polymorbidité et polymédication en ems: la réalité des

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1 Polymorbidité et polymédication en EMS: la réalité des chiffres O. Bugnon, J. Berger, I.Anguish, A. Niquille Unité de Pharmacie communautaire, Section des sciences pharmaceutiques, Université de Genève et Université de Lausanne Pharmacie de la Policlinique Médicale Universitaire, Lausanne Fribourg, le 5 mars 2015 Symposium interdisciplinaire 2015 d’assistance pharmaceutique des EMS fribourgeois « Ni trop ni trop peu de médicaments en EMS » Quelques définitions… Polymédication = Polypharmacie Pas de seuil absolu pour parler de polymédication Polymédication : 5 à 9 médicaments quotidiens Hyperpolymédication: ≥10 médicaments quotidiens 2

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Diapositive 1la réalité des chiffres
Unité de Pharmacie communautaire, Section des sciences pharmaceutiques,
Université de Genève et Université de Lausanne
Pharmacie de la Policlinique Médicale Universitaire, Lausanne
Fribourg, le 5 mars 2015
Symposium interdisciplinaire 2015
« Ni trop ni trop peu de médicaments en EMS »
Quelques définitions…
Polymédication = Polypharmacie Pas de seuil absolu pour parler de polymédication
Polymédication : 5 à 9 médicaments quotidiens
Hyperpolymédication: ≥10 médicaments quotidiens
2
2
Hausse de la polymorbidité et de la « fragilité » (frailty) avec l’âge et le statut socio-économique
précaire
mais… changement des objectifs thérapeutiques en fonction des attentes des patients (de leurs
proches) et de l’espérance de vie
Polymédication en EMS inévitable ???
Etude sur 1’751’841 patients de 314 cabinets médicaux , Ecosse
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Etude sur 1’751’841 patients de 314 cabinets médicaux , Ecosse
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La multimorbidité est associée à des taux plus élevés : • de mortalité,
• d’infirmités,
• de taux d’institutitonnalisation,
• de qualité de vie amoindrie
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Transition des priorités thérapeutiques au cours de la vie
Traduit et adapté de « Recommandations on palliative care and treatment of older people with Alzheimer’s disease and other progressive dementias. EAPC Dementia White Paper 2013
Troubles de santé Légers Modérés Sévères Parfaite santé Décès
O B
JE C
TI FS
D ES
S O
IN S
P R
O M
O TI
O N
D E
LA S
A N
Les évidences de la littérature internationale
Quelques chiffres tirés d’études de la Pharmacie de la PMU
Le régime médicamenteux « copieux » des personnes âgées…
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Prévalence de la polymédication chez la personne âgée?
Selon la littérature scientifique internationale: Usage courant de minimum 5 médicaments avec une prévalence plus élevée pour les patients « fragiles » et hospitalisés
Aux USA, 60% des personnes âgées de plus de 70 ans reçoivent régulièrement au moins 5 médicaments et 20% d’entre eux prennent au moins 10 médicaments.
1. M. Runganga et al. Clinical Interventions in Aging (2014): 9, 1453-1462 2. I.A. Scott et al. The American Journal of Medicine (2012) 125, 529-537. 3. American Geriatrics Society Expert Panel on the Care of Older Adults
with Multimorbidity . J Am Geriatr Soc (2012); 60: 1957-1968 4. A. Nobili et al. J of Comorbidity (2011); 1: 28-44
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Selon deux études menées par la Pharmacie de la PMU:
1. En moyenne 10 ± 3 médicaments (min 2; max 19) prescrits à la sortie d’un séjour (2009) pour 230 patients âgés de 82 ± 7 ans au CUTR Sylvana (CHUV, Lausanne)
2. En moyenne 8 médicaments (min 1; max 17) prescrits à 21 patients âgés de 82 ans (min 65, max 92) suivis par les soins à domicile de Lausanne et environs MAIS…
en moyenne 16 médicaments (min 2; max 62) retrouvés au domicile de ces patients lors d’un entretien de polymédication réalisé à domicile par un pharmacien. Environ 1/3 de ces médicaments en vente sans ordonnance.
Prévalence de la polymédication chez la personne âgée?
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RISQUE de la polymédication chez la personne âgée?
Selon la littérature scientifique internationale (1/3): Parmi les personnes âgées prenant au moins 5 médicaments et vivant à domicile: • Environ 33% vont expérimenter 1 effet indésirable (EI) par année • 25% de ces EI pourraient être évités par un usage approprié des
médicaments • 17% des hospitalisations liées à un effet indésirable sévère • 30-55% de ces EI sévères causant une hospitalisation pourraient
être évités
1. M. Runganga et al. Clinical Interventions in Aging (2014): 9, 1453-1462 2. I.A. Scott et al. The American Journal of Medicine (2012) 125, 529-537. 3. American Geriatrics Society Expert Panel on the Care of Older Adults
with Multimorbidity . J Am Geriatr Soc (2012); 60: 1957-1968 4. A. Nobili et al. J of Comorbidity (2011); 1: 28-44
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Présence d’au moins un médicament à risque pour la
personne âgée observée chez… • 20% des personnes vivant à domicile • 33% des personnes hospitalisées • 50% des patients vivants en EMS
1. M. Runganga et al. Clinical Interventions in Aging (2014): 9, 1453-1462 2. I.A. Scott et al. The American Journal of Medicine (2012) 125, 529-537. 3. American Geriatrics Society Expert Panel on the Care of Older Adults
with Multimorbidity . J Am Geriatr Soc (2012); 60: 1957-1968 4. A. Nobili et al. J of Comorbidity (2011); 1: 28-44
RISQUE de la polymédication chez la personne âgée?
Selon la littérature scientifique internationale (3/3): Parmi les personnes hospitalisées dans un service d’urgence, le
risque de trouver un effet indésirable comme raison de l’hospitalisation est de :
• 13% chez les patients traités par 2 médicaments • 38% chez les patients traités par 4 médicaments • 82% chez les patients traités par au moins 7 médicaments
1. M. Runganga et al. Clinical Interventions in Aging (2014): 9, 1453-1462 2. I.A. Scott et al. The American Journal of Medicine (2012) 125, 529-537. 3. American Geriatrics Society Expert Panel on the Care of Older Adults
with Multimorbidity . J Am Geriatr Soc (2012); 60: 1957-1968 4. A. Nobili et al. J of Comorbidity (2011); 1: 28-44
RISQUE de la polymédication chez la personne âgée?
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13 %
58 %
82 %
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70
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american academy of nurse practitioners,
Vol 17, issue 4, p.123–132
M. A. Steinman et. al., 2006, Journal of the
American Geriatrics Society, vol. 54, issue 10,
p. 1516–1523
Dafalgan 1g, 1 cpr eff. 4x/j
Fentanyl générique patch 50mcg/h, 1 patch tous les 3 jours
Trop ou trop peu de médicaments
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Bénéfices démontrés dans les études cliniques
Toxicité du traitement
« PAS TROP » pour soulager une douleur modérée durant 10 jours
chez une personne adulte jeune sans comorbidité
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Bénéfices du traitement
Toxicité du traitement
« TROP » chez une personne âgée avec une insuffisance rénale
« TROP (de sel) » cpr eff chez une personne âgée insuffisante cardiaque
« TROP (cher) » à discuter dans les cercles de qualité en EMS
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Bénéfices du traitement
Toxicité du traitement
Dafalgan 1g, 1 cpr eff. 4x/j
« TROP » chez une personne âgée avec des douleurs neurogènes (pas le 1er choix des analgésiques dans ce type de douleurs)
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Bénéfices du traitement
Toxicité du traitement
plupart des indications:
Patients « âgés » ≤3g/24h
>1 facteur de risque (p.ex. alcoolisme, hépatopathie,
malnutrition, tabagisme): <2g/24h
Revue Prescrire supplément interactions 2010
Furger „SURF Guide thérapeutique de Médecine interne“ 2009: 946 + 1152 + 1272
Guideline CKS 2010: Analgesia mild-to-moderate pain
Bases de la thérapeutique médicamenteuse 2005 : 43-47
Paracétamol: doses adéquates
Fentanyl générique patch 50mcg/h, 1 patch tous les 3 jours
« PAS TROP » Si douleur sévère évaluée de manière adéquate
et … AJOUTER opiacé en réserve pour les pics douloureux
AJOUTER laxatif pour contrer la constipation des opiacés AJOUTER éventuellement antiémétique à l’initiation du
traitement
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10 pistes de réflexion interdisciplinaire (1/2)
1. Prioriser les problèmes de santé (maladies, symptômes, médicaments) exprimés par les patients (ou leurs proches)
2. Faire une revue complète de la médication (y compris automédication)
3. Identifier les patients et les médicaments à haut risque d’effets indésirables
4. Estimer le confort du patient avec le traitement actuel (Escalade thérapeutique? Iatrogénie? Adhésion thérapeutique?)
5. Considérer les préférences et les objectifs individuels des patients
6. Privilégier les médicaments aux évidences scientifiques solides, éviter les changements inutiles et… « start slow, go slow »
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10 pistes de réflexion interdisciplinaire (2/2)
7. Adapter les objectifs du plan de traitement (p.ex. prévention IIaire) à l’estimation de l’espérance de vie
8. Evaluer la balance bénéfices/risques et coûts/avantages de chaque élément du plan thérapeutique (y compris les mesures non médicamenteuses)
9. Informer et accompagner le patient, respectivement les proches et l’équipe de soins, lors de l’instauration, la modification ou l’arrêt d’un traitement
10. Réévaluer régulièrement l’intérêt du traitement (bénéfices, adhésion thérap., concordance avec les préférences du patient), notamment lors des transitions de soins (p.ex. sortie d’hôpital)
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Quelques outils ….
Exemples d’outils utilisés pour évaluer le caractère approprié ou non d’un médicament (p.ex. au cours d’une revue de médication par un
pharmacien):
• STOPP & START (2008) ≥ 65 ans
• STOPP : 65 critères visant les problèmes médicamenteux les plus fréquents • START : 22 indicateurs EBM pour la prise en charge des maladies les plus
fréquentes
• Liste de médicaments à éviter absolument ou sous certaines conditions
• HANLON et al (1994) ≥ 65 ans
• 10 questions pour évaluer le caractère approprié ou non de chaque médicament avec des instructions spécifiques pour un usage responsable
• Etc….
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« Dé-prescription » ?
Oser envisager d’arrêter un traitement (« dé-prescrire ») en répondant aux questions suivantes: • L’objectif thérapeutique est-il en phase avec l’objectif de vie du
patient et de ses proches ? • Le médicament est-il là pour soulager l’effet indésirable évitable d’un
autre médicament qui lui pourrait être substitué ou arrêté ? • Existe-t-il une alternative non médicamenteuse réaliste? • Existe-t-il une alternative plus sûre et plus efficace ? • Un traitement continu sur le long terme est-il vraiment nécessaire ? • La dose d’entretien peut-elle être diminuée ? • L’arrêt du médicament ou la diminution de sa dose présente-t-il un
risque particulier pour le patient?
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Attention à l’arrêt brutal de ces médicaments Alpha-bloquants: Hypertension rebond, agitation
Bêta-bloquants: Risque de rebond : tachycardie, palpitations; réapparition de symptômes d’angine de poitrine
Dérivés nitrés: Réapparition de symptômes d’angine de poitrine
Furosémide: Réapparition des symptômes d’insuffisance cardiaque
Benzodiazépines: Effets de sevrage (p.ex. délirium, insomnie, crise convulsive)
Anticholinergiques: anxiété, nausée, vomissements, maux de tête, vertiges
Antipsychotiques: Dyskinésie, nausées, vomissements, agitation
Antidépresseurs: Baisse de l’humeur, agitation, maux de tête
Digoxine: Réapparition d’une fibrillation auriculaire rapide
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Les messages clés de l’exposé
• Ne pas culpabiliser les soignants face à la polymorbidité • Maîtriser les risques de la polymédication (prévenir,
détecter, minimiser) • Individualiser le traitement (préférences du patient,
espérance de vie) • « Evitons l’évitable » ( Lausanne, 18.6.2015: Symposium
interdisciplinaire de la PMU): escalade thérapeutique, iatrogénie, sous-traitement, non-adhésion thérapeutique
• Oser envisager la possibilité d’une dé-prescription
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Centre de Pharmacie Communautaire
Section des sciences pharmaceutiques,
Chaque personne est unique,
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Adresses de contact : Prof Olivier Bugnon Section des sciences pharmaceutiques, Pharmacie communautaire, Université de Genève, Université de Lausanne Pharmacie de la Policlinique Médicale Universitaire (PMU), Rue du Bugnon 44, 1011 Lausanne (Switzerland)
E-mail: [email protected] /
Secrétariat : [email protected]