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Université de Provence Aix‐Marseille 1 Centre de Formation de Musicien Intervenant Unité d’Enseignement DUM 266 ‐ Mémoire
L’UTILISATION DU VISUEL
DANS LA SEANCE MUSICALE A L’ECOLE
PRIMAIRE :
UN OUTIL DE COMPREHENSION DU
SONORE
Comment utiliser la notation musicale
pour comprendre le sonore ?
Bois Sophie – 2007 Directeur de recherche : Charles Fourment
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SOMMAIRE 1. INTRODUCTION..............................................................................................................3
1.1. La notation comme outil ............................................................................................3 1.2. Objectifs et limites de la recherche ............................................................................4 1.3. Les outils apportés par l'usage de la notation.............................................................7
1.3.1. La notation donne un cadre ................................................................................7 1.3.2. La notation permet une prise de distance et favorise la réflexion......................8 1.3.3. La notation pose la question de l'interprétation et de la communication ...........9
1.4. Annonce du plan ......................................................................................................11 2. DESCRIPTION DES EXPERIENCES............................................................................12
2.1. Notation dans le cadre de musique produite par les élèves......................................13 2.1.1. Structure générale d'un paysage sonore ...........................................................13 2.1.2. Notion de vitesse ..............................................................................................14 2.1.3. Notion d'intensité .............................................................................................15 2.1.4. Notion de hauteur.............................................................................................16 2.1.5. Notion de densité..............................................................................................17 2.1.6. Notation aide mémoire.....................................................................................18 2.1.7. Perception d'une phrase musicale : Apnée .......................................................20
3. Notation dans le cadre de musique entendue ...................................................................22
3.1. Ecoute d'un extrait (1'53) de Abyssi Symphonie de Georges Boeuf : Vers les grandes profondeurs .............................................................................................................22 3.2. Stripsody de Cathy Berberian ..................................................................................23 3.3. Gamelan de Bali.......................................................................................................26 3.4. M-E de Philippe Leroux...........................................................................................29
4. DU VISUEL VERS LE SONORE..................................................................................32
4.1. 1. Surface.................................................................................................................32 5. ANALYSE DES RESULTATS.......................................................................................34
5.1. Guider l'attention......................................................................................................34 5.2. Réflexion et structuration de la pensée ....................................................................35
5.2.1. Effort de mémoire et expression orale .............................................................35 5.2.2. Réflexion collective et cohésion du groupe .....................................................35 5.2.3. Perception d'une globalité ou d'éléments isolés ...............................................36 5.2.4. Déroulement dans le temps ..............................................................................37
5.3. Interprétation et création ..........................................................................................38 6. CONCLUSION................................................................................................................39
6.1. Conclusion et limites de la recherche.......................................................................39 6.2. Développement de l'écran animé .............................................................................40
7. BIBLIOGRAPHIE ...........................................................................................................42 8. Table des illustrations ......................................................................................................45
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1. INTRODUCTION
1.1. LA NOTATION COMME OUTIL
Est‐il possible dʹutiliser la notation musicale pour aider les élèves à comprendre
le phénomène sonore ? Comment exploiter la relation visuel‐sonore ?
Lʹexpression « notation musicale » est généralement attribuée à la musique
savante occidentale. Marc Honegger la définit ainsi : « ensemble de signes
conventionnels qui servent à fixer par écrit les sons musicaux et leur
interprétation1 ». Mais peut‐on considérer la notation musicale dans sa diversité
comme un outil au service de lʹécoute et de la création des élèves et non comme une
finalité ? La notation musicale deviendrait à ce moment là un support visuel à mettre
en relation avec le phénomène sonore quʹil représente afin de le comprendre. Les
recherches du M.I.M2 sur les Unités Sémiotiques Temporelles3 utilisent des termes
cinétiques pour traduire lʹaspect dynamique des UST (chute, trajectoire inexorable,
élan, étirement, en flottement, qui avance, qui tourne...) mettant ainsi en lumière
lʹinteraction entre visuel et sonore.
Dans le cadre de mon stage en responsabilité (Unité dʹEnseignement DUM
268), lʹenseignant de la classe de CP mʹa proposé de travailler sur le rapport entre
graphie et phonie. Ce projet, qui sʹinscrit dans les programmes officiels du cycle 2 :
« traduire des productions sonores sous forme de représentations graphiques4 », a
pour but dʹamener les élèves à établir la relation entre les sons et leurs transpositions
visuelles en lien avec lʹapprentissage de la lecture et de lʹécriture. Lors des séances
1 Honegger Marc, Science de la musique, Bordas, 1976 2 Laboratoire Musique et Informatique de Marseille, installé à la Cité de la Musique de Marseille, créé en 1984 3 Les Unités Sémiotiques Temporelles, éléments nouveaux dʹanalyse musicale, Musurgia 1996 4 Ministère de lʹEducation Nationale, Quʹapprend‐on à lʹécole élémentaire, Les programmes 2005‐2006, éditions
XO 2005 p. 135
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musicales, jʹai tenté de mettre cette relation entre visuel et sonore au service des
élèves en considérant la notation musicale comme un outil capable de les aider à
comprendre le phénomène sonore. Jʹai utilisé des supports visuels tels que symboles
et musicogrammes, « représentations graphiques de productions sonores5 ». Il sʹagit,
par le biais de questionnements et lʹobservation de différents types de notations
musicales, dʹamener les élèves à établir une relation entre la notation observée et le
résultat sonore afin quʹils en saisissent le sens et se lʹapproprient. La notation nʹest
pas considérée comme une finalité mais comme un outil permettant de mettre en
relief certains éléments musicaux afin de les comprendre. Cette utilisation de la
notation musicale est déjà développée dans une méthode pédagogique telle que
Percustra6 ou dans le mémoire « Son, signe, action » proposé dans le cadre de lʹaction
culturelle de Chalon sur Saône en 19837.
Jʹai placé la question de la notation au centre de ma recherche. Cette démarche
sʹarticule autour de deux axes : la production des élèves dʹune part, lʹécoute dʹextraits
musicaux dʹautre part.
1.2. OBJECTIFS ET LIMITES DE LA RECHERCHE
Le but de la recherche nʹest ni dʹétudier un type de notation en particulier, ni
dʹétablir un nouveau codage musical, mais de permettre aux élèves dʹapprocher le
phénomène musical par différents biais. Cʹest pourquoi jʹai donné la priorité au
sensoriel, au sonore; la notation nʹapparaissant quʹa posteriori, comme cela a été le cas
à lʹorigine de la notation musicale. Le support visuel, la notation sont une aide à
lʹécoute et à la création, car il nʹy a pas de création musicale sans écoute.
Dans le cadre du projet de classe sur lʹinteraction entre graphie et phonie, lʹaller‐
5 Petit Larousse illustré, 1989 6 Méthode percustra, créée par lʹensemble des Percussions de Strasbourg 7 Tete Elie, « Son, signe, action », ouvrage de pédagogie musicale, Acirene, 1993, p. 39 : « Bien quʹil ne sʹagisse
au départ que dʹune attitude de clarté envers les joueurs, cette tendance ira vers lʹécriture en sʹaffirmant dans les pédagogies des pratiques sonores [...] »
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retour entre visuel et sonore est indispensable. Mais, au sein de la classe comme pour
tout musicien, il ne sʹagit pas dʹaccumuler des savoirs théoriques. Lʹaller‐retour entre
le visuel et le sonore constitue un va et vient entre la lecture et lʹinvention, la culture
et la création8.
Tout au long de lʹannée, jʹai présenté aux élèves différents types de notations
et lʹenseignant a réutilisé certains documents en classe. Jʹai proposé différents
supports existants et jʹai noté moi‐même certains graphismes au tableau. Dans
certains cas, jʹai proposé aux élèves de noter eux‐mêmes, mais il ne sʹagissait pas de
développer la production de notation par les élèves. Jʹai souhaité utiliser le support
visuel pour apporter des précisions lors des productions sonores des élèves ainsi que
pour accompagner les écoutes dʹextraits musicaux. Je me suis appuyée sur la
notation musicale pour mettre en relief certains éléments musicaux.
Je souhaite ainsi montrer quʹil est possible dʹutiliser la notation musicale
comme un outil afin de noter, « faire une marque sur ce quʹon veut retenir9 »,
représenter, « rendre perceptible » et amener les élèves à comprendre et à
sʹapproprier le sonore.
En fin dʹannée, je pensais pouvoir évaluer les acquisitions des élèves et les
sensibiliser à la question de lʹinterprétation à travers le déchiffrage puis la création
de musicogrammes, mais je nʹai pas eu le temps de réaliser cette partie ma recherche.
Si lʹusage de supports visuels paraît essentiel lors de lʹapprentissage de la
lecture, lʹutilisation de la notation, « action de représenter par un système de signes
conventionnels », peut sembler paradoxale lors dʹinterventions en milieu scolaire.
La pratique du Musicien Intervenant sʹinscrit essentiellement dans lʹoralité et son
8 Emmanuel Perier, formation musicale et informatique, lʹenseignement de la musique assistée par ordinateur,
Points de vue, Cité de la Musique, 2003, p. 107 « Quelque soit son expérience, un musicien peut toujours se perfectionner pour améliorer ses capacités à comprendre ce quʹil entend, mettre en correspondance la musique lue et la musique entendue (dans les deux sens), jouer ce quʹil entend (intérieurement ou après écoute) »
9 Petit Larousse illustré, 1989
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rôle ne consiste pas à initier les élèves au codage musical traditionnel.
De plus, lʹutilisation dʹun code, « système conventionnel rigoureusement
structuré, de symboles ou de signes et de règles de communication », peut comporter
certains inconvénients tels que le recours à une notation systématique et la réduction
de notre perception à certains types de sons ou paramètres faciles à noter, ce que
soulève François Delalande dans son ouvrage La musique est un jeu dʹenfant10.
Ces écueils sont faciles à éviter si lʹon considère la notation comme un outil au
service du sonore et non comme une finalité. Lʹobjectif nʹétant pas dʹapprendre aux
élèves la technique de la notation musicale, jʹai veillé à éviter la notation
systématique. Lʹévolution de la notation musicale et la diversité des types de
notations utilisées au XXème siècle sont assez riches pour permettre lʹobservation et
lʹutilisation de notations variées (manuscrit grégorien, notation classique, partitions
contemporaines).
Selon les éléments que lʹon souhaite mettre en évidence, il existe de
nombreuses façons de représenter graphiquement la musique. François Delalande11
définit par exemple trois principaux types de notations : la notation opératoire (qui
explique le geste à accomplir), la notation incitative (qui représente les sonorités), la
notation perceptive (qui suggère lʹintention musicale). Jʹai par conséquent utilisé des
supports visuels et des codes différents afin de limiter les risques de notation
systématique.
En plus du tableau de classe et du support papier traditionnel, il est également
possible dʹutiliser des supports vidéos ou informatiques à visée didactique. Le
document vidéo Stripsody de Cathy Berberian12 est particulièrement intéressant à ce
titre puisque, tout en faisant entendre la pièce, il présente alternativement des
éléments de la partition originelle et lʹimage de la chanteuse. Lʹinformatique et ses
10 François Delalande, La musique est un jeu dʹenfant, INA GRM, éditions Buchet‐Chastel, 1997 11 François Delalande, opus cité p 111 à 115 12 Cathy Berberian, Stripsody, document diffusé sur la chaîne Arte
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supports interactifs sont également des outils appréciables pour leur souplesse
dʹutilisation (possibilités de modification au cours de la discussion). Jʹai proposé des
expériences autour des supports suivants : cédérom du Groupe de Recherches
Musicales « La musique électroacoustique13 », le logiciel Acousmographe14, le site de
la Cité de la Musique sur le Gamelan15.
1.3. LES OUTILS APPORTES PAR LʹUSAGE DE LA NOTATION
1.3.1. LA NOTATION DONNE UN CADRE
Lʹusage de la notation, apporte aux élèves un cadre et des repères. Le matériel
nécessaire à lʹutilisation dʹun support visuel, quʹil sʹagisse dʹun tableau ou dʹun
téléviseur implique un « repère géographique »16 qui permet de fixer lʹattention et
signale un moment particulier car « la nécessité de garder une trace écrite de toute
activité pédagogique fondée sur l’oral fait partie de ces lois non écrites qui régissent
l’institution scolaire17 ».
La notation permet également de fixer une structure, de faciliter la mémorisation
dʹune chanson ou dʹun enchaînement instrumental. Ce rôle dʹaide mémoire est
dʹailleurs à lʹorigine de la notation musicale : « Quand une civilisation est jeune, sa
musique ignore totalement toute trace dʹécriture [...]. La notation, lorsquʹelle existe,
est utilisée comme un aide‐mémoire a posteriori portant sur des mélodies déjà
13 La Musique électroacoustique, INA GRM, éditions Hyptique, 2000 14 « Logiciel dʹécoute et de représentation du signal sonore » proposé par lʹINA GRM http://www.ina.fr/grm/outils_dev/acousmographe/index.fr.html15 http://www.cite‐musique.fr/gamelan/ complément à lʹouvrage de Catherine Basset Musiques de Bali à
Java, Lʹordre et la fête, Cité de la Musique, Actes Sud 1995 16 Le tableau en classe de sixième, support visuel, outil pédagogique par Anne‐Tiphaine Vieillard‐Baron, 2003 http://francais.creteil.iufm.fr/memoires/vieillar.html 17 Le tableau en classe de sixième, support visuel, outil pédagogique par Anne‐Tiphaine Vieillard‐Baron, 2003 http://francais.creteil.iufm.fr/memoires/vieillar.html
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connues, non comme un moyen de les apprendre, ni surtout de les composer18 ».
Le travail réalisé à partir dʹun support visuel est bénéfique à la réalisation
sonore y compris lorsque le support visuel nʹest plus utilisé. En effet, la
concentration, lʹimplication, la réflexion entraînées par la compréhension de la
notation apportent une certaine assurance aux élèves, une capacité dʹattention,
dʹexigence, une qualité dʹécoute dans la production sonore. Le support visuel permet
ainsi de faciliter une étape dʹapprentissage et dʹapporter une certaine assurance, des
repères aux élèves. Son utilisation peut alors être transcendée par une réalisation
sonore19.
Parallèlement, le partage dʹun code commun, la réflexion commune pour
lʹélaboration ou la compréhension de ce code, consolident le sentiment
dʹappartenance à un groupe et sa cohésion20. La complicité née de cet échange
favorise la communication entre les élèves et leur fait prendre conscience de la
nécessité de disposer dʹoutils et de codes, dʹune culture commune, pour pouvoir
échanger et communiquer.
1.3.2. LA NOTATION PERMET UNE PRISE DE DISTANCE ET FAVORISE LA REFLEXION
Parallèlement à la pratique de lʹécriture qui « contribue à prendre de la
distance et à réfléchir21» , lʹusage de la notation musicale en classe implique un effort
de mémoire pour se souvenir de ce qui a été joué et/ou entendu, suscite des
discussions entre les élèves. Pour Hermine Sinclair, « il semble clair que les processus
18 Jacques Chaillez, 40 000 ans de musique, éditions LʹHarmattan, 2000, page 134 19 Cʹest une des idées développées par Véronique Pfeiffer‐Ryter, Madeline Demaurex et Joaquim Dolz à lʹoccasion du 9ème colloque de lʹAIRDF. Prendre des notes pour un exposé oral : intégrer lecture, écriture et oral au primaire, actes du 9ème colloque de lʹAIRDF, Québec, 26 au 28 août 2004, http://www.colloqueairdf.fse.ulaval.ca/fichier/Communications/Demaurex‐Pfiffer‐Dolz.pdf20 Tete Elie, « Son, signe, action », ouvrage de pédagogie musicale, Acirene, 1993 : « Cette attitude dʹécriture
tend à une plus grande compréhension des règles du jeu, dʹabord à lʹintérieur du groupe, ensuite à lʹextérieur de celui‐ci »
21 Joachim Dolz, « Ecrire pour apprendre, une stratégie pour comprendre », 2003 http://www.ordp.vsnet.ch/fr/resonance/2003/avril/Dolz.htm
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de description ont pour résultat un certain apprentissage où le sujet apprend à
centrer, à différencier et à classifier.»22
Lʹaspect collectif de cette pratique entraîne des reformulations, des
questionnements, des synthèses qui structurent la pensée des individus.
Cʹest pourquoi, comme le souligne E. Nonnon, lʹaspect évolutif du support visuel
est essentiel car cʹest la modification, « la construction au cours des discussions qui
permet de structurer la démarche orale et de guider lʹélève dans sa compréhension
des choses, de lʹaider à organiser ses idées23 ».
Pour Marcel Ley, lʹactivité graphique en relation avec la musique apparaît
comme une « possibilité dʹexpression, un moyen pédagogique de structuration de
la pensée esthétique, du temps, de lʹespace, une formulation symbolique des
phénomènes sonores et de leurs paramètres24 ».
1.3.3. LA NOTATION POSE LA QUESTION DE LʹINTERPRETATION ET DE LA COMMUNICATION
La découverte dʹun support visuel nécessite également un déchiffrage de chaque
élément, dʹune structure générale, dʹune intention et pose également la question du
sens et de lʹinterprétation. Comme cela est le cas pour la lecture dʹun texte, le rôle de
lʹintonation et de lʹinterprétation sont essentiels pour donner un sens à la notation.
Cette quête du sens implique un aller‐retour entre la découverte dʹun support
existant et sa correspondance sonore et peut favoriser la création de nouvelles sortes
de notations. Il sʹagit dʹune sorte dʹapprivoisement qui rend le musical plus proche
et permet ainsi aux élèves de sʹimpliquer pleinement dans le processus
dʹinterprétation ou de création.
22 Sinclair Hermine, La production de notations chez le jeune enfant, langage, nombre, rythmes et mélodies, PUF 1988 p. 127
23 E. Nonnon, ʺMettre au tableau, mettre en tableaux, ou comment structurer les discussions d’enfants Logique naturelle à l’oral et formalisations écritesʺ, Étude de linguistique appliquée, n° 81, 1991.
24 Marcel Ley, La mise en scène du conte musical, éditions Fuzeau, informations recueillies sur http://www.crdp‐montpellier.fr/ressources/memoires/memoires/2000/a/2/00a2028/00A2028_I.HTM
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1.4. ANNONCE DU PLAN
Puisque lʹutilisation de la notation en classe peut avoir différents intérêts, jʹai
essayé de trouver une méthode pédagogique permettant dʹutiliser cet outil pour
aider les élèves à comprendre le phénomène sonore. Comment utiliser la notation
musicale avec des élèves de CP afin de les aider à comprendre lʹélément sonore ?
Selon le principe dʹaller‐retour entre création et culture, jʹai imaginé trois types
dʹactivités complémentaires utilisant la notation musicale et favorisant lʹinteraction
visuel‐sonore : productions sonores des élèves, écoutes dʹextraits musicaux,
interprétations de supports visuels nouveaux.
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2.DESCRIPTION DES EXPERIENCES Cette recherche sʹinscrit dans le projet de classe et sʹest déroulée au cours de
13 séances réparties sur toute lʹannée avec une classe de CP de 26 élèves. Les séances
ont lieu le vendredi de 10h30 à 11h15 dans la bibliothèque de lʹécole équipée dʹun
tableau et dʹun téléviseur avec lecteur de vidéo et DVD. Le vidéo projecteur
commandé par lʹécole nʹétant pas livré, jʹai utilisé le téléviseur auquel jʹai relié mon
ordinateur.
Les élèves nʹayant jamais eu dʹintervention musicale auparavant, le début
dʹannée a été consacré à la découverte du monde sonore et à la mise en place de
dispositifs nécessaires à lʹintervention musicale (exploration instrumentale et vocale,
écoute dʹextraits musicaux, écoute de soi et de lʹautre, disposition des élèves,
apprentissage par imitation, prises de parole ordonnées). En accord avec
lʹenseignant, jʹai adopté une progression permettant aux élèves de sʹimprégner du
phénomène sonore avant dʹaccorder une place plus importante au support visuel.
Au cours de lʹannée, différentes situations ont pu être expérimentées, dʹautres
ont du être différées, pour des raisons propres aux conditions de lʹintervention
musicale (temps imparti, différents objectifs à poursuivre...). Les observations de
lʹenseignant sur la participation des élèves et le travail de récapitulation réalisé en
classe sont des données précieuses pour évaluer les résultats des expériences.
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2.1. NOTATION DANS LE CADRE DE MUSIQUE PRODUITE PAR LES ELEVES
Cette série dʹexpériences consiste à utiliser la notation pour aider les élèves à
comprendre et sʹapproprier certains éléments musicaux. Les graphismes proposés
sont toujours précédés de phases dʹexplorations sonores.
2.1.1. STRUCTURE GENERALE DʹUN PAYSAGE SONORE
Pendant la première partie de lʹannée (jusquʹaux vacances de Toussaint), nous
avons abordé le thème de la pluie. Nous avons chanté Lʹautomne est une chanson de
pluie, Les pieds dans lʹeau, écouté le Largo de Lʹhiver des Quatre saisons de A.
Vivaldi, Les Gouttes dʹeau de J. Sibelius, Les Orages de midi de G. Boeuf et réalisé
des explorations instrumentales sur « continu‐discontinu ». Jʹai proposé aux élèves
dʹimiter les gouttes de pluie (cordes en pizzicati dans les 2 premières pièces) avec les
instruments suivants : tambourins et doigts tapotés dans le creux de la main, wood
block, senza. Une fois le geste rebondi et la qualité instrumentale obtenus, jʹai
demandé aux élèves dʹimaginer une façon de jouer la pluie en continu en choisissant
un autre instrument présent dans la salle ou en modifiant le mode de jeu des
instruments utilisés auparavant. Le choix des élèves sʹest rapidement porté sur les
bâtons de pluie et il mʹa fallu poser de nombreuses questions avant quʹun élève ne
propose de gratter la peau des tambourins. Jʹai alors demandé à toute la classe de
frotter les tambourins ou leurs mains de façon circulaire et dʹalterner avec le geste
tapoté pour écouter la différence.
Lors des séances suivantes, nous avons repris et ordonné des explorations
instrumentales et vocales pour créer un paysage sonore sur le thème de la pluie
faisant se succéder trois parties : « gouttes de pluie rebondies », « pluie tombant en
continu » et « orage ». Cette partie conclusive a été jouée avec un tube à tonnerre et
des ballons de baudruche remplis de graines.
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Jʹai ensuite proposé de noter schématiquement la structure générale, ce qui a
permis une récapitulation des noms des instruments et de leur organisation.
Sʹappuyant sur les trois parties du paysage sonore, les élèves ont naturellement
adopté une notation imitative en proposant trois graphismes illustratifs permettant
de fixer le déroulement dans le temps de la production sonore et de préciser
lʹopposition continu/discontinu (gouttes dʹeau espacées et traits continus serrés) :
Figure 1: noter un paysage sonore
2.1.2. NOTION DE VITESSE
Au cours de cette séance, jʹai proposé aux élèves un jeu instrumental à partir
de sachets plastiques.
Jʹeffectue en les comptant 3 mouvements avec un sachet plastique, tandis quʹun
groupe dʹélèves doit réaliser, dans le même temps, un maximum de mouvements.
Les observateurs doivent compter le nombre de mouvements réalisés par leurs
camarades, ce qui sʹavère impossible tant la vitesse dʹexécution est grande. Il
apparaît donc de façon évidente que la vitesse dʹexécution ne dépend pas de la durée
de jeu mais bien du geste du musicien. Je propose alors 2 graphismes pour traduire
les réalisations : plus le graphisme est resserré, plus le mouvement est rapide.
Figure 2: Noter la vitesse d'exécution
Une fois les graphismes notés au tableau et joués par les élèves, jʹintroduis en
guise de vérification un jeu de questionnement à partir de sinusoïdes dessinées sur le
même principe :
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Figure 3: interpréter des variations de vitesse
Les élèves répondant correctement, je conclus lʹévaluation par un jeu de tuyaux
harmoniques plus ou moins rapide que les élèves doivent faire correspondre à un
graphisme de ressort dessiné selon les mêmes principes.
2.1.3. NOTION DʹINTENSITE
Le but de cette séance est dʹaider les élèves à différencier les notions de vitesse
et dʹintensité. Lʹétape de notation est précédée par une exploration instrumentale,
mais la réalisation est rendue difficile en raison de la confusion fréquente et
récurrente entre ces deux notions, confusion à laquelle sʹajoute la difficulté de
maîtrise instrumentale. Je propose alors aux élèves un jeu vocal pour mʹassurer quʹils
ont compris la consigne malgré le problème de la maîtrise instrumentale. Je note
ensuite au tableau deux graphismes et leur demande lequel correspond au son fort.
Lʹidée sous‐jacente est acceptée par les élèves : plus le trait est gras, plus lʹintensité
est forte, et ceci indépendamment de sa vitesse.
Figure 4: variations de vitesse et d'intensité
Cette étape laisse encore apparaître de nombreuses confusions entre vitesse et
intensité et les échanges entre les élèves à lʹoccasion du jeu de questionnement sont
mouvementés. Pour terminer la séance, des variations dʹintensité (indépendamment
de la vitesse) énoncées par des consignes verbales lors dʹun chant ont permis de
valider la compréhension de cette notion par les élèves.
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2.1.4. NOTION DE HAUTEUR
La confusion entre les notions de hauteur et dʹintensité est fréquente et jʹai
choisi de réaliser un travail sur ces deux notions à partir dʹun tambour de bois qui
permet de faire entendre deux hauteurs distinctes et de varier les intensités.
Les termes relatifs aux intensités semblaient acquis lors des séances précédentes,
ce qui a été confirmé tant que jʹai joué sur une seule hauteur. Mais lorsque jʹai
demandé aux élèves de dissocier intensité et hauteur, de nombreuses confusions sont
apparues entre « grave » et « fort » en particulier.
Lʹétape de notation permet alors de visualiser la distinction ou lʹassociation
des deux paramètres. Jʹadopte lʹidée selon laquelle plus le disque est petit, plus
lʹintensité est faible et jʹy ajoute le principe dʹécriture classique des hauteurs : grave
en bas, aigu en haut. Jʹinscris sur le tableau six formules numérotées faisant
apparaître différentes combinaisons des deux paramètres et demande aux élèves de
les expliquer. Je les joue sans respecter lʹordre et les élèves cherchent le numéro
correspondant à la formule jouée.
1. 2.
3.
4. 5.
6.
Figure 5 : reconnaître les hauteurs et les intensité
Lʹenseignant fera remarquer en fin de séance que les confusions ont été moins
nombreuses après lʹétape de notation et proposera aux élèves de refaire le jeu en
classe pendant la semaine.
Quelques semaines plus tard, à lʹoccasion de la présentation du temple block,
jʹai pu compléter le travail sur ces notions. Ayoub est désigné pour faire la
démonstration et doit chercher comment et où taper pour obtenir un son de bonne
qualité. Les autres élèves de la classe observent et écoutent attentivement puis
donnent leurs avis. Rapidement, ils signalent les différences de hauteur que certains
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associent justement à la taille des blocks. Une fois le mode de jeu établi (taper sur la
« bouche » des blocks en faisant rebondir les baguettes), je demande aux élèves de
venir jouer des sons « grave et doux », « aigu et fort » etc. Il ne sʹagit plus cette fois
pour les élèves de deviner lʹélément joué mais de jouer selon une consigne.
2.1.5. NOTION DE DENSITE
Lors de la découverte dʹun nouvel instrument, jʹai tenté une expérience sur la
notion de densité. En effet, lʹinstrument apporté, que jʹappelle « boîte à ploc », est
fabriqué à partir de bouteilles de lait servant de résonateurs et de ballons de
baudruche utilisés comme membrane à pincer.
Cet instrument dont lʹémission est difficilement contrôlable en terme dʹintensité
ou de vitesse, se prête par contre efficacement à un travail sur la densité. Il est
effectivement très facile en utilisant plusieurs instruments dʹobtenir un effet
dʹaccumulation.
Figure 6: boîtes à ploc
Une fois lʹaccumulation jouée par les élèves, je propose trois graphismes :
Figure 7 : notion de densité
Les élèves identifient rapidement les graphismes en fonction de ce quʹils
viennent de jouer. Certains élèves signalent quʹil faut jouer plus rapidement, dʹautres
rectifient en précisant quʹil sʹagit dʹêtre de plus en plus nombreux sans forcément
jouer plus vite individuellement. Malgré la confusion évidente de certains élèves, je
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nʹai pas jugé utile dʹapprofondir le travail dans cette direction.
2.1.6. NOTATION AIDE MEMOIRE
2.1.6.1. La baleine bleue de Steve Waring Jʹai également utilisé la notation comme aide mémoire, pour faciliter la
mémorisation dʹun chant faisant intervenir des passages instrumentaux. Dans
la chanson de Steve Waring, la baleine bleue cherche de lʹeau mais trouve
beaucoup dʹautres choses ! Je propose aux élèves dʹintercaler des passages
instrumentaux après chaque couplet en utilisant des objets sonores
correspondant au texte chanté. Je dessine alors un schéma permettant aux
élèves de mémoriser rapidement le texte et la structure, ce qui facilite les
enchaînements.
Le texte chanté (« la baleine bleue cherche de lʹeau, elle a trouvé... ») alterne
avec les passages instrumentaux illustrant le texte : sacs plastiques,
boomwackers (pour les vieux tuyaux), papiers divers (pour les vieux papiers),
chandelier Baschet, tube tonnerre (pour les vieux métaux) :
Figure 8: La baleine bleue cherche de l'eau...
2.1.6.2. Touchez pas à la mer Jʹai utilisé cette même fonction dʹaide mémoire dans un
arrangement du chant dʹAntoine Touchez pas à la mer. La mémorisation
de ce chant est rendue difficile par lʹabsence de lien logique entre les
phrases et lʹaspect répétitif de la mélodie qui nʹoffre pas de repère
mélodique. Jʹavais dans un premier temps pris le parti de chuchoter le
texte dans les moments de silence avant de réaliser au tableau quatre
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1. Ne dressez pas de frontière sur
l'océan (barrière)
2. Ne plantez pas de barbelé dans les
lagons (barbelé)
3. Epargnez les baleines et les grands
oiseaux blancs (baleine)
4. Gardez un peu d'eau claire pour nos
petits enfants (eau)
Figure 9: Antoine: "Touchez pas à la mer"
Dans les 2 cas, le support visuel est peu élaboré et nʹest pas utilisé
longtemps car les élèves ne le regardent plus lorsque le texte est mémorisé.
2.1.7. PERCEPTION DʹUNE PHRASE MUSICALE : APNEE
Jʹai également utilisé la notation pour faciliter la compréhension dʹune phrase
musicale jouée par plusieurs musiciens (chandelier, orgue de verre, vibratone, gloup‐
gloup25). Lors de la réalisation de la pièce Apnée26, les élèves rencontraient des
difficultés pour enchaîner les différentes parties de la phrase musicale jouée par
quatre musiciens différents.
Je souhaitais que les élèves comprennent que chacun des quatre musiciens jouait
25 Gloup‐gloup : instrument fabriqué par le MI : boîte de conserve remplie dʹeau dans laquelle on souffle à lʹaide dʹune paille
26 Apnée, extrait de la pièce Voyage écrite par le MI dans le cadre du DUM 263
20/45
une partie de la phrase et que les quatre parties devaient sʹenchaîner, comme on fait
se succéder des mots pour former une même phrase. Malgré mes explications, lʹidée
de phrasé semblait difficile à percevoir.
Jʹai alors utilisé la notation pour faciliter la compréhension des élèves :
superposition des graphismes indiquant lʹabsence de silence entre les instruments et
ligne de phrasé précisant lʹappartenance à un même ensemble :
Figure 10: "Apnée", phrase jouée par 4 instrumentistes
Les élèves ont alors considéré les quatre instruments comme une même entité et
ont réalisé un enchaînement plus rapide en échangeant des regards complices. Un
élève a indiqué que les musiciens se « faisaient passer le son ».
21/45
3.NOTATION DANS LE CADRE DE MUSIQUE ENTENDUE
Les expériences suivantes sont élaborées à partir dʹextraits musicaux afin que
les élèves « repèrent des éléments saillants [...] et se dotent de nouvelles références
pour accéder au patrimoine culturel27». Lʹenchaînement des séances obéit à une
progression permettant dʹétablir une interaction visuel‐sonore de plus en plus étroite
grâce aux différents supports utilisés. Certaines expériences donnent lieu à une
production sonore des élèves, leur permettant de réinvestir les éléments musicaux
repérés.
3.1. ECOUTE DʹUN EXTRAIT (1ʹ53) DE ABYSSI SYMPHONIE DE GEORGES BOEUF : VERS LES GRANDES PROFONDEURS
Jʹai choisi cette pièce pour son titre en rapport avec le projet dʹécole sur lʹeau,
son caractère et sa structure musicale. Lʹextrait est caractérisé par une trame continue
sur laquelle apparaissent de façon aléatoire des motifs discontinus ce qui permet aux
élèves de retrouver des éléments travaillés lors du paysage sonore sur la pluie. De
plus, le caractère fortement marqué (mystérieux ou inquiétant selon les élèves)
suggère immédiatement des réactions chez les élèves et facilite leur prise de parole.
Après une première écoute sans consigne, les élèves décrivent spontanément
deux éléments : des « bulles » et un élément fort, « qui fait peur ». Mon
questionnement et des écoutes supplémentaires permettent dʹapporter des précisions
sur ces deux motifs. Le premier élément qui rappelle des bulles est une sorte de
fourmillement de sons électroacoustiques aigus. Ils réapparaissent ponctuellement
27 Ministère de lʹEducation Nationale, Quʹapprend‐on à lʹécole élémentaire, Les programmes 2005‐2006, éditions XO 2005 p. 133
22/45
légèrement transformés. Le deuxième élément, joué dans le grave du piano, est fort,
bref, dynamique, caractérisé par son rythme pointé. Il réapparaît de façon aléatoire,
son rythme est quelquefois légèrement modifié mais son caractère et sa sonorité
(timbre, hauteur) restent identiques.
Je dessine alors deux graphismes au tableau sur propositions des élèves (qui
ont décrit des gestes mais nʹont pas osé noter eux‐mêmes). Je trace ensuite une ligne
continue et demande aux élèves à quel élément musical cela peut correspondre. Une
écoute supplémentaire permet à quelques élèves dʹidentifier une trame continue
autour de laquelle sʹorganisent les deux éléments décrits auparavant.
Figure 11: G. Boeuf, "vers les grandes profondeurs"
La notation est donc utilisée pour apporter un cadre, des repères, préciser
lʹorganisation des éléments musicaux, la construction de lʹextrait entendu.
Cette méthode peut paraître réductrice car elle risque de limiter lʹécoute de cette
pièce très riche à deux éléments. Cependant, les écoutes suivantes me permettent de
constater que les élèves conservent toute leur capacité dʹécoute et leur curiosité et
que de nombreux élèves ne signalent plus les motifs notés mais portent leur
attention sur les autres éléments musicaux.
3.2. STRIPSODY DE CATHY BERBERIAN
Lors de cette séance, jʹai présenté aux élèves le document vidéo Stripsody de
Cathy Berberian, ce qui me permet de proposer une nouvelle sorte de notation et
dʹévoquer la question de lʹinterprétation. Ce document propose alternativement des
images de la partition et de la chanteuse tout en faisant entendre la pièce. Les élèves
23/45
peuvent ainsi établir facilement la relation entre la notation et le résultat sonore.
La première réaction des élèves est la surprise et le rire, ce qui est prévisible avec
cette oeuvre. Mais rapidement, les élèves demandent à revoir certains « dessins »
comme lʹavion ou le train, demandent à quel graphisme correspond le cri de
« tarzan », posent des questions et cherchent à établir la relation entre chaque son
entendu et la correspondance visuelle.
Figure 12: C. Berbérian, extraits de "Stripsody"
La discussion entre les élèves est animée et lʹenseignant apprécie la forte
participation et les tentatives de lecture des onomatopées. Jʹoriente peu le débat et
me contente dʹorganiser les différentes interventions des élèves, de valider leurs
commentaires et de sélectionner certains passages sur la vidéo. Andreina fait
remarquer que certains dessins montent « parce que la voix est plus aiguë », Jauris
signale que certains mots ne correspondent pas tout à fait à ce qui est chanté (la pièce
est en anglais). Ottman se plaint parce que « cela va trop vite pour tout lire ».
Je leur montre alors la partition et leur explique quʹelle a été filmée et que seuls
des extraits apparaissent ponctuellement à lʹécran.
Enfin, jʹattire leur attention sur le graphisme du chat. Thomas voit un chat
écrasé; Noémie et Charly un chat hérissé.
24/45
Figure 13: C. Berbérian, le chat de "Stripsody"
Jʹen profite pour évoquer le sujet de lʹinterprétation, de lʹintention, de lʹintonation et
tente un parallèle avec les récitations apprises en classe, mais peu dʹélèves semblent
établir un lien. Je demande alors aux élèves de produire un miaulement avec des
intentions différentes, faisant ainsi remarquer que pour une même intention il peut y
avoir plusieurs versions. Revenant à la partition de Stripsody, je fais remarquer que
pour un même graphisme « chat », il peut exister plusieurs traductions sonores
comme il existe plusieurs façons de prononcer un même mot. Lʹenseignant,
souhaitant travailler en classe sur les onomatopées dans la bande dessinée, demande
à emporter la partition pour la revoir avec les élèves et leur faire réaliser un travail
graphique à partir de certaines onomatopées.
Voici les travaux de Charly, Jauris, Adam et Rémi :
25/45
Figure 14: travaux d'élèves
Les élèves ont chacun sélectionné une onomatopée que lʹenseignant a tracée sur
une feuille. Les élèves ont ensuite quadrillé leur feuille, créant ainsi différentes
formes géométriques. Le but était de colorier chaque forme en veillant à laisser la
totalité de lʹonomatopée vierge pour quʹelle apparaisse en blanc.
3.3. GAMELAN DE BALI
Le Gamelan est un instrument collectif traditionnel caractéristique des îles
indonésiennes de Bali et Java composé de percussions : gongs, métallophones,
xylophones, cymbales et peaux. Le gong est lʹinstrument fondamental de la musique
du Gamelan basée sur des formules cycliques.
26/45
Figure 15: Gamelan BARIS de Bali
Cette séance sur le Gamelan complète le travail sur la phrase musicale évoqué
plus haut. Jʹai utilisé la présentation shockwave « Gamelan mécanique » proposée
par le site de la Cité de la Musique28. Sur les trois interfaces interactives proposées
par le « Gamelan mécanique », deux sont particulièrement intéressantes pour notre
recherche. Elles permettent aux élèves dʹidentifier les timbres des instruments, de
repérer des paramètres connus tels que hauteur et vitesse, de trouver lʹorganisation
des éléments musicaux, de saisir lʹidée de phrase musicale répartie entre plusieurs
musiciens et de comprendre le rôle essentiel de chacun au sein du groupe.
La première interface fait jouer lʹensemble instrumental selon le principe dʹun
séquenceur et montre la diversité des éléments constitutifs du Gamelan (carillons de
gong à mamelons, tambours, petites cymbales, gongs, métallophones).
La simultanéité du son et la coloration des parties de lʹinstrument jouées
permettent aux élèves dʹassocier un timbre à une image, dʹobserver la vitesse
dʹexécution, la durée de la résonance. Il faut toutefois préciser quʹen temps normal, le
Gamelan nécessite la présence de musiciens. Une photographie représentant un
28 Le Gamelan mécanique, http://www.cite‐musique.fr/gamelan/
27/45
autre Gamelan et ses instrumentistes permet dʹéviter toute confusion.
Nous écoutons et observons le Gamelan Baris de Bali. Je commente les
premières réactions des élèves et leur demande de chanter la mélodie. Après
quelques essais et des éclats de rire, les élèves me font remarquer que la mélodie est
très rapide et difficile à chanter. Je confirme et leur fais remarquer quʹelle est de
nature répétitive. Je leur demande de repérer la partie du Gamelan avec laquelle la
mélodie est jouée, ce quʹils font aisément grâce au système de coloration. Les élèves
associent ainsi la mélodie au carillon de gongs à mamelons. Je leur demande alors
de mʹindiquer un élément musical différent. Les élèves remarquent les tambours
(que lʹon entend peu), les métallophones et enfin les gongs, plus graves, jouant plus
lentement, résonnant plus longtemps. Adam fait remarquer que la couleur donnée
au gong disparaît au fur et à mesure que lʹintensité du son diminue.
La deuxième représentation animée propose un système de notation
concentrique utilisée par Catherine Basset29 pour traduire la structure générale de
cette musique.
Figure 16: C. Basset, représentation d'un gamelan
Les sons y sont représentés par des points qui apparaissent à lʹintérieur des
29 Basset Catherine, Musiques de Bali à Java, Lʹordre et la fête Cité de la Musique, Actes Sud 1995
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formes géométriques représentant les différentes parties du Gamelan. Les élèves
repèrent facilement la continuité de la mélodie puisque les points ne sʹarrêtent jamais
de circuler et en déduisent que le carillon de gongs à mamelons est symbolisé par les
triangles de la périphérie. Je leur demande alors de deviner où sont représentés les
gongs. Les élèves cherchent des mouvements de points correspondant au timbre et à
la vitesse des gongs identifiés auparavant et finissent par trouver les quatre petits
disques blancs du centre. Certains élèves éprouvent des difficultés et pour les aider,
je demande à leurs camarades de compter jusquʹà quatre en fonction du trajet des
points pendant que jʹaccompagne les points avec le doigt. Alexandre signale alors le
caractère cyclique de la musique en relevant une correspondance entre le début de la
mélodie et le premier gong. Cette correspondance sonore est accentuée par
lʹalignement des points. Je demande ensuite aux élèves dʹobserver les carrés se
trouvant à la périphérie du 2ème cercle et de me chanter la mélodie correspondante.
Les élèves constatent avec amusement quʹil sʹagit dʹun motif quʹils avaient repéré
auparavant joués par les métallophones. Nous observons alors la première
animation et tout en chantant le motif mélodique des métallophones, nous vérifions
le caractère cyclique de la musique organisée autour des gongs. Le début du motif
mélodique correspond toujours au premier gong. Grâce à cet outil visuel et cette
technique de notation musicale, les élèves ont pu soutenir attentivement une écoute
prolongée, découvrir et décrire de nombreux éléments sonores, comprendre une
structure musicale.
3.4. M‐E DE PHILIPPE LEROUX
Cette pièce, construite sur le principe de percussion/résonance, permet aux
élèves dʹidentifier des instruments (piano, clochettes, flûte) et de repérer des sons
résonants, entretenus, courts, graves, aigus, répétés. Jʹai présenté cette pièce aux
élèves à partir du cédérom du Groupe de Recherches Musicales « La musique
29/45
électroacoustique30 » qui propose lʹécoute de la pièce accompagnée ou non dʹun
sonagramme et/ou dʹune acousmographie.
Jʹai tout dʹabord proposé une écoute sans support visuel, ce qui est rendu
possible grâce à lʹoption « écoute noire » du cédérom. Les élèves livrent leurs
premiers commentaires et disent avoir repéré des « bong », « bang », des sons graves.
Dʹautres signalent des « gloup » ou des « cling ». Mes questionnements et lʹéchange
avec les autres élèves accompagné dʹécoutes ciblées permettent dʹobtenir des
précisions : « un son grave qui dure longtemps » et « des cloches aiguës ». Jʹintroduis
alors les termes de percussion, attaque, résonance. Je propose une nouvelle écoute
avec le support visuel. La nouveauté que constitue le support visuel permet une
remobilisation de lʹattention.
Figure 17: P. Leroux : « M-E »
Lʹécoute des éléments décrits auparavant et lʹobservation de lʹacousmographie
sont simultanées et permettent aux élèves dʹassocier un symbole visuel avec un son
entendu. La notation utilisée facilite la perception de lʹélément percussion‐résonance.
Les élèves repèrent immédiatement le lien entre le nombre de sons percussifs
entendus et le nombre de pointes rouges visibles à lʹécran. Cette étape laisse
apparaître la réaction de certains élèves qui étaient restés muets jusque là.
Lors de lʹécoute suivante, certains élèves me demandent où sont notées les
cloches; dʹautres ont repéré la ligne violette sur lʹécran et suggèrent le
rapprochement. Une nouvelle écoute permet de confirmer cette hypothèse. Je
demande alors pourquoi dʹautres lignes apparaissent et propose aux élèves dʹécouter
30 La Musique électroacoustique, INA GRM, éditions Hyptique, 2000
30/45
une nouvelle fois en concentrant leur attention sur les lignes. La plupart des élèves
repèrent les entrées décalées des cloches. Je leur demande à quel élément musical les
différentes couleurs peuvent correspondre et un élève signale que les cloches nʹont
pas le même son. Quelques questions supplémentaires et une nouvelle écoute
permettent à certains élèves de préciser que les cloches nʹont pas la même hauteur.
Un élève fait alors observer quʹil y a une correspondance entre les pointes rouges et
les lignes. Un autre élève suggère que cʹest parce que chaque « bong » déclenche une
cloche. Tous les élèves nʹapprouvent pas, mais une nouvelle écoute et un geste
accompagnant chaque entrée de cloche permet de confirmer lʹhypothèse.
Nous écoutons la suite de la pièce en conservant le support visuel.
Figure 18: P. Leroux : « M-E » (suite)
Les élèves signalent un crescendo suivi de lʹarrêt brusque des cloches
correspondant à la fin des lignes. Jʹinterromps lʹécoute et leur demande de décrire la
suite de la notation. Les élèves repèrent les pointillés et la ligne continue. Je leur
demande à quoi cela pourrait correspondre. Un élève suggère que les pointillées
traduisent les cloches qui sʹarrêtent et recommencent. Un autre pense que la ligne
continue correspond au son grave qui joue sans arrêt. Lʹécoute permet aux élèves
dʹassocier les pointillés au timbre de la flûte et de confirmer lʹaspect discontinu du
motif mélodique. Un élève signale que les changements de hauteur des pointillés
correspondent à des changements de hauteurs de notes.
Les élèves sont restés enthousiastes et attentifs tout au long de cette séquence.
31/45
4. DU VISUEL VERS LE SONORE Je souhaitais utiliser cette partie de la recherche comme moyen dʹévaluation
en proposant aux élèves une notation inconnue afin quʹils la décryptent et la jouent.
Je pensais ainsi pouvoir approfondir la question de lʹinterprétation abordée
brièvement avec Stripsody et amener ensuite les élèves créer leur propre
musicogramme. Nous avons à ce jour seulement débuté ce travail.
4.1. 1. SURFACE
Lors de cette dernière séance, jʹai présenté un musicogramme avec le logiciel
Acousmographe. « Logiciel d’écoute et de représentation du signal sonore. Il facilite
le repérage, l’annotation et la description approfondie de tout enregistrement et
toute musique, en particulier électroacoustique ou de tradition orale31 ».
Surface est une pièce instrumentale écrite pour les élèves dans le cadre de lʹUnité
dʹEnseignement DUM 263. Les élèves connaissent le résultat sonore puisquʹils ont
déjà joué la pièce mais nʹont jamais vu la partition et lʹabordent donc comme une
nouveauté.
Je fais défiler lʹacousmographie en supprimant le son et demande aux élèves
dʹimaginer des instruments et des modes de jeu correspondant aux graphismes
observés. Je rappelle aux élèves que pour un même signe, plusieurs correspondances
sonores sont envisageables ce qui met un terme aux disputes naissantes. Après avoir
validé les propositions des élèves, je suggère lʹutilisation de certains instruments
(tambourins, tuyaux harmoniques) pour que la nomenclature corresponde à la pièce
dʹorigine mais je demande aux élèves de trouver le mode de jeu correspondant au
graphisme. A ce moment de la séance, les élèves nʹont pas encore identifié la pièce
31 Lʹacousmographe, « Logiciel dʹécoute et de représentation du signal sonore » proposé par lʹINA GRM : http://www.ina.fr/grm/outils_dev/acousmographe/index.fr.html
32/45
quʹils nʹavaient plus jouée depuis un certain temps.
La souplesse offerte par lʹoutil informatique me permet également de modifier
certains graphismes au fur et à mesure de la discussion afin de créer des éléments de
comparaison entre les combinaisons soufflées « schf », sfch », « chfs » (différences
dʹintensité signalées par la taille du graphisme).
Figure 19: différences d'intensité signalées par la taille du graphisme
Je propose au élèves de jouer la pièce en suivant lʹacousmographie sur le
téléviseur. Lʹintérêt des élèves est réel, et au moment de la répartition des
instruments, alors que je mʹattends à une certaine impatience de leur part, je constate
au contraire une très grande concentration. Il est intéressant de noter que les élèves
anticipent leur intervention en fonction du repère visuel mais me regardent pour
obtenir une confirmation au moment de jouer. Le support visuel apporte donc une
certaine autonomie aux élèves, mais ne mʹocculte pas et je conserve un rôle
important (variations de paramètres, validation ou rectification). Lʹaspect le plus
important est sans doute lʹattention portée par les élèves aux interventions de leurs
camarades au moment des tuilages instrumentaux.
Lors des réalisations précédentes, lʹécriture en tuilage, caractéristique de cette
pièce, avait été difficile à obtenir car les élèves nʹarrivaient pas tous à sʹarrêter de
jouer au bon moment, à écouter les autres ou à observer la direction simultanément.
Les têtes qui se tournent, les regards incitateurs ou les coups de coude
réprobateurs sont autant dʹéléments qui démontrent la communication entre les
élèves et leur compréhension du musicogramme proposé. La réflexion menée sur la
construction de la pièce a apporté aux élèves des repères et leur a permis dʹavoir une
attention soutenue tout au long de la séance.
33/45
5.ANALYSE DES RESULTATS Les expériences menées tout au long de lʹannée permettent‐elles de confirmer
les hypothèses de la recherche ? Les apports de la notation et du support visuel en
général sont‐ils utilisables lors dʹinterventions musicales en milieu scolaire ?
5.1. GUIDER LʹATTENTION
Lors des différentes expériences, jʹai pu vérifier la capacité du support visuel à
signaler un moment particulier et à guider lʹattention des élèves. Les remarques de
lʹenseignant concernant lʹintérêt des élèves, leur participation et leur capacité de
concentration pendant les séances mais également lors du réinvestissement en classe
ont confirmé mon impression. Cet apport du support visuel, reconnu dans les
apprentissages scolaires, est tout à fait transposable en musique et jʹai constaté son
intérêt dans toutes les situations proposées. Il est particulièrement intéressant de
noter que lʹattention apportée par le support visuel favorise une concentration et une
qualité dʹécoute au service de la production sonore des élèves. Je lʹai pu le constater à
lʹoccasion des prestations instrumentales liées au travail sur M‐E et Surface lors
desquelles les élèves ont fait preuve dʹune très grande attention, tant pour leur
intervention personnelle que dans lʹécoute de lʹautre (attention portée aux
résonances dans un cas et à lʹenchaînement des instruments dans lʹautre cas).
Lors de la séance sur M‐E, la découverte du support visuel a permis une
remobilisation de lʹattention pour les élèves qui éprouvaient des difficultés de
concentration lors de lʹécoute dite « noire ».
Les étapes de notation liées au travail sur les paramètres musicaux ont permis
dʹaccompagner un apprentissage réalisé à partir de différents instruments et de fixer
quelques repères. Dans certains cas, même si cela reste difficile à évaluer,
lʹenseignant et moi‐même avons eu lʹimpression que la notation favorisait la
34/45
compréhension pour certains élèves. La notation a surtout été utilisée pour attirer
lʹattention des élèves et mettre en place un dispositif permettant de réaliser une
évaluation sous forme de questionnement, ce qui a permis aux élèves de sʹapproprier
les éléments musicaux.
Les expériences sur les chansons La baleine bleue ou Touchez pas à la mer ont
également permis de mettre en évidence la fonction dʹaide mémoire de la notation
utilisée pour faciliter la mémorisation du texte ou de la structure.
5.2. REFLEXION ET STRUCTURATION DE LA PENSEE
5.2.1. EFFORT DE MEMOIRE ET EXPRESSION ORALE
Lʹeffort de mémoire réalisé par les élèves pour établir lʹordre des 3 parties du
paysage sonore sur la pluie et les interventions des instruments est évident. Le
même effort a été constaté lors de la notation de lʹextrait de Vers les grandes
profondeurs. La nécessité de partager avec le groupe incite les élèves à structurer
leur pensée, leur discours. Ce travail est réalisé régulièrement lors des activités
dʹécoute sans notation, mais le fait de pouvoir observer le résultat de leur réflexion
est une source de satisfaction pour les élèves. De plus, le support visuel favorise la
réaction et les commentaires des élèves, ce qui permet de sʹassurer de la
compréhension dʹune majorité dʹélèves.
5.2.2. REFLEXION COLLECTIVE ET COHESION DU GROUPE
La réflexion individuelle des élèves est accentuée par lʹaspect collectif de cette
pratique et les échanges entre les individus consolident la cohésion du groupe. Les
discussions souvent animées entre les élèves, la participation importante remarquée
et appréciée par lʹenseignant, les regards échangés sont des éléments probants.
35/45
5.2.3. PERCEPTION DʹUNE GLOBALITE OU DʹELEMENTS ISOLES
Lors dʹune conférence donnée à lʹoccasion du congrès de lʹAPEMU32 dʹoctobre
200633, François Madurell34 a signalé que la structure musicale était un élément
difficile à percevoir pour les élèves. Cependant, comprendre une structure ou un
principe dʹécriture peut aider les élèves dans leur compréhension du sonore.
Noter la structure générale du paysage sonore sur la pluie a permis aux élèves
de prendre conscience du parcours musical, dʹavoir une vision globale de la musique
quʹils venaient de jouer. Cette étape de notation a également été lʹoccasion de
récapituler les noms des instruments utilisés. Leur surprise et leur contentement face
au schéma montrent leur satisfaction dʹavoir joué une véritable histoire, mais
révèlent également que cet aspect nʹavait pas été compris malgré les indications
données lors de la production sonore. Cependant, même avec le schéma, certains
élèves semblent éprouver des difficultés à appréhender le déroulement dans le
temps. Ce point, sur lequel lʹenseignant souhaite mettre lʹaccent, a été développé
dans des expériences ultérieures.
Lors de la notation de lʹextrait Vers les grandes profondeurs, les élèves ont pu
repérer parmi les éléments notés, des paramètres travaillés dans les séances
précédentes et réinvestir ainsi des savoirs (hauteurs, continu, discontinu, rapide...) et
dégager lʹorganisation de ces éléments, ce qui leur a permis de clarifier une musique
riche. Certains élèves ont ainsi pu concentrer leur attention sur de nouveaux
éléments.
Lʹobservation du support visuel sur le Gamelan a été lʹoccasion pour les élèves
dʹidentifier les timbres dʹinstruments inconnus et leur associer des éléments connus
(hauteur, vitesse). Le système de notation a aidé les élèves dans la compréhension du
32 APEMU : Association des Professeurs dʹEducation Musicale et de chant choral 33 Actes du colloque à paraître 34 François Madurell, maître de conférence de lʹUniversité de Paris Sorbonne
36/45
découpage mélodique et de la structure musicale construite autour du gong. Cette
notation leur a également permis de saisir lʹidée de phrase musicale répartie entre
plusieurs musiciens et de comprendre le rôle essentiel de chacun au sein du groupe.
Nous avons, par la suite, réalisé un jeu vocal mettant en oeuvre un découpage
mélodique similaire à partir des chants Cache cache cachalot et Les pieds dans lʹeau.
A deux reprises, Thomas sʹest écrié : « comme le Gamelan ! ». Preuve en est que si il
nʹavait visiblement pas entendu la consigne, il toutefois avait compris lʹorganisation
mélodique du Gamelan.
Lʹacousmographie M‐E, a permis aux élèves de différencier des sons longs,
courts, résonants, répétés, des changements de hauteurs, lʹorganisation entre les sons
entretenus des clochettes et les impulsions du piano.
5.2.4. DEROULEMENT DANS LE TEMPS
Les supports sur écran animé permettent aux élèves dʹapprofondir lʹidée de
déroulement dans le temps, qui semblait poser des difficultés à certains élèves en
début dʹannée.
Le document Stripsody, qui fait défiler la partition et entendre le résultat
sonore simultanément, a permis aux élèves dʹétablir la relation entre la lecture dʹune
partition et dʹun livre (lecture de gauche à droite, intonation).
Le principe de lʹacousmographie proposée par le cédérom du GRM facilite
cette perception temporelle et de nombreux élèves ont signalé que la barre de
défilement se déplaçait en fonction de la musique.
Lʹexpérience de Surface, proposée avec le logiciel Acousmographe
fonctionnant sur le même principe, a permis de vérifier que les élèves avaient
assimilé le principe du déroulement dans le temps et de la lecture de gauche à droite,
puisquʹils ont fait le parallèle entre les barres de défilement des deux logiciels, me
signalant au passage que lʹune était blanche et lʹautre rouge, détail auquel je nʹavais
37/45
pas prêté attention. Cette dernière expérience a également mis en lumière la
compréhension du tableau à doubles entrées (apprentissage souhaité par
lʹenseignant), les élèves nʹayant éprouvé aucune difficulté à associer la temporalité
(lecture horizontale) avec la superposition des instruments (lecture verticale).
Lʹenseignant, manifestement satisfait, a confirmé cette impression.
5.3. INTERPRETATION ET CREATION
Cette hypothèse nʹa pas pu être confirmée par manque de temps, cependant
les expériences menées avec la vidéo Stripsody et lʹacousmographie de Surface ont
permis de faire observer aux élèves que la découverte dʹune notation demandait un
effort de compréhension et dʹinterprétation afin de donner un sens à la notation.
Les élèves ont pu remarquer que pour un même graphisme, plusieurs résultats
sonores étaient envisageables et que pour échanger et communiquer, il était
nécessaire de disposer dʹoutils communs.
38/45
6.CONCLUSION
6.1. CONCLUSION ET LIMITES DE LA RECHERCHE
Lʹinteraction visuel‐sonore est souvent utilisée pour permettre dʹidentifier des
timbres instrumentaux grâce à lʹassociation de lʹimage de lʹinstrument et du son.
Cʹest cette capacité que jʹai exploitée dans la première partie de lʹexpérience sur le
Gamelan. Mais les différentes expériences réalisées montrent que lʹutilisation de la
notation entraîne chez les élèves un effort de mémoire, une réflexion, une
communication, des reformulations qui structurent leur pensée. La notation musicale
devient ainsi un outil permettant aux élèves de distinguer des éléments musicaux et
leur organisation, de percevoir le déroulement dans le temps dʹun extrait musical, de
comprendre le phénomène sonore afin de se lʹapproprier. Le support visuel est ainsi
utilisé pour structurer la démarche sonore et sʹinscrit dans lʹoralité indispensable à la
pratique du Musicien Intervenant. La notation musicale constitue un véritable outil
dʹaide à lʹécoute mis au service de la compréhension des élèves.
Consciente de la nécessité de disposer dʹoutils pour pouvoir comprendre et
inventer, jʹai cherché à établir une progression permettant aux élèves de sʹapproprier
différents outils. Cette recherche sʹétant déroulée auprès dʹélèves nʹayant jamais eu
dʹinterventions musicales auparavant et dans le cadre particulier du milieu scolaire,
jʹai du prendre en compte certains facteurs (temps limité, différents objectifs
musicaux à poursuivre). Je nʹai pas eu le temps de développer les questions relatives
à lʹinterprétation et à la création.
Néanmoins, les expériences de Stripsody et Surface laissent envisager de
nombreuses possibilités dans des directions telles que lʹinterprétation de nouveaux
supports, et la création de musicogrammes par les élèves.
39/45
6.2. DEVELOPPEMENT DE LʹECRAN ANIME
Au cours de cette recherche, jʹai relevé un intérêt particulier des élèves pour
lʹécran animé. Cet outil, souple dʹutilisation et captivant, a facilité la compréhension
de certains éléments musicaux et a augmenté la capacité de concentration des élèves,
y compris lorsque le support nʹétait plus utilisé. Ces éléments nous permettent de
penser que lʹutilisation de ce type de support pourrait être développée lors
dʹinterventions en milieu scolaire sans nuire à la qualité musicale des séances.
A cet égard, il convient de souligner lʹintérêt de lʹoutil informatique.
Cette recherche ouvre de nouvelles perspectives sur la diversité des outils
pédagogiques utilisables lors des interventions en milieu scolaire. En effet, les
séances réalisées autour des supports proposés par le GRM (cédérom et
Acousmographe), ont mis en évidence les avantages offerts par lʹécran animé. Ce
support propose plusieurs possibilités dʹaide à lʹécoute et laisse imaginer des
développements possibles, en particulier la création de musicogrammes par les
élèves.
Lʹutilisation de lʹinformatique musicale par le Musicien Intervenant, suppose
une bonne connaissance des nombreux outils mis à sa disposition : TICCE
(Technologies de lʹInformation, de la Communication et de la Création pour
lʹEnseignement), CMAO (Création Musicale Assistée par Ordinateur), EMAO
(Enseignement Musical Assisté par Ordinateur). Pour autant, lʹintérêt du support
informatique ne doit pas faire oublier quʹil a, comme la partition classique, des
limites. Dans le cadre de lʹaide à lʹécoute, le support doit être préparé soigneusement
et adapté à la pièce écoutée en fonction des objectifs pédagogiques poursuivis. Le
Musicien Intervenant ne doit jamais oublier que le support, aussi séduisant soit‐il,
nʹest quʹun outil quʹil doit maîtriser pour le rendre réellement efficace.
Lʹoutil informatique nous permet également dʹenvisager le développement de
lʹéducation et de la création musicale au sein de lʹinstitution scolaire. Les
40/45
compétences transversales développées par la pratique musicale sont nombreuses et
peuvent être reliées à de nombreux domaines (lecture, langue, géographie, éducation
civique par exemple). A lʹheure où lʹinformatique se généralise dans les programmes
scolaires35, tandis que les éditeurs de manuels scolaires cherchent à renouveler les
outils pédagogiques36, lʹutilisation de lʹinformatique musicale à lʹécole est à
considérer comme un nouveau type de notation, comme un nouvel outil au service
de la compréhension du sonore.
35 Ministère de lʹEducation Nationale, Quʹapprend‐on à lʹécole élémentaire, Les programmes 2005‐2006, éditions XO 2005, p. 273 « Les compétences du premier niveau du Brevet informatique et internet font lʹobjet dʹun travail régulier dans lʹensemble des domaines dʹapprentissage, tout au long de lʹécole primaire »
36 De nombreux représentants de maisons dʹéditions ont circulé dans lʹécole tout au long du mois de mai
41/45
7.BIBLIOGRAPHIE Ouvrages cités
• Basset Catherine, Musiques de Bali à Java, Lʹordre et la fête Cité de la
Musique, Actes Sud 1995
• Chaillez Jacques, 40 000 ans de musique, éditions LʹHarmattan, 2000
• Delalande François, La musique est un jeu dʹenfant, editions Buchet‐Chastel,
1997
• Dictionnaire Petit Larousse illustré, 1989
• Honegger Marc, Science de la musique, Bordas, 1976
• M.I.M, Les Unités Sémiotiques Temporelles, éléments nouveaux dʹanalyse
musicale, Musurgia 1996
• Ministère de lʹEducation Nationale Quʹapprend‐on à lʹécole élémentaire, Les
programmes 2005‐2006, éditions XO 2005
• Nonnon E., ʺMettre au tableau, mettre en tableaux, ou comment structurer les
discussions d’enfants Logique naturelle à l’oral et formalisations écritesʺ,
Étude de linguistique appliquée, n° 81, 1991
• Sinclair Hermine sous direction de, par J. Bamberger, E. Ferreiro, M. Frey‐
Streiff, A. Sinclair, La production de notations chez le jeune enfant, langage,
nombre, rythmes et mélodies, PUF 1988
• Tete Elie, Son, signe, action, ouvrage de pédagogie musicale, Acirene, 1993
Ouvrages consultés
• Beltrando‐Patier M‐C, Histoire de la musique, Bordas, 1982
• Bosseur Jean‐Yves, Le sonore et le visuel, Intersections musique‐arts
plastiques aujourdʹhui, édition Dis Voir, 1992
• Carter‐Thomas Shirley, La cohérence textuelle, Pour une nouvelle pédagogie
de lʹécrit, éditions LʹHarmattan, 2000
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• Chailley Jacques, La musique et le signe, Les introuvables, éditions
lʹHarmattan 1994
Oeuvres musicales citées
• Berberian Cathy, Stripsody
• Boeuf Georges, Les Orages de midi
• Boeuf Georges, Vers les grandes profondeurs extrait de Abyssi Symphonie
• Gamelan, musique de Bali
• Sibelius Jean, Les Gouttes dʹeau
• Vivaldi Antonio, Largo de Lʹhiver extrait des Quatre saisons
Chansons citées
• Antoine, Touchez pas à la mer
• Boyer Jean‐Naty Cache cache cachalot
• Lʹautomne est une chanson de pluie
• Les pieds dans lʹeau
• Waring Steve, La baleine bleue
Méthode pédagogique citée
• Percustra, école des Percussions de Strasbourg,
http://www.ecoledespercussionsdestrasbourg.com/main.php?num_menu=3&
num_smenu=44&larg=
Didacticiels cités
• Cédérom « La Musique électroacoustique », INA GRM, éditions Hyptique,
2000
Document vidéo « Stripsody » de Cathy Berberian
• Logiciel « Acousmographe », INA GRM,
http://www.ina.fr/grm/outils_dev/acousmographe/index.fr.html
• Présentation shockwave : Le Gamelan mécanique, http://www.cite‐
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musique.fr/gamelan/
Sites Internet cités
Colloques et conférences :
• Actes du 9ème colloque de lʹAIRDF, Québec, 26 au 28 août 2004 : « Prendre
des notes pour un exposé oral : intégrer lecture, écriture et oral au primaire »,
Véronique Pfeiffer‐Ryter, Madeline Demaurex et Joaquim Dolz,
http://www.colloqueairdf.fse.ulaval.ca/fichier/Communications/Demaurex‐
Pfiffer‐Dolz.pdf)
• « Ecrire pour apprendre, une stratégie pour comprendre », Joachim Dolz,
2003, http://www.ordp.vsnet.ch/fr/resonance/2003/avril/Dolz.htm
Mémoires en ligne dʹétudiants IUFM :
• Académie de Créteil : Le tableau en classe de sixième, support visuel, outil
pédagogique, Anne‐Tiphaine Vieillard‐Baron, 2003
http://francais.creteil.iufm.fr/memoires/vieillar.html
• IUFM de Montpellier : Créer un conte musical ou comment développer la
créativité en cycle 3, Gautier Gourmaud, 2000
http://www.crdpmontpellier.fr/ressources/memoires/memoires/2000/a/2/00a20
28/00A2028_I.HTM
Présentation shockwave :
• Le Gamelan mécanique : http://www.cite‐musique.fr/gamelan/
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8.TABLE DES ILLUSTRATIONS Figure 1: noter un paysage sonore ...........................................................................................14 Figure 2: Noter la vitesse d'exécution ......................................................................................14 Figure 3: interpréter des variations de vitesse..........................................................................15 Figure 4: variations de vitesse et d'intensité.............................................................................15 Figure 5 : reconnaître les hauteurs et les intensité ...................................................................16 Figure 6: boîtes à ploc ..............................................................................................................17 Figure 7 : notion de densité......................................................................................................17 Figure 8: La baleine bleue cherche de l'eau... .........................................................................18 Figure 9: Antoine: "Touchez pas à la mer" ..............................................................................20 Figure 10: "Apnée", phrase jouée par 4 instrumentistes ..........................................................21 Figure 11: G. Boeuf, "vers les grandes profondeurs" ..............................................................23 Figure 12: C. Berbérian, extraits de "Stripsody"......................................................................24 Figure 13: C. Berbérian, le chat de "Stripsody".......................................................................25 Figure 14: travaux d'élèves ......................................................................................................26 Figure 15: Gamelan BARIS de Bali.........................................................................................27 Figure 16: C. Basset, représentation d'un gamelan ..................................................................28 Figure 17: P. Leroux : « M-E » ................................................................................................30 Figure 18: P. Leroux : « M-E » (suite).....................................................................................31 Figure 19: différences d'intensité signalées par la taille du graphisme...................................33
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