la sÉmantique interprÉtative

Upload: jurbina1844

Post on 04-Jun-2018

225 views

Category:

Documents


0 download

TRANSCRIPT

  • 8/13/2019 LA SMANTIQUE INTERPRTATIVE

    1/25

  • 8/13/2019 LA SMANTIQUE INTERPRTATIVE

    2/25

  • 8/13/2019 LA SMANTIQUE INTERPRTATIVE

    3/25

    3

    dans un rseau de relations : par exemple, il attribue un tre humain le procs rveroudormir. Pour Duvignau (2002, p. 73), un verbe est dfini deux fois : par les proprits duprocs qui lui sont intrinsques : rugir signifie crier, et par les proprits actancielles, qui luiassocient un, deux ou trois actants ou arguments : rugir se dit du lion. Le double rseaudfinitionnel confre une porte double. Par sa relation intrinsque, le verbe est reli un

    autre verbe, et par sa relation extrinsque, le verbe est reli un nom. Si la mtaphorenominale repose sur le rapprochement de deux entits de deux catgories diffrentes, lamtaphore verbale, quant elle, effectue un rapprochement entre deux concepts daction(Duvignau 2005, p. 40), dont un concept daction est utilis pour dcrire une action relevantdune zone smantique diffrente.

    Dans la perspective de la smantique interprtative, Rastier (1987) parle de connexions,mtaphoriques et symboliques, rendues possibles par lexistence de deux smmes[3] (ouplus) appartenant deux domaines diffrents, entre lesquels est opr un rapprochement ouune connexion. La connexion mtaphorique, qui correspond ce qui a t appel lamtaphore in praesentia (Rastier 2001a, p. 160-161 ; 2001a, p. 114), doit avoir deuxsmmes exprims dans le contexte, dont les smes gnriques sont incompatibles quant un des traits cest--dire quils ne proviennent pas de la mme catgorie et dont les

    smes spcifiques ont au moins un trait identique en commun. Ce dernier critre permetdidentifier ou de crer une ressemblance. La connexion symbolique correspond lamtaphore in absentia, qui implique une identification par conjecture sur, entre autres, lediscours et le genre du texte (Rastier 2001a, p. 161 ; 2001b, p. 115). En dautres termes, lesmme comparant est trouver dans le texte et le smme compar est virtuel ou construire partir du contexte. La connexion et linterprtation se font partir dindicescontextuels. Il doit toujours y avoir incompatibilit entre smes gnriques et ressemblanceentre smes spcifiques, mme si le smme compar nest que virtuel.

    Lide que la mtaphore implique une ressemblance entre le mtaphorisant et lemtaphoris est courante. Black (1993) discute la question de savoir si la mtaphore cre,ou est cre, par la ressemblance. En fin de compte, il maintient que cest la mtaphore qui

    cre la ressemblance entre les deux termes, plutt que de formuler une ressemblancepralable entre mtaphorisant et mtaphoris (Black, 1993, p. 36-38). Dans lanalyse deRastier (1987), une projection mtaphorique entre domaines semble exiger une certaineressemblance pralable. Lidentification entre smes spcifiques implique une ressemblanceentre les deux comparants, ressemblance qui, selon notre avis, peut tre une ressemblanceconue aussi bien que perue.Le sme spcifique ou le trait commun permettant lanalysede la mtaphore en tant que telle doit pouvoir tre affrent[4]. Dans la linguistique cognitive,il est considr que la projection mtaphorique requiert le maintien de certains traits dudomaine source. Svanlund (2001, p. 21 et suiv.) rappelle, cependant, que la diffrence estgalement essentielle. Il doit y avoir une distance entre les domaines en jeu.

    2.2 La mtaphore dite conceptuelle

    La linguistique cognitive, survenue dans les annes 80, a introduit une nouvelle perspectivesur la mtaphore, avec la parution du livre de Lakoff & Johnson (1980), qui la considrentcomme un mcanisme cognitif, fondamental dans notre comprhension du monde. Enlinguistique cognitive, la mtaphore est une projection slective des traits dun domaineconceptuel sur un autre(voir par exemple Svanlund 2001, p. 10-11 et 14 -15 ; Ekberg 1993),dfinition qui sera adopte dans ce travail.

    partir dun domaine source, par exemple LA GUERRE[5], on transpose ou transfrecertains traits un domaine cible, par exemple LARGUMENTATION (Lakoff & Johnson 1980, p.4). La structure cognitive sous-jacente est appele une mtaphore conceptuelle, enloccurrence LARGUMENTATION EST LA GUERRE. Cette mtaphore conceptuelle sous-tend desexpressions linguistiques comme Ils ont attaqu sa position indfendable Elle a recul sur

    tous ces points. La mtaphore permet de comprendre quelque chose (et den fairelexprience) par quelque chose dautre avec une structuration partielle (Lakoff et Johnson

  • 8/13/2019 LA SMANTIQUE INTERPRTATIVE

    4/25

    4

    1980, p. 15 ; notre traduction). En faisant cette projection entre domaines, nous structuronsnotre exprience du domaine cible, et, ce qui est plus important, la mtaphore peutinfluencer notre faon dagir et nos actions dans une situation particulire[6].

    On note que la dfinition et la description discutes ci-dessus impliquent unedirectionnalit, du domaine source vers le domaine cible. Dans la dfinition de Lundmark

    (2005, p. 12), une mtaphore est une projection conceptuelle, qui est un ensemble decorrespondances entre lments des deux domaines, o la source est une notion plusconcrte et la cible est plus abstraite [7]. Les termes source et cible indiquenttoujours cette mme directionnalit. De plus, Lundmark (2005) reprend lide que lesprojections mtaphoriques se ralisent souvent entre un domaine concret et un domaineabstrait, ce qui est cependant contest par Grady (1997). Dans nos donnes, il est douteuxque les domaines cibles soient considrer comme des domaines plus abstraits que celuide la guerre. Toutefois, la guerre sera ici utilise comme cadre structurant.

    Lakoff & Johnson (1980), Lakoff (1993) et dautres ont trouv une abondance demtaphores conceptuelles, les unes gnriques, telle MORE IS UPou LONG-TERM PURPOSEFUL

    ACTIVITIES ARE JOURNEYS; les autres plus spcifiques, telle LOVE IS A JOURNEY. On remarqueque la plupart des tudes ont t effectues sur langlais, o lon trouve des expressions

    comme Look how far weve come Were at a crossroad Well go our separate ways(Lakoff & Johnson 1980, p. 44). Lakoff (1993, p. 224-225) soutient que les mtaphores lesplus fondamentales sont plus rpandues, tandis que les mtaphores plus spcifiques sontculturellement dfinies. Il est intressant de noter que les mtaphores dans la prose

    journalistique dmontrent une lgre variation entre les cultures linguistiques. Boers &Demecheleer (1997, p. 127) trouvent que dans le discours conomique dun corpus

    journalistique, langlais, le nerlandais et le franais ont des taux diffrents de mtaphoresde guerre, de sant et de trajet.

    La dfinition cognitiviste de la mtaphore est cense couvrir toutes les mtaphores, enmettant laccent sur le fait que la mtaphore est un phnomne conceptuel. Dans ce sens,les mtaphores fonctionnent toutes de la mme manire, quelles soient conventionnelles ou

    innovatrices. Comparons aussi Dtrie (2001, p. 186), selon laquelle les mtaphores vives etconventionnelles sont issues dun processus identique, et Fauconnier (1997, p. 19), pour quila comprhension dune mtaphore se fait de la mme manire, quelle soit vive ouconventionnelle. Les mtaphores que nous appelons conventionnalises sont entre autresappeles conceptuelles ou quotidiennes . Ce dernier terme souligne leur caractreordinaire et omniprsent. Le terme conceptuel est cependant redondant : toutemtaphore est conceptuelle, quelle soit conventionnalise ou non. De plus, en linguistiquecognitive, le terme mtaphore conceptuelle dnote souvent la fois le ct conceptuelde la mtaphore et son expression linguistique.

    Les mtaphores conventionnalises se distinguent des mtaphores vives de deuxfaons. Premirement, elles ne sont plus perues comme des mtaphores, tout en tantcenses jouer un rle dans notre cognition. Svanlund (2001, p. 98 et suiv.) les caractrise

    comme des mtaphores qui ont perdu leur effet de mtaphore, et qui ne sont plus peruescomme telles. Les mtaphores conventionnalises sont entres dans le langage quotidienau point dtre lexicalises. Deuximement, le sens des mtaphores trs conventionnalisesna plus besoin dtre calcul, seulement repris du lexique mental. Lide que la mtaphoreconventionnalise peut vhiculer des effets de sens particuliers nest pourtant pas nouvelle.Riffaterre, parlant du clich, maintient que le clich reprsente une expressivit forte etstable (1971, p. 162, les italiques sont de lauteur). Le clich fonctionne en bloc et son sensest orient (Riffaterre 1971, p. 170), ce qui fait que son interprtation est dirige. Cecinempche pas quil soit une structure de style (Riffaterre 1971, p. 162). La thorie de lamtaphore conceptuelle considre les mtaphores conventionnelles comme desmtaphores, dans la mesure o elles conservent toujours leurs liens au domaine source.

    Ainsi, laccent est mis sur laspect diachronique mais aussi sur leur capacit dtreressuscites.

  • 8/13/2019 LA SMANTIQUE INTERPRTATIVE

    5/25

    5

    Selon la thorie de la mtaphore conceptuelle, la mtaphore prsente une dualit autreque le rapprochement de deux concepts diffrents. Elle a un ct conceptuel (un fait de lapense) et un ct linguistique. Ainsi, lexpression linguistique doit faire faire au lecteur ou linterlocuteur une projection slective entre domaines qui aboutit une intgration desdomaines en question, ayant pour rsultat une mtaphore. Cela est sans doute vrai pour les

    mtaphores nouvelles, et peut-tre pour une partie des mtaphores conventionnalises.Cependant, la plupart des usages des mtaphores conventionnalises est sans doutecompris directement et mme littralement, le sens tant enracin dans le systmeconceptuel commun (Steen 1994, p. 16). Il est possible, en ce qui concerne les mtaphoresconventionnalises, dargumenter pour lexistence dune double activation, du domainesource et du domaine cible (voir par exemple Svanlund 2001, p. 30 et suiv. pour unediscussion). Encore une fois, cette ide nest pas nouvelle : Le Guern (1973, p. 88) souligneque ce nest que lorsque le lien tymologique est rompu que la mtaphore conventionnalisea perdu toute son image. Dans les autres cas, cest--dire le lien tymologique restantquelque peu vivant, limage est attnue mais elle reste sensible (Le Guern 1973,p. 88) ;il est possible de raviver la mtaphore en laccompagnant dune mtaphore plus neuve (Le Guern 1973, p. 88). Lorsque la mtaphore est conventionnelle au point dtre reprise

    comme un tout du lexique mental, nous parlons dun lien prtabli entre le domaine sourceet le domaine cible, cest--dire que le fait de parler dune situation cible en termes dudomaine source ne pose aucune problme de comprhension, cest mme devenu la faonde parler de quelque chose. Le lien prtabli entre le domaine source et le domaine ciblepeut tre raviv, titre dexemple, par le filage de la mtaphore.

    La mtaphore, et peut-tre surtout la mtaphore dite conceptuelle, suscite la question dela polysmie. La polysmie est dfinie dans le TLFi comme la [p]roprit d'un signifiant derenvoyer plusieurs signifis prsentant des traits smantiques communs . Dans le campcognitiviste, Lakoff (1987, p. 416) dfinit un mot polysmique comme un item lexical avecune famille de sens lis[8] . Tous les sens dun item lexical sont lis de maniresdiffrentes, dont une (mais non la seule) possibilit est un lien mtaphorique. Selon Lakoff

    (1987), le sens, tout comme la cognition humaine en gnral, fonctionne selon le principe duprototype. Tout comme un membre dune catgorie peut tre plus prototypique que lesautres, un des sens dun mot peut tre plus prototypique que les autres sens. En dautrestermes, un des sens par exemple de attaquer serait plus reprsentatif de la catgorie

    ATTAQUER(Lakoff 1987, p. 417), que les autres sens. Comparons Larme attaque la villeLopposition attaque la droite La maladie attaque le foie. Le premier exemple semble leplus typique, alors que le troisime est le moins typique. Nos exemples montrent que lapolysmie est un phnomne graduel, avec des emplois qui se trouvent des distancesingales du prototype. Lemploi conventionnel dune lexie[9] dune certaine gnralit, parexemple un verbe comme attaquer dans Lopposition attaque la droite, est donc un cas depolysmie ; or, selon lanalyse prototypique, cest galement un cas de lien mtaphoriqueconventionnalis.

    Nous retrouvons une approche un peu diffrente dans Fauconnier & Turner (2003). Pources derniers, la polysmie drive du pouvoir de la potentialit du sens dune forme delangage (Fauconnier & Turner 2003, p. 79). Elle est lie lintgration conceptuelle (voir3.3), une opration mentale de cration de sens qui rsulterait frquemment en ce que nousappelons quotidiennement la polysmie. Ainsi, une forme de langage nous incite crer unsens. Dans nos exemples ci-dessus, par exemple, attaquer cre des sens lgrementdiffrents selon le contexte o le verbe sinscrit. Dans Larme attaque la ville le verbe a lesens prendre armes contre . Dans Lopposition attaque la droite, le sens du verbe estplutt critiquer svrement , tandis que dans La maladie attaque le foie, le sens est nuire , dtruire .

    La polysmie peut donc fonctionner comme une extension de sens partir du sens

    prototypique (cf. aussi Lundmark 2005, p. 66), ou bien elle est le rsultat dune intgrationconceptuelle qui, partir dune seule et mme lexie, incite la cration dun sens diffrent

  • 8/13/2019 LA SMANTIQUE INTERPRTATIVE

    6/25

    6

    selon le contexte. Dans notre analyse, le sens guerrier nest pas considr comme le senspremier ou typique mais nous nous intresserons au lien mtaphorique conventionnel aussibien que non conventionnel dans les lexies de guerre issues de nos donnes.

    Lobjectif de Lakoff & Johnson (1980), et de plusieurs chercheurs qui les ont suivis, a tdexaminer la systmaticit des mtaphores, la directionnalit (par exemple du concret

    labstrait) et le fonctionnement des systmes mtaphoriques. Leur position la pluscontroverse tait peut-tre celle qui consiste considrer les mtaphoresconventionnalises comme des mtaphores. Or, lide de lubiquit de la mtaphore nestpas nouvelle. Dumarsais (1730/1988, p. 63) a constat, ds le 18mesicle, que les faonsde parler sans figures seraient loin des parlers ordinaires des hommes.

    2.3 Lisotopie, le thme et la mtaphore file

    La notion disotopie a t dveloppe par Rastier (voir 1987, p. 87 et suiv.) qui la dfinitcomme une rcurrence dun sme (Rastier 1987, p. 94 et 276). Cette rcurrence doitstendre sur au moins deux smmes, mais ltendue peut tre un paragraphe, voire untexte entier (Rastier 1987, p. 110 et 129). Lisotopie est appele minimale si elle stenduniquement sur deux smmes (Rastier 1987, p. 129). Le smme est le signifi dunmorphme. Dans de rares cas, la rcurrence stend sur deux morphmes du mme mot,comme dans chiquito, o les morphmes chiqu- et -it-contient le sme /petitesse/ (Rastier1987, p. 129). Nous considrerons quant nous comme une isotopie minimale deux lexiesprovenant du mme domaine. La notion qui sera surtout retenue dans lanalyse textuelle estcelle disotopie gnrique. Elle correspond une rcurrence de deux ou plusieurs smesgnriques. travers lisotopie gnrique est induite limpression rfrentielle , cest--dire une impression de sens, dont dpend (en partie au moins) linterprtation (Rastier 1987,p. 177), et qui correspond ce qui est appel, dans la critique littraire, le sujet dun texte, oubien dans la thorie de la Gestalt, le fond dun texte (Rastier 1989, p. 58).

    Le thme est galement une notion emprunte Rastier (2001a, p. 191), qui le dfinitcomme une unit de contenu , en opposition une unit de signifiant. Le thme, bien que

    souvent dnot par un lexme, nest pas un signe, mais une construction (Rastier 2001a,p. 191), et il relve donc du ct notionnel. Le thme qui nous intresse est le thmegnrique, qui est dfini comme une rcurrence dun ou plusieurs smes gnriques (Rastier 2001a, p. 302). Cette dfinition est identique celle de lisotopie gnrique, mais la diffrence de cette dernire, le thme, si nous avons bien compris, est construit par larcurrence des isotopies elles-mmes.Le thme doit aussi tre rcurrent au moins une foisdans un texte. Dans une acception gnrale, le thme est parfois appel le sujet duntexte ; on dira que le sujet est lisotopie gnrique dominante du texte (Rastier 2001a,p. 197). Dans notre analyse textuelle, nous essayerons didentifier le thme gnrique desarticles.

    Il est bien connu quune mtaphore peut tre tendue ou file. Selon Gra (2001, p. 238),la mtaphore file est classiquement dfinie comme une mtaphore qui stend sur unensemble plus ou moins grand de mots . Von Malmborg (2004, p. 124) accorde lamtaphore file minimale deux lexies, et appelle une mtaphore file sur trois termes ou plusune mtaphore file complexe . Aucun des ouvrages consults ne mentionne de limitemaximale la mtaphore file, qui peut rester inscrite au sein dun nonc ou stendre surplusieurs, couvrant parfois plusieurs pages dune uvre. tant donn limportance ducontexte, il nest pas possible, ni trs intressant, de donner une limite suprieure maximale la mtaphore file. Gra (2001) cite un exemple tir de Cline, o la mtaphore est filesur plusieurs pages et o le sme rcurrent de /chaleur/, sil ne semble pas se trouver surchaque page, revient cependant suffisamment souvent pour pouvoir tre retenu commeinduisant une isotopie et donc crateur dune mtaphore file. La mtaphore file est dfiniedans le TLFi comme une srie structure de mtaphores qui exploitent, en nombre plus ou

    moins lev, des lments d'un mme champ smantique . La dfinition est succincte,mais doit laisser comprendre quau moins les termes mtaphorisants proviennent dun mme

  • 8/13/2019 LA SMANTIQUE INTERPRTATIVE

    7/25

    7

    domaine. ce domaine est li un ou plusieurs autres. Comparons ce propos la descriptionde Rastier, qui propose que ce nest pas unemtaphore qui est file pour constituer deuxisotopies, mais un nombre indfini de connexions mtaphoriques (dont le contenu nest pasncessairement identique) qui sont tablies entre des smmes relevant de plusieursisotopies (1987, p. 177). Il est donc possible que plusieurs domaines soient impliqus dans

    une mtaphore file. En exploitant le mme domaine source, la mtaphore peut impliquerdes domaines cibles diffrents.Inspire par ces dfinitions, nous retiendrons la suivante dans notre analyse : Une

    mtaphore file est une mtaphore portant sur au moins deux lexies, se rfrant la mmesituation et tendue sur un ou plusieurs noncs.

    Le fait quune isotopie ne constitue pas toujours une mtaphore file, mais quunemtaphore file doive ncessairement relever dune isotopie mrite une clarification. Danslexemple (1), une isotopie de guerre est constitue par les lexies en gras, sans quil sagissedune mtaphore :

    (1) Aprs avoir conquisplus du cinquime du territoirezarois, les rebellesde Laurent-DsirKabila se sont rendus matres, samedi 15 mars, des dfensestenues par les Forces armes

    zaroises la priphrie est de Kisangani. Selon des diplomates et des reprsentantsd'organisations humanitaires, l'aroport du chef-lieu de la province du Haut-Zare et troisimeville du pays, a t pris par les rebellesau cours de la matine. (Le Monde, 16/3/97 POLE)

    Lisotopie de guerre identifie est lisotopie gnrique dominante de ce paragraphe. Ellenest pas connecte une autre isotopie ou dautres lexies ; il nest donc pas questiondune mtaphore et il faut faire une interprtation concrte de cet exemple. Par contre, danslexemple (2), les lexies en gras proviennent dune isotopie de guerre, qui constitue en mmetemps une mtaphore file :

    (2) Quand il sattaque La Dfense de linfini, Giverny, en 1923, Aragon ambitionne dcrireune sorte de roman des romans en six tomes, avec des centaines de personnages. Mais,trs vite, ce travail est violemment critiqu par Breton et certains autres surralistes, qui y voientlmanation de tout ce quils combattent et entendent dynamiter : une littrature rputebourgeoise et conventionnelle. (L'Express,1/5/97 CULT)

    Lisotopie de guerre est connecte une isotopie /littrature/ qui est lisotopie dominante ;cette connexion entrane la constitution dune mtaphore. La mtaphore file et lisotopiesont importantes pour la notion de contenu imag[10] (notre traduction du mot sudois bildlighet de Svanlund 2001). Leffet de la mtaphore innovante nous fait voquer sondomaine source, avec plus ou moins de force. Lexemple (3) insiste sur la mtaphoremilitaire dans un contexte politique :

    (3) LEurope est une torpillequi aurait d dfoncer la coque du navire politique franais etexpdier par le fondce vieil ordre (L'Express, 1/5/97 POLI)

    La mtaphore conventionnalise ne nous rappelle son domaine source qu un moindredegr, voire trs peu, comme dans Une guerre des prix, devenue strotype. Svanlund(2001, p. 99) appelle ce degr dactivation des reprsentations du domaine source le degrde contenu imag dune expression mtaphorique. Une expression qui voque plusieursimages du domaine source a un haut degr de contenu imag, tandis quune expression quivoque peu dimages du domaine source a un moindre degr de contenu imag. Unemtaphore innovante doit avoir un plus haut degr de contenu imag quune mtaphoreconventionnelle.

    Selon Svanlund la co-activation dautres phnomnes du domaine source et la frquencede cette activation peuvent donner un indice du degr de contenu imag. Une tude

    quantitative du contexte indique les lments linguistiques qui sont, de faonconventionnelle, prsents dans les emplois respectivement concrets et mtaphoriques. De

  • 8/13/2019 LA SMANTIQUE INTERPRTATIVE

    8/25

    8

    faon conventionnelle veut ici dire que dautres lments smantiques du domaine sourcesont frquemment associs lnonc ou la lexie recherche(s). Cela ne veut pas dire quetoute la gamme dimages du domaine source soit active. Une expression mtaphoriquefrquemment employe avec dautres expressions du mme domaine source aurait un plushaut degr de contenu imag, cest--dire que le domaine source serait toujours

    explicitement voqu. Si, par contre, le contexte linguistique ne contient que trs peudautres expressions du domaine source, il serait naturel de penser que la mtaphore estconventionnalise.

    Nous revenons ainsi la question de savoir si une mtaphore conventionnalise peut treranime. Le filage de plusieurs expressions conventionnalises peut ventuellement rveiller le domaine source. Dans lexemple (4), les lexies de guerre prises une unepourraient sembler trs conventionnelles. Et pourtant, dans ce contexte, la co-occurrencedes lexies, mme conventionnalises, revle les liens au domaine source et voque ledomaine GUERRE:

    (4) Si lecteurs de droite et de gauche nont pas le mme optimisme, cest quils ne prsententpas non plus la mme dtermination dans leur engagement partisan. 15% des sonds

    proches du PS souhaitent ainsi que la gauche perde ces lgislatives, parce quils considrentquelle nest pas prte, ou bien que Lionel Jospin ne leur convient pas. A droite, le souvenir deslongues annes dopposition aide mobiliser, quelques irrductibles seulement souhaitant ladfaite dAlain Jupp. Il semble donc que les lecteurs de droite, nombreux tre dus par ledbut du mandat de Jacques Chirac, sont plus effrays par un ventuel retour de la gauche quedsireux de sanctionner leur camp. Mme sils napprcient gure Jupp (voir le palmarsIfop-L'Express du 24 avril), les partisans du RPR et de lUDF ne sont pas prts, pour sendbarrasser, placer Lionel Jospin Matignon. Ni, pour linstant, en courir le risque. Avec46% et 47% de Franais qui les jugent indsirables, gauche et droite ont mme russi, en cedbut de campagne, amortir le discrdit frappant les partis de gouvernement. (L'Express,1/5/97 POLI)

    Engagement partisan, mobiliser, dfaire, camp et les autres lexies en gras dans lexemple

    (4) induisent le domaine GUERRE. Le contexte, rempli de rfrences la guerre, a pour effetdveiller le lien mtaphorique entre les domaines GUERREet POLITIQUEdans cet emploi deslexies. Tout comme Svanlund (2001), nous considrons que le contexte peut veiller ledomaine source, en loccurrence le domaine GUERRE, dans une mtaphore conventionnelle.

    2.4 Les fonctions de la mtaphore dans le texte

    La mtaphore peut naturellement avoir plusieurs fonctions ; or, comme ces fonctions oprentlogiquement sur des niveaux diffrents, elles mritent une certaine clarification. Sur unniveau fondamental, la mtaphore tablit diffrentes relations entre les rfrents mis en jeu.

    part la comparaison abrge et lanalogie traditionnelles, la mtaphore peut instaurer lapersonnification dun inanim ou dune abstraction (ex. 5), ou la concrtisation duneabstraction (ex. 6) :

    (5) Cette vnrable dame se nomme la Revue des Deux Mondes. Doyenne du genre, elletient toujours le haut du pav face ses rivales (15 000 exemplaires). Elle fit preuve,successivement, daudace, en publiant Les Fleurs du mal, du scandaleux Charles Baudelaire,dune malencontreuse prudencedans laffaire Dreyfus et dun coupable aveuglement lgarddu rgime de Salazar. (LExpress, 19/2/98 CULT)

    (6) Mon me est le miroir de lunivers, et mon corps est la bordure du miroir (Voltaire,Micromgas ; exemple cit daprs Le Guern 1973, p. 16)

    Une mtaphore peut avoir une valeur hyperbolique ou bien une valeur de litote (Le Guern1973, p. 54, 72). Les mtaphores verbales peuvent animer un agent inanim, et ainsi lever

    linanim au niveau dun agent plutt typique (cf. Dahl & Fraurud 1996, p. 62), par exempledans La rouille attaque le fer. La mtaphore peut fonctionner sur le mode danalogie daction,

  • 8/13/2019 LA SMANTIQUE INTERPRTATIVE

    9/25

    9

    par exemple dans Elle pulvrise lopposition. Ces fonctions rfrentielles de la mtaphoreaboutissent leur tour ce qui est appel ici des fonctions textuelles.

    Au niveau du texte, la mtaphore sert certains buts. Traditionnellement, les chercheursont parl des fonctions argumentatives de la mtaphore. La liste des fonctionsargumentatives est souvent limite deux ou trois, mais comme nous allons le voir, le

    nombre dpend du chercheur consult.Selon Le Guern (1973, p. 71 et suiv.), le langage a traditionnellement trois fonctions : docere, placere, movere . La fonction appele docereest de transmettre de linformation.Selon Le Guern (1973, p. 71), la mtaphore offre au langage des possibilits dconomieen fournissant la formulation synthtique des lments de signification . Placere est lafonction traditionnellement attribue la mtaphore, savoir celle dorner et de plaire, quelon sattend trouver dans la prose littraire. Cependant, tout en ornant le discours, lamtaphore peut garder une vise quelque peu utilitaire (op. cit., p. 73). Mme en ornantle discours, la mtaphore peut avoir des effets de sens argumentatifs. La troisime fonctiondu langage, movere, a pour but dmouvoir et de persuader. Selon Le Guern, cest la

    justification mme de la mtaphore de persuader par lmotion, contrairement lalogique[11], qui est utilise pour convaincre par raisonnement. La mtaphore dynamique est

    celle qui a pour fonction de persuader et dmouvoir. En passant par les sentiments et nonpar la logique, elle provoque une raction affective qui sert persuader plutt que deconvaincre, ce dernier acte utilisant justement la logique. La mtaphore conventionnelle, enrevanche, nmeut pas de la mme manire, mais entrane une interprtation similaire partous les locuteurs dune langue.

    Les trois fonctions de la mtaphore quindique Le Guern (1973) sont rduites deux dansPappas (2003, p. 41). La mtaphore peut selon lui avoir deux fonctions, soit explicative ,soit argumentative ou rhtorique (lhsitation entre les deux termes est de lauteur).La fonction explicative de Pappas correspond la fonction docerede Le Guern (1973) et lafonction argumentative galerait la fonction movere.

    Deux autres tudes rcentes reformulent les fonctions argumentatives selon les thories

    fonctionnalistes et cognitivistes. Le fait de porter un jugement est considr comme une desdeux fonctions principales chez Kerzazi-Lasri (2003, p. 106 et suiv.), qui consacre une partieau caractre valuatif de la mtaphore . Lautre fonction principale est argumentative (op.cit., p. 113). Ces deux fonctions semblent, selon notre raisonnement, faire partie de lafonction movere, dans la mesure o lvaluation est une manire dargumenter pour oucontre quelque chose. Il est vrai que Kerzazi-Lasri mentionne aussi deux fonctions,lidentification et la caractrisation, qui semblent correspondre la fonction docere de LeGuern (1973).

    Lanalyse de Koller (2003b, p. 117) prend son dpart dans lanalyse textuellefonctionnaliste de Halliday[12] (1978 ; 1994) selon lequel le langage a trois mta-fonctions :interpersonnelle, idationnelle et textuelle (interpersonal, ideational et textual function). Lapremire fonction sert ngocier des identits et des rles sociaux. La deuxime construit le

    sens rfrentiel. La troisime cre la cohsion dans un texte. Koller considre que lamtaphore conventionnelle remplit ces trois fonctions dans le texte. Dans la fonctioninterpersonnelle, elle permet dtablir des niveaux de discours, sparant le discours rapportdes interviews du discours du journaliste. Dans la fonction idationnelle, elle permet deconstruire un scnario cognitif. Dans la fonction textuelle, lenchanement de la mtaphorecontribue la cohsion du texte. Cependant, par la suite (p. 123), elle prsente les fonctionslaborer, exemplifier, tendre, gnraliser, rfuter, attnuer, intensifier et faire cho. On voitici une augmentation du nombre des fonctions de la mtaphore. Or, ces fonctions diffrentde celle de Le Guern (1973), de Pappas (2003) et Kerzazi-Lasri (2003), dans ce sensquelles sont toutes employes dans des buts argumentatifs. Koller compte donc, pour ainsidire, une seule fonction textuelle pour les mtaphores, et les autres fonctions doivent peut-

    tre tre nommes des moyens.

  • 8/13/2019 LA SMANTIQUE INTERPRTATIVE

    10/25

    10

    Les fonctions de Koller (2003b, p. 123), laborer et tendre, trouvent un cho dansLundmark (2005, p. 18), mais dans une perspective cognitive :

    [Lakoff & Turner[13] (1989)] argue that creative metaphors are dependent on the conventionalsystem, and that there are various ways in which conventionalised metaphors can be exploited.One such strategy is to extend the metaphor and include aspects that are left out in the original

    partial mapping. [] A conventional metaphor may also be elaborated [] by including specificdetails.

    La projection mtaphorique conventionnelle peut ainsi tre soit tendue, incluant un aspectdu domaine source qui nest normalement pas projet, soit labore autour des dtails quisont projets. Lundmark en donne deux exemples : Dans Hamlet, linclusion du fait de rverdans la mtaphore conventionnelle LA MORT EST SOMMEIL, est une extension, puisque cedtail ne fait pas partie de la projection conventionnelle (Lundmark 2005, p. 18). Par contre,lorsque Horace parle de lternel exil sur le radeau , cest une laboration de lamtaphore LA MORT EST UN DPART, puisque elle ajoute des dtails sur le moyen et le type dudpart, savoir le radeau et lexil (Lundmark 2005, p. 18).

    Ce qui traditionnellement a t appel les fonctions argumentatives est donc unnombre de pratiques qui ont des vises pragmatiques, comme linformation, la persuasion etlexpression des motions. Dans notre analyse, nous garderons lhyperonyme de fonction

    pragmatique pour ces vises, pour ensuite les diviser en trois fonctions prcises :descriptive, argumentative et expressive (voir 6.1).

    Enfin, citons Lakoff & Johnson (1980, p. 236), notamment leur proposition que lamtaphore est apte cacher ou souligner des aspects de la ralit, selon le but dulocuteur ou de l'auteur, ce qui selon nous revient dire quelle a une fonction argumentative.Pappas (2003, p. 178) conclut que dans la rhtorique politique, le fait de cacher ou desouligner certains aspects est effectivement une des fonctions de la mtaphore. Limageassocie la mtaphore reprsente certains aspects du concept, tout en le combinant avecun jugement de valeur. Par exemple, un mariage incestueux entre deux entreprises (voir

    aussi les exemples 1.7 et 1.8 ci-dessous) focalise sur le caractre illicite de la liaison, ce quiconfre la description un jugement ngatif. Un armistice, entre les mmes entreprises,focalise moins sur le type de liaison et davantage sur une cessation dhostilits. Au niveaudu jugement induit, la mtaphore est moins ngative. Le jugement de valeur et la vise de lamtaphore nous semblent intimement lis, ces deux procds collaborant certainement lapersuasion.

    Laptitude des mtaphores souligner ou cacher des aspects du monde ne relve pasuniquement de leur fonction argumentative, mais aussi de leur fonction structurante .Lakoff & Johnson (1980, p. 61) introduisent galement la notion de mtaphores structurantes , qui seraient formes partir de concepts labors et quipermettraient dutiliser un concept trs labor et clairement dlimit pour en structurer unautre [14]. Cette fonction structurante fonctionne selon nous sur un autre niveau que lafonction argumentative, dans la mesure o elle prcde la fonction argumentative. Lafonction structurante permet de concevoir et de concrtiser une situation abstraite ou unphnomne abstrait et complexe en termes plus directement comprhensibles, comme parexemple lorsquune situation politique complexe est structure en termes de guerre, ce quirend la comprhension de la situation plus directe, plus immdiate (voir aussi 2.3). Cetteconception de la situation peut tre argumentative, dans la mesure o elle est positive oungative. Dans ce sens, la fonction structurante reprsente le moyen smantique gnral,qui peut ensuite tre employ dans des vises pragmatiques.

    Si lon admet que la mtaphore est un trope rhtorique, elle peut en tant que tel treemploye afin dinfluencer lopinion publique (Lakoff 1991) ou les employs dune entreprise(Boers & Demecheleer 1997). Schmitt (1988, p. 122), qui tudie les mtaphores dans les

    articles conomiques, est davis que la mtaphore a pour fonction de manipuler le lecteuret de guider son avis vers une direction prcise [15]. Le statut argumentatif de la mtaphore

  • 8/13/2019 LA SMANTIQUE INTERPRTATIVE

    11/25

    11

    conventionnalise est discut brivement par von Malmborg (2004) et Kerzazi-Lasri (2003).von Malmborg (2004, p. 132), citant Le Guern (1981, p. 69-70), inclut la mtaphoreconventionnelle dans les mtaphores argumentatives. Tandis que la mtaphore dynamiquenentrane pas une unique interprtation, la mtaphore conventionnalise incite uneinterprtation sinon identique, du moins trs similaire, chez tous les locuteurs natifs dune

    langue. Il est possible que dans la prose journalistique, les mtaphores conventionnalisessoient utilises pour rendre comprhensibles, voire captivants, certains phnomnes. Lereportage conomique ou politique noffre pas doccasion dtre potique, alors le journalistepeut utiliser des strotypes permettant de guider le jugement du lecteur. Prenons deuxexemples. Dans le premier, deux partis politiques opposs se sont rapprochs :

    (7) Le RPR sest UDFis , se plaint-on Rue de Lille. LUDF sest chiraquise , se lamente-t-on Avenue Charles-Floquet. Ce mariage incestueux a, petit petit, abtardi la droite etrduit son espace politique au profit du Front national. (LExpress, 3/7/97 POLI)

    Le rapprochement est dcrit en termes de mariage incestueux et abtardi , deuxexpressions linguistiques aux connotations ngatives, qui prsentent ce rapprochement

    politique comme particulirement nfaste. Dans lexemple (8), il sagit de deux entreprisesconcurrentes qui se sont rapproches :

    (8) Les groupes rivaux Kirch et CLT-UFA ont sign un armistice et souhaitent travaillerensemble dans la tlvision page allemande. Ils visent le contrle parit de la chane page Premiere, qui compte prs de 1,5 million dabonns. (Le Monde, 25/06/97 ECON)

    La lexie rivaux laisse entendre que les entreprises sont en comptition, alors que lesyntagme verbal ont sign un armistice signale que le rapprochement est considrercomme positif pour les deux entreprises, un fait qui est soulign aussi par souhaitenttravailler ensemble . De cette manire, mme les mtaphores conventionnalises peuventtre importantes pour limpression que produit un texte.

    3 La construction du sens

    Nous abordons ici une discussion de la construction du sens en contexte, et des outilsthoriques qui seront repris dans lanalyse textuelle. Cette partie sera clectique, mais, nouslesprons, dans le sens positif du terme : il a t jug non seulement possible maisfructueux de combiner des thories sur le sens, afin davoir plusieurs outils notredisposition.

    Quelle conception faut-il donc avoir du sens ? La relation entre locuteur et interlocuteur alongtemps t dcrite comme une transmission de sens, de lun lautre, modle que Reddy(1993) appelle la mtaphore du conduit (the conduit metaphor), cest--dire lide quecommuniquer, cest faire passer des ides, comme on fait passer des objets, et que les mots

    sont des conteneurs de sens. En ralit, le sens doit tre construit par chacun des deuxinterlocuteurs partir dindices linguistiques et parfois extralinguistiques, comme la situation,les actions qui suivent un nonc, ou encore les connaissances encyclopdiques (voir aussiRastier 1987, p. 11).

    Le sens est construit en contexte, fait affirm non seulement par la smantiqueinterprtative de Rastier (1987, 2001a), mais aussi par la thorie de lintgration conceptuellede Fauconnier & Turner (2002). Ce travail sinscrit dans la mme conception du sens : celui-ci est construit, manipul et organis en contexte. Chaque item lexical est en partiedtermin par le contexte qui lentoure. Ainsi, cest le contexte qui fait natre la mtaphoreaussi[16]. De plus, la terminologie diffre videmment selon les thories du sens. Afindanalyser les mtaphores de guerre en contexte il faut avoir des outils qui y sont adapts.Ces outils ont t emprunts majoritairement la smantique interprtative (Rastier 1987 et2001a) et la smantique cognitive (Langacker 1987 ; Fauconnier & Turner 2002).

  • 8/13/2019 LA SMANTIQUE INTERPRTATIVE

    12/25

    12

    3.1 Les units de sens : le sme et le prototype

    Lunit minimale de sens diffre suivant les thories. Selon la smantique interprtative, cestle sme(Rastier 1987, et 2001a). La smantique cognitive ne propose pas dunit minimalede sens, mais parle de prototype (Lakoff & Johnson 1980, Kleiber 1990, Fauconnier &Turner 2002). Commenons par une description du sme ; ensuite suivra celle du prototype.

    Le sme est une unit smantique distinctive (voir Rastier 1987, p. 275). Il existe dansune relation (binaire) dexclusivit mutuelle, par exemple /griffes rtractiles/ dans chat,oppos chien. Rastier (1987, p. 44 sqq ; 2001, p. 302) distingue quatre types de smes :gnriques et spcifiques, inhrents et affrents. Clarifions aussi la notion de smmeet sasignification dans la smantique interprtative : le smme est le signifi du morphme. Sonsens, en contexte, est dtermin par les smes.

    Les smes gnriques et spcifiques se dfinissent relativement une classe desmmes (Rastier 1987, p. 49). Le sme gnrique marque lappartenance du smme une classe smantique, comme le sme /couvert/, qui place cuillre et fourchette dans lamme classe. Le sme spcifique de son ct distingue un smme dun ou plusieurssmmes trs voisins, appartenant la mme catgorie, par exemple /sexe fminin/ pour

    femmedans la catgorie tre humain. (La distinction entre les deux types de smes marquela fonction dun sme dans un contexte donn. Ainsi, Rastier (1987, p. 52, les italiques sontde lauteur) constate que : lopposition spcifique/gnrique est relative son ensemblede dfinition ; aucun sme nest donc par nature spcifique ou gnrique. Un sme nestpas gnrique mme si plusieurs membres dune catgorie le comprennent : tous lesmembres doivent le contenir. Le sme gnrique note une identit entre smmes voisins,tandis que le sme spcifique note une disjonction entre smmes trs voisins. Ainsi, dansle caviar et les artes (exemple, abrg, de Rastier 1987, p. 53-54), les smmes sont lispar le sme gnrique /partie de poisson/. En revanche, ils sont disjoints par les smesspcifiques /comestible/ pour caviaret /non comestible/ pour artes.

    Les smes peuvent tre inhrents ou affrents. Les traits qui sont inhrents sont codifisen langue (Rastier 1987, p. 53). Par exemple, en franais, la diffrence entre caviaret artescodifie les traits /comestible/ et /non comestible/. Le sme inhrent est hrit du type parloccurrence, si rien dans le contexte ne linhibe ou ne le virtualise ; /noir/ est inhrent danscorbeau, sauf si lon dit un corbeau blanc, nonc qui virtualise effectivement le sme /noir/.Enfin, les smes affrents sont soit propags par le contexte, soit culturellement dtermins(Rastier 1989, p. 116). Un sme affrent culturellement attribu est par exemple /faiblesse/dans femme (Rastier 1989, p. 47). Un sme affrent actualis par le contexte est le sme/non alcoolis/ dans la lexie boissondans lopposition : Boisson : 6F ; Bire : 8 F (Rastier2001a, p. 302).

    La smantique cognitive ne propose pas, notre connaissance, dunit minimale de sensqui aurait le mme statut que le sme, savoir purement smantique. En gnral, lesthories cognitivistes nadmettent pas lide de traits smantiques, fondant leur critique sur le

    point de vue que les traits ncessaires et suffisants ne seraient pas aptes dcrire parexemple les emplois mtaphoriques des mots. Ils ont critiqu aussi la smantiquecompositionnelle, savoir la pense que le sens nest que la somme totale des traitssmantiques (Albertazzi 2000, p. 4 ; Turner & Fauconnier 1995, p. 6-7). En revanche,inspirs par Rosch, entre autres, Lakoff & Johnson (1980) et Lakoff (1987) parlent du

    prototype, terme dont lemploi au sein de la linguistique cognitive est rsum par Kleiber(1990). Le terme est n dans la psychologie, dans la recherche sur la catgorisation dumonde par la cognition humaine. Le prototype selon Rosch est le meilleur exemplaire ou lemeilleur reprsentant dune catgorie (Kleiber 1990, p. 47-48). Par exemple, dans lacatgorie oiseaux, le moineau est plus typique que le pingouin. En entendant oiseau , ilest plus probable que lon pense moineau que pingouin , que ce soit parce que ce

    dernier a des ailes rduites, inhabituelles, ou quil ne vole pas, que sa forme ne ressemblepas celle des autres oiseaux, etc. En sloignant du prototype, les membres de la catgoriesont lis par des ressemblances de famille . Pour en revenir notre exemple, les oiseaux,

  • 8/13/2019 LA SMANTIQUE INTERPRTATIVE

    13/25

  • 8/13/2019 LA SMANTIQUE INTERPRTATIVE

    14/25

    14

    3.2 Domaines, cadres et schmas images

    Au sein de la smantique cognitive, il est courant de parler de domaineset de cadres. Undomaine reprsente une tendue structure de connaissances gnrales etencyclopdiques, sur le fond desquelles le sens dun mot est dfini (Langacker 1987, p.147). Le mot est prototypique ou non, en fonction de son emploi dans le domaine. On noteque, par rapport la notion de domaine de la smantique interprtative, il y a uneressemblance dans le fait que les connaissances du domaine doivent tre partages par lacommunaut linguistique. La smantique interprtative considre le domaine comme li lexprience du groupe (Rastier 1989, p. 55) ; il est socialement norm. Par exemple,//politique// ou //sport//[19] constituent des domaines dans la socit occidentale. Dans lasmantique cognitive, le domaine est employ comme un outil destin sectionner notreexprience du monde et permet aussi dexpliquer les mtaphores quotidiennes, en tant queprojections entre domaines (Grady 1997, p. 175 et suiv.). Le cadreest plus spcifique : il estdfini comme une construction mentale de connaissances schmatiques (Fauconnier &Turner 2002, p. 40). Si le domaine est SPORT[20], le cadre peut tre JOUER AU FOOT. Unelexie est typiquement associe un cadre. Une lexie qui est employe en dehors de son

    cadre prototypique, en dehors de son usage typique ou conventionnel et introduite dans unautre cadre, peut devenir une mtaphore ou une expression plus ou moins figure. Parexemple, lexpression prenons laddition est lie un cadre prcis, avec un contenuspcifique, par exemple le restaurant, la carte, le serviteur, le dner et laddition. Si nousemployons cet nonc dans un contexte de repas amical, il y a une dviance par rapport ce cadre et nous allons linterprter comme une plaisanterie, un sarcasme ou peut-tre uneinsulte, selon la situation. La collision des cadres correspond l incompatibilitsmantique de Villard (1984, p. 35) et la catgorisation indue de Kleiber (1994, p.36).

    Les schmas images, leur tour, sont des structures trs squelettiques et abstraites, quiaident structurer les domaines et les cadres (Svanlund 2001, p. 49). Ils ont t mis enplace travers linteraction de lhomme avec le monde qui lentoure, notamment en ce quiconcerne les relations spatiales entre objets (Lakoff & Johnson 1999, p. 30). Par exemple,une grande partie de nos actions implique un mouvement, allant dun point de dpart unbut. Cela a donn lieu un schma appel SOURCE-TRAJET-BUT, abrg en TRAJET(TRAJECTORY) (voir la figure 1 ci-dessous).

    Figure 1. Le schma TRAJET

    Ce schma particulier est souvent reprsent par une flche, allant de gauche droite, avecle point de dpart, le trajet ou le chemin, et le point final. Les schmas imagessont censstre lis aux cinq sens. La plupart dentre eux seraient de nature kinesthsique (Grdenfors1999). Comme exemples de schmas images proposs dans la littrature, citons Grady

  • 8/13/2019 LA SMANTIQUE INTERPRTATIVE

    15/25

    15

    (1997, p. 180) et Lakoff & Johnson (1999, p. 35) : conteneur , trajectoire , force , blocage de force , centre-priphrie , partie-tout , rempli-vide , objet , procs (notre traduction des termes anglais). Les schmas sont des abstractions,dduites de nos expriences physiques. Chaque schma fait partie de plusieurs cadresdiffrents. Le schma TRAJET est ralis lexicalement par exemple par les verbes de

    mouvement, qui peuvent mettre laccent sur, par exemple, la phase initiale[21

    ] (partir), finale(arriver) ou mdiale (traverser) : Il part de la Gare Montparnasse Jarrive Paris On peuttraverser ici. Lorsque, dans une mtaphore, des traits du domaine source sont projets sur ledomaine cible, la structure topologique du schma image est gnralement garde dans laprojection (Sweetser 1990, p. 59-60 ; Lakoff 1993, p. 215).

    3.2.1 La dynamique de force

    Dans la linguistique cognitive, la notion de dynamique de force ( force dynamics) dsigneleffet dune force (F) sur un objet ou une entit, et le blocage ventuel de cette force.Extrapole en un schma image, on visualise souvent la dynamique de force comme lappuidune force (F) agissant sur un objet (O), et la soumission (fig. 2, a) ou la rsistance (fig. 2, b)de lobjet, o les flches reprsentent la force, et la direction de la force. Lobjet est

    reprsent par un cylindre. Soit, en a), lobjet obit limpulsion de force. Soit, en b), lobjetrsiste et bloque la force. Ce schma est cens tre un des plus fondamentaux de lacognition humaine (Kvecses 2000).

    Figure 2. Le schma image FORCE(daprs Saeed 1997, p. 311)

    La distinction entre domaines, cadres et schmas est parfois vague ; nous essayeronstoutefois de la prciser dans la figure 3 ci-dessous, travers lexemple (9), o torpiller etstratgie proviennent du domaine GUERRE. Torpillersuggre un cadre plus prcis, savoirCOMBAT NAVAL. travers le verbe torpiller, le schma FORCE est impliqu, suggrant unantagoniste qui attaque un agoniste (en loccurrence le phnomne abstrait la stratgie).

    (9) Car, affirmeront les autorits sans jamais le prouver, cet appel avait en ralit, le sens convenu dun ultime feu vert aux insurgs. Linsurrection, en tout cas, torpille lastratgiedes dputs, convertis lide dune autonomie par tapes, et rsolus, pour l'obtenir, mener une action lgale. (Le Monde, 16/03/97, CULT)

  • 8/13/2019 LA SMANTIQUE INTERPRTATIVE

    16/25

    16

    La diffrence entre le domaine et le cadre est une question de degr de spcificit. Nousgardons le terme domaine pour le niveau le plus gnral, par exemple le phnomneculturel et politique de la guerre, qui couvre une multitude de manifestations etdvnements. Le cadre est plus spcifique, avec des actants et actions spcifiques,comme par exemple LE COMBAT NAVALou LE COMBAT ARIEN. Le schma image est, comme

    nous venons de le dire ci-dessus, une structure plus fondamentale, sous-jacente, qui peuttre prsente dans plusieurs cadres (voir la figure 3 ci-dessous).

    Figure 3. Relation entre domaines, cadres et schmas image, illustre par lexemple (9)

    Le schma est une abstraction des traits qui semblent rcurrents et dont notre cognition faitusage afin de structurer un vnement peru. Le schma FORCE,par exemple, est prsentdans les expressions de modalit (Sweetser 1990) et dmotions (Kvecses 2000). Aussi,dans la figure 3, avons-nous mis le schma lextrieur du domaine, indiquant un degrdabstraction diffrent, alors que le cadre y est inclus. La structure du cadre prend sastructure du schma abstrait (reprsent par la flche verticale).

    Au sein de la linguistique cognitive, les opinions sur la nature des domaines, des cadres et

    des schmas images diffrent. Certains les considrent comme inns et universaux (entreautres Lakoff 1987, p. 268). Grdenfors (1999) soutient quil est probable que certainsdomaines fondamentaux sont inns, tandis que dautres seraient acquis, et dautres encoreseraient culturellement conditionns et acquis (voir aussi Lakoff 1993, p. 224-225).

    Passons maintenant la construction et au dveloppement du sens dans la perspectivede Fauconnier & Turner (2002), savoir le procd dintgration conceptuelle.

    3.3 Lintgration conceptuelle

    La thorie de lintgration conceptuelle, ou blending theory, cherche expliquer laconstruction dynamique, ou en ligne , du sens (Fauconnier & Turner 2002). Au lieu de sefonder sur les domaines, elle opre avec des espaces mentaux(Turner & Fauconnier 1995,

    p. 2). Premirement labors par Fauconnier (1994, 1997), les espaces mentaux sont desconstructions mentales temporaires et virtuelles, construites et manipules pendant le

  • 8/13/2019 LA SMANTIQUE INTERPRTATIVE

    17/25

    17

    discours (Fauconnier & Turner 2002, p. 40). Dans ces reprsentations mentales deslocuteurs, le sens se dveloppe et change.

    Ensuite, lintgration conceptuelle de Fauconnier & Turner (2002, p. 40 et suiv.) reprendles ides des espaces mentaux et des projections slectives et partielles, en les intgrantdans une thorie plus vaste qui traite de notre cognition gnrale, et les auteurs considrent

    que lintgration conceptuelle est implique non seulement dans les mtaphores ou lesconstructions langagires inventives mais galement dans le parler ordinaire, dans les rites,voire dans la science.

    Si la thorie de la mtaphore conceptuelle met laccent sur la systmaticit desmtaphores et lunidirectionnalit des projections entre domaines, lintgration conceptuellepropose une analyse plus dynamique en incluant la cration de sens en ligne , et enabandonnant lunidirectionnalit pour une double projection et des liens entre deux espacesdentre.

    La thorie de la mtaphore conceptuelle, on la vu, met en place deux domaines, sourceet cible, qui sont relis par des projections unidirectionnelles de la source la cible.Lintgration conceptuelle propose un schma de base, reproduit dans la figure 4 ci-dessous,contenant quatre espaces mentaux. Le modle ajoute ainsi deux espaces aux deux

    domaines source et cible proposs par la thorie de la mtaphore conceptuelle[22].Commenons par les deux espaces dentre, E1 et E2. Dans la thorie de lintgration

    conceptuelle, les deux espaces dentre contiennent des cadres, spcifiant des rles, desrelations et des actions spcifiques. Les lments qui se correspondent lun lautre sontdes homologues (counterparts). Entre les homologues se ralisent des projections slectives(mappings) trans-spatiales, liant rles et relations dans les deux espaces (cf fig. 4, 1Projections trans-spatiales). Suivant Fauconnier & Turner (2002, p. 46 et suiv.), lesprojections trans-spatiales entre homologues sont dnotes par des lignes pleines, tandisque les projections vers lespace gnrique et lespace intgrant sont dnotes par deslignes pointilles.

    Figure 4. Schma de base du rseau dintgration conceptuelle

    Situ en haut du schma idalis se trouve lespace gnrique. Celui-ci contient le squelettedes structures partages. partir des deux espaces dentre, la structure qui est partageest transmise vers lespace gnrique (voir fig. 4, 2 Projections vers lespace gnrique). Cet

  • 8/13/2019 LA SMANTIQUE INTERPRTATIVE

    18/25

    18

    espace gnrique prsente une structure abstraite, trs gnrale, qui contient tout ce que lesespaces dentre ont en commun, et ce dont on a besoin pour comprendre lintgrationfinale. La structure partage correspond souvent un schma image. Lespace gnriquepeut tre compar au tertium comparationis, cest--dire une qualit quelles ont en commun,et qui est requise pour que la comparaison puisse se faire. La question de savoir si ces

    ressemblances sont pralables ou construites, appartient au domaine de la philosophie(mais voir aussi la discussion sous 2.1 sur la crativit des mtaphores).Selon Gra (2001,p. 130-131), lespace gnrique est indispensable pour lintgration conceptuelle, dans lamesure o il la contraint inclure des traits partags. Or, Lundmark (2005) ne linclut pasdans ses analyses, sous prtexte que les structures partages se retrouvent de toute faondans lespace intgrant.

    Les deux espaces dentre (E1et E2) vont structurer ensemble un quatrime espace, quisera celui o se ralise lintgration conceptuelle (voir fig. 4, 3 Projections vers lespaceintgrant), appel lespace intgrant. Depuis les deux espaces dentre sont transmis desrles et des relations dont certains et certaines sont partags entre les deux espacesdentre, mais dont certains traits sont particuliers chaque espace dentre. Lacombinaison des deux espaces dentre donne lieu une structure nouvelle, particulire

    lintgration, qui est appele structure mergente, et qui se retrouve dans lespace intgrant.Prenons un exemple de Fauconnier & Turner (2002, p. 128) : le scnario de deux

    hommes dans le ring de boxe, en pleine lutte, fournit un cadre comprim pour dcrire lacomptition professionnelle de deux PDG. Nous pouvons dire que le premier PDG donne uncoup, alors que lautre lvite. Le deuxime se lance la charge, mais le premier le met KO.Le cadre BOXE fournit les rles des boxeurs, le lieu, laction et un but. Nous y trouvons,premirement, des relations trans-spatiales didentit, permettant de lier le premier boxeurau premier PDG, le deuxime boxeur au deuxime PDG et un coup un effort dun des PDGpour continuer la comptition commerciale (voir figure 5).

    Il y a des ressemblances entre les deux domaines en question : chaque ct veut gagner,on dispose de diffrents moyens pour gagner, on emploie des stratgies diffrentes. Ces

    ressemblances sont projetes partir des deux espaces dentre sur lespace gnrique.Dans notre exemple dintgration des domaines BOXEet COMMERCE(voir figure 5), lespacegnrique contient la comptition entre deux comptiteurs. Ces traits ont t induits partirdes deux espaces dentre.

    Il y a videmment des diffrences importantes entre les domaines dentre : le commerceest non-physique, ses combats se ralisent par la publicit, les ventes de marchandises, etle but est de gagner des clients. Cest pourquoi un des cadres est choisi comme le cadreorganisateur, c'est--dire le cadre qui prte sa structure lintgration. Il contient la structurede force dynamique, lintentionnalit, lchelle humaine et des schmas comme CONTENEUR,OPPOSITION, TRAJET. Un cadre comme COMPTITION est trop abstrait pour tre le cadreorganisateur, tandis que le cadre BOXE spcifie les participants, le lieu et laction (cf.Fauconnier & Turner 2002, p. 104).

    Le cadre organisateur choisi est non seulement le plus labor, mais aussi un cadre lchelle humaine, cest--dire le cadre qui exprime les choses une chelle directementconcevable ou apprciable. Chacun des deux espaces dentre (E1 et E2) participe lintgration qui suit : les PDG viennent du domaine COMMERCE, alors que les boxeurs, lesactions, etc. sont du domaine BOXE. Le cadre organisateur vient du domaine BOXE. traversle processus dintgration conceptuelle se construit un espace mental avec une nouvellestructure, o les PDG sont les boxeurs en train de se mettre KO.

  • 8/13/2019 LA SMANTIQUE INTERPRTATIVE

    19/25

    19

    Figure 5. Les PDG boxeurs (daprs Fauconnier & Turner 2002, p. 128)

    Ce quatrime espace donne lieu un tout cohrent, qui par la suite peut tre facilementmanipul. Il suffit de changer un rle ou une relation dans un des deux espaces dentre,pour manipuler et dvelopper lintgration entire. Nous pouvons par exemple ajouter desdtails, comme dans lexemple de notre corpus :

    (10) Pendant six mois, Jacques Chirac et Lionel Jospin se sont livrs un rounddobservation,que quelques uppercutsont peine troubl. Les voici retirspour les ftes dans leurs coinsrespectifs, lyse et Matignon, rives droite et gauche du ring parisien, en attendant quele gong du nouvel an les relance entre les cordes. (LExpress, 25/12/97, POLI)

    Dans cet exemple de notre corpus, on note les homologues entre acteurs, savoir les rlesde boxeurs du cadre BOXE, qui correspondent aux personnages Chirac et Jospin. Le lieu,Paris, a son homologue dans le ring des boxeurs. La structure temporelle est galementprise du cadre BOXE travers les lexies round, gong, retirset relance. Cette segmentationdu match en rounds, signals par le gong, simpose dans le domaine POLITIQUE, qui hritedune structure mergente dun sens dattente. Comparons aussi avec les fonctions desmtaphores dans le texte, discutes sous 2.4. En analogie avec la description de Lundmark(2005, p. 18), le cadre BOXEest ici labor et contient des dtails sur le lieu, comme leurscoins respectifs, entre les cordes. Cette laboration renforce les liens avec le domainesource, et augmente le contenu imag de la mtaphore.

    La thorie de lintgration conceptuelle se prte, comme lindique Gra (2001, p. 284),

    lexplication des mtaphores travers les rseaux dintgration, surtout lanalyse desmtaphores non-conventionnelles. Les mtaphores proviennent des intgrations unilatrales

  • 8/13/2019 LA SMANTIQUE INTERPRTATIVE

    20/25

    20

    ou bilatrales (Fauconnier & Turner 2002, p. 154), cest--dire que le cadre provientrespectivement de lun ou des deux espaces dentre. Les intgrations crent un espacemental o des structures entires peuvent tre manipules comme des units. Par exemple,les mtaphores de guerre employes en politique fournissent un espace manipulable,cohrent, avec des leaders et des troupes, des actions contre lopposition. Les mtaphores

    conventionnelles sont typiquement des intgrations mtaphoriques unilatrales (op. cit., p.127). Il sagit dune intgration conceptuelle qui a t conventionnalise, tablie, commecreuser sa propre tombe. Une fois lintgration tablie, nous pouvons la manipuler en bloc,comme une unit. Aussi navons-nous pas besoin, chaque fois, de rinterprterlintgration : elle fonctionne dsormais comme un tout. Prenons comme exemple lesdomaines POLITIQUE et GUERRE. Le discours politique est rempli de mtaphoresconventionnalises du domaine GUERRE, par exemple : mobiliser les troupes, attaquerlopposition, etc. Le cadre GUERRE fournit les expressions, qui sont devenuesconventionnelles ; cest pourquoi ces expressions sont si faciles utiliser. Gra (2001)soutient quil est douteux que lon puisse parler dun processus dintgration dans ces cas olintgration entire est rappele et utilise. Svanlund (2001, p. 31 et suiv.) est davis quunedouble activation est possible dans ces expressions, savoir que le domaine source est

    toujours activ mais faiblement. Selon Fauconnier & Turner (2002) le procs de lintgrationconceptuelle est le mme, que la mtaphore soit vive ou conventionnelle.

    Gra (2001, p. 169 et suiv.) fait un effort pour combiner lintgration conceptuelle et lasmantique interprtative. Selon lui, la cration dun thme, la thmatisation, dans un texte,correspond au choix des traits du domaine qui seront mis en avant dans lintgration.Rappelons que le thme est cr par la rcurrence des isotopies gnriques rptes aumoins une fois dans un texte. Ainsi, dans les deux exemples proposs par Gra, les deuxdomaines NAVIGATION et MARIAGE sont intgrs. Dans le premier exemple, le domaineNAVIGATION donne des rles comme capitaine, passagers, etc. Lintgration construit lemariage comme un navire embarquant pour un voyage. Dans lautre exemple, laspect dudomaine NAVIGATION mis en avant est celui dun naufrage, lexicalis par lnonc Les

    femmes et les enfants dabord. Dans le mariage rat, les femmes et les enfants doivent tressauvs les premiers. partir des mmes domaines, deux intgrations trs diffrentes sontconstruites grce deux thmatisations diffrentes. En dautres termes, ce qui est repris desespaces dentre a des consquences sur lintgration finale. Le processus intgratif restenanmoins le mme.

    3.4 Bilan : la construction du sens

    Dans cette partie, deux approches smantiques ont t discutes, dont chacune a desavantages et des inconvnients : la smantique interprtative (SI) et lintgrationconceptuelle (IC). La SI considre que les units de sens minimales ne sont pas fixes, maissusceptibles de changer selon le contexte. Elle nadmet pas un sens de base ou un sensprototypique. Par contre, lIC (Fauconnier & Turner 1998, 2002) admet un sens prototypiquede la lexie, et il sensuit que la cration du sens en contexte est une fonction de lamanipulation du prototype, notamment son intgration dans un espace nouveau.

    Les deux approches, la smantique interprtative et lintgration conceptuelle, ont ceci encommun dtre assez abstraites, et difficilement transformes en une mthode. Aussi bienune analyse en smes quune analyse en termes de prototype permet de prendre en comptele contexte linguistique et son influence sur le sens. La diffrence rside dans lexplication,et, ultrieurement, dans la vise de lexplication. Lanalyse en smes permettrait de dire quela virtualisation et laffrence de certains smes sont respectivement responsables du sens,mais elle ne cherche pas lier le sens une signification primaire, principale, propre, oulittrale ; elle ne sintresse expliquer ni lontologie du monde, ni la cognition humaine. Enrevanche, lanalyse en prototypes maintiendrait que le sens dune lexie dpend de son

    insertion dans un cadre typique, ou dans un cadre non typique. La signification prototypiqueserait principale ou propre. Le prototype aurait donc un statut ontologique, il serait primaire et

  • 8/13/2019 LA SMANTIQUE INTERPRTATIVE

    21/25

    21

    plus naturel. Il sensuivrait, de cette potentialit dattribuer la primaut une signification,quil serait possible de suivre le procs de la construction du sens dans la cognition humaineet de construire une ontologie des sens et de la directionnalit dans le dveloppement dessens secondaires.

    Lavantage, notre avis, de la smantique interprtative est quelle tient compte du fait

    que le sens est construit, sans le lier avec le monde et son existence. En revanche, lacognition humaine (la faon de penser et de raisonner sur le monde et lexistence) noussemble tre fondamentale pour lemploi de la langue. Ajoutons cependant quau sein de lasmantique interprtative aussi, il est possible de prendre en compte la pratique sociale, etson rapport avec lemploi de la langue.

    Notes

    1 Voir par exemple Kittay (1987, p. 16) pour une dfinition.2 Cf. Duvignau 2003, p. 870.3 Pour la smantique interprtative, le smme est le signifi du morphme.4 Un sme affrent est un sme qui apparat uniquement dans un contexte spcifique, souventsocialement norm, la diffrence dun sme inhrent qui relve du systme fonctionnel de la langue(cf. Rastier 1987, p. 44, 46).5 La notation de la linguistique cognitive veut que les petites majuscules dnotent lescorrespondances conceptuelles qui constituent la projection mtaphorique, aussi bien que lesdomaines quelles sont censes mettre en uvre (Lakoff 1993, p. 209). Nous suivrons ce procd.6 Ainsi Boers & Demescheleer (1997) suggrent que lemploi des mtaphores de guerre pour dcrireune situation financire difficile peut encourager les employs dune entreprise accepter desmesures impopulaires puisque cest la guerre et que tout le monde sait quil faut accepter dessacrifices en temps de guerre.

    7 a set of correspondences between elements in the two domains, where the source is a moreconcrete concept and the target a more abstract one (Lundmark 2005, p. 12)8 [] one lexical item with a family of related senses. (Lakoff 1987, p. 416)9 Nous empruntons la dfinition de lexie de Rastier (2001a, p. 300) : Une lexie est ungroupement stable de morphmes, constituant une unit fonctionnelle . Selon Rastier (2001a, p.154), beaucoup de lexies sont des mots.10 Le choix de ce terme mme semble reflter une perception des mtaphores comme desexpressions images, et peut-tre une perception de notre cognition comme une capacit de penseren images. Depuis au moins les annes 60, la psychologie a tudi la reprsentation image et sonimportance dans la plupart des activits cognitives (Denis 1975, p. 13).11 Soulignons que Le Guern (1973, p. 66-67) oppose le langage de la claire logique la languemtaphorique.12 Halliday, Michael A K. 1978. Language as Social Semiotic : The Social Interpretation of Language

    and Meaning. London : Edward Arnold.Halliday, Michael A K. 1994. 2medition.An Introduction to Functional Grammar. London : EdwardArnold.13 Lakoff, George & Turner, Mark. 1989. More Than Cool Reason: A Field Guide to Poetic Metaphor.New York : Mouton de Gruyter.14 [Structural metaphors] allow us [] to use one highly structured and clearly delineated concept tostructure another (Lakoff & Johnson 1980, p. 61).15 So erhlt die Metapher eine ideologische Funktion, dient dazu, den Leser zu manipulieren, seineMeinungsbildung in eine bestimmte Richtung zu drngen. (Schmitt 1988, p. 122)16 Cf. Brandt & Brandt (2005) qui constatent que le sens dune mtaphore rside dans son intentiondans une situation particulire, dans lnonciation.17 Mais voir aussi Fauconnier & Turner 2002, p. 142 : [] language does not represent meaningdirectly ; instead, it systematically prompts the construction of meaning.

    18 Gibbs (1994) a montr dans des expriences psycholinguistiques que cette conceptualisation corporelle est une ralit, et non pas uniquement une thorisation.

  • 8/13/2019 LA SMANTIQUE INTERPRTATIVE

    22/25

    22

    19 Rastier (1987, 1989) indique les classes smantiques de mme que des domaines et desdimensions par deux barres : //politique//. Les smes aussi bien que les isotopies sont marqus parune seule barre : /intensit/.20 La notation de la linguistique cognitive marque les domaines et cadres par des petites majuscules :GUERRE, SPORT, et aussi, comme nous lavons vu, les mtaphores dites conceptuelles : LOVE IS A

    JOURNEY.21 Les verbes de mouvement des langues germaniques ont la proprit dexprimer la manire aussibien que le mouvement, mais pas la direction (Borillo 1998). Cette lexicalisation de manire nest passpcialement relate au schma TRAJET.22 Pour une discussion approfondie sur les diffrences entre la thorie de la mtaphore conceptuelleet lintgration conceptuelle, voir aussi Gra 2001, Svanlund 2001 et Koller 2003.

    Rfrences bibliographiques

    ALBERTAZZI, Liliana. 2000. Which Semantics? . In Albertazzi, Liliana (d.), Meaning andCognition. A Multidisciplinary Approach. Amsterdam/Philadelphia : John Benjamins, p. 1-25.

    ALLESSON, Charlotte. 2004. Ms. Les verbes de conflit et se. tude du pronom sedans le cadre deverbes de conflit . Dpartement de franais et ditalien. Universit de Stockholm.

    ARISTOTE. La Potique, chap. XXI. In Ludwig, Pascal (d.). 1997. Le langage. Paris : FlammarionCorpus.BALZAC, Honor de. (1847) 1990. La Cousine BetteParis : Jean-Claude Latts.BAYLON, Christian & MIGNOT, Xavier. 2000. Initiation la smantique du langage. Paris : Nathan.BLACK, Max. 1993. More About Metaphor . In Ortony, Andrew (d.), Metaphor and Thought. 2me

    dition. Cambridge : Cambridge University Press, p. 19-42.BOERS, Frank & DEMECHELEER, Murielle. 1997. A Few Metaphorical Models in (Western)

    Economic Discourse . In Liebet, Wolf-Andreas, Redeker, Gisela & Waugh, Linda (ds),Discourse and Perspective in Cognitive Linguistics. Amsterdam/Philadelphia : John Benjamins, p.115-129.

    BORILLO, Andre. 1998. LEspace et son expression en franais. Paris : Ophrys.BRANDT, Per-Aage & BRANDT, Line. 2005. Making Sense of a Blend. A Cognitive-Semiotic

    Approach to Metaphor . Working Paper 132-05, Centre for Cultural Resarch, Universit dAarhus.Consult le 09/09/09 sur :

    http://www.hum.au.dk/ckulturf/pages/publications/lb/blend_metaphor.htmlCHARAUDEAU, Patrick. 2005. Le discours politique : Les masques du pouvoir. Paris : Vuibert.CHARAUDEAU, Patrick & MAINGUENEAU, Dominique. 2002. Dictionnaire danalyse de discours.

    Paris : Seuil.CHAROLLES, Michel. 1997. L'encadrement du discours : univers, champs, domaines et espaces .

    Cahiers de Recherche Linguistique 6, Universit de Nancy-2, p. 1-73.CLAUSEWITZ, Carl von. (1832) 1991. Om kriget. Stockholm : Bonniers.DAHL, sten & FRAURUD, Kari. 1996. Animacy in Grammar and Discourse . In Fretheim,

    Thorstein & Gundel, Jeanette K (ds), Reference and Referent Accessibility.Amsterdam/Philadelphia : John Benjamins, p. 47-64.

    DENIS, Michel. 1975. Reprsentation image et activit de mmorisation. Monographies franaisesde psychologie. Paris : CNRS.

    DTRIE, Catherine. 2001. Du sens dans le processus mtaphorique. Paris : H. Champion.

    DILKS, Charlotte. 2005. Les mtaphores de guerre dans la prose journalistique dans une perspectivecognitive. tude des verbes de guerre et de conflit. Mmoire de phil. lic. Dpartement de franaiset ditalien. Universit de Stockholm.

    DOWTY, David. 1991. Thematic Proto-Roles and Argument Selection . Language67.3, p. 547-619.DUMARSAIS, Csar Chesneau. 1730. Des tropes ou des diffrents sens. Franoise Douay-Soublin

    (d.) 1988. Paris : Critiques Flammarion.DUVIGNAU, Karine. 2002. La mtaphore, berceau et enfant de la langue. La mtaphore verbale

    comme approximation smantique par analogie dans les textes scientifiques et les productionsenfantines (2-4ans). Thse de doctorat. Universit de Toulouse-2.

    DUVIGNAU, Karine. 2003. Mtaphore verbale et approximation . Duvignau, Karine, Gasquet,Olivier, Gaume, Bruno (ds), Regards croiss sur lanalogie. Revue dIntelligence Artificielle, vol.17, n5-6, p. 869-885.

    DUVIGNAU, Karine. 2005. Pour un apprentissage-enseignement du lexique verbal calqu surlacquisition : revisite et apport des mtaphores / erreurs des enfants de 2- 4 ans . In

    Grossmann, Francis, Paveau, Marie-Anne, Petit, Grard (ds), Didactique du lexique : langue,cognition, discours. Grenoble : ELLUG, p. 37-49.

  • 8/13/2019 LA SMANTIQUE INTERPRTATIVE

    23/25

    23

    EKBERG, Lena. 1993. Verbet tai grammatikaliserad och metaforisk anvndning . Sprk och stil 3,p. 105-139.

    ENGWALL, Gunnel & BARTNING, Inge. 1989. Le COSTO description dun corpusjournalistique . Moderna sprk83, p. 343-348.

    ERICSON, Lars. 2004. Historiska visioner om det Nya Kriget . In Artus, Gunnar & Brehmer,

    Berndt (ds), Tio esser om det nya kriget (Dix essais sur la guerre nouvelle) . Stockholm :Swedish National Defence College (Frsvarshgskolan).FAUCONNIER, Gilles. 1994. Mental Spaces. (1re dition : 1984. Espaces mentaux. Paris : Minuit.)

    Cambridge : Cambridge University Press.FAUCONNIER, Gilles. 1997. Mappings in Thought and Language. Cambridge : Cambridge University

    Press.FAUCONNIER, Gilles & TURNER, Mark. 1998. Conceptual Integration Networks. Cognitive Science

    22-2, p. 133-187. Consult le 09/09/09 sur :http://markturner.org/cin.web/cin.html

    FAUCONNIER, Gilles & TURNER, Mark. 2002. The Way We Think. Conceptual Blending and TheMinds Hidden Complexities. New York : Basic books.

    FAUCONNIER, Gilles & TURNER, Mark. 2003. Polysemy and Conceptual Blending . In Nerlich,Birgitte, Herman, Vimala, Todd, Zazie & Clarke, David (ds), Polysemy: Flexible Patterns ofMeaning in Mind and Language. Berlin & New York: Mouton de Gruyter, p. 79-94.

    FILLMORE, Charles J. 1968. The Case for Case . In Bach, Emmon & Harms, Robert T (ds),Universals in Linguistic Theory. New York : Holt, Rinehart & Winston, p. 1-88.

    FRANOIS, Jacques. 2003. La prdication verbale et les cadres prdicatifs. Louvain/ Paris : Peeters.FRAPPIER-MAZUR, Lucienne. 1976. LExpression mtaphorique dans la Comdie Humaine. Paris :

    Klincksieck.GIBBS, Raymond W. Jr. 1994. The Poetics of Mind : Figurative Thought, Language, and

    Understanding.New York : Cambridge University Press.GIVN, Talmy. 1984. Syntax : A Functional-Typological Introduction. Vol. 1. Amsterdam : John

    Benjamins.GRADY, Joe. 1997. Foundations of Meaning. Primary Metaphors and Primary Scenes. Thse de

    doctorat. University of California, Berkeley.GRA, Philippe. 2001. La thorie de lintgration conceptuelle applique la mtaphore et la

    mtaphore file. Thse de doctorat. Universit de Paris X-Nanterre.

    GREISALMER, Laurent (d.) 2004. Le style du Monde. Paris : Le Monde.GRDENFORS, Peter. 1999. Some Tenets of Cognitive Semantics . In Allwood, Jens &Grdenfors, Peter (ds), Cognitive semantics. Meaning and cognition. Amsterdam : JohnBenjamins, p. 19-36.

    HENNET, Heidi & GIL, Alberto. 1992. Kreative und konventionelle Metaphern in der spanischenWirtschaftssprache der Tagespresse. Lebende Sprachen1/92, p. 30-32.

    KERZAZI-LASRI, Rafika. 2003. La mtaphore dans le commentaire politique. Paris : LHarmattan.KITTAY, Eve F. 1987. Metaphor. Its Cognitive Force and Linguistic Structure. Oxford : Clarendon.KLEIBER, Georges. 1990. Smantique du prototype. Catgories et sens lexical. Paris : PUF.KLEIBER, Georges. 1994. Mtaphore : le problme de la dviance . Langue franaise101, p. 35-

    56.KLEIBER, Georges. 1999. Une mtaphore qui ronronne nest pas toujours un chat heureux . In

    Charbonnel, Nanine & Kleiber, Georges (ds), La mtaphore entre philosophie et rhtorique.Paris : PUF, p. 83-134.

    KOLLER, Veronica. 2003a. Metaphor Clusters in Business Media Discourse : A Social CognitionApproach. Thse de doctorat. Dpartement danglais. Universit de Vienne. Consult le 09/09/09sur :http://www.wu.ac.at/inst/english/koller_diss.pdf

    KOLLER, Veronica. 2003b. Metaphor Clusters, Metaphor Chains: Analyzing the Multifunctionality ofMetaphor in Text . metaphorik.de05/2003, p. 115-134. Consult le 09/09/09 sur :http://metaphorik.de/05/koller.pdf

    KVECSES, Zoltan. 2000. Force and Emotion . In Albertazzi, Liliana (d.), Meaning and Cognition.A Multidisciplinary Approach. Amsterdam/Philadelphia : John Benjamins, p. 145-168.

    LANGACKER, Ronald W. 1987. Foundations of cognitive grammar. Vol. 1 : Theoretical prerequisites.Stanford : Stanford university press.

    LAKOFF, George. 1987. Women, Fire and Dangerous Things. What Categories Reveal about theMind. Chicago : Chicago University Press.

    LAKOFF, George. 1991. Metaphor in Politics. An Open Letter to the Internet. Consult le 09/09/09sur :http://philosophy.uoregon.edu./metaphor/lakoff-l.htm

  • 8/13/2019 LA SMANTIQUE INTERPRTATIVE

    24/25

    24

    LAKOFF, George. 1993. The Contemporary Theory of Metaphor . In Ortony, Andrew (d.),Metaphor and Thought. 2me dition. Cambridge : Cambridge University Press, p. 202-251.

    LAKOFF, George & JOHNSON, Mark. 1980. Metaphors We Live by. Chicago : University of ChicagoPress.

    LAKOFF, George & JOHNSON, Mark. 1999. Philosophy in the Flesh. New York : Basic Books.

    LE GUERN, Michel. 1973. Smantique de la mtaphore et de la mtonymie. Paris : Larousse.LE GUERN, Michel. 1981. Mtaphore et argumentation . In Ducrot, Oswald (d.), LArgumentation.Lyon : Presses universitaires de Lyon, p. 65-74.

    LUNDMARK, Carita. 2005. Metaphor and Creativity in British Magazine Advertising. Thse dedoctorat. Department of Languages and Culture. Lule University of Technology.

    MALMBORG, Gunilla von. 2004. La spcificit de la mtaphore journalistique : les mtaphores dequelques champs gnriques dans Le Monde et LExpress. Cahiers de la recherche 25. Thse dedoctorat. Dpartement de franais et ditalien. Universit de Stockholm.

    MRIME, Prosper. 1999. Colomba. Paris : Gallimard.MOURIQUAND, Jacques. 1997. Lcriture journalistique. Paris : PUF. Collection Que sais-je ?PAPPAS, Christos. 2003. Metaforen i det politiska sprket. En studie av socialdemokraternas och de

    konservativ-liberalas retorik i Grekland och Sverige vid millennieskiftet. Thse de doctorat.Dpartement de langues classiques. Universit de Stockholm.

    PENNACCHIONI, Irne. 1986. De la guerre conjugale. Paris : Mazarine.

    PRANDI, Michele. 2001. Mtonymie et mtaphore : Parcours partags dans lespace de lacommunication . Semen2, p. 71-82.

    RASTIER, Franois. 1987. La smantique interprtative. Deuxime dition. Paris : PUF.RASTIER, Franois. 1989. Sens et textualit. Paris : Hachette.RASTIER, Franois. 2001a.Arts et sciences du texte. Paris : PUF. Collection Formes smiotiques.RASTIER, Franois. 2001b. LIndcidable hypallage . Langue franaise129, p. 111-127.RASTIER, Franois. 2005. Discours et texte. Texto !, juin 2005. Consult le 14/09/09 sur :

    http://www.revue-texto.net/Reperes/Themes/Rastier_Discours.htmlRASTIER, Franois. 2006. De la signification lexicale au sens textuel : lments pour une approche

    unifie. Texto ! , mars 2006. Consult le 14/09/09 sur :http://www.revue-texto.net/Inedits/Rastier/Rastier_Signification-lexicale.html

    REDDY, Michael. 1993. The Conduit Metaphor . In Ortony, Andrew (d.), Metaphor and Thought.2me dition. Cambridge : Cambridge University Press, p. 164-201.

    RIEGEL, Martin, PELLAT, Jean-Christophe, & RIOUL, Robert. 1994. Grammaire mthodique dufranais. Paris : Presses universitaires de France.RIFFATERRE, Michel. 1972. Essais de stylistique structurale. Paris : Flammarion.SAEED, John I. 1997. Semantics. Oxford/Massachusetts : Blackwell.SCHMITT, Christian. 1988. Gemeinsprache und Fachsprache im heutigen Franzsisch. Formen und

    Funktionen des Metaphorik in wirtschaftsfachsprachlichen Texten . In Kalverkmpfer, Hartwig(d.), Fachsprachen in der Romania. Tbingen : Gunter Narr Verlag, p. 113-129.

    SMITH, M.L.R. 2003. War and Only War . In ngstrm, Jan & Duvesteyn, Isabelle (ds), TheNature of Modern War : Clausewitz and His Critics Revisited. Stockholm : Swedish NationalDefence College (Frsvarshgskolan), p. 23-46.

    STEEN, Gerhard J. 1994. Understanding Metaphor in Literature. An Empirical Approach. London/NewYork : Longman.

    SULLET-NYLANDER, Franoise. 1998. Le titre de presse. Analyses syntaxique, pragmatique etrhtorique. Cahiers de la recherche 8. Thse de doctorat. Dpartement de franais et ditalien.

    Universit de Stockholm.SVANLUND, Jan. 2001. Metaforen som konvention. Graden av bildlighet i svenskans vikt- och

    tyngdmetaforer. Stockholm studies in Scandinavian philology. Thse de doctorat. Stockholm :Almquist & Wiksell.

    SWEETSER, Eve. 1990. From Etymology to Pragmatics. Metaphorical and Cultural Aspects ofSemantic Structure. Cambridge : Cambridge University Press.

    TALMY, Leonard. 1988. Force Dynamics . Cognitive Science12, p. 49-100.TAMINE, Jolle. 1978. Description syntaxique du sens figur : la mtaphore. Thse de doctorat dtat.

    Universit de Paris 7.TESNIRE, Lucien. 1958. lements de syntaxe structurale. 2medition. Paris : Klincksieck.Le Trsor de la Langue Franaise Informatise. Disponible sur : http://atilf.atilf.fr/tlf.htmTULLGREN, Maria Hyln & EDMAR, Ingrid. 1991. Redogrelse fr arbetet med projektet Fransk

    tidningskorpus. COSTO Rapport 2. Dpartement de franais et ditalien. Universit de Stockholm.

    TURNER, Mark. 1988. Categories and Analogies . In Helman, David H. (d.), AnalogicalReasoning. Dordrecht/Boston/London : Kluwer Academic Publishers, p. 3-24.

  • 8/13/2019 LA SMANTIQUE INTERPRTATIVE

    25/25