le tour du monde en un jour - sintpietersabdij.stad.gent · © s.a. ipm 2017. toute représentation...

1
© S.A. IPM 2017. Toute représentation ou reproduction, même partielle, de la présente publication, sous quelque forme que ce soit, est interdite sans autorisation préalable et écrite de l'éditeur ou de ses ayants droit. 12 Les lieux d'art SEMAINE DU 30 AOÛT AU 5 SEPTEMBRE 2017 ARTS LIBRE l Photographies en vue Le tour du monde en un jour h “80 Days of Summer”, un beau parcours photographique d’été à Gand. Deux abbayes, un beffroi, un hôtel de ville de deux hôtels de maître, qui dit mieux ? MÊME SI LE FESTIVAL photo- graphique de Gand s’intitule “80 Days of Summer”, pas be- soin de se donner autant de temps que Phileas Fogg dans “Le Tour du Monde en 80 jours” de Jules Verne pour le parcourir. Un bon après-midi suffit. Il permet en tout cas une visite attentive de chacune des expositions. Cependant, tout comme au festival de Marchin (“La Libre” du 08-08-2017) et plus qu’à celui de Villers-la- Ville (“La Libre” du 23-08- 2017), cela vaut vraiment la peine de consacrer toute une journée à la promenade d’un lieu à l’autre. Pourquoi pas d’ailleurs y adjoindre un pas- sage par des lieux aussi formi- dables que le quai aux Herbes ou le pont Saint-Michel. Ou en- core par la cathédrale Saint-Ba- von, pour y suivre l’avance- ment de restauration de l’Agneau Mystique ? Impeccable Ceci dit, la programmation – restreinte mais de qualité – du festival vaut en soi le déplace- ment par la ville de Charles Quint. A commencer par les cinq expositions à l’abbaye Saint-Pierre qui assoient par- faitement la thématique “Roots Roads” et ce, c’est à no- ter, dans une présentation im- peccable. Côté “racines”, Ester Hessing montre la vie des gens qui ont choisi de revenir habi- ter dans la zone irradiée de Tchernobyl. Ce sont majoritai- rement des nonagénaires Sa- mosely qui croient que pour rejoindre leurs proches après la mort, il faut être enterré dans le même cimetière qu’eux. Tout nous semble normal et même charmant chez eux et pourtant, la radiation est bien là. Côté “nomades” Jeroen Toir- kens donne un bel aperçu de son travail au long cours sur les derniers nomades de l’hémis- phère nord, de la Turquie à la Mongolie en passant par la Russie. Frank Gaudlitz pré- sente quant à lui le voyage qu’il fit dès 2010 sur les traces de l’expédition légendaire d’Alexander von Humboldt à travers l’Amérique du Sud en 1801. Plus de 2 200 kilomètres à la découverte des paysages et des gens. Laurence Bonvin nous met avec une grande éco- nomie de moyens face à la co- lonie Blikkiesdorp construite durant la Coupe du Monde 2010 pour loger – on devrait dire parquer – des gens expul- sés de chez eux par les autori- tés sud-africaines. Les condi- tions y sont dures et indignes, mais l’ingéniosité humaine y remédie tant bien que mal. La suite du parcours gantois devrait passer par l’hôtel de ville où expose l’excellent Max Pinckers, cependant les mo- ments d’ouverture s’y rédui- sent à deux rendez-vous de trois quarts d’heure les same- dis et dimanches, ce qui est peu et en définitive un gros couac du festival. L’exposition de Joa- kim Eskildsen – de bonne fac- ture photographique, mais présentée sans imagination dans la peu avenante salle d’ac- cueil du beffroi – ne compense pas ce manque, cependant elle nous met sur le chemin de l’ab- baye Saint-Bavon l’on trouve une installation intéres- sante d’Antoine d’Agata réali- sée à partir d’images de réfu- giés à Cherbourg et surtout, dans le magnifique réfectoire, l’excellente et ingénieuse ex- position “L’homme qui mar- che” de l’agence Magnum sur les exils depuis la Seconde Guerre mondiale. Le parcours se termine par l’exposition d’Evgenia Arbu- gaeva sur un ancien site de re- cherche allemand en Tanzanie et sur les portraits de Christian Tagliavini, respectivement dans les bâtisses impression- nantes de l’Hôtel d’Hane Steenhuyse et du musée Ar- nold Vander Haegen à la Velds- traat. En fin de compte, tout cela nous donne une bien belle biennale. Jean-Marc Bodson U “80 Days of Summer”, festival de photographies à Gand, Jusqu’au 17 septembre. Rens : 80daysofsummer.be Blikkiesdorp, un village de conteneurs construit durant la Coupe du Monde 2010 pour parquer des gens expulsés de chez eux par les autorités sud-africaines. Un reportage de Laurence Boivin. ANTOINE D’AGATA/MAGNUM PHOTOS Un des réfugiés de Cherbourg photographié par Antoine d’Agata et présenté dans le jardin de l’abbaye Saint-Ba- von : sur la route, loin des racines… LAURENCE BONVIN

Upload: vanphuc

Post on 14-Sep-2018

215 views

Category:

Documents


0 download

TRANSCRIPT

© S.A. IPM 2017. Toute représentation ou reproduction, même partielle, de la présente publication, sous quelque forme que ce soit, est interdite sans autorisation préalable et écrite de l'éditeur ou de ses ayants droit.

12 Les lieux d'art SEMAINE DU 30 AOÛT AU 5 SEPTEMBRE 2017 ARTS LIBRE

l Photographies en vue

Le tour du monde en un jourh “80 Days of Summer”, un beau parcoursphotographique d’été à Gand.

Deux abbayes, un beffroi, un hôtel de ville dedeux hôtels de maître, qui dit mieux ?

MÊME SI LE FESTIVAL photo­graphique de Gand s’intitule“80 Days of Summer”, pas be­soin de se donner autant detemps que Phileas Fogg dans“Le Tour du Monde en 80jours” de Jules Verne pour leparcourir. Un bon après­midisuffit. Il permet en tout cas unevisite attentive de chacune desexpositions. Cependant, toutcomme au festival de Marchin(“La Libre” du 08­08­2017) etplus qu’à celui de Villers­la­Ville (“La Libre” du 23­08­2017), cela vaut vraiment lapeine de consacrer toute unejournée à la promenade d’unlieu à l’autre. Pourquoi pasd’ailleurs y adjoindre un pas­sage par des lieux aussi formi­dables que le quai aux Herbesou le pont Saint­Michel. Ou en­core par la cathédrale Saint­Ba­von, pour y suivre l’avance­ment de restauration del’Agneau Mystique ?

ImpeccableCeci dit, la programmation –

restreinte mais de qualité – dufestival vaut en soi le déplace­

ment par la ville de CharlesQuint. A commencer par lescinq expositions à l’abbayeSaint­Pierre qui assoient par­faitement la thématique“Roots Roads” et ce, c’est à no­ter, dans une présentation im­peccable. Côté “racines”, EsterHessing montre la vie des gensqui ont choisi de revenir habi­ter dans la zone irradiée deTchernobyl. Ce sont majoritai­rement des nonagénaires Sa­mosely qui croient que pourrejoindre leurs proches après lamort, il faut être enterré dansle même cimetière qu’eux.Tout nous semble normal etmême charmant chez eux etpourtant, la radiation est bienlà. Côté “nomades” Jeroen Toir­kens donne un bel aperçu deson travail au long cours sur lesderniers nomades de l’hémis­phère nord, de la Turquie à laMongolie en passant par laRussie. Frank Gaudlitz pré­sente quant à lui le voyage qu’ilfit dès 2010 sur les traces del’expédition légendaired’Alexander von Humboldt àtravers l’Amérique du Sud en

1801. Plus de 2200 kilomètresà la découverte des paysages etdes gens. Laurence Bonvinnous met avec une grande éco­nomie de moyens face à la co­lonie Blikkiesdorp construitedurant la Coupe du Monde2010 pour loger – on devraitdire parquer – des gens expul­sés de chez eux par les autori­tés sud­africaines. Les condi­tions y sont dures et indignes,mais l’ingéniosité humaine yremédie tant bien que mal.

La suite du parcours gantoisdevrait passer par l’hôtel deville où expose l’excellent MaxPinckers, cependant les mo­ments d’ouverture s’y rédui­sent à deux rendez­vous detrois quarts d’heure les same­dis et dimanches, ce qui est peuet en définitive un gros couacdu festival. L’exposition de Joa­kim Eskildsen – de bonne fac­ture photographique, maisprésentée sans imaginationdans la peu avenante salle d’ac­cueil du beffroi – ne compensepas ce manque, cependant ellenous met sur le chemin de l’ab­baye Saint­Bavon où l’ontrouve une installation intéres­sante d’Antoine d’Agata réali­sée à partir d’images de réfu­giés à Cherbourg et surtout,dans le magnifique réfectoire,l’excellente et ingénieuse ex­position “L’homme qui mar­che” de l’agence Magnum surles exils depuis la SecondeGuerre mondiale.

Le parcours se termine parl’exposition d’Evgenia Arbu­gaeva sur un ancien site de re­cherche allemand en Tanzanieet sur les portraits de ChristianTagliavini, respectivementdans les bâtisses impression­nantes de l’Hôtel d’HaneSteenhuyse et du musée Ar­

nold Vander Haegen à la Velds­traat. En fin de compte, toutcela nous donne une bien bellebiennale.Jean-Marc BodsonU“80 Days of Summer”, festivalde photographies à Gand,Jusqu’au 17 septembre. Rens :80daysofsummer.be

Blikkiesdorp, un village de conteneurs construit durant la Coupe du Monde 2010 pour parquerdes gens expulsés de chez eux par les autorités sud-africaines. Un reportage de Laurence Boivin.

ANTO

INE

D’AG

ATA/

MAG

NUM

PHOT

OS

Un des réfugiés de Cherbourg photographié par Antoined’Agata et présenté dans le jardin de l’abbaye Saint-Ba-von : sur la route, loin des racines…

LAUR

ENCE

BONV

IN