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  • Galerie Drouart

    nouvellesralits

    1946-1955

    Exposition organise par Arthur Cavanna et Daniel Schidlower,

    Galerie Drouart, en collaboration avec Domitille dOrgeval.

    Cette exposition naurait pu tre ralise sans le soutien du comit du Salon des Ralits Nouvelles. Nous exprimons toute notre gratitude M. Guy Lane et M. Louis Nallard, membres du Comit dhonneur, M. Michel Geminiani, Prsident, M. Henri Prosi, Vice-Prsident, ainsi qu M. Jacques Weyer.

    Nous remercions toutes les personnes qui ont contribu par leurs conseils et leur aide son laboration, et particulirement M. Alain Anceau, M. Carmelo Arden-Quin, M. Tristan Azzi, Mme Franka Berndt, M. Bolivar, Mme Jeanne Busse, Mme Genevive Claisse, M. Georges Coppel, Mme Lucy Del Marle, Mme Thrse Delmer, Mme Ruth Domela, M. Charles Euzet, Mlle Claire Euzet, M. Pierre Fichet, M. Franois Jousselin, M. Nicolas Ionesco, M. Fabrice Lapelletrie, M. Serge Lemoine, M. Roger Malina, Mme Yvette Moch, Mme Sylvie Nordmann, M. et Mme Jean dOrgeval, M. Alain Peyrissac, Mme Stphanie Peyrissac, M. Arnauld Pierre, M. Alexis Poliakoff, M. Jean Radou, M. Othello Radou, M. Georges Richar-Rivier, Mme Catherine Santoni-Folmer, Mme Catherine Topal, M. Didier Vallens, Mme Dominique Szymusiak, Mme Sabine Vazieux, ainsi que la Galerie Arnoux et la Galerie Lahumire.

  • ralits nouvelles

    Il y a quelques jours, je fus invit un de ces dners trs parisiens chez M. et Mme***, des clients de la Galerie. La conversation senferrait depuis plus dune heure sur les affaires politiques.La table rassemblait llite la mode de la bonne socit franaise : artiste peintre, musicien, littrateur, membres intel-lectuels de diverses professions librales, bref les habitus de M. et Mme ***. Seul un couple, cousin de la matresse de maison dont le mari tait professeur dhistoire au lyce de Montauban, venait rompre la belle harmonie de ce repas.

    Je mtais jusque-l bien gard dmettre la moindre opinion, prfrant couter laimable discordance des convives.Ce nest quau moment du dessert, propice un bref mais non moins embarrassant silence, que Mme *** me reprocha mon mutisme : Mon cher, serait-il indiscret de vous demander quoi vous pensez ? La plupart de mes amis tournrent vers moi leur regard dans un silence courtois. Un peu gn davoir t surpris dans ma rverie je rpondis : Nullement ! Je pensais . A quoi pensais-je, dailleurs ?

    Je pensais la pense, justement. Notre pense est absolue dans le moment o nous pensons, elle a sa propre existence, elle dborde, en se heurtant tout ce qui dborde, elle entreprend son petit voyage et devient lobjet dune ide. En fait lide, prcisment, tait de changer de conversation, et je pensais que certains, au moins, auraient reconnu le texte de Picabia.

    Je demandai alors : Quelquun a-t-il vu lexposition sur la peinture abstraite lEnvole Lyrique au muse du Luxembourg ? - Oui, fit remarquer la cousine de Mme ***, jy ai pouss mon mari et je dois reconnatre que tout ces gribouillis mont fait mal la tte, mon petit fils de cinq ans pourrait en faire autant ! Cette courageuse dclaration cra un nouveau silence et je ne rsistai pas lenvie de lui faire remarquer que dj, prs dun sicle auparavant, une rflexion similaire avait t releve chez Kahnweiler lors dune exposition Picasso et que le peintre prsent avait cingl cette rponse : Votre fils de cinq ans oui, mais vous certainement pas ! Cest alors que son montabalnais de mari, se sentant un peu chahut, me dit : Et Ingres, quen pensez- vous, Monsieur le moderniste ? - Ingres ? rpondis-je, Merveilleux ! Extraordinaire ! La force de son trait, la limpidit de son dessin, en font un prcurseur de lart moderne, tout comme Czanne pour les cubistes, et ce nest pas parce que nous prparons une exposition dart abstrait sur les Ralits Nouvelles que je vais stigmatiser tout lart du 19me sicle ! Vous ne me mettrez pas en dfaut l-dessus ! Chacun sembla avoir pris fait et cause pour cette polmique et tous se rassemblrent en trois clans : les pour , les indcis et les contre . Trs vite la discussion battit son plein, bien plus encore quau sujet des lections, et elle devint de plus en plus passionne, tous les -ismes montaient au crneau, impressionnisme, cubisme, fauvisme, expressionnisme, surralisme, Constructivisme, suprmatisme, et pourquoi pas lonanisme crbral de cer-tains critiques chers Alfred Jarry ?, me fit remarquer mon voisin et confrre, P.B.

    Je compris quil tait grand temps de calmer cette enthousiaste assemble qui semblait avoir perdu tout contrle, toute thique, et qui ntait pas sans rappeler les meilleurs moments dempoignades de 1947 la Coupole ou au Select. Jen conclus quil restait encore de beaux jours aux manifestations artistiques et au march de lart et conseillai tous, trs diplomatiquement, devant la multitude de questions de plus en plus pertinentes, la lecture douvrages spcialiss tel que : Quest ce que lart abstrait ? , de Georges Roque, ou celle de notre catalogue de rfrence sur lexposition des Ralits Nouvelles de 1946 1955, celui-l mme que vous avez entre les mains et, bien videment, de venir voir lexposition la Galerie Drouart.

    Le calme revenu, dans la crainte davoir fch certains invits, je me rappelai, un peu tard peut-tre, la phrase dAmbroise Vollard Pour vendre un tableau le mieux est encore de ne rien dire.

    Arthur CAvAnnA

    6 Premire partie AnAlyse

    6-9 La conqute de labstraction De sa naissance aux Ralits Nouvelles Daniel Schidlower

    10-25 Le Salon des Ralits Nouvelles 1946-1955 Domitille dOrgeval

    DoCuments

    26-47 Documents

    49 Seconde partie uvres 49-139 Planches couleur

    141 Troisime partie BiogrAphies Des peintres exposs

    141-157 Biographies

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    ralits nouvelles

    La conqute de labstraction De sa naissance aux Ralits Nouvelles Daniel SchiDlower

    Lart abstrait , n au dbut du vingtime sicle, continue aujourdhui dalimenter toute la cration artistique, den tre un ferment indniable.Plus quune cole ou un mouvement, il est dabord sa naissance, rupture avec toutes les conceptions dveloppes antrieurement, et il donne en mme temps a posteriori toute leur dimension ce quont t successivement le fauvisme, lexpressionnisme, le cubisme, le futurisme.La place que lart abstrait occupe aujourdhui intgre les positions de ses fondateurs quon a trop souvent voulu opposer les uns aux autres, en considrant dun ct lasctisme protestant de Piet Mondrian qui le conduit au noplasticisme ( Lart na de sens que sil exprime le non-matriel car cest ainsi quil permet lhomme de slever au-dessus de lui-mme ), de lautre le lyrisme de Wassily Kandisky qui lui fait crire ds 1910 que les objets nuisaient sa peinture , ou encore le nihilisme de Malevitch qui lamne au Carr blanc sur fond blanc en 1918.Certes, les artistes eux-mmes, plus tard, se sont positionns en acceptant pour les uns (voire en sen revendiquant) dtre considrs comme des artistes abstraits gomtriques , pour les autres, en se rclamant de la ncessit intrieure de Kandinsky, tandis que dautres encore, comme Bazaine estimaient que les formes qui passent travers nous, si peu figuratives soient-elles, proviennent de la nature, quelles sont traduites par lartiste (Bazaine, 1948).

    Les dveloppements de labstraction au lendemain de la premire guerre mondiale. La place particulire de lart abstrait rside en ce quil irrigue toute la socit travers la volont exprime ds lorigine de lier entre elles les diffrentes disciplines artistiques dans lidal dun Art total . Sa longvit repose sur le fait que depuis la fin de la guerre de 1914-1918, il a imprgn lesprit du Bauhaus, o lenseignement dartistes aussi diffrents que Wassily Kandinsky, Benjamin Itten, Paul Klee, ou bien encore Walter Gropius, Laszlo Moholy-Nagy, et Mies Van der Rohe, imposa lartiste-artisan comme figure participant la refonte de toute la socit . Cest cette mme orientation qui a fait le ciment du noplasticisme et de De Stijl et qui guida Van Doesburg dans ses exprimentations architecturales lmentaristes menes avec Van Eesteren dans le milieu des annes 20. Elle trouva un prolongement en France et en Belgique au sein du groupe runi autour de Vouloir, revue devenue sous la direction de Del marle en 1927 un organe du noplasticisme.

    Cest en URSS enfin, que Lunatcharski, Commissaire du peuple lducation et la culture fonde au lendemain de la Rvolution russe, en 1918, lIZO (Dpartement des Beaux Arts

    au Commissariat populaire lInstruction publique). Celle-ci donne un nouveau statut Malevitch, Tatline, El Lissitzky, Rodtchenko, qui se voient confier la constitution de nouvelles coles dart et la direction de nouveaux muses. De 1923 1928, Malevitch habite dans la Galerie de Petrograd o il dirige un laboratoire dart exprimental ax sur une nouvelle architecture.

    Lapport de ces artistes de lavant-garde est considrable, pour ne prendre que lexemple de Pevsner ou de Gabo, dont lart dmatrialis trouve ses prolongements dans lart cintique de la fin des annes 1950. Leur manifeste constructiviste placard en 1920 dans les rues de Moscou indiquait : 1) Pour rpondre la vie relle, lart doit se fonder sur deux lments fondamentaux, lespace et le temps. 2) Le volume nest pas la seule expression spatiale. 3) Les lments cintiques et dynamiques peuvent permettre dexprimer le temps rel, les rythmes statiques ny suffisent pas. 4) Le volume de la masse et celui de lespace ne sont pas plastiquement la mme chose, mais deux matriaux diffrents concrets et mesurables. 5) Lespace, matire mallable, devient partie intgrante de luvre. 6) lart doit cesser dtre imitatif pour dcouvrir des formes nouvelles .

    La politique de Staline du Ralisme Socialiste mettra fin ce mouvement protiforme et conduira lexil bon nombre dartistes russes davant-garde.

    Kandinsky, Gabo et Pevsner, prtextant lexposition dart russe qui se tenait la galerie Van Diemen Berlin, quittrent dfinitivement leur pays ds 1922. Mais cest dsormais en Allemagne ou Paris quils joueront alors un rle important.

    Dautres artistes davant-garde, parfois aussi les mmes, considrant que les arts plastiques dgags des contraintes formelles de reprsentation de la nature rejoignaient travers labstraction la musique, inscrivirent leur conception de lart total dans leur participation lopra ou au thtre.

    Il ne faut pas oublier que le Carr noir sur fond blanc de Malevitch est n en 1913 dans lopra dont il fit les dcors : Victoire sur le soleil (musique de Mathiouchine, livret de Kroutchenykh) pour ntre quensuite, en 1915, transcrit sur la toile.

    De mme que Frantisek Kupka attribuait la musique une importance primordiale dans les dveloppements de sa propre peinture : la musique est le seul art des sons qui ne se trouve pas dans la nature et quil faut crer presque entirement [] je crois que je peux trouver quelque chose entre la vision et laudition et que je peux produire une fugue en couleur comme Bach le fait en musique (1912).

    Ainsi une autre direction fut ouverte dans les annes 30 par les artistes Ernest Klausz, Louise Janin, Etienne Bothy, Jean Marie Euzet rallis par Henry Valensi, Gustave

    Composition, 1948 Flix Del Marle

  • ralits nouvelles

    Analyse

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    (le premier sous cette forme) reprenait en mme temps des textes de Mondrian, Delaunay, Malevitch, Kandinsky, Kupka, ressourant de la sorte en 1947 des courants qui allaient se confronter travers de nombreuses polmiques jusquen 1955 au moins .

    La situation ne de laprs-guerre permit la fois aux artistes abstraits de retrouver des conditions dcentes de travail, de bnficier dateliers nouvellement construits en particulier dans la banlieue sud de Paris, et de retrouver la possibilit de sexprimer par dautres moyens que ceux aux quels ils avaient t souvent contraints par la pnurie.

    Il est intressant de noter que de nouvelles techniques, le collage en particulier, galement les constructions et sculptures en matriaux divers de rcupration sont ns de ces conditions difficiles. Cela tait dj vrai la fin de la guerre de 1914-1918 o ces techniques nouvelles ont accompagn le dveloppement du mouvement dada, mais cela sest galement manifest pendant la guerre de 1939-1945. Domela a dvelopp ses constructions en rcuprant de nombreux matriaux abandonns. De mme, les collages de Jeanne Coppel lui ont permis de sexprimer en labsence de toile et de peinture lhuile.

    Le Salon des Ralits Nouvelles 1946-1955. Les diffrents courants qui staient dvelopps avant la guerre furent reprsents au nouveau Salon des Ralits Nouvelles. Ceux qui allaient constituer labstraction lyrique , Schneider, Soulages, Poliakoff, Hartung, Mathieu, sy retrouvrent dans les premires annes.

    Un nouveau groupe naquit au Salon des Ralits Nouvelles : le groupe Espace qui reprit son compte les ambitions dart total du Bauhaus ou du groupe de Stijl en associant architectes, sculpteurs et peintres. Flix Del Marle y joua un rle important jusqu sa mort en 1952, mettant en pratique dans la coloration des usines Renault Flins que termina Servanes, sa thorie de la couleur dans lespace .

    Il nest pas illgitime daffirmer que, durant ces dix premires annes (1946-1955), le Salon des Ralits Nouvelles fut un lieu privilgi de la dmocratisation de labstraction, de son dveloppement, de sa diversification, de lexploration de nouveaux champs. Cest sans doute aujourdhui seulement quon en mesure toute limportance. Dj en 1914, dans la prface la deuxime dition de lAlmanach du Blaue Reiter, Kandinsky affirmait : Notre poque nest peut-tre pas encore mre pour entendre et pour voir mais lespoir justifi de voir venir la maturit est enracin dans la ncessit . Dans le mme ouvrage, Franz Marc dclarait : Le monde accouche dune poque nouvelle. Il ny a quune question : est-ce que le moment est dj venu, aujourdhui de se dtacher du vieux monde ? Sommes-nous mrs pour une Vita Nuova ? Ceci est la question angoissante de notre poque.

    Aujourdhui, prs dun sicle plus tard, la question reste entire, la jeune gnration des amateurs et des collection neurs devrait elle tre la seule considrer lart abstrait comme une donne incontournable de notre temps ?

    Octobre 2006

    Bourgogne, Vito Stracquadaini et Charles Blanc-Gatty au sein du mouvement musicaliste fond en 1932. Henry Valensi estimait que : la musique tant lart prdominant du vingtime sicle , il faut musicaliser lensemble des formes de lexpression artistique de larchitecture la peinture en passant par la sculpture, il faut allger les arts.

    Une extraordinaire fermentation artistique. Lensemble de cette extraordinaire fermentation artistique dont les directions taient multiples fut rythm Paris par des expositions. En 1925, sous le titre lArt daujourdhui , une importante manifestation eut lieu o figurrent en particulier des uvres de Willi Baumeister, Jean Brunet, Fernand Lger, Otto-Gustaf Carlsund, Jean Crotti, Walter Dexel, Florence Henri, Marcelle Cahn, Francisca Clausen, David Kakabadze, Alfred Reth, Victor Servranckx, Poznanski (qui en tait lorganisateur), Robert et Sonia Delaunay, Michel Larionov, Nathalia Gontcharova, Jean Arp, Marcel Janco, Piet Mondrian, Theo Van Doesburg, Vilmos Huszar, Georges Vantongerloo, Friedrich Vordemberge-Gildewart, Cesar Domela, Laszlo Moholy-Nagy, Paul Klee.

    En avril 1930, lexposition du groupe Cercle et Carr fond peu de temps auparavant par Joaquin Torres-Garcia et Michel Seuphor, a lieu la Galerie 23 (rue la Botie). Cent trente uvres de quarante-six exposants y figurent. Ce groupe comprendra quatre-vingts membres dont Mondrian, Kandinsky, Arp, Schwiters, Vantongerloo, Moholy-Nagy, Gorin, Domela, FreundlichDe mme, Abstraction Cration fond en 1931 par Auguste Herbin et Georges Vantongerloo organise ses dbuts dans un local avenue de Wagram des expositions restes malheureusement confidentielles. Cette association compta jusqu 400 membres et diffusa ses ides travers ses cahiers annuels publis de 1932 1936.

    On assiste partir de cette poque une internationalisation de plus en plus grande des groupes dartistes abstraits sexprimant travers des expositions qui avaient lieu en Sude, au Danemark, en Italie, en Suisse en particulier. Aux Etats Unis en 1926, a lieu une exposition itinrante dart abstrait linstigation de la Socit Anonyme , fonde en 1920 par Marcel Duchamp, Man Ray, et Katherine Dreier. En 1936, A.E. Gallatin prsente sa collection dans le Museum of Living Art New York. Lanne suivante, ouvre dans la mme ville le Museum of non objective painting (Solomon R. Guggenheim Museum), puis en 1939, le Museum of Modern Art.

    A Paris encore, cest en 1939 que lantiquaire et collectionneur Frdo Sids multiplie les contacts prparant la tenue du futur Salon des Ralits Nouvelles ouvrant ses portes en juillet 1946 avenue du Prsident Wilson Paris. Il se distingue en tant le premier Salon qui regroupe exclusivement des artistes abstraits.

    Une priode de violente rpression. La guerre, lOccupation ont vu les arts placs sous le contrle de la propagande nazie. Mille personnes taient employes par les services officiels slectionner les artistes accepts par le rgime de Vichy ou tolrs pas le groupe Kultur de la

    Propaganda Abteilung . Cest ce mme groupe qui a t galement lorganisateur du pillage de plus de deux cents collections, de plusieurs dizaines de milliers dobjets dart. Une chape de plomb pesait sur la cration artistique dans toute lEurope.

    Max Ernst, Bellmer, Wols taient dports dans le camp des Milles. Otto Freundlich ne survcut pas sa dportation dans le camp de Lublin-Maidanech en Pologne.

    En URSS mme, la propagande de Staline avait condamn tout ce qui ne correspondait pas aux normes du Ralisme Socialiste . Le journal clandestin du parti communiste franais LArt franais dfendait Pignon, Fougeron, Goerg, Desnoyer Les crations des artistes abstraits taient considres comme expression de la dcadence bourgeoise.

    Les foyers o taient nes et staient dveloppes les crations davant-garde, ferms, avaient contraint lexil des centaines dartistes. Le Bauhaus avait cess ses activits ds 1931. Le nazisme condamnait un art quil appelait dgnr et quil exposa dailleurs la vindicte publique. DURSS staient expatries plusieurs vagues successives dartistes importants avec la consolidation du pouvoir de Staline et la victoire du Ralisme Socialiste.Lensemble de ces artistes, dans lmigration, allaient constituer dans toute lEurope et aux Etats Unis les ferments de la nouvelle cration artistique. Sans eux, il est vraisemblable que linternationalisation de lart abstrait et t moindre.

    Dautres artistes encore, comme Kasimir Malevitch aprs son voyage en Allemagne de 1927, subirent en URSS dans leur vie mme les consquences de la nouvelle politique artistique. Une partie de ses crits furent effectivement dtruits, lui-mme fut emprisonn plusieurs semaines. Ces conditions effroyables lentranrent retourner la figuration, mme si ct de sa signature ou en guise de signature, il reproduisait systmatiquement alors le Carr noir sur fond blanc, dont il considrait quil tait le premier pas de la cration pure dans la peinture ,l enfant royal , licne de notre temps , le Rien libr .

    Et pourtant, ici comme dans dautres domaines, la rsistance se manifestait. A Paris, la Galerie lEsquisse exposait Domela, Magnelli, De Stal, Kandinsky alors que celui-ci tait interdit dexposition depuis 1942 tandis que la Galerie de Berri exposait Vantongerloo et les dbuts dOlivier Debr. Cette rsistance, cette volont de prserver la continuit de labstraction, se sont manifestes galement dans les rencontres organises dans son atelier par Csar Domela, mais la vritable relance de lart abstrait a eu lieu au Salon des Ralits Nouvelles de 1946.

    Une nouvelle gnration pour labstraction. Les disparitions de Malevitch en 1935, de Mondrian en 1941, de Robert Delaunay en 1941, de Kandinsky en 1944, ncessitaient que le Salon des Ralits Nouvelles raffirme la filiation de ces matres pour permettre que se dveloppe la nouvelle gnration des abstraits de laprs-guerre. Cest pourquoi, aux cts des nouveaux venus, le premier Salon des Ralits Nouvelles leur consacra une rtrospective. Lalbum du Salon publi partir de 1947

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    Le Salon des Ralits Nouvelles 1946-1955 Domitille Dorgeval

    Le 19 juillet 1946, le premier Salon des Ralits Nouvelles (SRN) ouvrait ses portes au Palais des Beaux-Arts de la Ville de Paris. Cr par lamateur dart Frdo Sids, il fut principalement anim ses dbuts par Auguste Herbin et Flix Del Marle1. Larticle premier de ses statuts pr-cisait quil avait pour objectif la promotion e France et ltranger dexpositions duvres de lart communment appel : art concret, art non-figuratif ou art abstrait, cest--dire dun art totalement dgag de la vision directe de la nature. Ainsi, linverse de ses concurrents, le Salon des Surindpendants ou le Salon de Mai, le SRN nentendait pas limiter son entreprise un rassemblement annuel dartistes. Sa stricte ouverture ceux qui se rclamaient de labstrac-tion en constituait la spcificit, et son principal mrite fut dimposer cette forme dexpression comme courant artisti-que dominant dans la France de laprs-guerre.

    Paris aprs-guerre. lpoque, en effet, lart tabli et officiel se plaait sous le signe de l cole de Paris , et Braque, Matisse, Picasso, ou bien Bonnard sim-posaient comme gants garants de la peinture. Lart abs-trait, dnu dimagerie et de narration, tait toujours loin de faire lunanimit. Pour beaucoup, il tait synonyme dart tranger et jug ds lors suspect et rfractaire toute dfi-nition nationale. En dpit de ce conservatisme ambiant, le contexte dans lequel mergea le SRN ne fut peut-tre pas aussi dfavorable quil ny parut. Contrairement ses gran-des voisines, Londres et Berlin, Paris avait t pargne par les attaques militaires et ce fut naturellement quelle reprit

    1 Comme la soulign Serge Lemoine, Auguste Herbin noccupe pas la place qui lui revient dans lhistoire de lart du XXme sicle. Lin-fluence majeure quil exera en Europe dans les annes cinquante, et notamment travers le SRN, demeure tudier. Cf. Serge Le-moine Auguste Herbin, enfin , in Genevive Claisse, Herbin, Lau-sanne / Paris, ds. du Grand Pont / Bibliothque des Arts, 1993 ; sur cet artiste, on pourra lire aussi Herbin, cat. exp., Cret, Muse dart moderne, Le Cateau-Cambrsis, Muse Matisse, 1994. Sur Flix Del Marle, cf. Flix Del Marle, la polychromie dans lespace 1945-1952, Le Cateau-Cambrsis, Muse Matisse, Calais, Muse des beaux-arts, 1996 ; galement, cf. Flix Del Marle, cat. exp. Grenoble, Muse de Grenoble, Paris, Runions des Muses Nationaux, coll. reCon-natre , 2000. Extrait de larticle 1 des Statuts de la socit du salon des Ralits Nouvelles , Courbevoie, 1947 (archives SRN, 1947, 2).

    son titre de Capitale des Arts . Pour beaucoup encore, cette dernire demeurait le lieu de toutes les recherches de la modernit artistique (cubisme, abstraction, surralisme). Elle continuait de jouir de sa prestigieuse aura et dexer-cer son pouvoir dattraction auprs des artistes trangers : Allemands, Suisses, Nordiques, Hongrois, Polonais, Nord et Sud Amricains, nombreux furent ceux qui y firent le pleri-nage dans lespoir de rencontrer les matres du pass mais aussi lart de lavenir4. La priode de lOccupation avait contri-bu dvelopper un profond dsir de libert et de cration qui, une fois la guerre termine, se traduisit par un climat deffervescence artistique et intellectuel des plus rares. En tmoignait la coexistence ds 1949 de courants aussi oppo-ss que le ralisme socialiste, le surralisme rvolutionnaire, lart brut, COBRA, le lettrisme, labstraction de tendance gomtrique, celle de tendance lyrique et lart informel. Leur mergence tait avant tout redevable au dynamisme des galeries dont les initiatives donnrent un vritable souffle novateur la cration artistique. Parmi elles, citons les gale-ries Ren Drouin, Denise Ren5, Colette Allendy, Pierre Loeb, Aim Maeght, du Luxembourg, Lydia Conti, Suzanne Michel, Raymond Creuze, puis un peu plus tard, les galeries Arnaud, Daniel Cordier, et Paul FacchettiToutes ne se cantonnaient pas forcment la dfense dun unique courant et la plupart taient animes par des personnalits denvergure, souvent des femmes, qui dfendaient leurs choix avec passion sans pour autant en tirer profit.

    On ne saurait mesurer ltonnante vitalit de laprs-guerre sans voquer les grandes polmiques qui lagitrent.

    Sur ce point, voir le texte de Serge Lemoine, Capitale Paris , in Konkrete kunst in Europa nach 1945, Die Sammlung Peter C. Ruppert Collection, cat. exp., Museum im Kulturspeicher Wrzburg, 2002, pp. 129-135.4 Germain Viatte rappelle limportance de la communaut tudian-te trangre qui frquentait lAcadmie de la Grande Chaumire, les ateliers dAndr Lhote et de Fernand Lger. Selon lui, furent recen-ss 400 amricains, 100 espagnols, 80 japonais, 100 scandinaves, 50 belges, 30 israliens, de nombreux boursiers venus du Moyen-Orient, de Grce, de lAmrique latine, dAllemagne, et de Suisse. Cf. Germain Viatte, Paris chemins de lart et de la vie 1937-1957 in Paris-Paris 1937-1957 , cat.exp., Paris, Muse national dart moderne, Centre Georges Pompidou, 1981, p. 48, note 7.5 Cf. Denise Ren, lintrpide. Une galerie dans laventure de lart abstrait, 1944-1978, cat. exp., Paris, Muse national dart moderne, Centre Georges Pompidou, 2001.

    A

    Vue du 3e Salon des Ralits Nouvelles, Palais des beaux-arts de la Ville de Paris, 1948 (Archives SRN). On reconnatra, de gauche droite dans labside, deux tableaux dAuguste Herbin, Apollon-Dionysos et Lnine-Staline (1948), trois tableaux de Frantisek Kupka, Srie C VIII (1935 - 1946), Architecture philosophique (1913 - 1932) - au centre - et lvation, Srie C III (1938)

    A

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    Analyse

    ralits nouvelles 13

    Cette appellation avait, elle aussi, sa petite histoire : Frdo Sids lavait emprunte Apollinaire pour une exposition quil avait organise la Galerie Charpentier Paris, de juin juillet 1939. Runissant tous les plus grands artistes de lart abstrait, elle avait pour ambition doffrir un tableau synoptique de lvolution esthtique et technique dun art totalement dgag de la vision directe de la nature 10, autrement dit, de prsenter un panorama de lvolution de lart abstrait, de sa naissance la fin des annes trente. La reprise de son intitul atteste le souci quavait Frdo Sids de situer le SRN dans une continuit historique, cest--dire de montrer que labstraction avait un pass et donc, quelle appartenait la tradition franaise, au mme titre que la fi-guration. Une tentative qui peut faire sourire mais qui prend tout son sens lorsquon rappelle qu cette date, la seule exposition institutionnelle en France ayant accorde une place dimportance labstraction tait Les Matres de lart Indpendant 11 organise dans le cadre de lExposition Internationale des Arts et Techniques de 1937 au muse du Jeu de Paume (on pouvait y voir, entre autres, des oeuvres de Picasso, Lger, Kandinsky). Qui plus est, au lendemain de la Seconde Guerre mondiale, lun des problmes fonda-mentaux de labstraction fut de faire face au nationalisme exacerb, voire au chauvinisme de la plupart des historiens et des critiques dart. Citons Pierre Francastel qui, dans son Nouveau dessin, nouvelle peinture, lcole de Paris, publi en 1944, rappelait que depuis 1860 il ny a eu que deux arts, deux mouvements importants dans lhistoire de la peinture et du dessin, lImpressionnisme et le Cubisme, tout le reste, Nabisme, Symbolisme, Expressionnisme, Surralis-me, nest que poussire de scolastique, cest dire tranger lesprit franais. 1

    Les premires manifestations. Face ce rvision-nisme, lhommage que rendit le premier SRN aux grands disparus de labstraction, et notamment Delaunay, Van Doesburg, Freundlich, Kandinsky, Malevitch, Mondrian, Taeuber-Arp, El Lissitzky, paraissait ncessaire : il linscri-vait dans lhistoire et en lgitimait la cration. De fait, il nest gure surprenant que ce premier salon se soit droul sous lgide dun comit rassemblant des personnalits impor-tantes du monde de lart plutt que des artistes abstraits mconnus ou volontairement ignor : prsid par Andry- Farcy, le clbre conservateur du Muse de Grenoble, il avait pour secrtaire Nelly Van Doesburg, et pour membres

    10 Extrait de la glose rdige par Yvanoh Rambosson dans le pe-tit livret dit loccasion de lexposition.11 Cf. Christian Derouet, Kandinsky, triumvir de lexposition du Jeu de paume en 1937 , in Paris-Paris 1937-1947, op. cit., pp. 103-107.1 Pierre Francastel, Nouveau dessin, nouvelle peinture. Lcole de Paris, Paris, Librairie de Mdicis, 1946, pp. 14-15

    lancienne galeriste Marie Cuttoli, le directeur du journal Arts Raymond Cogniat, lacteur et metteur en scne Jean-Louis Barrault et le Dr. Paul Viard (mcne qui avait confi avant la guerre la dcoration de son appartement Robert Delaunay). Ce premier salon tirait galement son prestige de la pr-sence de nombreux matres vivants de lart abstrait, soit Arp, Baumeister, Bthy, Chauvin, Sonia Delaunay, Domela, Duchamp, Gleizes, Gorin, Herbin, Heurtaux, Kosnick-Kloss, Kupka, Magnelli, Pevsner, Picabia, Schwitters, Vanton-gerloo, Vezelay, Villon, Vordemberg-Gildewart. La plupart taient totalement inconnus du grand public et continuaient doeuvrer dans un grand isolement (songeons Kupka et Vantongerloo). On trouvait aussi une cinquantaine dartistes apparents par la critique une deuxime gnration de lart abstrait et qui comprenait des peintres dune jeunesse relative, comme Flix Del Marle, Henry Valensi, Marcel Lem-pereur-Haut, Hans Hartung, Jean Leppien, Henri Nouveau. Ceux-l, abstraits depuis les annes vingt et proche des cercles de lavant-garde, pour des raisons diverses, ne se firent vritablement connatre quaprs 1945. Dautres, plus jeunes, comme Serge Poliakoff, Christine Boumeester, Jean Deyrolle, Jean Dewasne, Jean-Michel Atlan, Franois Stahly ou Nicolaas Warb, taient venus lart abstrait juste avant ou pendant la guerre et neurent lopportunit dmerger sur la scne artistique quaprs celle-ci.

    On qualifia ce premier salon dambigu car il hsitait entre deux formules, proposant dun ct un bilan non exhaustif de lhistoire de labstraction, et de lautre, offrant une reprsentativit peu convaincante des tendances abs-traites mergentes1. Pour autant, il avait affirm ds ses dbuts sa raison dtre en runissant pour la premire fois des artistes qui menaient leurs recherches isolment ou qui, jusqualors, avaient t exposs en petits groupes (notamment la galerie Denise Ren et au Centre dart abs-trait de la rue Cujas ouvert par Cesar Domela au dbut de lanne 194614). Enfin, le public tait largement ignorant du pass abstrait de la France et en ce sens, la part importante dvolue aux pionniers de cette forme dexpression, malgr

    1 Cf. Dominique Viville Vous avez dit gomtrique ? Le Sa-lon des Ralits Nouvelles 1946-1957 in Paris-Paris 1937-1947, op. cit., pp. 407-439.14 Cesar Domela organisa dans ce local qui lui fut prt par des Dominicaines, de fvrier juillet 1946, cinq expositions runissant par petits groupes Domela, Hartung, Schneider, Herbin, Miszstrick de Monda, Nicolas Waarb, Engel-Pak, Poliakoff, Raymond, Dewasne, Deyrolle et Fleischmann. Dans ce lieu o les artistes assuraient eux-mmes la permanence, des confrences furent galement donnes par les critiques Charles Estienne, Madeleine Rousseau, Wilhelm Uhde, et les artistes Herbin, Dewasne et Monda. Un album collectif comportant une lithographie de chacun des participants except Herbin fut publi par les ditions Opra loccasion de ces manifestations. Cf. Cesar Domela 65 ans dabstraction, cat. exp., Muse dart moderne de la Ville de Paris, Muse de Grenoble, 1987,p. 293.

    Aprs les vicissitudes de lOccupation, lheure effectivement tait lengagement idologique, laffrontement doctri-nal. Dans les hebdomadaires et les revues dart et de lit-trature de lpoque (Combat, Arts, Les Lettres franaises, Art daujourdhui, Fontaine, Cimaise), les critiques Michel Seuphor, Lon Degand, Michel Tapi, Charles Estienne, Michel Ragon, Pierre Guguen, Julien Alvard, Raymond Cogniat, Franck Elgar, Roger van Gindertael, Herta Wescher et Pierre Descargues (pour ne citer queux), parfois eux-mmes peintres et potes, se livraient priodiquement des querelles de chapelle.

    la question dun art raliste ou abstrait qui agita tous les esprits dans limmdiat aprs guerre, se substitua au d-but des annes cinquante celle non moins polmique dune abstraction froide ou chaude . Dans ce dernier dbat, la position du SRN fut sans quivoque : ayant pour principe dtre ouvert tout ce qui ne reprsentait pas la ralit, la tendance qui y domina fut celle dun art construit et rationaliste. Ce parti pris, lissue de la campagne mene au dbut des annes cinquante contre labstraction gomtrique, lui porta un lourd et long prjudice. Depuis, le sort que lui a rserv la critique, en dehors des quelques rares et pertinentes tudes qui lui ont t consacres6, est cet gard des plus manifestes. Il nest pas rare, en effet, que le SRN soit considr comme le fief dune abstraction sclrose et dpasse. Or, quand bien mme il eut souffrir de la personnalit hgmonique dHerbin, il sut au fur et mesure de son existence souvrir progressivement toutes les tendances de labstraction. Bien entendu, comme toute organisation de ce type, le SRN nvita pas lcueil de la quantit et de lacadmisme. Pourtant, par les succs quil remporta et les noms qui y brillrent, son importance histori-que et sa qualit artistique ne font aujourdhui aucun doute. De mme, grce loriginalit de sa formule, il joua un rle de dcouverte systmatique que ni les galeries ni, a fortiori, les institutions de lpoque, ne peuvent prtendre avoir tenu.

    6 Sur le Salon des Ralits Nouvelles, on pourra consulter le catalo-gue de lexposition Ralits Nouvelles. Anthologie dHenri Lhotellier, Muse des beaux-arts de Calais, 1980 ; le texte de Dominique Vi-ville Vous avez dit gomtrique ? Le Salon des Ralits Nouvel-les 1946-1957 in Paris Paris 1937-1947, op. cit., pp. 407-439. Voir galement le texte de Vronique Wiesinger intitul Le salon des Ralits Nouvelles 1946-1991 in Abstractions en France et en Ita-lie, 1945-1975. Autour de Jean Leppien, Muse de Strasbourg, Paris, Muse de Strasbourg et Runions des Muses Nationaux, 1999 - 2000, pp. 44-49 ; Domitille dOrgeval, Le Salon des Ralits Nouvel-les : pour et contre lart concret , in Art Concret, cat. exp., Espace de lArt Concret, Chteau de Mouans-Sartoux / sous la direction de Serge Lemoine, Paris, Runions des Muses Nationaux, 2000, pp. 24-39. Serge Lemoine, loccasion de lexposition Aurlie Nemours du Centre Georges Pompidou, na pas hsit consacrer un long dveloppement au SRN, eu gard linfluence dcisive quil exera sur les premires annes de cration de lartiste. Cf. Serge Lemoi-ne, Prsence dAurlie Nemours , in Aurlie Nemours- Rythme Nombre Couleur, cat. exp., Paris, Muse national dart moderne, Centre Georges Pompidou, 2004, pp. 11-19.

    Naissance dune association. Dposs en 1946, les statuts du SRN constiturent le vritable acte de naissance du salon. Dans leur article premier, lantriorit dAbstrac-tion-Cration (1931-1936), association runissant des artis-tes abstraits, tait spcifie : Lassociation dite Abstrac-tion-Cration fonde en 1931, transforme en association dite SRN en 1946 a pour but lorganisation en France et ltranger dexpositions doeuvres dart communment ap-pel : art concret, art non figuratif ou art abstrait, cest dire dun art totalement dgag de la vision directe et de linterprtation de la nature . Lemploi des termes art concret, art non figuratif ou art abstrait , rendait compte des difficults prouves et des prcautions prises par les fondateurs du salon pour dfinir la notion dart abstrait. Chacun deux renvoyait effectivement des conceptions distinctes qui avaient suscit de nombreux dbats dans la presse de lpoque peu de temps avant la cration du SRN, et notamment la suite de lexposition Art Concret orga-nise par la galerie Drouin en juin 1945. Modeste par la taille mais ambitieuse par son propos, elle constitua une tape importante dans lhistoire de labstraction gomtrique en France, puisque pour la premire fois depuis la Libration furent prsentes des uvres de Jean Arp, Sonia et Robert Delaunay, Cesar Domela, Otto Freundlich, Jean Gorin, Auguste Herbin, Wassily Kandinsky, Alberto Magnelli, Piet Mondrian, Antoine Pevsner, Sophie Taeuber-Arp et de Theo Van Doesburg.

    Le terme d art concret tait privilgi par Kandins-ky, Van Doesburg, Arp et Gorin car ils reprochaient celui d art abstrait de dsigner une ralit abstractise et non la cration dun objet autonome : peinture abstraite et non concrte, disait van Doesburg, car rien nest plus concret, plus rel quune ligne, quune couleur, quune surfa-ce.9 Son utilisation pour lintitul de lexposition de la gale-rie Drouin et sa reprise dans les statuts du SRN, doivent ainsi tre envisag comme une rponse aux attaques consistant dvaloriser lart abstrait dans sa relation au rel. Effecti-vement, lun des arguments rcurrents des dtracteurs de lart abstrait consistait le qualifier dart inhumain, vide de sens, sous prtexte quil se dtournait de la nature et de la ralit.

    Lappellation Ralits Nouvelles rpondait des prcautions semblables : lutilisation du substantif ralit permettait de se prmunir habilement de toutes critiques.

    Sur cette association, voir Abstraction-Cration, cat. exp., Munster, Westflisches Landesmuseum fr Kunst, 1978 ; Muse dart moderne de la ville de Paris, 1978. Extrait de larticle 1 des Statuts de la socit du Salon des Ralits Nouvelles , op. cit.9 Extrait du premier article des Commentaires sur la base de la peinture concrte , paru dans le numro dintroduction de la revue Art concret (avril 1930).

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    A Art Concret, numro dintroduction de la revue, avril 1930, coll. part.Livret du 1er Salon des Ralits Nouvelles, 1946, Archives SRN Album Ralits Nouvelles no1, 1947, Archives SRNCahier Abstraction Cration Art non figuratif, no2, 1933, coll. part.Catalogue de lexposition Art Concret , Galerie Ren Drouin, 1945

    certaines absences, prsentait des vertus pdagogiques particulirement heureuses. Qui plus est, ds cette premi-re manifestation, la commission dachat de ltat procda lachat duvres, parmi lesquelles Autour dun point de Ku-pka (1911, 1927-1930, Muse national dart moderne, Paris).

    Le SRN naura acquit sa vritable structure quen 1947, puisque son comit directeur tait constitu cette fois-ci essentiellement dartistes, except Frdo Sids qui figurait comme prsident fondateur. Herbin occupait le poste de vice-prsident, Del Marle celui de secrtaire gnral, B-rard celui de trsorier, et on trouvait en qualit de membres Arp, Besanon, Sonia Delaunay, Dewasne, Gleizes, Gorin et Pevsner. Ce comit subit au cours des annes suivantes quelques changements. Les invitables dissensions et les luttes de pouvoir conduisirent aux dmissions en 1948 de Sonia Delaunay et de Besanon, lanne suivante celles dArp et de Dewasne : ils furent tour tour remplacs par Fonten, Lempereur-Haut, Piaubert, Olive-Tamari et Valensi. Les disparitions successives de Del Marle et de Frdo Sids en 1952 et 1953 furent lorigine dune instabilit durable au sein du salon (on assista notamment la multiplication des postes de prsident dhonneur et de prsident honoraire) qui dboucha en 1956 sur sa rorganisation.

    Relay dans son entreprise de dfense de lart abs-trait par de jeunes galeries dynamiques, le salon connut vite le succs : de 1946 1948, le nombre dexposants fut multipli par quatre, en passant de 89 366. Hormis ceux dj cits, il attira lui des artistes de tous les ges et de toutes tendances abstraites, informelle comme gomtrique, parmi lesquels Camille Bryen, Engel-Pak, Malespine, Jean Villeri, Philippe Hosiasson, Grard Vulliamy, Henri Goetz, Robert Fonten, Jean Piaubert, Wols, Serge Poliakoff, Georges Mathieu, tienne-Martin, Alexandre Noll, Grard Schneider, Leo Breuer, mile Gilioli, Jean Peyrissac, Geor-ges Folmer, Jo Delahaut, Henry Lhotellier, Jeanne Coppel, Francis Bott, Marcelle Loubchansky, Louis Nallard, Maria Manton, Pierre Soulages, Victor Vasarely, Nicolas Schffer, Berto Lardera, Edgar Pillet.

    Une volont dinternationalisation. Cet accroisse-ment tait galement d une participation trangre qui, dannes en annes, allait saccroissant. Le SRN, en tant que successeur digne dAbstraction-Cration, dsirait effective-ment donner une ampleur internationale ses manifesta-tions : ldition dun album annuel partir de 1947 rpondait cette politique de large diffusion et contribua dailleurs la renomme du salon hors frontires. Enfin, la prsen-ce dans son comit dhonneur de personnalits trang-res influentes telles que Palma Bucarelli, directrice de la galerie nationale dArt moderne de Rome ou Solomon R. Guggenheim, fondateur du Museum of Non Objective Art de New York, attestait cette volont dinternationalisation.

    En vue de favoriser les changes avec ltranger, galeristes, critiques, directeurs de muse furent sollicits ds la premi-re anne dexistence du salon. Parmi eux, lancien galeriste Lonce Rosenberg, ami de Frdo Sids depuis les annes trente, lui assura son aide : Mon cher Sids, je moccupe et vais moccuper de rassembler ladhsion des peintures abstraits non figuratifs italiens, anglais, belges et amricains au Salon des Ralits Nouvelles. Je les mettrais directement en rapport avec notre ami Herbin. 15 Dans le mme temps, lentre en contact avec larchitecte Alberto Sartoris, avec lartiste et directrice du Guggenheim Museum, Hilla Rebay, ou bien encore avec Leo Leuppi, le fondateur du groupe suisse Allianz, laissait entendre que tous les anciens r-seaux dAbstraction-Cration furent ractivs. Dailleurs, la majorit des artistes trangers rassembls ds la deuxime anne du salon, essentiellement amricains, suisses, britan-niques et italiens, taient issus ou fdrs par des membres de lancienne association.

    Le salon de 1948, par sa participation trangre mas-sive, attesta le succs de lentreprise. Pas moins de 17 nations diffrentes y furent reprsentes, avec les tats-Unis, la Grande-Bretagne, lItalie, lEspagne, la Belgique, lAllemagne, la Sarre, le Luxembourg, la Suisse, la Hongrie, la Pologne, la Sude, le Danemark, la Norvge, la Hollande, lArgentine, le Mexique, la Turquie. Une internationalisation qui avait t annonce par le secrtaire gnral du salon, Flix Del Marle, de manire trs solennelle dans une circu-laire du comit : Nous appelons votre attention sur le fait trs important que notre prochain salon comprendra une brillante participation de toutes les nations et quil aura lieu en mme temps et proximit des assises de lO.N.U. 16. La publication dans lalbum de 1948 dun schma retraant lhistoire de labstraction, de limpressionnisme jusquau SRN, visait galement mettre en avant les origines inter-nationales du salon, non sans exagrer le rle jou par la France dans leur dveloppement1.

    Cest ainsi quau salon de 1948, lart abstrait contem-porain allemand, marginalis depuis que les nazis lavaient tax de dgnr, eut droit de cit pour la premire fois

    15 Lettre de Lonce Rosenberg Frdo Sids date du 10 mars 1947 (archives SRN, 1947, 12).16 Circulaire du comit rdige par Flix Del Marle date du 12 mars 1948 (archives SRN, 1948, 2).1 Voir Section Documents, p. 28 . Ce schma qui signalait en 1911 la naissance en France de lart abstrait, et en Europe centrale de lart concret, provoqua la colre de Sonia Delaunay qui dans une lettre Sids datant de juin 1948 affirmait que le mot concret na de sens quen allemand, il na jamais exist comme dnomination dun mouvement pictural en 1911 et ajoutant avec une certaine mauvaise foi : il ny a pas eu dart abstrait en France en 1911, mme si certains prtendent avoir fait des toiles abstraites (archives du SRN, 1948, 76).

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    Analyse

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    en France depuis la guerre1. Les artistes participant (parmi lesquels Willi Baumeister, Rupprecht Geiger, Fritz Winter) avaient t runis par Ottomar Domnick, un mdecin psy-chiatre de Stuttgart qui avait constitu une remarquable collection dart abstrait allemand et franais. Pendant plus de dix ans, les tendances abstraites trangres contempo-raines navaient presque pas pntr lAllemagne et ctait surtout lart de Kandinsky, de Klee, dErnst ou de Baumeister qui servit de modle aux plus jeunes de ces artistes, comme en tmoignaient les toiles quils exposrent. En retour de la participation de ces peintres allemands au SRN, Dom-nick organisa en 1949 une exposition intitule Les forces cratrices dans la peinture abstraite , montre dans neuf villes allemandes de la trizone et qui runissait des peintres abstraits allemands et franais. Ces derniers taient tous membres du SRN, soit Flix Del Marle, Pierre Soulages, Hans Hartung, Francis Bott, Cesar Domela, Auguste Herbin, Kup-ka, Jean Piaubert, Grard Schneider et Jean Villeri. Soulages, alors g dune vingtaine dannes, eut le privilge de voir un de ses tableaux excut au brou de noix faire laffiche de lexposition. Aprs lpisode du SRN, le public franais aura eu peu lopportunit de dcouvrir lart abstrait allemand. Le numro spcial Allemagne de la revue Art daujourdhui, paru en aot 1953, contribua combler partiellement cette lacune. Enfin, lunique autre occasion fournie aux artistes abstraits allemands pour prsenter leurs uvres en France, relevant nouveau dune initiative prive, tait lexposition Peintures et sculptures non figuratives en Allemagne or-ganise en 1955 par Ren Drouin au Cercle Volnay Paris.

    Runis sous lgide du groupe Allianz, les Suisses avaient t rassembls en 1948 partir dune slection opre par Richard Paul Lhose et comprenait, entre autres, Walter Bodmer, Lili Erzinger, Diogo Graf, Meret Oppenheim, Leo Leuppi, Hans Erni, Max Huber, Lanfranco Bombelli Tiravanti, Hans Hinterreiter, ainsi que les concrets zuri-chois Max Bill, Richard Paul Lohse, Verena Loewensberg et Camille Graeser19. La participation de ces derniers, que lon retrouvera en 1950 puis dans lalbum de 1952, aura t loccasion daffirmer la spcificit de lart concret, terme par lequel ils dsignaient, dans la ligne du manifeste de lart concret de Tho Van Doesburg, un art gomtrique et systmatique, dont les lments, mathmatiquement pr-

    1 Pour plus de prcisions sur le sujet, cf. Marie-Amlie Kaufmann - zu Salm-Salm, Les changes artistiques franco-allemands en 1948-1949. La participation de lAllemagne au IIIe SRN Paris et lex-position itinrante Franzsische abstrakte Malerei en Allemagne , Les Cahiers du Muse national dart moderne, Centre Georges Pompidou, Paris, n 75, printemps 2001, pp. 98-111.19 Cf. Lart concret suisse : mmoire et progrs, cat. exp., Mu-se des beaux-arts de Dijon, Muse dart moderne de Strasbourg, Muse des beaux-arts de Dunkerque, Maison de la culture de Chalon-sur-Sane / sous la direction de Serge Lemoine, Dijon, Le Coin du Miroir, 1982.

    dtermins, taient justifis et contrlables. Lohse labora en 1942-1943 un processus de cration structurel et sriel dune radicalit des plus novatrices. Les tableaux quil pr-senta au SRN, Concrtion I (1945-46) et Concrtion III (1947), reposaient sur un systme fond uniquement sur le dploie-ment dhorizontales et de verticales, et taient rythms exclusivement par lordre dtermin des couleurs. En de-hors du SRN, les concrets zurichois furent prsents Paris chez Denise Ren, mais plutt rarement, et dans de le cadre d expositions collectives telle que Tendances de lart abs-trait (1948). Il fallut, par exemple, attendre la manifestation organise par le Muse national dart moderne en 1960, Lart moderne suisse de Hodler Klee pour voir runies en nombre des sculptures de Max Bill.

    Lautre participation trangre marquante au salon de 1948 fut celle des deux principaux mouvement davant-garde dAmrique Latine et argentins dorigine, Arte Concreto-Invencin et Arte Mad0. Ces associations, cres simultanment en 1946, faisaient tat des divergences qui taient apparues au sein dArturo, groupe dont elles taient toutes deux issues et qui tait trs imprgn des prcep-tes constructivistes de Torres-Garcia. Chef de fil dArte Concreto-Invencin et futur directeur de la Hochschule fr Gestaltung dUlm (1956), Tomas Maldonado entendait radi-caliser sa dmarche en renouant avec les principes stricts de rigueur et danalyse de lart concret. Au dbut de lan-ne 1948, ce dernier avait effectu un voyage dcisif en Europe, o il avait rencontr en Italie les membres du MAC (Movimento per lArte Concreta) et en Suisse les concrets zurichois. Les peintures quil envoya pour lalbum du salon, de mme que celles dHlito et les constructions de Sou-za, proches dans leurs conceptions de celles de Lohse et de Bill, mais aussi de Vantongerloo, tmoignaient bien de cette rorientation. Quant aux peintures en relief de Mele, ainsi quaux tableaux dcoups de Espinosa, sils ne trahis-saient en rien la devise de Maldonado, ( ne pas chercher, ne pas trouver : inventer ), ils sapparentaient par leur libert de conception davantage aux travaux de Mad. Ce groupe, qui fut cr Buenos Aires en 1946 linitiative de Carmelo Arden Quin, Gyula Kosice et Rhod Rothfuss, enten-dait dpasser les limites formelles de lart concret en axant ses recherches sur la dynamique de linvention : ainsi ses protagonistes substiturent au support rectangulaire le cadre polygonal, au statisme du plan la structure trans-formable. Ces innovations sonnaient le glas de la pein-ture traditionnelle : elles posaient le problme du mouve-ment et de la manipulation, deux concepts fondamentaux qui allaient ouvrir la voie lart cintique et participatif.

    0 Cf. Agns de Maistre, Les groupes Arte Concreto-Invencion et Mad , in Art dAmrique Latine, 1911-1969, cat. exp., Paris, Muse na-tional dart moderne, Centre Georges Pompidou, 1992, pp. 336-347.

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    Album Ralits Nouvelles, no4, 1950, p. 6-7Album Ralits Nouvelles, no8, 1953, p. 14-15Album Ralits Nouvelles, no8, 1953, p. 42-43Album Ralits Nouvelles, no8, 1953, p. 36

    Album Ralits Nouvelles, no3, 1949, p. 23Album Ralits Nouvelles, no3, 1949, p. 34Album Ralits Nouvelles, no1, 1947, p. 58-59

    H Album Ralits Nouvelles, no6, 1951, p. 37

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    Vue de la salle Espace au 7e Salon des Ralits Nouvelles, 1951, Art daujourdhui, srie 2, no 7, juillet 1951, p. 33

    Un dsaccord sur la paternit du mot Mad1 et le manifeste publi loccasion de la constitution du groupe entrana sa scission ds le dbut de lanne 1947 : Arden Quin prit ses distances avec Rothfuss et Kosice. Ce dernier baptisa son nouveau groupe Mad-Nemsor et sengagea activement dans sa promotion. Entrant en contact avec Flix Del Marle, il rassembla pour le SRN de 1948 des peintures articules de Biedma, Rhod Rothfuss et de Rasas Pet, des sculptures modulables et transformables de Juan Del Monte, Kosice et de Bresler, ainsi que des mobiles dUricchio.

    La section italienne prsente au SRN de 1948 consti-tuait galement un ensemble remarquable, avec quelques uns des Italiens de Paris , soit Lardera et Righetti, ain-si que les milanais Lucio Fontana (qui venait de fonder le Mouvement spatialiste) et le futur designer Ettore Sottsass. Enfin, il y avait les romains Piero Dorazio, Achille Perilli, Giulio Turcato, Pietro Consagra et Mino Guerrini, qui appartenaient tous au groupe dobdience marxiste Forma 1.

    Le manifeste de 194. En dpit de son succs crois-sant, le SRN nchappa pas aux critiques qui se firent en-tendre assez tt : dans son compte-rendu du SRN de 1948 publi dans Arts, Ren Massat dclarait ainsi : le temps de llagage est venu (...) trop de jeunes peintres encore pa-raissent tre venus lart abstrait sous une impulsion anar-chique, une phase dindpendance esthtique plus sensi-ble que pense . Ces critiques ntant pas infondes, les mois qui suivirent le salon furent loccasion dune mise au point par le comit qui dcida denvoyer un questionnaire ses membres socitaires. Les questions poses portaient sur les Dfinitions de lart abstrait et non figuratif , sur les Revendications professionnelles gnrales (rvision des

    1 Sur ce point, nous citons Agns de Maistre qui dans son tude sur Mad a bien rsum la complexit de la situation : Ils (Arden Quin et Kosice) ont fait de lhistoire de Mad lobjet dune perp-tuelle recration. Layant transforme en une fiction dont ils sont les auteurs et les personnages, Arden Quin et Kosice en revendiquent la proprit comme un crivain celle de son rcit. Si au dbut Mad ne veut rien dire, par la suite Arden Quin et Kosice multiplient les versions. Daprs le tmoignage du critique Juan Jacobo Bajarlia, ds 1947, Arden Quin prsente Mad comme un anagramme de son nom. Dans les annes 50, il linterprtera comme lunion des deux premires syllabes de matrialisme dialectique . On trouve une quatrime version, non signe : le nom Mad nest pas un sigle, bien que ses initiales correspondent mouvement artistique dinvention. Pour faire bonne mesure, Kosice qui soutenait lavoir trouv par hasard en ouvrant le dictionnaire a donn une cinquime version. Mad est la dformation du slogan des rpublicains, Ma-drid, Madrid, no pasaran . Cf. Agns de Maistre, Qu es el mo-vimiento Mad ? , in Mad Lart sud-amricain, cat. exp., Grenoble, Muse de Grenoble, Paris, Runions des Muses Nationaux, coll. reConnatre , 2002, p. 32. Forma 1, 1947-1987, cat. exp., Bourg-en-Bresse, Muse de Brou, Saint-Priest, Galerie Municipale dArt contemporain, 1987. Ren Massat, Ralits Nouvelles , Arts, 23 juillet 1948.

    locaux, ateliers) , sur l Attitude prendre par les Ralits Nouvelles devant les attaques injustifies dont est lobjet lart abstrait 4. partir des rponses reues, Auguste Herbin et Flix Del Marle5 rdigrent un manifeste intitul premier manifeste du Salon des Ralits Nouvelles de 1948 , bien que publi en 1949. Ce manifeste constitua un pisode im-portant de lhistoire du salon. Il dnonait en premier lieu le dsintrt des institutions franaises pour les oeuvres abs-traites, dont tmoignait lobligation dorganiser lexposition pendant les grandes vacances, ainsi que lviction systma-tique de lart abstrait des grandes manifestations telles que la biennale de Venise. Il ragissait aussi vivement lana-thme lanc contre labstraction par le Parti Communiste lequel, stant align sur les thories du sovitique Jdanov, estimait que seul le ralisme socialiste tait valable en art et en littrature. Enfin et surtout, il entendait mettre un terme la confusion quavaient gnr les prsences aux salons de 1947 et 1948 de nombreux artistes pratiquant une abstrac-tion dite lyrique ou informelle, et qui laissait plus de place la spontanit, au pathos ou la gestualit. Effectivement, ce manifeste procdait une redfinition de labstraction suivant des critres plus prcis que ceux initialement pro-mulgus : la question Quest-ce que lArt abstrait non-figuratif et non-objectif ? , il rpondait Sans lien avec le monde des apparences extrieures, cest pour la peinture, un certain plan ou espace anim par des lignes, des formes, des surfaces, des couleurs dans leurs rapports rciproques et, pour la sculpture, un certain volume anim par des plans, des pleins, des vides, exaltant la lumire. (.) La valeur mo-tive du message rsultera ncessairement et uniquement de la valeur intrinsque des lignes, des plans, des surfaces, des couleurs, dans leurs rapports rciproques et des plans, des pleins, des vides exaltant la lumire. Cette valeur est es-sentiellement plastique et minemment universelle 6. Une dfinition formaliste aux accents spiritualistes, affirmant que la seule abstraction dfendable tait celle qui appartenait aux domaines de lexpression rflchie et de la rgularit euclidienne. Celle-ci faisait largement cho aux prceptes noncs par Auguste Herbin dans LArt non figuratif non ob-jectif, ouvrage publi chez Lydia Conti en 1949. Il y avait codi-fi les grands principes qui rgissaient son alphabet plas-tique , sorte de grammaire picturale quil explora dans ses tableaux sous des formes sans cesse renouvelles. Celle-ci tablissait des correspondances entre des lettres et des for-mes gomtriques aux couleurs pures, traites en aplat.

    4 Archives SRN, 1947, 7.5 Ce manifeste est ni sign ni dat, mais une lettre conserve dans les archives du salon nous apprend quAuguste Herbin et Flix Del Marle, travaillrent ensemble sa rdaction, la fin de lt 1948 (cf. la lettre dAuguste Herbin adresse Frdo Sids date du 24 septembre 1948, archives SRN, 1948, 97).6 Ibidem.

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    Le manifeste de 1948 entrana un vent de contestations au sein du SRN. Il y eut celles plutt attendues des partisans de labstraction lyrique et de lart informel, comme Hartung, Schneider et Soulages qui signrent une lettre de protesta-tion commune dont voici un extrait : tout conglomrat de mots tendant dfinir dune faon prcise une manifesta-tion de sensibilit sera toujours quelque chose de navrant. Une telle dfinition serait en outre prmature pour un mou-vement en pleine volution. / Nous estimons, quant aux autres questions, que ce que les membres du Salon peuvent faire de mieux contre les attaques (pas toujours injustifies) dont ils sont lobjet, cest dy rpondre par des uvres de qualit. / Nous esprons que le comit prendra en consid-ration notre rponse et qu lavenir, il ne nous sera plus de-mand de rpondre des questionnaires de cet ordre . Mais ctait galement le point de vue de Cesar Domela qui, aprs avoir dit quil ne voyait ni la ncessit ni lutilit dun manifeste , avait suggr que la meilleure attitude avoir tait de se taire et faire de bons tableaux . Jean Deyrolle, quant lui, ne pouvait accepter que le manifeste ne rende pas compte des diffrents courants abstraits prsents au salon : je ne suis absolument pas daccord avec la publica-tion dun manifeste des Ralits. Les tendances tant trop diverses et la conception abstraite de la peinture pleine de possibilits nouvelles : il me semble que la seule action possible soit la production duvres valables. 9 Dautres affirmrent en des termes bien plus fermes leurs dsac-cords avec le manifeste du SRN, comme Jean Dewasne qui adressa une lettre de dmission au comit dans laquelle il en stigmatisait les prises de positions anti-matrialistes et spiritualistes : jugeant normal que la majorit du Co-mit des Ralits Nouvelles () attaque un parti politique aprs que certains membres de ce parti ont attaqu lart abstrait , il estimait linverse, que cette majorit pren-ne position contre un systme gnral de philosophie et contre une certaine conception de lesthtique thorique constitue un dpassement de ses attributions . Ainsi quil le prcisait : le comit na effectivement aucune qualit pour statuer sur ces faits. Dans les questions de gestion et dadministration, il est normal que la majorit lemporte et la minorit sincline . Il nen va pas de mme pour les questions philosophiques ou esthtiques, car chaque membre est libre de les rsoudre comme il lentend et le comit na aucun droit pour imposer lopinion de la majorit la minorit et parler ensuite au nom de tous les membres du salon. Dewasne rappelait effectivement que le dit sa-lon a t cr pour dfendre lart abstrait mais non pour

    Archives SRN, 1948, 49. Archives SRN, 1948,11.9 Lettre de Jean Deyrolle Frdo Sids date du 12 janvier 1948 (archives SRN, 1948, 48).

    dfendre des conceptions idalistes et spiritualistes contre des conceptions matrialistes, ni des thories esthtiques comme celle de lart pour lart lexclusion de toute autre ; et rciproquement dailleurs. Et de conclure : Je ne puis accepter cette rduction de ma libert de pense au sein de notre association, je vous fais parvenir par la prsente lettre ma dmission de votre comit. 0

    Ce nest quau fur et mesure de la prparation du SRN de 1949 que les effets du manifeste se firent vritablement ressentir. la fin du mois davril, Frdo Sids, loccasion de la visite de lexposition de la galerie Maeght les Matres de lart abstrait 1, apprit que les artistes de la galerie Denise Ren fidles au SRN, soit Gilioli, Dewasne, Deyrolle, Vasarely et Magnelli, avaient non seulement dcid de ne pas y parti-ciper, mais dexposer au salon concurrent, le Salon de Mai. Dautres artistes, comme Gleizes, Arp et Picabia, nexpos-rent plus au salon aprs celui de 1948, ou le dsertrent de manire durable. Si on ne peut affirmer que leur dpart est une consquence directe de la publication du manifeste, car ils le signrent et lapprouvrent, il est difficile de ne pas y voir une marque de dsapprobation de lvolution suivie par le salon. Ainsi, les prises de position de Gleizes dans son

    0 Lettre de Jean Dewasne au comit du SRN non date (archives SRN, 1949, 28). Pour Dewasne, la pratique dune abstraction pure et rigoureuse nest pas inconciliable avec le combat politique : avec son Apothose de Marat (1951, Paris, Centre Georges Pompidou, Muse national dArt moderne), tableau qui renoue avec la peinture dhistoire tant pas son sujet que par son grand format (9 mtres de long), Dewasne affirme que lart ne peut tre vid de toute subs-tance. Cest aux formes gomtriques vigoureusement dfinies et un chromatisme vivement contrast quil confie les messages de son engagement. En cela, Jean Dewasne rejoint la position des ar-tistes abstraits italiens du groupe Forma pour lesquels les termes de marxisme et de formalisme ne sont pas incompatibles et dont les uvres tmoignent dune interrogation sur les rapports entre le militantisme politique et lautonomie de la pense formelle.1 Cette exposition, qui se droula en deux volet davril juin 1949, accompagnait le lancement du livre de Michel Seuphor, LArt abstrait, ses Origines, ses Premiers Matres, Paris, Maeght, 1949. Lviction dHerbin et de Del Marle dans cette exposition-rtrospec-tive suscita la colre de Frdo Sids et fut lorigine de sa brouille avec Michel Seuphor. Cf. Frdo Sids, propos dune rtrospec-tive , Album Ralits Nouvelles 1949, n 3, p. 2 et 3. Gilioli reviendra au SRN, comme Dewasne, en 1956. Il trouva une terre daccueil au Salon de la Jeune sculpture, fond en 1949. Magnelli, quant lui, exposa au Salon de Mai durant les trois annes qui suivront. On le retrouve cependant aux Ralits Nouvelles en 1952 puis en 1956. Le dpart de ce dernier tait particulirement regrettable car, tout comme Herbin, il faisait figure de matre auprs des peintres de la jeune gnration (notamment ceux de la galerie Denise Ren) et son atelier tait un lieu de plerinage pour tous les artistes italiens de passage Paris (Piero Dorazio, Mino Guer-rini, Achille Perilli, Giulio Turcato). Deyrolle, qui tait cependant rest socitaire du SRN, devint galement un habitu du Salon de Mai. Toutefois, il exposa comme Magnelli aux SRN de 1952 et il y fit partir de 1956 un retour plus durable. Quant Atlan, lanne 1949 marque son entre au Salon de Mai o il exposa fidlement jusqu sa mort (un hommage lui fut dailleurs rendu en 1960).

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    Revue Arte concreto invencion, Buenos Aires, 1946, coll. part.Revue Arte MADI Universal, Buenos Aires, mars 1948, coll. part.Charles Estienne, LArt abstrait est-il un Acadmisme ?, Paris, d. de Beaune, 1950Franzsischer Abstrakter Malerei, 1949 [couverture ralise partir dune toile de Schneider], coll. part.Photographie de lAtelier dart abstrait situ au no10 rue de la Grande-chaumire, Paris, (photo Maywald), dans Art daujourdhui, srie no2, novembre 1950Au premier plan, de droite gauche, Lon Degand, Andr Bloc, Denise Ren, Jean Dewasne, Edgar Pillet; au second plan, Robert Jacobsen, Serge Poliakoff, Richard Mortensen, Jean Deyrolle

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    Georges Folmer, Wladyslaw Lopuszniak, Aurlie Nemours, Victor Vasarely, Jo Delahaut, Olle Baertling, Gnter Fruhtrunk, dont les peintures prouvent combien linfluence dAuguste Herbin a pu tre riche de possibilits et dnue de tout dogmatisme. Toutefois en 1950, lascendant de ce dernier, joint la cration par Edgar Pillet et Jean Dewasne dune acadmie de lart abstrait baptise lAtelier dart abstrait9, continua susciter des ractions hostiles. En tmoigne la parution du pamphlet de Charles Estienne intitul LArt abs-trait est-il un Acadmisme ?40 dans lequel ce futur champion de labstraction lyrique dnonait : les lments de base du nouveau code plastique et qui sont : la forme gomtri-que et la couleur dite pure, pure cest dire pure de vitami-nes, impersonnelle au maximum, la plus dgage possible des vibrations parasites de la modulation et de la matire. Bref, une lesthtique picturale du plan coup et de laplat et dans laquelle il voyait une nouvelle routine, (la) nouvelle usure de loeil et de lesprit . cette attaque, Lon Degand, fervent dfenseur de labstraction gomtrique, rpondait dans les colonnes dArt daujourdhui de faon moins p-remptoire : la mauvaise peinture ce nest pas la froide ni la bonne peinture la chaude . Ingres, Seurat, Juan Gris, Mondrian sont froids . Nest pas froid qui veut. En art, la froideur comme la chaleur est une forme de temprament. Il ny a pas de mauvais principe. Il ny a que de mauvais pein-tres (...) et dans tous les secteurs de peinture 41.

    Le renouveau des pratiques abstraites aux SRN des annes cinquante. Pourtant, ds le dbut des annes cinquante, le SRN fut le lieu dexprimentations fcondes qui contriburent renouveler de manire indite labs-traction et notamment celle de tendance gomtrique. Afin de propager lidal de synthse des arts qui lui tait cher, Flix Del Marle cra au SRN de 1949 une section architec-turale o furent invits exposer ceux dsirant svader du tableau de chevalet et gagner lEspace . Lexprience savrant concluante fut reconduite lanne daprs et un

    Sur cet artiste, cf. Edgard Pillet, cat. exp. Grenoble, Muse de Grenoble, Paris, Runions des Muses Nationaux, coll. re-Connatre , 2001.9 Lieu denseignement et de rflexion sur lart abstrait, cet atelier situ au 10 rue de la Grande Chaumire comportait des sances dapprentissages et de corrections assures par Jean Dewasne et Edgard Pillet mais aussi Jean Deyrolle, Cesar Domela, Victor Vasarely. Des confrences publiques doctobre 1950 juin 1952 eurent rgu-lirement lieu ; y participrent de nombreux critiques de la revue Art daujourdhui (Lon Degand, Julien Alvard, Charles Estienne, Andr Bloc, Roger van Gindertal, Michel Seuphor), mais aussi les artistes Flix Del Marle, Auguste Herbin. Pour connatre le programme exac-te de ces confrences, cf. Paris-Paris, 1937-1947, op. cit., p. 420.40 Charles Estienne, LArt abstrait est-il un acadmisme ?, Paris, ditions de Beaune, 1950.41 Lon Degand, Lpouvantail de lacadmisme abstrait, Art daujourdhui, srie 2, n 4, mars 1951.

    critique averti, Pierre Descargues, baptisa la section salle Espace . Celle-ci se retrouva au salon de 1951, o furent entre autres, rassembls les constructions plastiques de Gorin, de Servanes et de Folmer, les polychromies architecturales de Del Marle4, les essais darchitecture de Mazet, la tour spa-tio-dynamique de Nicolas Schffer, les sculptures de Bthy, de Marta Pan ou dAndr Bloc, les vitraux de Lhotellier et de Fleischmann, les peintures murales de Nicolaas Warb. La prsentation duvres aux implications architecturales parfois discutables incita Del Marle fonder peu de temps aprs, en octobre 1951, le Groupe Espace4 avec Andr Bloc, le directeur des revues Architecture daujourdhui et Art daujourdhui44. Sous le mot dordre la plastique dabord ! , ils rallirent leurs causes de nombreux peintres, sculpteurs et architectes, parmi lesquels Fernand Lger, Sonia Delaunay, Berto Lardera, Richard Neutra, Andr Bruyre, Bernard-Henri Zehrfuss, Jean Prouv, Claude Parent. Hrit des idologies no-plasticiennes et constructivistes, lidal de synthse des arts dans le contexte de la reconstruction devint effectif, donnant lieu des ralisations telles que les Polychromies architecturales des usines Renault de Flins45(1952) qui rsul-tait dune collaboration entre Del Marle, assist de Servanes, et larchitecte Zerhfuss. Relaye par les revues dAndr Bloc, laction du groupe Espace fut lorigine de limportance que revtit le thme de la synthse des arts dans la culture des artistes et architectes des annes cinquante. Quant au SRN, il eut galement son rle jouer dans sa diffusion en mettant la disposition du groupe chaque anne une salle.

    4 Sur Jean Gorin, cf. Marianne Le Pommer, Loeuvre de Jean Go-rin, Zurich, Waser, 1988 ; sur Servanes, artiste trop mconnue, cf. notre tude propos dacquisitions du Muse de Grenoble, les constructions spatiales de Servanes : des lments pour la synth-se des arts , Revue du Louvre - La revue des Muses de France, n 3, juin 2001, p. 72 et suivantes ; sur Georges Folmer, cf. Folmer et labstraction gomtrique, Nancy, Muse des beaux-arts, 1993 ; sur Nicolas Schffer, cf. Nicolas Schffer, Villa Tamaris de la Seyne-sur-Mer, Fondation Vasarely dAix-en-Provence, Dijon, ditions Les presses du rel, 2004.4 Diffrentes tudes relatent avec prcision lhistoire du groupe : cf. Marianne Le Pommer, Loeuvre de Jean Gorin, op. cit. , pp. 465-468 ; ainsi que Dominique Viville, Vous avez dit gomtrique ? Le Salon des Ralits Nouvelles in Paris-Paris, op. cit., pp. 407-419. Voir aussi Vronique Wiesinger, La synthse des arts et le Groupe Espace in Abstractions en France et en Italie, 1945-1975. Autour de Jean Leppien, op. cit., pp. 118-134.44 Sur Andr Bloc, cf. Aujourdhui, Art et Architecture, n 59-60, numro spcial Andr Bloc , dc. 1967 ; voir aussi le livre de Frdric Migayrou, Bloc, le monolithe fractur, Paris, AFAA, 1996, ainsi que Lengagement et la contribution dAndr Bloc pour larchitecture et les arts de lespace, Domitille dOrgeval, Mmoire de Matrise dHistoire de lArt, sous la direction de Serge Lemoine, Universit de Paris IV, Sorbonne, 1997. On pourra galement consulter le texte de Vronique Wiesinger intitul Andr Bloc in Abstractions en France et en Italie, 1945-1975. Autour de Jean Leppien, op. cit., pp. 52-58.45 Cf. notre tude sur ce sujet in Flix Del Marle, op. cit. , pp. 10-44.

    ouvrage publi la mme anne du manifeste, Lhomme de-venu peintre, apportent indirectement des claircissements sur les raisons de son dpart : plus que jamais jai la certitu-de de la lgitimit et de lopportunit de ce quon appelle sans trop de contresens, la peinture non figurative, si lon entend pas non figuration labsence du sujet spectaculaire. Mais len-gouement prcipit, aussi bien du ct des peintres que du ct dun certain public, pour tout ce qui ne montre plus les traces de limage figurative, nest pas sans minquiter. En 1951, Arp jeta un regard tout aussi svre que Gleizes sur lengouement la fois aveugle et radical des jeunes gnrations pour lart abstrait dans un court texte au titre lourd de sens Danger de mort . Il y crivait notamment : Notre gnration tire une immense fiert du progrs. Mais il ne la fera pas avancer sur le chemin de labsolu. Elle est capable de faire sauter la terre, car elle naime pas le compromis. Elle sachvera dans ce feu dartifice sans avoir atteint labsolu.(). De nombreux essais tents par les artistes chouent, selon moi, cause de cette crainte daccepter un compromis . En conclusion, Arp sinterro-geait : ne vaudrait-il pas mieux, parfois, laisser paratre un nez dans un carr ? 4 Par la valorisation de la notion de compromis dans le processus de cration dune uvre abstraite, qui sous entendait qulments figuratifs et non figuratifs pouvaient cohabiter, Arp tmoignait de sa dis-tance avec le SRN. En dpit de cette prise de position tran-che, celui qui se disait amateur de compromis y exposa nouveau en 1953, 1956 et 1957.

    Lanne 1949 marqua galement la fin de la participa-tion au SRN de Picabia, dpart qui navait rien de surprenant, lesprit pourfendeur de lartiste ne pouvant se satisfaire de lorientation dogmatique prise par le salon. De plus, son entourage immdiat ne dut gure linciter rester au SRN, comme Gabrielle Buffet qui avait port un jugement assassin sur lexposition de 1948 : Les ralits nouvelles, cette odeur de carton, ce faux idal, jespre, ne ta pas rendue malade ? Tu sais rien nenlve mieux la peinture ses qualits que de vouloir la rendre trop vraie Il est impossible de suspecter ces gens de gnie, qui se croient obliger dinventer une r-miniscence, comme une poltronne absurde Ces gens sont stupides Ces peintures sont mauvaises dun bout lautre, non pas au point de vue conscience mais au point de vue ar-tistique Les auteurs sont absolument vrais et peignent leurs tableaux tels que la mode lexige et ils y arrivent. Vraiment cela me fait sourire, ils ne doutent pas de ce que cest Et voil ! Tu as d avoir du mal avec ce chef des croupiers Sids. 5

    Albert Gleizes, Lhomme devenu peintre, Paris, Somogy / ditions dart, 1998.4 Jean Arp, Jours effeuills, pomes, essais, souvenirs 1920-1965, Paris, Gallimard, (1966), 1996, p. 403-404.5 Lettre non date [ crite entre juillet et octobre 1948 ], Corres-pondance Francis Picabia-Gabrielle Buffet, Bibliothque nationale de France.

    Dailleurs, Picabia, dans ces annes-l, tait activement sollicit par les acteurs du nouveau courant mergeant, celui de labstraction lyrique et de lart informel. Cest effective-ment sous son patronage que le critique Michel Tapi orga-nisa en 1948 deux expositions manifestes, HWPSMTB (elle regroupait Hartung, Wols, Picabia, Stahly, Mathieu, Tapi et Bryen), qui se tint la galerie Colette Allendy, et White and Black , qui se droula celle des Deux-les.

    Georges Mathieu et Camille Bryen staient loigns du SRN la suite du manifeste (ce dernier reviendra au SRN en 1956). Tous deux avaient t les initiateurs en 1947 de LImaginaire , exposition organise la galerie du Luxem-bourg et qui rassemblait les tenants dune cration abso-lument libre , soit Atlan, Bryen, Hartung, Leduc, Mathieu, Riopelle, Vuillamy, Wols et quelques autres. Dans Au-del du tachisme6, Georges Mathieu situait cette manifestation en raction au SRN : lessentiel tait de rassembler ceux qui reprsentant la libert totale, la plus absolue vis--vis des thories, en face de tous ceux qui lesquels on trouve des traces de Cubisme, de Constructivisme, de No-plasticis-me, de Surralisme. Le premier coup contre le formalisme gomtrique de labstraction lyrique tait n. Dautres artistes se rattachant cette mouvance, tels quEngel-Pak, Malespine, Nallard ou Njad nexposrent pas au SRN de 1949. Toutefois, leur absence semblerait circonstancielle ou tout au plus la marque dune dsapprobation passagre puisquon les retrouva au salon de 1950. Si le premier ma-nifeste du Salon des Ralits Nouvelles -1948 fut lorigine de nombreux remous internes et de dmissions, un grand nombre dartistes qui lavaient dsapprouv continurent cependant dexposer au salon. Au SRN de 1949, particip-rent les adeptes dune abstraction autre que celle corres-pondant aux critres noncs par le manifeste, et non r-ductible une catgorie spcifique. Parmi les plus connus, citons Hans Hartung, Grard Schneider, Pierre Soulages, Francis Bott, Pierrette Bloch, Henry Goetz et Christine Bou-meester, Philippe Hosiasson, Jean Piaubert, Serge Poliakoff, Jean Villeri, Franois Stahly et Jacques Germain. Il est ce-pendant vident que ce manifeste contribua stigmatiser lexistence de camps opposs au SRN et au sein mme de lart abstrait.

    La querelle du chaud et du froid . Aux SRN suivants, les adeptes dune peinture lisse et gomtrique, aux contours nets et cloisonns, se firent de plus en plus nombreux. Parmi eux, citons Cicero Dias, Henry Lhotellier,

    6 Georges Mathieu, De la rvolte la renaissance, au-del du tachisme, Paris, Gallimard, coll. Ides , (1963), 1972, p. 47. Cet ouvrage constitue une source importante pour lhistoire de labs-traction lyrique, en dpit de la mauvaise foi systmatique de Geor-ges Mathieu lgard de labstraction gomtrique et du rle de dcouvreur de gnie quil sattribue. Ibidem, p. 46.

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    mme voie et reprsenteront la tendance dure du SRN. Celle-ci, au cours de la deuxime moiti des annes cinquante, se marginalisera. En effet, tandis quau fur et mesure de lexistence du salon se posait de plus en plus la question de la qualit des oeuvres exposes, il avait fait dans ses slections tantt preuve de sectarisme, tantt de libra-lisme. Aliment par de nombreuses divisions internes, ce sempiternel balancement avait conduit en 1956 des dmis-sions ainsi qu un changement des statuts de lassociation. Le salon, dsormais prsid par Robert Fonten, prit le titre de Ralits Nouvelles - Nouvelles Ralits et se donna pour but lorganisation d expositions commun-ment appeles Art abstrait . Par ce changement, le SRN affichait sa volont de fdrer toutes les tendances de lart abstrait existantes. Toutefois, les refus dans les annes qui suivirent de la participation du groupe espagnol Equipo 57, dun tableau fond sur un systme de Franois Morellet, tmoignait dune inaptitude souvrir aux formes nouvelles de labstraction. Portant atteinte lide traditionnelle de composition, les uvres de ces artistes laissaient entrevoir la possibilit dun art fond sur la dmatrialisation et la re-lation. Autant denjeux communs la Nouvelle Tendance50, mouvement cr en 1961 qui sinscrivait dans une ligne concrte, cintique, non dogmatique, et dont certains des protagonistes avaient t pourtant lis, de prs ou de loin, au Salon des Ralits Nouvelles.

    50 Le mouvement de la Nouvelle Tendance mergea de lexposi-tion ponyme quorganisrent en septembre 1961 lartiste brsilien Almir Mavignier et le thoricien yougoslave Mathko Mestrovic et Bozo Beck la galerie dart moderne de Zagreb. Parmi la cinquan-taine de participants figuraient Narciso Debourg, Carlos Cruz-Diez, Karl Gerstner, Julije Knifer, Piero Dorazio, Gillo Dorfles, Andreas Cas-tellani, Piero Manzoni, les membres des groupes N, T, Nul, Zro, ainsi que ceux de lEquipo 57 et du GRAV. Lexprience fut ritre Za-greb (en 1962, 1963, 1965, 1969, 1973), Venise (1963) ainsi qu Paris grce Michel Far (1964, muse des Arts Dcoratifs) tandis que rgulirement se tenaient des runions gnrales.

    Reportage ironique sur le Salon des Ralits Nouvelles de 1949,Le Rouergue rpublicain, 29 juillet 1949

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    Les oeuvres qui y furent prsentes, notamment les constructions spatiales, ont constitues le point de dpart dune tendance internationale no-constructiviste qui se dveloppa dans les annes cinquante et soixante, et laquelle se rallirent nombres dartistes dont Joost Baljeu, John Mac Hale, Anthony Hill, mais aussi Stephen Gilbert et larchitecte situationniste, futur membre du mouvement Cobra, Constant.

    Avec le groupe Espace, Arte Mad constitua lun des rares mouvements qui ait t reprsent de manire dura-ble au salon. partir de 1949, il tait dfendu au SRN par Carmelo Arden Quin qui, ayant quitt lArgentine, avait reconstitu Paris un groupe Mad avec de nouveaux disciples : les franais Roger Neyrat, Roger Desserprit, Guy Lerein, Georges Sallaz, Pierre Alexandre, Marcelle Saint-Omer, Wolf Roitman, ainsi que les vnzuliens Omar Carreno, Luis Guevara et Ruben Nunez. Les Madstes de Paris offrirent le meilleur aperu de leurs travaux loccasion de celui de 1952 et de 1953 : tableaux polygonaux de Pierre Alexandre, Luis Guevara, Guy Lerein, et de Wolf Roitman ; sculptures ani-mes par des moteurs lectriques de Carmelo Arden Quin et de Ruben Nunez ; tableaux optiques-vibrations de Luis Guevara et de Ruben Nunez. Dans le mme temps, les Mads furent prsents en 1950 chez Colette Allendy, en 1951 avec dautres chez Suzanne Michel dans lexposition Espace- Lumire , et sept ans aprs chez Denise Ren.

    Au SRN de ces mmes annes, dautres artistes men-rent des tentatives analogues celles des Mads en prsen-tant des oeuvres qui posaient la question du mouvement, de la perception visuelle et de la participation du public. Ainsi, on vit en 1953 les Plans mobiles de Pol Bury, en 1954 les Signes pour un langage de Yacoov Agam et les Mta-mcaniques de Jean Tinguely, puis en 1955 les Structures en Plexiglas cintiques de Jesus Rafael Soto, les Electropain-tings de Frank J. Malina et les Reliefs lumineux de Lolo. Cette nouvelle gomtrie lumino-cintique allait tre clbre de manire retentissante en avril 1955 chez Denise Ren avec lexposition Le Mouvement ; organise par Victor Vasa-rely avec le soutien de Pontus Hulten, elle runissait sous lgide de Marcel Duchamp et dAlexander Calder, les artis-tes Robert Jacobsen, Victor Vasarely Yaacov Agam, Pol Bury, Jesus Rafael Soto et Jean Tinguely.

    Dans cette premire moiti des annes cinquante, un certain nombre dartistes dfendus par la galerie Arnaud trouvrent une alternative fconde labstraction gom-trique en sintressant aux procdures de non-composi-tion (programme, srie, hasard). Ainsi, Georges Koskas46,

    46 Sur Georges Koskas qui, parmi ces artistes, est le seul dont la production des annes cinquante ait fait lobjet dune rvaluation rcente, on pourra consulter Georges Koskas, peintures 1947-1959, cat. exp. Grenoble, Muse de Grenoble, Paris, Runions des Muses Nationaux, coll. reConnatre , 1998.

    Charles Maussion, Nicolas Ionesco, Albert Bitran, qui furent pour certains marqus dans un premier temps par Herbin, aboutirent une abstraction minimaliste jouant de la rp-tition ou la dissmination de formes dans le plan. Lemploi de mthodes non compositionnelles, bien qutant motiv par des proccupations diffrentes, avait conduit des ar-tistes qui leur taient intimement lis, les nord-amricains Jack Youngerman et Ellsworth Kelly, ainsi que Jesus Rafael Soto, des rsultats proches4. En tmoignent les parents existant entre Mur optique de Soto (expos au SRN de 1952), Cit de Kelly et Painting on two pannels de Youngerman (exposes toutes deux au SRN de 1951), peintures rsultant toutes de la distribution au hasard de motifs gomtriques. En 1950, Kelly avait prsent White relief, oeuvre o lartiste avait recouru une surface monochrome afin dliminer en apparence tout effet de forme se dtachant sur un fond. En cela, il anticipait dune dcennie les ralisations des grou-pes Nul et Zro. Mais cette prcocit heurta quelque peu la sensibilit du comit de slection du SRN qui naccepta pas dexposer son relief sous prtexte que ce ntait pas de lart. En 1955, cest Yves Klein qui se verra refuser un tableau monochrome orange, intitul Expression du monde de la couleur Mine Orange, toujours pour les mmes raisons. la mre de lartiste, Marie Raymond qui tait une grande fidle du SRN, le comit avait fourni lexplication suivante : Vous comprenez, ce nest vraiment pas suffisant tout de mme ; alors si Yves acceptait au moins dajouter une petite ligne, ou un point, ou mme simplement une tche de couleur, nous pourrions laccrocher, mais une seule couleur unie, non, non, vraiment ce nest pas assez, cest impossible 4. Lensemble des artistes que lon vient de citer auront t en France au dbut des annes 50, avec Franois et Vera Molnar, Franois Morellet et Servanes 49, parmi les rares comprendre lalternative fconde que pouvait offrir un art systmatique et sriel aux formules classiques de labs-traction gomtrique. Dautres, comme Aurlie Nemours, Jean Leppien, Andr Heurtaux, Gnter Fruhtrunk, Luc Peire, Marcelle Cahn, Georges Folmer, ou bien encore Leo Breuer, suiveront de manire plus ou moins radicale cette

    4 Sur les affinits plastiques existant entre ces diffrents artistes, cf. Arnauld Pierre, Limmatriel de Soto et la peinture du continuum , in Jesus Rafael Soto, cat. exp. Paris, Galerie nationale du Jeu de Paume, 1997 ; sur la premire partie de luvre dEll-sworth Kelly, cf. Ellsworth Kelly. Les annes franaises 1948-1954, Paris, Galerie nationale du Jeu de Paume, 1992.4 Cf. Yves Klein, cat. exp., Paris, Muse national dart moderne, Centre Georges Pompidou, 1983, p. 171.49 Cf. Vera Molnar, cat. exp., Grenoble, Muse de Grenoble, Pa-ris, Runions des Muses Nationaux, coll. reConnatre , 2001 ; Sur Franois Morellet, cf. Serge Lemoine, Franois Morellet, Paris, Flam-marion, 1996 ; sur Servanes, artiste mconnue, cf. Domitille dOrgeval, propos dacquisitions du Muse de Grenoble, les constructions spatiales de Servanes : Des lments pour la synthse des arts , La Revue du Louvre et des Muses de France, n3 - 2001, p. 72-81.

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    | 26 Tableau synoptique retraant lhistoire de lart, de limpressionnisme au Salon des Ralits Nouvelles de 1948 |28 Affiche du 3e Salon des Ralits Nouvelles, 1948 | 28 Vue de lexposition Ralits Nouvelles , Galerie Charpentier, 1939 | 29 Courrier de Georges Mathieu Frdo Sids dat du 10 aot 1946 | 29 Tlgramme de Francis Picabia adress Frdo Sids exprimant son refus de participer lexposition Ralits Nouvelles de la Galerie Charpentier, 1939 | 30-31 Statuts du Salon des Ralits Nouvelles, raliss partir de ceux du Salon Abstraction-Cration | 32 Signature des socitaires du Salon des Ralits Nouvelles prsents aux Assembles Gn-rales du 27 juillet et du 6 novembre 1946 | 33 Courrier de Georges Mathieu Frdo Sids dat du 10 aot 1946| 33 Plan daccrochage dAlberto Magnelli pour le Salon des Ralits Nouvelles de 1946 | 34 Lettre dAuguste Herbin Frdo Sids, date du 24 septembre 194 | 34 Rponse de Cesar Domela au questionnaire pour le mani-feste de 1948 | 34 Rponse des artistes Musicalistes au questionnaire pour le manifeste de 1948 | 35 Rponse de Nicolaas Warb au questionnaire pour le manifeste de 1948 | 35 Rponse des artistes Musicalistes au questionnaire pour le manifeste de 1948 | 36-37 Premier Manifeste du Salon des Ralits Nouvelles,1948 | 38 Lettre de Jean Deyrolle en protestation au manifeste de 1948 | 38 Lettre de Hans Hartung, Grard Schneider et Pierre Soulage en protestation au manifeste de 1948,15 janvier 1949 | 39 Lettre de protestation au manifeste de 1948 et de dmis-sion du comit, de Jean Dewasne janvier 1949 | 39 Lettre de dmission du comit de Jean Arp, date du 30 mars 194 | 39 Lettre de Le Corbusier aux membres du comit du Salon, manifestant son enthousiasme pou le Salon de 1948, date du 31 juillet 1948 | 40 Affiche du 3e Salon des Ralits Nouvelles, 1948 | 41 Article de Ren Massat consacr au Salon des Ralits Nouvelles de 1948 | 42 Lettre dAurlie Nemours demandant participer au Salon, date du 4 mai 1949 | 43 Lettre de Man Ray au sujet de sa participation au Salon de 1952, date du 30 juin 1952 | 44 Article de Ren Massat consacr au 3e Salon des Ralits Nouvelles | 44 Invitations au Salon des Ralits Nou-velles, annes 1955,1951 et 1952 | 45 Manifeste du groupe Espace, 6 octobre 1951 | 46 Album du Salon Ralits Nouvelles, 1955 | 47 Annonce aux socitaires du Salon des nouveaux statuts du Salon des Ralits Nouvelles, di-ts en 1956 |||| 26 Tableau synoptique retraant lhistoire de lart, de limpressionnisme au Salon des Ralits Nou-velles de 1948 |28 Affiche du 3e Salon des Ralits Nouvelles, 1948 | 28 Vue de lexposition Ralits Nouvelles , Galerie Charpentier, 1939 | 29 Courrier de Georges Mathieu Frdo Sids dat du 10 aot 1946 | 29 Tlgramme de Francis Picabia adress Frdo Sids exprimant son refus de participer lexposition Ralits Nouvelles de la Galerie Charpentier, 1939 | 30-31 Statuts du Salon des Ralits Nouvelles, raliss partir de ceux du Salon Abstraction-Cration | 32 Signature des socitaires du Salon des Ralits Nouvelles prsents aux Assembles Gn-rales du 27 juillet et du 6 novembre 1946 | 33 Courrier de Georges Mathieu Frdo Sids dat du 10 aot 1946| 33 Plan daccrochage dAlberto Magnelli pour le Salon des Ralits Nouvelles de 1946 | 34 Lettre dAuguste Herbin Frdo Sids, date du 24 septembre 194 | 34 Rponse de Cesar Domela au questionnaire pour le mani-feste de 1948 | 34 Rponse des artistes Musicalistes au questionnaire pour le manifeste de 1948 | 35 Rponse de Nicolaas Warb au questionnaire pour le manifeste de 1948 | 35 Rponse des artistes Musicalistes au questionnaire pour le manifeste de 1948 | 36-37 Premier Manifeste du Salon des Ralits Nouvelles,1948 | 38 Lettre de Jean Deyrolle en protestation au manifeste de 1948 | 38 Lettre de Hans Hartung, Grard Schneider et Pierre Soulage en protestation au manifeste de 1948,15 janvier 1949 | 39 Lettre de protestation au manifeste de 1948 et de dmis-sion du comit, de Jean Dewasne janvier 1949 | 39 Lettre de dmission du comit de Jean Arp, date du 30 mars 194 | 39 Lettre de Le Corbusier aux membres du comit du Salon, manifestant son enthousiasme pou le Salon de 1948, date du 31 juillet 1948 | 40 Affiche du 3e Salon des Ralits Nouvelles, 1948 | 41 Article de Ren Massat consacr au Salon des Ralits Nouvelles de 1948 | 42 Lettre dAurlie Nemours demandant participer au Salon, date du 4 mai 1949 | 43 Lettre de Man Ray au sujet de sa participation au Salon de 1952, date du 30 juin 1952 | 44 Article de Ren Massat consacr au 3e Salon des Ralits Nouvelles | 44 Invitations au Salon des Ralits Nou-velles, annes 1955,1951 et 1952 | 45 Manifeste du groupe Espace, 6 octobre 1951 | 46 Album du Salon Ralits Nouvelles, 1955 | 47 Annonce aux socitaires du Salon des nouveaux statuts du Salon des Ralits Nouvelles, di-ts en 1956 |||| 26 Tableau synoptique retraant lhistoire de lart, de limpressionnisme au Salon des Ralits Nou-velles de 1948 |28 Affiche du 3e Salon des Ralits Nouvelles, 1948 | 28 Vue de lexposition Ralits Nouvelles ,