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1 ère journée d’étude africaine en comptabilité et contrôle 1 LES MANIPULATIONS DES NOMBRES COMPTABLES DANS LES ENTREPRISES : ÉTUDE DES CAS AU CAMEROUN Gervais Félix MINKO Enseignant Chercheur ESSEC, Université de Douala, Cameroon [email protected] Résumé Depuis la faillite d’Enron en décembre 2001, une abondante littérature s’est développée autour de la problématique de détection des cas de manipulation des nombres comptables (MNC) publiés par les dirigeants d’entreprises. Les nombreux scandales financiers au cours de ce siècle ravivent cette problématique en mettant en évidence, les limites méthodologiques des modèles traditionnels (académiques et professionnels) de détection. La présente étude propose le modèle hybride comme une extension méthodologique exploratoire de détection des cas de MNC. La principale question évoquée étant de savoir si le modèle hybride est performant pour détecter les situations de MNC. L’étude empirique porte sur 185 entreprises installées au Cameroun. Le processus d’étude quanti-qualitatif mis en œuvre consiste à appliquer, dans un premier temps aux nombres comptables des entreprises retenues, le modèle quantitatif d’Imhoff (1977) ; en retenant pour hypothèse, le lissage des résultats pour des motifs fiscaux. La seconde étape consiste à approfondir la détection quantitative, par des analyses qualitatives inspirées des pratiques professionnelles. Les principaux résultats montrent que le modèle hybride fournit des arguments décisifs permettant d’apprécier les cas de MNC. Mots clés : Cas de manipulation - Nombres comptables - Modèles quantitatifs - Méthodologie qualitative. Abstract Since the failure of Enron in December 2001, an abundant literature has developed on the issue of detection of cases relating to manipulation of accounting figures, published by companies’ Managers. The various financial scandals during this century revive this subject by raising the limits of traditional models detection (academic and professional). The current investigation proposes an hybrid model as a methodological extension to the detection of cases relating to manipulation of accounting figures which makes the compromise between mutual forces of traditional models. The main issue is to know whether enforcement of the hybrid model is efficient in the process of detection of MNC cases. The empirical investigation will focus on the example of 185 companies settled in Cameroon and on which the suspicions of MNC cases seem to be proven. The quanti-qualitative investigation process put in place initially consists of applying the 1977 quantitative Imhoff model to accounting figures of the selected companies, while keeping the assumption of smoothing the results for tax reasons. The second step is to apply the criteria of detection inspired from professional qualitative practices to accounting figures of the sample. The main results show that the hybrid model provides decisive arguments to assess MNC cases. Keywords: Cases of manipulation - Accounting figures - Quantitative models - Qualitative methodology.

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1 ère journée d’étude africaine en comptabilité et contrôle

1

LES MANIPULATIONS DES NOMBRES COMPTABLES DANS LES ENTREPRISES : ÉTUDE DES CAS AU CAMEROUN

Gervais Félix MINKO Enseignant Chercheur

ESSEC, Université de Douala, Cameroon [email protected]

Résumé

Depuis la faillite d’Enron en décembre 2001, une abondante littérature s’est développée

autour de la problématique de détection des cas de manipulation des nombres comptables (MNC) publiés par les dirigeants d’entreprises. Les nombreux scandales financiers au cours de ce siècle ravivent cette problématique en mettant en évidence, les limites méthodologiques des modèles traditionnels (académiques et professionnels) de détection. La présente étude propose le modèle hybride comme une extension méthodologique exploratoire de détection des cas de MNC. La principale question évoquée étant de savoir si le modèle hybride est performant pour détecter les situations de MNC. L’étude empirique porte sur 185 entreprises installées au Cameroun. Le processus d’étude quanti-qualitatif mis en œuvre consiste à appliquer, dans un premier temps aux nombres comptables des entreprises retenues, le modèle quantitatif d’Imhoff (1977) ; en retenant pour hypothèse, le lissage des résultats pour des motifs fiscaux. La seconde étape consiste à approfondir la détection quantitative, par des analyses qualitatives inspirées des pratiques

professionnelles. Les principaux résultats montrent que le modèle hybride fournit des arguments décisifs permettant d’apprécier les cas de MNC.

Mots clés : Cas de manipulation - Nombres comptables - Modèles quantitatifs - Méthodologie qualitative.

Abstract

Since the failure of Enron in December 2001, an abundant literature has developed on the

issue of detection of cases relating to manipulation of accounting figures, published by companies’ Managers. The various financial scandals during this century revive this subject by raising the limits

of traditional models detection (academic and professional). The current investigation proposes an hybrid model as a methodological extension to the detection of cases relating to manipulation of accounting figures which makes the compromise between mutual forces of traditional models. The main issue is to know whether enforcement of the hybrid model is efficient in the process of detection of MNC cases. The empirical investigation will focus on the example of 185 companies settled in Cameroon and on which the suspicions of MNC cases seem to be proven. The quanti-qualitative investigation process put in place initially consists of applying the 1977 quantitative Imhoff model to accounting figures of the selected companies, while keeping the assumption of smoothing the results for tax reasons. The second step is to apply the criteria of detection inspired from professional qualitative practices to accounting figures of the sample. The main results show that the hybrid model provides decisive arguments to assess MNC cases.

Keywords: Cases of manipulation - Accounting figures - Quantitative models - Qualitative

methodology.

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1 ère journée d’étude africaine en comptabilité et contrôle

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INTRODUCTION

Les difficultés qui limitent la détection des cas de manipulation des nombres comptables (MNC) sont nombreuses. Au premier rang de celles-ci, l’absence d’une définition consensuelle

permettant d’appréhender les multiples facettes du phénomène oblige la littérature à distinguer les

cas de MNC conformes et non conformes aux normes et aux règles comptables ; sans pour autant

que les outils de détection y soient adaptés. Selon les normes comptables, les MNC sont considérées au sens de la « gestion des résultats » ; celle-ci est définie comme « une intervention motivée dans le processus de communication financière externe, dans le but d’en tirer un bénéfice personnel.» (Schipper, 1989, p. 92). La « gestion des résultats » est une pratique dont l’effet est nul

sur la période de manipulation considérée, et elle permet de limiter la volatilité des résultats sur

ladite période. Les notions telles que le lissage des résultats, le nettoyage des comptes, la

comptabilité créative, les résultats seuils, sont souvent assimilées à la « gestion des résultats ».En

dehors des normes comptables, les cas de MNC sont considérés comme des « cas de fraude » qui

s’appuient sur des documents comptables imaginaires ou falsifiés, des écritures comptables erronées ou volontairement omises, et sur des procédures comptables trompeuses (Cresey, 1953 ; Smaili et al., 2009 ; Kranacher et al.,2011).

Pour lever cette ambiguïté conceptuelle à laquelle les outils de détection semblent

inopérants, les cas de MNC sont considérés dans cette étude au sens de Stolowy et Breton (2003, p. 130) qui les définissent globalement comme« l’exploitation de la discrétion laissée aux dirigeants en matière de choix comptables ou de structuration des opérations, dans le but de générer une modification du risque de transfert de richesse associé à l’entreprise, tel que ce risque est perçu par le marché. » Ce point de vue, partagé par Colasse (1995), montre que la frontière entre la « gestion des

résultats » et la « fraude comptable »n’est pas évidente. La distinction qui s’opère généralement ex-

post pour dissocier les cas de MNC« frauduleux » de la « gestion des résultats » suite aux scandales

financiers révélés, s’apparente à un aveu d’échec pour les outils de détection habituels.

Cependant, la principale difficulté liée à la détection des cas de MNC concerne les modèles

d’application empirique mis en œuvre. La littérature montre que les modèles académiques sont

substantiellement quantitatifs et peu performants, car de nombreuses limites méthodologiques

influent sur les résultats empiriques. Ces limites portent sur l’inadéquation observée entre la

logique théorique sous-jacente aux modèles et les interprétations empiriques controversées auxquelles ils aboutissent (Jeanjean, 2003 ; Mard et Schatt, 2010). Pareillement, la méthodologie

qualitative du processus global de l’audit, préférée dans les pratiques professionnelles, présente

aussi des limites. La littérature montre que l’incompétence et la dépendance morale et financière

des auditeurs peuvent altérer la qualité d’une mission d’audit dans des circonstances de travail

particulières. L’incompétence porte sur la formation et l’expérience des auditeurs. L’indépendance

de l’auditeur n’est pas garantie, par exemple, lorsque ce dernier se trouve dans une situation d’agence particulière avec ses anciens camarades d’école qui sont les dirigeants de l’entreprise.

L’auditeur peut aussi donner son avis, pour satisfaire les objectifs d’un acteur particulier en contre

partie des retombées financières.

Ainsi, à partir du moment où les cas de MNC portent sur des faits de management cachés pour lesquels les modèles de détection actuels semblent peu performants, et compte tenu du fait

que les dirigeants prennent généralement les décisions de gestion en toute discrétion managériale,

la question de recherche suivante« comment détecter les cas de MNC ? » trouve sa justification

dans le cadre de notre étude. Elle permet ainsi d’envisager des perspectives méthodologiques

nouvelles. La présente étude propose donc l’extension méthodologique du modèle hybride, comme

une alternative de recherche permettant d’exploiter simultanément les atouts des modèles traditionnels. L’intérêt pour la détection des cas de MNC est manifeste, compte tenu de la portée

des nombres comptables dans le processus de prise de décisions des parties prenantes de

l’entreprise. Beaver (1968) observe un glissement de l’utilité décisionnelle des nombres comptables

vers une utilité contractuelle. Cela crée de nombreux cas de MNC qui alimentent l’actualité

économique mondiale.

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L’étude empirique porte sur 185 entreprises installées au Cameroun. Une première étape de

l’étude consiste à appliquer aux nombres comptables des entreprises de l’échantillon, le modèle

quantitatif d’Imhoff (1977) ; en retenant pour hypothèse d’étude le lissage des résultats pour des

motifs fiscaux. Le cadre théorique politico-contractuel de l’agence permet d’opérationnaliser cette

hypothèse dans le contexte des entreprises camerounaises. La seconde étape consiste à appliquer aux cas de MNC détectés par le modèle quantitatif, des critères qualitatifs d’analyse inspirés des

pratiques professionnelles. Ces dernières découlent des enseignements tirés des entretiens semi-

directs réalisés auprès des experts comptables du Cameroun. Cette seconde étape de l’étude suit

une démarche méthodologique qui permet la construction d’un modèle théorique interprétatif, à

partir de l’analyse comparative des données du terrain.

Le texte est structuré en quatre parties. Il commence par la justification théorique de

l’étude des MNC et présente la situation en contexte camerounais. Il continue avec la revue de la

littérature sur les travaux antérieurs et met en évidence les limites méthodologiques de détection

actuelles. La troisième partie présente la démarche méthodologique hybride préconisée. Alors que

la quatrième partie présente et discute les résultats issus de l’analyse séquentielle quanti-qualitative.

FONDEMENTS THÉORIQUES DEL’ÉTUDE DES MNC : REGARD SUR LE CONTEXTE

CAMEROUNAIS

Plusieurs modèles économiques sous-tendent l’hypothèse théorique des cas de MNC dans

les pratiques managériales des organisations. L’application empirique de ces modèles s’est

rependue dans les recherches académiques des économies modernes. Le système économique

camerounais est principalement caractérisé par la prépondérance des activités informelles et la

faiblesse des transactions financières dans un marché boursier embryonnaire. Le contexte camerounais offre donc un champ d’expérimentation empirique opportun et susceptible de révéler

des enseignements particuliers sur la pratique des MNC au sein des entreprises dans les pays en

développement.

Pratique des MNC : explications théoriques à partir des modèles économiques

L’activité de l’entreprise est généralement décrite dans un contexte d’asymétrie

d’informations où les objectifs des parties prenantes sont parfois divergents. Un agent peut en effet

disposer d’informations que les autres n’ont pas et en tirer un profit personnel. Par exemple, le

dirigeant en tant que principal acteur, peut être porté vers les objectifs favorables à ses propres

intérêts, au détriment de ceux des propriétaires ou des autres parties prenantes. Ainsi, agissant

dans la discrétion managériale, il peut entretenir entre les parties prenantes une situation d’asymétrie informationnelle susceptible de produire des cas de MNC.

Plusieurs modèles économiques fournissent une explication théorique à l’asymétrie

informationnelle observée dans les pratiques managériales. Le modèle économique de l’agence

(Jensen et Meckling, 1976 ; Jensen, 1983 ; Fama et Jensen, 1985) considère l’entreprise comme un nœud de contrats formels et informels, entre les divers agents économiques qui contribuent à son

fonctionnement. On dit qu’il y a relation d’agence (ou de mandat) entre deux individus chaque fois

que l’un agit pour le compte de l’autre. Le mandaté disposant en général d’informations

supplémentaires par rapport au mandataire, cela crée une situation d’asymétrie informationnelle.

Cette relation produit des coûts d’agence (ou de mandat). Deux types de contrats ont un rôle

important au sein de l’entreprise : d’une part, le contrat entre les dirigeants et les actionnaires ; d’autre part, le contrat entre les actionnaires et les dirigeants d’un côté et les créanciers de

l’entreprise (clients, État, banque, etc.) de l’autre côté. Une brève synthèse des courants de pensée

théoriques de l’agence est fournie dans le tableau de travail 1 ci-dessous. Elle permet de mettre en

évidence la susceptibilité des relations asymétriques entre les parties prenantes ; relations qui

favorisent les cas de MNC observés dans les organisations.

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Tableau 1 : Synthèse des approches théoriques de l’agence

Différents courants Contenu explicatif Auteurs de référence

La théorie normative de l’agence

Encore appelée modèle du « Principal-Agent », elle s’intéresse aux formes des contrats optimaux établis entre ces deux parties. En particulier, la théorie s’attache à modéliser certaines variables

explicatives de la forme des contrats telles que la structure des préférences des parties prenantes au contrat, la nature de l’incertitude ou la structure informative de l’environnement.

Jensen (1983) ; Baiman

(1990).

La théorie de l’économie des coûts de transaction

Remettant en cause plusieurs postulats de la théorie économique classique, elle utilise la notion de rationalité limitée, c'est-à-dire que les individus ont une capacité limitée d’acquisition et de traitement de l’information. Aussi, l’incertitude de l’environnement, d’une part,

et l’opportunisme des acteurs, d’autre part, mènent à des problèmes d’asymétrie informationnelle.

Williamson (1975)

La théorie politico-contractuelle de l’agence

encore appelée « modèle de Rochester », elle cherche à expliquer certaines formes organisationnelles et certains types de contrats et phénomènes observés. Elle a été reprise en comptabilité financière vers les années 1986.

Jensen et Meckling (1976) ; Watts et Zimmerman (1986) ; Charreaux(1987) ; la théorie politico-

contractuelle de la comptabilité

Source : Synthèse de l’auteur.

À la suite de la théorie de l’agence, la théorie des parties prenantes (PP) apporte aussi des éclairages sur les cas de MNC. Certains de ses enseignements permettent de limiter ces pratiques dans le système de gouvernance des entreprises. Selon Mercier (1999), les PP (stakeholders)

représentent l’ensemble des agents pour lesquels le développement et la bonne santé de l’entreprise

constituent des enjeux importants. La théorie des PP permet ainsi l’étude des relations organisations-stakeholders pour fonder un modèle rationnel d’organisation. Carroll (1989)

distingue les PP primaires qui ont une relation formelle ou contractuelle avec l’organisation et les

autres PP secondaires. Pelle-Culpin (1998), quant à lui, fait la distinction entre différentes PP : les PP institutionnelles découlant des lois, règlementations et organismes inter organisationnels ; les

PP économiques qui représentent les différents types d’acteurs opérant sur les marchés dans

lesquels l’entreprise est positionnée ; les PP éthiques qui représentent les organismes de défense de

l’éthique dans les affaires.

La théorie des PP repose sur deux postulats. Le premier, formulé par Freeman (1984),

stipule que l’organisation a des relations avec plusieurs groupes qui subissent les activités de

l’entreprise. Le second, défendu par Clarkson (1994), Donaldson et Preston (1995), stipule que les

intérêts des PP ont une valeur intrinsèque et aucun intérêt n’est sensé dominer les autres. Le champ d’application de la théorie des PP est la nature des relations organisations-stakeholders en

termes de processus et de résultat. Des tentatives de rapprochement de certaines théories d’utilité empirique en sciences de gestion sont effectuées à partir de la théorie des PP. Hill et Jones (1992)

ont généralisé la théorie de l’agence à partir des relations entre les PP et les managers. Ces derniers

y sont vus comme des agents et les PP se distinguent les uns des autres par leur importance et

leur pouvoir vis-à-vis des managers dans une perspective contractuelle forcée.

La relation d’agence ainsi réinterprétée conduirait, en accord avec les mécanismes de marché et les ingrédients de son raisonnement, à un équilibre des droits de propriété. La théorie

des PP a été rapprochée de la théorie des coûts de transaction de Coasse (1937) et de Williamson

(1975), par Freeman et Evan (1990), pour justifier la perspective d’une représentation des intérêts

des PP autres que les actionnaires. C’est donc dans cette logique de réinterprétation de la théorie

des PP qu’il faudrait envisager la détection des cas de MNC à partir d’une action collective des PP.

Contexte camerounais : une relation d’agence particulière entre parties prenantes

Le système économique camerounais se distingue des systèmes économiques modernes sur

trois points principalement : un secteur prédominant des activités informelles ; la prédominance

du rôle de l’État dans la collecte des recettes fiscales ; la faiblesse du marché boursier qui est encore embryonnaire. Sur ce dernier point, les balbutiements de la Douala Stock Exchange (bourse

des valeurs) ne permettent pas d’envisager un fonctionnement optimal du marché financier

national.

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Les travaux empiriques qui traitent des cas de MNC dans les entreprises du secteur

informel sont peu nombreux, voire inexistants. Les récentes lois des finances au Cameroun (2010 à

2015) mettent un point d’honneur pour sortir les entreprises de ce secteur de l’anonymat. Mais les

actions de l’État produisent très souvent l’effet inverse, tant il est évident que les recettes fiscales

sont privilégiées dans cette relation d’agence particulière. Une assertion populaire au Cameroun, non encore vérifiée par des travaux scientifiques, évoque la théorie des « trois bilans ». Un bilan

pour la banque, un autre pour le fisc, et un autre pour l’entreprise elle-même. Dans cette pratique,

il semblerait que le bilan de l’entreprise soit plus proche de la réalité de gestion ; alors que ceux des

autres parties prenantes pourraient présenter des chiffres comptables manipulés.

Dans un tel système économique où le budget du gouvernement est essentiellement constitué des revenus fiscaux, il est compréhensible que l’État se dote des pouvoirs spéciaux dans

ses relations d’agence avec les organisations. L’État se présente dans ce cas, comme un partenaire

ayant des droits privilégiés sur la distribution des revenus de l’entreprise. Il peut anticiper ses

recettes fiscales sous forme d’acomptes d’impôts selon une loi des finances taillée pour la cause. La

position de l’État dans le processus de collecte de l’impôt peut conduire les dirigeants d’entreprise à développer des stratégies pour limiter le transfert des richesses de l’entreprise vers l’État

(Ngantchou, 2005). Les études antérieures dans le contexte camerounais valident l’hypothèse de

l’instrumentalisation des données comptables pour des motifs fiscaux (Ngantchou, 2005 ;

Ndjetcheu, 2008) ; mais elles sont encore peu nombreuses.

REVUE DE LITTÉRATURE SUR LES MNC

La littérature sur les cas de MNC fait l’hypothèse selon laquelle certains dirigeants

d’entreprise manipulent les données comptables et financières qu’ils publient à destination des

tiers extérieurs, soit pour donner des signaux aux PP, soit pour camoufler la réalité des chiffres comptables (Healy et Wahlen, 1999). Les décisions des dirigeants étant prises en toute discrétion,

les cas de MNC constituent donc des phénomènes cachés que les modèles économiques actuels

n’arrivent pas encore à détecter. Cette deuxième partie de l’article propose la revue de la littérature

sur les facteurs explicatifs et les objectifs des pratiques de MNC dans les organisations. Elle

analyse aussi les limitesde détection des modèles actuels, et envisage des perspectives

méthodologiques nouvelles.

Facteurs explicatifs et objectifs des pratiques de MNC

Selon la littérature comptable et financière, les facteurs explicatifs des MNC sont liés aux

décisions de gestion et aux choix comptables du dirigeant. À partir des décisions de gestion discrétionnaires, le dirigeant peut par exemple céder certains actifs du patrimoine, dans le seul but

de combler ses insuffisances de résultat. Il peut aussi opérer des choix comptables opportunistes,

pour modifier la réalité de l’information financière et satisfaire ses intérêts personnels ; ou ceux des

autres PP (Stolowy et Breton, 2003). Par exemple, le dirigeant peut choisir une méthode

d’évaluation qui lui permet d’enjoliver le résultat comptable. Il peut aussi viser une structuration

des postes comptables dans le sens qui permet de camoufler la réalité économique de ces postes. Certains cas de MNC changent la structuration des postes comptables, sans pour autant avoir un

impact direct sur le résultat comptable. Une synthèse des facteurs explicatifs des MNC est fournie

dans le tableau 2. Elle est effectuée à partir l’analyse des informations financières litigieuses révélées par la Securities Exchange Comission (SEC). Cette dernière est l’organisme de surveillance

et de protection des transactions sur les marchés boursiers des États-Unis d’Amérique. Sur son

site internet librement accessible, des cas de MNC sont régulièrement publiés pour l’information des parties prenantes.

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Tableau 2 : Typologie des facteurs explicatifs des MNC

Acteurs Facteurs explicatifs des cas de MNC

PDG et DG

Augmentation frauduleuse des revenus

Certification des états financiers erronés

Comptabilité créative

Déformation et exagération des actifs

Vente à des conditions avantageuses

Utilisation des filiales pour dissimuler les infractions

Déclaration des employés fictifs

Omission volontaire d’informations

Évaluation opportuniste des stocks

Retard des paiements des charges

Directeur financier Utilisation des états financiers surévalués

Autres cadres comptables

Sous-estimation des créances

Comptabilité créatives

Rédaction des faux rapports

Par ailleurs, les objectifs visés dans les pratiques de MNC sont nombreux. Toutefois, Morse

et Richardson (1983) sont les auteurs pionniers à avoir envisagé la fiscalité comme source de

manipulation des données comptables. Le tableau 3 présente ces objectifs dans des contextes

particuliers.

Tableau 3 : Objectifs et contextes des MNC

Objectifs Contextes (exemples)

Minimisation des coûts politiques

Enquêtes ou surveillance par des organismes de réglementation (Jones, 1991 ; Rayburn et Lenway, 1992 : US Internationa Trade commission ; Cahan, 1992 : division anti-trust du ministère américain de la Justice ; Key, 1997 : industrie de la télévision câblée dans des périodes de surveillance par le Congrès ; Han et Wang, 1998 ; Makar et Pervaiz, 1998 : enquêtes anti-trust ; Lim et Matolcsy, 1999 ; Magnan et al., 1999 : enquêtes anti-dumping)

Réglementation environnementale (Cahan et al., 1997 ; Labelle et Thibault, 1998)

Minimisation de l’impôt (Warfield et Linsmeir, 1992 ; Boynton et al., 1992 ; Guenther, 1994 ; Maydew,

1997 ;Ngantchou, 2010)

Négociation avec des tiers : contrats de travail (Liberty et Zimmerman, 1986)

Règlementations spécifiques (Mensah et al., 1994 ; Ahmed et al., 1999)

Minimisation

des coûts de financement

Introduction en bourse, fusion, LBO (Aharony et al., 1993 ; Friedlan, 1994 ; Cormier et Magnan, 1995 ;

Magnan et Cormier, 1997 ; Teoh et al., 1998 ; Erickson et Wang, 1999 ; Le Nadant, 1999)

Renégociations d’emprunt et difficultés financières (DeAngelo et al., 1994 ; Sweeney, 1994 ; DeFond et Jiambalvo, 1994)

Contrats de dette, violations contractuelles et restrictions de dividendes (McNichols et Wilson, 1988 ; Press et Weintrop, 1990 ; Healy et Palepu, 1990 ; Beneish et Press, 1993)

Prise de contrôle (Thauvron, 2000)

Maximisation de la richesse des dirigeants

Optimisation de la prime à court terme (Healy, 1985 ; Clinch et Margiolo, 1993 ; Holthausen et al., 1995 ; Gaver et al., 1995 ; Hamza, 2012)

Changement de contrôle (DeAgelo, 1986 ; Perry et Williams, 1994 ; DeAngelo, 1988)

Changement de direction non routiniers (Murphy et Zimmerman, 1993 ; Pourciau, 1993 ; Dechow et Sloan, 1991)

Source : adapté de Stolowy et Breton (2003).

Limites méthodologiques de détection des cas de MNC

Deux types se distinguent des modèles de détection des cas de MNC : les modèles mis en

œuvre dans les études académiques et ceux utilisés dans les pratiques professionnelles des métiers

comptables. Dans les études académiques, par exemple, les modèles quantitatifs (flux de trésorerie, accruals, résultats seuils) sont majoritairement utilisés. Le terme accruals désigne l’ensemble des

régularisations comptables que les dirigeants d’entreprise effectuent au moment des arrêtés comptables. Les limites méthodologiques de ces modèles sont connues et influent sur les résultats

empiriques des travaux académiques (Jeanjean, 2003 ; Vidal, 2010 ; Mard et Schatt, 2010).Dans

les études professionnelles comptables, c’est la méthode qualitative du processus global de l’audit

qui est préférée. Elle est aussi porteuse de nombreuses limites méthodologiques.

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1 ère journée d’étude africaine en comptabilité et contrôle

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S’agissant des modèles quantitatifs, ils font l’objet de controverses récurrentes entre leur

logique théorique sous-jacente et les interprétations empiriques auxquelles ils aboutissent. Par exemple, le modèle des accruals de Jones (1991) qui se distingue particulièrement parmi les

modèles quantitatifs, comporte des limites théoriques évidentes (Jeanjean, 2005). Dechow et al.

(1995) montrent que la logique théorique de sa formulation initiale (ANi,t= αi + β1 ∗ ∆CAi,t

+ β2 ∗

IMMOCORPi,t+ εt), qui porte à croire que le chiffre d’affaires est une variable neutre dans la pratique

des MNC n’est pas justifiée. Au contraire, le chiffre d’affaires servirait effectivement de levier aux

cas de MNC qui s’appuient sur des situations commerciales particulières.

Les auteurs montrent aussi que des conditions de ventes trop avantageuses pour les

clients, avec des délais de paiement au-delà de la normale, peuvent avoir pour but de dissimuler le chiffre d’affaires fictif (Dechow et al. 1995 ; Jeanjean, 2005). La prolongation des délais de

paiement accordés aux clients cache parfois des ventes fictives qui sont comptabilisées en fin

d’année comptable, et qui sont généralement annulées l’année d’après. Un délai de paiement au-

delà de 3 mois semblerait suspect pour une entreprise qui cherche à couvrir son besoin en fonds de roulement. Aussi, la formulation sophistiquée du modèle de Jones (1991) qui porte sur l’analyse

des conditions d’exploitation sectorielle, ne fournit pas les éléments d’appréciation probants ;

lorsque les investissements en immobilisations au sein d’un même secteur d’activité présentent des

caractéristiques hétérogènes. Ce modèle est effectivement considéré, par la littérature, comme un

modèle sophistiqué qui prend en compte les conditions d’exploitation de la firme dans son secteur d’activité.

Les autres modèles quantitatifs, tels celui des résultats seuils (Burgstahler et Dichev,

1997 ; Mard, 2004 ; Vidal, 2010) ; ou encore celui du lissage des résultats (Copeland, 1968 ;

Imhoff, 1977 ; Eckel, 1981) ne sont pas plus performants. Le modèle des seuils fait l’hypothèse

d’une loi normale de distribution des résultats qui interprète toute irrégularité sur la courbe représentative de ces derniers comme la manifestation d’un cas de MNC. Cependant, l’irrégularité

des résultats empiriques observée lorsqu’on passe d’une étude non paramétrique à une étude

paramétrique fragilise cette logique théorique (Vidal, 2010 ; Mard et Schat, 2010).

Quant au modèle de lissage (Belkaoui, 1989 ; Copeland, 1968 ; Imhoff,1977 ; Eckel, 1981), son principe de validité des cas de MNC à partir du ratioqui porte uniquement sur deux agrégats

comptables, semble assez simpliste. De plus, son incapacité à dissocier le lissage naturel du lissage

intentionnel accroît l’incertitude des résultats empiriques(Breton et Chenail,1997).Le lissage

naturel des résultats découle de la manipulation d’évènements économiques qui affectent la vie de l’entreprise. Il affecte donc directement le cash-flow. En revanche, le lissage comptable qui consiste

à ne manipuler que les chiffres comptables, affecte le résultat, sans modifier le cash-flow. Cet

ensemble de limites montre que les modèles quantitatifs, à défaut de détecter avec certitude les cas de MNC, serviraient tout au plus à détecter la présomption des cas de MNC dans certaines

entreprises. D’où la nécessité d’une investigation approfondie par des études qualitatives

appropriées.

Toutefois, bien que porteuse de nombreuses opportunités méthodologiques (Sardais, 2005 ; Elleuch-Hamza, 2012), la méthodologie qualitative présente dans des circonstances de travail

particulières, quelques limites pratiques évidentes. Par exemple, les auteurs comme Beneish (1999)

soutiennent qu’une étude qualitative des cas de MNC serait fastidieuse, dans sa phase de collecte

des données, compte tenu du secret professionnel auquel les acteurs (dirigeants et auditeurs) sont

tenus. De même dans les pratiques professionnelles, les problèmes d’incompétence et de

dépendance liés aux auditeurs (DeAngelo, 1986 ; Tondeur, 2003 ; Causse et Tran Vu, 2012 ; Bertin et Godowski, 2012), limitent le processus global de l’audit qui se situe au centre du système de

gouvernance des entreprises. La technique de sondage partiel, qui consiste à auditer des comptes

sélectionnés pour des extrapolations d’ensemble, peut conduire à des conclusions erronées sur les

chiffres comptables.

Il est donc probable que les limites du modèle qualitatif connaissent une amélioration dans

une démarche quanti-qualitative qui cherche à approfondir les résultats des tests quantitatifs. La

démarche séquentielle quanti-qualitative se justifie alors dans notre étude comme un objectif de

recherche exploratoire, susceptible d’améliorer les outils de détection empirique des cas de MNC.

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1 ère journée d’étude africaine en comptabilité et contrôle

8

Dans un premier temps, le modèle quantitatif cherche à détecter la présomption de manipulation

dans quelques entreprises de l’échantillon. Dans une seconde phase, la méthodologie qualitative

sert à approfondir l’étude à partir des critères objectifs de gestion retenus dans le contexte

considéré.

MÉTHODOLOGIE DE RECHERCHE

La démarche méthodologique suit quatre étapes. La première présente les sources de

collecte des données empiriques quanti-qualitatives. La seconde permet de justifier le modèle ainsi

que les variables quantitatives utilisées. La troisième décrit les articulations de la méthode qualitative mise en œuvre. Tandis que la quatrième étape permet d’emboîter la démarche quanti-

qualitative dans une logique de détection simultanée des cas de MNC.

Source des données empiriques

Deux sources de données ont été retenues pour l’étude empirique : d’une part, un

échantillon d’entreprises tiré de la base des données de l’Institut national de la statistique (INS)1 du

Cameroun ; d’autre part, les entretiens semi-directs réalisés auprès des auditeurs des comptes

installés au Cameroun. Pour tester l’hypothèse des cas de MNC dans le contexte camerounais, 185

entreprises ont été sélectionnées dans la base des données de l’INS sur la période allant de 2005 à

2009 ; après plusieurs tris. Des contingences sur le terrain d’étude ont contraint à l’utilisation des données empiriques quantitatives sur la période de 2005 à 2009 ;car les données plus récentes des

années 2010 et 2011 étaient disponibles, mais incomplètes. Nous avons constaté la mise à jour

tardive des données de la base qui n’intègrent pas les changements intervenus dans la

nomenclature des secteurs d’activité, entre les années 2010 et 2011. Ces changements ont

entraîné le chamboulement de la classification intersectorielle des entreprises pour les deux grands ensembles. La validité statistique et représentative de l’échantillon semble donc acquise pour 185

entreprises observées sur une période de 5 ans. L’échantillon quantitatif exhaustif est décrit dans

le tableau suivant.

Tableau 4 : Description des entreprises de l’échantillon par secteur d’activité

Secteur d’activité Effectif

Agriculture 12

Commerce général 42

Industrie 66

Services 53

Travaux publics 12

Total 185

Source : Base de données de l’Institut national de la statistique du Cameroun (INS).

Par ailleurs, à la suite de l’étude exploratoire réalisée à partir des données empiriques collectées sur le site de la SEC américaine, des entretiens semi-directs ont été conduits auprès des

auditeurs camerounais. Au total, 13 individus ont été interviewés au cours de l’année 2015 : 08

inspecteurs vérificateurs des impôts et 05 experts comptables des cabinets d’audit indépendants.

Le choix des inspecteurs des impôts répond à un double souci de cohérence : arrimer les

informations financières à leurs destinataires et évaluer le travail des inspecteurs d’État qui sont formés pour sécuriser les recettes fiscales gouvernementales. Cette étude nous permettra donc de

nous faire une idée du potentiel d’expérience des inspecteurs des impôts. S’agissant des experts

comptables, leur choix est naturellement établi car il s’agit des professionnels dont le métier

consiste à réaliser les missions d’audit pour le compte des parties prenantes donneuses d’ordre. La

représentativité de l’échantillon qualitatif au niveau de13 individus est valide pour les études

qualitatives qui permettent la construction d’un cadre théorique interprétatif (Glaser et Strauss, 1967 ; Luckerhoff et Guillemette, 2012).

1L’INS est l’institution publique au Cameroun qui centralise les données financières produites par les entreprises. Afin de préserver l’anonymat des entreprises échantillonnées, ces dernières sont identifiées suivant une numérotation de 1 à 4.

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1 ère journée d’étude africaine en comptabilité et contrôle

9

Justification théorique du modèle de lissage des résultats dans le contexte camerounais

L’étude commence par un constat controversé suite à une analyse intuitive réalisée à partir de l’échantillon des données retenues. En effet, la courbe représentative des résultats imposables

des entreprises de l’échantillon tourne anormalement autour de la valeur zéro, sur cinq ans, et

sans explications théoriques apparentes. Ceci porterait à croire qu’à défaut d’éprouver des

difficultés particulières dans leurs secteurs d’activité respectifs, les entreprises de l’échantillon

manipuleraient leurs résultats imposables de façon opportuniste. La figure suivante illustre ce

constat pour l’année 2009.

Figure 1: Courbe représentative des résultats imposables de 185 entreprises camerounaises

en 2009

Source : base de données de l’INS.

Alors qu’on se serait attendu à ce que les firmes en situation de perte structurelle disparaissent au bout d’une période raisonnable de survie, celles de l’échantillon restent toujours

pérennes. L’hypothèse des cas de MNC semble donc possible dans ce contexte pour des motifs

encore inconnus. Au Cameroun, l’assertion populaire (non encore vérifiée) des « trois bilans »

suppose que la courbe des résultats des bilans destinés aux banquiers aurait une allure inverse à

celle de la courbe sur la figure ci-dessus. L’objectif de la firme dans ce cas est de lever facilement des financements en tirant avantage de sa santé financière apparente. L’hypothèse d’une

manipulation pour lever des fonds nécessaires à l’exploitation semble donc peu pertinente dans

notre étude. Par contre, les informations financières de notre échantillon étant destinées à

l’administration fiscale et centralisées au niveau de l’INS, l’argument de l’instrumentalisation des

nombres comptables pour minimiser l’impôt à payer semble plus réaliste au regard de l’allure de la courbe des résultats. La formulation de l’hypothèse intuitive (H.1) selon laquelle,« les nombres comptables publiés par les entreprises au Cameroun, et contenus dans la déclaration statistique et fiscale déposée auprès de l’INS, sont manipulés par certaines d’entre elles »peut donc être retenue.

Par ailleurs, les résultats imposables sont calculés à partir des résultats intermédiaires de

la déclaration statistique et fiscale (DSF). Selon l’acte uniforme de l’OHADA2, le résultat imposable

est la somme arithmétique du résultat des activités ordinaires (RAO), du résultat hors activités ordinaires (RHAO), et d’un certain nombre de charges qualifiées « non déductibles » selon la loi des

finances du Cameroun. Le résultat imposable est donc la base de calcul de l’impôt et son allure

lisse autour de la valeur zéro pourrait exprimer l’intention des dirigeants à payer l’impôt minimum

qui est fixé à un taux réduit sur le chiffre d’affaires, par rapport au taux général plus élevé

appliqué au résultat imposable.

2 Organisation pour l’harmonisation en Afrique du droit des affaires. Acte ratifié par le Cameroun en 2002.

-10 000 000 000

-5 000 000 000

-

5 000 000 000

10 000 000 000

15 000 000 000

20 000 000 000

25 000 000 000

30 000 000 000

35 000 000 000

S1

S7

S1

3

S1

9

S2

5

S3

1

S2

7

S4

3

S4

9

S5

5

S6

1

S6

7

S7

3

S7

9

S8

5

S9

1

S9

7

S1

03

S1

09

S1

15

S1

21

S1

27

S1

33

S1

39

S1

45

S1

51

S1

57

S1

63

S1

69

S1

75

S1

81

Résultats imposables des entrprises de l'échantillon

Val

eurs

des

rés

ult

ats

mis

à l

'éch

elle

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1 ère journée d’étude africaine en comptabilité et contrôle

10

Selon Imhoff (1977), le lissage se manifeste sur le résultat lorsque la variance de ce dernier

est artificiellement diminuée, de telle sorte que rapportée à celle du chiffre d’affaires, le rapport soit

inférieur ou égal à un. La formulation du ratio de lissage des résultats est la suivante : 𝐶𝑉𝐵

𝐶𝑉𝑉≤ 1

Avec :

𝐶𝑉𝐵 = Coefficient de variation du bénéfice,

𝐶𝑉𝑉 = Coefficient de variation des ventes.

𝐶𝑉𝐵 =√

∑(∆𝐵𝑖− ∆𝐵̅̅ ̅̅ )2

𝑛−1

∆𝐵

𝐶𝑉𝑉 =√

∑(∆𝑉𝑖− ∆𝑉̅̅ ̅̅ )2

𝑛−1

∆𝑉

∆𝐵̅̅ ̅̅ = (𝑩𝒕 − 𝑩𝒕−𝟏

) + (𝑩𝒕−𝟏− 𝑩𝒕−𝟐

) + (𝑩𝒕−𝟐− 𝑩𝒕−𝟑

) + (𝑩𝒕−𝟑− 𝑩𝒕−𝟒

) + (𝑩𝒕𝟒− 𝑩𝒕−𝟓

)

𝟓

∆𝑉̅̅ ̅̅ = (𝑽𝒕 − 𝑽𝒕−𝟏

) + (𝑽𝒕−𝟏− 𝑽𝒕−𝟐

) + (𝑽𝒕−𝟐− 𝑽𝒕−𝟑

) + (𝑽𝒕−𝟑− 𝑽𝒕−𝟒

) + (𝑽𝒕𝟒− 𝑽𝒕−𝟓

)

𝟓

Pour vérifier l’hypothèse (H.1) formulée à la suite des développements théoriques

précédents, trois hypothèses subsidiaires sont été retenues. Elles consistent à tester l’hypothèse de lissage du résultat imposable, l’importance du lissage dans des secteurs d’activité particuliers, et

l’importance du lissage pour certaines caractéristiques de la firme.

La première hypothèse subsidiaire (H.1.1), sur le lissage du résultat imposable, est formulée de la manière suivante : « Il existe des entreprises au Cameroun qui tendent à diminuer artificiellement la variance de leur bénéfice imposable. » Cette première hypothèse subsidiaire

confirmerait le lissage des résultats imposables pour les entreprises dont le coefficient de lissage

d’Imhoff (1977) est ≤ 1 (soit 𝐶𝑉𝐵

𝐶𝑉𝑉≤ 1).

La seconde hypothèse subsidiaire (H.1.2), sur l’importance du lissage intersectoriel, est formulée ainsi : « Les entreprises du secteur industriel à haute intensité technologique sont plus enclines à lisser leur résultat que les entreprises des autres secteurs d’activité.»Cette seconde

hypothèse sera confirmée s’il existe une différence statistique significative entre les entreprises par

secteur d’activité, appartenant au groupe des entreprises déjà détectées positives au lissage du résultat imposable (Balkaoui et Picur, 1984).

La troisième hypothèse subsidiaire (H.1.3), sur l’importance du lissage selon les caractéristiques de l’entreprise définie par la taille, est la suivante : « Les entreprises de petite taille sont plus enclines au lissage des résultats que celles de grande taille. » Cette troisième hypothèse

sera confirmée s’il existe une différence statistique significative entre les entreprises de petite et de

grande taille3qui lissent leurs résultats imposables (Watts et Zimmerman, 1972).

Les discussions sur la validité des résultats empiriques quantitatifs permettent d’introduire

l’approche qualitative, dans le but de lever les incertitudes empiriques généralement observées

dans d’autres contextes.

Démarche méthodologique qualitative

Comme annoncé précédemment, l’étude qualitative consiste en des entretiens semi-directs

réalisés auprès de 13 individus dont 08 inspecteurs des impôts et 05 auditeurs des comptes dans

les cabinets comptables indépendants. L’enjeu des entretiens consiste à tirer le maximum

3 La taille des entreprises est définie selon l’acte uniforme de l’OHADA par le chiffre d’affaires.

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1 ère journée d’étude africaine en comptabilité et contrôle

11

d’enseignements auprès des acteurs, en leur laissant une liberté d’expression significative pendant

les interviews.

Le guide d’entretien est élaboré autour de quatre thèmes. Le premier porte sur l’identité de la personne interviewée et permet d’apprécier son aptitude à détecter les cas de MNC dans le

contexte camerounais. Le second thème cherche à préciser, à partir de l’expérience des auditeurs,

si les cas de MNC sont théoriquement justifiés au Cameroun et quels sont les arguments qui

étayent leur point de vue. Le troisième thème porte sur l’indentification des déterminants des cas

de MNC, et les techniques de détection possibles au cas par cas. Le quatrième thème permet

d’identifier les motifs qui justifient les cas de MNC dans les entreprises au Cameroun et les moyens à mettre en œuvre pour les éradiquer. Les entretiens sont ensuite conduits à l’aide d’un protocole

qui reprend chaque thème avec des questions précises. Chaque interview a duré entre 45 minutes

et une heure. Les interviews ont été fidèlement retranscrites pour permettre la codification des

catégories thématiques. L’objectif de ce processus est de constituer des échantillons théoriques

pour la discussion des résultats (Glaser et Strauss, 1967).Les réponses obtenues feront l’objet d’une analyse comparative.

Combinaison quanti-qualitative

La combinaison quanti-qualitative est une analyse multiforme qui cherche à mutualiser les

atouts quanti-qualitatifs, pour améliorer le processus de détection des cas de MNC. Dans un premier temps, les résultats qui confirment les pratiques de lissage, dans une entreprise, peuvent

être interprétés dans le sens de la présomption de manipulations comptables. La démarche

qualitative permet donc à l’entreprise d’avoir une appréciation appropriée de la situation. Pour

mettre en évidence la pertinence méthodologique quanti-qualitative, des hypothèses

supplémentaires seront formulées à la suite de la constitution des échantillons théoriques qualitatifs.

PRÉSENTATION DES RÉSULTATS ET DISCUSSION THÉORIQUES

La présentation des résultats sera suivie de leur discussion, dans le cadre de quelques théories pertinentes pour notre recherche.

Résultats empiriques de l’étude

Ces résultats sont présentés de façon séquentielle en commençant par ceux du modèle quantitatif, suivis de ceux de l’étude qualitative approfondie.

Résultats de la démarche quantitative

Le résultat de l’hypothèse subsidiaire (H.1.1) selon laquelle,« il existe des entreprises au

Cameroun qui tendent à diminuer artificiellement la variance de leur bénéfice imposable » est

présenté dans le tableau suivant.

Tableau 5 : Proportion des lisseurs et des non lisseurs du résultat imposable

Entreprises

Effectif Lisseurs Non lisseurs

nombre % nombre %

Agriculture 12 10 83,33 2 16,67

Commerce 42 29 69,05 13 30,95

Industrie 66 41 62,12 25 37,88

Services 53 34 64,15 19 35,85

Travaux publics 12 8 66,67 4 33,33

Total 185 122 65,95 63 34,05

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1 ère journée d’étude africaine en comptabilité et contrôle

12

Ce tableau montre que 65,95% des entreprises de l’échantillon se livrent au lissage du

résultat imposable, contre 34,05% d’entre elles qui ne le font pas. Ce résultat confirme l’hypothèse

subsidiaire (H.1.1).

Quant à l’hypothèse subsidiaire (H.1.2) selon laquelle,« les entreprises du secteur industriel

à haute intensité technologique sont plus enclines à lisser leurs résultats que les entreprises des autres secteurs d’activité », le lissage est vérifié dans le secteur agricole(83,33%)et dans le secteur

industriel(62,12%).Pour vérifier si ces deux indicateurs sont statistiquement significatifs, le test du

Chi2 avec deux hypothèses (H0 : la proportion des lisseurs identique dans tous les secteurs

d’activité, et H1 : une au moins des entreprises aura une proportion de lissage plus importante que

les autres) a été effectué. Pour le seuil de signification𝛼 = 0,05, et avec (5-1)*(2-1) = 4 degrés de liberté, le Chi2 critique est égal à 9,48. Le Chi2échantillonnal est égal à 2,30 et est inférieur au Chi2

critique. Le résultat décline l’hypothèse H1 et retient H0, pour laquelle l’importance du lissage n’est

pas significative dans un secteur d’activité particulier. L’hypothèse subsidiaire (H.1.2) n’est pas

confirmée dans le contexte des entreprises de l’échantillon. Le classement des entreprises par importance du lissage est consigné dans le tableau ci-dessous.

Tableau 6 : Proportion des lisseurs et des non lisseurs par secteur d’activité

Entreprises

Classement Lisseurs Non lisseurs

nombre % nombre %

Agriculture 1er 10 83,33 2 16,67

Commerce 2e 29 69,05 13 30,95

Travaux publics 3e 8 66,67 4 33,33

Services 4e 34 64,15 19 35,85

Industrie 5e 41 62,12 25 37,88

Total 122 65,95 63 34,05

Le résultat de la troisième hypothèse (H.1.3) selon laquelle, « les entreprises de petite taille

sont plus enclines au lissage des résultats que celles de grande taille », montre que les entreprises

de petite taille se livrent au lissage des résultats (82%) par rapport à celles de grande taille (56%).

Le test de Chi2est mis en œuvre avec les hypothèses H0 : pour un lissage indifférent à la taille, et H1 : pour un lissage plus important dans les entreprises de petite taille. La valeur du Chi2 lue est

égale à 7,81, alors que le Chi2 échantionnal est égal à 4,83 au seuil 𝛼 = 0,05, et pour un degré de

liberté (4-1)*(2-1) = 3. Le résultat montre que la taille, appréhendée par le chiffre d’affaires,

n’influence pas le lissage des résultats imposables des entreprises de l’échantillon. La classification des résultats est consignée dans le tableau ci-dessous.

Tableau 7 : Proportion des lisseurs et des non lisseurs selon la taille mesurée par le chiffre

d’affaires

chiffre d’affaires

effectif Lisseurs non lisseurs

nombre % nombre %

Très petites entreprises [0 – 10 000 000] 17 14 82 3 18

Petites entreprises [10 000 001 – 30 000 000] 61 43 70 18 30

Moyennes entreprises [30 000 001 – 100 000 000] 57 37 65 20 35

grandes entreprises [100 000 001 et plus] 50 28 56 22 44

Total 185 122 66 63 34

On peut constater, à la suite de ces résultats, que les intentions de lissage des résultats se

manifestent dans le contexte des entreprises camerounaises sans distinctions particulières sur les

caractéristiques de ces entreprises. Ce qui expliquerait l’enlisement massif des résultats

imposables autour de la valeur zéro. Ce résultat sur le lissage des bilans, en contexte camerounais,

confirme bien l’hypothèse générale des cas de MNC. Le paradoxe cependant demeure dans

l’identification de la nature du lissage. S’agit-il d’un lissage conforme ou non conforme aux normes et règles comptables, d’un lissage artificiel ou d’un lissage naturel ? Ces questions montrent qu’à

l’état actuel de l’analyse, les impertinences sus évoquées ne peuvent être levées qu’à la suite d’une

analyse qualitative approfondie.

Des impertinences empiriques quantitatives à l’analyse qualitative approfondie

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1 ère journée d’étude africaine en comptabilité et contrôle

13

Selon les personnes interviewées, les dirigeants d’entreprises au Cameroun se livrent aux

pratiques des MNC pour des raisons fiscales parce que le contexte les y encourage. Elles font ici

référence à la corruption qui est régulièrement dénoncée par différents organismes nationaux et internationaux. Pour l’un des interviewés, par exemple : « Le Cameroun n’excelle pas dans ces pratiques, je connais des pays africains où le phénomène est trop poussé. Mais la plupart des cas de MNC semblent encouragés par le système lui-même qui est trop répressif et moins sensibilisateur. Voyez-vous, les cas d’erreurs sont sanctionnés au même titre que les cas réels. Je peux aussi dire qu’il y a l’environnement social en ce sens qu’on fait souvent comme les autres, puisqu’il y a des enjeux de gains personnels pour l’entreprise, et parfois aussi des opportunités politiques. »

S’agissant des motivations justificatives de ces pratiques, le dirigeant est l’acteur principal des cas de MNC, même s’il est aidé à la tâche par les collaborateurs responsables de la tenue des

comptes. Un auditeur interviewé pense que les problèmes éthiques liés à la formation initiale du

dirigeant sont aussi à mettre à l’actif de ces pratiques.

Cependant, le personnel est aussi prêt à participer à ces pratiques, lorsque les intérêts les

concernant sont en jeu. Une autre motivation concerne les caractéristiques de l’entreprise. Selon ce critère, les petites entreprises semblent plus enclines aux cas de MNC ; ce qui est en phase avec les

résultats du test empirique quantitatif. Un auditeur interviewé insiste sur le cas particulier des entreprises cotées, ou celles qui projettent d’entrer en bourses : « Vous imaginez, moi qui veut entrer en bourse en 2018 ou 2019, je dois commencer maintenant à tout faire pour avoir un bénéfice, parce que je sais que si je ne les fais pas, c’est reparti pour trois ans. De même, moi qui suis déjà dedans, si je ne les fais pas, je vais sortir. Alors je dois faire des résultats vaille que vaille, même si je dois tordre le coup au référentiel en sachant que je n’ai pas assez de bénéfice. »

Pour détecter les cas de MNC, il faut procéder au cas par cas en distinguant les comptes de

bilan (actif et passif) et les comptes de résultats (charges et produits). Nos résultats révèlent la

diversité des cas de MNC: l’analyse de cohérence générale de la DSF4, les investigations de justification, l’analyse des provisions inscrites au bilan, le recoupement des comptes, l’analyse des

libellés des opérations, la revue analytique, la comparaison des seuils, la dénonciation telle qu’elle

est pratiquée aux Etats-Unis, la vigilance sur les changements de méthodes, le rapprochement des

comptes bancaires, la vérification de l’ensemble des activités d’une personne, le droit de

communication, l’alternance entre le quantitatif et le qualitatif pour lever certaines équivoques.

En principe et selon un auditeur interviewé, il faut toujours être attentif aux alertes (Red

Flag) : « Par exemple, je vais venir trouver que quelqu’un est dans un secteur tertiaire des services. Je déroule sur 5 ans le ratio masse salariale, sur son chiffre d’affaires, et je vois qu’il a un taux de masse salariale qui est de 15% quand je sais que la norme c’est 30% dans ce secteur. Dès que je vois qu’il est à 15%, je m’arrête et je poursuis les investigations et c’est là que je vais trouver qu’une partie

du salaire du DG ou PDG a été comptabilisé en prime, dans un autre compte qui n’a rien à voir avec les salaires parce qu’on voulait le dissimuler. » Le tableau ci-dessous fait la synthèse des Red Flag

qui ont émergé des discours des personnes interviewées.

Tableau 8 : Échantillon théorique des alertes ou Red Flag des cas de MNC identifiées en

contexte camerounais

Alertes ou Red Flag des cas de MNC en contexte camerounais

1 Mauvaise organisation de la saisie comptable

2 Absence des procédures comptables

3 Absence du dispositif du contrôle interne dans l’entreprise

4 Profil éthique du dirigeant

5 Absence de substance comptable (pas de documents de base)

6 Niveau important des charges à répartir

7 Niveau important des encours de stock

8 Méthode d’évaluation des encours des travaux

9 Niveau d’antériorité du niveau des créances

10 Absence de rapprochement bancaire ou importance des suspens dans les états de rapprochement

4La déclaration statistique et fiscale (DSF) est une liasse de tableaux comprenant le bilan, le compte de résultat, le tableau financier des emplois et des ressources, les états annexes. Elle permet aux entreprises de l’espace OHADA de déclarer, aux

parties prenantes, leurs chiffres comptables et les commentaires qui accompagnent ces derniers.

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1 ère journée d’étude africaine en comptabilité et contrôle

14

11 Interprétation sélective des normes

12 Opérations inexpliquées dans les relevés des comptes bancaires

13 Niveau des provisions pour charges financières

14 Libellés inappropriés dans les comptes de charges

15 Niveau d’antériorité des dettes fournisseurs

16 Indice des manipulations à partir des ratios communs ou connus

17 Indices des manipulations à partir des statistiques sur les charges

18 Existence de bilan par type de destinataire

19 Niveau important des comptes courants d’associés

20 Absence de convention sur les comptes courants d’associés

21 Transfert d’opérations entre les comptes d’un groupe de sociétés

22 Méthode de comptabilisation des factures d’assistance technique

23 Ratios de charges intersectorielles

24 Contenu des contrats d’assistance technique

À la suite des échantillons théoriques constitués après l’analyse des entretiens, l’étude qualitative retient l’hypothèse implicite (H2) selon laquelle,« l’association des études qualitatives aux résultats empiriques quantitatifs est pertinente pour la détection des cas de MNC. » Elle se sert du

paradoxe empirique quantitatif qui permet de détecter les cas de MNC, à partir du lissage des

résultats, sans fournir des indications qui le distinguent des cas frauduleux. Le processus de validation de l’hypothèse (H2) consiste à formuler deux hypothèses subsidiaires à partir des

échantillons théoriques constitués.

La première (H.2.1) est ainsi formulée : « Une au moins des entreprises de l’échantillon

présente des résultats incohérents qui ne permettent pas de confirmer ou d’infirmer le cas de MNC détecté dans la démarche quantitative. »

La seconde (H.2.2) est la suivante : « Une étude qualitative approfondie fournit les éléments probants qui confirment ou infirment les cas de MNC détectés dans la démarche quantitative. »

Pour la validation empirique de ces deux hypothèses, quatre entreprises de l’échantillon sont retenues de façon aléatoire parmi les 185 concernées. La synthèse des alertes identifiées est

présentée dans le tableau ci-dessous, à partir des postes du bilan et du compte de résultat.

Tableau 9 : Synthèse des anomalies sur les postes du bilan des quatre entreprises

Postes du

bilan analysés

Entreprises

Situation

Opinions sur les cas de MNC

Lissage du RI

Résultat Entreprise 1 272814 352 Mitigée Non

Entreprise2 43 108 911 Mitigée Oui

Entreprise3 165 101 737 Mitigée Oui

Entreprise4 -131 582 256 Manipulation éventuelle Oui

Durée de stockage

Entreprise1 6 mois 7 jours Manipulation éventuelle Non

Entreprise2 1 mois 18 jours Semble normale Oui

Entreprise3 12 mois 4 jours Manipulation éventuelle Oui

Entreprise4 3 mois 27 jours Mitigé Oui

Durée de recouvrement

des créances

Entreprise1 35 jours Semble normale Non

Entreprise2 48 jours Semble normale Oui

Entreprise3 116 jours Manipulation éventuelle Oui

Entreprise4 223 jours Manipulation éventuelle Oui

Situation de trésorerie

Entreprise1 -249 134 660 Manipulation éventuelle Non

Entreprise2 -706 474 420 Mitigé Oui

Entreprise3 -761 222 052 Manipulation éventuelle Oui

Entreprise4 -82 025 053 Manipulation éventuelle Oui

Provisions financières

Entreprise1 168 823 646 Manipulation éventuelle Non

Entreprise2 2 229 720 Semble normale Oui

Entreprise3 171 554 254 Manipulation éventuelle Oui

Entreprise4 12 375 000 Manipulation éventuelle Oui

Délais de

paiement fournisseurs

Entreprise1 12 jours Incohérence avec la durée de recouvrement des créances Non

Entreprise2 49 jours Semble normale Oui

Entreprise3 65 jours Manipulation éventuelle Oui

Entreprise4 75 jours Manipulation éventuelle Oui

Trésorerie Entreprise1 252 738 021 Manipulation éventuelle Non

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1 ère journée d’étude africaine en comptabilité et contrôle

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passive Entreprise2 98 784 528 Mitigé Oui

Entreprise3 986 784 528 Manipulation éventuelle Oui

Entreprise4 268 511 253 Manipulation éventuelle Oui

Pour la validation empirique de l’hypothèse (H.2.1), on peut constater par exemple, s’agissant de l’entreprise 1 que l’analyse qualitative est mitigée par rapport au résultat de l’étude

quantitative. D’abord, cette entreprise se présente comme celle qui ne se livre pas au lissage du

résultat imposable. Mais l’analyse de ses conditions d’exploitation conduit à des conclusions

contradictoires. Une analyse de sa durée de stockage montre qu’elle conserve en moyenne ses

stocks pendant 6 mois et 7 jours, ce qui n’est pas réaliste à moins de rencontrer des difficultés

commerciales particulières dans son activité. Elle recouvre ses créances à 35 jours, et paie ses fournisseurs à 12 jours, ce qui est complètement incohérent, à moins de payer les fournisseurs à

partir des découverts bancaires ; ce qui justifierait le niveau important de la trésorerie passif. Dans

le cas contraire, la trésorerie passive serait fictive (voir même frauduleuse), et consisterait à

justifier des flux de trésorerie inexistants. Cette entreprise a un niveau de provisions financières

élevé (plus de la moitié de son résultat net) ; ce qui laisse entrevoir une manipulation des éléments exceptionnels pour rattraper la manipulation effectuée sur les éléments courants. Les analyses

empiriques qualitatives contredisent le test d’Imhoff (1977).

On peut aussi considérer le cas de l’entreprise 2 qui semble fonctionner normalement à

partir de l’appréciation des éléments qualitatifs de sa gestion, mais pourtant testée positive par le

coefficient d’appréciation de lissage d’Imhoff. Elle a un résultat positif avec une durée de stockage moyen d’un mois et demi. Ses créances sont recouvrées 35 jours après la vente et son crédit

fournisseurs se situe à un niveau très appréciable, soit 49 jours après l’achat. Bien que sa

situation de trésorerie reste tendue, et sa provision financière assez faible, les éléments de l’analyse

qualitative ne permettent pas de situer cette entreprise parmi celles qui sont considérées comme

ayant pratiqué les cas de MNC. Une fois de plus, les analyses empiriques qualitatives contredisent le test d’Imhoff (1977).

Les cas des entreprises 1 et 2 valident l’hypothèse empirique (H.2.1), en ce sens qu’ils

présentent des résultats incohérents entre le test quantitatif d’Imhoff (1977) et les éléments

d’analyse qualitative. Le processus de validation empirique de la seconde hypothèse subsidiaire

(H.2.2) s’effectue à partir de la lecture des éléments d’analyse qualitative qu’on observe dans le tableau de synthèse des anomalies. La lecture de ces anomalies confirme les cas de MNC, avec des

éléments probants pour les justifier. Le cas de l’entreprise 4 montre un résultat négatif important,

ce qui permet à celle-ci de ne payer que le minimum d’impôt exigé par l’administration fiscale. Elle

a des stocks pour une durée d’environ quatre mois et elle recouvre ses créances en 223 jours ; ce

qui est invraisemblable si elle doit payer ses fournisseurs en 75 jours. Ce constat permet d’envisager des conditions de paiement avantageuses ; ou frauduleuses, pour justifier une activité

fictive. Ce cas pourrait même s’apparenter à un cas frauduleux. La lecture des éléments

quantitatifs confirme l’hypothèse (H.2.2) formulée plus haut. Cependant, les entreprises exemptes

des présomptions des cas de MNC sont-elles si saines ?

Pour vérifier l’interrogation précédente, nous avons proposé une étude approfondie portant sur deux entreprises pour lesquelles aucune présomption de manipulation n’est à priori identifiée.

Ces deux entreprises ont fait l’objet d’une analyse approfondie sur leurs conditions générales

d’exploitation. Les principaux résultats sont présentés dans le tableau 10 ci-dessous.

Tableau 10 : Conditions d’exploitation des entreprises exemptes de lissage des résultats

postes du bilan

analysés

Entreprises

Situation

Opinions sur les cas de MNC

Résultat

Entreprise 1 2 948 495 206 Pas d’intention de lissage autour de la valeur zéro

Entreprise2 128 132 672 Pas d’intention de lissage autour de la valeur zéro

Durée de stockage

Entreprise1 26 jours Délai raisonnable pour une entreprise en activité normale

Entreprise2 21 jours Délai raisonnable pour une entreprise en activité normale

Durée de recouvrement des

créances

Entreprise1 13 jours Délai raisonnable pour une entreprise en activité normale

Entreprise2 7 jours Délai raisonnable pour une entreprise en activité normale

Situation de trésorerie Entreprise1 -4 392 467 561 Mitigée

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1 ère journée d’étude africaine en comptabilité et contrôle

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Entreprise2 -654 007 926 Mitigée

Provisions financières Entreprise1 106 590 706 Valeur des provisions raisonnable en rapport avec les créances

Entreprise2 0 Pas de provisions

Délais de paiement des fournisseurs

Entreprise1 47 jours Délai raisonnable

Entreprise2 56 jours Délai raisonnable

Trésorerie passive Entreprise1 7 657 253 070 Importante mais les créances clients s’élèvent à 11 989 670 258

Entreprise2 964 889 607 Importante mais les créances s’élèvent à 1 880 487 198

On peut remarquer que les indicateurs de gestion de ces deux entreprises semblent

normaux. Les résultats se situent très largement au-dessus de la valeur zéro. Les durées de

stockage sont respectivement de 26 jours pour la première entreprise,21 jours pour la seconde, et

ne présentent apparemment rien d’anormal. Les créances des clients sont recouvrées à 13 jours en

moyenne pour la première entreprise, et 7 jours pour la seconde. Ce qui semble exprimer des

relations de confiance avec la clientèle. La trésorerie passive s’élève pour l’entreprise1 à -4 392 467 561 FCFA et pour l’entreprise 2 à -654 007 926 FCFA. Cette situation laisse

apparemment penser que ces deux entreprises sont suffisamment endettées. Ce qui révélerait un

certain risque financier, sans un rapport manifeste avec des présomptions de MNC. La réalité est

que cet endettement traduit le financement du besoin créé par l’importance des stocks détenus et

l’importance des créances ; même si les délais de règlement des clients semblent brefs. Les délais de paiement fournisseurs semblent à la limite de l’acceptable : 47 jours pour l’entreprise 1 et 56

jours pour l’entreprise 2. Cette interprétation est discutable, sans pour autant véritablement

traduire un cas avéré de MNC.

Le test empirique effectué sur les entreprises supposées saines (sans pratiques des MNC)

confirme bien la validité du modèle de lissage permettant de détecter les entreprises qui se livrent à ces pratiques. La difficulté du modèle réside dans le fait qu’il est inopérant pour dissocier le lissage

naturel du lissage artificiel qui s’apparente à des cas de MNC. Pour se prononcer sur les

entreprises qui ne pratiquent pas le lissage des résultats, il faudrait effectuer d’autres tests

quantitatifs. Ces derniers permettent d’apprécier si les cas de manipulations éventuels visent la

surestimation des résultats au profit des parties prenantes. S’agissant de ces deux entreprises choisies au hasard, nous n’avons pas identifié des pratiques de MNC.

Discussion des résultats dans le cadre de quelques théories pertinentes

La sensibilité théorique du chercheur est sa capacité à donner du sens aux données

empiriques recueillies, et d’être capable de dépasser l’évidence d’une première interprétation pour découvrir ce qui semble caché au profane (Strauss et Corbin, 1998). Les résultats de notre étude

permettent de revisiter deux théories importantes pour le sujet traité : d’abord, la théorie des

parties prenantes ; ensuite, la théorie de la dénonciation des informations comptables et

financières manipulées.

Théorie des parties prenantes (PP)

La théorie des PP a longuement été discutée dans la première partie de l’article, comme une

théorie qui justifie les pratiques des MNC dans plusieurs pays, y compris au Cameroun. Les

résultats de notre recherche permettent d’affirmer qu’elle est une théorie pertinente pour décrypter les pratiques des MNC en contexte camerounais. Du point de vue des parties prenantes, l’activité

du chercheur universitaire s’apparente à celle de l’auditeur qui recherche par des analyses

approfondies, les informations comptables suspectées d’être manipulées par les entreprises.

L’activité de l’auditeur est guidée par plusieurs principes : sa compétence professionnelle ; son

indépendance morale, financière et éthique ; son engagement à prévenir voire révéler des cas de

MNC auxquels il serait confronté dans sa pratique professionnelle.

Théorie de la dénonciation

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La dénonciation est l’action de dénoncer (le Petit Robert), de dévoiler ou de signaler à

l’autorité par voie légale une situation préoccupante dans le fonctionnement d’une entreprise. La

pratique de la dénonciation est courante en comptabilité financière et dans différents pays. C’est

ainsi qu’aux États-Unis, la loi de 20025 sur la réforme de la comptabilité des sociétés cotées et la

protection des investissements impose de nouvelles règles sur la comptabilité et la transparence financière. Le contrôle de l’application de cette loi est effectué par des organismes, tels que la SEC,

qui encouragent la dénonciation des informations financières manipulées.

La dénonciation peut être faite spontanément sur la base des chiffres comptables

manipulés et constatés par des auditeurs. Par ailleurs, la pratique de la dénonciation a permis de

révéler les conditions de vente trop avantageuses pour les clients de certaines entreprises, et par conséquent susceptibles de révéler des fraudes comptables. La dénonciation peut aussi être faite

au niveau des parties prenantes. Les organes de presse jouent aussi un rôle important dans la

dénonciation des cas de MNC. Au Cameroun, plusieurs cas de dénonciation des MNC ont entraîné

l’interpellation des dirigeants et des auditeurs des entreprises concernées.

CONCLUSION

L’objectif de cet article était de montrer la pertinence de la détection empirique des cas de

MNC, à partir du modèle hybride qui permet de résoudre les insuffisances des modèles traditionnels. Le processus d’étude empirique séquentielle mis en œuvre a permis d’atteindre cet

objectif, en montrant que le modèle hybride fournit des arguments décisifs pour apprécier les MNC

au cas par cas.

L’application empirique du modèle hybride, dans le contexte des entreprises camerounaises, a révélé de nombreux enseignements pertinents pour la détection des cas de MNC.

Pour les auditeurs des comptes de l’administration fiscale, le modèle hybride se révèle comme un

outil adapté et performant. La méthode quanti-qualitative sert, dans un premier temps, à identifier

les entreprises pour lesquelles les présomptions des cas de MNC semblent évidentes.

L’approfondissement qualitatif de l’analyse permet, dans la phase suivante, de ne retenir que les

entreprises dont les cas de MNC sont avérés. Le modèle hybride pourrait ainsi permettre de développer un outil de travail pertinent pour les auditeurs des comptes des cabinets indépendants.

Les indicateurs quantitatifs sectoriels d’activité (taux des salaires sectoriels, amortissements, etc.),

connus des cabinets d’audit, serviraient par exemple, en comparaison avec ceux de l’entreprise

auditée, à révéler des situations pour lesquelles ces indicateurs ne sont pas conformes à ceux des

secteurs considérés.

Dans notre recherche, la validité du modèle de lissage est confirmée avec le test d’essai

effectué sur deux entreprises qui, à priori, ne pratiquent pas des MNC. Une analyse qualitative

approfondie de ces deux entreprises montre qu’elles ne pratiquent pas des MNC, du moins en ce

qui concerne le lissage des résultats. Quelques indicateurs de gestion de ces entreprises nous ont

semblé mitigés, mais pas suffisants pour conclure à des cas de MNC. Une étude quantitative différente pourrait révéler d’autres enseignements concernant ces deux entreprises.

Les résultats de notre recherche révèlent des enseignements utiles pour revisiter l’approche

théorique des MNC. Deux théories adaptées au contexte camerounais émergent de la discussion

des résultats : la théorie des parties prenantes et celle de la dénonciation des cas de MNC. La

théorie des parties prenantes confirme la nécessité de l’action collective, pour la préservation des intérêts de ces dernières. Celle de la dénonciation émerge comme une théorie d’accompagnement et

de renforcement des actions des parties prenantes notamment, les auditeurs, les organismes de

pression éthique, les salariés de l’entreprise.

Notre recherche présente une limite principale dans le processus de validation empirique de l’étude duale. Il aurait été pertinent d’obtenir des informations supplémentaires auprès des

5Loi « Sarbanes-Oxley ».

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dirigeants des entreprises concernées. Cette limite constitue une piste intéressante pour le

développement de la recherche sur les MNC, suivant une perspective méthodologique renouvelée.

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ANNEXES

Annexe 1 :Entretiens réalisés avec les inspecteurs des impôts et les experts comptables

Guide d’entretien

Premier thème : Identification de l’auditeur

Deuxième thème : Hypothèse des cas de manipulation des nombres comptables dans le contexte des entreprises camerounaises

Troisième thème :Identification des déterminants de la détection des cas de manipulation des

nombres comptables

Quatrième thème : Motifs pour lesquels les cas de manipulation des nombres comptables sont pratiqués dans les entreprises.

Annexe 2 : Protocole du guide d’entretien avec les auditeurs des comptes des cabinets

d’audit

Indentification de l’auditeur

1/ Nom et prénom : ___________________________________________________________

2/Cabinet d’audit : __________________________________________________________

3/ Grade : ___________________________________________________________________

4/ Responsabilités antérieures _________________________________ durée ____________ 5/ Responsabilité actuelle _____________________________________ depuis ___________

Premier thème : perception de l’hypothèse des cas de manipulation des nombres comptables dans

le contexte camerounais

Question 1 : la littérature fait l’hypothèse selon laquelle certaines entreprises manipulent les

nombres comptables. Quel est votre opinion à ce sujet ?

Question 2: selon vous, pourquoi les entreprises sont amenées à agir sur les nombres comptables ?

Question 3 : y a-t-il une particularité dans le contexte camerounais pour ce type de comportement ?

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Deuxième thème : les déterminants des cas de manipulation des nombres comptables

Question 4 : selon vous, qui pratique les cas de manipulation des nombres comptables dans l’entreprise ?

Question 5 : ces comportements sont-ils différents selon les caractéristiques des entreprises

(entreprise nationale, filiale de multinationale, petite entreprise, le mode de gouvernance) ?

Troisième thème : technique de détection des cas de manipulation des nombres comptables

Question 6 : quels sont les éléments particuliers (postes) de l’actifs pouvant servir à dissimuler les

cas de manipulation des nombres comptables ? Comment procéder à leur détection ?

Question 7 : quels sont les éléments particuliers (postes) du passif pouvant servir à dissimuler les

cas de manipulation des nombres comptables ? Comment les détecter ?

Question 8 : quels sont les éléments particuliers (postes comptables) des charges pouvant servir à

dissimuler les cas de manipulation des nombres comptables ? Comment les détecter ?

Question 9 : quels sont les éléments particuliers (postes comptables) des produits, pouvant servir à

dissimuler les cas de manipulation des nombres comptables ? Comment les détecter ?

NB. Les cas de manipulation des nombres comptables sont compris ici comme des interventions

délibérées dans les nombres comptables, pour enjoliver l’image réelle de l’entreprise. Ils peuvent être réalisés dans le cadre légal, c'est-à-dire dans le respect des règles comptables (changement des

méthodes comptables, décisions de gestion), ou en dehors des règles comptables (fraudes par faux

documents etc.).

Annexe 3 : Protocole d’entretien avec les inspecteurs des impôts

1er Partie : Identification de l’auditeur

1/ Nom et prénom : ___________________________________________________________

2/Centre des impôts: ____________________________________________________________

3/ Grade : ___________________________________________________________________ 4/ Responsabilités antérieures _________________________________ durée ____________

5/ Responsabilité actuelle _____________________________________ depuis ___________

2e Partie : l’hypothèse des cas de manipulation des nombres comptables dans le contexte

camerounais

Question 1 : La littérature fait l’hypothèse selon laquelle les entreprises manipulent les nombres

comptables. Quel est votre opinion à ce sujet, et particulièrement dans le contexte camerounais ?

3e partie :Indentification des déterminants éventuels des cas de manipulation des nombres

comptables

Question 2: selon vous, pourquoi les entreprises sont amenées à agir sur les nombres comptables ?

et particulièrement dans le contexte camerounais ?

11/ Précisément, existe-t-il des cas de manipulation des nombres comptables :

a/ - sur le chiffre d’affaires ? b/ - comment détecter ces cas ?

12/ Existent-ils des cas de manipulations des nombres comptables liés au produits ?

a/ quels sont les exemples de manipulation des produits que vous avez déjà rencontré ?

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b/ - comment détecter ces cas ?

13/ Existent-ils des cas de manipulations des nombres comptables à partir des charges ?

a/ - quels sont les exemples des cas de manipulation des charges que vous avez déjà rencontré ?

b/ - comment détecter ces cas ?

14/ Existent-ils des cas de manipulation des nombres comptables liés aux éléments du patrimoine

de l’entreprise ?

a/ - quels sont les cas concrets de manipulations des nombres comptables, liés aux éléments du

patrimoine ?

b/ - comment détecter ces cas ?

Quatrième partie : Les motifs des manipulations comptables

15/ les lois de finances en application au Cameroun ne vous-semblent-elles pas trop rigides pour

favoriser les cas de manipulations comptables par les dirigeants d’entreprises ?

16/ - quels sont les types d’impôts pour lesquels les dirigeants peuvent éviter de payer ?

17/- quels sont les techniques utilisées pour éviter le paiement de ces impôts ?

Annexe 4 : Différents codes repérés dans l’analyse des données en contexte camerounais

Catégories Codes Question

Existence des cas de manipulation des nombres comptables EXCMNC 1

Opinion favorable Opinion défavorable

ECMNC/OP ECMNC/OD

Les motivations des cas de manipulation des nombres comptables MCMNC 2

Minimiser le paiement de l’impôt MCMNC/I

Servir les intérêts personnels des dirigeants MCMNC/D

Par des erreurs comptables MCMNC/E

Le contexte économique et social favorable aux cas de MNC MCMNC/EC

Servir les intérêts des administrateurs MCMNC/AD

Atteindre les résultats prévus MCMNC/RP

Servir les intérêts du personnel MCMNC/IP

La formation des dirigeants MCMNC/FD

Exploitation des niches fiscales MCMNC/NF

Changer la physionomie des états financiers MCMNC/CP

Exploitation des ouvertures comptables MCMNC/OC

Tromper les parties prenantes MCMNC/TP

Techniques particulières des cas de manipulation des nombres comptables au Cameroun ?

TPCMNC 3

Aucune particularité dans le contexte camerounais TPCMNC/A

La répression fiscale TPCMNC/PF

Le contexte économique TPCMNC/CE

Le contexte social TPCMNC/CS

Les acteurs des cas de manipulation des nombres comptables au Cameroun ACMNC 4

Le dirigeant ACMNC/D

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Les responsables de la comptabilité ACMNC/RC

Les autres personnes en activité dans l’entreprise ACMNC/AP

Les commissaires aux comptes ACMNC/CC

Les cas de manipulation des nombres comptables selon les caractéristiques de l’entreprise

CMNCCE 5

Les petites entreprises individuelles CMNCCE/EI

Les grandes entreprises CMNCCE/GE

Les groupes d’entreprises privées CMNCCE/EP

Les multinationales CMNCCE/MN

Les entreprises à capitaux publics CMNCCE/CP

Les entreprises cotées CMNCCE/EC

Les entreprises qui souhaitent entrer en bourse CMNCCE/EB

Le manque de comportement éthique CMNCCE/CE

Le manque d’organisation et de procédures comptables CMNCCE/OP

Catégories Codes Question

Les techniques de détection des cas de MNC « postes de l’actif du bilan » TDMNCA 6 Le poste des charges immobilisées TDMNCA/CI Le poste des stocks TDMNCA/S Le recoupement des créances TDMNCA/CC

La circularisation des comptes de créance TDMNCA/C Le poste de trésorerie TDMNCA/TR La dénonciation TDMNCA/DE La demande d’information TDMNCA/DI

Vigilance sur les changements de méthodes comptables TDMNCA/CM Examiner les créances de façon nominale TDMNCA/EN Examiner le niveau d’antériorité des créances clients TDMNCA/AC Application de la méthode d’audit par sondage TDMNCA/SC

Faire des investigations TDMNCA/I Les techniques de détection des cas de MNC « postes du passif du bilan » TDMNCP 7 Le poste des provisions TDMNCP/PR Le recoupement des postes de dettes fournisseurs TDMNCP/CF

Les comptes courants TDMNCP/CC Examiner le niveau d’antériorité des dettes fournisseurs TDMNCP/AF

Les techniques de détection des cas de MNC « postes de charges » TDMNCCH 8 La détection des charges reclassées par une revue analytique TDMNC/RA La détection des charges exagérées par la demande documentaires TDMNC/DD La détection des provisions exagérées par comparaison des taux sectoriels connus TDMNC/TS

La détection des charges exagérées par les indicateurs statistiques TDMNC/IS La détection des anomalies de charges par échantillonnage TDMNC/EC La détection des anomalies de charges par analyse des libellés TDMNC/AL La détection des charges plafonnées TDMNC/CP

La détection des anomalies par les charges significatives TDMNC/CS Les techniques de détection des cas de MNC « postes de produits » TDMNCPD 9 Le recoupement du chiffre d’affaires dans les banques TDMNC/CAB Le recoupement du chiffre d’affaires chez les tiers TDMNC/CAT

L’analyse de l’exploitation TDMNC/AE Détection des anomalies des produits par l’importance des choses TDMNC/IC La vérification de l’ensemble des activités d’une personne TDMNC/VAP

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Effectifs observés

LISSEURS NLISSEURS TOTAL

AGRI 10 2 12

COMMERCE 29 13 42

INDUSTRIE 41 25 66

SERV 34 19 53

TP 8 4 12

TOTAL 122 63 185

Effectifs théoriques

LISSEURS NLISSEURS TOTAL

Chi² par cellule

AGRI 7,91351351 4,08648649 12

0,550125535 1,06532247

COMMERCE 27,6972973 14,3027027 42

0,061270756 0,1186513

INDUSTRIE 43,5243243 22,4756757 66

0,146405795 0,28351598

SERV 34,9513514 18,0486486 53

0,025895119 0,0501461

TP 7,91351351 4,08648649 12

0,000945208 0,0018304

TOTAL 122 63 185

Total Chi² = 2,30410867 p-value = 0,6800211

Chi² critique = 9,48772904

Effectifs observés

LISSEURS NLISSEURS TOTAL

TPE 14 3 17

PE 43 18 61

ME 37 20 57

GE 28 22 50

TOTAL 122 63 185

Effectifs théoriques

LISSEURS NLISSEURS TOTAL

Chi² par cellule

TPE 11,2108108 5,78918919 17 0,693935208 1,34381104

PE 40,227027 20,772973 61

0,191149575 0,37016267

ME 37,5891892 19,4108108 57

0,009235206 0,01788405

GE 32,972973 17,027027 50

0,750022153 1,45242385

TOTAL 122 63 185

Total Chi² = 4,82862375 p-value = 0,184785

Chi² critique = 7,8147279