avertissement prealablepfeda.univ-lille1.fr/iaal/docs/dess1999/animal/far_text_fin.pdf ·...

56
AVERTISSEMENT PREALABLE Le présent document a été réalisé par des étudiants du Master Pro Qualimapa (USTL-Lille) dans le cadre de leur scolarité. Il n’a pas un caractère de publication scientifique au sens strict. En effet, il n’a pas été soumis à un comité de lecture avant publication. Ce travail a été noté, ainsi que la soutenance orale et l’éventuelle production multimédia auxquelles il a donné lieu. Ces évaluations participent à l’évaluation globale des étudiants en vue de l’obtention du diplôme de Master ; elles ont un caractère privé et ne sont pas communiquées ici. Le contenu de ce document est donc proposé sous la seule responsabilité de leurs auteurs et doit être utilisé avec les précautions d'usage. C’est pourquoi le lecteur est invité à exercer son esprit critique. Sa reproduction, totale ou partielle, est autorisée à condition que son origine et ses auteurs soient explicitement cités. La liste des autres projets étudiants disponibles en ligne est disponible sur le site Internet du Master Qualimapa : http://qualimapa.univ-lille1.fr/rapp1.htm L’équipe enseignante

Upload: others

Post on 01-Nov-2020

0 views

Category:

Documents


0 download

TRANSCRIPT

Page 1: AVERTISSEMENT PREALABLEpfeda.univ-lille1.fr/iaal/docs/dess1999/animal/far_text_fin.pdf · L'infection n'entraîne pas de réaction immunologique détectable. ... l'appareil digestif

AVERTISSEMENT PREALABLE

Le présent document a été réalisé par des étudiants du Master Pro Qualimapa (USTL-Lille) dans le cadre de leur scolarité. Il n’a pas un caractère de publication scientifique au sens strict. En effet, il n’a pas été soumis à un comité de lecture avant publication. Ce travail a été noté, ainsi que la soutenance orale et l’éventuelle production multimédia auxquelles il a donné lieu. Ces évaluations participent à l’évaluation globale des étudiants en vue de l’obtention du diplôme de Master ; elles ont un caractère privé et ne sont pas communiquées ici. Le contenu de ce document est donc proposé sous la seule responsabilité de leurs auteurs et doit être utilisé avec les précautions d'usage. C’est pourquoi le lecteur est invité à exercer son esprit critique. Sa reproduction, totale ou partielle, est autorisée à condition que son origine et ses auteurs soient explicitement cités. La liste des autres projets étudiants disponibles en ligne est disponible sur le site Internet du Master Qualimapa : http://qualimapa.univ-lille1.fr/rapp1.htm

L’équipe enseignante

Page 2: AVERTISSEMENT PREALABLEpfeda.univ-lille1.fr/iaal/docs/dess1999/animal/far_text_fin.pdf · L'infection n'entraîne pas de réaction immunologique détectable. ... l'appareil digestif

L'avenir des farines animalesau sein de l'Union Européenne

Caroline BECARTPhilibert RIGAUDIEREStéphanie WAVELET

DESS QualimapaAnnée Universitaire 1999 -2000

Page 3: AVERTISSEMENT PREALABLEpfeda.univ-lille1.fr/iaal/docs/dess1999/animal/far_text_fin.pdf · L'infection n'entraîne pas de réaction immunologique détectable. ... l'appareil digestif

Sommaire

Première partie : Les farines animales à l’origine de l’ESB I. Qu’est ce que l’ESB ? 1 II. Transmissibilité 1. Transmission intra spécifique 2. Transmission mère veau 3. Transmission inter spécifique et barrière d’espèce 4. Transmission à l’homme III. Conséquences de cette crise 6 1. Cas d’ESB 6 2. Cas de MJC 7 3. Mesures politiques 7 4. Retombées économiques 7 5. Réglementation en vigueur dans les principaux pays producteurs de viande 8 6. Classification des tissus bovins en fonction de leur degré d’infectuosité 8 7. Le problème des sous produits dans les industries agroalimentaires, 9 pharmaceutiques et cosmétiques 8. Tests d’identification des FVO 9 9. Dépistage de la maladie 9

Deuxième partie : La filière de valorisation des déchets animaux I. Pourquoi utilise-t-on des farines animales ? 12 II. La transformation et la valorisation des coproduits animaux 15 1. Les matières premières utilisées 15 2. La filière et son organisation 16 3. Les produits obtenus 18 4. Une industrie de poids en Europe 19 5. Aujourd’hui une industrie sous contrôle 20 III. Un cas particulier : les concentrés protéiques carnés 22 1. Définition 22 2. Principaux aspects de la production des farines 23 3. L’intérêt nutritionnel des concentrés protéiques carnés 25 4. L’intérêt économique des concentrés protéiques carnés 26

Page 4: AVERTISSEMENT PREALABLEpfeda.univ-lille1.fr/iaal/docs/dess1999/animal/far_text_fin.pdf · L'infection n'entraîne pas de réaction immunologique détectable. ... l'appareil digestif

2

Troisième partie : Que faire des farines animales ? I. Généralisation de l’interdiction des farines animales à tous les animaux d’élevage 1. Composition moyenne des rations alimentaires des non ruminants 29 2. Les fabricants d’aliments vont devoir adapter leur formule 30 3. Un surcoût inévitable en élevage 33 4. Conséquences sur la filière de transformation 35 et de valorisation des coproduits animaux II. Harmonisations des règles en Europe 40 1. Cas de la France 40 2. Cas des autres pays 41 III. La position des syndicats et des pouvoirs publics 42 1. Position du SYNCOPAC et du SNIA 42 2. Position de la FNSEA 43 3. Position du ministre de l’agriculture M. GLAVANY 43 4. Position de la DGAL 44

Conclusion

Bibliographie Annexes

Page 5: AVERTISSEMENT PREALABLEpfeda.univ-lille1.fr/iaal/docs/dess1999/animal/far_text_fin.pdf · L'infection n'entraîne pas de réaction immunologique détectable. ... l'appareil digestif

3

INTRODUCTION

Page 6: AVERTISSEMENT PREALABLEpfeda.univ-lille1.fr/iaal/docs/dess1999/animal/far_text_fin.pdf · L'infection n'entraîne pas de réaction immunologique détectable. ... l'appareil digestif

4

Le 20 mars 1996, le ministre de la santé britannique annonce un lien possible entre l’apparition

d’une nouvelle variante de la maladie de Creutzfeld-Jakob chez l’homme et l’ESB chez les bovins.

C’est la suspicion d’une transmission à l’homme qui a donné une ampleur considérable à la crise de

la vache folle.

Aujourd’hui, les scientifiques connaissent le vecteur principal de la maladie : les farines animales.

Celles-ci sont fabriquées à partir de déchets animaux et réintégrées dans l’alimentation des animaux

d’élevage à l’exception des bovins et des ovins. Cette fabrication permet de valoriser ces co-

produits animaux et a un double intérêt pour les industriels de l’alimentation animale.

Depuis l’apparition des premiers cas de vache folle en 1988, les farines ont été interdites chez les

bovins et ovins en Europe. Des questions se posent quant à leur utilisation chez les autres animaux

d’élevage.

Pour répondre à cette problématique, il conviendra d’abord d’exposer les connaissances actuelles de

la crise de l’ESB, puis de faire un état des lieux de la filière de valorisation des co-produits

animaux. Il s’agira ensuite d’analyser les enjeux d’une décision définitive concernant les farines

animales en Europe.

Page 7: AVERTISSEMENT PREALABLEpfeda.univ-lille1.fr/iaal/docs/dess1999/animal/far_text_fin.pdf · L'infection n'entraîne pas de réaction immunologique détectable. ... l'appareil digestif

5

Première partie :

Les farines animales à l’origine de l’ESB

Page 8: AVERTISSEMENT PREALABLEpfeda.univ-lille1.fr/iaal/docs/dess1999/animal/far_text_fin.pdf · L'infection n'entraîne pas de réaction immunologique détectable. ... l'appareil digestif

6

I. Qu'est ce que l'E.S.B ? L'encéphalopathie spongiforme bovine (E.S.B, B.S.E en anglais) également appelée "maladie de

la vache folle", a été découverte en 1985 (déclarée officiellement en 1996) chez des bovins au

Royaume - Uni. Elle appartient à la famille d'affections neurodégénératives regroupées sous le

terme d'Encéphalopathies Spongiformes Subaiguës Transmissibles (E.S.S.T), maladies qui incluent,

chez les animaux, la tremblante du mouton ..., chez les hommes, la maladie de Creutzfeldt-Jakob

(M.C.J). L'infection n'entraîne pas de réaction immunologique détectable. Un examen histologique

post mortem de tissu nerveux cérébral d'un bovin suspect permet d'assurer avec certitude la

présence de la maladie. Les lésions dues à la maladie au niveau de celui-ci, font que le cerveau

ressemble alors à une éponge. On peut également observer l'accumulation de fibres, désignées sous

le terme de S.A.F (Scrapie Associated Fibrils), au niveau de ces lésions qui endommagent les tissus

nerveux.

Les symptômes sont impressionnants. L'animal devient agressif, nerveux, a des troubles moteurs,

une perte de l'équilibre, une perte de l'instinct grégaire, des tremblements, des mouvements

fréquents de l'oreille...

L'euthanasie est la seule issue. Entre 1986 et avril 1996, 157000 bovins auraient été abattus (en

grande majorité au Royaume-Uni, pays le plus touché par la crise).

Le prion. Cette maladie est due, comme c'est le cas pour la tremblante du mouton, à un agent

transmissible non conventionnel (A.T.N.C), le prion. D'après Stanley PRUSINER (qui aura pour

ses travaux le prix Nobel de médecine en 1997), qui l'a isolé en 1982, le prion est la forme modifiée

d'une protéine naturellement présente dans l'organisme. La protéine passe d'une forme normale

(PrPc = Cellular Prion Protein) à une forme pathogène (PrPsc = Scrapie Prion Protein), par une

modification de sa structure tridimensionnelle. C'est cette conversion des hélices de la PrPc en

feuillets plissés-bêta qui permet d'obtenir la PrPsc infectieuse. Cette dernière possède des propriétés

physico-chimiques différentes de la forme normale. Elle résiste à la protéolyse par la protéinase K,

qui est une enzyme capable de détruire les protéines, ce qui lui permet de franchir sans dommage

l'appareil digestif.

Le rôle de la protéine intacte est inconnu, comme les raisons de sa transformation. Cependant, des

chercheurs ont dernièrement réussi, à faire revenir la forme pathologique à la forme normale. Ces

travaux ont été menés par une équipe internationale dirigée par Claudio SOTO (Centre médical de

l'université de New York et Institut de recherche pharmaceutique Serono, à Genève). Cette équipe a

eu l'idée d'utiliser un composé peptidique pour s'attaquer aux feuillets-bêta. Des souris ont reçu en

Page 9: AVERTISSEMENT PREALABLEpfeda.univ-lille1.fr/iaal/docs/dess1999/animal/far_text_fin.pdf · L'infection n'entraîne pas de réaction immunologique détectable. ... l'appareil digestif

7

injection des mélanges, composés de ce peptide et d'extraits de tissus cérébraux de moutons atteints

de la tremblante et des sujets humains atteints de la maladie de Creutzfeldt-Jakob (M.C.J). L'action

du peptide a permis le retour à la configuration normale et a retardé l'apparition des signes cliniques

liés à l'Encéphalopathie Spongiforme Transmissibles (E.S.T).

A noter que Le prion serait également l'agent de la nouvelle forme variante de la maladie de

Creutzfeldt-Jakob, découverte en 1996 en Grande-Bretagne.

Toutefois, les chercheurs s'interrogent encore sur la nature exacte du prion. Un petit virus a été

évoqué. L'hypothèse d'un virino, qui serait l'association d'un acide nucléique et d'un prion, a été

émise. Le virino serait le véritable agent de la maladie. Il est masqué par une coque protectrice et ne

serait donc pas détecté par le système immunitaire de l'organisme.

Cette incertitude angoisse les responsables de la santé publique. Tout ce que l'on sait, c'est que là où

il y a un prion anormal, il y a de l'encéphalopathie.

Que ce soit chez l'homme ou chez la vache, les prions sont retrouvés au niveau du cerveau, de la

moelle épinière, de la rate, des ganglions lymphatiques, des amygdales et certaines parties de

l'intestin.

A noter une particularité inquiétante des agents responsables des encéphalopathies : ils sont

particulièrement résistants. Lorsqu'en laboratoire, on les soumet à une température de 160°C

pendant 24 heures, ils restent pleinement actifs. Soumis à une température de 360°C pendant une

heure, ils restent partiellement infectieux !

Origine de l'E.S.B

Selon l'explication scientifique la plus généralement admise, l'épizootie d'E.S.B au Royaume-Uni

aurait son origine première dans le recyclage de carcasses de bovins contaminés transformées en

aliments pour le bétail sous forme de farine de viande et d'os (F.V.O).En effet les conditions de

fabrication ont été modifiées en 1981-1982, suite à un incendie pour des raisons de sécurité

(réduction des températures de séchage et abandon du dégraissage par solvant pour optimiser

l'extraction des graisses). Ces changements auraient laissé subsister une certaine infectuosité et

permis le recyclage de carcasses d'ovins atteints de tremblante (maladie connue depuis deux

siècles).Les F.V.O ont donc servi de vecteur à la transmission de l'agent de la tremblante du mouton

au bovin. A leur tour, les carcasses de bovins contaminés recyclées ont propagé le prion.

Page 10: AVERTISSEMENT PREALABLEpfeda.univ-lille1.fr/iaal/docs/dess1999/animal/far_text_fin.pdf · L'infection n'entraîne pas de réaction immunologique détectable. ... l'appareil digestif

8

Quoiqu'il en soit, la responsabilité des farines contaminées de viande et d'os avancée dés le début de

l'épizootie est aujourd'hui admise par la quasi-totalité des scientifiques.

C'est la raison pour laquelle, dès juillet 1988, le Royaume-Uni puis certains Etats membres et enfin,

en juin 1994, l'Union Européenne (U.E) ont interdit l'utilisation des farines de mammifères pour

l'alimentation des ruminants. Les farines de viande étaient surtout destinées aux vaches laitières qui

ont besoin de beaucoup de protéines pour produire du lait.

Par ailleurs l'U.E a arrêté des normes de fabrication obligatoires dans tous les états membres pour

améliorer la sécurité des farines destinées aux autres animaux (porcs, volailles, poissons,...).Ces

normes ont été renforcées depuis le premier avril 1997 (un traitement de 133 C°, sous une pression

de 3 bars pendant au moins 20 minutes).

Il faut signaler qu'un test permettant de détecter la présence de F.V.O dans l'alimentation animale

est possible depuis 1997.

II. Transmissibilité Les incertitudes qui persistent sur le prion compliquent la compréhension de la transmission des

encéphalopathies.

1. Transmission intra-spécifique

Cest une transmission horizontale.

La responsabilité des farines contaminées de viande et d'os est aujourd'hui admise par la quasi-

totalité des scientifiques. De plus, la transmission par la voie orale a été prouvée

expérimentalement. On admet que la transmission par la voie intracérébrale est la plus efficace.

Toutefois, l'infection n'a été transmise, par voie orale ou par injection, qu'à partir de cervelle, de

moelle épinière ou de rétine. Il ne semble pas y avoir de contamination par contact ou par

l'environnement car il y a rarement plus d'un ou deux animaux malades par troupeau. La seule

raison qui pousse donc à abattre tout le troupeau en cas de déclaration d'un cas est le souci de

rassurer l'opinion publique.

Page 11: AVERTISSEMENT PREALABLEpfeda.univ-lille1.fr/iaal/docs/dess1999/animal/far_text_fin.pdf · L'infection n'entraîne pas de réaction immunologique détectable. ... l'appareil digestif

9

Le suivi du cheminement de l'agent infectieux dans l'organisme de l'animal depuis le tube digestif

jusqu'au cerveau a montré que le prion, à partir du tube digestif, atteint la moelle épinière par

l'intermédiaire des nerfs reliant ces deux tissus. Dans le même temps, il atteint l'iléon distal puis les

systèmes lymphatique et réticulolymphocitaire, la rate et le thymus, tandis qu'il progresse également

vers le bas et le haut de la moelle épinière, atteignant progressivement les zones centrales du

système nerveux. L'A.T.N.C déclenche ainsi dans le système nerveux central les symptômes

neurologiques classiques des E.S.S.T, en touchant tout d'abord le bulbe et le cervelet avant de

gagner le cerveau.

2. Transmission mère-veau

Si l'immense majorité des cas d'E.S.B est donc due à la contamination de l'alimentation, la

possibilité d'une transmission pseudo-verticale (donc de la mère à son veau) n'est pas totalement

écartée. Son importance est probablement très faible sinon l'épidémie ne régresserait pas. Le chiffre,

très contesté, de 10 % de chances pour qu'une vache folle donne naissance à un veau qui

succombera de l'E.S.B a été avancé par des chercheurs britanniques. Des travaux de recherche ont

été entrepris à ce sujet.

3. Transmission inter-spécifique et barrière d'espèce

Les Agents Transmissibles Non Conventionnels (A.T.N.C) ou prions sont transmissibles

expérimentalement entre espèces différentes.

L'efficacité de transmission entre deux espèces différentes dépend de la force de la barrière

d'espèce, les données de biologie moléculaire et de la transgénèse démontrent qu'un des supports

essentiels de la barrière d'espèce est le gène codant pour la protéine PrP. En conséquence, plus les

PrP du donneur et du receveur seront génétiquement proches, plus la transmission interspécifique

sera efficace. Néanmoins, la PrP ne pourrait, à elle seule, expliquer le phénomène de barrière

d'espèce : d'une part, les travaux récents de S.PRUSINER indiquent clairement la participation d'au

moins une autre protéine, et d'autre part, les mécanismes de la barrière d'espèce lors de l'infection

par voie périphérique sont encore loin d'être connus.

En revanche, il est très important de noter que certains animaux (chats, visons, singes et autres

animaux de zoo) semblent avoir contracté la maladie dans des conditions naturelles par

consommation de matériaux bovins contaminés.

La transmission à l'homme devient envisageable.

Page 12: AVERTISSEMENT PREALABLEpfeda.univ-lille1.fr/iaal/docs/dess1999/animal/far_text_fin.pdf · L'infection n'entraîne pas de réaction immunologique détectable. ... l'appareil digestif

10

4. Transmission à l'homme

Le 20 mars 1996, le ministre de la santé britannique annonce un lien possible entre l'apparition

d'une nouvelle variante de la maladie de Creutzfeldt-Jakob et l'E.S.B.

La maladie de Creutzfeldt-Jakob, qui a été décrite en 1920 et 1921 par Creutzfeldt puis par Jakob, a

habituellement trois origines :

- une forme sporadique majoritaire (un cas par an et par million d'habitants) qui se déclare

entre 50 et 75 ans.

- une forme familiale (5 à 10 % des cas) qui se déclare entre 35 et 55 ans.

- une forme iatrogène qui est due à des contaminations neurochirurgicales, à des greffes (de

la cornée) ou à l'utilisation thérapeutique de dérivés hypophysaires d'origine humaine (hormone de

croissance).

Dans tous les cas, la maladie se traduit par des lésions irréversibles au cerveau, qui conduisent à la

mort en quelques mois. Elle semble frapper presque exclusivement les personnes âgées de plus de

soixante ans.

C'est la découverte, en Grande-Bretagne, de douze malades présentant des lésions inhabituelles qui

a relancé le débat sur les risques de transmission à l'homme.

Ces victimes sont des personnes jeunes, n'appartenant à aucune catégorie à risque. Leur lésions

cérébrales sont différentes de celles des autres malades. En revanche, le monomorphisme des

lésions neuropathologiques des douze patients suggère une origine commune, et donc une souche

d'agent identique, souche que l'on retrouve chez les bovins malades.

Ceci provoquera aussitôt dans le public une réaction de panique, qui débouchera sur une crise

économico-politique à l'échelle de l'Europe : la crise de la vache folle est née.

Page 13: AVERTISSEMENT PREALABLEpfeda.univ-lille1.fr/iaal/docs/dess1999/animal/far_text_fin.pdf · L'infection n'entraîne pas de réaction immunologique détectable. ... l'appareil digestif

11

III. Conséquences de cette crise

1. Cas d'E.S.B

Au Royaume-Uni, l'E.S.B a connu un développement fulgurant à caractère épizootique. Apparue

en 1986, le nombre d'animaux frappés par la maladie s'élevait en effet à environ à 136 cas en 1987,

puis augmentait rapidement pour atteindre plus de 35 000 cas en 1992. Depuis, grâce aux mesures

prises, ce nombre a été réduit pour atteindre un peu plus de 3700 cas en 1996. Cette tendance

décroissante se poursuit. En effet pour l'année 1999, seulement 2015 cas ont été observés.

Ces résultats sont à prendre en considération en fonction de la période d'incubation moyenne de

l'E.S.B (5 ans).

Néanmoins, on observe au Royaume - Uni l'apparition de cas relativement nombreux (plus de 20

%) chez les bovins nés après l'interdiction d'utiliser des F.V.O dans l'alimentation des ruminants.

Ces bovins sont désignés sous le terme de NAIFS. L'existence d'une autre source est émise, en

particulier la contamination mère-veau mais cette hypothèse est non confirmée. Dans ces

conditions, on invoque plutôt les difficultés dans la maîtrise de l'utilisation des F.V.O et notamment

l'hypothèse selon laquelle ces bovins auraient été contaminés soit directement par absorption

d'aliments contenant des farines contaminées non identifiées, soit par "contamination croisée", c'est-

à-dire par contamination accidentelle de leurs rations par des aliments pour porcs ou volailles qui,

eux-mêmes, auraient pu contenir des farines contaminées.

C'est pourquoi en 1996, les fabricants d'aliments pour animaux séparent les productions destinées

aux volailles et porcs de celles destinées aux bovins.

Mais, l'écoulement illégal des stocks et le retard pris par certains états (dont la France) pour interdire les farines expliquent la propagation de la maladie.

Dans les autres pays, ayant importé du Royaume-Uni, des animaux ou des aliments pour le bétail

ou qui fabriquaient les farines animales selon les mêmes procédés, le nombre total de cas relevés est

environ de 800, ce qui représente moins de 0.5 % du total des cas d’E.S.B enregistrés.

Compte tenu de la faible incidence de l'épizootie dans ces pays, il est difficile de parler de

régression ou de progression de la maladie sauf peut - être en Suisse et en Irlande où, suite aux

mesures prises, elle semble régresser, et au Portugal où son développement en 1998 a préoccupé la

Commission.

Page 14: AVERTISSEMENT PREALABLEpfeda.univ-lille1.fr/iaal/docs/dess1999/animal/far_text_fin.pdf · L'infection n'entraîne pas de réaction immunologique détectable. ... l'appareil digestif

12

Voici un tableau récapitulatif de l'évolution de la maladie dans les cinq pays d'Europe les plus

touchés. On peut supposer qu'il sous-estime le nombre de bovins atteints par la maladie, puisqu'il

est basé sur les déclarations faites par les éleveurs aux autorités sanitaires.

Pays 1985 1987 1988 1989 1990 1991 1992 1993 1994 1995 1996 Total Royaume-Uni

1 136 1954 6995 13042

22939

35000

37020

26087

14223

3736 161133

Irlande - - - 15 14 17 18 16 19 16 10 125 Suisse - - - - 2 8 15 29 64 68 40 226 Portugal

- - - - 1 1 1 3 12 14 26 58

France - - - - - 5 - 1 4 3 11 24

2. Cas de M.CJ

A ce jour, on ne compte que 40 personnes mortes de la nouvelle variante de la maladie de

Creutzfeldt-Jakob.

3. Mesures politiques

Voir annexe 1, les principales mesures adoptées par la Grande-Bretagne, la France, l'U.E jusqu’en

1996.

4. Retombées économiques

Pour les pays européens, l'annonce de la probable transmission de la maladie de l'E.S.B à l'homme a

engendré une crise sans précédent dans la filière de la viande bovine. Cependant la consommation

était déjà en baisse, au profit des viandes blanches pour des raisons de prix (prix élevé de la viande

bovine) et nutritionnelles (intérêt à la diminution de la consommation des graisses animales). La

crise n'a fait qu'accentuer cette baisse de consommation. La consommation de cette catégorie de

viande a essuyé une baisse allant jusqu'à - 30 % en avril 1996 par rapport à l'année précédente dans

la plupart des pays européens (il en est de même pour les abats). Depuis, la consommation de

viande bovine en Europe, sans retrouver son niveau des années précédentes, ne poursuit plus sa

tendance à la baisse. On constate même un redressement général de la consommation européenne

de viande bovine.

De plus, l'embargo européen et mondial sur les exportations de viande bovine et britannique et de

ses produits dérivés couplé à la chute de consommation intérieure a coûté 4 milliards de francs au

Royaume-Uni. L'embargo est aujourd'hui levé. Mais la France refuse toujours d'importer la viande

anglaise, car ils estiment que tous les risques ne sont pas écartés.

Page 15: AVERTISSEMENT PREALABLEpfeda.univ-lille1.fr/iaal/docs/dess1999/animal/far_text_fin.pdf · L'infection n'entraîne pas de réaction immunologique détectable. ... l'appareil digestif

13

5. Réglementation en vigueur dans les principaux pays producteurs de viande

voir annexe 1

6. Classification des tissus bovins en fonction de leur degré d'infectuosité

L'étude des organes des bovins atteints d'E.S.B et des animaux ayant ingéré des aliments

contaminants mais ne présentant pas encore de signes cliniques n'a permis de retrouver l'infectuosité

que dans le système nerveux central (y compris la rétine) et dans l'iléon. L'Organisation Mondiale

de la Santé (O.M.S) ayant calé ses recommandations relatives à l'E.S.B sur celle de la tremblante du

mouton, maladie affectant davantage d'organes (cerveau, moelle épinière, thymus, amygdales,

l'intestin et la rate des bovins de moins de six mois). Mais selon le rapport DORMONT, " la

classification de l'O.M.S surévalue le risque lié à l' E.S.B tel qu'on peut l'évaluer à ce jour : elle

constitue une précaution de santé publique et doit donc être maintenue ".

Néanmoins, celui - ci rappelle la possibilité de contamination d'un tissu de la catégorie IV de

l'O.M.S (pas d'infectuosité détectable) par du tissu nerveux (catégorie I, haute infectuosité) lors de

la préparation industrielle des aliments. Cette remarque prend tout son sens à la lumière des

inspections vétérinaires effectuées au Royaume - Uni qui ont rapporté que les consignes sanitaires

destinées à éviter de laisser en contact les tissus potentiellement infectants avec les parties

comestibles de la carcasse n'étaient pas toujours respectées dans les abattoirs.

Suite aux conclusions du professeur DORMONT, la France décide de transformer en farine animale

(encore utilisée pour les porcs, les volailles et les poissons) les seuls déchets d'abattoirs provenant

de carcasses et de tissus déclarés propres à la consommation humaine. Les morceaux à risques sont

retirés afin de prendre une double précaution. Cependant, des vaches peuvent avoir été abattues

avant que la maladie ne se déclare étant donné que la période d'incubation de l'E.S.B est de cinq

ans.

De plus l'Afssa (l'Agence Française de Sécurité sanitaire des Aliments) recommande l'interdiction

du jonchage en France, une pratique d'abattage des bovins qui consiste à introduire dans leur boîte

crânienne une tige flexible afin de détruire au plus vite les terminaisons nerveuses pour provoquer

l'étourdissement avant la mise à mort. Il permet également d'obtenir une paralysie flasque de

l'animal qui évite des mouvements agoniques (notamment le pédalage), dangereux pour le

personnel. Or cette technique présente l'inconvénient d'introduire dans la circulation sanguine des

fragments de tissus nerveux dont on sait qu'ils peuvent, chez les animaux en phase d'incubation de

Page 16: AVERTISSEMENT PREALABLEpfeda.univ-lille1.fr/iaal/docs/dess1999/animal/far_text_fin.pdf · L'infection n'entraîne pas de réaction immunologique détectable. ... l'appareil digestif

14

la maladie, être hautement infectieux. De plus, cette technique met en évidence l'impossibilité

pratique d'assurer un nettoyage et une stérilisation correcte de la tige entre deux animaux.

7. Le problème des sous-produits bovins utilisés dans l'industrie agroalimentaire, pharmaceutique et cosmétique Au niveau des industries agroalimentaires : - le lait et ses dérivés. Aucune infectuosité n'a jamais pu être mise en évidence dans

le lait, qu'il s'agisse du lait de vache ou de brebis.

- la gélatine. Elle est fabriquée à partir de peau et d'os, deux organes réputés non

infectants. Mais elle peut éventuellement incorporer de faibles quantités de moelle

osseuse, ce qui pose problème à deux niveaux : celui de l'origine géographique des

animaux et celui de l'inactivation effective de l'E.S.B au cours du processus

industriel.

Au niveau pharmaceutique, les médicaments utilisant des dérivés de tissus bovins ont été éliminés

pour la plupart du marché dont 19 en 1992.

Au niveau cosmétique, les produits sont appliqués sur la peau. Les risques semblent alors peu

importants.

8. Test d'identification des F.V.O

La commission a proposé que le Centre Commun de Recherche (C.C.R) entreprenne des études sur

la validation des tests d'identification des farines de viande et d'os dans les aliments. Le C.C.R a

entamé les travaux visant à valider deux méthodes d'analyse, à un niveau international avec la

participation de tous les Etats membres de l'U.E.

La première méthode permet de vérifier que la farine a subi un traitement correct à la chaleur (20

minutes à 133°C), la deuxième permet de détecter la présence d'A.D.N bovin mitochondrial dans

des aliments contenant moins de 0.125 % de F.V.O d'origine bovine.

9. Dépistage de la maladie Pour l'homme Selon le rapport Dormont en 1996,

- un test diagnostique de la maladie de Creutzfeldt-Jakob est en attente de brevet aux Etats-Unis.

Basé sur la présence de deux protéines dans le liquide céphalo-rachidien des patients infectés, sa

sensibilité et sa spécificité seraient supérieures à 90 % si le prélèvement a été effectué post - mortem

ou juste avant le décès. Son évaluation pour des prélèvements plus précoces est en cours.

Page 17: AVERTISSEMENT PREALABLEpfeda.univ-lille1.fr/iaal/docs/dess1999/animal/far_text_fin.pdf · L'infection n'entraîne pas de réaction immunologique détectable. ... l'appareil digestif

15

- En France, 3 tests spécifiques de la maladie de Creutzfeldt-Jakob sont en cours de développement,

le plus susceptible de recevoir une application à moyen terme (1 à 5 ans) reposant sur

l'immunochimie. Un autre test, non spécifique de la maladie de Creutzfeldt-Jakob, repose sur la

présence d'un composé chimique dans les urines des personnes souffrant de dégénérescence

cérébrale, composé également retrouvé dans les urines des vaches folles. Le développement de ce

test devrait être fait.

Pour l'animal Il n'existe actuellement pas de moyens pratiques de diagnostic des bêtes infectées pendant la phase

d'incubation (qui est de cinq ans environ).

Mais aujourd'hui, nous attendons le protocole du programme de dépistage des bovins, tel que les

experts du comité présidé par le Docteur Dominique DORMONT et réuni sous l'égide de l'Agence

Française de Sécurité sanitaire des Aliments (Afssa), sont en train de le définir.

Si tout se passe bien, ce dépistage pourrait commencer à la fin mars 2000.

Pour participer à la mise en place du plan national de dépistage de l'E.S.B, la Direction Générale de

l'Alimentation (D.G.A.L) a sollicité Adilva (l'Association française des directeurs et cadres de

laboratoires vétérinaires et publics d'analyses).

Ils devront assurer les 40 000 tests prévus sur des animaux retrouvés morts ou devant être abattus

pour d'autres raisons que l'E.S.B, dont des animaux destinés à la boucherie.

Dans un premier temps, le plan de dépistage concernera le grand ouest (la Bretagne, la Basse-

Normandie, le pays de la Loire).

Les prélèvements seront réalisés par les agents des services vétérinaires dans les abattoirs et par les

vétérinaires sanitaires dans les exploitations.

Le type de test utilisé n'a pas encore été déterminé. Rappelons qu'actuellement, trois tests de

dépistage de l'E.S.B. sont disponibles sur le marché :

- un test français mise au point par le C.E.A (Comité de l'Energie Atomique) et commercialisé par

Bio-Rad (voir ci-contre).

- un test suisse commercialisé par Prionics. Il révèle que le prion pathologique y est beaucoup plus

répandu dans les cheptels bovins qu'on pouvait le penser.

- un test irlandais commercialisé par la société Enfer.

Il s'agit de technique Elisa ou Western Blot.

Page 18: AVERTISSEMENT PREALABLEpfeda.univ-lille1.fr/iaal/docs/dess1999/animal/far_text_fin.pdf · L'infection n'entraîne pas de réaction immunologique détectable. ... l'appareil digestif

16

Un appel d'offre international va d'autre part être lancé, au terme duquel un choix sera fait entre les

tests d'origine irlandaise, suisse, française.

Tout résultat positif nécessitera une confirmation de l'Afssa. En cas de positivité confirmée, le

troupeau correspondant sera abattu. Ces résultats seront rendus publics. Donc une concertation doit

être établie avec les éleveurs, les personnels des abattoirs ainsi qu'avec les organismes

professionnels qui devront prendre en charge les conséquences de ce qui pourra être découvert.

La France souhaiterait que le test de dépistage du prion soit mis en oeuvre dans tous les pays de

l'Union européenne et pas seulement en Grande - Bretagne. On pense que c'est la seule solution

pour avoir une connaissance de l'ampleur de l'épidémie de la vache folle en Europe. Mais en ce qui

concerne l'épidémie chez l'homme, les scientifiques ignorent encore quelle sera son ampleur.

Les F.V.O sont donc la principale source de transmission de l'E.S.B C'est pourquoi dans une

deuxième partie nous présenterons le processus de fabrication des farines animales qui sont issues

de déchets animaux, sans oublier d'exposer les facteurs qui ont poussé les industriels à utiliser ces

produits.

Page 19: AVERTISSEMENT PREALABLEpfeda.univ-lille1.fr/iaal/docs/dess1999/animal/far_text_fin.pdf · L'infection n'entraîne pas de réaction immunologique détectable. ... l'appareil digestif

17

Deuxième partie :

la filière de valorisation

des déchets animaux

Page 20: AVERTISSEMENT PREALABLEpfeda.univ-lille1.fr/iaal/docs/dess1999/animal/far_text_fin.pdf · L'infection n'entraîne pas de réaction immunologique détectable. ... l'appareil digestif

18

I. Pourquoi utilise-t-on les farines animales ? Depuis 40 ans, l’agriculture est productiviste, on en est à l’ensilage de mais, aux tourteaux

de soja, aux concentrés. Pour produire plus et gagner davantage, la farine de viande a été ajoutée.

Après la seconde guerre mondiale, la France est ruinée, affamée, en situation de pénurie.

200 000 exploitations agricoles sont totalement ou en partie sinistrées, l’effectif bovin a perdu 25 %

de son cheptel initial, 40 % des bêtes ont une origine indéfinissable. L’élevage français souffrait

déjà d’un sérieux retard avant les hostilités, il faut donc après la guerre produire pour nourrir

l’Europe, et répondre à la demande intérieure stimulée par la forte augmentation de la natalité.

La France se tourne vers le modèle américain, l’agriculture devient plus moderne et plus

productive. Les tracteurs remplacent les bœ ufs et les engrais le fumier.

En plus les ouvriers réclament le droit à la viande tous les jours (la viande est un aliment

symbolique qui a été longtemps réservé à une élite). Après la guerre, la consommation de bœ uf

progresse de 4,6 % par an.

Seules les filières blé et lait ont les faveurs après la guerre, les races laitières prennent le pas sur les

races bouchères, en effet le gouvernement privilégie la production laitière en garantissant le prix du

lait. La machine à produire s’emballe, sous l’impulsion des prix garantis du blé, du lait puis de la

viande.

En 1953, a lieu la première crise agricole : l’offre de la viande et du lait est excédentaire. L’état

décide de stocker les excédents à l’automne et de les remettre sur le marché quand la demande se

rétablit : ceci s’appelle l’intervention. Par conséquent, la production laitière et bovine s’intensifie

encore plus. De 1960 à 1965, 80 % de la viande est constituée par la vache de réforme.

La France devient vite autosuffisante en production de viande et veut l’exporter. Mais l’Europe n’en

veut pas, elle veut de la viande plus tendre avec des bêtes plus jeunes et non pas des vaches de

réforme.

L’état envisage alors de séparer techniquement la production de lait et de viande.

La filière des jeunes bovins apparaît et va modifier profondément le monde agricole, il faut des

bâtiments, des aliments, de l’engrais, du carburant, des pesticides.

Des excédents vont à nouveau être produits, l’état régularisera le marché avec ses subventions.

Page 21: AVERTISSEMENT PREALABLEpfeda.univ-lille1.fr/iaal/docs/dess1999/animal/far_text_fin.pdf · L'infection n'entraîne pas de réaction immunologique détectable. ... l'appareil digestif

19

En 1974, l’industrialisation de la filière lait et viande fait que l’on est excédentaire de vaches de

réforme, de veaux laitiers, de jeunes bovins (c’est à dire de viande de toutes origines). Entre 1970 et

1990, les dépenses de la CEE pour soutenir l’agriculture ont été multipliées par trois.

L’état a mis en place une machine à produire des excédents dont le consommateur ne veut

pas, qu’il faudra donc stocker pour ensuite les écouler sur les marchés mondiaux au prix de

coûteuses subventions.

En 1984, Bruxelles instaure les quotas laitiers, le lait excédentaire sera taxé à l’éleveur. Les

excédents de viande et l’abattage massif des vaches de réforme après les quotas laitiers apportent

sur le marché des quantités importantes de sous produits qui sont transformés en farines animales.

Ces farines constituent un bon apport protéique, à bon marché, car elles peuvent remplacer le soja

(qui est beaucoup plus cher). A ce titre, les farines réintègrent le circuit de l’alimentation des

vaches laitières puisqu’elles « boostent » leur production de lait et surtout qu’il faut produire

plus de lait avec moins de vaches.

En 1992, l’Europe décide de diminuer le prix d’intervention sur la viande bovine et de donner des

aides directes à l’éleveur.

La filière de la viande est hétérogène, difficile à organiser, la concurrence est vive entre les

régions, les races. De plus, le produit n’est pas stable en comparaison du blé ou du sucre. Jusqu’en

1953, les éleveurs tentent d’organiser la filière ; mais toutes les forces professionnelles s’y

opposent. Les éleveurs se désolidarisent des intermédiaires de la filière traditionnelle (chevillard,

marchands de bestiaux, boucher) et s’allient.

Les groupements de producteurs, les coopératives d’abattages et de transformations apparaissent et

se multiplient, ils sont en lien direct avec la grande distribution, qui prend le pouvoir sur l’aval

(chevillards et abatteurs). Les groupements de producteurs déterminent de l’âge d’abattage,

l’alimentation des animaux … Ce circuit plus court est appelé circuit intégré qui s’oppose au circuit

traditionnel.

En conséquence, les prix d’achat diminuent, la négociation est facile à cause de la situation

excédentaire, les industriels de la viande se renforcent et s’agrandissent, le produit est banalisé dans

les années 70.

On passe progressivement de la valorisation d’une carcasse entière avec bas et nobles

morceaux à l’industrialisation d’une carcasse découpée.

Page 22: AVERTISSEMENT PREALABLEpfeda.univ-lille1.fr/iaal/docs/dess1999/animal/far_text_fin.pdf · L'infection n'entraîne pas de réaction immunologique détectable. ... l'appareil digestif

20

Les agriculteurs et les coopératives, sous l’impulsion des pouvoirs publics et des syndicats, se sont

placés sous le joug de la grande distribution en voulant court circuiter par l’industrialisation de la

viande les intermédiaires traditionnels. Dès lors, il est impossible d’agir sur les prix et la

valorisation de leurs produits, ils n’ont qu’une seule issue pour dégager des marges

supplémentaires que la réduction des coûts de production par la poursuite de l’intensification,

au détriment de la qualité des produits.

En général, le bétail se nourrit de céréales mais quand toutes ces céréales sont à des prix élevés sur

le marché mondial, on donne des sous produits (son, pulpe de betterave, corn gluten feed). Les

fabricants d’aliments concentrés (riches en énergie et en azote) constituent les aliments en fonction

des matières premières qui sont au meilleur prix sur le marché. Les fabricants cherchent le bol

alimentaire le moins cher possible au meilleur rendement et découvrent que les farines

animales peuvent remplacer le soja.

Les farines sont portées à haute température pour qu’elles ne soient pas dangereuses, mais il faut les

surchauffer et cela coûte cher, en plus les farines perdent une partie de leur efficacité protéique avec

la température. Devant de tels arguments, les industriels anglais décident de diminuer leurs barèmes

de chauffage pour faire des économies d’énergie (la crise de l’énergie démarre) et avoir un produit

de meilleure qualité protéique.

On a assisté à la transformation d’une agriculture naturelle en une course frénétique au

productivisme et au profit.

Si l’alimentation des bovins (notamment des vaches laitières) s’était poursuivi avec des méthodes

naturelles, l’engrenage successif et complémentaire des excédents de lait, de poudre de lait, de

veaux et l’emploi des farines de viande aurait été inutile.

La modernisation, l’industrialisation, les prix garantis, la banalisation du produit, la pression sur la

baisse des prix ont été quelques facteurs qui ont poussé l’Europe dans la crise de la « vache folle ».

Les farines animales sont devenues le symbole même d’une agriculture productiviste qui a

privilégié les volumes et les profits au détriment de la qualité.

A ce niveau du rapport, il est maintenant nécessaire d’exposer le fonctionnement actuel de

recyclage des déchets et la fabrication des farines.

Page 23: AVERTISSEMENT PREALABLEpfeda.univ-lille1.fr/iaal/docs/dess1999/animal/far_text_fin.pdf · L'infection n'entraîne pas de réaction immunologique détectable. ... l'appareil digestif

21

II. La transformation et la valorisation des coproduits animaux Depuis toujours les animaux consomment des coproduits d’origine animale.

Les recettes de nos grands-mères utilisaient le suif et le saindoux des animaux abattus à la ferme.

Aujourd’hui, on continue d’utiliser ces produits mais à une échelle industrielle avec des outils

adaptés aux nouvelles exigences de sécurité alimentaire.

Très tôt l’activité d’abattage et de préparation des viandes a généré une part de coproduits animaux

croissants qui a suscité une recherche active sur leurs moyens de leur valorisation.

L’évolution des habitudes alimentaires dans notre pays est à l’origine de la création progressive

d’une industrie de la viande : cela se traduit par des quantités importantes de coproduits animaux.

L’homme moderne a décelé depuis longtemps les propriétés de ces coproduits constitués pour leur

grande part de corps gras, de matière protéique et de minéraux hautement digestibles.

Au fil du temps, répondant aux besoins des abattoirs, une industrie de la collecte des produits frais

s’est créée pour leur traitement et leur valorisation.

Cette activité permet d’utiliser sans gaspillage toutes les parties de l’animal autres que la viande.

1. Les matières premières concernées sont

A partir de matières premières périssables, les industriels doivent fabriquer des produits de

qualité, stables et d’une parfaite innocuité. Les origines des matières premières ci-contre.

Les matières premières utilisées sont :

• Les matières dites « alimentaires », issues d’animaux abattus déclarés bons pour la

consommation humaine, destinées à l’alimentation humaine et manipulées dans des

conditions hygiéniques sous contrôle vétérinaire.

• Les matières d’origine « alimentaire », issues d’animaux abattus déclarés bons pour la

consommation humaine mais non destinées à celle-ci, manipulés sous contrôle vétérinaire.

• Les matières dites d’origine « non alimentaire », issues de cadavres d’animaux, saisies

d’abattoirs et abats spécifiés de ruminants non destinés à l’alimentation humaine ou

animale.

Les abats et coproduits (os, sang, plumes, viscères, peaux) entrent dans ce que les professionnels

appellent le cinquième quartier (c’est tout ce qui dans un animal n’est pas de la viande donc ce qui

n’est pas consommé par l’homme soit par exemple 30 % d’une carcasse bovine).

Page 24: AVERTISSEMENT PREALABLEpfeda.univ-lille1.fr/iaal/docs/dess1999/animal/far_text_fin.pdf · L'infection n'entraîne pas de réaction immunologique détectable. ... l'appareil digestif

22

Répartition moyenne de la découpe d’une carcasse ci-contre

Diversité et qualité des coproduits en France ci-contre

Ces matières premières font l’objet de valorisations nombreuses, variées et parfois complexes

principalement fondées sur leur richesse en acides aminés (lysine, méthionine, cystine), minéraux

assimilables (phosphore et calcium) et en acides gras (acides oléique, stéarique, linoléique et

linolénique). Ces matières premières proviennent d’animaux sains inspectés sur leur lieu d’abattage

et dans les ateliers de préparation agréés et contrôlés par les services de l’état. L’origine des

matières premières est connue, les fournisseurs sont agréés et identifiés. De l’origine des matières

premières, de leur fraîcheur et de leur qualité, dépend la qualité des produits finaux.

2. La filière et son organisation

Cette filière de valorisation s’appuie sur des procédés de fabrication dont l’efficacité et la

sécurité ont été testées, approuvées et réglementées par les pouvoirs publics. Les contrôles mis en

place au cours des phases de stérilisation, de dégraissage, de séchage et de finition des productions

participent au renforcement de garanties de plus en plus sévères.

2.1. Cette filière a deux missions distinctes

• Activité de service

Elle assure la destruction, pour le compte de la collectivité publique, des cadavres d’animaux et des

viandes impropres à la consommation pour une plus grande sécurité de la chaîne alimentaire.

Chaque jour, près de 500 camions spécialisés pour l’équarrissage collectent plus de 17 000 cadavres

d’animaux. Au total ce sont plus de 450 000 tonnes de matières premières qui sont ainsi retirées de

la chaîne alimentaire pour être détruites par incinération. Et par là même il participe à la protection

de l’environnement et à une meilleure hygiène publique.

• Activité industrielle

- collecte sélective des coproduits (la différenciation des collectes est une évolution née de la

recherche systématique des propriétés intrinsèques de chaque type de matière première).

- la transformation et la valorisation des coproduits collectés dans les abattoirs, les boucheries, les

ateliers de préparation de viande, de poisson, pour produire essentiellement des protéines et des

graisses aux qualités nutritionnelles et fonctionnelles très recherchées par des unités spécialisées.

Page 25: AVERTISSEMENT PREALABLEpfeda.univ-lille1.fr/iaal/docs/dess1999/animal/far_text_fin.pdf · L'infection n'entraîne pas de réaction immunologique détectable. ... l'appareil digestif

23

- une activité de recherche et développement : ils contribuent à renforcer la qualité des produits

naturels issus de ces usines.

- répondre aux besoins de protéines et corps gras : dans un contexte d’équilibre fragile en protéines

et corps gras au niveau mondial et notamment en Europe, ce secteur apporte une contribution

significative à la couverture des besoins globaux. Ces produits sont des ingrédients reconnus et

appréciés.

2.2. Son organisation

Cette filière comprend des unités spécialisées pour des traitements spécialisées. Une

représentation simplifiée de la filière ci-contre

Le schéma détaillé de la filière et les sources de coproduits animaux sont présentés en annexe 2 et

3.

3. Les produits obtenus

La liste des produits obtenus est présenté en annexe 2

Les principaux marchés et clients de cette industrie sont :

• l’alimentation humaine : ce sont les propriétés fonctionnelles et organoleptiques des corps

gras animaux qui intéressent particulièrement ce marché (biscuiterie, panification, fritures,

sauces, potages, charcuteries, plats cuisinés).

• les applications industrielles : de la savonnerie à la métallurgie, les produits participent à

l’évolution des technologies et des performances de nombreux produits industriels et grand

public liés à leur caractère biodégradable (savonnerie, lipochimie, métallurgie, tannerie)

• l’agriculture : les produits sont partie prenante dans le domaine des engrais et des

amendements (fertilisants organiques ou organominéraux, amendements organiques)

• le principal débouché pour cette production est l’alimentation animale (volailles, porcs,

veaux, chiens, chats, pisciculture), car il prépare des aliments adaptés à chaque espèce pour

chaque stade de croissance en associant protéines et corps gras d’origine animale et végétale

avec différentes céréales. C’est 500 000 tonnes de farines animales utilisées en France par

360 fabricants produisant 23,5 millions de tonnes d’aliments composés.

Les principales qualités des produits destinés à l’alimentation animale sont :

Page 26: AVERTISSEMENT PREALABLEpfeda.univ-lille1.fr/iaal/docs/dess1999/animal/far_text_fin.pdf · L'infection n'entraîne pas de réaction immunologique détectable. ... l'appareil digestif

24

*haute digestibilité

*richesse en éléments nutritionnels

*variété des composants

Les produits obtenus sont riches en protéines, lipides et minéraux, ils seront étroitement associés à

des formulations alimentaires efficaces et optimales.

Les protéines d’origine animale sont de haute qualité, supérieure à la plupart des protéines d’origine

végétale. Les corps gras animaux permettent de fournir une source d’énergie concentrée et bien

équilibrée. Ces 2 composantes essentielles des coproduits d’origine animale renforcent l’intérêt de

ces produits sur un marché de plus en plus concurrentiel au niveau européen et mondial.

Les débouches en alimentation animale des coproduits sont présentés en annexe 4.

4. Une industrie de poids en Europe et en France

En Europe :

-une industrie présente dans les 15 pays

-une implantation des usines de traitement sur l’ensemble du territoire

-17000 salariés, 7000 camions ramassant chaque jour 50000 tonnes de matières premières pour 400

usines.

- 17 % de la valorisation des protéines et corps gras animaux

Ci-contre le résumé des tonnages

En France :

La France est la premier producteur européen de protéines et de corps gras animaux en Europe

- plus de 3 millions de tonnes collectées par an, soit plus de 12 000 tonnes par jour

- environ 40 usines aux capacités technologiques performantes à proximité des sources

d’approvisionnement : dans les régions d’élevage, d’abattage et des ateliers de découpe, la

proximité permet de garantir une fraîcheur des matières premières

- une centaine de centres de collecte rapprochant le fournisseur détenteur de coproduits du centre de

traitement

- plus de 3 000 hommes et femmes dans cette filière

-1000 camions spécialisés pour chaque type de collecte

Ces entreprises occupent une place significative dans l’économie agroalimentaire de notre pays.

Les principaux acteurs de cette filière sont tous adhérents au SIFCO (syndicat des industries

françaises des coproduits animaux) :

Page 27: AVERTISSEMENT PREALABLEpfeda.univ-lille1.fr/iaal/docs/dess1999/animal/far_text_fin.pdf · L'infection n'entraîne pas de réaction immunologique détectable. ... l'appareil digestif

25

- il favorise les échanges, participe aux débats et contribue à la mise en place des règles de

convention

- il apporte sa contribution à la veille stratégique sur les attentes et les besoins du marché

- l’objet et la volonté du SIFCO consistent à communiquer les compétences de la profession aux

différents marchés.

Le SIFCO est en liaison permanente avec les pouvoirs publics et l’ensemble des organisations

professionnelles de la filière, tant dans le domaine de la production agricole et de l’élevage, des

abattoirs, de la transformation de la viande, de l’alimentation animale et de l’alimentation humaine

que dans celui des industries chimiques ou de la lipochimie.

Les mêmes relations existent au niveau européen dans le cadre d’organisations européennes EURA

et UNEGA.

De plus, des contacts étroits ont été noués ces dernières années avec l’OMS (organisation mondiale

de la santé) et la FAO (organisation mondiale de l’agriculture et le l’alimentation) pour mieux

répondre aux enjeux de demain dans le domaine de la sécurité alimentaire.

L’industrie française de transformation des déchets d’abattoirs est largement dominée par deux

entreprises, à savoir la SARIA industries qui contrôle 50 % du marché avec ses sociétés Soprorga et

française maritime, et la société CAILLAUD qui contrôle 27 % de l’activité. Trois autres sociétés

d’envergure peuvent également être citées : Ferso bio dans le sud Ouest, Monnard dans le Jura et

Blanchard dans le massif central. Dix sept usines appartiennent à SARIA sur 40.

La liste des acteurs adhérents au sifco est présenté en annexe 5.

5. Aujourd’hui une industrie contrôlée

L’Etat définit le cadre réglementaire, propre à l’exercice de cette activité. La réglementation en

vigueur est régulièrement complétée par de nouvelles dispositions, relevant de la législation

européenne ou nationale :

• conformité aux normes : cette industrie est soumise à un agrément préalable délivré par le

ministère de l’agriculture. Cet agrément garantit la conformité de l’outil industriel aux règles

sanitaires nationales et européennes. Ces établissements font l’objet d’une autorisation

d’exploitation accordée par le préfet du département qui stipule les normes de sécurité et

détermine la composition des effluents gazeux et liquides restitués au milieu naturel.

Page 28: AVERTISSEMENT PREALABLEpfeda.univ-lille1.fr/iaal/docs/dess1999/animal/far_text_fin.pdf · L'infection n'entraîne pas de réaction immunologique détectable. ... l'appareil digestif

26

• contrôle des sources : les coproduits animaux utilisés dans nos matières premières sont issus

d’animaux ayant bénéficié d’un contrôle sanitaire lors de l’abattage. La traçabilité des

matières premières est la base de la fiabilité de ces produits.

• contrôle des procédés : la conformité est acquise lors de l’agrément préalable par le

ministère de l’agriculture. De plus des contrôles réguliers ont lieu par la DSV, la DGCCRF,

la DRIRE.

• contrôle des produits finis : outre les contrôles des différentes administrations de l’état, les

industriels procèdent à la vérification systématique de la bonne conformité des produits finis

au cahier des charges des clients. Les établissements se sont dotés d’importants moyens de

contrôle analytique soit en propre soit en relation avec des laboratoires privés ou officiels.

• la maîtrise de la qualité micro biologique : elle est constamment améliorée, c’est le fruit du

grand nombre de contrôles effectués à tous les stades de fabrication.

L’industrie de la transformation et de la valorisation des coproduits animaux est un carrefour

stratégique ci-contre

Pour les années 2000, les enjeux de cette industrie sont clairs :

• enjeux sanitaires * sécurité des origines des matières premières (97/534 CE)

* sécurité des procédés de traitement (96/449 CE, 99/534 CE)

* sécurité des utilisations

• enjeux nutritionnels * aspects qualitatifs des protéines et des corps gras animaux

* les produits de substitution en alimentation animale

• enjeux économiques * intérêt économique de l’utilisation en alimentation animale

* conséquences de l’interdiction des protéines animales et corps gras

animaux pour quelques secteurs d’activité

• enjeux environnementaux

• enjeux politiques * indépendance protéique et énergétique en Europe

Page 29: AVERTISSEMENT PREALABLEpfeda.univ-lille1.fr/iaal/docs/dess1999/animal/far_text_fin.pdf · L'infection n'entraîne pas de réaction immunologique détectable. ... l'appareil digestif

27

III. Un cas particulier : les concentrés protéiques carnés Les concentrés protéiques carnés sont les anciennes farines animales

1. Définition

Les farines de viande sont obtenues par cuisson, dégraissage, séchage et broyage de carcasses

entières ou de sous produits animaux terrestres à l’état frais.

Elles ne doivent pas comporter d’addition :

-de matières cornées (poils, sabots, cornes)

-de contenu viscéral

-de plumes même hydrolysées ou de coquilles d’œ ufs

-de produits non animaux (végétaux, minéraux)

Si le dégraissage est plus ou moins poussé, en fonction de la technologie utilisée (solvant ou

presse), les farines sont dites dégraissées (D) ou non dégraissées (G). Selon la teneur en protéine

brute, les farines sont désignées 45 / 50 / 55 / 60.

Le traitement des produits consiste en quatre grandes étapes : broyage, stérilisation, déshydratation,

dégraissage, raffinage. Il fournit 6 grands types de matières premières pour l’alimentation animale :

- Os et viscères (toutes espèces) ð farine de viande et graisse animale

- Os (bovins, porcins) ð farine d’os et graisse d’os

- Gras (bovins ou porcins) ð cretons et suifs, saindoux

- Plumes (volailles) ð farine de plume

- Volailles (os et viscères) ð farine d’abats de volaille et graisse de volaille

- Sang (toutes espèces) ð farine de sang

Les matières premières utilisées, la technologie de production et les définitions et normes de

composition des farines de viande sont assez variables d’un pays à l’autre et encore plus d’un

continent à l’autre.

Page 30: AVERTISSEMENT PREALABLEpfeda.univ-lille1.fr/iaal/docs/dess1999/animal/far_text_fin.pdf · L'infection n'entraîne pas de réaction immunologique détectable. ... l'appareil digestif

28

2. Principaux aspects de la production des farines

Les matières premières utilisées

Les farines de viandes sont issues du traitement des matières animales non consommées par

l’homme ni utilisées par l’industrie pharmaceutique ou vestimentaire, à savoir des morceaux d’os,

d’abats, de gras d’émoussage et de gras de parage récupérés dans les abattoirs et les centres de

découpe, auxquels s’ajoutent les carcasses d’équarrissage (sur l’ensemble de la France, ces

dernières représentent environ 9% des produits collectés pour être transformés en farines de

viande). Actuellement les farines sont produites à partir de mélanges de déchets et de carcasses en

proportion variable. Vous trouverez en annexe 6 la liste positive récente de ce que peut contenir une

farine de viande.

La technologie mise en œ uvre

Actuellement la fabrication des farines animales est assurée par un certain nombre de

procédés développés au cours des années 70-80. Le schéma de fabrication ci-contre

Les farines animales sont produites à partir du résidu protéique de la fonte des produits animaux,

dont l’objectif premier est la production de matières grasses et produits dérivés de l’os.

Les déchets de carcasses sont broyés (taille des particules = 20-50 mm) puis soumis à une cuisson

par vapeur sèche qui aboutit à la séparation des lipides et de l’eau des autres tissus.

Au cours de cette cuisson, qui peut être réalisée en un ou plusieurs cycles (cuisson continue ou

discontinue), les morceaux sont amenés de 100 °C à 125 °C et soumis à une agitation mécanique.

L’eau est évaporée à une pression au moins égale à la pression atmosphérique (les morceaux

passent d’une humidité de 70 % à la collecte à une humidité d’environ 10 %), les matières grasses

liquéfiées sortent des tissus.

Les graisses sont drainées et évacuées du four. Les résidus solides obtenus en fin de cuisson sont

ensuite placés dans une presse ou une centrifugeuse afin d’extraire le maximum de graisse.

L’application d’une pression supérieure à la pression atmosphérique dans les premières phases de la

cuisson peut favoriser des hydrolyses partielles des tissus osseux en particulier.

Selon les pays la température et la durée de cuisson ou la qualité bactériologique des farines doivent

répondre à des normes réglementaires. En Europe, la réglementation impose la stérilisation des

tissus utilisés à une température à cœ ur de 133 °C, à 3 bars et pendant 20 minutes, éliminant

pratiquement tout risque de survie de microorganismes ou de forme de résistance.

A l’issue de la cuisson, on obtient la farine sèche et stérilisée que l’on sépare de la matière grasse

liquide. Cette farine est alors dégraissée par pression puis éventuellement par une extraction au

Page 31: AVERTISSEMENT PREALABLEpfeda.univ-lille1.fr/iaal/docs/dess1999/animal/far_text_fin.pdf · L'infection n'entraîne pas de réaction immunologique détectable. ... l'appareil digestif

29

solvant (phénol, hexane) (l’extraction au solvant nécessitera une étape de chauffage supplémentaire

pour l’évaporation du solvant).

Le dégraissage permet d’obtenir des farines plus fluides, plus faciles à manipuler et moins sensibles

au rancissement. La farine est ensuite raffinée (élimination des impuretés résiduelles) et de nouveau

broyée afin d’obtenir une farine ayant une granulométrie régulière.

Les farines de presse dites grasses, représentent environ 40 % du marché français, les farines

d’extraction, dites maigres ou dégraissées, les 60 % restant.

Les matières premières sont fragiles, la stabilisation est obligatoire (cuisson puis dessiccation à

haute température), ceci améliore la conservation du produit mais les graisses résiduelles sont

l’objet d’une protection par des antioxydants afin de limiter leur rancissement.

Facteurs et éléments de variation de la qualité des farines

- espèces et morceaux de carcasses : elles influencent particulièrement sur la teneur en phosphore et

en magnésium, le profil d’acides aminés, la digestibilité des protéines. Notamment la teneur en tissu

conjonctif qui semble diminuer la disponibilité des protéines pour les volailles

- modalités du process : la cuisson constitue un facteur principal de la qualité des farines, une

cuisson prolongée diminue la disponibilité des acides aminés et une diminution de la teneur en

lysine.

Pratiques de caractérisation des farines de viande par les industriels français de l’alimentation

animale

- humidité, protéines brutes, matières grasses, cendres, phosphore et calcium (elles sont indiquées

dans les conditions générales de vente)

- la teneur en acides aminés indispensables (lysine, méthionine, cystine, thréonine, tryptophane) ou

indicateurs de la qualité (hydroxylysine et hydroxyproline)

- les valeurs énergétiques pour toutes les espèces animales

Les caractéristiques mesurées par le fabricant

Très peu de caractéristiques sont mesurées en routine : matière sèche, protéines brutes, matières

grasses, cendres brutes, calcium et phosphore. Les autres sont beaucoup moins mesurées :

digestibilité protéique, sodium, potassium, profil d’acides gras.

Page 32: AVERTISSEMENT PREALABLEpfeda.univ-lille1.fr/iaal/docs/dess1999/animal/far_text_fin.pdf · L'infection n'entraîne pas de réaction immunologique détectable. ... l'appareil digestif

30

Les conditions de vente

Les conditions générales de vente des farines sont présentées en annexe 7. Elles ont été définies par

le SNIA, le SYNCOPAC et le SIFCO.

Aujourd’hui, afin de reconquérir la confiance des consommateurs et surtout des clients des farines

animales, ces syndicats ont établi une liste positive de ce que peut contenir une farine de viande. Ils

demandent aux professionnels de mettre en place les moyens de contrôle et de maîtrise de la

production pour ainsi demander une certification de conformité de produits sur leurs concentrés

protéiques carnés auprès de la CNLC.

3. Intérêt nutritionnel des concentrés protéiques carnés :

La farine de viande est la matière première la plus équilibrée pour le formulateur (qualité

nutritionnelle, sécurité, compétitivité). Les concentrés protéiques carnés répondent à deux critères

recherchés par les industriels de l’alimentation animale :

-niveaux d’énergie élevés

-fortes concentrations en protéines

Le gros avantage des concentrés protéiques carnés, est de contenir en forte proportion, plus de

protéines digestibles (55 à 60 %). Elles constituent donc une source complémentaire d’acides

aminés indispensables (lysine et méthionine) notamment pour les porcs et les volailles.

Les farines de viande sont de bonne source de vitamines B 12, PP et de choline ainsi que d’autres

vitamines dont on apprécie l’importance surtout dans l’alimentation des porcs et des volailles. Du

fait de leur contenu en os, ces sous produits sont particulièrement riches en phosphate de calcium.

L’intérêt nutritionnel des concentrés protéiques carnés est présenté ci-contre.

L’emploi de ces farines de viande et d’os dans l’alimentation des ruminants qui peut se justifier

sur le plan nutritionnel a été interdit pour les bovins depuis 1990 et depuis 1994 pour les autres

ruminants.

Actuellement, les farines de viande produites en France sont utilisées en France pour la fabrication

des aliments composés. On peut estimer que 80 % de celles-ci sont incorporées dans les aliments

pour les volailles avec des taux qui peuvent être voisins de 5 à 6 % pour les poulets de chair et de 6

à 7 % pour les pondeuses. Les porcs sont les autres utilisateurs avec toutefois des taux

d’incorporation nettement plus faibles.

Page 33: AVERTISSEMENT PREALABLEpfeda.univ-lille1.fr/iaal/docs/dess1999/animal/far_text_fin.pdf · L'infection n'entraîne pas de réaction immunologique détectable. ... l'appareil digestif

31

4. L’intérêt économique des farines animales

- en Europe, ce sont 3 millions de tonnes de farines produites (poudre d’os, farine de viande, farine

de sang, farine de plumes, farines de soies, farines d’abats de volailles) répartis selon les différents

pays (présenté ci-contre)

En annexe 8 et 9 sont présentés des tableaux de consommation et de production des farines

animales en Europe en 1998

- en France ce sont 2 millions de tonnes de déchets (soit 30 % du poids vif de l’animal qui sont

traités chaque année) : la majorité des farines produites en France sont utilisées en France (ceci est

présenté derrière). Les régions les plus productives sont : la Bretagne, la Haute et Basse

Normandie, les Pays de Loire et la Franche Comté.

- les exportations des farines animales hors union européenne sont présentées en annexe 10

- les exportations des farines d’origine américaine en 1998 sont présentées en annexe 11

- le tableau en annexe 12 présente l’intérêt économique de la farine de viande en volailles chair et

porcs.

Malgré cette production, les farines animales ne couvrent que 9 % des besoins en protéine des

animaux en Europe.

Les farines animales à l’origine de l’ESB sont un sujet de discussion et de discorde en Europe.

Quelques solutions proposées sont les suivantes :

• Sécurité des origines des matières premières : contrôle des sources

* séparation des circuits des matières premières valorisables et non valorisables (97/534 CE)

* traçabilité des filières

• Sécurité des procédés de traitement

*mise en place d’un traitement à 133 °C - 20 minutes – 3 bars pour les matières premières d’origine

mammifères destinés à l’alimentation des volailles et des porcs (décision 96 /449 CE)

*fixation d’un taux maximal d’impuretés non solubles à 0,15 % dans les graisses fondues (99/534

CE)

• Sécurité des installations :

Page 34: AVERTISSEMENT PREALABLEpfeda.univ-lille1.fr/iaal/docs/dess1999/animal/far_text_fin.pdf · L'infection n'entraîne pas de réaction immunologique détectable. ... l'appareil digestif

32

*interdiction des protéines de mammifères en ruminants, décision 94/381 CE en Europe.

Malgré les précautions de certains pays, quelques failles persistent :

- tous les pays ne contrôlent pas rigoureusement les matières premières qu’ils incorporent dans les

farines : notamment les boues d’épuration dont la France a été mise en cause, les matières à hauts

risques…

- le traitement thermique réglementaire n’est pas suffisant pour garantir le risque zéro (le prion ne

serait peut être pas entièrement détruit).

- certains pays ont du retard en matière de législation (ils n’appliquent toujours pas le barème de

température obligatoire)

- des stocks de farines non conformes continuent de s’écouler frauduleusement

- on constate un manque de professionnels formés pour les contrôles

- le nombre de NAIF illustre clairement l’efficacité de la mesure

- l’apparition de la maladie n’a pas empêché les Britanniques d’exporter des farines, notamment en

France

-les techniques de jonchage en abattoir risque de propager la maladie

-certains équarrisseurs ne sont pas équipés pour travailler dans de bonnes conditions

Il est donc nécessaire que l’Europe prenne une décision sur l’avenir des farines animales. Plusieurs

alternatives sont possibles, elles sont exposées dans la troisième partie.

L’Europe se trouve donc face à une problématique qui va l’obliger à prendre des décisions. Parmi ces décisions, deux stratégies sont possibles : faudra-t-il interdire les farines animales dans l’Union européenne ou alors prendre des mesures draconiennes comme c’est le cas de la France pour assurer l’innocuité de ces produits ?

Une première solution réside dans l’élimination pure et simple, impliquant ainsi une non

valorisation des coproduits pour abattoirs. Autre débouché possible, leur utilisation comme engrais,

néanmoins celle-ci paraît difficilement envisageable, puisque se reposeraient très rapidement les

mêmes questions de santé publique, associées à leur utilisation en alimentation animale.

Enfin, une autre possibilité consisterait à aboutir à un compromis technique permettant de garantir,

notamment grâce à une trempabilité complète, l’origine et la sécurité sanitaire des matières

premières et des procédés de fabrication utilisés. En effet, il ne faut pas oublier qu’aujourd’hui, les

farines de viande produites en France ne sont plus que les déchets de ce que les humains ont

consommé. Les animaux morts et les produits à risque de contamination par l’agent responsable de

l’ESB tels que cervelle, moelle épinière, yeux... sont traités séparément. Outre la question de la

Page 35: AVERTISSEMENT PREALABLEpfeda.univ-lille1.fr/iaal/docs/dess1999/animal/far_text_fin.pdf · L'infection n'entraîne pas de réaction immunologique détectable. ... l'appareil digestif

33

rigueur de l’application des réglementations, cette solution se heurte cependant à un obstacle de

taille. En effet, les conditions de production des farines animales ne sont pas uniformes au sein de

l’Union européenne, ce qui nécessitera une harmonisation des réglementations sanitaires en

vigueur.

Nous allons exposer les deux stratégies possibles : points forts, points faibles et conséquences.

Page 36: AVERTISSEMENT PREALABLEpfeda.univ-lille1.fr/iaal/docs/dess1999/animal/far_text_fin.pdf · L'infection n'entraîne pas de réaction immunologique détectable. ... l'appareil digestif

34

Troisième partie : Que faire des farines animales?

Page 37: AVERTISSEMENT PREALABLEpfeda.univ-lille1.fr/iaal/docs/dess1999/animal/far_text_fin.pdf · L'infection n'entraîne pas de réaction immunologique détectable. ... l'appareil digestif

35

I. Généralisation de l’interdiction des farines animales à tous les animaux d’élevage

Les farines de viande et d’os sont déjà prohibées en France, depuis 1990 chez les bovins, et

depuis 1994 chez les ovins. Leur interdiction pourrait s’étendre à l’ensemble des animaux

d’élevage. Quelles conséquences pourraient engendrer un abandon des F.V.O et leur substitution

par des produits d’origine végétale est-elle possible ?

1. La composition moyenne des rations alimentaires des non ruminants

Cette ration se compose en moyenne de :

- 46% de céréales.

- 25% de tourteaux oléagineux.

- 9% de graines protéagineuses ou oléagineuses.

- 9% de coproduits de l’industrie céréalière.

- 3% de fourrage déshydraté.

- 3% de minéraux.

- 3% de farines animales pour les volailles et 5 % pour les porcs industriels.

- 1% de mélasse.

- 1% d’huiles végétales et de graisses animales.

Les matières riches en protéines (MRP) sont utilisées pour complémenter une alimentation de base

(céréales et fourrages dans le cas des bovins) qui satisfait les besoins en énergie mais qui est

souvent déséquilibrée en protéines. Elles peuvent être d’origine animale (farines de poisson et de

viandes) ou végétale (tourteaux de soja, de colza, de tournesol, corn gluten feed, protéagineux). Les

tourteaux de soja sont les plus employés car ils possèdent la plus forte teneur en protéines. Il

représente ainsi près de 60% de l’offre de matières riches en protéines. Les farines de viande

contiennent plus de protéines assimilables (55 %) contre 47 % pour les tourteaux de soja, 35 % pour

ceux de colza et 30 % pour le tournesol. Tandis que les graines de pois et de protéagineux en

contiennent 23 %.

L’interdiction des farines impliquerait une substitution de 3 à 5 % par d’autres protéines.

2. Les fabricants d’aliments composés vont devoir adapter leur formule

Face aux performances zootechniques demandées aujourd’hui à l’élevage, l’alimentation

animale doit être capable de fournir non seulement des niveaux élevés d’énergie, mais aussi des

Page 38: AVERTISSEMENT PREALABLEpfeda.univ-lille1.fr/iaal/docs/dess1999/animal/far_text_fin.pdf · L'infection n'entraîne pas de réaction immunologique détectable. ... l'appareil digestif

36

concentrations importantes en protéines et minéraux. Si les farines de viande, riches en matières

grasses, en protéines, en calcium et en phosphate, remplissent tous ces critères, plusieurs catégories

de végétaux (tourteaux tannés de colza et de soja, tournesol, pois...) sont également aptes à y

répondre. Mais généralement pauvres en calcium et souvent mal équilibrés en acides aminés (par

exemple le pois est riche en lysine, mais pauvre en méthionine et en tryptophane, tandis que le

tournesol est riche en lysine et pauvre en méthionine), leur utilisation en remplacement des farines

de viande engendre de nombreuses contraintes techniques pour les formulateurs. En effet, parvenir

aux mêmes objectifs de production en l’absence de farines animales, implique que les aliments

composés puissent garantir les mêmes apports nutritionnels, qu’il s’agisse des apports protéiques,

énergétiques ou minéraux. Sachant qu’aucun autre produit végétal n’est aussi concentré que les

farines animales, leur élimination implique mécaniquement une modification des volumes des

différents produits utilisés dans les aliments composés. Les nouvelles formulations qui en

résulteront, devraient donc favoriser l’incorporation des produits végétaux les plus concentrés,

comme les issues de maïs, les tourteaux de soja au détriment des produits moins concentrés tels que

le pois ou encore les graines de colza.

Il faut savoir que 500 000 tonnes de farines animales sont utilisées chaque année en France.

2.1. Le soja s’impose comme le meilleur substitut

On estime qu’un kilo de farines animales doit être remplacé par 1,2 kilo de tourteaux de

soja. Pour 500 000 tonnes de farines animales consommées, il faudrait donc 640 000 tonnes de soja.

Il serait donc nécessaire d’importer 640 000 tonnes de soja dont le cours actuel est de 1,30 franc le

kilo soit un coût de 832 millions de francs. Au niveau européen, il faudrait importer 2,5 millions de

tonnes supplémentaires de soja en plus des 25 millions déjà importées pour remplacer les 2,1

millions de tonnes de farines actuellement consommées.

Les fabricants français d’aliments pour animaux importent déjà 37% de leurs protéines,

essentiellement du continent américain.

Dans ce contexte, il est important de rappeler que la France, comme l’Union européenne, dépend

fortement des importations pour assurer la couverture des besoins en protéines végétales. Le

problème serait de réussir à produire davantage de protéines végétales, sachant que la France est

déjà déficitaire à hauteur de 46% et de 70% dans l’Union européenne. La production française de

soja n’a permis de couvrir que 5% des besoins en 1998.

Une suppression totale des farines animales dans l’Union européenne conduirait à une dépendance

par rapport aux Etats-Unis de près de 80% de notre consommation, car en matière de protéines

Page 39: AVERTISSEMENT PREALABLEpfeda.univ-lille1.fr/iaal/docs/dess1999/animal/far_text_fin.pdf · L'infection n'entraîne pas de réaction immunologique détectable. ... l'appareil digestif

37

végétales, c’est le soja qui est le leader et avec lui, les Etats-Unis, le Brésil et l’Argentine arrivant

bien après les Etats-Unis.

Accroître les achats de soja reviendrait à renforcer cette dépendance et, en même temps, à courir le

risque d’importer en Europe des organismes génétiquement modifiés. Ces OGM sont eux aussi

rejetés par les consommateurs européens et les filières agroalimentaires qui s’emploient à les

éliminer à la demande des distributeurs.

En résumé, il faudrait que l’Europe augmente de 10 % ses importations, sachant que 60 % des

surfaces cultivées en Amérique du nord sont génétiquement modifiées et que les Américains ne

séparent pas les récoltes avec et sans OGM.

Aussi, la remise en cause des approvisionnements en matières premières générée par l’abandon des

farines animales nécessitera que s’engage une réflexion sur l’évolution des productions végétales,

en particulier des surfaces cultivées en plantes protéiques (protéagineux et oléoprotéagineux) au

sein de l’Union européenne.

2.2. Les plantes oléagineuses, plus pauvres en protéines, sont également des substituts possibles

Des espèces adaptées à nos climats comme le pois ou le lupin sont envisageables ou alors

davantage de colza ou de tournesol.

La France est le premier producteur européen de graines oléagineuses et de protéagineux (50 % de

la production). En augmentant les surfaces de 30 % en Europe, ces cultures peuvent remplacer les

farines de viande. Ce chiffre correspond au meilleur compromis des points de vue agronomiques et

environnementaux : 2 millions d’hectares supplémentaires composés de 1.6 millions d’oléagineux

et 0.4 millions de protéagineux.

Malheureusement la nouvelle réforme de la PAC, mise en œuvre dès l’an 2000, n’encourage guère ces cultures, en supprimant le régime spécifique des oléagineux par l’alignement de leur paiement compensatoire sur celui des céréales. Outre leur faible rendement en protéine, l’agriculteur aura tout intérêt à semer des blés au rendement supérieur et moins coûteux à produire.

De plus les accords passés de Blair House impose une limitation des surfaces européennes à 5.5 millions d’hectares. Certains envisageraient de remettre en cause les accords de 1999 dans le cadre de l’OMC. Cet objectif (augmenter de 30 % les surfaces) ne pourra être atteint que grâce à des mesures

d’accompagnement prises par le budget agricole de la Commission européenne : cela coûterait 400

millions d’euros, soit 1 % du budget agricole de l’Europe.

La Fédération française des producteurs d’oléagineux et de protéagineux (FOP) compte beaucoup

sur les décisions qui seront y prises au cours des prochains conseils de ministres.

Page 40: AVERTISSEMENT PREALABLEpfeda.univ-lille1.fr/iaal/docs/dess1999/animal/far_text_fin.pdf · L'infection n'entraîne pas de réaction immunologique détectable. ... l'appareil digestif

38

Dans la course aux matières protéiques, l’Union européenne devra trouver un consensus politique

pour se battre face aux Etats-Unis.

La substitution ne pose pas de problèmes techniques mais économiques.

2.3. Détail des coûts de la suppression des farines sur la formulation des aliments pour animaux:

La substitution des farines et des graisses animales entraîne un surcoût dans la formulation, qui peut

être évalué en première analyse :

- Bovin : +5 à +10 francs / tonne d’aliment complémentaire

- Porc : +15 à 30 francs / tonne d’aliment complet

- Poulet de chair : +50 à +60 francs / tonne

- Dinde : +80 à + 100 francs / tonne

- Poulet reproducteur : +40 à +50 francs / tonne

- Pondeuse : +40 à + 50 francs / tonne

Il faut préciser que ces écarts de prix de formules alimentaires ont été réalisés dans un contexte de

prix bas du tourteau de soja. Il est clair qu’une suppression des farines de viande en Europe ou en

France entraînerait une demande accrue en tourteau de soja, qui conduirait immanquablement à un

renchérissement de cette matière première sur le marché mondial. Le coût global ci-dessous est

donc à considérer comme minimum.

Compte tenu des tonnages d’aliments fabriqués (chiffres 1998), le surcoût sur l’aliment peut être évalué à environ 700 millions de francs par an. 2.4. Détail des tonnes de remplacement par des sources protéiques métropolitaines

Ainsi, les correspondances protéiques peuvent être présentées de la manière suivante:

La France produit 500 000 tonnes de farines de viande. Pour les remplacer, il faudrait :

- 980 000 tonnes pois protéagineux (+57%)

- 650 000 tonnes colza et tournesol (+40%)

L’Europe produit 2,5 millions de tonnes de farines de viande. Pour les remplacer, il faudrait : -

5,7 millions de tonnes pois protéagineux

- 3,75 millions de tonnes de colza et tournesol

Page 41: AVERTISSEMENT PREALABLEpfeda.univ-lille1.fr/iaal/docs/dess1999/animal/far_text_fin.pdf · L'infection n'entraîne pas de réaction immunologique détectable. ... l'appareil digestif

39

Ces chiffres montrent l’importance primordiale d’une politique de développement des cultures

oléoprotéagineuses en France et en Europe, sous peine de voir la dépendance des pays de l’Union

européenne s’accroître à l’égard du soja américain.

3. Un surcoût inévitable en élevage

En outre, l’utilisation des farines animales ayant été longtemps motivée par leur faible prix,

leur remplacement induit aussi un surcoût en alimentation animale. En cas de suppression des

farines de viande et des matières grasses d’origine animale, on a estimé le surcoût du quintal

d’aliment à 2F pour le canard, à 4F pour le poulet standard et de 2,50F à 3,50F pour la poule

pondeuse. En formulation d’aliments pour les porcs, le surcoût serait situé, quant à lui, entre 1F et

1,50F et son incidence sur la production pourrait ainsi s’avérer assez limité, en particulier dans le

cas des porcs charcutiers. En revanche, le principal handicap devrait se manifester au niveau de

l’élevage des dindes industrielles, pour lesquelles le besoin en protéines est le plus important. Les

écarts de prix pourraient s’échelonner dans une fourchette allant de 3-4F à 6-7F par quintal

d’aliment. Néanmoins, si ces estimations sont à prendre avec précaution, les conséquences d’une

suppression des farines animales se prolongent au-delà même d’une simple modification et d’un

surcoût des aliments composés.

De plus, la suppression des farines animales étant synonyme d’une modification des formules, les

performances zootechniques peuvent s’en trouver affectées et cette question se pose tout

particulièrement pour les animaux à engraissement intensif (porc, aviculture). A moins de limiter

les exigences en matière de productivité. L’arrêt de l’utilisation des produits d’origine animale peut

s’accompagner d’une réduction des performances, entraînant ainsi une diminution des rotations au

sein de l’élevage et donc, une augmentation des frais fixes et a fortiori du coût global des

productions animales.

C’est la filière volaille qui serait la plus touchée par les conséquences de l’interdiction des farines

carnées. Elle devrait supporter les surcoûts liés à leur substitution par des protéines végétales (plus

chères), à la destruction et la non-valorisation des sous produits de volaille (farine de volaille), qui

sont actuellement réintégrés dans les rations des volailles ou vendus à des fabricants d’aliments

pour animaux domestiques. Les surcoûts de production des poulets standard augmenteraient de 10

%.

La non valorisation des farines de volailles poserait donc d’énormes problèmes de surcoût à toute la

filière avicole. En effet les sous produits sont en priorité réservés aux poulets destinés à l’export,

Page 42: AVERTISSEMENT PREALABLEpfeda.univ-lille1.fr/iaal/docs/dess1999/animal/far_text_fin.pdf · L'infection n'entraîne pas de réaction immunologique détectable. ... l'appareil digestif

40

marchés en concurrence directe avec le brésil et les Etats-Unis. L’interdiction de ces farines

remettrait en cause la compétitivité de la France dans ce secteur.

3.1. Le surcoût pour l'éleveur serait de

- Porc: +10 cts/kg poids vif

- Poulet de chair: +20 cts/kg poids vif

- Dinde: +30 cts/kg poids vif

- Oeuf: +1 ct/oeuf

Compte tenu des tonnages de production (chiffres 1997) en différents produits animaux, on obtient les surcoûts suivants pour la reformulation des aliments après suppression des co-produits animaux (farines de viandes et graisses animales): - Porc: 1 300 000 x 125F = 162,5 millions de francs

- Poulet: 1 208 000 x 200F = 241,7 millions de francs

- Dinde: 711 600 x 300F = 213,5 millions de francs

- Oeufs: 16,507 milliards x 0,01F = 165,1 millions de francs

Une extension approximative aux espèces animales non citées permet de proposer un surcoût

global pour les filières animales à 1 milliard de francs par an.

3.2. Incidence sur le coût des produits animaux

L’incidence du prix de l’aliment sur les productions animales n’est pas le seul élément à

prendre en compte : pour certaines espèces animales (volailles notamment), la suppression des

farines et des graisses animales oblige à déconcentrer l’aliment en énergie, ce qui augmente l’indice

de consommation et la quantité d’aliment consommé par l’animal ainsi que la durée de l’élevage.

De plus, le remplacement de la graisse par l’huile végétale donne au granulé une mauvaise tenue, ce

qui induit un gaspillage en élevage et, là aussi, une augmentation de l’indice de consommation.

Tous ces éléments doivent entrer en ligne de compte dans un calcul de surcoût sur les produits

animaux.

3.3. Perte de compétitivité de l’élevage français et européen

La suppression des coproduits animaux en alimentation animale induit une augmentation des coûts

de production des animales d’où :

-une perte de compétitivité de l’Europe par rapport à ses concurrents des marchés mondiaux.

-une distorsion de concurrence par rapport à ses compétiteurs qui, eux, auront toujours recours à

ces coproduits, y compris pour les produits animaux qu’ils exportent vers l’Europe.

Page 43: AVERTISSEMENT PREALABLEpfeda.univ-lille1.fr/iaal/docs/dess1999/animal/far_text_fin.pdf · L'infection n'entraîne pas de réaction immunologique détectable. ... l'appareil digestif

41

-un risque de délocalisation des productions européennes destinées à l’exportation vers des zones où

ces contraintes n’existent pas (Amérique latine, Asie du sud-est). Certains volaillers sont déjà

installés au Brésil.

4. Conséquences sur la filière de transformation et de valorisation des coproduits animaux

Comme nous avons vu précédemment, cette filière a un poids économique important. Elle se

sépare en deux, avec une collecte sélective des produits à haut risque qui sont détruits, et la

valorisation des produits à bas risques, qui fait vivre la filière par ses ventes de farines animales, de

graisses, suifs et saindoux.

Par une telle interdiction, ne seraient plus valorisées : les farines de viande, les graisses animales et

les produits à haut risque, soit environ 1 million de tonnes de produits (une fois séchés).

Les équarrisseurs éliminent les déchets. Ni les pouvoirs publics, ni la grande distribution, ni les abattoirs ne peuvent s’en passer. Si les farines sont interdites, la mission de ces derniers serait exclusivement du service public. La valorisation des déchets deviendrait nulle et même coûteuse sachant que l’activité en volume des équarrisseurs serait identique. L’organisation actuelle du service d’équarrissage a été fixée le 26 décembre par une nouvelle loi qui

a remplacé l’ancien texte législatif de 1975 : « la collecte et l’élimination des cadavres d’animaux et

des déchets d’abattoirs s’inscrivent désormais dans un service public financé par une taxe sur les

achats de viande ». A compter du 1 janvier 1997, il a été créé une taxe sur la vente au détail de

viandes, salaisons, produits de charcuteries assises sur la valeur hors taxe des achats des produits.

Pour les entreprises assujetties (la grande distribution notamment), le taux de taxe sera au maximum

de 0.6 % par tranche d’achats mensuels de viande HT, compris entre 0 et 125 000 et de 1 % au-delà.

Le tableau ci-contre résume le coût de traitement des farines par les équarrisseurs.

Globalement, les comptes devraient s’équilibrer à partir de l’an 2000 avec la résorption des stocks,

la recette de 600 MF par an devrait permettre de couvrir tout juste les dépenses du service public

d’équarrissage. Ce mode de financement doit être remis en cause et il convient d’ores et déjà de

chercher des solutions alternatives de financement et des économies.

Le tableau ci-contre présente les modes de financements possibles.

Page 44: AVERTISSEMENT PREALABLEpfeda.univ-lille1.fr/iaal/docs/dess1999/animal/far_text_fin.pdf · L'infection n'entraîne pas de réaction immunologique détectable. ... l'appareil digestif

42

Destruction des stocks L’autre souci de cette filière est la destruction par incinération des stocks de farines à hauts

risques en France. 75 000 tonnes de déchets provenant des abats spécifiques bovins, des fameux

veaux britanniques et des carcasses suspectes sont stockés, et s’accumulent depuis trois ans chez les

équarrisseurs sous forme de farines animales appelées « déchets ultimes ». Ces déchets sont

considérés par l’arrêté du 28 juin 1996 comme des matières à hauts risques.

Trois catégories de farines sont concernées :

- farines grasses à 30 de matière grasse (MG), ni broyées, ni tamisées

- farines pressées à 12 % de MG, non broyées ou broyées et tamisées

- farines dégraissées à 4 % de MG, non broyées ou broyées et tamisées

L’incinération de ces farines pose des problèmes techniques :

• Il faut mélanger ces produits à d’autres déchets comme les ordures ménagères. Toutes les

farines ont un pouvoir calorifique trois fois supérieur à celui des ordures ménagères. Elles

sont donc susceptibles de provoquer la dégradation des unités d’incinération d’ordures

ménagères (UIOM).

De plus les farines incinérées dégagent une forte proportion de matières minérales qui se

retrouvent dans les cendres volantes. Ces cendres peuvent accélérer le colmatage des filtres

des fumées.

• On peut éventuellement les traiter avec des déchets toxiques dans des déchetteries

industrielles mais le coût est trop élevé, 2000 F HT / tonne.

• Seuls les cimentiers peuvent incorporer ces produits comme « clinker » dans le ciment.

Malheureusement ils n’acceptent que les farines à 4 % de MG car ces produits contiennent

0.8 % de phosphore qui retarde la prise du ciment.

• Un autre souci est que ces farines ne sont pas des produits inertes. La protéine du prion n’est

pas craquée, le risque zéro n’existe pas et ceci effraie les collectivités et les industriels.

• La présence de graisse entraîne aussi d’autres problèmes. Elles ne s’enflamment pas

immédiatement, fondent, se retrouvent dans les mâchefers et bouchent les tuyauteries

Page 45: AVERTISSEMENT PREALABLEpfeda.univ-lille1.fr/iaal/docs/dess1999/animal/far_text_fin.pdf · L'infection n'entraîne pas de réaction immunologique détectable. ... l'appareil digestif

43

soudées. Il convient donc d’utiliser les farines à 12 % de MG, de les réduire en fines

particules et d’éviter qu’elles ne s’agglomèrent.

• De plus, lors du processus de combustion des farines apparaît une quantité non négligeable

de dioxine. Les dioxines sont des produits cancérigènes qui sont émis dans l’atmosphère. En

effet, les dioxines sont principalement produites par les usines de retraitement des déchets.

Leur formation résulte principalement de

- l’incinération des déchets ménagers, hospitaliers et industriels

- ainsi que les cimenteries

Ce sont les UIOM qui émettent le plus de dioxine.

La filière opérationnelle est celle de quelques usines d’incinération des ordures ménagères qui

acceptent les farines à 12 % de MG. L’alimentation des produits est réalisée soit par la chaîne

d’introduction des déchets hospitaliers (farines pulvérulentes conditionnées), soit par déversement

dans la fosse au-dessus des ordures ménagères. Le fort pouvoir calorifique des farines oblige à une

introduction précautionneuse et en petites quantités pour éviter les surchauffes.

La production de farines annuelles déclassées est de 150 000 tonnes, à cela s’ajoutent 75 000 tonnes

de farines de l’année 1996.

La profession se trouve donc dans la nécessité de trouver une réponse innovante à ce problème

d’incinération. Deux types de réponse peuvent être apportés :

- l’utilisation d’équipements existants (coincinération), en mélange avec des déchets ménagers, avec

les déchets industriels spéciaux ou comme combustible d’appoint dans les fours cimentiers. Ces

possibilités apportent une solution convenable et immédiate mais montrent néanmoins leurs limites

du fait de la spécificité du matériau. De nombreuses contraintes apparaissent et nécessitent de

limiter la coincinération à de petits volumes.

- l’utilisation d’équipements spécifiques (la monoincinération). Il faut prendre en compte la

spécificité du combustible afin d’en tirer le meilleur profit. A l’heure actuelle trois technologies se

révèlent prometteuses :

* le lit fluidisé

* la gazéification en lit fluidisé

* l’incinération en four tournant

Le coût de l’incinération :

Page 46: AVERTISSEMENT PREALABLEpfeda.univ-lille1.fr/iaal/docs/dess1999/animal/far_text_fin.pdf · L'infection n'entraîne pas de réaction immunologique détectable. ... l'appareil digestif

44

- 300 à 350 F/T pour les cimentiers (farines à 4 %)

- 500 à 800 F/T pour les unités d’incinération d’ordures ménagères (farine à 12 %)

- frais de transport 76 MF HT

- frais de stockage 18 MFHT

soit 237 MF TTC + 43 MF TTC pour l’incinération des 36 000 t de farines à 30 % de MG dont le

coût de l’incinération est de 1000 F HT par tonne.

De plus cette non-valorisationn entraîne une perte de 1 % du bénéfice net des entreprises d’abattage

et de transformation

Par conséquent l’interdiction des farines animales implique :

- une reformulation des rations qui entraînerait un surcoût de 700 millions de francs par an

- une substitution par le soja qui aura un surcoût de 832 millions de francs, une

dépendance de l’Europe à 80 % pour ses MRP et une ouverture de ses frontières aux

OGM.

- une substitution par les oléoprotéagineux qui obligerait à augmenter les surfaces

cultivables de 30 % en Europe

- un surcoût pour les filières animales de 1 milliard de francs par an

- une perte de compétitivité de l’élevage français et européen

- un coût de 1.5 milliard de francs pour la non-valorisation des déchets animaux et la

destruction des stocks de farines.

Le SNIA a calculé que l’interdiction des farines et des graisses animales au menu des volailles et

des porcs aurait un surcoût de 5 milliards de francs la première année et de 3 milliards de francs par

la suite.

La suppression pure et simple des farines pose donc autant de problèmes qu’elle en résout.

II. Harmonisation de la réglementation des farines animales en

Europe Dans tous les pays européens, les farines animales sont fabriquées par les usines

d’équarrissage, selon des règles en principe strictes, contrôlées par les états membres de l’Union européenne. En fait, ces règles ne sont pas forcément respectées. En effet, la situation en Europe varie sensiblement d’un pays à l’autre, caractérisée le plus souvent,

par un grand laxisme, comme si la crise de l’ESB n’avait pas eu lieu.

Page 47: AVERTISSEMENT PREALABLEpfeda.univ-lille1.fr/iaal/docs/dess1999/animal/far_text_fin.pdf · L'infection n'entraîne pas de réaction immunologique détectable. ... l'appareil digestif

45

1. Cas de la France :

La France n’a pas appliqué directement le traitement de stérilisation (applicable au 1er avril

1997), pourtant rendu obligatoire par la commission européenne. Elle suit plutôt les

recommandations du rapport Dormont qui instaure un tri de la matière première à la source :

tous les abats spécifiques « à risque », saisies et cadavres de toutes espèces sont écartés du circuit

des farines destinées à l’alimentation animale, sont collectés et voués à la destruction.

C’est le 9 février 1998, que la France décide de se plier à la réglementation. Les industriels s’exécutent, mais au nom du principe de précaution, la France a décidé de maintenir la séparation en amont. Aujourd’hui seul ce pays respecte cette triple barrière : - séparation des abats à risque (le tableau ci-contre les présente)

- élimination des cadavres de toutes espèces (pas seulement des bovins et des ovins)

- stérilisation

Les MRS (matière à risque spécifié) ont été bannis de la fabrication des farines dans l’union. La

France possède une réglementation nationale, interdisant l’usage des cadavres, des saisies

d’abattoirs ainsi qu’une liste de MRS plus longue que celle en vigueur au niveau de l’union.

La France a essayé d’étendre sa réglementation à l’union, mais ceci n’a pas été accepté. Par ailleurs,

le comité Dormont envisagerait :

- de convaincre les autres pays d’éliminer les MRS par incinération

- D’interdire de fabriquer sur un même site, des suifs et saindoux pour la consommation

humaine et des farines destinées à l’incinération, compte tenu des contaminations

croisées.

- De considérer les cadavres, les saisies et les boues d’épuration comme des matières à

haut risque et de les incinérer.

- D’interdire les farines de volailles en Europe comme c’est le cas en France pour

l’alimentation des ruminants.

En France, les équarrisseurs ont spécialisé des usines pour traiter spécifiquement les matières à

hauts risques, afin d’éviter des contaminations croisées. Pour SARIA INDUSTRIES, le coût est de

20 millions de francs par mois.

Les professionnels de l’alimentation animale exigent que les mêmes garanties soient appliquées sur

les farines importées, faute de quoi elles ne seront pas utilisées.

Page 48: AVERTISSEMENT PREALABLEpfeda.univ-lille1.fr/iaal/docs/dess1999/animal/far_text_fin.pdf · L'infection n'entraîne pas de réaction immunologique détectable. ... l'appareil digestif

46

La suspicion continue de planer à l’encontre des « voisins » exportateurs, la prudence reste de mise

dans les échanges internationaux.

Mais est ce que la France respecte bien les règles établies ?

2. Cas des autres pays :

- seuls la grande Bretagne et le Portugal, les 2 pays les plus touchés par la crise de la vache folle,

ont généralisé à toutes les bêtes d’élevage l’interdiction des farines animales.

- parallèlement aucun cas n’a été enregistré jusqu’à présent dans les pays comme l’Allemagne,

l’Autriche, le Danemark ou encore la Grèce, l’Italie, l’Espagne, qui ont maintenu leur utilisation

pour tous les animaux.

- l’Allemagne, la Suède, la Finlande, le Danemark, l’Autriche permettent très largement l’utilisation

des MRS ainsi celle des cadavres et des saisies d’abattoirs.

Le Danemark, l’Allemagne, l’Italie et l’Espagne, n’ayant déclaré aucun cas d’ESB, peuvent

exporter sans souci et n’applique que la stérilisation.

- l’Irlande, la Hollande et la Belgique doivent traiter correctement leurs produits, mais ne pratiquent

pas la séparation aussi poussée que la France.

Quoi qu’il en soit, l’absence d’harmonisation européenne dans les procédés de fabrication entraîne

non seulement des distorsions de concurrence dans le coût de fabrication des farines, mais pose

aussi problème surtout vis à vis de la libre circulation des farines en Europe. D’où l’importance de

l’étiquetage qui devrait en autre comporter une mention du pays d’origine.

La solution résiderait dans un processus vraiment fiable de fabrication et d’utilisation des farines,

les normes actuelles devant être respectées, les cadavres d’animaux malades devant être exclus de la

chaîne alimentaire de même que les abats à risque. (schéma ci-contre)

Cette fameuse séparation des abats à risque était pourtant sur le point de devenir obligatoire pour les

pays de la communauté le 1er avril 1998, la date a finalement été repoussée !

Dans un article d’un mensuel, le directeur scientifique du SYNCOPAC, M. MERLOT cite : « Il est aujourd’hui indispensable de sécuriser la filière en amont. Il faut ouvrir la boîte grise des

farines de viande, assurer la transparence et la traçabilité sur leur composition, sur les méthodes de

Page 49: AVERTISSEMENT PREALABLEpfeda.univ-lille1.fr/iaal/docs/dess1999/animal/far_text_fin.pdf · L'infection n'entraîne pas de réaction immunologique détectable. ... l'appareil digestif

47

traitement et leur transport. La situation actuelle engage la responsabilité des pouvoirs publics qui

sont en mesure d’apporter une garantie sanitaire.

Il est tout de même inadmissible que depuis 3 ans, on ne soit pas parvenu à une harmonisation de la

fabrication des farines dans un marché commun. »

III. La position des syndicats et des pouvoirs publics sur les farines animales

1. Position du SYNCOPAC et du SNIA

Le SYNCOPAC veut des garanties totales sur les farines animales et considère que si ces garanties

sont atteintes, il n'y a pas de raison de les interdire. Il veut des contrôles par les pouvoirs publics et

pas seulement des certifications, car pour lui la certification ne se justifie que si elle apporte un plus

par rapport à un standard.

Le SNIA demande une certification de produit, il veut des contrôles par des organismes certificateur

indépendants. Il considère que la démarche de certification reste volontaire et estime que cela doit

être obligatoire. Ce qui est destiné à être détruit a un coût, donc pour le SNIA si c'est imposé par les

pouvoirs publics, il faudra forcément que ces derniers payent. En décembre 1999, la farine de

viande était cotée 700 francs la tonne, alors que dans le même temps, le prix de la tonne de tourteau

de soja était de 1200 francs la tonne. Le SNIA veut une démarche privée concernant les contrôles et

estime que si le prix de la tonne de farine de viande atteignait 1400 francs, le coût des certifications

serait trouvé.

2. Position de la FNSEA

Il s'est prononcé le 9 juin 1999 pour un retrait des farines de viande en France et en Europe. Il a

exigé la réunion d'une conférence citoyenne sur la sécurité alimentaire afin d'établir tous les

problèmes qui sont liés à leur utilisation.

3. Position du ministre de l'agriculture M. Glavany

Après le scandale de fin mai 1999, où on a appris que des boues d'épuration étaient utilisées pour

fabriquer les farines animales, M. Glavany s'est déclaré favorable à une interdiction de l'utilisation

des farines animales pour l'alimentation des animaux. Cependant, le ministre a revu sa position le 9

juin 1999, se prononçant pour une harmonisation des conditions de fabrication sur le plan européen,

rappelant que l'interdiction totale des farines animales soulèverait deux types de difficultés : il

Page 50: AVERTISSEMENT PREALABLEpfeda.univ-lille1.fr/iaal/docs/dess1999/animal/far_text_fin.pdf · L'infection n'entraîne pas de réaction immunologique détectable. ... l'appareil digestif

48

faudrait d'une part compenser le déficit en apport nutritif protéinique des porcs et des volailles et

d'autre part avoir sans doute recours à des importations de soja américain génétiquement modifié.

La demande d'interdiction des farines n'a été que timidement relayée au conseil des ministres de

l'agriculture des 14 et 15 juin 1999. Ce conseil agricole a finalement accepté de procéder à un

examen critique de la problématique des farines animales et des déchets d'animaux ainsi que de la

législation communautaire relative à l'élimination des cadavres. Il faut rappeler qu'aujourd'hui seuls

le Portugal, la Grande Bretagne et la France vont au-delà des règles élémentaires de fabrication des

farines de viande et d'os (133°C, 3 bars, 20mn) en éliminant les matériaux à risque. M. le ministre

soupçonne encore certains pays de ne pas respecter les normes minimales, ce qui a expliqué que la

plupart des Etats Membres ont tenté, le 14 et 15 juin 1999 de serrer le débat sur les mesures de

contrôle des produits utilisés pour la fabrication des farines. C'est à la suite de ce débat que la

Commission européenne a engagé le 21 juin 1999 une procédure d'infraction contre la Belgique,

qu'elle accuse de retard dans la diffusion de l'information de cette contamination, connue depuis le

19 mars 1999.

4. La position de la DGAL

La DGAL estime que si des prescriptions doivent être données aux industriels quant aux moyens

minimaux à mettre en oeuvre pour interdire l'utilisation de farines animales dans l'alimentation des

animaux, il serait préférable de l'envisager au niveau de la réglementation communautaire, plutôt

que sous formes de réglementations nationales dont la conformité avec le droit communautaire

pourrait être contestée par les opérateurs.

Le contrôle de l'étiquetage des aliments contenant des produits protéiques est prévu par les

instructions régulièrement révisées. Les enquêtes effectuées à ce sujet montrent d'une manière

générale que la réglementation est assez bien respectée. Lors de la mise à jour en cours du plan pour

l'année 2000, des dispositions, afin de s'assurer que tous les établissements fabricant des aliments

pour ruminants font l'objet de prélèvement, vont être introduites afin d'améliorer l'uniformité des

contrôles sur l'ensemble du territoire national.

Page 51: AVERTISSEMENT PREALABLEpfeda.univ-lille1.fr/iaal/docs/dess1999/animal/far_text_fin.pdf · L'infection n'entraîne pas de réaction immunologique détectable. ... l'appareil digestif

49

CONCLUSION

Page 52: AVERTISSEMENT PREALABLEpfeda.univ-lille1.fr/iaal/docs/dess1999/animal/far_text_fin.pdf · L'infection n'entraîne pas de réaction immunologique détectable. ... l'appareil digestif

50

Si un risque de transmission de l’ESB à l’homme existe, les mesures qui ont été prises sont-elles de

nature à maîtriser ce risque ? Les farines animales sont-elles les seules responsables ?

Comment sortir les industriels de cette crise ?

Deux solutions se dégagent du problème lié aux farines animales :

- La première est la sécurité par la valorisation des coproduits animaux, c'est "le principe de

précaution". Il s'agirait d'harmoniser les politiques de sécurité alimentaire en appliquant la directive

97/534 CE dans tous les états membres. Il faudrait alors établir une liste exhaustive de toutes les

matières premières susceptibles de rentrer dans la composition des protéines et des corps gras

d'origine animale. Cela maintiendrait la compétitivité des élevages européens par rapport à ceux des

pays tiers et garantirait la sécurité alimentaire des produits animaux fabriqués en Europe.

- La deuxième est la sécurité par la destruction, c'est la politique de "risque zéro" visant à détruire

l'ensemble des coproduits animaux en Europe, il y aurait alors une perte de 5 à 10% de revenu pour

les éleveurs, ce qui entraînerait une perte de compétitivité des élevages européens par rapport à ceux

des pays tiers et une perte d'indépendance en matière de productions animales en Europe. Cela

entraînerait un danger pour la sécurité alimentaire des produits importés en Europe, plus compétitifs

mais qui ne respecteraient pas les normes européennes, sans oublier le coût élevé de la destruction

des coproduits en Europe.

L’interdiction des farines animales serait une réponse médiatiquement forte à une attaque

médiatiquement forte. Elle permettrait de satisfaire les attentes immédiates des consommateurs en

les rassurant sur la sécurité de leur alimentation. Dès à présent, les étiquettes "alimentation garantie

sans farine ni graisse animale" sur les poulets et "beurre garanti d'origine française" tentent de le

rassurer.

Quant à l’harmonisation au niveau européen, elle faciliterait les échanges communautaires et

renforcerait la sécurité sanitaire de fabrication des farines.

Quelle que soit la décision prise sur l’avenir des farines animales, celle-ci aura des conséquences

majeures tant au niveau économique, que politique. Ces questions d’actualités brûlantes et

redondantes semblent loin d’être résolues, tant au niveau européen qu’au niveau mondial…

Page 53: AVERTISSEMENT PREALABLEpfeda.univ-lille1.fr/iaal/docs/dess1999/animal/far_text_fin.pdf · L'infection n'entraîne pas de réaction immunologique détectable. ... l'appareil digestif

51

BIBLIOGRAPHIE

Page 54: AVERTISSEMENT PREALABLEpfeda.univ-lille1.fr/iaal/docs/dess1999/animal/far_text_fin.pdf · L'infection n'entraîne pas de réaction immunologique détectable. ... l'appareil digestif

52

BARBIN G., « ESB : les farines de viande à l’origine de la maladie », L’information agricole, n° 696, janvier 1997. BAYLE N., « Alimentation animale : gare aux idées simplistes », L’usine nouvelle, n° 2692, 17 juin 1999. BENKIMOUN P., « Les chercheurs comprennent mieux les maladies à prion », Le monde, 20 janvier 2000. BERTHIER A.L., « Farines animales : les effets d’une interdiction », Agro performances, septembre-octobre 1999. BOLOH Y., SERAT R., « Nouveau coup dur pour les farines animales », La France agricole, 27 août1999. C.G., « Farines animales : la triple barrière française », Réussir porcs, n° 40, juin 1999. COFFE J.P., De la vache folle en général et de notre survie en particulier, 1997. DELORME I., « Soja, pois, farines animales… l’Europe en panne de protéines », La France avicole, 20 septembre 1996. DORMONT D., « Le rapport Dormont et la crise de la vache folle », Agra Presse hebdo, cahier n° 2, n° 2569, lundi 17 juin 1996. F.C., « Le rapport sur l’évaluation du service public de l’équarrissage (extraits libres) », Le magazine Abatoirs entreprises viande, n° 137, août 1998. FORT R., « Peut-on se passer des farines animales ? », Cultivar les enjeux, n° 6, juillet-août 1999. GERARD C., « Farines animales : les transformateurs s’adaptent », Réussir aviculture, n° 19, septembre 1996. GROSRICHARD F., « Vache folle : le dépistage des bovins devrait commencer fin mars », Le monde, mardi 15 février 2000. JICQUEL J.L., « Farines de viandes, graisses animales : les vrais risques », RIA, n° 593, juillet-août 1999. JULIEN B., « La filière bovine sauvée, mais pas encore guérie », RIA, n° 589, mars 1999. La dépêche vétérinaire, n° 625, 12-18 février 2000. JULIEN C., « Le point sur les encéphalopathies spongiformes », La France agricole, septembre 1996. LEMAITRE P., « La sévérité prônée par la France rencontre un écho limité », Le monde, mercredi 16 juin 1999. LORELLE V., « L’industrie de la nutrition animale se dit prête à renoncer aux farines de viande », Le monde, mercredi 16 juin 1999.

Page 55: AVERTISSEMENT PREALABLEpfeda.univ-lille1.fr/iaal/docs/dess1999/animal/far_text_fin.pdf · L'infection n'entraîne pas de réaction immunologique détectable. ... l'appareil digestif

53

MARCHAND A., « De la cuisson à l’ancienne au séchage new look », La propriété agricole, n° 244, juillet-août 1996. MARTINIER X., « Farines animales et déchets de viande. Des Technologies pour une nouvelle réglementation », Environnement et technique, juillet-août 1997. MORTGAT B., « Les filières d’élimination et de valorisation sont en cours de test », Environnement et technique, juillet-août 1997. NAU J.Y., « Vache folle : après la Grande Bretagne, la France a été le pays le plus exposé au risque infectieux », Le monde, mardi 8 février 2000.. RABAUD A.F., « Farines animales : interdire ou autoriser partiellement ? », Les marchés, 4 juillet 1997. REIBEL S., Encéphalopathie spongiforme bovine, Polytechnica, 1993. SARIA industries., L’industrie de la transformation des coproduits d’origine animale dans l’Union européenne : les enjeux pour les années 2000, 1999. SIFCO., L’organisation des activités de transformation et valorisation des coproduits animaux en France, 1999. TOULIS F (interview de)., « L’interdiction des farines animales coûterait 3 milliards de francs », AGRA Presse Hebdo, n° 2717, lundi 21 juin 1999. X.S., « L’Europe renâcle à interdire les farines animales », L’information agricole, n° 724, juillet-aôut 1999. Documents et sites internet CHARLOT Philippe : « Le nez dans la farine ». KEMPF Hervé : « Le grand ouest encombré par les farines animales ». « Dioxine : la France va demander l’interdiction des farines animales en Europe ». « Farines animales », L’humanité, 11 septembre 1996. http:// www. agriculture.gouv.fr http:// www. bretagne-online.tm. fr http:// www. europa.eu.int http:// www. inra.fr http:// www. Lemonde.fr http:// www. mhr-viandes.com http:// www. multimedia.com/omnesg/omnes.html

Page 56: AVERTISSEMENT PREALABLEpfeda.univ-lille1.fr/iaal/docs/dess1999/animal/far_text_fin.pdf · L'infection n'entraîne pas de réaction immunologique détectable. ... l'appareil digestif

54

http:// www. soirillustre.be/3411 prions.html.