pour une poétique de la parole chez giono

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« SITUATION » N° 39

Alan J. CLAYTON

pour

chez Giono

LETTRES MODERNES MINARD

73, rue du Cardinal-Lemoine 75005 PARIS 1978

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Nous remercions le Faculty Research Committee de Tufts University et l'American Council of Learned Societies de l'appui qu'ils ont bien voulu nous accorder dans nos recherches sur Giono. Nous tenons tout particulièrement à exprimer notre recon- naissance à Bernard W. Harleston, Luce et Robert Ricatte, et Joseph Ferdinand pour les encouragements amicaux qu'ils nous ont donnés. Nos plus vifs remerciements vont également à Mlle Aline Giono, au docteur et à Mme Gérard Durbet dont la générosité nous a permis de mieux connaître l'œuvre et la person- nalité de Giono.

Toute reproduction ou reprographie et tous autres droits réservés

IMPRIMÉ EN FRANCE

ISBN : 2-256-90793-7

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A la mémoire de mes grands-parents, Morris et Fannie Pavell

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SIGLES ET ABRÉVIATIONS (conformes à la Série Jean Giono de La Revue des lettres modernes) Jean GIONO, Œuvres romanesques complètes (Paris, Gallimard, « Biblio-

thèque de la Pléiade »). I Tome I (1971). Édition établie par Robert RICATTE avec la colla-

boration de Pierre CITRON, Lucien et Janine MIALLET et Luce RICATTE.

II Tome II (1972). Édition établie par Robert RICATTE avec la colla- boration de Pierre CITRON et Luce RICATTE.

III Tome III (1974). Édition établie par Robert RICATTE avec la colla- boration de Henri GODARD, Lucien et Janine MIALLET et Luce RICATTE.

IV Tome IV (1977). Édition établie par Robert RICATTE avec la colla- boration de Pierre CITRON et de Henri GODARD.

dans A Angelo [IV] ÂF Les Âmes fortes (Gallimard, 1949) C Colline Enn. Ennemonde et autres caractères (Gallimard, 1968) EV L'Eau vive [III] GC Les Grands chemins (Gallimard, 1951) HT Le Hussard sur le toit [IV] IS L'Iris de Suse (Gallimard, 1970) JB Jean le Bleu [II] Melv. Pour saluer Melville [III] MP Le Moulin de Pologne (Gallimard, 1952) Noé Noé [III] Par. Fragments d'un Paradis [III] Pers. Mort d'un personnage [IV] PC Le Poids du ciel (Gallimard, 1949) Q Que ma joie demeure [II] Roi Un Roi sans divertissement [III] TV Triomphe de la vie (Grasset, 1942) Virg. Virgile [III] VR Les Vraies richesses (Grasset, 1937) JG1 Jean Giono 1, etc. (fascicules de La Revue des lettres modernes)

À l'intérieur d'un même paragraphe, les séries continues de réfé- rences à un même texte sont allégées du sigle commun initial et réduites à la seule pagination ; par ailleurs les références consécutives à une même page ne sont pas répétées à l'intérieur de ce paragraphe.

Toute citation formellement textuelle se présente soit hors texte, en petit caractère romain, soit dans le corps du texte en italique entre guillemets, les soulignés du texte d'origine étant rendus par l' alternance romain/italique ; mais seuls les mots en PETITES CAPITALES y sont souli- gnés par l'auteur de l'étude (le signe * devant un fragment attestant les petites capitales ou l'italique de l'édition de référence).

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INTRODUCTION

« "Plus vos peintres font des pommes, et même des lignes qui ne représentent rien, plus ils parlent d'eux." » (Le peintre Kama,

dans La Condition humaine de Malraux) « Quoi qu'on fasse, c'est toujours le por-

trait de l'artiste par lui-même qu'on fait. Cézanne, c'était une pomme de Cézanne. »

(Noé, 644) « Les œuvres, quelles qu'elles soient, ont

purement et simplement des noms d'hommes pour titre. » (Virg. , 1034)

T l'œuvre de Giono — et les récits d'avant-guerre en particulier — célèbre les pouvoirs magiques de la parole et la vocation démiurgique du poète. Dès

les premiers écrits publiés, Giono présente le poète (et ses doubles) comme un ennemi du réel et un concurrent du créateur : « Tout le réel a disparu », dit le narrateur de « Jeux ou la Naumachie » (1922), « et je suis le dieu qui regarde » (EV, 121). Et dans Triomphe de la vie, on lit : « Pour qu[e] [l'homme] puisse supporter le fait que le monde a été créé, il est obligé [...], à tout moment, de refaire en lui-même la création du monde. » (TV, 42). Le rôle que le poète se donne est donc d'effacer par la parole les formes du réel abhorré et de faire surgir à leur place celles du monde qu'il porte en lui et dont il est « [t]ellement bourré [...] que sa peau en éclate comme la peau des hydro- piques » (Virg., 1040). Dans Que ma joie demeure, par

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exemple, Jacquou parle des animaux magnifiques que la présence de Bobi lui a inspiré de créer : « Il en parlait comme si c'était vrai, comme si ces animaux étaient là. Et ils étaient encore dans le rêve. » (II, 723). De façon inattendue sans doute, le paysan qui parle ainsi « de ses rêves, de ses animaux merveilleux, de ses taureaux presque trop beaux pour être sur terre », nous livre un des nombreux « por- trait[s] de l'artiste par lui-même » (Noé, 644) qu'esquisse d'un bout à l'autre l'œuvre de Giono et que les présents essais se proposent de mettre en valeur. Or, l'artiste, chez Giono, c'est inévitablement le poète : celui dont le Verbe est à l'origine d'une remise en question du monde créé et qui ne cesse d'exalter — « contre la vérité et le réel » (1059), comme l'affirme sans ambages l'auteur de Virgile — une vision toute personnelle d'une telle envergure qu'elle finit par « occup[er] tout l'espace de la réalité» (ÂF,321). «La vérité ne comptait pas », poursuit le narrateur des Âmes fortes à propos de la volubile et menteuse Thérèse. « Rien ne comptait que d'être la plus forte et de jouir de la libre pratique de sa souveraineté. » La souveraineté du maître- parleur gionien consiste justement à faire croire à la pré- sence réelle de ce qui n'existe que « dans le rêve » (II, 723).

La vision et la parole poétiques s'inscrivent régulière- ment chez Giono dans une dynamique ascensionnelle qui s'oppose à l'horizontalité de l'existence terrestre : le poète apparaît comme un être ailé, épris d'azur, un habitant des airs, un Icare qui « mont[e] à la rencontre du soleil » (JB, 37) ; son « regard vole jusqu'au bout de l'horizon » (EV, 203) ; il parle « de là-haut où [s]a voix fait écho avec les étoiles » (Q,606). Dans « L'Eau vive », Giono évoque ainsi la rue où habite, à Manosque, le fontainier-poète Pétrus :

Il habite rue du Poète. J'ai des amis qui vont rire parce qu'ils connaissent la rue du

Poète, à Manosque : c'est une impasse.

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Mais mon homme aboutit quelque part ; il aboutit sur le grand large. Il y aboutit en falaise ; quand on est au bout, si ON N'A PAS DES AILES, ON TOMBE. N'est-ce pas une drôle d'impasse ?

Au fond de la rue, le mur est troué d'une porte. On entre : une large chambre, pleine à craquer d'une ombre feuillue, un âtre dort, l'oeil mi-clos.

Mais, voici Pétrus ; IL PARLE... ET C'EST DE CETTE FAÇON QUE L'IMPASSE DU POÈTE ABOUTIT EN PLEIN

CIEL, en plein pré du ciel, dans une immensité où le ciel est épais comme de l'herbe ; et l'on se baisse et l'on dit : « Des pâque- rettes. » On avance la main : non, ce sont des étoiles. (III, 98-9)

Parler, c'est donc voler. Le poète, c'est celui qui fait d'une impasse le point de départ d'une ascension, d'un envol vers le ciel étoilé. Par contre — comme nous le montrerons sur- tout à propos du maquignon et de l'épileptique de Jean le Bleu —, la lourdeur du non-parleur le condamne à gémir au ras du sol ou dans les bas-fonds humides où se décompose la matière.

L'exaltation de la parole poétique a effectivement pour corollaire chez Giono la dépréciation du mutisme et du silence, associés le plus souvent à la maladie ou à la mort. Albin-le-blanc dépérit moralement, ses « yeux d'eau claire » (1,222) sont déjà envahis par « un quelque chose d'amer ; une ombre, comme le reflet d'une viande qui pourrirait au fond d'une fontaine », lorsque l'intervention bienveillante d'Amédée — ce vieux Socrate des terres à blé, cet « accou- cheur » professionnel des paroles d'autrui — lui donne l'occa- sion de « se soulager », de « se dégonfler » (226), bref de se délivrer de l'histoire qu'il porte en lui et qu'il tait justement depuis plusieurs années : « "C'est pas exactement de la parole, maintenant [dira-t-il à Amédée sur le chemin de Marigrate], c'est comme si je saignais. C'est comme d'un mauvais apostume que j'ai crevé du couteau et qui saigne du sang et du pus ; voilà ma parole de ce soir, voilà. C'est du mal qui s'en va. De ces trois ans, dans ces pays, j'ai

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pas dit vingt mots de plus que le nécessaire pour se faire manger et boire." » (228). Et c'est par son chant orphique qu'il « parler[a] à Angèle » (285) et triomphera à la fin du mutisme de la Douloire.

De même, la première partie de Regain se donne à lire comme l'histoire d'un village mort parce que privé de la parole. Le dépérissement d'Aubignane est étroitement lié à la disparition progressive de ses habitants-interlocuteurs et des bruits-signes qui en disaient la présence, tel ce discours au second degré que tient le marteau de Gaubert lorsqu'il frappe sur l'enclume de la forge : « Ce bruit d'enclume, ça va dans la campagne et parfois ça rencontre Panturle qui chasse. C'est encore une chose à quoi on peut parler, ça. » (1,332). Panturle se présente au début comme un homme que la solitude a réduit au monologue : « Il a un défaut : il parle seul. Ça lui est venu aussitôt après la mort de sa mère. » (330) ; et encore : « Il est devenu plus méchant aussi. Il ne parle plus à ses ustensiles. » (342). En fait, mutisme et méchanceté, silence et violence constituent sou- vent chez Giono des couples complémentaires : avant la rencontre d'Arsule, qui lui réapprendra à « parler avec des paroles d'homme » (371), Panturle préfère à la parole le « geste des bêtes », les sourdes délices sexuelles de la chasse ; le patron de la Douloire, Clarius Barbaroux, comme il est si bien nommé, va d'un endroit à l'autre « sans desserrer les dents » (252), et il tient à son fusil ; le projet de meurtre est l'unique réponse de Jaume aux pouvoirs surnaturels de Janet et de sa «pute de langue » (189) ; et dans «Prome- nade de la mort », le comte de R. d'A..., qui a hérité de ses ancêtres la passion de la violence, « ne sait pas dire deux mots raisonnables à la suite » (EV,369) : c'est pourquoi le vieux Marquis — qui a su canaliser et sublimer, lui, sa « rage silencieuse » (360) dans l'amour des oiseaux — qua- lifie ironiquement de « symptôme lyrique » (370) le casque de cuir qu'aime porter son neveu guerrier.

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Notre propos est donc de jeter les bases d'une poétique de la parole chez Giono — de la parole et de ses substituts aussi bien que de ses contraires. La méthode adoptée pour cette étude, l'écrivain en a suggéré lui-même la définition, dans Fragments d'un Paradis, par le truchement du capi- taine de L'Indien : c'est « la méthode des bâtons rompus, ou des rapports, comme disent les peintres » (III, 913) Certes, on risque, à la suivre, d'« all[er] tout chercher à droite et à gauche » (IV, 615) comme le médecin bavard du Hussard accepte allégrement de le faire lorsqu'il assimile, par exemple, le choléra à « cette pièce de feu d'artifice appelée : soleil » et donc à un spectacle éblouissant et si séduisant que le cholérique « ne peut plus en détacher les regards » (618). Ce risque s'impose pourtant, croyons-nous, à quiconque s'efforce de pénétrer l'imaginaire de Giono, c'est-à-dire d'étudier les images qu'il ne cesse de privilégier et qui éclatent justement dans tous les sens, tels des feux d'artifice. C'est d'ailleurs « la méthode des bâtons rompus, ou des rapports » (III,913) qui permet au capitaine de L'In- dien et à son interlocuteur-double, M. Larreguy, d'inventer ensemble, comme l'écrivain qu'ils figurent, un ange à partir d'une raie : « Poisson à forme d'oiseau [dit le capitaine]. Ce qui nous permet, monsieur, de le précipiter par l'imagi- nation aussi bien dans les gouffres du ciel que dans les gouffres de la mer. » (910)

Nous avons tâché cependant de systématiser la méthode et de préciser, surtout à propos de Colline, que les rapports en question sont — inévitablement — d'ordre paradigma-

1. On relève également, dans l'introduction de Giono aux Œuvres com- plètes de Machiavel (Paris, Gallimard, « Bibl. de la Pléiade », 1952), cet avis sur Machiavel amateur de peinture : « Il avait [...] tout à voir dans les raisons qui poussaient un tel à s'exprimer de cette façon plutôt que d'une autre et à orga- niser dans les couleurs des rapports purement personnels. » (p. xv).

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tique Parole et coup de fusil relèvent, par exemple, d'un paradigme de l'expression dont les variantes sont pourtant inégalement valorisées par les textes. D'une manière géné- rale, coups de fusil, éclatements et explosions (y compris sans doute les feux d'artifice du choléra) remplacent et compensent chez Giono une carence verbale. Si les récits analysés ici (et bien d'autres encore) valorisent avant tout la parole qui coule de source, la parole qui jaillit irrésistible- ment, involontairement, d'une tête pleine à craquer (comme celle de Janet) d'images, de rêves, de visions, bref d'* « un monde » (Noé,621), ces mêmes récits tendent en revanche à déprécier l'action physique, apanage d'un bras, et surtout le geste violent, contraire radical et dérisoire de l'expression poétique. De qui triomphe Ulysse-le-« parleur » (JB, 7), pour rentrer dans ses biens, sinon d'un « héros de palestre » (1,27) dont les « vastes épaules » (83) et les « bras arqués comme deux anses d'amphore » ne peuvent rien contre les puissances surnaturelles de la poésie ? Antinoüs veut-il parler ? C'est « lentement, peinant à soulever des mots très rugueux » (72). La parole rocheuse de ce « bloc de nerfs » (83) est tout ce qu'il y a de plus opposé au flux verbal du poète : « Antinoüs grommelait des paroles trop dures, celles-là, pour les jeter à Pénélope ; il les broyait en lui-même avec un bruit de porc à l'auge. » (73).

Entre la parole et le geste, entre la poésie et l'action se produit donc une opposition récurrente, que résume d'une manière simple et directe une remarque de Giono à propos du poète dans « Aux sources mêmes de l'espérance » : « Son travail à lui, c'est de DIRE. Il a été désigné pour ça. Les autres FONT. » (EV, 203). Or les pôles de la structure oppositionnelle ainsi constituée se prêtent également à l'inversion : le dire

2. Nous employons le mot paradigme au sens saussurien de système ou de réseau associatif. Voir Ferdinand de SAUSSURE, Cours de linguistique générale (Paris, Payot, 1972), II Partie, chap. v et VI ; et Roland BARTHES, « Éléments de sémiologie », Communications 4 (1964), pp. 91—135.

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poétique — celui d'Ulysse, de Janet, d'Albin et de Bobi — apparaît en fin de compte comme une forme supérieure du faire ; la parole absorbe son contraire : elle se fait acte, et acte magique, propre à opérer la transfiguration du réel Cette réversibilité des pôles d'une même opposition explique qu'un personnage tel que Panturle puisse présenter d'abord les traits du violent, et ensuite ceux du poète. Car à la fin de Regain, l'ancien chasseur connaît effectivement cette pléni- tude intérieure, ce gonflement psychique et corporel qui caractérise le poète « boursouflé » (Virg., 1040) de chants vir- tuels : « Il a des chansons qui sont là, entassées dans sa gorge à presser ses dents. Et il serre les lèvres. » (1,428) ; autrement dit : des chansons qui attendent leur EX-PRESSION. Il en est exactement de même d'Ulysse (ce poltron que sa parole trans- forme en héros et en vainqueur d'Antinoüs-le-costaud) : « Les figures de cet extraordinaire périple [...], il les sentait toutes entrées en lui, entassées dans l'enclos de sa peau, la boursou- flant de formes nouvelles. » (53). Et à la fin de Naissance de l'Odyssée, son mensonge fabuleux répandu, Ulysse « sentait gonfler en lui la floraison de récits nouveaux » (122).

3. L'analyse de l'inversion complémentaire dépasserait le cadre de la présente étude. Signalons pourtant que l'œuvre gionienne est remplie de héros et d'actions héroïques qui, par leur caractère insolite, remettent en question un certain ordre moral ou naturel et dont la fonction recoupe donc celle de la parole. Le cas d'Angelo est exemplaire à cet égard : son idéalisme chevaleresque constitue une immense négation de la réalité humaine ou de la chose naturelle, c'est-à-dire de l'égoïsme, du désir et de l'ordre moral fondé sur eux.

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CHAPITRE PREMIER

COLLINE, OU LA TERREUR DE LA PAROLE (essai de lecture)

« "D'où te vient ce flux poétique qui coule de toi sans arrêt ?" » (EV, 102)

un jeu de contraires

olline déploie ses thèmes selon une axiologie résolu- ment binaire : pas d'élément majeur de la fiction qui ne soit affecté d'un opposé. Le texte est ici à l'image

même de la langue telle que l'a décrite Saussure : un système différentiel, privé de termes positifs 1 Seul le titre semble échapper à cette loi, mais c'est un trompe-l'œil : à la colline sombre et mystérieuse viendra s'opposer, tout au long du récit, le hameau des Bastides Blanches, petite communauté humaine installée dans son ombre. Cette opposition s'annonce dès les premières phrases du texte : « Quatre MAISONS fleu- ries d'orchis jusque sous les tuiles émergent de blés drus et hauts. C'est entre les COLLINES, là où la chair de la terre se plie en bourrelets gras. » (I, 127). Le titre réduit donc au degré zéro de l'expression le terme humain d'une opposition partout présente dans le récit.

À l'opposition initiale citée ci-dessus correspond une série de binarités complémentaires. Maisons et collines dési- gnent déjà, par métonymie, deux ordres ennemis, deux sphères d'influence rivales. D'un côté, l'humain et les acti- vités qui le caractérisent : construction, domestication (du

1. Ferdinand de SAUSSURE, Cours de linguistique générale (Paris, Payot, 1972), p. 166.

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situation essais de bilan ou d'approximations ( suite )

34. La Genèse de La Jeune Parque de Paul Valéry — essai de chronologie, par F. DE LUSSY. 1975.

35. La Vie retrouvée — étude de l'œuvre romanesque de Nathalie Sarraute, par F. CALIN. 1976.

36. Malraux ou le récit hybride — essai sur les techniques narratives dans L'Espoir, par Ph. CARRARD. 1976.

37. Dimensions, structures et textualité dans la trilogie romanesque de Beckett, par B. T. FITCH. 1977.

38. Introduction à Monsieur Ouine de Bernanos, par P.-R. LECLERCQ. 1978.

39. Pour une poétique de la parole chez Giono, par A. J. CLAYTON. 1978.

catalogue de nouveautés sur demande MINARD, 73, rue du Cardinal-Lemoine — 75005 PARIS

Imprimé en France. ISBN : 2-256-90793-

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