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Le journal des artisans et des entrepreneurs www.ffbatiment.fr Bâtiment actualité Le Bâtiment actualité n° 19 9 novembre 2010 supplement Ne plus s’en passer ! Emploi des seniors t ment t ment

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Le journal des artisans et des entrepreneurs www.ffbatiment.frBâtiment actualitéLe

Bâtiment actualité n° 19 9 novembre 2010supplement

Ne plus s’en passer !

Emploi des seniors

t mentt ment

2 Le supplément • Bâtiment actualité n° 19 • 9 novembre 2010

Crédits photos : FFB : Olivier RouxLaurent Mercier

Fotolia : Yuris Archus Junial Enterprises Volodymyr Vasylkiv Jose Manuel Gelpi Robert Lerich PA

som

maire

● Les seniors au cœur de la réflexion

sur le management des relations humaines p. 4 à 5

● Accord national dans le BTP pour l’emploi des salariés âgés p. 6 à 7– Quelles actions l’entreprise peut-elle réaliser ?

● Stratégies d’entreprise, du bon emploi de l’expérience p. 8 à 13– Des mesures en faveur des seniors, mais pas seulement– Préparer son départ, c’est aussi l’affaire du chef d’entreprise– Dépasser les idées reçues– Faciliter l’adaptation– Gérer les âges– Un management quotidien– Faciliter l’employabilité et la mobilité professionnelle– Croiser approche santé et ressources humaines– Former et être formé

● Ces seniors qui deviennent des formateurs p. 14 à 15– De chef d’entreprise à formateur, il n’y a qu’un pas– Une seconde vie professionnelle tout aussi passionnante– Une fin de carrière planifiée– Une véritable reconnaissance

Directeur de la publicationDidier RidoretDirecteur de la rédactionJean-Pierre RocheComité de rédactionFédération Française du BâtimentFédérations départementales 33 avenue Kléber75784 Paris Cedex 16Tél. : 01 40 69 51 82Fax : 01 40 69 53 67www.ffbatiment.fr - ISSN 0395-0913

I S O 9 O O 1

Achevé de rédiger le 20 octobre 2010 - 34e annéeReproduction autorisée sous réserve de la mention d’origine « © Bâtiment actualité 9 novembre 2010 »Imprimé sur papier certifi é PEFC avec des encres végétales

Ne plus s’en passer !

Emploi des seniors

3Le supplément • Bâtiment actualité n° 19 • 9 novembre 2010

Un beau défi à relever par les entreprises Emploi des seniors

Depuis plusieurs mois, la réforme des retraites est au cœur de l’actualité sociale.Sur ce sujet, nombreux ont été les rapports et les avis qui ont analysé les causes de la fragilité actuelle du régime. Deux contraintes majeures pèsent en effet sur l’équilibre de notre système de retraite : sortie précoce de la vie active et allongement de l’espérance de vie.On peut débattre à l’infini des arbitrages rendus, des options prises, des choix opérés, mais nul ne peut faire l’économie de réfléchir à la durée de la carrière.En cela, le développement du travail des seniors est la pierre angulaire de la réforme. Si l’âge de la retraite recule, travailler plus longtemps devient incontournable.L’an dernier, le gouvernement a fait voter une loi pour faire prendre conscience aux entreprises de l’urgente nécessité de promouvoir le recrutement et le maintien dans l’emploi des salariés âgés. Pour

les en convaincre, il y a associé une pénalité financière.Dans le BTP, un accord de branche en faveur de l’emploi des salariés âgés a été signé le

23 décembre 2009. Il permet aux entreprises de 50 à 300 salariés d’éviter la pénalité financière. Mais il appartient à présent aux entreprises de mettre en œuvre les mesures prévues par l’accord.Réfléchir à la pyramide des âges, tenir des entretiens de deuxième partie de carrière, développer le tutorat, penser aux aménagements de fin de carrière, poursuivre les actions de formation, améliorer les conditions de travail sont autant de pistes de réflexion.Tout comme l’emploi des femmes, l’emploi des seniors est désormais une question cruciale.

C’est aux entreprises de bâtir une nouvelle stratégie des ressources humaines. Un beau défi à relever !

Bruno Dumas

Président de la commission

des affaires sociales de la FFB

Ne plus s’en passer !

Emploi des seniors

4 Le supplément • Bâtiment actualité n° 19 • 9 novembre 2010

Le débat sur la réforme des retraites a mis les seniors sur le devant de la scène. Le temps de leur départ anticipé est aujourd’hui révolu. L’heure est au relèvement de leur taux d’emploi et à l’allongement de la durée de la vie professionnelle. D’autant que chaque année, nous gagnons deux mois d’es-pérance de vie. Les comparaisons eu-ropéennes le soulignent, la France est encore à la traîne pour ce qui concerne l’emploi des seniors : 48 % des Français de 55-60 ans sont au travail, contre 60 % en Europe. Pourtant, un renversement de tendance s’amorce, les pouvoirs publics ayant pris dès 2008 des mesures pour inciter les entreprises à recruter et à garder les salariés âgés, sous peine de pénalité financière. Des slogans gou-vernementaux, comme « L’expérience des plus de 50 ans, ne faites surtout pas l’expérience de vous en passer » ont sans doute aussi produit des effets pour faire évoluer les mentalités. En effet, selon les derniers chiffres du ministère du Travail, cette politique commence à porter ses fruits : le taux d’emploi des 55-60 ans est passé de 54,5 % début 2007 à 60 % aujourd’hui. En revanche, la situation des demandeurs d’emploi reste à améliorer : leur taux de chô-mage a progressé de 1,3 % en août, ce qui représente un chômeur sur cinq.

Une réelle prise de conscienceSelon une enquête de la DARES, l’aug-mentation des salariés de 50 ans et plus dans les prochaines années suscite

aujourd’hui moins d’appréhension chez les employeurs. Lorsqu’ils expriment des réserves, elles portent principale-ment sur le coût salarial et, dans une moindre mesure, sur la productivité. Une attention accrue est désormais ac-cordée à la gestion des âges pour éviter les pertes de compétences. 74 % des employeurs considèrent que les plus de 50 ans détiennent des com-pétences clés, en particulier dans la production, le management et le com-mercial. 17 % d’entre eux craignent d’être confrontés à la disparition de certaines de ces compétences dans les cinq années à venir. Une prise de conscience qui pousse les chefs d’en-treprise à préparer l’avenir. Ainsi, en 2008, 36 % des établissements de plus de 20 salariés employant des 50 ans et plus déclaraient que la pyramide des âges faisait partie de leur stratégie de ressources humaines, contre 25 % en 2001. Par ailleurs, des accords de gestion prévisionnelle des emplois et des compétences (GPEC) ont été mis en place dans un quart des entreprises de plus de 300 salariés.

La mixité des âges et des compétences, un atoutIl a été constaté que le déséquilibre entre générations peut provoquer des pro-blèmes importants sur les plans micro et macroéconomique. Pour qu’un équilibre s’installe entre innovation et expérience, une entreprise devrait, dans l’idéal, se composer de collaborateurs •••

❝ En 2050, un Français sur trois sera âgé de

60 ans ou plus, contre un sur cinq en 2005 ❞

❝ Un trimestre de vie gagné tous les deux ans ❞

L’évolution de la société française met en évidence un vieillissement de la population, un déséquilibre croissant

entre le nombre d’actifs et celui des retraités, une entrée plus tardive dans la vie active, une cessation d’activité encore

prématurée et un taux de chômage élevé des plus de 50 ans. Face au casse-tête du financement des retraites, l’État

a incité les entreprises et les branches à conclure des accords pour recruter et maintenir les salariés âgés dans l’emploi.

Il demande aux seniors de retarder leur départ à la retraite et encourage le retour à l’emploi de ceux qui sont au chômage.

Entrée dans la vie active1936 : 14 ans1946 : 16 ans2009 : 22 ans

Cessation d’activité1936 : 74 ans

1997 : 57,5 ans

Les seniors au cœur de la réflexion sur le management des res

5Le supplément • Bâtiment actualité n° 19 • 9 novembre 2010

Qu’est-ce qu’un senior ?

Il n’y a pas de définition générale des seniors.Du point de vue européen, on entend par seniors des salariés âgés de 45 ans et plus.En droit français, selon les cas, les salariés sont considérés comme seniors à 45, 50 ou 55 ans et plus.Par exemple, l’entretien de deuxième partie de carrière concerne obligatoirement les salariés âgés de 45 ans et plus. Il est renouvelé tous les cinq ans, puis tous les trois ans pour les salariés de plus de 55 ans.

••• expérimentés, de salariés à mi-carrière et de jeunes recrues.L’expérience et la disponibilité des se-niors, leur capacité à gérer les aléas et le travail en équipe, la valeur qu’ils accor-dent au travail, leur savoir-faire transmis aux plus jeunes sont autant d’atouts à prendre en compte.

Et le bâtiment ?Nombre d’entreprises du bâtiment l’ont compris. Elles mettent en place des plans d’action pour anticiper les recrutements, consti-tuer des équipes intergénérationnelles, assurer le transfert des savoir-faire, don-ner aux seniors des perspectives d’évo-lution, conserver ou augmenter leurs compétences, améliorer les conditions de travail pour préserver la santé et développer la prévention en matière de sécurité. Comme le témoignent les entreprises interviewées, au-delà des seniors, ces mesures s’intègrent dans une gestion plus globale des ressources humaines qui bénéficie à tous les salariés, quel que soit leur âge. Elles ont aussi un impact positif sur leur bilan social et sur l’image de l’en-treprise auprès des futurs candidats comme des clients publics ou privés. ■

ssources humaines

Trois pays européens sont en tête de liste pour l’emploi des 55-64 ans• La Suède (69,6 % en 2006) ;• le Danemark (60,7 %) ;• le Royaume-Uni (57,4 %).L’Allemagne compte 48,4 %, la France 38,1 % et l’Italie 32,5 %.Deux pays ont réussi à faire remonter fortement le taux d’emploi de leurs seniors depuis dix ans : la Finlande (de 20 points) et les Pays-Bas (de 19 points).

Quels outils pratiques ?

Dans le cadre de l’accord BTP seniors, des outils sont mis à la disposition des entreprises.

Vous trouverez surwww.metiers-btp.fr (observatoire prospectif des métiers et des qualifications)• des informations générales sur la réflexion à conduire, des données chiffrées par activité, métier, qualification, ainsi que des témoignages de chefs d’entreprise ;• un autodiagnostic destiné au chef d’entreprise sur la pyramide des âges dans sa société : il vous permettra de repérer les compétences clés de vos seniors (production, encadrement, bureau d’études, commercial…) et ainsi d’anticiper leur évolution, leur carrière, les recrutements, la transmission des savoirs, etc. ;• des documents à télécharger : texte de l’accord BTP, référentiels d’emploi, contrats aidés, guide d’entretien professionnel, présentation des différents dispositifs de formation…• des pistes d’action, pour mettre en œuvre les axes de l’accord BTP ;• des informations destinées aux salariés, dont un outil d’autopositionnement ;• des liens vers des sites utiles :– www.priorite-seniors.fr ;– www.emploidesseniors.gouv.fr ;– www.travail-solidarite.gouv.fr ;– www.guide-seniors-btp.fr ;– www.oppbtp.fr ;– www.probtp.fr ;– www.cnam.fr ;– www.anact.fr.

6 Le supplément • Bâtiment actualité n° 19 • 9 novembre 2010

Accord national dans le BTP pour l’emploi des salariés âgés

Pourquoi un tel accord ?Dans la perspective de l’allongement de la durée de la vie professionnelle en lien avec la réforme des retraites, les pou-voirs publics ont, dès la fin 2008, pris des mesures afin de favoriser le maintien en activité des salariés le plus longtemps possible.

La loi 1 a ainsi créé une obligation de conclure, avant le 1er janvier 2010, des accords en faveur du maintien dans l’emploi ou du recrutement de sala-riés âgés ou, en l’absence d’accord, de mettre en place des plans d’action en ce sens. À défaut d’accord d’entreprise ou de plan d’action, les entreprises (ou les groupes) de 50 salariés et plus sont soumis à une pénalité financière de 1 % de leur masse salariale.

Un accord de branche étendu par le ministre du Travail et validé par le ministre chargé de l’Emploi peut per-mettre aux entreprises et aux groupes de 50 à moins de 300 salariés d’éviter cette pénalité.

L’accord BTP 2 dispense les entreprises et les groupes de 50 à moins de 300 sala-riés de négocier eux-mêmes un accord ou de mettre en place un plan d’action et leur permet ainsi d’éviter la pénalité financière de 1 %.

Quelles conséquences pour les entreprises ?Il leur appartient de mettre en œuvre les mesures contenues dans l’accord de branche, dans la perspective des bilans qui seront faits chaque année au niveau de la branche ainsi qu’au terme de l’accord.

Qui est concerné ?Conclu pour trois ans, jusqu’au 31 dé-cembre 2012, cet accord collectif concerne :• les entreprises occupant de 50 à moins de 300 salariés ;• les entreprises appartenant à un groupe occupant de 50 à moins de 300 salariés,qui relèvent des conventions collectives nationales du bâtiment ou des conven-

tions collectives nationales des travaux publics.Les entreprises de 50 à moins de 300 salariés qui, au 26 mai 2010 (date d’extension de l’accord de branche), avaient conclu leur propre accord d’en-treprise ou déposé leur plan d’action ne sont pas visées par l’accord de branche du 23 décembre 2009.En conséquence, elles appliqueront les mesures contenues dans leurs propres accords ou plans d’action 3. ■

Un accord collectif national du 23 décembre 2009 en faveur de l’emploi des salariés âgés dans le BTP a été signé,

le 23 décembre 2009, avec trois organisations syndicales : CFTC, CGC et FO.

PYRAMIDE DES ÂGESpar qualification dans le bâtiment

en 2008

198 183 salariés du bâtiment ont plus de 50 ans en 2008.

Ils devraient donc partir à la retraite d’ici une dizaine d’années

Pour appliquer l’accord, les entreprises peuvent se reporter au

« Guide de mise en œuvre de l’accord national du 23 décembre 2009

en faveur de l’emploi des salariés âgés dans le BTP », établi par la FFB.

Pour vous le procurer,contactez votre fédération.

Source : UCF/CCCA-BTP

1. Article 87 loi de financement S.S. 2009, décrets nos 2009-560 et 2009-564 du 20 mai 2009,articles L. 138-24 et s., R. 138-25 et s. code de la sécurité sociale.2. Lettre de validation DGEFP du 22 février 2010, arrêté ministériel d’extension du 17 mai 2010 (J.O. 26 mai 2010).3. Dans les matières relevant des titres 4 à 7 de l’accord de branche, les conventions ou accords d’entreprise qui viendraient à être conclus après le 1er janvier 2010 ne peuvent comporter de clauses dérogeant aux dispositions de l’accord de branche, sauf dispositions plus favorables.

ont + de 50 ans (18 % des salariés)

32 % des IAC ont + de 50 ans(soit 25 296 salariés)

21 % des ETAM ont + de 50 ans(soit 42 322 salariés)

16 % des ouvrier ont + de 50 ans(soit 130 565 salariés)

ETAM IAC Ouvrier

0 50 000 100 000 150 000 200 000

Moins de 25 ans

De 25 à 29 ans

De 30 à 34 ans

De 35 à 39 ans

De 40 à 44 ans

De 45 à 49 ans

De 50 à 54 ans

De 55 à 59 ans

60 ans et plus

7Le supplément • Bâtiment actualité n° 19 • 9 novembre 2010

L’ACCORD DE BRANCHE A DEUX OBJECTIFS• Maintenir le taux d’emploi des salariés du BTP âgés de 50 ans et plus (17,2 % des salariés au niveau de la branche du BTP) ;• augmenter de 1 % le nombre de salariés du BTP âgés de 55 ans et plus (parvenir à 8,2 % des salariés de la branche du BTP).

Recrutement des seniors• Sensibiliser l’encadrement en matière de recrutement des seniors• Conclure des CDD seniors• Conclure des contrats de professionnalisation avec des salariés de plus de 45 ans

Évolution des carrières professionnelles

• Mettre en place une GPEC (gestion prévisionnelle de l’emploi et de compétences). Guide méthodologique de l’OPMQ-BTP (voir encadré page 5)• Mettre en place les entretiens de deuxième partie de carrière (et suivre une formation d’aide à la conduite de l’entretien)

Amélioration des conditions de travail – prévention de la pénibilité

• Mettre en place un plan de manutention des charges lourdes après consultation du CHSCT ou des DP• Faire participer les salariés à des réunions de sensibilisation de la campagne TMS BTP (OPPBTP-SIST)• Analyser les postes de travail en utilisant les programmes ADAPT-BTP• Développer les installations sanitaires sur les chantiers par la signature de contrats de prévention avec la CARSAT (ex-CRAM)

Développement des compétences et des qualifications

• Proposer un bilan de compétences aux salariés de 45 ans et plus• Développer les périodes de professionnalisation des salariés de plus de 45 ans

Aménagement des fins de carrière et de la transition entre activité et retraite

• Possibilité d’aménager les horaires et les conditions de travail par un passage à temps partiel• Possibilité de prendre en charge les cotisations vieillesse (régime de base plus complémentaire) sur la base d’un salaire à temps plein• Proposer un bilan de réorientation de carrière aux salariés de 58 ans et plus reconnus définitivement inaptes au travail

Transmission des savoirs et développement du tutorat

• Constituer des équipes d’âge mixte• Recourir au tutorat dans le cadre des accords nationaux de branche

Les mesures signalées en caractères gras sont à privilégier par les entreprises, car elles ne soulèvent pas de difficultés particulières de mise en œuvre.

RÉPARTITION PAR MÉTIERS

des salariés de plus de 50 ans dans le bâtiment en 2008

Dans deux métiers sur quatorze en production, les effectifs salariés

de 50 ans et plus dépassent les 20 %.30 % des chefs de chantier

ont 50 ans et plus.

Quelles actions l’entreprise peut-elle réaliser ?

Source : UCF/CCCA-BTP

dont 26 % des salariésont + de 50 ans

Production797 626 salariésdont 16 % des salariésont + de 50 ans

Technique etencadrement de

chantier105 680 salariés

dont 22 % des salariés

ont + de 50 ans

Administratif et commercial169 092 salariés

8 Le supplément • Bâtiment actualité n° 19 • 9 novembre 2010

Se projeter sur le long terme, quoi de plus difficile lorsque

la préoccupation première est l’activité immédiate ?

L’accord seniors a parfois été à l’origine d’une démarche

plus vaste résolument tournée vers l’avenir.

Pour Céline Pomathiod, DRH du Groupe Floriot, l’accord seniors a été à l’origine d’une démarche prospective. Il a permis de formaliser les actions existantes et de les incorporer dans le cadre plus géné-ral de la gestion des ressources humaines : « Pour améliorer l’employabilité des seniors, il faut s’interroger sur l’en-semble des tranches d’âge. »

Trois types d’actions prioritaires ont été fixés par l’entreprise : agir encore et toujours sur les conditions de travail, favoriser la transmission des savoirs et anticiper sur les évolutions de carrière.

Des mesures pour lutter contre les TMS...« L’amélioration des conditions de travail est, depuis de nombreuses années, une priorité pour l’entreprise afin d’éviter les accidents du travail et la survenue de maladies professionnelles.Nous avons programmé une étude ergonomique annuelle sur des postes à risque au regard des troubles mus-culo-squelettiques (TMS) qui pourraient apparaître. En 2010, le premier poste analysé est celui des banches. L’objectif :trouver les adaptations nécessaires afin d’éviter aux salariés le mal de dos.Un plan triennal de formation aux gestes et postures pour l’ensemble des salariés est également prévu. »

… et les longs trajets« Par ailleurs, nous avons décidé de por-ter une attention particulière aux trajets professionnels, l’entreprise intervenant sur plusieurs régions : Rhône-Alpes, Bourgogne et PACA.Aide à la recherche de logement pour les grands déplacements, mainte-nance de la flotte des 100 véhicules et remplacement de ceux-ci au-delà de 140 000 kilomètres sont autant de mesures qui devraient permettre de diminuer l’usure professionnelle due aux longs trajets. »

Des tuteurs volontairesLa deuxième mesure phare issue de l’ac-cord seniors concerne la transmission des savoirs et des compétences.« Depuis plus de dix ans, l’entreprise a développé une forte culture du tutorat pour suivre les jeunes embauchés. Ce tutorat est assuré essentiellement par des chefs de chantier et conducteurs de travaux qui ont entre 30 et 40 ans.Nous avons actuellement dans nos effectifs 10 % d’apprentis. Aussi, la transmission des savoirs est importante. Nous souhaitons donc aller plus loin en proposant aux salariés de plus de 45 ans de devenir tuteurs, sur la base du volontariat.

Nos assistants chefs, chefs d’équipe, maîtres ouvriers et maçons finisseurs, dont la compétence est reconnue, peu-vent se porter candidats.Dès que nous les aurons identifiés et que l’encadrement estimera qu’ils sont capables de transférer leur savoir-faire, ils suivront une formation au tutorat.Parallèlement, nous souhaitons repé-rer un ou deux formateurs ”maison”pour créer une école interne dédiée au transfert des connaissances, comme celle de la lecture d’un plan. »

Un bilan social individuelPour les entretiens annuels, et plus particulièrement ceux de deuxième partie de carrière, l’entreprise s’ap-puiera sur un outil original : le bilan social individuel. « Il s’agit d’un passeport informatisé qui retrace le parcours de chaque salarié :formation, certificats (Caces, secou-risme…), changements de fonction, évolution et composition de la rémuné-ration, mais aussi accidents de travail, visites médicales… C’est un support d’échanges entre le manager et le sala-rié au moment des entretiens annuels, mais aussi sur le chantier. Ainsi, l’af-fectation sur certains postes tiendra compte des éventuels problèmes de santé. »

« L’intérêt de cet accord réside dans la formalisation d’un plan de prévention et d’anticipation pour l’ensemble des salariés, et non pour les seuls seniors », affirme Céline Pomathiod.« Les textes sur les seniors sont trop restrictifs. Il ne s’agit là que d’un as-pect de la gestion prévisionnelle des emplois et des compétences de l’entre-prise. » ■

Des mesures en faveur des seniors, mais pas seulement

Entretien avec...

Céline Pomathiod

DRH

SRE Groupe Floriot

Bâtiment / génie civil, maisons individuelles, promotion immobilière

300 salariés dont 60 de plus de 50 ans

Ain

Stratégies d’entreprise

Du bon emploi de l’expérience

9Le supplément • Bâtiment actualité n° 19 • 9 novembre 2010

Les chefs d’entreprise issus du baby-boom seront, eux aussi, nombreux à partir à la retraite. Conscients de l’importance

d’assurer l’avenir de leur entreprise et la pérennité des emplois, certains s’y préparent plusieurs années à l’avance.

Préparer son départ, c’est aussi…l’affaire du chef d’entreprise

« Une transmission ne se fait pas du jour au lendemain. Il faut anticiper pour prévenir les risques », affirme François Poulingue, qui a cédé son entreprise en 2002.Son départ et celui de son épouse, direc-trice administrative et financière, ont été programmés longtemps à l’avance, car François Poulingue a fait le choix de vendre son entreprise (200 salariés) à quatre de ses cadres plutôt qu’à un grand groupe.Une manière de préserver l’implantation de son entreprise familiale dans un vil-lage de 1 200 habitants, et donc l’éco-nomie locale.

Accompagner le repreneur« La transmission à des cadres salariés pose un problème de reconnaissance :il a fallu que les cadres choisis soient reconnus par les autres salariés dans leurs nouvelles fonctions et qu’un leader soit accepté par les trois autres cadres.

Sans compter que les tâches que mon épouse et moi assurions ont dû être redistribuées entre eux.Il a fallu près de trois ans avant que la confiance s’établisse réellement avec l’ensemble du personnel. J’ai connu la même situation lorsque j’ai succédé à mon père. »Dans les faits, François Poulingue est resté sept ans salarié de l’entreprise, en qualité de responsable commercial, pour faciliter la transition.« La clé de la réussite était de ne pas perdre notre portefeuille de clients. » Tout en accompagnant le dirigeant, il a aussi assuré l’accueil et la formation des jeunes commerciaux. Et bien que faisant partie du comité de direction, il a pu dégager du temps pour prendre des mandats au sein de la FFB.

S’investir autrement« Pour un senior, l’essentiel est de conserver l’envie de travailler et de

trouver de nouveaux centres d’intérêt. J’ai beaucoup apprécié de consacrer du temps à la profession, notamment comme vice-président de l’Union char-pente menuiserie parquet. Ce mandat, comme d’autres dans la filière bois, a été un poste d’observation positif pour l’entreprise. »En raison de la crise, François Poulingue reconnaît que « la dernière année d’ac-tivité dans l’entreprise a été difficile. Et puis, lorsque l’on est un peu plus âgé, la pression est plus difficile à suppor-ter... et ce quel que soit le métier. Il est donc important de diminuer le stress des seniors et de redessiner leurs missions en fonction de leurs compétences ».

Cette stratégie a permis à ce chef d’en-treprise de quitter l’entreprise serein, confiant en la pérennité de l’entreprise pour les générations à venir. ■

Entretien avec...

François Poulingue

Ancien chef d’entreprise

Entreprise Poulingue

Entreprise générale de bâtiment(gros œuvre, charpente bois, menuiserie bois, serrurerie, couverture, désamiantage)

200 salariés

Eure

Si elles réagissent souvent sous la pression réglementaire, certaines entreprises ont pris conscience de la nécessité d’agir en profondeur. Rares sont celles dont les actions ne concernent qu’un champ d’intervention : préservation de la santé, gestion des compétences, transfert des savoirs… autant d’actions complémentaires qui profitent in fine à l’ensemble des salariés. Témoignages.

10 Le supplément • Bâtiment actualité n° 19 • 9 novembre 2010

Privilégier le dialogueToujours présent et disponible, Laurent Guay privilégie le dialogue avec son personnel. « Les salariés savent que s’ils rencontrent des difficultés, ils peuvent en discuter avec moi à tout moment. »Ainsi, lorsqu’un salarié lui signale des douleurs aux genoux, il change d’af-fectation : de la pose de revêtement de sol, par exemple, il passe aux travaux de peinture. Sa fonction précédente est alors confiée à une personne plus jeune.

Reconnaître le savoir-faire « À partir de 50 ans, et s’ils en ont les compétences, j’essaie de leur donner des tâches qui demandent plus de fini-tion, une plus grande précision. C’est une forme de reconnaissance de leur savoir-faire. »Anciens et jeunes travaillent en binôme et certains seniors ont suivi une forma-tion de formateur pour les encadrer. »Les entretiens annuels permettent de proposer des formations et de faire évo-luer vers plus de responsabilité ceux qui en ont les capacités.« Je souhaite les garder le plus long-temps possible, ce qui est faisable grâce aux outils de manutention. Comme cer-tains ont commencé très jeunes, ils ont cependant tendance à partir dès qu’ils le peuvent. »S’il n’a pas eu l’occasion d’embaucher des seniors, Laurent Guay a rappelé, pendant un mois, l’un de ses retraités pour former un futur conducteur de travaux. Cette mission, qu’il n’avait pas le temps de réaliser lui-même, a pu se faire grâce au dispositif cumul emploi-retraite, désormais plus ouvert.La gestion des âges s’organise donc au quotidien en fonction des besoins des salariés et de l’entreprise. ■

Faciliter l’adaptation

Entretien avec...

Laurent Guay

Président

Entreprise Pinxyl

Peinture, revêtement de sol, ravalement de façade

Moyenne d’âge : 38,5 ans

97 salariés dont 83 ouvriers et 4 apprentis

Indre-et-Loire

Embaucher et former au-delà de 50 ans, c’est possibleEn 2009, Pascal Kesler cherchait un tech-nicien chauffagiste pour le dépannage des chaudières installées chez ses clients.Lorsque Claude Boileau s’est présenté, il n’a pas hésité à embaucher ce senior de 53 ans au chômage, issu du secteur de l’électrotechnique. « Je préfère intégrer dans l’équipe un ancien qui a vraiment envie de travailler qu’un jeune non motivé. »En raison de son manque d’expérience dans le bâtiment, il lui propose une période d’essai de 15 jours. Devant sa détermination, il l’engage en contrat de professionnalisation (626 heures), puis en CDI.L’entreprise ayant pour marché l’installa-tion et le contrôle de panneaux solaires, il envisage de le faire évoluer à terme sur ce créneau.La preuve que l’on peut se former et évoluer à tout âge.

Assurer la transmission des savoirsPascal Kesler accueille chaque année des apprentis, des lycéens et des deman-

deurs d’emploi en stage, stratégie ancrée dans l’entreprise depuis sa créa-tion. Le tutorat et la formation font par-tie intégrante des missions des salariés qualifiés. L’un des salariés souffrant de problèmes de dos est devenu formateur à l’Afpa.« Former les autres est une bonne solu-tion pour les personnes en fin de car-rière, que ce soit dans l’entreprise ou à l’extérieur. »

Faciliter la vie au travail pour tousPascal Kesler met tout en œuvre pour assurer la sécurité et le confort de ses salariés au travail.« Avec le concours de l’OPPBTP, j’ai beaucoup investi dans l’équipement d’un monte-charge élévateur pour les chaudières et d’aspirateurs. Dans les mois à venir, je projette de réaliser un audit pour continuer dans cette voie. »

Formation et amélioration des condi-tions de travail, des actions à la portée des entreprises de toute taille pour fidé-liser les salariés dès leur embauche. ■

Dépasserles idées reçues

Entretien avec...

Pascal Kesler

Gérant

Entreprise Kesler Chauffage

Chauffage, énergies renouvelables

8 salariés et 2 apprentis de plus de 55 ans

Indre-et-Loire

Selon 2 700 chefs d’entreprise interrogés par la FFB, les principaux atouts des

seniors sont :• compétences techniques ;• savoir-faire ;• connaissance de l’historique des chantiers ;• forte culture du travail ;• fidélité à l’entreprise ;• fiabilité et autonomie ;• bon relationnel avec les clients ;• transmission des savoirs.

Des atouts reconnus par les entreprises

Entr

Seloninle

sen• com• sav• con l’hi• for• fidé• fiab• bon ave• tran

Despar

11Le supplément • Bâtiment actualité n° 19 • 9 novembre 2010

Jean-Marc Flipo n’a pas formalisé de plan en faveur des seniors.Pour lui, il s’agit d’un management « humain », au quotidien, pour l’en-semble des salariés.Tous ont commencé comme appren-tis et sont restés dans l’entreprise. « Garder les salariés, c’est un réflexe de survie pour l’entreprise. On se doit de les protéger. J’ai tout mis en place pour faciliter la manutention. Pour actualiser leurs compétences, les techniciens de maintenance suivent de nombreuses formations, souvent dispensées par les fabricants. »

Priorité aux compétencesQuand il embauche, ce qui prime, ce sont les compétences, quels que soient l’âge ou le sexe (il a une jeune technicienne en maintenance dans son équipe). Lorsqu’il a eu besoin d’un technico-commercial, il a préféré sélectionner une personne de 50 ans. « C’est plutôt un avantage de prendre quelqu’un d’expérimenté, de mature et de bien positionné dans le métier. » Ayant créé une nouvelle fonc-

tion dans l’entreprise – service après-vente et fidélisation des clients –, il a choisi, là aussi, une secrétaire de 50 ans en contrat de professionnalisation pour remplacer celle qui partait à la retraite. Cette dernière a assuré le tutorat de la nouvelle recrue et le transfert de son savoir pendant six mois.Une gestion des âges, des compétences et des conditions de travail qui devrait aider tous les salariés à rester dans l’en-treprise jusqu’à l’âge de la retraite. ■

Un management quotidien

Rassurer les salariés« Nous avons toujours eu une politique avant-gardiste : démarche qualité, amé-lioration des conditions de travail, de santé, de sécurité… Avec le plan seniors, signé le 1er janvier 2010, nous poursui-vons dans cette voie sur une population ciblée », affirme Cécile Jumel.L’entreprise a opté pour des actions en faveur du maintien des seniors. Mais elle a aussi embauché récemment deux per-sonnes de plus de 50 ans.« Nous allons mettre en place les entre-tiens de deuxième partie de carrière dès le second semestre. Les gens se sen-tent perdus avec les nouvelles mesures concernant la retraite. Ils devront tra-vailler plus longtemps. Il est d’autant plus important d’échanger avec eux sur leur avenir professionnel. »

Améliorer l’ergonomieRenouard SA a décidé de faire appel à l’OPPBTP pour effectuer une analyse ergonomique des postes de travail. L’atelier acier a été le premier sujet d’étude : débit de l’acier, bancs d’usi-nage et assemblage des châssis... tout y est passé.L’objectif : alléger autant que possible les charges lourdes et apprendre au per-sonnel à adopter de meilleures postures, car ils sont debout toute la journée.« Nous avons la chance de pouvoir béné-ficier de l’appui de la FFB et de la pro-fession sur ces questions. Il faut savoir la saisir, car ce n’est pas le cas dans les autres branches. »

Anticiper les recrutementsCécile Jumel reconnaît qu’au moment du report de l’âge de la retraite, le plan seniors est arrivé à point.« Il nous permet de réfléchir à notre pyramide des âges et d’anticiper nos besoins en recrutement. C’est sur-tout vrai en métallerie, où l’offre en apprentissage est insuffisante face à nos besoins. » ■

Gérer les âges

Entretien avec...

Cécile Jumel

DRH

Renouard SA

Métallerie, menuiserie alu

70 salariés dont 20 % ont plus de 50 ans et 2 apprentis

Côtes-d’Armor

❝ L’analyse de la pyramide des âges, des métiers et des compétences, même sommaire pour une PME, est une étape indispensable pour mettre en place une stratégie. C’est à partir de ce moment que l’entreprise peut piloter son avenir, négocier, former, débattre avec les salariés et les instances représentatives, nouer des partenariats. ❞

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des âges, nces, PME, pour ie. tr

Stratégies d’entreprise

Du bon emploi de l’expérience (suite)

Entretien avec...

Jean-Marc Flipo

Gérant

Flipo SAS

Plomberie-chauffage

15 salariés dont 3 salariés de plus de 50 ans et 2 apprentis

Moyenne d’âge : 30 ans

Nord

12 Le supplément • Bâtiment actualité n° 19 • 9 novembre 2010

Rabot Dutilleul a signé un accord-cadre seniors fin 2009, au niveau du groupe (15 entreprises).Cet accord porte sur le maintien dans l’emploi de tous les salariés de plus de 45 ans, avec un objectif chiffré de 5 % pour les plus de 55 ans et de 15 % pour la tranche des 45-54 ans.À chaque entité de déterminer ensuite des engagements précis.Chez Rabot Dutilleul Construction, l’ac-cord comporte plusieurs dispositions comme la rédaction d’un guide d’entre-tien de deuxième partie de carrière avec l’appui d’un consultant, la formation à la conduite de ces entretiens, la création d’un passeport formation, le développe-ment des compétences par la formation, etc. Parmi celles-ci, deux relèvent de l’amélioration des conditions de travail et de la transmission des savoirs.

Privilégier la santé au travailEn concertation avec les responsables du CHSCT 1 et le médecin du travail, l’entreprise a décidé de mettre l’accent sur la prévention et la santé au travail :une visite médicale annuelle, au lieu

de tous les deux ans, pour les plus de 50 ans ; un rappel facultatif de la formation « Prévention des risques liés à l’activité physique (PRAP) »pour les plus de 45 ans ; un module de recyclage de trois heures sur les risques des métiers du BTP destiné aux 150 sau-veteurs secouristes du travail. « Nous avons aussi créé une commission ”maintien dans l’emploi” chargée d’évo-quer, deux fois par an, la situation des salariés de plus de 45 ans qui ont des restrictions médicales lourdes.Comment aménager le poste concerné ?Comment anticiper l’inaptitude ? Quelles solutions envisager : autre poste ou reconversion ? Autant de questions pour lesquelles la commission devra apporter des réponses individualisées. » •••

Croiser approche santé et ressources humaines

Entretien avec...

Estelle Renaud

DRH

Rabot Dutilleul Construction

Entreprise générale de bâtiment

666 salariés dont 33 % de plus de 45 ans et 4 % de jeunes en alternance

Moyenne d’âge : 38,9 ans

Nord

Non à la discriminationSigné le 15 janvier 2010, le plan seniors, applicable aux deux entreprises Santunione et Sols Cash, s’attache à maintenir à 14 % au moins la part des personnes de plus de 50 ans, voire de la porter à 16 %.Le groupe affirme sa volonté de ne pratiquer aucune discrimination à l’em-bauche. Le personnel chargé du recrute-ment est sensibilisé dans ce sens.Il envisage aussi un meilleur partenariat avec Pôle emploi et le groupement d’em-ployeurs par l’insertion et la qualification (GEIQ), bien représenté localement.

Repenser l’organisation« Il faut penser à l’avenir et structurer l’entreprise en tenant compte de la pyramide des âges, avec des salariés qui auront une carrière professionnelle plus longue », souligne Serge Santunione.« Pour les carreleurs qui ont plus de 55 ans, j’adapte dans la mesure du pos-sible leur emploi, en les affectant à des tâches moins pénibles.

J’ai depuis peu créé une nouvelle entre-prise de chape fluide qui, du fait de sa technologie, devrait me permettre de proposer aux salariés les plus anciens de travailler dans de meilleures condi-tions. »Des équipes d’âge mixte sont constituées avec des expertises et des expériences différentes permettant d’anticiper la transmission des savoirs.

Priorité à la formationSerge Santunione s’engage à accor-der prioritairement un accès à la for-mation aux salariés âgés de 45 ans et plus. « Il s’agit surtout de forma-tions techniques, mais je prévois des formations de tuteur pour les équipes mixtes et de management pour deux conducteurs de travaux. »À partir d’un modèle proposé par la FFB, un passeport formation sera établi pour tout le personnel afin d’identifier et de faire certifier les connaissances, les com-pétences et les aptitudes professionnelles.Un seul regret pour Serge Santunione :

que les appels d’offres publics ne pren-nent pas en compte le « bilan social »des entreprises, en particulier les efforts accomplis pour former, fidéliser le per-sonnel (5 salariés ont reçu une médaille du travail pour avoir œuvré dans l’entre-prise entre 30 et 40 ans) ou améliorer les conditions de travail.Un sujet de réflexion pour l’avenir. ■

Faciliter l’employabilité et la mobilité professionnelle

Entretien avec...

Serge Santunione

Gérant

SARL Santunione et SARL Sols Cash

Vente, pose de revêtement de sol

48 salariés dont un de 58 ans, contrôleur de gestion, et trois de plus de 55 ans, sur chantier

Moyenne d’âge : 36 ans

Corse

13Le supplément • Bâtiment actualité n° 19 • 9 novembre 2010

Convaincue qu’il existe un lien entre la gestion des âges et la performance de l’entreprise, la direction de CMS a signé un plan d’action en faveur de l’emploi des seniors, dès novembre 2009.Les actions programmées concernent leur maintien dans l’emploi, avec un objectif chiffré de 8 % des plus de 55 ans parmi les effectifs, sur les trois prochaines années.

Valoriser l’expériencePour atteindre ce résultat, l’entreprise renforce les actions ayant déjà fait leurs preuves, comme le tutorat de tout nou-vel embauché.

« Pour anticiper plusieurs départs en retraite, nous allons bientôt recruter de jeunes ouvriers sans qualification.Ils seront encadrés par des compagnons professionnels qui n’assument pas encore la fonction de chef d’équipe, et qui sont donc plus disponibles », indiqueClaire Nodé-Langlois.Pour que la transmission des savoirs et des compétences s’effectue dans les meilleures conditions, les seniors repérés pour leur expertise se voient proposer une formation de tuteur.« Nous souhaitons que 20 % des plus de 50 ans en bénéficient, cette nouvelle fonction étant prise en compte dans leurs résultats annuels.Ils se montrent très fiers d’être choisis. Il s’agit pour eux d’une véritable recon-naissance de leur expérience. »

Développer la formationUn autre axe fort du plan : favoriser l’ac-cès à la formation des plus de 55 ans pour améliorer leur employabilité.Ces formations pourront être lancées à tout moment, en fonction des besoins de l’entreprise ou de la demande des salariés. 40 % d’entre eux devront en avoir suivi une d’ici à fin 2012.« Ils ont ainsi participé à un stage de pré-paration de chantier. Malgré la réticence de certains, qui estimaient avoir fait le tour de la question, cette formation a été très appréciée, car elle a abordé leur quotidien sous des angles différents. »Enfin, l’aménagement des fins de car-rière a notamment pour objectif de retarder le départ des salariés en leur proposant des mi-temps, des cumuls emploi-retraite ou des changements de mission lors de réunions d’information.« Cela présente l’avantage de prolonger la transmission des savoirs. » ■

Entretien avec...

Claire Node-Langlois

DRH

CMS (filiale du groupe Vinci)

Leader du désamiantage

238 salariés dont 14 % de plus de 51 ans et 5 % dans la tranche 56-60 ans

Val-de-Marne

••• L’entreprise sera également atten-tive à la demande des salariés souhai-tant l’aménagement de leur fin de carrière. Ils seront, par exemple, tous informés des possibilités ouvertes par le cumul emploi-retraite.

Transférer les compétencesRabot Dutilleul a toujours embauché de nombreux jeunes en alternance.Le tutorat est donc une pratique cou-rante et, chaque année, huit à dix personnes suivent une formation de formateur de trois jours. À l’avenir, la priorité sera donnée aux tuteurs de plus de 45 ans.Plus original, et forte d’une expérience antérieure, l’entreprise a retenu une dis-position qui ne sera utilisée qu’en cas de besoin : le transfert des compétences d’un futur retraité à son successeur.Le transfert en question, sur un métier très spécifique, a été le fruit de tout un processus : un consultant a été chargé de repérer et rédiger les compétences clés, attachées au savoir-faire personnel d’un chef d’atelier. Il a ensuite défini la façon de les transmettre et élaboré une méthode pédagogique pour les deux salariés, avec un suivi sur plusieurs mois. Un accompagnement de longue haleine, mais qui a porté ses fruits : le successeur est opérationnel un an avant sa prise de poste.En conclusion, explique Estelle Renaud :« Ce plan a été l’occasion de formaliser et de renforcer des actions existantes, de mutualiser la réflexion et les expériences des différentes entreprises du groupe et de proposer de nouvelles orientations en fonction des résultats. » ■

1. Comité d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail.

Stratégies d’entreprise

Du bon emploi de l’expérience

(suite)❝ Les seniors peuvent faciliter l’intégration des plus jeunes,

encadrer leur formation pour qu’ils prennent le relais

et assurent la pérennité de l’entreprise. ❞

Former et être formé

14 Le supplément • Bâtiment actualité n° 19 • 9 novembre 2010

Des années d’expérienceLe parcours de Dominique Julitte est tout sauf banal. Son CAP et son BEP d’électrotechnicien en poche, il travaille dans des secteurs aussi divers que la téléphonie, la photo-copie, la sécurité incendie, les ascenseurs. Il continue à gravir les échelons, jusqu’à devenir responsable d’un organisme de contrôle chargé de faire respecter les normes électriques. La société étant rachetée, en 1998, il décide de créer son entreprise d’élec-tricité avec, comme premier salarié, son fils, apprenti au CFA d’Antibes. Elle fonctionne bien pendant dix ans avec 15 salariés, mais, avec la crise de 2008, elle cesse son activité. Après avoir reclassé tous ses salariés, Dominique Julitte s’oriente vers la for-mation.

Devenir formateur en CFA« Comme j’avais déjà corrigé des épreuves de BP et effectué des rempla-cements ponctuels, j’ai été sollicité par le CFA d’Antibes pour un poste d’en-seignant en génie électrique auprès de jeunes en CAP et d’adultes en formation continue. J’avais alors 54 ans. Je n’ai eu aucune difficulté à m’intégrer dans l’équipe enseignante, composée de nombreux professionnels. J’ai même un ancien apprenti, artisan pendant deux ans, qui m’a rejoint au CFA. [...] Quant aux élèves, cela les rassure de savoir que j’ai 37 ans de métier. Ils apprécient beaucoup que je leur parle de la réa-lité de la vie de l’entreprise, avec des anecdotes. [...] Je suis aussi expert régio-nal aux Olympiades des métiers. Je suis surpris par la qualité du travail de ces jeunes, tous passionnés »

Dominique Julitte est ravi de cette reconversion, qui correspond à son goût de transmettre ses connaissances. Il considère que pour des seniors il y a de nombreuses possibilités d’enseigne-ment dans les domaines techniques. Une chance à saisir. « C’est une très belle expérience. Je ne changerais pour rien au monde. » ■

De chef d’entreprise à formateur, il n’y a qu’un pas

Entretien avec...

Dominique Julitte

Formateur en électricité

CFA Antibes

Alpes-Maritimes

Ces seniors qui deviennent des formateursTuteur, oui, mais… Avec le compagnonnage, le bâtiment est l’un des secteurs dans lesquels l’accueil,

la formation et le tutorat des jeunes embauchés se sont développés de façon historique. Cependant, tout senior n’a pas vocation à être tuteur. L’expérience et les compétences techniques

ne peuvent être les seuls critères. La perspective d’un enrichissement de ses tâches peut être l’objet de l’entretien de deuxième partie de carrière. Les salariés doivent être choisis pour leur motivation

à s’investir dans cette nouvelle tâche, leur aptitude au dialogue avec les jeunes et la capacité à transmettre leur savoir. Cela suppose que des formations, voire un accompagnement,

soient mis en place dans l’entreprise. Pour être bénéfique, le tutorat doit s’inscrire dans une démarche plus large de performance des équipes et de management des ressources humaines.

Pour le senior, ces nouvelles compétences peuvent aussi être transférables, à terme, dans un organisme de formation professionnelle à l’extérieur de l’entreprise.

15Le supplément • Bâtiment actualité n° 19 • 9 novembre 2010

Après un BTS de charpente-menuiserie, Alain Lavault reprend l’entreprise fami-liale. Il fait partie de la sixième généra-tion à assurer la relève. Il a toujours été attiré par la formation des jeunes, que ce soit comme maître d’apprentissage ou comme conseiller de l’enseignement technologique. En 1999, après des soucis de santé, il se tourne donc vers l’enseignement. Il commence par assurer des vacations à l’Éducation nationale et à l’Afpa, puis devient formateur pour les CAP et bac pro du CFA d’Autun, ainsi que pour les BTS du lycée professionnel. « Je fais passer mon savoir avec mes tripes. Après 37 ans de métier, on acquiert une multitude d’astuces qui n’existent pas dans les cours théoriques. Quand j’ai des questions, je réponds avec mon vécu. » Pour que cette passion s’inscrive dans la durée, il écrit actuellement un livre inti-tulé Découvrir, comprendre et aimer le trait de charpente. Cette seconde vie profes-sionnelle lui donne beaucoup de plaisir, et il encourage les seniors à s’engager dans cette voie, tout en étant conscients que tout le monde ne pourra peut-être pas le faire. ■

Une seconde vie professionnelletout aussi passionnante

Entretien avec...

Alain Lavault

Formateur en électricité

CFA BTP d’Autun

Saône-et-Loire

Cela fait cinq ans que Daniel Tosello est formateur en maçonnerie et plâtrerie au CFA de Toulon. Ouvrier, puis artisan avec huit salariés, il a planifié sa fin de carrière longtemps à l’avance. « Je savais qu’à 55 ans j’aurais des difficultés à poursuivre mon activité. Je souhaitais à tout prix transmettre aux jeunes la passion de mon métier, ce qui constituait une période transitoire entre une activité intense sur les chantiers et la retraite. » À 43 ans, il obtient le brevet de maîtrise qu’il a préparé pendant cinq ans. La partie psychologie de l’enseignement lui a permis de mieux aborder les ado-lescents.

Quand il est devenu maître artisan maçon, il a assuré des vacations au CFA, qui l’ont conforté dans cette vocation. Il est donc devenu naturellement forma-teur à part entière, après une formation de formateur au CCCA-BTP. « Pour faire ce métier, il faut aimer les jeunes, croire en eux et être passionné par son métier. Les aider à démarrer dans la vie, c’est une belle récompense. »Il espère que beaucoup d’autres seniors franchiront le pas. ■

Une fin de carrièreplanifiée

Entretien avec...

Daniel Tosello

Formateur en maçonnerie et plâtrerie

CFA de Toulon

Var

« Tout professionnel qui souhaite deve-nir formateur doit suivre une formation pédagogique en alternance de deux ans »,rappelle Pierre Gomez.En Île-de-France, la volonté politique de développement de l’alternance est forte. Le conseil régional a donc mis en place une formation complémentaire à celle du CCCA-BTP qui débouche sur le titre homologué de « formateur en CFA » de niveau bac+2. Elle comprend notamment un module sur la psychologie de l’adolescent et un rapport doit être produit sur un projet d’action à partir d’une situation pédago-gique non satisfaisante. « Cela demande beaucoup de travail à ces professionnels,

mais pour eux le titre est une véritable reconnaissance.Dans mon équipe, j’ai trois formateurs seniors de 56, 58 et plus de 60 ans. Les critères de sélection des candidats reposent surtout sur leur motivation à transmettre leur savoir, leur expérience et leur niveau de diplôme professionnel. Ce sont en général des personnes pas-sionnées et qui ont toutes eu des fonc-tions d’encadrement de jeunes en tant qu’artisan ou chef d’entreprise artisa-nale. » Un investissement plaisir pour achever sa carrière et passer le relais. ■

Une véritablereconnaissance

Entretien avec...

Pierre Gomez

Directeur

CFA-BTP de Brétigny-sur-Orge

Var

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