edition du jeudi 31 mars 2011

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LES ANNONCES DE LA SEINE EUROPE Cour Européenne des Droits de l’Homme Crucifix dans les salles de classe des écoles publiques italiennes .....2 Liberté de religion : sommaires de jurisprudence ...............................5 AU FIL DES PAGES...............................................................8 SOCIÉTÉ Conseil Economique, Social et Environnemental Un projet de société par Jean-Paul Delevoye ......................................9 Rénover notre modèle social par François Fillon ............................10 VIE DU DROIT XX ème anniversaire de l’Association Européenne des Barreaux des Cours Suprêmes ......................................12 PASSATION DE POUVOIR Thierry Orosco succède à Denis Favier à la tête du GIGN..13 VIE DES CABINETS DAVOCATS Cabinet Huglo Lepage & Associés ........................................15 JURISPRUDENCE Loi organique relative au Défenseur des droits Conseil constitutionnel - 29 mars 2011 - décision n°2011-626 DC....16 AU JOURNAL OFFICIEL ................................................18 ANNONCES LEGALES ...................................................19 ADJUDICATIONS................................................................20 DÉCORATION Patrick Sannino, Officier de la Légion d’Honneur...........32 J OURNAL OFFICIEL D’ANNONCES LÉGALES - I NFORMATIONS GÉNÉRALES, J UDICIAIRES ET TECHNIQUES bi-hebdomadaire habilité pour les départements de Paris, Yvelines, Hauts-de-Seine, Seine-Saint-Denis et Val de Marne 12, rue Notre-Dame des Victoires - 75002 PARIS - Téléphone : 01 42 60 36 35 - Télécopie : 01 47 03 92 15 Internet : www.annoncesdelaseine.fr - E-mail : [email protected] FONDATEUR EN 1919 : RENÉ TANCRÈDE - DIRECTEUR : JEAN-RENÉ TANCRÈDE Jeudi 31 mars 2011 - Numéro 21 - 1,15 Euro - 92 e année L a Grande Chambre, formation la plus importante de la Cour Européenne des Droits de l’Homme, a conclu à la non-violation de la Convention dans l’affaire Lautsi et autres c. Italie par un arrêt définitif rendu le18 mars 2011. Cette affaire concernait la présence de crucifix dans les salles de classe des écoles publiques en Italie. Selon les requérants, elle était incompatible avec l’obligation de l’Etat de respecter, dans l’exercice des fonctions qu’il assume dans le domaine de l’éducation et de l’enseignement, le droit des parents d’assurer à leurs enfants une éducation et un enseignement conformes à leurs convictions religieuses et philosophiques. Un arrêt de Chambre de la Cour de Strasbourg en date du 3 novembre 2009, avait jugé, à l'unanimité des 7 juges, que la présence de crucifix était incompatible avec l’obligation de l’Etat de res- pecter ce droit des parents. Face au tollé suscité par cette décision, le gouvernement ita- lien, conformément à l’article 43 de la Convention, a alors demandé le renvoi de l’affaire devant la Grande Chambre, considérant que la présence de crucifix dans les salles de classe des écoles publiques correspond aujourd’hui à une tra- dition qu’il est important de perpétuer : c’est « le fruit de l'évo- lution historique de l'Italie, ce qui lui donne une connotation non seulement culturelle mais aussi identitaire ». Par 15 voix contre 2, la Grande Chambre de la Cour de Strasbourg présidée par Jean-Paul Costa, est revenue sur la décision de 2009 et a conclu à la non violation de l’article 2 du Protocole numéro 1 de la Convention. Elle a estimé que la présence de symboles religieux dans les salles de classes relève de la marge d’appréciation de l’Etat qui doit concilier l’exercice des fonctions qu’il assume dans le domaine de l’éducation et de l’enseignement, et le respect du droit des parents d’assurer cette éducation et cet enseigne- ment conformément à leurs convictions religieuses et philo- sophiques. La Cour a en outre souligné qu’un crucifix apposé sur un mur est un symbole essentiellement passif, dont l’influence sur les élèves ne peut être comparée à un discours didactique ou à la participation à des activités religieuses. Si la présence du crucifix dans les salles de classe des écoles publiques donne à la religion majoritaire du pays une visibilité prépon- dérante dans l'environnement scolaire, « cela ne suffit toute- fois pas en soi pour caractériser une démarche d'endoctrine- ment de la part de l'Etat défendeur ». Cette décision, très attendue en Italie, a aussi fait l’objet d’un large débat dans tout l’espace européen. En effet, trente-trois membres du Parlement européen agissant collectivement, dix organisations non-gouvernementales, et dix Etats parties à la Convention, se sont vus accorder l’autorisation d’intervenir dans la procédure écrite. Les gouvernements de l’Arménie, de la Bulgarie, de Chypre, de la Fédération de Russie, de la Grèce, de la Lituanie, de Malte et de la République de Saint-Marin ont en outre été autorisés à intervenir collectivement dans la pro- cédure orale lors de l’audience de Grande Chambre qui s’est déroulée à Strasbourg le 30 juin 2010. Cette décision a été accueillie avec « une grande satisfac- tion » par l’Italie : le Ministre des Affaires Etrangères, Franco Frattini, a estimé dans un communiqué, que « c'est le senti- ment populaire de l'Europe qui a vaincu, parce que la décision (de la CEDH) se fait l'interprète avant tout de la voix des citoyens qui défendent leurs propres valeurs et leur propre identité ». Il a en outre exprimé le souhait que « l'Europe affronte avec le même courage le thème de la tolérance et de la liberté religieuse ». Jean-René Tancrède © Council of Europe La liberté de religion devant la Cour Européenne des Droits de l’Homme

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  • LES ANNONCES DE LA SEINE

    EUROPECour Europenne des Droits de lHomme Crucifix dans les salles de classe des coles publiques italiennes .....2Libert de religion : sommaires de jurisprudence ...............................5AU FIL DES PAGES...............................................................8SOCITConseil Economique, Social et EnvironnementalUn projet de socit par Jean-Paul Delevoye ......................................9Rnover notre modle social par Franois Fillon ............................10VIE DU DROITXXme anniversaire de lAssociation Europennedes Barreaux des Cours Suprmes ......................................12PASSATION DE POUVOIRThierry Orosco succde Denis Favier la tte du GIGN..13VIE DES CABINETS DAVOCATSCabinet Huglo Lepage & Associs ........................................15JURISPRUDENCELoi organique relative au Dfenseur des droitsConseil constitutionnel - 29 mars 2011 - dcision n2011-626 DC....16AU JOURNAL OFFICIEL ................................................18ANNONCES LEGALES ...................................................19ADJUDICATIONS................................................................20DCORATIONPatrick Sannino, Officier de la Lgion dHonneur...........32

    JOURNAL OFFICIEL DANNONCES LGALES - INFORMATIONS GNRALES, JUDICIAIRES ET TECHNIQUESbi-hebdomadaire habilit pour les dpartements de Paris, Yvelines, Hauts-de-Seine, Seine-Saint-Denis et Val de Marne

    12, rue Notre-Dame des Victoires - 75002 PARIS - Tlphone : 01 42 60 36 35 - Tlcopie : 01 47 03 92 15Internet : www.annoncesdelaseine.fr - E-mail : [email protected]

    FONDATEUR EN 1919 : REN TANCRDE - DIRECTEUR : JEAN-REN TANCRDE

    Jeudi 31 mars 2011 - Numro 21 - 1,15 Euro - 92e anne

    La Grande Chambre, formation la plus importante dela Cour Europenne des Droits de lHomme, aconclu la non-violation de la Convention danslaffaire Lautsi et autres c. Italie par un arrt dfinitifrendu le18 mars 2011.Cette affaire concernait la prsence de crucifix dans les sallesde classe des coles publiques en Italie. Selon les requrants,elle tait incompatible avec lobligation de lEtat de respecter,dans lexercice des fonctions quil assume dans le domaine delducation et de lenseignement, le droit des parents dassurer leurs enfants une ducation et un enseignement conformes leurs convictions religieuses et philosophiques. Un arrt deChambre de la Cour de Strasbourg en date du 3 novembre2009, avait jug, l'unanimit des 7 juges, que la prsence decrucifix tait incompatible avec lobligation de lEtat de res-pecter ce droit des parents.Face au toll suscit par cette dcision, le gouvernement ita-lien, conformment larticle 43 de la Convention, a alorsdemand le renvoi de laffaire devant la Grande Chambre,considrant que la prsence de crucifix dans les salles declasse des coles publiques correspond aujourdhui une tra-dition quil est important de perptuer : cest le fruit de l'vo-lution historique de l'Italie, ce qui lui donne une connotationnon seulement culturelle mais aussi identitaire .Par 15 voix contre 2, la Grande Chambre de la Cour deStrasbourg prside par Jean-Paul Costa, est revenue sur ladcision de 2009 et a conclu la non violation de larticle 2du Protocole numro 1 de la Convention.Elle a estim que la prsence de symboles religieux dans lessalles de classes relve de la marge dapprciation de lEtat quidoit concilier lexercice des fonctions quil assume dans ledomaine de lducation et de lenseignement, et le respect du

    droit des parents dassurer cette ducation et cet enseigne-ment conformment leurs convictions religieuses et philo-sophiques.La Cour a en outre soulign quun crucifix appos sur unmur est un symbole essentiellement passif, dont linfluencesur les lves ne peut tre compare un discours didactiqueou la participation des activits religieuses. Si la prsencedu crucifix dans les salles de classe des coles publiquesdonne la religion majoritaire du pays une visibilit prpon-drante dans l'environnement scolaire, cela ne suffit toute-fois pas en soi pour caractriser une dmarche d'endoctrine-ment de la part de l'Etat dfendeur .Cette dcision, trs attendue en Italie, a aussi fait lobjet dunlarge dbat dans tout lespace europen. En effet, trente-troismembres du Parlement europen agissant collectivement, dixorganisations non-gouvernementales, et dix Etats parties laConvention, se sont vus accorder lautorisation dintervenirdans la procdure crite. Les gouvernements de lArmnie, dela Bulgarie, de Chypre, de la Fdration de Russie, de la Grce,de la Lituanie, de Malte et de la Rpublique de Saint-Marin onten outre t autoriss intervenir collectivement dans la pro-cdure orale lors de laudience de Grande Chambre qui sestdroule Strasbourg le 30 juin 2010.Cette dcision a t accueillie avec une grande satisfac-tion par lItalie : le Ministre des Affaires Etrangres, FrancoFrattini, a estim dans un communiqu, que c'est le senti-ment populaire de l'Europe qui a vaincu, parce que la dcision(de la CEDH) se fait l'interprte avant tout de la voix descitoyens qui dfendent leurs propres valeurs et leur propreidentit . Il a en outre exprim le souhait que l'Europeaffronte avec le mme courage le thme de la tolrance et de lalibert religieuse . Jean-Ren Tancrde

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    Cour Europenne des Droits de lHomme

  • 2 Les Annonces de la Seine - jeudi 31 mars 2011 - numro 21

    EuropeLES ANNONCES DE LA SEINESige social :

    12, rue Notre-Dame des Victoires - 75002 PARISR.C.S. PARIS B 572 142 677 - (1957 B 14267)

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    Directeur de la publication et de la rdaction :Jean-Ren Tancrde

    Comit de rdaction :Thierry Bernard, Avocat la Cour, Cabinet BernardsFranois-Henri Briard, Avocat au Conseil dEtatAntoine Bullier, Professeur lUniversit Paris I Panthon SorbonneMarie-Jeanne Campana, Professeur agrg des Universits de droitAndr Damien, Membre de lInstitutPhilippe Delebecque, Professeur de droit lUniversit Paris I Panthon SorbonneBertrand Favreau, Prsident de lInstitut des Droits de lHomme des Avocats Europens,ancien Btonnier de BordeauxDominique de La Garanderie, Avocate la Cour, ancien Btonnier de ParisBrigitte Gizardin, Substitut gnral la Cour dappelRgis de Gouttes, Premier avocat gnral honoraire la Cour de cassationSerge Guinchard, Professeur de Droit lUniversit Paris II Panthon-AssasFranoise Kamara, Conseiller la premire chambre de la Cour de cassationMaurice-Antoine Lafortune, Avocat gnral honoraire la Cour de cassation Bernard Lagarde, Avocat la Cour, Matre de confrence H.E.C. - EntrepreneursJean Lamarque, Professeur de droit lUniversit Paris II Panthon-AssasNolle Lenoir, Avocate la Cour, ancienne MinistrePhilippe Malaurie, Professeur mrite lUniversit Paris II Panthon-AssasPierre Masquart, Avocat la CourJean-Franois Pestureau, Expert-Comptable, Commissaire aux comptesSophie Pillard, MagistrateGrard Pluyette, Conseiller doyen la premire chambre civile de la Cour de cassationJacqueline Socquet-Clerc Lafont, Avocate la Cour, Prsidente dhonneur de lUNAPLYves Repiquet, Avocat la Cour, ancien Btonnier de ParisRen Ricol, Ancien Prsident de lIFACFrancis Teitgen, Avocat la Cour, ancien Btonnier de ParisCarol Xueref, Directrice des affaires juridiques, Groupe Essilor International

    Publicit :Lgale et judiciaire : Didier ChotardCommerciale : Frdric Bonaventura

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    Copyright 2011Les manuscrits non insrs ne sont pas rendus. Sauf dans les cas o elle est autoriseexpressment par la loi et les conventions internationales, toute reproduction, totale oupartielle du prsent numro est interdite et constituerait une contrefaon sanctionnepar les articles 425 et suivants du Code Pnal.

    Le journal Les Annonces de la Seine a t dsign comme publicateur officiel pourla priode du 1er janvier au 31 dcembre 2011, par arrts de Messieurs les Prfets :de Paris, du 23 dcembre 2010 ; des Yvelines, du 16 dcembre 2010 ; des Hauts-de-Seine, du 22 dcembre 2010 ; de la Seine-Saint-Denis, du 21 dcembre 2010 ; duVal-de-Marne, du 31 dcembre 2010 ; de toutes annonces judiciaires et lgales prescritespar le Code Civil, les Codes de Procdure Civile et de Procdure Pnale et de Commerceet les Lois spciales pour la publicit et la validit des actes de procdure ou des contratset des dcisions de justice pour les dpartements de Paris, des Yvelines, de la Seine-Saint-Denis, du Val-de-Marne ; et des Hauts-de-Seine.N.B. : Ladministration dcline toute responsabilit quant la teneur des annonces lgales.

    - Tarifs hors taxes des publicits la ligneA) Lgales :Paris : 5,34 Seine-Saint-Denis : 5,29 Yvelines : 5,09 Hauts-de-Seine : 5,34 Val-de-Marne : 5,27

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    35 avec supplments culturels95 avec supplments judiciaires et culturels

    COMPOSITION DES ANNONCES LGALESNORMES TYPOGRAPHIQUES

    Surfaces consacres aux titres, sous-titres, filets, paragraphes, alinas

    Titres : chacune des lignes constituant le titre principal de lannonce sera compose en capitales (oumajuscules grasses) ; elle sera lquivalent de deux lignes de corps 6 points Didot, soit arrondi 4,5 mm.Les blancs dinterlignes sparant les lignes de titres nexcderont pas lquivalent dune ligne de corps6 points Didot, soit 2,256 mm.Sous-titres : chacune des lignes constituant le sous-titre de lannonce sera compose en bas-de-casse(minuscules grasses) ; elle sera lquivalent dune ligne de corps 9 points Didot soit arrondi 3,40 mm. Lesblancs dinterlignes sparant les diffrentes lignes du sous-titre seront quivalents 4 points soit 1,50 mm.Filets : chaque annonce est spare de la prcdente et de la suivante par un filet 1/4 gras. Lespace blanccompris entre le filet et le dbut de lannonce sera lquivalent dune ligne de corps 6 points Didot soit2,256 mm. Le mme principe rgira le blanc situ entre la dernire ligne de lannonce et le filet sparatif.Lensemble du sous-titre est spar du titre et du corps de lannonce par des filets maigres centrs. Leblanc plac avant et aprs le filet sera gal une ligne de corps 6 points Didot, soit 2,256 mm.Paragraphes et Alinas : le blanc sparatif ncessaire afin de marquer le dbut dun paragraphe o dunalina sera lquivalent dune ligne de corps 6 points Didot, soit 2,256 mm. Ces dfinitions typographiquesont t calcules pour une composition effectue en corps 6 points Didot. Dans lventualit o lditeurretiendrait un corps suprieur, il conviendrait de respecter le rapport entre les blancs et le corps choisi.

    2010

    Crucifix dans les sallesde classe des colespubliques italiennes :Affaire Lautsi

    Principaux faits

    Les requrants sont des ressortissantsitaliens, ns respectivement en 1957,1988 et 1990. La requrante, Mme SoileLautsi, et ses deux fils, Dataico et SamiAlbertin(1), rsident en Italie. Ces derniers taientscolariss en 2001-2002 dans lcole publiqueIstituto comprensivo statale Vittorino da Feltre, Abano Terme. Un crucifix tait accroch dansles salles de classe de ltablissement.Le 22 avril 2002, au cours dune runion duconseil dcole, le mari de Mme Lautsi soulevale problme de la prsence de symbolesreligieux dans les salles de classe, du crucifix enparticulier, et posa la question de leur retrait.Suite la dcision du conseil dcole demaintenir les symboles religieux dans les sallesde classe, Mme Lautsi saisit, le 23 juillet 2002,le tribunal administratif de Vntie, dnonantnotamment une violation du principe de lacit.Le 30 octobre 2003, le ministre de lInstruction,de lUniversit et de la Recherche - qui enoctobre 2002 avait pris une directive aux termesde laquelle les responsables scolaires devaientsassurer de la prsence du crucifix dans les salles

    de classe - se constitua partie dans la procdureinitie par Mme Lautsi, dont la requte tait,selon lui, dnue de fondement puisque laprsence de crucifix dans les salles de classe descoles publiques se fondait sur deux dcretsroyaux de 1924 et 1928(2).En 2004, la Cour constitutionnelle dclara laquestion de constitutionnalit, dont lavait saisile tribunal administratif, manifestementirrecevable car les textes quelle visait - les articlespertinents des deux dcrets royaux - nepouvaient faire lobjet dun contrle deconstitutionnalit, ayant rang rglementaire etnon de loi.Le 17 mars 2005, le tribunal administratif rejetale recours de Mme Lautsi. Il conclut que lesdispositions des dcrets royaux en questiontaient encore en vigueur et que la prsence decrucifix dans les salles de classe des colespubliques ne se heurtait pas au principe delacit de lEtat, qui faisait partie du patrimoinejuridique europen et des dmocratiesoccidentales . Le tribunal estima, notamment,que le crucifix tait davantage un symbole duchristianisme en gnral que du seulcatholicisme, de sorte quil renvoyait dautresconfessions. Il considra de surcrot quilsagissait dun symbole historico-culturel, ayantune valeur identitaire pour le peuple italien,ainsi quun symbole du systme de valeursinnervant la charte constitutionnelle italienne.Saisi par Mme Lautsi, le Conseil dEtat confirma,dans un arrt du 13 avril 2006, que la prsencede crucifix dans les salles de classe des colespubliques trouvait son fondement lgal dans lesdcrets royaux de 1924 et 1928 et que, eu gard

    JURISPRUDENCE

    Cour Europenne des Droits de lHommeGrande chambre - 18 mars 2011 - requte n30814/06Affaire Lautsi et autres c. Italie

    La Cour,()57. En premier lieu, la Cour prciseque la seule question dont elle setrouve saisie est celle de lacompatibilit, eu gard auxcirconstances de la cause, de laprsence de crucifix dans les sallesde classe des coles publiquesitaliennes avec les exigences desarticles 2 du Protocole nos1 et 9 de laConvention.Ainsi, en l'espce, d'une part, ellen'est pas appele examiner laquestion de la prsence de crucifixdans d'autres lieux que les colespubliques. D'autre part, il ne luiappartient pas de se prononcer surla compatibilit de la prsence decrucifix dans les salles de classe descoles publiques avec le principe delacit tel qu'il se trouve consacr endroit italien.58. En second lieu, la Cour souligneque les partisans de la lacit sonten mesure de se prvaloir de vuesatteignant le degr de force, desrieux, de cohrence etd'importance requis pour qu'ils'agisse de convictions au sensdes articles 9 de la Convention et 2

    du Protocole n1 (arrt Campbell etCosans c. Royaume-Uni, du25 fvrier 1982, srie A n48, 36).Plus prcisment, il faut voir l des convictions philosophiques ausens de la seconde phrase del'article 2 du Protocole n1, ds lorsqu'elles mritent respect dansune socit dmocratique , nesont pas incompatibles avec ladignit de la personne et ne vontpas l'encontre du droitfondamental de l'enfant l'instruction (ibidem).

    1. Le cas de la requrante() 63. La Cour ne partage pas lathse du Gouvernement selonlaquelle l'obligation pesant sur lesEtats contractants en vertu de laseconde phrase de l'article 2 duProtocole no1 porte uniquement surle contenu des programmesscolaires, de sorte que la questionde la prsence de crucifix dans lessalles de classe des coles publiquessort de son champ d'application.Il est vrai que nombre d'affairesdans le contexte desquelles la Cours'est penche sur cette dispositionconcernaient le contenu ou la mise

    en uvre de programmes scolaires.Il n'en reste pas moins que, commela Cour l'a d'ailleurs dj mis enexergue, l'obligation des Etatscontractants de respecter lesconvictions religieuses etphilosophiques des parents ne vautpas seulement pour le contenu del'instruction et la manire de ladispenser : elle s'impose eux dans l' exercice de l'ensembledes fonctions - selon les termesde la seconde phrase de l'article 2du Protocole n1 - qu'ils assumenten matire d'ducation etd'enseignement (voiressentiellement les arrts Kjeldsen,Busk Madsen et Pedersen, prcit, 50, Valsamis c. Grce, du18 dcembre 1996, Recueil desarrts et dcisions 1996-VI, 27, etHasan et Eylem Zengin, prcit, 49, et Folger, prcit, 84). Celainclut sans nul doutel'amnagement de l'environnementscolaire lorsque le droit interneprvoit que cette fonction incombeaux autorits publiques.Or c'est dans un tel cadre ques'inscrit la prsence de crucifix dansles salles de classe des coles

  • Les Annonces de la Seine - jeudi 31 mars 2011 - numro 21 3

    Europe

    la signification quil fallait lui donner, taitcompatible avec le principe de lacit. En tantquil vhiculait des valeurs civiles caractrisantla civilisation italienne - tolrance, affirmationdes droits de la personne, autonomie de laconscience morale face lautorit, solidarit,refus de toute discrimination - le crucifix dansles salles de classes pouvait, dans uneperspective laque , avoir une fonctionhautement ducative.

    Griefs et procdure

    Invoquant les articles 2 du Protocole n1 (droit linstruction) et 9 (libert de pense, deconscience et de religion), les requrants seplaignaient de la prsence de crucifix dans lessalles de classe de lcole publique o taientscolariss Dataico et Sami Albertin.

    Invoquant larticle 14 (interdiction de la discri-mination), ils estimaient quils avaient de cefait, ds lors quils ntaient pas catholiques,subi une diffrence de traitement discrimina-toire par rapport aux parents catholiques et leurs enfants.La requte a t introduite devant la Coureuropenne des droits de lhomme le 27 juillet2006. Dans son arrt de Chambre du3 novembre 2009, la Cour a conclu la viola-tion de larticle 2 du Protocole n1 (droit lins-truction) examin conjointement avec larticle9 (libert de pense, de conscience et de reli-gion). Le 28 janvier 2010, le gouvernement ita-lien a demand le renvoi de laffaire devant laGrande chambre conformment larticle 43de la Convention (renvoi devant la Grandechambre) et le 1er mars 2010, le collge de laGrande chambre a accept cette demande.Une audience de Grande chambre a eu lieu le30 juin Strasbourg. []

    Dcision de la Cour

    Article 2 du Protocole n1Il ressort de la jurisprudence de la Cour(3) quelobligation des Etats membres du Conseil delEurope de respecter les convictions religieuseset philosophiques des parents ne vaut passeulement pour le contenu de linstruction et lamanire de la dispenser : elle simpose eux dans lexercice de lensemble des fonctions quils assument en matire dducation etdenseignement. Cela inclut lamnagement de

    publiques italiennes (voir lesarticles 118 du dcret royaln965 du 30 avril 1924, 119 dudcret royal n1297 du26 avril 1928, et 159 et 190 dudcret-loi n297 du16 avril 1994 ; paragraphes 14et 19 ci-dessus).64. D'un point de vue gnral, laCour estime que lorsquel'amnagement del'environnement scolaire relvede la comptence d'autoritspubliques, il faut voir l unefonction assume par l'Etat dansle domaine de l'ducation et del'enseignement, au sens de laseconde phrase de l'article 2 duProtocole n1.65. Il en rsulte que la dcisionrelative la prsence de crucifixdans les salles de classe descoles publiques relve desfonctions assumes par l'Etatdfendeur dans le domaine del'ducation et de l'enseignementet tombe de ce fait sous l'empirede la seconde phrase del'article 2 du Protocole n1. Onse trouve ds lors dans undomaine o entre en jeul'obligation de l'Etat de respecterle droit des parents d'assurerl'ducation et l'enseignement deleurs enfants conformment leurs convictions religieuses etphilosophiques.66. Ensuite, la Cour considreque le crucifix est avant tout unsymbole religieux. Lesjuridictions internes l'ontpareillement relev et, du reste,le Gouvernement ne le conteste

    pas. Que la symboliquereligieuse puise, ou non, lasignification du crucifix n'est pasdcisif ce stade duraisonnement.Il n'y a pas devant la Courd'lments attestant l'ventuelleinfluence que l'exposition surdes murs de salles de classed'un symbole religieux pourraitavoir sur les lves ; on nesaurait donc raisonnablementaffirmer qu'elle a ou non un effetsur de jeunes personnes, dontles convictions ne sont pasencore fixes.On peut nanmoins comprendreque la requrante puisse voirdans l'exposition d'un crucifixdans les salles de classe del'cole publique o ses enfantstaient scolariss un manque derespect par l'Etat de son droitd'assurer l'ducation etl'enseignement de ceux-ciconformment ses convictionsphilosophiques. Cependant, laperception subjective de larequrante ne saurait elleseule suffire caractriser uneviolation de l'article 2 duProtocole n1.67. Le Gouvernement expliquequant lui que la prsence decrucifix dans les salles de classedes coles publiques, qui est lefruit de l'volution historique del'Italie, ce qui lui donne uneconnotation non seulementculturelle mais aussi identitaire,correspond aujourd'hui unetradition qu'il juge important deperptuer. Il ajoute qu'au-del

    de sa signification religieuse, lecrucifix symbolise les principeset valeurs qui fondent ladmocratie et la civilisationoccidentale, sa prsence dansles salles de classe tantjustifiable ce titre.68. Selon la Cour, la dcision deperptuer ou non une traditionrelve en principe de la marged'apprciation de l'Etatdfendeur. La Cour se doitd'ailleurs de prendre en comptele fait que l'Europe estcaractrise par une grandediversit entre les Etats qui lacomposent, notamment sur leplan de l'volution culturelle ethistorique. Elle soulignetoutefois que l'vocation d'unetradition ne saurait exonrer unEtat contractant de sonobligation de respecter les droitset liberts consacrs par laConvention et ses Protocoles.Quant au point de vue duGouvernement relatif lasignification du crucifix, la Courconstate que le Conseil d'Etat etla Cour de cassation ont cetgard des positions divergenteset que la Cour constitutionnellene s'est pas prononce(paragraphes 16 et 23 ci-dessus).Or il n'appartient pas la Courde prendre position sur un dbatentre les juridictions internes.69. Il reste que les Etatscontractants jouissent d'unemarge d'apprciation lorsqu'ils'agit de concilier l'exercice desfonctions qu'ils assument dans ledomaine de l'ducation et de

    l'enseignement et le respect dudroit des parents d'assurer cetteducation et cet enseignementconformment leurs convictionsreligieuses et philosophiques(paragraphes 61-62 ci-dessus).Cela vaut pour l'amnagementde l'environnement scolairecomme pour la dfinition etl'amnagement desprogrammes (ce que la Cour adj soulign : voiressentiellement, prcits, lesarrts Kjeldsen, Busk Madsen etPedersen, 50-53, Folger, 84, et Zengin, 51-52 ;paragraphe 62 ci-dessus). LaCour se doit donc en principe derespecter les choix des Etatscontractants dans ces domaines,y compris quant la place qu'ilsdonnent la religion, dans lamesure toutefois o ces choix neconduisent pas une formed'endoctrinement (ibidem).70. La Cour en dduit enl'espce que le choix de laprsence de crucifix dans lessalles de classe des colespubliques relve en principe dela marge d'apprciation de l'Etatdfendeur. La circonstance qu'iln'y a pas de consensus europensur la question de la prsence desymboles religieux dans lescoles publiques(paragraphes 26-28 ci-dessus)conforte au demeurant cetteapproche.Cette marge d'apprciation vatoutefois de pair avec un contrleeuropen (voir, par exemple,mutatis mutandis, l'arrt Leyla

    ahin prcit, 110), la tche dela Cour consistant enl'occurrence s'assurer que lalimite mentionne auparagraphe 69 ci-dessus n'a past transgresse.71. A cet gard, il est vrai qu'enprescrivant la prsence ducrucifix dans les salles de classedes coles publiques - lequel,qu'on lui reconnaisse ou non ensus une valeur symboliquelaque, renvoie indubitablementau christianisme -, larglementation donne lareligion majoritaire du pays unevisibilit prpondrante dansl'environnement scolaire.Cela ne suffit toutefois pas en soipour caractriser une dmarched'endoctrinement de la part del'Etat dfendeur et pour tablirun manquement auxprescriptions de l'article 2 duProtocole n1.La Cour renvoie sur ce point,mutatis mutandis, ses arrtsFolger et Zengin prcits. Dansl'affaire Folger, dans laquelleelle a t amene examiner lecontenu du programme d'uncours de christianisme, religionet philosophie ( KRL ), elle aen effet retenu que le fait que ceprogramme accorde une pluslarge part la connaissance duchristianisme qu' celle desautres religions et philosophiesne saurait passer en soi pourune entorse aux principes depluralisme et d'objectivitsusceptible de s'analyser en unendoctrinement. Elle a prcis

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  • 4 Les Annonces de la Seine - jeudi 31 mars 2011 - numro 21

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    lenvironnement scolaire lorsque le droitnational prvoit que cette fonction incombeaux autorits publiques. La dcision relative la prsence de crucifix dans les salles de classedes coles publiques relevant des fonctionsassumes par lEtat italien, elle tombe souslempire de larticle 2 du Protocole n1. Cettedisposition confre lEtat lobligation derespecter, dans lexercice des fonctions quilassume dans le domaine de lducation et delenseignement, le droit des parents dassurerlducation et lenseignement de leurs enfantsconformment leurs convictions religieuseset philosophiques.Selon la Cour, sil faut voir avant tout un sym-bole religieux dans le crucifix, il ny a pas dl-ment attestant de lventuelle influence quelexposition dun symbole de cette nature surdes murs de salles de classe pourrait avoir surles lves. De plus, sil est nanmoins compr-hensible que la requrante puisse voir danslexposition dun crucifix dans les salles declasse de lcole publique o ses enfants taientscolariss un manque de respect par lEtat deson droit dassurer lducation et lenseigne-ment de ceux-ci conformment ses convic-tions philosophiques, sa perception subjectivene suffit pas caractriser une violation de lar-ticle 2 du Protocole n1.Le gouvernement italien soutenait que la pr-sence de crucifix dans les salles de classe descoles publiques correspond aujourdhui une tradition quil juge important de perp-tuer. Pour lui, au-del de sa signification reli-gieuse, le crucifix symbolise les principes et

    valeurs qui fondent la dmocratie et la civilisa-tion occidentale, sa prsence dans les salles declasse tant justifiable ce titre. Sur le premierpoint, la Cour souligne que, si la dcision deperptuer une tradition relve en principe dela marge dapprciation des Etats membres duConseil de lEurope, lvocation dune tradi-tion ne saurait les exonrer de leur obligationde respecter les droits et liberts consacrs parla Convention et ses Protocoles. Sur le secondpoint, relevant que le Conseil dEtat et la Courde cassation italiens ont des positions diver-

    gentes sur la signification du crucifix et que laCour constitutionnelle ne sest pas prononce,elle considre quil ne lui appartient pas deprendre position sur un dbat entre les juridic-tions internes.Il reste que les Etats jouissent dune margedapprciation lorsquil sagit de concilierlexercice des fonctions quils assument dans ledomaine de lducation et de lenseignement etle respect du droit des parents dassurer cetteducation et cet enseignement conformment leurs convictions religieuses et philosophiques.

    que, vu la place qu'occupe lechristianisme dans l'histoire et latradition de l'Etat dfendeur - laNorvge -, cette question relevaitde la marge d'apprciation dontjouissait celui-ci pour dfinir etamnager le programme destudes (arrt prcit, 89). Elleest parvenue une conclusionsimilaire dans le contexte ducours de culture religieuse etconnaissance morale dispensdans les coles de Turquie dontle programme accordait une pluslarge part la connaissance del'Islam, au motif que la religionmusulmane est majoritairementpratique en Turquie,nonobstant le caractre lac decet Etat (arrt Zengin prcit, 63).72. De plus, le crucifix appossur un mur est un symboleessentiellement passif, et cetaspect a de l'importance auxyeux de la Cour, eu gard enparticulier au principe deneutralit (paragraphe 60 ci-dessus). On ne sauraitnotamment lui attribuer uneinfluence sur les lvescomparable celle que peutavoir un discours didactique oula participation des activitsreligieuses (voir sur ces pointsles arrts Folger et Zenginprcits, 94 et 64,respectivement).73. La Cour observe que, dansson arrt du 3 novembre 2009,la chambre a, l'inverse, retenula thse selon laquellel'exposition de crucifix dans lessalles de classe aurait un impactnotable sur les deuxime ettroisime requrants, gs de

    onze et treize ans l'poque desfaits. Selon la chambre, dans lecontexte de l'ducationpublique, le crucifix, qu'il estimpossible de ne pas remarquerdans les salles de classe, estncessairement peru commepartie intgrante du milieuscolaire et peut ds lors treconsidr comme un signeextrieur fort au sens de ladcision Dahlab prcite (voirles paragraphes 54 et 55 del'arrt).La Grande chambre ne partagepas cette approche. Elle estimeen effet que l'on ne peut sefonder sur cette dcision enl'espce, les circonstances desdeux affaires tant tout faitdiffrentes.Elle rappelle en effet quel'affaire Dahlab concernaitl'interdiction faite uneinstitutrice de porter le foulardislamique dans le cadre de sonactivit d'enseignement,laquelle interdiction taitmotive par la ncessit deprserver les sentimentsreligieux des lves et de leursparents et d'appliquer leprincipe de neutralitconfessionnelle de l'coleconsacr en droit interne. Aprsavoir relev que les autoritsavaient dment mis en balanceles intrts en prsence, la Coura jug, au vu en particulier dubas ge des enfants dont larequrante avait la charge, quelesdites autorits n'avaient pasoutrepass leur marged'apprciation.74. En outre, les effets de lavisibilit accrue que la prsence

    de crucifix donne auchristianisme dans l'espacescolaire mritent d'tre encorerelativiss au vu des lmentssuivants. D'une part, cetteprsence n'est pas associe unenseignement obligatoire duchristianisme (voir les lmentsde droit compar exposs dansl'arrt Zengin prcit, 33).D'autre part, selon lesindications du Gouvernement,l'Italie ouvre paralllementl'espace scolaire d'autresreligions. Le Gouvernementindique ainsi notamment que leport par les lves du voileislamique et d'autres symboleset tenues vestimentaires connotation religieuse n'est pasprohib, des amnagementssont prvus pour faciliter laconciliation de la scolarisation etdes pratiques religieuses nonmajoritaires, le dbut et la fin duRamadan sont souvent fts dans les coles et unenseignement religieux facultatifpeut tre mis en place dans lestablissement pour toutesconfessions religieusesreconnues (paragraphe 39 ci-dessus). Par ailleurs, rienn'indique que les autorits semontrent intolrantes l'garddes lves adeptes d'autresreligions, non croyants outenants de convictionsphilosophiques qui ne serattachent pas une religion.De plus, les requrants neprtendent pas que la prsencedu crucifix dans les salles declasse a incit audveloppement de pratiquesd'enseignement prsentant une

    connotation proslyte, ni nesoutiennent que les deuxime ettroisime d'entre eux se sonttrouvs confronts unenseignant qui, dans l'exercicede ses fonctions, se seraitappuy tendancieusement surcette prsence.75. Enfin, la Cour observe quela requrante a conserv entierson droit, en sa qualit deparent, d'clairer et conseillerses enfants, d'exercer enverseux ses fonctions naturellesd'ducateur, et de les orienterdans une direction conforme ses propres convictionsphilosophiques (voir,notamment, prcits, les arrtsKjeldsen, Busk Madsen etPedersen et Valsamis, 54 et31 respectivement).76. Il rsulte de ce qui prcdequ'en dcidant de maintenir lescrucifix dans les salles de classede l'cole publique frquentespar les enfants de la requrante,les autorits ont agi dans leslimites de la marged'apprciation dont disposel'Etat dfendeur dans le cadrede son obligation de respecter,dans l'exercice des fonctionsqu'il assume dans le domainede l'ducation et del'enseignement, le droit desparents d'assurer cetteducation et cet enseignementconformment leursconvictions religieuses etphilosophiques.77. La Cour en dduit qu'il n'ypas eu violation de l'article 2 duProtocole n1 dans le chef de larequrante. Elle considre parailleurs qu'aucune question

    distincte ne se pose en l'espcesur le terrain de l'article 9 de laConvention.

    2. Le cas des deuxime ettroisime requrants78. La Cour considre que, luecomme il se doit la lumire del'article 9 de la Convention et dela seconde phrase de l'article 2du Protocole n1, la premirephrase de cette dispositiongarantit aux lves un droit l'instruction dans le respect deleur droit de croire ou de ne pascroire. Elle conoit enconsquence que des lvestenants de la lacit voient dansla prsence de crucifix dans lessalles de classe de l'colepublique o ils sont scolarissun manquement aux droitsqu'ils tirent de ces dispositions.Elle estime cependant que, pourles raisons indiques dans lecadre de l'examen du cas de larequrante, il n'y a pas euviolation de l'article 2 duProtocole n1 dans le chef desdeuxime et troisimerequrants. Elle considre parailleurs qu'aucune questiondistincte ne se pose en l'espcesur le terrain de l'article 9 de laConvention. ()

    Par ces motifs, la Cour,1. Dit, par quinze voix contredeux, qu'il n'y a pas eu violationde l'article 2 du Protocole n1 etqu'aucune question distincte nese pose sur le terrain del'article 9 de la Convention ;2. Dit, l'unanimit, qu'il n'y apas lieu d'examiner le grief tirde l'article 14 de la Convention.

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    La Cour se doit donc en principe de respecterles choix des Etats dans ces domaines, y comprisquant la place quils donnent la religion, dansla mesure toutefois o ces choix ne conduisentpas une forme dendoctrinement. Ainsi lechoix de mettre des crucifix dans les salles declasses relve en principe de la margedapprciation de lEtat, dautant plus enlabsence de consensus europen(4). Cette margedapprciation va toutefois de pair avec uncontrle par la Cour, qui il appartient desassurer que ce choix ne relve pas dune formedendoctrinement.

    A cet gard, elle constate quen prescrivant laprsence du crucifix dans les salles de classedes coles publiques, la rglementation ita-lienne donne la religion majoritaire du paysune visibilit prpondrante dans lenvironne-ment scolaire. Elle estime toutefois que cela nesuffit pas pour caractriser une dmarchedendoctrinement de la part de lItalie et pourtablir un manquement aux prescriptions delarticle 2 du Protocole n1. Elle rappelle sur cepoint avoir dj jug(5) quau regard de la place

    prpondrante dune religion dans lhistoiredun pays, le fait quune part plus large que lesautres religions lui soit accorde dans les pro-grammes scolaires ne sanalyse pas en soi enune telle dmarche. Elle souligne ensuitequun crucifix appos sur un mur est un sym-bole essentiellement passif, dont linfluencesur les lves ne peut tre compare un dis-cours didactique ou la participation desactivits religieuses.La Cour estime en outre que les effets de lavisibilit accrue que la prsence de crucifixdonne au christianisme dans lespace scolairemritent dtre encore relativiss au vu deslments suivants : cette prsence nest pasassocie un enseignement obligatoire duchristianisme ; selon le Gouvernement, lespacescolaire en Italie est ouvert dautres religions(port des symboles et tenues connotationreligieuse non prohib chez les lves, prise encompte des pratiques religieuses nonmajoritaires, possibilit de mettre en place unenseignement religieux facultatif pour toutesles religions reconnues, fin du Ramadan souventfte dans les coles...) ; rien nindique que lesautorits se montrent intolrantes lgard deslves adeptes dautres religions, non croyantsou tenants de convictions philosophiques quine se rattachent pas une religion. Elle noteensuite que les requrants ne prtendent pasque la prsence du crucifix en classe a suscitdes pratiques denseignement connotationproslyte, ou que Dataico et Sami Albertin ontt confronts un enseignant qui se seraittendancieusement appuy sur cette prsence.Enfin, la Cour observe que Mme Lautsi, en tantque parent, a conserv entier son droit dclaireret conseiller ses enfants et de les orienter dansune direction conforme ses propresconvictions philosophiques.La Cour conclut quen dcidant de maintenirles crucifix dans les salles de classe de lcolepublique frquentes par les enfants de larequrante, les autorits ont agi dans leslimites de la latitude dont dispose lItalie dansle cadre de son obligation de respecter, danslexercice des fonctions quelle assume dans le

    domaine de lducation et de lenseignement,le droit des parents dassurer cette instructionconformment leurs convictions religieuseset philosophiques ; par consquent, il ny paseu de violation de larticle 2 du Protocole n1concernant la requrante. La Cour considreen outre quaucune question distincte ne sepose sur le terrain de larticle 9.La Cour parvient la mme conclusionsagissant du cas des deuxime et troisimerequrants.

    Article 14Dans son arrt de Chambre la Cour a estim,eu gard sa conclusion de violation de larticle 2du Protocole n1 combin avec larticle 9, quilny avait pas lieu dexaminer laffaire sous langlede larticle 14.Aprs avoir rappel que larticle 14 na pasdexistence indpendante puisquil vautuniquement pour la jouissance des droits etliberts garantis par les autres dispositions dela Convention et de ses Protocoles, la Grandechambre juge qu supposer que les requrantsentendent dnoncer une discrimination dansla jouissance des droits garantis par les articles 9et 2 du Protocole n1, elle ne voit l aucunequestion distincte de celles quelle a djtranches sur le terrain de larticle 2 du Protocolen1. Il ny a donc pas lieu dexaminer cette partiede la requte. []

    Notes :1 - Les deuxime et troisime requrants : dans sa requte, larequrante indique agir en son nom ainsi quau nom de ses enfantsalors mineurs, Dataico et Sami Albertin. Devenus entre-temps majeurs,ces derniers ont confirm vouloir demeurer requrants.2 - Article 118 du dcret royal n965 du 30 avril 1924 (rglement intrieurdes tablissements dinstruction moyenne) et article 119 du dcretroyal n1297 du 26 avril 1928 (approbation du rglement gnral desservices denseignement primaire).3 - Arrts Kjeldsen, Busk Madsen et Pedersen c. Danemark du7 dcembre 1976 ( 50), Valsamis c. Grce du 18 dcembre 1996 ( 27),Hasan et Eylem Zengin c. Turquie du 9 octobre 2007 ( 49) et Folgeret autres c. Norvge, arrt de Grande chambre du 29 juin 2007 ( 84).4 - Voir 26 28 de larrt.5 - Folger et autres c. Norvge, arrt de Grande chambre du 29 juin 2007 ;arrt de Chambre Hasan et Eylem Zengin c. Turquie du 9 octobre 2007.

    Libert de religionJurisprudence de la Cour Europenne

    Lobligation de prter un serment religieuxBuscarini et autres c. Saint-Marin(requte n24645/94)Arrt de Grande Chambre 18.02.1999Elus au Parlement de Saint-Marin en 1993, lesrequrants dnonaient lobligation qui leuravait t faite de prter serment sur les Evangiles,sous peine de dchance de leur mandat deparlementaire, ce qui dmontrait, daprs eux,que lexercice dun droit politique fondamentaltait subordonn, lpoque des faits, laprofession publique dune religion dtermine.La Cour a conclu la violation de larticle 9 dela Convention europenne des droits delhomme (libert de pense, de conscience etde religion). Elle a dit en particulier quelobligation de prter serment ntait pas

    ncessaire dans une socit dmocratique la poursuite de lun des buts noncs larticle9 2, jugeant contradictoire de soumettrelexercice dun mandat qui vise reprsenter ausein du parlement diffrentes visions de lasocit la condition dadhrer au pralable une vision dtermine du monde.

    Alexandridis c. Grce (n19516/06)Arrt de chambre 21.02.2008M. Alexandridis fut nomm avocat auprs dutribunal de premire instance dAthnes etprta serment en novembre 2005, conditionrequise pour lexercice de ses fonctions. Il all-guait avoir t oblig de rvler, lors de la pro-cdure de prestation de serment profession-nel, quil ntait pas chrtien orthodoxe afin depouvoir prononcer une dclaration solen-nelle, puisquil nexistait quun texte standardpour la prestation de serment. La Cour a conclu la violation de larticle 9,estimant que cette obligation avait portatteinte la libert de M. Alexandridis de ne

    pas tre contraint de manifester ses convic-tions religieuses.

    Lindication obligatoire de lappartenance religieusesur les documents officielsSinan Isik c. Turquie (n21924/05)Arrt de chambre 02.02.2010M. Iik, de confession alvie, demanda en vainen justice en 2004 le remplacement de lamention islam par le terme alvi sur sacarte didentit. Jusquen 2006, ce documentindiquait en effet obligatoirement la religion deson dtenteur ; depuis 2006, il est possible dedemander que la rubrique religion soit laissevide. Sa demande fut rejete au motif que leterme alvi ne dsignait quun sous-groupeau sein de lislam et que ctait donc juste titreque la carte didentit indiquait islam .La Cour a conclu la violation de larticle 9, nonen raison du refus dindiquer la confession durequrant (alvie) sur sa carte didentit maisdun problme tenant la mention mme -quelle soit obligatoire ou facultative - de la

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  • religion sur la carte didentit. Elle a soulignque la libert de manifester sa religioncomportait un aspect ngatif, savoir le droitde ne pas tre oblig de rvler sa religion.

    Wasmuth c. Allemagne (n12884/03)Arrt de chambre 17.02.11 Laffaire concernait le systme allemand deprlvement de limpt cultuel. M. Wasmuthdemanda en vain aux autorits de lui dlivrerune fiche dimposition qui nindiquait pas sanon-appartenance une socit religieusehabilite lever limpt cultuel. Il allguaitdevant la Cour que cette information obligatoiresur sa fiche dimposition emportait notammentviolation des articles 9 et 8 (droit au respect dela vie prive et familiale).

    La Cour a conclu la non-violation des articles8 et 9. Elle a estim quil y avait eu une ingrencedans lexercice par M. Wasmuth de ses droitsgarantis par ces deux dispositions, mais quelingrence poursuivait le but lgitime consistant garantir aux Eglises et socits religieuses ledroit de lever limpt cultuel. En outre, elle ajug lingrence proportionne ce but, tantdonn que la mention dnonce navait quuneporte informative limite relativement auxconvictions religieuses ou philosophiques deM. Wasmuth puisquelle indiquait seulementau fisc quil nappartenait pas lune des Eglisesou socits religieuses habilites lever limptcultuel et exerant ce droit en pratique.

    Lobjection de conscienceThlimmenos c. Grce (n34369/97)Arrt de Grande Chambre 06.04.2000M. Thlimmenos, tmoin de Jhova, futcondamn au pnal pour avoir refus desenrler dans larme une poque o la Grcenoffrait pas aux objecteurs de conscience ledroit daccomplir un service civil enremplacement du service militaire. Quelquesannes plus tard, les autorits refusrent de lenommer un poste dexpert-comptable enraison de sa condamnation, malgr son excellentclassement au concours pour cette fonction.La Cour a conclu la violation de larticle 14(interdiction de la discrimination) combin aveclarticle 9, estimant que lexclusion deM. Thlimmenos de la profession dexpert-comptable tait disproportionne au butpoursuivi, savoir punir en consquence lespersonnes qui refusent de servir leur pays,puisquil avait dj purg une peinedemprisonnement pour cette infraction.

    Bayatyan c. Armnie (n23459/03)Affaire pendante devant la Grande chambreM. Bayatyan, tmoin de Jhovah, refusadeffectuer son service militaire pour des raisonsde conscience lorsquil fut appel sous lesdrapeaux en 2001, mais dclara tre prt effectuer un service civil de remplacement. Lesautorits linformrent qutant donn labsencede loi en Armnie prvoyant un service deremplacement il tait tenu de servir dans

    larme. M. Bayatyan fut reconnu coupable destre soustrait ses obligations militaires etcondamn une peine demprisonnement. Ilvoyait dans sa condamnation une violation deses droits garantis par larticle 9 et soutenait quecette disposition devait tre interprte lalumire des conditions actuelles, la majorit desEtats membres du Conseil de lEurope ayantdsormais reconnu le droit lobjection deconscience.Dans larrt de chambre quelle a rendu le27 octobre 2009, la Cour a conclu la non-violation de larticle 9. Le 10 mai 2010, laffairea t renvoye devant la Grande chambre lademande du requrant. La Grande chambre atenu une audience le 24 novembre 2010.

    La reconnaissance par lEtat de communautsreligieuses ou de leurs reprsentants Hassan et Tchaouch c. Bulgarie (n30985/96)Arrt de Grande chambre 26.10.2000M. Hassan fut lu grand mufti de lacommunaut musulmane bulgare en 1992.Avec un autre membre de la communaut, il seplaignait qu la suite dun conflit au sein de celle-ci en 1994-1995 quant son dirigeant, leGouvernement le remplaa par un autrecandidat qui avait exerc ces fonctionsprcdemment.La Cour a conclu la violation des articles 9 et13 (droit un recours effectif ), estimant quelEtat stait ingr dans les affaires internes dela communaut religieuse, en favorisant unefaction et en excluant totalement la directionreconnue jusqualors.

    Eglise mtropolitaine de Bessarabie et autresc. Moldova (n45701/99)Arrt de chambre 13.12.2001Les autorits refusrent de reconnatre lEglisemtropolitaine de Bessarabie, une Egliseorthodoxe, au motif quelle stait spare delEglise mtropolitaine de Moldova, qui elletait reconnue par lEtat. LEglise mtropoli-taine de Bessarabie et un certain nombre depersonnes ayant des fonctions dans cetteEglise dnonaient le refus, car seuls les cultesreconnus par lEtat pouvaient tre pratiqussur le territoire moldave.Constatant en particulier qutant donn quelEglise requrante ntait pas reconnue, sesprtres ne pouvaient pas officier, ses membresne pouvaient pas se runir pour pratiquer leurreligion et, tant dpourvus de la personnalitmorale, elle ne pouvait pas bnficier de laprotection juridictionnelle de son patrimoine,la Cour a conclu la violation de larticle 9. Ellea estim en outre que les requrants navaientpas t en mesure dobtenir devant une instancenationale le redressement de leur grief, enviolation de larticle 13.

    Le port de vtements religieuxet laffichage de symboles religieuxDahlab c. Suisse (n42393/98)Dclare irrecevable 15.02.2001Mme Dahlab, institutrice qui stait convertie lIslam, dnonait la dcision de la direction delcole de lui interdire de porter le foulardpendant quelle enseignait, qui fut confirmepar le Tribunal fdral en 1997. Elle avaitauparavant port le foulard lcole pendantplusieurs annes sans avoir caus de troublemanifeste.

    La Cour a dclar la requte irrecevable,estimant que la mesure ntait pas draisonnable,compte tenu en particulier du fait que lesenfants dont Mme Dhalab avait la charge entant que reprsentante avaient entre quatre ethuit ans, ge auquel les enfants taient plusfacilement influenables que des lve plus gs.

    Leyla Sahin c. Turquie (n44774/98)Arrt de Grande chambre 10.11.2005Issue dune famille traditionnelle pratiquant lareligion musulmane, Mme ahin estimait quelleavait lobligation religieuse de porter le foulardislamique. Elle dnonait une circulaire adopteen 1998, alors quelle tait tudiante la facultde mdecine dIstanbul, interdisant auxtudiantes de porter le foulard en cours oupendant les examens, ce qui lavait finalementamene quitter le pays pour poursuivre sestudes en Autriche.La Cour a conclu la non-violation de larticle 9,estimant que lingrence dans lexercice par Mmeahin de son droit de manifester sa religion avaitune base lgale en droit turc, la Courconstitutionnelle turque ayant antrieurementjug le port du foulard dans les universitscontraire la Constitution. La requrante auraitdonc pu prvoir, ds son entre luniversit,que le port du foulard islamique par lestudiantes tait rglement dans lespaceuniversitaire et, partir de la date de lannoncede cette rglementation, quelle risquait de sevoir refuser laccs aux cours et aux examens sielle persistait le porter. Compte tenu de lamarge dapprciation dont jouissent les Etats enla matire, la Cour a en outre dit que lingrencepouvait passer pour ncessaire dans unesocit dmocratique au regard de larticle 9 2.En particulier, elle a considr quon ne pouvaitfaire abstraction de limpact que pouvait avoirle port de ce symbole, souvent prsent ou perucomme une obligation religieuse contraignante,sur ceux qui ne le portaient pas.

    El Morsli c. France (n15585/06)Dclare irrecevable 04.03.2008Mme El Morsli est une ressortissante marocainemarie un ressortissant franais. Elle se vitrefuser un visa dentre en France, au motifquelle navait pas accept de retirer son voileafin de se soumettre un contrle didentit parun agent masculin au consulat gnral de France Marrakech. Elle allguait la violation de sesdroits garantis par les articles 9 et 8.La Cour a dclar la requte irrecevable,estimant en particulier que les contrlesdidentit effectus dans le cadre de mesures descurit dun consulat gnral poursuivaient lebut lgitime de la scurit publique et quelobligation faite Mme El Morsli de retirer sonvoile tait limite dans le temps.

    Dogru c. France (n27058/05) et Kervancic. France (n31645/04)Arrts de chambre 04.12.2008Les requrantes, toutes deux musulmanes,taient scolarises dans une classe de siximedun collge public en 1998-1999. A plusieursreprises, elles se rendirent au cours dducationphysique et sportive la tte couverte etrefusrent denlever leur foulard, malgr lesdemandes rptes de leur professeur. Leconseil de discipline du collge prononalexclusion dfinitive des requrantes pour non-

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    Europe

    respect de lobligation dassiduit, en raison delabsence de participation active des intresses des sances dducation physique sportive.Cette dcision fut confirme par les tribunaux.Dans les deux affaires, la Cour a conclu lanon-violation de larticle 9, estimant en parti-culier que la conclusion des autorits natio-nales selon laquelle le port dun voile, tel que lefoulard islamique, ntait pas compatible avecla pratique du sport pour des raisons de scu-rit ou dhygine, ntait pas draisonnable.Elle a admis que la sanction inflige ntait quela consquence du refus des requrantes de seconformer aux rgles applicables dans len-ceinte scolaire dont elles taient parfaitementinformes et non, comme elles le soutenaient,en raison de leurs convictions religieuses.

    Aktas c. France (n43563/08), Bayrak c. France(n14308/08), Gamaleddyn c. France(n18527/08), Ghazal c. France (n29134/08),J. Singh c. France (n25463/08) et R. Singh c.France (n27561/08)Dclares irrecevables 30.06.2009Les requtes concernaient lexclusion de sixlves de leur tablissement scolaire en raisondu port de signes ostensibles dappartenancereligieuse. Ils taient inscrits pour lanne sco-laire 2004-2005 dans diffrents tablissementsscolaires publics. Le jour de la rentre, lesjeunes filles, de confession musulmane, se pr-sentrent avec les cheveux couverts dun voileou dun autre couvre-chef. Les garons taienteux coiffs du keski , sous-turban port parles Sikhs. Ayant refus de retirer ces acces-soires, les lves se virent refuser laccs auxsalles de classe et, aprs une priode de dia-logue avec les familles, furent exclus de leurstablissements pour non-respect du Code delducation. Devant la Cour, les requrants seplaignaient de linterdiction du port dun cou-vre-chef impose par leurs tablissements sco-laires. Ils invoquaient en particulier larticle 9.La Cour a dclar les requtes irrecevables,estimant en particulier que lingrence danslexercice par les lves de leur droit demanifester leur religion tait prvue par la loiet poursuivait le but lgitime de la protectiondes droits et liberts dautrui et de lordre public.Elle a rappel en outre le rle de lEtat commeorganisateur neutre et impartial de lexercicedes divers cultes, religions et croyances. Quant la sanction dexclusion dfinitive, la Cour nela pas juge disproportionne, les lves ayanteu la possibilit de poursuivre leur scolarit ausein dtablissements denseignement distance.

    Ahmet Arslan et autres c. Turquie (n41135/98)Arrt de chambre 23.02.2010Les requrants, 127 membres dun groupereligieux qui se qualifie lui-mme dAczimenditarikat, se plaignaient de leur condamnationen 1997 pour infraction la loi sur le port duchapeau et la rglementation du port devtements religieux en public pour avoir fait letour de la ville et avoir comparu en justice vtusde la tenue caractristique de leur groupe(compose dun turban, dun sarouel, dunetunique et dun bton).La Cour a conclu la violation de larticle 9,estimant en particulier que rien nindiquait queles requrants avaient reprsent une menacepour lordre public ou quils avaient fait acte deproslytisme en exerant des pressions abusives

    sur les passants lors de leur rassemblement. Ellea soulign que cette affaire concernait unesanction pour le port de tenues vestimentairesdans des lieux publics ouverts tous, et non,comme dans dautres affaires dont elle avait eu connatre, la rglementation du port desymboles religieux dans des tablissementspublics, o la neutralit religieuse pouvaitprimer le droit de manifester sa religion.

    Requtes diriges contre la Suisse concernantlinterdiction de construction de minaretsAprs la votation populaire tenue le 26 novem-bre 2009 en Suisse contre la construction deminarets, la Cour a reu un certain nombre derequtes. Les affaires suivantes sont pendantes :Association Ligue des Musulmans de Suisse etautres c. Suisse (n66274/09)Communique au gouvernement suisse enmai 2010Ouardiri c. Suisse (n65840/09)Communique au gouvernement suisse enmai 2010Baechler c. Suisse (n66270/09)Koella Naouali c. Suisse (n1317/10)Al-Zarka c. Suisse (n9113/10)

    Le proslytisme Kokkinakis c. Grce (n14307/88)Arrt de chambre 25.05.93M. Kokkinakis, tmoin de Jhovah, se plaignaitde sa condamnation pnale pour proslytismepar les tribunaux grecs en 1988 pour avoirentam une discussion sur la religion avec unevoisine, pouse dun chantre de lEgliseorthodoxe de la ville.La Cour a conclu la violation de larticle 9,estimant quil navait pas t dmontr que lacondamnation de lintress se justifiait par unbesoin social imprieux. Elle a relev que lesjuridictions grecques staient contentes dereproduire le libell de la loi frappant le pros-lytisme dillgalit sans prciser suffisammenten quoi le prvenu aurait essay de convaincreson prochain par des moyens abusifs.

    Larissis et autres c. Grce(ns 23372/94, 26377/94 et 26378/94)Arrt de chambre 24.02.1998Officiers dans larme de lair grecque et adeptesde lEglise pentectiste, les trois requrants furentcondamns pour proslytisme par les tribunauxgrecs, par des jugements devenus dfinitifs en

    1992, aprs avoir tent de convertir un certainnombre de personnes leur religion, notammenttrois soldats qui taient leurs subordonns.La Cour a conclu la non-violation de larticle 9 raison des mesures prises contre les requrantspour proslytisme envers des membres delarme de lair, compte tenu de la ncessit pourlEtat de protger de jeunes soldats contrelexercice de pressions de mauvais aloi par dessuprieurs. Toutefois, elle a conclu la violationde larticle 9 en raison des mesures prises contredeux des requrants pour proslytisme enversdes civils, tant donn que ceux-ci navaient past soumis des pressions et contraintes dumme ordre que celles exerces sur les soldats.

    La libert de religion et le droit linstructionFolgero et autres c. Norvge (n15472/02)Arrt de Grande chambre 29.06.2007En 1997, les programmes de lenseignementprimaire norvgien furent modifis, deuxmatires distinctes - le Christianisme et laphilosophie de vie - tant remplaces par unseul cours sur le Christianisme, la religion et laphilosophie - le cours de KRL. Membres delAssociation humaniste norvgienne, les

    requrants tentrent en vain de faire dispensertotalement leurs enfants des cours de KRL.Devant la Cour, ils allguaient en particulier quele refus des autorits de dispenser totalementleurs enfants du cours de KRL les avaitempchs dassurer ces derniers une ducationconforme leurs convictions religieuses etphilosophiques.La Cour a conclu la violation de larticle 2 duProtocole n1 (droit linstruction), estimant enparticulier que le programme de KRL accordaitun poids prpondrant au christianisme,considrant que dans le primaire et le premiercycle du secondaire lenseignement devaitcontribuer donner aux lves une ducationchrtienne et morale. Elle a jug que lemcanisme des dispenses partielles taitsusceptible de soumettre les parents concerns une lourde charge et au risque que leur vieprive soit indment expose, et quil y avait deschances que le conflit en germe les dissuade desolliciter de telles dispenses. En mme temps, laCour a soulign que lintention qui avait prsid la cration du cours, savoir que le faitdenseigner ensemble le christianisme et les autresreligions et philosophies permettait dtablir un

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  • environnement scolaire ouvert accueillant tousles lves, tait lvidence conforme auxprincipes de pluralisme et dobjectivit consacrspar larticle 2 du Protocole n1.

    Hasan et Eylem Zengin c. Turquie (n1448/04)Arrt de chambre 09.10.2007En 2001, M. Zengin demanda que sa fille, quitait scolarise lcole publique dIstanbul, ftdispense du cours de culture religieuse etconnaissance morale, indiquant que sa familleadhrait la confession alvie. Sa demandeayant t rejete, il se plaignait de la faon dontla culture religieuse et morale tait enseignedans les tablissements scolaires publics, savoirdans une optique religieuse qui louait latradition islamique dans sa conception sunniteet sans aucune information dtaille concernantles autres religions.La Cour a conclu la violation de larticle 2 duProtocole n1. Aprs avoir examin les lignesdirectrices du cours de culture religieuse etconnaissance morale mises par le ministreturc de lEducation nationale ainsi que lesmanuels scolaires, elle a estim que leprogramme accordait une plus large part laconnaissance de lislam qu celle des autresreligions et philosophies et inculquait les grandsprincipes de la religion musulmane, y comprisses rites culturels. Si les lves chrtiens ou juifspouvaient tre dispenss du cours de culturereligieuse et de morale, celui-ci tait obligatoirepour les enfants musulmans, y compris pourceux de la branche alvie.

    Appel-Irrgang c. Allemagne (n45216/07)Dclare irrecevable 06.10.2009Les requrants, une lve et ses parents,contestrent en 2006 une loi introduisant pourles lves des classes de la 7me la 10me Berlinun cours dthique obligatoire, au motif que lecaractre lac de cet enseignement heurtait leursconvictions protestantes. Ils saisirent en vain laCour constitutionnelle. Invoquant larticle 9 de

    la Convention et larticle 2 du Protocole n1, ilsallguaient que le cours dthique obligatoiretait contraire au devoir de neutralit de lEtat.La Cour a dclar la requte irrecevable, esti-mant en particulier que, daprs les dispositionspertinentes de la loi en question, le coursdthique avait pour objectif lexamen de ques-tions dthique fondamentales, indpendam-ment des origines culturelles, ethniques, reli-gieuses ou idologiques des lves, ce qui taitconforme aux principes de pluralisme et dobjec-tivit consacrs par larticle 2 du Protocole n1.

    Des personnes employes par des Eglisesou des groupes religieuxSchth c. Allemagne (n1620/03)Arrt de chambre 23.09.2010M. Schth, qui tait organiste et chef de churdans une paroisse catholique, se plaignait durefus des tribunaux dannuler son licenciement,qui avait t prononc en 1998 au motif quilavait enfreint le rglement de lEglise catholiquerelatif au service ecclsial aprs stre spar deson pouse pour vivre avec une autre femme.Il invoquait larticle 8.La Cour a conclu la violation de larticle 8,estimant en particulier que les juridictionsallemandes navaient pas mis en balance lesintrts de lEglise - sauvegarder sa crdibilit -qui employait M. Schth et le droit de celui-ciau respect de sa vie prive et familiale. La Coura en outre attach de limportance au fait quunemploy licenci par une Eglise navait gure depossibilit de retrouver un emploi.

    Obst c. Allemagne (n425/03)Arrt de chambre 23.09.2010M. Obst, qui fut directeur pour lEurope dudpartement des relations publiques de lEglisemormone, se plaignait du refus des tribunauxdannuler son licenciement en 1993 aprs quileut confi son directeur de conscience quilavait une relation extraconjugale. Il invoquaitlarticle 8.

    Contrairement laffaire de M. Schth (ci-des-sus), la Cour na pas conclu la violation de lar-ticle 8, estimant que les juridictions du travailstaient livres une mise en balance circons-tancie des intrts en jeu. Les conclusions desjuridictions du travail selon lesquelles le requ-rant navait pas t soumis des obligationsinacceptables ntaient pas draisonnables,tant donn que lintress, pour avoir grandiau sein de lEglise mormone, devait treconscient, lors de la signature du contrat detravail, de limportance que revtait la fidlitmaritale pour son employeur et de lincompa-tibilit de la relation extraconjugale quil avaitchoisi dtablir avec les obligations de loyautaccrues quil avait contractes envers lEglisemormone en tant que directeur pour lEuropedu dpartement des relations publiques.

    Siebenhaar c. Allemagne (n18136/02)Arrt de chambre 03.02.2011Mme Siebenhaar, de confession catholique, futemploye par une paroisse protestante commeducatrice puis fut mute la direction dunjardin denfants. Elle se plaignait de son licen-ciement partir de 1999, confirm par les juri-dictions allemandes du travail, au motif quelletait membre active dune autre communautreligieuse (lEglise universelle/ Fraternit delhumanit) et quelle proposait des cours dini-tiation pour le compte de cette communaut.La Cour a conclu la non-violation de larti-cle 9, estimant que les juridictions du travailstaient livres un exercice circonstanci demise en balance des intrts en jeu. Elle a jugraisonnable les conclusions de ces juridictionsselon lesquelles le licenciement tait nces-saire pour prserver la crdibilit de lEglise etque Mme Siebenhaar devait tre consciente,lors de la signature de son contrat de travail,que ses activits en faveur de lEglise univer-selle taient incompatibles avec son engage-ment dans lEglise protestante.Source : www.echr.coe.int 2011-154

    8 Les Annonces de la Seine - jeudi 31 mars 2011 - numro 21

    Europe

    Abattage rituel, financement des cultes,funrailles et inhumations, jours fris,lacit, prescriptions alimentaires et ves-timentaires, statut des communautsecclsiales...De lEurope lAsie en passant par le continentamricain, lAfrique et lOcanie, ce dictionnaire duDroit des Religions propose un panorama completde la gestion du fait religieux par les pouvoirs publicstout en clairant les relations tisses, au cours dessicles, entre droits confessionnels propres chaque

    religion, droits nationaux et droit international.Rdigs par les meilleurs spcialistes franais ettrangers des religions - thologiens, juristes, socio-

    logues - les articles prsents ici offrent la fois uneprsentation densemble, des perspectives compara-tives et des cls de comprhension des dbats etenjeux actuels de la rgulation juridique du phno-mne religieux.Ouvrage sans quivalent, ce dictionnaire du Droit desReligions est un guide indispensable pour comprendrelvolution actuelle des pratiques religieuses et leurprise en compte par les autorits religieuses et lespolitiques publiques la lumire du pluralismejuridique contemporain.800 pages - 39 - CNRS Editions - 15, rue Malebranche - 75005 PARISwww.cnrseditions.fr

    2011-155

    Droit des Religionssous la direction de Francis Messner

    Comprendre le fait religieux la lumire du droit :le dictionnaire indispensable

    Au fil des pages

  • Les Annonces de la Seine - jeudi 31 mars 2011 - numro 21 9

    Socit

    Un projet de socitpar Jean-Paul Delevoye

    M. le Prsident. Monsieur lePremier ministre, au nom duConseil conomique social etenvironnemental et de lensemblede ses membres, je vous souhaite la bienvenue.Nous sommes honors par cette marquedintrt que vous nous manifestez et impatientsde vous entendre.Grce la rvision constitutionnelle, souhai-te par le Prsident de la Rpublique, porte etvote par votre gouvernement, nous noussommes ouverts la jeunesse et lenvironne-ment, deux dfis majeurs pour notre socit.Vous nous avez saisis, depuis le dbut de cettenouvelle mandature, dj deux fois sur lesenjeux du vieillissement et ceux de labiodiversit. Nous avons immdiatementconstitu une commission ad hoc sur ladpendance qui rendra ses conclusions en juin,

    et conformment votre demande, nousanalyserons la question sous tous ses aspects :conomiques, socitaux, dmographiques,financiers, sanitaires, mais avec un seul objectif,peut-tre une seule obsession, que cette rformevienne renforcer dans sa pertinence et dans sesfondements notre pacte social de solidarit, afinque, sous le choc des intrts catgoriels etgnrationnels, il nexplose pas, les jeunes nevoulant pas apurer la dette ou supporter lacharge de leurs ans tandis que ceux-ciexigeraient une amlioration de leur conditionau mpris mme de lavenir de notre jeunesse.Il en est de mme pour la biodiversit, olintrt de lun ne peut nier lintrt de lautre,et lon voit bien quau moment du changement,mais Platon le disait dj, si la socit volueselon la dictature des motions ou le poids desintrts catgoriels, elle peut voluer vers latyrannie et mettre mal notre pacte rpublicain.En parallle, Monsieur le Premier ministre, noustravaillons une valuation des services publicsde lemploi, rflchissons au parcours dudemandeur demploi, avec cette question : nospolitiques publiques, bases sur linclusion,nengendrent-elles pas, quelquefois, des systmes

    dexclusion qui rendent plus dsesprs encorecelles et ceux qui bnficient de ces politiquespubliques ?Nous nous interrogeons sur les ingalits lcole. Nous tentons de dessiner, partir dun

    questionnement sur le rle de lEtat, les nouvellesformes de rgulation publique appeles par cettesocit qui volue rapidement et profondmentet qui, aprs le basculement du tout collectif autout libral, met laccent sur la pertinence de largulation publique au sein des forces mondiales,europennes et nationales.Nous avons engag un chantier sur la poli-tique agricole et rflchissons aux bouleverse-ments structurellement trs lourds qui vontcompltement modifier notre Nation, ladmographie, lintgration, lducation, lesnouvelles croissances, lamnagement urbain.Nous sommes aujourdhui en tat de marche.Monsieur le Premier ministre, vous avez fait lechoix du courage, de la lucidit, de la franchise,en assumant, voire mme en revendiquant, lamatrise des dpenses et des dficits publics.Mais la contrainte de la dette ne doit pas rduiremais dcupler notre capacit de penser. Laguerre des monnaies est ouverte, ainsi que celledes matires premires et des terres arables, afinde prserver les esprances de croissance et dedveloppement des richesses. Mais aujourdhuiles victimes ne restent pas muettes et sontsusceptibles de rvolte.

    Apaiser les marchs, cest bien, mais apaiser lesinquitudes des peuples, cest mieux.Vous devez trouver un quilibre difficile entrela ncessaire rigueur et lindispensable crois-sance, un quilibre fragile entre les dcisions

    Conseil Economique, Socialet EnvironnementalSance plnire - Paris, 22 fvrier 2011

    Le Premier Ministre, rpondant l'invitation de son nouveau prsident Jean-Paul Delevoye sest rendu le 22 fvrier dernierdans l'hmicycle du Palais d'Ina prsenter son ambition pour le Conseil conomique, social et environnemental. FranoisFillon a d'abord rappel l'importance qu'il souhaitait donner au CESE dans le nouveau paysage institutionnel dessin parla rvision constitutionnelle de 2008. C'est cette mme rvision constitutionnelle qui a ouvert le CESE aux reprsentants dela jeunesse et de l'environnement et qui a largi ses modes de saisine aux saisines parlementaire et citoyenne.Le Premier Ministre a insist sur les fonctions d'clairage et d'valuation des politiques publiques qu'il souhaite que le CESEs'approprie et sur le rle que ce dernier devra jouer dans la prioritaire et ncessaire rnovation de notre modle social.Il a enfin annonc de nouvelles saisines et chantiers de rflexion pour le CESE qui devront tre prochainement prciss et acts :- la mobilit des jeunes : internationale, gographique, professionnelle mais aussi sociale, culturelle,- la comptitive conomique de la France et son ventuel dcalage par rapport ses partenaires, notamment l'Allemagne,- l'avenir de la protection sociale et notamment la rpartition entre solidarit nationale et protection sociale complmentaire.Ces annonces interviennent aprs les saisines officielles sur la dpendance et sur la biodiversit sur lesquelles le Conseilconomique, social et environnemental a dj commenc travailler pour un rendu courant juin.

    Nous sommes prts rflchir au nouveau mode degouvernance car vous ne pourrez pas construire une responsabilitcollective sur des irresponsabilits individuelles et chacun doit sesentir acteur, mobilis sur la russite collective.Jean-Paul Delevoye

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  • court terme imposes par la gravit de lasituation, sans pour autant, voire mme, aucontraire, ngliger une vision moyen et longterme garante dune mobilisation pourconstruire notre devenir.Nous avons trouver les leviers indispensa-bles afin de conduire les changements quidoteront notre France des atouts ncessaires,probablement en rflchissant aux modalitsdune nouvelle gouvernance.Cest tout le charme de la politique que derendre conciliable ce qui, a priori, ne lest pas,seulement aujourdhui, je crois quil ne sagit plusseulement darbitrer des conflits dintrts caril y a en jeu un projet de socit, un avenircommun, un potentiel conflit des valeurs : ladignit de la personne humaine, le respect desressources naturelles ne peuvent tre sacrifissur lautel de lefficacit conomique, mme silefficacit conomique ne peut et ne doit enaucun cas tre occulte.La crise est dans les ttes, certains ont la peurau ventre, les ressorts citoyens sont fatigus. Il

    parat quelques fois difficile de mobiliser nosconcitoyens vers un projet collectif lorsquilsont un souci avec leurs projets personnels. Tropde dcisions sont prises chaud, en raction des motions. Il nous faut reconstruire oupartager des convictions afin de retrouver legot et le sens de la mobilisation collective, dela responsabilit et de la solidarit. Trop detactiques et de petits calculs sur le court termeet pas assez de stratgies sur le long termeexpliquent que la France rflchisse sur sacomptitivit avec des dbats trs longs sur labase dune culture du conflit et pas assez surcelle du dialogue et du consensus. On prfrela victoire euphorisante dun jour sur sonadversaire la sage et patiente construction delavenir dans la concertation.La France a dindniables atouts, mais condition que les Franais ne baissent pas lesbras. La France a une puissance collective mais quoi sert-elle si nous tirons plus de profit duconflit que du consensus ?Je suis de ceux qui pensent quil nous faut

    absolument retrouver le sens du politique, lesens du syndicalisme, comme engagement pourun projet de socit et non pas pour la conqutedun pouvoir court terme.Une action publique sans me, une socitdpourvue de sens, une lite qui naurait pas devision nengendrent pas pour autant un peuplesans action. Les Franais croient en eux titreindividuel, et pourtant, ils croient moins en leurdestin collectif. Ils sont orphelins des valeurs dela Rpublique mais ne souhaitent pas toujoursles appliquer eux-mmes.Nous avons besoin aujourdhui dun projet desocit, dune vision, dont je suis persuad que,sans elle, peu desprance pourrait advenir, et les-prance est le ressort ncessaire de la croissance.Nous sommes prts rflchir au nouveaumode de gouvernance car vous ne pourrez pasconstruire une responsabilit collective sur desirresponsabilits individuelles et chacun doit sesentir acteur, mobilis sur la russite collective.Nous devons aussi tenter de peser sur ce jeupolitique qui, trop souvent, privilgie laconqute de pouvoirs au prix de reniements oudu sacrifice de convictions, enrls dans uneentreprise de sduction sans limite o un lec-teur de gagn compte plus quun citoyen perdu.Le Conseil conomique social et environne-mental mesure sa responsabilit en vousoffrant, Monsieur le Premier ministre, sontemps - nous avons un mandat de cinq ans -,son recul, son indpendance, son expertise,son interactivit permanente avec lescitoyens. Vous avez souhait, pour le pays, uneanne utile ; nous voulons tre utiles par lapertinence de nos avis, mais aussi de nos ques-tionnements, par notre capacit anticiperlavenir et sensibiliser nos citoyens sur lesenjeux de demain.Monsieur le Premier ministre, nous vousproposons cet espace o lensemble desmembres du Conseil peuvent vous aider chapper la dictature du court terme, prfrer la stratgie la tactique, prfrer lesconvictions aux calculs.

    10 Les Annonces de la Seine - jeudi 31 mars 2011 - numro 21

    Socit

    Rnover notremodle socialpar Franois Fillon

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    Lordre du jour de vos travaux tmoignede votre volont dtre en prise directeavec les grands problmes de notresocit.Le gouvernement vous a saisi de deux sujetsdimportance : la dpendance et la biodiver-sit.Ce nest quun dbut, car la rnovation denotre modle social doit tre notre priorit.Si nous avons amorti le choc de la crise, cestgrce la force de notre modle social.Mais pour assurer sa prennit, ce modledoit voluer.Il doit voluer, parce quil est dfi, de lext-rieur, par la mondialisation qui nous offre deformidables opportunits, mais rduit nosmarges de progression conomique et nousoblige prendre garde nos dpenses et nossources de financement.

    Il doit voluer, parce quil est dfi, de lint-rieur, par lvolution de la socit, qui se carac-trise par des parcours individuels de plus enplus varis, mais aussi de plus en plus fragiles.Vous connaissez le paradoxe auquel nous fai-sons face.Rares sont les Etats qui prsentent un systmede protection sociale aussi complet que le ntre.Mais rares sont les socits o le sentimentdinquitude face lavenir est aussi fort quedans la ntre.Jean-Paul Delevoye le remarquait dans le rap-port 2009 quil prsentait comme Mdiateurde la Rpublique : Face la dtresse - disiez-vous - dun nombrecroissant de citoyens au parcours de vie mar-qu par des ruptures professionnelles, fami-liales, gographiques, les rponses de la sociten termes de politiques de solidarit [] fontmontre dune efficacit dclinante. Nos concitoyens sont partags entre laconscience que le renouveau est ncessaire etla crainte que notre systme de protection soitbranl par ce renouveau.Face au changement, linquitude est compr-hensible.

    Mais ce nest pas le changement qui compro-met notre modle social : cest linertie, cestlimmobilisme, cest la peur face aux dfis quildoit relever de toutes parts.Nous devons rpondre aux urgences dumoment, nous devons aussi rflchir lavenirde ce modle sous peine de voir notre pacterpublicain se fissurer.Rnover notre modle social, cest dabord ces-ser dopposer la prservation de son hritageet la lutte contre les dficits publics.Nous ne pouvons continuer demprunter tantet plus sur les marchs en renvoyant la detteaux gnrations futures.Nous ne pouvons accepter de voir se rduirenotre souverainet budgtaire qui est nces-saire la dfinition dune politique socialecohrente.Nous ne pouvons pas laisser croire qu'il fautdpenser toujours plus pour vivre mieux,alors que nous devons dpenser mieux pouradapter notre modle social aux besoins d'au-jourd'hui.C'est pourquoi, avec le Prsident de laRpublique, nous avons souhait inscrire dansla Constitution le principe du retour l'quili-

  • Les Annonces de la Seine - jeudi 31 mars 2011 - numro 21 11

    Socit

    bre de nos finances publiques.Le conseil d'Etat a t saisi cette semaine duprojet de texte qui sera dbattu dans les pro-chaines semaines au Parlement.Rnover notre modle social, cest galementrenforcer la lgitimit du dialogue social encessant de lui opposer la lgitimit politique.Nous avons choisi de moderniser notredmocratie sociale.Nous avons voulu redonner toute son impor-tance la ngociation collective en renforantla lgitimit de nos organisations syndicales.Avec la loi du 20 aot 2008, nous avons mis unterme aux rgles obsoltes de la reprsentati-vit des organisations syndicales de salaris.Celle-ci sapprcie dsormais en priorit parleurs rsultats aux lections professionnelles.On se rappelle que la contribution de votreconseil avait t dcisive dans ce chantier.Des partenaires sociaux plus forts dveloppe-ront la culture du dialogue, le sens de la ngo-ciation et du compromis.Et les salaris sauront quils peuvent leur faireconfiance pour ngocier les rformes nces-saires au bnfice de tous.Bien sr cela ne signifie pas quil ny aura plusde conflit social, cela ne signifie pas quil nyaura plus de divergences dintrt, mais celasignifie que nous aurons les moyens de mieuxles rguler.La prochaine tape devra tre la rvision desrgles de la reprsentativit patronale.Je suis sr que l aussi nous saurons ensembledpasser les conservatismes.Rnover notre modle social, cest aussi enfinir avec lopposition absurde entre solidaritet comptitivit.Cest miser sur le travail, parce quil fautdabord produire des richesses pour pouvoirles partager, et parce que cest lemploi quireste la meilleure protection contre les nou-velles formes de vulnrabilit sociale.Nous devons travailler plus, travailler pluslongtemps, tre plus nombreux travailler !La lutte contre le chmage est au cur de nosefforts.Nous les ciblons en direction de ceux qui sontles plus touchs : les jeunes, les chmeurs delongue dure, les seniors.Pour dvelopper lemploi des jeunes, nousdonnons la priorit au dveloppement de lal-ternance.Au plus fort de la crise, nous avons mis enplace des mesures exceptionnelles qui ontdonn des rsultats : le nombre de jeunes au

    chmage a baiss de 5% ces 12 derniers mois.Mais naturellement nous devons aller beau-coup plus loin.Cest pourquoi nous prparons des rformesstructurelles de lalternance, qui reste la voiedinsertion professionnelle durable la plussolide.Pour enrayer la progression du chmage delongue dure, nous misons sur les contratsaids qui permettent de rester en contact avecle monde du travail ou de renouer avec lui.Voil pourquoi nous avons dgag une enve-loppe complmentaire de 50 000 nouveauxcontrats, et nous les recentrons en faveur despersonnes les plus en difficults.Pour encourager lemploi des seniors, lesentreprises et les branches ont dsormaislobligation de mettre en place des accords oudes plans daction spcifiques.Nous accorderons la plus grande attention leur mise en uvre et je nhsiterai pas agircontre ceux qui resteraient en arrire.Est-ce l renouer avec des formes anciennesde traitement social du chmage, comme cer-tains veulent le faire croire ?Je ne le crois pas, parce que ce nest pas lassis-tanat qui est au principe de notre action, cestlinsertion et le retour lemploi.Je ne le crois pas, parce que notre philosophieest de rendre notre modle social plus favora-ble lemploi, et non de le considrer comme

    un systme de protection qui serait enquelque sorte parallle au march du travail.Cest pourquoi la rnovation de notre modlesocial implique davancer sur la flexscu-rit , ncessaire la continuit des parcoursprofessionnels qui sont marqus par unediversification plus grande quautrefois.Comptitivit et solidarit doivent tre lies,parce que la comptitivit doit nous permet-tre de financer la solidarit, et parce que lasolidarit doit tre oriente vers le dveloppe-ment de la formation et de lactivit.Notre ambition fondamentale, cest de renfor-cer la comptitivit de notre conomie pourdvelopper lemploi.Cest dans cet esprit que nous avons, depuis2007, relanc linnovation, dfiscalis lesheures supplmentaires, dcid dun ambi-tieux programme dinvestissements davenir,rform le crdit dimpt recherche et sup-prim la taxe professionnelle.Nous devons poursuivre nos efforts et pour lefaire nous avons besoin de votre expertise.Vous pourrez en particulier nous clairer surles volutions respectives de la France et deses principaux partenaires - et notammentlAllemagne - en identifiant lorigine des cartset en suggrant des orientations pour leredressement de notre comptitivit.Aprs une anne de rcession, la croissance delconomie franaise a atteint 1,5% en 2010,conformment nos prvisions, et nous

    maintenons notre objectif de 2% en 2011.Quil sagisse de la consommation, de la pro-duction ou des anticipations des entrepre-neurs, les indicateurs sont bien orients etnous entamons lanne 2011 avec un lanfavorable.Les mauvais chiffres du chmage en novem-bre et en dcembre sont certes une mauvaisenouvelle.Mais il ne faut pas y voir un retournement detendance dfavorable aprs le redressementprogressif du march du travail constat en2010.Une baisse du chmage en 2011 est un objec-tif la porte de notre conomie.Rnover notre modle social, cest rtablir laconfiance dans lgalit des chances et la pro-motion sociale.Cest vrai avant tout pour notre jeunesse.Nous entendons ses inquitudes, mais nousdevons aussi prendre la mesure de son ner-gie, de sa capacit renouveler notre socitet dessiner notre avenir.Au centre des aspirations de la jeunesse, il y avidemment lemploi qui dpend largementde la formation.Cest pourquoi nous avons lanc le chantier dela lutte contre le dcrochage scolaire, cestpourquoi nous avons aussi engag la mise enplace dun vritable service public de lorienta-tion.

    Mais lemploi nest pas tout.Nous devons aussi rpondre la volont den-gagement et douverture internationale quicaractrise la jeunesse.Avec le plan Agir pour la jeunesse , nousavons mis en place le service civique.Mais nous devons aller plus loin.Cest pourquoi jai dcid de vous saisir dunerflexion sur les moyens dencourager lamobilit des jeunes, que cette mobilit soitinternationale, territoriale, sociale, culturelleou professionnelle.Rnover notre modle social, cest enfin red-finir notre systme de protection sociale pourlui permettre de faire face aux nouveaux dfisqui se posent nous.Je saisirai votre assemble sur cette questioncentrale : quelle devra tre la part de la solida-rit nationale et celle de la protection socialecomplmentaire ?Il ne sagit pas dopposer les deux aspects, carcette protection complmentaire peut trecollective et faire appel des mcanismes desolidarit professionnelle ou interprofession-nelle.De la mme manire, nous devons nous poserla question des droits mais aussi des devoirs,car nous nous refusons confondre protec-tion sociale et assistance.Enfin, se pose la question de la rgulation et dela gouvernance. Je crois que lclairage quepourra apporter votre assemble sera dter-

    Nos concitoyens sont partags entre la conscience que lerenouveau est ncessaire et la crainte que notre systme deprotection soit branl par ce renouveau.Franois Fillon

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    Franois Fillon

  • 12 Les Annonces de la Seine - jeudi 31 mars 2011 - numro 21

    Socit

    minant pour nous guider dans les volutionsncessaires.Parmi les grands dfis que doit relever notresocit, dans le cadre de cette protectionsociale, il y a celui du vieillissement.Nous ne pouvons ignorer cette mutationdmographique de grande ampleur et sesconsquences.Nous avons dj commenc y rpondre enrformant notre systme de retraites parrpartition, afin den assurer la prennit.Nous devons aujourdhui traiter de front laquestion de la dpendance des personnesges.Nous avons fait le choix de ne pas remettre plus tard cette rforme et dexaminer toutesles options possibles.Nous aurons prendre des dcisions coura-geuses, car laugmentation du cot de ladpendance risque terme davoir un impactconsidrable sur nos finances publiques.Mais les interrogations auxquelles nousaurons rpondre dpassent le seul enjeufinancier.Comment vivre ensemble plus longtemps ?Comment renouveler la solidarit entre lesgnrations, qui est lun des fondements denotre pacte rpublicain ?Comment faire du vieillissement, non pas unecontrainte, mais une source dactivit, dem-ploi et de croissance ?

    Voil les questions sur lesquelles lexpertise devotre conseil sera attendue.Les mmes principes doivent guider la redfi-nition de notre politique de sant.Ici encore, 2011 sera une anne utile.Nous donnerons une nouvelle impulsion lamdecine de proximit et la mdecineambulatoire qui augmente les possibilits deprise en charge domicile.Nous rformerons notre politique du mdica-ment pour que les dysfonctionnements gravesrvls par laffaire du Mediator ne se repro-duisent pas.Nous moderniserons notre politique de priseen charge psychiatrique.Nous chercherons rpondre ds maintenantaux questions majeures qui nous sont posespar lexigence du retour lquilibre de lassu-rance-maladie.Comment dfinir un juste partage entre assu-rance-maladie et protection complmentaire ?Comment, aprs la cration des agencesrgionales de sant, continuer inscrire notrepolitique de sant dans la diversit de nos ter-ritoires ?Comment moderniser notre systme de santtout en prservant son excellence ?Comment gagner en efficacit sans rien per-dre en qualit des soins ?La responsabilit de tous doit tre engage !Non seulement pour traquer les fraudes, mais

    aussi pour progresser sur la pertinence dessoins, en rduisant les actes et les prescrip-tions inutiles et insuffisamment justifis.La sant ne doit pas tre simplement peruecomme un secteur de dpense.Elle doit tre aussi vue comme une source decroissance, un moteur conomique quicontribue notre croissance.Nous aurons ainsi mener bien le dploie-ment des 2,5 Md dinvestissements davenirdans les secteurs de la sant.Nous ferons merger de nouveaux champs dedveloppement conomique, je pense audomaine de la e-sant auquel nous avonsdonn une impulsion forte en 2010 en fixant,enfin, le cadre juridique de lactivit de tlm-decine.Je veux enfin voquer la politique du handi-cap, laquelle votre Conseil a consacr denombreux travaux.Nous aurons, en 2011, prparer une nouvelleConfrence nationale du handicap, au coursde laquelle nous examinerons, en particulier,la question de la scolarisation des enfants han-dicaps.Mais nous devrons galement - six ans aprsla loi du 11 fvrier 2005 - redfinir nos ambi-tions pour aller encore plus loin dans laccessi-bilit des lieux et linsertion professionnelledes personnes handicapes. []

    2011-156

    Association Europenne des Barreauxdes Cours Suprmes XXme anniversaire - Paris, 10 mars 2011

    LOrdre des avocats au Conseil dEtat et la Cour de cassation a organis le10 mars 2011 en partenariat aveclAssociation Henri Capitant et laSocit de lgislation compare un colloque sur Le juge de la cassation en Europe qui sesttenu dans le cadre prestigieux de laGrandChambre de la Cour de cassation.Magistrats, universitaires et avocats venusdAllemagne, de Belgique, dItalie, ou encore desPays-Bas ont ainsi particip cette journe derflexion qui tait organise en quatre tablesrondes prsides chacune par un Premierprsident de Cour de cassation ou par sonreprsentant : Geert Corstens, Premier prsidentde la Cour de cassation des Pays-Bas, ErnestoLupo, Premier prsident de la Cour de cassationdItalie, Christian Strok , Prsident de chambre la Cour de cassation de Belgique, reprsentantle Premier prsident, et Klaus Tolksdorf, Premierprsident de la Cour fdrale dAllemagne.Yves Bot, lavocat gnral de la Cour de justicede lUnion europenne a galement livr sespropres rflexions.Dans son discours d'ouverture le Prsident delOrdre au Conseil dEtat et la Cour decassation Didier Le Prado a expliqu les raisonsdu choix ce thme :

    Les avocats aux Conseils, qui constituent lebarreau spcialis ddi au deux juges decassation que sont le Conseil dEtat et la Cour decassation sont bien sr persuads de lintrt dumodle franais pour un accs clair, rgulieret effectif ces hautes juridictions.Mais, ils sont galement persuads de la ncessitde confronter ce modle celui dautres Etatsmembres de lUnion europenne.Pour Goethe : celui qui ne connat pas leslangues trangres ne connat rien de sa proprelangue.Nul doute que celui qui fut avocat auprs duTribunal dEmpire et, avant cela - sorte depionnier du systme Erasmus - tudiant en droitaux universits de Leipzig et de Strasbourg, auraitpu dire la mme chose des modles juridiques.Lintrt dune telle confrontation a, plusrcemment, t soulign lors dun colloqueorganis le 5 mars 2010 Rome par la CorteSuprema di cassassione et par le ConsiglioNationale Forenze, sur la rgulation de laccs aujuge de cassation en Europe.Le 20me anniversaire de lassociation euro-penne des barreaux de Cour suprme a tpour nous loccasion de poursuivre et dlargir cedbat engag Rome ; cette association regrou-pant les barreaux de Cours suprmes alle-

    mands, belges et franais a en effet t cr il y amaintenant 20 ans linitiative de lun de mesprdcesseurs, le Prsident Jacques Bor.LEurope des juges est aujourdhui une ralit :les juges nationa