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ArticlesArticles 2012 a 20162012 a 2016

Le Régime Ecossais Rectifié

RER

CONTENTS

Post #1Ce blog est une… | Le Régime Ecossais Rectifié

Post #2Code maçonnique des Loges Réunies et Rectifiées de France | Le Régime Ecossais Rectifié

Post #3Lettre à un profane par Jean Baptiste Willermoz | Le Régime Ecossais Rectifié

Post #4CODE DES CBCS | Le Régime Ecossais Rectifié

Post #5REFONDATION DE L’ORDRE | Le Régime Ecossais Rectifié

Post #6Intéressant ! | Le Régime Ecossais Rectifié

Post #7Directoire National Rectifié | Le Régime Ecossais Rectifié

Post #8Site à découvrir | Le Régime Ecossais Rectifié

Post #9Premier Point (1/10) | Le Régime Ecossais Rectifié

Post #10Deuxième Point (2/10) | Le Régime Ecossais Rectifié

Post #11Troisième Principe | Le Régime Ecossais Rectifié

Post #12Quatrième Point (4/10) | Le Régime Ecossais Rectifié

Post #13Cinquième Point (5/10) | Le Régime Ecossais Rectifié

Post #14Sixième Point (6/10) | Le Régime Ecossais Rectifié

Post #15Septième Point (7/10) | Le Régime Ecossais Rectifié

Post #16Huitième Point (8/10) | Le Régime Ecossais Rectifié

Post #17Neuvième Point (9/10) | Le Régime Ecossais Rectifié

Post #18

Dixième Point (10/10) | Le Régime Ecossais RectifiéPost #19

LE RÉGIME ÉCOSSAIS RECTIFIÉ | Le Régime Ecossais RectifiéPost #20

RETOUR AUX FONDEMENTS DE LA RECTIFICATION | Le Régime Ecossais RectifiéPost #21

Sur le site du « Philosophe Inconnu | «Le Régime Ecossais RectifiéPost #22

L’ Ordre des Chevaliers Bienfaisants de la Cité Sainte et sa finalité spirituelle véritable | Le RégimeEcossais Rectifié

Post #23Adogmatique, vous avez dit adogmatique ! | Le Régime Ecossais Rectifié

Post #24La doctrine de l’Ordre et la « sainte religion chrétienne » | Le Régime Ecossais Rectifié

Post #25La Profession du Régime rectifié doit-elle disparaître ? | Le Régime Ecossais Rectifié

Post #26Fidélité à la patente de 1935 : La vraie légitimité ! | Le Régime Ecossais Rectifié

Post #27L’ Ordre des Chevaliers Bienfaisants de la Cité Sainte et sa finalité spirituelle véritable. | Le Régime

Ecossais RectifiéPost #28

Le RER et l’obédience multi-rites de 1935 ! | Le Régime Ecossais RectifiéPost #29

La franc-maçonnerie à la lumière de l’orthodoxie : Jean-François Var règle ses comptes avec JeanTourniac | Le Régime Ecossais Rectifié

Post #30Dix prières de Louis Claude de Saint Martin | Le Régime Ecossais Rectifié

Post #31Le caractère opératif du Régime rectifié et sa vocation spirituelle. | Le Régime Ecossais Rectifié

Post #32Réveil du « Grand Directoire des Gaules » (1935-2012) | Le Régime Ecossais Rectifié

Post #33Pourquoi le Réveil historique du « Grand Directoire des Gaules » ? | Le Régime Ecossais Rectifié

Post #34« Phaleg » | Le Régime Ecossais Rectifié

Post #35

Jean-Baptiste Willermoz : extraits sur la prière | Le Régime Ecossais RectifiéPost #36

La dérive religieuse sectaire du Grand Prieuré des Gaules au grand jour ! | Le Régime EcossaisRectifiéPost #37

L’Ordre des Chevaliers Bienfaisants de la Cité Sainte et sa fonction mystique | Le Régime EcossaisRectifiéPost #38

Traité des deux natures de Jean Baptiste Willermoz | Le Régime Ecossais RectifiéPost #39

L’Ordre seul est le principe du Régime rectifié | Le Régime Ecossais RectifiéPost #40

LES GRADES MAÇONNIQUES DU RÉGIME ÉCOSSAIS RECTIFIÉ | Le Régime Ecossais RectifiéPost #41

Jean-Baptiste Willermoz : le fondateur du Régime Ėcossais Rectifié | Le Régime Ecossais RectifiéPost #42

L’ORDRE INTÉRIEUR ET LA NOTION DE « SECRET » | Le Régime Ecossais RectifiéPost #43

Qu’est-ce que la « Régularité » maçonnique pour le Régime Écossais Rectifié ? | Le Régime EcossaisRectifiéPost #44

Anniversaire de la Refondation de l’Ordre : 13 décembre 2014 | Le Régime Ecossais RectifiéPost #45

Camille Savoire et les Temples de la Franc-maçonnerie | Le Régime Ecossais RectifiéPost #46

Camille Savoire et « l’esprit » de la Gnose spiritualiste | Le Régime Ecossais RectifiéPost #47

Maçonnerie et Religion | Le Régime Ecossais RectifiéPost #48

Le Régime Écossais Rectifié et la doctrine de la matière | Le Régime Ecossais RectifiéPost #49

Régime Écossais Rectifié, foi chrétienne et « dogme » | Le Régime Ecossais RectifiéPost #50

La doctrine de la réintégration des êtres | Le Régime Ecossais RectifiéPost #51

Joseph de Maistre et la doctrine du Régime Écossais Rectifié | Le Régime Ecossais RectifiéPost #52

Petite leçon de La Leçon de Lyon | Le Régime Ecossais RectifiéPost #53

Le Régime Ecossais RectifiéPost #54

#1

Ce blog est une… | Le Régime Ecossais Rectifié

Ce blog est une proposition d’échanges sur le Régime Écossais Rectifié. Où en est ce régimeaprès deux cents ans d’une vie des plus mouvementées. Qelle est sa place dans les diversesobédiences? Qu’en est-il de ses fondements chrétiens? Que dire des liens avec les autres rites. Est-ilencore possible de le vivre selon le Code des Loges Réunies et Rectifiées? C’est à tous cesdébats que ce blog vous invite à participer selon les règles les plus élémentaires de la fraternité; sansdébordements grossiers et injurieux de façon à construire et non détruire!Permalink: https://willermoz.com/2012/11/07/ce-blog-est-une/

#2

Code maçonnique des Loges Réunies et Rectifiées de France | Le Régime EcossaisRectifié

Code maçonnique des Loges Réunies et Rectifiées de FranceTel qu’il a été approuvé par les Députésdes Directoires de France au ConventNational de Lyon en 5778IntroductionNul ordre, nulle société ne peut exister sans lois. L’exécution de ces lois assure la prospérité de la

société, leur oubli ou leur infraction en amène la décadence et la ruine.La sagesse de celles qui dirigent l’Ordre Maçonnique, aussi respectable par son ancienneté que

par son utilité, l’a fait triompher du temps et de ses adversaires, malgré les atteintes que lui ontportées quelques-uns de ses membres , soit par leurs vices personnels , soit par les abus multipliés,qu’ils ont tâché d’y introduire. S’il a perdu de son ancienne splendeur dans quelques contrées del’Europe c’est à ces membres corrompus qu’il faut l’ attribuer, le vulgaire ayant injustement renduréversible sur le corps entier ce qui le scandalisait dans des individus, qui , malgré le beau nom dontils se paraient étaient cependant tout-à-fait étrangers à l’ Ordre Maçonnique. Mais les mêmes vertus ,qui l’ont préservé , peuvent encore lui rendre toute fa gloire , et même il n’a jamais cessé d’ en jouirdans les lieux où la pratique. de ces vertus a été la base de tous ses travaux.

On ne peut cependant se dissimuler, que cette espèce de Maçons qui prétendent avoir acquis cetitre par la cérémonie de leur réception , quelque irrégulière qu’elle ait été, se sont multipliésconsidérablement dans certaines contrées, où il se trouvait peu ou point d’ établissements réguliers ;ignorant les véritables lois de l’Ordre ils en ont créées d’arbitraires, qui favorisaient leur ambition etleur cupidité ; ils ont porté dans ces nouvelles et nombreuses sociétés le goût pour l’indépendance etpour les plaisirs bruyants que l’ Ordre a toujours condamné , et pour soutenir l’espèce deconsidération; qui était nécessaire à leurs vues intéressées. et qu’ils avaient surpris par les dehorsmystérieux d’une fausse science, ils ont surchargé leurs cérémonies de nouvelles productions toujoursplus chimériques et plus absurdes les unes que les autres, et dont le plus grand nombre des Maçons aété longtemps la dupe. Mais tandis que l’ erreur multipliait ainsi les prosélytes, les vrais Maçonsplus circonspects dans leur marche et plus difficiles dans leur choix faisaient des progrès lents maisassurés Moins jaloux de captiver la multitude que d’acquérir de dignes Frères , ils attendaient engémissant que le prestige eut cédé , et que reconnaissant l’erreur dans laquelle on avait été entraîné ,on marquât un désir sincère d’entrer dans les vues. légitimes de l’Ordre et de suivre scrupuleusementles lois, en le dépouillant de tout intérêt personnel et de tout esprit de domination. Mais dédaignantpar principe ces grands moyens, qui assujettissent les volontés ils ne devaient attendre cette

importante révolution que du temps et de la disposition libre des esprits.Cependant quelques Maçons plus zélés qu’ éclairés mais trop judicieux pour se nourrir longtemps

de chimères, et lassés d’une anarchie dont ils sentaient le vice, firent des efforts pour se soustraire àun joug aussi avilissant. Des Loges entières dans diverses contrées, sentant la nécessité d’un centrecommun dépositaire d’ une autorité législative se réunirent et coopérèrent à la formation de diversgrands Orients. C’était déjà de leur part un grand pas vers la lumière mais à défaut d’en connaître levrai point central et le dépôt des lois primitives, elles suppléèrent au régime fondamental par desrégimes arbitraires particuliers ou nationaux, et par les lois qui ont pu s’y adapter. Elles ont eu lemérite d’ opposer un frein à la licence destructive, qui dominait partout, mais ne tenant point à lachaîne générale, elles ont rompu l’unité en variant les systèmes.

Des Maçons de diverses contrées de France , convaincus que la prospérité et la stabilité del’Ordre Maçonnique dépendaient entièrement du rétablissement de cette unité primitive, ne trouvantpoint chez ceux, qui ont voulu se l’approprier, les signes, qui doivent la caractériser, enhardis dansleurs recherches par ce qu’ils avoient appris sur l’ancienneté de l’ Ordre des Franc-maçons, fondésur la tradition la plus constante, sont enfin parvenus à en découvrir le berceau ; avec du zèle et de lapersévérance ils ont surmonté tous les obstacles et en participant aux avantages d’une administrationsage et éclairée, ils ont eu le bonheur de retrouver les traces précieuses de l’ancienneté et du but dela Maçonnerie.

Une autre erreur bien commune et bien dangereuse enfantée dans ces temps de troubles etd’anarchie que nous déplorons, et accréditée depuis par l’ usage. consistait à regarder les fondsd’une Loge, provenant des réceptions, comme lui appartenant en propre, sans reddition de compte àses supérieurs ; de-là la multitude de Loges formées sans constitutions légales pour favoriser lacupidité de quelques prétendus maîtres et de ceux, avec qui ils voulaient bien partager les produits deleur trafic. De-là encore ces dépenses énormes employées en banquets trop somptueux, et en futiles etmagnifiques décorations qui n’étant plus surveillées ont absorbé des fonds, dont la destination étaitbien plus précieuse, et ont été comme autant de larcins faits aux vues de bienfaisance quicaractérisent l’Ordre, et qui devaient le rendre. respectable aux yeux des profanes.

Il était toutefois aisé, en réfléchissant sans intérêt personnel d’ après les principes d’ une raisonéclairée, de reconnaître que les Loges ne font que des sociétés particulières, subordonnées à lasociété générale, qui leur, donne l’ existence et les pouvoirs nécessaires pour la représenter danscette partie d’autorité qu’elle leur confie; que cette autorité partielle émane de celle qui résideessentiellement dans le centre commun et général de l’Ordre, représenté, par ces Corps préposés àl’administration générale et particulière des différents districts et au maintien et à l’exécution de seslois; qu’aucune d’elles ne peut exister régulièrement, que par un consentement exprès des chefslégitimes de l’Ordre, constaté par la patente de constitution qu’ils lui donnent à la charge de seconformer aux lois statuts et règlements de l’Ordre, sans laquelle tous les actes de la Loge seraientnuls et clandestins, et les rétributions qu’elle exigerait, une véritable concussion ; qu’en vertu de cette

constitution, la Loge acquiert à la vérité la faculté et le pouvoir de recevoir légitimement au nom del’Ordre dans les quatre grades maçonniques, et de percevoir les rétributions prescrites , mais que leproduit de ces rétributions appartient proprement à l’Ordre en général, vu que les Loges n’agissent, etne peuvent agir qu’en vertu des pouvoirs qu’elles en ont reçus.

Il s’ensuit que l’Ordre, devant pourvoir au bien-être de tous ses établissements doit céder auxLoges sur ce produit tout ce qui est nécessaire à leur entretien, et un excédent, qui puisse les mettre enétat, par une sage économie, de remplir d’une manière satisfaisante et solide les vues bienfaisantes del’ institut ; mais qu’il peut et doit s’en réserver une portion, pour l’ exécution des mêmes projets pourl’Ordre en général , et pour subvenir aux frais considérables dune administration aussi étenduequ’elle est importante. Cette manière de voir plus sage et plus vraie, en prévenant les déprédations etles dépenses inutiles et immodérées, aurait produit en France les effets les plus salutaires, et auraitrendu l’Ordre des Maçons aussi respectable aux yeux du vulgaire qu’il a été avili par les abus. Pours’en convaincre, il ne faut que jeter les yeux sur les contrées du nord de l’Europe, où l’esprit de l’institut s’est mieux conservé . On verra avec autant de plaisir que de surprise les immenses secours ,que les Directoires ont procuré dans toutes les circonstances calamiteuses, et les établissementspatriotiques qu’ils y ont formé pour le soulagement de l’humanité. Pourquoi donc les Maçons françaisaussi compatissants et généreux qu’ aucun autre peuple de l’ Europe, ne s’empresseraient-ils pasd’imiter de si grands exemples, en s’unissant à un régime si utile et si satisfaisant, surtout lorsqu’ilsauront la certitude , que le dépôt des produits et son emploi est rigoureusement surveillé et administréavec sagesse. C’est ce dont ils vont être instruits par le précis du gouvernement général et particulierde l’Ordre.

PRÉCIS Du gouvernement général de l’ordre des Francs-Maçons, d’après les loisfondamentales, observées dans le régime réformé et rectifié.

L’ Ordre entier de la Franc – maçonnerie rectifiée est gouverné par un Grand-Maître Général, pardes Grands-Maîtres nationaux provinciaux et Administrateurs provinciaux, et par des DirectoiresÉcossais et des Régences (Grandes Loges) Écossaises, qui ont sous leur inspection ou tout l’Ordre enentier, ou une nation, ou une province, ou un district, ou un département particulier.

Chaque Régence Écossaise est composée d’un Chef ou Président, des officiers nécessaires à larégie de son département et des Députés-Maîtres, qui y sont compris, et qui sont chargés d’inspecterchacun les Loges de son arrondissement particulier, et d’en rendre compte à la Régence Écossaise.

(Chaque Directoire Écossais est composé de son Présiden, des représentants des Grandes LogesÉcossaises, et des officiers nécessaires à l’administration de son district.)

Les Grands Directoires provinciaux sont composés d’un Grand-Maître Général (Administrateurgénéral), d’un visiteur, d’un chancelier, et des Représentants des Directoires et Régences Écossaises.

(Le grand Directoire national enfin est présidé par le Grand-Maître national , comme chefprincipal de la nation, des administrateurs provinciaux, des présidents des Directoires, et desconseillers et officiers nécessaires pour sa régie et pour son administration.)

Par le moyen de l’ordre ainsi établi, les Loges et établissements inférieurs sont régulièrementreprésentés dans les corps supérieurs, et concourent à tous les actes qui en émanent. L’autoritélégislative réside dans tout l’Ordre assemblé régulièrement en Convent général. Les Conventsnationaux et provinciaux peuvent fixer la législation particulière d’une nation ou province, en tantqu’elle n’est pas contraire aux lois générales de l’Ordre.

Les causes litigieuses maçonniques sont jugées en première instance par le Comité Écossais(Comité Supérieur) de chaque Loge , présidé par le Vénérable Maître. De-là elles peuvent êtreportées par appel à la grande Loge Écossaise ; de là au Directoire Écossais, et enfin en dernierressort au grand Directoire national, mais sans effet suspensif.

Les objets de finance, qui regardent la Loge, sont discutés dans le Comité Écossais, et ensuitecommuniqués à la Loge entière, et les comptes sont visés par le Député- Maître et envoyés à lagrande Loge Écossaise, pour y être examinés. On ne peut disposer des fonds d’une Loge qu’avec leconsentement de ses membres. La même chose a lieu pour les caisses des établissement supérieurs.

C’est d’après ces principes, que sont rédigés les Règlements généraux à l’usage des Logesréunies ; Règlements qui sont d’autant plus à la convenance de chacun, que tout engagement dansquelque classe ou établissement de l’Ordre que ce soit, admet et autorise de droit les réserves de cequ’on doit au Souverain, au gouvernement, à la religion qu’on professe, et aux devoirs particuliers del’état qu’on a embrassé.

Tout Frère, reçu dans une Loge rectifiée, ou affilié à ses travaux, est tenu de signer ce CodeMaçonnique, et de promettre de s’y conformer et de concourir à en maintenir l’exécution. Il estpermis cependant à chaque Loge de faire des Règlements particuliers sur ce qui dépend de son local,pourvu qu’ils ne soient pas contraires à ces Règlements généraux et qu’ils soient approuvés par lagrande Loge Écossaise, ou par le Directoire Écossais dont elles dépendent. Ils seront joints alors auxpremiers, et signés de tous les Frères de la Loge.

On trouvera placé en tête de ces règlements généraux les qualités qu’on exige dans le Franc-maçon, membre d’une Loge réunie, les devoirs moraux qui lui sont imposés, les soins que prennentles Loges rectifiées pour la conduire et le bien-être de leurs membres, et l’esprit de fraternité et laliaison intime entre les Frères, qui caractérisent les Loges réunies et rectifiées.

Des qualités et des devoirs d’un vrai Franc-MaçonLe premier engagement du Franc-maçon en entrant dans l’Ordre, est d’observer fidèlement ses

devoirs envers Dieu, son Roi, sa patrie, ses Frères et soi-même. Il ne le prête après qu’on s’estassuré du respect qu’il porte à la Divinité, et de l’importance qu’il attache aux devoirs de l’honnête-homme . La cérémonie de sa réception, tout ce qu’il voit et entend, lui prouve que tous les Frères sontpénétrés de l’amour du bien. Tous se sont engagés par les promesses les plus saintes, d’aimer et depratiquer la vertu, de se vouer à la charité et à la bienfaisance, et de respecter les liens, qui lesunissent l’Ordre et à leurs Frères.

Les temps sont passé où, méconnaissant l’esprit de la vraie Franc-maçonnerie, on n’a jugé du

mérite d’un candidat que par l’augmentation des fonds ; où l’obligation maçonnique n’était qu’un jeude mots, et les cérémonies de réception qu’un amusement puéril et souvent indécent ; ces temps, oùl’on rougissait en public de ce qu’on approuvait en Loge, a où l’on craignait de rencontrer dans lasociété civile un homme, qu’on venait d’embrasser comme Frère. Ils sont passés ces tempsmalheureux, la honte de la maçonnerie, et nous tirerons le rideau sur des abus, auxquels une sageréforme a porté remède.

Fidèle aux lois primitives de l’Ordre, la Franc-maçonnerie d’après le régime réformé et rectifié,exige dans le candidat un désir sincère de devenir meilleur et d’appartenir à un Ordre, qui ne semontre au dehors que par des bienfaits, et qui compte parmi ses membres ce qu’il y a de plusrespectable dans la société civile. On fait des perquisitions exactes sur son caractère, ses principes etses moeurs, et on s’informe soigneusement, si son cœur est ouvert aux cris des malheureux, et s’il faitaimer et apprécier les douceurs de l’amitié. Si on n’a pas proscrit toute perception pécuniaire, c’estqu’on a vu, qu »en renonçant à tout objet d’économieet de finance, on se priverait de la principaleressource pour faire le bien. Il suffit qu’on soit persuadé, que l’argent qu’on donne est administréavec sagesse et employé utilement. C’est mériter la reconnaissance d’un homme bien né que se servirdes moyens qu’il offre pour faire des actes de bienfaisance.

Les Loges réunies et rectifiées regardent donc les mœurs avec raison comme un objet important etdigne de toute leur attention. C’est surtout à l’égard des jeunes Maçons que cette attention semanifeste. Dès qu’un homme a été jugé digne d’être associé aux travaux maçonniques, il est sûr detrouver dans ses frères des guides sages et prudents ; tous les yeux sont ouverts sur sa conduite. On lereprend avec douceur, lorsqu’ il tombe dans quelque faute , il est ramené quand il a le malheur des’égarer, il est soutenu dans ses entreprises difficiles, on lui témoigne hors de la Loge comme dansson enceinte les égards dus à son mérite ; quelles que puissent être les barrières que la fortune ou ladistance des états aient mis entre eux. Si des exhortations secrètes et fraternelles ne suffisent pas pourramener un jeune Maçon qui s’est égaré, on a recours à des moyens plus efficaces ; on le suspendd’un certain nombre d’assemblées, ou on l’exclut totalement. Car l’indulgence serait déplacée etmême criminelle dans les cas, où elle compromettrait la réputation d’un Ordre, qui a le pus grandintérêt à la conserver intacte. En pareil cas le jugement d’exclusion ou de longue suspension doit êtrenotifiées à toutes les Loges réunies et rectifiées, non seulement pour qu’elles s’y conforment, maisaussi pour soutenir par cet acte de rigueur et d’éclat la vertu chancelante des faibles. Mais on ne doitpunir que pour corriger. Si donc un tel frère revenait à lui et changeait de conduite, la Loges’empressera de le réhabiliter, avec la même publicité, qu’elle avait donné à son inconduite.

C’est en veillant religieusement sur la discipline maçonnique et en pratiquant scrupuleusement lesvertus que l’Ordre enseigne, qu’on réussira à déraciner entièrement les préjugés du vulgaire contrenotre Institut, et qu’on rassurera tous les hommes sur le genre et l’objet de nos travaux. Un pèreéclairé, une mère tendre désireront le moment qu’ils redoutaient jusqu’ici, celui qui ouvrira à leursenfants les portes de notre temple. On s’accoutumera à regarder nos Loges comme des écoles de

bienfaisance, et on envisagera la réception d’un homme, comme le garant de son mérite.Les voyageurs, séparés de leurs amis, ont plus besoin que d’autres de l’ attention et des soins

paternels des Loges. L’on ne se contente donc pas de les pourvoir de certificats ; on les recommandespécialement à l’amitié et à la bienfaisance des Loges et des frères, qui les composent, et les prie deremplacer auprès d’eux les frères qu’ils viennent de quitter, de les aider de leur conseil et de leurcrédit, et de les secourir dans le besoin en les assurant de la réciprocité la plus parfaite.

Ces soins bienfaisants, imposés comme devoirs stricts et indispensables, deviennent pour les vraisFranc – Maçons des sentiments nécessaires à leur bonheur ; indépendamment de l’estime publique, lapratique des vertus procure des jouissances vraies et durables à ceux, qui les remplissent fidèlement.C’est en aimant qu’on se fait aimer, et ce n’est que quand on inspire ce sentiment, que l’exemple desvertus qu’on donne, produit des effets salutaires et durables.

Code maçonnique des Loges Réunies et Rectifiées de FranceTel qu’il a été approuvé par les Députésdes Directoires de France au ConventNational de Lyon en 5778Chapitre Premier Des Directoires ProvinciauxLes Directoires provinciaux ont le droit exclusivement de constituer chacun les Loges de son

district. Leurs Officiers sont inamovibles et ne peuvent être changés de même que ceux des RégencesEcossaises, que sur leur démission volontaire, ou malversation bien prouvée. Les Patentes deconstitution sont expédiées à la demande de la Régence Ecossaise du département, s’il y en a déjàd’établie, au nom du Grand-Maître provincial par le Directoire provincial, et visées par le Présidentde la Régence Ecossaise. Ce sont encore les Directoires, qui donnent aux Loges les instructions,grades, lois et règlements de l’Ordre, de même que les emblèmes, symboles et devises pour lesLoges et pour les chambres de préparation.

Les principales dignités et charges du Directoire provincial, par lesquelles les Loges peuventavoir des relations avec lui, sont indépendamment du Président :

Le Visiteur du district, qui outre les visites qu’il est tenu de faire dans les Régences Ecossaises,peut visiter aussi les Loges de son district, et se faire rendre compte de leurs travaux et de leuradministration, de même que de l’état de leurs caisses, pour en faire son, rapport au Directoire;

Le Chancelier, qui est le chef de la correspondance du district, et surtout de celle qui regarde laréunion ou fondation de nouvelles Loges. Il préside à la chancellerie directoriale, et signe comme teltoutes les expéditions, actes, lettres et patentes.

Chapitre II Des Régences EcossaisesLes Régences Ecossaises sont établies dans chaque district pour la régie immédiate des Loges

réunies qui en dépendent. Elles y doivent veiller à l’exécution des lois et règlements prescrits, et aumaintien du bon ordre et de la discipline. C’est à elles que les Loges réunies doivent s’adresser danstoutes les demandes qu’elles ont à former; et c’est elles encore, qui sont la première instance d’appel

pour toutes les affaires litigieuses ou autres qui concernent les Loges de leur département.Les patentes de constitution sont expédiées sur la demande faite par les Régences Ecossaises, qui

peuvent être chargées en outre par le Directoire Provincial dont elles dépendent, de communiquer auxLoges les instructions, grades, lois et règlements établis dans l’Ordre, de même que les emblèmes,symboles et devises pour les Loges et chambres de préparation.

C’est le Visiteur particulier de la Régence Ecossaise, qui fera l’installation des nouvelles Logesde son département dont il sera fait acte sur les registres de la Loge, et copie collationnée en seraenvoyée à la Régence Ecossaise, et au Directoire provincial. C’est aussi lui qui est chargé de visiterou faire visiter de temps en temps les Loges du district, inspecter leurs travaux, vérifier les registreset les comptes, et en faire le rapport à la Régence Ecossaise. Les visites extraordinaires ordonnéesspécialement par la Régence Ecossaise, pour prendre connaissance plus positive sur quelques faitsgraves et importants, ou demandés par quelque Loge du département, seront faites aux frais de laLoge, ou des Loges qui les auront occasionnées.

Le Chancelier est le chef de la correspondance; il préside à la chancellerie, et a le soin particulierde tout ce qui y a rapport. Il signe en cette qualité toutes les lettres, expéditions, actes, lettres-patentes, etc., qui émanent de la Régence Ecossaise.

Toutes les Loges ont le pouvoir de conférer les trois grades symboliques à tous ceux qui en serontjugés dignes; pour le quatrième, elles sont tenues de demander le consentement de la RégenceEcossaise, pour chaque réception par le moyen du Député-Maître, en lui envoyant avec les nom, âgeet qualités civiles du candidat, le lieu de sa naissance et de son domicile et ensuite le Député-Maîtrefait la réception au nom du collège écossais dont il est le président-né. Les Régences Ecossaisesainsi que les collèges écossais du régime ne peuvent être composés que des frères qui possèdent tousles hauts grades du régime rectifié; les Régences Ecossaises ont seules le droit de conférer les hautsgrades qui sont supérieurs au 4ème qui est le dernier de la classe symbolique.

Chapitre III Des Loges Réunies et RectifiéesSous la dénomination de Loges réunies on entend toutes celles, qui sont fondées ou rectifiées par

patentes de constitution, émanées du Directoire du district, auquel elles appartiennent en vertu del’engagement qu’elles ont formé avec le Directoire d’observer fidèlement et invariablement lesrèglements généraux faits et à faire, et de se conformer en tout aux lois, statuts, et usages de laMaçonnerie rectifiée, qui leur seront indiqués.

On entend par Loges fondées celles, qu’un Directoire établit nouvellement, sans qu’elles aient euauparavant aucune constitution légale. On rectifie celles, qui constituées par un grand Orientquelconque, et pourvues de patentes régulières, veulent s’unir aux Loges rectifiées sous lesDirectoires, et s’engager à suivre exclusivement le régime qu’ils prescrivent, pour participer à tousces avantages.

Les Loges réunies par constitution d’un Directoire, sont autorisées par l’esprit de fraternité, quidoit animer tous les Maçons, à entretenir correspondance avec les Loges non réunies, mais

constituées par un grand Orient quelconque. Elles peuvent aussi les visiter, et les admettre dans lestravaux

des trois grades fondamentaux de la Franc-Maçonnerie, d’Apprenti, de Compagnon et de Maître,en se conformant réciproquement aux usages de la Loge qui est visitée. Mais elles ne peuvent prendreaucune part directe au régime des Loges non réunies, ni leur rien communiquer par écrit de ce

qui appartient au régime des loges réunies. Elles ne pourront avoir aucune correspondance directeavec aucun grand Orient, sans une permission expresse et par écrit du Directoire dont ellesdépendent. Les Directoires provinciaux de France, voulant faire participer les Loges

réunies de leur district aux avantages qui lui ont été réservés par un traité d’union fait entre-eux etle Grand Orient de France, se sont engagés de demander, pour chaque Loge qu’ils fondent ourectifient, des lettres d’agrégation au Grand Orient de France, que ce dernier ne peut pas refuser; en

conséquence il a été convenu par ledit traité, que chaque Loge qui n’aurait pas déjà des lettres deconstitution du Grand Orient de France, paierait une fois pour toutes pour ses lettres d’agrégation, lasomme de 36 livres. A cet effet, aussitôt qu’une Loge aura été réunie sous un des Directoires deFrance, elle dressera un tableau certifié de ses Officiers et membres, et une copie de sa patente deréunion au Directoire pour en être visés et envoyés au grand Orient avec la demande des lettresd’agrégation. Les Loges déjà constituées par le Grand Orient de France avant leur réunion, n’ont pasbesoin de lettres d’agrégation, leur ancienne patente du Grand Orient en tenant lieu.

Chaque Loge réunie est gouvernée et régie par son Vénérable-Maître ou l’Ex-Maître et ses deuxSurveillants. Elle a de plus un Orateur, un Secrétaire, qui est en même temps garde des Sceaux etarchives, un Trésorier, un Eléémosynaire, un Maître des Cérémonies et un Econome de la Loge.

S’il se trouvait plusieurs Loges réunies dans une même ville, qui s’assembleraient pour lacélébration d’une fête ou pour quelqu’autre affaire importante, la Loge générale sera alors présidéepar le Député-Maître, qui représente en tout dans sa résidence la Régence Ecossaise du département.Les Frères se placeront alternativement avec ceux des autres Loges, chacun dans son grade, encommençant par la Loge la plus ancienne rectifiée.

Dans le cas extraordinaire, où une Loge viendrait à se dissoudre, ou à changer de régime, lespatentes de constitution, registres, livres de comptes, meubles et bijoux maçonniques seront déposésentre les mains du Député-Maître, ou de son Représentant à la disposition de la Régence Ecossaisedu département. Le reliquat des caisses sera versé dans la caisse du département; et si quelquesFrères de ladite Loge voulaient se réunir, pour en former une nouvelle sous l’inspection desDirectoires, ils seraient tenus de requérir de nouvelles lettres de constitution. Tous les membresd’une Loge réunie sont donc intéressés à conserver le régime rectifié, et à en soutenir l’existence. enmaintenant parmi eux l’accord le plus parfait.

Chapitre IV Du Député-MaîtreLe Député-Maître est un dignitaire inamovible de l’Ordre, nommé par la Régence Ecossaise, dont

il reçoit ses provisions et ses instructions. Il représente la Régence Ecossaise du département. Il est

l’inspecteur perpétuel et particulier de la Loge ou des Loges établies dans la ville oul’arrondissement pour lequel il est député, et à ce titre il a droit d’entrée dans toutes les Loges de sonarrondissement, tant en personne que par son représentant. Il est aussi le représentant né de toutes lesLoges de son arrondissement auprès de la Régence Ecossaise. à laquelle il rend compte de saGestion.

S’il réside habituellement dans le lieu où siège la Régence Ecossaise du département, il propose àcette dernière un Frère pour le représenter dans la ville et le district où il est député. Mais s’il résidedans ce dernier lieu, il se fait représenter dans la Régence Ecossaise par un Frère, approuvé de mêmepar elle.

En sa qualité de Député-Maître, il n’a point droit de présidence dans aucune Loge des troispremiers grades. Mais, en cas de réception au grade de Maître Ecossais, ou d’assemblée générale deplusieurs Loges de son arrondissement, c’est à lui de présider. Hors de ces cas il a dans toutes lesassemblées maçonniques, auxquelles il assiste, la place d’honneur à la droite du Vénérable-Maître,qu’il cède à un Supérieur, s’il y en a.

Il est le premier conseiller des Loges de son arrondissement, ainsi que des Vénérables -Maîtres,qui les gouvernent; et en cette qualité il a droit d’entrée et de suffrage dans tous les Comités de laLoge.

Il doit être appelé aux élections du Vénérable-Maître et des principaux officiers de chaque Logede son arrondissement, qu’il préside quand il est présent. Il a droit de suspendre cette élection, si ellene se faisait pas conformément aux règlements généraux de l’Ordre, dont il est chargé spécialementd’assurer l’exécution.

Chapitre V Du Comité Supérieur de la LogeL’expérience a démontré, que le grand nombre des délibérants est plus nuisible qu’avantageux aux

délibérations, qui exigent un examen réfléchi; que la diversité d’opinion qui naît des différents degrésde connaissance, que les Maçons acquièrent dans les grades, multiplie les obstacles, tend à exciterdes mécontentements particuliers, et devient souvent une source de schismes et de divisions. On nesaurait donc prendre trop de précautions, pour prévenir de pareils inconvénients par des lois, quiassurent un examen tranquille et réfléchi à toutes les propositions essentielles à la Loge, etmaintiennent à chacun de ses membres, qui ont voix délibérative, le droit de voter dans sa classe,lorsqu’il s’agira de prononcer définitivement sur les propositions qui pourraient la concerner.

A cet effet il sera formé dans chaque Loge réunie un Comité, composé exclusivement de tous lesFrères de la Loge qui possèdent les hauts grades du régime, présidé par le Vénérable-Maître. Leslumières qu’ils ont acquises par leurs grades, et les épreuves, qu’ils ont subi pour y parvenir, doiventleur assurer la confiance de la Loge, pour l’administration générale de ses affaires.

Le Comité aura ses registres particuliers pour ses délibérations, qu’il ne fera jamais qu’en travailouvert. Les officiers de la Loge y rempliront leurs fonctions, s’ils sont de grade à pouvoir y êtreadmis, et à défaut il en sera nomme dans le Comité même. Il dirigera la correspondance au nom de la

Loge et lui en fera son rapport sur la communication, qui en aura été donnée par le Frère Secrétaire;il recevra et examinera toutes les propositions, concernant la Loge et nommément celles qui sontrelatives à la police intérieure et à l’administration des finances et règlements des comptes.

Tout ce qui regarde les Maîtres Ecossais y est réglé définitivement; mais les affaires de la Loge engénéral, n’y sont décidées que provisoirement, et la Loge aura toujours le droit de confirmer ou deréformer la décision du Comité, lorsqu’elle lui est communiquée.

Les Maîtres, membres ordinaires ou associés libres de la Loge, ont seuls voix délibérative, lesApprentis et Compagnons n’ayant que la consultative si le Vénérable-Maître juge bon de leurdemander leur avis.

Quelque temps avant celui qui est convenu pour la nomination annuelle ou triennale des officiers,le Comité Ecossais, formera en présence du Député-Maître ou de son Représentant, par la voie duScrutin, un tableau des Frères éligibles et le présentera à la Loge, en nommant trois sujets pour laplace du Vénérable-Maître. Le choix de ces Officiers, parmi les Frères éligibles, se fera en Logegénérale par les Maîtres et les Maîtres Ecossais à la pluralité des voix.

Chapitre VI Des Accusations et Punitions, et du Comité de ConciliationLes Loges réunies étant dirigées par les lois primitives d’un Ordre de paix et charité, doivent se

distinguer par la plus grande décence dans leurs assemblées. Dès lors toute accusation frivole,équivoque ou indécente, de même que tout propos libre, et toute médisance, et plaisanterie piquantesont proscrits, et les infracteurs à cette loi seront sévèrement punis selon la gravité, des cas. Il estaussi sévèrement défendu de parler en Loge de religion et de matières politiques.

Si un Frère a commis une faute qui ait scandalisé quelqu’un, le Frère qui l’aura remarqué pourraavec permission, accuser publiquement le délinquant; mais si une telle accusation faisait craindre unplus grand scandale encore, ou était de nature à blesser quelque Frère personnellement, l’accusateursera tenu de la confier en secret au Vénérable-Maître qui agira d’après sa prudence.

S’il se commet en Loge une faute grave, qui exige un examen réfléchi, il y sera délibéré, etl’accusé ayant été entendu, il sera condamné, s’il est coupable à une peine proportionnée au délit dontil pourra appeler au Comité Ecossais, à moins que ce ne soit devant lui que la cause ait été agitée enpremière instance.

La soumission aux lois de l’Ordre et l’obéissance à ses Chefs étant spécialement recommandéeaux Maçons, chaque frère doit se soumettre sans hésiter à la peine à laquelle il a été condamnée. Ellesera augmentée s’il s’y refuse, ou s’il s’y prête avec un air de plaisanteries; on pourra même le faireretirer, pour le juger avec sévérité, et prévenir les suites d’un Mauvais exemple de l’insubordination.

Les fautes légères sont punies par des amendes dans le tronc des pauvres-, les fautes graves sontpunies par suspension du droit d’assister, à un certain nombre d’assemblées et même par l’exclusiontotale temporaire ou perpétuelle qui sera signifiée à toutes les Loges Réunies de l’Ordre entier.

Tous les différends qui s’élèvent entre Frères, soit maçonniques soit civils, doivent être portésdevant le Comité de conciliation, avant que de passer au tribunal qui doit les juger.

Ce Comité sera composé du Député- Maître ou de son Représentant, du Vénérable-Maître et del’Eléémosynaire; si leurs premiers soins sont infructueux, les Frères nommeront chacun un arbitre,lesquels nommeront un surarbitre à leur choix.

Ce n’est qu’après que ce Comité n’aura pu réussir selon ses voeux, à rétablir la paix et l’harmonieparmi les Frères, qu’on laissera le cours à la justice ordinaire.

Du Comité Supérieur les différends sont portés par appel devant la Régence Ecossaise, toutefoissans effet suspensif; de là l’appel est porté au Directoire provincial

Les différends entre les Loges sont jugés par le tribunal qui leur est supérieur.Chapitre VII Du Vénérable-MaîtreLe Vénérable-Maître est le chef et l’organe de la Loge, dont il convoque et préside les

assemblées; il la gouverne pendant trois ans conjointement avec ses officiers, qui sont éligibles tousles ans.

Cette charge, étant une des plus importantes de l’Ordre maçonnique, ne doit être confiée qu’à desFrères d’un mérite reconnu, d’un zèle bien éprouvé, et qui joignent à un esprit ferme et éclairé toutela douceur du caractère nécessaire à des fonctions aussi essentielles.

A la fondation ou rectification d’une Loge, elle présentera trois sujets de ses membres à laRégence Ecossaise, qui les nommera à son choix aux places de Vénérable-Maître, et des deuxSurveillants. Ils seront ensuite installés par le Visiteur de la Régence Ecossaise, ou par le Député-Maître du lieu.

Dans une Loge fondée et rectifiée, le Vénérable-Maître est choisi de trois en trois ans parmi troisMaîtres des plus hauts grades,146 présentés par le Comité Supérieur. Cette élection se fera dans lemois qui précède la Saint Jean-Baptiste, par le scrutin à la pluralité des voix, en présence du Député-Maître ou de son Représentant, et aussitôt communiquée à la Régence Ecossaise du département.L’installation du nouveau Vénérable-Maître sera faite par le Député-Maître. Le prédécesseurdeviendra de droit Ex-Maître adjoint.

Le Vénérable-Maître est spécialement chargé de veiller au maintien des lois de l’Ordre, et àl’exécution des règlements; il doit gouverner sa Loge avec douceur, prudence et fermeté, y maintenirla subordination, y faire respecter l’Ordre et ses chefs, et veiller surtout à la frugalité et la décencedans les banquets, en se rappelant qu’il est responsable envers l’Ordre des écarts ou abus qu’iltolérerait. Il doit pareillement veiller à l’exactitude des recouvrements économiques, et à la redditiondes comptes tous les trois mois.

Dans les délibérations le Vénérable-Maître peut voter le premier ou le dernier à son choix; en casd’égalité de suffrages, il remettra la délibération à la prochaine assemblée, si l’affaire est de nature àpouvoir être différée. Si alors les suffrages sont encore égaux, le Vénérable-Maître jouit de la voixprépondérante.

Chapitre VIII Des Surveillants et autres Officiers de la LogeLes Surveillants de même que les autres officiers de la Loge sont élus à la pluralité des voix parmi

ceux que le Comité Supérieur aura présentés comme éligibles. Ces élections se font tous les ans dansle mois qui précède la Saint Jean-Baptiste. Tous les officiers de la Loge à l’exception du FrèreEconome, doivent être choisis de préférence parmi les Frères des plus hauts grades148, comme étantplus en état d’aider le Vénérable-Maître dans ses fonctions.

Les Surveillants sont après le Vénérable-Maître et l’Ex maître, les principaux Officiers de laLoge. Ils doivent l’aider en tout dans sa gestion, et veiller à ce que tous les autres officiersremplissent leurs fonctions avec zèle et exactitude. En cas d’absence du Vénérable-Maître et de l’Exmaître, s’il y en a, ils président la Loge.

L’Orateur porte la parole dans toutes les occasions solennelles au nom de la Loge; il doit à laréquisition du Vénérable-Maître instruire les Frères de leurs devoirs et des choses de l’Ordre à leurportée. Dans les Loges de réception, l’explication et les instructions des grades peuvent tenir lieu dediscours. La prudence exige que tous les discours de l’Orateur soient préalablement communiqués auVénérable-Maitre, avant que d’être prononcés en Loge.

Le Secrétaire est chargé spécialement de la correspondance de la Loge. Il signe par mandement dela Loge, et expédie les lettres, tableaux et certificats; il porte sur le protocole de la Loge lesréceptions, agrégations, délibérations et élections. Tout acte est signé par le Vénérable-Maitre, lesdeux Surveillants et le Secrétaire.

On ne fera et lira dans l’assemblée même que la minute ou le brouillon du protocole, qui serasigné et paraphé par celui qui a présidé la Loge. Le Secrétaire l’écrira chez lui au net et en fera lalecture à la première assemblée, pour être signé par le Vénérable-Maître, les deux Surveillants et leSecrétaire.

Les réceptions, agrégations et affiliations seront aussi signées par les Frères, qui ont été reçus,agrégés ou affiliés. En marge sur les registres et protocoles seront écrits les noms des Visiteurs et detous les Frères présents. Le Secrétaire convoque la Loge aux jours et heures convenues, en indiquantsur les billets d’invitation l’objet du travail, et en se souvenant de n’appeler aux délibérations que lesFrères, qui ont droit d’y voter. Il doit être circonspect à n’envoyer des lettres d’invitation à aucunVisiteur, s’il n’a le consentement du Vénérable-Maître ou de celui auquel il s’est remis pour cettepartie. Lorsqu’il y a banquet, il enverra la veille au Frère Econome la liste des Frères, qui ont promisde s’y rendre. Le Secrétaire est en même temps Garde des Archives, pour lesquelles il prêtera uneobligation particulière. Comme il pourrait souvent se trouver des papiers de la Loge entre ses mains,il les tiendra dans un portefeuille ou une caisse fermant à clef, portant l’adresse du Vénérable-Maîtreou du Député-Maître, et en cas d’accident ou de maladie, l’Eléémosynaire est chargé spécialement deprendre les mesures nécessaires pour la retirer.

Le Trésorier de la Loge est chargé de percevoir la quotité annuelle des Frères, et tout ce qui est dûpour réceptions ou affiliations, ou à quelque autre titre que ce soit. Il acquittera sur l’Ordre duVénérable-Maître les dépenses ordinaires, et en fournira les quittances et récépissés qu’il produiratous les trois mois au Comité Supérieur, avec les comptes des recettes et des dépenses, pour y être

arrêtés et visés par le Député-Maître, le Vénérable-Maître et les deux Surveillants, et communiquésensuite à toute la Loge. Il est tenu de compter tous les trois mois au plus tard avec le Trésorier de laRégence Ecossaise, et lui délivrer le quart des réceptions aux trois premiers grades, les trois quartsdu quatrième et l’Ecu d’Ordre. Il tiendra pour cet effet un livre séparé de recette pour tout ce quiappartient à la Régence Ecossaise. Outre ses livres de compte particulier, il aura encore un livre decompte général, sur lequel seront portées sommairement les recettes et dépenses de la Loge, et quisera produit et signé en Loge générale.

L’Eléémosynaire est chargé de recevoir l’offrande volontaire des nouveaux reçus, de présenter letronc des aumônes à tous les Frères à chaque assemblée, de même que pour les quêtesextraordinaires, et de retirer du Frère Econome tout ce qu’il aura pu réserver sur chaque banquet. Leproduit de tous ces objets est exclusivement réservé pour les aumônes, et l’état de cette caisse seraprésenté tous les trois mois à la Loge, pour y être visé et arrêté. Le tronc aura deux clefs, dont ilfaudra la réunion pour l’ouvrir; l’une sera entre les mains du Vénérable-Maître, et l’autre restera àl’Eléémosynaire, qui ne pourra en rien retirer sans le consentement du Vénérable-Maître et même desSurveillants, si l’objet est considérable. Il sera en outre l’Infirmier de la Loge, et tenu en cette qualitéde s’informer des Frères malades et de les visiter, de leur procurer les secours dont ils auraientbesoin, et de leur rendre en général tous les services que l’amitié, la fraternité et l’humanité pourrontlui dicter. Si un cas particulier l’exige, on pourra à sa réquisition lui adjoindre quelque autre Frère dela Loge. C’est l’Eléémosynaire encore qui est chargé spécialement de veiller à la conduite des Frèreset de faire des informations sur la vie et les moeurs des candidats, proposés pour être reçus, et d’enrendre compte au Comité Ecossais et même à la Loge si la prudence le, permet.

Le Maître des Cérémonies doit veiller au cérémoniel de chaque assemblée. et examiner avantl’heure indiquée pour le travail, si tout est disposé convenablement pour la cérémonie du jour. Il doitexaminer les Frères Visiteurs, leur demander leurs certificats et les mots, signes et attouchements durégime, auquel ils appartiennent. En cas de doute, il doit consulter le Vénérable-Maître, et mêmeattendre l’ouverture de la Loge, et en demander les ordres avant que de les admettre. Il doit avoirsoin de placer tous les Frères suivant leur, grades ou dignités dans le régime rectifié.

L’Econome est chargé des décorations et meubles de la Loge, du soi d les entretenir et de les faireréparer; de faire tendre et détendre la Loge convenablement à la cérémonie indiquée à chaqueassemblée; de l’approvisionnement des bougies, et de toutes autres choses à l’usage de la Loge, quisont confiées à sa garde. Toutes les dépenses ou avances qu’il fait, avouées par la Loge, doivent êtreconstatées par des comptes en règle, lesquels étant visés par le Vénérable-Maître, lui sontremboursés par le Frère Trésorier, sur son récépissé. Il est chargé de commander les banquets pourle nombre des Frères. dont le Secrétaire lui aura donné la liste. sauf les changements qui peuventsurvenir, qui sont remis à sa prudence. Il doit en faire la recette suivant l’usage, même auprès desFrères absents, sur lesquels il aurait compté et dénoncer à la Loge ceux qui ne satisferont pas à cedevoir à la première réquisition de la part. Il doit observer pour le, banquets, la frugalité prescrite

par les rites de l’Ordre, et ne jamais excéder le prix qui aura été fixé.Si une Loge est nombreuse, et que ses travaux soient multipliés, elle pourra élire et nommer des

adjoints à toutes les places, mais ils n’auront rang dans la Loge, que selon les grades qu’ilspossèdent. L’adjoint du Premier Surveillant ne pourra pas prendre la place du titulaire, si le SecondSurveillant est présent. Car de même que le Vénérable-Maître est remplacé en cas d’absence par lePremier Surveillant, s’il n’y a pas d’Ex-maître, de même le Premier Surveillant sera remplacé par leSecond, s’il est présent, et les adjoints ne pourront prendre leurs places qu’après les titulaires.

Chapitre IX Des Grades MaçonniquesLa Maçonnerie Rectifiée ne reconnaît que quatre grades; savoir: ceux d’Apprenti, de Compagnon,

de Maître et de Maître Ecossais. Tous les autres grades, sous quelque dénomination qu’ils soientreconnus, principalement toute espèce d’Elu, de Chevalier Ks et des grades qui leur ressemblent, sontexpressément défendus dans toutes les Loges réunies sous les peines les plus graves, commedangereux et contraires au but et à l’esprit de la Franc-Maçonnerie.

Les trois premiers grades seront conférés par le Vénérable-Maitre de la Loge, conformément auxcahiers qui lui en auront été fournis par le Directoire provincial. Le grade de Maître Ecossais estréservé au Député-Maître, s’il est présent; à son défaut, ou s’il le désire, il peut être conféré, commeles autres par le Vénérable-MaîÎtre.

Les intervalles des grades sont fixés1. à cinq mois d’assistance régulière aux travaux du grade d’Apprenti à celui de Compagnon;2. à sept mois de présence régulière, de celui-ci au grade de Maître;3. à une année de présence, du grade de Maître à celui de Maitre Ecossais.Les intervalles des trois premiers grades, dans certains cas rares et pour de fortes considérations,

peuvent être abrégés par dispenses du Comité Ecossais. Pour le quatrième, il faut les demander, demême que la permission de le conférer, à la Régence Ecossaise.

Les Apprentis ont le tablier de peau blanche, sans doublure ni bordure, la bavette haute; lesCompagnons ont le même tablier, avec des rubans bleus; les Maîtres ont le tablier doublé et bordé debleu, la bavette abattue; les Maîtres Ecossais ont le tablier comme il sera expliqué plus au long dansla suite de ce chapitre.

Aucun profane ne peut être reçu Franc-Maçon, s’il ne professe la religion chrétienne, s’il n’a pasl’âge de 21 ans, à moins qu’il soit fils de Maçon, ou muni de dispenses; et s’il n’est né de parentslibres.

Il ne pourra être proposé directement que par un membre de la Loge, qui en répondra, ainsi quedes frais de sa réception. Le proposant remettra sa proposition par écrit à la Loge, après en avoir faitpart au Vénérable-Maître en particulier. Après les informations requises, on tiendra le scrutin, qui nepourra, en aucun cas, se faire le même jour de la proposition. S’il est unanimement favorable, onfixera le jour de la réception, le proposant en avertira le candidat, et le présentera au Vénérable-Maître, qui l’exhortera à se rendre de plus en plus digne de la faveur que la Loge lui accorde.

Un Frère qui voudra avancer en grade, commencera par en prévenir le Vénérable-Maître, et sic’est pour le quatrième grade, il en préviendra le Député Maître; il se fera ensuite proposer dans laLoge du grade qu’il demande ou par eux, ou par quelque autre Frère, qui présentera avec laproposition par écrit, les certificats de présence expédiés par le Secrétaire sur les protocoles de laLoge, et les quittances du Frère Trésorier, comme quoi il a satisfait à ce qu’il devait à la Loge et à laRégence Ecossaise. Dans la première délibération, si rien ne s’oppose à son admission, on fixera lejour pour son examen sur les objets essentiels des grades qu’il a déjà reçus, et ce n’est qu’après cetexamen qu’on fera le scrutin définitif de son admission au nouveau grade qu’il demande.

Les membres d’une Loge réunie, ne peuvent recevoir aucun grade que dans celle à laquelle ilsappartiennent, à moins que le Vénérable-Maître, conjointement avec le Comité, leur en ait accordé lapermission; si un Frère néglige de demander cette permission, il ne sera pas reconnu dans sonnouveau grade, et même, selon le cas, il pourra être rayé du tableau.

Les Apprentis et Compagnons doivent être découverts pendant le travail, et doivent faire la gardeintérieure de la Loge. Dans les délibérations ils n’ont que la voix consultative, si le Vénérable-Maître leur demande leur avis. Le grade de Maître Ecossais est exclusivement affecté au RégimeRectifié. c’est par cette raison que, lorsqu’on le confère, ou qu’on tient Loge d’instruction de cegrade, on n’ose y faire assister aucun visiteur d’un autre Régime, quelque grade qu’il ait. On ne peutle donner qu’à un Frère qui appartient à une Loge réunie, sous quelque dénomination que ce soit, quioblige à y payer annuellement l’Ecu d’Ordre.

Lorsqu’un Frère aura été reçu régulièrement Maître Ecossais, le Vénérable Maître de la Loge, outel autre Frère qu’il commettra pour cela, pourra lui communiquer sans aucun frais ni cérémonies tousles grades dénommés supérieurs dans les autres régimes, qui seront à sa connaissance, sans que pourcela le Frère, auquel ils seront ainsi communiqués, puisse se décorer en Loge d’aucun des attributs etcouleurs desdits grades.

Les marques distinctives des Maîtres Ecossais sont :1. un tablier de peau blanche, coupé en carré long en travers, ainsi que la bavette, qui sera doublé

de taffetas vert, la bavette rebordée de couleur de feu.2. un cordon vert, à gros grains moiré de la largeur de deux pouces et demi, avec une rebordure de

trois lignes, en couleur de feu sur le bord extérieur seulement, avec une petite rosette aussi couleur defeu au bas.

3. le bijou du grade en vermeil, qui sera suspendu sur la poitrine, par le cordon passé au col ensautoir, et qui y sera attaché par un petit ruban couleur de feu. Ce bijou sera une étoile flamboyante àsix pointes, formant un double triangle avec la lettre H au milieu, entre le compas et l’équerre, sur unfond en couleur de feu. Cette étoile sera entourée d’un cercle surmonté d’une couronne.

Les Frères servants, ou gardes de la Loge, ne seront reçus qu’aux grades d’Apprenti et deCompagnon. Cependant chaque Loge pourra recevoir, en cas de besoin, au grade de Maître l’un desFrères servants, s’il est libre domicilié et d’un état convenable, après l’avoir longtemps et

rigoureusement éprouvé. Cette réception toutefois ne consistera que dans l’obligation qu’on lui enfera prêter, et dans son admission à une réception dans ce grade. Dès lors ce Frère servant deviendrale chef de ceux de sa classe.

Chapitre X Des Scrutins et de la manière de les tenirLe scrutin est le moyen par lequel la Loge cherche à connaître le sentiment des membres qui la

composent, dans toutes les affaires qu’elle a à résoudre. Il doit être tenu de manière à laisser àchacun la plus grande liberté dans son suffrage, sans que le voeu général de la Loge puisse être gênépar des motifs, intérêts ou caprices particuliers; l’accomplissement du voeu général devant être lepremier but de chacun des Frères. Il est donc de règle, que toutes les propositions importantes soientexaminées, et les différents avis qu’elles font naître, discutés et suffisamment éclairés avant que detenir le scrutin, qui doit en décider définitivement.

Il y a quatre manières différentes de tenir les scrutins, savoir :La première et la plus ordinaire, par ballotes blanches et noires; elle est spécialement employée

pour toutes propositions de réception, agrégation, affiliation, etc.La seconde par billets écrits; elle est usitée dans toutes les élections.La troisième par la simple affirmative ou négative verbale, lorsque le Vénérable-Maître après

l’examen d’une proposition, recueille ou fait recueillir par les Surveillants chacun sur leur colonneles suffrages définitifs. C’est la plus convenable dans les délibérations journalières, lorsqu’il s’agitd’un objet, sur lequel aucune considération ne peut gêner le suffrage public des Frères.

La quatrième enfin par acclamation; elle doit être la plus rare, comme étant la plus vicieuse, en cequ’elle entraîne rapidement les suffrages et peut en gêner la liberté; elle ne doit être proposée quedans les affaires peu importantes, ou lorsque le voeu général de la Loge s’est suffisamment manifestépendant la discussion de l’affaire.

Pour les élections et délibérations, c’est la pluralité des voix qui décide, et c’est pour chacun unerègle invariable de s’y soumettre; mais pour les propositions d’un candidat à recevoir, ou d’unMaçon à agréger, il faut un consentement unanime ou du moins général; il doit être essentiellementunanime, pour tous les cas de dispense.

Dans les cas de réception ou d’agrégation, lorsqu’il y a opposition par le scrutin, le Vénérable-Maître ou le proposant peuvent demander un scrutin par écrit, et motivé s’il peut l’être sans danger.Une ou deux oppositions secrètes ne peuvent annuler l’effet du scrutin, mais elles en nécessitent unsecond et même un troisième, dont le Vénérable-Maître fixe l’intervalle. Si elles sont avouées, ellessuspendent l’admission, jusqu’à ce que les motifs avoués à la Loge, ou en particulier au Vénérable-Maître, aient été jugés à la pluralité des voix. Dans l’intervalle fixé pour la tenue du nouveau scrutin,l’opposant ou les deux opposants, sont obligés de confier leurs motifs au Vénérable-Maître, ou dumoins à deux Maîtres Ecossais à leur choix, et si au dernier le nombre des Opposants n’a pasaugmenté, le Proposé sera admis, mais s’il s’y trouve seulement trois oppositions, quoique nonmotivées, il sera renvoyé définitivement pour un temps, ou pour toujours, selon les cas. Cette

méthode offre un moyen de multiplier les oppositions, lorsque les motifs en sont valables, sans secompromettre, et conserve à chacun sa liberté, sans exposer aux inconvénients dont on pourrait seplaindre ailleurs.

Le scrutin ne pourra en aucun cas être tenu le même jour de la proposition, mais on pourra dès lorsen fixer la tenue.

Chapitre XI Des Membres d’une LogeOn peut appartenir à une Loge à titre de membre ordinaire, d’associé libre, de membre honoraire,

et de Frère servant ou garde de la Loge.On nomme membres ordinaires d’une Loge ceux qui participent régulièrement à ses travaux,

assistent avec exactitude à ses assemblées, et paient toute la quotité annuelle dont on est convenu detrois mois à trois mois ou une fois pour l’année; ils sont éligibles aux dignités et charges de la Loge,et jouissent de la voix décisive dans toutes les délibérations auxquelles ils peuvent être appelés.

Les associés libres sont ceux, qui par leur domicile, leurs occupations civiles, leur situation, oupar quelqu’autre considération, ne peuvent s’assujettirent aux devoirs stricts et permanents que laLoge impose aux membres ordinaires. Ceux-ci paieront une quotité annuelle, qui sera fixée et payéeles mois de présence seulement; c’est surtout aux Militaires et aux voyageurs que cette classe estdestinée. Ils jouiront de tous les droits des membres ordinaires, à l’exception qu’ils ne pourront êtreéligibles à aucune charge ni dignité de la Loge, autre que celle d’Orateur, Maître des Cérémonies ouEconome, à moins qu’ils ne puissent prouver, qu’ils possèdent une des premières dignités dansl’intérieur de l’Ordre, et qu’ils n’entrent dans la première classe dès qu’ils accepteront quelqueplace. Ils auront voix consultative et délibérative dans toutes les assemblées de la Loge, excepté danscelle où l’on traitera de l’emploi des fonds; car alors ils n’ont que la consultative.

Les membres honoraires sont ceux auxquels la Loge veut accorder ce titre après dix ans deservice, en qualité de membre ordinaire, ou de quinze ans, s’ils n’ont été qu’associés libres, ou enreconnaissance de services éclatants rendus à la Loge dans un espace plus court. Ils ne paient d’autrerétribution que l’Ecu d’Ordre, et ne jouissent que de la voix consultative dans les délibérations. Ilssont éligibles, s’ils possèdent les hauts grades dans l’Ordre, et s’ils promettent d’entrer dans laclasse des membres ordinaires aussi longtemps qu’ils seront en place.

Les Frères amateurs sont choisis parmi les personnes à talent, capables de rendre des services à laLoge; ils sont reçus gratis, et ne peuvent posséder aucune charge ni dignité dans la Loge.

Enfin les Frères servants ou gardes de la Loge, dont le nombre ne saurait être trop petit, sont reçusgratis jusqu’au second grade, qui doit être le dernier pour eux; ils ne peuvent être élus à aucunecharge, et n’ont de voix consultative, que lorsqu’il s’agit d’une réception de servant ou de garde de laLoge.

Tous ces membres doivent être compris chacun dans sa classe sur le tableau général, qui seraenvoyé tous les ans après l’élection des Officiers à la Régence Ecossaise, et au Directoire provincialdu district, et qui portera en tête le nom et les qualités du Député-Maître du lieu. On y marquera les

noms, surnoms, qualités civiles et maçonniques, le lieu de naissance et de domicile, et l’âge de ceuxqui sont au-dessous de 25 ans. Ce tableau sera certifié par le Vénérable-Maître et ses deuxSurveillants, et visé par le Député-Maitre ou son représentant.

Les Frères, qui voudront s’affilier à une Loge réunie, doivent avoir visité auparavant ses travaux.On les passera au scrutin dans l’assemblée, qui suivra celle de leur proposition, et on y procédera dela même manière qu’à la réception d’un profane. Ils paieront la taxe de leur affiliation, de même quel’Ecu d’Ordre et la quotité annuelle, qui sera celle de la classe qu’ils choisiront.

Si le scrutin a été favorable, on communiquera au candidat les règlements de la Loge, qu’il signerale jour de son affiliation.

Un Frère membre d’une Loge réunie ne peut s’agréger à une autre, sans une permission par écrit decelle à laquelle il appartient.

Tous les Frères de la Loge indistinctement (hors les servants) recevront en travail ouvert, etjamais autrement, communication du mot de l’année, envoyé par la Régence, ou le Directoire à toutesles Loges du District, et il est défendu de ne le jamais donner à qui que ce soit, à moins d’un ordrespécial.

Tout Frère qui voudra se retirer d’une Loge, sera tenu de l’annoncer par écrit. On attendra alorsencore trois mois; si pendant tout ce temps il persiste dans sa volonté, il sera rayé du Tableau, et onen fera mention sur le protocole du jour; et dès lors il ne pourra rentrer qu’après s’être fait proposerde nouveau, avoir passé par le scrutin, et payé la taxe de l’affiliation. Il ne prendra rang sur le tableauqu’à la date de sa rentrée.

Chapitre XII Plan Economique de la LogeTous les membres agrégés de la Loge conviendront entre eux d’une quotité annuelle suffisante

pour payer les frais de Loge, servants et autres dépenses annuelles; elle sera payée par chacun auTrésorier de la Loge par trimestre ou annuellement. Ils le devront absents comme présents, tant qu’ilsseront sur le tableau de la Loge comme membres ordinaires.

Ceux qui négligent de la payer, et qui ayant été avertis une année de suite, n’auront pas satisfait,seront rayés du tableau et déchus de tous les droits, dont ils jouissaient dans la Loge.

Les membres associés libres concourront aux dépenses annuelles dans la proportion que la Logeaura jugée convenable.

Chaque Loge réunie au moment de sa fondation ou rectification, proposera à la Régence Ecossaisedu département, un projet d’évaluation pour la rétribution des quatre grades symboliques, ainsi quepour les agrégations et affiliations dans la proportion qu’elle jugera convenable à son local et à sescirconstances particulières. Ce projet sera arrêté définitivement par la Régence Ecossaise, pour êtreun tarif invariable pour la Loge, sur lequel seront perçues les réserves de la Régence Ecossaise.

Tous les Maçons appartenant à la Loge à quelque titre que ce soit, à l’exception des Frères à talentet servants, paieront chaque année à la Saint Jean d’été, l’Ecu d’Ordre, évalué à six livres, et tousceux qui négligeront d’y satisfaire, ou s’y refuseront, ayant été avertis trois fois, seront rayés du

Tableau de la Loge, à moins qu’ils ne soient reconnus dans l’impossibilité de payer.Ceux des Frères de la Loge, qui paient le Ducat d’Ordre à la caisse de la Régence Ecossaise, sont

exempts de l’Ecu d’Ordre; on en excepte les membres honoraires d’une Loge.Sur le produit des rétributions des trois premiers grades et des agrégations, il sera prélevé un

quart, qui sera versé tous les trois mois dans la caisse de la Régence Ecossaise; le surplus des fondsest entre les mains du Trésorier de la Loge, pour subvenir aux frais de décoration, et de bougies, etc.

Quant au quatrième grade, les Directoires ont voulu laisser aux Loges le quart de la rétributionpour payer les frais de réception et de décoration; les trois autres quarts sont versés tous les troismois dans la caisse de la Régence Ecossaise.

Les extraits des protocoles, qui constatent la quantité des réceptions faites dans chaque grade,pendant les trois mois, seront expédiés par le Secrétaire et signés de même que les comptes par leVénérable-Maître, et visés par le Député-Maitre du lieu.

Le produit des patentes et certificats de la Loge, sera employé en frais de chancellerie et engratifications pour les copistes. On fera ces dernières de l’avis du Vénérable-Maître et desSurveillants.

La caisse des aumônes confiée au Frère Eléémosynaire, ne pourra jamais être confondue dansaucun cas avec une autre caisse. Elle sera fournie :

1. du produit des offrandes des récipiendaires à chaque réception ou promotion et des quêtes quiseront faites dans toutes les assemblées de la Loge.

2. du produit des amendes.3. de ce qui aura pu être réservé par le Frère Econome sur la recette de chaque banquet. Le

produit de cette caisse ne pourra être employé dans aucun cas aux besoins de la Loge, et resteexpressément réservé pour les aumônes, qui pourront être fixées dans l’occasion parl’Eléémosynaire, le Député-Maître et le Vénérable-Maître, de même que des Surveillants, qui enrendront compte ensuite à la Loge.

Aucun pauvre Maçon n’aura droit à ces aumônes, à moins qu’il ne soit pourvu de certificats et delettres de recommandation d’une Loge réunie, ou d’une Loge non réunie, qui est en liaison decorrespondance et de fraternité avec elle.

Les Loges réunies sont tenues d’envoyer tous les ans à la Régence Ecossaise, ou au Directoireprovincial dont elles dépendent, l’état exact de leur caisse, et un extrait de leurs livres des comptespour la recette et dépense de l’année, le tout signé par le Vénérable-Maître, et visé par le Député-Maître ou son Représentant; elles les adresseront avec le Tableau de la Loge aux Visiteurs duDistrict et du département, qui les remettront au Directoire, ou à la Régence Ecossaise. Si la RégenceEcossaise jugeait nécessaire de savoir la composition de la Loge et l’état de ses caisses dansl’intervalle, elle ne pourrait point être refusée dans sa demande.

Chapitre XIII Des Frères VisiteursOn reconnaît pour Visiteurs les Frères d’un Régime régulier, qui ne sont pas membres de la Loge.

Les places sont assignées aux Frères d’après leurs grades et qualités maçonniques, sans égard à leurrang et état civil. Les Frères Visiteurs d’un régime étranger ne reçoivent d’autre distinction dans lesLoges réunies, que celle d’être placés à la tête de la colonne de leur grade, après les Visiteurs duRégime Rectifié. On leur permet de porter les cordons et tabliers de leurs grades, à l’exception detout ce qui a quelque rapport à l’Elu; mais quel que soit le grade dont ils sont pourvus, ils ne pourrontêtre classés qu’avec les Maîtres, et les Maîtres Ecossais.

Les Frères Visiteurs du Régime Rectifié sont placés à la tête de la colonne de leur grade. S’ilssont pourvus des hauts grades et de quelque grande dignité dans l’Ordre, ils obtiennent une placed’honneur à l’orient, à côté du Vénérable-Maître, avec lequel ils entrent en Loge, précédés desSurveillants et du Maître des Cérémonies.

Tout Frère Visiteur doit être proposé au Vénérable-Maître, ou à celui qu’il en a chargé, pour êtreinvité aux travaux par un billet maçonnique. Il paiera la quotité fixée pour le banquet, tout comme unautre Frère, et celui des Frères de la Loge, qui l’a proposé et amené, sera inscrit sur la liste commepayant pour lui.

Tout Frère Visiteur ne sera admis en Loge, qu’après avoir été soigneusement examiné par leMaître des Cérémonies sur les grades dans lesquels il désirera être reconnu; et après avoir présentéson certificat, et donné la parole de l’année, s’il est d’un régime où on en donne. S’il désire que laLoge vise son certificat, elle ne pourra le faire qu’autant qu’il aura été délivré par une Loge réunie.

Chapitre XIV Des Banquets et FêtesAutant les banquets trop somptueux, trop bruyants et trop fréquents, sont contraires à l’esprit de la

Maçonnerie, autant ceux où la dépense est modique et réglée, où règne la décence et la fraternité, sontpropres à conserver et à resserrer les liens qui unissent les Francs-Maçons. C’est pourquoi leVénérable-Maître assemblera les Frères en banquet, aussi souvent que les circonstances lepermettront.

Chaque Frère paiera la quotité fixée pour le banquet, absent ou présent, si on a compté sur lui.Cette quotité sera invariablement fixée pour chaque Loge selon son local, pour empêcher qu’on nepasse les bornes de la frugalité prescrite dans les banquets.

Les fêtes à célébrer dans les Loges réunies et rectifiées, sont les deux Saint Jean d’été etd’hiver.167 A cette dernière on fera la lecture du Code des règlements maçonniques, et l’Orateurprononcera un discours solennel, dans lequel il pourra parler de la réforme allemande et française, etdes actes de bienfaisance que la Maçonnerie a fait dans différentes contrées de l’Europe. On tâcherace jour de réunir, dans le même local, toutes les Loges d’une même ville, ou d’un mêmearrondissement.

Le jour de la fête de Saint Jean d’hiver sera principalement consacré à des actes de bienfaisance,que la rigueur de la saison et le manque de travail rendent précieux dans ce moment.

La même chose doit s’observer pour la fête de Saint Jean-Baptiste, qui sera spécialementconsacrée à l’installation des nouveaux Officiers et à la lecture des règlements particuliers de la

Loge; et tous les Frères renouvelleront solennellement ce jour-là, entre les mains du Vénérable-Maître leur engagement de les observer fidèlement. Il y aura un discours de même qu’à la Saint Jeand’hiver, et on portera au banquet toutes les sept santés d’Ordre.

Chapitre XV De la Police intérieure de la Loge.Le Trésorier, de même que l’Eléémosynaire aura un livre de recette et de dépense, et un autre de

compte général, sur lequel il portera sommairement tous les arrêtés des différentes caisses, qui serontfaits tous les trois mois, et qui seul sera communiqué à la Loge générale. Il faut aussi au Trésorier unlivre séparé pour les réserves de la Régence Ecossaise.

Il est enjoint aux Frères de garder le plus profond silence pendant les cérémonies de réception.Aucun Frère, à l’exception de ceux qui tiennent les places d’honneur, ne peuvent parler, sans en

avoir demandé la permission au Vénérable-Maître, par les Frères Surveillants.Dans les délibérations chacun dit son avis, quand il lui est demandé dans son rang par le

Vénérable-Maître, les Surveillants, ou le Maître des Cérémonies; et il est défendu d’interromprecelui qui parle, avant qu’il ait annoncé qu’il a fini.

Si après l’heure indiquée, le Vénérable-Maître n’est pas rendu à l’assemblée, celui ou un de ceuxqui sont préposés pour le remplacer, ouvrira le travail, dès que les Frères se trouveront au nombre desept, soit pour réception soit pour délibération.

Pour ranimer le zèle des Frères à fréquenter les assemblées, il est expressément défendud’instruire un Frère absent de ce qui s’est passé en Loge, à moins d’une permission expresse duVénérable-Maître.

Tout Frère qui, sans raisons valables aurait passé l’année sans assister aux travaux de la Loge,sera censé y avoir renoncé, surtout s’il n’a pas satisfait aux rétributions d’usage, en conséquence ilsera rayé du Tableau.

Nul profane ou Frère ne sera admis ou promu à un grade quelconque ou à un office et charge, qu’ilne produise la quittance du Frère Trésorier pour le montant dudit grade, et pour l’Ecu d’Ordre et laquotité annuelle, selon la classe qu’il a adopté dans la Loge.

Un Frère, qui vient après le travail commencé, s’annoncera à la porte de la Loge en frappant enMaçon; mais il ne frappera pas dès qu’on l’aura averti par un coup à la porte, qu’on l’a entendu, et ilattendra en silence jusqu’à ce qu’on vienne lui ouvrir.

Les Vénérable-Maître, Surveillants et Maître des Cérémonies sont tenus d’étudier leurs cahiers etles formules qui y sont contenues. Ils ne pourront néanmoins se dispenser d’avoir dans chaque travaille cahier du grade sous les yeux, afin qu’il ne soit jamais fait aucun changement dans le cérémonial etdans les formules. Après chaque travail ils seront rendus au Secrétaire qui en a le dépôt.

Aucun Frère ne peut avoir en sa disposition les cahiers des grades, ni les instructions qui y sontrelatives. Le Secrétaire pourra les confier à ceux qui doivent y étudier leurs fonctions, mais à nulautre sans un Ordre exprès du Vénérable-Maître, et aucune Loge n’en peut donner communication àaucune autre Loge, sans permission du Directoire.

Les Frères en cas de voyage sont tenus d’en prévenir le Vénérable-Maître et le Frère Secrétaire,et de se pourvoir d’un certificat et de lettres de recommandation pour les Loges qu’ils voudrontvisiter; ils paieront pour le premier la taxe établie.

A chaque assemblée, tant de réception et de cérémonies que de délibération, le Président doitfaire présenter le tronc des aumônes à tous les Frères, et surtout aux nouveaux reçus ou affiliés. UnFrère, qui n’aura assisté qu’à une ou deux assemblées pendant toute une année, sera tenud’indemniser les pauvres de ce qu’il leur aurait destiné, s’il eut assisté plus fréquemment auxassemblées.

Chaque Loge réunie aura dans son local un Tableau des Officiers et membres, du DirectoireProvincial, de la Régence Ecossaise et de la Loge, dans l’Ordre indiqué dans le Chapitre desmembres d’une Loge réunie.

En cas de maladie d’un Frère, on ne se reposera pas sur le seul Frère Eléémosynaire du soin de levisiter; tous ceux qui en auront le loisir, lui rendront les devoirs de l’amitié maçonnique, dans cesmoments où le vulgaire n’en connaît plus. Ils s’informeront cependant auparavant, si les visitesn’incommodent pas le malade ou causent quelque gêne ou dérangement dans les soins que sa maladieexige.

En cas de mort d’un Frère de la Loge, le Vénérable-Maître indiquera une assemblée particulière,dans laquelle il rendra compte des qualités du défunt, en s’étendant surtout sur celles qui constituentle bon Maçon. Il ne taira pas même ses défauts, mais il n’en parlera que pour en gémir, et avec tout leménagement possible, et saisira cette occasion pour exciter les Frères à la pratique de la vertu, quiseule survit au Maçon. Tous les Frères de la Loge seront invités à ce service maçonnique, et aurontun crêpe autour du bras gauche. La Loge sera tendue en noir.

Dans toutes les occasions où un Frère sera réjoui ou affligé par quelqu’ événement heureux oumalheureux, la Loge lui députera quelques Frères pour lui témoigner l’intérêt qu’elle y prend.

Si un Frère se marie, la Loge lui enverra par une députation un bouquet et une pièce de ruban bleu,avec une paire de gants blancs pour la nouvelle mariée. Lui-même recevra une paire de gants blancs,la première fois qu’il viendra en Loge. C’est le seul cas, hors les réceptions, où la Loge donne desgants à un Frère.

FINPermalink: https://willermoz.com/2012/11/07/code-maconnique-des-loges-reunies-et-rectifiees-de-france/

#3

Lettre à un profane par Jean Baptiste Willermoz | Le Régime Ecossais Rectifié

LETTRE A UN PROFANE PAR J BAPTISTE WILLERMOZ (Conforme à l´original de labibliothèque municipale de Lyon) Monsieur,

Vous m’avez confié le désir que vous aviez d’être reçu Maçon dans le Régime particulier que suitla Loge à laquelle MM. de S… sont attachés; le temps ne me permit pas pour lors de vous proposerquelques réflexions et observations préliminaires à cet égard, je les remis donc à un moment plusfavorable, et je saisis celui-ci pour vous les présenter, vous invitant à ne point précipiter votreréponse. Je suis très flatté de la confiance que vous m’avez témoignée pour l’ouverture que vousm’avez faite de votre projet, et j’agirai en tout ce qui s’ ensuivra d’après ce sentiment et l’estimeparticulière que vous m’avez inspirée, ainsi qu’à tous ceux qui ont l’honneur de vous connaître. Je nedoute pas que les motifs qui ont fait naître ce désir dans un homme aussi honnête et aussi réfléchi nesoient très louables, je ne doute pas non plus que la Loge à laquelle vous devrez les faire connaîtrequand il en sera temps ne sache bien les apprécier et ne leur rende toute la justice qui leur sera due.Je me borne donc ici, Monsieur, à vous donner quelque légère idée de l’institut en général, et duRégime particulier auquel vous désirez vous associer. L’origine et le but essentiel de cette institutionsont très anciens et sont fort peu connus, même du plus grand nombre de ceux qui portent le titre deMaçon, parce que le plus grand nombre se contente de l’écorce et fort peu cherchent le noyau. Lesuns ne désirent d’acquérir ce titre que pour se procurer sous son voile quelques amusementsmystérieux et des amis souvent alors aussi peu solides que le goût qui les unit ; d’autres le désirentpour exercer en commun une bienfaisance louable et honorable qui est le but ostensible et général dela Société ; d’autres enfin, qui n’ont pu penser qu’une institution dont l’ origine primitive se perddans la nuit des siècles puisse exister et avoir résisté à tous les chocs sans être soutenue par un butfondamental et essentiel pour les hommes de tout rang, âge et nation, ont pris un essor plus élevé, desorte que pendant que les uns rampent dans le vestibule de l’ Edifice, d’ autres planent sur son toit.

Ces mots d’une portée violente, accusatrice, se voulaient témoigner par des constatsrévélateurs que notre Fondateur voyait au quotidien autour de lui. Il n’épargnait pas les siens etpointaient du doigt tous les Frères de son temps qui ayant prêté serment sans en soupçonner laportée dans leurs âmes, continuaient de corrompre leur état en y associant celui qui les avaitcréé.

(suite de la lettre) Les écarts des uns dans la société civile ont avili aux yeux du public, souventimprudent et précipité dans ses jugements, la Société la plus respectable, parce qu’il a fait à cetégard comme il fait quelquefois pour ce qui concerne la Religion qu’il confond souvent avec laconduite répréhensible de quelques ministres qu’elle emploie. Mais cette Société ayant en elle uneforce propre, n’a point été et ne peut être par là avilie dans son essence, qui sera toujours très

respectable. De cette diversité de goût, il a dû résulter pendant le cours de la durée de cetteinstitution, et dans son sein même, des Régimes différents, dont les uns, à mesure qu’ils se sont plusrapprochés du but primitif, auront dû avoir des règles plus austères que ceux qui auront préféré d’enrester plus éloignés. Telles que l’on voit par exemple quelques parties de certains ordres religieuxqui ont établi des réformes particulière et plus sévères. sans cesser cependant d’appartenir à leurordre primitif, mais bien plutôt pour se rapprocher de son primitif. Cet exposé suffira je pense pourvous porter à examiner sérieusement quel est le régime qui conviendrait le mieux à vos vues et à vosgoûts, et je me ferais ensuite un devoir et un plaisir de vous indiquer les portes de celui que vousaurez préféré. Celui auquel je suis attaché (ainsi que MM. de S… à la dénomination particulière deRégime Rectifié. Il n’est pas le plus commode. ni le moins exigeant de tous ; mais s’il exige plus queles autres de ses membres, il leur laisse aussi espérer davantage ; il a ses épines, mais elles nepiquent que ceux qui avec trop de sensualité l’ effleurent [sic], ou qui ont l’impatience de les cueilliravant leur temps. Voici, Monsieur, pour aider à vos réflexions, une définition générale de laMaçonnerie dans le Régime Rectifié, qui est le seul dont je vous parlerai maintenant. La Maçonnerieest une école dans laquelle on éprouve graduellement l’aspirant pour en former un homme moral etvertueux, utile dans toutes les parties de la Société humaine où la divine providence l’a placé, ouvoudrait le placer ; dans laquelle on le forme ainsi sous le voile de divers symboles, emblèmes etallégories propres à exercer son intelligence suivant sa capacité, dont l’ étude est adoucie parquelques amusements de société, honnêtes et décents. qui deviennent intéressants par le sel dumystère qui les accompagne. On le forme ainsi s’il ne l’était déjà, ou on le fortifie dans l’ amourd’une pratique constante des devoirs religieux, moraux et sociaux, afin qu’il acquiert l’habitude decette vertu aimable et douce, qui plaît partout où elle se montre avec ces caractères, mais qui ne peutmériter le nom de vertu qu’ autant qu’elle est fondée sur les bases inébranlables de la religionchrétienne. Ainsi, quoique la société des Maçons ne soit pas une société religieuse car toutecontroverse en matière de religion et de politique est expressément défendue dans toutes sesassemblées, cependant les principes maçonniques qui la dirigent sont intimement liés aux principesfondamentaux de la Religion, sans lesquels nulle société particulière ne peut être essentiellementutile. Ainsi, pendant que le corps entier peut se rendre utile par la bienfaisance à la partie souffrantede l’ humanité, chaque individu qui la compose peut y trouver aussi pour lui-même un avantage réelet inappréciable pour tout le cours de sa vie, et bien au-delà, s’il sait priser le bien que l’institut peutlui faire. Voilà, Monsieur, une légère esquisse de la Maçonnerie en général. Je me fais un plaisir devous la présenter telle que je la connais, je souhaite qu’elle vous soit agréable. Nous ne proposons àpersonne de se faire recevoir parmi nous, et en cela nous différons beaucoup des autres, mais nousdevons quelques conseils et éclaircissements à celui qui se présente de sa propre volonté. Nousdevons lui faire entrevoir que la démarche qu’il se propose de faire est beaucoup plus importante queplusieurs ne le pensent, afin qu’il puisse réfléchir mûrement avant de demander sa réception. Il y alieu de croire que si partout et en tout temps on eût agi de même, on n´aurait pas eu besoin de

réforme, et la société aurait eu dans son sein moins de membres qui la déshonorent. Cependantmalgré ces précautions il y a peu de loges, dans tout régime indifféremment, qui puissent se féliciter ,au même degré de tous les membres qu’elles reçoivent ; mais, Monsieur, ce que les forces réunies dela Religion ne peuvent faire sur certains hommes, doit-on se le promettre de celles moins puissantesd’ un institut particulier ? Un nouveau reçu doit donc tirer le rideau de la charité fraternelle sur lesdéfauts de ceux-là, et chercher vers d’autres ses modèles, car je puis vous dire avec vérité que ceux-là restent fort longtemps, si ce n’est pas toute leur vie, dans le vestibule, quoiqu’ils soientquelquefois fort avancés en grades ou en dignité dans l’institut. Si après cet exposé vous persistez,Monsieur, dans le dessein que vous m’avez annoncé, je dois vous faire remarquer qu’il n’y a nullenécessité pour un homme de se faire recevoir Maçon, mais qu’il est de la plus grande importancepour un homme marié de ne faire aucune démarche essentielle qui puisse altérer le moins du mondel’union dans sa maison. Bien des femmes ont un préjugé contre la Maçonnerie ; tout injuste qu’il est,un homme sage ne doit pas le heurter de front. Parmi les femmes qui chérissent leur époux, il y en aqui regardent comme un temps enlevé aux douceurs de leur union celui que le mari destine à uneassociation étrangère ; elles craignent quelquefois que ce qui est un bien apparent ou ne présentequ’un amusement honnête ne devienne une cause de dissipation nuisible de manière ou d’autre au biencommun de la maison. J’ ose vous assurer que ces craintes sont sans fondement, mais on doit lesexcuser chez celles qui sont lespremières victimes de leurs préjugés, et on doit agir à leur égard avectoute la prudence que suggère l’amitié. L’homme honnête qui s’est choisi une compagne doit luirendre autant qu’il peut la vie douce, et ne la pas semer sans une nécessité absolue d’aucuneamertume ; le bonheur n’existe que là où on le procure à tout ce qui nous environne. Le vrai Maçondoit être fidèle sujet, bon mari, bon père, bon ami, enfin il doit être tout ce que lui inspire l’amour dela vertu et de ses devoirs : voilà ses caractères essentiels. S’il ne les a pas, ou s’il ne les acquiertpas, il court grand risque de déshonorer la société en se déshonorant lui-même. Vous avez, Monsieur,le bonheur d’être uni à une épouse aussi respectable qu’elle est aimable, et je crois qu’avant deprendre aucun engagement à cet égard, il vous serait prudent de vous assurer de ses dispositions là-dessus. Si elle y répugne, suspendez vos résolutions, et attendez un temps plus convenable. Necherchez point à arracher un consentement qui ne pourrait tranquilliser une âme honnête qu’autantqu’il serait accordé par l’amitié, et dirigé par la confiance. Lorsque vous aurez été reçu dans lasociété, redoublez s’il se peut d’attachement, de soins et de vertus ; vous lui prouverez alors que lasociété est utile de plus d’une manière, et que son consentement vous a été profitable. Si au contraire,comme je le pense d’après les idées que j’ai conçues de sa manière de penser et de son caractère, quime paraît la mettre au-dessus des préjugés de cette nature, Madame votre épouse n’est point contraireà votre désir, vous pouvez me communiquer le résultat de vos propres réflexions, j’attendrai d’enêtre instruit pour proposer les scrutins d’usage en pareil cas.

Je vous prie, Monsieur, de ne pas donner de publicité à cette lettre qu’une estime particulière adictée, de peur que si elle venait à la connaissance de quelque Maçon, elle ne blessât, contre mon

intention, ceux qui pourraient se reconnaître à certains portraits.Permalink: https://willermoz.com/2012/11/07/lettre-a-un-profane-par-jean-baptiste-willermoz/

#4

CODE DES CBCS | Le Régime Ecossais Rectifié

Titre I er

Des différentes classes de l’Ordreet des qualités requisespour y être reçu DIFFÉRENTES CLASSES DE L’ORDRE L’Ordre des Chevaliers bienfaisants de la C. S. ramené par la réforme à son but primitif, qui n’est

autre que le soulagement de l’humanité, au service de laquelle il est voué, s’occupe de tous lesmoyens propres à y atteindre, discute les idées utiles, et se sert de la réunion des forces individuellespour les réaliser et les exécuter avec plus de facilité. On n’a donc pas cru devoir astreindre lesChevaliers à des obligations uniformes et souvent incompatibles avec l’état qu’ils ont choisi dans lasociété civile, mais comme jadis une partie de la milice du Temple combattait sur les grands cheminsles ennemis des Chrétiens, tandis qu’une autre recevait les pèlerins dans leurs hospices, et y joignaitles pauvres et les blessés, on reconnaît de même aujourd’hui trois classes de Chevaliers, celles desChevaliers Réguliers ou Clerici, des Chevaliers Militaires, Milites, et des Chevaliers Civils ouEquites Cives Sanctae Civitatis.

Les Chevaliers d’une Préfecture sont distribués et divisés de deux manières, par Commanderiesselon leur domicile et par Classes selon leur condition civile. Chaque Classe dans une Préfecture aun Inspecteur, qui la préside lorsqu’elle est appelée à délibérer sur des objets relatifs à ses fonctionsou obligations.

Les Chevaliers réguliers, c’est-à-dire, ceux qui ont reçu les Ordres Sacrés d’une communionChrétienne, recommandent en particulier l’amour des bonnes mœurs et d’une religion douce,bienfaisante et tolérante, remplissent les fonctions ecclésiastiques, dans les cérémonies de l’Ordre, etveillent à l’observation du culte divin et d’une sainte discipline dans les asiles, hôpitaux d’orphelinset d’autres hospices fondés par l’Ordre.

Les Chevaliers Militaires, parmi lesquels on ne comprend en France, que ceux qui sont en activitéde service, ou qui se sont retirés avec la croix, ou après avoir servi 20 ans, se dévouent par denouveaux serments à la défense de leur patrie et promettent de se rappeler au milieu des horreurs dela guerre, des lois saintes de l’humanité et de la générosité envers les vaincus, les mourants et lesprisonniers.

On comprend parmi les Chevaliers civils, tous les Frères nobles ou non, qui n’ont pas servipendant l’espace de temps prescrit et qui ont un état honorable dans la société, tel qu’il est défini ci-après. Les Magistrats et gens de Loi font vœu de défendre le faible et l’opprimé ; les Médecinsd’assister gratuitement les pauvres de leurs conseils, les gens de Lettres de vouer leurs veilles à desouvrages, qui étendent l’empire de la vertu et de la vérité ; les négociants d’entretenir la circulationdes besoins mutuels et de procurer du travail et du pain à des citoyens pauvres et honnêtes ; lesagriculteurs, gens de finances et autres bourgeois honnêtes, placés dans un état moins assujettissant àdes devoirs civils, sont d’autant plus à même de vouer leurs loisirs au bien de l’humanité ; tous engénéral secondent les vues bienfaisantes de l’Ordre.

ARTICLE II

DES QUALITÉS REQUISES POUR ÊTRE REÇU

L’Ordre des Chevaliers bienfaisants de la C. S. fondé par des gentilshommes, n’admettait dans son

sein que ceux, qui prouvaient par titres authentiques et d’après les formalités requises, qu’ils étaientnés de parents nobles de nom et d’armes.

Cet ancien statut fondé sur la constitution féodale de l’Europe et militaire de notre ordre, tenantplus de la vanité que de la justice, on a cru, que dirigé aujourd’hui vers l’exercice seul des vertussociales et patriotiques, mixte d’ailleurs dans sa composition, on ne pouvait sans injustice en excluredes candidats utiles, remplis de talents et de zèle pour le bien public, mais moins favorisés par lehasard de la naissance.

Considérant donc que la vraie noblesse consiste dans la vertu, et que celui, qui arrache son nom à

l’obscurité par des actions généreuses, est digne des honneurs qui ne doivent en être que la suite, on aarrêté ce qui suit :

Nul ne sera admis dans l’Ordre qu’il n’ait fait preuve de noblesse. Ces preuves consisteront, oudans des titres d’une noblesse héréditaire, ou dans ceux d’une noblesse personnelle.

Les preuves d’une noblesse personnelle, seront ou l’exercice d’un emploi qui donne la noblesse,ou des actions vertueuses et non suspectes, qui seront consignées par des informations préliminairesfaites par le Prieur du Clergé et l’inspecteur des novices.

Quels que soient les titres de noblesse que produit un candidat, si dégénérant de ses ancêtres, il ensouille la tige respectable par des actions déshonorantes, il sera rejeté et ne sera reçu, que lorsquepar des mœurs pures et la vraie noblesse du cœur, il répondra à l’attente de la patrie.

Ne seront point admis dans la classe des Chevaliers, ceux, qui ne jouissent pas dans la sociétécivile d’une existence qui rapproche les individus, comme Nobles, Ecclésiastiques, Militaires,Magistrats, Médecins, Avocats, Négociants, Bourgeois aisés ou classés honorablement dans lafinance, et enfin tous ceux qui ne feront pas rougir l’Ordre de leur admission ; disposition dontl’application sera laissée à la prudence des Chapitres. Cette partie des informations, qui doiventessentiellement précéder toute inscription de candidats au noviciat, dépend de l’inspecteur desnovices, qui examine les titres de noblesse héréditaire ou morale, en fait l’exposé au Chapitre etexpédie au Commandeur de maison son consentement pour recevoir le candidat écuyer. C’est leprésident du Chapitre qui lui donne, lors de la cérémonie de son armement, le nom d’Ordre.

Tous les Chevaliers, qui ont été une fois admis à la profession de leurs vœux, sont parfaitementégaux. Ni une naissance plus illustre, ni un rang plus élevé dans la société civile, ne donnent lamoindre prérogative réelle aux Frères. Les Princes mêmes, qui veulent renoncer volontairement auxprestiges de la vanité et à l’inégalité politique des hommes, pour goûter des plaisirs purs dans le seinde l’amitié et de la bienfaisance, respecteront la loi précieuse de l’égalité, base fondamentale de toutOrdre, dont les membres se consacrent à l’exercice pénible, mais satisfaisant de la charité chrétienne.La seule prérogative due à leur naissance et aux moyens plus efficaces que la Providence leur adépartis pour se rendre utiles à l’humanité, est celle que le Chapitre provincial ou celui de laPréfecture à laquelle ils sont attachés, leur présente tout de suite après la réception un brevet deconseiller d’honneur de la province ou de la Préfecture, et le pas sur tous les simples Chevaliers.

C’est le Prieur du clergé qui est chargé des informations sur les qualités morales du Candidat ; ilfait les enquêtes les plus sévères pour s’assurer de ses principes religieux, de ses mœurs et de soncaractère. Il s’informera, s’il respecte la religion, base du bonheur public, s’il n’attaque jamais lesprincipes et surtout les sentiments religieux par des sarcasmes, et s’il est pénétré de cette tolérancedouce et éclairée, de cette charité fraternelle, que la loi chrétienne prescrit.

Quant aux mœurs, il écartera ces égoïstes décidés, qui ne vivent que pour eux et sacrifient à leurrepos et à leurs fantaisies, le bonheur de leur prochain. Il fermera l’entrée du Temple à ceux, qui ontmanqué aux lois de la probité et de l’honneur, qui sont connus publiquement pour avoir failli desatisfaire à leurs engagements, qui mènent une vie débauchée et crapuleuse, et se déshonorent par telautre vice majeur, qui donne scandale public.

Quant au caractère, il s’informera exactement, si le candidat proposé est bienfaisant, humain,sensible, si une avarice sordide ne le rend pas inhabile à goûter la volupté pure attachée aux bonnesactions ; et comme enfin l’intérêt de l’Ordre exige qu’on dérobe la connaissance de notrerétablissement et de nos opérations jusqu’au moment que nous aurons acquis par nos bienfaits et nostravaux des droits à l’estime publique et à une existence légale, pour que l’envie, le fanatisme et lamanie malheureuse de jeter du ridicule ou du découragement sur les projets utiles, ne s’opposent ànos progrès, on s’informera avec soin, si les candidats proposés sont discrets et susceptibles d’unzèle soutenu.

Les Chevaliers doivent être les arbitres de leur sort à avoir par cette raison atteint l’âge demajorité ou de 25 ans en entrant au Noviciat. Ils doivent jouir d’un revenu honnête et assuré, pour nepas tomber à la charge, au désaveu, ou au déshonneur de l’Ordre. Si le candidat n’a pas encore atteintson âge de majorité, il doit obtenir dispense d’âge du Chapitre, dont les suffrages doivent êtreunanimes sur ce point, et payer pour cette faveur un droit de passage applicable à l’hospice qui serafixé par le Chapitre.

Le Noviciat est d’un an ordinairement. Celui qui pendant son année d’épreuve, n’aura pas étéréglé en ses mœurs et conduite, sera tenu de continuer une seconde année, même une troisième, et sisa conduite ne devient pas plus régulière, il ne sera jamais armé Chevalier. Si l’Écuyer demandaitdispense d’intervalle à telles fins d’être armé Chevalier, avant l’année révolue de son Noviciat, ildoit obtenir pareillement pour cette faveur le Consentement unanime du Chapitre.

On ne pourra recevoir Écuyer un candidat d’une autre Province ou Préfecture sans le consentementformel de ses Supérieurs naturels. L’inspecteur des novices s’adressera à cet effet à eux, et pourratout au plus rendre un compte favorable de ses vie et mœurs, s’il a demeuré pendant un certain tempsdans le ressort de la Préfecture ou il demande le Noviciat.

L’Inspecteur des novices de la Préfecture du lieu de naissance du candidat, ou si elle n’est pas enactivité, le Visiteur général de la province ou du Prieuré, auquel on s’adresse en ce cas, commencentl’information d’état et de vie et mœurs, et si elleest favorable et que le Chapitre y consente, onenvoie au Chancelier de la Province ou à celui de la Préfecture où l’on veut recevoir, un acte qui luidonne facultatem inscribendi vel induendi selon la demande. Le Chapitre qui reçoit, prélève surchacune des deux réceptions de l’intérieur un quart pour frais de réception et renvoie le surplus de lataxe au Chapitre préfectoral du lieu de naissance du candidat, à moins que celui-ci ne soit établi dansce dernier lieu et y fasse élection permanente de domicile, dans lequel cas il n’y a pas de permissionà demander.

Ne seront pas compris dans la classe de ceux, qui élisent leur domicile, les Militaires qui sont engarnison dans une ville, qu’on renverra au lieu de leur naissance ou de leur domicile ordinaire.

Tout candidat enfin reçu dans la Fraternité intime des Chevaliers bienfaisants, doit recueillir lessuffrages unanimes pour son admission, qui seront donnés par la voie du scrutin avec des ballotesblanches et noires. La première proposition faite par un Frère sera simplement consignée sur lesregistres, et quand il s’agira de passer au scrutin, le Préfet sera obligé de demander le consentementdes Commanderies du district, porté au Chapitre par les Commandeurs respectifs. S’il y a deux ballesnoires, le scrutin est rompu et on ne peut proposer le candidat qu’après trois mois révolus. Si lesFrères, qui ont été contraires, ont eu de bons motifs et qu’ils veuillent les déclarer en plein Chapitre,on prend acte de leur dire et l’on ne peut alors jamais recevoir le candidat, à moins que ceux-cin’aient donné par écrit le désistement de leur opposition, pour qu’on ne profite pas de leur absence,pour proposer un candidat, qui leur serait désagréable.

S’il n’y a qu’une balle noire contraire à la réception, le Maître des cérémonies, qui recueille le

scrutin, le déclare à haute voix, et invite l’opposant à exposer les motifs dans un billet anonyme qu’ilenverra au conseil privé, qui examinera leur validité dans la huitaine : le Frère opposant sera obligéde se soumettre à la décision et de consentir à la réception du candidat, si les raisons de refus sontdéclarées insuffisantes.

ARTICLE III

DES COMPAGNONS D’ARMES

Outre les Chevaliers qui ont le premier rang dans l’Ordre, et peuvent seuls parvenir aux

Commanderies et dignités, on recevra encore conformément à l’ancienne règle et observance desCompagnons d’armes ou Armigeri qui ne doivent pas être de condition servile, mais nés de parentslibres, exerçant une profession honnête dans la Société et jouissant de la réputation d’une probitéintacte. Ces compagnons d’armes feront le service intérieur du temple et quelques-uns seront adjointsaux Officiers pour les soulager dans les fonctions pénibles de leurs charges. On choisit parmi eux : leDator pannorum, ou Maître de la garde-robe, et le. Minister respionsionum, chargé de faire rentrerles fonds, subordonnés aux Trésorier et Procureur, ainsi que les Secrétaires adjoints au Secrétaireprincipal du Chapitre. Ils n’assistent aux Chapitres de conférence que quand ils y sont appelés, pourêtre consultés sur les détails de fonctions, qui leur sont attribuées ou pour les remplir.

Le Chapitre pourra quelquefois, au bout d’un service long et distingué, recevoir un compagnond’armes Chevalier de Grâce ; mais il faut que tous les Capitulaires y consentent; ils recevront alors,outre le nom d’Ordre, qu’on leur donne lors de leur réception, un sceau avec la devise, les éperons etle manteau. Les Compagnons d’armes sont admis en plein à la participation du Secret de l’Ordre, etreçus d’après un formulaire prescrit et celui de l’armement des Chevaliers.

Les Compagnons d’Armes sont choisis, parmi les Frères à talent des Loges, dont la discrétion estéprouvée, et qui peuvent devenir utiles à l’Ordre et retirer des appointements et gratifications àmesure qu’ils rendront des services. Les dignités de Porte-Bannière et de Porte-Glaive doivent êtreconférées à des gens de confiance, qui aient servi dans les Troupes au moins pendant 6 ans. Ilsdoivent être tous Maçons et parvenus au grade de Maître. On les fera assister à une Loge d’Écossaisoù ils prêteront l’obligation de discrétion, après quoi ils seront reçus tout de suite Compagnonsd’Armes. On nomme un ou plusieurs Frères, pour s’informer de leur vie et mœurs, et les Compagnonsd’armes sont ouis sur le camarade qu’on veut leur associer, et admis au ballottage avec les autresChevaliers.

On ne recevra plus dans l’Ordre comme par le passé des valets d’armes, le Convent ayant trouvé

qu’il était inutile et dangereux même de confier lesecret de notre existence, qu’il nous est importantde cacher encore à des gens de conditions serviles, qui n’ont pas toujours cette faculté et cette probitérequise pour résister aux tentations qu’on pourrait leur faire, pour livrer nos secrets. On pourra toutau plus employer un ou deux valets dans l’enceinte extérieure et confier tout le service intérieur auxArmigeri. Dans ce cas les premiers seront aux ordres du Maître des Cérémonies, qui leur assigneraleur poste.

On ne recevra plus dans l’Ordre dorénavant des sujets dans cette classe intermédiaire appelésfaussement Écuyers, ce qui a ouvert la porte au mécontentement, à la jalousie et à des distinctionsarbitraires nées d’une interprétation plus ou moins forcée d’une Loi, vicieuse, dans la constitutionactuelle de l’Ordre, qui ne tend qu’à la bienfaisance et à l’étude de la vérité. En rappelant lasignification d’Écuyer à la véritable origine, qui était celle du Noviciat et de la pépinière desChevaliers, on donne cette qualification à ceux qui sont dans leur année d’épreuve pour être reçusChevaliers. Cette classe de membres de l’Ordre, inconnue jadis, où l’on ne trouve que les Equites etfratres fervientes, famuli ou armigeri, qui ne possédaient point de Commanderies, reste doncsupprimé et celle de Compagnons d’Armes, que nous lui substituons, tracera mieux les limites de laséparation et entraînera moins d’abus et de plaintes.

Titre 2

Des devoirs des frères

Les devoirs principaux des Chevaliers de la C. S. sont d’exercer les lois douces de la

Bienfaisance envers tous les hommes et principalement envers les Frères, d’obéir à leurs Supérieurs,et de remplir avec zèle et exactitude les obligations de citoyens et autres, qui leur sont imposé parleur situation respective.

Tous les Frères de la C. S. doivent respect et obéissance à leurs Supérieurs, légitimes, au Grand-Maître, Grand Prieur, Visiteur général, Préfet, Inspecteur de leur classe, Commandeur de leurdistrict, et autres officiers dans les affaires relatives à leur département. Cette obéissance cependant,qui est d’essence dans tout Ordre régulier qui vivait anciennement en commun, doit être raisonnable,et n’est demandée que sur des choses justes et honnêtes, conforme aux Statuts, et point contraire auxloi de la patrie, ou aux obligations civiles de chacun.

L’Hospitalité est la vertu principale des Chevaliers, ils doivent l’exercer entre eux, d’une manièrefranche, simple et qui ne soit point onéreuse ; on témoignera surtout aux étrangers toutes lesprévenances et on leur rendra tous les services capables de rendre leur voyage utile et agréable.

Chaque Préfecture fera des lois particulières pour bannir du réfectoire de l’Ordre, le luxe et lesprogrès d’une somptuosité contraire à la simplicité respectable qui doit le caractériser. On aconservé principalement de l’ancienne règle de Saint Bernard le titre : ut decimus panis pauperibusdetur, qui est de stricte observance pour tous les Chevaliers et Commandeurs, et à l’exécution duquell’Eléémosinaire doit veiller particulièrement.

La loi du Silence et de la discrétion la plus absolue est fondamentale dans l’Ordre ; il est défenduà tout Frère en telle dignité qu’il doit ou qu’il soit constitué, de révéler la moindre chose quiconcerne notre constitution, ou ce qui se passe dans nos assemblées directement ou indirectement.Ceux qui seront convaincus d’avoir dérogé à cette loi, seront déclarés incapables de posséder aucunedignité ou charge dans l’Ordre, et condamnés à des amendes, selon la gravité du cas.

L’exercice inviolable des lois sociales et des vertus patriotiques étant la base et le garant de laprospérité de notre Ordre, celui qui serait parjure à sa patrie, qui troublerait le peuple et luicauserait du dommage, sera jugé par son Chapitre ; son procès lui sera fait sans indulgence, et sonjugement sera envoyé dans toutes les provinces.

La pureté des mœurs peut seule préserver notre Ordre de la corruption et de la décadence, où sonttombées la plupart des institutions humaines. Fondé sur l’amour de la religion, des mœurs et d’unebienfaisance épurée par les motifs raisonnés qui la dictent, l’Ordre ne peut conserver dans son seindes Gens qui le déshonoreraient par des actions malhonnêtes. Le Conseil privé, dont on parlera plusbas, et principalement le Prieur du clergé veillent à la conservation des mœurs et requièrent d’officecontre tous ceux, qui donnent du scandale et compromettent l’Ordre par leurs principes ou leursactions.

Tout Chevalier est en droit d’avertir le Prieur ecclésiastique, soit ouvertement, soit par billets nonsignés, des désordres commis par un Frère. Celui-là doit chercher avant tout de le ramener par desmonitions fraternelles. Si elles ne réussissent pas, il en rend compte au conseil privé, qui examine ladénonciation, vérifie les faits dans le plus grand silence et conclut, soit à ce que la procéduredemeure supprimée, soit à faire avertir une seconde fois le Chevalier accusé de changer de conduite,soit enfin, si le cas est plus grave, d’ordonner la communication du réquisitoire au Chapitre entier,qui seul peut de l’avis des Chevaliers prononcer l’interdiction ou l’exclusion d’un Chevalier. Elledoit cependant le faire sans éclat. Le Prieur ecclésiastique fait cacheter le réquisitoire avec toutes lespièces, la procédure et le procès-verbal du prononcé, et le dépose aux archives dans un carton ouliasse particulière.

La Concorde intime qui doit régner entre les Frères pouvantêtre troublée par des motifs d’intérêt,ou par la malignité des gensqui se plaisent à semer la haine, on a cru nécessaire d’établir un conseilparticulier d’arbitres ou de juges de paix destinés à réconcilier des Frères, que souvent malentendurefroidit ou aigrit, et à employer tous les efforts pour concilier les procès civils des Frères, afind’obvier, s’il est possible, à la ruine qu’entraîne souvent la rapacité des suppôts de la justice. Cecomité de conciliation a non seulement lieu dans les Préfectures, mais aussi dans les Commanderies.

Deux Frères, qui sont en discussion ou en dispute, nomment chacun un arbitre et adjoignent à leursarbitres un troisième, qui conviendra aux deux parties, avant de tenir comité, les arbitres prononcentle serment suivant :

« Moi, Chevalier de la C. S., je jure et promets de ne jamais parler hors de cette assemblée,d’aucun des objets qui y seront traités, et de donner mon avis en mon âme et conscience et selon meslumières sans acceptation de personne, ainsi Dieu me soit en aide. » Lorsque la sentence du comitéde conciliation sera signifiée aux parties et qu’elles y acquiesceront on en fera mention au Chapitresuivant et on applaudira à la condescendance des parties aux vœux de l’Ordre, qui sont de diminuerles malentendus qui divisent les hommes et de tout tenter pour les rapprocher.

Par une suite de ce principe de bienveillance sociale universelle, tout Chevalier bienfaisant seregardera comme un juge de paix et emploiera tous ses soins à éteindre les haines, les procès et lesdivisions par de bons conseils et toutes les ressources honnêtes, que son cœur et la confiance qu’ilaura méritée par ses vertus, lui dicteront.

Tout Frère, qui plaidera contre un autre Frère devant les tribunaux ordinaires de la justice, sansavoir tenté la voie de la justice arbitraire de l’Ordre, sera regardé comme réfractaire au vœu deconcorde juré par tous les Chevaliers, condamné à une amende de 5 Louis au profit des pauvres etinterdit pendant 6 mois.

Pour ce qui regarde enfin la décence et le respect dû à nos augustes assemblées, le Préfet veilleraprincipalement à leur conservation. Il est défendu aux Frères de troubler l’ordre des conférences etdes cérémonies, soit en quittant leur place, soit en parlant hors de leur tour sans demander lapermission. Cette dernière formalité ne doit pas être regardée comme monastique, mais comme unmoyen inévitable d’empêcher que les délibérations ne soient tumultueuses et infructueuses ; nousordonnons surtout qu’on sévisse contre ceux des Frères, qui pourraient s’oublier au point de dire desinjures ou d’insulter du geste ou de fait un Frère, voulant que le délinquant soit tenu de demanderexcuse publiquement à celui qu’il aura offensé, et condamné à de grosses amendes, et même selon lagravité du cas, privé de l’habit pour quelques mois ou pour toujours.

Titre 3

Composition de l’Ordre en général

L’Ordre des Chevaliers bienfaisants de la C. S. est divisé en 9 provinces : Aragon, Auvergne,

Occitanie, Léon, Bourgogne, Grande Bretagne, Allemagne inférieure entre l’Elbe et l’Oder, hauteAllemagne et Italie, Grèce et Archipel.

Les Armes de l’Ordre sont deux cavaliers sur un même cheval dans un écusson écartelé de lacroix de l’Ordre.

Chaque Province a dans ses armes un caractère distinctif et chacun des Maîtres provinciauxpossède une des grandes charges de l’Ordre.

L’Aragon, dont le Provincial est grand Chancelier, et au nom duquel la convocation des conventsgénéraux doit se faire, a pour armes un anneau d’or ayant au dehors la forme d’une couronne delauriers, au milieu duquel en champs de gueules est écrit en lettres très hébraïques : in virtute tua.

Le Maître provincial d’Auvergne était grand Maréchal de la cavalerie ; les armes de la Provincesont un cavalier cuirassé portant une lance élevée en champs de gueules, avec l’inscription : quicupit.

Celui d’Occitanie Grand Amiral, galère d’argent en champs de gueules avec l’inscription :prospero motu.

Léon, dont le Provincial est Grand Doyen de l’Ordre, a pour armes un lion d’argent en champ degueules avec l’inscription : Audaces juvat.

La Bourgogne a pour ses armes une tête de mort d’argent en champs de gueules avec l’inscription :Mors omnia aequat ; son Maître Provincial est grand Trésorier de l’Ordre.

La Bretagne a pour ses armes un ancre d’or en champs de gueules, avec l’inscription : Fata viaminveniunt. Son Maître Provincial est Grand Commandeur de l’Ordre.

L’Allemagne inférieure ou la province entre l’Elbe et l’Oder a pour armes un bras armé tenant unglaive nu et sortant d’un nuageen champ de gueules. Une étiquette d’azur contient 3 lettresinitiales L.V. C. labor viris convenit ; Son Maître Provincial est visiteur général de l’Ordre.

La haute Allemagne a pour armes un acacia sous lequel on voit en champ d’azur une lance d’or, etau-dessous une étiquette d’argent avec lettres gothiques : U. U. U. Ultorem Ulciscitur Ultor. Son

Maître provincial est Proviseur général de l’Ordre.La neuvième province a pour armes un lion rouge, appuyé sur une croix noire en champ d’or avec

l’inscription veritas persuadet. Son Maître provincial est Inspecteur général des troupes.De ces neuf provinces, il n’y a que les trois provinces françaises, les deux allemandes et l’Italie

qui soient en activité légale. Si une des autres pouvait être rétablie, ou qu’on voulut en créer denouvelles, les Frères chargés de cette commission importante, doivent y être autorisés par un Conventgénéral, ou à son défaut par les autres provinces, et la restauration doit être motivée et notifiéelégalement à tous les Chapitres provinciaux pour être par eux la notification envoyée à toutes lesPréfectures régulières du Saint Ordre.

Quant aux fonctions qui pourraient compéter aux Maîtres provinciaux en vertu de leurs grandescharges, elles seront réglées dans un convent général, et jusque-là aucun des dits Maîtres, ne pourras’immiscer sous prétexte de sa grande charge, dans le gouvernement d’une province autre que lasienne.

Celle de ces Provinces dont le ressort est réuni en entier, ou pour la plupart sous une même

domination, forment un corps national pour modifier les lois générales de l’Ordre d’après celles dela patrie, dont la stricte observance est le premier devoir des Chevaliers Bienfaisants ; ce qui formela division de l’Ordre, en nations et en langues. C’est ainsi que les Provinces d’Auvergne,d’Occitanie et de Bourgogne forment la nation, ou la langue française.

Les Provinces réformées d’après le nouveau rite, sont divisées en Grands Prieurés. La nouvellematricule des trois provinces françaises en établit trois par province. Il suffit cependant qu’il y en aitdeux de restaurées par province, pour que celle-ci puisse être en activité légale.

Chaque Prieuré est divisé en Préfectures, la matricule en désigne six par ressort de chaque Prieuré; il suffit cependant qu’il y en ait deux d’établies pour tenir Chapitre prieural. Si des Établissementsnombreux excédant neuf Commanderies par Préfectures, forçaient de créer de nouvelles Préfecturesdans le ressort d’un Prieuré, le Chapitre provincial, juge de tous les changements qu’on veut fairedans la matricule, pourra en augmenter le nombre par Prieurés jusqu’à neuf, après quoi ondemanderait au Chapitre général ou à son défaut au Chapitre national la création d’un nouveauPrieuré.

Chaque Préfecture est composée de neuf commanderies, il suffit cependant que trois d’elles soienten activité pour que la Préfecture puisse opérer légalement.

Les Loges maçonniques, sont le séminaire des sujets destinés au Saint Ordre, et sont mises sousl’autorité d’un Commandeur, qui en est le Chef titulaire et inamovible.

Titre 4

Gouvernement général de l’Ordre

ARTICLE 1

NATURE DU GOUVERNEMENT

Le Gouvernement de l’Ordre est aristocratique, les Chefs ne sont que les Présidents des Chapitres

respectifs. Le grand Maître général ne peut rien entreprendre sans les avis des Provinciaux, le Maîtreprovincial sans celui des Prieurs et des Préfets, les Préfets sans celui desCommandeurs, et ceux-cisans en avoir conféré avec les Chevaliers de leur district. Tous les Présidents d’assemblées Maîtres

provinciaux, grands Prieurs et Préfets ont toujours le droit, après l’exposé de la matière fait par leChancelier, la première voix consultative et la dernière délibérative.

Dans toutes les assemblées quelconques de l’Ordre, la pluralité des suffrages l’emporte, et lesdécisions ainsi portées doivent être exécutées sur le champ provisoirement, malgré protestations ouappellations quelconques. Cette loi de la pluralité est sacrée et fondamentale dans l’Ordre, ainsi quetoute société bien ordonnée : elle est le rempart de la liberté et la sauvegarde contre le despotisme.Un Chef ou Président d’une assemblée quelconque, qui voudrait abuser de ses pouvoirs, au point derenverser cette loi fondamentale, est censé parjure à ses obligations, et encourt les punitions les plusgraves de la part de ses supérieurs.

ARTICLE II

CONVENT GENERAL

Le Convent général est l’assemblée des Maîtres Nationaux et Provinciaux, ou d’autres

Représentants des provinces choisis par elles.Il est convoqué par le Maître Provincial d’Aragon, ou à son défaut par un Chancelier nommé ad

hoc par le Grand-Maître général Président du Convent.Il doit être convoqué régulièrement tous les neuf ans et s’il se présente dans l’intervalle des

affaires majeures, le Grand-Maître ne pourra le convoquer que du consentement des deux tiers aumoins des provinces en activité.

Le lieu de l’assemblée sera décidé par la pluralité des suffrages des provinces. Si le Grand-Maître général ne peut s’y trouver, il a le droit d’y envoyer un commissaire, et alors le Convent seraprésidé par le plus ancien grand-Maître national ou provincial selon l’ordre de la matricule.

Les lois promulguées par un Convent général sont obligatoires pour tout l’Ordre, bien entendu quesur tous les points décidés les Maîtres Provinciaux aient reçu les instructions nécessaires de leurscommettants. Pour cette raison les objets à mettre en délibération dans un Convent général doiventêtre envoyés au moins six mois auparavant à tous les Chapitres Provinciaux, afin que ceux-ci aient letemps nécessaire pour en informer les Grands Prieurs et Chapitres Préfectoraux, et s’assurer ainsi duvœu général pour les instructions à donner aux députés de la province.

ARTICLE III

GRAND MAÎTRE GENERAL

Le Grand Maître général est Chef suprême de tout l’Ordre ; il est élu par les seuls Représentants

des provinces parmi ceux, qui sont le plus à même par leur Rang dans la Société civile et leur mérited’illustrer l’Ordre, et de faire le bien général.

Il ne peut rien innover de sa propre autorité dans la constitutionde l’Ordre, exercer aucun pouvoir

arbitraire, ni exiger d’aucun desChevaliers rien qui soit contraire aux règlements et statuts : tous lesChevaliers lui doivent respect et obéissance sous ces réserves.

Les autres prérogatives et droits honorifiques qu’on pourrait accorder aux Grands Maîtresgénéraux, nationaux et provinciaux seront définis et clairement énoncés dans la capitulation que lesélecteurs feront avec eux, lors de leur élévation.

Titre 5

Gouvernement national de l’Ordre

ARTICLE 1

CONVENT NATIONAL

Le Convent national est l’assemblée des Maîtres Provinciaux, Grands-Prieurs, Conseillers,

Préfets et officiers nationaux, présidés par le Grand-Maître national. Comme la tenue régulière desConvents généraux pourrait être sujette à quelque difficulté, le Convent national les supplée etpourvoit aux besoins des établissements de la nation par leurs Représentants réunis.

Le Convent national est convoqué ordinairement tous les six ans sur les ordres du Grand-Maîtrede la nation, par le Chancelier national, qui envoie les billets de convocation à tous les grandsofficiers de l’Ordre et à toutes les Préfectures en activité, en cas de vacances du Magistère Nationalou d’empêchement quelconque, le Maître Provincial d’Auvergne (en France), est en droit d’en fairela convocation. Toutes les fois que des circonstances extraordinaires exigeront pour le bien del’Ordre, la tenue d’un Convent national ; qu’il sera demandé par une des trois provinces de France et

consentie par une autre ; le Convent national sera convoqué extraordinairement par le Grand MaîtreNational et à son défaut par le Maître Provincial ou l’Administrateur de la plus ancienne des deuxprovinces qui l’auront désiré.

Le Convent complet , est composé de 81 personnes, d’après le rang suivant :Le Grand-Maître National …………………………………….. 1Trois Maîtres Provinciaux ……………………………………… 3Neuf Grands-Prieurs ……………………………………………. 9Huit Conseillers d’administration …………………………… 8Trois Visiteurs généraux ……………………………………….. 3Trois Chanceliers des Provinces …………………………….. 3Cinquante quatre Préfets ou Représentantsdes Préfectures …………………………………………………. . 5481 Ces derniers roulent entre eux selon la date de l’érection de leurs Préfectures, sans égard à la

matricule, avec la seule distinction, que les Préfets présents auront rang sur les simplesReprésentants.

Les Maîtres Provinciaux peuvent envoyer un commissaire à leur place, mais les Grands-Prieurs,Visiteurs et Chanceliers ne peuvent être remplacés en cas d’empêchement, que par un Représentantnommé par leur Chapitre respectif.

Tous les Chevaliers qui se trouvent sur les lieux, ont droit d’assister au Convent national, hors del’enceinte des membres capitulaires, en observant le silence et le respect dû à cette augusteassemblée législative de l’Ordre.

Le Convent national doit être annoncé six mois d’avance à toutes les Préfectures par leChancelier, qui les invite dans des lettres de convocation à lui envoyer les demandes qu’ellesdésirent de mettre en délibération, il en rédige un cahier méthodique qui trace l’ordre desconférences capitulaires, et l’envoie trois mois avant la tenue aux Préfectures, pour mettre celles-ci àmême de donner des instructions précises à leurs Représentants. Nul objet ne pouvant être agité dansles Chapitres nationaux, qui n’ait été proposé et communiqué auparavant à toutes les Préfectures.

Le siège du Convent national de France ainsi que du conseil d’administration du SérénissimeGrand-Maître est à Paris; si les circonstances le permettent.

ARTICLE II

GRAND-MAITRE NATIONAL

Le Grand-Maître National est élu au Convent à la pluralité des suffrages par les Maîtres

Provinciaux, Grands Prieurs, Visiteurs et Préfets des provinces réunies, présidées ad hoc par leMaître Provincial d’Auvergne.

Le Grand Maître national expédie dans son conseil les patentes aux Maîtres provinciaux etconseillers nationaux.

Le Grand Maître national proclame et enregistre dans son conseil toutes les Préfectures nouvelles,et y fait inscrire sur le tableau général des Loges régulières du royaume, les Loges constituées par lesDirectoires Écossais.

Le Grand-Maître National étant le Chef de l’Ordre en France, et répondant à l’état de la bonneconduite de tous ses membres ; il reçoit dans son conseil l’obédience de tous les MaîtresProvinciaux, Grands Prieurs et Préfets, (excepté les Chefs et officiers des Prieurés exempts) ; cetteobédience consiste dans la promesse de ne jamais rien entreprendre dans l’Ordre de contraire auxlois du royaume.

Les Grands Prieurs auront soin d’informer le Sérénissime Grand-Maître des nouveauxétablissements et actes de bienfaisance qui se font dans l’étendue de leur ressort, pour que celui-ci,par une suite de la protection signalée qu’il doit par ses vœux à l’Ordre, puisse en faire mention dansl’occasion.

Le Grand Maître National a toujours la voix prépondérante en cas de partage égal d’opinions.

ARTICLE III

CONSEIL D’ADMINISTRATION NATIONALE

Le conseil d’administration nationale ou Grand Directoire Écossais de France est composé de

neuf personnes y compris le Sérénissime Grand-Maître ; les membres de ce conseil, qui exerce dansl’intérieur quelques droits honorifiques et reçoit les appels en dernière instance des Directoires dansles affaires symboliques, sont choisis par le Sérénissime Grand-Maître sur trois sujets présentés parle Convent. Si quelque place vaque dans l’intervalle d’un convent, celui-là peut de l’agrément destrois Maîtres provinciaux nommer un Officier ad interim jusqu’au prochain Convent.

Les Maîtres Provinciaux et Grands Prieurs qui se trouvent sur les lieux, sont membres nés de cetribunal et y prennent rang immédiatement après le Sérénissime Grand-Maître.

On choisira parmi ces conseillers un Chancelier national, qui convoque le Convent sur les ordresdu Sérénissime Grand-Maître ou de son vicaire né, et vise tous actes, patentes, procès verbaux,

expédiés tant au Convent qu’au conseil national, auxquels il met le grand sceau ; il donne la premièrevoix consultative, tant au Convent qu’au conseil immédiatement après le Grand-Maître, et tient lebureau en face du Grand Maître assisté de ses Secrétaires.

Titre 6

Gouvernement provincial

ARTICLE I

DES CHAPITRES PROVINCIAUX

. Le Chapitre provincial est l’assemblée des Représentants de la Province présidé par le Maître

Provincial ; il est composé de 27 personnes s’il est complet, du Provincial, des trois Grands Prieurs,du Visiteur Général, du Chancelier Provincial, des dix-huit Préfets et des trois Visiteurs Prieuraux.

Le Chapitre Provincial se tient tous les trois ans au mois d’Octobre au chef-lieu de la province ; leChancelier expédie les lettres de convocation aux personnes, qui ont droit d’y comparaître.

On ne traite au Chapitre Provincial que les affaires qui regardent toute la province, commechangement de matricules, érection de Préfectures nouvelles, élection ou confirmation d’un officiersupérieur de l’Ordre, appel en dernière instance des Chapitres Prieuraux.

Tous les Chapitres Provinciaux doivent être ouverts et fermés solennellement et en vestition. Siparmi les officiers supérieurs de la Province, Représentants des Préfectures ou Conseillers de laProvince, il se trouve un Chevalier ecclésiastique, il doit y remplir les fonctions de son état, à sondéfaut le Prieur du Clergé de la Préfecture du lieu.

ARTICLE II

DU MAITRE PROVINCIAL.

Le Maître Provincial est Chef et Supérieur de sa province, tous les Chevaliers, lui doivent respectet obéissance, et doivent lors de leur réception la lui prêter entre les mains du Préfet.

Le Maître Provincial ne peut rien exiger d’aucun Frère qui soit au-delà des règlements généraux,ni innover aucune disposition relative à la province, sans le consentement de la majeure partie duChapitre : la loi sacrée de la pluralité étant fondamentale et constitutive dans l’Ordre.

Le Maître Provincial préside au Chapitre provincial, s’il est empêché de s’y trouver il a le droitde nommer un commissaire pour y assister en son nom ; ce commissaire a rang après les Grands-Prieurs présents ; le Maître provincial représente de droit sa province au Convent général, mais aussin’y doit-il voter que d’après les instructions. Les patentes de tous les officiers de la province sontexpédiées en son nom ainsi qu’en celui du Maître national par le Chancelier et contresignées par leVisiteur général de la province et le Prieur du district.

Le Visiteur général de la province doit envoyer tous les ans au Maître provincial l’état de laprovince et des différents établissements qui la composent.

Le Maître Provincial est élu au Chapitre provincial de la manière suivante : les Préfets de chaquePrieuré, après avoir reçu les instructions de leurs commettants, se rassemblent dans une salle et ydonnent leurs suffrages, cacheté au Grand-Prieur qui porte ces sept voix au conclave présidé par leVisiteur général de la province et composé du Chancelier, des Visiteurs prieuraux et des Conseillersd’honneur de la province (s’il y en a). Le Chancelier confond les 21 billets et les ouvre en présencedes Grands-Prieurs, en attendant les Préfets se rendent au grand chœur et y prennent leur place, leconclave s’y rend de son côté, le Visiteur général proclame le nouveau Maître Provincial, et s’il estsur les lieux, en fait tout de suite la cérémonie de son installation, sinon on lui envoie un Chevalierd’honneur, qui lui porte le décret de son élection, et l’engage, s’il est possible, à venir tout de suiteau lieu du Chapitre provincial, pour recevoir l’investiture.

En cas d’absence, d’âge avancé ou d’autres circonstances qui l’exigent, on peut du vivant duMaître Provincial et de son consentement nommer de la même manière un coadjuteur, qui supplée leProvincial en cas d’absence et le remplace un jour de droit.

ARTICLE III

DU VISITEUR GÉNÉRAL DE LA PROVINCE

Le Visiteur de la Province est élu à la pluralité des suffrages du Chapitre provincial parmi les

Préfets ou autres membres capitulaires.Le Visiteur rend compte à chaque Chapitre provincial de l’état des Préfectures, de leurs caisses,

Commanderies, hospices et du nombre des Chevaliers dont il compose la matricule et l’armorialgénéral de la province.

Les fonds de l’Ordre étant destinés pour les pauvres et les frais de visite trop multipliés pouvantoccasionner des abus, on doit choisir le Visiteur de la province parmi les Chevaliers les plus zélés etles plus aisés, qui fasse les visites à ses frais, et il ne pourra se faire rembourser que cellesordonnées spécialement par son Chapitre.

Le Visiteur général de la province lors de sa tournée fera un cahier de l’état de l’Ordre danschaque Préfecture, qui contiendra les noms d’Ordre et du siècle des Préfets, Officiers Commandeurs,Chevaliers et autres membres de l’Ordre ; leurs qualités civiles et d’Ordre, l’état des registres descaisses, les établissements ou actes de bienfaisance, les observations des Préfets et autresSupérieurs, les plaintes des inférieurs.

Le Visiteur général se fera donner par les Doyens, Visiteurs des Préfectures, l’état desCommanderies et par l’Inspecteur des Novices celui des Loges. S’il en a le loisir il visitera lui-même ces établissements, pour s’assurer par ses propres yeux de l’exactitude de leurs rapports.

Si le Visiteur général est empêché de faire ses visites lui-même, il les fera faire par les VisiteursPrieuraux, qui sont ses délégués naturels.

Toutes les Préfectures et Commanderies doivent lors de la tournée du Visiteur général ou desVisiteurs particuliers leur ouvrir leurs registres et comptes, et leur rendre les mêmes honneurs, qu’àleurs Supérieurs. Le Visiteur n’a pas le droit d’innover de sa seule autorité, mais il doit rendrecompte de son inspection aux Chapitres Provinciaux. S’il arrivait cependant que dans le cours d’unede ses visites, le Visiteur général trouvât le Chapitre divisé, et qu’il fût à craindre, que le progrès dudésordre ne fit des ravages trop considérables, le Visiteur général a droit de prononcerprovisoirement et les parties sont obligées de s’en rapporter à son jugement sauf l’appel auxinstances supérieures, qui ne sera cependant pas suspensif.

Les Prieurés ou Préfectures nouvelles, ainsi que les Commanderies dans les districts où l’Ordren’est pas encore en activité, doivent être installés par le Visiteur général ou Prieural à son défaut.

ARTICLE IV

DU CHANCELIER DE LA PROVINCE

Le Chancelier de la Province est élu à la pluralité des suffrages du Chapitre Provincial parmi les

Préfets, Chanceliers ou autres officiers des Préfectures.Sa place est une des plus importantes. Il est l’agent général de la Province ; toute la

correspondance, le résumé des délibérations et la rédaction des matériaux à proposer au Chapitreroulent sur lui.

Il convoque le Chapitre sur les ordres du Provincial, ou à son défaut du premier Grand-Prieur, sonVicaire né, rédige sur les propositions et demandes des Préfectures le cahier de délibérations etl’envoie au moins un mois avant le temps de la tenue à toutes les Préfectures. Il expédie tous lesactes, tient les registres et expose les matières, qu’on veut mettre en délibération.

II expédie au nom du Grand-Maître provincial les brevets et patentes, et en perçoit les rétributionssuivant la taxe pour l’entretien des Secrétaires attachés à la Province, et les autres frais dechancellerie.

Le Chancelier vise et enregistre les pouvoirs des Députés au Chapitre Provincial. Le Maître desCérémonies de la Préfecture du lieu, faisant fonction de Maître des cérémonies de la province, lesplace à leur rang. Le Chancelier est assis aux Chapitres en face du Président, mais il a rangimmédiatement après le Visiteur de la Province et avant les Préfets.

Les Chanceliers Prieuraux, qui se trouvent dans le lieu de la tenue du Chapitre Provincial,prennent séance à côté du Chancelier de la province, et donnent leurs avis et voix consultatives aprèslui.

En cas d’absence ou d’empêchement quelconque du Chancelier Provincial, le Chancelier Prieuralen remplira les fonctions.

ARTICLE V

CONSEILLERS D’HONNEUR

Pour récompenser le zèle de ceux qui ont exercé longtemps des charges importantes dans la

province, le Chapitre Provincial peut les nommer Conseillers d’honneur, et leur accorder séance etvoix consultative. On se servira de préférence des conseillers d’honneur de la province, qui résidentdans le chef-lieu pour composer le conseil d’administration. Les princes étrangers ou grandsseigneurs nationaux, qui désireront appartenir à une de nos provinces, seront attachés par ce titre auChapitre Provincial. Le Maître Provincial expédie les patentes des conseillers d’honneur, et leVisiteur Général y met son visa.

ARTICLE VI

COMITE D’ADMINISTRATION

Pour entretenir l’activité pendant la vacance du Chapitre Provincial, celui-ci créera toutes les fois

avant de se séparer un Comité pour l’expédition des affaires courantes et qui ne souffrent point dedélai, ainsi que pour donner connaissance aux Chanceliers particuliers des Préfectures, de lacorrespondance générale et des affaires, qui regardent toute la province. Le Comité sera établitoujours dans le chef-lieu de la province et jugera provisoirement les cas pressants sauf la ratificationdu Chapitre prochain, auquel il rendra compte de toutes ses opérations. Le Visiteur général et leChancelier de la province sont membres nés du Comité. Le Comité répartit aussi tous les ans les fraisde la régie provinciale à portions égales sur les Préfectures. La Caisse préfectorale du chef-lieu faitles avances, et tous les Trésoriers préfectoraux doivent rembourser sur le champ l’assignation prisesur eux.

Titre 7

Gouvernement prieural

§ 1

Le Chapitre Prieural est l’assemblée des Représentants des Préfectures réunies, sous l’autorité duGrand-Prieur. Quand les six Préfectures sont en activité, il est composé de neuf personnes. Le

Grand-Prieur, les six Préfets, le Visiteur et le Chancelier du Prieuré.

§ 2

Il se tient régulièrement vers Pâques, au chef-lieu du Prieuré.

§ 3

L’avis motivé sur l’érection, ou la translation de nouvelles Préfectures, le jugement des instancesdévolues par l’appel des Chapitre préfectoraux à ce tribunal, ainsi que la constitution de toutes lesLoges symboliques, et la définition de toutes les instances maçonniques, dont on ne peut plusinterjeter appel au Grand Directoire national, appartiennent aux Prieurés, qui prennent pour titreostensible le nom de Directoire Écossais.

§ 4

Le Grand-Prieur est Vicaire né du Maître Provincial dans l’étendue de son ressort. Les Chevaliers

lui doivent en cette qualité respect et obéissance sous les réserves générales.

§ 5

Le Grand-Prieur est élu par les six Préfets et choisi parmi eux, ou d’autres officiers du Prieuré.

L’élection est présidée par le Visiteur général de la Province, commissaire né du ChapitreProvincial, confirmée par le Chapitre et le Maître Provincial, qui lui expédient sa patente, et notifiéeau Grand-Maître national.

§ 6

Le Visiteur du Prieuré représente le Visiteur général dans l’étendue du ressort. Il ne pourra porter

en frais les visites, que lorsqu’elles auront été ordonnées par le Chapitre. Il est élu par le ChapitrePrieural et confirmé par la Chapitre Provincial. Sa patente est expédiée par le Chancelier de laProvince au nom du Maître Provincial, et contresignée par le Visiteur général, qui l’installe.

§ 7

Le Chancelier Prieural est choisi et patenté de la même manière. Il convoque le Chapitre Prieural

dans le courant de janvier, et renvoie au plus tard, au commencement de mars le cahier desdélibérations aux Préfectures de son district. En cas d’absence ou d’empêchement, le Chancelier dela Préfecture le remplace de droit.

§ 8

Les frais de la tenue des Chapitres Provinciaux sont puisés par le Visiteur dans la caisse dans la

caisse préfectorale du chef-lieu, et remboursés à répartition égale par les Préfectures. Les comptesdoivent titre arrêtés au Chapitre avant la clôture.

§ 9

Les patentes que le Grand-Prieuré est dans le cas d’expédier, sont celles de l’érection d’une

nouvelle Préfecture et celle d’une Loge symbolique, sur la demande des Grandes Loges écossaises.La première, vu les frais considérables des nouveaux établissements, se donne gratis, à la réserve de48tt d’expédition pour la copie collationnée des règles, rituels, codes, matricules et noviciat. Lespatentes des Loges nouvellement constituées ou rectifiées sont expédiées à la vérité par le DirectoireÉcossais, mais celui-ci n’étant pas dans le cas d’avoir besoin d’une dotation, en abandonne les droitsde constitution à la Grande Loge Écossaise, en se réservant deux Louis pour frais d’expédition ducode symbolique et des quatre grades maçonniques.

§ 10

A l’instar du Chapitre provincial le Prieural peut nommer des conseillers d’honneur et un Comité

d’expédition avant de se séparer.

Titre 8

Gouvernement préfectoral

CHAPITRE I

DES PRÉFECTURES

ARTICLE I

COMPOSITION DES CHAPITRES PRÉFECTORAUX

§ 1

Une Préfecture est l’assemblée des Commandeurs du district, présidée par le Préfet et dirigée par

les Inspecteurs des Classes, Chancelier et autres officiers ; elle est toujours existante et en activité,tandis que les assemblées des tribunaux supérieurs ne sont pas permanentes.

§ 2

Le Chapitre Préfectoral est composé du Préfet, Doyen, Senior, lier, Trésorier, Eléémosinaire,

Inspecteurs des novices ou écuyers et Maître des Cérémonies. § 3 Le Chapitre Préfectoral est donc composé de dix-huit personnes, s’il est complet. Lors d’une

première formation, s’il n’y a pas encore beaucoup de sujets capables, les Commanderies et chargespeuvent être réunies ; mais lorsque la Préfecture est nombreuse, on évitera de donner deux places àune même personne.

§ 4 Un officier du Chapitre, absent n’a pas droit de se faire représenter par un autre, parce que son

titre est personnel, et ne peut être transféré que du consentement du Chapitre. Mais dans le cas d’unelongue absence le Chapitre pourra nommer un Vicaire aux places, qu’un titulaire ne peut pas exercer

par lui-même. § 5 Seront par cette raison même exceptés de cette loi les Commandeurs qui représentent leurs

districts, auxquels tant la Commanderie que le Commandeur même peuvent substituer un fondé deprocuration tout et quantes fois celui-ci sera empêcher de se rendre en personne en Chapitre et d’yporter les vœux des Chevaliers de son district.

§ 6 Tous les officiers de la Province et du Prieuré, lorsqu’ils assistent aux Chapitres Préfectoraux, y

prennent rang à la droite du Préfet et jouissent de la première voix consultative. § 7 Les objets qu’on traite dans les Chapitres Préfectoraux sont l’administration générale de la

Préfecture, l’établissement des Commanderies et de l’Hospice, l’élection des officiers, l’examen desplans économiques ou de bienfaisance présentés, la réception des nouveauxChevaliers, l’installationdes Loges maçonniques, les comptes des Chargés d’administrations, etc.

§ 8 Les Chapitres Préfectoraux s’assemblent tous les 15 jours et au moins une fois par mois ; et

extraordinairement toutes les fois que le Préfet le juge à propos. § 9 Seront appelés les Chevaliers en Commanderies surtout pour la proposition d’un nouveau

candidat, pour l’élection d’un Préfet et pour l’établissement de l’Hospice préfectoral. Le Préfet peutles convoquer aux autres assemblées s’il le juge à propos, sans qu’ils aient suffrage délibératif ; maisil demandera leur opinion pour éclairer davantage la délibération qu’on agite.

§ 10 Toute affaire jugée majeure à la pluralité des suffrages, ne doit pas être décidée avec

précipitation, mais communiquée aux Commanderies, pour que tous les Chevaliers concourent à la

délibération et s’intéressent d’autant plus vivement au but d’un Ordre, à l’administration duquel ilsparticipent. Les Commandeurs doivent à l’assemblée fixée pour la décision, voter d’après la pluralitédes opinions des Chevaliers de leur district. Les Commanderies qui n’auront pas envoyé leurssuffrages dans le terme prescrit, ne pourront plus revenir contre la délibération.

§ 11 Le Président recueille les suffrages des membres capitulaires, et le Chancelier en prend note et les

compte. Tout, indistinctement doit se décider à la pluralité, à moins que le Chapitre ne décide lui-même, qu’il faut les trois quarts ou l’unanimité des suffrages. Quand il s’agit de l’exclusion dansl’assemblée quelconque, il faudra au moins les trois quarts des suffrages.

§ 12 Pour former une délibération capitulaire, il faut au moins cinq membres qui aient le droit de voter,

non compris les Chevaliers que le Chef veut bien y appeler pour donner leur voix consultative. Encas d’égalité de suffrages, la délibération doit être remise à l’assemblée prochaine, et l’on doit alorsmarquer sur les billets de convocation, que c’est pour reprendre l’objet non décidé à la dernièreassemblée ; et si à cette assemblée les suffrages se trouvent encore partagés également, celui duPréfet est prépondérant et décisif, à moins qu’il ne préfère de le renvoyer à une troisièmedélibération, dans laquelle l’affaire doit être terminée.

§ 13 Tout membre capitulaire âgé de 50 ans, qui aura exercé un office à la Préfecture pendant 15 ans,

ou bien s’il a moins de 50 ans, qui en aura 20 de service, a droit à la vétérance et devient Conseillerhonoraire de son Chapitre ; il jouit en cette qualité de la voix délibérative dans toutes les assemblées.

§ 14 Tout officier, qui donnera au Chapitre la démission de sa charge, ne l’obtiendra qu’après l’avoir

demandé à trois reprises, et à intervalles égaux de mois à mois.Les procès-verbaux d’une assemblée capitulaire seront rédigés par le Chancelier sur la minute, lus

dans l’assemblée suivante, et signés au moins par cinq des membres capitulaires, qui ont étéprésents.

Le Préfet est Chef de la Préfecture, dont il gouverne les différents membres, selon les statuts et

l’esprit de l’Ordre. Il est Représentant né de la Préfecture aux assemblées supérieures. Tous lesChevaliers de quelque classe ou dignité qu’ils soient, lui doivent respect et obéissance.

L’élection du Préfet se fait par les trois Inspecteurs, Chefs des Classes et les Commandeurs

capitulaires, qui doivent voter d’après la pluralité des suffrages des Chevaliers de leur district,convoqué à cet effet. Le Chapitre préfectoral présente trois sujets, parmi lesquels on est obligé dechoisir. L’élection est présidée par le Chancelier qui recueille les voix, sans en avoir une lui-même ;proclamée par le Maître des Cérémonies, et confirmée par le Maître Provincial. Le nouveau Préfetreçoit sa patente au Chapitre Provincial par le Chancelier et contresignée par le Grand Prieur etVisiteur général ; il est installé dans la Préfecture par le Visiteur général de la Province, ou à sondéfaut par le Visiteur du Prieuré.

La convocation de tous les Chapitres se fait sur les ordres du Préfet ou par la voix du Maître des

Cérémonies, ou directement par le Secrétaire du Chapitre. En l’absence du Préfet, le doyen, après lui,le Prieur du Clergé, et le Senior sont en droit de convoquer ; ces derniers ne doivent cependant lefaire que sous l’autorité du conclave composé de trois Inspecteurs des Classes et du Chancelier. Si lePréfet quoique présent, refuse pendant neuf jours la convocation, le conclave peut y suppléer etautoriser le Doyen à convoquer. Lorsqu’à l’heure fixée par arrêté capitulaire, ou indiquée dans lesbillets de convocation, le Préfet ou Président n’est pas arrivé, on attend un quart d’heure, àl’expiration duquel le Doyen ou plus ancien membre capitulaire ouvre le Chapitre.

Le Préfet ne peut rompre aucune conférence, mais il peut faire opiner au renvoi de la délibération

à la prochaine assemblée, et si la pluralité le juge ainsi, on ne peut la continuer; on doit même dedroit remettre toutes les propositions nouvelles qui demandent des éclaircissements préliminaires àla prochaine assemblée. Le renvoi sera décidé sur la demande d’un des membres du Conclave oud’un Commandeur.

Tous les Chevaliers prêtent obédience au Préfet. Cette obédience n’est pas monastique et aveugle,

mais tous doivent respecter en lui, le dépositaire principal des lois et de l’autorité dont les lumièreset le zèle ont déterminé le choix du Chapitre ; ils doivent lui témoigner tous les égards possibles, nonseulement dans les assemblées intérieures de l’Ordre, mais aussi dans la vie civile ; et celui-ci plus

jaloux de régner sur les cœurs que d’exercer une autorité de pure représentation, mettra tous ses soinsà mériter la confiance et l’amitié de ses Frères.

Si contre toute attente un Préfet s’oubliait au point de vouloir exercer des violences au Chapitre,

forcer des délibérations, suspendre les travaux ou faire tel acte qui ferait péricliter la constitution del’Ordre, le Chapitre peut sous l’autorité du Doyen et à la pluralité des deux tiers des suffrages, faireun arrêté contre lui, qui doit être mis en exécution et envoyé tout de suite aux Supérieurs de laProvinces; au Maître Provincial

Grand-Prieur et Visiteur général, nonobstant appel quelconque qui sera cependant discuté entemps et lieu. Le Grand-Prieur doit en ce cas se composer un conseil de cinq membres du Prieuré aumoins, et s’il confirme l’arrêté il peut suspendre provisoirement le Préfet de toutes ses fonctions.

Si le Préfet ne peut se rendre en personne aux Chapitres Prieuraux, Provinciaux et Nationaux,

auxquels il ne peut cependant voter que d’après les instructions positives de ses Commettants, leChapitre nomme un autre de ses membres pour le représenter, et de préférence un des officiers duconclave.

Le Préfet régit et gouverne le Temple ou la Grande Commanderie de la Préfecture, qui est la

maison commune louée ou achetée des deniers de l’Ordre consacrés à cet objet. Cette Maison doitêtre propre à y tenir les différentes assemblées de l’Ordre. C’est dans ce Temple de l’amitié et de labienfaisance que les Chevaliers se rendent pour goûter ensemble des plaisirs purs et honnêtes, on yloge un Chevalier oucompagnon d’armes, pour avoir l’inspectionsous les ordres du Préfet, ou duMaître des Cérémonies sur la maison.

Le Banneret ou Inspecteurs des Chevaliers militaires, est le Doyen ou la seconde personne du

Chapitre, et remplace de droit le Préfet, en cas d’absence ou de vacance. Il est nommé par le Chapitre auquel on appelle tous les Chevaliers militaires. Sa patente ainsi que

celle de tous les officiers de la Préfecture sont expédiées au Chapitre Préfectoral sous l’autorité des

Maîtres National et Provincial et contresignées par le Grand-Prieur et le Visiteur général. Tous les compagnons d’armes prêtent obéissance au Banneret et sont commandés par lui, surtout

lePorte-Bannière et le Porte-Glaive, qui sont à sa nomination. La Bannière des Préfectures, mi-partie, ainsi que l’ancien beauséant des Chevaliers du Temple,

contient d’un côté les Armes de la Province et d’un autre les Armes de la Préfecture. Le Doyen est visiteur né des Commanderies de la Préfecture ; il veille avec sévérité à

l’administration régulière des différentes caisses de l’Ordre, qui sont toutes consacrées au bien del’humanité. Il installe les nouveaux établissements et visite les anciens. Ils présentent leur état auChapitre et tous les ans au Visiteur Prieural.

Le Doyen est membre du conseil privé et de la commission du trésor, et un des trois

administrateurs de l’Hospice, qui est l’établissement bienfaisant de la Préfecture, déterminé pararrêté capitulaire d’après les besoins les plus pressants du local, soit qu’on veuille établir uneinfirmerie ou porter des secours quelconques à des malades, soit qu’on préfère de fonder une maisond’éducation pour des orphelins, enfants trouvés ou nés de parents, qui sont dans l’impuissance de lesélever ; soit qu’on ouvre un asile à la pauvreté, pour assurer à des indigents honnêtes une subsistanceassurée en échange d’un travail proportionné à leurs forces ; soit enfin qu’on veuille transporter nosbienfaits à la campagne en instituant des fêtes villageoises, pour encourager les bonnes mœurs etl’industrie ; en perfectionnant les écoles rurales ; en établissant des sages-femmes ou des chirurgienshabiles à la campagne en faveur de la classe utile des cultivateurs ; ou tels autres moyens, qui serontjugés propres à soulager l’humanité d’une manière efficace.

I.ca trois inspecteurs des Classes recevront dans l’Hospice des personnes qu’il en jugeront dignes

à la pluralité des suffrages, et partageront entre eux les détails de l’administration. Le Doyen auraprincipalement la police et l’inspection sur ceux qui y sont employés, et y maintiendra l’ordre et larégularité. Le Prieur du clergé sera préposé aux devoirs spirituels, à la conservation des mœurs etaux instructions qu’on jugera à propos d’y donner. Le Senior aura soin de la comptabilité et de tousles détails économiques.

Les administrateurs de l’Hospice tiendront bureau toutes les semaines pour la régie qui leur est

confiée, et y emploieront, de préférence des compagnons d’armes de l’Ordre. Le Doyen a l’inspection particulière sur la vie et les mœurs des Chevaliers militaires, et est

adjoint au Prieur du clergé pour les enquêtes à faire sur la vie et les mœurs des Frères de sa classe,qui demandent à être inscrit au Noviciat.

Le Prieur ecclésiastique, Inspecteur des Chevaliers réguliers, estpréposé à toutes les cérémonies

religieuses et à la direction spiri tuelle des fondations bienfaisantes de l’Ordre. Il est chargé particulièrement de la conservation de la règle et des mœurs. Par cette raison il est

préposé aux enquêtes sévères qu’on fait avant de recevoir un candidat au noviciat et donne par écritsa permission au Commandeur qui la fait enregistrer.

Le Prieur Ecclésiastique est élu par le Chapitre, auquel on adjoint les Chevaliers pour ce scrutin. Dans les Chapitres de vestition, il ne peut jamais présider ; mais il occupe invariablement la

première place à la gauche du Président, et y remplit les fonctions de sa charge ; mais dans lesChapitres de délibération, il peut en l’absence du Préfet et du Doyen présider aux conférences aurang de sa charge.

L’Inspecteur des Chevaliers de la classe civile est en même temps Senior du Chapitre, et le

préside en l’absence des trois autres Chefs. Il est élu par les membres du Chapitre, auxquels on adjoint les Chevaliers de la classe civile, pour

former le conclave. Il a l’inspection particulière sur les vies et mœurs des Chevaliers civils. Il est adjoint au Prieur du

Clergé pour les informations à faire sur les candidats de sa classe. Le Senior est membre du conseil privé, de la commission du trésor et un des administrateurs de

l’Hospice, et a particulièrement soin de la comptabilité et de tous les détails économiques. La place de Chevalier est une des plus importante du Chapitre. Il est élu à la pluralité des

suffrages. Le Chancelier est l’agent général de la Préfecture et Chef de la Chancellerie. Il délivre, vise et

scelle toutes les expéditions de l’Ordre. On lui adjoint à titre de Secrétaire en Chef du Chapitre, unChevalier, qui le soulage dans ses fonctions et tient le protocole. La Chancellerie est encorecomposée d’un ou plusieurs compagnons d’armes adjoints qui prêtent entre les mains du Chancelieren plein Chapitre le serment de fidélité et de discrétion.

Le Chancelier doit veiller particulièrement à la conservation des lois de l’Ordre ; il requiert en

cette qualité d’office dans tout ce qui regarde l’exécution des lois, et le Chapitre est obligé de statuersur les réquisitions, et d’ordonner mention d’icelles sur les registres.

Par une suite de la parfaite connaissance des lois, que le Chancelier doit nécessairement avoir, il

présente l’état de la question et établit son avis dans toutes affaires portées au Chapitre, sanspréjudice à la voix délibérative qu’il donne à son tour. Dans les affaires importantes, il doitdemander le renvoi de la proposition au prochain Chapitre, pour avoir et pour pouvoir se préparersuffisamment à exposer la matière.

Le Chancelier ou ses adjoints entretiennent la correspondance avec les Supérieurs et les autres

Préfectures, tant de la Province que de l’Ordre en général pour resserrer les liens intimes de la

fraternité, et se communiquer réciproquement les opérations utiles de bienfaisance, qui peuvent servird’exemple.

Il est cependant enjoint expressément au Chancelier de simplifier la correspondance, d’éviter les

écritures inutiles et surtout de se concerter avec ses collègues, pour qu’elles ne soit pas troponéreuse, et qu’on ménage les frais, parce que tous nos fonds appartiennent aux pauvres.

Le Chancelier sur les propositions faites dans le courant de l’année, rédige un cahier de

délibérations que la Préfecture envoie au Chancelier du Prieuré, pour y être fait droit, ainsi que celuides objets qui doivent être portés aux Chapitres Provinciaux et Nationaux ; il ne doit cependant lesenvoyer qu’après les avoir présentés auparavant au Chapitre et les avoir fait signer par les troispremiers officiers présents.

Le Chancelier rédige tous les actes du Chapitre ainsi que les instructions pour les députés de la

Préfecture. Le Chancelier prête un serment particulier au Chapitre, de ne communiquer à personne sans l’aveu

du Chapitre aucune expédition des Règles, Rituel, Code ou autres pièces concernant l’Ordre, ni d’entirer copie pour lui-même.

II a seul la garde des archives ; tous les membres capitulaires y ont l’entrée de droit; mais ils

doivent se faire accompagner par le Chancelier. Le Chancelier ne doit écrire à personne au nom du Chapitre, sans en avoir conféré auparavant

avec lui ; dans un cas pressant, qui ne permet point de délai, il doit ou moins consulter le Préfet ou leDoyen en son absence, et rendre compte après au Chapitre.

Les extraits et autres expéditions faites par le Chancelier n’ont pas besoin d’être visés par le

Préfet, mais en son absence les extraits faits par un autre qui remplit ses fonctions doivent êtrelégalisés.

Le fisc de la Chancellerie provient des brevets et autres expéditions et sert aux frais de sceaux,

papier, parchemin, plumes et autres matériaux nécessaires à la chancellerie, le surplus doit êtreemployé au bout de l’an en gratifications au secrétaire du Chapitre et aux autres adjoints de laChancellerie. En cas d’insuffisance le Chancelier présentera ses comptes à la commission du trésor.

Ne seront point compris dans le fisc de la Chancellerie les rétributions pour l’établissement des

Commanderies et constitutions de rectification des Loges, qui seront versées dans la caissepréfectorale. Les premières seront de trois Louis, les lettres de constitution de cinq, et celles derectification de soixante livres. Les officiers et Commandeurs reçoivent leur brevet au ChapitrePréfectoral. La patente sera expédiée sous l’autorité des Maîtres National et Provincial, au nom duPréfet par le Chancelier de la Préfecture et visée par le Grand-Prieur.

Les cinq premiers officiers dignitaires du Chapitre, savoir le Préfet, le Doyen, le Prieur du Clergé,

le Senior et le Chancelier forment le conseil privé ou conclave, qui juge provisoirement et enpremière instance tous les objets qui demandent prompte expédition, parce qu’en pareil cas on nepeut pas toujours convoquer le Chapitre et que la multiplicité des voix ne ferait qu’allonger ladécision des affaires courantes.

Le Trésorier chargé de la comptabilité de l’Ordre est une des personnes les plus essentielles du

Chapitre ; une probité scrupuleuse, le zèle le plus assidu et le plus vigilant doivent le caractériser ;c’est lui qui tant que l’Ordre n’a point de sanction légale paraît en son nom dans les affaires civiles.

Le Trésorier est le Chef de la commission du Trésor, dont on parlera plus bas; il est chargé du

placement de tous les fonds de l’Ordre. Il recueille les responsions et donations des Chevaliers, ettient un état exact des dépenses.

Il est élu à la pluralité des suffrages au Chapitre, qui fera tomber son choix sur un Chevalier qui

entende les affaires et dont la fortune soit établie solidement.

Pour soulager le Trésorier dans ses fonctions, on lui adjoint le Procureur, qui sans être capitulaire,

est officier de la Préfecture, et dont parlera plus bas. L’Eléémosinaire est chargé de la distribution des aumônes. La caisse des aumônes est destinée à

des actes de bienfaisance durables tels que ceux qui résultent des plans de charité combinés, onévitera de diminuer cette caisse par ces générosités, qui n’ont pour objet que le soulagementmomentané des malheureux, en faveur desquels on prendra d’autres voies. L’Eléémosinaire assisteles Frères malades, leur porte les secours qui peuvent leur être agréables, et préside aux honneursfunèbres que l’Ordre rend à ceux de ses membres, qui payent le tribut à la nature.

Il est élu en Chapitre à la pluralité des suffrages, de préférence dans la classe des Chevaliers

réguliers, dont il est alors le Sous-Prieur ; quoique le Chapitre ne soit pas strictement obligé à cela,s’il ne se trouve pas de Chevaliers de cette classe en état de remplir cette place.

Les aumônes distribuées à la maison Préfectorale par l’Eléémosinaire proviennent des quêtes

rassemblées aux Chapitres de vestition et de solennité et de la portion de revenus du TemplePréfectoral, qui sera affectée à cet objet. Ces aumônes ne seront pas données à des vagabondsmendiants de profession, mais on en fera de petites pensions hebdomadaires ou mensuelles pourdespauvres honteux, pères de famille indigents ou autres personnesmisérables, incapables de gagnerleur pleine subsistance, auxquelles on donnera les suppléments nécessaires selon la faculté de lacaisse des aumônes.

L’Eléémosinaire fera le cadastre des pauvres, qui doivent recevoir cette petite charité aux jours

convenus à la maison Préfectorale, et rendra compte tous les six mois de son administration auChapitre.

En cas de maladie sérieuse d’un Frère, l’Eléémosinaire chargé par état de lui porter des

consolations fraternelles, se nantira des papiers d’Ordre, qui pourront être en dépôt chez lui.

Lors du décès d’un Chevalier de l’Ordre, le Chapitre s’assemblera pour célébrer sa mémoire, et

l’on fait ce jour une distribution d’aumônes aux pauvres. A la fête des trépassés on faitl’énumération des Chevaliers morts dans l’année, et recommande leur souvenir aux Frères. S’ildécède un membre capitulaire, sa place au Chapitre reste vacante et couverte d’un crêpe jusqu’à lanomination du successeur.

L’Inspecteur des Novices ou Ecuyers est chargé de les. instruire des usages anciens de l’Ordre

pendant leur noviciat et de veiller sur leur conduite. Du compte qu’il en rend au Chapitre dépend leterme de leur épreuve. Il leur ordonne les caravanes prescrites par l’ancienne règle et converties parla nouvelle en œuvres de bienfaisances et d’humanité, qu’ils sont obligés d’exercer, soit en visitantsouvent l’hospice et s’y vouant aux détails de la charité, soit en se transportant à la campagne pour yverser des bienfaits.

L’Inspecteur des Novices l’est aussi des Loges du ressort de la Préfecture, qui porte dans le

symbolique le nom de Grande Loge Ecossaise. Il reçoit le jour de son inspection annuelle dans lesLoges, les honneurs dûs aux Supérieurs de l’Ordre.

Le Maître des Cérémonies est chargé de tout le Rituel de l’Ordre de faire célébrer les fêtes et de

veiller à ce que les armements des Chevaliers se fassent d’après le rite de l’Ordre. II est le lieutenant du Temple et préposé à la garde de tous les effets et meubles de la maison

communale. Le concierge reçoit de lui ses instructions et lui est entièrement subordonné. Il est envoyé comme Chevalier d’honneur de la part du Chapitre, toutes les fois qu’il y a un

message intéressant à faire aux Supérieurs de l’Ordre. II rédige la matricule et l’armorial de la Préfecture ; y insère les noms et armes d’ordre et du

siècle des Chevaliers, ainsi que leur dignité et les remet tous les ans au Doyen-Visiteur, qui l’envoie

au Visiteur du Prieuré. II soigne les petites dépenses nécessaires pour l’ameublement des Chapitres ; mais toute dépense

extraordinaire doit être communiquée auparavant à la commission du trésor. La charge de Maître des Cérémonies est à la nomination du Maître Provincial sur trois sujets

présentés par le Chapitre. Cette place porte par cette raison le nom de Commande Magistrale et lepourvu reçoit sa patente de Maître provincial contresignée par son Secrétaire particulier.

Les Commanderies sont les premiers établissements de l’Ordre, leur réunion forme les

Préfectures ; elles sont gouvernées par un Commandeur, qui en vertu de ce titre et de cet office estmembre du Chapitre Préfectoral, auquel il porte les vœux et les suffrages de ses Chevaliers. LesCommanderies nouvelles sont installées sur les ordres du Chapitre Préfectoral par le Doyen-Visiteur.

Dans le ressort de chaque Préfecture on peut former neuf Commanderies et pas plus. Il suffit

cependant qu’il y en ait trois en activité, pour qu’elles puissent se réunir en Chapitre Préfectoral. On ne doit recevoir dans une Commanderie que 9 Chevaliers au plus et 5 au moins. L’un d’eux est

Senior et remplace de droit le Commandeur tant dans les assemblées du Chapitre que dans celles dela Commanderie même, et un autre Procureur, chargé des détails économiques. Le Chapitre peutcependant pour faciliter un premier établissement permettre par dispense, que pendant la premièreannée la Commanderie ne soit composée que de 3 Chevaliers.

Les Commandeurs sont élus de la manière suivante : Les Chevaliers de la Commanderie

présentent au Chapitre trois sujets de leur district choisis par eux dans une assemblée convoquée adhoc, le Chapitre nomme un des trois présentés qui est confirmé et patenté par le Maître Provincial etinstallé par le

Doyen-Visiteur du Chapitre.

Lorsque quelque Chevalier a des facilités pour faire un établissement dans quelque ville de la

Préfecture propre à être le siège d’une Commanderie, il peut se présenter au Chapitre et luidemander le titre de Commandeur à brevet et la permission d’entamer dans le dit endroit lesnégociations nécessaires. Le Chapitre peut alors donner voix et séance au Commandeur titulaire, àcharge par lui de remplir ses engagements dans l’espace d’un an, au bout duquel temps sacommission cesse et son brevet lui est retiré s’il n’y a satisfait.

Tout établissement qu’on veut faire dans un district. où l’Ordre n’est pas encore en activité, doit

nécessairement commencer par la formation d’une Commanderie, qui sera mise sous les ordres et ladirection de la Préfecture voisine et ce n’est qu’après que trois Commanderies composées de 3Chevaliers chacune au moins seront érigées, et qu’elles pourront demander au Chapitre Prieural etProvincial l’établissement d’une Préfecture ; on réitère à cet effet la défense expresse de créer desPrieurés ou Préfectures in partibus, sans qu’il y ait le nombre suffisant d’établissements inférieurs,qui doivent leur servir de base.

Les matières que le Chapitre est obligé de renvoyer aux Commanderies, sont l’élection d’un

Préfet, la proposition d’un nouveau Candidat, l’établissement de l’Hospice Préfectoral et toute autreaffaire majeure, dont la communication aux Commanderies aura été ordonnée par le Chapitre. Dansles trois cas énoncés, tous les suffrages des Chevaliers seront comptés au Chapitre, dans les autres leCommandeur seul votera au Chapitre selon la pluralité des avis.

Les Commandeurs ont droit d’assembler leurs Chevaliers aussi souvent que les affaires et le bien

de l’Ordre l’exigent. En l’absence du Commandeur, si le Chapitre renvoie à la maison lacommunication d’un arrêté, qui demande à être délibéré ou promulgué, le Senior est en droitd’assembler ses Frères.

Les Commanderies ont droit d’après le consentement préalable de la Préfecture, de recevoir des

écuyers ou novices, mais elles ne doivent jamais armer ces derniers Chevaliers, solennité réservéeaux seuls chapitres Préfectoraux.

La Franc-Maçonnerie Conservatrice de notre Saint Ordre en est la pépinière, où l’on élève et

prépare les sujets qu’on croit propre à y entrer; elle doit donc être dans une liaison intime avec legouvernement intérieur du Saint Ordre.

Le Convent a arrêté les statuts et règlements généraux de la Maçonnerie, qui servent de règles

invariables à tous ceux, qui suivent la réforme du Très Saint Ordre. Les appels des Comités écossais des Loges sont portés aux Grandes Loges Écossaises ou

Chapitres Préfectoraux, de là aux Grands Prieurés ou Directoires Écossais, et enfin en dernièreinstance au Grand Directoire National. L’érection d’une Loge est accordée par le Directoire Écossaissur l’avis des Grandes Loges Écossaises, mais elle doit être confirmée et enregistrée au GrandDirectoire National.

Toute Loge est sous l’autorité d’un Commandeur, qui peut en réunir plusieurs sous son maillet,

dont il est alors le Chef titulaire ou Député-Maître. Chaque Loge lui adjoint tous les trois ans unVénérable pour la gouverner sous son autorité.

Titre 9Objets économiques DE LA COMMISSION DU TRESOR Dans chaque Préfecture le Trésorier est préposé au maniement et placement des deniers de

l’Ordre, d’après les avis et arrêts de la commission du Trésor. Celle-ci est composée du Trésorier-Président, des trois inspecteurs des classes, ou à leur défaut

des plus anciens officiers du Chapitre subrogés par lui, et du Procureur qui fait à la commission duTrésor les mêmes fonctions que le Chancelier au Chapitre.

Le Trésorier fait des propositions et paie les déboursés du Chapitre sur des quittances ou desmémoires; toute dépense extraordinaire doit être proposée et approuvée par la commission duTrésor, et signée au moins de trois des commissaires avant d’être entreprise. Le Trésorier présentetous les six mois en Chapitre les comptes du Trésor particulier de la Préfecture.

Le Procureur est choisi parmi les Chevaliers de la Préfecture au Chapitre Préfectoral ; la plus

scrupuleuse intégrité et le zèle le plus épuré doivent déterminer le choix de cet officier ainsi quecelui du Trésorier ; il est membre né de la commission du Trésor et quoi qu’il ne soit point par saplace membre capitulaire, il le devient après quelques années de service avec le titre de Conseillerde la Préfecture, en l’absence du Trésorier, il le remplace de droit au Chapitre. Le Dator pannorum,choisi parmi les compagnons d’armes est à ses ordres.

Tout Frère reçu dans l’intérieur doit payer pour sa réception une dot fixée dans chaque Préfecture

selon les circonstances locales, dont le tiers sera payé lors de son inscription au noviciat et les deuxautres tiers lorsqu’il est armé Chevalier.

Cette dot doit être la même pour tous les Frères. La Commission du Trésor est chargée de

pourvoir à son paiement et de faire avec le candidat à ce sujet tels arrangements qu’elle juge àpropos. L’uniformité de cette contribution qui ne peut être diminuée en aucun cas, est le principe del’égalité parfaite de tous les Frères.

Le Chapitre seul peut donner dans des cas extraordinaires et lorsqu’il s’agit de faire l’acquisition

d’un sujet distingué, qui est à même de se rendre utile, dispense du paiement de cette dot ; mais cettedispense, qui ne pourra être que très rare, doit être accordée, unanimement et sans contradiction d’unseul membre capitulaire.

Les Frères ne pourront avoir aucune Commanderie ou charge dans le Chapitre avant qu’ils aient

quittance plénière de la commission du Trésor au sujet de leur droit de réception, et l’on fera lors detoutes les élections une liste des membres éligibles, parmi lesquels on n’en comprendra aucun, quidoive encore au Trésor.

§ 5

Cette donation consacrée invariablement et sans la moindre déduction à des établissements pieux

et solides est divisée en trois parties ; les deux tiers appartiennent à l’Hospice de la Préfecture et letroisième au Temple.

§ 6 Le placement des différents fonds de l’Ordre appartient à la commission du Temple et du Trésor,

qui les administre et délivre les intérêts de la prébende du Temple et de l’Hospice auxadministrateurs respectifs, quand elles sont en exercice.

§ 7 Le Temple ou la Grande Commanderie Provinciale sera mise en activité, quand le Chapitre jugera

à propos de faire acquisition d’une maison ou d’un terrain propre à en bâtir une. Lors qu’un jour ilsera doté richement, après avoir prélevé les fonds d’achat, de construction et de décoration, onplacera le surplus à intérêt ; un quart de la rente sera versé aux aumônes hebdomadaires, un autrequart destiné à l’entretien et la moitié servira au Préfet à faire les honneurs du Temple vis-à-vis desChevaliers de la Préfecture et surtout des Frères étrangers.

L’Hospice sera mis en activité, quand les fonds se seront accrus à un capital considérable et que

le Chapitre Préfectoral le jugera à propos. On ajoutera jusqu’à cette époque les intérêts des sommesprincipales, qui entrent, et ce n’est qu’alors que les intérêts courants et augmentant successivementseront appliqués aux usages prescrits par les administrateurs de l’Hospice.

Le Chapitre seul, auquel on appellera les Chevaliers ou au moins dans lequel on comptera leurs

suffrages, présentés par leurs Commandeurs, décideront au moment que l’Hospice Préfectoral doitêtre mis en exercice, de l’endroit ou il doit s’établir, ainsi que du genre d’établissement bienfaisant,auquel on doit donner la préférence.

La commission du Trésor doit donner au moins tous les six mois aux administrateurs respectifs du

Temple et de l’Hospice l’état de leur caisse, et ceux-ci en doivent faire le rapport tous les ans auChapitre. Quand ces deux prébendes seront en activité, les comptes de l’emploi des revenus doiventêtre visés tous les ans par le Trésorier et le Procureur, qui sont auditeurs des comptes et présentés

ensuite au Chapitre. C’est le Chapitre seul, qui peut reprendre un administrateur sur quelque emploi mauvais des fonds,

et lui enjoindre d’être plus circonspect et plus attentif à l’avenir. Lorsqu’une fois l’Hospice sera en activité et bien doté, on établira le bénéfice rural prescrit par la

règle, en inscrivant la taxe de l’inscription au noviciat. Le bénéfice rural sera alors consacré à des œuvres de bienfaisance à exercer à la campagne. On y

achètera des biens-fonds et y établira la maison des Novices de la Préfecture. Les deux tiers serontinvariablement affectés à de bonnes oeuvres et administrés par le Prieur du Clergé. Le tiers desrevenus du bénéfice ruralpeut être employé par le Maître des Novices à l’entretien de la maison desNovices et autres dépenses, pour y recevoir les Frères qui voudront y goûter les plaisirs de la retraiteet les Novices qui viendront y faire leur caravane.

Tous les Chevaliers à commencer par leur réception au Noviciat s’engagent à une capitation

annuelle d’un ducat évalué en France à 12tt, et destiné à être joint aux trois quarts du grade Écossais.Ce trésor particulier de la Préfecture sert à faire face aux frais courants de correspondance, deréception, de décoration, etc., ainsi qu’aux contributions pour les dépenses communes et tenue deChapitres Supérieurs Prieuraux, Provinciaux et Nationaux.

Cette contribution se paie tous les ans au 1er de juillet entre les mains du Minister Responsionum

chargé de ce recouvrement. Ceux des Frères à qui l’on à demander et qui laissent écouler une annéesans la payer, sont tenus de la payer double pour forme d’amende, sur simple assignation duTrésorier, dont on ne peut

interjeter appel qu’au Chapitre assemblé. A l’instar des Chevaliers du S.O. tous les maçonsmembres d’une Loge réunie, qui en sont les Novices, paient tous les ans un écu de 66tt versé dans lacaisse Préfectorale.

En forme de reconnaissance de la faveur que l’Ordre fait aux Officiers dignitaires de les décorer

d’une charge ou titre, qui leur donne une influence plus satisfaisante dans le gouvernement de l’Ordre, ils paieront lors de leur élection deux Louis pour leur brevet, à verser dans la caisse Préfectorale.

Les frais des Chapitres Prieuraux, sont répartis également entre les différentes Préfectures par le

Chancelier et payés sur quittance par les Trésoriers respectifs. Les frais des Chapitres Provinciaux et autres dépenses communes à la Province, sont répartis

également tous les ans entreles différentes Préfectures par le Comité d’administration Provinciale etpayés sur quittance par les Trésoriers respectifs.

Chaque Préfecture étant subdivisé en neuf petits ressorts, qui forment autant de Commanderies

pour l’intérieur, et sous l’autorité desquelles les Loges Maçonniques sont mises ; les Commanderiesont leurs caisses et leur administration particulière. La caisse de la Commanderie est administrée àl’instar de la caisse Préfectorale par le Procureur, sous l’autorité de la commission du Trésor forméedu Commandeur et du Senior. Les comptes seront rendus tous les six mois à la Commanderie, tous lesans au Doyen-Visiteur, et aux Visiteurs supérieurs toutes les fois qu’ils le demanderont.

Cette caisse, qui est proprement la caisse de réserve des Loges, est formée du quart des

différentes affiliations ou réceptions symboliques, qui se font dans les Loges du ressort. Quand les fonds d’une Commanderie seront montés à 100 Louis, on commencera à la mettre en

activité, alors la rente servira à un établissement particulier de bienfaisance, qui sera déterminé parle Chapitre Préfectoral sur les observations des Chevaliers et qui sera administré par leCommandeur. La Commanderie sera cependant en droit avant d’établir la prébende de bienfaisance,de faire sous l’autorité du Chapitre l’acquisition d’une maison commune pour y assembler lesChevaliers et la Loge de la ville qui en dépend.

Les Caisses maçonniques sont formées de trois quarts des droits d’affiliation et de réception aux

trois premiers grades de la Maçonnerie, d’un quart de la taxe de la réception d’Écossais, ainsi quedes quotités annuelles ; les taux de réception et de capitation sont fixés par chaque Loge d’après sesbesoins et ses forces et confirmés par la grande Loge Écossaise.

La disposition des fonds de la Loge appartient au Comité Écossais de ladite Loge sous la direction

du Trésorier de la Loge, qui doit présenter tous les six mois ses comptes en Comité et tous les ans enLoge.

L’inspecteur des novices et le Député-Maître doivent surveiller l’emploi que font les Loges de

leurs deniers ; malgré que ceux-ci leur appartiennent en pleine propriété, elles ne doivent pas leséparpiller en dépenses vaines ou ridicules, mais consacrer à l’exemple de l’Ordre intérieur, dontelles sont la pépinière, le superflu de leurs fonds à des actes d’une bienfaisance éclairée et réfléchie,qui seront proposés par le Comité Écossais et agréés par la Loge.

Tous les plans économiques proposés pour augmenter le bien-être du Chapitre, faire travailler

utilement les fonds, ou lui en procurer de nouveaux, doivent être portés au Chapitre, qui en renvoiel’examen d’abord à la commission du Trésor, et statue ensuite sur ses conclusions arrêtées etprésentées au Chapitre par le Trésorier.

Si l’on proposait quelque plan commun à plusieurs Préfectures ou même à toute la Province : il

doit être porté selon son étendue au Chapitre Prieural ou Provincial pour y être statué de commodovel incommodo. Ceux-ci statueront tout de suite ou in pleno, ou bien sur le rapport préalabledescommissaires nommés pour l’examiner. L’Ordre recevant des bienfaits des étrangers comme deses membres, on fera l’emploi, suivant la volonté du bienfaiteur, pourvu néanmoins qu’elle ne soitpas contraire à la religion, ni au gouvernement, et à défaut de destination, l’ordre en fera l’emploi dela manière la plus convenable pour le bien de l’humanité et de la patrie.

Fait et arrêté en Convent National de France tenu à Lyon et clos aujourd’hui 29 Nov. 465.10 Déc. 1778.

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#5

REFONDATION DE L’ORDRE | Le Régime Ecossais Rectifié

LES PRINCIPES DE L’ORDRE EN 10 POINTS

– I –L’Ordre issu de la réforme de Lyon, tire uniquement sa légitimité et sa « régularité », par delà les

qualifications initiatiques de ses membres, de sa fidélité observée face aux principes énoncés etarrêtés en 1778 lors du Convent des Gaules.

– II –Les deux Codes de Lyon de 1778, sont les seules et uniques lois constitutives du Régime Écossais

Rectifié, qui en organisent la vie et le fonctionnement. Ces lois, non seulement aucune instancerectifiée n’a le pouvoir de les modifier, mais son premier devoir, clairement stipulé et précisé, est deles respecter et de les faire respecter.

– III –L’Ordre, du point de vue rectifié, entendu dans son principe le plus authentique, ni ne se réfère, ni

ne participe d’une structure administrative et temporelle, mais relève d’abord et avant tout d’unedimension purement spirituelle.

– IV –Depuis le réveil du Régime en France au XXe siècle, la conception originelle du Code n’a

presque jamais été suivie ni respectée, entraînant des disfonctionnements significatifs dans la logiqueorganisatrice du Régime Écossais Rectifié. Notre action, de nature refondatrice, est une volonté deretour aux sources du Convent des Gaules de 1778, en tentant, non pas de recréer une nouvellestructure au milieu de celles déjà existantes – à l’égard desquelles nous avons de l’amitié enreconnaissant le travail souvent remarquable qu’elles ont accompli – mais de redonner à la notion «d’Ordre » la place centrale qu’elle n’aurait jamais dû perdre, dans l’entière et pleine fidélité avecl’enseignement exposé dans les différentes « Instructions » du Régime en toutes ses classes.

– V –Cette action refondatrice, insiste tout particulièrement sur le caractère fondamental de la doctrine

qui forme, avec l’Ordre, un tout indissociable, sachant que le lien intime avec la doctrine de laRéforme de Lyon représente, non une option du point de vue initiatique lorsqu’on est membre duRégime, mais relève d’un enseignement initiatique et spirituel auquel – au terme d’une propédeutiquedouce et bienfaisante qui est le propre de l’initiation – il est nécessaire d’adhérer, faute de quoi on semet soi-même en dehors des critères d’appartenance du système willermozien dont le rôle est,précisément, d’étudier, de préserver et de veiller attentivement sur les éléments doctrinaux quiprésidèrent à la fondation de l’Ordre.

– VI –

L’aspect doctrinal définit le Régime rectifié, ce qui est une spécificité unique dans tout le champrituel de la franc-maçonnerie universelle, et donne au système willermozien une nature à nulle autrepareille qui le distingue entièrement des autres Rites maçonniques, lui conférant son caractère devoie dite « non-apocryphe » au regard des critères de la doctrine de la réintégration, dont l’Ordre estle seul dépositaire légitime depuis le XVIIIe siècle.

– VII –L’essence de la rectification, outre un Rite original et une pratique spécifique s’exerçant en quatre

grades formant la classe symbolique et un Ordre, dit « intérieur », d’essence chevaleresque distinguéen un état probatoire d’Écuyer Novice et le grade de Chevalier Bienfaisant de la Cité Sainte(C.B.C.S.), se caractérise par un enseignement fondé sur le « christianisme transcendant »,christianisme non dogmatique fidèle à la loi de grâce de l’Évangile et aux vérités de la sainte religionchrétienne, mais relevant par des voies secrètes participant d’un tradition non ostensible, de la «sainte doctrine parvenue d’âge en âge par l’initiation jusqu’à nous ».

– VIII –L’Ordre, qui se rattache à celui « primitif essentiel et fondamental qui lui a donné naissance »,

dont « l’origine est si reculée qu’elle se perd dans la nuit des siècles », est autosuffisant et complet. Ilse pense et se considère comme l’aboutissement des connaissances mystérieuses de la franc-maçonnerie et possède à ce titre son essence propre travaillant à un but précis, expliquant pourquoi ilest absolument non juxtaposable, et ne peut être inclus dans une organisation commune avec d’autresRites sous quelques motifs ou prétextes aussi louables soient-ils. La volonté de rattachement à lanotion originelle «d’Ordre rectifié» – dont l’objet est « d’aider à remonter jusqu’à l’Ordre primitif »– telle que pensée et établie lors du Convent des Gaules par Jean-Baptiste Willermoz (1730-1824),ne saurait de la sorte être, en aucun cas et d’aucune manière, de nature « obédientielle » – conceptionétrangère à l’esprit de la rectification – mais purement et étroitement fidèle aux seuls critères duRégime rectifié.

– IX –L’initiative de refondation étant de nature transhistorique, initiatique et spirituelle, participe d’une

situation d’attente, dans l’espoir qu’un jour les diverses composantes de la famille rectifiéereviennent à la conception originelle de « l’Ordre », et réalisent leur unité sur le principe unique etfondateur de « rectification » tel que défini et établi par la Réforme de Lyon.

– X –Notre action refondatrice, afin que soit engagé un retour au principe de l’Ordre, relève donc autant

du témoignage que du souci conservatoire, afin que le projet willermozien puisse être vécu ettransmis, par-delà le temps, en sa vérité essentielle, afin qu’il perdure à travers l’Histoire en absoluefidélité avec l’idée originelle de nature initiatique et spirituelle, exposée et arrêtée lors du Conventdes Gaules en 1778.Permalink: https://willermoz.com/2012/12/17/refondation-de-lordre/

#6

Intéressant ! | Le Régime Ecossais Rectifié

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#7

Directoire National Rectifié | Le Régime Ecossais Rectifié

Directoire National Rectifié

Revenir aux fondements de ce que fut, et doit être le Régime Ecossais Rectifié selon laconception willermozienne authentique, en fidélité à ce ce que voulut exactement Jean-BaptisteWillermoz pour l’Ordre, en nous rattachant à l’essence de la Réforme de Lyon engagée auConvent des Gaules en 1778.

Notre action est une volonté de retour aux sources du Convent des Gaules de 1778, en

tentant – non pas de recréer une nouvelle structure au milieu de celles déjà existantes – mais deredonner à la notion « d’Ordre » la place centrale qu’elle n’aurait jamais dû perdre, tout eninsistant sur le caractère fondamental de la doctrine qui forme, avec l’Ordre, un toutindissociable en une union étroite et intime.

Contact : [email protected]

Permalink: https://willermoz.com/2012/12/21/directoire-national-rectifie/

#8

Site à découvrir | Le Régime Ecossais Rectifié

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#9

Premier Point (1/10) | Le Régime Ecossais Rectifié

LES PRINCIPES DE L’ORDRE EN 10 POINTS

– I –L’Ordre issu de la réforme de Lyon, tire uniquement sa légitimité et sa « régularité », par delà les

qualifications initiatiques de ses membres, de sa fidélité observée face aux principes énoncés etarrêtés en 1778 lors du Convent des Gaules.Permalink: https://willermoz.com/2012/12/25/premier-point-110/

#10

Deuxième Point (2/10) | Le Régime Ecossais Rectifié

LES PRINCIPES DE L’ORDRE EN 10 POINTS

– II –Les deux Codes de Lyon de 1778, sont les seules et uniques lois constitutives du Régime Écossais

Rectifié, qui en organisent la vie et le fonctionnement. Ces lois, non seulement aucune instancerectifiée n’a le pouvoir de les modifier, mais son premier devoir, clairement stipulé et précisé, est deles respecter et de les faire respecter.Permalink: https://willermoz.com/2012/12/26/deuxieme-point-210/

#11

Troisième Principe | Le Régime Ecossais Rectifié

LES PRINCIPES DE L’ORDRE EN 10 POINTS

– III –L’Ordre, du point de vue rectifié, entendu dans son principe le plus authentique, ni ne se réfère, ni

ne participe d’une structure administrative et temporelle, mais relève d’abord et avant tout d’unedimension purement spirituelle.

http://directoirenationaldeslogesreuniesetrectifie.hautetfort.com/

Permalink: https://willermoz.com/2012/12/27/troisieme-principe/

#12

Quatrième Point (4/10) | Le Régime Ecossais Rectifié

LES PRINCIPES DE L’ORDRE EN 10 POINTS

– IV –Depuis le réveil du Régime en France au XXe siècle, la conception originelle du Code n’a

presque jamais été suivie ni respectée, entraînant des disfonctionnements significatifs dans la logiqueorganisatrice du Régime Écossais Rectifié. Notre action, de nature refondatrice, est une volonté deretour aux sources du Convent des Gaules de 1778, en tentant, non pas de recréer une nouvellestructure au milieu de celles déjà existantes – à l’égard desquelles nous avons de l’amitié enreconnaissant le travail souvent remarquable qu’elles ont accompli – mais de redonner à la notion «d’Ordre » la place centrale qu’elle n’aurait jamais dû perdre, dans l’entière et pleine fidélité avecl’enseignement exposé dans les différentes « Instructions » du Régime en toutes ses classes.

http://directoirenationaldeslogesreuniesetrectifie.hautetfort.com/

Permalink: https://willermoz.com/2012/12/28/quatrieme-point-410/

#13

Cinquième Point (5/10) | Le Régime Ecossais Rectifié

LES PRINCIPES DE L’ORDRE EN 10 POINTS

– V –Cette action refondatrice, insiste tout particulièrement sur le caractère fondamental de la doctrine

qui forme, avec l’Ordre, un tout indissociable, sachant que le lien intime avec la doctrine de laRéforme de Lyon représente, non une option du point de vue initiatique lorsqu’on est membre duRégime, mais relève d’un enseignement initiatique et spirituel auquel – au terme d’une propédeutiquedouce et bienfaisante qui est le propre de l’initiation – il est nécessaire d’adhérer, faute de quoi on semet soi-même en dehors des critères d’appartenance du système willermozien dont le rôle est,précisément, d’étudier, de préserver et de veiller attentivement sur les éléments doctrinaux quiprésidèrent à la fondation de l’Ordre.

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#14

Sixième Point (6/10) | Le Régime Ecossais Rectifié

LES PRINCIPES DE L’ORDRE EN 10 POINTS

– VI –L’aspect doctrinal définit le Régime rectifié, ce qui est une spécificité unique dans tout le champ

rituel de la franc-maçonnerie universelle, et donne au système willermozien une nature à nulle autrepareille qui le distingue entièrement des autres Rites maçonniques, lui conférant son caractère devoie dite « non-apocryphe » au regard des critères de la doctrine de la réintégration, dont l’Ordre estle seul dépositaire légitime depuis le XVIIIe siècle.

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#15

Septième Point (7/10) | Le Régime Ecossais Rectifié

LES PRINCIPES DE L’ORDRE EN 10 POINTS

– VII –L’essence de la rectification, outre un Rite original et une pratique spécifique s’exerçant en quatre

grades formant la classe symbolique et un Ordre, dit « intérieur », d’essence chevaleresque distinguéen un état probatoire d’Écuyer Novice et le grade de Chevalier Bienfaisant de la Cité Sainte(C.B.C.S.), se caractérise par un enseignement fondé sur le « christianisme transcendant »,christianisme non dogmatique fidèle à la loi de grâce de l’Évangile et aux vérités de la sainte religionchrétienne, mais relevant par des voies secrètes participant d’un tradition non ostensible, de la «sainte doctrine parvenue d’âge en âge par l’initiation jusqu’à nous ».

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#16

Huitième Point (8/10) | Le Régime Ecossais Rectifié

LES PRINCIPES DE L’ORDRE EN 10 POINTS

– VIII –L’Ordre, qui se rattache à celui « primitif essentiel et fondamental qui lui a donné naissance »,

dont « l’origine est si reculée qu’elle se perd dans la nuit des siècles », est autosuffisant et complet. Ilse pense et se considère comme l’aboutissement des connaissances mystérieuses de la franc-maçonnerie et possède à ce titre son essence propre travaillant à un but précis, expliquant pourquoi ilest absolument non juxtaposable, et ne peut être inclus dans une organisation commune avec d’autresRites sous quelques motifs ou prétextes aussi louables soient-ils. La volonté de rattachement à lanotion originelle «d’Ordre rectifié» – dont l’objet est « d’aider à remonter jusqu’à l’Ordre primitif »– telle que pensée et établie lors du Convent des Gaules par Jean-Baptiste Willermoz (1730-1824),ne saurait de la sorte être, en aucun cas et d’aucune manière, de nature « obédientielle » – conceptionétrangère à l’esprit de la rectification – mais purement et étroitement fidèle aux seuls critères duRégime rectifié.

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#17

Neuvième Point (9/10) | Le Régime Ecossais Rectifié

LES PRINCIPES DE L’ORDRE EN 10 POINTS

– IX –L’initiative de refondation étant de nature transhistorique, initiatique et spirituelle, participe d’une

situation d’attente, dans l’espoir qu’un jour les diverses composantes de la famille rectifiéereviennent à la conception originelle de « l’Ordre », et réalisent leur unité sur le principe unique etfondateur de « rectification » tel que défini et établi par la Réforme de Lyon.

http://directoirenationaldeslogesreuniesetrectifie.hautetfort.com/

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#18

Dixième Point (10/10) | Le Régime Ecossais Rectifié

LES PRINCIPES DE L’ORDRE EN 10 POINTS

– X –Notre action refondatrice, afin que soit engagé un retour au principe de l’Ordre, relève donc autant

du témoignage que du souci conservatoire, afin que le projet willermozien puisse être vécu ettransmis, par-delà le temps, en sa vérité essentielle, afin qu’il perdure à travers l’Histoire en absoluefidélité avec l’idée originelle de nature initiatique et spirituelle, exposée et arrêtée lors du Conventdes Gaules en 1778.

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#19

LE RÉGIME ÉCOSSAIS RECTIFIÉ | Le Régime Ecossais Rectifié

LE RÉGIME ÉCOSSAIS RECTIFIÉ

Le Régime Écossais Rectifié prit naissance en 1778 à Lyon, lors d’un Convent général de la StricteObservance, dit « Convent des Gaules ».

Du point de vue historique, si l’on veut comprendre ce que représente, tant dans son originalitéque sa finalité, la Réforme de Lyon, il convient de souligner que les décisions qui seront prises lorsdu Convent des Gaules en 1778, sont véritablement à l’origine du Rite, ou plus exactement du «Régime » Écossais Rectifié, transformant, réformant et, en effet, « rectifiant » en profondeur la StricteObservance dite « Templière » [1], nouveau Régime, ou système pensé et voulu par Jean-BaptisteWillermoz (1730-1824).

Code Maçonnique des Loges Réunies et Rectifiées de France,Tel qu’il a été approuvé par les Députés des Directoiresau Convent National de Lyon 5778.On peut donc dire que le Convent des Gaules, qui se déroula de novembre à décembre 1778 à

Lyon, dans ses décisions, établissait et constituait un Rite fondé sur quatre grades symboliques,conduisant à un Ordre de Chevalerie, dit « Ordre Intérieur », formé des Ecuyers Novices et desChevaliers Bienfaisants de la Cité Sainte, Ordre Intérieur auquel était adjoint une classe secrète, dite« non-ostensible », de Chevaliers Profès et Grands Profès [2].

Ainsi était établi un nouveau système absolument original et novateur, extrêmement éloigné, mêmes’il en conservait plus ou moins le cadre général extérieur, de ce qu’avait été la Stricte Observance,mais également l’ensemble de la franc-maçonnerie, que le Régime nouvellement établi avaitl’ambition de réformer et de « rectifier » afin de lui transmettre les bienfaisantes lumières de ladoctrine de la réintégration qui éclaire d’une manière unique ce que fut l’homme à son origine, sonétat actuel et sa destination future, conférant ainsi un caractère absolument original au RégimeEcossais Rectifié, et surtout expliquant sa nature dite « non-apocryphe » [3].

Les intentions de Willermoz seront clairement affichées lors de ce Convent fondateur : rétablirl’unité de la Maçonnerie sur un fondement initiatique véritable, soit celui de la doctrine de laréintégration, afin de faire cesser la confusion initiatique et revenir au dépôt primitif.

Il l’explique en ces termes dans le préambule du Code Maçonnique des Loges Réunies etRectifiées de France de 1778, dont chaque mot possède son importance :

« Quelques Maçons plus zélés qu’éclairés mais trop judicieux pour se nourrir longtemps dechimères, et lassés d’une anarchie dont ils sentaient le vice, firent des efforts pour se soustraire àun joug aussi avilissant. Des Loges entières dans diverses contrées, sentant la nécessité d’un

centre commun, dépositaire d’une autorité législative, se réunirent et coopérèrent à la formationde divers grands Orients. C’était déjà de leur part un grand pas vers la lumière ; mais à défautd’en connaître le vrai point central et le dépôt des lois primitives, elles suppléèrent au régimefondamental par des régimes arbitraires particuliers ou nationaux, par des lois qui ont pu s’yadapter. Elles ont eu le mérite d’opposer un frein à la licence destructive,qui dominait partout,mais ne tenant point à la chaîne générale, elles en ont rompu l’unité en variant les systèmes. [4]»

Ces propos préliminaires ne manquent pas d’intérêt.Mais ce qui suit est plus encore crucial dans l’explication du projet :« Des Maçons de diverses contrées de France, convaincus que la prospérité et la stabilité de

l’Ordre Maçonnique dépendaient entièrement du rétablissement de cette unité primitive, netrouvant point chez ceux qui ont voulu se l’approprier, les signes qui doivent la caractériser, etenhardis dans leurs recherches par ce qu’ils avaient appris sur l’ancienneté de l’Ordre desFrancs-Maçons, fondé sur la tradition la plus constante, sont enfin parvenus à en découvrir leberceau ; avec du zèle et de la persévérance, ils ont surmonté tous les obstacles, et en participantaux avantages d’une administration sage et éclairée, ils ont eu le bonheur de retrouver les tracesprécieuses de l’ancienneté et du but de la Maçonnerie. [5]»

On observera que ce projet de réforme émane de France et qu’il s’édifia dans l’antique capitaledes Gaules, plaçant sous les auspices de la pensée et de la langue d’un pays au sein duquel l’intérêtpour les idées, notamment philosophiques, était éveillé au plus haut point et, à ce sujet,singulièrement d’ailleurs au XVIIIe, siècle des philosophes par excellence. Le Régime en conserveraune tonalité et un évident climat, qui relèvent de la sensibilité de l’âme française pour la réflexion enparticulier dans le domaine des choses de l’esprit. Joseph de Maistre proposera d’ailleurs pour cetteraison dans son Mémoire au duc de Brunswick (1781), que les déclarations du Convent prévu àWilhelmsbad en 1782, soient rédigées en français : « Ce projet doit être en français parce que c’estla langue de l’univers… » [6]

******************(1) Ce système devait à peu près tout à un seul homme, précisément au Reichsfreiherr, le baron

d’Empire Karl Gotthelf von Hund und Altengrotkau, seigneur de Lipse, chambellan de Son AltessseSérénissime l’Electeur de Cologne et de l’Electeur de Saxe, conseiller d’Auguste III de Pologne.Initié à l’âge de dix neuf ans à Francfort, c’est lors de son séjour à Paris, entre décembre 1742 etseptembre 1743 qu’il se convertit au catholicisme et que, selon ses dires, il fut reçu dans un «Chapitre Templier », en présence de Lord Kilmarnock, par un étrange et mystérieux Chevalier nomméEques a Penna Rubra (Chevalier au plumet rouge), dont il eut l’intime conviction qu’il s’agissait enréalité du prétendant Stuart, Charles Edouard ou Jacques III, Grand Maître de l’Ordre de Jérusalem,qui le nomma à cette occasion Grand Maître de la VIIIe Province. Ce dernier lui aurait confié que samission, d’après les ordres des « Supérieurs Inconnus », était de réformer, de « Rectifier » la Franc-maçonnerie.

(2) Georg Kloss résume, dans son Histoire de la Franc-maçonnerie en France (1852-1853), enune phrase heureuse l’origine et la nature des deux professions : « Quand Willermoz modifia en 1778au Convent de Lyon le Rituel de la Stricte Observance, il y ajouta les deux gradesthéosophiquesde Chevalier Profès et Grand Profès, dans lesquels étaient élaborées les idées de MartinezPasqualis, mais purifiées et anoblies. La pierre de fond en était le Traité de laRéintégration.» (Cf.G. Van Rijnberk, Martines de Pasqually, Sa vie, son œuvre, son ordre, Derain-Raclet, 1938, tome1er, p. 102).

(3) « La Grande Profession conserve en son entier le dépôt de la doctrine de la réintégration,voilà qui la définit philosophiquement. Le Régime ou le Rite écossais rectifié, dans la fouléeénigmatique de Martines de Pasqually et sous l’action de Jean-Baptiste Willermoz, a spécifié lascience spécifique de la franc-maçonnerie – qui est ‘‘la science de l’homme’’, selon Joseph deMaistre – en la doctrine de la réintégration, commune aux élus cohen, à Louis-Claude de Saint-Martin et aux ordres martinistes dignes de ce nom. » (R. Amadou, Martinisme,CIREM, 1997, pp.37 & 40).

(6) Code Maçonnique des Loges Réunies et Rectifiées de France, Tel qu’il a été approuvé parles Députés des Directoires au Convent National de Lyon 5778.

(4) Ibid. Le texte stipule ensuite : «Représenté par ces Corps préposés à l’administrationgénérale et particulière des différents districts et au maintien et à l’exécution de ses lois ;qu’aucune d’elles ne peut exister régulièrement, que par un consentement exprès des chefslégitimes de l’Ordre, constaté par la patente de constitution, qu’ils lui donnent la charge de seconformer aux lois, statuts et règlements de l’Ordre, sans laquelle tous les actes de la Logeseraient nuls et clandestins, et les rétributions qu’elle exigerait, une véritable concussion ; qu’envertu de cette constitution, la Loge acquiert à la vérité la faculté et le pouvoir de recevoirlégitimement au nom de l’Ordre dans les quatre grades Maçonniques, et de percevoir lesrétributions prescrites, mais que le produit de ces rétributions appartient proprement à l’Ordre engénéral, vu que les Loges n’agissent et ne peuvent agir qu’en vertu des pouvoirs qu’elles en ontreçus. »

(5) Ibid.(6) Joseph de Maistre, Mémoire au duc de Brunswick, 1782. http://directoirenationaldeslogesreuniesetrectifie.hautetfort.com/archive/2012/12/22/le-directoire-

national-rectifie-de-france-d-n-r-f.htmlPermalink: https://willermoz.com/2013/01/19/le-regime-ecossais-rectifie/

#20

RETOUR AUX FONDEMENTS DE LA RECTIFICATION | Le Régime EcossaisRectifié

RETOUR AUX FONDEMENTS DE LA RECTIFICATION

Jean-Baptiste Willermoz, 1782.Depuis le réveil complet du Régime en France au XXe siècle, force est de constater que les

principes de fonctionnement propre à l’Ordre, pourtant clairement définis, n’ont pas été respectés.On a voulu se servir des cadres obédientiels de la maçonnerie andersonienne afin de faire vivre le

Régime Rectifié. Et, à cet égard, la plupart des formes sous lesquelles vit le Régime actuellement nesont en rien conformes à son essence, mais de plus, y compris les formes structurelles distinguéessous le nom de «Grands Prieurés» qui sont en réalité éloignés bien souvent des critères propres de larectification tels que spécifiés dans le Code de 1778.

En effet, l’idée d’un « Grand Prieuré National » pour la nation Française par exemple, estincohérente, puisque la France selon le Code de 1778 est constituée de trois Provinces (IIed’Auvergne, IIIe d’Occitanie, Ve de Bourgogne) qui, théoriquement, devraient posséder chacune sonGrand Prieuré, ces trois Grands Prieurés devant être placés sous l’autorité d’un Grand MaîtreNational [1].

On est ainsi obligé de constater que depuis le réveil du Régime au XXe siècle – ceci dit sans

oublier ce que nous devons d’immense et d’important à ceux qui entreprirent de redonner vie auRégime, ainsi qu’aux institutions qui en incarnèrent et en incarnent encore l’esprit avec beaucoup devérité et de sincérité que nous ne contestons aucunement – la conception originelle du Code n’apresque jamais été suivie, entraînant des disfonctionnements significatifs dans la logiqueorganisatrice du Régime Ecossais Rectifié qui cessa, dès lors, de se penser comme un « Ordre », leramenant à un Rite réduit à une conception obédientielle absolument étrangère à l’esprit de larectification, même si imaginant en relever en usant de titres et dénominations issus du corpussémantique willermozien.

Mais ce premier constat se double d’un second, non moins significatif, qui découle presque dupremier et en est la conséquence quasi logique : l’essence de la rectification, outre un Rite original etune pratique spécifique s’exerçant en quatre grades formant la classe symbolique et un Ordreintérieur d’essence chevaleresque distingué en un état probatoire (Ecuyer Novice) et le grade deChevalier Bienfaisant de la Cité Sainte, c’estd’abord et avant tout un enseignement, c’est-à-direune «doctrine» selon le nom qui lui fut donné par Willermoz, enseignement savamment élaboré etintroduit lors du Convent des Gaules en 1778, ce que confirma de même le Convent de Wilhelmsbad

en 1782 [2]. Sans cette doctrine le Régime rectifié n’est plus !Sans cette doctrine le Régime se réduit à une coquille vide, à une écorce dont on aurait arraché le

noyau, une structure dénuée de sa substance puisque cette doctrine relève de l’enseignement sacré etinvariant d’un Ordre primtif [3]. Or cet enseignement, précisément, aujourd’hui se trouve menacé,puisque non seulement il est assez largement oublié et délaissé, et parfois, ce qui est plus grave,déformé, contredit, et même à certaines occasions, carrément nié, décrié et dénoncé en raison de sonchristianisme transcendant [4].

Cette double situation, sur le plan structurel et doctrinal est donc très inquiétante. Elle oblige à ceque nous puissions empêcher une dérive extrêmement préoccupante pour ce que représented’inestimable le dépôt willermozien, nous enjoignant à réagir, afin de répondre aux exigences duRégime dont nous avons le devoir, de par notre état de membres, d’être les gardiens et vigilantsprotecteurs.

Notre action est donc une volonté de retour aux sources du Convent des Gaules de 1778, en tentantnon pas de recréer une nouvelle structure au milieu de celles déjà existantes, mais de redonner à lanotion « d’Ordre » la place centrale qu’elle n’aurait jamais dû perdre, tout en insistant sur lecaractère fondamental de la doctrine qui forme, avec l’Ordre, un tout indissociable en une unionétroite et intime sachant que le lien intime avec la doctrine de l’Ordre représente, non une option dupoint de vue initiatique lorsqu’on est membre du Régime, mais relève d’un enseignement spirituelauquel il est nécessaire d’adhérer, faute de quoi on se met soi-même en dehors des critèresd’appartenance du système willermozien dont le rôle est, précisément, de préserver les élémentsdoctrinaux établis lors de sa fondation.

********************* (1) « Les Provinces réformées d’après le nouveau rite, sont divisées en Grands Prieurés. »

(Titre III, art. 3, Code Général des Règlement de l’Ordre des C.B.C.S., 1778).(2) Recès du Convent Général tenu à Wilhelmsbad (1782).(3) « Cet ordre par excellence, à défaut de le pouvoir nommer, ne peut être appelé que le haut

et saint ordre (…) » ordre par excellence détenteur des « des connaissances précieuses et secrètesqui découlent de la Religion primitive. » (Instruction d’Ecuyer Novice, 1778).

(4) « Le but de Willermoz était donc de préserver la doctrine dont Martines de Pasqually avaitété, selon que ce dernier lui avait enseigné, l’un des relais seulement ; maintenir, quand sombraitl’ordre des Elus Cohen, la vraie Maçonnerie selon le modèle que Martinès de Pasqually lui avaitrévélé comme l’archétype et que garantit une conformité doctrinale avec la doctrine de laréintégration. » (R. Amadou, Martinisme, CIREM, 1997, p. 36).

http://directoirenationaldeslogesreuniesetrectifie.hautetfort.com/archive/2012/11/20/retour-aux-

fondements-de-la-rectification.htmlPermalink: https://willermoz.com/2013/01/30/retour-aux-fondements-de-la-rectification/

#21

Sur le site du « Philosophe Inconnu | «Le Régime Ecossais Rectifié

La doctrine de la réintégration des êtresJean-Marc VivenzaLa doctrine de la réintégration des êtres, Martinès de Pasqually, Louis-Claude de Saint-Martin et

Jean-Baptiste Willermoz à la lumière de la pensée d’Origène.Présentation de l’éditeur : « Pour appréhender véritablement les enjeux de cette réflexion

doctrinale importante s’il en est, il convient de clarifier deux points principaux relatifs à lasensibilité en effet « origéniste » qui fut partagée par Martinès de Pasqually († 1774), Louis-Claudede Saint-Martin (1743-1803) et Jean-Baptiste Willermoz (1730-1824), de sorte que nous puissionscomprendre en quoi l’adhésion à leur doctrine représente, non une option du point de vue initiatiquelorsqu’on est membre de ses voies, mais relève d’un enseignement spirituel auquel il est nécessaired’adhérer, faute de quoi on se met soi-même en dehors des critères d’appartenance des Ordres dontle rôle est de préserver les éléments doctrinaux établis par leurs fondateurs.

Ainsi les trois études que nous publions touchant à la doctrine de la matière telle que soutenue parMartinès, Saint-Martin et Willermoz, font apparaître des thèses audacieuses relevant du « mysticismespéculatif », rendant évidentes des distances importantes avec l’enseignement des confessionschrétiennes, ce qui n’a rien de surprenant au regard des idées du courant illuministe qu’il nous fautconsidérer et admettre pour ce qu’il est, à savoir une voie initiatique extra ecclésiale possédant sonoriginalité et ses sources propres. Ces études ont pour but de susciter une certaine réaction etprovoquer chez le lecteur, en quelque sorte, une interrogation salutaire en forme de choc, puisquequ’une tendance se manifeste de façon de plus en plus insistante, en l’écrivant et le faisant savoir,visant à récuser les positions de l’illuminisme et à les désigner comme des déviances théologiques etdes hérésies dualistes. Nous avons donc jugé qu’il était temps de réagir en exposant les fondementsthéoriques de ces courants relatifs à la doctrine de la réintégration, avant que n’advienne uneincompréhension générale en forme de rejet à l’égard de la doctrine initiatique que véhicule lesstructures issues de la pensée martinésienne. »

Note de lecture : Jean-Marc Vivenza a le mérite de mettre en évidence une influence que peud’études portant sur la doctrine de la réintégration ont soulignée : celle d’Origène. Certes, LouisMoreau, dès 1850, avait reproché à Saint-Martin de reprendre deux erreurs importantes de cethéologien de l’Antiquité : la préexistence des âmes et la résipiscence des anges déchus. Mais peu dechercheurs se sont interrogés depuis sur la présence d’éléments rejetés par le christianisme officieldepuis plusieurs siècles dans les textes martinistes, que ce soient ceux de Martinès de Pasqually, deLouis-Claude de Saint-Martin ou de Jean-Baptiste Willermoz.

Jean-Marc Vivenza tente d’expliquer ici le regain d’intérêt que connaît le siècle des Lumières

pour la pensée d’Origène, notamment avec la traduction de son Traité sur les principes, publiée entre1739 et 1759. On regrettera toutefois qu’il n’ait pas poussé plus avant sa réflexion en s’interrogeantsur la présence de l’origénisme chez des auteurs tels que Saint-Georges de Marsais, Jacob Boehme,Pierre Poiret, et bien d’autres penseurs de l’illuminisme, chez qui ces idées sont présentes à desdegrés divers, et dont l’influence aurait pu parvenir jusqu’à Martinès de Pasqually et ses disciples.De même, la revendication d’une tradition secrète issue du christianisme primitif n’est pas rare dansla maçonnerie du XVIIIe siècle. Elle est présente chez les Rose-Croix d’Or d’ancien système, toutcomme chez les maçons qui voient dans les templiers ou les esséniens la source de leur tradition.Quoi qu’il en soit, les références évoquées par Jean-Marc Vivenza ne manquent pas d’intérêt.

S’intéressant également à notre époque, l’auteur montre que les théories d’Origène connaissent unregain d’intérêt depuis quelques années et recueillent les faveurs de quelques théologiens. D’unemanière générale, voici un ouvrage novateur, qui ouvre des perspectives intéressantes à ceux quis’attachent à l’étude des textes de la tradition martiniste.

D. Clairembaulthttp://www.philosophe-inconnu.com/Livres/vivenza-doctrine-de-la-reintegration.html

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#22

L’ Ordre des Chevaliers Bienfaisants de la Cité Sainte et sa finalité spirituelle véritable| Le Régime Ecossais Rectifié

L’Ordre des Chevalier Bienfaisant de la Cité Sainte, tel qu’il surgira de l’intention de son fondateurJean-Baptiste Willerlmoz (1730-1824), aura pour but d’incarner une « société » devant représenterune possibilité, pour « l’âme de désir », de s’agréger à un pieux regroupement, une organisationhiérarchisée et structurée, habitée par la juste connaissance des nécessités du temps et la parfaiteconscience de l’indispensable travail de « réconciliation » qui est à réaliser pendant la courte vie quinous a été donnée.

De ce fait, le frère qui en acceptera les règles d’obéissance, prononcera, au moment de sonarmement, un serment de fidélité à l’Ordre, et se liera définitivement à lui par des engagementsformels, posant à cet instant sacré sa main, en gage de sincérité, sur les Saintes Ecritures. Ilappartiendra, dès lors, à un corps organique, solide et unifié, à une communauté spirituelle possédantune authentique foi lui conférant une rare et remarquable verticalité. Progressant ensuite dans lerespect de ses devoirs, des impératifs que lui imposent son état, se revêtant de l’obéissance et selaissant lentement travailler par la « Parole » révélée, le Chevalier, communiant intérieurement au «sang du Christ », acceptera, et consentira avec joie, à sa transformation rédemptrice par le « lavagede régénération et le renouvellement de l’Esprit Saint, richement répandu sur nous par Jésus Christ,Notre Sauveur, afin que, ayant été justifiés par sa grâce nous devinssions héritiers selon l’espérancede la vie éternelle. » (Tite 3, 5-6).

Ces promesses de l’espérance de la vie éternelle participent d’ailleurs directement de l’aspirationpropre du frère du Régime, de chaque Chevaliers devenu capable de les appréhender comme unecertitude qui accompagne toutes ses actions et ses moindres pensées, puisqu’ayant posé ses deuxgenoux à terre, sur le sol poussiéreux de cette vallée de larmes pour pouvoir y prier le Christ enCroix qui nous purifia du péché de prévarication, et dont le Chevalier porte l’image sur son manteau,en un feu permanent transperçant l’immaculée blancheur du vêtement qui l’enveloppe et le protège.

I. Placés sous la Croix du ChristLa Croix du Christ est, à ce titre, l’unique levier de la « réintégration », elle en représente la

perspective et l’accomplissement, le modèle et le Principe. C’est dans son « mystère » que se cachel’ensemble de la doctrine, mais aussi l’intégralité de la Toute Puissance du Verbe de Dieu. Elleréincorpore, à la fois l’origine primitive et la destination, le premier Adam et le second, dans unquaternaire symbolique, une unité retrouvée, achevant et dissolvant définitivement, par l’effet de saforce salvatrice, les fers de la manifestation qui nous tenaient enchaînés dans cet univers dégradé,fers qui sont d’ailleurs amenées à disparaître lorsque la fin des temps surviendra, puisqu’ils nepossèdent aucune véritable réalité, aucune consistance ontologique propre : « L’univers créé, lorsque

le temps prescrit pour sa durée apparente sera accompli, tous les principes de vie, tant générale queparticulière, en seront retirés pour se réintégrer dans leur source d’émanation. (…) L’univers entiers’effacera aussi subitement que la volonté du Créateur se fera entendre ; de manière qu’il n’en resterapas plus de vestige, que s’il n’eut jamais existé. » (Instruction secrète).

La Croix annonce déjà ce moment, elle en est le vivant rappel, la constante mémoire, l’heureusecertitude ; elle est l’essence substantielle de la consécration du Chevalier, son viatique, le lieu de sarenaissance à l’exemple du « Phénix » qui surgit, resplendissant et rayonnant d’une vie nouvelle, dubois de son bûcher, là où il devait normalement être sacrifié.

II. L’héritage spirituel primitifLa constitution d’un Ordre, porteur et héritier d’une longue tradition, s’imposait donc pour Jean-

Baptiste Willermoz, afin que soit offert aux hommes, possédant une vraie noblesse de coeur maiscependant désorientés au sein d’une période incrédule et corrompue, de participer à l’oeuvresalutaire de réarmement spirituel et religieux, à la reconstruction des fondations du vrai Temple quin’est point fait de mains d’homme, et accomplir, par là-même, l’impérieux devoir imposé à ceux quine peuvent accepter, ou qui souffrent, de croupir dans le marasme existentiel sans chercher às’extraire de la ténébreuse geôle dans laquelle ils furent enfermés en venant en ce monde ; lieuterrible et trompeur dominé par celui qui en est le prince, et qui, surtout, détient sur ces domainespérilleux la gloire et l’autorité (Luc 4, 6).

Il y a donc quelque exagération, et une certaine erreur à parler purement et simplement de la «constitution » de l’Ordre des Chevaliers Bienfaisants de la Cité Sainte, dans le sens où Jean-BaptisteWillermoz donna simplement ce nom à une forme traditionnelle de transmission qu’il considéraitcomme extrêmement ancienne, bien plus antique encore que l’Ordre du Temple lui-même, qui en futcependant le détenteur à une certaine période de l’Histoire, et dont le Régime Rectifié conserveaujourd’hui l’héritage.

Cet Ordre, très ancien, qui se dissimula un temps sous le voile de la Franc-Maçonnerie, et quiresta et demeure caché au plus grand nombre, Willermoz le désigne sous le titre mystérieux de « Hautet Saint Ordre » ; Ordre primitif qui, « à défaut de pouvoir être nommé, ne peut être appelé que leHaut et Saint Ordre », à la base de la véritable initiation, et ne doit absolument pas être confonduavec les formes contingentes qu’empruntent, pour un temps limité, les institutions se consacrant àl’étude des « sciences sacrées » et à la perfection des hommes.

III. Sens authentique de la « Bienfaisance » et finalité véritable de l’OrdreD’ailleurs, dans la réponse polémique qu’il fit à l’Eques a Fascia, dans l’opposition, la

contestation et la mauvaise querelle qui lui étaient opposées, Willermoz ne dissimula point quel’intitulé de « Chevaliers Bienfaisants » qui avait été retenue pour dénommer les frères de l’OrdreIntérieur du Régime Rectifié, était en fait une élégante manière de désigner une société d’hommes seconsacrant à un but non uniquement tourné, de façon exclusive et prioritaire, sur l’exercice de lacharité publique, car quel aurait été le besoin pour cela de se réunir secrètement et tenir fermées et

closes, loin des yeux indiscrets, des réunions ayant pour « objet » de secourir les pauvres, ousoulager les malades et les nécessiteux, mais qu’il y avait, dans cette organisation, une finalité denature purement initiatique : « Il est donc vrai que la bienfaisance, telle qu’on l’entend, écrit leFondateur de l’Ordre de la Cité Sainte, n’est qu’un but accessoire, et ses allégories, ses emblèmes,sont les instructions bienfaisantes que l’Institution donne à ceux qu’elle reçoit en son sein ! S’ilsétaient des signes muets, ou n’étaient susceptibles que d’une interprétation relative à l’Ordre duTemple, je demanderais pourquoi recommander avec tant de soin, au Maçon, de les méditer ? UneSociété qui ne veut que soulager l’Humanité devrait-elle, pour atteindre ce but, se réunir dans untemple qui ne renferme que des emblèmes ? Pour faire du bien aux hommes, est-il besoin de mettre enusage des marques de cette nature ? Quand on ne veut que rassembler des secours pour les verser surl’indigent, on forme un bureau de charité et on ne s’occupe que de cet objet…» (Réponse auxassertions contenues dans l’ouvrage du R. F. L, Eques a Fascia, Prae + Loth, et Vis. Prus. Ausiae,ayant pour titre: De Conventu Generali Latomorum apud Aquas Wilhelminas, Imprimé à Lyon sur laminute déposée aux Archives, 1784.).

On prendra donc soin, en observant une particulière attention sur ce point clé, expliquant et sous-tendant toute l’entreprise willermozienne, de se souvenir que l’intention qui présida à l’action dudisciple lyonnais de Martinès de Pasqually, lors de la tenue des Convents constitutifs du RégimeEcossais Rectifié, fut de préserver et conserver un héritage fondamental, de nature doctrinal etopératif, et que c’est cet héritage qui constitue le coeur du Régime, mais également le vénérable etinestimable dépôt primitif détenu, précisément, par le « Haut et Saint Ordre ».

ConclusionIl est bien évident que la plus grande discrétion s’impose en ces matières, mais on nous autorisera

toutefois, pour la juste compréhension de cette question délicate entre toutes, une très courte citationde l’Instruction pour la réception des frères Ecuyers Novices de l’Ordre Bienfaisant des ChevaliersMaçons de la Cité Sainte, qui ne laisse planer aucun doute sur l’effectivité de cette origine : «L’institution maçonnique ne peut ni ne doit être confondue avec l’Ordre primitif et fondamental quilui a donné naissance ; ce sont en effet deux choses distinctes. L’Ordre primitif doit être secret, parcequ’il a un but essentiel qui est très élevé, que peu d’hommes sont dignes de connaître ; son origine estsi reculée, qu’elle se perd dans la nuit des siècles ; tout ce que peut l’institution maçonnique, c’estd’aider à remonter jusqu’à cet Ordre primitif, qu’on doit regarder comme le principe de la franc-maçonnerie ; c’est une source précieuse, ignorée de la multitude, mais qui ne saurait être perdue :l’un est la Chose même, l’autre n’est que le moyen d’y atteindre ; c’est sous ce point de vue, monB.A.F., qu’il faut considérer la franc-maçonnerie en général, et le Régime particulier auquel vousêtes attaché, si vous voulez en avoir une juste idée, et en retirer quelque fruit. »

Réponse d’Eques a Crucis Mysterio à un CBCS sur la Bienfaisance.http://directoirenationaldeslogesreuniesetrectifie.hautetfort.com/archive/2012/12/22/le-directoire-

national-rectifie-de-france-d-n-r-f.html

Permalink: https://willermoz.com/2013/02/11/l-ordre-des-chevaliers-bienfaisants-de-la-cite-sainte-et-sa-finalite-spirituelle-veritable/

#23

Adogmatique, vous avez dit adogmatique ! | Le Régime Ecossais Rectifié

Les dogmes de l’Eglise ont-ils autorité sur le Régime rectifié ?Le Grand Maître du GPDG, après avoir déclaré récemment que les sacrements de l’église étaient

nécessaires pour que les prières ne conduisent pas à l’illusion, rajoutait sans gêne, dans la dernièrelivraison des Cahiers Verts : «C’est le dogme qui est intangible, pas la doctrine. » (Cahiers verts,n°7, sept 2012).

Pour savoir de façon un peu plus précise ce que signifie cette déclaration, il suffit peut-être de seréférer aux critères exigés pour être membre du GPDG par son Grand Aumônier, et dont il vient, à lastupéfaction générale, de nous révéler la nature :

« En ce qui me concerne, pour la maçonnerie rectifiée, il faut et il suffit que l’impétrant confesse :– 1) la Divine Trinité : Père, Fils et Saint-Esprit ;– 2) la double nature du Christ, vrai Dieu et vrai homme (ce qui exclut les nestoriens et les ariens)

;– 3) la résurrection des morts (ce qui exclut les vivenzarques). Ceci est ma conception propre qui

revendique d’être intégriste. »(A Tribus Liliis, sur les réseaux sociaux).Ces propos tenus par celui qui exerce la charge officielle de Grand Aumônier du GPDG, non-

démentis pour l’instant, auraient donc pour conséquence, d’exclure, pour l’instance qui présida auréveil du RER en 1935, Jean Baptiste Willermoz du Régime dont il est le fondateur !

http://lalecondelyon.hautetfort.com/archive/2013/02/06/sur-une-deviance-dogmatique-au-sein-du-

regime-ecossais-recti.html

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#24

La doctrine de l’Ordre et la « sainte religion chrétienne » | Le Régime Ecossais Rectifié

Il faut le reconnaitre, il perdure d’importantes confusions à propos du Régime Ecossais Rectifié, surlequel de très nombreuses méprises sont énoncées, troublant notablement la nature même de cetOrdre, car s’en est un, qui est certes chrétien en son essence, mais d’un christianisme dit« transcendant », qui n’a strictement rien à voir avec une conception dogmatique qui est étrangèreau système initiatique édifié par Jean-Baptiste Willermoz, en effet dépositaire d’un enseignementdoctrinal introduit lors du Convent des Gaules en 1778.

a) Une double stratégie initiatique Il y a clairement, afin d’accéder au cœur doctrinal du Régime rectifié, que ce dernier désigne sous

le nom de « Sanctuaire », une double stratégie à l’intérieur du système édifié par Willermoz : – 1°) celle visant à accroitre dans les âmes leur adhésion à la « sainte religion

chrétienne » ;– 2°) une autre leur faisant entrevoir des vérités contenues secrètement par le

christianisme défini comme étant une authentique initiation. Ainsi, de la formule du Serment au Grade d’Apprenti : « …je m’engage….d’être fidèle à la

sainte religion chrétienne…» (Rituel du 1er Grade, 1802), jusqu’à la Profession de Foi deChevalier Bienfaisant de la Cité Sainte : « faisant profession publique de la religion chrétienne,ainsi que de la doctrine et des vérités évangéliques qu’elle enseigne… » (Rituel du 6e Grade deC.B.C.S., 1784), se retrouvent les mêmes déclarations faisant proclamer aux Frères leur attachementà la religion chrétienne et ses vérités.

C’est ce que souligne la Règle maçonnique : « Rends donc grâce à ton Rédempteur ; prosterne-

toi devant le Verbe incarné, et bénis la Providence qui te fit naître parmi les chrétiens. Professeen tous lieux la divine Religion du Christ, et ne rougis jamais de lui appartenir. L’Evangile est labase de nos obligations ; si tu n’y croyais pas, tu cesserais d’être Maçon. » (Règlemaçonnique ARTICLE I. Devoirs envers Dieu et la Religion, 1802).

b) Les confusions issues de la double stratégie initiatique

Cette double stratégie, mélant adhésion au christianisme et approche de connaissances secrètes –qui égare certains et les conduit à prendre l’écorce pour le noyau – ne vise en réalité qu’à laisserentrevoir le voile posé sur des vérités cachées de la religion chrétienne, qui la perfectionnent,l’enrichissent et l’éclairent sur plusieurs points particuliers.

On remarquera, par exemple, que la Profession de Foi des Chevaliers reste très évasive sur la

nature de la vie post mortem, faisant dire à l’impétrant : « Je crois à la vie future et éternelle, danslaquelle chacun recevra suivant qu’il l’aura mérité », impétrant qui récitera croire à l’Eglise deceux réunis par la foi, non en des « dogmes », mais en Jésus-Christ : « Je crois enfin à la SainteEglise universelle et apostolique, visible et invisible, des membres réunis par la foi en notreSeigneur et divin Maître Jésus-Christ. »

Et il n’est pas étonnant que les termes de cette Profession de Foi soient très évasifs, puisque

précisément, sur ce sujet, l’enseignement ultime de l’Ordre soutient que l’existence de l’homme aprèsle jugement dernier, lors de la résurrection des morts, sera d’une nature non-corporelle, immatérielleet purement spirituelle.

On est donc là, objectivement, face à des positions qui ne relèvent pas du dogme de l’Eglise, mais

participent d’un corpus doctrinal qui confère au Régime rectifié une nature singulière dans ledomaine du christianisme, corpus sensible à tous les Grades évidemment, mais qui est conservépleinement dans le « Sanctuaire » plus haut évoqué.

Certaines allusions dans l’Instruction du rituel du dernier Grade ostensible du Régime sont, à cet

égard, fondamentales. On y lit des indications extrêmement importantes qu’il convient de ne pasnégliger sous peine de se méprendre entièrement sur la nature du Régime rectifié et du christianismeque l’on y enseigne.

c) Le Régime rectifié ouvre sur le « Sanctuaire » Voici ce qu’on peut entendre :

« Comme Maçon symbolique, vous en avez étudié la structureet les dehors ; comme Novice vous êtes entré dans le porche ;comme Chevalier, vous venez d’être admis dans le Templemême et les portes du sanctuaire vous sont ouvertes ».(Instruction, Rituel du 6e Grade de C.B.C.S., 1784).

Les portes du « Sanctuaire »….. quel Sanctuaire ? Un avertissement prévient pourtant que tous ne sont pas appelés vers ces domaines : « Mais, mon

Bien-Aimé Frère, tous les Chevaliers ne sont pas pénétrés des rayons qui en émanent ; il en estqui, victimes de l’habitude et des préjugés, ferment les yeux avec dédain et retournent sur leurspas ; d’autres en entrevoient l’éclat et la beauté, sans avoir le courage de les fixer constamment ;d’autres enfin, jugeant mieux de leur origine et de la noblesse de leur être, ne négligent rien pourse rendre dignes de les contempler. Soyez du nombre de ces derniers, mon Bien-Aimé Frère. Parune scrupuleuse attention sur vous-même, écartez les préventions, consultez vos forces et surtout,ne négligez pas votre intelligence, ce flambeau lumineux pour ceux dont l’amour de la Véritéest l’unique mobile ». (Ibid.).

Il y a donc un « Sanctuaire » nous apprend l’Instruction de C.B.C.S., où tous les Chevaliers ne

sont appelés, détenteur des rayons des « rayons de la Vérité », ouvert à ceux qui ne négligent pasd’exercer leur intelligence ayant pour mobile l’amour de la Vérité.

Voilà qui est très intéressant. d) L’Ordre est une classe d’instruction secrète L’Instruction donne un avertissement solennel au nouveau Chevalier, avertissement que beaucoup

ne comprennent pas : « vous redevenez apprenti dans un ordre de choses dont le seul vrai Maîtreest au ciel », et par delà cet avertissement, l’Ordre confesse une chose cruciale :

« l’Ordre des Chevaliers Maçons de la Cité Sainte vous fait unaveu qui ne vous donne aucun droit : il est une classed’instruction qui fut longtemps tenue secrète et à laquellecelui qui vous en parle dans ce moment n’a peut-être et n’aurapeut-être jamais part ». (Instruction C.B.C.S.,Ibid.).

L’Ordre des C.B.C.S., estune « classe d’instruction qui fut longtemps tenue secrète » ? Les paroles deviennent de plus en plus mystérieuses assurément !

e) L’initiation rectifiée est dépositaire d’une « Science universelle » Si nous poursuivons notre examen, pour savoir sur quoi porte cette instruction tenue secrète, on

tombe sur cette indication : « l’Initiation parfaite doit être une initiation à des connaissancesgénérales et plus élevées.» (Ibid.).

Comment, l’initiation parfaite, dont on sait qu’elle est détenue au sein du Sanctuaire selon ce qu’en

dit positivement l’Instruction, relèverait de connaissances plus élevées que celles délivrées auxChevaliers, et qui nous révèlerait des lumières sur le christianisme sous le nom de « Scienceuniverselle » ?

C’est en effet exactement ce que soutient le rituel des C.B.C.S. :

« Les connaissances parfaites nous furent apportées par la Loispirituelle du christianisme, qui fut une initiation aussimystérieuse que celle qui l’avait précédée : c’est dans celle-làque se trouve la Science universelle. Cette Loi dévoila denouveaux mystères dans l’homme et dans la nature, elle devintle complément de la science. Elle est la plus sublime, la plusélevée, la plus parfaite de toutes, enfin la seule à désirer pourun vrai Chevalier de la foi. » (Ibid.)

Résumons-nous : Par delà les vérités de la sainte religion chrétienne, le christianisme est donc une

initiation mystérieuse détenteur de connaissances parfaites connues sous le nom de « Scienceuniverselle », dont le Sanctuaire de l’Ordre est le dépositaire.

C’est tout à fait ça, et c’est en effet ce qu’affirme clairement l’Instruction destinée aux C.B.C.S. Conclusion : « il existe encore des Maîtres dans cette Science importante… » Très bien mais comment accéder à ce Sanctuaire et recevoir les lumières de cette « Science

universelle », dont on aura compris qu’il s’agit d’un enseignement, c’est-à-dire d’une « doctrine » ? Voici la réponse de l’Ordre ; il n’y en aura point d’autre plus explicite, puisque le 6e Grade de

Chevalier Bienfaisant de la Cité Sainte, est le dernier des Grades ostensibles du Régime rectifié. Ce qui est dit à cet instant, est donc tout à la fois peu et beaucoup. Lisons avec attention :

« Tout ce que nous savons, tout ce que nous pouvons vousrévéler de ce secret, c’est qu’il existe encore des Maîtres danscette Science importante : vous apprendre à les chercher, vousdire à quels signes ils peuvent vous reconnaître, c’estsatisfaire à tous nos engagements, et, nous osons le dire, vousavoir rendu le plus important service que l’homme puisseattendre de ses semblables ». (Ibid.)

Comme l’écrivait Joseph de Maistre, à qui nous laisserons nous délivrer les derniers mots sur

cette question : « Que d’autres que leur génie appelle aux contemplations métaphysiques cherchentdans la nature même des choses les preuves de notre doctrine… » (Mémoire au duc deBrunswick-Lunebourg (1782).

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#25

La Profession du Régime rectifié doit-elle disparaître ? | Le Régime Ecossais Rectifié

A propos d’un article de Pierre Noël sur la Professiondans Renaissance Traditionnelle.

La dernière livraison de la revue Renaissance Traditionnelle, n° 168 octobre 2012, (pp. 231-267), propose un article intitulé : « La Profession » sous la signature de Pierre Noël. Ce sujet, plusqu’aucun autre, est évidemment de nature à intéresser les maçons du Régime rectifié, et il est doncnormal que nous nous soyons penchés sur cette analyse afin d’examiner ce que contient ce texte,d’autant que les études sur la classe « non-ostensible » du système fondé par Willermoz ne sont pasexcessivement nombreuses, ce qui est sans doute conforme au caractère secret qui caractérise cesdomaines.

a) Place de la Profession au sein du Régime rectifiéL’article de Pierre Noël débute par un court exposé historique de la Profession, montrant en quoi

elle se rattache, du moins pour sa forme, à la Profession de la Stricte Observance, d’où elle tired’ailleurs son nom, mais en substituant à ce qui était un engagement définitif envers l’Ordre et unedéclaration d’adhésion à la foi chrétienne, un enseignement tiré des thèses de Martinès de Pasqually.

Ce travail, extraordinaire d’intelligence et de patience, fut l’œuvre de Jean-Baptiste Willermoz,et devint quasi « officiel », lors du Convent des Gaules en 1778, au moment où fut institué l’Ordredes Chevaliers Bienfaisants de la Cité Sainte.

L’enseignement de la Profession, soutenait Willermoz, « …est une initiation particulière quiconsiste en diverses instructions écrites dans lesquelles on développe les principes et les basesfondamentales de l’Ordre, et dans lesquelles on explique les emblème, symboles et cérémonies dela Maçonnerie symbolique. » [1]

On comprend ainsi que cet enseignement occupe une place décisive et centrale dans lacompréhension de ce que représente le Régime rectifié sur le plan initiatique. Cela semble évident.

b) Une bonne mise en lumière du caractère non-dogmatique de la ProfessionPierre Noël, voit bien, et démontre clairement dans son article, que cet enseignement, s’il est basé

sur le christianisme, néanmoins les prêtres et l’Eglise l’ignorent puisqu’ils « ont perdu tout sens del’ésotérisme depuis des siècles » (p. 244), soulignant que les mots « Christ » et « christianisme »(de même que « religion chrétienne ») « sont absents des 42 pages manuscrites des Instructionsaux Grands Profès » (p. 250), tout en rajoutant que seule la croyance en Dieu et l’immortalité del’âme est exigée au sommet de l’Ordre, la sainte religion chrétienne étant mentionnée dans leserment « mais sans référence aux dogmes » ( p. 249).

Tout ceci est parfaitement exact, et conforme aux Articles 14 et 16 des Statuts et Règlements del’Ordre des Grands Profès, dont est en effet, absente toute demande d’adhésion aux dogmes de

l’Eglise et des conciles.On appréciera ainsi à ce titre, le rappel des termes de la lettre de Willermoz datant de 1807 [2],

qui ne peuvent que surprendre ceux « qui ne voient dans le RER que sa connotation chrétienne » (p.263), puisqu’il est affirmé dans ce courrier que les enseignements de la Profession « ne peuventservir à qui se contente de le religion traditionnelle, pas plus qu’à celui qui ne jure que parl’enseignement de l’Eglise » (p. 263), mais « sont utiles voire nécessaires aux tièdes, à tous ceuxqui croient vaguement en Dieu sans être autrement convaincus des enseignements et dogmes del’Eglise. » (Ibid.).

c) Méconnaissance de la doctrine de la ProfessionPlus délicats les autres points abordés dans cet article sur la Profession.Si le copier/coller des 40 articles des Statuts et Règlements (pp. 244-257), est d’un intérêt

relatif pour le sujet de la nature de la Profession, la méconnaissance de ce que représentel’enseignement doctrinal de la classe non-ostensible, va se révéler fatale au raisonnement développépar Pierre Noël.

En effet, si Pierre Noël admet bien que « le RER est remarquablement bâti au tour de la doctrineésotérique de Martines » (p. 242), c’est pour étrangement mettre rapidement en garde sur le fait queMartinès n’est pas un « maître non exclusif », et que son enseignement ne « dépasse guère Plotin etles gnostiques » (p. 243).

A partir de ce jugement, aussi hâtif que partial, est ainsi entièrement évacuée de l’article, quiaurait pu être intéressant, la dimension théorique de la doctrine de la Grande Profession, dont lespropos de conclusion vont montrer qu’à partir de cet oubli important – qui touche d’ailleurs la quasitotalité des structures qui aujourd’hui pratiquent le Rite écossais rectifié – on ne peut qu’aboutir à unetotale incompréhension de ce que signifie du point de vue initiatique le système édifié par Willermozau XVIIIe siècle.

Certes sont bienvenues les explications sur la fabrication d’une Grande Profession imaginaire, àcaractère liturgique et sacerdotal, par Robert Ambelain (des extraits du rituel sont reproduits page260 ss.), et elles peuvent s’avérer bénéfiques puisque faisant apparaître les confusions – bien enrapport avec l’esprit qui dominait au milieu du XXe siècle en ces domaines – qui depuis n’ont eu decesse de croître, au point de faire surgir des dizaines de lignées d’une pseudo-Profession apocryphequi a proliféré de façon exponentielle en milieu maçonnique, quoiqu’on puisse noter une surprenantecroyance en la qualité de Grand Profès de Georges Bogé de Lagrèze, une fois Grand Profès en1932 (p. 258), une autre foi en 1937 (p. 258, note 42), alors que cette qualité de Profès, douteuse, n’ajamais pu être ni renseignée ni établie ?

Mais le plus problématique, pour le moins, se trouve dans la conclusion de cet article (« VII. Uneréflexion finale »), qui synthétise les propos parsemés à plusieurs endroits du texte, et dont unephrase en est le parfait résumé : La Grande Profession a-t-elle encore un sens ?

d) Peut-on encore adhérer à la doctrine du Régime rectifié ?

Tout provient, nous l’avons déjà dit, de la méconnaissance, volontaire ou involontaire, de PierreNoël à l’égard de ce que représente, sur le plan théorique, l’enseignement de la Grande Profession,considérant que « personne n’est prêt à adhérer à la doctrine de Martines », pour la simple raisonqu’elle est « l’expression mythologique de la veine des écrits apocalyptiques des premiers siècles,des manuscrits de Nag-Hammadi », ceci aboutissant à un jugement brutal : « A quoi bon, dès lors,établir une classe secrète, si cela ne sert qu’à transmettre un savoir mort ou à satisfaire laconvoitise de chasseurs de ruban ? » (p. 262).

On perçoit bien le caractère terriblement destructeur pour le Régime rectifié d’un telraisonnement arbitraire, refusant, par l’effet d’un a priori partial envers l’enseignement doctrinalde l’Ordre, que l’on puisse de nos jours conférer un quelconque crédit aux Instructions secrètes,regardées comme «un savoir mort» (sic !). Pierre Noël écrit donc logiquement : « Ne peuventadhérer à la position de Willermoz que ceux qui lisent les Instructions au premier degré, lesacceptent à la lettre, y croient et se les incorporent comme parole d’évangile ou vérité scientifique(au sens que le patriarche lyonnais donnait à ce terme). » (p. 264).

Pourtant, quoique puisse en penser Pierre Noël, et sans d’outre bien d’autres avec lui, tel étaitbien le souhait du fondateur du Régime rectifié, puisque en effet : « Jean-Baptiste Willermoz partaitdu principe que l’enseignement des instructions étaient vérité factuelle, incontestable et nonexpression symbolique ! » (p. 263). Il était donc bien question d’accepter les Instructions commel’expression de la vérité initiatique par excellence pour les Frères de l’Ordre, selon ce que déclaraitpositivement Willermoz : « La doctrine des Grands Profès […] n’est point un système hasardéarrangé comme tant d’autres suivant des opinions humaines ; elle remonte…jusqu’à Moïse … LesInstructions sont un extrait fidèle de cette Sainte Doctrine parvenue d’âge en âge par l’Initiationjusqu’à nous.» [3]

Mais Pierre Noël, qui n’hésite pas à mélanger les questions et s’engage dans des amalgames àl’équilibre, disons « hasardeux » pour rester charitable, signale que « La Profession peut mêmeservir de marchepied aux grades coen qui conduisent à la pratique de ce qu’il faut bien appeler dela magie, malgré les dénégations des thuriféraires » (p. 264). Dès lors pour lui s’impose uneconviction dont il tente de convaincre son lecteur, en une formule stupéfiante qui frise avec lacaricature : « Qui peut donc adhérer aux Instructions de Martines revues par Willermoz ? » (ibid.).

On le voit, par ignorance de ce que représente effectivement, dans sa richesse herméneutique, saprofondeur initiatique et sa perspective spirituelle, l’enseignement doctrinal de la Profession, réduiten une phrase à « l’expression mythologique de le veine des écrits apocalyptiques des premierssiècles, des manuscrits de Nag-Hammadi », Pierre Noël aboutit à une position qui est la suivante :« A quoi bon dès lors constituer un collège élitiste et secret, dans le seul but, la seule fonction,serait d’étudier et de commenter un texte qui relève de l’épistémologie, sinon de l’archéologie dela pensée ? » (p. 264).

Conclusion : faut-il vraiment que disparaisse la Profession ?

On ne saurait certes affirmer proposition plus contraire à l’esprit du Régime rectifié, plus inexactesur le plan théorique, plus erronée par rapport à ce que représente l’œuvre réalisée par Jean-BaptisteWillermoz, car le système issus de la Réforme de Lyon a tout de même était conçu, il semble vital dele rappeler, pour être le dépositaire de la doctrine de la réintégration au moment où l’Ordre desélus coëns disparaissait, ainsi que le précisa fort justement en son temps Robert Amadou : « Le butde Willermoz était donc de préserver la doctrine dont Martines de Pasqually avait été, selon quece dernier lui avait enseigné, l’un des relais seulement ; maintenir, quand sombrait l’ordre desElus Cohen, la vraie Maçonnerie selon le modèle que Martinès de Pasqually lui avait révélécomme l’archétype et que garantit une conformité doctrinale avec la doctrine de la réintégration.» [4]

Il convient donc d’y insister une fois encore : dépossédé de l’enseignement des Instructionssecrètes, le Régime rectifié est vidé de son sens et de son essence, car tous ses mystères, la valeur deses loi numériques, la signification de ses Instructions à tous les grades, ses symboles ainsi quel’ensemble de son architecture spirituelle, ne trouvent leur explication uniquement, et nulle partailleurs, que dans la doctrine de la classe non-ostensible.

Mais au fond Pierre Noël, qui pourtant ne fait pas de l’humour noir, a raison : « A quoi sert deconserver un grade à la recherche de sa raison d’être puisque… il n’en est pas un ? »

Et il vrai, et sur ce point nous sommes, quoique paradoxalement, en parfait accord avec PierreNoël, puisque la distance est devenue objective et réelle aujourd’hui avec l’enseignement du Régime,il est donc absolument inutile que les formes contemporaines sous leurs diverses désignations quipratiquent le rectifié, s’encombrent de connaissances qu’elles ne comprennent plus, ou auxquelleselles ne souhaitent pas adhérer, en s’alourdissant d’une classe qui ne leur est d’aucune utilité.

Certes l’article de Pierre Noël se conclut par des hypothèses, dont l’une consiste à suggérer quecette Profession devienne une sorte de lieu de rencontre discret réservé aux dignitaires rectifiés,leur permettant de dépasser les limitations obédientielles : «le but réel pourrait être … de permettreà des dignitaires de haut niveau de se rencontrer en toute discrétion, quels que soient leursobédiences et grands prieurés…» (p. 264).

Tout ceci donne au final des propositions qui ne sont pas très sérieuses, et surtout totalementéloignées de l’esprit du système willermozien.

«La question [qui] demeure » (p. 264), pour reprendre l’ultime phrase de cet article, c’est-à-direla question authentique car essentielle pour la perspective initiatique de l’œuvre édifiée au XVIIIesiècle par Jean-Baptiste Willermoz, est en réalité la suivante : que deviendrait le Régime rectifiésans l’enseignement doctrinal de l’Ordre ?

La réponse est très simple, mais assez désespérante : un rite maçonnique réduit à l’état de vestige,une ruine vénérable, une enveloppe creuse, morte et vide…en réalité un sépulcre.

Il serait de la sorte infiniment prudent, avant que de s’aventurer dans des conclusions trop rapidessur un sujet qui mérite d’être étudié avec grande attention, et dont ce récent article de Pierre Noël

publié dans Renaissance Traditionnelle n’évite malheureusement pas l’écueil, de se remettre enmémoire le solennel avertissement de Willermoz : « Cette Doctrine a toujours été la base desInitiations (…) mais cette science mystérieuse et sacrée, la connaissance en est un crime pourceux, qui négligent d’en faire usage…. » [5]

Notes.1. J.-B. Willermoz, Lettre à la Triple Union de Marseille, 1807 (« article secret à ma lettre du

1er septembre 1807 », [° 173], BNF, fm 292.2. Ibid.3. Jean-Baptiste Willermoz, Statuts et Règlement de l’Ordre des Grands Profès, Ms 5.475, BM

Lyon.4. R. Amadou, Martinisme, CIREM, 1997, p. 36.5. Jean-Baptiste Willermoz, Instructions secrètes des Chevaliers Grands Profès, fonds Georg

Kloss, Bibliothèque du Grand Orient des Pays Bas, à La Haye [1er catalogue, section K, 1, 3]. http://semperrectificando.wordpress.com/2013/03/07/la-profession-du-regime-rectifie-doit-elle-

disparaitre/http://directoirenationaldeslogesreuniesetrectifie.hautetfort.com/

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#26

Fidélité à la patente de 1935 : La vraie légitimité ! | Le Régime Ecossais Rectifié

COMMUNIQU É

Le Directoire National Rectifié de France (D.N.R.F.), rappelle que le réveil du Régime rectifiéles 20 et 23 mars 1935 en France, a été effectué par le Grand Prieuré d’Helvétie, au titre du« Grand Directoire des Gaules » dont il se veut l’héritier en raison de son histoire et de sesqualifications, entendu que ce réveil fut décidé, selon ce que déclare la Charte-Patente délivrée parle G.P.I.H. : « après que les requérants eurent pris, tant en leur nom qu’au nom de leurs mandants,l’engagement solennel de pratiquer le Rite Écossais Rectifié en conformité des statuts de l’Ordretel qu’il est encore en usage en Suisse, et notamment de maintenir dans leur intégralité lesdécisions arrêtées aux divers Convents de Kohlo, en 1772, de Wilhelmsbad, en 1782, et desGaules, en 1778 ». [1]

Le Directoire National Rectifié de France, a donc été constitué le 15 décembre 2012 à Lyondans le but de « pratiquer le Rite Écossais Rectifié en conformité des statuts de l’Ordre », etensouhaitant – dans la fidélité à l’esprit qui présida à la constitution du Grand Directoire des Gaules en 1935 – que soient « maintenues dans leur intégralité les décisions arrêtées aux diversConvents de l’Ordre rectifié », puisque ayant constaté le non respect qui est advenu avec« l’engagement solennel » qui accompagnait pourtant le réveil du Régime, afin qu’il soit pratiqué etmaintenu en conformité avec les Statuts de l’Ordre et les décisions de ses Convents fondateurs.

En conséquence, le Directoire National Rectifié de France se place ainsi dans la continuité destermes fixés par le Grand Prieuré d’Helvétie au Grand Directoire des Gaules, étant entendu que :« Le Grand Prieur d’Helvétie, ès qualité, a expressément reconnu le Grand Directoire des Gaulescomme puissance régulière, autonome et indépendante du Régime Rectifié en France (…). » [2]

Le Directoire National Rectifié de France,

Lyon, le 20 mars 2013.Document téléchargeable :

http://directoirenationaldeslogesreuniesetrectifie.hautetfort.com/media/01/02/2363718085.2.pdfpour le réveil du Régime Écossais Rectifié en France

Notes.1. Cf. CHARTE CONSTITUTIVE & LETTRES PATENTES pour le réveil du Régime

Écossais Rectifié en Francesous l’obédience du Grand Directoire des GaulesGrande ChancellerieOr. de Genève, Fait et signé en double exemplaire sous les Sceaux du Grand Prieuré Indépendantd’Helvétie, du Grand Directoire Écossais Rectifié et de la Préfecture de Genève, à Genève, et à

Paris, les 20 et 23 mars 1935. 2. Ibid. La Charte-Patente stipulait : « avec les pouvoirs les plus étendus pour créer en ce pays

toutes Préfectures, Commanderies, Loges de Saint-André et éventuellement, toutes Logessymboliques du Rite Rectifié sous son obédience, et a salué en la personne du T Rév F ChevBienfaisant de la Cité Sainte, Docteur Camille Savoire, in ordine eques a fortitudine, le premierGrand Prieur, Grand-Maître National. »Permalink: https://willermoz.com/2013/03/20/fidelite-a-la-patente-de-1935-la-vraie-legitimite/

#27

L’ Ordre des Chevaliers Bienfaisants de la Cité Sainte et sa finalité spirituelle véritable.| Le Régime Ecossais Rectifié

L’Ordre des Chevalier Bienfaisant de la Cité Sainte, tel qu’il surgira de l’intention de son fondateurJean-Baptiste Willerlmoz (1730-1824), aura pour but d’incarner une « société » devant représenterune possibilité, pour « l’âme de désir », de s’agréger à un pieux regroupement, une organisationhiérarchisée et structurée, habitée par la juste connaissance des nécessités du temps et la parfaiteconscience de l’indispensable travail de « réconciliation » qui est à réaliser pendant la courte vie quinous a été donnée.

De ce fait, le frère qui en acceptera les règles d’obéissance, prononcera, au moment de sonarmement, un serment de fidélité à l’Ordre, et se liera définitivement à lui par des engagementsformels, posant à cet instant sacré sa main, en gage de sincérité, sur les Saintes Ecritures. Ilappartiendra, dès lors, à un corps organique, solide et unifié, à une communauté spirituelle possédantune authentique foi lui conférant une rare et remarquable verticalité. Progressant ensuite dans lerespect de ses devoirs, des impératifs que lui imposent son état, se revêtant de l’obéissance et selaissant lentement travailler par la « Parole » révélée, le Chevalier, communiant intérieurement au «sang du Christ », acceptera, et consentira avec joie, à sa transformation rédemptrice par le « lavagede régénération et le renouvellement de l’Esprit Saint, richement répandu sur nous par Jésus Christ,Notre Sauveur, afin que, ayant été justifiés par sa grâce nous devinssions héritiers selon l’espérancede la vie éternelle. » (Tite 3, 5-6).

Ces promesses de l’espérance de la vie éternelle participent d’ailleurs directement de l’aspirationpropre du frère du Régime, de chaque Chevaliers devenu capable de les appréhender comme unecertitude qui accompagne toutes ses actions et ses moindres pensées, puisqu’ayant posé ses deuxgenoux à terre, sur le sol poussiéreux de cette vallée de larmes pour pouvoir y prier le Christ enCroix qui nous purifia du péché de prévarication, et dont le Chevalier porte l’image sur son manteau,en un feu permanent transperçant l’immaculée blancheur du vêtement qui l’enveloppe et le protège.

II. Placés sous la Croix du ChristLa Croix du Christ est, à ce titre, l’unique levier de la « réintégration », elle en représente la

perspective et l’accomplissement, le modèle et le Principe. C’est dans son « mystère » que se cachel’ensemble de la doctrine, mais aussi l’intégralité de la Toute Puissance du Verbe de Dieu. Elleréincorpore, à la fois l’origine primitive et la destination, le premier Adam et le second, dans unquaternaire symbolique, une unité retrouvée, achevant et dissolvant définitivement, par l’effet de saforce salvatrice, les fers de la manifestation qui nous tenaient enchaînés dans cet univers dégradé,fers qui sont d’ailleurs amenées à disparaître lorsque la fin des temps surviendra, puisqu’ils ne

possèdent aucune véritable réalité, aucune consistance ontologique propre : « L’univers créé, lorsquele temps prescrit pour sa durée apparente sera accompli, tous les principes de vie, tant générale queparticulière, en seront retirés pour se réintégrer dans leur source d’émanation. (…) L’univers entiers’effacera aussi subitement que la volonté du Créateur se fera entendre ; de manière qu’il n’en resterapas plus de vestige, que s’il n’eut jamais existé. » (Instruction secrète).

La Croix annonce déjà ce moment, elle en est le vivant rappel, la constante mémoire, l’heureusecertitude ; elle est l’essence substantielle de la consécration du Chevalier, son viatique, le lieu de sarenaissance à l’exemple du « Phénix » qui surgit, resplendissant et rayonnant d’une vie nouvelle, dubois de son bûcher, là où il devait normalement être sacrifié.

II. L’héritage spirituel primitifLa constitution d’un Ordre, porteur et héritier d’une longue tradition, s’imposait donc pour Jean-

Baptiste Willermoz, afin que soit offert aux hommes, possédant une vraie noblesse de coeur maiscependant désorientés au sein d’une période incrédule et corrompue, de participer à l’oeuvresalutaire de réarmement spirituel et religieux, à la reconstruction des fondations du vrai Temple quin’est point fait de mains d’homme, et accomplir, par là-même, l’impérieux devoir imposé à ceux quine peuvent accepter, ou qui souffrent, de croupir dans le marasme existentiel sans chercher às’extraire de la ténébreuse geôle dans laquelle ils furent enfermés en venant en ce monde ; lieuterrible et trompeur dominé par celui qui en est le prince, et qui, surtout, détient sur ces domainespérilleux la gloire et l’autorité (Luc 4, 6).

Il y a donc quelque exagération, et une certaine erreur à parler purement et simplement de la «constitution » de l’Ordre des Chevaliers Bienfaisants de la Cité Sainte, dans le sens où Jean-BaptisteWillermoz donna simplement ce nom à une forme traditionnelle de transmission qu’il considéraitcomme extrêmement ancienne, bien plus antique encore que l’Ordre du Temple lui-même, qui en futcependant le détenteur à une certaine période de l’Histoire, et dont le Régime Rectifié conserveaujourd’hui l’héritage.

Cet Ordre, très ancien, qui se dissimula un temps sous le voile de la Franc-Maçonnerie, et quiresta et demeure caché au plus grand nombre, Willermoz le désigne sous le titre mystérieux de « Hautet Saint Ordre » ; Ordre primitif qui, « à défaut de pouvoir être nommé, ne peut être appelé que leHaut et Saint Ordre », à la base de la véritable initiation, et ne doit absolument pas être confonduavec les formes contingentes qu’empruntent, pour un temps limité, les institutions se consacrant àl’étude des « sciences sacrées » et à la perfection des hommes.

III. Sens authentique de la « Bienfaisance » et finalité véritable de l’OrdreD’ailleurs, dans la réponse polémique qu’il fit à l’Eques a Fascia, dans l’opposition, la

contestation et la mauvaise querelle qui lui étaient opposées, Willermoz ne dissimula point quel’intitulé de « Chevaliers Bienfaisants » qui avait été retenue pour dénommer les frères de l’OrdreIntérieur du Régime Rectifié, était en fait une élégante manière de désigner une société d’hommes seconsacrant à un but non uniquement tourné, de façon exclusive et prioritaire, sur l’exercice de la

charité publique, car quel aurait été le besoin pour cela de se réunir secrètement et tenir fermées etcloses, loin des yeux indiscrets, des réunions ayant pour « objet » de secourir les pauvres, ousoulager les malades et les nécessiteux, mais qu’il y avait, dans cette organisation, une finalité denature purement initiatique : « Il est donc vrai que la bienfaisance, telle qu’on l’entend, écrit leFondateur de l’Ordre de la Cité Sainte, n’est qu’un but accessoire, et ses allégories, ses emblèmes,sont les instructions bienfaisantes que l’Institution donne à ceux qu’elle reçoit en son sein ! S’ilsétaient des signes muets, ou n’étaient susceptibles que d’une interprétation relative à l’Ordre duTemple, je demanderais pourquoi recommander avec tant de soin, au Maçon, de les méditer ? UneSociété qui ne veut que soulager l’Humanité devrait-elle, pour atteindre ce but, se réunir dans untemple qui ne renferme que des emblèmes ? Pour faire du bien aux hommes, est-il besoin de mettre enusage des marques de cette nature ? Quand on ne veut que rassembler des secours pour les verser surl’indigent, on forme un bureau de charité et on ne s’occupe que de cet objet…» (Réponse auxassertions contenues dans l’ouvrage du R. F. L, Eques a Fascia, Prae + Loth, et Vis. Prus. Ausiae,ayant pour titre: De Conventu Generali Latomorum apud Aquas Wilhelminas, Imprimé à Lyon sur laminute déposée aux Archives, 1784.).

On prendra donc soin, en observant une particulière attention sur ce point clé, expliquant et sous-tendant toute l’entreprise willermozienne, de se souvenir que l’intention qui présida à l’action dudisciple lyonnais de Martinès de Pasqually, lors de la tenue des Convents constitutifs du RégimeEcossais Rectifié, fut de préserver et conserver un héritage fondamental, de nature doctrinal etopératif, et que c’est cet héritage qui constitue le coeur du Régime, mais également le vénérable etinestimable dépôt primitif détenu, précisément, par le « Haut et Saint Ordre ».

ConclusionIl est bien évident que la plus grande discrétion s’impose en ces matières, mais on nous autorisera

toutefois, pour la juste compréhension de cette question délicate entre toutes, une très courte citationde l’Instruction pour la réception des frères Ecuyers Novices de l’Ordre Bienfaisant des ChevaliersMaçons de la Cité Sainte, qui ne laisse planer aucun doute sur l’effectivité de cette origine : «L’institution maçonnique ne peut ni ne doit être confondue avec l’Ordre primitif et fondamental quilui a donné naissance ; ce sont en effet deux choses distinctes. L’Ordre primitif doit être secret, parcequ’il a un but essentiel qui est très élevé, que peu d’hommes sont dignes de connaître ; son origine estsi reculée, qu’elle se perd dans la nuit des siècles ; tout ce que peut l’institution maçonnique, c’estd’aider à remonter jusqu’à cet Ordre primitif, qu’on doit regarder comme le principe de la franc-maçonnerie ; c’est une source précieuse, ignorée de la multitude, mais qui ne saurait être perdue :l’un est la Chose même, l’autre n’est que le moyen d’y atteindre ; c’est sous ce point de vue, monB.A.F., qu’il faut considérer la franc-maçonnerie en général, et le Régime particulier auquel vousêtes attaché, si vous voulez en avoir une juste idée, et en retirer quelque fruit. »

Jean-Marc VivenzaPermalink: https://willermoz.com/2013/04/10/l-ordre-des-chevaliers-bienfaisants-de-la-cite-sainte-

et-sa-finalite-spirituelle-veritable-2/

#28

Le RER et l’obédience multi-rites de 1935 ! | Le Régime Ecossais Rectifié

Un Ordre Chevaleresque, et certes pas une Obédience maçonnique. Un ancien Grand Maître duGPDG ne disait-il pas il y a une dizaine d’années : « le Rectifié n’est pas soluble dansl’Obédience » ? Son engeance l’a oublié. D’ailleurs Willermoz n’emploie que très rarement le termede Franc-maçonnerie, et jamais celui de Classe Maçonnique pour désigner la « Classe desSymboles ». C’est en soit un indice révélateur que d’aucuns ont tendance à oublier bien facilementaprès avoir été les chantres (autoproclamés) du Willermozisme bon teint et de sa transmission(forcément ininterrompue) bien comprise, surtout à un moment ou le GPDG était en difficulté avec laGLNF.

L’histoire évènementielle qui mêle la grande et la petite, la vocation, l’essence spirituelle,l’architrave du GPDG, est d’être, selon une expression publiée dans certaine presse (guidée par lessoins diligents de ces mêmes chantres), le « garant en France et dans le monde de la pratiqueauthentique du Rite Ecossais Rectifié ».

Comment le GPDG peut-il, valablement et légitimement, demeurer ce garant, en insérant cesgreffons (les deux autres rites), étrangers et incompatibles avec sa vraie nature, au tronc du Rectifié ?Il y a antagonisme rédhibitoire. Ce serait faire du GPDG une chimère au sens étymologique du terme.Ce n’est pas facile à porter sur un Blason, c’est carrément funeste sur une Bannière d’Ordre !

Comment un Ordre, dont la Classe des Symboles est par nature- en 4 Grades, peut-il se complairede deux autres Rites qui, au regard du paysage maçonnique « classique », se travaillent en 3 grades.Ce qui a toujours été source de conflits inéluctables avec les Obédiences, toutes de typeAndersonnien, et ce qui m’amène à m’interroger sur les raisons occultes de l’amnésie volontaire dontcertains semblent être atteints. Comment une Classe Symbolique dont l’essence est d’être unepropédeutique à une Classe Chevaleresque, peut-elle se satisfaire de deux autres Rites, dontl’aboutissement est autre ? N’en déplaisent aux apparences, les Ordres Maçonniques du Temple et deMalte, s’ils ont « l’aspect » chevaleresque qu’on leur prête, ne conduisent pas aux mêmes Portes etencore moins avec le même esprit. Et même si les SPR+C se donnent le nom de Chevaliers, ilsoublient qu’ils ne sont pas « adoubés ».

Et que l’on ne me chante pas le couplet bêlant du « christianisme » d’apparence comme prétexte àcette baroque mixture. Car nul ne peut nier (s’il a un peu lu et surtout compris- certaines instructionsdites « secrètes », confirmées par certaines lettres) que JB Willermoz considérait que la VoieRectifiée n’était pas destinée à tous les Chrétiens, mais à ceux des Chrétiens qui faisaient de la« Chute Adamique » le cœur du problème comme il en est le nœud Gordien. J’aime profondément etrespecte tous mes Frères Chrétiens quelles que soient leurs confessions ; mais cela ne signifie pasque, dans les « circonférences qui sont les nôtres » (comme dirait un de mes amis très chers), tous

nos Frères en Christ disposent de la « pâte » nécessaire pour comprendre, intégrer et mettre à profitl’enseignement de nos Pères fondateurs, lesquels reprirent, voilés sous certaines apparences, lamoelle de l’enseignement de l’Eglise Chrétienne des premiers siècles.

Par ailleurs, il est indubitable que dans le Code des CBCS, JB Willermoz avait bien prévu quec’est la Classe Chevaleresque ou Ordre Intérieur qui devait « inspirer », « animer », « instruire » laClasse des Symboles. Ceci en vertu d’un principe immuable : « ce qui est en bas est comme ce quiest en haut », ce qui ne peut signifier que ce qui est en bas inspire ce qui est en haut ! Car « l’Espritnous dit comment on va au Ciel, pas comment va le Ciel » !

On me rétorquera que ce rôle est dévolu à la Classe « discrète » de la Grande Profession. Soit !Encore faut-il être CBCS pour devenir membre des Collèges Métropolitains ; il conviendrait de nepas l’oublier. Et, à ce propos, je ne vois pas comment des Grands Profès auraient à inspirer etenrichir (qu’ils commencent par la bien comprendre pour eux-mêmes sans la trahir serait déjà un bondébut) la Doctrine de l’Ordre Rectifié au profit…de Classes purement andersonniennes, dans dessystèmes exclusivement andersonniens, lesquels n’ont aucun rapport de surcroît- avec le Rectifié !

Je sais, nous savons et il est inutile de nous rappeler que JB Willermoz avait pratiqué tous lesRites et reçu tous les Grades, y compris du RF. Mais s’il avait estimé que la chose fut si belle etsuffisante, il n’aurait jamais provoqué la réforme Rectifiée. Ce faisant, il tirait la conclusion que lesRites andersonniens étaient très insuffisants, indigents et que l’essence de la « Maçonnerie » étaitailleurs ! Ne cherchons pas à ré écrire l’histoire du Rectifié en s’autoproclamant légataireuniversel de JB Willermoz ; le concierge n’est pas propriétaire de l’immeuble !

Il me semble que tout ceci relève d’une manipulation délibérée, issue de conceptionsparticulières, élaborée à des fins singulières, où la confusion des genres est manifestée sous prétexte« d’ouverture » à tous les Chrétiens (qui n’en demandent pas tant), mais destinée essentiellement àassouvir des tendances curieuses et bien moins innocentes qu’on veut bien le prétendre. Un OrdreChevaleresque, et en particulier l’Ordre des Chevaliers Bienfaisants de la Cité Sainte, n’a pas à sedévaluer au niveau d’une Obédience Maçonnique, comme il n’a nulle légitimité à se grandir enrevêtant la Chasuble d’une Eglise, quelle qu’en soit la confession.

Bref, si le « patchwork » est cousu de fil blanc, il n’est pas bordé de sain(t)es intentions ! Béthanie

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#29

La franc-maçonnerie à la lumière de l’orthodoxie : Jean-François Var règle sescomptes avec Jean Tourniac | Le Régime Ecossais Rectifié

Il nous semble utile de reproduire tel que ce post du blog « Semper Rectificando » qui montrebien la manière d’asservir le Régime Écossais Rectifié à un dogme ecclésial.

« Son Rectifié n’était absolument pas celui de ses fondateurs, Willermoz et les autres ; c’était un Rectifié à sa façon, à son gré, et surtout selon ses desseins. Desseins en partie occultés et en partie avoués – et comme les maçons sont généralement naïfs, ils n’y voyaient que du feu. » (p. 17). Jean-François Var, qui occupa pendant de longues années des responsabilités au sein du Grand

Prieuré des Gaules, et se distingua jusqu’à tout récemment par la fonction de Grand Aumônier qu’ilexerça, vient enfin de publier l’ouvrage dont il annonçait la sortie depuis des mois sous le titre Lafranc-maçonnerie à la lumière du Verbe, (Editions Dervy, 2013, 274 p).

On y trouve un recueil de nombreuses études portant sur le Régime rectifié, qui pour certaines

avaient été déjà éditées lors des décennies précédentes dans diverses revues maçonniques comme lesCahiers Villard de Honnercourt, ou les Cahiers Verts. Les voici donc réunies, ces dites études,accompagnées de quelques textes plus récents, en un seul volume, le tout formant un ensemblecohérent non dénué d’intérêt, quoique l’on sente une nette évolution de la pensée au cours des ans,disons d’une conception rectifiée assez respectueuse de la doctrine de Willermoz, à des approchesbeaucoup plus personnelles.

Pourtant, le texte justifiant l’édition de ce recueil, et sur lequel nous allons nous arrêter, est situé

en introduction, faisant suite à une aimable préface du père José A. Ferrer Benimeli s.j., (pp. 7-9),révélant des motivations pour le moins surprenantes et problématiques, tant sur le fond que sur la

forme. a) Un procès ad hominem sévère et inquisitorial D’emblée un sentiment de surprise saisit le lecteur : la vigueur plus que sévère des propos

distribués à l’encontre de Jean Tourniac, cité sous son nom civil [Jean Granger], tant dans sesfonctions maçonniques que ses attachements confessionnels et religieux, sous les traits d’un « Janusbifrons » (sic), (p. 12) !

Le procès à charge, sans possibilité de réponse évidemment puisque Jean Tourniac a quitté ce

monde en 1995, prend parfois l’aspect d’attaques ad hominem d’une rare rigueur. Ainsi Jean-François Var, qui n’hésite pas à s’immerger dans les domaines de la psychologie,

soutient tranquillement, avec un sens posthume de la fraternité plus que discutable, que l’ancienGrand Prieur du Grand Prieuré des Gaules, était un homme « séducteur », « jouissant de sa faconde »,usant de duplicité dans ses rapports humains, puisque affichant une chaleur qui était de la « pose »,masquant « indifférence » et « animosité ».

Voici le passage en question : «Jean Granger était la séduction même. Avec l’épaisse moustache

blanche qui barrait son visage rose, il faisait l’effet d’un vieux grand-père gaulois, dont ilparaissait avoir la bonhomie. Le verbe haut et sonore, la faconde rarement prise au dépourvu, ilétait de ceux qui, dans une réunion ou un repas, ne passent pas inaperçus, et il en jouissaitvisiblement. Dans les rapports personnels, il se montrait chaleureux – et je mis du temps àcomprendre que cette chaleur était de la pose et ne correspondait à rien de réel : elle masquait aumieux de l’indifférence, voire de l’animosité. J’en excepte sa cour : il régnait (je répète le terme)sur un petit cénacle qui lui vouait un culte quasi idolâtrique. » (p. 13).

Plus grave, la foi religieuse de Jean Tourniac, domaine où il convient habituellement d’observer

une certaine réserve puisque Dieu seul sonde les cœurs et les reins, est dénoncée par Jean-FrançoisVar selon une manière que l’on pourrait croire extraite d’un réquisitoire rédigé par un inquisiteurmédiéval de l’ex Saint-Office : « Granger, qui se proclamait catholique romain et se flattait de sesrelations dans l’épiscopat, qui était assidu à sa paroisse et y chantait dans la chorale, bref ceparangon du christianisme, ne l’était pas en esprit et en vérité si l’on s’en remet à sesdéclarations publiques.» (p. 18).

Chacun appréciera les propos.

b) Motif des reproches à l’encontre de Jean Tourniac En réalité, ce que Jean-François Var attribue comme principal défaut à Jean Tourniac, c’est son

adhésion aux thèses de René Guénon, ce dernier étant à ses yeux l’un des plus grands hérésiarques(sic) de tous les temps : « Lâchons le mot : Guénon est un hérésiarque, un des plus grands de tousles temps – inutile de nier sa grandeur, elle rend le péril d’autant plus redoutable. » (p. 27).

Mais Tourniac est plus coupable encore que Guénon aux yeux de Var, car il aurait délibérément

« faussé » et « déformé » le Rectifié pour servir des vues guénoniennes personnelles : «En revanche,j’estime Granger infiniment plus coupable pour avoir délibérément faussé, déformé le Rectifiépour servir ses desseins, et diffusé au sujet de ce Rite exceptionnellement unique des idéescontrouvées et qui, malheureusement, continuent à avoir cours. Granger passe toujours pour lePhénix du Rectifié. Eh bien, non : ce Phénix ne doit pas renaître de ses cendres ! » (p. 27).

Et la charge se poursuit ainsi avec une dureté qui frise parfois avec la limite de l’acceptable,

parlant d’une volonté « d’instrumentaliser » avec des « desseins occultes » le Régime rectifié :« Granger ne s’intéressait pas au Rectifié en tant que tel (tous les écrits de Tourniac le montrentsurabondamment, même ceux qui lui sont prétendument consacrés) ; il ne s’y intéressait que pourl’instrumentaliser. Son Rectifié n’était absolument pas celui de ses fondateurs, Willermoz et lesautres ; c’était un Rectifié à sa façon, à son gré, et surtout selon ses desseins. Desseins en partieoccultés et en partie avoués – et comme les maçons sont généralement naïfs, ils n’y voyaient quedu feu. » (p. 17).

Mais Jean-François Var n’en reste pas là. Tourniac fut, selon-lui, un personnage usant d’arguments « spécieux », un agent de la subversion

cherchant tout simplement à liquider la tradition chrétienne : « Ce qui malheureusement n’est pasrisible, c’est que ces convictions, ces croyances, ont orienté toute l’action de Granger au sein duGrand Prieuré des Gaules, action que je n’hésite pas à qualifier de subversive. Tel est leraisonnement spécieux : puisqu’il n’existe qu’une seule Tradition pure et immaculée, et que toutesles autres, étant humaines, sont relatives et impermanentes, et vouées à l’obsolescence, eh bien !liquidons celles qui s’opposent à nos vues, puisque nous avons barre sur elles. » (p. 20).

c) Les raisons d’une croisade contre Jean Tourniac Pourtant, c’est par l’examen instructif des motivations de tels propos tranchants, que l’on parvient

à comprendre ce qui pousse aujourd’hui Jean-François Var à entreprendre un tel procès posthume à

l’encontre de Jean Tourniac. En effet, Var nous explique qu’il fut libéré de son guénonisme par la lecture des Pères de

l’Eglise : « Qui plus est, grâce (jamais ce mot n’eut un sens aussi fort) à Daniel Fontaine, jedécouvris la plénitude de la tradition patristique conservée dans la Tradition plénière de l’Egliseorthodoxe. Et cette Tradition-là était le fruit de l’action continue du Saint-Esprit. Quelépanouissement des perspectives ! » (p. 16).

Il n’y aurait rien de blâmable à cela. On peut se pencher sur les Pères de l’Eglise lus selon « la Tradition plénière de l’Eglise

orthodoxe » et s’en nourrir afin d’éclairer son cheminement spirituel et initiatique, et y trouverd’excellentes lumières.

Là où les choses prennent un tour franchement problématique, c’est lorsque qu’une substitution de

la pensée des Pères lus selon « la Tradition plénière de l’Eglise orthodoxe », intervient d’avecl’enseignement doctrinal du Régime rectifié, piège catégorique fatal, que nous avons suffisammentexpliqué (Cf. « Un piège dogmatique sectaire pour le Régime Ecossais Rectifié : la Franc-maçonnerie chrétienne ! » ; « Régime Ecossais Rectifié et christianisme de l’Ordre »), ainsidécrit par Jean-François Var, nous donnant de mieux comprendre les impasses théoriques danslesquelles s’est enfermé l’ancien Grand Aumônier du G.P.D.G. : « Et, merveille, entre Willermoz,Saint-Martin et l’Eglise régnait une complète harmonie (je répète) qui me transportaitd’allégresse : c’est ce que je ressentais dans mes débuts exultants ; par la suite, j’apportai à cetteappréciation quelques modulations, il n’empêche qu’elle reste toujours immuable en son fond. »(p. 16).

Le grave problème de Jean-François Var, ainsi que des dirigeants du Grand Prieuré des

Gaules partageant cette conviction, est venu de là et pas d’ailleurs, en imaginant « une complèteharmonie » entrel’Eglise et la doctrine initiatique willermozienne. [1]

Et cette erreur, erreur lourde de terribles conséquences, si elle a permis historiquement une mise à

distance d’avec les thèses de Guénon, distance qui peut être considérée rétrospectivement commeutile et bénéfique – quoique les méthodes employées pour écarter Tourniac et ses amis du GrandPrieuré des Gaules puissent donner lieu à bien des réserves sur lesquelles nous n’insisterons pas –s’est imposée ensuite comme une nouvelle prison conceptuelle pour le Régime rectifié au sein duGrand Prieuré des Gaules.

Et la constitution de cette nouvelle prison conceptuelle qui allait se refermer sur le G.P.D.G.,Jean-François Var nous en donne une description de façon presque naïve : « Comme je l’ai écrit àplusieurs reprises : enfin, je pouvais vivre la plénitude de l’initiation dans la plénitude de lafoi ! » (p. 16).

Voilà, explicite, patente et manifeste l’origine des difficultés dans lesquelles ont a précipité le

Régime rectifié au sein du G.P.D.G., passant de la doxa guénonienne à la pensée des Pères lus selon« la Tradition plénière de l’Eglise orthodoxe », en imaginant une transposition parfaite, une« plénitude » (sic), entre initiation et foi !

d) Aux mêmes causes les mêmes effets désastreux sur le Régime rectifié Et ce qui est paradoxal, c’est que les critiques faites par Var contre Tourniac, qui prit il est vrai au

nom de son guénonisme des libertés importantes avec le Rectifié, peuvent se retourner avec une totaleéquivalence, si ce n’est dans la forme du moins dans les effets, en raison de l’entreprise desoumission et de domination du système fondé par Jean-Baptiste Willermoz, vis-à-vis de conceptionsthéologiques et dogmatiques qui lui sont pourtant étrangères depuis toujours.

Ecoutons sur ce sujet Jean-François Var nous parler de son action, ou de celle de ceux qui ont

exercé, ou exercent encore, leur autorité sur le Grand Prieuré des Gaules, afin de transformer cettestructure qui était de nature rectifiée à l’origine, en une obédience chrétienne pratiquant plusieursrites, coiffée d’une Aumônerie qui a en charge de veiller sur « l’instruction religieuse des Frères »(sic) : « ce qui est tout à fait clair, c’est qu’on s’octroie le droit de torturer les rituels pour leurfaire dire tout autre chose que ce qu’ils signifient, et parfois même le contraire (…) que penser duChef d’un Ordre qui s’ingénie à faire prendre à celui-ci l’orientation inverse de celle que lui avaitdonnée son fondateur et initiateur ? » (p. 20).

Or, on pourrait, à la virgule près, attribuer ces lignes, soit à Jean-François Var, soit aux dirigeants

du G.P.D.G., passés et présents, non pour des orientations guénoniennes cette fois-ci comme du tempsde Tourniac, mais pour des positions fondées sur un christianisme dogmatique, missionnaire etmilitant, tout aussi nuisible à l’authenticité willermozienne et étranger à l’esprit du Régime rectifié.

Mais poursuivons l’exercice de mise en parallèle des torts attribués à Tourniac avec le propre

comportement de Var, tant il est instructif et révélateur : « Moi, j’appelle cela de la présomption, etaussi de la forfaiture ; de la forfaiture, parce que celui qui, choisi par ses pairs, avait la charge etla mission de conserver le Régime dans son authenticité et sa pureté, avait au contraire conçu leprojet machiavélique de le liquider. » (p. 24).

Présomption, forfaiture ? Les termes utilisés par Jean-François Var sont forts, mais cependant ils conviennent et décrivent

parfaitement, sans que celui qui signe ces lignes s’en rende apparemment compte, la propreorientation dans laquelle l’ex Grand Aumônier a engagé, et avec lui ceux qui l’entouraient dans sonœuvre, le Grand Prieuré des Gaules, au point d’avoir substitué à la doctrine willermozienne lapensée des Pères de l’Eglise lus selon « la Tradition plénière de l’Eglise orthodoxe », à quois’ajoute de nos jours une conception personnelle du christianisme en tant que source d’autoritésupérieure, laissée à l’interprétation subjective d’un Grand Maître auto-proclamé « prêtre » etprophète » d’une Révélation que l’on place au-dessus de la doctrine du Régime.

Conclusion Ainsi, nous ne résistons pas en conclusion au plaisir de citer un passage de Jean-François Var

dans lequel ce dernier, qualifiant le chrétien qui adhère aux thèses de Guénon, le déclare« schizophrène », alors que le dit chrétien, qui prétend plier la doctrine du Régime rectifié à lapensée des Pères lus selon « la Tradition plénière de l’Eglise orthodoxe », tombe lui-même sous lescoups des identiques travers et se voit contraint aux mêmes acrobaties intellectuelles qui furentreprochées hier aux guénoniens et qui sont aujourd’hui l’apanage des modernes interprètes duRégime, conjuguant comme les disciples de Guénon, au choix : arrangements avec la vérité, mauvaisefoi, vues personnelles, dissimulations, mensonges, traficotages multiples et surtout grande hypocrisie.

Lisons Jean-François Var nous parler finalement de lui-même et de ses amis qui, tout en déclarant

que les dogmes de l’Eglise doivent être intégralement respectés et l’objet d’une adhésion pleine etentière sous peine de ne pouvoir être considéré comme un vrai chrétien et donc ne pas pouvoirappartenir à l’Ordre, sont membres d’un Régime fondé sur des affirmations qui contredisentpositivement, et en de nombreux points, les dits dogmes de l’Eglise, et feraient d’ailleurs hurler àl’hérésie les Pères participant de « la Tradition plénière de l’Eglise orthodoxe » [2] : « Un telchrétien, ou bien est inconscient, ou bien est schizophrène intellectuellement (il remise sa foi auplacard pour l’en tirer au besoin), ou bien ne prend pas sa foi au sérieux, n’en fait qu’uneattitude. Il n’existe aucune autre possibilité. » (pp. 26-27).

*

Remercions donc Jean-François Var pour cet exercice d’aveu inconscient auquel il s’est livré

dans l’Introduction de son ouvrage, nous ayant donné l’occasion de fournir aux lecteurs une méthode

aisée de décryptage des propos dirigés contre l’ancien Grand Prieur Jean Tourniac, qui peuventapparaître en réalité – tout en ce monde étant inversé – comme une confession personnelle relative àsa propre attitude, quoiqu’en un mode différent et sous un motif autre, mais au résultat tout à faitsemblable à l’arrivée pour le Régime rectifié.

Laissons une dernière fois la parole à l’ex Grand Aumônier du G.P.D.G. – maintenant que nous

avons compris comment fut substituée à l’enseignement de Willermoz la pensée des Pères lus selon« la Tradition plénière de l’Eglise orthodoxe », plaçant le Régime rectifié dans une situationidentique à celle où étaient parvenus à le contraindre des guénoniens qu’on combattait auparavant –nous demandant s’il l’on ne risque pas un jour d’écrire, en se contentant simplement de changer lesinitiales de celui visé dans la phrase de l’Introduction de La franc-maçonnerie à la lumière duVerbe : « [J.-F. V.] ne s’intéressait pas au Rectifié en tant que tel (tous ses écrits le montrentsurabondamment, même ceux qui lui sont prétendument consacrés) ; il ne s’y intéressait que pourl’instrumentaliser. Son Rectifié n’était absolument pas celui de ses fondateurs, Willermoz et lesautres ; c’était un Rectifié à sa façon, à son gré, et surtout selon ses desseins. Desseins en partieoccultés et en partie avoués – et comme les maçons sont généralement naïfs, ils n’y voyaient quedu feu. » (p. 17).

Espérons, à ce titre, que les maçons des générations à venir, heureusement désabusés de certaines

naïvetés car mieux instruits en ces domaines que leurs aînés, y voient plus clair, et même de façontransparente sur les questions doctrinales … et non « que du feu » (sic) … afin que le Phénix puisseenfin « renaître de ses cendres ». Et de ce point vue, l’ouvrage de Jean-François Var pourrait êtreutile, quoique de façon paradoxale, à leur instruction, afin de se prémunir de certains pièges quimenacent l’authenticité et l’essence véritable du Régime écossais rectifié.

Jean-François Var, La franc-maçonnerie à la lumière du Verbe

t. 1, Le Régime Ecossais Rectifié

Dervy, 2013, 274 p. Notes.

1. Jean-François Var nous fournit, dans une note, un renseignement à ne pas négliger, s’agissant desa découverte de la prétendue « adéquation » doctrinale entre la foi des Pères de l’Eglise et ladoctrine du Régime rectifié : « Je tiens à rendre un hommage particulier à un auteur que j’avaislu « par hasard » : Yves Marsaudon. Son ouvrage De l’initiation maçonnique à l’orthodoxiechrétienne¸ Paris, Dervy-Livres, 1965, sans avoir eu d’influence immédiate sur mon propreparcours, le décrit d’une façon étonnamment prémonitoire. »

2. Le Rectifié professe, de façon implicite dans les Instructions destinées à tous les grades, et de

façon explicite dans les Instructions secrètes de sa classe dite « non-ostensible », des thèsescondamnées par l’Eglise et ses conciles, portant sur la nature immatérielle d’Adam avant la chute, lacréation du monde effectuée non par Dieu mais par des esprits intermédiaires, l’emprisonnement dansun corps de matière des anges et de l’homme en conséquence de leur péché, la vocation à ladissolution des éléments de la création lors de la fin des temps, la résurrection incorporelle duChrist, la destination incorporelle des créatures dans l’éternité, etc.

Semper Rectificando : http://semperrectificando.wordpress.com/2013/05/22/la-franc-maconnerie-a-la-lumiere-de-lorthodoxie-jean-francois-var-regle-ses-comptes-avec-jean-tourniac/Permalink: https://willermoz.com/2013/05/24/la-franc-maconnerie-a-la-lumiere-de-lorthodoxie-jean-francois-var-regle-ses-comptes-avec-jean-tourniac/

#30

Dix prières de Louis Claude de Saint Martin | Le Régime Ecossais Rectifié

Dix prièresattribuées à Louis Claude de Saint-Martin

( texte intégral de la première édition)

– Prière 1 –Source éternelle de tout ce qui est, toi qui envoies aux prévaricateurs des esprits d’erreur et

de ténèbres qui les séparent de ton amour. Envoie à celui qui te cherche un esprit de vérité qui lerapproche de toi pour jamais. Que le feu de cet esprit consume en moi jusqu’aux moindrestraces du vieil homme, et qu’après l’avoir consumé, il fasse naître de cet amas de cendres, unnouvel homme sur qui ta main sacrée ne dédaigne plus de verser l’onction sainte. Que ce soit làle terme des longs travaux de la pénitence, et que ta vie universellement une transforme toutmon être dans l’unité de ton image, mon cœur dans l’unité de ton amour, mon action dans uneunité d’œuvres de justice, et ma pensée dans une unité de lumières. Tu n’imposes à l’homme degrands sacrifices que pour le forcer à chercher en toi toutes ses richesses et toutes sesjouissances, et tu ne le forces à chercher en toi tous ces trésors, que parce que tu sais qu’ils sontles seuls qui puissent le rendre heureux, et que tu es le seul qui les possède, qui les engendre etqui les crée. Oui, Dieu de ma vie, ce n’est qu’en toi que je peux trouver l’existence et lesentiment de mon être. Tu as dit aussi que c’était dans le cœur de l’homme que tu pouvaisseulement trouver ton repos ; n’interromps pas un instant ton action sur moi, pour que je puissevivre, et en même temps pour que ton nom puisse être connu des nations ; tes prophètes nousont enseigné que les morts ne pouvaient te louer ; ne permets donc jamais à la mort dem’approcher : car je brûle de rendre ta louange immortelle, je brûle du désir que le soleiléternel de la vérité ne puisse reprocher au cœur de l’homme d’avoir apporté le moindre nuage etcausé la moindre interruption dans la plénitude de ta splendeur. Dieu de ma vie, toi que l’onprononce et tout s’opère, rends à mon être ce que tu lui avais donné dans son origine, et jemanifesterai ton nom aux nations, et elles rapprendront que toi seul es leur Dieu et la vieessentielle, comme le mobile et le mouvement de tous les êtres. Sème tes désirs dans l’âme del’homme, dans ce champ qui est ton domaine et que nul ne peut te contester, puisque c’est toiqui lui as donné son être et son existence. Sèmes-y tes désirs, afin que les forces de ton amourl’arrachent en entier aux abîmes qui le retiennent et qui voudraient l’engloutir pour jamais aveceux. Abolis pour moi la région des images ; dissipe ces barrières fantastiques qui mettent unimmense intervalle et une épaisse obscurité entre ta vive lumière et moi, et qui m’obombrent de

leurs ténèbres. Approche de moi le caractère sacré et le sceau divin dont tu es le dépositaire, ettrans-mets jusqu’au sein de mon âme le feu qui te brûle, afin qu’elle brûle avec toi, et qu’ellesente ce que c’est que ton ineffable vie et les intarissables délices de ton éternelle existence.Trop faible pour supporter le poids de ton nom, je te remets le soin d’élever en entier l’édifice,et d’en poser toi-même les premiers fondements au centre de cette âme que tu m’as donnéepour être comme le chandelier qui porte la lumière aux nations, afin qu’elles ne restent pas dansles ténèbres. Grâces te soient rendues, Dieu de paix et d’amour ! Grâces te soient rendues dece que tu te souviens de moi, et de ce que tu ne veux pas laisser languir mon âme dans la disette! Tes ennemis auraient dit que tu es un père qui oublie ses enfants, et qui ne peut pas lesdélivrer.

J’irai vers toi, Dieu de mon être ; j’irai vers toi, tout souillé que je suis ; je me présenterai

devant toi avec confiance. Je m’y présenterai au nom de ton éternelle existence, au nom de mavie, au nom de ta sainte alliance avec l’homme ; et cette triple offrande sera pour toi unholocauste d’agréable odeur sur lequel ton esprit fera descendre son feu divin pour le consumeret retourner ensuite vers ta demeure sainte, chargé et tout rempli des désirs d’une âmeindigente qui ne soupire qu’après toi. Seigneur, Seigneur, quand entendrai-je prononcer au fondde mon âme, cette parole consolante et vive avec laquelle tu appelles l’homme par son nom,pour lui annoncer qu’il est inscrit dans la milice sainte, et que tu veux bien l’admettre au rang detes serviteurs ? Par la puissance de cette parole sainte, je me trouverai bientôt environné desmémorials éternels de ta force et de ton amour, avec lesquels je marcherai hardiment contre tesennemis, et ils pâliront devant les redoutables tonnerres qui sortiront de ta parole victorieuse.Hélas, Seigneur, est-ce à l’homme de misère et de ténèbres à former de pareils vœux et àconcevoir de si superbes espérances ! Au lieu de pouvoir frapper l’ennemi, ne faut-il pas qu’ilsonge lui-même à en éviter les coups ? Au lieu de paraître, comme autrefois, couvert d’armesglorieuses, n’est-il pas réduit comme un objet d’opprobre, à verser des pleurs de honte etd’ignominie dans les profondeurs de sa retraite, n’osant pas même se montrer au jour ? Au lieude ces chants de triomphe qui autrefois devaient le suivre et accompagner ses conquêtes, n’est-il pas condamné à ne se faire entendre que par des soupirs et par des sanglots ? Au moins,Seigneur, fais-moi une grâce, c’est que toutes les fois que tu sonderas mon cœur et mes reins, tune les trouves jamais vides de tes louanges et de ton amour ; je sens, et je voudrais ne jamaiscesser de sentir, que ce n’est point assez du temps entier pour te louer ; et que, pour que cetteœuvre sainte soit accomplie d’une manière qui soit digne de toi, il faut que tout mon être soitsaisi et mû par ton éternité ; permets donc, ô Dieu de toute vie et de tout amour, permets à monâme de chercher à fortifier sa faiblesse dans ta puissance ; permets-lui de former avec toi uneligue sainte qui me rende invincible aux yeux de mes ennemis, et qui me lie tellement à toi parles vœux de mon cœur et du tien, que tu me trouves toujours aussi ardent et aussi empressé pour

ton service et pour ta gloire, que tu l’es pour ma délivrance et pour mon bonheur. Epoux de mon âme, toi par qui elle a conçu le saint désir de la sagesse, viens m’aider toi-

même à donner la naissance à ce fils bien-aimé que je ne pourrai jamais trop chérir. Dès qu’ilaura vu le jour, plonge-le dans les eaux pures du baptême de ton esprit vivifiant, afin qu’il soitinscrit sur le livre de vie, et qu’il soit reconnu pour jamais comme étant au nombre des fidèlesmembres de l’Eglise du Très-Haut. En attendant que ses faibles pieds aient la force de lesoutenir, prends-le dans tes bras comme la mère la plus tendre, et préserve-le de tout ce quipourrait lui nuire. Epoux de mon âme, toi que l’on ne connaît jamais, si l’on n’est humble, jerends hommage à ta puissance, et je ne veux pas confier à d’autres mains que les tiennes, ce filsde l’amour que tu m’as donné. Soutiens-le toi-même, lorsqu’il commencera à former sespremiers pas. Quand il sera dans un âge plus avancé et susceptible de l’entendre, instruis-le del’honneur qu’il doit à son père, pour qu’il obtienne de longs jours sur la terre ; inspire-lui lerespect et l’amour pour la puissance et les vertus de celui qui lui a donné l’être. Epoux de monâme, inspire-moi la première à nourrir continuellement ce fils chéri de ce lait spirituel que tuformes toi-même dans mon sein ; que je ne cesse de contempler dans mon fils l’image de sonpère, et dans son père l’image de mon fils, et de tous ceux que tu peux engendrer en moi dans lecours non-interrompu de toutes les éternités. Epoux de mon âme, toi que l’on ne connaît jamais,si l’on n’est sanctifié, sers à la fois de mentor et de modèle à ce fils de ton esprit, afin que danstous les temps et dans tous les lieux, ses œuvres et son exemple annoncent et manifestent sacéleste origine ; tu poseras ensuite toi-même sur sa tête la couronne de gloire, et il sera pour lespeuples un monument éternel de la majesté de ton nom. Epoux de mon âme, telles sont lesdélices que tu prépares à ceux qui t’aiment et qui cherchent à s’unir à toi. Périsse à jamais celuiqui voudrait m’engager à te préférer un autre époux ! Epoux de mon âme, prends-moi toi-mêmepour ton propre fils ; que lui et moi nous ne fassions qu’un à tes yeux, et verse abondamment surl’un et sur l’autre, les grâces que nous ne pouvons tous deux recevoir que de ton amour. Je nepuis plus vivre, si tu n’accordes à la voix de mon fils et à la mienne de s’unir ensemble pourchanter éternellement tes louanges, et pour que nos cantiques soient comme des fleuvesintarissables engendrés sans cesse par le sentiment de tes merveilles et de ton ineffablepuissance.

Seigneur, comment oserais-je me regarder un instant sans frissonner d’horreur sur ma

misère ! J’habite au milieu de mes propres iniquités qui sont les fruits de mes abus dans tous lesgenres, et qui sont devenus comme mon vêtement ; j’ai abusé de toutes mes lois, j’ai abusé demon âme, j’ai abusé de mon esprit, j’ai abusé et j’abuse journellement de toutes les grâces queton amour ne cesse journellement de répandre sur ton ingrate et infidèle créature. C’est à toique je devais tout offrir et tout sacrifier, et je ne devais rien offrir au temps qui est devant tes

yeux, comme les idoles, sans vie et sans intelligence, et cependant je ne cesse d’offrir tout autemps, et rien à toi ;et par là je me précipite d’avance dans l’horrible abîme de la confusion quin’est occupée qu’au culte des idoles, et où ton nom n’est pas connu. J’ai fait comme les insenséset les ignorants du siècle qui emploient tous leurs efforts pour anéantir les redouta-bles arrêtsde la justice, et faire en sorte que cette terre d’épreuve que nous habitons ne soit plus à leursyeux une terre d’angoisse, de travail et de douleur. Dieu de paix, Dieu de vérité, si l’aveu demes fautes ne suffit pas pour que tu me les remettes, souviens-toi de celui qui a bien voulu s’encharger et les laver dans le sang de son corps, de son espritet de son amour ; il les dissipe et lesefface, dès qu’il daigne en faire approcher sa parole. Comme le feu consume toutes lessubstances matérielles et impures, et comme ce feu qui est son image, il retourne vers toi avecson inaltérable pureté, sans conserver aucune empreinte des souillures de la terre. C’est en luiseul et par lui seul que peut se faire l’œuvre de ma purificationet de ma renaissance ; c’est parlui que tu veux opérer notre guérison et notre salut, puisqu’en employant les yeux de son amourqui purifie tout, tu ne vois plus dans l’homme rien de difforme, tu n’y vois plus que cetteétincelle divine qui te ressemble et que ta sainte ardeur attire perpétuellement à elle comme unepropriété de ta divine source. Non, Seigneur, tu ne peux contempler que ce qui est vrai et purcomme toi ; le mal est inaccessible à ta vue suprême. Voilà pourquoi l’homme méchant estcomme l’être dont tu ne te souviens plus, et que tes yeux ne sauraient fixer, puisqu’il n’a plusaucun rapport avec toi ; et voilà cependant cet abîme d’horreur où je n’ai pas craint de fairemon séjour. Il n’y a pas d’autre alternative pour l’homme : s’il n’est perpétuelle-ment plangédans l’abîme de ta miséricorde, c’est l’abîme du péché et de la misère qui l’inonde ; mais aussi, iln’a pas plutôt détourné son cœur et ses regards de cet abîme d’iniquité, qu’il retrouve cet océande miséricorde dans lequel tu fais nager toutes tes créatures. C’est pourquoi je me prosterneraidevant toi dans ma honte et dans le sentiment de mon opprobre ; le feu de ma douleurdesséchera en moi l’abîme de mon iniquité, et alors il n’existera plus pour moi que le royaumeéternel de ta miséricorde.

Ôte-moi ma volonté, Seigneur, ôte-moi ma volonté ; car si je peux un seul instant suspendre

ma volonté devant toi, les torrents de ta vie et de ta lumière entreront en moi avec impétuosité,comme n’y ayant plus d’obstacle qui les arrête. Viens m’aider toi-même à briser ces funestesbarrières qui me séparent de toi ; arme-toi contre moi-même, afin que rien en moi ne résiste à tapuissance, et que tu triomphes en moi de tous tes ennemis et de tous les miens, en triomphant dema volonté. Ô principe éternel de toute joie et de toute vérité, quand est-ce que je serairenouvelé au point de ne me plus apercevoir moi-même que dans la permanente affection de tavolonté exclusive et vivifiante ? Quand est-ce que les privations en tout genre me paraîtront unprofit et un avantage, en ce qu’elles me préservent de tous les esclavages, et me laissent plus demoyens de me lier à la liberté de ton esprit et de ta sagesse ? Quand est-ce que les maux me

paraîtront une faveur de ta part, comme autant d’occasions de remporter des victoires, et derecevoir de ta main les couronnes de gloire que tu distribues à tous ceux qui combattent en tonnom ? Quand est-ce que tous les avantages et les joies de cette vie, me paraîtront autant depièges que l’ennemi ne cesse de nous dresser pour établir dans nos cœurs un Dieu de men-songeet de séduction, en place du Dieu de paix et de vérité qui devrait toujours y régner ? Enfin,quand est-ce que le saint zèle de ton amour et l’ardeur de mon union avec toi me dominerontjusqu’à donner avec délices ma vie, mon bien-être et toutes les affections étrangères à ce butexclusif de l’existence de l’homme qui est ta créature, et que tu as chéri jusqu’à vouloir l’aiderpar ton exemple, en te donnant toi-même tout entier pour lui. Non, Seigneur, celui qui n’est pasemporté par ce saint dévouement n’est pas digne de toi, et il n’a pas encore fait le premier pasdans la carrière. La connaissance de ta volonté et le soin du serviteur fidèle de ne jamais s’enséparer un seul instant, voilà l’unique et véritable lieu de repos pour l’âme de l’homme ; il nepeut en aborder sans être sur le champ rempli de délices, comme si tout son être était renouveléet revivifié dans toutes ses facultés, par les sources de ta propre vie ; il ne peut s’en écarter,sans se voir sur le champ livré à toutes les horreurs de l’incertitude, des dangers et de la mort.Hâte-toi, Dieu de consolation, Dieu de puissance ; hâte-toi de faire descendre dans mon cœur unde ces purs mouvements divins pour établir en moi le règne de ton éternité, et pour résistercons-tamment et universellement à toutes les volontés étrangères qui viendraient se réunir pourle combattre dans mon âme, dans mon esprit et dans mon corps. C’est alors que je m’abandon-nerai à mon Dieu dans la douce effusion de ma foi, et que je publierai ses merveilles. Leshommes ne sont pas dignes de tes merveilles, ni de contempler la douceur de ta sagesse et laprofondeur de tes conseils ! Mais suis-je digne moi-même de prononcer de si beaux noms, vilinsecte que je suis, et qui ne mérite que les vengeances de la justice et de la colère ? Seigneur,Seigneur, fais reposer un instant sur moi l’étoile de Jacob,et ta sainte lumière s’établira dans mapensée, comme ta volonté pure dans mon cœur.

– Prière 6 –Ecoute, mon âme, écoute, et console-toi dans ta détresse : Il y a un Dieu puissant qui veut se

charger du soin de guérir toutes les plaies. Il est le seul, oui, il est le seul qui ait ce suprêmepouvoir, et il ne l’exerce qu’envers ceux qui l’en reconnaissent comme le possesseur et commele jaloux administrateur. Ne va point à lui sous un déguisement comme la femme de Jéroboam,que le prophète Akia accabla de reproches ; vas-y plutôt avec l’humilité et la confiance que doitte donner le sentiment de tes effroyables maux, et de l’universelle puissance de celui qui ne veutpoint la mort du pécheur, puisque c’est lui qui a créé les âmes. Laisse au temps accomplir sa loisur toi, dans tout ce qui tient au temps ; n’accélère point son œuvre par tes désordres ; ne laretarde point par tes désirs faux et tes vaines spéculations qui sont le partage de l’insensé. Maisuniquement occupé de ta guérison intérieure et de ta délivrance spirituelle, rassemblesoigneusement le peu de forces que chaque degré du temps développe en toi ; sers -toi de ces

secrets mouvements de la vie, pour te rapprocher chaque jour de plus en plus de celui quivoudrait déjà te posséder dans son sein, et te faire partager avec lui, la douce liberté d’un êtrequi jouit pleinement de l’usage de toutes ses facultés, sans jamais connaître aucun obstacle.Dans les moments où ces heureux élans s’empareront de toi, soulève-toi sur ton lit de douleurs,et dis à ce Dieu de miséricorde et de toute-puissance : Jusqu’à quand, Seigneur, laisserez-vouslanguir dans l’esclavage et dans l’opprobre, cette antique image de vous-même que les sièclesont pu ensevelir sous leurs décombres, mais qu’ils n’ont jamais pu effacer ? Elle a osé vousméconnaître dans ces temps où elle habitait dans la splendeur de votre gloire ; et vous, vousn’avez eu autre chose à faire, que de fermer sur elle l’œil de votre éternité ; et dès l’instant elles’est trouvée plongée dans les ténèbres, comme dans un abîme. Depuis cette lamentable chute,elle est devenue journellement la risée de tous ses ennemis ; ils ne se contentent pas de lacouvrir de leurs dérisions ; ils l’infestent de leurs venins ; ils la chargent de chaînes, pour qu’ellene puisse pas se défendre, et pour qu’ils aient plus de facilité à diriger sur elle leurs flèchesempoisonnées. Seigneur, Seigneur, cette longue et humiliante épreuve n’est-elle pas suffisante,pour que l’homme reconnaisse ta justice et rende hommage à ta puissance ? Cet amas infect desdédains et des mépris de son ennemi, n’ a – t- il pas séjourné assez longtemps sur cette image detoi-même pour lui dessiller les yeux, et la convaincre de ses illusions ? Ne crains-tu pas qu’à lafin ces substances corrosives n’effacent entièrement son empreinte, et la rendent absolumentméconnaissable ? Les ennemis de ta lumière et de ta sagesse ne manqueraient pas de confondrecette longue chaîne de mes opprobres avec ton éternité même ; ils croiraient que leur règned’horreur et de désordre est la seule et réelle demeure de la vérité ; ils croiraient l’avoiremporté sur toi et s’être emparé de ton royaume. Ne permets donc pas, ô Dieu de zèle et dejalousie, que ton image soit profanée plus longtemps. Ta propre gloire me touche encore plusque mon propre bonheur qui ne serait pas fondé sur ta propre gloire. Lève-toi de ton trôneimmortel, de ce trône où repose ta sagesse, et qui est tout resplendissant des merveilles de tapuissance ; entre un instant dans la vigne sainte que tu as plantée de toute éternité ; prends unseul grain de ce raisin vivifiant qu’elle ne cesse de produire ; presse-le de ta main divine, et faiscouler sur mes lèvres le jus sacré et régénérateur qui seul peut réparer mes forces ; ilhumectera ma langue desséchée ; il descendra jusque dans mon cœur ; il y portera la joie avecla vie ; il pénétrera tous mes membres ; il les rendra sains et robustes, et je paraîtrai vif, agileet vigoureux, comme je l’étais le premier jour que je sortis de tes mains. C’est alors que tesennemis, déçus dans leurs espérances, rougiront de honte, et frissonneront de frayeur et derage, de voir que leurs efforts contre toi auront été vains, et que ma sublime destinée auraatteint son accomplissement, malgré leurs audacieuses et opiniâtres entreprises. Ecoute donc, ômon âme, écoute et console-toi dans ta détresse : Il y a un Dieu puissant qui veut se charger dusoin de guérir toutes les plaies.

– Prière 7 –

Je viens me présenter aux portes du temple de mon Dieu, et je ne quitterai point cettehumble place de l’indigent, que le père de ma vie ne m’ait distribué mon pain de chaque jour. Levoici qui s’avance, ce pain de chaque jour ; je l’ai reçu, je l’ai goûté, et je veux annoncer sadouceur aux races futures. L’éternel Dieu des êtres ; le titre sacré qu’il a pris pour se faireconnaître aux nations visibles et invisibles ; celui qui s’est fait chair ; l’esprit de celui au nom dequi tout doit fléchir le genou au ciel, sur la terre et dans les enfers : voilà les quatre élémentsimmortels qui composent ce pain de chaque jour. Il se multiplie sans cesse comme l’immensitédes êtres qui s’en nourrissent, et à quelque terme que parvienne leur nombre, ils ne pourrontjamais en diminuer l’abondance, ni se trouver dans la disette ; ce pain de chaque jour adéveloppé en moi les germes éternels de ma vie et les a mis à même de faire passer dans monsang la sève sacrée de mes racines originelles et divines. Les quatre éléments qui le composentont fait disparaître du chaos de mon cœur les ténèbreset la confusion ; ils y ont rétabli unevivante et sainte lumière, au lieu de la froide obscurité qui l’enveloppait ; leur force créatricem’a transformé dans un nouvel être, et je suis devenu le dépositaire et l’administrateur de leurssaints caractères et de leurs signes vivifiants. Alors, pour manifester la gloire de celui qui achoisi l’homme comme son ange et son ministre, je me suis présenté à toutes les régions ; j’aiconsidéré et comme passé en revue tous les ouvrages de ses mains, et j’ai distribué sur chacund’eux ces caractères qu’il avait imprimés sur moi pour les transmettre à toutes ses créatures, etpour leur confirmer les propriétés et la puissance du nom qu’elles avaient reçues. Je n’ai pointborné mon ministère à agir ainsi sur les ouvrages réguliers de l’éternelle sagesse ; je me suisapproché de tout ce qui était difforme, et j’ai laissé tomber sur ces fruits du désordre les signesde justice et de vengeance attachés aux secrets pouvoirs de mon élection. Ceux de ces fruitsque j’ai pu arracher à la corruption, je les ai offerts en holocauste au Dieu suprême, et j’aicomposé mes parfums des pures louanges de mon esprit et de mon cœur, afin que tout ce quirespire reconnaisse qu’à ce seul Dieu suprême sont dus tous les hommages, toute la gloire ettous les honneurs, comme étant l’unique source de toute puissance et de toute justice ; et je luiai dit dans les transports de mon amour : Heureux l’homme, puisque tu as bien voulu le choisirpour en faire le siège de ton autorité, et le ministre de ta gloire dans l’univers ! Heureuxl’homme, puisque tu as permis qu’il sentît jusque dans les profondeurs de ton essence, lapénétrante activité de ta vie divine ! Heureux l’homme, puisque tu as permis qu’il osât t’offrirun sacrifice de reconnaissance puisé dans le sentiment ineffable de toutes les vertus de ta sainteuniversalité.

Il ne vous a pas traitées ainsi, puissances terrestres, puissances de l’univers : il vous a rendues lessimples agents de ses lois et les forces opérantes de l’accomplissement de ses desseins ; aussi n’y a-t-il pas un être dans la nature, n’y a-t-il pas un être parmi vous qui ne le seconde dans son œuvre, etqui ne coopère à l’exécution de ses plans. Mais il ne s’est point fait connaître à vous comme le Dieude paix et comme le Dieu d’amour ; et, lors même qu’il vous donna l’existence, vous étiez encore

assez agitées par les suites de la rébellion, puisqu’il recommanda à l’homme de vous soumettre et devous dominer. Bien moins encore, puissances perverses et corrompues, vous a-t-il traitées avec lesmêmes faveurs dont il lui a plu de combler l’homme. Vous n’avez pas su conserver celles qu’il vousaccorda par votre origine ; vous avez eu l’imprudence de croire qu’il pouvait y avoir pour vous unplus beau sort, un privilège plus glorieux, que d’être l’objet de sa tendresse, et dès lors vous n’avezplus mérité que d’être l’objet de sa vengeance. C’est l’homme seul à qui il confie les trésors de sasagesse ; c’est dans cet être, selon son cœur, qu’il a mis toute son affection et tous ses pouvoirs. Il luia dit en le formant: « Répands sur tout l’univers l’ordre et l’harmonie dont je t’ai permis de puiserles principes dans ma propre source ; il ne peut me connaître que par la régularité de mes œuvreset la fixité de mes lois ; il ne peut être initié dans les mystères de mon sanctuaire ; il n’a en lui quela mesure de mes puissances, c’est à toi de les exercer dans tous ses domaines, puisque c’est parles actes seuls de mes puissances qu’il peut savoir qu’il y a un Dieu. Pour mes ennemis, lance sureux tous les traits de ma colère, ils sont encore plus loin de moi que les puissances de la nature, etla sainteté de ma gloire ne me permet plus de me manifester à eux que par le poids de ma justice.Toi seul, homme, toi seul réuniras désormais aux dons de mes puissances et de ma justice, celui depouvoir sentir les vivantes délices de mon amour, et de les faire partager à ceux qui s’en rendrontdignes. C’est pour cela que je t’ai formé seul à mon image et à ma ressemblance ; car l’être quin’aime point, ne pourrait pas être à mon image. C’est de ce trône sacré où je t’ai placé, comme unsecond Dieu, que je verrai se répandre sur tout ce qui est sorti de mes mains, les divers attributsde mon être, et tu me seras cher au-dessus de toutes les productions, puisque si je t’ai choisi pourêtre mon organe universel, il n’y aura plus rien de moi qui ne soit connu. »

Souverain auteur de mon esprit, de mon âme et de mon cœur, sois béni à jamais dans toutes lesrégions et dans tous les siècles, pour avoir permis que l’homme, cette ingrate et criminelle créature,pût recouvrer des vérités aussi sublimes. Il s’en était rendu indigne par son crime ; et si le souvenirde ton antique et sainte alliance n’eût engagé ton amour à les lui rendre, elles seraient demeuréeséternellement perdues pour lui. Louanges et bénédictions à celui qui avait formé l’homme à son imageet à sa ressemblance, et qui, malgré tous les efforts et les triomphes des enfers, a su le réhabiliterdans sa splendeur, dans la sagesse et dans les félicités de son origine. Amen.

Unissons-nous, hommes de paix, hommes de désirs ; unissons-nous pour contempler dans un

saint tremblement l’étendue des miséricordes de notre Dieu, et disons-lui en commun que toutesles pensées des hommes, tous leurs désirs les plus purs, toutes leurs actions les plus régulières,ne pourraient ensemble approcher du moindre acte de son amour. Comment pourrions-nousdonc exprimer cet amour, lorsqu’il ne se borne point à des actes particuliers et d’un moment,mais qu’il développe à la fois tous ses trésors, et cela d’une manière constante, universelle etimperturbable. Oui, Dieu de vérité et de charité inépuisable, voilà comment tu en agisjournellement avec l’homme ! Qui suis-je ? Un vil amas de dégoûtantes ordures qui ne

répandent en moi et autour de moi que l’infection. Eh bien ! c’est au milieu de cette infectionque ta main infatigable se plonge sans cesse, pour trier le peu qui reste encore en moi de ceséléments précieux et sacrés dont tu formas ton existence. Telle que cette femme soigneuse quidans l’Evangile consume sa lumière, pour retrouver la drachme qu’elle a perdue, tu ne cesses detenir tes lampes allumées, et tu te courbes continuellement jusqu’à terre, espérant toujours quetu vas retrouver dans la poussière cet or pur qui s’est échappé de tes mains. Hommes de paix,comment ne contemplerions-nous pas dans un saint tremblement l’étendue des miséri-cordes denotre Dieu ? Nous sommes mille fois plus coupables envers lui, que ces malfaiteurs, selon lajustice humaine, qui sont conduits au travers des villes et dans les places publiques, couverts detous les signes de l’infamie, et que l’on force de confesser hautement leurs crimes aux pieds destemples et de toutes les puissances qu’ils ont méprisées. Nous devrions comme eux, et avec millefois plus de justice qu’eux, être traînés ignominieusement au pied de toutes les puissances de lanature et de l’esprit ; nous devrions être amenés comme des criminels devant toutes les régionsde l’univers, tant visibles qu’invisibles, et recevoir en leur présence, les terribles et honteuxchâtiments que méritent avec justice nos effroyables prévarications ; mais au lieu d’y trouverdes juges redoutables, armés de la vengeance, qu’y rencontrons-nous ? Un roi vénérable dontles yeux annoncent la clémence, et dont la bouche ne cesse de prononcer le pardon pour tousceux qui seulement veulent bien ne point s’aveugler au point de ne se pas croire innocents. Loinde vouloir que nous portions plus longtemps les vêtements de l’opprobre, il ordonne à sesserviteurs de nous rendre notre première robe, de nous mettre un anneau au doigt et dessouliers à nos pieds, et, pour le déterminer à nous combler de pareilles faveurs, il suffit que,comme de nouveaux enfants prodigues, nous reconnaissions ne pas pouvoir trouver dans lamaison des étrangers le même bonheur que dans la maison de notre père. Hommes de paix,comment ne contemplerions-nous pas dans un saint tremblement l’étendue de l’amour et desmiséricordes de notre Dieu ! et comment ne formerions-nous pas une sainte résolution de resterà jamais fidèles à ses lois et aux bienfaisants conseils de sa sagesse ? Non, je ne peux aimer quetoi, Dieu incompréhensible dans ton indulgence et dans ton amour ; je ne veux plus aimer quetoi, puisque tu m’as tant pardonné ; je ne veux plus trouver d’autre lieu de repos que le sein etle cœur de mon Dieu. Il embrasse tout par sa puissance, et quelque mouvement que je fasse, jetrouve partout un appui, un secours et des consolations, parce que sa source divine versepartout à la fois tous ces biens. Il s’élance lui-même dans le cœur de l’homme, il ne s’y élancepas une seule fois, mais constamment et par des actes réitérés. C’est par là qu’il engendre etmultiplie en nous sa propre vie, parce qu’à chacun de ces actes divins, il établit en nous desrayons purs et extraits de sa propre essence, sur lesquels il aime à se reposer, et qui deviennenten nous les organes de ses générations éternelles. De ce foyer sacré, il envoie dans toutes lesfacultés de notre être de semblables émanations qui, à leur tour, répétant sans cesse leur actiondans tout ce qui nous compose, multiplient ainsi continuellement notre activité spirituelle, nos

vertus et nos lumières. Voilà pourquoi il est si utile de lui élever un temple dans notre cœur. Ôhommes de paix, ô hommes de désirs, unissons-nous pour contempler dans un saint tremblementl’étendue de l’amour, des miséricordes et des puissances de notre Dieu.

Seigneur, comment nous serait-il possible ici-bas de chanter les cantiques de la Cité sainte ?

Est-ce du milieu des torrents de nos larmes que nous pouvons faire entendre les chants de lajoie et de la jubilation ? Si j’ouvre la bouche pour en former les premiers sons, les sanglotsm’oppressent et je ne puis laisser échapper que des soupirs et que les accents de la douleur ;etsouvent même ces sanglots s’étouffent dans mon sein, ou bien nulle oreille charitable n’est prèsde moi pour les entendre et m’apporter du soulagement. Je me sens accablé par l’étendue et lalongueur de mes souffrances, et le crime ne cesse de se présenter à moi, pour m’annoncer quedans un instant la mort va le suivre et glacer tout mon être par la froideur de ses poisons ; déjàelle s’est emparée de tous mes membres, et je touche au moment d’être délaissé comme lecadavre qui vient d’expirer, et que les serviteurs abandonnent à la putréfaction. Cependant,Seigneur, puisque tu es la source universelle de tout ce qui existe, tu es aussi la source del’espérance ; et si ce rayon de feu ne s’est point encore éteint dans mon cœur, je tiens encore àtoi, je suis encore lié à ta vie divine par cette immortelle espérance qui découle continuellementde ton trône. J’ose donc t’implorer du sein de mes abîmes ; j’ose appeler à mon secours ta mainbienfaisante pour qu’elle daigne s’employer à ma guérison. Comment est-ce qu’elles s’opèrentles guérisons du Seigneur ? C’est par la docile soumission aux sages conseils de ce médecindivin. Il faut que je prenne avec reconnaissance et avec un ardent désir, le breuvage amer quesa main me présente ; il faut que ma volonté concoure avec celle qui l’anime pour moi ; il fautque la longueur et les souffrances du traitement ne me fassent pas repousser le bien que veutme faire ce suprême auteur de tout bien ; il se pénètre du sentiment de mes douleurs, je n’aiautre chose à faire que de me pénétrer du sentiment de son charitable intérêt pour moi. C’estpar là que la coupe du salut me sera profitable ; c’est alors que ma langue reprendra sa force, etque je chanterai les cantiques de la Cité sainte. Seigneur, quel sera mon premier cantique ? Ilsera tout entier à l’honneur et la gloire de celui qui m’aura rendu la santé et qui aura opéré madélivrance. Je le chanterai ce cantique depuis le lever du soleil jusqu’à son coucher ; je lechanterai par toute la terre, non seulement pour célébrer la puissance et l’amour de monlibérateur, mais pour communiquer à toutes les âmes de désir et à toute la famille humaine, lemoyen certain et efficace de recouvrer à jamais la santé et la vie. Je leur apprendrai que par là,l’esprit de sagesse et de vérité se reposera sur leur propre cœur, et les dirigera dans toutesleurs voies. Amen.

Auras-tu la force, ô mon âme, de contempler l’énormité de la dette que l’homme coupable a

contractée envers la Divinité ? Mais, si tu as eu celle de te livrer au crime, tu peux bien en

considérer toute l’horreur. Mesure donc par la pensée le champ du Seigneur ; rappelle-toi quel’homme devait en être le cultivateur ; tâche de te faire une idée de l’immensité des fruits quiauraient dû s’y produire par tes soins ; songe que toutes les créatures qui sont sous le cielattendaient de ta soigneuse culture leur subsistance et leur soutien ; songe que les champs duSeigneur attendaient de toi leur ornement et leur parure ; songe que le Seigneur lui-mêmeattendait de ta vigilance et de ta fidélité, la gloire et la louange que devait lui attirerl’accomplissement de ses desseins ; songe que toutes ces choses devaient s’opérer par toi sansaucune interruption. Tu es tombé, tu as laissé l’ennemi prendre empire sur toi et corrompre tesvoies. Dès l’instant, tu as rendu stérile la terre du Seigneur ; tu as plongé le cœur de Dieu dansla tristesse. Dès ce même instant, tu as comme tari la source de la sagesse et de la moisson dansce bas monde ; et, depuis cette fatale époque, tu arrêtes chaque jour toutes les productions duSeigneur ; contemple à présent l’énormité de ta dette ; contemple l’impossibilité où tu es del’acquitter, et frissonne jusque dans les derniers replis de ton être. Tu dois les fruits de chaqueannée, depuis le moment de ton infidélité ; tu dois la dîme de toutes les heures qui se sontécoulées depuis l’heure fatale ; tu dois tout ce que ces mêmes fruits et cette même dîmeauraient rapporté dans les mains où tu aurais dû les déposer ; tu dois tous les fruits que tuempêcheras de croître jusqu’à la consommation des siècles. Quel est donc l’être qui aurait pujamais t’acquitter envers la justice éternelle, envers cette justice dont les droits ne peuvents’abolir et dont les plans ne peuvent manquer d’arriver à leur terme et à leur accomplissement ?C’est ici, Dieu suprême, que se manifestent les torrents de ta miséricorde et l’abondanceintarissable de tes éternels trésors ; ici, ton cœur divin s’est ouvert sur ta malheureuse créature,et non seulement ses redevances ont été acquittées, mais elle s’est trouvée encore assez richepour pouvoir venir au secours de l’indigent. Tu as dit à ton verbe de venir cultiver lui-même lechamp de l’homme. Ce verbe sacré, dont l’âme est l’amour, est descendu vers ce champ frappéde stérilité. Il a consumé par le feu de sa parole toutes les plantes parasites et vénéneuses quis’y étaient semées ; il y a semé en place le germe de l’arbre de vie ; il a ouvert les canaux desfontaines salutaires, et les eaux vives sont venues l’arroser ; il a rendu la force aux animaux dela terre, l’agilité aux oiseaux du ciel ; il a rendu la lumière aux flambeaux célestes, le son et lavoix à tous les esprits qui habitent la sphère de l’homme ; et il a rendu à l’âme de l’homme cetamour dont il est lui-même la source et le foyer, et qui a dirigé son saint et admirable sacrifice.Oui, éternel Dieu de toute louange et de toute grâce, il n’y avait qu’un être puissant, comme tonfils divin, qui pût ainsi réparer nos désordreset nous acquitter envers ta justice. Il n’y avait quel’être créateur qui pût payer pour nous ce que nous avions entièrement dissipé, puisqu’il fallaitpour cela qu’il se fît une nouvelle création. Puissances universelles, si vous vous sentez sidisposées à chanter ses louanges, pour vous avoir rétablies dans vos droits, et pour vous avoirrendu votre activité, quelles actions de grâces ne lui dois-je donc pas, pour s’être lui-mêmerendu caution de toutes mes dettes envers lui, envers vous, envers tous mes frères, et pour les

avoir acquittées ? Il est dit de la femme pénitente, que parce qu’elle avait beaucoup aimé, on luiavait beaucoup pardonné. A l’homme on lui a tout remis, on a tout payé pour lui, non seulementavant qu’il ait commencé d’aimer, mais même lorsqu’il était plongé dans les horreurs de l’ingra-titude et comme glacé toute entiers maintenant à celui qui a commencé par nous pardonner tout.Chaque mouvement de notre Dieu doit être un mouvement universel, et qui se fasse sentir danstoutes les régions de tous les univers. Qu’à l’exemple de ce Dieu suprême, l’amour fasse unmouvement universel dans tout notre être, et embrasse à la fois toutes les facultés qui nouscomposent. Amen.

http://www.societedesindependants.org/Permalink: https://willermoz.com/2013/07/05/dix-prieres-de-louis-claude-de-saint-martin/

#31

Le caractère opératif du Régime rectifié et sa vocation spirituelle. | Le Régime EcossaisRectifié

Une idée récurrente, très souvent répandue, se rencontre fréquemment à propos du Régime

Ecossais Rectifié, idée que l’on retrouve sous la plume de nombreux auteurs, et non des moindres,affirmant l’absence totale de composante « opérative » au sein du système élaboré par Jean-BaptisteWillermoz. Si cette opinion se fonde en partie sur la volonté déclarée, et clairement affichée, dufondateur du Régime de ne point avoir souhaité introduire des éléments directs de la théurgiemartinésienne, même au sommet de l’Ordre, elle ne fait que rapporter ce qui exact, puisque tel, eneffet, fut son vœu pour de multiples raisons, dont la principale, parmi bien d’autres, tient au caractèreextrêmement délicat et complexe de ces domaines réservés, où seuls quelques esprits d’uneexceptionnelle solidité peuvent s’aventurer sans risquer de se voir renverser par les forces inconnuesqu’ils réveillent et manipulent, et qu’il est très difficile de maîtriser mais beaucoup plus courant d’endevenir le jouet et l’esclave. En revanche, déclarer avec assurance l’inexistence de tout aspect« opératif », si l’on veut bien considérer que la théurgie n’est pas, à elle seule, et loin s’en faut,l’ensemble et la totalité de l’œuvre spirituelle, est une erreur qu’il convient de fermement redresser,car profondément oublieuse des grandes perspectives transcendantes du système adopté en 1782 auConvent de Wilhelmsbad, perspectives qui relèvent, indéniablement, d’un ordre singulièrement« opératif » s’il en est, du moins si l’on veut bien reconnaître à ce terme le sens précis qui lui estaccordé, puisque, en l’espèce, c’est « d’opération » divine dont il s’agit dans le cadre des travaux développés au sein du Régime Écossais Rectifié.

Reprenant, une nouvelle fois, l’emblème vénérable du Temple afin de lui conférer la pleine et

légitime dimension qui lui revient, Willermoz jugera nécessaire, comme nous l’avons vu, de conduireles frères du Régime d’une connaissance extérieure de l’édifice sacré dans lequel se célébraient lesgloires de l’Eternel, à une intime perception de son caractère intérieur, de sa valeur directementpersonnelle s’appliquant à chaque homme cheminant vers le terme de sa réconciliation. Mais, lasecrète conviction de Willermoz, qu’il cherchera à transmettre dans les rituels par un savant usageméthodique et répété des vérités de la Sainte Ecriture, consiste en la certitude que l’homme, s’il futcréé en image et ressemblance de Dieu, a été également façonné selon les mêmes principes que leTemple, sa forme corporelle nous montrant d’ailleurs l’identique division en trois parties du lieusaint des hébreux (Porche, Temple et Sanctuaire), se reproduisant pareillement et s’appliquant àl’aide des mêmes lois à l’homme lui-même : « Le Temple universel est divisé en trois parties, qui

furent toujours distinguées par les Sages sous les noms de terrestre, céleste et Surcéleste. Demême celui de Salomon était divisé en trois parties distinctes par leur position et leur forme et parleur destination particulière, savoir le Porche, le Temple intérieur et le Sanctuaire. De mêmeaussi le corps de l’homme est divisé en trois parties bien distinctes, qui sont le ventre, la poitrineet la tête. » (Instruction secrète).

Poursuivant son habile analogie, Willermoz nous fait alors pénétrer dans la compréhension subtile

des principes et règles que l’on se devait d’observer lorsque l’on pénétrait dans l’enceinte sacrée :« Les limites de l’univers créé le séparent à jamais d’une immensité incréée et sans bornes, queles sages ont appelée immensité divine. Elle est voilée aux yeux de la nature sensible et ne peutêtre conçue que par l’intelligence. De même au centre du Sanctuaire était le Saint des Saints oul’Oracle, qui était voilé aux yeux du Peuple et des Prêtres eux-mêmes. Le Grand Prêtre seul ypouvait entrer une fois l’an, pour adorer la majesté suprême au nom de la nation entière ; et s’ilétait assez imprudent pour s’y présenter sans être préparé par toutes les purifications légalesspirituelles et corporelles, il y courait le risque de mort. » (Ibid.) C’est précisément à partir de ceconstat, portant sur la nécessité de purification pour le célébrant désireux de franchir le voile quisépare les autres parties du Temple du Saint des Saints, que va s’élaborer toute l’entreprisespirituelle dévolue aux frères avancés de l’Ordre des Chevaliers Bienfaisants de la Cité Sainte.

L’œuvre de purification va ainsi s’imposer comme la « voie » par excellence que propose le

Régime Ecossais Rectifié à ses membres, « voie » se présentant sous la forme d’un chemin deremontée vers l’essence primitive dont l’homme s’éloigna pour son malheur, d’une lente ascensionvers le centre de la Création qui avait établi notre premier parent, en tant qu’agent immédiat de laDivinité, dans un état de gloire et de perfection : « Il faut donc aujourd’hui, pour retourner à cecentre dont il est descendu, écrit Willermoz, qu’il remonte par le même chemin et qu’il paie àchacun de ses agents principaux le tribut d’expiation et de justice qu’il s’est imposé pourrecouvrir les sept dons spirituels qu’il possédait dans sa plénitude. C’est ce tribut d’expiation etde justice que

l’homme doit commencer à payer ici-bas, quoiqu’il ne puisse pas l’acquitter pleinement tant

qu’il est lié à cette forme de matière qui l’expose sans cesse à de nouveaux dangers. Son travailici-bas est de se purger avec grand soin des sept vices, ou péchés capitaux, opposés aux septvertus qui peuvent seules lui procurer les sept dons de l’esprit. » (Leçons de Lyon, n° 103,mercredi 23 octobre 1776, W).

On comprendra ainsi beaucoup mieux pourquoi les sept vertus (quatre cardinales et troisthéologales) occupent une place centrale dans les rituels de l’Ordre, et le sens de l’insistancesoutenue qu’imposent les instructions par demande et réponse des différents grades, mettant en avantl’importance des vertus spécifiques attribuées à chaque classe initiatique, jusqu’à ce que le frèreparvienne, au terme de son itinéraire symbolique, devant la Montagne de Sion où il apercevra, en sonsommet lumineux et irradiant, l’Agneau de Dieu, l’Agnus Dei, entouré des sept sceaux dont parlel’Apocalypse, c’est-à-dire les sept cachets qui retiennent fermé et clos le Livre de la Révélation :« Et je vis dans la droite de celui qui était assis sur le trône, un livre, écrit au dedans et sur lerevers, scellé de sept sceaux. Et je vis un ange puissant, proclamant à haute voix : Qui est digned’ouvrir le livre et d’en rompre les sceaux ? Et personne, ni dans le ciel, ni sur la terre, ni au-dessous de la terre, ne pouvait ouvrir le livre ni le regarder. Et moi, je pleurais fort, parce que nuln’était trouvé digne d’ouvrir le livre ni de le regarder. Et l’un des anciens me dit : Ne pleure pas ;voici, le Lion qui est de la tribu de Juda, la racine de David a vaincu pour ouvrir le livre et sessept sceaux. » (Apocalypse, 5, 1-5.)

On voit ici combien est essentiel ce lent travail de purification, de « rectification », et à quel point

il intervient directement dans la possibilité, pour le frère conscient du caractère propre de samission, de se voir compter parmi les élus du Seigneur, et d’être digne de figurer, si Dieu le veut, àl’intérieur du Livre que retiennent les sept sceaux, sachant qu’il ne pourra compter, pour l’aider dansson labeur et dans son œuvre, que sur la « force » du Lion, Lion abrité par une pierre, c’est-à-direprenant naissance dans la crèche à Bethléhem comme il prend naissance au sein de chaque pierrebrute lorsque la lumière de la Vérité traverse la roche épaisse de la matérialité ; adorable Lion de latribu de Juda, le Christ Notre Seigneur qui a vaincu pour nous la puissance des ténèbres, qui a ouvertles sept sceaux et nous a définitivement libéré des chaînes de la prévarication.

Ainsi, les progressives opérations de purifications que se propose de réaliser le Régime Ecossais

Rectifié, en prenant le temps qu’il convient en ces domaines, respectant les capacités et l’économieparticulière de chacun, sont loin d’être négligeables puisqu’elles interviennent directement dansl’éventuelle célébration à laquelle est convié le disciple du Divin Réparateur, célébration qui luidonnera de franchir la porte du Sanctuaire, de relever l’autel des parfums et d’offrir son encens àl’Eternel : « L’homme bien purifié est le seul grand prêtre qui puisse entrer dans le Sanctuaire del’Intelligence, comprendre sa nature, se fortifier par elle, et rendre dans son propre Temple unhommage pur à celui dont il est l’image. Mais s’il néglige de se purifier avant de se placer devantcet autel, les ténèbres épaisses de la matière viennent l’aveugler, et il trouve la mort où il devaitpuiser la vie. » (Instruction secrète).

Dira-t-on après cela que le Régime Ecossais Rectifié est exempt de tout aspect « opératif », qu’il

ne possède aucun élément de nature pratique alors même qu’il est un authentique séminaire où sontenseignées et mises en œuvres les bases de la véritable purification spirituelle ?

Certes, il est sans doute bien plus flatteur pour la vaniteuse créature de manipuler aveuglément des

éléments étheriques, d’appeler les puissances intermédiaires et les esprits angéliques, de se livrer àdes pratiques invocatoires sans se soucier des conditions préalables requises avant de se lancer dansces exercices extrêmement dangereux. Sous couvert de spiritualité, c’est en réalité, nous pouvons enêtre certains, et par delà la vaine curiosité, l’orgueil et la prétention de l’homme déchu qui sontcélébrés dans ce type de travaux contestables totalement dénués d’intérêt initiatique réel s’ils ne sontpas précédés d’une puissante purgation des scories du vieil homme.

C’est pourquoi, sagement, chrétiennement, Jean-Baptiste Willermoz nous invitera à la seule

théurgie qui soit essentielle et première, celle qui doit intervenir sur l’autel privilégié et supérieurqui réside en l’homme, c’est-à-dire son cœur. Il nous demandera, avec patience et tempérance, denous consacrer d’abord à la réforme vitale de notre être par le chemin obscur, silencieux et secret del’humilité, du renoncement et de la prière. Voie droite et absolue de sanctification, unique cheminassuré de notre profonde réconciliation avec l’Eternel : « S’humilier, veiller sur soi et prier sontdonc les devoirs principaux de tous les membres de l’Ordre. La prière doit être vocale, elle doitêtre l’expression de la faculté de parole qui constitue l’homme ressemblance divine. Elle doit êtreprécédée d’un examen de sa conduite, d’un aveu de ses fautes, de l’exposé de ses besoins etaccompagnée d’une demande de secours nécessaires. » (Leçons de lyon, n°103, mercredi 23octobre 1776, W).

Voilà la méthode du Régime Écossais Rectifié, l’œuvre propre et spécifique du système voulu par

Jean-Baptiste Willermoz qui, pour être austère, n’en recèle pas moins les outils essentiels pourprocéder à une véritable reconstruction de l’être, pour le rétablir dans plénitude de la grâce de Dieu,le réintroduire dans la communion malheureusement brisée avec le l’Éternel. N’est-ce point là une« opération » vitale, une « opération » sans laquelle il n’est absolument pas envisageable d’espérerpénétrer les mystères divins ? La réponse coule évidemment de source et, personne ne le contestera,s’impose d’elle-même. Mais comment oser prétendre, dès lors, que le Régime Ecossais Rectifié estdépourvu de toute dimension « opérative », qu’il n’est pas détenteur de pratiques spirituellesfondamentales ? C’est bien plutôt le contraire qui est exact, à savoir que le Régime Rectifié n’est, enlui-même, dans toute sa structure pyramidale et hiérarchique, à ses différents niveaux, sous réserved’être vécu correctement et fidèlement, qu’une profonde et pénétrante « opération » de purgation

salvatrice, de reconstruction régénératrice, de réveil de la créature à la vraie foi, une « voie »effective de souveraine sanctification.

Par ailleurs, et l’on perçoit ici toute l’exigence de sa vocation à la « bienfaisante » charité, il ne

s’agit pas d’attendre, dans la conception de Willermoz, les ultimes degrés de l’Ordre pour recevoirdes moyens que l’on cacherait au plus jeune des Apprentis – le Régime, en raison de son caractèrechrétien – engage immédiatement le nouveau frère dans la compréhension que les réalités divines luisont accessibles dès l’instant qu’il reçoit Jésus Christ comme son Sauveur, qu’il s’en remet entre lesmains du Rédempteur et travaille à la mort de la nature pécheresse en lui. En fait, depuis le sacrificede Notre Seigneur sur la Croix, les promesses de la vie éternelle sont offertes pour tout homme naîtde nouveau, c’est-à-dire non selon la chair et le sang, mais en esprit et en vérité. Et, de ce point devue, la seule autorité, l’unique règle, c’est la loi du Ciel, la Parole révélée du Réparateur, c’est elleseule qui commande et dirige, en substance, les travaux de l’Ordre.

Jean Marc VIVENZA Permalink: https://willermoz.com/2013/08/30/le-caractere-operatif-du-regime-rectifie-et-sa-vocation-spirituelle/

#32

Réveil du « Grand Directoire des Gaules » (1935-2012) | Le Régime Ecossais Rectifié

Le Directoire National Rectifié de France, comme il a été rappelé dans un précédent

Communiqué en date du 20 mars 2012 [1], ayant constaté et pris acte du non respect qui est advenuavec le temps de « l’engagement solennel » qui accompagnait le réveil du Régime ÉcossaisRectifié effectué le 23 mars 1935 par le Grand Prieuré Indépendant d’Helvétie – en érigeant leGrand Directoire des Gaules [2], afin que le Régime soit pratiqué et maintenu en conformité avecles Statuts de l’Ordre et les décisions de ses Convents fondateurs [3] – fut constitué le samedi 15décembre 2012 à Lyon, dans le but, précisément, de revenir à cette fidélité oubliée à l’égard « desstatuts de l’Ordre » et des principes énoncés dans ses « Convents fondateurs ».

La constitution, le 15 décembre 2012 à Lyon, d’un Directoire National Rectifié de France établià partir de la transmission initiatique de Camille Savoire (1869-1951) et des qualifications propresau Régime rectifié, a donc eu pour objet un retour aux Principes de l’Ordre [4], en réveillant le« Grand Directoire des Gaules » sur ses bases fondatrices, réveil qui a été accompagné de laréappropriation légale de la désignation historique du nom [5], dont le Directoire National Rectifiéde France est à présent, juridiquement, le détenteur, l’amenant à adjoindre désormais sur l’ensemblede ses documents officiels, en interne comme en externe, la double dénomination :

Directoire National Rectifié de France

Grand Directoire des Gaules

(D.N.R.F. – G.D.D.G.) Ceci implique, et indique donc concrètement, que le « Directoire National Rectifié de France –

Grand Directoire des Gaules », est aujourd’hui devenu le dépositaire, non seulement du nom parlequel s’est opéré le réveil du Régime rectifié au XXe siècle en France, mais également de lalégitimité initiatique de ce réveil effectué en mars 1935, en tant que seul continuateur véritable del’esprit qui présida à cet acte fondateur, de par sa volonté de respecter « l’engagement solennel »qui fut pris lors de cette cérémonie, de pratiquer et maintenir le RégimeÉcossais Rectifié enconformité avec les Statuts de l’Ordre et les décisions de ses Convents fondateurs [6].

En conséquence de quoi, nous portons à la connaissance le fait que la source du dépôt de1935, relative au réveil du Régime É cossais Rectifié qui fut réalisé en France, est ainsi à présentplacée au sein du « Directoire National Rectifié de France – Grand Directoire des Gaules », quien assure la garde, en organise la pratique, et auquel il incombe désormais d’en préserver

l’héritage historique.Le Directoire National Rectifié de France

Grand Directoire des GaulesLyon, le 15 septembre 2013.

Création du « Grand Directoire des Gaules »,

lors de la tenue de la Préfecture de Genève,

le 23 mars 1935, à Neuilly-sur-Seine.

(In Jean Baylot, Histoire du Rite Ecossais Rectifié en France au XXe siècle, 1976).

Notes.1. Communiqué du D.N.R.F., Lyon, le 20 mars 2013.2. La tenue officielle de la Préfecture de Genève pour le réveil du Régime en France, présidée par

E. Rochat, Grand Prieur du Grand Prieuré Indépendant d’Helvétie, eut lieu à Neuilly-sur-Seine, lesamedi 23 mars 1935, dans le Temple de la Loge La Lumière à l’Orient de Neuilly, Villa del’Acacia.

3. La Charte-constitutive & Lettres-patentes pour le réveil du Régime Écossais Rectifié enFrance, sous l’obédience du Grand Directoire des Gaules, stipule : « Voulant assurerdéfinitivement le réveil en France du Rite Écossais Rectifié, tel qu’il y fut jadis pratiqué (…) aprèsque les requérants eurent pris, tant en leur nom qu’au nom de leurs mandants, l’engagementsolennel de pratiquer le Rite Écossais Rectifié en conformité des statuts de l’Ordre tel qu’il estencore en usage en Suisse, et notamment de maintenir dans leur intégralité les décisions arrêtéesaux divers Convents de Kohlo, en 1772, de Wilhelmsbad, en 1782, et des Gaules, en 1778, tendantà assurer au Rite Rectifié son uniformité. (…) Le Grand Prieur d’Helvétie, ès qualité, aexpressément reconnu le Grand Directoire des Gaules comme puissance régulière, autonome etindépendante du Régime Rectifié en France (…).» (Fait et signé sous les Sceaux du Grand PrieuréIndépendant d’Helvétie, du Grand Directoire Écossais Rectifié et de la Préfecture de Genève, àGenève, et à Paris, les 20 et 23 mars 1935).

4. Cf. Principes de l’Ordre en 10 points, Lyon, 15 décembre 2012.5. Association loi de 1901 : « Grand Directoire des Gaules – Ordre des Chevaliers

Bienfaisants de la Cité sainte – Directoire National Rectifié de France – Grande Loge Rectifiéede France – (D.N.R.F. – G.D.D.G.) », enregistrée en Préfecture sous le n° W381014245, publiée auJournal Officiel du samedi 13 juin 2013, 145e année, n° 23, sous le n° 670.

6. Par un étrange phénomène dont l’Histoire a le secret, c’est le 15 décembre 1946, que CamilleSavoire, après guerre, réveilla le Grand Directoire des Gaules mis en sommeil le 3 septembre 1939

en le déclarant en Préfecture de Nanterre (Haut-de-Seine), mais sous la dénomination fautive, crééein abstracto, de « Grand Prieuré des Gaules » (sic), dénomination qui d’ailleurs avait eu tendance àapparaître, avant de s’imposer, dès avant même la création de la Grande Loge Écossaise Rectifiée le24 octobre 1935, car si le Code de 1778 prévoit bien comme seule instance dirigeante etreprésentative de l’Ordre sur le plan national, un « Conseil d’administration nationale ou GrandDirectoire Écossais de France » (Code Général des règlements de l’Ordre des C.B.C.S, Titre 5,Art. III), en revanche le terme « Grand Prieuré » ne peut s’appliquer, toujours selon le Code Général(Titre 3, Art. III), qu’à une Province et non à une Nation, sauf si cette dernière y est assimilée, ce quin’est évidemment pas le cas pour la France qui compte trois Provinces (IIe d’Auvergne, IIIed’Occitanie, Ve de Bourgogne).

A ce sujet, dans son discours inaugural au Convent des Gaules, le Président Antoine-FrançoisProst de Royer (1729-1784), ab Aquila, précise bien le sens du terme « Gaules » : « Un Conventnational annoncé dans ses Provinces » (Cf. Discours du Très magnifique Frère Président Prost deRoyer, Lyon, 20 novembre 1778). De même, le Code Maçonnique, dans son Introduction, indiqueque le Convent réunit : « Des Maçons de diverses contrées de France » (Code Maçonnique desloges réunies et rectifiées de France, 1778). Enfin, les Actes du Convent National, retraçant lesminutes du Convent des Gaules, s’intitulent « Actes du Convent National des Trois Provinces desGaules tenu à Lyon », précisant : « Le Convent National convoqué et ouvert à Lyon le 20 novembre(…) est composé des Trois Provinces situées en France. » (MS 5.842, BM de Lyon). L’expression «Gaules » désigne, comme on le voit, la France en son appellation romaine ancienne (lat. Gallia),englobant ses trois Provinces (IIe Alvernia, IIIe Occitania, Ve Burdundia), mais n’est évidemmentrattachée à aucun Grand Prieuré portant le nom « des Gaules », inscrit à la matricule de la Réformede Lyon.

C’est pourquoi, sachant que « Les Provinces réformées d’après le nouveau rite, sont divisées enGrands Prieurés » (Code Général des règlements de l’Ordre des C.B.C.S, Art III, titre 3), ce GrandPrieuré dit « des Gaules », absent, et pour cause, de la matricule nationale de l’Ordre arrêtée le 27novembre 1778 à Lyon, qui fut créé ex nihilo après 1935, puis déclaré en Préfecture en 1946 et à demultiples dates ultérieures en étant accompagné de diverses dénominations adjacentes, relève donc,concrètement, sur le plan des critères rectifiés, de la pure invention terminologique.

Mais c’est à cause de cette invention terminologique, qui d’ailleurs en inspira bien d’autres, quele nom « Grand Directoire des Gaules », pourtant celui-là seul au bénéfice duquel furent rédigées laCharte-constitutive et les Lettres-patentes du 23 mars 1935 établies par le Grand PrieuréIndépendant d’Helvétie, nom qui lui aurait dû être maintenu en chacun de ses actes par l’instance duréveil, a été, étrangement, tout simplement éclipsé au profit d’une désignation fautive, qui devint celleutilisée pour l’ensemble des documents officiels, notamment de 1946 à nos jours. Et, à cet égard, laConvention du 13 juin 1958, dénoncée le 13 juin 2000, signée avec la Grand Loge NationaleFrançaise, aura singulièrement contribué à entériner définitivement cette tendance, puisque

contractée entre « L’Obédience maçonnique dénommée « Grande Loge Nationale Française »et L’Ordre de Chevalerie (sic) dénommé « Grand Prieuré des Gaules » » (Cf. Convention entre laGrande Loge Nationale Française et le Grand Prieuré des Gaules, 13 juin 1958). Nousn’abordons-pas, volontairement, les actes consécutifs des nombreux dépôts en Préfecture qui furentensuite réalisés sous diverses dénominations associatives – accompagnant celle du «Grand Prieuré»(sic) dit « des Gaules » (re-sic), issu de la déclaration fautive de 1946 – qui de 1958 jusqu’à cesdernières années, reproduiront sans exception la même erreur de désignation.

On comprend donc en quoi, le retour à la dénomination « Grand Directoire des Gaules » est à lafois une façon de manifester notre volonté de respecter les termes de la Charte du réveil de 1935,mais surtout de signaler que c’est l’instance même du réveil du Régime en France – quoique nonoublieuse de ce qui relève des épisodes antérieurs aux 15 décembre 2012 à Lyon – qui retrouveaujourd’hui ses fondements historiques.

Document téléchargeable :Réveil du Grand Directoire des Gaules – 15 sept. 2013

Permalink: https://willermoz.com/2013/09/15/reveil-du-grand-directoire-des-gaules-1935-2012-2/

#33

Pourquoi le Réveil historique du « Grand Directoire des Gaules » ? | Le RégimeEcossais Rectifié

Nous reproduisons en l’état cet article édifiant de Semper Rectificando.

Le Directoire National Rectifié de France – Grand Directoire des Gaulesveille désormais, sur la conservation et préservation,

de la légitimité historique du Réveil du Régime Ecossais Rectifié au XXe siècle.Le 15 septembre 2013, le Directoire National Rectifié de France a annoncé dans un

Communiqué largement diffusé, qu’il avait réveillé le « Grand Directoire des Gaules », constituéle 23 mars 1935 à Paris par le Grand Prieuré Indépendant d’Helvétie – érigeant ce dit « GrandDirectoire des Gaules », afin que « le Régime Ecossais Rectifié soit pratiqué et maintenu enconformité avec les Statuts de l’Ordre et les décisions de ses Convents fondateurs » [1].

Cette annonce, venant s’ajouter à celle du 15 décembre 2012 qui informait de la constitution duDirectoire National Rectifié de France (D.N.R.F.), précisément afin que le Régime EcossaisRectifié soit pratiqué en conformité avec les Statuts de l’Ordre et ses Convents fondateurs,relève d’une volonté historique qu’il convient de comprendre, sans quoi il est fort possible que lesobservateurs et acteurs de la chose maçonnique, passent complètement à côté d’un évènementextrêmement important sur le plan de l’Histoire du Régime rectifié, pouvant aisément confondre en selaissant abuser, les épiphénomènes qui accompagnent inévitablement le cours des choses en ce bas-monde, et qui d’ailleurs après saturation envahissante, s’évaporent très vite des mémoires, avec leséléments essentiels qui seuls intéressent le devenir de l’initiation willermozienne.

Eclairons donc, puisque se sont les seuls qui importent, les « éléments essentiels » qui intéressentle devenir de l’initiation rectifiée.

a) Un nom imaginaire sous lequel le Régime Ecossais Rectifié n’a jamais été réveillé au XXesiècle, celui de : « Grand Prieuré des Gaules » !

Tout d’abord un premier constat.Le Grand Directoire des Gaules, fort curieusement, à peine constitué en 1935, et alors que tous

les documents officiels de l’époque ont été rédigés à son seul profit, fut peu à peu éclipsé par unedénomination surgie de l’imagination et créée de toute pièce : « Grand Prieuré des Gaules » – sansdoute par l’effet d’un mimétisme trompeur à l’égard du Grand Prieuré Indépendant d’Helvétie, quilui – puisque l’Helvétie fut érigée en Grand Prieurélors du Convent des Gaules en 1778, pouvait serevendiquer du titre de « Grand Prieuré », contrairement à la France (ou à la « Gaule« ) constituéede trois Provinces (IIe Auvergne, IIIe Occitanie, et Ve Bourgogne), auxquelles seules est liée la

notion de « Grand Prieuré » – et que l’on se mit à utiliser sans y faire trop attention, pour désignerl’instance du Réveil au niveau national.

Ce nom de « Grand Prieuré des Gaules », était, reste et demeure donc, le fruit d’une pureinvention arbitraire, car sans aucun lien et dénué de toute légitimité nominative, ni avec l’acte duRéveil de 1935, mais également avec la matricule de l’Ordre des Convents fondateurs du RégimeEcossais Rectifié, tant celui des Gaules en 1778, que celui de Wilhelmsbad en 1782.

On pourra dès lors, toujours chercher en vain un quelconque « Grand Prieuré des Gaules » dansles documents historiques officiels, on ne trouvera strictement rien sous ce nom, ni au XVIIIe siècle,ni non plus au XXe, notamment en 1935…et ce jusqu’en 1946.

b) Un constant éloignement des critères du Réveil du Régime rectifié (1946-2012)Mais, comme si cette invention terminologique avait posé sur lui, quasi ontologiquement, une sorte

de destination à l’erreur, ce « Grand Prieuré des Gaules », déclaré en effet tardivement en Préfectureaprès-guerre le 15 décembre 1946 [2], qui ne possédait donc, comme on vient de le voir, qu’un « liende désir » avec le Grand Directoire des Gaules de 1935, certes lentement mais inexorablement, semit à s’éloigner au fil des années des critères mêmes qui avaient été pourtant précisément spécifiéslors de l’acte du Réveil du Régime.

Nous ne retracerons pas ici, quoique cette liste serait fort instructive, le rappel des renoncements constants et successifs à l’égard des critères du Réveil qui adviendront de 1946 à nos jours, nouscontentant de dire simplement que ces positions aberrantes, trahissant objectivement l’esprit de laRéforme de Lyon – dont celle ultime, et sans doute fatale, sous le concept de « franc-maçonneriechrétienne », aura abouti à la constitution d’une obédience multiritualiste à laquelle est attachéeuneAumônerie dont la mission (sic) est « l’enseignement des principes spirituels des Ordres, enparticulier la doctrine de la religion et de l’initiation chrétiennes » [3], ce qui aurait évidemmentfait frémir d’épouvante Jean-Baptiste Willermoz (1730-1824) – ont cependant conduit la tendancewillermozienne issue du Grand Prieuré des Gaules, à se séparer en décembre 2012 de cette instances’étant écartée des principes de l’Ordre pour, enfin, et il était temps avant qu’il ne soit trop tard,revenir aux fondements du Régime rectifié.

c) Le Réveil du Grand Directoire des Gaules, instance du Réveil du Régime rectifiéEn quoi consiste donc l’initiative du Directoire National Rectifié de France, dont on parle

beaucoup et que l’on commente avec plus ou moins de pertinence à propos de sa nature et de sesobjectifs, mais qu’il serait heureux et surtout fort utile de comprendre, afin d’éviter à de nombreuxobservateurs de voir passer le courant de l’Histoire avec un bandeau sur les yeux ?

Résumons-donc les grands principes, qui fondent l’action du Directoire National Rectifié deFrance.

1°) Le Réveil du Grand Directoire des Gaules répond à deux points principaux :

Le nom « Grand Directoire des Gaules » a été tout simplement éclipsé 70 ans par une

désignation fautive, prétendant incarner la légitimité du Réveil de 1935, mais en étantaucunement rattachée à une réalité historique du Régime du XVIIIe siècle au XXe.Les critères, qui conditionnaient le Réveil du Régime rectifié en 1935, ainsi que le devenir etla nature de l’instance par laquelle s’opérait ce « Réveil », ont tous, peu à peu au fil desannées, été abandonnés, oubliés, voire profondément trahis, provoquant un éloignementconsidérable d’avec l’intention initiale qui avait motivé l’entreprise de Camille Savoire etdes Frères qui l’entouraient à l’époque [4].

2°) Les décisions qui s’imposaient sont donc les suivantes :

Il fallait que soit engagé sans tarder – faute de quoi le risque était grand de voir disparaîtrele courant willermozien fidèle aux intentions de Camille Savoire, courant qui avait quitté laG.L.N.F. en 2000 pour préserver le Régime en s’engageant auprès du G.P.D.G. [5] – unretour aux critères qui présidèrent à l’intention fondatrice du Réveil.Que le nom sous lequel s’était effectué ce Réveil soit de nouveau utilisé de manière àsymboliser la volonté de retour aux intentions de 1935, et qu’enfin resurgisse véritablement,non une obédience de plus au sein du chaos régnant actuellement – voire un énième « GrandPrieuré rectifié » au milieu de tous ceux créés pour des motifs divers depuis plusieurs décennies– mais l’instance sous laquelle ceux qui réveillèrent le Régime au XXe siècle voulurent lefaire vivre, soit le : « Grand Directoire des Gaules ».

ConclusionAinsi donc, après une éclipse de près de 70 ans, le Directoire National Rectifié de France,

conscient de sa responsabilité historique, a donc refait surgir sur la scène de la vie initiatiquerectifiée, pas simplement le « nom » par lequel le Régime fut réveillé en France en 1935, maisd’abord et avant tout, l’intention fondatrice qui présida à ce Réveil.

De ce fait la désignation :« Directoire National Rectifié de France – Grand Directoire des Gaules »,

signale en 4 points :1) Le souhait de revenir à l’esprit des Convents fondateurs de l’Ordre ;

2) La volonté de respecter les critères willermoziens qui seuls définissent le Régime ;3) La fidélité vis-à-vis du projet de Camille Savoire désireux de réveiller complètement le

Régime rectifié, qui se concrétisa en mars 1935 ;4) La responsabilité désormais, de la conservation et préservation, de la légitimité historique

du Réveil du Régime Ecossais Rectifié au XXe siècle en France.Comme l’écrit dans son Communiqué le D.N.R.F.- G.D.D.G., à juste titre : « On comprend donc

en quoi, le retour à la dénomination « Grand Directoire des Gaules » est à la fois une façon demanifester notre volonté de respecter les termes de la Charte constitutive du Réveil de 1935, et de

signaler que c’est l’instance même du Réveil du Régime en France – quoique non oublieuse de cequi relève des épisodes antérieurs aux 15 décembre 2012 à Lyon – qui retrouve aujourd’hui sesfondements historiques. » [6]

Lire : Notes.1. Charte-constitutive & Lettres-patentes pour le réveil du Régime Écossais Rectifié en

France, sous l’obédience du Grand Directoire des Gaules, Fait et signé sous les Sceaux du GrandPrieuré Indépendant d’Helvétie, du Grand Directoire Écossais Rectifié et de la Préfecture deGenève, à Genève, et à Paris, les 20 et 23 mars 1935.

2. On notera tout de même l’étrange coïncidence, liant en un écho lointain, la déclaration deCamille Savoire effectuée le 15 décembre 1946 après-guerre pour sortir l’instance du Réveil de sonsommeil forcé, et celle des Frères réunis afin de constituer le « D.N.R.F. – G.D.D.G. », le 15décembre 2012 à Lyon.

3. Cf. Statuts Civils & Constitution et Règlements Généraux du G.P.D.G., Livre VII, titre I,2005, p. 54.

4. Depuis plusieurs années Camille Savoire était en relation suivie avec le G.P.I.H. afin quepuisse être réveillée en France une instance de direction du système fondé par Jean-BaptisteWillermoz au XVIIIe siècle. Dans son discours le 23 mars 1935, Camille Savoire soulignait que leG.O.D.F. s’opposait à la pratique authentique du R.E.R. et que le Grand Directoire des Gaulesformerait pour répondre aux exigences willermoziennes, un Ordre autonome et indépendant, composéde membres « désireux de quitter les Obédiences françaises dont les agissements, étaient encontradiction avec le caractère de la Franc-maçonnerie ». Il rajoutait : « Voilà comment nousavons régulièrement réveillé en France le Rite Rectifié : ce réveil ayant été fait en accord et avecle concours de la seule puissance ayant l’autorité suprême du Rite au monde et en conformité desdécisions des divers Convents de 1778, 1781, 1808, et 1811, et en exécution de la décision prise en1828 par le Directoire de la 5° province de Neustrie déléguant à la dernière de ses préfectures,dite de Zurich, ses archives, prérogatives, droits, etc…, avec mission de les conserver jusqu’aujour où le réveil du Rectifié pourrait s’effectuer en France et lui permettrait de s’en dessaisir. »

5. Rappelons que la sortie de la G.L.N.F., en forme d’éviction motivée le 13 juin 2000 par une« volonté d’expansionnisme vers d’autres rites », s’est faite sous la bannières d’un « G.P.D.G. –Ordre Unis », qui devint ensuite « G.P.D.G. Ordre des Chevaliers Maçons Chrétiens de France /Ordre des Francs-Maçons Chrétiens de France », se révélant incapable depuis 12 ans ! d’instruireune réforme apte à ramener cette obédience – ayant en réalité substitué à l’enseignement de l’Ordreune conception assez originale et très personnelle du christianisme – aux critères du Régimerectifié.

6.Communiqué du D.N.R.F.- G.D.D.G., 15 septembre 2013.

En lien sur le même sujet :Permalink: https://willermoz.com/2013/10/01/pourquoi-le-reveil-historique-du-grand-directoire-des-gaules/

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« Phaleg » | Le Régime Ecossais Rectifié

« Phaleg » :place, sens et fonction de ce nom au sein

duRégime Ecossais Rectifié

*

« … Il serait imprudent de « ‘s’attaquer » à Phaleg, soit en méconnaissant le type deséparation qu’il symbolise, soit en le considérant comme disqualifié pour l’Ordremaçonnique, par suite de sa présence dans les grades bleus du Rite Rectifié. » (JeanTourniac)

Une farouche hostilité à l’égard du Régime Ecossais Rectifié avaitdéjà conduit René Guénon (1886-1951), en divers textes, à des jugements excessifs d’une rareinexactitude à l’égard des spécificités rituelles que l’on rencontre au sein de nos Loges, se lançantd’ailleurs dans des attaques irraisonnées qui n’ont cessées, depuis, d’être reprises et réitérées par lesmodernes et mimétiques disciples de l’auteur de la Crise du monde moderne. Rien ne semblerait, enapparence, justifier cette opposition violente et agressive que nous observons à notre encontre, si cen’est une volonté d’imposer, par tous les moyens, les vues faussées d’une théorie erronée quin’accepte pas de voir ses principaux arguments réduits à néant dés lors qu’elle est confrontée auxvérités de la Révélation.

On nous affirme ainsi dernièrement, reprenant une antienne bien connue conjuguée à d’autrescompliments plus ou moins aimables, que la place de Phaleg, nom reçu par les Apprentis lors de leurintroduction dans l’Ordre, serait le signe que le Régime place, dès les premiers instants de leurréception, sous les auspices de la « division » les nouvelles pierres qui nous rejoignent. Jugementinquiétant il est vrai, et qui ne manquerait pas de jeter un certain trouble s’il était fondé. Mais quelcrédit devons-nous accorder à pareille sottise et non moins brutale affirmation ? Il nous fut donné denous exprimer sur ce point extrêmement significatif dans un texte à paraître 1, mais nous ne voudrionspas laisser croire, en ne répondant pas aux arguments qu’on nous oppose, qu’il s’agisse d’unequestion auxiliaire, alors même que cette emblématique présence de Phaleg, est à la source dupuissant mouvement de rejet du Rectifié vis-à- vis de la tradition « caïniste », tradition déviée etsouillée productrice de crimes et d’une orientation opposée aux lois divines.

1 René Guénon et le Régime E cossais Rectifié, Editions du SymorghI. Qui est Phaleg ?Le livre de la Genèse, en ces chapitre X et XI, nous apprend que Phaleg était un descendant de

Sem, l’un des trois fils de Noé qui sut se préserver de l’influence perverse de Cham 2. Cette «préservation », cet éloignement volontaire, sa mise à distance de la perversion et du mal, en font unemblème significatif de la pureté, de la fermeté dans le souci du service de Dieu, de la rigueur etfidélité envers les commandements saints et sacrés du Ciel.

2 Voici ce que nous dit l’Ecriture Sainte dans le Chapitre onzième du livre de la Genèse :« 1 Et toute la terre avait une seule langue et les mêmes paroles. 2 Et il arriva que lorsqu’ils

partirent de l’Orient, ils trouvèrent une plaine dans le pays de Shinhar ; et ils y habitèrent. 3 Etils se dirent l’un à l’autre : Allons, faisons des briques, et cuisons-les au feu. Et ils avaient labrique pour pierre, et ils avaient le bitume pour mortier. 4 Et ils dirent : Allons, bâtissons-nousune ville, et une tour dont le sommet [atteigne] jusqu’aux cieux ; et faisons-nous un nom, de peurque nous ne soyons dispersés sur la face de toute la terre. 5 Et l’Éternel descendit pour voir laville et la tour que bâtissaient les fils des hommes.6 Et l’Éternel dit : Voici, c’est un seul peuple,et ils n’ont, eux tous, qu’un seul langage*, et ils ont commencé à faire ceci ; et maintenant ils neseront empêchés en rien de ce qu’ils pensent faire. 7 Allons, descendons, et confondons là leurlangage, afin qu’ils n’entendent pas le langage l’un de l’autre.8 Et l’Éternel les dispersa de là surla face de toute la terre ; et ils cessèrent de bâtir la ville. 9 C’est pourquoi on appela son nomBabel*, car là l’Éternel confondit le langage ** de toute la terre ; et de là l’Éternel les dispersasur la face de toute la terre.

10 Ce sont ici les générations de Sem : Sem était âgé de cent ans, et il engendra Arpacshad,deux ans après le déluge.

11 Et Sem, après qu’il eut engendré Arpacshad, vécut cinq cents ans ; et il engendra des fils etdes filles.

12 Et Arpacshad vécut trente-cinq ans, et engendra Shélakh.13 Et Arpacshad, après qu’il eut engendré Shélakh, vécut quatre cent trois ans ; et il engendra

des fils et des filles.14 Et Shélakh vécut trente ans, et engendra Héber.15 Et Shélakh, après qu’il eut engendré Héber, vécut quatre cent trois ans ; et il engendra des

fils et des filles.16 Et Héber vécut trente-quatre ans, et engendra Péleg.17 Et Héber, après qu’il eut engendré Péleg, vécut quatre cent trente ans ; et il engendra des

fils et des filles.18 Et Péleg vécut trente ans, et engendra Rehu.19 Et Péleg, après qu’il eut engendré Rehu, vécut deux cent neuf ans ; et il engendra des fils et

des filles.20 Et Rehu vécut trente-deux ans, et engendra Serug.21 Et Rehu, après qu’il eut engendré Serug, vécut deux cent sept ans ; et il engendra des fils et

des filles.

22 Et Serug vécut trente ans, et engendra Nakhor.23 Et Serug, après qu’il eut engendré Nakhor, vécut deux cents ans ; et il engendra des fils et

des filles.24 Et Nakhor vécut vingt-neuf ans, et engendra Térakh.25 Et Nakhor, après qu’il eut engendré Térakh, vécut cent dix-neuf ans ; et il engendra des fils

et des filles.26 Et Térakh vécut soixante-dix ans, et engendra Abram, Nakhor, et Haran.27 Et ce sont ici les générations de Térakh : Térakh engendra Abram, Nakhor, et Haran.28 Et Haran engendra Lot. Et Haran mourut en la présence de Térakh, son père au pays de sa

naissance, à Ur des Chaldéens.29 — Et Abram et Nakhor prirent des femmes : le nom de la femme d’Abram était Saraï et le

nom de la femme de Nakhor, Milca, fille de Haran, père de Milca et père de Jisca.30 Et Saraï était stérile, elle n’avait pas d’enfants.31 Et Térakh prit Abram son fils, et Lot, fils de Haran, fils de son fils, et Saraï, sa belle-fille,

femme d’Abram, son fils ; et ils sortirent ensemble d’Ur des Chaldéens pour aller au pays deCanaan ; et ils vinrent jusqu’à Charan, et habitèrent là.

32 Et les jours de Térakh furent deux cent cinq ans ; et Térakh mourut à Charan . » (Genèse XI).

Certains exégètes hébreux vont même jusqu’à considérer que Phaleg fut une forme demanifestation du Verbe qui, dans une préfiguration de ce que sera son rôle, sépara la terre entre les

élus et les ennemis deDieu : « Héber עבר , génère deux principes distincts dont le premier a nom Phaleg פלג ,

l’expansion génératrice du Verbe vivant, principe; or, du fait même de sa manifestation, seproduit la division sur la terre.

Le nom du second principe est Yaqtan יקטן , la fermeture volontaire de l’esprit humain âl’action de l’Esprit divin et l’obscurcissement qui en résulte . » ( Dr. E.A. Chauvet, Esotérisme dela Genèse).

II. Raison de la présence de Phaleg eu sein du Régime Ecossais Recitifié.Le nom de Phaleg, de par cette image de retranchement du vice que lui confère l’Ecriture, fut

heureusement « substitué » à celui de Tubalcaïn dans les rituels rectifiés, nous indiquant clairement,et non uniquement à cause d’une « pieuse folie » provenant de l’esprit dérangé d’une « crisiaque »selon « l’aimable » et charitable jugement de quelques auteurs parfois eux-mêmes membres duR.E.R., que la Réforme lyonnaise voulut se placer dans la descendance de Sem 3.

Lisons, à ce titre, ce que Jean-Baptiste Willermoz exposa, dans un argumentaire circonstancié etétayé dont on ne peut soutenir qu’il donne des signes particuliers de dérangement intellectuel produitpar les visions de Mademoiselle Marie-Louise de Vallière (1731-1814), chanoinesse deRemiremont, par ailleurs sœur du chevalier Alexandre de Monspey (1739-1807), i.o. Eques Paulus

a Monte Alto, pour justifier cette éradication de Tubalcaïn devenue nécessaire, lors de la tenue duDirectoire Provincial d’Auvergne, à Lyon , le 5 mars 1785 :

« …On n’a pas remarqué que c’est une contradiction de donner à l’Apprenti ce mot deralliement [Tubalcaïn]après lui avoir fait quitter tous les métaux qui sont l’emblème des vices. Eneffet, d’un côté, on lui apprend que ce n’est point sur les métaux que le vrai Maçon doit travailler; et de l’autre, on le met dans le cas de croire que Tubalcaïn, le Père et l’inventeur du travail surles métaux, serait le premier instituteur de la Maçonnerie élevée.

Si Tubalcaïn fut le fondateur d’une initiation quelconque, on voit quel devait en être l’objet etle but par ce qu’en dit l’Écriture, et dans ce siècle où tant de Maçons s’occupent de l’alchimie, un

Régime qui en connaît les dangers ne doit pas conserver un nom qui ne s’est perpétué que parl’ignorance ou le défaut d’attention de plusieurs qui n’ont pas aperçu ce

3 Voici le Commentaire intéressant de Dom Ceillier, concernant le rôle que joua Héber, le père dePhaleg lors de la construction de la Tour de Babel, se tenant éloigné de cette folle entreprise,correspondant bien au sens que lui reconnaît Jean-Baptiste Willermoz et le Rectifié : « Dieu ordonneà Noé de quitter l’arche; lorsqu’il est sorti, il offre à Dieu un sacrifice et il est béni avec sesenfants. Il reçoit de Dieu la promesse que les hommes ne périront plus par un déluge. Ensuite, ilbénit Seni et Japhet; mais il maudit Chanaan, parce que Chain, dont il était le fils,, avait révélé lanudité de son père. Cette malédiction fut accomplie sur les Gabaonites, et, à vrai dire, elle eutl’apparence d’une (525) malédiction, mais en réalité ce fut une prophétie. Liste des descendantsde Noé jusqu’à Phaleg, à qui ce nom fut donné parce que la terre fut divisée air temps où il vécut.Alors fut construite la tour dans le lieu qui fut appelé Babylone, c’est-à-dire confusion, parce quedans cet endroit eut lieu la confusion, des langues. Héber, père de Phaleg, ne consentit point, dit-on, à construire la tour avec les autres et pour cela, sa langue ne fut point changée; mais il gardason idiome intact, et lui imposa même son nom. On l’appelait Héber, sa langue fut l’hébraïque, etainsi est-il prouvé que l’idiome hébreu est la plus ancienne des langues. Cette langue était celledont tous se servaient avant la confusion.

Héber fut l’ancêtre d’Abraham. Généalogie des descendants de Seth jusqu’à Abraham. Tharé,père d’Abraham, prend avec lui ses fils Abraham et Nachor et Loth, son petit-fils, et vient au paysde Charran, ayant résolu d’habiter la terre de Chanaan. Tharé mort, Abraham reçoit de Dieul’ordre de quitter le pays de Charran et il s’en va à Sichem, dans le pays de Chanaan. Dieu luipromet de donner cette terre à sa race. Abraham élève à Dieu un autel et fixe sa tente vers la mer.» (Dom Rémy Ceillier, Commentaire de la Genèse, Abbaye Saint-Benoît de Port-Valais).

rapport et cette inconséquence, et sont encore par là liés à ceux qui s’occuperaient à imiterTubalcaïn qui, le premier a touché les métaux.

Si de cette observation on passe à l’examen du temps auquel vécut Tubalcaïn, on voit que c’estavant le déluge, fléau par lequel Dieu voulut effacer de dessus la terre les ouvrages des hommes.Si l’initiation de Tubalcaïn s’est propagée, elle est impure, et il paraîtra important de rompre tous

les rapports avec lui, puisqu’on fait quitter aux Maçons tous les métaux, emblème vrai et retenudans tous les Régimes, comme pour les séparer de celui qui les a travaillés le premier. C’est doncaprès le déluge, au temps de la confusion des langues, qu’on trouve la raison de la fondationd’une initiation secrète qui a dû se perpétuer et qui est l’objet de la recherche des Maçons.

Une étude de la vérité faite dans les intentions pures a conduit à apprendre que c’est dans lesdescendants de Sem qu’il faut chercher la fondation de la vraie initiation. Sem fut béni par Noé, etl’on est fondé de croire que Phaleg, fils d’Héber et descendant de Sem qui fut père de tous lesenfants d’Héber, est le fondateur de la seule vraie initiation, et ce motif paraît déterminant poursubstituer au nom de Tubalcaïn celui de Phaleg. Cham maudit par Noé aura eu son initiation :tout l’atteste, et que son mot de ralliement ait été Tubalcaïn ; il est emblème des vices, et ilconvient aux enfants de Chanaam qui l’auront transmis ; mais on doit se rappeler qu’il est dit :que Chanaam soit maudit, qu’il soit à l’égard de leurs frères les esclaves des esclaves. »

Phaleg incarne donc, comme il nous est largement démontré ici par Jean-Baptiste Willermoz, entant que fondateur des « Justes et parfaites Loges » 4, la véritable « Tradition », l’initiation sainte etpure des « enfants de Dieu » qui se sont maintenus dans la grâce de l’Eternel ; Daniel Fontaine, dansun article portant sur cette question, soulignera d’ailleurs justement cette élection promesse defécondes bénédictions, par une judicieuse remarque sémantique : « … la racine du nom de Phalegest PHAL et veut dire une élection, une mise à part, en même temps qu’une germination[…] » 5.

III. Une étrange hostilité vis-à-vis d’un « nom très juif dans un rituel très chrétien »Toutefois, certains esprits chagrins, pas toujours bienveillants, n’acceptent pas cette interprétation

et, refusant les évidences, aveuglés par une étrange hostilité, ne souhaitent voir dans Phaleg qu’ungerme de division et de disqualification, ce qui est bien plutôt sans doute, si l’on y prend gardeattentivement et en éclairant objectivement leurs motivations, que la projection de leurs proprescontradictions irrésolues.

C’est pourquoi il nous semble judicieux de rappeler les analyses de Jean Tourniac en la matière,qu’on ne pourra soupçonner d’une quelconque prévention anti-guénonienne, analyses que nouspartageons entièrement et qui rejoignent parfaitement celles que nous soutenons, à savoir que Phalegreprésente certes une séparation mais une « séparation » ayant le sens d’une « mise à part pour Dieu» :

4 Rituel du Grade d’Apprenti du Rite Ecossais Rectifié, rédigé en Convent Général de l’Ordrel’an 1782, version complétée par Jean-Baptiste Willermoz et communiquée par lui en 1802 à laRespectable Loge de la Triple Union à l’Orient de Marseille.

5 D. Fontaine, À propos de Phaleg, Les Cahiers Verts n° 10-12, Grand Prieuré des Gaules, 1992.« La « séparation » qui relève de l’élection ou de la sortie du monde, ne contredit en rien,

affirme ainsi Jean Tourniac en introduction à son propos, l’état requis par l’élévation à la maîtrisemaçonnique. » Fort justement il rajoute que l’on ne voit d’ailleurs pas en quoi Tubalcaïn, si chargéd’une suspecte réputation malgré son image de « constructeur » mis à l’honneur dans divers Rites

maçonniques, « qui comporte des « côtés maléfiques et « ensorcelants », sous jacents augauchissement des applications de l’Art Royal et aboutissant à l’inversion du but recherché dansl’initiation », soit mieux adapté à l’état de franc-maçon ayant vocation à « rassembler ce qui estépars ».

Ainsi, poursuit Tourniac : « si nous admettons une dualité de significations, opposées oucomplémentaires, pour Tublacaïn, il ne nous est pas interdit de reconnaître une dualité de sensidentique pour Phaleg. Ce dernier signifie « séparé et distingué ». Quelques commentateurstraditionnels du Judaïsme ont vu dans ce mot le symbole de la séparation entre le temps etl’espace, à quoi se réfère justement la division des arts traditionnels entre peuples sédentaires etpeuples nomades. A cette conception se rattachent les idées de bouleversement, scission,séparation et guerre ou lutte.

Mais le même mot qui, remarquons-le dans la mesure où il établit la « distinction » ou la« séparation » est à l’opposé de la « confusion », se trouve à l’origine de dérivés trèsintéressantes dans les langues sémitiques. Nous citerons, entre autres :

– fellouque : la barque qui fend les eaux et sépare ;– fellah : le paysan qui ouvre le sol pour l’ensemencer.Dans cette acception la racine du mot contient l’idée d’une pénétration mâle – phallique – d’un

réceptacle féminin de potentialités.On peut découvrir la même racine dans la mot fellagah, celui qui coupe la route et la fend, et

qui, dans une perspective évidemment sans rapport avec l’histoire contemporaine, peut qualifierl’action des « gardiens du seuil » et du garde extérieur de la Maçonnerie. Le mot possède donc uncertain rapport avec la démarche et les péripéties de l’Apprenti ou du candidat à l’initiation.

La même racine engendre les mots hébraïques suivants :– Phaleg : noble, distingué du reste, élu (on retrouve ici l’idée d’élection « du mileu du

monde », Jean XVII, 6).– Peleg : fleuve, torrent.– Pelougah : cohorte, « phalange ».– Pelageh : famille, clan.– Ha-phelah : discerner, préférer, élever, donner la grâce.– Pelah : tracer la voie, silloner, fendre la terre. (A la racine Phé-Lamed sont associés les mots

suivants : fléau de la balance– Pélès : prier, s’incliner, supplier (hith phelel),

circonscription, district, division territoriale, et aussi discussiond’exégèse doctrinale (Pilpoul), parvis du Temple.Dans ce « sillon » d’idées on remarquera que la racine a pu distinguer le partage des terres,

déterminant le lieu géométrique d’édification d’une synagogue dans les temps anciens.)Mais déjà Fabre d’Olivet, étudiant selon sa méthode la racine bilitère double des trois

consonnes de Phaleg, en donnait les sens suivants [ce qui, soit dit en passant, justifie totalementl’interprétation effectuée par Daniel Fontaine sur

la base bilitère du radical PHAL 6 פלא ] : symbole de toute élévation, idée de distinction et deprivilège, chose

admirable et dont on fait mystère, noblesse, germe, chose liée, fève, mesure de l’étendue.On voit donc qu’il y a des séparations qui, si elles sont déjà logiques au grade d’Apprenti,

auquel se réfère le nom…, ne seraient pas tellement contradictoires avec le but poursuivi par lesmaîtres. Et je serais presque tenté de penser que ce nom n’est finalement pas si mal choisi quecela au Rite Rectifié, ne croyez-vous pas ? 7»

La démonstration de Jean Tourniac nous semble sans appel, et il faudrait faire preuve d’uneévidente mauvaise foi, ou d’une perverse intention, pour en refuser les conclusions. D’ailleursl’ancien Grand Prieur du Grand Prieuré des Gaules que fut Tourniac, convaincu du caractère valideet fondé de son raisonnement, n’en reste pas là, bien au contraire, et nous entraîne plus avant dans unecompréhension approfondie du sens important et de la haute valeur de Phaleg à l’intérieur de notreRégime : « Si nous interrogeons maintenant l’Ecriture, nous voyons que Phaleg, de la race deSem, est le nom d’un fils d’Héber, ancêtre d’Abraham, le père des croyants, et qui fut appelé de cenom parce que de son temps « la terre était partagée » (Genèse X, 25). Il habitait avec Jectan, sonfrère, la « montagne d’Orient » et non pas l’Empire de Babel, en terre de Sennaar, comme Nemrod,de la Race de Cham et de la parenté symbolique de Tubalcaïn (Genèse X, 7-11) 8.

6 Effectivement tout mot hébreu se rattache en principe à une racine de trois consonnes,généralement un verbe. L’Hébreu connaît toutefois un certain nombre de noms anciens ne possédantque deux lettres ainsi que des dits « faibles » dont la racine apparaît fréquemment sous la formebilitère. Une autre caractéristique des langues sémitiques étant la fixité des consonnes relativementaux éléments vocaliques qui sont plus ou moins « flottants », on est donc parfaitement autorisé sur leplan de l’étude sémantique à se fonder sur l’isolation du radical bilitère de Phaleg pour en dégager lesens évoqué.

7 J. Tourniac, Un nom très juif dans un rituel très chrétien : un certain « Phaleg », in Vie etperspective de la Franc- Maçonnerie traditionnelle, Dervy, 1978, pp. 163-172.

8 Il n’est pas anodin de noter que Phaleg, fils d’Héber, c’est-à-dire de celui qui donnera son nomaux hébreux, habite un lieu « séparé », tenu à l’écart de l’endroit où réside Tubalcaïn, endroit quin’est autre que celui où sera érigée la Tour de Babel. Un deuxième élément mérite toute notreattention, non moins troublant, pour ne pas dire inquiétant, c’est celui qui nous est révélé par le «Sloane Manuscript » , 1711, (SM 3329, Bibliothèque de Trinity College à Dublin ; le manuscritcommence par un dessin représentant un H majuscule surmonté d’une croix, visiblement extrait dumonogramme IHS du nom de Jésus), tel que la revue le Symbolisme de janvier 1967 nous l’apprendsous la plume de J.-P. Berger, à savoir que le Nom d’El Shaddaï fut sans doute prononcé pour lapremière fois à la Tour de Babel ! Jean Tourniac, voyant bien le caractère pour le moins renversant

d’une telle affirmation qui pouvait avoir des conséquences redoutables sur ses tentatives «d’acclimatation » des visions guénoniennes à l’intérieur du Rectifié, tenta de temporiser et expliquaquelque peu gêné et embarrassé : « Le dit manuscrit, s’il précise que c’est à la Tour de Babel que lemot des Maçons fut employé pour la première fois, ne spécifie nullement la nature de ce mot. »(Op. cit., p. 169). Or, il y a là de quoi vraiment s’interroger sérieusement devant la faiblesse d’unetelle discrète et rapide évacuation du problème, pour ne pas dire évidente dérobade, sachant que JeanTourniac n’eut de cesse d’expliquer et soutenir à l’envie, à la suite de Guénon, et dans de nombreuxouvrages dont Les Tracés de lumière, Dervy, 1976, témoignent amplement et éloquemment, que lemot des Maçons, la fameuse « Parole perdue », n’était autre que le Nom El Shaddaï !

(…) En second lieu, on note dans le Judaïsme traditionnel, qu’à l’époque de Phaleg, la viehumaine subit un raccourcissement de moitié – de 464 ans pour Heber, le père, à 239 ans pourPhaleg, le fils aîné Cette division est d’ordre symbolique et se réfère à la prophétie de Phaleg. Eneffet ce dernier est considéré par certains exégètes juifs comme ayant eu pour rôle providentiel deprédire les conséquences funestes – dont la dispersion des constructeurs – du Mémorial de Babel.Et c’est ainsi que par un détour imprévu, Phaleg nous ramène à Tubalcaïn et à cette parenté« parfois charnelle et parfois symbolique » qui unirait Caïn, Tubalcaïn, et Nemrod (DeutéronomeXXXII, 7-8). 9»

Jean Tourniac, que l’on ne peut accuser à cet endroit d’inconséquence, réagissant en authentiquefrère du Rectifié, lance ce sage avertissement qui aurait dû inspirer quelques réserves àd’imprudentes plûmes : « Si la prophétie de Phaleg, telle que la rapporte la tradition juive, n’estpas « réjouissante » – et la Vérité n ‘a pas a être consolante comme le rappelait René Guénon –elle est hautement salutaire pour les Maçons « qui ont des yeux pour voir et des oreilles pourentendre », et qui sont attentifs aux signes, dont celui de la Tour de Babel. La malédictionprophétique a valeur d’avertissement divin et il serait imprudent de « s’attaquer » à Phaleg, sil’on peut dire, soit en méconnaissant le type de séparation qu’il symbolise, soit en le considérantcomme disqualifié pour l’Ordre maçonnique, par suite de sa présence dans les grades bleus duRite Rectifié ou inversement. 10» Soit, traduit clairement, il serait très dangereux de refuser à Phalegle rôle qui lui fut conféré par l’Ecriture et Willermoz, et l’on ne s’attaque jamais sans d’incalculablesrisques au type de séparation qui caractérise Phaleg en la regardant par erreur comme «disqualifiante » pour le Régime Ecossais Rectifié, sous peine d’être soi-même, en retour, durement etsévèrement frappé en disqualification.

IV. ConclusionOn ne peut donc, en conclusion, qu’encourager les « cherchants » sincères à se garder d’utiliser

les peu sérieuses interprétations guénoniennes concernant le Régime Ecossais Rectifié regardé parles modernes disciples de la pseudo cause « traditionnelle » comme porteur d’éléments suspects,alors même que René Guénon ne pénétra jamais dans une loge du Régime Ecossais Rectifié, ne putaccéder, ni à la doctrine spécifique des Maîtres Ecossais de saint André, ni au sein de l’Ordre

Intérieur, et donc méconnut le cœur du dépôt initiatique willermozien et les fondements « opératifs »de la chevalerie chrétienne, n’accédant jamais aux Instructions de la Profession et de la GrandeProfession, et pire même, ayant toujours, par l’effet d’une incroyable méprise, confondu l’état deChevalier Bienfaisant de la Cité Sainte avec celui de Chevalier Profès.

S’il n’y avait pas déjà suffisamment d’éléments plus que problématiques concernant l’utilisationde ce « Nom » par des chrétiens placés sous une économie différente depuis la venue du Christ,c’est-à-dire non pas celle de la « loi » mais celle de la « Grâce » devant de ce fait invoquer le seulNom de Jésus afin d’être sauvés et rétablis en justice devant le Père, ce signe troublant suffirait àmontrer l’origine non conforme à l’esprit du Régime Ecossais Rectifié du Nom El Shaddaï et soninadéquation totale du point de vue de la perspective spirituelle fondamentale dans laquelle sontinscrits les frères.

9 Ibid., p. 172-173.10 Ibid., p. 174.Tout ceci est donc tout de même extrêmement gênant lorsqu’on prétend parler d’autorité sur un

sujet dont on est ignorant, et dont on méconnaît profondément l’authentique esprit et l’essentielleperspective spirituelle, tout en se croyant cependant autorisé à en tancer les prétendues « limites » et« disqualifications », sous couvert d’une fallacieuse, quoique bien légère, science.

Les véritables « hommes de désirs » seront donc heureusement inspirés de se tourner sans délai,sachant comme Phaleg se protéger des germes de la corruption, vers des sources bien plus pures en lamatière, qui leurs seront d’une aide largement supérieure en ces domaines subtils qui exigent rigueuret cohérence, ayant tout intérêt à s’instruire auprès de maîtres porteurs d’une authentiqueconnaissance éclairée par les lumières, non de la très hasardeuse pensée de Guénon, mais desfondateurs du Rite Ecossais Rectifié et de la Révélation contenue dans la « Sainte Parole » desEvangiles.

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#35

Jean-Baptiste Willermoz : extraits sur la prière | Le Régime Ecossais Rectifié

« L’étude sans la prière, a dit autrefois un sage est un véritableathéisme et la prière sans l’étude une vaine présomption. C’est-à-dire que celui qui croit pouvoir acquérir une vraie lumière parl’étude et par la seule force de son application, pense et agitcomme un athée et que celui qui présume que pour obtenir laconnaissance de la vérité, il lui suffit de la demander dans sesprières, sans faire aucun effort pour la découvrir et sans méditersur ses voies, n’est qu’un homme présomptueux, lâche ouindifférent pour elle. Le premier n’acquerra qu’une science vaineet dangereuse, l’autre restera dans l’ignorance. »

« Vérité éternelle, tu m’entoures de tes rayons, mais desombres ténébreuses s’élèvent sans cesse de mon âme etm’empêchent de porter mes regards jusqu’à toi.

Tous les jours, le soir et au milieu de la nuit, le matin et lemidi, je t’invoque avec ardeur. Mes efforts sont vains et inutiles.Le voile épais de mes affections matérielles m’ôte le vue de talumière.

Les images des objets auxquels j’ai livré mes sens, se placenten foule entre ton action bienfaisante et les faibles efforts de mavolonté ; elles m’égarent et m’entraînent par leurs illusionstrompeuses. Tu m’échappes et je perds l’espoir de t’atteindre.

O vérité sans laquelle mon être n’est qu’un néant, je necesserai de t’invoquer. Jusqu’à ce que tu aies exaucé mon désir,mes vœux seront mon unique existence. Entends ma voix, viensactionner celui qui t’appelle avec tant d’ardeur. J’abjure l’amourdes objets sensibles ; c’est toi seul que je veux aimer etcontempler à jamais comme mon unique vie. Car c’est toi qui esla vie de l’homme, et je sais avec évidence que ma destinée est devivre toujours en toi et avec toi. »

« Où pourrai-je donc trouver la science et la sagesse ? J’aipassé les jours et les nuits dans la recherche et les méditations etje demande encore où elle se tient cachée. L’homme est bien loin

de la connaître et d’en savoir le prix.Elle n’est ni dans les profondeurs de la mer ni dans les abîmes

de la terre. Où est-elle donc cette sagesse et cette intelligence ?Où pourrai-je la trouver ? J’ai consulté tous les êtres vivants ;aucun ne l’a encore aperçue, et j’ai vu qu’ils ne l’ont point eneux… Il n’y a que Dieu qui connaisse la route qui conduit verselle ; lui seul sait où elle se tient.

Lorsqu’il donnait des lois à tous les êtres, qu’il soumettait àses ordres les ventes et les tempêtes et qu’il dirigeait la foudredans la carrière qu’il lui imposait, la sagesse était devant lui.Alors, il dit à l’homme : Tu ne trouveras la science etl’intelligence que dans la crainte du Seigneur. »

Textes extraits de Mes pensées et celles des autres, B.M. de Lyon, MS 5526.http://www.directoirerectifiedefrance.org/?page_id=146

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#36

La dérive religieuse sectaire du Grand Prieuré des Gaules au grand jour ! | Le RégimeEcossais Rectifié

Le Grand Maître du GPDG, par l’effet d’un sectarisme religieuxincompatible avec les voies initiatiques,annonce vouloir « amender, opposer,contrarier, enrichir »,etmême « contester » (sic !) l’héritage doctrinal willermozien…Le numéro récemment publié des Cahiers Verts (n° 8, 2013), revue éditée jusqu’à présent par les

Editions du Simorgh dont l’ancien directeur de publication fut un Grand Maître adjoint éphémère duGrand Prieuré des Gaules en raison du scandale provoqué par l’affaire de la bibliothèque RobertAmadou, propose diverses contributions, dont, et c’est ce sur quoi nous arrêterons car ce texte estsigné de l’actuel Grand Maître fraîchement réélu pour un nouveau mandat de 4 ans, son discoursd’orientation.

Ce discours a vocation à poser les bases sur lesquelles on entend engager l’obédiencemultiritualiste coiffée d’une Aumônerie, qui a vécu la rupture que l’on sait en décembre 2012,puisque celui qui fut son Porte-parole officiel – suivi par de nombreux Frères dont l’ancien GrandMaître du G.P.D.G., et l’ancien Grand Conservateur du Rite écossais rectifié au G.P.I.F. (G.O.D.F.) -, prit l’initiative, face à une situation d’éloignement d’avec les critères du Régime qui s’avéraitirréversible, de réveiller le Grand Directoire des Gaulesqui était en sommeil depuis 1939.

Le sous-titre : «À ceux qui déchirent sa tunique », est d’ailleurs relativement bien choisi par unBruno Abardenti qui, comme nous allons le constater, piétine allègrement les principeswillermoziens, annonçant immédiatement la tonalité en étant à la navrante hauteur, à bien des égards,de ce que développe ce discours stupéfiant.

a) Permanence des pratiques de travestissement des textesD’entrée, par un petit tour de passe-passe dont il a le secret, et qui est désormais une habitude de

fonctionnement pour le GPDG, le Grand Maître du Grand Prieuré des Gaules, jamais en peine d’untravestissement comme il nous l’avait signalé récemment, commence son discours de la saint Michel2013 par une substitution tout à fait étonnante, puisqu’il considère que la Règle Maçonnique rédigée àWilhelmsbad proclamerait, selon lui, que « l’initiation parfaite » (sic) serait le christianisme.

Pour appuyer son propos, il cite ce passage connu de la Règle Maçonnique : « Tu accompliras tasublime destinée, tu recouvreras cette ressemblance divine, qui fut le partage de l’homme dansson état d’innocence, qui est le but du christianisme, et dont l’initiation maçonnique fait son objetprincipal. » [1]

Est-il question d’un « christianisme initiation parfaite » dans ce passage ?Nullement.

Il est simplement spécifié, dans la Règle Maçonnique en IX articles, que le but des travauxmaçonniques est de concourir à ce que chaque homme retrouve la « ressemblance divine » qu’il aperdue, but signalé comme étant commun avec le christianisme. Pas une ligne de plus.

D’ailleurs, à travers tous les rituels de l’Ordre, la seule chose que révélera le Régime rectifié, nonaux Frères des classes symboliques, et surtout pas de façon ostensible et tapageuse comme il estdevenu courant dans un GPDG mué en école de religion, mais seulement à ceux qui atteignent l’étatde Chevaliers Bienfaisants de la Cité Sainte, c’est que le christianisme, s’il « fut une initiation aussimystérieuse que celle qui l’avait précédée », apporta certes, mais uniquement en tant que Loi, des «connaissances parfaites », et que c’est cette Loi qui «est la plus sublime, la plus élevée, la plusparfaite de toutes » [2], non le « christianisme » en tant que tel, qu’on se garde bien de définir.

b) Depuis le VIe siècle, « l’initiation parfaite » est conservée dans le secretOn remarquera en effet, et c’est pourquoi ces trémolos exagérés et déplacés sur le

« christianisme » auraient été vigoureusement rejetés par Jean-Baptiste Willermoz qui constitua sonsystème comme une lente et prudente propédeutique de la Vérité, que si le Rituel du 1er Grade évoqueà plusieurs endroits le « christianisme », ou « la sainte religion chrétienne », il s’interdit de préciserce que l’Ordre entend sous ces termes, et pour cause, puisque le Frère apprendra, un peu plus tard, enavançant dans l’initiation, que le christianisme auquel se réfère le Régime rectifié, provient de celui,lié à la « religion primitive », détenteur de vérités oubliées, voire condamnées aujourd’hui parl’Eglise depuis le VIe siècle !

Et c’est en cela, sans aucun doute, que réside la preuve du travestissement positif, évident et trèscoupable de la doctrine du Régime opéré par Bruno Abardenti, car ce n’est non pas « l’Eglise » pourle système édifié par Willermoz, mais les Loges qui conservèrent l’initiation parfaite jusqu’au VIesiècle, « initiation parfaite » consistant dans les précieuses connaissances aujourd’hui perdues, quepréservent les initiés qui se sont retirés dans le secret !

Lisons : « Les Apôtres reçurent l’Initiation parfaite du Verbe même, et leur mission fut de laporter dans toutes les parties de l’univers. Nul doute, Mon Bien Aimé Frère, qu’elle n’ait ététransmise aux Nations où l’Evangile a été prêché. Les Loges qui la reçurent conservèrentjusqu’au VIe siècle ces précieuses connaissances, et le refroidissement de la foi annonce assezqu’à cette époque le souvenir s’en est affaibli, et que ce qu’il restait d’initiés se retirèrent dans lesecret. Mais aussi on doit croire que ces connaissances se sont perpétuées sans interruptionpendant tous les siècles du monde car tous les ouvrages que Dieu a créés demeurent à perpétuitéet nous ne pouvons rien ôter à tout ce que Dieu a fait. » [3]

Voilà l’enseignement véritable du Régime rectifié, l’authentique position de l’Ordre, qui est trèsloin de correspondre avec le discours trompeur, saturé d’impressions religieuses subjectives,embrumé des vapeurs illusoires issues d’une passion charismatique ecclésiale et de visionspersonnelles propres à l’actuel Grand Maître du Grand Prieuré des Gaules, introduisant des vuesfantaisistes au sein d’un Rite, jusqu’à en corrompre totalement l’économie, le sens et la nature.

c) Qui a raison Jean-Baptiste Willermoz ou Bruno Abardenti ?On sourira ainsi, à ce titre, provenant de quelqu’un qui clame à tue-tête des propos, d’ailleurs

puissamment déformés, sur le christianisme, que l’Ordre ne délivre qu’après plusieurs années d’unepatiente démarche et qu’il se garde de révéler trop vite, écrire hypocritement, au sujet de la doctrineinterne du Régime qui elle, traverse l’ensemble des Grades et confère sa spécificité à la Réforme deLyon : « Il est donc extrêmement dangereux de vouloir poser cet enseignement comme préalableau parcours que propose le Rite Ecossais Rectifié, car cela reviendrait à ne pas tenir compte del’importance du rythme et des effets du Rite agissant au bénéfice de l’homme. Agir ainsi serait lanégation de son mode opératoire. » (p. 12).

Ah bon, voilà qui est nouveau ?!Il serait donc « extrêmement dangereux de vouloir poser cet enseignement comme préalable au

parcours que propose le Rite Ecossais Rectifié »…..ceci est curieux, car précisément le Rituel dittout le contraire, la mauvaise foi atteignant ici des sommets, sachant que la rencontre avec le Trianglerayonnant, le Chandelier à trois branches symbolisant la triple puissance, les « essencesspiritueuses », etc., pour prendre des exemples significatifs, advient dès le Grade d’Apprenti,Apprenti qui sera invité par la Règle Maçonnique à se libérer des « vapeurs grossières de lamatière », et que plus positivement encore, alors que celui qui doit être reçu franc-maçon n’estencore qu’un candidat séjournant dans la chambre de préparation, un Frère lui délivre cetavertissement impératif : « L’Ordre, ne doit pas accueillir des individus qui auraient une doctrineopposée à celle qu’il regarde comme sa règle fondamentale… » [4]

Avons-nous bien lu ?La comparaison vaut toutes les démonstrations :

Proposition A : « L’Ordre, ne doit pas accueillir des individus qui auraient une doctrineopposée à celle qu’il regarde comme sa règle fondamentale… » (J.-B. Willermoz, Rituel duGrade d’Apprenti, Discours du Frère préparateur au candidat, 1802).Proposition B : « Il serait extrêmement dangereux de vouloir poser cet enseignementcomme préalable au parcours que propose le Rite Ecossais Rectifié ». (B. Abardenti, SaintMichel 2013, Discours du SGM du GPDG, Cahiers Verts n° 8, 2013, p. 12).

Qui donc a raison, Bruno Abardenti ou Jean-Baptiste Willermoz ?On le constate, si le « christianisme » n’est absolument pas désigné, et à aucun endroit dans la

Règle Maçonnique, comme « l’initiation parfaite », en revanche, une disposition ou un a priori auminimum favorable (qu’il appartient aux enquêteurs, au frère préparateur, au parrain et aux membresde la Loge d’évaluer), à l’égard de la doctrine que l’Ordre regarde comme sa règle fondamentale,est un préalable obligatoire pour être reçu franc-maçon du Régime rectifié !

Et ce préalable obligatoire relève d’une raison simple qu’explique Jean-Baptiste Willermoz : ce

que le Régime rectifié considère sous le nom de « christianisme », analyse qui sera dévoilée après letemps d’un parcours procédant par étapes, participe d’une approche transcendantede nature nondogmatique, d’un enseignement perdu par l’Eglise depuis le VIe siècle, c’est-à-dire d’unedoctrine, en effet, qui est très loin de correspondre à ce que Bruno Abardenti, abusant desprérogatives de sa charge de Grand Maître, souhaite mettre sous le nom de « christianisme », sevoulant, dans une envolée pompeuse frisant d’ailleurs avec le ridicule : « le féal de la vérité, lechevalier de la beauté, le prêtre de l’amour, le prophète de son retour» [5].

C’est pourquoi, cette tirade grotesque du Grand Maître du GPDG, lorsqu’on constate sonéloignement positif d’avec les positions de l’Ordre, pourrait être ainsi paraphrasée : «je serai le féalde la contre-vérité, le chevalier du travestissement, le prêtre de la division, le prophète de sesdétours».

d) Des propos de chef de secte !Mais par delà une entrée en scène qui se veut grandiloquente, quoique gravement faussée et

mensongère dans la mesure où elle s’appuie sur une contrevérité formelle qui vient d’être démontrée,que nous réserve la suite de ce discours hallucinant ?

En vérité bien des surprises, et non des moindres !Développant sa péroraison à partir de son erreur initiale, Bruno Abardenti qui use et abuse des

métaphores religieuses, poursuit son envolée lyrique par plusieurs paragraphes du même tonneaurédactionnel, au sein desquels il n’hésite pas à parler du « banquet des mystères divins »,« d’eucharistie perpétuelle », des « messagers de braise », « d’action prophétique par coopérationangélique », des « vivants du Seigneur », etc., (p. 11), nous faisant nous demander si Abardenti neconfond pas ses extases personnelles, avec la réalité concrète de son obédience, dont il semble avoiroublié qu’elle n’est pas une congrégation d’évangélisateurs missionnaires, mais une organisationmaçonnique ?

Cependant, plus inquiétant encore, s’exprimant comme s’il prêchait, emporté par les vapeursd’une visible passion, Bruno Abardenti en vient à proférer des attaques à l’encontre de ceux qui sesont opposés à la déviance religieuse qui, au fil des ans, s’est imposée au GPDG, en des termes quirelèvent objectivement de la phraséologie des gourous enfiévrés et des chefs de sectes, parlant, telun adepte de la scientologie, en des formules qui ne prennent même plus la peine de dissimuler unevolonté de règlement de compte personnel, en désignant à la vindicte : les « faux prophètes [qui]nous enferment dans des palais de cristal au parfum de néant » (p. 12), ou les « boucs (sic !) quipratiquent l’errance de l’aventure mentale » (ib.).

Chacun, évidemment, jugera de la valeur et du bien-fondé de ces formulations totalementdéplacées et inappropriées, et saura en tirer les conclusions qui s’imposent concernant les méthodesde l’actuel Grand Maître du GPDG.

e) Pour le Grand Maître du GPDG, « les dogmes de l’Eglise sont intangibles » et ont autoritésur la franc-maçonnerie !

Toutefois, revenant sur ses propos antérieurs, Bruno Abardenti qui se doute que là est bien le fonddu problème, tient de nouveau à persuader son auditoire de la justesse d’une affirmation qui auraitfait hurler Willermoz et tous les fondateurs du Régime rectifié : « J’ai déclaré et écrit à la SaintMichel 2012, que le dogme était intangible, mais pas la doctrine. » (p. 12).

En effet, il écrivait en 2012 : « C’est le dogme qui est intangible, pas la doctrine (…) Nousrestons… sentinelles des défaillances oublieuses des vérités religieuses… Sans la présence duChrist en nous, à travers ses sacrements, nos prières à termes nous feront tomber dansl’illusion…[l’homme] n’est nullement au-delà des lois de l’Eglise. » [6]

Qu’un Grand Maître d’une structure maçonnique française en lien avec des obédiences qui sedéclarent « adogmatiques », puisse affirmer lors d’un discours officiel, qui plus est imprimé dans larevue de son organisation, que seul le « dogme » défini par les conciles a autorité sur l’enseignementd’un système maçonnique dont il a la charge, et que par ailleurs, les « sacrements de l’Eglise » nousgarantissent de la prétendue « illusion » que constitueraient les méthodes préconisées par les voiesinitiatiques, ce à quoi se rajoute l’insistance sur le fait que, selon lui, « nul n’est au-delà des lois del’Eglise », est absolument stupéfiant !

On se demande d’ailleurs par quel miracle sont encore maintenus des accords de reconnaissanceentre une déviance religieuse dogmatique sectaire, ce qu’incarne objectivement le GPDGaujourd’hui, et des obédiences fondées sur la « liberté absolue de conscience », la « laïcité », et« l’indépendance par rapport aux dogmes de l’Eglise ». Passons.

f) Le projet destructeur de l’Ordre dévoilé !Le « sommet » de ce discours, si l’on peut parler ainsi pour de tels propos affligeants, est atteint

dans les lignes suivantes qui permettent de mesurer, certes le degré de distance d’avec les critèresinitiatiques, mais surtout la menace directe qui pèse sur l’Ordre, puisque Bruno Abardenti, du haut deson estrade associative, en vient à qualifier de « petits maîtres » (sic !) Willermoz, Saint-Martin etMartinès de Pasqually, de la façon suivante : « Toute doctrine qui ne se discuterait pas,deviendrait par définition un dogme (…) L’homme dans ses gènes originels, doit coopérer auxénergies divines, en prolongeant de son talent tout enseignement humain, même inspiré.Willermoz, Saint-Martin et Martinez au regard du seul vrai Maîtresont des « petitsmaîtres»… » (p. 13).

Et comment doit-on se comporter à l’égard de ceux, regardés comme des « petits maîtres », par le« Grand Maître » (sic) du GPDG ?

On l’aura deviné, en ne se gênant pas pour : « les amender, [les] opposer, [les]contrarier, puisqu’enrichir n’est point trahir, sans encourir les foudres d’une doxa trop pharisienne pourqui, l’Esprit Saint aurait cessé de souffler, soit à la Crucifixion, soit à la naissance au ciel des «petits maîtres ». (p. 13)

Voilà l’aveu tant attendu !La réalité est enfin exposée au grand jour de ce projet concocté depuis longtemps déjà par un

noyau de zélotes occupant la tête du GPDG, qui cherchent, par tous les moyens à leur disposition, àsoumettre, de gré ou de force, la doctrine de l’Ordre avec l’enseignement de l’Eglise, considérantqu’ils n’ont pas à se gêner, car, si l’on suit bien l’équation simple qui désormais s’impose :

1°) – Puisque « Willermoz, Saint-Martin et Martinez au regard du seul vrai Maîtresont des « petits maîtres » ;

2°) – Sachant que Bruno Abardenti se laisse désigner comme le « représentant du Christ en cemonde » par le Grand Orateur du GPDG, et le fait publier complaisamment dans les Cahiers Verts ences termes : « (…) il est le digne représentant du Christ dans l’ordre. (…) En servant l’ordre etson Grand Maître ou ses représentants et lieutenants, nous servons le Christ » [7] ;

3°) – Il est donc possible, puisque Abardenti et ses affidés se considèrent comme inspirés parl’Esprit-Saint, s’autoproclamant les « représentants du Christ »,bénéficiaires, on l’aura compris, des« énergies divines », qui « prolongent de leur talent tout enseignement humain »: « d’amender,opposer, contrarier, enrichir » une doctrine de l’Ordreen contradiction d’avec les canonsconciliaires, afin de la transformer et la rendre conforme avec la dogmatique de l’Eglise !

Tel est le sinistre et terrifiant projet, cette fois-ci avoué et clairement dévoilé, positivementexprimé, auquel se sont consacrés quelques sectaires qui, dans leur illusion charismatique,s’imaginent détenteurs du pouvoir d’amender, opposer, contrarier et enrichir Willermoz, Saint-Martin et Martinès de Pasqually ! trompant d’ailleurs ceux qui leur font confiance et auprèsdesquels ils se présentent comme des défenseurs de la « franc-maçonnerie chrétienne », alors queleur but n’est autre, comme il apparaît à présent – après avoir opéré une mutation sans douteirréversible de l’obédience devenue une structure multiritualiste coiffée d’une Aumônerie -, dans unsecond temps, que d’engager une transformation radicale et profonde de la substance même duRégime rectifié, pour en faire quelque chose de tout à fait différent, voire d’opposé à ce que lesfondateurs de l’Ordre édifièrent au Convent des Gaules en 1778, mais compatible en revanche, avecles critères de la « franc-maçonnerie chrétienne », telle que la conçoit le GPDG d’aujourd’hui.

ConclusionIl ne s’agit plus de se le cacher, le stade des menaces ou des risques étant largement franchi, le

loup s’est introduit dans la place et dirige une organisation, qui d’ailleurs n’est plus, faute d’en avoirconservé les critères, une structure rectifiée qu’elle dit elle-même, et soutient ne pas être, ce qui esttout à fait exact, d’autant que l’essence de la transmission de Camille Savoire (1869-1951) estdésormais passée, en décembre 2012 à Lyon, en d’autres mains infiniment plus respectueuses del’héritage willermozien, et qui ont réveillé, car cela était devenu une nécessité impérative, le GrandDirectoire des Gaules, à l’origine du retour du Régime rectifié en France en mars 1935.

Un point semble cependant important à rappeler aux Grand Maître du GPDG et de son petit grouped’amis, qui sont à la tête de cette entreprise de corruption des fondements de l’Ordre : Willermoz,Saint-Martin et Martinès de Pasqually, onttoujours affirmé, en y insistant de façon solennelle, queleur « doctrine », qu’ilsqualifiaient de « sainte »,n’était point une « invention humaine » ni une

« fille de la raison susceptible de contestation » [8], comme vient d’en faire diffuser l’affirmation àtous ses membres le GPGD dans son bulletin interne baptiséEpitomé, mais qu’elle provenait, parl’intermédiaire de Moïse, de Dieu Lui-même !

Ainsi donc, que les aveugles illusionnés, qui annoncent vouloir amender, opposer, contrarier,enrichir, et même jusqu’à « contester » (sic) l’héritage doctrinal des maîtres fondateurs, sesouviennent que ce type d’action, folle et insensée s’il en est, n’est pas sans quelques risques sur leplan spirituel, et qu’on ne se livre pas à ce petit jeu impunément, surtout dans les domainesinitiatiques. Quant à ceux, que ces débats jusqu’à présent avaient dépassés, ou qui les imaginaientauxiliaires, non majeurs, voire périphériques, les considérant comme des « querelles entrethéologiens », des « divergences d’intellectuels », des « oppositions individuelles », ils ne pourrontplus dire « on ne savait pas », « on ne se doutait pas que le mal était si profond », ou « on n’avait paspris conscience d’une action si grave envers le Régime rectifié et le devenir de l’Ordre »….

Pour que les choses soient claires, voici ce que Jean-Baptiste Willermoz a toujours soutenu àpropos de la « sainte doctrine », ce à quoi il demandait de souscrire, pour certains, sous serment, etqui aurait été absolument scandalisé, saisi d’effroi, profondément choqué et épouvanté en apprenantque certains prétendus « membres » de son Régime, pensaient et affirmaient souhaitable aujourd’hui,d’amender, opposer, contrarier, enrichir, et contester la doctrine de l’Ordre :

« La doctrine […] n’est point un système hasardé arrangé comme tant d’autressuivant des opinions humaines ;

elle remonte… jusqu’à Moïse qui la connut dans toute sa puretéet fut choisi par Dieu pour la faire connaître au petit nombre des initiés,

qui furent les principaux chefs des grandes familles du Peuple élu, auxquels il reçut ordre de la transmettre

pour en perpétuer la connaissance dans toute sa vérité…Les Instructions sont un extrait fidèle de cette Sainte Doctrine

parvenue d’âge en âge par l’Initiation jusqu’à nous.[…]

La forme de cette Instruction a quelquefois varié selon les temps et les circonstances,mais le fond, qui est invariable, est toujours resté le même.Recevez-la donc avec un juste sentiment de reconnaissance

et méditez-en la doctrine sans préjugé avec ce respect religieuxque l’homme dignement préparé peut devoir à ce qui l’instruit et l’éclaire. »

Jean-Baptiste Willermoz,Statuts et Règlement de l’Ordre des G. P., Ms 5.475, BM Lyon.

Cahiers Verts n° 8, nouvelle série, 2013.Notes. 1. Cf. Règle Maçonnique, in Rituel d’Apprenti rédigé en Convent Général de l’Ordre l’an 1782,

Version de 1802 de la Triple Union à l’Orient de Marseille, Bibliothèque Nationale, Paris.2. Rituel de l’Ordre de la Cité Sainte pour la classe des Chevaliers, approuvé par le Convent de

Wilhelmsbad le 30 août 1782, ratifié le 18 juillet 1784, BM de Lyon, Fonds Willermoz, ms 5921.3. Cf. Instruction d’Ecuyer Novice, 1778-1808.4. Rituel d’Apprenti rédigé en Convent Général de l’Ordre l’an 1782, op.cit.5. Bruno Abardenti, Discours du Sérénissime Grand Maître du Grand Prieuré des Gaules, Saint

Michel 2013, Cahiers Verts n° 8, 2013, p. 11.6. Bruno Abardenti, Discours saint Michel 2012, Cahiers Verts n° 7, pp. 14-15.7. Dominique V., Ordre et obédience, Cahiers Verts n° 8, 2013, p. 31. Si l’on pouvait avoir

encore quelques doutes sur le fait que l’Ordre doive impérativement se libérer de la tutelle desobédiences pour vivre selon son essence, ce texte en deux parties publié dans les Cahiers Verts n°8,(Ordre chevaleresque et initiation chrétienne, pp. 17-24, Ordre et obédience, pp. 25-34), serait denature à convaincre quiconque, de par les propositions invraisemblables qu’il soutient allant jusqu’àréintroduire du « droit divin » dans l’exercice des charges, de la nécessité pour l’Ordre de sonémancipation de la prison structurelle des organisations non rectifiées.

8. J.-F. V., « ….la doctrine rectifiée (…) est fille de la raison, même si cette raison estchrétienne ;Tout ce qui est de l’ordre de la raison est susceptible de contestation », Epitomé, n°1,décembre 2013, p. 5. Le texte de l’Epitomé est reproduit in extenso sur le blog de l’ex GrandAumônier du GPDG, Un Orthodoxe d’Occident : « Doctrine et dogme…dans l’Eglise et la franc-maçonnerie« , assorti de quelques commentaires hallucinants qu’aurait pu signer le très réactionnaireet intégriste Abbé Augustin Barruel (1741-1820) – qui désignait la doctrine des illuminés commeétant une forme contemporaine de l’hérésie gnostique et manichéenne -, commentaires qui témoignentd’un rejet hostile et virulent des bases de la pensée illuministe.

http://semperrectificando.wordpress.com/2014/01/02/la-derive-religieuse-sectaire-du-grand-prieure-des-gaules-au-grand-jour/Permalink: https://willermoz.com/2014/01/03/la-derive-religieuse-sectaire-du-grand-prieure-des-gaules-au-grand-jour/

#37

L’Ordre des Chevaliers Bienfaisants de la Cité Sainte et sa fonction mystique | LeRégime Ecossais Rectifié

Si le Convent des Gaules en 1778 compta treize séances, ce fut dès la première que Jean deTurkheim et Jean-Baptiste Willermoz soumirent à l’adoption des suffrages de l’assemblée des frèresle nouveau nom « d’Ordre des Chevaliers Bienfaisants de la Cité Sainte». Alice Joly précise,s’appuyant sur un document faisant état des délibérations [BM Lyon, ms. 5479] :

« Qui eut l’idée de ce nom ? Une chose est certaine, c’est qu’ilétait avant l’ouverture des débats déjà choisi et accepté par lespromoteurs de la réforme. (…) La loge de Willermoz s’appelait «la Bienfaisance », mais on a remarqué qu’un grade de ChevalierBienfaisant existait déjà dans la loge de Saint-Théodore de Metz,et qu’il y avait en Suisse un système Écossais qui révérait commepatron Saint Martin, le soldat romain au cœur charitable. Si nousen croyons les souvenirs de Paganucci ce seraient ces influences,probablement représentées par Saltzman, qui auraient fait choisirle nouveau titre.

Il était fait pour convenir également aux desseins de Willermozcar il évoquait les Templiers sans les nommer, et donnait auxChevaliers une vague et idéale patrie, qui pouvait être tout aussibien Rome, centre de la chrétienté, Jérusalem, où s’éleva letemple de Salomon et où Jésus-Christ fut crucifié, que la citécéleste immatérielle, espoir et but suprême de tout effortmystique. » [1]

Le Régime Ecossais Rectifié, en tant qu’Ordre des C.B.C.S., prit donc naissance en 1778 à Lyon,

lors du Convent général de la Stricte Observance qui avait pour mission d’arrêter une positionferme vis-à-vis des points problématiques qui apparaissaient comme un facteur de nombreusesméprises et d’interprétations discutables parmi les frères des Provinces allemandes et françaises.

Jean-Baptiste Willermoz qui avait trouvé dans la Stricte Observance un cadre très solide, unestructure évidemment organisée et incomparablement plus stable que celles de l’Ordre Chevaliers

Maçon Elus Coëns de l’Univers à l’intérieur duquel il exerçait des responsabilités, mais dont iln’avait eu de cesse de se lamenter depuis 1767 du désordre qu’il y régnait, ressentait néanmoinscomme un vide, une limite dont les illusoires prétentions présentées comme étant les objectifs secretset ultimes de la maçonnerie et, en particulier, parmi bien d’autres, la réédification de l’Ordre duTemple, lui apparaissaient comme extrêmement dérisoires et fort maigres du point de vue initiatique.

Le but, clairement et explicitement confié à l’Ordre des Chevaliers Bienfaisants de la CitéSainte, fut donc de conserver et préserver, au moment où les élus coëns disparaissaient de la scènede l’Histoire, ladoctrine de la réintégration, mais christianisée et corrigée de ses erreurs trinitaireset christologiques.

A ce titre, et on en comprend aisément la raison, la constitution d’un « Ordre », porteur et héritierde l’authentique tradition, s’imposait pour Jean-Baptiste Willermoz, afin que soit offert auxhommes, et en particulier aux maçons possédant une sincère noblesse de cœur mais cependantdésorientés au sein de temps incrédules et corrompus, de participer à l’œuvre salutaire deréarmement spirituel et religieux, à la reconstruction des fondations du vrai Temple qui n’est pointfait de mains d’homme, et accomplir, par là même, l’impérieux devoir imposé à ceux qui ne peuventaccepter, ou qui souffrent, de croupir dans le marasme existentiel sans chercher à s’extraire des fersde la prison matérielle dans laquelle ils furent enfermés en venant en ce monde ; lieu inquiétantdominé par celui qui en est le prince, et qui détient sur ces domaines périlleux la gloire et l’autorité(Luc 4, 6).

Mais cette transformation, « opérée » par la foi en la Parole de Vérité, et dont la responsabilité estconfiée à l’Ordre, encore faut-il que cet « Ordre » soit en mesure de l’accomplir, ou tout au moins dela rendre possible, ce qui ne se peut réaliser que si la fidélité est conservée intacte aux principes duRégime, fixés et arrêtés par le Convent des Gaules en 1778.

Note.1. A. Joly, Un mystique lyonnais et les secrets de la franc-maçonnerie, Protat frères, 1938, pp.

110-111.http://www.directoirerectifiedefrance.org/?page_id=71

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#38

Traité des deux natures de Jean Baptiste Willermoz | Le Régime Ecossais Rectifié

« Mais à peine le troisième jour est commencé, il ressuscite glorieusement du tombeau par sapropre divine puissance, et commence à se montrer à ceux qui l’ont aimé le plus tendrement, sousune nouvelle forme corporelle, en tout point semblable à celle dans laquelle il avait vécu parmiles hommes, mais glorieuse et impassible, dont il se revêt, et qu’il fait aussi disparaître à son gré.C’est avec cette même forme glorieuse qu’après avoir conversé, marché, mangé pendant quarantejours, leur apparaissant subitement et disparaissant aussi subitement de devant eux quand il luiplaît, après leur avoir demandé de baptiser en son nom, d’enseigner aux hommes le mystèreineffable de la Trinité divine du Père, du Fils et du Saint-Esprit, faisant un seul Dieu, qu’il monteglorieusement au ciel en leur présence, où il sera rendu visible aux anges et aux hommessanctifiés, dans cette forme humaine glorifiée.

Mais quelle est donc la nature de cette nouvelle forme corporelle, et qu’est-ce qui constitue ladifférence essentielle de celle-ci sur la première ? demanderont ces hommes charnels et matérielsqui ne voient rien que par les yeux de la matière, et ceux qui sont assez malheureux pour nier laspiritualité de leur être, et ceux aussi qui, attachés exclusivement au sens littéral des traditionsreligieuses, ne veulent voir dans la forme corporelle de l’homme primitif avant sa chute, qu’uncorps de matière comme celui dont il est actuellement revêtu, en y reconnaissant seulement unematière épurée. C’est Jésus-Christ lui-même qui va leur prouver la différence essentielle de cesdeux formes corporelles et leur destination, en se revêtant de l’une après sa résurrection, aprèsavoir anéanti l’autre dans le tombeau.

Jésus homme-Dieu voulant se rendre en tout semblable à l’homme actuel, pour pouvoir luioffrir en lui un modèle qu’il pût imiter en tout, s’est soumis à se revêtir en naissant d’une formematérielle parfaitement semblable à celle de l’homme puni et dégradé. Elle diffère cependant ence point unique que la forme matérielle de l’homme conçu dans la concupiscence de la chair estcorruptible, au lieu que la forme matérielle de Jésus, conçue par l’unique opération du Saint-Esprit et sans aucune participation des sens matériels, est incorruptible. Mais Jésus-Christdépose dans le tombeau les éléments de la matière, et ressuscite dans une forme glorieuse qui n’aplus que l’apparence de la matière, qui n’en conserve pas même les principes élémentaires, et quin’est plus qu’une enveloppe immatérielle de l’être essentiel qui veut manifester son actionspirituelle et la rendre visible aux hommes revêtus de la matière.

Si on pouvait encore douter de cette importante vérité, qu’on réfléchisse sérieusement sur lesétonnantes apparitions sous formes humaines de l’archange Gabriel à Marie et à Zacharie, pèrede Jean-Baptiste, sur celles des anges envoyés à Abraham pour lui prédire la naissance d’Isaac etla punition de Sodome, de l’ange conducteur du jeune Tobie, et d’un grand nombre d’autres

apparitions semblables des esprits purs, dont la forme corporelle a été réintégrée en eux-mêmes eta disparu aussitôt que leur mission particulière était terminée. Elles prouvent toutes les mêmesvérités. Jésus-Christ ressuscité se revêt de cette forme glorieuse chaque fois qu’il veut manifestersa présence réelle à ses apôtres pour leur faire connaître que c’est de cette même forme, c’est-à-dire d’une forme parfaitement semblable et ayant les mêmes propriétés, dont l’homme était revêtuavant sa prévarication ; et pour leur apprendre qu’il doit aspirer à en être revêtu de nouveauaprès sa parfaite réconciliation, à la fin des temps.

C’est là en effet cette résurrection glorieuse des corps qui seront en même temps changés pourles hommes réconciliés, ainsi que l’exprime saint Paul, mais qui ne seront pas changés pour lesréprouvés. C’est enfin cette résurrection glorieuse dont la manducation réelle du corps et du sangde Jésus-Christ en apporte dans tous ceux qui y participent dignement, le germe fructificateur. »

Jean-Baptiste Willermoz, Traité des deux natures, Bibliothèque municipale de Lyon, fondsWillermoz, ms. 5940.

http://www.directoirerectifiedefrance.org/?page_id=142Permalink: https://willermoz.com/2014/04/09/traite-des-deux-natures-de-jean-baptiste-willermoz/

#39

L’Ordre seul est le principe du Régime rectifié | Le Régime Ecossais Rectifié

Lors du Convent des Gaules fut édictée une loi qui deviendra le principe même du RégimeEcossais Rectifié : c’est « l’Ordre », considéré comme base et principe, et non quelque structureobédientielle, qui légitime et fonde la régularité des Loges :

« Les Loges ne sont que des sociétés particulières, subordonnéesà la société générale, qui leur donne l’existence et les pouvoirsnécessaires pour la représenter dans cette partie d’autorité qu’elleleur confie ; que cette autorité partielle émane de celle qui résideessentiellement dans le centre commun et général de l’Ordre….[1]»

Ainsi s’imposait que puisse être érigé un Ordre initiatique d’essence chevaleresque, mais d’unechevalerie toute spirituelle car destinée à livrer une bataille subtile se situant dans l’invisible,capable de lutter, non pour rétablir un Ordre matériel disparu au cours de l’Histoire au XIVe siècle,celui du Temple, mais contre les reliquats de la dégradation originelle, en engageant un combatsusceptible de réduire et abattre les forces qui enserrent les êtres dans les obscurs cachots dudomaine des ombres depuis la Chute.

René Guénon (+ 1951) sur ce point sut rappeler avec pertinence ce qui vint frapper la maçonneriemoderne, lorsqu’elle appliqua à ses formes traditionnelles, le modèle de structures profanes :

« Cette « dégénérescence », si elle ne change en rien la natureessentielle de la Maçonnerie, rend parfaitement explicables lesnombreuses déviations qui s’en sont dégagées depuis troissiècles, et dont l’organisation sous sa forme « obédientielle », endes structures qui présentent le défaut évident « d’avoir étécalquées sur la forme des gouvernements profanes », est l’uncaractère fort symptomatique de cette modernité. » [2]

Ce à quoi – pour rendre hommage à Marius Lepage (+ 1972), grand maçon qui prit l’initiatived’inviter le Révérend Père Michel Riquet en loge – on pourrait rajouter ces lignes que n’aurait pasreniées Willermoz :

« L’Ordre est d’essence indéfinissable et absolue; l’Obédience

est soumise à toutes les fluctuations inhérentes à la faiblessecongénitale de l’esprit humain. » [3]

Force est de constater, alors qu’aujourd’hui beaucoup ont perdu la compréhension de ce qu’est« l’Ordre » selon les critères du Régime rectifié, et qu’il est donc grand temps d’en revenir auxprincipes de la Réforme de Lyon, tels que rappelés dans l’une des Instructions datant du Conventdes Gaules :

« Vous cherchez à remonter au but primitif de la Franc-Maçonnerie et l’on vous a attaché à un Ordre qui correspond avecceux qui seuls peuvent vous instruire. Si vous savez quelque jourvous faire reconnaître pour un vrai chevalier Maçon de la CitéSainte, si vous bâtissez constamment dans le temple du Seigneur,vous pouvez concevoir l’espoir de parvenir à un but si désiré. »(Instruction du 5e Grade, 1778).

******************Notes1. Code Maçonnique des Loges Réunies et Rectifiées de France, Tel qu’il a été approuvé par

les Députés des Directoires au Convent National de Lyon 5778.2. R. Guénon, Aperçus sur l’initiation, ch. XIV, « Des qualifications initiatiques » & ch. XXIX,

« Opératif » et « Spéculatif ».3. Marius Lepage, L’Ordre et les Obédiences, Histoire et Doctrine de la Franc-Maçonnerie,

1956, p.8.Permalink: https://willermoz.com/2014/04/15/362/

#40

LES GRADES MAÇONNIQUES DU RÉGIME ÉCOSSAIS RECTIFIÉ | Le RégimeEcossais Rectifié

Il est un domaine qui suscite souvent l’incompréhension, et qui pourtant est une caractéristiqueessentielle du Régime rectifié, à savoir le caractère autosuffisant et indépendant de la « voie

initiatique » qui fut fondée par Jean-Baptiste Willermoz au XVIIIe siècle, qui ne saurait s’adjoindreou coexister avec d’autres Rites maçonniques, la nature propre de la Rectification n’autorisant pas

que puissent vivre ensemble, et sous l’autorité d’une même structure obédientielle quelle que soit sadénomination, le Régime rectifié et d’autres systèmes initiatiques, ce qui est tout à fait contraire à

l’esprit de l’Ordre.

L’ordonnancement des Grades du Régime, permet de bien comprendre comment est organisé leRégime écossais rectifié, sachant que l’explication du Code écarte d’entrée, tous les grades d’élus,dont celui de Chevalier Kadosch :

Voici comment les choses sont exposées dans le Code Maçonnique des Loges Réunies et

Rectifiées de France, unique règle pour le Régime rectifié :

« La Maçonnerie rectifiée ne reconnaît que quatre grades ; savoirceux d’Apprenti, de Compagnon, de Maître et de MaîtreÉcossais. Tous les autres grades, sous quelque dénominationqu’ils soient connus, principalement toute espèce d’élu, deChevalier Ks. (Kadosch) et des grades qui leur ressemblent,sont expressément défendus dans toutes les Loges réunies sousles peines les plus graves, comme dangereux et contraires au butet à l’esprit de la Franc-Maçonnerie. » [1]

Le sujet touchant à la religion professée par les candidats afin d’être admis en Loge, est on ne peutplus clair, sachant cependant que le terme « professer », consiste pour le Régime – qui fait preuved’une grande sagesse et d’une infinie prudence afin d’éviter les querelles théologiques – enseulement deux points, et pas un de plus : 1°) la croyance en l’existence de Dieu, et 2°)l’immortalité de l’âme :

« Aucun profane ne peut être reçu Franc-Maçon s’il ne professe lareligion chrétienne, s’il n’a pas l’âge de vingt et un ans, à moins

qu’il soit fils de Maçon, ou muni de dispenses, et s’il n’est né deparents libres. » [2]

Le grade de Maître-Écossais, qui deviendra au fil du temps « Maître-Écossais de Saint-André »,est exclusif au Régime, et nul s’il n’en est membre ne peut y être admis :

« Le grade de Maître-Écossais est exclusivement affecté aurégime rectifié. C’est par cette raison que, lorsqu’on le confère,ou qu’on tient Loge d’instruction de ce grade, on n’ose y faireassister aucun visiteur d’un autre régime, quelque grade qu’il ait.On ne peut le donner qu’à un Frère, qui appartient à une Logeréunie sous quelque dénomination que ce soit, qui oblige à ypayer annuellement l’écu d’Ordre. »

Un point extrêmement important mérite d’être souligné, le Frère devenu Maître-Écossais de Saint-André, peut se voir communiquer tous les autres grades de la Franc-maçonnerie, maisuniquement par »communication », ce qui signifie sans que soit organisée une quelconque« cérémonie » pour la transmission de ces grades :

« Lorsqu’un Frère aura été reçu régulièrement Maître-Écossais, leVénérable-Maître de la Loge ou tel autre Frère qu’il commettrapour cela, pourra lui communiquer, sans aucun frais nicérémonies tous les grades dénommés supérieurs dans lesautres régimes, qui seront à sa connaissance, sans que pour celale Frère, auquel ils seront ainsi communiqués, puisse se décoreren Loge d’aucun des attributs et couleurs desdits grades. »

Enfin, les décors des « Maîtres-Écossais de Saint-André » font l’objet d’une description

minutieuse :

« Les marques distinctives des Maîtres-Écossais sont : 1 ° ‑ Untablier de peau blanche, coupé en carré long en travers, ainsi quela bavette, qui sera doublée de taffetas vert, la bavette rebordéede couleur de feu. 2° ‑ Un cordon vert à gros grains moiré de la

largeur de deux pouces et demi, avec une rebordure de troislignes, en couleur de feu, sur le bord extérieur seulement, avecune petite rosette aussi couleur de feu au bas. 3° ‑ Le bijou dugrade en vermeil, qui sera suspendu sur la poitrine par le cordonpassé au col en sautoir, et qui y sera attaché par un petit rubancouleur de feu. Ce bijou sera une étoile flamboyante à six pointes,formant un double triangle avec la lettre « H » au milieu entre lecompas et l’équerre sur un fond en couleur de feu. Cette étoilesera entourée d’un cercle surmonté d’une couronne. »

Le Régime rectifié doit donc, ceci étant un point non négociable s’il se veut authentique et êtrepratiqué en fidélité à ses bases fondatrices, respecter les prescriptions du Code de 1778, et ne points’en écarter, sous peine d’un éloignement dommageable et d’une distance préjudiciable dont lesconséquences se feront sentir tôt ou tard et inévitablement, sur l’esprit de l’Ordre.

(Cf. Code Maçonnique des Loges Réunies et Rectifiées de France, CHAPITRE X, (1778).

Notes.1. Les éléments relatifs à la transmission des grades dits « bleus » (délais, décors, etc.), sont

explicitement précisés : « Les trois premiers grades seront conférés par le Vénérable-Maître de laLoge, conformément aux cahiers qui lui en auront été fournis par le Directoire Écossais. Le gradede Maître-Écossais est réservé au Député-Maître, s’il est présent ; à son défaut, ou s’il le désire,il est conféré comme les autres par le Vénérable-Maître. (…) Les Apprentis ont le tablier de peaublanche sans doublure ni bordure, la bavette haute ; les Compagnons ont le même tablier, avecdes rubans bleus ; les Maîtres ont le tablier doublé et bordé de bleu, la bavette abattue ; lesMaîtres Écossais ont le tablier comme il sera expliqué plus au long dans la suite de ce chapitre. »

2. En théorie, seule la cooptation est admise afin d’être reçu maçon du Régime rectifié : «Lecandidat ne pourra être proposé directement que par un membre de la Loge, qui en répondra,ainsi que des frais de sa réception. Le proposant remettra sa proposition par écrit à la Loge,après en avoir fait part au Vénérable-Maître en particulier. Après les informations requises, ontiendra le scrutin, qui ne pourra en aucun cas se faire le même jour que la proposition. S’il estunanimement favorable, on fixera le jour de la réception ; le proposant en avertira le candidat, etle présentera au Vénérable-Maître, qui l’exhortera à se rendre de plus en plus digne de la faveurque la Loge lui accorde. »

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#41

Jean-Baptiste Willermoz : le fondateur du Régime Ėcossais Rectifié | Le RégimeEcossais Rectifié

Jean-Baptiste Willermoz – 10 juillet 1730 – 29 mai 1824 –« Je fus persuadé dès mon entrée dans l’Ordre que la Maçonnerie voilait des vérités rares et importanteset cette opinion devint ma boussole. »Jean-Baptiste Willermoz est né à Lyon, le 10 juillet 1730. Introduit en 1750 au sein d’une loge

dont certains pensent qu’il s’agit des « Amis Choisis », mais dont le nom nous reste inconnu, il sepassionne immédiatement pour les activités maçonniques, au point d’être nommé, deux ans plus tard,soit à vingt deux ans, Vénérable Maître.

Willermoz, dès cette date s’attache à une idée, qu’il précise dans un courrier à Charles de Hesse(1744-1836) en 1781 : « Je fus persuadé dès mon entrée dans l’Ordre [maçonnique] que laMaçonnerie voilait des vérités rares et importantes et cette opinion devint ma boussole. »

De 1761 à 1765, Willermoz s’oriente vers la recherche de ce qui lui apparaîtra comme étantl’essence véritable de la Maçonnerie, son objectif caché et authentique. Il dira en 1772 au baron deHund (1722-1776), dans une lettre dans laquelle il revient sur cette période où il explora avec unevive curiosité la foule complexe des degrés écossais : « Depuis ma première admission dansl’Ordre, j’ai toujours été persuadé qu‘il renfermait la connaissance d’un but possible et capablede satisfaire l’honnête homme. D‘après cette idée, j‘ai travaillé sans relâche à le découvrir. » [1]

Mais après des années d’exploration acharnées Willermoz en était arrivé à une sorte de relatifdésabusement et lassitude. Il restait, certes, convaincu que la Maçonnerie était détentrice d’unevéritable secret, mais n’était pas parvenu, malgré l’intensité de ses efforts, à le mettre à jour. [2]

C’est au printemps 1767, où Willermoz se déplaçait sur Paris, que son ami Jean-Jacques Baconde la Chevalerie (1731-1821) lui parle en des termes plus qu’élogieux, d’un nouvel Ordre secret quivenait d’installer récemment à Versailles son instance dirigeante – désigné sous le nom de « TribunalSouverain » – Ordre dont les travaux et les cérémonies étaient d’un niveau infiniment supérieur à toutce que l’on connaissait jusqu’alors.

Le chef de cet Ordre, Martinès de Pasqually, était détenteur d’une science incomparable enmatière initiatique, et conférait non pas des initiations mais de véritables « ordinations » auxcandidats qui se présentaient à la porte de son Temple, les introduisant dans une société, quasisacerdotale, qui avait pour titre : « Ordre des Chevaliers Maçons Elus Coëns de l’Univers ».

Initié en en 1767 dans cet Ordre, un an plus tard, en mai 1768, Martinès acceptait que Willermozsoit reçu Réau+Croix (ultime degré de ce système), lui donnant l’autorisation d’ouvrir, à Lyon, un

Temple coën.Pourtant, quatre ans plus tard, le 5 mai 1772, Martinez de Pasqually, s’embarquait pour Saint

Domingue aux Antilles, d’où, dans d’obscures et bien étranges conditions, il décéda malheureusementen septembre 1774.

Louis-Claude de Saint-Martin (1743-1803), qui était désormais seul sur Bordeaux après avoirété le secrétaire de Martinès, décidait de se rendre à Lyon. Il restera jusqu’en avril 1776 dans cetteville, vivant au foyer de Willermoz.

Au cours de son séjour, il élabora un programme d’instruction pour les « Elus Coëns » de la ville,organisant avec Willermoz et Jean-Jacques du Roy d’Hauterive, la séries des « Leçons » dites deLyon, qui furent destinées à l’étude et l’approfondissement de l’enseignement de Martinès dePasqually.

De la sorte Willermoz va engager dans les Leçons de Lyon, une relecture générale desenseignements martinésiens à la lumière des vérités de la Révélation afin de rendre conforme ladoctrine de la « Réintégration », avec l’initiation chrétienne qu’il souhaitait réaliser de tous sesvœux.

Entre temps Willermoz, pendant cette période d’intense étude doctrinale à Lyon, avait étésingulièrement « désorienté » par le départ de Martinès pour sa lointaine destination, alors mêmequ’il ne cessait d’être très inquiet par l’état de la maçonnerie en France consécutif au désordregénéré par le conflit entre les grades écossais, désordre renforcé par la mort du comte de Clermonten 1771, auquel succéda Louis Philippe duc de Chartes et d’Orléans.

C’est cette situation incertaine qui décida Willermoz à écrire une très longue lettre au baron deHund, en date du 18 décembre 1772, qu’il concluait en proposant une véritable alliance, et demandaitun rattachement formel à la Stricte Observance dite « Templière ». La lettre qu’envoya Willermoz enAllemagne ne fut pas sans effet, puisque von Hund finira par diligenter son visitator specialis, lebaron von Weiler, afin qu’il installe, tout d’abord en septembre 1773 à Strasbourg le Directoire de laVe Province dite de Bourgogne, puis ensuite à Lyon, celui de la IIe Province dite d’Auvergne enjuillet 1774.

Patente, en latin, de Visiteur Général perpétuel de l’Ordrede la Stricte Observance « Templière »pour le Frère Bapt (ist)e du Dezert (Batistam ab Eremo) ,Chancelier de la II° Province (Auvergne)en date du 11 mars 460 (22 mars) 1774.Nomination de Jean-Baptiste Willermozpar le Baron von Hund, « Frater Carolus ab Ense« ,contresigné par le Baron de Weiler, « Frater Augustus a Spica Aurea »et le secrétaire de l’OrdreCarl-Henirich Ludwig Jacobi, « Frater a Stella fixa« .

Mention au dos de la main de Willermoz « reçu le 10 avril 1774″.A cette occasion, Jean-Baptiste Willermoz fut reçu Chevalier sous le nom d’Eques Baptista ab

Eremo (Chevalier Baptiste du désert) son blason représentant un ermite portant une lance sur l’épauleet ayant pour devise « Vox in deserto », avec douze autres membres de la loge nouvellement créée :« La Bienfaisance ».

Les conditions étaient ainsi réunies, pour que le Régime Ėcossais Rectifié puisse naître, lors duConvent des Gaules, qui allait se tenir quatre ans plus tard, en novembre 1778 à Lyon.

Notes.1. Lettre de Willermoz à Charles de Hesse, 12 octobre 1781.2. Pierre-Jacques Willermoz partageait également la désillusion de son frère Jean-Baptiste, et s’il

n’avait plus aucune foi dans l’alchimie, jugée aussi vaine que superficielle (Lettre à Martinès dePasqually, 1768, Bibliothèque de Lyon, ms. 5471), il déclarait en outre : « Je me soucie très peu dedécorations, de grands mots, de grandes clartés, de chiffres, de figures singulières par lesquelleson amuse, dans tout ce qui est connu jusques à présent, et au bout demander toujours : cui bono? »(Lettre, 22 mai 1767, Lyon, ms. 5225).

Bibliographie :– A. Joly, Un mystique lyonnais et les secrets de la franc-maçonnerie : J-B. Willermoz,

Démeter, 1986.– J.-M. Vivenza, Jean-Baptiste Willermoz, Fondateur du Régime Ėcossais Rectifié, Editions

Signatura, 2012.http://www.directoirerectifiedefrance.org/?page_id=416

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#42

L’ORDRE INTÉRIEUR ET LA NOTION DE « SECRET » | Le Régime EcossaisRectifié

« La loi du Silence

et de la discrétion la plus absolue

est fondamentale dans l’Ordre... »

Revenir aux fondements de ce que fut, et doit être, « l’Ordre » selon la conception willermozienne,d’autant après des décennies de pratiques inspirées des formes étrangères au Régime, oblige à unexamen attentif de ce que voulut exactement Willermoz.

Et il se trouve que le fondateur lyonnais avait un projet établi selon une perspective qui plaçaitl’Ordre, en renonçant aux prétentions temporelles du Temple, sous les auspices d’une entreprise denature uniquement spirituelle.

Dès lors, pour ce qui concerne notre volonté de nous rattacher à l’essence de la Réforme de Lyonengagée au Convent des Gaules en 1778, il convient d’être vigilants – et plus particulièrement dansun siècle qui a fait de la profanation du secret, notamment de par le développement des outilsvirtuels une attitude permanente – au respect des règles fondatrices de l’Ordre si nous voulonsinscrire notre action dans la fidélité et la vérité.

Précisions :

1°) La volonté refondatrice de l’Ordre, de la façon dont elle estexprimée par le Directoire National Rectifié de France, émanede Frères habilités, de par leurs qualifications initiatiques et latransmission dont ils sont dépositaires, à engager une telleinitiative. Elle ne relève donc pas d’une « auto-proclamation »surgie d’une quelconque volonté subjective.

2°) La refondation de l’Ordre ne tend pas à se constituer en unénième Grand Prieuré, mais souhaite agir en tant que forcespirituelle active en cultivant la plus totale discrétion sur sonOrdre Intérieur.

3°) Dans le respect des modalités rectifiées, cette volontérefondatrice, dirigée par l’Ordre Intérieur, dit Ordre des

Chevaliers Bienfaisants de la Cité Sainte, doit s’effectuer parun travail de retour aux principes du Régime s’exerçantuniquement de l’extérieur sous l’intitulé du cadre prévu à ceteffet : Directoire National des Loges Réunies et Rectifiées deFrance, abrégé en Directoire National Rectifié de France (D.N.R.F.).

Pourquoi ces exigences ?Parce que dans la conception de Willermoz, l’Ordre, qui ne porte pas le tire « d’Intérieur » pour

rien, relève d’une activité qui se doit d’être secrète afin d’exercer son influence et œuvrer au travailspirituel de réconciliation avec le Ciel que chaque Frère se doit d’effectuer, et pour cela rien de cequi est du monde doit s’introduire dans l’Ordre, et aucun élément concernant l’activité de l’Ordre nedoit être révélé :

« La loi du Silence et de la discrétion la plus absolue estfondamentale dans l’Ordre ; il est défendu à tout Frère entelle dignité qu’il doit ou qu’il soit constitué, de révéler lamoindre chose qui concerne notre constitution, ou ce qui sepasse dans nos assemblées directement ou indirectement.Ceux qui seront convaincus d’avoir dérogé à cette loi, serontdéclarés incapables de posséder aucune dignité ou charge dansl’Ordre... » [1]

L’activité de l’Ordre Intérieur s’effectue donc de manière secrète, et ne communique pas sur sonactivité afin de se protéger, et conserver ses mystères à l’abri de la confusion du siècle.

C’est un principe, celui du secret, connu de toutes les organisations initiatiques ou religieuses [2],voulu, défini et fixé par les fondateurs du Régime Ecossais Rectifié.

***********************

Notes.

1. Titre II, Code Général des Règlement de l’Ordre des C.B.C.S., 1778.2. R. Ambelain, Le Martinisme, Editions Niclaus, 1946, p. 181.

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#43

Qu’est-ce que la « Régularité » maçonnique pour le Régime Écossais Rectifié ? | LeRégime Ecossais Rectifié

On ne cesse, à temps et à contretemps dans le milieu maçonnique, de se référer au principe de la« régularité », cette dernière souvent, et bien à tort, étant considérée comme synonyme d’une« légitimité » autour de laquelle toute vie initiatique semble, pour les uns être subordonnée afin debénéficier d’une hypothétique « validité », acquise ou espérée, et pour les autres, d’un critèrerevendiqué et déclaré détenu, ceci pour des raisons diverses.

Mais qu’en est-il réellement de cette célèbre « régularité » – semble-t-il «l’un des plus anciensmots du vocabulaire maçonnique» [1], lorsqu’on aborde le cas, spécifique s’il en est, du RégimeÉcossais Rectifié ?

La question est importante et il convient d’y apporter une réponse.a) Les principes de la « régularité » sont issus des ‘‘ Basic Principles’’ de la Grande Loge

Unie d’Angleterre définis en 1929Ce n’est en réalité qu’en 1929, donc assez tardivement au regard de l’Histoire de la franc-

maçonnerie universelle, que la Grande Loge Unie d’Angleterre (G.L.U.A.), dans les « BasicPrinciples » a défini les critères de cette fameuse « régularité » dont on parle si souvent – et quibénéficie d’un relatif prestige, bien infondé au demeurant, renforcé par une constante actualitépuisque la recherche, parfois frénétique, de cette « régularité », agite par intervalles réguliers lesmaçons -, « Basic Principles » dans lesquels figurent comme principales dispositions : « la croyanceen le Grand Architecte de l’Univers et en Sa volonté révélée » ; « l’Obligations sur, ou en pleinevue, du Volume de la Loi Sacrée ouvert, de manière à symboliser la révélation d’en haut qui lie laconscience de l’individu particulier qui est initié » ; « aucune Grande Loge ne doit avoir quelquerelation maçonnique que ce soit avec des Loges mixtes ou des Obédiences qui acceptent desfemmes parmi leurs membres » ; « les discussions sur des sujets politiques ou religieux sontstrictement interdites », etc. [2]

Les « Basic Principles » définissant les critères de la « régularité,s’appuient les Constitutions publiées en 1723.

Ces principes, ou « Landmarks », s’appuient en fait sur les Constitutions de la Grande Loge deLondres, publiées en 1723, rédigées par le pasteur presbytérien James Anderson (1684-1739) avecl’aide de John Théophile Désaguliers (1683-1744) le 24 juin 1717, Constitutions dont le titreoriginel était Constitution, Histoire, Lois, Obligations, Ordonnances, Règlements et Usages de laTrès Respectable Confrérie des Francs-maçons acceptés, véritable travail de reformulation desanciens devoirs en une tentative d’adaptation fédérative, et d’ailleurs singulièrement réductrice, desrègles et lois de la tradition artisanale, dont les travaux de Clement Edwin Stretton (1850-1915)

dans « The Speculative Mason », ont bien montré le caractère destructeur à l’égard de la vénérabletradition opérative.

Quoi qu’il soit, ce sont ces Constitutions de 1723, qui présidèrent en décembre 1813 à « l’Acted’Union » qui permit la création de la Grande Loge Unie d’Angleterre mettant fin au schisme entreles Modernes et les Anciens, dont on voudrait faire la base de la « régularité » universelle sur leplan maçonnique, alors qu’elles apparaissent, objectivement, plutôt comme une authentique entreprised’altération de l’essence de la Maçonnerie originelle, ce qui n’allait pas tarder à engendrer desconfusions multiples et sans cesse croissantes, tant sur le plan organisationnel qui’initiatique.

b) Le Régime Écossais Rectifié a procédé en 1778 a une « rectification » de la franc-maçonnerie andersonienne

Le Régime Écossais Rectifié posa dès 1778, des principes intangibles profondémentdifférents de la franc-maçonnerie andersonienne.

C’est pourquoi, loin de s’y référer comme source de la légitimité de son Ordre, Jean-BaptisteWillermoz (1730-1824), conçut et façonna le Régime Écossais Rectifié en 1778 à Lyon, comme unecomplète « rectification » de l’ensemble de la franc-maçonnerie, dotant son système, de par son lienavec la Stricte Observanceallemande, d’une structure empruntant beaucoup plus aux règles etformes des Ordres militaires de l’antique Chevalerie médiévale, comme en témoigne le Code desC.B.C.S. (Code Général des Règlements de l’Ordre des Chevaliers Bienfaisants de la Cité Sainte,Lyon, 1778), plutôt qu’aux conceptions de la Maçonnerie libérale défendues par les Constitutions de1723 rédigées par les pasteurs Anderson et Désaguliers.

Ainsi, totalement étranger à cette perspective universaliste organisée en « Grandes Loges », quiplus est faiblement religieuse et ignorant absolument tout des éléments théoriques de la doctrine de la« réintégration », le Régime Écossais Rectifié posa, et ce dès les premiers instants de sa fondation,des principes intangibles profondément différents du milieu maçonnique du XVIIIe siècle – et doncde ceux issus des conceptions de la « régularité » provenant de la Grande Loge Unie d’Angleterre,reformulés en 1929, qui prétend aujourd’hui conférer une prétendue « légitimité » aux gradessymboliques, et même aux grades et degrés situés au-delà des Loges symboliques en raison de leurrattachement aux « Grandes Loges » dont ils dépendent, pour bénéficier d’une illusoire « régularité »,ce qui relève, on en conviendra aisément, de l’absurdité la plus totale.

Cette situation, qui vise à imposer les critères d’une « régularité » définie en 1929 par la GrandeLoge Unie d’Angleterre (G.L.U.A.) dans les « Basic Principles », à des systèmes initiatiquesrecevant leur légitimité de sources absolument indépendantes de la maçonnerie anglaise – ce qui estbien le cas du Régimeécossais rectifié né en France au XVIIIe siècle sur des bases entièrementautonomes -, n’a, il convient de le dire avec force, strictement aucun sens !

c) Toutes les branches de la maçonnerie andersonienne, sont regardées comme« apocryphes » par le Régime Écossais Rectifié

À ce propos, il est tout à fait étonnant de voir comment fonctionnent de nos jours certaines

obédiences maçonniques à l’égard d’un Régime qu’elles ont positivement « vassalisé » à leur profit,n’hésitant pas à tordre le cou à ses principes, parfois avec une incroyable désinvolture, afin desoumettre le Régime rectifié à des règles et des cadres fonctionnels qui lui sont parfaitementétrangers [3].

La franc-maçonnerie « non rectifiée » n’est, au regard de la Réforme de Lyon, rien d’autre« qu’apocryphe », c’est-à-dire, pour être clair, une maçonnerie dépourvue et ignorante de ladoctrine ésotérique de la « réintégration ».

Ce triste état de fait, contre lequel s’éleva déjà Camille Savoire (1869-1951) lors de la créationdu Grand Directoire des Gaules en mars 1935, en s’opposant vigoureusement à la manière dont leGrand Orient de France entendait s’approprier, et faire vivre sous une tutelle inacceptable, leRégime écossais rectifié [4], perdure malheureusement depuis bien des décennies, faisant quel’ensemble du monde obédientiel semble entièrement oublier un point fondamental sur lequel leDirectoire National Rectifié de France-Grand Directoire des Gaules, réveillé en décembre 2012à Lyon,insiste avec force : à savoir que « l’Ordre » issu de la réforme de Lyon, tire uniquement salégitimité et sa « régularité » de sa fidélité observée à l’égard des principes énoncés et arrêtés en1778 lors du Convent des Gaules, entérinés lors du Convent de Wilhelmsbaden 1782 [5].

Voilà ce qu’est la « régularité » pour le Régime écossais rectifié, et il n’y en a pas d’autre, quiserait à rechercher auprès d’une maçonnerie qui, il conviendrait d’en être un minimum conscientlorsqu’on traite de ces sujets, n’est au regard des critères de la Réforme de Lyon, rien d’autre« qu’apocryphe », c’est-à-dire, pour être clair, est une maçonnerie dépourvue et ignorante de ladoctrine ésotérique de la « réintégration » provenant de Martinès de Pasqually ( + 1774), déposée etinfusée par Jean-Baptiste Willermoz en 1778 au sein de la Stricte Observance, aboutissant, lors de sa« rectification » en 1778 à Lyon lors du Convent des Gaules, à la constitution du système initiatiquespécifique qui devint le Régime écossais rectifié [6].

ConclusionLe Régime Écossais Rectifié dépasse, selon ses critères, en éminence, en autorité et en

connaissance des mystères de l’initiation, tous les systèmes – et l’ensemble des régimescomposites et « apocryphes » – méconnaissant la « doctrine de la réintégration ».

Ainsi, le Régime rectifié, placé, selon les dispositions des Codes de 1778 (Code Maçonniquedes Loges Réunies et Rectifiées & Code Général des Règlements de l’Ordre des ChevaliersBienfaisants de la Cité Sainte), – unique critère de référence pour le Régime -, sous l’autorité d’unDirectoire National fédéré en Provinces sur lesquelles sont souchés des Grands Prieurés, n’aaucunement besoin de se rattacher à une instance maçonnique quelconque – en particulier sous laforme d’une « Grande Loge » qui devrait être « reconnue » par la Grande Loge Unie d’Angleterre(G.L.U.A.) – on se demande bien pourquoi ? -, ou d’une obédience prétendant « posséder » leRégime, ceci afin de bénéficier d’une illusoire « régularité » qui lui ferait défaut, puisque sa«véritable régularité » le Régime écossais rectifié la possède en plénitude depuis deux siècles et

demi, grâce à l’action de son fondateur, le lyonnais à qui tous les maçons rectifiés doivent tant :Jean-Baptiste Willermoz.

Enfin, et plus profondément encore, ce que nous ne cessons de proclamer et que notre initiative de« Refondation » du Régime nous fait devoir d’affirmer : le système issu de la Réforme de Lyon – etce n’est pas pour rien qu’il se voulut une initiative de « rectification » entière de la franc-maçonnerie en 1778, dépasse, selon ses propres critères, en éminence, en autorité et en connaissancedes mystères de l’initiation, tous les systèmes, l’ensemble des régimes composites, et lesorganisations constituées en « Grandes Loges », méconnaissant la « doctrine de la réintégration » [7],et, bien évidemment, n’a aucunement besoin pour vivre et se développer, des formes structurellesadministratives connues sous le nom « d’obédiences maçonniques », puisque la « conceptionobédientielle est absolument étrangère à l’esprit de la rectification », faisant que vouloir fairerentrer le R.E.R., dans les cadres de la maçonnerie andersonienne en le faisant coexister, soit avecd’autres Rites, soit avec des visions et conceptions (sociétales, politiques, symboliques, initiatiques,confessionnelles, dogmatiques, etc.), issues de voies « apocryphes », est une absolue aberration.

*Ainsi, et que ceci soit bien entendu : le Régime écossais rectifié est « régulier » dès lors que,

bénéficiant d’un lien de transmission effectif et valide avec le « réveil » opéré en 1935, il est pratiqué en fidélité à son essence, à ses principes organisateurs, aux Codes fondateurs qui endéfinissent les règles, et à sa doctrine interne définie dans les Instructions à tous les grades, et cette« régularité » est de nature initiatique et trans-historique, puisqu’elle se rattache uniquement etinvisiblement, à l’Ordre essentiel, primitif et fondamental qui se perd dans la nuit des siècles.

Notes.1. A. Bernheim, Régularité et Reconnaissance, Etudes maçonniques, Masonic papers,2. Cf. Principes de base pour la reconnaissance par elle d’une autre Grande Loge, ou

Déclaration des Principes de Base, Grande Loge Unie d’Angletterre, 1929. On notera que le premierdes « huit principes de base » figurant dans cette Déclaration, stipule : « Chaque Grande Loge doitavoir été établie légalement par une Grande Loge dûment reconnue ou par trois Loges ou plusrégulièrement constitués », ce qui n’intéresse en rien le Régime écossais rectifié, organisé enRégime autonome depuis 1778, non sous le modèle d’une « Grande Loge » (sic), mais par sesDirectoires et Grands Prieurés.

3. Le Grand Directoire des Gaules a tenu le 15 décembre 2012, quoiqu’il en déplaise, à rappelerque le Régime depuis son « Réveil » en 1935, n’avait jamais pu vivre selon ses critères : « On estainsi obligé de constater que depuis le réveil en 1935 du Régime, la conception originelle duCode n’a presque jamais été suivie, entraînant des dis-fonctionnements significatifs dans lalogique organisatrice du Régime Écossais Rectifié qui cessa, dès lors, de se penser comme un «Ordre », le ramenant à un Rite réduit à une conception obédientielle absolument étrangère àl’esprit de la rectification, même si imaginant en relever en usant de titres et dénominations issus

du corpus sémantique willermozien. » (Cf. « Principes de l’Ordre en 10 points », point IV, DNRF-GDDG, 15 décembre 2012, Lyon).

4. Parmi les « fables maçonniques », il en est une qu’il convient de dissiper entièrement, tantelle revient comme une antienne singulièrement fausse et erronée, celle consistant pour le GrandOrient de France, à s’imaginer détenteur d’un quelconque titre de propriété sur le Régime écossaisrectifié au motif des Traités d’Union de 1776, 1781 et 1811, signés, à l’époque, avec les instancesdirigeantes du Régime. Or ces Traités, comme il est aisé de le constater à leur lecture, n’eurent pourbut, comme le stipulent leurs articles, que de « déléguer » au Grand Orient de France, sousl’autorité des Directoires du Régime, et surtout sur leur proposition, la création d’établissementssymboliques, c’est-à-dire de Loges bleues. C’est peu, relève du niveau purement administratif, etc’est tout. Les Directoires, dont il était d’ailleurs précisé en préambule des Traités, qu’ils forment« Le corps du Régime Rectifié en France », bénéficiaient d’un représentant au sein du GrandDirectoire des Rites du Grand-Orient, et conservèrent toujours leur entière souveraineté sur leRégime, tant au niveau de l’Ordre Intérieur que des Loges symboliques, puisque rien ne pouvait sefaire, dans le cadre de leur création – et plus encore des rituels du seul ressort de l’Ordre rectifié -,sans proposition et décision des Directoires. Autant dire que les Loges symboliques rectifiées quitravaillèrent ainsi sous les auspices du Grand Orient de France, furent « agrégées » (sic) àl’Obédience, au seul titre de leur participation administrative, et qu’il ne fut jamais question, et cecipas un seul instant et dans l’esprit de quiconque, d’une quelconque idée «d’appropriation du Régime»par le Grand Orient de France, appropriation et détention d’ailleurs rendues absolumentimpossibles au regard de l’organisation propre du Régime écossais rectifié, structuré depuis leXVIIIe siècle comme un « Ordre » autonome et indépendant, gouverné par les établissementsostensibles et non-ostensibles de sa classe chevaleresque, ses Directoires et ses Grands Prieurés.

5. « L’Ordre issu de la réforme de Lyon, connu sous le nom de Régime Écossais Rectifié, tireuniquement sa légitimité et sa « régularité », par delà les qualifications initiatiques de ses membres,de sa fidélité observée face aux principes énoncés et arrêtés en 1778 lors du Convent des Gaules. »(Cf. « Principes de l’Ordre en 10 points », point I, DNRF-GDDG, 15 décembre 2012, Lyon).

6. « L’aspect doctrinal définit le Régime rectifié, ce qui est une spécificité unique dans tout lechamp rituel de la franc-maçonnerie universelle, et donne au système willermozien une nature à nulleautre pareille qui le distingue entièrement des autres Rites maçonniques lui conférant son caractère devoie dite « non-apocryphe » au regard des critères de la doctrine de la réintégration, dont l’Ordreest le dépositaire légitime depuis le XVIIIe siècle. » (Cf. « Principes de l’Ordre en 10 points »,point VI, DNRF-GDDG, 15 décembre 2012, Lyon).

7. Il n’est pas inutile de se remémorer certaines vérités : « L’Ordre des Chevaliers Bienfaisantsde la Cité Sainte, fut conçu pour être l’écrin de l’Ordre mystérieux qui est l’essence même duRégime rectifié, sa substance intérieure secrète. Ses travaux se déroulent donc dans l’invisible etauront pour objet de se consacrer à l’étude et à la conservation de la doctrine de la réintégration

dont l’Ordre est le dépositaire de par l’Histoire, doctrine sacrée qui a un but essentiel et trèsélevé que peu d’hommes sont dignes de connaître. Willermoz écrira du Haut et Saint Ordre :« Son origine est si reculée, qu’elle se perd dans la nuit des siècles ; tout ce que peut l’institutionmaçonnique, c’est d’aider à remonter jusqu’à cet Ordre primitif, qu’on doit regarder comme leprincipe de la franc-maçonnerie ; c’est une source précieuse, ignorée de la multitude, mais qui nesaurait être perdue : l’un est la Chose même, l’autre n’est que le moyen d’y atteindre.» (Cf.Proclamation refondatrice de l’Ordre rectifié, D.N.R.F.-G.D.D.G

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#44

Anniversaire de la Refondation de l’Ordre : 13 décembre 2014 | Le Régime EcossaisRectifié

« Extrait de l’Allocution du SGM du DNRF-GDDG, tiré du »Phénix Renaissant »n°1 – décembre 2014, B ulletin interne du Grand Directoire des Gaules ». Le but primitif de la Franc-maçonnerieForce est de constater, alors qu’aujourd’hui beaucoup ont perdu la compréhension de ce qu’est «

l’Ordre » selon les critères du Régime rectifié, qu’il est donc grand temps d’en revenir aux principesde la Réforme de Lyon, tels que rappelés dans l’une des Instructions datant du Convent des Gaules : «Vous cherchez à remonter au butprimitif de la Franc-Maçonnerie et l’on vous a attaché à un Ordre quicorrespond avec ceux qui seuls peuvent vous instruire. Si vous savez quelque jour vous fairereconnaître

pour un vrai chevalier Maçon de la Cité Sainte, si vous bâtissez constamment dans le Temple duSeigneur, vous pouvez concevoir l’espoir de parvenir à un but si désiré. »

Il convient ainsi de conserver en mémoire, que le travail du maçon rectifié, est, non de se perdredans de vaines entreprises profanes dans lesquelles les formes obédientielles, hélas ! entraînentbeaucoup trop de vrais cherchants en les conduisant à des impasses spirituelles, mais de tenter deremonter, par un lent et patient labeur intérieur, vers la « source précieuse » qui se perd dans la nuitdes siècles : « L’origine de l’Ordre est si reculée, qu’elle se perd dans la nuit des siècles ; tout ceque peut l’institution maçonnique, c’est d’aider à remonter jusqu’à cet Ordre primitif, qu’on doitregarder comme le principe de la franc-maçonnerie….»

Ainsi le Régime, car il s’agit bien d’un « régime » lorsqu’on parle du R.E.R., est fondé sur lanotion d’Ordre, notion qui n’a strictement rien à voir avec la conception moderne « d’obédience ».

C’est pourquoi le Directoire National Rectifié de France-Grand Directoire des Gaules, dans ses «Principes de la Refondation de l’Ordre en dix points » rappelle : « L’Ordre », du point de vuerectifié, entendu dans son principe le plus profond, le plus authentique, ne réfère donc pas à unestructure administrative et temporelle, mais relève d’une dimension purement spirituelle dont l’Ordredes Chevaliers Bienfaisants de la Cité Sainte a le devoir de protéger l’existence, et de le défendrecontre les forces de l’Adversaire. »

Pour être clair sur le sujet, la conception structurelle obédientielle, en réalité issue d’une visiontrès moderne, est absolument étrangère à l’esprit de la rectification, et vouloir faire rentrer le RégimeÉcossais Rectifié dans les cadres de la maçonnerie andersonienne en le faisant coexister avecd’autres Rites, ou en le pliant à des vues et conceptions (sociétales, politiques, confessionnelles,

dogmatiques, etc.), étrangères aux principes de l’Ordre, est une profonde aberration. http://www.directoirerectifiedefrance.org/?page_id=557

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#45

Camille Savoire et les Temples de la Franc-maçonnerie | Le Régime Ecossais Rectifié

Camille Savoire et les Temples de la Franc-maçonnerie

Vie, pensée et parcours initiatique d’un franc-maçon du Régime écossais rectifiéJean-Marc Vivenza« La Matière n’est qu’une transformation de l’Esprit,elle cherche à dominer ce dernier et à l’asservir,alors que l’homme sage que doit être le Franc-Maçoncherche à se libérer des emprises de la Matière. »(Camille Savoire, Regards sur les Temples de la Franc-maçonnerie,Les éditions intiatiques, 1935, p. 31).Camille Savoire (1869-1951), trop peu connu de nos contemporains, y compris de ceux qui

s’intéressent aux questions touchant au monde de l’initiation, joua pourtant un rôle essentiel, pour nepas dire fondamental et déterminant, dans l’histoire de la franc-maçonnerie française du XXe siècle,et notamment pour le Régime écossais rectifié, dont il est à l’origine du « réveil » en France.

L’occasion de la réédition de son ouvrage : « Regards sur les Temples de la Franc-maçonnerie », publié en septembre 1935 aux éditions initiatiques, depuis fort longtemps introuvable,nous donne de porter un éclairage approfondi plus que mérité, et sans aucun doute fort utile, sur la vieet personnalité de celui dont on mesure difficilement l’extraordinaire étendue de l’action, et surtout,la nature et la portée exacte de cette dernière.

1. Entrée en franc-maçonnerie (1892)

Cinq après avoir assisté à une conférence organisée par le Grand Orient de France à Orléans, le 14octobre 1892, il entrait en franc-maçonnerie dans une Loge de la Grande Loge SymboliqueÉcossaise qui avait été créée en 1880 et qui sera à l’origine de la Grande Loge de France(G.L.D.F.). Il quitta cependant cette Grande Loge au bout d’un an, au profit du Grand Orient deFrance (G.O.D.F.), où il fera un long parcours.

Vénérable Maître de sa Loge en 1897, charge qu’il occupa jusqu’en 1913, Savoire avait sollicitéen 1896 Paul Viguier (1828-1901) pour être admis au Chapitre, puis au Conseil Philosophique« L’Avenir », dont il devint le Président. Suite à quoi, poursuivant sur son évolution maçonnique, en1897 il intégrait le Grand Collège des Rites où il reçut les 31ème, 32ème et 33ème degrés du Riteécossais ancien et accepté. Ainsi, à partir de 1913, au sein du Grand Collège des Rites, il entrepritde renouveler cette institution, créant le « Bulletin du Grand Collège des Rites », dont ladocumentation représenta une sorte de synthèse de l’ensemble de l’activité des structures fédérant les

Hauts-Grades, tout en publiant des travaux de qualité.

1. Grand Commandeur du Grand Collège des Rites au sein du Grand Orient de France (1923-1935)

Bulletin du Grand Collège des Rites,« Les Ateliers Supérieurs du Grand Orient de France ; historique – doctrine »,Par Camille Savoire et André Lebey, 1924.« Dès que je fus investi de la fonctionde Grand Commandeur du Grand Collège des Rites ,par une de ces mystérieuses influences dont la vie est remplie,de par une puissance inconnue,il se produisit, dans mes conceptions philosophiques et maçonniques,une transformation complète. »(Camille Savoire, Regards sur les Temples de la Franc-maçonnerie,op.cit., p. 27). Cet investissement fit que, « sollicité et malgré un refus motivé et formel », le 15 septembre

1923, Savoire devint le Grand Commandeur du Grand Collège des Rites, charge qu’il occupadurant douze ans, jusqu’en 1935, temps pendant lequel, de l’agnostique qu’il était, il parvint à uneconception beaucoup plus ouverte sur la spiritualité, se désolant du climat d’intolérance qu’avait créél’athéisme dogmatique : « Dès que je fus investi de cette haute fonction, par une de cesmystérieuses influences dont la vie est remplie et au milieu desquelles nous évoluons souvent sansen avoir conscience, mus par une puissance inconnue, il se produisit, dans mes conceptionsphilosophiques et maçonniques, une transformation complète (…) Je dois ajouter, pour rendrehommage à la vérité, que je ne trouvai pas, dans le Grand Collège des Rites, le grand centreinitiatique d’études symboliques, rituelles et philosophiques que je pressentais. La plupart de sesmembres, depuis la mort du Grand Commandeur Blatin, en 1911, semblaient avoir perdu de vue lamission dévolue au Grand Collège des Rites au sein du Grand Orient, mission qui avait été elle-même très restreinte à la suite de la rupture des relations des Maçonneries étrangères de Hauts-Grades avec le Grand Orient, devenu schismatique à leurs yeux, pour avoir, en 1876, supprimé lesymbole et la formule invocatoire rituelle : « A la Gloire du Grand Architecte de l’Univers ». Cevote avait amené peu à peu, au sein du Grand Orient de France, l’existence d’un dogmatismematérialiste irraisonné, stupidement athée dans le sens où l’entendait Anderson et qui, pour êtrenié en théorie, n’en existait pas moins. Cet état d’esprit rendait difficile, par l’intolérance qu’ilcréait, tout travail initiatique. Les rituels de 1887, élaborés à la suite du véritable coup d’Etatmaçonnique de 1885, et ceux de 1920 avaient entièrement faussé le travail initiatique qui doits’effectuer graduellement après chacune des augmentations de salaire. » [1]

III. De l’agnosticisme au spiritualismeCamille Savoire, de l’agnosticisme de son jeune âge va, peu à peu, sans doute de par l’exercice de

sa charge et son contact avec les degrés élevés des différents Rites maçonniques, évoluer vers unspiritualisme qui, pour n’être point une adhésion pleine et entière à une « Révélation », participaitnéanmoins d’un refus du matérialisme.

« L’étude approfondie des anciens rituels,en m’éclairant à la lumière des travaux d’occultistesou d’initiés anciens ou modernes,me permit d’entrevoir le caractère initiatique de la Franc-Maçonnerie. »(Camille Savoire, Regards sur les Temples de la Franc-maçonnerie,op.cit., p. 30).Il explique ainsi cette progressive évolution, l’ayant amené à admettre le caractère « initiatique »

de la franc-maçonnerie, ce qui pour lui représentait une découverte significative : « Appelé à exercerles fonctions de Grand Commandeur, mon premier soin fut d’étudier l’histoire et de rechercherl’origine des Ateliers supérieurs de tous grades et de tous rites existant au sein du Grand Orient(…) ce fut le désir de travailler dans le secret et le silence, à l’abri des regards indiscrets de lapolice et des autorités qui attira vers la Franc-Maçonnerie les adeptes de certainesorganisations philosophiques, initiatiques ou occultistes, survivances des anciennes confréries deRose-Croix, Alchimistes, Illuminés d’Allemagne ou de Bavière, lesquelles vinrent s’agréger ausein de la Franc-Maçonnerie en y constituant des Loges d’un caractère spécial qui, lors desprojets de classification en 7, puis en 15 et, enfin, en 33 grades, adoptèrent des titres distinctifs(…) Quoi qu’il en soit de ces origines, l’étude approfondie des anciens rituels, en m’éclairant à lalumière des travaux d’occultistes ou d’initiés anciens ou modernes, me permit d’entrevoirnettement le caractère initiatique de la Franc-Maçonnerie, tel que l’avaient conçu certains de sesadeptes, et de le comparer aux sociétés initiatiques de tous les temps, sinon par les moyensemployés, mais par les buts poursuivis, la communauté des symboles, de certaines appellations,mots et signes de reconnaissance, formes rituelles, épreuves. » [2]

« Ce fut le désir de travailler dans le secret et le silence,(…) qui attira vers la Franc-Maçonnerie les adeptesde certaines organisations …. survivances des anciennes confréries lesquelles vinrent (…) [constituer] des Loges d’un caractère spécial.. »De cette première conviction portant sur le caractère initiatique de la franc-maçonnerie, en surgira

une autre, à savoir la nécessité pour l’initié de devoir se livrer à un travail intérieur pour parvenir àla pleine compréhension de ce que signifie « l’Esprit », pour reprendre l’expression employée parSavoire : « Des études poursuivies pendant plus de dix ans (…), j’acquis la notion que seul untravail intérieur effectué sur soi-même peut faire progresser dans la voie de l’initiation, laquellen’est qu’une éducation de ce sens intime qu’on désigne sous le nom d’intuition et qui n’est

vraisemblablement qu’une communion ou une prise de contact avec l’Intelligence universelle.Cette notion est incompatible avec une profession de foi matérialiste. Tout ceci me conduisit versun spiritualisme s’élevant au-dessus des dogmes des religions, des diverses croyancesphilosophiques et métaphysiques qui m’a paru constituer le véritable fondement de la Franc-Maçonnerie…» [3]

Une certitude dès lors s’imposait pour Camille Savoire, l’initié doit chercher à se libérer desemprises de la Matière : « s’était effectuée en moi une accession vers la conception d’un mondedans lequel la Matière qui, dans ses divers aspects, n’est qu’une transformation de l’Esprit,cherche à dominer ce dernier et à l’asservir, alors que l’homme sage que doit être le Franc-Maçon cherche à se libérer des emprises de la Matière. » [4]

1. IV . Liens avec le Grand Prieuré Indépendant d’Helvétie

On le constate, loin du portrait que l’on présente encore parfois de lui, en quelques années, CamilleSavoire, de par ses fonctions de Grand Commandeur des Rites et son cheminement maçonniquepersonnel, avait profondément évolué, puisque du matérialiste agnostique qu’il déclarait être dans sapériode de jeunesse, il était devenu un spiritualiste qui, pour conserver son attachement à la libertéde penser – liberté non synonyme pour lui d’incroyance – néanmoins, n’hésitait plus à se référer à lakabbale, aux Rose-Croix, refusant l’athéisme et en appelant à un travail intérieur capable de faireaccéder l’initié à la connaissance véritable de la « Gnose », entendue comme l’expression de « l’âmeuniverselle ».

On est donc très loin d’une attitude de rejet de la spiritualité, bien au contraire. D’ailleurs, la suitede son parcours va nous le démontrer éloquemment.

Camille Savoire, à Genève,fut armé Chevalier Bienfaisant de la Cité Sainte (C.B.C.S.),le 11 juin 1910 en prenant pour nom d’ordre Eques a Fortitudine.A cet égard, du point de vue de ses relations maçonniques, s’il était Grand Commandeur du Grand

Collège des Rites, place de premier ordre au sein du Grand Orient de France, c’est surtout en tant quemédecin spécialiste de la tuberculose, que Camille Savoire voyageait très souvent en Europe àl’occasion de congrès médicaux, et en profitait pour établir de nombreux contacts avec des maçonsétrangers, nouant ainsi des liens étroits avec plusieurs obédiences. Ceci explique pourquoi, alorsqu’il était 33ème degré du Rite écossais ancien et accepté (R.E.A.A.), Savoire, à Genève, futarmé Chevalier Bienfaisant de la Cité Sainte (C.B.C.S.), le 11 juin 1910 en prenant pour nomd’ordre Eques a Fortitudine.

La cérémonie témoigne de l’intérêt de Savoire pour le Rite écossais rectifié, qui n’était pluspratiqué en France depuis le XIXe siècle, et qui était regardé par les maçons comme un Rite detendance chrétienne, ce qui n’est point inexact, ceci montrant les sympathies initiatiques de celui

qui était entré en contact avec le Grand Prieuré Indépendant d’Helvétie (G.P.I.H.), en cherchant àdévelopper et étendre ses contacts avec les structures obédientielles étrangères, en s’affiliant à unestructure, à l’époque, amie du Grand Orient de France, non ostracisée par son rejet à la référence auGrand Architecte de l’Univers depuis 1877.

Cette réception, mais nous devrions dire, plus exactement, cet « armement », car il s’agissait biende cela, réalisé comme nous l’apprend Savoire par équivalence avec les 30ème et 33ème degrés duRite écossais ancien et accepté, allait correspondre également à la fondation par le Grand PrieuréIndépendant d’Helvétie d’une « Commanderie » du Rite écossais rectifié à Paris rattachée à laPréfecture de Genève, le Directoire de Genève prévoyant, si les choses se déroulaient correctementau cours du temps, de réveiller, dans un délai non défini, le Directoire de Neustrie, selon la formuleemployée : « lorsque la Préfecture à venir remplirait les exigences du Code », promettant de rendreà ce Directoire tous ses pouvoirs constitutifs, y compris ceux de fonder des Loges des trois premiersGrades, ce qui laisse entendre clairement, que l’intention de 1910 portait en germe, quoique de façonnon explicite, l’édification future du Grand Directoire des Gaules de 1935.

1. Premier réveil du Rite écossais rectifié en France (1911)

Pièce de la Loge de Maître Écossais de Saint-Andrédu « Centre des Amis », Orient de Paris, époque Louis XVI.Les Lettres-patentesrédigées à cette occasion par le G.P.I.H., fixaient le cadre de ce premier

réveil en stipulant le domaine de compétence de la Commanderie constituée, laissant entrevoir lacréation d’une Préfecture de Paris qui avait vocation à travailler sous les auspices du DirectoireÉcossais d’Helvétie selon les exigences du Code Général de 1778.C’est ainsi qu’à son retour àParis, Savoire, soutenu par les Frères Ribaucourt et Bastard, décidait de constituer, le 20 juin 1910,une Loge symbolique travaillant au Rite écossais rectifié sous le nom du « Centre des Amis »,initiative qui eut une importance considérable pour le devenir de la vie initiatique française.

Médaille de la Loge de Maître Écossais de Saint-Andrédu « Centre des Amis », Orient de Paris, 1911,in E. de Ribaucourt, Résumé de l’Histoire du Régime Écossais Rectifié,Extrait de la revue L’Acacia, Paris, 1912.

1. Approfondissement des liens initiatiques

S’ouvre alors, une période intermédiaire, qui aboutira au final en mars 1935, au réveil complet duRégime écossais rectifié en France, période pendant laquelle Savoire va, inexorablement,considérer qu’il n’est pas possible de faire vivre le Régime rectifié dans le cadre des obédiencesmaçonniques, et qu’il convient donc de le constituer en tant que système autonome.

Les archives nous apprennent que, dans ces années allant de 1911 à 1935, Savoire étendit ses

liens initiatiques et spirituels, entrant en relation étroite avec un jésuite franc-maçon, le père JosephBerteloot (1881-1955), nous laissant imaginer ce que les entretiens qu’ils eurent l’un avec l’autreont pu avoir comme influence, ce à quoi il faut rajouter, son admission au sein de l’Ordre Martiniste.

En effet, en 1921, Savoire va se rapprocher du martinisme, par l’intermédiaire du Chapitre Saint-André Apôtre n° 2, dirigé par Serge Constantinovitch Marcotoune (+ 1971). Ce dernier, parmiles membres fondateurs de la Société occultiste internationale (SOI), dirigée par Jean Bricaud(1881-1934), entendait succéder au Groupe indépendant d’études ésotériques fondé par Papus en1889. [5]

Harvey Spencer Lewis (1883-1939)Il fut accueilli au Temple « Arthur Groussier » du Grand Orient de Francepar Camille Savoire le 20 septembre 1926.Par ailleurs, on ignore généralement que lorsque Harvey Spencer Lewis (1883-1939) [6], le

fondateur de l’Ancien et Mystique Ordre de la Rose-Croix,revint en France en 1926 une secondefois, il rencontra, le 11 août, Firmin Gimier, représentant le Chapitre « l’Effort » et Camille Savoire,afin d’aborder les questions touchant à l’esprit de la Rose-Croix. C’est ainsi que le 20 septembre1926, Lewis fut accueilli au Temple « Arthur Groussier » du Grand Orient de France par CamilleSavoire en personne, alors Grand Commandeur du Grand Collège des Rites, lors d’une tenue deGrand Chapitre au 18ème degré du Rite écossais ancien et accepté, degré dit de Souverain PrinceChevalier Rose-Croix. Savoire, fut même reçu à cette occasion, membre d’honneur de la confrérierosicrucienne dirigée par Lewis, et en remerciement lui écrivait : « Je veux d’abord vous remercierdu grand honneur que vous m’avez fait en me conférant le titre de membre d’honneur de laconfrérie Rose-Croix dont vous êtes le président. Je m’efforcerai d’acquérir les connaissances etqualités nécessaires pour remplir la mission que ce titre m’impose.» [7]

VII. Le Réveil du « Grand Directoire des Gaules » (mars 1935)Il est bien évident que de telles dispositions d’esprit chez Savoire, au sein d’un Grand Orient de

France profondément agnostique, véhiculant une culture de quasi athéisme militant, ne pouvaitconduire qu’à une succession d’incompréhensions qui, d’ailleurs, vont aboutir à une rupture radicale.

Camille Savoire, le 5 avril 1924 à Genève, en sa qualité de Grand Commandeur du Grand Collègedes Rites, fut reçu par le G.P.I.H., qui avait installé à la charge de Grand-Prieur Ernest Rochat,(1868-1953), Eq. a Studio, depuis le 26 avril 1919 et qui les resta jusqu’en 1939. Ces liens étroits,renforçant une amitié mutuelle participant d’une commune estime, vont intervenir directement dansles événements qui surviendront peu après. En ces années, Savoire ne semble poursuivre qu’un seulbut qui lui tient à cœur : le réveil complet du Régime rectifié sur le territoire français.

La solution alternative, devant l’impossibilité d’établir le Régime au sein du Grand Orient deFrance, va s’imposer d’elle-même, Camille Savoire comprenant que le Régime, au fond, tant enraison de son essence que de sa nature organisationnelle, se devait d’être pratiqué en dehors desobédiences en tant que système autonome. C’est cette idée qui fut à l’origine de la constitution du

Grand Directoire des Gaules en mars 1935.

Constitution du « Grand Directoire des Gaules »,

lors de la tenue de la Préfecture de Genève, le 23 mars 1935, à Neuilly-sur-Seine,

in J. Baylot, Histoire du Rite Écossais Rectifié de France au XXe siècle,Collection historique, Grande Chancellerie de l’Ordre, 1976, p. 71.Ainsi, les 20 et 23 mars 1935, allant au bout d’un processus qui semblait à présent irréversible, se

déroulait à Paris la tenue historique de la Préfecture de Genève, présidée par le Grand Prieur duG.P.I.H., qui prenait soin de dénoncer le traité de 1911 signé avec le G.O.D.F., et installait laPréfecture de Neustrie, donnant une Patente officielle à Camille Savoire, en lui octroyant, en tant queGrand Prieur du « Grand Directoire des Gaules », toute autorité pour créer en France des ateliersdu Rite Écossais Rectifié. Dans son discours, Camille Savoire soulignait que le G.O.D.F. s’opposaità la pratique authentique du Régime rectifié. et que le Grand Directoire des Gaules formerait donc,pour répondre aux exigences willermoziennes, un Ordre autonome et indépendant, composé demembres « désireux de quitter les Obédiences françaises dont les agissements, étaient encontradiction avec le caractère de la Franc-maçonnerie » ; Savoire rajoutant: « Voilà commentnous avons régulièrement réveillé en France le Rite Rectifié : ce réveil ayant été fait en accord etavec le concours de la seule puissance ayant l’autorité suprême du Rite au monde et en conformitédes décisions des divers Convents de 1778, 1781, 1808, et 1811, et en exécution de la décisionprise en 1828 par le Directoire de la 5° province de Neustrie déléguant à la dernière de sespréfectures, dite de Zurich, ses archives, prérogatives, droits, etc…, avec mission de les conserverjusqu’au jour où le réveil du Rectifié pourrait s’effectuer en France et lui permettrait de s’endessaisir.» [8]

Une Patente fut délivrée qui stipulait : « Le Grand Prieur d’Helvétie, ès qualités, a expressémentreconnu le Grand Directoire des Gaules comme puissance régulière, autonome et indépendantedu Régime Rectifié en France, avec les pouvoirs les plus étendus pour créer en ce pays toutesPréfectures, Commanderies, Loges de Saint-André et éventuellement, toutes Loges symboliques duRite Rectifié sous son Obédience, et a salué en la personne du T. Rév. F. Chev. Bienfaisant de laCité Sainte, Docteur Camille Savoire, in ordine eques a fortitudine, le premier Grand Prieur,Grand-Maître National.» [9]

Quatre mois plus tard après la constitution du Grand Directoire des Gaules, un Traité d’allianceet d’amitié fut conclu avec le Grand Prieuré d’Helvétie, le 5 juillet à Genève, et le 25 du même moisà Paris, et ce « pour une période indéterminée », les deux puissances maçonniques se reconnaissantpour « seules et uniques Puissances Souveraines du Régime Écossais Rectifié dans leurs paysrespectifs, savoir : le Grand Directoire des Gaules pour la France et ses Colonies et le GrandPrieuré Indépendant d’Helvétie pour toute la Suisse, et n’admettent comme ateliers réguliers du

Régime Rectifié que ceux constitués en France par le Grand Directoire des Gaules, et en Suisseque ceux relevant directement du Grand Prieuré Indépendant d’Helvétie.»[10]

http://jean-marcvivenza.hautetfort.com/Permalink: https://willermoz.com/2015/03/04/camille-savoire-et-les-temples-de-la-franc-maconnerie/

#46

Camille Savoire et « l’esprit » de la Gnose spiritualiste | Le Régime Ecossais Rectifié

« La connaissance ne s’obtient que par l’initiation, connaissance qui est une « communion » avec l’âme universelleet dont le nom n’est autre que Gnose.» Camille Savoire (1869-1951)La réédition de son ouvrage publié en 1935 : « Regards sur les Temples de la Franc-

maçonnerie », précédé d’une longue Préface de Jean-Marc Vivenza, vient de porter une lumièrepour le moins assez nouvelle sur la personnalité de Camille Savoire.

On s’aperçoit en effet, à la lecture des 90 pages de présentation du livre, que l’on ignoraiténormément de choses sur celui qui fut à l’origine, en 1935, l’année même où il faisait paraître sonlivre, du « réveil » du Régime Rectifié en France.

Jean-Marc Vivenza nous révèle ainsi bien des aspects méconnus du parcours de Camille Savoire,et surtout nous montre l’évolution de celui qui se disait agnostique en son jeune âge, vers unspiritualisme de plus en plus marqué : « Camille Savoire, de l’agnosticisme de son jeune âge vadonc, peu à peu, sans doute de par l’exercice de sa charge et son contact avec les degrés élevésdes différents Rites maçonniques, évoluer vers un spiritualisme qui, pour n’être point uneadhésion pleine et entière à une « Révélation », participait néanmoins d’un refus dumatérialisme. » [1)

« Ce fut le désir de travailler dans le secret et le silence,qui attira vers la Franc-Maçonnerieles adeptes de certaines organisations philosophiques,initiatiques ou occultistes, survivances des anciennes confréries… »Camille Savoire s’explique lui-même sur ce changement de point de vue, après avoir découvert

« le caractère « initiatique » de la franc-maçonnerie » : « Ce fut le désir de travailler dans lesecret et le silence, à l’abri des regards indiscrets de la police et des autorités qui attira vers laFranc-Maçonnerie les adeptes de certaines organisations philosophiques, initiatiques ouoccultistes, survivances des anciennes confréries de Rose-Croix, Alchimistes, Illuminésd’Allemagne ou de Bavière, lesquelles vinrent s’agréger au sein de la Franc-Maçonnerie en yconstituant des Loges d’un caractère spécial (…) l’étude approfondie des anciens rituels, enm’éclairant à la lumière des travaux d’occultistes ou d’initiés anciens ou modernes, me permitd’entrevoir nettement le caractère initiatique de la Franc-Maçonnerie, tel que l’avaient conçucertains de ses adeptes, et de le comparer aux sociétés initiatiques de tous les temps, sinon par lesmoyens employés, mais par les buts poursuivis, la communauté des symboles, de certainesappellations, mots et signes de reconnaissance, formes rituelles, épreuves.» [2]

Mais ce premier constant va aboutir à une décision qui transformera profondément la vie deCamille de Savoire : « à savoir la nécessité pour l’initié de devoir se livrer à un travail intérieurpour parvenir à la pleine compréhension de ce que signifie « l’Esprit », pour reprendre l’expressionemployée par Savoire : « Des études poursuivies pendant plus de dix ans, confrontées avec lesdécouvertes et enseignements de la science contemporaine, j’acquis la notion que seul un travailintérieur effectué sur soi-même peut faire progresser dans la voie de l’initiation, laquelle n’estqu’une éducation de ce sens intime qu’on désigne sous le nom d’intuition et qui n’estvraisemblablement qu’une communion ou une prise de contact avec l’Intelligence universelle.Cette notion est incompatible avec une profession de foi matérialiste. Tout ceci me conduisit versun spiritualisme s’élevant au-dessus des dogmes des religions, des diverses croyancesphilosophiques et métaphysiques qui m’a paru constituer le véritable fondement de la Franc-Maçonnerie… » [3]

Camille Savoire va en tirer une conclusion qui deviendra une sorte de credo pour lui, ainsi résumépar Jean-Marc Vivenza : « l’initié doit chercher à se libérer des emprises de la Matière ».

« La Matière qui n’est qu’une transformation de l’Esprit,cherche à dominer ce dernier et à l’asservir,alors que l’homme sage que doit être le Franc-Maçoncherche à se libérer des emprises de la Matière.»Et c’est bien ce qu’affirme positivement l’auteur des Regards sur les Temples de la Franc-

maçonnerie : « s’était effectuée en moi une accession vers la conception d’un monde dans lequella Matière qui, dans ses divers aspects, n’est qu’une transformation de l’Esprit, cherche àdominer ce dernier et à l’asservir, alors que l’homme sage que doit être le Franc-Maçon chercheà se libérer des emprises de la Matière.» [4]

Entrant dans une étude de « l’Esprit », Camille Savoire, comme nous le fait découvrir Jean-MarcVivenza, « apprit que la connaissance ne s’obtient que par l’initiation, connaissance qui est une« communion » avec l’âme universelle et dont le nom n’est autre que Gnose » [5].

Cette « Gnose, Camille Savoire l’avait expérimentée par « l’étude de l’esprit » : « L’étude del’esprit apprend à l’homme à connaître l’âme, c’est-à-dire la force et la vie intime des choses etdes êtres, de l’inanimé comme de l’animé et cette connaissance ne s’acquiert que par l’initiation,c’est-à-dire par l’éducation d’un sens intime, « l’intuition », qui a pour effet d’établir entre leMaçon et la vie universelle une «véritable communion » alors que notre intelligence est souventfaussée par nos intérêts, nos passions et nos préjugés. Cette connaissance, véritable communionavec l’âme universelle, c’est la Gnose. Pour l’acquérir, le Franc-Maçon doit maîtriser sespassions, établir un juste équilibre entre ses diverses facultés : raison, intelligence, sensibilité, etles accorder avec le milieu universel réalisant ainsi le « juste milieu » de chacun de nous, c’est-à-dire « la loi de notre être » en conformité avec la « loi universelle ». Cette loi n’est pas fixe, disaitConfucius. Aussi, le Maçon, par un perpétuel effort et un éveil constant, doit conformer ses

pensées et ses actes au principe changeant de l’Univers tout en s’efforçant de garantir sonharmonie intérieure ! » [5]

« L’étude de l’esprit apprend à l’hommeà connaître l’âme,c’est-à-dire la force et la vie intime des choses et des êtres,de l’inanimé comme de l’animéet cette connaissance ne s’acquiert que par l’initiation… »Ainsi donc, analyse Jean-Marc Vivenza : « On le constate, loin du portrait erroné que l’on

présente encore parfois de lui, en quelques années, Camille Savoire, de par ses fonctions deGrand Commandeur des Rites et son cheminement maçonnique personnel, avait profondémentévolué, puisque du matérialiste agnostique qu’il déclarait être dans sa période de jeunesse, il étaitdevenu un spiritualiste qui, pour conserver son attachement à la liberté de penser – liberté nonsynonyme pour lui d’incroyance –, néanmoins, n’hésitait plus à se référer à la kabbale, aux Rose-Croix, refusant l’athéisme, appelant à un travail intérieur capable de faire accéder l’initié à laconnaissance véritable de la « Gnose », entendue comme l’expression de « l’âme universelle ». Onest donc très loin d’une attitude de rejet de la spiritualité, bien au contraire. » [6]

« La route de l’initiation conduisant à la Gnose,[est]cette connaissance suprêmequi ne connaît pas les limitations de connaissance.C’est l’acquisition de la Gnose qui constitue l’objet principal de l’institution.Car elle est indispensable à la recherche de la Vérité….»Le témoignage le plus probant des convictions spiritualistes qui étaient devenues les siennes et sur

lesquelles Jean-Marc Vivenza porte un éclairage tout à fait saisissant, allait être donné par CamilleSavoire à la demande de son ami Constant Chevillon (1880-1944) qui : « s’il avait encore desobjections à formuler à l’égard du dogmatisme ecclésial, n’en avait point à l’encontre duspiritualisme spéculatif qui pour lui était synonyme de « connaissance », c’est-à-dire de la« Gnose » qui constitue même, selon lui, « l’objet principal de l’institution initiatique » [7].

Voici donc ce que Camille Savoire allait déclarer, en 1939, dans la préface qu’il accorda à unopuscule publié par Constant Chevillon, alors Grand Maître de l’Ordre Martiniste : « la route del’initiation conduisant à la Gnose, [est]cette connaissance suprême qui ne connaît pas leslimitations de connaissance. C’est en effet l’acquisition de la Gnose qui constitue l’objet principalde l’institution. Car elle est indispensable à la recherche de la Vérité sans laquelle on ne sauraittravailler au perfectionnement individuel et collectif des êtres.» [8]

La réédition des « Regards sur les Temples de la Franc-maçonnerie » à l’heureuse initiativedes éditions la Pierre Philosophale, rend donc, par la Préface étendue de Jean-Marc Vivenza quiprésente cette nouvelle édition – la première depuis 1935 – un hommage plus que mérité à unegrande figure de la maçonnerie spiritualiste, qu’il importait, loin des caricatures que certains avaient

édifiées sur Camille Savoire, de porter à la lumière…de la « connaissance ».Notes.

1. J.-M. Vivenza, Préface, in Camille Savoire, Regards sur les Temples De la Franc-maçonnerie,La Pierre Philosophale, 2015, p. 20.

2. Ibid., pp. 110-111.

3. Ibid.

4. Ibid., p. 22.

5. Ibid., p. 114.

6. Ibid., p. 23.

7. Ibid., pp. 78-79.

8. Ibid., p. 79, tiré de C. Savoire, Préface, in C. Chevillon, Le Vrai Visage de la Franc-Maçonnerie, Éditions des Annales Initiatiques, (2ème édition), 1940.

Camille Savoire et les Temples de la Franc-maçonnerie

Éditions La Pierre Philosophale, 338 p. https://lecrocodiledesaintmartin.wordpress.com/2015/03/10/camille-savoire-et-lesprit-de-la-

gnose-spiritualiste/Permalink: https://willermoz.com/2015/03/10/camille-savoire-et-lesprit-de-la-gnose-spiritualiste/

#47

Maçonnerie et Religion | Le Régime Ecossais Rectifié

Jean-Baptiste Willermoz, pourtant fervent catholique mais avec une intelligence remarquable,avait compris combien il était extrêmement dangereux de mêler la religion avec la franc-maçonnerie,notamment dans les grades symboliques qui sont, et doivent rester, une propédeutique duchristianisme, un séminaire prudent et mesuré dans lequel est développée une approche touteintérieure et intime des mystères de la Révélation.

Car la foi, et son corollaire, c’est-à-dire la rencontre dans le coeur avec le Divin MaîtreRéparateur, est un chemin constitué par le fruit de la réunion de l’âme avec le Ciel, réunion faite demouvements constants, de variations qui sont la vie propre de l’esprit, esprit qu’’il ne faut surtout pasbrusquer, ni auquel il ne convient d’imposer un rythme brutal, et encore moins contraindre sous lepoids d’une dogmatique rigide qui n’a aucunement sa place au sein de l’initiation, d’autant que lechristianisme auquel se réfère l’Ordre, selon Joseph de Maistre, relève du « christianismetranscendant » participant de vérités aujourd’hui oubliées par l’Eglise et que cette dernière regardemême comme des « erreurs » en les condamnant de par le fait qu’elle les ignore ou ne veut plus lesconnaître, ainsi que l’explique Willermoz (Cf. Cahier D 5e , Bibliothèque Nationale de Paris, 1806-1818).

Lisons donc avec attention les sages conseils de Willermoz, pour s’y conformer et en observer lesprincipes :

« Du moment qu’on mêlera la religion à la maçonnerie dansl’O. symbolique on opérera sa ruine ; je la vois même sepréparer en plusieurs endroits par la multiplicité peu sévère[…] et par le zèle imprudent qui en vue du bien du prochain selivre a l’esprit de prosélytisme ; pour faire préférer notrerégime nous mettons à découvert ses principes et son butparticulier nos discours oratoires deviennent des sermons,bientôt nos Loges deviendront des églises ou des assembléesde piété religieuse….

[…]

Ce danger mon ami qui peut paraître chimérique est bien plusprochain qu’on ne pense, si on n’y met promptement ordre….»

(Lettre de Willermoz à Bernard de Türckheim (1752-1831), du 3 février 1783, in RenaissanceTraditionnelle n°35, juillet 1978, p. 179).Permalink: https://willermoz.com/2015/06/05/maconnerie-et-religion/

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Le Régime Écossais Rectifié et la doctrine de la matière | Le Régime Ecossais Rectifié

Jean-Baptiste Willermoz et la corruption de la nature de l’hommeEclaircissements à propos de la distinction entre « l’ordre de la chair » et « l’ordre de l’esprit »Jean-MarcVivenza « A quoi fait allusion ce mausolée, avec ces inscriptions ?A l’immortalité de l’âme, aux principes élémentaireset à la dissolution de la matière. »J.-B. Willermoz, Rituel du 3e Grade du Régime Ecossais Rectifié.~ 2 ~Voilà un sujet impressionnant, une question délicate qui est l’objet d’éternelles discussions au sein

des cénacles rectifiés, et même en d’autres, entraînant souvent, à n’en plus finir, des débats animésdans lesquels s’affrontent des opinions radicalement opposées. Cela en est arrivé à un tel point quebeaucoup ne savent plus trop quoi penser alors même que l’Ordre – c’est-à-dire le Régime EcossaisRectifié – possède de façon claire une doctrine portant sur la matière, exprimée en des termesincontestables n’autorisant, a priori, aucun doute ni aucune réserve, ceci faisant qu’il ne devraitnormalement n’y avoir nulle confusion régnant en ces domaines pour quiconque respecte les positionswillermoziennes et ne cherche pas à y substituer des vues étrangères ou extérieures à ces dernièresqui ont, et elles seulement, autorité sur le plan doctrinal.

Or confusion il y a, confusion assez largement répandue et grandement perceptible, montrant certesque ne sont pas compris, mais surtout connus faute d’être travaillés comme il se devrait, les textes duRégime rédigés pourtant avec une infinie patiente pédagogique par Jean-Baptiste Willermoz, attituded’oubli qui est une erreur doublée d’une faute du point de vue initiatique. C’est pourquoi, face à cettesituation problématique générant de nombreuses convictions inexactes et vues subjectives diverses, ilnous a semblé utile et même nécessaire de présenter, le plus complètement possible, les thèseseffectives sur la nature de l’homme, la matière et sa destination, qui ont été en effet « infusées » parson fondateur au sein du système mis en oeuvre lors du Convent des Gaules en 1778 à Lyon etentériné définitivement en 1782 à Wilhelmsbad.

I. Les sources de la pensée willermoziennePréalablement, pour connaître la raison de la position du Régime Rectifié à l’égard de la matière

entendue aussi bien comme constituant le corps charnel de l’homme que le composé matériel communà toutes choses créées traversant les trois règnes du vivant (animal, végétal, minéral), il convient desavoir comment cette pensée s’est peu à peu imposée au principal concepteur du Régime au point dedevenir sa pensée officielle, pensée occupant une place centrale dans les principes théoriques

enseignés par l’Ordre et allant même jusqu’à participer d’une bonne part des instructions ultimesdestinées au Chevaliers admis dans la classe non-ostensible.

A la lecture des textes du Régime un constat immédiat s’impose : nous nous trouvons face à uneanalyse structurée, arrêtée et construite qui prédomine dans le système willermozien traversant tousles grades en faisant l’objet d’exposés méthodiques résumés en quelques thèses relativement sévèressur le caractère corrompu et la nature déchue des formes dans lesquelles l’homme se trouve placé,enserré et est contraint de vivre pendant son séjour en ce monde. Ces thèses d’où proviennent-elles ?De Martinès de Pasqually (+ 1774) pour une grande part en effet, mais pas seulement. Elles ont étépropagées par d’autres auteurs spirituels bien avant lui, parmi lesquels Origène (v. 185-253),Clément d’Alexandrie (IIe s.), ou même Platon et les néoplatoniciens (Jamblique, Porphyre, Plotin,Damascius), voire plus directement saint Paul, premier maître instructeur en ces sujets fondamentaux,

~ 3 ~et bien évidemment l’Evangile lui-même par les paroles du Christ qui pose une distinction très

nette entre le monde et le ciel, entre les choses crées et incréées, entre le visible et l’invisible, ce quiaboutira à l’établissement d’une distinction fondatrice essentielle qui prendra, dès les premiers tempsde l’Eglise, une place centrale au sein du christianisme : « Mon royaume n’est pas de ce monde. Simon royaume était de ce monde, mes serviteurs auraient combattu, afin que je ne fusse pas livré auxJuifs ; mon royaume n’est pas d’ici. » (Jean XVIII, 36).

Un autre point est parfois évoqué en forme d’interrogation teintée chez certains d’une étrangecrainte, relatif au climat propre de l’histoire de la pensée religieuse occidentale qui futconsidérablement influencé par ce courant : les thèses willermoziennes seraient-elles marquées parune sensibilité augustinienne ? Sans aucun doute puisqu’on retrouve de nombreuses affirmationssemblables à celles du Rectifié dans les ouvrages de l’évêque d’Hippone (De la nature et de lagrâce, De Trinitate, De la grâce et du libre arbitre, La Cité de Dieu, etc.). Ces thèses, quis’imposeront comme une sorte de signature distinctive de la pensée théologique de saint Augustin(354-430) portent sur la corruption de l’homme, l’état dégradé de la création, le caractère vicié dumonde matériel, la nécessité de la grâce, et constituent ce qu’il convient d’appeler en effet «l’augustinisme théologique », qui insista avec une force extraordinaire sur les tragiques conséquencesnégatives de la chute : « Par le fait de leur origine, tous les hommes sont soumis à la corruption, notrenature viciée n’a plus droit qu’à un châtiment légitime… ne pensons pas que le péché ne puisse pointvicier la nature humaine, mais sachant par les divines Ecritures, que notre nature est corrompue,cherchons plutôt comment cela s’est fait.» [1]

Est-il donc illégitime, en examinant les textes du Régime Ecossais Rectifié, de signaler cetteidentité conceptuelle entre la pensée de saint Augustin et celle de Willermoz ? Certes non, c’estmême, selon nous, un exercice instructif que de souligner ce lien nous permettant de replacer, sans lasoumettre car il convient de respecter les domaines et ne point les confondre, la doctrine du Régimeau sein de l’histoire de la spiritualité chrétienne. Mais il convient également, dans le même temps, de

voir que ces thèses ne sont pas propres à saint Augustin mais sont communes à de nombreux penseursantérieurs ou postérieurs à lui, de même qu’elles ne sont pas uniquement celles de Willermoz et duRectifié puisqu’elles inspirèrent, pour ne citer que les figures se situant à la périphérie immédiate dela réforme de Lyon, les oeuvres de Louis-Claude de Saint-Martin (1743-1803), Joseph de Maistre(1753-1821) et Franz von Baader (1765-1841). La question qui doit donc seule nous importer estuniquement de savoir ce que pense et affirme le Régime rectifié, et il se trouve que ce Régime,précisément en ses bases doctrinales essentielles, se rattache aux thèses néoplatoniciennes,origéniennes et augustiniennes. C’est un fait ; et si l’on veut être en accord avec un Ordre auquel ondit appartenir, il convient logiquement d’en accepter la doctrine et la professer, ou tout au moins, cequi est un minimum, d’en respecter les vues et ne point les qualifier « d’hérésies ».

II. Les conséquences du péché originelOn remarque ainsi que dès les célèbres leçons de Lyon (1774-1776), Willermoz exposa la raison

pour laquelle l’homme est revêtu aujourd’hui d’un corps de matière, puisque devant à l’origine lutterpour

~ 4 ~libérer des fers matériels les esprits qui y étaient emprisonnés, il a été finalement puni de son

crime en subissant le même sort que les ennemis de l’Eternel, c’est-à-dire en étant précipité, lui quiétait un esprit glorieux, à son tour dans un « corps de matière ténébreux » : « L’homme fut puni de soncrime d’une manière conforme à la nature même du crime, il se trouva resserré dans une prison decette même matière qu’il devait contenir et se soumit par là à une action sensible de ces espritspervers sur ses sens corporels provenus de cette matière qui avait été créée pour les tenir enprivation..Adam, déchu de son état de gloire et enseveli dans un corps de matière ténébreuse, sentitbientôt sa privation. Son crime était toujours devant ses yeux… » (J.-B. Willermoz, leçon n°6, 24janvier 1774).

Propos auxquels répondent ces lignes du rituel du grade de Maître Ecossais exprimant un jugementqui traverse tout le Rectifié : « C’est cette dégradation de l’homme, ce sont l’abus de sa liberté, lechâtiment qu’il en a reçu, l’esclavage dans lequel il est tombé et les suites funestes de son orgueil quivous ont été représentés aujourd’hui dans le premier tableau, par le saccagement et la destruction dupremier Temple de Jérusalem : image sensible de l’humiliante métamorphose qu’ils occasionnèrentdans la première forme corporelle de l’homme.»

« Adam, déchu de son état de gloireet enseveli dans un corps de matière ténébreuse,sentit bientôt sa privation… »J.-B. Willermoz, leçon n°6, 24 janvier 1774.Pour cette conception à laquelle adhère à la suite de Willermoz les principaux représentants du

courant illuministe européen : Friedrich Oetinger (1702-1782), Kirchberger (1739-1798), Karl vonEckartshausen (1752-1803), Dietrich Lavater (1743-1826), pour ne citer que les plus connus, la chair

dont furent revêtus Adam et Eve et leur descendance est une punition, la conséquence du péchéoriginel, une sanction, conception qui peut surprendre le lecteur contemporain habitué à un regardmoins négatif sur la chair, d’autant que d’autres courants optent pour une position bien plus optimistecomme on en trouve trace dans les églises orientales infiniment moins sévères sur le sujet, mais dontla source se trouve cependant formellement dans l’Ecriture et chez plusieurs Pères de l’Eglise commesaint Grégoire de Nysse (+394) qui déclarait positivement : «Nous sommes devenus chair et sang parle péché. » (S. Grégoire de Nysse, Hom. Op. 22 205 A).

III. Prévarication d’Adam et corruption de la nature~ 5 ~« Nous sommes devenus chair et sang par le péché. »S. Grégoire de Nysse, Hom. Op. 22 205 A.a) Tradition patristiqueCette idée d’un emprisonnement de l’homme dans un corps de matière en punition du crime

d’Adam possède sa source dans l’Ecriture Sainte et fut reprise ensuite par certains Pères de l’Eglise.Mais c’est sans doute, comme nous l’avons déjà signalé, Origène

disciple de saint Clément d’Alexandrie, qui systématisa, développa et édifia de façon la plus lacomplète la thèse d’une Chute de l’homme dans la matière, d’une descente dans des corps grossierset animaux, comme répondant à une faute antérieure, en se fondant sur le récit, il est vrai saisissant dutroisième chapitre du livre de la Genèse, où il est dit, après l’épisode du péché originel : « Dieu fit àl’homme et à la femme des tuniques de peau. » (Genèse III, 21.).

Si nous sommes placés dans une structure matérielle aujourd’hui, dans une enveloppe corporelle,cela est donc pour Origène la conséquence de la chute, de la faute commise en Eden ; c’est-à-dire,pour être clair, que c’est en punition et pour notre honte que nous reçûmes des « vêtements de peau »semblables à ceux des animaux, entraînant tragiquement toute la famille humaine dans l’héritage dupéché, péché se signalant par une détermination de la chair à la corruption et à la mort.

Après la faute du premier homme affirme Origène, en faisant sienne l’analyse de saint Paul, tousles descendants d’Adam naissent dans un état d’aversion à Dieu parce qu’ils sont, par la faute de leurpère, privés des dons que Dieu avait octroyés à l’homme, comme le soutient également Tertullien (+v. 220) : « L’homme, condamné à mort dès l’origine, a entraîné dans son châtiment tout le genrehumain contaminé par son sang. » (Sermon de l’âme, 1 ; c. IV). De la sorte, depuis le péché originel,par essence, la chair « contaminée », la matière corporelle est opposée aux lois divines, car à causede la prévarication d’Adam en Eden : « la pensée de la chair est inimitié contre Dieu. » (RomainsVIII, 7). C’est une règle invariante se reproduisant à chaque génération ; la chair est ainsiirréformable et c’est un travail vain et inutile que de chercher à lui conférer une autre orientationcomme le déclare Salomon : « Quand tu broierais le fou dans un mortier, au milieu du grain,

~ 6 ~avec un pilon, sa folie ne se retirerait pas de lui. » (Proverbes XXVII, 22). La vieille nature est

précisément « dénaturée », abîmée dans la matière ; la chair est corrompue, malade, frappée d’unesouillure mortelle de par les effets de la prévarication d’Adam.

« L’homme, condamné à mort dès l’origine,a entraîné dans son châtimenttout le genre humain contaminé par son sang. »Tertullien, Sermon de l’âme, 1 ; c. IV.Cette conception on le voit, avant même saint Augustin qui théorisa cependant cette idée de

corruption radicale de la chair de par la chute avec l’insistance que l’on sait en Occident, fut exposéepar Origène et son disciple Grégoire le Thaumaturge (+270), puis Eusèbe de Césarée (260-340),pensée qui passa à la postérité, par saint Jérôme (344-420) qui la fit figurer dans ses nombreuxCommentaires, sans oublier Evragre le Pontique (345-400), Grégoire de Nysse (335-394) et saintMaxime le Confesseur (580-662).

Saint Augustin occupe évidement une place centrale dans l’histoire de la pensée théologique enraison de l’importance monumentale de son oeuvre, faisant que l’accent fut mis d’une façonparticulière sur le sujet du péché originel avant même que le saint évêque d’Hippone ne fut reconnucomme un docteurde l’Eglise par Rome (en 1295 par Boniface VIII), ceci sans compter queparallèlement à son influence déterminante, saint Hilaire de Poitiers (+367) s’ouvrit à la penséed’Origène sur la chute dont il traduira les Commentaires sur les Psaumes, ce qui procurera uneautorité réelle et conjointe à la fois à Origène et à saint Augustin sur de nombreux théologiens àtravers tout le moyen âge occidental jusqu’à l’âge classique et la période moderne, de saint Bernardde Clairvaux (1090-1153) ou Guillaume de Saint-Thierry (1085-1148), et par eux la tradition

~ 7 ~cistercienne, puis saint Thomas D’aquin (+ 1274), saint Bonaventure (+ 1274) et Maître Eckhart

(1260-1328) qui, dans son Commentaire du Prologue de Jean, s’inspira nommément d’Origène quicomparait l’apôtre bien aimé du Christ à l’aigle évoqué par Ézéchiel (XVII, 3-4), ceci sans oubliersaint Jean de la Croix (1542-1591) et sainte Thérèse d’Avila (1515-1582) convertis à la lecture desaint Augustin, saints espagnols pénétrés des thèses augustiniennes, comme le seront d’ailleurs lesplus grands spirituels chrétiens, théologiens et docteurs d’Occident. [2]

b) Enseignement des PèresLes théologiens enseignent donc, s’agissant des conséquences du péché pour nos premiers parents

:1) La perte des dons surnaturels et préternaturels.2) Le dépouillement de la grâce sanctifiante, des vertus infuses, des dons du Saint-Esprit et du

droit du bonheur du Ciel.3) Le retrait des dons extranaturels, c’est-à-dire, pour le traduire clairement, qu’Adam et Eve, et

nous par héritage, avons été assujettis à l’ignorance, à la concupiscence et à la mort.4) La révolte des sens et la désobéissance native.

5) La transformation de notre corps immortel en une chair corrompue et la malédiction du sol(Genèse III, 17)

Saint Grégoire de Nysse écrit : « Ainsi l’homme étant tombé dans le bourbier du péché, a perdud’être l’image du Dieu incorruptible, et il a pris en échange par le péché l’image d’une bouecorruptible : c’est cette image que le Verbe nous exhorte à déposer en la nettoyant comme avec del’eau par la pureté de notre vie : ainsi le revêtement de boue étant déposé, à nouveau la beauté del’âme se manifestera. Déposer ce qui est étranger, c’est en effet pour l’âme revenir à son état naturel.Et ceci ne lui est pas possible autrement qu’en redevenant ce qu’elle était à l’origine. » (S. Grégoirede Nysse, PG 46, 372 B-C).

« Déposer ce qui est étranger,c’est en effet pour l’âme revenir à son état naturel.Et ceci ne lui est pas possible autrementqu’en redevenant ce qu’elle était à l’origine. »S. Grégoire de Nysse, PG 46, 372 B-C.c) Sens de l’Incarnation~ 8 ~De la sorte, rappellerons les pieux auteurs à la suite de saint Paul, lorsque l’Ecriture parle de

l’Incarnation du Seigneur, ce n’est pas pour nous signaler que le Christ est venu prendre conditionhumaine afin d’en magnifier l’état et se louer de notre situation ; pour nous adresser des félicitationset nous encourager à profiter plus encore de notre fond vicié et infecté par le péché, pourcomplaisamment flatter nos séductions sensibles et nous inviter à nous délecter de nos impressionscharnelles. Il ne faut jamais oublier que s’il est venu parmi nous, sous forme d’homme, c’est pourprendre sur lui notre nature pécheresse, pour assumer, par amour, notre triste condition abîmée par lafaute, pour endosser la déréliction de notre état chuté – non pas pour glorifier la chair et ses fruitsamers mais bien au contraire nous appeler, dès ici bas aux réalités célestes : « Lui [le Christ Jésus]qui de condition divine dit Paul, n’a pas craint de s’anéantir (le verbe grec kenosis, est encore, sur leplan métaphysique, bien plus fort que ne le rend le français « anéantir »), prenant la forme d’esclave,étant fait à la ressemblance des hommes ; et, étant trouvé en figure comme un homme, il s’est abaissélui–même, étant devenu obéissant jusqu’à la mort, et à la mort de la croix. C’est pourquoi aussi Dieul’a haut élevé et lui a donné un nom au–dessus de tout nom, afin qu’au nom de Jésus se ploie toutgenou des êtres célestes, et terrestres, et infernaux, et que toute langue confesse que Jésus Christ estSeigneur, à la gloire de Dieu le Père. » (Philippiens, II, 7-11).

« Il a été fait péchépour que Dieu condamnât le péché dans la chair. »(Epître aux Romains VIII, 3).Il s’est fait « péché » dit même saint Paul pour mieux nous faire comprendre le sens de

l’Incarnation, et « il est mort pour nos péchés » (1 Corinthiens XV, 3), « portant les péché en son

corps .» (1 Pierre II, 22) ; « il a été fait péché pour que Dieu condamnât le péché dans la chair . »(Romains VIII, 3).

~ 9 ~Le Christ s’est fait « chair » (ou « homme » ce qui est équivalent pour notre présent état de

créatures livrées, sur le plan naturel, aux puissances de l’adversaire de Dieu dont témoigne, à chaqueseconde, le terrible spectacle de ce monde désorienté, scandaleux et criminel), non pour venirprofiter de notre condition et nous complimenter sur son usage, mais nous en sauver ! Pas pourcélébrer la beauté de notre situation, festoyer et danser, prendre femme et se dégourdir les sens, maispour nous délivrer par sa mort ignominieuse sur le bois de la Croix en affirmant que, par sonsacrifice expiatoire, la réalité du Ciel nous attendait, précisant que son « Royaume n’est pas de cemonde » (Jean XVIII, 36), et qu’il fallait que l’Agneau fût sacrifié pour nous laver du péché : « Ilfallait une victime pour mériter la grâce [d’Adam]. Il fallait que sa forme corporelle matérielle futpurifiée par la destruction de son fils Abel et par l’effusion de son sang, afin, que, purgée par là deson impureté, elle devînt plus susceptible de communication. La mort d’Abel n’opéra point laréconciliation de son père, mais elle le disposa à l’obtenir. Il ne pouvait l’obtenir parfaite que par ladestruction de sa propre forme matérielle, mais il fallait qu’elle fut purgée de son impureté parl’effusion du sang de son fils Abel, et ce fils ne fut donné qu’à cette fin. » (Willermoz, Leçon n°6, 24janvier 1774).

IV. L’opposition entre « l’ordre de l’esprit » et « l’ordre de la chair »Ceci étant précisé, nul ne saurait donc contester la radicale opposition que l’on trouve dans les

Evangiles entre l’esprit et la chair : «C’est l’esprit qui vivifie ; la chair ne profite de rien » (Jean VI,63), et particulièrement chez saint Paul, entre ces deux ordres absolument antithétiques : l’ordre del’esprit et l’ordre de la chair. Même si certains se refusent, par l’effet d’une vision anthropologiqueerronée, à reconnaître l’antagonisme des deux ordres, pourtant nettement souligné à de multiplesendroits du texte sacré, il faut bien se rendre à l’évidence et admettre que la nature de l’homme(c’est-à-dire son âme et son corps, son esprit relevant quant à lui d’un autre « ordre » non naturel),entendue sous le terme générique de « chair », est frappée de corruption et de réprobation.

« Misérable homme que je suis,qui me délivrera de ce corps de mort ? »(Epître aux Romains VII, 24).Comment ne pas citer, en premier lieu eu égard à son caractère emblématique, l’épisode de

Nicodème,~ 10 ~docteur en Israël, auquel Jésus annonce qu’il doit naître de nouveau, concluant son discours ainsi :

« Ce qui est né de l’Esprit est esprit, ce qui est né de la chair est chair » (Jean III, 6). Quant à l’apôtrePaul, nul n’a plus que lui établi des liens concrets entre le péché et la chair, s’écriant même, dans ungémissement quasi désespéré et pathétique : « Misérable homme que je suis, qui me délivrera de ce

corps de mort ? » (Romains VII, 24). L’opposition est également clairement soulignée dans cepassage significatif : « Marchez par l’Esprit, et vous n’accomplirez point la convoitise de la chair.Car la chair convoite contre l’Esprit, et l’Esprit contre la chair ; et ces choses sont opposées l’une àl’autre… » (Galates V, 16-17). Enfin, de nouveau dans l’Epître aux Romains, c’est une véritablecondamnation de ce que représente la « chair » en son essence et sa nature qui nous est adressée,établissant une équivalence saisissante entre la « chair » et le péché : « Quand nous étions dans lachair, les passions des péchés, lesquelles sont par la loi, agissaient dans nos membres pour porter dufruit pour la mort. » (Romains VII, 5). Puis, un peu plus loin, et toujours avec la même intransigeance: « Moi je suis charnel, vendu au péché (…) C’est le péché qui habite en moi. Car je sais qu’en moi,c’est-à-dire en ma chair, il n’habite point de bien (…) Je vois dans mes membres une autre loi quicombat contre la loi de mon entendement et qui me rend captif de la loi du péché qui existe dans mesmembres. » (Romains VII, 15-18 ; 23). Le cri de Paul est d’une grande honnêteté : « De moi-mêmeselon l’entendement je sers la loi de Dieu ; mais de la chair, la loi du péché. » (Romains VII, 25).

« La pensée de la chair est la mort ;mais la pensée de l’Esprit, vie et paix …ceux qui sont dans la chairne peuvent plaire à Dieu. »(Epître aux Romains VIII, 5-8).Voudrions-nous encore nier, après ces paroles, le fruit vénéneux que représente la « chair »,

oserions-nous refuser de voir le caractère à jamais flétri et abîmé de ce qui est charnel ? Alorsécoutons saint Paul qui, avec une redoutable force de conviction, insiste plus avant de manière à nepoint laisser subsister la moindre trace d’ambiguïté : « Dieu a envoyé son propre Fils enressemblance de chair de péché, et pour [le] péché, a condamné le péché dans la chair, afin que lajuste exigence de la loi fut accomplie en nous, qui ne marchons pas selon la chair, mais selonl’Esprit. » (Romains VIII, 3-4). Après cet impressionnant rappel, qui demande à être lu avec crainteet tremblement, une sainte fureur continue d’habiter l’apôtre des Gentils, et, comme si cela nesuffisait pas,

~ 11 ~voulant fermement faire pénétrer dans le coeur de ses auditeurs le message du Salut, il poursuit

son prêche par ses lignes redoutables : « Ceux qui sont selon la chair ont leurs pensées aux choses dela chair ; mais ceux qui sont selon l’Esprit aux choses de l’Esprit ; car la pensée de la chair est lamort ; mais la pensée de l’Esprit, vie et paix ; – parce que la pensée de la chair est inimitié contreDieu, car elle ne se soumet pas à la loi de Dieu, car aussi elle ne le peut pas. Et ceux qui sont dans lachair ne peuvent plaire à Dieu. » (Romains VIII, 5-8).

*Saint Paul espérait certes convaincre par son discours, mais il voulait surtout pouvoir être certain

de parler à des êtres qui avaient déjà entrepris de rejeter les oeuvres de la « chair », délivrant, par

delà la distance des siècles, un enseignement vital pour notre devenir surnaturel, si nous acceptons,bien évidemment, de déposer ce qui, en nous, est « aliéné » par le l’effet du péché : « Or vous n’êtespas dans la chair, mais dans l’Esprit, si du moins l’Esprit de Dieu habite en vous ; mais si quelqu’unn’a pas l’Esprit de Christ, celui-là n’est pas de lui. Mais si le Christ est en vous, le corps est bienmort à cause du péché, mais l’Esprit est vie à cause de la justice. » (Romains VIII, 9-10).

« Ni la chair ni le sangn’hériteront du royaume de Dieu »(1 Corinthiens XV, 50).Les paroles de Paul, que reprendra Saint-Martin, et dont on conviendra sans peine qu’il est bien

difficile d’en nier le sens direct et catégorique, ont la vertu de dissiper toute contestation possible àpropos de la question qui nous occupe : « Ni la chair ni le sang n’hériteront du royaume de Dieu » (1Corinthiens XV, 50). Ainsi la chair, conçue comme étant l’unité de l’âme et du corps, ce qui n’enlèverien à la réprobation dont elle est chargée puisque cela englobe la matière corporelle et son principed’animation, qui n’est pas identique à « l’esprit » que l’on désigne aussi comme « l’âme », est bienviolemment rejetée de par sa corruption, elle est pécheresse par nature et ne participera pas à laréalité future du royaume.

~ 12 ~« …cultive ton âme immortelle et perfectible,et rends-la susceptible d’être réunie à la source pure du bien,lorsqu’elle sera dégagéedes vapeurs grossières de la matière. »(Règle maçonnique, Art. II, Immortalité de l’âme).Jean-Baptiste Willermoz, qui n’a pas manqué de soutenir cette vision toute paulinienne du devenir

concernant le composé charnel « psychosomatique », rajoutera cette sentencieuse mise en garde endestination des membres du Régime rectifié : « Homme ! Roi du monde ! Chef-d’oeuvre de lacréation lorsque Dieu l’anima de son souffle ! médite ta sublime destination. Tout ce qui végèteautour de toi, et n’a qu’une vie animale, périt avec le temps, et est soumis à son empire : ton âmeimmortelle seule, émanée du sein de la Divinité, survit aux choses matérielles et ne périra point.Voilà ton vrai titre de noblesse ; sens vivement ton bonheur, mais sans orgueil : il perdit ta race et tereplongerait dans l’abîme. Etre dégradé ! malgré ta grandeur primitive et relative, qu’es-tu devantl’Eternel ? Adore-le dans la poussière et sépare avec soin ce principe céleste et indestructible desalliages étrangers ; cultive ton âme immortelle et perfectible, et rends-la susceptible d’être réunie à lasource pure du bien, lorsqu’elle sera dégagée des vapeurs grossières de la matière. » (Règlemaçonnique, Art. II, Immortalité de l’âme).

V. La chair est destinée à être abandonnée selon WillermozWillermoz explique très bien, en des termes ne laissant place à aucune incertitude, cette essence

fugitive et mortelle de la chair : « l’homme est pendant son séjour sur la Terre un composé ternaire :

savoir de deux substances passagère [ une âme ou vie passive et passagère, et un corps de matièrequi disparaissent totalement après la durée qui leur est prescrite ] qui le constituent animal comme labrute, et d’un esprit intelligent et immortel par lequel il est vraiment image et ressemblance divine.»[3] La chair est donc destinée à être abandonnée, oubliée conformément à l’indication del’Ecclésiaste : « Ce qui est tordu ne peut être redressé » (Ecclésiaste I, 15) ; prétendre « spiritualiser» la chair,

~ 13 ~comme le laissent supposer certains, est une erreur, une radicale absurdité, il s’agit bien plutôt

pour Willermoz de se dépouiller de la chair pour accéder à l’esprit.En effet, loin de fonder de naïfs espoirs sur une hypothétique, et bien illusoire, « transmutation du

corps en esprit et de l’esprit en corps », Willermoz soutient qu’il n’y a que rêveries dans cetteillusoire prétention s’appuyant sur des sources parfois extrêmement suspectes étrangères à laRévélation. Il saura revenir, avec intelligence et lucidité, aux leçons de l’Evangile, et insistera pourque soit médité le solennel et rigoureux avertissement de Jésus à Nicodème : « Ce qui est né de lachair est chair ; et ce qui est né de l’Esprit est esprit. » (Jean III, 6). Dans son Traité des deux natures,Willermoz s’explique à ce titre sur l’importance de ne jamais confondre la nature charnelle et lanature spirituelle : « Elles ont chacune leur action propre et distincte, qui, dans bien des cas, opèreséparément. Il est donc bien important pour le vrai chrétien, à qui l’une d’elles est proposée pourmodèle [c.a.d. la nature spirituelle conforme à celle du Divin Réparateur], de ne pas les confondretoujours et d’apprendre à les discerner.» [4]

« Attachez-vous aux choses d’en haut,et non à celles qui sont sur la terre… »Ce discernement est fondamental car la régénération, opérée par la réception et l’ouverture à la

Lumière du Verbe, chez tout homme, ne signifie en aucun cas le changement de l’ancienne naturecharnelle et pécheresse, mais l’introduction d’une nouvelle nature totalement autre ; c’estl’introduction, dans le corps corrompu de par sa constitution ténébreuse, de la vie du Second Adamobtenue par le Saint Esprit, basée sur la bienheureuse Rédemption accomplie par le Christ. La vienouvelle n’annule donc pas le vieil homme, l’ancienne nature demeure toujours et constamment cequ’elle était, sans aucune possibilité d’amélioration : bien au contraire, comme le confirme saintPaul, la renaissance spirituelle révèle plus encore sa noire constitution, car « la chair complotecontre l’Esprit, et l’Esprit contre la chair ; et ces choses sont opposées l’une et l’autre. » (Galates V,17). Nous avons plutôt à nous « dépouiller » du vieil homme ce qui indique qu’il convient de nous endéfaire, de l’oublier sans regrets à son triste sort, de l’abandonner à sa misérable finitude : « Si doncvous êtes ressuscités avec le Christ, cherchez les choses d’en haut, où le Christ est assis à la droitede Dieu. Attachez-vous aux choses d’en haut, et non à celles qui sont sur la terre. Car vous êtes morts,et votre vie est cachée avec le Christ en Dieu. (…) faites mourir ce qui, dans vos membres, estterrestre (…) vous étant dépouillés du vieil homme et de ses oeuvres et ayant revêtu l’homme

nouveau, qui se renouvelle, dans la connaissance, selon l ‘image de celui qui l’a créé. » (ColossiensIII, 1-11).

~ 14 ~« …faites mourir ce qui, dans vos membres, est terrestre (…)vous étant dépouillés du vieil homme et de ses oeuvreset ayant revêtu l’homme nouveau,qui se renouvelle, dans la connaissance,selon l ‘image de celui qui l’a créé. »(Colossiens III, 10-11).La question de la coexistence des deux natures au sein du « nouvel homme » est l’une des plus

délicates et incomprises, et de cette ignorance surgissent toutes les inexactitudes et positions erronéesdans lesquelles tombent les esprits séduits par les discours d’une fausse science ; la régénération, enraison du caractère passif de l’être en punition de l’acte criminel d’Adam, n’est pas l’abolition ou latransformation, voire la « spiritualisation » de la vieille nature, mais bien son abandon : « L’hommeactuel est composé de deux natures différentes, par le lien invisible qui enchaîne son esprit à un corpsde matière. Son esprit étant une émanation du principe divin qui est vie et lumière, il a la vie en luipar sa nature d’essence divine éternelle, quoiqu’il ne puisse produire les fruits de cette vie qui est enlui que par les influences de la source dont il émane. » (Leçon n°88, 7 février 1776).

L’homme est, depuis la Chute, un être divisé, fracturé, déchiré entre sa volonté malade ou fautive,son corps grossiers aux appétits animaux, et la « puissance de la vie divine en lui » ; « cetassemblage inconcevable de deux natures si opposées est cependant aujourd’hui le triste apanage del’homme. Par l’une il fait éclater la grandeur et la noblesse de son origine, par l’autre réduit à lacondition des plus vils animaux il est l’esclave des sensations et des besoins physiques. » (Instructionsecrète) ; c’est cela le sens authentique de l’expression de l’Instruction morale d’Apprenti, à savoir l’« union presque inconcevable » reprenant avec plus de précision « l’assemblage inconcevable » du1er grade, qui est le grand mystère de l’homme. Le Régime Rectifié va donc porter toute sa vigilanteattention sur les moyens susceptibles de nous conduire à la plénitude de notre nature spirituelle par unchemin de retour vers la source originelle de la Lumière.

VI. « Corps de matière » et « Corps de Résurrection »~ 15 ~« C’est Jésus-Christ lui-mêmequi va prouver la différence essentielledes deux formes corporelles et leur destination,en se revêtant de l’une après sa résurrection,après avoir anéanti l’autre dans le tombeau. »J.-B. Willermoz, Traité des deux natures.La clé argumentaire et théorique, expliquant cette position à ce point fidèle du Régime Rectifié

vis-à-vis de l’Evangile, nous est livrée par Jean-Baptiste Willermoz au moment où il nous dévoile lemystère de la Résurrection, nous donnant d’accéder à la pleine compréhension des élémentsexpliquant la place, et le statut de l’homme, ou du « mineur spirituel », dans le plan Divin, ainsi quela composition exacte de son enveloppe corporelle avant et après la Chute : « Quelle est donc lanature de cette nouvelle forme corporelle [celle du Christ après la Résurrection], et qu’est-ce quiconstitue la différence essentielle de celle-ci sur la première ? demanderont ces hommes charnels etmatériels qui ne voient rien que par les yeux de la matière, et ceux qui sont assez malheureux pournier la spiritualité de leur être, et ceux aussi qui, attachés exclusivement au sens littéral des traditionsreligieuses, ne veulent voir dans la forme corporelle de l’homme primitif avant sa chute, qu’un corpsde matière comme celui dont il est actuellement revêtu, en y reconnaissant seulement une matière plusépurée. C’est Jésus-Christ lui-même qui va leur prouver la différence essentielle de ces deux formescorporelles et leur destination, en se revêtant de l’une après sa résurrection, après avoir anéantil’autre dans le tombeau. » [5]

L’exemple donné par Willermoz est très intéressant pour notre sujet, car en effet nous voyons dansles Evangiles que les disciples ont des difficultés pour reconnaître Jésus après sa Résurrection, alorsqu’ils vécurent à ses côtés pendant trois années, ils ont besoin d’un certain temps d’adaptation pouradmettre qu’il s’agit bien de lui. Parfois même, ils le prirent pour une autre personne (Jean XX, 15 ;XXI, 4), ne s’apercevant pas que c’était lui. Tous les textes témoignent donc de l’immense lenteur, del’incertitude, du doute et de la réserve (Matthieu XXVIII, 17) de la part des disciples. On peut doncêtre fondé à affirmer que le Christ, après sa Résurrection, ne possède plus la même apparence, n’estplus identique à ce qu’il était dans son corps de chair. Il n’est d’ailleurs plus contraint par lesdéterminations terrestres, il traverse les portes et les murs (Jean XX, 19; Luc XXIV,36) ; il disparaîtimmédiatement après avoir été reconnu, il semble être devenu insaisissable comme le souffle du vent(Lux XXIV, ,31). Jésus ressuscité est un être différent, un être spirituel ceci nous montrant que laRésurrection ne fut pas la « réanimation » de sa chair, mais l’acquisition d’une apparence qui n’estplus de ce monde, qui n’appartient plus aux lois terrestres.

~ 16 ~« Jésus-Christ dépose dans le tombeaules éléments de la matière,et ressuscite dans une forme glorieusequi n’a plus que l’apparence de la matière,qui n’en conserve pas même les principes élémentaires… »J.-B. Willermoz, Traité des deux natures.De ce fait, Jésus selon Willermoz qui nous a montré comment l’homme avait à se sauver en

plaçant ses pas dans les siens, nous donne l’exemple magnifique de cette oeuvre à accomplir, et c’esten se mettant à son école que nous pourrons recouvrer notre pureté perdue, véritable invitationproposée par le Régime fondé par Jean-Baptiste Willermoz à ses membres, à se fondre

intérieurement dans l’oeuvre « d’imitation » de ce que nous enseigna par son exemple le Christ NotreSeigneur et Maître : « Jésus homme-Dieu voulant se rendre en tout semblable à l’homme actuel, pourpouvoir lui offrir en lui un modèle qu’il pût imiter en tout, s’est soumis à se revêtir en naissant d’uneforme matérielle parfaitement semblable à celle de l’homme puni et dégradé. (…) Jésus-Christdépose dans le tombeau les éléments de la matière, et ressuscite dans une forme glorieuse qui n’aplus que l’apparence de la matière, qui n’en conserve pas même les principes élémentaires, et quin’est plus qu’une enveloppe immatérielle de l’être essentiel qui veut manifester son action spirituelleet la rendre visible aux hommes revêtus de matière. » [6]

Que devons-nous retenir de ce que nous montra Jésus-Christ, après sa Passion sur le bois de laCroix, en se manifestant à ses disciples ? Willermoz l’expose pour notre bénéfique instruction : «Jésus-Christ ressuscité se revêt de cette forme glorieuse chaque fois qu’il veut manifester sa présenceréelle à ses apôtres pour leur faire connaître que c’est de cette même forme, c’est-à-dire d’une formeparfaitement semblable et ayant les mêmes propriétés, dont l’homme était revêtu avant saprévarication ; et pour leur apprendre qu’il doit aspirer à en être revêtu de nouveau après sa parfaiteréconciliation, à la fin des temps.» [7]

~ 17 ~« Semé corps naturel, on ressuscite corps spirituel.S’il y a un corps naturel, il y a aussi un corps spirituel…de même que nous avons porté l’image du terrestre,nous porterons aussi l’image du céleste… »St. Paul, Ire Epître aux Corinthiens, XV.Nous pouvons être convaincus, selon ce que nous enseigne Willermoz, que le corps que nous

aurons à la résurrection ne sera pas matériel mais spirituel, comme ceci est confirmé par saint Paulde manière explicite : « Mais quelqu’un dira : Comment les morts ressuscitent–ils, et avec quel corpsreviennent–ils ? Insensé ! ce que tu sèmes ne reprend pas vie, s’il ne meurt. (…)Semé corruptible, onressuscite incorruptible. Semé méprisable, on ressuscite glorieux. Semé plein de faiblesse, onressuscite plein de force. Semé corps naturel, on ressuscite corps spirituel. S’il y a un corps naturel,il y a aussi un corps spirituel. C’est pourquoi il est écrit : Le premier homme, Adam, devint un êtrevivant. Le dernier Adam est devenu un esprit vivifiant. Le spirituel n’est pas le premier, c’est ce quiest naturel ; ce qui est spirituel vient ensuite. Le premier homme tiré de la terre est terrestre. Ledeuxième homme vient du ciel. Tel est le terrestre, tels sont aussi les terrestres ; et tel est le céleste,tels sont aussi les célestes. Et de même que nous avons porté l’image du terrestre, nous porteronsaussi l’image du céleste. Ce que je dis, frères, c’est que la chair et le sang ne peuvent hériter leroyaume de Dieu, et que la corruption n’hérite pas l’incorruptibilité. » (I Corinthiens, XV 35-54).

VII. L’anéantissement de la matière et de l’univers crééL’homme, avant la prévarication, et nous touchons ici au centre de la doctrine rectifiée, était doté

non d’un corps de matière mais d’un « corps de gloire », et c’est ce corps glorieux perdu de par sa

faute qu’il lui faut retrouver, et non pas travailler, en vain, à « diviniser » ou « spiritualiser » uncorps de matière frappé par la finitude et la limite, triste vestige d’une faute scandaleuse.

~ 18 ~La chair, les corps, la matière, sont destinés à la mort et à l’anéantissement pour Willermoz : « les

corps, la matière, les animaux, l’homme même comme animal, et tout l’univers créé ne peuvent avoirqu’une durée temporelle momentanée. Ainsi donc tous ces êtres matériels., ou doués d’une âmepassive, périront et s’effaceront totalement, n’étant que des produits d’actions secondaires, auquel lePrincipe unique de toute action vivante n’a coopéré que par sa volonté qui en a ordonné les actes(….) comme le Temple matériel élevé par les ordres de Salomon fut détruit dès que la gloire duSeigneur et les vertus qu’il y avait attachées s’en furent retirées, de même aussi le Temple universelcessera lorsque l’action divine en aura retiré ses puissances, et que le terme prescrit pour sa duréesera accompli.» [8]

« L’univers entier s’effacera aussi subitementque la volonté du Créateur se fera entendre ;de manière qu’il n’en resterapas plus de vestige que s’il n’eût jamais existé. »J.-B. Willermoz, Instructions secrètes.Et Willermoz insiste même d’une manière assez forte sur la vocation à la disparition définitive, à

l’anéantissement de l’ensemble de l’univers créé matériel, ceci à l’image de ce qu’il advient pour lescorps particuliers animaux ou humains : « Ce qui est dit des corps particuliers doit s’appliquer demême à l’univers créé ; lorsque le temps prescrit pour sa durée apparente sera accompli, tous lesprincipes de vie, tant générale que particulière, en seront retirés pour se réintégrer dans leur sourced’émanation. Les corps et la matière totale éprouveront une décomposition subite et absolue, pour seréintégrer aussi dans la masse totale des éléments, qui se réintégreront à leur tour dans les principessimples et fondamentaux, comme ceux-ci se réintégreront dans la source primitive secondaire quiavait reçu puissance de les produire hors d’elle-même. Cette réintégration absolue et finale de lamatière et des principes de vie qui soutiennent et entretiennent son apparence, sera aussi prompte quel’a été sa production ; et l’univers entier s’effacera aussi subitement que la volonté du Créateur sefera entendre ; de manière qu’il n’en restera pas plus de vestige que s’il n’eût jamais existé. » [9]

~ 19 ~« Les principes matériels et grossiers,semblables au cadavre de l’homme,restent sur la terre,réduits en cendres inaniméesqui n’ont ni action ni vertus. »J.-B. Willermoz, Instructions secrètes.La dissolution, ce que l’on désigne comme étant « l’apocatastase », n’est pas une crainte mais une

libération, elle n’est pas à redouter mais à espérer, à attendre avec joie, à regarder comme le momentde la naissance à la vraie vie selon l’esprit : « C’est cette dissolution des corps et de la matière engénéral qui est désignée dans le 3ème grade par le cadavre d’Hiram, dont la chair quitte les os.Lorsque les liens qui unissent l’âme passive avec le corps, et l’être spirituel avec l’âme passive,viennent enfin à se détruire, l’âme se réintègre dans sa source particulière. Comme elle a été sansintelligence, elle n’est susceptible ni du bonheur, ni des pâtiments, et rien n’arrête sa réintégration. Lecorps ou le cadavre, à qui la vie était absolument étrangère, reste abandonné à la corruption ; il sedissout, et l’homme a rendu à la terre tout ce qu’il en avait reçu. Dès lors l’esprit, dégagé desentraves de le matière, avec laquelle il ne fut jamais immédiatement uni, se rapproche plus ou moinsde l’une ou de l’autre des deux causes opposées qui se manifestent dans l’univers temporel, selonque, s’étant plus ou moins purifié ou corrompu, il a contracté plus d’affinité avec elles. C’est ainsique finit l’homme terrestre (…) Les principes matériels et grossiers, semblables au cadavre del’homme, restent sur la terre, réduits en cendres inanimées qui n’ont ni action ni vertus. » [10]

Conclusion : du corps glorieux au « Saint-Elément »Voilà les raisons profondes des positions et convictions du Régime Rectifié à l’égard de la

matière et des corps charnels – qui ne sauraient surprendre que les esprits troublés par de brumeusesthéories à l’égard de la forme actuelle de l’homme prévaricateur – et la bienheureuse perspectivequ’il veut remettre en mémoire chez ceux qui suivent sérieusement ses voies, afin qu’ils puissentpénétrer, entièrement, et avec une joyeuse certitude, le sens de cette merveilleuse sentence quebeaucoup n’auront pas de peine à reconnaître puisqu’elle résume, en quelques mots, toute l’essencede la doctrine de la « Réintégration » :

~ 20 ~« Deponens Aliena, Ascendit Unus »Le discours fait au nouveau Maître qui vient de découvrir l’emblème de la perspective

d’immortalité est remarquable : « ….pensez à la mort, puisque vous êtes près de votre tombeau ;pensez-y donc efficacement et ne méprisez pas les avertissements de la nature et de celui qui veillesur vous. On vous a montré le tombeau qui vous attendait et vous y avez vu les tristes restes de celuiqui a vécu. Ce tombeau est l’emblème de la matière universelle, qui doit finir dans son tout commedans ses parties, et à laquelle un nouveau règne, plus lumineux, doit succéder Le mausolée placé àl’occident vous a offert un spectacle plus consolant, en vous apprenant à distinguer ce qui doit pérird’avec ce qui est indestructible, et les maximes que vous avez reçues dans vos voyages vous ontappris ce que doit faire celui qui a eu le bonheur de connaître et de sentir cette distinction. »

Comment donc ne pas penser à cette déclaration positive portant sur le sens du mausolée et de sesinscriptions :

«A quoi fait allusion ce mausolée, avec ces inscriptions ?*A l’immortalité de l’âme, aux principes élémentaires

et à la dissolution de la matière. »Comment, dès lors, ne pas se réjouir de cette perspective ultime, de cette « apocatastase » qui ne

devrait terroriser que les êtres attachés aux tristes vestiges passagers qu’ils ont devant les yeux,retenus par les dérisoires reliquats des biens temporels corruptibles qu’ils prennent, dans leur erreur,pour des trésors merveilleux, alors même que tout ce qui existe, en ce bas-monde, est frappé dedéchéance et est condamné à la dégradation et à la mort ; « en ce jour, dit l’apôtre Pierre, les cieuxpasseront avec fracas, les éléments embrasés se dissoudront, et la terre avec les oeuvres qu’ellerenferme sera consumée. Puisque tout cela est en voie de dissolution… » (2 Pierre III, 10-11).Soyons dans l’allégresse, bien au contraire, à l’idée certaine que viendra, dans sa splendide Lumière,l’Agneau de Dieu, et s’accomplira alors, pour l’ensemble des êtres spirituels régénérés et pour lesélus du Seigneur, les mineurs réconciliés et sanctifiés, une formidable dissolution en forme de «Réintégration » – ou plus exactement une « Intégration en Dieu » – qui les autorisera à être denouveau revêtus de leur corps glorieux en étant intégrés, par grâce, à la « substance lumineuse »originelle, réunis pour l’éternité au sein du « Saint-Élément » pour y demeurer dans leur nature «spirituelle divine ». [11]

~ 21 ~Jean-Baptiste WILLERMOZ :Fondateur du Régime Ecossais RectifiéEditions Signatura, 2012.Notes.1. S. Augustin, De la nature et de la grâce, Ch. XX, in Oeuvres complètes de Saint Augustin, sous

la direction de M. Raulx, t. XVII, Bar-le-Duc 1871.2. A ce sujet, taxer saint Augustin, à qui l’on doit la fécondité de la pensée religieuse occidentale

en divers domaines, et libéra l’Eglise tour à tour du manichéisme, du donatisme, du pélagianisme etde l’arianisme, d’être à la source de multiples « hérésies », et une contrevérité manifeste qui doitautant à l’ignorance qu’à l’intention polémique pour plusieurs raisons conjointes :

– 1°) Tout d’abord les principaux réformateurs au XVIe siècle, Luther et Calvin, qui ne sont enrien « hérétiques » au regard du Credo de Nicée (325), afin de fonder leur doctrine de la justification,s’inspirèrent en premier lieu de saint Paul et de l’Evangile et non de l’auteur des Confessions,quoique qu’ils aient tenu ce dernier en haute estime – leur attitude de rupture schismatique à l’égardde Rome ayant été cependant inspirée, on l’oublie bien trop facilement, par l’exemple des églisesautocéphales orientales dites « orthodoxes », et non par les positions ecclésiales de l’évêqued’Hippone absolument intraitable sur la question de « l’unité de l’épouse de Jésus-Christ » (Cf. DeCivita Dei).

– 2°) Quant à faire porter à saint Augustin la responsabilité du prétendu « jansénisme », ou ce quel’on entend généralement comme tel en utilisant une terminologie contestable pour désigner uncourant qui prit véritablement forme en s’appuyant en France sur un prêtre de grande piété, Jean

Duvergier de Hauranne, abbé de Saint-Cyran (1581-1643), qui exposa une sensibilité spirituelle quifut tout d’abord accueillie avec beaucoup de sympathie par saint Vincent de Paul (+ 1660) puis par lecardinal Pierre de Bérulle (1575-1629), fondateur en 1611 de la « Société de l’oratoire de Jésus »,c’est conférer à Louis XIV une curieuse autorité en matière spirituelle dont il était pourtantentièrement dépourvu.

En effet, s’il n’est pas ici le lieu d’entrer dans les nombreux détails des évènements historiquesqui jalonnent l’épisode dit janséniste, qu’il nous suffise toutefois de signaler que la bulle Unigenitus,que le pape Clément XI accorda finalement de guerre lasse à Louis XIV en septembre 1713 pourcondamner l’oratorien Pasquier Quesnel, se contente simplement de déclarer hérétiques 101propositions extraites

~ 22 ~des Réflexions morales, ouvrage de Quesnel paru en 1692, bulle qui reste d’un absolu silence à

propos d’un imaginaire mouvement qui porterait le nom de « jansénisme » qui n’eût en réalitéd’existence que dans la tête de ses ennemis. Fait paradoxal, le roi qui avait insisté de façon abusivejusqu’à ce que Clément XI exprime une sentence disciplinaire dans la bulle Unigenitus, cettedernière, si elle condamnait les Réflexions morales de Quesnel, affirmait également la prééminencede Rome sur l’Eglise de France et le droit de contrôle total du Saint-Siège sur elle. Il n’est pascertain que ce soit ce que recherchait le gallican Louis XIV qui fut bien puni de son aveuglement et desa haine religieuse.

Ainsi, si est apparu en 1641 le mot « janséniste » pour stigmatiser les disciples de Jansénius, alorsque les amis de Port-Royal se considéraient simplement comme des « amis de la vérité », des «disciples de saint Augustin » qui regardaient la grâce comme seule capable de sauver les créatures depar la faiblesse de notre libre-arbitre et nos tendances pécheresses, l’Histoire démontre que noussommes en fait en présence d’un « hérésie imaginaire », d’un « fantôme » terminologique jamaiscondamné par Rome – le jansénisme n’existant pas puisque ce terme n’est que l’utilisation d’unedénomination polémique dont la signature ténébreuse s’exprimera en 1711 dans l’acte abominable deLouis XIV qui décida, furieux de ne pouvoir soumettre et faire taire les théologiens augustiniens quilui signalaient ses erreurs et critiquaient son absolutisme, de faire raser l’abbaye de Port-Royal enexhumant scandaleusement les corps des religieuses cisterciennes qui reposaient paisiblement dans lecimetière du cloître pour en disperser les ossements et les livrer à l’appétit des chiens errants.

Fort heureusement, la postérité de saint Augustin demeure absolument immense, elle estphilosophique, métaphysique, littéraire et religieuse, et il faudrait citer des milliers de noms pour enfaire état véritablement, retenant simplement ceux de Louis-Isaac Lemaître de Sacy (1613-1684),auteur d’une des plus admirables traductions de la Bible au XVIIe, et, plus proches de nous, LéonBloy (1846-1917), Charles Péguy (1873-1914), Lucien Laberthonnière (1860-1932) MauriceBlondel (1861-1949), Georges Bernanos (1888-1948), François Mauriac (1885-1970), EtienneGilson (1884-1978), Jacques Maritain (1882-1773), Maurice Zundel. (1897-1975) ami de Paul VI, et

jusqu’à Edith Stein, disciple et collaboratrice du philosophe allemand Edmund Husserl, patronne del’Europe, convertie du judaïsme et connue sous son nom religieux de sainte Thérèse-Bénédicte de laCroix (1891-1942), morte en martyre pour sa foi et canonisée par le pape Jean-Paul II le 11 octobre1998.

3. J.-B. Willermoz, Le Traité des deux natures, MS 5940 n°5, Bibliothèque de Lyon.4. Ibid.5. Ibid.6. Ibid.7. Ibid.8.Instructions secrètes des Chevaliers Grands Profès, fonds Georg Kloss, Bibliothèque du Grand

Orient des Pays Bas, à La Haye [1er catalogue, section K, 1, 3].9. Ibid. Cette idée d’un anéantissement général du créé se retrouve dans le discours destiné à

l’instruction du nouvel élu coën qui venait d’être reçu aux trois premiers grades symboliques : «L’esprit pur et simple n’a ni forme, ni figure visible aux yeux de la matière (…) Les hommes, àmesure qu’ils se sont éloignés de leur principe, se sont accoutumés à croire que la matière existaitnécessairement par elle-même et que, par conséquent, elle ne pourrait être détruite totalement. Si telleest votre opinion, c’est un des premiers sacrifices que vous avez à faire pour parvenir auxconnaissances auxquelles vous aspirez. En effet, si vous attribuez à la matière une existence réellequ’elle n’eut jamais, c’est la rendre éternelle comme Dieu ; c’est attaquer l’unité indivisible duCréateur en qui vous admettez d’une part un être spirituel pur et simple, éternel, et un être matériel,éternel comme lui, ce qui est absurde à pense (…)C’est ainsi que cet univers physique de matièreapparente sera aussi promptement réintégré a son premier principe de création, après la durée detemps qui lui est

~ 23 ~fixée, qu’il a été conçu dans l’imagination du Créateur. Apprenez de là, mon frère, le cas que vous

devez faire de cette matière dont les hommes font leur idole, et combien ils s’abusent grossièrementen sacrifiant pour elle tout ce qu’ils ont de plus précieux. » (Cf. Discours d’instruction à un nouveaureçu sur les trois grades d’apprenti, compagnon et maître symboliques, fonds Willermoz, ms. 5919-12).

10. Ibid.11. On retiendra cette remarque de Robert Amadou (+ 2006) : « La matière réintégrée cela

signifie la matière anéantie puisque son principe étant le néant, sa réintégration ne peut se faire quedans le néant c’est-à-dire qu’elle disparaîtra sauf les formes transmuées.» (Robert Amadou, Entretienavec Michel Cazenave, France-Culture, « Les Vivants et les Dieux », 4 mars 2000.)Permalink: https://willermoz.com/2015/12/12/le-regime-ecossais-rectifie-et-la-doctrine-de-la-matiere/

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Régime Écossais Rectifié, foi chrétienne et « dogme » | Le Régime Ecossais Rectifié

Dans sa lettre à Bernard de Türckheim (1752-1831), du 3 février 1783, Jean-BaptisteWillermoz (1730-1824) prévenait solennellement : « Du moment qu’on mêlera la religion à lamaçonnerie (…) on opérera sa ruine… nos discours oratoires deviennent des sermons, bientôtnos Loges deviendront des églises ou des assemblées de piété religieuse (…)Ce danger mon amiqui peut paraître chimérique est bien plus prochain qu’on ne pense, si on n’y met promptementordre.… » [1]

Cette mise en garde, vitale s’il en est, participe également d’une sagesse consécutive à unequestion délicate, soit « l’autorité des dogmes » dans leur rapport à la foi chrétienne au sein duRégime écossais rectifié.

a) Les différentes interprétations du dogmeOn le sait, les trois confessions chrétiennes majoritaires (catholicisme, orthodoxie et réforme),

adhèrent, du moins en principe sachant qu’il subsiste des exceptions, aux affirmations du symbole deNicée-Constantinople (325-381), considéré comme étant « admis par tous » [2].

Le problème provient en réalité des différents types d’herméneutique, qui conduisirent lesthéologiens au cours des siècles, selon les sensibilités, les périodes, les origines et les situations, àdes variantes portant quasiment jusqu’à l’infini, de ce que l’on désigne, selon une formule sans douteun peu rapide et assez réductrice, comme étant la croyance «commune et admise par tous ». En effet,quoi de « commun » entre les analyses des pères alexandrins, des cappadociens, des pères latins, desscolastiques, des mystiques rhénans, des Frères du libre-esprit, des réformateurs, etc., les uns et lesautres ayant une conception très différente de ce qu’il convient d’entendre par la « Règle de la Foi »?

b) Les dogmes voilent la véritéAinsi, apparaissant après les guerres de religion au XVIIIe siècle, tout le courant illuministe avec

Joseph de Maistre (1753-1821), tendit à considérer que le langage dogmatique de l’Église étaitfinalement un obstacle à la transmission vivante de la foi – foi dont Origène (IIIe s.) pensait qu’elledevait porter sur la « connaissance supérieure des mystères » [3] – et « voilait plus qu’il neprotégeait » la Révélation : « Les saintes Écritures : jamais il n’y eut d’idée plus creuse que celled’y chercher les dogmes chrétiens : il n’y a pas une ligne dans ces écrits qui déclare, qui laisseseulement apercevoir le projet d’en faire un code ou une déclaration dogmatique de tous lesarticles de foi. (…) jamais l’Église n’a cherché à écrire ses dogmes; toujours on l’y a forcée. Lafoi, si la sophistique opposition ne l’avait jamais forcée d’écrire, serait mille fois plus angélique :elle pleure sur ces décisions que la révolte lui arracha et qui furent toujours des malheurs….L’état de guerre éleva ces remparts vénérables autour de la vérité : ils la défendent sans doute,

mais ils la cachent. (…) le Christ n’a pas laissé un seul écrità ses Apôtres. Au lieu de livres il leurpromit le Saint-Esprit. ‘‘C’est lui, leur dit-il, qui vous inspirera ce que vous aurez à dire’’ » [4]

Participant de cet état d’esprit, le Régime écossais rectifié, qui est un pur produit del’illuminisme, tout en faisant des déclarations de « profession chrétienne » et n’accueillant en sonsein que des chrétiens, se garda pourtant toujours de définir ce qu’il entendait sous le terme de« chrétien » – exigeant simplement des candidats à l’admission dans ses loges, la croyance en Dieuet en l’immortalité de l’âme, puis, dans son Ordre Intérieur, et après une lente propédeutiqueinitiatique, une reconnaissance de la « triple essence, puissance et action indivisible du Père, duFils et du Saint-Esprit », et une confession que Jésus-Christ est le « Verbe divin ». L’Ordre restecependant absolument silencieux sur les modalités de la vie post mortem, et on peut comprendrepourquoi, puisque certaines Instructions soutiennent des propositions contraires à celles de l’Égliseau sujet de la « résurrection de la chair » [5], se contentant ainsi de faire dire, avec une prudenteréserve, aux chevaliers de la Cité Sainte : « Je crois à la vie future et éternelle, dans laquellechacun recevra suivant qu’il l’aura mérité. » [6]

c) Les loges ne sont point des écoles de théologie Le Régime rectifié, sachant donc ce que les variantes issues des différentes herméneutiques

religieuses avaient produit comme interprétations multiples du Credo au cours des siècles, observaune grande distance à l’égard des « dogmes », au point d’interdire toute discussion à leur sujet : « Nevous livrez point avec vos Frères à de stériles discussions dogmatiques, apprenez-leur à aimer età imiter notre divin Seigneur et Maître Jésus-Christ, notre Rédempteur… » (Instruction destinéeaux Chevaliers Bienfaisants de la Cité Sainte, 1784).

Et cette variante infinie dans les interprétations, dont l’histoire fut si riche et donna lieu à tant deluttes et de combats perpétuels [7], était si bien envisagée et connue par le fondateur du Régimerectifié, qu’elle fit même l’objet d’une sévère mise en garde : « Nos Loges (…) ne sont point desécoles de théologie… ni d’autres objets profanes. D’un autre côté, vula diversité des opinionshumaines dans tous les genres, ces lois ont dû interdire toutes discussions qui pourraient tendre àtroubler la paix, l’union et la concorde fraternelle. En supposant même que le terme final del’institution maçonnique pût donner à ceux qui l’atteignent des lumières suffisantes pour résoudreprécisément les questions et discussions religieuses qui auraient pu s’élever entre les Frères s’illeur était permis de s’y livrer, où serait …le tribunal assez éclairé pour apprécier leurs décisionset les faire respecter ? » (J.-B., Willermoz, Rituel du Grade de Maître Écossais de Saint-André,1809).

Un sage avertissement est d’ailleurs fermement formulé à l’égard d’un ministre de la religion,lorsqu’il est membre de l’Ordre, au moment où il devient Chevalier de la Cité Sainte, afin qu’il netrouble point les assemblées par des querelles théologiques et dogmatiques : « Qu’il tolère avecdouceur tous ceux qui ne diffèrent que dans quelques points de dogme ; que cette tolérance soitréciproque entre toutes les communions chrétiennes, et que leurs ministres apprennent à leurs

troupeaux à vivre dans la paix de Jésus-Christ leur vrai pasteur. » (Cf. Instruction destinée auxChevaliers Bienfaisants de la Cité Sainte, « Devoirs particuliers des Chevaliers ministres de lareligion chrétienne », Rituel des C.B.C.S., 1784).

ConclusionLa sentence, définitive à l’égard de ces sujets dogmatiques et religieux, est donc claire pour le

Régime rectifié : « Ainsi donc, nous le répétons, les lois qui interdisent expressément toutesdiscussions sur ces matières [dogmatiques, théologiques et religieuses], sont infiniment sages etdoivent être rigoureusement observé». (Ibid.).

De la sorte, la seule et unique croyance manifeste, qui n’est ni dogmatique, ni ecclésiale, et quiest encore moins issue d’une quelconque définition conciliaire, réunissant en son sommet lesmembres de l’Ordre – membres qui constituent précisément par cette réunion « l’Église visible etinvisible » – est celle en Jésus-Christ : « Je crois enfin à la Sainte Église universelle etapostolique, visible et invisible, des membresréunis par la foi en notre Seigneur et divin MaîtreJésus-Christ. » [8].

Notes.1. Lettre de Willermoz à Bernard de Türckheim (1752-1831), du 3 février 1783, in Renaissance

Traditionnelle n°35, juillet 1978, p. 179.2. Quelques réserves toutefois, se doivent d’être soulignées, puisque dans le protestantisme

les unitariens ne reconnaissent pas la Trinité, ce à quoi s’ajoute un point par ailleurs, qui est àconsidérer : « Si la Réforme du xvie siècle n’a en effet pas mis en cause les premiers concilesœcuméniques, leur réception effective fait aujourd’hui problème dans certaines Églisesprotestantes, réformées.» (J.-M., Prieur, La Charte œcuménique européenne : Aspectsthéologiques, in Positions luthériennes, vol. 50, no 3, 2002, p. 232). On sait d’ailleurs sur ce point,que certains courants de la Réforme, dont la Société religieuse des Amis ou Quakers, sousl’inspiration de George Fox (1624-1691), Le piétisme fondé par Philipp Jacob Spener (1635-1705), ou encore, les Frères de Plymouth à l’initiative de John Nelson Darby(1800-1882),remarquable traducteur de la Sainte Écriture – courants partageant l’idée d’un sacerdoce universelconduisant à l’absence de clergé et de liturgie – refusent et rejettent par principe toute notion de« dogme », travaillant uniquementà être réunis « autour du Seigneur » entre « frères », dans un espritde pure simplicité évangélique. (Cf. E. G. Léonard, Histoire générale du protestantisme, P.U.F.,1988).

3. Origène (IIIe s.), influencé par Philon d’Alexandrie (Ier s.), considérait que chaque verset del’Écriture possède un sens caché : « L’homme spirituel, qui goûte les choses spirituelles et à quil’Esprit Saint enlève le voile, découvre sous la lettre la nourriture spirituelle de son âme. » (J.Daniélou, Origène, Cerf, 2012, p. 289). Le grand alexandrin affirmait : « C’est autre chose deconnaître Dieu que de croire simplement en Lui ». (Cf. H. Crouzel, Origène et la connaissancemystique, Préface H. de Lubac sj, Desclée de Brouwer, 1961).

4. J. de Maistre, Essai sur le Principe Générateur des constitutions politiques, § 15, P. Russand,Lyon, 1833.

5. La doctrine ultime du Régime rectifié, enseigne une thèse que l’Église condamna constammentdans ses conciles et par ses docteurs, à savoir l’anéantissement du corps matériel charnel – qui réduitl’homme « à la condition des plus vils animaux » (sic) -, produit d’une cause occasionnelle ou« action secondaire » : « L’homme est spirituel et immortel, [c’est] pourquoi les corps, la matière,les animaux, l’homme même comme animal, et tout l’univers créé ne peuvent avoir qu’une duréetemporelle momentanée. Ainsi donc tous ces êtres matériels, ou doués d’une âme passive, périrontet s’effaceront totalement, n’étant que des produits d’actions secondaires, auquel le Principeunique de toute action vivante n’a coopéré que par sa volonté qui en a ordonné les actes. (…)toute forme de matière doit infailliblement se détruire et se décomposer. (…) Les corps et lamatière totale éprouveront une décomposition subite et absolue, pour se réintégrer (…) l’universentier s’effacera aussi subitement que la volonté du Créateur se fera entendre ; de manière qu’iln’en restera pas plus de vestige que s’il n’eût jamais existé.» (Instruction secrète, B.M. Lyon, Ms.5.475).

6. Profession de Foi des Chevaliers Bienfaisants de la Cité Sainte, 1784.7. Cf. Bernard Sesboüé, Histoire des dogmes, Desclée, 1994.8. Profession de Foi, op. cit.

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La doctrine de la réintégration des êtres | Le Régime Ecossais Rectifié

Pour un retour à la pensée d’Origène ou : « La Sainte Doctrine parvenue d’âge en âge par l’Initiation jusqu’à nous » Jean-Marc Vivenza L’idée commune à l’ensemble des penseurs de l’illuminisme est que l’homme, avant d’être incarné

dans la forme qui est la sienne, fut un être purement spirituel ; Adam et Eve avaient certes un corpsavant la faute originelle selon cette vision, mais un corps immatériel, non corruptible, non mortel,bien différent de celui, fragile et soumis à la mort (Romains VII, 24) que nous connaissons, ce quipoussera d’ailleurs le très catholique Joseph de Maistre (1753-1821) à écrire dans ses célèbresSoirées de Saint-Pétersbourg : « l’état de nature est une contre nature » [1].

C’est cette affirmation au sujet de la nature primitive purement spirituelle de l’homme,l’assimilant aux esprits angéliques, qui se trouve placée au sommet doctrinal du système de Jean-Baptiste Willermoz (1730-1824),conception héritéede Martinès de Pasqually (+ 1774) qui insistasur « l’émanation » d’Adam, en la distinguant de la « création » [2] : « Vous ne pourrez en douter,lorsque vous aurez appris, si vous l’ignorez encore, que l’homme appartient par sa propreessence, à la classe des Etres spirituels divins, et que, par la prérogative des Etres pursspirituels, il y a sans cesse entre eux une action et une réaction réciproque de toutes leursfacultés. C’est pour cette raison, qu’avant son crime, l’homme se connaissait lui-même avecévidence, comme il connaissait le Principe Créateur Universel et toutes les créatures qui sontémanées de lui.» [3]

« L’opinion [d’Origène] n’a rien de commun avec le manichéisme.On peut observer qu’elle est encore aujourd’hui la base de toutes les initiations modernes. »(Joseph de Maistre, Mélanges B, p. 302.)

1. Les thèses fondatrices de l’illuminisme

L’illuminisme, qui puise à de multiples sources (kabbale, judéo-christianisme, hermétisme,Rose+Croix, courants mystiques, etc.), affirme donc que c’est en punition de la désobéissance et pournotre honte que nous reçûmes des « vêtements de peau » (Genèse III, 21) dont nos premiers parentsfurent couverts, entraînant, en conséquence tragique de la tentation et de la chute d’Adam et Eve, le

fait que le péché ait atteint ensuite l’ensemble de la famille humaine – et ce entièrement au point defaire « soupirer toute la création » en attente d’une délivrance de notre corps : « Car nous savonsque toute la création ensemble soupire et est en travail jusqu’à maintenant ; et non seulement elle,mais nous–mêmes aussi qui avons les prémices de l’Esprit, nous aussi , nous soupirons en nous–mêmes, attendant l’adoption, la délivrance de notre corps. » (Romains VIII, 22-23).

« Les connaissances ténébreusesqu’il avait acquises par ses oeuvres matériellesI’ayant jeté en privation absolue divine,il prostitua son encens aux plus indignes créatures, et ses facultés s’obscurcirentau point qu’il douta de sa propre existence spirituelle et de celle de tous les agents de l’univers. » (J.-B. Willermoz, Instruction secrète des Chevaliers Profès)

1. a) La Création selon la conception dogmatique de l’Eglise

Ce point est extrêmement problématique, car si Adam a quelque peu, par son péché, « abîmé » soncorps selon l’Eglise en introduisant la mort dans le monde (Romains V, 12), toutefois son corps luifut donné à l’origine parfait, il ne fut pas une sanction consécutive à la désobéissance. Dieu fit aucommencement les choses infiniment bonnes, il n’est pas du tout question, comme chez Martinès, d’unmonde matériel de nature « apparente » dénué de réalité, faux, feint et simulé selon l’Ecriture, maisd’un univers très concret, objectivement et réellement marqué du sceau de l’amour et de la charitédans lequel l’homme, selon la vision hébraïque, avait été créé en sa chair dans des conditionsparfaites, doté de l’immortalité et de l’incorruptibilité ; Adam étant le sommet, le couronnement del’œuvre divine.

Et la doctrine chrétienne professe à ce sujet, tout comme le judaïsme, l’excellence de la créationphysique, cosmique et biologique, insistant sur la perfection originelle primirive de l’existencehumaine corporelle, et conçoit la Création comme un pur don d’amour du Créateur. Selon larévélation hébraïque, selon la pensée de l’Eglise universelle et son enseignement dogmatique, selonla doctrine des Pères et des grands docteurs, en créant le monde matériel, et donc l’homme dans sachair, Dieu a « révélé comme le premier pas de l’alliance avec son Peuple, le premier et universeltémoignage de son amour tout-puissant » (cf. CEC, 288). Ce monde a été voulu et créé bon etparfait, c’est seulement l’introduction du mal, par un abus de la liberté d’Adam, qui le corrompit enl’affaiblissant, et lui conféra une tonalité moindre dans l’ordre de l’être, telle est la conception de laCréation matérielle selon la dogmatique ecclésiale qui repousse toute idée dépréciative à l’égard dela matière, et rejette totalement les systèmes néoplatoniciens, plotiniens, dualistes ou gnostiques, qui

comprennent l’existence du monde comme une dégradation, le résultat d’une chute et la conséquenced’une tragédie. Pour l’Eglise, Adam et Eve en leurs corps primitifs qui étaient de chair, vivaient enamitié avec Dieu au sein du Paradis terrestre, sans effort ni souffrance, et étaient destinés à ne pasconnaître la mort.

Ainsi, l’Eglise et la théologie chrétienne la plus constante, à travers toutes les définitionsdogmatiques acceptées par l‘ensemble des confessions chrétiennes, refusent catégoriquement quel’ordre surnaturel et l’ordre de la Révélation, soient prétendument fondés sur un ordre natureldévalorisé ontologiquement, un ordre qui n’aurait qu’un caractère « apparent », c’est-à-dire irréel,qui serait une illusion, un simulacre, un composé « dépourvu de réalité propre », un « assemblageinstable », une situation existentielle dégradée et souillée provenant de la « densification » d’unenature spirituelle première réalisée, en forme de sanction, par l’action d’essences spirtueusessoumises au contrôle d’esprits inférieurs, formant, par le corps actuel de l’Adam chuté, un « voileopaque » autour d’un corps glorieux conservé intact, mais comme dissimulé en arrière plan dela « matière apparente », constituant, sur ce dit « corps glorieux », un voile caractérisé par un« nombre de décomposition » (sic) qui soulignerait l’aspect « éphémère », « circonstanciel etartificiel de la matière ». Cette position, violemment dénoncée, combattue, repoussée et condamnéeavec la plus grande fermeté par les Pères conciliaires, est celle, entre autres penseurs non-chrétienssoutenant des systèmes philosophiques dualistes, d’un Plotin (205-270), pour lequel le mondematériel est le résultat d’une suite d’émanations successives à partir de l’Un, faisant que plus lesêtres sont loin de la source originelle plus leur statut est inférieur, constitués de matières de plus enplus épaisses et dégradées. Or, bien au contraire, l’Eglise affirme solennellement que l’ordre naturel,qui est celui de la Création matérielle de l’homme, des animaux des végétaux et des minéraux et desastres, est l’œuvre du Verbe « par qui tout a été fait » (Jean I, 1-13), elle rappelle que « Tout a étécréé par Lui et pour Lui » (Colossiens I, 16-17), et que le mystère du Christ est la lumière décisivesur le mystère de la Création. (cf. CEC, 280). En conséquence de quoi, la substance matérielled’Adam en effet, créée juste et parfaite comme le Temple universel à l’origine, n’est pas moins quel’âme destinée à la gloire.

1. b) La thèse martinésienne au sujet de la Création matérielle

Pourtant, en opposition directe avec les affirmations dogmatiques de l’Eglise, Martinès dePasqually, Louis-Claude de Saint-Martin (1743-1803) et Jean-Baptiste Willermoz, n’ont eu decesse d’insister sur le fait que la nature matérielle actuelle dont sont revêtus les fils d’Adam,consécutive à « l’incorporisation de l’homme », est non pas le produit d’un don d’amour, mais lerésultat d’une sanction, la conséquence des œuvres impures et matérielles auxquelles se livra celuiqui possédait auparavant une existence, non pas charnelle matérielle, mais spirituelle, et qui en arriva

à penser, par égarement, que la matière était un principe de l’Univers : « Les connaissancesténébreuses qu’il avait acquises par ses oeuvres matérielles I’ayant jeté en privation absoluedivine, il prostitua son encens aux plus indignes créatures, et ses facultés s’obscurcirent au pointqu’il douta de sa propre existence spirituelle et de celle de tous les agents de l’univers. En effet,dans cet état il restait privé de la perception de ces agents et de tous les rapports directs qu’ilavait auparavant avec eux, car il ne pouvait plus apercevoir que des Etres matériels, divisibles etcomposés. Voilà, mon Cher Frère, ce qui lui fit perdre entièrement l’idée de l’unité et de laperception des Etres spirituels divins, et ce qui le porta enfin à croire que la matière était enmême temps le seul principe de l’Univers, et l’univers même.» [4]

Cet être, selon la pensée de Martinès et dans la logique de sa doctrine si éloignée des définitionsdogmatiques, qui était primitivement uniquement spirituel et immatériel, fut donc emprisonné enpunition de sa faute dans un corps de matière, et se laissa abuser par ses sens en se préoccupant desobjets inférieurs afin « d’augmenter ses jouissances corporelles », au point d’oublier son essencespirituelle initiale : « Vous devez concevoir également la possibilité des ténèbres que répandirentsur l’esprit de l’homme, les faits qu’il opéra contre la loi du Créateur. Car aussitôt que sanségard à son rang glorieux d’être pur spirituel, il eut conçu et exécuté le monstrueux projet de senourrir des fruits matériels, il ne tarda pas, ainsi que les traditions vous font annoncé, à seregarder lui-même comme un être de matière. Dès lors, il ne s’occupa qu’à connaître et à fortifierles rapports qu’il venait d’acquérir avec la nature sensible et inférieure ; il mit toute sa gloire àdécouvrir les facultés apparentes et les propriétés du corps, afin d’augmenter ses jouissancescorporelles ; enfin, il ne reconnut pour vraie science, que la Science physique temporelle, parceque c’était la seule dont il pouvait avoir l’évidence.» [5]

« Aussitôt que sans égard à son rang glorieux d’être pur spirituel,[Adam] eut conçu et exécuté le monstrueux projetde se nourrir des fruits matériels, il ne tarda pas à se regarder lui-même comme un être de matière.Dès lors, il ne s’occupa qu’à connaître et à fortifier les rapports qu’il venait d’acquériravec la nature sensible et inférieure ; il mit toute sa gloire à découvrir les facultés apparenteset les propriétés du corps,afin d’augmenter ses jouissances corporelles… »J.-B. Willermoz, Instruction secrète des Chevaliers Profès.

1. Influence d’Origène sur l’illuminisme chrétien

Willermoz, qui fixera à partir de cette conception la doctrine du Régime rectifié dont il puisa leséléments initiaux chez Martinès de Pasqually [6], mais dont il christianisa profondément l’enseignement lors des leçons de Lyon (1774-1776), leçons lors desquelles furent corrigées laconception trinitaire et la christologie du Traité sur le réintégration des êtres, va faire crédit etadopter en réalité ce qui est une évidence, puisque la théurgie sera écartée de l’Ordre qui affirmerasa foi en la Sainte Trinité et en la double nature du Christ, la pensée hellénistique néoplatonicienne etplotinienne, mais par le biais des thèses d’Origène (+ 252) [7] – ayant dû accéder, ce qui semblefort probable, à l’édition intégrale de ses œuvres effectuée par le moine bénédictin dom de laRue au XVIIIe siècle, édition des Œuvres d’Origène, 1759 (Œuvre complètes en 4. vol., avec notesde l’édition des Origeniana de Pierre-Daniel Huet, 1668, Commentaires grecs et latins d’Origènesur le Nouveau Testament), édition signalée dans les Manuscrits de la Bibliothèque de de Lyon,1812.

Origène soutenait, et l’on constate rapidement la parfaite similarité avec l’enseignementwillermozien : « Les âmes, d’essence divine, préexistaient, elles sont tombées dans des corpsmauvais à cause d’une faute antérieure à la création du monde physique (…) la matérialité est uneconséquence de la Chute. Tous les êtres matériels sont des substances intellectuelles déchues. Lescréatures intellectuelles demeuraient dans un séjour divin, avant de tomber dans les lieuxinférieurs, et, de devenir, d’invisibles qu’elles étaient, visibles. Dès qu’elles furent tombées, elleseurent besoin de corps. C’est pourquoi Dieu leur fit des corps, et créa ce monde matériel etvisible. La matérialisation est une conséquence de la chute, mais, chez Origène, c’est Dieu quicrée la matière à cause de la chute.» [9]

« Dès que les âmes furent tombées,elles eurent besoin de corps.C’est pourquoi Dieu leur fit des corps,et créa ce monde matériel et visible.La matérialisation est une conséquence de la chute..» Origène,Le Traité Sur les Principes (De principiis).

1. La pensée d’Origène

L’œuvre laissée par Origène est extraordinairement riche. Il s’attacha à l’étude approfondie desEcritures et engagea une étude exégétique des principaux livres de la Bible, témoignant d’unchristianisme sortant du contexte palestinien qui s’ouvrait à la culture hellénistique. Dans son œuvreil élabora une synthèse du christianisme et de la philosophie grecque qu’il considérait comme unepréparation, une authentique introduction à l’Evangile. Analysant le texte de l’Ecriture, Origène

mettra en lumière le sens de la formule utilisée par les synoptiques lorsqu’ils évoquent la« fondationdu monde » (Matthieu, 13, 25 ; 25, 34 ; Luc 11, 50), formule reprise ensuite par saint Paul dans sesEpîtres, qui fait référence à une notion de descente, d’évidente dégradation. Les écrivains sacrésemployèrent le terme καταβολή (katabolè), provenant du verbe καταβάλλω (kattaballô),c’est-à-direl’action de « jeter de haut en bas » pour parler de la création du monde matériel, et Origèneconsidérera que cela ne provenait pas d’un contresens de leur part, mais d’une nette volonté de nousindiquer le caractère descendant du geste créateur, alors même qu’il eût été possible, et normal enpareille circonstance, d’utiliser le terme kτίσις (ktisis), signifiant positivement « Création » au sensplénier et originel.

Inutile de rappeler que l’origénisme, en tant que mouvement, bien que défendu âprement parRuffin d’Aquilée (Ve s.), qui traduisit du grec vers le latin le De Principiis (Peri archôn), a étécondamné par le Ve Concile œucuménique de Constantinople II en 553.

Néanmoins, disciple de saint Clément d’Alexandrie (IIe siècle), Origène fut le représentantprincipal de l’école alexandrienne, et sera regardé comme celui dont les idées, malgré les réserves etles censures qui s’attachèrent plus tard à sa pensée, exerceront incontestablement l’influence la plusétendue sur les auteurs chrétiens. Sébastien Le Nain de Tillemont (1637-1698) dira : «Je croisqu’on peut assurer que depuis lui jusqu’à S. Jean Chrysostome, tous ceux qui ont travaillé avecquelque estime sur l’explication des Écritures, ont été ses disciples et n’ont guère dit que ce qu’ilsavaient appris de lui.» [10]

Origène fait reposersur la seule responsabilité de l’homme,sur son péché, sur la faute originelle,et non à cause de la volonté d’un quelconque démiurgeou « puissance hostile » un «principe du mal »,la situation dans laquelle se trouve plongée l’humanité. La pensée d’Origène a été principalement propagée en Orient par Evagre le Pontique (345-400),

Grégoire de Nysse (335-394) et les Cappadociens, puis par saint Maxime le Confesseur (580-662) ; en Occident, c’est surtout grâce à saint Hilaire de Poitiers (+367) que l’on s’ouvrit à lapensée d’Origène. Ce courant origéniste, et Origène lui-même, n’est donc pas « gnostique » [11], ils’en écarte même en ayant combattu les thèses dualistes, et ne participe à aucun titre d’une influencegnostique effective, quoique marqué par les thèses platoniciennes, puisque Origène (comme Martinèsde Pasqually le soulignera de même dans son Traité apparaissant comme un lointain continuateur duthéologien alexandrin sur ce thème [12]), fait reposer sur la seule responsabilité de l’homme, sur sonpéché, sur la faute originelle, et non à cause de la malsaine volonté d’un quelconque démiurge ou

« puissance hostile » un «principe du mal », la situation dans laquelle se trouve plongée l’humanité.[13]

Origène affirmera que la Création est la manifestation concrète d’une descente du haut en directiondu bas, une chute, un mouvement significatif « de superioribus ad inferiora descendum » [14].

Il développera, en de nombreuses pages, sa vision et n’hésitant pas à soutenir, en des expressionsqui préfigurent étrangement les thèses willermoziennes : « Les âmes, à cause de l’excessivedéchéance de leur intelligence, ont été enfermées dans ces corps épais et compacts : c’est pourelles, à qui cela était désormais nécessaire, que ce monde visible a été créé. » [15] Origèneappuiera sa thèse d’une Chute dans la matière dans des corps grossiers et animaux, comme répondantà une faute antérieure, en se fondant sur le récit du troisième chapitre du livre de la Genèse, où il estdit, après l’épisode du péché originel : « Dieu fit à l’homme et à la femme des tuniques de peau. »(Genèse 3, 21).

« Les âmes, à cause de l’excessive déchéance de leur intelligence, ont été enfermées dans ces corps épais et compacts : c’est pour elles, à qui cela était désormais nécessaire,que ce monde visible a été créé. » Origène, De Princip., III, 5, 4, K.

1. Identité doctrinale entre origénisme et le willermozisme

Alors oui Origène, que Willermoz reprend quasiment à la virgule près sur le plan des idées dans

les Instructions secrètes du Régime Ecossais Rectifié, a défendu l’apocatastase et l’éternitéincorporelle des âmes « réintégrées » en Dieu : « Si toutes les créatures, comme nous l’avons déjàdit, doivent un jour être sans corps, tous les corps seront donc détruits et réduits au néant d’où ilsont été tirés; après quoi il viendra un temps où ils seront encore nécessaires. » Il ajoute ensuite :« Mais si ce corps corruptible est revêtu de l’incorruptibilité, et si ce corps mortel est revêtu del’immortalité, comme nous l’avons déjà fait voir et par les lumières de la raison et par (autoritéde l’Ecriture sainte; alors la mort sera absorbée et détruite par une entière victoire, et lacorruption anéantie par l’incorruptibilité ; peut-être même que tous les corps, sur lesquels seulsla mort peut agir, seront entièrement détruits. » Et un peu après : « Si ce que je dis n’est pascontraire à la foi, peut-être serons-nous jour sans corps, ou s’il est vrai que celui qui vitentièrement assujetti à Jésus-Christ n’a point de corps, et que toutes les créatures doivent un jourlui être assujetties, il faut conclure que nous n’aurons point de corps quand nous seronsentièrement assujettis à Jésus-Christ.» [16]

Il dit encore au même endroit, faisant intervenir la puissance de la grâce qui préfigure déjà les

positions de saint Augustin : « Quand toutes les créatures seront assujetties à Dieu, elles sedépouilleront de leur corps et alors tous les corps seront détruits. Que s’il est nécessaire de lesrétablir pour servir aux créatures raisonnables qui seront déchues de leur premier état, ils serontcréés une seconde fois. Car Dieu laisse aux âmes des combats à soutenir et des ennemis à vaincre,pour leur faire comprendre que ce n’est point par leurs propres forces, mais par sa grâce qu’ellespeuvent remporter une pleine et entière victoire: ce qui me fait croire que Dieu ne crée desmondes différents que pour différentes causes; et que ceux-là se trompent qui s’imaginent que tousles mondes seront semblables. Lorsque nous serons arrivés au point de n’être ni chair, ni corps etpeut-être même ni âme non plus; alors notre esprit ayant acquis toute sa perfection , et n’étantplus obscurci par les nuages épais que l’ornent les passions de la matière, verra à découvert etface à face les substances raisonnables et intelligibles.» [17]

« Rien ne nous persuade mieux qu’il n’y aura point de corpsquand toutes choses auront pris fin,que ce que dit le Sauveur dans cette prière : « De même que nous ne sommes qu’un vous et moi,de même que ceux-ci ne soient qu’un en nous. » Car nous devons savoir ce que Dieu estet ce que le Sauveur doit être;en quoi consiste cette ressemblance du Père et du Filsqui est promise aux saints, et comment les saints ne seront qu’undans le Père et le Fils, de même que le Père et le Fils ne sont qu’un. » (Origène, De Princip., III, 5, 4, K). Les analyses des passages de saint Paul, reçoivent exactement la même interprétation de la part

d’Origène, interprétation « incorporelle » mettant en opposition l’ordre de la chair et l’ordre del’esprit, qui sera d’ailleurs reprise à l’identique par Willermoz et Saint-Martin : « Quant auxparoles de l’apôtre saint Paul: Que toutes les créatures seront délivrées de la corruption àlaquelle elles sont assujetties pour participer à la liberté et à la gloire des enfants de Dieu, nousexpliquons ces paroles en disant : que les créatures raisonnables et incorporelles qui tiennent lepremier rang parmi les créatures ne sont point assujetties à la corruption, parce qu’elles n’ontpoint de corps, qui seuls sont sujets à la corruption; mais ces corps en seront délivrés lorsqu’ilsparticiperont à la gloire du Fils de Dieu.» [18]

Il y a même une remarquable identité entre ce que dit Willermoz de la Résurrection du Christ,abandonnant dans la tombe les éléments de la matière préfigurant ce qu’il nous adviendra lors denotre naissance au ciel, et ce qu’écrit Origène : « Rien ne nous persuade mieux qu’il n’y aura pointde corps quand toutes choses auront pris fin, que ce que dit le Sauveur dans cette prière : « Demême que nous ne sommes qu’un vous et moi, de même que ceux-ci ne soient qu’un en nous. » Car

nous devons savoir ce que Dieu est et ce que le Sauveur doit être; en quoi consiste cetteressemblance du Père et du Fils qui est promise aux saints, et comment les saints ne seront qu’undans le Père et le Fils, de même que le Père et le Fils ne sont qu’un. En effet, si la vie quemèneront les saints est entièrement semblable à celle de Dieu, il faut nécessairement ou que Dieuait un corps et soit environné de quelque matière, comme nous sommes environnés de chair; ou, sicela parait indigne de Dieu, particulièrement à ceux qui ont quelque idée de la majesté et de lagloire de cet être incréé et supérieur à tous les êtres, il faut ou que nous perdions toute espérancede ressembler à Dieu, si nous devons avoir des corps; ou que notre vie, si elle participe aubonheur de celle de Dieu, comme on nous le fait espérer, en ait toutes les prérogatives.» [19]

La conclusion d’Origène est on ne peut plus claire : « Puisqu’il y a des choses, comme nousavons déjà dit plusieurs fois, qui commencent par où les autres finissent, on demande si alors il vaura encore des corps, ou si l’on vivra sans corps après qu’ils auront été détruits, et s’il fautcroire que les créatures qui n’ont point de corps mèneront une vie incorporelle, telle que noussavons qu’est celle de Dieu. Si tous les corps que l’apôtre saint Paul appelle « les choses visibles,» appartiennent à ce monde qui tombe sous nos sens, il n’y a point de doute que les créatures quin’ont pas de corps, mèneront une vie incorporelle. Et Dieu sera tout eu toutes choses, de manièreque. toutes les substances corporelles seront changées en celle qui est la meilleure et la plusexcellente de toutes, c’est-à-dire en la substance de Dieu.» [20]

« Si tous les corps que l’apôtre saint Paul appelle « les choses visibles, »appartiennent à ce monde qui tombe sous nos sens,il n’y a point de doute que les créatures qui n’ont pas de corps,mèneront une vie incorporelle.Et Dieu sera tout eu toutes choses,de manière que toutes les substances corporelless eront changées en celle qui est la meilleureet la plus excellente de toutes, c’est-à-dire en la substance de Dieu.» (Origène, De Princip., III, 5, 4, K).

1. Origène est un théologien chrétien

Cette identité de vue, place bien Willermoz dans la continuité d’Origène, dont on peut dire que leRégime Ecossais Rectifié est une sorte de continuité théorique sur le plan initiatique, puisque en faitla doctrine de Pasqually, débarrassée de ses erreurs trinitaires et christologiques – ce qui fut opéréafin de constituer le Régime Ecossais rectifié – en revient, ni plus ni moins, qu’à être de l’origénismesur le plan doctrinal.

Or Origène fut, dans les domaines théologique et exégétique, un chercheur et un penseur très

prolifique, qui eut une influence notable sur plusieurs Pères de l’Eglise qui s’inspirèrent de ses écritscomme, par exemple, saint Grégoire de Naziance (+390) et saint Basile de Césarée (+379). Iln’est pas un « gnostique », mais d’abord et avant tout un théologien chrétien, peut-être à l’origine dumonachisme qui se développa à partir du IVe siècle, et des grands courants de la mystiqueapophatique et dionysienne qui traversèrent la spiritualité de l’Eglise, porteur d’une «gnose» en effet,en son nom authentique, à savoir «une conaissance divine qui illumine l’âme purifiée», selon saintClément d’Alexandrie.

Ὠριγένης Αλεξάνδρεια C’est en s’inscrivant dans cette tendance à la redécouverte d’Origène entreprise par les

théologiens au XXe siècle, que le cardinal Jean Daniélou (1905-1974) montra, dès 1948,qu’Origène était un « grand spirituel chrétien » en soulignant l’influence qu’il exerça sur l’histoire dela mystique [21]. Origène est donc une des grandes figures de l’histoire de l’Eglise. Alors ouiOrigène, que Willermoz reprend quasiment à la virgule près sur le plan des idées dans lesInstructions secrètes du Régime Ecossais Rectifié, a défendu l’apocatastase et l’éternitéincorporelle des âmes « réintégrées » en Dieu.

Dès lors, pourquoi donc exercer, d’autant pour les maçons du Régime Ecossais rectifié qui saventWillermoz imprégné d’origénisme qu’il regarde comme l’enseignement le plus abouti de la saintereligion chrétienne le plaçant au cœur de son système, un tel rejet des thèses d’Origène surl’apocatastase, alors que cette même doctrine, absolument identique, formulée en des termessemblables et aboutissant quasiment aux mêmes conclusions, n’a jamais été condamnée chez saintGrégoire de Nysse ? Mystère, et mystère d’autant plus grand que nul tribunal ecclésiastique officielayant autorité, ne fait reproche à personne pour l’instant, notamment à l’égard de théologienscontemporains, pour beaucoup d’éminents ministres de l’Eglise, d’adhérer aux thèses d’Origène…oude saint Grégoire de Nysse ! [22]

ConclusionLe Haut et saint Ordre a pour fonctionde conserver dans sa pureté l’héritage doctrinal,d’en faire connaître les fondements et d’en approfondir le sens,afin que les travaux qui s’effectuenten relation avec la doctrine dont il a la garde,soient authentiquement fidèles à l’enseignement dispensé d’âge en âge,désigné sous le nom de « connaissances sublimes ». Encore une fois, la doctrine de la réintégration possède ses critères singuliers, ses lois, ses

principes ; elle soutient des vérités qui sont intrinsèquement liées entre elles et ne peuvent faire

l’objet d’une volonté de modification sans détruire, en réalité, la nature même de la dite doctrine, etla modifier au point de rendre incompréhensibles certaines de ses affirmations – en particulier cellesuscitant tant d’interrogations et d’émois car heurtant de plein fouet la dogmatique ecclésiale, portantsur la destination à l’anéantissement des formes matérielles qui doivent être dissipées « aussipromptement » qu’elles ont été formées, ce qui pourtant rejoint l’affirmation même de l’Ecriture : «En ce jour, les cieux passeront avec fracas, les éléments embrasés se dissoudront, et la terreavec les œuvres qu’elle renfermra consumée. Puisque tout cela est en voie de dissolution… » (2Pierre 3, 10-11).

Il convient donc de conserver à l’esprit que l’initiation léguée par Martinès de Pasqually, et quele Régime rectifié en tant que dépositaire de la doctrine de la réintégration qu’il contribua à sauver etpréserver de par la volonté même de Jean-Baptiste Willermoz, est indissociablement unie, en tant quebase théorique essentielle, au Haut et Saint Ordre des élus de l’Eternel. Et ce saint Ordre a pourfonction, précisément, de conserver dans sa pureté l’héritage doctrinal, d’en faire connaître lesfondements et d’en approfondir le sens, afin que les travaux qui s’effectuent en relation avec ladoctrine dont il a la garde, soient authentiquement fidèles à l’enseignement dispensé d’âge en âge,désigné sous le nom de « connaissances sublimes ». Mais l’indication essentielle de Willermoz estcelle-ci : « Les Loges qui reçurent [l’initiation parfaite] conservèrent jusqu’au VIe siècle cesprécieuses connaissances, et le refroidissement de la foi annonce assez qu’à cette époque lesouvenir s’en est affaibli, et que ce qu’ilrestait d’initiés seretirèrent dans lesecret. Mais aussiondoit croire que cesconnaissances se sont perpétuées sans interruption pendanttous les sièclesdumonde car tous lesouvrages que Dieu acréés demeurent àperpétuité et nous nepouvons rien ôteràtout ce que Dieu afait. Ce qui a été estencore, ce qui doitêtre a déjà été, et Dieurappelle lepassé. » [23]

Jusqu’au VIe siècle ?Cette affirmation curieuse qui fit poser tant de questions et plongea de nombreux lecteurs de

Willermoz dans d’insolubles énigmes, ne devrait pourtant ne plus être de nature à nous étonner àprésent, car que s’est-il passé dans l’histoire du christianisme pour que le fondateur du Régimerectifié revienne sans cesse sur ces « connaissances sublimes » qui se seraient perdues, ou devenuessecrètes, en raison d’un « refroidissement » ou d’un « affaiblissement » de la foi au VIe siècle ?

La réponse est évidente. En plein milieu du VIe siècle, exactement en 553, les thèses d’Origèneont été condamnées par l’Eglise lors du concile de Constantinople II. Or, ces « connaissancessublimes », qui ne sont autres qu’un développement magnifique et argumenté de pensée origéniste quielle-même se pensait comme une vive lumière projetée sur la Révélation, une gnose, un témoignagedu « sens spirituel » de l’Ecriture selon la « règle l’Eglise céleste », sont au cœur des voies issuesde la doctrine délivrée par Martinès de Pasqually au XVIIIe siècle et se retrouvent, tant sous laplume de Louis-Claude de Saint-Martin, formant de ce fait la base des enseignements dispensésdans les cénacles saint-martinistes, que dans le conservatoire providentiel du Haut et Saint Ordre que

représente le Régime rectifié.Voilà pourquoi Willermoz qui considérait que le christianisme avait été à l’origine une initiation

conduisant à la connaissance des mystères de l’invisible, et dont la doctrine qu’il « infusa » au seindu Régime rectifié soutient la nature immatérielle d’Adam avant la Chute, le caractère ténébreux dela matière, l’apocatastase et l’éternité incorporelle des âmes « réintégrées » en Dieu, put déclareravec une assurance qui devrait être regardée avec un infini respect et une révérence quasi religieuse :« La doctrine des Grands Profès […] n’est point un système hasardé arrangé comme tant d’autressuivant des opinions humaines ; elle remonte…jusqu’à Moïse qui la connut dans toute sa pure etfut choisi par Dieu pour la faire connaître au petit nombre des initiés, qui furent les principauxchefs des grandes familles du Peuple élu, auxquels il reçut ordre de la transmettre pour enperpétuer la connaissance dans toute sa vérité… Les Instructions sont un extrait fidèle de cetteSainte Doctrine parvenue d’âge en âge par l’Initiation jusqu’à nous» [24].

« La doctrine des Grands Profès […] n’est point un système hasardéarrangé comme tant d’autres suivant des opinions humaines ;elle remonte…jusqu’à Moïse qui la connut dans toute sa puretéet fut choisi par Dieu pour la faire connaître au petit nombre des initiés,qui furent les principaux chefs des grandes familles du Peuple élu,auxquels il reçut ordre de la transmettrepour en perpétuer la connaissance dans toute sa vérité…Les Instructions sont un extrait fidèle de cette Sainte Doctrineparvenue d’âge en âge par l’Initiation jusqu’à nous»– J.-B. Willermoz, Statuts et Règlement de l’Ordre des Grands Profès, Ms 5.475, BM Lyon – La Sainte Doctrine parvenue d’âge en âge par l’Initiation jusqu’à nous, c’est celle qui provient de

l’interprétation spirituelle de l’Ecriture, qui n’en reste pas au niveau de la lecture littérale oudogmatique – de ces dogmes qui protègent, mais également « voilent » et « cachent » selon Josephde Maistre – celle qui fait accéder à l’essence véritable du texte, qui traverse l’écorce pouratteindre le noyau, qui laisse apparaître la fine perle sublime de la Vérité : « De même des saintesÉcritures : jamais il n’y eut d’idée plus creuse que celle d’y chercher la totalité des dogmes chrétiens: il n’y a pas une ligne dans ces écrits qui déclare, qui laisse seulement apercevoir le projet d’enfaire un code ou une déclaration dogmatique de tous les articles de foi. (…) jamais l’Église n’acherché à écrire ses dogmes; toujours on l’y a forcée. La foi, si la sophistique opposition ne l’avaitjamais forcée d’écrire, serait -mille fois plus angélique : elle pleure sur ces décisions que la révoltelui arracha et qui furent toujours des malheurs, puisqu’elles supposent toutes le doute oul’attaque, et qu’elles ne purent naître qu’au milieu des commotions les plus dangereuses. L’état de

guerre éleva ces remparts vénérables autour de la vérité : ils la défendent sans doute, mais ils lacachent : ils la rendent inattaquable, mais par là même moins accessible. Ah ! ce n’est pas ce qu’elledemande, elle qui voudrait serrer le genre humain dans ses bras. (…) le Christ n’a pas laissé un seulécrit « à ses Apôtres. Au lieu de livres il leur « promit le Saint-Esprit. ‘‘C’est lui, leur dit-il, quivous inspirera ce que vous aurez à dire’’ » [25]

Lire :Editions La Pierre Philosophale, 232 pages.Pour consulter le sommaire :« La doctrine de la réintégration des êtres » Notes

1. J. de Maistre, Œuvres Complètes, t. VII, Librairie Emmanuel Vitte, 1854, p. 526.2. Emanation et Création chez Martinès de Pasqually :

Pour se confronter à une conception métaphysique, théologique ou théogonique de la Création, encorefaut-il en comprendre la logique interne, en posséder les concepts pour les utiliser correctement et,surtout, ce point est essentiel, en avoir apprivoisé sérieusement le vocabulaire et les élémentsthéoriques. Faute de quoi, on tombe fatalement, en se risquant à des propositions imaginaires animéespar un zèle missionnaire pouvant porter jusqu’aux visions illusoires – et parfois à quelqueségarements excessifs générés sans doute par ces trompeuses illusions qui produisent à l’occasiond’étranges fièvres irrationnelles – dans la littérature fantasmée, la romance subjective et la fabulationpersonnelle, en s’éloignant entièrement de l’exercice de la pensée analytique précise qui s’impose ences sujets. On peut, bien évidemment, raconter des tas de choses avec le sentiment de la vérité,sentiment naïf un rien touchant, qui pourtant cumule souvent les erreurs manifestes et les contresensvariés, tout en conjuguant l’inexactitude avec la méprise radicale conduisant directement à laformulation d’absurdités, dont on s’étonnera de les voir régulièrement proférées avec la conviction,qui n’est pas sans faire sourire, de la béate certitude.

1. a) Différence entre émanation et Création

L’une des plus répandues, parmi les absurdités évoquées portant sur l’œuvre divine dans la doctrinede Martinès, consiste à confondre à l’intérieur de l’action du Créateur deux processus pourtant trèsdistincts et absolument différents : l’émanation et la Création. L’émanation – qui n’est pascomplètement exempte de nécessité puisque Dieu « émane » dans la conception de Martinès,

contrairement au récit biblique et à la position dogmatique de l’Eglise, ni uniquement par « charité »,ni pour faire participer ses créatures de son amour infini, mais pour avoir simplement des « témoins »de sa gloire, ce qui limite considérablement la perspective ontologique de l’intention de l’Etreéternel – relève d’une action bien particulière très différente de la Création. On peut de ce fait gloserpendant de longs développements sur la notion de « gloire », et le sujet ne manque pas d’intérêt, maiscet exercice est cependant d’une aide plus que réduite pour la compréhension du problème qui nousoccupe, soit celui de la Création contrainte du monde matériel selon la doctrine de Martinès et ledéveloppement de l’histoire divine telle que présentée dans son Traité. Or, pour comprendre quel estle sens de la Création matérielle, il faut se pencher attentivement, non seulement sur ce quidifférencie émanation et Création sur le plan ontologique, mais sur ce qui suivit l’émanation desesprits, car après l’émanation on assiste dans le récit de Martinès, à un évènement dramatique : lavolonté des esprits célestes d’égaler Dieu dans sa puissance créatrice. En effet ces êtres émanésvoulurent se rendre semblables à Dieu en générant des créatures spirituelles En conséquence de quoil’univers matériel fut créé, et c’est là le point central de la conception martinésienne, de façoncontrainte pour devenir le lieu fixe dans lequel seront emprisonnés les esprits pervers : « A peine cesdémons, ou esprits pervers, eurent conçu d’opérer leur volonté d’émanation semblable à cellequ’avait opérée le Créateur, ils furent précipités dans des lieux de ténèbres, pour une duréeimmense de temps, par la volonté immuable du Créateur.» (Traité, 15). Cette Création matériellede l’univers physique, lieu de « ténèbres », de « sujétion » et de « misère impure », se différencieainsi considérablement de l’émanation et de la génération des esprits. On n’est plus du tout, maisalors vraiment plus, dans le même cadre, on entre, du point de vue chronologique et métaphysique,dans le domaine de la sanction, de la privation, de l’exil et de la corruption, en quittant la région durayonnement de la « gloire ». C’est pourquoi, pour éviter une confusion dont les conséquencesseraient redoutables, visant à conférer à cet univers physique matériel les qualités ou les motifs del’immensité divine en s’attachant aux formes terrestres vouées à la dissolution et l’anéantissement eten leur accordant une dignité et une destination qu’elles n’ont pas, Martinès met fermement en gardeson lecteur : « Gardez vous, prévient-il, de confondre la création avec l’émanation ! La créationn’appartient qu’à la matière apparente, qui, n’étant provenue de rien si ce n’est de l’imaginationdivine, doit rentrer dans le néant, mais l’émanation appartient aux êtres spirituels qui sont réelset impérissables. » (Traité, 138).

Il n’existe donc nulle possibilité d’établir un lien d’équivalence, ou de similitude, ni dansl’intention, ni dans l’exécution, entre l’émanation et la Création qui ne participent pas du tout dumême processus mais relèvent de deux actions entièrement différentes, faisant qu’il n’y a pas une« double création » chez Martinès, proposition qui n’a strictement aucun sens, mais deux actionsjustifiées par deux causes extrêmement dissemblables. L’une est « l’émanation » pour la gloire del’Eternel, l’autre la « Création » en punition de la prévarication. Et de l’une à l’autre il n’existe aucunrapport possible de comparaison ou d’équivalence, car elles portent sur des domaines

essentiellement et substantiellement différents de par leur mode d’apparition à l’existence : « Leseaux qui se sont élevées jusqu’aux portes du firmament et qui ont dérobé toute la nature à vosyeux vous représentent le néant où était la nature universelle avant que le Créateur eût conçu,dans son imagination, d’opérer la création, tant spirituelle que temporelle. Il vous fait voirclairement que tout être temporel vient immédiatement par l’ordre de sa pensée et de sa volonté etque tout être spirituel divin vient directement de son émanation éternelle.» (Traité, 138); «…aucun être ne peut se revêtir de la substance d’une forme apparente, sans qu’elle ne soitcomposée de ces trois principes. » (Traité, 230), ceci montrant bien que pour être apparentes, lesformes matérielles ne sont pas pour autant dépourvues de substance, loin de là même, puisque cettesubstance est composée de trois principes, soit d’une loi ternaire déterminée par une force decorruption, de dissolution et d’anéantissement, loi imposée en punition d’une « opération impure etmauvaise » (Traité, 30) !

Et la distinction entre émanation et création porte bien sur une différence substantielle commel’explique Martinès : « Vous savez que le nombre ternaire est donné à la terre, ou à la formegénérale, et aux formes corporelles de ses habitants, de même qu’aux formes des habitantscélestes. Ce nombre ternaire provient des trois substances qui composent toutes les formesquelconques et que nous nommons principes spiritueux, soufre, sel et mercure, comme émanantde l’imagination et de l’intention du Créateur. Ces trois principes ayant été produits dans un étatd’indifférence, l’axe central les a disposés et les a opérés pour leur faire prendre une forme et uneconsistance plus consolidée, et c’est de cette opération de l’axe central queproviennent toutes lesformes corporelles, de même que celles dont les esprits pervers devaient se revêtir pour leurplus grande sujétion. C’est aussi, par conséquent, de ces mêmes substances qu’étaientcomposées les formes corporelles de Kaïn et de ses deux sœurs, dont nous expliquonsmaintenant le type. » (Traité, 73).

Retenons donc qu’à l’évidence il n’y a, non pas « deux créations » pour Martinès, mais une« émanation glorieuse », puis une « création matérielle » produite par un changement de la formeglorieuse en une forme de matière substantiellement impure, dite apparente puisque créée en punitionde la prévarication ; et telle est la distinction extrêmement importante à ne jamais oublier sous peinede tomber dans des erreurs grossières. Cette vérité est au cœur central de la thèse martinésienne.

1. b) Distinction fondamentale entre l’émanation « quaternaire » et la Création « ternaire »

Et cette vérité se distingue en fonction de l’essence divine elle-même, qui est « triple » relativement àla création, et « quatriple » relativement à l’émanation. Tout ce qui touche à l’émanation d’Adamest régi par le quaternaire, tout ce qui touche à la création matérielle relève du ternaire : « Lesesprits pervers sont assujettis aux mineurs, ayant dégénéré de leur puissance supérieure par leurprévarication. Les bons esprits sont également assujettis à l’homme par la puissance quaternaire,

4, qu’il reçut avec son émanation. Cette puissance universelle de l’homme est annoncée par laparole du Créateur, qui lui dit : “J’ai tout créé pour toi, tu n’as qu’à commander pour être obéi.” »(Traité, 16).

Ce qui est émané relève du quaternaire, ce qui est créé relève du ternaire : « ce fameux nombreternaire de création de toute forme quelconque… » (Traité, 48), et ce ternaire préside à toute lacréation matérielle : « les trois essences spiritueuses qui composent les différentes formescorporelles de matière apparente, tant celles de l’être raisonnable que celles de l’êtreirraisonnable. Joignez ces deux nombres ternaires vous verrez, par leur produit sénaire, lenombre de création divine, ou les six pensées du Créateur pour la création universelle, générale etparticulière. » (Traité, 60). La distinction fondatrice, qui distingue substantiellement émanation etcréation, est résumée ainsi par Martinès : « Le nombre ternaire apprendra à connaître l’unitéternaire des essences spiritueuses dont le Créateur s’est servi pour la création des différentesformes matérielles apparentes, et le nombre quaternaire nous apprend à connaître le nombrespirituel divin dont le Créateur s’est servi pour l’émanation spirituelle de tout être spirituel devie, qui sont les esprits majeurs, vivant qui est donné au Christ et de privation qui sont les démonset les mineurs qui sont tombés sous leur puissance. » (Traité, 64).

La distinction entre « quaternaire » et « ternaire » est donc essentielle et fondamentale pourcomprendre la différence ontologique qui sépare émanation et création, l’oublier participe d’uneincompréhension profonde, absolue et radicale de ce qui fonde, et ce sur quoi repose, toute ladoctrine de la réintégration :

3. Nombre appartenant à la terre ou à l’homme4. Quatriple essence divine.5. Démoniaque appartenant à la matière. (Traité, 66).

La barrière entre l’émanation et la création est donc infranchissable, elle sépare deux mondes, deuxdomaines antithétiques, dissemblables, irréconciliables et totalement étrangers l’un à l’autre, enraison de la pureté immatérielle de ce qui se rapporte à la divinité pour le premier domaine desesprits émanés, de l’impureté ténébreuse de ce qui appartient à la matière apparente pour les formescréées de ténébreuses .

1. c) L’apparence désigne le composé matériel créé irréel, mais en tant que fruit d’une« opération impure et d’une volonté mauvaise»

Il est d’ailleurs intéressant de se pencher un instant sur la notion « d’apparence » – sachant lecaractère démoniaque de tout ce qui est de l’ordre de la matière pour Martinès -, et dont on voudraitfaire une utilisation de ce terme « d’apparent » avec pour finalité de minorer l’aspect foncièrementimpur du composé matériel, apparence qui n’est pas uniquement synonyme de fantasmatique ou de

purement illusoire, de non concret, bien que cette idée soit effectivement présente chez Martinès,montrant une nette influence platonicienne en reprenant l’attribution de l’apparence, par unedistinction qui est à la fois ontologique et épistémologique puisqu’elle se rapporte à divers degrésd’être, à des réalités appelées « formes » ou « idées » qui sont des « archétypes » conçus idéalement,dans le monde de l’esprit, et dont sont issues, par dégradation et éloignement les choses du mondesensible, néoplatonisme aisément décelable teinté de kabbale dont on sait les profondes tendancesacosmiques qui possèdent des traces évidentes de dualisme et de gnosticisme regardant la Création,et surtout la matière, comme un rêve, une illusion qui doit s’évanouir pour retourner à l’Un à l’Absolu., position très voisines de la thèse védântine par excellence, mais dont Isaac Louira(+1572) poussera assez loin la problématique, notamment celle du chevirat hakelim (réparation dela fracture) dans son Sefer haGilulim.

Par delà le fait que soutenir que l’homme fut revêtu, par dégénérescence, d’une « matièreapparente » en conséquence « funeste » de la chute, comme un accident affecterait une substancepremière qu’il recouvrirait, tel un « vêtement épais », en la « densifiant » – proposition transpirantles classiques thématiques dualistes et gnostiques radicalement insoutenable pour l’Eglise – essayeren parallèle de s’appuyer vainement, en désespoir de cause, sur « l’apparence » pour tenterd’acclimater le système de Martinès avec les positions ecclésiales, relève comme toujours de vuesprofondément chimériques renforçant plus encore l’incohérence d’une position cherchantd’impossibles conciliations dogmatiques, alors qu’il serait bien plus raisonnable et singulièrementplus honnête d’admettre les difficultés et de les assumer ou de s’en écarter en s’éloignant de thèsesobjectivement non solubles dans l’eau des déclarations conciliaires, ce qui ne peut qu’aboutirinévitablement à une impasse catégorique, stérile et inutile.

En effet, l’Eglise soutient que loin d’avoir conçu un monde de matière « apparente », c’est-à-direun monde qui serait « faux, feint et simulé » (sic), Dieu a posé dans l’existence, a porté à l’être et àla réalité, le monde de la création, l’univers créé, comme étant un signe de sa propre manifestation, etc’est même, comme le soulignent tous les Pères, sa première manifestation pour que nousconnaissions Dieu à partir, précisément des œuvres créées qui nous donnent une connaissancecertaine du Créateur. Nul caractère « apparent » dans la Création ! Le livre de la nature matérielle estle seul livre écrit de la main de Dieu Lui-même, il n’est pas – proposition qui serait regardée commesaugrenue par n’importe quel théologien, une « apparence » (sic), y compris si l’on se tortille pourdire que cette apparence n’en est pas vraiment une, car elle n’est qu’une conséquence de la Chute.Car la Chute précisément selon l’Ecriture, a introduit un affaiblissement dans le monde matériel en yfaisant entrer la mort, mais ne l’a pas rendu « apparent », elle ne l’a pas fait passer de la réalité à lasimulation, de l’authenticité à la feinte, de l’objectivité à l’illusion ou à la fausseté. Ce mondematériel est tout à fait réel, concret et bon pour l’Eglise, le corps charnel de l’homme n’est en aucuncas une illusion, et surtout, il ne « souille » pas le corps glorieux en « altérant sa forme » (sic) !

La Création, même après la Chute, à partir des œuvres de Dieu – à partir de ses poèmes, « ta

poiêmata », comme dit Paul – nous révèle Dieu Lui-même au point que l’apôtre dit que les païenssont inexcusables de ne pas avoir connu Dieu comme Créateur : « Ils sont donc inexcusables,puisque, ayant connu Dieu, ils ne l’ont pas glorifié comme Dieu et ne lui ont pas rendu grâces ;mais ils se sont égarés dans de vains raisonnements, et leur cœur sans intelligence a été plongédans les ténèbres. Se vantant d’être sages, ils sont devenus fous ; et ils ont remplacé la gloire duDieu incorruptible par des images représentant l’homme corruptible, des oiseaux, desquadrupèdes et des reptiles (…) eux qui ont remplacé la vérité de Dieu par le mensonge et qui ontadoré et servi la créature au lieu du Créateur, qui est béni éternellement. » (Romains I, 19-25). Sicette Création matérielle avait été « apparente » suite au péché d’Adam, alors ce sont les païens, n’yvoyant pas la main de Dieu mais celle des esprits inférieurs actionnant les essences spiritueuses del’axe feu central, qui auraient eu raison contre saint Paul !

Mais, ce qui renforce plus encore l’éloignement par rapport aux positions ecclésiales, c’est que cequi est dit « apparent » ne signifie pas seulement inexistant ou irréel dans la langue de Martinès,même si ce sens est tout à fait exact, mais « créé », et en ce qui concerne la matière, créée de façonimparfaite, impure et souillée « puisqu’elle est le fruit de l’opération d’une volonté mauvaise »(Traité, 30). Le fait que la matière soit un mal, n’est lié à aucune notion « dualiste » qui la feraitcoéternelle à Dieu, ce qui est une nouvelle erreur consécutive à une grave confusion entre les notionsde temporalité et de substance, mais parce qu’elle participe d’une « opération impure et d’unevolonté mauvaise », lui conférant un caractère ténébreux et mortifère, qui plus est produite par desesprits inférieurs agissant sur ordre du Créateur pour former les corps à partir des trois essencesspiritueuses : « les esprits inférieurs, ayant reçu l’ordre du Créateur pour la construction del’univers, ainsi que l’image de la forme apparente qu’il devait avoir, produisirent d’eux-mêmesles trois essences fondamentales de tous les corps, avec lesquels ils formèrent le temple universel(…) des esprits inférieurs producteurs des trois essences spiritueuses d’où sont provenues toutesles formes corporelles » (Traité, 256).

A ce sujet le Dictionnaire Universel Français et Latin, imprimé à Trévoux (1704-1771), qu’ilest bon de consulter en effet si tant est qu’on veuille bien le lire, et surtout le citer correctement,donne de nombreuses acceptions au terme « Apparence ». Dans un premier sens, sous sa formenominale féminine, en effet est dit relevant de l’apparence «La surface des choses, ce qui d’abordfrappe les yeux (…). Se dit aussi de ce qui est opposé à la réalité, qui est faux, feint et simulé (…).Reste, marque, vestige, trace de quelque chose » (Trévoux, t. I, 1771, p. 485). Mais la définition estla suivante pour la forme adjectivale : « Apparent, ente, adj., 1. Ce qui est visible, certain,évident, dont on ne peut douter (…)….2. Se dit de ce qui n’est que vraisemblable (…) 3. Se ditaussi de ce qui est faux, qui paraît d’une façon et qui est de l’autre. » (Ibid., p. 486). Onremarque donc un léger glissement sémantique, faisant que l’apparence peut désigner de troismanières une même réalité, mais dans les trois acceptions adjectivales, la question de la nature decette apparence et la sa raison n’est pas abordée. Or, ce qui nous intéresse au premier chef, Martinès

répond à cette question et nous indique que cette nature se rapporte à son caractère impur, « fruitd’une opération ténébreuse » et d’une « volonté mauvaise », par ailleurs produite par les espritsinférieurs pour y insérer les démons puis Adam. Et cette nature démoniaque ténébreuse n’est pas enrapport avec son apparence – qui relève du mode de conception par création et non par émanation –mais avec sa substance, qui elle est un produit, le résultat d’une « opération impure et d’unevolonté mauvaise » (Traité, 30).

Nous sommes donc, dans le cadre de la matière apparente, face à deux domaines différents qui seconjuguent et renforcent deux caractères eux-mêmes tout à fait distincts et opposés :

1. L’émanation et la création /(réalité impérissable / forme apparente).2. Formes glorieuse et matière impure / (volonté divine / opération mauvaise).

« Apparent » signale donc des formes matérielles créées, c’est-à-dire des causes secondes quidépendent dans leur être de la pensée du Créateur : « Cette forme glorieuse n’est autre chosequ’une forme de figure apparente, que l’esprit conçoit et enfante selon son besoin et selon lesordres qu’il reçoit du Créateur.» (Traité, 47), mais des formes qui pour être dénuées de réalitévéritable sur le plan des êtres émanés – le seul réel pour Martinès -, n’en sont pas moinssubstantiellement impures et mauvaises. Les formes apparentes dans le vocabulaire martinésien, sontainsi des formes matérielles irréelles, fausses et mensongères, qui relèvent d’une finitude, d’unelimite, témoignant d’une carence ontologique, mais qui sont également souillées, impures etténébreuses, en raison de leur caractère passif et de leur origine : « L’homme porte sur sa forme lafigure réelle de la forme apparente qui apparut à l’imagination du Créateur et qui fut ensuiteopérée par des ouvriers spirituels divins et mise en substance de matière apparente solide passive,pour la formation du temple universel, général et particulier. » (Traité, 79). Voilà pourquoi lacarence ontologique dont est frappée la chair d’Adam, son enveloppe matérielle ténébreuse, estdestinée à l’anéantissement précisément à cause de son caractère « apparent », ce qui veut direqu’elle est destinée à la finitude et vouée à la dissolution contrairement aux être émanésimpérissables car immatériels : « La création n’appartient qu’à la matière apparente, qui, n’étantprovenue de rien si ce n’est de l’imagination divine, doit rentrer dans le néant, mais l’émanationappartient aux êtres spirituels qui sont réels et impérissables. » (Traité, 138) – Willermoz précisede même en des termes identiques à ceux de Martinès : « ce corps est un néant, parce que lamatière générale dont ce corps est une faible partie, n’ayant point de réalité, mais seulementune apparence qui doit disparaître un jour, est véritablement un néant » (Jean-BaptisteWillermoz, FM 509, 3e Cayer [C]), B N Paris, I. De la liberté et des facultés des êtres spirituels etde leur émancipation).

Cette matière formant le corps charnel d’Adam, est donc désignée comme « apparente » pourMartinès, car elle est vidée de toute dimension spirituelle, provient d’un principe ternaire dépendantd’un nombre de corruption et de dissolution, elle est le fruit d’une origine impure, souillée, infectée

et ténébreuse et doit donc être anéantie et non « spiritualisée » lors de la réintégration : « puisqu’elleest le fruit de l’opération d’une volonté mauvais » (Traité, 30).

1. d) Adam a été émané sous une « forme glorieuse » par nécessité

Par ailleurs, autre point singulièrement important pour notre réflexion à propos de ce qui distingueémanation et Création, la division entre monde matériel et immatériel, entre formes passivesd’apparence de matière ténébreuse et formes impassives ne date absolument pas pour Martinès de laprévarication d’Adam, mais de la première prévarication des esprits pervers qui eut pour effet decontraindre le Créateur de créer « l’univers physique en apparence de forme matérielle, pour êtrele lieu fixe où ces esprits pervers auraient à agir et à exercer en privation toute leur malice. »(Traité, 6). Adam apparaît ainsi sur la scène de l’histoire divine comme un esprit émané quaternaire,un être immatériel qui, de par sa faute, sera précipité dans un corps de matière ténébreuse formé,selon une loi ternaire, par les essences spiritueuses – « trois essences spiritueuses d’où sontprovenues toutes les formes corporelles » (Traité, 256) -, ce qui d’ailleurs, redisons-le une nouvellefois, toutes ces thèses relèvent de conceptions que l’Eglise rejette violemment mais que Martinèsprofesse et soutient, soit celle de l’ensomatose, c’est-à-dire de l’incorporisation d’un espritimmatériel, celui d’Adam, dans ce monde sensible – être préexistant au sein de la vie divine avantsa chute dans le corps – en raison d’une faute antérieure : « Vous savez que le Créateur émanaAdam homme-Dieu juste de la terre, et qu’il était incorporé dans un corps de gloireincorruptible. » (Traité, 43). Mais si Adam a été placé initialement selon Martinès dans une formepurement spirituelle et glorieuse certes, cette forme toute glorieuse qu’elle fût répondait cependant àune nécessité, et pas des moindres.

De quelle type cette nécessité ?Voici la réponse : « La forme dans laquelle Adam fut placé était purement spirituelle et

glorieuse, afin qu’il pût dominer sur toute la création, et exercer librement sur elle la puissance etle commandement qui lui avaient été donnés par le Créateur sur tous les êtres. » (Traité, 47).L’homme a donc été émané en réalité, comme nous le constatons, non pour bénéficier d’un dongratuit, d’une vie libre non soumise à aucun objet particulier, offerte par un don gratuit pour le simplele bonheur de l’homme et de sa postérité, mais pour combattre les esprits pervers : « Nouscomprendrons aisément, par cette figure, que l’homme n’avait été émané que pour être toujours enaspect du mauvais démon, pour le contenir et le combattre. La puissance de l’homme était biensupérieure à celle du démon, puisque cet homme joignait à la sienne celle de son compagnon et deson intellect et que, par ce moyen, il pouvait opposer trois puissances spirituelles bonnes contredeux faibles puissances démoniaques ; ce qui aurait totalement subjugué les professeurs du malet, par conséquent, détruit le mal même. » (Traité, 16).

Ainsi ce caractère de « nécessité », présidant à toute la doctrine de la réintégration, va si loin – et

c’est là un point qui n’est généralement pas du tout perçu dans ce qu’il signifie réellement sur le planthéorique par les commentateurs de Martinès – que sans la première prévarication des espritsrévoltés Dieu n’aurait sans doute jamais créé l’homme, Adam, le mineur spirituel – « l‘ordre del’émanation des mineurs spirituels n’a commencé qu’après la prévarication et la chute desesprits pervers » (Traité, 233) – montrant bien que l’ensemble du corpus conceptuel martinésien estfondé, sous-tendu, appuyé sur cette loi de « contrainte nécessaire » qui participe d’une approche trèsdifférente de la gratuité de la Création telle qu’enseignée, et soutenue officiellement, par le dogme del’Eglise qui insiste sur la fait que Dieu crée à partir « de rien » (ex nihilo ; 2 M 7, 28) un mondeordonné et bon, qu’Il transcende à l’infini, en une action créatrice indépendance de toute contrainteextérieure : Deus ex solis suae naturae legibus, et a nemine coactus agit. On le voit, la doctrine dela réintégration est une pensée singulièrement originale de par sa distance d’avec la conception del’Eglise, possédant ses critères propres et sa logique interne spécifique, tant sur le planmétaphysique, spirituel et initiatique, qu’il convient de comprendre, pour ensuite les respecter, souspeine de tomber dans des divagations fantaisistes.

Une question cependant. La couche glorieuse où fut émancipé Adam, que le Traité nous présentecomme « figurée par six et une circonférence » dont les six cercles signalaient les six pensées duCréateur utilisées pour la création du temple universel : « les six cercles, le Créateur représentaitau premier homme les six immenses pensées qu’il avait employées pour la création de son templeuniversel et particulier » (Traité, 22), était-elle uniquement immatérielle ne comportant que« l’apparence de forme matérielle », ou bien avait-elle déjà en son sein des régions de matièreténébreuse ?

1. e) Les démons n’ont pas été enfermés dans un « chaos », ils ont été chassés du Ciel et sontrestés des esprits

Tout d’abord une précision, cette couche n’est pas le temple universel, mais une « figure » de cetemple, ce qui est bien différent. Les circonférences tracées par l’Eternel lors de l’émancipationd’Adam, sont un symbole, un signe, mais non la chose même ; elles ont pour fonction d’évoquer, dereprésenter, tout en isolant et protégeant Adam, mais ne sont pas la réalité objective du templeuniversel, elles ne sont « qu’une forme de figure apparente », qui est transitoire aussi vite réintégréeque générée par l’esprit : « Cette forme glorieuse [dans laquelle Adam fut placé], n’est autre chosequ’une forme de figure apparente, que l’esprit conçoit et enfante selon son besoin et selon lesordres qu’il reçoit du Créateur. Cette forme est aussi promptement réintégrée qu’elle est enfantéepar l’esprit. » (Traité, 47).

Ce premier point est important car il permet de comprendre que cette projection en forme de

figure apparente, ne prétend pas être concrètement, le temple universel, mais uniquement son image,sa « figure » apparente. Reste toutefois à savoir, comme il nous a été donné de le lire non sans

étonnement, si les essences spiritueuses détachées dans l’axe feu central en raison de la prévaricationdes démons, se trouvaient à l’état de « chaos indifférencié » assimilable à l’abîme d’avant laCréation, considérant que leur opération leur avait valu un séjour dans la privation, c’est-à-dire, unsimple éloignement de Dieu : «…c’est pour avoir tenté une opération opposée aux lois immuablesdu Créateur que les démons se trouvent n’avoir d’autre puissance que cette puissance quinaire deconfusion et qu’ils sont précipités dans les abîmes de la privation divine pour une éternité. »(Traité, 240) ? Si on répond positivement, pour tenter de faire correspondre la position de Martinèsavec le texte de la Genèse par une acrobatie thématique entre la couche spirituelle, dans laquelle leCréateur plaça son premier mineur et l’abîme de la privation divine – même si on est encore trèsloin des définitions dogmatiques de l’Eglise mais disons que l’intention de s’en approcher est assezaisément décelable malgré une impossibilité catégorique que certains se refusent à admettre – alorson peut donner libre cours à une relecture assez osée du Traité, allant jusqu’à soutenir, en inférant« l’abîme de privation » avec le « tohu bohu » de Genèse I, une très hypothétique correspondanceavec « l’exégèse des Pères de l’Eglise », ce qui d’ailleurs n’aurait pas manqué de faire sursautervigoureusement les vénérables auteurs placés sur les autels des différentes confessions chrétiennes,sans même parler de leurs prévisibles réactions s’ils avaient pu se pencher sur les thèses du Traitéde Martinès. Ce type d’exercice visant à faire rentrer dans le moule ecclésial la penséemartinésienne, auquel nous sommes à présent habitué, se heurte cependant à une sérieuse difficulté, etelle n’est pas mince : c’est qu’on ne peut assimiler la création matérielle consécutive à laprévarication des esprits rebelles à « l’abîme » sur lequel l’esprit de Dieu planait au tout début de laCréation. Le passage de l’Ecriture : « Au commencement Dieu créa les cieux et la terre. Et la terreétait informe et vide ; les ténèbres couvraient l’abîme et l’Esprit de Dieu reposait sur les eaux »(Genèse I, 1-2), ne fait pas du tout écho à une sanction, à une région matérielle constituée pour yenfermer les démons, ces deux versets indiquent l’acte et l’état primitifs qui ont servi de point dedépart à l’œuvre ordonnatrice d’où est procédé l’univers tel que nous le contemplons actuellement, etc’est cette définition qui est reprise et sur laquelle insistent tous les Pères de l’Eglise, la plupart serefusant à spéculer sur l’intervalle entre les deux versets de Genèse 1, 1 et Genèse 1, 2. Aucun d’euxne soutient l’idée d’une identité entre l’abîme sur lequel l’Esprit de Dieu reposait, et un lieu où lesdémons auraient été placés dans une sorte de magma indifférencié, de situation latente etintermédiaire, et ceci pour une raison évidente, c’est que les démons pour la dogmatique chrétienne,n’ont pas été enfermés dans un « chaos » fût-il originel, en réponse à leur révolte, ils ont été chassésdu Ciel certes, mais ils sont restés des esprits !

1. f) La Création du monde matériel est une conséquence de la prévarication

Très différente la position de Martinès, vis-à-vis de laquelle il ne peut y avoir nulle contestation,pour lui le monde matériel a été conçu, avant l’émanation d’Adam, pour servir de prison aux espritsrévoltés ! Il le rappelle constamment dans le Traité, et ajoute ceci sur quoi il importe d’insister :sans prévarication il n’y aurait jamais eu de Création, et ce point est en contradiction absolue,encore une fois, d’avec la conception de la Création selon le dogme de l’Eglise pour lequel laCréation n’est pas une conséquence de la Chute, mais un don d’amour, l’expression d’une générositédiffusive, un témoignage de pure Charité. Avec Martinès la tonalité est donc tout autre, radicalementautre même comme on peut en juger : « Sans cette première prévarication, aucun changement neserait survenu à la création spirituelle, il n’y aurait eu aucune émancipation d’esprits hors del’immensité, il n’y aurait eu aucune création de borne divine, soit surcéleste, soit céleste, soitterrestre, ni aucun esprit envoyé pour actionner dans les différentes parties de la création. Tu nepeux douter de tout ceci, puisque les esprits mineurs ternaires n’auraient jamais quitté la placequ’ils occupaient dans l’immensité divine, pour opérer la formation d’un univers matériel. Parconséquent, Israël, les mineurs hommes n’auraient jamais été possesseurs de cette place etn’auraient point été émanés de leur première demeure ou, s’il avait plu au Créateur de lesémaner de son sein, ils n’auraient jamais reçu toutes les actions et les facultés puissantes dontils ont été revêtus de préférence à tout être spirituel divin émané avant eux. » (Traité, 237).

Est-ce clair, ou est-il encore besoin d’y insister ? Soulignons tout de même, en insistant car il importe de le faire, sur ce passage significatif où est

soutenue l’affirmation énorme, absolument insoutenable pour le dogme de l’Eglise, portant sur l’actede Création de l’Eternel motivé par la prévarication : « Tu ne peux douter de tout ceci, puisque lesesprits mineurs ternaires n’auraient jamais quitté la place qu’ils occupaient dans l’immensitédivine, pour opérer la formation d’un univers matériel. Par conséquent, Israël, les mineurshommes n’auraient jamais été possesseurs de cette place et n’auraient point été émanés. »(Traité, 237).

Il n’est donc pas question lors de l’émanation d’Adam, qui surgit dans un univers marqué par la

prévarication des esprits précipités dans les fers de la matière ténébreuse, d’une Création conservée« pure, glorieuse et lumineuse, inondée de l’Esprit de Dieu » (sic) – soutenir ceci n’a strictementaucun sens et participe d’une vue illusoire forgée par la volonté de plier Martinès à des conceptionsdogmatiques qui lui sont étrangères et dont il est très éloigné en raison de ses thèses qui tombenttoutes sous le coup des plus sévères et rigoureuses censures ecclésiales et conciliaires -, mais d’ununivers déjà distingué en trois parties : l’Immensité divine, l’Immensité surcéleste et l’Immensitécéleste contenant le Monde terrestre, univers qui vient de traverser un drame consécutif ausurgissement abominable du « principe du mal spirituel » (Traité, 5). Et cette idée centrale qui fonde

la pensée de Martinès, à savoir que sans la prévarication aucun changement – ce qui signifie aucunecréation matérielle terrestre – ne serait intervenu, est sans cesse expliquée tout au long du Traité quien fait quasiment une réitération constante de son exposé doctrinal en insistant sur le fait que laprévarication d’Adam a fait descendre l’homme et toute sa postérité dans un monde, non pas émané,mais créé, et l’a fait descendre sous une forme matérielle différente de celle des mondes supérieursoù il avait été émancipé, nous montrant que la Création qui suivit la prévarication des premiersesprits n’a, et à aucun moment, était ni créée, ni placée dans un état glorieux : « Oui, si ce premiermineur n’eût point prévariqué, il ne serait jamais devenu habitant de ce monde terrestre matériel,il n’aurait point désuni sa puissance divine quaternaire pour la rendre simplement inférieure etternaire, ainsi que te le prouve le simple triangle sensible où sont attachés trois corps planétaires,la Lune, Vénus et Jupiter. Mais cette prévarication a fait descendre l’homme sur cette surface etl’a précipité dans un monde tout opposé à celui pour lequel il avait été émancipé. Tu vois en effetque le monde céleste conserve toujours la forme de son origine et sa similitude avec le surcélesteet le divin, mais le monde inférieur n’a qu’une forme matérielle et différente de celle des troismondes supérieurs. C’est par la désunion que tu aperçois dans le double triangle de ce mondesensible que tu peux concevoir la privation du premier mineur et de ceux qui résident dans ce lieude ténèbres, privation qui assujettit ces mineurs spirituels aux peines du corps et à celles del’esprit. » (Traité, 242).

Conclusion : il faut, d’abord et avant tout, avant que de s’exprimer sur ces sujets, apprendre lanécessité de toute chose créée et celle de tout être émané et émancipé

Quant à la place occupée par Adam originellement, elle a été souillée puis purifiée par l’Eternel,et c’est dans ce lieu de nouveau saint, ce cercle qui n’aurait point été émané s’il n’y avait eu unepremière prévarication – de même qu’il n’y aurait pas eu de création matérielle – que la postéritéhumaine doit être réintégrée : « Apprends de moi que cette même place existe et existera dans toutesa propriété éternellement. Elle a été souillée par la prévarication d’Adam, mais elle a étépurifiée par le Créateur, ainsi que te l’assure la réconciliation du premier homme. Oui, c’est dansce saint lieu qu’il faut que la postérité mineure spirituelle d’Adam soit réintégrée. C’est lepremier chef-lieu que le mineur a habité, dès son émancipation divine, et la prévarication dupremier homme ne l’en a exclu que pour toute la durée du temps. Observe donc ici que c’estl’émancipation de ce cercle mineur qui désigne et qui complète la quatriple puissance divine, sanslaquelle le mineur n’aurait aucune connaissance parfaite de la Divinité. L’émanation de ce cerclen’aurait point eu lieu sans la prévarication des démons ; sans cette prévarication, il n’y auraitpoint eu de création matérielle temporelle, soit terrestre, soit céleste ; n’y ayant eu ni l’une nil’autre, il n’y aurait point eu d’immensité surcéleste ; toute action d’émanation spirituelle seserait faite dans l’immensité divine, de même que toute espèce de création de puissance pour lesesprits émanés dans cette même immensité. Considère donc ce qu’a occasionné la prévaricationdes mauvais esprits ; réfléchis sur cette création universelle, réfléchis sur ton émanation. Tu

apprendras à connaître la nécessité de toute chose créée, et celle de tout être émané etémancipé. » (Traité, 224).

3. Instruction secrète des Chevaliers Profès, op.cit.4. Ibid.5. Ibid.6. L’étude des sources de Martinès, qui n’ont point permis pour l’instant d’arriver à une conclusion

certaine, laisse cependant penser à une nette influence judéo-chrétienne chez le thaumaturgebordelais, non exempte de liens avec les enseignements de la kabbale : « La particularitémagico-théurgique de Martines s’analyse par rapport à la kabbale. Sa théurgie comme sathéosophie ne sont pas spécifiquement kabbalistiques, de plus elles s’expriment dans uncontexte chrétien inaliénable. Une influence par résonance de la kabbale n’est toutefois pas àexclure, voire l’influence directe de certains ouvrages. En kabbale comme chez Martines,priment les thèmes théosophiques de la descente et de la remontée ; de la chute, de ladispersion et de la restauration, de la réintégration. » (R. Amadou, Introduction au Traité surla Réintégration des êtres, Collection Martiniste, Diffusion Rosicrucienne, 1995, pp. 22-25).Assez crédible donc l’idée, d’une probable influence du judaïsme, ou plus exactement du judéo-christianisme primitif dont tout indique qu’il fut très proche des positions religieuses del’ébionisme ou de l’elkassaïsme sur Martinès, même si certaines analogies peuvent êtredémontrées entre le Traité et les textes des écoles gnostiques chrétiennes et des kabbalistes,quoique Martinès soit un catholique de parents eux-mêmes catholiques, qui sera baptisé puis semariera à l’Eglise, faisant ensuite baptiser ses enfants, et ayant, à de multiples occasions,largement prouvé son respect à l’égard de l’institution ecclésiale romaine, tout en prônant lapratique d’un culte de nature théurgique calqué sur les méthodes préconisées par les grimoiresmagiques médiévaux.

7. Origène est né en Egypte dans une famille chrétienne vers l’an 185. Il reçut une formationhellénique et une éducation biblique dans sa famille. Son père était citoyen romain. Lors de sonvoyage en Egypte, l’empereur Septime Sévère (193-211) prit des mesures draconiennes (193-211) contre les chrétiens. Le père d’Origène fut mis à mort en 202 par décapitation ; Origène, quiavait alors 17 ans, assista à sa mort et aurait voulu le suivre dans le martyr mais sa mère, encachant ses vêtements, l’en empêcha. Vers 207 Origène rencontra des païens désireux de mieuxconnaître la religion chrétienne. La connaissance qu’il possédait de la philosophie grecque luipermit de dispenser un enseignement destiné à des païens qu’il conduisait à la conversion. Il tissade ce fait des liens profonds avec le platonisme alexandrin de son temps, reprenant le projet dePantèneet de saint Clément d’Alexandrie, qui consistait à former une sorte d’université, laDidascalée, où toutes les sciences humaines étaient mises au service de la théologie. Désignécomme le successeur de saint Clément d’Alexandrie qui avait été à la tête de l’école

catéchétique, il y enseigna entre 212 et 231.Vers 250, lors de la persécution de Dèce, Origène estarrêté et torturé. Retrouvant sa liberté, il meurt peu après, des suites de ses blessures, à Tyr en252.

Parmi ses écrits, on distingue :– Les Commentaires sur l’Ecriture Sainte.– Le Traité Sur les Principes (De principiis).– De nombreux livres d’exégèse, des homélies, de controverses : Apologie du christianisme

contre Celse, De la prière, l’Exhortation au martyre, etc.

8. Après qu’Erasme en eut prit l’initiative à Bâle dès 1536, un édition intégrale d’Origène futentreprise en France par le père Charles de la Rue, bénédictin, mort en 1739, continuée par domCharles-Vincent de la Rue, son neveu, qui donna le dernier volume annoté des Origeniana àParis, en 1759. Cette édition aura un écho significatif auprès des érudits, chercheurs etthéologiens, et il apparaît plus que vraisemblable, même s’il nous manque l’inventaire de sabibliothèque qui nous eût été d’une aide appréciable, que Willermoz accéda à cette édition et ypuisa ses références doctrinales.

9. C. Tresmontant, La Métaphysique du christianisme et la naissance de la philosophiechrétienne, Seuil, 1961, pp. 395 ; 421.

10. S. Le Nain de Tillemont, Mémoires pour servir à l’histoire ecclésiastique, t. III, p. 585.11. Alain Marboeuf, dans son étude sur la recherche des sources judéo-chrétiennes qui ont influencé

le système théologique et philosophique de Martinès de Pasqually rattachant ce dernier à la gnosevalentinienne, place Origène dans la liste des Pères ayant combattu le gnosticisme, entre Clémentd’Alexandrie et saint Athanase : « Les branches du rameau gnostique chrétien sont d’abordjudéo-chrétiennes, les subtilités théologiques qui les séparent du Judaïsme ou duChristianisme orthodoxes étant parfois ténues. Citons, par ordre chronologique : les Séthiens,le Mandéisme qui correspond à la branche du Baptiste, les Ebionites, le Marcionisme, leManichéisme, l’Arianisme, le Nestorianisme. Certains de ces mouvements ne sont maintenantconnus qu’au travers des hérésiologues vivant aux II-IIIème siècles et aux Pères de l’Eglise :Saint-Irénée de Lyon (v.130-v. 202), Clément d’Alexandrie (150-v.211), Tertullien (v. 155-v.222), Origène (v.185-253), Saint-Athanase (v.294-373), Saint-Grégoire de Naziance (v.330-v.390), Saint-Grégoire de Nysse (v.335-v.394), Saint-Augustin (354-430).» (A. Marboeuf,Martinès de Pasqually et La Gnose Valentinienne,The Rose+Croix Journal 2008 – Vol 5, p.63).

12. Martinès, qui parle longuement du péché d’Adam comme cause de sa chute, insiste clairement, cequi l’éloigne du gnosticisme stricto sensu, sur le fait que le mal ne provient que de la créaturenon du Créateur : « La création n’appartient qu’au Créateur et non à la créature. Les penséesmauvaises sont enfantées par l’esprit mauvais, comme les pensées bonnes sont enfantées par

l’esprit bon, c’est à l’homme de rejeter les unes et de recevoir les autres, relativement à sonlibre arbitre qui lui donne droit de prétendre aux récompenses de ses bonnes œuvres, mais quipeut aussi le faire rester pour un temps infini dans la privation de son droit spirituel. Le mal,je le répète, ne prend son origine ni du Créateur ni d’aucune de ses créatures particulières. Ilne vient que de la pensée de l’esprit opposé aux lois, préceptes et commandements del’Eternel, pensée que l’Eternel ne peut pas changer dans cet esprit, sans en détruire la libertéet l’existence particulière, comme il a été dit ci-dessus.» (Traité, § 15, « origine du mal »). Iln’y a donc aucune « substantialité » du mal chez Pasqually alors que c’est le cas chez lesgnostiques : « L’on peut voir, par tout ce que je viens de dire, que l’origine du mal n’est venued’aucune autre cause que de la mauvaise pensée suivie de la volonté mauvaise de l’espritcontre les lois divines, et non pas que l’esprit même émané du Créateur soit directement lemal, parce que la possibilité du mal n’a jamais existé dans le Créateur. Il ne naît uniquementque de la seule disposition et volonté de sa créature. Ceux qui parlent différemment ne parlentpas avec connaissance de cause des choses possibles et impossibles à la Divinité. » (Traité §17, « Dieu est juste, sans mal possible en lui »).

13. CardinalHenri de Lubac, Histoire et Esprit : L’Intelligence de l’Écriture d’après Origène,Éditions du Cerf, 2002.

14. Origène, De Princip., III, 5, 4, K.15. Ibid.16. 1 Origène, De Princip., op.cit.17. Ibid.18. De Princip., op.cit.19. Ibid.20. Ibid.21. J. Daniélou, s.j., Origène, La Table Ronde, 1948.22. J. Daniélou, Henri de Lubac, Hans Urs Von Balthasar, P. F. Marlière, Mgr A. Léonard, etc.23. Instruction du grade d’Ecuyer Novice, 1778, Bibliothèque du Grand Orient des Pays-Bas, la

Haye, Fonds Kloss, F XXVI 113‑10.24. Jean-Baptiste Willermoz, Statuts et Règlement de l’Ordre des Grands Profès, Ms 5.475, BM

Lyon.25. J. de Maistre, Essai sur le Principe Générateur des constitutions politiques, § 15, P. Russand,

Lyon, 1833, pp. 18-20 ; 22-23 ; 28.

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Joseph de Maistre et la doctrine du Régime Écossais Rectifié | Le Régime EcossaisRectifié

« Le monde doit être regardécomme l’expression d’un ensemble de choses invisibles

manifestées visiblement.(…) il n’y a qu’un monde, car la matière n’est rien.»

Toutes les conceptions de Joseph Maistre (1753-1821) portant sur les desseins de la divineProvidence au cœur de l’histoire, la condition de l’homme, sa chute et sa possible « réconciliation »avec Dieu, sa vigilante attention appliquée aux lois de l’analogie mettant en lumière lacorrespondance entre ce qui est en haut et ce qui est en bas, le monde regardé comme l’expression,selon la phrase de saint Paul, reprise par Maistre dans le « Xe Entretien » des Soirées de Saint-Pétersbourg, d’un « ensemble de choses invisibles manifestées visiblement(…) » – rajoutant : »Iln’y a rien de si visible que les liens des deux mondes ; on pourrait même dire, rigoureusementparlant, qu’il n’y a qu’un monde, car la matière n’est rien» -, participent, de toute évidence, deséléments doctrinaux reçus et rencontrés au sein du Régime écossais rectifié.

C’est le dessein de Dieu sur l’histoire du monde, son plan, que Maistre cherchait à découvrirderrière la chronologie des événements, c’est cet « esprit recteur » qu’il décela dans l’œuvre detransformation politique, morale et religieuse qui modela les nations au cours du temps : « Parce queles hommes sont sortis des voies primitivement tracées par Dieu à leur action, Dieu, dont le plandoit aboutir avec ou sans nous, pour ou contre nous, ramène nos volontés coupables à son fermedessein par les souples initiatives de sa rédemption, touches intimes par lesquelles nous pouvonsacquiescer à la souffrance comme à une prévenance divine et utiliser par notre acceptation lessursis de la toute-puissante Bonté. » [1]

Si cet enseignement eschatologique et métaphysique exista, on peut donc légitimement sedemander s’il se trouve préservé aujourd’hui et où ?

I. La Maçonnerie rectifié est issue de la « vraie religion éternelle »La réponse à cette question est claire pour Maistre, c’est la franc-maçonnerie rectifiée – c’est-à-

dire enrichie, transformée et devenue dépositaire de la doctrine de Martinès de Pasqually -,« branche détachée et peut-être corrompue d’une tige ancienne et respectable », qui seule estdétentrice de cet antique savoir. Il est incontestable qu’elle puise ses fondements dans une initiationbien antérieure aux Templiers, son but premier étant de retrouver les éléments épars de la sciencesacrée, les clés de la Révélation primitive, « base de la vraie religion éternelle. » [2]

« ...nous ne sommes pas enfants de l’esclave, mais de la femme libre. »Maistre, suivant en cela Jean-Baptiste Willermoz (1730-1824), en fit une vérité centrale du

Régime écossais rectifié, à savoir que l’Incarnation du Verbe a profondément modifié, pour tous leshommes, les bases historiques de la vie religieuse ; le caractère « libérateur » de la Parole du Christchange radicalement les données classiques du rapport à Dieu et au culte qui lui était rendu depuis lachute. Comme le dit saint Paul : « ...nous ne sommes pas enfants de l’esclave, mais de la femmelibre. » (Gal. IV, 31.)

Cet aspect du message évangélique fait l’objet d’un regard spécial de la part de Maistre ; cettepossibilité offerte à l’humanité de communier, par le sacrifice du Fils, aux mystères les plus secretsde l’intimité du Père, sont pour lui une occasion de pousser plus avant encore sa pensée.

« Le christianisme a changé le cœur de l’homme. Il a épuré toutes les croyances dont labase n’était point fausse, mais qui s’étaient corrompues, rectifiant les cultes (…) Il a, en uncertain sens, soulevé le voile épais qui cachait aux peuples la face de l’antique Isis, appelanttous les hommes à l’héritage du Père, initiant les foules aux mystères essentiels réservésjusqu’alors jalousement. (…). »

Le christianisme pour Maistre « a changé le cœur de l’homme. Il a épuré toutes les croyancesdont la base n’était point fausse, mais qui s’étaient corrompues, rectifiant les cultes et faisantcesser les abus criminels. Il a, en un certain sens, soulevé le voile épais qui cachait aux peuples laface de l’antique Isis, appelant tous les hommes à l’héritage du Père, initiant les foules auxmystères essentiels réservés jusqu’alors jalousement. (…) Jésus est l’Initié par excellence, l’Initiéabsolu, l’éternel confident de la Sagesse du Père. L’humanité qu’il a revêtue, il l’a conduite auplus haut degré de la connaissance, il l’a fait entrer transfigurée dans le Royaume de Dieu. (…) Atous ceux qui veulent s’unir mystiquement à lui il est venu apporter ce royaume. En vivant, ennous mouvant dans le Christ ressuscité, initié d’un genre unique, nous sommes initiés nous-mêmesaux mystères éternels de la Vie. » [3]

Le christianisme, pense Maistre, est le couronnement des religions, « La Religion » par définition,celle qui conduit à son maximum de profondeur l’exigence métaphysique universelle, celle qui recèleles mystères ineffables malheureusement oubliés par les prêtres, celle qui « révèle l’homme àl’homme. » (Du Pape, liv. III, ch. I.) Celle qui est, selon la belle expression de Louis-Claude deSaint-Martin (1743-1803) : « Le terme est le repos de toutes les religions. » (Le Ministère del’Homme Esprit), la religion de pure intériorité, ce christianisme transcendant, ce »plus puresprit du christianisme », si essentiel au Régime écossais rectifié, mettant secrètement en œuvrel’indicible travail de déification, de réintégration qui, dans la paix de « l’Absolu Silence », dévoiledans le cœur de chaque homme la surnaturelle Lumière de l’Esprit.

II. Le christianisme comme vraie et authentique initiationPour les fondateurs du Régime, ceux qui portèrent le nouveau système pensé lors du Convent des

Gaules en 1778 à la visibilité de la vie maçonnique, Moïse sut réaliser la synthèse brillante desmystères de la Tradition, et la scella « sous le triple sceau des mots sacrés du Bereschit » ; cetteTradition se poursuivit par les Prophètes de l’Ancien Testament et fit l’objet d’une étude serrée de la

part de certains milieux qui se penchaient, dans le plus grand secret, sur les « arcanes » de la sciencedivine.

« Cédons à l’amour et entrons dans la voie royalequi aboutit à la Cité Sainte. »D’ailleurs Maistre, profondément marqué par la lecture des écrits d’Origène (IIIe s.), croit en

l’existence d’une tradition secrète, d’une discipline réservée, d’une science de « l’Arcane », ce quil’amène à affirmer, que « le christianisme, dans les premiers temps, était une vraie initiation oùl’on dévoilait une véritable magie divine. »[4]

Ceci explique d’ailleurs parfaitement pour lui les propos de saint Paul sur le lait réservé à lafoule, et la nourriture solide donnée uniquement aux parfaits : « Je vous ai donné du lait et non pasune nourriture solide ; car vous n’en n’étiez pas capables, et vous ne l’êtes pas même maintenant,puisque vous êtes encore charnels… Or quiconque n’est nourri que de lait ne comprend rien auxdiscours de la Sagesse, parce qu’il est enfant. Mais la nourriture céleste est pour les parfaits. » (ICor., III, 2 et Heb., VI, 12-14.)

Maistre, tel un visionnaire, annonce : « le royaume de Dieu arrivera sur la terre comme au ciel »(Mélanges A), et pour hâter ce temps libérateur, il nous demande, tel qu’il le formulera dans leMémoire qu’il fit parvenir le 17 juin 1782 au duc de Brunswick dans la perspective de la préparationduConvent de Wilhelmsbad, de travailler d’abord à réaliser l’union des Eglises chrétiennes quirestaurera la robe sans couture, puis, en forme d’instante prière, déclare : « Cédons à l’amour etentrons dans la voie royale qui aboutit à la Cité Sainte. » [5]

Afin que nos esprits restent impérativement en état d’éveil, de manière à être capables d’entrerdans la voie royale qui nous conduit aux portes de la Cité Sainte, le comte savoisien nous donne cesolennel avertissement que l’on prendra soin de méditer avec attention : « Il faut nous tenir prêtspour un événement immense dans l’ordre divin, vers lequel nous marchons avec une vitesseaccélérée qui doit frapper tous les observateurs. Des oracles redoutables annoncent déjà que lestemps sont arrivés. » [6]

III. Le Mémoire au duc de BrunswickJean-Baptiste Willermoz avait fait parvenir à Maistre les statuts, rituels, les instructions ainsi que

diverses pièces secrètes portant sur la nature même du travail ésotérique.Ces instructions, lui écrit Willermoz dans une lettre du 9 juillet 1779 tout en le félicitant pour la

qualité de ses dispositions, sont susceptibles de lever les doutes que vous pouvez avoir sur ladoctrine, non sans les avoir étudiées à fond, « étant admis d’abord les dogmes de l’existence deDieu, de la spiritualité et de l’immortalité de l’âme. Mais cette étude doit être des plus sérieuse. iln’y a pas un seul mot qui n’eût besoin d’être médité avec la plus grande attention ». [7]

« Faisons-nous une généalogie claire et digne de nous… Remontons aux premiers siècles dela loi sainte, fouillons l’antiquité ecclésiastique, interrogeons les pères l’un après l’autre,réunissons, confrontons les passages, montrons que nous sommes chrétiens… Allons même

plus loin : la vraie religion a bien plus de dix-huit siècles. Elle naquit le jour que naquirent lesjours »

Willermoz précise que, tout en devant se mettre au-dessus des préjugés « acquis ou naturels »pour pourvoir faire une lecture fructueuse de ces textes, Maistre devra « écouter la voix de son cœur,principe de conviction intérieure dans une affaire où l’homme raisonnable ne doit point enespérer d’extérieure. Car, déclare-t-il, les systèmes philosophiques laissent des vides qui affligentet tourmentent l’homme, alors que cette doctrine offre une chaîne dont tous les chaînons sontliés à leur place et vous présentent un ensemble qui explique et démontre à votre intelligencetout l’univers intellectuel et physique (…), votre propre existence comme homme avec tous lesrapports qui vous lient en cette qualité au reste de l’univers et à son auteur. Après l’avoirencouragé à ne rien attendre des hommes, il insiste sur le fait que le feu qui doit nous éclairer, nouséchauffer est en nous, et un désir pur, vif et constant est le seul soufflet qui puisse l’embrasser etl’étendre ». C’est donc la lettre d’un conseiller et d’un guide que reçoit Maistre, d’un maître quiinvite à une étude approfondie des vérités métaphysiques ignorées de la raison commune, obscurciespar la passion et voilées aux regards grossiers de l’homme.

*La lettre circulaire du duc de Brunswick demandait aux frères répondent aux six questions

suivantes : 1) – L’Ordre repose-t-il sur une convention ou bien a-t-il pour but une société ancienne etlaquelle ? 2) -Existe-t-il des Supérieurs Inconnus et lesquels ? 3) – Quelle est la fin véritable del’Ordre ? 4) – Est-ce la restauration de l’Ordre du Temple ? 5) – De quelle façon le cérémonial et lesrites doivent-ils être organisés pour tendre à la perfection ? 6) – L’Ordre doit-il s’occuper dessciences secrètes ?

Comme on le voit, étaient soulevés dans cette enquête l’ensemble des problèmes qui agitaient demanière importante la Stricte Observance, mais qui, également, et plus globalement aussi,intéressaient la Maçonnerie en général au XVIIIe siècle, dans la mesure où on touchait ici à desquestions fondamentales portant précisément sur l’origine, la finalité et la nature de cette sociétéparticulière qui, pour beaucoup de profanes comme pour le plus grand nombre des initiés, restaitl’objet d’un mystère impénétrable.

Maistre croit « à la réalité d’une science qui peut mettre l’homme en communication avec desintelligences d’ordre supérieur ; il tient pour acquis que le christianisme, dans les premierstemps, était une véritable initiation où l’on dévoilait une véritable magie divine. Maistre enconcluait qu’à la même époque une élite d’initiés avait eu accès à certaines vérités inconnues duplus grand nombre. Il est donc naturel que les martinistes, qui observaient généralement lapratique du catholicisme mais vivaient, eux aussi, d’un catholicisme supérieur, lui aient inspiréune certaine sympathie » [9].

C’est donc avec une réelle assurance et une force de conviction visible, qu’il développe sesarguments en rédigeant son « Mémoire » qui ne comprend pas moins de soixante quatre pages d’une

écriture serrée.Maistre, pour ce qui concerne la première question de la lettre circulaire, ne fait aucun crédit à la

thèse templière, et nous livre même à cette occasion une opinion franchement négative à l’égard del’Ordre du Temple. « Si nos cérémonies sont vraiment l’emblème des vicissitudes de l’Ordre desT(empliers), il ne nous reste que le regret d’avoir été maçons ; car nous aurons employé dans cecas notre temps et nos facultés d’une manière bien peu philosophique…Il fait, en forme de synthèsegénérale, apparaître une idée centrale qui ne le quittera plus, celle de la primitive origine de la vraiereligion dont témoigne dans ses mystères la Franc-maçonnerie : « Faisons-nous, dit Maistre, unegénéalogie claire et digne de nous… Remontons aux premiers siècles de la loi sainte, fouillonsl’antiquité ecclésiastique, interrogeons les pères l’un après l’autre, réunissons, confrontons lespassages, montrons que nous sommes chrétiens… Allons même plus loin : la vraie religion a bienplus de dix-huit siècles. Elle naquit le jour que naquirent les jours ». [10]

IV. La réunion des églises chrétiennes autour de l’idée du « christianisme transcendant »Il y donc pour Joseph de Maistre, comme pour les fondateurs du Régime rectifié, une

incomparable supériorité « initiatique » du christianisme, et il est vain et inutile de chercher unesource plus « pure » à l’initiation maçonnique : « Attachons-nous à l’Evangile et laissons-là lesfolies de Memphis… Remontons à l’origine des choses et montrons par une filiation incontestableque notre système réunit au dépôt primitif les nouveaux dons du Grand Réparateur ». Comme ledit fort bien et avec pertinence Emile Dermenghem, «L’opinion personnelle de Maistre est très nette: l’initiation maçonnique, la science occulte moderne sont d’essence absolument religieuse etchrétienne. Il semble même qu’à son avis la véritable source de l’initiation doive être cherchéedans le christianisme primitif, épuration et épanouissement lui-même d’une tradition plusancienne, en un mot dans la kabbale judéo-chrétienne ». [11]

« Il serait temps d’effacer la honte de l’Europe et de l’esprit humain. A quoi nous sert deposséder une religion divine, puisque nous avons déchiré la robe sans couture, et que lesadorateurs du Christ, divisés par l’interprétation de son Livre Saint, ne sont portés à des excèsqui feraient rougir l’Asie ? … Ne serait-il pas digne de nous proposer l’avancement duchristianisme comme un des buts de notre Ordre ? »

Ainsi, les frères de l’Ordre devront tout spécialement se consacrer à la « réunion des égliseschrétiennes et l’instruction des gouvernements », ils auront pour tâche de rechercher « tout ce quipeut contribuer à l’avancement de la religion, à l’extirpation des opinions dangereuses, en un motà élever le trône de vérité sur les ruines de la superstition et du pyrrhonisme » ; il y a là un desprojets les plus essentiels pour Maistre, celui qui lui inspire peut-être le passage le plus éloquent, dupoint de vue politique, de son Mémoire.

Et il faut bien le reconnaître, l’unité de la chrétienté, à laquelle Maistre aspire, représente pour luiun objectif prioritaire de par l’état inquiétant dans lequel se trouve l’Europe. Aussi ne manque-t-ilpas de dire : « Il serait temps d’effacer la honte de l’Europe et de l’esprit humain. A quoi nous sert

de posséder une religion divine, puisque nous avons déchiré la robe sans couture, et que lesadorateurs du Christ, divisés par l’interprétation de son Livre Saint, ne sont portés à des excèsqui feraient rougir l’Asie ? … Ne serait-il pas digne de nous proposer l’avancement duchristianisme comme un des buts de notre Ordre ? » [12]

« Nous travaillerons lentement mais sûrement… Comme, suivant l’expression énergiqued’un ancien Père, l’univers fut autrefois surpris de se trouver aryen, il faudrait que les chrétiensmodernes se trouvassent surpris de se voir réunis »

Puis, Maistre poursuit dans le même sens, en insistant, avec un sens politique et tactique déjà fortpertinent que l’on retrouvera plus tard dans ses écrits, sur une méthode ingénieuse capable decontourner de nombreux obstacles : « Ce projet aurait deux parties, car il faut que chaquecommunion travaille par elle-même, et travaille à se rapprocher des autres. Sans doute cetteentreprise paraîtra chimérique à bien des frères, mais pourquoi ne tenterions-nous pas ce quedeux théologiens, Bossuet et Molanus, tentèrent dans le siècle passé, avec quelque espérance desuccès ?… Jamais cependant cette réunion n’aura lieu, tant qu’elle se traitera publiquement. Lareligion ne doit plus être considérée de nos jours que comme une pièce de la politique de chaqueEtat, et cette politique est d’un tempérament si irritable ! Dès qu’on la touche du bout du doigt,elle entre en convulsion. L’orgueil théologique fera naître de nouveaux obstacles, en sorte quecette grande entreprise ne peut se préparer que sourdement… Nous travaillerons lentement maissûrement… en établissant des comités de correspondance composés surtout des prêtres desdifférentes communions… agrégés et initiés à l’Ordre. Comme, suivant l’expression énergiqued’un ancien Père, l’univers fut autrefois surpris de se trouver aryen, il faudrait que les chrétiensmodernes se trouvassent surpris de se voir réunis ». [13]

Conclusion : le Régime rectifié doit se consacrer à la « révélation de la Révélation »Nous sommes donc en présence d’un vaste projet, projet de rétablissement de « l’unité

chrétienne », projet également de combat contre l’indifférence en matière religieuse, à un moment oùla « libre pensée », le scientisme, prenaient une importance considérable dans les esprits, et où lesferments viciés d’une fausse conception du laïcisme se répandaient dangereusement et donneront lesfruits amers que nous savons en 1792 : « au moment où le christianisme a perdu tant de terraindans les esprits et où les faux savants, arrachant le froment de l’ivraie, ont guéri les préjugés« comme la gangrène guérit la douleur » [14]

« Que d’autres, que leur génie appelle aux contemplations métaphysiques, cherchent… lespreuves de notre doctrine. Que d’autres enfin (et plaise à Dieu qu’il en existe beaucoup!) nousdisent ce qu’ils ont appris de cet esprit qui souffle où il veut, comme il veut et quant il veut.»

Maistre voulait faire du Régime rectifié l’instrument effectif du redressement de la foi et de lareligion, mais selon une conception « transcendante et œcuménique », loin de tous les dogmatismes,et d’ailleurs, abordant la connaissance du « christianisme transcendant », Maistre le désigne commedevant être consacré, selon l’expression magnifique qu’il emploie, à la « révélation de la

Révélation », à la connaissance sublime car, « tout homme entraîné vers les croyances chrétiennessera nécessairement ravi de trouver la solution de plusieurs difficultés pénibles dans lesconnaissances que nous possédons ». [15]

C’est l’ouverture vers la contemplation des vérités sacrées et de la connaissance de mystèresoubliés par l’Eglise depuis le VIe siècle, préparation initiale à leur mise en œuvre, et surtout leurexposition doctrinale complète, au sein de la classe non ostensible de l’Ordre.

C’est le temps de la recherche approfondie au sujet de la nature initiatique du christianisme, dusens réel des allégories sacrées, des mystères de l’Ecriture : « Que les uns s’enfoncentcourageusement dans les études d’érudition qui peuvent multiplier nos titres et éclaircir ceux quenous possédons. Que d’autres, que leur génie appelle aux contemplations métaphysiques,cherchent dans la nature même des choses les preuves de notre doctrine. Que d’autres enfin (etplaise à Dieu qu’il en existe beaucoup!) nous disent ce qu’ils ont appris de cet esprit qui souffleoù il veut, comme il veut et quant il veut.» [16]

Nous sommes donc, comme nous le constatons, en présence d’un authentique programme deconnaissance ésotérique, d’une « voie », au sens traditionnel du terme, d’illumination intérieure,d’intériorisation de la foi et de son épanouissement métaphysique au cœur des frères, dans la vivanteet concrète incarnation, en chacun, du « christianisme transcendant ».

Tout Maistre se trouve dans ces lignes, dans ce véritable « Manifeste » de nature spirituelle etmétaphysique, mais également toute la perspective métaphysique, eschatologique et doctrinale duRégime rectifié.

Joseph de Maistre pressentait bien que les temps sont proches où “ l’homme revêtu de son corpsde gloire ”, sera enfin reçu au sein de “ l’Unité ”, réintégré dans sa véritable nature divine, dans sapremière propriété, vertu et puissance spirituelle primitive, non-séparé de sa véritable origine.

Les temps viendront où la tête du serpent sera écrasée et où la céleste et sainte Jérusalem avec sesdouze portes descendra avec éclat (Ap. XXI), car en effet les temps arrivent où l’homme retrouverason héritage perdu, où il recevra de nouveau son habit de blancheur, abandonnant pour toujours sesterribles et insupportables “ habits de peau ” dont il fut recouvert pour sa plus grande honte, car“ les âmes ayant péché en s’éloignant de leur Créateur, ont mérité d’être enfermées en diverscorps comme dans une prison …et c’est là le monde actuel. ” (Mélanges B, 2 déc. 1797) ; ce sont làles ténèbres obscures de la corruption et de la génération dans lesquelles l’humanité fut emprisonnéeet dans lesquelles elle gémit depuis des siècles pour sa punition et dont elle aspire, légitimement, àêtre définitivement libérée.

Maistre, tel un visionnaire, annonce donc en conclusion : “ Lorsque ce qui est en dehors, (…)lorsque la vie ou la génération extérieure sera devenue semblable à la vie intérieure ou angélique.Alors il n’y aura qu’une naissance. Il n’y aura plus de sexe. Le mâle et la femelle ne feront qu’unet le royaume de Dieu arrivera sur la terre comme au ciel.” (Mélanges A.)

Notes.

1. Abbé Louis Carret, Finesse et géométrie dans Joseph de Maistre, Paillet, 1937, p. 66.2. J. de Maistre, Mémoire au duc de Brunswick, 1782.3. E. Dermenghem, Joseph de Maistre mystique, La Colombe, 1948, pp. 186-187.4. J. de Maistre, Essai sur leprincipe Générateurs des constitutions politiques, § 15, 1814.5. J. de Maistre, O.C., t. VIII, 1834, p. 403.6. J. de Maistre, Soirées de Saint-Pétersbourg, , XIe Entretien, 1821.7. J-B. Willermoz, Les Sommeils, La Connaissance, 1926, p. 163.8. Ibid., pp. 163-168.9. C.J. Gignoux, Joseph de Maistre, Prophète du Passé Historien de l’Avenir, N.E.L., 1963, pp.

38-39.10. Joseph de Maistre, Œuvres, vol. II, op. cit., p. 97.11. E. Dermenghem op.cit., p. 97. Nous croyons utile de signaler que ce nom de « Grand

Réparateur », que l’on retrouve ici dans le Mémoire de Joseph de Maistre, est celui-là même utilisépar Martinès de Pasqually et les élus coëns, pour désigner le Christ, venant dans le monde rétablir leséquilibres rompus, montrer le chemin de la « Réintégration » et, enfin et surtout, « réparer » lesdramatiques conséquences de la chute.

12. J-B. Willermoz, Les Sommeils, op.cit., p. 106.13. Ibid., pp. 107-108.14. Emile Dermenghem fait remarquer avec justesse, que « ce passage prouve que, dès cette date,

Maistre a conçu sa fameuse théorie de la superstition, déjà il la juge préférable au pyrrhonisme, et ily cherche un « résidu divin ». (E. Dermenghem, op. cit., p. 67).

15. Joseph de Maistre, op. cit., 109.16. Ibid., p. 112..

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#52

Petite leçon de La Leçon de Lyon | Le Régime Ecossais Rectifié

« L’objet de la Révélation divine est toujours d’ordre religieux. Il ne s’encombre ni du fatrascosmologique, ni des spéculations métaphysiques dont sont chargés les livres sacrés de la plupart

des religions anciennes (ainsi les Védas de l’Inde et les œuvres gnostiques, ou même certainsapocryphes juifs). Dieu révèle ses desseins, qui tracent pour l’homme la voie du Salut ; il se

révèle lui-même, pour que l’homme puisse le rencontrer. » (Vocabulaire de théologie biblique,Cerf, 1962, p. 928)

Par delà l’éventuelle identité d’origine des Rites Écossais « Ancien & Accepté » et « Rectifié »,

s’agissant de leur possible source commune que serait le « Chapitre de Clermont », il convient deconserver en mémoire – d’où certaine similitude que l’archaïsme caïniste de l’ancien et accepté,ignorant la sainte doctrine, ne perçoit évidemment pas en raison de son incapacité à accéder vers detels domaines mystiques et métaphysiques -, que l’écossisme, représente cependant une tendance ausein de la maçonnerie, qui est, en effet, une source commune avec le Régime rectifié, puisque cettesource a pour origine le Chevalier de Ramsay (1686-1743), reçu en 1730 à la Horn Lodge qui, dansson célèbre « Discours » dont la première version est de 1736, prononcé en tant que Grand Orateurde la Grande Loge, eut l’idée magnifique de rattacher la maçonnerie écossaise aux Ordres médiévauxde chevalerie, et aux Templiers.

Ramsay fit appel aux Frères de « bonne volonté » afin de remettre de « l’ordre au sein du chaos »

et d’établir à cette fin une nouvelle chevalerie initiatique qui sera à la base de ce que l’on désignesous le nom de « Hauts-Grades », et qui seront, avec la Stricte Observance, « l’Ordre Intérieur »d’essence chevaleresque que nous connaissons aujourd’hui.

Il est utile de rappeler que l’expression : « Ordo ab chao », qui deviendra la devise même de «

l’écossisme » ancien et accepté, provient de Ramsay, le secrétaire de Fénelon (1651-1715), puisl’intime de Madame Guyon (1648-1717) – un Ramsay qui se rendit en 1707 à Cambrai où il se mit auservice de Fénelon dont il devint l’ami et le secrétaire, se convertissant à son contact au catholicisme(Fénelon, à cette époque, vivait retiré dans son diocèse, faisant les frais de l’emportement « anti-quiétiste » et de l’atmosphère générale de suspicion à l’égard de la mystique d’abandon) -, et que sonidée, exposée en 1736, est nourrie des idées de la mystique abstraite ainsi que des conceptionspolitiques de « l’Imperium Europa » – traduites en termes « guelfes » par le savoisien ChevalierBienfaisant de la Cité Sainte, Joseph de Maistre (1753-1821), Josephus Eq. A Floribus, qui sesouviendra dans son ouvrage « Du Pape« , que cette perspective, en un mode plus discret, mais non

moins européen, se trouve au cœur du projet organique de l’Ordre fondé en 1778 à Lyon par Jean-Baptiste Willermoz.

Néanmoins, il convient de l’affirmer en toute honnêteté, et même si nous devons le faire à

contretemps de l’uniformisation « convenable » de l’actuel discours maçonnique, le projet desexpressions contemporaines de l’écossisme en diffère nettement : le Mystère surnaturel del’Évangile, s’y trouve dissimulé, dans l’échelle graduelle de ses récits symboliques, comme une« possibilité » anecdotique, un « rameau détaché du tronc commun[1] » de l’héritage mythologiquecomposite de l’humanité ; la confusion babélienne et l’illusion prométhéenne y dominent, le faisantculminer en ses « sommets », avec la perspective dominatrice d’un « Saint-Empire » perméable auxéléments de la Modernité, où se profile l’ombre inquiétante de la lignée caïnite et du meurtre. Ilignore évidemment – est-il nécessaire de le rappeler ? – la perspective du Salut et, plus encore, cellede la réintégrationde l’homme dans ses primitives propriétés et son essence divine, fondatrice desInstructions willermoziennes, ce qui lui confère son caractère « apocryphe. » Et désignant ceux qui« ont surchargé leurs cérémonies de nouvelles productions toujours plus chimériques et plus absurdesles unes que les autres[2] », la Réforme maçonnique de Lyon, rejette avec vigueur, les éléments decette « source entachée et qui plus est, réprouvée par l’Éternel[3]. »

On ne peut être plus clair. Au titre de ce sursaut, on ne négligera pas ce clin d’œil de l’Histoire, lorsqu’une nouvelle

initiative, plus tardive, se fit jour : « Paris, le 20 juin 1910[…] Nous, chevaliers Bienfaisants de la Cité Sainte du régime Écossais R. et Templier, 33°

inscrits comme tels au Suprême Conseil du Rite Écossais Ancien et Accepté de Suisse, membresactifs de la Maçonnerie régulière en France et faisant partie de ses Ateliers supérieurs (GO etREAA) : Informons le plus fraternellement le GODF de ce qui a été fait, afin que les dispositionsdu Traité de 1811 nous soient fraternellement appliquées. Les Droits Maçonniques au réveilrégulier de nos Loges sont exposés dans notre Patente ci-jointe concernant la collation des Hauts-Grades de notre ordre.

Veuillez agréer…Le Préfet délégué de l’Ordre Dr Camille Savoire, CBCS, 33°Le Commandeur, Dr E. de Ribaucourt, CBCS, 33°Dr G. Bastard, CBCS, 33° »Il est donc temps, en cette période inversée – singulièrement marquée par les forces ténébreuses

de la contre-tradition – , de rendre son sens dialectique à la devise de l’écossisme, en lui redonnant,

dans ce monde où « l’ordre » (sic) est devenu une abomination obscure et les voies initiatiques desantres infectées par les miasmes de l’Adversaire – qui plus est frappées et dévoyées en diffusant laplus totale corruption spirituelle – , sa capacité ontologique véritable :

« Chao ab Ordo » !

[1] René Guénon, Introduction générale à l’étude des doctrines hindoues, 1921[2] Extrait du Code Maçonnique des Loges réunies & rectifiées (1778) qui indique, en son

introduction, que « des Maçons de diverses contrées de France, convaincus que la prospérité et lastabilité de l’Ordre Maçonnique dépendaient entièrement du rétablissement de cette unité primitive(…), enhardis dans leurs recherches par ce qu’ils avaient appris sur l’ancienneté de l’Ordre desFrancs‐maçons, fondé sur la tradition la plus constante, sont enfin parvenus à en découvrir le berceau; avec du zèle et de la persévérance ils ont surmonté tous les obstacles et en participant aux avantagesd’une administration sage et éclairée, ils ont eu le bonheur de retrouver les traces précieuses del’ancienneté et du but de la Maçonnerie.

[3] Jean-Marc Vivenza, René Guénon et la tradition primordiale, éditions du Simorgh, 2012,p.20Permalink: https://willermoz.com/2016/01/24/petite-lecon-de-la-lecon-de-lyon/

#53

Le Régime Ecossais Rectifié

Revue officielledu Directoire National Rectifié de France-Grand Directoire des Gaules

Numéro « Hors Série » : – 92 pages – (15 € port compris) – disponible sur commande :

[email protected]

IntroductionI – Nature du Régime Écossais Rectifié

II – Le retour du Régime Écossais Rectifié en FranceIII- Évolution vers le spiritualisme de Camille Savoire

IV – Vers le réveil complet du Régime Écossais Rectifié en FranceV – Constitution du Grand Directoire des Gaules (20 & 23 III 1935)

VI – Constitutionde la Grande Loge du Régime Rectifié de France (24 X 1935)

VII – Mise en sommeildu Grand Directoire des Gaules (3 IX 1939)

VIII – Éclipse du Grand Directoire des Gaules (15 XII 1946)IX – Réveil du Grand Directoire des Gaules (15 XII 2012)

ConclusionAnnexes :

Annexe I : Charte-Patente constitutivedu Grand Directoire des Gaules (20 & 23 mars 1935)

Annexe II : Traité d’Alliance et d’Amitié entrele Grand Directoire des Gaules et le Grand Prieuré d’Helvétie, 25 juillet 1935.

Annexe III : LES PRINCIPES DE LA « REFONDATION »DE L’ORDRE EN 10 POINTS

Site virtuel du Phénix Renaissant

LE PHÉNIX RENAISSANTPermalink: https://willermoz.com/2016/09/19/481/

#54

Bibliothèque Municipale de GrenobleFonds Prunelle de Lière, dossier T.4188, XXX, 02. Léonard Joseph Prunelle de Lière (1740-1828), est un personnage attachant, dont le rôle, trop

méconnu auprès de Louis-Claude de Saint-Martin (17431803), fut cependant très important, voireessentiel, notamment dans la publication des œuvres après la naissance au Ciel de celui qui se fitconnaître sous le nom du « Philosophe Inconnu ».

Né le 17 mars 1740 à Grenoble, avocat, propriétaire ayant des relations avec Saint Domingue,

botaniste et minéralogiste à ses heures, Prunelle de Lière s’éteingnit à Paris le 12 mars 1828. Sonnom d’ordre au sein du Régime Écossais Rectifié était : Josephus eques a Tribus oculis.

1. Un disciple précoce de Saint-Martin

Administrateur de la commune de Grenoble à compter de 1791, puis élu Député à la Convention

en 1792, il se prononcera contre la mort du Roi, et proposa un simple bannissement. Il souhaitait queLouis XVI soit jugé, non par les députés de la Convention (on imagine pourquoi), mais par descommissaires nommés dans les départements, laissant la possibilité au monarque d’en appeler aupeuple dans des assemblées primaires, c’est-à-dire constituées d’hommes choisis pour leur qualitésmorales.

Prunelle de Lière fut un authentique disciple de Saint-Martin, de manière précoce à compter de1776. Il passera les dernières années de sa vie dans une intense et fervente dévotion, traduisantdirectement de l’hébreu, les Psaumes et le livre d’Isaïe

(1821). Dès 1773 Prunelle de Lière est membre de la loge « La Bienfaisance » à l’Orient de Grenoble ;

membre en 1776 de l’Ordre des Chevaliers maçons Elus coëns de l’Univers, il assiste à presquetoutes les réunions et tenues à Lyon auprès de JeanBaptiste Willermoz (1730-1824). Son influence irad’ailleurs croissante au Collège métropolitain, puis au Collège de Grenoble, où il introduisit lesfrères grenoblois André Amar (1755-1816) et Joseph-Marie Barral de Montférat (1742-1828).

Voici comment Alice Joly, dans son ouvrage consacré à Jean-Baptiste Willermoz, décrit, à la fois

l’état du Collège de Grenoble, et la sensibilité spirituelle de Prunelle de Lière : « Le Collège de

Grenoble comprenait le Commandeur de Savye [sic pour Sayve],Yves Giroud, Dépositaire, Joseph Prunelle de Lière, Censeur, André Faure et FrançoisHenry de

Virieu. Tous avaient été reçus en 1779, l’année même où leur loge la Bienfaisance avait étérectifiée par le Directoire de Lyon. Nous sommes mieux renseignés encore sur la vie du Collège deGrenoble. Les lettres du comte de Virieu, celles de Giroud et de Prunelle de Lière, montrentqu’une collaboration intime s’établit très vite entre le Collège Métropolitain et sa filialedauphinoise. A Circulis [Virieu] se montrait Profès aussi convaincu qu’il s’était montré zéléChevalier Bienfaisant.

Il débordait d’enthousiasme : « je vous reconnais pour mon maître à tous égards, écrit-il àWillermoz en 1780 ; et cet aveu plaît à mon cœur sans coûter à mon amour-propre. » On peutsupposer que le Dépositaire des Profès apprécia à sa juste valeur ce témoignage de déférence, quilui venait de la part d’un de ses disciples les mieux nés ; quoi qu’il en soit, il le recommanda, en1782, à Claude de Saint-Martin, comme possédant toutes les qualités du véritable « homme dedésir. Léonard Prunelle de Lière, autre Grand Profès grenoblois, donnait aussi de grandessatisfactions à son directeur spirituel. Si Virieu l’emportait par l’activité, Prunelle le dépassaitpar la ferveur. La doctrine qu’on lui enseignait lui parut si importante, qu’auprès d’elle lesquestions d’administration maçonnique lui semblaient fastidieuses et de faible intérêt ; il trouvaitpesantes les dignités et les charges dont on l’avait revêtu.

Son désir d’être laissé tout entier à soi-même, le besoin de recueillement qu’il exprime font

penser qu’il était doué pour la vie contemplative et rappelle les désirs analogues qu’exprimasouvent Saint-Martin. Prunelle de Lière ne s’élevait pas jusqu’à souhaiter la vision béatifique etl’union avec Dieu ; selon la méthode particulière que lui avait transmise Willermoz, son «attention continue » se fixait plus modestement sur les « êtres bienfaisants », intermédiairescélestes. Cela était bien suffisant pour que son ambition intérieure fût fort vive et pour qu’elles’exprimât en termes émus. Il ne critiquait en aucune façon le but idéal que son maître proposait àses efforts, mais sentait quelle difficulté il y a à se dégager véritablement de toutes les chosessensibles et matérielles, pour faire renaître en soi l’Homme-Dieu primitif. » [1]

1. Au service de l’œuvre du Philosophe Inconnu

Lié au sénateur Lenoir-Laroche (1749-1825) [2], Prunelle de Lière fut immédiatement averti par

ce dernier de la Naissance au Ciel du Philosophe Inconnu, le 14 octobre 1803 ; Louis-Claude deSaint-Martin était en effet venu rendre visite ce jour là à ses amis dans leur propriété d’Aulnay dontil aimait la douceur. [3]

Ce que l’on sait moins, c’est qu’à la disparition du Philosophe Inconnu, c’est Prunelle de Lierre

qui, aidé par Gilbert, recueillit et sauva de l’oubli et de la dispersion une grande partie de l’héritagelittéraire de Saint-Martin. C’est lui qui paya à sa sœur, Mme de l’Estenduère, devenue l’uniquehéritière du Philosophe Inconnu, les manuscrits des traductions de Jacob Boehme (1575-1624), c’estPrunelle de Lierre, enfin, qui se chargea de couvrir les frais de l’impression des « Quarantequestions sur l’âme », et de la « Triple vie de l’homme ».

Par ailleurs, c’est encore lui qui s’engagea à verser la somme nécessaire pour l’impression de la

Notice sur Saint-Martin, qu’écrivit Tourlet [4] ; l’impression de la notice a coûté à Prunelle deLierre 60 livres payées le 11 floréal an 11. Toute la correspondance et les factures concernantl’impression des œuvres de Boehme traduites par Saint-Martin, échangées entre Prunelle de Lierre etla librairie Migneret, est d’ailleurs conservée à la Bibliothèque Municipale de Grenoble dans lefonds Prunelle de Lierre (MS 90592) [5].

III. La fervente piété d’un initié selon l’interne D’autre part, il convient de savoir que Prunelle de Lière sera l’objet d’une lettre non datée, mais

qui doit être selon toute vraisemblance de 1775, de recommandation de la marquise de Lusignan àJean-Baptiste Willermoz : « Monsieur Prunel (sic) vous remettra ma lettre Monsieur. C’est unehonnête âme et sensible, il a vivement désiré d’être des nôtres. M. D’Hauterive l’a rudoyé, sansemployer aucun raisonnement. Un homme accoutumé à l’étude et aux sciences goûte peu cettemanière. Il était parfait athée. J‘ai pris une marche tout autre que d’Hauterive pour le tirer de là(la persuasion) je le vois au point de la prière […]. Il a retardé son voyage, laissé ses affairespour voir M. de Saint-Martin, je le lui faisais attendre, espérant qu’il changerait sa situation,mais ses affaires le commandent, il part bien fâché de ne rien avoir. Voyez Monsieur ce que vouspouvez faire pour lui. Vous ferez une bonne action, il sait par cœur le livre Des erreurs et de lavérité. » [6]

*Il y a lieu de signaler enfin, une œuvre intéressante de Prunelle de Lière, le livre « Pensées et

considérations morales et religieuses », sorte de commencement de réponse aux questions d’ordredu Régime Écossais Rectifié, sa traduction des Prophéties d’Isaïe, nous replongeant à de nombreuxendroits dans les arcanes du Traité sur la réintégration des êtres de Martinès de Pasqually (+1774).

Notes.

1. A. Joly, Jean-Baptiste Willermoz, Un Mystique lyonnais et les secrets de la francmaçonnerie,Protat Frères, 1938, pp. 134-138.

2. Avocat et journaliste né à Grenoble, Jean-Jacques Lenoir-Laroche fut l’un des amis de Louis-Claude de Saint-Martin. Comme son compatriote et ami Prunelle de Lière, il était franc-maçon etChevalier Bienfaisant de la Cité Sainte. Dès 1789, il deviendra Grand Profès. Lenoir-Larochejouira d’une grande considération à Grenoble. Son mémoire intitulé Considérations sur laconstitution des états du Dauphiné applicables aux États généraux lui permettra d’étendre sanotoriété jusqu’à Paris. En 1789, il est nommé député. Après avoir quitté le Dauphiné, il sembleprendre ses distances avec la maçonnerie. Installé à Paris, il entrera au « Conseil des Anciens »,institution composée de deux cent cinquante membres de plus de quarante ans, mariés ou veufs.Ce conseil est, avec celui des Cinq-Cents, l’une des deux assemblées détenant le pouvoirlégislatif entre 1795 et le coup d’état de Brumaire (9-10 novembre 1799). Au cours de cettepériode, Jean-Jacques Lenoir-Laroche est en relation avec Louis-Claude de Saint-Martin. Dansson journal, ce dernier précise :

« J’ai passé délicieusement la soirée du dernier jour de l’an 1799 du XVIII e siècle chez ma bonneamie Mme Lenoir-Laroche, une des femmes des plus vertueuses que j’aie connues, et qui a desvues très louables sur l’éducation des jeunes personnes de son sexe. » (Mon portrait historique etphilosophique, 1789-1803, Paris, Julliard, 1961, n° 976, p. 399.)

Comment les deux hommes se sont-ils connus ? Il est possible qu’ils se soient rencontrés à Lyon,dans le cadre des activités du R.E.R., à moins que ce ne soit dans les salons de la duchesse deBourbon, que fréquentaient plusieurs anciens Chevaliers Bienfaisants du Lyonnais et du Dauphiné,comme Périsse-Duluc. À Paris, Jean-Jacques

Lenoir-Laroche et sa femme Claire demeurent au Carré Geneviève, École centrale du Panthéon, n°8, puis au 803 de la rue Porchet, faubourg Saint-Germain. En 1800, ils acquièrent une maison decampagne, dite La Colinière, à Aulnay, commune de Châtenay, près de Paris. Louis-Claude de Saint-Martin, attiré par la douceur de ce lieu surnommé la Vallée aux loups, aime à venir dans cette grandemaison. Il semble toutefois que ses relations avec ses amis aient été assez espacées pendant uncertain temps. Selon ce qu’on peut déduire de son Portrait, elles ne reprennent véritablement qu’en1803 :

« Pendant le voyage que j’ai fait à Chamarandes et à Lormois, Mme La Roche-Le Noir (sic) estvenue me chercher à Paris, pour renouer notre liaison qui s’était un peu ralentie. J’ai trouvé cettedigne personne aussi excellente qu’à son ordinaire. Mais son mari, que j’ai revu aussi dans lemême temps, m’a paru être actuellement en avant de sa femme ; tandis qu’antérieurement, c’étaitla femme qui m’avait paru en avant de son mari. » ( Mon portrait…, op. cit., n° 1102, p. 432.)

Jean-Jacques Lenoir-Laroche s’occupera auprès d’Antoine Lamaignère, juge de paix du premierarrondissement de Paris, lieu où Saint-Martin était domicilié, des formalités administrativesoccasionnées par le décès du Philosophe inconnu. (À cette époque, il habitait au n° 668 de la rueSaint-Florentin, actuellement le n° 5 de la même rue). Le sénateur avait-il, comme on le prétend, tiréun trait sur ses activités maçonniques ? Notons qu’il reste en relation avec Jean-Baptiste Willermoz.Dans l’une de ses lettres datée de 1811, il évoque en des termes chaleureux celui qu’il nomme «notre ami Saint Martin » (Ms 5890, bibliothèque de Lyon).

3. Dans son Portrait historique et philosophique, le Philosophe inconnu évoquera le mélange dejoie et de mélancolie que lui procurait la campagne à Aulnay :

« La vue d’Aulnay, près Sceaux et Chatenay, m’a paru agréable autant que peuvent me le paraîtreà présent les choses de ce monde. Quand je vois les admirations du grand nombre pour les beautésde la nature, et les sites heureux qu’elle nous présente, je rentre bientôt dans la classe desvieillards d’Israël qui, en voyant le nouveau temple, pleuraient sur la beauté de l’ancien (1erd’Esdras 3, 1213). » (Mon portrait…, op. cit., n° 1106, p. 433.)

Le 14 octobre 1803, Saint-Martin vient passer la journée à Aulnay. Il ignore que La Colinièresera sa dernière demeure. En effet, le lendemain, Lenoir-Laroche écrit à Prunelle de Lière :

« Venez nous voir, mon cher Delierre ; nous avons besoin de nous consoler mutuellement de laperte commune que nous venons de faire et à laquelle vous ne vous attendez sûrement pas. Cepauvre St Martin !… il est venu nous voir hier à Aulnay, il est arrivé à trois heures ; il s’est mis aulit à dix heures assez bien portant. À onze il n’était déjà plus. C’est un épanchement dans lapoitrine. Nous vous dirons les détails : Demain nous repartons pour le faire ensevelir, mais nousne partirons pas avant dix heures du matin. Si vous pouviez venir auparavant, ce serait unegrande satisfaction pour nous. Je ne puis vous en dire davantage. » (Ms n° 2023, Bibliothèquemunicipale de Grenoble).

4. Cf. Tourlet, Notice historique sur les principaux ouvrages du Philosophe Inconnu et sur leurauteur Louis-Claude de Saint-Martin, Archives littéraires de l’Europe, t. I, Paris, 1804.

5. « L’élu coën, chevalier a Tribus Oculis et grand profès (Lyon, 1779) Léonard-Joseph Prunellede Lierre (ou de Lière), mandataire de la sœur du Philosophe inconnu pour sa successionlittéraire, avait copié les exemplaires de Saint-Martin (FZ), après son décès ; les copies dePrunelle sont conservées à la Bibliothèque municipale de Grenoble (BMG) et Alice Joly en a

publié une, n° 39, pour la première fois, in AJ, pl. VIII, h.t. entre p. 252-253. Voir un premierétat sommaire des papiers de Prunelle de Lierre à la BMG in Bibliographie générale desécrits de Louis-Claude de Saint-Martin (Paris, l967, h.c. ; ex. communicables à la B.N.F. et àla bibliothèque de la Sorbonne ; A paraître dans I’Esprit des choses, à partir du n°18, 1997) ;cf. « Histoire du fonds Z », étude en tête du premier volume (« Franc-maçonnerie ») del’édition collective du fonds Z, à paraître. L’original de certaines copies de Prunelle manquedans le fonds Z ; l’édition collective de FZ , volume II (« Théurgie »), publie donc ces copies. »(R. Amadou, Préface aux Leçons de Lyon)

6. Bibliothèque de Lyon, MS 5829.

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