jean youssef Étude expérimentale d'un jet plan turbulent se

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THÈSE Pour l’obtention du grade de Docteur de l’École Nationale Supérieure de Mécanique et d’Aérotechnique Faculté des Sciences Fondamentales et Appliquées Diplôme National - Arrêté du 7 août 2006 ÉCOLE DOCTORALE SCIENCES ET INGÉNIERIE EN MATÉRIAUX, MÉCANIQUE, ENERGÉTIQUE ET AÉRONAUTIQUE DOMAINE DE RECHERCHE : MÉCANIQUE DES FLUIDES ET THERMIQUE Présentée par Jean Youssef Étude expérimentale d’un jet plan turbulent se développant dans un flux uniforme en co-courant Directrice de thèse : Mme Éva Dorignac Co-encadrant : M. Johan Carlier Soutenue le 14 novembre 2012 Devant la Commission d’Examen JURY Michel Stanislas Professeur à l’École Centrale de Lille Rapporteur Sedat Tardu Maître de Conférences HDR de l’université de Grenoble Rapporteur Joël Delville Ingénieur de Recherche, CNRS, Institut Pprime Examinateur Denis Lemonnier Directeur de Recherches, CNRS, Institut Pprime Président Éva Dorignac Professeur de l’université de Poitiers, Institut Pprime Examinateur Johan Carlier Ingénieur de Recherche, Irstea Examinateur

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  • THSE

    Pour lobtention du grade de

    Docteur de lcole Nationale Suprieure de Mcaniqueet dArotechnique

    Facult des Sciences Fondamentales et Appliques

    Diplme National - Arrt du 7 aot 2006

    COLE DOCTORALE SCIENCES ET INGNIERIE EN MATRIAUX, MCANIQUE,ENERGTIQUE ET ARONAUTIQUE

    DOMAINE DE RECHERCHE : MCANIQUE DES FLUIDES ET THERMIQUE

    Prsente par

    Jean Youssef

    tude exprimentale dun jet plan turbulent sedveloppant dans un flux uniforme en co-courant

    Directrice de thse : Mme va Dorignac

    Co-encadrant : M. Johan Carlier

    Soutenue le 14 novembre 2012Devant la Commission dExamen

    JURY

    Michel Stanislas Professeur lcole Centrale de Lille RapporteurSedat Tardu Matre de Confrences HDR de luniversit de Grenoble RapporteurJol Delville Ingnieur de Recherche, CNRS, Institut Pprime ExaminateurDenis Lemonnier Directeur de Recherches, CNRS, Institut Pprime Prsidentva Dorignac Professeur de luniversit de Poitiers, Institut Pprime ExaminateurJohan Carlier Ingnieur de Recherche, Irstea Examinateur

  • Remerciements

    La prsente tude a t effectue lIrstea de Rennes, au sein de lquipe Araulique et

    Contrle des Ambiances Turbulentes (ACTA) en collaboration avec linstitut Pprime Poitiers,

    sous la direction de Mme va Dorignac, Professeur luniversit de Poitiers et de M. Johan

    Carlier, Ingnieur de Recherche lIrstea.

    Jexprime ma profonde reconnaissance Denis Lemonnier qui ma fait lhonneur de prsider

    le jury. Je remercie particulirement Michel Stanislas et Sedat Tardu pour avoir accept dtre

    rapporteurs de ce travail et davoir consacr une partie de leur temps pour le juger. Leurs

    remarques et questions mont aid rflchir davantage sur les perspectives de ce travail.

    Mes remerciements sadressent aussi Jean Moureh pour avoir rpondu positivement mon

    invitation la soutenance de cette thse.

    Je tiens exprimer toute ma gratitude va Dorignac, Jol Delville et Johan Carlier qui

    mont fait dcouvrir et explorer un sujet de recherche passionnant. Je tiens les remercier pour

    leur soutien de cette thse, tant du ct scientifique que du ct humain. Leur formidable sens

    physique, leur dynamisme communicatif, leur enthousiasme et leur disponibilit mont permis

    de mener bien ce travail.

    Je suis particulirement reconnaissant envers Johan Carlier pour tout le temps quil ma

    accord, pour mavoir guid, conseill et fait confiance tout au long de cette thse. Son impli-

    cation en tant que responsable de cette thse au sein de lIrstea a t dterminante pour le bon

    droulement de cette tude.

    Je remercie beaucoup Georges Arroyo de lIrstea pour toutes ses qualits humaines qui

    se traduisent par lintrt quil tmoigne aux membres de son quipe. Je remercie vivement

    Dominique Heitz pour sa disponibilit et ses judicieux conseils, Philippe Loisel, Michel Loubat,

    Philippe Georgeault et Anthony Guibert pour leur disponibilit et leur gnie technique dont

    i

  • Remerciements

    ils mont fait profiter durant cette thse, Laurence Wallian pour toutes ces scripts gniaux qui

    mont facilit mes calculs, Malick Ndoye pour tous ses fichiers qui simplifient grandement la vie

    et Amina Omar pour tous ses SOS informatiques.

    Que mes collgues post-doctorants (Cdric Degouet, Romo Tatsambon), thsards (Toutou

    Baila Ndiaye, Kodjovi Sodjavi), stagiaires et autres, ainsi que lensemble des personnels de

    lIrstea et surtout de lquipe ACTA trouvent ici lexpression des mes chaleureux remerciements.

    Cette tude naurait pas pu tre ralise sans le soutien financier de lIrstea et de la Rgion

    Bretagne. Que les responsables de ces organismes trouvent ici lexpression de notre reconnais-

    sance pour lintrt et la confiance quils ont accords notre travail.

    Enfin sautons une ligne pour les remerciements qui suivent adresss mes parents et tout

    ceux qui me supportent.

    Parce quune thse ne se fait pas seulement par le travail qui suit, je voudrais remercier mes

    parents, ma famille et mes voisins Libanais pour les prires, le soutien et la confiance quils

    mont toujours accords. Mes amis, mes colocataires et les frres de la communaut des Frres

    de Plormel occuperont toujours une place privilgie. Sans votre prsence mes cts et votre

    soutien sans faille, ce travail ne serait pas encore fini. Merci tous et toutes.

    ii

  • Table des matires

    Introduction gnrale 1

    1 Sujet de ltude . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1

    2 Contexte des tudes appliques de lquipe ACTA . . . . . . . . . . . . . . . . . 2

    2.1 Domaine principal dtude : le contrle des flux pour la matrise des

    ambiances . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 2

    2.2 Exemples dtudes appliques . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 3

    2.3 Ltude des rideaux, de type jet plan en co-courant . . . . . . . . . . . . 5

    3 Objectif de ltude . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 6

    4 Moyens et mthodes . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 7

    4.1 Principaux moyens exprimentaux . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 7

    4.2 Campagnes de mesure et bases de donnes . . . . . . . . . . . . . . . . . 7

    5 Organisation du document . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 8

    I Revue de la littrature 9

    1 quations de base pour les coulements turbulents . . . . . . . . . . . . . . . . . 9

    1.1 Proprits . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 9

    1.2 quations instantanes . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 10

    1.2.1 quation de continuit . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 10

    1.2.2 quations de quantit de mouvement . . . . . . . . . . . . . . . 11

    1.3 quations moyennes . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 11

    1.3.1 quations du mouvement moyen . . . . . . . . . . . . . . . . . 11

    1.3.2 quations du mouvement fluctuant . . . . . . . . . . . . . . . . 12

    iii

  • Table des matires

    1.3.3 quations de tensions de Reynolds . . . . . . . . . . . . . . . . 13

    1.3.4 quations de lnergie cintique . . . . . . . . . . . . . . . . . . 14

    2 Jet plan turbulent en co-courant . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 15

    2.1 Rgions de lcoulement . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 16

    2.1.1 Rgion initiale . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 16

    2.1.2 Rgion pleinement dveloppe . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 18

    2.2 quations de base simplifies . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 19

    2.2.1 Le jet plan, un coulement cisaill libre . . . . . . . . . . . . . . 19

    2.2.2 Cas du jet plan sans co-courant . . . . . . . . . . . . . . . . . . 21

    2.2.3 Cas du jet plan en co-courant . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 23

    2.2.4 Bilan sur les variables dadimensionnement locales et globales . 28

    2.3 quations de transport des tensions de Reynolds . . . . . . . . . . . . . . 30

    2.4 quations de transport de lnergie cintique . . . . . . . . . . . . . . . . 31

    3 Revue bibliographique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 32

    II Moyens exprimentaux 47

    1 Soufflerie Jet Plan . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 47

    1.1 Gnration des coulements . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 50

    1.1.1 Circuits arauliques . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 50

    1.1.2 Groupes moto-ventilateurs . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 50

    1.1.3 Dispositifs de rgulation . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 51

    1.2 Systme de coordonnes et dplacement des sondes . . . . . . . . . . . . 52

    2 Soufflerie dtalonnage . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 52

    3 Thermocouple . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 54

    3.1 Mthode oprationnelle de ltalonnage . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 54

    3.2 Instrumentation . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 54

    4 Anmomtrie fils chauds . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 55

    4.1 Principe . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 55

    4.2 Loi de King . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 55

    4.3 Mthode oprationnelle de ltalonnage . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 57

    4.3.1 talonnage dynamique de la sonde fil simple . . . . . . . . . . . 57

    4.3.2 talonnage dynamique de la sonde fils croiss . . . . . . . . . . 58

    4.4 Instrumentation des chanes de mesures . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 64

    4.4.1 Instrumentation de la chane de mesure pour la sonde fil simple 64

    4.4.2 Instrumentation de la chane de mesure pour la sonde fils croiss 64

    iv

  • Table des matires

    4.5 Campagne de mesure par CTA . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 65

    4.5.1 Paramtres de contrle . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 65

    4.5.2 Paramtres de lacquisition numrique . . . . . . . . . . . . . . 66

    5 Vlocimtrie par Images de Particules . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 70

    5.1 Principe . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 70

    5.2 Instrumentation de la chane de mesure . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 70

    5.3 Campagne de mesure par PIV . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 72

    6 Qualification et adaptation initiale de la soufflerie Jet Plan . . . . . . . . . . . . 74

    6.1 Homognit de lcoulement . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 74

    6.2 Caractrisation des conditions de sortie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 75

    6.2.1 Profils de vitesse moyenne . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 75

    6.2.2 Taux de turbulence . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 76

    6.3 Couches limites . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 77

    6.3.1 Profil thorique de la vitesse moyenne longitudinale . . . . . . . 78

    6.3.2 Profil de vitesse moyenne . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 83

    6.3.3 Taux de turbulence . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 83

    III Comportement dun jet plan turbulent en co-courant 85

    1 Grandeurs mesures et analyses . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 85

    2 Mode de reprsentation des profils transversaux . . . . . . . . . . . . . . . . . . 87

    3 coulement moyen . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 90

    3.1 volution des profils adimensionns de la vitesse moyenne . . . . . . . . 90

    3.2 Superposition des profils normaliss de la vitesse moyenne . . . . . . . . 91

    3.3 volution de lexcs de dbit volumique et de lexcs de quantit de mou-

    vement . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 92

    3.4 volution de lexcs de la vitesse moyenne sur laxe et de lpaisseur du jet 96

    3.5 Proposition dun modle universel dvolution dun jet plan en co-courant 100

    3.6 Raisonnement associ sur lvolution du nombre de Reynolds . . . . . . . 103

    4 Tenseur de Reynolds . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 105

    4.1 Forme des profils des tensions de Reynolds . . . . . . . . . . . . . . . . . 105

    4.2 volution des tensions adimensionnes sur laxe . . . . . . . . . . . . . . 107

    5 Coefficient de dissymtrie et daplatissement . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 111

    6 chelles caractristiques de lcoulement . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 118

    6.1 chelles de Kolmogorov . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 119

    6.2 chelles de Taylor et chelles intgrales . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 122

    v

  • Table des matires

    6.3 Densits spectrales et nombre de Strouhal . . . . . . . . . . . . . . . . . 127

    6.4 Discussion sur les liens entre les chelles . . . . . . . . . . . . . . . . . . 130

    IV tude exploratoire de linfluence de la temprature sur lcoulement 137

    1 Transport de scalaire dans les coulements cisaills et nombre de Richardson . . 140

    1.1 Approximation de Boussinesq . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 140

    1.2 quation de transport de lnergie cintique turbulente . . . . . . . . . . 140

    1.3 quation de transport de la variance des fluctuations de temprature . . 141

    1.4 Nombre de Richardson . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 142

    2 Comparaison des deux mtrologies PIV et CTA . . . . . . . . . . . . . . . . . . 143

    3 Effet de la temprature sur une configuration de jet en co-courant . . . . . . . . 147

    4 Effet de la temprature sur une configuration isocintique . . . . . . . . . . . . . 148

    5 Perspective dtude par PCTA . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 151

    Conclusion gnrale et perspectives 155

    Rfrences bibliographiques 159

    Catalogue des rsultats des mesures par CTA 165

    Articles 219

    vi

  • Nomenclature

    ACTA Araulique et Contrle des Atmosphres Turbulentes

    CCA Constant Current Anemometry

    CTA Constant Temperature Anemometry

    CEAT Centre dEtudes Arodynamiques et Thermiques

    GEPEA GEnie des Procds Environnement Agro-alimentaire

    Irstea Institut national de recherche en sciences et technologies pour lenviron-

    nement et lagriculture

    INRIA Institut National de Recherche en Informatique et en Automatique

    LEA Laboratoire dEtudes Arodynamiques

    LET Laboratoire dEtudes Thermiques

    PCTA Parameterizable Constant Temperature Anemometry

    PDF Probability Density Function

    PIV Particle Image Velocimetry

    RANS Reynolds Averaged Navier-Stokes

    RMS Root Mean Squared

    Oprateur de moyenne statistique Variable moyenne de lcoulement() Variable fluctuante de lcoulementa Coefficient dtalonnage du fil chaud

    b Coefficient dtalonnage du fil chaud

    vii

  • Nomenclature

    e Tension de sortie de lanmomtre

    Euu Densit spectrale de puissance de la vitesse longitudinale

    Evv Densit spectrale de puissance de la vitesse normale

    Eww Densit spectrale de puissance de la vitesse transversale

    fc Frquence de coupure

    Fr Nombre de Froude rduit

    fs Frquence de Strouhal

    H Largeur de lorifice du jet plan en sortie

    K Coefficient de diffusion thermique

    Kt Diffusivit thermique turbulente

    Ku Coefficient daplatissement de la vitesse longitudinale

    Kv Coefficient daplatissement de la vitesse normale

    Kw Coefficient daplatissement de la vitesse transversale

    L Longueur de lorifice du jet plan en sortie

    n Coefficient dtalonnage du fil chaud

    P Taux de production dnergie cintique turbulente

    r = UeUj

    Rapport de vitesse

    ReH =(UjUe)H

    Nombre de Reynolds en sortie

    Re =Ue

    Nombre de Reynolds global

    Re0,5 =Ub0,5

    Nombre de Reynolds local

    Ri Nombre de Richardson de gradient

    Rif =Kt Ri

    tNombre de Richardson local de flux turbulent

    Ruu Coefficient de corrlation temporelle de la vitesse longitudinale

    Rvv Coefficient de corrlation temporelle de la vitesse normale

    Rww Coefficient de corrlation temporelle de la vitesse transversale

    Su Coefficient de dissymtrie de la vitesse longitudinale

    Sv Coefficient de dissymtrie de la vitesse normale

    Sw Coefficient de dissymtrie de la vitesse transversale

    St Nombre de Strouhal

    u Vitesse longitudinale instantane

    v Vitesse normale instantane

    w Vitesse transversale instantane

    uaxe Vitesse moyenne longitudinale maximale (sur laxe)Ue Vitesse uniforme du flux co-courant en sortie

    Ub = uaxe Ue Excs de vitesse du jet le long de son axe

    viii

  • Nomenclature

    Uj Vitesse uniforme du jet plan en sortie

    x Direction longitudinale ou de lpanouissement du jet

    y Direction latrale ou normale au plan central du jet

    z Direction transversale ou selon lenvergure

    Coefficient de dilatation pour un gaz parfait

    U = Uj Ue Excs de vitesse du jet en sortie paisseur du jet le long de son axe

    0,5 Demi-paisseur du jet

    chelle de Kolmogorov de longueur

    Taux de dissipation dnergie cintique turbulente

    u chelle intgrale base sur la vitesse longitudinale

    v chelle intgrale base sur la vitesse normale

    w chelle intgrale base sur la vitesse transversale

    u Micro-chelle de Taylor base sur la vitesse longitudinale

    v Micro-chelle de Taylor base sur la vitesse normale

    w Micro-chelle de Taylor base sur la vitesse transversale

    =UjUeUj+Ue

    Paramtre de cisaillement

    Viscosit cinmatique

    t Viscosit turbulente

    chelle de Kolmogorov de temps

    paisseur dexcs de quantit de mouvement

    Temprature instantane de lcoulement

    f Temprature du fil chaud

    ref Temprature de rfrence

    e Temprature du flux co-courant en sortie

    j Temprature du jet en sortie

    = j e Diffrence de temprature en sortie

    ix

  • Nomenclature

    x

  • Introduction gnrale

    1 Sujet de ltude

    Les rideaux de gaz sont souvent utiliss pour leur capacit sparer deux ambiances en

    limitant le transfert de quantit de mouvement, de scalaire ou de particule, et ce sans avoir

    recours une barrire solide. Les performances de sparation sont altres du fait de la grande

    sensibilit du jet aux perturbations extrieures, de la configuration de la zone dimpact et du

    phnomne dentranement. Lapparition naturelle de la turbulence pour ce type dcoulement

    cisaill favorise en outre le mlange et donc nuit la sparation. Lorsque le rideau dair est

    r-aspir aprs une distance donne dans sa direction longitudinale de mouvement, les incon-

    vnients de limpact sont vits. Cest le cas, par exemple, dans les Meubles Frigorifiques de

    Vente, dont ltude est lorigine de la prsente thse. Dans cette configuration industrielle,

    un rideau dair froid fait barrire entre lintrieur froid du meuble et lambiance chaude en-

    vironnante. Laugmentation de leffet sparateur du rideau dair est recherche en le couplant

    avec un rideau adjacent aliment en air chaud ambiant. Cette configuration pose la fois des

    questions spcifiques et des questions plus gnrales, que nous avons cherches aborder par

    ltude du cas rduit dun rideau se dveloppant dans des co-courants vitesse et temprature

    dcales.

    Ltude de cette thse portera donc sur lanalyse du comportement dun rideau dair froid

    ou chaud, appel ici jet plan anisotherme, lorsquil se dveloppe entre deux flux uniformes en

    co-courant. La discipline scientifique concerne par lobjet de cette thse est principalement

    la mcanique des fluides, dans le domaine de la turbulence des coulements cisaills libres et

    du transport de scalaire passif/actif (ici, la temprature). Lapproche choisie est exprimentale

    1

  • Introduction gnrale

    et ncessite lutilisation dune soufflerie spcifique conue et construite par lquipe ACTA1

    dIrstea2 de Rennes.

    2 Contexte des tudes appliques de lquipe ACTA

    Lquipe ACTA dIrstea mne des recherches en mcanique des fluides appliques aux cou-

    lements dair prsents dans les enceintes industrielles o la qualit des ambiances doit tre

    contrle. Le principal domaine dapplication est le contrle des atmosphres ultra-propres

    dans lindustrie alimentaire.

    2.1 Domaine principal dtude : le contrle des flux pour la matrise

    des ambiances

    Le contexte est celui dcoulements localement forcs, en air ultrapropre obtenu par filtration

    trs haute efficacit. Cet air ultrapropre assure des ambiances locales exemptes de toute

    contamination porte par les particules de lair. Ces ambiances hyginiques sont appliques

    autour de produits alimentaires sensibles, partout o lon ne peut - ou ne veut - compter sur

    des moyens plus agressifs de prvention des dveloppements microbiens. Lenvironnement de

    ces protections localises est le sige de mouvements dair faible vitesse, naturels ou forcs.

    Les flux forcs ont des vitesses de lordre de 0, 5 2 m/s au maximum, alors que lair ambiant

    se dplace gnralement moins de 1 m/s.

    lobjectif de maintien datmosphres exemptes de particules contaminantes, sajoute sou-

    vent le souci de matriser les diffrences de temprature entre deux zones, sans sparation

    solide.

    Ces conditions particulires de recherche applique ont amen lquipe ACTA dvelop-

    per des outils, principalement exprimentaux, adapts aux coulements tudis. On citera les

    mthodes lies aux capteurs fils chauds (CTA3) ou froids (CCA4), dont lapplication aux

    coulements anisothermes basse vitesse demande des procdures dtalonnage spcifiques et

    parfois des mthodes de mesure spcifiques, comme le fil chaud surchauffe variable para-

    mtrable (PCTA5) dvelopp en collaboration avec lInstitut Pprime (Jol Delville, inventeur

    dun nouveau dispositif de mise en uvre de la surchauffe variable [14]). Dans le domaine de

    1Araulique et Contrle des Atmosphres Turbulentes2http://www.irstea.fr3Constant Temperature Anemometry pour anmomtrie temprature constante4Constant Current Anemometry pour anmomtrie courant constant5Parameterizable Constant Temperature Anemometry

    2

    http://www.irstea.fr

  • Introduction gnrale

    lanmomtrie par mesures optiques, lquipe est engage dans des recherches communes avec

    lINRIA, dans le cadre de lquipe-projet commune Fluminance6, qui portent essentiellement sur

    les applications du flot optique lestimation du mouvement fluide dans les squences dimages

    ensemencement variable en traceur. Rcemment (2009), cette quipe commune Fluminance

    sest lance, dans le cadre de sa collaboration avec lINRIA, dans la mise au point de mthodes

    nouvelles visant le contrle des coulements par les moyens de lasservissement visuel.

    2.2 Exemples dtudes appliques

    Historiquement, les principales applications ont t lies des flux contrls assimilables

    des jets trs larges, une vitesse faible infrieure 1 m/s, appuys ou non sur des surfaces.

    Dans ces coulements, les recherches ont port principalement sur les interfaces entre ces flux

    forcs et les ambiances trs faible vitesse. Le problme des effractions par des obstacles,

    bras doprateurs ou pices techniques traversant ces interfaces, a t trait en se concentrant

    sur lanalyse de la turbulence induite, dans la perspective dune lutte contre les transferts de

    pollution ou de chaleur travers ces interfaces.

    On peut citer en particulier les tudes menes partir du dveloppement de la technique du

    Flux Progressif (brevet Cemagref-Unir) dans laquelle un flux horizontal dair ultrapropre, ap-

    puy sur un plan de travail, protge celui-ci des contaminations aroportes. La figure 1 illustre

    quelques tudes menes partir du problme dune effraction par un obstacle allong, rduit

    un cylindre. Le cur de ces tudes est le cas dune couche de mlange impactant un obstacle

    cylindrique (thses de D. Heitz [5] (1999), C. Braud [6] (2003) et P. Parnaudeau [7] (2004)).

    Ces tudes ont t menes en troite collaboration avec le LEA7 de Poitiers, maintenant intgr

    dans lInstitut Pprime de lUniversit de Poitiers.

    Le jet plan est un autre coulement gnrique tudi par lquipe ACTA. La motivation

    initiale est venue des tudes menes, en partenariat industriel, sur les Meubles Frigorifiques de

    Vente, dont le rideau frontal, assimilable un jet plan, spare lambiance froide du meuble-

    prsentoir, dune ambiance nettement plus chaude (typiquement 0 2C pour le rideau et 20

    25C pour lambiance). Ces tudes rejoignent celles dans lesquelles il est question de maintenir

    une ambiance froide autour de produits biologiques travaills dans des ateliers alimentaires,

    tout en maintenant une temprature de confort sur les oprateurs travaillant sur ces produits

    (typiquement 1C sur le produit et 16C sur la personne). Le contexte est celui de la lutte contre

    les Troubles Musculo - Squelettiques (TMS) des travailleurs de lalimentaire, sans relcher les

    6http://www.irisa.fr/fluminance/indexFluminance.html7Laboratoire dEtudes Arodynamiques

    3

    http://www.irisa.fr/fluminance/indexFluminance.html

  • Introduction gnrale

    Figure 1: tudes fondamentales lies la perturbation dun coulement ultrapropre protecteur :a) Technique du Flux Progressif en agroalimentaire ; b) Modlisation des zones deffraction parcouche de mlange et sillage ; c) tude numrique du croisement couche de mlange/sillage ;d) tude par POD des structures tourbillonnaires perturbes, partir de mesures en dual-PIV.

    exigences sanitaires sur la qualit des produits.

    Les sujets de recherche lis ces applications sont principalement :

    ltude des transferts turbulents de chaleur travers une couche de mlange (thses de

    M. Ndoye [1] (2008) et K. Sodjavi en cours) ;

    loptimisation de la dstratification des alles froides de magasin (projet ANR SIMPFRI

    2006-2008, figure 2) ;

    ltude des doubles rideaux de meuble de vente (projet industriel Dicaflo 2009-2011).

    partir de ces problmes de flux verticaux froids et de rideaux sparateurs, un courant

    gnrique de recherches sur les rideaux dair anisothermes a t lanc dans lquipe ACTA,

    avec pour objectif de contribuer aux recherches doptimisation des sparations dambiance

    dans les atmosphres industrielles, commerciales, tertiaires et dans les procds thermiques.

    La collaboration dIrstea de Rennes avec linstitut Pprime a t prolonge, sur ces sujets de

    4

  • Introduction gnrale

    Figure 2: Projet SIMPFRI sur les Meubles Frigorifiques de Vente : a) Simulation du meuble etde lalle froide dstratifier ; b) tude optique du rideau isolant par visualisations et PIV.

    mcanique des fluides et thermique, en ltendant au LET8 intgr dans lInstitut Pprime de

    lUniversit de Poitiers.

    2.3 Ltude des rideaux, de type jet plan en co-courant

    Parmi les points tudier dans le domaine des rideaux sparateurs pour lhygine et le

    contrle de la thermique des ambiances, figure le dveloppement de la turbulence dun jet plan

    vertical lorsque celui-ci sexpanse (se dveloppe en largeur) naturellement dans une ambiance

    au repos ou en lger co-courant. Des travaux sur cet coulement et pour cette vise applicative

    ont t mens dans lquipe de Franois Penot, du LET de lUniversit de Poitiers, sur le

    confinement de lambiance des Meubles Frigorifiques de Vente, et dans lquipe de Camille

    8Laboratoire dtudes Thermiques

    5

  • Introduction gnrale

    Solliec, du GEPEA9 de lUniversit de Nantes sur le confinement des fumes dans le cas de feux

    en tunnels routiers.

    Ce sujet dtude a motiv la construction dune soufflerie spcifique mettant en uvre

    un coulement constitu dun jet plan entour, de manire variable, de deux jets larges en co-

    courant. Une telle exprience permet ltude dun jet appuy sur un autre jet, dun jet dans une

    ambiance en mouvement, etc. Cette exprience prsente lavantage, dans le contexte scientifique

    des tudes menes par ailleurs, dautoriser les comparaisons avec des rsultats rpertoris, en

    exprimental et en numrique, en expansion de jet dans un trs lger co-courant. Il doit en

    effet tre pris en compte que des rsultats ont pu tre obtenus dans ce domaine des jets, ou

    plus gnralement des coulements cisaillement transversal fort, en appliquant de lgers co-

    courants pour des raisons de pure faisabilit des recherches. En numrique, lapplication dun

    co-courant lve des difficults pratiques au niveau des conditions dentres de domaine. En

    exprimental, il peut en tre de mme, en particulier lorsque lon souhaite obtenir des champs

    moyens mesurables, en vitesse, dans lenvironnement du jet. Lquipe ACTA sest ainsi dote de

    la soufflerie Jet Plan, trois courants spars, vitesses et tempratures ajustables sparment.

    Elle sera dcrite dans le chapitre II.

    3 Objectif de ltude

    Ltude prsente dans ce mmoire de thse vise caractriser, par une approche expri-

    mentale, le comportement de lcoulement de jet plan froid ou chaud, lorsquil se dveloppe

    entre deux flux uniformes en co-courant, avec ou sans gradient de temprature entre ces cou-

    lements parallles. Cette caractrisation est destine poser les bases dactions doptimisation

    (ou contrle passif) ou de contrle actif des conditions de sparation dambiances par un rideau

    plan vertical. Ltude porte plus particulirement sur la mesure et lanalyse des caractristiques

    dynamiques qui conditionnent le mlange entre le jet plan et les courants adjacents. Un intrt

    particulier est port aux grandeurs dcrivant les structures tourbillonnaires et les diffrentes

    chelles de la turbulence. Lvolution spatiale et temporelle de ces lments est au cur de lana-

    lyse. Lvolution longitudinale du jet, son expansion et les transitions entre rgimes successifs

    de mlange sont analyses partir des donnes dtailles de la turbulence. Une part importante

    de ltude porte sur lanalyse de linfluence de deux grandeurs conditionnant le comportement

    de lcoulement, le nombre de Reynolds du jet et le rapport de cisaillement entre le jet et les

    co-courants.

    9GEnie des Procds Environnement Agro-alimentaire

    6

  • Introduction gnrale

    4 Moyens et mthodes

    Les moyens et mthodes seront dcrits dans le chapitre II. Nous donnons ici, en introduction,

    une brve description des lments gnraux.

    4.1 Principaux moyens exprimentaux

    Les outils principaux, mis en uvre ici sur la soufflerie Jet Plan, sont les techniques ex-

    primentales dAnmomtrie par fils chauds croiss Temprature Constante (CTA) et de

    Vlocimtrie par Images de Particules (PIV). Les techniques optiques base de lasers plans et

    de camras utilises pour la PIV ont galement t mises en uvre pour la visualisation simple

    de lcoulement, en appui lanalyse des donnes de mesure. Lanalyse des donnes sappuie

    trs largement sur les outils statistiques permettant dextraire et de caractriser les diffrents

    moments qui clairent le dtail du mlange turbulent.

    4.2 Campagnes de mesure et bases de donnes

    Ltude sappuie sur la constitution de bases de donnes danmomtrie par CTA et PIV,

    gnres lors de sries dexpriences menes dans la soufflerie Jet Plan, par application dun

    ensemble de combinaisons du nombre de Reynolds et du rapport de vitesse entre le jet plan et les

    co-courants. Les mesures par anmomtrie fil chaud (CTA) ont t effectues avec des sondes

    un fil et deux fils, spcifiquement construites en trs petite taille par rapport aux dimensions

    de lcoulement. Les sondes deux fils ont t utilises pour la mesure des deux composantes

    de vitesse correspondant au plan transversal dexpansion du jet (composante u et v), avec

    mesure en parallle dans un plan perpendiculaire pour suivre, aux diffrents points de mesure,

    la troisime composante perpendiculaire ce plan (composante u et w). Les mesures par PIV ont

    t menes avec un systme dacquisition dans un plan dclairage laser (2D) frquence faible

    (1, 33 Hz) pour des mesures deux composantes (2D2C) avec trois camras pour lacquisition

    en champ large. Le dispositif de mesure a t dplac par un systme permettant de balayer

    lespace complet dans et autour du plan principal de mesure. Auparavant, la soufflerie Jet Plan

    a t adapte spcifiquement pour cette tude, puis qualifie dans ses modes de gnration des

    coulements dans les gammes de ltude. Ont t particulirement vrifis les profils de vitesse

    moyenne et de temprature, lhomognit suivant lenvergure (caractre 2D en moyenne), les

    gradients longitudinaux de vitesse et de temprature, ainsi que les fluctuations temporelles en

    sortie des convergents, donnant en particulier le taux de turbulence de la soufflerie.

    7

  • Introduction gnrale

    5 Organisation du document

    Ce document est constitu, outre ce chapitre Introduction gnrale et le chapitre Conclu-

    sion gnrale et perspectives, de quatre chapitres et de deux annexes :

    Le chapitre I de ce mmoire intitul Revue de la littrature est une revue bibliogra-

    phique sur et autour de lcoulement de jet plan turbulent se dveloppant entre deux flux

    uniformes en co-courant ;

    Le chapitre II intitul Moyens Exprimentaux est ddi la prsentation des dispositifs

    exprimentaux et des moyens de mesure utiliss pour raliser ltude ;

    Le chapitre III intitul Comportement dun jet plan turbulent en co-courant

    prsente les rsultats des mesures CTA et leur analyse dans le cas isotherme ;

    Le chapitre IV intitul tude exploratoire de linfluence de la temprature sur

    lcoulement porte sur les expriences PIV ralises en coulement isotherme et aniso-

    therme (cest--dire avec un gradient de temprature entre le jet plan et les co-courants).

    Dans les chapitres III et IV, le dveloppement de lcoulement est abord pour un jeu restreint

    de paramtres de contrles travers ltude de linfluence de ces paramtres (tels le nombre de

    Reynolds ReH et le rapport des vitesses r) sur les profils moyens, les paisseurs caractristiques,

    lexpansion et la similitude des grandeurs moyennes. Cette tude sintresse ensuite la turbu-

    lence ; les fluctuations dynamiques sont tudies travers lvolution de grandeurs statistiques

    comme le tenseur de Reynolds, les coefficients de dissymtrie et daplatissement (moments

    dordre 3 et 4), ainsi que les fonctions de densit de probabilit (PDFs). La similitude de ces

    diffrentes grandeurs associes aux fluctuations dynamiques est galement examine.

    Enfin, la partie Annexes contient :

    Lannexe A qui prsente un catalogue de figures dtaillant les rsultats des mesures par

    anmomtrie fils chauds de lensemble des 11 configurations tudies ;

    Lannexe B qui contient les articles issus de cette tude et publis dans divers congrs.

    8

  • Chapitre I

    Revue de la littrature

    Les jets plans font partie de la famille des coulements cisaills libres selon la classification

    classique des coulements turbulents propose par Chassaing [8]. Ce travail de thse porte

    sur ltude dun jet plan dbouchant dans un coulement uniforme co-courant. Sera tudie

    plus particulirement, via une approche exprimentale, la rgion de turbulence pleinement

    dveloppe dans laquelle des lois de similitude propre au jet peuvent tre dgages. Dans ce

    chapitre, on prsentera les rsultats ncessaires de la littrature sur lesquels sappuieront nos

    analyses et discussions. La premire section est un rappel des quations de base de la dynamique

    des coulements fluides turbulents. La deuxime section synthtise les connaissances sur le jet

    plan turbulent en co-courant. La dernire section est une revue bibliographique des travaux

    raliss sur les jets plans. La rdaction de ce chapitre sest appuye, outre les articles qui seront

    cits, sur un certain nombre douvrages de rfrence tel que Abramovich [9], Townsend [10],

    Rajaratnam [11] et Lee et Chu [12].

    1 quations de base pour les coulements turbulents

    Dans le cadre de cette tude, il est prvu de sintresser plus particulirement ltat de

    lcoulement aprs la transition, lorsque la turbulence est pleinement dveloppe. Il sagit dun

    tat de lcoulement qui a oubli les perturbations qui lont engendr.

    1.1 Proprits

    Phnomnes instationnaires et non-linaires : les quations de Navier-Stokes, qui d-

    crivent les coulements de fluide, contiennent des termes non-linaires. Cette non-linarit a

    un rle primordial dans le dveloppement de la turbulence qui se caractrise par des varia-

    tions spatiales et temporelles trs irrgulires. Ce caractre fortement non-linaire est associ

    la coexistence dans lcoulement de mouvements des chelles trs diffrentes. Lnergie de

    9

  • Chapitre I. Revue de la littrature

    lcoulement transite entre ces diffrentes chelles. Ce transfert dnergie seffectue en moyenne

    et dans le cas des coulements tridimensionnels, depuis les grandes structures cohrentes jus-

    quaux plus petites. La taille des grandes structures est limite par la gomtrie de lcoulement.

    Leur nergie provient de lcoulement moyen. La taille des plus petites structures est lie aux

    effets dissipatifs (chelle de Kolmogorov).

    Phnomnes dissipatifs : cest la viscosit du fluide qui est lorigine de la dissipation

    de lnergie cintique produite aux grandes chelles. La transformation de lnergie cintique

    en nergie interne (lvation de temprature) seffectue au niveau des chelles dissipatives plus

    petites.

    Phnomnes tridimensionnels et rotationnels : mme lorsque lcoulement moyen est

    bidimensionnel, les fluctuations induites par la turbulence sont ncessairement tridimension-

    nelles et le champ de vitesse est rotationnel.

    Phnomnes diffusifs : les coulements turbulents ont la proprit de favoriser le mlange

    par diffusion de quantit de mouvement, de chaleur et de masse.

    Phnomnes imprdictibles : bien que les quations de Navier-Stokes soient dterministes,

    il est impossible de prdire le comportement dune solution long terme. Ceci demanderait une

    prcision infinie sur les conditions initiales.

    1.2 quations instantanes

    La dynamique des coulements turbulents de fluide est dcrite par un jeu dquations cou-

    ples reprsentant les descriptions mathmatiques des lois de conservation de la physique. Lex-

    pression analytique dun coulement sobtient grce aux quations de continuit et de quantit

    de mouvement.

    1.2.1 quation de continuit

    Cette quation exprime le principe de conservation de la masse. Dans cette tude, les cou-

    lements incompressibles seront essentiellement considrs. Cette quation se traduit dans ce cas

    par :uixi

    = 0, (I.1)

    avec ui les composantes de la vitesse.

    10

  • I.1 quations de base pour les coulements turbulents

    1.2.2 quations de quantit de mouvement

    Pour un coulement Newtonien et incompressible, les quations de quantit de mouvement

    sont connues sous le nom dquations de Navier-Stokes. Ces quations expriment la contribution

    des forces de pression et de viscosit lacclration dune particule fluide :

    uit

    + ujuixj

    = 1

    p

    xi+

    2uixjxj

    , (I.2)

    avec p, la pression, , la masse volumique et , la viscosit cinmatique. Cette quation peut

    galement scrire de la manire suivante :

    uit

    + ujuixj

    = 1

    p

    xi+ 2

    sijxj

    , (I.3)

    avec sij = 12(

    uixj

    +ujxi

    ), le tenseur du taux de dformation.

    1.3 quations moyennes

    Les champs instantans peuvent sexprimer comme la somme dun champ moyen et dun

    champ fluctuant. Selon cette dcomposition dite de Reynolds, une quantit instantane f est

    dcrite comme tant la somme de sa moyenne statistique f et dune fluctuation f :

    f (xi, t) = f (xi, t) + f (xi, t) . (I.4)

    La quantit f peut reprsenter une composante de la vitesse, la pression ou la temprature de

    lcoulement. En introduisant la dcomposition de Reynolds, les nouvelles quations obtenues

    sont dites quations moyennes. Dans la littrature anglo-saxonne, il est utilis lacronyme

    RANS 1.

    1.3.1 quations du mouvement moyen

    En introduisant la dcomposition de Reynolds dans lquation de continuit et en lui appli-

    quant loprateur de moyenne statistique, le champ moyen sera dfini par :

    uixi

    = 0 (I.5)

    1Reynolds Averaged Navier-Stokes

    11

  • Chapitre I. Revue de la littrature

    et les trois composantes de la vitesse moyenne obissent aux relations suivantes :

    uit

    + ujuixj

    + ujuixj

    = 1

    pxi

    + 2uixjxj

    . (I.6)

    La condition dincompressibilit sur les fluctuations implique :

    ujuixj

    = uiu

    j

    xj. (I.7)

    Les quations moyennes peuvent alors scrire sous la forme suivante :

    uit

    + ujuixj

    = 1

    pxi

    + 2uixjxj

    uiu

    j

    xj, (I.8)

    ou encore :uit

    + ujuixj

    = 1

    pxi

    +

    xj(ij Rij) , (I.9)

    avec ij = 2sij et Rij = uiuj, le tenseur de Reynolds. Sous cette forme, les quations duchamp moyen de vitesse sont diffrentes des quations instantanes puisquapparat dans ces

    quations un nouveau terme li leffet du champ fluctuant. Il est possible dassimiler son effet

    une loi de comportement non-Newtonnien.

    1.3.2 quations du mouvement fluctuant

    Par soustraction de lquation I.5 lquation I.1, on obtient :

    uixi

    = 0. (I.10)

    Les quantits moyennes et fluctuantes vrifient donc toutes les deux lquation de continuit.

    En soustrayant aux quations de quantit de mouvement instantane I.2 les quations de

    quantit de mouvement moyen I.8, les quations de quantit de mouvement pour les fluctuations

    deviennent :

    uit

    + ujuixj

    + ujuixj

    + ujuixj

    = 1

    p

    xi+

    2uixjxj

    + uiu

    j

    xj. (I.11)

    Une manire dtudier la dynamique de lcoulement passe par lanalyse des quations de

    tensions de Reynolds et des quations de transport de son nergie cintique. Ces bilans nerg-

    tiques sobtiennent en faisant une srie de manipulations algbriques des quations de continuit

    12

  • I.1 quations de base pour les coulements turbulents

    et de quantit de mouvement de lcoulement fluctuant associ.

    1.3.3 quations de tensions de Reynolds

    En multipliant lquation I.11 par uk, nous obtenons :

    ukuit

    +ujukuixj

    +ukujuixj

    +ukujuixj

    = 1uk

    p

    xi+uk

    2uixjxj

    +ukuiu

    j

    xj. (I.12)

    En interchangeant les indices libres k et i, nous pouvons crire :

    uiukt

    +ujuiukxj

    +uiujukxj

    +uiujukxj

    = 1ui

    p

    xi+ui

    2ukxjxj

    +uiuku

    j

    xj. (I.13)

    Finalement, en ajoutant lquation I.12 lquation I.13, en prenant la moyenne et en consid-

    rant lquation de continuit, nous obtenons les quations de transport des contraintes ou des

    tensions de Reynolds. Ces dernires peuvent tre exprimes sous la forme dun bilan :

    uiukt

    + ujuiuk

    xj=

    (ujuk

    uixj

    + uiujukxj

    )i

    (

    uiujukxj

    +1

    (uip

    xk + u

    kp

    xi

    ))ii

    +1

    p(

    uixk

    +ukxi

    ) iii

    +2uiukxjxj

    iv

    2ui

    xj

    ukxj

    v

    (I.14)

    Le terme de gauche reprsente la variation totale du tenseur de Reynolds constitue de la

    somme des variations temporelles et convectives. Cette variation totale dpend de plusieurs

    phnomnes, notamment de linteraction des tensions de Reynolds avec les gradients de vitesse

    moyenne, qui constituent la production (i), le transport turbulent associ aux corrlations triples

    et aux corrlations pression-vitesse (ii), la redistribution par les forces de pression reprsente

    par la corrlation pression-dformation (iii), la diffusion visqueuse cre par les interactions

    visqueuses entre la vitesse et ses gradients (iv) et le tenseur de dissipation turbulente (v).

    13

  • Chapitre I. Revue de la littrature

    1.3.4 quations de lnergie cintique

    La dcomposition de Reynolds peut sappliquer lnergie cintique instantane k = 12uiui

    dont la moyenne statistique se dcompose en une nergie cintique moyenne note :

    k = 12uiui (I.15)

    et une nergie cintique turbulente note :

    k = 12uiui. (I.16)

    Cette notation nest pas tout--fait satisfaisante au niveau des lois de composition de loprateur

    de moyenne, mais cette entorse permet, sans consquence, plus de clart dans lcriture de ce

    qui suit.

    Lquation de transport de lnergie cintique moyenne est obtenue en multipliant lqua-

    tion I.8 par la vitesse moyenne ui :

    kt

    + ujkxj

    =

    (uiuj)uixj

    i

    (

    uiujujxj

    +1

    pujxj

    )ii

    +2k

    xjxjiii

    uixj

    uixj

    iv

    (I.17)

    Le terme de gauche est le taux de variation de lnergie cintique moyenne. Le terme de droite

    est constitu dune part de la puissance extrieure (qui transporte lnergie cintique moyenne

    dun point un autre) de la pression et du mouvement fluctuant (ii) et de la viscosit (iii) et

    dautre part de la puissance intrieure du mouvement fluctuant (i : change dnergie entre le

    mouvement moyen et fluctuant) et de la viscosit (iv : taux de dissipation visqueuse de lnergie

    cintique moyenne).

    Lquation de transport de lnergie cintique turbulente est la demi-somme des composantes

    14

  • I.2 Jet plan turbulent en co-courant

    diagonales des quations de transport des tensions de Reynolds I.14 :

    kt

    + ujkxj

    =

    uiujuixj

    i

    (

    kujxj

    +1

    pujxj

    )ii

    +2kxjxj

    iii

    ui

    xj

    uixj

    iv

    (I.18)

    Cette quation est analogue lquation de transport de lnergie cintique moyenne I.17.

    Le terme de gauche reprsente la variation totale de lnergie turbulente. Le terme (i) appa-

    rat dans lquation de transport de lnergie cintique moyenne I.17 avec un signe contraire.

    Il reprsente la production de turbulence par le transfert dnergie de lcoulement moyen

    lcoulement fluctuant. Le terme (ii) dsigne la diffusion turbulente. Il correspond au transport

    de lnergie cintique turbulente par les fluctuations de vitesse et au transfert dnergie cin-

    tique turbulente par linteraction de la pression et des vitesses fluctuantes. Le terme (iii) est

    la diffusion molculaire de lnergie cintique turbulente par la viscosit. Le terme (iv) est la

    dissipation de lnergie cintique turbulente sous forme de chaleur par les forces visqueuses. Ce

    terme est toujours ngatif. Il constitue un puits dans lquation de k et conduit donc unedcroissance de la turbulence dans le cas des coulements non forcs ou sans cisaillement.

    En rsum, la variation de lnergie cintique turbulente se prsente sous la forme de lqui-

    libre entre les mcanismes de production, de diffusion, de transferts et de dissipation des mouve-

    ments turbulents. Ces quations seront utilises pour commenter le comportement des tensions

    de Reynolds et peuvent permettre de reprsenter les bilans des quations de transport de notre

    tude exprimentale, en recourant quelques hypothses simplificatrices.

    2 Jet plan turbulent en co-courant

    Un jet est lcoulement produit par une source continue de mouvement. Un jet plan est un

    jet issu dun orifice de forme rectangulaire se dchargeant dans une grande masse dun mme

    fluide, le plus souvent au repos. Lcoulement tudi est un jet plan en co-courant, cest--dire

    un jet plan dont le fluide environnant se dplace dans la mme direction. La figure I.1 montre

    une visualisation et une reprsentation schmatique de son coulement moyen. La largeur et la

    longueur de lorifice sont notes respectivement H et L. Dans cette tude, le rapport daspect

    gomtrique est LH

    = 40. La direction longitudinale x est la direction de lpanouissement du

    15

  • Chapitre I. Revue de la littrature

    jet, la direction latrale y est normale au plan de symtrie et la direction z est la direction de

    lenvergure. Lorigine O du repre se situe au milieu de la section de sortie du jet, au niveau

    des bords de fuites des deux plaques sparatrices. Lpanouissement transversal (suivant z)

    du jet est ngligeable et lcoulement est strictement bidimensionnel en moyenne dans le plan

    xOy. Le jet prsente un plan de symtrie xOz. La vitesse uniforme du jet plan au soufflage est

    appele Uj et la vitesse uniforme des co-courants au soufflage Ue.

    Le nombre de Reynolds ReH est un paramtre de contrle pour le jet plan en co-courant. Il

    est, pour cette tude, dfini comme suit :

    ReH =(Uj Ue) H

    . (I.19)

    Dans cette tude, le rgime dcoulement est turbulent, cest--dire que le nombre de Reynolds,

    calcul la sortie de la buse de soufflage est relativement grand (ReH 10 000).Un autre paramtre de contrle pour le jet plan en co-courant est le rapport de vitesse entre

    les deux coulements :

    r =UeUj

    , (I.20)

    ou le paramtre de cisaillement :

    =Uj UeUj + Ue

    . (I.21)

    Le rapport de vitesse et le paramtre de cisaillement sont lis par la relation :

    =1 r1 + r

    . (I.22)

    2.1 Rgions de lcoulement

    Lcoulement moyen dun jet plan turbulent en co-courant peut tre divis en deux rgions :

    la rgion initiale et la rgion pleinement dveloppe.

    2.1.1 Rgion initiale

    La rgion initiale stend de la sortie du jet jusquau dbut de la rgion pleinement dvelop-

    pe dans laquelle lcoulement est en similitude. La longueur de la rgion initiale est de lordre

    de 10 H. Elle dpend fortement de la forme du profil de vitesse et des critres utiliss pour

    considrer la similitude atteinte. la sortie du jet, lcoulement est gnralement uniforme

    (conditions exprimentales ajustes pour obtenir un profil de vitesse le plus proche possible

    de luniformit : profil plat ou top-hat ). Il se forme alors de part et dautre deux couches

    16

  • I.2 Jet plan turbulent en co-courant

    Figure I.1: Visualisation et reprsentation schmatique de lcoulement moyen dun jet planturbulent en co-courant.

    cisailles de type couche de mlange turbulente. Les couches cisailles sont le sige dinstabilits

    nes de linertie des deux coulements (jet/co-courant) qui les gnrent et du terme non-linaire

    de lquation de quantit de mouvement. Ces instabilits sont connues sous le nom dinstabilit

    de Kelvin-Helmholtz. Elles se manifestent dabord par une ondulation de la nappe de vorticit

    qui senroule par la suite pour gnrer des lchers priodiques de structures tourbillonnaires

    primaires. Ces dernires sont des structures bidimensionnelles dont la taille augmente sous lef-

    fet de lentranement. Elles finissent par interagir entre elles provoquant ainsi une modification

    locale de la priodicit au passage des structures, plus en aval. Des structures secondaires en

    forme dpingles cheveux apparaissent galement donnant la turbulence son caractre tridi-

    mensionnel. Dans le cas dun jet plan, les lchers tourbillonnaires des deux couches de mlange

    ont la particularit dtre en phase, en vis--vis avec des structures tourbillonnaires contra-

    17

  • Chapitre I. Revue de la littrature

    rotatives. Le jet est alors en rgime variqueux, par opposition au rgime sinueux de lalle

    tourbillonnaire de Von Karman caractristique des coulements de sillage. Laugmentation de

    la taille des structures tourbillonnaires conduit la coalescence des deux couches de mlange.

    Le mlange conduit une dclration progressive de la vitesse du jet et un entranement de

    lambiance environnante.

    De ce fait, il existe un secteur angulaire, ayant pour base lorifice du jet, dans lequel la

    vitesse du fluide reste constante et gale Uj, et la turbulence reste faible. Cette zone, de par

    sa forme, est appele cne potentiel et sa longueur est denviron quatre huit fois la largeur de

    la buse de soufflage. La taille de cette zone dpend nanmoins fortement des conditions initiales

    du jet.

    La zone de transition dbute aprs le cne potentiel dlimit par deux coulements de

    type couche de mlange. Elle prend fin lorsquun tat de turbulence pleinement dveloppe

    apparat pour lcoulement de type jet plan. Cest donc une zone de transition entre deux types

    dcoulement (couche de mlange et jet) dans laquelle les caractristiques de la turbulence sont

    fortement modifies avec beaucoup dintermittence, une forte croissance de lnergie cintique

    turbulente et une modification profonde de sa rpartition en chelle.

    Dans la rgion initiale, rgion dtablissement de lcoulement, le comportement de lcou-

    lement ne prsente pas encore une similitude de type jet.

    2.1.2 Rgion pleinement dveloppe

    Dans cette rgion, le comportement du jet plan ne dpend plus des conditions particulires

    qui lont engendr, mais seulement de la vitesse dentranement et de la quantit de mouvement

    la source du jet. Quelles que soient les conditions initiales du jet en sortie, et notamment la

    forme du profil de vitesse, le mlange turbulent de la quantit de mouvement conduit une

    forme proche dune fonction gaussienne du profil de vitesse moyenne. Le jet plan en co-courant

    prsente plus largement une auto-similarit de toutes les proprits statistiques de lcoulement

    moyen et turbulent. Les profils latraux de la vitesse moyenne et des tensions de Reynolds ont

    une affinit gomtrique et ils peuvent se dduire les uns des autres en fonction des coordonnes

    rduites.

    La rgion pleinement dveloppe se caractrise par lpanouissement du jet plan suivant y.

    Son largissement progressif saccompagne de la diminution de la vitesse moyenne sur laxe du

    jet. Ce comportement est pilot par la quasi conservation de la quantit de mouvement du jet et

    par le phnomne dentranement de son environnement, tous deux conduisant laugmentation

    du dbit du jet le long de son panouissement.

    18

  • I.2 Jet plan turbulent en co-courant

    Le phnomne dentranement est d la viscosit du fluide. Elle sexprime travers le terme

    de diffusion dans lquation de conservation de la quantit de mouvement. La diffusion visqueuse

    est toujours prsente pour ce type dcoulement fortement cisaill. La diffusion turbulente est

    prpondrante ds que lcoulement prsente des structures tourbillonnaires en interaction. La

    nature intermittente de ces structures leur permet dentraner des paquets de fluide irrotationnel

    lintrieur du jet. Au total, la quantit de mouvement du jet est quasiment conserve alors

    que son dbit augmente significativement.

    2.2 quations de base simplifies

    Pour un type dcoulement et une exprience donne, il est ncessaire, pour lanalyse, de

    formuler des hypothses simplificatrices. Elles permettent de simplifier les quations de base

    (quations de Navier-Stockes gnralises) qui dcrivent la dynamique particulire de lcou-

    lement considr. Dans ce qui suit, il sera prsent les hypothses simplificatrices propres

    lexprience considre de jet plan et les quations qui en rsultent.

    2.2.1 Le jet plan, un coulement cisaill libre

    Dans notre cas, nous admettons les hypothses simplificatrices suivantes :

    proprit dergodicit en moyenne. La moyenne temporelle note () peut donc se substi-tuer la moyenne statistique note et donc : f = lim

    T1T

    T0

    f(t)dt ;

    fluctuations centres, f = 0 ; coulement permanent (stationnaire),

    t = 0 ;

    coulement homogne suivant laxe z, z = 0 ;

    coulement plan en moyenne. Toutes les grandeurs moyennes sont donc indpendantes

    de la direction transversale. Par ailleurs, la vitesse moyenne transversale est nulle et, par

    raison de symtrie statistique, les covariances incluant la vitesse fluctuante transversale

    le sont galement, soit w = 0, uw = 0 et vw = 0 ; conditions aux limites dun jet libre, (y ), u 0 et uv 0.

    Les quations de base de lcoulement moyen I.5 et I.8 (quation de continuit et quations de

    quantit de mouvement) deviennent :

    ux

    +vy

    = 0, (I.23)

    uux

    + vuy

    = 1

    px

    u2

    x u

    vy

    , (I.24)

    19

  • Chapitre I. Revue de la littrature

    uvx

    + vvy

    = 1

    py

    uv

    x v

    2y

    . (I.25)

    Outre les hypothses simplificatrices prcdentes, le jet plan est un coulement cisaill dont les

    chelles transversales sont petites compares aux chelles longitudinales. Lapproximation de

    type couche limite (hypothse de Prandtl) peut donc sappliquer avec :

    pour la gomtrie, Ly Lx ; pour la cinmatique, v u.

    En intgrant lquation I.25, il vient :

    p + v2 = p, (I.26)

    o p est la pression lextrieur de la zone de mlange. En tenant compte des hypothsesnonces ci-dessus, lquation de continuit reste inchange :

    ux

    +vy

    = 0, (I.27)

    et les quations de quantit de mouvement se rduisent :

    uux

    + vuy

    +u2

    x v

    2x

    = uv

    y. (I.28)

    La prsence de corrlation double confre ce systme dquations un caractre ouvert, en ce

    sens quil contient lordre un plus dinconnues que dquations. Une premire faon denvi-

    sager sa fermeture consiste exprimer directement la corrlation partir du champ de vitesse

    moyenne faisant ainsi appel au concept de viscosit turbulente. Une autre voie de fermeture

    consiste adjoindre au systme certaines quations aux drives partielles. Pour une explication

    dtaille, le lecteur pourra se rapporter louvrage de Chassaing [8].

    Le comportement moyen peut nanmoins se dduire de la version intgrale des quations

    du mouvement. Lquation de quantit de mouvement I.28 peut se rcrire sous la forme :

    u2x

    +uv

    y+

    u2x

    v2

    x= u

    vy

    . (I.29)

    En intgrant travers le jet de y = y = +, le ct gauche de lquation I.29 devient :

    x

    +

    [u2 +

    (u2 v2

    )]dy + [uv]+ , (I.30)

    20

  • I.2 Jet plan turbulent en co-courant

    et le ct droit de lquation donne :

    +

    (u

    vy

    )dy = [uv]+ , (I.31)

    soit en utilisant les conditions limites du jet :

    x

    +

    [u2 +

    (u2 v2

    )]dy = 0. (I.32)

    La quantit de mouvement est donc prserve dans la direction longitudinale. Ainsi :

    M =

    +

    [u2 +

    (u2 v2

    )]dy, (I.33)

    avec M , la quantit de mouvement de lcoulement du jet plan.

    Miller et Comings [13] montrent que les deux quantits de turbulence de lquation I.33 sont

    du mme ordre de grandeur. La contribution des termes de turbulence lintgrale de quantit

    de mouvement de lcoulement est seulement denviron 4%. Ces quantits peuvent donc tre

    ngliges et la quantit de mouvement peut tre approxime par la quantit de mouvement en

    sortie du jet M0 avec :

    M +

    u2dy = M0. (I.34)

    2.2.2 Cas du jet plan sans co-courant

    Dans la rgion pleinement dveloppe, le profil de vitesse moyenne peut tre approch par

    une fonction gaussienne. Il est dfini par :

    U

    Ub=

    uuaxe

    = exp

    [ln ()

    (y

    )2](I.35)

    avec Ub (x) = uaxe (x), la vitesse maximale sur laxe du jet et (x), lpaisseur du jet dfiniecomme tant la position y pour laquelle uuaxe = . Par une simple intgration du profil de

    vitesse, on obtient pour le dbit volumique du jet :

    Q =

    +

    udy = I1Ub, (I.36)

    21

  • Chapitre I. Revue de la littrature

    et pour la quantit de mouvement :

    M =

    +

    u2dy = I2U2b . (I.37)

    avec I1 =

    ln() et I2 =

    2 ln() .

    De ces deux quations (I.36 et I.37), il est possible den dduire :

    Ub =I1I2

    M

    Q(I.38)

    =I2I21

    Q2

    M. (I.39)

    Lvolution longitudinale de ces deux quantits peut tre calcule au prix dune hypothse

    supplmentaire. Dans la littrature, deux hypothses diffrentes sont utilises : lhypothse

    dpanouissement et lhypothse dentranement.

    Lhypothse dpanouissement a t gnralise par Lee et Chu [14] (1996). Cette hypo-

    thse suppose que la variation de lpaisseur du jet dans un rfrentiel Lagrangien est propor-

    tionnelle la vitesse du jet, elle-mme proportionnelle la vitesse sur laxe :

    DDt

    = Ucx

    = Ub, (I.40)

    ou plus simplement, en modlisant la vitesse de convection Uc par la vitesse du jet Ub :

    = x (I.41)

    avec , le coefficient de proportionnalit dit dpanouissement. En utilisant lquation I.37,

    cette hypothse permet den dduire :

    Ub =

    [(1

    I2

    M0

    ) 12

    ]x

    1

    2 , (I.42)

    = [] x. (I.43)

    Lhypothse dentranement a t introduite par Morton et al. [15]. Cette seconde hypo-

    thse relie le flux de masse du fluide entran la vitesse dans le jet. En effet, en intgrant

    22

  • I.2 Jet plan turbulent en co-courant

    lquation de continuit travers le jet, on aura :

    dQ

    dx=

    d

    dx

    +

    udy = [v]+ = 2ve (I.44)

    avec ve = [v]y=, la vitesse dentranement. Lhypothse dentranement se traduit par :

    ve = Ub. (I.45)

    En utilisant cette hypothse dans lquation I.44 et en identifiant uaxe par lexpression delquation I.39, on obtient :

    dQ

    dx= 2Ub = 2

    I1I2

    M

    Q(I.46)

    soit par intgration :

    Q2 = 4I1I2

    M0x. (I.47)

    En utilisant cette galit, il est possible den dduire le comportement du jet avec :

    Ub =

    [(1

    4

    I1I2

    M0

    ) 12

    ]x

    1

    2 (I.48)

    =

    [4

    I1

    ]x (I.49)

    Les constantes exprimentales des hypothses dpanouissement et dentranement sont lies

    par la relation :

    =4

    I1. (I.50)

    2.2.3 Cas du jet plan en co-courant

    Dans la rgion pleinement dveloppe dun jet plan turbulent en co-courant, le profil de

    lexcs de vitesse U = u Ue, normalis par lexcs de vitesse sur laxe Ub = uaxe Ue,peut tre approch par une distribution Gaussienne semblable celle dun jet plan dans une

    ambiance au repos (Patel [16]) :

    U

    Ub=

    u Ueuaxe Ue

    = exp

    [ln ()

    (y

    )2]. (I.51)

    Dans cette rgion, le comportement en similitude peut se dduire par de simples considra-

    23

  • Chapitre I. Revue de la littrature

    tions sur lcoulement moyen. Les proprits de similitude permettent de dcrire lcoulement

    en fonction dune unique variable despace sans dimension qui correspond la variable de

    similitude. Cette variable est dfinie par = y

    , o (x) est lpaisseur du jet dfinie comme

    tant la position y pour laquelle uUeuaxeUe = .

    Par une simple intgration du profil de vitesse, on obtient pour lexcs de dbit volumique

    du jet :

    Qe =

    +

    (u Ue) dy = I1Ub, (I.52)

    et pour lexcs de quantit de mouvement :

    Me =

    +

    u (u Ue) dy = I2U2b + I1UeUb. (I.53)

    En utilisant une dmarche semblable celle du jet plan, il est ais de montrer que lexcs

    de quantit de mouvement est conserv avec :

    Me =

    +

    u (u Ue) dy = Me0 (I.54)

    o Me0 = Uj (Uj Ue) H dans le cas dun profil de vitesse en sortie du type chapeau haut-de-forme ou top-hat .

    Dans la rgion pleinement dveloppe dun jet plan turbulent en co-courant tel que celui

    tudi dans cette thse, il est suppos que lcoulement ne dpend pas directement des conditions

    initiales comme la vitesse du jet Uj et lpaisseur du jet H en sortie mais seulement de lexcs

    de quantit de mouvement en sortie Me0. Il y a ainsi deux chelles qui dfinissent lcoulement

    de jet plan turbulent en co-courant : la vitesse ambiante du co-courant Ue et lpaisseur dexcs

    de quantit de mouvement dfinie comme suit :

    Me0 = U2e . (I.55)

    Lutilisation de ces deux chelles permet dobtenir une reprsentation universelle des variables

    de similitude.

    En introduisant les variables adimensionnelles[Ub =

    UbUe

    ],[ =

    ]et[x = x

    ], la conser-

    vation de lexcs de la quantit de mouvement devient :

    I2U2b

    + I1U

    b

    = 1 (I.56)

    24

  • I.2 Jet plan turbulent en co-courant

    Cette quation contient deux inconnues : Ub et . Pour tudier lvolution longitudinale de

    ces quantits, une quation auxiliaire doit tre formule. Dans la littrature, cette quation

    auxiliaire est issue soit de lhypothse dpanouissement soit de lhypothse dentranement

    prcdemment dcrites dans le cas du jet plan dans une ambiance au repos. La rsolution de

    ce systme de deux quations deux inconnues permet den dduire le comportement moyen

    du jet.

    Lhypothse dpanouissement suppose que la variation de lpaisseur du jet dans un

    rfrentiel Lagrangien est proportionnelle une vitesse relative entre le jet et son co-courant :

    DDt

    = Ucx

    = Ub. (I.57)

    En posant Uc = Ue + Ub, lhypothse dpanouissement peut tre crite comme lquation

    auxiliaire :ddx

    = Ub

    Ue + Ub. (I.58)

    ou encore :ddx

    = Ub

    1 + Ub(I.59)

    Dans la littrature sur les jets turbulents, la valeur de 0,5 se situe gnralement autour de 0, 11.

    En revanche, la valeur de varie sensiblement suivant les auteurs. Pour les jets plans, Abramo-

    vich [9] propose une quation auxiliaire lgrement diffrente dans laquelle = 0, 5 alors que

    Patel [16] et Gaskin et Wood [17] proposent de prendre = 1. Pour les jets axisymtriques,

    Wright [18] et Chu, Lee and Chu [19] obtiennent = 0, 5 et Davidson et Wang [20] = 0, 65.

    Lhypothse dentranement relie le flux de masse du fluide entran la vitesse dans le

    jet :dQ

    dx= 2ve, (I.60)

    avec

    ve = Ub. (I.61)

    Lquation auxiliaire est donc simplement :

    dQ

    dx= 2Ub . (I.62)

    Dans les 2 cas, ce systme de deux quations peut alors tre numriquement intgr en utili-

    25

  • Chapitre I. Revue de la littrature

    sant la mthode de Runge-Kutta pour obtenir lvolution de Ub et diffrents endroits en aval

    de la source. La relation entre le coefficient dentranement et le coefficient dpanouissement

    peut tre obtenue en considrant les quations I.56, I.59 et I.62 :

    = 2

    [1 + Ub

    Ub

    ] [2I2U

    b + I1

    I1I2Ub

    ]. (I.63)

    Il est au moins possible de dterminer le comportement asymptotique de Ub (x) et (x).

    En supposant que toutes les grandeurs moyennes et turbulentes peuvent se dduire des pro-

    fils amont par similitude, nous verrons que les grandeurs moyennes satisfont alors des lois

    universelles.

    Les champs de la vitesse moyenne et des tensions de Reynolds, peuvent tre dfinis par des

    fonctions de similitude comme suit :

    f () =U

    Ub,

    g () =vUb

    ,

    g1 () =u2U2b

    ,

    g2 () =v2U2b

    ,

    g12 () =uvU2b

    .

    avec = y

    . En identifiant ces expressions dans lquation I.52, ceci permet dobtenir :

    x

    [

    UbUe

    ( +

    f () d +

    UbUe

    +

    f 2 () d

    )]= 0. (I.64)

    Cette quation est constitue de deux termes pour lesquels les intgrales sont du mme ordre

    de grandeur. Le premier est I1 = + f () d, le moment d au co-courant et le deuxime est

    I2 = + f

    2 () d, le moment d lexcs de vitesse. Le poids relatif de ces deux termes est

    port par la valeur de UbUe

    . Dans un jet plan turbulent en co-courant, le processus de mlange

    du jet est sous linfluence de lcoulement ambiant. Cest le rapport entre le maximum dexcs

    de vitesse et la vitesse ambiante du co-courant UbUe

    qui dtermine lentranement.

    Cas UbUe

    1 : ce type de flux est souvent dsign par jet fort. Cest le jet plan en co-courant

    26

  • I.2 Jet plan turbulent en co-courant

    avec Uj Ue. Pour ce cas, lquation I.64 se rduit :

    x

    [

    (UbUe

    )2 +

    0

    f 2 () d

    ] 0 (I.65)

    En posant Ub xp et xq (analogue lhypothse dpanouissement) dans cette

    quation, ce remplacement permet dobtenir :

    q + 2p = 0, (I.66)

    Cas UbUe

    1 : ce type de flux est souvent dsign comme jet faible. Pour ce cas, lqua-tion I.64 devient :

    x

    [

    UbUe

    +

    0

    f () d

    ] 0 (I.67)

    En posant galement Ub xp et xq dans cette quation, il est possible den dduire

    que :

    p + q = 0 (I.68)

    Cas UbUe

    1 : pour le cas intermdiaire UbUe

    1, mme sil y a similitude, il nest pas possibledavoir une relation exponentielle simple du type donn par lquation I.66 et I.68.

    Pour rsoudre les exposants p et q, il faut identifier les fonctions de similitude dans lqua-

    tion I.28. Ainsi, chacun des termes de cette quation scrit comme suit :

    uux

    = U bUef UbUe

    f + UbU

    bf

    2 U2b

    ff

    vuy

    =U2b

    f

    0

    f d UbU bf

    0

    fd

    1

    y=

    U2b g12

    soit :

    [g12] =U

    b

    Ub

    UeUb

    [f ] UeUb

    [f] +

    Ub

    Ub

    [f 2 f

    0

    fd

    ]+

    [f

    0

    f d ff ]

    (I.69)

    Les termes [] sont sensiblement du mme ordre de grandeur. Le poids de ces termes danslquation est donc port par leurs coefficients respectifs. De plus, le terme de gauche [g12] est

    ncessairement du mme ordre de grandeur que lensemble des termes de droite. En identifiant

    27

  • Chapitre I. Revue de la littrature

    Ub et par leurs lois de puissance, ces coefficients deviennent :

    Ub

    Ub

    UeUb

    xq1UeUb

    UeUb

    xq1UeUb

    U bUb

    xq1

    xq1

    Pour le jet fort, il en rsulte q 1 = 0. Avec la relation q +2p = 0 de lquation I.66, il est doncpossible den dduire :

    Ub 1x

    (I.70)

    x (I.71)

    Pour le jet faible, il en rsulte q 1 p = 0. Avec la relation p + q = 0 de lquation I.68, il estdonc possible den dduire :

    Ub 1x

    (I.72)

    x (I.73)

    On peut alors souligner que dans les 2 cas, Ub dcrot en 1x . En revanche, pour le jet fort,

    lpanouissement est linaire alors que pour le jet faible, cet panouissement croit en

    x comme

    pour un coulement de sillage.

    2.2.4 Bilan sur les variables dadimensionnement locales et globales

    Le tableau I.1 prsente les couples des variables dadimensionnement locales et globales uti-

    lises dans cette tude pour ladimensionnement des quantits statistiques. Chacun des couples

    est constitu dune chelle de vitesse caractristique et dune chelle de longueur caractristique.

    Les variables dadimensionnement locales (uaxe Ue, ) correspondent aux variables desimilitude utilises pour la superposition des profils transversaux des quantits statistiques dans

    la rgion pleinement dveloppe.

    Les variables dadimensionnement globales sont utilises pour ladimensionnement des profils

    de lvolution, le long de laxe du jet, des quantits statistiques et des variables de similitude. Il

    28

  • I.2 Jet plan turbulent en co-courant

    Adimensionnement uaxe Ue Excs de vitesse du jet le long de son axelocal paisseur du jet le long de son axeAdimensionnement Uj Ue Excs de vitesse du jet la sortieglobal H paisseur du jet la sortieAdimensionnement Ue Vitesse du co-courantglobal paisseur dexcs de quantit de mouvement

    Tab. I.1: Variables dadimensionnement locales et globales.

    est communment reconnu que le comportement du jet dans la rgion de turbulence pleinement

    dveloppe ne dpend pas des conditions prcises du jet la sortie (gomtrie de base, profil

    de vitesse, tat des couches limites) mais seulement de lexcs de quantit de mouvement et de

    lentranement du jet. On a ainsi pour lexcs de quantit de mouvement Me et de lexcs de

    dbit Qe :

    Me =

    +

    u (u Ue) dy = Me0

    Qe =

    +

    (u Ue) dy = Qe0

    Des chelles de vitesse (Uj Ue) et de longueur H peuvent tre estimes en supposant un profilde vitesse en chapeau haut-de-forme la sortie du jet avec :

    Me0 = Uj (Uj Ue) H (I.74)Qe0 = (Uj Ue) H (I.75)

    soit :

    Uj Ue =Me0Qe0

    Ue (I.76)

    H =Q2e0

    Me0 Qe0Ue(I.77)

    Ces variables dadimensionnement globales (UjUe) et H seront ainsi utilises afin de comparerles comportements statistiques des jets aux conditions dentre diffrentes.

    Pour ltude particulire de la rgion pleinement dveloppe dun jet plan turbulent en co-

    courant tel que celui tudi dans cette thse, il a t suppos dans ce chapitre que lcoulement

    ne dpend pas directement des conditions initiales comme la vitesse du jet Uj et lpaisseur

    du jet H en sortie mais seulement de lexcs de quantit de mouvement en sortie Me0. Deux

    29

  • Chapitre I. Revue de la littrature

    chelles suffisent dfinir lcoulement de jet plan turbulent en co-courant : la vitesse ambiante

    du co-courant Ue et lpaisseur dexcs de quantit de mouvement dfinie comme suit :

    Me0 = U2e (I.78)

    Ces deux chelles (Ue et ) seront utilises pour mettre en vidence lexistence dune reprsen-

    tation universelle des variables de similitude.

    2.3 quations de transport des tensions de Reynolds

    En tenant compte des hypothses simplificatrices nonces prcdemment, les quations de

    transport des tensions de Reynolds scrivent :

    pour u2 :

    uu2

    x+ vu

    2y

    =

    2(u2u

    x+ uvu

    y

    )i

    (

    u3x

    +u2v

    y+

    2

    upx

    )ii

    +2

    pu

    x iii

    +

    (2u2

    x2+

    2u2y2

    )iv

    2((

    u

    x

    )2 +

    (u

    y

    )2 +

    (u

    z

    )2)

    v

    (I.79)

    pour v2 :

    uv2

    x+ vv

    2y

    =

    2(v2v

    y+ uvv

    x

    )i

    (

    v3y

    +uv2

    x+

    2

    vpy

    )ii

    +2

    pv

    y iii

    +

    (2v2

    x2+

    2v2y2

    )iv

    2((

    v

    x

    )2 +

    (v

    y

    )2 +

    (v

    z

    )2)

    v

    (I.80)

    30

  • I.2 Jet plan turbulent en co-courant

    pour w2 :

    uw2

    x+ vw

    2y

    =

    0 i

    (

    uw2x

    +vw2

    y

    )ii

    +2

    pw

    z iii

    +

    (2w2

    x2+

    2w2y2

    )iv

    2((

    w

    x

    )2 +

    (w

    y

    )2 +

    (w

    z

    )2)

    v

    (I.81)

    pour uv :

    uuv

    x+ vu

    vy

    =

    (u2v

    x+ v2u

    y

    )i

    (

    u2vx

    +uv2

    y+

    1

    vpx

    +1

    upy

    )ii

    +1

    p(

    v

    y+

    v

    x

    ) iii

    +

    (2uv

    x2+

    2uvy2

    )iv

    2(u

    x

    v

    x + u

    y

    v

    y + u

    z

    v

    z)

    v

    (I.82)

    2.4 quations de transport de lnergie cintique

    De mme, en prenant en compte les hypothses nonces ci-dessus, lquation de transport

    de lnergie cintique moyenne scrit :

    ukx

    + vky

    =

    +uvuy

    +(u2 v2

    ) ux

    i

    y

    [(p

    + k)v]

    ii

    0 iii

    (

    uy

    )2iv

    (I.83)

    31

  • Chapitre I. Revue de la littrature

    et lquation de transport de lnergie cintique turbulente scrit :

    uk

    x+ vk

    y

    =

    uvuy

    (u2 v2

    ) ux

    i

    y

    (pv

    + kv)

    ii

    0 iii

    [(

    u

    x

    )2 +

    (u

    y

    )2 +

    (u

    z

    )2

    +(

    v

    x

    )2 +

    (v

    y

    )2 +

    (v

    z

    )2 iv

    +(

    w

    x

    )2 +

    (w

    y

    )2 +

    (w

    z

    )2]

    (I.84)

    3 Revue bibliographique

    Les jets plans sont prsents dans de nombreuses applications industrielles et phnomnes

    environnementaux. Cest un coulement cisaill qui a fait lobjet de nombreuses tudes tho-

    riques, exprimentales et numriques. Cette section est une revue bibliographique sur les jets

    plans. Le choix a t fait de reprendre de faon chronologique (en drogeant parfois pour plus

    de clart) les principales publications qui ont marqu lactivit de recherche sur cet coulement

    depuis le dbut du sicle dernier.

    Schlichting [21] (1933) est un des premiers tudier avec une approche acadmique les cou-

    lements du type jet. Il sest intress au dveloppement dun jet issu dune buse circulaire (jet

    circulaire) et dune buse longue et troite (jet plan) dans une ambiance au repos. Dans le cas

    des jets plans, les conditions limites et les hypothses de bi-dimensionnalit et daffinit go-

    mtrique de lcoulement lui ont permis dintgrer numriquement les quations fondamentales

    de la mcanique des fluides. Les solutions rsultantes ont donn les premires descriptions de

    lcoulement de jet plan, avec une expansion des profils en loi de puissance dans la rgion de

    similitude. Bickley [22] (1937) a poursuivi cette tude en calculant analytiquement ces solutions

    en considrant les approximations de Prandtl tablies pour ltude de la couche limite. Il note

    que le dveloppement du jet est accompagn par un entranement du fluide ambiant, ce qui

    produit une augmentation du dbit et une diminution de la vitesse axiale tout en conservant

    une quantit de mouvement constante.

    Paralllement aux travaux de Schlichting, Frthmann [23] (1934) a abord par une approche

    exprimentale ltude du jet plan se dveloppant dans une ambiance au repos. Il a mesur en

    utilisant un tube de Pitot les profils de la vitesse moyenne dans la rgion 0 < x/H < 25, avec H

    32

  • I.3 Revue bibliographique

    Figure I.2: Profil de vitesse moyenne diffrentes stations dans le jet plan daprs Frth-mann [23]

    la largeur de la buse de soufflage (figure I.2). La rgion explore se limitait principalement la

    rgion initiale dans laquelle stablit lcoulement. Les quantits statistiques prsentes navaient

    donc probablement pas encore atteint un tat asymptotique.

    Une tude plus complte a t mene par Miller et Comings [13] (1957) au moyen dun tube

    de Pitot et surtout dun anmomtre fil chaud. Les profils transversaux et lvolution axiale

    de la pression statique et du moment dordre un (moyenne) et deux (cart-type) de la vitesse

    longitudinale ont t obtenus jusqu une distance de 40H. De ces mesures, Miller et Comings

    ont pu vrifier lexistence dune rgion de similitude avec une croissance linaire de lpaisseur

    du jet et une dcroissance en racine carre de la vitesse sur laxe (figure I.3). Ils ont galement

    pu mettre en vidence une pression statique ngative dans le jet (except dans la rgion du cne

    potentiel) voluant comme lcart-type des fluctuations de vitesse (figure I.4), ce qui conforme

    lquation du mouvement transversal (quation I.26).

    Van Der Hegge Znen [24, 25] (1958) a men un tude comparable celle de Miller et

    Comings. Il sest intress aux proprits cinmatiques de lcoulement avec des mesures par

    anmomtrie fil chaud pour un nombre de Reynolds ReH = 13 300 avec deux rapports das-

    pect diffrents (L/H = 20 et 25 avec L, lenvergure du jet) et sur une distance axiale identique

    celle de Frthmann. Il a par ailleurs tudi le transport de temprature avec un thermocouple

    et le transport de matire (gaz de ville) avec un analyseur de gaz et une canne de prlvement.

    33

  • Chapitre I. Revue de la littrature

    Figure I.3: Croissance linaire de lpaisseur du jet b et dcroissance en racine carre de lavitesse sur laxe Uc daprs Miller et Comings [13]. a et Ur sont respectivement la largeur et lavitesse en sortie de buse.

    Figure I.4: Profils de pression moyenne et de la tension uu travers le jet, avec = yb,

    daprs Miller et Comings [13]

    De lensemble de ces expriences, il a tabli les profils des grandeurs caractristiques (vitesse,

    temprature et concentration). Il a not linfluence du rapport daspect sur ces profils statis-

    34

  • I.3 Revue bibliographique

    Figure I.5: Profil de vitesse, de temprature et de concentration moyenne daprsVan Der Hegge Znen [25]

    tiques. Il a galement estim la viscosit turbulente et la longueur de mlange de cet coulement.

    Il a par ailleurs constat que lexpansion est identique pour les deux quantits scalaires et que

    cette expansion est plus lente pour les quantits cinmatiques (figure I.5).

    Heskestad [26] (1965) a ralis des mesures dun jet plan dans une ambiance au repos en

    utilisant une technique danmomtrie fil chaud inclin et temprature constante (le fil est

    inclin successivement selon trois angles diffrents par rapport laxe du jet) lui permettant

    daccder aux statistiques relatives au trois composantes de vitesse. Il a ainsi pu calculer, outre

    les profils de vitesses moyennes et du tenseur de Reynolds, lintermittence de lcoulement, les

    coefficients daplatissement et les bilans dnergie (en ayant recours des hypothses simplifi-

    catrices). Ces mesures ont t ralises de 47 160H, soit une rgion situe juste en aval par

    rapport aux travaux prcdemment cits. La similitude des profils de vitesse moyennes et les lois

    de comportement relatives lexpansion du jet sont vrifies dans toute la rgion. En revanche,

    la similitude pour les profils des grandeurs turbulentes napparat qu partir de 65H, ce qui

    est une valeur bien plus grande que celle couramment admise. Heskestad commente assez peu

    leffet du nombre de Reynolds sur lcoulement moyen et les caractristiques de la turbulence.

    Cet effet a t tudi plus en dtail par Lemieux et Oosthuizen [27] en de de 60H pour des

    nombres de Reynolds variant de 700 4200. Les profils de vitesse moyenne adimensionns par

    35

  • Chapitre I. Revue de la littrature

    Figure I.6: volution de lpaisseur du jet et dcroissance en racine carre de la vitesse sur laxe(adimensionnes par la vitesse extrieure U1 et la largeur de la buse H) daprs Bradbury [28]

    Figure I.7: Profils de pression moyenne et de la tension uu travers le jet daprs Brad-bury [28]

    des variables locales ne sont pas affects par la valeur du nombre de Reynolds, contrairement

    au tenseur de Reynolds et la vitesse dpanouissement. Au del de ReH 5 000, cet effetdisparat suggrant plus un effet de Reynolds faible quun effet Reynolds proprement dit.

    Ltude dun jet se dchargeant dans un mme fluide se dplaant dans la mme direction

    36

  • I.3 Revue bibliographique

    (co-courant) a dabord t aborde par Bradbury [28] (1965) dans le cas dun jet plan et Antonia

    et Bilger [29] (1974) dans le cas dun jet axisymtrique. Lcoulement de jet plan tudi par

    Bradbury tait du mme type que celui considr dans cette thse. Bradbury a mesur le

    dveloppement du jet plan se dveloppant dans un flux uniforme co-courant dans la rgion allant

    de 0 70H pour un nombre de Reynolds ReH = 30 000 et pour deux rapports de vitesse r = 0, 07

    et 0, 16. Les mesures de pression et de vitesse moyennes ont t ralises sparment avec une

    sonde de pression statique et un tube de Pitot et les mesures de turbulence par anmomtrie fil

    chaud inclin, courant constant. La prsence des co-courants a permis dviter les coulements

    de retour qui pouvaient nuire la mesure par fil chaud. Nanmoins, lintensit turbulente dans

    les co-courants tait trop leve dans le cas r = 0, 07 pour permettre des mesures prcises.

    Les rsultats nont donc t prsents que dans le cas r = 0, 16. Lanalyse de Bradbury sur le

    comportement du jet plan en co-courant sest construite par comparaison avec lapproche de

    Townsend [30] (1956) sur les coulements cisaills libres en gnral et sur les coulements de

    sillages en particulier. Un dveloppement analytique simple lui a permis de prdire lexistence

    de deux rgions dans lesquelles lpanouissement du jet se comporte de faon diffrente. Un

    jet plan en co-courant est dabord un jet fort suivant un comportement de type jet puis, la

    vitesse moyenne sur laxe tant dcroissante, il devient un jet faible suivant un comportement

    de type sillage. Les rsultats exprimentaux obtenus confirment ce comportement (figure I.6)

    et montrent que le jet atteint un tat de similitude environ 30H. Les mesures de pression

    moyenne (figure I.7) sont du mme ordre de grandeur que celles de Miller et Comings [13], mais

    la forme du profil diffre avec la prsence de deux pics de pression de part et dautre de laxe du

    jet (pics que lon retrouve sur la tension uu, mais pas sur vv). Bradbury souligne que lesprofils de turbulence ressemblent ceux dun sillage. En revanche, lintermittence et les bilans

    dnergie prsentent des diffrences significatives. Bradbury et Riley [31] (1967) ont tendu

    cette tude diffrents rapports de vitesse r. Sur la base darguments dimensionnels simples,

    ils ont identifi des variables dadimensionnement (vitesse du co-courant Ue et paisseur dexcs

    de la quantit de mouvement ) leur permettant dobtenir une reprsentation universelle des

    profils des variables de similitude caractrisant lexpansion du jet en tenant compte de lorigine

    virtuelle du jet qui dpend en revanche des conditions particulires en sortie de jet (figure I.8).

    Le comportement du jet dans la zone de turbulence pleinement dveloppe dpend non pas de la

    gomtrie de la buse ou de la forme du profil de vitesse en sortie, mais seulement de lexcs de la

    quantit de mouvement et de la vitesse dentranement. Bradbury et Riley ont donc reformul le

    comportement thorique dun jet plan en co-courant dans cette reprsentation. Ce changement

    de comportement a ensuite t confront sans succs une prdiction base sur le modle des

    grands tourbillons en quilibre de Townsend [30].

    37

  • Chapitre I. Revue de la littrature

    Figure I.8: volution de lpaisseur et de la vitesse sur laxe du jet (adimensionnes par lavitesse extrieure U1 et lpaisseur dexcs de quantit de mouvement ) daprs Bradbury etRiley [31]

    Bilger [32] (1969) a compil les rsultats des tudes menes par dautres auteurs sur les

    coulements de jets et de sillages (notamment ceux de Schlichting [21], Townsend [30] et Brad-

    bury et Riley [31]) pour caractriser le comportement des coulements se dveloppant dans un

    flux co-courant. Il identifie ce type dcoulement par jet-sillage et cartographie son com-

    portement dans lespace form par le rapport de vitesse et la distance axiale (figure I.9). Il le

    dcompose en deux rgions : la rgion initiale (zone de recirculation ou cne potentiel) et la

    rgion pleinement dveloppe (avec une similitude de type jet ou sillage). Il met en vidence la

    dpendance de la rgion initiale aux conditions gnratrices de lcoulement alors que la rgion

    de similitude, dans le cas du jet, ne dpend que de lexcs de la quantit de mouvement et de

    lentranement (except pour lorigine virtuelle des lois de comportement). En sinspirant de

    modles tablis par Townsend (modle des grands tourbillons en quilibre [30] et modle den-

    tranement [33], cf. thse Vogel [34] pour de plus amples dtails), il parvient obtenir un bon

    accord entre la thorie et lexprience sur les lois de dexpansions des coulements jet-sillage

    en gnral (figure I.10).

    Patel [16] (1971) sest galement intress au problme de prdiction du dveloppement vers

    laval dun jet plan libre ou parital dans un coulement uniforme co-courant. La dmarche uti-

    lise est identique, et plus claire, que celle dAbramovich [9]. Elle consiste intgrer un systme

    dquations diffrentielles constitu de lquation de conservation de la quantit de mouvement

    et dune quation auxiliaire traduisant lhypothse dpanouissement gnralise par Chu et

    38

  • I.3 Revue bibliographique

    Figure I.9: Rgimes dcoulement pour les jets-sillages turbulents daprs Bilger [32]

    Figure I.10: volution de lpaisseur du jet et de la vitesse sur laxe daprs Bilger [32]

    Lee [14] laquelle suppose que la variation de lpaisseur du jet dans un rfrentiel Lagrangien

    est proportionnelle la vitesse du jet. Les deux inconnues du systme sont une vitesse et une

    chelle caractristiques du jet une position donne, telles que lexcs de vitesse sur laxe du

    jet et lpaisseur du jet. En intgrant ce systme, Patel obtient une solution continue qui pr-

    dit correctement les deux comportements asymptotiques (comportement de jet fort puis de jet

    faible) mesurs par Bradbury et Riley [31]. Lhypothse dpanouissement utilise lui pe