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FRANCISCO CANDIDO XAVIER Lumière Céleste 1

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Un clic sur l'image et vous avez l'ouvrage en WORDFRANCISCO CANDIDO XAVIERLumière CélesteCette œuvre nous décrit la réalité du monde spirituel dans un style léger et agréable. Elle nous dépeint une vie faite de travail qui, au fond, n'est pas si différente de celle vécue sur la Terre, à l'exception de la forme sous laquelle se présente la matière.Tout en indiquant les chemins que l'Esprit incarné doit par¬courir pour progresser, elle met en évidence le fait que la con¬naissance de la vérité doit être accompagnée d'actions réalisées avec dévouement et persévérance au service du bien.Elle nous montre également 1’échange existant entre les deux mondes à travers des contes et des chroniques pour nous guider dans notre vie quotidienne. Nous apprenons aussi que nous pouvons toujours compter sur l'intercession des bons Esprits, dès lors que nous faisons l'effort de nous rénover avec bonne volonté et que nous sommes prêts à renoncer à tout ce qui porte préjudice à notre processus évolutif.Lorsque l’élève est prêt, le maître apparaît.

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FRANCISCO CANDIDO XAVIER

Lumière Céleste

Dicté par l'Esprit Frère X

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FRANCISCO CANDIDO XAVIER

Lumière Céleste

Cette œuvre nous décrit la réalité du monde spirituel dans un style léger et agréable. Elle nous dépeint une vie faite de travail qui, au fond, n'est pas si différente de celle vécue sur la Terre, à l'exception de la forme sous laquelle se présente la matière.

Tout en indiquant les chemins que l'Esprit incarné doit parcourir pour progresser, elle met en évidence le fait que la connaissance de la vérité doit être accompagnée d'actions réalisées avec dévouement et persévérance au service du bien.

Elle nous montre également 1’échange existant entre les deux mondes à travers des contes et des chroniques pour nous guider dans notre vie quotidienne. Nous apprenons aussi que nous pouvons toujours compter sur l'intercession des bons Esprits, dès lors que nous faisons l'effort de nous rénover avec bonne volonté et que nous sommes prêts à renoncer à tout ce qui porte préjudice à notre processus évolutif.

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Lorsque l’élève est prêt, le maître apparaît.

Edition brésilienne originale

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OUVRAGES DEJA TRADUITS EN FRANÇAIS

Série : André Luiz (Collection La vie dans le monde Spirituel) 1-161. Nosso Lar, la Vie dans le Monde Spirituel, 2. Les Messagers3. Missionnaires de la Lumière 4. Ouvriers de la Vie Eternelle 5. Dans le Monde Supérieur 6. Agenda Chrétien 7. Libération, par l'esprit André Luiz 8. Entre le Ciel et la Terre 9. Dans les Domaines de la Médiumnité 10. Action et Réaction 11. Evolution entre deux Mondes12. Mécanismes de la Médiumnité13. Et la Vie Continue14. Conduite spirite 15. Sexe et destin 16. Désobsession

Série : Emmanuel Les Romans de l’histoire 17. Il y a deux mille ans18. 50 ans plus tard19. Paul et Etienne20. Renoncement21. Avé Christ

Série: Source Vive22. Chemin, Vérité et Vie. 23. Notre Pain24. La Vigne de Lumière25. Source de Vie

Divers26. Argent27. Choses de ce Monde (Réincarnation Loi des Causes et Effets)28. Chronique de l’Au-delà29. Contes Spirituels30. Directives31. Idéal Spirite32. Jésus chez Vous33. Justice Divine34. Le Consolateur35. Lettres de l’autre monde36. Lumière Céleste

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37. Matériel de construction38. Moment39. Nous40. Religions des Esprits41. Signal vert42. Vers la lumière

Sommaire

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1. Devant le grand rénovateur 82. Mains rouillées 103. Petite histoire de disciple 134. Aux portes du Ciel 165. La mission 186. L'ange serviteur 207. Dans le royaume terrestre 228. Directive 249. Remarques d'un ancien 2610.Un homme du monde 2811.Eclaircissement 3012.L'ange réparateur 3213.Comment traiter les médiums 3414.Orientation chrétienne 3615.Le candidat empressé 3816.Perte irréparable 4017.Remède contre les tentations 4218.L'incompréhensible dévot 4419.Un oracle différent 4620.En guise de réponse 4821.Pour expliquer 5022.Juste allégation 5223.Une lettre sans prétention 5424.Dans le règne animal 5625.Esprits malades 5826.La protection de saint Antoine 6027.Tout est relatif 6228.L'homme et le bœuf 6429.L'esprit qui manquait 6630.Vieil apologue 6831.Les plus grands ennemis 70

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32.Dans une ville céleste 7233.Au souvenir de la parabole 7434.Vers l'ascension chrétienne 7635.Une remarque inattendue 7836.Les hésitations de Pierre 8037.Candidat indisponible 8238.Entre le bien et le mal 8439.La question de l'inspecteur 8640.Une prière réajustée 8841.Une interprétation rigoureuse 9042.Jusqu'à Moïse 9243.Par loyauté fraternelle 9444.L'apprentissage de Judas 9645.L'écriture de l'Évangile 9846.La révolution chrétienne 10047.En souvenir du philosophe 10248.L'attitude du guide spirituel 10449.Hommes prodiges 10650.Billet à Jésus 108

Biographie 110 Liste des ouvrages en langue brésilienne 113

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Lumière céleste

Les créations de l'ombre se meuvent dans les profondeurs de la vallée humaine...Ce sont les poulpes millénaires de la guerre et de la destruction. Ils se relèvent des

cendres déposées par les siècles et menacent la civilisation.Ils envahissent les pays et dominent les peuples, s'engouffrent dans les édifices

religieux et les foyers, raillent les idées supérieures qui nourrissent l'humanité et séparent les frères en brandissant le glaive de la mort.

Pourtant, la voix du berger divin émerge des zones obscures où persévèrent les hurlements du mal:

« Moi, néanmoins, je vous dis :Soyez miséricordieux.Aimez vos ennemis.Bénissez ceux qui vous maudissent.Faites du bien à ceux qui vous haïssent.Priez pour ceux qui vous font du tort et qui vous persécutent.Bénissez votre croix.Si quelqu'un vous force à faire un mille, faites-en deux avec lui.Si quelqu'un veut plaider contre vous et prendre votre tunique, laissez-lui encore

votre manteau.Persévérez dans le bien jusqu'au bout.Restez courageux ! »Dans les conflits idéologiques actuels, les forces perturbatrices de la haine et de la

discorde hurlent enragées dans toutes les directions :— Retournons à la barbarie ! Descendons dans les ténèbres !...Mais attentifs à l'assemblée céleste, les vrais chrétiens de toutes les écoles et de

toutes les tendances en communion autour du Maître répètent en contemplant les lueurs du monde futur :

- Lumière céleste ! Lumière céleste !...

Frère X

Pedro Leopoldo, le 14 décembre 1947

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Devant le grand rénovateur

Seigneur, au souvenir de ta crucifixion entre deux malfaiteurs, alors que tu exerçais ton ministère d'amour universel, nous entendons monter les appels de différents courants religieux présents dans le monde. Ils évoquent ton nom pour stimuler les agitations confuses de la rénovation politique qui secouent la planète...

Ils soutiennent que tu es le plus grand révolutionnaire de tous les temps. Ils affirment que tu ébranlas les fondements sociaux de l'ordre humain, que tu changeas le cours de la civilisation, que tu transformas les peuples de la terre.

Qui pourrait te nier, Seigneur, la condition d'ambassadeur céleste ? Qui pourrait méconnaître ton apostolat de rédemption ?

Or, en divulguant le message de la Bonne Nouvelle, jamais tu n'insultas le gouvernement établi...

Ami de tous les souffrants et de tous les nécessiteux, jamais tu ne t'unis aux malheureux pour t'aventurer à stimuler la haine ou l'indiscipline. Tu t'approchais des désemparés pour guérir leurs blessures, pour leur enseigner la voie du bien, pour leur tendre tes mains bienfaitrices et empressées. Lorsque tu t'adressais à la foule anonyme et affligée, tu ne préconisais pas, au nom du Père éternel, de mouvements armés irrévérencieux vis-à-vis des autorités légalement constituées. Plutôt que d'inciter à la révolte, tu recommandais de respecter la Loi de Moïse, d'honorer la dignité des prêtres. Tu assurais que le royaume de Dieu ne surgirait pas sous des signes extérieurs, mais à travers l'élévation spirituelle de l'homme vraiment désireux de profiter des dons divins, quelle que fût sa race ou sa nationalité. Lorsque tu exposais les principes supérieurs au cœur populaire, tu ne cherchais pas à te faire remarquer auprès du pouvoir romain dominateur sous prétexte de soutenir l'esprit de liberté. Tu conseillais plutôt de respecter César en payant le tribut qui lui était dû.

Quand tu érigeais de nouvelles colonnes dans le temple de la foi ardente, que tu invoquais des mains honnêtes et des cœurs purs au service du Ciel, tu ne méprisais pas la légion des pécheurs et des criminels qui t'approchait assoiffée de transformation pour réaliser la tâche bénie... Tu ne leur parlais pas d'une tribune teintée d'or pour souligner la distance vous séparant. Tu étais en communion avec tous ceux qui croisaient ton chemin dans la vie alors que tu foulais l'herbe des sentiers que tu parcourais. Tu étreignais les lépreux et les délinquants, les avares et les provocateurs, les femmes et les filles infortunées. Tu n'imposais pas non plus d'obligation qui aurait pu impliquer la gestion des intérêts publics, ni ne tenais de propos malicieux pour pousser au désespoir. Tu demandais à peine la rénovation des cœurs pour que la lumière du royaume céleste pénètre les profondeurs de l'être.

Tandis que tu soutenais l'idéal sublime d'obéissance à Dieu, tu ne te prononçais jamais pour la mort ou la punition des compagnons moins courageux. Plein de confiance en l'avenir, tu supportais les faiblesses de tes disciples les plus chers, certain que si, dans les moments les

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plus difficiles, ils pouvaient t'être infidèles, dans les grandes heures, ils ne sauraient trahir le Père. De sorte que tu ne perdais pas courage, tu semais la fraternité et tu portais secours en éduquant ton prochain à travers les propos que tu tenais et en donnant l'exemple.

Si tu plaçais ta confiance en un vaste monde où la solidarité régnerait dans les relations humaines, jamais, tu n'essayas d'imposer par la force des directives absolues. Tu commençais toujours par faire vivre en toi les desseins divins que tu révélais dans ton cœur en cultivant le travail et l'espoir avec une fidélité suprême pour le pouvoir divin. Lui qui donna des saisons appropriées à la semence et à la germination, à la floraison et à la fructification. À aucun moment, tu ne fis appel à la violence sous prétexte de devoir répondre à un besoin d'ordre supérieur. De tout ton apostolat, jamais, tu ne dédaignas la moindre occasion de soutenir ton prochain en l'aidant à s'édifier.

De sorte que tu étreignais les vieux et les malades, les déshérités et les attristés, les blessés et les enfants...

Seigneur, jamais, tu n'affirmas que les disciples devaient dominer Rome pour être utiles à la Judée ni ne promis les premières places sur la voie de la gloire à tes compagnons bien-aimés, pas même à Jean et à Jacques qui te furent si chers. Cependant, tu garantis la victoire sublime à tous les hommes qui seraient les serviteurs dévoués de leurs semblables par amour pour le Père céleste.

Invariablement, tu implorais l'aide et la protection, le pardon et l'assistance pour ceux qui te persécutaient gratuitement par ironie et ingratitude...

Ton ordre était celui de l'amour et de la paix pour que tout esprit se convertisse au bien infini...

Pourtant, de nos jours encore, on improvise des guerres sanglantes et les conflits en ton nom abondent. Il est des compagnons qui se disputent les situations de prestige pour servir ta cause, comme si le sacrifice personnel n'était pas la clef de ton œuvre rédemptrice. D'autres rappellent tes enseignements pour justifier l'insoumission et le désordre.

Oui, tu fus en vérité le grand rénovateur. Tu transformas les siècles et les nations en travaillant et en pardonnant, en aidant et en servant, en espérant et en aimant toujours !...

Un jour, sur la place publique, alors que tu étais seul avec une humble sœur malheureuse que la population ignorante avait fustigée, pris d'émoi, tu lui demandas :

— Femme, où sont les persécuteurs qui t'accusent ? Aujourd'hui, Maître, quoique je déplore le temps que j'ai moi-même perdu sur la terre, tout aussi trompé et intoxiqué que les autres, le souvenir de la croix infâme me revient en mémoire. Seul à donner l'exemple de l'amour et du renoncement, de l'abnégation et du martyre, j'ose te demander avec les larmes de mon profond repentir :

— Seigneur, où sont les rénovateurs qui t'honorent ?

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Mains rouillées

Quand Joachim Sucupira abandonna son corps alors qu'il avait une soixantaine d'années, il nous laissa l'impression qu'il monterait directement au Ciel. Il avait vécu loin du monde dans le précieux confort qu'il avait hérité de ses parents. Il parlait peu, marchait encore moins, ne faisait jamais rien.

Il portait toujours des habits impeccables. La cravate qu'il exhibait devait être hors de prix, une petite orchidée signalait le revers de son veston et un foulard admirablement bien plié tombait irréprochablement de sa petite poche. Son visage dénonçait son goût prononcé pour la distinction. Chaque matin, il se rendait chez un barbier renommé pour retrouver un peu de son expression juvénile. Ses cheveux bien coupés, quoique rares, couvraient son crâne avec élégance.

Il se disait chrétien. Le fait est que vivant isolé comme il l'était, il n'aurait pas fait de mal à une mouche. Mais il affirmait être terrifié par les religieux en tout genre. Il détestait les règles catholiques, critiquait les organisations protestantes et prenait les spirites pour des fous. Il acceptait Jésus à sa façon, non à celle de Jésus.

Ses facilités économiques transitoires faisaient que dans la vie il se permettait de reporter les leçons bienfaitrices de l'assistance fraternelle vis-à-vis de son prochain.

Il étudiait, étudiait, étudiait...Il était chaque fois plus convaincu que la meilleure ligne de conduite à suivre était la

sienne. Rester loin de tout le monde pour éviter toutes complications et toutes déceptions. Il se disait simplement qu'il effectuait ainsi une préparation appropriée pour sa nouvelle existence après la tombe. De sorte qu'on pouvait penser que la désincarnation d'un homme qui cherchait autant à se préserver serait un voyage sans escale vers la cour céleste.

Il donnait à ses proches suffisamment d'argent pour subvenir à leurs besoins d'aventures et de fantaisies pour qu'ils ne le dérangent pas. Il distribuait d'importantes aumônes pour résoudre les problèmes de charité. Il vivait loin du monde pour ne pas pécher. Des amis intimes se demandaient même : Joachim, ne serait-il pas le type de religieux soi-disant parfait ? Loin de toutes les complications de l'expérience humaine en vertu d'une solide fortune qu'il avait héritée de ses parents, il était impossible que le paradis ne lui soit pas accordé.

Or, à présent, la responsabilité à laquelle il se trouvait confronté ne correspondait pas à l'attente générale.

Une fois désincarné, Sucupira entra dans une sphère d'action où il semblait passer inaperçu par les grands serviteurs célestes. Il les voyait s'agiter avec brio dans les champs et dans les villes. Ils donnaient discrètement de divines recommandations aux oreilles de tous ceux qui réalisaient des tâches édifiantes. Il en vint même à voir un ange qui étreignait singulièrement sa vieille cuisinière analphabète.

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Mais quand il s'approcha des messagers du Ciel, ils ne le reçurent pas.Il arrivait à marcher, voir, entendre, penser. Pourtant, pauvre Joachim ! Ses mains et

ses bras restaient inertes. On aurait dit des antennes en marbre, irrémédiablement collées à son corps spirituel. Quand il voulait assouvir sa soif ou sa faim, il était obligé de se traîner par terre, car il ne pouvait s'aider de ses mains.

Pendant longtemps, il dut supporter un tel malheur. Il multipliait les appels et les larmes. Puis, un beau jour, il fut conduit par une entité charitable à un petit tribunal de secours qui fonctionnait, de temps à autre, dans les régions inférieures où il vivait repenti.

Le bienfaiteur qui assumait les fonctions de juge avait réuni une assemblée d'Esprits pénitents. Il leur déclara ne pas avoir beaucoup de temps en raison des nombreuses obligations qui le retenaient au niveau supérieur. D'ailleurs, il n'était là que pour résoudre les cas les plus pénibles et les plus urgents.

De dévoués compagnons du bien avaient sélectionné une demi-douzaine de souffrants qui allait être entendue, dont Sucupira qui venait en dernier avec ses bras pétrifiés.

Il pleura, supplia, se lamenta. Quand il fut prêt à faire un rapport général et détaillé de son existence passée, le juge lui fit :

- Non, mon ami, il ne s'agit pas de ta biographie. Nous avons peu de temps. Passons à ce qui nous intéresse.

Il l'examina longuement et lui fit observer quelques minutes plus tard :- Ta merveilleuse acuité mentale démontre que tu as beaucoup étudié.Il fit une courte pause et se mit à lui demander :- Joachim, as-tu été marié ?- Oui- Est-ce que tu consacrais du temps à ton foyer ?- Ma femme s'occupait de tout. -Tu as eu des enfants ?- Oui- Tu t'intéressais à eux quand ils étaient petits ?- Nous avions plusieurs domestiques et du personnel pour ça.- Et dans leur jeunesse ?- Naturellement, ils étaient sous la bonne garde des professeurs.- As-tu exercé une profession utile ?- Je n'avais pas besoin de travailler pour gagner mon pain.- Tes amis n ont-ils jamais été une source de problème pour toi ? -J'ai toujours cherché

à fuir les amitiés par peur d'avoir des ennuis. Je ne voulais pas nuire ni qu'on me nuise.Le juge marqua un temps d'arrêt, réfléchit longuement et continua :- Avais-tu une religion ?- Oui, j'étais chrétien, lui répondit Sucupira.- Tu aidais les catholiques ?- Non. Je détestais les prêtres.- Tu coopérais avec les Eglises réformées ?- Certainement pas. Ils sont bien trop intolérants.- Tu étais en contact avec les spirites, alors ?- Non. Je craignais leur présence.- As-tu secouru des malades au nom du Christ ?- La terre a de nombreux infirmiers.- Tu as déjà aidé des enfants abandonnés ?- Il y a partout des crèches pour cela.- As-tu écrit des messages de réconfort ?- Pour quoi faire ? Le monde est plein de livres et d'écrivains.- Tu préférais le marteau ou l'enclume ?

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- Aucun des deux.- Tu secourais les animaux sans défense, alors ? -Non.- Tu aimais cultiver la terre ?- Jamais.- As-tu déjà planté des arbres comme source de bienfaits ?- Non plus.- Tu te consacrais à la canalisation des eaux pour protéger les paysages asséchés ?Sucupira eut un geste de dédain et lui fit :- Je ne me suis jamais intéressé à ça.L'instructeur le questionna sur toutes les activités édifiantes connues sur la planète. À

la fin de l'interrogatoire, il lui fit sans plus tarder :- Ton cas s'explique : tu as les mains rouillées.Devant l'expression abasourdie de son interlocuteur amer, il lui fit :- Il s'agit de talent non utilisé, mon ami. Ton remède consiste à retourner apprendre ta

leçon. Répète ton cours terrestre.Déconcerté, Joachim voulut mieux comprendre.Le juge, néanmoins, n'avait plus de temps à perdre, il lui demanda de s'adresser à un

autre compagnon.Roger qui était originaire de Rio de Janeiro, désincarné depuis 1945, le reçut avec un

regard aimable et ravi. Après avoir écouté ses longues lamentations, il lui dit patiemment :- Allons, Sucupira. Tu entreras dans la file dans quelques jours.- Quelle file ? demanda le malheureux, bouche bée.- La file de la réincarnation, ajouta le joyeux assistant. Puis posant son bras sur

l'épaule du paralytique, il conclut en souriant :- Ce dont tu as besoin, Joachim, c'est d'agir...

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Petite histoire de disciple

Quand le Maître rendit visite à son disciple pour la première fois, il le trouva plongé dans la lecture des enseignements divins.

Il le vit absorbé à chercher la sagesse et lui dit :— Que le fils détenteur de la connaissance supérieure soit béni !Mais avant de continuer son chemin, il le confia aux bons soins de ses préposés.Plus tard, quand il revint le voir, il le surprit enflammé d'enthousiasme par le caractère

merveilleux des choses. Il se sentait dominé par les éclairages de la révélation et se proposait de les répandre partout sur la terre. Il voulait vaincre le monde pour le Seigneur suprême. Il multipliait les promesses de sacrifice personnel et interprétait théoriquement le salut comme un service absolu d'espoir contemplatif.

Le compagnon éternel caressa son front rêveur et lui fit :- Loué soit l'apôtre de l'idéal !Puis il continua son chemin, après l'avoir confié à de dévoués messagers. À une autre

occasion, il revint pour l'observer et nota de nouveaux changements. Le disciple était à présent guidé par une volonté combative. À travers la connaissance et l'idéal auquel il aspirait, il se croyait en possession de la réalité universelle et partait en guerre contre tous ceux qui n'avaient pas son degré d'évolution. Il tenait des propos incendiaires pour purifier, pensait-il, les cercles de la croyance religieuse. Il accusait, jugeait et punissait sans commisération. Il trouvait une étrange volupté à se faire de nouveaux ennemis. Il prétendait tout détruire et tout rénover. De sorte qu'il méconnaissait le respect dû à son prochain, il balayait les moindres règles d'éducation et assumait de graves responsabilités pour l'avenir.

Néanmoins, Fange compatissant, qui reconnaissait sa sincérité cristalline, caressa doucement ses mains inquiètes et lui fit :

— Que le défenseur de la vérité soit soutenu !Puis il repartit après l'avoir placé sous la protection de fidèles missionnaires.Lorsqu'il revint le voir à d'autres époques, il remarqua les différents changements qui

s'opéraient en lui. Le disciple prêchait systématiquement les principes édifiants qu'il avait adoptés en les conditionnant à ses points de vue. Il écrivait des pages véhémentes et faisait des discours émouvants. Il projetait sur ses auditeurs la vibration de sa foi. Il conduisait les masses. Son talent d'élocution tant à l'oral qu'à l'écrit en faisait un héros.

L'instructeur sublime l'étreignit et lui déclara :— Que le ministre de la parole céleste soit illuminé !Et il reprit son chemin après l'avoir laissé sous l'inspiration de valeureux émissaires.Après de longues années, l'être magnanime retourna le voir et remarqua combien il

avait changé. L'âme de l'apprenti exhibait de profondes blessures. La conquête du monde n'était pas si facile se disait-il avec amertume. Bien que sincère, il avait été confronté à

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l'hypocrisie. Désireux de pratiquer le bien, il était sans cesse visé par le mal. Il se voyait entouré d'épines. Il supportait les calomnies et les sarcasmes. Ridiculisé par ceux qu'il aimait le plus, il était plein de doutes et de craintes pernicieuses. Il se sentait incompris dans ses meilleures intentions. Quand il donnait du pain, il recevait des pierres en retour. S'il allumait la lumière, il provoquait les persécutions des ténèbres. Comme un affamé qui cherche à se nourrir, il lisait les livres saints. Il avait du mal à rester fidèle à ses idéaux. Il enseignait le chemin supérieur, le cœur lacéré et les pieds ensanglantés...

Le sage des sages sécha son abondante sueur et lui fit :— Bien-aimé soit le pèlerin de l'expérience !Et il continua sa route en le confiant à d'affectueux bienfaiteurs.Lorsqu'il revint le voir un peu plus tard, le Sauveur nota la situation surprenante qui

était la sienne. Pleurant intérieurement, le disciple reconnaissait que la maîtrise de soi était bien plus difficile que la conquête du monde. Dans les minutes culminantes de son apprentissage, il s'était aussi abandonné à l'emprise des forces inférieures. Quoique toujours debout, il savait personnellement combien la boue dans sa bouche avait un goût amer. Il avait cédé à de nombreuses reprises aux suggestions indignes qu'il combattait. Il avait appris que s'il était facile d'enseigner le bien aux autres, il était toujours difficile et douloureux de l'édifier en son for intérieur. Lui, qui condamnait la vanité et l'égoïsme, la volupté et l'orgueil, remarquait qu'il n'avait pas délogé de tels monstres de son âme. Il renonçait à se battre avec l'extérieur afin de se battre davantage avec lui-même. Il vivait sous la pression de la tempête rénovatrice. Conscient de ses faiblesses et de ses imperfections, il s'en remettait pardessus tout à Dieu. C'est ainsi que malgré sa peine, dans la prière et dans la vigilance, il soumettait à sa bonté infinie les problèmes personnels qui le torturaient.

Le divin ami sécha ses larmes et s'exclama :— Béni soit le frère de la douleur sanctifiante !Et il retourna à ses activités après l'avoir recommandé aux collaborateurs célestes.Après de nombreuses années, le Tout-Miséricordieux revint finalement le voir.

Lorsqu'il vit la situation qui était celle de son apprenti, il resta admiratif. Il était complètement rénové. Il préférait se taire pour que d'autres puissent se faire entendre. Il analysait les difficultés d'autrui à travers les tribulations par lesquelles il était passé. La compréhension dans son âme était douce et spontanée, sans la moindre supériorité humiliante. Il voyait partout des frères et était prêt à les aider, à les secourir sans se soucier d'obtenir la moindre récompense. À ses yeux, les enfants des autres devaient recevoir autant d'amour que ceux nés au foyer. Il comprenait les drames douloureux de ses voisins, honorait les personnes âgées et tendait des mains protectrices aux enfants et aux jeunes. Il lisait les écrits sacrés, mais percevait aussi la sagesse éternelle qui existe en l'abeille ouvrière, dans le nuage lointain ou dans le murmure du vent qui souffle. Il se réjouissait de la joie et du bien-être de ses amis, tout comme il partageait leurs malheurs. La convoitise et la jalousie, le mépris et la colère ne perturbaient pas son sanctuaire intérieur. Il ne ressentait pas le besoin de pardonner parce qu'il aimait ses semblables comme Jésus le lui avait enseigné. Il priait pour les adversaires gratuits qui surgissaient en chemin, convaincu qu'ils n'étaient pas mauvais, mais ignorants et incapables. Il aidait les ingrats tout en se souvenant que le fruit vert ne peut avoir la saveur de celui qui mûrit opportunément. Dans la solitude de ses prières de louange à Dieu, il pleurait de joie en reconnaissant l'extension des bénédictions qu'il recevait du ciel... Il interprétait les douleurs et les problèmes comme des possibilités substantielles d'amélioration. Les luttes étaient pour lui des étapes ascensionnelles. À ses yeux, les pervers étaient des frères malheureux, nécessiteux de compassion fraternelle. Sa parole ne condamnait jamais. Ses pieds ne marchaient pas en vain. Ses oreilles étaient toujours attentives au bien. Ses yeux voyaient plus haut. Ses mains aidaient sans cesse. Il syntonisait son esprit avec la sphère supérieure. Son plus cher désir, à présent, était de connaître le programme du Maître et de

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l'accomplir. Il prêchait la vérité et il l'enseignait à tous ceux qui venaient le voir pour l'entendre, de sorte qu'il ressentait un très grand plaisir à être utile. Heureux, il était toujours prêt à servir tout le monde. Il savait qu'il était indispensable de soutenir le faible pour ne pas être abattu par la fragilité, et d'aider le plus fort pour que la force mal appliquée ne l'avilît pas. Il cultivait la connaissance, l'idéal, l'enthousiasme, la combativité pour le bien, l'expérience bienfaitrice et la prière qui illumine. Mais par-dessus tout, il comprenait le besoin qu'il y avait à refléter la volonté divine dans le service rendu à son prochain. Ses paroles s'enduisaient de science céleste, l'humilité sincère était une glorieuse auréole sur son front. Où qu'il allât, les enfants de l'ombre se rassemblaient autour de lui. Dans son âme, ils venaient chercher la lumière qu'ils aiment presque toujours sans comprendre...

Lorsque le Seigneur le vit dans un tel état, il le prit dans ses bras et de cœur à cœur, il proclama :

— Bienheureux le serviteur fidèle qui cherche la volonté divine de Notre Père !Dès lors, il demeura pour toujours avec le disciple.

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Aux portes du Ciel

À l'extrême limite de la terre avec le ciel, un pèlerin accosta enveloppé dans un manteau de brume. Il dégageait une profonde pureté et une grande douceur. Son front révélait toute sa noblesse aux éclats diamantins qui rayonnaient dans toutes les directions. Un halo lumineux signalait sa présence.

Lorsqu'il fut reçu par l'entité angélique qui gérait l'important passage, il lui présenta sa plus grande aspiration : Entrer définitivement au paradis pour y jouir d'un repos béatifiant.

Quoiqu'il fût admiratif et respectueux devant un esprit aussi pur, le divin employé esquissa un geste comme s'il avait remarqué une vague imperfection presque imperceptible au regard inexpérimenté, et lui fit :

— Mon frère, je rends hommage à la beauté de ta pureté intérieure, néanmoins, voyons si tu as déjà acquis la vertu parfaite.

Ravi et souriant, le voyageur victorieux se tint à l'écoute.- As-tu déjà réussi à te remplir d'amour sublime ? demanda l'ange sur un ton

respectueux.- Grâce à Dieu ! répondit l'interpellé.— Exaltais-tu l'humilité ? -Oui.— Et gardais-tu fidèlement espoir ?— Tous les jours.— As-tu pratiqué le bien ?- Invariablement— As-tu cultivé la pureté ?— Avec un zèle extrême.— Donnais-tu l'exemple du travail édifiant ?— Tous les jours.— Gardais-tu la foi ?— Je m'en remettais au pouvoir divin par-dessus tout.— Enseignais-tu la vérité et la mettais-tu en pratique ?- De toutes mes forces.— As-tu fait preuve de patience ?— Je ne la perdais jamais.— Combattais-tu en ton for intérieur certains vices, tels que la vanité, l'orgueil,

l'égoïsme, la jalousie, l'entêtement et la discorde ?— Scrupuleusement.— Combattais-tu les maux qui tourmentent la vie, tels que la haine et la perversité, la

folie et l'ignorance, la brutalité et la stupidité ?- Toujours.

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L'ange l'interrompit, réfléchit pendant de longues minutes comme s'il était face à une grave énigme et demanda :

- Mon ami, as-tu déjà travaillé en enfer ?- Ah, ça non ! répondit le pèlerin scandalisé. Comment cela pourrait-il être ?L'agent céleste sourit à son tour, et lui fit remarquer :— // ne te manque que cela pour monter plus haut.- Oh ! Quel contresens ! objecta l'intéressé, comment servir parmi les génies

sataniques qui ont, en permanence, les yeux troublés par la malice, les oreilles tourmentées par les cris, les mains liées par les entraves du mal dominant, les pieds chancelants sur le sol instable, et toutes les facultés de l'âme dérangées par les tentations ?

— Oui, mon ami, souligna le préposé divin, le bien sert à sauver le mal, l'amour est fait pour que nous aimions, la sagesse est d'abord destinée à l'ignorant. La plus grande mission de la vertu est d'éliminer le vice et de soutenir l'obsédé. C'est pour cela que le Ciel ne perd pas l'enfer de vue...

À l'air étonné de son auditeur, il finit par conclure :— Retourne sur la terre, descends en enfer créé par l'homme et sers le Seigneur

suprême. Ensuite, reviens me voir... Alors, nous nous occuperons de ton passage. Rappelle-toi que même si le soleil se trouve à cent cinquante millions de kilomètres de ton monde, il envoie des rayons lumineux rédempteurs à l'abîme planétaire...

Puis le contrôleur de la porte céleste referma le passage légèrement entrouvert. Dans son manteau lilial, effaré et déçu, le pèlerin prit le temps de s'asseoir pour méditer un peu sur toutes ses conquêtes.

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La mission

Lorsque Pacheco se rendit pour la première fois à la réunion d'échange spirituel, Richard, un dévoué bienfaiteur de l'au-delà, lui annonça la précieuse tâche qu'il aurait à accomplir. Il avait été amené à renaître parmi les hommes pour réaliser une grande mission. Il cultiverait les bénédictions de Jésus, répandrait une vive lumière sur les ombres de la terre.

À cette idée, Pacheco se réjouissait déjà. Il pleurait de joie. Il se voyait devant de grandes foules de souffrants administrer les grâces émanant du Ciel. Dès lors, il se mit à attendre l'ordre venu directement du Plus-Haut pour procéder à l'exécution du lublime mandat dont il était porteur.

Attaché à la doctrine consolatrice des Esprits, il accepta de mettre au service du bien ses facultés médiumniques avancées qui s'étaient révélées de bonne heure ; quoiqu'il le fit un peu par Contrainte. Il n'était pas vraiment enclin au contact permanent avec les malheureux et les curieux, toujours nombreux parmi les morts et les vivants, néanmoins, il voulut essayer. Il attendait sa prometteuse mission pleine de preuves évidentes et se disait prêt à la recevoir en toute confiance.

Cependant, quelques mois plus tard, le jeune homme dénonçait une immense fatigue. Au bout de deux ans à peine, il jetait l'éponge. Il quitta le groupe qu'il fréquentait. Pacheco se retrancha dans le silence. Il avait décidé de retourner à la vie paisible de son foyer, car il ne voulait plus d'ennuis. À quoi bon se soucier d'un autre monde, quand sa chère femme et ses enfants aimants lui offraient déjà une oasis de paix ? Pourquoi convoiter d'autres ambitions quand il avait déjà celle d'assurer un beau pécule pour l'avenir de sa famille ? Il lisait les nouvelles du mouvement qui l'intéressait auparavant et s'en tenait à apprécier une bonne conversation entre compagnons.

De temps en temps, un ami lui demandait son avis sur la médiumnité et le spiritisme. Pacheco lui parlait, alors, solennellement de l'immortalité de l'âme. Il rapportait ses expériences et finissait toujours par conclure :

- À certaines occasions, les Esprits protecteurs ont déclaré que j'avais une grande mission à accomplir.

- Oh ! Mais, alors, pourquoi as-tu pris tes distances du mouvement spirite ?! C'était toujours la question qui venait à brûle-pourpoint.

Il croisait les bras et disait sur un ton supérieur :- Les idées sont respectables, mais les créatures... Elles s'imaginent que mes facultés

doivent servir à traiter des problèmes les plus mesquins de la vie. Un bon nombre voulait par mon intermédiaire dans quel secteur commercial ils pouvaient faire les meilleures affaires. D'autres voulaient des informations relatives à des trésors enterrés. Une foule de gens venait me voir pour trouver le moyen d'occulter des fautes graves, ou parce qu'ils voulaient convertir les entités spirituelles en piètres justiciers. J'étais impitoyablement harcelé pour cacher des

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crimes ou les démasquer. Je devais servir de médiateur entre maris et femmes pour réconcilier des couples qui avaient échoué par leur propre négligence. D'autres fois, mes collègues exigeaient que je m'occupe de leurs parents désincarnés. Je perdis ma tranquillité tant chez moi que dans la rue. Mes amis et mes parents conspiraient affectueusement contre ma paix. Sous prétexte que je devais pratiquer la charité, dans les rues, des queues grandissantes de nécessiteux et de curieux étaient toujours là à m'attendre. Pacheco s'interrompit, toussa légèrement, et continua :

— Au sein même de l'association, la vanité des compagnons déchaînait des passions difficilement tolérables.

La discorde déchirait tout le monde. Personne ne voulait servir. Ils voulaient tous commander et contrôler. L'obéissance due aux enseignements de Jésus et aux conseils des bons Esprits n'était qu'une façon de parler. Leur cœur en était bien loin. Les directeurs se disputaient pour des questions insignifiantes ; les frères abusaient de leur faculté d'analyse. Comment être utile à des organisations de ce genre ? Personne ne cherchait la vérité cristalline.

Tant les ignorants que ceux qui étaient cultivés suppliaient pour que la vérité s'adaptât à eux, à leurs besoins, à leurs cas... Devant tout cela...

Le narrateur se tut, prit un air réservé. Puis ils changèrent de conversation, car effectivement, l'exposition de Pacheco ne manquait pas de logique.

La vie, néanmoins, suivit son cours en se rénovant quotidiennement, et l'intelligent déserteur n'oublia jamais la mission promise par le généreux Richard.

Les expériences blanchirent ses cheveux, les hivers vaincus ridèrent son visage. La mort lui ravit sa compagne. Le monde lui enleva ses enfants.

Seul à présent, de temps en temps, il allait voir d'anciens compagnons de foi et leur demandait à la fin de leurs longs entretiens :

- Et ma mission ? Je l'ai attendue avec tant d'espoir...Les jours passèrent jusqu'à ce que notre ami aussi fût obligé de quitter son corps

emporté par une angine.Une fois désincarné, il lutta intensément pour retrouver sa vision et son audition

singulièrement affaiblies.Il errait chancelant jusqu'à ce qu'un jour, il vit Richard devant lui.Angoissé, il s'agenouilla et lui demanda en larmes :- Oh, mon bienfaiteur, et la mission que tu m'avais promise ? L'interpellé lui sourit

d'un air attristé et s'exclama :- Comment cela ! Tu t'es enfui à l'instant même où...- Pardon ? lui fit le malheureux abasourdi.- Oui, reprit son ami, la possibilité d'aider ton prochain était la mission que tu as

dédaignée.Pacheco fondit en larmes et se référa à l'incompréhension des hommes et aux querelles

infinies de ses compagnons.Néanmoins, sereinement, Richard lui rétorqua :- Jésus n'aurait pas eu besoin de venir accomplir son apostolat parmi nous, si la terre

avec été peuplée d'anges et de saints. En vérité, la majeure partie des créatures humaines souffrent d'une cécité de cœur inqualifiable quand il s'agit de révélation divine. Pourtant, comment réaliser l'œuvre de perfectionnement général si personne ne contribue à l'âpre tâche entamée ? Qu'en serait-il de nous, Pacheco, si le Christ n'avait pas été prêt à souffrir pour nous enseigner le chemin du bien et de la vie éternelle ? La. mission de la lune est de vaincre les ténèbres, la gloire du bien est de vaincre le mal par l'amour.

En sanglots, le malheureux se mit à crier :- Pourquoi faut-il que je ne le comprenne qu'à présent ? Imperturbable, Richard lui fit :

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- Ne te désespère pas, supporte les conséquences de ton erreur et attends l'avenir. Tu retourneras plus tard à l'école du monde, et lorsque tu seras à nouveau dans le cercle charnel, n'oublie jamais que les missions salvatrices sur la terre sont presque toujours revêtues d'un tablier ou d'un uniforme.

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L'ange serviteur

Lorsque l'ange serviteur atteignit le patio où se reposaient plusieurs désincarnés, il balaya du regard les alentours pour voir si l'un d'eux pourrait l'aider à réaliser la mission incontournable qu'il avait à accomplir et qui l'avait amené au Ciel.

Comme il avait besoin d'un compagnon récemment revenu de la terre, il s'approcha des âmes dernièrement débarquées dans l'au-delà. Activement, il chercha le collaborateur répondant aux conditions exigées.

En quelques mots, il expliqua ses objectifs à un homme au visage grave et lui demanda :

-Mon frère, quels sont tes plans ?- J'attends mon entrée au banquet divin, répondit simplement l'interpellé, j'étais

catholique apostolique romain. Je servais diverses congrégations. Jamais, je ne perdis la sainte messe. Je me confessais régulièrement. Extasié et heureux, je reçus l'hostie des centaines de fois. Je traitais toujours avec égards les prêtres et je baisais respectueusement l'anneau de mes pasteurs. Je distribuais des aumônes à la maison religieuse à laquelle j'étais affilié. Pour honorer la mémoire des saints, je faisais de longues pénitences.

Il fixa l'horizon lointain, fit le signe de la croix et conclut :- Loué soit le Seigneur qui me sauva par le mystère du saint sacrement ! J'entrerai

repentant à la cour céleste ! Alléluia ! Alléluia !...L'émissaire du Ciel l'approuva d'un geste calme et suivit son chemin.Puis, son attention fut attirée par un désincarné à qui il demanda :— Ami, qu'est-ce que tu attends ?- Euh... Moi ?! Soupira-t-il, je viens chercher l'héritage de mon Dieu. Je vécus dans la

religion réformée. Par-dessus tout, j'ai gardé la foi. Je n'ai jamais oublié de pratiquer mon culte. Tant que j'étais sur la terre, je lisais quotidiennement la Bible. Je défendais ardemment les idéaux évangéliques. En tant que combattant du Christ, je condamnais ses ennemis. Je comptais être récompensé de mes services lors du jugement final ; je me rends compte à présent que ma gloire peut être précipitée. C'est à la droite du Seigneur que je me tiendrai pour toujours.

L'ange lui fit un signe d'approbation et passa son chemin.- Qu'attends-tu mon frère ? demanda-t-il au troisième. Souriant, le nouvel

interlocuteur lui fit :- J'ai été spirite. De bon gré, je me suis préparé à mon voyage dans les mondes de

félicité. J'ai porté secours aux Esprits des ténèbres. J'ai pratiqué la charité à tous les niveaux. J'ai été simple et patient. Je n'ai jamais manqué une seule session. Systématiquement, j'ai prêché les principes que j'avais étreints au nom de Dieu. Invariablement, j'ai fait confiance aux bons Esprits. À présent, il est bien naturel que j'entre en possession des bienfaits éternels.

Le missionnaire angélique l'approuva également et se tourna vers le suivant :

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- Quels sont tes projets, ami ? lui demanda-t-il plein d'attention.- Moi ? Moi ? Bégaya le compagnon à qui il s'était adressé. En vérité, je ne comprends

pas moi-même ce que je fais parmi les justes et les miséricordieux. Je suis embarrassé qu'on m'ait amené là.

Puis, comme il contenait mal son émoi, il ajouta d'un air désappointé :— J'étais athée à mon grand malheur. Je ne croyais pas en la survie de l'âme.

Franchement, je ne sais pas si j'ai pratiqué le moindre bien dans le monde. Je n'ai fait qu'accomplir ce qui relevait de mes devoirs d'humanité, attentif aux directives dictées par ma conscience. J'ai cherché à soutenir les faibles et ceux qui étaient abattus. J'ai fait mon possible pour aider les ignorants et les oisifs à apprendre et à servir, comme je l'aurais fait pour moi, sans chercher à être récompensé là où j'étais. Or, j'ai trouvé tant de souffrance sur la terre et j'ai vu tant de tâches qui n'attendaient que le secours de bras forts et généreux. De sorte que, même si j'ai lutté pour être un homme digne, j'ai vraiment honte de l'incroyance qui fut la mienne, car je sais à présent qu'il existe une justice miséricordieuse et infaillible au Ciel. S'il m'était accordé de formuler quelque projet, je dois dire que mon unique désir serait de retourner sur terre et de coopérer plus activement au bonheur de nos semblables.

Surpris, l'ange l'étreignit et l'invita à le suivre en lui disant :— Eh bien, allons-y. Tous ceux qui se trouvent dans cet atrium de repos méritent la

bénédiction divine. Le catholique, le réformiste, le spirite et l'incrédule, ils sont tous susceptibles de monter jusqu'ici, ce furent des hommes importants pour l'amélioration du monde. Mais pour servir à mes côtés, je préfère la compagnie d'un frère dont la pensée n'est pas prisonnière d'une quelconque récompense céleste. j'ai besoin d'un coopérateur libéré des complications de paiement.

Tout reliquat rend les choses difficilement réalisables.Et, sans plus tarder, il descendit en compagnie de l'ex-matérialiste pour traiter de

tâches urgentes sur la terre.

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Dans le royaume terrestre

Au cours de notre conversation afférente aux grandes personnalités du monde, un bon vieillard prit la parole. Sur un ton calme, il nous dit :

- On raconte qu'après les victoires de Constantin, alors que les chrétiens se sentaient plus tranquilles en vertu des idées politiques prônées par l'empereur, un beau jour, le diable prit l'apparence du Maître. Ce fut sous la forme de sacrilèges qu'il parla à la foule respectueuse qui restait bouche bée.

Prenant des airs de chef, un des dirigeants du peuple s'avança et fit à Satan :- Seigneur, comment discernerons-nous les êtres supérieurs sur le royaume terrestre ?Le roi des ténèbres, qui semblait s'attendre à cette question, lui lança un regard perçant

sous le masque apostolique sous lequel il se dissimulait. Il eut un grand geste en guise de bénédiction et parla à la foule sur un ton déguisé :

- En vérité, je vous dis que les plus grands du royaume de la chair seront ceux qui sauront le mieux utiliser le mensonge.

Ceux qui auront les attitudes les plus sournoises et les plus provocantes se couvriront de la gloire des cimes.

Tous ceux qui défendront ardemment leurs propres biens, attentifs aux conventions mondaines respireront l'air des montagnes terrestres.

Ceux qui joueront le rôle du « sel » dans les grandes affaires faciles et lucratives ; ceux qui accumuleront des habits en oubliant la nudité de leurs semblables ; ceux qui monopoliseront l'huile et la farine en oubliant la faim de leurs voisins, tous ceux-là connaîtront le triomphe.

Ceux qui fuiront les associations pauvres et humbles ; ceux qui ne porteront que des habits irréprochables et bien coupés ; ceux qui parleront plus fort dans les assemblées, ils prospéreront toujours.

Ceux qui exerceront la tyrannie en négligeant le droit des autres pour faire valoir leurs caprices personnels ; ceux qui ne seront jamais dépendants pour avoir la liberté de tout faire sans consulter personne ; les mauvais et les pervers qui présenteront leurs réalisations avec la décence du monde, tous gagneront de l'importance.

Ceux qui avanceront sans le moindre scrupule pour se montrer en haut de l'échelle des intérêts immédiats ; ceux qui, peu soucieux de se réconcilier sincèrement avec leurs adversaires, se remettront à les côtoyer hypocritement pour se venger opportunément ; ceux qui, dans le plus grand calme, s'efforceront de pratiquer le mal en se faisant passer pour des bienfaiteurs, tous ceux-là escaladeront de prodigieux sommets.

Ils atteindront d'indicibles hauteurs sur la terre, tous ceux qui anéantiront leurs frères ; ceux qui, au lieu de pratiquer « aimez-vous les uns les autres », exerceront le « dévorez-vous comme vous le pourrez » ; ceux qui à l'inverse de « priez et soyez vigilants » accepteront comme devise le « défendez-vous, peu importe les moyens ».

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Ceux qui calomnieront comme on fait des éloges, ceux qui persécuteront comme on aide, ceux qui détruiront le bien comme on combat le mal, seront couverts de prestige.

Ceux qui tueront le temps en méprisant la dignité du travail ou ridiculiseront l'étude sérieuse et édifiante seront sans cesse distingués et appréciés du commun des mortels. Ceux qui cultiveront les sarcasmes, ceux qui ne manqueront pas d'ironie et feront les plus fines critiques, seront pris pour des génies.

Ceux qui priseront l'extravagance, les droits sans contraintes, ceux qui feront des discours longs et envenimés qui compliqueront la vie d'autrui jouiront d'un grand prestige.

Ceux qui sèmeront la confusion chez leurs auditeurs, les assoiffés de possession et tous ceux qui utilisent leur intelligence rien que pour conserver des avantages transitoires, atteindront des positions enviables.

En vérité, il vous a été dit que tant que vous ne serez pas simples comme des enfants, vous ne serez pas en mesure d'atteindre le royaume des Cieux ! Et bien, maintenant, je vous dis que tant que vous n'aurez pas mûri en astuce, vous ne posséderez pas le royaume terrestre!

Tombé sous le coup de la stupéfaction, le bon vieillard resta silencieux. Après un long moment, il renvoya en arrière les mèches de ses cheveux blancs qui tombaient éparses sur son front ridé, se redressa en se tenant à son bourdon et s'exclama avant de continuer son chemin :

— On dit aussi qu'à ce jour encore, tant de siècles après avoir reçu les enseignements de Jésus, rares sont ceux qui apparaissent en plaidant la cause du royaume céleste. Par contre, tous les jours, des millions de créatures se disputent férocement le meilleur moyen d'atteindre la maturité terrestre conformément aux définitions de Satan...

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Directive

La question relative à l'hypothétique existence du plan invisible est aussi vieille que le monde.

Le premier temple consacré à la foi religieuse sur la terre aura certainement été le siège des suppliques évoquées par l'homme primitif pour implorer la manifestation des dieux.

De tout temps, l'appel au secours étouffa l'hymne d'hosannas.L'esprit incarné sur la planète joue avant tout le rôle d'Œdipe qui se retrouve piégé par

les circonstances qu'il a lui-même tissées. Et si le fils de Laïos parvint à déchiffrer l'énigme qui lui fut posée par le sphinx près de la ville de Thèbes, l'homme ordinaire, quant à lui, s'effraie et s'agenouille devant la tombe, face aux problèmes de la mort.

Or, nous n'évoquons pas cette image pour faire des considérations littéraires sur ce vieux sujet. Nous voulons à peine faire allusion à l'empressement de nos amis terrestres qui se tournent vers notre concours fraternel pour résoudre des questions qui relèvent de leur compétence. C'est avec une étrange ferveur que les « vivants » demandent des orientations aux « morts », comme si les contorsions de notre corps lors de la transe finale avaient fait de nous des sorciers infaillibles. Quotidiennement, des organisations charitables et des médiums sont tourmentés de mille manières possibles par quantité de sollicitations de cette nature au sein du mouvement spirite. Nous pourrions facilement renouveler dans le monde les délicieux oracles grecs pleins de fantaisie païenne si, de nos jours, la lumière du Christ ne dirigeait pas nos impulsions, car il n'y a pas le moindre doute que la masse des réclamations et des doléances, adressées à notre sphère, ne peut que surprendre.

Certains sympathisants de la cause doctrinale veulent avoir l'avis de l'au-delà sur le cours du change, sur des plaintes judiciaires ou les surprises que renferme le sous-sol...

Or, ces commentaires ne s'adressent pas aux consultants tourmentés des médiums qui manquent de vigilance.

Nous nous reportons aux compagnons sincères qui cherchent une ligne de conduite spirituelle pour servir de leur mieux.

Certains affirment être fatigués et avoir perdu leurs illusions. D'autres se déclarent inquiets et torturés. Parfois, ils attendent de nous de longs communiqués pleins d'informations. Ils exigent des détails. Ils désirent que nous nous prononcions sur la conduite qui leur incombe en société et au foyer. Beaucoup nous considèrent naïvement comme des juges en toge flamboyante. Ils attendent de nos mains des écrits fulminants, comme si nous ne luttions pas aussi pour éliminer nos propres défauts et traiter nos propres imperfections.

C'est pour eux que nous rappelons les règles que nous avons à présent épousées. La seule directive respectable que nous pourrions donner aux compagnons qui agissent avec droiture, c'est de reprendre la voie du Christ. À l'exception des Esprits missionnaires qui ont consumé leur existence dans le renoncement sanctifiant, ce que nous faisons outre-tombe, en franc-parler, c'est du travail de blanchisserie. Notre habit est sale ; or il est impossible de parcourir les chemins illuminés et purs sans porter une tenue propre.

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La solution logique pour la communauté des frères incarnés est donc de se réajuster pour concourir au bien légitime. Ceux qui cherchent à acquérir la connaissance et la sainteté s'efforcent de commencer dans leur propre entourage. Les candidats à l'élévation cherchent à s'élever. Ceux qui aspirent à la convivialité avec les entités supérieures s'efforcent d'émerger de la vallée profonde où se concentrent les motifs inférieurs de la vie pour parvenir, un jour, à l'illumination... Ils n'attendent pas que les désincarnés viennent leur montrer leurs déficiences. Nous aussi, nous sommes des convalescents de l'âme. Tout autant qu'eux, nous éprouvons le besoin de guérir définitivement.

Un jour, Oscar Wilde énonça que l'art de donner des conseils consiste à indiquer aux autres ce qui nous manque le plus. Or, nous ne retomberions pas après la mort dans une telle erreur, pour le moins nous les pécheurs repentis.

Tournons-nous donc tous vers le conseiller divin.Conjuguons avec lui les verbes prier et veiller, pardonner et aimer, aider et servir.

Commençons notre tâche par nos frères les plus proches qui sont dans l'incompréhension.L'heure de la révélation spirituelle dans les laboratoires et les cabinets de recherche

doit passer par de loyaux chercheurs qui aspirent à trouver la lumière. Les circonstances actuelles demandent qu'en soi, on sache se recueillir. L'âme a besoin de se centrer afin de sentir la clarté sublime du Ciel dans l'intimité de sa conscience.

Pauvre de ceux qui ne domineront pas la fougue de leur imagination dans la course que la civilisation moderne a improvisée vers la mort !...

Que les apprentis du monde entendent notre appel, eux qui attendent l'orientation de ceux qui les ont précédés dans le grand voyage : Faisons appel à Jésus, non seulement en tant que sauveur glorieux de l'humanité, mais aussi en tant que Maître de notre expérience individuelle. Que ceux qui sont agacés par l'exhibition des « longues tuniques » de l'extravagance, parmi les pharisiens de tous les temps, reviennent avec nous à la simplicité originale. Lavons notre pensée aux sources cristallines de la vérité. Redevenons des enfants, et en cherchant l'ami éternel, demandons-lui avec notre sincérité infantile :

- Seigneur, nous avons entendu tes paroles lorsque tu appelais les petits. Enseigne-nous à marcher, à servir et à vivre !...

Et soyons convaincus que le guide des siècles, serein et accueillant, prendra nos mains fragiles pour nous conduire « à travers les vallées de l'ombre et de la mort » où, en sa compagnie, « nous n'aurons peur de rien ».

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Remarques d'un ancien

Un beau jour, l'esprit de l'humble « journaliste désincarné », fustigé par l'opinion publique qui s'égarait au souvenir de sa mémoire, entendit un ancien lui parler avec sagesse et sérénité :

- Quand Jésus transforma l'eau en vin aux noces de Cana, les médisants près de lui murmurèrent : Comment est-ce possible, un messie qui pousse à l'ivresse ?

« Plus tard, en compagnie des pêcheurs de la Galilée, la foule inconsciente fit la remarque suivante : C'est un vagabond qui cherche à se joindre à des êtres aussi médiocres que lui. Pourquoi ne se tourne-t-il pas vers les gens influents ?

« Après les premières prédications, au lieu de reconnaître les bienfaits de la parole divine, la foule des ignorants faisait le commentaire suivant sur un ton irrévérencieux : C'est un insoumis. Il vit sans horaires ni discipline.

« Lors de la multiplication des pains et des poissons, la masse ne ressentit aucune émotion, comme on aurait pu s'y attendre. D'ailleurs, ils furent nombreux à demander en fronçant les sourcils : Comment cela se peut-il ? Voilà un guide qui soutient l'oisiveté !

« Alors qu'il nettoyait les blessures de quelques lépreux qui vinrent le voir, ils affirmèrent en sourdine : II se joue de la démence des imbéciles pour impressionner !

« Et quand ils le virent guérir un paralytique, ce samedi-là, ses ennemis arbitraires considérèrent : II porte publiquement atteinte à la Loi.

« Pour avoir accepté la considération affectueuse de Marie de Magdala, ils murmurèrent en médisant : C'est un vulgaire semeur de troubles. Il n'arrive même pas à ajuster son masque à son propre visage, il vit en compagnie d'une vile créature porteuse de sept démons.

« Lorsqu'il profita de la contribution offerte par de nobles dames, comme Jeanne de Cusa, pour réaliser son apostolat, des exclamations retentirent : II exploite les femmes charitables ! Il vit de l'argent des riches et se fait passer pour vertueux !

« Tandis qu'il s'attardait quelques minutes auprès de pêcheurs publicains pour leur enseigner la science de la rénovation intime, ils l'accusaient sans la moindre compassion : C'est un jouisseur de la vie comme les autres !

« S'il cherchait à se recueillir dans des endroits silencieux pour prier, ils s'écriaient sans le moindre respect : II s'agit d'un sauveur solitaire, bien trop fier pour se comparer au peuple.

« Comme il s'approchait de la Samaritaine dans l'intention de secourir son âme, ils se demandèrent avec malice : Que fait-il en compagnie d'une femme qui a déjà appartenu à plusieurs maris ?

« Quand il répondit aux suppliques d'un centurion plein de foi, sa désinvolture intrigua : C'est un adulateur de Romains sans vergogne.

Lumière céleste« Lors de sa visite à Zachée, il entendit des remarques ironiques : C'est un prédicateur

du Ciel qui se vaut des puissants de la terre pour se protéger.

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« En étreignant l'aveugle de Jéricho, il discerna les questionnements qui se faisaient à son égard : Pourquoi est-il si attaché à tant de gens immondes ?

« En pénétrant dans Jérusalem le jour des festivités, incapable de retenir la joie de ceux qui avaient confiance en son ministère, il se trouva confronté à des critiques sarcastiques : Dehors, le révolutionnaire ! Mort au faux prophète !...

« Lorsqu'il censura la bassesse de l'esprit commercial du grand Temple de Salomon, ils dirent de lui ouvertement : C'est un dangereux détracteur de Moïse.

« Lorsqu'il fit sortir Lazare de sa tombe, ils s'écrièrent non loin de là : C'est Satan en personne !...

« Tandis qu'il lavait les pieds de ses compagnons réunis lors du dernier repas pour leur faire ses adieux, on fit observer dans son entourage : C'est un pauvre dément.

« Quand il se laissa prendre sans offrir la moindre résistance, la foule objecta : C'est un lâche ! Il en a compromis plus d'un, et le voilà qui se dérobe à présent sans la moindre réaction !

« En recevant la poutre, ils crièrent à tue-tête à ses oreilles : Déserteur ! Tu paieras tes crimes !

« Lors du martyre suprême, il fut interpellé sans commisération : Sorcier, où sont tes défenseurs ?

« Torturé, à l'heure de l'agonie, il entendit encore d'innombrables voix s'exclamer : Sauve-toi toi-même, et descends de ta croix !

« Et avant que son cadavre n'arrive dans les bras maternels de Marie tremblante d'angoisse, nombreux furent ceux qui quittèrent le Golgotha en murmurant : II a eu la fin qu'il méritait, entre des voleurs. »

Le vieillard marqua un temps d'arrêt expressif, puis ajouta :- Comme vous le savez, c'est ce qui est arrivé à Jésus-Christ, le divin gouverneur

spirituel de la planète.Il eut un sourire affable et en vint à conclure :- Quant à nous, endettés comme nous sommes, que devons-nous attendre des foules

terrestres ?À cet instant, je vis le pauvre écrivain désincarné exhiber une expression de joie qui se

transforma en un formidable éclat de rire cristallin...

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Un homme du monde

On ne pouvait nier à Sidoine Gonçalves qu'il fut un homme intelligent. Il traitait des intérêts de la vie terrestre avec un rare savoir-faire. Sa capacité inventive dans le domaine financier était enviable. De loin, il percevait les affaires lucratives. Il identifiait les facteurs d'ordre économique en usant d'une si grande expérience que ses richesses se multipliaient sans cesse.

Lors des conversations évangéliques auprès de ses collègues de travail spirite, il faisait plaisir à voir. Il révélait une spontanéité surprenante pour traiter d'heureux concepts. Cependant, il ne se compromettait jamais à la tribune, bien qu'il déclarât sa foi lors de brillants échanges.

Indirectement, les amis spirituels, qui observaient son acuité intellectuelle, faisaient leur possible pour l'amener à préparer sa voie vers la sphère supérieure.

Sidoine était un homme admirable dans le domaine des biens transitoires. Que ne serait-il pas en mesure d'accomplir s'il consacrait son intelligence aux attributs éternels de l'esprit ?

Pour cette raison, des parents proches et lointains se réunirent dans « l'autre monde » afin d'élever son niveau intime.

Ils le couvrirent de messages consolateurs et supérieurs à travers les mains d'amis précieux qui écrivirent des centaines de livres remarquables pleins de conseils sanctifiants. Il devait être bon et se rendre utile afin de profiter de la vie terrestre pour trouver le chemin de la lumière.

Mais que ce soit dans les salons ou dans les rues, Sidoine s'esquivait toujours gentiment en disant :

- Voyons, mes amis ? Je ne suis qu'un homme du monde enlisé dans les affaires matérielles. Je ne suis pas prêt à semer la parole divine.

Néanmoins, les bienfaiteurs de l'au-delà ne s'en tinrent pas là. Gonçalves fut appelé au royaume du Seigneur de mille manières possibles. Or, malgré le niveau de connaissance auquel il était arrivé, il se rabaissait toujours, inapte à témoigner du moindre élan d'élévation.

S'il était invité à se rendre au chevet des malades, sa réponse était claire :- Qui suis-je au fond ? Moi, qui n'ai rien à donner. D'ailleurs, je me sens incapable d'aider

les souffrants. J'ai les nerfs brisés.Quand un compagnon inspiré par les Esprits bienveillants venait supplier son concours

pour soutenir un organisme de charité, il répliquait immédiatement :- Moi ? Comment pouvez-vous penser à moi ? Je suis indigne d'une telle responsabilité.

Ma présence compliquerait les choses au lieu de les résoudre.À d'autres occasions, des frères de lutte dans la difficulté lui demandaient de se prêter aux

tâches de bienfaisance chrétienne. Mais implacable, Sidoine répondait :- Certainement pas ! Je n'ai pas la moindre valeur, d'ailleurs, l'opinion publique ne me le

pardonnerait pas. Remplacez-moi, car je ne peux vous être utile...Il continuait à fréquenter les réunions évangéliques et les apôtres de la spiritualité ne

cessaient d'envoyer des signes à son cœur.Un beau jour, ils lui suggérèrent de se consacrer au développement médiumnique pour le

bien des affligés. Mais, ce fut avec fermeté qu'il repoussa cette proposition :

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- Quelle mauvaise idée ! s'exclama-t-il irrité. Il me faudra vivre de nombreux siècles avant de pouvoir réaliser de tels desseins. Je suis un homme du monde inhibé de partager un ministère de la sorte...

Les entités fraternelles essayèrent, alors, de l'amener à apporter son concours à une crèche. Guidées par les travailleurs désincarnés, quelques dames lui soumirent cette idée, mais Gonçalves explosa :

— Moi, m'occuper d'orphelins abandonnés ? Quelle drôle d'idée ! Allez chercher quelqu'un d'autre...

Et sur un ton grincheux, il ajouta :— Je ne suis qu'un homme du monde...Les sphères supérieures voulurent, alors, faire en sorte qu'il porte secours à un asile de

personnes âgées pour que son esprit puisse avoir accès à des zones de pensées plus nobles à travers l'assistance fraternelle apportée à son prochain. Il fallait que Sidoine fasse briller en lui la lumière.

Les possibilités qu'il détenait à ces fins commençaient à s'estomper. Sa courte existence sur la terre touchait déjà à sa fin. Mais l'intéressé de la bénédiction divine refusa. Lorsqu'il reçut cet appel, sans tergiverser, il annonça :

- Absolument pas ! Je rejette une telle responsabilité ! Et il répétait :- Pourquoi moi ?...Finalement, les missionnaires supérieurs lui donnèrent l'occasion de soutenir quelques

fous relégués à l'hospice. Le collaborateur retardataire pouvait encore être très utile. Il Aiderait des compagnons dévoués au bien et pourrait sauver plusieurs malades. Néanmoins, à cette nouvelle invitation, il s'énerva, refusa et se retira.

Or, l'heure du départ était venue. Gonçalves ressentit, à ce moment-là, un vide profond dans son cœur angoissé. Il était resté enchaîné aux intérêts éphémères et, sans son corps charnel, il ne savait que faire de l'éternité qu'il avait devant lui.

Il se retrouvait affligé sans équilibre et sans lumière.Après de longues et difficiles pérégrinations par les voies de l'incompréhension et de la

souffrance, il fut reçu par un dévoué messager céleste qui vint répondre à ses prières pleines d'émotion.

Sidoine s'agenouilla.Devant le sublime missionnaire qui l'enveloppa de son magnétisme inondé d'amour, ses

yeux s'ouvrirent... Il retrouvait la clarté bénie.De ses mains tendues et tremblantes, il interpella l'émissaire qui n'avait que quelques

instants à lui consacrer en vertu des obligations qui l'attendaient ailleurs :- Messager du Ciel, implora-t-il sous le coup de l'émotion, j'ai fait valoir ce que

je suis ! J'ai toujours gardé la foi en la Providence divine, j'ai fréquenté les réunions édifiantes où les bons Esprits nous aidaient. J'ai été croyant et j'ai quitté mon corps grossier en espérant être admis dans les sphères heureuses.

Devant l'ambassadeur silencieux, il répéta cette fois en proie à l'inquiétude :- Est-il possible que vous ne me reconnaissiez pas ? Serais-je privé de la protection à

laquelle j'ai fait appel ?Le préposé de Jésus, dont l'expression calme révélait une tristesse évidente, lui fit :— Je te reconnais bien. Chaque fois que nous t'avons envoyé un appel pour servir, ton

esprit s'empressait de douter de ta propre capacité.Lumière céleste- Oui, oui... bégaya, Sidoine, extrêmement désappointé, mais c'est bien à moi que vous

faites allusion ? Connaissez-vous mon nom, par hasard ?- Bien sûr ! lui fit l'entité angélique, tu es un homme du monde... quand tu changeras ton

âme d'adresse, viens nous voir... Nous serons prêts à te répondre...Puis, l'émissaire fit volte-face et reprit son chemin, tandis que Gonçalves se replongeait

dans l'obscurité. Le cœur oppressé, il se mit à se rappeler...

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Eclaircissement

Mon ami, tu te demandes pourquoi nous sommes amenés à écrire autant.Ne devrions-nous pas plutôt chercher la lumière de la cour céleste pour nous reposer ?

Aurions-nous, par hasard, une telle nostalgie des activités humaines que nous accepterions de nous replonger dans ses angoisses de bon gré ? À ton avis, la tombe devrait être le passage idéal pour tomber dans l'oubli absolu.

Jusque-là tes questionnements sont plutôt communs. Il est inutile de demander à un homme ordinaire les motifs qui le poussent à travailler pour garantir son propre bonheur.

Mais tes interrogations vont bien plus loin. Tu veux savoir pourquoi nous nous consacrons au sujet religieux.

— Tous les Esprits désincarnés, allègues-tu effaré, s'efforcent de diffuser les principes de la foi et de la charité. Ils ressemblent aux prédicateurs insistants qui prêchent du haut de leur chaire. N'avons-nous pas suffisamment d'orateurs et de prêtres dans le monde ?

Tu te trompes en généralisant de la sorte. Tous les désincarnés ne se consacrent pas encore à une tâche aussi noble. Des millions restent aimantés à la croûte terrestre pour empêcher le progrès mental des créatures qui leur ressemblent. Comme de vrais démons en liberté, ils préfèrent choisir la discorde et la malice. D'ailleurs, quand ils le peuvent, ils en viennent même à répandre de cruels poisons à travers les écrivains qui manquent de vigilance. Concernant l'éternité, ils maintiennent beaucoup de gens dans l'ignorance pour mieux s'accommoder de l'infériorité dans laquelle ils se complaisent.

Néanmoins, ce n'est pas pour commenter les perturbations de notre sphère d'action que je t'écris cette lettre.

Tu fais allusion à la religion, comme si la foi était un refuge pour les Esprits malades. Impliqué dans le tourbillon qui agite l'océan de notre civilisation décadente, tu es aussi emporté par le raisonnement des illusions de l'homme économique. Tu crois possible la régénération du monde de l'extérieur vers l'intérieur, et tu te donnerais, peut-être, volontiers, à un quelconque hérétique assoiffé de sang qui te promettrait un monde réformé par décrets périmés tous les cinq ans.

Dans un tel climat, tu ne peux comprendre le service religieux.Admettrais-tu par hasard qu'un verger se mette à produire sans semence ? La vie

humaine persisterait-elle sans l'autel de la maternité ?Le raisonnement théorique et le terrain de l'expérimentation pratique, sur lesquels sont

basés les principes philosophiques et scientifiques de la terre, ne se maintiendraient pas sans la source occulte et invisible de la mystique religieuse.

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Seul l'être privé de raison arrive à se mouvoir sans racines dans la spiritualité supérieure.

Les grands auteurs, soi-disant matérialistes, que tu mentionnes avec un plaisir évident, ne furent que des athlètes de la pensée en conflit avec les impositions de la prêtrise organisée.

Ils n'étaient pas hostiles à Dieu, objet sacré de leurs études et cogitations, ils combattaient les tristes moyens souvent utilisés par les hommes de mauvaise foi qui s'efforçaient de placer le Seigneur éternel et suprême au sein de la politique. Au fond, ils identifiaient la lumière divine à la lampe de l'intellectualité qui éclairait leur esprit.

Innée chez la créature, la religion est une flamme sublime. Toutes les notions de droit dans le monde naquirent à la lumière de sa clarté et tous les départements de justice dans différents pays du globe lui doivent leur provenance.

Un beau jour, le premier sauvage prit conscience qu'il lui appartenait de respecter la hutte de son frère. Ce fut à la glorieuse vision du ciel qu'une telle compréhension lui apparut, tandis qu'il se recueillait dans la contemplation du soleil et des étoiles, de l'ombre et de la tempête, l'idée de Dieu lui vint à l'esprit.

Soustraire la pensée religieuse de l'expérience humaine reviendrait à déshydrater la terre. Sans l'eau divine de la spiritualité, toute construction planétaire serait destinée à une sécheresse irrémédiable.

Arriverais-tu à vivre exclusivement dans le désert ? L'homme peut rire avec Voltaire, étudier avec Darwin, philosopher avec Spinoza, conquérir avec Napoléon, théoriser avec Einstein, ou même faire de la théologie avec Saint-Thomas. Mais pour vivre dignement son existence, il faut se nourrir intimement de principes sanctifiants, tout comme on entretient son corps avec du pain. Celui qui ne dispose pas du divin combustible pour son utilisation personnelle a inconsciemment recours aux réserves des autres. Il n'est pas d'idéalisme supérieur qui ne soit né de l'activité spirituelle, sans lui le concept de civilisation résulte en un épais mensonge.

Par conséquent, ne sois pas sarcastique à l'égard de ceux qui consacrent leur temps au ministère religieux.

Avec les scientifiques modernes, vous pourrez entrevoir l'atome, photographier la cellule et confirmer la courbure de l'espace... En Amérique, étant donné le développement des vaisseaux spatiaux, nombreux sont ceux qui pensent déjà demander aux autorités administratives de la politique dominante que leur soient réservés des terrains sur la Lune...

Ils peuvent bien réfléchir à tout cela, mais ils ne dévieront pas l'idée religieuse de sa voie d'un seul millimètre. La foi représente la clarté d'un soleil qui illumine intérieurement l'esprit humain. Sans cette clarté, la planète pourrait perdre définitivement l'espoir en un meilleur avenir.

Quant au fait de m'attarder quelque temps auprès de ces amis admirables qui cherchent à servir le christianisme renaissant après leur mort, crois bien qu'ils le font par gentillesse et non parce que je le mérite. Je n'ai rien d'un Livingstone dans les Afriques de « l'autre monde ». Celui qui définit mon cas avec patience, c'est Shakespeare, notre vieux sage. Il dit un jour que « quand Dieu nous voit endurcis dans le mal, il ferme nos yeux à l'immondice et trouble notre jugement, de sorte que nous en venons à adorer nos égarements et à rire de nous-mêmes, alors que nous courrons à notre perte complètement atteints de cécité et pleins d'orgueil ». Tu peux donc en déduire que je suis un malade qui cherche à s'améliorer.

Quoique désincarné, je ne peux savoir si tu es en bonne santé. Je crois, néanmoins, que si un jour, tu es frappé par le malheur comme je l'ai été, tu ne pourras t'empêcher de faire ce que je fais.

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L'ange réparateur

Après de longues suppliques, le croyant affligé se trouva enfin en présence de l'ange réparateur, il s'agenouilla respectueusement et lui fit d'une voix larmoyante :

—Bienfaiteur céleste aidez-moi par pitié ! Je porte les stigmates de l'échec. Je suis profondément malheureux !... Toutes les forces du mal se sont unies contre moi. Où que j'aille, je suis poursuivi sans rémission... Mes affaires font faillite, mes intérêts souffrent de préjudices interminables, ma santé décline... Je vis en proie aux préoccupations et aux souffrances. En vain, je cherche le secours de la prière, mais après avoir fréquenté plusieurs temples et tenté différentes dévotions, je suis toujours aussi affligé. Venez au secours de ma destinée ! Vous êtes le bienveillant réparateur des vies frustrées. Aidez-moi ! Je suis découragé...

Pendant un moment, l'émissaire angélique resta silencieux à observer discrètement le malheureux. Puis d'un air compatissant, il lui fit :

— Vraiment, ton déséquilibre est émouvant.Frère XIl le fixa d'un regard limpide et entama un délicat interrogatoire :— Mon ami, as-tu la foi ?- Oui, répondit le souffrant, ma confiance en Jésus est illimitée.- Et tu souhaites retrouver la paix, calmer les difficultés qui surgissent sur ton

chemin?- Je n'aspire qu'à cela.L'instructeur fit une courte pause et ajouta :— Tu sais que l'homme est un être vivant détenteur d'une conscience qui lui est

propre, doué d'une raison personnelle, et qu'il est l'héritier de Dieu,..- Oui, je le sais.- Bien, lui fit le préposé de la spiritualité, la tâche réparatrice qui m'incombe est basée

sur l'acceptation de l'individu. Nous ne pouvons prendre d'assaut le cœur de la créature si elle est réfugiée dans la citadelle de la vanité et de l'orgueil. Par conséquent, si tu espères que nous intercédions en ta faveur, réponds loyalement à mes questions.

Sous l'influence de la lumière rayonnante de l'ambassadeur céleste, il reconnut qu'il serait inutile de mentir.

-As-tu un foyer et exerces-tu une profession régulièrement? -Oui...- Tu comprends qu'il est de ton devoir de faire preuve d'amour, de gentillesse et

d'assistance vis-à-vis de tes domestiques et de démontrer du respect, de la sollicitude et de l'attention à l'égard de tes supérieurs et de tes subalternes ? En vivant en communauté, dans

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la lutte quotidienne, tu sais épargner ton foie et ton cœur des projections vibratoires néfastes de la haine et de la révolte ? Tu exerces, régulièrement, les notions de fraternité ? Tu combats l'intempérance mentale en retenant tes impulsions inférieures ? Tu cherches à partager avec ceux qui t'entourent ce qui t'appartient ? Tu sers sans te plaindre et tu évites l'obscurité de la médisance ? Tu considères que l'esprit de service vient avant tes préoccupations personnelles ? En résumé, tu préserves ta paix intérieure ?

— Oh ! Mais tout cela est bien trop difficile...—Je suis d'accord, lui fit observer l'ange, et l'élévation exige des efforts, mais tu

aspires à la clarté supérieure, n'est-ce pas ?- Bon, objecta le malade un peu désenchanté, comment agir avec de telles règles dans

un .environnement réfractaire à de tels idéaux ? Je ne tolère pas les exigences ni n'accepte une coopération partielle. Selon mon point de vue, si je suis entouré de personnes sans mérite, comment puis-je leur exprimer une quelconque considération ? Je ne peux concevoir une justice inefficace. En outre, dans le cercle domestique, je ne supporte pas les insolences de ceux qui m'accompagnent dans la vie. D'ailleurs, j'ai une meilleure relation avec les inconnus. Mes parents expriment en permanence de l'hostilité à mon égard et ne cèdent jamais un centimètre à mes points de vue. S'ils préfèrent la guerre ouverte, que faire, sinon l'accepter ?

Le messager esquissa un sourire discret et continua :— Si ta condition au foyer et au travail est aussi périlleuse, voyons ce qu'il en est au

niveau social. Cherches-tu à être en relation avec tes semblables ? Est-ce que tu te consacres à un service de bienfaisance quel qu'il soit ? Reçois-tu les souffrants avec bonté et oublies-tu facilement les attaques de ceux qui sont mauvais ? Arrives-tu à immuniser ton cerveau et tes nerfs de l'influence des forces ténébreuses ? Vis-tu avec modération pour éloigner les marques indésirables de la jalousie en donnant l'exemple de la correction pour que les tentacules de la calomnie n'atteignent pas ton état d'esprit ? Agis-tu, en tout, avec prudence, justice et solidarité fraternelle pour que le dépit et la révolte ne menacent pas l'ensemencement du bien ? As-tu de la compassion pour les malheureux, aides-tu ceux qui commettent des erreurs et cherches-tu à connaître les vrais nécessiteux bien qu'en contrariant parfois tes propres inclinations ? Sais-tu être le médecin de ton âme en assistant les affligés du chemin pour que les émissions bénéfiques de la reconnaissance te soutiennent et te guérissent ? Respectes-tu les autres pour être respecté par un plus grand nombre ?

L'implorant passa de la déception à la révolte et objecta :- Au fond, je suis très loin d'une telle perfection. Il est impossible d'être un ange au

milieu d'esprits sataniques. Si je suis sympathique avec les malheureux, ils peuvent me dévorer... En général, les souffrants sont plus paresseux que malheureux. Je ne supporte pas les mauvaises gens et je crois que la justice n'existe pas pour cette espèce de créatures. Si je ne me défends pas contre mes voisins, ils finiront par m'écraser.

Il regarda l'interlocuteur divin les yeux exaspérés et en vint à conclure :- C'est justement parce que je vis malade et découragé que je viens vous supplier de

m'aider...-Alors, explique-toi. Que prétends-tu donc ?- Mais, vous n'êtes pas l'ange sublime, l'administrateur de la réparation ? Je veux

réajuster ma vie, un miracle du secours céleste.- Oh ! Oui, soupira l'émissaire, tu voudrais que Dieu utilise la violence...Tout en gardant son calme, il prit congé du souffrant. Il lui expliqua qu'il devait

s'occuper des autres secteurs d'assistance. Des foules angoissées l'attendaient dans l'au-delà...- Mais, vous m'abandonnez, vous me laissez désemparé ? s'écria le singulier

demandeur sous le coup d'une violente irritation, serait-ce que le Ciel aussi me déteste ?Le messager angélique lui fit alors sereinement :

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- Tu n'en es pas encore au point de devoir être réparé. Avant que notre intervention ait lieu, il te faudra d'abord passer par de grandes souffrances sur la voie que tu as à parcourir...

Puis, il lui fit un signe fraternel de la main et conclut :- Le siècle prochain, nous nous retrouverons...

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Comment traiter les médiums

Tu te tournes vers moi, qui suis un Esprit désincarné, pour connaître la manière appropriée de traiter les médiums. Tu allègues que beaucoup ont croisé ton chemin, sans que tu puisses les comprendre. Ils commencent leur tâche avec enthousiasme, mais rapidement abandonnent la semence. Quelques-uns acceptent de servir pendant quelque temps ; mais d'autres ne dépassent pas quelques mois. Nombreux sont ceux qui s'éloignent discrètement, se retirent délibérément, quand tant d'autres dérapent en pleine pente attirés par des fantaisies tentatrices.

Tout en affirmant ton amour pour la doctrine qui nous unit à présent, c'est avec franchise que tu demandes : Comment traiter tous ces gens pour que le spiritisme n'en vienne pas à souffrir des interruptions encourues dans les démonstrations de la survie spirituelle ?

Je n'ai pas la prétention d'être un modèle de bonnes manières. Mal éduqué comme je l'ai été, je manque de moyens pour rédiger des règles de courtoisie, même dans « l'autre monde ».

Je crois, néanmoins, que le médium doit recevoir un traitement analogue à celui qui est donné à tout être humain. Il s'agit d'une personne incarnée qui a, quotidiennement, besoin de nourriture, de bain et de sommeil. Il doit s'occuper de sa famille, travailler et se reposer, respecter et être respecté. Il ne conservera pas son talent médiumnique comme un outil précieux rongé par la rouille, mais évitera le mouvement intempestif de ses facultés, tout comme le forgeron soigne son enclume. C'est avec plaisir qu'il coopérera à la clarification des problèmes de la vie auprès de ceux qui s'y consacrent sincèrement. Mais il ne livrera pas ses facultés psychiques à la curiosité malsaine des investigateurs inconscients, d'incurables étourdis qui, sous prétexte de collaborer avec les scientifiques d'un certain club, font des commentaires académiques entre le sourire d'une belle femme et une dose de whisky.

Ce n'est, en synthèse, qu'une définition que je dois fournir au passage ; néanmoins, puisque tu te rapportes à l'amour que tu affirmes consacrer au spiritisme édifiant, il faudrait que tu sondes ta propre conscience.

Vraiment, ils sont innombrables les compagnons qui se précipitent sur la tâche médiumnique pour glisser rapidement dans le désenchantement et la souffrance comme les hirondelles dans le ciel tombant à moitié mortes dans le trou sombre de l'abîme. Or, nous constatons que si les oiseaux s'enfoncent quelques fois dans les ténèbres, fascinés par de dangereuses illusions, dans la majorité des cas, ils sont blessés par les coups de feu des chasseurs inconscients.

Cependant, et cela est pénible à dire, mais presque tous les médiums sont abandonnés par leurs propres amis, sans la moindre considération...

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Le plan supérieur trace le programme des tâches, bénéfiques et rénovatrices. L'ouvrier qui y consent est prêt à le mettre à exécution, mais dès que la porte du service reste grande ouverte, la foule d'oisifs s'y engouffre.

Oublions le long cortège des investigateurs et des curieux qui transforment en cobaye le premier malade psychique qui leur tombe sous la main. Les réclamations insatiables de ses frères d'idéal sont plus nocives. En les identifiant, nous sommes forcés de reconnaître que les spirites modernes ont beaucoup à apprendre sur leur propre équilibre, avant que le premier médium, dont la tâche est bien définie, n'ait pu accomplir intégralement sa mission.

L'intermédiaire entre les deux plans se déplace avec une extrême difficulté pour livrer aux créatures terrestres le message dont il est porteur. Si des adversaires insensés le reçoivent en lui jetant des pointes d'ironie, ses amis lui érigent un piédestal enveloppé d'épais nuages d'encens pernicieux. C'est presque toujours étourdi, grisé par les émanations sournoises des compliments adulateurs que le serviteur entame son ministère. Bien vite, il ne sait quelle attitude adopter. Les adeptes et les sympathisants de la cause se chargent en permanence de le convertir en motif de spectacle. Quand l'exhibitionnisme ne s'en tient pas à la tentation de convaincre ses voisins, il se forge sur de prétendus motifs de charité.

Une lutte s'intensifie entre la sphère supérieure qui aspire au bien-être collectif avec la projection de la nouvelle lumière sur la nuit des hommes, et l'arène terrestre où les hommes désespérés cherchent à maintenir leurs intérêts immédiats dans la chair. Le médium vit rarement une vie régulière. S'il reste dignement au service de son gagne-pain, les compagnons se chargent de le déranger en l'appelant avec insistance pour qu'il sorte de son refuge respectable où il cherche à gagner sa vie en toute dignité.

S'il montre la moindre instabilité dans la réalisation de sa faculté, des tribunaux accusateurs s'improvisent autour de lui. Mais s'il reste persévérant dans le bien, l'attaque d'éléments destructeurs empressés de le renverser surgit en force. S'il se maintient à son poste, il est obligé de respirer dans la solitude presque absolue, car les exigences des tâches à réaliser se multiplient de la part de ses compagnons de foi. Pendant ce temps, ses domestiques et ses semblables s'en éloignent, prudemment, parce qu'ils ne sont pas nés avec le renoncement pour vocation. Il se met à vivre sous la contrainte les existences des autres, interdit de suivre son propre chemin. Il est obligé d'ingérer avec son repas les fluides de désespoir et d'inquiétude des personnes rebelles et excessives qui viennent le voir et qui se disent souffrantes. En vain, il a la nostalgie de l'eau salutaire coulant sur sa peau en sueur parce que les vrais et les faux nécessiteux de sa propre confrérie absorbent ses heures en réclamant son attention. Au quotidien, il travaille activement sous le poids des préoccupations et des angoisses interminables de la guerre des nerfs. Le soir, quand il arrive chez lui et qu'il se couche, son corps est épuisé et ses résistances brisées.

Si celui qui est à l'avant-garde ne rétrocède pas, fustigé par les démons de l'imprudence et de la démence, et s'il n'est pas victime des entités malveillantes qui le conduisent au-devant de la scène dans son « triste rôle », sa destinée sera celle de la valve usée prématurément.

Une fois l'appareil radiophonique connecté, le message qui arrive est rauque ou ne peut être énoncé. La machine délicate crépite et grésille inutilement. L'électricité et la révélation sonore ne cessent d'exister, mais l'appareil se brouille, non pas parce qu'il est usé, mais pour les coups abusifs qu'il a encaissés.

Comprends-tu, donc, ce que je veux dire ?La force spirituelle et la contribution rénovatrice des missionnaires de la sagesse

vibreront avec vous. Néanmoins, comment peuvent-ils s'exprimer convenablement si les intéressés persécutent les médiums. S'ils les utilisent jusqu'à l'exhaustion, jusqu'au vampirisme, les rendent malades et les vouent à la mort ? Comme nous sommes forcés de le reconnaître, mon cher, il est aussi difficile de trouver des médiums aptes à traiter avec les

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spirites du premier siècle de la codification kardécienne, qu'il est rare de trouver des spirites qui savent bien les traiter...

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Orientation chrétienne

Lors de la session consacrée au réconfort édifiant des souffrants, le consultant perçut que l'estimable orienteur spirituel incorporait la médium en transe. Dès que le dévoué mentor eut terminé la conférence sur le thème évangélique qui avait été choisi ce jour-là, il s'excusa pour lui demander des conseils.

— Bien sûr, mon fils ! s'exclama l'Esprit ami avec bonté, je suis là pour t'écouter ; tu peux m'ouvrir ton cœur...

Ce fut d'abord timidement que l'homme se mit à parler. De manière docile, il se pencha vers le bienfaiteur :

- Cher protecteur, je suis exténué ! J'ai autant besoin de Conseils que l'assoiffé d'une gorgée d'eau. J'ai perdu les biens qui m'étaient les plus chers !... Ma santé est défaillante et je déambule en vain d'une clinique à l'autre, ce qui me revient très cher. Mon foie ne fonctionne plus normalement, mes reins me menacent à toute heure, mon cœur bat de manière irrégulière... Comme mon organisme est à moitié mort, ma famille m'a relégué à l'abandon. Mes parents ont disparu. J'ai des frères consanguins qui pourraient certainement me soutenir, mais ils me fuient comme si j'étais un criminel impénitent. Une telle situation, néanmoins, était encore supportable, mais voilà que ma femme aussi, après seize ans de mariage, m'a quitté, me laissant ainsi irrémédiablement affligé...

Ah ! Mon bienfaiteur, fit-il sur un ton larmoyant, comment puis-je résoudre un tel problème ? Je suis un fantôme errant qui cherche inutilement la paix. À chaque instant, mon foyer vide me tourmente terriblement. Cependant, ma malchance ne s'arrête pas là. Pris d'antipathie à mon égard, il y a deux semaines de cela, mon chef m'a expulsé sans la moindre pitié. D'une voix sèche, il me fit appeler, puis il eut envers moi des propos agressifs et me ferma les portes de la maison que je servais depuis sept ans... Je suis le plus malheureux des hommes... J'ai déjà essayé de me suicider. Mais, on dirait que pour ça aussi, la malchance me poursuit parce que toutes mes tentatives ont raté... Toutes les occasions d'amélioration me sont interdites... Qu'est-ce que j'ai fait, cher bienfaiteur, pour mériter autant de disgrâces ? Aurais-je, par hasard, oublié Dieu ?...

Des sanglots saisirent sa voix. L'instructeur désincarné lui caressa les cheveux prématurément blanchis et lui fit :

- Sois patient, mon fils ! Il n'est pas d'effet sans cause. Le suppliant reprit courage et implora :

- Inspire-moi, dévoué protecteur ! Guide-moi. Ne m'abandonne pas !...- Que désires-tu que je fasse ? lui demanda le messager spirituel.

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- Trace-moi un chemin... ma destinée est embrouillée... Conseille-moi, au nom de Jésus !

- Au nom du Maître qui descendit des Cieux pour nous servir et nous sauver ?- Oui, gémit l'interpellé.- Dans ce cas, mon fils, retourne au commencement et rectifie ton chemin. Le Père t'a

accordé une santé harmonieuse. Alors, pourquoi as-tu intoxiqué tes reins avec des « drinks » irritants ? Sur quoi t'es-tu basé pour consumer tes forces dans des nuits de plaisir insensé ? Il est encore temps de tout reconstruire. Oublie les poisons quotidiens qui consument lentement tes énergies avec un petit verre apparemment sans importance, et donne un rythme régulier à ton expérience d'homme sur la terre.

Attire-toi, aussi, les bonnes grâces de la famille en proposant un armistice de bonne volonté. Tu fais référence à l'abandon de tes parents, mais tu ne parles pas de ton mépris à leur égard quand tu obtins un meilleur poste à la banque où tu travaillais. Tu as facilement oublié les devoirs de solidarité fraternelle et tu en es même au point d'accuser les autres ! Fais comme le fils prodigue, prends le chemin du retour et témoigne une sincère humilité envers tout le monde. Demande des excuses pour tes erreurs, sois affectueux et bon... Quant à ta femme, que dire ? Comment peux-tu oublier la tyrannie domestique dont ton cœur volontaire a largement abusé ? Ta femme, la sentinelle de ton foyer et la mère de tes enfants, n'est pas un animal, tu ne peux la traiter avec de l'argent et des injures. Après plus de trois lustres de sacrifices incessants, la pauvre n'a pas résisté et s'est éloignée... Pars à sa recherche en nourrissant dans ton cœur un profond sentiment de repentir pour tes erreurs volontaires et involontaires ! Excuse-toi. Demande-lui pardon pour le sombre passé et garde tes larmes pour sceller avec elle de nouveaux engagements de rédemption. Quant à tes activités professionnelles, si tu désires être guidé par Jésus, retourne voir ton chef et supplie-le de t'excuser pour ton attitude insensée. Cherche à agir correctement, sans trahir les obligations de gentillesse et la reconnaissance envers celui qui est digne de ton respect, de ton affection et de ta gratitude.

Peut-être blessé dans son amour propre, le consultant sécha ses larmes. Puis, après les paroles de l'orienteur qui clôturaient la réunion dans une émouvante prière, le groupe se dispersa. Je remarquai, néanmoins, que l'homme si malheureux gardait le silence...

Jamais je ne pus oublier l'orientation noble et belle, douce et franche qui avait été donnée par le sage de la spiritualité supérieure. Je ne sais, cependant, si elle fut bénéfique car, à mon retour sur ce lieu de prière où j'eus l'occasion d'entendre une telle bénédiction, ce fut en vain que je cherchai le frère malheureux que je ne revis plus...

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Le candidat empressé

Alors que Jacques, fils de Zébédée, suivait le Maître à une courte distance le long du Jourdain, un propriétaire terrien, jeune et pieux, s'approcha de lui, car il disait vouloir entrer dans le royaume des Cieux.

Sur un ton résolu, il s'adressa à l'apôtre et lui demanda :— Est-il vrai que le Messie est porteur d'une Bonne Nouvelle ?Le regard candide et lucide de l'ami du Nazaréen s'illumina de joie, là-dessus, il lui

répondit :- Oui, c'est le messager de la vie éternelle. Avec Lui, nous connaîtrons le monde

rénové : sans oppresseurs ni victimes, rien que des frères, tous fils du même Père...- Quelle est sa devise ? demanda le jeune homme, propriétaire de nombreux

biens.- L'amour à Dieu, par-dessus tout, et à son prochain comme à soi-même, répondit

Jacques, sans hésiter.- Et sa règle d'édification ?- La bonté pour tous les êtres, même pour nos ennemis.— Son programme ?- La coopération avec le Père suprême sous tous ses aspects pour le bien du monde

régénéré.— Quel est son objectif ?— Le bonheur pour toutes les créatures.- Quelles directives préconise-t-il dans les moments difficiles ?- Le pardon sincère au sens large, l'oubli du mal, l'aide mutuelle, la véritable

fraternité, la prière pour les adversaires et les persécuteurs, le service désintéressé et l'action altruiste sans récompense avec une persévérance absolue dans le bien jusqu'à la fin de la lutte.

- Pense-t-il vaincre sans armée et sans armes ?- Le Maître fait confiance aux hommes de bonne volonté pour le salut de la terre.- De sorte qu'il croit possible la victoire finale ?- Sans aucun doute. Notre bataille est celle de la lumière contre les ténèbres, elle

dispense toute lutte sanglante.- Que demande le chef de ce mouvement en plus des qualités édifiantes couramment

évoquées ?- Une extrême fidélité à Dieu, un cœur courageux et fraternel prêt à servir sur la terre

au nom du Ciel.

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Le regard vif du jeune propriétaire eut une étrange lueur, puis après une courte pause, il lui demanda :

— Crois-tu possible mon admission dans le cercle du prophète ?- Pourquoi pas ? s'exclama Jacques doucement et ingénument.Alors, tout en démontrant le caractère sublime de son idéalisme, le jeune homme se

mit à parler :- Depuis plusieurs années, je rêve de rénovation. Nos coutumes tournent à la

décadence. Les voix de la loi divine semblent s'être éteintes avec les écrits sacrés. Le peuple élu se fane comme l'herbe improductive que la nature maudit. Le fier Romain domine de toute part. Le monde est une fournaise ardente où les légionnaires consument les esclaves. Pendant cela, Israël dort en toute imprévoyance et oublie la mission que Jéhovah lui a confiée...

Emerveillé, Jacques écoutait ses arguments. Il n'avait jamais vu un enthousiasme aussi vibrant chez un homme aussi jeune.

- Le Messie nazaréen, continua le jeune sur un ton béatifiant, est l'ambassadeur de la vérité, il faut le suivre dans sa sanctification. Le Temple de Jérusalem est la maison bénie de notre foi. Mais le luxe débordant du culte extérieur arrosé du sang des taureaux et des chevreaux nous oblige à penser au châtiment prochain. Resserrons les rangs aux côtés du Restaurateur. Nos ancêtres l'attendaient. Approchons-nous de lui pour accomplir les plans célestes.

Puis, il posa longuement son regard sur le visage rayonnant du fils de Zébédée et il ajouta :

- Je ne peux vivre dans un autre climat... Je vais voir le Messie et je travaillerai à la construction de la nouvelle terre !...

Il se débarrassa du panier de raisins mûrs qu'il tenait à la main et s'écria :- Je ne perdrai plus de temps !...Comme il s'éloignait rapidement, le disciple du Christ ne put suivre ses longs pas.Marc, l'évangéliste, nous décrit cet épisode qui se trouve au chapitre 10 de l'Évangile,

des versets 17 à 22.Le jeune homme accourut auprès de Jésus. Essoufflé, il haletait. Il prétendait entrer

immédiatement au royaume des Cieux, il s'agenouilla donc devant le Christ et s'exclama :- Bon Maître, que dois-je faire pour hériter de la vie éternelle ?Le divin Ami le dévisagea sans surprise et lui demanda : — Pourquoi m'appelles-tu

bon ? De bon, il n'y a que Dieu.Devant l'insistance du candidat, le Seigneur s'informa de ses intentions. Le jeune

homme lui expliqua que depuis son enfance, il observait les commandements de la loi divine : « Tu ne commettras point d'adultère ; tu ne tueras point ; tu ne déroberas point ; tu ne diras point de faux témoignage ; tu ne feras de tort à personne ; honore ton père et ta mère. »

Une fois terminé ce bref rapport, le jeune homme le questionna d'une voix angoissée :- Seigneur, je peux donc entrer dans le royaume de Dieu ?Mais le Maître lui sourit et lui fit :— IL te manque une chose. Va, vends tout ce que tu as, donne-le aux pauvres. De

sorte que tu auras un trésor dans le ciel. Une fois que cela sera fait, rejoins-moi et tu pourras me suivre.

À cet instant, l'admirable idéaliste exhiba sur son visage un indicible changement. Brusquement, il oublia le pouvoir romain, l'impénitence des Israélites, le rêve de rédemption du Temple, la Bonne Nouvelle et le monde rénové. Une extrême pâleur lui couvrit le visage et lui, qui était arrivé en courant, s'en alla finalement d'un air triste...

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Perte irréparable

Sur un ton paternel, l'instructeur spirituel expliqua aux candidats qui allaient faire une nouvelle expérience dans la chair :

- Pour reconstruire votre destinée, ne perdez jamais votre calme. En pleine activité terrestre, il vous sera indispensable de valoriser l'erreur. Celle-ci ne peut être un motif de découragement absolu. La méprise est un avertissement de la vie. Dans la certitude du bien infini qui neutralise tout le mal, après avoir profité de sa coopération sous forme de souffrance, l'esprit peut atteindre des sommets sublimes. Le Père n'accorde la grâce de la réparation qu'aux enfants qui ont déjà acquis l'entendement. Faites donc preuve d'une profonde compréhension face à toute épreuve difficile. La chute vraiment dangereuse est celle dans laquelle nous nous complaisons, engourdis et stationnaires. Se relever pour reprendre le chemin perdu sera toujours un acte méritoire pour l'âme que le trésor céleste récompensera par la révélation d'occasions sanctifiantes. La sérénité doit présider à vos moindres impulsions dans la tâche à venir. Sans les ressources de la pondération personnelle, le fleuve de la paix ne fertilisera jamais les continents de l'œuvre militante. Il est donc indispensable de se souvenir du caractère précaire de toute possession d'ordre matériel. Le temps, qui fixe la gloire des valeurs éternelles, détruit toutes les organisations temporaires sur la terre et dans d'autres mondes. Toutes les formes basées sur la substance instable périront vu leur caractère transitoire dans le domaine de l'expression.

En restant attentifs aux impératifs du progrès pacifique, n'oubliez surtout pas que tout ce qui est de nature humaine est remplaçable. Toutes les scènes que vous intégrez se destinent à l'éducation de l'âme. Bientôt, elles disparaîtront dans le passé, comme tous les spectacles ne seront plus dans les paysages qui nous entourent...

La loi de substitution fonctionne quotidiennement pour nous tous.Tout témoignage incomplet, toute leçon mal apprise seront répétés autant de fois que

nécessaire.Même la nature, sur la croûte terrestre, vous instruira différemment selon le va-et-

vient des choses et des situations.Les printemps et les hivers se renouvellent pour tous les êtres sur la terre, dans les

différents règnes, depuis des milliers d'années. Les influences lunaires se réarticulent, semaine après semaine, en diffusant un magnétisme différent de la lumière polarisée. Dans les milieux planétaires, l'enfance, la jeunesse et la vieillesse des corps est une loi qui fonctionne pour tous.

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Comme dans le domaine des formes temporaires, la substitution joue un rôle prépondérant dans l'ordre spirituel.

Celui qui ne dispose pas de parents consanguins témoignant de bonne volonté trouvera une famille plus grande dans le cadre des relations humaines. Si vous ne pouvez supporter l'enclume, vous aurez accès à la menuiserie. Dans toute maison édifiante, dès lors que vous serez inspirés par l'idéal de servir, de semer et de cultiver le bien, vous serez partagés entre les possibilités de le réaliser de manière intense.

Dans les arts et dans les sciences, vous recevrez tous la bénédiction d'apprendre et de réapprendre, d'essayer et de recommencer sans cesse.

Dans les circonstances apparemment plus difficiles, nul ne devra se laisser aller au désespoir. Tout comme l'aube fait briller la lumière au delà des ténèbres, l'occasion de réajustement, de réhabilitation et d'ascension brillera toujours sur les abîmes dans lesquels nous nous précipitons imprudemment et sans réfléchir... Restez toujours en paix, car tout sera reformulé et remplacé au fur et à mesure que les problèmes seront élucidés et au fil du chemin parcouru par les mortels...

L'orienteur révéla dans son regard une luminosité différente et ajouta :— Il y a, néanmoins, au cours de nos activités une perte irréparable. À l'exception des

valeurs prépondérantes au parcours évolutif, ce préjudice est la mesure qui définit la distance entre le bien et le mal, le riche et le pauvre, l'ignorant et le sage, entre le démon et le saint. Une telle lacune ne peut être comblée. Dieu a fait la loi de telle manière que, dans l'intérêt des hommes ou des anges, pas même Sa justice peut y remédier. Face à l'expectative des auditeurs, l'instructeur compléta :

- Chaque jour, des occasions de servir utilement se présentent et sont perdues. Elles représentent un plus assuré, qui nous distancie de tous les compagnons qui s'exemptent de cette erreur.

Et comme les apprentis se regardaient, admiratifs, le mentor conclut sur un ton paternel :

—Pour nous aider à préserver la paix, Jésus nous a recommandé : « contemplez les lys du champ ! » Néanmoins, pour que nous ne nous moquions pas de la profonde valeur des heures, II nous a Lui-même avertis : « Marchez, tant que vous avez la lumière ! »

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Remède contre les tentations

Alors qu'il était déjà âgé, Simon Pierre fut interrogé par un jeune chrétien de Jérusalem qui se disait porteur de précieux titres de noblesse. Il voulait connaître un remède efficace contre les tentations. Sans la moindre hésitation, Simon lui répondit :

- Un beau jour, un homme de Gaza, qui aimait sincèrement le Seigneur et suivait scrupuleusement ses commandements, parvint à la quarantaine après avoir accompli tous ses devoirs envers ses proches. Il se retrouvait donc complètement libéré des obligations les plus immédiates. Comme ses aspirations les plus élevées étaient définitivement intégrées en Dieu, il se consacra à la contemplation des mystères divins. Il se recueillit donc exclusivement dans la prière et dans la méditation. En extase devant les arbres et les sources, devant la terre et le ciel, il louait le Créateur dans des cantiques de profonde reconnaissance. Il était devenu si merveilleusement fidèle au pouvoir céleste que les forces divines permirent à l'Esprit des ténèbres de s'approcher de lui, comme cela se produisit, un jour, avec Job dans la sécurité de son foyer à Hus.

Le roi du mal s'approcha du parfait croyant et se mit à le combattre en essayant d'assombrir son cœur.

Après de longues journées à vivre d'âpres conflits, l'aspirant au paradis implora en sanglots l'Eternel de lui donner les moyens de s'esquiver des tentations. Il le supplia avec une si grande ferveur que le Miséricordieux envoya un émissaire pour lui dire de cultiver sa terre.

Le pieu dévot suivit rigoureusement cet ordre.Il acquit une grande propriété, prépara les semences et les fertilisa. Il protégea les

tendres bourgeons, partagea les eaux intelligemment, puis il se fit aider régulièrement par de nombreux serviteurs. De sorte que lorsque le dominateur pervers arriva, il le trouva si occupé qu'il fut contraint de reporter la réalisation de ses sinistres desseins.

L'adepte de Dieu agit avec tant de brio que, rapidement, la propriété agricole dont il était garant se convertit en un centre de richesse bénie qui produisait mécaniquement et en abondance pour tout le monde.

Ayant répondu à la demande du Seigneur, le propriétaire terrien retourna se reposer et le démon revint lui rendre visite.

Un autre combat silencieux se mit en place, de sorte que le dévot supplia à nouveau l'intervention du Père suprême.

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En se manifestant à travers le dévoué messager, dans sa grande bonté, celui-ci lui recommanda de filer la laine des troupeaux d'ovins qui peuplaient les pâturages. Profitant donc du conseil céleste, il observa fidèlement ces instructions.

Il embaucha du personnel, sélectionna des moutons, acquit des métiers à tisser et des navettes. De sorte qu'il devint propriétaire d'une grande usine de filature. Quand le démon remarqua qu'il était si occupé, qu'il n'y avait pas de place pour la provocation, il se tint à distance pour attendre une nouvelle occasion.

En quelques années, les efforts du missionnaire apportèrent la prospérité à l'industrie manufacturière, le dispensant de toute préoccupation.

Lorsque le génie satanique remarqua cela, il revint et reprit sa guerre intime.L'apprenti de la foi fit appel à la prière, et une fois de plus, il dut implorer les mesures

providentielles du donneur de bénédictions.Le Tout-Puissant s'exprima par le biais d'un ange. Il l'induisit à moudre le blé pour le

bien commun.Le favori se remit au travail. Ce fut au prix de grands efforts qu'il construisit de grands

moulins avec un groupe de personnes pour fabriquer des farines blanches. Lorsque le dragon des ombres revint le voir, il perçut une si grande ardeur pour réaliser cette activité bienfaitrice qu'il se retira à nouveau, déconcerté, guettant une occasion plus opportune.

Vu le succès que le loyal serviteur obtenait, il entra dans une nouvelle phase de repos. Furieux, Satan revint à la charge pour prendre possession de sa vie.

Le pieux disciple du salut se réfugia dans la confiance en Dieu. Le Tout-Aimant lui envoya un autre messager pour lui conseiller de faire pousser un verger dans l'intérêt des serviteurs qui l'accompagnaient dans son expérience.

Immédiatement, le zélé croyant retourna à la tâche. Il était si absorbé par ses nouvelles responsabilités que le persécuteur dut faire marche arrière et épier une occasion plus appropriée.

La fidélité conféra au travailleur productif les nouvelles bénédictions d'une prospérité méritée et la sérénité le remplit de bonheur.

Heureux et insouciant, le croyant se plongea dans la béatitude pour remercier les dons divins. Le maudit en profita pour ressurgir et l'inviter à reprendre le duel occulté.

Mais, finalement, le dévot comprit les leçons du Seigneur et ne supplia plus son aide. Il s'impliqua dans le service utile rendu

au monde et à ses semblables jusqu'à la fin de ses jours, quand il quitta la terre en exhibant la couronne de l'éternité.

Un peu appréhensif, l'auditeur eut un léger sourire.Habitué à la souffrance et au sacrifice, le vieux Pierre se tut. Puis, très calmement, il

en vint à conclure :- Le seul remède avéré que je connaisse contre les tentations, c'est de plonger sa

pensée et ses mains dans le travail qui dignifie notre vie pour le Seigneur.Ce fut ainsi que s'acheva l'entrevue fraternelle.

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L'incompréhensible dévot

Devant le ciel clair-obscur du crépuscule, le dévot extasié suppliait le Très-Haut :- Seigneur, ouvre-moi les greniers de la prospérité spirituelle ! J'ai besoin de grandir

mentalement pour vous servir. Je sens, Père, que mes forces gisent endormies... Que faire pour m'élever ? Je dispose d'éléments matériels suffisants pour pourvoir aux exigences de la vie. Malgré tout, je reconnais au fond que je manque d'entrain, je suis abattu... Je veux vibrer dans votre amour infini, me consacrer à la quête infatigable de vos dons de sagesse. Pourtant, intimement, je m'attarde dans l'indécision du voyageur qui se sent abandonné dans le brouillard épais... Ô Père magnanime, ne me laissez pas somnoler au bord du chemin... Je n'ignore pas les choses sacrées. Je sais qu'il est indispensable de travailler à notre illumination pour que le monde soit finalement racheté... J'ai appris que votre volonté prévaut sur la nôtre. Depuis longtemps, je sais que notre collaboration personnelle est fondamentale à l'exécution des programmes salutaires. Mais comment avancer si je manque de moyens au niveau spirituel ? Aidez-moi à me surpasser, soutenez-moi pour que j'arrive à déchirer le voile qui m'empêche de contempler votre glorieuse lumière présente dans tous les paysages de la vie. Ne m'abandonnez pas. Je suis à vous. Je vous appartiens. Dilatez mon entendement, donnez-moi l'occasion de profiter des bénédictions que vous m'avez déjà accordées, aidez-moi à appréhender les dons que vous me faites partager. J'attends votre manifestation paternelle. Ouvrez-moi les sources de la grâce, vous mon géniteur fatigué de lutter depuis si longtemps pour développer et élargir ma compréhension des choses. Que vos desseins s'accomplissent!...

Puis, il se souvint de la prière de l'ange dans le beau récit de 1 :'Évangile de Luc, et se mit à répéter la pensée de Marie :

- Que la volonté du Seigneur s'accomplisse en l'esclave !...Après la prière, il frotta ses yeux avec son mouchoir pour sécher ses larmes de

repentir.La nuit commençait à enfiler des constellations dans la voûte céleste.Réconforté, il reprit donc le chemin de son foyer. Il avait prié avec ferveur et attendait

la bénédiction divine pour sa propre édification.Avant même de traverser le jardin domestique, voilà que son épouse angoissée vint à

sa rencontre.

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Un de leurs enfants souffrait d'une étrange colique. Il avait été ausculté par le médecin et allait être soumis, quelques heures plus tard, à une délicate opération.

Abasourdi, comme si quelqu'un lui avait donné un énorme coup sur la tête, il n'était pas encore revenu de sa surprise qu'un fidèle serviteur, le visage blême, s'arrêta net devant lui et l'informa que le plus grand dépôt de coton de sa propriété avait été accidentellement incendié. Nul n'avait pu localiser l'origine du feu qui avait implacablement détruit tout ce qui se trouvait sur son passage.

Le dévot dut faire un effort pour ne pas s'effondrer. Son sang affluait dans son cerveau par jets violents. Il était loin d'arriver à se dominer. Il se sentait divaguer, incapable de donner la moindre direction constructive à son petit monde physiologique...

Figé, il ne bougeait plus. A cet instant, une vieille tante en sueur, excessivement nerveuse, arriva en lui disant que son père agonisait dans une ville avoisinante...

Le dévot oublia que la bonté divine pouvait guérir son fils, lui donner une nouvelle plantation de cotonniers plus riche et plus étendue et fournir un repos bien mérité à son père fatigué qui luttait et souffrait sur la terre depuis longtemps. D'une minute à l'autre, cet homme fut transformé. Lui qui suppliait le Ciel de lui donner les moyens de s'illuminer pour se développer mentalement, pour grandir en connaissance et en vertu et s'éveiller à la vie éternelle, plutôt que de recevoir les tests divins avec courage et sérénité pour mieux profiter de l'occasion de s'élever, il s'écria affligé :

- Où est donc Dieu qui n'entend pas mes prières ? Je suis un malheureux, le plus malheureux des hommes !...

Vaincu, il s'effondra sur son lit, alors que la lutte ne faisait que commencer. Il choisit de fuir les possibilités de croissance spirituelle pour se rabattre sur les sédatifs prescrits par son médecin.

Alors que je suivais son expérience de près en tant qu'ami désincarné, je reconnus que quand les croyants supplient la protection du Ciel, presque tous ne prétendent pas au fond respirer le climat supérieur de la vérité et de la lumière... De toute évidence, c'est à la condition d'orchidées protégées sous la serre céleste qu'ils aspirent.

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Un oracle différent

- Mon sorcier du Vélabre est fabuleux, fit Tulia Prisca qui s'entretenait à Capharnaum avec la femme de Cusa. Imagine-toi que soucieuse de mon bonheur, c'est sur ses conseils que je fais ce voyage en Judée. Cet oracle est le meilleur qui soit ! Nous l'avons rapporté d'Achaïe, lors du dernier voyage que mon oncle, l'avocat Amian, réalisait là-bas en mission administrative. Il lit les présages et sait d'avance qui gagnera les jeux au cirque. Il découvre les criminels et indique avec une précision absolue le lieu où se trouvent les objets perdus.

Jeanne, qui l'écoutait attentivement, eut un étrange regard. Après une courte pause, la patricienne poursuivit en clignotant des yeux :

- Druze, mon mari, est tombé amoureux de Mécie, la femme de Flacus. Ce crime me brise le cœur. J'ai même essayé de m'ouvrir les veines et de mourir, mais Tissapherne, mon mage, a résolu le problème. Il m'a conseillé de faire un voyage de loisirs et m'a assuré que d'autres hommes sympathiseraient avec moi, comme cela se produit actuellement. J'ai laissé mes enfants avec les vieilles esclaves et la galère a résolu le reste. J'ai goûté à beaucoup de plaisirs et, à mon retour, si Mécie insiste dans son intromission, le charmeur me fabriquera une crème radicale. Elle deviendra plus laide que les sorcières de l'Esquilin.

Puis, l'illustre étrangère se tut un instant, pour finalement continuer :- Jeanne, tu ne me connais peut-être pas suffisamment, mais je dois t'avouer que j'aime

consulter tous les types de sorciers. J'ai entendu parler de l'un d'eux qui devient célèbre dans cette province. Je sais que tu fréquentes son cercle d'amis. Tu ne pourrais pas me conduire au mage nazaréen ?

L'interpellée fit son possible pour s'esquiver. Elle ne voulait pas déranger le Maître avec des visites frivoles et inutiles. Néanmoins, son insistance finit par vaincre sa réticence. Peu après, Jésus les recevait dans la modeste résidence de Pierre.

Comme toujours, il planait dans son regard une sublime mélancolie. La jeune matrone se sentit intimidée. Cet homme n'était pas un vulgaire diseur de bonne aventure. De son front, il émanait des forces incompréhensibles qui imposaient le respect. Elle ne put le traiter autrement que de « Seigneur », conformément à l'attitude respectueuse de son amie. Elle n'arrivait pas à dissimuler son appréhension. Le Nazaréen semblait ignorer sa position

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hiérarchique élevée. Il ne révéla rien de lui-même. Il ne fit aucun commentaire sur le succès qu'avait son passage au milieu du peuple. Il la regardait droit dans les yeux, sans fausse supériorité ni servilité. Sûr de lui, attentif à ses obligations, le travailleur attendait que la visiteuse lui dévoilât les raisons qui l'amenaient. Embarrassée par cette situation inattendue, elle lui demanda quelque peu frustrée :

- Seigneur, vous connaissez le mage Tissapherne, qui sert notre maison ?Jésus eut alors un large sourire aimant et lui fit :- On trouve partout des devins...Déroutée par cette remarque intelligente, Tulia

craignit de voir s'installer un nouveau silence et ajouta immédiatement :- Je viens vous voir pour vous demander de l'aide...- Que désires-tu ? demanda le Maître, sans la moindre affectation.- Mon mari s'est détourné de mon affection. J'ai souffert d'amertume que le serviteur

le plus méprisable ne saurait connaître. Que dites-vous de cela, Seigneur ?- Que la douleur bien comprise est une lumière pour le cœur...- Oh ! Même quand nous sommes offensés ? -Oui.- Ne devons-nous pas rendre la pareille ?- Jamais.- Et la justice ?- La justice est un arbre stérile s'il ne peut produire les fruits de l'amour pour la vie

éternelle.- Voulez-vous dire que si mon mari s'égare, il m'appartient de payer pour lui ?- Pas à ce point. Le bonheur est impossible là où l'on ne sait pas oublier les fautes.- Vous insinuez que je dois pardonner mon mari ?- Autant de fois que nécessaire.Irritée, Tulia perdit son contrôle et lui fit remarquer :- Druze est un débauché. Il s'est comporté en bourreau implacable. Et il

m'appartiendrait de le respecter et de l'aimer malgré tout ?- Pourquoi pas ? lui rétorqua le Maître, celui qui ne sait pas renoncer à ses désirs

recevra difficilement le don divin de la joie perpétuelle.-Je dois donc retourner chez moi, réassumer la direction de mon foyer et reprendre la

responsabilité de l'éducation de mes enfants, comme l'animal qui se laisse atteler à une intolérable charrue ?

- C'est dans le sacrifice que réside la véritable gloire, lui fit Jésus, imperturbable.- Oh ! se plaignit la patricienne désenchantée, Tissapherne, le mage qui a toute ma

confiance, m'a conseillé de prendre du plaisir... Je ne peux douter de lui. C'est un véritable oracle. Il a des réponses infaillibles, il voit nos dieux et les entend toujours. . .

Puis, fixant le Seigneur d'un air appréhensif, elle objecta :- Pensez-vous, par hasard, qu'il se trompe ? Le Maître lui sourit et répondit :- La voix de notre conscience ne peut être toujours d'accord avec l'opinion de nos

meilleurs amis. Le devoir est plus important que les présages de tout devin.- Et tu n'as pas de nouveautés pour moi ? Je viens de si loin et tu n'as rien pour me

contenter ? Quel message devrais-je garder de cette visite ?- Je prie le Père, dit Jésus très sereinement, qu'il t'illumine et te bénisse.À cet instant, Jeanne lui fit ses adieux.Dehors, peut-être troublée par l'immense clarté du ciel qui épousait les reflets

diamantins du lac, la noble Romaine, sincèrement désappointée, lui fit :- Effectivement. . . cet oracle est bien différent. . .

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En guise de réponse

Tu t'insurges, mon ami, contre les informations relatives aux formes que nous utilisons sur le plan spirituel. Tu t'étonnes de savoir que nous avons notre propre domicile avec tout l'équipement indispensable à la vie organisée de celui qui continue toujours à évoluer et à apprendre.

Tu assures que nous matérialisons excessivement les images que nous évoquons et que nos pages ne sont peut-être que l'expression des hallucinations des médiums.

Ton attitude ne m'étonne pas. Si j'étais sur la terre, je penserais la même chose.Imagine-toi que moi, qui étais habitué à gagner et à perdre, je voyais le monde comme

l'élève en primaire qui fait de terribles efforts pour essayer de prononcer l'alphabet afin de pénétrer, un pas après l'autre, dans le laboratoire de la science. J'identifiais les énormes conflits imposés à tout professionnel digne de ce nom et désireux de se spécialiser. Néanmoins, quand il s'agissait de la mort du corps, je croyais pieusement que l'âme du défunt s'envolerait en plein ciel à la recherche du trône divin. D'après moi, il suffisait d'avoir l'aval d'une religion respectable pour que le défunt entrât dans les joies du paradis. Je savais que les tribunaux humains rendent la justice avec des circonstances qui pouvaient être atténuantes ou aggravantes selon les circonstances prépondérantes au pénible drame des coupables. Je n'ignorais pas que l'échelle de l'éducation est bien plus grande que les cinq lignes de la portée musicale. Néanmoins, il ne m'était jamais venu à l'idée que notre amélioration resterait intense dans ces parages. J'admettais que les « morts » étaient des anges ou des démons absolus, à l'exception de ceux qui étaient retenus au purgatoire par la police divine, comme les soldats qui s'attardent dans un « no man's land ». De fait, pour les croyants en général, le purgatoire, entre ce monde et l'autre, est une espèce de territoire de Cerre entre Allemands et Français des siècles derniers.

Comme tu le vois, ta façon de percevoir les choses aujourd'hui a aussi été la mienne, tant que j'étais sur la terre.

À l'époque, jamais, je n'aurais pu concevoir l'expérience corporelle comme un phénomène transitoire d'extériorisation de l'esprit impérissable. Selon mon entendement, l'esprit était une projection du corps.

As-tu déjà vu une plus grande méprise ?

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Or, c'était une erreur que ma vanité berçait ardemment.Je n'étais pas sans savoir que d'illustres sages m'avaient précédé sur la voie de la

connaissance, que la sandale des héros et des saints s'était traînée dans la poussière planétaire bien avant mes pieds malades ; néanmoins, jamais, je ne pus accepter d'autres points de vue que le mien.

Pourtant, la tombe m'imposa l'art du réajustement.Je ne cesse d'apprendre avec la naïveté de ceux qui font partie d'un groupe scolaire. Et

je rends grâce à Dieu d'avoir conçu cette occasion indispensable.Ne crois pas être dans le voisinage du paradis et ne le prends pas mal si nous donnons

des nouvelles des villes et des institutions, des temples et des hôpitaux, des arbres et des sources, outre-tombe...

Quand nos yeux immobiles reçoivent le revêtement traditionnel des cendres, nous vérifions que le ciel est plus haut et l'horizon plus lointain.

Tu n'applaudirais pas le nudisme, mais tu crois que pour témoigner d'authenticité, les désincarnés ne devraient pas utiliser le moindre vêtement. Tu estimes la bénédiction du sanctuaire domestique dans la communion douce et aimante des liens affectifs, mais tu considères que pour cultiver la réalité universelle, nous devons vivre séparés, errer de sphère en sphère, sans but ni foyer. L'ordre qui règne dans le cadre du cercle doctrinal auquel tu consacres ton attention te satisfait, mais tu exiges qu'en communiquant avec les « vivants », nous soyons comme des essaims de guêpes ou des volées d'oiseaux.

Ne crois pas que la sépulture te dispense de la responsabilité individuelle de continuer à apprendre à aspirer au bien. Dieu est amour, par conséquent, l'harmonie est la base de ses manifestations. De sorte que pour être aimant, un père ne saurait être injuste.

Tu sais que pour s'élever des profondeurs des abymes auxquels il s'est adapté, le poisson a besoin de modifier sa vessie natatoire. Alors que faire des millions d'âmes humaines immobilisés dans des processus d'intelligence inférieurs, incapables de respirer au-delà de l'atmosphère dense de la vallée s'il ne leur était pas donné des conditions de vie analogues, voire profondément similaires à celles de la croûte terrestre ?

Ne pense pas que la mort leur fasse pousser des ailes dans le dos.Si d'après l'évolution des choses, notre dimension humaine n'est pas parfaite, comment pensons-nous pouvoir accéder au règne angélique ?

Au contact de tes objections, il me vient à l'esprit une fable dont le vieux Jean de La Fontaine n'est pas l'auteur.

Elle raconte qu'un papillon lumineux, désireux de préparer l'avenir des chenilles, se posa dans la communauté où il était né en faisant un grand scandale dans tout le nid.

- En vérité, dit-il, je suis un membre de votre famille, ma physiologie est similaire à la vôtre, même si je vole très loin, que je vois des villes et des fleuves, des êtres et des plantes que vous ne connaissez pas, je suis toujours un lépidoptère quoique perfectionné... Bientôt, vous serez comme moi. Par conséquent, je ne m'éloignerai pas trop de notre abri, afin de m'occuper des intérêts de nos descendants...

Cependant, il ne put continuer. Le ventre collé au sol, les larves se dispersèrent dans un vent de panique.

Toutes refusèrent le message et rejetèrent le messager. Ce qui, en fait, n'empêcha en rien le travail de la nature.

Peu après, le papillon pondait ses œufs. Des œufs naissaient les chenilles. Les chenilles dormaient dans les cocons. Et des cocons apparurent des papillons...

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Pour expliquer

Il en est qui protestent contre notre correspondance à caractère d'information. Comme eux, tu soutiens qu'on ne peut croire en nos travaux rédempteurs dont les outils ressemblent étrangement à ceux qui sont utilisés sur la terre.

Tantôt, nous nous rapportons à des filets lumineux, puis nous décrivons des systèmes de défense.

Le fait est que vous, qui êtes toujours collés au sol de la planète, n'êtes pas obligés d'accepter ce que vous ne pouvez voir.

Lorsqu'un botaniste européen donne des nouvelles à un collègue américain sur l'existence de plantes inconnues dans la région équatoriale, si l'intéressé désire s'en assurer personnellement, il consentira à faire le sacrifice d'un voyage pour s'en rendre compte de lui-même. Dans notre cas, nous ne marchandons ni la nouvelle ni le voyage pour être dûment analysés ; et puis, qui est prêt à payer le prix fait d'effort et de perfectionnement dans le renoncement ?

En outre, comme ce fut notre cas, vous arrivez presque toujours sur le plan spirituel brutalement projetés par la mort comme les fusées que les savants prétendent faire atterrir sur la Lune.

À ce sujet, tu affirmes que la force mentale des Esprits désincarnés pourrait dispenser de telles circonstances. Pour soutenir tes déclarations, tu affirmes que les malades mentaux, obsédés par les entités perverses, cèdent parfaitement aux émissions magnétiques dégagées par la prière.

Je ne doute pas de ses facultés régénératrices et curatives.Mais, dis-moi, as-tu l'habitude de faire des estimations ?Supposerais-tu, par hasard, que la force susceptible d'être récoltée par la chute d'un

ruisseau est identique au potentiel de la cascade ?Dans ce cas, transfère cette image aux énergies associées au mal et fais les comptes.Tu te souviendras, probablement, qu'il nous incombe de mobiliser les ressources du

bien avec une intensité plus grande et plus forte. Je crois que nous finissons tous par agir de

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cette manière, même si pour l'instant, en ce qui me concerne, je dois admettre qu'après de nombreux siècles, ce n'est qu'à présent que je me sens incité à servir le bien légitime.

À ton avis, le miraculeux « fiât » de la Genèse serait entre nos mains peu après les péripéties de la transe finale du passage physique.

Or, le pouvoir mental ne peut s'improviser.Tu fais allusion aux cures magnétiques pratiquées dans l'hôpital que tu fréquentes,

comme si tout relevait d'une simple question de volonté personnelle. Le travail pour toi est un jeu mécanique qui se joue entre les desseins et les énergies.

De fait, son concours est précieux.Qu'en serait-il des grandes villes, habituées aux avantages de l'électricité, si la modeste

prise électrique se refusait à faire la liaison avec l'usine ?Quand tu administres des bienfaits spirituels aux nécessiteux, tu ne peux voir la foule

invisible rassemblée autour de ta précieuse collaboration : ni les désincarnés en état de déséquilibre qui profitent de ton secours fraternel, ni les bienfaiteurs généreux qui utilisent tes mains, ta pensée et ta bonne volonté. Par conséquent, la prière et le dévouement consacrés à autrui seront pour toi d'inaltérables points d'appui, puisque tes yeux mortels ne peuvent identifier toute l'étendue du tableau, sans grave dommage pour ton équilibre dans le cadre des luttes que tu mènes au cours de ta réincarnation. Que tu acceptes ou non la vérité, tu ne peux agir seul. Même si tu dispenses la coopération des entités amicales, chaque fois que ta conscience honnête portera secours à ton prochain, ils seront en ta compagnie. Si ce n'est pas par ton intermédiaire, ce sera par celui des nécessiteux.

En outre, il me semble que tu ne t'es pas encore penché sur le problème relatif au lieu de guérison. Le dictionnaire nous dit que l'hôpital est un établissement consacré aux soins des patients.

Pourtant, il existe des centres de cette nature qui sont salutaires et d'autres préjudiciables.

Tu redoubles d'attention pour une maison d'amour évangélique idéalisée sur le plan supérieur et lentement matérialisée sur la terre. Des travailleurs incarnés et des guides désincarnés y trouvent donc une large gamme de vibrations adéquates reposant solidement sur la sympathie et la confiance. Personnellement, j'ai visité, dernièrement, plusieurs centres nuisibles à l'être humain. Je me rapporte à certains « camps de concentration » du temps de la guerre en Europe. Ces institutions regroupaient des souffrants en tous genres. Des milliers de victimes y étaient flagellées et tourmentées, et des centaines de bourreaux y étaient mêlés à un nombre incalculable d'Esprits détachés de leur corps physique en proie à de douloureux déséquilibres. Crois bien que notre collaboration mentale - et ici je fais référence aux compagnons infiniment supérieurs au modeste serviteur qui écrit ces lignes • était extrêmement limitée face aux émanations de haine qui régnait de façon monstrueuse. Le terrain était plein d'obsédés, mais... la zone était préjudiciable.

Naturellement, tu demanderas :- Pourquoi ? Pour quelle raison le plan supérieur ne s'impose-t-il pas sur le plan

inférieur ?En réponse, je dirai à peine qu'un jour, le monde vit passer quelqu'un dont la force

mentale rénovatrice et divine relevait les paralytiques et rendait la vision aux aveugles. Jésus imposait le respect aux êtres des ténèbres par sa simple présence ; il en vint même à rendre leur vitalité à des corps cadavérisés. Il apporta à la terre le plus grand message du Ciel. Mais quand il se vit entouré de ses semblables aveuglés d'envie et de jalousie, d'incompréhension et d'égoïsme, d'orgueil et de haine, d'ingratitude et d'indiscipline, d'injustice et de méchanceté, il rassembla ses énergies sublimes et infinies en son for intérieur, et se livra à la croix du sacrifice sans se défendre.

Si tu me demandes pourquoi, franchement, je ne saurais te répondre.

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J'admets qu'en procédant de la sorte, l'Ambassadeur sublime voulut fixer dans le cœur humain la leçon de la nécessité du royaume de Dieu.

Tout homme, fils du Créateur et héritier de l'éternité doit grandir en ce sens, il doit s'améliorer et s'élever grâce à sa volonté et à son intelligence. Toute créature se devra, à elle-même, le ciel ou l'enfer où elle se trouve.

Je me souviens qu'un jour, le divin Crucifié enseigna : - Le royaume céleste est en vous !

Celui qui ne voudra pas le découvrir en lui-même deviendra comme un malade qui refuse tout type de traitement. Pour ce genre de souffrant, les médecins et les remèdes n'ont pas de raison d'être.

Quant à notre matériel secouriste et à nos milices célestes, à nos groupes de surveillance et à nos organisations qui honorent la hiérarchie et l'ordre, le travail et l'évolution dans le cadre du mérite et de la justice, tout cela relève de notre bataillon domestique.

Jusqu'à ce que vous veniez nous rejoindre, sous le coup inévitable de la mort, vous croirez nos informations si vous le voulez ; d'autant que d'après la vieille philosophie populaire, celui qui donne ce qu'il peut, n'est pas obligé de donner davantage.

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Juste allégation

Lors d'un entretien avec quelques amis, le grand orienteur spirituel faisait des considérations expressives.

- Comme vous le savez tous, depuis des temps immémoriaux, les compagnons incarnés se tournent vers notre sphère pour trouver des modèles utiles à leurs activités sur la croûte terrestre. La masse paresseuse, exclusivement intéressée par l'échange des émotions physiques, n'a jamais fait d'efforts en ce sens, parce qu'elle reçoit sans discuter les mesures qui lui sont imposées, tandis que les hommes actifs et intelligents, chaque fois qu'ils le peuvent, délaissent leur lourde enveloppe physique et viennent demander notre collaboration. Ils étudient les travaux que nous réalisons autant qu'ils le peuvent et observent le développement évolutif de nos institutions. D'ailleurs, nous avons des instructions spéciales pour leur faciliter un tel accès, tout comme nous sommes autorisés à monter à des niveaux plus élevés pour chercher l'inspiration de nos supérieurs.

Puis, tout en révélant dans son regard une bienveillance infinie, il fit une longue pause et poursuivit :

- Ministres de la foi, administrateurs des biens publics, scientifiques et artistes, conducteurs de la pensée et de la culture de l'humanité incarnée, avides de rénovation dans l'intérêt des contemporains, chaque fois qu'ils se montrent à la hauteur des titres dont ils sont détenteurs, ils s'empressent de s'imprégner de notre concours spirituel. Ils ne savent pas toujours ce qu'ils veulent, d'ailleurs, nous sommes obligés d'agir avec eux comme des enseignants du primaire. Nous supportons leurs impulsions intempestives sans les censurer, et nous déterminons les heures appropriées pour leur donner des leçons. Dès qu'ils s'éloignent de leur corps provisoirement débranché, sous l'influence du sommeil, nous réunissons les plus aptes au progrès intellectuel pour qu'ils soient dûment préparés à servir. Habituellement, pour nous comprendre, ils éprouvent d'énormes difficultés. Sans cesse, des obstacles se dressent pour qu'ils utilisent commodément leur mémoire. Beaucoup reçoivent notre collaboration pendant vingt, trente, cinquante ans, et finissent surpris par la mort, sans avoir rempli un seul des nombreux engagements assumés. Quelques-uns, néanmoins, bien intentionnés et

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persévérants, franchissent les obstacles, dépassent leurs limites, brisent leurs chaînes et fixent nos enseignements en s'affichant à l'avant-garde du temps, bien en évidence sur la croûte planétaire. Généralement, ils sont combattus par les oisifs, d'ailleurs, les indolents ont toujours été hostiles aux serviteurs loyaux. Bon nombre de ces amis persévérants finissent martyrisés, comme ce fut le cas du Christ, notre Seigneur. Cependant, un jour, l'occasion se présente où leurs idées sont louées et mises à profit. Pour ces compagnons, nos portes sont toujours ouvertes. Du problème des aliments à la plus haute instance judiciaire, ils étudient avec nous. Ils retirent d'ici les miettes de lumière qu'ils peuvent enregistrer dans leur champ mental moyennement évolué pour les rapporter sur la terre. Comme cela se produit avec les abeilles ouvrières qui transportent dans la ruche la quantité d'essences récoltée en fonction de leurs capacités. C'est ainsi qu'en observant nos codes de droit, ils font des lois conformément à leurs inclinations personnelles, des institutions qui progressent graduellement vers la justice universelle. De manière identique, ces pionniers de l'idéalisme supérieur, ont érigé des temples religieux, amélioré la science, illuminé la philosophie, fondé l'industrie et perfectionné le commerce. De temps à autre, les masses laissent ressurgir leur animalité primitive, ils régressent dans leurs impulsions, s'ouvrent aux génies sataniques de la destruction et les individus se jettent les uns contre les autres dans des heurts sanglants. Mais dominés par les êtres supérieurs qui nous rendent visitent, ils finissent toujours par poser les armes, reconstruire les villes, recomposer l'économie et réajuster leur raisonnement, à nouveau attirés par nos cercles d'action. Pendant ce temps, les précurseurs du progrès se réunissent et par le biais d'accords et d'entretiens, ils font de nouveaux serments à Dieu. Ils exaltent les symboles les plus élevés de la dignité humaine et ont sans cesse recours à nos services. Quelques-uns demandent d'où leur viennent les valeurs de l'intuition et la majorité a l'habitude de considérer notre collaboration comme une fantaisie.

L'orienteur eut une expression significative et ajouta : - Dans le passé, nous occupions la galerie des dieux et nous étions pris pour des muses. La vérité est que, depuis les prémices de la vie planétaire, les êtres copient nos modèles dans leurs grandes lignes. Ils n'arrivent jamais à nous imiter convenablement. Ils admirent nos tours lumineuses et construisent de sombres édifices qu'ils appellent des gratte-ciel. Ils observent nos chemins fleuris brillant d'éclats et dessinent des lits en pierre dans la terre pour exprimer leur sentiment de fraternité. Ils contemplent nos outils délicats et légers, mais improvisent des machines pesantes d'où s'échappe un combustible malodorant qui menace, à tout instant, la vie corporelle. Pourtant, une telle situation est justifiable. Le sculpteur peut avoir de merveilleuses idées, mais pour les concrétiser, il dépend du matériel qu'il a sous la main et nous devons convenir que la condensation de fluides sur la croûte terrestre se caractérise par une très grande dureté. L'orienteur s'arrêta, eut un air expressif et conclut : Jusqu'ici, tout est logique, tout est de l'ordre du raisonnable... Or, il se trouve que, récemment, certains de nos compagnons donnèrent des nouvelles de nos organisations aux incarnés. Et vous savez ce qui s'est passé ? Nos courriers ont fait beaucoup de bruit. Même les médiums sous nos influences sont entraînés dans un vent de révolte. On dit que nous n'avons pas de personnalité, que les « morts » sont les plagiaires des « vivants », que nos villes, nos lois, nos institutions et nos équipements, que toute notre structure multimillénaire d'ordre et de travail n'est que le reflet de leur culture. S'ils le pouvaient, ils intenteraient même un procès contre nous auprès des cabinets de l'ingénierie divine.Ne trouvez-vous pas tout cela étonnant et incompréhensible ? Nul ne répondit, et comme l'illustre enseignant eut un franc sourire, un éclat de rire général se propagea parmi nous.

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Une lettre sans prétention

Mon cher,

J'ai bien reçu tes notes.Je sais que tu n'accepteras pas ma réponse avec l'entendement qui serait souhaitable. Si

tu te souviens encore de moi, tu ne toléreras pas le fait que j'ai survécu.Tu liras ma pensée loin de notre chaleureuse relation quand je vivais enfoncé dans un

scaphandre similaire au tien sous la mer épaisse de l'oxygène terrestre.Tu recevras cet effort avec un esprit extrêmement critique. Tu chercheras à savoir, tout

d'abord, si j'ai correctement employé les verbes et si j'ai ponctué ma lettre avec l'élégance requise.

Tu diras probablement que mes moyens se sont appauvris, que mes arguments ne sont pas convaincants.

Néanmoins, venons-en à ce qui nous intéresse.Tu affirmes que les Esprits désincarnés, d'après les nouvelles qu'ils fournissent au

monde, se déplacent sur un plan absolument irréel. À ton avis, nous vivons dans des maisons illusoires, nous nous occupons d'institutions qui n'existent pas, nous cueillons les fleurs et les fruits du mensonge et nous volons de façon stationnaire comme des ombres dans un endroit fantaisiste. Tu ajoutes que, pour juger de notre situation, tu te bases sur le sol que tu foules. Selon les appréciations qui éclairent ta façon de voir les choses, la sphère où tu respires toujours est la plus solide de toute la structure universelle. Rien ne souffre d'altération autour de toi, vu la position très particulière qui est la tienne.

Si j'y étais, peut-être que je passerais par la même amnésie. Il suffit de dire que. D'ailleurs, quand je portais le fardeau de la chair, j'étais parfaitement étranger à mes propres défauts. Quant aux besoins essentiels, jamais, je ne me suis soucié la vitesse du temps qui passait.

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Ce ne fut qu'à l'heure où mes amis jetèrent de la terre et de la chaux sur mon corps sans défense, que je me mis à méditer sur l'impermanence des situations et des choses. Je revis alors ma lointaine enfance et je passai en revue notre village du nord tourmenté par le sable envahissant. Les maisons et les arbres qui se transformaient peu à peu en tas de ruines. Les compagnons de mes jeux infantiles disparus. Certains étaient partis découvrir des villes fascinantes, d'autres gisaient submergés dans la brume de leur tombe. Progressivement, la mémoire me revenait et je me mis à voir, avec les yeux de l'imagination, la maison où j'étais né. La mort brandissait sa faux gigantesque à tort et à travers. La maladie se répandait comme le feu dans les pâturages escarpés. Tout se transformait. Le boulanger mourut du jour au lendemain vaincu par une attaque cérébrale. La blanchisseuse qui habitait en face de chez nous, une femme courageuse et robuste, se mit brusquement à utiliser des béquilles parce qu'elle s'était cassée une jambe. De temps à autre, nos voisins portaient le deuil pour rendre hommage à leurs parents décédés, et même le plus vieux prêtre qui passait ses semaines à nous enseigner le catéchisme, un beau matin, fut transporté au cimetière, au moment où on s'y attendait le moins.

Tout changeait d'heure en heure, jusqu'au moment où nous nous quittâmes pour nous revoir plus tard à la capitale.

Tu faisais de ton mieux pour cacher tes maux d'estomac, tandis que je dissimulais habilement les dérèglements de mon système endocrinien.

Ton visage n'était plus le même. Il était entièrement marqué par les rides. Tes cheveux, que j'avais connus fins, soyeux et abondants étaient rares et blancs. Tes yeux injectés de sang me fixaient intensément. Tes mains bien soignées, dont tu te souciais peu, auparavant, étaient à présent lourdes et grosses avec des veines saillantes.

Bien sûr, tu as dû remarquer un profond changement en moi, mais ta bonté étouffa les remarques négatives que je fis taire à mon tour.

Et les filles que nous courtisions à une autre époque, émerveillés dans le paysage de notre enfance ? Certaines d'entre elles à Rio utilisaient en vain tous les moyens possibles pour lutter contre le cours implacable de la nature. Elles étaient presque méconnaissables. Les dentistes qualifiés ne parvenaient pas à restaurer leur bouche que nous avions aimée avec ivresse dans les premiers élans de la jeunesse. Elles surgissaient en pleine avenue, tout comme nous d'ailleurs, à la recherche de remèdes pour soigner leurs rhumatismes naissants.

La mort, mon cher, avait le pouvoir de réveiller mes souvenirs. Et compte tenu de l'amitié qui nous a toujours liés sur la scène terrestre, je me souviens mélancoliquement de ton propre bonheur si lointain... Je suis conscient que tu as perdu tes parents, ton épouse inoubliable et ton fils cadet qui t'était si cher par affinité sentimentale. En dix ans, tu as changé de résidence quinze fois pour soulager ton cœur angoissé, irrémédiablement peiné...

Tes yeux restent fixés dans le passé et comme je m'identifie avec ta douleur passagère, alors que tu es plein d'or et vide de paix, je me souviens avec nostalgie de ton beau perroquet qui nous distrayait en criant les noms des hommes politiques influents de l'époque ; il y a presque trente ans de cela.. J'aimerais te réconforter, te redonner du courage, mais... quoique tu sois abattu par les désillusions et les changements incessants, tu es convaincu de vivre sur le plan le plus solide et le plus immuable de l'univers, et tu crois que je suis un vagabond invisible qui raconte des blagues adressées à l'ingénuité humaine.

Toi, homme de chair et de sang, tu te dis inaltérable et tu affirmes que je ne suis qu'une ombre qui revient du pays de la mort.

Comment un fantôme pourrait-il consoler un homme sûr de lui au point de se déclarer intangible ?

Décidément, tu as tout à fait raison.

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Dans le règne animal

On raconte que les singes contemplaient la ville en y déposant tous leurs rêves d'avenir...

Certains clamaient qu'ils étaient fatigués et voulaient se reposer. Les femelles de l'espèce se disaient épuisées. Depuis des millénaires, elles s'occupaient de leurs petits, les nourrissaient, subissaient des horreurs, étaient couvertes d'humiliation et soutenaient qu'elles avaient besoin de repos.

Quiconque entendait leurs plaintes aurait été ému par leurs larmoiements. Les simiens les plus vieux pleuraient et faisaient peine à voir. Ils affirmaient, sans hésitation, que les conflits dans la forêt étaient franchement terribles et angoissants.

Pourtant, ces animaux insouciants dormaient presque toute la journée, savouraient les fruits de la terre, et quand ils n'avaient pas une proie facile en vue, ils ne se gênaient pas pour profiter des produits cultivés par les hommes.

Si l'ennui les menaçait, tout le monde courait dans les bois touffus pour improviser un véritable parc de loisirs dans les branches brodées de fleurs. Ils mangeaient ce qu'ils ne plantaient pas, profitaient des immenses ressources du sol, mais dès que leurs jeux étaient terminés, ils se perdaient dans une longue litanie de plaintes.

- On ne supporte plus cette vie ! se plaignaient les anciens.- On change tout ! menaçaient les plus jeunes.De sorte que leurs revendications ne s'arrêtaient que lorsqu'ils contemplaient la grande

ville qui concentrait tous leurs espoirs.De retour à la grotte sauvage, des commentaires s'imposaient concernant ce

changement. Leur transfert chez les bipèdes était la seule mesure raisonnable. Les humains n'avaient que des avantages. Pendant la nuit, ils profitaient des lumières qui les éclairaient. Ils portaient des vêtements colorés. Ils vivaient dans des maisons confortables, buvaient de l'eau froide pendant la canicule et du chocolat chaud en hiver. Ils avaient des palais pour leur

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gouvernement, des écoles, des clubs, des journaux, des parcs et des machines. Ils profitaient des plaisirs de l'intelligence. Là où ils respiraient, le ciel leur était ouvert.

Un changement immédiat était donc urgent.Compte tenu de l'exigence générale, les chimpanzés les plus prudents se réunirent et

envoyèrent un vieux singe pour enquêter sur place.Le singe intelligent s'approcha des hommes et s'insinua discrètement dans un cirque.Il partagea l'expérience des enfants de la raison pendant cinq années consécutives.

Décoré de clochettes, il dévora des centaines de bananes, il parcourut des villages et des hameaux, fit des blagues étonnantes, puis un beau jour, il revint...

Tous ses compagnons se rassemblèrent pour l'entendre.Les femelles de la tribu tenaient leurs petits, tandis que les vieux simiens étaient

alignés devant tout le monde.L'envoyé présenta son rapport en poussant des cris solennels. Il serait presque

impossible de traduire son exposé en langage humain. Néanmoins, après les salutations fraternelles, le messager leur expliqua, plus ou moins, en ces termes :

- Tout le monde attend le moment de pénétrer dans le royaume des humains parce que vous croyez que je reviens d'un paradis, comme si vous alliez être totalement débarrassés des tâches et des responsabilités. Vous commettez, cependant, une grave erreur. Je suis resté cinq ans parmi les créatures qui sont supérieures à nous dans leur organisation, leur conduite et leur façon de vivre. Or dans le cadre de la conservation de l'espèce et de son maintien, les lois auxquelles ils sont soumis ne diffèrent pas des principes auxquels nous sommes contraints d'obéir. Ils élèvent des enfants avec des difficultés similaires aux nôtres et sont aussi sous le coup des tourments et des maladies. Quiconque les voit avec leur résidence de luxe, les juge à tort, pensant trouver parmi eux le repos et la joie infinie. Certes, les hommes nous sont supérieurs et ils agissent à un niveau bien plus élevé. Toutefois, malheur à eux s'ils arrêtent de travailler ! La nature qui nous entoure envahirait les villes en détruisant leur charme et leur progrès. Ils ont des châteaux et des universités, des voitures et des fermes. Toutefois, pour maintenir les valeurs éducatives qui les distancient de nous, ils sont obligés de se conformer à d'horribles disciplines. Ils ne font pas ce qu'ils veulent, comme nous dans la grotte. Ils sont soumis à des codes et des décrets qu'ils doivent respecter avec brio. La guerre entre eux, à vrai dire, est un état naturel. Les pires se livrent à des monstres dangereux qui portent le nom d'égoïsme et de vanité, d'ambition et de discorde. Ils se mettent à pratiquer des violences visant à dominer les situations. En conséquence, les meilleurs sont obligés de vivre armés jusqu'aux dents pour se défendre, pour préserver les institutions dont ils sont fiers. Il est indiscutable que leurs résidences sont merveilleuses, mais ils ont tellement de problèmes inquiétants qui les torturent que, de temps à autre, d'eux-mêmes, ils improvisent des pluies de bombes qui détruisent leurs propres réalisations, ce qui les amène à se remémorer les leçons apprises avec les puissances supérieures de la vie. Pour maintenir l'éclairage de la sphère où ils vivent, ils supportent, jour et nuit, des afflictions. En fait, ils sont détenteurs d'une intelligence prodigieuse ; il me semble même qu'ils arriveront à gravir l'échelle du progrès encore bien plus haut que nous ne sommes en mesure de l'appréhender. En revanche, ils travaillent tant et souffrent tellement, ils sont contraints à de telles disciplines que moi, mes frères, je reviens résigné de mon sort... Je veux ma caverne boueuse, je préfère nos coutumes et nos besoins... le ciel des hommes ne me convient pas... Je ne le supporte pas... Je suis un singe...

Les membres du conclave le couvrirent, alors, de railleries et de pierres. Nul ne crut le messager. Pour eux, la ville des hommes était un nid céleste, sans devoirs ni combats, sans difficultés ni accidents. Par conséquent, les singes ne cessèrent d'exiger l'accès au monde des humains dans le seul but de jouir et de se reposer.

J'écoutai cette curieuse légende, tout en étudiant son caractère symbolique.

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Cette histoire ne dépeignait-elle pas la situation actuelle entre les « morts » et les « vivants » ?

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Esprits malades

- Où en arriverons-nous, Monsieur Daniel ! s'exclama Porphyre, ce cher compagnon des activités spirituelles, j'ai vu beaucoup de théorie dans le cadre de la doctrine, de nombreuses discussions pour ceci ou pour cela, mais cette idée « d'Esprits malades » ne convient pas... Comment faire pour avaler une telle nouvelle ? Les maladies du corps, qui se forment dans la faune microscopique, doivent naturellement disparaître avec l'élimination des os. L'esprit est l'esprit. N'avons-nous pas là une affirmation parfaitement orthodoxe ? Si les maladies sont transférables, alors...

- Voyons, Porphyre ! lui fit son interlocuteur avec complaisance, réfléchissons bien. Celui qui nous a éveillés à ces réalités ne nous a pas dépeint les choses de cette façon, sans plus ni moins. D'ailleurs, toutes les maladies ne nous accompagneront pas. Il est indéniable qu'un grand nombre d'entre elles ne dépasseront pas les limites de notre sépulture. Néanmoins, on ne peut nier l'état de déséquilibre de l'esprit dans une telle disharmonie pour que les maladies de l'âme soient clairement compréhensibles. Tu ne peux soutenir qu'un homme complètement dominé, qui passe son temps à perpétrer des violences contre les autres en dégageant des émissions magnétiques destructrices ou perturbatrices, peut être spirituellement sain une fois mort, tout simplement parce qu'il a décidé d'accepter « in extremis » le pouvoir de la prière. La prière est un remède salutaire qui doit être utilisé dès le début du traitement. Cependant, elle ne peut supprimer d'un seul coup les épines qu'un tel homme s'est créées de lui-même. Ne crois-tu pas que les imprévoyants et les pervers, une fois détachés de leur corps physique, conserveront longtemps encore le fruit amer de leur propre semence ? L'interpellé n'abandonna pas pour autant.

- Non, lui fit-il contrarié, je ne peux être d'accord. À mon avis, le corps et l'âme sont fondamentalement différents. La matière, c'est de la poussière et tout ce qui a trait à la poussière est destiné à rester sur le sol de la planète. Il m'est impossible de croire à des « Esprits malades » dans l'autre monde. La mort est la force qui nivelle tout. Dans la tombe,

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nous abandonnerons tous nos motifs de perturbation matérielle. Nous ne sommes ici que pour passer par des épreuves expiatoires et la sépulture nous ouvre la voie aux mondes heureux. Sinon...

Face à des réticences aussi fortes, son ami reprit ses considérations :- Mais n'es-tu pas heureux d'interpréter nos luttes sur la surface de la terre comme des

enseignements édifiants ? Ne te sens-tu pas, par hasard, dans une grande école où l'apprenti est responsable de lui-même aux regards des orienteurs et de ses bienfaiteurs ? Où la mort est un « signal du drapeau » comme dans les courses de chevaux, contraignant chaque esprit à chercher rapidement la meilleure place ?

Porphyre, rebelle, répondit :- Si tu utilises cet argument pour justifier la théorie des entités malades, tu as tort. Les

Esprits ne peuvent être malades. Nous ne pouvons entretenir l'illusion d'hôpitaux dans « l'autre vie ».

Mais avant que la discussion ne se gâtât, madame Amélie, l'épouse du conseiller entêté, vint les appeler pour assister à la réunion qui allait avoir lieu chez eux.

La table était prête. Les médiums et d'autres compagnons méditaient.Au bout de quelques minutes, ils entamèrent les travaux sous la direction de Porphyre.Ils prononcèrent des prières émouvantes et firent des commentaires réconfortants.La substantialité de la spiritualité supérieure était authentique, précise. Tout se

combinait dans une sincérité familiale cristalline.A la fin de la session, voilà que le médium incorpora une âme en peine qui souffrait.

Cet Esprit poussait des cris et des hurlements. Il disait être dans l'obscurité et affirmait qu'il avait beaucoup de mal à entendre. Il éprouvait une terrible douleur à la main droite. Il fit mention de souvenirs fragmentaires. Sa mémoire était celle d'un hémiplégique. Il avait été juge dans une région lointaine et avouait avoir corrompu la cour. Il disait s'être réveillé hors de son corps physique, torturé par d'anciennes victimes. Il était terriblement angoissé. Il voulait vivre à nouveau parmi les hommes pour réparer les fautes commises.

Le directeur de la réunion lui parla avec amour, mais avec conviction.Après mûre réflexion, une fois que le dévoué orienteur incarné eut utilisé toutes les

ressources à sa portée, le malheureux révéla une amélioration et quitta la salle en promettant de tirer profit des conseils reçus.

Les tâches s'achevèrent par les actions de grâce.Le dirigeant de la session s'essuya le front en sueur.Alors que la salle se vidait, après les adieux réconfortants de ses amis qui s'éloignaient

heureux d'avoir accompli leur devoir, Daniel s'approcha du compagnon et lui fit avec bonne humeur :

- Alors Porphyre, tu crois que nous avons secouru un Esprit désincarné fort et en bonne santé ? Le malheureux accusait un déséquilibre mental évident, il révélait des troubles et des douleurs parfaitement localisés. Un médecin expérimenté aurait pu faire un diagnostic complet de son état.

Silencieux, Porphyre restait pensif.- Pour moi, continua Daniel, le communicant est gravement malade et tu as servi de

médecin providentiel. Imagine-toi qu'il présentait les symptômes d'une fièvre rhumatismale, une fatigue qui provenait de troubles circulatoires, la mémoire défaillante d'un paralytique, les visions d'un fou, sans nous référer à ses problèmes psychologiques complexes, qui exciteraient la curiosité de plusieurs Freud. Ne crois-tu pas que j'ai raison ?

A cet instant, Porphyre, déçu, secoua la tête et répondit vaincu :- Depuis plus de vingt ans, je suis conseiller d'Esprits souffrants, pourtant en toute

franchise, je n'avais encore jamais pensé à cela.

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La protection de saint Antoine

Un jour, un vénérable ami nous raconta qu'à la lumière du plan supérieur, Antoine de Padoue travaillait à l'extension de la gloire divine. C'est ainsi qu'il recevait sans cesse les prières des petites familles italiennes vivant sur les collines de son pays natal.

Il était donc amené à les aider tous les jours, et les manifestations incessantes d'une si grande foi étaient pour lui une source d'enchantement.

Pendant ses rares heures de loisir, l'admirable thaumaturge se reposait parfois. Dans ces moments-là, il prenait le temps de noter les requêtes que le petit groupe familial lui faisait.

Enchanté, il souriait en rapportant ces supplications. Le groupe de dévots le priait de leur accorder de meilleures conditions de vie.

Il se souvenait de son nom à propos de tout : pour les migraines des propriétaires, pour les rêves des filles à marier, pour les imprudences de leur garçon, pour les chaussures des enfants.

Pour autant, le saint trouvait fort curieuse la répétition de leurs requêtes.Elles variaient d'un trimestre à l'autre, mais se répétaient chronologiquement.En fonction des saisons, il était donc amené à fournir les mêmes solutions à ses

collaborateurs : de l'argent et des ressources, son secours et des remèdes, la joie et le réconfort.

Les vœux se reproduisaient, quotidiennement, au cours de ses activités routinières, quand saint Antoine se mit à analyser de plus près les notes qu'il avait en sa possession. Surpris, il constata que la poignée de croyants n'avait pas, une seule fois, demandé du travail. Inquiet, le généreux protecteur se mit à réfléchir, mais comme la dévotion des bénéficiaires était toujours la même, insouciante et naïve, il décida de leur rendre visite personnellement.

Auparavant, il se fit annoncer et se rendit directement sur place, à la date prévue, pour faire les vérifications nécessaires. Il souhaitait savoir ce qui se passait.

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En possession d'une notification, Célestin, son précieux collaborateur spirituel, était venu l'attendre non loin de la résidence des humbles paysans.

Lorsque le personnage illuminé demanda des nouvelles, le compagnon des bonnes œuvres lui répondit respectueusement.

Bientôt, vous saurez tout.Effectivement, peu après, il pénétrait dans une petite ferme avec une vieille maison, un

jardin abandonné, une cour difficile d'accès livrée à une végétation sauvage, un toit qui s'effondrait, et ce qui ressemblait à une étable ; une vache y ruminait son dernier repas.

Ils entrèrent.Dans la salle, en costume du dimanche de retour de la messe, un couple de personnes

âgées écoutait la conversation de leurs enfants, un jeune homme robuste, deux jeunes filles à marier et deux enfants. Saint Antoine bénit le cadre domestique et nota que son effigie était affectueusement gardée.

Leurs propos étaient entrecoupés de louanges verbales faites à son nom.À tout instant, ils répétaient ces paroles :Merci saint Antoine !Le prestigieux ami céleste se tourna, alors, vers son collaborateur pour lui demander

des éclaircissements concernant les activités du groupe.Il lui signala qu'aucun membre de ce foyer n'avait vraiment de travail rémunéré. Puis,

Célestin finit par lui dire sans atermoiements :- Tout tourne autour de la vache qui profite de vos bénédictions.- Comment ça ? lui fit le saint tout étonné.- Comme le père dit qu'il est malade, il ramasse de l'herbe pour la nourrir. Quant aux

jeunes, elles la traient deux fois par jour. Le jeune homme, à son tour, porte le lait au village pour le vendre. Petite-boule, la vache protectrice ne sort de l'étable que cinq jours dans l'année quand elle va paître avec le troupeau voisin. Elle est obligée de fournir six à huit litres de lait par jour et un veau par an. La maîtresse de maison l'enveloppe d'une douce affection et les enfants la brossent soigneusement. Malgré tout, elle vit abattue entre les quatre murs de son étroite étable. Sachant tout l'amour que vous consacrez à cette ferme, nous partageons, avec cette humble petite vache, les dons incessants que votre générosité nous envoie. C'est ainsi que nous protégeons sa santé et son bien-être, car si la production de lait venait à chuter, qu'arriverait-il à vos insouciants admirateurs ? C'est Petite-boule qui leur garantit d'avoir du pain et de quoi vivre, tant aujourd'hui que demain.

Tout en réfléchissant, Antoine se rendit à l'étable... Il caressa l'animal héroïque et retourna à l'intérieur de la maison.

Au cours de la conversation animée qui se tenait, on pouvait entendre à chaque instant:- Loué soit saint Antoine !- Vive saint Antoine !- Saint Antoine priera pour nous !Et entre chaque acclamation, ils se plaignaient du monde.Un peu triste, l'avocat céleste

invita son compagnon à se retirer et ajouta :- Nous avons déjà beaucoup aidé cette famille si nécessiteuse. Antoine s'approcha de

la vache, la souleva, et sans quePetite-boule s'en rendit compte, il la transporta là où l'on pouvait contempler un

énorme précipice. Au sommet, le saint l'aida à se jeter dans le vide.En quelques secondes, la vache ne faisait plus partie des animaux vivant sur la terre.À son collaborateur terrifié, le thaumaturge expliqua :- Souvent, pour bien protéger, il faut jeter l'ancre. Et il retourna au Ciel.Dès le lendemain, les prières furent modifiées.

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Les paysans ne firent plus de demandes d'ordre général, et grâce au travail honorable et constructif de chacun, une juste prospérité rénova leur foyer leur apportant la paix, la confiance et des joies infinies...

Combien de bienfaiteurs spirituels sont quotidiennement contraints d'imiter dans le monde des incarnés la protection de saint Antoine ?

27

Tout est relatif

Quand, plein de bonne volonté, l'esprit communicant fit référence à son domicile sur le plan extraphysique, Raphaël, un frère qui se caractérisait par son intelligence, objecta sur un ton narquois :

- Des maisons dans l'au-delà ? Quelle sottise !...Un peu désappointé, le messager lui fit part d'impressions concernant la vie sociale

dans « l'autre monde ».Sans hésiter, le même homme lui fit sur un ton railleur :- Eh bien ça alors ! Des sociologues outre-tombe ? C'est tout ce qui nous manquait.L'émissaire ne se découragea pas. Il lui parla des jardins autour de sa résidence.- Comment ça ? demanda l'investigateur qui appréciait les sarcasmes, seraient-ce les

jardins suspendus de Sémiramis ? Ce ne sont que des illusions !... Après nos rosiers épineux et nos engrais désagréables, on ne trouve pas de parterres de fluides.

L'entité persévérante se rapportaaux institutions d'enseignement qu'elle fréquentait. Mais le mauvais ouvrier se hâta de considérer :

- Si les « morts », à présent, sont soumis aux luttes estudiantines, nous sommes franchement perdus.

Le communicant n'abandonna pas pour autant. Il se mit à parler des espoirs sublimes qu'il nourrissait en attendant sa chère épouse, au-delà de la tombe. Mais, toujours avec la même expression de dérision, le compagnon irrévérencieux laissa entendre :

- Doux mensonge ! On n'a jamais entendu parler de mariage dans la sphère des âmes ?

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Le porteur du message ne se laissa pas abattre. Il commenta les problèmes de son corps subtil qui servait, à présent, sa conscience. Il énuméra les avantages et les inconvénients auxquels il devait faire face ; mais l'inquisiteur fraternel lui fit remarquer avec scepticisme :

- L'Esprit n'a pas de corps, ce n'est qu'une fantaisie. Les phénomènes en question sont de pures hallucinations.

Le précieux messager des bonnes nouvelles provenant du monde spirituel prit finalement congé.

Devant ses collègues curieux et inquiets, l'analyste tenace déclara avec emphase :- Plus d'objectivité ! Pas d'illusions ! Je suis un homme qui sait juger.Après cet incident, il quitta le groupe des travailleurs du bien. Il se disait bien trop

réaliste pour accepter sans examen plus poussé les descriptions des désincarnés. Il considérait la conception doctrinale à un niveau de transcendance absolue.

À plusieurs reprises, des amis dévoués lui suggérèrent de retourner à l'étude. Affectueusement, ses parents s'interposèrent pour qu'il reprenne l'effort salutaire de la croyance religieuse. Mais Raphaël était imperméable à toutes opinions. Il entendait les appels, faisait des gestes malicieux et parodiait un texte évangélique :

- Donnez à la matière ce qui est à la matière et à l'esprit ce qui est à l'esprit. En dehors de cela, je ne comprends pas votre attitude.

Fier de lui, il complétait toujours de la même manière :- N'oubliez pas que je suis un homme qui sait juger. Mais l'heure de quitter la vie

charnelle arriva. Abattu, affligé,il essayait de se recomposer. Après tout, se disait-il, le changement n'a pas été si

grand. Mentalement, il avait l'impression d'être le même homme. Mais au fond, il n'arrivait pas à éliminer son envie folle de retourner à ses affaires, à ceux qui lui étaient chers et qui l'attiraient sur le plan humain. Il méditait sur la justice divine et cherchait à se rassurer. Il ne se souvenait pas d'avoir fait du mal dans l'intention délibérée de blesser quiconque, d'ailleurs, il n'avait commis aucun crime. Au fond de son âme, cependant, il ressentait une certaine inquiétude. Il en vint à conclure qu'il s'était fait du tort. Il n'avait pas été l'expression de la vérité autant qu'il aurait dû l'être. Il serait déraisonnable de retourner à la superficie terrestre pour augmenter ses questionnements ? Qui sait ? Peut-être, pourrait-il profiter de meilleures ressources pour trouver la paix intérieure.

Il lui vint à l'esprit qu'il pourrait se rapprocher du messager spirituel. Rempli d'espoir, il se mit à le visualiser et lui demanda avec un profond respect :

- Divin bienfaiteur, viens à moi !... Dis-moi où se trouve ma propriété terrestre ?L'entité interpellée lui répondit avec bonté :- Votre propriété ? Quelle énorme erreur !...- Et mon corps physique ? demanda Raphaël en pleurant.- Votre corps à présent, cher ami, est une pure fantaisie.- Et mes biens ?L'émissaire eut un sourire et ajouta :- Si vous ne conservez pas votre trésor dans votre esprit impérissable, les biens que

vous possédiez en d'autres temps n'étaient qu'une illusion...- Mes assurances, mes titres portaient mon nom !...- Pour servir pendant quelques années, lui expliqua l'agent de la réalité divine.- Mes enfants ?- Ils appartiennent d'abord à Dieu avant d'être acheminés à la parentalité provisoire.- Ma femme ? Où est-elle ? Elle m'a toujours obéi aveuglément. M'aurait-elle

aussi abandonné ?

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- Votre partenaire se résignait à son sort avec bonté et renoncement, mais elle n'a jamais été l'esclave de vos caprices. Elle conserve le titre de filiation céleste, tout comme vous d'ailleurs.

- Mon bureau en ville, ma maison de campagne, mes documents, mes intérêts...- Oui, désormais, tout cela est dépassé pour vous, ce n'est plus que le résidu du passé

que vous persistez à retenir dans votre esprit malade plutôt que de profiter des leçons que vous avez vécues dans le monde...

- Oh ! Quelle horreur ! s'écria Raphaël prit de terreur, comment comprendre tout cela? Qui détiendra la vérité ? Ceux qui quittent la terre ou ceux qui s'y attardent ? Ceux qui « meurent » ou ceux qui « vivent » ?

Le bienfaiteur eut un autre sourire et conclut :- Consulte ta conscience. Comme toujours, tu es un homme qui sait juger...

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L'homme et le bœuf

Un ange venu d'une sphère lointaine, soucieux de connaître les divers aspects et degrés de l'intelligence de la raison universelle, atterrit dans un champ sur la terre. Il fut surpris par le paysage où il trouva un homme et un bœuf. Il admira les fleurs sauvages, contempla les horizons ensoleillés et se réjouit au souffle de la brise, tout en rendant grâce au Seigneur suprême. Comme il n'avait pas beaucoup de temps, il se mit à observer directement les êtres qui peuplaient l'astre qu'il visitait pour vérifier l'état d'avancement de leur compréhension des choses.

Il examina les pupilles de l'homme et y découvrit l'agitation du mal.Il sonda les yeux du taureau et y trouva le calme et la paix.Grâce aux critères particuliers qu'il utilisa il en vint à conclure que le bœuf était

supérieur à l'homme. Son impression se confirma quand il voulut faire une expérience et qu'il demanda mentalement aux deux de travailler en silence. L'animal répondit parfaitement à son souhait. Humblement, il se mit à bouger, alors que le bipède se mit à crier de façon scandaleuse en proférant des insultes à faire rougir une pierre.

Un peu inquiet, l'ange lui conseilla de rester patient.Bien éduqué, l'arrière-petit-fils de la jungle continua son travail imperturbable et

tolérant.

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Mais le descendant agité d'Adam fit éclater un fouet qui blessa la hanche de son collaborateur à quatre pattes.

Accablé par la triste scène, le sublime ambassadeur lui demanda d'accepter son sacrifice.

Docilement, le bœuf obéit sans la moindre réticence en démontrant un intérêt indéniable à être utile, peu soucieux de ses blessures.

L'homme, cependant, redoubla de cruauté en utilisant un pic pour lui arracher encore plus de chair sanglante...

Particulièrement choqué, le superviseur céleste nota ce qui répondait aux objectifs de sa mission et s'en alla d'un air soucieux.

Après une courte distance, il rencontra une vache attachée à une grosse corde avec un autre homme qui était en train de la traire.

Pris d'une impression indéfinissable, il lui demanda de faire preuve de renoncement.La mère bovine lui répondit avec une résignation héroïque, fermement résolue à se

sacrifier. Mais avant que l'émissaire céleste n'ait eu le temps de l'examiner, parce qu'une mouche volait près de son nez, le berger cingla le pis de la vache pour s'en débarrasser. Dans un mouvement de pitié, le serviteur des deux caressa la victime qui, agréablement surprise, bougea de quelques centimètres. Brusquement, le paysan se mit à crier frénétiquement en l'injuriant...

- Tu veux me repousser, c'est ça ? s'écria-t-il diaboliquement.Prestement, il se leva, fit quelques pas, sortit une vieille canne et lui frappa les cornes.Affligé, l'ange renforça les énergies de la vache en lui appliquant des passes

magnétiques de fluide divin, pria les bénédictions du Tout-Puissant pour qu'il lui vienne en aide, fit pression sur l'agresseur en lui donnant des maux de tête qui lui seraient salutaires, prit les notes qu'il devait et se retira.

Alors qu'il allait prendre son envol dans le firmament du ciel, il rencontra un génie sublime de la hiérarchie terrestre.

Ils se saluèrent fraternellement et l'agent divin commenta la beauté du paysage.Mais, il ne cacha pas son étonnement quant à ce qu'il avait observé.Il lui parla des objectifs qui l'avaient obligé à s'arrêter quelques minutes sur la terre et

conclut en disant à son frère de vertu et de pureté :- Je suis satisfait de l'élévation sentimentale des créatures supérieures de la planète.

Elles cultivent la générosité, renoncent au moment opportun, travaillent sans se plaindre, et surtout aident avec une rare sérénité les créatures inférieures.

L'ange terrestre se tut stupéfait d'entendre de tels éloges à propos des hommes. L'autre, néanmoins, continua :

- J'ai eu l'occasion de témoigner de faits poignants. Cependant, je suis désolé de l'avouer : je ne suis pas d'accord avec la condition des êtres les plus nobles de la terre qui se déplacent toujours à quatre pattes, alors que les animaux sauvages agressifs qui les accompagnent ont déjà la légèreté des bipèdes. De toute évidence, le Tout-Puissant doit connaître la raison pour laquelle ces êtres si différents se trouvent réunis dans une évolution commune... Toutefois, j'ai l'intention de présenter un rapport complet aux autorités divines afin de modifier le cadre en vigueur.

À de telles idées, son compagnon lui demanda des explications plus claires. L'ange l'invita à justifier ses propos.

A son tour, le protecteur de la terre désappointé lui expliqua que la situation était toute autre : le bipède est sur la croûte planétaire le roi de l'intelligence, il porte en lui les lauriers de la compréhension, tandis que le bœuf est un simple candidat au raisonnement, complètement livré au libre arbitre du contrôleur du sol. Il souligna que, quoiqu'il soit humble et travailleur,

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le bœuf collaborateur passe sa vie au service du bien et finit à l'abattoir pour servir de nourriture aux hommes...

Sans dissimuler son étonnement, le visiteur des cieux lui fit :- Alors, le problème est encore plus grave...Il réfléchit, réfléchit et ajouta :Je n'ai jamais vu une planète où la raison ait été autant

dénaturée.Il prit congé de son collègue, s'apprêta sans plus tarder à quitter définitivement la

planète et en vint à conclure :- Je vais présenter un rapport différent.Mais on ne sait toujours pas si l'ange est allé demander des mesures au trône éternel

pour que les bœufs lèvent les pattes de devant pour copier la posture du héros humain, ou s'il est allé demander des mesures aux puissances célestes afin que les hommes baissent les bras et marchent à quatre pattes comme les bœufs...

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L'esprit qui manquait

Lorsque madame Arlinda arriva au centre spirite, désireuse de guérir les troubles qui l'assaillaient, elle fut reçue par le conseiller Dagobert, un dévoué protecteur spirituel de personnes dans le besoin.

- Je veux guérir, lui fit-elle, et servir la doctrine. La médiumnité est un ministère céleste. Si Dieu pense que j'en suis digne, je serai là pour travailler dur et avec dévouement.

Considérant ses bonnes dispositions, le directeur du groupe l'entoura de fluides rénovateurs.

- J'ai besoin d'Esprits qui me guérissent ! se plaignait l'obsédée larmoyante, et dès que j'irai mieux, j'obéirai et je servirai la vérité jusqu'à la fin de mes jours...

Le bienfaiteur se hâta de solliciter l'aide de médecins compétents de la spiritualité pour qu'elle retrouve son équilibre.

Bientôt, madame Arlinda était revigorée, heureuse. Elle n'avait plus de phobies inquiétantes. Elle était enfin guérie. Elle fréquentait toujours les petites réunions d'études, mais elle ne tenait plus les mêmes propos...

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- Ah, si Amaro, mon mari, obtenait un emploi, j'accepterais plus volontiers de me consacrer à la tâche médiumnique ! Mais comme...

Et elle finissait en soupirant :- Si les Esprits charitables pouvaient nous soutenir... Dagobert intervint pour

demander la coopération d'un bienfaiteur qui, indirectement, agirait discrètement à travers les fils invisibles de l'inspiration pour que son mari trouve un travail digne de ce nom, convenablement rémunéré.

Pourtant, madame Arlinda se faisait moins ponctuelle aux sessions édifiantes, car elle mettait en avant de nouvelles allégations.

- Comment contribuer dans le domaine de la médiumnité ? Mes deux garçons, Rodolf et Fernand, sont une source d'inquiétudes incessantes pour moi... Nous savons que les activités de cette nature requièrent la paix... Il m'est impossible de garder mon calme avec les angoisses que je supporte. Si les esprits m'aider à les éduquer...

Une fois de plus, son protecteur vint à son secours en la rapprochant du concours décisif d'éducateurs désincarnés doués d'une grande sagesse qui réussirent à modifier les tendances des garçons en disciplinant leurs impulsions et en les conduisant à de sérieux établissements d'enseignement.

À présent que le problème était résolu, madame Arlinda se trouva un nouveau besoin :- Dieu merci, disait-elle, j'ai été exaucée dans mes prières. Mais comment commencer

à collaborer dans le domaine de la médiumnité ? Tant que nous ne déménageons pas, toute tentative serait vaine. Imaginez-vous que je suis quotidiennement harcelée par les voisins. Avant tout, j'ai besoin de quitter cet environnement. Tant que cela n'a pas lieu...

Et elle complétait :- Si les Esprits voulaient bien m'aider à réaliser ce changement... Serviable,

Dagobert s'empressa de coopérer. Il ne connaissait pas d'agent immobilier dans « l'autre monde », mais il avait des amis qui sauraient apporter leur concours sans dommage pour personne.

Quelques semaines plus tard, la femme quittait son domicile exigu pour une résidence aérée et spacieuse.

À présent qu'elle avait tiré parti de tout ce qu'elle pouvait, elle avait du mal à avancer de nouveaux prétextes d'ordre matériel. Feignant d'être préoccupée, elle fit aux compagnons du groupe :

- Je suis prête pour la tâche médiumnique... Mais comment commencer ? Je passe tout mon temps à attendre que se fasse sentir l'influence des frères invisibles autour de notre table de prières !... Pourtant, rien ! Je ne note pas la moindre vibration différente autour de moi ! Ça ne mène vraiment à rien...

Et elle concluait avec des réserves :- Si les Esprits voulaient bien m'aider... Immédiatement, le bienfaiteur prit des mesures

en ce senset fit venir des compagnons compétents pouvant soutenir la candidate dans son effort

d'initiation.Madame Arlinda fut criblée d'exhortations et d'inspirations. Ses amis de l'au-delà lui

parlèrent de la charité, de l'éducation, du service envers son prochain. Ils tinrent tout près de son cœur des souffrants pour lui offrir de précieuses occasions de pratiquer la science de l'élévation. Portés par des forces impondérables, d'innombrables nécessiteux vinrent frapper à sa porte.

Elle était invitée à faire le bien à travers tous les clairons de la vie spirituelle.Pourtant, la future missionnaire s'y refusait catégoriquement. Elle voulait participer

aux tâches médiumniques, mais ne pouvait supporter la vue des maladies, elle ressentait des craintes indéfinissables en présence des personnes troublées, et ne cachait pas le déséquilibre

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nerveux qui l'affligeait quand il s'agissait de lecourir les entités souffrantes. Elle redoutait les complications et ne voulait pas être jugée par l'opinion publique.

Deux fois par semaine, les plaintes et les échappatoires se multipliaient devant ses collègues étonnés, quand un soir, Dagobert, cet inestimable ami spirituel, entra en communication avec le groupe. Comme d'habitude, il était de bonne humeur, et avait l'air satisfait. Après les échanges qui lui donnèrent l'occasion d'exprimer de précieux encouragements, madame Arlinda l'interpella en le suppliant :

- Mon protecteur, aidez-moi ! J'ai besoin de faire des progrès ! Puis-je compter sur votre aide pour développer mes facultés médiumniques ?

L'interpellé lui répondit sur un ton énigmatique :- Oui !... Avant d'être un phénomène, la médiumnité est un travail consacré à

autrui!...Madame Arlinda voulait que des promesses plus claires lui soient faites, de sorte

qu'elle ajouta :- Les protecteurs m'aideront-ils ? Dagobert sourit et lui fit :- Moi, désormais, ma sœur, je ne connais qu'un Esprit qui puisse vous aider. Un seul !

Sans lui, vous ne serez jamais heureuse.- Oh ! Qui est-ce ? demanda la femme, dominée par l'envie d'implorer une autre

protection. Je prierai, je l'inclurai dans mes oraisons quotidiennes...À la surprise générale, Dagobert lui dit :- C'est l'esprit de bonne volonté. Pour le trouver, vous n'avez pas besoin de vous

adresser à « l'autre monde ». Il est en vous.Un lourd silence retomba et la session fut achevée sans autre consultation.

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Vieil apologue

Le Père suprême nota un jour que l'homme, le fils de son amour et l'héritier de sa sagesse, errait à tâtons dans l'obscurité angoissante de l'ignorance, plongé dans la vallée obscure de la mort... Il fit, donc, appel au Temps pour que le pèlerin des ténèbres trouvât la lumière sur la terre. Le malheureux fils y apprendrait la science de la vie avec la Vérité pour que le tombeau ne trouble plus sa voie éternelle...

Quand l'homme naquit dans la sphère charnelle, pleine d'attention, maîtresse Vérité alla trouver le petit.

Mais les protecteurs de l'enfant, ses parents, quoiqu'à titre précaire, la chassèrent en colère.

- L'enfant est à nous ! s'écrièrent-ils aveuglés par l'égoïsme, il est trop tôt, bien trop tôt pour l'introduire à la réalité des choses.

Et ils isolèrent le jeune apprenti dans un cocon tissé de mensonges.Plutôt que de lui révéler sa condition d'usufruitier de l'école terrestre, ils le bercèrent

de dangereuses illusions. Ils lui affirmèrent que le monde était sa propriété, qu'il était supérieur à ses semblables, en somme, qu'il était le seul être digne de respirer dans

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l'atmosphère planétaire. Ils l'incitèrent à toujours dominer, à vaincre à tout prix, même quand la souffrance et la misère imploreraient sa pitié et la justice.

Une fois l'heure de la puberté arrivée, quand l'homme quitta son foyer, c'était un vrai petit diable. Il savait frapper, piller, humilier, s'imposer et blesser...

La Vérité nota que des obstacles majeurs se dressaient entre eux, néanmoins, elle s'en approcha et lui proposa le trésor qu'elle avait à lui offrir.

Le gosse eut un sourire cynique et objecta :- Je n'en ai rien à faire. Je veux vivre à ma façon. Sans se décourager, la Vérité se

retira.Quand en pleine jeunesse, l'intéressé se corrigea, elle revint lui présenter son

patrimoine impérissable. Le garçon lui fit avec mépris :- Je suis encore trop jeune ! Je suivrai mon chemin sans béquilles. À nouveau, sa

messagère sublime se retira. Quelques annéesplus tard, on lui signala que son pupille avait bu dans le monde à la source de

nouvelles connaissances. Pleine d'espoir, elle retourna le voir pour lui offrir les biens éternels. De lourds manuels sous le bras, il chercha, une fois de plus, à se dérober. Il se mit à rire en faisant des grimaces et lui fit :

- J'ai la terre. Je n'ai pas besoin du ciel. Je suis trop occupé par les difficultés immédiates de la vie pour m'enquérir de lointains problèmes ! Cette suggestion est prématurée!...

L'instructrice resta à proximité à attendre une autre occasion...Quand l'élève réfractaire à la leçon se maria pour devenir provisoirement le père

d'autres apprenants à l'école terrestre, elle revint le voir pour lui donner accès à la spiritualité supérieure. Le protégé refusa de la voir.

- Je suis bien trop affairé... je n'ai pas le temps de réfléchir aux questions transcendantes...

Alors, l'infatigable bienfaitrice se mit à lui rendre régulièrement visite dans l'espoir d'un brusque changement.

Mais l'homme lui présentait les prétextes les plus divers en échange du don divin.- Non, pas aujourd'hui, ma femme est souffrante.- Mes enfants sont trop agités.- Tout d'abord, je dois garantir l'avenir de ma descendance.- Ma tête explose !- J'ai pris d'autres engagements, je ne suis pas libre...- Malade comme je suis, je ne mettrai pas un pied dehors.- Je ne peux pas rater le club.Malgré tout, la Vérité n'abandonnait jamais. Elle employait tous les moyens pour venir

le voir toutes les semaines. Cependant, l'habile escrimeur du raisonnement avait des coups inattendus. Il s'esquivait toujours habilement alors qu'il avait encore des forces et la santé. Mais quand il se vit souffrant et âgé, il prit un air de victime et s'excusa en assurant :

- Je me sens si fatigué...- Il faut rallonger le nombre des années.- Je suis trop vieux pour rajeunir...Un jour, pourtant, il remarqua en lui-même une singulière différence. Horrifié, il

constata que sa chair était flasque et qu'il en perdait le contrôle. Son sang épais grossissait dans ses veines. Sa peau ressemblait à un parchemin. Ses os craquaient, ils étaient cassants.

La mort impassible s'approcha de lui, essayant de lui fermer les yeux, mais le malheureux cria à l'aide. Il eut recours à la science avec des piqûres et des breuvages, et à la foi en priant avec émoi dans son lit confortable.

Comme il craignait l'obscurité de la tombe, il s'écria donc en son for intérieur :

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- La Vérité ! Je veux la Vérité !...Voyant qu'il était à nouveau aveugle, la bienfaitrice ne put satisfaire sa demande.

Penchée près de ses oreilles, elle lui expliqua :Frère X- Maintenant, c'est trop tard...Le mourant la supplia d'intercéder auprès du Temps, mais inflexible, le Temps

s'excusa en disant :- Désormais, il te faudra attendre...Et la mort, chère et détestée, respectée et incomprise, s'approcha doucement, baissa le

voile et conclut :- À présent, c'est à mon tour. Je vais m'occuper de ton cas.

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Les plus grands ennemis

Un jour, Simon Pierre dit à Jésus :- Seigneur, comment puis-je savoir où sont nos plus grands ennemis ? Je veux les

combattre afin de travailler efficacement pour le royaume de Dieu.Sous le soleil lumineux d'une matinée parfumée, ils étaient sur la route entre

Capharnaiim et Magdala.A cette question, le Maître se plongea dans une longue méditation.Comme le disciple se fit insistant, il lui répondit avec bienveillance :- Le moment venu, l'expérience nous révèle tout.- Oh ! s'exclama Simon avec impatience. Il faudra trop longtemps.Imperturbable, l'ami divin lui expliqua :- Pour ceux qui ont « des yeux pour voir » et « des oreilles pour entendre », une

heure suffit parfois pour apprendre d'inoubliables leçons.Désappointé, Pierre se tut.Avant qu'il n'ait eu le temps de reprendre ses questions, il remarqua que quelqu'un se

glissait furtivement derrière de vieux figuiers qui poussaient le long de la route. L'apôtre pâlit

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et força le Maître à interrompre sa marche, il supposait que l'inconnu était un pharisien qui avait l'intention de l'assassiner. Ce fut avec des propos menaçants teintés d'irritation qu'il somma le voyageur anonyme de s'éloigner. Et lorsqu'il essaya de le saisir en employant la force, on entendit l'inconnu éclater de rire. L'hypothèse était fausse. Au lieu d'un pharisien, c'était André, son propre frère qui surgit des fourrés en souriant, il venait rejoindre la petite caravane.

Jésus fit un geste expressif à Simon et lui dit :- Pierre n'oublie jamais que la peur est un adversaire redoutable. Le groupe reprit son

chemin. Peu après, ils rencontrèrent un lévite qui récitait des passages de la Torah et leur parla sur un ton manquant de respect.

Simon piqua une colère. Il se mit à lui répondre et à discuter sans la moindre expression de tolérance fraternelle jusqu'à ce que l'interlocuteur terrifié eût pris la fuite. Le Maître qui, jusque-là, était resté silencieux fixa son disciple d'un regard très lucide et lui demanda :

- Pierre, quel est le premier devoir d'un homme qui est candidat au royaume céleste ?La réponse lui vint clairement et rapidement :- Aimer Dieu par-dessus tout et son prochain comme soi-même.- As-tu observé cette règle sublime dans le cas présent ? lui fit sereinement le Christ,

rappelle-toi qu'avant tout il est essentiel d'offrir notre aide à celui qui ignore le vrai bien et n'oublie pas que la colère est un cruel persécuteur.

Quelques pas plus loin, ils rencontrèrent Théophraste, un Juif grec qui se consacrait à la vente de parfums. Il lui parla d'un certain lépreux Zéchonias qui avait été guéri par le prophète nazaréen et qui avait fui Jérusalem où il proférait contre le Messie de fausses accusations.

Le pêcheur ne put se retenir. Il se mit à crier que Zéchonias était un ingrat. Il énuméra les bienfaits que Jésus lui avait prodigués et se lança dans des commentaires longs et amers, tout en maudissant son nom.

Une fois qu'il eut terminé, le Christ lui demanda :- Pierre, combien de fois pardonneras-tu à ton frère ?- Jusqu'à soixante-sept fois sept fois, répondit l'apôtre humblement.Le céleste ami le regarda calmement et conclut :- La dureté est un bourreau pour l'âme.Après une courte distance, ils croisèrent Rufus Gracus, un vieux Romain à moitié

paralysé. Celui-ci leur sourit avec mépris du haut de sa litière portée par de robustes esclaves.Remarquant son geste sarcastique, Simon lui fit sans hésiter :- Voudrais-tu guérir ce pécheur impénitent pour faire plier son cœur à Dieu.Jésus, cependant, lui caressa l'épaule et ajouta :- Pourquoi instaurer la violence dans le monde si le père en personne ne s'est jamais

imposé à quiconque ?Et à l'expression désenchantée de son compagnon, il conclut :- La vanité est un joug subtil.Peu après, ils arrivèrent à la modeste auberge d'Aminadab, un adepte des idées

nouvelles.Attablé, un certain Zadias, un affranchi de Césarée, se mit à faire des commentaires

sur les événements politiques de l'époque. Quand il évoqua les erreurs et les excès de la cour impériale, Simon concorda et participa même à cette exécution verbale. Les dignitaires et les philosophes, les artistes et les administrateurs d'outre-mer furent l'objet de cuisantes remarques. Tibère fut évoqué à travers des récriminations sans pitié.

Après cet échange animé, Jésus demanda au disciple si, par hasard, il avait déjà été à Rome.

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La réponse ne se fit pas attendre :- Jamais.Le Christ sourit et lui fit observer :- C'est curieux, tu parlais avec une telle désinvolture de l'empereur que j'avais

l'impression d'être devant quelqu'un qui aurait été intimement lié à lui.Puis il ajouta :- Soyons convaincus que la médisance est un redoutable tyran. Déconcerté, le pêcheur

de Capharnaùm garda le silence. Le Maître contempla le paysage extérieur, observa la position du soleil, comme pour consulter le temps, puis se tourna vers son compagnon qui avait manqué de vigilance, et ajouta avec bonté :

- Pierre, il y a exactement une heure, tu voulais savoir où se trouvent nos plus grands adversaires. Depuis, cinq apparurent parmi nous : la peur, la colère, la dureté, la vanité et la médisance...

Comme tu le vois, nos pires ennemis vivent dans nos propres cœurs.Puis, souriant, il finit par conclure :- C'est en nous-mêmes que nous livrerons la plus grande guerre.

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Dans une ville céleste

Une fois désincarné, Joaquim Pires, un croyant sincère et un assidu pratiquant de l'Évangile, voulut immédiatement savoir où se trouvaient les portes du ciel. Il avait combattu ses passions, distribuer des bienfaits sans penser à la moindre récompense, il s'était humilié en faveur des autres chaque fois que les circonstances lui suggéraient de faire preuve de sérénité et de renoncement.

En somme, Joaquim était un homme de bien. Cependant, comme nous sommes loin d'être des créatures parfaites, il ne pensait qu'à une chose : se reposer au paradis. Il n'avait pas été soumis à des épreuves difficiles et angoissantes. Malgré tout, il caressait l'idée d'être anesthésié dans « l'autre monde ». Il voulait se reposer, oublier, s'enivrer dans l'extase divine...

De sorte qu'il était mort sans aucune crainte, presque content de faire ses adieux à sa famille. On aurait dit une hirondelle humaine, heureuse d'aller chercher ailleurs le printemps. Et, le fait est qu'il avait tant de mérites qu'un prodigieux fil lumineux signalait son chemin de la tombe aux portes d'une ville merveilleuse.

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Une fois arrivé, Joaquim, en émoi, pâlit de joie. Enchanté, il nota qu'à l'intérieur, il y avait du bonheur et de la lumière, mais aussi des signes évidents de travail... Le bruit des activités salutaires et le son frénétique des cloches atteignirent ses oreilles étonnées.

Avant de se livrer à de plus grands questionnements intérieurs, un sympathique messager vint à sa rencontre sur le seuil.

- Est-ce le paradis ? demanda-t-il comme un paysan inexpérimenté qui visite pour la première fois une grande métropole.

- Oui, l'informa l'interpellé gentiment, nous sommes dans une cité céleste.- Vous voulez dire, alors, que géographiquement parlant, je ne respire plus

l'atmosphère de la chair..., lui fit le nouveau venu avec hésitation.- Pas tout à fait, insinua l'envoyé fraternel.Les délicats tympans de Pires enregistrèrent l'appel des trompettes, ce qui l'amena à

considérer timidement :- Mon ami, je ne fais plus partie du nombre des « vivants »?... L'autre répondit à sa

question réticente catégoriquement :- Là-dessus, il n'y a aucun doute...-Mais, continua le « mort » de manière fortuite, même ici, on travaille ?- Beaucoup.- Dans cette ville, y a-t-il des horaires à respecter, une attribution des tâches, des

responsabilités individuelles, des lois, des luttes et des conflits ?Le messager eut un geste expressif d'indulgence et lui fit remarquer :- Crois-tu que la mort de la chair, qui est un simple phénomène de la nature, puisse

purifier l'Esprit, comme par miracle ? Ici, nous réalisons d'innombrables tâches. Pour nous, le repos est une leçon, un temps de récupération ou de stimulation. Notre bonheur ne se cristallise pas en autels figés.

- Oh ! s'exclama Joaquim affligé, la justice dans le monde m'a appris qu'il existe un paradis pour les bons et un enfer pour les méchants.

- Et vous, lui demanda l'autre intentionnellement, vous vous jugez parfaitement bon ?- Non, lui répondit Pires avec une sincère humilité, je suis un pécheur et je le

reconnais, mais... franchement, je ne pensais pas qu'il y aurait autant de travail une fois dans la tombe.

- Supposerais-tu, par hasard, que notre objectif de lutte et de solidarité, d'amélioration et de reconstruction, soit intempestif et inopportun ? Celui qui est infiniment bon se doit d'aider celui qui ne l'est pas. Il faut répondre à tout prix aux impératifs de la vie. Seul Dieu est absolu.

- Oui, je comprends... grommela Joaquim découragé, mais bon, je rêvais de paix perpétuelle. Et il continua :

- Ici, y a-t-il quelqu'un qui dirige et des subalternes ?- Parfaitement.- Des serviteurs qui sont meilleurs et d'autres moins bons ?- Oui, mais à un niveau de justice et de mise à profit plus élevé.- Y a-t-il des études et des épreuves, des spécialisations et des obligations ?- Bien au-delà de ce qui se fait sur la terre...- Des erreurs et des doutes, des débats et des désaccords ?- Dans toutes les sphères d'action, parce que le libre arbitre de l'âme évoluée est

naturellement de coopérer à la structuration des destinées sous la supervision de la volonté divine.

- Par conséquent, poursuivit Joaquim, il y a des recours et des sanctions, des déséquilibres et des difficultés.

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- Exactement. Vous n'ignorez pas que là où l'erreur est possible, les moyens de la corriger doivent exister.

Le nouveau désincarné réfléchit longuement et ajouta :- Je cherche le repos inaltérable... Qui sait si le ciel que je cherche ne brille pas dans la

sphère supérieure ?- J'en doute, lui fit son interlocuteur. Plus on s'élève, plus on travaille, quoique dans

des conditions différentes.Perplexe, Pires s'assit en proie à un indicible abattement. L'émissaire eut un geste de

bonne humeur et lui fit remarquer :- Il me semble que le ciel dont tu rêves, c'est un Eden du genre « Limax arborum ».

Ces créatures, qui au fond sont aussi des enfants de Dieu, se suffisent à elles-mêmes et se nourrissent de feuilles et de fleurs. Elles sont calmes et dorment d'un sommeil réparateur sous la lumière du firmament. Elles ne demandent rien. Ne rient ni ne pleurent. Ignorent ce qui les entoure... Elles ne savent pas ce qu'est la détresse ou les maux de tête. Elles mangent ce qu'elles trouvent dans la précieuse végétation de la vie. Ignorent s'il existe entre les hommes la guerre ou la paix, les difficultés ou les tourments. Elles vivent étrangères aux drames biologiques et aux conflits spirituels et, si une catastrophe frappait l'univers dans lequel nous nous trouvons, elles ne feraient pas la différence...

- Oh ! s'exclama Joaquim brusquement enthousiasmé, qui sont ces êtres privilégiés ?- Ce sont les limaces, lui répondit l'émissaire en souriant, et si vous tombez

suffisamment bas, vous trouverez leur paradis...Joaquim changea d'expression et, bien que consterné quand il entendit prononcer le

mot limace, il se résolut à entrer.

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Au souvenir de la parabole

Le Seigneur suprême appela trois fidèles serviteurs qu'il envoya louer sa grandeur divine dans des contrées lointaines où œuvraient des milliers de travailleurs à des degrés divers de vertu et de sagesse. A ces fins, il leur distribua de précieux dons.

Avec amour, il remit au premier cinq « talents » en lui recommandant :- Emporte ces trésors de joie et de prospérité avec toi. Ce sont la santé, la richesse, la

compétence, le discernement et l'autorité. Où que tu ailles, multiplie-les pour le bien de tes enfants et de tes frères. À eux qui sont courbés sur le sol de la planète dans une condition inférieure, apporte-leur mes bénédictions pour les encourager dans leurs efforts.

Au second serviteur, il donna deux « talents », et lui fit :- Là où tu te rends, donne au monde ces deux joyaux qui sont destinés à éclairer et à

aider. Il s'agit de l'intelligence et du pouvoir. Répands ces bienfaits respectables sur mes constructions éternelles.

Au troisième, il lui confia un « talent » qu'il prit le soin de lui remettre en lui disant :

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- Prends cette lampe sublime et va ton chemin. C'est la douleur, le don céleste de l'éveil spirituel. Fais-la briller dans ton champ d'action pour ton bien et celui de tes semblables. Ses rayons donnent libre accès aux divins tabernacles.

Puis il observa ses trois collaborateurs qui s'en allaient et dit :- J'attendrai leur retour pour faire les comptes.Le temps passa rapidement, et le jour arriva où les messagers revinrent au foyer

paternel.Le Souverain, qui les attendait sous le porche, était plein d'espoir et heureux.Une fois les salutations d'usage faites, le premier envoyé s'avança et lui donna les dix

« talents » en lui disant :- Seigneur, voici tes dons multipliés. Tu m'en as donné cinq et je te rends le double. En

respectant la santé, j'ai gagné du temps ; en répandant la richesse, j'ai attiré la gratitude ; en faisant preuve de compétence, j'ai reçu de l'estime en retour ; en agissant avec discernement, j'ai trouvé l'équilibre, et en affirmant l'autorité de ton nom, j'ai établi l'ordre. Ton plan de félicité et d'évolution est réalisé.

Le Seigneur le bénit et lui dit :- Puisque tu as été fidèle dans ces affaires d'ordre mineur, je t'accorde l'intendance des

intérêts majeurs de ma demeure.Le second s'approcha et déposa entre ses mains quatre « talents » en précisant :- Seigneur, reçois tes biens multipliés. En cultivant l'intelligence, j'ai obtenu le

travail, et en soumettant le pouvoir à ta sage volonté, j'ai réussi à attirer le progrès. Tes expectatives d'instruction et d'aide dans mon domaine d'activité ont été atteintes.

Le père loua sa conduite et lui fit avec plaisir :- Puisque tu as fait preuve de fidélité dans les moindres choses, il te sera beaucoup

donné pour réaliser de grandes tâches.Peu après, le troisième et dernier serviteur de l'expédition s'approcha et rendit intact le

bien qu'il avait reçu en disant :- Seigneur, reprends l'héritage indésirable que tu m'as donné... Je sais que tu es

austère et exigeant, que tu récoltes ce que tu ne sèmes pas et que tu règnes partout... Comme j'ai éprouvé d'énormes difficultés à supporter le poids que tu avais mis sur mes épaules, par peur de ton jugement, je l'ai caché sous la terre et je le remets maintenant entre tes mains... Ce don est un fardeau trop lourd à porter... Il me rappelle de mauvais souvenirs par lesquels je suis passé, il bloque mes désirs et je n'aimerais vraiment pas l'avoir à nouveau avec moi. Il est impossible de réaliser des profits ou d'obtenir des avantages avec un joug d'une telle nature. Reprends donc ton étrange et insupportable don !...

Le Tout-Puissant eut l'air attristé et lui fit sur un ton énergique :- Tu n'es qu'un serviteur infidèle et mauvais, comment peux-tu multiplier ma

bénédiction si tu n'as même pas fait l'effort de l'examiner ? Comment éclairer le chemin si tu as laissé la lumière éteinte ? Ton oisiveté a transformé quelques grammes d'un service bénéfique en plusieurs tonnes d'angoisse qui pèseront dorénavant sur toi. Tu as créé des fantômes qui n'ont jamais existé, multiplié des préoccupations et des craintes qui t'ont amené à crier et à trépigner comme un simple idiot à un niveau avancé de mes travaux... Enfin, tu as jeté mon trésor dans le marais du désespoir et de la révolte et tu viens commenter la crainte et le zèle que ma présence t'impose, alors que tu n'as été que stupide et paresseux ! La douleur était ton occasion sacrée et l'unique lumière sur ton chemin pour que la clarté soutienne tes compagnons de lutte régénératrice et salutaire. Tu as rejeté le don que je t'avais confié... Retourne, donc, à l'ombre et au désespoir que tu as étreints !...

Et ce serviteur, qui s'était perdu par mégarde et par manque de soumission, ne comprit la valeur sublime de la lumière de la souffrance que quand il se retrouva seul et désemparé au milieu des ténèbres.

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Vers l'ascension chrétienne

Il arrivait souvent à Philippe de méditer, de sorte qu'un beau jour, le vieux pêcheur fidèle au prophète de Nazareth entama un monologue sur la grandeur de l'Evangile.

La « Bonne Nouvelle », se disait-il, était sans nul doute d'une trop grande élévation pour les banalités de l'existence ordinaire. De toute évidence, le Maître fut l'ambassadeur du ciel, d'ailleurs, les principes dont il était porteur révélaient une grande transcendance. Comment faire face aux problèmes et les résoudre ? Lui qui accompagnait le Seigneur, pas à pas, devait passer par d'immenses difficultés pour le suivre avec fidélité et pureté. Il y avait des moments où brusquement il voyait s'envoler les promesses d'amélioration intime qu'il se faisait à lui-même. L'ascension évangélique était presque impraticable. Les idéaux, les espoirs et les objectifs du Sauveur étaient bien trop lointains à son avis... Si les obstacles de son cheminement spirituel entravaient les objectifs salutaires de son cœur, que n'arriverait-il pas aux hommes ignorant la vérité et plus faibles que lui ?

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En conséquence, de temps à autre, il interpellait son Ami céleste en lui posant des questions.

Jésus, doux et persuasif, lui déclarait :- Philippe, ne te laisse pas aller à de telles pensées. Il est essentiel d'établir des critères

supérieurs pour inspirer les voyageurs de la révélation des cieux et les encourager quand cela est nécessaire... Si nous ne décelons pas la beauté des cimes, comment pouvons-nous éduquer l'esprit qui rampe dans le marais ? Ne méprise pas, sans réfléchir, la clarté qui brille au-delà...

- Mais, Seigneur, fit sincèrement son compagnon avec pondération, ne serait-il pas plus juste de nuancer les visions ? L'amour que nous prônons est universel et infini. La plupart des créatures souffre de leur étroitesse d'esprit et de leur incompréhension. Beaucoup d'hommes en arrivent même à haïr et à persécuter comme s'ils pratiquaient d'excellentes vertus. Il existe des philosophes qui passent leur vie et leur temps à couronner ceux qui tyrannisent leurs prochains. Il est donc raisonnable de diminuer la lumière de la révélation pour que l'entendement des peuples ne se trouble pas. Au fil du temps, nos continuateurs se chargeront d'apporter de plus amples informations...Le Christ eut un sourire bienveillant et ajouta :

- L'âme humaine est parfaitement capable de comprendre et de concrétiser les idées rédemptrices de nos enseignements qui sont des foyers lumineux dans les cieux. Le sommet de la montagne ne secoue pas la plaine, et si des obstacles apparaissent nous empêchant de grimper, ces difficultés nous échoient. L'étoile, qui nous invite à un raisonnement plus élevé, est toujours une source de bienfaits, elle ne perturbe jamais. Ne maudis pas la lumière, car tout obstacle à la construction du royaume des cieux se trouve en nous.

Le vieux frère pénétrait le terrain des longs questionnements intérieurs et finit par conclure en disant :

- Seigneur, comme j'aimerais comprendre tout cela plus clairement !Jésus se recueillit dans le silence pour méditer comme à son habitude.Un beau jour, tous deux se préparaient à atteindre les sommets de l'Hermon, lors d'un

long et laborieux voyage. Encore à basse altitude, l'apôtre se mit à admirer émerveillé les splendeurs qui jaillissaient de la montagne.

Fini l'herbe verdoyante et fleurie. Ils entamèrent leur marche sur un sentier escarpé.À présent, le paysage était aride et nu.De petits cailloux pointus parsemaient le chemin.Malgré leur lenteur, Philippe s'arrêtait de temps à autre pour prier. En sueur et gêné, il

s'asseyait à l'écart pour ôter les petites pierres qui se glissaient sournoisement dans ses sandales. Il passait du temps et perdait patience à les chercher entre ses doigts de pied blessés. Des dizaines de fois, ils s'arrêtèrent brusquement pour répéter cette opération. De sorte que lorsqu'ils arrivèrent en haut des montagnes, baignées de soleil, à la vision prodigieuse de la nature tout autour d'eux, le Maître, qui profitait toujours des observations faites directement sur le terrain pour en tirer des leçons de vie, lui expliqua avec douceur :

- Comme tu vois, Philippe, ce n'est pas la clarté des hauteurs qui a rendu notre marche difficile, mais les modestes petites pierres qu'il y avait par terre. Le jour radieux ne nous fait jamais de mal, ce sont plutôt les petites questions du monde qui interrompent le voyage des hommes vers Dieu, Notre Père.Presque toujours, afin de suivre la voie du devoir élevé et souverain, notre âme demande la collaboration des autres, tout comme les pieds ont besoin de la protection des sandales sur ces chemins scabreux... Toute la difficulté réside dans les problèmes insignifiants de l'ascension... La même chose se produit au cours de l'évolution humaine. Quand les questions les plus infimes sont traitées avec imprudence, elles peuvent violemment frapper un cœur. Observe chaque minute d'une conférence, l'opinion changeante, le geste irréfléchi... Ils peuvent se transformer en petites pierres nuisibles qui coupent les pieds et menacer notre équilibre spirituel. Comprends-tu, à présent, l'importance des petites

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choses dans nos efforts quotidiens ? Le pêcheur galiléen secoua la tête de manière significative, et répondit convaincu : - Oui, Maître, je comprends maintenant.

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Une remarque inattendue

Alors que la renommée de Jésus se répandait de toute part, aux alentours de Génésareth, on disait que le Messie ne perdait jamais l'occasion d'enseigner le bien à travers les représentations de la nature.

Face aux vagues de révoltes, il commentait les passions qui dévastent la créature. De sorte qu'en regardant un nid de jeunes oiseaux tendres, il exaltait le caractère sublime des liens familiaux ; lorsqu'il contemplait les fleurs bucoliques, il louait la tranquillité et la sécurité des choses simples ; en écoutant le chant des oiseaux, il se rapportait aux harmonies du ciel. Il y eut un moment où d'un grain de moutarde, il réussit à extraire un glorieux symbole de foi, et lors d'une soirée éblouissante de prédications réconfortantes, il dépeignit les tableaux inoubliables du royaume de Dieu à l'image d'un champ de blé. Il donna des explications sur l'amour céleste en utilisant une pièce de monnaie perdue. Puis vint l'instant, ô divine surprise,

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OÙ le Christ réussit à soustraire la malheureuse pécheresse de la lapidation en utilisant des paroles qui révélaient sa parfaite compréhension de la justice !

Une fois sa sagesse reconnue et proclamée, les disciples s'efforçaient de lui arracher de nobles références et des paroles riches d'enseignements. Même s'ils se relayaient pour exposer les blessures et les méchancetés humaines parce qu'ils étaient curieux d'appréhender sa conception de la vie, le Maître était toujours doué de ressources infinies pour révéler la « meilleure part » des choses.

Il savait défendre la cause des malheureux comme personne, identifier les mesures pour atténuer les fautes commises, toujours respecter l'ordre. Il combattait ouvertement le mal et fouettait le péché. De sorte qu'il était toujours prêt à aider et à soutenir les victimes. S'il s'élevait contre les monstres de la perversité et de l'ignorance, jamais il ne manqua de compassion pour les malheureux et les malchanceux. Il relevait et encourageait inlassablement. Il stimulait les qualités supérieures sans relâche, surprenait des angles illuminés dans les expressions apparemment ténébreuses.

Impressionnés par sa façon d'être, un beau jour, alors qu'ils revenaient d'une courte visite à Césarée, Jean et Jacques rapportèrent stupéfaits le cas d'un voleur repenti qui avait été enfermé à grand bruit en prison...

À son retour, quand il arriva à Capharnaüm, Jacques dit à son frère après avoir évoqué les tourments du prisonnier :

- Que dirait le Seigneur s'il venait à l'apprendre. Arriverait-il à retirer des leçons bénéfiques d'un événement aussi lamentable ?

Alors que son frère l'écoutait avec un intérêt évident, il ajouta :- Je te tiendrai au courant.En effet, après avoir embrassé Jésus, le fils de Zébédée vint lui raconter l'incident

désagréable avec des phrases longues et inutiles.- Le criminel de Césarée, lui fit-il avec ferveur, a été pris en flagrant délit. Il a été

arrêté alors qu'il était sur le point de réaliser une audacieuse tentative de vol programmée depuis six mois.

Il avait découvert une grande quantité de bijoux appartenant à une importante famille romaine, et pendant cent quatre-vingts jours, il avait secrètement creusé la paroi rocheuse afin de piller ces richesses, sans témoin. Il s'était fait passer pour un misérable esclave qui avait été roué de coups de fouet. Il se disait affamé et assoiffé. Conformément aux ordres cruels de ses maîtres, il disait qu'il travaillait de l'aube au crépuscule dans un champ, non loin de la demeure patricienne, rien que pour profiter de la nuit et dépasser les embûches qui auraient pu l'empêcher de s'approprier des camées, des diamants, des colliers en or, des bracelets garnis de pierres précieuses. Le dernier soir, il fut suivi par un gardien vigilant, et lorsqu'il plongea ses mains avides dans l'immense trésor, surgirent deux grands vigiles armés d'épées qui s'empressèrent de l'attraper. Il voulut leur échapper, mais ce fut en vain. Ils le ruèrent de coups au visage. De ses bras violemment frappés, du sang coulait en abondance. Assommé, battu, après avoir subi de dures humiliations, agonisant, le malheureux fut mis aux fers dans de telles conditions qu'il ne pourrait peut-être même pas attendre la peine de mort...

Le Maître entendit ce long récit en silence et comme il remarqua l'attitude d'expectative de ses disciples, il les fixa d'un regard perçant et doux et leur fit :

- Si la pratique du mal nécessite tant d'intelligence et de travail de la part d'un homme, nous pouvons calculer combien nous avons besoin de compréhension, de dévouement et de persévérance dans le sacrifice pour faire le bien.

Puis il s'éloigna d'un air pensif, tandis que les deux jeunes gens se regardaient, surpris, ne sachant plus quoi dire.

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Les hésitations de Pierre

Peu après l'installation des apôtres à Jérusalem, une fois les révélations de la Pentecôte passées, un service d'aide sociale fut merveilleusement organisé malgré les persécutions qui s'esquissaient. Un beau jour, l'accueillante maison dirigée par Simon-Pierre fut visitée par une pauvre femme. Elle portait tous les stigmates des pécheurs. Elle avait été lapidée et des taches de sang couvraient ses vêtements en lambeaux. Elle tenait des propos indécents. On aurait dit qu'elle était à moitié folle et malade.

Effrayées, les femmes du refuge chrétien se retirèrent. Même Pierre, qui avait reçu les précieux enseignements du Seigneur, hésita quant à l'attitude appropriée à adopter.

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Comment faire dans de telles circonstances ? Cet abri était destiné à accueillir les créatures dans la misère, pourtant comment classer la triste condition de cette femme qui, de toute évidence, récoltait les angoisses des jouissances excessives de la vie ? N'était-elle pas en train de payer ses dettes ? Si elle s'était enivrée à la coupe du plaisir jusqu'à la folie, ne devait-elle pas supporter le fiel de l'affliction ?

Il allait la prier de se retirer quand il se souvint du besoin de prier. Si son cas avait été omis dans les dispositions régissant l'institution fraternelle, il était impératif de consulter l'inspiration du Messie.

Le Maître lui dicterait sa conduite. Il alla donc trouver conseil dans la ferveur de la prière.

Tandis que la malheureuse attendait la réponse sous les exclamations d'une petite foule qui regardait ses blessures, l'apôtre chercha un coin de solitude et exhorta la protection du divin Ami qui avait été crucifié.

Peu après, tout près de ses mains qu'il tendait suppliant, lui apparut Jésus entouré de lumière.

- Maître, supplia Pierre voulant en venir directement au sujet en question, comme s'il savait combien ces moments inoubliables étaient brefs, nous avons reçu une pécheresse qui nous le savons est livrée au mal ! Aide-moi, inspire-moi !... Que dois-je faire ?!...

Le sublime Sauveur se prononça en lui disant :- Pierre, je ne suis pas venu guérir les biens portants...Le disciple comprit ce à quoi il faisait référence, mais compte tenu de la grave

responsabilité qui était la sienne en tant que dirigeant, il ajouta :- Seigneur, nous sommes, désormais, sans ton orientation directe et concrète.

Pourquoi devons-nous la recevoir dans cette maison ? Afin de la juger ?Avec la même sérénité, Jésus lui répondit :- Pour cela, il y a sur la terre de nombreux juges.- Pour lui faire comprendre l'ampleur de ses erreurs ? demanda Simon en larmes.- Non, Pierre, répondit le maître. Pour lui faire prendre conscience de la misère dans

laquelle elle vit, notre sœur sait que sur la voie publique, il y a des milliers de bouches qui maudissent et de nombreuses mains qui lapident.

- Pour lui donner la notion de la souffrance dans laquelle, de son propre chef, elle s'est plongée ?

- Non plus. Ceux qui l'exploitent en la jetant affamée et assoiffée dans la tristesse et le chagrin se chargent de réaliser une tâche aussi ingrate...

- Pour lui parler des peines qui l'attendent dans ce monde et dans l'autre ?- Toujours pas. Pour cette terrible tâche, il y a les esprits accusateurs qui n'hésitent pas

à condamner au nom du Père en oubliant leurs propres fautes...L'ancien pêcheur de Capharnaum se mit alors à pleurer en suppliant, car au fond, il

souhaitait se conformer aux exigences de la justice et en même temps donner l'exemple de l'amour que le Christ lui avait légué. Haletant et sanglotant, il ignorait comment poursuivre ses questionnements, mais Jésus s'approcha de lui, illuminé et bienveillant... Il essuya ses larmes qui coulaient abondamment et lui expliqua :

- Pierre, pour faire du mal et maudire, condamner et punir, la ville et la campagne sont pleines de mauvais serviteurs. Notre ministère va au-delà de la justice en soi. Pour réaliser l'Évangile, il faut faire appel au concours de celui qui soutient et éduque, édifie et sauve, console et renonce, aime et pardonne... Apporte ton soutien à notre sœur égarée et aide-la à se relever. Ne l'enfonce dans des abîmes plus profonds... Arrache-la de la mort et ramène-la à la vie... N'oublie pas que nous sommes porteurs de la Bonne Nouvelle du salut !...

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Puis il se tut tandis que, peu à peu, sa figure rayonnante s'effaçait dans la pénombre de la soirée... L'apôtre se leva, fit quelques pas, dépassa la longue file de frères étonnés, ouvrit doucement la porte et s'adressa à la femme sur un ton accueillant :

- Entre cette maison est la tienne !- Qui êtes-vous ? demanda la malheureuse terrifiée.- Moi ? fit Pierre avec les yeux bouffis de larmes. Je suis ton frère.

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Candidat indisponible

Lorsque le maître entama les tâches du royaume céleste pour secourir les affligés près des eaux du lac de Génésareth, il s'illustra par un triomphe incontestable. Comme on commentait ses dispositions à recevoir des compagnons et des disciples, les candidats avides de nouveautés furent nombreux à apparaître. Ne serait-il pas agréable de suivre cet homme divin qui rendait la santé aux paralytiques et ouvrait de nouveaux horizons à la foi ? Sa parole pleine d'amour parlait d'un royaume à venir où les affligés seraient consolés. Ses mains

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comme saisies d'une lumière sublime, distribuaient la paix et le bonheur, la joie et le courage. L'accompagner était tentant.

En conséquence, le nombre de femmes et d'hommes qui venaient le voir quotidiennement était important.

On croyait qu'un nouvel ordre politique serait instauré dans la province. Il resterait peut-être des postes importants avec des rémunérations expressives.

Pleines d'espoir, les mères voulaient confier leurs enfants au Messie nazaréen. Enthousiastes, les jeunes et les vieux venaient le voir de loin pour se mettre sous sa tutelle. À tous ceux qui se présentaient volontairement, il avait une phrase amicale, montrait un charmant sourire, avait un geste rassurant.

Ce fut ainsi que par une radieuse matinée, alors que le Seigneur se reposait chez Lévi pendant quelques minutes, un personnage notable révélant un extrême empressement sortit d'une riche litière.

Le nouveau venu voulut rapidement régler la raison de sa visite, il s'adressa donc directement au Christ. Comme il avait entendu des commentaires sur le nouveau royaume, il voulait être l'un de ses disciples. Avant tout, précisait-il simplement, ce serait pour lui un honneur que d'accompagner le Maître lors de ses sermons et de ses enseignements.

Le Prophète regarda ses riches vêtements et lui demanda :- Vraiment, tu accepterais le témoignage du ministère ?- Parfaitement, répondit le jeune homme avec courtoisie.- Aujourd'hui, lui fit le maître après une longue pause, à Capharnaiim dans un hangar

près de chez Pierre, nous avons deux fous agonisants qui ont besoin d'un secours fraternel. Pourrais-tu nous aider à les secourir ?

Le jeune homme fronça les sourcils et souligna :- Je n'hésiterais pas. Cependant, je suis l'armurier de Fassur, chef de la maison

d'Hérode et je conserve ce titre avec vénération. Pour quelqu'un de mon rang, un tel service ne serait pas approprié. Les nobles de notre race pourraient me reconnaître. La critique ne me le pardonnerait pas, il se peut donc que je ne puisse répondre à cette tâche...

Jésus ne s'irrita pas pour autant.Il contempla son interlocuteur surpris, et lui proposa avec bonté :- Il y a deux orphelines chez Jeanne qui attendent que des mains aimantes les prennent

dans leurs bras ? Avec toutes les relations prestigieuses que tu as, ne serais-tu pas en mesure de leur trouver une destinée édifiante ? Ce sont des petites filles qui ont besoin d'une protection maternelle.

- Oh ! Je ne peux pas ! s'exclama le novice choqué, je suis commentateur des textes d'Ezéchiel et je m'entraîne à ceux de Jérémie en dehors de Jérusalem. Une documentation émanant d'illustres prêtres confirme l'excellence de ma culture. En tant qu'interprète du Testament, ma condition fait que je ne peux correspondre à l'offre que vous me faites... Comme on peut le voir...

Sans s'altérer, le Maître ajouta :- Un homme paralysé et mourant a été recueilli chez Philippe. Il arrive de loin, car il

espère trouver une guérison impossible. Il est fatigué et vit affligé, mais Philippe reste souvent absent puisqu'il part en mission pour porter secours... Si vous lui donniez ne serait-ce que deux jours d'assistance charitable, vous pratiqueriez une noble action...

- C'est impossible, réagit le jeune homme, je suis inspecteur, je fais respecter les règles du Lévitique et dans le cadre de cette fonction, je serais probablement obligé d'isoler le malade dans la vallée des lépreux !... La mesure est impérative s'il a avalé de la viande impure.

Le Seigneur eut un sourire et le remercia. Mais son interlocuteur voulut insister, alors Jésus lui demanda :

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- Mais que cherches-tu enfin ?- Me garantir une place dans le royaume qui est à venir...- Le Nazaréen le fixa des yeux et d'un regard translucide, il lui répliqua :- Tu t'es trompé de chemin. De toute évidence, ta voiture doit suivre son chemin vers

Jérusalem où se trouvent concentrés tous ceux qui distribuent des postes bien rémunérés.- Mais, je réitère ma demande, dit l'armurier de Fassur, je veux entrer dans le nouvel

ordre !...En dépit du ton impératif sur lequel il avait prononcé ces mots, le Maître en vint à

conclure très calmement :- Suis ton chemin et ne t'entête pas. En effet, nous avons besoin de compagnons pour

nous aider. Tu as déjà de nombreux titres qui t'en empêchent et l'Évangile a besoin de cœurs disponibles prêts à apporter l'aide nécessaire à Notre Père.

L'exposant des textes d'Ezéchiel éclata de rire, jeta au Messie un long regard sarcastique comme s'il avait vu un fou et partit sans comprendre.

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Entre le bien et le mal

Le génie du bien et le génie du mal s'approchèrent en même temps de l'homme et se connectèrent aux antennes réceptives de son esprit pour disputer son concours.

Appliqué à la construction du royaume de Dieu sur la terre, plus puissant et plus fort, le génie du bien souffla sur son front pour éclairer son âme et lui transmit le message suivant par le biais « du téléphone sans fil » de sa pensée :

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- Mon fils, je viens t'ouvrir la voie de la lumière éternelle. Tu seras transporté à des hauteurs sublimes. Tu rejoindras l'entourage des collaborateurs du Tout-Puissant. Grâce à ton concours, la planète sera libérée de la peste, de la faim et de la guerre et le paradis brillera pour toutes les créatures...

L'homme frémissait de joie intérieure.Le génie céleste se mit à lui faire une liste des conditions :- À ces fins, tu commenceras par renoncer aux facilités humaines.Tu te réjouiras quand tu seras méprisé.Tu serviras sans relâche.Tu ne demanderas jamais de récompense. Tu aideras le nécessiteux qui s'est perdu

dans la souffrance et l'impie qui s'est précipité dans l'abîme de l'ignorance.Tu te réjouiras de la prospérité de tout le monde et tu préféreras te sacrifier.Avec tes amis, tu partageras la joie de leur réussite, tout comme la douleur.Tu ne t'arrêteras pas aux imperfections des autres, mais tu surveilleras, jour et nuit, tes

propres défauts afin de les corriger définitivement.Tu auras toujours confiance en Dieu, notre Seigneur, même quand le découragement

te harcèlera de toute part.Tu ne chercheras pas à être flatté.Tu t'en tiendras à ton devoir avant tout, convaincu que toute la gloire appartient au

Créateur.Tu estimeras ceux qui ne te comprennent pas.Tu excuseras des centaines de fois par jour.Tu ne perdras pas ton temps en vaine curiosité.Tu te consacreras à faire le bien, sans poser des questions inutiles.Tu ne t'attacheras pas aux résultats de l'action pour que les prisons fleuries ne

surprennent pas ton âme.Tu collaboreras au bien de tous en apprenant à servir.Et par-dessus tout, tu n'oublieras pas que seul l'amour sacrificiel te donnera l'énergie et

les moyens de réaliser l'œuvre immortelle que je propose.L'ange s'interrompit et l'homme, loin d'être enthousiasmé par cette offre, se laissa aller

à un profond désarroi...À ce moment-là, le génie du mal, soucieux de conserver son emprise sur son « ego »,

lui souffla sur le front pour assombrir son esprit avec le magnétisme de l'illusion et lui fit :- Mon fils, ne t'inquiète pas des idéaux supérieurs.Les étoiles sont des lumières merveilleuses dans le firmament, mais elles sont

inaccessibles.Aide-moi à conserver la terre telle qu'elle est pour que la lumière ne dérange pas le

travail millénaire des ténèbres.Agrandis ta cage et mets-y les âmes imprudentes.Enchaîne ceux qui s'approchent de toi.Ne pardonne jamais, parce que le pardon est une faiblesse...Avant d'être bon, soucie-toi de ne pas être stupide.Le renoncement, c'est l'art des lâches.Si une bombe menace ton domicile, fais en sorte de la mettre chez ton voisin.Ne te sacrifie jamais pour personne.Concentre-toi sur les profits immédiats et multiplie les intérêts et les droits.Quand tu ne trouveras personne pour aduler ton nom, adresse-toi des louanges à toi-

même.Ne pense pas trop aux constructions élevées, mais n'oublie pas de faire une bonne et

solide publicité de toi-même.

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Pense à toi quatre-vingt-dix-neuf fois et réfléchis aux intérêts des autres à peine une fois sur cent, si cela est possible. Comme ça, tu vaincras dans la vie.

Ne crois pas à la paix loin de ton lit ou de ta table, et ne gaspille pas ton temps avec le mythe de la fraternité universelle.

Accumule des pierres précieuses et de l'or pour les convertir en tribune d'où tu pourras parler tranquillement à tes semblables.

Rappelle-toi que l'abri monétaire est l'unique endroit sur la planète où l'on respire de façon suffisamment sûre.

En échange de ta précieuse collaboration — le porteur du mal eut à cet instant une grimace diabolique —, je t'aiderai à trouver une bonne maison, un lit confortable, des plaisirs et de la nourriture en abondance.

L'homme venait à peine d'enregistrer la proposition dans sa pensée qu'il faillit devenir fou de joie. Il entreprit de lui-même de se déconnecter de l'influence du génie du bien et se livra aveuglément au génie du mal.

Le messager du ciel se retrouva écarté. L'inspirateur satanique lui jeta alors un regard sarcastique comme pour le défier :

- Eh bien, tu ne m'arracheras pas mon allié inconditionnel ? Comme il nota que l'émissaire divin gardait le silence, il s'écria d'une voix de stentor :

- Pourquoi n'uses-tu pas de ton pouvoir et de ta sagesse pour confondre l'homme ?L'interpellé répondit sans s'irriter :- J'ai plus important à faire et je n'ai pas à passer mon temps en conflits inutiles.

Néanmoins, cette affaire n'est pas réglée. Si le génie de la douleur ne passe pas dans quelques jours, je reviendrai plus tard en compagnie du génie de la mort...

Et il s'éloigna rapidement, certainement, pour s'adresser à d'autres hommes.

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La question de l'inspecteur

Le rassemblement des membres spirites de cette nuit-là avait un air de fête. Deux semaines plus tôt, Abel, l'un des directeurs spirituels de la maison, avait annoncé que la visite d'un messager de Jésus était prévue pour cette heure. Il viendrait de très haut, non seulement pour apporter la bénédiction du Seigneur, mais aussi pour contrôler l'humble établissement.

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Les compagnons devaient donc se préparer à cette présence vénérable. Pour cette raison, la petite communauté redoublait d'activités et d'attentions.

Accrochées aux murs très propres, on pouvait voir des touffes de fleurs parfumées. La lumière se répandait abondamment des lampes soigneusement placées. Un grand tapis amortissait le bruit des pas quand on pénétrait doucement dans la salle, et l'atmosphère rappelait le silence sacré d'un temple antique.

Quand les dix coopérateurs incarnés se rassemblèrent autour de la table simple et accueillante, la prière du directeur s'éleva, émouvante et cristalline.

Tout à l'écoute, nous étions pris d'une ineffable émotion.En fait, le groupe était constitué de serviteurs de la foi sincères et bien intentionnés.

Peut-être était-ce pour cela qu'ils méritaient, cette nuit-là, la déférence élevée en question.Une fois la prière d'ouverture terminée, nous fûmes informés que l'ambassadeur du

plan supérieur ne tarderait pas à se manifester.En effet, deux minutes plus tard, la pièce fut inondée d'une douce lumière.Comme entouré d'un vaste halo d'étoiles évanescentes, l'émissaire entra dans le

sanctuaire avec une expression de sublime bienveillance.Il nous salua avec bonté, incorpora le médium le plus approprié, et faisant preuve

d'une grande sagesse et de vertus sans limites, il félicita l'équipe en service, commenta la magnanimité de Jésus qui nous permettait d'avoir la joie de vivre ces moments réconfortants. Il exalta l'expectative de la sphère supérieure relative à la collaboration des hommes, puis il demanda à ses amis incarnés de lui parler individuellement de l'existence du spiritisme chrétien dans la vie de chacun.

Nous avions l'impression d'être en présence d'un instructeur illuminé soumettant un délicat marathon à une petite salle de classe studieuse.

Un peu embarrassés par la générosité et la gentillesse de la demande, les compagnons se mirent à répondre en commençant par le conducteur de l'assemblée.

- Dieu merci ! fit le dirigeant du groupe, grâce à lui, je me sens réconforté. Le spiritisme m'a ouvert de nouveaux horizons... Je suis un autre homme. Mon passé désagréable a disparu... À aucun moment, je n'ai reçu une aussi grande clarté dans mon cœur ! Je suis heureux, grand bienfaiteur, et je remercie le Père suprême le don de la connaissance qui m'a apporté tant de bonheur !...

Peu de temps après, ce fut le tour de madame Castorine, une collaboratrice dévouée de l'organisation :

- J'ai trouvé dans cette foi consolatrice mon havre de paix. Béni soit Jésus, notre Maître divin !...

Après elle, monsieur Camara, un médium débutant expliqua avec émoi :- La nouvelle révélation est une merveilleuse source de joie pour mon âme. Je ne peux

exprimer toute la gratitude qui vibre en moi.Une fois que le compagnon eut terminé, monsieur Jean Costa, un admirable interprète

des idées chrétiennes expliqua :- J'ai été aidé par le spiritisme, plus jamais je n'ai souffert du moindre doute.

Désormais, l'Évangile est pour moi une source de profonde sécurité, car je reconnais que la justice divine est parfaite et que l'Esprit est immortel.

Dès qu'il eut terminé, son épouse prit la parole pour s'exprimer à son tour :- La doctrine, c'est ma vie !...Cette brève déclaration achevée, monsieur Freitas, un lecteur attentif aux thèses

scientifiques, plus loquace que les autres, s'exprima à travers de brillants propos sur les pondérations « richéistes », fit référence au métapsychisme européen et termina en garantissant :

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- Le spiritisme est le seul système qui pacifie l'intelligence. En lui, la conviction, la raison et la logique sont parfaitement respectées.

Ensuite, monsieur Emerenciane annonça :- Avec le spiritisme chrétien, j'ai trouvé mon bonheur. Madame Nair à ses côtés

ajouta:- Moi aussi.Pour terminer, monsieur Soares, profondément concentré dans la prière, s'exclama :- Le spiritisme est un phare qui est à jamais allumé en moi... Sans lui, il y a longtemps

que je serais plongé dans les ténèbres de l'erreur...De retour au calme, l'émissaire remercia le respect et l'affection manifestés à travers

les réponses faites à sa demande et ajouta :- Mes amis, il n'y a aucun doute que la nouvelle révélation est un message indéniable

du ciel pour le cheminement humain qui établit l'empire du bien en prouvant la survie de l'âme après la mort et en apportant le réconfort ! Je vous ai tous sentis édifiés, éclairés et heureux !... Mais ce que Jésus veut savoir, c'est justement ce que vous accomplissez avec cette bénédiction. En fait, le spiritisme est votre lumière... Qu'en avez-vous fait ? Il s'agit d'un idéal supérieur... Quels bienfaits faites-vous avec ? C'est un don du ciel... Quels bénéfices une telle grâce produit-elle en vous ou autour de vous ?

L'inspecteur divin s'interrompit. Mais comme les participants restaient respectueusement silencieux, qu'ils se regardaient les uns les autres, le vénérable ami prit congé avec bonne humeur et promit de revenir bientôt.

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Une prière réajustée

Madame Malvine Chaves était une femme profondément vertueuse et dévouée à la cause du bien. Ildefonse, son fils gisait alité depuis quatre longues années, on aurait dit un

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agneau aux prises avec une situation difficile. Il paraissait apprécier les prières de sa mère, se consacrait à d'édifiantes lectures et savait s'exprimer avec respect et gentillesse. Tous ceux qui lui rendaient visite repartaient avec des paroles d'encouragement.

En émoi, sa mère dévouée se tourna vers le Médecin divin pour qu'il apaise son angoisse :

- Seigneur, pourquoi mon fils souffre-t-il d'une telle invalidité ? Pourquoi affliger sa jeunesse d'une telle douleur en l'immobilisant à l'âge de dix-huit ans ? Ramène-le à la vie en lui permettant de se mouvoir ! Rends-lui son équilibre, par pitié ! Relève-le et je me consacrerai entièrement à ton service divin !...

Ses mots restaient étranglés dans sa gorge par les larmes qui jaillissaient de ce cœur sublime, bouleversant d'émotion les amis spirituels qui l'accompagnaient en silence.

Afin d'obtenir la concession céleste qu'elle suppliait, la femme serviable se consacrait à toutes les activités secouristes qui se présentaient.

Elle rendait visite aux mourants, soutenait les souffrants, protégeait les enfants abandonnés, risquait sa santé et aventurait ses ressources dans la charité. De sorte qu'elle attira l'attention de précieux collaborateurs du plan invisible. En vertu de ses nombreux liens d'amitié et de reconnaissance, les suppliques de la matrone vivement estimée étaient à présent soutenues par un grand groupe d'entités spirituelles qui priait tous les jours pour que le sort d'Ildefonse s'améliorât. Il suppliait Dieu de lui rendre sa liberté de mouvement. Il disait que si le malade ne méritait pas cette grâce, vu les mérites de sa mère qui était une femme admirable dans sa foi et dans sa dévotion, cette faveur ne devait plus tarder à lui être accordée.

Les prières et les promesses se multiplièrent à un tel point qu'un jour l'ordre vint du Ciel déterminant que le jeune homme allait totalement retrouver sa mobilité.

Joyeux, les ouvriers du monde invisible attendirent patiemment cette belle occasion, et quand un médium notable se présenta, il vint à l'esprit de madame Chaves de le conduire à son fils.

Le missionnaire l'accueillit avec bienveillance et se déclara prêt à aider le malade afin d'obéir à des desseins supérieurs. Avec ferveur, la mère lui fit remarquer qu'elle espérait une guérison complète, vu le sentiment de confiance qui l'avait guidée jusque-là.

Au service de la santé humaine, le missionnaire se mit à prier, entouré d'Esprits aimants et reconnaissants. Il posa ses mains sur le patient hémiplégique et transmit avec vigueur les fluides régénérateurs des désincarnés.

En quelques jours, le miracle s'était produit.Ildefonse avait retrouvé son équilibre organique dans son intégralité.Heureuse, sa mère célébrait la bénédiction qui leur avait été accordée et multipliait les

gestes de compassion fraternelle et de rénovation spirituelle élevée.Un mois, jour pour jour, s'était écoulé quand madame Malvine commença à déchanter.Depuis qu'il était guéri, Ildefonse avait bien changé. Il avait perdu son amour pour les

choses sacrées. À tout instant, il proférait des jurons. Lorsque sa mère l'invitait à prier, il lui disait sur un ton irrévérencieux que la religion n'était faite que pour les infirmeries et les hospices et qu'il n'était ni malade ni âgé pour lui donner de l'importance. Incapable de travailler, il fuyait toute discipline bénéfique. Au fur et à mesure que le temps passait, il changeait le jour pour la nuit, pressé de vivre des nuits bruyantes. Il semblait ne penser qu'à la discothèque et ses dépenses démesurées n'en finissaient plus. Quand sa mère lui demandait de réfléchir à son attitude, il souriait, se moquait d'elle, et affirmait son intention de rattraper le temps perdu allongé sur une chaise longue à prendre des drogues et des injections.

Dix mois plus tard, c'était un véritable pervers.Il s'enivrait tous les soirs et revenait chez lui porté par les bras de ses amis. Quand sa

mère lui faisait des réprimandes, il refusait de lui payer le centième de ce qu'il lui devait. Il en

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vint même à falsifier la signature d'un oncle pour lui extorquer scandaleusement de grosses sommes d'argent.

Sa généreuse mère ne savait pas comment résoudre le problème de son fils rebelle et ingrat.

Des plaintes surgissaient de partout. Les autorités et les parents, les amis et les inconnus venaient sans cesse lui faire des réclamations.

La femme dévouée était affligée et éperdue, ne sachant pas comment réajuster la situation quand, une nuit, elle demanda à son fils ivre de respecter ses cheveux blancs, il l'agressa en la rouant de coups qui blessèrent profondément son cœur.

Sans la moindre parole de révolte, madame Malvine, qui avait intercédé en faveur de son fils, retourna dans sa chambre en silence, et se mit à prier :

- Médecin divin, je comprends à présent tes sages et justes desseins. Mon fils est aussi un mouton de ton infini troupeau !... Ne permets pas, divin Ami, qu'il devienne un monstre !... Je ne sais, Seigneur, comment vous définir ses besoins, mais permettez-moi de comprendre votre compassion et modifiez son malheureux parcours. Elle essuya de copieuses larmes et répéta les paroles de l'Évangile :

- Je suis ta servante... Qu'il me soit fait selon ta volonté !... Une intense lumière spirituelle brilla autour de sa vénérable tête. Une nouvelle bénédiction du plus haut descendit sur son foyer et à la surprise de tous, le lendemain, Ildefonse s'éveilla paralysé...

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Une interprétation rigoureuse

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Après une longue incursion dans le monde spirituel, Juvénal Silva en vint à conclure que les souffrances de l'âme sont une fatalité, que la douleur est une épine inévitable, et qu'il ne serait pas raisonnable d'intervenir pour porter secours. Les philosophies et les enseignements n'affirmaient-ils pas que l'individu reçoit toujours selon ses mérites ? S'il n'était pas possible de modifier la structure de la graine, par quelle audace chercher à transformer les situations ? En examinant « au pied de la lettre » toutes les thèses doctrinaires, il complétait convaincu : - Pourquoi aider ? Si l'estropié respire sans pouvoir se bouger et si le pauvre souffre de la misère et du malheur, certes, c'est parce qu'ils obéissent à des desseins que nous ne devons pas déranger.

Parfois, en compagnie d'amis intimes, il plaisantait :- Si je donne vingt pièces au malfaiteur déguisé en mendiant, il achètera probablement

de quoi attaquer le premier passant insouciant qui se présentera.À certaines occasions, il avait recours au cas d'une vipère frigorifiée, secourue par les

mains d'un charitable camionneur qui, ayant retrouvé son équilibre, lui inocula son poison mortel.

Alors qu'il se complaisait dans ses interprétations, il vivait de façon paradoxale. Il acceptait la révélation divine, mais il niait l'esprit de sacrifice. Si un compagnon considérait les inconvénients qu'il y avait à être trop rigoureux en matière de textes sacrés, il avait recours à des passages qui venaient, en quelque sorte, confirmer son point de vue et faisait observer :

- Le Christ en personne n'a-t-il pas affirmé « qu'aucun moineau ne tombe à terre sans que notre Père le veuille et que tous les cheveux de notre tête sont comptés » ? Si nos difficultés dépendent de la volonté divine, comment comprendre les interférences de la créature ?

En cristallisant cet étrange état d'esprit, il se replia sur lui-même. Après s'être enfermé dans la tour illusoire de l'individualisme excessif, il s'entoura de lourds coffres et de quelques fleurs dans un palais qui rassemblait les conditions les plus avancées du confort moderne. Comme il se sentait complètement dispensé d'aider quiconque, il amassa facilement tout ce qu'il put pour se prémunir de l'avenir.

Théoriquement parlant, c'était un orateur remarquable, mais dans le domaine de l'action, Juvénal s'abandonnait, impuissant, aux suggestions de l'égoïsme. Quand ses frères venaient frapper à sa porte pour implorer de l'aide pour les démunis, il leur faisait à moitié en colère :

- Je ne donne rien. Chacun n'a que ce qu'il mérite. Où avez-vous la tête ? C'est une invasion dans la vie d'autrui. La bienfaisance est une obligation qui relève de l'État. Je ne peux interférer sur la décision des autorités.

Lumière célesteSi on lui disait que la douleur n'attendait pas les décrets et que la mort n'avait pas

l'habitude de lire les décisions gouvernementales, il explosait de colère :- Chaque esprit est entouré de ce dont il mérite ou demande. Puis Juvénal s'employait

à citer un grand nombre de références faites aux lois de régénération. Pour affirmer ses dires, il se basait sur des études en tout genre, il avait recours à des enseignements orientaux et occidentaux. Il citait d'innombrables exemples qu'il tirait de sa propre vie. Personne ne pouvait le faire changer d'avis.

De temps à autre, des femmes charitables venaient le voir pour réclamer des contributions pour des œuvres de bienfaisance. Or, chaque fois, il réagissait vivement :

- Pardonnez-moi, s'exclamait-il irrité, mais il me semble que vous devez avoir bien peu à faire chez vous, sans quoi vous ne dérangeriez pas le travail divin, car la charité à quémander sans cesse ne s'accorde pas avec la justice. Si vous libérez tous les malfaiteurs derrière les barreaux qui sont prisonniers et subissent une juste souffrance, qu'en sera-t-il du monde dans lequel nous vivons ? Sachez que je ne vous suis pas. Je suis l'ennemi du désordre.

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Invariablement, les protectrices des pauvres se retiraient en proie à la tristesse et à la déception.

Juvénal continua ainsi jusqu'à sa désincarnation après quoi, il entra dans un isolement douloureux.

Il vivait au hasard, comme enveloppé dans la colonne d'un épais brouillard. Il gémissait, pleurait, demandait de l'aide, mais c'était en vain. Il pressentait qu'autour de lui des gens passaient, mais personne ne s'intéressait à lui.

Toutefois, il vint un moment où le malheureux fut reçu par un messager de l'assistance divine. Profitant de l'occasion, il se plaignit, le supplia et formula même des exigences.

Après tout, déclarait-il désespéré, je n'étais pas un criminel ni un pervers...L'envoyé, qui avait un regard translucide et lumineux, lui fit calmement :- Mon fils, chacun reçoit ce qu'il a planté. Les arbres de l'égoïsme ne produisent pas

les fleurs de la cordialité.Juvénal multiplia ses explications. Accusé par sa conscience, il espérait trouver des

arguments. S'il n'avait pas fait plus de bien, c'était justement parce qu'il ne voulait pas contredire les dispositions des épreuves rémissibles.

- Oui, dit l'émissaire serein, en fonction de tels principes, tu peux comprendre à présent ta solitude...

- Tu veux dire, déclara Silva abattu, que nous devons enfreindre les desseins célestes?Sans se troubler le moins du monde, le messager précisa :- Si la douleur humaine est une source de rénovation pour ceux qui souffrent et

expient, c'est également une occasion d'ensemencement sublime pour tous ceux qui veulent planter le bien impérissable. Sinon, Jésus n'aurait pas eu à se sacrifier sur la croix pour nous tous.

L'interlocuteur l'écoutait stupéfait. Mais avant qu'il n'ait eu le temps de discuter, le vénérable secouriste lui demanda franchement :

- Juvénal, toi, qui connaissais si bien la question du mérite, quand tu voyais quelqu'un s'approcher de ta porte ou de ta personne, pourquoi n'as-tu jamais pensé que la sagesse et le programme de Dieu agissaient en toutes circonstances à travers les liens invisibles, et que le malade ou le nécessiteux étaient déjà dignes de ton soutien et de ta protection ?

Quoiqu'il fût égoïste, Silva faisait appel à la logique et à la raison, de sorte qu'il perdit à cet instant l'envie de répondre et plongea sa tête entre ses mains pour méditer.

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Jusqu'à Moïse

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Quand Euclide Brandon désincarna, il s'attendait à ce que les portes du paradis lui fussent ouvertes immédiatement.

Il avait vécu avec la Bible à la main, à consulter sans cesse ses différents textes.Il déclarait toujours que les dix commandements contrôlaient sa vie. En pensée, il

aurait bien souhaité que le monde lui appartienne, néanmoins, il vénérait Dieu. De sorte qu'il ne prononçait jamais son nom en vain, observait le repos dominical, honorait ses parents, n'avait jamais commis d'homicide ni d'adultère, ni de vol, il ne convoitait pas publiquement les biens de son prochain, même s'il faisait en sorte de tourner les circonstances en sa faveur quand il le pouvait, et ne se livrait jamais à de faux témoignages.

Pour autant, Euclide entrait au pays de la mort sans la moindre dette.Mais en atteignant, la frontière entre ce monde et l'« autre » aux limites de la

spiritualité, notre ami fut fortement surpris. Il fut reçu sans considération particulière. Dans ce vaste espace de travail sélectif, il était traité comme un vulgaire consultant dans une agence d'information.

Amené à donner des explications, il eut avec le greffier de la justice divine un dialogue intéressant, une fois qu'ils se furent salués :

- Vous n'avez reçu aucun ordre concernant mon transfert définitif vers le ciel ? demanda-t-il en toute confiance.

L'interpellé eut une expression joviale, le regarda après avoir pris connaissance des détails relatifs à son origine :

- Nous n'avons rien reçu en ce sens du niveau supérieur. Vous étiez chrétien ?- Effectivement, répliqua Euclide blessé dans son amour propre, j'ai accepté Jésus au

plus profond de moi.- Vous l'avez accepté et suivi ?- Parfaitement. Je lisais son testament jour et nuit.- Vous le lisiez et vous le pratiquiez ?- Avec la plus grande exactitude.- À part les bienfaits de l'Évangile, en profitiez-vous pour vous rénover en Jésus pour

mieux pratiquer la sagesse et la vertu ?Euclide répondit par l'affirmative. Mais comme il paraissait un peu mal à l'aise avec

les questions qui lui étaient posées, le superviseur de la sphère supérieure lui recommanda de lui présenter le plus succinctement possible quelques données autobiographiques. Il voulait résoudre cette énigme.

Encouragé, Euclide fut clair et bref.- Moi, dit-il, en démontrant toujours un certain plaisir à s'exprimer à la première

personne, je fus un homme juste sur la terre. J'ai toujours pris soin de préserver cet aspect de ma personnalité. Quand les autres me témoignaient de la gentillesse et du respect, je leur rendais la monnaie de leur pièce. Ceux qui me faisaient plaisir, je partageais avec eux des avantages susceptibles d'être articulés par mon influence. Si bien que j'ai laissé mes biens à ceux qui avaient su gagner ma sympathie. Quant aux autres qui me faisaient du mal, j'usais envers eux des mêmes procédés. Je n'ai jamais eu envie d'aider les malfaiteurs, parce que pour eux il n'y a pas assez de barreaux dans le monde. Lorsque j'étais importuné par les méchants, je savais conjuguer le verbe corriger, et quand ils me tourmentaient trop, je les punissais sévèrement. La corde et le fer ne peuvent être oubliés pour améliorer les hommes. Quand j'étais harcelé, jamais je ne permis que mes amis me devancent pour me venger. Face au moindre défi, je ne gardais pas le silence, si j'étais invité à lutter, je devais vaincre. Piétiné par les autres, je leur rendais la pareille. Je n'ai jamais perdu mon temps à enseigner aux délinquants et aux vagabonds ce qu'ils ne voulaient pas apprendre, et si j'ai traité les personnes dignes avec générosité, j'ai manifesté aux déshonorés l'antipathie qu'ils méritaient. Lorsque je

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recevais des fleurs, j'improvisais un jardin à ceux qui me faisaient des faveurs, mais si j'étais surpris par des cailloux, je répondais par des jets de pierre.

Il fit une longue pause et souligna :- Ne pensez pas que j'ai pu facilement exercer la justice. Les hommes comme moi, qui

cherchent à être équilibrés et chrétiens, vivent une expérience terrestre très ingrate.Il eut une expression étrange dans les yeux et ajouta :- Comme vous le voyez, mes plaintes sont opportunes. Si le paradis ne m'est pas

ouvert, moi qui ai marché avec la Bible à la main...Avec bonne humeur, le fonctionnaire céleste intervint pour préciser :- Le plan supérieur ne vous ferme pas le passage, cependant, Euclide, votre justice n'a

pas connu la miséricorde...- Oh! Mais, je n'ai jamais pris d'engagements sans consulter les textes sacrés !...- Oui, lui fit le sage interlocuteur, vous n'avez pas dépassé le stade de Moïse. Tout

naturellement, vous retournerez à la chair pour continuer à apprendre avec Jésus-Christ.Et souriant, il ajouta :- Le programme de votre cours a un retard de 1900 ans... En entendant cette

explication, Euclide baissa la tête et se tut, comme pour réfléchir...

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Par loyauté fraternelle

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Mon ami,

Tu affirmes que tu ne peux accepter l'idée de la survie après la mort parce que tes yeux ne peuvent se certifier de notre présence spirituelle. Tu soulignes que tu ne peux imiter saint Augustin qui se transforma brusquement. Il est fort probable au fond que tu te considères supérieur au disciple de saint Ambroise, mais crois bien que tes doutes ne sont pas fondés et enfantins.

Ta déclaration mentionne les philosophes et les scientifiques, et tu mets l'accent sur les athées avec des phrases adulatrices.

À la rigueur, nous ne devrions pas perdre de temps avec tes questionnements, cependant, ils soulèvent un grave problème qui fait que nous en avons pris note et nous allons y répondre.

En fait, tu vis la majeure partie du temps de ce qui est invisible aux yeux des mortels.Le cactus plein d'épines qui fleurit dans le désert ne saurait dire par quel miracle il

reste vivant dans le sol aride. Tout comme toi, d'ailleurs, qui es pris dans le sombre engrenage de la négation, tu ne serais pas en mesure d'expliquer pourquoi tu affiches la fleur précieuse de l'intelligence.

Ta tête a recourt au raisonnement et fait des hypothèses ; elle débite des sarcasmes pour en conclure que la civilisation est un château de cartes qui s'écroule indéfiniment dans l'abîme de la tombe.

Cependant, tes yeux restent fixés sur le « plat de lentilles ».Ton problème est de l'ordre de l'immédiateté, à peine. Rien d'autre.Tu manques de réflexion.Ton incapacité à vérifier ce qui relève de la phénoménologie commence déjà avec

l'énigme de la naissance. L'histoire de ton corps transcende les notes de ta fiche généalogique. Tu ne sais toujours pas comment tu es entré dans le sanctuaire des formes terrestres et, si un biologiste te parle de chromosomes pour élucider les questions de l'embryologie, naturellement, tu croiras entendre une histoire mensongère fondée sur une présomption scientifique. Si tu n'as pas vu la formation des éléments microscopiques, comment pourrais-tu admettre les élucidations qui traitent de la question ?

Quand vient le soir, de retour chez toi, tu te mets à écouter les nouvelles qui passent à la radio sur les capitales étrangères et tu entends des informations avérées sur Rome et Washington. Pourtant, tu ne vois pas tous les fils qui sont nécessaires pour que les messages te parviennent.

Tes organes absorbent l'air dont ils se nourrissent en grande partie, alors que tu ne t'en rends même pas compte.

La maladie, qui te ronge les entrailles et te force à investir dans des assurances, procède le plus souvent de l'attaque de la faune microscopique sauvage qui se multiplie sous l'influence morbide de ton esprit. Et même si tu ne peux identifier l'ennemi de ta tranquillité personnelle et domestique, tu es bien obligé de croire en son existence.

Pas plus que tes yeux ne voient les mouvements péristaltiques de tes intestins dans leur activité quotidienne conformément à ta réalité humaine, sans eux ta mission terrestre serait menacée.

Pour finir, mon cher, toi, qui souhaites que nos mains soient palpables, tes intentions et tes pensées sont-elles perceptibles à ceux qui t'entourent ? Je te garantis que tes parents et amis ne connaissent pas un dixième de ta véritable personnalité. Mais quand il s'agit de nous, ton exigence est infaillible.

Pourtant, ton argumentation ne justifie pas le jugement négatif que tu as.Cherche d'autres façons d'entrevoir la vérité.

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Un jour, à l'école primaire, j'ai rencontré un garçon agité, un collègue volage et inconstant qui faisait que notre professeur devait lui consacrer de longues heures. Il lui soumettait ses doutes quant à l'existence de la Terre de Feu parce qu'il n'avait jamais vu son contour et ne croyait pas ce qui était écrit dans la leçon de géographie. Pourtant, nous ne pouvons remettre en cause son intelligence infantile encore rudimentaire. Tu lis différentes langues et tu les comprends grâce à ta grande culture intellectuelle, tu cites Haeckel, Schopenhauer et Le Bon. Or, nous savons tous que la raison, toujours critique, ne s'arrête pas au stade du berceau.

Cherche, donc, son origine.Étudie et réfléchis.Ne t'en tiens pas exclusivement aux pupilles que la tombe fermera plus tard. Fais un

effort de réflexion. Le fait de voir est plus vaste, ne te limite pas au corps éphémère. Le rôle de l'esprit est impérissable. Examine le problème de la mort avec plus d'ampleur. Prépare tes bagages, car tu feras aussi la traversée que j'ai déjà faite.

Si tu es sincère, ne rate pas l'occasion d'améliorer tes connaissances sur la nouvelle vie qui t'attend. N'oublie pas, mon ami, que, malgré les efforts que nous faisons tous, les Voronoffs du monde, et la miraculeuse pénicilline de notre estimé professeur Fleming, les registres des cimetières sont toujours régulièrement signés...

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L'apprentissage de Judas

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Malgré son caractère affectueux, bien souvent, Judas était impulsif et agité. Il était tombé amoureux des idéaux du Messie, et bien qu'ayant épousé ces nouveaux principes, à de nombreuses reprises, il entrait en conflit avec eux. Il se sentait en quelque sorte le propriétaire de la Bonne Nouvelle, et son attachement frénétique à Jésus faisait souvent de lui le chef de file lors des délibérations importantes. De sorte qu'il organisa la première bourse de la communion apostolique pour récolter des fonds, et obéissant à la même impulsion, il pensa servir la grande cause qu'il avait épousée lorsqu'il accepta le piège dangereux qui déboucha sur l'arrestation du Maître.

En dépit des études rénovatrices auxquelles il se consacrait, prisonnier des conflits intérieurs qui caractérisaient sa façon d'être, il ignorait comment conquérir la sympathie autour de lui.

Il avait constamment sur les lèvres, une remarque amère, une pensée malheureuse.Quand Lévi évoquait certains fonctionnaires d'Hérode, respectueux de l'Évangile, il

disait sur un ton narquois :- Ce ne sont que des serpents sournois. Ils salissent le trésor public, flattent les prêtres,

et se laissent piétiner par le Romain dominateur... À mon avis, ce ne sont que des espions...Naturellement, un peu déçu, son compagnon entendait ces déclarations, tandis que ses

nouveaux collègues, moins enthousiastes, prenaient leur distance.Une généreuse amie de Jeanne de Cusa, lui donna un jour les moyens de participer à la

marche en groupe de Capharnaüm à Jérusalem. Mais lorsqu'il reçut cette somme, l'apôtre irréfléchi fit la remarque ingrate suivante :

- J'accepte votre offre, cependant, je ne me laisse pas duper. La donatrice prétend acheter le royaume des Cieux, après avoir joui de tous les plaisirs du royaume terrestre. Sachez tous que cet argent est impur, qu'il est né du péché.

Ces paroles, prononcées devant la bienfaitrice, furent pour elle la source d'une indéfinissable amertume.

À Césarée, la femme héroïque d'un paralysé se sentit baignée par la lumière de l'Évangile, elle ouvrit les portes de son foyer aux plus démunis. Les orphelins et les malades venaient chercher son affection fraternelle. Malgré tout, le disciple atrabilaire ne put s'empêcher de dire en recourant à la médisance :

- Et son passé ? fit-il cruellement, son mari est tombé malade à cause des tristes scènes qu'il dut supporter. Franchement, je n'accepte pas sa conversion. De toute évidence, si elle est généreuse, c'est pour en tirer quelques profits.

Profondément blessée par ces insinuations peu charitables, la débutante de la bienfaisance arrêta tout ce qu'elle avait entrepris, causant d'énormes préjudices pour les enfants malheureux.

Lorsque le Messie en personne eut béni Zachée et ses services, Judas s'écria en cachette avec indignation :

- Ce publicain paiera plus tard. Il appauvrit ses semblables, s'entoure d'esclaves, agit sordidement avec cupidité, et prétend vouloir entrer dans le royaume de Dieu !... Il n'ira pas loin... Il trompe peut-être le maître, pas moi...

En alimentant de telles dispositions, il souffrait de la méfiance d'un bon nombre. De temps à autre, il était délicatement repoussé.

Jésus, qui suivait ses attitudes en silence, conseillait à chacun la prudence, l'amour et la tolérance. Mais à peine eut-il terminé ses observations pleines d'indulgence que Simon Pierre arriva en expliquant que Jéroboam, un pharisien sympathisant de la Bonne Nouvelle, semblait incliné à aider l'Évangile naissant.

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- Jéroboam ? avertit Judas sur un ton sarcastique, c'est un renard aux griffes pointues. Un simple fourbe ! Je le connais depuis vingt ans. Il ne fait qu'exploiter son prochain et amasser de l'argent. Il fut un temps où il en est même arrivé à battre son propre père parce que le malheureux lui avait pris un demi-baril de vin !...

Le fait est que, peu à peu, les circonstances le forcèrent à s'isoler. Même ses camarades devenaient distants. Personne n'appréciait ses accusations gratuites et ses lamentations sans raison. Seul le Christ ne perdait pas patience. Il passait de longues heures à l'encourager et à lui expliquer les choses affectueusement...

Un après-midi chaud et sec, tous deux voyageaient dans les environs de Nazareth, ils étaient fatigués après un long voyage, quand pris de remords, le fils de l'Iscariote demanda :

- Seigneur, pour quelle raison dois-je souffrir de si grandes humiliations ? Je note que mes compagnons s'éloignent discrètement de moi... Je n'arrive pas à avoir des relations durables. Il y a comme une force qui me sépare des autres... Je suis incompris et fustigé par la destinée...

Puis levant ses yeux tristes au divin Ami, il répéta :- Pourquoi ?!...Comme il nota que la voix du disciple était pleine de larmes qui n'arrivaient pas à

couler, peiné, Jésus allait lui répondre quand ils s'approchèrent, tout à coup, d'un puits où ils avaient l'habitude d'assouvir leur soif. Se réjouissant de cette bénédiction, Judas se baissa impulsivement et plongea ses mains avides dans le liquide cristallin, mais toucha par inadvertance le fond, rapportant une grande poignée de boue à la surface.

- Oh ! Oh ! Quelle misère ! s'écria-t-il désespéré. Calmement, le bon maître eut un sourire et dit :

- Dans ce puits sans prétention, Judas, tu peux trouver la leçon que tu cherches. Quand tu voudras de l'eau pure, retire-la avec soin et reconnaissance. Tu n'as pas besoin de troubler la boue du fond et des bords. Quand tu auras soif de tendresse et d'amour, fais la même chose avec tes amis. Reçois leur coopération affectueuse sans penser à mal pour ne pas perdre le bien suprême.

Un lourd silence tomba entre le bienfaiteur et le protégé. L'apôtre, qui manquait de vigilance, changea d'expression, mais ne répondit pas.

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L'écriture de l'Evangile

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Lorsque Jésus recommanda de prêcher partout la Bonne Nouvelle, le petit collège apostolique se rassembla autour de lui dans l'humble maison de Pierre. Les questions sur ce thème, qui leur était cher, affluèrent.

- Maître, fit Philippe avec pondération, si ceux qui nous sont hostiles nous empêchent d'avancer, que ferons-nous ? Devrons-nous recourir à l'autorité pour les punir ?

- Notre mission, répliqua Jésus d'un air songeur, a pour objectif de convertir le mal en bien, l'ombre en lumière. Même si cette transformation nous coûte du temps et des sacrifices, le programme ne peut être différent.

- Mais... réagit Thomas, et si nous sommes attaqués par des criminels ?- Même dans ce cas, affirma le Christ, notre ministère est celui de la rédemption, nous

devrons toujours pardonner et aimer. En persistant dans le bien, nous parviendrons à la victoire finale.

- Seigneur, objecta Jacques, le fils d'Alphée, si nous sommes interpellés par les pharisiens, les dévots de la Loi, quelle attitude devrons-nous adopter ? Ce sont les gardiens des textes sacrés, ils s'en servent pour justifier habilement leur conduite orgueilleuse. Ils sont astucieux et pugnaces. Ils disent être les héritiers des prophètes. Que faire puisque le nouveau royaume nous dit d'agir fraternellement, sans tyrannie ?

- Même ainsi, fit le Messie nazaréen, nous devons témoigner des nouvelles idées. Quant à la loi de Moïse, nous lui consacrons notre respect. Cependant, nous rénoverons son sens sublime, comme la graine se transforme en fruits bénis. La justice sera à la base de notre travail sur la terre. Toutefois, seul l'esprit de sacrifice garantira notre récolte.

Après une courte pause, fortement impressionné par cette réponse, Thaddée ajouta :- Et si les casuistes nous perturbent ?- Nous supplierons l'inspiration divine pour qu'elle nous vienne en aide.- Mais que se passera-t-il si nous n'arrivons pas à trouver l'entendement au point de ne

pas être en mesure de capter le secours du Très-Haut ? insista l'apôtre.Avec un sourire, Jésus lui expliqua :- Alors, il faudra purifier votre cœur en attendant que la lumière d'en haut se fasse en

vous.À ce stade, André intervint pour demander :- Maître, lors de notre prédication, devons-nous appeler toutes les créatures sans

distinction ?- Nous aiderons tout le monde, sans restriction, répondit le Sauveur avec une inflexion

significative dans la voix.- Seigneur, demanda Simon circonspect, nous sommes pleins de bonne volonté, mais

nous sommes aussi de faibles pécheurs. Que se passera-t-il si nous tombons sur la route ? Si nous entendons à plusieurs reprises les suggestions du mal pour nous éveiller par la suite tourmentés de remords ?

- Pierre, répliqua l'Ami divin, se lever et continuer est le bon remède.- Mais comment faire, insista le pêcheur, si notre chute est si désastreuse qu'elle nous

empêche de nous relever immédiatement ?- Nous nous remettrons à articuler nos bras déboîtés, nous soulagerons notre cœur

brisé et nous louerons le Père des leçons utiles que nous aurons reçues pour continuer à aller de l'avant...

- Que faire si les démons nous attaquent ? interrogea Jean de son regard limpide.- Nous les inciterons à glorifier le travail pacifique.- Et s'ils nous haïssent et nous persécutent ? commenta Jacques, le fils de Zébédée.- Nous les soutiendrons en nous réfugiant dans la prière.

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- Et si ces ennemis puissants et intelligents nous détruisent ? demanda le fils de l'Iscariote.

- L'esprit est immortel, élucida Jésus calmement, la justice prend racine partout.À cet instant, Lévi, un homme pratique habitué aux statistiques, fit observer

prudemment :- Seigneur, le pharisien lit la Torah en se basant sur ses instructions ; le sadducéen

détient de précieux rouleaux auxquels il a recourt pour faire la propagande des principes qu'il étreint ; quant aux gentils pour soutenir leurs écoles, ils ont des milliers de parchemins avec les pensées et les croyances enregistrées des philosophes grecs et perses, égyptiens et romains... Et nous ? À quels documents aurons-nous recours ? Quel matériel utiliserons-nous pour enseigner au nom du Père sage et miséricordieux ?!...

Le Maître réfléchit longuement et lui dit :- Nous utiliserons la parole, si nécessaire, tout en sachant que le verbe corrompu gère

la perturbation et les ténèbres. Nous nous servirons des caractères écrits pour étendre le royaume des

Cieux. Toutefois, n'ignorons pas que les places dans le monde exhibent de nombreux scribes en tunique dont la sombre pensée renforce le pouvoir de l'incompréhension et de l'ombre. Par conséquent, nous utiliserons toutes les ressources humaines dans notre apostolat ; sachant, néanmoins, que le plus précieux matériel d'exposition de la Bonne Nouvelle, c'est nous-mêmes. Notre prochain constatera le message du Père à travers l'image que nous donnons de notre propre vie, à travers nos paroles et nos actes, nos résolutions et nos attitudes...

Puis, il posa sa main sur sa poitrine et ajouta : - L'écriture divine de l'Évangile, c'est le cœur du disciple. Les douze compagnons se regardèrent, admiratifs, et le silence tomba sur eux, alors que non loin de là, les eaux cristallines reflétaient l'immense ciel bleu, balayé par les brises qui annonçaient les premières visions de la nuit...

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La révolution chrétienne

À plusieurs reprises, Thomas avait entendu parler du nouveau royaume. Impressionné, il en venait à croire que le peuple j uif était à la veille d'un formidable renouveau politique. De toute évidence, Jésus était le chef suprême du mouvement qui se présentait de manière pacifique, mais qui se terminerait certainement par des affrontements sanglants. Le Maître ne se rapportait-il pas constamment à la volonté du Tout-Puissant ? L'avènement de la nouvelle ère ne pouvait être nié. Des légions d'anges descendraient probablement du ciel et lutteraient pour l'indépendance du peuple élu.

Comme pour justifier cette attente, tout le monde se rassemblait autour du Messie pour écouter ses promesses.

Ils devaient être à la veille de changements sur la terre, sans dominateurs ni esclaves.Finalement un soir, il se décida à soumettre au Christ ses impressions. Celui-ci lui

donna la confirmation qu'il attendait :- Sans l'ombre d'un doute, lui fit le Nazaréen, l'Évangile est porteur d'une

transformation gigantesque du monde. Il se destine à la rédemption des niasses anonymes et souffrantes. Il changera le chemin des peuples.

- Un mouvement révolutionnaire ! compléta Thomas, voulant donner un sens politique plus large à sa définition.

- Oui, fit le Prophète divin, en quelque sorte... Enthousiaste, le disciple se souvint du caractère belliqueux

de la race, des souffrances dans le désert, de la capacité de résistance qui marquait le destin des Israélites, en commençant par Moïse, et lui demanda franchement :

- Seigneur, me confierez-vous par hasard le projet d'une telle entreprise ?Jésus eut un regard significatif et répondit :- Demain, très tôt, en contournant les eaux, nous nous rendrons ensemble sur la

montagne. Peut-être aurons-nous plus de temps à consacrer à des explications.Intrigué, l'apôtre attendit le lendemain. Impatient, bien avant le lever du jour, il alla

retrouver le Seigneur, chez Simon Pierre. Mais, il fut surpris de le trouver en train de l'attendre, prêt à partir pour la journée.

À peine eurent-ils pris la route qu'ils rencontrèrent un pauvre pêcheur ivre qui se traînait sur la voie publique. Le Messie s'arrêta et s'approcha du misérable pour le secourir.

- Mais que fais-tu, s'exclama Thomas contrarié, c'est Jonas, un vieux diable qui vit ivre. Pourquoi doit-on l'aider ? Demain, à la même heure, dans les mêmes conditions, on le retrouvera étendu, ici même.

Le céleste Compagnon, cependant, ne tint pas compte de ses conseils et répondit :- Je n'ai pas l'impression que tes allégations soient justes. Tu dois ignorer en quoi

consiste l'expérience de Jonas. Tu ne sais pas pourquoi il s'est laissé aller à une telle dépendance. Malade de l'esprit, il est dans un état critique, ses souffrances vont en s'aggravant au fur et à mesure qu'il s'enfonce. En fait, il vit à récidiver ses erreurs. Alors, n'est-il pas raisonnable que nous lui portions secours dès à présent ?

Sans réponse devant un tel argument, l'apprenti se limita à coopérer. Il conduisit l'ivrogne dans un endroit sûr où un ami bienveillant serait prêt à lui fournir un peu de chaleur humaine et de pain.

Puis ils reprirent leur marche. Mais bien vite, une femme pauvre s'empressa d'implorer le Messie de venir voir sa fille atteinte d'une forte fièvre.

En compagnie du disciple, le Sauveur pria à côté de la petite confiante, il la bénit, et son corps retrouva son équilibre.

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Ils allaient quitter Capharnaùm, quand ils furent abordés par trois pauvres femmes qui voulaient recevoir les instructions de la Bonne Nouvelle pour leurs tout-petits. Le Christ ne se fit pas prier. Il leur apporta des explications simples et concises.

Il n'avait pas encore conclu cet aperçu rapide de l'Évangile que Japhet, le bûcheron, arriva haletant pour supplier le Messie de se rendre chez lui, parce que son enfant était mort et sa femme était devenue folle.

L'émissaire de Dieu le suivit sans hésiter devant Thomas qui restait silencieux. Il réconforta la mère éperdue pour la ramener à la raison et enseigna au foyer perturbé que la mort, au fond, n'était que la victoire de la vie.

Ces tâches matinales avaient accaparé tout leur temps, et lorsqu'ils se remirent en route finalement, voilà qu'une vieille femme à demi paralysée demanda de l'aide à l'Ami céleste. Elle avait une jambe horriblement ulcérée et ne pouvait se servir que d'une main.

Le Messie la traita avec bonté. Il sollicita le concours de l'apôtre et la conduisit tout près de là, où il lava ses plaies et la laissa correctement logée.

Alors qu'ils avaient repris leur voyage vers les montagnes, le maître et le disciple furent obligés de répondre à plus d'une cinquantaine de cas difficiles pour atténuer les souffrances, donner du courage, dissiper l'ignorance et diffuser des leçons d'espoir et d'illumination. Toujours entourés d'aveugles et de fous, de lépreux et d'infirmes, de malades et d'affligés, ils eurent à peine le temps de faire un léger repas à base de pain et de légumes.

Quand ils eurent atteint leur objectif, il faisait déjà nuit. Dans le ciel, les étoiles brillaient au loin. Ils étaient épuisés.

Thomas avait les pieds ensanglantés, il essuya la sueur abondante de son front et rendit grâce à Dieu de pouvoir enfin se reposer. Malgré tout, la fatigue ne calmait pas sa curiosité. Il regarda le Christ d'un air interrogateur et lui demanda :

- Seigneur, me donnerez-vous à présent la clé de la conspiration libératrice ?Le divin interpellé lui déclara sans hésitation :- Thomas, les hommes devraient être fatigués des révoltes et des guerres qui viennent

de l'extérieur et sèment la ruine, la haine, la cruauté et le désespoir. Notre initiative rédemptrice s'opère de l'intérieur vers l'extérieur. Nous sommes déjà en pleine révolution évangélique. D'ailleurs à travers ce jour, avec les tâches bénies qu'il nous a apportées, tu peux trouver la réponse à ta question. Tant que le mal sera prépondérant, que le chemin des hommes sera semé d'afflictions et de ténèbres, nous combattrons pour le triomphe suprême du bien.

Devant son disciple déçu, il en vint à conclure :- Notre ordre n'est pas de tuer pour renouveler, mais plutôt de servir pour améliorer et

toujours chercher à élever.Thomas se mit à réfléchir longuement et ne posa plus de question.

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En souvenir du philosophe

On raconte qu'Epictète, l'esclave philosophe, reçut la visite de Lysandre, un affranchi d'Epaphrodite. Celui-ci était venu lui faire ses adieux, car il devait partir d'urgence en voyage. Devant son ami intime, il gardait le silence.

- Mais tu n'es pas content ? s'exclama son ami délivré de l'esclavage, tu ne partages pas ma joie à l'idée de mon heureux départ ?

L'interpellé le fixa des yeux et lui demanda :- Que cherches-tu ?- Un merveilleux séjour, un environnement différent, un changement de vie, la

splendeur de la ville impériale, l'honneur d'entendre les célèbres tribuns, la contemplation de spectacles somptueux, et qui sait, peut-être, me faire remarquer parmi les patriciens dominateurs.

Immobile, le philosophe écoutait son compagnon. Toujours imperturbable, une fois terminée cette brève exposition, il lui fit :

- Tu entreprends un long et périlleux périple pour satisfaire ton ambition personnelle. Cependant, quel voyage as-tu fait pour changer ta façon de voir et cultiver de nobles sentiments ?

Surpris, son ami n'arrivait pas à répondre.- Tu cherches un autre environnement, poursuivit le sage sans s'altérer, mais quand as-

tu déjà essayé de t'améliorer ? Tu détestes toujours ceux qui te blessent, tu réagis quand on t'insulte, tu te justifies tout de suite quand on t'accuse de la moindre faute... Qu'est-ce que tu pourras trouver de nouveau dans la vie ? Tu aspires aux splendeurs de la ville des Césars, mais tu n'as pas allumé la plus petite lumière en toi. Tu veux avoir la joie d'entendre de célèbres orateurs, mais tu n'as jamais consulté quelqu'un pour t'éclairer sur la façon de t'améliorer. Tu assistes aux spectacles extravagants pour les yeux de la chair, mais tu oublies qu'il y a des prisonniers qui observent ces folles festivités derrière les barreaux de leur prison. Tu rêves de figurer parmi ceux qui dominent, mais tu ne contrôles pas encore ta propre existence.

À ces paroles sereines, son ami rougit, puis s'écria sur un ton grincheux :- Pourtant, je suis libre à présent... Epictète lui sourit et lui fit pour conclure :- Tu es en liberté, mais tu ne peux te fuir à toi-même... Certes, cet épisode nous

rappelle notre propre vie.La jeunesse pleine de rêves et la vieillesse couronnée de déceptions invitent notre

conscience à la vérité à travers notre illumination intérieure. Comme l'ami d'Épictète, nous nous reposons à l'ombre des arbres fleuris des délicieux mensonges, dans la jungle inextricable des émotions humaines. Nous aspirons à des mélodies qui nous transportent, à de riches apparences pour nous voiler la face, nous cueillons les bourgeons en fleur et gaspillons les fruits verts, jaloux de notre indépendance. De sorte que nous serons toujours le jeu des réactions inférieures quand la lutte viendra doucement frapper à notre porte.

Nous désirons et nous réalisons les choses au niveau extérieur pour pénétrer par la suite les chemins de l'ennui mortel. Pourtant, nous buvons jusqu'à l'ivresse pour finalement trouver au fond de notre verre, le vinaigre du désespoir.

Une fois les déceptions d'ordre physique passées, nous conservons la terrible sensation de nous êtres trompés. Dans la mort, nous espérons trouver la révélation d'un paradis merveilleux d'ambroisies et de cantiques angéliques. Nous rêvons de pouvoir traverser les sublimes portiques des mystérieux palais pleins d'augustes trésors et de lauriers éternels.

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C'est le difficile voyage de l'affranchi à une Rome différente, auréolée de pourpre et de richesses.

Cependant, devant le château céleste étincelant de lumière, nous restons figés face à nous-mêmes, plongés dans les ombres amères de notre cœur. Ivres d'espoir, nous essayons d'avancer, tout en criant notre joie devant la « terre nouvelle ». Mais de lourdes chaînes retiennent notre esprit à ce que nous sommes, nous obligeant à reconnaître que la graine de l'indifférence produit l'abondante récolte des remords et des larmes.

Nous nous plaignons, nous pleurons, nous prions...Alors, la droiture de notre conscience nous répond calmement :- Qu'as-tu fait jusqu'à ce jour, sinon répéter ce que tu as fait pendant des siècles ? Tu

hais quand on te persécute, tu réagis quand on te jette des pierres, tu t'empresses de te défendre quand on te critique... Tu ne démontres pas la moindre compréhension, tu n'aides pas, tu n'aimes pas.

Tentés par l'idée de nous enfuir, nous contemplons le plan infini qui se déploie devant nos yeux, nous invitant à la belle aventure au seuil de l'éternité, et dans un dernier effort pour nous débarrasser de nos propres œuvres, nous nous exclamons aussi :

- Pourtant, je suis libre à présent...Et la conscience, divine et irrépréhensible, nous réplique avec la sérénité

imperturbable du sage en captivité :- Tu es en liberté, mais tu ne peux te fuir à toi-même...

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L'attitude du guide spirituel

Sous notre regard attentif, le guide spirituel du groupe se mit à exercer ses fonctions de superviseur, il commença par les explications suivantes :

- Mes frères, enrichissons notre vie de bénédiction. La mort est un simple changement de conditions extérieures, préparez-vous, donc, de votre mieux pour franchir son seuil avec la lumière nécessaire. L'incarnation terrestre est un cours d'illumination et d'ascension. La joie et la douleur, le contentement et la satisfaction, l'abondance et la pénurie offrent à notre âme la possibilité de nous améliorer. Notre problème fondamental n'est pas tant de croire ou de ne pas croire. Face aux situations difficiles de l'expérience humaine, il est essentiel que nous appliquions les principes de la foi, comme si nous cherchions à faire fuir les ténèbres. D'ailleurs, à quoi peut bien servir la confiance en la Providence divine si nous ne tirons pas profit des dons de la clairvoyance céleste qui a placé notre esprit en condition d'apprentissage pour notre propre bonheur ? Par conséquent, tout ce que tu feras pour le bien, pendant ton passage transitoire sur la terre, est important pour l'éternité. Si le Père suprême n'attendait de nous que l'encens de l'adoration, que signifierait cet atelier grandiose qu'est le monde ? Ne serait-ce donc que pour satisfaire une poignée de croyants oisifs que le soleil et la lune brilleraient, que les étoiles scintilleraient, que les fontaines couleraient, que les arbres seraient fructueux, et que le vent soufflerait ? Comment Dieu, ce créateur infatigable, pourrait-il ériger un temple aussi somptueux rien que pour que les enfants de la terre s'y reposent indéfiniment sans objectif de progrès ? Il est donc essentiel de rénover notre entendement en nous élevant spirituellement à l'immortalité victorieuse. Vous avez des outils précieux pour réaliser cette construction sublime. Ce sont « les obstacles, les épreuves et les luttes ». Si vous les utilisez pour le bien, vous serez, bientôt, maîtres de plus grandes opportunités en termes d'illumination. Promis à la glorieuse destinée de coopérateurs de l'Éternel, il faut que tu comprennes l'importance de la vie sur la surface du globe, tout comme il est important pour l'élève d'avoir une juste appréciation de l'école qui le prépare et l'édifie. La souffrance dans le monde est, par conséquent, un appel à l'ascension. Sans elle, il serait difficile d'éveiller les consciences à la réalité supérieure. La douleur, cette piqûre bénéfique, nous empêche de nous jeter dans le précipice du mal. Tout le long du chemin, elle nous aide à avancer sans cesse, en nous corrigeant si nécessaire pour la bonne réussite du plan rédempteur. Cherchons, donc, à profiter de ses bénédictions rénovatrices en pratiquant la fraternité au fil de notre pérégrination bénie vers l'avant. Le sombre passé ne nous intéresse pas. Recevons la lumière compatissante du présent, cultivons les qualités sanctifiantes de notre sanctuaire intérieur en nous transformant en tabernacles vivants de la volonté auguste et de la miséricorde de l'Éternel. Par conséquent, mes amis, aidons-nous les uns les autres, cherchons la vérité et le bien en répondant aux exigences de l'amour chrétien. Sans cette démarche personnelle de transformation, pour mieux comprendre et appliquer les enseignements du Christ, on ne peut s'attendre à voir naître un monde meilleur, des paysages heureux ou le bonheur à l'infini...

A ce stade, le conseiller marqua un temps d'arrêt.Avait-il terminé sa conférence ? Nous ne le savions pas au juste.Il avait l'air prêt à reprendre le fil de son bel exposé, quand un homme s'approcha du

petit groupe de collègues incarnés.Il me parut enclin à s'exprimer avec amour, joie et gratitude. Aurait-il compris les

propos de notre guide spirituel qui, en fin de compte, était là pour nous orienter, nous diriger,

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nous montrer la voie. Loin de là ! Le frère cité prit l'attitude d'un consultant tourmenté. Au mépris de tout ce qui avait été dit jusque-là, il lui demanda :

- Maître, que me dites-vous des biens qui m'ont été dérobés ? Le vol dont j'ai été victime représente beaucoup pour moi. Je ne dois pas oublier l'avenir... Les avocats de mes parents semblent avoir obtenu gain de cause... Dois-je m'attendre à un quelconque soutien ?

Troublé, je remarquai que le mentor spirituel ne répondait pas. Il eut une expression paternelle sur son visage serein et sur le même ton de voix, il fit le commentaire suivant :

- À ce sujet, mon ami, je pense qu'il serait plus opportun de déposer une plainte à la police. Tournez-vous vers la section des objets trouvés...Peu après, il demanda la bénédiction de Jésus pour tout le monde, et s'éloigna du médium pour nous rejoindre sur le plan spirituel.

Pris d'effarement, je fis référence à l'incompréhension du groupe qui avait été l'objet de notre visite.

Loin d'être embarrassé, le généreux mentor me fit remarquer :- Ne nous affligeons pas. Je connais ce frère depuis longtemps. Il y a environ deux

mille huit cents ans, il était membre d'une association d'enseignements secrets à proximité du temple de Zeus à Olympie, tandis que j'exerçais les fonctions d'un humble instructeur spirituel. La première fois que je me matérialisai dans le cercle d'études qu'il fréquentait pour expliquer la symbolique des mystères orphiques afin de les adapter à la lumière divine, il se leva au milieu de l'assemblée pour me demander de l'aider à retrouver des bijoux perdus.

- Oh ! ajouta-t-il sur un ton sarcastique, il y a presque trois millénaires de cela, et cet homme est toujours à la recherche d'objets ?!

Le guide me tapota l'épaule paternellement, et ajouta avec compassion :- Voilà tout, mon cher. Mais nous continuons notre tâche pour le bien de tous. Vingt-

huit siècles représentent la totalité de mon noble concours. Il s'agit d'un problème que nous pouvons nous-mêmes résoudre... Depuis combien de millénaires, Jésus fait-il tout ce qu'il peut pour nous aider en dépit de notre résistance et de notre insensibilité ?!...

Il me caressa la tête et conclut à ces mots :- N'est-ce pas ?À mon tour, j'eus un sourire de dépit et je me tus.

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Hommes prodiges

Dès qu'il vit que le Seigneur était à la recherche de coopérateurs pour réaliser son ministère rédempteur, André, un disciple serviable, se rendit un jour chez Pierre avec trois compagnons qui voulaient aussi se porter candidats à cette divine entreprise.

Jésus les accueillit avec sérénité et douceur, tandis que l'apôtre présentait les nouveaux arrivants avec un enthousiasme empreint de naïveté.

- Celui-ci, Maître, fit-il en prenant le bras du plus âgé, c'est Jacob, le fils d'Eliakim, le gardien de chèvres qui a de magnifiques visions du monde occulte. Il a déjà vu les démons flageller les hommes impurs, et quand il se rendit à Jérusalem lors de son dernier pèlerinage au Temple, il vit les flammes du feu céleste sur les pains d'oblation. Il a également vu parmi les prêtres, les Esprits d'ancêtres glorieux surprenant les sublimes révélations de l'invisible.

Comme l'Ami divin restait silencieux, attentif à ses propos, le disciple souligna :- Cet excellent compagnon pourrait nous aider dans nos travaux, me semble-t-il.Jésus posa, alors, un regard profond sur le candidat et esquissa un geste interrogateur à

Jacob. Un peu gêné par cette attitude silencieuse, celui-ci déclara :- Oui... c'est la vérité... Je vois ce qui est gardé secret et j'aspire à recevoir les leçons

de la nouvelle école. Cependant, je crains l'opinion publique. Je travaille chez Priscus Bitinius, le chef romain, où je reçois un bon salaire. S'ils apprennent que je fréquente vos réunions, il est fort probable qu'ils m'expulsent... Je perdrai mes gages et ma famille souffrira peut-être de la faim...

Un grand silence se fit tout autour d'eux. Jésus restait impassible. Ses lèvres portaient un léger sourire pratiquement imperceptible.

Comme André souhaitait que ses amis intègrent le groupe apostolique, il indiqua ensuite, un juif d'un âge moyen qui révélait dans son regard une brillante intelligence :

- Lui, Seigneur, c'est Menahem, fils d'Adod, l'orfèvre. Ses capacités d'écoute sont différentes des nôtres et il fait des rêves miraculeux. Il entend les vok du ciel qui annoncent l'avenir avec précision, et pendant son sommeil, il reçoit des avertissements étonnants. Grâce à ces facultés, il a déjà découvert les bijoux de Pomponne Fabrine, quand les illustres Romains visitaient Césarée. Ses qualités de devin furent utilisées à d'innombrables reprises avec succès. En passant par Jérusalem, d'illustres religieux lui rendirent visite pour mettre à l'épreuve ses étranges facultés. Il parvint à lire les papyrus qui se trouvaient à distance et transmit des messages d'une grande authenticité émanant d'illustres défunts de notre race.

Après un bref intervalle, il souligna :- Ne serait-il pas pour nous un précieux collaborateur ?Le Christ fixa son regard lucide sur Menahem qui lui expliqua :- Oui, réellement j'entends les voix du ciel et je résous, grâce à mes rêves, divers

problèmes pour lesquels je suis consulté. Je désirerais adhérer à la nouvelle foi, mais de nombreux engagements me retiennent. Je ne pourrai pas participer assidûment... Mon beau-père Ephraïm, le marchand de parfums, est très riche et il est prêt à se retirer tout comme mes proches qui se reposent déjà. Je suis donc l'héritier de sa grande fortune et je sais qu'il serait scandalisé si j'adhérais à la croyance rénovatrice... de ce fait, je devrais être prudent... Je ne peux perdre cet énorme legs...

Comprenant le sentiment étrange qu'il suscitait, il s'empressa d'ajouter :

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- Même si je pouvais me défaire de biens aussi précieux, je devrais malgré tout prendre soin de ma femme et de mes enfants...

À nouveau, le silence envahit la pièce. Devant le Messie, qui ne s'était pas encore manifesté de façon directe, le pêcheur empressé lui présenta son troisième ami :

- Maître, voici Moab, fils de Josué, le cultivateur. C'est un prodige en Ecritures saintes. Tous les scribes le regardent d'un air envieux et désabusé. Son don d'écrire avec une incroyable facilité sur tous les sujets, qui intéressent le peuple élu, l'a rendu célèbre. Des hommes importants d'Israël lui formulent différentes énigmes afférentes à la Loi et aux prophètes, dont il triomphe systématiquement en les résolvant... Parfois, il lui arrive d'écrire dans des langues étrangères. Certains disent que l'esprit de Jéhovah en personne plane sur lui...

L'apôtre se tut et, malgré l'atmosphère pesante qui s'abattit sur la salle, le scribe miraculeux s'expliqua :

- Effectivement, j'écris dans de mystérieuses circonstances. Une lumière semblable à du feu descend du firmament sur mes mains et je remplis des rouleaux énormes avec des instructions et des descriptions que je ne saurais comprendre moi-même... Je souhaite suivre les principes du royaume céleste, ici même, en Galilée. Cependant, je ne peux pas trop me compromettre. Dans la ville sainte, je suis lié à un grand révolutionnaire qui m'a promis des fonctions politiques importantes dès que nous aurons assassiné le procurateur et éliminé quelques patriciens influents. Je veux profiter de mes facultés pour participer à la restauration de nos droits... Je vais conquérir une bonne position, de l'or, la célébrité, être mis en avant... Pour autant, je ne peux accepter trop de responsabilités...

Le silence se fit encore plus pesant.Mais André était soucieux de voir ces nouveaux éléments prendre part au collège

galiléen, il demanda donc au Christ :- Maître, ne cherches-tu pas des associés pour collaborer au service rédempteur ?

Accepteras-tu nos amis ?Mais ce fut avec une sérénité complaisante que Jésus lui fit :- Non, André ! Que nos frères continuent leur chemin en paix. Pour l'instant, leur

parcours est différent du nôtre. Le premier souhaite vivre sa situation lucrative, le second attend un héritage d'or, d'argent et de pierres précieuses, quant au troisième, il chasse la gloire éphémère du pouvoir humain !...

- Seigneur, considéra le frère de Pierre, il faut se rappeler que l'un d'eux « voit », l'autre « entend » et le dernier « écrit », miraculeusement...

- Oui, fit Jésus pour conclure cet entretien, des hommes prodigieux ont toujours existé dans le monde, porteurs de merveilleux dons qu'ils gâchent de manière irréfléchie, mais je cherche ceux qui, au-dessus d'eux, désirent mettre à exécution la volonté de Notre Père.

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Billet à Jésus

Seigneur Jésus, à l'heure où la joie de Noël allume de nouvelles lumières dans les foyers en fête, je retourne à la vieille Palestine et je revois en imagination le paysage de ta venue...

Rome étendait ses frontières au Nil, à l'Euphrate, au Rhin, à la Tamise, au Danube, à la Mer Morte, au lac de Génésareth, aux sables du Sahara. César « pacifiait et protégeait » les habitants des régions les plus lointaines en subornant la sympathie des princes régionaux. Tous les dieux indigènes se soumettaient à Jupiter, le seigneur de l'Olympe, dont les aigles dominateurs étaient les émissaires flottant au vent en haut des galères pleines de maîtres et d'esclaves.

Te souviens-tu, Seigneur, que l'empereur Auguste, le divin, fit réaliser une statistique à grande échelle ? Entouré d'assesseurs intelligents, Octave intensifia la centralisation du monde romain en réorganisant l'administration des services publics. Les circonscriptions censitaires en Judée se remplirent de fonctionnaires exigeants. Les familles, les propriétés, les industries furent enregistrées. Joseph et Marie aussi se déplacèrent avec les autres pour se plier à ces décisions. La sensibilité Israélite pouvait rester distante du culte rendu à César en résistant à l'adulation exprimée sur le passage des triomphateurs baignés de la pourpre ensanglantée, mais l'expérience judaïque, faite de sueur et de larmes, n'échappa pas à l'obéissance de l'autorité politique. Les auberges étaient pleines, il n'y avait plus de place.

De ce fait, l'étoile glorieuse, qui marqua ton arrivée, ne brilla pas sur les temples ni sur les résidences somptueuses. Seule la mangeoire simple t'offrit un peu de confort et un abri. Les hommes et les femmes faisaient des statistiques minutieuses sur les biens et les intérêts. Si le gouvernement impérial décrétait le recensement pour réajuster la censure et les tributs, les gouvernés de la province alignaient des mesures en imposant des modifications au cadre de vie commun pour se soustraire d'une certaine manière à ces exigences. On échangeait des chèvres et des chameaux, des terres et des maisons, de petites propriétés agricoles et de petites industries.

Y avait-il de la place pour la méditation dans les prophéties ? Pour accomplir le devoir religieux, ne suffisait-il pas de comparaître aux cérémonies du Temple de Jérusalem pour offrir les sacrifices prescrits et se prosterner devant l'offrande sacrée au son des trompettes ? Il était plus raisonnable de trouver le meilleur moyen de tromper les réquisitions du Romain dominateur. La fraction du peuple élu, qui s'agglomérait dans la ville de David, lisait les textes sacrés, récitait les psaumes et se référait précipitamment aux livres de la sagesse. Cependant, la majorité ne considérait pas que ce fût un péché que de tuer le temps en disputes et en conversations interminables ou de tromper son prochain en toute élégance.

Par conséquent, Seigneur, qui aurait passé quelques minutes à peine à défendre la protection de Marie et de Joseph ? Ils avaient la sincérité de ceux qui marchent avec toi, parlaient des visites des anges, des voix du ciel, tandis que le monde palestinien restait fanatiquement absorbé par les biens immédiats. Ils commentaient avec passion les listes et les informations allusives aux troupeaux et aux propriétés agricoles. Aux récits du rêve de Joseph ou de l'expérience de Zacharie, ils préféraient les nouvelles afférentes à la production de farine ou au revenu des vergers...

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Malgré tout, pour livrer à l'humanité le divin message dont tu t'es fait le dépositaire fidèle, tu ne fus pas blessé par l'indifférence. Tu entamas ton apostolat de bénédictions éternelles dans une humble mangeoire. L'Évangile inaugura la première page vivante de la nouvelle révélation dans une simple étable. La nature fut la première étape dans ta bataille multiséculaire de la lumière contre les ténèbres.

Et tandis que tu poursuis patiemment ta conquête de l'esprit du monde, les hommes ne cessent de faire d'innombrables statistiques...

Aux recensements d'Octave suivirent ceux de Tibère, après Tibère, il y eut les dénombrements d'autres dominateurs. Une fois que le pouvoir romain fut fragmenté, d'autres organisations autoritaires apparurent non moins tyranniques. Les services censitaires se développèrent de toute part.

Les nations modernes ne font rien d'autre que d'étendre leur pouvoir en améliorant leurs statistiques.

Dans l'ancienne Judée, ils firent l'inventaire des moutons et des juments, des chameaux et des bœufs. De nos jours, Jésus, les recensements sont encore plus importants. Avec le perfectionnement de la guerre, le recensement est essentiel aux décisions administratives. Avant le carnage, on rassemble des statistiques relatives aux stocks de canons, de chars et de navires, d'avions, de mitrailleuses et de fusils. On calcule le nombre d'hommes disponibles pour préparer les massacres, ensuite, on note le nombre de blessés et de mutilés. Cela, avant que le sang soit versé, parce qu'après, l'inventaire des grandes et des petites affaires est peut-être même plus actif. Il y a les courses à l'armement et aux banques, la valorisation et la dévalorisation des biens mobiliers et immobiliers, le change officiel et le marché noir, la concurrence loyale et déloyale, le marché légal et clandestin, tout cela conformément aux statistiques préalables qui sont à l'origine de mesures administratives et régissent les mécanismes d'échange.

Nous savons que tu ne condamnes pas l'acte de compter. Tu nous as même conseillé que nul ne doit risquer la moindre construction avant d'avoir fait rigoureusement ses comptes pour que l'œuvre ne reste pas inachevée. Pourtant, nous sommes agacés par tant de recensements sur la mort, car en vérité, la demeure des hommes qu'est la terre n'a jamais été aussi riche et aussi pauvre, aussi étincelante de splendeurs et aussi profondément plongée dans les ténèbres, aussi heureuse et aussi malheureuse qu'à ce jour.

Nous désirons, Maître, incorporer les édifications de la foi, les services de l'espoir, les valeurs de la charité, néanmoins, nous sommes encore si peu à nous intéresser aux rêves révélateurs et aux voix du ciel. Malgré cela, nous savons que, fanatisés par les statistiques des expressions périssables, les hommes examinent les graphiques d'un regard inquiet. D'ailleurs, amers et tristes, alors qu'ils se meuvent entre les tableaux et les chiffres, ils élèvent leur cœur au ciel torturé par la soif d'infini...

Peut-être, Seigneur, pourrais-tu revenir consolider ta gloire, comme il y a presque vingt siècles ?! Malheureusement, nous n'oserions te le demander. De toute part, les gens négocient des biens transitoires pour améliorer l'inventaire de leurs acquisitions extérieures. Les gouvernements votent des budgets et prélèvent des tributs. Les croyants posent précipitamment leurs yeux sur ton Évangile rédempteur et répètent des formules verbales comme les Juifs dans le passé rabâchaient la Loi sans la digérer. Il était presque certain qu'il n'y aurait pas de place pour toi parmi les créatures. Nous ne souhaitons pas que tu sois amené à renaître dans l'étable pour travailler au bord de l'eau, prêcher chez les gens et sur les barques empruntées pour finalement mourir flagellé sur la croix. Nous travaillerons pour que ta gloire brille entre les hommes, pour que ta lumière se fasse dans les consciences, parce qu'en vérité, Seigneur, à quoi servirait ton retour si la statistique des choses sacrées n'offre pas la moindre garantie d'une victoire prochaine ? Comment insister pour que tu reviennes auprès des hommes, s'il n'y a pas encore de place pour que tu naisses, travailles et meures ?

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Francisco Cándido Xavier (2 avril 1910 - 30 juin 2002),

Francisco Cándido Xavier (2 avril 1910 - 30 juin 2002), alias Chico Xavier, est le médium brésilien le plus célèbre2 et le plus prolifique du XXesiècle. Sous l'influence des « Esprits », il produisit plus de quatre cent livres de sagesse et de spiritualité, dont une centaine édités dans plusieurs langues. Il popularisa grandement la doctrine spirite au Brésil. Chico Xavier reçu d'innombrables hommages tant du peuple que des organismes publics3. En 1981, le Brésil proposa officiellement Chico Xavier comme candidat au Prix Nobel de la paix. En 2000, il fut élu le « Minéro du XXe siècle », à la suite d'un sondage auprès de la population de l'état fédéré brésilien où il résidait4. Après sa mort, les députés de l'assemblée nationale brésilienne ont officiellement reconnu son rôle dans le développement spirituel du pays5.

EnfanceFrancisco Cándido Xavier est né le 2 avril 1910 dans la municipalité de Pedro

Leopoldo, dans l'État du Minas Gerais (Brésil). La famille compte neuf enfants, ses parents, tous deux analphabètes, sont vendeurs de billets de loterie pour son père et blanchisseuse pour sa mère. Il raconte que c'est après avoir perdu sa mère, à l'âge de cinq ans, qu'il commence à entendre des voix. Il travaille dès neuf ans, comme tisserand, tout en continuant l'école primaire. À douze ans, il rédige en classe une rédaction remarquable et explique à sa maîtresse que ce texte lui a été dicté par un Esprit qui se tenait près de lui. À la suite de la guérison de l'une de ses sœurs qui souffrait d'obsession, Chico ainsi que toute sa famille adhère aux théories du spiritisme.

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Centre spirite 'Luis Gonzala', à pedro leopoldo, en 2008

Chico Xavier étudie la doctrine spirite et fonde le centre spirite « Luiz Gonzaga », le 21 juin 1927. Il s'investit dans son activité de médium et développe ses capacités en psychographie. Il affirme voir, en 1931. son « mentor » spirituel sous la forme d'un Esprit prénommé Emmanuel. Guidé par cet être invisible, Chico publie son premier livre en juillet 1932 : Le Parnasse d'oulre-tombë1, recueil de 60 poèmes attribués à neuf poètes brésiliens, quatre portugais et un anonyme, tous disparus. Cet ouvrage de haute poésie, produit par un modeste caissier, qui le signe du nom d'auteurs décédés provoque l'étonnement général. Le journal O Globo, de Rio dépêche l'un de ses rédacteurs, non spirite, assister pendant plusieurs semaines aux réunions du groupe spirite du centre Luiz Gonzaga. Il s'ensuit une série de reportages qui popularisent le spiritisme au Brésil.

Une vie de médium

À partir de sa première publication, Chico Xavier ne cesse d'écrire des poèmes, des romans, des recueils de pensées, des ouvrages de morale ou des traités de technique spirite. Bon nombre de ces publications deviennent des succès de librairie, dont la plus vendue reste Nosso Lar, la vie dans le monde spirituel, diffusée à plus de 1,3 million d'exemplaires . Beaucoup sont traduites en anglais, français et espagnol. La totalité des droits d'auteur reviennent à des œuvres de charité, Chico ne vivant que de son maigre salaire d'employé au ministère de l'agriculture. À partir de 1957, Chico Xavier s'installe àUberabaqui devient un lieu de rassemblement pour les spirites du monde entier. Il y décède le 30 juin 2002, sans jamais varier d'explications à propos de l'origine de sa production littéraire phénoménale. Sous son impulsion, le Brésil est devenu la patrie d'adoption du spiritisme : il y compterait 20 millions de sympathisants dont 2,3 millions de pratiquants, ce qui en ferait la troisième religion du pays.

De son vivant, Chico Xavier fut le citoyen d'honneur de plus d'une centaine de villes, dont Sâo Paulo. En 1980, un gigantesque mouvement national se constitua afin qu'il obtienne le Prix Nobel de la paix, l'année suivante. Dans tous les États du Brésil des comités de soutien se formèrent, des centaines de municipalités, des Assemblées législatives de la plupart des États, des parlementaires de Brasilia, dont Tancredo Neves alors Président du Parti Populaire au Sénat, appuyèrent sa candidature .En 1981, plus de 10 millions de Brésiliens signèrent une pétition en faveur de l'attribution de la prestigieuse distinction à Chico Xavier. La même

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année, le député José Freitas Nobre transmit lui-même au comité de Stockholm un dossier constitué de plus de 100 kg de documents, afin d'appuyer la candidature du médium . Chico Xavier ne reçut pas le prix Nobel, mais devint une figure emblématique du Brésil. Aujourd'hui, des dizaines de villes au Brésil possèdent une rue Chico-Xavier . La vie de ce médium a servi de base au film "Chico Xavier" produit par Columbia Pictures en 2010.

Principaux livres produits par Chico Xavier

Chico fut un écrivain très prolifique : 451 livres lui sont attribués, dont 39 édités après sa mortâ. Comme tous les médiums, Chico Xavier ne prétendait pas être l'auteur des livres, mais uniquement l'instrument utilisé par les esprits pour se manifester et transmettre leurs enseignements. C'est la raison pour laquelle, le nom d'un Esprit est associé à chaque livre.

Listes des ouvrages en brésilien à suivre

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Xavier Candido Franscisco437 Livres

1. ...E O Amor Continua Alv. Esp. Diversos 1983

2. A Caminho Da Luz Feb Emmanuel 1938

3. À Luz Da Oração Clarim Esp. Diversos 1969

4. A Morte É Simples Mudança Madras Flávio Mussa Tavares 2005

5. A Ponte Fergs Emmanuel 1983

6. A Semente De Mostarda Geem Emmanuel 1990

7. A Terra E O Semeador Ide Emmanuel 1975

8. A Verdade Responde Ideal Emmanuel/André Luiz 1990

9. A Vida Conta Ceu Maria Dolores 1980

10. A Vida Escreve Feb Hilário Silva 1960

11. A Vida Fala I Feb Neio Lucio 1973

12. A Vida Fala Ii Feb Neio Lucio 1973

13. A Vida Fala Iii Feb Neio Lucio 1973

14. A Volta Ide Esp. Diversos 1993

15. Abençoa Sempre Geem Esp. Diversos 1993

16. Abençoando Nosso Brasil Pinti Esp. Diversos 2007

17. Abrigo Ide Emmanuel 1986

18. Ação E Caminho Ideal Emmanuel/André Luiz 1987

19. Ação E Reação Feb André Luiz 1957

20. Ação, Vida E Luz Ceu Esp. Diversos 1991

21. Aceitação E Vida Uem Margarida Soares 1989

22. Adeus Solidão Geem Esp. Diversos 1982

23. Agência De Notícias Geem Jair Presente 1986

24. Agenda Cristã Feb André Luiz 1948

25. Agenda De Luz Ideal Esp. Diversos 1998

26. Agora É O Tempo Ideal Emmanuel 1984

27. Algo Mais Ideal Emmanuel 1980

28. Alma Do Povo Ceu Cornélio Pires 1996

29. Alma E Coração Pens Emmanuel 1969

30. Alma E Luz Ide Emmanuel 1990

31. Alma E Vida Ceu Maria Dolores 1984

32. Almas Em Desfile Feb Hilário Silva 1961

33. Alvorada Cristã Feb Neio Lucio 1948

34. Alvorada Do Reino Ideal Emmanuel 1988

35. Amanhece Geem Esp. Diversos 1976

36. Amigo Ceu Emmanuel 1979

37. Amizade Ideal Meimei 1977

38. Amor E Luz Ideal Emmanuel/Esp. Diversos 1977

39. Amor E Saudade Ideal Esp. Diversos 1985

40. Amor E Verdade Ideal Esp. Diversos 2000

41. Amor Sem Adeus Ide Walter Perrone 1978

42. Anotações Da Mediunidade Ceu Emmanuel 1995

43. Ante O Futuro Ideal Esp. Diversos 1990

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44. Antenas De Luz Ide Laurinho 1983

45. Antologia Da Amizade Ceu Emmanuel 1995

46. Antologia Da Caridade Ideal Esp. Diversos 1995

47. Antologia Da Criança Ideal Esp. Diversos 1979

48. Antologia Da Esperança Ceu Esp. Diversos 1995

49. Antologia Da Espiritualidade Feb Maria Dolores 1971

50. Antologia Da Juventude Geem Esp. Diversos 1995

51. Antologia Da Paz Geem Esp. Diversos 1994

52. Antologia Do Caminho Ideal Esp. Diversos 1996

53. Antologia Dos Imortais Feb Esp. Diversos 1963

54. Antologia Mediúnica Do Natal Feb Esp. Diversos 1967

Aos Probl. Do Mundo Feesp Esp. Diversos 1972

55. Apelos Cristãos Uem Bezerra De Menezes 1986

56. Apostilas Da Vida Ide André Luiz 1986

57. As Palavras Cantam Ceu Carlos Augusto 1993

58. Assembléia De Luz Geem Esp. Diversos 1988

59. Assim Vencerás Ideal Emmanuel 1978

60. Assuntos Da Vida E Da Morte Geem Esp. Diversos 1991

61. Astronautas No Além Geem Esp. Diversos 1974

62. Atenção Ide Emmanuel 1981

63. Através Do Tempo Lake Esp. Diversos 1972

64. Augusto Vive Geem Augusto Cezar Netto 1981

65. Aulas Da Vida Ideal Esp. Diversos 1981

66. Auta De Souza Ide Auta De Souza 1976

67. Ave, Cristo! Feb Emmanuel 1953

68. Bastão De Arrimo Uem Willian 1984

69. Baú De Casos Ideal Cornélio Pires 1977

70. Bazar Da Vida Geem Jair Presente 1985

71. Bênção De Paz Geem Emmanuel 1971

72. Bênçãos De Amor Ceu Esp. Diversos 1993

73. Bezerra, Chico E Você Geem Bezerra De Menezes 1973

74. Boa Nova Feb Humberto De Campos 1941

75. Brasil, Coração Do Mundo,

76. Brilhe Vossa Luz Ide Esp. Diversos 1987

77. Busca E Acharás Ideal Emmanuel/André Luiz 1976

78. Calendário Espírita Feesp Esp. Diversos 1974

79. Calma Geem Emmanuel 1979

80. Caminho Espírita Cec Esp. Diversos 1967

81. Caminho Iluminado Ceu Emmanuel 1998

82. Caminho, Verdade E Vida Feb Emmanuel 1949

83. Caminhos Da Fé Ideal Cornélio Pires 1997

84. Caminhos Da Vida Ceu Cornélio Pires 1997

85. Caminhos De Volta Geem Esp. Diversos 1975

86. Caminhos Do Amor Ceu Maria Dolores 1983

87. Caminhos Ceu Emmanuel 1981

88. Canais Da Vida Ceu Emmanuel 1986

89. Canteiro De Idéias Ideal Esp. Diversos 1999

90. Caravana De Amor Ide Esp. Diversos 1985

91. Caridade Ide Esp. Diversos 1978

92. Carmelo Grisi, Ele Mesmo Geem Carmelo Grisi 1991

93. Cartas De Uma Morta Lake Maria João De Deus 1935

94. Cartas Do Coração Lake Esp. Diversos 1952

95. Cartas Do Evangelho Lake Casimiro Cunha 1941

96. Cartas E Crônicas Feb Irmão X 1966

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97. Cartilha Da Natureza Feb Casimiro Cunha 1944

98. Cartilha Do Bem Feb Meimei 1962

99. Ceifa De Luz Feb Emmanuel 1979

100. Centelhas Ide Emmanuel 1992

101. Chão De Flores Ideal Esp. Diversos 1975

102. Chico Xavier - Dos Hippies

103. Chico Xavier – Mandato

104. Chico Xavier Em Goiânia Geem Emmanuel 1977105. Chico Xavier Inédito:

106. Chico Xavier Pede Licença Geem Esp. Diversos 1972

107. Chico Xavier, Uma Vida

108. Cidade No Além Ide André Luiz/Lucius 1983

109. Cinquenta Anos Depois Feb Emmanuel 1940

110. Claramente Vivos Ide Esp. Diversos 1979

111. Coisas Deste Mundo Clarim Cornélio Pires 1977

112. Coletânea Do Além Feesp Esp. Diversos 1945

113. Comandos Do Amor Ide Esp. Diversos 1988

114. Compaixão Ide Emmanuel 1993

115. Companheiro Ide Emmanuel 1977

116. Confia E Segue Geem Emmanuel 1984

117. Confia E Serve Ide Esp. Diversos 1989

118. Construção Do Amor Ceu Emmanuel 1988

119. Continuidade Ideal Esp. Diversos 1990

120. Contos Desta E Doutra Vida Feb Irmão X 1964

121. Contos E Apólogos Feb Irmão X 1958

122. Conversa Firme Cec Cornélio Pires 1975

123. Convivência Ceu Emmanuel 1984

124. Coração E Vida Ideal Maria Dolores 1978

125. Corações Renovados Ideal Esp. Diversos 1988

126. Coragem Cec Esp. Diversos 1971

127. Correio Do Além Ceu Esp. Diversos 1983

128. Correio Fraterno Feb Esp. Diversos 1970

129. Crer E Agir Ideal Emmanuel/Irmão José 1986

130. Crianças No Além Geem Marcos 1977

131. Crônicas De Além-Túmulo Feb Humberto De Campos 1936

132. Cura Geem Esp. Diversos 1988

Da Vida Geem Roberto Muszkat 1984

133. Dádivas De Amor Ideal Maria Dolores 1990

134. Dádivas Espirituais Ide Esp. Diversos 1994

De Amor Ide Emmanuel 1992

De Amor Uem Esp. Diversos 1993

135. Degraus Da Vida Ceu Cornélio Pires 1996

136. Desobsessão Feb André Luiz 1964

137. Deus Aguarda Geem Meimei 1980

138. Deus Sempre Ideal Emmanuel 1976

139. Diálogo Dos Vivos Geem Esp. Diversos 1974

140. Diário De Bênçãos Ideal Cristiane 1983

141. Dicionário Da Alma Feb Esp. Diversos 1964

142. Dinheiro Ide Emmanuel 1986

143. Do Outro Lado Da Vida Inovação Paulo Henrique Bresciane 2006

144. Doações De Amor Geem Esp. Diversos 1992

Dos Benefícios Ger Bezerra De Menezes 1991

145. Doutrina De Luz Geem Emmanuel 1990

146. Doutrina E Aplicação Ceu Esp. Diversos 1989

147. Doutrina E Vida Ceu Esp. Diversos 1987

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148. Doutrina Escola Ide Esp. Diversos 1996

149. E A Vida Continua... Feb André Luiz 1968

E Trabalho Ideal Esp. Diversos 1988

150. Educandário De Luz Ideal Esp. Diversos 1985

151. Elenco De Familiares Ideal Esp. Diversos 1995

152. Eles Voltaram Ide Esp. Diversos 1981

153. Emmanuel Feb Emmanuel 1938

154. Encontro De Paz Cec Esp. Diversos 1973

155. Encontro Marcado Feb Emmanuel 1967

156. Encontros No Tempo Ide Esp. Diversos 1979

157. Endereços Da Paz Ceu André Luiz 1982

158. Entender Conversando Ide Emmanuel 1984

159. Entes Queridos Geem Esp. Diversos 1982

160. Entre A Terra E O Céu Feb André Luiz 1954

161. Entre Duas Vidas Cec Esp. Diversos 1974

162. Entre Irmãos De Outras Terras Feb Esp. Diversos 1966

163. Entrevistas Ide Emmanuel 1971

164. Enxugando Lágrimas Ide Esp. Diversos 1978

165. Escada De Luz Ceu Esp. Diversos 1999

166. Escola No Além Ideal Cláudia P. Galasse 1988

167. Escrínio De Luz Clarim Emmanuel 1973

168. Escultores De Almas Ceu Esp. Diversos 1987

169. Espera Servindo Geem Emmanuel 1985

170. Esperança E Alegria Ceu Esp. Diversos 1987

171. Esperança E Luz Ceu Esp. Diversos 1993

172. Esperança E Vida Ideal Esp. Diversos 1985

173. Estamos No Além Ide Esp. Diversos 1983

174. Estamos Vivos Ide Esp. Diversos 1993

175. Estante Da Vida Feb Irmão X 1969

176. Estradas E Destinos Ceu Esp. Diversos 1987

177. Estrelas No Chão Geem Esp. Diversos 1987

178. Estude E Viva Feb Emmanuel/André Luiz 1965

179. Evangelho Em Casa Feb Meimei 1960

180. Evolução Em Dois Mundos Feb André Luiz 1959

181. Excursão De Paz Ceu Esp. Diversos 1990

182. Falando À Terra Feb Esp. Diversos 1951

183. Falou E Disse Geem Augusto Cezar Netto 1978

184. Família Ceu Esp. Diversos 1981

185. Fé Ideal Esp. Diversos 1984

186. Fé, Paz E Amor Geem Emmanuel 1989

187. Feliz Regresso Ideal Esp. Diversos 1981

188. Festa De Paz Geem Esp. Diversos 1986

189. Filhos Voltando Geem Esp. Diversos 1982

190. Flores De Outono Lake Jésus Gonçalves 1984

191. Fonte De Paz Ide Esp. Diversos 1987

192. Fonte Viva Feb Emmanuel 1956

193. Fotos Da Vida Geem Augusto Cezar Netto 1989

194. Fulgor No Entardecer Uem Esp. Diversos 1991

195. Gabriel Ide Gabriel 1982

196. Gaveta De Esperança Ide Laurinho 1980

197. Gotas De Luz Feb Casimiro Cunha 1953

198. Gotas De Paz Ceu Emmanuel 1993

199. Gratidão E Paz Ide Esp. Diversos 1988

200. Há Dois Mil Anos Feb Emmanuel 1939

117

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201. Harmonização Geem Emmanuel 1990

202. História De Maricota Feb Casimiro Cunha 1947

203. Histórias E Anotações Ceu Irmão X 1989

204. Hoje Ceu Emmanuel 1984

205. Hora Certa Geem Emmanuel 1987

206. Horas De Luz Ide Esp. Diversos 1984

207. Humorismo No Além Ideal Esp. Diversos 1984

208. Ideal Espírita Cec Esp. Diversos 1963

209. Idéias E Ilustrações Feb Esp. Diversos 1970

210. Indicações Do Caminho Geem Carlos Augusto 1995

211. Indulgência Ide Emmanuel 1989

212. Inspiração Geem Emmanuel 1979

213. Instruções Psicofônicas Feb Esp. Diversos 1956

214. Instrumentos Do Tempo Geem Emmanuel 1974

215. Intercâmbio Do Bem Geem Esp. Diversos 1987

216. Intervalos Clarim Emmanuel 1981

217. Irmã Vera Cruz Ide Vera Cruz 1980

218. Irmão Ideal Emmanuel 1980

219. Irmãos Unidos Geem Esp. Diversos 1988

220. Janela Para A Vida Fergs Esp. Diversos 1979

221. Jardim Da Infância Feb João De Deus 1947

222. Jesus Em Nós Geem Emmanuel 1987

223. Jesus No Lar Feb Neio Lucio 1950

224. Jóia Ceu Emmanuel 1985

225. Jovens No Além Geem Esp. Diversos 1975

226. Juca Lambisca Feb Casimiro Cunha 1961

227. Juntos Venceremos Ideal Esp. Diversos 1985

228. Justiça Divina Feb Emmanuel 1962

229. Lar - Oficina, Esperança

230. Lázaro Redivivo Feb Irmão X 1945

231. Lealdade Ide Maurício G. Henrique 1982

232. Leis De Amor Feesp Emmanuel 1963

233. Levantar E Seguir Geem Emmanuel 1992

234. Libertação Feb André Luiz 1949

235. Linha Duzentos Ceu Emmanuel 1981

236. Lira Imortal Lake Esp. Diversos 1938

237. Livro Da Esperança Cec Emmanuel 1964

238. Livro De Respostas Ceu Emmanuel 1980

239. Loja De Alegria Geem Jair Presente 1985

240. Luz Acima Feb Irmão X 1948

241. Luz Bendita Ideal Emmanuel/Esp. Diversos 1977

242. Luz E Vida Geem Emmanuel 1986

243. Luz No Caminho Ceu Emmanuel 1992

244. Luz No Lar Feb Esp. Diversos 1968

245. Mãe Clarim Esp. Diversos 1971

246. Mais Luz Geem Batuíra 1970

247. Mais Perto Geem Emmanuel 1983

248. Mais Vida Ceu Esp. Diversos 1982

249. Mãos Marcadas Ide Esp. Diversos 1972

250. Mãos Unidas Ide Emmanuel 1972

251. Marcas Do Caminho Ideal Esp. Diversos 1979

252. Maria Dolores Ideal Maria Dolores 1977

253. Material De Construção Ideal Emmanuel 1983

254. Mecanismos Da Mediunidade Feb André Luiz 1960

118

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255. Mediunidade E Sintonia Ceu Emmanuel 1986

256. Mensagem Do Pequeno Morto Feb Neio Lucio 1947

257. Mensagens De Inês De Castro Geem Inês De Castro 2006

258. Mensagens Que Confortam Tt Ricardo Tadeu 1983

259. Mentores E Seareiros Ideal Esp. Diversos 1993

260. Migalha Uem Emmanuel 1993

261. Missão Cumprida Pinti Esp. Diversos 2004

262. Missionários Da Luz Feb André Luiz 1945

263. Momento Ceu Emmanuel 1994

264. Momentos De Encontro Ceu Rosângela 1984

265. Momentos De Ouro Geem Esp. Diversos 1977

266. Momentos De Paz Ideal Emmanuel 1980

267. Monte Acima Geem Emmanuel 1985

268. Moradias De Luz Ceu Esp. Diversos 1990

269. Na Era Do Espírito Geem Esp. Diversos 1973

270. Na Hora Do Testemunho Paidéia Esp. Diversos 1978

271. Não Publicadas 1933-1954 Madras Esp. Diversos 2004

272. Nascer E Renascer Geem Emmanuel 1982

273. Natal De Sabina Geem Francisca Clotilde 1972

274. Neste Instante Geem Emmanuel 1985

275. Ninguém Morre Ide Esp. Diversos 1983

276. No Mundo Maior Feb André Luiz 1947

277. No Portal Da Luz Cec Emmanuel 1967

278. Nos Domínios Da Mediunidade Feb André Luiz 1955

279. Nós Ceu Emmanuel 1985

280. Nosso Lar Feb André Luiz 1944

281. Nosso Livro Lake Esp. Diversos 1950

282. Notas Do Mais Além Ide Esp. Diversos 1995

283. Notícias Do Além Ide Esp. Diversos 1980

284. Novamente Em Casa Geem Esp. Diversos 1984

285. Novas Mensagens Feb Humberto De Campos 1940

286. Novo Mundo Ideal Emmanuel 1992

287. Novos Horizontes Ideal Esp. Diversos 1996

288. O Caminho Oculto Feb Veneranda 1947

289. O Consolador Feb Emmanuel 1941

290. O Esperanto Como Revelação Ide Francisco V. Lorenz 1976

291. O Espírito Da Verdade Feb Esp. Diversos 1962

292. O Espírito De Cornélio Pires Feb Cornélio Pires 1965

293. O Essencial Ceu Emmanuel 1986

294. O Evangelho De Chico Xavier   Didier Emmanuel    2000

295. O Ligeirinho Geem Emmanuel 1993

296. Obreiros Da Vida Eterna Feb André Luiz 1946

297. Oferta De Amigo Ide Cornélio Pires 1996

298. Opinião Espírita Cec Emmanuel/André Luiz 1963

299. Orvalho De Luz Cec Esp. Diversos 1969

300. Os Dois Maiores Amores Geem Esp. Diversos 1983

301. Os Filhos Do Grande Rei Feb Veneranda 1947

302. Os Mensageiros Feb André Luiz 1944

303. Paciência Ceu Emmanuel 1983

304. Páginas De Fé Ideal Esp. Diversos 1988

305. Páginas Do Coração Lake Irmã Candoca 1951

306. Pai Nosso  Feb Meimei 1952

307. Palavras De Chico Xavier Ide Emmanuel 1995

308. Palavras De Coragem Ideal Esp. Diversos 1987

119

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309. Palavras De Emmanuel Feb Emmanuel 1954

310. Palavras De Vida Eterna Cec Emmanuel 1964

311. Palavras Do Coração Ceu Meimei 1982

312. Palavras Do Infinito Lake Esp. Diversos 1936

313. Palco Iluminado Geem Jair Presente 1988

314. Pão Nosso Feb Emmanuel 1950

315. Parnaso De Além Túmulo Feb Esp. Diversos 1932

316. Pássaros Humanos Geem Esp. Diversos 1994

317. Passos Da Vida Cec Esp. Diversos 1969

Pátria Do Evangelho Feb Humberto De Campos 1938

318. Paulo E Estevão Feb Emmanuel 1942

319. Paz E Alegria Geem Esp. Diversos 1981

320. Paz E Amor Ceu Cornélio Pires 1996

321. Paz E Libertação Ceu Esp. Diversos 1996

322. Paz E Renovação Cec Esp. Diversos 1970

323. Paz Ceu Emmanuel 1983

324. Pedaços Da Vida Ideal Cornélio Pires 1997

325. Pensamento E Vida Feb Emmanuel 1958

326. Perante Jesus Ideal Emmanuel 1990

327. Perdão E Vida Ceu Esp. Diversos 1999

328. Pérolas De Luz Ceu Emmanuel 1992

329. Pérolas Do Além Feb Emmanuel 1952

330. Pétalas Da Primavera Uem Esp. Diversos 1990

331. Pétalas Da Vida Ceu Cornélio Pires 1997

332. Pinga Fogo (1ª Entrevista) Edicel Esp. Diversos 1971

333. Pingo De Luz Ideal Carlos Augusto 1995

334. Plantão Da Paz Geem Emmanuel 1988

335. Plantão De Respostas Ceu Pinga Fogo Ii 1995

336. Poetas Redivivos Feb Esp. Diversos 1969

337. Ponto De Encontro Geem Jair Presente 1986

338. Pontos E Contos Feb Irmão X 1951

339. Porto De Alegria Ide Esp. Diversos 1990

340. Praça Da Amizade Ceu Esp. Diversos 1982

341. Preito De Amor Geem Esp. Diversos 1993

342. Presença De Laurinho Ide Laurinho 1983

343. Presença De Luz Geem Augusto Cezar Netto 1984

344. Pronto Socorro Ceu Emmanuel 1980Psicografias Ainda 

345. Quando Se Pretende Falar

346. Queda E Ascensão Da Casa

347. Quem São Ide Esp. Diversos 1982

348. Rapidinho Geem Jair Presente 1989

349. Realmente Pinti Esp. Diversos 2004

350. Recados Da Vida Maior Geem Esp. Diversos 1995

351. Recados Da Vida Geem Esp. Diversos 1983

352. Recados Do Além Ideal Emmanuel 1978

353. Recanto De Paz Fmg Esp. Diversos 1976

354. Reconforto Geem Emmanuel 1986

355. Reencontros Ide Esp. Diversos 1982

356. Refúgio Ideal Emmanuel 1989

357. Relatos Da Vida Ceu Irmão X 1988

358. Relicário De Luz Feb Esp. Diversos 1962

359. Religião Dos Espíritos Feb Emmanuel 1960

360. Renascimento Espiritual Ideal Esp. Diversos 1995

361. Renúncia Feb Emmanuel 1942

120

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362. Reportagens De Além-Túmulo Feb Humberto De Campos 1943

363. Resgate E Amor Geem Tiaminho 1987

364. Respostas Da Vida Ideal André Luiz 1975

365. Retornaram Contando Ide Esp. Diversos 1984

366. Retratos Da Vida Cec Cornélio Pires 1974

367. Revelação Geem Jair Presente 1993

368. Rosas Com Amor Ide Esp. Diversos 1973

369. Roseiral De Luz Uem Esp. Diversos 1988

370. Roteiro Feb Emmanuel 1952

371. Rumo Certo Feb Emmanuel 1971

372. Rumos Da Vida Ceu Esp. Diversos 1981

373. Saudação Do Natal Ceu Esp. Diversos 1996

374. Seara De Fé Ide Esp. Diversos 1982

375. Seara Dos Médiuns Feb Emmanuel 1961

376. Segue-Me Clarim Emmanuel 1973

377. Seguindo Juntos Geem Esp. Diversos 1982

378. Semeador Em Tempos Novos Geem Emmanuel 1989

379. Semente Ide Emmanuel 1993

380. Sementeira De Luz Vinha De Luz Neio Lucio 2006

381. Sementes De Luz Ideal Esp. Diversos 1987

382. Senda Para Deus Ceu Esp. Diversos 1997

383. Sentinelas Da Alma Ideal Meimei 1982

384. Sentinelas Da Luz Ceu Esp. Diversos 1990

385. Servidores No Além Ide Esp. Diversos 1989

386. Sexo E Destino Feb André Luiz 1963

387. Sinais De Rumo Geem Esp. Diversos 1980

388. Sinal Verde Cec André Luiz 1971

389. Sínteses Doutrinárias Ceu Esp. Diversos 1995

390. Somente Amor Ideal Maria Dolores/Meimei 1978

391. Somos Seis Geem Esp. Diversos 1976

392. Sorrir E Pensar Ide Esp. Diversos 1984

393. Taça De Luz Feesp Esp. Diversos 1972

394. Tão Fácil Ceu Esp. Diversos 1985

395. Temas Da Vida Ceu Esp. Diversos 1987

396. Tempo De Luz Fmg Esp. Diversos 1979

397. Tempo E Amor Ide Esp. Diversos 1984

398. Tempo E Nós Ideal Emmanuel/André Luiz 1993

399. Tende Bom Ânimo Ideal Esp. Diversos 1987

400. Tesouro De Alegria Ide Esp. Diversos 1993

401. Timbolão Feb Casimiro Cunha 1962

402. Tintino... O Espetácilo Continua Geem Francisca Clotilde 1976

403. Tocando O Barco Ideal Emmanuel 1984

404. Toques Da Vida Ideal Cornélio Pires 1997

405. Traços De Chico Xavier Ceu Esp. Diversos 1997

406. Trevo De Idéias Geem Emmanuel 1987

407. Trilha De Luz Ide Emmanuel 1990

408. Trovadores Do Além Feb Esp. Diversos 1965

409. Trovas Da Vida Ceu Cornélio Pires 1999

410. Trovas Do Coração Ide Cornélio Pires 1997

411. Trovas Do Mais Além Cec Esp. Diversos 1971

412. Trovas Do Outro Mundo Feb Esp. Diversos 1968

413. Tudo Virá A Seu Tempo Madras Elcio Tumenas 2003

414. Uma Vida De Amor E Caridade Fv Esp. Diversos 1992

415. União Em Jesus Ceu Esp. Diversos 1994

121

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416. Urgência Geem Emmanuel 1980

417. Venceram  Geem Esp. Diversos 1983

418. Vereda De Luz Geem Esp. Diversos 1990

419. Viagens Sem Adeus Ideal Claudio R.A . Nascimento 1999

420. Viajaram Mais Cedo Geem Esp. Diversos 1985

421. Viajor Ide Emmanuel 1985

422. Viajores Da Luz Geem Esp. Diversos 1981

423. Vida Além Da Vida Ceu Lineu De Paula Leão Jr. 1988

424. Vida E Caminho Geem Esp. Diversos 1994

425. Vida E Sexo Feb Emmanuel 1970

426. Vida Em Vida Ideal Esp. Diversos 1980

427. Vida No Além Geem Esp. Diversos 1980

428. Vida Nossa Vida Geem Esp. Diversos 1983

429. Vinha De Luz Feb Emmanuel 1952

430. Visão Nova Ide Esp. Diversos 1987

431. Vitória Ide Esp. Diversos 1987

432. Vivendo Sempre Ideal Esp. Diversos 1981

433. Viveremos Sempre Ideal Esp. Diversos 1994

434. Volta Bocage Feb Manuel M.B.Du Bocage 1947

435. Voltei Feb Irmão Jacob 1949

436. Vozes Da Outra Margem Ide Esp. Diversos 1987

437. Vozes Do Grande Além Feb Esp. Diversos 1957

Compilação Geem (Março De 2007) Com Utilização A Partir Do Livro 413 Da Relação Fecfas (Fraternidade Espírita Cristã Francisco De Assis, De Belo Horizonte-Mg)

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