pour une approche interprétative de la modélisation du

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Pour une approche interprétative de la modélisation du comportement du consommateur Jean Philippe Galan Professeur des Universités Centre de Recherche en Management (CRM, UMR 5303 CNRS/UT1) IAE Université de Valenciennes et du Hainaut Cambrésis Les Tertiales, rue des Cent-Têtes, 59313 Valenciennes Cedex 9 [email protected] / +33(0)5.61.63.56.79 “I can dream up schemes when I'm sitting in my seat I don't see any flaws 'til I get to my feet (...) I could make a mark if it weren't so dark I could be replaced by any bright spark But darkness makes me fumble For a key, to a door that's wide open” The Police Darkness © 1981, A&M Records

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Page 1: Pour une approche interprétative de la modélisation du

Pour une approche interprétative de la modélisation du comportement du

consommateur

Jean Philippe Galan

Professeur des Universités

Centre de Recherche en Management (CRM, UMR 5303 CNRS/UT1)

IAE – Université de Valenciennes et du Hainaut Cambrésis

Les Tertiales, rue des Cent-Têtes, 59313 Valenciennes Cedex 9

[email protected] / +33(0)5.61.63.56.79

“I can dream up schemes when I'm sitting in my seat

I don't see any flaws 'til I get to my feet

(...) I could make a mark if it weren't so dark

I could be replaced by any bright spark

But darkness makes me fumble

For a key, to a door that's wide open”

The Police – Darkness

© 1981, A&M Records

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Pour une approche interprétative de la modélisation du comportement du

consommateur

Résumé:

La recherche en comportement du consommateur a été et demeure largement constituée par

des positionnements positivistes et hypothético-déductifs. Alors que se structurent depuis

vingt ans plusieurs perspectives alternatives, il parait plus que jamais nécessaire de passer en

revue les pratiques traditionnellement instituées dans le champ en matière de travail

statistique ; ce que cet article se propose de faire. La déconstruction des canons actuels de la

recherche ainsi menée nous permettra de dégager de nouvelles perspectives méthodologiques

combinées, afin d’éviter que le champ de la recherche en consommation ne se fracture

irrémédiablement selon un schisme improductif.

Mots-clés : épistémologie, méthodologie, interprétativisme, modélisation.

For an interpretive approach of the consumer behavior modelling

Abstract:

Consumer research has always been and still is massively constituted by positivist and

hypothetico-deductive inquiries. For the past 20 years a lot of alternative approaches have

been emerging and it now seems absolutely necessary to review the traditionally instituted

practices of our field when it comes to statistics. That is what this article aims to do, by

deconstructing actual research canons and pointing out new mixed methodological

approaches. These methodological innovations and thoughts could help us to avoid the threat

of a definitive schism of our research field.

Key-words: epistemology, methodology, interpretivism, modelling.

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Pour une approche interprétative de la modélisation du comportement du

consommateur

Introduction

Le projet des Lumières, marquant les débuts de l’ère moderne, a proposé « d’éclairer »

l’homme par la science afin de le libérer du carcan religieux et des superstitions. Dans le

sillon de cet héritage philosophique, la recherche en marketing a épousé l’idéal de scientificité

lorsque deux fondations, Ford et Carnegie, ont au milieu du vingtième siècle cherché à libérer

la littérature marketing de la subjectivité des chercheurs et praticiens, afin de passer de l’art à

la science du marketing. Ainsi que le rapporte Cochoy (1999), vers 1954, ces deux fondations

ont chargé des experts indépendants d’ausculter les universités américaines dans le but de

financer une réforme de l’enseignement et de la recherche en gestion. Le tournant scientifique

du marketing s’est concrétisé par la publication d’ouvrages clairement orientés tels que ceux

de Bass & al. (1961) ou Frank, Kuehn et Massy (1962) ainsi que par le recrutement de

spécialistes des techniques quantitatives et des sciences sociales. Ces approches ont débouché

à la fin des années 1960 sur des espoirs de modélisation du comportement du consommateur

dans des modèles dits « intégrateurs » (e.g. Engel, Kollat et Blackwell, 1968 ; Howard et Seth,

1969 ; Nicosia, 1966) ayant pour ambition de porter l’étude de comportement du

consommateur au rang de science exacte tout en l’émancipant du marketing (e.g. Arndt, 1986)

et parvenir à enfermer le consommateur dans un ensemble d’équations (Cochoy, 1999).

Cependant, les dernières décennies ont été marquées par une progressive remise en cause de

l’approche moderne. Le projet moderne, proposant aux individus une amélioration de leur

condition par une approche scientifique objective, est en faillite et avec lui l’ensemble de ses

institutions. Le consommateur « désenchanté » découvre et critique son rôle jusqu’alors passif

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dans la consommation. L’ère moderne se clôt sur un bilan décevant ; la science n’a pas tenu

ses promesses d’harmonie et de confort, et d’importantes menaces comme la destruction de

l’environnement, les inégalités sociales et le chômage n’ont pas disparu.

Certains chercheurs se perçoivent également comme les prisonniers du carcan rationaliste

moderne. Thompson (1993) explique ainsi que l’approche postmoderne se caractérise par une

incrédulité vis-à-vis des méta-narrations unifiantes, qui refoulent les discours alternatifs en les

soumettant par des déclarations autoritaires dont la prétendue objectivité doit être remise en

cause pour considérer sa nature culturellement contingente. Ainsi, portée par le courant

postmoderne, une large partie de la littérature marketing tend à remettre en cause l’analyse

positiviste en « niant aux discours dont la généalogie est trouble (…) toute possibilité d’être

vraie » (Cova et Cova, 2009). Sherry (1991) décrit ce mouvement comme un « tournant

interprétatif », désignant par là une « alternative postmoderne » au positivisme dominant,

l’émergence d’une posture plus subjective dans laquelle le chercheur est l’instrument de la

recherche, confronté à des réalités multiples et dont le but est moins de lier des causes à des

conséquences que de développer des connaissances enracinées.

Alors que ce tournant doit être synonyme de renouveau et de revitalisation des recherches et

de la discipline, il peut être synonyme de choix exclusif et de sclérose méthodologique. En

effet, comme le souligne Deshpandé (1983), la distinction de différentes écoles de pensée

amène souvent à les considérer comme indépendantes et mutuellement exclusives. Le

positionnement épistémologique entraîne souvent, par filiation, des choix méthodologiques

déterminés qui débouchent sur une rivalité entre les approches qualitative et quantitative,

lesquelles stigmatisent les oppositions entre positivisme et interprétativisme. Certains

chercheurs demeurent ainsi prisonniers de méthodes qui ne sont peut-être pas toujours les

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mieux adaptées aux phénomènes étudiés. Pourtant, nombreux sont les auteurs qui soutiennent

une posture plus relative, prônant l’existence d’un continuum philosophique qui va du

positivisme à l’interprétativisme (e.g. Bergadaà et Nyeck, 1992 ; Deshpandé, 1983, Lee, 1991,

Reichardt et Cook, 1980). De part et d’autres, apparaissent des points de vue moins tranchés –

e.g. le positivisme aménagé (Huberman et Miles, 1991) ou le constructivisme modéré (Van

den Belt, 2003) – qui se situent sur ce continuum. Malgré ces possibilités, des configurations

politiques et communautaires participent au clivage entre approches quantitative et qualitative

(Sherry, 1991 ; Bergadaà et Nyeck, 1992) et le fait d’utiliser une méthode plutôt qu’une autre

est un moyen de signifier son appartenance à un courant ou une communauté scientifique.

Il semble donc nécessaire d’entamer une réflexion sur la place de l’approche quantitative dans

la recherche en comportement du consommateur. L’approche quantitative a été pendant de

longues années l’apanage d’une logique hypothético-déductive liée à la posture positiviste

moderne. Ainsi elle a porté le projet moderne et incarné les idées d’objectivité, de causalité et

de généralisation. Bien que dominante, cette approche n’échappe pas aux contingences

historiques, sociales et culturelles. Cette communication se propose ainsi de présenter les

contingences de l’activité de modélisation en comportement du consommateur, faisant ainsi

suite à un premier travail sur les contingences dans la construction des outils de mesure

(Galan, 2011). Après avoir présenté les aspects qui affectent l’objectivité dans la création de

modèles de comportement du consommateur, une première réflexion est proposée quant à

l’utilisation des modèles quantitatifs dans une perspective interprétative.

1. Les contingences de la modélisation du comportement du consommateur

La modélisation du comportement du consommateur consiste, après avoir élaboré le modèle

de mesure, à émettre des hypothèses sur les relations entre les différentes variables. La plupart

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du temps ces hypothèses ont pour objectif d’établir la présence de relations de causalité entre

les variables. Quoique cette étape de modélisation structurelle convient très bien au paradigme

positiviste et à la démarche hypothético déductive, il y a suffisamment de subjectivité dans la

démarche pour se libérer de ce carcan afin de construire et interpréter les modèles.

1.1. Objectif à p<,05 ?

S’il est un point sur lequel les statisticiens eux-mêmes sont très critiques, c’est bien sur la

notion de signification de test de l’hypothèse nulle. Le principal élément sur lequel il semble

nécessaire de s’arrêter est sur le fameux « p<0,05 » qui ponctue toute analyse quantitative du

comportement du consommateur qui se respecte et qui est utilisé comme critère « objectif »

pour distinguer ce qui est faux de ce qui est acceptable parmi les hypothèses émises par le

chercheur. Il est une pratique, quasi-automatique, qui fait partie du rituel de la présentation

des résultats d’une analyse statistique, et qui consiste à préciser que les résultats obtenus sont

« significatifs à p <0,05 ». Ce que cela signifie vraiment ne semble plus faire partie des

préoccupations des chercheurs. Chacun se souvient de l’erreur de type I, mais se souvient-il à

quoi elle correspond ? L’erreur de type I est la probabilité de rejeter l’hypothèse nulle alors

qu’elle est « vraie ». Par consensus, ou par habitude, le seuil de 5% (erreur de type 1) est

devenu le standard, une frontière artificielle (Loftus, 1996) entre deux mondes (Yoccoz,

1991) : celui de la différence (significative) et celui de l’égalité (différence non significative).

Pourtant, rien n’oblige le chercheur à opter pour un seuil de 5%. Ronald A. Fisher, considéré

comme un des fondateurs des statistiques a lui-même précisé que le chercheur n’avait pas à

avoir un seuil fixe pour, années après années, rejeter les hypothèses (Fisher 1925 [1990]). Ce

qu’il est important d’avoir en tête c’est que le seuil de signification est à la base un seuil de

risque lié à un coût : le coût de l’erreur de type 1, c'est-à-dire d’avoir rejeté l’hypothèse nulle

alors qu’elle était vraie, et donc d’avoir corroboré l’hypothèse d’une relation significative

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(alors qu’il n’y en avait aucune). Dans les faits cette fonction de coût n’est jamais calculée, et

les chercheurs prennent le seuil arbitraire de 5% qui n’a pas toujours de sens, car les décisions

liées au rejet de l’hypothèse nulle n’ont pas toutes les mêmes conséquences que ce soit au

niveau théorique ou pratique. Pour Cohen (1994), ce critère de 5% est de l’ordre du sacré et

du rituel et persiste malgré 40 ans de critiques. Pour l’auteur, nous – enseignants, chercheurs,

consultants – sommes responsables de la ritualisation du test de signification de l’hypothèse

nulle jusqu’à un point où il n’a plus de sens (p. 997).

1.2. La causalité remise en cause

Dans le débat qui « oppose » positivisme et interprétativisme dans la recherche sur le

comportement du consommateur, la causalité semble un point central. En effet, pour Bogdan

et Taylor (1975 ; cités par Deshpandé, 1983 : 103), les positivistes cherchent les faits ou

causes des phénomènes sociaux, en faisant peu de cas des états subjectifs des individus. Pour

Hudson et Ozanne (1988), les positivistes ont un objectif d’explication et de prévision, et de

ce fait font des liens de causalité une priorité (p. 512). Un grand nombre d’auteurs (e.g. Lutz,

1989 ; Thompson, Locander et Pollio, 1989 ; Wallendorf et Belk, 1989) s’appuie sur cet

argument comme recours au paradigme interprétativisme, y compris en France, à l’instar de

Bourgeon, Bouchet et Pulh (2003) qui proposent d’avoir recours au domaine des

« philosophies relativistes d’obédience humaniste » en refusant la tendance positiviste qui met

« l’accent sur l’empirisme, la quantification, et la prédiction ». Pour Hunt (1991), reprenant

l’expression de Philips, cette focalisation supposée des positivistes sur la causalité est une

exagération, découlant d’un « antipositivsme rampant » (p. 36). Il y a ici une confusion entre

positionnement épistémologique et choix méthodologique et le lecteur parcourant la littérature

marketing, reconnaîtra que la causalité est souvent au centre des méthodes quantitatives.

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Il est une convention, largement acceptée dans la communauté scientifique, y compris dans

les plus grandes revues, qui consiste à tolérer au chercheur d’inférer une relation de causalité

sur la base d’une corrélation. C’est particulièrement le cas dans les analyses de régression ou

les modèles d’équations structurelles sur lesquels bon nombre d’auteurs s’appuie. Ces

méthodes sont dénommées « explicatives » ou « modèles de causalité » (e.g. Evrard, Pras,

Roux, 1993), pourtant, rien dans ces méthodes ne permet de conclure que lorsque deux

construits A et B sont corrélés, A soit l’antécédent de B ou inversement. Dès 1981, Fornell et

Larcker soulignaient que la causalité ne pouvait pas être inférée des valeurs des paramètres

estimés (1981 : 386). Afin d’illustrer ce fait, la figure 3 affiche les résultats d’une analyse de

la relation entre deux construits A et B par la méthode des équations structurelles.

Figure 1 – Deux modèles de causalité AB ; AB

Si l’hypothèse testée est : « H1 : A influence B de manière linéaire et positive », le chercheur

aurait donc trouvé un support dans le modèle représenté par la figure 1(a). Pourtant, il est bien

clair que l’hypothèse inverse (« H1 : B influence A de manière linéaire et positive ») aurait

trouvé le même support, à partir des mêmes données, mais en modélisant de manière

différente. On voit bien dans les indicateurs fournis par le logiciel d’analyse, qu’aucun des

modèles n’est supérieur à l’autre. D’un point de vue statistique, les deux modèles sont

strictement équivalents. Le chercheur ne peut donc en aucun cas trouver un support statistique

b1 b2 b3

B 0,22

(p<,05)

a1 a2 a3

A

b1 b2 b3

B 0,22

(p<,05)

a1 a2 a3

A

² : 16,78 ; GFI : 0,974 ; AGFI : 0,933 ;

NFI : 0,986 ; CFI : 0,992 ; SRMR : 0,0383

² : 16,78 ; GFI : 0,974 ; AGFI : 0,933 ;

NFI : 0,986 ; CFI : 0,992 ; SRMR : 0,0383

e1 e2 e1 e2

(a) (b)

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au fait que la relation AB est une meilleure description du phénomène observé que la

relation BA. Pourtant, la littérature est remplie de ce genre de cas, et des exemples

pourraient être cités par centaines. La plupart du temps, le lecteur accepte les conclusions sur

la base d’une causalité qui satisfait le bon sens et donc encore une fois, sur la base d’une

narration culturellement déterminée (Thompson, 1993). Toutefois, lorsque l’on examine

certains pans de la littérature, on peut observer que ce « bon sens » n’est pas toujours suffisant

pour départager deux modèles concurrents. Pour Tissier-Desbordes (1998), un des problèmes

majeurs que rencontrent les méthodes interprétatives est justement « la difficulté de

l’interprétation, qui fait appel au savoir du chercheur (…) et les possibilités d’interprétation

du texte étant liées à la subjectivité de l’auteur, un même texte peut être interprété

différemment par deux personnes (p.47). Pour l’auteur, le recours aux méthodes quantitatives

permettrait d’éviter cette subjectivité. Pourtant, au regard de certains débats sur des relations

de causalité comme le lien entre qualité de service et satisfaction (e.g. Parasuraman, Zeithaml

et Berry, 1988 ; Bolton et Drew, 1991), il ne semble pas y avoir une grande différence entre

les deux logiques. Que la méthode soit quantitative ou qualitative, la communauté, les

professionnels qui utilisent les résultats, les étudiants, les lecteurs, tous doivent faire confiance

au chercheur, en sa capacité de maîtriser les outils et à interpréter les résultats qu’il obtient.

1.3. (re)spécifications

Une autre critique faite au positivisme concerne l’approche hypothético-déductive qui lui est

associée. L’objectif de généralisation des théories, amène le chercheur à confronter des lois

générales aux observations. Ce faisant, on lui reproche un manque d’originalité lié au fait que

ne sont testées que des hypothèses scientifiquement établies, c'est-à-dire de justifier des

propositions plutôt que d’en découvrir (Deshpandé, 1983 : 106). Bergadaà et Nyeck (1992)

font remarquer que s’il est reproché aux chercheurs utilisant une logique déductive de ne faire

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que tester des connaissances sans en découvrir de nouvelles, l’induction est tout autant remise

en cause par les chercheurs qui s’interrogent sur le fait de savoir si les données ne sont pas

elles-mêmes un produit théorique. C’est le cas des critiques faites à la théorie enracinée

(grounded theory ; Glaser et Strauss, 1967) qui, à l’inverse de la démarche hypothético-

déductive part du terrain, pour construire la théorie.

La modélisation du comportement du consommateur par les modèles de « causalité » (Evrard,

1985), est généralement considérée comme l’application même du principe hypothético-

déductif. Le chercheur construit un cadre théorique à partir duquel il fait des hypothèses sur

les relations entre divers concepts. Ces hypothèses sont testées statistiquement, fournissant

ainsi un support empirique à la théorie émise par le chercheur. Ici encore il y a une large

confusion du positionnement épistémologique avec le choix méthodologique. Certes

l’approche quantitative parait particulièrement adaptée à une logique déductive, pourtant, elle

ne s’oppose pas à une logique plus inductive. Dans les faits, il est possible que les hypothèses

soient finalement rédigées après l’analyse des résultats. Quelles raisons – autres que la

curiosité – peuvent amener le chercheur à analyser des liens dont il n’a pas fait l’hypothèse

avant l’analyse des données ? Il y en a principalement trois : les indices de modifications

proposés par le logiciel de traitement statistique, la multicolinéarité, l’apparition d’effets

modérateurs et/ou médiateurs.

Premièrement, les logiciels habituellement utilisés dans le cadre des modèles d’équations

structurelles proposent des améliorations de l’ajustement général du modèle

(²).Concrètement, le logiciel propose de supprimer ou d’ajouter des liens entre les différents

paramètres du modèle, que ce soit entre les variables latentes, les attributs, les termes d’erreur

ou toute combinaison de ces éléments par paire. Certaines de ces modifications peuvent

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apparaître pertinentes à certains chercheurs et il est bien évident que 1/ cette pertinence perçue

dépend clairement de la culture du chercheur et 2/ chaque chercheur ne prête pas la même

attention à ces indices (en outre, le logiciel ne les fournissant pas par défaut, c’est au

chercheur de les exécuter ce qui suppose qu’il connaît l’existence de ces fonctionnalités). De

fait, un lien qui frappe le bon sens du chercheur et qui permet d’améliorer la qualité statistique

globale du modèle, va être introduit dans le faisceau des hypothèses, ou, dans une posture plus

souple, le chercheur les présentera dans une section de « résultats complémentaires ».

Deuxièmement, il peut arriver que différentes variables explicatives du modèle soient

fortement corrélées entre elles. Ce phénomène est appelé multicolinéarité. Il cause des erreurs

d’estimation, mais le véritable problème est, qu’en l’absence de test spécifique, la

multicolinéarité passe souvent inaperçue (Grewal, Cote et Baumgartner, 2004). Il existe donc

un premier point critique lié au fait que tout chercheur ne teste pas la multicolinéarité et

produit potentiellement des résultats erronés d’un point de vue statistique. Le deuxième point

tient à la solution envisagée après détection de la multicolinéarité. Il y en a plusieurs : (1) le

chercheur ne veut pas revoir son modèle et va choisir une autre méthode d’analyse plus

robuste face à ce type de problème à l’instar de l’approche par les moindres carrés partiels

(PLS ; e.g. Jagpal, 1982) ; (2) il supprime une des variables corrélées, diminuant ainsi la

multicolinéarité mais par là même la qualité de son modèle ; (3) il « fusionne » les variables

corrélées dans un même concept latent s’il y a trouve une justification théorique ; (4) il tente

de comprendre la relation entre les variables corrélées et teste divers modèles pour arriver à

une solution satisfaisante théoriquement et statistiquement. Ainsi, il construit des relations de

médiations entre les variables. Ces choix sont à la discrétion du chercheur et dépend encore

une fois de sa connaissance des alternatives et de ce qu’il perçoit comme étant pertinent.

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Troisièmement, des effets médiateurs et/ou modérateurs peuvent apparaître au moment de

l’analyse. Les travaux de Baron et Kenny (1986) ont permis de prendre conscience de

l’importance de ces deux types de variables et ont servi de base à un grand nombre de

recherches. Les auteurs précisent que si le modérateur spécifie quand certains effets vont

apparaître, les médiateurs expliquent comment et pourquoi ces effets apparaissent. Ces

variables apportent donc un éclairage sur les relations du modèle et ne pas les prendre en

compte peut conduire à ignorer une relation forte entre deux variables. Dès lors, on peut

accepter ici la flexibilité de la démarche quant au positionnement épistémologique. Le

positiviste retournera à la littérature pour décider quelles variables seront élues pour émettre

les hypothèses de modération ; la démarche opposée consistant à procéder par tâtonnement à

partir des variables disponibles pour trouver un éventuel modérateur. Dans les deux cas il

s’agit d’une tâche sans fin. En effet, il est toujours possible de se mettre à un niveau de recul

plus élevé pour se poser la question de l’existence d’un nouveau médiateur ou modérateur.

C’est ce que l’on appelle les médiations modérées et les modérations médiatisées (e.g. Wu et

Zumbo, 2008). Les médiations modérées représentent le cas de l’apparition d’une médiation

conditionnée par les valeurs d’une autre variable et les modérations médiatisées représentent

le cas où l’effet du produit de la variable indépendante et du modérateur (X*Mo)1 sur la

variable expliquée peut être médiatisé par une quatrième variable (Me) de telle façon que

X*MoMeY. C’est une construction sans fin, à un niveau +1, on parlera de modération

médiatisée modérée ou de médiation modérée médiatisée et ainsi de suite.

Dans les trois cas (indices de modifications, multicolinéarité, médiateurs/modérateurs), le

chercheur est tout à fait libre de construire son modèle sur une base inductive, en se fondant

sur son intuition.

1 Dans le cas d’un modérateur quantitatif, l’effet modérateur est révélé par l’effet significatif du

produit de la variable explicative (X) et du modérateur (Mo) sur la variable expliquée (Y) tel que

X*MoY.

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2. Pour une analyse qualitative des données quantitatives

La section précédente suggère que l’objectivité qui a été revendiquée par l’approche

quantitative n’apparaît être qu’une illusion (Berger et Berry, 1988). Les différentes procédures

qui paraissent garantir cette objectivité sont dès lors de l’ordre du rituel (Cohen, 1994) et

peuvent être considérés à ce titre comme les « outils d’une religion des statistiques »

(Salsburg, 1985). Parmi d’autres rituels communautaires, la maîtrise de l’outil statistique

permet la socialisation des nouveaux chercheurs – les doctorants – qui peuvent être amenés à

choisir un positionnement épistémologique sur cette même base sociale (Trocchia et

Berkowitz, 1999). Ces stratégies de socialisation perdurent tout au long de la carrière du

chercheur qui, pour publier et promouvoir ses travaux, peut modifier ses choix conceptuels et

méthodologiques en fonction de ce qu’il pense être acceptable par la communauté (Bergadàa

et Nyeck, 1992 ; Peter et Olson, 1983). De fait, l’ « affrontement » des communautés de

chercheurs sur la base du statut scientifique de leur approche, prend les allures d’un drame

social (Sherry, 1991). Le courant de la Consumer Culture Theory (CCT, Arnould et

Thompson, 2005), qui amorce peut-être un changement de paradigme (Arnould, 2006) est

fondé sur un positionnement épistémologique qui affirme être ouvert aux méthodologies

quantitatives (Arnould et Thompson, 2005 : 870). Pourtant, les auteurs eux-mêmes ne peuvent

que constater que la plus notable des fausses idées concernant la CCT est que ce courant de

recherche est défini par l’utilisation des méthodes qualitatives (Arnould et Thompson, 2007 :

4). Toutefois, cette apparente ouverture ne semble qu’un vœu pieux et aucun papier issu de ce

courant ne se focalise sur la possible utilisation des méthodes quantitatives dans une

perspective interprétative. Pour certains auteurs, le courant interprétatif est fondé sur des

méthodes qualitatives (Tadajewski, 2006), en position de défiance vis-à-vis du paradigme

« dominant », et a tendance à exclure plus qu’il n’inclut (Foxall, 2000). Pourtant, abandonner

les analyses quantitatives sur la base d’une position puritaine (Foxall, 2000) liée à une

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confusion entre méthode et posture épistémologique semble infructueux. Au contraire,

l’analyse quantitative, peut, à l’instar de bien d’autres méthodologies interprétatives amener

un éclairage particulier sur un phénomène de consommation.

Quelles sont alors les solutions pour sortir de cette situation qui paraît problématique tant au

niveau épistémologique, méthodologique que social ? Nous avons vu dans la première

section que le plan épistémologique n’était pas un problème en soi et qu’il n’y a pas de lien

nécessaire de filiation entre niveaux épistémologique et méthodologique. En revanche, s’il n’y

a pas de lien nécessaire, il faut admettre que les techniques de modélisations les plus utilisées

(e.g. les équations structurelles fondées sur l’analyse des structures de covariance) sont

fondamentalement ancrées dans le positivisme. Ceci se retrouve au niveau logiciel (e.g.

LISREL) avec des outils qui sont structurés pour la démarche hypothético-déductive.

Certaines méthodes paraissent toutefois ouvrir la voie à des démarches plus inductives.

2.1 Modélisation structurelle exploratoire (ESEM) et réseaux bayésiens

Lors de la construction d’échelles de mesure, la structure factorielle est mesurée à l’aide d’une

analyse factorielle exploratoire puis confirmée par une analyse confirmatoire. L’ESEM

(Exploratory Structural Equation Modelling) est une méthode hybride utilisant des aspects de

l’analyse exploratoire et de l’analyse factorielle confirmatoire. En permettant un ajustement

des axes de manière à maximiser les corrélations avec les items, on permet à l’outil de

proposer une structure. Ainsi que le rappellent Asparouhov et Muthén (2009) la modélisation

est habituellement utilisée pour tester une théorie qui est construite sur la base de

considérations non liées aux données. Au contraire l’ESEM permet une alternative en

permettant un ajustement de la théorie. De manière encore plus évidence les réseaux

bayésiens se prêtent mieux à une perspective interprétative. En effet, sous la forme de

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« graphes orientés acycliques » ils permettent d’évaluer les relations entre les différentes

variables impliquées par la modélisation sur la base de probabilités conditionnelles. Le

chercheur a ainsi, pour caricaturer, une représentation graphique de différents modèles

alternatifs et peut choisir celui qui lui correspond le mieux ou, dans une approche plus

constructiviste (Holt, 1991) interpréter tous les modèles alternatifs. Comme le rappellent

Naïm & al. (2008) la connaissance contenue dans le réseau est transformée en fonction de la

vraisemblance de l’observation des exemples étudiés selon la connaissance initiale (p. 189).

En d’autres termes, l’utilisation des réseaux bayésiens est directement liée à la volonté de

mettre à jour la connaissance de manière incrémentale afin de faire évoluer les modèles.

Ces méthodes, qui laissent plus de place à l’interprétation des modèles et des mesures, sont

elles cependant capables de résoudre le « drame social » qui se joue entre tenants des

approches quantitative et qualitative ? C’est sûrement un premier pas mais ce qui a été dit plus

haut suggère que cela n’est pas seulement une question de technique statistique. Ce qui se

joue c’est aussi la remise en cause d’une hiérarchie sous-jacente entre qualitatif et quantitatif

dans laquelle le premier a besoin du second pour accéder au rang de vérité scientifique. Ainsi,

il semble que pour aller au-delà de ce clivage, et de cette impasse dans laquelle chacun des

protagonistes cherche à construire la valeur scientifique de son discours il faille trouver des

solutions plus intégrées à l’image de ce que proposent les méthodes mixtes.

2.2 Les méthodes mixtes

Beaucoup de chercheurs ont intégré la thèse de l’incommensurabilité qui sous-entend que les

paradigmes et les méthodologies ne peuvent et ne doivent pas être mélangés (Davies et

Fitchett, 2005). Certains auteurs (e.g. Hammond, 2005 ; Hohenthal, 2006 ; Johnson et

Onwuegbuzie, 2004) proposent alors une approche plus « pragmatique » pour améliorer la

Page 16: Pour une approche interprétative de la modélisation du

15

recherche. Dans cette perspective, le pragmatisme repose sur le fait de parvenir à utiliser et

apprécier le qualitatif et le quantitatif dans une même recherche, d’où le terme de méthode

mixte. Cette méthodologie se définit pour Johnson et Onwuegbuzie (2004) comme « la classe

de recherche où le chercheur mixe ou combine les techniques de recherches, méthodes,

approches, concepts ou langage dans une unique étude » ; le point fondamental dans cette

approche est la question de recherche, « les méthodes de recherche doivent suivre les

questions de recherche d’une manière qui offre la meilleure chance d’obtenir des réponses

utiles » (Johnson et Onwuegbuzie, 2004). Par une meilleure compréhension des forces et des

faiblesses de chacune des deux méthodologies, un chercheur « pragmatique » pourra parvenir

à mieux répondre à sa question de recherche en combinant les stratégies à sa disposition, au

lieu de faire un choix mono-méthode contraignant ses données et sa réflexion. Ainsi

l’approche mixte peut amener à faire du quantitatif dans une perspective plus interprétative

qui peut en outre être envisagé d’une manière exploratoire.

Conclusion

Le modèle est loin d’être un outil objectif, à l’instar de la photographie (e.g. Dion et Ladwein,

2005), il ne restitue pas la réalité, il est sélectif et incomplet car le chercheur est amené à faire

un certain nombre de choix : choix du nombre de concepts à mettre en relation, choix du

nombre d’items (et de leur type de relation avec la variable latente), relations entre les

concepts, etc. De même, certains de ces choix ou décisions sont influencés par la culture du

chercheur : détection et solutions proposées face à une éventuelle multicolinéarité face à des

modifications proposées par le logiciel, face à une relation anormalement faible qui présage

peut-être l’existence de médiations et de modérations.

Page 17: Pour une approche interprétative de la modélisation du

16

Il importe donc de repenser la pratique des statistiques en dehors du traditionnel « modèle

canonique (…) hypothético-déductif empiriquement validé sur un échantillon représentatif »

(Martinet, 1990). Dans ce système de pratiques – fortement ritualisé – il existe une claire

hiérarchie entre les approches quantitatives et qualitatives. Ces dernières jouent un rôle

second, dit « exploratoire », et servent à établir une première approche approximative du

cadre d’étude. L’analyse statistique vient ensuite « confirmer » ces ébauches, entérinant par-là

l’idée du langage mathématique comme langage final de vérité, comme langage véritable de

la recherche. Les critiques adressées à ce modèle de la recherche depuis notamment le

« tournant interprétatif » énoncé par Sherry (1991) ont donné naissance à de multiples

perspectives nouvelles fédérées sous l’étendard de la CCT (Arnould et Thompson, 2005).

Mais plutôt que d’ouvrir la voie à une déconstruction des méthodes et pratiques de recherche

traditionnelles, la CCT est peut-être en train de créer pour tous les chercheurs déviants du

modèle canonique un ghetto théorique, une niche enclavée sur le marché des théories,

renforçant par-là l’impression d’incommensurabilité (Kuhn, 1962) et d’incompatibilité.

Hors, ce schisme (Sherry, 1991 ; Arnould, 2006) n’a rien d’inéluctable. Il nous semble qu’il

soit possible de l’éviter afin de faire des recherches en marketing et en consommation un

véritable champ de recherche pluridisciplinaire qui au-delà de ses multiples angles de vue, se

donne la possibilité d’intégrer, de réfléchir et de problématiser chaque perspective qui la

compose (MacInnis et Folkes, 2010). La condition nécessaire à ce rapprochement semble être

l’abolition de la hiérarchie et routine du qualitatif exploratoire / quantitatif confirmatoire. De

même qu’il n’est pas toujours absolument nécessaire de mener une étude quantitative

confirmatoire pour venir analyser et confirmer un matériel issu de recherches qualitatives, on

peut également penser à développer la pratique statistique comme un outil de recherche

exploratoire plutôt que comme une procédure finale venant sanctionner la pertinence d’un

Page 18: Pour une approche interprétative de la modélisation du

17

modèle élaboré a priori. Les différentes approches qualitatives et quantitatives seraient ainsi à

considérer et à évaluer par rapport à leur concordance et adaptation à des questions de

recherche. Les méthodes mixtes, quoique pragmatiques, permettent une première réflexion sur

les rapports entre qualitatif et quantitatif et nous permettent d’entrevoir la possibilité d’utiliser

les modèles statistiques comme matériau de recherche au même titre qu’une photographie ou

une série d’interviews sans toutefois tomber dans un relativisme radical, et peuvent ainsi nous

aider à penser à la ré-articulation de nos designs de recherche.

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