partie i : la maladie du paludismeao.um5s.ac.ma/jspui/bitstream/123456789/14310/1/p0222009.pdf ·...

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1 I I n n t t r r o o d d u u c c t t i i o o n n

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  • 1

    IInnttrroodduuccttiioonn

  • 2

    Le paludisme est une endémie parasitaire majeure provoquée par le

    développement dans les hématies des hématozoaires du genre plasmodium (P)

    transmis par la piqûre d’un moustique femelle : l’anophèle qui se trouve lui-

    même porteur du parasite. Quatre espèces plasmodiales sont pathogènes pour

    l’homme: P. falciparum, le plus répandu et le plus dangereux, P. vivax, P.

    ovale, et P. malariae.

    L’association paludisme et grossesse demeure un problème majeur de santé

    publique avec des conséquences néfastes, tant sur la mère (anémie, accès

    pernicieux, avortement) que sur le fœtus (faible poids de naissance, paludisme

    congénital) surtout chez les primipares. Cette ampleur du problème est attestée

    entre autre par les chiffres annoncés par l‘organisation mondiale de la santé

    (OMS), il y aurait environ, chaque année, 25 millions de femmes enceintes et

    soumises au risque de paludisme, dont 25 % ont un placenta infesté par les

    Plasmodium au moment de l’accouchement. En Afrique, entre 75 000 et 200 000

    enfants naissent de femmes atteintes de paludisme, avec un faible poids de

    naissance, la mortalité à la naissance des enfants de mères paludéennes est

    estimée à 100 000 par an [1,2].

    Les femmes enceintes sont particulièrement vulnérables, car la grossesse

    réduit l’immunité de la femme et donc rend beaucoup plus susceptible à

    l’infection palustre, voir même aggraver les manifestations du paludisme en

    raison de l’état d’immunodépression relative.

    Connaissant que le paludisme autochtone a été éliminé du Maroc depuis

    2005, le Maroc reste un pays d’accueil pour des voyageurs venant des pays

    d’endémies palustres (étudiants, touristes, malades, migrants clandestins…),

    parmi ces voyageurs, il peut y avoir des femmes enceintes infectées, d’où

    l’intérêt de connaître la gravité du paludisme sur la grossesse, les antipaludiques

  • 3

    autorisés au cours de la grossesse ainsi que leur limite d’utilisation afin d’assurer

    la prise en charge de ces femmes.

    De même plusieurs femmes peuvent se retrouver pour un raison ou un

    autre, dans des pays infectés par le paludisme, d’où la nécessité de connaître

    l’ensemble des mesures préventives ainsi que la chimioprophylaxie adaptée aux

    pays visités.

    Dans le cadre de ce travail, nous nous allons intéresser sur l’impact du

    paludisme sur la grossesse, les différents schémas thérapeutiques, ainsi que les

    mesures prophylactiques afin d’éviter la survenue du paludisme chez la femme

    enceinte.

  • 4

    PPaarrttiiee II :: GGEENNEERRAALLIITTEESS SSUURR LLEE

    PPAALLUUDDIISSMMEE

  • 5

    A- HISTORIQUE

    I- HISTORIQUE : PALUDISME.

    Le paludisme (malaria) est une des plus vieilles maladies de l`homme dont

    les manifestations cliniques sont décrites par les premières civilisations : Les

    médecins de l’inde védique et brahmanique distinguaient déjà, 1000 ans avant

    JC, des fièvres intermittentes caractéristiques. Ainsi que Hippocrate décrivait

    longuement des fièvres tierce et quarte [3].

    Les principaux événements ayant marqué l’évolution du paludisme sont :

    - 1630 : Emploi de l’écorce de quinquina contre les « fièvres des

    marais » ;

    - 1820 : Découverte de la quinine par Pelletier et Caventou ;

    - 1880 : Découverte du parasite par Laveran ;

    - 1885-90 : Découverte de trois premières espèces parasites de l’homme

    P.vivax, P.malariae et P.falciparum par Marchiafava et Celli ;

    - 1897 : Découverte le rôle des moustiques dans la transmission du

    paludisme par Ross ;

    - 1922 : Découverte de P. ovale par Stephens ;

    - 1940 : Découverte des antimalariques de synthèse (Nivaquine) ;

    - 1948 : Découverte du stade hépatique ;

    - 1957 : L’OMS entreprit à l’éradication de paludisme ;

    - 1960 : Apparition des premiers cas du chloroquinorésistance, en

    Colombie, puis en Asie du Sud-Est ;

    - 1968 : L’OMS renonça à l’éradication et entreprit dans la lutte contre

    le paludisme ;

    - 1976 : Culture in vitro de P.falciparum ;

  • 6

    - 1980 : Mise en évidence des hypnozoïtes ;

    - 1983 : Premières tentatives de vaccination antipalustre ;

    - 1990 : chloroquinorésistance a été décelée dans tous les pays tropicaux

    [3,4,5,6,7].

    II- HISTORIQUE : PALUDISME AU MAROC

    Au début XX ème siècle, le paludisme se présentait au Maroc comme une

    maladie endémo-épidémique avec des poussées épidémiques estivo-automnales

    fréquentes. Les régions les plus peuplées et les plus pourvues en eau étaient les

    plus gravement touchées en particulier par les espèces P.falciparum et P.vivax.

    Mais, depuis le lancement du programme de lutte contre le paludisme en

    1965, le nombre de cas autochtones est passé de 30.893 en 1963 à un millier de

    cas vers la fin des années quatre vingt. Les efforts fournis ont également permis

    d’éradiquer en 1973 l’espèce P.falciparum qui est responsable du paludisme

    grave. Depuis cette date, seule l’espèce P.vivax est à l’origine du paludisme

    autochtone [8].

    En 1999, le Maroc a mis en place une stratégie visant l’élimination du

    paludisme autochtone. Cette stratégie, axée sur l’intensification des actions de

    lutte et la formation des professionnels de santé dans les provinces à risque, a fin

    de maîtriser davantage la maladie et de désactiver ses derniers foyers de

    transmission [9].

    Ainsi, le tout dernier foyer de transmission autochtone a été détecté et

    neutralisé en 2002 dans la province de Chefchaouen. Depuis cette date, 4 cas ont

    été dépistés en 2003 et un seul cas en 2004, tous résiduels. Et depuis l’année

    2005, aucun cas autochtone n’a été dépisté au niveau national [8].alors que 83

    cas de paludisme importés ont été notifiés en 2005 et 100 cas en 2006 [10].

  • 7

    B- EPIDEMIOLOGIE

    I- SITUATION DANS LE MONDE

    Plus de deux milliards de personnes vivent en zone à risques de paludisme.

    Chaque année, il y a environ 400 à 500 millions de malades, dont 1,5 à 2,5

    millions décèdent, Une grande majorité de ces décès surviennent chez des jeunes

    enfants moins de 5 ans résidants en Afrique subsaharienne [1]. Les autres

    groupes à haut risque sont les femmes enceintes, les voyageurs non immunisés,

    les réfugiés, et les ouvriers agricoles arrivant dans des zones d'endémie [11].

    Plus de 90 % de tous les cas de paludisme surviennent en Afrique

    subsaharienne.

    Avec l’apparition et la rapide extension des chimiorésistances et de

    l’accoutumance des moustiques aux insecticides, le paludisme est actuellement

    en progression [1].

    II- REPARTITION GEOGRAPHIQUE

    Le paludisme est toujours le grand fléau de l’hémisphère sud et

    particulièrement des pays pauvres ou en développement et touche souvent les

    plus faibles catégories de population : femmes enceintes et enfants.

    En fait la principale zone à risque est l’Afrique et plus précisément

    l’Afrique subsaharienne. En dehors du sous continent le paludisme est en recul

    dans toutes les autres zones d’endémie : Asie, Amérique Centrale et du Sud

    [12].

    1- Europe

    Le paludisme a été éradiqué. Des réintroductions temporaires peuvent se

    produire et des cas isolés survenir (paludisme des aéroports). Mais c’est

  • 8

    essentiellement le paludisme d’importation (paludisme des voyageurs) qui y

    sévit [13].

    2- Afrique

    Le paludisme existe faiblement en Afrique du Nord, où l’on rencontre les

    espèces P. vivax et P. malariae. Il est largement répandu dans toute l’Afrique

    intertropicale où coexistent P. falciparum, P. ovale et, pour une moindre part, P.

    malariae.

    Dans certaines zones d’Afrique de l’Est, on rencontre aussi P. vivax. La

    transmission est intense à Madagascar, où les quatre espèces coexistent [14].

    Elle est de nouveau établie à l’île Maurice, et elle n’existe plus à La Réunion.

    Généralement, les zones de fortes endémies en Afrique contiennent les

    pays entre les latitudes 20° nord et 20° sud de l’Afrique subsaharienne. Elles

    sont localisées en Afrique équatoriale : Cameroun, Centre Afrique, Congo,

    Côte-d’Ivoire, Gabon, Guinée équatoriale, Ouganda, Tanzanie, Tchad [15].

    3- Amérique

    L’Amérique du Nord est indemne du paludisme. En revanche, celui-ci

    existe en Amérique centrale (P. vivax surtout) mais les Ile des Caraïbes sont

    indemnes à l’exception d’Haïti [11]. Il n’existe pas de transmission dans les

    Petites Antilles : Guadeloupe, Martinique. En Amérique du Sud existent

    d’importants foyers dus à P. falciparum (résistants aux amino-4-quinoléines) et

    à P. vivax. Le paludisme sévit toujours en Guyane française mais

    essentiellement sur les fleuves et dans la forêt. D’une manière générale toutes

    les villes américaines sont indemnes sauf en Amazonie [12,14].

  • 9

    4- Océanie

    Certaines, sont atteintes : Nouvelle-Guinée, Iles Salomon,Vanuatu ;

    d’autres, au contraire, en sont totalement dépourvues : Tahiti,Nouvelle-

    Calédonie, Iles Loyauté... ; l’Australie et la Nouvelle Zélande sont indemnes

    [13,14].

    5- Asie

    Comme en Afrique, le paludisme sévit modérément en Asie Mineure

    (Turquie), péninsule indienne (P. vivax surtout) et intensément en Birmanie,

    Chine du sud, Thaïlande, Viêt-Nam, Cambodge, Laos (P. falciparum surtout,

    avec des souches chimiorésistances) [13]. La transmission en Asie se fait sous

    forme de foyers disséminés en milieu rural dans les zones de collines boisées.

    Toutes les grandes villes asiatiques sont indemnes sauf les villes indiennes [14].

    Risque moyen à élevé risque faible risque est quasiment nul

    Figure 1 : Répartition des cas de paludisme dans le monde, Selon Malaria Atlas Project (MAP) 2008[16].

  • 10

    III- LE PARASITE

    Le paludisme est la conséquence de l'infection par l'une ou plusieurs des

    espèces de Plasmodium.

    Le genre Plasmodium est un protozoaire, fait partie du phylum des

    Apicomplexa (ou sporozoaires). Dans la nature, plusieurs espèces de ce genre

    sont capables d'infecter les reptiles, les oiseaux ou les mammifères. Parmi ces

    espèces, seules quatre d'entre elles, peuvent évoluer chez l'Homme et provoquer

    une symptomatologie clinique :

    - Plasmodium falciparum,

    -Plasmodium vivax,

    - Plasmodium ovale,

    - Plasmodium malariae [6].

    Chacune de ces espèces se caractérise par sa propre morphologie (voir

    annexe 1), sa répartition géographique, mode de rechute ainsi que sa réponse

    vis-à-vis des drogues antipaludiques.

    1- Cycle évolutif du plasmodium :

    Le cycle du plasmodium assez complexe, nécessite deux hôtes, un hôte

    définitif, l’homme, et un hôte intermédiaire et vecteur, l’anophèle femelle

    hématophage.

    Chez l'homme où s'effectue la totalité du cycle asexué ou schizogonique,

    se déroulant lui-même en :

    Une phase intra hépatique ou schizogonie hépatique;

    Une phase intra-érythrocytaire : schizogonie endoérythrocytaire:

    Chez le moustique s'effectue le cycle sexué ou sporogonique.

  • 11

    a- La phase asexuée

    a-1- La schizogonie exoérythrocytaire:

    Lors d'une piqûre par l’anophèle femelle contaminé, les sporozoïtes,

    cellules infectantes caractéristiques de tous les sporozoaires sont injectés dans la

    circulation sanguine. En quelques dizaines de minutes ils pénètrent dans les

    hépatocytes où ils se cachent sous le nom de cryptozoïtes ; ceux-ci grossissent,

    leur noyau se divise et donnent des Schizontes matures ou corps bleu,

    l’éclatement de l'hépatocyte par le schizonte qui devient de plus en plus gros va

    libérer de nombreux mérozoïtes qui migreront via la voie sanguine vers les

    hématies [12,14].Cette phase est asymptomatique et dure environ 6 à 15 jours

    selon l’espèce en question [18,19,20,].

    Chez certaines espèces, telles P. vivax et P. ovale, les sporozoïtes peuvent

    rester à l'état de dormance dans les hépatocytes sous la forme d'hypnozoïtes et ne

    se développent qu'ultérieurement (périodes de reviviscence) [20].

    a-2- La schizogonie endoérythrocytaire:

    Les mérozoïtes libérés des hépatocytes pénètrent dans les érythrocytes par

    un mécanisme complexe où ils évoluent en stade jeune Trophozoïte (" anneau "

    ou " ring "), Trophozoïte mature puis Schizonte, ce dernier évolue par

    multiplication des noyaux, en schizonte mature ou corps en rosace. La rupture

    de la membrane du globule rouge par le Schizonte mature libère des mérozoïtes

    qui réinfectent rapidement des hématies saines. Chaque cycle endoérythrocytaire

    dure 48 heures pour P. vivax, P. ovale et P. falciparum responsable du fièvre

    tierce et 72 heures pour P. malariae qui donne la fièvre quarte.

  • 12

    Après plusieurs cycles schizogoniques apparaissent dans les hématies des

    éléments à potentiel sexuel, les gamétocytes mâles et femelles [12,14,19].

    b- La phase sexuée : la sporogonie

    Lors d’un repas sanguin sur un paludéen, l’anophèle femelle absorbe des

    trophozoïtes, des schizontes, des rosaces, et des gamétocytes.

    Les éléments asexués sont digérés et seuls les gamétocytes ingérés

    poursuivent le cycle. Au niveau de l’estomac de l’insecte, les gamétocytes

    femelles évoluent en un macrogamète sans division nucléaire et le gamétocyte

    mâle se divise, en subit l’exflagellation qui donne plusieurs gamètes males

    mobiles. La fécondation donne un zygote mobile, ookinète, qui après avoir

    traversé l'épithélium intestinal, s’arrête sur la face externe du gastre, devient

    oocyte puis sporocyste où se forment les sporozoïtes. L’éclatement du

    sporocyste libère les sporozoïtes qui migrent dans les glandes salivaires où ils

    s'accumulent, rendant ainsi la femelle d’anophèle infectieuse [14,19,20].

    Lorsque cette femelle piquera un homme sain, elle injectera les sporozoïtes

    avec sa salive. Généralement, chez l’anophèle l’ensemble du cycle se déroule en

    10 à 20 jours, suivant la température et l’espèce plasmodiale en cause [21].

  • 13

    Figure 2 : Cycle de Plasmodium [18].

    2- Espèces plasmodiales

    a- Plasmodium falciparum :

    C’est l’espèce la plus pathogène et la seule responsable des cas mortels. Le

    développement du cycle chez le moustique exige une température supérieure à

    18 °C et un degré hygrométrique élevé, d’où leur existence dans les régions

    tropicales d’Afrique, d’Amérique Latine et d’Asie.

  • 14

    P.falciparum est l’espèce la plus rencontré chez la femme enceinte, elle est

    connue par sa résistance aux plusieurs antipaludiques [14,18,22,23,24].

    b- Plasmodium vivax :

    Sa transmission s’arrête à une température < 15°C [12]. P. vivax est très

    largement réparti sur tous les continents sauf en Afrique tropicale. Cela est

    expliqué par le fait que l’infection des hématies par P. vivax implique que

    l’Homme soit porteur du récepteur « Duffy Antigen receptor for Chemokines»

    (DARC), alors que ce récepteur est absent chez la plupart des populations noires

    d’Afrique.

    Le paludisme à P. vivax a été quasi éradiqué du monde tempéré ;

    L’endémie persiste dans une petite partie du Bassin méditerranéen (Moyen

    Orient, Turquie, Afrique du Nord), en Asie intertropicale, en Afrique (sauf

    Afrique de l’Ouest), Comores, Madagascar, régions Pacifique, et en Amérique

    latine [25].

    c- Plasmodium ovale :

    C’est l’espèce la plus rare. Il est présent surtout en Afrique Centrale et

    certaines régions pacifiques.

    d- Plasmodium malariae :

    Il sévit en Afrique tropicale avec quelques foyers en Afrique du Nord mais

    aussi en Amérique Centrale et du Sud (mer des Caraïbes et Golfe du Mexique)

    et en Asie (Iran). [14,18,24].

  • 15

    Tableau I : Caractères des différents plasmodiums [1].

    IV- LE VECTEUR : l’anophèle femelle

    1- Classification :

    Tableau II : Taxonomie de l’anophèle [17].

    II existe plus de 450 espèces d'anophèles (An), dont environ 80 sont

    vectrices de différents Plasmodium et dont une cinquantaine sont capables de

    transmettre le paludisme à l’homme [26].

    Les principales espèces sont :

    Embranchement Arthropodes

    Classe Insectes

    Ordre Diptères

    Sous-ordre Nématocères

    Famille Culicidae

    Sous-famille Anophèlinae

    Genre Anophèles

  • 16

    En Afrique : on a Anophèles gambiae, An. arabiensis, An. funestus

    et An. Moucheti. Au Maroc deux espèces sont été impliquées dans

    la transmission du paludisme à savoir : An. Labranchiae et

    An.sergenti [27].

    En Indonésie et dans le Pacifique : An. farauti et An. punctulatus,

    En Asie du Sud-Est : An. stephensi et An. maculatus,

    En Chine et au Moyen-Orient : An. sinensis, An. labranchiae et An.

    sergenti,

    En Amérique du Sud : An. albimanus et An. quadrimaculatus,

    Et dans l’ancien monde : An. maculipennis [26].

    2- Morphologie d’anophèle

    L’anophèle adulte mesure 5 à 20 mm. Il est fusiforme à pattes allongées et

    grêles avec une paire d’ailes. Son attitude est oblique au repos, tête en bas et

    possède une trompe piqueuse très élaborée.

    Le vol de l'anophèle est silencieux et seule la femelle est hématophage et

    pique la nuit, sa piqûre est indolore [26,27].

  • 17

    Figure 3 : Le vecteur du paludisme: Anophèles gambiae lors d’un repas sanguin [24].

    3- cycle de vie :

    L’anophèle femelle ne s’accouple généralement qu’une seule fois au cours

    de son existence et conservent le sperme dans des spermathèques tout au long de

    leur vie pour féconder tous les lots d’œufs successifs. D’où elle est obligée de se

    nourrir de sang pour assurer la maturation de ses œufs [12].

    Après chaque repas sanguin, la femelle se réfugie dans un abri, appelé gîte

    de repos, jusqu’au développement complet des œufs (cycle gonotrophique), cela

    se fait généralement en 48 heures. Quand les œufs sont prêts, elle se met à la

    recherche d’une collection d’eau (gîte larvaire).

    Une fois le gîte larvaire choisi, de chaque œuf sortira une larve qui a un

    mode de vie exclusivement aquatique. Après quatre stades larvaires, la larve

    donnera une nymphe d’où émergera un individu adulte (imago). La durée de vie

    d’une larve est variable il s’écoule entre 8 jours (à 31°C) et 20 jours (à 20°C).

    Après l’émergence, les femelles sont fécondées puis partent à la recherche d’un

  • 18

    repas de sang. Les mâles restent à proximité des gîtes larvaires attendant

    l’émergence de nouvelles générations des femelles pour les féconder [19,21].

    V- MODALITES DE CONTAMINATION

    1- Paludisme autochtone :

    C’est celui qui sévit en zone d’endémie. L’évaluation de sa fréquence

    permet de définir sa présentation épidémiologique : sporadique, endémique,

    endémoépidémique ou épidémique. La transmission est dite :

    Stable si la circulation vectorielle anophélienne est pérenne,

    intermédiaire si elle est saisonnière courte,

    instable si elle est très courte ou aléatoire d’une année à l’autre.

    La mesure d’indices spléniques et parasitologiques permet de définir le

    niveau endémique : hypo-, méso- ou halo-endémique [3,19,21].

    2- Paludisme d’importation

    Il est observé dans les pays tempérés, chez des voyageurs en provenance

    des zones d’endémie. Depuis 1985, date à partir de laquelle les souches

    plasmodiales chloroquinorésistantes ont émergé en Afrique centrale et

    occidentale, le nombre des cas de paludisme d’importation n’a cessé de croître

    en Europe et dans les pays non endémique [3]. Toute symptomatologie, surtout

    fébrile, au retour d’une zone d’endémie doit faire suspecter un paludisme et

    impose un diagnostic parasitologique d’urgence [28].

    3- paludisme transfusionnel :

    Les quatre espèces plasmodiales pathogènes pour l’homme peuvent être

    transmises par transfusion, et la contamination peut se produire avec un très

    faible nombre de parasites. La transmission peut avoir lieu non seulement à

    partir de la transfusion de culots globulaires, mais serait également possible à

  • 19

    partir des autres produits sanguins labiles (plaquettes, plasma frais, concentrés

    leucocytaires...).

    En zone d’endémie, la prévalence des donneurs de sang impaludés varie de

    7 à 30 %, alors que dans les zones non endémiques le risque de paludisme post-

    transfusionnel reste très faible.

    La période d’incubation après la transfusion infectante varie de 12 jours (P.

    falciparum) à 3-4 semaines (P. vivax). Le parasite entraîne une infection

    pouvant être sévère voir fatale par accès pernicieux si l’espèce incriminée est P.

    falciparum [12,29].

    On en rapproche aussi au paludisme accidentel des professionnels exposés

    au sang, post-greffe et celui des toxicomanes échangistes [20].Une récente revue

    de la littérature estime à vingt-et-un le nombre de cas de paludisme rapportés

    chez des victimes aux accidents exposant au sang n’ayant pas séjourné en zone

    d’endémie(18 à P. falciparum et 3 à P. vivax)[30].

    4- paludisme congénital :

    Le paludisme congénital résulte de la contamination transplacentaire du

    fœtus. Il est le plus souvent latent, décelé par la présence transitoire de

    plasmodies dans le sang du cordon ou dans le sang périphérique de l’enfant.

    Deux formes cliniques sont individualisées :

    le paludisme congénital infestation constaté dans 20 % à 30 % des

    cas, il est défini par une parasitémie cliniquement asymptomatique et

    spontanément abortive en 2 ou 3 jours.

    le paludisme congénital maladie: plus rare (3 % des cas), mais

    plus grave, décrit comme une parasitémie persistante, avec des

  • 20

    manifestations cliniques pathologiques au cours des sept premiers jours de

    vie et d’évolution spontanée souvent fatale [31,32,33].

    5- paludisme d’importation anophélienne ou paludisme des aéroports :

    Il est observé chaque année chez des sujets n’ayant pas effectué de voyage

    en zone d’endémie, mais ayant séjourné à proximité d’un aéroport, généralement

    en période estivale. On en rapproche des cas anecdotiques de paludisme

    d’importation touchant des sujets contaminés à distance des aéroports par des

    anophèles transportés dans des bagages de voyageurs au retour de pays

    tropicaux[3].

  • 21

    C- PHYSIOPATHOLOGIE ET IMMUNITE ANTIPALUSTRE

    I- PHYSIOPATHOLOGIE

    1- Formes simples

    La fièvre qui est le principal symptôme de l’accès palustre simple est due à

    l’éclatement des rosaces qui libèrent dans le torrent circulatoire du pigment

    malarique (hémozoïne) ; celui-ci se comporte comme une véritable substance

    pyrogène. A la suite de l’éclatement des rosaces, il y a lyse des hématies ce qui

    donne l’anémie.

    Le foie intervient par l’activité phagocytaire des cellules de Kuppfer, et par

    la transformation de l’hémoglobine libérée en bilirubine libre, d’où le subictère

    [34,35]. (Annexe 2)

    2- Accès pernicieux

    L'accès pernicieux, dû exclusivement à Plasmodium falciparum, est

    essentiellement le résultat de la séquestration des hématies parasitées dans les

    vaisseaux au niveau des différents organes, en particulier du cerveau. II y a une

    formation de rosettes, par adhérence des hématies parasitées entre elles et avec

    des hématies saines.

    En effet, la présence de tubérosités (ou knobs), à la surface des hématies

    ralentit la circulation par des phénomènes d'autoagglutination et de

    cytoadhérence par des ligands réagissant avec des récepteurs des endothéliums

    vasculaires. Ceci provoque une anoxie [31], provoquant une obnubilation puis

    un coma fébrile. Mais d'autres phénomènes interviennent comme la production

    de cytokines, le TNF (tumor necrosis factor) étant un marqueur de gravité du

    paludisme [36]. (Annexe 2)

  • 22

    II- IMMUNITE ANTIPALUSTRE

    1- Immunité innée contre le paludisme

    Elle s’observe dans certaines hémoglobinopathies telles que la

    drépanocytose, la thalassémie et le déficit en G6PD. Dans ces cas il y a une

    inhibition du développement plasmodial.

    Les sujets ne présentant pas d’antigènes Duffy sur leurs hématies (fréquent

    dans la race noire) sont naturellement résistants à l’infection par P.vivax [37].

    2- Immunité acquise

    Chez les populations des régions où le paludisme est endémique, l’infection

    palustre induit de fortes réponses immunes humorales, impliquant une

    production à prédominance d’IgM et d’IgG mais aussi d’autres isotypes

    d’immunoglobuline, notamment les sous classes d’IgG : IgG1, IgG2, IgG3 et

    IgG4. Bien qu’une grande proportion de ces immunoglobulines soit non

    spécifique au paludisme, reflétant une activation polyclonale de la lignée

    lymphocytaire B, plus de 5% d’entre elles sont des anticorps spécifiques qui

    réagissent avec une grande variété d’antigènes des parasites [38].

    Après plusieurs années d'infections répétées, l’homme peut acquérir une

    immunité, appelée prémunition. Souvent, cette immunité n'est pas stérilisante

    car il n'a jamais été démontré de façon formelle de disparition totale des

    parasites de P. falciparum en l'absence de traitement, aussi elle est labile car la

    prémunition disparait en l'absence de contacts fréquents entre l'être humain et le

    parasite (elle disparait après 12 à 24 mois si le sujet quitte la zone

    d'endémie)[39].

    http://fr.wikipedia.org/wiki/Labile

  • 23

    D- CLINIQUE DU PALUDISME

    I- SYMPTOMATOLOGIE COMMUNE

    Ses aspects sont communs aux quatre espèces plasmodiales, même si l’on

    observe des nuances ou des degrés dans l’intensité des signes selon le parasite.

    Aussi l’âge de l’hôte (enfant, adulte) ou son état (grossesse, immunodépression)

    impriment des particularités cliniques [20].

    1- Accès de primo-invasion

    a- incubation :

    Encore appelée phase prépatente, elle dure habituellement de 7 à 21 jours,

    mais parfois plusieurs mois. Elle est cliniquement muette [20].

    b- Invasion :

    Elle est marquée par une fièvre progressivement croissante atteignant 39 à

    40 °C, et qui devient continue. Le tableau clinique est celui d’un embarras

    gastrique fébrile : anorexie, douleurs abdominales, nausées, parfois

    vomissements, diarrhée, associés à des céphalées et myalgies [3,18].

    2- Accès palustres

    Ils peuvent suivre immédiatement une primo-invasion pour P. falciparum,

    alors que pour les autres espèces, ils ne peuvent se manifester qu’après plusieurs

    semaines, mois ou années.

    Ces accès sont caractérisés par la succession de 3 stades à un rythme

    particulier :

    stade de frissons : frissons violents avec sensation de froid intense et une

    fièvre à 39°C.

    stade de chaleur : sans frissons et une fièvre à 40-41°C.

  • 24

    Stade de sueurs : des sueurs abondantes et une température à 37°C.

    Le rythme des accès est variable selon l’espèce plasmodiale. Ils surviennent

    tous les 2 jours lorsque la schizogonie est de 48 heures et réalisent alors une

    fièvre tierce (P. vivax, P. ovale et P. falciparum), ou bien tous les 3 jours pour

    une schizogonie de 72 heures et déterminent une fièvre quarte (P. malariae)

    [12,13, 19,20 ,21].

    II- PARTICULARITES SYMPTOMATIQUES LIES AUX ESPECES

    1- Paludisme à P. vivax

    Le P.vivax est responsable de la fièvre tierce bénigne. L’accès de primo-

    invasion survient après une incubation silencieuse de 12 à 21 jours, parfois de 6

    à 9 mois pour certaines souches. Des accès de reviviscence schizogonique

    peuvent survenir pendant 3 à 5 ans.

    La symptomatologie est typique, avec rarement des tableaux de fièvre

    rémittente [3].

    2- Paludisme à P. ovale

    Proche du paludisme à P. vivax, il en partage la bénignité. L’incubation

    varie de 15 jours à plusieurs mois. Les rechutes évoluent sur un rythme tierce.

    Elles se répètent rarement en l’absence de réinfection, mais parfois jusqu’à 5 à 7

    ans après le dernier séjour en zone d’endémie [3].

    3- Paludisme à P. malariae

    Il se distingue par le rythme de quarte des accès de fièvre périodique, une

    longue durée d’incubation environ 3 semaines, et par une complication que l’on

    rencontre chez l’enfant : la néphrite quartane qui est une néphropathie

  • 25

    glomérulaire sévère, révélée, après des années d’infection chronique, par un

    syndrome néphrotique impur chez l’enfant [3,4].

    4- Paludisme à P. falciparum

    P. falciparum est la seule espèce plasmodiale à pouvoir évoluer vers un

    accès grave et être la cause directe de la mort par défaillance multiviscérale. Son

    incubation chez l’Homme est de 12 jours [3]. Il est responsable de fièvre tierce

    maligne, de la fièvre bilieuse hémoglobinurique, et du Paludisme viscéral

    évolutif. [3,14,20].

    a- Paludisme viscéral évolutif (PVE)

    Il survient chez des sujets insuffisamment prémunis et exposés à des

    infestations répétées (enfants autochtones, adulte expatrié sous

    chimioprophylaxie insuffisamment efficace). La plupart des cas sont dus à

    P.falciparum, rarement à d’autres plasmodies. Le PVE associe une anémie, une

    dyspnée, une splénomégalie, une fièvre modérée et un retard staturopondéral

    chez l’enfant [12].

    b- Fièvre bilieuse hémoglobinurique (FBH)

    Elle survient chez le sujet ayant déjà fait des accès fébriles, dus a P.

    falciparum qui ont été traités par la quinine [31,40].

    La FBH est une réaction immunologique à la prise de quinine et non une

    complication directe du paludisme, ce qui entraine une hémolyse intravasculaire

    aiguë avec hémoglobinurie macroscopique et une anémie profonde, associée à

    une parasitémie nulle ou faible et elle se traduit par la survenue brutale d’une

    fièvre élevée, rapidement suivie de l’émission d’urines de couleur rouge porto et

    d’un ictère [12].

  • 26

    Plusieurs études ont montré que les nouveaux aminoalcools, en particulier

    halofantrine et méfloquine, sont responsable dans la plupart des cas de la FBH

    [12,41,42].

    PVE et FBH sont des formes sévères du paludisme à P. falciparum, mais

    restent classés en dehors des accès palustres graves [43].

    c- Paludisme grave à P.falciparum

    c-1- Critères de gravite du paludisme

    L’OMS a défini des critères de gravité du paludisme (tableau III). La

    présence d’un ou plusieurs de ces critères cliniques ou biologiques, associé à la

    présence de P. falciparum dans le sang, fait porter le diagnostic d’accès palustre

    grave [3].

  • 27

    Tableau III : Critères de gravité de paludisme [31].

    c-2- Accès pernicieux ou neuropaludisme

    L’accès pernicieux est dû au tropisme cérébral de P. falciparum. Il survient

    à tout âge mais il atteint surtout l’enfant de 4 mois à 4 ans.

    Le début de l’accès pernicieux peut être progressif en quelques heures ou

    plus brutal, avec l'apparition de fortes céphalées puis d'une prostration. Le

    patient présente une fièvre à 40°C, une anémie sévère, une tachycardie et des

    troubles neurologiques assez marqués, de la confusion au coma profond calme,

    avec des crises hypertoniques, des convulsions et une abolition des reflexes,

    Cliniques biologique

    Prostration Hémoglobinurie

    Troubles de conscience

    (score de Glasgow < 9)

    Hémoglobine < 5 g/dl

    Anémie

    Hématocrite < 15 %

    Détresse respiratoire

    (dyspnée) Hypoglycémie < 2,2 mmol/I

    Convulsions répétées

    Œdème pulmonaire

    PH 5 mmol/I

    Saignement anormal Hyperparasitémie > 4 % chez le sujet non

    immun

    Ictère clinique

    Diurèse < 400 ml/24h

    Insuffisance rénale Créatininémie < 265µmol/l

    (ou bilirubine > 50 µmol)

  • 28

    avec un score de Glasgow modifie (inférieur à 9) pour l’adulte et un score de

    Molyneux inférieur à 2 pour l’enfant [31,43].

    E- DIAGNOSTIC BIOLOGIQUE DU PALUDISME

    Le paludisme est une urgence parasitologique dont la prise en charge

    nécessite un diagnostic rapide, précis et sûr afin de mettre en place un traitement

    adapté [12,44].

    I- ELEMENTS D’ORIENTATION

    1- Signes cliniques

    A cause de la diversité des tableaux cliniques, le diagnostic du paludisme

    est une urgence médicale, donc toute suspicion clinique de paludisme doit faire

    pratiquer immédiatement et en urgence une recherche de Plasmodium. Ainsi que

    toute fièvre au retour d’une zone d’endémie doit être suspecte de paludisme du

    fait de son évolution toujours possible vers la forme neurologique (accès

    pernicieux palustre ou neuropaludisme [45].

    2- Perturbations biologiques :

    Certaines modifications de l’hémogramme sont très évocatrices du paludisme :

    Anémie hémolytique due à l’hémolyse des hématies infectés,

    Leucopénie qui est habituellement survenue lors des accès palustre,

    Thrombopénie qui est fréquente au cours du paludisme de l’enfant.

    Autres paramètres peuvent être indicateurs des accès palustre :

    La C protéine réactive peut s’élever de façon très importante lors des

    accès palustre.

    Une hyperbilirubinimie qui est principalement secondaire à une

    hémolyse intravasculaire, et rarement à une attente hépatique [12,41,46].

  • 29

    II- DIAGNOSTIC PARASITOLOGIQUE

    1- Frottis mince :

    Le frottis mince(FM) (1-1,5 μL de sang étalé sur 250-600 mm2) est la

    méthode de référence pour l’étude morphologique des hématozoaires et pour le

    diagnostic différentiel entre les espèces plasmodiales [15]. Il est coloré selon la

    méthode de May-Grünwald-Giemsa (MGG) après fixation à l’alcool.

    L’examen du frottis doit permettre de reconnaître l’hématozoaire, d’en

    préciser l’espèce et le stade de développement et d’en apprécier la quantité [47].

    Cependant, les parasites sont retrouvés à l’intérieur des globules rouges

    formés d’un noyau coloré. en rouge et d’un cytoplasme bleu. Ils contiennent des

    pigments bruns noirâtres dans le cytoplasme (pigment malarique), et dans le

    cytoplasme de l’hématie parasitée se trouvent les granulations de Schüffner ou

    les taches de Maurer selon l’espèces plasmodiale [15].

    Les critères d’identification de l’espèce en cause sont

    principalement :(tableau IV)

    La taille et la forme de l’hématie parasitée,

    La présence ou non des grains de Schüffner ou de taches de

    Maurer,

    Certains aspects morphologiques spécifiques d’espèce.

    Le FM présente l’avantage par rapport à la goutte épaisse de mieux

    quantifier l’importance de la parasitémie [48].

    Il existe des kits de coloration rapide équivalente à celle du MGG : RAL

    555, Hémacolor, Diffquick, qu’ayant une qualité suffisante pour un diagnostic

    de routine.

  • 30

    Tableau IV : Conduite pratique pour identifier un Plasmodium [15].

    Frottis sanguin coloré à l’hémacolor. Gamétocyte femelle de P. falciparum

    (obj x 100).

    Frottis coloré à l’hémacolor. Trophozoïte de P. ovale. Granulation, de Schüffner. Hématie ovalisée et frangée

    (obj x 100).

  • 31

    Figure 4: différents espèces plasmodiales sur des frottis sanguins [15]

    2- La goutte épaisse (GE)

    Elle consiste à examiner quelques µl de sang après hémolyse des globules

    rouges et coloration selon la méthode de Giemsa. La sensibilité de cette

    technique est de 10 à 20 hématies parasitées par microlitres de sang [48]. Cette

    sensibilité est de 10 à 20 fois supérieure à celle du FM [12].

    Les parasites sont cependant plus difficiles à identifier et leurs rapports

    avec les hématies parasitées ont disparu avec la lyse de ces dernières. Seuls les

    leucocytes et les parasites sont visibles [15].

    La réalisation de la GE est un peu délicate et nécessite une bonne

    expérience pour la lecture, mais elle reste la technique de référence pour l’OMS

    dans le diagnostic du paludisme [15].

    Frottis coloré à l’hémacolor. Schizonte en bande équatoriale de

    P. malariae (obj x 100).

    Frottis coloré à l’hémacolor. Deux trophozoïtes de P. vivax avec cytoplasme amiboïde. L’hématie de taille plus grande contient de nombreuses granulations de

    Schüffner (obj x 100).

  • 32

    III- NOUVELLES TECHNIQUES :

    1- Tests de diagnostic rapide immuno-chromatographiques

    Il s’agit des trousses de détection prêtes à l’emploi qui permettent en

    quelques minutes et sans matériel particulier de mettre en évidence la présence

    du plasmodium. La détection d’antigènes parasitaires se fait par immunocapture

    à l’aide des bandelettes réactives sensibilisées par des anticorps monoclonaux

    spécifiques : HRP2 (Histidin Rich Protein 2) de Plasmodium falciparum, pf-

    LDH (Plasmodium falciparum Lactate Déshydrogénase), pv-LDH (Plasmodium

    vivax Lactate Déshydrogénase), anticorps anti-aldolase. En pratique, une goutte

    de sang veineux est déposée sur la bandelette. Après un délai de révélation, des

    bandes de précipitation apparaissent signant la présence de Plasmodium

    falciparum ou P. vivax. Cet outil, simple d’utilisation et d’interprétation ne doit

    jamais être utilisé isolément. Sa sensibilité et sa spécificité, notamment pour

    Plasmodium ovale, quelles que soient les marques ne sont jamais de 100 %

    [48,49,50].

    2- Tests de diagnostic rapide par Polymerase Chain Reaction (PCR)

    Ces tests consistent à la détection du génome de Plasmodium par biologie

    moléculaire (PCR), La cible de l’amplification est habituellement tout ou partie

    de la petite sous-unité de l’ARN ribosomal (SSU rRNA). Plusieurs techniques

    ont été développées, elles présentent toutes un certain nombre d’avantages tel

    que : une spécificité voisine de 100 %, sensibilité supérieure à 90% [50].

    3- Technique Quantitative Buffy Coat (QBC)

    La technique QBC combine une centrifugation et coloration fluorescente

    des acides nucléiques par l'acridine orange. Elle permet la visualisation des

  • 33

    plasmodiums entre les couches d’hématies d’une part, et de leucocytes et

    plaquettes, d’autre part. La spécificité de la technique pour la détection de

    P.falciparum est élevée, supérieure à 93%. Elle chute à 52% pour les infections

    causées par les autres espèces plasmodiales, surtout s’il s’agit de formes

    avancées dans leur cycle parasitaire. C’est une technique rapide mais nécessite

    un matériel complexe et un expérimentateur habitué, notamment pour faire un

    diagnostic d’espèce [12,50].

    IV- Sérologie

    Plusieurs techniques peuvent être utilisées pour déceler la présence

    d’anticorps antipalustres dans le sang. Ainsi, on peut citer :

    - L’immunofluorescence,

    - L’hémagglutination,

    - Enzyme-linked immunosorbent, assay (ELISA),

    - Immunotransfert [12].

    Ces différentes techniques n'ont pas d'intérêt pour un diagnostic d'urgence.

    La sérologie est surtout utilisée sur le plan épidémiologique et pour le diagnostic

    de certaines formes cliniques tel le Paludisme viscéral évolutif, au cours duquel

    le taux d'anticorps est très élevé.

  • 34

    F- TRAITEMENT ET PROPHYLAXIE.

    I- TRAITEMENT

    1- Classification des antipaludiques

    On distingue 2 grandes classes :

    Les schizonticides : qui agissent sur les formes érythrocytaires (en cours

    de cycle évolutif). Ils comprennent des produits à action rapide (amino-4-

    quinoleines, amino-alcools, sesquiterpènes) mais dont le mécanisme de

    résistance apparaît lentement et d'autres à action lente (antifoliques,

    antifoliniques) mais dont la résistance apparaît rapidement.

    Les gamétocytocides : qui détruisent les gamétocytes (en fin de cycle chez

    l'homme, qui ne peuvent évoluer que chez le moustique), ce sont des

    amino-8-quinoleines, en particulier la primaquine [31].

    a- Schizonticides érythrocytaires

    Amino-4-quinoleines : chloroquine (NIVAQUINE®), amodiaquine

    (FLAVOQUINE®)

    Amino-alcools : quinine (QUINIMAX®, SURQUINA®, QUININE

    LAFRAN), méfloquine (LARIAM®), halofantrine (HALFAN®),

    luméfantrine [43].

    Les dérivés quinoléiques et les amino-alcools interfèrent avec l’utilisation

    de l’hémoglobine dans la vacuole nutritive du parasite en inhibant la formation

    de l’hémozoïne [51].

    Sesquiterpènes : artémisinine et ses dérivés : cette classe d’antipaludiques

    est de type peroxyde interfère aussi avec l’utilisation de l’hémoglobine, par

    libération de radicaux libres, toxiques pour le parasite. On trouve

  • 35

    dihydroartémisinine, artéméther (PALUTHER®), artèsunate

    (ARSUMAX®),

    Antimétabolites : Ils bloquent la division du noyau de l’hématozoaire. Ce

    groupe comprend :

    Les Antifoliques : sulfadoxine, dapsone ; Ils agissent au niveau de la voie

    de synthèse des folates en inhibant la dihydroptéroate synthétase (DHPS)

    qui produit l’acide folique.

    Les Antifoliniques : proguanil (PALUDRINE®), pyriméthamine

    (MALOCIDE®) ; ils inhibent la dihydrofolate réductase (DHFR) qui

    produit l’acide folinique.

    Les Antibiotiques : tétracyclines, dont doxycycline (DOXYPALU®,

    VIBRAVEINEUSE®) ; clindamycine, ces molécules peuvent inhiber la

    synthèse protéique par inhibition de certaines fonctions de l’apicoplaste.

    Les Analogues de l’ubiquinone (naphtoquinones) : atovaquone est un

    inhibiteur puissant des fonctions mitochondriales en bloquant la chaîne de

    transfert d’électrons au niveau de son enzyme-clé, la dihydroorotate

    deshydrogénase (DHOdase). Elle a peu d’impact thérapeutique lorsqu’elle

    est utilisée seule. En combinaison avec un antimétabolite (proguanil), on

    observe une intéressante synergie d’action grâce à une inhibition

    séquentielle de la synthèse des pyrimidines [43,51].

    b- Schizonticides intra-hépatiques

    Amino 8 quinoléines : représenté par primaquine qui agit par induction des

    altérations dans l’ultrastructure de la membrane mitochondriale, ce qui

    perturbe le métabolisme du parasite, D’autres mécanismes sont évoqués,

    tels que la production de radicaux libres [52].

  • 36

    Antimétabolites : proguanil, cyclines.

    c- Gamétocytocides :

    Amino 8 quinoléines : primaquine, tafénoquine [43 ,51].

    2- Schémas thérapeutiques

    Les schémas thérapeutiques proposés dans le cas des accès palustres sont

    récapitulés dans le tableau suivant :

  • 37

    Tableau V : Médicaments antipaludiques utilisables en traitement curatif

    [43].

    Médicaments (spécialités)

    Accès à P. vivax, P. ovale, P.

    malariae

    Accès simple à P. falciparum

    Chloroquino-sensible

    Accès simple à P. falciparum

    Chloroquino- résistant

    Accès grave à P. falciparum

    Quinino-sensible

    Accès grave à P. falciparum

    Quinino-résistant

    Quinine QUINIMAX®

    8mg/kg/j toutes les

    8 heures X 7 j Idem, IV en

    urgence Idem + cyclines

    Chloroquine NIVAQUINE®

    25 mg/kg en 3 jours,10, 10, 5 mg /kg/j

    Idem ou 500 mg/j x 5 j

    Amodiaquine FLAVOQUINE®

    30 mg/kg en 3 j Idem

    Sulfadoxine Pyriméthamine

    FANSIDAR®

    3 cp en une prise x 1j enfant : 1 cp/10 kg

    Méfloquine LARIAM®

    25 mg/kg en 2 ou 3

    prises x 1 j

    Halofantrine HALFAN®

    24 mg/kg en 3 prises

    x 1j 2 éme cure à J7

    Doxycycline DOXYPALU®

    VIBRAVEINEUSE®

    200 mg/j + quinine IV

    Arthémeter Luméfantrine

    RIAMET® COARTEM®

    4 cp /prise en 6 prises à H0,

    H12,H24,H36,H48,H60 dose adulte

    Atovaquone Proguanil

    MALARONE®

    4 cp en 1 prise x 3 j dose adulte

    Artéméther IM PALUTHER®

    3,2 mg/kg x1j + 1,6 mg/kg/jx4j

    Artésunate-amodiaquine

    ASAQ® COARSUCAM®

    AS : 4 mg/kg/j

    AQ : 10 mg/kg/j x 3 j

  • 38

    3- La résistance aux antipaludiques

    La chimiorésistance est l'un des obstacles majeurs qui entrave la lutte

    contre le paludisme. Cette résistance est apparue depuis plusieurs années chez

    l’espèce P. falciparium surtout pour la chloroquine (15 ans après leur mise sur le

    marché) et les antifolates (1 an après leur mise sur le marché). L’émergence de

    cette résistance dans les pays tropicaux rend difficile le traitement antipaludique

    et aggravant ainsi le problème de la santé publique par l’augmentation de la

    mortalité liée au paludisme. Le P. vivax a acquis précocement la résistance aux

    antifoliniques et, depuis quelques années, en Asie, à la chloroquine. Cette

    dernière reste généralement efficace sur P.vivax, P.ovale, P.malariae. La

    chimiorésistance représente l’une des causes possible des échecs thérapeutiques,

    mais aussi l’orientation vers les associations antipaludiques [12,53].

    II- PROPHYLAXIE

    Le but de la prophylaxie antipaludique est de prévenir le paludisme chez un

    sujet sain, donc l’idéal est d’éviter l’infestation par le paludisme en se

    protégeant au maximum contre les piqures de moustique et/ou en prenant une

    chimioprophylaxie adéquate.

    1- Protection contre les moustiques

    a- Réduction de la densité de moustiques

    a-1- Une lutte antilarvaire

    Elle est bénéfique quand les gîtes sont limités en nombre, facilement

    identifiables et faciles d’accès. Les méthodes utilisées dans la lutte antilarvaire

    se classent en quatre catégories :

  • 39

    L’aménagement de l’environnement : travaux de drainage et

    l’hygiène péridomestique ;

    La lutte chimique : la plus utilisée, traitement des gîtes larvaires

    avec des insecticides chimiques ;

    La lutte biologique : utilisation de prédateurs ou de bactéries

    entomopathogènes exemple Bacillus thuringiensis (Bti).

    La lutte génétique : réduction de la densité des populations de

    moustiques par modification de leur patrimoine génétique ou par

    leur autodestruction. Elle concerne essentiellement le lâcher de

    mâles stériles dans certaines régions bien délimitées [26].

    a-2- Une lutte imagocide.

    Peut se faire de deux manières :

    Aspersion intradomiciliaire des insecticides tels que le DDTqui a été

    remplacé par des organophosphorés moins toxiques pour l’environnement

    (malathion, bendiocarb ou deltaméthrine) [54], soit des champignons

    entomopathogènes (Beauveria bassiana et Metarhizium anisopliae) [55].

    Pulvérisations spatiales extradomiciliaires de pyréthrinoïdes ou

    d’organophosphorés [26].

    b- Réduction du contact Homme-vecteur

    b-1- Moustiquaires imprégnées d’insecticides

    Bien que les moustiquaires non traitées soient depuis longtemps utilisées

    pour se protéger des piqûres de moustiques, l’avènement de moustiquaires

    imprégnées d’insecticides a considérablement augmenté leur efficacité, ajoutant

    à l’effet de barrière physique, un effet répulsif et létal vis-à-vis des

    moustiques[56].En effet, l’effet répulsif des pyréthrinoïdes empêche le

  • 40

    moustique de se gorger au travers de la moustiquaire et d’y pénétrer lorsque

    celles-ci sont trouées après un certain temps d’utilisation. L’effet létal sur les

    moustiques est important mais variable selon l’insecticide choisi et l’espèce

    cible.

    L’utilisation de rideaux imprégnés peut également constituer une méthode

    complémentaire aux moustiquaires imprégnées [26].

    b-2- Protection vestimentaire

    Le port de vêtements couvrants et amples (chemise à manches longues,

    pantalon et chaussettes) à partir du coucher du soleil assure une efficacité

    incomplète. Alors qu’il est recommandée d’imprégner les vêtements par de la

    perméthrine, la durée d’efficacité de l’imprégnation est de l’ordre de cinq

    lavages [26].

    b-3- Répulsifs cutanés

    Ce sont des produits qui éloignent les moustiques sans toutefois les tuer, la

    durée d’efficacité est au moins six heures s’ils sont utilisés à des concentrations

    suffisantes. Actuellement, l’Afssaps (Agence française de sécurité sanitaire des

    produits de santé) a donné un avis favorable uniquement pour des produits

    utilisant comme principe actif un des quatre répulsifs de synthèse suivants [26] :

    • Diéthyltoluamide, ou DEET,

    • P-Menthane-3,8 diol, ou citriodiol,

    • Icaridine, ou KBR 3023,

    • Ethyl-butyl-acetyl-amino-propionate, ou IR 3535.

    Les critères de choix doivent se faire selon la substance active, son dosage,

    l’âge des utilisateurs et selon l’état physiologique (grossesse, allaitement).

  • 41

    2- LA CHIMIOPROPHYLAXIE

    a- Principes

    Aucun moyen préventif n’assure à lui seul une protection totale. Il convient

    donc d’insister sur la nécessité de l’observance simultanée d’une protection

    contre les piqûres de moustiques associée à la chimioprophylaxie.

    Le choix d’une chimioprophylaxie doit tenir compte de :

    zones visitées : qui sont classées en groupe 1, 2 et 3 selon

    chloroquinorésistance (annexe 3), on distingue :

    Groupe 1 : zones sans chloroquinorésistance.

    Groupe 2 : zones de chloroquinorésistance.

    Groupe 3 : zones de prévalence élevée de

    chloroquinorésistance ou multirésistance.

    l’intensité de la transmission,

    durée du séjour,

    l’âge et poids du voyageur,

    une grossesse en cours ou future.

    des antécédents pathologiques [12].

    La prophylaxie doit être poursuivie lors de la sortie de la zone d’endémie

    pour une durée variable selon la molécule prescrite. [57].

    b- Les schémas prophylactiques

    Les schémas prophylactiques recommandés par l’agence sanitaire

    française, institut de veille sanitaire(InVES), d’un voyageur non immun se

    rendant en zone d’endémie, sont résumés dans le tableau suivant :

  • 42

    Tableau VI : Chimioprophylaxie antipaludique chez l’adulte selon les groupes de

    chimiorésistances [57,58]

    groupe de

    chimiorésistance Adulte Femme enceinte Enfant

    Groupe 1

    CHLOROQUINE

    (Nivaquine®)

    100 mg/j

    Séjour + 4 semaines après

    CHLOROQUINE

    (Nivaquine®)

    1,5 mg/kg/j

    Séjour + 4 sem. après

    Groupe 2

    CHLOROQUINE + PROGUANIL

    100 mg/j 200 mg/j

    (Nivaquine® + Paludrine®) ou (Savarine®)

    Séjour + 4 semaines après

    CHLOROQUINE +

    PROGUANIL

    1,5 mg/kg/j + 3 mg/kg/j

    (Nivaquine®)

    (Paludrine®)

    Séjour + 4 sem après

    ATOVAQUONE

    250 mg

    +

    PROGUANIL 100 mg

    (Malarone®) 1 cp/j

    Séjour + 1 semaine

    après

    ATOVAQUONE 250

    mg

    +

    PROGUANIL 100mg

    Peut être envisagée si

    nécessaire

    - Si < 11kg :idem ci-dessus

    - Si $ 11 kg et < 40 kg :

    ATOVAQUONE 62,5 mg

    + PROGUANIL 25 mg

    (Malarone enfant®)

    1 cp/10 kg/j

    Séjour + 1 sem. après·

    Groupe 3

    MEFLOQUINE 250 mg (Lariam®)

    1 cp/semaine

    10 j avant + séjour + 3 semaines après

    Si >15 kg :

    MEFLOQUINE (Lariam

    ®)

    5 mg/kg/sem.

    10 j avant + séjour + 3

    sem. après

    DOXYCYCLINE

    (monohydrate de

    doxycycline:

    Doxypalu®,

    Granudoxy®)

    100 mg/j

    Séjour + 4 semaines

    après

    Si > 8 ans

    DOXYCYCLINE

    (monohydrate de

    doxycycline)

    50 mg/j si < 40 kg

    séjour + 4 sem. après

  • 43

    3- VACCINATION

    La découvert d’un vaccin efficace pourrait s’avérer être le meilleur moyen

    de lutte contre le paludisme. Plusieurs antigènes «candidats» ont été

    essayés, mais aucun n’a encore montré une efficacité suffisante et durable qui

    soit utile pour la santé publique [59].

    a- ESPOIRS ET CONTRAINTES

    Les obstacles à la mise au point de vaccins antipalustres comprennent

    l’existence de plusieurs espèces de parasites, de plusieurs stades de

    développement du parasite et de différents mécanismes d’évasion immunitaire

    (diversité antigénique), ainsi que le manque des intérêts industriels

    pharmaceutiques.

    Néanmoins, Il existe trois grandes raisons de croire en la faisabilité d’un

    vaccin antipalustre :

    L’existence d’une immunité acquise avec l’âge par les populations

    vivant en zone d’endémie élevée ;

    Les travaux d’injection de sporozoïtes irradiés ont conduit à une

    certaine protection contre l’infection que ce soit chez la souris, le singe

    ou l’homme ;

    Le transfert passif d’immunoglobulines à des individus naïfs infectés

    par P. falciparum permet d’éliminer le parasite du sang [12, 59,60].

    b- LES CANDIDATS VACCINS

    b-1- Vaccins contre les stades pré-érythrocytaires

    Ils doivent induire des réponses immunes visant les sporozoïtes ou les

    schizontes hépatiques. Le but est d’empêcher toute libération de mérozoïtes dans

  • 44

    le sang, pour induire une immunité chez des individus non-immuns [61]. On

    distingue :

    b-1-1- Vaccins contre la CSP (circum sporozoite protein)

    Ce sont des vaccins qui reproduisent une immunité acquise avec des

    sporozoïtes irradiés en provoquant une réponse anticorps contre la CSP (circum

    sporozoite protein). Parmi ces vaccins, seul le RTS, S/AS02A qui a donné les

    résultats les plus encourageants, selon une étude effectuée récemment au

    Mozambique : l'efficacité de ce vaccin contre les manifestations cliniques de

    malaria est de 30%, 45 % contre la première infection par le P. falciparum, et de

    58 % contre les formes sévères de la maladie. Mais d’autres études d'efficacité

    sont nécessaires avant de les soumettre à l'approbation des autorités [62,63].

    b-1-2- Vaccins contre les schizontes hépatiques

    Ces vaccins visent à induire une réponse cellulaire T contre les schizontes

    hépatiques. Ils incluent un ou plusieurs antigènes. Plusieurs vaccins de ce type

    sont en cours de développement [59].

    b-2- Vaccins contre les stades sanguins asexués

    Ils viseraient soit à empêcher l’invasion des hématies, soit à empêcher

    l’évolution des infections vers les formes cliniques et potentiellement graves de

    la maladie. La principale cible de vaccins contre les stades sanguins asexués est

    le mérozoïte.

    Les principaux antigènes candidats vaccins ayant atteint le stade des essais

    cliniques sont MSP-1 (Merozoite Surface Protein- 1), MSP-3, AMA-1 (Apical

    membrane antigen Ŕ 1), EBA-175 (Erythrocyte binding antigen) et GLURP

  • 45

    (Glutamate rich protein), mais seul le MSP-1qui a subi à des essais chez

    l’homme [64,65].

    b-3- Vaccins bloquant la transmission

    Ce sont des vaccins dirigés contre les antigènes des stades sexués du

    parasite en empêchant la fécondation dans l’estomac de l’anophèle et en

    bloquant le développement du parasite. Ces vaccins visent à limiter la

    transmission des parasites de l’homme au vecteur, et secondairement du vecteur

    à l’homme [59,66].

  • 46

    PPaarrttiiee IIII ::

    PPAALLUUDDIISSMMEE EETT

    GGRROOSSSSEESSSSEE

  • 47

    A- LE PALUDISME AU COURS DE LA GROSSESSE

    La grossesse est considérée comme une période à haut risque en matière du

    paludisme : probabilité d’accès palustre plus élevée, gravité potentielle plus

    forte, et retentissement chez le fœtus. Par ailleurs l’aggravation de la résistance

    aux antipaludiques et l’extension des zones géographiques amplifient le

    problème du paludisme chez la femme enceinte.

    I- MODIFICATIONS PHYSIOLOGIQUES AU COURS DE LA

    GROSSESSE

    1- Modifications hématologiques

    a- Composition du sang

    Le nombre des globules rouges (GR) baisse de 4,2 à 3,8 millions (M),

    l’hématocrite baisse parallèlement au compte des GR, avec une moyenne allant

    de 0,40-0,42 jusqu’à un minimum de 0,31-0,34. Alors que la concentration en

    hémoglobine varie de la même manière, des taux de 10,5 g/dL peuvent

    s’observer chez les patientes non carencées en fer.

    A ces modifications s’ajoute l’augmentation de volume plasmatique et de la

    masse globulaire.

    Ceci explique : l’hémodilution physiologique ou l’anémie physiologique

    de la grossesse [67].

    Pour les leucocytes, la grossesse est marquée par une hyperleucocytose qui

    peut atteindre lors de l’accouchement 12 000 à 15 000 éléments/mm3. Le taux

    des polynucléaires neutrophiles augmente depuis le 45ème

    jour de la grossesse

    jusqu’à 30 semaine d’aménorrhée, puis reste en plateau. Les éosinophiles,

    basophiles et monocytes connaissent une légère augmentation mais le

    pourcentage relatif est peu modifié.

  • 48

    Pour les lymphocytes, il n’y a pas de variations du nombre, Les fonctions

    lymphocytaires sont diminuées, de même que l’immunité à médiation cellulaire,

    vraisemblablement sous l’effet des œstrogènes. D’autres hormones interviennent

    dans ces modifications : l’hCG (human chorionic gonadotrophin) et la

    prolactine, par exemple, qui diminuent les fonctions lymphocytaires. Cette

    diminution serait nécessaire à la survie et au développement du fœtus, mais

    s’accompagne d’une diminution de la résistance aux infections virales et au

    paludisme.

    Concernant les plaquettes, La numération diminue peu (10%) au cours de

    la grossesse, mais près de 10% des patientes développent une thrombopénie

    gestationnelle (80-150 G/l) [67].

    b- Hémostase

    La grossesse s’accompagne de changements importants, à la fois du

    système de coagulation et du système de fibrinolyse. Ces modifications

    convergent dans leur ensemble vers un état d’hypercoagulabilité, avec

    diminution de la fibrinolyse, surtout au 3ème

    trimestre de la gestation [68].

    2- Modifications métaboliques et endocriniennes Pendant la grossesse: il y a augmentation du métabolisme de base,

    augmentation du métabolisme du glucose favorisé par une hypersécrétion

    insulinique en plus de la résistance périphérique à l’insuline.

    Toutes les glandes endocriniennes vont s’adapter et réagir pour aider au

    développement du fœtus. L’hypophyse antérieure baisse sa production

    d’hormones en direction des ovaires à l’exception de la prolactine qui augmente

    progressivement. L’hormone stimulant la thyroïde (TSH) augmente, la T4

    également alors que la T3 diminue [37].

  • 49

    3- Modifications Cardio-vasculaires

    Le cœur est obligé d’augmenter son débit. Il le fait d’abord en augmentant

    le volume de sang éjecté à chaque contraction, ensuite en accélérant son rythme.

    La tension artérielle est abaissée, surtout la minima avec une baisse des

    résistances périphériques et une augmentation de la pression veineuse dans les

    membres inférieurs, ce qui prédispose aux œdèmes [37].

    4- Modifications gastro-intestinales

    Les nausées et les vomissements sont très répandus au cours du premier

    trimestre de la grossesse. Mais, ils ont tendance à régresser ultérieurement sauf

    si pathologie digestive préexistante. La constipation est fréquente à cause de

    l’action myorelaxante de la progestérone [79].

    5- Modifications de l’appareil respiratoire

    La respiration est modifiée ; car la mère doit également respirer pour le

    fœtus. Là encore, elle le fait surtout en augmentant l’efficacité des échanges

    gazeux et en modifiant peu son rythme respiratoire. La ventilation est de 60%

    supérieure à la normale, alors que la consommation d’oxygène n’augmente que

    de 20%. Il y a une baisse de la pression de gaz carbonique dans le sang.

    Ces modifications sont en grande partie dues à l’action de la progestérone

    sur les centres respiratoires [37].

    6- Modifications de l’appareil urinaire

    Le flux rénal sanguin est augmenté (d’un quart à un tiers), Ainsi que la

    filtration glomérulaire est augmentée. Les fonctions des tubes rénaux sont

    modifiées. A partir de 20 semaines d’aménorrhée, il ya une certaine dilatation

    des voies excrétrices ce qui peut donner une stase d’où le risque d’infection

    urinaire [37,69,70].

  • 50

    II- ASPECTS IMMUNOLOGIQUES CHEZ LA FEMME ENCEINTE VIS-A-VIS DU PALUDISME

    1- Immunologie de la grossesse

    Le système immunitaire, doit s’adapter à la greffe semi-allogénique que

    constitue le fœtus. Pour éviter le rejet du fœtus, plusieurs mécanismes

    physiologiques sont mis en œuvre [71], le placenta humain est dépourvu des

    antigènes HLA-A, B et C, cela empêche la reconnaissance de l'organe par les

    cellules T maternelles [72,73], alors que la forte expression de HLA G sur les

    cytotrophoblastes joue un rôle dans la prévention locale contre l’activation des

    cellules NK maternelles [74 ,71].

    Pour les anticorps, les taux d’immunoglobulines G (IgG) ainsi que ceux des

    immunoglobulines A (IgA) sont significativement réduits. Les IgG atteignent

    leurs taux les plus bas au cours des 10 dernières semaines. Or Les anticorps

    antiplasmodiques appartiennent principalement à la classe des IgG, ce qui

    expliquerait donc la plus grande susceptibilité de la femme enceinte à l’infection

    palustre surtout à partir du second trimestre [75,76].

    En fin, une grande partie de la régulation du système immunitaire pendant

    la grossesse dépend d’un profil particulier de cytokines de type « TH2 » [71].

    2- Aspect immunologique de l’interaction grossesse-paludisme

    Pendant la grossesse, les défenses immunitaires sont déprimées, et plus

    chez les primipares que chez les multipares [77]. Il est maintenant admis que la

    prévalence du paludisme chez les primipares est plus élevée que chez les

    multipares [18], cela est confirmé par une étude réalisée au Burkina Faso [78].

    En outre, il paraît de plus en plus que l’immunité protectrice au paludisme

    pour les habitants des zones de transmission stable de P. falciparum acquièrent

  • 51

    pendant leur enfance, est due aux IgG ayant une spécificité pour un type donné

    d’antigènes parasitaires, dénommés antigènes variants de surface (AVS) [79].

    Par ailleurs, il a été montré que les érythrocytes infectés (EI) collectées au

    niveau du placenta adhèrent exclusivement à un récepteur inhabituel de l’hôte, la

    Chondroïtine sulfate A (CSA), pratiquement jamais utilisé par les parasites dans

    le cas d’infections chez des individus hors période de grossesse [80].

    Dans les zones d’endémie palustre, l’immunité acquise antipalustre ne

    permet pas aux jeunes femmes et aux primigestes de se protéger contre le

    paludisme qui contracte les femmes enceintes, cela est due à l’absence dans leur

    sérum des d’IgG spécifiques des AVS exprimés par les parasites adhérents au

    placenta (AVSPAP) [80,81]. Mais, à la suite de l’exposition aux AVSPAP, des

    IgG spécifiques de ces antigènes sont rapidement produits [82], ce qui est

    cohérent avec la diminution de la susceptibilité au paludisme de la femme

    enceinte avec l’augmentation du nombre de grossesses, et semble indiquer le

    rôle clé des anticorps spécifiques des AVSPAP dans la protection à ce syndrome

    [83,84].

    3- Immunité passive maternotransmissible

    C’est le transfert in utero des immunoglobulines G de la mère prémunie à

    son fœtus et qui lui confèrent une immunité passive pendant les 4 à 6 premiers

    mois de la vie. Cette immunité s’estompe au cours du temps et l’on observe chez

    l’enfant, après le sixième mois de sa vie, une augmentation de la sensibilité au

    paludisme. Cette période dure jusqu’à environ neuf ans, selon les enfants.

    Ensuite, se développe progressivement l’acquisition d’une immunité semi

    protectrice active dite semi immunité [85].

  • 52

    III- PHYSIOPATHOLOGIE :

    Elle explique un double phénomène : la grossesse favorise la survenue de

    l'infection palustre et le paludisme est plus sévère avec un retentissement

    potentiellement plus grave du fait de la grossesse [86].

    1- Retentissement de la grossesse sur le paludisme

    La grossesse, véritable « stress » immunologique, provoque une chute de

    l’immunité antipalustre et, de ce fait, peut démasquer un paludisme latent, ou

    favoriser la survenue des formes graves (accès pernicieux). Le taux d’infestation

    du placenta est toujours supérieur à celui du sang. En effet, le Plasmodium est

    souvent retrouvé dans le placenta, alors que les examens de sang restent négatifs

    [87]. Ainsi, à Panama, sur 400 placentas examinés, 11 étaient parasités, alors

    que les frottis sanguins des mêmes patientes étaient négatifs [1].

    Quel que soit le stade de la grossesse, les symptômes classiques du

    paludisme sont accentués. P.falciparum risque toujours d’évoluer, sans

    traitement, vers l’accès pernicieux. En fin de grossesse, il y a souvent un risque

    de reviviscence et il n’est pas rare de constater, lors d’une crise aiguë de

    paludisme, un accouchement prématuré avec parfois une mort subite de la mère

    dans les suites immédiates [1].

    2- Retentissement du paludisme sur la grossesse

    Il est certain qu’un paludisme transforme une grossesse normale en

    grossesse pathologique. Les accès répétés du paludisme peuvent perturber le

    fonctionnement hypophysaire et entraîner une stérilité. Par ailleurs, la nidation

    peut être perturbée chez les femmes atteintes de paludisme viscéral évolutif,

    avec une splénomégalie importante.

  • 53

    Au premier trimestre : le paludisme entraîne une accentuation des signes

    sympathiques (vomissements gravidiques) de la grossesse. Dans les grossesses

    avancées, il existe une corrélation entre le taux de parasitémie et la durée de la

    fièvre d’une part et le risque d’avortement d’autre part, surtout en zone

    endémique.

    Au deuxième et au troisième trimestres : Le paludisme reste en zone

    tropicale, la principale cause d’anémie au cours de la grossesse. Mais aussi,

    responsable de l’accouchement prématuré, la mort foetale in utero et l’infection

    placentaire est citée comme principale responsable du faible poids de naissance

    [1, 37, 88].

    a- Anémie palustre et grossesse

    La femme enceinte présente au cours de la grossesse une anémie

    physiologique par hémodilution. Cette anémie physiologique peut être aggravée

    par différents facteurs, les principales reconnues étant le paludisme, les déficits

    en fer et en acide folique, les ankylostomes, les hémoglobinopathies et le VIH

    [89]. Cependant le paludisme reste le facteur le plus déterminant ; en effet 26%

    des anémies sévères sont attribuables au paludisme. Cette anémie peut être

    retrouvée chez toutes les femmes quelque soit le niveau de transmission palustre

    et l’immunité. En ETHIOPIE [90], une étude comparative du paludisme au

    cours de la grossesse dans une zone à faible transmission palustre et dans une

    zone à forte transmission avait retrouvé :

    - 76,9% de cas d’anémie chez les femmes parasitées contre 39,0% chez les

    femmes non parasitées dans la zone à transmission palustre élevée.

    - 61,5% de cas d’anémie chez les femmes parasitées contre 13,9% les

    femmes non parasitées dans la zone à transmission palustre faible.

  • 54

    Le mécanisme d’installation de cette anémie palustre de la grossesse serait, la

    destruction des érythrocytes parasités, les troubles de l’érythropoïèse, les

    phénomènes d’auto-immunité et la splénomégalie paludique hyperactive,

    associés à l’augmentation des besoins en fer et en acide folique au cours de la

    grossesse [37].

    Cette anémie apparaît vers la 20ième

    semaine d’aménorrhée. Elle est

    hémolytique, normocytaire et normochrome, surtout importante chez les

    primipares [91], et s’aggrave parallèlement aux nombres d’accès de paludisme

    [92].

    Des études récentes ont montré qu’une chimioprophylaxie efficace permet

    de réduire l’incidence de l’anémie sévère [93].

    b- Infection palustre placentaire

    b-1- Séquestration placentaire

    Cette séquestration a été observée seulement avec l’espèce P. falciparum.

    Elle est due à un phénomène de cytoadhérence des hématies parasitées au niveau

    du tissu placentaire. Les mécanismes de la cytoadhérence nécessitent la liaison

    des ligands (protéines) exprimés par l’hématie parasitée avec des récepteurs

    présents dans le placenta [1].

    Chez la femme enceinte, les hématies infestées ont une capacité particulière

    de cytoadhérence à la couche de syncytiotrophoblastes du placenta par le

    récepteur CSA [94,95],

    b-2- Protéines adhérant aux CSA

    Une équipe de l’Institut de Recherche pour le Développement (IRD), en

    collaboration avec des chercheurs de Copenhague (Danemark) et de

    Guediawaye (Sénégal), ont découvert que P. falciparum porte un gène

  • 55

    particulier, nommé VAR2CSA, qui code très probablement la protéine qui se lié

    aux CSA, cette découverte est faite après plusieurs travaux montrant que seuls

    les hématies parasités des femmes enceintes sont capable d’adhérer aux CSA

    [96,97,98].

    Par conséquent, la séquestration des parasites dans le placenta entraîne

    une diminution de la circulation au niveau du placenta ce qui provoque une

    diminution du passage transplacentaire des éléments nutritifs et une baisse des

    échanges en oxygène et donc un ralentissement de la croissance fœtale [98].

    A noter que, même s’il n’y a pas de cytoadhérence des hématies, en cas

    d’infestation par les autres espèces de Plasmodium, il peut y avoir une anémie

    maternelle et un faible poids de naissance [1 ; 99].

    Figure 5 – Physiopathologie du paludisme au niveau du placenta [1].

  • 56

    IV- CONSEQUENCES CLINIQUES DU PALUDISME SUR LA GROSSESSE

    1- Effets de l’infection par P. falciparum

    L’infection due à P. falciparum au cours de la grossesse a de nombreuses

    conséquences néfastes pour la femme enceinte, le fœtus et le nouveau-né

    (Figure 6).

    Figure 6 : Conséquences du paludisme pendant la grossesse [100]

    a- Effets sur la santé maternelle

    Les effets du paludisme sur la mère varient de négligeables à sévères, en

    fonction du niveau d’immunité acquis avant la grossesse et de l’efficacité des

    réactions immunitaires au cours de la grossesse. L’immunité acquise dépend de

    l’intensité de la transmission palustre, du nombre de grossesses antérieures et de

    l’existence de certaines pathologies, comme l’infection par le virus de

  • 57

    l’immunodéficience humaine (VIH), qui peuvent altérer davantage l’efficacité

    des réactions immunitaires pendant la grossesse [100,101].

    a-1- Femme vivant en zone de transmission forte ou stable

    En Afrique subsaharienne, c’est la transmission stable qui prédomine, avec

    pour conséquence, la plus lourde charge d’infections palustres pendant la

    grossesse. Dans ces zones, les femmes sont immunisées, et ont acquis une

    protection relative contre le paludisme, mais cette immunité acquise régresse au

    cours de la grossesse surtout chez la primigeste. En effet, la première grossesse

    réactive plus le paludisme que les grossesses ultérieures [102,103]

    Malgré une plus forte prévalence de la parasitémie et une densité

    parasitaire plus élevée chez les femmes enceintes par rapport aux autres,

    l’infection à P. falciparum reste en générale silencieuse dans ces régions.

    L’immunité maternelle acquise réduit le risque du paludisme grave, et, dans

    cette situation, il est rare de pouvoir imputer les décès maternels uniquement au

    paludisme. Les principaux effets néfastes en sont le petit poids de naissance et

    l’anémie maternelle (Figure 7) [1,100].

  • 58

    Figure 7 : Conséquences du paludisme pendant la grossesse : zones de transmission forte ou stable [100]

    a-2-Femme vivant en zone de transmission faible ou instable

    Dans ces régions, les femmes en âge de procréer ont acquis une immunité

    relativement faible contre le paludisme et toutes les femmes enceintes ont donc

    le même risque d’infection palustre. Dans ces conditions, toutes les formes du

    paludisme peuvent se rencontrer, allant des formes bénignes à l’accès

    pernicieux, mais il ne faut pas confondre une crise de paludisme et une

    éclampsie (tableau VI).

    Au premier trimestre de la grossesse, le paludisme contribue à la perte de

    l’enfant (avortement) et, au dernier trimestre, à la naissance prématurée. C’est

    essentiellement en cas de paludisme contracté en fin de grossesse que peut

    survenir une infestation du fœtus à l’origine du paludisme congénital (10 % des

    naissances d’enfants de femmes atteintes de paludisme).

  • 59

    En l’absence de diagnostic et de traitement rapide, le pronostic est réservé

    pour la mère et le fœtus, l’évolution pouvant être rapidement fatale [1,75,100].

    Figure 8 : Conséquences du paludisme pendant la grossesse : zones de transmission faible ou instable [100]

    Tableau VII : Eléments distinctifs entre éclampsie et accès pernicieux [1].

    Eclampsie Accès pernicieux palustre

    Contexte Hypertension artérielle Paludisme

    Symptômes

    Prise de poids

    Œdème des membres

    inférieurs

    Hyper-réflectivité, coma

    Crises convulsives itératives

    Fièvre à 39°C-40°C

    Hépatosplénomégalie

    Prostration ou coma aréactif

    Crises convulsives rares

    Biologie

    Protéinurie > 3,5 g/24 h

    Créatininémie >

    100 μmol/L

    Anémie hémolytique

    Frottis sanguin :

    Plasmodium

  • 60

    b- Chez le fœtus et le nouveau-né

    Les différentes manifestations du retentissement du paludisme sur le

    produit de conception sont :

    b-1- La réduction du poids de naissance

    L’anémie maternelle et la séquestration des hématies parasitées au niveau

    du placenta entraînent une baisse des échanges utéro-placentaires en nutriments

    et en oxygène. Cette perturbation des échanges va être responsable d’un retard

    de croissance intra-utérin qui se traduit à la naissance par la réduction du poids

    du nouveau-né [104] (tableau VII).

    Tableau VII : Comparaison des poids moyens de naissance (en grammes) des enfants de

    femmes atteintes ou non de paludisme [1].

    Pays Nombre de

    naissances

    Poids moyen des nouveau-nés

    parasités sains

    Côte-d’Ivoire 198 2 960 3 080

    Ghana 50 2 855 3 033

    Nigeria 440 2 778 3 076

    Ouganda 570 2 805 3 068

    Tanzanie 413 2 945 3 020

    b-2- L’avortement

    Lorsque la perturbation des échanges utéro-placentaires est sévère, suite à

    une anémie sévère, elle peut aboutir à un avortement [102].

  • 61

    b-3- La prématurité

    L’hyperthermie provoque une libération de prostaglandines qui entrainent

    des contractions utérines et des décollements placentaires d’où les

    accouchements prématurés [102].

    b-4- La mortalité fœtale

    La mort foetale in utero survient plutôt en fin de grossesse, sans doute liée

    aux perturbations des échanges fœto-maternels, associées à l’insuffisance

    placentaire et au franchissement massif de la barrière placentaire par P.

    falciparum. Alors que La mortinatalité et la mortalité néonatale par souffrance

    fœtale sont induites par l’hyperthermie et l’altération de l’état maternel source

    de dystocies [18].

    Plusieurs études réalisées en Afrique ont montré que la mortalité périnatale

    était plus élevée dans les zones d’endémie palustre que dans les zones non

    endémiques. Cet état de fait a été bien illustré par une revue de l’équipe de Van

    Geertruyden portant sur 117 études réalisées entre 1948 et 2002. Dans cette

    revue, le taux de mortalité périnatale est estimé à 61,1pour mille en zone

    d’endémie palustre contre 25,8 pour mille en zone non endémique. 60 à 70% des

    cas sont retrouvés dans des zones à transmission palustre faible, zone où les

    femmes enceintes font facilement des accès palustres graves [105].

    b-5- Le paludisme congénital

    Généralement, en cas du paludisme maternel, le placenta joue efficacement

    son rôle de filtre sélectif. Les parasites de la mère sont arrêtés, alors que les

    anticorps plasmodiaux traversent la barrière placentaire et permettant ainsi une

    immunisation passive du nouveau-né. Cette immunité assure une protection de

    l’enfant pendant les 3 à 6 premiers mois. Les antigènes plasmodiaux passent

  • 62

    également dans la circulation fœtale, ce qui permet une immunisation active

    partielle du nouveau-né. Cependant dans de rares cas des hématies parasitées

    peuvent se retrouver dans la circulation fœtale et entrainer ainsi un paludisme

    congénital. Le plus souvent il ne s’agit que d’un paludisme infestation c'est-à-

    dire sans manifestations cliniques chez le nouveau-né ; et les parasites sont

    éliminés du sang fœtal au bout de quelques jours.

    Le paludisme congénital maladie est exceptionnel et se manifeste le plus

    souvent par un ictère fébrile avec hépatosplénomégalie et anémie [106].

    L'évolution est souvent mortelle. Les enfants survivants peuvent présenter un

    retard de croissance et une ossification défaillante. Le paludisme congénital doit

    être différencié du paludisme néonatal, contracté au moment de l’accouchement

    et qui ne se manifestera que plusieurs semaines plus tard [31].

    2- Effets de l’infection par d’autres espèces de Plasmodium

    Les effets des trois autres espèces qui peuvent provoquer le paludisme chez

    l’homme (Plasmodium vivax, P. malariae et P. ovale) sont moins clairs. Les

    femmes africaines enceintes exposées au risque d’infection à P. vivax vivent

    principalement dans des zones de transmission faible ou instable. L’infection

    donne alors souvent des accès fébriles. Une étude chez des femmes enceintes

    non immunisées en Thaïlande signale que l’on associe au paludisme à P. vivax

    au cours de la grossesse des anémies maternelles et des petits poids de

    naissance, mais dans une moindre mesure qu’avec P. falciparum [107]. Des

    études seront nécessaires pour mieux définir les effets de l’infection à P. vivax

    sur la santé des femmes enceintes et des nouveaux-nés en Afrique.

  • 63

    B- ASSOCIATION DE PALUDISME ET VIH AU COURS DE LA GESTATION

    Le paludisme et l’infection par VIH sont à notre époque deux problèmes

    majeurs de santé publique, notamment, en Afrique subsaharienne. L’impact de

    l’infection par le VIH sur l’infection palustre est modulé par le degré

    d’immunodépression des patients mais aussi par leur état d’immunité vis-à-vis

    du Plasmodium [108].

    Pendant la grossesse, l'infection à VIH augmente la prévalence et les

    conséquences du paludisme, ces deux infections sont associées indépendamment

    à un risque accru d'anémie maternelle, d'insuffisance pondérale à la naissance et

    de retard de croissance foetale. Alors que la co-infection paludisme - VIH durant

    la grossesse est associée à un risque accru de décès maternels, périnatals et

    infantile précoce.

    I- ASPECTS EPIDEMIOLOGIQUES

    1- Situation actuelle de la pandémie du sida

    a- Adultes

    Dans le monde, 30,8 millions d’adultes vivent avec le VIH. Ce chiffre

    continue à augmenter d’années en années, même si cette croissance est devenue

    faible. En revanche, la prévalence globale dans la population adulte au niveau

    mondial n’augmente plus : elle s’est stabilisée à 0,8 %. Le nombre de nouvelles

    infections chez l’adulte est en légère décroissance, estimé à 2,3 millions en 2008

    contre 2,5 millions en 2001.

    En Afrique sub-saharienne, la prévalence moyenne dans la population

    adulte a été estimée à 5% en 2007, contre 5,7% en 2001. Cela représentait un

    total de 20,3 millions d’adultes infectés en 2007, contre 19,1 en 2001.

  • 64

    Hors Afrique sub-saharienne, la prévalence moyenne ne dépasse pas 1% de

    la population adulte dans aucune autre région du monde, à l’exception des

    Caraïbes (1,1 %). L’Europe de l’Est et l’Asie centrale (prévalence adulte 0,8 %)

    sont les régions les plus touchées, suivie de l’Amérique du Nord (0,6 %),

    l’Amérique latine (0,5 %), l’Océanie (0,4 %), l’Asie du Sud/Sud-Est (0,3 %), le

    Moyen-Orient/Afrique du Nord (0,3 %), l’Europe de l’Ouest (0,3 %) et l’Asie

    de l’Est (0,1 %) [109,110,111].

    b- Enfants

    L’épidémie pédiatrique suit la courbe de celle de l’adulte. D’un côté, le

    nombre absolu d’enfants vivant avec le VIH continue à augmenter pour

    atteindre un total mondial record de deux millions en 2007. D’un autre côté, on

    observe une baisse (proportionnellement plus forte que pour l’adulte) du nombre

    de nouvelles infections pédiatriques, estimées à 0,37 million en 2007 contre 0,45

    million en 2001[110].

    2- Epidémiologie des interactions entre paludisme et VIH

    Les zones d’endémie pour le VIH et le paludisme se superposent et

    concernent l’Afrique subsaharienne, l’Asie du Sud-Est, l’Amérique latine et les

    Caraïbes (Figure 9). Toutefois, la