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Dimanche 26 Mars. LIBERTÉ, ÉGALITÉ, FRATERNITÉ. 1848. N o 3. LA SITUATION ET L'AVENIR. La France vient d'être témoin pour la dernière fois, nous l'espérons , d'un de ces cataclysmes comme Dieu en permet quelquefois, qui est venu renverser de fond en comble l'édifice social, dont la base, assise sur des institutions incomplètes, de- vait couler tôt ou tard sous le vent de la justice et du progrès. Le Peuple grandit à mesure qu'il avance dans le temps, et l'heure de sa réhabilitation comme de sa souveraineté ne pouvait larder à sonner au cadran des destinées de l'humanité. Résigné sous toutes les dominations de l'anti- quité ; crédule et humble serviteur de Dieu sous Moïse ; esclave à Athènes comme à Rome; exploité au moyen-âge autant par la superstition religieuse que par la royauté ; de tout temps le Peuple, cette grande et sublime manifestation de l'Homme-Dieu sur la terre, a subi son sort comme le Christ au Calvaire , sans se plaindre et sans désespérer de la justice suprême. Si bien souvent i l ne s'est pas contenté de demander à ce que le calice de l'amertume fût éloigné de ses lèvres; si, succombant à une juste -indignation, il s'est levé comme un seul homme contre les oppresseurs, c'était moins pour obéir à un sentiment de vengeance et de cruauté, que pour protester hautement contre la violation de ses droits, contré la part qu'on lui disputait au banquet de la vie, auquel Dieu doit avoir égale- ment convié tous ses enfants. Qu'on le sache donc bien une fois pour toutes, et que les pages de l'histoire écrites, avec le sang et les sueurs du peuple, l'enseignent clai- rement à tous: « Il n'y a dans l'humanité que des enfants de » la même famille; » II n'y a au-dessus de l'humanité que DIEU, » de qui émane tout. » Chaque peuple n'est donc que le membre d'un. immense CORPS SOCIAL qui doit penser , agir , dans un même but : L'ORDRE ET L'HARMONIE UNIVERSELS. La solidarité doit être telle entre toutes les parties de cette immense famille, entre tous les rouages de ce mécanisme infini, que la suspen- sion ou la déviation d'un seul ressort doit en- traîner nécessairement des désordres , des r é - volutions incalculables et d'une réparation diffi- cile et coûteuse. C'est donc à atteindre cet accord unanime que devaient travailler toutes les populations de la terre ; et Dieu ne devait vouloir régner que sur une humanité intelligente et bien hiérarchisée, et non pas sur une agglomération de hordes sau- vages , de peuplades barbares ou de nations hy- pocrites et stupides. Mais, pour arriver à cet ensemble harmonieux, résultant du concours de tous les êtres humains, il fallait d'abord que les contrées les mieux pla- cées pour entrer dans cette voie d'organisation, prissent l'initiative et commençassent, sous l'in- fluence et l'égide deslois générales de l'équilibre , de l'accord, à établir dans leur sein des éléments d'ordre et de hiérarchie , et arrivassent à grouper progressivement: d'abord les familles, les com- munes, les villes , les provinces, pour atteindre ensuite les nations et les diverses parties du monde. Or, pour arriver à cet admirable et unique résul- tat, l'homme, premier élément moléculaire de cette immense chaîne , avait autour de lui, sur un riche domaine , toutes les ressources néces- saires pour ce but; son intelligence supérieure, combinée avec celle de ses semblables et aug- mentée de tous les leviers que lui fournissaient l'industrie, les sciences et les arts, ajoutait en- core aux chances du succès une certitude vrai- ment mathémathique... Qu'est-il donc arrivé de si fatal et de si antipa- thique a l 'homme, pour que le labeur de tant de générations, les efforts de tant d'intelligences, n'aient hélas abouti qu'au néant?? Nous avons plus d'une fois, ces jours-ci, l'oc- casion d'analyser une à une toutes les causes des malheurs de l'humanité ; constatons seulement aujourd'hui : « 1Que l'harmonie de chaque famille, de » chaque nation, ne pouvait arriver que sous » l'influence positive d'un concours unanime de » pensées de forces, d'intérêts DE CHACUN » POUR TOUS , DE TOUS POUR CHACUN. » 2." Que les intérêts sont divisés ; que l'anta- » gonisme est en règne; que l'ordre n'est nulle » part et QUE L E DÉSORDRE EST PAR- . .. TOUT. » Oui, telle est encore la triste situation, non pas seulement de la France , mais de l'Europe et du monde entier! Heureusement pour nous, fils de la grande nation, de celle que toutes les intelligences ont saluée comme la reine, comme la pensée , comme le cœur de l'humanité; heureusement que la jus- tice, divine nous a inspiré un .généreux et noble effort pour renverser une dernière fois l'ordre de choses créé à tant de frais de corruption et d'iniquité, et vient permettre au peuple le plus éclairé de la terre de reconstituer à nouveau L E MODÈLE DE SOCIÉTÉ VÉRIDIQUE , sur la- quelle viendront se hiérarchiser toutes les nations du monde. Citoyens, nous sommes donc appelés au. plus grand acte peut-être qu'ait été à même de pro- duire une génération ; la tache est immense , difficile ; elle réclame le concours de tous les ef- forts, petits ou grands , simples ou élevés : ne dé- sespérons pas de notre œuvre; puisons dans notre cœur les sentiments de justice distributive et de modération dont nous avons besoin , et demandons surtout aux lumières de la SCIENCE SOCIALE les enseignements indispensables pour constituer notre ordre social nouveau. La situation toute provisoire nous nous trouvons a donné déjà au monde, par le calme et la haute science des hommes qui nous gou- vernent , la preuve de notre force, de notre pa- tience et de notre vertu après la victoire ; don- nons-lui encore une preuve plus solennelle et plus positive de notre SCIENCE, en organisant une Constitution qui soit le premier anneau de l'im- mense chaîne de peuples et de frères que doit former l'humanité. D. r F. P. A MES CONCITOYENS. La République est le Gouvernement de tous, par tous ; elle est le droit commun en matière de Gouvernement. La Monarchie n'était qu'un droit de fait et d'exception. Une fraction seulement du pays était républi- caine ; en quelques heures, un coup du ciel et la démence d'un Roi ont républicanisé la France en- tière. La République est le droit commun ; la Répu- blique est la seule forme de Gouvernement qui soit universelle. Citoyens, c'est en vertu des principes de l'universalité, que je me présente à vos suffrages comme représentant les travailleurs ; j'ai toujours professé ce principe, même à une époque l'avé- nement du Gouvernement républicain me paraissait très-éloigné. Il me paraît nécessaire, pour que la représentation nationale ne soit pas faussée, que toutes les classes de la société y soient représentées. Mais , Citoyens, vous; avez le droit d'exiger de tous vos représentants qu'ils aient donné des ga- ranties d'ordre et de stabilité, et fait des études préalables sur les questions qui ont agité le pays depuis cinquante années. Dans mon opinion, ce n'est que par la solution des problèmes sociaux que l'on arrivera à concilier tous les intérêts en lutte. Il faut faire cesser l'antagonisme, afin d'ôter tout prétexte à la peur des hommes qui n'étaient pas préparés à la transformation sociale. Citoyens, pénétrez-vous d'un principe: les so- ciétés sont impérissables. Dieu a placé des jalons sur la route de l'avenir; depuis le Christ, l'homme a été relevé a ses propres yeux; la Religion chré- tienne à républicanisé le monde par son principe, qui n'est autre que celui de la Fraternité univer- selle. Biais l'homme a passer par des phases dif- férentes pour arrivera son émancipation complète. Aussi, chers concitoyens, ne nous effrayons pas de. la difficulté des problèmes sociaux: la science divine et humaine n'a jamais fait défaut aux hommes de bonne volonté; soyez persuadés que le salariat, qui a remplacé l'esclavage, sera rem- placé par l'association : sans cela la Fraternité serait un vain mot. Citoyens, si j'étais assez heureux pour réunir vos suffrages, tous mes efforts tendraient vers la création d'un ministère du progrès, qui aurait pour mission spéciale d'entendre toutes les plaintes des travailleurs et de mettre à l'étude tous les pro- blèmes sociaux, en ce qu'il y a de réalisable dans les travaux de ces hommes que nous appelons les jalons de l'humanité. Quant à moi, je demanderai, pour que prompte et bonne justice soit rendue à tous, que dans chaque localité industrielle ou agricole il soit créé un Comité électif, qui aurait pour mission de s'oc- cuper de toutes les questions de salaire. Je demanderais que chaque canton annexât à son Ecole des terres pour l'instruction agricole, un atelier industriel et une bibliothèque publique. C'est seulement au moyen d'une éducation profes- sionnelle très-entendue qu'on pourra vivifier toutes les sources de là richesse publique, et déverser ensuite une partie des forces vives de L'ÉLECTEUR RÉPUBLICAIN, JOURNAL DES CLUBS ET DE L'ORGANISATION DU TRAVAIL. Prix de la Feuille : 5 centimes. Tout ce qui concerne la Rédaction doit être adressé FRANCO au Comité rédacteur, place du Bon-Pasteur, 28, au Cabinet de Lecture. L'Électeur Républicain est adressé dans toutes les communes du Département, et se vend dans les divers quartiers de Nantes. Il est provisoirement hebdomadaire.

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Page 1: LIBERTÉ, ÉGALITÉ, FRATERNITÉ. N L'ÉLECTEUR RÉPUBLICAIN,€¦ · LIBERTÉ, ÉGALITÉ, FRATERNITÉ. 1848. — No 3. LA SITUATIO ENT L'AVENIR. La France vien d'êtrt e témoi poun

Dimanche 26 Mars. LIBERTÉ, ÉGALITÉ, FRATERNITÉ. 1848. — N o 3.

LA SITUATION ET L'AVENIR. La France vient d 'être témoin pour la dernière

fois, nous l 'espérons , d'un de ces cataclysmes comme Dieu en permet quelquefois, qui est venu renverser de fond en comble l'édifice social, dont la base, assise sur des institutions incomplètes, de­vait couler tôt ou tard sous le vent de la justice et du progrès .

L e Peuple grandit à mesure qu'il avance dans le temps, et l'heure de sa réhabilitation comme de sa souveraineté ne pouvait larder à sonner au cadran des destinées de l'humanité.

Résigné sous toutes les dominations de l'anti­quité ; crédule et humble serviteur de Dieu sous Moïse ; esclave à Athènes comme à Rome; exploité au moyen-âge autant par la superstition religieuse que par la royauté ; de tout temps le Peuple, cette grande et sublime manifestation de l'Homme-Dieu sur la terre, a subi son sort comme le Christ au Calvaire , sans se plaindre et sans désespérer de la justice suprême.

Si bien souvent i l ne s'est pas contenté de demander à ce que le calice de l'amertume fût éloigné de ses lèvres ; si, succombant à une juste

-indignation, i l s'est l evé comme un seul homme contre les oppresseurs, c'était moins pour obéir à un sentiment de vengeance et de cruau té , que pour protester hautement contre la violation de ses droits, contré la part qu'on lui disputait au banquet de la vie, auquel Dieu doit avoir égale­ment convié tous ses enfants.

Qu'on le sache donc bien une fois pour toutes, et que les pages de l'histoire écr i tes , avec le sang et les sueurs du peuple, l'enseignent clai­rement à tous:

« Il n'y a dans l'humanité que des enfants de » la même famille;

» II n'y a au-dessus de l'humanité que DIEU, » de qui émane tout. »

Chaque peuple n'est donc que le membre d'un. immense C O R P S S O C I A L qui doit penser , agir , dans un même but : L'ORDRE ET L'HARMONIE U N I V E R S E L S .

L a solidarité doit être telle entre toutes les parties de cette immense famille, entre tous les rouages de ce mécanisme infini, que la suspen­sion ou la déviation d'un seul ressort doit en­traîner nécessairement des désordres , des r é ­volutions incalculables et d'une réparation diffi­cile et coûteuse.

C'est donc à atteindre cet accord unanime que devaient travailler toutes les populations de la terre ; et Dieu ne devait vouloir régner que sur une humanité intelligente et bien hiérarchisée, et non pas sur une agglomération de hordes sau­vages , de peuplades barbares ou de nations hy­pocrites et stupides.

Mais, pour arriver à cet ensemble harmonieux, résultant du concours de tous les êtres humains, i l fallait d'abord que les contrées les mieux pla­cées pour entrer dans cette voie d'organisation, prissent l'initiative et commençassent , sous l ' in­fluence et l'égide deslois générales de l'équilibre , de l'accord, à établir dans leur sein des éléments d'ordre et de hiérarchie , et arrivassent à grouper progressivement: d'abord les familles, les com­

munes, les villes , les provinces, pour atteindre ensuite les nations et les diverses parties du monde. Or, pour arriver à cet admirable et unique résul­tat, l'homme, premier élément moléculaire de cette immense chaîne , avait autour de l u i , sur un riche domaine , toutes les ressources néces­saires pour ce but; son intelligence supér ieure , combinée avec celle de ses semblables et aug­mentée de tous les leviers que lui fournissaient l'industrie, les sciences et les arts, ajoutait en­core aux chances du succès une certitude vrai­ment mathémathique. . .

Qu'est-il donc arrivé de si fatal et de si antipa­thique a l'homme, pour que le labeur de tant de générations, les efforts de tant d'intelligences, n'aient hélas abouti qu'au néant??

Nous avons plus d'une fois, ces jours-ci , l 'oc­casion d'analyser une à une toutes les causes des malheurs de l'humanité ; constatons seulement aujourd'hui :

« 1 Q u e l'harmonie de chaque famille, de » chaque nation, ne pouvait arriver que sous » l'influence positive d'un concours unanime de » pensées de forces, d'intérêts D E C H A C U N » P O U R TOUS , D E TOUS P O U R C H A C U N .

» 2." Que les intérêts sont divisés ; que l'anta-» gonisme est en r è g n e ; que l'ordre n'est nulle » part et QUE L E DÉSORDRE E S T P A R -... TOUT. »

O u i , telle est encore la triste situation, non pas seulement de la France , mais de l'Europe et du monde entier!

Heureusement pour nous, fils de la grande nation, de celle que toutes les intelligences ont saluée comme la reine, comme la pensée , comme le cœur de l 'humanité; heureusement que la jus­tice, divine nous a inspiré un .généreux et noble effort pour renverser une dernière fois l'ordre de choses créé à tant de frais de corruption et d' iniquité, et vient permettre au peuple le plus éclairé de la terre de reconstituer à nouveau L E MODÈLE D E SOCIÉTÉ VÉRIDIQUE , sur l a ­quelle viendront se hiérarchiser toutes les nations du monde.

Citoyens, nous sommes donc appelés au. plus grand acte peu t -ê t r e qu'ait été à même de pro­duire une génération ; la tache est immense , difficile ; elle réclame le concours de tous les ef­forts, petits ou grands , simples ou élevés : ne dé­sespérons pas de notre œ u v r e ; puisons dans notre cœur les sentiments de justice distributive et de modération dont nous avons besoin , et demandons surtout aux lumières de la S C I E N C E S O C I A L E les enseignements indispensables pour constituer notre ordre social nouveau.

La situation toute provisoire où nous nous trouvons a donné déjà au monde, par le calme et la haute science des hommes qui nous gou­vernent , la preuve de notre force, de notre pa­tience et de notre vertu après la victoire ; don­nons-lui encore une preuve plus solennelle et plus positive de notre S C I E N C E , en organisant une Constitution qui soit le premier anneau de l'im­mense chaîne de peuples et de frères que doit former l 'humanité. D . r F . P.

A MES CONCITOYENS. La République est le Gouvernement de tous,

par tous ; elle est le droit commun en matière de Gouvernement. La Monarchie n'était qu'un droit de fait et d'exception.

Une fraction seulement du pays était républ i ­caine ; en quelques heures, un coup du ciel et la démence d'un Ro i ont républicanisé la France en­t ière .

L a République est le droit commun ; la Répu­blique est la seule forme de Gouvernement qui soit universelle.

Citoyens, c'est en vertu des principes de l'universalité, que je me présente à vos suffrages comme représentant les travailleurs ; j 'a i toujours professé ce principe, même à une époque où l'avé-nement du Gouvernement républicain me paraissait très-éloigné. I l me paraît nécessaire, pour que la représentation nationale ne soit pas faussée, que toutes les classes de la société y soient représentées .

Mais , Citoyens, vous; avez le droit d'exiger de tous vos représentants qu'ils aient donné des ga­ranties d'ordre et de stabilité, et fait des études préalables sur les questions qui ont agité le pays depuis cinquante années. Dans mon opinion, ce n'est que par la solution des problèmes sociaux que l'on arrivera à concilier tous les intérêts en lutte. Il faut faire cesser l'antagonisme, afin d'ôter tout prétexte à la peur des hommes qui n'étaient pas préparés à la transformation sociale.

Citoyens, pénétrez-vous d'un principe: les so­ciétés sont impérissables. Dieu a placé des jalons sur la route de l'avenir; depuis le Christ, l'homme a été relevé a ses propres yeux; la Religion chré­tienne à républicanisé le monde par son principe, qui n'est autre que celui de la Fra tern i té univer­selle.

Biais l'homme a dû passer par des phases dif­férentes pour arrivera son émancipation complète. Auss i , chers concitoyens, ne nous effrayons pas de. la difficulté des problèmes sociaux: la science divine et humaine n'a jamais fait défaut aux hommes de bonne vo lon té ; soyez persuadés que le salariat, qui a remplacé l'esclavage, sera rem­placé par l'association : sans cela la Fraterni té serait un vain mot.

Citoyens, si j 'étais assez heureux pour réunir vos suffrages, tous mes efforts tendraient vers la création d'un ministère du progrès, qui aurait pour mission spéciale d'entendre toutes les plaintes des travailleurs et de mettre à l 'étude tous les pro­blèmes sociaux, en ce qu'il y a de réalisable dans les travaux de ces hommes que nous appelons les jalons de l'humanité.

Quant à moi, je demanderai, pour que prompte et bonne justice soit rendue à tous, que dans chaque localité industrielle ou agricole i l soit créé un Comité électif, qui aurait pour mission de s'oc­cuper de toutes les questions de salaire.

Je demanderais que chaque canton annexât à son Ecole des terres pour l'instruction agricole, un atelier industriel et une bibliothèque publique. C'est seulement au moyen d'une éducation profes­sionnelle t rès-entendue qu'on pourra vivifier toutes les sources de là richesse publique, et déverser ensuite une partie des forces vives de

L'ÉLECTEUR RÉPUBLICAIN, JOURNAL DES CLUBS ET DE L'ORGANISATION DU TRAVAIL.

P r i x de la Feuille : 5 centimes. Tout ce qui concerne la Rédaction doit être adressé FRANCO au Comité rédacteur, place du Bon-Pasteur, 28, au Cabinet de Lecture.

L'Électeur Républ icain est adressé dans toutes les communes du Département, et se vend dans les divers quartiers de Nantes. Il est provisoirement hebdomadaire.

Page 2: LIBERTÉ, ÉGALITÉ, FRATERNITÉ. N L'ÉLECTEUR RÉPUBLICAIN,€¦ · LIBERTÉ, ÉGALITÉ, FRATERNITÉ. 1848. — No 3. LA SITUATIO ENT L'AVENIR. La France vien d'êtrt e témoi poun

la population sur des contrées fertiles et loin­taines qui n'attendent que des bras et de l 'intel-ligence pour devenir de nouveaux foyers de civi­lisation.

Voilà, citoyens, mes convictions et mon pro­gramme politique. Si vous croyez que dans une Assemblée constituante, simple ouvrier, je puisse tenir dignement ma place, je viens vous demander vos suffrages. Soyez convaincu que je serai fidèle à mon mandat.

Je dois vous dire que je ne serai pas un homme d'initiative sur les questions extérieures et admi­nistratives. Mais j ' adhè re de toutes les forces de mon âme au manifeste du citoyen Lamartine ; car je veux comme vous que notre belle France, pro­tectrice de tous les oppr imés , reprenne enfin son rang à la tête de la civilisation.

A B I T O N , OUVRIER.

NOUVELLES DES CLUBS. Le Club de la section Sainte-Croix , qui tient

ses séances tous les soirs, rue du Calvaire, le premier a invité les candidats qui se portent pour la représentation nationale, à venir s'expliquer dans son sein sur leur foi politique et leur maniè­re de comprendre les graves devoirs que le man­dat du peuple leur imposerait. Un certain nombre de citoyens se sont soumis à cette formalité : nous citerons entre autres le citoyen Suire, ouvrier typographe, qu i , dans sa Profession de F o i , a surtout insisté en faveur de l'organisation du tra­vail.

Après le citoyen Suire, le citoyen de Générès-Sourvillé a exprimé des dispositions trop monar­chiques et laissé percer des tendances trop légiti­mistes, pour ne pas provoquer les murmures des membres républicains de la section Sainte-Croix. L e lendemain, en briguant les suffrages du même Club, M . Evariste Boulay-Pâty, bibliothé­caire du Palais-National (ci-devant Palais-Royal) et poète lauréat , a protes té de son dévouement à la République. Il a pu invoquer avec orgueil le nom de son p è r e , brave patriote de notre pre­mière Révolution, et jurisconsulte distingué, dont la mort a laissé un vide regrettable sur les bancs de la Cour de Rennes.

Le citoyen Foulon, docteur-médecin, s'est pré­senté à son tour. Nous n'essaierons pas de suivre cet honorable candidat dans les longs déve loppe­ments qu'il a donnés à ses opinions. E n résumé, M . Foulon votera pour la République, la liberté d'en­seignement et l'organisation du travail.

Dans d'autres séances ; les citoyens Lechalas, ancien élève de l'Ecole Polytechnique, et-Wal-deck-Rousseau , avocat, ont développé leur pro­gramme politique et social.

Celui de M . Lechalas, esprit philosophique et mathématique dont les idées et les principes s'en­chaînent et se lient fortement dans un but complet d'organisation, a été publié sommairement dans notre numéro de jeudi.

M . Waldeck-Rousseau veut ordre et liberté au dedans, grandeur et dignité au dehors. Voilà son programme politique. Dans son programme social, i l réclame, au profit des classes ouvr iè res , des Ecoles primaires et industrielles d'apprentissage pour les enfants , des Caisses d 'épargnes et de se­cours mutuels pour l'âge m û r , des Caisses de re­traite pour la vieillesse et l'infirmité.

Plusieurs ouvriers , parmi lesquels nous citerons le citoyen Edesse, ont également offert d'apporter leur pierre à l'édifice. Nous louons cet empressement, dont certainement les électeurs leur sauront g r é , car i l faut beaucoup d'ouvriers, beaucoup de ces honnêtes et modestes travailleurs à l 'Assemblée constituante, autant pour le bon conseil, le conseil pratique au dedans, que pour garantie de la sincérité de l'Assemblée au dehors.

L e citoyen Arnous - Rivière , concurrent de M . Billault aux dernières élect ions, a fait une

Profession de Fo i trop républicaine pour ne pas surprendre un grand nombre de ses auditeurs.

Enf in , dans la séance de jeudi . au milieu du bruit d'un scrutin tumultueux, les citoyens Har-douin , conseiller à la Cour de cassation, et Bitou, ouvrier jardinier, ont exposé leur Profession de Foi .

Le premier nous a paru plus propre à discuter une question de droit qu'une question sociale toutefois, i l dit s'être beaucoup occupé de la ques­tion des sels dans l 'intérêt du producteur et du consommateur.

Nous n'avons pas à nous occuper du programme de notre Gérant, qui paraît dans ce même numéro de l'Électeur Républicain.

Le citoyen Sibillè, président du Club Sainte-Croix , a , dans la même séance , donné lecture d'une lettre de notre compatriote M . Blain , tan­neur à Quimperlé , qui se présente aussi lui aux suffrages des électeurs de la Loire-Inférieure.

Nous aimons ces explications vives et franches qui s'improvisent entre le candidat et l 'électeur. Il est difficile à celui-ci de ne pas se faire alors une idée juste du méri te du premier, de ses apti­tudes oratoires, de la portée des études sérieuses ou superficielles qu'il a faites, et qui l'ont plus ou moins bien préparé à l'accomplissement conscien­cieux des immenses et difficiles devoirs qu'il as­sume comme mandataire du peuple à la Consti­tuante.

CLUB DE l'UNION DÉMOCRATIQUE. Vendredi soir, la salle Graslin a été prompte-

ment garnie de spectateurs. Le Bureau de l'Union Démocratique ayant ordonné la fermeture des portes, un grand tumulte a eu lieu à l 'extérieur, et l'on a fini par rouvrir au public qui se pressait aux abords du Théâtre. Nous pensons qu'il con­viendrait de ne jamais fermer les portes , mais de ne pas laisser péné t re r les personnes qui n'ont pas de billets. On en a distribué jusqu'ici à tous les citoyens qui se sont p ré sen té s ; cette dis­tribution doit avoir un terme , sans quoi dés mil­liers de personnes chercheraient vainement à en­trer à chaque séance. Nous émettons le vœu qu'il y ait toujours plusieurs Clubs ouverts dans la même so i rée , afin que les travailleurs qui re­cherchent avec tant d'avidité l'enseignement po­litique et social, trouvent toujours de la place quelque part.

Dans la séance de vendredi , les citoyens Neveu-Derotrie, Aubinais, Suire, Perrault et D u -reau ont été entendus, et lecture a été donnée d'une lettre du citoyen Gatterre, docteur-médecin, lequel présente aux suffrages des électeurs le citoyen Ernest Ménars , Secrétaire général du citoyen Rocher. Tous ceux qui connaissent le citoyen Ménars , se joindront au citoyen Gatterre pour appuyer un aussi honorable candidat, que recommandent des opinions démocrat iques aussi sages qu'éclairées , et d'une date trop an­cienne pour que personne en suspecte la s in ­cérité.

Actes officiels du Gouvernement provisoire. On lit dans le Moniteur Universel (journal offi­

ciel de la République Française) : Sur le rapport de la Commission du Gouverne­

ment pour les travailleurs, Considérant que toutes les questions que sou­

lève le problème complexe de l'organisation du travail ne peuvent être résolues simultanément et à bref délai ;

Mais qu'il importe dès aujourd'hui, et en atten­dant les mesures plus efficaces qui seront prochai­nement et successivement p roposées , de réaliser toutes les améliorations que comporte le présent état de choses ;

Le Gouvernement provisoire décrète : 1." Il sera établi dans chaque Mairie de Paris

un bureau gratuit de renseignements ;

2. ° Ces bureaux dresseront les tableaux statis­tiques de l'offre et de la demande de travail. Ils faciliteront et régulariseront les rapports entre les personnes qui cherchent un emploi ou du travail, d'une part, et celles qui demandent des employés ou des travailleurs, de l'autre ;

3. ° A cet effet, i l sera tenu deux registres : Sur le premier on inscrira, par catégories de profes­sions , toutes les demandes d'emploi, le nom et l'adresse des demandeurs , sur le second, le nom et l'adresse de tous ceux qui ont besoin d 'employés, en ayant soin de mentionner le salaire offert et les conditions exigées ;

4. " Les registres seront communiqués à tout citoyen qui voudra les consulter.

Un règlement d'administration publique déter­minera l'organisation de ces bureaux gratuits de renseignements.

Suivent les signatures des membres du Gou­vernement provisoire.

An Gérant de L'ÉLECTEUR RÉPUBLICAIN. CITOYEN,

Heureux d'avoir coopéré pour ma faible part à la fondation de l'Électeur Républicain, adonné d'ailleurs à des occupations qui ne me laissent que de t rès -cour t s loisirs, je vous prie de vouloir bien communiquer aux membres du Comité de rédac­tion le regret que j ' ép rouve de ne pouvoir, à l'ave­nir, participer à leurs travaux.

Salut et Fraternité. ADOLPHE B O B I E R R E .

FAITS DIVERS. Le citoyen Rocher, Commissaire général du

Gouvernement provisoire de la République dans les départements de là Loire inférieure, Morbihan, Finistère , Côtes-du-Nord et Ille-èt-Vilaine , a nommé Secrétaire - général délégué le citoyen Ernest Menard. Cette fonction, comme celle du citoyen Rocher, est du reste essentiellement gra­tuite et ne pouvait être confiée à un plus digne citoyen.

Les orateurs qui doivent prendre la parole au Club de l'Union Démocratique lundi prochain, 27, pour exposer leur foi politique, sont les c i ­toyens :

Guiberteau, Pître Chevalier, Merlant (d'Ance-nis), Arnous-Rivière et Henri Hardouin.

Un décret du Gouvernement porte que : Les extraits de naissance qui seraient n é c e s ­

saires pour établir l 'âge des électeurs et pour l'exercice du droit é lec tora l , seront délivrés gra­tuitement à chaque citoyen qui les réclamera.

Ces extraits ne pouvant servir que pour cet objet, seront remis et resteront déposés à la Mai­rie de la commune. Ils seront marqués d'un c a ­chet portant ces mots : Élection de l'Assemblée nationale.

— Dans une petite commune près de Bayonne, le curé venait d'entonner le Domine salvum d'une voix ferme et retentissante; mais après avoir prononcé ces deux mots il s'aperçoit qu'il commet un so léc isme, il se trouble, la m é ­moire lui manque, et il lui est impossible de trouver la fin de sa phrase. Il a à cœur cependant de prouver à ses parois­siens que ses intentions ne sont pas douteuses ; il répète d'une voix plus éclatante encore le Domine saIvum fac, et remplace les mots qui lui manquent par ceux-ci le Gouvernement pro­visoire. Les oreilles les plus républicaines ont trouvé la va­riante irréprochable.

On demande des CRIEURS pour la vente de l'Electeur Républicain. S'adresser place du Bon-Pasteur, 28, au Cabinet de Lecture.

L E GÉRANT, B I T O N , ouvrier.

NANTES, IMPRIMERIE DE M . M E VEUVE C. MELLINET. — 44,273.