civil ; Attendu que le contrat d’hospitalisation et de soins conclu entre un patient et un établissement de santé met à la charge de ce dernier, en matière d’infection nosocomiale, une obligation de sécurité de résultat dont il ne peut se libérer qu’en rapportant la preuve d’une cause étrangère ; Attendu que pour débouter M. Y... de sa demande formée contre la Clinique Ambroise-Paré à raison de la survenance de l’infection nosocomiale, la cour d’appel a énoncé quaucune négligence ou défaillance fautive ne pouvait être reprochée à cet établissement de santé pendant la phase pré et postopératoire ; Attendu qu’en statuant ainsi, la cour d’appel a violé le texte susvisé ; PAR CES MOTIFS : CASSE ET ANNULE, sauf en ce que qu’il a décidé que M. X... était responsable, en raison de l’absence d’information sur le risque d’infection nosocomiale, de la perte de chance subie par M. Y..., l’arrêt rendu le 19 décembre 1996, entre les parties, par la cour d’appel de Versailles ; remet, en conséquence, quant à ce, la cause et les parties dans l’état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d’appel d’Amiens. Publication : Bulletin 1999 I N° 220 p. 141

Page 97: LE RECOURS DES TIERS PAYEURS ET L'IMPACT DU SYSTEME D

97/114

Document n°16

Arrêt du Conseil d'Etat du 13 juillet 2007

Conseil d’État N° 299693 Inédit au recueil Lebon 5ème et 4ème sous-sections réunies M. Martin Laprade, président M. Olivier Rousselle, rapporteur M. Olson, commissaire du gouvernement SCP GATINEAU ; SCP ROGER, SEVAUX ; LE PRADO, avocat(s) Lecture du vendredi 13 juillet 2007 REPUBLIQUE FRANCAISE AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS Vu la requête, enregistrée le 14 décembre 2006 au secrétariat du contentieux du Conseil d’Etat, présentée pour le CENTRE HOSPITALIER INTERCOMMUNAL D’EAUBONNE MONTMORENCY, dont le siège est 28 rue du Docteur Roux à Eaubonne (95602) ; le CENTRE HOSPITALIER INTERCOMMUNAL D’EAUBONNE MONTMORENCY demande au Conseil d’Etat : 1°) d’annuler l’ordonnance du 24 novembre 2006 par laquelle le juge des référés de la cour administrative d’appel de Versailles a rejeté sa requête tendant à l’annulation de l’ordonnance du 5 juin 2006 du juge des référés du tribunal administratif de Cergy-Pontoise en tant qu’elle a fait droit à la demande de provision présentée par Mme A et ordonné que les intérêts échus de la somme de 111 996,26 euros que le CENTRE HOSPITALIER INTERCOMMUNAL D’EAUBONNE MONTMORENCY a été condamné à verser à la caisse primaire d’assurance maladie des Hauts-de-Seine seront capitalisés à la date du 12 octobre 2006 puis à échéance annuelle à compter de cette date pour produire eux-mêmes intérêts ; 2°) statuant comme juge du référé provision de rejeter la demande de provision présentée par

Page 98: LE RECOURS DES TIERS PAYEURS ET L'IMPACT DU SYSTEME D

98/114

Mme A ; Vu les autres pièces du dossier ; Vu le code de la santé publique ; Vu la loi n° 2002-303 du 4 mars 2002 ; Vu la loi n° 2002-1577 du 30 décembre 2002 ; Vu le code de justice administrative ; Après avoir entendu en séance publique : - le rapport de M. Olivier Rousselle, Conseiller d’Etat, - les observations de Me Le Prado, avocat du CENTRE HOSPITALIER INTERCOMMUNAL D’EAUBONNE MONTMORENCY, de la SCP Gatineau, avocat de la caisse primaire d’assurance maladie des Hauts-de-Seine et de la SCP Roger, Sevaux, avocat de l’Office national de l’indemnisation des accidents médicaux, - les conclusions de M. Terry Olson, Commissaire du gouvernement ; Considérant qu’aux termes de l’article R. 541-1 du code de justice administrative : « Le juge des référés peut, même en l’absence d’une demande au fond, accorder une provision au créancier qui l’a saisi lorsque l’existence de l’obligation n’est pas sérieusement contestable. Il peut, même d’office, subordonner le versement de la provision à la constitution d’une garantie » ; Considérant que, en application de ces dispositions, le juge des référés de la cour administrative d’appel de Versailles a, par une ordonnance du 24 novembre 2006, rejeté la requête du CENTRE HOSPITALIER INTERCOMMUNAL D’EAUBONNE MONTMORENCY tendant à l’annulation de l’ordonnance du juge des référés du tribunal administratif de Cergy-Pontoise le condamnant à verser à Mme et à la caisse primaire d’assurance maladie des Hauts-de-Seine des provisions en réparation des dommages subis par Mme A du fait d’une infection nosocomiale consécutive à une intervention subie en août 2002 dans ce centre hospitalier et ayant entraîné une invalidité permanente de 40% ; Considérant, en premier lieu, qu’aux termes du I de l’article L. 1142-1 du code de la santé publique, dans sa rédaction issue de l’article 98 de la loi du 4 mars 2002 relative aux droits des malades et à la qualité du système de santé, : « Hors le cas où leur responsabilité est

Page 99: LE RECOURS DES TIERS PAYEURS ET L'IMPACT DU SYSTEME D

99/114

encourue en raison d’un défaut d’un produit de santé, les professionnels de santé ..., ainsi que tout établissement, service ou organisme dans lesquels sont réalisés des actes individuels de prévention, de diagnostic ou de soins ne sont responsables des conséquences dommageables d’actes de prévention, de diagnostic ou de soins qu’en cas de faute. / Les établissements, services et organismes susmentionnés sont responsables des dommages résultant d’infections nosocomiales, sauf s’ils rapportent la preuve d’une cause étrangère » ; que selon le II du même article, lorsque la responsabilité d’un professionnel, d’un établissement, service ou organisme mentionné au I ou d’un producteur de produits n’est pas engagée, les victimes d’un accident médical, d’une affection iatrogène ou d’une infection nosocomiale peuvent prétendre à la réparation de leurs préjudices au titre de la solidarité nationale dans des conditions tenant au degré de leur invalidité et précisées par décret ; qu’en vertu de l’article L. 1142-22 du même code, l’Office national d’indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales (ONIAM) est chargé de cette indemnisation au titre de la solidarité nationale ; Considérant qu’en vertu de l’article 101 de la loi du 4 mars 2002, et comme l’a expressément confirmé l’article 3 de la loi du 30 décembre 2002 relative à la responsabilité médicale, ces dispositions sont applicables aux infections nosocomiales consécutives à des soins réalisés à compter du 5 septembre 2001 ; que l’ordonnance n’est par suite pas entachée d’erreur de droit sur ce point ; Considérant, en deuxième lieu, qu’aux termes de l’article L. 1142-1-1 du code de la santé publique, dans sa rédaction issue de l’article 1er de la loi du 30 décembre 2002 : « Sans préjudice des dispositions du septième alinéa de l’article L. 1142-17, ouvrent droit à réparation au titre de la solidarité nationale : / 1º Les dommages résultant d’infections nosocomiales dans les établissements, services ou organismes mentionnés au premier alinéa du I de l’article L. 1142-1 correspondant à un taux d’incapacité permanente supérieur à 25 % déterminé par référence au barème mentionné au II du même article, ainsi que les décès provoqués par ces infections nosocomiales (...) » ; que ces dispositions, distinctes de celles qui résultaient de la loi du 4 mars 2002 précitée, ont créé un nouveau régime de prise en charge par la solidarité nationale des dommages résultant des infections nosocomiales, à la seule condition qu’elles aient entraîné un taux d’incapacité permanente supérieur à 25% ou le décès du patient ; qu’il ne résulte ni des termes de la loi du 30 décembre 2002 ni de ses travaux préparatoires que le législateur ait entendu conférer à ces nouvelles dispositions une portée rétroactive, en sorte que ce nouveau régime n’est entré en vigueur qu’à la publication de cette loi au Journal officiel le 1er janvier 2003 ; que dès lors, le juge des référés de la cour administrative d’appel de Versailles n’a pas commis d’erreur de droit et n’a pas excédé son office en jugeant que ces dispositions ne s’appliquent qu’aux conséquences dommageables des infections nosocomiales consécutives à des activités de prévention, de diagnostic ou de soins réalisées à compter du 1er janvier 2003, et que le centre hospitalier n’était dès lors pas fondé à se prévaloir des dispositions de l’article L. 1142-1-1 du code de la santé publique pour s’exonérer de sa responsabilité à raison d’une infection nosocomiale consécutive à une intervention réalisée en août 2002 ; Considérant qu’il en résulte que, le juge des référés de la cour administrative d’appel de Versailles, après avoir souverainement relevé que le CENTRE HOSPITALIER INTERCOMMUNAL D’EAUBONNE MONTMORENCY ne contestait pas le caractère nosocomial de l’infection contractée par Mme A au mois d’août 2002 et ne rapportait pas la preuve d’une cause étrangère, n’a pas commis d’erreur de droit en déduisant de ces constatations, par une ordonnance suffisamment motivée, que le centre hospitalier avait l’obligation non sérieusement contestable de réparer les dommages consécutifs à cette

Page 100: LE RECOURS DES TIERS PAYEURS ET L'IMPACT DU SYSTEME D

100/114

infection ; Considérant qu’il résulte de ce qui précède que le CENTRE HOSPITALIER INTERCOMMUNAL D’EAUBONNE MONTMORENCY n’est pas fondé à demander l’annulation de l’ordonnance du juge des référés de la cour administrative d’appel de Versailles du 24 novembre 2006 ; Considérant qu’il y a lieu de faire application des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative et de mettre à la charge du CENTRE HOSPITALIER INTERCOMMUNAL D’EAUBONNE MONTMORENCY la somme de 3000 euros que demande l’Office national d’indemnisation des accidents médicaux, affections iatrogènes et infections nosocomiales (ONIAM) à ce titre, et celle de 3050 euros que demande la caisse primaire d’assurance maladie des Hauts-de-Seine au même titre ; D E C I D E : -------------- Article 1er : La requête du CENTRE HOSPITALIER INTERCOMMUNAL D’EAUBONNE MONTMORENCY est rejetée. Article 2 : Le CENTRE HOSPITALIER INTERCOMMUNAL D’EAUBONNE MONTMORENCY versera, au titre de l’article L.761-1 du code de justice administrative, une somme de 3000 euros à l’Office national d’indemnisation des accidents médicaux, affections iatrogènes et infections nosocomiales (ONIAM) et de 3050 euros à la caisse primaire d’assurance maladie des Hauts-de-Seine. Article 3 : La présente décision sera notifiée au CENTRE HOSPITALIER INTERCOMMUNAL D’EAUBONNE MONTMORENCY, à Mme Simone A, à l’Office national de l’indemnisation des accidents médicaux, affections iatrogènes et infections nosocomiales, à la caisse primaire d’assurance maladie des Hauts-de-Seine et au ministre de la santé, de la jeunesse et des sports.

Page 101: LE RECOURS DES TIERS PAYEURS ET L'IMPACT DU SYSTEME D

101/114

Document n°17 Cass, civ 1, 9 avril 2014 : revirement de jurisprudence. Vide juridique pour les tiers payeurs : aucun recours possible en recouvrement de leur créance. Cour de casation chambre civile 1 Audience publique du 9 avril 2014 N° de pourvoi: 13-16165 ECLI:FR:CCASS:2014:C100393 Publié au bulletin Cassation M. Charruault, président Mme Dreifuss-Netter, conseiller apporteur M. Sudre, avocat général Me Foussard, Me Le Prado, avocat(s) REPUBLIQUE FRANCAISE AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l’arrêt suivant : Sur le moyen unique, pris en sa première branche : Vu les articles L. 1142-1-1, L. 1142-17, alinéas 2 et 7, L. 1142-21, I, alinéa 2, du code de la santé publique, ensemble l’article L. 376-1 du code de la sécurité sociale ; Attendu qu’en vertu du premier de ces textes, applicable aux infections nosocomiales contractées postérieurement à l’entrée en vigueur de la loi n° 2002-1577 du 30 décembre 2002, ouvrent droit à réparation au titre de la solidarité nationale les dommages résultant d’infections nosocomiales correspondant à un taux d’incapacité permanente ou d’atteinte permanente à l’intégrité physique ou psychique supérieur à 25 % ainsi que les décès provoqués par ces infections, l’Office national d’indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales (l’ONIAM) étant seul tenu d’indemniser les victimes, déduction faite, en vertu du deuxième des textes susvisés, alinéa 2, des prestations énumérées à l’article 29 de la loi n° 85-677 du 5 juillet 2005, au nombre desquelles figurent les sommes versées par les caisses d’assurance-maladie ; qu’il résulte du septième alinéa du même texte et du troisième des textes susvisés, que l’établissement de santé dans lequel l’infection a été contractée peut uniquement en cas de faute, consistant notamment en un manquement à ses obligations réglementaires en matière de lutte contre les

Page 102: LE RECOURS DES TIERS PAYEURS ET L'IMPACT DU SYSTEME D

102/114

infections nosocomiales, être appelé à indemniser l’ONIAM, de tout ou partie des sommes qu’il a versées ; Qu’il en résulte, d’une part, que la victime, lorsque l’article L. 1142-1-1 du code de la santé publique est applicable, n’étant titulaire d’aucune action à l’encontre de l’établissement de santé où l’infection a été contractée, les caisses d’assurance-maladie ne disposent d’aucune action subrogatoire à l’encontre de cet établissement, d’autre part, qu’aucun des textes susvisés ne confère, aux dites caisses, d’action récursoire envers l’établissement de santé au titre des sommes qu’elles ont versées à leur assuré ou pour son compte ; Attendu que, pour condamner le Centre régional de lutte contre le cancer Paul Papin (le Centre) et la Société hospitalière d’assurance mutuelle (la SHAM), son assureur, à verser certaines sommes à la caisse primaire d’assurance maladie de Maine-et-Loire (CPAM), au titre des débours exposés et de l’indemnité forfaitaire versée à Joël Y..., en raison de l’infection nosocomiale par lui contractée à l’occasion de la pose, dans cet établissement, le 27 décembre 2006, d’une chambre implantable, infection dont il est décédé le 29 janvier 2007, l’arrêt retient que la CPAM, n’ayant pas plus de droits que l’ONIAM mais bénéficiant d’un régime juridique différent de ce dernier, en vertu de l’article L. 376-1 du code de la sécurité sociale, disposait d’un recours de droit commun envers le Centre, responsable sans faute de l’infection ; En quoi la cour d’appel a violé les textes susvisés, les trois premiers par refus d’application, le quatrième par fausse application ; PAR CES MOTIFS, et sans qu’il y ait lieu de statuer sur les autres branches du moyen : CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l’arrêt rendu le 17 janvier 2013, entre les parties, par la cour d’appel d’Angers ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l’état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d’appel de Rennes ; Condamne la caisse primaire d’assurance maladie de Maine-et-Loire aux dépens ; Vu l’article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ; Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l’arrêt cassé ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du neuf avril deux mille quatorze. MOYEN ANNEXE au présent arrêt Moyen produit par Me Le Prado, avocat aux Conseils, pour la Société hospitalière d’assurances mutuelles et l’Institut de cancérologie de l’Ouest. Le moyen reproche à l’arrêt attaqué : D’AVOIR condamné in solidum l’institut de cancérologie de l’Ouest, venant aux droits du centre régional de lutte contre le cancer Paul Papin et son assureur, la SHAM à payer à la caisse primaire d’assurance maladie de Maine-et-Loire les sommes de 30. 660 euros avec intérêts au taux légal à compter du 27 octobre 2010 au titre des débours qu’elle a exposés et de 1495, 50 euros au titre de l’indemnité forfaitaire majorée ; AUX MOTIFS PROPRES QU’« il n’est pas discuté que le décès de Monsieur Y...est dû à une infection nosocomiale survenue en l’état d’une aplasie précoce sans qu’aucune faute ne puisse être reprochée à l’établissement de santé ; que ce sinistre est pris en charge dans le cadre des dispositions de l’article L. 1142-1-1° du code de la santé publique qui dispose « sans préjudice des dispositions du 7ème alinéa de l’article L. 1142-17, ouvrent droit à réparation au titre de la solidarité nationale, les dommages résultant d’infections nosocomiales dans les établissements, services ou organismes mentionnés au premier alinéa du I de l’article L. 1142-1 ainsi que les décès provoqués par ces infections nosocomiales » ; qu’à défaut de faute démontrée de l’établissement de santé, l’Oniam ne dispose pas du recours subrogatoire prévu par L. 1142-17 du code de la santé publique ; que les appelants, faisant état des débats parlementaires lors de la loi du 30 décembre 2002 dite About, soutiennent que le législateur a souhaité transférer les coûts de l’indemnisation des infections nosocomiales graves à la solidarité nationale à travers l’Oniam et qu’ainsi l’indemnisation de la caisse primaire d’assurance maladie de Maine et Loire incombe à l’Oniam ; que toutefois il convient de

Page 103: LE RECOURS DES TIERS PAYEURS ET L'IMPACT DU SYSTEME D

103/114

remarquer que les débats parlementaires n’évoquent pas la prise en charge de la créance des tiers payeurs ; qu’ils font également état des conclusions en date du 21 avril 2009, de Madame Anne Dulmet, commissaire du gouvernement, devant le tribunal administratif de Strasbourg desquelles il résulterait que la prise en charge par l’Oniam de l’indemnisation de la victime au titre de la solidarité nationale, exclut de fait le recours des tiers payeurs ; que c’est omettre que Madame Dulmet souligne que la loi du 4 mars 2002 ne mentionne pas l’indemnisation des caisses au titre de la solidarité nationale, que l’Oniam n’est pas l’auteur de l’acte dommageable, que l’indemnisation par la solidarité nationale ne concerne que les victimes physiques du dommage ; que l’Oniam ne peut être condamné à indemniser la caisse primaire d’assurance maladie au titre de la solidarité nationale ; que les pièces versées aux débats par les appelants démontrent que l’Oniam n’est pas compétent pour rembourser à la caisse primaire d’assurance maladie de Maine et Loire le montant de ses débours ; qu’aux termes de l’article L. 376-1 du code de la sécurité sociale : « lorsque, sans entrer dans les cas régis par les dispositions législatives applicables aux accidents du travail, la lésion dont l’assuré social ou son ayant droit est atteint est imputable à un tiers, l’assuré ou ses ayants droits conservent contre l’auteur de l’accident le droit de demander la réparation du préjudice causé, conformément aux règles du droit commun, dans la mesure où ce préjudice n’est pas réparé par application du présent livre. Les caisses de sécurité sociale sont tenues de servir à l’assuré ou à ses ayants droits les prestations prévues par le présent livre, sauf recours de leur part contre l’auteur responsable de l’accident » ; que la caisse primaire d’assurance maladie dispose ainsi d’un recours de droit commun à l’encontre du responsable sans faute de l’infection nosocomiale : la caisse primaire d’assurance maladie n’a pas plus de droits que l’Oniam mais bénéficie d’un régime juridique différent résultant des dispositions de l’article susvisé ; que d’ailleurs au niveau même de la prise en charge de la victime, les dispositions de l’article 1142-17 du code de la santé publique prévoient que l’Oniam indemnise uniquement le préjudice même de la victime, celui resté à sa charge et non un préjudice incluant les dépenses engagées pour la victime par la caisse de sécurité sociale : l’offre d’indemnisation visée à cet article est faite après déduction des prestations énumérées à l’article 29 de la loi n° 85-677 du 7 juillet 1985 qui comprennent les prestations versées par les organismes de sécurité sociale ; qu’ainsi le jugement déféré est confirmé en ce qu’il a condamné in solidum l’institut de cancérologie de l’Ouest et la Sham à verser à la caisse primaire d’assurance maladie le montant de ses débours ; que toutefois ceux-ci s’élèvent à la somme de 30. 660 ¿ suivant notification en date du 9 août 2010 et non à 30. 066 ¿ comme indiqué par erreur purement matérielle dans le jugement qui sera infirmé sur ce point » ; ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE « l’article L. 376-1 du code de la sécurité sociale dispose que : “ Lorsque, sans entrer dans les cas régis par les dispositions législatives applicables aux accidents du travail, la lésion dont l’assuré social ou son ayant droit est atteint est imputable à un tiers, l’assuré ou ses ayants droit conserve contre l’auteur de l’accident le droit de demander la réparation du préjudice causé, conformément aux règles du droit commun, dans la mesure où ce préjudice n’est pas réparé par application du présent livre. Les caisses de sécurité sociale sont tenues de servir à l’assuré ou à ses ayants droit les prestations prévues par le présent livre, sauf recours de leur part contre l’auteur responsable de l’accident “ ; que, par ailleurs, en vertu de l’article L. 1142-1 I alinéa 2 du code de la santé publique, les établissements, services et organismes dans lesquels sont réalisés des actes individuels de prévention, de diagnostic ou de soins sont responsables des dommages résultant d’infections nosocomiales, sauf s’ils rapportent la preuve d’une cause étrangère ; qu’en l’espèce, il est constant que les préjudices des ayants droit de Monsieur Y...ont été pris en charge par la solidarité nationale-à travers l’ONIAM-et que celui-ci n’a pas exercé d’action subrogatoire contre l’établissement de santé, en l’absence de faute imputable à la clinique ; qu’il ressort en effet du rapport d’expertise des docteurs A...et B... que le décès de Monsieur Y...est dû à une infection nosocomiale contractée lors de son hospitalisation au Centre Paul PAPIN et dont l’évolution a été gravissime en raison de la survenue d’une aplasie précoce sans qu’aucune faute ne puisse être reprochée à l’établissement de santé ; que si les défendeurs soutiennent que tout comme l’ONIAM, la Caisse ne peut exercer de recours à l’encontre de

Page 104: LE RECOURS DES TIERS PAYEURS ET L'IMPACT DU SYSTEME D

104/114

l’établissement de santé en l’absence de tout manquement pouvant lui être reproché, il convient d’observer que l’article L. 1142-1-17, qui subordonne le recours subrogatoire contre l’établissement de santé à la preuve d’une faute de ce dernier à l’origine du dommage et notamment en matière de lutte contre les infections nosocomiales à la preuve d’un manquement caractérisé aux obligations posées par la réglementation, ne s’applique qu’à l’ONIAM et que les caisses de sécurité sociale disposent d’un droit propre et autonome en vertu de l’article L. 376-1 précité ; que l’article L. 1142-1 I alinéa 2 ayant expressément consacré la responsabilité des établissements de santé dans le cas des infections nosocomiales, il y a lieu d’en déduire que la Caisse est fondée, en vertu de son droit propre, à exercer un recours contre l’établissement de santé responsable des dommages résultant de l’infection nosocomiale contractée, même en l’absence de faute de celui-ci, sauf pour ce dernier à rapporter la preuve d’une cause étrangère exonératoire ; qu’en l’espèce, le Centre Paul PAPIN n’invoque pas l’existence d’une cause étrangère et la Caisse justifie par la production de la notification des débours définitifs en date du 9 août 2010 avoir exposé des débours suite au traitement de l’infection nosocomiale dont a été victime Monsieur Joël Y...(frais d’hospitalisation du 10 au 29 janvier 2007) à hauteur de 30. 066 ¿ ; que, dans ces conditions, il sera fait droit à la demande de la Caisse et l’Institut de Cancérologie de l’Ouest venant aux droits du Centre Régional de Lutte contre le Cancer Paul Papin et la SHAM seront par conséquent condamnés in solidum à lui rembourser la somme de 30. 066 ¿ correspondant à ses débours, ce avec intérêts au taux légal à compter du 27 octobre 2010, date de signification de l’assignation à la SHAM » ; 1°/ ALORS, d’une part QU’aux termes de l’article L. 1142-1-1 du code de la santé publique, ouvrent droit à réparation au titre de la solidarité nationale les dommages résultant d’infections nosocomiales dans les établissements, services ou organismes mentionnés au premier alinéa du I de l’article L. 1142-1 correspondant à un taux d’atteinte permanente à l’intégrité physique ou psychique supérieur à 25 % déterminé par référence au barème mentionné au II du même article, ainsi que les décès provoqués par ces infections nosocomiales les décès provoqués par les infections nosocomiales dans les établissements de soins ; que la prise en charge des dommages résultant d’infections nosocomiales et décès provoqués par elles par l’office national d’indemnisation des accidents médicaux est exclusif de tout recours exercé par les tiers payeurs à l’encontre de l’établissement de santé dans lequel a été contractée l’infection nosocomiale ; qu’en décidant du contraire, la cour d’appel a violé la disposition précitée ensemble l’article L. 376-1 du code de la sécurité sociale ; 2°/ ALORS, d’autre part et en toutes hypothèses, QUE, dans leurs écritures d’appel, l’institut de cancérologie de l’Ouest et la SHAM (concl., p. 11 et s.) ont fait valoir que le fondement de l’article L. 376-1 du code de la sécurité sociale est la subrogation des organismes sociaux dans les droits de la victime, laquelle ne peut subroger les tiers payeurs dans des droits qu’elle n’a pas, de sorte que la caisse primaire d’assurance maladie ne peut se voir octroyer une action récursoire à l’encontre de l’établissement au sein duquel l’infection nosocomiale a été contractée, la victime ne disposant pas d’un tel droit, suivant la jurisprudence du Conseil d’Etat ; qu’en laissant sans réponse ces conclusions, la cour d’appel a violé l’article 455 du code de procédure civile ; 3°/ ALORS, enfin et en toutes hypothèses, QU’aux termes de l’article L. 1142-17 du code de la santé publique, si l’office qui a transigé avec la victime estime que la responsabilité d’un professionnel, établissement, service, organisme ou producteur de produits de santé mentionnés au premier alinéa de l’article L. 1142-14 est engagée, il dispose d’une action subrogatoire contre celui-ci ; qu’aux termes du même texte, cette action subrogatoire ne peut être exercée par l’office lorsque les dommages sont indemnisés au titre de l’article L. 1142-1-1, sauf en cas de faute établie de l’assuré à l’origine du dommage, notamment le manquement caractérisé aux obligations posées par la réglementation en matière de lutte contre les infections nosocomiales ; qu’aux termes de l’article L. 1142-21, al. 2 du même code, lorsqu’il résulte de la décision du juge que l’office indemnise la victime ou ses ayants droit au titre de l’article L. 1142-1-1, celui-ci ne peut exercer une action récursoire contre le professionnel, l’établissement de santé, le service ou l’organisme concerné ou son assureur, sauf en cas de

Page 105: LE RECOURS DES TIERS PAYEURS ET L'IMPACT DU SYSTEME D

105/114

faute établie à l’origine du dommage, notamment le manquement caractérisé aux obligations posées par la réglementation en matière de lutte contre les infections nosocomiales ; que, si en application de l’article L. 376-1 du code de la sécurité sociale les tiers payeurs peuvent exercer leur recours subrogatoire contre l’établissement de santé en sa qualité de responsable des dommages résultant d’infections nosocomiales, il se déduit des dispositions combinées des articles L. 1142-17 et L. 1142-21, al. 2 du code de la santé publique, relatives au recours subrogatoire ouvert à l’ONIAM, que lorsque l’indemnisation de la victime d’une infection nosocomiale est assurée au titre de la solidarité nationale, le législateur a entendu que la responsabilité de l’établissement de santé dans lequel l’infection a été contractée ne puisse être recherchée par l’ONIAM et les tiers payeurs subrogés dans les droits de la victime, que dans les cas où, conformément aux dispositions des articles précités, le dommage est imputable à une faute de l’établissement de santé ; qu’en retenant cependant que la caisse primaire d’assurance maladie dispose d’un recours de droit commun à l’encontre du responsable sans faute de l’infection nosocomiale, et que n’ayant pas plus de droits que l’ONIAM, elle bénéficie d’un régime juridique différent résultant des dispositions de l’article L. 376-1 du code de la sécurité sociale et en refusant, par motifs adoptés, à l’établissement de santé le bénéfice de l’article L. 1142-17 du code de la santé publique, tout en constatant qu’aucun faute ne pouvait lui être reprochée, la cour d’appel a violé les dispositions susvisées. Publication : Décision attaquée : Cour d’appel d’Angers , du 17 janvier 2013 Titrages et résumés : SANTE PUBLIQUE - Protection des personnes en matière de santé - Réparation des conséquences des risques sanitaires - Risques sanitaires résultant du fonctionnement du système de santé - Indemnisation des victimes - Indemnisation par l’Office national d’indemnisation des accidents médicaux - Cas - Indemnisation des dommages résultant d’infections nosocomiales - Action récursoire ou subrogatoire contre l’établissement de santé - Conditions - Détermination - Portée Il résulte de la combinaison des articles L. 1142-1-1 du code de la santé publique, applicable aux infections nosocomiales contractées postérieurement à l’entrée en vigueur de la loi n° 2002-1577 du 30 décembre 2002, L. 1142-17, alinéas 2 et 7, et L. 1142-21, I, alinéa 2, du code de la santé publique, que l’ONIAM est seul tenu d’indemniser les victimes de ces infections, déduction faite notamment des sommes versées par les caisses d’assurance maladie, l’établissement de santé dans lequel elles ont été contractées pouvant seulement, en cas de faute, consistant notamment en un manquement à ses obligations réglementaires en matière de lutte contre les infections nosocomiales, être appelé à indemniser l’ONIAM de tout ou partie des sommes qu’il a versées. Dès lors, les caisses d’assurance maladie ne disposent, à l’encontre de l’établissement et au titre des sommes qu’elles ont versées à leur assuré ou pour son compte, ni d’une action subrogatoire, la victime n’étant elle-même titulaire d’aucune action, ni d’une action récursoire, qu’aucun des textes susvisés ne lui confère

Page 106: LE RECOURS DES TIERS PAYEURS ET L'IMPACT DU SYSTEME D

106/114

Document n°18 : Cass, civ, 4 juin 2014 : Les tiers payeurs ne disposent pas d’action récursoire en recouvrement de leur créance

Cour de cassation, civile, Chambre civile 1, 4 juin 2014, 13-17.223

LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant : Sur le moyen unique : Vu les articles L. 1142-1-1, L. 1142-17, alinéas 2 et 3, et L. 1142-21, alinéa 1er, du code de la santé publique ; Attendu qu'en vertu du premier de ces textes, applicable aux infections nosocomiales contractées postérieurement à l'entrée en vigueur de la loi n° 2002-1577 du 30 décembre 2002, ouvrent droit à réparation au titre de la solidarité nationale les dommages correspondant à un taux d'incapacité permanente ou d'atteinte permanente à l'intégrité physique ou psychique supérieur à 25 % ainsi que les décès provoqués par ces infections, l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales (l'ONIAM) étant seul tenu d'indemniser les victimes, déduction faite, en vertu de l'article L. 1142-17, deuxième alinéa, des prestations énumérées à l'article 29 de la loi n° 85-677 du 5 juillet 2005, au nombre desquelles figurent les sommes versées par les caisses d'assurance maladie ; qu'il résulte du troisième alinéa du même article et de l'article L. 1142-21, alinéa 1er, que l'établissement de santé dans lequel l'infection a été contractée peut seulement, en cas de faute, consistant notamment en un manquement à ses obligations réglementaires en matière de lutte contre les infections nosocomiales, être appelé à indemniser l'ONIAM, au titre d'une action récursoire ou subrogatoire, de tout ou partie des sommes mises à sa charge ; Attendu que, pour condamner la société clinique du Sud Vendée et son assureur, la société Axa, à rembourser à la Mutualité sociale agricole de Loire-Atlantique Vendée le montant des prestations versées à Mme X..., victime d'une infection nosocomiale contractée lors d'une opération de la cataracte pratiquée, le 8 septembre 2004, par un médecin de la Clinique du Sud Vendée, l'arrêt attaqué retient que, si l'article L. 1142-17 du code de la santé publique interdit à l'ONIAM, lorsqu'il a indemnisé au titre de la solidarité nationale la victime d'une infection nosocomiale, d'exercer un recours subrogatoire contre l'établissement de soins dans lequel celle-ci a été contractée, en revanche, les tiers payeurs sont en droit d'exercer leur action récursoire contre l'établissement auquel le dommage est imputable, même s'il n'a pas commis de faute, puisqu'en cas d'indemnisation au nom de la solidarité nationale, l'ONIAM n'est légalement substitué à l'auteur du dommage que pour la seule réparation de la part du préjudice revenant à la victime, à l'exclusion des prestations des tiers payeurs que ceux-ci ne peuvent d'ailleurs en aucun cas réclamer à l'ONIAM ; Qu'en statuant ainsi, alors qu'aucun des textes susvisés ne confère, aux tiers payeurs, d'action récursoire envers l'établissement de santé au titre des sommes qu'elles ont versées à leur assuré ou pour son compte, la cour d'appel en a fait une fausse application ; PAR CES MOTIFS : CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 27 février 2013, entre les

Page 107: LE RECOURS DES TIERS PAYEURS ET L'IMPACT DU SYSTEME D

107/114

parties, par la cour d'appel de Poitiers ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Limoges ; Condamne la Mutualité sociale agricole de Loire-Atlantique Vendée aux dépens ; Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la Mutualité sociale agricole de Loire-Atlantique Vendée ; la condamne à payer à la société Axa France IARD et à la Clinique Sud Vendée la somme globale de 3 000 euros ; Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du quatre juin deux mille quatorze. MOYEN ANNEXE au présent arrêt Moyen produit par la SCP Célice, Blancpain et Soltner, avocat aux Conseils, pour la société Axa France IARD et la société Clinique du Sud Vendée Il est fait grief à l'arrêt attaqué D'AVOIR condamné solidairement la CLINIQUE DU SUD VENDEE et la compagnie AXA FRANCE IARD à payer à la MUTUALITE SOCIALE AGRICOLE DE LOIRE ATLANTIQUE VENDEE les sommes de 20. 831, 98 ¿ avec intérêts au taux légal à compter du 23 juillet 2007 et 966 ¿ au titre de l'indemnité forfaitaire de gestion, AUX MOTIFS PROPRES QUE « Thérèse X..., assurée sociale auprès de la MSA de Loire Atlantique Vendée, a été opérée de la cataracte le 8 septembre 2004 par un médecin de la clinique du Sud Vendée à Fontenay-le-Comte, intervention au cours de laquelle elle a été contracté une infection nosocomiale par staphylococcus epidermitis, avec pour principale conséquence dommageable une perte de la vision de l'oeil gauche. La victime a saisi la Commission régionale de conciliation et indemnisation des accidents médicaux puis l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales (Oniam) qui l'a indemnisée de son préjudice au nom de la solidarité nationale, l'expert désigné ayant retenu une incapacité permanente partielle de 26 %. La Mutualité sociale agricole de Charente-Maritime (MSA) a engagé une action contre la société clinique dit Sud Vendée et contre son assureur la société Axa France, en paiement des prestations servies à Thérèse X...dans le cadre des soins et traitements consécutifs à cette infection nosocomiale et le tribunal de grande instance de La Roche-sur-Yon a fait droit à cette demande, ce que la clinique et son assureur contestent en appel. L'article L. 1142-17 du code de la santé publique interdit à l'Oniam, lorsqu'il a indemnisé au titre de la solidarité nationale la victime d'une infection nosocomiale, d'exercer un recours subrogatoire contre l'établissement de soins dans lequel celle-ci a été contractée. En revanche les tiers payeurs sont en droit d'exercer leur action récursoire contre l'établissement auquel le dommage est imputable-même s'il n'a pas commis de faute-puisqu'en cas d'indemnisation au nom de la solidarité nationale l'Oniam n'est légalement substitué à l'auteur du dommage que pour la seule réparation de la part de préjudice revenant à la victime, à l'exclusion des prestations des tiers payeurs que ceux-ci ne peuvent d'ailleurs en aucun cas réclamer à l'Oniam » ; ET AUX MOTIFS SUPPOSEMENT ADOPTES QU'« il résulte des dispositions de l'article L. 1142-1- I alinéa 2 du code de la santé publique que " les professionnels de santé sont responsables des dommages résultant d'infections nosocomiales sauf s'ils rapportent la preuve d'une cause étrangère ". L'article L. 1142-1-1 du même code dispose que les dommages résultant d'infections nosocomiales correspondant à un taux d'incapacité supérieur à 25 %

Page 108: LE RECOURS DES TIERS PAYEURS ET L'IMPACT DU SYSTEME D

108/114

ouvrent droit à réparation au titre de la solidarité nationale. Par ailleurs, l'article L. 1142-17 du code de la santé publique fait interdiction à ONIAM qui a indemnisé la victime au titre de la solidarité nationale d'exercer son action subrogatoire contre l'établissement sauf en cas de faute de ce dernier. Ces dispositions organisent ainsi un régime d'indemnisation spécifique des infections nosocomiales ayant causé une atteinte permanente supérieure à 25 % même en présence d'un établissement responsable qui n'est nullement exonéré de sa responsabilité. L'article L 376-1 du code de la sécurité sociale prévoit en outre que " si la responsabilité du tiers est entière ou si elle est partagée avec la victime, la caisse est admise à poursuivre le remboursement des prestations mises à sa charge ". Ainsi le fait que l'ONIAM n'ait pas la possibilité de recourir contre l'établissement en l'absence de faute prouvée et en présence d'un taux supérieur à 25 % ne saurait faire obstacle au droit de recourir de l'organisme de sécurité sociale pour le recouvrement des prestations servies à la victime. En l'espèce, il résulte du rapport d'expertise du Docteur A... que Madame X...a été victime d'une infection nosocomiale ayant entraîné une incapacité permanente partielle de 26 %. En conséquence, l'indemnisation de son préjudice incombe à la solidarité nationale. L'impossibilité pour I'ONIAM de recourir contre la clinique en l'absence de faute prouvée ne s'oppose cependant pas au recours de la MSA qui est fondée sur la responsabilité sans faute de celle-ci. Le montant des prestations versées par la MSA à son assurée s'élève au regard de l'état de créance définitif produit à 20. 831, 98 euros. LA CLINIQUE SUD VENDEE et son assureur AXA seront condamnés solidairement à payer cette somme à la MSA, outre les intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 23 JUILLET 2007. Conformément aux dispositions de l'article 1154 du code civil, la capitalisation des intérêts sera ordonnée. En application des dispositions de l'article L 454-1 du code de la sécurité sociale, la caisse est fondée à solliciter une indemnité forfaitaire de gestion d'un montant de 966 euros » ; 1°) ALORS QUE l'action subrogatoire ouverte aux tiers payeurs par l'article L. 376-1 du code de la sécurité sociale ne peut être exercée que dans la limite des droits dont dispose la victime contre l'auteur d'un dommage ; que l'article L. 1142-1-1 du code de la santé publique, créé par la loi n° 2002-1577 du 30 décembre 2002, a mis à la cha rge de l'ONIAM l'indemnisation des dommages résultant d'infections nosocomiales correspondant à un taux d'atteinte permanente à l'intégrité physique ou psychique supérieur à 25 % ; que lorsque les conditions d'application de ce texte sont réunies, la victime ne peut agir en indemnisation que contre l'ONIAM intervenant au titre de la solidarité nationale, non contre l'établissement de santé dans lequel l'infection nosocomiale aurait été contractée ; qu'il s'ensuit que le tiers payeur ayant versé des prestations à la victime d'une infection nosocomiale présentant le caractère de gravité prévu à l'article L. 1142-1-1 du code de la santé publique ne peut exercer de recours contre l'établissement de santé qu'il estime responsable de l'infection, ni contre son assureur ; que pour juger que la MUTUALITE SOCIALE AGRICOLE, organisme social auquel était affiliée Madame X..., était fondée à exercer un recours en remboursement des sommes versées à cette dernière contre la société AXA FRANCE IARD, assureur de la CLINIQUE DU SUD VENDEE, établissement dans lequel Madame X...avait subi le 8 septembre 2004 une intervention chirurgicale au cours de laquelle elle estimait avoir contracté une infection nosocomiale ayant entraîné une incapacité permanente partielle évaluée par voie d'expertise à 26 %, la Cour d'appel a retenu que les tiers payeurs étaient en droit d'exercer une action récursoire contre l'établissement auquel le dommage était imputable, même en l'absence de faute de celui-ci, dans la mesure où en cas d'indemnisation de la victime par l'ONIAM au titre de la solidarité nationale, l'office n'était légalement substitué à l'auteur du dommage que pour la seule part de préjudice revenant à la victime, à l'exclusion des prestations des tiers payeurs que ceux-ci ne pouvaient réclamer à l'ONIAM ; qu'en statuant de la sorte, quand il résultait de ses propres constatations que l'infection nosocomiale contractée par Madame X...avait causé à cette dernière une incapacité permanente partielle de 26 %, entrant par conséquent dans le champ d'application de l'article L. 1142-1-1 du code de la santé publique, imposant l'intervention de l'ONIAM au titre de la solidarité nationale sans que la victime puisse recourir

Page 109: LE RECOURS DES TIERS PAYEURS ET L'IMPACT DU SYSTEME D

109/114

à un quelconque titre contre l'établissement de santé, ce dont il résultait que la MUTUALITE SOCIALE AGRICOLE, qui ne pouvait avoir plus de droits que la victime dans les droits de laquelle elle était subrogée, ne disposait d'aucun recours contre la CLINIQUE DU SUD VENDEE et son assureur AXA FRANCE IARD, la Cour d'appel a violé les articles L. 1142-1-1, L. 1142-17 et L. 1142-21 du code de la santé publique ; 2°) ALORS, SUBSIDIAIREMENT, QU'il résulte des dispositions des articles L. 1142-1-1, L. 1142-17 et L. 1142-21 du Code de la santé publique que l'ONIAM est seul tenu d'assurer, au titre de la solidarité nationale, la réparation des dommages résultant des infections nosocomiales ayant entraîné un taux d'incapacité permanente supérieur à 25 % ; que l'établissement de santé dans lequel l'infection a été contractée peut uniquement, en cas de faute, être appelé à indemniser l'ONIAM dans le cadre d'une action récursoire ou subrogatoire, de tout ou partie des sommes ainsi mises à sa charge ; qu'il s'ensuit que le recours des tiers payeurs contre l'établissement de santé est subordonné à la preuve d'une faute commise par l'établissement de santé ayant été à l'origine du dommage ; qu'en jugeant néanmoins que la MUTUALITE SOCIALE AGRICOLE était fondée à exercer un recours contre la CLINIQUE DU SUD VENDEE et son assureur AXA FRANCE IARD, même en l'absence de faute de cet établissement de santé, la Cour d'appel a violé les articles L. 1142-1-1, L. 1142-17 et L. 1142-21 du code de la santé publique. --------------------------------------------------------------------------------

Page 110: LE RECOURS DES TIERS PAYEURS ET L'IMPACT DU SYSTEME D

110/114

Bibliographie

Articles de doctrine :

- Thierry TAURAN, Conditions d’exercice du recours subrogatoire des Caisses, La Semaine

Juridique Social n°49, 4 décembre 2012, 1527

- Serge DEYGAS, Les conditions de recevabilité des actions subrogatoires de l’ONIAM et

des organismes sociaux, Procédures n°11, Novembre 2012, comm. 337

- Hélène MUSCAT, régime de l’action subrogatoire des tiers payeurs contre l’ONIAM dans le

contentieux de l’hépatite C, La Semaine juridique Edition générale n°39, 26 Septembre 2011,

1028

- Christophe RADE, Conditions de l’indemnisation par l’ONIAM, responsabilité civile et

assurances n°5, Mai 2011, comm. 188

- Actualité : ONIAM et recours subrogatoire des tiers payeurs, DALLOZ Etudiant

- Recours subrogatoires des tiers payeurs contre l’ONIAM, La Semaine Juridique

Administrations et collectivités territoriales n°7, 15 Février 2010, act. 128

- Substitution de l’ONIAM à l’EFS : incidence sur les contrats d’assurance, Lexis Nexis,

Responsabilité civile et assurances n°2, Février 2013, comm. 62

- Charles – André DUBREUIL, Effets de la substitution de l’ONIAM à l’EFS sur la

détermination du débiteur de l’indemnisation, La Semaine Juridique Administrations et

Collectivités territoriales n°15, 8 Avril 2013, act. 323

- Sara BRIMO, Les conséquences de la substitution de l’ONIAM à l’Etablissement français

du sang pour l’indemnisation des préjudices résultant d’une contamination par le virus de

l’hépatite C, droit Administratif n°7, Juillet 2011, comm. 72

- Hervé ARBOUSSET, Action subrogatoire des tiers payeurs contre l’ONIAM : une

clarification salutaire, La Semaine Juridique Administrations et collectivités territoriales n°30,

25 Juillet 2011, 2274

- Rodolphe MESA, Accidents médicaux et infections nosocomiales : délai de prescription et

recours subrogatoire de l’ONIAM et de la caisse primaire d’assurance maladie, Lamy Droit

de la santé, n°139, mai 2014

- Maître François LAMPIN, Revirement de jurisprudence du Conseil d’Etat sur les infections

nosocomiales endogènes, Alineas, Mise au point

- Sabine BOUSSARD, Indemnisation des infections nosocomiales contractées entre le 5

septembre 2001 et le 1er janvier 2003, Droit Administratif n°1, Janvier 2012, comm. 11

- Nadia CHECKLI, Responsabilité médicale et infection nosocomiale : l’inapplicabilité de la

loi du 4 mars 2002 aux instances en cours, Responsabilité civile et assurances n°12,

Page 111: LE RECOURS DES TIERS PAYEURS ET L'IMPACT DU SYSTEME D

111/114

Décembre 2006, étude 20

- Charles – André DUBREUIL, L’indemnisation du préjudice causé par une infection

nosocomiale, Droit Administratif n°8, Août 2011, comm. 75

- L’étendue du rôle de l’ONIAM dans la réparation des infections nosocomiales, Gazette du

Palais, 4 juillet 2013 n°185 p.26

- Recours de la CPAM à l’encontre de l’établissement de santé responsable d’une infection

nosocomiale, La Semaine Juridique Administrations et Collectivités territoriales n°43, 24

Octobre 2011, act. 674

- Sophie HOCQUET – BERG, Infections nosocomiales : débiteur de la réparation,

Responsabilité civile et assurances n°10, Octobre 2013, comm. 311

- Priorité à l’indemnisation sur la désignation du responsable pour les infections

nosocomiales, Gazette du Palais, 4 août 2011, n°216 p.11

- Sara BRIMO, A propos de la substitution de l’ONIAM à l’EFS pour l’indemnisation des

victimes de l’hépatite C : parole à la Cour de cassation, Droit Administratif n°2, Février 2013,

comm. 15

- Réparation intégrale et solidarité nationale, Petites affiches, 20 septembre 2005, n°187,

p.16

- Infections nosocomiales : à qui la faute ?, Petites affiches, 22 juin 2011, n°123, p.13

- Maud BALDOVINI, Les CRCI, l’ONIAM, les caisses de sécurité sociale et le juge, Droit

Administratif n°12, Décembre 2012, comm. 97

- Thibault DE RAVEL, Infections nosocomiales et ONIAM : caisse d’assurance maladie

contre établissement de santé, Dalloz actualité 19 mai 2014

Codes et dictionnaires :

Code de la sécurité sociale, édition 2010 34eme édition Dalloz.

Site internet :

- www.ffsa.fr : Responsabilité médicale et solidarité nationale, Georges Durry

- www.sciencedirect.com : Synthèse le contentieux de la responsabilité médicale et l’ONIAM,

Gilles Devers

- www.droitjuridique.fr : Droit de la responsabilité médicale

- www.caducee.net : Dans quels cas peut-on engager la responsabilité d’un médecin ?

- www.oniam.fr

- L’Argus de l’Assurance – Recours subrogatoire du tiers payeur contre l’ONIAM

– Lextenso

– Lexis Nexis

Page 112: LE RECOURS DES TIERS PAYEURS ET L'IMPACT DU SYSTEME D

112/114

– Légifrance

- Lamy Droit de la santé

– Mediam (site intranet de la CPAM du Maine-et-Loire)

– L’essentiel : actualité juridique

Page 113: LE RECOURS DES TIERS PAYEURS ET L'IMPACT DU SYSTEME D

113/114

Page 114: LE RECOURS DES TIERS PAYEURS ET L'IMPACT DU SYSTEME D

114/114