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L’Alliance fructueuse de fromagers basques Aquitaine Le nouveau départ du Four Solaire de Mont-Louis Languedoc-Roussillon Le succès mondial d’un coutelier ariégeois Midi-Pyrénées Le magazine de l'Association de Développement des Pyrénées par la Formation www.adepfo.asso.fr

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L’Alliance fructueuse de fromagers basques

Aquitaine

Le nouveau départ du Four Solaire de Mont-Louis

Languedoc-Roussillon

Le succès mondial d’un coutelier ariégeois

Midi-Pyrénées

Le magazine de l'Association de Développement des Pyrénées par la Formation

www.adepfo.asso.fr

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sommaire/ N°48

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10 6Rencontre à La-Bastide-sur-l’Hersavec Jean-Paul Tisseyre, un coutelier Meilleur Ouvrier deFrance qui façonne avec la mêmepassion les produits à bon rapportqualité-prix et les pièces de collection.

Visite du célèbre Four Solaire de Mont-Louis. Bâti en1947, il opère actuelle-ment une mue impor-tante qui devrait profiter à sa double activité de production et de tourisme.

Installé à Bulan, CyrilleDiovada entend profiter

des ressources et dupotentiel des Baronnies

pour favoriser la création d’une entreprise

de métallurgie.

Depuis 2005, l’Association Formation,Insertion, Développement Local (Afidel)mène dans le Comminges un projet

pilote à l’enseigne des Jardins de Cocagne. Objectifs : créer une

activité alliant le social, l’agriculture biologique et la vente hebdomadaire

de paniers de légumes.

Reportage à Ossès, au Pays Basque, où trois

producteurs de fromage fermierunissent leurs efforts dans un

espace de vente commun.

14Le Président de l’Adepforevient sur la problématique des

territoires ruraux frontaliers.Propos recueillis lors de la confé-

rence annuelle de l’Associationdes Régions Frontalières

Européennes.

Couverture :Sommelier éclatéPhoto :Jean-Paul Tisseyre

Magazine édité par l’ADEPFOAssociation de Développement des Pyrénéespar la Formation Toulouse 20002, Esplanade Compans Caffarelli - BP 58012 -31080 Toulouse cedex 6Tél 05 61 11 03 11 - Fax 05 61 11 03 10 E-mail : [email protected]

Directeur de la publication :Roger Barrau, Président de l'ADEPFORédaction :Michel Muro, Sébastien VaissièreSecrétariat de rédaction - Création - Éxécution :Poulpe Extra communicationImpression : Imprimerie Lahournère - ToulouseDépôt légal à parution

L’ADEPFO, éditeur d’«Objectif Pyrénées»contribue au développement localet applique la politique de sesfinanceurs : la République française,les Régions Aquitaine, Midi-Pyrénées,Languedoc Roussillonet l’Union Européenne.

Pyrénées-Atlantiques

Gers

Haute-Garonne

Hautes-PyrénéesAriège

Aude

Pyrénées-Orientales

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Lorsqu’en 1982 l’ADEPFO menait ses premières actions

dans les Pyrénées, la Formation-Développement était un

outil récent, méconnu et novateur. Vingt-sept ans plus

tard il est connu et reconnu et se révèle essentiel pour le déve-

loppement de l’activité et de l’ emploi dans les Pyrénées.

Aujourd’hui encore, l’ADEPFO encourage l’esprit d’initiative

des populations du massif et s’inscrit en cela dans les nouvel-

les orientations fixées par la Convention Interrégionale de

Massif des Pyrénées 2007-2013 qui entend promouvoir no-

tamment le renforcement de l’attractivité des Pyrénées en ter-

mes d’emplois et de services et le développement des coopérations européennes. La problé-

matique « Innovation, croissance et emploi : quelle compétitivité pour les régions de montagne ? » était

d’ailleurs au cœur des réflexions de la Conférence de l’Association Européenne des élus de

montagne impulsée par l’AEM et organisée à Toulouse le 6 novembre dernier par la Région

Midi-Pyrénées, l’Europe, la DIACT Pyrénées, l’ANEM, la Confédération Pyrénéenne du Tou-

risme et l’ADEPFO.

Notre magazine Objectif Pyrénées prend une forme nouvelle et s’imprime désormais sur pa-

pier recyclé.

Chaque projet illustre un savoir-faire pyrénéen et démontre la légitimité de l’ADEPFO sur le

terrain. Les expériences relatées dans ce numéro rappellent la nécessité d’appuyer des pro-

jets novateurs en plaçant leurs initiateurs au centre du dispositif de formation. De Jean-Paul

Tisseyre, coutelier au talent infini, jusqu’à Cyrille Diovada, touche-à-tout décidé à ressusciter

des métiers oubliés dans les Baronnies, en passant par les nouvelles applications du Four So-

laire de Mont-Louis, chaque projet reflète la légitimité et le savoir-faire de l’ADEPFO sur le ter-

rain. Tantôt presque évidents, tantôt méthodiquement élaborés, ces projets ont permis de

sauver, de créer ou de consolider des emplois et participé largement au développement

de l’activité dans les Pyrénées. Ce qui frappe à la lecture de ces projets, c’est l’incroyable

richesse du massif et la volonté farouche dont font preuve ses habitants lorsqu’il s’agit

de mettre les Pyrénées en valeur. Ces projets nous adressent tous le message suivant :

pour construire l’avenir de nos territoires, conjuguons innovation et atouts traditionnels du

massif. Puisse ce message tre bien entendu !!!ROGER BARRAUPresident de l’ADEPFO

Innovation et tradition

éditorial

s

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Union fromagère

Au début du mois de mai 2007, le vil-lage d’artisans d’Ossès qui a vu lejour à partir de 2002, a été officielle-

ment inauguré. Situé sur l’axe routier trèsfréquenté des vacanciers reliant Bayonneà Saint-Jean-Pied-de-Port, cet ensemblede bâtiments commerciaux rassembleplusieurs artisans-créateurs (ferronnier,conserveur, sandalier-espadrilleur, froma-gers, fabricant de meubles massifs, ébé-nistes et potiers). Le principe de fonction-nement de ce village consiste àmutualiser les efforts financiers, partager4

SOUCIEUX DE DÉVELOPPER LEURS

VENTES ET DE VALORISER LES

PRODUCTIONS LOCALES, DES ÉLE-

VEURS ET DES FROMAGERS

D’OSSÈS ONT MUTUALISÉ LEURS

COMPÉTENCES ET LEUR ÉNERGIE

POUR DÉVELOPPER UN POINT DE

VENTE ET UNE UNITÉ D’AFFINAGE

COMMUNS. UN PROJET MENÉ À

BIEN AVEC SOUTIEN DE LA FORMA-

TION-DÉVELOPPEMENT.

Aquitaine/Massif

Fromages, vins, miels et confitures sont les produits

phare de la boutique. Photos Sébastien Vaissière

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en occupant une partie des locaux despoteries Goicoechea. En 2006, l’espace devente ouvre ses portes pour l’été et les ré-sultats se font sentir malgré certaines dif-ficultés d’organisation : « Les trois produc-teurs ont appris à travailler ensemble, àpartager le même espace de vente pour ypromouvoir leurs fromages mais aussi d’au-tres produits locaux conformes à leur cahierdes charges. Mais malgré les heurts des pre-mières semaines, l’opération a porté sesfruits grâce à l’expérience de ses initiateursqui sont issus de démarches de qualité, engagés dans des associations et militantsde la production fermière » résume DanielHarotzarène, l’un des intervenants del’ACCEA LAN BERRI. Même si pour l’heure l’équilibre sembledifficile à trouver, la saison 2007 a donnésatisfaction aux trois fromagers. L’objectifaffiché de privilégier le village d’artisansplutôt que les marchés (gourmands entemps et peu rentables) et d’augmenter levolume des ventes pourrait être atteintdès l’été 2009.

les frais de promotion et d’entretien dusite et éviter la dispersion des points devente. Il s’agit de répondre à la demanded’une clientèle en quête d’authenticité etde facilité d’accès. Un souci particulier estégalement apporté sur le site à l’environ-nement et à l’architecture. La présence de fromagers et d’éleveursd’Ossès dans cet espace commercial s’ex-plique par leur désir précoce de collabora-tion. Producteurs de fromage de brebis etde vache, ces derniers sont labellisés indi-viduellement et pratiquent tous la ventedirecte. Ils sont présents sur les marchéset travaillaient ensemble à la belle saisonsur certaines opérations avant même lanaissance du village d’artisans.

Un projet à affinerLes trois fromagers d’Ossès prennent alorsles choses en main et décident de tenterl’aventure. Ils font appel à l’Adepfo pourmettre en place tous les éléments préala-bles au démarrage de leur projet d’instal-lation d’une unité d’affinage et de com-mercialisation. Une campagne deformation-développement est alors miseen œuvre avec l’aide de Claude Viu, piloteéducatif Adepfo, mettant l’accent sur lesobjectifs et les finalités partagées, le sta-tut juridique de l’outil collectif à conce-voir, les conditions d’exploitation et l’opti-misation des pratiques commerciales. L’Adepfo préconise alors de faire un essai 5

“l’opération a porté ses fruits grâce à l’expérience de ses initiateurs… ”Daniel Harotzarène

Daniel Harotzarène,formateur d’ACCEA LAN BERRIdevant les locaux de l’associa-tion Euskal herriko Laborantza

Ganbara. Photo S.V.

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ARIEGE/LABASTIDE-SUR-L’HERS

Les lames salvatrices d’un coutelier de génie

comme ça, d’instinct. Dès mes premièrespièces, j’ai essayé de réaliser des objets prati-ques et esthétiques. » se souvient-il. Lesproches du coutelier amateur ont doncété longtemps ses seuls clients. Mécani-cien ajusteur employé dans une entre-prise des environs, Jean-Paul Tisseyre n’attendait alors qu’une seule chose de la fabrication de couteaux : le plaisir de lacréation.Mais les choses changent rapidement lejour où l’artisan ariégeois croise le cheminde Charles Bennica, célèbre coutelier héraultais. Ce dernier, épaté par le travailde Jean-Paul Tisseyre, lui propose de l’ac-compagner au salon international des artisans d’art de Paris. Le succès est immé-diat, et le coutelier amateur prend pleine-ment la mesure de son talent : « J’ai com-pris ce jour-là que le fait de ne pas avoirappris la coutellerie par la voie tradition-

Il y a quelques années à peine, Jean-Paul Tisseyre aurait eu bien du mal àimaginer qu’au mois d’octobre 2007 il

recevrait des mains du Président de la Ré-publique le titre de Meilleur Ouvrier deFrance classe coutellerie, option couteaude chasse. Il faut dire que la coutellerie estlongtemps restée pour lui une passion as-souvie en marge de son activité profes-sionnelle, un art parallèle lui permettantd’exprimer son talent et de satisfaire parents, amis et connaissances. Cet enfantde Labastide-sur-l’Hers a ceci de particu-lier qu’il a toujours fabriqué des couteauxsans jamais apprendre à le faire. Créer deslames, concevoir des manches et imagi-ner les mécanismes est pour lui aussi naturel que de respirer : « J’ai commencé lacoutellerie très jeune en observant la meulede mon père. J’ai fabriqué mes premierscouteaux pour m’en servir à la chasse,6

BIEN QU’IL FASSE MONTRE D’UN TALENT EXCEPTIONNEL POUR LA FABRICATION DE COUTEAUX ET D’UN

AMOUR IMMODÉRÉ POUR SA TERRE NATALE, JEAN-PAUL TISSEYRE NE POUVAIT ESPÉRER VIVRE DE SON

ACTIVITÉ SANS ÊTRE FORMÉ AUX ARTS DÉLICATS DU COMMERCE, DU MARKETING ET DE LA GESTION

D’ENTREPRISE. AVEC LE SOUTIEN DE LA FORMATION-DÉVELOPPEMENT, L’ENFANT DE LABASTIDE-SUR-

L’HERS A AINSI CRÉÉ SON PROPRE EMPLOI ET PROJETTE D’EN CRÉER UN DEUXIÈME.

De cet atelier qui ne paie pas de mine sortentchaque année des pièces convoitées par les plus

grands collectionneurs de couteaux de la planète.Photo Sébastien Vaissière

Dans la boutique attenante à l’atelier de Jean-Paul Tisseyre à Labastide-sur-l’Hers.

De gauche à droite :Jean-Paul Tisseyre, Michel Muro (directeur de l’Adepfo), Xavier Mervoyer (PyrénéesEntreprise) et Émilie René (Strater). Photo D.R.

Midi-Pyrénées/Massif

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plus prestigieuse. Pourtant, il manque àJean-Paul Tisseyre le moyen de se mettreà l’abri des aléas du marché pour assurerla bonne santé de son entreprise. « J’avaisbeau prendre le problème dans tous lessens, j’arrivais toujours à la conclusion quej’aurais du mal à vivre de la coutellerie en neproposant que des pièces uniques. Je dois àl’Adepfo et à Michel Muro en particulierl’idée d’un couteau de grande qualité fabri-qué avec des sous-traitants et destiné à uneclientèle touristique et moins spécialisée… »raconte-t-il. C’est ainsi qu’apparaît leMontségur, couteau pliant né du savoir-faire du maître et vendu à un prix raison-nable. Un produit qui représente au-

jourd’hui le tiers duchiffre d’affaires deJean-Paul Tisseyre etlui permet de voirl’avenir avec séré-nité : « Avec la clientèle prestigieuse (collectionneurs deRussie, du Moyen-Orient etc., grandschefs comme Pierre

Gagnaire) et la clientèle loisir, je sais quemon activité est viable. Je ne pense pas quecela aurait été le cas sans le concours etl’écoute de l’Adepfo qui a su adapter la for-mation à mes besoins. »En créant son propre emploi et en prépa-rant le terrain pour en créer un deuxièmedans les années à venir, Jean-Paul Tisseyrea également attiré des visiteurs à Labas-tide-sur-l’Hers et permis d’associer le nomdu village à la renommée internationalede son travail.

nelle me permettait de créer des pièces origi-nales susceptibles d’intéresser une clientèlede connaisseurs. » confie-t-il.

Succès immédiatFort de cette expérience, Jean-Paul Tis-seyre comprend qu’il peut espérer vivrede sa passion. Cette perspective lui estd’autant plus agréable que l’entreprise quil’emploie bat de l’aile : « Je savais qu’il mefaudrait quitter mon emploi à moyen terme,et rien ne laissait supposer que j’allais trou-ver un nouvel emploi dans les environs. Plu-tôt que de chercher du travail à Toulouse ouailleurs, j’ai pensé que la coutellerie me per-mettrait de rester au pays. » Dès lors, par lagrâce de concours remportés et d’articlesparus dans la presse spécialisée, le coute-lier ariégeois passe d’une clientèle localede chasseurs et d’artisans à des acheteurspointus et exigeants. Le succès de sescouteaux haut de gamme est tel qu’il netravaille plus qu’à temps partiel à l’usine.C’est en poussant la porte de l’associationAriège Initiative que Jean-Paul Tisseyreentend pour la première fois parler del’Adepfo : « À l’époque je cherchais de l’aidepour installer définitivement mon activité.J’étais un peu désemparé : on ne me propo-sait que des stages de coutellerie ou bien desformations générales peu adaptées à moncas. L’Adepfo en revanche m’a immédiate-ment parlé de gestion des comptes, de tech-niques de vente, de stratégie commer-ciale… J’ai bien vite compris que j’avaissollicité les bonnes personnes ! »

La solution MontségurJean-Paul Tisseyre commence ainsi à dé-velopper son activité autour de la fabrica-tion de pièces uniques tout en acquérantles bases de la gestion et du commerce.Lui qui n’a jamais connu que le salariat dé-couvre les réalités du chef d’entreprise :« Je pensais que fabriquer des couteaux de

grande qualité suffirait à assurer la péren-nité de mon entreprise, mais j’ai vite comprisque travailler à mon compte supposait depasser plus de la moitié du temps à faire au-tre chose que des couteaux ! C’est une réalitédont on ne se doute pas lorsqu’on est sala-rié ! » ironise-t-il. À partir de 2004, la renommée du coute-lier de Labastide-sur-l’Hers ne cesse decroître. Le carnet de commandes se rem-plit, les murs de la boutiques se tapissentde prix et de récompenses, la clientèles’internationalise et devient de plus en 7

“J’ai pensé que la coutellerie me permettrait de rester au pays…”

Alliance du savoir-faire de Jean-Paul Tisseyre etdu concours de sous-traitants, le couteau pliantMontségur rencontre de plus en plus de succèsauprès du public. Photo Jean-Paul Tisseyre

Les pièces du couteau sommelier Tisseyre avant assemblage.Photo Jean-Paul Tisseyre

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Du feret du savoir-faire

tie du passé depuis la généralisation de laproduction d’outils à grande échelle. Or, lesoutils fabriqués par un taillandier sont plusefficaces et solides que ceux produits à lachaîne. Aujourd’hui personne n’est là pourrépondre à cette demande. »Cyrille Diovada détermine dès lors la dou-ble activité de sa future entreprise : la métallurgie et la production de fer de trèsgrande qualité susceptible de fournir unematière première exceptionnelle aux arti-sans spécialisés, et la fabrication d’outils

Comme tous ceux qui savent voir au-delà des apparences, Cyrille Diovadaa compris que les Baronnies forment

un territoire propice aux projets ambi-tieux. Aussi, lorsqu’il visite en 2007 à Bulan une charmante masure et son étable attenante, il comprend qu’il atrouvé le lieu idéal où installer l’entreprisede métallurgie dont il rêve depuis des années. Dessinateur industriel de forma-tion, Cyrille Diovada a en effet pratiqué denombreux métiers avant de se tourner définitivement vers la métallurgie et lesarmes blanches. « Tout au long de ma vie,résume-t-il, j’ai plus ou moins consciem-ment multiplié les rencontres et les expé-riences pour rendre possible le projet de vieque je mène aujourd’hui. » Son idée estsimple : monter un atelier pour y prati-quer les différents métiers liés au fer, notamment la taillanderie, la coutellerieet la forge : « Si la ferronnerie artisanale estun marché saturé, les autres métiers de lamétallurgie traditionnelle sont en perte devitesse et même en voie de disparition, expli-que-t-il. Il est par exemple très difficile de nos jours pour un professionnel ou unamateur éclairé de se procurer des outils dequalité, car le métier de taillandier fait par-8

INSTALLÉ À BULAN DEPUIS 2007, CYRILLE DIOVADA ENTEND PROFITER DES RESSOURCES ET DU

POTENTIEL DES BARONNIES POUR FAVORISER LA CRÉATION D’UNE ENTREPRISE DE MÉTALLURGIE.

MÊLANT LA REMISE AU GOÛT DU JOUR DE MÉTIERS OUBLIÉS, LA VALORISATION DU PATRIMOINE ET LE

POSITIONNEMENT DANS UN MARCHÉ PROMETTEUR D’OUTILS DE QUALITÉ, CE PROJET ACCOMPAGNÉ

PAR L’ADEPFO ALLIE CRÉATION D’EMPLOI ET D’ACTIVITÉ DANS UN TERRITOIRE RESTÉ À L’ÉCART DES

GRANDS AXES DE COMMUNICATION.

Cyrille Diovada achève la fabrication d’un four traditionnel. Photo Sébastien Vaissière

Cyrille Diovada et Hélène Gaulier, pilote éducatif.Photo S.V.

Midi-Pyrénées/Massif

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2008 à octo-bre 2008 : «La formationtelle qu’elle aété définie audépart devaits’achever end é c e m b r e ,mais il a fallus’adapter aux difficultés inhérentes à unetelle entreprise. Le jeu en valait la chandellecar ce projet bénéficie d’un excellent an-crage territorial et suscite un vif intérêt ausein du comité de pilotage » explique Hé-lène Gaulier. En marge de son entreprise, Cyrille Dio-vada espère mener à bien deux autre pro-jets chers à son cœur. Le premier consisteà intensifier son engagement dans unprogramme unique au monde destiné àdévelopper en Europe la fabrication desabres d’arts martiaux de grande qualitécapables de concurrencer l’excellence ja-ponaise. Le second, plus lointain,concerne un projet d’hebergement afinde faire partager son amour des Baron-nies et de créer un deuxième emploi.

pour les particuliers et les professionnels,le tout animé par un état d’esprit de par-tage des connaissances, de transmissiondu savoir-faire et de développement local.

Le Bureau Territorial du ConseilRégional Midi-Pyrénées à Tarbeset l’Adepfo de concertLorsqu’il entreprend à l’été 2007 la réno-vation de la maison et l’aménagement del’atelier, Cyrille Diovada est un demandeurd’emploi décidé à créer sa propre entre-prise. Si ses compétences lui permettentde réaliser l’atelier et de rassembler le matériel nécessaire à son activité, il luifaut en revanche achever sa formationtechnique et s’aguerrir aux réalités de l’en-treprise. Il se tourne alors vers le BureauTerritorial du Conseil Régional Midi-Pyré-nées à Tarbes qui, séduit par l’idée, financeà 80% la formation technique. Le bureaumet alors le porteur de projet en relationavec l’Adepfo qui prend immédiatementen charge l’accompagnement de la phaseopérationnelle. Plusieurs modules de for-mation sont mis en place, qui mettentl’accent sur la finalisation de l’offre com-merciale en fonction de la demande, desatouts et des faiblesses de l’activité, sur larecherche de la valeur marketing (notam-ment les questions de rentabilité et de dé-veloppement commercial), sur la commu-nication, l’utilisation d’internet et sur lesdifférentes techniques commerciales àmettre en œuvre. « La prise en charge àhauteur de 80% de la formation techniquepar le Bureau Territorial nous a permis dedégager un budget conséquent pour les for-mations marketing et commerciale, et doncde multiplier les chances de réussite du pro-jet » souligne Hélène Gaulier, pilote édu-catif ADEPFO.

Outils locaux et sabres japonaisSi le projet de Cyrille Diovada suscite à cepoint l’enthousiasme, c’est qu’il ajoute à lacréation d’emploi une dose importante dedéveloppement local : « Le fait d’avoirtrouvé cette maison s’est accompagné d’unheureux hasard, se réjouit Cyrille. En effetBulan possède un important passé métal-lurgique. D’après mes recherches il estmême possible de mettre à jour une petitemine locale d’extraction du fer. Je projettede travailler comme les forgerons d’autre-fois pour valoriser ce patrimoine oublié etutiliser les matières premières des Baronniespour produire des objets 100% locaux ! »promet-il avant de confier : « Dans les Ba-ronnies, il faut encourager prioritairementles gens qui souhaitent travailler sur placepour développer le potentiel de ce merveil-leux territoire. »Avant même de fêter sa première annéed’installation à Bulan, Cyrille Diovada a étéélu conseiller municipal du village. Dequoi faire patienter cet esprit bouillon-nant qui a dû retarder la création de sonentreprise initialement prévue en janvier 9

Cyrille Diovada devant un soufflet de forgeron de 1868. La rénovation

et l’utilisation d’outils anciens font partie de sesobjectifs principaux. Photo S.V.

“Un projet qui ajoute à lacréation d’emploi une dose de

développement local”

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Un retour à la terre pour le retour à l’emploi

compagnement de personnes vers l’inser-tion. Notre rôle consiste à embaucher des individus qui souhaitent travailler, sans exiger aucune forme de qualification »explique-t-il.

Les candidats à la réinsertion se voientdonc confier différents postes liés à la culture de fruits et légumes, à la prépara-tion des paniers, à l’entretien, à la gestionadministrative ou au contact avec lesclients. Pendant une durée maximum dedeux ans, ils sont salariés, payés au SMICet bénéficient du réseau de l’Afidel pourtrouver une porte de sortie. De leur côtéles adhérents souscrivent un abonnementleur permettant de récupérer 48 paniersbio par an livrés à Huos ou dans l’un despoints de dépôt des environs.Le choix et la souplesseAu-delà de l’aspect social, la préservationde l’environnement motive tout particu-lièrement les membres de l’association : « Nous voulons montrer qu’il est possiblesur ce territoire de faire vivre une exploita-tion de ce type en mode agricole Bio. Nosprix sont aujourd’hui inférieurs à ceux duBio vendu au détail et légèrement supé-rieurs au Bio en demi-gros » assure RémyMartin. C’est au cours de la phase de démarrage

C’est en 2005 que Rémy Martin, Direc-teur de l’Afidel, a l’idée de créer unatelier d’insertion agricole dans le

Comminges, territoire de vastes étenduescultivées, idéal pour l’expérimentation dece genre de programmes. À la recherched’appuis et d’expériences similaires, il serapproche des Jardins de Cocagne (voirencadré) et décide d’inscrire son projetdans ce réseau renommé. Les Jardins de Cocagne du Comminges voient ainsi le jour en 2006 à Huos, petite communesituée à quinze kilomètres de Saint-Gau-dens : « Cette opération pilote qui crée etconsolide l’activité en milieu de montagne aentraîné la création du premier Jardin deCocagne de Haute-Garonne » souligne Hélène Gaulier, pilote éducatif Adepfo.

Depuis lagenèse dup r o j e t ,Rémy Mar-tin fait ensorte quela structuresoit bienplus qu’un

simple atelier d’insertion : « Il s’agissait demettre sur pied une entreprise sociale à dou-ble vocation avec d’un côté la production etla vente de produits Bio et de l’autre l’ac-10

DEPUIS 2005, L’ASSOCIATION FORMATION, INSERTION, DÉVELOPPEMENT LOCAL (AFIDEL) MÈNE

DANS LE COMMINGES UN PROJET PILOTE À L’ENSEIGNE DES JARDINS DE COCAGNE. OBJECTIF :

CRÉER UNE ACTIVITÉ ALLIANT LE SOCIAL, L’AGRICULTURE BIOLOGIQUE ET LA VENTE HEBDOMADAIRE DE

PANIERS DE LÉGUMES. ACCOMPAGNÉ PAR L’ADEPFO, CE PROJET A DÉJÀ PERMIS LA CRÉATION DE

QUINZE EMPLOIS.

Midi-Pyrénées/Massif

“Je n’aurais jamais pu finan-cer les Jardins du Commingessans le concours de l’Adepfo.”

Rémy Martin

© macromagnon - Fotolia.com

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Les Jardins de Cocagne sont des jardins biologiques collectifs à vocation d’insertion so-

ciale et professionnelle créés à partir d’associations à but non lucratif. Fondé en 1991 sur

un modèle ayant fait ses preuves en Suisse, le premier Jardin de Cocagne a vu le jour

dans le Doubs sous l’impulsion de l’association Julienne Javel. Jusqu’en 1999, près de 50

jardins ont été créés sur ce modèle, encourageant la mise en œuvre du Réseau Cocagne

destiné à accompagner les projets, à les animer, à professionnaliser les équipes et à com-

muniquer sur le sujet. Aujourd’hui les Jardins de Cocagne représentent 87 installations

en activité, 15 en projet, 2700 jardiniers en contrat d’insertion, 450 personnes en enca-

drement, 13000 adhérents consommateurs et 900 bénévoles.

LE RÉSEAU COCAGNE

plesse offerte mais aussi le fait de pouvoirchoisir notre formateur, ce qui, dans un cir-cuit de formation traditionnel, aurait été im-possible. En définitive, je n’aurais jamais pufinancer les Jardins du Comminges sans leconcours de l’Adepfo » avoue Rémy Martin. Étant donnée la demande croissante enproduits Bio et le potentiel de développe-ment de cette entreprise sociale, les Jar-dins de Cocagne du Comminges se fixentcomme objectif la production en 2011 de400 paniers livrés chaque semaine. Pourl’heure, 13 ouvriers maraîchers s’affairentsous les serres pour produire un peu plusde 100 paniers hebdomadaires.

que Rémy Martin a sollicité le concours del’Adepfo afin d’ancrer le projet et d’en assurer la crédibilité grâce à une action deformation-développement articulée au-tour d’une partie commerciale et d’unepartie technique et dispensée par des in-tervenants issus du réseau des jardins deCocagne (Organisation et développementdes partenariats, positionnement et déve-loppement commercial, organisation etgestion du site de production, organisa-tion et gestion du personnel). « La forma-tion a été très positive. Elle a permis de don-ner des compétences à ceux qui en avaitbesoin. Nous avons apprécié la grande sou-

11

Autour du Directeur Rémy Martin (premier rangà droite) et d’Hélène Gaulier (2ème au premierrang à gauche), l’équipe des Jardins de Cocagnedu Comminges. Photo Sébastien Vaissière.

om

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FOUR SOLAIRE

Attractif et productif à la fois

le tourisme, la recherche, la cuisson de cé-ramiques, la réalisation d’objets en bronzeet la création de prototypes de petitsfours solaires clef en main et utilisablespartout dans le monde. Las, les réalités dela gestion d’un tel équipement et les aléasdu climat, des saisons touristiques et desennuis techniques ont empêché FSD decourir tous ces lièvres à la fois. La forma-tion a permis de reconsidérer l’ensemblede ces chantiers : « Après l’étude économi-que menée début 2007, le choix du dévelop-pement d’un artisanat de production pourrenforcer l’intérêt des visites et envisager undéveloppement commercial par le biais denouvelles stratégies marketing, de commu-nication et de distribution a été confirmé. »confie André Rainier, pilote éducatifAdepfo. Le nouveau modèle économique adoptéfait du Four solaire un vecteur de commu-nication utile au développement du terri-toire associé à un outil de production no-vateur, propre et performant. L’idéeconsiste à mettre le four à la dispositiondes artisans dans le but d’accompagner lacréation de produits nouveaux réalisés àpartir de l’énergie solaire. Des produits es-tampillés “Four Solaire de Mont Louis” etissus d’un mode de fabrication en phaseavec les préoccupations écologiques ac-tuelles.

Une formation sur mesureLoin de se borner à cette première étape,la formation a jeté les bases de nouvellesstratégies et d’un nouveau fonctionne-

C’est à Félix Trombe, scientifique de renom et pionner de l’énergie solaireen France, que Mont-Louis doit son

four solaire. Construit à partir de 1947, ilétait alors le premier four solaire à doubleréflexion au monde. Depuis, le temps apassé, mais ces équipements de hautetechnologie restent d’actualité grâce à la pureté de l’énergie qu’ils concentrent età l’absence totale de pollution générée. Depuis 1993, et en marge des recherchesscientifiques menées par le CNRS, la société Four Solaire Développement exploite le four de deux façons. D’une part en assurant chaque année l’accueilde plus de 30.000 visiteurs, d’autre part enutilisant la concentration solaire à hautetempérature pour des productions indus-trielles et artisanales en bronze, cérami-que ou métal. Dans ce contexte, et quinze ans après son arrivée à Mont-Louis, le gérant de FSDDenis Eudeline ressentait de besoin deprendre un nouveau départ : « Quand onfait fonctionner longtemps la même struc-ture, il faut parfois la redynamiser et raviverle feu sacré. En douceur, certes, mais en profondeur. Les salariés et moi-mêmeavions besoin d’ouvrir les yeux sur certainesréalités, de mieux nous comprendre, detrouver un fonctionnement harmonieux. »explique-t-il.

Lieu de visite et site de production Lors de son arrivée en 1993, Denis Eude-line souhaitait développer conjointement12

CONÇU EN 1947, LE FOUR SOLAIRE DE MONT-LOUIS EST AUJOURD’HUI EXPLOITÉ PAR LA SOCIÉTÉ

FOUR SOLAIRE DÉVELOPPEMENT. DEPUIS 1993, CETTE S.A.R.L ASSURE LES VISITES DU SITE ET

EXPLOITE LE FOUR POUR DES PRODUCTIONS INDUSTRIELLES ET ARTISANALES. EN 2007, LE BESOIN DE

DÉFINIR DE NOUVELLES STRATÉGIES MARKETING, TOURISTIQUES ET COMMERCIALES SE FAISANT SENTIR,

LE DIRECTEUR DE FSD A FAIT APPEL À L’ADEPFO. À L’HEURE OÙ NOUS IMPRIMONS, LES PREMIERS

EFFETS BÉNÉFIQUES DE LA FORMATION-DÉVELOPPEMENT SE FONT DÉJÀ SENTIR.

Démonstration de fusion d’une pièce de métalprovoquée par la seule énergie du four solaire.Photo Sébastien Vaissière

Languedoc Roussillon/Massif

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duits proposés dans la boutique (bijoux,souvenirs, bibelots) offrent plus de visibi-lité quant à leur mode de fabrication, le nombre de visites et le chiffre d’affairessont en légère augmentation malgré unemétéo calamiteuse en début d’été, et lessalariés semblent davantage investis. En-fin, de nombreuses pistes commercialessont étudiées auprès de professionnels dela céramique et le four est intégré dansune démarche de développement territo-rial par le biais de nombreuses collabora-tions (notamment avec le lycée profes-sionnel de Prades). 61 ans après saconstruction, le Four solaire est plus quejamais un vecteur important de dévelop-pement pour Mont-Louis et l’ensemble du territoire alentour.

ment de l’entreprise. « Nous avions entreautres objectifs celui de développer le chiffred’affaires sans toucher à la masse salarialeet de sensibiliser les salariés à la productivitéet au marketing » explique André Rainier.Un objectif d’autant plus important queFSD est une entreprise singulière, commele rappelle Denis Eudeline : « La philoso-phie de Four Solaire Développement est unsavant mélange d’esprit d’entreprise, desouci du développement durable, de valeursde partage et de solidarité. La grande forcede l’Adepfo est d’avoir su s’adapter à nosparticularismes pour nous proposer une for-mation sur mesure. » Organisée en décembre 2007, la forma-tion-développement porte déjà ses fruits.L’entreprise gagne en efficacité, les pro- 13

Que retenez-vous de la formation dispenséeà FSD ?Sans hésiter l’ambition pour le site dontfont preuve les salariés et leur directeur, etl’inépuisable potentiel du Four solaire. Il fal-lait avant tout créer un modèle économi-que susceptible de faire vivre un four multi-fonction. Denis Eudeline avait besoin d’unfonctionnement plus efficace et porté pardes salariés parties prenantes du projet.

Comment la formation-développement était-elle articulée ?Après la redéfinition du modèle économi-que, celle du business plan et un audit des

ressources humaines, trois modules de for-mation ont été élaborés. Le premier concer-nait le marketing (prix du produit, produc-tion, communication et distribution) et lamise en œuvre du modèle économique etdes plans d’action qui les accompagnent.L’idée consistait à adapter les théories mar-keting aux réalités du four en concertationavec les salariés. Une démarche proche duprincipe de Top-Down et Bottom-up. Ledeuxième module était consacré à la com-munication et à la participation des salariés,à sa mise en œuvre. Le module concernaitégalement la construction concertée de

nouvelles règles de fonctionnement (typecongés et organisation interne). Enfin, letroisième volet de cette formation abordaitl’organisation et les nouveaux cadres des vi-sites, et plus largement l’apprentissage dela valeur du travail fourni.

Les résultats sont-ils visibles aujourd’hui ? Au-delà des résultats chiffrés qui restent enlégère augmentation malgré la météo défa-vorable, je suis convaincu que cette forma-tion a initié un mouvement bénéfique pourle développement de la production semi-industrielle et artisanale sur le site.

3 QUESTIONS À

Ivan Komaroff, formateur et dirigeant de K Conseil

De gauche à droite : Denis Eudeline : directeurgérant de FSD, Bîba Thiam : assistante du direc-

teur, Karine Feyder : animatrice scientifique,Hélène Rancoul : responsable de la boutique,

André Rainier : pilote éducatif Adepfo, IvanKomaroff : formateur et Ludovic Bruant : respon-

sable technique du four. Photo S.V.

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ROGER BARRAU,DÉLÉGUÉ MIDI-PYRÉNÉES À L’ASSOCIATION EUROPÉENNE DES RÉGIONS FRONTALIÈRES (ARFE)

“Les difficultés ont conduit les montagnards à l’obligation d’excellence”

TERRITOIRES RURAUX TRANSFRONTALIERS

toires faiblement peuplés. L’accessibilitédifficile, le climat très rude, les catastro-phes naturelles ont poussé les popula-tions à émigrer, ceci notamment dansles montagnes du Sud et du Nord del’Europe. Cet abandon progressif poseun problème important en matière d’environnement, de gestion de l’eau etde protection face aux risques naturels.Un troisième groupe se concentre prin-cipalement à l’Est de l’Europe, dans lesnouveaux états membres. Ces territoiressont encore peuplés. Ils doivent être modernisés afin de relayer durablementles activités agricoles. A défaut, une très forte émigration provoquerait leurabandon progressif.

Quelles priorités faut-il dégager pour encou-rager le développement de ces territoires ? Il existe une grande diversité dans cesrégions de montagne. Elle se situe entredeux extrêmes : d’un côté une monta-gne qui subit la désertification et courtaprès une diversification économique,de l’autre une montagne soumise à lapression touristique et urbanistique à la recherche d’un équilibre entre protec-tion de la nature et développement. Ce-pendant, l’analyse par massif confirmeun enjeu commun : maintenir une po-pulation permanente, préserver la biodi-versité et développer des activités au-tres que le tourisme et l’agriculture.Au-delà de cette diversité, les territoiresde montagne doivent tous affronter lesmêmes types de contraintes qui génè-rent des surcoûts dans leur activité éco-nomique et sociale. Il reste cependantque les difficultés spécifiques liées auclimat, à la pente, à l’altitude et même àl’enclavement ont souvent conduit les

gne. On admet que sont ainsi concernés30 à 40 % de la surface de l’UE et 10 à 20 % de la population. Au sein des espaces ruraux, les montagnes et mas-sifs montagneux ont très souvent étédes zones frontières et ceci justifie largement l’intérêt que doit leur porternotre Association de Régions Frontaliè-res. Ces territoires ne sont pas négligeables en termes d’intégrationeuropéenne, de géopolitique du conti-nent et de dynamisme démographique.Il s’agit également d’un enjeu immenseen matière de ressources naturelles aupremier rang desquelles vient l’eau.Comme le démontrent les récents travaux de l’Association Européenne desélus de Montagne ces territoires sontaussi une ressource en matière de com-pétitivité et d’emploi, de connaissanceet d’innovation, nécessaires pour unecroissance durable de l’Union Euro-péenne.

Le développement des zones de montagne ducontinent est-il homogène ?Les montagnes européennes ont connuau cours des deux derniers siècles desrythmes de développement très diffé-rents. Un premier groupe a développéune industrie à proximité de l’hydroélec-tricité et une industrie de haute préci-sion issue le plus souvent du savoir fairedu travailleur saisonnier pendant l’hiver.D’autres activités ont pu développer unpotentiel économique important enparticulier autour du tourisme. Dans ces régions, la population reste attachéeà ses montagnes. Elles sont aujourd’huiparmi les mieux armées pour atteindreles objectifs de Lisbonne.Un autre groupe est composé de terri-

Quelles étaient les grandes orientations de la récente conférence de l’Association Euro-péene des Régions Frontalières ? Notre conférence s’est intéressée à lapromotion de solutions innovantes dansles zones rurales et de montagne trans-frontalières. Elle s’est située dans le pro-longement des orientations de l’UE pourle développement rural de 2007 à 2013,soit notamment autour de quatre axes :l’amélioration de la compétitivité del’agriculture, l’amélioration de l’environ-nement et des paysages, l’améliorationde la gouvernance et la mobilisation dupotentiel endogène de ces zones. Cesorientations découlent notamment desobjectifs de durabilité de Göteborg etde la stratégie de Lisbonne pour la crois-sance et l’emploi. Il s’agit bien de pro-mouvoir la cohésion économique et so-ciale mais aussi la cohésion territorialeen Europe. Cette cohésion concernel’ensemble du territoire communautaireet notamment toutes les zones frontiè-res en accordant une priorité aux zonesrurales de montagne les plus défavori-sées. Ces dernières sont confrontées àde plus grandes difficultés que les zonesurbaines, et pourtant elles offrent deréelles possibilités de développement.

Quelle place la montagne occupe-t-elle danscette réflexion sur les zones frontalières ? Il me paraît important de porter une attention spécifique aux territoires demontagne, attention retenue dans leprojet de Traité Simplifié de l’UE. Cet éclairage nouveau est d’ailleursconforté par la perspective d’un LivreVert sur la Montagne. Rappelons que sur les 27 états membresde l’UE, 21 sont concernés par la monta-14

interview

Le col de la Pierre Saint-Martin dans les PyrénéesAtlantiques, à la frontière franco-espagnole.

Photo ©david hughes - Fotolia.com

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lement au niveau des massifs sur unecoordination efficace des politiques sec-torielles et des politiques « montagne »nationales et/ou régionales. C’est surcette meilleure gouvernance que lamontagne pourrait fonder son avenir.

Quelles leçons concernant les reliefs faut-il ti-rer du rapport international du groupe inter-gouvernemental d’experts sur l’évolution duclimat (GIEC) ? S’agissant de la montagne, ces difficul-tés prévisibles vont bien au-delà de laquestion de la neige et du fonctionne-ment des stations de sport d’hiver. Ellesconcernent tous les aspects au quoti-dien de la vie en montagne. La force decette évolution appelle certainement unrenouvellement complet des codes tra-ditionnels de la réflexion et un regardnovateur sur les problématiques de lamontagne.Je veux d’ailleurs saluer la qualité du ré-cent rapport de l’Association Nationaledes Élus de la Montagne (ANEM) sur lesenjeux du changement climatique. Enune vingtaine de propositions, il déclinediverses mesures permettant de fiabili-ser la démarche d’autodéveloppementévoquée ci-dessus pour l’avenir de lamontagne. Il débouche enfin sur l’appelà un effort supplémentaire de solidaritéet de justice au niveau européen. La vé-ritable réponse au changement climati-que prévisible implique en effet descoûts spécifiques nouveaux que les col-lectivités locales de la montagne, enparticulier les plus petites, ne peuventassumer seules. Elle appelle la créationd’un Fonds Européen Spécial d’Adapta-tion et d’Ajustements au changementclimatique annoncé permettant d’envi-sager plus sereinement l’avenir de lamontagne.

et conforter les systèmes valléens, déve-lopper les réseaux, utiliser les Techni-ques d’information et de communica-tion (TIC) au service de l’éducation, de laformation professionnelle, de l’améliora-tion de la compétitivité des entreprisespar l’accès aux centres de ressources.L’adaptation aux risques naturels inhé-rents à la vie en montagne, le dévelop-pement et la diversification du tourismedurable en prenant en compte les pers-pectives du changement climatique etleur incidence sur la pratique des sportsde neige sont également à entrepren-dre. Enfin, la coopération transfronta-lière notamment doit permettre de pro-mouvoir des projets touristiquesdurables par la mise en œuvre pour lesdivers massifs de plans de gestion trans-frontaliers. Bien évidemment, une telledémarche suppose la prise en comptede la montagne dans les réseaux tran-seuropéens de transport et d’énergies.

Faut-il envisager une nouvelle gouvernancepour relever au mieux ces défis ? La plupart des Etats membres sontconcernés à divers niveaux par l’aména-gement de la montagne. Certains sesont dotés de Comités nationaux, régio-naux et locaux pour gérer cet aménage-ment.Rappelons que la quasi-totalité des zo-nes de montagne est éligible aux FondsStructurels et à divers Programmes d’In-térêt Communautaire sans oublier l’inté-rêt de la coopération territoriale dans leszones frontalières. La plupart des dispo-sitifs réglementaires permettent de mo-biliser des moyens financiers non négli-geables au service de l’avenir de lamontagne. Encore faut-il faciliter cettemobilisation ! Une démarche euro-péenne pourrait donc porter essentiel-

montagnards à l’obligation d’excellence.La compétitivité de l’économie de mon-tagne repose donc notamment sur laqualité de ses produits, sur le savoir-fairede ses habitants et sur la nécessaire plu-riactivité des montagnards.

Comment donc surmonter les handicaps natu-rels de la montagne ? La montagne peut être le chef de filed’une croissance de qualité, à l’opposéd’une croissance de quantité. Cette qua-lité se fonde sur de nombreuses référen-ces (agriculture et pastoralisme : exem-ples de qualité, de tradition, detraçabilité et d’innovation ; valorisationdes ressources en eau ; activité forestièreet industrie du bois ; production d’éner-gies renouvelables ; tourisme durable àdiversifier et à développer). Il reste ce-pendant que si le milieu montagnard estun milieu potentiellement porteur, il estégalement un milieu fragile. Il faut sesoucier de la préservation de son envi-ronnement : l’aménagement présent etfutur de ces territoires ne peut reposerque sur la recherche permanente d’unéquilibre entre développement écono-mique et préservation de la nature.Remarquons également qu’il ne s’agitpas d’instituer une politique unique etuniforme pour l’ensemble de ces terri-toires, mais tout au contraire de pro-mouvoir une logique de dévellopementendogène, reconnaissant la spécificitéde chacun des massifs et leur compé-tence à comprendre, à décider et à met-tre en œuvre les moyens les mieuxadaptés à leur développement durable.Soulignons enfin que ces politiques doi-vent s’inscrire dans une politique parta-gée entre l’Union Européenne et lesétats membres, politique adaptée à lalocalisation supranationale de nom-breux massifs qui s’étendent sur le terri-toire de plusieurs États.Le projet INTERREG IIIC, Action pour Dé-velopper, Expérimenter et Pérenniserdes dispositifs innovants d’appuis auxterritoires (projet ADEP) porté par la Ré-gion Midi-Pyrénées avec le soutien del’ADEFPAT et de l’ADEPFO est un bonexemple d’identification des besoins etdes possibilités offertes par la coopéra-tion interrégionale. Ce projet pourrait àterme déboucher, en relation avec l’As-sociation européenne des Élus de Mon-tagne (AEM) et dans le cadre d’undossier Interreg IV C, sur la mise en placed’un véritable réseau européend’échange de bonnes pratiques et depromotion de la Formation-développe-ment au service de l’économie monta-gnarde.

Comment assurer la préservation et dévelop-per l’attrait exercé par les montagnes ?Il est important de promouvoir et déve-lopper les Services d’Intérêt Général afinde maintenir une population en altitude 15

Roger Barrau, président de l’ADEPFO. Photo D.R.

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