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Jeudi 23 Mars. LIBERTÉ, ÉGALITÉ, FRATERNITÉ. 1848. - N.° 2. La rapidité avec laquelle le premier numéro de L'ÉLECTEUR RÉPUBLICAIN a été écoulé, nous impose l'obligation de le faire dorénavant paraître 2 fois par semaine. En conséquence, L'ÉLECTEUR RÉPUBLICAIN paraîtra le mercredi et le samedi soir. LIBERTÉ, ÉGALITÉ, FRATERNITÉ. Elle vient de reparaître, en caractères splen- dides, sur le fronton de nos édifices, cette devise qu'y avait inscrite, il y a 55 ans, la main de nos pères! En la reprenant avec orgueil, nous l'avons ren- due plus héroïque et plus sublime ! Nous l'avons purifiée de toute idée de vengeance, de toute me- nace.'... Ce n'est pas au nom de la Terreur que nous venons à vous, frères; ce n'est pas au nom de la mort que nous vous adjurons !... La Liberté, l'Égalité, la Fraternité, ces trois anges du Ciel, viennent de briser du pied le sinistre échafaud po- litique , sur lequel a si souvent coulé un sang chaud d'honneur et de patriotisme ! Travailleurs, hommes du peuple, ne voyez-vous pas quelle force nous donnent ces trois mots paci- fiques qui résument tout l'Evangile social? Nous ne menaçons pas, nous ne haïssons pas: nous sommes des hommes de justice, de modération et d'amour ; et, au nom du Dieu qui nous a mis sur la terre tous égaux, tous libres, tous frères, nous proclamons la Charte du monde ! Charte glorieuse, qui va luire comme un soleil sur l'Univers, qui réchauffera les âmes engour- dies par la servitude, qui séchera la larme sur la paupière humide du proscrit, et qui fera hurler sur leurs trônes les despotes, comme gémissent les oiseaux de nuit quand de vives clartés viennent dissiper l'ombre où ils promènent la terreur et la mort. L'aurore d'un jour nouveau se lève. La terre tressaille! L'humanité s'agite et la voilà qui s'ap- prête à quitter la vallée de larmes ! Qu'il est beau l'horizon vers lequel s'élancent nos vœux! Qu'il est riche de promesses, l'avenir mystérieux que, de toutes les forces de notre âme, nous voudrions atteindre !... Si ce sont là des chimères insensées, des espérances impossibles , i l est une heure où i l est permis de s'enivrer de ces rêves! Cette heure est arrivée.' Puisse-t-elle se prolonger, pour le bonheur de l'humanité ! Aujourd'hui, pas de défaillance. Ayons tous du cœur et de la foi ! La foi qui transporte les mon- tagnes et qui se joue de ce que les simples ap- pellent l'impossible. Arrière les âmes pusillanimes ! Ne sommes-nous pas arrivés à l'âge des miracles ? N'avons-nous pas tous assisté à cette prodigieuse Révolution où le doigt de Dieu a gouverné les évé- nements , en dehors de toutes les prévisions de la sagesse humaine ? Travailleurs, ce miracle qui étonne les savants de ce monde, qui confond la sagesse des habiles, nous le comprenons, nous ; nous en saisissons le mystère adorable ! Pourquoi tant de choses inouïes en quelques heures, en quelques minutes : ces coups de fou- dres frappant sous nos yeux le plus solide édifice de la terre ! Pourquoi cette stupeur d'un peuple ; ce soudain entraînement de 34 millions d'hommes vers une République inconnue ! Pourquoi ce mi- racle prolongé? Je vais vous le dire en deux mots. C'est, travailleurs, que Dieu vous aime ! Depuis six mille ans, accablés de toutes les fa- tigues et de toutes les servitudes, affamés et sup- pliants , abreuvés de honte et de misère, d'iniqui- tés et d'infamies , —•. vous n'avez eu qu'un ami, qu'un protecteur, c'est Dieu, le Dieu vivant et invisible ! Il y a dix-huit siècles , il a pris un ouvrier , pau- vre comme vous, simple et humble comme vous ; il a mis sur son front le diadème de la Divinité, et il l'a fait le Roi de tous les globes où gémissent des opprimés, où crient des infortunes, en l'appelant SON FILS. Celui-là nous a signé de son sang la Charte de délivrance! Son testament, vous le connaissez : Liberté, Égalité, Fraternité! Eh bien, travailleurs, c'est parce que ces trois mots étaient lettre morte, c'est parce qu'ils étaient devenus une formule banale, à laquelle tous les faits donnaient un démenti et que toutes les évi- dences repoussaient, — que ce miracle, que cette Révolution de 1848 s'est accomplie sous nos yeux. Et maintenant, il faut que ces trois mots inscrits sur le fronton de nos édifices passent dans les cœurs, dans les institutions, dans les mœurs, et que nous assistions à leur universelle application. Que cette Charte soit bien une vérité ! La Liberté! Nous n'avons eu encore que celle de mourir de faim. Frères, n'appelez pas liberté cette faculté d'aller au Club, d'être distrait de vos occupations pour aller discourir et donner vos votes à tel dont vous ne connaissez que la langue dorée : jours de li- berté , mais jours de chômage et de misère que ceux-là. La Liberté que vous devez réclamer, c'est celle d'envoyer vos enfants à l'école ; c'est celle de trouver dans un travail assuré le pain de chaque jour. La Liberté que vous réclamez, c'est préci- sément le contraire de la liberté qu'on vous lais- sait : c'est la liberté de VIVRE EN TRAVAIL- LANT, et non celle de mourir de faim, faute de travail. Egalité. Nous savons bien qu'il y aura toujours des inégalités ici-bas : mais au moins qu'il n'y ait de privilèges pour personne ! Que les impôts soient proportionnels à la fortune : que le Peuple ne supporte pas à lui seul des taxes accablantes ! Que les prolétaires trouvent dans l'Etat une bien- veillance , une sympathie égale à celle que l'Etat témoigne à ceux qui possèdent ! Fraternité. Il n'y a pas à chercher des mois pour déterminer les devoirs qu'impose ce sentiment. Ecoutons parler nos cœurs!... Le principe de la Fraternité est toute la morale du Christ: « Aimons- nous , aimons-nous les uns les autres ! » Ouvriers, aimez les patrons; patrons, aimez les ouvriers; riches, aimez les pauvres ; pauvres, aimez les riches ! Aimez-vous , aimez-vous, aimez-vous ! Liberté, Égalité, Fraternité! Que cette Charte devienne une vérité ! ! ! LES CLUBS. Nous l'avons dit dans notre dernier numéro, il est nécessaire, indispensable, que l'action des Clubs puise dans une centralisation l'unité et la force qu'on ne trouve jamais dans une série d'ef- forts isolés les uns des autres. Mais sous quelle influence et suivant quelles données un Club cen- tral doit-il être formé ? Telle est la question fort grave qui a occupé lundi une grande partie de la séance de l'Union Démocratique. Chacun de nous a lu ces jours-ci, dans plusieurs rues de la ville, un placard annonçant la formation effectuée d'un Club central et invitant les divers Comités électoraux à s'y faire représenter; déplus, une lettre émanant de ce Club, dit Central , et adressée à chaque Président, l'invitait à participer aux travaux du nouveau Comité, dont le Bureau était déjà constitué et dont les membres signaient non en qualité de membres provisoires, mais bien en qualité de membres définitifs. L'illégalité d'une telle démarche était flagrante ; aussi, dans le sein de l'Union Démocratique comme dans le sein du Comité Sainte-Croix, cette convocation donna lieu à des interprétations diverses, mais qui eurent pour but définitif de re- fuser le concours au Club dit central, non pas qu'on voulût faire de l'exclusivisme à l'é- gard de personne, mais uniquement en vue de rester dans les conditions de liberté sous l'in- fluence desquelles doivent s'accomplir toutes les opérations électorales. Mais i l y a plus, le Comité dit central refusait la coopération de tout Club qui, bien que se disant Républicain, pouvait, par la nature des tendances antérieures de ses membres, ou le choix des can- didats qu'il patronait, être fort suspect sous ce rapport. Pour notre part et en fait, nous compre- nons en ceci la résolution du Comité central; mais en droit, nous ne pouvons l'admettre. C'est éga- lement dans ce sens que vota l 'Union Démocratique; et d'ailleurs , ajouta avec raison un de ses membres, « on n'exclut que ce qu'on craint ; refuser la lutte, c'est avoir peur ; admettons toutes les opinions. » Telle est la règle de conduite admise par l'assemblée La discussion engagée sur ce point, M. Victor Mangin, délégué avec M . Guiberteau par le Club dit Central, démontra en quelques paroles qu'il avait bien fallu que quelqu'un prît l'initiative. Or, que leur Comité avait eu ce mérite incontestable. Pour nous, qui dès lors ne voyons plus depuis cet aveu que la Commission démocratique agis- sant; par délégation en vue de s'adjoindre les Clubs franchement républicains , nous ne saurions qu'approuver encore plus le refus de participation de quelques Comités ; et voici pourquoi : Nous respectons sincèrement le Comité Démo- cratique , nous comptons des amis parmi ses mem- bres , et nous serons toujours les premiers à signa- ler la noble initiative qu'il a prise dans les événe- ments qui viennent de s'accomplir. Mais, selon nous, le Comité Démocratique, con- voquant à l'Assemblée de plusieurs de ses membres, les présidents des différents Clubs , ne remplit en aucune façon le but d'une réunion libre des délé- gués de tous les Comités. L'ÉLECTEUR RÉPUBLICAIN, JOURNAL LES CLUBS E T D E L'ORGANISATION DU TRAVAIL Prix de la Feuille : 5 centimes. Tout ce qui concerne la Rédaction doit être adressé FRANCO au Comité rédacteur, place du Bon-Pasteur, 28, au Cabinet de L e c t u r e L'Électeur Républicain est adressé dans toutes les communes du Département, et se rend dans les divers quartiers de Nantes. 11 est provisoirement hebdomadaire.

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Page 1: Jeudi 23 Mars. LIBERTÉ, ÉGALITÉ, FRATERNITÉ. L'ÉLECTEUR … · 2012-06-08 · Jeudi 23 Mars. LIBERTÉ, ÉGALITÉ, FRATERNITÉ. 1848. - N.° 2. La rapidit ave laquelléc le premiee

Jeudi 23 Mars. L I B E R T É , É G A L I T É , F R A T E R N I T É . 1848. - N.° 2.

La rapidité avec laquelle le premier numéro de L'ÉLECTEUR RÉPUBLICAIN a été écoulé, nous impose l'obligation de le faire dorénavant paraître 2 fois par semaine. En conséquence, L'ÉLECTEUR RÉPUBLICAIN paraîtra le mercredi et le samedi soir.

L I B E R T É , É G A L I T É , FRATERNITÉ.

Elle vient de reparaître, en caractères splen-dides, sur le fronton de nos édifices, cette devise qu'y avait inscrite, i l y a 55 ans, la main de nos pères!

E n la reprenant avec orgueil, nous l'avons ren­due plus héroïque et plus sublime ! Nous l'avons purifiée de toute idée de vengeance, de toute me­nace.'... Ce n'est pas au nom de la Terreur que nous venons à vous, frères; ce n'est pas au nom de la mort que nous vous adjurons !... La Liberté, l'Égalité, la Fraternité, ces trois anges du Ciel , viennent de briser du pied le sinistre échafaud po­litique , sur lequel a si souvent coulé un sang chaud d'honneur et de patriotisme !

• Travailleurs, hommes du peuple, ne voyez-vous pas quelle force nous donnent ces trois mots paci­fiques qui résument tout l'Evangile social? Nous ne menaçons pas, nous ne haïssons pas: nous sommes des hommes de justice, de modération et d'amour ; et, au nom du Dieu qui nous a mis sur la terre tous égaux, tous l ibres, tous frères, nous proclamons la Charte du monde !

Charte glorieuse, qui va luire comme un soleil sur l 'Univers, qui réchauffera les âmes engour­dies par la servitude, qui séchera la larme sur la paupière humide du proscrit , et qui fera hurler sur leurs trônes les despotes, comme gémissent les oiseaux de nuit quand de vives clartés viennent dissiper l'ombre où ils promènent la terreur et la mort.

L'aurore d'un jour nouveau se lève. La terre tressaille! L'humanité s'agite et la voilà qui s'ap­prête à quitter la vallée de larmes ! Qu'i l est beau l'horizon vers lequel s'élancent nos vœux! Qu' i l est riche de promesses, l'avenir mystérieux que, de toutes les forces de notre âme, nous voudrions atteindre !... Si ce sont là des chimères insensées, des espérances impossibles , i l est une heure où i l est permis de s'enivrer de ces rêves! Cette heure est arrivée.' Puisse-t-elle se prolonger, pour le bonheur de l'humanité !

Aujourd'hui, pas de défaillance. Ayons tous du cœur et de la foi ! L a foi qui transporte les mon­tagnes et qui se joue de ce que les simples ap­pellent l'impossible. Arrière les âmes pusillanimes ! Ne sommes-nous pas arrivés à l'âge des miracles ? N'avons-nous pas tous assisté à cette prodigieuse Révolution où le doigt de Dieu a gouverné les évé­nements , en dehors de toutes les prévisions de la sagesse humaine ?

Travailleurs, ce miracle qui étonne les savants de ce monde, qui confond la sagesse des habiles, nous le comprenons, nous ; nous en saisissons le mystère adorable !

Pourquoi tant de choses inouïes en quelques heures, en quelques minutes : ces coups de fou­dres frappant sous nos yeux le plus solide édifice

de la terre ! Pourquoi cette stupeur d'un peuple ; ce soudain entraînement de 34 millions d'hommes vers une République inconnue ! Pourquoi ce m i ­racle prolongé? Je vais vous le dire en deux mots.

C'est, travailleurs, que Dieu vous aime ! Depuis six mille ans, accablés de toutes les fa­

tigues et de toutes les servitudes, affamés et sup­pliants , abreuvés de honte et de misère, d'iniqui­tés et d'infamies , —•. vous n'avez eu qu'un ami, qu'un protecteur, c'est Dieu, le Dieu vivant et invisible !

Il y a dix-huit siècles , i l a pris un ouvrier , pau­vre comme vous, simple et humble comme vous ; i l a mis sur son front le diadème de la Divinité, et i l l'a fait le Roi de tous les globes où gémissent des opprimés, où crient des infortunes, en l'appelant SON F I L S .

Celui-là nous a signé de son sang la Charte de délivrance! Son testament, vous le connaissez :

Liberté, Égalité, Fraternité! E h b ien, travailleurs, c'est parce que ces trois

mots étaient lettre morte, c'est parce qu'ils étaient devenus une formule banale, à laquelle tous les faits donnaient un démenti et que toutes les évi­dences repoussaient, — que ce miracle, que cette Révolution de 1848 s'est accomplie sous nos yeux.

Et maintenant, i l faut que ces trois mots inscrits sur le fronton de nos édifices passent dans les cœurs, dans les institutions, dans les mœurs, et que nous assistions à leur universelle application.

Que cette Charte soit bien une vérité ! La Liberté! — Nous n'avons eu encore que

celle de mourir de faim. Frères, n'appelez pas liberté cette faculté d'aller

au C l u b , d'être distrait de vos occupations pour aller discourir et donner vos votes à tel dont vous ne connaissez que la langue dorée : jours de l i ­berté , mais jours de chômage et de misère que ceux-là.

L a Liberté que vous devez réclamer, c'est celle d'envoyer vos enfants à l'école ; c'est celle de trouver dans un travail assuré le pain de chaque jour. La Liberté que vous réclamez, c'est préci­sément le contraire de la liberté qu'on vous lais­sait : c'est la liberté de V I V R E E N T R A V A I L ­L A N T , et non celle de mourir de fa im, faute de travail.

Egalité. Nous savons bien qu'il y aura toujours des inégalités ici-bas : mais au moins qu'il n'y ait de privilèges pour personne ! Que les impôts soient proportionnels à la fortune : que le Peuple ne supporte pas à lui seul des taxes accablantes ! Que les prolétaires trouvent dans l'Etat une bien­veillance , une sympathie égale à celle que l'Etat témoigne à ceux qui possèdent !

Fraternité. I l n'y a pas à chercher des mois pour déterminer les devoirs qu'impose ce sentiment. Ecoutons parler nos cœurs!... Le principe de la Fraternité est toute la morale du Christ : « Aimons-nous , aimons-nous les uns les autres ! » Ouvriers, aimez les patrons; patrons, aimez les ouvriers; r iches, aimez les pauvres ; pauvres, aimez les riches ! Aimez-vous , aimez-vous, aimez-vous !

Liberté, Égalité, Fraternité! Que cette Charte devienne une vérité ! ! !

L E S C L U B S . Nous l'avons dit dans notre dernier numéro, i l

est nécessaire, indispensable, que l'action des Clubs puise dans une centralisation l'unité et la force qu'on ne trouve jamais dans une série d'ef­forts isolés les uns des autres. Mais sous quelle influence et suivant quelles données un Club cen­tral doit-il être formé ? Telle est la question fort grave qui a occupé lundi une grande partie de la séance de l'Union Démocratique.

Chacun de nous a lu ces jours-ci, dans plusieurs rues de la ville, un placard annonçant la formation effectuée d'un Club central et invitant les divers Comités électoraux à s'y faire représenter; déplus, une lettre émanant de ce C l u b , dit Central , et adressée à chaque Président, l'invitait à participer aux travaux du nouveau Comité, dont le Bureau était déjà constitué et dont les membres signaient non en qualité de membres provisoires, mais bien en qualité de membres définitifs.

L'illégalité d'une telle démarche était flagrante ; aussi , dans le sein de l'Union Démocratique comme dans le sein du Comité Sainte-Croix, cette convocation donna lieu à des interprétations diverses, mais qui eurent pour but définitif de r e ­fuser le concours au Club dit central, non pas qu'on voulût faire de l'exclusivisme à l 'é­gard de personne, mais uniquement en vue de rester dans les conditions de liberté sous l ' in ­fluence desquelles doivent s'accomplir toutes les opérations électorales.

Mais i l y a plus, le Comité dit central refusait la coopération de tout Club qui, bien que se disant Républicain, pouvait, par la nature des tendances antérieures de ses membres, ou le choix des can­didats qu'il patronait, être fort suspect sous ce rapport. Pour notre part et en fait, nous compre­nons en ceci la résolution du Comité central; mais en droit, nous ne pouvons l'admettre. C'est éga­lement dans ce sens que vota l 'Union Démocratique; et d'ailleurs , ajouta avec raison un de ses membres, « on n'exclut que ce qu'on craint ; refuser la lutte, c'est avoir peur ; admettons toutes les opinions. » Telle est la règle de conduite admise par l'assemblée

La discussion engagée sur ce point, M . Victor Mangin, délégué avec M . Guiberteau par le Club dit Central, démontra en quelques paroles qu'il avait bien fallu que quelqu'un prît l'initiative. O r , que leur Comité avait eu ce mérite incontestable.

Pour nous, qui dès lors ne voyons plus depuis cet aveu que la Commission démocratique agis­sant; par délégation en vue de s'adjoindre les Clubs franchement républicains , nous ne saurions qu'approuver encore plus le refus de participation de quelques Comités ; et voici pourquoi :

Nous respectons sincèrement le Comité Démo­cratique , nous comptons des amis parmi ses mem­bres , et nous serons toujours les premiers à signa­ler la noble initiative qu'il a prise dans les événe­ments qui viennent de s'accomplir.

Mais, selon nous, le Comité Démocratique, con­voquant à l'Assemblée de plusieurs de ses membres, les présidents des différents Clubs , ne remplit en aucune façon le but d'une réunion libre des délé­gués de tous les Comités.

L'ÉLECTEUR RÉPUBLICAIN, J O U R N A L L E S C L U B S E T D E L ' O R G A N I S A T I O N D U TRAVAIL

Prix de la Feuille : 5 centimes.

Tout ce qui concerne la Rédaction doit être adressé F R A N C O au Comité rédacteur, place du Bon-Pasteur, 28, au Cabinet de L e c t u r e L ' É l e c t e u r R é p u b l i c a i n est adressé dans toutes les communes du Département, et se rend dans les divers quartiers de Nantes. 11 est provisoirement hebdomadaire.

Page 2: Jeudi 23 Mars. LIBERTÉ, ÉGALITÉ, FRATERNITÉ. L'ÉLECTEUR … · 2012-06-08 · Jeudi 23 Mars. LIBERTÉ, ÉGALITÉ, FRATERNITÉ. 1848. - N.° 2. La rapidit ave laquelléc le premiee

C'est à ce point de vue seulement que nous le combattons, eu égard à la question de forme, question essentiellement importante en ce moment.

Ajoutons que l'Union Démocratique, d'accord en cela avec le Club Sainte-Croix, a décrété à l'unanimité la formation d'un Club réellement central • c'est-à-dire, l'étant de fait par suite de son action combinée avec celle des cantons et des membres de tous les Clubs sans exception, quelle-que soit la couleur qu'on leur prête.

De tous les points du département, nous re­cevons des nouvelles qui nous démontrent l 'ac­tivité avec laquelle on se prépare aux réunions électoralles

A u Pellerin, Comité vient de s'installer; voici les noms des membres dé son Bureau : — Président, Vieillechèze; — Vice-président, Gros-Lambert et Joseau.

A Indret, le Club provisoirement constitué, sous la patriotique influence de notre ami le c i ­toyen Parent, a formé définitivement son Bureau, de la manière suivante : — Président, M . Lebou-leur; —Vice-président, M . Clavel ; — Secrétaire, M M . Parent et Guyard , plus quatre assesseurs choisis entre les ouvriers de l'Etablissement.

L e Club Saint-Jacques est organisé. Nous nous sommes rendus dimanche soir à la

séance de la Phalange Républicaine, présidée par M . Dureau , et où i l ne fallait rien moins que la popularité de ce jeune citoyen pour com­primer la fougue enthousiaste de l'assemblée, cha­que fois qu'une noble pensée, qu'une chaleureuse inspiration émanait de la Tribune des orateurs. Nous regrettons que l'espace nous manque pour rendre compte des Professions de F o i prononcées à cette belle séance, mais nous comptons bien nous acquitter de ce devoir dans notre prochain numéro. A . B.

COMITÉ ELECTORAL DE SAINTE-CROIX. Nous reproduisons la Profession de Foi aussi

éloquente que concise, présentée par M . Lechalas aux électeurs du Club de Sainte-Croix :

i ° Politique. — L a République. — Liberté in ­dividuelle. — Liberté de la presse. — Liberté d'association. — Liberté religieuse. — Liberté d'enseignement avec garanties de capacité et de moralités

2.° Respect des droits de la propriété et de la famille.

3.° Organisation sociale. — M E S U R E S D E T R A N S I T I O N . — L'Etat propriétaire de toutes les voies de communication. — Marques de fa­brique obligatoires". — Caisse générale de secours mutuels et de retraite. — Assurances par l'Etat. Indemnités aux compagnies. — Crèches et Salles d'Asile perfectionnées. — Enseignement élémen­taire gratuit. — Education professionnelle, agr i ­cole , industrielle. — ARMÉES INDUSTRIELLES : E n -diguement des rivières. Irrigations. Défrichements. Dessèchements. Reboisement des montagnes. — M E S U R E S D É F I N I T I V E S . — Combinaison de l'agriculture avec l'industrie. — Association entre le travail et le capital.

L E C H A L A S , Ancien élève de l'École Polytechnique, ingénieur.

Les Électeurs républicains de Nozay ont consti­tué un Bureau chargé de diriger les réunions pré­paratoires électorales, et d'entrer en rapport avec les Comités électoraux du Département. Nous transmettons la lettre qu'adresse ce Bureau au Président du Club l'Union Démocratique. Nous engageons tous les Comités cantonaux à se mettre en relation avec ce Club ; i l tient ses séances dans la salle Graslin, sous la présidence de M . Thé-baud.

AUX C A N D I D A T S . Les candidats qui briguent l'honneur de repré­

senter leurs concitoyens à l'Assemblée nationale nous obligeront, en nous adressant leurs Profes­sions de F o i , que nous nous ferons un devoir de publier impartialement dans nos colonnes.

A U X O U V R I E R S . Ouvriers, i l est des gens qui calomnient l 'hon­

nêteté de vos âmes Il est des hommes assez pauvrement organisés

pour oublier que nous sommes tous frères. Que l'inégalité des fortunes est la seule cause

de l'injuste inégalité intellectuelle q u i , encore au­jourd'hui, met une barrière entre telle ou telle classe de la société.

Il est enfin des hommes q u i , passant d'un ex­trême à l 'autre, vous poussent à l'emploi des moyens violents, pour conquérir brusquement vos droits légitimes, méconnus trop longtemps.

A tous ces hommes* comment devez-vous ré ­pondre ?

L e voici :

MANIFESTE DES OUVRIERS MARÉCHAUX DE LYON. « Nous, ouvriers compagnons maréchaux, un moment

enivrés par l'ère nouvelle, cédant à l'entraînement général, peu confiants après avoir été si souvent trompés, nous nous sommes joints il nos frères les travailleurs pour faire grève, afin d'obtenir une augmentation de salaire, bien méritée pour nous par le savoir, l'intelligence et l'assiduité qu'exige le genre de service que nous rendons à la société, par la rudesse excessive des travaux de notre art, autant que par les dangers auxquels ils nous exposent.

» Mieux éclairés, plus rassurés par la voie dans laquelle est entré le Gouvernement, nous retournons spontanément à nos travaux journaliers, fiers d'être les enfants d'un pays qui tient vis-à-vis de l'étranger un langage aussi noble, aussi franc et aussi digne que celui exprimé par le mani­feste de notre Ministre des affaires étrangères. Non , un pareil Gouvernement ne peut pas faillir à l'humanité. Ef­frayés nous-mêmes des embarras sans nombre que doit rencontrer l'établissement d'une République basée sur des principes de justice et de fraternité, nous ne les augmente­rons pas par un sot amour-propre.

» Nous supplions tous nos frères des autres corps d'état de nous imiter. Unissons-nous tous pour prouver que, si l'instruction nous manque encore, le bon sens nous guidera vers l'ordre, seule planche de salut pour notre pays, que nous aimons avant tout. Patience donc, frères! patience! Ce n'est pas la rudesse de nos travaux qui nous effraie, ce ne sont pas les dangers non plus; nos vies, comme nos bras et nos sueurs, appartiennent à la France, qui semble luire aujourd'hui d'une clarté nouvelle pour le salut des peuples. Elle fait justice en nous rendant nos droits politi­ques, source de toute amélioration raisonnable. Lui serons-nous moins dévoués que quand elle nous traitait comme des enfants déshérités? Nous nous unirons pour qu'elle jouisse du calme qu'elle réclame dans notre intérêt comme dans celui du monde entier.

» Ce que nous demandons, au nom de tous les travail­leurs, ce n'est point la fortune des riches, ce n'est point l'oi­siveté improductive pour le pays, c'est de jouir de la juste considération due aux travailleurs qui .produisent la r i ­chesse des nations.

» Ce que nous demandons, c'est que les impôts pèsent principalement sur ceux qui ont le superflu et non sur nous, qui avons à peine le nécessaire ; sur ceux qui con­somment plus que sur nous qui produisons.

» Ce que nous demandons, c'est que ceux qui doivent nous remplacer aient l'instruction que nous regrettons, car seule elle établit une différence entre les hommes.

» Ce que nous demandons, c'est que le Gouvernement prenne des mesures pour nous délivrer de ce fantôme hi ­deux qu'on appelle la misère, et qui sans cesse menace les travailleurs après une vie de labeurs et de privations. Qu'une somme minime soit versée par ceux qui nous emploient chaque jour, sans que pour cela il soit diminué sur nos sa­laires, et que cette somme serve à organiser, entre les mains du Gouvernement, une caisse de retraite où la vieil­lesse et l'infirmité aient un égal droit ; que ceux qui meu­rent ou ceux que la fortune favorise laissent leurs droits à ceux qui sont moins heureux. Hommes de calcul et de cœur, c'est à nous de trouver le chiffre de cette minime obole que doivent verser pour nous ceux qui nous occu­pent, pour que nous n'ayons jamais à tendre la main à la pitié, et qu'une existence digne, sobre, mais assurée, con­sole notre vieillesse ou notre impuissance au travail.

» Nous comprenons, et nos frères le comprendront sans doute, que nous n'avons plus d'excuse en demandant au­jourd'hui la menace à la bouche. Oui , nous comprenons , et tous nos frères le comprendront aussi, qu'en nous don­nant à tous le droit de suffrage, nous n'avons plus de mo­tifs à protester en refusant nos services à la société. Re­prenons tous nos travaux, respectons les autorités d'un

pays qui cherche des lois égales pour tous ; nommons de bons représentants qui fassent respecter nos droits , et in­clinons-nous fièrement devant les suffrages de la majorité, même devant les erreurs qui tiennent à l'imperfection humaine.

» Ceux qui ne comprendront pas ce langage seront in­dignes des droits qu'on leur rend ; ceux-là seront les en­nemis du nouvel ordre de choses, c'est-à-dire de la jus­tice et de l'égalité. Frères, prenons-y garde, les millions de l'absolutisme nous menacent; ils n'ont de force que par le désordre et l'anarchie ; ils prendront toutes les formes pour nous l'inspirer.

» Prenez-y garde, frères, prenez-y garde, tous ceux qui vous prêchent le désordre sont leurs agents et les en­nemis de la République, dont ils affichent les couleurs, dont ils empruntent le nom.

» Répétons tous, Français de cœur : Soumission au vote de la majorité, et guerre à la force brutale de l'op­pression.

» La Guillotière, chez la mère, le 9 mars 1848. » Les compagnons maréchaux de Lyon,

» G R O S , L A G R A N G E , G A U T I E R , B A S T O N , D E S ­P L A C E S , P E L T I E R , P O N S , L E C H Ê N E , G A R D U I , T R O C H E T , A R R A U L T . »

F A I T S D I V E R S . Voic i les noms des citoyens qui composeront la

nouvelle Mairie de Nantes : ÉVARISTE COLOMBEL , Maire. CHÉROT, 1er Adjoint. E R R I A U , 2.e id. B U R E A U , 3.e id. D A N I E L L A C O M B E , 4. e id. BERTIN , 5.e id. H U E T T E , 6.e id.

L a Commission d'enquête pour l'organisation du travail, s'est réunie à la Préfecture sous la présidence de M . Dureau. El le a composé son Bureau de la manière suivante :

Président, M . Dureau. — Vice-présidents, M M . Jégou , Colombel. — Secrétaire, M . Eriau. — Secrétaires-adjoints, M M . Adolphe Bobierre et Laurent.

Trois membres siègent chaque jour à la Préfec­ture , de 1 heure à 3 heures, et reçoivent toutes les communications relatives à la grave question qu'ils ont à approfondir.

L a Commission communique directement dans ce but avec le Comité central établi au Luxem­bourg.

Les invalides civils ont pris possession des T u i ­leries , où ils sont provisoirement installés.

L e citoyen Fouquet, ex capitaine de la grande Armée, est nommé Commissaire du Gouvernement au château de Nantes, avec mission de prendre toutes les mesures d'ordre et de salut public que les intérêts de la République lui paraîtront com­mander. — Il est entré avant-hier en fonction.

Un ex-conservateur rallié , entendant un brave ouvrier raconter, avec le feu de l'enthousiasme populaire, les grandes actions auxquelles i l avait pris part dans les glorieuses journées de Février, disait au narrateur : « On ne peut vraiment mé­connaître ici le doigt de Dieu. » S i vous disiez les quatre doigts et le pouce, répliqua le vain­queur des barricades, vous ne vous tromperiez guère.

A Paimbœuf la confiance s'est tellement réta­b l ie , qu'à l'ouverture de la séance de la Caisse d'épargne, i l est parvenu à l'Autorité une renon­ciation de demandes des remboursements s'élevant à 30,000 fr. L e Gouvernement devait solder 1/10.e des demandes, soit 5,506 fr. 30 c , et i l rentrera aujourd'hui, 13 courant, à la caisse du Receveur particulier, 2,000 fr.

On demande des CRIEURS pour la vente de l'Electeur Républicain. S'adresser place du Bon-Pasteurf 28 , au Cabinet de Lecture.

L E GÉRANT , B I T O N , ouvrier.

NANTES , IMPRIMERIE DE M . M E VEUVE C. MELLINET. — 44,248.