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Vol. 103 - Février 2009 Christophe LAGOUTE Réalisation d’un détecteur de muons : une approche de physique du XX e siècle au lycée par Christophe LAGOUTE Lycée Bellevue - 31400 Toulouse [email protected] RÉSUMÉ Les rayons cosmiques ont joué un rôle historique majeur dans la construction de la physique et constituent encore aujourd’hui un sujet de recherche important à l’échelon international. Étudier ce rayonnement dans les établissements scolaires est une occasion intéressante d’aborder des notions de physique fondamentale du XX e siècle. Réaliser dans un lycée d’enseignement général, un détecteur de muons, qui sont des particules élémen- taires issues du rayonnement cosmique, est rendu possible grâce à l’existence sur le marché, de composants performants, peu onéreux, et simples d’utilisation. Après une présentation sommaire des rayons cosmiques, l’article décrit en détail le fonctionnement d’un détec- teur de muons reproductible dans un laboratoire de lycée. Quelques applications péda- gogiques, telles que l’analyse statistique des données, l’étude du rayonnement reçu et des effets relativistes, sont proposées. INTRODUCTION C’est un point désormais couramment souligné : les programmes français d’enseigne- ment de la physique comportent peu de physique du XX e siècle. À deux exceptions près, la présentation des interactions fondamentales en première S, et celle des phénomènes radio- actifs en terminale, aucun élément d’information ou de sensibilisation aux avancées majeures que furent la relativité, la physique quantique et la théorie du chaos, n’est prévu, et ce, du lycée, jusqu’en deuxième année incluse des Classes préparatoires aux grandes écoles (CPGE). Précisons en outre, que la présentation des interactions en première S exclut l’interaction faible qui pourtant est responsable de la radioactivité étudiée, elle, en terminale. Avec ces programmes, nous forgeons une image classique et newtonienne du monde, aussi bien chez ceux qui ne poursuivront pas d’études supérieures scientifiques que chez les futurs techniciens et ingénieurs qui ne bénéficieront pas nécessairement, en école, d’un enseignement de physique fondamentale. En conséquence, nous privons les esprits des passionnantes avancées du XX e siècle. Cela, alors que se déroulent au CERN (Conseil européen pour la recherche nucléaire) les expériences les plus élaborées jamais réalisées par l’humanité pour tester le comportement de la matière aux hautes énergies, alors qu’un récent prix Nobel de physique honore la science française sur des travaux qui UNION DES PROFESSEURS DE PHYSIQUE ET DE CHIMIE 143

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Vol. 103 - Février 2009 Christophe LAGOUTE

Réalisation d’un détecteur de muons :une approche de physique du XXe siècle au lycée

par Christophe LAGOUTELycée Bellevue - 31400 Toulouse

[email protected]

RÉSUMÉ

Les rayons cosmiques ont joué un rôle historique majeur dans la construction de laphysique et constituent encore aujourd’hui un sujet de recherche important à l’écheloninternational. Étudier ce rayonnement dans les établissements scolaires est une occasionintéressante d’aborder des notions de physique fondamentale du XXe siècle. Réaliser dansun lycée d’enseignement général, un détecteur de muons, qui sont des particules élémen-taires issues du rayonnement cosmique, est rendu possible grâce à l’existence sur le marché,de composants performants, peu onéreux, et simples d’utilisation. Après une présentationsommaire des rayons cosmiques, l’article décrit en détail le fonctionnement d’un détec-teur de muons reproductible dans un laboratoire de lycée. Quelques applications péda-gogiques, telles que l’analyse statistique des données, l’étude du rayonnement reçu et deseffets relativistes, sont proposées.

INTRODUCTION

C’est un point désormais couramment souligné : les programmes français d’enseigne-ment de la physique comportent peu de physique du XXe siècle. À deux exceptions près, laprésentation des interactions fondamentales en première S, et celle des phénomènes radio-actifs en terminale, aucun élément d’information ou de sensibilisation aux avancéesmajeures que furent la relativité, la physique quantique et la théorie du chaos, n’est prévu,et ce, du lycée, jusqu’en deuxième année incluse des Classes préparatoires aux grandesécoles (CPGE). Précisons en outre, que la présentation des interactions en première S exclutl’interaction faible qui pourtant est responsable de la radioactivité étudiée, elle, en terminale.

Avec ces programmes, nous forgeons une image classique et newtonienne dumonde, aussi bien chez ceux qui ne poursuivront pas d’études supérieures scientifiquesque chez les futurs techniciens et ingénieurs qui ne bénéficieront pas nécessairement, enécole, d’un enseignement de physique fondamentale. En conséquence, nous privons lesesprits des passionnantes avancées du XXe siècle. Cela, alors que se déroulent au CERN(Conseil européen pour la recherche nucléaire) les expériences les plus élaborées jamaisréalisées par l’humanité pour tester le comportement de la matière aux hautes énergies,alors qu’un récent prix Nobel de physique honore la science française sur des travaux qui

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relèvent exclusivement de la physique quantique, alors que la cosmologie moderne s’in-terroge sur l’origine de la matière et de l’énergie noire. À notre époque, peut-être plusencore qu’auparavant, la physique fondamentale nous incite à mener une réflexionprofonde et personnelle sur la place que nous occupons dans la Nature.

Ce point de vue contraste avec les conceptions utilitaristes de la science, qui privi-légient ses applications, ses approches expérimentales et industrielles. Il n’en a pas toujoursété ainsi. Dans les années 1990 par exemple, les programmes des terminales scientifiqueset ceux de CPGE, comportaient une part importante de physique fondamentale et moderne.Aujourd’hui, en ce temps de désaffection marquée pour les filières scientifiques, on peutse demander si leur réhabilitation n’exige pas que dès le lycée, nos jeunes élèves puis-sent entrevoir les splendeurs de la physique de leur époque. C’est le pari d’une réponsepositive à cette question qui est à l’origine de ce projet, réalisé au sein du club CNRSJeunes « Physique récente » du lycée Bellevue de Toulouse et démarré avec le soutienscientifique du Centre de physique des particules de Marseille (CPPM) : étudier lesrayons cosmiques avec un détecteur de muons entièrement réalisé au sein d’un lycéed’enseignement général, et aborder les notions de physique moderne qui en découlent.

Le travail pédagogique en lycée, tel que nous l’avons expérimenté à Toulouse,commence par la réalisation du détecteur. Son exploitation scientifique promet, elle, depassionnantes excursions en physique moderne : détection et analyse de la composantemuonique du rayonnement cosmique, classification des particules élémentaires, phéno-mènes relativistes, etc. Le niveau des élèves impliqués s’étale de la première S, parexemple en TPE (Travaux personnels encadrés) ou dans un club de physique, jusqu’endeuxième année de CPGE, en TIPE (Travaux d’initiative personnelle encadrés).

Le principe de détection des muons par scintillation est commun, et plusieurs solu-tions technologiques de traitement électronique des signaux existent. Citons par exemple,la Roue Cosmique du CPPM (1) et The Cosmic Connection de l’Université de Berkeley (2).L’électronique que nous proposons, de complexité intermédiaire, est conçue pour êtrecomprise dans son principe par un élève de terminale et dans son détail, par un élève dePremière année de CPGE.

Après quelques informations historiques et théoriques sur le rayonnement cosmique,l’article présente le détecteur de muons afin, d’une part, de permettre sa reproduction pard’autres laboratoires de lycées, et, d’autre part, de comprendre en détail son fonctionne-ment ; la dernière section est consacrée à son utilisation.

1. LES RAYONS COSMIQUES

1.1. Découverte

La découverte des rayons X en 1895 par le physicien allemand Wilhelm RÖNTGEN,

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(1) La Roue Cosmique : http://marwww.in2p3.fr/IMG/pdf/roue_cosmique.pdf(2) The Cosmic Connection : http://cosmic.lbl.gov/

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Figure 1 : Gerbe cosmique.

puis celle de la radioactivité naturelle en 1896 par Henri BECQUEREL, suscita l’engoue-ment de la communauté scientifique pour ces rayons aux propriétés surprenantes, commepar exemple, la possibilité de radiographier le squelette avec des rayons X. Parmi lesinstruments de laboratoire de l’époque figurait l’électroscope, inventé dans les années1750 par l’abbé Jean-Antoine NOLLET, destiné à détecter et mesurer des charges élec-triques. Au cours de diverses expérimentations sur les corps radioactifs, les physiciensrelevèrent la présence d’un fond continu de rayonnement qui déchargeait l’électroscope,dont l’origine était attribuée à la radioactivité naturelle de l’écorce terrestre.

À l’issue de l’exposition universelle de Paris en 1889, Gustave EIFFEL proposa pourprotéger sa tour du démantèlement qu’on l’utilisât à des fins de recherche scientifique.C’est ainsi que le père Theodore WULF, physicien amateur néerlandais, s’aperçut contretoute attente, que le fond de rayonnement continu était plus intense au sommet de la tourqu’à sa base. Résultat bien surprenant, car si l’origine du rayonnement avait été terrestre,son intensité aurait dû décroître avec l’altitude.

La question de l’origine de ce rayonnement se posait à nouveau. Pour y répondre,le physicien et aérostier autrichien Viktor Frantz HESS effectua une série de mesures enballon, souvent de nuit, à une altitude de 6000 m en 1912. Il confirma ainsi l’accroisse-ment de l’intensité du rayonnement avec l’altitude, ce qui lui permit de démontrer que

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son origine est une « source extraterrestre de radiation pénétrante ». En 1926, le physi-cien américain Robert MILLIKAN leur donna le nom de rayons cosmiques. De grandesascensions stratosphériques, en cabines pressurisées, souvent très périlleuses, se succé-deront entre 1931 et 1935, et contribueront à caractériser plus précisément ce rayonne-ment (cf. figure 1, page précédente). HESS, obtint en 1936, le prix Nobel de physique pourla découverte du rayonnement cosmique.

1.2. Interaction avec la Terre

Entre 1928 et 1932, le physicien néerlandais Jacob CLAY effectua, en bateau, unepremière série de mesures, entre Amsterdam et Java, qui établit la dépendance du fluxdu rayonnement cosmique avec la latitude. Une étude détaillée de cette dépendancedébuta en 1930, à l’initiative du physicien américain Arthur COMPTON, qui lança denombreuses expéditions à travers le monde impliquant soixante-neuf stations distribuéesentre 78° de latitude nord et 46° de latitude sud. On comprit alors que la variation duflux était liée à l’influence du champ magnétique terrestre sur des particules incidentesélectriquement chargées [1].

Un effet est/ouest, très instructif, fut mis en évidence : le flux reçu en direction del’ouest était légèrement plus important qu’en direction de l’est. Cette anisotropie azimu-tale indique que les particules incidentes sont majoritairement positives. En effet, si l’onconsidère deux faisceaux incidents dans le plan équatorial, initialement confondus surune même trajectoire radiale, l’un constitué de particules de charge positive, l’autre, departicules de charge négative (cf. figure 2a), la déviation magnétique est telle qu’en unpoint M de l’équateur, on ne reçoit du faisceau initial que les charges positives dans ladirection de l’ouest ; les charges négatives ayant été déviées, elles, vers l’ouest. Un excèsde charges positives dans le faisceau incident engendre donc un flux accru en directionde l’ouest.

Plus généralement, le mouvement d’une particule du rayonnement cosmique dansl’environnement terrestre dépend de sa trajectoire initiale et de son énergie. Comme le

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Figure 2a : Effet est-ouest. Figure 2b : Interaction particule-dipôle.Figure 2 : Interaction avec la Terre.

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champ magnétique terrestre est bien représenté par celui d’un dipôle magnétique placéau centre de la Terre, le problème se ramène à l’étude du mouvement de particules char-gées dans le champ d’un dipôle de moment m (cf. figure 2b).

1.3. Gerbes cosmiques

Les particules du rayonnement cosmique primaire, c’est-à-dire tel qu’il se présenteavant d’interagir avec la Terre, entrent en collision avec les noyaux d’azote ou d’oxygènedans la stratosphère à typiquement 20 km d’altitude. Ces collisions créent des gerbes demilliards de nouvelles particules (cf. figure 1), mises en évidence en 1938 par le physi-cien français Pierre AUGER [2].

Des analyses ultérieures, notamment de trajectoires dans des chambres à bulles, ontmontré que le rayonnement cosmique primaire est essentiellement constitué de protons(87 %) et de noyaux d’hélium ou particules α (12 %), ainsi que de quelques électrons (1 %).

Les collisions qui brisent les noyaux d’azote ou d’oxygène en noyaux ( , ,sur la figure) plus légers comme le lithium, le béryllium ou le bore, donnent au sol unecomposante dite hadronique (cf. figure 1). Des pions ( , et ) qui sont des parti-cules constituées de quarks et d’antiquarks, de la famille des mésons (cf. annexe 1), seforment lorsqu’un proton du rayonnement primaire interagit avec un proton, ou unneutron, d’un noyau atomique, selon des réactions du type :

Les pions neutres , dont la durée de vie est brève , se désintègrent endonnant deux photons gamma, qui eux-mêmes, créent des paires électron-positron :

Par rayonnement de freinage, il se forme de nouveaux photons :

Cette composante électromagnétique de la gerbe a notamment pour effet d’exciter lafluorescence de l’azote, dont l’observation est précieuse dans la détection des gerbes.

Les pions chargés, de 26 ns de durée de vie, se désintègrent eux, en muons etneutrinos muoniques :Les neutrinos traversent la Terre en interagissant très peu, tandis que l’on détecte, au sol,les muons, particules responsables du déchargement des électroscopes.

Notons que les collisions produisent d’autres types de mésons, notamment deskaons ( , , et ). Ils se désintègrent eux aussi, et selon des réactions analoguesà celles des mésons .r

K0 K0r K+ K–

et– –$ $r n y r n y+ +

n n

+ +r

e e ee ou– –$ $c c+ ++ +

c

e eet –0$ $r c c c+ ++

8 10 s–17#] g0r

p p p pp p p n

p n p pp n p n

– –

0

0$

$

$

$

r r r

r r r

r r r

r r r

+ + + + ++ + + + +

+ + + + ++ + + + +

+

+ +

+

+

–rr +0r

N mN lN

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En raison de la complexité et de la richesse des collisions en jeu dans les gerbes,les rayons cosmiques ont longtemps constitué une source précieuse d’information sur lesparticules élémentaires, avant que les accélérateurs ne prennent le relais. Citons, parexemple, la découverte du positron en 1932 par le physicien américain Carl ANDERSON,pour laquelle il reçut le prix Nobel de physique la même année que HESS, suivie de celledu muon en 1936, des pions et kaons en 1947 et 1949 [3] et des hypérons (1949),(1952), (1953).

1.4. Désintégration des muons

Les muons sont des particules électriquement chargées, de masse environ deux centsept fois celle de l’électron ; aussi les considère-t-on parfois comme des « électrons (oupositrons) lourds ». L’énergie de masse d’un électron étant , celle d’unmuon vaut .

Les muons sont instables, de durée de vie moyenne . Ils se désintègrenten donnant des électrons ou des positrons, et des neutrinos, électroniques et muoniques :

1.5. Flux et énergie des muons

Le flux de muons reçu au sol en France est typiquement de cent trente particulespar mètre carré et par seconde au niveau de la mer, taux qui participe à environ 10 % dela radioactivité naturelle. S’ajoutent environ cinquante électrons et positrons par mètrecarré et par seconde, issus de la composante électromagnétique des gerbes.

Une fois créés, les muons sont soumis aux interactions électromagnétiques descharges électriques de la colonne d’atmosphère qu’ils traversent. Ce sont essentiellementles noyaux d’azote et d’oxygène qui diffusent élastiquement les muons (diffusion Ruther-ford). La déviation de la trajectoire est au plus de quelques degrés, mais les muonsperdent une partie de leur énergie au taux linéaire d’environ 0,2 MeV par dematière rencontrée. La relation entre la pression atmosphérique p à l’altitude z et la massepar unité de surface de la colonne verticale d’atmosphère présente au dessus du détec-teur, s’établit facilement dans l’hypothèse d’une atmosphère en équilibre hydrostatique etd’un champ de pesanteur uniforme d’intensité . En désignant par la masse volu-mique de l’air, on a, l’axe Oz étant croissant selon la verticale ascendante :

qui donne, en intégrant

d’où l’on tire, puisque :p 03 =] g–z

p gdd

m 0t= ( ) –p z g zdmz

0t=3#

mtg0

ms

kg m– 2$

e eet– –e e$ $n y y n y y+ + + +

n n

+ +r r

2,197 spx n=

106m c MeV2 =n

0,511m c MeVe2 =

R

NK

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puisque

Ainsi, au niveau de la mer, où , avec , on obtient :

d’où une perte totale d’énergie , après traversée de cette colonne de matière :

La distribution en quantité de mouvement des muons décroît au-delà de quelques, comme on peut le voir sur les courbes de la figure 3, données pour différentes

valeurs de masse par unité de surface de colonne d’air traversée. À une altitude prochedu niveau de la mer (courbe à ), la coupure se situe autour de . Larelation entre l’énergie totale d’une particule libre, sa quantité de mouvement P et sonénergie de masse étant :

on obtient, en négligeant l’énergie de masse, une énergie typique de quelques GeV.E EP c2 2 2

02= +

E0

E

960 g cm– 2$ 2 GeV c–1$

GeV c–1$

E 0,2 1,03 10 2 GeV4# # .D =ED

,, 1,03 10m g

p0 09 8

1 013 10 kg m–s

0

54 2#

# $= = =] ]g g9,8g m s–0

2$=1013p 0 hPa.] g( )m z zds mz

t= 3#( ) ( )p z g m zs0=

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Figure 3 : Spectre de quantité de mouvementde muons négatifs à 50° de latitude nord [4].

Figure 4 : Spectre d’énergie du rayonnementcosmique primaire sur douze ordres de grandeur [7].

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1.6. Effet relativiste

Les muons les plus énergétiques ont donc une énergie totale de plusieurs dizainesde fois leur énergie de masse, ce qui en fait des particules ultra-relativistes. Leur vitesse,dans le référentiel du laboratoire, est alors proche de c, et la distance d parcourue pendantla durée de vie d’un muon vaut :

Comme ils se forment dans la stratosphère, par exemple à 20 km d’altitude, la durée dutrajet jusqu’au sol est supérieure d’un facteur à leur durée de viemoyenne. Puisque la loi de désintégration des particules élémentaires est une loi expo-nentielle (cf. annexe 2), la population de muons à l’instant , formés à l’instantorigine dans la stratosphère, décroît selon la loi exponentielle suivante :

étant la durée de vie moyenne de la particule dans le référentiel du laboratoire. Si, la fraction de muons arrivant au sol à l’instant est :

Sur les milliards de particules formées dans les gerbes, aucune ne devrait atteindre le sol.Cependant, on détecte bien des muons !

Ce problème trouve sa solution dans le contexte de la dynamique einsteinienne, dontil constitua d’ailleurs une confirmation historique [5]. En réalité, la durée de vie moyennedes muons est celle mesurée dans le référentiel où ils sont immobiles, c’est-à-dire, dansleur référentiel propre. En dynamique einsteinienne, le temps est relatif, ce qui se traduitpar la dilatation des durées [6]. Précisément, l’intervalle de temps moyen qui sépare,dans son référentiel propre, l’instant de création et celui de désintégration d’un muon,devient , dans le référentiel terrestre, en translation rectiligne uniforme par rapport auréférentiel du muon, à la vitesse relative v. La relation entre et est la suivante :

est le facteur de Lorentz, relié à l’énergie totale du muon par :

Pour un muon d’énergie 1 GeV, on obtient :E

, ,m c 207 0 51110 9 52

3

#c = = =

n

E m c2c=n

– cv1

– /2 1 2c = b l; Ep

px c

x= l

pxlpx

pxl

px

( ) – 30 –exp expNN

030 30 10–p

p

p 13.x

x

x= =_ e ]i o gt 30 px=px x=

x

( ) ( ) –expN t N t0 x= b l

( )N t

/ ,f 20 0 66 30.=

3 10 2,197 10 660d c m–p

8 6# # #. .x=

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Ainsi, dans le référentiel terrestre, la durée de vie moyenne du muon n’est pas ,mais . Le taux de réduction de la population de muons d’énergie 1 GeV estalors :

ce qui justifie leur présence au niveau du sol.

1.7. Sources du rayonnement

Le spectre d’énergie du rayonnement cosmique primaire s’étend sur près de douzeordres de grandeur et possède une remarquable régularité (cf. figure 4, pages précédentes).Une partie des particules, celles dont l’énergie cinétique se situe entre 10 et 100 MeVprovient du Soleil. Pour les énergies supérieures, entre 100 MeV et 10 GeV, on considèredes mécanismes de production impliquant des restes de supernovae galactiques.

Au-delà, les particules sont si énergétiques, que les sources plausibles ne peuventêtre que d’origine extragalactique telles que des quasars ou noyaux actifs de galaxies. Lesmécanismes imaginés impliquent souvent des trous noirs supermassifs. Une autre pisteavancée est celle de la désintégration de particules lourdes non encore détectées qui seraientdes reliques des premiers instants de l’Univers.

Une prédiction importante, faite en 1965 par Kenneth GREISEN, Vadim ZATSEPIN etGeorgiy KOUZMIN et qui reste à confirmer expérimentalement, est la coupure attenduedans le spectre aux alentours de eV. Au-delà de cette énergie, appelée coupure GZK,les particules doivent interagir avec les photons du fond diffus cosmologique, ce quiaurait pour effet de limiter leur parcours. Comme aucune source proche n’est susceptiblede produire des particules ayant de telles énergies, on s’attend bien à observer une coupuredans le spectre. L’expérience Auger, installée dans le sud de l’Argentine, s’intéresse parti-culièrement à la détection de ces particules ultra énergétiques.

2. RÉALISATION DU DÉTECTEUR DE MUONS

2.1. Vue d’ensemble et fonctionnement

Le détecteur, dont une vue d’ensemble est donnée sur la figure 5 (cf. page ci-après),fonctionne en détectant la lumière qu’émet, par scintillation, un matériau traversé par uneparticule rapide. Les molécules de ce matériau, appelé scintillateur (a), sont excitées parinteraction électromagnétique, au passage des muons, électrons et positrons issus desgerbes cosmiques, ou des particules provenant de la radioactivité naturelle ( essen-tiellement). La désexcitation par fluorescence dans le domaine visible des molécules duscintillateur produit des photons, qu’un photomultiplicateur (PM) transforme en impul-sions électriques (b).

–b

1019

– / , ,expNN

030 30 9 5 0 04p

.x =]_ ^g i h

p px x cx= =l

px x=

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La profondeur de pénétration des électrons issus de la radioactivité naturelle dansla matière solide est inférieure au millimètre, tandis que les muons, plus massifs peuventtraverser plusieurs mètres. Une détection en coïncidence, c’est-à-dire simultanée, pardeux blocs (c) de détection successifs A et B, suffit à dissocier les muons des électrons ;ces derniers, absorbés par le bloc A, ne donnent aucun signal au niveau du bloc B. Lesmuons, en revanche, traversent les deux blocs (cf. figure 6, page ci-contre). Le petit déca-lage temporel entre les instants de passage dans deux détecteurs séparés de d = 30 cmpar exemple, peut être négligé. En effet, les muons étant ultra relativistes, ce décalagevaut :

Comme la détection se fait à des intervalles réguliers de , le décalage demeurefaible et n’occasionne qu’une perte dans la détection de 1/50 = 2 % des muons.

Un boîtier électronique de détection (d) à seuil réglable met en forme les signauxdélivrés par les PM et permet diverses opérations logiques de combinaison, la plusimportante étant un ET logique pour assurer la détection en coïncidence. Ce boîtier,appelé discriminateur, est commandé par un ordinateur grâce à une interface USB (e)

Td d%x^ h50T nsd =

, 1cd

3 100 3 nsd 8#

.x = =

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Figure 5 : Détecteur de muons.

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d’entrée-sortie numérique NI-USB6501 (environ 110 €) de la société National Instru-ments (2, rue Hennape - 92735 Nanterre Cedex), comme l’indique le schéma fonctionneldu détecteur présenté sur la figure 6. Les bits de réglages à commandent les opéra-tions de combinaison des signaux à effectuer, comme nous allons le voir. Un compteurdes événements retenus à l’issue de cette combinaison, intégré à la carte d’interface, estlu à intervalles de temps réguliers par un programme réalisé sous Labview (f).

Si le budget dont on dispose le permet, on peut ajouter un bloc supplémentaire, Isur la figure 6, offrant deux applications intéressantes :♦ une détection en coïncidence à trois blocs, qui réduit les coïncidences fortuites, c’est-à-dire les événements simultanés qui ne sont pas dus au passage d’un muon, mais aubruit ou à la radioactivité naturelle (cf. paragraphe 3) ;

♦ l’évaluation de l’efficacité de la détection en déterminant la proportion de muons détectésdans A et B, mais dont le passage n’est pas enregistré par I, alors qu’il le devrait.Une source basse tension régulée de 6 V (g) est utilisée comme alimentation de base

pour le discriminateur et les convertisseurs haute tension (h) qui alimentent les PM. Unealimentation standard 6 V régulée du commerce, courante dans un laboratoire de lycée,convient tout à fait pour réaliser cette source basse tension (g).

Le typon double face du circuit, réalisé avec le logiciel Eagle, ainsi que le program-me de pilotage du détecteur sont disponibles sur simple demande auprès de l’auteur.

2.2. Réalisation des blocs de détection

Un bloc de détection (cf. figure 7a, page ci-après) est constitué de son scintillateur,d’un PM et de sa base d’alimentation, l’ensemble étant assemblé par l’intermédiaired’une pièce mécanique cylindrique de logement du PM (cf. figure 7b, page ci-après).

s7s0

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Figure 6 : Schéma fonctionnel du détecteur.

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2.2.1. Scintillateurs

Le scintillateur plastique à base depolystyrène (type UPS-923), a été obtenuauprès de la société DetecEurope, 56 000Vannes, (prix indicatif 230 € TTC), pourune dimension de . Onpeut envisager de le biseauter (cf. figure 8)afin de constituer un petit guide delumière pour améliorer la détection, maisle gain modeste obtenu se fait au prix de la difficulté de l’opération : le scintillateur plas-tique a tendance à fondre sous la chaleur dégagée par la lame de découpe, ce qui renddifficile le travail de ce matériau.

La surface du scintillateur, tel qu’il est livré, en particulier sa tranche, mérite unpolissage manuel, avec un produit abrasif, par exemple le polish 1 (cf. figure 9). Une foispolie, la tranche du scintillateur présente une surface bien lisse, aux reflets bleutés.

1,4 14,5 30 cm3# #

U N I O N D E S P R O F E S S E U R S D E P H Y S I Q U E E T D E C H I M I E154

Figure 7a : Vue de deux blocs.Figure 7 : Blocs de détection.

Figure 9 : Polissage d’un scintillateur.

Figure 7b : Assemblage d’un bloc.

Figure 8 : Biseautage possible des scintillateurs.

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Vol. 103 - Février 2009 Christophe LAGOUTE

À ce stade, le scintillateur est recouvert d’une enveloppe réfléchissante, par exemple,du papier aluminium alimentaire (cf. figure 10). On doit veiller à laisser libre une petitefenêtre rectangulaire contre laquelle viendra se plaquer l’entrée du PM. Grâce à l’enve-loppe réfléchissante, la lumière émise lors du passage d’une particule peut subir plusieursréflexions à l’intérieur du scintillateur avant d’atteindre la fenêtre d’accès à la cathodedu PM.

Deux ou trois couches d’un ruban adhésif noir recouvrent le tout.

U N I O N D E S P R O F E S S E U R S D E P H Y S I Q U E E T D E C H I M I E 155

Figure 10 : Recouvrement d’un scintillateur.

Figure 11 : Photomultiplicateur.

2.2.2. Photomultiplicateurs

Les blocs fonctionnent avec des PM de la société Photonis (ZI Beauregard - AvenueRoger Roncier - 19106 Brive-la-Gaillarde), précisément le modèle XP3102, dont on peutvoir un exemplaire sur la figure 11, accompagné de sa base (modèle VD101TA) de répar-tition de la haute tension sur les dynodes du détecteur. L’ensemble, PM+base, coûte environ230 € TTC.

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2.2.3. Logement du PM

Une pièce de logement du PM (cf. figure 12a), taillée dans un cylindre plein en PVCde diamètre 5 cm, et de longueur environ 20 cm, doit être réalisée dans un atelier demécanique doté d’une machine à aléser ou d’un tour. On commence par creuser lecylindre qui accueillera le PM sur une profondeur de 9 cm, puis on extrude latéralementla seconde partie de la pièce, côté scintillateur, afin de réaliser la mâchoire qui viendraenserrer ce dernier (cf. figure 12). L’épaisseur de l’extrusion ( 1,5 cm) dépend de celledes couches de ruban adhésif qui enveloppe le scintillateur, aussi est-il prudent de bienmesurer l’épaisseur totale du scintillateur une fois recouvert, avant de creuser. On peutéventuellement utiliser une perceuse sur colonne avec un foret à fond plat pour fabriquercette mâchoire.

2.2.4. L’assemblage

L’assemblage du bloc commence par le centrage de la pièce de logement du PM surle scintillateur (cf. figure 12b) : en regardant à travers l’orifice cylindrique, on doit voirla tranche du scintillateur diaphragmée par la cavité cylindrique, légèrement en relief parrapport au fond en PVC (cf. figure 12c). Un joint de mastic noir permet de fixer défini-tivement la pièce sur le scintillateur et d’assurer l’étanchéité à la lumière (cf. figure 12d).

.

U N I O N D E S P R O F E S S E U R S D E P H Y S I Q U E E T D E C H I M I E156

Figure 12a :Pièce en PVC.

Figure 12b :Fixation du scintillateur.

Figure 12c :Centrage du scintillateur.

Figure 12d :Fixation par un joint

de mastic noir.Figure 12 : Assemblage d’un bloc de détection.

On insère alors le PM dans son logement jusqu’à ce qu’il vienne en butée sur latranche du scintillateur. On fixe ensuite, avec du mastic noir, la base du PM à la pièceen PVC. Notons que l’on peut aussi utiliser une colle ou une huile optique, entre le PMet le scintillateur, afin d’améliorer le transfert de lumière à cette interface. Un tel usagecomplique néanmoins le changement éventuel du PM en cas de panne, aussi s’en est-ondispensé.

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2.2.5. Haute tension des PM

La base du PM choisi doit être alimentée par une haute tension négative, en pratique– 1000 V, obtenue avec l’élévateur de tension G20 de marque EMCO (cf. figure 13a),que l’on peut se procurer auprès de la société Équipements scientifiques S.A. (127, ruede Buzenval - BP 26 - 92380 Garches), prix indicatif de 80 € TTC). Ce module élévateurest peu encombrant (moins de ) et très simple d’utilisation : sa tensiond’entrée de quelques volts, est élevée en sortie, à la tension de plusieurs centainesde volts, selon la relation :

On applique alors, en entrée du module élévateur, la basse tension régulée précédemmentdécrite , afin d’obtenir, en sortie, la haute tension d’alimentation de la base duPM, .

Ce module haute tension est isolé au sein d’un petit boîtier de sécurité (cf. figure 13b),comportant l’entrée 6 V et la sortie 1000 V sur une fiche isolée (cf. figure 5) (h).

– 1000U Vs =6U Ve =

–U U122000

s e=

Ue Us

4 4 1,6 cm3# #

U N I O N D E S P R O F E S S E U R S D E P H Y S I Q U E E T D E C H I M I E 157

Figure 13a : Module EMCO G20.Figure 13 : Haute tension.

Figure 13b : Boîtier de sécurité.

2.3. Discriminateur

Le discriminateur a été réalisé avec des composants électroniques simples, dont lefonctionnement est compréhensible par un élève de terminale scientifique. Le lecteur peut

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consulter pour approfondir des ouvrages d’électronique fondamentale analogique et numé-rique [8].

Les composants de base du discriminateur sont : le comparateur rapide AD8561, dedurée de montée 3,8 ns, qui est utilisé pour mettre en forme les signaux d’entrée et desortie, et les circuits logiques CMOS de la série rapide 74F, dont les temps de réponsesont de quelques nanosecondes.

2.3.1. Alimentation

La source basse tension du détecteur (6 V) doit être abaissée à 5 V afin de s’adapterà la tension de fonctionnement de la carte d’interface NI-USB6501. On utilise pour celale régulateur intégré de tension L4941, à très faible tension de seuil, monté selon le schémade la figure 14 ; les condensateurs électrolytiques et filtrant les parasites.C1 C2

U N I O N D E S P R O F E S S E U R S D E P H Y S I Q U E E T D E C H I M I E158

Figure 14 : Conversion 6 V - 5 V.

Figure 15 : Signaux en sortie d’un PM.

2.3.2. Seuil de détection

En sortie d’un PM, les signaux électriques créés par les particules rapides traversantle scintillateur, se présentent sous la forme d’impulsions de tension négatives ,d’amplitude comprise typiquement entre – 200 mV et – 2 V, et de durée maximale 10 ns(cf. figure 15).

– ( )u t 0<PM

L’impédance caractéristique de sortie du PM étant de 50 Ω, on évite la distorsion

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des impulsions en adaptant les impédances d’entrées du discriminateur par une résistancede 50 Ω, ou d’un oscilloscope de contrôle avec un T et un bouchon de 50 Ω. En l’ab-sence de cette adaptation, les impulsions s’étalent sur quelques dizaines de microse-condes !

L’entrée des voies A, B et I du discriminateur se compose des étages électroniquessuivants (cf. figure 16) : une résistance = 50 Ω d’adaptation d’impédance, des conden-sateurs et de capacité 100 nF qui découplent les signaux variables sortis du PMdes tensions stationnaires du circuit, un diviseur de tension constitué par les résistors

= = 12 kΩ et R de quelques kΩ, le comparateur AD8561.R7 R8

C4C3

R2

U N I O N D E S P R O F E S S E U R S D E P H Y S I Q U E E T D E C H I M I E 159

Figure 16 : Entrée du discriminateur.

Afin d’analyser le fonctionnement de ce circuit, appliquons le théorème de super-position. Considérons les sources stationnaires d’une part, et celle variable que constituele PM, d’autre part ; on obtient alors respectivement les deux circuits représentés sur lafigure 17.♦ On passive les sources variables (cf. figure 17a) : les condensateurs et secomportant comme des coupe-circuits, les courants d’entrée du comparateur, del’ordre du µA, étant négligeables, les potentiels et des entrées du comparateursont donnés par les relations habituelles des diviseurs de tension :

et d’où

étant la tension d’alimentation de 5 V. Puisque , la tension appliquée àl’entrée du comparateur est négative. En l’absence de signal du PM, le comparateurest en saturation basse (0 V) sur sa sortie Q et haute (5 V) sur son complémentaire .Le condensateur de 100 nF filtre les parasites sur les entrées d’alimentation VCCC5

Qr

–U 0<sUa

– – –V V R R RR U U– a s

7 8= + + =+V R R R

R R U– a7 8

7= + ++V R R R

R Ua7 8

7= + ++

V–V+

C4C3

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et 0 V du composant. L’entrée GNDdoit être reliée à la masse ; la borneLATCH, « verrou » en français, nonutilisée ici, est neutralisée par uneliaison à la masse.

♦ On passive les sources stationnaires(cf. figure 17b) : le résistor se retrouverelié à la masse. La fréquence caracté-ristique de variation d’une impulsionde tension issue du PM estassez élevée pour que les condensa-teurs se comportent comme des courts-circuits. En effet, comme les impul-sions ont une durée typique de 10 ns,la fréquence caractéristique vaut Hz,d’où une réactance négligeable devant lesimpédances du circuit. L’entrée du comparateur reçoit alors directement l’impulsionde tension du PM changée de signe : .Le résistor est alors en court-circuit, tandis que se retrouve en parallèle suret . La résistance équivalente de ces trois résistors vaut, pour :

L’impédance d’entrée reste adaptée à celle de sortie du PM.

La tension à l’entrée du comparateur est alors la superposition des tensionset (cf. figure 17) :

La sortie bascule de l’état haut à l’état bas lorsque devient positif, c’est-à-dire sil’amplitude de l’impulsion est suffisante : . Si le seuil n’est pas atteint, lecomparateur ne délivre aucune impulsion.

En pratique, le seuil est réglable grâce à plusieurs résistors permettant d’obtenirdifférentes valeurs de la résistance , que l’on sélectionne avec un interrupteur rotatifdouze pôles et quatre positions : quatre seuils sur trois voies nécessitant un total de douzerésistors. L’interrupteur permet de régler simultanément les trois voies d’entrée. Lesseuils adoptés sont donnés dans le tableau 1 (cf. page ci-contre). L’impulsion réelleobtenue, , est représentée sur la figure 18 (cf. page ci-contre).( )u tc

R

( )u t U>PM s

fQr

– – ( )V V U u t– s PMf = = ++

( )u tPM

–Usf

R R R R R1 1 1501

10001

120001 47

– –

2 7

1 1

2. .X= + + = + +l c bm l1R kX=RlR8

RR2R7

– ( )V V u t– PM=+

/ / ,C1 1 100 10 2 10 0 03– 9 8# # # #~ r X= =] g108

( )u tPM

U N I O N D E S P R O F E S S E U R S D E P H Y S I Q U E E T D E C H I M I E160

Figure 17a :Régime stationnaire.

Figure 17b :Régime variable.

Figure 17 : Circuits équivalents.

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2.3.3. Horloge à 20 MHz

Afin de combiner les signaux produits par les PM des différents blocs de détection,il est nécessaire d’obtenir des impulsions synchrones, c’est-à-dire cadencées par un signald’horloge. Le signal d’horloge est donné par un oscillateur intégré à quartz (cf. figure19a) fournissant des oscillations sinusoïdales de fréquence 20 MHz converties en créneauxpar une porte logique ET (circuit intégré 74F08) dont la seconde entrée est portée à latension haute 5 V (cf. figure 19b). Les signaux obtenus, de période 50 ns, nommés CLKpour clock (« horloge » en français), sont représentés sur la figure 19c.

U N I O N D E S P R O F E S S E U R S D E P H Y S I Q U E E T D E C H I M I E 161

Figure 19a :Quartz et portelogique ET.

Figure 19b :Schéma.

Figure 19c :Signaux d’horloge.

( )R kX 1 2 3,9 10( )U Vs 0,2 0,4 0,7 1,5

Figure 18 : Impulsion en sortie du comparateur.Tableau 1 : Valeurs de R et seuils correspondants.

2.3.4. Impulsions synchrones

Deux bascules JK, contenues dans le boîtier d’un circuit intégré 74F112, sont utili-sées pour cadencer les impulsions négatives asynchrones , issues du comparateur.( )u tc

Figure 19 : Horloge.

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La figure 20 précise le branchement à réaliser. Examinons le fonctionnement du systèmeen désignant simplement par 0, l’état bas et par 1 l’état haut.

U N I O N D E S P R O F E S S E U R S D E P H Y S I Q U E E T D E C H I M I E162

Figure 20 : Production d’impulsions synchrones avec deux bascules J et K.

La première bascule est mise à 1 grâce à son entrée asynchrone (borne 4), sur uneimpulsion négative (transition 1-0-1). Comme le précise la fiche technique du compo-sant, disponible sur http://www.alldatasheet.com, lorsque l’horloge passe à l’état 0 (frontd’horloge négatif) avec J à 0 et K à 1, la sortie passe à 0. Ainsi, la sortie bascule à 1 defaçon asynchrone, et revient à 0, de façon synchrone. C’est ce que l’on peut voir sur l’os-cillogramme de la figure 21a, où la fonction de rémanence a été activée afin de super-poser différentes traces produites par plusieurs impulsions successives. La courbe du hautest le signal d’horloge, celle du bas, la sortie de la bascule : les mises à 1 sont asynchrones,les mises à zéro sont synchrones.

La seconde bascule fonctionne en mode synchrone. La notice technique du compo-sant précise que sur un front d’horloge, lorsque l’entrée J est à 0 (aucune détection), lasortie est forcée à 0. En revanche, lorsque J est à 1, la sortie s’inverse ; elle passe aussià 1. Au prochain front d’horloge, la première bascule étant revenue à 0, la seconde yrevient à son tour : les mises à 1 et 0 sont synchrones (cf. figure 21b).

Figure 21a : Signaux en sortiede la première bascule.

Figure 21b : Signaux en sortiede la seconde bascule.

Figure 21 : Signaux en sortie.

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Ainsi, l’association de ces deux bascules permet de transformer une impulsion néga-tive asynchrone, de durée approximative 10 ns, en une impulsion synchrone de durée 50 ns.

2.3.5. Combinatoire des signaux

Les trois blocs de détection A, B et I subissent ce traitement électronique qui aboutità des impulsions synchrones positives. On peut alors réaliser diverses combinaisons,comme par exemple ne détecter les signaux issus que d’un seul bloc, détecter les coïn-cidences entre A et B ou encore celles entre A, B et I. Ces combinaisons sont simples àeffectuer en électronique numérique à l’aide de portes logiques.

Pour une grande variété de réglages, on a choisi la structure représentée sur lafigure 22 où l’on reconnaît les 8 bits de commande , , … et les entrées logiquesA, B et I associées aux blocs de détection.

s7s1s0

U N I O N D E S P R O F E S S E U R S D E P H Y S I Q U E E T D E C H I M I E 163

Figure 22 : Combinaison des signaux A, B et I.

La première opération logique, XOR NAND, effectue la combinaison NON(A XOR ),dont la table de vérité (cf. tableau 2) indique que l’on obtient à sa sortie, soit A si ,soit si : c’est un inverseur logique commandé.Ar s 01 =

s 11 =s1

A s1 A XOR s1 NON (A XOR )s11 1 0 10 1 1 01 0 1 00 0 0 1

La deuxième opération, qui est un OU logique avec le bit de commande , permetde neutraliser si on le souhaite, la voie A. En effet, en imposant , le résultat de l’opé-s 14 =

s4

Tableau 2 : Valeurs de R et seuils correspondants.

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ration est toujours 1, quelle que soit la valeur logique de A.Viennent ensuite des portes logiques ET combinant les voies entre elles, de sorties

C et D, puis deux nouveaux inverseurs suivis d’un ET final. Le tableau 3 indique lesvaleurs que doivent prendre les 8 bits afin de réaliser les combinaisons les plus intéres-santes. Des combinaisons plus élaborées, non décrites ici, peuvent nécessiter la mise àzéro des bits et . Précisons que les tensions 0 ou 5 V, qui paramètrent les bits à, sont délivrées par l’interface NI-USB6501, commandée par le logiciel de pilotage

décrit ci-après (cf. § 2.4.).s7

s0s7s0

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Mode de détection s0 s1 s2 s3 s4 s5 s6 s7Détecteur A 1 1 1 1 0 1 1 1Détecteur B 1 1 1 1 1 0 1 1Détection de muons [A et B] 1 1 1 1 0 0 1 1A sauf muons [A et non B] 1 1 0 1 0 0 1 1B sauf muons [B et non A] 1 0 1 1 0 0 1 1Détecteur I 1 1 1 1 1 1 0 1Détection de muons [A et B et I] 1 1 1 1 0 0 0 1Détection de muons [A et I] 1 1 1 1 0 1 0 1Détection de muons [B et I] 1 1 1 1 1 0 0 1Pertes de muons [A et B et non I] 1 1 1 0 0 0 0 1Tableau 3 : Valeurs des bits de commande pour les principales combinaisons des blocs de détection.

2.3.6. Sortie compteur

Les impulsions synchrones de 50 ns des signaux combinés sont trop brèves pourpouvoir déclencher le compteur de l’interface NI-USB6501, aussi est-il nécessaire de lesporter à au moins 150 ns. Pour cela, on utilise le verrou de sortie (LATCH) d’un autrecomposant AD8561. Tant qu’une tension dite de verrouillage, supérieure à un seuillimite , est appliquée sur l’entrée LATCH du composant, ce dernier conserveson état de sortie, quel que soit l’état des entrées.

Le dispositif dont le schéma est donné sur la figure 23a (cf. page ci-contre), réaliseune temporisation en verrouillant la sortie grâce à un circuit RC (précisément )comportant une diode (cf. figure 24a, page ci-contre).D1^ h

R C11 6

0,6U Vv .

uv

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♦ Sur l’entrée – du comparateur, on reconnaît un pont diviseur qui permet d’imposer lepotentiel , les résistances étant identiques. Puisque les impulsions synchronespositives sont appliquées sur l’entrée +, la sortie Q, en absence de verrouillage, bascu-lerait sur le front montant à l’état haut, et sur le front descendant à l’état bas. Onretrouverait les mêmes impulsions en sortie qu’en entrée et le système n’aurait alorsaucune utilité.

♦ En l’absence d’impulsion en entrée, la sortie Q étant à l’état bas, la tension deverrouillage est nulle. Lorsqu’une impulsion se présente à l’entrée, le front montantest celui d’un échelon de tension appliqué au circuit RC : le courant, et donc la tensionaux bornes du résistor, est discontinu. La décroissance est exponentielle, de duréecaractéristique (cf. figure 24b). Tandis que le condensateur se charge, la diodedemeure bloquée ; elle ne joue donc à ce stade, aucun rôle. Tant que la tensionappliquée sur le verrou est supérieure au seuil , la sortie Q reste verrouillée sur saUv

uvRCx =

uv

2,5V V– =

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Figure 23a : Circuit. Figure 23b : Signaux.Figure 23 : Allongement des impulsions.

Figure 24a : Montage. Figure 24b : Tension de sortie.Figure 24 : Circuit RC de verrouillage.

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valeur haute (5 V). Lorsque le seuil est atteint, l’impulsion d’entrée étant achevée, lasortie non verrouillée retombe à sa valeur basse (potentiel nul) : le condensateur sedécharge rapidement à travers la diode devenue passante.Comme le compteur déclenche sur les fronts descendants, on récupère des impul-

sions allongées négatives sur la sortie . En prenant comme valeur et, on obtient en pratique des durées d’environ 200 ns (cf. figure 23b) suffi-

santes pour déclencher le compteur.

2.3.7. Sorties DEL et buzzer

Lorsqu’une particule est détectée, il est intéressant de produire un petit flash lumi-neux à l’aide d’une DEL ainsi qu’un bref signal audio avec un buzzer à oscillateurintégré. Au préalable, il faut ajouter un circuit de temporisation supplémentaire quiallonge cette fois considérablement les impulsions afin de les rendre perceptibles. Enprenant et , et en choisissant la sortie Q du nouvel AD8561, ongénère des impulsions positives d’environ 33 ms.

Le circuit amplificateur à transistor 2N1711 représenté sur la figure 25, permet à laDEL (de résistance de protection 100 Ω) et au buzzer de fonctionner.

1C Fn=R 51 kX=

100C C pF6= =3,3R R k11 X= =Qr

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Figure 25 : Buzzer et DEL.

2.4. Logiciel de mesure et d’analyse

Le logiciel de pilotage du détecteur, spécialement conçu par l’auteur de cet articleest libre de droits. Il fonctionne sous Windows XP et Vista. Son interface est représentéesur la figure 26 (cf. page ci-contre) et nécessite l’installation préalable des pilotes gratuitsNI-DAQmx téléchargeables sur le site de la société National Instruments (3).

2.4.1. Réglages du détecteur

Les champs de saisie du panneau permettent de régler les paramètres géométriques

(3) http://www.ni.com

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du détecteur (dimension et distances des scintillateurs), l’angle zénithal de visée (0° pourune visée au zénith), le seuil de détection tel qu’il est réglé sur le détecteur, ainsi que laconfiguration de la mesure (combinatoire des signaux).

Le panneau permet d’enregistrer les coordonnées géographiques, l’altitude et latempérature à laquelle s’effectue la mesure.

2.4.2. Fenêtre temporelle de mesure

À l’aide du panneau, on règle la durée des fenêtres de comptage (1 s ici), le nombrede tirages (1000 ici), ainsi que le nombre de mesures à effectuer automatiquement (10dans cet exemple).

2.4.3. Statistiques de la distribution

Le panneau indique en temps réel l’état de la mesure et les dernières valeursenregistrées. Le champ « coups dans la fenêtre » indique le nombre de détections effec-tuées dans la dernière fenêtre de comptage (1 s ici). Le graphique donne l’évolution deces valeurs au cours du temps.

La valeur moyenne des coups enregistrés est donnée, en diverses unités, sur lepanneau , dont le nombre moyen de coups par minutes sur le détecteur. L’histogramme

U N I O N D E S P R O F E S S E U R S D E P H Y S I Q U E E T D E C H I M I E 167

Figure 26 : Logiciel de mesure et d’analyse.

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de ces coups, qui se construit en temps réel, est donné par le graphique . Le graphique, rappelle la distribution obtenue à l’issue de la dernière série de mesures, la courberouge étant un ajustement de cette distribution par une loi de Poisson de moyenne égaleà celle des échantillons enregistrés (cf. annexe 3).

L’évolution de la moyenne et de l’écart type des mesures s’affiche en temps réel surle panneau ; le rapprochement de la moyenne et de l’écart type témoignant d’une statis-tique poissonienne.

2.4.4. Simulation

Un mode de simulation peut être sélectionné à l’aide du panneau , ce qui permetd’effectuer des tirages théoriques ultra-rapides obéissant à une loi de Poisson dont l’ac-tivité simulée est réglable. On peut alors facilement constater les fluctuations statistiquesdes résultats de tirages successifs.

2.4.5. Enregistrement des données

Le panneau permet d’enregistrer les données dans un fichier texte, les champsétant séparés par des caractères de tabulation afin de pouvoir facilement s’adapter à unelecture par un tableur.

3. UTILISATION DU DÉTECTEUR

3.1. Intérêt pédagogique d’un détecteur de muons

Voici quelques aspects pédagogiques intéressants dans la réalisation et l’utilisationd’un détecteur de muons. Sur le plan expérimental :♦ le renforcement d’un savoir-faire en électronique analogique ;♦ la découverte de l’électronique numérique ;♦ la familiarisation avec les phénomènes physiques aléatoires et les incertitudes statis-tiques ;

♦ l’analyse scientifique de l’influence de divers paramètres sur le flux de muons mesuré(direction de visée, altitude, température, tensions d’alimentation…).

Sur le plan fondamental :♦ la découverte des rayons cosmiques et de quelques-unes de leurs propriétés ;♦ la présentation du muon qui est une particule du modèle standard ;♦ la découverte d’un effet purement relativiste : la relativité du temps.En outre, les éléments de culture scientifique inhérents au domaine ouvrent sur :♦ l’astrophysique des hautes énergies ;♦ la cosmologie (fond diffus cosmologique, échelles de distance, d’énergie, …) ;♦ la physique des particules élémentaires (classification, interactions, …) ;♦ les programmes internationaux (LHC, AUGER, …).

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Illustrons ces aspects par quelques exemples dont certains peuvent servir de pointde départ d’un TPE de première, être approfondis dans un club de physique, être déve-loppés en vue d’un concours de type Olympiades de Physique France, ou encore, inspirerun TIPE en CPGE.

3.2. Électronique analogique [tout niveau]

La mise au point du discriminateur réclame le contrôle fréquent des signaux nonpériodiques du circuit avec un oscilloscope. Le réglage de cet appareil sur ce type designaux est un excellent exercice pour en acquérir la maîtrise : synchronisation, échellede temps, fréquence de déclenchement, observation d’impulsions, etc.

3.3. Électronique numérique [niveau première]

On peut proposer la construction ou la vérification de la table de combinaison (cf.tabeau 3, pages précédentes) des signaux issus des blocs de détection avec les bits decommande , , …, , et à cette occasion, découvrir les portes logiques élémentaires.Le câblage de ces portes sur une plaque d’essai ne présente aucune difficulté offrant l’op-portunité et l’occasion d’explorer les fiches techniques fournies par les constructeurs,source essentielle d’informations en électronique.

3.4. Fluctuations statistiques [niveau première]

Une fois assemblé, le détecteur peut mesurer le flux des muons qui le traverse :où est le nombre de coups enregistrés et la durée de l’enregistrement.

En relançant une mesure, on observe que le résultat diffère, signe du caractère aléatoiredu phénomène. Il est alors instructif de simuler un grand nombre d’enregistrements et dereprésenter la distribution obtenue (cf. figure 27) afin d’évaluer l’incertitude due auxfluctuations statistiques. Sur la figure, environ.2,5 mincoups –

e1$dU =

edU

TeNe/N Te e eU =eU

s7s1s0

U N I O N D E S P R O F E S S E U R S D E P H Y S I Q U E E T D E C H I M I E 169

Figure 27 : Distribution de 5000 valeurs simulées du flux de muons à travers le détecteur.eU

Page 28: Article paru dans le BUP 103 de février 2009

Réalisation d’un détecteur de muons : une approche… Le Bup no 911 (1)

3.5. Distribution de Poisson [niveau terminale]

Le programme de mathématiques de terminale S aborde la loi binomiale, dont la loide Poisson est un prolongement naturel (cf. annexe 3).

Le logiciel de mesure détermine le flux en sommant les nombres de coupsenregistrés dans n intervalles successifs de durée appelés « fenêtres de comp-tage » (cf. figure 28a). Ainsi :

puisque

Si la probabilité par unité de temps d’enregistrer un muon est indépendante du temps,alors les nombres sont les réalisations successives d’une variable aléatoire qui suitune loi de Poisson (cf. annexe 3). La distribution des , donne au facteur multi-plicatif près , la probabilité d’obtenir N coups pendant la durée T :

avec

désignant la moyenne de X, égale à , sa variance.

Le logiciel construit l’histogramme en temps réel, c’est-à-dire, en mettant àjour la liste des au fur et à mesure des nouvelles acquisitions, et permet d’observerla convergence de la moyenne et de la variance de l’échantillon vers la même limite

(cf. figure 28b). Une fois la mesure achevée, l’histogramme est ajusté par une loimx x2v=

Nk

Nk

( )h N

x2vmx

!–Pr expX N N

m mPoisson

xN

x= =] ^g h( ) Prh N N X Ne Poisson" =] gPr X NPoisson =] gNe

Nk( )h NXNk

N Ne kk

n

1=

=/nT N1

e kk

n

1U =

=/

/T T ne=NkeU

U N I O N D E S P R O F E S S E U R S D E P H Y S I Q U E E T D E C H I M I E170

Figure 28 : Distribution de Poisson.

Figure 28a : n acquisitions de coups dansdes fenêtres d’enregistrement de durée T.

Nk Figure 28b : Histogramme deset moyenne et variance de l’échantillon statistique.

Nk( )h N

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Vol. 103 - Février 2009 Christophe LAGOUTE

de Poisson. La qualité de cet ajustement valide l’hypothèse de l’indépendance temporellede la densité de probabilité d’enregistrer un muon, analogue à la loi de décroissanceradioactive.

3.6. Fluctuations statistiques [niveau terminale]

Le nombre de coups enregistrés pendant la durée , est, lui aussi, la réalisationd’une variable aléatoire Y de loi poissonienne, de moyenne et de variance .Lorsque est élevée, ce qui commence typiquement à partir de 5, la loi de Poissontend vers une loi gaussienne de moyenne et variance identiques ; en pratique, lors d’unemesure, est de l’ordre de quelques centaines ou milliers.

L’incertitude due aux fluctuations statistiques sur la mesure de à , qétant un nombre entier, est donc :

En supposant la convergence vers la loi normale atteinte, les valeurs q = 1, 2 ou 3 corres-pondent à des intervalles de confiance respectifs = 68,3 %, = 95,5% et = 99,7 % ;l’intervalle de confiance donnant le pourcentage de l’échantillon statistique contenudans l’intervalle .

On en déduit l’encadrement de la mesure de et son incertitude relative :

et

qui décroît en ; la mesure est donc d’autant plus fiable qu’elle comporte un nombreélevé de coups.

Dans les simulations précédentes (cf. figure 27), effectuées avec une durée d’acqui-sition , pour lesquelles , le flux moyen de la distribution et sonincertitude à un sigma valent :

et

ce qui donne bien l’écart type de la gaussienne qui ajuste la distribution (cf. figure 27).

3.7. Coïncidences fortuites [niveau terminale]

Les muons ne sont pas les seules particules à produire des signaux dans les détec-

, minN 1667100 2 45/ /

–e

e

e1 1 2 1 2

1d UU= = =min1000

1667 60 100 –e

1#U = =

m 1667y =1000T se =

1/N /e1 2

Nq/

e

q e

e1 2

d

U

U =TN

TN

TN q T

N /

ee

e

e

q e

e

e

e

e1 2

! !d

U = =

eU

– ,m q m qy y y yv v+7 AIq

I3I2I1

N q qm qN/ /q e y y e

1 2 1 2.d v= =

q yvNeNq ed

my

my

my y2v =my

Ne Te

U N I O N D E S P R O F E S S E U R S D E P H Y S I Q U E E T D E C H I M I E 171

Page 30: Article paru dans le BUP 103 de février 2009

Réalisation d’un détecteur de muons : une approche… Le Bup no 911 (1)

teurs. La radioactivité naturelle, essentiellement , provoque un nombre de coups typi-quement dix fois plus important que les muons. Quant au bruit du PM, il est à l’originede faux événements dont la fréquence est d’autant plus élevée que le seuil de détectionchoisi est bas. On s’attend donc à observer une petite quantité de coïncidences, ditesfortuites, dues, non à des muons, mais à des signaux qui se produisent dans les détec-teurs, par hasard, dans un intervalle de temps inférieur à la fenêtre temporelle de détec-tion . Ces coïncidences fortuites représentent une fraction du taux de comptageque l’on peut évaluer de la façon suivante.

Supposons que la fréquence moyenne de détection des muons soit , etcelle du bruit, . La probabilité qu’il ne se produise aucun événement dû au bruitdans un bloc pendant , est (cf. annexe 2) : . Celle qu’il se produiseau moins un événement dans chacun des n blocs de détection (n = 1, 2 ou 3), dans cemême intervalle temporel est donc :

Puisqu’en pratique, , cette expression devient, en développant l’exponentielle :

Ainsi, lors d’une acquisition de durée , le nombre moyen d’événements fortuitsvaut :

En comparant ce résultat au nombre moyen de muons détectés, on trouve la frac-tion de coïncidences fortuites pour une détection à n blocs :

À deux blocs, on atteint 1 % de coïncidences fortuites avec un bruit dont la fréquencemoyenne est :

d’où

ce qui est très au-dessus du bruit constaté, au plus de quelques dizaines de hertz au seuilde détection le plus bas.

50 10 1001 447 Hz–b 9# #

m = =T1001

m

b d2

m

m =

TT T T– –

fm e

bn

dn

e

m

bn

dn1 1

fm

m

m

m= =

ff

Tm em

N TT p T T–

fd

ef b

ndn

e1m= =

NfTe

– –p T T1 1f b dn

b dn. m m=^ ^h h7 A

T 1b d %m

– – –expp p T1 1fn

b dn

0 m= =^ ^h h7 A

pf–expp Tb d0 m= ^ hTd

p0bm

1Hzmm =

50T nsd =

–b

U N I O N D E S P R O F E S S E U R S D E P H Y S I Q U E E T D E C H I M I E172

Page 31: Article paru dans le BUP 103 de février 2009

Vol. 103 - Février 2009 Christophe LAGOUTE

3.8. Distribution angulaire zénithale[tout niveau, développements en CPGE]

En pointant le détecteur dans une direction formant un angle avec le zénith (cf.figure 29a), on observe que le flux reçu varie (cf. figure 29b). Cette variation s’ajustebien à une loi de proportionnalité en qui résulte de la combinaison de plusieursphénomènes [9] :♦ la variation de la longueur du chemin parcouru par les muons avec l’angle de visée :l’épaisseur d’atmosphère traversée dépendant de ;

♦ la perte d’énergie lors de la traversée de l’atmosphère ;♦ la désintégration des muons ;♦ le spectre initial d’énergie des muons.On peut envisager la réalisation d’un modèle incluant ces différents paramètres en CPGEet permettant de restituer cette loi empirique.

i

cos2i

i

U N I O N D E S P R O F E S S E U R S D E P H Y S I Q U E E T D E C H I M I E 173

Figure 29a : Angle zénithal. Figure 29b : Flux mesuré, interpolé par une loi en .cos2iFigure 29 : Visée en dehors du zénith.

3.9. Flux total de muons [niveau CPGE]

Le flux total de muons n’est pas égal au flux mesuré par le détecteur. Eneffet, le détecteur ne peut déceler que les muons dont les trajectoires intersectent lessurfaces des scintillateurs des deux blocs A et B (cf. figure 30a, page ci-après). On définitalors l’efficacité géométrique du détecteur par le rapport :

La détermination de nécessite la notion d’angle solide, qui ne figure plus auprogramme en CPGE ; une présentation aux élèves de cette notion est donc indispen-sable. Le calcul analytique de est complexe, aussi, vaut-il mieux recourir à une simu-gf

gf

gm

efU

U=

eUmU

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Réalisation d’un détecteur de muons : une approche… Le Bup no 911 (1)

lation informatique, plus simple, à l’aide d’un logiciel de calcul numérique. La méthodeest la suivante :♦ tirer aléatoirement la position de l’impact d’un muon sur le détecteur B ;♦ tirer aléatoirement la direction incidente de ce muon ;♦ déterminer si la trajectoire coupe le détecteur A et compter les muons détectés, parmiun total élevé de muons incidents ( par exemple).Les variables x et y sont tirées au sort avec des lois de densité de probabilité

uniformes sur leurs domaines de variation respectifs , (cf. figure30b). La densité de probabilité de la variable aléatoire d’angle zénithal doit suivre laloi de variation du flux en .cos2 i

i

– / , /L L2 26 @– / , /l l2 26 @

106

U N I O N D E S P R O F E S S E U R S D E P H Y S I Q U E E T D E C H I M I E174

Figure 30a : Muons détecté et non détecté. Figure 30b : Simulation par tirage aléatoire.Figure 30 : Efficacité géométrique du détecteur.

La densité volumique élémentaire demuons dont la direction d’incidence est comprisedans l’angle solide élémentaire ,étant l’azimut, s’écrit (cf. figure 31) :

où est une constante. Si est le champ devitesse des muons incidents, le courant volu-mique élémentaire de muons dont la direction d’incidence est dans l’angle solides’écrit :

avecles muons étant ultra-relativistes. Le flux à travers l’élément de surface des muonsdont la direction d’incidence est dans l’angle solide est égal au flux du courant volu-dX

Sd

v c.i] gJ n vd d v i i= ] ]g gdXJd

v i] gn0

cosn nd dv 02i i X=] g

z

sind d di i zX =

dnv

Figure 31 : Densité volumique de muons.

Page 33: Article paru dans le BUP 103 de février 2009

Vol. 103 - Février 2009 Christophe LAGOUTE

mique à travers cette surface :

n étant la normale de l’élément . On obtient le flux total en intégrant sur le demi-espace et sur la surface S du détecteur :

où et sont les densités de probabilité angulaires normalisées respectivement azimu-tale et zénithale :

et

L’angle est donc tiré au sort selon une loi uniforme sur . On montre par ailleurs,que la variable aléatoire de densité de probabilité s’obtient à partir d’une variablealéatoire uniforme sur , avec : .

Sur la figure 32, on a représenté l’inverse de l’efficacité géométrique pourdifférentes valeurs de la distance d entre les scintillateurs et donné un ajustement poly-nomial de cette relation. Pour d = 30 cm, on trouve , ce qui signifie que seulsdes muons qui traversent le détecteur B, atteignent le détecteur A.

,0 43g .f

/1 gf

arccos /1 4H K= ] g,0 16 @K

pi

H

,0 2r6 @pz

cos sinp 4 3 i i=i

p 21r

=z

pi

pz

cos sinn Sc n Sc p p2d d d d/m 0

30 0

2

0

2i i i z

ri zU = =

z

r

i

r

i z= =# # #

Sd

J n cosS dn c Sd d d dm v$ i iU = = ] g

U N I O N D E S P R O F E S S E U R S D E P H Y S I Q U E E T D E C H I M I E 175

Figure 32 : Efficacité géométrique du détecteur en fonction de la distanceentre les scintillateurs A et B.

3.10. Variation du flux avec l’altitude [tout niveau]

Le flux de muons varie avec l’altitude. On peut effectuer des mesures en rendant ledétecteur mobile, par exemple en utilisant des batteries 6 V comme sources de tension,ou en utilisant un convertisseur stabilisé 220 V qui fonctionne sur la prise de l’allume-

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Réalisation d’un détecteur de muons : une approche… Le Bup no 911 (1)

cigare d’un véhicule (cf. figure 33).

U N I O N D E S P R O F E S S E U R S D E P H Y S I Q U E E T D E C H I M I E176

Figure 33 : Mesures en montagne.

Les mesures obtenuesdans les Pyrénées jusqu’à2400 m d’altitude ont étéportées sur la figure 34.Les altitudes ont été rele-vées sur une carte IGNTop 25 des Pyrénées, puiscomparées avec cellesdonnées par Google Earth ;l’écart constaté est infé-rieur à 10 m, d’où un posi-tionnement altimétriquesatisfaisant.

Le flux de muons croît avec l’altitude z, ce qui constitua historiquement une preuve,ainsi que nous l’avons vu, de l’origine extraterrestre du rayonnement reçu. Les donnéess’ajustent convenablement à la loi exponentielle suivante :

3.11. Relativité du temps [niveau CPGE]

Comme nous l’avons vu, c’est l’effet relativiste de la dilatation des durées quijustifie la présence des muons au niveau du sol ; la durée de vie d’un muon dans leréférentiel terrestre étant reliée à celle dans son référentiel propre par :

pp

x c

x= l

px

xl

– . , ,exp minzz z99 0 378

1 2 65avec coups et km, ,–

e e e00

01

0U U U= = = =c m

Figure 34 : Mesures dans les Pyrénées.

Page 35: Article paru dans le BUP 103 de février 2009

Vol. 103 - Février 2009 Christophe LAGOUTE

Supposons que le flux enregistré soit assimilable à un faisceau incident monoéner-gétique d’énergie . La loi de désintégration étant exponentielle, la réduction de lapopulation de muons au cours du temps lors du trajet dans l’atmosphère, entre deuxinstants et de passage dans le référentiel terrestre en des points d’altitudes respec-tives et (cf. figure 35) est donnée par :

Si l’on néglige la perte d’énergie le long du trajet des muons, la distance parcourues’écrit :

les muons étant ultra-relativistes. On en déduit l’expression de la variation de la popula-tion avec l’altitude :

L’énergie du faisceau est donc :

soit environ 1/2 GeV, à comparer aux quelques GeV des muons reçus. L’écart provientde l’hypothèse simpliste d’un faisceau monoénergétique. Un modèle plus élaboré, danslequel on tiendrait compte de l’étalement énergétique du faisceau, s’impose ; cetteapproche monoénergétique a toutefois le mérite d’en établir les fondements.

E , 106,8 430m c cz m c 3 10 2 2 10

2650 MeV–p

2 0 28 6# # #

#c x= = = =n n

–expN z N z zz z

1 20

1 2=^ ^ dh h n z c p0 c x=

– – –z z v t t c t t1 2 2 1 2 1# #.= l l l l^ ^h h

– –expN t N t t tp

2 12 1x

=l ll

l l^ ^ eh h oz2z1

t2lt1l

E

U N I O N D E S P R O F E S S E U R S D E P H Y S I Q U E E T D E C H I M I E 177

Figure 35 : Trajet de muons en incidence zénithale.

REMERCIEMENTS

Je tiens à remercier José BUSTO, physicien du Centre de physique des particules deMarseille (CPPM), dont les conseils ont été une aide indispensable à la réalisation de cedétecteur, et avec qui les discussions scientifiques furent un grand plaisir. La délégationrégionale Midi-Pyrénées du CNRS et son département de communication ont joué un

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Réalisation d’un détecteur de muons : une approche… Le Bup no 911 (1)

rôle important, d’accompagnement et de financement du projet, à travers la structure deCLUB CNRS. J’adresse enfin mes sincères remerciements à Mme Évelyne CANCELLARA,adjointe technique de laboratoire au lycée Bellevue de Toulouse, qui, avec talent, a jouéun rôle important dans la réalisation mécanique et le câblage du détecteur et remercie lesrelecteurs Serge CASTAING, Francis LAVERNHE et Olivier PUJOL pour leur travail.

BIBLIOGRAPHIE

[1] LEPRINCE-RINGUET L. Les rayons cosmiques. Albin Michel, 1945.[2] AUGER P. et al., CR Aca. des Sc., 1938, 206, 1721.[3] Élémentaire, n° 3, IN2P3, (http://elementaire.web.lal.in2p3.fr/).[4] BELLOTTI R. et al., Phys. Rev. D, 1996, 53, 1.[5] FRISH D. H. et SMITH J. H., Am. J. Phys., 1963, 31, 342.[6] PÉREZ J.-Ph. Relativité et invariance. Dunod, 2005.[7] CRONIN J., GAISSER T.K. and SWORDY S.P., Sci. Amer., 1997, 276, 44.[8] PÉREZ J.-Ph. et al. Électronique. Dunod, 2006.[9] CASTAGNOLI C. et al. Nuovo Cimento Della Societa Italiana Di Fisica A, 1984, 82,

(1).

U N I O N D E S P R O F E S S E U R S D E P H Y S I Q U E E T D E C H I M I E178

Christophe LAGOUTEDocteur es astrophysiqueProfesseurLycée BellevueToulouse (Haute-Garonne)

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Vol. 103 - Février 2009 Christophe LAGOUTE

Annexe 1Classement des particules élémentaires

U N I O N D E S P R O F E S S E U R S D E P H Y S I Q U E E T D E C H I M I E 179

Figure 36 : Classement des particules élémentaires.

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Réalisation d’un détecteur de muons : une approche… Le Bup no 911 (1)

Annexe 2Loi de décroissance exponentielle

Densité de probabilité

Un événement aléatoire, dont la probabilité par unité de temps qu’il se réalise estindépendante du temps, est décrit par une variable aléatoire dont la densité de proba-bilité suit la loi de décroissance exponentielle :

Citons par exemple l’instant de détection d’un muon mesuré depuis un instant originearbitraire, la durée qui sépare l’arrivée de deux muons, et celle entre l’instant de détec-tion d’un muon et celui de sa désintégration.

Afin d’établir ce résultat, écrivons la probabilité que l’événement se produiseentre l’instant origine et , un petit intervalle de temps (cf. figure 37) :

La probabilité qu’il se réalise, dans un même intervalle de durée, entre les instantset , k étant un nombre entier, vaut aussi , puisqu’elle est indépendante

du temps :–p p p1k

k0 0= ^ h

p0k t1 D+] gk tDp0l

Prp k t k t p1< <0 0D C D= + =l ]^ g htD

p0

( ) –expg t tm m= ] g( )g t

C

m

U N I O N D E S P R O F E S S E U R S D E P H Y S I Q U E E T D E C H I M I E180

Figure 37 : Découpage d’un intervalle temporel de durée T en n intervalles de durée .tD

Calculons la probabilité de ne pas observer d’événement avant l’instant ,et de l’observer avant l’instant . La probabilité de non réalisation dans un inter-valle étant , celle de sa réalisation valant , s’écrit :

En faisant tendre vers zéro, on en déduit la densité de probabilité de à l’ins-tant t :

avec k ttD

=( ) –lim limg t tp t1 /

tk

tt t

0 0m m

DD= =

" "D D

D] g

C( )g ttD

–p p p1kk

0 0= ^ hpkp0– p1 0tD

k t1 D+] gt k tD=pk

Page 39: Article paru dans le BUP 103 de février 2009

Vol. 103 - Février 2009 Christophe LAGOUTE

Puisque , en posant et , on en déduit la relation recher-chée : .

Moyenne et variance

La valeur moyenne d’une loi exponentielle est facile à déterminer :

Un calcul analogue permet d’établir l’expression de la variance : .

Probabilité de réalisation

La probabilité de réalisation de l’événement dans un intervalle de durée T est :

celle qu’il ne se réalise pas valant : .–exp Tm] g

/exp limx x n1nn= +

"3] g /n t1 D= –x m=

– – –( )Pr exp expT t t Tg t t 1dd<expTT

00m mmC == =] ] ]g g g##

/12 2v m=

– –( ) – –exp expexpt t tt g t t t t t t 1d d d0 00 0

# m mm mm

m

mC = = = + =3 33

3] ] ]g g g< F# ##

( ) –expg t tm m= ] g

U N I O N D E S P R O F E S S E U R S D E P H Y S I Q U E E T D E C H I M I E 181

Page 40: Article paru dans le BUP 103 de février 2009

Réalisation d’un détecteur de muons : une approche… Le Bup no 911 (1)

Annexe 3Loi de Poisson

La variable aléatoire X donnant le nombre de réalisations de dans un intervallede durée T, suit une loi de Poisson, du nom du mathématicien français Siméon POISSONdu XIXe siècle, dont l’expression est la suivante :

qu’on se propose de démontrer.La densité de probabilité de réalisation d’un premier événement à l’instant t est

donnée par l’expression exponentielle (cf. annexe 2) :

Plus généralement, la densité de probabilité de réalisation d’un k ème événement àl’instant t est donnée par la fonction d’Erlang, du nom du mathématicien danois AgnerERLANG du début du XXe siècle :

dont on vérifie facilement qu’elle s’identifie à lorsque .Afin d’établir cette relation récurrente, supposons-la vérifiée au rang k et détermi-

nons la densité de probabilité de la réalisation du ème événement à l’ins-tant t. Si est la variable aléatoire donnant l’instant de réalisation de l’événementk, de densité de probabilité , le prochain événement se produira au bout d’une duréedonnée par la variable aléatoire , de densité de probabilité . Ces deux variables

étant indépendantes, s’écrit :

La probabilité que l’événement ait lieu avant l’instant t est donc :

l’intégrale double portant sur le domaine défini par (cf. figure 38a, page ci-contre). En explicitant, on trouve :

– ! – –Pr exp expt k t t t1 d d< – –

k

k

t

tkk

k k

t t1

01

0k

kmm mx xC C+ =

x

+

= =^ ] ^ ]h g h g# #

t t<k x+D

– ! –Pr expt g t g t k t t t1d d d d<D D

–k k k k

k

kk

k k

11# x x

mm x xC C+ = = +

+^ ^ ] ] ^h h g g h7 A# #

k 1+

,g tk k1 x+ ^ h,g t g t gk k k k1 #x x=+ ^ ^ ]h h g

g x] gCx

g tk k^ htkkC

k 1+] g( )g tk 1+

k 1=( )g t

( ) – ! –expg t k t t1–

k

kk 1m

m= ] ]g g

( ) –expg t tm m= ] g

! –Pr expX k kT TPoisson

kmm= =] ] ]g g g

C

U N I O N D E S P R O F E S S E U R S D E P H Y S I Q U E E T D E C H I M I E182

Page 41: Article paru dans le BUP 103 de février 2009

Vol. 103 - Février 2009 Christophe LAGOUTE

qui donne, en intégrant sur :

La densité de probabilité s’obtient en dérivant cette expression parrapport à t :

ce qui établit la relation d’Erlang.On peut alors calculer la probabilité qu’il se produise k événements dans

un intervalle de durée T, probabilité égale au produit de celle qu’il se produise k événe-ments avant un instant , par celle que le ème se déroule à l’issue d’une duréetelle que :

le domaine d’intégration étant représenté sur la figure 38b. En intégrant sur , onobtient :

c’est-à-dire, la loi de Poisson.! –– ! –Pr expexpX k t kT Tk t T1 d–

k

k

kk

t

T k1

0k

mm

mm= ==

=] ] ] ] ]g g g g g#

xDl

–Pr expX k t g t tg t g d d d dD –k k k kt

T

T tk k 0k k

# x m mx xm x= == 3

x= =l

] ^ ] ^ ]g h g h g# ##

t T>k x+x

k 1+t T<k

Pr X k=] g

( ) – –! – ! –exp expg t k t t kt t k t t1

– –k

k

kk

kk

k kk

11 1

1mm m

mm= + =+

+

] b ] ]g l g g

( ) ,g t g tk k k1 1 x=+ + ^ h– – – –! – – – ! –exp expexp expk t t t k

t tt t k t t1 1d d– –k

kkt

k kk

k

k

kkt

k1

01

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U N I O N D E S P R O F E S S E U R S D E P H Y S I Q U E E T D E C H I M I E 183

Figure 38a : Se déroulant avant t. Figure 38b : Dont un se réalise avant T,l’autre, après.

Figure 38 : Domaines d’intégration associés à deux événements.