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Université Paris V (Malakoff)
D.E.A. Droit de l’Economie Internationale et du Développement
Année Académique 1998-1999
L'UNION EUROPEENNE
ET L'AUTORITE PALESTINIENNE
Mémoire de DEA Droit de l'économie internationale et du développement
par Mademoiselle Delphine FENASSE
sous la direction du professeur Edmond JOUVE
INTRODUCTION
La politique méditerranéenne originelle de l'Europe s'est ordonnée autour d'accords
d'association avec les pays de la rive Nord, comme la Grèce et la Turquie, et d'accords
préférentiels avec la plupart des pays tiers méditerranéens, comme les accords non
préférentiels avec Israël et la Yougoslavie, qui ne comportait que des dispositions d'ordre
commercial. A compter du Sommet de Paris de 1972, la Communauté européenne met en
œuvre de façon progressive une approche globale méditerranéenne qui se traduit par divers
types d'accords de coopération, avec Israël, les pays du Maghreb, puis ceux du Machrek, et
des accords d'association avec Malte et Chypre. Il était clair que l'approche globale, qui se
traduisit par des protocoles financiers ajustables pour des périodes de cinq ans, répondait à
deux objectifs qui sont loin d'avoir perdu toute leur actualité à la date actuelle : d'une part
équilibrer l'élargissement au Nord de la Communauté européenne a partir de 1973, et d'autre
part avancer sur la voie du libre-échange, en contrepartie d'une politique d'aide par secteurs de
coopération. A compter de 1989, une fois que les élargissements de la Communauté
européenne vers le Sud ont été accomplis avec la Grèce, l'Espagne et le Portugal, l'approche
globale a fait l'objet de corrections selon le schéma dit de la « politique méditerranéenne
rénovée ». Elle comportait un relèvement de l'enveloppe de l'aide globale et ajoutait un appui
à l'intégration régionale, une coopération financière horizontale, l'appui à des réformes
économiques d'ajustement, l'idée d'un dialogue permanent, c'est à dire une politique de co-
développement. Où se situe la Palestine dans cette politique européenne méditerranéenne ?
Le 24 février 1997, un « accord d'association euro-méditerranéen intérimaire relatif aux
échanges et à la coopération entre les Communautés européennes et l'O.L.P. pour le compte
de l'Autorité palestinienne de Cisjordanie et de la bande de Gaza » a été signé. C'est un accord
bilatéral dans le cadre du partenariat euro-méditerranéen tel que défini à la Conférence de
Barcelone de novembre 1995.
En effet, la séparation géographique de la Cisjordanie et de la Bande de Gaza, ainsi que le
bouclage des territoires palestiniens par Israël contraint le peuple palestinien à vivre dans une
précarité avancée1. La Palestine se situe aux frontières du Liban et de la Syrie au nord, de
1 Shaat (Nabil) : « Les besoins d’un pays à construire » Revue d’études palestiniennes n°6, 1995, p.59
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Delphine FENASSE, L’Union européenne et l’Autorité palestinienne, Mémoire DEA 1998-1999 1
l'Egypte au sud, de la Jordanie à l'est, et de la mer Méditerranée à l'ouest. Les territoires de
Gaza et de Cisjordanie sont les territoires qui constituent la Palestine telle que revendiquée
actuellement par Yasser Arafat, président de l'Autorité palestinienne représentante du peuple
palestinien de Gaza et de Cisjordanie. La Cisjordanie est la partie centrale de la Palestine, et
n'a pas de lien frontalier avec Gaza, en bord de mer. Cet encerclement oblige les Palestiniens
à emprunter les routes israéliennes pour aller travailler, souvent en Israël d'ailleurs, où ils
n'ont pas les professions les plus enrichissantes (au sens financier et social du terme). Mais
fréquemment, le gouvernement israélien boucle ces territoires pour des raisons de sécurité, ce
qui paralyse la population palestinienne, et la condamne à vivre dans un véritable ghetto. La
pauvreté dont sont victimes les populations de Gaza et de Cisjordanie varie d'importance entre
les deux parties de la Palestine. La densité de la population est presque dix fois plus élevée à
Gaza qu'en Cisjordanie2, le PNB par habitant en 1994 était de 1230 dollars à Gaza contre
2000 dollars en Cisjordanie. Quant aux réfugiés, dont le nombre ne cesse de croître, ils
constituent les deux tiers de la population de Gaza et seulement 40% en Cisjordanie. Enfin,
Gaza est davantage dépendante d'Israël pour 1'emploi que ne l'est la Cisjordanie. Les
Palestiniens souffrent de divers maux tels qu'un chômage élevé, une infrastructure dévastée, et
un total dénuement pour 300.000 d'entre eux. De plus, plus de la moitié de ce peuple a un
statut de réfugié3. Cela engendre des conditions de vie dans des camps extrêmement difficiles.
Tout cela est dû à un conflit vieux de plusieurs siècles, et déclaré depuis 50 ans entre juifs
israéliens et arabes palestiniens, et sur lequel la Palestine s'est construit une identité, un pays
morcelé et appauvri.
Avec le retrait des forces coloniales britanniques, cette région est devenue très instable. Cette
instabilité est due pour beaucoup au conflit Israélo-Palestinien. En effet, avec le départ des
britanniques, il a fallu aux différents peuples vivant, à l'époque, en Palestine, trouver une
solution pour vivre ensemble dans un même Etat. Cet Etat était peuplé en majorité d'arabes,
mais aussi de nombreux juifs et de quelques chrétiens. Dès les années 1890 on voit apparaître
l'idéologie du sionisme4 qui vise à la restauration d'un Etat juif indépendant en Palestine. Il
s'agit non seulement d'un retour du peuple juif en terre d'Israël, mais aussi de la création d'un
véritable Etat israélien. Les Arabes, de leur côté, voient cette théorie comme une volonté de
colonisation de leur pays dont Jérusalem, la capitale, est un lieu saint de la religion 2 « Developping the occupied Territories, an investment in peace », Banque mondiale, Rapport, septembre 1993 3 Selon les sources de l’UNRWA et du HCR, il y a 3.417.688 réfugiés dont 359.005 au Liban, 356.739 en Syrie, 1.413.252 en Jordanie, 476.050 à Gaza et 542.642 en Cisjordanie
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musulmane. Il s'ensuivra, depuis lors, des conflits entre les Arabes et les Israéliens. En février
1916, les accords Sykes-Picot entre la France et la Grande-Bretagne prévoient un partage de
la Terre sainte. Le 2 novembre 1917, Lord Balfour, ministre britannique promet aux sionistes
la création d'un Foyer national juif en Palestine.
Le premier conflit commence en 1947 et la « guerre d'indépendance d'Israël ». Après deux
années de guérilla des groupes sionistes les plus actifs en Palestine contre la puissance
mandataire britannique, David Ben Gourion l'emporte, en août 1946, sur le modéré Chaïm
Weizman à la Conférence sioniste mondiale. Il lance un appel à la résistance armée contre la
politique du Livre blanc britannique de 1939 qui prévoit une Palestine arabe unitaire
indépendante avec une représentation juive appropriée. En septembre 1947, un plan de
partage est adopté par l'O.N.U., au lieu du principe d'Etat fédéré binational. Côté arabe, la
Ligue des Etats arabes, créée en 1944-1945, refuse dès septembre 1947 l'idée même de
partage de la Palestine. En effet, les Palestiniens arabes, après la Seconde Guerre mondiale, se
retrouvent doublement partagés : une partie en zone majoritairement sioniste, sur le littoral, et
une partie en Palestine très majoritairement arabe, en Galilée, au Néguev et au Centre. Ce
refus se manifestera par la prise des armes par le Jihad à partir de décembre 1947. Les
massacres de juifs sont nombreux et souvent considérés comme des représailles des meurtres
commis par la Haganah5. Les exemples les plus tristement célèbres des activités meurtrières
juives sont le dynamitage de villages entre Tel-Aviv et Jérusalem, la prise de Tibériade, le
massacre de Deïr Yasin par l'Irgoun6, la prise de Haïfa, et l'occupation militaire de Jaffa. Ces
attaques sont destinées à faire fuir les Arabes. Ils feront des milliers de réfugiés arabes7. Le 14
mai 1948 David Ben Gourion annonce la renaissance de l'Etat juif sous le nom d'Etat d'Israël.
Il se garde d'en indiquer les frontières mais les chefs de ce nouvel Etat avaient des ambitions
territoriales évidentes, particulièrement sur le Néguev et la Galilée8. De son côté, le Congrès
palestinien de Jericho vote l'annexion de la Cisjordanie à la Transjordanie le 1er décembre
1948. A la fin de 1947, la Ligue arabe essaye de coordonner les différentes armées arabes
syriennes, égyptiennes, libanaises, transjordaniennes et irakiennes, sans succès. Elle est battue
partout, plus nombreuse au début mais vite diminuée, car sous équipée comparé aux armes de
4 Lire Herzl (Théodore) « L’Etat des juifs », Paris, 1990, La Découverte, 188p. 5 Milice d’autodéfense juive 6 Organisation secrète armée juive issue du Bétar, mouvement de jeunesse sioniste de droite 7 En 1950 l’UNRWA estime qu’il y a 957.000 réfugiés palestiniens 8 Enderlin (Charles) « Paix ou guerres : les secrets des négociations israélo-arabes 1917-197 », Paris, 1997, Stock, 731p.
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pointes fournies à Israël par les Etats-Unis et l'Europe via les réseaux de la Haganah. Depuis
l'été 1948 jusqu'à la fin de la guerre, il y eut ainsi entre 60.000 et 100.000 soldats israéliens
bien armés et aguerris contre 30.000 à 40.000 soldats arabes mal entraînés. Les combats
cessent en janvier 1949.
La guerre de 1947-1949 va fixer sur le terrain le double principe de division : un Etat juif avec
une assez forte minorité palestinienne arabe, le territoire de Gaza sous administration
égyptienne directe, et la Cisjordanie intégrée au royaume de Jordanie. 6700km² de la Palestine
du plan de 1947 sont occupés. Mais Israël ne s'estime pas tenu par des résolutions non
reconnues par les Etats arabes. Israël est pourtant admis à l'O.N.U. le 11 mai 1949, mais sur la
base des frontières définies en 1947.
Le Mouvement pour la Libération de la Palestine voit le jour en 1956, fondé par Yasser Arafat
et ses compagnons de lutte. En 1959, le M.L.P. pose des principes selon lesquels il faut
supprimer « l'entité sioniste » dans ses organismes politiques économiques et militaires, en
organisant une révolte violente. Cette révolte doit devenir indépendante des Etats et des partis
politiques arabes car ne concernant que les Palestiniens. En 1959, le nouveau chef de l'Irak,
Kassem, lance l'idée d'un gouvernement palestinien à Gaza et en Cisjordanie, puis annonce
l'existence effective d'une entité palestinienne. L'idée provoque un écho considérable parmi
les Palestiniens de Gaza et de Jordanie. Il fait savoir qu'il y a déjà une armée palestinienne
entraînée à Bagdad, une armée de libération de la Palestine. Le 13 janvier 1964, Nasser
convoque un sommet arabe au Caire. Ce sommet décide de la création d'un commandement
militaire arabe unifié et d'une organisation palestinienne pour « permettre au peuple
palestinien de jouer son rôle dans la libération de son pays et de son autodétermination ». Une
représentation au sein de la Ligue arabe d'une entité palestinienne par l'O.L.P. (Organisation
de Libération de la Palestine), en tant qu'observatrice est décidée. Le premier Conseil national
palestinien se tient le 28 mai 1964.
Lévi Eshkol remplace David Ben Gourion en 1963 au poste de premier ministre israélien.
C’est un modéré qui renonce à la course aux armements et se rapproche de Nasser. Mais à
partir de 1965, le terrorisme palestinien se manifeste. Pendant les trois premiers mois de
l'année, l'Assifa, branche militaire du Fatah9, réussi une dizaine d'attentats en Israël. Ce
terrorisme fera un argument parfait pour les Israéliens pour ne pas négocier. On ne négocie
pas avec des terroristes. D'ailleurs, même encore aujourd'hui, l'O.L.P. est toujours considérée
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par le gouvernement israélien comme une organisation terroriste, ayant pour but la destruction
d'Israël10.
L'opinion israélienne est « dopée » par les discours menaçant des arabes et les extrémistes
religieux au gouvernement en profitent pour exiger la nomination de Moshé Dayan au
ministère de la défense. Dès le 1er juin 1967, une attaque est décidée pour le 5 du même mois.
Cette attaque est menée tour à tour contre l'Egypte, la Jordanie et la Syrie et durera jusqu'au
10 juin, date de la cessation des hostilités. Une fois encore, le bilan est désastreux pour les
parties arabes : perte de 70.000km² de territoire, dont les 5.500km² de la Cisjordanie et de la
bande de Gaza, c'est à dire toute la Palestine restée arabe depuis 1949. Une résolution n°242
est votée à l'O.N.U. le 22 novembre 1967 demandant l'évacuation des territoires occupés par
l'armée israélienne, l'instauration de frontières « sûres et reconnues » et le règlement du «
problème des réfugiés ». Selon la langue employée, le texte signifie retrait de territoires
occupés ou des territoires occupés, donc de certains territoires occupés ou de tous les
territoires occupés. La Syrie, l'Irak et la résistance palestinienne rejetteront cette résolution
dans sa traduction autre que française, et les Israéliens soutiendront la traduction anglaise.
Le terrorisme palestinien se manifeste à nouveau en mai 1972. Israël vit à l'heure du
terrorisme et des détournements d'avions. Ce funeste mois de mai, des palestiniens de
Septembre noir, une organisation du Fatah, prend en otages les passagers du Boeing de la
Sabena qui faisait le trajet Bruxelles-Tel Aviv. Arrivé à destination et après vingt-quatre
heures de pourparlers, un commando monte à l'assaut de l'avion. Deux pirates de l'air sont
tués, deux jeunes palestiniennes sont capturées vivantes, et les passagers sont libérés.
Quelques jours plus tard, le 31 mai 1972, trois japonais descendent d'un avion d'Air France à
l'aéroport de Lod. Ils viennent de Rome et ressemblent à des touristes tout à fait normaux.
Lorsqu'ils reçoivent leurs valises, ils en sorte deux Kalachnikov et des grenades. C'est un
véritable massacre. 24 personnes sont assassinées et il y a des dizaines de blessés. Sur les trois
terroristes, deux sont abattus et le troisième est capturé. Il appartient, comme ses camarades, à
l'Armée rouge japonaise, qui a réalisé cet attentat pour le compte du Front populaire pour la
libération de la Palestine. Mais l'année 1972 n'est pas terminée. Le 5 septembre, aux jeux
Olympiques de Münich, un commando de Septembre noir s'introduit dans l'immeuble des
athlètes israéliens. Un sportif est tué en essayant de résister et onze autres sont pris en otage. 9 Organisation palestinienne créée en 1958, entre autre par Yasser Arafat. En arabe, Fatah sont les abréviations écrites à l’envers de Mouvement de libération de la Palestine.
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Les terroristes exigent la libération de cinquante de leurs camarades emprisonnés en Israël.
Après plus d'une journée de négociation, le gouvernement bavarois autorise les Palestiniens et
leurs prisonniers à quitter le village olympique pour se rendre en hélicoptère jusqu'à l'aéroport
militaire voisin. La police allemande essaie de libérer les otages et échoue. Le bilan est très
lourd : dix israéliens, un allemand ainsi que le pilote de l'hélicoptère sont tués. Trois
palestiniens sont capturés vivants. Ils seront libérés quelques semaines plus tard suite au
détournement d'un avion de la Lufthansa. Mais les Palestiniens ne s'arrêtent pas là. Le 10
septembre, un agent du Mossad11 est assassiné, puis un journaliste syrien. Les Israéliens
ripostent par les assassinats de 3 chefs terroristes. Mais Septembre noir ripostent avec
l'assassinat d'un chef du Mossad. Cette série noire finira avec 1'intervention d'un commando
du Mossad au Liban pour supprimer d'autres chefs de Septembre noir et détruire les bâtiments
administratifs du Front de libération de la Palestine.
En 1973, la guerre du Kippour éclate. Elle a pour origine la volonté de récupération de
quelques un des territoires égyptiens et syriens occupés par Israël depuis juin 1967. Le 6
octobre, les forces égyptiennes et syriennes lancent une offensive contre les troupes
israéliennes du Sinaï et du Golan. La contre-offensive israélienne est déclenchée le 8, contre
la Syrie d'abord. Un texte de cessez-le-feu est mis au point le 22 octobre, par la résolution 338
des Nations-Unies. Les Israéliens continuent leur progression en Egypte et il faudra attendre
deux autres résolutions de l'O.N.U. du 23 et du 25 octobre pour les stopper. Des accords de
désengagement progressif des forces militaires israéliennes sont trouvé le 18 janvier 1974 et
le 4 septembre 1975.
Le sommet arabe de Rabat du 26-28 octobre 1974 proclame publiquement que l'O.L.P. est «
le seul représentant légitime du peuple palestinien sur tout territoire palestinien libéré ». A
partir de 1973, le mouvement palestinien évolue. Dès 1974, la cause palestinienne est de plus
en plus défendue au sein de l'O.N.U. Yasser Arafat est convié à l'Assemblée générale des
Nations unies, où il prononce un discours modéré qui n'évoque l'Etat unitaire démocratique
que comme un idéal à atteindre. L'O.L.P. est alors invitée à avoir à l'O.N.U. le statut
d'observateur tandis que sont proclamés, le 22 novembre 1974, par l'Assemblée générale les «
droits inaliénables du peuple palestinien en Palestine » qui incluent le droit à
l'autodétermination sans interférence extérieure ainsi que le droit à l'indépendance et à la
10 Il faut préciser que dans sa Charte constitutive, l’OLP prônait la destruction de l’Etat juif. Mais récemment, Yasser Arafat, président de l’Autorité palestinienne, a fait retirer de la Charte cet article. 11 Services secrets israéliens.
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souveraineté nationale. On assiste là à une véritable révolution : la première reconnaissance
internationale officielle de l'existence d'un peuple palestinien à part entière. En conséquence
de quoi, les revendications se précisent, et par là se modèrent. En revanche, depuis la guerre
du Kippour, les colonies juives en territoire palestinien ne cessent de s'accroître12.
En 1978 apparaissent les accords de Camp David entre Israël et l'Egypte. L'accord implique la
restitution à l'Egypte en trois ans de la totalité du Sinaï, ainsi que la mise en place d'un «
Conseil administratif » en Cisjordanie et à Gaza pour une durée intérimaire de cinq ans dans
le but d'un transfert d'autorité pacifique et progressif. Les représentants du peuple palestinien
sont invités à négocier, dès les pourparlers sur la mise en place du Conseil administratif. Mais
il faut remarquer qu'il n'est pas question de souveraineté palestinienne dans ces deux accords.
En 1982 se déroule au Liban une troisième guerre israélo-palestinienne. C'est durant cette
guerre que se déroulent les massacres de Sabra et Chatila, deux camps de réfugiés palestiniens
au sud Liban, massacré organisés par l'A.L.S. (Armée du Liban-Sud) sous les yeux des
israéliens qui laissent faire13. Le nombre de victimes de ce massacre n'a jamais pu être
déterminé avec certitude mais on parle de mille à cinq mille morts, femmes et enfants. Cette
guerre est particulière car pour la première fois, une offensive israélienne massive dans un
pays arabe ne provoque pas de réponse militaire arabe coalisée. Il y a plutôt une solidarité
arabo-israélienne de facto contre l'O.L.P. installée au Liban.
En 1987, éclate l'Intifada qui signifie soulèvement en arabe. Il s'agit d'un sursaut palestinien à
l'intérieur même des territoires occupés par Israël. L'enjeu est clair : le rétablissement de la
souveraineté palestinienne sur la Cisjordanie et Gaza, dans ses frontières de 1949, mais pas
sur Israël. Ce mouvement est conduit par des jeunes de toutes classes. Les actions sont
populaires et la violence limitée. Il n'y a aucune arme si ce n'est des pierres et des bouteilles
incendiaires artisanales. S'ajoute à cela des actions de résistance passive telles que le boycott
des produits israéliens, le refus de payer les taxes et les impôts, et des grèves quasi-générales.
L'administration militaire et civile israélienne réagit par des arrestations administratives de
très jeunes gens de plusieurs mois, avec tortures attestées. Un couvre-feu est établit, les
maisons suspectées d'héberger des terroristes sont dynamitées ou murées... La fermeture
d'écoles ou de centres universitaires est imposée, et les ripostes armées sont meurtrières. Les
Arabes d'Israël se solidarisent avec leurs voisins palestiniens. A la fin de l'été 1988, une
tendance d'inspiration islamiste fondamentaliste fait son apparition à Gaza sous le nom de 12 En 1987, on dénombrait déjà 60.000 colons en Cisjordanie, 2500 dans la Bande de Gaza, et 8000 au Golan.
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Hamas14. Cette apparition aura, entre autres conséquences, la renonciation de la Jordanie à sa
souveraineté sur la Cisjordanie, revendication pourtant permanente depuis le début des
hostilités en 1948.
Le 15 novembre 1988, le Conseil national palestinien se réunit à Alger et proclame un Etat
indépendant en Palestine. Pour le Conseil, cela induit l'acceptation d'Israël en tant qu'Etat du
Proche-Orient, la condamnation du terrorisme, et la volonté de participer à des négociations
de paix dans le cadre d'une conférence internationale15. En décembre 1988, cet Etat
palestinien est également reconnu par une soixantaine d'Etats, ceux de la Ligue arabe
principalement.
Le 30 octobre 1991, une conférence de paix se tient à Madrid. Elle décide de la tenue de
réunions futures entre Israéliens, Jordaniens, Syriens et Libanais. C'est l'amorce d'un
processus de paix durable. En janvier 1993, Israël abolit sa loi interdisant aux israéliens tout
contact avec l'O.L.P. Des négociations secrètes se tiennent près d'Oslo dès le 20 janvier 1993.
Les 9 et 10 septembre 1993, ces négociations aboutissent à une reconnaissance mutuelle entre
Israël et l'O.L.P. S'en suivra la signature d'une déclaration de principe le 13 septembre 1993 à
Washington. Cette reconnaissance marque le début d'un règlement d'un conflit vieux de
plusieurs siècles. Cela signifie également la volonté d'Israël de cesser l'occupation de la
Cisjordanie et de Gaza, et de ne plus contrôler le destin d'un autre peuple. Le 29 août 1994, le
transfert des pouvoirs civils à l'Autorité autonome dans l'ensemble des territoires palestiniens
est effectué. Le 4 novembre 1995, un des instigateurs de la paix, Ytzhak Rabin, est assassiné
par un extrémiste juif israélien. Le 20 janvier 1996, les premières élections palestiniennes se
déroulent sous le contrôle d'observateurs internationaux. Arafat est plébiscité Président du
Conseil d'autonomie avec 89% des voix. Les 88 membres de ce Conseil sont
démocratiquement élus.
En mai 1996, Benjamin Netanyahu est élu Premier ministre en Israël. De nombreuses
personnalités et spécialistes de la région prédisent un échec futur du processus de paix. A
cette époque, 151.000 colons vivent dans les implantations juives de Cisjordanie et de Gaza.
1999 est une année événement. En mai 1999, Ehoud Barak est à son tour élu Premier ministre
de l’Etat d’Israël. C’est un travailliste, ami d’Ytzhak Rabin. Mais c’est aussi un militaire pour
qui la sécurité d’Israël passe avant tout. En mai également, Yasser Arafat devait déclarer 13 Enderlin (Charles), op.cit. pp.460 à 467 14 Sigle de Mouvement de la résistance islamique. Née en 1987 au début de l’Intifada, elle n’est pas membre de l’OLP et a rejeté les accords de Washington de 1993.
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l’Etat de Palestine. Mais il a préféré différer cette déclaration pour laisser se dérouler les
élections israéliennes dans la sérénité.
Cette paix s'est fait dans le sang des deux camps, mais grâce également aux interventions
extérieures au conflit. Ainsi des américains par exemple, qui ont encadré le processus de paix
de Washington, et dont on peut même dire que cette région est leur « domaine réservé ».
Mais l'Europe n'est pas en reste, même si son rôle se situe davantage sur un plan d'aide
technologique et financier que sur un plan politique et diplomatique. En effet, l'Europe a
toujours été écartée des négociations de paix entre Israël et l'OLP. En 1996, lors du sommet
de Washington, l'Europe n'a pu avoir une place dans la tentative de relance du dialogue
israélo-palestinien, malgré tous ces efforts. L'Europe avait demandé un co-parrainage avec les
Etats-Unis dans le processus de paix. Ce à quoi les Etats-Unis ont répondu par l'intermédiaire
de leur porte-parole du département d'Etat Nicholas Burns : « Les Israéliens et les
Palestiniens nous ont demandé d'être leur intermédiaire. La décision leur appartient et nous
la respecterons : les Etats-Unis resteront donc le seul pays (tiers) à participer aux
négociations en cours ». Pourtant, la proposition de co-parrainage européen était soutenue par
les pays arabes et surtout par l'Autorité palestinienne de Yasser Arafat.
Le président de la République Jacques Chirac, lors d'un voyage au Proche-Orient en octobre
1996 a précisé que la priorité politique de l'Union européenne était la construction de la paix
dans cette région, que cette paix passait par une aide financière et technologique de l'Union
européenne, mais que cette dernière ne saurait être uniquement un bailleur de fonds. En effet,
l'Union européenne est le premier donneur d'aide à l'économie palestinienne, et cela dans une
perspective constante depuis la déclaration de Venise16 de 1980 de soutenir le peuple
palestinien. Elle doit apporter également sa contribution politique au processus de paix. Le
président de la République n'a d'ailleurs cesser de rappeler le rôle déterminant de l'Union
européenne dans la préparation et la supervision des élections législatives palestiniennes de
janvier 199617.
Depuis 1973 et la Déclaration de Bruxelles18, l'Europe communautaire a analysé le problème
sous l'angle des résolutions 242 et 338 des Nations-Unies, notamment à propos du caractère 15 Cf Réunion entre les Palestiniens et les juifs américains à Stockholm en novembre 1988. 16 Bull. CE. 6-1980. Elle pose les fondements essentiels de la position européenne sur la question palestinienne et définit une série de principes tels que la reconnaissance des droits légitimes du peuple palestinien (point 4), son droit à l’autodétermination (point 6), l’association de l’OLP à toute négociation (point 7), l’illégalité des colonies de peuplement et des modifications démographiques et immobilières (point 9). 17 Discours de Jacques Chirac, Université du Caire, 08/04/1996 18 Bull. CE. 10-1973, point 2.5.0.2., p.115
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inacceptable de l'acquisition des territoires par la force et la demande d'un retrait total d'Israël
des territoires occupes depuis 1967.
Mais cette politique d'aide au peuple palestinien a posé plusieurs difficultés, comme celle de
l'harmonisation des Etats membres de l'Europe communautaire sur la question. En effet, la
France a toujours eu une conception plutôt pro-arabe du conflit, alors que la Grande-Bretagne
ne voulait pas se désolidariser des américains, et que l'Allemagne s'est toujours gardée de se
prononcer en faveur de l'une ou l'autre partie dans un souci diplomatique du à la
responsabilité de l'Allemagne dans l'Holocauste (il ne faut pas oublier que l'Etat hébreu s'est
aussi construit, en partie, par rapport aux génocides et pogroms dont la communauté juive a
été victime depuis des siècles). Les divergences d'appréciation du conflit se vérifient par le
montant des subventions des Etats membres de l'Europe à la Cisjordanie et à Gaza. Par
exemple, pour 1994, le montant de ces subventions en millions de dollars était de 46,1 au
Danemark, 40,60 en Allemagne, 21,2 aux Pays-Bas, 21,1 pour la France, 19,0 pour la Suède,
17,3 en Italie, 16,19 pour la Grèce, 13,9 en Espagne, 8,800 au Portugal, 4,6 en Belgique, 3,19
pour l'Autriche, et 0,3 en Irlande. Comment construire une politique commune avec des
visions si différentes du conflit israélo-arabe ? La difficulté qui se pose à l'Europe est donc
d'obtenir le consensus des Etats membres dans le cadre de la coopération.
Il faut ajouter une autre difficulté. En effet, l'article 238 du Traité de l'Union européenne
dispose que « La Communauté peut conclure avec un ou plusieurs Etats ou organisations
internationales des accords créant une association caractérisée par des droits et obligations
réciproques, des actions en commun et des procédures particulières ». Comment alors
pouvoir contracter avec un Etat qui n'en est pas un de jure, même s'il l'est de facto ? L'Europe
communautaire a toujours refusé de reconnaître un Etat palestinien, bien qu'elle l'ait toujours
soutenu implicitement et indirectement. C'est tout le sens de la visite de Jacques Chirac en
Palestine en 1996. Elle s'est déroulée avec un protocole de visite d'un chef d'Etat à un autre
chef d'Etat. Yasser Arafat est d'ailleurs traité comme un chef d'Etat. Pour remédier au
problème de l'inexistence de l'Etat palestinien, on instaurera un cadre de Partenariat euro-
méditerranéen et de dialogue euro-arabe avec la Ligue arabe dont est membre l'Autorité
palestinienne.
De plus, les domaines relevant de la compétence communautaire sont du ressort de la
Commission, laquelle est habilitée à mener les discussions après avoir reçu l'autorisation du
Introduction
Delphine FENASSE, L’Union européenne et l’Autorité palestinienne, Mémoire DEA 1998-1999 10
Conseil. Il se pose donc également le problème de la coordination entre les organes relevant
de l'instance communautaire et ceux relevant de la coopération politique.
On constate donc un « atypisme » des relations euro-palestiniennes. Le premier caractère
atypique se situe dans le fait que l'Europe puisse dialoguer ou coopérer avec un partenaire qui
n'est pas un Etat et qu'elle se refuse à reconnaître comme tel. Malgré cette difficulté, elle à
réussi à nouer des liens avec les Territoires palestiniens de façon à ne pas perdre totalement
pied dans cette région du monde. Le second caractère atypique est qu'une entité juridique
composée d’Etats membres ayant des positions aussi divergentes sur le conflit au Moyen-
Orient, ait tout de même réussi à être un partenaire économique incontournable dans la région.
Mais ce qui rend cette relation particulière, c'est qu'elle a malgré tout aboutit à des résultats
concrets, tels que les Conférence de Barcelone en 1995, celle de Malte de 1998 et celle de
Stuttgart d'avril 1999 à laquelle a participer pleinement l'Autorité palestinienne. Ces
conférences ont été tenues dans le cadre du Partenariat euro-méditerranéen et ont aboutît à des
accords tel que celui cité au début de l'introduction.
Le plan sera donc organisé comme suit. Dans une première partie nous étudierons le cadre des
relations euro-palestinienne, en examinant dans un premier chapitre la difficile harmonisation
des Etats membres sur la question palestinienne depuis la Coopération Politique européenne
jusqu'à la Politique Méditerranéenne rénovée, puis, dans un second chapitre, nous aborderons
le Partenariat euro-méditerranéen. Dans une seconde partie, nous étudierons le contenu des
relations euro-palestiniennes, en particulier les réalisations concrètes de ces relations euro-
palestiniennes, et les accords commerciaux passés entre les deux parties.
Partie 1-. Le cadre des relations euro-palestiniennes
Chapitre 1-. Une prise de position commune difficile : de la Coopération
Politique Européenne (C.P.E.) à la Politique Méditerranéenne Rénovée
(P.M.R.).
Pour la majorité de la population européenne, l'idée d'établir une relation privilégiée avec les
pays arabes est née avec le conflit israélo-arabe d'octobre 1973. Cela est dû aux conséquences
de ce conflit : multiplication par quatre du prix du pétrole, réduction des livraisons, embargo à
l'égard de certains pays...
Mais cette idée n'est pas complètement vraie car l'intérêt de la Communauté pour cette région
du monde est antérieur à ces événements, et des accords étaient déjà en vigueur avec Israël ou
avec ses voisins arabes.
I-. L'adoption des premières déclarations des Etats membres sur la question
Palestinienne
Dans les années 1970, les positions des Etats membres sur le conflit israélo-arabe diffèrent
selon les Etats: la politique française favorable aux thèses arabes est appuyée par les
gouvernements britanniques et italiens mais jugée inacceptable par les Pays-Bas et
l'Allemagne fédérale.
Des efforts seront faits en 1971 dans le cadre de la Coopération politique européenne. pour
harmoniser les points de vue.
A-. La Coopération politique européenne (CPE)
1 Chapitre 1-. Une prise de position commune difficile
Delphine FENASSE, L’Union européenne et l’Autorité palestinienne, Mémoire DEA 1998-1999 12
Cette Coopération Politique Européenne est décidée lors de la Conférence des chefs d'Etat ou
de gouvernement à La Haye en décembre 1969 et mise au point dans le cadre du Rapport
Davignon19 adopté le 27 octobre 1970. Il s'agit de traiter les questions internationales au
niveau intergouvernemental. Elle est distincte de l'activité communautaire et s'ajoute à celle-
ci. La première réunion ministérielle visant à mettre en œuvre la CPE s'est tenue le 19
novembre 1970 à Munich20. Elle devait amorcer l'harmonisation des positions des Etats
membres sur le conflit israélo-arabe. C'est dans ce cadre que vont être prises les trois
premières positions communes européennes sur la question du Moyen-Orient que sont le
Document Schuman, la Déclaration de Bruxelles et la Déclaration de Londres.
1-. Le « Document Schuman » de 1971
Une première prise de position informelle, connue sous le nom de « Document Schuman » est
adopté le 17 mai 197121. Ce document trace les grandes lignes de la position européenne sur
le conflit israélo-arabe. Il est fait mention de la résolution 242 du Conseil de sécurité des
Nations-Unies qui déclare l'acquisition de territoires par la force inacceptable et demande le
retrait total d'Israël des territoires occupés depuis 1967.
Ne pouvant influencer, faute d'unanimité, un règlement politique, l’Europe s'emploie, à partir
de 1972, à définir une politique méditerranéenne, basée sur « une approche globale et
équilibrée ». Cette politique est décidée lors de la Conférence des chefs d’Etat ou de
gouvernement à Paris les 19 et 21 octobre 197222. Elle est conçue comme substitut
économique à une impossible démarche politique. L'idée est de contribuer à la paix et à la
stabilité de la région moyen-orientale en facilitant son développement économique et en
proposant à tous les Etats riverains une sorte de relation privilégiée. Quatre premiers éléments
composeront l'approche globale : remplacer la pluralité d’accords conclus avec des Etats
méditerranéens, la nouvelle politique ne doit pas se faire au détriment des autres pays avec
lesquels la Communauté a déjà des accords préférentiels, cette politique ne doit pas entraver
la politique globale mise en œuvre pour la coopération au développement à l'échelle
mondiale, et cette approche devra être équilibrée.
19 Ou rapport de Luxembourg, Bull.CE., 11-1970 p.9 20 Première conférence des ministres des affaires étrangères sur l’union politique, Bull.CE., 11-1970, p.9 21 Seconde conférence des ministres des affaires étrangères sur la coopération politique, Bull.CE., 6-1971, .30 22 Point 12 du dispositif de la déclaration précitée.
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Delphine FENASSE, L’Union européenne et l’Autorité palestinienne, Mémoire DEA 1998-1999 13
Mais cette « approche globale et équilibrée » est jugée trop modeste par certains anciens
associés, particulièrement le Maghreb, et trop régionaliste par plusieurs Etats membres,
surtout la Grande-Bretagne qui subordonne son accord à l'adoption d'une politique d'aide
globale au développement.
2-. La « Déclaration de Bruxelles » de 1973
Le 17 octobre 1973, pour répondre à Israël et aux Etats-Unis, les producteurs arabes de
pétrole décident, outre l'augmentation des prix affichés du baril, une réduction nette de 5% de
la production par mois. De plus, la guerre de Kippour éclate au même moment. La France et
surtout le président Georges Pompidou réclame l'adoption d’une position européenne
commune. Il est soutenu dans sa démarche par la Grande-Bretagne et l'Italie.
Le 6 novembre 1973, les Neuf adoptent la « Déclaration de Bruxelles ». Elle constitue l'une
des premières tentatives d’harmonisation des positions des Etats membres sur le conflit au
Moyen-Orient. Les principales positions retenues, en dehors de celles mentionnées à propos
du document Schuman, sont :
- "la reconnaissance que, dans l'établissement d'une paix juste et durable, il devra être tenu
compte des droits légitimes des palestiniens
- le respect des résolutions 338 et 242 du Conseil de sécurité des Nations- Unies
- le respect de la souveraineté, de l'intégrité territoriale et de l'indépendance de tous les Etats
de la région et leur droit de vivre en paix dans des frontières sures et reconnues ».
Il s'agit là de la première manifestation solidaire des Neuf sur un problème de politique
internationale qui les divise. De plus, l'adoption de cette déclaration est généralement
considérée comme un début de penchant de la position communautaire en faveur des thèses
arabes. En effet, pour la première fois, l’Europe mentionne les « droits légitimes des
palestiniens ».
D'ailleurs, réunis à Alger du 26 au 29 novembre 1973, les chefs d’Etat arabes analysent cette
position comme l'amorce d’une évolution européenne en faveur de leurs thèses. Dans la
déclaration « à l'intention de l’Europe occidentale » qu'ils publient le 28, ils accueillent la
position des Neuf comme « la première manifestation d’une meilleure compréhension de la
cause arabe » mais souhaitent en outre que la CEE « œuvre par tous les moyens en vue de
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Delphine FENASSE, L’Union européenne et l’Autorité palestinienne, Mémoire DEA 1998-1999 14
l'évacuation par Israël de tous les territoires arabes occupés, en premier lieu Jérusalem, et du
rétablissement du peuple palestinien dans ses droits nationaux ».
3-. La « Déclaration de Londres »
Cette déclaration, qui date de juin 197723 est une étape importante dans l'évolution de la
position européenne sur la question palestinienne. Non seulement la déclaration reprend le
communiqué de la Commission générale de Tunis du 12 février 1977 et les déclarations
antérieures où les Palestiniens sont considérés comme un « peuple avec une identité
nationale », mais il ajoute que ce peuple a « besoin d'une patrie » et que cette patrie est une
condition indispensable à « une paix juste et durable ». La déclaration appelle de ses vœux la
tenue de négociations avec la participation de « toutes les parties au conflit, y compris les
représentants du peuple palestinien qui doivent participer aux négociations d'une manière
appropriée » et « en consultation avec toutes les parties intéressées ». Il n'est cependant pas
question d’un « Etat palestinien », mais le fait de mentionner la nécessité d'une « patrie pour
le peuple palestinien » constitue une étape importante.
Au-delà de cette déclaration, des décisions limitées seront prises sur le plan économique: sept
études et deux colloques seront lancés. De plus les Neuf ont donné un accord jugé très mitigé
par la partie Arabe sur la conclusion d’un accord commercial cadre régional non préférentiel
entre la CEE, et les pays de la Ligue arabe. En effet, cet accord se situe bien en-deçà de la
demande de la partie arabe qui voit là une preuve supplémentaire du manque de volonté de
l’Europe de s'engager dans un dialogue que ses partenaires voudraient « global ».
B-. Le Dialogue Euro-Arabe (DEA)
On prête la paternité du terme « dialogue euro-arabe » à Michel Jobert et au président
Georges Pompidou. La demande de dialogue est, du côté arabe, à l'ordre du jour bien avant la
guerre d'octobre 1973, même si celle-ci en sera le catalyseur. Mais le vrai point de départ du
DEA est le sommet européen de Copenhague. Et malgré les obstacles que ce dialogue va
23 Bull. CE., 6-1977, point 2.2.3., p.67.
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rencontrer, il réussira tout de même à mettre en place des structures de dialogue et aura des
retombées concrètes pour les Palestiniens.
1-. Le sommet européen de Copenhague
Ce sommet des 14 et 15 décembre 1973 va conduire à la mise en place d’une procédure
d’urgence en cas de crise. En effet les chefs d’Etat ou de gouvernement déclarent qu’ils
« attachent la plus grande importance à ce que les institutions communautaires fonctionnent
pleinement et que les décisions nécessaires y soient prises en temps utiles », qu’« ils sont
convenus également de se réunir à tout moment quand la situation internationale l'exige », et
qu' « ils sont convenus que les ministres des affaires étrangères des Etats membres devraient,
lors de leur prochaine réunion, arrêter les moyens par lesquels une attitude commune
pourrait être développée rapidement en temps de crise ». La question du Moyen-Orient va
ainsi favoriser l'harmonisation progressive des politiques étrangères européennes et permettre
la création de mécanismes de concertation suffisamment souples. En effet, il faut noter, tout
au long du communiqué final la volonté des Neuf de « parler d’une même voix dans les
grandes affaires du monde », ou de réaffirmer « la position commune de leurs gouvernements
sur la question du Moyen-Orient, telle qu'elle est contenue dans la déclaration du 6
novembre ». Enfin, la déclaration rappelle sa conviction que le problème du Proche-Orient ne
pourra se faire que par le respect de la résolution 242 des Nations-Unies et par la prise en
considération des droits légitimes des Palestiniens.
C'est également à Copenhague que le D.E.A. est lancé.
En effet, lors de ce sommet, quatre ministres arabes, délégués par le Sommet arabe d'Alger,
sont reçus par le président en exercice de la Communauté. Il est décidé de développer, entre
les deux zones, une coopération financière, technologique, économique et culturelle à long
terme. Les chefs d’Etat des Neuf affirment « l'importance qu’ils attachaient à l'ouverture
avec les pays arabes de négociations sur un régime global comprenant une coopération
étendue en vue du développement économique et industriel de ces pays, d'investissements
industriels et de l'approvisionnement stable des Etats membres de la Communauté en énergie,
à des prix raisonnables ».
Le 11 février 1974, une décision du Conseil des Communautés Européennes accepte le
principe du DEA et habilite son président, de concert avec la Commission, en ce qui concerne
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Delphine FENASSE, L’Union européenne et l’Autorité palestinienne, Mémoire DEA 1998-1999 16
les matières relevant de la compétence des Communautés, à engager des pourparlers avec la
partie arabe.
Mais déjà des difficultés apparaissent.
2-. Les obstacles au D.E.A.
Malheureusement, ce dialogue part sur de mauvaises bases dans la mesure où les deux parties
sont en désaccord sur le but du DEA.
Du côté européen, la préoccupation première porte sur les fluctuations du prix du baril de
pétrole et sur l'approvisionnement régulier de la Communauté en énergie. La partie arabe au
DEA insiste, elle, sur le volet politique. Ce dernier répond à deux objectifs : aider le peuple
palestinien à recouvrer ses droits d’une part, et préserver la stabilité dans la région d'autre
part. Mais l’Europe, tout en ne reniant pas le caractère politique naturel du DEA, cherche à le
limiter à ses aspects économiques et commerciaux. D'ailleurs, les Danois et les Néerlandais
posaient comme préalable à leur accord sur le principe d'un DEA, la levée de l'embargo
pétrolier par les pays producteurs. Les Britanniques pour leur part, bloquaient le dossier dans
l'espoir de resserrer le dialogue avec les Etats-Unis qui avaient largement désapprouvé
l'initiative des Neuf. Encore, les Arabes, voulaient que la CEE prenne position sur le conflit
israélo-arabe en général et sur la question palestinienne en particulier. Cela présupposait la
reconnaissance de l'OLP comme seul représentant légitime du peuple palestinien, celle du
droit au retour des réfugiés palestiniens, et le droit des palestiniens à l'autodétermination dans
un Etat. Les Etats membres sont embarrasser devant cette exigence. Le compromis de Dublin
intervient alors. Il stipule qu’on ne participe plus au dialogue en tant qu’Etats mais en tant que
groupe, chacun étant libre de choisir ses délégués. C'est une formule boiteuse mais qui permet
tout de même de commencer le dialogue.
Mais on ne peut pas affirmer de façon catégorique que les Arabes veulent parler de la
Palestine et les Européens du pétrole. En effet, comme le démontre le précédent paragraphe,
les Européens n'ont pas attendu 1973 pour s'intéresser à la question palestinienne et à la
stabilité du Proche-Orient. Jusqu’en 1975, l’Europe a donc une position ambiguë.
En 1975, les Européens reconnaissent que la question palestinienne est centrale pour la partie
arabe au dialogue. Ils reconnaissent aussi, petit à petit les droits du peuple palestinien. En
quelques années, on passe de l'évocation de la question des « réfugiés », aux « droits légitimes
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des Palestiniens »24,puis au « droit légitime du peuple palestinien a donner une expression
effective à son identité nationale », pouvant impliquer « la nécessité d’une patrie pour le
peuple palestinien »25 « à la reconnaissance du droit du peuple palestinien à
l'autodétermination » qui doit être exercée « selon une formule appropriée à déterminer dans
le cadre d’un règlement pacifique global »26. Bien sur, la Communauté ne reconnaît pas
l'OLP en tant que seul représentant légitime du peuple palestinien, mais demande que
« L'OLP soit associée »27 aux négociation et « qu'elle "doit participer aux négociations »28.
En outre, la CEE évite d’évoquer un Etat palestinien.
Entre 1981 et 1988, de nombreux événements constituent un frein au Dialogue tels que
l'assassinat du président Sadate le 06 octobre 1981, le raidissement des relations est-ouest
avec l'arrivée de R. Reagan à la présidence des Etats-Unis, le début de la décennie du
Président français François Mitterrand qui est connu pour ses amitiés avec Israël, l'invasion
israélienne. du Liban en juin 1982, ou encore le déclenchement de l'Intifada en décembre
1987.
Entre 1989 et 1992, le DEA reprend de la vigueur. Mais la crise du Golfe viendra stopper le
processus. Le 2 août 1990, l'armée irakienne envahit le Koweït. Les Douze condamnent cette
violation du droit international le jour même et exigent le retrait immédiat des troupes
irakiennes de ce pays29. Les dirigeants palestiniens et l'opinion publique palestinienne, vont,
quant à eux, soutenir Saddam Hussein. Le coût de cet engagement en faveur de l'Irak sera très
élevé : perte du soutien financier des pays du Golfe, expulsion des travailleurs palestiniens du
Koweït, et situation de faiblesse dans les négociations de paix de Madrid de 1991 orchestrées
par les Etats-Unis. La Déclaration de Luxembourg est très sévère : « Compte tenu des
nombreux messages de soutien de M. Arafat, président de l'OLP, à l'agresseur Saddam
Hussein, les ministres des affaires étrangères des Douze sont convenus, lors de leur réunion
du 4 février 1991 à Bruxelles, de ne pas prévoir, dans les présentes circonstances, un contact
à haut niveau entre la présidence et l'OLP. Cette décision ne met aucunement en question ni
le rôle de l'OLP ni les droits du peuple palestinien ».
24 Déclaration de Bruxelles de 1973. 25 Déclaration de Londres de juin 1977. 26 Déclaration de Venise de 1980. 27 Idem. 28 Déclaration de Madrid de 1991 29 Déclaration commune du 04/08/1990, Bull. CE. 7/8-1990, points 1.5.11 et 1.5.14
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Mais si la mention d’un Etat palestinien ne semble plus faire problème, aucun des pays de la
CEE n’a reconnu l’Etat palestinien proclamé par Yasser Arafat le 15 novembre
1988.Pourtant, la récente visite de Jacques Chirac en Cisjordanie s'est effectuée avec le même
protocole que pour une visite officielle de chef d’Etat à chef d'Etat, ce qui montre une
reconnaissance implicite de cet Etat.
3-. Le cadre institutionnel du DEA
Lors d’une réunion d'experts au Caire du 10 au 14 juin 1975, les principes, les objectifs, et les
domaines du DEA sont mis au point. Les deux parties conviennent que le dialogue doit porter
sur les domaines de coopération que sont l'industrialisation, l'infrastructure de base,
l'agriculture et le développement rural, la coopération financière, le commerce, la coopération
scientifique et technique ainsi que les questions culturelles et sociales et les problèmes de
main d’œuvre.
L'effacement des Etats pour ne plus laisser apparaître que des parties, résulte du problème de
la représentation palestinienne. En effet, les Européens refusent de reconnaître l'OLP, devenue
membre de la Ligue arabe en 1974. Le compromis de Dublin va résoudre le problème en ne
faisant siéger qu’une seule délégation arabe et une seule délégation européenne, avec le choix
de ses membres.
Il n'y a pas de structure permanente propre, les réunions n’ont pas de siège fixe et se tiennent
alternativement dans une capitale européenne ou une capitale arabe.
a-. La Commission générale
La Commission générale est l'organe suprême du dialogue. Elle est composée de délégués des
deux parties arabe et européenne, y compris des officiels ayant rang d'ambassadeurs ou un
rang équivalent et les co-présidents de chaque comité de travail.
Elle assure les volets économiques, techniques, sociaux et culturels. Sa fonction est de décider
de la composition des comités, de définir leurs tâches spécifiques et les règles de procédure.
Elle doit orienter et contrôler la tâche des comités de travail et leur allouer les fonds
nécessaires à l'exécution de celle-ci.
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Enfin, elle approuve les projets qui lui sont présenté. Elle fera rapport à la Troïka ministérielle
et lui soumettra des recommandations.
La présidence de la Commission est assurée conjointement par les chefs des délégations
arabes et européennes. Les décisions sont prises par consensus.
b-. Les comités de travail
Ces comités sont au nombre de trois : économique, technique, social et culturel. Le premier,
économique, a la tâche des domaines de l'agriculture, de la sécurité alimentaire, de l'industrie
et la promotion commerciale. Le deuxième, technique, a la tâche des domaines du transfert de
technologie, de l'environnement, du transport et des communications. Enfin le troisième,
social et culturel, a la tâche des domaines de la formation technique et professionnelle, la lutte
contre la drogue et les questions sociales et culturelles.
Chaque comité de travail comprend des experts des deux parties. Des personnes qualifiées,
quelles proviennent des secteurs publics ou privés concernés, peuvent être consultées. Les
parties désignent pour chaque comité un co-président, un co-vice président, un co-rapporteur
et un co-rapporteur ad hoc pour des projets spécifiques, quand nécessaires. La durée du
mandat des co-présidents et des co-vice présidents est de trois ans renouvelable une seule fois.
c-. La troïka ministérielle
Le volet politique du dialogue est assuré par une réunion ministérielle institutionnalisée en
formation de troïka. La réunion se tient une fois par an, alternativement dans une capitale
européenne ou arabe. La troïka étudiera les questions politiques d'intérêt commun et donnera
l'impulsion nécessaire aux volets économique, technique, social et culturel. Elle peut
organiser de sa propre initiative des conférences ministérielles plénières.
II-. De la Déclaration de Venise à la Politique méditerranéenne rénovée
L’année 1980 marque un tournant dans l'évolution de la position communautaire concernant
le conflit israélo-arabe. Cela commence en mars 1980 avec le voyage de Valery Giscard
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d’Estaing dans les pays du Golfe. Dans ses multiples déclarations, le président français aborde
le droit des Palestiniens à l'autodétermination et insiste tout particulièrement sur un processus
de négociations auquel devraient participer toutes les parties concernées notamment le peuple
palestinien, ce qui implique la participation de l’OLP.
A la suite des accords de paix israélo-égyptiens, la CEE va reprendre l'initiative en adoptant,
le 13 juin 1980, la Déclaration de Venise30.
A-. La Déclaration de Venise
Elle constitue l’élément essentiel de base de la politique moyen-orientale de la Communauté
européenne ainsi que le point de départ d’une réelle volonté commune de prendre position
dans ce conflit.
1-. Le contexte d’adoption
La Déclaration de Venise est considérée comme le point culminant dans l'approche
communautaire du conflit israélo-arabe. Elle contient, en effet, les fondements essentiels de la
position européenne sur la question palestinienne et définit une série de principes dont les
principaux sont :
- « Le droit à l'existence et à la sécurité de tous les Etats de la région, y compris Israël, et la
justice pour tous les peuples, ce qui implique la reconnaissance des droits légitimes du peuple
palestinien » (point 4)
- « Le problème palestinien qui n'est pas un simple problème de réfugiés, doit enfin trouver
une juste solution. Le peuple palestinien, qui a conscience d'exister en tant que tel, doit être
mis en mesure, par un processus approprié défini dans le cadre du règlement global de paix,
d'exercer pleinement son droit à l'autodétermination » (point 6)
- « (...) Ces principes (…) s'imposent à toutes les parties concernées, donc au peuple
palestinien, et à l’OLP qui devra être associée à la négociation » (point 7)
30 Bull. CE. 6/1980. Point 1.1.6.
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Delphine FENASSE, L’Union européenne et l’Autorité palestinienne, Mémoire DEA 1998-1999 21
- « ( … ) Les Neuf soulignent qu'ils n'acceptent aucune initiative unilatérale qui ait pour but
de changer le statut de Jérusalem et que tout accord sur le statut de la ville devrait garantir le
droit de libre accès pour tous aux lieux saints » (point 8)
- « (...) Les Neuf considèrent que ces colonies de peuplement, ainsi que les modifications
démographiques et immobilières dans les territoires arabes occupés, sont illégales au regard
du droit international » (point 9).
La nouveauté dans la Déclaration de Venise réside dans une plus grande précision des termes
employés. On n’use plus de termes qui peuvent se prêter à des interprétations diverses.
Dans les faits, cette déclaration se traduit par une participation financière accrue de la CE au
développement des activités et des infrastructures économiques et sociales en Cisjordanie et
dans la Bande de Gaza. Petit à petit, des secteurs prioritaires sont déterminés. Il s'agit
notamment de l'hygiène et la santé, de l'éducation. L'accent est également mis sur toutes les
activités pouvant de donner une plus grande autonomie alimentaire aux Palestiniens ou
favorisant la création d’emplois locaux.
2-. Les conséquences
La Déclaration de Venise donne une nouvelle impulsion à la volonté déclarée des Etats
membres de nouer des liens directs avec les représentants de la population palestinienne.
Ainsi, la position communautaire se précise. Rien d'étonnant alors que la Déclaration de
Venise ai suscité une vive réaction de la part des dirigeants israéliens. Lors d’une rencontre
avec les chefs de la diplomatie européenne, le 7 octobre 1980, le premier ministre israélien
Yitzhak Shamir ne fait pas preuve de diplomatie : « Il existe un certain lien entre la position
européenne et le terrorisme antisémite »31. Paradoxalement, l'OLP, qui est pourtant nommée
dans le texte, est déçue. Elle s'attendait à une reconnaissance pure et simple. Les Américains
critiquent vivement la déclaration de Venise. Ils considèrent que les Européens outrepassent
leurs engagements et usent trop souvent des déclarations unilatérales sans consultation
préalable.
Malgré ces critiques, à partir de 1981, la Communauté européenne tente de développer une
coopération plus ambitieuse. Les aides transitent par le biais d’institutions jordaniennes
31 Bichara (Khader) « Israël et l’avenir du dialogue euro-arabe », Revue française d’études politiques méditerranéennes, 11 novembre 1975, pp.27-35
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implantées en Cisjordanie avant 196732. Ce n'est qu'à la fin de l'année 1986 que la
Communauté met en place une aide directe en faveur de la population palestinienne33. Cette
aide financière, qui totalise 139 millions d'écus pour la période 1987-1993, vise à encourager
l'emploi dans l'agriculture, la santé, les petites industries, l'éducation, la formation technique
et professionnelle. Elle aide aussi au renforcement des institutions palestiniennes locales telles
que les municipalités ou les universités. Il s'agit surtout de compléter l'aide. traditionnelle par
des projets à long terme. Deux lignes budgétaires sont adoptées afin de mettre en œuvre cette
aide.
Partout en Europe, l'Intifada suscite une vive émotion, tant au niveau des Etats qu'au niveau
des opinions publiques. Yasser Arafat est invité dans les capitales européennes, notamment
Rome du 3 au 4 novembre 1988, mais l'OLP n'est toujours pas reconnu comme seul
représentant du peuple palestinien.
Le 15 novembre 1988, Yasser Arafat proclame devant le Conseil national palestinien réuni à
Alger « l'établissement de l’Etat palestinien sur notre terre palestinienne avec, pour capitale,
la Jérusalem sainte ». Les Douze réagissent à cette proclamation, dans le cadre de la CPE, par
une déclaration publiée à Bruxelles le 21 novembre 1988 : « Les Douze attachent une
importance particulière aux décisions adoptées par le Conseil national palestinien à Alger
qui reflètent la volonté du peuple palestinien à affirmer son identité nationale et qui comporte
des pas positifs vers le règlement pacifique du conflit israélo-arabe ».
En 1989, les Douze saisissent l'occasion de la tenue de la Conférence de Madrid le 27 juin
pour faire une longue déclaration sous la forme d’un « appel pressant aux autorités
israéliennes pour quelles mettent fin aux mesures répressives, qu’elles appliquent les
résolutions 605, 607, et 608 du Conseil de Sécurité, qu'elles respectent les dispositions de la
Convention de Genève », et appellent à la tenue d’élections dans les territoires occupés. Pour
la première fois, les Douze estiment que l'OLP doit non seulement être associée au processus
de paix mais y « participer ». 32 Dupla (thomas) « the role of the European Community », Economic aspects of political sttlement in the Middle-East, 18-21 avril 1990, VU University Press, Amsterdam, 191, pp.181-184 33 Cette nouvelle approche a été définie par le Conseil européen autour de quatre grands principes concernant l’attitude à adopter vis à vis des Territoires palestiniens occupés : - l’aide de la Communauté concerne la population palestinienne de Cisjordanie, y compris Jérusalem-Est, et la bande de Gaza - l’aide est mise en œuvre sans que la Communauté ne recherche l’approbation des autorités israéliennes - l’aide de la Communauté ne doit pas couvrir les besoins en infrastructure relevant de la responsabilité de la puissance occupante
1 Chapitre 1-. Une prise de position commune difficile
Delphine FENASSE, L’Union européenne et l’Autorité palestinienne, Mémoire DEA 1998-1999 23
B-. La Politique méditerranéenne rénovée (PMR)
La chute du Mur de Berlin et les évolutions politiques de 1989 dans la région Proche-
Orientale viennent renforcer la nécessité de reconsidérer les relations entre l'Union
européenne et les pays tiers méditerranéens, et donc avec les Palestiniens. Les protocoles
financiers bilatéraux ne seront pas abandonnés mais une Politique Méditerranéenne Rénovée
est engagée. En 1990, l'adoption de la PMR a renforcé la coopération avec les pays tiers
méditerranéens. Ce renforcement se fera par l'augmentation des protocoles financiers et en
apportant un soutien au processus de réformes économiques engagé par certains partenaires.
Les concessions à l'égard des exportations agricoles ont aussi été élargies.
1-. Le contenu de la Politique Méditerranéenne Rénovée
La politique originelle de la Communauté comportait l'octroi de concessions commerciales et
une coopération financière classique. La politique dite rénovée entendait y ajouter un soutien
aux réformes économiques et à l'ajustement structurel ainsi qu’un appui à la coopération
régionale et aux formes nouvelles de coopération décentralisée. En ce sens, le projet de
partenariat s'inscrit dans la continuité d'une évolution déjà amorcée.
La PMR est dotée d'une enveloppe budgétaire de 1,3 milliards d’écus d'aide directe sur la
période 1992-1996, et de 3,6 milliards d’écus pour les prêts pour la même période. Elle
comprend plusieurs volets de coopération :
- l'accompagnement au processus d’ajustement économique
- l'encouragement à l'investissement privé et la facilitation de l'accès au marché
communautaire pour les produits en provenance des Pays Tiers Méditerranéens (PTM)
- le renforcement du dialogue économique et politique et notamment la diffusion des droits et
valeurs fondamentales à caractère universel
- le développement de la coopération décentralisée, c'est à dire la coopération entre
collectivités locales et régionales (Med-Urbs), la coopération entre universités (Med-
- les programmes en matière d’infrastructure doivent être considérés au cas par cas seulement s’ils sont proposés par des organisations palestiniennes et au seul bénéfice de la population palestinienne.
1 Chapitre 1-. Une prise de position commune difficile
Delphine FENASSE, L’Union européenne et l’Autorité palestinienne, Mémoire DEA 1998-1999 24
Campus), entre PME et agents locaux de développement (Med-Invest), entre les
professionnels des Médias (Med-Médias).
La PMR apporte plusieurs innovations. Tout d’abord, l'effort financier pour la période 1992-
1996 a enregistré une augmentation de 50% par rapport aux moyens prévus dans les
protocoles financiers précédents. Ensuite, un saut qualitatif important a été effectué avec le
lancement d'une coopération régionale. Encore, au travers de programmes de coopération
décentralisée qui agissent au cœur même de la société civile, la voie à une véritable relation
de partenariat a été ouverte. Enfin, un appui à un ajustement structurel a été introduit pour
certains pays méditerranéens engagés dans un processus d'ouverture et de réforme
économique.
2-. Financement de la Politique Méditerranéenne Rénovée
Cette nouvelle politique, en application à partir de 1992, a permis une nette augmentation des
ressources financières (elles ont été multipliées par trois) et l'ouverture de nouveaux domaines
à la coopération, avec notamment un appui à l'ajustement structurel, doté de 300 millions
d’écus. L'Union européenne peut ainsi accompagner le processus de réformes économiques en
contribuant au financement des secteurs sociaux.
a-. Les subventions indirectes
L'aide indirecte de l’Union européenne aux Palestiniens se manifeste de deux façons : soit par
l'aide aux réfugiés à travers l’UNRWA, Office de secours et de travaux des Nations-Unies
pour les réfugiés de Palestine dans le Proche-Orient, soit par un système de cofinancement
avec les ONG européennes.
En ce qui concerne l'aide à l’UNRWA, la coopération avec l’Union européenne a été fixée par
des conventions formelles. Celles-ci dirigent les contributions directement vers le budget
ordinaire de l’UNRWA pour ses programmes d'éducation, de santé et d’aide alimentaire.
Cette aide s'est élevée à 338,6 millions d'écus entre 1987 et 1994 pour les réfugiés palestiniens
dans la région. La Commission européenne apporte 32 millions d'écus en 1995 au budget de
l’UNRWA pour l'aide alimentaire (12,9 millions en 1994).
1 Chapitre 1-. Une prise de position commune difficile
Delphine FENASSE, L’Union européenne et l’Autorité palestinienne, Mémoire DEA 1998-1999 25
En ce qui concerne le cofinancement avec les ONG européennes, de 1979 à 1992, la somme
totale apportée par la Commission européenne a été de 12,8 millions d'écus, ce qui correspond
à une contribution de 38,6% pour un ensemble de projets chiffré à plus de 33 millions d’écus.
b-. La Banque Européenne d’Investissement (BEI)
La Banque Européenne d’Investissement a pour mandat d’accorder des prêts pour soutenir les
projets d’investissement entrepris dans les Territoires palestiniens et de financer le
développement des PME. L'intervention de la BEI, située a Luxembourg est considérée
comme essentielle aussi bien par les donateurs que par les bénéficiaires. « Le peuple
palestinien a besoin de l'aide de la BEI » a affirmé Yasser Arafat durant une visite d’officiels
de l’Union européenne à Gaza. Après l'approbation par les procédures légales de la BEI du
prêt aux Palestiniens, demande a été faite à la banque d'effectuer un prêt de 250 millions
d'écus entre 1995 et 1998 pour la réhabilitation des infrastructures et pour les PME. La BEI
travaille en étroite coopération avec la Commission européenne, la Banque mondiale et les
autres donateurs, afin de compléter au mieux les subventions de l’UE et les autres aides avec
les crédits qu’elle accorde. Une étude de projet, permettant d’accorder des crédits directs aux
Territoires palestiniens, est en cours et concerne notamment le regroupement de prêts pour la
réhabilitation de petites infrastructures. La BEI a également l'intention d’utiliser les subsides
offerts par le METAP (Mediterranean environment program). Pour accélérer le
développement de l'activité économique, la BEl a été chargée d’étudier l'ouverture d’une
banque de développement ou de toute autre forme d’intermédiaire financier.
Jusqu’à la mise en place de ces institutions, la BEI examine le passage des fonds destinés aux
PME en fournissent des possibilités de crédits en coopération avec les banques arabes, servant
alors d'intermédiaires avec les entreprises palestiniennes.
Avec son expérience dans le financement de projets transfrontaliers, réalisés dans l’Union
européenne et dans les pays tiers méditerranéens, la BEI joue également un rôle dans le
financement de projets régionaux, tels que la transmission d'électricité. Ce type de projets
peut être financé par le dispositif de prêts horizontaux de la banque, s'élevant à 1,8 billions
d'écus, débloqués pour des .projets dans les pays tiers pro méditerranéens.
Les exemples de résultats concrets sont multiples, comme par exemple les tours de Nusseirat
à Gaza pour construire des logements pour les petits et moyens revenus ou l'hôpital Khan
1 Chapitre 1-. Une prise de position commune difficile
Delphine FENASSE, L’Union européenne et l’Autorité palestinienne, Mémoire DEA 1998-1999 26
Younis dans le sud de la bande de Gaza, ou encore la mise en place d’un ramassage et d'une
élimination des ordures ménagères à Rafah au sud de Gaza.
Cette aide financière européenne est la plus importante de tous les pays donateurs. L’Europe
est le premier « bailleur de fonds » du processus de paix au Moyen-Orient, expression issue
de la deuxième Conférence internationale des pays donateurs qui s'est déroulée à Washington
le 30 novembre 1998 (la première conférence des pays donateurs s'est déroulée en octobre
1993 à la suite des accords d’Oslo). A cette occasion, l’Union européenne s'est engagée à
accorder aux Palestiniens une aide de 400 millions d’écus (environ 2,6 milliards de francs) au
cours de cinq prochaines années, le premier programme d’aide (1993-1998) venant à
échéance à la fin de l'année 1998.
Cette nouvelle approche va très vite déboucher sur le partenariat euro-méditerranéen, adopté à
Barcelone en 1995.
1 Chapitre 2-. Le partenariat euro-méditerranéen
Delphine FENASSE, L’Union européenne et l’Autorité palestinienne, Mémoire DEA 1998-1999 27
Chapitre 2-. Le partenariat euro-méditerranéen
C'est en 1992 qu'a commencé à germer l'idée d'un projet plus global avec la proposition
espagnole de libre-échange. Le concept de partenariat est mis en avant, en juin 1992, au
Conseil européen de Lisbonne face à l'inopérance des réformes entreprises dans plusieurs
Etats et au défi sécuritaire découlant des pressions démographiques et migratoires. Ensuite,
l'objectif d'établir un partenariat euro-méditerranéen a été affirmé notamment aux Conseils
européens d'Essen de décembre 1994, de Corfou les 24 et 25 juin 1994 et de Cannes en juin
1995, et finalement agréé par toutes les parties à la conférence de Barcelone en novembre
1995. Le terme « partenariat » est retenu dans la communication de la Commission du
19 octobre 1994. La politique ambitieuse de partenariat repose sur le renforcement de la
démocratie et le respect des droits de l'homme, qui constituent un élément essentiel des
relations euro-méditerranéennes. Ce Partenariat servira de cadre aux relations entre la
Communauté européenne et l’OLP d’abord. Elle servira de lieu de dialogue politique et
économique entre les deux parties.
I-. Un partenariat novateur
Les grandes orientations de ce partenariat ont été définies à Cannes en juin 1995 et
approuvées avec les pays méditerranéens lors de la Conférence de Barcelone en novembre
1995. Cette nouvelle approche, plus globale, de la coopération euro-méditerranéenne,
s'articule autour de trois volets : un volet politique et de sécurité, un volet économique et
financier, et enfin, un volet social et humain.
Les instruments de coopération sont également modifiés. Ainsi, les protocoles financiers
bilatéraux disparaissent et sont remplacés par un règlement financier unique, MEDA, tandis
que les accords de coopération liant l'UE aux Pays Tiers Méditerranéens doivent, petit à petit,
laisser la place à de nouveaux accords, plus complets, les accords euro-méditerranéens
d'association.
1 Chapitre 2-. Le partenariat euro-méditerranéen
Delphine FENASSE, L’Union européenne et l’Autorité palestinienne, Mémoire DEA 1998-1999 28
A-. La première participation de l'Autorité palestinienne en tant que « partenaire à part
entière »
En novembre 1988, lors de la XIXème session du Conseil National Palestinien, Yasser Arafat
proclame l'établissement d'un « Etat arabe de Palestine » ayant Jérusalem pour capitale.
L'Etat de Palestine a été reconnu par près d'une centaine de pays. Cette entité nationale, cet
Etat en devenir, n'a pas formellement été reconnu par la Communauté et ses Etats membres.
Pourtant, dans la déclaration de Londres du 29 juin 1977 les Etats membres ont toutefois
souligné la nécessité d'une « patrie » pour le peuple palestinien : « Les Neuf sont convaincues
qu'une solution du conflit au Moyen-Orient ne sera possible que si le droit légitime du peuple
palestinien à donner une expression effective à son identité nationale se trouve traduit dans la
réalité ce qui tiendrait compte de la nécessité d'une patrie pour le peuple palestinien ».
Aux termes de l'accord sur la bande de Gaza et de la zone de Jéricho du 4 mai 1994 et
conformément à la Déclaration de principes israélo-palestinienne : « L'Autorité palestinienne
n'aura pas de pouvoirs et de responsabilités dans le domaine des relations extérieures. (…)
Nonobstant les dispositions du présent paragraphe, l'OLP peut mener les négociations et
conclure des accords avec des Etats ou des organisations internationales au profit de
l'Autorité palestinienne dans les seuls cas suivants :
1) accords économiques, dûment spécifiés à l'annexe IV du présent accord ;
2) accords avec les pays donateurs destinés à mettre en place des arrangements en matière
d'aide à l'Autorité palestinienne ;
3) accords pour la mise en application des plans de développement régional détaillés à
l'annexe IV de la Déclaration de principes ou dans les accords entrant dans le cadre des
négociations multilatérales (…) »
A Barcelone, « L'Autorité palestinienne, représentée par M. Arafat, président de l'Autorité
palestinienne » est invitée à participer en tant que partenaire à part entière à la Conférence
interministérielle euro-méditerranéenne. Mais la Déclaration de Barcelone précise toutefois
que "cette initiative euro-méditerranéenne n'a pas vocation à se substituer aux autres actions et
initiatives entreprises en faveur de la paix, de la stabilité et du développement de la région,
mais qu'elle contribuera à favoriser leur succès. Les participants appuient à la réalisation d'un
règlement de paix juste, global et durable au Moyen-Orient, y compris le principe « des
territoires contre la paix avec tout ce que cela implique ». De plus, la Déclaration de
1 Chapitre 2-. Le partenariat euro-méditerranéen
Delphine FENASSE, L’Union européenne et l’Autorité palestinienne, Mémoire DEA 1998-1999 29
Barcelone contient, dans le cadre du volet relatif au partenariat politique et sécurité une
déclaration de principes qui se réfère notamment au respect de l'égalité de droits des peuples
et leur droit à disposer d'eux-mêmes. Après de nombreux débats, toute référence au principe
d'autodétermination a toutefois été écartée et ce malgré les demandes syrienne et
palestinienne. L'apparition du terme « Palestine » en décembre 1996, c'est à dire après les
premières élections générales palestiniennes est toutefois à noter.
B-. Les trois volets de la Conférence de Barcelone
1-. Le volet politique et de sécurité : la définition d'un espace commun de paix et de stabilité
« Les participants expriment leur conviction que la paix, la stabilité et la sécurité de la région
méditerranéenne sont un bien commun qu'ils s'engagent à promouvoir et à renforcer par tous
les moyens dont ils disposent. A cet effet, ils conviennent de mener un dialogue politique
renforcé et régulier, fondé sur le respect des principes essentiels du droit international et
réaffirment un certain nombre d'objectifs communs en matière de stabilité interne et
externe ».
Il s'agit de promouvoir des mécanismes visant à la stabilité régionale, y compris la possibilité
d'un pacte de stabilité, à travers un dialogue politique renforcé et sur la base de quelques
grands principes acceptables par tous les partenaires, notamment le respect des libertés
fondamentales, la construction d'un Etat de droit etc.
Ce volet s'inspire, sur le plan instrumental, de l'expérience de l'Organisation sur la Sécurité et
la Coopération en Europe. Par exemple, si certaines dispositions ont un caractère purement
relationnel, d'autres s'attachent aux structures internes des Etats comme l’Etat de droit et la
démocratie, le pluralisme politique et social, le respect des droits de l'homme. Les questions
de sécurité sont approfondies, comme dans l'OSCE à travers quelques lignes directrices, dont
la limitation des forces militaires dans les Etats de la région, l'adhésion aux régimes existants
en matière de non-prolifération des armes ABC.
a-. Droits de l'homme, démocratie et Etat de droit
1 Chapitre 2-. Le partenariat euro-méditerranéen
Delphine FENASSE, L’Union européenne et l’Autorité palestinienne, Mémoire DEA 1998-1999 30
Tous les Etats parties doivent adopter des règles de comportement national en conformité
avec celles reconnues par la Communauté internationale. Cela signifie que les partenaires
s'engagent à agir conformément à la Charte des Nations-Unies et à la Déclaration Universelle
des Droits de l'Homme ainsi qu'aux obligations résultant des Déclarations et accords
internationaux dans ce domaine par lesquels ils sont liés. Chaque partenaire s'engage par
ailleurs à prendre des mesures concrètes pour l'application effective des libertés
fondamentales et à respecter les droits de l'homme et les libertés fondamentales et l'exercice
de ces droits et libertés.
Chaque partenaire doit pouvoir s'engager aux développements de l'Etat de droit et de la
démocratie dans son système politique intérieur. Cela signifie des élections régulières et libres
des instances dirigeantes et de représentation, une justice indépendante, l'équilibre des
pouvoirs (chaque partenaire s'engage à respecter la diversité et le pluralisme dans sa société),
une bonne gestion des affaires publiques.
La stabilité interne des Etats est considérée comme une composante à moyen terme de la
stabilité de l'ensemble de l'espace euro-méditerranéen.
b-. Stabilité, sécurité, relation de bon voisinage
La paix et la stabilité de la région méditerranéenne sont un bien commun, qu'ils s'engagent à
préserver et à renforcer par tous les moyens à leur disposition. A cette fin, les partenaires
s'engagent à respecter leur égalité souveraine ainsi que tous les droits inhérents à leur
souveraineté, conformément au droit international d'une part, et à s'abstenir de toute
intervention directe ou indirecte contraire aux normes du droit international dans les affaires
intérieures d'un autre partenaire et à respecter son intégrité territoriale, d'autre part. Encore, les
partenaires renoncent à recourir, dans leurs relations mutuelles, à la menace ou à l'emploi de
la force contre l'intégrité territoriale ou l'indépendance politique d'un autre partenaire, ou de
toute autre manière incompatible avec les buts des Nations-Unies, et s'engagent à étudier des
mécanismes communs de diplomatie préventive et à régler leurs différends par des moyens
pacifiques.
Les partenaires s'engagent aussi à coopérer pour prévenir et combattre la menace d'activités
terroristes par la ratification et l'application des instruments internationaux et des
engagements auxquels ils souscrivent à cet égard, à exécuter leurs engagements dans les
1 Chapitre 2-. Le partenariat euro-méditerranéen
Delphine FENASSE, L’Union européenne et l’Autorité palestinienne, Mémoire DEA 1998-1999 31
conventions de désarmement et de non-prolifération des armes, et à développer entre eux des
relations de bon voisinage.
2-. Le volet économique et financier : construire une zone de prospérité partagée
Il s'agit de fonder progressivement un espace économique euro-méditerranéen de libre-
échange dans le respect des règles de l'OMC. En parallèle, renforcer la coopération financière,
et notamment le soutien à la modernisation économique en favorisant les investissements, en
particulier ceux du secteur privé. Ce volet repose sur trois éléments :
- l'instauration progressive d'une zone de libre-échange pour les biens et la libéralisation
progressive des échanges de services.
- la mise en œuvre d'une coopération et d'une concentration économique appropriées dans les
domaines concernées.
- l'augmentation substantielle de l'assistance financière de l'Union à ses partenaires.
a-. Zone de libre-échange euro-méditerranéenne
Les partenaires s'engagent à établir un espace euro-méditerranéen fondé sur le libre-échange
d'ici 2010. Cet espace couvrirait l'essentiel des échanges, en se fondant sur les possibilités
offertes et sur les obligations imposées par l'Organisation Mondiale du Commerce. Dans cette
zone, les produits manufacturés circuleraient librement sans obstacle tarifaire et non tarifaire.
Le commerce des produits agricoles seront progressivement libéralisé par l'accès préférentiel
réciproque, et le droit d'établissement des sociétés, la prestation de services transfrontaliers et
les mouvements de capitaux seront progressivement libéralisés, en tenant compte de l'accord
GATS.
D'autre part, afin de faciliter les échanges, les partenaires devront adopter des règles d'origine
largement similaires qui passent par un développement de la coopération douanière entre
l'ensemble des partenaires. Ils devront également améliorer les systèmes de certification en
vue de faciliter la reconnaissance mutuelle des certifications de conformité et, à plus long
terme, une harmonisation des normes. Ils devront enfin adopter des normes optimales de
protection de la propriété intellectuelle et des règles de concurrence analogues.
1 Chapitre 2-. Le partenariat euro-méditerranéen
Delphine FENASSE, L’Union européenne et l’Autorité palestinienne, Mémoire DEA 1998-1999 32
b-. La coopération
Les partenaires soulignent la grande importance pour le développement économique de
l'investissement, de l'élimination progressive des obstacles à l'investissement et de
l'instauration d'un environnement propice aux investissements étrangers directs. Ils
reconnaissent que la coopération régionale constitue un facteur clé pour favoriser
l'instauration d'une zone de libre-échange. Encore, les partenaires soulignent leur
interdépendance en matière d'environnement, qui impose une approche régionale et une
coopération renforcée. Enfin, ils reconnaissent l'importance de la coopération dans les
domaines de l'agriculture, du développement des infrastructures, des technologies de
l'information et des Télécommunications.
3-. Le volet social, humain et culturel
Il s'agit de développer la dimension humaine des relations, notamment par le moyen d'une
coopération décentralisée, en œuvrant en faveur de l'éducation, de la formation, de la
jeunesse, de la culture et des médias, des populations migrantes et de la santé. Une
coopération dans les domaines de la justice et des affaires intérieures est également envisagée
pour lutter contre le trafic des stupéfiants, le terrorisme, l'immigration clandestine et la
criminalité internationale
a-. Le domaine social
Dans les domaines de l'éducation et de la formation, les partenaires encouragent l'échange de
toutes les informations disponibles sur les systèmes, les politiques et les actions dans le
domaine de l'éducation et de la formation, ainsi que le développement des programmes de
formation professionnelle en mettant l'accent sur le secteur privé. Les partenaires encouragent
également la promotion des réseaux de coopération entre universités et l'encouragement de la
mobilité entre chercheurs et enseignants, le renforcement des liaisons entre l'enseignement et
les entreprises, ainsi que le développement de l'enseignement en mettant l'accent sur
l'éducation des jeunes filles et l'alphabétisation des adultes. En fin les partenaires encouragent
1 Chapitre 2-. Le partenariat euro-méditerranéen
Delphine FENASSE, L’Union européenne et l’Autorité palestinienne, Mémoire DEA 1998-1999 33
le développement des programmes de formation des cadres de l'entreprise et de
l'administration.
En ce qui concerne le développement social, les partenaires reconnaissent l'importance du
développement social qui, à leur avis, doit aller de pair avec tout développement économique.
Ils attachent une priorité particulière au respect des droits sociaux fondamentaux.
b-. Le domaine pénal
Les partenaires conviennent de la nécessité d'une approche coordonnée en ce qui concerne le
trafic de stupéfiants. Ils soulignent la nécessité d'une coopération étroite tant policière que
douanière. En ce qui concerne le terrorisme, les partenaires reconnaissent l'importance de le
prévenir et de le combattre. Pour cela, il faut renforcer la coopération afin de lutter plus
efficacement contre cette menace. Sur la criminalité internationale, les partenaires
reconnaissent qu'il est nécessaire de prévenir et lutter plus efficacement ensemble contre la
criminalité internationale à la mesure du développement de leur partenariat. Pour régler tous
ces problèmes, les partenaires s’entendent sur le développement indispensable d’une
coopération judiciaire. Cela implique une amélioration des procédures d'extradition, de la
politique des commissions rogatoires internationales et des échanges de magistrats et
d'informations.
Enfin, les partenaires conviennent d'une volonté de lutter contre le racisme et la xénophobie,
ainsi que la corruption.
C-. Le financement du partenariat : le programme MEDA
Dès le début des années 60, la Communauté européenne, par la signature d'accords de
coopération, a fait des pays du bassin méditerranéen des partenaires commerciaux privilégiés.
Cette coopération, mise en œuvre par le biais de privilèges commerciaux comme les
réductions tarifaires ou le libre-accès et de protocoles financiers quinquennaux composés de
dons budgétaires et de prêts de la BEI, ne correspondait pas à une approche globale des
relations euro-méditerranéennes. Une nouvelle orientation a commencé à se dessiner en 1992
lors de l'adoption de la PMR. Cela se traduisit par un doublement du montant global des
1 Chapitre 2-. Le partenariat euro-méditerranéen
Delphine FENASSE, L’Union européenne et l’Autorité palestinienne, Mémoire DEA 1998-1999 34
protocoles financiers et la constitution de deux nouveaux outils de coopération : une ligne
horizontale constituée de prêts BEI destinée au financement de projets de coopération
régionale entre les pays tiers méditerranéens, ainsi que des réseaux de coopération MED-
CAMPUS, MED-MEDIA, MED-URBS et MED-INVEST dans le cadre de la politique
méditerranéenne décentralisée.
Au Conseil européen de Cannes de 1995, les chefs d'Etats et de gouvernements ont manifesté
leur ambition en matière de coopération avec les Pays Tiers Méditerranéens en annonçant une
augmentation substantielle des crédits alloués à cette région. Quelques mois plus tard, à
Barcelone, la tendance à la globalisation et à l'intégration des instruments de partenariat a été
confirmée. A partir du 1er janvier 1997 en effet, un seul règlement, MEDA, se substituant aux
différents protocoles bilatéraux, servira de cadre unique à la coopération entre l'UE et les
PTM. Par ailleurs, les Etats ont affirmé lors de cette même conférence leur volonté de faire
évoluer leurs relations de la coopération vers le partenariat. Le règlement MEDA devrait donc
accompagner la mise en application des accords d'association déjà signés, comme avec la
Tunisie en avril 1995, Israël en novembre 1995, le Maroc en février 1996 ou l'OLP en février
1997.
Le programme MEDA a pour objectif de créer une zone euro-méditerranéenne de libre-
échange à l'horizon 2010. La création de cet espace commercial commun entre les PTM et
l'UE a pour but de stimuler, dans ces pays, la réforme des structures en général et de
l'industrie en particulier, afin qu'ils puissent résister à la concurrence européenne. Les
Européens y trouvent, au travers de l'ouverture des marchés, de nouveaux débouchés pour
leurs produits et une nouvelle zone d'investissement.
Il a été prévu que 10 % de l'enveloppe de MEDA soient consacrés au financement de projets
réalisés dans le cadre de la coopération régionale, principalement par l'intermédiaire des
programmes MED.
II-. Les programmes MED
Réseaux de coopération décentralisée, les programmes MED mettent directement en contact
les opérateurs économiques et les animateurs de la société civile des pays de l'UE et des
partenaires méditerranéens. Ils visent à promouvoir les contacts, la compréhension et les
1 Chapitre 2-. Le partenariat euro-méditerranéen
Delphine FENASSE, L’Union européenne et l’Autorité palestinienne, Mémoire DEA 1998-1999 35
échanges de savoir-faire et d'expérience entre des personnes, des groupes et des organisations
et institutions des deux rives de la Méditerranée.
A-. Définition des programmes
Un programme MED fournit un cadre au sein duquel sont réalisés les projets. Chaque projet
fait partie d'un « réseau de coopération ». Actuellement, quatre programmes MED sont en
fonctionnement : MED-URBS, qui s'adresse aux conseils municipaux et aux autorités locales,
MED-CAMPUS, qui concerne les universités et les institutions similaires, MED-MEDIA,
destiné aux professionnels des médias et MED-INVEST, pour les petites et moyennes
entreprises. Ces programmes sont ouverts aux particuliers, aux groupes et aux organisations
cherchant à travailler avec d'autres dans le même champ d'activité et à échanger expériences,
savoir-faire et informations. Ils travaillent sur des projets communs dans le cadre de ces
réseaux.
1-. MED-URBS
Ce programme veut contribuer à améliorer la qualité de vie dans les villes méditerranéennes
et à renforcer la démocratie locale, en stimulant la coopération décentralisée entre les autorités
locales de l'Union européenne et de ses partenaires méditerranéens. Il s'agit d'échanger les
expériences en matière de la gestion des villes et de leur développement social et économique.
En 1995, un total de 48 réseaux ont été sélectionné. On peut citer deux exemples de
programmes :
- INSER MED II : pour stimuler le développement urbain, social et économique, en
organisant des cours de formation pour les administrateurs locaux originaires des partenaires
méditerranéens et pour les jeunes au chômage ainsi qu'en créant un centre d'artisanat.
- Gestion intégrée de l'eau : pour mettre en place un système intégré de purification des eaux
usées et pour développer une stratégie de purification favorisant le développement socio-
économique de sous-produits en les intégrant dans le développement local. L'exemple du
projet d'évacuation des eaux usées de Rafah, ville de la bande de Gaza, illustre parfaitement le
but du programme MED-URBS.
1 Chapitre 2-. Le partenariat euro-méditerranéen
Delphine FENASSE, L’Union européenne et l’Autorité palestinienne, Mémoire DEA 1998-1999 36
2-. MED-CAMPUS
Le programme MED-CAMPUS vise à promouvoir la coopération dans les études supérieures
en subventionnant des projets de collaboration entre les campus et les entreprises tout autour
de la Méditerranée. MED-CAMPUS cherche également à souligner la compréhension entre
l'UE et ses partenaires méditerranéens dans le domaine culturel.
Concrètement, ce programme contribue à créer ou à renforcer des réseaux d'universités et
d'autres institutions d'enseignement supérieur qui fonctionneront comme des filières
permettant de rassembler les expériences et de transférer le savoir-faire de l'UE vers ses
partenaires et au sein de ceux-ci.
On peut trouver trois types principaux d'actions MED-CAMPUS :
- Action 1 : "Former les enseignants", en essayant d'améliorer la technique et les méthodes du
personnel universitaire des partenaires méditerranéens. Les champs d'action dans ce domaine
sont la technologie et la législation concernant l'environnement, la conservation de l'énergie,
les nouvelles technologies, la gestion, l'enseignement des langues et la traduction, les mass-
médias et les communications, les techniques bancaires et les marchés financiers.
- Action 2 : Formation continue des cadres administratifs et techniques de l'administration
publique et des entreprises privées. Les champs d'action prioritaires sont l'environnement, le
tourisme, l'enseignement supérieur, les services sanitaires et sociaux, les collectivités locales
et les municipalités, la qualité de production en général et les petites et moyennes entreprises.
- Action 3 : La formation euro-méditerranéenne post-universitaire. Cette action est destinée
aux jeunes diplômés des partenaires méditerranéens et propose un cours unique de troisième
cycle sur les problèmes spécifiques à la Méditerranée dans les domaines des relations
politiques, juridiques, et socio-économiques au niveau euro-méditerranéen, dans les domaines
de l'environnement, et enfin dans les domaines des technologies de l'information et de la
communication.
3-. MED-INVEST
1 Chapitre 2-. Le partenariat euro-méditerranéen
Delphine FENASSE, L’Union européenne et l’Autorité palestinienne, Mémoire DEA 1998-1999 37
Le programme MED-INVEST vise à stimuler le développement des PME chez les partenaires
méditerranéens et à leur fournir les ressources techniques dont elles ont besoin pour être
compétitives et pour établir et maintenir le contact entre elles.
Une phase pilote a été engagée en 1992 et une phase de consolidation a été lancée en 1996.
Actuellement, MED-INVEST comprend deux sections :
- La section A s'attache à étendre les programmes de l'UE à ses partenaires méditerranéens en
établissant des contacts qui sont susceptibles de se transformer en structures de coopération.
L'accent est mis à cet égard sur le partenariat entre les entreprises.
- La section B comprend des projets expérimentaux destinés à fournir les instruments
nécessaires à la croissance et au développement de sociétés existantes ou à la création de
nouvelles sociétés chez les PM.
4-. MED-MEDIA
Des médias de qualité, qu'il s'agisse de la presse, de la radio ou de la télévision, contribuent au
développement politique, économique, social et culturel des populations auxquelles ils
s'adressent. Ce programme vise à étendre la coopération entre les professionnels, en créant
des réseaux de médias d'un haut niveau technique et professionnel. Il permet aux
professionnels des médias des partenaires méditerranéens de profiter de l'expérience et du
savoir-faire de leurs homologues de l'Union européenne. Il permet également aux
professionnels des médias d'échanger leurs expériences et de comprendre le contexte
politique, culturel et quotidien de leurs partenaires grâce aux contacts établis entre eux. De
plus, tout en élevant les niveaux professionnels des médias et en améliorant les conditions de
travail de leurs partenaires méditerranéens, MED-MEDIA tend à stimuler la compréhension
mutuelle et à encourager les contacts à long terme entre les professionnels des médias. En
1993-1994 a débuté une phase pilote comprenant 31 projets. En 1995, 35 projets ont été
sélectionnés. On peut citer comme exemple de réalisation, le film de Hanan Ashrawi "A
woman of her time". Ce film est un portrait intimiste de Hana Ashrawi, porte-parole
palestinienne, militante des droits de l'homme et figure de premier plan dans la formation du
nouvel Etat palestinien.
1 Chapitre 2-. Le partenariat euro-méditerranéen
Delphine FENASSE, L’Union européenne et l’Autorité palestinienne, Mémoire DEA 1998-1999 38
5-. MED-TECHNO
Le programme MED-TECHNO vise à améliorer l'application de technologies performantes
chez les partenaires méditerranéens, en encourageant la coopération et l'échange de savoir-
faire entre les PM et les pays de l'UE. Dans un même temps, le programme cherche à
promouvoir la coopération entre les différents PM devant faire face à des défis similaires et
veut les inciter à développer des approches communes aux problèmes. Il y a deux types
d'actions :
- Type 1 : Projets de développement communs à l'échelle du laboratoire ou de petits projets
pilotes comprenant l'adaptation des technologies existantes et mise au point de solutions
innovatrices, la sélection et la formation de personnel approprié pour la réalisation et la
supervision du projet, l'estimation socio-économique et, concernant l'environnement, l'examen
du rapport coûts/bénéfices et du potentiel d'application, évaluation des obstacles possibles et
considération de l'impact et des conséquences à long-terme.
- Type 2 : Réseaux de scientifiques, d'experts techniques, d'industries, d'administrations et de
collectivités, d'organisations non-gouvernementales et d'autres institutions, qui sont actives
dans le domaine indiqué.
B-. L'après Barcelone
Comment poursuivre la coopération euro-méditerranéenne, tant dans le domaine politique
qu'économique, alors que le processus de paix au Moyen-Orient est gravement menacé ? Tel
est le redoutable défi qu'ont eu à surmonter les deuxième et troisième conférence euro-
méditerranéenne. La deuxième réunion se tiendra à Malte, les 15 et 16 avril 1997, avec les
ministres des affaires étrangères des 27 pays partenaires, et la troisième à Stuttgart en avril
1999.
1-. La deuxième conférence interministérielle euro-méditerranéenne de Malte d'avril 1997
a-. Bilan du partenariat
1 Chapitre 2-. Le partenariat euro-méditerranéen
Delphine FENASSE, L’Union européenne et l’Autorité palestinienne, Mémoire DEA 1998-1999 39
Dans le domaine politique et de sécurité, les hauts fonctionnaires chargés du suivi de la mise
en œuvre du partenariat se sont réuni à six reprises depuis la Conférence de Barcelone. Si les
résultats demeurent fragiles. la Commission européenne dans sa communication du 19 février
1997 soulignait toutefois que « Ce dialogue constitue aujourd'hui un forum sans équivalent de
discussion des problèmes politiques et stratégiques entre l'ensemble de la région et l'Union ».
Selon Manuel Marin commissaire européen, « beaucoup de progrès ont été réalisés, en
particulier concernant la préparation d'une Charte euro-méditerranéenne pour la paix et la
stabilité », qui serait le mécanisme institutionnel de dialogue et de prévention des crises. Ce
projet de Charte représente aujourd'hui l'objectif principal du volet politique et de sécurité du
partenariat euro-méditerranéen.
Dans les domaines économique et financier, des progrès considérables ont été accomplis dans
la négociation des accords d'association euro-méditerranéens, préalables indispensables à
l'instauration, à plus long terme, d'une zone de libre échange. Depuis la Conférence de
Barcelone, quatre nouveaux accords de ce type ont été signés, avec la Tunisie, Israël, le
Maroc et l’OLP pour le compte de l'Autorité palestinienne. Les négociations sont très
avancées avec l'Egypte, la Jordanie et le Liban. Avec l'Algérie, les négociations ont
commencé le 4 mars dernier à Bruxelles. Quant à la Syrie, les contacts exploratoires se
poursuivent
Dans les domaines social, culturel et humain, le partenariat a ouvert la voie à un certain
nombre de projets communs comme le patrimoine culturel, les transports maritimes… Mais
les résultats ne sont pas pour l'instant à la hauteur des ambitions de la Conférence de
Barcelone. Lors d’un voyage à Tunis, Manuel Marin a été clair : « En plus du développement
économique, il est temps de définir des objectifs plus concrets pour le volet humain de notre
partenariat ». Parmi les priorités à mettre en œuvre figurent les échanges entre jeunes de part
et d'autre de la Méditerranée, ainsi que la culture et l'information : 17 projets de coopération
associant à chaque fois plusieurs pays méditerranéen dans de multiples domaines comme la
protection des sites archéologiques sous-marins et terrestres, l’inventaire des musiques
traditionnelles arabes, ont été présélectionnés. Enfin, côté diffusion de l'information, un site
Internet a été ouvert à l'occasion de la deuxième conférence euro-méditerranéenne. Les pays
méditerranéens ont un meilleur accès à l'information en général : l'Union européenne a
cofinancé la mise en place du service arabe de la chaîne télévisée d'informations continues
1 Chapitre 2-. Le partenariat euro-méditerranéen
Delphine FENASSE, L’Union européenne et l’Autorité palestinienne, Mémoire DEA 1998-1999 40
Euronews. L'inauguration de ce programme coïncidera justement avec la tenue de la
conférence de Malte.
b-. Le contexte d'adoption
Le 29 mai 1996, Benjamin Netanyahu, le principal opposant aux accords avec les
palestiniens, remporte les élections israéliennes à la Knesset pour quatre ans. Le chef du
Likoud a bénéficié du soutien de l'ensemble de la communauté orthodoxe, ainsi que de tous
les mouvements de droite et d'extrême droite.
Le 14 janvier 1997, il conclut un accord avec Yasser Arafat pour un redéploiement de l'armée
israélienne hors des quatre cinquièmes de la ville d'Hébron et trois retraits supplémentaires de
Cisjordanie. Mais des retards et des difficultés s'accumulent. M. Netanyahu exerce une
politique du refus d'application des accords. L'Union européenne et son Conseil s'en
inquiètent et dénoncent les obstacles : la poursuite et l'intensification de la colonisation, le
bouclage de la Cisjordanie et de Gaza dont les effets sont dévastateurs tant pour l'économie
palestinienne que pour le « climat de confiance », l'absence de mise en ouvre des accords
économiques israélo-palestiniens, notamment la création d'une voie de passage sûr entre la
Cisjordanie et Gaza, la création d'un port et d'un aéroport à Gaza. Toutes ces difficultés
maintiennent la Cisjordanie et Gaza dans un statut de dépendance et de marchés captifs
israéliens. Ces territoires se transforment en un gouffre financier. En effet, l'aide économique
sert avant tout à payer les fonctionnaires et à combler un budget que l'Autorité ne peut
équilibrer faute d'activité économique.
L'Europe réagit par des déclarations fermes, mais sans effets réels. Elle nomme, en octobre
1996, M. Miguel Angel Moratinos envoyé spécial au Proche-Orient, chargé d'aider au
rapprochement des parties et de relever les violations des accords signés. Lors du sommet
européen d'Amsterdam de juin 1997, l’Europe soutient le « droit des palestiniens à
l'autodétermination sans exclure la possibilité d'un Etat ». Enfin, elle soumet aux deux
parties, au printemps 1997, un « code de bonne conduite » : la partie palestinienne
s'engagerait à tout faire pour assurer la sécurité d'Israël, la partie israélienne respecterait le
statu quo démographique et territorial et l'ensemble des accords économiques. Toutes ces
initiatives restent lettre morte. Impuissante, acceptant dans les faits que seuls les Etats-Unis
1 Chapitre 2-. Le partenariat euro-méditerranéen
Delphine FENASSE, L’Union européenne et l’Autorité palestinienne, Mémoire DEA 1998-1999 41
soient en mesure de régler les problèmes politiques, l'Europe accepte son rôle
« complémentaire ».
Ces évolutions négatives du processus de paix compliquent le déroulement de la Conférence
de Malte en 1997. En effet, les deux représentant d'Israël et de l'Autorité palestinienne se
refuse à se rendre à la conférence. Il faudra l'intervention de M. Hans van Mierlo, ministre
néerlandais des affaires étrangères et président en exercice du Conseil des ministres de l'UE
pour que les deux protagonistes se rencontre alors qu'aucun échange entre eux ne s'était plus
produit depuis plusieurs semaines. Son insistance permet une reprise de contact pendant une
heure, pendant lesquelles MM. Lévy et Arafat énumèrent leurs griefs réciproques et rappelle
leurs exigences respectives, mais le ministre israélien plaide pour que cette rencontre soit la
première d'une série afin « de montrer que nous avons la capacité de surmonter les
obstacles ». Le chef de l'Autorité palestinienne souhait que tout soit fait pour éviter une
« explosion de la situation au Proche-Orient ».
Les pays arabes, de leur côté, entendaient « tester la crédibilité du processus de Barcelone »,
en réclamant une prise de position nette contre la politique du premier ministre Netanyahu,
non par référence à un quelconque lien entre ce processus et le processus de paix mais au nom
des principes retenus dans la déclaration signée par les 27 participants en novembre 1995 à
Barcelone. Ils exigent que le préambule de la déclaration finale condamne implicitement
Israël en rejetant « la politique du fait accompli » et « toute attitude négative » ainsi que
« toute initiatives unilatérales ». Ils se heurtent d'abord à une fin de non-recevoir européenne,
anticipant un refus israélien. M. van Mierlo, représentant de l’Union européenne dans les
Territoires occupés, était même disposé à faire un constat d'échec en conclusion, et à rendre
publiques les divergences entre participants. Il faudra l'intervention personnelle du chef de la
diplomatie française, Hervé de Charrette, pour que les Arabes renoncent à leur ambition
d'isoler l'Etat juif.
Finalement, le document final mentionne la nécessité de revenir au processus de paix « tel que
convenu à Madrid le 31 octobre 1991 ».
2-. Les conférences euro-méditerranéennes de Palerme et de Stuttgart
a-. La session ministérielle informelle euro-méditerranéenne de Palerme
1 Chapitre 2-. Le partenariat euro-méditerranéen
Delphine FENASSE, L’Union européenne et l’Autorité palestinienne, Mémoire DEA 1998-1999 42
La session informelle euro-méditerranéenne s'est déroulée les 3 et 4 juin 1998 dans la capitale
sicilienne. Elle avait pour objectif de relancer le processus de Barcelone dont les résultats sont
décevants. La première tentative de relance de Malte ayant échoué en avril 1997 suite au
blocage du processus de paix au Moyen-Orient. Depuis Malte, malgré de nombreuses
réunions sectorielles, aucun progrès véritable n’avait été enregistré. Certains pays arabes
avaient même annulé des réunions déjà programmées en refusant d'accueillir une délégation
officielle d'Israël. Les discussions sur chacun des trois volets du partenariat se sont présentées
de façon suivante :
- Le volet politique et de sécurité
Les ministres ont procédés à un réexamen de fond et repris leurs discussions sur de nouvelles
bases en vue d'élaborer une charte commune et un plan d'action. Le groupe arabe dans son
ensemble a annoncé le dépôt d'un projet spécifique dont leurs ministres des affaires étrangères
débattent pendant leur réunion interne à Beyrouth. Des propositions sont faites en vue d'un
plan d'action concerté et de réunions d'experts en matière de prévention du terrorisme ou de la
violence.
- Le volet économique
Plusieurs actions sont en cours dans ce cadre, mais la plupart sont antérieures au processus de
Barcelone (énergie, télécommunications, etc.). Une longue liste reste soumise à
l'approbation ; les projets qu'elle contient concernent pratiquement tous les domaines de
l'activité économique : bourses des valeurs, investissements, agricultures et agro-industrie,
etc. La Commission européenne a toutefois reconnu que la prolifération de projets n'était pas
fructueuse et elle a appelé de ses vœux une rationalisation du travail en commun : de son côté,
la Tunisie a proposé l'étude de règles de conduite strictes afin de lutter contre la multiplication
incontrôlable de projets. L'essentiel des débats a été centré autour du projet de zone de libre-
échange, accueilli avec scepticisme et appréhension par plusieurs pays tiers méditerranéens.
La Commission européenne compte clarifier ses intentions en vue d'enregistrer des progrès
significatifs lors de la prochaine session formelle de Stuttgart.
- Le volet social et culturel
On observe en ce domaine aussi un foisonnement de projets qui ne correspondent pas souvent
à un intérêt régional global mais concernent un nombre limité de pays. Plusieurs pays ont
souhaité une remise en ordre afin de mieux cibler la détermination d'actions communes.
1 Chapitre 2-. Le partenariat euro-méditerranéen
Delphine FENASSE, L’Union européenne et l’Autorité palestinienne, Mémoire DEA 1998-1999 43
De leur côté, les pays arabes ont préparé soigneusement cette rencontre. Avant que ne
s'ouvrent les travaux de la conférence, les pays arabes avaient manifesté clairement leur
intention de ne pas accepter que le processus de paix au Moyen-Orient ne soit traité qu'en
marge. Après avoir coordonné leurs positions en se réunissant pendant deux jours à Beyrouth,
ces pays ont désigné le ministre libanais comme leur coordinateur et porte-parole. Il avait
souligné que les problèmes étaient globaux et que le partenariat euro-méditerranéen
représente un tout. Selon lui, il fallait exclure pour le moment tout ce qui impliquerait une
collaboration avec Israël, et il a reproché aux Européens de « parler de paix et de sécurité à
chaque conférence sans envisager les moyens de les obtenir ». La partie arabe n’a pas
demandé à l'Union européenne d'épouser sa position mais de se prononcer. Par exemple, selon
le chef de la diplomatie égyptienne, M. Amr Moussa, les Quinze devraient soutenir
formellement l'initiative commune de MM. Moubarak et Chirac sur une conférence
internationale sur le Moyen-Orient. L’invitation fut suivie par les Quinze.
La conférence a donc clos ses travaux par une décision de relance « tranquille et dans la
sérénité » du processus engagé à Barcelone en novembre 1995. Cette appréciation, venant
d'un délégué communautaire, confirme que les vingt-sept pays membres du processus sont
parvenus à éviter l'échec, et à faire en sorte que la question du processus de paix n'ait pas une
influence décourageante sur le processus euro-méditerranéen. « Au contraire, nous attendons
du processus de Barcelone qu'il ait une influence positive sur celui du Moyen-Orient » a
affirmé le ministre espagnol Abel Matutes lors des débats de la première journée. M. Kinkel a
dit son espoir de parvenir à une relance effective lors de la 3ème session formelle fixée au mois
d'avril 1999 à Stuttgart.
La session de Palerme étant informelle, elle ne s'est pas terminée par des conclusions
officielles.
b-. La troisième conférence interministérielle euro-méditerranéenne de Stuttgart d’avril 1999
Cette troisième conférence s’est réunie dans un contexte politique particulier. D’une part, elle
se tenait quelques semaines avant les élections législatives anticipées en Israël qui ont eu lieu
le 17 mai 1999. D’autre part, le 4 mai 1999 correspondait à une éventuelle déclaration de
l’instauration de l’Etat palestinien, que Yasser Arafat a finalement décidé de différer pour
laisser les élections israéliennes se dérouler dans de bonnes conditions. La Conférence de
1 Chapitre 2-. Le partenariat euro-méditerranéen
Delphine FENASSE, L’Union européenne et l’Autorité palestinienne, Mémoire DEA 1998-1999 44
Stuttgart s’est donc déroulée dans une période de grande incertitude pour le processus de paix.
A cette troisième Conférence interministérielle euro-méditerranéenne, il s’agissait de
capitaliser sur les progrès de Palerme, c’est à dire de pérenniser le mode de fonctionnement
du Partenariat dans ses points positifs, et d’en corriger certains autres, ainsi que de réfléchir à
son évolution.
En ce qui concerne le chapitre politique et de sécurité les partenaires ont fait part de leur
volonté d’une coopération concrète contre le terrorisme. Sur la Charte pour la paix et la
stabilité, les hauts fonctionnaires ainsi que le réseau des Instituts de Politique Etrangère
EuroMeSCo travaillent à définir le contenu et le cadre institutionnel dans lequel pourrait être
approuvée la Charte.
En ce qui concerne le chapitre économique et financier, l’objectif était de confirmer la
stratégie sur le libre échange, la transition économique, et l’investissement privé, et de mieux
cibler les efforts des partenaires en fonction des réalités observées. Il a été souligné le
caractère essentiel d’accélérer la négociation en cours des accords d’association et la
ratification des accords déjà conclus.
Enfin, en ce qui concerne le chapitre culturel, social et humain, un bilan a été présenté.
Un cadre ayant été posé, l’Union européenne et les Palestiniens vont pouvoir mettre à profit
cette possibilité de coopération. Des projets vont être mis en place et réalisés, tant dans les
domaines économique, politique, social, et culturel.
2 Chapitre 1-. L’Europe, premier ‘bailleur de fonds’ du processus de paix au Moyen-Orient
Delphine FENASSE, L’Union européenne et l’Autorité palestinienne, Mémoire DEA 1998-1999 45
Partie 2-. Le contenu des relations euro-palestiniennes
Le cadre mis en place, l’Europe se retrouve « premier bailleur de fonds du processus de paix
au Moyen-Orient », partenaire économique incontournable pour les Palestiniens ainsi que le
premier partenaire commercial d’Israël. L’Europe a pris le problème de son rôle au Moyen-
Orient à l’envers. Ne pouvant prendre une place politique de premier plan, monopole des
Etats-Unis, elle se réserve une place économique qui la rend incontournable dans la région.
D’ailleurs, le 3 juillet 1997, la Commission européenne propose un nouveau Règlement du
Conseil pour poursuivre l'assistance financière et technique en Cisjordanie et dans la bande de
Gaza. Elle propose de lancer un programme d'une durée de huit ans, de 1999 à 2006 à
réexaminer dans un délai de deux ans, et au plus tard d'ici le 31 décembre 2000. En 1997, un
accord d'association est signé avec l'OLP pour le compte de l'Autorité palestinienne. L’Europe
est la première région occidentale à passer des accords commerciaux avec les Palestiniens
directement, sans passer par la Ligue arabe ni par les Israéliens.
Chapitre 1-. L'Europe, premier « bailleur de fonds » du processus de
paix au Moyen-Orient
Le 9 janvier 1996, les donateurs et organisations internationales, réunis à Paris en conférence
ministérielle sur l'assistance technique aux territoires palestiniens, ont promis aux Palestiniens
quelques 1,365 milliards de dollars pour 1996. L'Union européenne a annoncé qu'elle
contribuerait à cet effort à hauteur de 200 millions d'écus pour la période 1996-1998 répartis
comme tel : 50 millions d'écus mis chaque année à la dispositions des Palestiniens depuis les
accords d'Oslo de 1993, auxquels s'ajoutent 15 millions pour combler le déficit budgétaire de
1996 de l'Autorité palestinienne, 5 millions en faveur des projets de développement en
Cisjordanie et à Gaza, et enfin des prêts à long terme de la Banque Européenne
d’Investissement. L’intervention de l’Union européenne se situe aux plans politique,
économique et social.
2 Chapitre 1-. L’Europe, premier ‘bailleur de fonds’ du processus de paix au Moyen-Orient
Delphine FENASSE, L’Union européenne et l’Autorité palestinienne, Mémoire DEA 1998-1999 46
I-. Dans les domaines politiques et économiques
A-. Le soutien économique
Ce soutien s’est concrétisé par la construction d’un aéroport et par une aide en faveur des
entreprises palestiniennes.
1-. L'aéroport de Gaza
Lors de la Conférence de donateurs de Washington du 30 novembre 1998, l'Union européenne
s'est félicitée de l'ouverture de l'aéroport de Gaza, le 24 novembre 1998. Cet événement a été
qualifié d’« historique » par les Palestiniens, qui bénéficient ainsi pour la première fois d'un
lien direct avec le reste du monde. L'aéroport devrait être un poumon économique pour
l'économie palestinienne, en ouvrant d'importantes possibilités d'exportations et en offrant une
porte d'entrée pour les investisseurs. Les autorités israéliennes pourront toutefois contrôler les
mouvements de passagers et de marchandises, au nom de la sécurité de l'Etat hébreu.
L'ouverture de cet aéroport international avait été retardée depuis deux ans en raison de
différends entre Israël et l'Autorité palestinienne sur le rôle de la sécurité israélienne. C'est
finalement lors du sommet de Wye Plantation en octobre 1995 qu'Israéliens et Palestiniens
ont établi un protocole définissant les modalités du fonctionnement de l'aéroport. Jusqu’à
présent, seuls des vols d'inauguration ont eu lieu, le calendrier de l'ouverture des lignes
internationales restant à fixer. Premières destinations desservies : Le Caire, Amman et Jeddah
en Arabie Saoudite. Les pays de l'UE, en particulier l'Espagne, l'Allemagne et la Suède ont
participé notamment au financement de l'aéroport pour l’équipement du site, la formation des
employés... Les Pays-Bas ont pour leur part fait don de deux avions aux lignes palestiniennes.
2-. Le développement des entreprises
L’Union européenne soutient aussi le développement des entreprises dans les territoires
palestiniens. Cela peut prendre la forme d'un financement ayant un impact direct sur les
affaires. Dès 1991, des prêts ont été accordés à de petites entreprises, y compris à des
2 Chapitre 1-. L’Europe, premier ‘bailleur de fonds’ du processus de paix au Moyen-Orient
Delphine FENASSE, L’Union européenne et l’Autorité palestinienne, Mémoire DEA 1998-1999 47
organisations travaillant dans l'exportation. Cela peut aussi impliquer le soutien d'initiatives se
répercutant sur le secteur économique dans son ensemble. 12200 écus ont été ainsi attribués
au Centre de développement des affaires de l'université de Bethléem, qui développe et
actualise les programmes d'économie politique et de gestion, enseignés à la faculté
d'administration des affaires, et stimule les contacts entre l'université et le monde des affaires
au niveau du campus et des entreprises.
Le 27 octobre 1986, le Conseil des ministres de la Communauté européenne adopte le
règlement 3363/86, sur une proposition de la Commission européenne, concernant le régime
tarifaire applicable aux importations, des produits originaires des territoires occupés.
B-. Le soutien politique
En septembre 1993, un accord israélo-palestinien est signé à Washington. Suite à cet accord,
un régime d'autonomie est mis en place à Gaza et à Jéricho avec le retrait de l'armée et de
l'administration israéliennes, à l'exception des colonies de peuplement juives. L'Autorité
palestinienne s'installe à Gaza et est présidée par Yasser Arafat. En 1995, cette autonomie est
étendue aux principales villes de Cisjordanie et en 1996, les premières élections
palestiniennes désignent le Conseil de l'Autonomie palestinienne et son président, Yasser
Arafat. Ce Conseil fera office de Parlement.
L'UE a joué un rôle de premier plan dans l'organisation de ces élections. En effet, la
Communauté internationale a confié à l'UE le soin de coordonner l'observation de ces
élections générales. Les Quinze avaient déployé beaucoup d’efforts pour que ces élections
puissent se dérouler. Elle a consacré, depuis début 1994, 5,5 millions d'écus au soutien
logistique nécessaire à la tenue de ce scrutin tel que l’équipement des bureaux de vote, une
aide à la Commission palestinienne chargée d'établir les listes électorales, etc. Une « unité
électorale » européenne, s'appuyant sur 700 observateurs internationaux dont 300 européens,
aura scruté au jour le jour la régularité de la préparation et de la tenue de l'élection des 88
membres du Conseil palestinien.
Malgré les quelques irrégularités constatées lors de la préparation de la loi électorale des
élections et du dépouillement des bulletins (changements perpétuels du calendrier électoral,
absence de publicité dans les médias pour certains candidats indépendants, présence massive
de la police israélienne aux abords des bureaux de postes où devaient voter les Palestiniens de
2 Chapitre 1-. L’Europe, premier ‘bailleur de fonds’ du processus de paix au Moyen-Orient
Delphine FENASSE, L’Union européenne et l’Autorité palestinienne, Mémoire DEA 1998-1999 48
Jérusalem-Est, arrestation de six Palestiniens dans un bureau de vote…), les observateurs
européens ont jugé globalement correctes ces élections. La Présidence italienne a publié la
déclaration suivante au nom de l'Union européenne : « L'Union européenne se déclare
profondément satisfaite du succès des premières élections générales palestiniennes. Elle
félicite tous les candidats élus au Conseil palestinien ainsi que M. Arafat, élu Président du
Conseil, et elle adresse ses vœux les plus sincères à ces représentants dûment élus du peuple
palestinien à l'occasion de leur entrée en fonctions. L'Union européenne félicite également le
peuple palestinien pour la maturité politique dont il a fait preuve à l'égard de la démocratie
et de l'élection du Conseil palestinien et du président de celui-ci. Elle applaudit à la manière
dont la grande majorité des candidats et des agents électoraux se sont acquittés de leurs
obligations pendant le processus électoral. Elle se félicite du fait que les élections proprement
dites se soient déroulées dans un climat généralement pacifique, qui n'a pas été assombri par
des incidents risquant d'entraîner des troubles ou des divisions ou de donner lieu à des
tension ou à des actes de violence de nature à compromettre le processus démocratique.
L'Union européenne souligne l'importance que revêt le succès des élections palestiniennes
pour l'ensemble du processus de paix au Moyen-Orient. Ces élections n'ont pas seulement
conféré une légitimité démocratique à l'Autorité palestinienne ; elles ont aussi confirmé
l'attachement du peuple palestinien et de ses dirigeants démocratiquement élus au volet
palestinien du processus de paix et au règlement pacifique du conflit au Moyen-Orient. Elles
ont confondu les opposants au processus de paix au Moyen-Orient, qui cherchent à saper ce
processus par la violence et la terreur. L'Union européenne est fière d'avoir joué un rôle de
premier plan dans les opérations d'observation internationale des élections palestiniennes ».
Un autre événement politique majeur illustre le rôle politique de l’Union européenne. Le 7
juillet 1998, l’Assemblée générale des Nations-Unies a élevé le statut de la délégation
palestinienne. De simple observateur depuis 1974, elle devient « super-observateur ». en vertu
de la résolution, la délégation palestinienne est désormais en mesure de co-parrainer les
résolutions relatives à la question palestinienne et au Proche-Orient. Elle peut également
participer aux débats de l’assemblée générale, s’exprimer après le dernier membre inscrit sur
les question de Palestine et du Proche-Orient, exercer un droit de réponse, présenter des points
d’ordre, siéger à l’Assemblée générale après les Etats non membres mais avant certains
observateurs. Mais la délégation palestinienne n’a ni le droit de vote, ni la possibilité de
présenter des candidats aux divers postes.
2 Chapitre 1-. L’Europe, premier ‘bailleur de fonds’ du processus de paix au Moyen-Orient
Delphine FENASSE, L’Union européenne et l’Autorité palestinienne, Mémoire DEA 1998-1999 49
Le rôle de l’Europe dans l’adoption de cette résolution a été considérable. En effet, les pays
arabes et les Non-alignés avaient réclamé une session extraordinaire de l’Assemblée générale
de l’ONU afin de donner à la délégation palestinienne à l’ONU un statut proche de celui d’un
Etat membre. Selon le projet de résolution arabe, les Palestiniens devaient garder leur statut
d’observateur, mais pourraient participer pleinement » à toutes les activités et conférences de
l’ONU. Cela leur permettrait par exemple de présenter des textes, d’être assis dans la salle
avec les autres délégations, mais ils n’auraient pas le droit de vote. Immédiatement Benyamin
Netanyahou affirmait que cette initiative « risque de provoquer l’effondrement du processus
de paix ». Ayant appris que l’Union européenne avait nouer des contacts avec l’autorité
palestinienne pour parvenir à un compromis permettant d’élever le niveau cette
représentation, Israël s’est livré à un intense lobbying auprès des dirigeants européens pour
qu’ils ne joignent pas leurs voix à celle des pays arabes et Non-alignés qui disposaient déjà
d’une majorité à l’Assemblée générale. Le directeur général du ministère israélien des
Affaires étrangères, Eyran Bentsur, pris des contacts avec l’Autriche, qui assurait la
présidence de l’Union européenne depuis le 1er juillet 1998. Le but israélien de ces entretiens
est d’empêcher l’élévation du niveau de représentation palestinienne à l’ONU. Mais après des
hésitations, l’Union européenne se ralliera à la thèse du super-observateur, contre les Etats-
Unis, Israël, les îles Marshall, et la Micronésie.
II-. Dans les domaines sociaux
Il s’agit de voir quels projets ont été réalisés dans ce domaine, ainsi que d’étudier les
différentes aides européennes aux réfugiés palestiniens.
A-. Les projets réalisés
Dans la mesure du possible, les projets financés par l'Union européenne s'attaquent aux
problèmes sociaux les plus urgents de la région dans le but d'améliorer la vie des Palestiniens.
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Delphine FENASSE, L’Union européenne et l’Autorité palestinienne, Mémoire DEA 1998-1999 50
C'est pourquoi l'Union européenne a investi des fonds dans des programmes comme celui des
Tours de Nusseirat à Gaza, pour construire des logements pour les petits et moyens revenus
d'une région où les appartements sont rares et chers. Ces Tours peuvent accueillir en tout 2160
personnes.
L'Union européenne considère également l'amélioration de l'état sanitaire comme une priorité,
ce qui suppose la construction d'hôpitaux, l'extension des installations et la mise en place d'un
système de soins de base. Ainsi, l'hôpital Khan Younis dans le sud de la bande de Gaza a été
financé avec 60 millions d'écus. Il compte 232 lits et, tout comme le projet de logement, il
permettra de créer des emplois. Les premières hospitalisations étaient prévues pour le
printemps 1996.
On peut également citer le projet d'élimination des ordures à Rafah, ville de la bande de Gaza.
L'Union européenne a investi 1,5 millions dans ce projet qui facilite considérablement la vie
des 45000 palestiniens qui dépendent de la municipalité de Rafah et des 60000 qui vivent
dans le camp de réfugié de la ville. Ce projet inclut un programme de grand nettoyage, la mise
en place d'un ramassage public des ordures, une décharge contrôlée et son fonctionnement
dans de bonnes conditions sanitaires. Des programmes de formation et d'éducation sanitaire,
un renforcement des institutions dans la municipalité de Rafah et la création de systèmes de
planification adéquats, sont également prévus.
De tels projets sont conçus pour améliorer la santé et l'environnement et en tirer des bénéfices
économiques. En créant 48 emplois immédiats et un total de 90 postes permanents et en
mettant la population à contribution, le projet de Rafah a fourni des emplois absolument
nécessaires et une prise de conscience civique qui peut mener à une ville aux conditions
sanitaires saines fin 95. Un suivi aide Rafah à faire face au défi du doublement de sa
population d'ici l'an 2000. Le projet complémentaire de l'évacuation des eaux usées de Rafah
va également permettre d'améliorer la situation sanitaire.
Ces quelques exemples d’action de reconstruction ne doivent pas occulter les difficultés que
l’aide européenne rencontre pour arriver sur le terrain : fournitures bloquées par les douanes
israéliennes, frais de stockage demandés par ces mêmes douanes aux donateurs européens…
Début 1995, la Commission européenne estimait que ces entraves représentaient une
proportion « significative » de l’aide européenne.
2 Chapitre 1-. L’Europe, premier ‘bailleur de fonds’ du processus de paix au Moyen-Orient
Delphine FENASSE, L’Union européenne et l’Autorité palestinienne, Mémoire DEA 1998-1999 51
B-. L'aide aux réfugiés palestiniens
L’aide de l’Union européenne aux Palestiniens se situe à deux niveaux. Au niveau européen,
l’Union est présente dans le cadre de son programme d’aide humanitaire ECHO. Au niveau
international, l’Union est le premier donateur à l’UNRWA, office de secours des Nations-
Unies pour les réfugiés palestiniens.
1-. Le rôle de l'Union européenne dans l'Office de secours des Nations-Unies aux réfugiés
palestiniens (UNRWA)
La coopération avec l'UNRWA a débuté en 1971. L'assistance de l’Union européenne a été et
est encore d'une très grande importance dans le budget de l'UNRWA. La Communauté
européenne et ses Etats membres fournissent 43 % du budget total de cette organisation.
Depuis 1972, l'Union européenne et l'UNRWA ont signé dix conventions34. Celles-ci
régissent les contributions de l'Europe au budget ordinaire et au budget d'aide alimentaire de
l'Office. Chaque convention a fixé la contribution au budget ordinaire pour les trois années
suivantes, c'est à dire les programmes d'éducation, de santé de secours et de services sociaux.
Elles ont prévu également la négociation annuelle de la contribution au budget d'aide
alimentaire. Cette aide concerne les réfugiés palestiniens dans cinq régions, à savoir la
Jordanie, la Syrie, le Liban, la Cisjordanie et la bande de Gaza. Cette aide s'est élevée à 338,6
millions d'écus entre 1987 et 1994 pour les réfugiés palestiniens. L’Union européenne apporte
32 millions d'écus en 1995 au budget de l'UNRWA pour l'éducation et la santé.
L'aide de l'UNRWA aux réfugiés palestiniens se décompose, entre autre, en deux programmes
d’éducation et de santé.
34 Convention CE-UNRWA 1972-74, JO n° L 304 du 31/12/1972, p.24. Convention CE-UNRWA 1975-78, JO n° L 203 du 28/07/1976, p.40. Convention CE-UNRWA 1979-80, JO n° L 108 du 26/04/1980, p.56. Convention CE-UNRWA 1981-83, JO n° L 392 du 31/12/1981, pp.3-6. Convention CE-UNRWA 1984-86, JO n° L 188 du 16/07/1984, pp.8-19. Convention CE-UNRWA 1987-89, JO n° l 136 du 26/05/1987, p.43. Convention CE-UNRWA 1990-92, JO n° L 118 du 09/05/1990, p.36. Convention CE-UNRWA 1993-1995, JO n° L 9/16 du 13/01/1994. Convention CE-UNRWA 1996-98.
2 Chapitre 1-. L’Europe, premier ‘bailleur de fonds’ du processus de paix au Moyen-Orient
Delphine FENASSE, L’Union européenne et l’Autorité palestinienne, Mémoire DEA 1998-1999 52
a-. Le programme d'éducation
L'UNRWA assure un enseignement à plus de 40.000 élèves palestiniens. Ce programme
d’éducation a pour objectif de répondre aux besoins fondamentaux de formation des réfugiés
palestiniens et de leur fournir un accès élargi à tous les niveaux du système éducatif. Pour
réaliser cet objectif, le programme prévoit des mesures en faveur de l'enseignement général,
de la formation des professeurs et de la formation professionnelle et technique. Les écoles de
l'UNRWA sont gérées d'une manière économique et comptaient en moyenne en 1995 40,3
élèves par professeur au niveau primaire et 30,3 au niveau préparatoire. Le coût annuel par
élève inscrit est relativement faible par rapport aux normes régionales et internationales, soit
en moyenne 266 dollars par élève au niveau primaire et 371 dollars par élève au niveau
préparatoire Ce programme d'éducation de l'UNRWA représente son programme le plus
lourd, absorbant près de la moitié de son budget total. Mais le nombre de réfugiés augmentant
d'environ 3,5 %, il est nécessaire d'accroître sensiblement le nombre de professeur afin de
pouvoir faire face à l'augmentation de la population scolaire.
b) Le programme général de santé
Le programme de santé de l'UNRWA privilégie les soins de santé primaires, complétés,
lorsque les moyens financiers le permettent, par quelques soins de santé secondaires et
tertiaires.
Le nombre de réfugiés qui vivent dans les camps a doublé depuis les 25 dernières années. La
forte densité de population dans les camps ne fait qu'accroître la nécessité de services
d'hygiène que l'UNRWA fournit dans les camps en coopération avec les Etats et municipalités
d'accueil. L'augmentation du nombre de réfugiés, en particulier des enfants et des personnes
âgées, catégories qui sollicitent le plus le programme de santé, entraîne une augmentation du
coût de la fourniture des soins de santé primaires, de même d'ailleurs que la forte demande
d'hospitalisation. L'Office s'efforce par tous les moyens de maîtriser ses dépenses afférentes
aux soins de santé secondaires et tertiaires.
Tout en maintenant la fourniture de services de santé générale, le programme de santé prévoit
d'autres mesures, notamment un sous-programme renforcé de protection maternelle et
infantile portant entre autres sur le planning familial, le développement de programmes pour
2 Chapitre 1-. L’Europe, premier ‘bailleur de fonds’ du processus de paix au Moyen-Orient
Delphine FENASSE, L’Union européenne et l’Autorité palestinienne, Mémoire DEA 1998-1999 53
le contrôle des maladies non transmissibles, ainsi que des mesures en vue de maîtriser les
coûts des services hospitaliers, un programme d'hygiène et un sous-programme nutritionnel et
d'alimentation supplémentaire.
2-. L’Office humanitaire de la Communauté européenne (ECHO)
Cet Office humanitaire de la Communauté européenne a été fondé en 1992 pour superviser et
coordonner les opérations d’aide humanitaire menées par l’Union européenne dans les pays
non membres. Durant ses cinq années d’existence, il a acheminé de l’aide d’urgence et de
l’aide à la reconstruction dans des régions en crise de plus de 60 pays du monde. En 1997,
l’aide d’urgence, l’aide alimentaire et l’aide aux personnes réfugiées et déplacées qu’il a
distribué a atteint près de 442 millions d’écus. ECHO travaille en partenariat avec les
organisations non gouvernementales, les agences spécialisées des Nations-Unies et d’autres
organismes internationaux tel que le Comité international de la Croix-Rouge et contribue ainsi
à atténuer les effets des crises de tout ordre, des catastrophes naturelles aux conflits ethniques.
Un règlement adopté le 20 juin 199635 définit la base juridique du rôle d’ECHO et de son
mandat. Ce règlement dispose que l’aide doit être distribuée en toute indépendance et
impartialité et qu’elle doit être gérée dans un esprit d’ouverture et de transparence. Le mandat
d’ECHO est de :
- sauver et préserver des vies humaines dans des situations d’urgence et de posturgence
immédiate lors de catastrophes naturelles ou causées par l’homme,
- apporter l’assistance et les secours nécessaires aux populations touchées par les crises de
plus longue durée telles que des guerres civiles,
- financer l’acheminement de l’aide et s’assurer que l’aide bénéficie bien à tous ceux auxquels
elle est destinée,
- venir en aide aux réfugiés et aux personnes déplacées dans le pays ou dans la région où ils
ont trouvé refuge, et les aider à se réinstaller dans leur pays d’origine,
- réaliser des opérations de réhabilitation et de reconstruction à court terme pour aider les
victimes à retrouver un minimum d’autosuffisance en prenant en compte, lorsque cela est
possible, les objectifs du développement à long terme,
35 Règlement du Conseil des ministres n° 1257/96 du 20 juin 1996
2 Chapitre 1-. L’Europe, premier ‘bailleur de fonds’ du processus de paix au Moyen-Orient
Delphine FENASSE, L’Union européenne et l’Autorité palestinienne, Mémoire DEA 1998-1999 54
- assurer la préparation aux catastrophes, notamment en mettant en place des systèmes
d’alerte rapide et en finançant des mesures de prévention dans les régions à haut risque.
Mais ECHO n’a pas seulement pour rôle de fournir de l’aide, il doit aussi :
- réaliser des études de faisabilité pour ses opérations humanitaires,
- faire le suivi des projets humanitaires et œuvrer à la mise en place de mécanismes de
coordination,
- réaliser des programmes de formation et fournir une assistance technique à ses partenaires,
- financer des actions humanitaires de déminage, notamment en sensibilisant les populations
locales aux dangers des mines antipersonnel,
- sensibiliser l’opinion publique aux problèmes humanitaires en Europe et dans les pays tiers.
Pour l’année 1997, les moyens financiers d’ECHO provenaient de la Convention de Lomé
(article 254) pour 7.420.000 d’écus, et de la Communauté européenne pour 441.611.954 écus
divisés entre les différents programmes d’ECHO. Plus spécifiquement, pour l’aide aux Etats
d’Afrique du Nord et du Moyen-Orient dont ont bénéficié les Palestiniens, elle s’est élevée à
18,150 millions d’écus en 1997
2 Chapitre 2-. Les accords et règlements commerciaux et financiers
Delphine FENASSE, L’Union européenne et l’Autorité palestinienne, Mémoire DEA 1998-1999 55
Chapitre 2-. Les accords et règlements commerciaux et financiers
Deux catégories de décisions seront prises par l’Union européenne pour développer ses
contacts commerciaux avec la Palestine : des règlements du Conseil et un accord intérimaire
d’association.
I-. Les règlements
A-. Le règlement d’octobre 1986 « Concernant le régime tarifaire applicable aux
importations dans la Communauté de produits originaires des territoires occupés »36.
Lors de sa session du 27 octobre 1986, le Conseil européen a décidé de mesures en faveur des
populations palestiniennes de la rive occidentale du Jourdain et de la Bande de Gaza portant à
la fois sur l’assistance financière et sur le régime commercial. Sur le plan commercial, les
mesures visent à accorder aux produits originaires des Territoires occupés un régime analogue
à celui accordé aux pays limitrophes qui sont liés à l’Union européenne par des accords de
coopération préférentiels. Le régime prévoit l’accès en franchise au marché de l’Union pour
tous les produits industriels ainsi que des concessions tarifaires, le cas échéant assorties de
calendriers, pour un certain nombre de produits agricoles. Un système de règles d’origines
adaptées à la situation spécifique des Territoires occupés, a été mis en place.
Par conséquent, en 1986, la Communauté européenne est leader dans l'ouverture des marchés
aux produits palestiniens, soutenant ainsi les entreprises dont le rôle est aujourd'hui primordial
à la mise en place d'une économie viable par l'Autorité palestinienne.
L'adoption de ce règlement a deux conséquences. Au niveau économique, il implique
l'insertion des Territoires palestiniens occupés dans le schéma commercial préférentiel euro-
méditerranéen. Au niveau politique, il s'agit d'une reconnaissance implicite d'une « entité
palestinienne autonome ». La réaction israélienne face à l'adoption de ce règlement autonome
36 Règlement du Conseil n° 3363/86 du 27 octobre 1986, JOCE, n° L 306 du 01/11/1986
2 Chapitre 2-. Les accords et règlements commerciaux et financiers
Delphine FENASSE, L’Union européenne et l’Autorité palestinienne, Mémoire DEA 1998-1999 56
ne se fait pas attendre. Des mesures sont adoptées par le gouvernement israélien pour différer
la mise en œuvre du programme d'exportation.37 Ce dernier exige que la commercialisation
des produits agricoles palestiniens se fasse via les compagnies israéliennes sous label israélien
et que les exportateurs palestiniens utilisent les ports et aéroports de l'Etat hébreu. La
Commission prévient alors les autorités israéliennes que le Parlement européen peut ne pas
donner son avis conforme à la conclusion de trois nouveaux protocoles devant compléter
l'accord CE-Israël de 1975. Le début de l'Intifada en décembre 1987 va toutefois amener le
Parlement européen à différer son vote mais, le 9 mars 1988, aucun des trois protocoles
n'obtient l'avis conforme. A la suite de ce blocage, les autorités israéliennes concluent
finalement, le 10 octobre 1988, et ce après de nombreuses discussions, un accord avec les
exportateurs palestiniens et, dans la foulée, le Parlement européen donne son avis conforme
aux trois protocoles.
B-. Le règlements« Relatif à la coopération financière et techniques avec les Territoires
occupés » de juillet 199438
Ce règlement permet aux Palestiniens de bénéficier d’une aide bilatérale relativement
similaire à celle octroyée aux PTM dans le cadre des protocoles financiers quinquennaux.
L’objectif est de mettre en œuvre « une coopération financière et technique avec les
Territoires occupés en vue de contribuer à leur développement économique et social durable
dans le cadre d’un programme d’une durée de cinq ans ».
Quant aux types d’actions susceptibles d’être financées au titre de cette coopération
financière, l’article 2 stipule qu’elles portent par priorité sur les domaines suivants :
« Infrastructures, développement urbain et rural, enseignement, santé, environnement,
service, commerce extérieur, mise en place et renforcement des institutions nécessaires au
bon fonctionnement de l’administration publique et à la promotion de la démocratie et des
droits de l’homme ».
Les financements de la Communauté peuvent prendre la forme d’études de faisabilité, de
projets d’investissement, d’actions d’assistance technique ou de formation. La Banque
37 Israël bénéficiait d’un monopole d’Etat en matière de produits agricoles, et la commercialisation 38 Règlement du Conseil n° 1734/94 du 11 juillet 1994, JOCE n° L 182 du 16/07/94 p.4
2 Chapitre 2-. Les accords et règlements commerciaux et financiers
Delphine FENASSE, L’Union européenne et l’Autorité palestinienne, Mémoire DEA 1998-1999 57
européenne d’investissement participe également à certains financements sur ses ressources
propres.
Il sera complété par Le règlement « Relatif à la coopération financière et technique avec les
Territoires occupés modifiant le règlement n° 1763/92 relatif à la coopération financière
intéressant l’ensemble des pays tiers méditerranéens »39 Il étend les actions de coopération
financière et technique régionales et multilatérales mises en œuvre dans le cadre de la PMR.
II-. L'accord intérimaire de 1997
Les élections palestiniennes, qui ont conféré une légitimité démocratique aux nouvelles
Autorités palestiniennes, ont ouvert la voie à la conclusion d'un accord euro-palestinien, dans
le cadre du processus de Barcelone.
Il faut, tout d'abord, souligner la rapidité des négociations euro-palestiniennes. En effet, à la
suite de la conclusion de l'accord intérimaire Israël-OLP le 28 septembre 199540, le Conseil de
l'Europe a invité, le 2 octobre 1995 « la Commission à entamer des conversations
exploratoires avec l'Autorité palestinienne en vue d'aboutir à la conclusion d'un accord euro-
méditerranéen d'association dès que les circonstances le permettront »41.
Il faut ensuite souligner les difficultés auxquelles les négociateurs ont dû faire face. Ils ont du,
à la fois, résoudre les problèmes juridiques soulevés par la non reconnaissance de la Palestine
comme un Etat souverain et indépendant, et respecter les dispositions de l'accord intérimaire
israélo-palestinien sur la bande de Gaza et la zone de Jéricho du 4 mai 1994. Mais après avoir
surmonter toutes ces difficultés, comme nous l'avons déjà vu plus haut, l'accord a été signé.
Les principales différences entre l'accord CE-OLP et les accords d'association euro-
méditerranéens d'association, outre les fondements juridiques, l'intitulé de l'accord, l'absence
de titre consacré au dialogue politique, proviennent de la structure de ce dernier ainsi que des
modalités de gestion des échanges.
Cette question de la reconnaissance d'un Etat palestinien a posé problème lors de la
conclusion des accords bilatéraux euro-palestiniens conclu dans le cadre du processus de 39 Règlement du Conseil n° 1735/94 du 11 juillet 1994, JOCE n° L 182 du 16/07/94 p.6 des produits agricoles palestiniens était réalisée via les compagnies israéliennes AGREXCO et Citrus Marketing Board. 40 Appelé "accord de Taba" ou "Oslo II
2 Chapitre 2-. Les accords et règlements commerciaux et financiers
Delphine FENASSE, L’Union européenne et l’Autorité palestinienne, Mémoire DEA 1998-1999 58
Barcelone. En effet, contrairement aux accords euro-méditerranéens d'association, il était
difficile, en raison de l'absence d'Etat palestinien indépendant et souverain, bénéficiant de
compétences en matière de politique étrangère et disposant de frontières reconnues par
l'ensemble de la Communauté internationale, de fonder ces accords sur l'article 238 de
l’Union européenne qui stipule que « la Communauté peut conclure avec un ou plusieurs
Etats ou organisations internationales des accords créant une association caractérisée par
des droits et des obligations réciproques, des actions en commun et des procédures
particulières ». Un accord fondé sur l'article 238 aurait en effet, en principe, impliqué la
reconnaissance, au moins implicite, d'un Etat palestinien.
Par contre, l'article 113, qui constitue le fondement de la politique commerciale commune,
dispose en son troisième paragraphe que "si des accords avec un ou plusieurs Etats ou
organisations internationales doivent être négociés, la Commission présente des
recommandations au Conseil, qui l'autorise à ouvrir les négociations nécessaires". Le terme
d'Etat apparaît donc clairement et force est de constater que l'OLP et l'Autorité palestinienne
ne sont pas des "organisations internationales". L'OLP est un mouvement de libération
nationale et l'Autorité palestinienne fonctionne véritablement comme un gouvernement. Faut-
il en déduire que le fait de recourir à l'article 113 à défaut du 238, soit une reconnaissance
implicite de l'existence d'un Etat palestinien tel qu'il a été proclamé par Yasser Arafat en 1988
? La réponse est négative car l'Union a passé des accords avec la Principauté d'Andorre en
1990, alors que les ambiguïtés sur son statut n'ont été levées qu'en 1993.
Mais la possibilité d'une reconnaissance implicite de l'Etat de Palestine n'est sans doute pas
l'unique raison du rejet du recours aux articles 238 et 113. Ce rejet est compréhensible en
raison de la situation particulière des Territoires palestiniens, les aléas du processus de paix et
la sensibilité de la question palestinienne, y compris au sein même de l'Union européenne.
A-. La structure de l'accord
En ce qui concerne cette structure, les négociateurs ont cherché à établir une certaine
similarité avec celle des accords euro-méditerranéens d'association même si l'accord CE-OLP
présente certaines caractéristiques propres. L'accord est composé de six titres et de soixante- 41 Bull. CE. 10-95 point 1.4.84
2 Chapitre 2-. Les accords et règlements commerciaux et financiers
Delphine FENASSE, L’Union européenne et l’Autorité palestinienne, Mémoire DEA 1998-1999 59
quinze articles, contre huit titres et quatre-vingt seize articles pour l'accord CE-Tunisie ou
neuf titres et quatre-vingt articles pour l'accord CE-Israël.
1-. Le préambule de l'accord
Il souligne « l'importance des liens existants entre la Communauté et le peuple palestinien de
Cisjordanie et de la bande de Gaza » en précisant qu'il s'agit de « renforcer ces liens et (d')
établir des relations durables fondées sur le partenariat et la réciprocité ».
En ce qui concerne la notion de partenariat, il s'agit bien entendu de faire référence à l' "esprit
de partenariat" du processus de Barcelone tout en mettant en exergue le caractère privilégié
de la relation. Quant à la réciprocité, elle est notamment induite par le respect des obligations
du GATT/OMC lors de l'établissement d'une zone de libre-échange et ce, conformément au
respect du principe de mise en conformité.
Le respect des principes de la Charte des Nations-Unies, en particulier le respect des droits de
l'homme, des principes démocratiques et des libertés politiques et économiques est considéré
comme le fondement même des relations euro-palestiniennes.
Les objectifs généraux de l'accord sont au nombre de six :
- fournir un cadre approprié à un dialogue global entre les parties, afin de permettre le
renforcement de leurs relations,
- établir les conditions propres à la libéralisation des échanges,
- promouvoir, à travers le dialogue et la coopération, le développement de relations
économiques et sociales équilibrées entre les parties,
- contribuer au développement social et économique de la Cisjordanie et de la bande de Gaza,
- encourager le coopération régionale afin de consolider la coexistence pacifique ainsi que la
stabilité politique et économique,
- promouvoir la coopération dans d'autres domaines d'intérêt mutuel.
2-. Les titres
Le titre I est relatif à la « Libre circulation des marchandises ». Il comprend trois chapitres :
« Produits industriels », « Produits agricoles et produits de la pêche », « Dispositions
communes ».
2 Chapitre 2-. Les accords et règlements commerciaux et financiers
Delphine FENASSE, L’Union européenne et l’Autorité palestinienne, Mémoire DEA 1998-1999 60
Le titre II est, quant à lui, consacré aux « Paiements, capitaux, concurrence, propriété
intellectuelle et marchés publics ». On remarquera que l'article 33 de cet accord stipule que
« les parties assureront une protection adéquate et effective des droits de propriété
intellectuelle, industrielle et commerciale en conformité avec les plus hauts standards
internationaux, y compris les moyens effectifs de faire valoir leurs droits ».
Le titre III de l'accord CE-OLP concerne la « Coopération économique et développement
social ». Les dispositions de cet article s'attachent essentiellement à reconnaître
« l'importance du développement social qui doit aller de pair avec le développement
économique » les partie signalant qu'elles attachent une attention particulière « au respect des
droits fondamentaux ». Un certain nombre de mesures concernant la promotion de l'égalité
entre hommes et femmes - le développement de la planification familiale – l'amélioration du
système de protection sociale et la satisfaction des besoins de santé – l'amélioration des
conditions de vie dans les zones défavorisées et le respect des droits de l'homme et des
principes démocratiques notamment par la voie du « dialogue socioprofessionnel », est par
ailleurs mentionné.
De plus le titre III contient une série de dispositions portant sur la coopération industrielle
(article 38) qui vise, entre autres, à « soutenir l'Autorité palestinienne dans ses efforts de
modernisation et de diversification de l'industrie ». Une déclaration commune relative à un
programme de soutien à l'industrie palestinienne dans laquelle l’Union européenne reconnaît
« la nécessité, pour l'industrie palestinienne de rechercher des marchés à l'étranger » a
également été annexée à l'accord traduisant ainsi dans les faits l'attribution du pouvoir
économique tel qu'il était envisagé dans la communication d'octobre 1995 sur « l'aide
économique future de l'Union européenne à la Cisjordanie et à Gaza ». Des dispositions en
matière de promotion et de protection des investissements (article 39), concernant la
normalisation et l'évaluation de la conformité (article 40) ou encore relatives aux transports
(article 46), aux télécommunications et technologies de l'information (article 47) sont
également introduites.
La coopération scientifique et technologique (article 49) doit notamment « ouvrir aux
institutions palestiniennes l'accès aux programmes communautaires de recherche et de
développement technologique ». Les questions environnementales (article 50), la coopération
douanière (article 52) et la coopération en matière de politique économique (article 54) font
aussi l'objet d'articles spécifiques.
2 Chapitre 2-. Les accords et règlements commerciaux et financiers
Delphine FENASSE, L’Union européenne et l’Autorité palestinienne, Mémoire DEA 1998-1999 61
La coopération régionale (article 55) constitue, quant à elle « un élément important du soutien
apporté par la Communauté au développement de la région dans son ensemble ». Les actions
prioritaires en la matière consisteront à promouvoir le commerce intra-régional, développer la
coopération régionale en matière d'environnement, encourager la création de l'infrastructure
de communication nécessaire au développement économique de la région, renforcer le
développement de la coopération des jeunes avec les pays voisins.
Le titre IV est consacré à la coopération dans les secteurs de l'audiovisuel, de la culture, de
l'information et de la communication. On y trouve des mesures visant à associer l'Autorité
palestinienne aux initiatives de la communauté dans le secteur de l'audiovisuel (article 56), à
encourager la coopération culturelle (article 57) et à améliorer la situation de l'éducation et de
la formation professionnelle (article 58).
Le titre V, relatif à la coopération financière, définit les grandes orientations de la coopération
financière euro-palestinienne. Il s'agit notamment de « réagir aux effets économiques
qu'exerce, sur la Cisjordanie et la bande de Gaza, l'instauration progressive d'une zone de
libre échange (…) ».
Le titre VI est consacré aux « Dispositions constitutionnelles, générales et finales ». Ces
dispositions institutionnelles ont été simplifiées. A la différence des accords euro-
méditerranéens, il n'y a en effet pas de Conseil d'association (niveau ministériel) ni de Comité
de l'association (niveau fonctionnaires) mais un « comité mixte pour le commerce et la
coopération » composé de représentants de l’Union européenne et de l'Autorité palestinienne
qui se réunit une fois par an et qui dispose d'un pouvoir de décision (art.63 § 1) et peut
formuler des résolutions recommandations ou avis (art 63 § 2). Aux termes de l'article 67
« chaque partie peut saisir le comité mixte de tout différend portant sur l'application ou
l'interprétation de l'accord ».
Enfin, il faut signaler que l'accord CE-OLP comporte 11 déclarations communes, trois
annexes concernant le régime des échanges de produits industriels, deux protocoles relatifs
aux produits agricoles et un troisième protocole qui s'attache à définir la notion de « produits
originaires » et les méthodes de coopération administrative de l'accord CE-OLP.
L'accord CE-OLP ne contient pas d'articles relatifs à la coopération en matière de drogue et de
terrorisme mais des actions en la matière sont toutefois prévues, au niveau régional, par la
Déclaration de Barcelone.
2 Chapitre 2-. Les accords et règlements commerciaux et financiers
Delphine FENASSE, L’Union européenne et l’Autorité palestinienne, Mémoire DEA 1998-1999 62
B-. Les modalités de gestion des échanges commerciaux : vers une zone de libre échange
euro-palestinienne
L'objectif de la création d'une zone de libre échange euro-palestinienne, d'ici le 31 décembre
2001, constitue l'un des éléments clé de l'accord CE-OLP. La création d'une telle zone de libre
échange, si elle s'inscrit naturellement dans le cadre de la création d'un Espace Economique
Euro-Méditerranéen (EEEM), composé de trois unions douanières (Chypre, Malte, Turquie)
et des huit zones de libre échange à établir, en principe, d'ici 2010 (Algérie, Egypte, Israël,
Jordanie, Liban, Maroc, Syrie, Tunisie), est un cas un peu à part étant donné la situation
économique de l'entité palestinienne : taille et morcellement du marché, dépendance vis à vis
de son voisin israélien…
1-. Les produits industriels
En ce qui concerne ces produits, il convient tout d’abord de souligner que les Territoires
palestiniens exportent peu de produits industriels. L'accord prévoit qu'aucun nouveau droit de
douane, ni taxe d'effet équivalent, n'est introduit dans les échanges entre l’Union européenne
et la Cisjordanie et la bande de Gaza. Les produits originaires de Cisjordanie et de la bande de
Gaza sont admis à l'importation dans l’Union européenne en exemption de droits de douane et
taxes d'effet équivalent et sans restrictions quantitatives ni mesures d'effet équivalent (article 5
et 6).
Pour un certain nombre de produits agricoles transformés comme le maïs ou le chocolat, la
Communauté maintient un élément agricole à l'importation des marchandises palestiniennes
dans la Communauté. Pour quelques produits européens comme les pâtes alimentaires, le
couscous), l'Autorité palestinienne peut conserver, pour la durée de l'accord, les droits de
douane à l'importation et des taxes d'effet équivalent dont le niveau ne dépasse pas ceux en
vigueur au 1er juillet 1996.
2-. Les produits agricoles
2 Chapitre 2-. Les accords et règlements commerciaux et financiers
Delphine FENASSE, L’Union européenne et l’Autorité palestinienne, Mémoire DEA 1998-1999 63
Il faut constater que le régime dont bénéficient les Territoires palestiniens, et ce jusqu'à
l'entrée en vigueur de l'accord CE-OLP, est un régime autonome (pouvant donc être abrogé
par la Communauté européenne unilatéralement à tout moment) particulièrement favorable.
L'accord CE-OLP permet de contractualiser sur une base réciproque ce régime autonome dans
la mesure où les dispositions du régime du régime actuel ont été, pour l'essentiel, transposées
dans le cadre du premier protocole d'accord.
L'accord permettra aux Palestiniens d'exporter leurs produits agricoles sans droits de douane
et sans limites quantitatives à l'exception toutefois de certains produits sensibles, tels que les
fraises et les fleurs coupées, pour lesquels les droits de douane sont supprimés dans la limite
de contingents tarifaires (respectivement 1200 et 1500 tonnes par an). Certains produits
exemptés de droits de douane sont également soumis à des quantités de références. C'est le
cas, par exemple des tomates (1000 tonnes par an), des aubergines (3000 tonnes par an) ou
encore des oranges (25000 tonnes par an).
Conclusion
Delphine FENASSE, L’Union européenne et l’Autorité palestinienne, Mémoire DEA 1998-1999 64
CONCLUSION
La politique israélienne à l’égard des territoires occupés transforme l’aide au développement
en simple ballon d’oxygène pour les Palestiniens. Elle permet ainsi à Israël de continuer sa
politique d’occupation, de colonisation et d’asphyxie des territoires sans avoir à en supporter
le coût économique et social.
Sans reconnaître officiellement un Etat palestinien, (bien qu’elle le fera dès que Yasser Arafat
l’aura proclamé), l’Union européenne est indéniablement, compte tenu du contexte, allée
aussi loin qu’elle le pouvait. Elle a exploité les possibilités offertes par les dispositions
relatives à la politique de coopération au développement. Les autorités israéliennes elles-
mêmes ont reconnu, en la regrettant, la portée politique de l’accord intérimaire de 1997. En
effet, l’ambassadeur d’Israël à Bruxelles a déclaré que « l’accord intérimaire conclu par
Israël et l’OLP le 28 septembre 1995 indique très clairement que l’Autorité palestinienne n’a
pas le pouvoir de signer un accord politique. Cet accord avec l’Union européenne donne un
statut international à l’Autorité palestinienne que nous ne sommes pas prêts à reconnaître ».
Il s’agit d’une nouvelle illustration de la (trop) timide affirmation politique de l’Union
européenne sur l’échiquier moyen-oriental face au leadership diplomatique américain. Certes,
l’Union européenne ne peut se permettre de rivaliser avec les Etats-Unis en l’absence d’une
politique de défense commune et d’un « bras armé » crédible. Elle peut toutefois exiger d’être
mieux associée aux différents volets du processus de paix et consultée sur une base plus
régulière. L’action de l’envoyé spécial de l’Union européenne eu Moyen-Orient pourrait, à cet
égard, contribuer à mettre en œuvre une stratégie plus ambitieuse fondée sur la médiation. Les
résultats sont encore minces, la principale difficulté étant de convaincre Israël et les Etats-
Unis de la crédibilité de la démarche européenne. Mais les Américains ont-ils vraiment intérêt
à ce que l’Europe communautaire s’émancipe politiquement afin d’affirmer son identité sur la
scène internationale ?
L’Union européenne peut jouer un rôle de premier plan dans cette région du monde. Elle
dispose aujourd’hui de son statut de puissance économiques, politiques et diplomatiques
nécessaires. En matière économique, elle est le premier partenaire commercial d’Israël devant
les Etats-Unis. L’Europe pourrait, comme en 1986, utiliser son rôle économique pour faire
Conclusion
Delphine FENASSE, L’Union européenne et l’Autorité palestinienne, Mémoire DEA 1998-1999 65
plier Israël. Par exemple, elle pourrait « geler » de façon conditionnelle l’accord économique
dit « intérimaire » en cours avec Israël tant que ce pays ne respecte pas ses engagements
politiques et économiques et les droits de la personne humaine, comme le prévoit l’accord lui-
même. L’arrêt de toutes les formes de colonisation, l’ouverture de la voie de passage prévue
entre la Cisjordanie et la bande de Gaza, la levée du bouclage, la construction du port et
l’ouverture de l’aéroport, l’arrêt de la torture et la libération des prisonniers politiques
permettraient au fur et à mesure à Israël de bénéficier des avantages de l’accord. Il ne s’agit
pas là de promouvoir une politique d’embargo tel que celui imposé à l’Irak. Il ne s’agit pas
non plus d’un blocus tel que celui qu’Israël impose à la population palestinienne. Il s’agit
simplement de faire valoir les atouts européens (et ils sont nombreux) pour s’affirmer comme
partenaire incontournable dans la région moyen-orientale.
Bibliographie
Delphine FENASSE, L’Union européenne et l’Autorité palestinienne, Mémoire DEA 1998-1999 66
BIBLIOGRAPHIE
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Economica
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2-. Thèses et mémoires
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3-. Documents officiels
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Marché Commun, n°171 janvier 1974 p.47
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1995
Deuxième Conférence interministérielle euro-méditerranéenne de Malte, 15-16 avril 1997
4-. Articles et dossiers de presse
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"Partenariat euro-méditerranéen : premier bilan", 7 jours Europe, n°250, 2 décembre 1996
"Conférence euro-méditerranéenne de Malte : sauver la paix par la coopération", 7 jours
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Europe, n°334, 7 décembre 1998 p.4
5-. Sources informatiques
site du Monde diplomatique : www.monde-diplomatique.fr
site de la Revue d'études palestiniennes : www.ipsjps.org/rdp/
site de la Commission européenne : http://europa.eu.int
site du Partenariat euro méditerranéen : http://www.diplomacy.edu/euromed
site du CEPII : www.cepii.fr
Table des matières
Delphine FENASSE, L’Union européenne et l’Autorité palestinienne, Mémoire DEA 1998-1999 68
Table des matières
INTRODUCTION 0
Partie 1-. Le cadre des relations euro-palestiniennes 11 Chapitre 1-. Une prise de position commune difficile : de la Coopération Politique Européenne (C.P.E.) à la Politique Méditerranéenne Rénovée (P.M.R.). 11
I-. L'adoption des premières déclarations des Etats membres sur la question Palestinienne 11 A-. La Coopération politique européenne (CPE) 11
1-. Le « Document Schuman » de 1971 12 2-. La « Déclaration de Bruxelles » de 1973 13 3-. La « Déclaration de Londres » 14
B-. Le Dialogue Euro-Arabe (DEA) 14 1-. Le sommet européen de Copenhague 15 2-. Les obstacles au D.E.A. 16 3-. Le cadre institutionnel du DEA 18
a-. La Commission générale 18 b-. Les comités de travail 19 c-. La troïka ministérielle 19
II-. De la Déclaration de Venise à la Politique méditerranéenne rénovée 19 A-. La Déclaration de Venise 20
1-. Le contexte d’adoption 20 2-. Les conséquences 21
B-. La Politique méditerranéenne rénovée (PMR) 23 1-. Le contenu de la Politique Méditerranéenne Rénovée 23 2-. Financement de la Politique Méditerranéenne Rénovée 24
a-. Les subventions indirectes 24 b-. La Banque Européenne d’Investissement (BEI) 25
Chapitre 2-. Le partenariat euro-méditerranéen 27 I-. Un partenariat novateur 27
A-. La première participation de l'Autorité palestinienne en tant que « partenaire à part entière » 28 B-. Les trois volets de la Conférence de Barcelone 29
1-. Le volet politique et de sécurité : la définition d'un espace commun de paix et de stabilité 29 a-. Droits de l'homme, démocratie et Etat de droit 29 b-. Stabilité, sécurité, relation de bon voisinage 30
2-. Le volet économique et financier : construire une zone de prospérité partagée 31 a-. Zone de libre-échange euro-méditerranéenne 31 b-. La coopération 32
3-. Le volet social, humain et culturel 32 a-. Le domaine social 32 b-. Le domaine pénal 33
C-. Le financement du partenariat : le programme MEDA 33 II-. Les programmes MED 34
A-. Définition des programmes 35 1-. MED-URBS 35 2-. MED-CAMPUS 36 3-. MED-INVEST 36 4-. MED-MEDIA 37 5-. MED-TECHNO 38
B-. L'après Barcelone 38 1-. La deuxième conférence interministérielle euro-méditerranéenne de Malte d'avril 1997 38
Table des matières
Delphine FENASSE, L’Union européenne et l’Autorité palestinienne, Mémoire DEA 1998-1999 69
a-. Bilan du partenariat 38 b-. Le contexte d'adoption 40
2-. Les conférences euro-méditerranéennes de Palerme et de Stuttgart 41 a-. La session ministérielle informelle euro-méditerranéenne de Palerme 41 b-. La troisième conférence interministérielle euro-méditerranéenne de Stuttgart d’avril 1999 43
Partie 2-. Le contenu des relations euro-palestiniennes 45 Chapitre 1-. L'Europe, premier « bailleur de fonds » du processus de paix au Moyen-Orient 45
I-. Dans les domaines politiques et économiques 46 A-. Le soutien économique 46
1-. L'aéroport de Gaza 46 2-. Le développement des entreprises 46
B-. Le soutien politique 47 II-. Dans les domaines sociaux 49
A-. Les projets réalisés 49 B-. L'aide aux réfugiés palestiniens 51
1-. Le rôle de l'Union européenne dans l'Office de secours des Nations-Unies aux réfugiés palestiniens (UNRWA) 51
a-. Le programme d'éducation 52 2-. L’Office humanitaire de la Communauté européenne (ECHO) 53
Chapitre 2-. Les accords et règlements commerciaux et financiers 55 I-. Les règlements 55
A-. Le règlement d’octobre 1986 « Concernant le régime tarifaire applicable aux importations dans la Communauté de produits originaires des territoires occupés ». 55 B-. Le règlements« Relatif à la coopération financière et techniques avec les Territoires occupés » de juillet 1994 56
II-. L'accord intérimaire de 1997 57 A-. La structure de l'accord 58
1-. Le préambule de l'accord 59 2-. Les titres 59
B-. Les modalités de gestion des échanges commerciaux : vers une zone de libre échange euro-palestinienne 62
1-. Les produits industriels 62 2-. Les produits agricoles 62
CONCLUSION 64