techniques neuro-musculaires basées sur l'étirement et pathologie

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1 Techniques neuro-musculaires basées sur l’étirement et pathologie mécanique du membre inférieur Dominique Bonneau Dr Md-Dr Sc Institut Supérieur de Thérapeutique Manuelle 23, Avenue des Lierres -84000 Avignon www.medecinemanuelle.fr Résumé. Les techniques neuro-musculaires basées sur l’étirement tendino-corporéal constituent une base fondamentale de la prise en charge manuelle des dysfonctionnement mécaniques, bénins et réductibles, des membres inférieurs. Elles sont plus particulièrement indiquées dans les pathologies où l’on retrouve une hypo-extensibilité douloureuse du muscle. Cette réaction musculaire est en rapport, soit avec un traumatisme direct musculaire, soit un dysfonctionnement mécanique articulaire ou rachidien dont la cause est locale ou posturale globale . Plus qu’une attitude thérapeutique analytique, il est parfois utile de traiter le groupe musculaire anatomique ou fonctionnel, tel le système propulseur du pied ou l‘appareil extenseur du genou. L’étirement post –isométrique permet une action musculaire spécifique alors que la pression glissée met en jeu les capteurs cutanés, permettant une diffusion de l’information et la « reprogrammation » des capteurs. Un apprentissage de technique d’auto- étirement musculaire, analytique ou global, par le patient est le garant d’une stabilité du résultat. Les techniques neuro-musculaires basées sur l’étirement musculaire tendino-corporéal font parties des armes thérapeutiques efficaces dans la prise en charge manuelle des affections mécaniques, bénignes et réversibles touchant le membre inférieur. L’empirisme de cette discipline tend à montrer que les techniques myotensives paraissent plus efficaces sur les muscles toniques que sur les phasiques. Leur application aux dysfonctionnements mécaniques bénins du membre inférieur est donc de premier ordre, du fait de la présence d’un grand nombre de fibres toniques dans chacun des groupes musculaires du plan dorsal et ventral (7, 8, 9, 10, 14). Mais tout dysfonctionnement algique de l’appareil locomoteur du membre inférieur impose, comme pour n’importe quelle autre localisation, une analyse fine de la symptomatologie et un examen clinique précis pour en préciser l’étiologie. En effet, elle peut être aussi bien articulaire périphérique que rachidienne, segmentaire (traumatique ou dégénérative) ou posturale (1, 11, 12, 16). Les projections viscérales proximales se localisent habituellement en regard du segment fémoral ou du genou, et orientent vers une cause souvent genito-urinaire. Après un rappel des différentes techniques manuelles réflexes dont l’objectif est la réinitialisation des capteurs cutanées et tendino-musculaires, nous décrirons les méthodes reposant sur l’étirement musculaire tendino-corporéal et les particularités liées au membre pelvien. Nous en préciserons les principales indications et nous terminerons par l’importance de l’apprentissage par le patient des techniques d’auto-étirement afin de prévenir les récidives. Principes des techniques neuro-musculaires Le terme de techniques neuro-musculaires regroupe les méthodes réflexes qui reposent sur les mécanismes de régulation de la contraction musculaire. Si la boucle gamma est la référence, elle n’est pas la seule mise en cause (2). Tout muscle squelettique possède des mécanorécepteurs et des métaborécepteurs qui informent les centres supra-segmentaires de l’état mécanique et métabolique du muscle.

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Page 1: Techniques neuro-musculaires basées sur l'étirement et pathologie

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Techniques neuro-musculaires basées sur l’étirement

et pathologie mécanique du membre inférieur Dominique Bonneau Dr Md-Dr Sc

Institut Supérieur de Thérapeutique Manuelle – 23, Avenue des Lierres -84000 Avignon

www.medecinemanuelle.fr

Résumé.

Les techniques neuro-musculaires basées sur l’étirement tendino-corporéal constituent une

base fondamentale de la prise en charge manuelle des dysfonctionnement mécaniques, bénins

et réductibles, des membres inférieurs. Elles sont plus particulièrement indiquées dans les

pathologies où l’on retrouve une hypo-extensibilité douloureuse du muscle. Cette réaction

musculaire est en rapport, soit avec un traumatisme direct musculaire, soit un

dysfonctionnement mécanique articulaire ou rachidien dont la cause est locale ou posturale

globale . Plus qu’une attitude thérapeutique analytique, il est parfois utile de traiter le

groupe musculaire anatomique ou fonctionnel, tel le système propulseur du pied ou l‘appareil

extenseur du genou. L’étirement post –isométrique permet une action musculaire spécifique

alors que la pression glissée met en jeu les capteurs cutanés, permettant une diffusion de

l’information et la « reprogrammation » des capteurs. Un apprentissage de technique d’auto-

étirement musculaire, analytique ou global, par le patient est le garant d’une stabilité du

résultat.

Les techniques neuro-musculaires basées sur l’étirement musculaire tendino-corporéal font

parties des armes thérapeutiques efficaces dans la prise en charge manuelle des affections

mécaniques, bénignes et réversibles touchant le membre inférieur. L’empirisme de cette

discipline tend à montrer que les techniques myotensives paraissent plus efficaces sur les

muscles toniques que sur les phasiques. Leur application aux dysfonctionnements mécaniques

bénins du membre inférieur est donc de premier ordre, du fait de la présence d’un grand

nombre de fibres toniques dans chacun des groupes musculaires du plan dorsal et ventral (7,

8, 9, 10, 14).

Mais tout dysfonctionnement algique de l’appareil locomoteur du membre inférieur impose,

comme pour n’importe quelle autre localisation, une analyse fine de la symptomatologie et un

examen clinique précis pour en préciser l’étiologie. En effet, elle peut être aussi bien

articulaire périphérique que rachidienne, segmentaire (traumatique ou dégénérative) ou

posturale (1, 11, 12, 16). Les projections viscérales proximales se localisent habituellement en

regard du segment fémoral ou du genou, et orientent vers une cause souvent genito-urinaire.

Après un rappel des différentes techniques manuelles réflexes dont l’objectif est la

réinitialisation des capteurs cutanées et tendino-musculaires, nous décrirons les méthodes

reposant sur l’étirement musculaire tendino-corporéal et les particularités liées au membre

pelvien.

Nous en préciserons les principales indications et nous terminerons par l’importance de

l’apprentissage par le patient des techniques d’auto-étirement afin de prévenir les récidives.

Principes des techniques neuro-musculaires Le terme de techniques neuro-musculaires regroupe les méthodes réflexes qui reposent sur les

mécanismes de régulation de la contraction musculaire. Si la boucle gamma est la référence,

elle n’est pas la seule mise en cause (2).

Tout muscle squelettique possède des mécanorécepteurs et des métaborécepteurs qui

informent les centres supra-segmentaires de l’état mécanique et métabolique du muscle.

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Le muscle est un corps viscoélastique qui se caractérise par deux états fondamentaux sous la

dépendance du système nerveux, l’état contracté ou relâché. Il peut aussi, sous l’action de

force extérieure (résistance manuelle du thérapeute), connaître l’état étiré et raccourci.

Les techniques neuromusculaires agissent sur un muscle défini soit en l’étirant soit en le

raccourcissant ce qui entraîne le phénomène inverse sur l’antagoniste.

On peut donc évoquer une forme de réinitialisation de ces capteurs lors de la réalisation de ces

méthodes, expliquant leur action de normalisation de la tension musculaire.

Fuseau neuro-musculaire et réflexe myotatique

Le fuseau neuro-musculaire, et son innervation sensitive Ia, est le récepteur hautement

spécialisé qui est à l’origine de la réponse réflexe myotatique. Le fuseau neuro-musculaire est

sensible à l’allongement du muscle et plus particulièrement à sa raideur, faisant intervenir,

outre l’allongement, le paramètre de force (13). Il est un capteur adaptatif qui grâce à la

coactivation des motoneurones alpha et gamma conserve sa sensibilité de mesure quelque soit

l’état du muscle. Il ajuste en permanence le niveau de contraction selon le degré de la

résistance à l’effort initial. Le réflexe myotatique contrôle la raideur du muscle. Il se traduit

par une augmentation du niveau de contraction du muscle en réponse à son propre étirement

(« stretch réflex » des anglo-saxons). La contraction supplémentaire qui en résulte tend à

ramener le muscle à sa longueur initiale, il s’agit donc d’un asservissement du muscle en

raideur.

L’organe neuro-tendineux de Golgi et l’inhibition autogénique

L’organe neuro-tendineux de Golgi est un mécanorécepteur, de type capteur de force, situé

dans le tendon et les aponévroses musculaires. Il est stimulé par la force contractile des fibres

musculaires en série avec lui. Sa sensibilité dynamique lui confère la fonction de détecteur

des variations de la force exercée par les unités motrices sur leur attache tendineuse. Il est

innervé par les fibres sensitives Ib et il permet de corriger les informations transmises par les

tensiomètres. Le réflexe d’inhibition autogénique trouve son origine dans l’ONT. Il se traduit

par l’inhibition des motoneurones a innervant un muscle en réponse à la contraction de ce

même muscle (15).

Ce phénomène a été décrit expérimentalement sur le chat mésencéphalique lorsque l’on

cherche à vaincre l’hypertonie des extenseurs du genou en le fléchissant de force. Dans un

premier temps, le tonus augmente, à la base de la description du réflexe myotatique, puis

secondairement, le tonus chute brutalement lors de la disparition brutale du tonus des

extenseurs et le genou de fléchit brutalement comme une lame de canif.

Mais, organes neuro-tendineux de Golgi et fuseaux neuro-musculaires, ne sont pas les seuls

capteurs mis en cause dans le mode d’action des thérapies manuelles. Récepteurs cutanés et

péri-articulaires tels les Pacini (sensible à la vibration) et les Ruffini (sensibles à l’étirement)

occupent une place privilégiée (6).

Le réflexe ipsi-latéral de flexion

Il est mis en jeu par l’action d’un fort stimulus appliqué sur la peau d’un membre qui entraîne

l’activation des motoneurones provoquant le retrait du membre stimulé.

Les afférents au réflexe de flexion (ARF) ne sont pas seulement cutanés mais aussi tendino-

musculaires. Ce réflexe est couplé à l’inhibition réciproque permettant l’inhibition des

extenseurs (15).

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Peau et récepteurs

Il est fondamental de rappeler, une nouvelle fois, que tout traitement manuel, qu’il soit à

destinée musculaire ou articulaire, met en jeu avant tout la peau et ses capteurs. Il est donc

primordial de repositionner la place du support du tact qu’est le revêtement cutané.

Les études histologiques ont montré l’extrême spécialisation des capteurs incorporés dans le

revêtement cutané dont le rôle est d’identifier le stimulus mécanique, thermique ou nociceptif

perçu, de le transformer en un signal électrique à destinée centrale ou il est analysé et intégré

dans un système de réponse adaptée. On décrit des récepteurs thermiques sensibles aux

variations de température et à leur vitesse de variation et dont l’analyse sera modulée par les

données des capteurs pileux qui informent de la rapidité d’écoulement du flux de la colonne

aérique. Les récepteurs mécaniques sont extrêmement diversifiés, allant de la simple

terminaison libre sensible à l’étirement du conjonctif environnant aux corpuscules hautement

spécialisés tels ceux décrits par Pacini, Ruffini, Meissner ou Krause où la terminaison

nerveuse se trouve entourée par une capsule formée de lamelles conjonctives. (6)

Les critères d’analyse de ces capteurs ne sont pas simplement focalisés sur la nature du

stimulus mécanique telle que la déformation de la peau. Cette dernière peut être provoquée

par une traction, une torsion ou une pression. Mais il est important de prendre en compte et

d’analyser les caractères spatio-temporels tel que le mode d’installation, son maintien

(continu ou vibratoire) ou son interruption mais aussi la surface d’application du stimulus

dont la configuration géométrique est un facteur primordial dans la modulation de

l’information transmise. Parmi les autres critères de différenciations entrent en jeu

l’adaptation lente ou rapide, la sensibilité à la vitesse du mouvement ou au maintien d’une

position. Ainsi force est de constater que la peau, organe du tact dont la surface et la richesse

en capteur est colossale par rapport aux autres organes sensoriels, exerce la fonction

d’analyse et de transfert des informations mécanique, thermique, immunologique et

électromagnétique appliquées aux corps, sollicitations qui interfèrent sur le mode de

fonctionnement de l’organisme humain. Désormais, il apparaît plus évident qu’on ne peut

tenir à l’écart la peau dans les études consacrées au mode d’action de la médecine manuelle,

discipline qui s’intègre pleinement dans la grande famille des réflexothérapies aux cotés des

autres thérapies telle que l’acupuncture (2).

Les techniques basées sur l’étirement musculaire tendino-corporéal (7,8,9,10,16,)

L’étirement post isométrique

Appelée aussi myotensif, cette méthode dérive du contracter-relacher employé en

rééducation. Le but est d’étirer et décontracter le muscle spasmé. Cela s’applique en priorité à

une pathologie musculaire douloureuse associée à une restriction de mobilité en rapport avec

la contracture musculaire.

En pratique, après avoir identifié le muscle ou le plus souvent un groupe de muscles

agonistes, tel le quadriceps, on demande au patient d’effectuer une contraction isométrique

(sans déplacement des leviers articulaires), dont l’intensité de la force est faible. Une

résistance manuelle est appliquée en distalité sur le segment de membre intéressé. Le vecteur

de cette résistance est directement appliqué dans le sens inverse du mouvement provoqué

par le muscle à étirer durant les 6 à 8 secondes du maintien de la contraction.

Au terme de cette contraction, après un temps mort d’une à deux secondes, nécessaire au

relâchement de l’ensemble des fibres musculaires, un étirement "post-isométrique " est

effectué par le médecin jusqu'à la perception d'une résistance appelée barrière motrice, et cet

étirement est maintenu une douzaine de secondes.

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Une nouvelle contraction est demandée, suivie d'un étirement, puis renouvelée jusqu'au gain

d'amplitude désirée.

Les variantes sont nombreuses et se différencient par le nombre de cycles et leur durée.

On peut utiliser la respiration en demandant au patient d’inspirer lentement durant la

contraction isométrique et de souffler durant la période d’étirement.

Pression glissée

Cette technique doit être largement utilisée au niveau du membre inférieur. Sollicitant

muscles et peau, son action s‘applique non seulement aux contractures secondaires à un

dysfonctionnement articulaire, mais aussi s’étend aux myalgies que l’on rencontre dans les

syndromes cellulo-teno-myalgiques. Elles sont dues à des dysfonctionnements douloureux

intervertébraux mineurs (12). Par ailleurs, on rencontre fréquemment des zones de

contracture musculaire, sans limitation articulaire, d’évolution favorable après utilisation de

cette méthode.

Dans un premier temps, on recherche par la palpation en profondeur en suivant le sens des

fibres des muscles la présence d’une zone contracturée douloureuse, perçue comme une

induration solidaire du corps musculaire. On prendra soin d’éliminer par échographie, en cas

de doute, une autre étiologie, tel un hématome récent. Dans un deuxième temps, le muscle est

mis en position d’étirement maximal, et le praticien exerce des pressions glissées profondes,

dans le sens des fibres, en insistant sur la zone de contracture, jusqu’à l’obtention de

l’atténuation palpatoire de la tension.

L’amélioration subjective par le patient est parfois vécue comme une « douleur qui fait du

bien » !!

Compression ischémique

Cette manoeuvre consiste en l’application d’une pression soutenue sur le point le plus

douloureux du muscle en cause, (de 6 à 13 kgfs), après avoir étiré le muscle préalablement

détendu, durant le temps nécessaire à l’atténuation de la douleur du point-détente, environ une

minute.

Comparable d’efficacité avec la précédente, elle est plus mal vécue par le patient…

L’étirement tendineux transversal ou décordage :

Moins décrite que les précédentes, cette méthode est d’un apport non négligeable en

thérapeutiques manuelles car elle s’applique autant sur les muscles du squelette axial

(décordage inter-épineux) que sur le squelette appendiculaire.

La technique consiste en l’application d’une force perpendiculaire au tendon à solliciter, afin

de réaliser un étirement transversal bref, tel le repli d’une lame de canif, par l’intermédiaire de

la face dorsale de l’IPP de l’index ou de la pulpe du majeur, à la manière d’un joueur de

contrebasse actionnant les cordes de son instrument.

Son action semble mettre en jeu les organes neuro-tendineux de Golgi dont on connaît le rôle

inhibiteur dans la contraction musculaire.

Les variantes

Étirement –vaporisation proposé par Travell et Simons (16)

La technique originelle consiste à vaporiser du cryo-fluoro-méthane sur la peau selon des

lignes parallèles au grand axe du muscle à traiter, selon un angle de 30° et à une distance de

40 cms de la peau, et dans une seule direction, en se dirigeant vers la zone de la douleur

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référée, à une vitesse régulière de 10 cm/s, en recouvrant la totalité de la surface du muscle,

sans dépasser trois passages.

Étirement –vaporisation

Nous proposons une variante de la technique consistant à déplacer sur la peau sèche de la

glace pilée dans une tasse en carton ou un cube de glace enveloppé dans du plastique.

Le point fondamental est l’écart de température et la rapidité de son installation, ce qui

élimine toute technique proposant l’application prolongée de glace dans une vessie.

Le but est la création d’un point localisé de changement de température et non un

refroidissement global que l’on obtiendrait par l’application de « cold pack ».

L’étirement est réalisé en même temps que l’application du froid.

On mesure l’amplitude d’extension du muscle avant et après (auto-évaluation du patient:

menton- acromion par exemple).

Infiltration-étirement

Injection dans le point détente de Procaïne à 0.5 % dans du sérum salé isotonique, jusqu’à ce

que le point soit insensible, puis on étire le muscle, et on applique des enveloppements chauds

pendant quelques minutes . Enfin, le patient procède à des exercices de mobilisations actives.

Massage

À type de friction ferme appuyée, comparable au Rolfing

À type de massage en bande à vitesse lente de la distalité vers la proximalité,

à une vitesse de l’ordre de 8 mm/sec

Le massage à la glace

Le massage périosté

Applications aux muscles du membre inférieur

Le plan dorsal pelvi-crural : les ischio-jambiers

En préambule, il paraît utile de rappeler que le terme de crural a été longtemps utilisé à tort

pour qualifier le segment fémoral. En effet, ce terme, dont l’éthymologie provient du latin

crus (nom.), cruris (gen.), désigne la jambe.

Nous connaissons le rôle important des ischio-jambiers dans la stabilisation du bassin. Ils

s’exprimeront précocément lors de dysfonctionnement du genou, responsable du flessum

caractéristique. Ils sont innervés par les deux racines constitutives du nerf sciatique, L5 pour

les médiaux et S1 pour le biceps fémoral. Il est fréquent de retrouver des contractures

douloureuses en phase séquellaires accessibles au traitement manuel local. Rappelons qu’ils

sont extenseurs de la hanche, fléchisseurs du genou et stabilisateurs du squelette pelvi-

rachidien axial.

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L ‘étirement post-isométrique (fig 1)

Figure 1 : Étirement post-isométrique des ischio-jambiers : Position de départ à gauche

et d’arrivée à droite

Pression glissée (fig 2)

Figure 2 : Pression glissée des ischio-jambiers, avec détail de la prise à droite

Le plan ventral pelvi-crural : le quadriceps (9)

Composant musculaire de l’appareil extenseur du genou, il est le siège fréquent des

contractures dans les syndromes fémoro-patellaires. S’il paraîtrait logique de retrouver ces

dernières au sein du vaste medial, compte tenu de sa fonction de rappel, il est, en fait, plus

fréquent de les rencontrer dans le vaste latéral souvent à sa partie proximale.

Dans les phases séquellaires des névralgies fémorales, les techniques myotensives apportent

un soulagement notable, surtout les pressions glissées, de part leur double action sur le

dermatome et le myotome.

L ‘étirement post-isométrique

Il est possible de réaliser cette technique en position couchée sur le dos (fig 3) ou à plat

ventre, tout en veillant à ne pas créer une trop forte lordose pouvant générer des lombalgies.

Figure 3: Étirement post-isométrique du quadriceps : Position de départ à gauche et

d’arrivée à droite

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Pression glissée (fig 4)

Figure 4: Pression glissée du quadriceps

Le grand fessier

C’est le muscle le plus volumineux et le plus puissant de l’économie, ce qui se comprend

aisément puisqu’il est le veilleur de la lordose de l’homme. Son rôle dans la stabilisation

rachidienne est fondamental du fait de ses liens étroits avec le fascia thoraco-lombal. Il est en

outre, innervé éssentiellement , mais non exclusivement, par la racine S1, son EPI (étirement

post-isométrique) est un préalable au traitement de tout dysfonctionnement lombo-pelvien,

radiculaire ou non.

L ‘étirement post-isométrique( fig 5 et 6)

Figure 5 : Étirement post-isométrique bilatéral des grands fessiers

Figure 6: Étirement post-isométrique du grand fessier : Position de départ à gauche et

d’arrivée à droite

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Pression glissée (fig 7)

Figure 7 : Pression glissée du grand fessier

Le moyen fessier.

Depuis Pauwells, son rôle dans la statique pelvienne est bien connu.

Si l'on considère que l'appui du corps se projette en appui monopodal sur la symphyse

pubienne par rapport à l'axe de la coxo-fémorale, le bassin a tendance à s'incliner du coté

opposé à l'appui. Pour éviter ce phénomène, une force de rappel compense le mouvement

selon un rapport de 1 à 3 correspondant à la différence de longueur du bras de levier.

Il est innervé par le nerf fessier supérieur (L5).

Il est abducteur de la hanche en chaîne cinétique ouverte.

L ‘étirement post-isométrique (fig 8)

Figure 8: Étirement post-isométrique du moyen fessier : Position de départ à gauche et

d’arrivée à droite

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Pression glissée (fig 9)

Figure 9: Pression glissée du moyen fessier

Les pelvi-trochanteriens

Piriforme, obturateur interne, jumeau supérieur et inférieur, carré fémoral et obturateur

externe constituent ce groupe musculaire qui oriente le membre inférieur en rotation latérale,

fonction primordiale pour le changement de direction.

Le nombre important de ces muscles est dû à l’obligation de réaliser cette rotation quelle que

soit la position en flexion ou extension du segment fémoral. Nous connaissons le paradoxe de

l’inversion d’action du piriforme selon l’angle de flexion de hanche : rotateur latéral de 0° à

70° de flexion, au delà de cet angle, en flexion il devient rotateur indifférent puis médial.

L ‘étirement post-isométrique (fig 10)

Figure 10: Étirement post-isométrique du piriforme

Ponçage du piriforme (fig 11)

Figure 11: Ponçage du piriforme

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Les adducteurs

Gardiens de la hanche, ils expriment prècocément une perturbation mécanique, tant chez le

nourrisson porteur d’une luxation de hanche que chez l’adulte dans les coxarthroses

débutantes. Au nombre de cinq, ils se distinguent par leurs insertions distales et proximales.

Ils tirent profit des techniques myotensives non seulement dans les coxopathies mais aussi

dans la pubalgie dans sa forme de tendinopathie des adducteurs. L’étirement post isométrique

est le préalable au protocole de Pau-Toronto qui s ‘attache à récupérer une indolence dans

toute l’amplitude d’étirement du muscle avant de le tonifier dans les différents secteurs

d’amplitude(3).

Pectiné, long adducteur (ex-moyen), court adducteur (ex-petit), grand adducteur et gracile

appartiennent à ce groupe.

Le testing musculaire permet de les distinguer. ( fig 12, 13, 14)

Figure 12 : Testing du long et du court adducteur

Figure 13 : Testing du grand adducteur

Figure 14: Testing du gracile

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L ‘étirement post-isométrique (fig 15)

Figure 15 : Étirement post isométrique du court et long adducteur : Position de départ à

gauche et d’arrivée à droite

Poplité

C’est un muscle méconnu et qui appartient au groupe des muscles dits phares car témoins

expressifs précoces d’un dysfonctionnement articulaire.

Il est le premier à manifester une pathologie du genou. Le kyste poplité est souvent incriminé

à tort dans ces algies postérieures du genou . (fig 16)

Figure 16 : Étirement post-isométrique du poplité : Position de départ à gauche et

d’arrivée à droite

Le triceps sural

Il constitue avec le court fléchisseur plantaire la composante musculaire du complexe

propulseur du pied, le complexe tricipito-achilléeo-calcanéo-plantaire. Innervé

essentiellement par la racine S1, il exprimera une souffrance segmentaire rachidienne aussi

bien aigue que chronique. Étirement post-isométrique et pression glissée sont des techniques

sédatives de ces douleurs notamment en phase chronique.

Il est le grand responsable en cas d’hypo-extensibilité, de souffrance des différentes

composantes du système propulseur du pied tant chez l’enfant en période péri-pubertaire

(maladie de Sever) que chez l‘adulte, tendinopathie d’Achille, souffrance du gastrocnémien

médial, aponévrosite plantaire. Si l’EPI ou la pression glissée apportent un soulagement

certain, l’enseignement de techniques d’auto-rééducation au patient est indispensable pour

stabiliser le résultat obtenu.

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L ‘étirement post-isométrique (17)

Figure 17: Étirement post-isométrique du triceps sural : Position de départ à gauche et

d’arrivée à droite

Pression glissée (fig 18)

Figure 18 Pression glissée du triceps sural

Les auto-étirements Indispensables pour la stabilité du résultat, ils nécessitent la participation active et régulière

du patient. Si les techniques analytiques sont fondamentales pour la précision de la

thérapeutique (fig 19, 20, 21 22), il paraît plus logique de connaître des techniques globales

qui mettent en jeu les groupes musculaires que certains classent en chaîne (3). Le stretching,

la méthode Mézières en sont des exemples.

Figure 19: Étirement du droit fémoral et du psoas

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Figure 20: Étirement du gracilis

Figure 21: Étirement des adducteurs

Figure 22: Étirement des ischio-jambiers

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Figure 23 : Auto-étirement du complexe tricipito-achilléo-calacnéo-plantaire

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