le developpement durable

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Farid Baddache Le developpement durable

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  • Le dveloppement durable

  • Dans la collection Eyrolles Pratique

    Sorganiser, cest facile !, Stphanie Bujon et Laurence Einfalt Guide des premiers secours la maison, Dr Pascal Cassan et Dr Caroline Cross Rdiger sans complexes, Michelle Fayet Gagner en effi cacit, Dr Patrick M. Georges Le commerce quitable, Tristan Lecomte Guide de la maison conome, Jrme Robert et Laurent Fabas Lentretien de motivation, Patrick de Sainte Lorette et Jo marz Le CV et la lettre de motivation, Patrick de Sainte Lorette et Jo Marz Le bilan de vos comptences, Patrick de Sainte Lorette et Corinne Goetz Tester et dvelopper sa mmoire, Patrick de Sainte Lorette et Jo Marz Savoir prendre des notes, Rene Simonet et Jean Simonet

  • Farid Baddache

    Le dveloppement durable

    Troisime tirage 2010

  • ditions Eyrolles61, Bd Saint-Germain75240 Paris Cedex 05www.editions-eyrolles.com

    Mise en pages : Istria

    Cet ouvrage a fait lobjet dun reconditionnement loccasion de son troisime tirage (nouvelle couverture et nouvelle maquette intrieure).Le texte reste inchang par rapport au tirage prcdent.

    LEPHOTOCOPILLAGE

    TUE LE LIVRE

    Le code de la proprit intellectuelle du 1er juillet 1992 interdit en effet ex-pressment la photocopie usage collectif sans autorisation des ayants droit. Or, cette pratique sest gnralise notamment dans les tablisse-ments denseignement, provoquant une baisse brutale des achats de li-vres, au point que la possibilit mme pour les auteurs de crer des uvres nouvelles et de les faire diter correctement est aujourdhui menace.

    En application de la loi du 11 mars 1957, il est interdit de reproduire intgralement ou partiellement le prsent ouvrage, sur quelque support que ce soit, sans autorisation de lditeur ou du Centre Franais dExploitation du Droit de Copie, 20, rue des Grands-Augustins, 75006 Paris.

    Groupe Eyrolles, 2006, pour le texte de la prsente dition Groupe Eyrolles, 2010, pour la nouvelle prsentationISBN : 978-2-212-54683-5

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    Sommaire Introduction . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .7

    Chapitre 1 : Quest-ce que le dveloppement durable ? . . . . . . . . . . . . . . 11

    Chapitre 2 : Corriger les options non durables de notre civilisation . . . .49

    Chapitre 3 : Adopter un mode de vie durable . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .97

    Chapitre 4 : Sengager en faveur du dveloppement durable . . . . . . . . 137

    Conclusion . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 177

    Annexes . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 179

    Table des matires . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .205

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    IntroductionNotre monde va mal ! La croissance conomique de ces dernires dcen-nies a apport beaucoup de richesses et de confort. Mais elle sest faite sans le moindre souci de gestion de lenvironnement ni dquit sociale ; au dtriment de notre avenir collectif : on vit au jour le jour, sans se proccuper de ce qui va suivre, ni de ceux qui vont nous suivre

    Le dveloppement durable propose une alternative cet tat de fait. Sur le plan de lenvironnement, il existe des solutions aux problmes auxquels est confronte la plante. Il suffi t dchanger nos habitudes de production et de consommation contre de nouveaux comporte-ments plus respectueux de notre environnement et de notre entou-rage ! Sur le plan social aussi, il y a moyen de corriger les dsquilibres ns dune mondialisation rapide aux retombes conomiques ingales (en tmoignent le chmage persistant dans nos socits et le retard de dveloppement de nombreux pays du Sud). Il est possible de btir une socit plus juste, soucieuse dentretenir lemploi et lconomie locale, de rduire la misre et lexclusion dans nos propres villes et dans les pays du Sud. L encore, les germes du changement sont l : commerce quitable, implication associative, tourisme durable. Il ne reste qu agir pour valoriser les initiatives qui existent dj.

    Mais moi ? Quest-ce que je peux faire ? Face lampleur du problme, il est tentant de se reposer sur les pouvoirs publics ou les dcideurs conomiques, qui certes doivent assumer leurs responsabilits, corriger les dysfonctionnements et anticiper les problmes. Mais il faut recon-natre que les problmes rsultent avant tout de la somme de compor-

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    tements et dintrts individuels. Le rchauffement climatique par exemple est caus par les missions de gaz effet de serre, dont 50% sont lis nos transports quotidiens en voiture et lnergie dpen-se pour assurer le confort de nos maisons et bureaux ! Autre exemple : cest avant tout parce que nous sommes constamment en qute des plus bas prix, que les industriels font les dlocalisations ncessaires et imposent aux sous-traitants des contrats diffi ciles honorer sans procder une restructuration de lemploi. Nos comportements indi-viduels contribuent donc activement la dtrioration du monde dans lequel nous vivons. Cest ce niveau-l que chacun peut agir !

    Imaginons un petit immeuble rassemblant 10 familles de 4 personnes. Quatre litres par minute, cest le dbit courant dun robinet. En laissant couler leau lorsquelle se lave les dents, une famille de 4 personnes gaspille largement 15 000 litres deau par an. Chaque anne, limmeuble gaspille donc 150 000 litres deau. Si les familles se passent la consigne de se brosser les dents avec un verre deau plutt quen laissant couler le robinet, limmeuble peut conomiser 150 000 litres deau potable !

    On pourrait multiplier les exemples concrets pour montrer combien laddition de chaque comportement individuel peut faire masse. Bien sr, ce nest pas un brossage des dents co-responsable qui va crer la socit du dveloppement durable ! Mais cest en adoptant de bons rfl exes, en montrant lexemple autour de soi, en diffusant linforma-tion et en sengageant pour que les choses changent que lon pourra faire voluer les mentalits et les structures en faveur dun dveloppe-ment effi cace et durable.

  • Intro

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    AvertissementLes chiffres qui ponctuent cet ouvrage ont t puiss auprs de sources ables. Ils sont le fruit de travaux scienti ques croisant les donnes pour obtenir des analyses au plus prs de la ralit. Ils ne sont pas pour autant parfaits, tout simplement parce que les tudes et ltat davance des sciences ont leurs limites, et que certaines donnes sont dif ciles obtenir. Ce livre vise donner une vision claire et simple des enjeux du dveloppement durable. Il va donc lessentiel, sans entraner le lecteur dans le ddale des controverses entre experts qui jalonnent les dossiers du dveloppement durable. De mme, les gestes du dveloppement durable ne sont pas exhaustifs, ce sont des pistes types dactions quon peut approfondir.

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    Chapitre 1

    Quest-ce que le dveloppement

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    Si lexpression de dveloppement durable nest passe dans le langage courant qu la fi n des annes 1980, la notion de dveloppe-ment durable est ancienne. Dveloppe tour tour par diffrentes traditions intellectuelles, elle intgre des rfl exions cologiques, cono-miques et socio-culturelles qui puisent leurs racines dans lhistoire des ides et des pratiques conomiques et sociales. Aujourdhui, il devient urgent de regarder notre mode de vie la lumire de ce concept, pour que change le monde dans lequel nous vivons.

    Une synthse de lenvironnement, de lconomique et du social

    Le rapport Brundtland

    En 1987, la Commission des Nations Unies sur lEnvironnement et le Dveloppement publiait le rapport Brundtland, intitul Notre Avenir tous. Ce document, devenu un texte fondateur du dveloppement dura-ble, rend compte de ltat de la plante. On y constate que les problmes environnementaux les plus graves sont principalement lis la grande pauvret des pays du Sud et aux modes de production et de consom-mation non durables du Nord. Ce rapport attire lattention sur le fait que lhomme ne pourra pas ternellement produire selon des pratiques qui sollicitent davantage de ressources naturelles que la plante nest

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    capable den offrir long terme, ni consommer indfi niment des produits jetables dont on ne sait que faire une fois quils sont uss. Le rapport insiste sur lurgence de prendre en compte lcosystme de notre plante.

    Lcosystme

    En cologie, un cosystme dsigne lensemble form par une associa-tion ou communaut dtres vivants (ou biocnose), et son environ-nement gologique, pdologique et atmosphrique (le biotope). Les lments constituant un cosystme dveloppent un rseau dinter-dpendances permettant le maintien et le dveloppement de la vie.

    Il ne sagit pas de sacraliser les espaces vierges, ni dy interdire les acti-vits humaines mais de prserver ces espaces des pollutions qui accom-pagnent la civilisation industrielle. Le rapport met en vidence le fait quun dveloppement mal matris, cologiquement irresponsable, tel que nous le pratiquons aujourdhui, peut mener lhumanit sa perte. Tout dveloppement doit se faire dans le respect des quilibres colo-giques naturels de la plante. Cest suite au rapport Brundtland que sera adopt le terme de sustainable development , ou encore, en franais, de dveloppement durable, soutenable ou viable .

    Le dveloppement durable

    Cest un dveloppement qui rpond aux besoins des gnrations actuelles sans compromettre ceux des gnrations futures.

    Les trois piliers du dveloppement durable

    Il ne suffi t pas de dfi nir le concept de dveloppement durable, encore faut-il en considrer les implications concrtes : que faut-il changer dans nos comportements ? Le dveloppement viable ncessite de prendre en compte de faon harmonieuse les trois piliers de la vie moderne, que sont lconomie, le social et lenvironnement. chaque pilier corres-pondent des critres particuliers. Ainsi, lapproche conomique recherche

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    pour chaque action (produire, vendre et acheter, travailler, se dpla-cer, se nourrir) les pratiques et les produits apportant un bon rapport qualit/prix. La dimension sociale sexprime lorsquon veille adopter des pratiques propices au dveloppement de lemploi et respectueuses de lintgrit et de la culture des personnes qui travaillent la produc-tion des biens consomms. Enfi n, sur le plan de lenvironnement, le dveloppement durable implique de choisir des pratiques, des produits et des processus de production favorables au respect de la plante et de la sant.

    Les trois piliers du dveloppement durable

    La prise en compte de ces trois piliers introduit des questions nombreuses et inhabituelles : l o dordinaire nos comportements sont rgis par le souci de leffi cacit, de lconomie ou du plaisir, le dveloppement durable attire notre attention sur limpact de nos actes les plus anodins sur le monde qui nous entoure. Les notions de plaisir et dpanouisse-ment ne sont pas nies pour autant. Elles sont simplement intgres dans une rfl exion qui tient compte du dveloppement durable. Un exemple simple, tir de la vie quotidienne, permet de comprendre cette gymnastique de lesprit.

    Il y a plus dune faon dacheter des orangesJachte des oranges selon lapproche traditionnelle. Si je fais attention la dpense : jachte les oranges les moins chres, en les choisissant de prfrence de qualit. Cest largument conomique qui prvaut. Si je veux me faire plaisir : jachte les meilleures oranges, sans regarder leur prix, ni leur provenance,

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    sans me demander non plus si cest la saison des oranges. Cest une approche hdoniste.

    Maintenant, jachte des oranges selon lapproche du dveloppement durable. Les arguments de lapproche traditionnelle restent valables : je peux tout fait baser mes achats sur la recherche du meilleur rapport qualit/prix, ou sur la recherche de plaisir. Mais dautres paramtres viennent nourrir ma r exion avant lachat. Jintgre dsormais dans ma r exion des critres environnementaux et sociaux. Ainsi, je minterroge :

    Dans quelles conditions ces oranges ont-elles t plantes et rcoltes ? Les travailleurs taient-ils des ouvriers saisonniers venus dAfrique du Nord pour travailler dans des plantations du sud de lEurope o ils sont pays une misre et traits comme des moins-que-rien ?

    Dans quel respect de lenvironnement ces oranges ont-elles t produites ? A-t-on utilis pour ce faire des tonnes de pesticides et dengrais ?

    Do viennent ces oranges ? Si elles proviennent de lautre bout du monde, les longues distances du transport ont sans doute t la source dimportantes missions de gaz qui aggravent le rchauffement climatique.

    Lapproche du dveloppement durable prend en compte aussi bien lar-gument conomique que la notion de plaisir. Ainsi, si lon se soucie du rapport qualit/prix, on peut viter dacheter les oranges hors saison : non seulement elles sont moins bonnes, mais en plus elles sont plus chres car il faut les faire venir de plus loin. Si lon se soucie davantage de son plaisir, on peut largir celui-ci la satisfaction de faire du bien autour de soi : en vitant dacheter des marchandises produites dans des conditions sanitaires et sociales critiquables, on contribue rellement lamlioration de la condition de vie des travailleurs. Si plus personne nachte doranges produites par des ouvriers trangers corvables merci, les producteurs seront contraints de sadapter lvolution de la demande et de revoir les conditions de travail de leurs ouvriers.

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    Une invitation repenser notre vie quotidienne

    La rfl exion sur le dveloppement durable nous invite donc repenser tous les aspects de notre vie quotidienne avec un nouveau souci : cher-cher toujours le meilleur compromis entre lintrt conomique, envi-ronnemental et social. Naturellement, il est infi niment plus simple de raisonner selon lapproche traditionnelle. La gymnastique de lesprit, consistant prendre en compte les paramtres conomiques, sociaux et environnementaux, est toutefois une technique ncessaire pour aligner progressivement nos rfl exes de consommateurs sur les enjeux du dveloppement durable. Avec un peu dexercice, on acquiert facile-ment le rfl exe de se poser les bonnes questions et didentifi er progres-sivement les lments de rponse les plus pertinents, pour entrer dans la logique dun dveloppement plus durable.

    La pratique quotidienne du dveloppement durable, quil sagisse, au niveau individuel, de faire ses courses ou de se brosser les dents, ou lchelle internationale, du lancement dimportants projets, peut se rsumer en quelques axes de questionnement que montre le tableau ci-dessous.

    Les principaux axes de rfl exion du dveloppement durable

    Environnement Social conomie

    Devant une action individuelle ou collective, on peut se poser les questions suivantes :

    Est-ce mauvais pour ma sant et celle de mes proches ?

    Cela participe-t-il mon confort et mon panouissement personnel ?

    Cela offre-t-il un bon rapport qualit/prix ?

    Cela participe-t-il au rchauffement climatique ?

    Cela altre-t-il la vie sociale autour de moi ?

    Cela me fait-il conomiser de largent lachat et sur le long terme ?

    Cela gnre-t-il de la pollution ?

    Cela nuit-il au dveloppement dautres populations (sur le plan de la sant, du savoir) ? Cela entretient-il la pauvret et les ingalits ?

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    Cela gaspille-t-il des ressources naturelles (eau,) ?

    Est-ce contraire la survie et au respect de la culture et des pratiques traditionnelles dautres populations ?

    Cela nuit-il la biodiversit ?

    Est-ce contraire au respect des droits de lhomme ? Cela entrane/suppose-t-il lexploitation des gens du Sud au bnfi ce de mon confort personnel ?

    Finalits

    Vivre plus en harmonie avec notre environnement naturel

    Conserver un certain confort de vie et de bien-tre, voire lamliorer

    Payer un juste prix

    Transmettre aux gnrations futures un monde dans lequel elles pourront vivre

    Assurer notre panouissement et celui de ceux qui nous entourent

    Intgrer le souci du dveloppement durable dans les actes dachat

    Se soucier de sa sant et de celle de ses proches

    Vivre de manire plus solidaire avec les autres habitants de la plante

    Les fondements non durables de notre civilisation

    Pendant des sicles, le dveloppement de notre civilisation sest fond sur lexploitation extensive des ressources de la plante et sur lutilisa-tion de populations humaines domines militairement, politiquement et conomiquement (quil sagisse des prisonniers de guerre au temps des Pharaons, du serf cultivant la terre du seigneur mdival ou des esclaves noirs dans les plantations de coton). Aujourdhui, ltat critique de notre plante et laggravation des ingalits sociales font que nous ne pouvons plus nous dissimuler le fait que des pans entiers de notre civilisation sont btis sur des principes non viables.

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    Les fondements antrieurs la rvolution industrielle

    Le tournant nolithique

    Dune certaine manire, la problmatique du dveloppement durable est ne il y a 12 000 ans, lorsque lhomme est devenu sdentaire. Cessant alors de vivre comme une bte, de suivre les troupeaux pour manger, de sabriter o il peut pour dormir, lhomme se sert de ses formidables facults mentales pour organiser la vie autour de lui afi n dassurer ses besoins alimentaires, la protection des siens, le dveloppement de rites et de coutumes. Il commence ainsi instrumentaliser la nature au service de ses besoins et desseins (transformation de lespace nces-saire lagriculture, apparition de villages et dbut durbanisation).

    laube de lre nolithique, la Terre ne comptait que 10 millions dhabitants, la pression de son activit sur lenvironnement tait donc tout autre quaujourdhui, o lon compte plus de 6 milliards dtres humains sur terre. De plus, lpoque nolithique, lhomme nusait dans son activit quotidienne que de matriaux rapidement biodgradables (bois, os, plantes, pierres).

    Il ne sagit videmment pas de remettre en cause limportance dci-sive de ce tournant, mais de souligner le paradoxe de ce dveloppement non durable , qui a permis le dveloppement des plus hautes qualits humaines. Cette sdentarisation a par exemple donn naissance un artisanat riche, le dveloppement du commerce a multipli les changes culturels. La sdentarisation permet lhomme de sinstaller sur des territoires, de cumuler des connaissances, de dvelopper des tech-niques, et de donner naissance des civilisations telles que celles de lgypte ou de la Grce antiques.

    Biodgradable

    Un produit biodgradable se dcompose/se dgrade en matires orga-niques par des micro-organismes (bactries, enzymes, champignons et algues).

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    Laccentuation de la pression dmographique

    Dans lAntiquit, les groupes humains continuent de senrichir et de saccrotre. La relative scurit et le dveloppement de nouvelles tech-niques, telles que la roue, la houe ou laraire, permettent de gagner en productivit agricole et de nourrir une population plus nombreuse. Ds lAntiquit cependant, lhomme est confront aux consquences de la pression quil exerce sur la nature. Ainsi, le paysage des rgions mdi-terranennes, caractris par la broussaille semi-dsertique, na rien de naturel , il est la consquence dune dforestation acclre du pour-tour mditerranen. Sous la forte pression agricole exerce par lEmpire romain, les forts sont progressivement radiques. Jusqu la fi n du Moyen ge, le modle de dveloppement sera peu prs le mme : une pression dmographique croissante sur les milieux naturels, conduisant lasschement de marcages et des dforestations massives.

    Le dveloppement de techniques non durables

    Linvention de la mtallurgie (travail du cuivre, du fer ou encore de lar-gent) permet damliorer considrablement lquipement agricole, et daccrotre la production. Lintgration des mtaux dans la vie quoti-dienne marque nanmoins lavnement de la socit non durable , puisque la matire premire, puise dans les mines, nexiste quen stocks limits sur la Terre. Tant que les besoins ne sont pas impor-tants, la plante est cependant capable dabsorber la demande et les dchets gnrs. Mais lorganisation politique des tats et le dvelop-pement du commerce international entranent une utilisation crois-sante des ressources naturelles visant accrotre lemprise de lhomme sur la plante. Ainsi, la construction massive de bateaux pour explorer les ocans, pcher et conqurir favorise la dforestation massive de lEurope.

    Certaines catastrophes naturelles (de fortes pluies par exemple, au cours desquelles on se rend compte que les forts en amont de villages permet-taient dviter la formation de torrents de boue) et la raison de quelques seigneurs, sages gestionnaires des ressources de leur domaine, sont lorigine des premires mesures en faveur de lenvironnement. Ainsi, Philippe VI de Valois promulgue en 1346 une Ordonnance sur la protec-tion des forts.

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    Un systme conomique mondial, centr sur les intrts europens

    LEurope sorganise en puissants tats qui se structurent et squipent pour partir la conqute des richesses du monde. La recherche de nouvelles routes commerciales permettant de se procurer denres et pices prcieuses entrane le dveloppement des technologies de navi-gation et darmement, ncessaires pour armer les bateaux qui sillonnent les mers : cette fi n, les tats industrialisent les moyens de production et exploitent davantage les ressources naturelles. Tandis que quelques voix slvent en Europe pour protger les forts ou limiter le surp-turage, les Europens agissent de manire diffrente dans les pays convoits du Sud, notamment en Amrique, dont les richesses naturel-les sont vritablement pilles. Ils asservissent les populations autoch-tones, crant dune part un systme conomique mondial se structu-rant autour de lconomie europenne et de ses intrts, provoquant dautre part la disparition de cultures et de savoirs dsormais perdus.

    La rvolution industrielle a aggrav les problmes

    La rvolution industrielle marque le passage dune socit agricole une socit de production mcanise de biens non alimentaires. Ce changement saccompagne du regroupement de la main duvre et dune acclration de lurbanisation. Les formidables richesses impor-tes principalement dAmrique au cours du XVIIIe sicle vont venir nour-rir et fortifi er le capitalisme europen, et le doter de ressources consid-rables, entranant un dveloppement rapide de la socit europenne. partir du milieu de ce sicle apparaissent en Angleterre, puis dans toute lEurope occidentale, des techniques rvolutionnaires pour lpoque (qui nous apparaissent aujourdhui banales). Ces transformations vont certes dans le sens dun mieux-tre gnral (les hommes vivent mieux et plus longtemps quau Moyen ge) mais cette amlioration saccom-pagne du dveloppement de pratiques qui contribuent dgrader len-vironnement naturel et social.

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    Les principales dcouvertes de la rvolution industrielle

    1765 : James Watt invente la machine vapeur.

    Le dveloppement du transport vapeur permet de saffranchir des contraintes gographiques et naturelles : grce au train, il devient possible de relier des rgions et des villes trs distantes, les bateaux vapeur autorisent la navigation sur les mers, en dpit des vents et des courants.

    Devant linsuf sance des ressources en bois, lexploitation des gisements de charbon se banalise : facile extraire et transporter, ce dernier a en plus la rputation dexister en quantits illimites dans les sous-sols de la terre.

    Le dveloppement de la mtallurgie conscutif au manque de bois pousse lutilisation du charbon. La formation de rsidu (coke) permet le dveloppement dalliages nouveaux (fonte, acier), qui permettent de passer outre les freins que la nature opposait jusqualors lessor de lurbanisme et de larchitecture.

    Lindustrie textile se dveloppe. La culture du coton, plus rsistant et moins cher que la laine, permet daugmenter la production des textiles et notamment des vtements. Paralllement se dveloppent les premires pollutions de masse, lies lusage massif des teintures.

    Les entrepreneurs rassemblent leurs capitaux, a n de construire de vastes entreprises industrielles internationales (usines, nouvelles machines, exploitation de matires premires, ou transport de la production). La formation des capitaux industriels organise progressivement lconomie du monde autour des besoins des marchs occidentaux.

    Lurbanisation massive et laggravation des problmes sanitaires

    la fi n du XVIIIe sicle, la croissance de la population est telle que les campagnes sont surpeuples, provoquant un fort exode vers les villes, o les usines offrent du travail. Ainsi, la rvolution industrielle contribue lurbanisation massive de populations traditionnellement rurales. Le territoire des pays europens est alors profondment remodel. Lorga-nisation des communauts urbaines, considrablement largies, pose dimportants problmes sanitaires, en raison de la promiscuit des activits de production industrielle et des habitations. Le revers de la

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    rvolution industrielle apparat trs vite dans les villes, o se produisent de nombreux dgts du progrs . Dimportants soucis dinsalubrit apparaissent :

    subvenir aux besoins en eau potable, traiter les eaux uses ; vacuer les dchets, notamment les nouvelles gnrations de dchets rsultant des progrs de la chimie appliqus lindustrie, et qui ne se sont pas biodgradables naturellement, en peu de temps ;

    assurer un air respirable , dans un contexte dmergence daller- gies nouvelles ;

    grer les tensions sociales urbaines, dans des espaces souvent surpeupls : lexode rural et lanonymat des ensembles ouvriers urbains touffent les traditions rurales, rduisent lutilisation des langues rgionales et rendent plus superfi cielles les relations sociales entre individus.

    Les problmes rsultant dune excessive concentration urbaine ont certes gagn en complexit depuis le XIXe sicle, mais ils restent fonda-mentalement les mmes. Des fermes retires peuvent se rassembler autour dun point deau naturel et saccorder sur un espace isol pour y entreposer leurs dchets, mais la concentration sur des espaces urbains restreints de populations qui ne se connaissent pas ncessairement entre elles exige lintervention dune autorit publique forte, capable dorganiser les services garantissant le maintien dune hygine lmen-taire dans les quartiers afi n de prvenir les pidmies.

    Des nergies fossiles comme moteur de lconomie

    La rvolution industrielle est aussi lavnement dune nergie qui nest plus produite grce lutilisation de la force motrice des chevaux ou des bufs. Il y a rupture : progressivement, le moteur vapeur puis thermique ptrole se substitue au cheval. Llectricit et le gaz remplacent le bois. Le charbon, puis le ptrole deviennent peu peu les sources nergtiques qui font tourner lconomie. Depuis la rvolution industrielle, notre socit se fonde sur une conomie du carbone.

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    Les nergies fossiles et les nergies renouvelables

    Les matires premires fournissant lnergie industrielle (charbon, gaz naturel, ptrole) sont appeles nergies fossiles car ces matires premires sont fossilises. Elles sont enfouies sous terre, et prsentent la forme de dpts sdimentaires, prsents en quantits limites . Par opposition, on parle dnergies renouvelables en rfrence aux matires premires disponibles permettant de produire de lnergie linfi ni sur la plante : le soleil, le vent, leau, la chaleur naturelle, les vgtaux.

    Depuis le XVIIIe sicle, toute lconomie sest appuye sur lutilisation massive de sources dnergie comme le charbon et le ptrole qui, dune part, nexistent quen quantits limites, et dont la combustion libre, dautre part, en lespace de quelques dizaines dannes, du carbone que la Terre a mri durant des millions dannes. La ncessit de faire voluer les structures de production, prvisible depuis des annes, semble maintenant urgente, en raison notamment du dveloppement conomique rapide de pays dous de grandes capacits industrielles comme la Chine ou lInde.

    Les principaux hydrocarburesLe carbone est un lment de base de la chimie organique et de la chimie du vivant. Associ lhydrogne, il est la base des hydrocarbures. Cest un composant du ptrole, du gaz naturel, du charbon.Le charbon est un combustible qui provient des grandes forts marcageuses de lpoque carbonifre, formes il y a 300 millions dannes et progressivement dcomposes, sous leffet du climat chaud et humide. Certains terrains saffaissent, les dbris vgtaux sy accumulent, fermentent et sont enfouis sous des sdiments. Ce processus de superpositions de dpts dans une atmosphre charge de gaz carbonique a donn naissance des substances solides et combustibles haute teneur en carbone : la houille, le lignite et la tourbe. Les gisements ainsi forms se prsentent en amas ou, plus souvent, en veines intercales entre dautres formations sdimentaires.Le ptrole est le rsultat dune lente maturation. Il y a des millions dannes, les ocans recouvraient de nombreuses rgions

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    actuellement merges. Les restes des minuscules organismes qui peuplaient ces mers ont, pour une in me partie dentre eux, t pigs dans les roches sdimentaires. Sous certaines conditions favorables, la lente dcomposition de ces organismes a gnr un processus de sdimentation qui au bout de dizaines, voire de centaines de millions dannes, a donn des gisements ptrolifres.

    Des progrs technologiques qui suscitent autant desprance que dinquitude

    Au dbut du XIXe sicle, Napolon disposait des mmes technologies pour la campagne de Russie quHannibal, dans lAntiquit, pour aller de Carthage Rome : la marche et la force de traction animale (chevaux ou lphants). En lespace de 2 000 ans, les techniques de locomo-tion navaient gure volu. Depuis, le chemin parcouru est immense. Lexemple des transports illustre combien lhomme a progressivement appris dpasser les donnes de la nature. Depuis la rvolution indus-trielle, la matrise et les connaissances que lhomme a de son univers ont connu une acclration extraordinaire. Dans de nombreux domaines, lhumanit semble avoir davantage avanc durant les deux sicles derniers quau cours des 2 000 ans qui ont prcd. Le dpassement des lois de lapesanteur, les dcouvertes dans le domaine de la sant, notamment de la gntique, ou les nouvelles technologies de commu-nication en sont autant dexemples. Il est tentant de croire que lhomme a acquis une matrise suffi sante de la nature pour faire face tous les dangers.

    Les rsultats de cette grande avance doivent cependant nous inciter une grande vigilance. Nous dfrichons de nouveaux espaces de connais-sances dont nous ne matrisons pas les consquences pour notre sant et notre avenir collectif. Ainsi, certains progrs de la chimie nous ont permis de dvelopper des substances toxiques accroissant les risques de cancer ou gnrant des maladies qui nexistaient pas auparavant. Les technologies du nuclaire, tout en apportant de formidables ressources nergtiques, laissent aux gnrations futures des tonnes de dchets radioactifs, hautement dangereux pour le genre humain et les espaces naturels sils ne sont pas lobjet dun traitement sr et rigoureux. Les travaux sur les organismes gntiquement modifi s rservent des surprises la fois positives et inquitantes. Face aux dfi s poss par

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    le dveloppement durable, les sciences reprsentent la fois le plus grand danger, en raison des enjeux de leur manipulation, et latout le plus prcieux pour lhomme dsireux dinventer de nouvelles structures de production.

    Une conomie de march quil faut accompagner

    Depuis la rvolution industrielle, notre monde a vu saffronter deux systmes conomiques qui ont abord de manire radicalement diff-rente la notion de dveloppement : lconomie planifi e et lconomie de march. Il est intressant de revenir sur ce double hritage qui a largement marqu les mentalits.

    Le capitalisme, systme conomique fond sur la proprit des moyens de production et dont les mcanismes se basent sur le principe dac-cumulation continue du capital et la recherche du profi t, semble lour-dement responsable de la situation dramatique dans laquelle nous sommes actuellement. Cest bien la recherche de profi ts qui a sous-tendu peu prs toutes les innovations et les ruptures technologiques. Cest elle qui a pouss le riche propritaire romain dfricher et multi-plier les terres agricoles autour de sa villa, pour vendre toujours plus dhuile dolive ou de vin. Cest la recherche de nouvelles voies commer-ciales qui a pouss les Europens faire preuve daudace et de crativit pour dvelopper de nouvelles technologies de navigation et partir la conqute des mers. Cest enfi n parce que le bois devenait rare et cher quon a cherch dvelopper des techniques de substitution sappuyant sur des combustibles abondants comme le charbon et le ptrole.

    Aujourdhui, la pression des marchs fi nanciers sur les entreprises est telle que ces dernires sont condamnes choisir des logiques de court terme, susceptibles de maximiser les dividendes verss aux action-naires. Ce faisant, les entreprises se dtournent dune gestion coh-rente long terme, seule capable de prendre en compte les enjeux du dveloppement durable et dalimenter des performances fi nancires par de meilleures performances sociales et environnementales. Force est donc de reconnatre que si le capitalisme a jou un rle moteur dans le dveloppement de notre socit, il est aussi lourdement responsable de sa non-durabilit .

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    Le dtour par lanalyse dun systme rejetant les principes fondateurs de lconomie de march peut aider comprendre limportance dune gestion cohrente, tenant compte la fois du march et de lenviron-nement.

    Lchec de lconomie plani e en URSSLconomie plani e en Union sovitique offre un exemple de gestion conomique dconnecte des lois de march. Les dirigeants de lURSS sefforcrent en effet de construire grande chelle un systme conomique fond sur des logiques diffrentes : le rgime sovitique ne visait pas ladquation de loffre et la demande, ni un retour immdiat sur investissement, mais le respect dun plan quinquennal. Le dveloppement conomique tait plani par ladministration centrale. Les units de production devaient excuter la production des quantits commandes. En labsence de tout souci de retour sur investissement immdiat, cette indpendance aurait pu permettre dviter certains excs du capitalisme, et de construire un dveloppement conomique sur le long terme. Malheureusement, le systme sovitique na pas pour autant mieux pris en compte le dveloppement durable. Ce systme a mme t particulirement dsastreux ce niveau-l. De fait, si le systme de march a eu le dfaut de consommer de faon irresponsable les ressources naturelles, le systme sans march a fait pire : en rigeant en modle un productivisme aveugle (on fabriquait ainsi dnormes quantits de produits identiques et inutiles, puisque inadapts aux besoins des usagers) et en fondant toute lconomie sur une industrie lourde, dvoreuse dquipements lourds, le mode de gestion plani e, obsd par lambition de produire toujours plus, ngligeant la demande et le cot rel de production, sest avr bien plus nocif pour lenvironnement. Labsence de march a pu entretenir lillusion de lexistence de ressources naturelles in nies, la rarfaction potentielle de ressources naturelles ne pouvant pas se traduire, selon la loi de loffre et de la demande, par une volution des prix. Cest ce quont montr les travaux dconomistes comme Harold Telling, sur la rente du producteur : le producteur capitaliste qui bn cie dune hausse des prix dune ressource, signe de la rarfaction de celle-ci, peut pro ter de ses gains pour investir dans des substituts ou reconvertir les moyens de production. Lconomie plani e, ne tenant compte ni des besoins des consommateurs ni des contraintes de production (rarfaction des ressources,

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    gaspillages dans la conception, absence de concurrence), a bloqu les mcanismes incitant les acteurs conomiques adapter leur production aux besoins des destinataires et loptimiser.

    En comparaison, les principes fondateurs de lconomie de march semblent plus vertueux, au sens o ils prennent en compte les choix des consommateurs (si ceux-ci veulent des produits forte teinte colo-gique et sociale, les producteurs se doivent dadapter les productions pour continuer vendre). Par ailleurs, la concurrence et la tension que celle-ci exerce sur les prix doivent thoriquement inciter les produc-teurs optimiser les cots, notamment en chassant le gaspillage, en conomisant les ressources qui ont tendance se rarfi er, ou en inno-vant pour adapter les structures de production aux enjeux de socit, tels que le dveloppement durable.

    Les lacunes et les acquis de la r exion conomique

    Une fois que lon a constat quune conomie sans march comme lex-URSS ntait pas une alternative capable de rpondre aux enjeux du dveloppement durable, on ne peut que dplorer que, pour autant, notre systme capitaliste ne soit capable dapporter de lui-mme des solutions pleinement satisfaisantes du seul fait de ses mcanismes de fonctionnement. Baignant dans lillusion plurisculaire dune plante aux ressources naturelles infi nies, les conomistes ont en effet long-temps nglig lenvironnement dans leurs rfl exions. En ralit, durant des sicles, les scientifi ques ou les thoriciens qui se penchrent sur les thmatiques de lconomie, de lenvironnement ou du social eurent des proccupations diffrentes et ne cherchrent pas harmoniser leurs penses. La prise en compte des trois piliers du dveloppement durable est rcente.

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    Des r exions exclusivement analytiques

    Les conomistes classiques

    La proccupation des conomistes est danalyser le systme du march : ils cherchent comprendre les mcanismes rpondant lobjectif vendre toujours plus de quantits en rduisant autant que possible les prix de revient , en phase avec lintrt particulier des acteurs cono-miques. La nature offre des ressources en abondance, quil sagit dex-ploiter moindre cot, non de grer dans le temps. Quils nourrissent la pense conomique et politique de droite ou de gauche, les penseurs classiques (tels Adam Smith, David Ricardo, ou Thomas R. Malthus) restent invariablement dans une rfl exion qui fait peu de cas de la nature. Cest peine sils reconnaissent quil est ncessaire de ne pas surexploiter les terres, pour tre certain de pouvoir en tirer des rcoltes par la suite.

    Les conomistes classiques

    Ce sont les conomistes antrieurs au XIXe sicle. Leurs travaux consti-tuent le socle majeur et incontournable de toutes les rfl exions cono-miques. Ils ont profondment infl uenc la pense politique contem-poraine.

    Les conomistes classiques ne se soucient donc pas de lenvironne-ment. Ils ont les yeux rivs sur les facteurs qui font la concurrence, le prix, la dcision dinvestissement des individus. Ils ne sintressent pas non plus au bien-tre commun et lpanouissement des individus de la plante. Ils redoutent les drglements sociaux qui seraient cons-cutifs une trop grande multiplication des hommes. Comme les popu-lations, notamment ouvrires, ont tendance crotre tant que le salaire est suffi sant pour nourrir des bouches supplmentaires, il faut tenir les salaires un point dquilibre pour viter lexplosion dmogra-phique. Cest le niveau zro de proccupation cologique et sociale !

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    Les premiers cologistes : le refus du progrs

    Longtemps, notre socit, dont le dveloppement conomique est fond sur une matrise croissante de la nature, na gure prt datten-tion lenvironnement. Hormis lexprience de quelques communauts religieuses qui fondent leur rgle de vie sur le respect de la Cration (ainsi, les moines cisterciens au XIIe sicle ou les communauts quakers la fi n du XVIIe sicle), il faut attendre le XIXe sicle pour que se dve-loppent les premires rfl exions cologiques.

    Rvolution industrielle : le besoin de se prserver dune catastrophe imminente

    En 1866, Haeckel explique lcologie comme la science des relations de lorganisme avec son environnement, comprenant au sens large toutes les conditions dexistence . Cest la premire apparition du terme cologie . Progressivement, des hommes critiquent la socit moderne au nom de la dfense dune nature vierge et sorganisent pour dfendre cette ide. lpoque de la rvolution industrielle, on distingue deux types de dfenseurs de la pense cologiste : le forestier et laristocrate.

    Le forestier

    Ds le XIXe sicle, cest lide de la catastrophe imminente qui prend le relais dans les esprits et motive lorganisation des premiers cologistes. En France, linstitut du Musum national dhistoire naturelle regroupe les premiers mouvements protecteurs de la nature. Les forestiers, voyant les terribles dgts causs par les inondations, facilites par la dforestation, cherchent sensibiliser la socit au respect de la nature. Constatant le rle rgulateur des forts comme moyen de lutte contre les rosions, ils plaident pour la replantation des forts. Les individus sorganisent en socits, forme ancienne de nos actuelles associations. En 1854, la Socit impriale de zoologie et dacclimatation se met en place pour attirer lattention des autorits publiques sur les premiers dgts causs par le progrs, tels que les pollutions des teintureries textiles ou la disparition des oiseaux dcims par les premiers engrais chimiques. Ds 1860, des lois forant la reconstitution de forts sont votes. Le forestier est un technicien. Pour lui, il est de lintrt de

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    lhomme de comprendre comment fonctionne la nature pour mieux la mettre au service des besoins des hommes. La rfl exion du technicien sarrte donc lintrt de lhomme pour la nature, sans se proccuper de lintrt de la nature pour elle-mme.

    Le mythe du technicien On confond souvent les enjeux de sant avec ceux de la protection de lenvironnement. Par exemple, il est vident que leau glauque dun marcage est porteuse de nombreux micro-organismes. Elle peut transmettre de nombreuses maladies (infections intestinales, malaria) aux personnes qui la boiraient ou vivraient proximit. Par contre, il est vident quune telle eau est trs favorable la prservation dun excellent niveau local de biodiversit. La dfense des intrts de la sant publique ne va pas forcment de pair avec la protection de lenvironnement.

    Laristocrate

    Ds la fi n du XIXe sicle, certains membres des lites nobles sindignent dactes de destruction de la nature, tels que lextermination danimaux ou la destruction de sites ou de paysages magnifi ques, notamment dans les colonies ou les nouveaux territoires. Aux tats-Unis, les parcs nationaux se multiplient dans lide de conserver intactes des parcelles du capital naturel. Un immigrant cossais y fonde le Sierra Club ds 1892, tandis quen France quelques socits sorganisent ds la fi n du XIXe sicle. En France, la loi du 2 mai 1930 sur la protection des sites permet diffrentes associations telles la Socit nationale de protec-tion des paysages et des colonies ou la Socit pour la protection des paysages et de lesthtique de la France dobtenir une reconnaissance de leurs activits militantes. Dans une socit focalise sur lide posi-tive du progrs et conforte par lapparente abondance des ressources naturelles, la proccupation environnementale restera longtemps confi -ne des cercles dinitis. Laristocrate esthte, rveur contemplatif en qute de beaux paysages, est lorigine du mythe dune nature vierge, qui doit le rester. Ce mythe implique un certain conservatisme.

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    Le mythe de laristocrate ou du rveur contemplatif

    On confond souvent la prservation de la nature avec la prservation du paysage propos la vue des individus. Si on jette un trognon de pomme dans une fort, par exemple, il sera facilement et rapidement absorb par son environnement naturel. Ce geste nest pas mauvais pour lenvironnement (pour autant quil ne soit pas multipli par le nombre de promeneurs qui parcourent ladite fort chaque anne !). En revanche, il est drangeant pour les promeneurs qui ont la vue dun paysage souill. On confond alors la protection de lenvironnement avec la protection des yeux du promeneur ! La protection de la beaut du paysage ne va pas forcment de pair avec la protection de lenvironnement.

    Une pense coupe de lconomie

    Pour les cologistes, tout prlvement que le capital opre sur la nature nuit directement celle-ci, indirectement aux hommes. Leur pense est centre sur lenvironnement, elle ne sintresse quindirectement aux enjeux sociaux, elle nglige compltement le domaine conomique.

    Les premiers socialistes : la recherche dun systme galitaire

    Les penseurs antrieurs Karl Marx, qui recherchrent un gal bien-tre de chaque individu dans la socit, peuvent tre assimils a posteriori des penseurs socialistes. Ils portent un regard critique sur les ingalits produites par la socit capitaliste, et sur son incapacit faire bnfi -cier galement tous les individus des fruits de la croissance conomique et du progrs technique . Charles Fourier et Jean-Lonard Sismonde de Sismondi sont particulirement intressants.

    Charles Fourier et les phalanstres

    Charles Fourier (1772-1837) est lennemi dclar des villes, de lindustrie et surtout du commerce. Frapp par lurbanisation rapide de la France au tournant du XIXe sicle, il constate que la ville dshumanise les rapports entre les humains. Il pense que le commerce ne peut prosprer que dans la fraude et le mensonge. Il en conclut que lhomme ne peut spanouir dans sa communaut que sil vit en petits groupes de taille humaine, sans avoir besoin de commercer pour vivre. Il dveloppe ainsi une tho-rie prnant la vie en petite communaut, base sur le phalanstre .

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    Il sagit dune association de travail et de vie regroupant un nombre prcis dindividus (1620, compos pour moiti dhommes et de femmes), anims par de communes passions et dcids vivre ensem-ble. Les membres des phalanstres vivent de prfrence du jardinage, et renoncent toute forme de commerce. Au XIXe sicle, il y eut des tenta-tives de cration de phalanstres en Europe (prs de Rambouillet et de Houdan, en France) et aux tats-Unis (au Texas). Aprs avoir connu des fortunes diverses, ces tentatives ont chou, soit par manque de prpa-ration des membres de la communaut, soit la suite de dissensions internes. En 1835, des fouriristes ouvrent une picerie de commerce vridique et social Lyon, dont les principes font beaucoup penser aux ides du commerce quitable aujourdhui.

    Jean-Lonard Sismonde de Sismondi (1773-1842) et le refus des lois du march

    Jean-Lonard Sismonde de Sismondi (1773-1842) fut dabord un fervent admirateur dAdam Smith. Le spectacle de la misre en Angleterre transforma son optimisme initial en indignation devant la pauvret et lexploitation engendres par le capitalisme. Sismondi analyse alors la concurrence comme un facteur qui pousse lentreprise toujours recher-cher les conomies quelle peut faire. Cette logique fait de louvrier une victime de choix. Ultime maillon de la chane conomique, louvrier a, selon Sismondi, le choix entre tre licenci pour tre remplac par une machine, ou accepter de faire des efforts sur son salaire pour permettre lentreprise de rester comptitive. Sismondi est donc anti-industria-liste. Il voudrait que le progrs se ralentisse et pour cela prconise de supprimer les rcompenses aux inventeurs et manufacturiers, mainte-nir le mtier contre la fabrique, suspendre toute action gouvernemen-tale en faveur de lindustrie. Il pense que lindustrie cre lexploitation et que, par consquent, plus lindustrie progressera et plus cette exploi-tation sintensifi era.

    Karl Marx (1818-1883) conceptualise lexploitation conomique

    Trs inspir par les rfl exions de Charles Fourier, Saint-Simon et Proudhon, Karl Marx est un philosophe de formation, mais pour lui la rfl exion philosophique doit viser lapplication pratique. Elle est insparable

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    dune transformation radicale de la socit, transformation destine dpasser la sphre de lalination humaine, cest--dire celle de lexis-tence historique o lhomme (au travail) est dpouill de lui-mme et de ses uvres. Le concept dalination est important pour Karl Marx, il fait rfrence la situation o ltre humain (en tant que personne qui doit travailler pour vivre) est priv de son essence et confront son produit qui devient Autre que lui et le domine (puisque la valeur du produit lemporte sur la valeur du travailleur).

    Un dsintrt pour lenvironnement

    Les premiers penseurs sociaux posent les bases des rfl exions actuelles sur la place de la condition sociale dans le dveloppement durable. Le rejet de lconomie de march et du capitalisme pose la question de la recherche de manires diffrentes de faire fonctionner lconomie au travers de coopratives, de mutuelles et dassociations notamment. Lenvironnement est absent des proccupations de ces penseurs : leurs rfl exions sur la condition sociale ne contiennent pas dlments rela-tifs aux impacts que pourrait avoir un mauvais traitement de lenviron-nement sur les conditions de vie des hommes. Par exemple, Karl Marx sexprime en termes positifs sur la domestication de la nature, deve-nant un objet pour lhomme, donc une chose utile . Il est vrai quau XIXe sicle le dveloppement de la classe ouvrire et les diffi ciles condi-tions de travail quelle connat incitent les penseurs se focaliser sur les enjeux sociaux et dlaisser les rfl exions sur lenvironnement.

    Au XXe sicle, la synthse des trois piliers

    Ds la fi n du XIXe sicle, des observateurs avertis ont remarqu que notre monde ne pouvait pas continuer se dvelopper ternellement sur le mme modle. Ainsi, le prsident des tats-Unis, Thodore Roosevelt, disait en 1909 (avec) la croissance constante de la population et laug-mentation encore rapide de la consommation, notre peuple aura besoin de grandes quantits de ressources naturelles. Si notre gnration dtruit ces ressources (), nous enlevons le droit la vie aux gnrations futures . Des penseurs vont essayer dharmoniser les trois piliers , en

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    travaillant sur les liens de cause effet des diffrents lments de la rfl exion conomique, sociale et environnementale.

    Les externalits

    Alfred Marshall (1842-1880) met en vidence lexistence deffets ext-rieurs positifs sur lconomie. Il prend lexemple des utilits que les entreprises se rendent entre elles. Celles-ci peuvent, par exemple, profi -ter dun mme bassin rgional de main-duvre ou encore dun journal professionnel. Il existe ainsi des facteurs externes lactivit cono-mique proprement parler que les analyses des conomistes classiques nauraient pas reprs, mais qui infl uenceraient positivement lactivit conomique. Ces facteurs externes ne font pas lobjet de transaction fi nancire et ne sont donc pas explicitement intgrs dans le march. Pourtant, le contexte gographique ou politique dune entreprise peut avoir une infl uence positive sur sa capacit prosprer.

    Les externalits

    Ce sont les effets positifs ou ngatifs quentrane lactivit dun agent conomique lextrieur ou que subit cet agent en provenance de lex-trieur. Ce sont des charges ou des produits extrieurs au march.

    Le principe de pollueur payeur

    Par la suite, Arthur Pigou (1877-1959) objecta que les effets externes peuvent aussi tre ngatifs. Pigou dcrit la pollution, par exemple, comme une dsconomie externe dans la mesure o les dom-mages quelle provoque ne sont pas directement pris en compte par le march. Les dsconomies externes constituent donc un cot social non compens, impos la collectivit, en dehors de toutes transac-tions volontaires. Cette notion fait apparatre des confl its dintrts entre agents conomiques, confl its qui ne sexpriment pas en terme montaire. Les effets externes peuvent prendre quatre formes :

    les effets externes entre producteurs (par exemple, usine polluant leau utilise par une tannerie) ;

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    les effets externes de producteur consommateur (par exemple, la pollution dun lac) ;

    les effets externes de consommateurs producteur ; les effets externes entre consommateurs, qui peuvent tre dus la pollution ou aux phnomnes dencombrement.

    Pigou juge que, pour valuer ces effets externes, il faut les rapporter de lchange en monnaie sonnante et trbuchante, afi n de disposer dun talon de mesure fi able et reconnu par tous dans la socit. Il propose donc de rgler le problme en intgrant dans les mcanismes de march les externalits , cest--dire en leur associant une sorte de prix : cest la naissance du principe du pollueur payeur . Ce principe fait une distinction entre cot priv et cot social, faisant porter sur les agents conomiques la fois un cot priv (par exemple, cot de fabri-cation des shampooings) et un cot socital, cest--dire la fois social et environnemental. Ainsi, la fabrication et lutilisation du shampooing ont un impact sur lenvironnement, par exemple les rejets de lusine dans la rivire adjacente, le retraitement de leau des douches des utili-sateurs et le recyclage de la bouteille, une fois quelle est jete. Tout cela reprsente un cot qui peut tre pay par ladjonction dune taxe.

    Le march des droits polluer

    La distinction entre cot priv et cot social nest pas juge suffi sante par Ronald Coase (n en 1910, prix Nobel en 1991). Selon lui, le strict respect des lois de loffre et de la demande sur un march devrait entra-ner lajustement des acteurs. Ceux-ci doivent en effet logiquement se rendre compte quil est de leur intrt de tenir compte de limpact externe ngatif que peuvent prsenter leurs productions et consom-mations. Il y a donc un intrt conomique ce quune ngociation directe sinstaure entre pollueur et victime de la pollution. ce titre, ltat ne doit alors intervenir que dans le cas o le surcot gnr pour le pollueur en compensation des dgts causs est suprieur au surcot gnr par la prise en charge par ltat dune administration dun march organisant les transactions de compensation entre pollueurs et victimes de la pollution. Cest la naissance du principe de droits polluer sous compensation montaire dtermine par le march . Le

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    rle de ltat consiste uniquement amnager des espaces aidant le march se corriger de lui-mme. Linstauration du protocole de Kyoto et du march de permis dmission, mis dans le cadre de la lutte contre le rchauffement climatique, vont dans ce sens. Les industries, consid-res comme de gros metteurs de gaz effet de serre, se voient remettre des permis leur allouant un quota de droit dmission de gaz effet de serre refl tant approximativement leur niveau dactivit. Pour produire plus dmissions, elles doivent acheter des quotas supplmentaires un prix fi x par le march de loffre et de la demande.

    Un concept encore trop peu intgr dans lenseignement

    Nimporte quelle personne ayant reu une initiation en sciences cono-miques a entendu parler de penseurs fondamentaux comme Smith ou Ricardo. En revanche, Marshall ou Pigou sont peu connus du grand public. Lenseignement conomique se concentre en effet essentielle-ment sur les principes fondamentaux de lois du march et de ladqua-tion entre loffre et la demande des acteurs conomiques. Aujourdhui, il est rare que cette culture conomique soit enrichie de dveloppe-ments sur les questions dexternalits, pourtant simples comprendre. Il est regrettable que le systme denseignement actuel ne familiarise pas suffi samment les futurs scientifi ques, conomistes, ou managers avec une culture conomique qui prenne en compte le dveloppement durable.

    Les enjeux du dveloppement durable en politique

    Aprs avoir vu llaboration du concept de dveloppement durable, il est temps de sinterroger sur la place de ce concept dans les discours et les actes politiques qui dcident de lorganisation et du fonctionne-ment de la socit. Cette dernire partie vise comprendre comment le dveloppement durable est pris en compte aujourdhui sur le plan politique.

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    Les ressorts de la prise de conscience collective

    Lobservation de notre monde montre clairement que les individus, les citoyens et les pouvoirs politiques nont pas naturellement la fi bre du dveloppement durable et que nous nous comportons naturelle-ment de manire totalement irresponsable vis--vis de la plante et des gnrations qui nous suivront. Ce concept sest cependant impos dans le dbat politique (au moins sur le plan thorique), parce quil rvle et rpond des proccupations inquitantes. En plus dexpliquer lapparition du thme dans le dbat politique, lanalyse de ces proccu-pations permet de comprendre par quel biais la pratique du dveloppe-ment durable peut sancrer dans nos mentalits.

    Le portefeuille

    Cela ressemble fort une vidence. Il est cependant important de le souligner dans notre rfl exion sur la prise en compte du dveloppement durable. Le niveau des prix est le principal mobile qui puisse pousser les individus changer de comportement en faveur dune plus grande conomie des ressources. Le souci de contrler ses dpenses vient naturellement avant le souci du dveloppement durable, mais dans la mesure o les deux aspects sont lis (dans le cas de consommation deau ou dessence dont les factures augmentent, ou dune collecte municipale des dchets capable de mettre des amendes aux particuliers qui ne font pas le tri slectif correctement, par exemple), le portefeuille est une raison majeure dadopter un nouveau comportement contri-buant plus activement au dveloppement durable. Cette constatation implique nanmoins que, si lon veut favoriser ladoption de nouvelles habitudes, il faut offrir aux consommateurs un avantage fi nancier clair, qui compense le dsagrment de leffort du changement. Cet avantage fi nancier est rel, cet ouvrage vise le dmontrer.

    La sant

    Le second vecteur de la prise de conscience du mauvais tat de notre plante ne vient pas dune observation individuelle, mais dune analyse de la communaut scientifi que, largement relaye par les mdias. Il sagit des consquences que peuvent avoir sur notre sant des pratiques

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    nfastes, peu respectueuses du dveloppement durable. Ainsi, ds 1974, des scientifi ques ont commenc voquer lamincissement de la couche dozone, puis, durant les annes 1980, montrer les effets que pouvait avoir sur la sant la dgradation de la couche dozone.1 Ce nest quen 1987 quest sign le protocole international de Montral qui vise llimi-nation progressive des gaz responsables de ce phnomne. Le vritable ressort de cette initiative nest pas le souci de lenvironnement en tant que tel, mais les craintes pour la sant humaine. Dans ce cas de fi gure, il faut la persvrance de certains chercheurs, usant de leur libert pour poursuivre leurs recherches en dpit du scepticisme de la communaut scientifi que, et lentre en action dONG (telles que Oxfam, Amnesty International, Caritas, CARE, ou encore le WWF) pour obliger les gouver-nements se runir, couter les experts et faire voluer la lgislation pour rpondre aux attentes des populations.

    Quels sont les acteurs du dveloppement durable ?

    Le rle de ltat et des collectivits

    Face lenvergure des problmes attachs au dveloppement durable, il est tentant de sexclamer Mais que fait le gouvernement ? . Il est vrai que de par sa fonction, celui-ci doit tre le principal acteur de la prise en compte du dveloppement durable. Il est le seul pouvoir donner limpulsion ncessaire au cur de laction publique, pouvoir lgi-frer et rglementer dans les diffrentes sphres de la vie conomique et sociale, depuis la politique nergtique lamnagement du terri-toire et la problmatique des transports, dans le domaine de lhabitat, de la politique touristique ou encore de la sensibilisation de la popula-tion aux questions du dveloppement durable.

    Le problme, cest quau lieu de traiter en priorit les dossiers impor-tants, les responsables politiques traitent les dossiers urgents, sensi-bles . Or le politique doit imposer les dossiers importants auprs de ses lecteurs au lieu de grer les dossiers urgents pousss en avant par les mdias. Cest un principe de fonctionnement qui est indispensable pour que le dveloppement durable puisse bnfi cier dun traitement politique conforme la hauteur de son importance et quil ne soit pas sans cesse relgu en dossier de seconde main. Toutefois, la France

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    commence se mobiliser. Une stratgie nationale du dveloppement durable a t lance en 2003, permettant la mise en place de quelques mesures importantes : charte de lenvironnement, plan sant-environ-nement, plan climat, rforme du code des marchs publics permettant dintgrer des critres durables, plan air, plan ville durable notamment.

    Les entreprises et la cration dun espace conomique soucieux de durabilit

    Dans un monde domin par le souci de la croissance conomique, il faut sappuyer sur lconomie de march existante pour crer un espace conomique de march intgrant le dveloppement durable et btir un alter monde possible et durable. Soucieuses de rpondre aux attentes de leurs clients et dinnover pour amliorer la rentabilit des processus de production et de mise disposition des produits sur les marchs, les entreprises peuvent jouer un grand rle dans ldifi cation dune cono-mie de march lre du dveloppement durable. Elles disposent des connaissances et des capitaux indispensables. Reste la question de la motivation. La dmarche et les efforts seront-ils positivement appr-cis des marchs fi nanciers ? Les clients sont-ils vraiment en attente de produits respectueux du dveloppement durable ? Lentreprise ne risque-t-elle pas, en sengageant dans cette voie, de perdre en compti-tivit sur les concurrents ?

    Pour crer un espace conomique se fondant sur des rgles du jeu motivant les entreprises investir pleinement les rfl exions du dve-loppement durable, ltat franais et, de plus en plus, les instances europennes ont un rle majeur jouer : lvolution des structures des marchs fi nanciers (notamment lintgration de lanalyse extra-fi nan-cire socitale) permettrait aux entreprises de mieux valoriser leurs dmarches de dveloppement durable ; lducation et la sensibilisation de tous les individus aux problmatiques du dveloppement durable permettraient de faire voluer les comportements ; enfi n des modifi ca-tions dans la lgislation et la fi scalit pourraient encourager les entre-prises dans leurs innovations et leur contribution active au dveloppe-ment durable, par exemple. De la part des autorits politiques, ce serait une manire intelligente doffrir des rductions dimpts aux entre-prises tout en obtenant des contreparties dinvestissement de leur part, dans lintrt de la socit.

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    Louverture progressive au dbat de socit

    Le dveloppement durable doit tre la proccupation de tous, car il est de lintrt de tous. La socit civile a un rle de gouvernance jouer dans le suivi des activits risque (chimie, nuclaire notamment). De manire gnrale, force est de constater que les dcisions ayant trait au dveloppement durable nont pas t prises la seule initiative des diri-geants. La mobilisation collective est souvent indispensable pour obte-nir la prise en compte de tel ou tel aspect nfaste du dveloppement. Lenjeu dun contexte dmocratique, favorable la libre expression des problmes de socit, prend ici tout son sens. En France, louverture du droit de participation du grand public aux dcisions concernant lenvi-ronnement sest faite en plusieurs tapes.

    La gestion de lenvironnement industrielLa pollution industrielle pose des questions aux riverains depuis quelle existe ! La gestion de lenvironnement industriel est donc lun des terrains pionniers o se sont dveloppes linformation puis la concertation entre le public, les tablissements et ltat franais, seul mme dautoriser, de mettre en demeure ou de sanctionner les tablissements. LUnion europenne a dabord jou un rle moteur dans la reconnaissance dun droit linformation du public, voire dun droit de participer aux processus de dcision. Par la suite, des commissions locales dinformation et de surveillance (CLIS) et des secrtariats permanents pour la prvention des pollutions industrielles (SPPPI) ont t mis en place. Des espaces dinformation concernant les activits nuclaires ont galement vu le jour. Depuis lvnement de Tchernobyl, qui a montr au grand public les limites de lexpertise of cielle, de nombreuses associations ont rclam laccs des informations plurielles et ables, faisant appel la contre-expertise des informations gouvernementales. Le principe de Comit consultatif dinformation sur la sret nuclaire , mis en place en 1999, permet de multiplier les sources dinformation et de rendre le dispositif davantage transparent. La catastrophe AZF de Toulouse, en septembre 2001, a renforc le droit de regard du public sur les activits risque. Un cadre juridique gnralisant la participation du grand public, des salaris et des associations dans llaboration des projets et dans laccs linformation se met progressivement en place. Il existe dsormais, par exemple, des bureaux dinformation appels Comits dInformation sur les Risques Technologiques (CIRT).

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    Le droit de participer aux dcisions touchant lenvironnement

    Les dispositions concernant linformation du public ont t confortes par la convention dAarhus signe le 25 juin 1998 au Danemark par trente-neuf tats. Adopte en application de larticle 10 de la dclaration de Rio pour la rgion Europe de la Commission conomique des Nations Unies, la convention dAahrus porte sur laccs linformation, la participa-tion du public au processus dcisionnel et laccs la justice en matire denvironnement.

    Le droit un environnement sain reconnu lgal dun droit de lhomme

    En France, la charte de lenvironnement, vote le 28 fvrier 2005, recon-nat comme fondamental (au mme titre que la Dclaration universelle des droits de lhomme) le droit de vivre dans un environnement qui-libr et respectueux de la sant . Cest un grand pas en avant. Tout en rendant aux individus la responsabilit de leurs actes et des cons-quences de ceux-ci sur lenvironnement (est notamment voqu le prin-cipe de pollueur payeur et le principe de prcaution), la charte de lenvironnement affi rme le principe dun droit linformation du public ainsi que le droit de participer llaboration des dcisions publiques ayant une incidence sur lenvironnement.

    Ces textes quon trouvera aisment sur Internet (voir les sites indiqus en page 197) ne doivent pas rester lettre morte. Ils doivent nourrir la conscience citoyenne. En effet, le droit de vivre dans un environne-ment durable ne suse que si lon ne sen sert pas .

    Des solutions en construction

    Un contexte de mondialisation

    Soucieux denvironnement, le dveloppement durable ne se limite pas aux frontires des tats ou des continents. De plus, limbrication des liens politiques et conomiques qui fondent notre civilisation fait que la rponse aux problmes ne peut plus se poser en termes strictement nationaux.

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    Les initiatives internationales en faveur du dveloppement durable

    1972 : naissance du mouvement politique.

    Rapport du club de Rome Halte la croissance qui nonce lavertissement suivant : Chaque jour pendant lequel se poursuit la croissance exponentielle () rapproche notre cosystme mondial des limites ultimes de sa croissance. Dcider de ne rien faire, cest dcider daccrotre le risque deffondrement.

    Cration du PNUE (Programme des Nations Unies pour lEnvironnement).

    1979 : premire confrence internationale sur lhomme et le climat, lONU.

    1985 : convention pour la protection de la couche dozone.

    1987 : protocole de Montral sur les CFC (cloro uorocarbones).

    Rapport Brundtland.

    1992 : sommet de la terre de Rio. Programme daction Agenda 21 .

    1997 : confrence sur leffet de serre de Kyoto.

    2002 : sommet de la Terre de Johannesburg. Pacte Mondial.

    Cette chronologie, apparemment fournie, ne doit pas cacher que dans les faits, laction politique internationale est domine par une grande inertie. La guerre froide et les clivages politiques, accompagns de dbats sans fi n sur la question de savoir si le march tait capable de rsorber ses propres dysfonctionnements ou si lintervention de ltat tait chaque fois fondamentale , ont considrablement retard les dcisions politiques. Le rapport Halte la croissance qui date de 1972 est malheureusement toujours dactualit. Llan qui portait la confrence de Rio de 1992 (voir la Dclaration de Rio en page 191), un moment o la fi n de la guerre froide ouvrait la porte une meilleure capacit de concertation et de coordination internationales na pas eu les effets escompts. La confrence de Johannesburg, elle non plus, na gure eu de suites. Au-del de quelques avances notables sur les ques-tions de rchauffement climatique notamment, la porte de ces actes internationaux reste faible. Il est clair que si les citoyens taient davan-tage conscients des enjeux et quils se mobilisaient plus, on pourrait esprer que les dcideurs politiques avancent plus rapidement. Il est

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    galement clair que si par exemple lEurope pouvait parler dune seule voix, elle pourrait peser plus fortement au niveau international.

    La Dclaration de Rio et lAgenda 21

    Les vingt-sept principes adopts dans la Dclaration de Rio, en 1992, devraient thoriquement inspirer toutes les dcisions publiques prises par les tats signataires, dont la France.2 En application de cette Dclara-tion, la France a mis en place le dispositif des chartes dcologie urbaine ou chartes pour lenvironnement : programmes partenariaux pour un dveloppement durable . Il sagit, dans la gestion environnementale dun territoire, de mettre en uvre une nouvelle approche cono-mique, favorisant, dans lesprit de Rio, un dveloppement durable int-grant les notions de cots cologiques. La qualit prserve ou retrouve de lenvironnement peut devenir alors lenjeu dune nouvelle croissance susceptible dattirer de nouveaux investissements, activits cono-miques et emplois . Il sagit aussi de russir le pari de la qualit de la vie en ville, en construisant une ville pour demain dont le dveloppement sera plus participatif et plus conome en ressources non renouvelables. Nimporte quelle commune, quelle que soit sa taille, peut laborer un Agenda 21 son chelle. Quelques collectivits ont commenc y rfl -chir ds le milieu des annes 1990, mais la dmarche reste marginale. Cest trop souvent un simple effet dannonce qui ninspire pas relle-ment les politiques damnagement du territoire.

    Les enjeux et les limites de la mobilisation citoyenne

    Des problmatiques complexes

    La rfl exion du dveloppement durable savre complexe : comment penser toutes les causes et toutes les consquences socitales dun projet, dun produit ou dune pratique en gardant lesprit une vision de long terme ? Le porteur de projet (tat, collectivit, entreprise, indi-vidu) doit disposer dune connaissance large des enjeux, de manire prendre en compte dans sa rfl exion tant les lments les plus vidents que les signaux faibles, moins pertinents de prime abord, mais suscep-

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    tibles davoir un rel impact long terme. Lexistence dune recherche indpendante des choix de ltat, la capacit des citoyens sorgani-ser en associations de consommateurs ou en ONG activistes dfendant des clauses sociales ou environnementales permettent de nourrir les rfl exions de regards croiss, voire contradictoires et sont les moteurs dune meilleure prise en compte des enjeux du dveloppement durable. Il est dans lintrt du consommateur de bnfi cier dune information sur les produits quil achte qui soit diffrente de celle que peut lui four-nir son fournisseur. Il est galement de lintrt des entreprises de sas-seoir autour dune table avec des ONG et des syndicats pour couter les proccupations montantes et dtecter en interne les pistes de progrs permettant de contribuer plus activement au dveloppement durable.

    Un dialogue dlicat

    Des questions sensibles comme le nuclaire ou les OGM rappellent sans cesse combien il est indispensable, pour sasseoir autour dune table et changer, de disposer dune culture commune et de mme niveau, susceptible de justifi er les prises de position contradictoires, toutes les questions les plus lmentaires, mais jamais de laisser lignorance et lincomptence dcider la place des experts. La rfl exion du dvelop-pement durable doit de plus intgrer la fois des enjeux conomiques, sociaux et environnementaux. Or, la plupart des acteurs susceptibles de discuter et de dcider de ces projets reprsentent prioritairement un seul de ces domaines quils vont dvelopper au dtriment de lharmonie gnrale. Le processus de dveloppement durable exige que les diff-rents acteurs fassent abstraction de leur seule vision du monde pour croiser leurs intrts ceux dautrui. Le dcloisonnement socioculturel, lattitude dcoute active et douverture lautre sont indispensables.

    Des espaces de concertation clarifi er

    La cration despaces publics de concertation, notamment sur le thme de lenvironnement industriel, ne doit pas cacher les limites du travail accompli : ces espaces restent dans les faits trs ingaux quant lga-lit de traitement des requtes, la capacit se faire entendre des dci-sionnaires conomiques et industriels, et laccs des informations

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    fi ables manant de diffrentes sources de recherche. De plus, depuis les annes 1970, et du fait de proccupations montantes en matire de risques lis aux activits nuclaires ou chimiques, des bureaux, des secrtariats, des comits se sont monts sur des territoires ou des problmatiques spcifi ques. Aujourdhui, la trs grande complexit des structures ne facilite pas les dbats. Il faut tout remettre plat et tirer les enseignements des diffrentes expriences pour btir des espaces de dbat simplifi s, adapts aux problmatiques locales et affectant chaque partie un rle clair.

    Un autre monde est possibleLe slogan Un autre monde est possible est le cri du mouvement altermondialiste. Laltermondialisation nest pas oppose la mondia-lisation, elle demande que le processus de mondialisation se fasse dans le respect des valeurs telles que la dmocratie, la justice conomique, lautonomie des peuples, la protection de lenvironnement et les droits humains fondamentaux, afi n que ces valeurs restent prpondrantes sur la logique strictement conomique de ce processus.

    Laltermondialisation en appelle une mondialisation matrise et soli-daire, encadrant lexpression du march. Le slogan Un autre monde est possible illustre bien le sens du mouvement qui cherche des alternatives, globales et systmiques, lordre fi nancier et commer-cial international en contestant notamment lorganisation interne, le statut et les politiques dinstitutions comme lOrganisation Mondiale du Commerce (OMC), le Fonds Montaire International (FMI), lOrgani-sation de Coopration et de Dveloppement conomique (OCDE), le G8 et la Banque Mondiale.

    Laltermondialisme ne doit pas tre confondu avec lantimondialisme ! Des raccourcis rapides ont t effectus dans les mdias pour confondre sous une mme dnomination la fois les opposants toute forme de mondialisation (tels que les nationalistes, les protectionnistes, les communautaristes, les fondamentalistes) et ceux dfendant une autre forme de mondialisation plus soucieuse de valeurs environnementales et socitales. Ces mouvements sont pourtant profondment diffrents dans leurs principes et leurs modes daction.

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    Un autre monde est possible. Un autre monde est ncessaire. Mais pour autant, cet autre monde ne peut ni se construire partir de rien, ni rayer dun simple revers de main les structures sur lesquelles sap-puie notre socit actuelle. Si un autre monde est donc btir, il doit sappuyer sur des principes fondamentaux, tels quun dveloppement contrl de lconomie de march et lexercice sans cesse renouvel de la dmocratie.

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    Chapitre 2

    Corriger les options non durables de notre civilisation

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    Pour corriger les options prises au cours des sicles prcdents, il est ncessaire didentifi er les phnomnes nfastes hrits des pratiques de nos prdcesseurs, au dveloppement desquels nous continuons de contribuer, ou que nous pouvons contenir laide de quelques gestes simples.

    Le rchauffement climatique, rvlateur du mauvais tat de notre plante

    Lintensi cation de leffet de serre

    Leffet de serre est naturellement produit par latmosphre de la Terre qui retient une partie de la chaleur mise par le soleil. Sil ny avait pas cette retenue de chaleur, la temprature la surface de la Terre serait aux alentours de -18C, temprature insuffi sante pour permettre la vie humaine. Leffet de serre est un effet naturel. Le rchauffement clima-tique rsulte, lui, dune intensifi cation de leffet de serre, lie la produc-tion excessive de gaz carbonique sur terre. Le rchauffement climatique nest donc pas naturel : il rsulte principalement de lactivit humaine.

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    Les gaz responsables de leffet de serre

    Latmosphre est forme dun certain nombre de gaz, dont une infi me partie sert emprisonner la chaleur et assurer leffet de serre nces-saire la vie sur la Terre. Parmi ces gaz, le principal est le dioxyde de carbone ou gaz carbonique, dont la notation chimique est CO2. Outre ce dernier, les principaux gaz contribuant leffet de serre sont le mthane ou gaz naturel (CH4), la vapeur deau (H2O), lozone (O3), le protoxyde dazote (NO2) et les fl uorocarbones. Hormis les fl uorocar-bones, tous ces gaz sont naturellement prsents dans latmosphre en quantit infi me (moins de 1%). Or depuis le dbut de lre industrielle, les teneurs atmosphriques en dioxyde de carbone et mthane ont augment respectivement de 30% et de 145%. La concentration crois-sante de ces gaz est due lmission, sous leffet des activits humaines, dimportantes quantits de dioxyde de carbone, issu de la combustion dnergies fossiles et de certaines activits industrielles, et de mthane, produit par la vgtation fermente ou brle en labsence doxygne (rizires, dcharges publiques, ruminants, dforestation). Nos activits conomiques drglent les cycles naturels : la terre a mis des mill-naires pour stocker et transformer du carbone en ptrole et charbon. Notre productivisme est en train dexploiter, de brler et de rejeter dans lair en quelques dcennies ce carbone lentement accumul.

    Une volution rapide, sans prcdent

    Il est certain que la Terre a dj connu des changements climatiques (priode chaude et humide laquelle vivaient les dinosaures, priode glacire laquelle vivaient les mammouths). Mais la vitesse de lvo-lution actuelle (une moyenne de plus dun demi-degr en un sicle, pour lensemble du globe) et la vitesse prvue pour la suite (une augmenta-tion globale de 1,4C au mieux 5,8C au plus, en 2100) est 100 fois plus leve que les diffrents changements spontans de la temprature sur Terre, qui concernaient quelques degrs sur des priodes de 10 000 ans, chaque fois.

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    Le drglement climatique et ses consquences

    Selon les prvisions scientifi ques, il est trs probable (de 90 99% de probabilit) que le drglement climatique provoquera des vagues de chaleur plus longues et plus intenses, avec une lvation particulire des tempratures nocturnes. La mme hauteur de probabilit existe quil y ait des prcipitations de plus en plus intenses et surtout de plus en plus variables dune anne sur lautre, notamment dans les latitudes moyennes comme les ntres. Les sries statistiques dont nous dispo-sons sont encore insuffi santes pour attribuer tel ou tel vnement mtorologique extrme (tempte, inondation, canicule) au dr-glement climatique. Mais les faits observs lheure actuelle valident les prvisions scientifi ques. Ainsi, les intervalles entre les ts chauds tendent se raccourcir, signe dun rchauffement de la plante.

    Les lois physiques font que leau chaude occupe un peu plus de volume que leau froide. Vu la masse deau contenue dans les ocans, le rchauf-fement des eaux qui accompagne le rchauffement de la plante provo-quera une monte des eaux, galement nourrie par la fonte progressive des calottes de glaces polaires et des glaciers continentaux.3 Selon la moyenne des estimations, le niveau slverait denviron cinquante centimtres dici 2100. Certains deltas, lagunes et rgions littorales pourraient tre submergs. En France, la Camargue et le rivage lagunes du Languedoc seraient immergs.

    Face au rchauffement du climat, la nature va tenter de sadapter. Ces changements auront des consquences de grande ampleur sur les paysages, la vie animale et vgtale, lvolution des sols et des ressour-ces en eau. En Mditerrane, on observe dj larrive de nombreux poissons tropicaux africains et indiens, dont les barracudas le long des ctes franaises !

    Le lm catastrophe de Roland Emmerich intitul Le jour daprs (The Day After Tomorrow), sorti en mai 2004, est videmment ctif, mais il donne un bon aperu (en vitesse acclre) de certaines modlisations scienti ques et de limpact sur notre vie quotidienne du changement climatique.

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    La prvision de limpact du changement climatique sur la sant savre un exercice dune grande diffi cult. Pour linstant, il sagit surtout de spculation. (Il faut par ailleurs noter que des effets bnfi ques pour-raient coexister avec les effets ngatifs.) Les pathologies les plus suscep-tibles de contribuer un excs de mortalit, suite au changement du climat, sont les maladies cardiovasculaires et crbro-vasculaires. Dans les pays du Sud, les recherches actuelles sintressent dventuels liens entre laugmentation des tempratures et des prcipitations et la recrudescence de la borrliose et du paludisme au Sngal, au Mali ou au Niger, ou encore lmergence possible dpidmies de cholra dans le Bassin mditerranen. Parmi les effets indirects, on peut prvoir laugmentation du risque dintoxications alimentaires et de contami-nation par les systmes de climatisation. Le changement de climat tant propice pour nombre de vecteurs de maladies (tiques, mousti-ques, phlbotomes), notamment ce