lettre de l'observatoire n°12

8
Bulletin trimestriel de mai 2001, n° 11 édito La Caisse nationale d’assurance-maladie a confirmé, jeudi 15 février 2001, que la progression de la consommation médicale en 2000 est supérieure aux objectifs votés par le Parlement. Les dépenses d’assurance-maladie du seul régime général des salariés seraient en hausse de 6,3 % alors que le Parlement avait prévu pour 2000 une évolution de 2,5 %. La tendance pour 2001 relevée en janvier dernier n’est pas bonne puisqu’elle est proche du niveau des dépenses enregistrées au dernier trimestre 2000. C’est dans ce contexte que la lettre de l’observatoire a choisi de consacrer son sujet du trimestre aux lois de financement de la Sécurité sociale. En effet, depuis 1996, chaque automne, le Parlement doit discuter et voter une loi relative au budget de la Sécurité sociale. Pourquoi un nouvel instrument juridique est-il apparu nécessaire et s’agit-il d’un outil performant sont les questions qui ont guidé notre recherche. L’actualité juridique, économique et sociale est marquée par la parution prochaine de l’ouvrage demandé par l’observatoire alptis à Olivier Ferrier sur “Les très petites entreprises”. La lettre de l’observatoire consacre un article à deux des thèmes abordés dans l’étude. Malgré la progression des données sur les très petites entreprises, il s’agit d’un domaine qui reste mal connu : preuve s’il en est de la difficulté d’établir une définition uniforme de la très petite entreprise. Un aspect particulièrement important a également retenu notre attention : la démographie des très petites entreprises. Par ailleurs, la rubrique “libres opinions” mise en place au trimestre dernier traite à nouveau des retraites des médecins. Le Docteur André Rémond, ancien interne des hôpitaux de la région de Paris et administrateur supplément de la Caisse autonome de retraite des médecins de France (CARMF), nous rappelle la structure du régime de retraite des médecins avant d’évoquer les problèmes que rencontre le système. Le sujet du trimestre 2•5 Les lois de financement de la Sécurité sociale Actualité juridique, économique et sociale 6•7 Les très petites entreprises Libres opinions 7•8 Petite histoire de la retraite des médecins Pour en savoir plus 8 l’actualité juridique, économique et sociale des travailleurs indépendants leur ressemble : elle bouge tout le temps. Cette lettre en est un bon résumé. DE VOUS A NOUS, la lettre de l’observatoire L’observatoire alptis de la protection sociale réunit les associations de prévoyance de l’ensemble alptis, des universitaires, des chercheurs et des personnalités représentant le monde des travailleurs indépendants et des petites entreprises qui composent son Conseil d’administration. Son comité scientifique comprend un directeur scientifique : M. Piatecki, et des chercheurs dans différentes disciplines : MM. Bichot, Duru, Lancry, Riondet et Mmes Demeester et Hennion-Moreau. Son premier objectif est d’appréhender le problème de la protection sociale des travailleurs indépendants, des très petites entreprises et de leurs salariés. Son rôle est de recueillir et traiter des informations sur ces domaine, et de les diffuser au moyen d’ouvrages et d’une lettre trimestrielle. Celle-ci porte un regard sur l’actualité sociale, économique et juridique de ces populations. alptis observatoire de la protection sociale

Upload: alptis-assurances

Post on 17-Mar-2016

214 views

Category:

Documents


0 download

DESCRIPTION

Lettre de l'observatoire N°12

TRANSCRIPT

Page 1: Lettre de l'observatoire N°12

Bulletin trimestriel de mai 2001, n° 11

é d i t oLa Caisse nationale d’assurance-maladie a confirmé, jeudi 15 février 2001, que la progression de la consommationmédicale en 2000 est supérieure aux objectifs votés par leParlement. Les dépenses d’assurance-maladie du seul régimegénéral des salariés seraient en hausse de 6,3 % alors que leParlement avait prévu pour 2000 une évolution de 2,5 %. La tendance pour 2001 relevée en janvier dernier n’est pas bonnepuisqu’elle est proche du niveau des dépenses enregistrées audernier trimestre 2000. C’est dans ce contexte que la lettre del’observatoire a choisi de consacrer son sujet du trimestreaux lois de financement de la Sécurité sociale. En effet, depuis 1996, chaque automne, le Parlement doitdiscuter et voter une loi relative au budget de la Sécuritésociale. Pourquoi un nouvel instrument juridique est-il apparunécessaire et s’agit-il d’un outil performant sont les questionsqui ont guidé notre recherche.L’actualité juridique, économique et sociale est marquée par la parution prochaine de l’ouvrage demandé par l’observatoirealptis à Olivier Ferrier sur “Les très petites entreprises”. La lettre de l’observatoire consacre un article à deux des thèmesabordés dans l’étude. Malgré la progression des données sur lestrès petites entreprises, il s’agit d’un domaine qui reste malconnu : preuve s’il en est de la difficulté d’établir une définitionuniforme de la très petite entreprise. Un aspect particulièrementimportant a également retenu notre attention : la démographiedes très petites entreprises.Par ailleurs, la rubrique “libres opinions” mise en place autrimestre dernier traite à nouveau des retraites des médecins. Le Docteur André Rémond, ancien interne des hôpitaux de larégion de Paris et administrateur supplément de la Caisseautonome de retraite des médecins de France (CARMF), nousrappelle la structure du régime de retraite des médecins avantd’évoquer les problèmes que rencontre le système.

Le sujet du trimestre 2•5

Les lois de financement de la Sécurité sociale

Actualité juridique, économiqueet sociale 6•7

Les très petites entreprises

Libres opinions 7•8

Petite histoire de la retraite des médecins

Pour en savoir plus 8

l’actualité juridique, économique et sociale des travailleursindépendants leur ressemble : elle bouge tout le temps.

Cette lettre en est un bon résumé.

DEVOUS

A NOUS,

la lettre de l’observatoireL’observatoire alptis de la protection sociale

réunit les associations de prévoyance de l’ensemble alptis, des universitaires,

des chercheurs et des personnalitésreprésentant le monde des travailleurs

indépendants et des petites entreprises quicomposent son Conseil d’administration.

Son comité scientifique comprend un directeur scientifique : M. Piatecki, et

des chercheurs dans différentes disciplines :MM. Bichot, Duru, Lancry, Riondet et

Mmes Demeester et Hennion-Moreau.

Son premier objectif est d’appréhender le problème de la protection sociale

des travailleurs indépendants, des très petitesentreprises et de leurs salariés.

Son rôle est de recueillir et traiter des informations sur ces domaine, et de lesdiffuser au moyen d’ouvrages et d’une lettre

trimestrielle. Celle-ci porte un regard sur l’actualité sociale, économique

et juridique de ces populations.

alptis

observatoire

de la protection sociale

Page 2: Lettre de l'observatoire N°12

Le sujet du trimestre

2

En 1996, le Parlement doit se prononcer sur unenouvelle loi relative au financement de la Sécuritésociale. Pourquoi un tel instrument est-il apparunécessaire dans le paysage politique français ?Deux éléments peuvent être relevés : l’échec du modede gestion de la Sécurité sociale et des difficultésfinancières liées à la conjoncture économique.En ce qui concerne le mode de gestion, rappelonsque la Sécurité sociale est un service public géré auniveau local et régional par des organismes de droitprivé et au niveau national par des établissementspublics, étant précisé que chaque branche - maladie,maternité, invalidité, décès ; vieillesse ; accidents dutravail, maladies professionnelles ; famille - disposede sa propre caisse. A l’origine, les syndicatsdésignaient les administrateurs de chaque caisse. La loi du 30 octobre 1946 a remis en cause cesystème pour éviter la domination d’un syndicatmajoritaire et l’a remplacé par des élections. Lesordonnances Jeanneney de 1967 reviennent unenouvelle fois sur ce mode de désignation : les élections sont donc supprimées et le paritarismeentre les syndicats et le patronat est institué. En 1982, on procède à nouveau à l’élection desadministrateurs. Finalement, l’ordonnance du 24 avril 1996 - consécutive à l’annonce du plan Juppé - prévoit la désignation de tous les membresdu Conseil d’administration : les représentants desassurés sociaux le sont par les organisationssyndicales représentatives au niveau national tandisque les représentants des employeurs le sont parleurs organisations professionnelles égalementreprésentatives au niveau national. Les difficultés dela Sécurité sociale et les nouveaux pouvoirs accordésau Parlement montrent l’incapacité desadministrateurs à trouver des solutions poursauvegarder l’équilibre financier des régimes deSécurité sociale. Ils vont plutôt laisser à l’Etat le soinde prendre des mesures impopulaires. Il fauttoutefois nuancer ce point car c’est l’Etat quidétermine les taux de cotisation et le niveau desprestations. Le pouvoir des partenaires sociauxapparaît donc relatif.En ce qui concerne les difficultés financières liéesà la conjoncture économique, il faut préciser quependant longtemps la croissance a permis dedégager les ressources nécessaires pour faire face auxdépenses croissantes liées à l’amélioration descouvertures offertes par la Sécurité sociale. En 1974,lorsque le premier choc pétrolier survient, lesressources sont plus difficiles à trouver alors que lesdépenses continuent de progresser. Depuis 1975, laSécurité sociale fait donc régulièrement l’objet deplans de redressement. Malgré les réformes, la

situation financière de la Sécurité sociale esttoujours déplorable. Les déficits financiersatteignaient 60 milliards de francs en 1994 et près de65 milliards en 1995. Au début des années 90, pourles résorber et, par là même assurer la pérennité dusystème, la Sécurité sociale a eu recours à l’emprunt.La situation ne s’est pourtant pas arrangée puisqu’en1995, l’endettement du régime général s’élevait à 120 milliards de francs. Après que des forumsrégionaux de la protection sociale, animés par lesministres concernés, aient été organisés, le Premierministre de l’époque - Alain Juppé - a présenté auParlement une réforme. Il déclare alors à l’Assembléenationale, le 15 novembre 1995, que l’ambition duGouvernement est de “sauver notre système deprotection sociale parce qu’il est notre meilleurearme pour lutter contre l’exclusion et réduire lafracture sociale ; construire, pour nos enfants, laSécurité sociale du XXIe siècle ; imaginer un nouveaucontrat de sécurité et de solidarité sociale entre lesFrançais”.Parmi les trois grands axes de la réforme - que sontune Sécurité sociale plus juste, une responsabilisationdes acteurs et une mise en place des mesures desauvegarde -, un des aspects de la responsabilité desacteurs de la Sécurité sociale va retenir notreattention : la réforme institutionnelle. En effet, le Premier ministre souhaite mettre le Parlement aucœur de la nouvelle chaîne de responsabilité. Il enconstituera même selon les termes du Premierministre, “la clé de voûte” ; il “deviendra un acteurfondamental de notre protection sociale”.Le Gouvernement a dû opérer une réformeconstitutionnelle pour instituer un nouveau moyende contrôle pour le Parlement. Désormais, grâce àla loi constitutionnelle n° 96-138 du 22 février1996, le Parlement peut se prononcer surl’évolution des recettes et des dépenses desrégimes obligatoires de la Sécurité sociale.Quelques années après la création des lois definancement de la Sécurité sociale, il convient d’enétablir un bilan. Même si ce type de loi apparaît àbien des égards nécessaire, un certain nombred’éléments montrent qu’il s’agit d’un outilperfectible.

LA LOI DE FINANCEMENT DE LA SÉCURITÉ SOCIALE : UN OUTIL NÉCESSAIRE

L’institution d’une loi de financement relative à laSécurité sociale est apparue nécessaire, compte tenude la place et du poids financier du “budget socialde la Nation” dans le budget de l’Etat. Depuis la loiconstitutionnelle du 22 février 1996, la loi de

Les lois de financement de la Sécurité sociale

Page 3: Lettre de l'observatoire N°12

financement de la Sécurité sociale octroyant unpouvoir accru au profit du Parlement est une réaliténouvelle. Pourtant il faut savoir qu’il s’agit là d’unepréoccupation et même d’une revendicationancienne.

Une préoccupation ancienneLe fait que le budget de la Sécurité sociale soit enpartie financé par des ressources issues du budgetde l’Etat est l’élément déclencheur du souciparlementaire d’obtenir un élargissement de sespouvoirs. Ce souhait trouve sa source dans l’article14 de la Déclaration des droits de l’Homme et ducitoyen de 1789. Il est en effet prévu que “tous lescitoyens ont le droit de constater, par eux-mêmesou par leurs représentants, la nécessité de lacontribution publique, de la consentir librement,d’en suivre l’emploi et d’en déterminer la quotité,l’assiette, le recouvrement et la durée”.Le Parlement revendique bien un accroissementde ses pouvoirs dans la mesure où il disposait, dèsavant la création de cette catégorie de lois, d’unecertaine compétence. En effet, en vertu de l’article 34de la Constitution du 4 octobre 1958, il appartientaux parlementaires de “déterminer les principesfondamentaux de la Sécurité sociale” mais égalementde “fixer les règles concernant l’assiette, le taux et lesmodalités de recouvrement des impositions detoutes natures”, étant précisé que les recettesperçues au profit de la Sécurité sociale sontcomprises dans les impositions de toutes natures. Lacréation du budget annexe des prestations socialesagricoles (BAPSA) a permis au Parlement de prendreposition dans ce domaine. La loi de finances estaussi un moyen d’obtenir des informations enmatière de financement de la protection sociale.Outre ces dispositions, le Parlement bénéficiaitégalement d’un certain nombre d’informationscomme le rapport du Gouvernement annexé auprojet de loi de finances précisant l’effort social dela Nation.Toutes ces possibilités disparates ne suffisaient pasà permettre un contrôle efficace du Parlement.C’est pourquoi les parlementaires ont, à maintesreprises, tenter d’élargir leur champ de compétences.Dès 1979, un rapport de la Commission de contrôlede la Sécurité sociale mettait en évidence lanécessité d’un contrôle parlementaire dans cedomaine. Après le rejet d’une réforme de laConstitution, le rapport proposait un aménagementde la procédure budgétaire pour permettre auParlement de vérifier “les concours budgétaires auxorganes de la Sécurité sociale” et de se prononcer surles comptes prévisionnels de celle-ci. De 1980 à 1983,on a toujours conscience de l’absence de dispositionspermettant au Parlement d’inclure le budget socialde la Nation dans le débat parlementaire.

Des propositions ont été faites par voied’amendements parlementaires. Malheureusement,compte tenu de leur caractère constitutionnel, cesderniers ont été déclarés irrecevables. En d’autrestermes, l’Assemblée nationale seule étaitincompétente en la matière. Une proposition de loiorganique émanant du Président de la Commissiondes finances de l’Assemblée nationale - Micheld’Ornano - voit le jour. L’idée est de positionner laréforme dans le cadre de l’article 34 de laConstitution (il s’agit de l’article relatif aux pouvoirsdu Parlement) et d’interpréter les dispositions defaçon suffisamment extensive pour en déduire deuxéléments : d’une part, “l’existence d’une autorisationannuelle de percevoir les cotisations des régimesobligatoires d’assistance et de Sécurité sociale” etd’autre part, “la fixation par le Parlement dumontant prévisionnel des dépenses annuelles de cesrégimes et des données générales de l’équilibrefinancier de chaque régime”. Compte tenu du risquede refus du Parlement d’autoriser la perception descotisations, la proposition fut un échec. Suite à cesatermoiements, le Parlement s’est contenté d’obtenirun renforcement de son droit à l’information.L’accentuation des déficits dans les années 90 a, unenouvelle fois, déclenché la polémique. Le planJuppé aura donc eu le mérite de mettre enfin enplace un dispositif nouveau permettant au débatet au vote parlementaire de s’exprimer et ce,grâce à la procédure de révision de la Constitution.La mise à disposition d’un outil permettant auParlement de discuter sur le “budget social de laNation” est ardemment désirée. Ce souhait trouvesa concrétisation en 1996 : la loi de financement dela Sécurité sociale est une réalité nouvelle pour lavie parlementaire.

Une réalité nouvelleLa loi de financement de la Sécurité sociale est unenouveauté à bien des égards : il s’agit d’une nouvellecatégorie de loi qui confère notamment despouvoirs nouveaux au Parlement. Aux termes del’article 34 de la Constitution, “les lois definancement de la Sécurité sociale déterminent lesconditions générales de son équilibre financier et,compte tenu de leurs prévisions de recettes, fixentles objectifs de dépenses”. Avant la mise en place de cette nouvelle procédurelégislative, le rôle du Parlement était limité “au votedes crédits alloués par l’Etat aux régimes de Sécuritésociale” et, à partir de 1994, “à débattre sans vote, del’évolution des recettes et des dépenses des régimesobligatoires, au vu du rapport gouvernemental”.La création de cette nouvelle catégorie de loispermet au Parlement d’avoir un regard accru surles finances destinées à la Sécurité sociale.Dorénavant, et aux termes de la loi organique

3

Le sujet du trimestre

Page 4: Lettre de l'observatoire N°12

n° 96-646 du 22 juillet 1996, le Parlement doit“approuver les orientations de la politique de santéet de Sécurité sociale” ainsi que “les objectifsdéterminant les conditions générales de l’équilibrefinancier de la Sécurité sociale”. Il doit en outre“prévoir, par catégorie, les recettes de l’ensemble desrégimes obligatoires de base et des organismes crééspour concourir à leur financement”. Il est égalementchargé de fixer d’une part, “l’objectif national dedépenses d’assurance maladie pour tous les régimes”et d’autre part, “par branche, les objectifs dedépenses des différents régimes obligatoires de basecomportant plus de 20 000 cotisants actifs ouretraités titulaires de droits propres”. Il doit enfin“déterminer, pour chaque régime entrant dans lechamp d’application de la loi et des organismesconcourant à leur financement, les limites desressources de trésorerie auxquelles ils peuventlégalement recourir”.L’intervention du pouvoir parlementaire enmatière de finances sociales apparaît pleinementjustifié à différents points de vue. En effet, il estimportant de signaler que le budget social, autrementdit les dépenses et les recettes affectées à la Sécuritésociale, est d’un montant supérieur à celui dubudget de l’Etat. A cette remarque, s’ajoute uneprécision non négligeable et qui conforte l’idée de lanécessité de l’intervention du pouvoir législatif : les ressources dont dispose la Sécurité socialerésultent principalement de prélèvements sociauxassis sur les revenus du travail, c’est-à-dire descotisations tant salariales que patronales. MartinHirsch1 explique d’ailleurs que c’est “la protectionsociale qui est responsable de la totalité del’augmentation des prélèvements obligatoires depuis1974, alors que les prélèvements fiscaux sont restéspratiquement constants en pourcentage du PIB”.Enfin, selon Charles Descours - sénateur et auteur durapport relatif aux lois de financement de la Sécuritésociale pour le compte de la Commission des affairessociales du Sénat -, la nécessité d’accorder un droitde regard plus soutenu au Parlement met en exerguel’incapacité des partenaires sociaux à maintenirl’équilibre financier des comptes. Il s’agit ni plusni moins de l’échec du système mis en place par lesordonnances Jeanneney en 1967.La loi de financement de la Sécurité sociale apparaîtcomme un instrument important voireincontournable pour permettre au Parlementl’exercice d’un réel contrôle dans ce domaine.

LA LOI DE FINANCEMENT DE LA SÉCURITÉ SOCIALE : UN OUTIL PERFECTIBLE

L’instauration des lois de financement de la Sécuritésociale permet aux parlementaires de débattre un

thème phare de la vie sociale française. Même s’ils’agit d’un instrument juridique efficace pourcontrôler l’action du Gouvernement dans cedomaine, un certain nombre d’insuffisances estapparu ; quelques améliorations seraient doncsouhaitables.

Des insuffisances constatéesLes parlementaires ont mis en évidence desimperfections qui sont souvent de naturematérielle. Le projet de loi de financement de laSécurité sociale élaboré par le Gouvernement doits’accompagner d’un certain nombre d’annexes dontun rapport qui a pour objet de présenter “les objectifs qui déterminent les conditionsgénérales de l’équilibre financier de la Sécuritésociale”. Ce document soulève un certain nombre dedifficultés dans la mesure où il ne remplit pas safonction. En effet, le rapport ne met pas en avantles grandes orientations susceptibles de faciliterla discussion du projet lui-même. Il s’analyseplutôt en un savant mélange d’“exposés des motifsdes articles du projet”, de “rappel des priorités desanté publique”, de “succession de déclarationd’intention” et d’“engagements pris par leGouvernement”. Finalement, ce document pouvantêtre amendé par les parlementaires perd saspécificité. Le Conseil d’Etat, dans l’arrêt Rouquetterendu le 5 mars 1999, a d’ailleurs dénié toute portéenormative au rapport gouvernemental : “les orientations et les objectifs présentés par lerapport accompagnant la loi de financement de laSécurité sociale ne sont pas revêtus de la portéenormative qui s’attache aux dispositions de celle-ci”.Il en résulte un intérêt limité pour la représentationnationale de proposer des amendements.

Par ailleurs, si la loi de financement doit êtrel’occasion d’un débat parlementaire, la multiplicationde débats extérieurs - tels que les Etats généraux dela santé, la Conférence nationale de la famille ou lamission sur les retraites - constitue autantd’éléments échappant au Parlement. Des organismes chargés de la santé publique ontégalement été mis en place2 : l’objectif de cettedémarche est d’aider les hommes politiques à définirles grandes orientations dans ce domaine. Si l’intention était louable, il en va différemmentdans la pratique car la coordination entre lestravaux des différents organismes et ceux relatif à lapréparation du projet de loi de financement de laSécurité sociale est difficilement possible. En définitive, l’influence des propositions de cesorganes sur le projet est fortement limitée.Les parlementaires relèvent d’importants problèmesde nature comptable. Les informations fournies

4

Le sujet du trimestre

1Martin Hirsch, Les enjeux de la protection sociale, Montchrestien, coll. “clefs” politique, 1994, p. 41.2Le Haut comité de la santé publique et la Conférence nationale de la santé.

Page 5: Lettre de l'observatoire N°12

5

Le sujet du trimestre

ne sont pas particulièrement claires. S’ajoute à celades soucis dans les délais : les comptes de laSécurité sociale sont souvent remis tardivement etleur fiabilité est parfois incertaine.Les parlementaires souhaitent opérer un contrôleplus efficace sur le financement de la Sécuritésociale ; ils ont donc fait un certain nombre depropositions en ce sens.

Des améliorations souhaitablesSuite aux dysfonctionnements rencontrés, lesparlementaires ont donc émis des suggestions.Néanmoins, de façon plus globale, on observera queles difficultés sont également liées à ladétermination de la nature de la Sécurité sociale engénéral et de la loi de financement en particulier.Les parlementaires souhaitent d’une part,“redistribuer les débats pour recentrer les loisde financement” et d’autre part, “clarifier lesenjeux des finances sociales”. En redistribuant lesdébats, le Parlement espère retrouver un rôle majeurdans le domaine sensible qu’est la protection sociale.Ceci suppose qu’en plus d’une loi annuelle definancement de la Sécurité sociale, soient mises enplace des lois pluriannuelles d’orientationspermettant de fixer les grands axes de la politiquede la santé et de la Sécurité sociale, en dehors detout aspect pécuniaire. Par ailleurs, lesparlementaires préconisent le vote de lois portantdiverses mesures d’ordre social pour alléger les loisde financement et permettre un examen plus précisdu budget stricto sensu. La clarification des enjeuxdes finances sociales doit principalement permettreune meilleure lisibilité des lois de financement maiségalement mieux délimiter les frontières entre loi definancement de la Sécurité sociale et loi de finances.Outre les aménagements matériels prônés par lesparlementaires, il serait nécessaire de réfléchir sur lavéritable nature juridique de cette loi et, par voiede conséquence, sur sa portée. La spécificité de la loide financement de la Sécurité sociale est d’une part,d’affecter un domaine sensible et d’autre part, depeiner à s’installer dans la vie politique. En effet, il s’agit d’une catégorie de loi hybride,se rapprochant fortement des lois de finances.C’est la raison pour laquelle elle doit évoluer, jouird’une plus grande autonomie. La loi de financementde la Sécurité sociale a un statut constitutionnelidentique à celui des lois de finances. Ces deux loissont évoquées à l’article 34 de la Constitution.Toutes deux sont soumises à un contenu strict - desamendements qui ne concerneraient ni l’équilibrefinancier des régimes obligatoires de base, ni lecontrôle du Parlement sur l’application des lois definancement seraient irrecevables, autrement dit les“cavaliers sociaux” sont prohibés ; le Conseilconstitutionnel exerce d’ailleurs son contrôle sur ce

point - et à des délais de vote impératifs - laprocédure de vote prévue à l’article 47-1 de laConstitution est calquée sur celle de la loi definances énoncée à l’article 47 de ladite Constitution.Malgré tous les points communs, la loi definancement de la Sécurité sociale se distingue de laloi de finances dans la mesure où sa portée est plusréduite. En effet, il s’avère que la loi de financementde la Sécurité sociale n’est pas une loibudgétaire. Elle ne constitue donc pas “un acte deprévision et d’autorisation portant sur un ensemblede dépenses et de recettes et ayant pour effet delimiter les pouvoirs des autorités chargées de sonexécution”. La loi ne donne que des prévisions derecettes ; il ne s’agit donc pas d’une autorisation deperception des recettes comme pour les lois definances. Les dépenses fixées par la loi peuvent êtredépassées ; ainsi le pouvoir du Parlement se résume-t-il à la détermination des objectifs d’évolution desdépenses. De plus, les sanctions prévues sontlimitées à des reversements d’honoraires. L’absence de caractère budgétaire de la loi ne lui ôtepas les effets normatifs qu’elle produit. La loi ne serésume pas à une simple déclaration d’intention ; le Conseil constitutionnel précise que les pouvoirslégislatif et réglementaire se doivent de respecter lesconditions générales de l’équilibre financierdéterminé par la loi.Le caractère hybride de la loi de financement de laSécurité sociale ainsi que les éléments de similitudeavec la loi de finances conduisent à se poser laquestion de l’intérêt de ce type de loi. Ne s’agit-ilpas d’un instrument juridique superflu comptetenu de l’existence de la loi de finances ? Malgré cesinterrogations, il faut noter que cette loi arenforcé sensiblement le pouvoir de contrôle duParlement. Cette intervention législative estpleinement approuvée dans la mesure où on assiste àune fiscalisation croissante des recettes du “budgetsocial”.

Page 6: Lettre de l'observatoire N°12

6

“Les petites et moyennes entreprises (PME)constituent la quasi-totalité du parc des entrepriseset la majorité d’entre elles sont des très petitesentreprises (TPE) qui restent toujours petites. Ce sont les entrepreneurs qui insufflent ladynamique de la création d’emploi”. Malgré la placenon négligeable qu’occupe les TPE dans la vieéconomique française, peu d’études y sontconsacrées. C’est pourquoi l’observatoire alptis de laprotection sociale a demandé à Olivier Ferrier deréaliser un ouvrage sur cette question. Les travauxexistants envisagent les TPE sous l’angle de lagestion. Ici, l’auteur propose une analyseéconomique des TPE. Il aborde successivement les thèmes suivants : qu’est-ce qu’une TPE ? ; le financement des TPE ; la théorie économique desTPE ; la démographie des TPE ; les TPE en Europe ;les TPE dans les secteurs d’activité et les TPE dans lemonde.La lettre de l’observatoire a choisi de vous présenterl’un de ces thèmes : la démographie des TPE. Avant d’envisager ce point, il semble important dedévelopper la notion de TPE.

LA NOTION DE TPE

Dans ce domaine, il n’existe pas de définitionuniforme. En revanche, différentes approches sontretenues :L’approche quantitative propose de définirl’entreprise ou la PME “comme un centre decontrôle dont la propriété est délimitée”. En d’autrestermes, dans cette approche la structure juridique seconfond pleinement avec celui qui la dirige.L’approche qualitative envisage l’entreprise commeune “boîte noire”. Quatre grands modes demanagement et d’organisation (le type d’origine oude propriété de l’entreprise ; les stratégies ou lesobjectifs de la direction ; le stade d’évolution, dedéveloppement ou d’organisation de la firme ; letype de secteur ou d’opportunité de marchés danslequel évolue l’entreprise) constituent autant decritères permettant de déterminer à quelle catégoried’entreprise appartient une entreprise donnée.L’approche internationale est très hétéroclite dansla mesure où elle varie selon les pays. Par exemple,l’OCDE a opté pour le critère du nombre de salariésdans l’entreprise tandis que certains pays opèrentune distinction en fonction du secteur d’activitéconcerné.L’approche composite constitue en quelque sortela synthèse des trois premières approches dans lamesure où elle tient compte d’un certain nombre decritères : la dimension brute de l’entreprise ;

le secteur d’activité ; le marché ; le contrôle etl’organisation ; la stratégie ainsi que le recours ounon à l’innovation. Est donc considérée comme uneTPE, une entreprise dont les critères se situent dansune zone minimale.L’approche technologique consiste à dire que lesTPE peinent à surmonter les “barrièrestechnologiques”. Cette conception permet d’établirune frontière nette entre les TPE et les grandesentreprises : si les premières “se positionnent versdes activités essentiellement soutenues par lademande intérieure des ménages” et sont“structurées autour de marchés locaux”, les secondesse dirigent plus volontiers vers des “activitéssoutenues par la demande extérieure”.Malgré l’existence de différentes conceptions de lanotion de TPE, il n’en demeure pas moins que lecritère de l’effectif reste prépondérant. Lorsquel’entreprise ne dispose pas encore de salariés, le lienqui unit le dirigeant à son entreprise est absolu ; il s’agit là d’un facteur important permettant decomprendre certains aspects de la démographie des TPE.

LA DÉMOGRAPHIE DES TPE

L’étude de la démographie des TPE suppose que l’ons’intéresse à trois éléments : la création, l’existenceet la disparition de l’entreprise.

La création d’entrepriseLa France mesure la création d’entreprise parréférence au registre mensuel des mouvementsd’entreprises, étant précisé que les chiffres netiennent pas compte de “l’enregistrement d’unitéséconomiquement inactives” mais prennent enconsidération “des réactivations et des reprisesd’unités mises en sommeil”. Il faut savoir qu’entre1987 et 1995, on a observé une chute de la créationdes TPE. Les TPE employant un ou deux salariés etcelles ayant six à neuf employés ont été les plusaffectées : pour les premières, on enregistre 83,7 %de créations en moins tandis que pour les secondes,on note une baisse de 82,6 %. Ce mauvais résultatconcerne toutes les régions françaises même s’il fautnoter une progression des TPE sans salariés en Ile deFrance (3,9 %).Cette situation est paradoxale car, dans un mêmetemps, un sondage de mars 1998, réalisé par l’IFOP,montre qu’1,2 millions de Français déclaraient avoirun projet de création d’entreprise. Il s’agit d’un chiffrenon négligeable qu’il faut cependant nuancer :les personnes répondent souvent de manière trèsspontanée ; la fiabilité des chiffres indiqués dans lesondage est donc toute relative.

Actualité juridique, économique et sociale

Les très petites entreprises

Page 7: Lettre de l'observatoire N°12

7

Libres opinions

Petite histoire de la retraite des médecinspar le Docteur André Remond

L’ARCHITECTURE DU SYSTÈME DE RETRAITE DES MÉDECINS

Le régime de retraite des médecins a vu le jour en1947 et est devenu effectif en 1949. Il est géré par laCaisse autonome de retraite des médecins de France(CARMF). Au départ, il a été comme ses frères desprofessions libérales composé de deux régimes ;tous les deux basés sur la répartition qui reste sonactuel credo. Aujourd’hui, le système de retraite desmédecins est composé de trois étages.

Un régime de base comportant une cotisation dontune large partie a, comme pour d’autres caisses,

“compensé” des régimes spéciaux déficitaires ; voire,à son départ, versé des allocations à des catégoriessociales qui acceptaient mal de “payer” descotisations. Il est sous la tutelle du Ministère desaffaires sociales et toute idée de modification de soncalcul reste à ce jour soumise à cette tutelle qui enfait un système de compensation national. A noter simplement que le prélèvement sur lesrevenus n’est pas au même pourcentage pour toutesles catégories sociales et que les professions de santésont pour ce régime les plus ponctionnés. Ce régime assure 15 % du total de la retraite àce jour.

Actualité juridique, économique et sociale

Le Gouvernement a mis en place une politiqueen faveur du développement de la créationd’entreprise notamment grâce à des simplificationsd’ordre administratif, des aides financières ou encoredes dispositions fiscales privilégiées.Malgré ces différents éléments, un certainnombre d’obstacles à la création d’entreprisesont mis en exergue dans l’ouvrage. En effet, onpeut relever quelques inégalités : par exemple,“l’accès à l’accueil, l’orientation et l’accompagnementà la création d’entreprise n’est pas le même pourtous” ; les créateurs d’entreprise sont pénalisés enmatière de protection sociale (leur couverturesociale n’est pas aussi protectrice que celle dessalariés) ; “l’accès au financement se fait audétriment des “petits” porteurs de projets”.On observe que la situation géographique est unélément prépondérant dans la création d’entreprisedans la mesure où que les TPE sont plus présentesdans le sud de la France que dans le nord. Certeselles sont de moindre taille mais jouent un rôleéconomique important.

L’existence et la disparition de l’entrepriseUne étude menée par l’Insee sur la survie quelquesannées plus tard des entreprises créées en 1987 meten évidence que la forme juridique de l’entrepriseest un élément important. En effet, il apparaîtqu’une entreprise créée sous la forme d’une sociétéanonyme ou d’une société à responsabilité limitée àplus de chances de survivre que celle qui l’a été sousle statut de travailleur indépendant. Selon qu’ils’agisse d’un artisan, d’un commerçant ou d’unmembre d’une profession libérale, les données sont

quasiment similaires : le taux de survie en 1994 variede 28 à 45 % selon la catégorie de travailleurindépendant.De manière plus générale, il faut retenir que lataille initiale de l’entreprise est un élémentdéterminant de sa survie au bout d’une année.En effet, Eurostat, dans son rapport annuel sur “lesentreprises en Europe” a souligné qu’une entrepriseoù il n’y a que le propriétaire a statistiquementparlant moins de chance de survivre après une annéede fonctionnement qu’une entreprise disposant d’aumoins un salarié. En France, Eurostat a relevé qu’uneentreprise restreinte au seul dirigeant a environ 80 %de chances de survivre après la première annéetandis qu’une entreprise ayant embauché jusqu’àdeux salariés passe à 92 % de chances de survie. Une entreprise employant au moins vingt salariésdispose quant à elle d’un pourcentage de survie de95 %. A noter qu’après trois années d’existence, unenouvelle entreprise voit son taux de survie chuter à65 % puis à 50 % après cinq ans.Parmi les diverses raisons qui justifient qu’uneentreprise sur deux disparaisse après cinq annéesd’existence, quatre sont majeures. La défaillanced’une entreprise résulte principalement des erreursdu dirigeant dans sa gestion mais également desproblèmes de trésorerie liés au défaut de paiementde nombres de débiteurs, des difficultés liées à laconjoncture économique ou à une mauvaiseorganisation de la structure de financement(l’entreprise perd son indépendance financière). Pour éviter la perte d’un nombre non négligeable depetites entreprises, il est préconisé de mettrel’accent sur la formation des dirigeants.

Page 8: Lettre de l'observatoire N°12

Libres opinions

8

Un régime complémentaire, lui aussi basé sur descotisations proportionnelles aux revenus, est géréplus directement par la CARMF avec l’approbationde la tutelle. Nous verrons plus loin les problèmesde ce régime qui représente 40 % de la retraite.Le dernier né “l’Avantage Social Vieillesse” (ASV)a été crée en 1960 au moment de la signature despremières conventions médicales. Il s’agissait,moyennant une diminution des honoraires, de faireassumer par les caisses maladies une partie de laretraite suivant la formule 2/3 payés par la caisse et1/3 payé par le médecin. Ce régime, facultatif audépart (l’on signait individuellement la convention),est devenu obligatoire après référendum en 1972pour tous les médecins conventionnés avec laSécurité sociale. Il s’agit en somme de compenser unebaisse des honoraires pendant une période d’inflationrapide. Ce régime assure 45 % de la retraite.

LES PROBLÈMES RENCONTRÉS PAR LE SYSTÈME

La retraite des médecins était et reste fixée à 65 anssans limitation d’horaires de travail. Jusqu’en 1993, lesystème de retraite des médecins n’a guère connu deproblèmes. A partir de cette date vont se profilerdifférents facteurs d’un avenir relativement pessimiste :• Le numerus clausus, institué en 1970, va fatalement

réduire le nombre de cotisants d’autant quebeaucoup d’étudiants se dirigeront vers descarrières hospitalières ou salariées.

• La sortie de carrière de nombreux confrères entre2005 et 2015 laisse à prévoir qu’il faut adopter desmesures financières et il n’y en a pas tellementdans un régime par répartition : baisser lesretraites ou augmenter les cotisations ou les deuxà la fois.

Or, la CARMF n’a pas de prise sur le régime de basequi est dirigé par l’État. Elle n’est que gestionnaire dusystème ASV dont l’initiative de fonctionnementrevient à la Caisse d’assurance maladie, les syndicatsmédicaux plus divisés par des questions de personnesque d’union dans l’action et les études prospectives.

Cette situation de tension profite aux caisses qui,dans leur esprit d’économie, semblent oublier qu’ils’agit d’un acquis social de la profession. En effet, laprofession a accepté que le prix de la consultationn’augmente pas en fonction du coût de la vie alorsque les charges des cabinets médicaux augmentaientde plus de 15 % de cet indice. Elles n’auront de cessed’inventer un changement de répartition descotisations (Décret Teulade n° 93-7663 du 29 mars1993 : 50 % aux caisses, 50 % aux cotisants qui nesera abrogé que six mois après un changement demajorité gouvernementale). Ce qui en dit long surl’état d’esprit régnant dans les plus hautes sphèresdes cabinets ministériels. En ce qui concerne la gestion du régimecomplémentaire (théoriquement dévolue à laCARMF), deux conceptions aux conséquencesradicalement opposées sont apparues :• les uns prônent un plan de diminution de 6 % dès

1995 suivi d’un autre de 6 %, soit une baisse de 12 % en 10 ans et une augmentation descotisations de 6 à 14 % des revenus (ramenés à 12 % après rectification des calculs).

• Les autres défendent une augmentation discrètedes cotisations de 6 à 8 % des revenus mais unebaisse drastique de 20 % des allocations de moinsde 10 ans. D’où une guerre de générationstournant actuellement à l’avantage des seconds,suivant les résultats aux élections du Conseild’administration (où les retraités sont sous-représentés).

Pour terminer, disons que la retraite moyenne desmédecins est actuellement de 15 800 F par mois, cequi est peu si l’on tient compte des 10 ans d’études,d’horaires de travail sans mesure et deresponsabilités de plus en plus accablantes. Maisdisons aussi que le Gouvernement qui parletoujours du respect des droits acquis n’a rien fait àce jour pour tenir sa parole.

Cet article n’engage que son auteur et non l’observatoirealptis de la protection sociale.

Pour en savoir plus

Le financement de la Sécurité sociale et le planJuppé ont suscité une importante littératurejuridique.Pour une information complète, vous pouvezconsulter les numéros spéciaux de la revue Droitsocial :• Le plan Juppé, mars 1996• Le plan Juppé II, septembre-octobre 1996• le plan Juppé III, septembre-octobre 1997

est une publication trimestrielle éditée parl’observatoire alptis de la protection sociale

12, rue Clapeyron - 75379 Paris Cedex 08Tél : 01 44 70 75 64 - Fax : 01 44 70 75 70

E-mail : [email protected]

Directeur de publication : G. Coudert

A contribué à la rédaction de ce numéro : C. Habert

Réalisation : C. Dumollard

Dépôt légal en cours

la lettre de l’observatoire