navires de la grande guerre - cuirassé · mai 1940 : lutte anti-aérienne, défense de cherbourg....

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Cuirassé COURBET Marine Nationale

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Cuirassé

COURBET

Marine Nationale

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Navires de la Grande Guerre – Navire COURBETFiche récapitulative mise à jour le 29/06/2008 – V3

Auteurs : Yves DUFEIL – Franck LE BEL – Marc TERRAILLON

Nom : COURBETType : Cuirassé (type Jean Bart).

Chantier : Arsenal de LorientCommencé : 01 septembre 1910.Mis à flot : 23 septembre 1911.Terminé : Septembre 1913.

En service (MN) : 19 novembre 1913.Retiré (MN) : 09 juin 1944.

Caractéristiques :164,9 (ht.) 158,50 (pp.) x 27 x 14,90 m. ;TE : 9 m. ;23 400 t . ; 26 000 tpc. ;28 000 cv. ;21,5 noeuds, 22 noeuds aux essais ;24 chaudières Niclausse ;4 turbines Parsons ;4 hélices ;1 150 h.

Rayon d’action :760 milles à 20 noeuds,2800 milles à 10 noeuds.

Protection :Ceinture de 180, 270 et 180 mm. ;Blockhaus : 300 mm. ;Ponts blindés de 70 et 48 mm. ;Tourelles principales : 280, 290, 250 et 100 mm. ;Artillerie secondaire : 180 mm.

Sister-ships : Jean Bart, France et Paris.

Armement :XII de 305 modèle 1906-1910 en 6 tourelles doubles,XXII de 138,6 modèle 1910 en batteries,IV de 47,IV TLT sous-marins de 450.

Principales dates :Cuirassé issu du programme naval de 1912 (1).Premier de cette série, à être mis sur cale, mais second à êtrelancé, il est aussi le premier « dreadnought (2) » français.

1 Cf. annexe.

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Mai 1913 : armé pour essais.24 juin 1913 : avant d’être mis en service, il conduit enAngleterre le Président de la République, Raymond Poincaré, etrejoint Brest le 26 juin.Septembre 1913 : achevé.19 novembre 1913 : mis en service, sept ans après leDreadnought britannique.Novembre 1913 : opère une traversée de longue durée avec leJean-Bart05 janvier 1914 : le VA Boué de Lapeyrère, commandant en chefarbore sa marque sur le COURBET.05 janvier 1914 – 29 octobre 1915 : navire amiral de l’ArméeNavale.10 juin 1914 : une organisation de l'Armée Navale place leCOURBET et le Jean-Bart en une section hors rang.Tout au long de la guerre 1914-1918, les quatre cuirassés de laclasse COURBET servent en Méditerranée avec l'ArméeNavale et participent au blocus de l'Adriatique.01 août 1914 : figure à l’effectif de la section hors rang del’Armée Navale. (Capitaine de vaisseau Benoît, commandant dubâtiment).16 août 1914 : le COURBET conduit l’interception et ladestruction en Adriatique du petit croiseur autrichien Zentasurpris au large du Monténégro et qui est coulé.1914 - 1915 : surveillance du canal d’Otrante1915 : à la suite du torpillage du Jean Bart, la croisière à l'ouvertde l'Adriatique est tenue puis supprimée à la suite du torpillagedu Léon Gambetta le 27 avril 1915 ; le COURBET, avec lesautres cuirassés est maintenu en alerte à Malte, puis àBizerte.Juin 1915 : à Malte.5 – 18 novembre 1915 : carénage à Toulon.15 avril 1916 : figure à l’effectif de la 2ème division de la 1ère

Escadre de ligne de l’Armée Navale avec la marque du CADaveluy commandant de division sur le Paris et du VAFavereau commandant d’escadre sur la Bretagne.23 mai 1916 : le COURBET forme avec le Paris et le Jean-Bart la 2ème division de la 1ère Escadre.15 septembre – 13 octobre 1916 : travaux d’entretien à Toulon.8 – 10 octobre 1917 : carénage à Malte.01 juillet 1918 : figure à l’effectif de la 2ème division de la 1ère

Escadre de l’Armée Navale (VA Gauchet), et portant la marquedu VA Sagot-Duvauroux commandant de la division.Novembre 1918 – avril 1919 : à Corfou.1920 : la 1ère Escadre devient Escadre de la Méditerranéeoccidentale.15 mars – 20 octobre 1920 : bâtiment amiral de l'Escadre de laMéditerranée occidentale.

2 Le sixième HMS Dreadnought, de la Royal Navy, fut le prototype du cuirassé dit monocalibre. Il eut une telleinfluence que son nom devint synonyme de ce type de navire qui fut le cuirassé moderne. Il a été le premiergrand bateau à être propulsé par des turbines à vapeur. Son apparition rendit désuets tous les bâtiments existants,et à l'approche de la Première Guerre mondiale, il déclencha une course aux armements navals.

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1921 : l'Escadre de la Méditerranée occidentale est dissoute pourdevenir l'Escadre de la Méditerranée. Le COURBET devientécole de canonnage.Avec l'Escadre de la Méditerranée, il participe à l'entraînementde celle -c i et aux cro is ières en Méditerranée et enAtlantique, ainsi qu'aux grandes man uvres.1922 - 1930 : en disponibilité armé, école de canonnage à Brest,600 apprentis à bord.Juillet 1923 - avril 1924 : en refonte à La Seyne sur Mer.1927 - 1928 - 1929 : le bâtiment subit une grande refonte auxForges et Chantiers de la Méditerranée, à La Seyne.1930 : il devient bâtiment école de canonnage1931 - 1932 - 1933 - 1934 : il participe à des écoles à feu et àdes exercices.1934 - 1936 : écoles à feu et exercices entre Toulon et les Salinsd'Hyères.1934 : division des écoles à Toulon.1937 - 1938 : une refonte de l'appareil évaporatoire a lieu àl'arsenal.10 juin 1939 : une cinquième escadre est constituée avec la 3ème

division de ligne (Paris, COURBET) qui arrive à Brest le 11juillet. Celle-ci continue comme division d'instruction jusqu'enmai 194021 mai 1940 : réarmé à effectif de guerre, les deux cu irasséssont affectés à la défense des ports du Nord.27 mai 1940 : ils appareillent pour Cherbourg.Mai 1940 : lutte anti-aérienne, défense de Cherbourg.19 juin 1940 : à partir de la rade de la Capelle, le COURBETretarde par ses tirs de 305 les colonnes motorisées allemandes quise dirigent sur Cherbourg.20 juin 1940 : il appareille pour l'Angleterre et ralliePortsmouth.03 juillet 1940: il est désarmé et occupé par la Royal Navy ; saisipar les Anglais à Portsmouth lors de l’opération « Catapult ».10 juillet 1940 : il est remis aux FNFL (France), est constitué enunité administrative, sert de dépôt des équipages, et est incorporé àla défense anti-aérienne de Portsmouth.Août 1940 – janvier 1941 : sert de batterie anti-aérienne, abat 5avions allemands sans jamais être atteint par une bombe.1941 : le bâtiment est désarmé jusqu'en 194424 mars 1941 : désarmé, il sert de dépôt de matériel.09 juin 1944 : coulé volontairement en face d’Hermanville ; ladernière mission du COURBET est son sabordage àOuistreham pour constituer une digue afin de protéger lesopérations de débarquement sur les plages. La coque quiémerge supporte des canons contre avions, il subit denombreuses attaques qui ne modifient en rien son assiette !L'épave est démolie sur place après la guerre.

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Plans :

Les plans du cuirassé COURBET sont disponibles àl’adresse suivante :

http://www.servicehistorique.sga.defense.gouv.fr/02fonds-collections/banquedocuments/planbato/planbato/Plans/planbato.php?id=127

Equipage :Cf. annexes.

Citation :N.C.

Remerciements :A l’attention deJean François X.Olivier Prunet.Louis Toscano.

Bibliographie :Le Courbet, le cuirassé de toutes les batailles - Patrick David -Serge David - Yves Marchaland - Editions du Bout du Monde -avril 2005.

Dictionnaire des bâtiments de la flotte de guerre française deColbert à nos jours - Tome II – 1870 / 2006 - LV Jean-MichelRoche.

La guerre navale dans l'Adriatique - CV A. Thomazi – Payot,1927.

La guerre navale dans la Méditerranée - CV A. Thomazi - Payot,1929.

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Les Cuirassés Français de 23500 tonnes – Robert Dumas et JeanGuiglini – Editions des 4 Seigneurs – Grenoble – 1980.

Mers El-Kébir & Catapult, les marins de l’oubli - Martial LeHir.

La Royale - Jean Randier.

La Grande Guerre sur mer - Yves Buffetaut.

Histoire Maritime de la Première Guerre Mondiale - Paul Chacket Jean Jacques Antier.

Cent ans de cuirassés français - Eric Gille.

Les navires français – 1914 / 1918 - Jean Moulin.

Les cuirassés français - Jean Moulin.

Atlas des navires de la Première Guerre mondiale – collectif.

Les navires de légende – collectif.

Les Flottes de Combat en 1917 - Commandant de Balincourt.

Les Flottes de Combat en 1925 - Commandant de Balincourt.

Les Flottes de Combat en 1929 - Commandant Vincent-Bréchignac.

Les Flottes de Combat en 1940 - Commandant Vincent-Bréchignac.

Les Flottes de Combat en 1944 / 1945 - Commandant Vincent-Bréchignac et Henri Le Masson.

Histoire des marins français - Tome III – 1870 / 1940 - CAHubert Granier.

Revues : N.C.

Internet :N.C.

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Iconographie :

Marine Militaire Française - Lorient – Le cuirassé « Courbet » à flots prés de sa cale de construction.

LORIENT – Cuirassé dans l’Arsenal.

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Marine de Guerre – Le « Courbet », Cuirassé d’Escadre de 23 000 tonnes.

Marine Militaire – Le Courbet, Cuirassé de 23 000 tonnes.

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Marine de Guerre – Le « Courbet », Cuirassé d’Escadre de 23 000 tonnes.

Cuirassé Courbet.

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Marine Militaire Française – COURBET, cuirassé à turbines.

Marine de Guerre – « COURBET » - Cuirassé d’Escadre.

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COURBET

Vue prise du Courbet.

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Annexe 1 :Silhouettes

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Dessins de Robert Dumas

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Annexe 2 :A bord du Courbet en mer le 17 août 1914.

Le Vice-Amiral Boué de LapeyrèreCommandant en Chef la 1ère Armée Navale

à Monsieur le ministre de la Marine, Paris(Cabinet du Ministre)

Monsieur le Ministre,

Conformément aux indications de votre télégramme n° 3189 du13 août courant, j'ai décidé de faire exécuter dans la nuit du 15au 16 août et dans la journée du 16, par toutes les forcesdisponibles un raid dans l'Adriatique ayant pour objet desurprendre les bâtiments autrichiens qui pouvaient tenir leblocus des côtes du Monténégro.

Les cuirassés de l'Armée Navale et trois escadrilles detorpilleurs placés sous ma direction devaient suivre pendant lanuit la côte italienne à plus de 10 milles au large pour se trouverà la hauteur d'Antivari le lendemain à 9 heures du matin tandisque les croiseurs, sous la direction de l'Amiral de Sugny,auxquels s'étaient adjoints les navires anglais de l'AmiralTroubridge suivaient la côte d'Albanie pour me rejoindre aurendez-vous devant Antivari.

Pour fixer les détails de cette opération, l'ordre n° 114 du 16août dont un exemplaire est ci-joint fut remis aux chefs degroupe au cours d'une conférence tenue à bord du Courbet auNord de l'Ile Fano et à laquelle assistait l'Amiral Troubridge.

A 19 heures le 15 août, les forces navales anglaises et françaisesconcentrées à une dizaine de milles au Nord de l'Ile Fanoappareillaient dans les conditions indiquées par l'ordre précité.

Pendant la nuit aucun incident ne se produisit dans la navigationdes deux groupes.

A 6 heures du matin le 16 août, le premier groupe placé sous madirection, formé en ligne de file dans l'ordre suivant :

o section hors rang,o 1ére Escadre de Ligne,o 2ème Escadre de Ligne,o torpilleurs en avant et sur les flancs, aux postes de

protection contre les sous-marins,faisait route au N.20.E le cap un peu au Nord d'Antivari.

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A 8 heures 30, à 15 milles de la côte, les vigies signalent droitdevant sous la terre, deux fumées, puis, quelques minutes après,deux autres fumées dans le S.80.E.En approchant, on reconnaît que les deux premières fuméesproviennent de deux torpilleurs qui s'éloignent dans la directionde Cattaro et que les deux autres sont celles d'un petit croiseur àdeux cheminées, type Zenta précédé par un torpilleur d'escadredu type Huszar. Ces deux bâtiments font route à toute vitesse lelong de terre se dirigeant vers Cattaro.

La route de l'Armée est inclinée progressivement d'abordjusqu'au N.5.E. puis jusqu'au N.10.0. de manière à couper laroute aux deux bâtiments.

Les torpilleurs sont placés à gauche de l'Armée de manière àdégager le champ de tir.

Arrivé à 14 000 mètres des bâtiments qui se dérobent le long deterre, on reconnaît qu'ils portent le pavillon national autrichien.Le signal de branle-bas de combat, battant depuis un moment,est amené ; la vitesse est portée à 17 n uds. On aperçoit enmême temps à 6 heures 45 l'escadre légère et la division anglaisequi arrivent par le Sud.

Le torpilleur gagne franchement sur l'avant. On man uvre àpartir de 9 heures pour lui couper la route et à 9 heures 2minutes le COURBET ouvre le feu simultanément sur letorpilleur avec les 14 cm et sur le croiseur avec les 30 cm. Ladistance au croiseur est de 12 000 mètres.

Le croiseur autrichien a ouvert le feu. Les coups de ses pièces de12 tombent à 3 ou 400 mètres de la ligne.

Le Jurien de la Gravière et les torpilleurs sont lancés à lapoursuite du torpilleur mais son avance est trop grande et ils neparviennent à l'approcher à distance d'ouverture de feu qu'aumoment où il réussit à gagner Cattaro.

Dès 9 heures 12 le croiseur a été arrêté ; une grande colonne devapeur et de fumée sort de ses cheminées et de son arrière.

Les cuirassés ont reçu l'ordre de cesser le feu à 9 heures 20 et à 9heures 25 toute la ligne vient sur la gauche par la contre marchepour se rapprocher du croiseur autrichien à bord duquel unincendie fort important semble s'être déclaré.

On aperçoit des explosions successives comme celles quepourraient produire des mines et une épaisse colonne de fumée

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blanche sort depuis le milieu jusqu'à l'arrière du bâtiment.L'arrière s'enfonce progressivement.

La perte de ce croiseur n'est pas douteuse et, tous les torpilleursétant partis à la poursuite du torpilleur autrichien, je demande aucontre-amiral Troubridge d'envoyer ses destroyers portersecours au bâtiment en feu ; mais à 9 heures 35, après quelquesexplosions plus fortes, le croiseur se mate à 45° environ l'avantet jusqu'à la moitié du navire hors de l'eau, puis il coule ainsi parl'arrière sans avoir amené son pavillon.

Les forces alliées firent alors route vers le canal d'Otrante et ladivision anglaise ayant reçu de son Gouvernement l'ordred'exécuter une nouvelle mission dans les parages desDardanelles, s'éloigne dans le Sud.

La nécessité d'être sorti de l'Adriatique avant la nuit ne m'a paspermis de pousser plus loin ma reconnaissance sous peine d'êtreexposé à des attaques de torpilleurs dans des conditionsdéfavorables ; étant donné que mes torpilleurs étaient pour laplupart à la limite de leur approvisionnement de combustible.

D'ailleurs, il eût été tout à fait illusoire de tenter quoi que ce fûtcontre les batteries blindées de Cattaro et j'ai voulu ne pasindiquer d'intentions à l'égard de cette place avant d'avoir eu lesrenseignements indispensables que j'essaye de me procurerauprès des Autorités monténégrines. Pour débuter dans mesinformations, j'ai fait prendre par le Chef de la 2e Escadrille unindigène de Dulcigno qui est maintenant à bord du COURBET.

Le Gouverneur de Dulcigno a eu une entrevue rapide avec leCapitaine de Frégate commandant la 2e Escadrille, d'où il résulteque ce fonctionnaire qui parle admirablement le français n'est aucourant d'aucun des mouvements des Autrichiens.

Je vais tâcher de me procurer des renseignements à ce sujet parl'intermédiaire de l'indigène actuellement à bord du COURBET.

En résumé, pour me conformer à vos intentions, j'ai d'un côté,essayé d'entrer en relations avec le Monténégro et d'autre part,j'ai fait devant Antivari une manifestation qui a eu pour résultatde détruire ou de mettre en fuite les Forces Navalesautrichiennes, malheureusement bien modestes, qui bloquaientce port.

Le croiseur était selon toutes probabilités, occupé à mouiller desmines autant qu'ont pu nous le faire supposer les petitesexplosions successives qui se sont produites à son bord avantqu'il ne disparaisse.

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Dans les coups de canon qui ont été tirés contre les bâtimentsautrichiens, plusieurs avaries sérieuses se sont produites dans lematériel d'artillerie, en particulier sur le Condorcet et Injusticequi ont eu :

o Le premier, deux pièces de 24 avariées au point de neplus servir par suite de la rupture d'une frette de volée.

o Le deuxième une pièce de 19 cm brisée au renfort. Unrapport détaillé et technique vous sera adressé dès queles Commandants de ces bâtiments auront pu me rendrecompte d'une manière précise de ces avaries.

Le moral du personnel est toujours excellent, malgré les fatiguesénormes qu'il subit depuis plus de 15 jours déjà, et, si je ne peuxavoir de base d'opérations dans les environs immédiats, il seraindispensable que je retourne à Malte non seulement pour meravitailler, mais aussi et surtout pour faire reprendre haleine aupersonnel et laisser visiter les machines et chaudières.

Mon intention est alors de laisser en croisière les 6 croiseurs etles torpilleurs qui auront à leur disposition les trois charbonnierset le pétrolier mouillés depuis hier au Sud du Cap Bianco, c'est-à-dire en pleine mer et dans un endroit d'où ils devrontappareiller au premier vent.

Depuis deux jours que la reconnaissance d'Antivari a été faite,nous attendons en vain l'escadre autrichienne et notre charbondisparaît.

L'accident survenu à la Démocratie dans la brume, et dont jevous ai rendu compte télégraphiquement, complique encorenotre situation et m'impose de prendre des mesures pourremettre en état le plus tôt possible personnel et matériel afinque les unités disponibles puissent donner leur rendementmaximum. Nos opérations ne pourront vraiment être fructueusesque lorsque nous aurons une base solide à l'entrée del'Adriatique et, à défaut de Corfou, cette base me semble devoirêtre Vallona, si comme je vous l'ai demandé télégraphiquement,je puis en disposer.

Faute de base dans ces conditions, nous fatiguerons personnel etmatériel et nous risquerons d'être surpris dans une situationvraiment défectueuse.

Signé : Lapeyrère

Tiré de l’ouvrage « Les cuirassés français de 23 500 tonnes ».

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Annexe 3 :Ordre n° 114 - 16 août 1914

I. L'intention du Commandant en Chef étant d'allersurveiller les environs d'Antivari et de détruire les bâtimentsautrichiens bloqueurs, s'il y en a, les dispositions suivantesseront prises.

II. La section hors rang suivie des deux escadres de ligne etdes 2e, 4e et 5e escadrilles de torpilleurs partira à 1 heure dumatin, le 16 août, d'un point situé à 10 milles à l'Est du feu duCap d'Otrante, pour se présenter devant Antivari vers 9 heuresdu matin le 16 août. La vitesse sera, en conséquence, réglée à 16

uds. Les recommandations les plus strictes seront faites pourassurer l'extinction de toutes les lumières. On n'échangera pointde signaux lumineux.

La même interdiction est faite au sujet des projecteurs qu'il fautà tout prix éviter d'allumer pour ne pas déceler la présence desescadres aux torpilleurs qui pourraient circuler dans ces parages.Les Officiers, devront dîner à 5 heures et les feux des cuisinesseront tous éteints à 6 heures.

Les équipages devront être plus que jamais tenus en éveilpendant l'exécution de ce coup de main qui peut avoir les plusgrandes conséquences si, comme la chose est possible, toutes lesforces autrichiennes se trouvent entre Cattaro et Antivari.

III. Tandis que les Escadres de Ligne et les 2e, 4e et 5e

Escadrilles de torpilleurs feront route par la côte italienne, lesdeux divisions légères, sous la conduite de M. le Contre-amiralde Sugny passeront à proximité des côtes albanaises et quitterontles parages de l'Ile Fano en temps utile pour opérer leur jonctionavec les forces de ligne devant Antivari à 9 heures du matin.

Il est bien entendu que si un combat avait lieu avant l'arrivée desescadres devant Antivari, les Divisions Légères ne devraient pashésiter à marcher au canon pour prendre part à la bataille.

La 3e Escadrille devra se tenir dans les environs du Cap Biancopour y attendre l'arrivée des transports de charbon et de mazoutqui aura lieu probablement dans la matinée du 16.

IV. Le Commandant en Chef compte que ce coup de mainsera effectué avec la vigueur et la célérité indispensables à saréussite et, une fois de plus, il fait appel en toute confiance aupatriotisme et au dévouement de tous.

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V. L'intention du Commandant en Chef est que tous lesbâtiments aient quitté l'Adriatique, le 16 août, avant la nuit pourrallier la zone située au Sud de l'Ile de Fano et à l'Ouest deCorfou. Tout torpilleur ou navire ne pouvant pas suivres'efforcerait de rallier cette zone et y prendrait les postessuivants :

o cuirassés de la 1re Escadre de ligne : 12 milles au Suddu feu de Fano ;

o cuirassés de la 2e Escadre de ligne : 3 milles à l'Ouestdu poste précédent ;

o croiseurs : 3 milles à l'Ouest du poste précédent ;o torpilleurs : Baie de Saint-Georges, Corfou, ne devront

y rallier que de jour après échange des signaux dereconnaissance avec le Blenheim.

P.O. Le Contre-Amiral Chef d'Etat-Major de la 1re ArméeNavale

Signé : Illisible

Tiré de l’ouvrage « Les cuirassés français de 23 500 tonnes ».

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Annexe 3 :Extrait de la Revue Maritime.N° 204 - Novembre 1963.

L'AFFAIRE DE LA ZENTA

13 août 1914 : La déclaration de guerre de l'Autriche-Hongrietrouve l'Armée navale à Malte. C'est une force imposante : 7croiseurs cuirassés et une quarantaine de torpilleurs éclairent etprotègent un corps de bataille de 13 cuirassés (3dont leCOURBET sur lequel l'amiral a sa marque et son frère le Jean-Bart. Ces deux bâtiments, alors tout récents, et dotés desappareils de direction de tir les plus modernes (transmissionsélectriques à recopie sans lecture Le Comte-Aubry, conjugateurgraphique Le Prieur, correcteurs mécaniques de distance et dedérive, etc...) constituent un des atouts majeurs de l'arméenavale.

Après une année d'activité intense, celle-ci navigue bien, lesrésultats des exercices de tir de l'été ont été bons et il semble quel'on puisse envisager l'avenir avec confiance. A vrai dire laprotection contre les sous-marins et les mines est bien médiocre,mais ce qui est plus surprenant, à une époque où l'on croit que ladécision sera obtenue par le canon, en bataille rangée, ce sontcertaines lacunes de la préparation au combat. C'est ainsi que,quoi qu'il n'existe aucune consigne pour le choix des objectifs etmalgré que le COURBET doive tirer en concentration avec leJean-Bart, aucun ordre n'a été donné à ce sujet, malgrél'insistance de son officier de tir.

Il est vrai que l'Etat-Major est surchargé de travail parl'organisation du ravitaillement de la flotte, les consultationsavec les Anglais et, enfin, l'établissement d'un plan d'opération.Car, chose étrange, aucune action n'a été préparée contre laflotte autrichienne qui actuellement bloque le Monténégro. Onne peut cependant laisser durer cette situation et unedémonstration de force rapide s'impose qu'on prépare en hâte.

L'armée navale appareille donc le 14. Son but est d'effectuer unraid sur Cattaro pour faire lever le blocus du Monténégro et deramasser tout ce qu'on pourra trouver de navires autrichiens à lamer en cours de route.

Pendant que les navires déployés en râteau remontentl'Adriatique, on s'installe petit à petit dans la guerre et on

3 1 section hors rang : COURBET et Paris. 1re escadre : 6 cuirassés type Voltaire. 2e escadre : 5 cuirassés typePatrie. 1re division légère : 4 croiseurs cuirassés de 14 500 t. 2e division légère : 3 croiseurs cuirassés de 12 000 t.7 escadrilles de torpilleurs.

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commence à s'organiser. Le 15, le sous-chef d'état-major chargédes questions d'artillerie, demande à l'officier de tir duCOURBET quelles consignes il convient de donner au Jean-Bart pour le tir en concentration. Mieux vaut tard que jamais !La vitesse de chargement des pièces de 305 étant de 45secondes, on décide que les deux bâtiments tireront par salvesalternées décalées de 22 secondes, le Jean-Bart tirant après leCOURBET. Cet ordre est transmis au destinataire par signaux àbras et les distributeurs de salves sont réglés à 45 secondes.

Mais on en reste là. Aucune consigne n'est donnée pour le tir despièces de 138, non plus, d'ailleurs que pour le tir des deux autresescadres cuirassées.

Cependant on approche du but. Le 16, par un temps magnifique,l'armée navale qui n'a rien trouvé à la mer, se rabat sur Antivari.Les escadres légères ont rallié au rendez-vous et on n'est guèreloin de ce port quand, vers 8 h 30, le COURBET aperçoit par60° tribord un torpilleur autrichien du type Uhlan et, par 80°tribord un petit croiseur du type Zenta qui semble occupé àmouiller des mines.

Les Autrichiens aussi ont vu les navires français, ils n'insistentpas et cherchent à s'échapper vers Cattaro à toute vitesse, tout ense rapprochant de la côte.

A ce moment, les forces légères sont trop loin pour pouvoirintervenir utilement mais les navires de ligne sont bien placéspour intercepter l'ennemi et les douze cuirassés, en ligne de file,COURBET et Jean-Bart en tête, augmentent de vitesse pour luicouper la route. Puis on hisse le petit pavois et on rappelle auxpostes de combat.

Sur le COURBET, l'amiral et son état-major se sont installésavec le commandant sur la passerelle du blockhaus pourobserver les événements. Evénements qui, du reste, devraientêtre exempts d'imprévu car ce n'est pas la Zenta, dont lamalheureuse artillerie de 120 porte à peine à 10 000 mètres, quipourra y changer grand-chose. On va tirer comme à l'exercice.Ordre est donné de prendre le croiseur ennemi comme objectif.Les transmissions de tir sont branchées à la fois sur les 305 etsur les 138 et toute l'artillerie du COURBET est pointée sur laZenta... Jusque-là, tout va très bien.

Mais, soudain, l'amiral prie le commandant de faire envoyer uncoup de semonce au croiseur autrichien. L'officier de tirtéléphone donc au poste central de faire tirer un coup desemonce par la tourelle 1. Surpris par ce terme inusité, le centralcommence par en demander répétition. L'ordre est cependant

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enfin compris et transmis quand le commandant avise l'officierde tir que l'amiral désire deux coups au lieu d'un seul. D'oùnouvelle explication téléphonique au poste central. Cependant ladistance diminue et approche de 13 500 mètres, limite de portéedes 305 : la tourelle s'apprête à tirer deux coups.

Mais l'amiral, pensant qu'il serait bon de semoncer aussi letorpilleur, demande qu'on tire sur lui un coup de 138. Du coup,l'officier de tir objecte au commandant qu'il est impossible detirer un seul coup de 138, la même lampe feu étant communeaux trois pièces de chaque casemate. Il demande en outre à fairedébrancher les transmissions de la casemate 7 du réseau del'artillerie principale afin de pouvoir leur faire afficher leséléments du torpilleur.

Après réflexion, on décide donc que la casemate tirera troiscoups, mais on juge inutile de débrancher ses transmissions pourune seule salve de semonce. Fâcheuse décision, car l'officier detir adjoint, chargé du tir de la casemate, devra donner ses ordrespar porte-voix au poste central, celui-ci les téléphonera autéléphoniste de la casemate qui les criera aux servants despièces. Ces derniers devront utiliser ces éléments en prenantbien soin, contrairement à ce qu'ils sont entraînés à faire, de nepas recopier les indications de leurs appareils qui, elles,correspondent à la Zenta. Adieu direction de tir perfectionnée !

A coup sûr, tout cela est regrettable. Mais, ce qui l'est bien plus,c'est que personne n'informe le Jean-Bart de ces décisions « inextremis ». Celui-ci se tient donc simplement prêt à appliquerles consignes de tir en concentration qu'il a reçues la veille,lesquelles ne prévoient aucun coup de semonce. Sur le Courbet,dans l'excitation de la discussion, personne n'y pense.

La tourelle 1 tire... Et à la surprise générale, 22 secondes après,le Jean-Bart envoie une salve de réglage normale sur la Zenta.

C'est malencontreux, mais tant pis ! Puisque le feu est ouvert, lemieux est de continuer en appliquant, cette fois, les consignescommunes aux deux navires. L'officier de tir du COURBETreçoit donc l'ordre de commencer le feu et, les points de chutedes coups de semonce ayant été correctement observés, leCOURBET tire une première salve de réglage qui est appréciéeencadrante. Tout est rentré dans l'ordre et il semble quedésormais le tir va s'effectuer normalement. Pour le moment,c'est au Jean-Bart de tirer... Mais une dizaine de secondes aprèsla salve du COURBET, une bruyante canonnade se déchaîne :l'amiral vient d'ordonner l'ouverture générale du feu ! Et chaquecuirassé tire, au moment de son choix, sur le but qu'il préfèrepour peu qu'il soit à sa portée.

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Désormais, autour de la Zenta, et du Uhlan, s'élève une forêt degerbes où personne ne peut distinguer ses points de chute deceux du voisin. Le COURBET, dont le tir est réglé, tire encorequelques coups. Puis, la Zenta commençant à couler, le feucesse après une vingtaine de minutes de cette canonnadedésordonnée.

Pendant que l'artillerie principale se livre à cette exhibitionspectaculaire, la mise en uvre de l'artillerie secondaire duCOURBET provoque d'autres déboires. En effet, tout d'abord,l'officier de tir adjoint n'arrive pas à obtenir une distancetélémétrique du Uhlan. Renseignements pris, le télémètre estutilisé par l'état-major qui fait prendre la distance de deuxcroiseurs anglais apparus sur les lieux. Mais l'amiral s'impatientedu retard des coups de semonce de 138 ; il faut tirer de suite.Bon ! on utilisera une distance estimée à vue, comme au bonvieux temps ; quoiqu'à environ 9 000 mètres ce ne soit guèrefameux.

Les trois coups partent enfin, mais, à ce moment, les bâtimentsont déjà ouvert le feu et, dans la quantité de gerbes qui entourentle navire autrichien, il est impossible de distinguer les points dechute de 138. Le Uhlan en profite et forçant de vitesse, réussit às'échapper vers Cattaro, indemne.

Mais la Zenta qui coule continue bravement à tirer de toutes sespièces intactes. Tir sans espoir dont les coups tombent à trois ouquatre mille mètres du COURBET mais qui obtient cependantun résultat inattendu : les gerbes sont aperçues... par l'amiral, quiles prend pour les points de chute des 138 ! A la vue de ce qu'ilcroit être un tir lamentable de l'artillerie secondaire, la colère,qu'avait fait monter progressivement en lui le retard des coupsde semonce et le tir confus de ses navires éclate. Se précipitant àl'entrée du blockhaus, il prend violemment à partie lemalheureux officier de tir, qui de toute façon n'y peut rien, et, luiayant crié : « votre tir est exécrable », quitte la place avant qu'onait pu lui expliquer sa double méprise.

Par une ironie du sort, cette appréciation était particulièrementerronée, du moins à propos du tir des 305. Il devait ressortir, eneffet, du rapport du commandant de la Zenta que la salve, jugéeencadrante par le COURBET, avait comporté un coup but (4).

4 Le rapport précise que le coup avait atteint le navire à la flottaison, soulevant une forte colonne d'eau etd'éclats. C'est probablement cette gerbe qui a masqué le coup but au COURBET et l'a fait prendre pour un coupcourt. Quatre officiers et 125 hommes de la Zenta réussirent à se sauver à la nage et à atteindre Castel Latva.L'amiral avait fait signaler aux torpilleurs les plus proches de se porter à leur secours, mais ceux-ci, qui étaientanglais, ne comprirent pas l'ordre.

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Le tir des 305 avait donc été excellent et ce n'est pas le moindrequiproquo de la journée que le blâme en soit retombé surl'officier qui avait fait but sur la Zenta à sa première salve deréglage.

Somme toute, l'affaire était assez mince et peu glorieuse pournos armes. Elle n'en est pas moins, peut-être, plus riched'enseignements que ne l'aurait été un succès plus brillant.

Tout d'abord, elle illustre notre degré d'impréparation à laguerre. On peut se demander, en effet, ce qui se serait passé si,au lieu d'un petit croiseur sans défense, l'armée navale avaitrencontré les navires de ligne autrichiens. Il est bien probable,certes, qu'on aurait fait l'économie des coups de semonce et quele tir du COURBET et du Jean-Bart se serait effectuénormalement. Mais on ne voit pas pourquoi celui du reste del'armée navale aurait été moins désordonné. En fait, lesbâtiments tiraient bien individuellement mais leur entraînementavait été conduit comme si, naviguant ensemble, ils devaientcombattre isolément. Lacune singulière à une époque où on necroyait qu'au combat d'escadres.

On peut aussi remarquer combien il est dangereux de modifierau dernier moment des règles établies. Plus un navire est bienentraîné, plus l'observation des consignes y prend un caractèremachinal. Et il faut que cela soit, car au combat, on ne disposepas nécessairement de sa liberté d'esprit ordinaire. L'introductiond'un élément nouveau dans cette organisation cohérente maiscomplexe risque en raison même de son caractère mécanique,d'avoir une cascade de conséquences imprévisibles et, peut-être,impossible à rattraper. En l'espèce, l'ordre de tirer des coups desemonce a certainement gêné le service artillerie duCOURBET, qui n'y était pas préparé, et y a causé un certainflottement. Mais il a aussi provoqué l'ouverture du feu par leJean-Bart, ce qui dépassait manifestement les intentions del'amiral.

Dans un autre ordre d'idée, cette affaire montre combien il estavantageux qu'un amiral dispose d'une passerelle de majoritédotée de moyens indépendants de ceux du bord. Les officiersd'état-major, en effet, ne sont pas nécessairement au courant desdétails d'organisation des services du bâtiment. S'ils usent desinstallations d'un service ils peuvent, à leur insu, perturber samarche. Les officiers de la majorité qui utilisaient le télémètrecentral du COURBET avaient certainement les meilleuresraisons du monde de le faire. Ils n'en privaient pas moinsl'artillerie de 138 de ses moyens de télémétrie et il y avait peu dechances qu'un simple télémétriste ose le leur faire remarquer

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Enfin, un amiral n'en est pas moins homme et, comme tel, sujetà des accès d'humeur ou d'impatience. Que ceux-ci soientintempestifs ou justifiés, il n'est pas souhaitable qu'ils semanifestent directement au personnel du bord, au risque évidentd'interférer avec l'action du commandant. Dans l'affaire de laZenta, l'erreur de l'amiral n'était pas tellement de confondre lesgerbes de l'ennemi avec les siennes (tout le monde peut setromper et il n'avait aucun moyen d'appréciation) ni de reprocherà l'officier chargé du tir de 305 ce qu'il croyait être un mauvaistir de 138, mais il n'aurait pas dû s'adresser directement à unofficier du bord, dont la situation en service est rigoureusementdéfinie dans une stricte hiérarchie. Bien sûr, une telle attitudes'explique par l'excitation de l'action et ne se serait pas produiteen temps normal, mais c'est justement au combat qu'un incidentde ce genre est surtout à éviter. Et il est certain que, si l'état-major de l'amiral et celui du bâtiment avaient occupé des locauxdistincts, cette erreur n'aurait matériellement pas pu êtrecommise.

L'analyse d'un événement militairement aussi peu important quel'affaire de la Zenta peut paraître de peu d'intérêt. Et, certes, lesconditions du combat moderne sont trop éloignées de celles del'époque pour que les enseignements techniques que l'on peut entirer soient guère utilisables. Mais il convient de se rappeler que,quels que soient les moyens utilisés, ils sont toujours mis en

uvre par une organisation humaine et que les hommes eux,changent peu.

J. Le Comte, Capitaine de Vaisseau (e.r.)

Tiré de l’ouvrage « Les cuirassés français de 23 500 tonnes ».

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Annexe 4 :EPILOGUE DE L'AFFAIRE DE LA ZENTA

Extrait des Travaux du Service Historique de la Marine sur laguerre 1914-1918 - « Les opérations en Adriatique » par le C.F.de Brouac de Vazelhes (pages 37 et 38).

II y eut 6 officiers et 130 hommes survivant à la destruction dela Zenta ; ils furent capturés par les Monténégrins. L'amiralautrichien Winterhalter écrit qu'il y avait parmi eux leurhéroïque commandant, le capitaine de frégate Pachner, et qu'ilsnagèrent pendant 5 heures ; il blâme les Français de ne s'être pasportés au secours des naufragés. (La Marine austro-hongroisedans la guerre mondiale : petit opuscule de 10 pages traduit d'undocument italien.)

Le 26 août, les Affaires étrangères écrivaient au ministre de laMarine :

L'ambassadeur des Etats-Unis à Paris a reçu de son collègue deVienne le message suivant du Gouvernement austro-hongrois :

« Le croiseur autrichien Zenta a eu dernièrement une rencontreavec des navires français. Depuis, l'on ignore si des marinsmorts, blessés ou naufragés ont pu être recueillis par des naviresfrançais.

« Le Gouvernement austro-hongrois désirerait avoir une listedes noms des survivants et savoir où ils se trouventactuellement... conformément à la Convention de La Haye... »

La lettre fut transmise le 28 août au C.E.C.

Le 13 septembre, l'E.M.G. télégraphiait au C.E.C. :

« Le ministre de France à Copenhague télégraphie :

« Dans une interview publiée par un journal de Copenhague, leministre d'Autriche a accusé le vaisseau français qui a coulé laZenta d'avoir refusé de recueillir les matelots qui se débattaientdans les eaux. Il serait bon de pouvoir indiquer commeréfutation le nombre de prisonniers qui ont été faits par vousdans ce combat. Je vous prie de me fournir à ce sujet tousrenseignements utiles. »

Le C.E.C. répond le 26 septembre que, soucieux d'éviter despertes d'existences inutiles, il a fait cesser le feu dès que lasituation lui parut sans espoir. Il aurait voulu de plus assurer lesauvetage de l'équipage, mais il n'avait alors à sa disposition que

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des bâtiments de haut bord qu'il ne pouvait ni stopper à causedes sous-marins, ni engager dans les champs de mines. Laproximité de la côte laissait d'ailleurs supposer que lessurvivants de la Zenta pourraient être recueillis par desembarcations.

Tiré de l’ouvrage « Les cuirassés français de 23 500 tonnes ».

Le croiseur léger austro hongrois ZentaCoulé par les cuirassés de l’Armée Navale le 16 août 1944.

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Annexe 5 :Commandants

C. de Vaisseau Benoit du 03.05.13 au 20.12.15C. de Vaisseau Daveluy du 20.12.15 au 19.03.16C. de Frégate (int.) Cotoni du 19.03.16 au 26.03.16C. de Vaisseau Viaux du 26.03.16 au 26.03.18C. de Vaisseau Morache du 26.03.18 au 21.12.18C. de Frégate (int) Lecoq du 21.12.18 au 30.01.19C. de Vaisseau Perier d'Hauterive du 30.01.19 au 01.06.20C. de Vaisseau Cazenave du 01.06.20 au 10.09.21C. de Vaisseau Grizon du 10.09.21 au 26.12.22C. de Vaisseau Audouard du 26.12.22 au 26.12.23C. de Vaisseau Valat du 26.12.23 au 24.01.25C. de Vaisseau Mottez du 24.01.25 au 01.10.25C. de Vaisseau Benêt du 01.10.25 au 01.04.26C. de Vaisseau Deligny du 01.04.26 au 15.03.28C. de Vaisseau Duval du 15.03.28 au 01.07.31C. de Vaisseau Martel du 01.07.31 au 19.01.32C. de Vaisseau Walser du 19.01.32 au 19.01.33C. de Vaisseau Fournery du 19.01.33 au 29.12.34C. de Vaisseau de Nantes du 29.12.34 au 29.09.36C. de Vaisseau Mathieu du 29.09.36 au 06.08.38C. de Vaisseau Croiset du 06.08.38 au 15.05.40C. de Corvette (int.) Wietzel du 15.05.40 au 15.08.40C. de Corvette Jourden du 15.08.40 au 02.09.40C. de Corvette (int) Charrier du 02.09.40 au 15.10.40C. de Frégate Gayral du 15.10.40 au 11.02.41C. de Corvette (int) Jubelin du 11.02.41 au 31.03.4lC. de Vaisseau Wietzel du 01.04.44 au 15.06.44

Marins MPLF

Aubert Gustave Edmond, matelot de 2ème classe timonierbreveté, né le 14 septembre 1890 à Lillebonne, département dela Seine Inférieure, tué dans un accident de chemin de fer enItalie le 18 janvier 1919 entre Florence et Tarente, alors que,permissionnaire, il regagnait son bord.

Leonetti François, matelot sans spécialité, né le 02 décembre1893 à Muro, département de la Corse, trouvé mort le 8 juin1915 à La Valette, Malte, sous le bastion compris entre laBarracca inférieure et le bastion de Santa Barbara.

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Annexe 6 :La loi-programme de 1912 :

La loi-programme du 30 mars 1912 fixait la compositionorganique de la flotte française :

o 28 cuirassés d’escadreo 10 éclaireurs d’escadreo 52 torpilleurs de haute mero 10 bâtiments pour divisions lointaineso 94 sous-marins, etc.

La loi avait également prévu que compte tenu des 5 cuirassés dela classe Patrie de 14865 tonnes, mis en chantier en 1901 - 1902et des 6 Danton de 18350 tonnes (1906), les 17 cuirassés du typeDreadnought et dérivés, à armement principal monocalibre qu'ilfaudrait construire pour arriver au chiffre de 28 devraient êtremis en chantier :

o deux en 1910 et 1911,o trois en 1912,o deux en 1913 et 1914,o quatre en 1915,o deux en 1917 ;

L’entrée en service de ces derniers était prévue pour mars 1920.

Deux ans avaient été nécessaires pour étudier, puis déposerdevant le parlement, le projet de loi qui allait être voté en 1912.L'initiative en revenait au Vice-amiral Boué de Lapeyrère,Ministre de la Marine du 24 juillet 1909 au 3 novembre 1910.

Il devait ensuite prendre le 5 août 1911 le commandement enMéditerranée de ce qu'on appelait alors "l'Armée Navale", cetteArmée Navale qui allait devenir plus puissante encore, àl'automne 1912, lors du regroupement dans cette mer de notre3ème Escadre, jusque-là stationnée dans le Nord, avec nos 1ère et2ème Escadres de la Méditerranée. Il devait exercer cecommandement pendant près de cinq années consécutives.

La loi fut défendue devant le Parlement par M. Declassé, qui enobtint le vote.

Des amendements avaient été proposés : M. de Lanessandemandait la construction de huit cuirassés de lignesupplémentaires pour porter leur nombre de 28 à 36. Laproposition Lanessan resta sans suite.

En fait plusieurs circonstances obligèrent très vite legouvernement à modifier l’exécution de la loi programme de1912 dans le sens d’une accélération : on estimait que nous nous

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trouverions en 1918 avec une légère infériorité numérique vis-à-vis de l’Italie et de l’Autriche.

Il fallait accélérer nos constructions. L'amélioration desméthodes de montage sur cale avait permis de ramenerl'échelonnement des mises en chantier de 20 à 17 mois.

On autorisa donc la Marine à commencer en 1913 quatrecuirassés (les quatre Normandie) au lieu des deux prévus.L'unique cuirassé qui devait être commencé en 1914 serait missur cale le 1er janvier 1914 et non le 1er octobre comme prévu :ce devait être le Béarn, cinquième de la classe Normandie.

En outre, on voulait opposer aux escadres étrangères desformations de même composition et de même force, c'est-à-direde huit bâtiments, constituées avec des unités homogènes, ayantmême armement (calibre), même vitesse et mêmes qualitésévolutives. Avec les trois Bretagne et les quatre Normandie, onpouvait constituer une escadre homogène en y ajoutant le Béarn.

Les mises en chantier pour les cuirassés d'escadre, se seraientsuccédées comme suit :

o 4 en 1915,o 2 en 1917,o 2 en 1919,o 2 en 1920,o 4 en 1921o et 2 en 1922.

La réalisation de ce programme nous aurait permis de disposeren 1925, en supplément de l'escadre à 8 constituée par les troisBretagne et les 5 Normandie, de deux autres escadres à huitnavires de ligne (dont une comprenant les quatre Lyon), armésde 340 ou 380, auxquels se seraient ajoutés les quatre Jean-Bart,armés de 12 pièces de 305.

Les cuirassés de 23 500 tonnes type Jean-Bart

Le changement des directeurs des constructions navales entraînaune modification des méthodes.

L'ingénieur en chef H. Lyasse succéda en 1910 à Lhomme.Appelé à Paris par le directeur, A. Louis, et le ministre, l'AmiralBoué de Lapeyrère, il reçut promptement la Direction de laSection technique.

Connaissant bien l'origine des erreurs qui avaient retardél'exécution des programmes navals, il posa des principes quiparaissent aujourd'hui évidents : achever l'étude complète des

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projets, pour que tout puisse être commandé en temps utile etque le navire soit précisé dès le début de sa construction danstous ses détails.

C'est ainsi qu'il jeta les bases du programme de 1910, avecl'étude des cuirassés de 23500 t.

Ces navires, qui n'avaient pas une originalité très marquée parrapport aux constructions déjà commencées en Angleterre(super-Dreadnought et Minas-Geraes), marquèrent cependant larenaissance de la flotte française.

H. Lyasse sut d'ailleurs franchement passer de 18000 tonnes à23500 tonnes, soit un accroissement de près de 30 %.

La disposition de l'artillerie principale était très semblable àcelle du Mina-Geraes, construit en Grande-Bretagne pour leBrésil, mais les tourelles latérales n'étaient pas décalées. Unecaractéristique importante était l'artillerie secondairesubstantielle, bien que son calibre de 138 mm fût inférieur aucalibre de 152 mm généralement répandu à cette époque. Cecalibre de 138 mm avait été préféré du fait de la vitesse de tirélevée, et apprécié pour la défense contre les torpilleurs.

En ce qui concerne la protection, on avait adopté un compromis: tenant compte de l'effet des obus explosifs au-dessus de l'eau etde l'effet des obus sous l'eau, on considéra essentiel dedévelopper les zones protégées.

Bien que l'épaisseur de la cuirasse ait été augmentée par rapportà la classe Danton, et que l'épaisseur minimum admise ait étéabaissée à 180 mm, l'épaisseur était nettement inférieure à celledes cuirassés américains et anglais. Sur les cuirassés français laceinture latérale s'étendait néanmoins beaucoup plus bas sous laflottaison.