rapport public annuel 2011 de la cour des comptes tome 2

Upload: spotligt

Post on 06-Jul-2015

222 views

Category:

Documents


0 download

TRANSCRIPT

RAPPORT PUBLIC ANNUEL 2011

Tome 2 Suites donnes aux observations des juridictions financires

RAPPORT PUBLIC ANNUEL 2011

I

Rponses

Introduction .. Premire partie La Cour constate .Introduction ... Chapitre I Des progrs tangibles - Les services publics deau et dassainissement : des volutions encourageantes. - Les organismes faisant appel la gnrosit publique.

III 1

3 5 51 61 63 69 81 93 107 65 78 87 100 113 26 59

Chapitre II Des avances prometteuses ..- La dcristallisation des pensions des ressortissants des territoires autrefois sous souverainet franaise - Les autorits de rgulation financire. - Les services centraux chargs de loutre-mer - Le Bureau des recherches gologiques et minires (BRGM) - Le personnel du contrle de la navigation arienne.

Deuxime partie La Cour insiste 117Chapitre I Des rformes acclrer .- Le CNRS dans le nouveau paysage de la recherche.. 119 121 153 155 173 187 203 219 165 180 195 212 224 141

Chapitre II Des volutions amplifier ..- La prparation et le suivi de lexcution du budget de lEtat - Les effets de la certification des comptes de lEtat - Les mesures lgislatives concernant la scurit sociale et les retraites

- La COFACE . - La rorganisation de la collecte de la taxe dapprentissage dans le secteur des transports et de la logistique

II

COUR DES COMPTES

Rponses

- Le GIP Habitat et interventions sociales pour les mal-logs et les sansabri - Lcole nationale de la voile et des sports nautiques Troisime partie La Cour alerte Chapitre I Des urgences fort enjeu .- Chorus et les systmes dinformation financire de lEtat - Le Centre national de la fonction publique territoriale (CNFPT) - Le Grand port maritime de Marseille : blocage social et dclin Chapitre II Des changements ncessaires - Les agences comptables des lyces et collges publics - Ltablissement public dinsertion de la dfense (EPIDE) - La participation de la France aux corps militaires europens permanents.

239 249 261 263 265 295 335 357 359 367 381

243 253

285 318 350

363 372 388

Les chiffres-cls. Annexe ...

389

409

IntroductionAprs lintroduction, dans le tome 2 de ldition 2010 du rapport public annuel, dun indicateur statistique de suivi des recommandations prsentes dans ses rapports publics et dans les communications aux ministres (les rfrs), le tome 2 de ldition 2011 sattache rendre compte, dune nouvelle faon, des progrs faits par la Cour dans le suivi mthodique des effets de ses interventions antrieures. Premire innovation : lchantillon des constats prsents est rparti selon une chelle trois degrs : le premier constitu des cas o, depuis lintervention de la Cour ou des chambres rgionales, les progrs observs sont avrs et substantiels ; un deuxime, intermdiaire, o de relles amliorations ont t engages, mais la ralit et lampleur du changement restent confirmer ; un troisime degr, form des cas o, linverse, la situation na pas ou peu volu, voire sest dtriore. Seconde innovation : pour chacun de ces trois degrs, la Cour a retenu quelques cas exemplaires, dont elle prsente une analyse plus approfondie, en tte dune slection dune demi-douzaine dautres illustrations voques de faon plus synthtique. Pour le premier degr (1re partie), deux exemples de progrs convaincants sont mis en avant : dune part, les volutions nombreuses, profondes et, dans lensemble nettement positives, constates, en matire de services publics deau et dassainissement, la suite de la publication, dans le rapport public annuel de 2003, dun bilan densemble des contrles mens conjointement par la Cour et les chambres rgionales ; dautre part, les effets, aussi indniablement bnfiques, des contrles raliss par la Cour au titre de la mission particulire que lui a confie le lgislateur lgard des organismes faisant appel la gnrosit publique. Pour le deuxime degr (2me partie), lvolution du CNRS depuis 2007 vient illustrer le cas intermdiaire o la rforme a besoin encore dune forte impulsion pour devenir vraiment tangible. Pour le troisime degr (3me partie), trois exemples sont donns de situations o le poids des rigidits met en pril dindispensables rformes : la modernisation sans cesse compromise du Grand port maritime de Marseille ; les difficults persistantes du projet Chorus, pourtant majeur puisquil couvre une bonne part du systme dinformation financire de lEtat ; la lenteur mise se rformer par le Centre national de la fonction publique territoriale (CNFPT).

IV

COUR DES COMPTES

Enfin, le tome 2 fournit des donnes chiffres sur lactivit de la Cour et des chambres rgionales et territoriales des comptes pour 2010 et les trois annes antrieures1

Larticle L.136.3 du code des juridictions financires prvoit que le rapport public annuel de la Cour comporte des observations relatives au fonctionnement, lactivit, aux moyens et aux rsultats du contrle des chambres rgionales des comptes.

1

RAPPORT PUBLIC ANNUEL 2011

V

Indicateur de suivi des recommandations Le tableau ci-dessous prsente lvolution de lindicateur de suivi des recommandations formules par la Cour et les chambres rgionales et territoriales dans les rapports publics de la Cour et dans ses communications aux ministres. Cet indicateur est lun des sept indicateurs de performance du programme du budget de lEtat ddi aux juridictions financires2. Il y est associ lobjectif 2 contribuer la performance de la gestion publique . Il sagit dun taux de suites donnes, couvrant les trois annes antrieures (pour 2010, les trois annes 2007, 2008 et 2009) et dfini comme la part, dans les recommandations les plus significatives formules au cours de la priode, de celles qui ont t suivies dune rforme effective totale, partielle ou en cours.2009 Nombre de recommandations formules prises en compte (1) Dont : recommandations ayant donn lieu une rforme (2) Taux (2/1) 688 502 73 % 2010 825 583 71 %

En 2010, plus prcisment, sur les 583 recommandations ayant donn lieu une rforme, 217 ont fait lobjet dune rforme totale, 168 dune rforme partielle, et 198 dune rforme en cours . Lvolution de lindicateur en 2010 fait apparatre une lgre dgradation, le taux passant de 73% en 2009 71 % en 2010. Mme si la cible fixe 73 % pour 2010 na donc pas t atteinte, un tel rsultat tmoigne nouveau du dialogue en gnral constructif en amont de ces recommandations et dune coute satisfaisante des administrations en aval.

2

Programme n 164 Cour des comptes et autres juridictions financires , relevant de la mission budgtaire conseil et contrle de lEtat rattache au Premier ministre.

VI

COUR DES COMPTES

Par ailleurs, le caractre significatif de cet cart doit tre relativis, dans la mesure o le primtre de lindicateur a t doublement largi en 2010 : - les chambres rgionales et territoriales y ont t intgres ; - le nombre des recommandations formules par la Cour prises en compte a notablement augment en 2010 en raison dun suivi interne plus exhaustif. La prcision des apprciations permises par lindicateur restera ellemme toujours relative du fait de la nature de la ralit quil vise reflter. Cest l une limite que rencontre lensemble des institutions suprieures de contrle, qui, pour la plupart, calculent, elles aussi, ce type dindicateur. Pour autant, la Cour et les chambres rgionales et territoriales des comptes entendent bien uvrer vigoureusement, avec toutes administrations, afin que la cible de 75 % en 2013 prvue par le programme de performance 2011 soit atteinte.

RAPPORT PUBLIC ANNUEL 2011

VII

Le suivi des recommandations de la Cour par leurs destinataires

Lattention renforce porte par la Cour des comptes aux effets de ses contrles la conduite systmatiser, dans ses travaux, lexamen des suites donnes ses recommandations : Pour autant, en ce domaine, les progrs ne dpendent pas uniquement de la Cour : lattention accorde par les organismes contrls aux observations et aux recommandations que leur adresse la Juridiction nest pas moins dterminante. A cet gard, la faon dont les organismes sorganisent pour assurer leur suivi interne est intressante observer. Cependant, rares sont encore ceux qui ont mis en place un suivi systmatis, appuy sur un systme dinformation ad hoc il peut tre trs simple et des revues priodiques. Lexemple de lADEME Le cas de lAgence de lenvironnement et de la matrise de lnergie (ADEME) montre tout lintrt dune organisation bien formalise, sans pour autant ncessiter des procdures complexes ou des moyens supplmentaires. LADEME a fait lobjet, depuis sa cration au dbut des annes 1990, de trois contrles de la Cour des comptes, qui ont port sur les priodes 19921995, 1996-2003 et 2003-2008. Un quatrime sy est ajout en 2010, la demande du prsident de la commission des finances du Snat sur le fondement de larticle 58-2 de la loi organique relative aux lois de finances du 1er aot 2001 (LOLF). Cette dernire enqute a permis de constater que la direction de ltablissement public a organis efficacement le suivi des observations et recommandations prcdemment formules par la Cour, et, au surplus, quun bon nombre a t suivi deffet. - ce suivi interne sappuie sur un tableau qui recense lensemble des recommandations issues des contrles. Sous lgide du service dinspection de ltablissement, charg dassurer les relations avec les corps de contrle externe, ce tableau est actualis partir des rponses manant des divers services de lAgence.

VIII

COUR DES COMPTES

- une synthse est priodiquement examine en comit daudit Dans cette perspective, le document mentionne lavancement des engagements et le dtail du retour des directions. - cette mto , selon la terminologie adopte par lAgence, distingue cinq situations : engagement tenu , engagement non tenu mais laction est prvue ou en cours , engagement non tenu , pas dengagement mais une action ne serait-elle pas ncessaire ? , sans suites : pas dengagement et pas de besoin . Du point de vue de lorganisme objet du contrle, lexercice se rvle trs utile, la fois pour amliorer la gestion et pour dialoguer avec les gestionnaires. Pour lauditeur externe quest la Cour des comptes, une telle dmarche offre un outil prcieux : - le tableau lui permet dassurer le suivi de ses suites dans de bonnes conditions, en ciblant ses demandes, et donc sans solliciter exagrment les services ; - le rapprochement priodique entre les donnes du tableau rempli par lADEME et celles du systme dinformation, interne la Cour, de suivi de ses recommandations facilite le travail de tous, en garantissant une information rigoureuse, partage et jour.

RAPPORT PUBLIC ANNUEL 2011

IX

Les magistrats, rapporteurs extrieurs3 et experts dont les noms suivent ont effectu les contrles sur lesquels le prsent rapport (tome 2) est fond

Premire partie : La Cour constate M. Arambourou, premier conseiller de chambre rgionale des comptes, Mme Arnould, premire conseillre de chambre rgionale des comptes, Mme Baldacchino, auditeur, M. Barbaste, premier conseiller de chambre rgionale des comptes, M. Berthet, premier conseiller de chambre rgionale des comptes, M. Blanquefort, premier conseiller de chambre rgionale des comptes, M. Bonnelle, premier conseiller de chambre rgionale des comptes, M. Boura, premier conseiller de chambre rgionale des comptes, Mme Boursier, premire conseillre de chambre rgionale des comptes, M. Brouillet, auditeur, M. Cahuzac, prsident de section de chambre rgionale des comptes, M. Cani, premier conseiller de chambre rgionale des comptes, conseiller matre, M. David, prsident de section de chambre rgionale des comptes, M. Dupuy, conseiller matre, M. Gauthe, premier conseiller, M. Geoffroy, conseiller matre, Mme Gervais, conseillre de chambre rgionale des comptes, Mme Girardey-Maillard, premire conseillre de chambre rgionale des comptes, M. Girardi, prsident de section de chambre rgionale des comptes, M. Grimaud, premier conseiller de chambre rgionale des comptes, M. Grouillet, conseiller de chambre rgionale des comptes, Mme Ham, premire conseillre de chambre rgionale des comptes, M. Houel, premier conseiller de chambre rgionale des comptes, M. Janer, prsident de section de chambre rgionale des comptes, Mme Jurga-Hoffmann, premire conseillre de chambre rgionale des comptes, M. Lapierre, premier conseiller de chambre rgionale des comptes, M. Leclercq, premier conseiller de chambre rgionale des comptes, M. Lefas, conseiller matre, Mme Legrand, conseiller rfrendaire, M. Louis, prsident de section de chambre rgionale des comptes, M. Mattret, premier conseiller de chambre rgionale des comptes, Mme Morell, conseiller matre, M. Navez, premier conseiller de chambre rgionale des comptes, M. Ochsenbein, premier conseiller de chambre rgionale des comptes, M. Ortiz, conseiller rfrendaire, M. Perraud, premier conseiller de chambre rgionale des comptes,3 Les rapporteurs extrieurs (dnomination fixe par le code des juridictions financires) sont des magistrats ou des fonctionnaires appartenant dautres administrations qui sont dtachs la Cour des comptes pour y exercer les fonctions de rapporteur.

X

COUR DES COMPTES

M. Picquenot, premier conseiller de chambre rgionale des comptes, M. Le Potier Mme Plant, rapporteur extrieur, M. Prigent, premier conseiller de chambre rgionale des comptes, M. Rasra, conseiller matre, prsident de chambre rgionale des comptes, Mme Renondin, prsidente de section de chambre rgionale des comptes, M. Roch, premier conseiller de chambre rgionale des comptes, M. Sigalla, premier conseiller de chambre rgionale des comptes, M. Stphan, premier conseiller de chambre rgionale des comptes, M. Strassel, conseiller rfrendaire, Mme Suc, auditeur, M. Tisserand, premier conseiller de chambre rgionale des comptes, Mme Tizon, premire conseillre de chambre rgionale des comptes, Mme Toraille, conseiller rfrendaire, Mme Turon, premier conseiller de chambre rgionale des comptes, M. Vanhove, premier conseiller de chambre rgionale des comptes, M. Zinger, premier conseiller de chambre rgionale des comptes. Deuxime partie : La Cour insiste M. Blondel, conseiller rfrendaire, Mme Charolles, conseiller rfrendaire, M. Desrousseaux, rapporteur extrieur, M. Lion, conseiller rfrendaire, expert, M. Rabat, conseiller matre, M. Strassel, conseiller rfrendaire, Mme Suc, auditeur, M. Thomas, conseiller rfrendaire, M. Tournier, conseiller matre, M. Zerah, expert. Troisime partie : La Cour alerte M. dAlbis, conseiller matre en service extraordinaire, Mme Dayries, conseiller matre, M. Duchadeuil, conseiller matre, M. Lafaure, conseiller matre, M. Mazzocchi, expert, M. Rmond, conseiller matre, M. Schott, conseiller matre en service extraordinaire, M. Vareille, rapporteur extrieur.

Premire partie

La Cour constate

Chapitre I

Des progrs tangibles

Les services publics deau et dassainissement : des volutions encourageantes Les organismes faisant appel la gnrosit publique

Les services publics deau et dassainissement : des volutions encourageantesLa transparence et la matrise du prix de leau sont, pour lensemble des usagers, des enjeux fondamentaux, qui dpendent trs largement de la qualit de la gestion par les collectivits territoriales des services publics deau et dassainissement. Cette gestion peut, au choix de la collectivit, tre assure directement par celle-ci, sous la forme dune rgie, ou tre confie, par dlgation, une entreprise prive. Plus de douze milliards deuros ont t facturs en 2008 aux usagers domestiques et aux gros consommateurs4, pour un volume distribu de plus de quatre milliards de m deau. 71% de la population franaise est desservie en eau potable par les oprateurs privs ; 56% le sont pour lassainissement. Les dlgataires ont ralis prs de cinq milliards deuros de chiffre daffaires annuel hors taxes dans ces secteurs, ce qui correspond un niveau quivalent celui des redevances perues par les collectivits organisatrices. Par ailleurs, les redevances destines aux agences de leau ont reprsent, dans le mme temps, 1,7 Md deuros. Dans son rapport public particulier de dcembre 2003, la Cour constatait que la facture deau tait peu lisible et difficilement contrlable. Elle mettait laccent sur les fortes disparits tarifaires releves selon les territoires, et sur linsuffisante connaissance, par les collectivits territoriales, des cots et de la formation du prix de leau. Elle recommandait, en consquence, de dvelopper la gestion intercommunale des services publics deau et dassainissement, afin de renforcer les conomies dchelle, damliorer leur transparence financire, et de mettre en place des outils de pilotage et des indicateurs de performance. Sept ans plus tard, lenqute de suivi conduite par la Cour et les chambres rgionales des comptes montre que les volutions constates correspondent, pour une large part, aux recommandations formules en 2003. Dimportants efforts de rationalisation restent, toutefois, encore accomplir.4 Donnes publies en mars 2010 par le BIPE, en collaboration avec la fdration professionnelle des entreprises de leau (FP2E).

6

COUR DES COMPTES

Selon loffice national de leau et des milieux aquatiques (ONEMA), pas moins de 35.000 services5 sont, en France, chargs de leau et de lassainissement. Ce nombre excessif de services, source de surcots pour le consommateur, est sans quivalent dans les autres pays europens : par comparaison, lAngleterre et le Pays de Galles ne comptent que 22 services, les Pays Bas 40, le Portugal 600, et lAllemagne un peu plus de 13.000. Il sexplique avant tout par le nombre trs lev de communes en France ; sa rduction est, dans ce contexte, directement lie aux progrs de lintercommunalit. ***

I - Les suites donnes aux recommandations de la CourA - Les principales recommandations de 2003La Cour insistait, en 2003, notamment sur labsence de transparence du prix de leau, lignorance par les collectivits locales de la qualit du service rendu lusager et, dans le cas des gestions dlgues, la mconnaissance des marges des entreprises dlgataires de services publics. Elle dplorait le caractre sommaire des comptes produits par les dlgataires, labsence de rapprochement entre les comptes prvisionnels et les comptes-rendus annuels, et, plus gnralement, le manque de moyens des collectivits territoriales pour valuer correctement le montant de la rmunration destine couvrir le renouvellement des quipements. Il tait recommand, en consquence, que les collectivits territoriales se dotent de vritables outils de pilotage, amliorent le contrle de la performance en mettant en place des indicateurs, et tablissent un lien plus troit entre la performance du service et la rmunration du dlgataire. Enfin, partant du constat que la viabilit et lquilibre conomique des services deau et dassainissement ntaient pas assurs sur des territoires communaux gnralement trs restreints, la Cour appelait au dveloppement de la coopration intercommunale, seule mme de mutualiser les charges et les moyens. Elle estimait que les nouvelles5 14 376 services deau potable, 17 686 services dassainissement collectif et 3 297 services dassainissement non collectif

LES SERVICES PUBLICS DEAU ET DASSAINISSEMENT : DES EVOLUTIONS ENCOURAGEANTES

7

communauts de communes et dagglomrations pouvaient constituer des espaces adquats pour organiser de nouvelles rgies ou lancer des appels doffres plus attractifs, mme de faire jouer, au bnfice de lusager, la concurrence entre les grandes entreprises du secteur.

B - Les progrs initis par le Gouvernement et le Parlement1 - Lamlioration de la transparence financire a) Le contenu du rapport annuel du dlgataireLa loi du 8 fvrier 1995 relative aux marchs publics et aux dlgations de services publics avait rendu obligatoire la production par le dlgataire dun rapport annuel, retraant la totalit des oprations affrentes lexcution de la dlgation de service public. Il a fallu attendre dix ans pour que le dcret du 14 mars 2005 prcise les donnes comptables, les mthodes et lments de calcul conomique devant figurer dans ce rapport annuel. Il doit comprendre dsormais, en particulier, le compte annuel de rsultat de l'exploitation (CARE) du service et prsenter des informations patrimoniales, dont un tat des dpenses de renouvellement ralises dans lanne. L'analyse de la qualit du service public dlgu est apprcie partir d'indicateurs proposs par le dlgataire ou demands par le dlgant.

b) Les apports de la loi du 30 dcembre 2006 sur leau et les milieux aquatiques (LEMA) Une plus grande transparence du prix de leau.Cette loi a prvu que toute fourniture deau, y compris aux services publics, doit faire lobjet dune facturation, lexception des consommations deau des bouches et poteaux dincendie. La fixation du tarif de leau est galement prcise : elle comprend une part fixe, plafonne afin dviter que les services publics deau et dassainissement ne facturent un montant trop lev de part fixe, et une part proportionnelle. La structure des charges des services est cependant constitue 80 % ou 90 % de charges fixes.

8

COUR DES COMPTES

Le montant de la facture deau, calcul en fonction du volume rellement consomm, doit tre tabli soit sur la base dun tarif uniforme au mtre cube, soit sur la base dun tarif progressif. A compter du 1er janvier 2010, et sauf exception, les tarifs dgressifs sont prohibs. Enfin, les demandes de versement par les usagers dune caution ou dun dpt de garantie sont dsormais interdites, alors que ces pratiques taient courantes auparavant.

Lamlioration de la qualit du service rendu lusager.Le rglement de service est amlior. Il dfinit les prestations assures par le service, ainsi que les obligations respectives de l'exploitant, des abonns, des usagers et des propritaires . L'exploitant doit remettre ce rglement chaque abonn, et rendre compte au maire ou au prsident du groupement des modalits et de l'effectivit de sa diffusion.

Le renforcement des obligations du dlgataire.Dans le cas o le contrat met la charge du dlgataire des obligations de renouvellement et des grosses rparations caractre patrimonial, le dlgataire annexe au contrat un programme prvisionnel de travaux, avec une estimation des dpenses, et il rend compte annuellement de son excution. En fin de contrat, le dlgataire tablit un inventaire dtaill du patrimoine de la collectivit dlgante et lui remet, 18 mois avant lchance du contrat, les supports techniques ncessaires la facturation ainsi que les plans des rseaux. Le dlgataire reverse au dlgant les sommes correspondant des travaux inscrits au programme prvisionnel et finalement non excuts.

c) Les amliorations budgtaires et comptables La programmation et le pilotage budgtairesLa LEMA ouvre aux communes et aux tablissements publics chargs de la gestion des services deau et dassainissement la possibilit de voter en excdent la section investissement de leur budget, afin de leur permettre de provisionner et de financer des travaux d'extension ou d'amlioration inscrits dans le cadre d'une programmation pluriannuelle.

LES SERVICES PUBLICS DEAU ET DASSAINISSEMENT : DES EVOLUTIONS ENCOURAGEANTES

9

Pour renforcer le pilotage des dpenses, les services publics industriels et commerciaux peuvent recourir aux autorisations de programme dans le cas des dpenses dinvestissement. Ces procdures, particulirement adaptes aux services deau et dassainissement compte tenu de la dure longue des investissements, permettent de ne faire figurer au budget annuel que les seules dpenses rgler au cours de lexercice, et non la totalit des dpenses.

La dtermination des cots des servicesLa refonte, applicable au 1er janvier 2008, de linstruction budgtaire et comptable applicable aux services deau et dassainissement permet de mieux valuer les charges issues de lutilisation des actifs et des obligations lgard des tiers. Une approche, dite par composants , est introduite afin de permettre damortir sparment, et selon des dures diffrentes, des lments constitutifs dimmobilisations dcomposables. Autre innovation, lamortissement peut dsormais tre calcul partir de la diffrence entre le cot dentre dun bien et sa valeur rsiduelle, ds lors que cette dernire est significative et mesurable . La dure damortissement correspond donc la dure relle dutilisation par le service, calcule selon des critres conomiques.

2 - Le dveloppement du contrle de la performanceUn nouvel tablissement public cr par la loi prcite de dcembre 2006, loffice national de leau et des milieux aquatiques (ONEMA), se voit notamment charg de mettre en place un systme dinformation sur les services publics deau et dassainissement (SISPEA), ddi au recueil et la diffusion des donnes. Ce systme dinformation national est aliment en grande partie par les indicateurs de performance figurant dans le rapport annuel sur le prix et la qualit du service (RPQS), prsent par chaque autorit organisatrice, maire ou prsident dun tablissement public de coopration intercommunale, son assemble dlibrante dans les six mois qui suivent la clture de l'exercice. Un dcret et un arrt du 2 mai 2007 prcisent les indicateurs de performance et les donnes qui doivent figurer dans le RPQS.

10

COUR DES COMPTES

3 - Les dispositions lgislatives incitent au dveloppement de la coopration intercommunaleLes dispositions lgislatives adoptes postrieurement au rapport public particulier de 2003 pour favoriser le regroupement des services publics deau et dassainissement sont encore assez modestes. Une loi du 7 dcembre 2006, complte sur ce point par la LEMA, prvoit quun syndicat mixte deau et dassainissement peut adhrer un autre syndicat mixte. Lorsque ladhsion saccompagne du transfert de la totalit des comptences, elle entrane la dissolution du syndicat adhrent. La loi du 7 dcembre 2006 reconnat galement aux communes une comptence obligatoire sagissant de la distribution deau potable, et une comptence facultative sagissant de la production deau, de son transport et de son stockage. Les comptences exerces pralablement la publication de la loi par les dpartements et les syndicats autoriss ou constitus doffice ne peuvent tre toutefois tre confies aux communes sans lautorisation des personnes publiques concernes. Enfin, la LEMA a ajout tout ou partie de lassainissement aux comptences optionnelles des communauts de communes.

C - Les efforts engags par les collectivits territoriales1 - Une plus grande transparence dans le choix du mode de gestion des services publicsEn application du code gnral des collectivits territoriales (CGCT), les assembles dlibrantes doivent se prononcer sur le principe de chaque dlgation de service public. Les collectivits sont donc tenues dtudier et de comparer les cots, les avantages et les inconvnients dune exploitation en rgie avec ceux dune exploitation en gestion dlgue. Les tudes conduites doivent tre impartiales et exhaustives. Les conditions de mise en uvre de ces dispositions sont trs variables. Malgr les progrs constats, le recours lexpertise nest pas encore gnralis, et le changement de mode de gestion reste exceptionnel : entre 1998 et 2006, 4% seulement des procdures de renouvellement des contrats ont dbouch sur un changement de mode de gestion, selon une tude ENGREF6 TNS-Sofres.

6

cole nationale du gnie rural, des eaux et des forts

LES SERVICES PUBLICS DEAU ET DASSAINISSEMENT : DES EVOLUTIONS ENCOURAGEANTES

11

2 - Des services mieux structurs dans les grandes collectivitsLa constitution, au sein des collectivits, de services ou de directions dots dagents trs qualifis et ddis au contrle des services publics deau et dassainissement, est hors de porte de la grande majorit des collectivits locales franaises. Dans les quelques grandes collectivits qui se sont donn les moyens dassurer ce contrle, la Cour a pu constater que les donnes du rapport fourni par le dlgataire taient effectivement analyses, contredites et ventuellement rectifies. Ceci est dautant plus important que ces donnes ont vocation alimenter le rapport annuel sur le prix et la qualit du service (RPQS). Toutefois, pour les collectivits qui se sont engages dans cette voie, le dlai dun mois entre la transmission du rapport du dlgataire et la prsentation du RPQS lassemble dlibrante (du 1er juin au 30 juin) est trop rduit pour permettre la collectivit de contrler effectivement le rapport. Dans la pratique, la transmission du document dfinitif est retarde de plus de trois mois. La Cour recommande donc que la date de prsentation du rapport annuel sur le prix et la qualit du service soit reporte au 30 septembre, afin de permettre lautorit organisatrice dexpertiser convenablement les informations transmises par le dlgataire.

3 - La rduction de la dure des contrats de dlgation et lamlioration de leurs conditions de ngociationLa dure des contrats de dlgation de service public a t rduite, depuis 2003, pour stablir en moyenne aux alentours de 12 ans. Les ngociations sont mieux prpares par les collectivits, qui recourent davantage aux services de socits de conseil et daudit. Certains contrats ont, toutefois, encore des dures excessives. Un syndicat des eaux a prorog plusieurs fois par avenant un contrat de dlgation, le faisant passer dune dure initiale de 18 ans une dure de 40 ans. Des contrats stalant de 25 30 ans ont t relevs dans certaines collectivits. La Cour souligne que les contrats de longue dure conclus antrieurement la loi du 29 janvier 1993 relative la prvention de la corruption et la transparence de la vie conomique et des procdures publiques sont, faute de prvoir une rvision des conditions conomiques, parfois trop favorables au dlgataire, seul bnficier des gains de productivit. Dans une collectivit contrle par la Cour, un service

12

COUR DES COMPTES

exploit en grance dans le cadre dun contrat dune dure de 38 ans parvenait gnrer, au cours des dernires annes, une marge nette de 13,19 %. Par ailleurs, la Cour relve que, selon les donnes de ltude prcite ENGREF TNS-Sofres, le taux de contrats assorti dun changement doprateur est relativement limit : il est compris entre 8 % et 11 %. Il ny a pas l ncessairement un obstacle lamlioration des termes du contrat : pour une collectivit locale, le principal facteur de rduction des cots est la rengociation intervalles rguliers du contrat et la mise en concurrence des candidats. La Cour a rencontr lexemple dune collectivit ayant renouvel deux contrats, deau et dassainissement, attribus pendant prs de quarante ans au mme dlgataire, avec la cl une baisse denviron 25 % de sa rmunration et une amlioration du service rendu. Ces constats sont confirms par les rsultats de lenqute nationale ralise pour le compte de la direction de leau : ils dmontrent quen 2006, le renouvellement des contrats sest traduit par une rduction de la rmunration du dlgataire denviron 15 % pour leau potable et de 7 % pour lassainissement.7

4 - Les progrs en matire de contrle de la performanceLes indicateurs inclure dans le RPQS ont t prciss par une circulaire du 28 avril 2008, qui prvoit notamment quatorze indicateurs de performance pour leau, quinze pour lassainissement collectif et un pour lassainissement non collectif. A la suite du rapport public particulier publi en 2003, certaines collectivits ont anticip lobligation rglementaire de faire figurer les indicateurs de performance dans le RPQS, et adapt les contrats de dlgation en consquence. De plus, certains contrats contiennent, conformment aux prconisations de la Cour, des clauses de mesure de la performance assorties de dispositifs dintressement du dlgataire. Il est de fait que les collectivits qui ralisent un pilotage des services laide dindicateurs de performances ont effectivement amlior la qualit du service. Une commune qui avait, en 2006, un taux de rendement du rseau faible (67 %) a pos des capteurs de bruit pour

7 Enqute TNS SOFRES mars 2008 impact de la procdure de dlgation sur les services publics de leau

LES SERVICES PUBLICS DEAU ET DASSAINISSEMENT : DES EVOLUTIONS ENCOURAGEANTES

13

dtecter les fuites et les traiter plus rapidement. Le taux de rendement sest tabli 90 % en 2008.

II - Les progrs restant accomplirA - Amliorer la transparence financire et le pilotage des services1 - Systmatiser une gestion spare de la trsorerieLorsque le service est gr en rgie, la trsorerie est isole dans un compte spcifique, et ne peut tre utilise par dautres services, quils relvent du budget gnral ou dautres budgets annexes. Mais, dans le cadre dune dlgation de service public, la trsorerie du service dlgu est confondue avec lensemble de la trsorerie de la collectivit, au nom du principe de lunit de caisse. Dans ces conditions, il nest pas rare que les excdents de trsorerie du service de leau ou de lassainissement soient affects au financement doprations du budget gnral. Ainsi, dans une commune, sur 11 millions deuros de dette inscrits au budget annexe de lassainissement, 3 millions deuros, soit 31,2 % de la dette totale, concernaient en fait le budget principal. Les usagers du service dassainissement ont ainsi support tort, pendant cinq ans, prs de 800 000 dintrts qui auraient d tre pris en charge par le budget principal de la commune. A contrario, dans certaines communes, la trsorerie du budget principal est affecte aux besoins de financement du service de leau et de lassainissement. Ces chevauchements entre budgets nuisent la ralit des cots du service et rendent malaises les comparaisons tarifaires entre collectivits, ou entre gestion directe et dlgation de service public. Pour que la trsorerie des services deau et dassainissement dlgus ne soit pas affecte dautres usages, il serait prfrable dtendre aux services en gestion dlgue la rgle de sparation de trsorerie applicable aux rgies.

14

COUR DES COMPTES

2 - Mettre en uvre effectivement les amliorations budgtaires et comptablesLa LEMA autorise le vote dune section dinvestissement en surquilibre, afin de permettre les travaux dextension ou damlioration des services prvus dans le cadre dune programmation pluriannuelle. Cette disposition, qui permet en principe de lisser dans le temps laugmentation des redevances, est cependant sans effet pratique, car, en ltat actuel du droit, les ventuels excdents qui apparaissent en trsorerie ne peuvent tre placs. La Cour a relev le cas dun syndicat mixte disposant, fin 2009, dune trsorerie denviron 12 millions deuros constitue en prvision dun vaste programme dinvestissements, mais dont le placement lui a t refus compte tenu des dispositions de larticle L. 1618-1 du code gnral des collectivits territoriales. De plus, les pratiques en matire damortissement nont pas t modifies et lapproche par composants dcrite prcdemment est ignore. Le recours aux autorisations de programme reste lexception. Enfin, les rseaux sont parfois mieux connus par les exploitants que par les services techniques des collectivits dlgantes. Lors des rengociations des contrats, lancien exploitant est alors en mesure destimer plus prcisment ltat exact des quipements et le montant des travaux ventuels effectuer, et il bnficie ainsi dune prime au sortant .

3 - Adapter les clauses financires du contratLe rapport de la Cour de 2003 dnonait lexistence de clauses financires dfavorables aux usagers : formules de rvision inadaptes, persistance de droits dusage, dentre ou doccupation du domaine public.

a) Les formules de rvisionUne formule de rvision permet de faire voluer la rmunration du dlgataire au gr de la variation des cots rels quil supporte. Toute la difficult vient du fait que les contrats et leurs annexes, en particulier le compte de rsultat prvisionnel, ne prcisent gnralement pas le lien entre cette formule de rvision et la structure des charges. Cette information est pourtant indispensable pour justifier la pertinence des pondrations retenues, entre la part fixe et la part variable du prix de

LES SERVICES PUBLICS DEAU ET DASSAINISSEMENT : DES EVOLUTIONS ENCOURAGEANTES

15

leau, ou entre les diffrents indices. Souvent, le poids relatif des indices dans la formule de rvision ne correspond pas la structure des charges du compte de rsultat. A titre dexemple, dans de nombreux contrats, lindice des salaires compte pour environ 50 % dans la formule de rvision. Or, la lecture des comptes annuels fait apparatre que les charges de personnel ne constituent quenviron un tiers de lensemble des dpenses lies lexploitation du service. Pour justifier ces carts, les dlgataires font valoir que dautres postes budgtaires comportent, eux aussi, des charges de personnel. Ceci apparat rarement de manire explicite dans les comptes rendus transmis aux collectivits dlgantes. En labsence de telles prcisions, les dlgants ne disposent donc pas des informations leur permettant de vritablement contrler la pertinence de la formule de rvision.

b) Les droits doccupation du domaine public et la gratuit des livraisons deauLes communes et les tablissements publics de coopration intercommunale (EPCI) peuvent autoriser le dlgataire utiliser gratuitement le domaine public. Si tel nest pas le cas, la collectivit dtermine annuellement le montant de la redevance doccupation du domaine public, dans la limite d'un plafond fix au 1er janvier 2010 30 euros par kilomtre de rseau. Le niveau des redevances contractuelles fixes antrieurement la promulgation de la LEMA na, toutefois, pas t systmatiquement modifi. Ainsi, la Cour a constat quune redevance d'occupation du domaine public s'levait, au 1er juillet 2010, prs de 1590 par kilomtre de rseau, soit plus de cinquante fois le plafond fix par le dcret prcit. Par ailleurs, toujours en application de la LEMA, toute fourniture deau, y compris aux services publics, doit faire lobjet dune facturation. Or, la Cour a constat que des livraisons gratuites deau sont encore effectues, en contradiction avec les dispositions lgislatives. A titre dexemple, dans une communaut urbaine, le volume total de ces livraisons gratuites certaines des communes membres a t valu, selon les annes, entre 500.000 et 1 000 000 m3, principalement pour nettoyer les rues et arroser les espaces verts.

16

COUR DES COMPTES

4 - Complter les comptes rendus financiersLe dcret du 14 mars 2005 ne fixe aucune rgle denregistrement comptable ou de prsentation des tats financiers qui soit opposable au dlgataire du service public local. La prsentation des comptes rsulte, dans la pratique, des dispositions arrtes en juin 2007 par la Fdration professionnelle des entreprises de leau (FP2E). Etant donn les lacunes rcurrentes constates dans la prsentation et le contenu du compte annuel de rsultat dexploitation (CARE), ce vide juridique doit tre combl. Par ailleurs, la Cour insistait, dans son rapport public de 2003, sur limpossibilit de procder des comparaisons entre les comptes annuels de rsultat dexploitation (CARE), produits chaque anne par les dlgataires aux collectivits, et les comptes dexploitation prvisionnels. Ce constat est toujours dactualit, mme lorsque le contrat prvoit que le compte annuel doit tre prsent sous la mme forme que le compte de rsultat prvisionnel. Les dlgataires objectent que les deux documents, qui rpondent des objectifs et des logiques diffrents, nont pas tre compars. Ils estiment notamment que le compte dexploitation prvisionnel annex au contrat, qui taye loffre commerciale du dlgataire, sert de base la ngociation pour la fixation des tarifs, mais ne constitue pas un engagement de dpenses. Par ailleurs, les dlgataires soulignent que la diffrence de structure de prsentation entre les deux comptes est lorigine dcarts inluctables, puisque le CARE est un document commun tous les contrats, alors quil existe autant de comptes prvisionnels que de contrats. Dans ce cadre, la comparaison ne devrait pas seffectuer poste par poste de dpenses, mais au niveau de la totalit des frais. La Cour estime, pour sa part, que limpossibilit de rapprocher ces deux documents nuit la transparence du prix de leau, que la collectivit et lusager sont en droit dattendre. Elle recommande donc que le compte rendu annuel de rsultat dexploitation soit accompagn dun rapport financier dtaill analysant lorigine des carts constats, tant par rapport aux exercices prcdents que par rapport au compte dexploitation prvisionnel. Enfin, si le compte rendu technique est gnralement trs dvelopp, tel nest pas le cas du compte rendu financier, souvent lacunaire, parfois rduit une ou deux pages. Le CARE est accompagn dune note mthodologique qui explique ses modalits dlaboration.

LES SERVICES PUBLICS DEAU ET DASSAINISSEMENT : DES EVOLUTIONS ENCOURAGEANTES

17

Cette note, trs gnrale, est insuffisante pour comprendre les donnes propres du service dlgu. Il est recommand de complter ce compte rendu avec des donnes chiffres permettant de justifier, notamment, le mode de calcul des charges rparties ou calcules.

5 - Accrotre la transparence des charges de structure et de personnelDans les comptes des dlgations de service public de leau et de lassainissement, il existe, ct des charges directes facilement imputables et contrlables, des charges rparties entre plusieurs contrats, dont des frais de sige ou frais de structure, nettement moins contrlables. Selon le dcret du 14 mars 2005, pour ltablissement du compte du dlgataire, les charges indirectes, notamment de structure, doivent tre values selon des critres internes issus de la comptabilit analytique de lentreprise, ou selon une cl de rpartition dont les modalits prcises dans le rapport du dlgataire. En pratique, on ne peut que stonner de lopacit qui entoure le mode de calcul des charges de structure, empchant les collectivits dlgantes de connatre la vritable rentabilit de leurs contrats. Au demeurant, de fortes variations du montant de ces charges sont souvent constates dune anne sur lautre. Ainsi, dans un cas de remise en comptition avec reconduction de lancien titulaire de la dlgation, la Cour a pu constater que les charges de structure annuelles taient passes de 283 000 136 000, sans que le primtre du contrat soit significativement modifi, et sans quune explication convaincante lui soit fournie. Enfin, il est difficile pour les collectivits de contrler la ralit des frais de personnel du dlgataire imputs au contrat. Certains agents peuvent, en effet, intervenir sur plusieurs contrats de dlgation dans un primtre proche. Les dispositions contractuelles permettant le contrle de ces frais sont souvent rdiges de faon trop gnrale pour tre rellement susceptibles deffet.

6 - Evaluer et intgrer dans les comptes dexploitation les produits financiers et les charges financiresDans le cas o le service de l'eau ou de lassainissement est exploit en affermage, une surtaxe ou une redevance est perue par la

18

COUR DES COMPTES

socit fermire, et reverse la collectivit dlgante qui finance les investissements. Les collectivits dlgantes ne font pas toujours preuve de diligence quant au suivi de ce reversement. Par exemple, un syndicat navait pas connaissance des dates de reversement de la redevance par le fermier, les lettres-chques tant directement adresses au comptable, sans information de lordonnateur. Par ailleurs, les dlais de reversement prvus par les contrats sont parfois longs, procurant ainsi au dlgataire un avantage de trsorerie dautant plus consquent que les sommes dues par les usagers font, de plus en plus souvent, lobjet dun prlvement mensuel. Il serait souhaitable que les collectivits dlgantes tiennent davantage compte, dans leurs contrats, de cette volution du mode de paiement. Cet avantage de trsorerie au bnfice de lentreprise est, du reste, susceptible de gnrer des produits financiers, qui napparaissent gnralement pas dans le rapport du dlgataire, alors mme quils participent lconomie du contrat. Pour autant, ces dispositions rglementaires nimposent pas, aujourdhui, de fournir ces donnes dans le compte annuel de rsultat de l'exploitation. Dans un souci de transparence, les produits financiers et les charges financires devraient tre valus par le dlgataire et connus de la collectivit dlgante. Larticle R. 1411-7 du code gnral des collectivits territoriales devrait donc tre complt pour rendre obligatoire la communication de ces informations par le dlgataire.

B - Renforcer le contrle de la performance1 - La production et le contrle des indicateursLa Cour a relev plusieurs difficults dans la production, le contrle et le suivi des indicateurs de performance : les collectivits doivent disposer, au sein de leurs services, des moyens adquats pour tablir et suivre les indicateurs, faute de quoi le RPQS sera incomplet ou erron : reprise telle quelle des indicateurs transmis par le dlgataire, erreurs factuelles, lacunes, etc. A titre dexemple, un syndicat intercommunal dassainissement avait renseign seulement trois indicateurs sur quinze, dont notamment un taux de desserte de 100 % manifestement erron ; certains indicateurs rclament, pour tre correctement renseigns, une organisation rigoureuse. Lindicateur taux de

LES SERVICES PUBLICS DEAU ET DASSAINISSEMENT : DES EVOLUTIONS ENCOURAGEANTES

19

rclamation doit, titre dexemple, bien intgrer le fait que les rclamations des usagers peuvent tre adresses indiffremment loprateur ou lautorit organisatrice ; trop souvent encore, les indicateurs sont perus par les collectivits comme des contraintes administratives et non comme des outils de pilotage. Ils figurent, dans les rapports annuels, sans dfinition, sans mise en perspective, et assortis de commentaires lacunaires ; linterprtation de certains indicateurs ncessite de prendre des prcautions : ainsi, le prix de leau varie en fonction de multiples facteurs (gographie, pollution, difficult de captage, qualit et tendue du rseau, etc.). Confronts un prix lev, les usagers risquent de porter une apprciation ngative sur lensemble du service, alors mme que ses performances peuvent tre trs satisfaisantes.

2 - La centralisation des rsultats lONEMALe systme dinformation sur les services publics deau et dassainissement (SISPEA), qui recueille et diffuse les donnes sur l'eau, est aliment, en grande partie, par les indicateurs de performance figurant dans les RPQS. Plusieurs difficults mritent dtre mentionnes ce sujet : selon lONEMA, les donnes recueillies dans le SISPEA en septembre 2010 couvraient environ 53 % de la population. Ce taux de couverture, dj relativement bas, doit de plus tenir compte du fait quune collectivit est intgre dans la base ds lors quelle a renseign au moins un indicateur ; les services de petite taille, desservant moins de mille habitants, sont assez largement absents de la base de donnes ; la base de donnes comporte des incohrences et des rsultats non pertinents. Comme le prcise le site Internet Eaufrance.fr , qui permet de consulter les chiffres des services qui ont aliment la base SISPEA, le dispositif est encore en rodage ; lobjectif dexhaustivit de la base de donnes est trs difficilement compatible avec le morcellement des structures existantes.

20

COUR DES COMPTES

Afin que ce systme dinformation devienne un vritable instrument dinformation et de pilotage des services publics deau et dassainissement, plusieurs amliorations devraient tre apportes : la base de donnes devrait, dfaut dtre exhaustive, tre plus reprsentative de la diversit des services publics. La transmission des donnes pourrait tre obligatoire pour les services les plus significatifs, et la base pourrait tre complte avec les donnes de services slectionns selon un chantillonnage national et territorial pertinent ; les indicateurs devraient tre contrls et valids avant publication sur le site ; la publication de ces indicateurs devrait tre assortie de commentaires tenant compte de la diversit des conditions dexcution des missions du service.

C - Faibles avances de la coopration intercommunale1 - La persistance des constats relevs par le rapport public de 2003En 2003, la Cour soulignait la dispersion, lhtrognit et la complexit de lorganisation territoriale des services publics deau et dassainissement. Peu de changements ont t constats depuis. LONEMA dnombre plus de 35.000 services deau potable et dassainissement collectif des eaux uses, certains dentre eux ne disposant que de comptences partielles. La Cour a mme relev le cas aberrant dune commune, o la gestion de la distribution deau potable est assure par deux entits diffrentes, une gestion en rgie dun ct, un syndicat intercommunal de lautre, qui se rpartissent les quartiers. Selon le quartier o il habite et selon lun ou lautre des deux distributeurs qui lalimente, le consommateur ne paye pas leau au mme prix. Dans un autre cas, un syndicat mixte exerant les comptences mixtes eau et assainissement regroupe quatre communes disperses, et 22 communes rparties dans quatre communauts de communes diffrentes. Malgr quarante ans dexercice, ce syndicat nest toujours pas parvenu fdrer et regrouper ses membres sur un primtre territorial cohrent.

LES SERVICES PUBLICS DEAU ET DASSAINISSEMENT : DES EVOLUTIONS ENCOURAGEANTES

21

2 - Des structures intercommunales parfois dficientesCertaines intercommunalits qui choisissent dexercer des comptences dans le domaine de leau ou de lassainissement ne donnent aucune suite concrte cette dcision, laissant les communes membres continuer grer, dans la pratique, les services publics correspondants. Ces situations, dans lesquelles les comptences statutaires sont exerces par dautres structures, sont porteuses de forts risques juridiques et engagent la responsabilit des acteurs concerns. Dans certains cas, les tentatives de rationalisation natteignent pas les objectifs recherchs. Ainsi, dans un dpartement, six syndicats mixtes de production fdrent 55 structures de distribution afin dassurer, en thorie, une gestion mutualise des investissements. Cependant, en raison de dispositions statutaires inadaptes, la part de ces syndicats dans la production deau potable dans le dpartement demeure marginale. Il en rsulte une cascade complexe dencaissements de la surtaxe, conduisant un dlai dun an entre le moment o lusager acquitte sa facture et le moment o le destinataire final encaisse les fonds. Enfin, lorsque les comptences sont transfres aux structures intercommunales, les transferts patrimoniaux ou comptables ne sont pas toujours correctement raliss. Huit ans aprs le transfert une communaut urbaine de la comptence "eau", les transferts de biens et de dettes de certains syndicats intercommunaux n'taient toujours pas intgralement effectus. En particulier, les syndicats avaient conserv la gestion des installations de production et de transport d'eau potable.

3 - Les freins au dveloppement de la coopration intercommunaleTrois sries darguments, dordre technique, conomique et juridique, sont mis en avant par les collectivits pour justifier le faible recours lintercommunalit : des arguments dordre technique : lexistence de nombreux bassins versants serait source de difficults, par exemple si les zones de captage de leau sont situes hors du territoire de ltablissement public de coopration intercommunale. Linterconnexion croissante des rseaux vient attnuer la porte de cet argument ; ltat des quipements mis en commun dans le cadre de lintercommunalit est souvent trs htrogne. Le cot de leur modernisation devrait, dans lventualit dun passage

22

COUR DES COMPTES

lintercommunalit, tre mutualis sur lensemble des usagers, au dtriment des habitants des communes disposant dj dinstallations performantes ; des arguments dordre conomique : les lus locaux craignent que luniformisation du prix, qui va de pair avec le dveloppement de lintercommunalit, ne conduise alourdir la facture de certains consommateurs. Le ministre de lintrieur a, de ce point de vue, admis que la recherche de lunification des tarifs ntait pas soumise une chance stricte ; la mise en place du service unique de l'eau au niveau intercommunal devait conduire, terme , un tarif unique. A contrario, la Cour a parfois observ des tentatives duniformisation du prix de leau sur des territoires bien plus tendus que ceux dune intercommunalit. Ainsi, un syndicat dpartemental avait mis en place, en sappuyant sur un mcanisme de prquation, un prix unique de leau lchelle du dpartement. Un tel dispositif contrevenait aux dispositions du code gnral des collectivits territoriales, en vertu duquel les redevances deau potable doivent tre corrles avec le cot rel du service. Au cas despce, le prix unique impos par ce syndicat ntait pas en adquation avec le cot rel du service rendu par chaque syndicat de distribution membre du syndicat dpartemental ; les contrats de dlgation de service public nont pas tous la mme date dchance, et les changements affectant les comptences exerces (distribution, production) ou le territoire concern peuvent aboutir des modifications importantes de lconomie des contrats ; des arguments dordre juridique : la diversit juridique des gestionnaires des services deau et dassainissement est un frein au dveloppement de lintercommunalit ; le passage une gestion intercommunale des services deau et dassainissement ncessite une rorganisation lourde. Lorsque lintercommunalit prend la comptence eau ou assainissement les communes concernes doivent se retirer des syndicats dont elles sont membres, et lensemble du dispositif doit tre rorganis, avec la cl une prolifration du nombre de dlibrations ncessaires.

LES SERVICES PUBLICS DEAU ET DASSAINISSEMENT : DES EVOLUTIONS ENCOURAGEANTES

23

Lorsque la volont politique existe, ces freins peuvent tre surmonts. Par exemple une communaut de communes ayant choisi dexercer la comptence assainissement , est parvenue rationaliser avec succs, avec le soutien de ses communes membres, lensemble des structures charges de ce service public. La communaut de communes s'est substitue aux syndicats et aux communes dans les contrats de dlgation en cours ; elle a harmonis, au moyen davenants venant proroger ou avancer leur terme, les dates dchance des diffrentes conventions. Enfin, les syndicats intercommunaux ont t dissous.

4 - Le regroupement ncessaire des services publics a) Pour raliser des conomies dchelleLe financement des principaux investissements est gnralement rendu possible par lintervention des rgions, des dpartements et des agences de leau, ce qui permet de compenser la faible surface financire de nombreuses structures intercommunales. Cette cascade de subventions contribue maintenir en vie des services qui ne seraient pas en mesure de raliser, par eux-mmes, les investissements ncessaires. A linverse, le financement du renouvellement des rseaux reste souvent la charge des structures intercommunales, avec la cl un risque lev de non ralisation des travaux de renouvellement, et une dgradation du taux de rendement. La mauvaise qualit de certains rseaux, dont les travaux de renouvellement ont t trop longtemps ngligs, constitue un obstacle de plus lintgration intercommunale. Enfin, le nombre lev de collectivits de ces services publics est un obstacle majeur loptimisation de la politique dachats, tant pour les investissements que pour les dpenses courantes. Seuls des regroupements dune taille significative permettraient de raliser des conomies dchelle et de mutualiser les moyens, les comptences et les cots.

b) Pour amliorer les capacits de pilotageDe nombreuses collectivits ne disposent pas des moyens humains et techniques pour piloter correctement les services publics de leau et de lassainissement. La Cour a constat que, dans certains syndicats, lemprise du dlgataire tait telle que ses reprsentants assistaient presque systmatiquement aux runions du comit syndical, y compris lorsqutaient abordes des questions les concernant directement. Autre

24

COUR DES COMPTES

exemple : dans une collectivit, il nexistait, lexception du prsident, aucun agent affect au service de leau, ce qui laissait carte blanche au dlgataire. Le caractre malheureusement artisanal de cette organisation tranche avec les moyens financiers, juridiques et techniques dont disposent les quelques grands groupes attributaires des contrats.

c) Pour pallier le dsengagement de lEtat des missions dingnierie publiqueLes syndicats deau et dassainissement et les collectivits petites et moyennes se faisaient traditionnellement assister par les services de lEtat, les DDAF8 et les DDE9, devenues aujourdhui les directions dpartementales des territoires (DDT). Ces prestations dingnierie publique concernaient la matrise douvrage, des tudes ou la matrise d'uvre mais galement le contrle des dlgataires. Depuis 2008, les conseils de modernisation des politiques publiques ont prvu, quelques exceptions prs, un arrt total des prestations dingnierie publique au plus tard fin 2011. Ceci ne fait que renforcer la ncessit, pour les collectivits, de mutualiser les moyens et des comptences au sein de structures intercommunales pertinentes.

*** Depuis 2003, de rels progrs ont t accomplis en matire de transparence financire et de contrle de la performance des services deau et dassainissement, notamment en cas de dlgation de ceux-ci. Il nen demeure pas moins que le dveloppement de la coopration intercommunale en matire deau et dassainissement est rest trs limit, puisquil existe encore environ 35 000 services. Seule la rduction drastique du nombre de structures permettra damliorer la gestion, et de rquilibrer les rapports entre les collectivits et les dlgataires de service public. Pour lamlioration de la transparence financire, la Cour prconise : - pour les services grs en dlgation de service public, de rendre obligatoire louverture dun compte de trsorerie propre, dans la

8 Direction dpartementale de lagriculture et de la fort, 9 Direction dpartementale de lquipement

LES SERVICES PUBLICS DEAU ET DASSAINISSEMENT : DES EVOLUTIONS ENCOURAGEANTES

25

comptabilit de la collectivit publique, linstar de ce qui existe lorsque le service est gr en rgie ; - dautoriser le placement des excdents constitus par la mise en uvre des dispositions de larticle L. 2224-11-1 du code gnral des collectivits territoriales ; - de mettre en uvre effectivement les nouvelles normes comptables de linstruction M49 applicable aux services deau et dassainissement, condition indispensable une meilleure connaissance des cots et du prix de leau ; - de dterminer par voie rglementaire le contenu et la prsentation du compte annuel de rsultat dexploitation du dlgataire, celui-ci devant tre strictement comparable au compte dexploitation prvisionnel annex au contrat ; - de reporter au 30 septembre la prsentation du rapport annuel sur le prix et la qualit du service, afin de permettre lautorit organisatrice de mener une expertise au fond des informations transmises par le dlgataire ; - afin de disposer dune base de donnes sur leau pertinente sur lensemble de la France, damliorer le fonctionnement du systme dinformation sur les services publics deau et dassainissement (SISPEA), en instaurant une obligation de transmission de lensemble des indicateurs de performance pour les services publics les plus significatifs au plan national, et en compltant cette base de donnes avec les indicateurs de performances de services slectionns selon un chantillonnage reprsentatif de la diversit des structures et des territoires.

26

COUR DES COMPTES

REPONSE DE LA MINISTRE DE LECOLOGIE, DE LENERGIE, DU DEVELOPPEMENT DURABLE ET DE LAMENAGEMENT DU TERRITOIRE

Comme ce projet le souligne, lenqute de suivi ralise par la Cour et les chambres rgionales des comptes montre que les volutions constates, notamment en application de la loi sur leau et les milieux aquatiques du 30 dcembre 2006, correspondent pour une large part aux recommandations formules par la Cour en 2003. Lobligation de remettre aux abonns le rglement de service, la possibilit de vote en excdent de la section dinvestissement, le suivi des provisions pour renouvellement en gestion dlgue ont constitu des avances importantes pour la transparence des services et de la formation du prix. Lintroduction dun encadrement des taux des redevances doccupation du domaine public des collectivits territoriales par les canalisations des services deau et dassainissement concourt ce mme objectif de transparence de la formation du prix. Ce rgime, prcis par le dcret n 2009-1683 du 30 dcembre 2009, est applicable aux nouvelles conventions de dlgation de service. Pour les conventions en cours, ce dcret demande didentifier ds la premire rvision les parts de la redevance verse par le dlgataire la collectivit imputables respectivement loccupation du domaine public et au financement douvrages remis la collectivit lexpiration de la convention. La suppression des cautions et des dpts de garantie a facilit laccs leau des personnes les plus vulnrables. Lenqute de suivi souligne les progrs restant faire dans deux domaines : les outils de pilotage des services et la gestion intercommunale. La construction du rseau de donnes sur les services deau et dassainissement a t engage par lOffice Nationale de l'Eau et des Milieux Aquatiques (ONEMA) ds sa cration en application de la loi sur leau et les milieux aquatiques du 30 dcembre 2006. LONEMA a aujourdhui rendu accessible sur le site Internet www.services.eaufrance.fr/, lorganisation des services pour lensemble du territoire national. Si les principales villes ont procd au rapportage sur ce site des donnes du rapport sur le prix et la qualit des services, le dficit de saisie est encore important pour les services de moindre taille. Je ne puis quappuyer votre demande de dfinir des chantillons reprsentatifs de la diversit des services publics afin de pouvoir publier rapidement des donnes clefs relatives aux caractristiques et aux performances des services. Ces publications permettront de souligner aux collectivits, mais galement aux gestionnaires et aux associations et aux membres des commissions consultatives des services publics locaux lintrt de cet outil de

LES SERVICES PUBLICS DEAU ET DASSAINISSEMENT : DES EVOLUTIONS ENCOURAGEANTES

27

pilotage pour dfinir, au plan local et dans la transparence, des dmarches de progrs pour le service aux usagers. Conscient de cette ncessit, lONEMA, sous lgide du comit national de leau et de sa commission consultative sur le prix et la qualit du service, a engag des actions dinformation des collectivits et damlioration du dispositif de saisie des donnes, avec lappui des agences des agences de leau. Des premires publications de rsultats agrgs permettront aux collectivits de disposer de rfrences de performance, leur permettant de dfinir localement les priorits damliorations, aprs dbat au sein de la commission consultative des services publics locaux lorsquelle existe. La construction dune vision partage du service par la publication de synthses sur les valeurs dindicateurs de performance selon les caractristiques des services, passe ncessairement par limplication des collectivits organisatrices des services dans la dfinition des priorits dexploitation de donnes. La dfinition de mesures contraignantes concernant la transmission des donnes ne pourrait aller qu lencontre de cette ncessit dune construction de lobservatoire par les diverses parties prenantes. Lexhaustivit des donnes ne peut donc tre envisage que dans une perspective long terme. Les indicateurs de performance introduits par le dcret et larrt du 2 mai 2007 ont fait lobjet de fiches descriptives identifiant les mthodes de calcul. Des premiers travaux ont t conduits pour valuer la qualit des donnes. Si, ce jour, les donnes publies font lobjet de contrles de cohrence, il conviendra effectivement de poursuivre lexamen, avec les collectivits territoriales, des modalits de validations des donnes, sans alourdir pour autant les charges des collectivits. Comme la Cour le souligne, le dlai dun mois entre la transmission du rapport du dlgataire et la prsentation du rapport sur le prix et la qualit du service lassemble dlibrante ne permet pas une vrification et une appropriation des donnes par la collectivit organisatrice. Je ne puis de ce fait qutre trs favorable votre proposition de reporter au 30 septembre la date de publication du rapport sur le prix et la qualit du service. En ce qui concerne la connaissance des rseaux, la loi du 12 juillet 2010 portant engagement national pour lenvironnement demande aux collectivits organisatrices des services dtablir avant la fin de l'anne 2013 un descriptif dtaill des rseaux deau et dassainissement, points dentre pour la mise en uvre dune gestion patrimoniale de ces infrastructures. La Cour souligne plusieurs reprises les impacts du nombre trs lev de collectivits organisatrices, tant sur la lisibilit de lorganisation et de la facture deau, que sur le pilotage des contrats de dlgation. La loi de rforme des collectivits territoriales demande cet gard un effort de rationalisation des intercommunalits existantes, lanne 2011 devant permettre aux prfets dlaborer, en liaison avec les commissions

28

COUR DES COMPTES

dpartementales de la coopration intercommunale, un schma dpartemental de coopration intercommunale permettant notamment dassurer une couverture totale du territoire par des tablissements publics de coopration intercommunale fiscalit propre. La loi de rforme donne ainsi les outils ncessaires pour une rationalisation de lorganisation des services. Les dispositions de la loi sur leau et les milieux aquatiques mais galement de larticle 51 de la loi relative la mise en uvre du Grenelle de lenvironnement facilitent la constitution de syndicats mixtes permettant de rpondre aux contraintes gographiques dorganisation notamment lies la localisation des ressources. Sil reste prciser les possibilits dincitations ces regroupements afin de faciliter la modernisation des quipements les plus anciens repris par ces intercommunalits, la question de lharmonisation des chances des contrats de dlgation de service me parat pouvoir tre gre dans le contexte rglementaire actuel et la diffusion de retours dexpriences serait en ce domaine utile. Les divers domaines examins par le rapport, que ce soit la mise en concurrence des contrats ou la gestion financire des services, montrent limportance de linformation des collectivits organisatrices des services. LONEMA ralise dsormais lenqute annuelle sur les rsultats des mises en concurrence des contrats de dlgation de services et actualisera en 2011 la synthse des dpenses et des recettes des services. Le prsent rapport de la Cour permettra de dfinir les outils complmentaires mettre en uvre pour permettre aux collectivits de disposer des outils de pilotage et des retours dexprience ncessaires pour amliorer la performance et la matrise du prix des services deau et dassainissement.

REPONSE DU MINISTRE DE LINTERIEUR, DE LOUTRE-MER, DES COLLECTIVITES TERRITORIALES ET DE LIMMIGRATION

J'ai pris connaissance avec la plus grande attention des remarques formules par la Cour. Elles appellent de ma part les observations suivantes. 1. S'agissant des progrs restant accomplir en termes d'amlioration de la transparence financire et du pilotage des services a) Quant la ncessit d'amliorer la transparence financire : Concernant le caractre relativement exceptionnel du changement de mode de gestion voqu par la Cour, je tiens rappeler que, comme le prcise le Conseil d'Etat dans son rapport

LES SERVICES PUBLICS DEAU ET DASSAINISSEMENT : DES EVOLUTIONS ENCOURAGEANTES

29

l'eau et le droit de 2010, une dcision de changement d'un mode de gestion l'autre relve de la libre administration des collectivits locales et suppose bien souvent une rorganisation des services, ce qui constitue naturellement un frein (difficults lies au statut des personnels notamment). En outre, la rcente tude statistique 2010 du Service de l'Observation et des Statistiques (SOeS ex IFEN) sur la gestion des services d'eau potable et d'assainissement, souligne un recours accru la gestion en rgie, notamment dans le secteur de l'assainissement, ainsi qu'une rduction de l'cart de prix entre les services grs en rgie et ceux organiss en dlgation. Par ailleurs, dans le cadre de la loi n 2010-788 du 12 juillet 2010 portant engagement national pour l'environnement, dite Grenelle II, plusieurs dispositions visent attnuer l'asymtrie d'information entre le dlgant et le dlgataire. Ainsi, l'article 163 de la loi prcite, dont le dcret d'application est en cours de rdaction, impose au dlgataire de remettre la collectivit dlgante le fichier des abonns ainsi que les caractristiques des compteurs et les plans des rseaux six mois avant la fin du contrat. Un tel dispositif est de nature permettre l'organe dlibrant de l'autorit organisatrice de disposer d'une information complte et fiable sur l'tendue du service avant de prendre une dcision quant sa reprise en rgie ou la poursuite de son exploitation en gestion dlgue. S'agissant du report de la date de remise du rapport annuel du maire sur le prix et la qualit du service prconis par la Cour, le ministre de l'intrieur n'est pas oppos une volution en ce sens du droit applicable afin d'amliorer l'utilit concrte des informations contenues dans ce rapport en donnant la collectivit un temps suffisant pour les exploiter. En ce qui concerne la dure excessive de certains contrats de dlgation, il convient de souligner qu'un important socle lgislatif et jurisprudentiel permet de prvenir de telles drives, mme s'il existe encore certaines situations drogatoires de manire ponctuelle. Ainsi l'article 75 de la loi du 2 fvrier 1995, dite loi Barnier , interdit de conclure, dans le domaine de l'eau et de l'assainissement, des contrats d'une dure suprieure 20 ans. D'autre part, la rcente jurisprudence du Conseil d'Etat commune d'Olivet (CE, Ass., 8 avril 2009, Compagnie gnrale des eaux, commune d'Olivet) tend cette obligation aux contrats conclus avant l'entre en vigueur de la loi prcite. Une circulaire sera adresse aux prfets au dbut de l'anne 2011 afin de les sensibiliser cette jurisprudence et de

30

COUR DES COMPTES

leur permettre de jouer un rle de conseil, aux cts des TPG, auprs des collectivits territoriales concernes. S'agissant enfin des difficults lis aux droits d'occupation du domaine public, l'article L.2224-11-2 du code gnral des collectivits territoriales relatif l'encadrement des montants des redevances susceptibles d'tre perues par les collectivits pour l'occupation de leur domaine public renvoyant un dcret d'application (dcret n 2009-1683 du 30 dcembre 2009), les dispositions relatives l'encadrement desdites redevances ne peuvent ds lors s'appliquer qu' partir de la date d'entre en vigueur de ce dcret. Le rgime d'encadrement ne peut donc pas s'appliquer aux contrats de dlgation passs antrieurement cette date. b) Quant la ncessit damliorer le contrle de la performance : Conscient des difficults indicateurs de performance, on systme d'information sur d'assainissement, bien qu'en progrs et un acquis dont ne services publics. lies au contrle et au suivi des peut souligner que l'existence d'un les services publics d'eau et phase de dveloppement, est un bnficient souvent pas les autres

La consolidation de cet acquis et le caractre rellement oprationnel de ce dernier ncessitent cependant une troite concertation avec les collectivits afin de disposer de donnes fiables. L'exhaustivit et la pertinence de cet outil doivent donc tre envisages dans une perspective long terme qui exclut, dans un premier temps, l'diction de mesures contraignantes concernant la transmission des donnes collectes. c) Quant lextension de la sparation de trsorerie aux services en gestion dlgue linstar de la rgle applicable aux services grs en rgie : Ainsi que rappel prcdemment, le choix du mode de gestion des services publics d'eau et d'assainissement est effectu en fonction de multiples facteurs qui sont propres la commune (structure traditionnelle de gestion, conditions de reprise du personnel, structures adaptes ou non pour assurer un contrle de l'excution du service, en cas de gestion dlgue, capacit rpondre la technicit plus ou moins importante de la gestion). L'article L. 1412-1 du CGCT prvoit la cration de rgies dotes de l'autonomie financire pour la gestion des services publi s c locaux industriels et commerciaux (SPIC) uniquement lorsqu'une collectivit ou un groupement assure leur exploitation en rgie directe. La collectivit peut galement opter pour une gestion dlgue du

LES SERVICES PUBLICS DEAU ET DASSAINISSEMENT : DES EVOLUTIONS ENCOURAGEANTES

31

service public dans le cadre des dlgations impliquant alors un budget propre.

de service public,

Ds lors, l'individualisation des SPIC au sein d'un budget gr selon l'instruction budgtaire et comptable M4 permet d'tablir les cots exacts du service. Cependant, l'application des dispositions de l'article L.1412-1du CGCT n'implique pas une individualisation des trsoreries de chaque service, susceptible d'entraner des frais financiers supplmentaires. Cette facilit de gestion permet en effet une grande souplesse de gestion, notamment par l'utilisation des excdents ponctuels de trsorerie de certains services pour les besoins d'un autre service. Seules les rgies dotes de l'autonomie financire et de la personnalit morale, ou dotes de la seule autonomie financire lorsque la collectivit a opt pour une gestion directe du SPIC, disposent d'un budget autonome e t donc d'un compte au trsor. Par ailleurs, dans le cadre d'une dlgation de service public, la trsorerie du service dlgu est retrace dans la comptabilit du tiers- dlgataire. Un rapprochement entre les comptes d'exploitation des dlgataires et les comptes administratifs des collectivits dlgantes permet donc de connatre la trsorerie du service dlgu au terme de chaque exercice comptable. Il convient de plus de souligner que la gestion commune de la trsorerie ne dispense bien videmment pas du respect des rgles d'quilibre budgtaire requises, en prvision comme en excution. Elle ne permet pas plus au comptable de procder au paiement des mandats en cas d'indisponibilit des crdits. Ds lors, les risques financiers lis la prsence d'un compte au trsor mutualis sont donc trs faibles. Enfin, la mutualisation des trsoreries ne signifie pas une mutualisation des diffrents services publics grs, chaque SPIC possde toujours son propre budget avec des dpenses et des recettes qui lui sont propres. Au total, l'exemple cit par la Cour semble plus procder d'un dfaut d'imputation des dettes que d'un inconvnient li la rgle de mutualisation des trsoreries. d) Quant la mise en budgtaires et comptables : uvre effective des amliorations

La loi organique relative aux lois de finances du 1er aot 2001 admet la possibilit de drogations l'obligation de dpt des fonds au Trsor condition qu'elles soient prvues par la loi. L'article 116 de la loi de finances pour 2004 dfinit un tel rgime drogatoire, codifi aux articles L.1618-l et suivants du CGCT, complt par le

32

COUR DES COMPTES

1 dcret n 2004-628 du 28 juin 2004 portant application de l article 116 de la loi de finances pour 2004. Les rgies charges de la gestion d'un SPIC ont galement la possibilit de placer leur excdent de trsorerie auprs d'un tablissement bancaire. Comme le souligne la Cour, la loi du 30 dcembre 2006 sur l'eau et les milieux aquatiques a ouvert la possibilit aux SPIC de voter un budget en excdent d'investissement, dont l'utilisation (reprise en recettes de fonctionnement) est autorise lorsque les excdents sont issus de l'exploitation de l'exercice en cours. Cependant, la constatation d'excdent en investissement doit conduire la collectivit s'interroger sur le niveau des redevances perues. En effet, la fixation des tarifs doit trouver sa contrepartie dans le service rendu l'usager et non pas servir constituer, de manire rpte, des excdents notamment en section d'investissement. En application des dispositions des articles L.1618-1 et 2 du CGCT, les fonds dgags en fin d'exercice aprs excution du budget, qui correspondent des disponibilits qui excdent les besoins immdiats de la collectivit sont soumis l'obligation de dpt au Trsor. Toutefois, s'agissant des rgies charges d'un SPIC dotes de la personnalit morale et de l'autonomie financire, l'activit concurrentielle de ces tablissements, les ncessits pratiques et les besoins commerciaux de 1'exploitation peuvent motiver l'ouverture d'un compte de dpt dans un tablissement de crdit agr ou La Poste aprs autorisation expresse du directeur dpartemental des finances publiques de leur ressort. Ds lors, il ne m'apparat pas ncessaire rglementation actuellement en vigueur. de modifier la

e) Quant aux rgles d'amortissement et de gestion pluriannuelle: S'agissant des rgles d'amortissement des immobilisations, l'approche par composants a t introduite dans l'instruction budgtaire et comptable M 4 au 1er janvier 2008. Les SPIC locaux ont dsormais la possibilit d'amortir sparment et selon des dures diffrentes les lments constitutifs de leurs immobilisations dcomposables. Toutefois, cette mthode de l'amortissement par composant constitue une simple possibilit offerte aux collectivits territoriales, et ne peut nullement tre interprte comme une obligation. En effet, cette mthode comptable suppose la mise en uvre d'une comptabilit analytique et d'un suivi fin que toutes les collectivits territoriales ne sont pas toujours en mesure de mettre en uvre.

LES SERVICES PUBLICS DEAU ET DASSAINISSEMENT : DES EVOLUTIONS ENCOURAGEANTES

33

En matire de gestion pluriannuelle des crdits, depuis le 1er janvier 2008, les SPIC peuvent recourir aux autorisations de programme pour leurs dpenses d'investissement ainsi qu'aux autorisations d'engagement pour leurs dpenses d'exploitation, l'exception des frais de personnel et des subventions verses aux organismes privs (articles L.2221-5, L.2311-3 et R.2311-9 du CGCT). Cette procdure permet de ne pas inscrire au budget l'intgralit d'une dpense pluriannuelle, mais les seules dpenses rgler au cours de l'exercice. Toutefois, le recours la pluriannualit est avant tout un outil de gestion offert aux collectivits territoriales et tablissements publics locaux qui constitue donc une simple facult pour les services publics locaux caractre industriel et commercial. Or, comme pour les collectivits territoriales, il y a un dlai d'adaptation ncessaire au passage ce mode de gestion qui n'est pas toujours parfaitement matris. Dans ces conditions, qu'il s'agisse de l'utilisation de la mthode d'amortissement par composant ou du recours la pluri-annualit, la dcision appartient en tout tat de cause l'assemble locale, dans la mesure o cela relve d'un choix de gestion de la collectivit qui dpend des moyens humains et des comptences dont elles disposent. Il convient galement de souligner que les nouvelles rgles budgtaires et comptables applicables aux SPIC depuis le 1er janvier 2008 ont permis une meilleure information des lus. La mise en place rcente de ces rgles peut expliquer leur faible appropriation par les services gestionnaires. 2. S'agissant de la coopration intercommunale et des freins ses avances a) Quant Ln persistance des constats relevs par le rapport public de la Cour de 2003. On pourra observer que les services publics de l'eau et de l'assainissement font partie des services dont le lgislateur a entendu faciliter l'organisation au niveau intercommunal. Il a pour ce faire prvu, voire organis, la dvolution des comptences affrentes aux tablissements publics de coopration intercommunale (EPCI) et ce de longue date. Ainsi, le CGCT a inscrit, depuis 1966, cette comptence au rang des comptences obligatoires des communauts urbaines (CU). Les 16 CU existantes ce jour constituent ainsi une autorit organisatrice unique sur le territoire qu'elles recouvrent. La loi no 2010-1563 du 16 dcembre 2010 de rforme des collectivits

34

COUR DES COMPTES

territoriales (RCT) a confort cette obligation en prvoyant que les comptences eau et assainissement seront galement, titre obligatoire, dvolues au nouveau type d'EPCI fiscalit propre, les mtropoles , appel tre cr. C'est dire que ces services sont considrs, par nature, comme d'essence intercommunale pour qu'en soit facilite la gestion une chelle pertinente et mutualiss les services et les cots affrents. S'agissant des communauts d'agglomration, cres par la loi n 99-586 du 12 juillet 1999 relative au renforcement et la simplification de la coopration intercommunale, l'eau et l'assainissement sont inscrits au rang des six comptences optionnelles de ces structures dont trois au moins doivent tre choisies. En ce qui concerne les communauts de communes, ces comptences appartiennent au champ des comptences facultatives que les communes ont la possibilit de transfrer la structure intercommunale suivant des rgles prvues par les dispositions combines des articles L. 5211-5 et L. 5211-17 du CGCT dont les rgles ont t assouplies par la loi de rforme des collectivits territoriales du 16 dcembre 2010. Le lgislateur a donc donn aux acteurs locaux les outils utiles pour faire progresser la coopration intercommunale dans les domaines de l'eau et l'assainissement. S'agissant des observations de la Cour sur certaines situations locales : -cas de la commune dont une partie du territoire dispose d'un service assur en rgie et l'autre par un syndicat dont la commune fait partie : cette situation, tout en restant exceptionnelle, a t considre comme valide par le Conseil d'Etat dans un avis rendu le 7 juin 1973 ; -cas du syndicat mixte en incapacit de fdrer les communes et EPCI intresss sur un primtre territorial pertinent: le nouvel article L. 5210-1-1 du CGCT issu de l'article 35 de la loi du 16 dcembre 2010 prescrit l'laboration, dans chaque dpartement, d'un schma dpartemental de coopration intercommunale (SDCI) qui sera tabli au vu d'une valuation de la cohrence des primtres et de l'exercice des comptences des groupements existants et devra notamment prvoir les modalits de rationalisation des primtres desdits EPCI et syndicats mixtes existants. La dfinition de primtres territorialement pertinents devrait donc tre revue chaque fois que ncessaire dans ce cadre.

LES SERVICES PUBLICS DEAU ET DASSAINISSEMENT : DES EVOLUTIONS ENCOURAGEANTES

35

b) Quant aux structures intercommunales parfois dficientes: La Cour met en lumire l'exercice de comptences par des communes alors mme ces comptences ont t dvolues des EPCI ou des syndicats mixtes. Elle fait tat de statuts dont l'imprcision facilite ces pratiques. Cette situation n'est effectivement aucunement justifiable et ne devrait pas se produire. En application du principe dit d'exclusivit, les EPCI ou syndicats mixtes sont les seuls pouvoir agir, l'intrieur de leur primtre, dans les domaines se rattachant aux comptences qui leur ont t transfres. Paralllement, la cration de l'EPCI ou du syndicat mixte et tout transfert de comptences son endroit emportent dessaisissement immdiat et total des communes pour les comptences transfres. Le prfet, dans le cadre du contrle de lgalit sur les actes des communes et des groupements est en mesure de faire cesser ces dysfonctionnements en demandant l'annulation des dcisions prises par des autorits incomptentes pour agir. Par ailleurs, le prfet assure des conseils aux lus afin que les statuts des groupements soient clairs pour viter des conflits de comptences qui pourraient natre de statuts obscurs ou ambigus. La jurisprudence administrative sanctionne l'imprcision rdactionnelle des statuts des EPCI quant aux comptences qui leur sont transfres par les communes membres (Tribunal administratif de Strasbourg, 9 mai 1990 Commune de Pange). La loi du 16 dcembre 2010 renforce ce rle de conseil des prfets en prvoyant notamment que Lors de la cration dun tablissement public de coopration intercommunale, les statuts sont soumis aux conseils municipaux en mme temps que la liste des communes intresses dans les conditions prvues larticle L. 5211-5. Pour la Cour, le rglement des transferts patrimoniaux et financiers inhrents aux transferts de comptences peut s'avrer trop long. S'agissant du cas voqu relatif une communaut urbaine, les immeubles et meubles faisant partie du domaine public des communes appartenant l'agglomration sont affects de plein droit la communaut urbaine, ds son institution, dans la mesure o ils sont ncessaires l'exercice des comptences de la communaut (cf. article L. 5215-28). Cette affectation est suivie d'un transfert dfinitif, par accord amiable, de proprit ainsi que des droits et obligations attachs aux biens transfrs. A dfaut d 1accord amiable, un dcret en Conseil d'Etat procde au transfert dfinitif de proprit au plus tard un an aprs les transferts de comptences la CU. Lorsque la comptence tait exerce par un syndicat, sa dissolution ou le retrait des communes adhrentes pouvait donner lieu

36

COUR DES COMPTES

des dlais plus longs, en raison de la rpartition des biens propres du syndicat et du solde de l'encours de la dette auquel il convenait de procder. La loi du 16 dcembre 2010 a modifi l'article L. 5211-25-1 qui dsormais prvoit que l'arrt du prfet fixant cette rpartition, en cas de dsaccord entre les parties, est pris dans un dlai de six mois suivant la saisine du ou des reprsentants de l'Etat dans le ou les dpartements concerns par l'organe dlibrant de l'EPCI ou de l'une des communes concernes. Ce dispositif devrait permettre d'carter les dficiences en matire de transferts patrimoniaux et financiers aux structures intercommunales. c) Quant aux freins au dveloppement de la coopration intercommunale : La Cour voque trois sries d'arguments d'ordre technique, conomique et juridique : les arguments d'ordre technique : Ces arguments portent sur l'existence de nombreux bassins versants pour lesquels les zones de captages peuvent tre situes hors du territoire de I'EPCI, ce qui constituerait un obstacle au transfert de comptences aux groupements. On observera sur ce point que le fait que les zones de captage d'eau soient situes hors du territoire de l'EPCI n'est pas en soi un frein au dveloppement de l'intercommunalit. D'une part, il nest pas interdit qu'un groupement puisse intervenir en dehors de son propre territoire, pour des raisons d'intrt gnral. Par ailleurs, une telle situation est l'exemple mme d'une ncessaire rationalisation du primtre intercommunal par l'adjonction des territoires concerns pour un exercice efficient de la comptence en cause. La loi du 16 dcembre 2010 devrait permettre d'y concourir. les arguments conomiques : La Cour souligne que les quipements mis en commun, les services rendus et, en consquence, les tarifs pratiqus d'une commune l'autre peuvent tre disparates, ce qui constitue un frein la mutualisation dont l'intercommunalit est porteuse. Sur l'uniformisation des prix: la cration d'un groupement a pour objectif un dveloppement fond sur la cohrence spatiale du territoire et sur la solidarit financire et sociale des communes associes. C'est un objectif majeur qui doit se traduire, en matire de gestion des services publics, par une harmonisation des conditions de leur gestion au sein des territoires et par une unification des tarifs, redevances ou taxes qui en assurent le financement. Pour autant, comme le relve la Cour, le CGCT n'impose pas formellement qu'une telle obligation soit satisfaite ds le transfert de

LES SERVICES PUBLICS DEAU ET DASSAINISSEMENT : DES EVOLUTIONS ENCOURAGEANTES

37

comptences opr. Le transfert de comptences entrane la mise disposition d'quipements varis qui conduit ncessairement la ralisation de travaux de rationalisation ou d'amlioration. Les prestations techniques doivent si ncessaire tre homognises, ce qui suppose l'tablissement de priorits et une rorganisation des services ncessairement chelonne. Sur l'uniformisation des contrats: des modes de gestion diffrents peuvent tre mis en uvre sur le territoire syndical ou communautaire. Les articles L. 5211-5 et L. 5211-17 du CGCT ont organis la substitution des EPCI aux communes dans les contrats en cours en prvoyant qu'ils continuent d'tre excuts dans les conditions antrieures jusqu' leur chance, sauf accord contraire des parties. C'est pourquoi, un contrat unique pour l'ensemble du primtre ne peut, en pratique, tre mis en place qu' l'issue de la priode transitoire. Le renouvellement des contrats permet cette harmonisation. Il peut tre prconis de jouer sur la dure des nouveaux contrats qui devront tre tablis l'occasion de l'arrive premption des contrats en cours de manire faire concorder leur date d'expiration. Les arguments d'ordre juridique La Cour souligne la rorganisation lourde qu'implique notamment le passage une gestion intercommunale des services d'eau et d'assainissement. Elle cite notamment le cas o des communes doivent se retirer des syndicats pour rejoindre un EPCI fiscalit propre. Cette obligation concerne les EPCI trs intgrs que sont les communauts d'agglomration, les communauts urbaines et les mtropoles. Les communauts de communes et les syndicats n'y sont pas soumis, le transfert de comptences s'accompagnant pour elles d'une substitution aux communes dans les syndicats dont elles faisaient partie. S'agissant des EPCI trs intgrs, le retrait est une condition ncessaire pour qu'une autorit organisatrice unique sur le territoire communautaire puisse tre en capacit de grer ces services publics sur son propre primtre. Cette formalit rpond la ncessit de simplifier le paysage intercommunal et d'viter d'aboutir une trop grande diversit des gestionnaires des