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Le pâturage, c’est robot-compatible ! La mise en place d’un robot de traite dans une exploitation entraîne de nombreuses modifications, mais contrairement à une idée reçue, elle ne rime pas avec arrêt du pâturage. Le robot et le travail de l’éleveur Production laitière et qualité du lait Avec l’arrivée d’un robot, le temps de travail global de l’éleveur peut diminuer jusqu’à 2h/jour. Mais c’est surtout la suppression des astreintes de la traite qui va lui permettre une grande souplesse d’organisation dans son travail quotidien. C’est lui qui choisit les moments de la journée consacrés à l’observation indispensable de ses vaches et à l’étude des données transmises par le robot (conductivité, écarts de traite…). En contrepartie, il courra le risque d’être alerté 24h/24h sur son portable en cas de dysfonctionnement, ce qui dans les premiers mois peut engendrer un certain stress. De même, en cas d’absence prolongée (congés, week- end), il lui sera plus difficile de se faire remplacer. Plus que le robot lui-même, c’est souvent le changement d’alimentation qui entraîne une hausse de la production laitière, avec un meilleur début de lactation mais un tarissement plus précoce. Les bâtiments et le troupeau La qualité du lait se détériore souvent, après la mise en service d’un robot (germes, lipolyse, spores butyriques, cellules…). Ces problèmes sont en majorité réglés dans les mois qui suivent. Cependant, le fonctionnement même du robot multiplie le risque de contamination et donc l’augmentation des cellules et des mammites : l’état sanitaire du troupeau et l’environnement sont à surveiller de près. Le robot entraîne souvent une réorganisation des bâtiments (barrières anti- retour, parcs…), l’adoption des logettes pour une meilleure propreté des mamelles et le passage à la ration semi-complète avec distribution du concentré au robot. Le pâturage reste cependant possible l’été. Photo : M. Barbet Afin de limiter les réformes, l’éleveur va aussi devoir adapter la génétique de son troupeau aux exigences du robot : bonne conformation des mamelles, débit de traite élevé, qualité des aplombs… Enfin, si le robot est en limite de capacité, il lui faudra songer à étaler les vêlages. D’un point de vue économique Avec son prix d’achat élevé, sa durée d’amortissement encore mal connue, ses coûts de fonctionnement

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Le pâturage, c’est robot-compatible ! La mise en place d’un robot de traite dans une exploitation entraîne de nombreuses modifications, mais contrairement à une idée reçue, elle ne rime pas avec arrêt du pâturage.

Le robot et le travailde l’éleveur

Production laitière et qualité du lait

Avec l’arrivée d’un robot, le temps de travail global de l’éleveur peut diminuerjusqu’à 2h/jour. Mais c’est surtout la suppression des astreintes de la traite qui va lui permettre une grandesouplesse d’organisation dans son travail quotidien.C’est lui qui choisit lesmoments de la journéeconsacrés à l’observationindispensable de ses vaches et à l’étude des données transmises par le robot (conductivité, écarts de traite…).

En contrepartie, il courra le risque d’être alerté 24h/24h sur son portable en cas de

dysfonctionnement, ce qui dans les premiers mois peutengendrer un certain stress. De même, en cas d’absence prolongée (congés, week-end), il lui sera plus difficilede se faire remplacer.

Plus que le robot lui-même, c’est souvent le changement d’alimentation qui entraîne une hausse de la production laitière, avec un meilleurdébut de lactation mais un tarissement plus précoce.

Les bâtiments et le troupeau

La qualité du lait se détériore souvent, après la mise en service d’un robot(germes, lipolyse, spores butyriques, cellules…). Ces problèmes sont en majorité réglés dans les mois qui suivent. Cependant, lefonctionnement même du robot multiplie le risque de contamination et doncl’augmentation des cellules et des mammites : l’étatsanitaire du troupeau et l’environnement sont à surveiller de près.

Le robot entraîne souventune réorganisation desbâtiments (barrières anti-retour, parcs…), l’adoptiondes logettes pour une meilleure propreté des mamelles et le passage à la ration semi-complète avec distribution du concentré au robot. Le pâturage restecependant possible l’été.

Photo : M. Barbet

Afin de limiter les réformes, l’éleveur va aussi devoiradapter la génétique de son troupeau aux exigences du robot : bonne conformationdes mamelles, débit de traite élevé, qualité des aplombs…Enfin, si le robot est enlimite de capacité, il lui faudra songer à étaler les vêlages.

D’un point de vue économiqueAvec son prix d’achat élevé, sa durée d’amortissement encore mal connue, sescoûts de fonctionnement

(eau et électricité) et de maintenance supérieurs à ceux d’une salle de traite, le robot pèse lourd surl’économie de l’élevage. Il est cependant rentablelorsqu’il se traduit effectivement par une baisse du coût de maind’œuvre sur l’exploitation.D’autant que sa rentabilité est très dépendante du quota laitier par stalle, avec un effet de seuil important : si un robot monostalle peu convenir pour un quota de 650 000 L en Prim’Holstein (500 000 L en Normande), il faut passer à 2 stalles pour 750 000 L. Cela renforce l’importance d’une bonne maîtrise des coûts alimentaires et doncde l’utilisation du pâturage.

Robot de traite etpâturageLe pâturage (>10-15 ares par vache) est tout à faitcompatible avec la traite robotisée, pour peu que le parcellaire soit regroupé autour du bâtiment, sans route à traverser, avec moins de 800 m entre le point le plus éloigné et le robot.L’été, le risque majeur est une moindre fréquentation du robot à certaines périodes et un engorgement à d’autres, lié au caractère grégaire des vaches au pâturage, ce qui peut être

rédhibitoire pour les grands troupeaux (> 50 VL).

Les clés de la réussiteLe but de l’éleveur, s’il veut éviter de perdre son temps à aller chercher ses vaches au pâturage, est de les inciterà revenir souvent au bâtiment, d’où elles ne pourront sortir qu’après avoir été traites.Pour cela, il devra contrôler leur circulation avec l’aide de barrières anti-retour, voire de portes de tri automatiques, selon une stratégie adaptée à sonsystème de pâturage.

Ainsi le nombre de parcelles accessibles simultanément (1 ou 2), le schéma decirculation mis en place

(jour / nuit par exemple)ou la répartition des animaux en 2 troupeaux (pour les quotas > 600 000 L) lui permettront de fluidifierle "trafic" au niveau de l’automate.

Il pourra aussi offrir des motivations spécifiques pour le retour au bâtiment.C’est notamment le cas des points d’eau, qui pourrontêtre placés juste avant le robot, bien que pour lebien-être des animaux ils soient aussi recommandés dans les parcelles éloignées. L’accès au couchage dans le bâtiment est également un plus pour les animaux et pour la fréquentation du robot.Il en est de même de ladistribution au robot en quantité limitée (1-3 kg / j) d’un concentré appétant, bien que son intérêt soit controversé, surtout pour des animaux en fin de lactation.Enfin, la distribution d’unfourrage conservé est parfois utile, ne serait-ceque pour ajuster les apportsalimentaires à la ressourcepâturable.

Si le pâturage intégral,24h/24h, n’est pas toujours possible avec un robot, sa version restreinte à 12-18 h par jour semble un choix judicieux, à la fois en terme de coût alimentaire plus faible pour l’éleveur, de bien-être pour l’animal et d’image du robot.

Photo : D. Pomiès

Dominique POMIES Yann MARTINOTINRA SECLO