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ACTUALITÉ 2 Prise d’acte : effet de la démission Demande de report de l’entretien préalable de licenciement : faut-il dire oui ? Remise tardive du certificat de travail : quelle sanction ? Convocation à un entretien préalable : avec ou sans grief ? DOSSIER 5 Les organisations syndicales au cœur de la réforme du droit du travail LE POINT SUR 7 La procédure de recouvrement de cotisations sociales COURRIER DES LECTEURS 9 Il y a quelques mois, nous vous avions relaté le cas de ce chef d’entreprise américain qui avait augmenté la rémunération de plusieurs milliers de ses salariés après avoir lu l’ou- vrage de Thomas PIKETTI « le Capital au XXI e siècle ». Aujourd’hui, ce même PDG vient d’avoir une autre idée lumineuse. En effet, il vient de proposer au personnel de sa société d’améliorer leur pouvoir d’achat s’ils prouvent qu’ils dorment au moins 7 heures par nuit ! « Si nos employés peuvent prouver qu’ils dorment sept heures ou plus pen- dant vingt nuits consécutives, nous leur donnons 25 dollars par nuit avec un plafond de 500 dollars par an ». La logique du dispositif est simple : « être actif sur le lieu de travail et prendre les meilleures décisions est une des règles de base de l’entreprise. Vous ne pouvez pas y être préparé si vous êtes à moitié endormi ». Pour appréhender la « performance » nocturne, les volontaires ont été dotés de bracelets connectés qui collectent leurs données personnelles. Ces dernières sont ensuite centralisées, synchronisées et analysées via une application numérique de l’entreprise. Les premiers résultats seraient très encourageants, la productivité individuelle aurait augmenté de 69 minutes par mois. Cette histoire à dormir débout pourrait prêter à sourire si elle n’était pas significative d’une nouvelle tendance lourde. De plus en plus d’entreprises utilisent des objets connectés pour surveiller l’activité de leurs salariés. De nombreuses voix commencent à s’élever pour dénoncer une nouvelle forme d’atteinte à la vie privée. À ce titre, il semble que notre législation sociale soit très prochainement enrichie d’un « droit à la déconnexion » qui serait opérationnel à titre expérimental dès le 1 er janvier 2017. À suivre ! Philippe LAFONT, Consultant en droit social Une histoire à dormir debout N° 179 - 2 e trimestre 2016 Découvrez TISSOT FORMATION Formations pratiques et opérationnelles www.tissot-formation.fr FORMATION l CONSEIL

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ACTUALITÉ 2• Prise d’acte : effet de la démission • Demande de report de l’entretien préalable de

licenciement : faut-il dire oui ? • Remise tardive du certificat de travail : quelle

sanction ?• Convocation à un entretien préalable : avec ou sans

grief ?

DOSSIER 5• Les organisations syndicales au cœur de la

réforme du droit du travail

LE POINT SUR 7• La procédure de recouvrement de cotisations

sociales

COURRIER DES LECTEURS 9

Il y a quelques mois, nous vous avions relaté le cas de ce chef d’entreprise américain qui avait augmenté la rémunération de plusieurs milliers de ses salariés après avoir lu l’ou-vrage de Thomas PIKETTI « le Capital au XXIe siècle ».

Aujourd’hui, ce même PDG vient d’avoir une autre idée lumineuse. En effet, il vient de proposer au personnel de sa société d’améliorer leur pouvoir d’achat s’ils prouvent qu’ils dorment au moins 7 heures par nuit !« Si nos employés peuvent prouver qu’ils dorment sept heures ou plus pen-dant vingt nuits consécutives, nous leur donnons 25 dollars par nuit avec un plafond de 500 dollars par an ».La logique du dispositif est simple : « être actif sur le lieu de travail et prendre les meilleures décisions est une des règles de base de l’entreprise. Vous ne pouvez pas y être préparé si vous êtes à moitié endormi ».Pour appréhender la « performance » nocturne, les volontaires ont été dotés de bracelets connectés qui collectent leurs données personnelles. Ces dernières sont ensuite centralisées, synchronisées et analysées via une application numérique de l’entreprise. Les premiers résultats seraient très encourageants, la productivité individuelle aurait augmenté de 69 minutes par mois. Cette histoire à dormir débout pourrait prêter à sourire si elle n’était pas significative d’une nouvelle tendance lourde. De plus en plus d’entreprises utilisent des objets connectés pour surveiller l’activité de leurs salariés. De nombreuses voix commencent à s’élever pour dénoncer une nouvelle forme d’atteinte à la vie privée. À ce titre, il semble que notre législation sociale soit très prochainement enrichie d’un « droit à la déconnexion » qui serait opérationnel à titre expérimental dès le 1er janvier 2017. À suivre !

Philippe LAFONT,Consultant en droit social

Une histoire à dormir debout

N° 179 - 2e trimestre 2016

Découvrez

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Actualité

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Social Métallurgie Actualités - 2e trimestre 2016 - N° 179

Prise d’acte : effet de la démission

La prise d’acte permet au salarié de mettre fin à son contrat de travail en raison de manquements graves qu’il vous reproche. Il lui revient de saisir les juges afin qu’ils statuent sur les effets de la rupture : ceux d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse ou ceux d’une démission. Dans cette dernière situation, le salarié doit verser une indemnité compensatrice de préavis.

Prise d’acte de la rupture du contrat de travail : définitionLa prise d’acte de la rupture du contrat de travail est un mode de rupture réservé au salarié lorsqu’il vous reproche d’avoir commis des manquements graves.Le salarié saisit le conseil de prud’hommes afin qu’il sta-tue sur les effets de la rupture.

Notez-le Lorsque le conseil de prud’hommes est saisi d’une telle demande, l’affaire est directement portée devant le bureau de jugement, qui statue au fond dans un délai d’un mois suivant sa saisine.

Si les juges estiment que vos manquements sont suffi-samment graves pour empêcher la poursuite des relations contractuelles, la rupture produit les effets d’un licencie-ment sans cause réelle et sérieuse.Si au contraire, les juges estiment que les manquements ne sont pas suffisamment graves pour empêcher la pour-suite des relations contractuelles, la rupture produit les effets d’une démission.

Prise d’acte de la rupture du contrat de travail : les effets d’un licenciement et d’une démissionDans le cas d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse, vous devrez notamment verser au salarié les indemnités suivantes :– l’indemnité légale ou conventionnelle de licenciement ; – les indemnités compensatrices de congés payés et de

préavis ; – l’indemnité pour licenciement sans cause réelle et

sérieuse.Dans le cas où la rupture produit les effets d’une démis-sion, le salarié est redevable d’un préavis de démission et donc il doit vous verser une indemnité compensatrice de préavis de démission.Cour de cassation, chambre sociale, 31 mars 2016, n° 14-28217

Demande de report de l’entretien préalable de licenciement : faut-il dire oui ?

Pour pouvoir sanctionner un salarié, il faut respecter la procédure disciplinaire à commencer par la convo-cation de ce dernier à un entretien préalable. Mais si le salarié vous demande de reporter l’entretien préa-lable, êtes-vous tenu d’accepter ?

Entretien préalable de licenciement : convocation du salariéLa convocation du salarié à un entretien préalable se fait par lettre recommandée avec accusé de réception (LRAR) ou lettre remise en main propre contre décharge datée et contresignée par le salarié.Cette lettre doit notamment indiquer :– l’objet de l’entretien ;– la date et l’heure ;– le lieu ;– la possibilité pour le salarié de se faire assister par une

personne de son choix appartenant à l’entreprise ou, en l’absence d’institutions représentatives du personnel, par un conseiller extérieur.

Attention, un délai de 5 jours ouvrables doit être respecté entre la présentation de la lettre de convocation à entre-tien préalable et l’entretien lui-même.

Entretien préalable de licenciement : demande de report du salariéIl peut arriver que le salarié, lorsqu’il reçoit la convocation à l’entretien, demande un report de date.La loi ne vous oblige pas à accéder à une demande de report de l’entretien préalable. Si votre convention collec-tive ne vous l’impose pas non plus, vous êtes donc libre de maintenir la date de l’entretien préalable et de conti-nuer la procédure de licenciement même si le salarié ne se présente pas à l’entretien. Tout sera en pratique une question de circonstances (le report est-il ou non gênant pour vous ? Le salarié a-t-il un vrai empêchement ? Est-il nécessaire pour vous d’entendre les explications du sala-rié lors de l’entretien ?).

Notez-leSi vous décidez toutefois de reporter l’entretien, sachez que vous n’avez pas à reprendre toute la procédure mais seulement à informer le salarié, par tout moyen, des nouvelles dates et heures de l’entretien. En outre, lorsque le report de l’entretien

Apprentissage - Si un contrat d’apprentissage est annulé, le jeune travailleur peut prétendre au paiement des salaires sur la base du SMIC ou du salaire minimum conventionnel avec application des abattements d’âge pour la période où le contrat a pu être exécuté (Cass. soc., 22 mars 2016, n° 15-10.530). CDD d’usage - Les secteurs d’activité dans lesquels des CDD d’usage peuvent être conclus sont ceux correspondant à l’activité principale de l’entreprise (Cass. soc., 17 mars 2016, n° 14-20.813). CDI (Contrat de travail à durée indéterminée) - Lorsqu’il y a requalification de CDD successifs en CDI, les allocations de chômage ne sont pas prises en considération dans le calcul des rappels de salaire (Cass. soc., 16 mars 2016, n° 15-11.396).

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Social Métallurgie Actualités - 2e trimestre 2016 - N° 179

préalable se fait à la demande du salarié, le délai de 5 jours ouvrables court à compter de la présentation de la lettre initiale de la convocation.

Cour de cassation, chambre sociale, 6 avril 2016, n° 14-28.815

Remise tardive du certificat de travail : quelle sanction ?

Jusqu’à présent, la Cour de cassation considérait que le moindre retard dans la remise du certificat de travail causait nécessairement au salarié un préjudice qu’il convenait de réparer par des dommages et intérêts. Mais elle vient de changer d’avis…

Certificat de travail : une obligation de mise à dispositionLe certificat de travail est un document que vous devez tenir à la disposition du salarié lors de son départ de l’en-treprise, quelle qu’en soit la cause. Il permet au salarié de prouver qu’il est libre de tout engagement et de postuler ainsi auprès d’un autre employeur.En revanche, vous n’avez aucune obligation de le lui envoyer : si le salarié souhaite l’obtenir, il doit venir le récupérer. Par sécurité, il est conseillé d’informer le salarié que son certificat est à disposition sur son lieu de travail.Pour des raisons pratiques, vous pouvez toutefois choisir de transmettre le certificat au salarié :– par voie postale (lettre recommandée avec AR) avec

les autres documents de fin de contrat : reçu pour solde de tout compte, attestation Pôle emploi, etc. Conservez alors un exemplaire que vous tenez à disposition du salarié ;

– par remise en mains propres : faites alors signer une décharge au salarié dans laquelle il reconnaît avoir reçu ce document.

Certificat de travail : les risques d’une remise tardiveLe certificat de travail doit être remis au salarié à l’expira-tion du contrat, c’est-à-dire à la date de la rupture défini-tive de son contrat (Code du travail, art. L. 1234-19).

Notez-leSi vous dispensez votre salarié d’effectuer son préa-vis, le certificat de travail doit comporter comme date de fin de contrat, le dernier jour de la période de pré-avis non travaillé.

Si vous tardez à remettre ce document au salarié, il pourra vous faire condamner à lui délivrer sous astreinte.Depuis plusieurs années, la Cour de cassation considé-rait également que la remise tardive du certificat de travail causait nécessairement un préjudice au salarié, réparé par l’octroi de dommages et intérêts.Mais elle vient d’atténuer cette position estimant que l’exis-tence d’un préjudice et l’évaluation de celui-ci relèvent du pouvoir souverain d’appréciation des juges du fond. Le salarié doit donc apporter des éléments prouvant son préjudice pour être indemnisé (par exemple, ne pas avoir obtenu un travail faute d’avoir pu prouver qu’il était libéré de son ancien travail).

Notez-leLa Cour de cassation a jugé dans cette affaire qu’il en allait de même en cas de délivrance tardive du bulletin de paie : le préjudice doit être prouvé. Elle ne s’est en revanche pas prononcée sur le cas de l’attestation Pôle emploi. Jusqu’à présent, pour cette dernière aussi, le préjudice était automatique en cas de retard même si le salarié avait pu être indemnisé par Pôle emploi. D’autres cas de figure pourraient également être touchés (défaut de mention de la priorité de réembauche en cas de licenciement éco-nomique, absence de mention de la convention col-lective dans le bulletin, etc.). À suivre !

Cour de cassation, chambre sociale, 13 avril 2016, n° 14-28.293

Convocation à un entretien préalable : avec ou sans grief ?

Dès lors que vous envisagez de licencier un sala-rié, vous devez, sauf exception, le convoquer à un entretien préalable. Suite à des décisions de justice condamnant des employeurs à verser des dommages et intérêts à leurs salariés parce qu’ils n’avaient pas précisé les griefs reprochés dans la lettre de convo-cation, la position de la Cour de cassation était très attendue sur cette question : la convocation doit-elle préciser les griefs reprochés au salarié ?

Convocation à un entretien préalable de licenciement : mentions obligatoiresLa convocation à un entretien préalable est adressée au salarié par lettre recommandée avec accusé de réception ou remise en main propre contre décharge.

Clause de mobilité - Si le salarié refuse d’exécuter son préavis sur son nouveau lieu de travail en application d’une clause de mobilité, il ne perçoit pas les indemnités compensatrices de préavis et de congés payés afférents (Cass. soc., 31 mars 2016, n° 14-19.711). Clause de non-concurrence - Est licite la clause de non-concurrence limitée à une durée d’un an sur le territoire de la Corse et comportant une contrepartie financière s’élevant au quart du salaire moyen des 6 derniers mois (Cass. soc., 31 mars 2016, n° 14-29.865). Comité d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail (CHSCT) - Commet le délit d’entrave, l’employeur qui consulte le CHSCT alors que la décision de réorganisation était en cours de mise en œuvre (Cass. crim., 30 mars 2016, n° 13-81.784). Discrimination - Est victime d’une discrimination en raison de son état de santé le salarié n’ayant pas perçu un supplément de rémunération au motif que l’appréciation de ses compétences était difficile en raison de ses nombreuses absences pour maladie (Cass. soc., 11 mars 2016, n° 15-10.615)

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Social Métallurgie Actualités - 2e trimestre 2016 - N° 179

La lettre de convocation doit indiquer la date, l’heure et le lieu de l’entretien.Elle doit aussi mentionner la possibilité offerte au salarié de se faire assister pendant son entretien. Il peut se faire assister par une personne de son choix appartenant au personnel de l’entreprise ou, en l’absence d’institutions représentatives dans l’entreprise, par un conseiller du salarié (Code du travail, art. R. 1232-1).

Convocation à un entretien préalable : doit-elle préciser les griefs reprochés au salarié ?La lettre de convocation indique également l’objet de l’en-tretien entre le salarié et l’employeur (Code du travail, art. L. 1232-2). Mais aucune disposition du Code du travail ne vous impose de préciser les griefs reprochés au salarié.Il faut savoir qu’une décision de la cour d’appel de Paris de mai 2014 et qu’un jugement du conseil de prud’hommes d’Evreux, en mai 2015, avaient sanctionné des employeurs pour ne pas avoir précisé les faits fautifs reprochés au salarié dans la convocation à un entretien préalable.Ils fondaient notamment leur décision sur l’article 7 de la convention OIT n° 158 relatif aux droits de la défense : « Un licenciement ne peut intervenir avant que le salarié ait eu la possibilité de se défendre contre les allégations formulées par son employeur ». En n’ayant pas l’informa-tion avant leur entretien préalable, les salariés ne pou-vaient pas préparer leur défense.On attendait la position de la Cour de cassation sur le sujet. C’est chose faite. Pour elle, la convocation à l’entre-tien préalable n’a pas à préciser les griefs reprochés au salarié.

En effet, l’énonciation de l’objet de l’entretien dans la lettre de convocation et la tenue de l’entretien préalable au cours duquel le salarié, qui a la faculté d’être assisté, peut se défendre contre les griefs formulés par l’employeur, satisfont à l’exigence de loyauté et du respect des droits du salarié. L’entretien préalable se tient régulièrement sans violer les droits de la défense du salarié.En bref, pas de référence aux griefs dans la lettre de convocation à l’entretien préalable.Cour de cassation, chambre sociale, 6 avril 2016, n° 14-23.198

Forfait jours - La convention de forfait doit obligatoirement indiquer le nombre de jours travaillés dans l’année, à défaut, elle n’est pas valable (Cass. soc., 16 mars 2016, n° 14-28.295). Grève - Recourir à des contrats précaires pour remplacer des salariés grévistes expose l’entreprise et l’employeur, personne physique, à une sanction pénale (Cass. crim., 1er mars 2016, n° 14-86.601). Indemnité compensatrice de préavis - L’employeur n’est pas tenu de verser au salarié une indemnité de préavis lorsque ce dernier est dans l’impossibilité d’exécuter sa prestation de travail du fait d’un arrêt maladie (Cass. soc., 11 mars 2016, n° 15-11.443). Licenciement d’un salarié protégé - Comme pour les autres salariés la rupture du contrat de travail d’un salarié protégé peut aussi intervenir lorsque, à la suite d’une absence de longue durée ou d’absences fréquentes et répétées, la situation cause de graves perturbations au fonctionnement de l’entreprise, et rend nécessaire le remplacement effectif et définitif du salarié (CE, 9 mars 2016, n° 378129). Licenciement nul - Un employeur ne peut pas procéder au licenciement d’un salarié en représailles d’une action de justice introduite par ce dernier. Ce licenciement est frappé de nullité (Cass. soc., 16 mars 2016, n° 14-23.589). Maladie - Le fait qu’un salarié soit placé en arrêt maladie sous le régime des « sorties dites libres » ne l’exonère pas d’informer son employeur de son adresse permettant le cas échéant de réaliser une contre-visite médicale (Cass. soc., 16 mars 2016, n° 14-16.588). Médecin du travail - Les préconisations formulées par le médecin du travail s’imposent à l’employeur. En effet, l’employeur tenu à une obligation de sécurité de résultat en matière de protection de la santé et de la sécurité des salariés placés sous sa subordination juridique est tenu d’agir de manière concrète afin de satisfaire aux exigences médicales (Cass. soc., 2 mars 2016, n° 14-19.639). Reclassement - Les propositions de reclassement faites par l’employeur à un salarié déclaré physiquement inapte ne doivent pas obligatoirement être écrites (Cass. soc., 31 mars 2016, n° 14-28.314). Résiliation judiciaire - Le défaut de paiement, pendant une période limitée d’un complément de salaire lié au commissionnement sur les ventes n’est pas suffisamment grave pour empêcher la poursuite du contrat de travail et ne justifie donc pas la résiliation judiciaire du contrat aux torts de l’employeur (Cass. soc., 9 mars 2016, n° 15-10.804). Salaire minimum interprofessionnel de croissance (SMIC) - Un préjudice est nécessairement causé au salarié lorsque l’employeur manque à son obligation de paiement d’une rémunération au moins égale au SMIC (Cass. soc., 17 mars 2016, n° 14-22.121). Travail dissimulé - Le caractère intentionnel de la dissimulation peut résulter du paiement des heures supplémentaires en partie sous forme de primes (Cass. soc., 23 mars 2016, n° 14-21.772).

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Actualité conventions collectivesMétallurgie – Ingénieurs et cadres (n° 3025)Salaires, primes et indemnités - Accord du 28 janvier 2016 relatif aux appointements annuels minimaux garan-tis à partir de l’année 2016Accords nationaux (n° 3109)Ce trimestre cette convention collective n’a pas fait l’ob-jet d’actualisation. Par contre, plusieurs conventions col-lectives locales ont été mises à jour.Pour une consultation intégrale de vos conventions collec-tives et une meilleure prise en compte des actualisations (les conventions collectives sont mises à jour au quotidien sur Internet), nous vous conseillons de les consulter depuis votre espace abonné www.editions-tissot.fr et de vous inscrire aux alertes conventions collectives pour être informé par mail dès que vos conventions ont fait l’objet d’une actualisation (service compris dans votre abonnement).

Pour toute information complémentaire, n’hésitez pas à contacter notre service relation clientèle au 04 50 64 08 08.

Dossier

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Les organisations syndicales au cœur de la réforme du droit du travail

Par Delphine Witkowski, juriste en droit social

Social Métallurgie Actualités - 2e trimestre 2016 - N° 179

À l’occasion des vives discussions sur le projet de loi Travail, les syndicats ont rappelé leur rôle dans la concertation sociale au niveau national. Pourtant, au niveau de l’entreprise, les modes de négociation collective issus de la loi Rebsamen permettent plus facilement à l’employeur de conclure un accord col-lectif sans délégué syndical. Comment se situent les syndicats dans ce nouveau paysage ?

Le projet de loi Travail réaffirme le rôle de la négociation collective en droit du travail

Le projet de loi Travail renforcerait la prééminence de la négociation collective d’entrepriseInitialement, l’accord de branche s’imposait à l’accord d’entreprise, qui devait en respecter les principes et ne pouvait y déroger que dans un sens plus favorable pour les salariés.Cette architecture a été remise en question, puisque la loi n° 2004-391 du 4 mai 2004 relative au dialogue social permet aux accords d’entreprise de déroger aux accords de branche postérieurs au 6 juillet 2004 dans un sens plus défavorable pour les salariés, tant que ces accords ne l’interdisent pas. Les accords sur les salaires, les classifications, la mutua-lisation des fonds de la formation et la prévoyance restent toutefois préservés de toute dérogation moins avanta-geuse pour les salariés.Le projet de loi visant à instituer de nouvelles libertés et de nouvelles protections pour les entreprises et les actifs dit « loi Travail » va plus loin dans cette logique. Il érige en principe, en matière de durée du travail, que l’accord d’entreprise a vocation à poser les règles, alors que l’ac-cord de branche ne s’appliquerait qu’à défaut d’accord d’entreprise.Ce projet s’inscrit dans une évolution plus globale impul-sée en 2015 par le rapport de Denis Combrexelle et du comité présidé par Robert Badinter, qui défendent l’élar-gissement de cette prééminence de l’accord d’entreprise à d’autres domaines du droit du travail.La loi n’interviendrait plus qu’à titre supplétif, c’est-à-dire à défaut d’accord d’entreprise et d’accord de branche. La négociation collective est donc renforcée comme fonde-ment du droit du travail français, ce qui ne peut que satis-faire a priori les organisations syndicales qui disposent du monopole de la négociation avec l’employeur.

Les nouvelles heures de délégation pour accroître les moyens d’action des syndicatsAutre bonne nouvelle pour les syndicats : ces derniers verraient augmenter le nombre d’heures de délégation que les délégués syndicaux peuvent utiliser pour leurs dif-férentes missions syndicales dont celles liées à la prépa-

ration des négociations collectives ou à la négociation en tant que telle à un niveau autre que celui-ci de l’entreprise (pour mémoire, le temps passé à la négociation dans l’en-treprise n’est pas décompté des heures de délégation). Cette progression de l’ordre de 20 % est détaillée à la fin de cet article.

Mais le monopole des syndicats dans la négociation collective n’est plus intact

Le nouveau critère de l’accord majoritaire peut rendre plus difficile la négociation Depuis la loi du 4 mai 2004, dans une entreprise ou un éta-blissement disposant de délégués syndicaux, un accord collectif est valide s’il remplit de façon cumulative les deux conditions suivantes :− être signé par un ou plusieurs syndicats ayant recueilli

au moins 30 % des suffrages exprimés au premier tour des dernières élections des membres titulaires du comité d’entreprise, de la délégation du personnel ou, à défaut, des délégués du personnel ;

− ne pas avoir fait l’objet, dans les 8 jours de sa notifi-cation, de l’opposition d’une ou plusieurs organisations représentatives non signataires de l’accord et ayant recueilli la majorité des suffrages exprimés (soit 50 % + 1 voix) lors de ces mêmes élections (peu importe le nombre de votants).

Le projet de loi Travail modifierait le seuil exigé de suf-frages recueillis par les syndicats signataires au premier tour des dernières élections professionnelles, pour le por-ter de 30 % des voix à 50 % des voix.Concrètement, il sera donc plus difficile pour les syndicats d’entreprise de réunir l’audience nécessaire pour pouvoir signer et faire appliquer un accord d’entreprise dont ils seraient signataires.Ce nouveau seuil est certes prévu pour le moment pour les seuls accords négociés en matière de durée du tra-vail, mais il pourrait être étendu à d’autres domaines de négociation.S’ils réunissent le seuil de 30 % des suffrages exprimés au premier tour des dernières élections (ce même seuil aujourd’hui exigé pour la signature de l’accord), les syn-dicats pourraient soumettre l’accord au référendum des salariés à la majorité des suffrages exprimés. L’autonomie syndicale dans la négociation d’entreprise serait de ce fait relativisée.

La « loi Rebsamen » a ouvert les possibilités de négo-cier sans délégué syndicalLa négociation collective n’était déjà plus l’apanage exclu-sif des syndicats depuis la loi n° 2008-789 du 20 août 2008 relative à la démocratie sociale.

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Social Métallurgie Actualités - 2e trimestre 2016 - N° 179

En effet, cette dernière avait mis en place des possibilités pour l’employeur de pallier l’absence de délégué syndical dans l’entreprise, lorsqu’il souhaitait négocier sur un sujet exigeant un accord collectif, en négociant avec les repré-sentants du personnel ou avec un salarié mandaté par un syndicat.Néanmoins, ces facultés étaient conditionnées par un seuil d’effectif de 200 salariés et l’employeur ne pouvait pas conclure d’accord d’entreprise sur une thématique pour laquelle la loi ne prévoyait pas de mise en œuvre par accord collectif.La loi n° 2015-994 du 17 août 2015 relative au dialogue social et à l’emploi, dite « loi Rebsamen » a déverrouillé cette situation. Toutes les entreprises sans condition d’ef-fectif peuvent maintenant négocier un accord collectif avec les élus du personnel. Elles peuvent également négocier avec un salarié mandaté en présence de représentants élus, si ceux-ci ne veulent pas négocier.Surtout, il est maintenant possible de négocier des accords collectifs d’entreprise avec les élus du personnel sur des thèmes pour lesquels la loi n’exige pas d’accord, dès lors qu’ils sont mandatés par un syndicat et que le texte est approuvé par la majorité des salariés.Sans remettre donc en cause le monopole du délégué syndical qui reste l’interlocuteur obligé de l’employeur pour négocier, la loi permet de contourner plus facilement son absence via le mandatement, ce qui peut à terme limi-ter la motivation de salariés pour briguer un mandat de délégué syndical.

Un paysage syndical amené à évoluer à court terme

La nouvelle mesure de la représentativité syndicale patronale Du côté de la représentation syndicale des salariés, les cinq grandes fédérations, la CGT, la CFDT, la CGT-FO, la CFE-CGC et la CFTC, se sont vu confirmer en 2013 leur représentativité aux niveaux national et interprofession-nel. Les adhérents de ces organisations sont donc néces-sairement des interlocuteurs légitimes pour négocier des accords collectifs.Mais la négociation collective exige aussi la représenta-tivité des interlocuteurs patronaux. Cette dernière résulte

notamment de l’application de 6 critères, dont l’audience, qui se mesure en fonction du nombre d’entreprises adhé-rentes et selon les niveaux de négociation.La mesure de l’audience a suscité de nombreuses discus-sions du fait que le nombre d’entreprises adhérentes ne prend pas en compte l’effectif de ces entreprises. Le projet de loi Travail propose de pallier cette lacune en intégrant la prise en compte du nombre de salariés de l’entreprise à hauteur de 80 % dans l’appréciation de l’audience.Une nouvelle mesure de la représentativité des organisa-tions syndicales patronales commencera au mois de juin 2016 pour s’achever en mars 2017 par la publication des arrêtés de représentativité.L’enjeu est de taille pour les organisations patronales, car l’équilibre des forces entre syndicats conditionne l’attribu-tion de fonds paritaires pour leur fonctionnement. Par ailleurs, le résultat de cette mesure déterminera le nouveau paysage dans le cadre duquel se dérouleront notamment les futures négociations de branche.

La réduction à venir du nombre d’accords de brancheSuite au constat que de nombreuses branches profes-sionnelles n’ont peu ou pas d’activité de négociation ou représentent aujourd’hui trop peu de salariés, le gouver-nement s’est donné pour objectif de réduire leur nombre de façon radicale.Celles-ci passeraient de plus de 700 à ce jour à 400, puis à 200 dans les 3 ans de la publication de la loi Travail.Il s’agit concrètement d’une fusion de branches, car les salariés représentés par ces branches seront « réaffec-tés » à d’autres branches professionnelles actives, qui devront en conséquence modifier par avenant leur champ d’application.L’enjeu est de taille pour les syndicats, qui représenteront mécaniquement au sein de chaque branche, un nombre d’entreprises et de salariés accrus, avec un nouvel équi-libre entre les différentes organisations du fait de l’intégra-tion de ces nouveaux effectifs.Les années à venir éprouveront donc la faculté des orga-nisations syndicales à s’adapter aux nouveaux équilibres sociaux et à conserver leur place dans l’entreprise dans le nouveau contexte juridique de négociation.

L’évolution prévisible des heures de délégation des délégués syndicaux : ›

Effectifs de l’entreprise Nombre d’heures de délégation actuelles (C. trav. art. L. 2143-13)

Nombre d’heures de délégation prévues par le projet de loi Travail (art.17)

De 50 à 150 salariés 10 heures 12 heures

De 151 à 499 salariés 15 heures 18 heures

De 500 à 999 salariés 20 heures + 10 heures allouées à la section syndicale

24 heures + 12 heures allouées à la section syndicale

À partir de 1000 salariés 20 heures + 15 heures allouées à la section syndicale

24 heures + 18 heures allouées à la section syndicale

Vous faites l’objet d’une procédure de recouvrement des cotisations sociales suite aux conclusions d’un contrôle de l’URSSAF ou à un retard de paie-ment. Si cette mise en demeure de payer dans le mois qui suit reste sans effet, l’URSSAF procède au recouvre-ment forcé de la dette.Pouvez-vous contester le redres-sement de cotisations sociales ? La procédure de recouvrement vous impose-t-elle de prendre un avocat ? De quels droits disposez-vous et quelles sont les obligations qui s’im-posent à vous ?

La bonne méthode

Étape 1 - Réagir dès la phase précontentieuse de la procédure pour éviter le recouvrement forcé des cotisations sociales

Vous recevez une mise en demeureLa procédure de recouvrement débute par la réception d’une mise en demeure. Celle-ci vous est adressée par lettre recommandée avec accusé de réception, et précise les charges sociales visées (nature, périodes, montant, taux, assiette), et les délais et voies de recours.

AttentionVous devez absolument aller retirer la lettre recommandée avec accusé de réception ! Si vous la refusez ou si vous ne la réclamez pas, elle sera considérée malgré tout comme vous ayant été remise et la procédure se poursuivra. Idem si elle revient avec les men-tions « N’habite pas à l’adresse indiquée » ou « Parti sans laisser d’adresse », car vous aviez l’obligation d’informer l’URSSAF de votre changement d’adresse.

Sachez que la procédure de recou-vrement ne concerne en général que vos charges sociales des trois dernières années civiles qui pré-

cèdent son envoi, plus l’année en cours (cette durée de recouvrement peut être portée à cinq ans en cas de travail illégal). Ainsi, peuvent être incluses, dans un contrôle effectué au cours de l’année N, les cotisations exigibles à partir du 15 janvier de N-3 (et à partir du 15 janvier N-5 en cas de travail illégal).

Vos moyens d’actionLe mieux est de régler votre dette le plus rapidement possible : cela sus-pendra le cours des majorations de retard et vous permettra de demander leur remise gracieuse.Vous pouvez également demander des délais de paiement : dans ce cas, les majorations vont continuer à cou-rir, mais elles pourront être remises quand votre échéancier sera terminé.Vous pouvez contester la mise en demeure en saisissant la commis-sion de recours amiable (CRA) dans le mois, à condition de présenter des arguments sérieux.Un avocat n’est pas obligatoire et la procédure est gratuite (lettre recom-mandée avec AR au président de la CRA de l’URSSAF concernée). Votre recours doit être clairement motivé, pièces à l’appui (les pièces citées dans votre lettre doivent être numé-rotées et les copies jointes classées suivant le même ordre).En cas de rejet de votre demande par la CRA (par courrier ou par silence d’un mois), vous pouvez là encore régler votre dette ou décider de saisir le tribunal des affaires de la Sécurité sociale (TASS).Si vous avez plusieurs établissements dépendant d’URSSAF différentes et que celles-ci leur appliquent des solutions divergentes, vous pouvez saisir l’ACOSS (par lettre recomman-dée avec accusé de réception), qui a autorité sur l’ensemble des URSSAF pour leur imposer une application homogène de la réglementation.Saisine du TASS : le recours doit être effectué dans les deux mois de la décision de la CRA (en cas de silence de la CRA, dans les trois mois qui suivent sa saisine). Un avocat n’est

pas obligatoire (vous pouvez toutefois être représenté par un avocat si vous le souhaitez). Le recours se fait :− par demande déposée au secréta-

riat du tribunal (la lettre de la CRA indique le TASS compétent) ;

− par lettre recommandée avec accu-sé de réception au secrétariat du tribunal.

Vous devez contester, pièces à l’ap-pui, les motifs de redressement. Si la décision du tribunal vous est défavo-rable, vous pouvez éventuellement encore la discuter, à condition plus que jamais d’avoir en main des élé-ments très sérieux et confirmés par un conseil juridique (voir Notre conseil) :− devant la cour d’appel si le mon-

tant du litige est supérieur à 4000 euros ;

− sinon devant la Cour de cassation.

Étape 2 - Poursuivre la procédure lors de la phase de recouvrement forcé

Si vous ne vous êtes pas opposé à la mise en demeure et que vous n’avez pas payé votre dette, ou si vous avez fait opposition à la mise en demeure, mais que la CRA, puis éventuellement le TASS, ont rejeté votre demande, l’URSSAF dispose alors de cinq ans pour vous adresser une contrainte (à compter de la fin du mois qui suit l’envoi de la mise en demeure).

ExempleVous avez reçu le 15 janvier de l’an-née N une mise en demeure portant sur des cotisations et majorations de retard au titre du 4e trimestre de N-2.

Action en recouvrement par contrainte : du 15 février de l’année N au 15 février de l’année N+5.

Vous recevez alors une contrainte par courrier recommandéElle précise la nature de la dette, le montant des cotisations réclamées et la période à laquelle elles se rapportent, et indique la référence de la ou des mise(s) en demeure successive(s). Elle ne peut pas porter sur des sommes supérieures à ces

Le point sur...

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La procédure de recouvrement de cotisations sociales

Social Métallurgie Actualités - 2e trimestre 2016 - N° 179

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dernières. La contrainte vaut juge-ment et va permettre à l’URSSAF de procéder à une saisie.

Vos moyens d’actionLe mieux est encore et toujours de régler votre dette, éventuellement dans le cadre de délais de paiement. Mais vous pouvez aussi, si vous avez là encore des arguments sérieux, la contester devant le TASS en faisant une « opposition à contrainte », dans les quinze jours de sa signification :− soit par inscription au secrétariat du

tribunal (TASS) ;− soit par lettre recommandée avec

AR au secrétariat du tribunal, en joignant une copie de la contrainte.

Votre opposition doit être motivée : elle sera irrecevable si vous indiquez seulement que vous contestez le montant des cotisations réclamées, sans avancer aucune raison à l’appui. Vous devez contester, pièces à l’ap-pui, les motifs de redressement (s’il s’agit d’un contrôle, vous reprendrez les arguments déjà indiqués dans votre réponse à l’inspecteur).Le TASS peut valider la contrainte ou annuler les sommes dues (en partie ou en totalité). Dans le 1er cas, vous pouvez encore saisir la cour d’appel ou la Cour de cassation (selon le montant du litige).

Éviter les erreursSi vous ignorez les injonctions de paiement de l’URSSAF, des majo-rations de retard s’accumuleront à chaque mois de retard et ne pour-ront pas être remises tant que vous n’aurez pas payé la totalité des coti-sations dues. Si vous rencontrez des difficultés de paiement, demandez plutôt un échéancier de paiement par simple courrier motivé : les URSSAF accordent des délais dans 80 % des cas si la demande est fondée et l’en-treprise viable. L’échéancier suspen-dra le cours des poursuites.

Les sanctions possibles En cas de non-paiement des cotisa-tions aux dates d’exigibilité, les majo-rations de retard sont égales à 5 % des cotisations dues (10 % en cas de travail illégal), auxquelles s’ajoute une majoration de 0,4 % par mois dès le 1er mois de retard.

En cas de redressement suite à un contrôle, cette majoration de 0,4 % par mois ne court qu’à compter du 1er février de l’année suivant la période redressée.Si l’URSSAF considère qu’il y a « abus de droit », c’est-à-dire acte volontaire pour échapper au paie-ment de tout ou partie des cotisations dues, la pénalité est de 20 % des coti-sations et contributions dues (l’abus de droit ne peut toutefois pas s’appli-quer si l’entreprise avait recouru, sur le point litigieux, au rescrit social ou à l’arbitrage de l’ACOSS).L’employeur qui n’est pas à jour du paiement des cotisations au 31 décembre d’une année est privé de l’attestation annuelle délivrée par l’URSSAF et nécessaire pour concou-rir aux marchés publics (toutefois, l’entreprise ayant obtenu des délais de paiement et qui respecte l’échéan-cier fixé reçoit cette attestation).Si l’URSSAF constate un délit de tra-vail dissimulé pour non-déclaration de salarié, elle peut calculer les coti-sations mensuelles dues au titre de ce salarié sur une base forfaitaire de 25 % du plafond annuel de Sécurité sociale (soit 9854 euros en 2016).Le redressement est majoré de 25 % en cas de constat de travail dissimulé en cas de récidive dans les 5 ans (40 % lorsque les faits sont commis à l’égard de plusieurs personnes ou d’une personne dont la vulnérabilité ou l’état de dépendance sont appa-rents ou connus).

Notre conseil Devant les tribunaux, votre bonne foi sera une condition nécessaire, mais non suffisante, et vous devrez être en mesure d’avancer des pièces jus-tificatives. Vous aurez intérêt au pré-alable à prendre conseil sur le plan juridique, car vous risquez d’alourdir considérablement votre dette par les majorations de retard (qui continue-ront à courir malgré vos recours), des pénalités supplémentaires et des frais de justice. Il n’est donc pas judicieux de contester par entêtement ou pour gagner du temps.

Question/Réponse Que dois-je faire pour obtenir une remise des majorations de retard ? Cette remise gracieuse des majo-rations de retard ne peut vous être accordée que si vous payez l’intégra-lité des cotisations dues et que vous êtes de bonne foi (difficultés finan-cières accompagnées d’un effort de votre part pour vous mettre à jour, défaillance d’un client important, maladie, retard du courrier en période estivale, etc.).Si ces conditions sont remplies, une remise vous est accordée, sur demande écrite et motivée de votre part. Elle peut être partielle, ou totale en cas de circonstances exception-nelles (sinistre, vol de documents, longues grèves des postes, etc.).Sachez également que les majo-rations de retard font l’objet d’une remise automatique par le directeur de l’organisme de recouvrement dans les conditions suivantes :− aucune infraction n’a été constatée

sur les derniers 24 mois ;− le montant des majorations de

retard est inférieur au plafond men-suel fixé pour l’année civile en cours (3218 euros pour 2016) ;

− vous avez réglé les cotisations dues et fourni vos déclarations dans le mois suivant la date d’exigibilité des cotisations.

Les majorations de retard complé-mentaires ne peuvent être remises que si les cotisations ont été régu-larisées dans un délai maximal de 30 jours. Une remise peut aussi être accordée par l’URSSAF en cas de force majeure ou de cas exception-nels, les seules difficultés écono-miques étant exclues.

Cette étude de cas est un extrait de la publication : Responsable et gestionnaire paie (Éditions TISSOT)*Des études de cas complémentaires ainsi que des modèles de bulletins annotés et commentés et des outils à télécharger, sont accessibles directement depuis la version Internet de cette publication (accès réservé aux abonnés « Responsable et gestionnaire paie »). Plus d’informations et essai gratuit sur www.editions-tissot.fr et auprès de notre service relation clientèle : 04.50.64.08.08.

Requalification de CDD en CDI Une longue durée d’interruption suite à une succes-sion de nombreux CDD n’empêche pas de les requa-lifier en CDIMa fille est intérimaire depuis janvier 2014 et a réalisé une cinquantaine de missions dans la même entreprise en tant que manutentionnaire pour répondre à des sur-croits d’activité, avec à chaque fois de courtes périodes d’interruption de quelques jours. Elle a été absente 10 mois pour congé de maternité et congé parental de mars 2015 à décembre 2015, puis a refait 2 missions pour remplacement dans cette entreprise en janvier et février 2016, avant que l’agence d’intérim arrête de l’employer sans aucune raison. Elle a menacé l’agence d’intérim de demander la requalification de tous ses contrats depuis janvier 2014 en CDI, mais le responsable d’agence lui a indiqué que du fait de son absence de 10 mois, elle n’avait plus aucune chance d’obtenir gain de cause. Qu’en est-il ? Le responsable de l’agence d’intérim essaye de dissua-der votre fille comme il peut, mais ses arguments n’ont aucune force. Si les CDD ont été de courte durée, il est possible que l’employeur ait pu respecter les délais de carence imposés entre deux contrats sur un même poste (1/3 de la durée du dernier CDD renouvellement compris s’il a duré au moins 14 jours, 1/2 de la durée dans les autres cas), mais ceci reste à vérifier.Néanmoins, l’agence d’intérim a manifestement pourvu un besoin permanent de son client en employant votre fille de façon quasi continue sur un même poste pendant une longue période. Par ailleurs, la Cour de cassation a clairement affirmé que le fait qu’une période d’emploi en CDD successifs ait été interrompue par une absence de plusieurs mois ne doit absolument pas être pris en consi-dération pour apprécier ce recours abusif au CDD (Cass. soc. 3 juin 2015, n° 14-17.705). Par conséquent, non seu-lement votre fille semble fondée à demander la requalifi-cation de ses CDD successifs en CDI devant le bureau de jugement du conseil des prud’hommes, mais elle pourra demander une indemnité de requalification d’autant plus importante que sa requête sera fondée sur une période d’emploi de janvier 2014 à février 2016.

Salarié protégéPar qui un salarié peut-il être assisté dans une UES, pour un entretien préalable à licenciement ?J’ai constitué une unité économique et sociale (UES) entre trois entreprises dont je suis le président et ai pro-cédé à l’élection du comité d’entreprise dans cette UES. Je souhaite licencier pour faute l’ancien délégué du per-sonnel de la plus petite entreprise, qui compte 12 sala-riés. Cette dernière n’a plus de délégué du personnel à ce jour faute de candidat aux dernières élections il y a deux mois. J’ai convoqué le salarié à un entretien préa-lable et je m’apprête à solliciter l’autorisation préalable à licenciement auprès de l’inspection du travail. Mon expert-comptable m’indique que la convocation à entretien n’est pas valable, car j’aurais dû mentionner la possibilité pour le salarié d’être assisté par un conseiller du salarié, alors que j’ai juste mentionné le fait qu’il pouvait être assisté par un salarié de l’entreprise ? A-t-il raison ?C’est vous qui avez raison. En effet, à partir du moment où l’entreprise qui emploie le salarié appartient à une UES, il

faut apprécier l’existence de représentants du personnel à ce niveau pour indiquer au salarié la possibilité d’être assisté à l’occasion d’un entretien préalable à licencie-ment. Concrètement, s’il n’existait aucun représentant du personnel au sein de l’UES, vous auriez dû mentionner la possibilité d’être assisté par un autre salarié ou par un conseiller du salarié. En revanche, à partir du moment, où d’autres sociétés composant l’UES disposent de représen-tants du personnel, en l’occurrence de membres d’un CE, vous ne devez indiquer que la possibilité d’être assisté par un salarié d’une entreprise appartenant à cette UES. C’est une solution qui est appliquée depuis longtemps par la Cour de cassation dans le cas de licenciement de salariés non protégés, mais il semble que l’on puisse également l’appliquer au licenciement d’un salarié protégé (CAA Mar-seille, 3 mars 2015). Si vous aviez suivi le conseil de votre expert-comptable, vous auriez non seulement commis une irrégularité de procédure, mais vous n’auriez aucune chance d’obtenir l’autorisation administrative préalable de licencier ce salarié.

LicenciementComment faire pour rétracter un licenciement notifié à un salarié ?J’ai licencié un salarié pour insuffisance professionnelle récemment, mais je me suis rendu compte que mon direc-teur du personnel qui a rédigé le courrier de notification a très peu motivé le courrier. Je suis sûr que ce licencie-ment ne sera pas validé au cas où le salarié viendrait à le contester. Puis-je rétracter le licenciement, par exemple en lui proposant une rupture conventionnelle ? La rétractation d’un licenciement ne peut que résulter d’un accord entre l’employeur et le salarié, qui doit être un accord exprès. Vous ne pouvez en aucun cas obliger un salarié à accepter cette rétractation, ni déduire son accord de son comportement. Il faut obligatoirement que vous signiez avec lui un écrit précis, clair et daté par lequel vous constatez d’un commun accord la renonciation au licenciement par les deux parties. Vous pouvez aussi for-maliser un courrier de proposition de rétractation auquel le salarié répond positivement par écrit. Une autre possibilité consiste effectivement à réaliser une procédure de rupture conventionnelle. En effet, il est admis que la signature d’une telle convention alors qu’un licenciement a été précédemment notifié, revient à une renonciation commune de l’employeur et du salarié à ce licenciement (Cass. soc., 3 mars 2015, n° 13-20.549).

Social Métallurgie Actualités - 2e trimestre 2016 - N° 179Courrier des lecteursPar Delphine Witkowski, juriste en droit social

Directeur de la publication : Robin DUALÉ

Editeur : Nathalie GODARD

Auteurs : Delphine WITKOWSKI, Philippe LAFONT

PAO : Gaby HOLTZER

Fabrication : Delphine PICCHIOTTINO

Dépôt légal : 2016-04 (03)

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